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INST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY, SCIENCE AND TECHNOLOGY

COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 26 avril 2001

• 0906

[Traduction]

La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): La séance est ouverte. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le comité entreprend l'examen réglementaire de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes.

Nous sommes très heureux d'accueillir ce matin, de Bell Canada, Mme Linda Gervais, vice-présidente, Relations avec le gouvernement fédéral. Vous voudriez tous avoir sous les yeux le texte de son exposé préliminaire. Je vous propose, madame Gervais, de nous présenter votre exposé, après quoi nous passerons aux questions.

Mme Linda Gervais (vice-présidente, Relations avec le gouvernement fédéral, Bell Canada): Merci, madame la présidente, d'avoir bien voulu nous inviter à témoigner aujourd'hui sur ce sujet important. Bonjour, mesdames et messieurs les membres du comité,

[Français]

honorables députés.

[Traduction]

Je suis particulièrement heureuse d'avoir l'occasion de présenter les opinions et observations de Bell Canada concernant la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes. D'entrée de jeu, je tiens à préciser que le point de vue que je vous soumets aujourd'hui est celui d'une employée d'une importante société canadienne, de compétence fédérale, qui entretient des liens d'affaires étroits avec les secteurs privé et public de notre économie nationale.

Pour Bell Canada, travailler avec le gouvernement consiste tout autant à mettre en commun recherches et savoir-faire techniques, à échanger des opinions et à établir des relations qu'à influer sur l'issue de divers enjeux.

[Français]

Je suis ici pour vous dire que Bell appuie à la fois l'intention de la loi et l'approche utilisée par le gouvernement pour l'appliquer. Celle-ci est ouverte, bien pensée et consultative. C'est aussi une approche qui reflète les quatre principes de base de la loi, à savoir: l'accès libre et ouvert au gouvernement est une importante question de politique publique; le lobbying auprès des détenteurs d'une charge publique est une activité légitime; les détenteurs d'une charge publique et le grand public doivent savoir qui tente d'influencer le gouvernement; le système d'enregistrement des lobbyistes rémunérés ne doit pas gêner l'accès libre et ouvert au gouvernement.

[Traduction]

Nous croyons que la loi actuelle a rendu le lobbying plus transparent et plus responsable, critères fondamentaux pour l'exercice d'un sain pouvoir, et qu'elle a fait disparaître la connotation de dissimulation qui entachait ce processus.

Avant de poursuivre, j'aimerais prendre un instant pour décrire brièvement Bell Canada, son champ d'activités et la portée de ses relations avec le gouvernement fédéral.

Bell Canada est le premier fournisseur de télécommunications au pays. Nous employons plus de 43 000 Canadiens, surtout au Québec et en Ontario. Nous fournissons des services de connectivité à des clients de résidence et d'affaires, notamment des services de transmission de la voix et des données sur fil et sans fil, des services d'accès haute vitesse et sans fil à Internet, des services IP/large bande, la radiodiffusion directe à domicile par satellite et des solutions d'affaires électroniques. Nous comptons plus de 11 millions de lignes d'accès au Québec et en Ontario. Nous desservons également plus de 2,7 millions de clients des services sans fil d'un bout à l'autre du pays par l'intermédiaire de Bell Mobilité de même que 800 000 clients par l'intermédiaire de Bell ExpressVu. L'an dernier, nous avons acheté pour plus de 3 milliards de dollars sur le marché canadien afin de moderniser nos réseaux et d'améliorer et étendre les services que nous offrons aux Canadiens.

Nos actifs sont majoritairement détenus par BCE, l'entreprise canadienne qui compte le plus grand nombre d'actionnaires.

Les interactions entre Bell Canada et le marché sont aussi nombreuses et diversifiées que nous relations avec le gouvernement fédéral.

[Français]

Comme nous sommes une entreprise de compétence fédérale, de multiples facettes de notre exploitation sont assujetties aux décisions d'organismes gouvernementaux.

• 0910

[Traduction]

Sur le plan administratif et réglementaire, nous traitons avec divers conseils et organismes fédéraux, tels que le CRTC, comme vous le savez tous, le Bureau de la concurrence, le Tribunal canadien des droits de la personne, le Conseil canadien des relations du travail, la Commission du droit d'auteur et le Commissariat à la protection de la vie privée, qui ont tous une incidence marquée sur nos activités.

Les ministères gouvernementaux exercent un large éventail de pouvoirs sur nous, contrôlant l'accès à divers intrants d'entreprise qui se répercutent sur notre capacité de soutenir la concurrence sur le marché. L'obtention de licences radio ou d'autorisations visant l'implantation de tours radio, la vente aux enchères de fréquences radioélectriques, l'attribution de positions orbitales de satellite, les permis d'exportation, les évaluations environnementales, les politiques et pratiques en matière de fiscalité, de commerce, d'approvisionnement et de développement économique régional sont autant de facteurs qui façonnent notre environnement. Voilà la réalité avec laquelle nous devons composer.

Parce que nos besoins en tant qu'entreprise exigent, au même titre que les besoins de chaque citoyen, un accès libre et ouvert au gouvernement, nous souscrivons aux principes de base de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes.

La capacité d'obtenir et d'échanger librement de l'information, de partager l'expertise et de faire modifier les politiques est essentielle si nous voulons assurer un dialogue à la fois vaste et constructif avec le gouvernement. Il est clair que la compréhension mutuelle et la collaboration entre l'État et le secteur privé débouchent sur une meilleure politique publique. À notre avis, l'adoption de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes a contribué au dialogue franc et ouvert que les Canadiens et les entreprises canadiennes doivent engager dans le cadre de leurs relations avec le gouvernement.

Dans une lettre adressée le 9 mars à ce comité, le ministre Tobin souligne l'importance des changements positifs apportés à la loi en 1995 afin d'améliorer la transparence du processus de lobbying. Nous convenons avec lui qu'il en a résulté des avantages pour le public, notamment des directives plus élaborées en matière de rapports, l'établissement d'un code de conduite et l'implantation d'un système d'enregistrement électronique.

Nous nous permettons toutefois de formuler les modestes observations suivantes sur les questions auxquelles le ministre a demandé au comité d'accorder une attention particulière à l'occasion de cet examen. Nous appuyons la proposition d'amendement visant à obliger les consultants lobbyistes à confirmer périodiquement leur enregistrement. Il pourrait être tentant pour certains consultants de maintenir leur enregistrement pour diverses raisons. Cependant, tout retard indu en matière de désenregistrement risque de créer une confusion et des erreurs inutiles. Une modification visant à corriger cette lacune administrative serait donc souhaitable. La confirmation obligatoire aurait pour effet de contrer le désenregistrement pratiqué de façon non rigoureuse.

Quant aux dispositions d'application de la loi, Bell est mal placée pour juger si la limite actuelle de deux ans est ce qui convient. Nous laissons cette question aux intervenants qui s'y connaissent mieux.

On vous a également demandé d'examiner si la procédure d'enregistrement visant les lobbyistes internes d'un organisme devait s'appliquer aussi aux lobbyistes internes d'une entreprise. Dans le cas des premiers, le dirigeant de tout organisme dont un ou plusieurs employés fait du lobbying est tenu d'enregistrer son organisme. Si le total du temps de lobbying de tous les employés représente 20 p. 100 du travail de l'équivalent d'un employé, il doit fournir la liste de tous les employés qui font du lobbying, peu importe le temps qu'ils y consacrent.

Comparons cette condition aux exigences actuelles visant les lobbyistes internes d'une entreprise, selon lesquelles ceux qui consacrent une partie importante de leurs fonctions, définie comme 20 p. 100 du temps, au lobbying doivent s'inscrire.

La possibilité que la norme visant les organismes soit étendue aux entreprises nous préoccupe. Nous craignons que ce changement n'alourdisse la paperasserie pour les entreprises, sans bénéfice apparent pour le public. Nous ne pensons pas que l'esprit et les principes de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes seraient mieux servis par le changement proposé.

J'imagine, naturellement, que le législateur a voulu, à l'origine, accorder une attention particulière aux lobbyistes internes d'un organisme puisque la principale fonction des organismes ou associations est de faire du lobbying auprès du gouvernement au nom de leurs clients. En outre, le nouveau fardeau administratif semble aller à l'encontre des efforts du gouvernement pour simplifier le plus possible la réglementation.

[Français]

En conclusion, je tiens à réitérer une fois de plus que Bell Canada appuie entièrement la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes et ses principes sous-jacents. Nous estimons qu'elle a bien servi les Canadiens et qu'elle continuera de le faire.

Merci encore une fois de m'avoir donné l'occasion de comparaître devant le comité.

[Traduction]

Merci de m'avoir donné l'occasion de venir témoigner devant vous ce matin. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions. Merci.

La présidente: Merci beaucoup, madame Gervais.

Nous allons maintenant passer aux questions.

Je tiens simplement à rappeler aux membres du comité que nous devons accueillir d'autres témoins dans une demi-heure environ.

Monsieur Penson, vous avez la parole.

M. Charlie Penson (Peace River, AC): Merci.

Je vous souhaite la bienvenue, madame Gervais.

Je m'intéresse à la question du réenregistrement ou du désenregistrement. Quel est le problème? Pourquoi demandez-vous un changement à cet égard?

• 0915

Mme Linda Gervais: Nous appuyons la recommandation du ministre principalement parce que j'ai remarqué en parcourant le registre, comme je le fais de temps en temps, que certaines personnes que nous avions embauchées plusieurs années auparavant continuaient à inclure Bell Canada sur la liste de leurs clients même s'il y avait déjà un certain temps que la relation avait pris fin. J'estime qu'il s'agit simplement d'un moyen de favoriser la transparence et l'exactitude. Le plus souvent, l'enregistrement et le désenregistrement se font par voie électronique. Nous pensons donc que ce serait une bonne idée.

M. Charlie Penson: Il s'agit donc de personnes qui représentent des entreprises à titre de consultant?

Mme Linda Gervais: Oui.

M. Charlie Penson: D'accord. C'est tout ce que j'avais comme question.

La présidente: Merci, monsieur Penson.

Monsieur Lastewka, avez-vous des questions?

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Oui, j'en ai.

J'allais poser la même question que M. Penson. Je crois savoir que, bien souvent, les lobbyistes s'enregistrent parce qu'ils représentent telle entreprise et que, quatre ou cinq ans plus tard, ils continuent à inclure l'entreprise dans leur liste de clients parce qu'ils veulent rehausser leur prestige. Est-ce bien pour cette raison qu'ils le font ou est-ce simplement un oubli de leur part?

Mme Linda Gervais: Je ne peux pas vraiment me prononcer en leur nom. Il s'agit peut-être simplement d'un oubli, mais nous pensons qu'ils devraient le faire puisque tout le monde va respecter les lois et les règlements.

J'ai eu des surprises. Il nous est arrivé, par exemple, de retenir les services de certaines organisations pour un très court laps de temps et pour un projet bien précis, mais comme elles étaient appelées à traiter avec le gouvernement, elles devaient s'enregistrer. Cependant, le désenregistrement ne se fait pas toujours aussi rapidement que l'enregistrement.

M. Walt Lastewka: Vous représentez une très grande entreprise. Votre entreprise embauche-t-elle des lobbyistes de l'extérieur?

Mme Linda Gervais: Oui.

M. Walt Lastewka: Ils doivent donc s'enregistrer et indiquer qu'ils font du lobbying en votre nom.

Mme Linda Gervais: Tout à fait.

M. Walt Lastewka: Très bien. Ce qui vous préoccupe donc, c'est que deux ou trois ans plus tard, le nom de Bell figure toujours sur la liste de leurs clients alors qu'ils ne travaillent plus pour l'entreprise.

Mme Linda Gervais: Il y a aussi autre chose que j'ai remarqué. Pendant un certain nombre d'années, Bell Canada s'en remettait entièrement à une association pour s'occuper de ses relations avec le gouvernement. Aussi très peu du travail se faisait à l'interne. La situation a changé il y a environ quatre ans quand j'ai mis sur pied le service que je dirige, et nous avons commencé à assumer nous-mêmes la responsabilité d'une plus grande part du travail.

Par ailleurs, les divers services qui composent l'entreprise avaient chacun leurs experts en relations gouvernementales pour leurs différents projets. Il n'y avait personne chez Bell pour s'occuper de cela, si bien que, quand les contrats prenaient fin—et tout était coordonné par mon bureau—, on n'était pas toujours aussi prompt à se désenregistrer qu'on aurait pu l'être.

M. Walt Lastewka: À propos de la règle des 20 p. 100 dont vous avez parlé, d'autres entreprises m'ont fait comprendre que cela les empêcherait parfois de confier des tâches à certaines personnes, car il pourrait s'agir davantage de fournir de l'information ou de faire du lobbying que de... D'où vient la charge de travail? Est-elle attribuable à la nécessité de tenir compte des tâches de chaque personne?

Mme Linda Gervais: C'est peut-être parce que nous sommes une assez grande entreprise, mais nous avons des employés, des employés de Bell, dans bien des villes et dans différentes provinces. Ils ne seront pas tous appelés à traiter avec le gouvernement au sens de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes, c'est-à-dire, à essayer d'influencer une décision.

