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NRGO Rapport du Comité

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CHAPITRE 3 : LE RÔLE DU GOUVERNEMENT FÉDÉRAL

A. Recherche et développement

Le Comité reconnaît l’importance des utilisations des forêts qui ne sont pas liées aux produits forestiers. En même temps, il reconnaît que beaucoup de ces autres utilisations ne sont pas facilement quantifiables et débordent peut–être des limites de l’analyse scientifique. Néanmoins, le Comité est convaincu que les grandes pratiques d’aménagement forestier devraient être fondées sur de solides assises scientifiques. Des témoins de tous les milieux n’ont cessé de souligner qu’il fallait disposer de données scientifiques pour prendre toutes sortes de décisions, que ce soit au sujet des critères et indicateurs de développement durable, ou des normes de certification. Dans le passé, les décisions sur les pratiques d’aménagement ont été basées sur des recherches scientifiques indépendantes dont la valeur était reconnue de tous, et ces pratiques continueront à évoluer afin de tenir compte des percées de la science.

Le gouvernement fédéral a toujours joué un rôle primordial dans la compréhension des fondements scientifiques de la foresterie. De nombreux témoins de tous les horizons ont souligné au Comité que les recherches effectuées par le Service canadien des forêts (SCF) sont cruciales pour l’orientation des politiques des gouvernements de tous les paliers ainsi que des pratiques d’aménagement forestier de l’industrie. Les projets de recherche en cours dans les 5 centres de recherche forestière du SCF sont mis en oeuvre grâce à 10 réseaux nationaux collaborant avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, l’industrie, les universités, les Premières nations et les autres intervenants du milieu. Ces réseaux comprennent entre autres le Réseau de recherche sur les feux de forêt et le Réseau sur les méthodes de lutte contre les ravageurs. Enfin, des témoins sont également venus vanter le Programme de forêts modèles. Beaucoup d’entre eux croient que ce programme constitue un excellent moyen de tester de nouvelles méthodes innovatrices d’aménagement durable des forêts.

La valeur des travaux de recherche et développement exécutés ou gérés par le SCF est reconnue par les divers intervenants à l’échelle nationale et internationale. Ainsi, la Chine et le Canada ont signé une lettre d’intention concernant la formation sur la gestion des feux de forêt et on a aussi largement consulté les Canadiens pour leur expertise dans la lutte contre les ravageurs. Il ne fait aucun doute que le Canada est un chef de file mondial dans la compréhension scientifique de l’aménagement des forêts.

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral, de concert avec les provinces et territoires, continue à soutenir les travaux de recherche et développement afin de s’assurer que le Canada demeure un chef de file dans la recherche scientifique sur les méthodes innovatrices d’aménagement des forêts. Il devrait en particulier soutenir le Service canadien des forêts et ses centres de recherche ainsi que le Programme de forêts modèles.

De nombreux témoins ont reconnu la valeur des recherches effectuées par le SCF. Le Comité réalise aussi que l’acceptation des arguments scientifiques revêt une importance cruciale pour maintenir ou élargir l’accès aux marchés internationaux. Ainsi, pour que le système de certification de l’aménagement forestier durable de la CSA soit accepté à l’échelle internationale, il sera primordial que les données scientifiques sur lesquelles est fondé ce système soient acceptées de tous. De même, dans le cas des barrières commerciales non tarifaires d’ordre phytosanitaire, il faudra disposer d’arguments scientifiques solides et à jour pour obtenir la levée de ces barrières. Dans ces deux cas, les chances que nous réussissions à conserver nos marchés dépendront beaucoup de la crédibilité de nos données scientifiques. Or, l’une des façons d’accroître cette crédibilité est de faire une promotion énergique de notre expertise. Plus il y aura de pays à reconnaître la valeur de notre technologie et à l’utiliser, plus la communauté internationale reconnaîtra notre expertise scientifique, ce qui renforcera du même coup notre position dans les négociations internationales.

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral, de concert avec les provinces et territoires, fasse activement la promotion à l’échelle internationale de l’expertise scientifique canadienne dans le domaine de l’aménagement des forêts ainsi que des progrès réalisés au Canada dans la certification des forêts.

