Passer au contenu
;

JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 033 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 24 octobre 2022

[Enregistrement électronique]

(1105)

[Traduction]

    Je vous souhaite la bienvenue à la 33e réunion du Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le 22 septembre, le Comité poursuit son étude sur l'objet du projet de loi C-28, Loi modifiant le Code criminel (intoxication volontaire extrême).
    Conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022, la réunion d'aujourd'hui se tient suivant un format hybride, c'est‑à‑dire que certains membres du Comité y participent en personne alors que d'autres le font à distance, à l'aide de l'application Zoom.
     J'aurais quelques consignes à transmettre aux témoins et aux députés pour veiller à ce que tout se déroule bien.
    Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Ceux qui participent à la réunion par vidéoconférence doivent cliquer sur l'icône du micro pour l'activer, et le mettre en sourdine lorsqu'ils n'ont pas la parole. Des services d'interprétation sont offerts. Les participants à la réunion via Zoom ont le choix, au bas de leur écran, entre la transmission du parquet, l'anglais et le français. Ceux qui se trouvent dans la salle peuvent utiliser l'oreillette et choisir le canal souhaité. Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
    Les députés présents dans la salle qui souhaitent prendre la parole sont priés de lever la main. Sur Zoom, veuillez utiliser la fonction « Lever la main ». Notre greffier et moi-même nous efforcerons de tenir à jour la liste des intervenants. Merci à l'avance de votre patience et de votre compréhension à cet égard.
    Je vous demanderais en outre de porter attention aux signaux que je pourrais vous faire. Lorsqu'il vous restera 30 secondes, je brandirai ce livre jaune. S'il ne vous reste plus de temps, je vous présenterai cette chemise rouge.
    Sans plus tarder, j'aimerais souhaiter la bienvenue à notre témoin pour la première heure...
    Nous vous écoutons, monsieur Fortin.

[Français]

     Monsieur le président, les tests de son ont-ils été faits avant le début de la séance avec les témoins qui y participent par vidéoconférence?
    Les résultats étaient-ils satisfaisants? Je ne vous ai pas entendu le dire.

[Traduction]

    Le greffier me confirme que c'est chose faite et que les tests sont concluants.

[Français]

    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Merci.
    Sans plus tarder, je cède la parole à notre ministre de la Justice, l'honorable David Lametti, pour les cinq prochaines minutes.

[Français]

    Je vous remercie de m'avoir invité à participer à l'étude de la teneur de l'ancien projet de loi C‑28, Loi modifiant le Code criminel (intoxication volontaire extrême).
    Aujourd'hui, je suis assisté par des avocats et avocates du ministère de la Justice, maîtres Matthew Taylor, Chelsea Moore et Joanne Klineberg, que je remercie.
    Comme vous le savez, ce projet de loi est entré en vigueur le 23 juin 2022, moins de six semaines après que la Cour suprême du Canada eut rendu sa décision dans les causes R. c Brown, R. c Sullivan et R. c Chan.
    Dans ces décisions, la Cour suprême a conclu à l'inconstitutionnalité de l'ancienne version de l'article 33.1 du Code criminel, parce qu'il écartait la défense d'intoxication extrême dans tous les cas, que la personne ait agi par négligence ou ait commis une faute alors qu'elle avait consommé.
(1110)

[Traduction]

    La Cour suprême a rétabli l'intoxication extrême comme moyen de défense de plein droit pour les crimes violents, ce qui permettait aux inculpés de se soustraire à leur responsabilité, et ce, même s'ils avaient fait preuve de négligence dans leur consommation de drogue ou d'autres substances intoxicantes. L'adoption rapide du projet de loi à l'étude montre bien que tous les parlementaires souhaitaient combler le vide juridique créé par les décisions en question.
    Avec l'adoption du projet de loi C‑28, la loi prévoit maintenant que les individus ayant fait montre de négligence criminelle dans leur consommation de substances intoxicantes peuvent être tenus responsables des préjudices causés à autrui alors qu'ils étaient en état d'intoxication extrême. Selon le Fonds d'action et d'éducation juridique pour les femmes, le projet de loi C‑28 était une solution « réfléchie, nuancée et constitutionnelle » au vide étroit, mais important, laissé dans la loi par les jugements de la Cour suprême.
    Le projet de loi C‑28 avait les mêmes objectifs que l'article 33.1 dans sa version précédente adoptée en 1996, à savoir de protéger les victimes de crimes violents perpétrés sous l'effet de l'intoxication en tenant responsables ceux qui causaient des préjudices à autrui après s'être volontairement intoxiqués de façon négligente. Dans l'arrêt Brown, la Cour suprême a reconnu la légitimité et l'importance pressante de ces objectifs, et suggéré deux solutions viables du point de vue constitutionnel que le Parlement pourrait adopter de telle sorte que les fautifs soient tenus responsables dans les cas où un tel verdict s'impose. Nous avons choisi l'une de ces approches, laquelle rend possible une condamnation pour des crimes violents comme l'homicide involontaire et l'agression sexuelle. Cette approche permettra de tenir les délinquants responsables de leurs gestes, comme les victimes s'y attendent à juste titre, tout en respectant la Charte.
    En vertu du nouvel article 33.1 proposé, la Couronne peut demander une condamnation pour crime violent en prouvant que l'inculpé a causé des préjudices à autrui alors qu'il était dans un état d'intoxication extrême résultant de sa négligence criminelle dans la consommation de substances intoxicantes. L'individu peut être tenu criminellement responsable s'il est prouvé qu'il s'est écarté de façon marquée de la norme de diligence attendue d'une personne raisonnable, dans les circonstances. Par « s'écarter de façon marquée », on entend que l'individu n'a pas du tout fait ce qu'on aurait pu attendre d'une personne raisonnable dans les mêmes circonstances en vue d'éviter un risque prévisible — en l'occurrence, le risque d'une violente perte de contrôle.