Les associations sont toutefois, en règle générale, bien plus petites. Leur principale fonction est de représenter leurs clients et leurs membres auprès du gouvernement et de défendre leurs intérêts. Il se pourrait qu'elles aient d'autres tâches, mais c'est là leur principale fonction.

Dans le cas d'une entreprise, la principale fonction est la fourniture de services—dans notre cas à nous, il s'agit de fournir des services aux Canadiens. J'ai dans mon service un certain nombre de personnes qui s'occupent de relations avec le gouvernement, qui traitent avec le gouvernement. Je ne m'inquiète pas de savoir s'il s'agit de 5, 10 ou 20 p. 100; dès que «les relations avec le gouvernement» entrent dans leur description de fonctions, je veille à ce que ces personnes soient enregistrées, car il s'agit là de notre principale fonction au sein de Bell Canada.

• 0920

Tous les autres qui pourraient être appelés à traiter avec le gouvernement, même s'il ne s'agit pas de 20 p. 100—et je pense à deux autres cas, Bell et BCE—, sont aussi enregistrés. Nous ne nous soucions même pas de la règle des 20 p. 100; nous voulons simplement nous assurer d'une certaine rigueur.

Dans certains cas, il s'agit d'un simple appel téléphonique, tandis que dans d'autres, il pourrait s'agir de négocier une acquisition ou une fusion complexe. Je ne le saurais même pas tant que l'acquisition n'aurait pas été annoncée.

La situation est donc un peu plus complexe, et je crois que c'est parce que l'activité d'une entreprise est différente. Sa principale fonction est de fournir un service ou de fabriquer un produit, tandis que la principale fonction d'une association ou d'une organisation est en fait de faire du lobbying auprès du gouvernement.

M. Walt Lastewka: D'accord. J'ai une dernière question.

Je veux revenir à quelque chose qu'on a dit l'autre jour au sujet des contacts. Vous avez des attributions clés en ce qui concerne les relations de votre entreprise avec le gouvernement. Vous pourriez peut-être nous en dire un peu plus sur la difficulté de communiquer avec le gouvernement. Est-ce difficile, d'après vous, de parler à des ministres, des fonctionnaires ou des députés?

Mme Linda Gervais: D'après mon expérience, non. J'ai constaté que, de manière générale, on est de bonne foi. Notre régime de gouvernement se fonde sur la transparence et la consultation, et on constate un désir sincère de dialoguer et d'entendre les points de vue ou de fournir de l'information. Il y a donc échange d'information. D'après mon expérience, le plus souvent, on essaie de nous aider.

M. Walt Lastewka: Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci, monsieur Lastewka.

[Français]

Monsieur Brien.

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Merci.

Je connais la réponse, mais je vais quand même vous poser la question. Est-ce qu'il ne serait pas utile pour le public, y compris les députés au Parlement, d'avoir de l'information un peu plus précise sur les activités des lobbyistes? Par exemple, qui rencontrez-vous à un certain niveau de la fonction publique? On peut savoir sur quel dossier vous travaillez, mais il serait peut-être intéressant de savoir qui vous rencontrez, de savoir si vous rencontrez un sous-ministre, un sous-ministre adjoint, des gens de très haut niveau au CRTC ou quelque chose du genre. Ne pensez-vous pas que cela ajouterait à la transparence?

Mme Linda Gervais: La loi met vraiment l'accent sur les lobbyistes, qui doivent se déclarer, et je pense que l'accent doit rester sur les lobbyistes. Pour ce qui est de savoir à qui les lobbyistes adressent les questions, cela varie. Ça peut être un fonctionnaire de niveau assez bas, comme ça peut être un sous-ministre ou même le ministre. Cela dépend du dossier et de la question. On n'a pas pour politique de parler seulement aux gens de la fonction publique qui sont à un certain niveau ou seulement aux ministres.

M. Pierre Brien: Je comprends. Dans votre démarche, vous allez chercher de l'information, mais quand arrive le stade où on parle d'influencer, et non pas seulement d'échanger de l'information, je suis convaincu qu'on parle à des gens de niveaux supérieurs. Ce serait peut-être de l'information pertinente. Il serait bon qu'on sache qui est rencontré, et non pas seulement le sujet sur lequel on fait du lobbying.

Mme Linda Gervais: Pour nous, c'est très clair. Pour la plupart des politiques qui nous intéressent, on s'adresse au ministère de l'Industrie. Au ministère de l'Industrie, on sait très clairement qui a la responsabilité dans ce domaine. Ça peut être d'autres personnes. Me demandez-vous si je dois mentionner les noms des fonctionnaires?

M. Pierre Brien: Est-ce que ça vous dérangerait de le faire?

Mme Linda Gervais: Je pense que ça serait difficile. On demandait plus tôt si on avait des problèmes à avoir des renseignements, à obtenir qu'on nous rappelle et à présenter notre perspective. La réponse a été non.

• 0925

Je pense que si nous dévoilions les noms de ces personnes qui reçoivent nos appels, elles ne seraient peut-être pas aussi ouvertes et hésiteraient à nous rappeler parce qu'elles auraient certaines craintes. On veut un processus ouvert. Je pense que les conséquences d'une telle chose seraient tout à fait contraires à ce qu'on recherche. Je pense que cela inciterait certaines personnes à ne pas nous rappeler, à ne pas fournir de l'information et à ne pas être ouvertes.

M. Pierre Brien: Ça me surprend un peu, mais...

Mme Linda Gervais: C'est la nature humaine.

M. Pierre Brien: Je ne peux pas m'empêcher de passer un commentaire. Ce sera ma dernière remarque.

J'estime que vous êtes sûrement très efficaces dans vos activités de lobbying, particulièrement auprès du CRTC. Je vous le dis et vous transmettrez le message chez vous. C'est moi qui fais du lobbying présentement. Je trouve assez spécial qu'une entreprise comme la vôtre ait encore des lignes groupées au Québec.

Mme Linda Gervais: Des lignes...?

M. Pierre Brien: Des lignes multiples, des utilisateurs multiples sur des lignes. On connaît la situation financière de votre compagnie, et tout le monde se réjouit qu'elle soit solide, mais...

Mme Linda Gervais: On prévoit qu'à la fin de l'année, on aura complètement fini le projet, parce qu'on a déjà...

M. Pierre Brien: Ça fait plusieurs fois qu'on dit ça.

Mme Linda Gervais: Non, c'est vrai. On vient de soumettre au CRTC une autre proposition qu'on appelle service improvement plan pour ceux et celles qui n'ont pas de service présentement. On a promis que ce serait fini à la fin de l'an 2001.

M. Pierre Brien: On s'en reparlera.

Mme Linda Gervais: Donnez-moi un coup de fil. C'est un dialogue à deux sens.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Brien.

[Traduction]

Monsieur Cannis, allez-y.

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Merci, madame la présidente.

Bonjour, madame Gervais, et bienvenue à notre comité. Je tiens à vous remercier pour vos remarques constructives et pour les critiques constructives que vous nous avez présentées également dans votre exposé. Trois des quatre questions—la mienne étant la quatrième—qui vous auront été posées concernent essentiellement, il me semble, la question du désenregistrement. M. Lastewka a posé une question à ce sujet, tout comme M. Penson.

Vous parlez dans votre mémoire de transparence, d'honnêteté, de franchise, et je suis entièrement d'accord avec vous. Vous avez raison de dire que la collaboration permet d'en arriver à de meilleures politiques gouvernementales.

Les consultants ou les lobbyistes qui acceptent de travailler pour vous ou pour quelqu'un d'autre ont sûrement une obligation, mais ils ont tendance à la négliger. Comme vous le dites dans votre mémoire, «il pourrait être tentant pour certains consultants de maintenir leur enregistrement pour diverses raisons». Ce sont ces «diverses raisons» qui nous préoccupent tous, je pense. Le temps excessif que mettent certains consultants à se désenregistrer pourrait poser un problème à cause de l'impression et des soupçons qui pourraient en découler.

N'avez-vous pas une obligation? Qu'en pensez-vous? Quelle est votre position là-dessus? L'entreprise pourrait dire: «Écoutez, nous avons retenu les services de la firme d'experts-conseils XYZ pour telle période», et elle pourrait assurer un suivi. Elle pourrait dire: «Écoutez, monsieur X, vous avez terminé le travail que vous deviez faire pour nous. Nous vous en remercions. Peu importe que nous ayons obtenu les résultats escomptés, notre relation est maintenant terminée. Nous vous donnons maintenant tant de temps pour que vous puissiez vous acquitter de votre obligation.» Ne pensez-vous pas que, si nous pouvions compter sur vous pour rappeler ainsi à l'ordre vos employés temporaires, si vous voulez, nous pourrions atténuer le problème et en arriver à une plus grande transparence?

Mme Linda Gervais: Premièrement, ce n'est pas un gros problème. Cela n'est arrivé qu'une ou deux fois à ma connaissance, et il s'agissait de firmes que je n'avais pas embauchées moi—même.

Deuxièmement, l'entreprise a-t-elle l'obligation de communiquer avec la firme pour lui demander...

M. John Cannis: En fait, je ne voulais pas parler de votre entreprise. Je disais simplement que...

Mme Linda Gervais: Non. Vous avez parfaitement raison. C'est d'ailleurs ce que nous avons fait. Nous avons dit: «Écoutez, nous avons remarqué que vous étiez toujours inscrit, et, à notre connaissance, vous ne faites plus de travail pour nous, alors vous pourriez prendre les mesures voulues pour vous désenregistrer.» Ce n'est rien de grave. C'est simplement une question d'ordre administratif. Nous avons effectivement pris des mesures. Vous avez raison, je crois que nous avons une obligation à cet égard. Quelle que soit la solution que propose le comité, l'entreprise devrait assumer cette responsabilité. Je ne pense pas que cela pose de problème.

M. John Cannis: Merci.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Cannis.

Madame Desjarlais, allez-y.

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Oui.

Sur ce point, ce sont les lobbyistes eux-mêmes qui s'enregistrent. Ce n'est pas Bell qui enregistre tel ou tel lobbyiste quand elle retient ses services?

• 0930

Mme Linda Gervais: Non. Je suis moi-même enregistrée. C'est à moi de m'en occuper. Si je retiens les services d'une firme ou d'un particulier, c'est à eux de s'enregistrer et c'est à eux de se désenregistrer ou de se réenregistrer le cas échéant.

Mme Bev Desjarlais: D'accord.

J'ai une question qui fait suite à celle de M. Brien, car c'est un aspect qui me préoccupe moi aussi. Vous avez reconnu l'importance des quatre principes: l'accès libre et ouvert au gouvernement est une question d'intérêt public importante; le lobbying auprès des titulaires de charge publique est une activité légitime; les titulaires de charge publique et le grand public devraient savoir qui tente d'influencer le gouvernement; et, quatrièmement, le système d'enregistrement ne devrait pas constituer une entrave à l'accès libre et ouvert au gouvernement. Bon, alors, on s'entend généralement pour dire qu'il ne semble pas être trop difficile d'avoir accès au gouvernement. Ceux que nous avons entendus nous ont dit également que, de manière générale, ils arrivent à avoir accès au gouvernement.

Une des questions qui se posent est de savoir si le lobbying se fait auprès des titulaires de charge publique ou plutôt auprès des fonctionnaires. Il semble qu'il se fasse plutôt auprès des fonctionnaires et que ce ne soit pas suffisamment reconnu. Si donc vous aviez à nous donner une idée approximative de la quantité de lobbying que vous faites auprès des titulaires de charge publique—et je parle ici de représentants élus—par opposition aux fonctionnaires, quelle serait la proportion dans chaque cas?

Mme Linda Gervais: Pour ce qui est de mon service, je dirais que nous traitons sans doute plus avec les représentants politiques qu'avec les fonctionnaires. Nous sommes une entreprise fortement réglementée, et nos démarches au niveau politique ne sont pas englobées dans la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes. Elles ne s'inscrivent pas, dans notre structure administrative, sous une rubrique dite «relations avec le gouvernement». Il s'agit souvent de démarches auprès d'organismes quasi judiciaires, si bien que la relation est assez ordonnée, disons, car nous devons témoigner en public devant des organismes qui s'apparentent à de véritables tribunaux. C'est donc une toute autre relation.

Pour ce qui est de nos activités, je dirais qu'elles se situent plutôt au niveau politique...

Mme Bev Desjarlais: La proportion est-elle 80-20, 70-30, 60-40, 50-50?

Mme Linda Gervais: Tout dépend de la question et du moment. Nous ne tenons pas de registres, et les heures ne sont pas facturées, en ce sens que je ne facture pas les autres services. Nous recevons un salaire. Je dirais que nous consacrons facilement 50 p. 100 de notre temps à des activités au niveau politique, et je répartis le travail en conséquence dans mon service. Je dirais que, pour bien des raisons, Bell Canada a été en cause dans bien des questions d'ordre politique sur lesquelles les députés et ministres ont eu à se pencher ces dernières années. Par ailleurs, comme je l'ai indiqué, nous avons eu pendant un certain nombre d'années un service qui s'occupait des relations avec le gouvernement et un responsable des associations. Quand nous nous sommes reconfigurés, nous nous sommes rendu compte que nous avions vraiment perdu le contact avec les représentants politiques, qui sont pour nous des intervenants clés.