B. Surveiller l’état des forêts et des pratiques forestières

De nombreux groupes préoccupés de l’état des pratiques forestières et des forêts canadiennes ont comparu devant le Comité. Nous sommes d’accord avec les témoins qui ont souligné que ces préoccupations constituaient une bonne chose, mais nous sommes en même temps choqués par la façon dont ces préoccupations sont déformées par des organisations internationales dans leurs campagnes de financement et leurs tentatives de restreindre l’accès du Canada aux marchés étrangers. Il nous faut contrer par tous les moyens possibles cette exploitation flagrante de préoccupations environnementales par l’utilisation de campagnes de désinformation. Pour ce faire et pour permettre une véritable expression des préoccupations de la population à l’égard de l’état des forêts canadiennes, il est absolument essentiel de surveiller l’état réel de nos forêts. Cette information doit être diffusée à la population canadienne et à nos partenaires commerciaux internationaux afin que les débats publics et les négociations internationales soient fondés sur l’état réel des forêts et des pratiques forestières plutôt que sur des renseignements déformés ou erronés.

La surveillance de l’état des pratiques forestières et forêts canadiennes et ses répercussions sur les débats publics et internationaux relèvent clairement de la responsabilité du gouvernement fédéral. Ce dernier possède à la fois le mandat, en particulier à l’échelle internationale, et la capacité de surveiller l’état des forêts. Ainsi, l’utilité des travaux réalisés par le Centre canadien de télédétection, et notamment le rôle important joué par RADARSAT, sont reconnus à l’échelle internationale dans le domaine de la surveillance des forêts ainsi que de leur aménagement.

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral, de concert avec les provinces et territoires, encourage le rassemblement et la diffusion de données exactes et à jour sur l’état des pratiques forestières et des forêts canadiennes.

Le gouvernement fédéral est certainement le principal responsable du rassemblement de données sur l’état global des forêts canadiennes. Toutefois, étant donné la mondialisation croissante du commerce et de l’information, le Comité reconnaît également que d’autres organisations sont de plus en plus en mesure de rassembler efficacement de l’information sur l’état des forêts, grâce en particulier aux progrès de la technologie des satellites. Le Comité voit donc d’un bon oeil l’échange de renseignements sur l’état des forêts canadiennes et estime que tout accroissement des connaissances à ce sujet pourrait faciliter l’aménagement des forêts. Il encourage donc le gouvernement à participer à ces échanges mondiaux de données. En même temps, le gouvernement devrait prendre des mesures énergiques pour contrer toute utilisation fallacieuse ou déformation de ces données de plus en plus disponibles. Le Programme international de partenariats en foresterie constitue l’un des outils qui a déjà permis au gouvernement de diffuser de l’information factuelle sur l’état des forêts canadiennes.

C. Le Programme international de partenariats en foresterie

En octobre 1992, le Conseil canadien des ministres des Forêts (CCMF) mettait sur pied le Programme international de partenariats en foresterie (PIPF). Ce programme vise à informer les principales instances décisionnelles européennes, américaines et asiatiques des politiques et pratiques du Canada en matière d’aménagement forestier durable. Ce programme est administré et ses activités annuelles gérées par Ressources naturelles Canada (RNCan), avec l’aide d’un groupe de travail sectoriel représentant tous les gouvernements concernés. Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international du Canada (MAECI) et Industrie Canada sont également représentés au sein du groupe de travail. L’industrie de la forêt est pour sa part représentée par trois groupes qui ont un statut d’observateurs lors des réunions du groupe de travail. Chaque année, RNCan et le MAECI signent une entente en vertu de laquelle ce dernier ministère, par le truchement de ses ambassades, réalise des activités approuvées dans divers marchés d’exportation, en l’occurrence ceux des États–Unis, de l’Europe et du Japon. Pratiquement tous les crédits de ce programme sont utilisés pour ces activités additionnelles menées par le MAECI. Toutes les autres instances gouvernementales concernées au Canada, notamment RNCan, assument les dépenses salariales et les autres dépenses internes à même leurs budgets.

