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INST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 24 février 2003




¹ 1525
V         Le président (M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.))
V         M. Charles Dalfen (président, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes)

¹ 1530
V         Le président
V         M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, Alliance canadienne)
V         M. Charles Dalfen
V         M. Brian Fitzpatrick

¹ 1535
V         M. Charles Dalfen
V         M. Brian Fitzpatrick
V         M. Charles Dalfen
V         Le président
V         M. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.)
V         M. Charles Dalfen
V         M. Serge Marcil

¹ 1540
V         M. Charles Dalfen
V         M. Serge Marcil
V         M. Charles Dalfen
V         M. Serge Marcil
V         Le président
V         M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ)

¹ 1545
V         M. Charles Dalfen
V         M. Paul Crête
V         M. Charles Dalfen
V         M. Paul Crête
V         M. Charles Dalfen
V         M. Paul Crête
V         M. Charles Dalfen
V         M. Paul Crête
V         M. Charles Dalfen
V         M. Paul Crête
V         M. Charles Dalfen

¹ 1550
V         Le président
V         M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.)
V         M. Charles Dalfen
V         M. Brent St. Denis
V         M. Charles Dalfen

¹ 1555
V         M. Brent St. Denis
V         M. Charles Dalfen
V         M. Brent St. Denis
V         M. Charles Dalfen
V         Le président
V         M. Brian Fitzpatrick
V         M. Charles Dalfen

º 1600
V         M. Brian Fitzpatrick
V         M. Charles Dalfen
V         M. Brian Fitzpatrick
V         M. Charles Dalfen
V         M. Brian Fitzpatrick
V         M. Charles Dalfen
V         Le président
V         M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.)
V         M. Charles Dalfen
V         M. David Colville (vice-président, Télécommunications, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes)
V         M. Larry Bagnell
V         M. David Colville

º 1605
V         M. Larry Bagnell
V         Le président
V         M. Larry Bagnell
V         Le président
V         M. Larry Bagnell
V         M. Charles Dalfen
V         M. Larry Bagnell
V         Le président
V         M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.)

º 1610
V         Le président
V         M. Charles Dalfen
V         M. Joe Fontana
V         M. Charles Dalfen
V         M. Joe Fontana
V         M. Charles Dalfen
V         M. Joe Fontana
V         M. Charles Dalfen
V         M. Joe Fontana
V         M. Charles Dalfen

º 1615
V         Le président
V         M. Paul Crête
V         M. Charles Dalfen
V         M. Paul Crête
V         M. Charles Dalfen
V         M. Paul Crête
V         M. Charles Dalfen
V         M. Paul Crête
V         M. Charles Dalfen
V         M. Paul Crête
V         M. Charles Dalfen

º 1620
V         M. Paul Crête
V         M. Charles Dalfen
V         Le président
V         M. Dan McTeague (Pickering—Ajax—Uxbridge, Lib.)
V         M. Charles Dalfen
V         M. Dan McTeague
V         M. Charles Dalfen

º 1625
V         Le président
V         M. Brian Fitzpatrick
V         M. Charles Dalfen
V         M. Brian Fitzpatrick
V         Le président
V         M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.)

º 1630
V         M. Charles Dalfen
V         M. Andy Savoy
V         M. Charles Dalfen

º 1635
V         Le président
V         M. Larry Bagnell
V         M. Charles Dalfen
V         M. Larry Bagnell
V         M. Charles Dalfen
V         Le président
V         M. Brian Fitzpatrick

º 1640
V         M. Charles Dalfen
V         M. Brian Fitzpatrick
V         Le président
V         M. Dan McTeague
V         M. Charles Dalfen
V         Le président
V         Le président
V         M. Konrad von Finckenstein (commissaire à la concurrence, bureau de la concurrence, ministère de l'Industrie)

º 1650

º 1655
V         Le président
V         M. Brian Fitzpatrick
V         M. Konrad von Finckenstein
V         Le président
V         M. Brian Fitzpatrick
V         Le président
V         M. Larry Bagnell
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Larry Bagnell

» 1700
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Larry Bagnell
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Larry Bagnell
V         M. Konrad von Finckenstein

» 1705
V         Le président
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein

» 1710
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Crête
V         Le président
V         M. Dan McTeague

» 1715
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Dan McTeague
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Dan McTeague
V         M. Konrad von Finckenstein

» 1720
V         M. Dan McTeague
V         M. Konrad von Finckenstein
V         Le président
V         M. Brian Fitzpatrick

» 1725
V         M. Konrad von Finckenstein
V         Le président
V         M. Larry Bagnell
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Larry Bagnell

» 1730
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Larry Bagnell
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Larry Bagnell
V         Le président
V         M. Serge Marcil
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Serge Marcil

» 1735
V         M. Konrad von Finckenstein
V         Le président
V         M. Dan McTeague
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Dan McTeague
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Dan McTeague
V         M. Konrad von Finckenstein

» 1740
V         Le président
V         M. Brian Fitzpatrick
V         Le président
V         M. Brian Fitzpatrick
V         M. Gaston Jorré (sous-commissaire principal de la concurrence, Direction générale des fusionnements, Bureau de la concurrence, ministère de l'Industrie)
V         M. Brian Fitzpatrick
V         M. Gaston Jorré
V         Le président
V         M. Larry Bagnell

» 1745
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Larry Bagnell
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Larry Bagnell
V         Le président










CANADA

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 023 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 24 février 2003

[Enregistrement électronique]

¹  +(1525)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.)): Conformément le paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions les restrictions à l'investissement étranger dans les entreprises de télécommunications.

    Nous accueillons aujourd'hui deux groupes de témoins. D'abord, de 15 h 15 à 16 h 45, nous recevons le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes représenté aujourd'hui par son président, M. Charles Dalfen.

    Monsieur Dalfen, nous vous serions reconnaissants de nous présenter ceux qui vous accompagnent, après quoi vous aurez la parole. Nous vous en remercions.

+-

    M. Charles Dalfen (président, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes): Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs du comité.

    Je suis Charles Dalfen président du CRTC. À mes côtés se trouvent David Colville, vice-président des télécommunications, Shirley Soehn, directrice exécutive des télécommunications, et Allan Rosenzveig, avocat général des télécommunications.

    Nous sommes heureux de comparaître aujourd'hui, pendant votre étude de ce très important dossier. Nous avons écouté attentivement les témoignages des autres intervenants, et je suis conscient de l'ampleur du défi que doit relever votre comité. Au CRTC, nous sommes confrontés à des dilemmes semblables quotidiennement. Notre travail consiste à étudier les demandes souvent concurrentielles soumises par différentes parties qui participent à nos processus et de tenter de déterminer ce qui est dans l'intérêt public.

    Le Parlement a institué le conseil en 1968 à titre d'organisme indépendant chargé de réglementer et de superviser tous les éléments du système canadien de radiodiffusion. Puis, en 1976, l'organisme se voyait octroyer la responsabilité de réglementer les entreprises et les fournisseurs de services de télécommunications sous juridiction fédérale.

    Dans ce secteur d'activité, nos pouvoirs découlent de la Loi sur les télécommunications de 1993. Dans le secteur de la radiodiffusion, nos pouvoirs découlent de la Loi sur la radiodiffusion de 1991. Les deux lois prévoient des règles différentes et relèvent de deux ministres différents. La Loi sur la radiodiffusion relève du ministre du Patrimoine canadien, tandis que la Loi sur les télécommunications relève du ministre de l'Industrie.

    Le statut du CRTC ne lui permet pas d'établir des règles sur la propriété étrangère, mais plutôt de les administrer, tout en poursuivant les objectifs établis par le Parlement dans chacune des lois. L'un des objectifs énoncés dans la Loi sur les télécommunications est de promouvoir l'accession à la propriété des entreprises canadiennes et leur contrôle par des Canadiens. Pour sa part, la Loi sur la radiodiffusion précise que «le système canadien de radiodiffusion doit être, effectivement, la propriété des Canadiens et sous leur contrôle».

    Les règles actuelles relatives à la propriété étrangère dans le secteur de la radiodiffusion et dans le secteur des télécommunications sont similaires, mais il y a deux choses à retenir. Premièrement, dans le cas des entreprises de télécommunications, les règles relatives à la propriété sont définies dans la Loi sur les télécommunications et, dans le secteur de la radiodiffusion, ces règles ne sont pas définies dans la loi elle-même, mais proviennent plutôt des directives que le gouverneur en conseil donne au CRTC, en se fondant sur la Loi sur la radiodiffusion.

    Deuxièmement, dans le secteur de la radiodiffusion, les restrictions relatives à la propriété étrangère et au contrôle des entreprises de radiodiffusion sont liées à l'attribution de licences par le conseil. Un particulier n'a pas le droit de détenir une licence de radiodiffusion, à moins qu'il ne se conforme aux règles de propriété canadienne définies dans les directives. Les directives s'appliquent également lors de l'étude de transferts de contrôle et de participations importantes dans des entreprises autorisées, lorsque l'approbation préalable du conseil est requise.

    Pour sa part, la Loi sur les télécommunications ne relient pas les règles de propriété à l'attribution de licences, mais plutôt à la capacité d'exploiter une entreprise de télécommunications, seulement si l'entreprise est la propriété de Canadiens et sous leur contrôle.

[Français]

    Le terme «canadien» est défini dans la réglementation adoptée par le gouverneur en conseil. Cette même réglementation accorde au conseil le pouvoir de surveiller et de mettre en oeuvre les règles de propriété. Mis à part ces différences, comme je le précisais, les règles de propriété sont similaires pour les secteurs des télécommunications et de la radiodiffusion. D'ailleurs, dans ces deux secteurs, les règles précisent qu'au moins 80 p. 100 des membres du conseil d'administration de l'entreprise de télécommunication ou d'un titulaire de licence de radiodiffusion doivent être des Canadiens. Au moins 80 p. 100 des actions avec droit de vote émises et en circulation doivent appartenir à des Canadiens. De plus, l'entreprise ne peut être contrôlée directement ou indirectement par des non-Canadiens. Dans le cas d'une société de portefeuille oeuvrant dans le secteur des télécommunications ou de la radiodiffusion, au moins 66 2/3 p. 100 des actions avec droit de vote doivent appartenir à des Canadiens.

    Or, si ces deux règles sont combinées, la propriété étrangère effective des entreprises pourrait s'élever jusqu'à 46,6 p. 100 des actions avec droit de vote. Il existe certaines différences entre les règles de propriété des télécommunications et de la radiodiffusion. Par exemple, les règles relatives à la radiodiffusion prévoient que le PDG d'une entreprise de radiodiffusion doit être un Canadien.

[Traduction]

    Plusieurs des intervenants qui ont comparu au comité se préoccupent de la concurrence dans l'industrie des télécommunications.

    Les objectifs de la politique sur les télécommunications ont été établis par le Parlement à l'article 7 de la Loi sur les télécommunications. En vertu de ces objectifs, nous devons nous assurer que les Canadiens ont accès à des services de communications variés, innovateurs, de haute qualité et abordables et que ces services sont concurrentiels sur la plan national et international. L'alinéa 7f) précise que nous devons favoriser de plus en plus les forces du marché en ce qui concerne la fourniture de services de télécommunications et assurer l'efficacité de la réglementation dans le cas où elle est nécessaire.

    Dans les marchés de l'interurbain, du sans fil et de l'Internet de détail, nous nous sommes abstenus de réglementer, car la concurrence était suffisante pour permettre aux forces du marché de contrôler les prix. Néanmoins, dans le marché de la téléphonie locale, nous continuons à réglementer les prix car la concurrence actuelle est insuffisante pour permettre une déréglementation.

    Le conseil est d'avis que la forme de concurrence la plus durable est ce que nous appelons la concurrence fondée sur les installations. On entend par là que les fournisseurs de services de télécommunications concurrents devraient offrir leurs services en utilisant leurs propres équipements et leurs propres installations, plutôt que de dépendre de ceux des autres entreprises.

    Nous croyons qu'à long terme, cette concurrence basée sur les installations permettra de mieux atteindre les objectifs définis par le Parlement dans la Loi sur les télécommunications. Nous préconisons la concurrence fondée sur les installations, mais une période de transition vers ce modèle est nécessaire.

    Par conséquent, nous adoptons actuellement une approche hybride qui permet aux nouveaux venus d'utiliser les installations qui leur sont nécessaires, appartenant aux entreprises de télécommunications traditionnelles déjà en place, dites «titulaires», moyennant des tarifs réglementés. Un exemple de ces installations serait les fils qui vont du bureau central de la compagnie de téléphone aux locaux de l'utilisateur.

¹  +-(1530)  

[Français]

    Il nous reste beaucoup de chemin à parcourir pour atteindre notre objectif de faciliter la concurrence basée sur les installations. La concurrence, particulièrement celle des marchés locaux, n'évolue certainement pas aussi rapidement que nous l'aurions souhaité. À titre d'autorité réglementaire dans le secteur des télécommunications, le conseil assume la responsabilité d'améliorer cette situation.

[Traduction]

    Nos récentes décisions, particulièrement celles relatives au plafonnement des prix et les processus qui en assurent le suivi, ont visé à éliminer les obstacles permettant ainsi de faciliter la concurrence. Et nous continuerons en ce sens. Néanmoins, la réglementation n'est qu'un des morceaux du casse-tête. On peut également compter sur une reprise des marchés financiers, les développements technologiques et la qualité des décisions d'affaires prises par l'industrie.

[Français]

    J'ai brièvement brossé un tableau du rôle du conseil à l'égard de la propriété des industries de la radiodiffusion et des télécommunications au Canada. J'ai également fait le point sur l'état de la concurrence dans le secteur des télécommunications.

[Traduction]

    Si vous avez des questions, j'y répondrai avec plaisir, avec l'aide de mes collègues au besoin.

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci beaucoup de votre exposé.

    Commençons la série de questions par celles de M. Fitzpatrick.

+-

    M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

    Merci beaucoup à M. Dalfen.

    Ce que nous cherchons à savoir, c'est qui est le propriétaire de la «tuyauterie», si j'ose dire, du réseau de transmission. Nous n'avons pas vraiment abordé l'aspect du contenu, même si on y fait parfois allusion.

    Ce que l'on évoque souvent—dans la mesure où je comprends bien ceux qui s'opposent à la levée des restrictions à l'investissement dans la transmission—, c'est que ce faisant, on nuirait au contenu canadien et on risquerait de perdre l'identité culturelle canadienne, entre autres choses.

    Leurs détracteurs rétorquent qu'il s'agit de deux questions totalement distinctes. Ils affirment que la réglementation vise également le contenu que le régime de propriété n'a pas grand-chose à voir avec la question.

    Si je vous dis tout cela, c'est parce que nous avons entendu vendredi dernier les représentants du Royaume-Uni et que nous avons vu pour la première fois des gens qui avaient libéralisé leurs règles et les effets concrets que cela avait eu sur leur système. Ce qu'ils nous ont dit, au fond, c'est que le service avait été amélioré par l'assouplissement des règles, que les coûts avaient baissé, que la qualité et le choix avaient considérablement augmenté et que le contenu britannique s'en portait mieux, grâce à un choix élargi et à une ouverture du marché. De plus, il semble que les règlements parvenaient amplement à assurer un contenu britannique de qualité.

    J'espère avoir bien interprété leur témoignage. Mais ce que nous ont dit ces spécialistes de la Grande-Bretagne a suffi à me convaincre et je me suis demandé pourquoi il ne serait pas possible de faire la même chose au Canada.

    Que dites-vous de cela?

+-

    M. Charles Dalfen: J'ai eu le plaisir, en effet, de rencontrer la personne qui a témoigné, et elle m'a dit ce qu'elle vous avait expliqué lors de son témoignage. Nous avons ensuite discuté des différences qui existaient entre le Canada et le Royaume-Uni, de même que les mesures qui s'appliquaient ici au contenu et qui visaient à protéger notre culture et à exercer une certaine vigilance.

    En fait, les deux secteurs ont été traités de façon distincte puisqu'ils relèvent de deux lois distinctes, la Loi sur les télécommunications et la Loi sur la radiodiffusion, et c'est pourquoi les règles qui s'appliquent à la propriété sont indépendantes de celles qui s'appliquent au contenu. Je conviens donc avec lui, dans une certaine mesure, que le régime s'appliquant à la propriété est distinct de celui qui s'applique au contenu, puisqu'il relève de deux lois.

+-

    M. Brian Fitzpatrick: Faisons une supposition, car cela m'aidera. Le témoin nous expliquait que si un géant des médias américain ou européen achetait une compagnie de câblodistribution canadienne, les règlements—s'ils étaient les mêmes qu'au Royaume-Uni—obligeraient l'acheteur à transmettre un certain contenu britannique. Cela ferait partie du contrat et ce serait obligatoire.

    Le témoin nous a expliqué que l'on avait eu des résultats exceptionnels et que l'on avait réussi à diffuser de la programmation d'excellente qualité à saveur britannique chez eux. Ils y sont obligés, étant donné l'environnement compétitif qui existe et que les consommateurs exigent de la qualité. Les entreprises sont donc obligées de fournir un produit de qualité et elles le font. Pourquoi cela ne serait-il pas possible tout autant au Canada?

¹  +-(1535)  

+-

    M. Charles Dalfen: C'est une des décisions très difficiles que vous aurez à prendre. Dans la mesure où nous pouvons vous aider, nous pouvons confirmer que les deux secteurs sont en effet distincts et que, comme je l'ai dit en ouverture, dans le domaine de la radiodiffusion, il existe une directive sur les investissements étrangers qui s'applique et qui est distincte des règles qui régissent le contenu, tout comme c'est le cas actuellement au Royaume-Uni.