[Français]

     Vous vous souviendrez que l'intoxication extrême est un état mental rare qui s'apparente à l'automatisme lorsqu'un accusé perd la maîtrise de ses actes, mais qu'il est encore capable d'agir. Permettez-moi de préciser une fois de plus que cet état est exceptionnellement rare, et que l'intoxication, même à un degré avancé, ne répond pas à la définition d'intoxication extrême. Je le répète: l'intoxication à elle seule ne constitue jamais un motif de défense dans le cas de crimes comme l'agression sexuelle.

[Traduction]

    Je vais me permettre de répéter ce dernier point, car il est essentiel que tout le monde comprenne bien. L'intoxication ne peut jamais être un motif de défense pour les crimes comme l'agression sexuelle. C'était le cas avant les jugements de la Cour suprême; c'est encore le cas aujourd'hui.
    Il est très difficile d'invoquer l'intoxication extrême comme moyen de défense. Pour y parvenir, l'inculpé doit satisfaire à une norme de preuve plus exigeante que celle s'appliquant habituellement. Il doit d'abord convaincre le juge, suivant la prépondérance des probabilités et grâce au témoignage d'experts, qu'il était en état d'intoxication extrême lorsqu'il a posé des gestes violents. L'ivresse ou l'intoxication n'est pas en soi un argument de défense. L'intoxication extrême est un état rare et, comme son nom l'indique, extrême. La Cour suprême a établi clairement qu'il est à peu près impossible d'en arriver à un état d'intoxication extrême par la seule consommation d'alcool. Le projet de loi C‑28 a comblé un vide étroit, mais important, dans la loi pour veiller à ce que le recours à cet argument de défense demeure exceptionnellement rare.
    Certains ont fait valoir qu'il ne sera pas facile de faire appliquer cette nouvelle disposition du fait qu'il sera trop ardu pour la Couronne de prouver que le risque de violence était prévisible. Je ne suis pas d'accord. À mon avis, ces nouvelles dispositions sont tout à fait applicables. Le Parlement a envoyé un message clair: quiconque consomme des substances intoxicantes dans des circonstances témoignant d'un mépris flagrant pour la sécurité d'autrui sera tenu responsable s'il commet des actes violents.
    Je tiens à souligner que la loi exige seulement qu'il y ait un « risque » de perte de contrôle violente. Si l'on interprète bien cette précision, on constate que la norme de preuve à respecter est moins exigeante que celle découlant d'autres dispositions du Code criminel qui nécessitent plutôt qu'un résultat particulier soit « susceptible » de se produire. C'est le cas notamment de l'article 215 suivant lequel une personne susceptible d'exposer à un péril permanent la santé d'autrui peut être tenue responsable de ne pas lui avoir fourni les choses nécessaires à l'existence. Les procureurs réussissent à établir la preuve d'une telle infraction malgré le critère de probabilité constituant une norme de preuve plus exigeante. J'ai donc bon espoir qu'ils parviendront également à faire la preuve qu'il existe un risque de perte de contrôle violente.
    Il ne faut pas oublier que les procureurs n'ont pas à faire la preuve de quoi que ce soit tant et aussi longtemps que l'inculpé n'a pas lui-même démontré qu'il était dans un état d'intoxication extrême, une norme de preuve très exigeante. Si l'inculpé ne peut pas faire la preuve d'une telle intoxication, il sera reconnu coupable de l'infraction, comme n'importe quel autre prévenu.
(1115)

[Français]

    Les Canadiens raisonnables veulent connaître les risques — même les risques rares — qui sont associés aux substances intoxicantes qu'ils prévoient prendre et à la façon dont ils prévoient les prendre. Tout Canadien raisonnable est préoccupé par la sécurité d'autrui lorsque ses actes présentent un risque.

[Traduction]