Mme Bev Desjarlais: J'aurais encore une toute petite question à poser.

Vous avez dit, en réponse à M. Brien, que l'idée de devoir noter ou déclarer les noms des personnes à qui vous parlez vous inquiète puisque ces personnes pourraient hésiter à vous parler. Vous venez par ailleurs de nous dire que plus de 50 p. 100 de vos contacts se font avec des titulaires de charge publique. Serait-ce donc les représentants élus qui hésiteraient à vous parler, ou serait-ce les fonctionnaires avec qui vous avez des contacts qui deviendraient un peu plus circonspects?

Mme Linda Gervais: Ce serait plutôt les fonctionnaires. Je dois vous dire que, quand nous nous sommes enregistrés, j'ai simplement supposé en toute innocence et naïvement, que tout contact avec des représentants du gouvernement, qu'il s'agisse de fonctionnaires ou de représentants élus, devait être compté. Ainsi, pour la règle des 20 p. 100, je ne fais pas de distinction entre les contacts que nous avons avec les représentants élus et ceux que nous avons avec les fonctionnaires. J'inclus tous les contacts de mon service.

Mme Bev Desjarlais: Très bien.

Quand vous prenez contact avec quelqu'un, le notez-vous quelque part? N'est-ce pas ce qui se fait habituellement dans le milieu des affaires?

Mme Linda Gervais: Vous me demandez si je consigne cela dans un rapport?

• 0935

Mme Bev Desjarlais: Non, pas si vous le consignez dans un rapport. Je ne sais pas. Le plus souvent, on note cela dans un agenda ou, si on travaille à un dossier, on indique dans le dossier qu'on a parlé à un tel ou une telle. C'est ce que je fais moi-même à mon bureau.

Mme Linda Gervais: Pas vraiment. Pas toujours, non.

Mme Bev Desjarlais: D'accord. Merci.

Mme Linda Gervais: S'il s'agit simplement d'un appel téléphonique, je ne le note pas, non.

Mme Bev Desjarlais: Considérez-vous que cela vous prendrait tout simplement trop de votre temps?

Mme Linda Gervais: Si le comité décide qu'il serait vraiment important de le faire, soit.

La présidente: Merci beaucoup, madame Desjarlais.

Madame Jennings, vous avez la parole.

[Français]

Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Merci, madame la présidente. Merci, madame Gervais de votre présentation. J'ai manqué la première partie, je m'en excuse, mais j'ai quand même votre document.

Je veux revenir à la question posée par mes collègues des deux côtés de la salle à propos de la divulgation de contacts avec des membres de la fonction publique, les sous-ministres, les sous-ministres adjoints... [Note de la rédaction: inaudible].

Cela ne me dérange pas que vous, en tant que lobbyiste, ne conserviez pas nécessairement des notes ou des dossiers précis sur chaque appel téléphonique que vous faites ou sur chaque rencontre que vous tenez. Mais ne croyez-vous pas qu'il est d'intérêt général que le public ait accès aux informations sur les contacts que les sous-ministres et autres cadres supérieurs de la fonction publique ont avec des lobbyistes, et que ce sont ces fonctionnaires qui devraient rendre cette information disponible?

Mme Linda Gervais: Je pense que cette responsabilité doit être celle des lobbyistes et non pas celle de la fonction publique.

Mme Marlene Jennings: Pourquoi?

Mme Linda Gervais: Parce que nous sommes ceux qui, d'habitude, effectuent les appels ou cherchent à obtenir de l'information. Je ne sais pas quel serait le but ou l'intérêt de savoir... Vous ne parlez que des sous-ministres et des sous-ministres adjoints?

Mme Marlene Jennings: Je parle des hauts placés, des cadres supérieurs de la fonction publique. Je vous donne un exemple.

Imaginons qu'il existe une politique gouvernementale qui stipule que toute compagnie qui fabrique des marteaux doit s'enregistrer à chaque année, et que le coût de cet enregistrement soit de 300 $ ou de 300 000 $, et qu'il y ait un processus d'enregistrement, etc. Les compagnies qui fabriquent des marteaux se diraient que cela n'a pas de sens, qu'il s'agit d'un obstacle qui nuit à leur compétitivité face aux compagnies des États-Unis qui ne sont pas soumises à ces processus réglementaires. Mais si les Canadiens avaient décidé que cela se passerait ainsi, peut-être que cela aurait même constitué un enjeu politique lors d'une campagne générale et que le parti qui aurait promis cette réglementation aurait gagné l'élection. Les compagnies feraient alors du lobbying. Je m'attendrais à ce que les compagnies en fassent. Mais si jamais le sous-ministre, les sous-ministres adjoints, les directeurs généraux, régionaux et autres rencontraient des lobbyistes employés par des compagnies concernées ou par des compagnies de consultants lobbyistes, j'aimerais le savoir, car je représente plusieurs Canadiens et Canadiennes. Ces fonctionnaires ont quand même le pouvoir de recommander un changement ou une modification de politique au ministre, ou même un changement législatif. J'aimerais savoir si cette personne avait rencontré des représentants de telle compagnie, telle association etc.

• 0940

Je n'ai pas besoin d'être informée par les lobbyistes. Le simple fait que vous soyez enregistré en tant que lobbyiste me dit que vous allez effectuer des activités de lobbyiste. J'aimerais savoir quelles personnes ont rencontré les employés de la fonction publique qui ont un pouvoir de faire des recommandations et de prendre des décisions. Voilà pourquoi je me demande si nous ne devrions pas changer de point de vue, et ne pas confier aux lobbyistes la responsabilité de divulguer ces informations.

Ne serait-ce pas plutôt la responsabilité des fonctionnaires? Grâce à la technologie d'aujourd'hui, la plupart des gens ont un agenda électronique. On peut même remonter un an, deux ans, trois ans dans le passé, et savoir qui on a rencontré. Si certains ne savent pas comment faire, je peux leur envoyer un de mes adjoints qui leur donnera un petit cours là-dessus.

C'était ma question.

Mme Linda Gervais: Je suis mal placée pour répondre pour les fonctionnaires, parce que je n'en suis pas une.

J'aimerais souligner que plusieurs contacts avec les sous-ministres et les sous-ministres adjoints ne constituent pas du lobbying comme tel, c'est-à-dire de chercher à avoir une influence sur certaines décisions relatives à certains projets. Il faudra donc établir une distinction entre le lobbying et les appels ou les rencontres dont le but est simplement d'échanger de l'information, pour mieux savoir ce qui se passe.

Si je souhaitais changer quelque chose, un règlement par exemple, je ne commencerais jamais par m'adresser au sous-ministre ou au sous-ministre adjoint. Je commercerais à un niveau plus bas.

Mme Marlene Jennings: À quel niveau?

Mme Linda Gervais: Cela dépend de qui est responsable.

Mme Marlene Jennings: Donnez-nous une idée.

Mme Linda Gervais: Je pourrais m'adresser à un agent d'un niveau peu élevé, et ce pour deux raisons. Je voudrais premièrement avoir plus de renseignements pour comprendre le pourquoi de cette réglementation.

Je voudrais deuxièmement connaître les conséquences de cette réglementation sur ma compagnie, les conséquences en termes d'emplois et d'investissements, et si cela pourrait me forcer à déménager dans un autre pays ou dans une autre province.

Je commencerais donc par échanger de l'information, pour savoir quelles sont les conséquences de cette réglementation.

La présidente: Merci, madame Jennings.

[Traduction]

Et, enfin, il y a Dan McTeague qui veut poser des questions avant que nous ne passions au groupe suivant.

M. Dan McTeague (Pickering—Ajax—Uxbridge, Lib.): Oui. Bonjour, Linda, je suis content de vous revoir.

Mme Linda Gervais: Moi aussi.

M. Dan McTeague: Il en va de même pour vos amis et vos collaborateurs. Vous n'avez certainement pas exagéré quand vous avez parlé de la dimension politique de vos contacts. Certains d'entre nous, notamment ceux qui siègent à ce comité, ont été à même d'apprécier tous les efforts que déployaient Bell Canada pour influencer la politique gouvernementale et qui n'ont pas été en vain. Je suis sûr que nous aurons l'occasion d'interagir encore sur des questions très intéressantes.

Je voulais vous demander, si vous le permettez...

Mme Linda Gervais: Je cherche...

Une voix: Je crois que c'était un compliment.

M. Dan McTeague: Oui, c'était un compliment, un peu maladroit, mais un compliment néanmoins. Prenez-le comme vous voudrez.

Je m'intéresse...

Mme Linda Gervais: Si c'est de vous, monsieur McTeague, je considère que c'est un compliment.

M. Dan McTeague: Merci. La page est tournée.

Je voulais vous interroger au sujet des titulaires de charges importantes. Vous pourriez peut-être donner au comité une idée du nombre de personnes qui, au moment de s'enregistrer, ont aussi dû s'assurer de ne pas contrevenir aux codes et aux lignes directrices sur les conflits d'intérêts. Je songe tout particulièrement aux personnes qui travaillent maintenant pour Bell Canada après avoir occupé une charge publique importante. Pourriez-vous indiquer au comité combien de ces lobbyistes Bell a à son service ou a embauchés à quelque fin que ce soit—le CRTC? Vous avez examiné la liste de ces personnes qui sont maintenant au service de Bell Canada. Assument-elles généralement leurs fonctions dès le premier jour où elles sont autorisées à le faire en vertu du code, dès le lendemain du délai d'un an dans le cas de ceux qui n'étaient ni ministres de la Couronne ni titulaires d'une charge importante?

Mme Linda Gervais: Écoutez, je veux vraiment être sûre de bien comprendre la question. Quand vous parlez de titulaires de charges importantes, voulez-vous parler de ministériels élus qui se retrouvent à l'emploi de mon entreprise?

M. Dan McTeague: Exactement, mais ils auraient été soumis à une période de restriction d'un an ou deux selon l'importance de la charge qu'ils occupaient. Il ne s'agit pas seulement de représentants élus, mais aussi, bien entendu, de personnes qui auraient travaillé pour un ministre ou qui, à un moment donné, auraient été au BCP ou au CPM et qui travaillent maintenant pour Bell Canada ou en son nom pour tenter d'influencer la politique publique.

• 0945

Mme Linda Gervais: Bon, d'accord. Vous mettez à rude épreuve le souvenir que j'ai de ce qui s'est passé chez Bell. Nous avons effectivement embauché un ancien ministre du gouvernement québécois dont le portefeuille n'avait rien à voir avec les communications. Il avait démissionné pour des raisons de principe relativement à la loi 101. Il a travaillé pour une autre entreprise et s'est retrouvé ensuite à notre emploi pendant un certain temps. Pour ce qui est de la période de restriction, il y en a sans doute eu une. Je ne suis pas sûre toutefois qu'elle était nécessaire parce qu'il ne s'occupait pas du tout de communications, les communications étant de compétence fédérale. C'est la seule personne ayant occupé une charge importante à laquelle je puisse penser; il s'agissait d'un représentant élu qui avait été ministre.

M. Dan McTeague: Qu'en est-il des fonctionnaires, comme je l'ai dit dans ma...

Mme Linda Gervais: J'y arrivais. Nous n'avons jamais embauché qui que ce soit qui ait travaillé au cabinet du ministre de l'Industrie, le service qui nous touche le plus. J'ai déjà recruté deux personnes qui avaient travaillé dans le cabinet de ministres libéraux, mais jamais de personnes qui avaient eu un emploi relié directement à quelque chose que nous faisons. Ces anciens employés ne sont pas venus... ou plutôt un est venu parce qu'il avait perdu son poste. Je l'ai embauché, mais il n'y avait pas de conflit d'intérêts vu qu'il n'y avait rien... Nous n'avons pas grand-chose à voir avec les ministères pour lesquels il avait travaillé.

Une personne que j'ai recrutée avait travaillé au cabinet du premier ministre longtemps avant et avait ensuite travaillé pour une autre entreprise pendant quatre ou cinq ans.

M. Dan McTeague: Voici ce qu'on dit dans les définitions du Code sur les conflits d'intérêts:

    4.(1) Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente partie et à l'annexe [...] «titulaire d'une charge publique»

      a) ministre, y compris secrétaire d'État;

      b) secrétaire parlementaire;

      c) membre du personnel d'un ministre, à l'exception des membres de la fonction publique;

      d) personne nommée à une charge à plein temps par le gouverneur en conseil [...]

On ne dit pas que ces personnes doivent travailler dans un domaine ou pour un ministère avec lequel le nouvel employeur, Bell Canada dans votre cas, a un rapport quelconque.