Ce programme parraine la venue au Canada de missions composées de décideurs et de délégués commerciaux étrangers, organise des visites d’experts canadiens (principalement des chercheurs) dans des marchés étrangers, et distribue de l’information factuelle sur les pratiques d’aménagement durable des forêts au Canada. Le ministre Goodale est d’avis que ce programme porte fruit puisque les membres des missions accueillies sous son égide confirment mieux connaître maintenant les politiques et pratiques canadiennes d’aménagement des forêts après avoir observé sur le terrain le type d’aménagement forestier durable pratiqué ici. Depuis la création de ce programme en 1993, quelque 25 de ces missions sont venues nous visiter. Le calendrier des activités 1999–2000 prévoit une série de visites de représentants des États–Unis, de l’Europe et du Japon.

Le programme a, au départ, reçu des crédits proportionnels de 4,5 millions de dollars sur une période de trois ans des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Il a ensuite été prolongé de quatre ans sans crédit supplémentaire et devait se terminer en mars 1999. Lors de la préparation de son rapport intérimaire, Les pratiques d’aménagement forestier au Canada dans une perspective de commerce international, de nombreux témoins avaient signalé au Comité que ce programme contribuait réellement à faire mieux connaître à l’étranger les pratiques d’aménagement forestier du Canada. Par conséquent, le Comité avait recommandé que le gouvernement fédéral, de concert avec les gouvernements provinciaux et territoriaux réunis au sein du CCMF, reconduise pour une période de cinq ans ce programme et lui octroie les budgets nécessaires à la réalisation de ses objectifs.

Après la publication de cette recommandation (juin 1999), lors de la seconde phase de son étude, le Comité a entendu certains groupes venir lui dire que le secteur forestier devrait se charger lui–même de défendre ses propres intérêts à l’étranger. Certains estimaient qu’il serait préférable de consacrer les fonds dépensés pour ce programme à d’autres programmes fédéraux qui encouragent des méthodes d’aménagement innovatrices comme le Programme de forêts modèles du SCF. Le Comité prend bonne note de ces opinions, mais il estime que la très grande majorité des témoins étaient en faveur du maintien de ce programme. Le Comité est d’accord avec la décision du CCMF de maintenir ce programme pour une période de cinq ans.

Le Comité applaudit le renouvellement de ce programme, mais il croit également qu’on augmenterait la portée du message qu’il contribue à véhiculer si d’autres programmes mettaient également l’épaule à la roue. Ainsi, le Comité a entendu un témoignage très convaincant des représentants des travailleurs forestiers, selon lesquels on accroîtrait la crédibilité et l’efficacité d’un programme international de diffusion d’information si celle–ci était communiquée par les gens qui travaillent dans la forêt et qui vivent dans les collectivités forestières. Le fait de demander à ces gens de se rendre sur les marchés internationaux afin d’aller décrire tout ce qui se passe réellement dans le bois contribuerait à situer davantage ces questions dans un contexte humain. Cette démarche augmenterait presque certainement l’efficacité d’une campagne visant à contrer les campagnes de désinformation cherchant à restreindre l’accès des produits forestiers canadiens aux marchés internationaux.

Le Comité a été inspiré par les exposés de divers groupes de travailleurs et en particulier par celui de l’IWA Canada et du chapitre 2171 de l’IWA, qui, en compagnie de la Forest Alliance of B.C., ont proposé un programme faisant, entre autres, appel aux gens qui travaillent et vivent dans les forêts pour aller diffuser sur les marchés internationaux de l’information sur l’état des forêts et de l’aménagement forestier au Canada. Le Comité recommande donc que le gouvernement fédéral, de concert avec les provinces et territoires, mette sur pied un tel programme ou participe à celui déjà proposé par des groupes de travailleurs comme l’IWA Canada et le chapitre 2171 de l’IWA.

D. Commerce international

Le gouvernement fédéral dispose d’un mandat clair pour promouvoir le commerce des produits forestiers canadiens et surveiller l’application des règlements sur le commerce international. Comme des témoins l’ont souligné, la promotion des produits forestiers canadiens à l’échelle internationale constitue une tâche essentielle pour maintenir l’imposant excédent commercial que le secteur des forêts dégage. Il nous faut non seulement exporter nos produits forestiers, mais également notre expertise. En effet, l’expertise canadienne dans l’aménagement des forêts est déjà jugée la meilleure au monde, et il nous faudrait donc prendre des mesures pour la vendre sur les marchés étrangers.