    Donc, en ce qui concerne les règles sur les investissements étrangers, sachez que le Parlement, ou le gouvernement, selon celui des deux qui en a le pouvoir, peut les modifier comme il l'a déjà fait par le passé.

+-

    M. Brian Fitzpatrick: À cette époque de la mondialisation, de la libéralisation des marchés et du libre mouvement des capitaux et d'autres biens, peut-on expliquer de façon logique et rationnelle l'imposition de ces restrictions aux investissements étrangers dans la câblodiffusion, mis à part peut-être le fait que nos concitoyens craignent de perdre une partie du contenu canadien dans les médias?

+-

    M. Charles Dalfen: Nous représentons ici le CRTC, et le conseil a pour rôle d'administrer les règles et les décisions de principe que le gouvernement énonce dans sa sagesse. Comme je l'ai déjà dit, le gouvernement a déjà changé les règles en 1968 et 1976, et depuis lors, nous nous sommes adaptés et n'avons jamais constaté que ces changements faisaient obstacle à notre travail. Je suis sûr qu'il en ira de même pour tout autre changement que pourrait éventuellement apporter le gouvernement.

+-

    Le président: Monsieur Marcil, à vous.

    Je vous rappelle que nous nous en tenons à notre règle de six minutes, puisque nous recevons deux groupes de témoins.

[Français]

+-

    M. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Bienvenue à cette commission.

    J'ai compris ce que vous avez répondu à mon collègue Brian. Cependant, étant donné que vous êtes président d'un organisme dont le rôle est important au Canada, j'aimerais vous poser une question. Vous avez votre propre expérience, mais vous avez aussi une opinion en tant que président. Je comprends que vous parliez au nom du CRTC, qu'il est de la responsabilité du Parlement de modifier des lois et que vous ayez la responsabilité de les appliquer. Je comprends tout cela.

    Or, de notre côté, nous aimerions que des gens d'expérience comme vous, qui connaissent les deux côtés de la médaille, nous éclairent sur cette question. On a reçu toutes sortes de groupes. Certains sont d'accord, d'autres s'opposent. Comme l'a mentionné M. Fitzpatrick, ce sont surtout les entreprises oeuvrant à la fois du côté des télécommunications et de celui du contenu qui pourraient causer problème s'il y avait une déréglementation, cela à cause de la souveraineté canadienne.

    Imaginez, monsieur Dalfen, qu'on déréglemente le secteur demain matin et que, par le fait même, on ouvre le marché à tous ceux et celles qui ont le goût d'acheter, d'investir au Canada et de développer des entreprises de télécommunications.

    En vous basant sur votre expérience et sur celle du CRTC, croyez-vous qu'on pourrait déréglementer et permettre aux entreprises étrangères de devenir propriétaires d'entreprises canadiennes ou de développer de nouvelles entreprises américaines ou européennes sur notre territoire tout en ayant un cadre de réglementation capable de protéger la souveraineté culturelle canadienne? En fait, c'est le noeud de la question.

+-

    M. Charles Dalfen: Est-ce que vous parlez de la radiodiffusion, des télécommunications, ou des deux?

+-

    M. Serge Marcil: Certaines entreprises sont uniquement dans le domaine des télécommunications et selon moi, cela ne pose pas de problème étant donné qu'elles se préoccupent uniquement d'infrastructure. Cependant, des entreprises comme Rogers ou Vidéotron sont à la fois dans le domaine des télécommunications, du transport et du contenu. Si demain matin une entreprise américaine ou européenne décidait d'acheter Vidéotron ou Rogers Communications, comment pourrait-on s'assurer que vos objectifs en matière de radiodiffusion soient maintenus, à savoir que tous les Canadiens et Canadiennes reçoivent le meilleur service possible et que la souveraineté culturelle canadienne soit en même temps protégée?

    Cela serait-il possible advenant une déréglementation? Pourrait-on adopter un cadre qui permette aux entreprises étrangères de prendre possession d'entreprises canadiennes tout en garantissant l'atteinte de vos deux objectifs?

¹  +-(1540)  

+-

    M. Charles Dalfen: À mon avis, il faut bien étudier les objectifs des deux lois--j'ai fait allusion à l'alinéa 7d) de la Loi sur les télécommunications--parce qu'elles comportent des dispositions que nous devons appliquer dans le cadre des décisions visant à promouvoir l'accession à la propriété des entreprises canadiennes et à leur contrôle par des Canadiens.

    Cela implique qu'il ne s'agit pas seulement d'ajuster ou de changer l'analyse. Tout le cadre de la loi doit être révisé afin qu'on puisse décider si cet objectif doit être maintenu à travers le Canada et, le cas échéant, en tirer les conclusions qui s'imposent. Changer des règlements est relativement facile, mais il faut tenir compte de tout l'encadrement auquel ils sont reliés.

+-

    M. Serge Marcil: Excusez-moi, monsieur le président. Supposons qu'un des objectifs soit d'assurer que les Canadiens aient accès à des services de communication variés, novateurs, de haute qualité et ainsi de suite. À mon avis, des étrangers aussi bien que des Canadiens pourraient répondre à de telles exigences; on pourrait demander que les entreprises atteignent certains objectifs moyennant les tarifs appropriés.

    En matière de radiotélédiffusion, votre expérience au jour le jour, les combats que vous menez et les plaintes que vous avez à régler vous permettent-ils de nous dire ce qui arriverait advenant une déréglementation? Si on se retrouvait dans une situation de free market où tout le monde pourrait investir, selon votre expérience de président du CRTC et celle des gens qui vous accompagnent, est-ce qu'on pourrait quand même avoir un cadre permettant à toute la population canadienne d'avoir accès à un service de télécommunications qui soit équitable, tout en ayant une réglementation, différente de celle qu'on a présentement, qui permette aux entreprises étrangères, comme M. Fitzpatrick l'a demandé plus tôt, d'atteindre les objectifs culturels canadiens?

+-

    M. Charles Dalfen: J'essaie, dans la mesure du possible, de bien répondre à vos questions, mais ce n'est jamais vraiment simple. Je vous donne ce qu'on appelle les bookends. D'un côté, il est évident qu'en intégrant notre marché, une compagnie étrangère doit payer des impôts, obtenir des permis pour les véhicules motorisés et respecter toutes les lois canadiennes. Voilà qui est clair.

    Toutefois, si on abolit les règlements sur la propriété étrangère, est-ce qu'on pourra exercer le même contrôle sur les compagnies étrangères? D'un côté, il s'agit d'une situation normale puisqu'on pratique cela tous les jours au gouvernement; d'un autre côté, l'expérience que nous avons se restreint à la réglementation de compagnies canadiennes, sauf dans les cas de revente, où les étrangers, en vertu de la loi, peuvent s'intégrer à notre marché.

    Je ne peux pas vous dire ce qui se produira dans le domaine de la radiodiffusion si on opte pour la déréglementation. Je peux toutefois vous dire qu'on utilise ces outils de contrôle non seulement à l'égard de la propriété étrangère mais aussi à l'égard des objectifs.

    Certains de ces objectifs visent la promotion de la programmation canadienne, l'épanouissement des services canadiens, l'utilisation de l'équipement canadien et ainsi de suite. Nous avons ainsi tout un cadre à promouvoir.

    On ne peut pas prévoir ce qui adviendra si on abolit un, deux, trois ou quatre règlements. Je peux dire, néanmoins, qu'on utilise ces outils quotidiennement.

+-

    M. Serge Marcil: Je vais vous poser la question à l'envers.

[Traduction]

+-

    Le président: Vous n'avez déjà plus de temps. Nous devons nous en tenir à notre règle des six minutes, puisque nous recevons deux groupes de témoins.

    Passons à M. Crête.

[Français]

+-

    M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur Dalfen, vous dites avoir brossé un tableau du rôle du conseil en ce qui a trait à la propriété des industries en radiodiffusion et en télécommunications au Canada; vous affirmez aussi avoir fait le point sur l'état de la concurrence dans le secteur des télécommunications.

    Or, j'aimerais savoir ce que vous-même nous recommandez à l'égard de la propriété étrangère. Est-ce que vous suggérez au comité d'abolir l'aspect de la loi en vertu duquel nous avons un marché public complet ou nous conseillez-vous d'autres solutions? Quelle est la position du CRTC à ce sujet?

¹  +-(1545)  

+-

    M. Charles Dalfen: En 35 années d'existence, le CRTC n'a jamais eu pour rôle de donner ce genre de conseil. On vit avec les règlements et les objectifs dont je viens de discuter avec M. Marcil, et on peut répondre à n'importe laquelle de vos questions. Cependant, ni mes collègues ni moi-même ne pouvons faire ce type de recommandation parce qu'il n'est pas en notre pouvoir de le faire.

    Je me sens un peu mal à l'aise parce que comme individus, nous avons des opinions personnelles, mais nous sommes ici à titre de représentants du conseil. Ce dernier n'a pas à se pencher sur cette question étant donné qu'elle ne relève pas de sa compétence. J'essaie malgré tout d'être aussi positif que possible.

+-

    M. Paul Crête: Je vais poser la question autrement.

    En tenant pour acquis que l'objectif visé est une industrie saine, des productions de qualité, un bon auditoire et des cotes d'écoute intéressantes, dans tous les secteurs existants, diriez-vous que le modèle actuel est optimal?

+-

    M. Charles Dalfen: Il est difficile de dire si le modèle est optimal, mais c'est celui qu'on utilise depuis 35 ans. Est-ce que c'est possible d'y apporter des changements? Absolument. On a fait des changements et des ajustements. Dans votre sagesse, vous avez fait des recommandations et on va composer avec celles-ci.

+-

    M. Paul Crête: Et dans votre sagesse, vous devez, vous aussi, vivre avec cela. Vous faites des recommandations et vous appliquez des dispositions de la loi. Si demain matin, vous étiez en mesure de changer la loi, le feriez-vous ou la laisseriez-vous plutôt telle qu'elle est?

+-

    M. Charles Dalfen: Ce n'est pas nous qui voulons changer la loi; en revanche, nous n'y sommes pas opposés. Je ne veux pas ducker votre question, comme on dit en bon français, mais nous sommes vraiment mal à l'aise d'avoir à formuler une opinion au nom de l'institution que je préside; ce n'est pas notre rôle. Je ne sais pas si mes collègues sont du même avis. Nous nous soumettons à certaines directives, mais nous sommes par ailleurs tout à fait capables de composer avec des changements.

+-

    M. Paul Crête: Je veux poser une question d'un autre ordre. Vous dites que  le conseil croit ultimement que la concurrence la plus durable serait ce qu'il appelle la concurrence fondée sur les installations. On parle ici, je crois, de la téléphonie régulière.

    Expliquez-moi comment le fait de fonder la concurrence sur les installations peut aider à élargir cette concurrence. L'idée qu'à l'heure actuelle, chacune des compagnies mettrait sur pied ses installations m'apparaît quelque peu utopique. C'est la situation chez nous. Avoir trois tours ou trois types d'équipement côte à côte équivaut à dire qu'on maintient le monopole actuel.

+-

    M. Charles Dalfen: Je vous comprends.

    Nous avons un régime de revente qui découle de la loi. Les étrangers peuvent y participer, et certains intègrent le marché de cette façon. Il reste qu'à notre avis, pour développer une concurrence à long terme, il est important que des investissements soient faits dans l'équipement et les systèmes de télécommunications, sinon on risque d'avoir besoin de réglementation indéfiniment. Je ne pense pas que ce soit souhaitable.

+-

    M. Paul Crête: Est-ce que le fait de modifier le pourcentage de propriété étrangère précisé dans la loi modifierait votre point de vue ou votre tâche à cet égard? Est-ce une question de pourcentage ou de principe?

+-

    M. Charles Dalfen: Vous parlez de la concurrence basée sur les installations?

+-

    M. Paul Crête: Non, je m'excuse; je suis revenu à cela parce que j'ai très peu de temps.

+-

    M. Charles Dalfen: C'est bien de préciser que dans le domaine des communications sans fil--on parle ici des interurbains et d'Internet--, il y a présentement une concurrence robuste basée sur les installations. On voit donc que cela peut se faire. On n'en est pas encore là dans le domaine des télécommunications locales, mais c'est bien de se rappeler que dans d'autres domaines, on y est arrivé et ce, partout au pays.

¹  +-(1550)  

[Traduction]

+-

    Le président: Je remercie M. Crête d'avoir été bref, puisque nous sommes nombreux à vouloir interroger les témoins.

    Au tour de M. St. Denis.

+-

    M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je remercie les témoins d'avoir comparu.

    J'aimerais poser deux brèves questions. Page 4 de votre mémoire, vous dites que la concurrence, et particulièrement celle des marchés locaux, n'évolue certainement pas aussi rapidement que vous l'auriez souhaité. Je sais que cela s'explique de diverses façons, mais vous serait-il possible de nous donner en ordre d'importance les deux, trois, quatre ou cinq raisons à cela? Supposons qu'il y ait un ralentissement économique, par exemple, et que... Vous est-il possible de nous les donner en ordre de priorité, monsieur Dalfen?

+-

    M. Charles Dalfen: C'est une très bonne question. Depuis ma nomination au poste de président de CRTC il y a plus d'un an, je cherche cette liste. C'est une très bonne question.

    Je ne peux pas vous donner un classement clair, car je n'ai pas réussi à en trouver un. Je peux vous nommer un certain nombre de facteurs. Le ralentissement économique depuis la fin du boom des entreprises point-com a eu une incidence très négative sur le processus. On pourrait parler d'une offre excédentaire pendant les beaux jours de capacité, par rapport à l'évolution de la demande réelle, sans la confondre avec la mentalité de l'époque selon laquelle il suffisait de produire pour trouver preneur.

    Comme nous le faisons sans doute tous de temps en temps, après coup nous constatons que nous aurions probablement pu affiner certains règlements pour peut-être assurer un accès plus rapide aux réseaux titulaires ici et là. L'organisme de réglementation doit probablement assumer une part de responsabilité, comme nous le devons tous.

    Un autre facteur est la qualité des décisions des gens d'affaires qui ont investi dans la capacité lorsqu'il a semblé que la capacité allait être utilisée. On a acheté, investi et installé de l'équipement qui pose maintenant problème.

    Un autre facteur est la baisse de la demande en raison du ralentissement général de l'économie.

+-

    M. Brent St. Denis: Merci pour cette réponse.

    Je comprends que vous ne puissiez pas répondre aux questions relatives aux politiques. Vous administrez les règles établies par le Parlement. Mais si je vous présente un scénario, est-ce que vous pouvez me dire ce que vous en pensez?

    Je pense que nous devons assouplir les règles. Et je cherche donc les raisons pour lesquelles nous le ferions pas, plutôt que d'exprimer une opinion négative et de chercher ensuite les raisons de le faire. Mon opinion pourrait se résumer ainsi: «Faisons-le sans débattre des raisons de ne pas le faire.»

    Si nous assouplissions les règles afin d'éliminer toutes restrictions à la propriété étrangère de l'infrastructure, des moyens de transmission, etc., je pense que nous serions surtout préoccupés par les zones grises où les installations de radiodiffusion et les moyens de transmission font l'objet d'une propriété commune, par exemple dans la câblodistribution. Vous pouvez séparer ces deux secteurs assez rapidement dans votre processus de décision puisque les deux parties sont assujetties à des restrictions en matière de propriété. Si les restrictions qui s'appliquent à la propriété de l'infrastructure étaient assouplies, pourriez-vous continuer à gérer le contenu de la radiodiffusion en utilisant vos instruments actuels, même si on allégeait les restrictions qui s'appliquent aux moyens de transmission? L'interface serait plus compliquée. Est-ce que vos instruments actuels vous permettraient d'agir dans de telles circonstances?

+-

    M. Charles Dalfen: Dans la mesure où cette question est la même que celle que posait M. Fitzpatrick, ma réponse reste la même. Il y a deux ensembles de règles. Les règles qui s'appliquent à la propriété et les règles qui régissent le contenu ont toujours été administrées séparément. Le Parlement a énoncé ses politiques et ses objectifs dans deux lois distinctes. Il ne s'agit pas simplement de politiques gouvernementales qui sont modifiées de temps à autre. Il s'agit d'exigences prévues dans la loi que nous devons appliquer. Je suis sûr que vous tiendrez compte de ce fait pendant votre examen de la question. En examinant les règles particulières, vous examinerez les objectifs.

    La réponse est oui, nous avons administré ces deux ensembles de règles de façon très différente, et nous avons souvent examiné les deux. Par exemple, lorsqu'il y a un changement de propriétaire, nous voulons nous assurer que la directive sur la propriété étrangère est respectée. Puis nous examinons le programme et les autres éléments. Dans ce sens, nous examinons les deux aspects de façon indépendante.

    Cependant, il y a toujours un chevauchement en raison des objectifs et également du fait que mise à part les règles de propriété étrangère, comme le mentionnait M. Marcil, il y a d'autres objectifs comme la promotion de la souveraineté et de l'identité canadienne, etc., qui nous obligent toujours à tenir compte de la propriété, du contrôle, de la direction et de l'influence sur l'entreprise de radiodiffusion afin de nous assurer de l'atteinte de ces objectifs. Il s'agit donc d'un examen exhaustif.  

    Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.

¹  +-(1555)  

+-

    M. Brent St. Denis: J'imagine une membrane entre les deux segments. Je me demande si la question de la propriété de l'infrastructure n'a pas une incidence à l'endroit où les deux segments se rencontrent et si cela vous pose un problème plus ou moins important. Si je comprends bien, vous aurez encore les instruments nécessaires pour exercer vos fonctions si les règles qui s'appliquent d'un côté de la membrane, par exemple la propriété des infrastructures, sont alléguées.

+-

    M. Charles Dalfen: La membrane est un bon exemple, car ce n'est pas une cloison étanche.

    Je ne peux pas vous donner d'exemple. Réflexion faite, si. La semaine dernière, nous avons rendu une décision au sujet de la participation d'une entité étrangère. Nous avons examiné cette participation sous toutes les coutures, pas seulement sur le plan de la propriété mais également la marque du produit et l'influence sur les décisions de programmation, etc. Il ne s'agissait pas simplement de vérifier que la règle de 80 p. 100 était respectée mais également de déterminer si l'entité étrangère pouvait exercer un contrôle sur l'entreprise. Nous avons donc rendu une décision très détaillée exigeant que le demandeur modifie diverses dispositions de son entente avec l'entité étrangère afin que tout soit conforme. Alors il s'agit bien d'une membrane, comme vous l'avez si bien dit.

+-

    M. Brent St. Denis: Et la pression pourrait changer d'un côté.

+-

    M. Charles Dalfen: C'est exact.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur St. Denis. Vous aurez un autre tour plus tard.

    M. Fitzpatrick.

+-

    M. Brian Fitzpatrick: Je trouve les objectifs assez intéressants. J'aurais cru que le principal objectif serait la création d'un système de distribution concurrentiel et de qualité qui respecte et même dépasse les attentes de l'utilisateur final, le public canadien, et non pas la propriété de l'infrastructure. Mais, le Parlement a fixé ses objectifs.

    Le câble, les satellites et les antennes permettent d'avoir accès aux signaux de télévision et au contenu. Dans une moindre mesure, le câble, les compagnies de téléphone et les satellites fournissent un accès à l'Internet. Ce sont surtout les compagnies de téléphone qui fournissent des services de télécommunications, mais les antennes, les satellites et le câble peuvent également être présents dans ce secteur. Je mentionne cela uniquement parce qu'une question secondaire est celle de savoir si nous devrions avoir un régime pour surveiller l'application des règles de propriété. De par sa nature, le câble fait concurrence aux compagnies de téléphone, et vice versa, mais il y a également d'autres joueurs.

    J'ai l'impression que les Britanniques ont été assez surpris d'apprendre que nous avions un ministère qui administrait un régime pour le câble et un autre qui s'occupaient de l'application d'autres règlements visant les autres moyens de transmission et que ces règlements n'étaient pas les mêmes. Si j'ai bien interprété leur communication non verbale, ils étaient assez surpris que nous ayons un mécanisme aussi bizarre.

    Ces entreprises sont en concurrence directe les unes avec les autres, alors pourquoi les règles ne seraient-elles pas les mêmes pour toutes? C'est la question que nous nous posons. Quelles que soient les restrictions qui s'appliquent à la propriété étrangère, est-ce qu'il ne devrait pas y avoir un ensemble de règles pour la propriété de tous ces concurrents?

+-

    M. Charles Dalfen: À l'heure actuelle, les règles sont assez semblables sans être identiques. Vous avez absolument raison.

    Je suppose que le câble est réglementé en vertu de la Loi sur la radiodiffusion parce qu'à l'origine il s'agissait d'une extension des signaux de radiodiffusion. Pour leur part, les entreprises de télécommunications sont réglementées en vertu de la Loi sur les télécommunications.

    Il ne faut pas oublier cela, particulièrement maintenant. Cela fait 25 ans que nous les incitons à se livrer une concurrence directe, et nous avons enfin une véritable compétition axée sur les installations dans le secteur de l'Internet à haute vitesse. Comme tout le monde ici le sait, ils se livrent une concurrence farouche qui sert bien le consommateur, si bien que le Canada se place, je crois, au deuxième rang dans le monde pour l'utilisation de la large bande.

    Il est évident que vous devriez tenir compte des deux avant de décider ce que vous allez faire de la Loi sur les télécommunications.

º  +-(1600)  

+-

    M. Brian Fitzpatrick: À mon avis, cela va de soi tout comme il va de soi que le soleil se lève le matin et se couche le soir. Lorsqu'un grand nombre d'entreprises se livrent une concurrence directe dans le même secteur d'activités, il faudrait que la loi s'applique également à chacune d'elle. Les règles devraient être les mêmes pour tous les concurrents.

    On peut dire que les câblodistributeurs fournissent essentiellement un contenu de télévision, etc. Dans la plupart des régions du Canada—et vous le savez très bien—, les compagnies de téléphone fournissent un très bon produit par satellite qui fait directement concurrence aux câblodistributeurs et elles sont probablement en train de s'accaparer d'une bonne part de leur marché. La concurrence est très vive.

    Je pense que Microsoft est en train de chercher le moyen d'utiliser l'Internet pour distribuer des émissions de télévision à une station de télévision. Elle est en train de mettre au point des prototypes. Il se peut bien qu'elle y arrive pas dans un an ou deux.

    Ne conviendrait-il pas, du point de vue administratif, d'avoir un seul ensemble de règles de propriété s'appliquant à la même catégorie de concurrents?

+-

    M. Charles Dalfen: Lorsque nous réglementons le marché, nous faisons notre possible pour que les règles du jeu soient aussi équitables que possible.

+-

    M. Brian Fitzpatrick: Vous le faites pour le contenu, mais moi je vous parle de la propriété.

+-

    M. Charles Dalfen: Ça ne s'applique pas uniquement au contenu. Ça s'applique aussi aux conditions d'abonnement, à la réglementation ou la déréglementation des tarifs, à leurs rapports avec les fournisseurs d'accès Internet, afin qu'ils soient réglementés de façon équitable.

+-

    M. Brian Fitzpatrick: Moi je parle de la propriété.

+-

    M. Charles Dalfen: À l'heure actuelle, les règles de propriété sont semblables, même s'il y a deux régimes. Oui, là aussi ils sont traités de manière semblable.

+-

    Le président: Nous passons maintenant à M.  Bagnell.  

+-

    M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Le dernier intervenant a dit qu'il allait de soi que le soleil se lève le matin qu'il se couche le soir. Dans ma circonscription du Yukon, ce n'est pas toujours le cas.

    Si vous avez suivi nos audiences, vous avez dû constater que pour assurer la concurrence, il y a quelque chose d'encore plus important que la propriété étrangère et c'est un cadre de réglementation qui permet à l'industrie d'être compétitive et d'attirer des investisseurs.

    Je voudrais aborder un certain nombre de points qui ont peut-être déjà été mentionnés mais qui intéressent ma circonscription.

    À l'heure actuelle, il n'y a pas de concurrence locale, mais vous vous dirigez dans cette voie. Je suis heureux de l'entendre. Vous imaginez bien qu'un accès local est absolument essentiel, surtout dans les régions rurales et éloignées comme la mienne. Ce n'est pas un luxe. Les moins-nantis n'ont pas les moyens de s'offrir autre chose qu'un accès local.

    Si votre poêle à bois s'éteint quand il fait moins 40 degrés à l'extérieur, ou si vous tombez de votre fauteuil roulant ou si votre chaudière à mazout ne fonctionne pas parce qu'il y a une panne d'électricité, vous gèlerez à mort assez rapidement. C'est vraiment essentiel.

    Pour nous, il faut que les prix soient aussi bas que possible. À l'heure actuelle, notre taux de chômage se situe au troisième rang au pays et il nous faut donc des prix bas.

    En ce qui concerne l'accès local, je n'étais pas content il y a quelques années lorsque vous avez tenu des audiences, parce que vous avez très bien réussi à attirer la concurrence pour les services interurbains, mais les compagnies de téléphone ont essayé d'obtenir une plus grande part de leur revenu de l'accès local qui n'était pas protégé. Vous avez permis des augmentations qui dépassaient largement le taux d'inflation dans le Nord.

    J'espère que vous allez réglementer l'accès local jusqu'à ce que vous ayez atteint notre objectif commun d'attirer des concurrents dans le secteur local.

+-

    M. Charles Dalfen: Je vais demander à David Colville, vice-président des télécommunications, de répondre à votre question.

+-

    M. David Colville (vice-président, Télécommunications, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes): Nous avions l'intention de continuer à réglementer le service local. Comme vous le savez, nous réglementons encore NorthwesTel en vertu de l'ancien modèle du taux de rendement.

    Vous avez parlé de concurrence dans le service local. Lorsque nous avons rendu notre dernière décision, il y a quelques années, nous avons ouvert le secteur des interurbains à la concurrence. La concurrence commence à arriver dans votre territoire. Entre-temps, nous allons continuer à réglementer les tarifs locaux.

+-

    M. Larry Bagnell: Ce que je disais c'est que lorsque vous avez réglementé les tarifs locaux, vous avez autorisé des augmentations qui dépassaient largement le taux d'inflation.

+-

    M. David Colville: Nous cherchons à maintenir l'équilibre tout en essayant de créer un environnement qui permettrait la concurrence. C'est en réponse aussi à la question que posait M. St. Denis tout à l'heure, au sujet de la concurrence qui n'évolue pas aussi rapidement que nous l'aurions souhaité sur les marchés locaux. Le fait est que les aspects économiques du marché local sont très différents de ceux du marché interurbain.

    Je suppose que nous étions préoccupés par le fait que les tarifs de l'interurbain étaient tellement plus élevés que les coûts. Lorsqu'il y a eu de la concurrence, les tarifs ont diminué rapidement. Sur le marché local, dans la plupart des cas, les tarifs étaient inférieurs aux coûts, particulièrement dans les régions très éloignées et les régions rurales. Si nous voulons une concurrence durable, nous croyons qu'il faudrait essayer d'avoir une structure tarifaire plus rationnelle.

    Dans votre cas, l'autre difficulté, que nous avons reconnue dans notre décision sur les tarifs élevés, est que nous avons dû imposer au Sud de subventionner la prestation de services à tous les habitants du Nord, particulièrement l'accès à l'Internet. Nous avons dû essayer de trouver un juste équilibre entre la subvention qui serait fournie par le Sud et la part que les habitants du Nord paieraient eux-mêmes pour obtenir le service. Nous avons dû exercer notre jugement.

    À ce moment-là, nous n'avons pas vraiment tenu compte de l'inflation. Comme je l'ai dit, nous avons dû exercer notre jugement pour trouver un équilibre entre l'objectif de ramener les tarifs plus près des coûts, probablement à égalité aux coûts, dans les régions très éloignées et rurales, d'une part, et le montant de la subvention qui viendrait du Sud, d'autre part.

º  +-(1605)  

+-

    M. Larry Bagnell: Nous nous réjouissons certainement de cette deuxième décision. J'espère simplement que vous garderez cela en mémoire lorsque vous tiendrez d'autres audiences.

+-

    Le président: J'espère que vous allez rattacher tout cela à l'investissement étranger.

+-

    M. Larry Bagnell: Vous vous souvenez, monsieur le président, que j'ai dit...

+-

    Le président: Je ne voudrais pas être obligé de déclarer vos propos irrecevables.

+-

    M. Larry Bagnell: Vous vous rappellerez, monsieur le président, que pendant les audiences les gens ont dit que l'objectif de l'investissement étranger est d'accroître la concurrence, et les témoins ont mentionné quelque chose qui est encore plus important pour la concurrence. J'essayais simplement d'approfondir ce que des témoins antérieurs ont déjà mentionné.

    Dans le même ordre d'idées, il y a la question de l'accès aux infrastructures. Comme certains intervenants l'ont dit, ces éléments d'actif sont au prix coûtant et les entreprises doivent payer ce que paierait n'importe qui, de sorte qu'il n'y a pas vraiment de concurrence et le CRTC devrait établir des tarifs qui sont essentiellement égaux au coût que paierait la compagnie de téléphone qui est propriétaire des lignes plutôt que de fixer un prix de détail ou des tarifs tellement élevés qu'il interdit l'accès au concurrent. Ce n'est pas vraiment assez transparent ou efficace pour assurer une concurrence suffisante.

+-

    M. Charles Dalfen: Au fait, nous venons d'entamer une procédure visant le tarif d'accès à un réseau numérique concurrent, pour répondre aux besoin des concurrents, c'est-à-dire pour leur permettre de se prévaloir des installations de la société locale à un tarif qui sera réglementé.

    Nous sommes convaincus qu'on ne peut pas demander à quelqu'un de vendre ses produits à un coût inférieur à son coût de revient. Ce qu'il faut, c'est bien calculer les coûts et voir à ce que la majoration soit aussi faible que possible tout en demeurant équitable pour toutes les parties. C'est ce que nous essayons de faire. Nous avons réalisé des progrès qui ont été signalés par un certain nombre des témoins représentant la concurrence que vous avez entendus. Mais ce n'est pas terminé. Nous publions chaque année un rapport de surveillance de l'industrie et de l'état de la concurrence sur les marchés locaux. Ce n'est pas encore entièrement satisfaisant. Nous devrons donc continuer d'y travailler.

    Depuis, nous avons rendu un certain nombre de décisions, pas seulement sur les prix maximums comme dans le dernier cas dont nous avons parlé, mais aussi des décisions quant aux limites de ce qui peut être fait pour récupérer des clients, sur la publicité, etc. Nous devrons continuer de veiller à ce que la concurrence ait des chances équitables de réussir à servir les Canadiens.

+-

    M. Larry Bagnell: Merci.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Bagnell.

    M. Fontana, puis M. Crête et M. McTeague.

+-

    M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président.

    J'aimerais revenir sur un certain nombre de questions pour essayer de savoir si l'investissement étranger est oui ou non un moyen de susciter la concurrence.

    À ce sujet, Brian, permettez-moi de dire que la dernière fois qu'on a voulu examiner cette question de l'investissement étranger et du contrôle par des intérêts étrangers, la tâche avait été confiée à l'Agence d'examen de l'investissement étranger dont les travaux avaient suscité beaucoup de craintes pour ce qui est de savoir si ces investissements sont à l'avantage ou non du Canada. À mon avis, cependant, l'investissement étranger est effectivement un moyen d'obtenir des capitaux, ce qui permet de susciter la concurrence, et ce, sans sacrifier sa souveraineté. Tout le monde semble bloquer par cette idée que si quelqu'un possède 51 ou 52 p. 100 des actions au lieu de 48 ou 46 p. 100, nous perdrons quelque chose. On croit que le Canada y perdra.

    Brent et d'autres ont posé des questions à ce sujet. J'ai été extrêmement étonné, monsieur Dalfen, de vous entendre dire que votre rôle n'est pas de donner des conseils au gouvernement. Dans ce cas, on peut se demander qui sait ce qui se fait au pays ou ailleurs au monde si ce n'est le CRTC. J'espère que le gouvernement demanderait au moins...

    De même, j'ai une deuxième question. Lorsque le gouvernement vous donne des conseils, l'écoutez-vous?

    Compte tenu des outils dont vous disposez et dont Brent a parlé, ne pourriez-vous pas utiliser pour cela la réglementation? Si nous voulons vraiment protéger la culture canadienne, le contenu canadien et toutes ces sortes de choses, ne vaut-il pas mieux utiliser un règlement, que ce soit pour la télédiffusion ou les télécommunications, plutôt que d'utiliser les règles sur l'investissement étranger? Qu'en pensez-vous?

º  +-(1610)  

+-

    Le président: Écoutons la réponse avant que le temps soit écoulé.

+-

    M. Charles Dalfen: Il est certain que nous pouvons intervenir devant n'importe quelle instance et produire des rapports, et c'est ce que nous faisons. Officieusement, nous sommes là pour conseiller dans la mesure de nos moyens. Mais en l'occurence ici, il s'agit d'un domaine que le Parlement s'est réservé, ainsi que le gouvernement. J'ai posé la question à mes collaborateurs et à d'autres personnes aussi: avons-nous eu de la difficulté à administrer ces règles? D'après ma propre expérience et la leur, non, même en tenant compte des changements successifs qui ont été apportés. Voilà ce que nous avons à dire. Maintenant quant à la façon dont vous voulez procéder, c'est votre décision et celle du Parlement.

    Nous utilisons les règlements, les licences de radiodiffusion, les ordonnances et les décisions pour exécuter la politique. C'est ce que nous faisons couramment. Nous allons continuer à oeuvrer pour que les objectifs de la loi soient atteints et exercer nos pouvoirs dans ce sens. Nous ne manquons donc pas de moyens.

+-

    M. Joe Fontana: Ma seconde question a trait à cette fonction de service-conseil. Je demanderais donc au CRTC à qui vous rendez compte de toutes vos décisions. Vous êtes une créature du gouvernement fédéral qui vous dicte vos rôles et vos responsabilités, mais également votre façon de procéder. Vous pourriez peut-être répondre à cette question.

    Je voudrais également poser une question au nom de mon collègue Joe Volpe qui est membre du comité mais qui a malheureusement été empêché. Il s'agit des responsabilités décisionnelles et de tout ce qui s'ensuit, mais aussi de la décision concernant le volet radiodiffusion de World Telemonde qui a fait l'objet d'un appel. Le conseil des ministres vous avait demandé de reconsidérer la demande mais vous avez ignoré la décision du cabinet à cet égard, du moins, si j'ai bien compris. L'industrie estime—c'est une supposition de ma part—que vous avez peut-être gaffé avec cette décision.