    Lorsque nous avons constaté à quel point la désinformation faisait rage à la suite de la décision de la Cour suprême, nous savions qu'il était important d'agir rapidement. Beaucoup de gens laissaient entendre qu'une simple intoxication pourrait servir de moyen de défense pour des crimes horribles, comme l'agression sexuelle. La désinformation non intentionnelle et le style alarmiste parfois intentionnel de certains reportages peuvent entraîner des conséquences très graves pour les femmes de tout le pays en accentuant les préjugés avec lesquels doivent déjà composer les survivantes de la violence fondée sur le genre.
    Nous avons donc agi sans tarder pour nous assurer que les discours semblables ne se perpétuent pas dans la sphère publique, car il est important que tous les Canadiens puissent se sentir en sécurité. Je me réjouis de voir que tous les parlementaires ont su conjuguer leurs efforts pour passer rapidement à l'action afin d'éviter que cette désinformation s'enracine plus profondément encore.
    Je vais suivre de près votre étude sur cette importante question et j'ai grand hâte de prendre connaissance de votre rapport final. D'ici là, nous allons continuer de travailler en étroite collaboration avec nos partenaires fédéraux, provinciaux et territoriaux pour assurer une mise en oeuvre efficace de la loi.
    Merci.
    Merci, monsieur le ministre.
    Nous allons maintenant entreprendre notre premier tour de questions en commençant par M. Moore qui dispose de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre, d'avoir bien voulu comparaître aujourd'hui dans le cadre de cette importante étude.
    Certains se demandent peut-être pourquoi nous menons cette étude. C'est en raison de l'arrêt Brown de la Cour suprême qui, il faut bien le dire, a mis en péril la sécurité des Canadiens, et des Canadiennes tout particulièrement. C'est ainsi que Mme Vecchio, M. Brock, qui est aussi membre du Comité, M. Caputo et moi-même vous avons écrit pour vous exhorter à agir sans tarder et vous offrir toute l'aide que nous pouvions vous apporter pour combler cette importante brèche laissée dans notre Code criminel par cette décision.
    On vous posera aujourd'hui beaucoup de questions au sujet du projet de loi lui-même. J'en aurais toutefois une qui est de portée plus générale. Votre gouvernement passe à l'action seulement quand bon lui semble. À titre d'exemple, lorsque le poste d'ombudsman pour les prisonniers est devenu vacant, il a été pourvu le lendemain. Lorsque la même chose est arrivée pour l'ombudsman des victimes d'actes criminels, il a fallu une année entière pour nommer un successeur. J'aurais aimé que nous puissions entendre le point de vue de l'ombudsman des victimes d'actes criminels lors de nos travaux sur le projet de loi C‑5, dans le cadre de la présente étude et relativement à d'autres dossiers législatifs touchant la justice pénale.
    Nous venons tout juste de terminer une autre étude qui nous a permis d'entendre les témoignages de victimes d'actes criminels. L'un des cas les plus médiatisés au cours des dernières années au Canada a été celui de Sharlene Bosma dont l'époux, Tim, a été assassiné. Tous les Canadiens se sont intéressés à cette affaire. L'assassin a également été reconnu coupable d'avoir tué son propre père et son ancienne amie de cœur. Grâce aux mesures législatives adoptées pour permettre le cumul des périodes d'inadmissibilité, il ne pouvait pas demander une libération conditionnelle avant 75 ans.
    Cependant, à la suite du jugement rendu par la Cour suprême dans l'affaire Bissonnette, cet individu sera maintenant admissible à une libération conditionnelle après 25 ans. Je crois d'ailleurs que ce délai a commencé à s'écouler il y a près de 10 ans déjà. Lors de sa comparution devant notre comité, Sharlene Bosma a dit trouver une lueur d'espoir dans toute cette situation en sachant que, grâce à ce qu'elle-même a fait ainsi qu'au travail du procureur de la Couronne et à la contribution d'autres témoins, sa fille n'aurait jamais à assister à une audience de libération conditionnelle. Comme on nous l'a maintes fois répété, ces audiences ont le désavantage de faire revivre le traumatisme aux victimes et à leurs familles.
    Monsieur le ministre, vous avez réagi sans tarder et nous avons collaboré avec vous pour que le projet de loi C‑28 puisse être adopté rapidement. C'est dans le cadre du même exercice que nous sommes réunis aujourd'hui pour voir s'il n'y a pas moyen d'améliorer ce projet de loi.
    Voici donc ma question. Est‑ce que votre gouvernement et vous-même allez réagir au jugement de la Cour suprême dans l'affaire Bissonnette?
(1120)
    Merci pour cette question, monsieur Moore.
    Il va de soi que nous compatissons avec les survivants de l'attentat à la mosquée de Québec ainsi qu'avec la famille Bosma et toutes les autres victimes de tels actes horribles. Nous mettons tout en œuvre pour pouvoir faire le nécessaire aussi rapidement que possible.
    Nous avons pris tous les moyens afin de pourvoir sans tarder le poste d'ombudsman des victimes d'actes criminels. Il y a des situations où les choses échappent à notre contrôle quant au bon fonctionnement des différents processus. Je ne vais pas entrer dans les détails, mais nous avons fait de notre mieux dès le départ pour trouver un successeur à ce poste. C'est maintenant chose faite, et je pense que tout le monde conviendra que nous avons fait un excellent choix.
    Ce qui distingue ce cas‑ci de l'arrêt Bissonnette, c'est que la Cour suprême nous a proposé deux pistes de solution pour la suite des choses. Je rappelle que le jugement Bissonnette ne change rien à la peine effectivement imposée à l'individu condamné pour meurtre. Il sera juste plus rapidement admissible à une libération conditionnelle. Je comprends que ce n'est pas rien, mais l'admissibilité à la libération conditionnelle ne signifie pas nécessairement que l'individu va bénéficier d'une mise en liberté sous condition. Nous nous sommes efforcés de faire valoir que cela s'inscrit dans les limites du pouvoir discrétionnaire d'un juge qui impose une peine de la sorte. C'est l'argument que le procureur général du Canada a présenté dans cette cause devant la Cour suprême. Celle‑ci a rejeté cet argument par neuf voix contre aucune.
    Je suis disposé à entendre toutes les suggestions, mais il n'y a pas toujours une voie à suivre, ou même deux dans les causes qui nous intéressent aujourd'hui avec les arrêts Brown et Sullivan. Il n'y a pas de voie facile ou claire. La décision de la Cour suprême était quant à elle très claire dans son interprétation de la Constitution.
    Je veux juste souligner encore une fois que l'admissibilité à une libération conditionnelle ne se traduit pas automatiquement par une telle libération. Rien n'est garanti et la peine imposée demeure toujours la même.
    Merci, monsieur le ministre.
    Je demande seulement, et nous demandons tous, que les mêmes personnes qui ont réfléchi ensemble aux suites à donner à l'arrêt Brown en examinant les options possibles — et nous aurons le temps de discuter des avantages et des inconvénients de ces différentes options — se penchent maintenant sur l'arrêt Bissonnette.
    De nombreuses victimes ainsi que leurs proches nous ont indiqué que le processus de libération conditionnelle les obligeait à revivre leur traumatisme, surtout en sachant que leurs enfants devaient y participer.
    Tout récemment dans ma circonscription, un individu en liberté conditionnelle a pris la fuite. Personne ne savait où se trouvait cet homme reconnu coupable du meurtre de la fille de 16 ans de l'un de mes commettants. Nous apprenons maintenant qu'il peut de nouveau demander une libération conditionnelle, et ce, même s'il s'est retrouvé illégalement en liberté.
    Le processus de libération conditionnelle est en soi une revictimisation. Nous devons faire le même effort de réflexion pour réagir à l'arrêt Bissonnette. Ce serait certes ma recommandation la plus pressante.
    Merci, monsieur Moore. Je suis désolé, mais vous n'avez plus de temps.
    Nous passons maintenant à Mme Diab pour les six prochaines minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.

