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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON CITIZENSHIP AND IMMIGRATION

COMITÉ PERMANENT DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le vendredi 4 mai 2001

• 1349

[Traduction]

Le président (M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.)): Bon après-midi, mesdames et messieurs. Nous souhaitons la bienvenue aux gens de Halifax qui témoignent devant le comité.

Il s'agit de Kevin Arsenault, de l'Atlantic Region Association of Immigrant-Serving Agencies, de Blair Hodgman, avocat, du cabinet d'avocats Allen and Hodgman, et de Bruce Allen, un avocat du même cabinet.

Je souhaite la bienvenue à nos témoins ainsi qu'à un député de la région, Peter Stoffer, qui est également avec nous.

Je me demande si nous pourrions commencer par demander à Kevin Arsenault de nous faire un exposé au nom de son organisme.

[Note de la rédaction: Difficultés techniques]

Kevin, nous avons de la difficulté à vous entendre. Veuillez recommencer.

• 1350

M. Kevin Arsenault (président, Atlantic Regional Association of Immigrant-Serving Agencies): Comme je le disais, notre organisme représente tous les fournisseurs de services qui facilitent le rétablissement des réfugiés, surtout les réfugiés parrainés par le gouvernement, mais également ceux des autres catégories.

Pour gagner du temps, je commencerai par vous dire que notre organisation est affiliée au Conseil canadien pour les réfugiés. Le Conseil a beaucoup travaillé à l'analyse et à l'examen du projet de loi précédent, le projet de loi C-31 et de ce projet loi-ci. Nous approuvons le travail qu'il a accompli et je tiens à dire que ARAISA appuie son analyse et ses conclusions. Je sais qu'il est assez difficile d'examiner toute une série de recommandations et de les intégrer dans un projet de loi, mais j'espère que le comité accordera à ce travail toute l'attention qu'il mérite.

Comme je représente des organismes qui oeuvrent pour l'établissement des réfugiés, je me préoccupe surtout du fait que même si le programme d'établissement est prévu dans le projet de loi, les lignes directrices et les diverses dispositions concernant sa mise en oeuvre n'y sont pas énoncées et se retrouveront dans le règlement. Nous ne sommes pas les premiers à exprimer cette inquiétude. Il est difficile de savoir exactement de quoi nous parlons avant d'avoir vu le règlement.

La ministre a dit, je crois, qu'il y aura des consultations. Je vous demanderai quelles seront exactement les autres possibilités qui nous seront données d'émettre notre avis une fois que ce règlement sera préparé et présenté, avant qu'il ne soit adopté? C'est une des questions qui nous préoccupent.

Par ailleurs, nous espérons que les intentions énoncées dans le projet de loi, du moins à certains égards, en ce qui concerne l'établissement, s'accompagneront de toute une série d'initiatives et de politiques.

Par exemple, nous nous sommes réjouis des changements à l'égard du délai trop court qu'accorde la loi actuelle pour s'établir et s'intégrer à son propre rythme. On s'attend à ce qu'au bout de deux ans, vous soyez en mesure de vous débrouiller seul. Je crois que le projet de loi prévoit un délai de trois à cinq ans. Nous nous en réjouissons compte tenu de ce que nous avons constaté.

Toutefois, si l'appui accordé par le gouvernement fédéral pour les services et les programmes, la formation linguistique et le reste n'est pas également élargi, cela revient à reconnaître certains besoins, mais sans fournir les moyens d'assurer une meilleure intégration à long terme des nouveaux arrivants.

Nous voudrions également une distinction plus claire entre le programme de réfugiés admis pour des motifs humanitaires et les autres catégories d'immigrants dans les règles et les critères qui s'appliquent aux différentes catégories de réfugiés. Nous croyons qu'un programme humanitaire ne devrait pas se fonder sur des critères exigeant la stabilité économique ou même la capacité de s'intégrer.

Pour ce qui est des dispositions concernant le regroupement familial, nous les approuvons, mais là encore, si l'on empêche des gens de venir au Canada rejoindre leur famille en raison de leur situation économique, cela semble contraire aux principes humanitaires du programme de réfugiés.

C'était là, comme entrée en matière, quelques observations que je voulais faire au nom de ARAISA. Nous voudrions voir le règlement qui doit accompagner le programme d'établissement des réfugiés.

Une conférence nationale sur l'établissement, la première du genre, aura lieu dans à peu près un mois, à Kingston, en Ontario. Environ 400 représentants des organismes de service de tout le pays, de même que du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration y participeront et ce sera la tribune idéale pour mettre au point certains détails du règlement et des programmes que devrait prévoir le projet de loi en ce qui concerne le l'établissement des réfugiées.