    Je me demande si cela ne va pas dans les deux sens. Vous nous dites que vous ne conseillez pas le gouvernement et que vous ne devriez d'ailleurs pas le faire, mais lorsque le gouvernement vous demande quelque chose, pour des raisons de politique par exemple, des raisons de politique publique, en ce qui concerne la radiodiffusion, les chaînes multiculturelles et ainsi de suite, vous faites la sourde oreille au conseil des ministres qui pourtant a des comptes à rendre à la population.

+-

    M. Charles Dalfen: Je m'insurge contre cette description.

+-

    M. Joe Fontana: De quoi? De votre gaffe?

+-

    M. Charles Dalfen: Que nous ayons ou non gaffé, c'est votre opinion et vous êtes libre de l'avoir, mais je n'accepte pas que vous disiez que nous avons fait la sourde oreille au gouvernement. Le gouvernement nous avait demandé de reconsidérer une décision en tenant compte de certains éléments, et c'est ce que nous avons fait. Le gouvernement ne nous a jamais demandé d'arriver à une décision différente de la première, et il n'a pas non plus le pouvoir de le faire en vertu de la loi.

+-

    M. Joe Fontana: Qui a le pouvoir?

+-

    M. Charles Dalfen: C'est le pouvoir que la loi confère au CRTC, sous réserve d'un appel devant le gouverneur en conseil et les tribunaux.

+-

    M. Joe Fontana: Ainsi donc, lorsque quelqu'un interjette appel auprès du gouverneur en conseil et que ce dernier fait volte-face et dit: «je n'aime pas votre décision, vous devriez la reconsidérer», cela semble vouloir dire que vous devriez réenvisager la chose, non? Et puis vous faites volte-face et vous prétendez qu'il y en a d'autres...

+-

    M. Charles Dalfen: Non, c'est une autre étape. Si, au bout du compte, le gouvernement n'aime pas notre décision, il peut la mettre en veilleuse. C'est une autre étape du processus. La loi précise très clairement la chose à faire précisément pour que le processus soit juste et raisonnable. Je pense que le résultat voulu a été obtenu et que le conseil a pleinement reconsidéré sa décision initiale et a dûment pris acte des arguments du gouvernement. Mais il en est arrivé à la conclusion unanime qu'il fallait maintenir la décision première.

º  +-(1615)  

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    M. Crête.

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Merci, monsieur le président.

    En vous basant sur la très grande expérience que vous avez de l'accès aux services dans les milieux ruraux, êtes-vous en mesure de me dire si l'accès libre à l'investissement étranger accélérerait vraiment la mise en application de services de meilleure qualité dans les milieux ruraux ou si, au contraire, ce serait un facteur négligeable?

+-

    M. Charles Dalfen: Je n'ai rien vu encore qui confirmait ou infirmait cette hypothèse. Vous aurez peut-être l'occasion, au cours de vos consultations, de vous faire une meilleure idée de cela.

+-

    M. Paul Crête: Supposons qu'on ajoute au système, toutes les autres variables étant égales, la possibilité d'investissements étrangers. Si j'en crois ce que vous me dites, vous n'avez pas l'information nécessaire pour déterminer si cela aiderait à intégrer le marché qui représente 20 p. 100 de la population et qui occupe 80 p. 100 du territoire, alors que 80 p. 100 de cette même population est concentrée sur 20 p. 100 du territoire. Si je comprends bien, vous n'avez pas d'opinion à ce sujet. Est-ce exact?

+-

    M. Charles Dalfen: Non, monsieur Crête; je ne vois pas comment on pourrait exiger d'un investisseur, canadien ou étranger, qu'il dépense son argent dans les zones les moins bien desservies du Canada. Ça ne fonctionne pas de cette façon.

+-

    M. Paul Crête: Le fait d'ouvrir le marché et qu'il y ait, par conséquent, plus d'argent et plus de concurrence pourrait-il, à votre avis, faire en sorte que ces services soient plus faciles à obtenir ou croyez-vous au contraire que cela n'aurait pas d'effet? Je ne parle pas de déterminer des endroits précis pour investir, mais seulement de l'arrivée de cette possibilité.

+-

    M. Charles Dalfen: Peut-être.

+-

    M. Paul Crête: Je n'ai pas d'opinion à ce sujet.

+-

    M. Charles Dalfen: Certains de vos témoins sont beaucoup plus près des opérations que je ne le suis, et vous aurez l'occasion de recueillir différentes opinions à ce sujet. Néanmoins, je peux vous dire qu'à l'heure actuelle, on a un pourcentage de télédensité, en d'autres mots de pénétration du marché par le téléphone, de 98 p. 100, et que pour ce qui est d'Internet à haute vitesse, on se classe deuxième au monde. Avec notre régime actuel, on réussit plutôt bien en comparaison avec les autres pays; toutefois, cela ne signifie pas qu'on ne puisse pas faire mieux. Cependant, c'est à vous de décider si l'investissement étranger pourrait ou non être profitable.

+-

    M. Paul Crête: Je vais vous donner un exemple. À un kilomètre de l'autoroute 20, à Saint-Pascal de Kamouraska, on n'avait pas accès à l'autoroute à haute vitesse mais avec le temps, on a quand même réussi à la faire installer par le biais d'Internet par micro-ondes. Soudainement, Bell Canada a trouvé les moyens de mettre un système sur pied. Dans ce cas, la concurrence a créé le besoin.

    Nous sommes des élus représentant la population, et non des businessmen. En ce sens, nous craignons que l'abolition des règles sur l'investissement étranger n'apporte aucun avantage, sinon une consolidation de l'entreprise.

    Vous avez une grande expertise en la matière; pour moi, le CRTC fait partie de ceux qui, au Canada, savent le mieux ce qui peut influencer la mise en oeuvre d'initiatives au niveau local. Je voulais savoir si vous aviez une opinion à ce sujet.

+-

    M. Charles Dalfen: Il est évident que les investisseurs ne recherchent pas les zones d'opération qui ne sont pas rentables. Cela implique que plus on attirera d'argent étranger, plus cette règle s'appliquera.

    Quelqu'un a suggéré l'idée que ça pourrait être pire, ce qui est une façon d'inverser la question. Il est difficile de prouver que l'argent étranger va aider à la mise sur pied de services au Canada, mais est-ce que cela peut nuire? Peut-être pas. C'est une bonne question. Chose certaine, il y a des gens, que ce soit à Londres, à New York ou partout ailleurs dans le monde, qui vont chercher les endroits où leurs investissements seront les plus rentables. Si le Canada est un tel pays, ils vont y investir, sinon ils vont aller ailleurs; ils ont le choix étant donné que ce domaine est de plus en plus mondialisé.

º  +-(1620)  

+-

    M. Paul Crête: Enfin, si je comprends bien, l'investissement étranger peut permettre de consolider l'industrie, mais il ne mène aucunement, de façon automatique, à un meilleur service dans les milieux ruraux.

+-

    M. Charles Dalfen: Ce n'est absolument pas automatique.

[Traduction]

+-

    Le président: Vous pouvez encore poser une question brièvement. Mais vous aurez un deuxième tour. D'accord.

    M. McTeague.

+-

    M. Dan McTeague (Pickering—Ajax—Uxbridge, Lib.): Monsieur le président, je vous remercie.

    Merci messieurs d'être venus aujourd'hui. Le gros avantage d'être vice-président, c'est qu'on a toutes ces excellentes questions sous les yeux.

    Monsieur Colville, vous savez comme moi qu'il y a de nombreuses années déjà, je faisais partie du Comité du patrimoine et que l'une des raisons pour lesquelles j'ai quitté ce comité était que je ne voulais pas avoir à poser des questions délicates au CRTC, de sorte que je vais encore essayer de m'en abstenir.

    Monsieur Dalfen, je vous remercie pour votre intervention. Vous avez dit deux ou trois choses qui ont, je crois, fait sourciller les membres du comité, notamment lorsque vous avez parlé de ce que vous jugiez la forme la plus durable de concurrence, une concurrence basée sur l'infrastructure. Je pense qu'en tout état de cause, la plupart des gens sont arrivés à la conclusion que le statu quo était inacceptable peu importe comment on présentait les choses, et vous avez même laissé entendre devant nous que la situation des marchés locaux n'avait pas évolué aussi rapidement que vous l'auriez voulu. Je me demande si ce n'est pas simplement ce que vous voudriez vous ou ce que nous pourrions faire nous dans un monde idéal, mais cela tient au fait que le marché est prédéterminé de la façon peut-être la plus appropriée, n'est-ce pas?

    Par exemple, si le marché laissait entendre ou si le comité partait du principe, comme l'affirment certains, qu'il faudrait modifier la Loi sur les télécommunications en éliminant le critère qui privilégie l'appartenance à des intérêts canadiens qui en exercent le contrôle, considéreriez-vous malgré tout que votre objectif optimal, même si cela sous-entend la participation d'intérêts non canadiens, qui est la multiplication des possibilités et d'avoir de façon plus réaliste les moyens de faire intervenir les diffuseurs dotés d'infrastructures plutôt que des hybrides que vous semblez considérer comme une solution de départ, demeurerait le même?

+-

    M. Charles Dalfen: Ici encore, je ne vois aucune adéquation automatique. Je peux concevoir qu'il y ait des arguments en faveur de cette solution, c'est certain. Comme je le disais à M. Crête, si vous retournez l'argument et si vous dites que vous n'êtes peut-être pas capable d'établir une corrélation positive, pouvez-vous à tout le moins affirmer que cela ne fera pas de tort en ce qui concerne l'accès au capital et le coût de celui-ci? Je pense qu'on pourrait probablement l'affirmer aussi. À ce moment-là, il s'agit de savoir comment cela s'intègre aux autres objectifs prescrits par la loi et, si vous avez la conviction d'en avoir vraiment pour votre argent et de pouvoir respecter ces autres objectifs, eh bien qu'il en soit ainsi, c'est donc la route à suivre.

+-

    M. Dan McTeague: Sans aller jusqu'à recommander un genre de bureau de réglementation national des valeurs mobilières—ce qui ferait sourciller bien du monde, c'est certain, parce que nous ignorons si c'est quelque chose qui pourrait ou non être envisagé—, il me semble que le marché ne penche ni dans un sens, ni dans un autre. C'est-à-dire pour une concurrence basée sur les infrastructures ou pour un marché dans lequel un diffuseur pourrait utiliser le matériel d'un autre. Et bien sûr, vous êtes assis entre deux chaises avec cette réglementation qui dit ce qui est équitable.

    Comment donc faire en sorte que le CRTC puisse faire pencher la balance alors que le marché semble neutre et que les actionnaires se sont déjà prononcés, ou que le marché s'est révélé incapable d'avancer les concours financiers indispensables pour atteindre les objectifs mêmes que vous trouvez dans la loi? En deux mots, je vous demande si ce que vous demandez est impossible à atteindre dans la structure actuelle des choses. Et si c'est le cas, que proposeriez-vous? Je sais que vous ne pouvez rien proposer, vous nous l'avez dit. Mais s'il n'y a aucun autre moyen d'arriver à créer une concurrence entre ceux qui sont des facilitateurs, quel modèle pourriez-vous proposer qui nous aiderait à sortir de cette impasse qui exigerait sinon toute la sagesse de Salomon?

    Il est clair que le cabinet a un avis partagé sur la question. Et le public aussi, d'ailleurs. Quant à vous, vous demandez à plusieurs parlementaires qui vont recevoir un petit cours accéléré en télécommunications comment résoudre du jour au lendemain tous les problèmes du monde. Nous attendons du CRTC qu'il nous donne quelques éléments de réponse, mais si le CRTC a une préférence qui ne correspond pas tout à fait à ce que veut le marché, comment sortir de l'impasse?

+-

    M. Charles Dalfen: J'ai plusieurs choses à dire.

    C'est une proposition intéressante. Il est indéniable que la Loi sur la radiodiffusion et la Société Radio-Canada n'existeraient pas aujourd'hui si le Canada avait permis le jeu des forces du marché. On a cru nécessaire à l'époque d'investir et d'adopter une loi afin que nous ayons notre propre régime. Ce régime tient compte de la propriété étrangère. Les enjeux peuvent être compartimentés car nous avons parlé de deux groupes de règles. Comme l'a dit M. St. Denis, c'est une membrane qui les sépare et quant à moi, j'ajoute qu'elle est «perméable».

    Vu les objectifs des deux lois, il est indéniable qu'il faut tenir compte de notions comme la «souveraineté canadienne» et de la nécessité de stimuler et de promouvoir la propriété et le contrôle canadiens... Ces notions sous-tendent donc intégralement ces lois. Si, comme vous le faites, vous isolez ces notions, il faut le faire avec beaucoup de prudence. Mais comme je l'ai dit plus tôt, au fil des ans, nous avons démontré que nous pouvions nous accommoder des changements et c'est ce que nous ferons à l'avenir.

    Si nous avions laissé les forces du marché s'exercer seules, nous n'aurions pas pu créer ces institutions culturelles au Canada. En effet, la règle sur la propriété étrangère des entreprises de télécommunications, qui est entrée en vigueur après la guerre avec des compagnies comme la Société canadienne des télécommunications d'outre-mer, le transporteur international... Elle trouve son origine dans le souci de sécurité né de la guerre parce qu'alors il n'était pas question qu'un autre pays se charge des communications vitales. Cette société s'est maintenue jusqu'à son abandon quelques années plus tard. On a constaté un renversement de la vapeur. Au bout du compte, Téléglobe a cessé d'appartenir à des Canadiens.

    On constate donc une évolution des opinions et des points de vue à cet égard. Actuellement, vous êtes en train de vous demander si nous devrions réagir à l'évolution et à la mondialisation, en modifiant éventuellement nos règles. Vous constatez que ce n'est pas aussi simple que c'en a l'air à première vue, non seulement à cause des restrictions quant au contenu mais à cause de la trame des objectifs définis dans les lois.

º  +-(1625)  

+-

    Le président: Merci,monsieur McTeague.

    M. Fitzpatrick.

+-

    M. Brian Fitzpatrick: Je respecte votre position. Le CRTC a été créé par une loi du Parlement, qui vous confère vos pouvoirs. Je m'inquiéterais davantage si c'était le conseil des ministres ou le Bureau du premier ministre qui vous donnait des instructions quant à ce que vous estimez être nécessaire sur le plan du contenu canadien. Personnellement, si c'était le cas, je trouverais cela troublant et offensant. Je respecte donc votre position à cet égard, et je ne la contesterai pas.

    Des témoins nous ont dit qu'il fallait surmonter de grands obstacles pour accéder aux infrastructures et aussi pour obtenir des accords d'affiliation; la route pour obtenir sa place au soleil était pavée d'écueils, pour ainsi dire. Si j'ai bien compris la logique de certains, la propriété publique serait le meilleur régime pour obtenir l'accès. L'entreprise privée en monopole canadien serait une solution de rechange. La propriété étrangère serait catastrophique car cela signifierait de devoir aller à Dallas ou en Corée du Sud ou ailleurs pour faire pression afin d'intégrer la chaîne 36 au système, etc.

    J'ai eu du mal à accepter cet argument car si j'ai bien compris votre rôle, monsieur, quiconque ayant une raison légitime de ne pas se sentir traité équitablement par un câblodistributeur ou par les fournisseurs de services satellite peut avoir recours au CRTC. Vous avez le devoir d'offrir à ceux qui se sentent lésés des recours justes et raisonnables, peu importe qui est propriétaire du système.

    Est-ce que je me trompe?

+-

    M. Charles Dalfen: Vous avez raison, je suis d'accord.

+-

    M. Brian Fitzpatrick: Cette réponse me suffit parce qu'elle est très éloquente.

+-

    Le président: Est-ce tout, monsieur Fitzpatrick? Merci.

    M. Savoy.

+-

    M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Merci beaucoup d'être venus aujourd'hui.

    Nous comprenons tous autour de la table le dilemme dans lequel nous sommes placés. Comme Dan l'a dit, ce qu'il nous faut, c'est la sagesse de Salomon.

    Je m'intéresse en particulier à la productivité canadienne et à la recherche et à l'innovation au Canada et à la façon dont nous pouvons favoriser tout cela. Dans le secteur des télécommunications, nous avons des problèmes de R & D et d'innovation. Nous avons aussi des programmes visant à aider les localités rurales et isolées dans le domaine des télécommunications, surtout pour ce qui est de l'Internet.

    Si l'on examine votre modèle fondé sur les installations, il exigerait un investissement considérable. Mais en même temps, si l'on n'envisage pas de supprimer ou tout au moins de réduire les restrictions sur la propriété étrangère, ne pensez-vous pas qu'il y a contradiction entre ce besoin généralisé ou cette demande de nouveaux capitaux pour la productivité, l'innovation, l'extension des services, et les services de technologie de l'information, d'une part, et votre demande de favoriser la concurrence fondée sur les installations, d'autre part? Ne pensez-vous pas qu'il nous faudra des investissements étrangers pour progresser dans la mise en place de ce modèle?

º  +-(1630)  

+-

    M. Charles Dalfen: C'est possible. À première vue, on serait porter à croire que si l'on éliminait les règles, l'accès ne s'en porterait pas moins bien. Évidemment, on ouvrirait la porte à tout un univers de nouveaux actionnaires et institutions financières. Je pense que c'est évident, que ça va de soi.

