La Loi constitutionnelle de 1867 exige un quorum de 20 députés, incluant le Président, « pour constituer une assemblée de la Chambre dans l’exercice de ses pouvoirs[5] ». Cette exigence constitutionnelle est réitérée dans le Règlement[6]. Pour qu’un tel quorum soit présent, il suffit donc qu’il y ait 20 députés, nonobstant leurs affiliations partisanes ou qu’ils siègent du côté du gouvernement ou de l’opposition[7]. À ce sujet, le Vice-président de la Chambre déclarait en 1998 : Il faut un minimum de 20 députés. Si 20 députés sont présents, le débat reprend. Le Président ne veut pas savoir si le quorum est formé uniquement de députés du parti ministériel, uniquement de députés de l’opposition ou encore d’un mélange des deux. Il n’incombe pas au Président de dire aux députés d’un côté ou de l’autre de la Chambre qui devrait être à sa place ou combien de députés devraient être présents pour n’importe quel débat[8]. Malgré plusieurs tentatives pour l’accroître, le nombre de députés requis pour former le quorum est demeuré inchangé depuis la Confédération[9]. La charge de travail des députés est telle aujourd’hui que la présence à la Chambre ne constitue qu’une de leurs nombreuses fonctions. Il incombe traditionnellement aux whips de chaque parti de s’assurer, au moyen de tableaux de service, de la présence du nombre requis de députés pour qu’il y ait quorum. Quorum avant le début d’une séanceAu moment où la Chambre doit se réunir, le Président compte les députés présents. S’il y en a moins de 20, il peut reporter les travaux de la Chambre au jour de séance suivant[10]. Le Président ne peut prendre ce genre d’initiative que si la séance n’a pas encore été déclarée ouverte[11]. Une fois la séance ouverte, « le pouvoir que le Président exerce sur la compétence de la Chambre revient à la Chambre. […] le Président ne peut pas clore une séance à sa guise[12] ». Il semble que cela ne se soit jamais produit au début d’une séance et, en pratique, la sonnerie d’appel des députés déclenchée au début d’une séance persiste jusqu’à ce que le quorum soit atteint, même plusieurs minutes après l’heure prévue de la séance[13]. Exceptionnellement le mercredi, l’usage est de déclencher la sonnerie quelques minutes avant l’heure prévue de la séance afin de pouvoir lire la prière et chanter l’hymne national plus tôt sans empiéter sur le temps consacré aux Déclarations de députés et aux Questions orales[14]. Quorum pendant une séancePendant une séance, tout député peut signaler au Président l’absence de quorum et demander que l’on compte les députés présents. Cela peut se faire pendant qu’un autre député a la parole. S’il y a manifestement quorum, le Président peut l’annoncer simplement et se dispenser de compter les députés présents; la Chambre retourne alors à ses travaux. En cas de doute au sujet du quorum, le Président compte les députés. S’il y a quorum, les travaux reprennent[15]. Si le premier dénombrement montre toutefois qu’il n’y a pas quorum, le Président ordonne que la sonnerie d’appel retentisse pendant au plus 15 minutes[16]. Si, pendant ce temps, un deuxième dénombrement révèle que le quorum est atteint, le Président ordonne que la sonnerie d’appel cesse et la Chambre reprend ses travaux[17]. Si après 15 minutes un deuxième dénombrement révèle qu’il n’y a toujours pas quorum, le Président reporte les travaux de la Chambre au jour de séance suivant et les noms des députés présents sont consignés dans les Journaux[18]. En comité plénier, le quorum est aussi, comme à la Chambre, de 20 députés. Si un député signale l’absence de quorum dans un comité plénier, le président