[Français]

     Merci, monsieur le ministre. Nous sommes très reconnaissants que vous comparaissiez au Comité pour clarifier le projet de loi C‑28.

[Traduction]

    J'aimerais poser quelques questions très précises, car j'ai l'impression qu'il persiste une grande confusion et beaucoup d'incompréhension. Lorsqu'on commence à utiliser la terminologie juridique et à traiter de tout ce qui vient avec, je peux comprendre le simple citoyen d'être un peu perdu.
    Je suis très heureuse qu'un représentant de l'organisme Les mères contre l'alcool au volant ait pu comparaître lors de notre dernière séance. Il a pu nous indiquer de façon claire et concise que ce projet de loi n'aura pas d'incidence sur les causes d'intérêt pour son groupe. Je pense qu'il est très important que les Canadiens le comprennent.
    Dans l'exposé que vous nous avez présenté aujourd'hui, vous avez souligné que ces dispositions ne s'appliqueront jamais aux crimes d'agression sexuelle. C'est justement le genre de précision que nous devons apporter au bénéfice des Canadiens.
    Pourriez-vous clarifier les choses à l'intention des Canadiens en utilisant un langage clair et simple, plutôt que des termes techniques? J'ai fait partie d'un comité d'accès à la justice en Nouvelle-Écosse. Dans les premières réunions, peut-être parce que ma langue maternelle n'est ni l'anglais ni le français, j'ai été très reconnaissante qu'on m'explique les choses dans un tel langage clair et simple.
    Qu'entend‑on par intoxication extrême? Qu'est‑ce que l'intoxication volontaire? De quoi est‑il question exactement ici, monsieur le ministre?
(1125)
    Merci pour ces questions, madame Diab.
    On parle d'intoxication volontaire lorsque la personne consomme elle-même la substance intoxicante, qu'il s'agisse d'alcool, de drogue ou de quoi que ce soit d'autre. On veut dire par là que la personne consomme de telles substances de son propre chef. Nous limitons ainsi les circonstances qui sont ciblées.
    L'intoxication extrême a été interprétée par les tribunaux comme étant assimilable à un état d'automatisme. Cela signifie que le corps fonctionne, mais que l'on n'a aucun contrôle sur lui. Je pense que c'est la façon la plus simple de le décrire. Les membres peuvent bouger, et il arrive en de rares occasions que la personne puisse poser des gestes extrêmes, mais elle n'exerce aucun contrôle sur elle-même. Ce sont des circonstances plutôt rares. D'un point de vue juridique, cela a pu être isolé d'un certain nombre d'éléments distincts, ce qui permet de prévoir une exception.
    Il s'agit en fait de reconnaître que la façon dont la personne est entrée dans cet état d'automatisme a son importance, et ce, même si c'est le fait de ses propres actions. Dans la plupart des cas, lorsque l'individu aurait pu raisonnablement prévoir qu'il risquait de perdre le contrôle de lui-même ou que la situation pouvait connaître un aboutissement violent, il serait tout de même tenu responsable de ses gestes. S'il a agressé quelqu'un sexuellement, il demeure coupable d'agression sexuelle. Il en va de même d'un homicide involontaire.
    La seule exception s'applique aux rares cas où il est possible d'établir que la personne n'aurait pas pu ou dû savoir ce qui allait se passer suivant la norme de diligence attendue d'une personne raisonnable et en tenant compte de la prévisibilité objective du risque. Si une personne se retrouve dans un état d'automatisme après avoir pris un médicament sur ordonnance pour la première fois et qu'il lui était impossible — comme à n'importe qui d'autre — de prévoir comment les choses allaient tourner, elle aura peut-être une chance de s'en tirer.
    Je répète qu'il faut que l'individu se retrouve dans un tel état et soit en mesure de prouver que c'était bel et bien le cas. Il incombe alors à la Couronne de faire la preuve que la personne aurait pu le prévoir ou aurait dû le savoir d'une manière ou d'une autre.
    Merci, monsieur le ministre.
    Je vais profiter du temps qui me reste pour vous poser deux autres questions. En quoi le projet de loi C‑28 permettra‑t‑il de mieux protéger les Canadiens et les victimes contre la criminalité? D'après ce que vous avez pu apprendre, est‑il fréquent que les coupables présumés invoquent l'intoxication volontaire extrême comme moyen de défense?
    Elle est rarement invoquée, et il est encore plus rare qu'elle soit retenue. Aucun cas n'a été signalé depuis que la loi a été modifiée. Depuis la dernière décision de la Cour suprême, elle n'a été que rarement utilisée, et il est très, très rare que cette défense soit couronnée de succès.
    Cette disposition protège les femmes et les hommes contre les actes perpétrés dans un état d'intoxication volontaire, dans le sens où davantage de personnes seront tenues criminellement responsables et que seules les personnes qui n'avaient aucun moyen de savoir que cela aurait pu ou aurait dû se produire seront exclues de son application. Cela nous aide, de façon plus générale, à faire passer le message que l'intoxication n'est pas une défense admissible. Chacun est responsable de ce qu'il fait quand il est intoxiqué. Je pense que c'est tout aussi important que le fait d'avoir modifié le Code criminel en tant que tel. C'est le message qu'on veut envoyer à tout le monde, pour déconstruire l'idée selon laquelle on peut s'en tirer, d'une manière ou d'une autre, sous prétexte qu'on était sous l'effet de l'alcool ou de drogues. Ce n'est tout simplement pas le cas.
(1130)
    Très bien. Merci beaucoup. C'est très apprécié.
    Merci, madame Diab.
    Nous passons maintenant à M. Fortin pour six minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Bonjour, monsieur le ministre. Je suis content de vous voir ici ce matin.
    Au Bloc québécois, nous applaudissons cette décision, car nous croyons qu'il fallait colmater cette brèche dans la loi. Je pense que c'est important. Le texte me semble intéressant.
     Toutefois, j'ai quelques questions. En fait, depuis le début, je m'interroge beaucoup sur la notion d'intoxication volontaire. N'y a-t-il pas là une brèche? Avez-vous, par exemple, examiné le cas d'une personne qui dit répondre aux critères, mais qui ajoute qu'elle ne s'est pas intoxiquée volontairement, quelqu'un ayant mis de la drogue dans sa consommation ou ajouté une substance plus puissante dans le joint qu'elle croyait ne contenir que du cannabis? Avez-vous examiné cet aspect d'une intoxication extrême soi-disant involontaire, mais qui pourrait être douteuse?
    Merci de votre question, monsieur Fortin.
    Nous parlons d'auto-intoxication. S'il est avéré que quelqu'un d'autre est la cause de l'intoxication, cela pourrait être une défense. Tout dépend des faits, et cela soulève effectivement cette autre question.
    Par contre, advenant que la personne aurait dû savoir dans les circonstances qu'il y avait un risque, il lui serait beaucoup plus difficile de prouver son innocence. Je ne parle pas ici de la façon dont le joint a été fait ni de la source de l'intoxication, quelle qu'elle soit. C'est le contexte qui va le déterminer. La jurisprudence contient justement des normes visant à renforcer le message que l'auto-intoxication n'est pas une défense et que les exceptions sont rares.
    Merci, monsieur le ministre.
    Vous offrez au paragraphe (4) une définition de ce qui constitue une intoxication extrême, soit une intoxication « qui rend une personne incapable de se maîtriser consciemment ou d'avoir conscience de sa conduite. »
     Cette définition me semble un peu vague. Selon vous, est-elle suffisante pour faire consensus parmi les tribunaux? Aurait-il été possible de mieux définir le terme « extrême »?
     Merci. C'est une bonne question.
    C'est une définition connue, que nous avons reprise de l'ancienne version de la loi. Par ailleurs, la jurisprudence définit également l'intoxication extrême comme s'apparentant à l'automatisme, qui rend une personne incapable de se maîtriser consciemment. Cette interprétation est plus facile à comprendre et en fait une norme reconnue dans le milieu et qui marche bien.
    Je vous remercie et je vais changer de sujet.
    Comme vous le savez, nous avons reçu des organismes la semaine dernière pour parler du projet de loi C‑28. Un commentaire revenait, qui m'a un peu étonné. Nous parlions de consultations, et certains individus semblaient considérer qu'ils n'avaient pas été consultés ou ne l'avaient pas été suffisamment.
    Pouvez-vous nous parler des consultations qui ont été faites par votre ministère avant le dépôt du projet de loi C‑28? Qui a été consulté et sur quels aspects du projet de loi? Quels ont été les commentaires des organismes ou des individus consultés?
(1135)
    Merci.
    Nous avons fait des consultations rapides, mais nous en avions déjà fait auparavant. Permettez-moi de vous donner la liste des organismes consultés.