• 1355

Je vous remercie de votre attention. C'est tout pour le moment.

Le président: Merci, Kevin.

Pour répondre à votre question au sujet du processus de réglementation, nous avons déjà indiqué, je crois, que nous tenons beaucoup à y participer. Lorsque le règlement aura été préparé, après l'adoption du projet de loi, le comité tiendra des consultations publiques au sujet des dispositions réglementaires.

Comme vous le savez sans doute, nous avons demandé à la ministre et au ministère de publier un document de discussion sur le projet de règlement qui a été préparé. Je crois que ce document de discussion s'est révélé très utile jusqu'ici, non seulement pour nous, mais aussi, je l'espère, pour le grand public, pour l'aider à comprendre un peu ce que le ministère et la ministre envisagent à l'égard de ce nouveau projet de loi. Oui, il y aura d'importantes consultations publiques au sujet du règlement.

Nous allons maintenant donner la parole à Mme Blair Hodgman. Soyez la bienvenue.

Mme Blair Hodgman (témoignage à titre personnel): Bonjour. Je m'appelle Blair Hodgman.

[Français]

Je viens de la belle ville de Halifax. Je vous souhaite un bon après-midi. C'est une journée magnifique, ici, aujourd'hui.

[Traduction]

Mon mari et moi sommes des citoyens américains, résidents permanents au Canada, et nous vivons à Chester, en Nouvelle-Écosse. Lorsqu'il était enfant, mon mari venait passer l'été à Chester. Ses grands-parents paternels sont enterrés à Chester et son arrière-grand-père, William Lawrence, était le constructeur du plus grand voilier jamais construit au Canada.

J'ai passé de plus en plus de temps ici, en Nouvelle-Écosse, avec mon mari, depuis que j'y suis venue pour la première fois en 1978. Nous avons voulu faire de la Nouvelle-Écosse et du Canada un endroit où nous allions résider de façon plus permanente au lieu d'y passer seulement nos vacances et nous avons donc décidé de nous faire accréditer pour y exercer le droit. Cette formalité a pris environ trois ans et nous avons dû faire évaluer nos diplômes, passer les examens de la faculté de droit et passer l'examen du Barreau de la Nouvelle-Écosse. Nous avons fini par être admis au Barreau de la province en 1994.

Comme nous avons décidé finalement de vivre en Nouvelle-Écosse, nous avons demandé des visas d'immigration. C'est avec beaucoup de joie que nous avons reçu ces visas par la poste le jour de mon anniversaire, en janvier 1998.

Exactement deux mois après l'arrivée de nos visas, ma mère a été victime d'un accident vasculaire cérébral. C'est une citoyenne américaine âgée de 75 ans qui a vécu toute sa vie aux États-Unis. Je suis fille unique et elle est veuve. Après son attaque, elle a dû renoncer à demeurer chez elle, dans le New Jersey. Cette attaque et une attaque subséquente l'ont rendue totalement incapable de prendre soin d'elle-même et j'ai dû la placer dans un foyer de soins de Cleveland.

Déterminés à réaliser notre rêve, mon mari et moi avons quand même immigré au Canada. Depuis deux ans et demi, nous avons fait beaucoup de rénovations dans notre maison, nous avons noué des amitiés et des liens personnels, nous nous sommes installés dans notre vie professionnelle ici au Canada et nous avons ouvert un cabinet juridique. Nous avons assujetti volontairement notre revenu américain à l'impôt canadien et nous avons donc payé des dizaines de milliers de dollars d'impôts sur un revenu qui, autrement, n'aurait été imposable qu'aux États-Unis.

Nous avons fait tout ce qu'il était humainement possible de faire pour nous établir au Canada, mais nous avons également passé plus de temps aux États-Unis que nous ne l'avions prévu. Pour avoir une certaine tranquillité d'esprit, nous avons obtenu des permis de retour pour résidents permanents grâce auxquels nous avons pu passer le temps nécessaire aux États-Unis pour prendre soin de ma mère sans compromettre notre vie au Canada. Nous sommes allés souvent aux États-Unis en sachant que nos permis nous permettraient de revenir.

Le projet de loi C-11 compromettrait la situation de gens comme nous, de gens qui ont élu domicile au Canada, mais qui ont des obligations légitimes à l'étranger. Le projet de loi C-11 annule rétroactivement les droits que nous avons déjà acquis et fait planer l'incertitude sur notre avenir. Le projet de loi C-11 impose de nouvelles normes en ce qui concerne votre conduite passée. La loi actuelle vous permet d'obtenir un permis de retour pour avant que vous ne partiez à l'étranger. Un agent détermine avant si vous avez de bonnes raisons de vouloir vous absenter du Canada. À votre retour, le permis suffit à prouver que vous ne comptiez pas renoncer à votre statut de résident permanent. Le projet de loi C-11 ne permet pas de conserver le permis de retour et tient compte du temps que vous avez déjà passé à l'extérieur du pays même si vous déteniez un permis de retour pendant votre absence.