    Par contre, il est difficile d'établir automatiquement une corrélation et de dire que cela garantira que nous aurons tous les investissements dont nous aurons besoin pour le régime fondé sur l'infrastructure. Comme un certain nombre de gens l'ont déjà dit ici, tant que le marché n'aura pas repris, que les gens n'auront pas recouvré leur confiance dans ce secteur et que les plans d'entreprise ne seront pas jugés sur leur mérite propre, ni les Canadiens ni les investisseurs étrangers ne vont investir. Quand le climat est favorable, comme il l'était à la fin des années 1990 et en 2000, il n'y a aucun problème à attirer de l'argent dans quelque secteur que ce soit. L'important, c'est que nous ayons au Canada un accès à large bande parmi les meilleurs au monde, et que l'on investisse dans un système téléphonique qui soit le meilleur au monde.

    Il y a une observation intéressante au sujet de la pénétration du téléphone au Royaume Uni. M. Edmonds, à qui j'en ai parlé, vous l'a peut-être dit, je ne sais pas. La vérité est que quand on a ouvert la porte à la concurrence pour la téléphonie locale, cela s'est fait grâce aux exploitants du câble. Les Canadiens, y compris Vidéotron et BCE à l'époque, étaient des chefs de file dans ce mouvement. Je pense que nous conviendrons tous, comme d'ailleurs quiconque a utilisé le système dans les années 1960 comme je l'ai fait, que c'était parce que le service était affreux en comparaison de ce à quoi nous étions habitués au Canada.

    Le monopole gouvernemental de British Telecom à l'époque n'offrait tout simplement pas un service qui était à la hauteur. Donc, quand le représentant d'une compagnie de câble faisait du porte à porte au Royaume-Uni pour offrir un service téléphonique, il n'était pas très difficile d'offrir un service téléphonique qui était meilleur. Ils n'avaient même pas de facturation détaillée pour les comptes. On obtenait une facture de téléphone qui ressemblait à la facture d'électricité, précisant qu'on avait utilisé tel nombre d'unités. On ne savait pas où, quand, comment, ou pourquoi. On recevait une simple facture, et le service était très mauvais. Ce mauvais service a donc aidé les Canadiens à s'implanter au Royaume-Uni et à y vendre des services téléphoniques en même temps que des services de câble.

    Au Canada, cependant—je sais que c'est une façon détournée de répondre à votre question—, nous avons tous grandi avec un service téléphonique de première qualité. Notre service à large bande passante est maintenant de la meilleure qualité. Donc, évidemment, au fil des années, quelles que soient les règles, nous avons réussi à attirer des investissements dans ces secteurs. C'est la même chose pour la télévision par câble et l'accès à haute vitesse.

    Donc, avons-nous vraiment eu des difficultés à trouver des capitaux jusqu'à maintenant? C'est une question que vous examinerez, j'en suis sûr. Mais on peut également se demander naturellement si ouvrir toute grande la porte peut faire tort? Probablement que non, parce que l'on aurait évidemment beaucoup plus de sources de capitaux et un plus grand nombre d'investisseurs. Mais quant à savoir quels en seraient les avantages, je ne suis pas certain que l'on puisse tirer une conclusion automatique.

+-

    M. Andy Savoy: Pour ce qui est de la concurrence basée sur les installations et des nouveaux venus en particulier, je sais que vous avez établi des formalités pour des nouveaux venus quant à l'utilisation de l'infrastructure existante des gros utilisateurs, des grosses entreprises de télécommunications. Cela dit, si les nouveaux venus essaient de trouver des capitaux pour se doter d'installations, sans la levée des restrictions directes à la propriété étrangère, cela pourrait s'avérer très difficile.

    Parlons maintenant des nouveaux venus spécifiquement. Est-ce que vous avez une optique différente selon qu'il s'agit de nouveaux venus ou de grosses entreprises de télécommunications existantes?

+-

    M. Charles Dalfen: Il y a de nouveaux venus dans le secteur de la revente. Comme chacun le sait, on peut obtenir un contrat de revente de services téléphoniques interurbains auprès d'acteurs basés en Floride et en Californie. Ces derniers n'ont même pas besoin d'avoir des bureaux au Canada. On peut quand même composer des numéros multiples et obtenir des services téléphoniques à moindre prix.

    Ces acteurs sont donc présents sur le marché canadien, et les consommateurs canadiens en profitent. Or, ces acteurs ne veulent pas se doter d'installations, puisqu'ils peuvent tirer avantage du régime de revente qui est en vigueur au Canada depuis 12 ou 13 ans, qui permet toujours d'offrir des services excellents.

    Je voudrais vous dire quelque chose, même si c'est quelque peu désinvolte. Le président de l'Université Harvard, qui a déjà occupé le poste de secrétaire au Trésor, a dit que dans l'histoire du monde, jamais personne n'a lavé une voiture de location. La morale de cette affirmation est que si vous vous contentez de revendre le produit de quelqu'un d'autre, est-ce que vous allez vraiment y mettre du coeur et faire les investissements nécessaires pour assurer la viabilité à long terme de votre entreprise?

    Nous croyons que s'il est vrai qu'il y a de la place sur le marché canadien pour ce genre d'acteurs et s'il est vrai aussi qu'ils sont déjà ici, cela ne devrait pas servir de base pour l'élaboration d'un plan d'action en matière d'innovation pour le Canada ni pour assurer les avantages à long terme pour les consommateurs. Il faudra toujours compter sur une intervention réglementaire pour maintenir les marges de bénéfice à un niveau bas et les prix à un niveau élevé; voilà ce qu'il en est du point de vue des parties concernées. C'est pourquoi nous y sommes favorables.

    Les nouveaux venus auront-ils absolument besoin de capitaux étrangers pour réussir? C'est à eux qu'il incombe de prendre cette décision. Nous n'en avons pas la certitude. Un des nouveaux venus a déjà dit que dans certaines des situations qui existent aujourd'hui, on ne pourrait pas persuader des martiens mêmes d'investir dans ces entreprises. Tout dépend du plan d'affaires au bout du compte.

º  +-(1635)  

+-

    Le président: Merci infiniment.

    Je donne maintenant la parole à M. Bagnell, puis à M. Fitzpatrick. Soyez brefs, s'il vous plaît.

+-

    M. Larry Bagnell: Je vais reprendre là où je me suis arrêté tout à l'heure, c'est-à-dire à la question de l'accès raisonnable aux infrastructures. Je vais reformuler ma question d'une manière que le président jugera acceptable.

    Si la propriété étrangère libérait des capitaux que les gens pourraient investir—et bien entendu, il faudrait que l'environnement soit suffisamment concurrentiel pour que leur investissement vaille la peine—, une fois que vous aurez déterminé les coûts que les concurrents devront assumer pour avoir accès aux moyens de transmission, y a-t-il un examen et une estimation objectifs effectués par un tiers? Les faites-vous faire toujours ou laissez-vous simplement aux entreprises traditionnelles locales le soin de déterminer les coûts?

+-

    M. Charles Dalfen: Les méthodes sont établies à la suite d'audiences publiques durant lesquelles toutes les parties ont l'occasion de se prononcer. Le coût des facteurs de production dépend l'entreprise traditionnelle locale, le cas échéant. Nous passons ensuite ces coûts au crible, et s'il ne s'agit pas d'information confidentielle, nous les soumettons à un examen public. Le processus est très ouvert et très transparent.

    Je pense que vous avez entendu une de ces entreprises, dites titulaires, qui est venue se plaindre devant vous de ce que nous avons modifié ce qu'elle estime être ses coûts sur la base de moyennes et d'estimations nationales. Je pense donc qu'il est assez clair que les coûts proposés par ces entreprises déjà en place font l'objet d'un examen minutieux tout comme les méthodes proposées par toutes les parties concernées, le but étant pour nous de faire en sorte non seulement que nous obtenions les coûts réels, mais aussi que les gens dans les régions éloignées obtiennent les subventions et que nous ne haussions pas les tarifs à tel point que tout le monde doive verser des subventions excessivement élevées.

    Comme vous le savez, le taux de cotisation national de l'année dernière a baissé, passant de 4,5 p. 100 à moins de 1,5 p. 100, simplement en raison de l'examen auquel nous soumettons les coûts.

    Nous essayons donc de concilier notre désir de ne pas exiger de tous de vendre à un prix inférieur au prix de revient et la nécessité de faire en sorte que les coûts soient aussi exacts que possible. On ne se contente pas d'un seul examen par un tiers, mais de deux, de trois, de quatre et de cinq examens par différents tiers. Tous les participants contribuent au processus.

+-

    M. Larry Bagnell: Vous avez donc accès au site, que vous pouvez visiter et inspecter tout ce que vous voulez?

+-

    M. Charles Dalfen: Oui, nous avons un contact constant avec eux.

    L'un corrige l'autre. Étant donné que nous avons TELUS, SaskTel, Manitoba Tel, Bell et Alliant, on a donc l'occasion de comparer les coûts d'une entreprise à l'autre. Quand quelque chose ressort, quelque chose qui sort de la norme, on s'interroge et on demande pourquoi les coûts sont si élevés comparativement au reste du pays. On nous répond alors que c'est une question de terrain et de climat et ainsi de suite, des facteurs qui doivent être pris en compte. Cela dit, nous essayons d'examiner ces informations aussi soigneusement que possible, c'est ce qui garantit que les décisions prises sont équitables et que les coûts sont exacts.

+-

    Le président: Monsieur Fitzpatrick, vous pouvez poser une seule question, puis nous passerons à M. McTeague.

+-

    M. Brian Fitzpatrick: Je veux simplement revenir à l'expérience du Royaume-Uni. Plus j'entends parler de cette politique de Tony Blair en Grande-Bretagne, plus je me dis que cet homme doit être sur la bonne voie. Cela étant, si je comprends bien la philosophie britannique à ce sujet, la libéralisation de l'investissement étranger s'est accompagnée d'un accroissement de la concurrence. Qui dit accroissement de la concurrence dit intérêt des consommateurs. Les consommateurs sont donc au coeur des choix. Les gens qui offrent des services, des choix et un contenu piètres et ainsi de suite se retrouvent perdants dans un climat de compétitivité. En revanche, les gens qui répondent aux attentes des consommateurs, qui les dépassent même, dans ces domaines, y gagnent. Si l'on ajoute à cela un bon cadre réglementaire pour le contenu, c'est le contenu britannique qui y gagne le plus.

    Je suis absolument incapable de comprendre pourquoi une telle approche ne serait pas bonne à suivre au Canada aussi, une approche qui nous permettrait de donner à 30 millions de Canadiens l'accès à un système qui leur permette de faire des choix. Au lieu de s'en remettre à un cabinet ou à une bureaucratie quelconque, pourquoi ne pas laisser les Canadiens choisir ce qui constitue à leurs yeux un contenu canadien de qualité dans un environnement concurrentiel.

    J'imagine que ce que je recherche, c'est une réaction, pour ou contre, de votre part à mes observations.

º  +-(1640)  

+-

    M. Charles Dalfen: Vous avez soulevé de nombreuses questions, monsieur Fitzpatrick, et étant donné que vous vous appuyez sur le modèle du R.-U., qui a suscité beaucoup d'intérêt un peu partout, peut-être souhaiteriez-vous demander à vos attachés de recherche de comparer sinon de contraster les modèles canadiens et britanniques pour voir où nous nous situons.

    À mon avis, notre régime nous permet d'avoir d'assez bons résultats en matière de prix, d'expansion de large bande et ainsi de suite, quand on le compare au modèle britannique. Là encore, cela ne signifie pas pour autant qu'il n'y a pas lieu d'apporter des améliorations, et il est vrai que le régime britannique suscite un intérêt, pas uniquement au Canada mais partout dans le monde.

+-

    M. Brian Fitzpatrick: Une de mes émissions favorites, soit dit en passant, c'est Mr. Bean. Il est intéressant de noter que la première fois que j'ai vu cette émission, c'était à la télévision publique américaine que nous pouvons capter au Canada. L'émission n'était pas offerte par des entreprises canadiennes. Bon nombre d'émissions de qualité que je regarde sur Showtime et sur les chaînes publiques nous parviennent des États-Unis. Nous obtenons donc par la porte de service des émissions de qualité.

+-

    Le président: Je vous remercie, monsieur Fitzpatrick.

    Monsieur McTeague, vous avez le dernier mot.

+-

    M. Dan McTeague: Monsieur Dalfen, j'ai bien apprécié votre comparaison avec les automobiles de location. Cela me rappelle la location que j'ai dû payer l'autre jour, qui incluait certainement des frais pour le lavage de la voiture entre autres. Et peut-être qu'ils m'ont lessivé en même temps.

    Je voudrais vous poser une question sur le processus. Si quelqu'un, par exemple, n'est pas content de la décision, disons la connexion avec AT&T, quel est son recours? Que fait-on en général? Nous avons entendu d'autres témoins, et on nous a dit que dans certains pays on peut porter l'affaire devant les tribunaux. En gros, vous ne devenez pas l'arbitre final sur une question de prix de détail ou de gros.

    Vous pourriez peut-être nous expliquer cela.

+-

    M. Charles Dalfen: Certainement.

    Au Canada, nous avons toutes sortes de recours. Par exemple, aux États-Unis, si la FCC rend une décision que vous n'aimez pas, vous devez vous adresser aux tribunaux. Vous ne pouvez pas faire appel auprès du gouvernement. Ici, il y a trois niveaux. D'une part, on peut nous renvoyer l'affaire. Nous avons en vertu de la loi le pouvoir de réviser et de modifier notre décision. Deuxièmement, vous pouvez vous adresser au Cabinet qui peut examiner la question ou nous demander un rapport ou nous demander de revenir sur notre décision. Et troisièmement, vous pouvez faire appel aux tribunaux si vous estimez que vous avez des arguments juridiques à faire valoir.

    Nous sommes donc un organisme qui rend des comptes. M. Montana est parti, mais nous sommes responsables devant nous-mêmes. Il y a une deuxième option, avec un groupe différent, le Cabinet et les tribunaux, pour revoir une deuxième fois la question de façon à s'assurer que le point de vue du premier groupe n'est pas faussé.

    Je ne vais pas mentionner tous les autres pays, mais c'est en tout cas nettement plus que ce qu'il existe aux É.-U.

+-

    Le président: Merci beaucoup. Ceci conclut notre discussion avec ce groupe. Nous vous sommes reconnaissants d'être venus nous rencontrer. S'il y a des questions, je suis sûr que les attachés de recherche vous contacteront pour avoir plus de précisions.

    Nous allons lever la séance deux minutes.

º  +-(1643)  


º  +-(1648)  

+-

    Le président: Nous reprenons notre réunion. Nous accueillons maintenant Konrad von Finckenstein, le Commissaire à la concurrence, du Bureau de la concurrence. Nous sommes heureux de le revoir à notre comité. Il est venu souvent nous aider à mieux comprendre les questions de concurrence.

    Nous sommes enchantés de vous revoir.

    M. Finckenstein est accompagné de son adjoint, M. Gaston Jorré.

    Monsieur Finckenstein, vous pouvez commencer par vos remarques liminaires et nous passerons ensuite aux questions.

+-

    M. Konrad von Finckenstein (commissaire à la concurrence, bureau de la concurrence, ministère de l'Industrie): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité. C'est un grand plaisir d'être ici pour vous donner un aperçu de la politique de la concurrence concernant les restrictions à l'investissement étranger.

[Français]

    Comme vous le savez, le Bureau de la concurrence est un organisme de mise en application de la loi responsable de l'administration et de l'application de la Loi sur la concurrence, de la Loi sur l'emballage et l'étiquetage des produits de consommation, de la Loi sur l'étiquetage des textiles et de la Loi sur le poinçonnage des métaux précieux. Notre rôle est de promouvoir et de maintenir une concurrence équitable, afin que les Canadiennes et les Canadiens puissent profiter de bas prix, d'un choix de produits et de services de qualité.

º  +-(1650)  

[Traduction]

    En tant que Commissaire à la concurrence, j'ai également un rôle de champion à jouer afin de promouvoir la politique de la concurrence en général. Le Bureau de la concurrence fait la promotion de la concurrence dans tous les aspects de l'activité économique, car nous croyons que les forces du marché sont les plus efficaces allocateurs de ressources peu abondantes.

    Toutefois, nous reconnaissons que les gouvernements ont aussi à poursuivre d'autres objectifs de politique publique comme des politiques sociales et culturelles qui peuvent être prioritaires aux objectifs concurrentiels. Lorsque de telles préoccupations concernant les politiques publiques chevauchent la concurrence, elles devraient être maintenues au minimum.

    J'ai déjà présenté le point de vue du bureau concernant la propriété étrangère lorsque j'ai comparu devant le Comité du patrimoine de la Chambre des communes en décembre 2002. Permettez-moi de me répéter et de mettre l'accent sur les points que j'ai fait valoir à ce moment-là.

    Premièrement, l'accès au capital est essentiel pour une industrie dynamique et efficace. Les restrictions en matière de capital étranger ne sont pas cohérentes avec un marché financier efficace. Une diversité d'options et de sources de capital, incluant diverses sources, l'acceptation de divers risques et diverses modalités sont nécessaires pour qu'un marché fonctionne comme il faut. Par exemple, un plus grand accès au capital étranger serait bénéfique aux entreprises de télécommunications interurbaines, aux câblodistributeurs et à d'autres sociétés qui ont l'intention d'entrer dans le marché de la téléphonie locale. Les compagnies de câblodistribution et de télécommunications qui souhaitent augmenter leurs réseaux existants pourraient aussi en bénéficier.