Mme Linda Gervais: Je voudrais vous signaler une chose, monsieur McTeague. Il existe un code sur les conflits d'intérêts au gouvernement, mais il y a aussi un code très complet pour les employés de Bell Canada. C'est un document très épais. Les employés doivent lire le code et le signer une fois par année et respecter tous ses principes. On fait des vérifications et les administrateurs...

M. Dan McTeague: D'accord, mais je voulais parler des lobbyistes que vous embauchez pour défendre les intérêts de Bell Canada et de notre propre code relatif au conflit d'intérêts.

Mme Linda Gervais: Je pense qu'ils ont respecté votre code de conduite.

M. Dan McTeague: D'accord, mais sont-ils embauchés le lendemain du jour où prend fin la période de restriction d'un an ou de deux ans selon le niveau du poste qu'ils occupaient au gouvernement?

Mme Linda Gervais: Cela n'est pas entré en ligne de compte parce que ce n'était pas le cas des personnes que nous avons embauchées.

M. Dan McTeague: Une dernière question, si vous me le permettez, madame la présidente. Certains ici ont laissé entendre déjà que l'on devrait prolonger la période de restriction, surtout dans le cas de personnes qui occupaient un poste supérieur au sein de l'exécutif. Si j'accepte ce que disait Sean Moore hier, et je sais qu'il n'avait pas entendu dire que les titulaires d'une charge publique, peut-être dans le cas d'un organisme législatif qui n'est pas aussi important...

Mme Linda Gervais: Je n'irais jamais dire une telle chose.

M. Dan McTeague: C'est une chose que je sais déjà. Je voulais savoir ce que vous pensez de la possibilité qu'on prolonge la période de restriction à cinq ans dans le cas des personnes qui sont maintenant visées par une période de restriction de deux ans, comme on le fait aux États-Unis, et qu'on prolonge à deux ans la période de restriction d'un an qui s'applique maintenant à ceux qui détiennent un poste à un niveau inférieur à la fonction publique.

Mme Linda Gervais: Comme je l'ai déjà dit, nous n'embauchons pas tellement de gens qui ont occupé de tels postes. Vous pourriez croire que oui, mais nous ne le faisons pas.

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Dan se cherche un emploi.

Des voix: Ah, ah!

M. Dan McTeague: Quelles ouvertures existe-t-il, Linda?

Mme Linda Gervais: Pour quelqu'un qui possède vos compétences, il y a toujours de nombreuses ouvertures.

M. Dan McTeague: Je vais m'adresser aux sociétés pétrolières maintenant.

Je m'en excuse.

Mme Linda Gervais: Pour revenir à votre question, je ne peux pas vraiment répondre. Je l'ignore. Honnêtement, j'ai l'impression que cela revêt beaucoup plus d'importance pour ceux qui recherchent un emploi que pour les entreprises qui veulent les embaucher.

M. Dan McTeague: Merci.

La présidente: Je vous remercie beaucoup d'être venue ce matin, madame Gervais. Nous vous remercions de vos observations. La discussion a été intéressante et nous serons ravis de vous revoir une autre fois.

Mme Linda Gervais: Merci beaucoup.

La présidente: Nous allons suspendre la séance une soixantaine de secondes pendant que nous changeons de témoins. Le deuxième groupe attend de s'avancer. Merci beaucoup.

• 0950




• 0953

La présidente: Nous reprenons nos travaux.

Nous sommes heureux d'accueillir l'autre groupe de témoins. Il s'agit de M. Pierre Morin, président de Pierre Morin Conseils Limitée; de M. Peter Clark, président de Grey, Clark, Shih and Associates Limited; et de MM. Scott Proudfoot et Michael Teeter, coprésidents de Hillwatch Inc.

Je propose que nous commencions d'abord par la déclaration d'ouverture de chaque témoin, après quoi nous passerons aux questions. Procédons dans l'ordre que je viens de dire, à moins que vous préfériez autre chose. Nous commencerons donc par M. Pierre Morin, président.

[Français]

Monsieur Morin.

M. Pierre Morin (président, Pierre Morin Conseils Limitée): Bonjour, madame la présidente.

Hier après-midi, je n'avais pas encore de déclaration liminaire, mais en tentant de trouver la lettre que le ministre de l'Industrie vous a adressée, j'ai communiqué avec le greffier qui, soit dit en passant, me l'a fait parvenir, mais qui m'a aussi indiqué où cette lettre se trouvait sur le site du conseiller en éthique.

Je me suis interrogé. Dans une capitale où les symboles ont autant de valeur, le mandat confié par un ministre à un comité parlementaire n'est ni sur le site du ministre, ni sur le site du comité parlementaire, mais sur le site d'un fonctionnaire. Je vous laisse vivre avec les symboles, mais dès qu'on sort d'Ottawa, la perception est que se sont les fonctionnaires qui mènent, et je vous signale que vous ne faites rien pour corriger cette perception. Cet événement ne fait rien pour la corriger.

• 0955

L'autre réflexion est un peu en deux parties. J'étais ici en 1995, devant le sous-comité Z, et, en boutade, j'avais signalé que lorsqu'un premier ministre provincial du même parti que le premier ministre fédéral crie à l'aide pour des programmes, c'est peut-être plus le chef de parti que le chef de gouvernement qui intervient. Le chef de gouvernement est exempté par la loi; le chef de parti ne semble pas être exempté par la loi. Pourtant, il n'y en a aucun d'enregistré.

Je vous signalerai en même temps que s'il y a un groupe qui tente d'influencer les politiques et les programmes gouvernementaux, c'est celui des machines des partis politiques et tous leurs membres permanents. Je vous prie de vérifier votre liste. Je crois qu'ils en sont aussi absents que j'en suis. Il y a là matière à se poser certaines questions.

Toujours dans la mesure où on veut une loi d'application générale, une loi qui s'applique à tout le monde, qui traduit une volonté de transparence, il y a des questions que je soulève, qui se posent. Il y a aussi un problème intrinsèque à la loi elle-même. On définit l'activité de lobbying comme étant celle de tenter d'influencer des politiques, des octrois. Je sais que les juristes du ministère de la Justice vous ont dit qu'il y avait une certaine difficulté avec la preuve. Ça, c'est l'aspect juridique. Moi, j'ai un certain problème simplement pour comprendre «tenter d'influencer».

Est-ce que, pour un client, faire une représentation qui porte exclusivement sur un programme d'aide du gouvernement ayant des balises pour déterminer qui y a accès, qui y est admissible, donc, de soumettre une proposition tout à fait admissible, constitue une tentative d'influencer? La question se pose, et puisque vous êtes en train de revoir la loi, je veux simplement la soulever devant vous.

Enfin, j'ai un dernier commentaire qui fait suite à la question posée tout à l'heure à Mme Gervais. Je voudrais, effectivement, renchérir sur son propos. Si vous tenez à viser les fonctionnaires qui font l'objet de représentations pour tenter d'influencer les politiques, ce sont rarement vraiment de hauts fonctionnaires. Il faut voir comment la machine gouvernementale fonctionne. Il y a des gens, souvent des professionnels, qui colligent l'information, qui établissent les états de situation. C'est, à mon avis, le meilleur endroit pour influencer le cours des choses. Après, les tentatives d'influencer sont faites beaucoup plus pour tenter d'empêcher que quelque chose se produise, c'est-à-dire pour demander l'exercice du non à un élu ou à un haut fonctionnaire, que pour pousser dans la même direction, sauf dans certains cas, bien entendu. Mais je parle de façon générale.

En général, une fois que l'état de la situation et la problématique ont été établis à un niveau relativement inférieur, mais très bien informé, de l'appareil gouvernemental, le dossier chemine et, vous le savez, les décisions se prennent un peu par osmose. L'osmose a commencé beaucoup plus bas et c'est peut-être là qu'il faudrait intervenir, ce que je ne souhaite pas, puisque je n'aimerais pas qu'on soit aussi affublés du syndrome français de tout contrôler.

• 1000

Merci, madame la présidente.

[Traduction]

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Morin.

Avant de donner la parole au deuxième témoin, je voudrais préciser que la lettre en question est affichée sur le site Web de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes et du conseiller en éthique notamment parce que 98 p. 100 des enregistrements de lobbyistes se font par Internet et que cela semble être la meilleure façon pour les gens de trouver cette lettre. J'ai aussi demandé au greffier de fournir un exemplaire de la lettre à tous les témoins et je voudrais recommander à la Chambre d'affecter davantage de ressources à la création d'un site Web beaucoup plus détaillé. Les règles déterminent pour l'instant ce que le comité peut faire, mais je recommanderai certainement que les comités aient accès à des sites Web plus détaillés parce que je pense que c'est une bonne idée. Merci.

M. Pierre Morin: Merci beaucoup, madame la présidente.

Je dois dire que ce n'était pas une critique à votre endroit, mais il y aurait de la place pour ajouter ces détails sur le site du ministère dans la section sur la gouvernance des entreprises, qui porte justement sur cette question. On y trouve des communiqués, mais rien au sujet de l'étude du comité.

La présidente: En effet.

Je vais maintenant donner la parole à M. Peter Clark, de Grey, Clark, Shih and Associates.

M. Peter Clark (président, Grey, Clark, Shih and Associates Limited): Merci, madame la présidente.

Nous sommes un cabinet de consultants en commerce international. Nous faisons du travail de consultation en commerce et nous sommes aussi des experts-conseils lobbyistes. Nos clients comprennent des gouvernements, de même que des entreprises canadiennes et étrangères, des associations professionnelles, des centaines de milliers d'agriculteurs canadiens et divers groupes et organismes agricoles.

J'ai suivi vos discussions au comité avec intérêt et j'ai pensé qu'il serait utile, au lieu de parler du point de vue plus général des associations horizontales que vous avez entendues jusqu'ici, de vous donner des détails sur ce que nous faisons tous les jours, pour vous aider à comprendre notre point de vue. Je voudrais aussi répondre aux questions soulevées dans la lettre que vous avez reçue du ministre Tobin et à certaines autres questions abordées par votre comité.

Relativement aux exigences pour les lobbyistes de la deuxième catégorie, dans le cas des associations professionnelles, je trouve que les exigences de déclaration actuelles suffisent. S'il s'agit d'une association professionnelle, on connaît d'habitude son point de vue et, s'il s'agit d'une association verticale, on connaît ses membres. À mon avis, les exigences en matière de déclaration et d'inscription des membres d'associations qui s'occupent de lobbying sont tout à fait satisfaisantes.

Je ne suis pas nécessairement d'accord avec Jason Myers au sujet des entreprises parce que de 400 à 500 heures représentent vraiment beaucoup. Plus quelqu'un est haut placé, moins il passe de temps à des activités qui devraient faire l'objet d'une déclaration ou d'une inscription aux termes de la loi et je pense que cela cause un déséquilibre. Je ne sais pas quelle pourrait être la solution, mais cela risque de causer des problèmes à court terme. J'espère que nous discuterons aujourd'hui de la façon dont notre industrie, puisque le lobbying est une industrie, évolue maintenant à l'époque de l'informatisation et de la spécialisation en structures, étant donné que l'on peut toujours éviter de dépasser certaines limites si on le veut vraiment. Je ne veux pas dire qu'on le fait, mais cela peut causer un problème.

Je suis cependant d'accord avec Jayson Myers que les exigences en matière de déclaration sont insuffisantes dans le cas des organismes non gouvernementaux ou ONG. Je trouve très bizarre qu'une lobbyiste très active et visible comme Maude Barlow, par exemple, n'est pas maintenant et n'a jamais été enregistrée aux termes de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes. Le Conseil des Canadiens a cessé d'être enregistré il y a près d'un an. Si l'enregistrement des lobbyistes vise la transparence, il faut que cela s'applique à tous. Ces organismes ne sont pas d'autres formes de gouvernement.

Je disais à M. Bélanger que c'est lui mon lobbyiste. Il est mon député et les députés représentent la société civile. C'est ce que j'ai déjà dit à d'autres comités parlementaires relativement à des questions commerciales.

Les représentants de ces organismes devraient être enregistrés. On saurait alors d'où vient leur argent. On saurait s'ils sont financés par le gouvernement d'une façon ou d'une autre et dans quelle proportion. Certains de leurs représentants ne s'enregistrent pas sous prétexte qu'ils ne reçoivent pas de salaire officiel et qu'ils sont des bénévoles, mais je pense que c'est très dangereux. C'est une échappatoire qui permettrait à ceux qui ont une fortune personnelle de se soustraire aux obligations qu'ont d'autres contribuables qui travaillent pour des honoraires ou un chèque de paye.

• 1005

Je le répète, ces organismes devraient aussi être tenus de divulguer la source de leur financement, ce qui m'amène à deux autres choses.

Depuis quelques années, il se fait de plus en plus de lobbying par le truchement de la page en regard de l'éditorial dans les journaux. Dans bien des cas, ces opinions des électeurs sont rédigées par des gens qui font du lobbying en retour d'honoraires et qui ne divulguent pas le nom de leur client ou le fait qu'ils travaillent pour obtenir ces honoraires. Les députés, les élus et les fonctionnaires lisent ces articles, mais ces lobbyistes ne sont pas enregistrés. Cela peut être un problème et il me semble que vous devriez y réfléchir.

