La procédure et les usages de la Chambre des communes

Deuxième édition, 2009

La procédure et les usages de la Chambre des communes - 3. Les privilèges et immunités - Les types de privilèges

 

Les privilèges de la Chambre peuvent être examinés sous deux angles : celui des droits et immunités des députés et celui des droits de la Chambre dans son ensemble. Hiérarchiquement, les droits des députés sont subordonnés à ceux de la Chambre pour prémunir la collectivité contre le risque que des députés interprètent abusivement la portée de leurs privilèges. Par exemple, les privilèges d’un député sont réputés suspendus dès lors que la Chambre lui ordonne de comparaître de son siège ou à la barre de la Chambre[139] pour y être interrogé. Il est toutefois extrêmement rare que la Chambre fasse primer ses droits collectifs sur ceux d’un député. Certaines de ces immunités s’appliquent également aux fonctionnaires de la Chambre et aux personnes que la Chambre cite à comparaître dans le cadre de ses travaux[140].

En outre, la Chambre, collectivement, et les députés, individuellement, ont la responsabilité d’éviter de se servir abusivement de leurs droits et immunités, en particulier de leur liberté de parole[141]. Les députés devraient s’abstenir de conclure tout arrangement susceptible de limiter leur capacité d’exercer leurs fonctions de député en toute indépendance[142]; de soulever des questions futiles en prétendant qu’il y a atteinte à un privilège ou outrage; de se servir du privilège de leur liberté de parole pour formuler des critiques injustes à l’endroit d’autrui dans le cadre des débats. La Chambre devrait exercer avec le maximum de retenue les pouvoirs qui lui sont dévolus relativement au privilège et à l’outrage et s’assurer que, dans l’exercice de son pouvoir d’imposition de sanctions pour outrage, ces sanctions sont proportionnelles à l’infraction commise[143].



[139] Bien que cela arrive rarement, deux députés ont été cités à comparaître à la barre de la Chambre pour être réprimandés ces 20 dernières années : Ian Waddell (Port Moody–Coquitlam) en 1991 (Journaux, 31 octobre 1991, p. 574, 579, Débats, p. 4271‑4285, 4309‑4310) et Keith Martin (Esquimalt–Juan de Fuca) en 2002 (Débats, 17 avril 2002, p. 10526‑10527; Journaux, 22 avril 2002, p. 1323‑1324, Débats, p. 10654‑10670; Journaux, 23 avril 2002, p. 1337‑1338, Débats, p. 10747-10748; Journaux, 24 avril 2002, p. 1341, Débats, p. 10770). Pour plus d’information, voir la section intitulée « Le blâme, la réprimande et la citation à comparaître à la barre de la Chambre » du présent chapitre.

[140] Est considéré comme fonctionnaire « celui qui travaille au service de la Chambre et que ses attributions obligeraient à être physiquement présent au service de la Chambre ou d’un de ses comités » (Maingot, 2éd., p. 166‑167). Voir aussi Loi sur le Parlement du Canada, L.R. 1985, ch. P-1, par. 86(2), qui fait mention du commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique à titre de haut fonctionnaire du Parlement : « Lorsqu’il s’acquitte de ces fonctions, il agit dans le cadre de l’institution de la Chambre des communes et possède les privilèges et immunités de cette chambre et des députés. »

[141] Cette responsabilité, dont on trouvera une description dans l’ouvrage australien House of Representatives Practice (5e éd., p. 753‑754), vaut également pour la Chambre des communes.

[142] C’est pour cette raison et dans le but d’interdire aux candidats à une élection de signer des engagements que le Parlement a adopté l’article 550 de la Loi électorale du Canada (L.C. 2000, ch. 9). Cet article dispose qu’il est illégal pour un candidat de signer un document écrit qui lui est présenté sous forme de sommation ou de réclamation, si le document le contraint à suivre une ligne de conduite qui l’empêchera d’exercer sa liberté d’action au Parlement, s’il est élu, ou à démissionner comme député, s’il en est requis par les personnes qui lui proposent l’engagement en question. Voir aussi le chapitre 4, « La Chambre des communes et les députés ».

[143] En 2002, le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a déclaré ceci dans un rapport à la Chambre : « Le pouvoir de punir les outrages ne doit pas être exercé à la légère. Il existe pour les rares occasions où l’aptitude du Parlement à fonctionner est entravée ou compromise » (50e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, par. 39, présenté à la Chambre le 22 mars 2002 (Journaux, p. 1250)).

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