[Traduction]

    En voici la liste: Hébergement Femmes Canada, Luke's Place, le Pathway Group, l'Ontario Network of Victim Service Providers, la Fédération des maisons d'hébergement pour femmes, Farrah Khan, la Fondation canadienne des femmes, le FAEJ, Robin Parker, l'Association nationale des centres d'amitié, l'Association des femmes autochtones, Action Now Atlantic, Étudiant.e.s pour une culture du consentement, Kent Roach, Janine Benedet, Frances Chapman, Gerry Ferguson, Michael Plaxton, Hugues Parent, l'Association des avocats noirs du Canada, la Criminal Lawyers' Association, l'Association des Avocats de la Défense de Québec, la Criminal Trial Lawyers' Association, Tony Paisana, Jody Berkes, la Women's Law Association of Ontario et l'Association nationale de la femme et du droit.

[Français]

    Nous avons donc fait ces consultations et la grande majorité des organismes ont appuyé nos démarches, que ce soit de manière formelle ou informelle.
    Des préoccupations particulières ont-elles été soulevées par les organismes consultés relativement au projet de loi C‑28?
    Je peux vous dire que l'Association nationale Femmes et Droit était un des groupes qui n'étaient pas favorables au projet de loi. L'Association voulait quelque chose qui ressemblait davantage à l'ancienne version de la loi.

[Traduction]

    Malheureusement, nous n'avons plus de temps.

[Français]