Je n'ai pas de texte préparé, mais vous pourrez lire ce que j'ai dit dans la transcription de vos délibérations. Une autre chose qui m'inquiète ne touche pas les lobbyistes qui ne sont pas enregistrés, et je tiens à bien le préciser, mais concerne les lobbyistes qui sont enregistrés.

Il y a des personnes qui influencent la politique de l'État et qui sont des porte-parole très efficaces, qui sont bien versées en politique et qui sont financées anonymement. J'ai remis au greffier un éditorial du National Post disant qu'un donneur étranger anonyme avait fourni 1,6 million de dollars à la faculté des sciences de santé de l'université Dalhousie à la condition que la faculté embauche une certaine personne comme professeur. Il s'agit d'Elizabeth May, directrice exécutive du Sierra Club of Canada. Je respecte énormément Elizabeth. Elle est très compétente et elle est enregistrée comme lobbyiste pour Sierra Club of Canada. Nous ignorons qui a financé ce don à l'université Dalhousie et c'est ce qui cause des problèmes.

Sur le plan de la divulgation et de la transparence, il ne faudrait pas avoir des règles différentes pour les organismes à but lucratif et les associations sans but lucratif. Il arrive de plus en plus souvent que l'on consulte ces organismes non gouvernementaux de la société civile et que ceux-ci participent à la prise de décision. Les mêmes critères devraient s'appliquer à ces groupes qu'aux organismes commerciaux.

Pour ce qui est d'avoir des renseignements plus complets, je suis tout à fait prêt à répondre à vos questions là-dessus. J'utilise souvent la base de données que vous avez maintenant. Je vérifie régulièrement les numéros les plus récents pour pouvoir dire à mes clients s'il y a des gens qui sont d'accord avec eux sur certaines questions ou qui prennent la position contraire. Je trouve cela relativement efficace. À mon avis, les services du conseiller en éthique ont permis d'innover dans ce domaine en administrant ce programme et j'ai bien hâte de voir les améliorations qu'on nous a promises.

Je ne vois pas pourquoi il serait utile de fournir des détails sur tous les contacts. Tenons-nous des dossiers de tous nos contacts? Oui. Pourrions-nous vous aviser de tous ceux que nous rencontrons dans le cadre d'une activité enregistrable? Oui. Pouvons-nous vous aviser de tous nos appels? Pour ma part, je pourrais le faire. J'ai parfois un peu de mal à savoir exactement à qui les huit ou neuf personnes qui travaillent pour nous ont parlé à un ministère quelconque lorsqu'elles consultent leurs notes 30 ou 40 jours plus tard, mais d'habitude, nous pouvons savoir à peu près ce qui s'est passé.

Je ne sais pas à quel point c'est vraiment utile. La base de données contient des renseignements de nature générale. J'espérais que M. Alcock serait ici parce que je voulais lui parler du problème d'une surdose d'information. Les renseignements sont utiles s'ils sont accessibles. L'information est aussi utile si l'on peut s'en servir, mais je ne suis pas certain qu'on puisse se servir d'une surabondance d'information.

Relativement aux honoraires, je ne sais pas quoi vous dire là-dessus vu la façon dont notre industrie évolue. Dans le cas des démarches auprès du gouvernement, elles ne visent pas nécessairement un seul lobbyiste, une seule entreprise ou un seul fonctionnaire. Il arrive de plus en plus souvent que ceux qui offrent ces services travaillent en équipe, et c'est relativement facile d'organiser l'équipe pour éviter d'avoir à déclarer de l'activité ou à l'enregistrer. À ce moment-là, on ne voit que la partie émergée de l'iceberg.

Je ne sais pas non plus à quel point il est utile de fournir des renseignements au sujet des honoraires. Les membres de l'industrie tiennent toujours à protéger leur position concurrentielle.

• 1010

Deuxièmement, à cause de la façon dont la loi est structurée, parce que les lobbyistes qui ne s'enregistrent pas commettent une infraction, les gens ont tendance à se dire que deux précautions valent mieux qu'une et à s'enregistrer inutilement.

Comme l'a signalé la représentante de Bell Canada, bon nombre de nos activités concernent des offices de réglementation, des commissions et des agences qui fonctionnent au grand jour. Je n'ai pas besoin d'être enregistré pour de telles activités, mais si, dans le cadre de ces activités, je m'organise pour rencontrer le titulaire d'une charge quelconque dans un domaine qui est ou qui n'est pas directement relié au mien, je dois m'enregistrer. Je m'enregistre donc pour le cas où je devrais organiser une telle réunion.

Mes clients n'ont pas de contrat d'une durée de un, deux ou trois mois. Certains de mes clients sont avec moi depuis 15 ou 20 ans. Nous avons des arrangements permanents.

Les négociations commerciales évoluent constamment. La politique commerciale évolue. Nos experts en la matière peuvent vous dire qu'il n'y a pas de règle écrite nulle part. Tout se fait à l'avenant. On s'occupe des problèmes à mesure qu'ils surgissent. On a donc tendance à s'enregistrer, surtout dans mon domaine, pour le cas où on aurait une activité qui doit être enregistrée.

À mon avis, la tâche devient trop lourde si l'on impose trop de conditions. Les gens risquent d'être beaucoup plus prudents et plus sélectifs au sujet des activités qui seront enregistrées.

Je répondrai volontiers à vos questions.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Clark.

Nous allons maintenant passer à MM. Scott Proudfoot et Michael Teeter de Hillwatch Inc.

Monsieur Teeter, allez-y.

M. Michael Teeter (coprésident, Hillwatch Inc.): Merci.

Scott et moi nous occupons de lobbying de la première et de la deuxième catégorie depuis une vingtaine d'années chacun. Nous répondrons volontiers à vos questions tantôt à propos des aspects commerciaux du lobbying, mais on nous a demandé de parler plutôt de l'Internet et du lobbying, puisque c'est l'un de nos domaines de spécialisation. C'est donc ce que nous allons faire. C'est de cela que nous parlons dans notre mémoire, et nous nous contenterons de vous en donner un bref aperçu oralement.

Depuis trois ou quatre ans, nous avons constaté que l'Internet joue un rôle de plus en plus important dans la façon dont nous communiquons, dont nous nous organisons et dont nous faisons des démarches auprès des gouvernements. C'est une tendance qui est particulièrement marquée aux États-Unis. Par ailleurs, cela veut dire que l'Internet rend le processus de lobbying plus ouvert et plus transparent.

Nous avons donc pensé qu'il valait mieux emboîter le pas que de s'opposer à cette tendance, contrairement à bien des lobbyistes qui pensent que leur travail doit se passer en coulisses et en secret. De notre côté, nous considérons que ce n'est pas vraiment cela qu'est le lobbying. Le lobbying consiste à prendre certains intérêts du secteur privé pour les faire correspondre aux intérêts du secteur public sans cacher quoi que ce soit pour que tout le monde en sorte gagnant. L'Internet est un outil essentiel pour atteindre cet objectif.

Nous avons construit une communauté autour de Hillwatch.com. C'est ce qu'on appelle une communauté électronique, pour des gens comme vous et moi. Je ne veux pas entrer trop dans les détails, mais notre site contient une fonction ou une section appelée «liste de lobbying». Il s'agit de liens à toutes sortes de lobbyistes, pour la plupart des organismes.

En théorie, si vous voulez savoir qui dit quoi sur les questions qui vous intéressent et quelles questions font l'objet de débats au gouvernement ou ailleurs, vous pouvez aller voir sur l'Internet. Si vous organisez tous ces renseignements de façon utile, cela fournit un grand service au public. Pensez à ce que cela veut dire pour valoriser votre travail. Si vous voulez savoir ce qui se passe relativement aux aliments génétiquement modifiés, vous pouvez trouver tous les rapports qui ont été faits sur les aliments génétiquement modifiés depuis quelques années et trouver tous les points de vue divergents et convergents sur le sujet.

C'est une chose tout à fait constructive et utile. Cela devrait être encouragé et non le contraire. Selon nous, le gouvernement et le Parlement ont un rôle essentiel à jouer pour garantir que cela fonctionne bien.

Scott.

M. Scott Proudfoot (coprésident, Hillwatch Inc.): L'Internet peut faire beaucoup pour favoriser la discussion des politiques publiques parce que c'est la source de renseignements de prédilection de bien des gens. Maintenant que plus de 50 p. 100 de la population du Canada est branchée, qu'il y a des liens avec les médias, avec ceux qui participent à la discussion des politiques publiques, avec les responsables d'associations, le taux de branchement est probablement de 80 p. 100 à 90 p. 100 dans bien des cas.

• 1015

Si vous demandez à ces gens où ils cherchent leurs renseignements d'abord, de plus en plus vous diront qu'ils cherchent pour commencer sur l'Internet. Si nous posions la question à votre personnel, je suis certain que le taux de réponse serait d'au moins 80 p. 100. Si nous posions la question aux journalistes, le taux de réponse serait de plus de 90 p. 100 d'après certains chiffres. Cela veut dire, pour retenir l'attention de tous ces gens et mettre ses idées de l'avant, s'il faut avoir une présence dans le cyberespace et être facilement accessible. Cela permet à plus de gens de mettre leurs positions de l'avant.

Les groupes qui ont compris la valeur de l'Internet comme outil de promotion pour leurs opinions ont été les groupes de la société civile. Ce n'est pas qu'ils soient plus intelligents que les autres. Le fait est qu'ils possèdent moins de ressources que les autres groupes. Ils ont compris que l'Internet est un outil qui leur permet de faire les choses mieux, de façon plus économique et plus vite et ont décidé de s'en servir. J'ai déjà comparé l'Internet au couteau de l'armée suisse d'une organisation de campagne de promotion. On peut faire toutes sortes de choses grâce à l'Internet.

Ces groupes se sont tournés vers l'Internet et s'en sont très bien servi. Nous l'avons vu lors du récent Sommet des Amériques. Les divers groupes se sont organisés sur l'Internet pour manifester contre le sommet. Cela a incité les autres groupes qui font l'objet des attaques des groupes de la société civile à se servir eux aussi de l'Internet pour défendre leurs points de vue.

Un très bon exemple de cette situation est le débat sur les aliments génétiquement modifiés dont Michael a déjà parlé. Vous pouvez trouver toutes sortes d'informations là-dessus sur notre site. Les militants anti-aliments génétiquement modifiés se servent de l'Internet pour critiquer les entreprises traditionnelles, qui ont été prises au dépourvu. Tout à coup, elles se sont rendu compte qu'elles devaient défendre leur position publiquement. Si vous visitez les sites des entreprises traditionnelles ou des associations qui les représentent, vous y trouverez toutes sortes de renseignements fiables, toutes sortes de renseignements intéressés, beaucoup de documentes scientifiques et beaucoup de propagande visant à semer la peur. Vous pouvez trouver toutes sortes de choses sur cette question. Il y a quatre ou cinq ans, cela aurait été impossible. Maintenant, tous ces renseignements sont accessibles au public. Selon nous, à part la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes, l'existence de l'Internet incite l'industrie à fonctionner beaucoup plus au grand jour qu'auparavant.

Bien sûr, cela a certains désavantages. L'un de ces désavantages, c'est que vous, députés, allez être assaillis de toutes sortes de renseignements d'ordre politique superflus. Nous venons de voir un rapport disant que les sénateurs américains reçoivent 55 000 courriels chaque mois. Les représentants à la Chambre en reçoivent 8 000. Je ne connais pas les chiffres pour le Canada, mais je peux vous dire que vous allez être inondés. Cela va vous déplaire et ce sera vraiment un problème. Que pouvez-vous faire? C'est vraiment un problème pour vous parce que bien des gens jugent pouvoir se servir de cette méthode pour communiquer avec leur député.

L'autre chose qui rejoint ce que disait M. Clark dans une certaine mesure, c'est que l'Internet comme médium politique n'a pas encore atteint sa maturité. Certains sites ont un look très classe et l'on se demande souvent si les propriétaires des sites sont des groupes légitimes qui représentent un grand nombre de personnes ou s'il s'agit simplement de Pierre, Jean, Jacques et de quelques-uns de leurs amis qui savent comment bâtir un bon site pour mettre leur point de vue de l'avant. Il n'existe pas vraiment de règles pour dire qu'un groupe doit s'identifier correctement sur l'Internet.

À mon avis, de la même façon que le public a commencé à réclamer des mesures d'accréditation ou des règles de divulgation dans le cyberespace, les gens comme vous vont commencer à réclamer certaines choses. Vous et d'autres allez commencer à dire que, si quelqu'un a un site Internet et met une politique quelconque de l'avant, cette personne doit s'identifier. Je pense qu'il faudra songer à des codes volontaires et à d'autres programmes de ce genre.