    Deuxièmement, le capital étranger ne se résume pas seulement à apporter de l'argent au Canada, mais implique aussi d'apporter aux Canadiennes et aux Canadiens des idées financières venant de l'extérieur, une influence financière, des sources de technologie et une gestion efficace. Le secteur des médias au Canada et à travers le monde est en transition. La convergence, un terme pauvrement défini que les industries ont adopté aveuglément, n'a pas été jusqu'à maintenant un succès. Aucun modèle d'entreprise saine et rentable n'a surgi. Des ajustements dans l'industrie des médias sont attendus à court terme. L'accès au capital étranger facilitera seulement la transition et assurera à la fin une industrie canadienne forte.

    Troisièmement, selon nous, en fait de distribution, il n'y a pas de distinction entre la distribution de signaux téléphoniques et les signaux de radiodiffusion. Par conséquent, les distributeurs de l'un ou l'autre des signaux, soit les compagnies de téléphone ou les entreprises de distribution en radiodiffusion, devraient profiter du même accès au capital et être liés par les mêmes règles de propriété. Faute de cela, on donnerait à un secteur un avantage injuste par rapport à l'autre et on déformerait la prise de décisions sur le plan économique.

    Les compagnies de câblodistribution, c'est-à-dire les EDR, lorsqu'elles ont comparu devant le Comité du patrimoine, ont dit clairement qu'elles étaient prêtes à se séparer structurellement en compagnies de distribution et en compagnies de contenu en vue de profiter de tout assouplissement des règles de propriété étrangère pour les distributeurs de télécommunications.

    Nous ne croyons pas que les restrictions de propriété étrangère soient nécessaires afin d'avoir une industrie des télécommunications saine et énergique. En vertu de la Loi sur les télécommunications, l'autorité réglementaire a beaucoup de pouvoirs sur les distributeurs de télécommunications, comme établir les tarifs pour les distributeurs existants, déterminer la qualité du service, assurer un service abordable dans les régions rurales ou éloignées, et discipliner un comportement anticoncurrentiel dans les domaines encore réglementés. Évidemment, tous les domaines qui ne sont pas sujets à une réglementation sont régis par la Loi sur la concurrence.

    Quatrièmement, si les pouvoirs de l'autorité réglementaire sont insuffisants pour leur permettre d'atteindre les objectifs gouvernementaux—un fait auquel nous ne souscrivons pas et qui reste à prouver—ce comité pourrait penser à modifier la Loi sur les télécommunications afin d'introduire une exigence d'octroi de licence aux distributeurs de télécommunications. Un tel octroi de licences et permis en vertu des règles de l'OMC est mis en pratique chez la plupart de nos partenaires commerciaux. De telles licences, comme de raison, peuvent être sujettes à des modalités qui sont nécessaires pour atteindre les objectifs présumément inatteignables en vertu du présent régime.

[Français]

    Je voudrais mettre l'accent sur le fait que ces quatre points touchent les compagnies de télécommunications, peu importe qu'elles distribuent des signaux d'accès à la téléphonie, à la radiodiffusion ou à Internet.

[Traduction]

    Quand j'ai comparu en décembre devant le Comité du patrimoine, le bureau a recommandé que le gouvernement

inclue, dans le cadre de la politique canadienne de réglementation et de radiodiffusion:

a) l'objectif de réglementer, lorsque c'est nécessaire, de façon à viser uniquement la réalisation des objectifs culturels de la loi;

b) l'objectif d'augmenter la confiance dans les forces du marché;

c) l'objectif d'améliorer l'efficacité et la compétitivité des services canadiens de radiodiffusion.

    Ce sont là les recommandations que nous avons formulées à propos de la Loi sur la radiodiffusion.

    En conclusion, le message du bureau est simple. Nous ne voyons pas ce qui pourrait être atteint au moyen de l'instrument peu flexible que sont les restrictions de propriété étrangère alors que nous pourrions utiliser une réglementation beaucoup plus subtile et moins dérangeante.

º  +-(1655)  

[Français]

    Nos recommandations s'appliquent à tous les distributeurs de signaux de télécommunications, peu importe le type. Un signal est un signal, et les mêmes règles devraient s'appliquer à tous les distributeurs.

    Je suis heureux que vous m'ayez demandé de comparaître devant vous. J'espère qu'un aperçu de la perspective de la concurrence peut contribuer utilement aux délibérations sur cette importante question. Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur von Finckenstein.

    Monsieur Fitzpatrick.

+-

    M. Brian Fitzpatrick: Merci, monsieur.

    Quelquefois, j'ai l'impression que notre pays a un penchant pour les monopoles. Nous avons tendance à penser que c'est un meilleur système et qu'il n'y a rien de sinistre et de mauvais à avoir un marché sain, concurrentiel et des choses comme la propriété étrangère, etc.

    Je n'appartiens pas à cette école. J'ai reçu du R.-U. des preuves assez convaincantes qui confirment mon point de vue, à savoir qu'un contexte sain, concurrentiel et libéralisé constitue la meilleure façon d'administrer des programmes de qualité au public. Je n'ai entendu aucun argument convaincant dans l'autre sens.

    J'ai lu votre rapport et examiné vos conclusions qui confirment ce que j'ai pu apprendre de l'expérience du R.-U. En gros, il n'y a rien dans votre rapport avec quoi je suis en désaccord ou que je souhaite critiquer ou sur quoi je voudrais vous contre-interroger. Je crois que c'est parfait. Voilà pour ma question, mon commentaire.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Je suis très heureux de vous l'entendre dire.

+-

    Le président: Et votre question suivante?... C'est tout?

+-

    M. Brian Fitzpatrick: C'est tout. Je n'ai rien à a redire. Je trouve que ce qu'il dit est parfait.

+-

    Le président: Bon. Monsieur Bagnell.

+-

    M. Larry Bagnell: Je suis heureux de vous revoir, Konrad. Cela fait une vingtaine d'années que nous travaillons ensemble.

    Si nous autorisons les investissements étrangers, puisque vous avez l'air de dire que cela ne poserait pas de problème, et que de grosses entreprises américaines prenaient le contrôle de nos propres entreprises et que de gros intervenants venaient créer un véritable monopole, j'ai l'impression que les petits intervenants ne réussiraient pas à agir assez vite pour assurer leur survie dans notre régime de concurrence.

    Quand nous avons tenu des audiences sur la concurrence, vous vous souviendrez que je n'ai pas arrêté de demander s'il y avait assez d'argent dans le système pour faire les choses rapidement et efficacement. Plus précisément, nous avons une nouvelle petite compagnie aérienne qui a eu des difficultés avec Air Canada, et qui, me semble-t-il, est trop exaspérée pour suivre toute la procédure après avoir vu le cas de WestJet, dont les représentants ne se présentent même pas à leurs propres audiences, je crois, parce qu'ils estiment que le processus est trop lent ou qu'il n'y a pas assez de ressources dans le système.

    J'aimerais avoir vos commentaires à ce sujet.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Merci.

    Vous parlez du régime de concurrence en général, et notamment de notre aptitude à faire face à des abus de position dominante. C'est manifestement un gros problème.

    La loi a été modifiée grâce à votre comité l'an dernier, et elle comporte maintenant de nouvelles dispositions concernant les ordonnances de cesser et de s'abstenir qui peuvent être émises par le tribunal pour mettre fin à un certain comportement pendant que le tribunal tient ses audiences pour déterminer si le comportement est effectivement abusif ou non. Nous espérons donc que cela apportera un certain soulagement. Ce pouvoir n'existait pas lorsque l'affaire WestJet a débuté.

    L'affaire WestJet—et à propos, ils sont présents aux audiences—a été la première, et elle traîne énormément en longueur pour toutes sortes de raisons, comme les attentats du 11 septembre, le fait que le juge président a eu le cancer, etc. Il y a eu des tas de bouleversements. Espérons que les autres affaires se régleront plus rapidement.

    Toutefois, vous soulignez un point tout à fait judicieux. En effet, l'administration d'un régime de concurrence coûte cher et il faut des ressources. Or, nous manquons de ressources. Je l'ai déjà dit au comité, et c'est toujours le cas. Si l'on n'a pas suffisamment de ressources, on ne peut pas régler correctement les affaires. Nous devons établir des priorités, ce qui fait que les affaires secondaires peuvent être reléguées au second plan. J'espère que ce n'est pas le cas et j'espère que ce n'est pas le cas pour la compagnie aérienne de votre circonscription, mais c'est la réalité des choses. En tant qu'administrateur de la loi, je fais de mon mieux dans les limites du budget dont je dispose.

+-

    M. Larry Bagnell: Je n'ai nullement renoncé à ma croisade pour faire en sorte que le système s'applique aux toutes petites entreprises.

    Dans votre texte, à la page 9, vous énumérez trois objectifs. Je ne suis pas d'accord avec le mot «uniquement» dans votre objectif a). Vous avez l'air de dire que seul l'objectif a) peut être suivi, c'est-à-dire qu'il s'agit uniquement de la réalisation des objectifs culturels de la loi, ce qui ne laisse aucune place aux deux autres objectifs.

»  +-(1700)  

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Non, ceci est pris hors contexte. Ce que j'ai essayé de dire dans cette citation, c'est que quand j'ai comparu devant le Comité du patrimoine—et évidemment nous parlions de la Loi sur la radiodiffusion—j'ai formulé plusieurs recommandations. La principale était que les règlements du CRTC devaient viser la réalisation des objectifs culturels fondamentaux de la loi, c'est-à-dire que les objectifs autres que les objectifs culturels ne devaient pas entrer en considération pour le CRTC. Il n'a pas à se prononcer sur des questions économiques, il ne doit pas essayer de favoriser un concurrent par rapport à un autre ou de déterminer si quelqu'un va réussir ou non. C'est l'entrepreneur qui risque son argent qui doit prendre ces décisions.

    Le CRTC doit établir un cadre. Ce cadre est là pour consolider le système de radiodiffusion au Canada et favoriser l'accroissement et l'épanouissement de la culture canadienne.

    Ce sont les objectifs culturels fondamentaux et c'est là-dessus que le conseil doit se concentrer. Il n'a pas à se prononcer sur des questions économiques.

+-

    M. Larry Bagnell: Vous parlez simplement du contenu?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Nous parlons de la Loi sur la radiodiffusion. Fondamentalement, cette loi vise à promouvoir la culture canadienne, et c'est très bien. Tous les règlements doivent être rédigés en fonction de cet objectif.

    Les responsables de la réglementation n'ont pas à se demander si quelque chose va être plus rentable ou a plus de chance qu'autre chose de réussir. Leur rôle est d'établir un cadre qui assure la promotion des objectifs culturels. C'est à l'entrepreneur de déterminer comment il se structure et comment il s'adapte pour profiter du système de façon à rentabiliser au maximum son investissement, mais le cadre de réglementation l'oblige à promouvoir des objectifs culturels.

+-

    M. Larry Bagnell: Quand vous dites qu'il faudrait donner aux diffuseurs par câble et aux entreprises de télécommunications le même accès aux investissements étrangers—et je suis sûr qu'il y a des gens dans cette salle qui s'en réjouissent—je pense que la principale objection du Comité du patrimoine, c'est qu'on ne va peut-être pas pouvoir protéger le contenu et qu'il y a donc des inquiétudes à se faire pour la radiodiffusion.

    Pensez-vous qu'il soit possible de protéger le contenu dans ces deux contextes par le biais du CRTC ou par un autre biais?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Disons que quand je vous parle de télécommunications, je vous parle de signaux transportés sur un canal. Peu importe que ce soit un signal téléphonique, un signal d'Internet ou un signal de radiodiffusion. Vous avez un canal sur lequel vous envoyez des signaux électroniques. Les règles devraient être les mêmes dans tous ces cas.

    Ces entreprises empiètent déjà les unes sur les autres. Les compagnies de câble vous donnent accès à Internet. Il y a la téléphonie par câble dans certaines régions. Vous pouvez accéder à Internet au moyen du téléphone et dans certaines régions on fait des expériences d'envoi de signaux de radiodiffusion par les fils téléphoniques, etc. Dans la mesure où tous ces gens-là sont dans le domaine du transport, les règles sont les mêmes.

    Quand on parle de contenu, c'est différent. Dans ce cas-là, on tient à s'assurer que le contenu canadien et la culture canadienne vont être protégés. Quand les représentants de la câblodistribution ont comparu au Comité du patrimoine, Janet Yale, la présidente, accompagnée des trois présidents de son association, a dit qu'ils étaient prêts à se séparer sur le plan structurel. Ils ont dit: «Si vous assouplissez les règles, assurez-vous que vous nous appliquerez les mêmes règles, dans la mesure où nous sommes des transporteurs de signaux, qu'aux compagnies de téléphone, parce que nous avons le même type d'activité».

    Donc, j'imagine que cela veut dire que la compagnie de câblodistribution va se diviser en deux. Prenez par exemple Rogers: Vous aurez d'un côté Rogers et de l'autre Rogers transport. Rogers transport sera soumise aux mêmes règles que n'importe quelle compagnie de téléphone. En ce qui concerne le contenu de Rogers, ce sont les règles sur la radiodiffusion qui s'appliqueront. Naturellement, la compagnie de transport ne pourra pas être propriétaire de canaux, ne pourra pas faire de radiodiffusion ni s'occuper de contenu. Elle se contentera de transporter un signal électronique.

    Si l'on établit le cadre de cette manière, ce sera à ces intervenants de voir s'ils veulent profiter de cette possibilité de se séparer ou s'ils jugent qu'il y a suffisamment de synergie pour garder les deux entités sous un même toit en payant le prix d'une restriction à la propriété étrangère. C'est à eux de décider.

    Je pense que le cadre devrait être suffisamment souple pour leur donner la possibilité de faire leur choix. À mon avis, c'est ce qu'ils feront tous, mais cela reste à voir. On aura des règles du jeu égales pour tous les gens qui ont la même activité, c'est-à-dire le transport de signaux.

»  +-(1705)  

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Bagnell.

    Monsieur Crête.

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Merci beaucoup, monsieur le président. Lorsque le président de Bell Canada, M. Sabia, est venu nous rencontrer, il nous a recommandé d'être prudents au sujet de la libéralisation. Des négociations internationales vont avoir lieu à ce sujet et, à son avis, éliminer d'office la question des restrictions à la propriété étrangère serait un peu comme mettre une carte sur la table.

    Votre hypothèse selon laquelle les restrictions à la propriété étrangère disparaîtraient vous permet-elle de nous assurer que les règles sur le contenu seraient protégées, ou doit-on plutôt s'attendre à ce que des compagnies intentent des poursuites sous prétexte que cela restreint la libre concurrence? Si tel était le cas, non seulement les restrictions à la propriété étrangère mais aussi la protection à l'égard du contenu disparaîtraient.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: D'abord, je tiens à préciser que les négociations internationales sur le contenu ne sont pas mon domaine.

+-

    M. Paul Crête: Non, mais certaines d'entre elles portent sur un ensemble de situations. À l'heure actuelle, un débat important a lieu dans le but de déterminer si on doit obtenir une exception culturelle. La culture pourrait ne pas être touchée par les négociations, tout comme elle pourrait l'être; nous sommes donc dans une position d'attente où il pourrait être dangereux de mettre toutes nos cartes sur la table immédiatement.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Mais ce que je suggère n'a rien à voir avec le contenu. Je parle seulement du transport des signaux.

+-

    M. Paul Crête: Mais les gens du Comité du patrimoine et ceux qui sont venus témoigner nous ont dit qu'on ne pouvait pas séparer ces domaines. À leur avis, si on laisse aux compagnies qui oeuvrent dans les deux secteurs l'occasion de pénétrer dans ce domaine par l'entremise du signal, elles vont nécessairement--particulièrement dans le cas des câblodistributeurs--finir par essayer d'agir sur le contenu.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Il existe à l'heure actuelle, dans le cadre de l'OMC, un accord sur le transport des signaux de télécommunications. J'étais membre de la délégation canadienne qui a négocié cet accord et je peux vous dire que ce dernier ne touche pas le contenu ou la radiodiffusion. Il ne porte que sur les télécommunications. Je n'ai entendu parler d'aucun mouvement qui serait favorable à l'inclusion de la radiodiffusion et du contenu; en fait, il y a beaucoup de pays autres que le Canada qui craignent d'ouvrir à nouveau ce thème. En outre, je crois que la différence entre le transport des signaux et le contenu est claire et bien comprise.

    Naturellement, il faut s'assurer que nos négociations sur la scène internationale ne confondent pas ces deux idées. Mais je ne vois pas comment ce que je suggère ici pourrait être dangereux dans le contexte de nos négociations internationales.

+-

    M. Paul Crête: Est-ce vous avez fait des projections concernant ce qui résultera de l'abolition des restrictions sur la propriété étrangère et sinon, quelle est votre opinion à ce sujet? Supposons que nous retenions votre proposition et que nous abolissions les restrictions. Dans 10 ou 15 ans, croyez-vous qu'il y aura au Canada une concurrence réelle dans ces marchés, ou qu'il y aura plutôt un géant, un peu comme Bell mais ouvert à l'investissement étranger? Avez-vous une idée du modèle qui va ressortir de cela? Bien sûr, il pourrait ne pas y avoir de changement; les forces pourraient demeurer égales. Quelle est votre hypothèse?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Il très difficile de prédire comment les marchés vont évoluer. La seule chose que nous puissions faire est d'élaborer un cadre de réglementation qui permet la concurrence. À ce chapitre, la Loi sur la concurrence voit à ce qu'il n'y ait pas de conduite anticoncurrentielle.