du comité compte les députés. S’il n’y a pas quorum, le comité lève sa séance et la Chambre reprend ses travaux[19]. Lorsque le président du comité fait rapport, le Président compte les députés présents à la Chambre. S’il n’y a pas quorum, la sonnerie d’appel retentit pendant au plus 15 minutes. D’habitude, le quorum est vite rétabli afin que la Chambre puisse poursuivre ses travaux[20]. Si la Chambre doit lever la séance faute de quorum, tout point à l’ordre du jour qui est alors à l’étude, à l’exception d’une affaire émanant des députés qui ne fait pas l’objet d’un vote, garde son rang au Feuilleton pour la séance suivante[21]. L’absence de quorum entraîne l’ajournement de la Chambre uniquement pour la journée. Diverses pratiques entourent les demandes de vérification du quorum. D’une part, le député qui signale l’absence de quorum n’est pas tenu de rester à la Chambre[22]. Qui plus est, un député qui, alors qu’il a la parole, signale l’absence de quorum puis quitte la Chambre peut, vérification faite qu’il y a quorum, revenir poursuivre son intervention[23]. D’autre part, les députés n’ont pas besoin d’être à leur place pour être comptés[24]. Pendant le dénombrement, la présidence n’accueillera aucun rappel au Règlement ni aucune question de privilège[25]. En revanche, la présidence n’accueillera aucune demande de vérification de quorum lorsqu’une question a été mise aux voix[26]. Lorsque le Président lève la séance faute de quorum, que ce soit au début ou au cours d’une séance, les députés présents sont priés de passer au Bureau et de signer le plumitif afin que leurs noms soient consignés dans les Journaux. Seuls les noms des députés comptés devraient logiquement figurer au plumitif, mais cela n’a pas toujours été le cas puisque les députés peuvent entrer ou sortir de la Chambre à volonté pendant et après le dénombrement. La liste des députés publiée dans les Journaux peut donc renfermer plus de 20 noms[27]. C’est donc le compte qui est décisif pour l’ajournement de la Chambre, et non pas la liste des noms[28]. Absence de quorum lors des votesSi l’on signale au Président, lors d’un vote par appel nominal, que le nombre de voix exprimées additionné du nombre de députés présents qui n’ont pas voté (dont le Président) est inférieur à 20, le vote est annulé et la procédure habituelle de vérification du quorum est déclenchée. Si aucune objection n’est exprimée au moment où la Chambre est informée du résultat du vote, le Président confirme simplement le résultat et les travaux se poursuivent comme s’il y avait quorum[29]. Quorum lorsque la Chambre est convoquée au SénatLe quorum est réputé atteint, quel que soit le nombre de députés présents, lorsque la Chambre reçoit un message la priant de se rendre au Sénat[30]. Comme la Chambre ne fait que servir de témoin aux délibérations qui vont se dérouler à la chambre haute et qu’elle n’exerce aucun de ses pouvoirs en répondant à cette convocation, l’obligation constitutionnelle d’atteindre le quorum de 20 députés ne s’applique pas. En vertu d’ententes préalables informelles entre les deux chambres, la plupart des messages sollicitant la présence de la Chambre au Sénat sont livrés par l’huissier du bâton noir à des moments où la Chambre des communes siège et est donc susceptible d’avoir atteint le quorum. Dans ces cas, le Président prend connaissance du message dès réception et la Chambre se rend, Président en tête, au Sénat[31]. Il arrive cependant que, lorsqu’elle est convoquée pour assister à une cérémonie de sanction royale, la Chambre soit en période d’ajournement. Le Président peut alors, à la demande