Si vous trouvez que les choses bougent maintenant, vous allez sans doute trouver qu'elles bougent davantage plus tard vu les nouvelles technologies qui existent déjà, les transferts quai à quai, les caméras numériques à prix modique, l'utilisation des larges bandes, la télévision numérique. Les groupes civils pourront essentiellement demander à leurs membres, à leurs bénévoles et à leurs partisans de leur prêter leur capacité informatique excédentaire dans quelques années pour pouvoir mettre de l'avant leur propre point de vue grâce à leur propre poste de télévision numérique.

Bien des gens veulent une démocratie plus directe. Ils veulent remplacer non seulement leurs élus, mais aussi, sinon plus encore, les médias. Vous allez avoir droit à l'émission «Tout ce qu'il faut savoir sur les droits des animaux» ou «Parlons antimondialisation». C'est vers cela qu'on se dirige. Nous allons tous devoir nous adapter à ces changements, mais je pense qu'il existe des solutions constructives et Michael va vous en parler.

• 1020

M. Michael Teeter: Certains trouvent l'idée des communautés électroniques plutôt inquiétantes, mais nous trouvons cela fascinant. L'un des avantages de l'Internet, c'est qu'il permet à des gens d'un peu partout dans le monde de se réunir, de communiquer et de former des opinions communes de façon très économique, efficace et efficiente. Soit dit en passant, certains organismes, notamment certains organismes gouvernementaux aux États-Unis, sont parmi les premiers à vouloir créer des communautés électroniques et ils le font de façon très efficace.

Que font ces communautés électroniques? Pour voir les choses du bon côté, elles permettent de se renseigner beaucoup plus qu'auparavant sur ce qui se passe dans le monde et sur ce que les autres membres du groupe font. La mauvaise nouvelle pour vous, peut-être, c'est qu'elles exercent de plus en plus de pressions sur les gouvernements. Elles s'organisent pour exercer des pressions sur les gouvernements. C'est ce qu'elles font. Ce sont des lobbyistes, mais ce n'est pas seulement une personne qui représente quelqu'un qui préfère rester dans l'ombre et qui doit s'enregistrer. Il y a des millions de personnes qui se servent de l'Internet pour s'organiser.

L'autre caractéristique de ces cybercommunautés, c'est l'absence chez elles d'une chose que les associations ont. Les associations ont des structures et des règlements. Ce n'est pas le cas de ces communautés. Elles n'ont pas de chef, elles n'ont pas de mandat et elles n'ont pas de règles de conduite. L'un des grands défis pour les gouvernements sera de s'occuper de ces questions. Qu'allez-vous faire de ces communautés qui exercent des pressions sur vous?

Je vais vous dire autre chose: les hauts fonctionnaires mêmes dont nous sommes en train de parler qui font l'objet de pressions de la part de lobbyistes forment leurs propres cybercommunautés. Ces cybercommunautés sont en train d'être formées à l'intérieur du gouvernement et elles adoptent des positions de principe.

Donc, nous considérons que le gouvernement doit absolument tâcher de gérer ces cybercommunautés de façon légitime.

M. Scott Proudfoot: La Loi sur l'enregistrement des lobbyistes concerne vraiment la transparence et l'amélioration de la transparence de la défense des intérêts publics. D'après notre expérience, la loi est bien administrée et répond à un réel besoin, dans une certaine mesure, mais je crois qu'il y a des choses plus importantes qui se passent. En fait, il y a des choses que le gouvernement peut faire pour rendre le processus beaucoup plus ouvert, au-delà de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes—et ce dont il s'agit en fait c'est du processus de consultation publique et de son fonctionnement.

Nous tenons constamment des consultations publiques avec nos clients. J'aimerais vous dire qu'elles se déroulent toutes très bien, mais c'est rarement le cas. Beaucoup de ces consultations ne sont pas ouvertes, beaucoup d'entre elles ne sont pas transparentes et beaucoup d'entre elles ne sont pas inclusives. Souvent on se demande si les personnes qui dirigent ces consultations savent ce qu'elles font. Donc, notre expérience à cet égard n'a pas été vraiment bonne et cela influence peut-être un peu notre point de vue.

Il existe une façon d'utiliser Internet pour rendre le processus beaucoup plus accessible. C'est ce qu'a fait le Royaume-Uni et nous vous encourageons fortement à l'imiter. Il existe un portail pour les citoyens britanniques qui s'appelle UK Online, et dans la partie du portail appelée Citizen Space, il y a un bouton qui porte la mention «Consultations». Cela vous amène à un registre central où vous pouvez trouver toutes les consultations qui se déroulent au gouvernement britannique. Vous pouvez alors grâce à un lien consulter les renseignements de base qui sont fournis par les hauts fonctionnaires à propos de ces consultations, et vous pouvez trouver quelles sont les personnes ressources et où envoyer votre mémoire.

Ce registre central constitue en réalité un lien vers les registres ministériels, et dans les bons registres ministériels, vous pouvez vous rendre sur les sites des ministères. Dans chaque site, sur la première ou la deuxième page, il y a habituellement un bouton de «Consultations», qui vous amène à leur registre.

Habituellement, ces sites vous fournissent des renseignements sur les consultations en cours et celles qui viennent de se terminer. Dans le cas de celles qui viennent de se terminer et à l'issue desquelles le gouvernement a rendu une décision, on vous donne un résumé des personnes qui ont comparu, de ce qu'elles ont dit et de la décision prise par le gouvernement. Tout cela est exposé dans un code de pratique concernant la consultation qui est public et sur Internet.

Nous pensons que c'est une excellente idée. Cela motiverait beaucoup plus les gens à participer, à se renseigner sur ce qui se passe, et c'est pourquoi nous vous recommanderions de tout simplement leur voler cette idée et de l'appliquer au Canada.

Bien entendu, comme nous sommes Canadiens, nous pensons que nous pouvons y apporter des améliorations. Nous estimons qu'il y a un certain nombre de choses que nous pourrions ajouter. Tout d'abord, j'ignore pourquoi on ne peut pas avertir les gens par courriel lorsqu'une consultation est sur le point de se tenir. Par exemple, il suffit de créer, dans le cadre d'un registre de consultations, une liste de 30 ou 40 sujets clés. Ces sujets vous intéressent-ils? Cochez-les et donnez-nous votre adresse électronique. Nous vous enverrons alors un courriel pour vous indiquer la tenue d'une prochaine consultation. Vous pourrez alors vous rendre sur le site de consultations, obtenir plus de renseignements, vous renseigner sur le contexte et participer si vous le voulez. C'est une technologie très simple peu coûteuse et facile à utiliser.

Deuxièmement, qu'est-ce qui m'empêche de trouver les mémoires que les gens ont présentés dans le cadre d'une consultation et de les lire? Qu'est-ce que cela a de compliqué? Si vous avez un registre de consultations, pourquoi ne pas avoir un bouton sur lequel on pourrait cliquer pour avoir accès aux mémoires? Il suffit d'avoir une liste des personnes qui ont présenté des mémoires. Elles pourraient alors fournir les liens qui permettraient de consulter leurs documents sur leur site. Les gens pourraient alors les consulter, ou le gouvernement pourrait fournir une forme quelconque de registre central doté d'une base de données consultable.

• 1025

Ici encore, il s'agit d'une technologie relativement simple—elle existe déjà—et elle rendrait le processus extrêmement accessible en permettant de connaître les positions adoptées par les différents intéressés.

Il faut toutefois faire une importante mise en garde: je crois que cela doit être volontaire. Parfois les renseignements que nous fournissent nos clients sont confidentiels—nous ne devrions pas divulguer de l'information que ne devraient pas connaître leurs concurrents. Je pense que les gens ont le droit de ne pas divulguer de l'information s'ils ne le veulent pas. Mais je pense que la plupart des gens participeraient à une telle initiative.

Enfin, au fur et à mesure qu'évoluera le gouvernement en direct—une fois que le gouvernement aura maîtrisé cette technologie et offrira des consultations publiques,—je crois que les gens seront très satisfaits. Ils n'hésiteront pas à consulter les sites Web et à communiquer de cette façon avec le gouvernement, car si cela est bien fait, ce sera plus facile et plus rapide.

Mais lorsque les gens commencent à utiliser les sites Web, il y a un dialogue qui s'établit. Nous avons constaté un phénomène très intéressant sur notre site. On nous a posé des questions pour aider les enfants à faire leurs devoirs—ce n'est pas nécessairement ce que nous avions prévu lorsque nous avons installé le site. Les gens communiquent avec vous à leurs propres conditions, de leurs propres manières et ont leurs propres priorités. Avec le temps, les sites Web du gouvernement deviendront des mécanismes interactifs, avec des boucles de commande qui permettront de recueillir l'avis du public.

Donc la question qui se pose est la suivante: Quelle est la place du député dans ce processus? Jusqu'à un certain point, vous pouvez être exclus du processus. Dans le cadre de nos discussions sur les mécanismes de consultation et les cybercommunautés, je pense que nous devons examiner comment nous pouvons intégrer au processus les représentants élus et la responsabilité démocratique.

Si cette idée de consultations publiques vous plaît—et nous espérons que c'est le cas—, je propose que quel que soit le mécanisme adopté, on prévoie un bouton qui indique: «Communiquez avec votre député. Si quelque chose vous tient à coeur, faites-en part à votre député.» C'est le genre de mécanisme qu'il faut prévoir.

Au fur et à mesure qu'évoluera le gouvernement en direct, il faudra envisager d'autres moyens d'intégrer les députés au processus. Il serait très inquiétant de ne pas en faire une grande priorité.

Je vous remercie.

La présidente: Je vous remercie.

Je tiens à vous remercier tous pour vos exposés. Notre temps est limité. Je tiens à rappeler à tout le monde que notre réunion se termine à 11 heures car il y a un autre comité qui va siéger ici.

Nous allons passer aux questions et commencer par M. Penson.

M. Charlie Penson: Je vous remercie, madame la présidente.

Je tiens à remercier nos témoins de ce matin. Cet exposé été très intéressant.

Messieurs, je pense que vous avez raison. Je pense que le public veut effectivement avoir son mot à dire. Cela est assez évident à la lumière du débat sur la société civile, monsieur Clark. Nous sommes submergés de courriels d'information à l'heure actuelle. Cela fait partie de la nouvelle ère de l'information, et nous devons y faire face.

Il me semble que plutôt que d'essayer d'enregistrer tous les lobbyistes, partons simplement du principe que tout le monde fait du lobbying auprès de nous. C'est vraiment ce qui se passe dans les faits. Il me semble que c'est préférable à essayer d'établir de trop nombreux paramètres liés à cette Loi sur l'enregistrement des lobbyistes.

Nous pourrions continuer à en élargir la portée pour inclure l'Église unie et tous les différents groupes de la société civile. Mais que se passe-t-il dans le cas du type qui m'envoie chaque jour un courriel sur les différentes choses qu'il réclame en tant que particulier? Il va falloir que nous apprenions à nous occuper de ce genre de cas.

En passant, il est intéressant de constater que lorsqu'on commence à correspondre par courriel avec ses électeurs, très vite votre correspondant vous parle d'un concours de tir où il a remporté la première place et il vous demande si vous voulez venir voir son trophée. On pourrait croire alors qu'il s'agit presque davantage d'une amitié que d'une relation avec un député.

Je suppose que c'est là où je veux en venir: N'est-il pas préférable de faire confiance au jugement de ceux d'entre nous qui font l'objet de lobbying? Nous savons que nous faisons l'objet de pressions politiques, et nous devons séparer le bon grain de l'ivraie. Je pense que nous devrions cesser d'essayer d'établir des paramètres artificiels pour régir ceux qui peuvent faire du lobbying.

M. Peter Clark: Monsieur Penson, je ne propose pas que nous élargissions les paramètres. Je disais que les paramètres n'étaient pas respectés. Qu'importe que le lobbying vienne de l'entreprise, d'un groupe d'agriculteurs, d'un éleveur de l'Alberta, des maïsiculteur en Ontario ou au Manitoba, ou du Council of Canadians. C'est sans importance, à mon avis.

Mais je crois que s'ils veulent assumer un rôle prépondérant, devraient en informer le reste du pays, car les causes pour lesquelles ils font du lobbying et les lobbyistes eux-mêmes ne recueillent peut-être pas l'approbation de tous. Je ne dis pas qu'il faudra multiplier les déclarations.

• 1030

M. Charlie Penson: Vous avez raison. Il faut égaliser les règles du jeu. Mais je tiens simplement à dire que nous devrions peut-être assouplir un peu les règles du jeu afin que chacun n'ait pas à respecter toutes ces exigences.

M. Peter Clark: Uniquement s'ils exercent ce type d'activités. Vous savez, l'Église unie et les autres groupes dont vous parlez viennent souvent témoigner ici devant les comités parlementaires. Ils n'ont pas à s'enregistrer pour le faire.

M. Charlie Penson: Monsieur Clark, lorsque le groupe des pompiers a pris d'assaut la Colline et a parlé à tout le monde—que faites-vous dans un cas pareil?

M. Peter Clark: Je suppose que c'est une situation difficile.

M. Charlie Penson: Ils faisaient du lobbying, n'est-ce pas?

M. Michael Teeter: Dans un cas comme celui-là, les responsables de leur association sont probablement enregistrés, mais pas leurs membres.