    Il est très difficile de prédire l'évolution des choses, spécialement dans un petit marché comme le nôtre. Notre population n'est pas la même que celle de nos voisins du Sud. Généralement, nous avons plus de concentration au Canada qu'aux États-Unis parce que le marché est plus petit.

    J'espère néanmoins que votre hypothèse ne se concrétisera pas et qu'un géant ne dominera pas toute la scène. Y aura-t-il une dualité ou une triple...? Je ne le sais pas. Je n'ai pas de boule de cristal.

»  +-(1710)  

+-

    M. Paul Crête: Mais compte tenu de la présence de nos voisins américains, pensez-vous que notre situation est à cet égard différente de celle des pays d'Europe ou d'ailleurs dans le monde? La levée des restrictions, dans un tel contexte, aurait-elle pour nous des conséquences plus sérieuses--on parle ici de l'arrivée massive de capitaux américains--que ce qu'on pourrait observer ailleurs?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: C'est une possibilité, mais il est également possible qu'on ait accès à une plus grande masse de capital, d'investisseurs et ainsi de suite. Il n'est pas nécessaire qu'une compagnie canadienne soit amalgamée à un géant américain. Il se peut que la compagnie canadienne trouve sa niche, se spécialise et qu'en plus d'occuper une part du marché canadien, elle entre sur le marché américain et s'y spécialise. Beaucoup de compagnies canadiennes ont réussi.

    On peut voir l'intégration nord-américaine comme un danger ou comme une occasion d'affaires, selon qu'on est optimiste ou pessimiste. Ici, dans le domaine des télécommunications tout particulièrement, il semble que beaucoup de compagnies aient profité de l'occasion qui s'offrait.

+-

    M. Paul Crête: Croyez-vous vraiment, si on parle du contenu des médias, qu'il n'y aura aucun impact sur l'industrie de la créativité et que, à moyen terme, cette dernière pourra continuer à créer et à être concurrentielle, même si, en matière de télécommunications, le propriétaire est américain?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Ici, nous parlons vraiment du domaine de la radiodiffusion. Les dangers que je prévois dans ce domaine sont nombreux, mais ils sont d'ordre technologique et, avec l'évolution d'Internet, cela va progresser. Que ce soit l'an prochain ou dans cinq ans, il sera de plus en plus facile d'obtenir simultanément et immédiatement toutes les émissions sur Internet. Tous les règlements de radiodiffusion pourront dès lors être contournés. C'est là que réside le vrai danger.

    Que fera-t-on? Pourra-t-on réglementer Internet? Devrait-on promouvoir la créativité et les émissions canadiennes? Devrait-on créer des programmes de soutien? Il s'agit là de vrais dangers, à mon avis, contrairement à la levée des restrictions sur la propriété étrangère dont on parle ici.

+-

    M. Paul Crête: Merci.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur McTeague.

+-

    M. Dan McTeague: Monsieur le président, encore une fois, merci.

    Monsieur le commissaire Jorré, merci d'être venu nous voir.

    Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion d'entendre ma dernière question à M. Dalfen sur le CRTC au sujet des recours disponibles à ceux qui considèrent une décision du CRTC comme un problème. Évidemment, le CRTC a énuméré plusieurs recours, mais je ne l'ai pas entendu faire mention de la Loi sur la concurrence ou du Bureau de la concurrence—à juste titre. Je pense que vous avez énoncé ici très clairement les domaines qui ne sont pas l'objet de réglementation mais qui sont assujettis à la Loi sur la concurrence.

    J'ai été frappé au fil des ans, monsieur le commissaire, parce que j'ai vu plusieurs secteurs où il y avait évidemment lieu de se préoccuper de l'efficacité de nos marchés, que les marchés sont un bien meilleur moyen ou mécanisme ou véhicule de bonne politique publique.

    En passant, ce que vous avez dit au sujet des ressources m'inquiète. Je sais que notre comité a recommandé à notre gouvernement d'accorder plus de ressources à votre ministère. Je ne suis pas nécessairement convaincu qu'il faut affecter ces ressources uniquement aux fusions à une époque où celles-ci sont de moins en moins nombreuses.

    Je veux aborder la question avec le président afin de m'assurer que nos recommandations de l'an dernier ont eu pour effet de nous garantir un arbitre efficace et vigoureux.

    Je m'étonne cependant de vos propos ici. Vous semblez inviter le CRTC à se pencher sur des questions qui, de mon avis—et je pense de l'avis de nombreuses personnes qui ont examiné ce dossier—devraient relever de la Loi sur la concurrence. C'est certainement le cas aux États-Unis, où si j'ai des problèmes avec l'AOL Time Warner, je peux présenter l'affaire au département de la Justice, division antitrust ou à la FCC ou aux tribunaux.

    Dans notre tentative de mettre en place des solutions axées sur le marché, y a-t-il des secteurs où, à votre avis, la réglementation, nonobstant la proposition sur les investissements étrangers, devient si lourde que vous ne parviendrez pas à atteindre l'objectif d'attirer des idées financières, comme vous le dites, une influence financière et des sources de technologie à moins de les exclure de cette réglementation?

»  +-(1715)  

+-

    M. Konrad von Finckenstein: C'est plutôt difficile. Ce que vous me demandez en réalité, c'est de faire des commentaires sur le processus réglementaire d'autres organismes. Je suis persuadé que M. Dalfen a répondu à votre question. Il y a eu des plaintes au sujet du CRTC, au sujet de sa lenteur et de son inefficacité, justifiées ou pas. Je pense qu'il vous faut parler à ceux qui ont fait ces allégations et aux représentants du CRTC. Je ne pense pas qu'il me revienne de faire des commentaires au sujet de l'efficacité des procédures du CRTC.

+-

    M. Dan McTeague: Monsieur le commissaire, il y a deux ou trois ans, j'ai écrit au premier ministre avec copie à tous et chacun, faisant état de mes préoccupations au sujet de la vague de convergence dont nous étions témoins à l'été de 2000. À l'époque, j'avais proposé la création d'un comité hybride qui, après consultation des membres du cabinet, se serait vu confier l'examen des effets de la convergence qui comportait évidemment plusieurs préoccupations sur le plan de la concurrence.

    Manifestement, dans les secteurs de la radiotélédiffusion et du patrimoine, on se préoccupait de questions de contenu et d'opinions éditoriales objectives, préoccupations tout à fait justifiées dans certains cas. Mais j'étais moi aussi préoccupé par la qualité de la concurrence et évidemment par la question du prix.

    Dans ce genre de circonstances, si nous recommandions ce que vous conseillez, c'est-à-dire plus d'investissements étrangers, nous faudrait-il également examiner le climat réglementaire pour déterminer qui fait quoi selon votre recommandation? Est-ce un conseil ou une direction que devrait prendre le comité, à votre avis?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Monsieur McTeague, vous me placez dans une situation difficile... je suis ici comme champion de la concurrence. Vous me demandez si le régime réglementaire actuel dans le domaine de la concurrence est le meilleur dans le secteur des communications—si le partage de certaines responsabilités entre Industrie Canada, le CRTC et le Bureau de la concurrence représente la meilleure formule. Probablement pas. Il y a sans doute de meilleures façons ou des façons plus efficientes de s'y prendre, mais je ne pense pas qu'il me revienne de préconiser une réaffectation des responsabilités.

+-

    M. Dan McTeague: Monsieur le commissaire, peut-être pouvez-vous nous aider. Une façon plus simple d'aborder la question c'est qu'évidemment il y a des exemples partout au monde d'une augmentation ou d'une diminution de la propriété étrangère. L'Australie en est un exemple, la Grande-Bretagne un autre.

    Peut-être pourriez-vous nous donner des exemples du niveau de responsabilité des autorités pertinentes dans le domaine des télécommunications? Est-ce que leurs responsabilités sont plus grandes depuis la déréglementation? Maintenant que les investissements étrangers se sont implantés dans ces pays, est-ce que l'intervention ou le contrôle des autorités responsables de la concurrence a augmenté, se maintient ou a diminué?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: De façon générale, tous les pays qui ont libéralisé les communications et permis à un pourcentage plus élevé de propriétés étrangères connaissent plus de concurrence dans leur marché. Cette concurrence accrue a entraîné de meilleurs prix, une plus grande qualité et plus d'innovation dans ces secteurs. Certains pays ont choisi de réunir en un seul organisme les responsables de la concurrence et de la réglementation confiant au même organisme la responsabilité de la concurrence ainsi que de la promotion... D'autres pays ont divisé les deux.

    L'expérience générale c'est que lorsque vous réunissez les deux ensemble, après un certain temps, les responsables de la réglementation sont co-optés par les réglementés et les questions de concurrence cèdent le pas aux préoccupations propres à l'industrie.

    Nous croyons fermement—conviction partagée, par exemple, par les Américains et certains Européens—qu'il faut maintenir les deux séparément. Il faut un organisme dont l'objectif est de promouvoir la concurrence et un autre chargé de réglementer l'industrie, d'assurer l'accès, etc., parce qu'il faut des points de vue différents dans les deux cas. Si vous réglementez toujours l'industrie que vous consultez à tous les jours, après un certain temps, vous finissez par voir le point de vue de cette industrie. On ne peut pas faire cela. C'est très difficile même avec les meilleures intentions du monde de demeurer objectif et en même temps de reconnaître les intérêts du consommateur, de l'utilisateur et de ceux qui veulent se joindre à cette industrie.

»  +-(1720)  

+-

    M. Dan McTeague: Une dernière question, monsieur le commissaire. L'an dernier et depuis quelques années, ce comité a joué un rôle important dans la négociation d'ententes de coopération internationale avec plusieurs autres pays. Croyez-vous que cela va renforcer la capacité de votre bureau de déceler, si cela devient une préoccupation, les investissements étrangers qui pourraient avoir une composante internationale? Est-ce que cela vous aide à mieux faire votre travail? Y a-t-il lieu de se préoccuper de l'application vigoureuse et efficace de la loi?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Je pense qu'en Amérique du Nord, surtout grâce à l'intégration économique, la même question se présente des deux côtés de la frontière, ce qui nécessite la coopération entre les organismes. Encore la semaine dernière, par exemple, nous et la Commission fédérale du commerce des États-Unis, de concert avec les Mexicains, avons fermé une entreprise qui vendait de faux médicaments pour le cancer à des personnes désespérées prêtes à faire n'importe quoi pour obtenir la guérison. Ce produit n'avait aucune valeur. On prétendait que ce produit était disponible au Mexique et on le vendait aux Canadiens et aux Américains. Grâce à notre collaboration, nous avons réussi à fermer l'entreprise. Évidemment, c'est un cas extrême.

    Il y a aussi d'autres cas où il s'agit d'une conduite anti-concurrentielle, ou encore de cas où il y a fusion, mais des renseignements différents sont donnés aux organismes des deux côtés de la frontière. Notre capacité de travailler ensemble est absolument essentielle pour faire face à une économie qui ne reconnaît aucune frontière et où le gros des échanges commerciaux se fait du nord au sud et non pas de l'est à l'ouest.

    Les pouvoirs qu'on nous a conférés l'an dernier par des amendements à la Loi sur la concurrence sont très utiles. Nous avons maintenant des ententes de coopération avec le Mexique, les États-Unis, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Nous sommes en train de finaliser une entente avec le Royaume Uni. Nous avons une entente avec l'Union européenne. Nous nous en servons beaucoup et il le faut pour nous assurer que les mêmes règles s'appliquent partout et que les entreprises ne peuvent pas jouer un pays contre l'autre.

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup.

    Monsieur Fitzpatrick.

+-

    M. Brian Fitzpatrick: Il y a un problème de perception, monsieur. On semble présumer automatiquement que lorsqu'il y a une participation étrangère dans une entreprise, celle-ci perd son identité nationale. Je ne partage pas ce point de vue. Je songe à des sociétés comme Sony, Toyota, Nokia et Seimens qui ne sont pas des sociétés américaines. Lorsque les gens pensent à ces sociétés, ils les associent avec leur pays d'origine. Les Japonais considèrent Toyota comme une entreprise pleinement japonaise bien qu'elle soit présente sur de nombreux marchés dans le monde. C'est la même chose pour CNR, Magna International et Nortel Networks qui sont considérées comme des entreprises canadiennes. Ces entreprises ont pris de l'ampleur. Toutes ces formules magiques voulant que le degré de propriété étrangère ne puisse pas être supérieur à 25 p. 100 ou 48 p. 100 ne leur importent pas beaucoup.

    Ce n'est pas là-dessus que je voulais vous poser une question, mais vous pourrez me dire ce que vous en pensez une fois que j'aurai fini de poser ma question.

    On nous a parlé du cas de petits joueurs sur le marché qui cherchaient à obtenir accès au réseau existant. Je ne connais pas toute la terminologie qu'utilise l'industrie, mais j'ai eu l'impression qu'ils réclamaient un prix de gros pour accéder à ces systèmes, prix qu'on ne leur offrait pas. En fait, on ne leur donnait même pas un prix de détail. On leur faisait payer un prix exorbitant pour avoir accès à ces systèmes. Il leur était donc très difficile de vraiment faire concurrence aux gros distributeurs existants et de survivre. J'aimerais connaître votre avis sur les témoignages que nous avons entendus à ce sujet. Les petits joueurs dans cette industrie nous ont dit qu'il s'agissait d'un obstacle majeur pour eux qui compromettait leur compétitivité et leur santé financière.

»  +-(1725)  

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Je suis tout à fait d'accord avec vous sur la question de la propriété étrangère. Je me suis souvent prononcé devant votre comité et d'autres comités contre les restrictions sur la propriété étrangère parce que je ne vois vraiment pas qui on cherche à protéger de cette façon. Ainsi, pourquoi pose-t-on des restrictions à la propriété étrangère dans les cas des sociétés aériennes? À mon avis, si l'on voulait réglementer... qu'Air Canada ou WestJet appartiennent à des Canadiens ou à des étrangers n'a rien à voir avec les marchés qu'elles desservent. Elles desserviront les marchés qui sont rentables pour elles si ces marchés ne sont pas rentables, elles auront recours à des avions plus petits et réduiront le nombre de vols. La réglementation doit normalement viser un objectif précis, mais je ne sais pas à quoi servent les restrictions sur la propriété étrangère.

    Vous soulevez la question de l'accès qui est liée à celle du type de concurrence qu'on souhaite permettre au Canada. Nous avons présenté nos arguments au CRTC au sujet du plafonnement des prix, ce dont il est vraiment question. Nous avons clairement dit que la concurrence fondée sur la mise à disposition d'installations pour utiliser la terminologie en usage dans le domaine, ce qui reviendrait à obliger chaque distributeur à avoir ses propres installations, n'est pas possible dans le cas du Canada. Dans un pays aussi vaste et aussi peu peuplé, il est impossible d'avoir des réseaux concurrents. Il faut donc que les distributeurs puissent avoir accès aux réseaux des autres. Le plus souvent, il faut se servir des installations des autres. On devrait alors avoir accès à un prix de gros et non pas à un prix de détail ou peut-être même un prix à rabais parce que le transporteur vend son service et n'a pas à en faire la promotion et à assumer des coûts de commercialisation.

    Le mieux qu'on puisse faire c'est d'avoir un système mixte comportant de la concurrence fondée sur la mise à disposition d'installations et la revente de services. Il ne sera jamais possible d'avoir un système ne reposant que sur la concurrence fondée sur la mise à disposition d'installations en raison des énormes investissements que cela exigerait des nouveaux distributeurs. Le CRTC n'a jusqu'ici qu'accepté une partie de nos arguments.

    Dans la mesure où les nouveaux distributeurs doivent utiliser les installations des distributeurs existants, ils veulent que ces services leur soient offerts à un prix de gros et qu'on leur accorde un rabais.

+-

    Le président: Monsieur Bagnell.

+-

    M. Larry Bagnell: La difficulté qui se pose, je suppose, c'est que dans le secteur des télécommunications le problème de la propriété étrangère ne semble pas beaucoup se poser. Certains radiodiffuseurs, y compris les câblodistributeurs, pensent qu'ils devraient cependant être traités de la même façon. Il y a évidemment le problème du contenu qui se pose encore pendant un certain temps.

    Nous parlions de cette question il y a un instant. Vous avez parlé des installations de Rogers et du contenu de Rogers et de la séparation possible des deux entreprises. Dites-vous qu'il ne devrait pas y avoir de propriété croisée ou de propriété commune dans le cas de ces deux entreprises?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Je dis simplement qu'elles peuvent profiter de la situation qui peut leur être avantageuse. Si vous avez un câblodistributeur qui voudrait scinder son entreprise en deux dont l'une ne s'occuperait que du contenu et des canaux spécialisés et l'autre de la transmission du contenu et du signal de base ainsi que de l'accès à Internet, ce câblodistributeur devrait ensuite pouvoir décider s'il va faire une émission publique sur le marché américain ou le marché britannique ou de décider quel degré de propriété étrangère il est prêt à accepter. Ce câblodistributeur devrait être en mesure de pouvoir décider ce qui est le mieux pour lui.