• 1400

Les périodes d'absence motivées uniquement par des raisons économiques sont les seules qui sont clairement autorisées dans ce projet de loi. Si vous ne remplissez pas les critères à cause du temps que vous avez déjà passé à l'étranger, vous risquez de perdre votre statut à moins d'avoir quitté le pays pour des raisons économiques. Ma situation est donc compromise étant donné que j'ai passé du temps aux États-Unis pour prendre soin de ma mère.

Ceux qui proposent ce projet de loi prétendent qu'il est transparent, alors qu'il fait planer l'incertitude au sujet du temps que je devrai passer, à l'avenir, pour prendre soin de ma mère. Comme je l'ai dit, seules les considérations économiques entrent en ligne de compte pour autoriser des périodes d'absence. Seuls ceux qui quittent le Canada pour aller travailler pour une entreprise canadienne ou une agence du gouvernement canadien savent qu'ils ne risquent rien. Aucune disposition ne permet de quitter le pays pour passer du temps avec sa famille, faire des études, travailler pour un organisme de charité ou pour toutes sortes d'autres raisons légitimes. Ceux qui quittent le Canada pour l'une de ces raisons, ne connaîtront leur sort qu'à leur retour et leur avenir dépendra d'un agent d'immigration qui décidera de les expulser ou non uniquement en fonction de motifs d'ordre humanitaire.

J'ai des amis qui sont également résidents permanents au Canada. James a un doctorat en agronomie et il travaille pour un organisme des Nations Unies ayant pour mission d'éliminer la faim dans le monde. Son travail l'oblige à vivre en Afrique du Nord. Sa famille et lui ont immigré au Canada il y a deux ans, mais ils sont sortis du pays en se fiant à leur permis de retour; pourtant, leur avenir est compromis à cause des dispositions de ce projet de loi tel qu'il est actuellement formulé.

Comment quelqu'un peut-il planifier sa vie à partir d'une disposition qui rend votre avenir tributaire d'une notion aussi vague que des motifs d'ordre humanitaire?

Si le projet de loi C-11 est adopté sous sa forme actuelle, les gens comme mon ami James et sa famille ne sauront jamais à l'avance s'ils peuvent poursuivre en toute sécurité leurs activités professionnelles méritoires à l'étranger sans compromettre leur situation. Les étudiants ne sauront jamais à l'avance s'ils peuvent fréquenter sans risque une université étrangère comme Oxford ou la Sorbonne et rentrer au Canada. Si le projet de loi C-11 est adopté sous sa forme actuelle, tant que ma mère ne sera pas décédée, mon mari et moi ne serons jamais certains de conserver notre statut.

Le simple fait que ce projet de loi ait été déposé a déjà eu de graves conséquences pour moi. Je vous demande de bien vouloir modifier ce projet de loi pour rétablir les permis de retour. Permettez-nous de faire valoir nos raisons avant de nous absenter du Canada afin que nous soyons certains de pouvoir revenir. Ne nous dissuadez pas de nous acquitter de nos obligations personnelles, éducatives et professionnelles.

Je vous remercie de votre temps et de votre attention.

Le président: Merci, Blair et Bruce.

Bruce, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Bruce C. Allen (témoignage à titre personnel): Oui. J'allais aborder un sujet assez différent, si vous le permettez.

Comme vous le savez, je suis avocat. J'exerce exclusivement le droit de l'immigration et je suis autorisé à exercer à la fois aux États-Unis et au Canada. Je connais bien la loi sur l'immigration américaine et canadienne.

Je me spécialise dans le domaine de l'emploi. Pratiquement tous mes clients sont des travailleurs très instruits et très qualifiés. La majorité d'entre eux travaillent dans l'informatique. Il y a aussi des médecins et des infirmières. Autrement dit, il s'agit précisément du genre d'immigrants que le Canada doit attirer, comme nous en conviendrons tous.

Il ne se passe pas une journée sans que je reçoive un appel téléphonique de quelqu'un qui travaille actuellement aux États-Unis et qui, découragé par la procédure d'immigration américaine, souhaite venir au Canada.