du gouvernement, convoquer la Chambre pendant cette période dans le seul but d’assister à la cérémonie[32]. Dans ces cas, lorsqu’on sait que la Chambre sera invitée à se rendre au Sénat, le Président convoque la Chambre à l’heure convenue. Lorsque l’huissier du bâton noir arrive, le Président reçoit le message et se dirige, accompagné des députés présents (en nombre souvent inférieur au quorum), vers le Sénat. De retour de la cérémonie qui s’est déroulée à la chambre haute, la Chambre ajourne de nouveau. [5] L.R. 1985, Annexe II, no 5, art. 48. Le quorum de l’Assemblée législative de la Province du Canada avait aussi été fixé à 20 députés (Acte d’Union, 1840, L.R. 1985, Appendice II, no 4, art. XXXIV). [6] Art. 29 du Règlement. [7] En 1990, Nelson Riis (Kamloops) a fait valoir, entre autres, qu’il incombait au gouvernement de maintenir le quorum lorsque la Chambre étudie les travaux des subsides (Débats, 2 avril 1990, p. 10083). Dans sa décision subséquente, le Président Fraser a affirmé que la présidence pouvait difficilement conclure que le gouvernement doit être tenu seul responsable de l’ajournement de la Chambre faute de quorum (Débats, 3 avril 1990, p. 10119). Voir aussi Débats, 17 mai 2000, p. 6970. [8] Débats, 7 mai 1998, p. 6644. [9] Il y a eu, dans le passé, plusieurs tentatives de porter le quorum de 20 à 30 et même à 50 députés. Voir, par exemple, Journaux, 29 mai 1925, p. 348. Entre 1952 et 1980, Stanley Knowles (député de Winnipeg‑Nord‑Centre de 1942 à 1958 et de 1962 à 1984) a déposé de façon répétée des projets de loi sous la rubrique des Affaires émanant des députés visant à porter le quorum à 30 et à 50 députés. Aucune de ces mesures n’a été adoptée. [10] Art. 29(2) du Règlement. [11] Le 16 novembre 1982, lorsque la Chambre a repris sa séance après l’interruption pour le repas du soir, le président de séance, constatant qu’il n’y avait pas quorum, a pris l’initiative de faire retentir la sonnerie d’appel. Le quorum n’étant toujours pas atteint, il a ajourné la Chambre (Journaux, p. 5353, Débats, p. 20729). [12] Redlich, J., The Procedure of the House of Commons: A Study of its History and Present Form, vol. II, traduction de A.E. Steinthal, New York : AMS Press, 1969 (réimpression de l’éd. de 1908), p. 74. [13] En pratique, la sonnerie d’appel des députés déclenchée au début d’une séance continue jusqu’à ce que le quorum soit atteint, ordinairement de cinq à dix minutes après l’heure prévue du début de la séance. Toutefois, il revient à la présidence de décider d’un temps d’attente raisonnable avant d’ajourner une séance. Il est arrivé que les cloches sonnent plusieurs minutes, voire de 20 à 25 minutes, avant que le quorum ne soit atteint. À noter que les Journaux et les Débats ne reflètent pas toujours une telle situation. Voir, par exemple, Journaux, 3 mai 2002, p. 1377, Débats, p. 11161. [14] Débats, 27 mars 1991, p. 19068; 4 décembre 1991, p. 5762-5763. [15] Voir, par exemple, Débats, 28 juin 2005, p. 7903; 9 mai 2006, p. 1118. [16] À une occasion, un député a retiré sa demande de vérification de quorum lorsqu’il a été avisé par la présidence que la sonnerie d’appel ne fonctionnait pas ce jour-là (Débats, 13 mars 2001, p. 1566). [17] Art. 29(3) du Règlement. Voir, par exemple, Journaux, 24 mars 2005, p. 566-567; 21 juin 2005, p. 942. [18] Art. 29(3) et (4) du Règlement. Depuis l’adoption de l’article 29(3), en 1982, la Chambre a été ajournée pour défaut de quorum à deux reprises seulement (Journaux, 30 mars 1990, p. 1477; 19 octobre 1995, p. 2032). [19] Voir, par exemple, Journaux, 6 juin 1899, p. 239. Pour plus d’information, voir