J'estime que nous ne devrions pas décourager ce genre de chose, mais plutôt l'encourager. Cela est important pour la démocratie. Mais en ce qui concerne les titulaires d'une charge publique, qu'ils soient élus ou non, je crois que la question importante à se poser est la suivante: Qui sont-ils et qui représentent-ils?

Je peux vous dire que c'est la première chose que je dis à un représentant du gouvernement qui ignore qui je suis ou qui je représente. Je leur dis mon nom et qui je représente. La plupart d'entre eux s'y attendent.

Donc, je dirais que c'est une meilleure façon pour vous de mieux comprendre qui sont ceux qui font du lobbying auprès de vous. Au bout du compte, nous ne pourrons jamais enregistrer tout le monde—et nous ne le devrions pas. Ce serait une grave erreur.

En ce qui concerne l'Internet, j'aimerais dire que lorsque les gens communiquent avec vous en tant que députés par Internet, que ce soit des gens de votre circonscription ou d'ailleurs, vous devriez y voir l'occasion de saisir des données. Une fois que vous apprenez quelque chose à propos d'une personne, cette personne devient essentiellement un bénévole.

Les politiciens américains ont perfectionné ce système, et il arrive au Canada. Au bout du compte, je peux vous dire que vous serez en mesure de distinguer les vraiment bons députés des autres par l'efficacité avec laquelle ils s'acquittent de cette tâche.

La présidente: Avant de poursuivre, monsieur Morin, souhaitez-vous ajouter quelque chose?

M. Pierre Morin: Nous nous préoccupons ici des gens qui viennent sur la Colline. Mais que se passe-t-il dans le cas des gens—un groupe de camionneurs, ou d'agriculteurs—qui bloquent la 417? Vous pouvez avoir l'impression de ne pas être visé par un tel geste, et pourtant c'est un geste qui vous vise ainsi que vos politiques.

La présidente: Dernière question, monsieur Penson.

M. Charlie Penson: Je suis d'accord avec vous. Mais je crois qu'il s'agit vraiment de faire preuve de bon sens pour débrouiller tout ça.

Je sais que Bell Canada fait du lobbying. Et après? Je le savais bien avant que Bell Canada ait à s'enregistrer comme lobbyiste. Ce que je veux dire c'est à quoi cela sert-il? Nous savons que cela existe.

M. Pierre Morin: Je crois que vous essayez de régler un problème en 2001 qui remonte à 1988.

M. Charlie Penson: Pourriez-vous me donner des précisions?

M. Pierre Morin: Au départ, la loi a été proposée à cause des prétendus scandales qui se sont produits après les élections générales de 1993. Cela a entraîné la révision de la loi de 1988. Mais vous essayez toujours de régler le problème de 1988.

Il faudrait peut-être envisager la situation comme suit: Quels sont les problèmes qui existent en 2001? Quels sont les problèmes—comme la communauté électronique—dont vous êtes saisis? C'est là la vraie question. N'essayez pas de remédier aux scandales de 1988. Ils n'existent plus depuis longtemps.

M. Charlie Penson: C'est un bon argument, et je suis d'accord avec vous.

La présidente: Votre dernière question, monsieur Penson.

M. Charlie Penson: Pour enchaîner là-dessus, l'un des témoins a parlé du lobbying sur Internet et des possibilités que cela présente. Avec la convergence, entre autres, il y aura beaucoup de chaînes spécialisées—et j'en suis ravi; je considère que c'est une bonne chose.

À cet égard, je suis en opposition avec Tom Kent, de la Commission Kent des années 60, qui a comparu devant notre comité l'année dernière. Il déplorait le fait que certains services de nouvelles n'ont pas suffisamment de personnel aujourd'hui pour faire autre chose que de rapporter les faits. Eh bien, c'est ce que veulent beaucoup de gens. Ils veulent avoir l'occasion de changer de chaîne s'ils ne sont pas d'accord avec ce qui se passe, ou alors regarder une chaîne et prendre leur propre décision.

Donc je me réjouis de constater ce qui se passe, et je pense que c'est aux Canadiens de déterminer ce qu'ils attendent de toute cette question de convergence.

• 1035

La présidente: Je vous remercie, monsieur Penson. Monsieur Lastewka, à vous.

M. Walt Lastewka: J'ai une seule question, et je pense que M. Morin vient de mettre le doigt dessus. Nous devons tenir compte du monde dans lequel nous vivons maintenant, et je n'ai pas l'intention de revenir en arrière. Je veux examiner la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes telle qu'elle est rédigée et voir comment elle s'applique aujourd'hui et au cours des années à venir, avant que des changements trop importants se produisent.

La question que je veux poser aux témoins est la suivante: que faut-il changer à la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes pour qu'elle corresponde au monde dans lequel nous vivons aujourd'hui? Y a-t-il des dispositions qu'il faudrait supprimer parce qu'elles n'ont plus de raison d'être? Y a-t-il des dispositions qu'il faudrait ajouter à cause de la situation qui existe aujourd'hui? C'est une question très claire, très simple et directe.

La présidente: Monsieur Clark, allez-y.

M. Peter Clark: Je vous remercie. Je suis d'accord avec ce qu'a dit M. Morin à propos de l'environnement différent dans lequel nous fonctionnons aujourd'hui. Dans ma déclaration, lorsque j'ai parlé de la politique commerciale—qui est l'une des questions qui m'intéressent—, j'ai dit que le milieu des affaires évolue de façon rapide et constante.

Mais aujourd'hui, nous ne traitons pas d'une loi qui a été conçue essentiellement pour éviter le trafic d'influence et la vente de contacts, pour parler carrément. C'est pourquoi nous devons déclarer chaque réunion que nous organisons, alors qu'auparavant le fait que cela ait un lien avec les critères précédents à la partie (a) n'avait pas d'importance.

Aujourd'hui, nous avons affaire à un gouvernement qui table beaucoup plus sur la transparence. À cause de l'Internet, ce n'est plus l'influence qui prime mais l'information. Les gouvernements doivent fonder leurs politiques sur l'information.

Mais ce qu'il faut déterminer, c'est d'où provient l'information et qui les gens représentent-ils? Comment pourrions-nous enregistrer une réunion ou une rencontre? C'est cela qu'il faut comprendre. Il peut s'agir d'une rencontre en tête-à-tête. Mais l'organisation d'une conférence téléphonique, ou l'organisation d'une téléconférence ou d'une réunion de personnes de différentes régions du pays ou du monde dont l'image est retransmise sur des écrans de télévision, cela constitue aussi une réunion, à mon avis.

Nous devons nous assurer de bien faire comprendre ces aspects pour éviter que l'on essaie d'utiliser ces techniques pour se soustraire à l'obligation de déclarer ce genre d'activité. L'essentiel c'est de savoir qui fait les présentations et qui ces personnes représentent. Il faut que cela soit déclaré pleinement. C'est tout ce dont nous avons besoin, car ainsi les gens pourront fonder leurs décisions sur des renseignements de qualité qu'ils pourront évaluer en conséquence.

En ce qui concerne les propositions faites par Michael et Scott à propos de l'établissement de bases de données sur des sites accessibles—l'OMC a déjà commencé à le faire. À Affaires étrangères et Commerce international nous avons affiché des déclarations de principe sur le Web.

Cela est faisable et permettrait d'améliorer nettement les interventions et la prise de décision. Je crois qu'il faut que ce soit une situation qui évolue. Je ne crois pas que nous devrions insister autant pour que les personnes se désenregistrent en 30 jours. Qu'on leur donne une déclaration à remplir tous les six mois ou chaque année où on leur demande s'ils travaillent toujours pour telle ou telle personne. Dans la négative, on peut les rayer de la liste.

La présidente: Monsieur Teeter.

M. Michael Teeter: Une fois qu'on adopte une structure réglementaire, comme c'est le cas ici, on s'aventure en terrain glissant. Les problèmes présentés par le ministre proviennent de personnes qui se plaignent d'une absence d'équité, qui réclament que l'on arrondisse les angles et ainsi de suite. Telles seront les choses tant que vous maintiendrez la structure réglementaire.

Je vous recommande de vous occuper assurément en toute conscience des questions qui vous sont posées. Mais si vous voulez apporter une contribution positive à la transparence, à l'ouverture et ainsi de suite—ce qui est vraiment la raison d'être de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes—je me hasarderais un peu dans le secteur dont nous avons parlé. Je commencerais par examiner comment Internet influe sur la transparence, comment on pourrait intégrer toute cette question de consultation et de gouvernement ouvert aux mesures que vous tâchez de prendre dans le cadre de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes.

Je crois qu'ainsi vous rendrez le débat beaucoup plus concret.

Le ministre des Finances Paul Martin a prononcé un discours de la conférence Crossing Boundaries, dont Reg a assuré la coprésidence il y a quelques semaines. Dans ce discours il a fait certains commentaires très éloquents à propos du rôle d'Internet et de la façon dont les jeunes en particulier s'attendent à traiter avec le gouvernement en utilisant Internet et à quel point il est d'une importance critique tant pour les gouvernements que pour les députés de disposer des outils qui permettent de communiquer avec les jeunes de la façon dont ils veulent communiquer, c'est-à-dire à l'aide d'Internet. Donc je crois que vous avez suffisamment d'éléments pour vous permettre de faire une déclaration éloquente à propos de l'avenir.

• 1040

M. Walt Lastewka: Je ne voulais pas que nous concevions un tel système pour qu'ensuite vous le critiquiez. Je voulais que vous nous indiquiez en quoi il devrait consister car vous avez beaucoup plus d'expérience que nous tous réunis.

Une voix: Engagez-le!

M. Scott Proudfoot: En ce qui concerne ce que le ministre vous a présenté, je crois que c'est une bonne idée que l'on propose aux lobbyistes de revoir leur enregistrement tous les six mois, car autrement certains négligeront de le faire. Donc, pourquoi ne pas le faire? Mais si vous nous demandez de le faire chaque mois, l'utilisation de ce programme devient vraiment pénible. Donc six mois c'est suffisant, à mon avis. Cela prend du temps et l'accès devient difficile après 9 h 30. J'ignore si c'est parce qu'ils ont le plus ancien serveur dans l'édifice, et qu'il s'agit d'une technologie vraiment désuète. Voilà ce que j'avais à dire. Je préfère le faire périodiquement et composer avec l'exaspération que cela provoque. Mais ne m'obligez pas à le faire constamment.

Le fait est qu'à l'heure actuelle nous parlons de consacrer des milliards de dollars au gouvernement en direct, et tous les responsables qui s'occupent de ces programmes et qui les planifient, de même que les projets exploratoires, ne réfléchissent pas vraiment à la démocratie en direct. Ils ne considèrent tout simplement pas que cela fait partie de leur mandat. Ils s'intéressent uniquement à offrir leurs services en direct. Donc, s'ils ne réfléchissent pas à la démocratie en direct et s'ils n'envisagent pas d'ouvrir le système, qui diable le fait? Et si ce n'est pas vous, je ne crois pas qu'ils interviendront pour montrer la voie.

Il existe donc toute une foule de moyens, mais je présenterai un dernier argument. En ce qui concerne Internet, je crois que souvent une approche réglementaire directe ne fonctionne pas parce qu'il s'agit d'un système international, mondial. C'est pourquoi on parle tant de normes volontaires et de l'établissement d'un consensus—c'est la seule chose qui semble fonctionner dans ce médium. Donc si on se préoccupe de la divulgation et de l'absence de communication de la part de ces groupes, ils ont tous des sites Web. Si nous arrivions à les persuader d'adopter volontairement un bon code de pratiques, je suis sûr que la plupart d'entre eux accepteraient d'en faire partie. Je pense que cela réglerait un grand nombre de problèmes.

La présidente: Très bien. Je vous remercie.

[Français]

M. Pierre Morin: Je serai bref. J'aimerais que l'on se demande s'il y a adéquation entre le projet de loi et les décisions récentes des tribunaux, et ce même si vous donniez suite à toutes les demandes du ministre. Les tribunaux ont statué que des groupes autres que les partis politiques pouvaient intervenir durant une campagne électorale afin d'influencer le cours de l'élection.

Or c'est là, essentiellement, du lobbying à l'état pur. Et ils n'ont pas à s'enregistrer. Il y a là, essentiellement, un problème d'adéquation. Monsieur Clark a tout à fait raison, vous travaillez à une loi qui aurait bonne pour 1988. La situation a beaucoup changé depuis. Il ne s'agit plus d'influence qui s'exerce mais d'information qui se transmet, et c'est généralement celui qui transmet l'information la plus crédible qui l'emporte. En tout cas, voilà ce qu'est maintenant ma profession, de façon presque exclusive.

[Traduction]

La présidente: Je vous remercie.

Excusez-moi, mais je dois passer à quelqu'un d'autre. Nous commençons vraiment à manquer de temps.