    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Merci, monsieur Fortin.
    Monsieur Garrison, allez‑y pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie le ministre d'être parmi nous aujourd'hui.
    Je tiens à souligner que je pense que le contexte dans lequel nous avons travaillé ici est celui d'une lacune créée dans la loi, qui était peut-être plus petite que ce que le public pouvait percevoir, mais il y a eu beaucoup de coopération et une intervention rapide du Parlement.
    Parfois, notre institution a la mauvaise réputation de ne pas être capable d'accomplir des choses. Dans le cas présent, la liste des parties consultées est impressionnante. Nous savons qu'elle n'est pas aussi complète qu'elle aurait pu l'être parce qu'il fallait agir vite. Autrement, nous serions encore assis ici à tenir des consultations et à multiplier les audiences, et il aurait fallu des mois pour corriger cette lacune. Je vous remercie du leadership dont vous avez fait preuve en vous adressant à nous tous pour que cela se fasse.
    La Cour suprême a essentiellement donné deux choix au Parlement. J'aimerais que vous preniez une minute pour nous parler de ces deux choix. En termes simples, la Cour a dit qu'on pouvait soit créer une nouvelle infraction, soit corriger l'article existant. Pouvez-vous expliquer un peu pourquoi on a choisi de corriger l'article 33.1 plutôt que de créer une nouvelle infraction?
    Je vous remercie de cette question, comme je vous remercie tous de votre appui.
    Il n'y avait qu'un article visé, ce qui présentait l'avantage de rendre les consultations plus efficaces.
    C'était aussi un problème connu. Depuis l'arrêt Daviault, bien des juristes estimaient que cette disposition était inconstitutionnelle. La Cour nous a donné deux options: nous pouvions adopter une nouvelle loi qui régirait essentiellement ce genre de situation ou nous pouvions reprendre l'ancienne loi et corriger la situation problématique, soit le cas de la personne qui se rend innocemment dans cet état alors qu'elle ne pouvait pas savoir que cela pouvait arriver — ou qu'elle ne devait pas le savoir, selon une norme objective.
    Nous avons jugé que la deuxième option était la plus simple, parce qu'elle s'appuyait sur des normes connues, tout d'abord, et parce qu'elle comportait moins de risques de conséquences imprévues pour les juges, les procureurs de la Couronne ou les avocats de la défense. Lorsqu'on crée une nouvelle norme, qu'on crée une nouvelle loi, il y a une période d'interprétation: quelle en est la portée? Jusqu'où cela ira‑t‑il? Qu'est‑ce que cela inclut?
    C'est en partie pourquoi nous avons fait ce choix. Il y a aussi que les victimes elles-mêmes disaient: « Cette personne m'a agressée sexuellement. Je veux qu'elle soit accusée d'agression sexuelle. Je ne veux pas qu'elle soit accusée d'une forme de négligence criminelle. Cela ne porte pas la même stigmatisation. » Cela a probablement été déterminant.
     Le calendrier des séances a créé une circonstance inhabituelle, en ce sens que nous avons entendu quelques témoins dans le cadre de ces consultations avant de vous entendre vous, aujourd'hui, monsieur le ministre. Ce n'est pas comme cela d'habitude. C'est peut-être un peu injuste.
    Nous avons entendu des représentants de l'Association des femmes autochtones du Canada, Mme McBride et M. Bond. Ils ont témoigné de façon très éloquente du fait que bien qu'il s'agisse d'une bonne solution à leurs yeux, le gouvernement est loin d'en faire assez compte tenu du nombre total de femmes autochtones au Canada qui sont victimes de violence.
    Ils disaient espérer que le fait que cette question ait été portée à l'attention de la Cour suprême suscite une réflexion approfondie et mène à une stratégie plus large, pour s'attaquer aux causes profondes de la violence commise contre les femmes autochtones dans ce pays. Avez-vous quelque chose à répondre à ce témoignage, qui était très émouvant?
(1140)
    Je dirais que je ne conteste rien de tout cela. Je pense que nous avons besoin d'une solution plus holistique, aux dimensions multiples, pour nous attaquer aux déterminants sociaux de la criminalité et aux facteurs qui y conduisent, tout en offrant un meilleur soutien aux victimes, en particulier dans les communautés éloignées, où l'impact est double.
    Si j'avais la solution, je l'aurais mise en place il y a longtemps. Je travaille avec mes collègues — avec vous tous — pour trouver d'autres solutions, et je suis absolument d'accord avec la teneur de ces remarques.
    L'une des choses que Mme McBride a dites très clairement, c'est qu'il y a un réel manque de ressources dans la plupart des Premières Nations pour s'attaquer aux causes profondes de la violence et qu'il faut vraiment du financement pour renforcer la capacité des organisations communautaires locales. Je sais que ce n'est pas nécessairement du ressort de votre ministère, mais cela m'a semblé assez juste, dans la mesure où elle soulignait que chaque Première Nation pouvait avoir sa propre façon de s'attaquer aux causes de la violence, mais que sans renforcement des capacités, elles n'étaient pas en mesure de le faire.
    Encore une fois, je suis d'accord avec cette observation et ce sentiment. Je fais de mon mieux pour obtenir des fonds pour des choses comme les centres de justice communautaire. J'ai eu un certain succès dans mes efforts afin d'obtenir du financement pour les centres de justice communautaire, en particulier dans le contexte autochtone, mais aussi pour les enfants, par exemple. J'essaie de convaincre mes collègues qu'il faut augmenter le financement de diverses organisations de base parce que je pense que cette observation est juste: c'est la seule façon de lutter efficacement contre ce phénomène.
    Il me reste peut-être 30 secondes, donc rapidement, avez-vous entendu des gens de ces organisations vous dire si cette mesure est suffisante depuis que nous avons adopté cette loi? En d'autres termes, avez-vous eu des échos de ceux qui ont été consultés à l'origine pour savoir s'ils estiment que la solution que nous avons proposée est suffisante?