Au cours de chacune de ces discussions, on me pose la question suivante: Une fois que je serai au Canada, est-ce que je pourrai voyager? Vais-je pouvoir terminer ma maîtrise? Vais-je pouvoir terminer le projet de réseau Internet auquel je travaille pour une grande société?

Je dis à ces personnes: «Cela ne pose pas de problème. Le Canada souhaite que vous veniez. Le Canada cherche des raisons de vous accueillir et non pas de vous exclure. Si vous avez de bonnes raisons d'aller à l'étranger, le Canada a une procédure qui vous autorise à le faire.»

Le projet de loi C-11 va m'empêcher énormément d'aider le Canada à attirer ce genre d'immigrants, parce qu'il modifie les relations avec ses résidents permanents de deux façons fondamentales.

• 1405

D'abord, le projet de loi impose aux résidents permanents une obligation qui n'a jamais existé depuis le début de l'histoire du pays. Ce n'est pas l'obligation d'obéir à nos lois, de faire vivre sa famille, de participer aux activités communautaires, mais l'obligation de ne pas voyager. C'est une obligation qui empêchera les gens d'aller faire des études supérieures, de travailler à l'étranger, de mener des activités de bienfaisance et de s'occuper de leur famille.

Deuxièmement, le projet de loi oblige les résidents permanents à renouveler leur statut tous les cinq ans. On le fait sous le prétexte de leur remettre une carte plastifiée pratique, qu'il faut renouveler tous les cinq ans, ce qui forcera certainement les gens à attester de leur présence en faisant rapport de leurs faits et gestes quotidiens au cours d'une période de 1 826 jours.

Cela va imposer un énorme fardeau aux résidents permanents, tant à ceux qui voyagent qu'à ceux qui restent chez eux, mais qui n'ont pas pris la peine de réunir des preuves de leur présence. C'est une exigence intrusive qui n'a pas sa place dans une société démocratique et qui est difficile ou même impossible à satisfaire.

J'estime que le critère actuel à remplir pour conserver la résidence permanente est satisfaisant. Ce critère est moralement acceptable et il est objectif. Il n'impose pas l'obligation de faire rapport de ses faits et gestes au gouvernement. Il se fonde sur l'intention du résident permanent de garder son domicile permanent au Canada. Cela peut être facilement établi en fonction de faits objectifs comme ceux dont Blair vient de parler.

En ce qui me concerne... J'ai une maison à Chester. J'ai un bureau à Chester et ma famille se trouve également à Chester. Mes parents y résident, de même que mon grand-père. Ce sont là des faits objectifs et non pas subjectifs. Ce sont là les renseignements qui comptent. Ce sont eux qui attestent de mon droit de rester au Canada.

C'est le critère utilisé aux États-Unis. C'est celui que l'on a utilisé jusqu'ici au Canada et il faudrait le conserver.

Le président a dit—je crois qu'il a employé l'expression «alléluia» à propos de la nouvelle disposition qui semble laisser davantage la liberté de voyager parce qu'elle prévoit une plus grande période. Je reconnais que si la loi actuelle présente un défaut c'est bien la règle des 183 jours. Ce délai est un peu trop court, même s'il s'agit d'une présomption plutôt que d'une obligation et si un permis de retour permet d'éviter le problème. Je crois qu'il faudrait rallonger cette période. Elle devrait être d'un an ou peut-être de 18 mois. Il est possible de remédier à ce défaut sans modifier de façon fondamentale les relations entre le Canada et des centaines de milliers de ses résidents.

Le Canada vient d'être l'hôte d'un Sommet des Amériques, un sommet qui laissait présager un nouveau marché mondial des ressources humaines et des autres ressources. Le Canada n'aura plus besoin d'imposer de nouvelles restrictions à l'égard des gens les plus brillants que nous espérons attirer ici.

Je voudrais aborder très brièvement trois autres obstacles à l'immigration de travailleurs qualifiés auxquels ce projet de loi ne remédie pas.

Tout d'abord, il devrait être plus facile de venir travailler au Canada sur une base temporaire. La majorité des immigrants qui arrivent aux États-Unis pour y travailler commencent par travailler pendant deux ou trois ans avec un permis temporaire. Il est beaucoup plus difficile d'immigrer aux États-Unis que de... Il est beaucoup plus facile d'entrer aux États-Unis comme travailleur temporaire...

Le vice-président (M. John McCallum (Markham, Lib.)): Excusez-moi, monsieur Allen, puis-je vous interrompre un instant?

M. Bruce Allen: Oui.

Le vice-président (M. John McCallum): Désolé. Soit dit en passant, je m'appelle John McCallum. Mon collègue a dû partir et c'est maintenant moi qui préside la réunion. Les impératifs technologiques nous forcent à interrompre la communication à 14 h 30 et, comme plusieurs personnes désirent vous poser des questions, je vous demande de bien vouloir résumer votre point de vue assez rapidement.