Pour maintenir notre excédent commercial attribuable aux produits forestiers, il nous faudra conserver nos marchés internationaux et en trouver d’autres si nous en perdons certains pour des raisons légitimes. La perte de marchés pour des raisons illégitimes devrait, elle, être combattue par tous les moyens possibles. Or, les accords internationaux constituent certainement l’outil le plus puissant dont le gouvernement dispose pour ce faire. Cette démarche est particulièrement importante puisque, comme le Comité l’a entendu, il est probable que les barrières commerciales non tarifaires deviendront de plus en plus fréquentes à l’échelle internationale au fur et à mesure que les accords commerciaux réduiront les droits de douane actuels. Cette situation se présente déjà avec l’industrie des pâtes et papiers puisqu’il a été convenu durant le cycle d’Uruguay des négociations de l’OMC que tous les droits de douane sur les produits de pâtes et papiers seraient éliminés d’ici l’an 2004. Comme on l’a signalé au Comité, cette situation risque d’entraîner l’imposition future de barrières commerciales non tarifaires, comme ce fut le cas avec le nématode du pin pour le bois d’oeuvre résineux exporté vers les marchés européens. Dans le cas des barrières commerciales d’ordre phytosanitaire, les résultats d’une contestation d’une barrière commerciale non tarifaire dépendront beaucoup des règles internationales et de la force des arguments scientifiques que chaque partie avancera à l’appui de sa cause. Le Comité a déjà formulé des recommandations afin qu’on continue à appuyer les recherches scientifiques menées au SCF pour faciliter ces négociations internationales. L’autre responsabilité que le gouvernement fédéral peut assumer en ce qui touche à la prévention des barrières commerciales non tarifaires concerne la surveillance des règlements internationaux et la participation à leur élaboration.

En ce qui concerne les autres barrières commerciales non tarifaires qui pourraient être érigées, par exemple au moyen de la certification des forêts, il faut là aussi que le gouvernement surveille les règlements internationaux et tout particulièrement les éventuelles infractions aux règles de l’OMC et qu’il participe activement à l’établissement de ces règles.

Des témoins ont aussi indiqué que le gouvernement devrait surveiller d’autres aspects des organisations internationales dont il est membre, en raison d’apparentes divergences d’opinion entre des organisations internationales comme l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et la Banque mondiale. Le Comité a ainsi appris que des représentants de la FAO ont déclaré que la certification, en particulier celle qui est pratiquée par des groupes d’acheteurs, constitue une menace au commerce. D’un autre côté, la Banque mondiale, après avoir indiqué qu’elle ne privilégierait aucun programme, appuie le Fonds mondial pour la nature qui soutient pour sa part le système de certification du Forest Stewardship Council.

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral, de concert avec les provinces et territoires, surveille étroitement le respect des règles commerciales internationales établies par l’Organisation mondiale du commerce et dans divers accords commerciaux internationaux. Le gouvernement devrait aussi encourager les organisations internationales dont il est membre, à s’engager à ne pas soutenir des activités qui pourraient conduire à l’établissement de barrières commerciales non tarifaires.

Toujours dans le contexte du commerce international, mais plutôt en marge des enjeux traités dans le cadre de la présente étude, la question de l’Entente Canada–États–Unis sur le bois d’oeuvre résineux suscite un intérêt certain chez plusieurs membres du Comité. Nul doute aux yeux de tous que l’arrivée à échéance de l’entente au 31 mars 2001 mérite une attention particulière compte tenu du fait que plus de 80 p. 100 des exportations de bois d’oeuvre résineux sont destinées à nos voisins du sud. Toutefois, le Comité a choisi de ne pas entendre de témoignages exhaustifs sur la question du bois d’oeuvre résineux, précisément parce que les enjeux et les ramifications qui s’y rapportent sont bien différents de ceux qui entourent les questions de boycottage des produits forestiers canadiens et d’accès aux marchés internationaux.