    Je pense que nous observons tous la situation attentivement. Je pense que cette excuse a été invoquée une fois en défense, sans succès. Chose certaine, elle n'a jamais été invoquée avec succès. Évidemment, nous sommes toujours en dialogue. Je pense que les groupes qui appuyaient cette mesure au départ l'appuient toujours et que les groupes qui avaient des réserves au départ ont toujours des réserves. C'est ce que vous allez entendre pendant les séances du Comité.
    Bien sûr, nous surveillons et suivons de près nos dialogues.
    M. Randall Garrison: Je vous remercie.
    Merci, monsieur Garrison.
    Nous entendrons maintenant Mme Vecchio, qui dispose de cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je suis très heureuse d'être ici pour parler du projet de loi C‑28. Comme le ministre le sait, j'en parle beaucoup dans le cadre de mon travail de porte-parole de l'opposition en matière de condition féminine et d'égalité des sexes et de présidente du comité de la condition féminine. Nous savons que les statistiques sur la violence entre partenaires intimes montrent que la violence est souvent le fait d'hommes contre des femmes. De même, nous constatons que les statistiques sur l'intoxication extrême par l'alcool ou les drogues sont très élevées.
    Monsieur le ministre, vous avez dit que certaines organisations comme le FAEJ étaient réceptifs à cette mesure, mais nous constatons également que d'autres groupes ne le sont pas. J'ai ici une liste d'au moins 20 groupes qui ne le sont pas. Je pense que la seule chose que je veux dire, c'est qu'il faut nous assurer de tous les écouter.
    Je sais qu'il y a une certaine idée préconçue et que tous ceux qui sont ici peuvent se demander pourquoi nous étudierions un projet de loi après son adoption? Comme l'a dit M. Moore, il est important que nous le fassions. Cependant, j'espère vraiment que nous tirerons les leçons de cette expérience et que si des changements sont nécessaires, nous les apporterons, parce que la voix des femmes doit être entendue.
    Il y a deux organisations similaires, le FAEJ et l'Association nationale de la femme et du droit. L'une appuie vivement cette mesure, l'autre pas du tout. Pouvez-vous me décrire les conversations que vous avez eues avec les membres de l'Association nationale de la femme et du droit et ce qu'elles aimeraient vous voir changer?
    Je sais qu'elles déplorent qu'il n'y ait pas de préambule dans ce texte de loi. Nous sommes d'avis que le préambule reste le même, et le tribunal a conclu dans l'affaire R. c. Brown que l'objectif législatif était légitime ici, de sorte que nous n'avons pas jugé nécessaire de changer le préambule. Nous pensons que le préambule s'applique toujours, donc je suppose que nous sommes respectueusement en désaccord, mais nous comprenons tout à fait l'enjeu.
(1145)
    Monsieur le ministre, leur avez-vous parlé personnellement? Pendant les consultations, leur avez-vous parlé?
    Tout s'est passé si vite que nous avons réparti le travail entre les membres de mon équipe, mais mon équipe a parlé à des membres de l'ANFD.
    Tant qu'à parler des consultations, à combien de consultations avez-vous participé?
    J'ai participé à quelques-unes, mais à très peu, en fait, étant donné les contraintes de temps. C'est mon équipe politique qui a rencontré la plupart des personnes.
    Je comprends.
    Pour ce qui est de mon équipe, nous travaillons de manière intensive à un certain nombre de textes législatifs. Compte tenu des contraintes de temps et de l'urgence de la situation... J'ai reçu votre lettre, heureusement, de même que celle de M. Moore.
    Absolument.
    Je pense que vous et moi sommes tous deux d'accord pour dire qu'il faut colmater la brèche, parce que nous savons qu'à l'heure actuelle, environ 6 %... Quand je regarde les statistiques, je trouve que c'est très inquiétant.
    Au sujet de l'intoxication extrême, nous avons entendu la semaine dernière le témoignage de Jennifer Dunn, du London Abused Women's Centre. Quiconque me connaît sait que c'est la statistique que je cite habituellement. Elle a dit: « Selon Statistique Canada, à peine 6 % des affaires d'agression sexuelle sont signalées à la police et seulement cinq d'entre elles se rendent jusqu'au procès. »
    Je pense que cela revient parmi les préoccupations que nous entendons, car nous savons qu'il y a un problème dès l'entrée dans le système judiciaire. Quand on constate que les gens ne dénoncent pas les agressions, que faites-vous, vous et votre ministère, pour faire en sorte que le système soit plus accueillant et que les victimes de crimes soient mieux protégées lorsqu'elles se manifestent, pour qu'elles soient soutenues par le système judiciaire lui-même?
    Depuis notre arrivée au pouvoir, en 2015, nous avons apporté un certain nombre de changements aux définitions de l'agression sexuelle, notamment dans le Code criminel, afin de prévenir la revictimisation et de favoriser des interrogatoires et des contre-interrogatoires légitimes, toujours dans le but d'essayer de protéger les victimes lorsqu'elles se présentent...
    Très bien, monsieur le ministre...
    Non, c'est essentiel parce que...
    Absolument...
    Le traitement des victimes...
    Excusez-moi. Je vous arrête. Je vais...
    Laissez-moi juste finir ma réponse.
    Non, c'est bon, monsieur. C'est mon temps. En tant que présidente du comité de la condition féminine, je connais mon rôle. Je vais simplement passer à la question suivante, si vous le voulez bien.
    Mais vous m'avez posé une question. Je veux y répondre.
    Je vais passer à la question suivante, parce que mon temps est très court.
    M. David Lametti: D'accord.
    Mme Karen Vecchio: Je m'intéresse à la formation des juges.
    Je sais que la marraine du projet de loi C‑233 est présente dans la salle aujourd'hui, et je sais que vous avez vous-même déposé un projet de loi. Comment ces mesures sont-elles accueillies par les juges? Je pense que l'une des choses qui me préoccupent le plus, c'est que lorsque les gens entrent dans le système, ils n'ont pas l'impression qu'ils vont obtenir ce dont ils ont vraiment besoin. Les victimes n'osent pas se manifester parce qu'elles ne font pas confiance au système.
    Où en sommes-nous en matière de formation des juges?