    À notre avis, cela ne compromettrait en rien la réglementation sur le contenu qui est actuellement en place et qui vise à favoriser l'épanouissement de la culture canadienne.

    Comme ces entreprises distribuent des signaux électroniques, elles devraient être assujetties aux mêmes règles que celles qui s'appliquent aux entreprises de téléphone.

    Il faudrait donc pouvoir faire une offre et les entreprises décideront si elles veulent s'en prévaloir.

+-

    M. Larry Bagnell: Ne pensez-vous pas que ceux qui transmettent les signaux et qui ont un degré de propriété américaine semblable peuvent exercer une influence sur le contenu des émissions qu'ils distribuent?

»  +-(1730)  

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Pourquoi serait-ce le cas? Si quelqu'un transporte des signaux, il veut transporter le plus de signaux possible pour faire le plus d'argent possible. C'est tout. Cette personne ne se préoccupera pas du contenu de ces signaux, mais simplement du nombre de signaux qu'elle transmet.

+-

    M. Larry Bagnell: Je me permets de me faire l'avocat du diable. Vous vous faites le champion de la concurrence. On ne peut pas ajouter indéfiniment des joueurs sur ce marché, ce qui pourrait réduire la concurrence... Compte tenu de cela et du fait que vous, Dan et moi avons convenu plus tôt que ce système n'est pas aussi rapide qu'il pourrait l'être et qu'il est plus difficile aux petites entreprises d'y avoir accès et que nous n'avons même pas encore approuvé les frais d'adhésion au système, n'est-il pas possible que l'accroissement de la propriété étrangère aille à l'encontre de l'objectif visé qui est d'accroître la concurrence?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Comme vous l'avez fait remarquer, notre rôle c'est de veiller à ce qu'on ne limite pas la concurrence. Et c'est pourquoi la loi nous permet d'interdire les fusions. Nous pouvons nous y opposer si elles visent à réduire la concurrence.

    Dans quelle mesure est-ce possible? Je suppose que tout est possible. Je suis convaincu que les gens sont en affaires parce qu'ils veulent faire de l'argent et non parce qu'ils veulent avoir des démêlés avec les responsables de la réglementation. Toute entreprise voulant se lancer sur le marché des télécommunications au Canada se structurera et fonctionnera de façon à maximiser ses profits et non de façon à ce que le CRTC ou nous-mêmes la traînions devant les tribunaux.

+-

    M. Larry Bagnell: De manière à ne pas avoir à payer de dommages. Mais ce n'est pas grave.

+-

    Le président: Très bien.

    Monsieur Marcil, avez-vous des questions à poser?

[Français]

+-

    M. Serge Marcil: Oui. Excusez-moi d'avoir quitté tout à l'heure. C'est qu'il y avait au Comité des transports un témoin que je voulais interviewer.

    Ma question est simple. Vous me donnez l'impression, et c'est peut-être un fait, que vous ne vous enfargez pas dans les fleurs du tapis lorsqu'on discute de la concurrence. Au Bureau de la concurrence, vous parlez bien évidemment de la concurrence. Lorsqu'on parle du contenu et de la souveraineté culturelle, vous n'avez pas à en tenir compte. Lorsque le CRTC s'est présenté ici tout à l'heure, il n'a pas voulu donner d'opinion sur la déréglementation. La Loi sur la concurrence existe pour favoriser la concurrence.

    On parlait tout à l'heure des télécommunications, qui semblent être tellement faciles à régler. Mais lorsqu'on parle de contenu, cela n'a pas d'importance pour les mêmes entreprises; le marché pourrait faire en sorte que les valeurs canadiennes soient respectées, etc. Pourrait-on établir un cadre pour le faire?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Je crois que vous avez mal compris ce que j'ai dit. À la page 3, j'ai précisé que certaines valeurs politiques et publiques avaient priorité sur la concurrence. C'est clair pour moi. En cas de conflit, ces valeurs auront priorité. Je dis simplement que là où il n'y a pas de conflit entre les valeurs culturelles et celles de la concurrence, on devrait libérer les valeurs de la concurrence afin qu'on puisse avoir un marché concurrentiel. Je reconnais qu'il y a des politiques publiques qui sont très importantes, qui ont priorité et qui doivent être préservées.

    En répondant à la question de M. Crête, j'ai dit que je ne voulais pas faire quoi que ce soit pour diminuer la protection et l'encouragement de la culture canadienne. Si on abolit la propriété étrangère pour le transport des signaux, je ne pense pas que cela aura un effet sur l'augmentation de la protection de la culture canadienne.

+-

    M. Serge Marcil: Je saisis bien ce que vous dites. En fait, il y aurait moyen de déréglementer et de permettre à l'entreprise étrangère de devenir propriétaire d'entreprises canadiennes ou de développer des entreprises au Canada. Selon votre expérience, il y aurait aussi moyen que dans le cadre de la déréglementation, ou puisse ouvrir nos marchés parce qu'on vit dans une économie nord-américaine. On devrait être totalement ouverts à tous les points de vue, mais il y a toujours un élément culturel. Donc, il y aurait moyen d'établir un cadre qui comporterait certaines exigences, peu importe qui deviendrait propriétaire d'une entreprise au Canada.

»  +-(1735)  

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Nous sommes totalement d'accord.

[Traduction]

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Monsieur McTeague.

+-

    M. Dan McTeague: Monsieur le commissaire, le témoin qui a comparu avant vous, le président du CRTC, nous a tous fait bien rire en comparant les personnes qui participent à cette approche hybride qui permet aux nouveaux arrivants d'utiliser les installations des titulaires à une personne qui loue un véhicule et ne le lave jamais. Bien entendu, tout comme le conseil, il considère que la forme de concurrence la plus durable est ce que l'on appelle la concurrence fondée sur la mise à disposition d'installations. Je crois que vous avez abordé cet aspect.

    C'est une théorie très intéressante, mais je ne suis pas sûr qu'elle corresponde aux forces du marché. Je reconnais les contraintes qui vous sont imposées en tant que commissaire à la concurrence, mais existe-t-il une théorie particulière—axée sur les forces du marché, je dirais—qui vous amène à conclure que ce n'est pas une si mauvaise chose et que vous seriez prêt à construire deux ou dix installations complètement séparées? Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Non. Comme je l'ai mentionné, nous avons indiqué que le système qui donne le meilleur résultat est un système hybride de concurrence fondée sur la mise à disposition d'installations et la mise en concurrence de revendeurs. En ce qui concerne l'analogie que vous avez faite à propos des voitures, de nombreuses entreprises font beaucoup d'argent en louant des voitures, donc vous pouvez faire beaucoup d'argent en louant des lignes. C'est pourquoi je considère qu'il ne s'agit pas d'une analogie vraiment appropriée.

    Je crois qu'il est trop optimiste, trop utopique de croire que nous pouvons avoir une concurrence strictement fondée sur la mise à disposition d'installations au Canada. Nous n'avons tout simplement pas une population et une densité suffisantes, et les distances sont grandes. Dans de petites régions, de toute évidence, comme au centre-ville de Toronto, on voudra avoir une concurrence fondée sur la mise à disposition d'installations, mais cela ne sera pas possible à Moose Jaw. C'est un facteur dont il faut se rendre compte. Donc, pour assurer une concurrence au niveau local, il faudra que cela se fasse par la mise en concurrence de revendeurs ou par un mélange de mise en concurrence de revendeurs et de concurrence fondée sur la mise à disposition d'installations.

+-

    M. Dan McTeague: Considérez-vous que la mise en concurrence de revendeurs est une solution efficace à long terme? De toute évidence, c'est ce que vous croyez. Vos remarques m'ont presque paru désobligeantes, mais je le dis avec tout le respect que je vous dois. Il semble que nous avons des gens très compétents qui essaient de joindre les deux bouts et qui font de leur mieux dans des circonstances très éprouvantes, très difficiles et très déroutantes. De toute évidence, le fait que votre position se démarque de celle du CRTC sur cette question témoigne aussi de cette confusion.

    Je ne suis pas sûr que le président voudrait que je présente un autre projet de loi votable devant le comité qui propose d'accorder des pouvoirs supplémentaires au Bureau de la concurrence, compte tenu de la façon dont il voit cette question. Pourriez-vous commenter l'analogie qui a été faite ici à savoir est-il vraiment nécessaire d'établir toute une série d'objectifs nobles à l'intention, comme M. Bagnell l'a indiqué, de marchés très petits et très limités tout en mettant tout en oeuvre pour assurer un milieu concurrentiel dont le comportement est en même temps exemplaire?

    Connaissez-vous des endroits dans le monde où ces systèmes hybrides se sont avérés très efficaces, comme ceux qui existent à l'heure actuelle au Canada, dans le cadre de régimes réglementaires semblables? 

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Pourriez-vous répéter la question, je vous prie? Je veux m'assurer de bien répondre à votre question.

+-

    M. Dan McTeague: Il me semble que le conseil demande une mesure utopique en matière de concurrence fondée sur la mise à disposition d'installations. Existe-t-il dans le monde des exemples de libéralisation où on continue d'avoir un mélange raisonnable de structures étatiques ou d'entreprises de télécommunications, où les installations essentielles arrivent à exercer une concurrence très efficace avec les revendeurs ou ceux en aval qui leur font concurrence au niveau du détail?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Il existe aux États-Unis de nombreux secteurs où il y a des entreprises florissantes qui s'occupent principalement de revente et qui ont très peu d'installations. Il existe d'autres secteurs où des entreprises exercent une concurrence à l'aide de leurs propres installations. Donc, il est clair que les deux modèles fonctionnent. Il existe différents modèles d'entreprises, et vous devez vous positionner de façon appropriée et choisir vos clients soigneusement.

    Je pense que le CRTC lui-même considère qu'à l'heure actuelle nous avons un système hybride. Lors de la dernière présentation que nous lui avons faite, en ce qui concerne le plafonnement des prix, nous avons indiqué qu'il était à notre avis illusoire d'avoir pour objectif général une concurrence fondée sur la mise à disposition d'installations et qu'il ne fallait pas même y penser. Il faut avoir un système mixte.

    L'étendue de ce système mixte peut varier d'une région à l'autre, mais il ne faut pas commencer par un objectif impossible à atteindre. Il est préférable de partir du principe que nous aurons toujours un système mixte et, par conséquent, comment pouvons-nous ouvrir ce système mixte afin de permettre non seulement aux nouveaux arrivants d'entrer sur ce marché mais aux titulaires de rentabiliser de façon raisonnable leurs investissements afin qu'ils ne construisent pas d'installations qu'ils doivent ensuite louer aux titulaires à des prix antiéconomiques?

»  +-(1740)  

+-

    Le président: Je vais céder la parole à M. Fitzpatrick, puis à M. Bagnell .

+-

    M. Brian Fitzpatrick: J'ai quelques observations à faire.

    Moi aussi je viens d'un coin isolé du monde. Certains croient que les régions isolées sont défavorisées par un marché concurrentiel. Personnellement, je considère qu'un secteur sain et extrêmement compétitif permet d'obtenir une technologie qui aide les régions éloignées, et en matière de contenu je songe évidemment à la communication par satellite grâce aux antennes paraboliques. Une personne qui vit dans les Territoires du Nord-Ouest peut avoir accès au même type de contenu qu'une personne qui vit à Toronto. Ce genre de technologie n'existait pas il y a vingt ou trente ans, et cela n'a rien à voir avec le CRTC ou quoi que ce soit; il s'agit ici d'innovation technologique. Je n'accepte pas l'argument voulant que cela représente un risque pour les régions éloignées. Je crois que si vous analysez la question, vous constaterez que leurs hypothèses sont fausses.

    Une autre hypothèse que je considère fausse, c'est que nous devons imposer des restrictions à la propriété pour éviter de compromettre notre identité nationale ou notre culture.

    Il n'y a pas longtemps, j'ai lu un article et vous connaissez peut-être mieux cette question que moi. Il y a trente ans, le secteur pharmaceutique allemand était le plus important au monde. Dans sa sagesse, le gouvernement allemand a décidé que cette industrie devrait être protégée de la concurrence et ainsi de suite parce qu'il s'agissait d'un trésor national. Aujourd'hui, je crois que la plus importante entreprise pharmaceutique allemande arrive au quinzième rang dans le monde. Le secteur pharmaceutique allemand n'est plus le chef de file à l'échelle mondiale. Les économies ouvertes, libéralisées ont pris la relève, surtout les États-Unis.

    Certains prétendent que si nous avions un marché ouvert ici, une grosse entreprise américaine pourrait mettre la main sur Bell Canada. Je vois la situation d'une autre façon. Je constate les problèmes que connaît le secteur américain et il me semble qu'il serait plus probable que ce serait Bell Canada qui irait aux États-Unis pour faire l'acquisition de certains éléments. Je ne vois pas du tout WorldCom venir ici pour racheter Bell Canada. SPC Systems est à peu près la seule entreprise là-bas qui est solide à l'heure actuelle.

    Je ne comprends pas toutes ces considérations sous-jacentes comme...

+-

    Le président: Y a-t-il une question derrière tout cela?

+-

    M. Brian Fitzpatrick: La question en fait est de savoir s'il existe des raisons stratégiques logiques et solides pour établir ces restrictions à la propriété étrangère.

+-

    M. Gaston Jorré (sous-commissaire principal de la concurrence, Direction générale des fusionnements, Bureau de la concurrence, ministère de l'Industrie): En ce qui concerne les télécommunications, nous ne voyons pas la nécessité de telles restrictions. Par contre, dans le secteur de la radiodiffusion, il existe d'autres aspects que le gouvernement doit envisager différemment, et auxquels on peut donner suite. Mais nous convenons avec vous qu'en ce qui concerne les télécommunications, les gens devraient pouvoir investir et les entreprises devraient pouvoir décider de la meilleure façon de procéder.

+-

    M. Brian Fitzpatrick: Qu'en est-il du secteur de la câblodistribution?

+-

    M. Gaston Jorré: Le câble est une installation de transmission. Et nous avons indiqué qu'il s'agisse de câble, de téléphone, d'Internet, toutes les installations de transmission devraient être traitées de la même façon, ce qui diffère du contenu qui est transmis.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Monsieur  Bagnell, vous avez la dernière et brève question.

+-

    M. Larry Bagnell: Monsieur von Finckenstein, vous conviendrez sans doute que les gens prennent des décisions qui ne concernent pas uniquement les résultats financiers—qu'il s'agisse de vous ou de moi ou de présidents d'entreprises; en établissant des règlements pour le gouvernement, nous prenons des décisions pour des raisons autres que des raisons strictement économiques.

»  -(1745)  

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Il est claire que nous sommes des bêtes économiques, mais pas exclusivement, effectivement.

+-

    M. Larry Bagnell: Mais si nous ne sommes pas exclusivement des bêtes économiques, vous venez de dire que si nous divisions Rogers en contenu et en contenant, le contenant serait régi exclusivement par des motifs économiques. On en contrôle une partie grâce aux règlements sur le contrôle du contenu, mais il existe une certaine marge de manoeuvre quant au moment où vous le présentez. Si nous parlons de propriété américaine, les Américains sont très patriotiques et ils pourraient avoir certaines choses... Le président d'une entreprise, qui après tout est humain, pourrait exercer une influence quant à l'heure à laquelle une émission est présentée, la façon de l'annoncer, le genre d'émissions qu'il veut diffuser, même si cela n'est pas économique. Cela n'est-il pas possible?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Évidemment, il est toujours possible que l'on prenne des décisions irrationnelles. Je pars du principe que les gens d'affaires prennent principalement des décisions rationnelles. Le président de l'entreprise dont vous parlez doit se justifier auprès des actionnaires. Il doit justifier pourquoi, s'il existe une façon plus rentable de procéder, pourquoi il choisit une façon moins rentable de procéder.

    Je suppose que nous sommes en train de parler de décisions économiques, prises de façon rationnelle afin d'obtenir des résultats financiers. C'est la raison pour laquelle on dirige une entreprise. Cependant, si vous dirigez une entreprise pour des raisons autres qu'économiques, à moins que vous en soyez propriétaire, tôt ou tard vous devrez rendre des comptes. Si vous en êtes le propriétaire, vous risquez alors de faire faillite. C'est votre choix. Mais dans l'ensemble, dans toutes nos prévisions, nous partons du principe qu'il s'agit d'entreprises qui fonctionnent selon des principes économiques et rationnels et dont l'objectif est de maximiser leurs bénéfices.

+-

    M. Larry Bagnell: Monsieur le président, pourrais-je terminer par une brève histoire à titre d'exemple?

    Il existait une entreprise à Fairbanks, en Alaska, dont j'ai rencontré le président un jour. Il possède d'importants intérêts miniers un peu partout aux États-Unis. Je lui ai demandé, «Pourquoi avez-vous installé votre siège social à Fairbanks en Alaska? Cela coûte plus cher, vous êtes loin du centre, c'est très antiéconomique». Il a répondu, «J'aime vivre ici».

    Il y a donc des décisions qui ne sont pas économiques

    Je vous remercie.

-

    Le président: Je vous remercie, monsieur Bagnell.

    Je tiens à remercier les témoins non seulement de leurs exposés, mais de leurs questions et des réponses qu'ils nous ont fournies aujourd'hui. Merci beaucoup d'avoir comparu devant nous. Je suis sûr que si nous avons besoin de conseils supplémentaires, nous communiquerons avec votre bureau. Merci beaucoup.

    Nous nous reverrons demain. La séance est levée.