M. Bruce Allen: Cela va me prendre 10 secondes.

Je crois que la nouvelle exigence concernant l'avoir net qui sera incluse dans le règlement éliminerait des gens comme Bill Gates et Henry Ford s'ils présentaient leur demande aujourd'hui. C'est une erreur et il faudrait trouver une meilleure façon d'autoriser le personnel médical, surtout les médecins, à immigrer au Canada. Nous ne pouvons pas continuer à voir un médecin sur 50 quitter le pays.

C'est tout ce que j'avais à dire.

[Français]

Je vous remercie de votre temps et de votre attention.

• 1410

[Traduction]

Le vice-président (M. John McCallum): Merci beaucoup pour ces arguments qui me paraissent très convaincants.

Comme nous disposons de 20 minutes, nous n'avons pas beaucoup de temps devant nous. Je vais demander à mes collègues de se présenter quand ce sera leur tour de poser des questions. Je vais commencer par Inky Mark.

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, AC): Merci, monsieur le président.

Je m'appelle Inky Mark. Je suis le critique en chef de l'opposition pour ce comité permanent. Je vous remercie d'avoir pris la peine de nous faire part de vos préoccupations.

Je voudrais revenir sur la question de la résidence permanente. Comme la plupart d'entre nous, je ne crois pas que les résidents permanents devraient être désignés comme des étrangers. J'ai toujours considéré que si vous avez le statut de résident, vous devriez pouvoir le conserver. Ou bien vous êtes un résident ou bien vous n'en êtes pas un. Vous ne pouvez pas être les deux en même temps.

J'ai deux questions à poser. Serait-il avantageux de porter à 10 ans la période qui entre en considération? Personnellement, je n'aime pas du tout l'idée d'imposer une période de présence physique compte tenu du rétrécissement des distances, de notre place au sein de la communauté mondiale et de la façon dont les gens circulent d'un pays à l'autre. On pourrait dire que les permis de retour sont la solution.

Que se passe-t-il, aux États-Unis, pour ceux qui quittent le pays pendant plus d'un an?

Voilà les trois questions auxquelles vous pouvez répondre.

M. Bruce Allen: Si vous me permettez de répondre à la dernière, à l'heure actuelle, les États-Unis n'imposent pas de période de résidence fixe à leurs résidents permanents. Il y a des exigences à satisfaire lorsque que vous demandez la citoyenneté. Les résidents permanents sont libres d'aller et venir grâce à leur carte verte, s'ils s'absentent du pays pendant plus d'un an. Vous pouvez obtenir un permis de retour valide pour deux ans, avant votre départ, ce qui s'apparente beaucoup au système canadien, et ce permis est renouvelable. Le nombre de fois où vous pouvez le renouveler n'est pas limité.

Il est frappant qu'un pays qui, selon moi, a généralement des lois sur l'immigration beaucoup plus restrictives et punitives que le Canada, n'impose pas d'obstacles importants à ses résidents permanents. Il y a une carte. La carte actuelle, qu'on appelle la carte verte, est valide pour 10 ans et vous la renouvelez simplement en payant un droit et en fournissant une nouvelle photo. Vous n'avez pas à préciser où vous étiez et ce que vous avez fait dans l'intervalle.

M. Inky Mark: Monsieur Allen, que se passe-t-il aux États-Unis si vous quittez le pays pendant plus d'un an sans permis de retour?

M. Bruce Allen: Vous devez vous adresser à un consulat des États-Unis à l'étranger pour demander un visa de retour et vous devez alors démontrer que vous ne comptiez pas abandonner votre résidence aux États-Unis. Mais jamais vous ne devez faire la preuve de 700, 800 ou 900 jours de présence. En principe, vous pouvez vous absenter pendant de nombreuses années. Encore une fois, cela ne veut pas nécessairement dire que le visa vous sera émis. Chaque cas est considéré en fonction de ses mérites.

Le vice-président (M. John McCallum): Merci et si votre français n'est pas très bon, je vous suggère de mettre votre écouteur pour l'interprétation.

Madeleine.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Je vous remercie, monsieur le président.

Mme Blair Hodgman: Nous n'entendons pas l'interprétation.

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: On essaie de nouveau. Je m'appelle Madeleine Dalphond-Guiral. Je suis députée du comté de Laval-Centre au Québec. Je vous remercie d'être ici. J'ai deux questions à poser. La première s'adresse à M. Arsenault.