[Français]

M. Pierre Brien: Merci. Il s'est dit des choses extrêmement intéressantes, des choses qui donnent des points de vue différents de ce qu'on a toujours entendu jusqu'à présent. Cependant, monsieur Morin, il y quelque chose que je ne comprends pas dans votre approche. Vous parlez des groupes qui font pression: ceux qui bloquent des routes ou qui interviennent dans des campagnes électorales. Cela se fait à visage découvert. On les voit. Cela ne me dérange pas qu'ils soient enregistrés ou pas. Leurs actions sont publiques, vues et connues. Normalement, ils agissent pour être vus du public. Cette zone ne m'inquiète pas. Ce qui m'inquiète, c'est ce qu'on ne voit pas.

• 1045

Vous avez dit lors de vos remarques d'ouverture sur l'accès à l'information, que ce qui se passait ici, et qui est disponible sur Internet, vous donnait l'impression que les fonctionnaires dirigent. Vous n'êtes pas le seul à avoir cette impression. Nous avons aussi cette impression jusqu'à un certain point. J'ai le sentiment de ne pas savoir assez ce qu'ils font et j'aimerais en savoir un peu plus.

Vous avez demandé si, lorsque vous intervenez dans un programme normé, vous deviez rapporter ce genre d'activités. Ma question concerne le client qui vous engage. Vous engage-t-il parce que vous avez de l'influence potentielle ou seulement parce que vous allez l'aider à comprendre comment tout cela fonctionne?

M. Pierre Morin: Si je prétendais avoir de l'influence, je contreviendrais au Code criminel. Si même je prétends vous connaître, je contreviens au Code criminel. Ce qui arrive plus fréquemment—je parle plus particulièrement de mon expérience—, c'est que je m'occupe beaucoup plus de mon client que de l'appareil gouvernemental. En fait, j'enseigne à mon client à gérer ses relations gouvernementales. Je l'aide à faire ses démarches plutôt que de les faire moi-même. Mais il peut arriver parfois qu'on me demande de compléter une demande pour le client, par exemple une subvention dans un programme normé, et je complète le formulaire. Mais je ne fais pas de représentations. Je n'essaie pas de changer ou de modifier les normes ou d'obtenir quoi que ce soit d'autre que ce qui est offert par le programme.

M. Pierre Brien: Sans se limiter à votre cas, ne croyez-vous pas qu'il existe un certain nombre de clients d'entreprise qui espèrent, quand ils font affaire avec une firme de relations publiques ou de lobby, que celle-ci ait de l'influence parce qu'elle a accès à des informations privilégiées vu sa connaissance de certains fonctionnaires qui savent à quel moment les délais vont être fixés, à quel moment la demande doit être remise, etc.?

M. Pierre Morin: Vous me permettrez d'être cynique, ce sont ces clients que j'adore. Quand ils me disent connaître un tel ministre, je leur dis de faire leurs démarches et de revenir me voir lorsqu'ils s'apercevront que cela ne fonctionne pas.

M. Pierre Brien: Je ne parlais pas du ministre, je parlais...

M. Pierre Morin: Que ce soit le ministre ou le sous-ministre, ils ont tous un confrère avec qui ils ont étudié et qui est très influent au sein du gouvernement. Je leur dis d'y aller et de revenir me voir. Et ils reviennent. Mais je vais répondre à votre question. Vous êtes un comité parlementaire. Vous avez, effectivement, le pouvoir de convoquer n'importe quel fonctionnaire pour lui demander ce qu'il recommande, pourquoi, et quelles influences il a subies. Le faites-vous? Vous pouvez nous demander si nous avons tenté d'influencer....

[Traduction]

La présidente: Monsieur Morin.

M. Pierre Morin: Oui.

La présidente: Notre comité a un certain mandat. Nous avons le pouvoir de convoquer certaines personnes à comparaître devant le comité en rapport avec ce mandat. Nous ne pouvons pas simplement convoquer n'importe qui et leur demander n'importe quoi.

M. Charlie Penson: Nous pensons que nous devrions pouvoir le faire.

La présidente: Monsieur Brien, avez-vous une autre question?

[Français]

M. Pierre Morin: Madame la présidente, vous avez ce pouvoir lorsque vous revoyez les crédits.

[Traduction]

M. Charlie Penson: Oui, c'est exactement mon argument.

La présidente: Je voulais simplement préciser que nous avons effectivement un mandat et que nous avons un budget affecté à ce comité. Selon ce budget, nous pouvons convoquer certaines personnes, ce que nous avons d'ailleurs fait.

[Français]

Monsieur Brien, s'il vous plaît.

[Traduction]

Une dernière question?

M. Pierre Brien: Non.

La présidente: Madame Torsney, je vous prie.

Mme Paddy Torsney: Je vous remercie.

Pour reprendre un autre point que vous avez présenté, monsieur Morin, au cours des campagnes électorales, on nous demande tous de remplir sondage après sondage après sondage sur notre position. Dans un grand nombre d'entre eux, on nous avertit que les résultats seront rendus publics et que si vous ne répondez pas correctement, vous risquez de perdre votre parrainage. Je dirai en fait que c'est devenu un peu comme une entreprise maintenant. Il faut désigner quelqu'un simplement pour faire des sondages pendant les campagnes électorales. De toute évidence, ils font du lobbying pour faire valoir leurs points de vue.

J'ai quelques questions, et j'aimerais avoir entre autres vos commentaires sur la période de restriction. Certains se sont dits intéressés à avoir une période de restriction de deux et cinq ans plutôt que d'un an. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

• 1050

Deuxièmement, un grand nombre d'organisations et d'associations à but non lucratif sont financées en fait par des entreprises, par différentes personnes qui ont un point de vue. Je crois que vous avez fait allusion à certains d'entre eux, monsieur Clark. Comment devrait-on les obliger à communiquer leurs sources de financement? Est-ce que cela devrait se faire au moyen de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes ou par un autre moyen?

De toute évidence, une très bonne association pourrait adopter un nom très utile qui semblerait inoffensif, et qui pourrait leur en vouloir? Même si cette association était financée par des gens ayant un point de vue bien précis qui cherchent à influencer la politique publique, cela pourrait être parfaitement légitime. Certaines personnes aimeraient probablement en savoir un peu plus sur ceux qui les financent. Comment envisagez-vous la chose? Comment se ferait cette divulgation? Est-ce que ce serait au niveau du paiement d'honoraires ou de droits? De toute évidence, dans le cas de ce petit commerce qui dépense un million de dollars pour les services de lobbyistes, il y a quelque chose qui se passe. Comment en voyez-vous le fonctionnement?

M. Peter Clark: Lorsque le Council of Canadians s'est enregistré, lors de leur dernier enregistrement qui est arrivé à expiration, ils ont indiqué très clairement qu'aucun de leurs moyens de financement ne provenait d'entreprises ou de gouvernements.

Mme Paddy Torsney: Très bien.

M. Peter Clark: En ce qui concerne les associations, on pourrait demander qu'elles indiquent la nature de leur financement, la source de ce financement. Je n'y vois aucun problème.

Mme Paddy Torsney: Non, mais...

M. Peter Clark: Nous comprenons que dans certains cas... Greenpeace International, qui reçoit beaucoup d'argent de sources différentes, mais qui a été désenregistré en tant qu'organisme de bienfaisance au Canada parce qu'apparemment cette organisation n'agit pas nécessairement dans l'intérêt public, assure une partie de ce financement, et... Nous aimerions vraiment déterminer si certaines de ces organisations sont utilisées comme couvertures. Mais je crois qu'il serait utile de demander dans l'enregistrement d'indiquer la nature du financement et si ce financement ne provient pas des cotisations des membres, d'indiquer quels sont les principaux contributeurs.

Mme Paddy Torsney: Très bien.

M. Michael Teeter: En ce qui concerne la question de la période de cinq ans, je trouve qu'elle est trop longue et injuste pour ceux qui veulent subvenir à leurs besoins ou qui doivent subvenir à leurs besoins lorsqu'ils quittent la vie publique ou une charge publique. Il n'est pas nécessaire de faire du lobbying, comme Pierre l'a dit, pour être efficace. Le lobbying, tel qu'il a été défini, signifie exercer une influence. Qu'est-ce qu'on entend par influence? Quoi qu'il en soit, les gens vont gagner leur vie. Je crois que cette période de cinq ans est une chimère et qu'il est préférable d'abandonner cette idée.

Quant à la question du financement et de la divulgation, je dirais la même chose. Si l'organisme reçoit son financement d'une société qui tient à rester anonyme tout en exerçant une influence—je n'en connais pas d'exemple et si cela existe, je trouve cela lamentable—j'ai l'impression qu'au lieu de se faire enregistrer, la société en question préférerait mettre fin au lobbying. En fait, l'organisme reçoit de l'argent pour faire des déclarations publiques, des profils médiatiques, etc. Cela n'a rien à voir avec le lobbying. La société tient à ce que son rapport reste confidentiel et privé et les choses s'arrêteraient là. On pourrait continuer à faire un travail très efficace, j'en suis sûr, ce serait plus efficace que s'ils devaient vous téléphoner régulièrement pour vous donner des instructions comme ce serait le cas s'il y avait eu effectivement enregistrement.

M. Scott Proudfoot: Je vais me limiter à quelques observations. Avec la période de restriction, dans la vraie vie, on sait que quand on quitte un emploi, tout ce qu'on peut avoir appris sera connu du public dans les six mois qui suivent. Qu'il s'agisse d'un marché public ou d'autre chose, tout le monde est au courant après six mois—les secrets du Cabinet, et ainsi de suite. Tout cela finit par se trouver dans le domaine public. Alors il faut reconnaître que l'avantage que représente la connaissance de ces éléments disparaît vite. Dans certains cas, c'est disparu en deux semaines. Je pense pouvoir affirmer que dans la plupart des cas, après six mois, on ne détient aucune connaissance qui ne soit accessible à des personnes qui connaissent bien le système et qui sont prêtes à faire le travail nécessaire.

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Alors il faut se poser la question, qu'est-ce qu'on essaie de faire—est-ce qu'on veut simplement punir les gens? Est-ce qu'on cherche vraiment à mettre des obstacles devant quelqu'un qui quitte la vie publique pour reprendre sa carrière comme avocat, par exemple, et lui rendre la vie aussi difficile que possible? Pourquoi voudrait-on se présenter comme candidat? Il faut prendre le temps de réfléchir à tout ce qui peut décourager les gens de participer à la vie publique. Nous sommes toujours en train de créer de nouvelles formes de dissuasion quand je pense qu'il faudrait plutôt encourager les gens à entrer dans la vie publique.

Quand on regarde l'attitude générale à l'égard des lobbyistes c'est comme si... souvent ils font savoir aux fonctionnaires qu'ils ne leur font pas confiance ni à eux ni aux représentants élus et c'est comme si on voulait les marquer d'un signe pour indiquer ce manque de confiance. Au contraire, je pense qu'on peut faire confiance à peu près à tout le monde dans ce milieu, à très peu d'exceptions près, et ce n'est pas sain d'avoir ce soupçon qui porte sur tout le monde et cela finit par coûter très cher. Désolé, mais j'ai dû vider mon sac.

[Français]

M. Pierre Morin: Je suis totalement d'accord avec M. Proudfoot. Son propos est tout à fait exact. Je ne peux m'empêcher de penser, au fil des discussions, que si j'embauchais un haut fonctionnaire ou un élu, ce ne serait pas pour lui demander d'aller me représenter comme entreprise. Je l'embaucherais pour me conseiller, pour savoir comment vous pensez. Ce n'est pas une question d'information ou de donner quelque chose. Il s'agit de connaître votre façon de penser, comment évoluent les choses, et j'enverrais quelqu'un d'autre. Alors, que veut dire cooling-off period? Cela veut simplement dire que je n'engage pas quelqu'un pour qu'il retourne vous voir. Cela n'est pas très élégant.

[Traduction]

La présidente: Nous devons quitter la salle car le Comité de la procédure doit siéger ici après nous...

Mme Paddy Torsney: Pourriez-vous nous dire si, d'après votre expérience, on respecte cette période de restriction car je me rappelle que certaines personnes m'ont dit que je ne pouvais pas aborder tel sujet avec elle mais qu'on pourrait en reparler après la période de restriction?

M. Peter Clark: D'après notre expérience, on respecte cette exigence. Je fais ce travail depuis longtemps et je ne connais pas de cas de manquement.

La présidente: Je voudrais remercier les témoins d'être venus nous parler et je vous suis reconnaissante non seulement de vos déclarations mais de votre participation à cet échange. Monsieur Teeter, s'il y a moyen de savoir où ces gens qui envoient des courriels habitent dans ma circonscription, cela m'intéresserait beaucoup. C'est justement un de mes soucis par rapport aux communications par courriel.

Une voix: Je ne vais pas répondre avant d'obtenir l'adresse.

La présidente: Exactement. Si vous pouvez envisager une façon rapide qui me permettra d'obtenir une adresse exacte, j'aimerais bien pouvoir l'incorporer dans tous mes dossiers.

M. Scott Proudfoot: Nous vous montrerons comment vous pouvez les convaincre de vous la fournir.

La présidente: On essaie.

Merci beaucoup. La séance est levée.

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