le chapitre 19, « Les comités pléniers ». [20] Jusqu’en décembre 1982, si le premier dénombrement demandé au cours d’une séance confirmait l’absence de quorum, le Président était tenu d’ajourner la Chambre. Le 29 novembre 1982, la Chambre a adopté le texte actuel de l’article 29(3) du Règlement conformément à la recommandation du Comité spécial chargé d’examiner le Règlement et la procédure de ne laisser retentir la sonnerie d’appel que pendant au plus 15 minutes. Cet article du Règlement est entré en vigueur à la fin de la période réservée aux Ordres émanant du gouvernement le 22 décembre 1982 (Journaux, 29 novembre 1982, p. 5400). Avant l’adoption de cet article du Règlement, la Chambre a été ajournée de cette manière à neuf reprises (Journaux, 14 juin 1869, p. 244; 29 juin 1917, p. 395; 11 mars 1919, p. 49; 9 juin 1938, p. 434 (Comité des subsides); 10 juillet 1969, p. 1329‑1331; 17 décembre 1974, p. 217‑218; 23 mars 1979, p. 588, 590; 5 mai 1982, p. 4797; 16 novembre 1982, p. 5353). [21] Art. 41(2) du Règlement. Avant l’adoption de cet article le 13 mai 1991, toute affaire à l’étude au moment de l’ajournement faute de quorum était rayée du Feuilleton. On pouvait cependant demander à la Chambre, à une séance subséquente, de rétablir toute affaire rayée faute de quorum. Voir, par exemple, Journaux, 30 mars 1990, p. 1477; 3 avril 1990, p. 1486. Voir aussi Débats, 2 avril 1990, p. 10076‑10089; 3 avril 1990, p. 10119‑10121. Depuis l’adoption de l’article 41(2) du Règlement en 1991, la Chambre n’a levé qu’une fois la séance faute de quorum, soit le 19 octobre 1995. La Chambre en était alors à la deuxième heure de débat sur une affaire émanant des députés faisant l’objet d’un vote. L’affaire a été reportée au bas de l’ordre de priorité au Feuilleton (Feuilleton, 20 octobre 1995, p. 22‑23). [22] Voir, par exemple, Débats, 13 décembre 1990, p. 16724. [23] Voir, par exemple, Débats, 19 avril 1982, p. 16368‑16370. [24] Voir, par exemple, Débats, 27 octobre 1999, p. 770-771; 27 septembre 2001, p. 5653. [25] Voir, par exemple, Débats, 5 mai 1982, p. 17067. [26] Voir, par exemple, Débats, 2 avril 1993, p. 18021. [27] Voir, par exemple, Journaux, 5 mai 1982, p. 4797; 16 novembre 1982, p. 5353. [28] Journaux, 10 juillet 1969, p. 1329‑1330. [29] Voir, par exemple, Journaux, 15 juin 1988, p. 2893; 26 mai 1989, p. 274. Voir aussi la décision rendue le 12 juillet 1982, où le Président Sauvé affirme que puisque personne n’a demandé, d’après le compte rendu des délibérations, que l’on vérifie l’absence de quorum : « Je dois donc en conclure que le quorum était atteint » (Débats, 9 juillet 1982, p. 19201; 12 juillet 1982, p. 19214‑19215). [30] Art. 29(5) du Règlement. [31] Voir, par exemple, Journaux, 11 mai 2006, p. 165-166, Débats, p. 1266, 1280. [32] Art. 28(4) du Règlement. Voir, par exemple, Débats, 22 juin 2007, p. 10943-10944. Les délibérations à la Chambre ont, à l’occasion, fait l’objet de rappels au Règlement lorsque les députés se sont regroupés dans l’attente d’une convocation au Sénat pour une cérémonie de sanction royale pendant l’ajournement de la Chambre. Le 30 décembre 1988 et le 29 juin 1989, Marcel Prud’homme (Saint‑Denis) s’est levé pour faire observer que, puisque la Chambre n’était convoquée que pour attendre l’arrivée du gentilhomme huissier de la verge noire qui convoquerait la Chambre au Sénat, la Chambre n’aurait pas dû faire la prière et le Président n’aurait pas dû occuper le fauteuil avant que le sergent d’armes n’annonce l’arrivée du gentilhomme huissier de la verge noire (Débats, 30 décembre 1988, p. 851‑852; 29 juin 1989, p. 3803‑3806). |