Vous avez fait allusion, dans votre exposé, à la réunification des familles et, bien sûr, aux coûts qui sont générés par le départ de celles-ci de leur pays d'origine pour venir au Canada rejoindre un des leurs qui a été reconnu comme réfugié. Comment, d'après vous, pourrait-on régler ce problème? C'est certain que si trois ou quatre membres se déplacent d'un pays X vers le Canada, il y a des coûts énormes.

• 1415

Quant aux réfugiés, on sait qu'il n'y a que quelques pays qui acceptent des réfugiés. Est-ce que vous suggérez que le Canada, en l'occurrence, assume tous les coûts ou si vous voyez d'autres façons de faire?

[Traduction]

M. Kevin Arsenault: Il y a toutes sortes de possibilités. Les programmes de parrainage conjoints ont été assez efficaces. Si vous prenez la situation au Kosovo, par exemple, je sais que dans ma province, l'Île-du-Prince-Édouard, le taux de succès a été important en ce sens que le pourcentage de Kosovars qui sont restés à l'Île-du-Prince-Édouard et qui exercent un emploi rémunéré est beaucoup plus élevé que pour les réfugiés parrainés par le gouvernement.

La participation de la collectivité est sans doute un facteur, mais c'est le résultat d'un effort concerté. Il ne faut pas sous-estimer la bonne volonté dont les gens peuvent faire preuve pour l'établissement et l'intégration des réfugiés, car c'est la bonne volonté qui se traduit par des programmes concrets et un appui.

J'ajouterai une chose dont je n'ai pas encore parlé, à savoir que même si le nouveau projet de loi élargit le regroupement familial—je pense que les parents sont inclus—nous voudrions qu'il s'étende également aux frères et soeurs. La peur que cela coûte cher au Canada n'est peut-être pas confirmée par les études car, d'après notre expérience, une famille réunie est une famille plus heureuse, une famille plus saine et mieux en mesure de participer à la vie de la collectivité et d'apporter une contribution économique et culturelle durable au Canada.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Ma question s'adresse à Mme Hodgman.

Vous nous avez fait part de votre situation particulière. Il semble clair qu'avec le projet de loi C-11 tel qu'il est présentement, des situations comme la vôtre pourraient se présenter. Avez-vous une solution? Est-ce que vous croyez que la loi actuelle qui régit l'immigration devrait être conservée comme telle en ce qui concerne les résidents permanents et leur droit de revenir? Est-ce que le pouvoir accordé aux agents d'immigration fait également partie de votre inquiétude?

[Traduction]

Mme Blair Hodgman: La norme actuelle me paraît satisfaisante. On voit si vous aviez l'intention d'abandonner ou non votre résidence au Canada et quels sont vos liens avec le pays. Cela me paraît satisfaisant. Cela protège les résidents permanents en leur permettant de savoir, avant leur départ, que le Canada reconnaîtra la légitimité de leur absence. Je crois que cela protège les intérêts du Canada en faisant en sorte que les gens conservent leurs liens avec le pays s'ils souhaitent demeurer des résidents permanents.

À mon avis, les pouvoirs que le projet de loi confère aux agents d'immigration sont beaucoup trop importants. Ils sont largement augmentés. En précisant seulement une ou deux circonstances dans lesquelles il est permis de quitter le pays, on laisse toutes les autres circonstances à la discrétion d'un agent. Je crois également que le contrôle effectué par les agents d'immigration en vertu de ce projet de loi pourrait être très exigeant et injuste.

Je suis donc satisfait de la loi actuelle. J'ai mon permis de retour et je le montre quand je reviens au Canada. J'explique les raisons de mon absence et je mentionne que je retourne au Canada. Je n'ai pas eu de difficulté, mais je vis en redoutant le jour où ce projet de loi sera adopté. Je dois passer beaucoup de temps auprès de ma mère. Si je m'absente trop longtemps pour prendre soin d'elle, je ne serai peut-être plus la bienvenue à mon retour au Canada. C'est très injuste envers les résidents permanents qui apportent leur contribution à la société canadienne.

Merci.

Le vice-président (M. John McCallum): Merci beaucoup.

• 1420

Je voudrais accorder un peu de temps à nos deux députés des Maritimes, John Herron et aussi, s'il désire formuler une observation ou une question, à Peter Stoffer. Et je voudrais dire moi-même quelques mots. On m'a dit que cette machine se ferme automatiquement à 14 h 30 et je vais donc demander à ceux qui poseront des questions et qui y répondront d'être assez brefs.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Merci, monsieur le président.

Ma question sera très brève et portera sur la protection des réfugiés. Tout au long de la semaine, de nombreux témoins se sont inquiétés de ce que le dernier appel avant le renvoi d'un réfugié se résume à un examen du dossier plutôt qu'une audience devant la CISR. Nous avons l'intention de déposer des amendements qui rétabliront la comparution. Seriez-vous d'accord? Je crois que cette question devrait s'adresser à M. Arsenault.

M. Kevin Arsenault: Je pense que oui. Je crois également que le projet de loi prévoit des audiences par vidéoconférence plutôt qu'en personne.

Lorsque vous séparez physiquement les gens—et les psychologues l'ont démontré dans toutes sortes d'expériences—vous risquez de les traiter de façon moins humaine et cela à cause de l'éloignement. Quand les gens vous parlent en vous regardant dans les yeux, ce n'est pas du tout la même chose que lorsque vous lisez une feuille de papier, surtout si des considérations culturelles entrent en jeu telles que la langue, ou une interprétation différente de divers mots. Par définition, les réfugiés recherchent une protection et, dans bien des cas, c'est pour eux une question de vie et de mort sur laquelle la Commission décide sans connaître tous les faits et sans pouvoir les questionner de façon plus dynamique. Je serais donc entièrement d'accord pour cet amendement. Il faudrait que ce soit une nouvelle exigence de la nouvelle loi.

M. John Herron: C'était ma question, monsieur le président.

Merci.

Le vice-président (M. John McCallum): Merci.

Peter voudrait-il dire quelque chose?

M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Oui. Merci, John, et bonjour à tous mes collègues.

Je voudrais m'adresser au témoin qui a pris la parole en dernier, ici, à Halifax... S'il n'y a aucun changement en ce qui concerne les possibilités d'emploi des gens qui viennent ici et qui ont de la difficulté à voyager ou à poursuivre leurs études, si le projet de loi est adopté, pensez-vous qu'il pourrait faire l'objet d'une contestation judiciaire?

M. Bruce Allen: Je suis certain qu'il sera contesté. La Charte des droits et des libertés reconnaît des droits aux résidents. D'un autre côté, je pense qu'aucun professionnel ne viendra au Canada pour contester, au nom de la Constitution, les restrictions qui l'empêchent de voyager. C'est maintenant qu'il faut agir, selon moi, pour empêcher que cette situation ne se produise.

Le Canada est désavantagé, surtout à cause d'un problème de perception, par rapport à des pays comme les États-Unis pour recruter les immigrants qualifiés dont nous avons besoin. Le principal avantage du Canada c'est la rapidité et l'équité de sa procédure d'immigration. C'est un atout en notre faveur et je crois qu'il faudrait faire le maximum pour l'améliorer.

M. Peter Stoffer: Deuxièmement, vous avez dit que votre mère se trouve à Cleveland. Est-ce difficile...? Par exemple, pourriez-vous la faire venir au Canada?

Mme Blair Hodgman: Pour venir au Canada comme résident permanent, vous devez subir un examen médical et son état de santé ne serait pas jugé acceptable. Elle a droit aux soins médicaux aux États-Unis et elle vit dans un foyer de soins. Ce foyer de soins des États-Unis n'est pas couvert par le régime d'assurance-santé canadien et il serait donc pratiquement impossible de la faire venir ici sans permis ministériel ou sans autre dispense. Elle a vécu toute sa vie aux États-Unis et il serait donc très difficile, sinon impossible, de la faire venir ici pour que nous puissions prendre soin d'elle.

• 1425

M. Peter Stoffer: Autrement dit, vous êtes vraiment dans une situation impossible?

Mme Blair Hodgman: Oui. Je n'ai pas le choix. Elle a un grand nombre d'autres problèmes de santé dont je n'ai pas parlé ici faute de temps, mais ce serait très difficile et même pratiquement impossible à cause du système canadien.

M. Peter Stoffer: Merci.

C'est tout, John.

Le vice-président (M. John McCallum): Merci beaucoup.

Je ne sais pas si Inky veut le dernier mot, mais je voudrais faire une brève observation. Je dirais seulement que vous avez présenté des arguments convaincants au sujet du droit de retour d'un résident permanent. Je ne sais pas exactement ce qu'il est possible de faire, mais je tiens à dire que je vais examiner la question. Vos arguments m'ont paru très convaincants.

Mme Blair Hodgman: Merci, monsieur.

M. Inky Mark: Merci, John.

Suite à cette discussion, je voudrais savoir pourquoi les gens ne demandent pas la citoyenneté? Cela ne réglerait-il pas la plupart des problèmes dont vous nous avez parlé aujourd'hui?

Mme Blair Hodgman: Vous devez remplir la plupart des mêmes critères pour obtenir la citoyenneté et je n'y ai pas encore droit. Il y a donc...

Une voix: Cela prend des années.

Mme Blair Hodgman: Oui, il faut attendre plusieurs années avant d'avoir droit à la citoyenneté si bien que cela ne règle pas vraiment tous les problèmes. Il y a aussi certains pays qui ne permettent pas la double citoyenneté. Par exemple, vous ne pouvez pas avoir à la fois la citoyenneté canadienne et la citoyenneté américaine. Un citoyen de l'Inde ne peut pas avoir en même temps la citoyenneté américaine. Je ne sais pas ce qu'il en est au Canada; il faudrait que j'examine la question. J'ai une amie qui est naturalisée Américaine et qui doit obtenir un visa si elle veut retourner en Inde pour visiter sa famille.

Il y a donc plusieurs raisons pour lesquelles les gens n'optent pas pour la citoyenneté canadienne. Cette situation n'est pas avantageuse pour le Canada. Je comprends les raisons pour lesquelles la Loi sur la citoyenneté limite le temps que vous passez à l'extérieur du pays, mais je ne vois pas pourquoi la Loi sur l'immigration devrait empêcher les gens de conserver leur résidence au Canada.

M. Inky Mark: Si cette disposition était modifiée pour prolonger la période à 10 ans plutôt que cinq, seriez-vous satisfaite?

Mme Blair Hodgman: Vous parlez de prolonger la validité de la carte ou...

M. Inky Mark: De la porter à 10 ans, comme la carte verte aux États-Unis.

Mme Blair Hodgman: Le problème est que cela ne changerait pas la nature de la loi. Je m'oppose à ce que l'on se base sur la présence physique plutôt que des critères objectifs. Si vous me forcez à compter le nombre de jours que je vais passer au chevet de ma mère, allez-vous forcer les étudiants à s'inquiéter s'ils passent trop de temps à faire des études supérieures à l'étranger alors qu'ils ont l'intention de vivre au Canada et qu'ils ont des liens solides avec le Canada? Le nombre de jours de présence que vous passez au Canada est un critère injuste et qui n'est pas vraiment pertinent. Il faudrait plutôt se demander quels sont vos liens avec le Canada, vos rapports avec le Canada. C'est ce que je pense. C'est ce que fait la loi actuelle et je ne vois aucune raison de la modifier. Je n'y vois aucun avantage.

M. Inky Mark: Oui, mais au bout de 10 ans, vous devriez certainement pouvoir répondre aux conditions voulues pour obtenir la citoyenneté.

Mme Blair Hodgman: Oui, mais dites-vous qu'il faudra prouver quatre ans de présence physique au cours d'une période de 10 ans? Est-ce bien ce que vous proposez? Je ne comprends pas très bien.

M. Inky Mark: Du moment que vous ne sortez pas du pays pendant plus de deux ans.

Mme Blair Hodgman: Deux ans sur 10?

M. Inky Mark: Sur 10.

Mme Blair Hodgman: Ce serait certainement une amélioration par rapport à la norme proposée. Mais je reste convaincue qu'il faudrait tenir compte avant tout des intentions de l'intéressé au lieu du nombre de jours. Si c'est seulement deux ans sur 10, ce serait certainement une amélioration.

M. Inky Mark: Merci.

Le vice-président (M. John McCallum): Merci.

J'ai peur de devoir mettre un terme à cette discussion, car on est sur le point de nous couper la communication. Je tiens à vous remercier tous infiniment d'être venus nous parler. Je regrette que nous n'ayons pas pu avoir un échange plus personnel, mais je vous remercie beaucoup d'avoir pris le temps de venir. Nous avons pris bonne note de vos observations et nous allons voir ce que nous pouvons faire pour y donner suite.

Merci beaucoup. Bonne journée.

[Français]

Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.): Je voudrais faire un rappel au Règlement.

Non, ne vous inquiétez pas. Avant que nous nous disions bonjour pour la fin de semaine, je veux tout simplement faire part au comité de mon intention de lui demander officiellement, la semaine prochaine, la permission de présenter trois amendements à l'article 3 qui traite des objets de la loi. Si vous voulez davantage d'éclaircissements...

• 1430

[Traduction]

Le vice-président (M. John McCallum): J'allais dire la même chose. Nous n'avons pas le quorum, mais je vous signale que je voudrais déposer auprès du greffier quatre amendements aux articles 5, 15, 16 et 44. Les voici. Veuillez les considérer comme étant déposés.

Y a-t-il d'autres questions que vous désirez aborder? Merci beaucoup à tous. La séance est levée.

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