    Nous venons d'adopter un projet de loi qui oblige tout nouveau juge nommé par le gouvernement fédéral à suivre une formation qui porte notamment et principalement sur les agressions sexuelles. Cela fait partie du processus de mise en candidature. Les candidats doivent suivre cette formation pour être nommés juges. Ils obtiennent leur nomination juste après.
     Cela se passe bien. C'est l'Institut national de la magistrature qui s'en occupe, et nous...
    Puis‑je vous poser une petite question à ce sujet?
    Ils doivent suivre cette formation. Quelle est la durée du cours? Le contenu en est‑il continuellement mis à jour? Par exemple, les médias sociaux n'existaient pas il y a 20 ans, et Dieu sait qu'ils ont changé nos vies depuis. À quelle fréquence doivent-ils suivre ce cours? Une fois qu'ils l'ont suivi une première fois, doivent-ils le refaire? Doivent-ils continuer d'améliorer leurs compétences et leurs connaissances en matière d'agression sexuelle et sur les questions connexes?
    Nous avons déposé ce projet de loi précisément pour que les gens acceptent de suivre cette formation avant de devenir juges, parce qu'une fois qu'une personne est juge, le principe de l'indépendance judiciaire est tel que nous ne pouvons pas la forcer à suivre une formation. Les juges en chef font de leur mieux pour demander à leurs juges de suivre des cours de perfectionnement. Cela a un effet positif, parce que cela indique que c'est important.
    Enfin, je pense que cela incite aussi les juges des cours provinciales, qui sont saisis de la plupart des affaires pénales au Canada, à se former en ce sens. Nous sommes véritablement en train d'établir une nouvelle norme.
    De plus, l'Institut national de la magistrature est reconnu mondialement pour la formation qu'il offre aux juges. Il forme des juges du monde entier, y compris du Canada. Il met continuellement son offre à jour.
    Merci, madame Vecchio.
    Je donnerai maintenant la parole à M. Naqvi pour cinq minutes.
    Bonjour, monsieur le procureur général. Je vous remercie d'être ici.
    Je sais que mes collègues vous ont posé des questions sur les parties qui ont été consultées au sujet de ce projet de loi. Pourriez-vous en déposer la liste au Comité, afin que nous l'ayons en main?
    Certainement.
    Ce serait formidable. Je vous remercie beaucoup.
    J'ai écouté avec une attention toute spéciale vos commentaires sur la désinformation lorsque la Cour suprême a rendu sa décision. Les choses que j'ai entendues dans les cercles juridiques au lendemain de cette décision sont très préoccupantes.
    Pouvez-vous nous dire ce que vous ont dit les personnes avec qui vous avez collaboré et les personnes que vous avez consultées sur l'incidence de cette décision de la Cour suprême et le message qu'elle a envoyé à la société en général?
(1150)
    Je vous remercie de cette question.
    En fait, c'est probablement parmi les principaux facteurs à nous avoir motivés à agir rapidement. Il y a eu beaucoup de désinformation sur les médias sociaux en particulier, et nous en avons tous vu des bribes sans en voir l'intégralité. Tout à coup, si vous étiez intoxiqué, c'était comme si vous aviez pigé la carte « Sortez de prison sans frais ». C'était un laissez-passer.
    La désinformation a explosé. Nous devions corriger cela rapidement. Même s'il s'agissait d'un cas rare et même si c'était faux, cela n'avait aucune importance, car les gens croyaient que c'était vrai.
    En comblant cette lacune, qui était certes minime, nous avons pu accentuer le message général, à savoir que si vous vous soûlez, vous serez tenu responsable. C'est un message d'une importance cruciale que les gens avaient besoin d'entendre.
    Honnêtement, j'aurais préféré que nous n'ayons pas à le faire. Si seulement il n'y avait pas un tel degré de désinformation. Qu'elle soit erronée ou délibérée n'a pas d'importance, puisqu'elle existe. Nous devions à ce moment‑là faire obstacle à ce message, et nous devons continuer de le faire. Nous avons tous la responsabilité de le faire.
    Colmater cette brèche nous a aidés, à cette fin. Et agir rapidement nous a aidés à renforcer encore plus ce message.
    Merci.
    Je pense que c'est un message important et ferme qui vise à prévenir la violence fondée sur le sexe. Le Parlement a agi à l'unisson et très rapidement; tous les partis politiques ont uni leurs forces, ce qui en dit long sur la volonté collective de défendre les intérêts de nos électeurs et de tous les Canadiens.
    Je suis également très intéressé par la façon dont vous avez décidé du recours à prendre. Certains vous ont demandé d'invoquer la clause dérogatoire. Vous avez choisi de ne pas le faire, et je vous en sais gré. Vous avez choisi une solution assez chirurgicale et méthodique.
    Pouvez-vous nous parler des délibérations qui se tiennent au sein de votre ministère sur des questions de nature constitutionnelle comme celles‑ci, quand il faut déterminer la façon de corriger une loi en fonction d'un arrêt de la Cour suprême du Canada?
    Je vous remercie de cette question. C'est une question intéressante sur le processus.
    Tout d'abord, je suis entouré d'un excellent groupe d'avocats, tant au ministère de la Justice que dans mon équipe politique. Nous sommes généralement très attentifs à cela.
    La Cour suprême du Canada nous a donné une feuille de route à suivre pour ce genre d'affaires. La clause dérogatoire est envisageable. Elle fait partie de la Constitution. Je crois qu'elle ne doit être utilisée qu'en dernier recours — c'était la volonté des auteurs de la Constitution en 1982 — et seulement lorsqu'il n'y a pas d'autres options, parce qu'avec la clause dérogatoire, on empiète sur les droits des gens. En l'espèce, la Cour suprême nous a donné deux moyens de le faire sans empiéter sur les droits des gens, et nous avons choisi l'un d'eux.
    Par ailleurs, cette disposition particulière avait le mérite d'avoir été examinée depuis l'affaire Daviault en 1993. Nous étions au fait d'un corpus d'opinions existantes émises par des personnes qui avaient déjà estimé que cette disposition particulière était inconstitutionnelle, ce qui nous donnait une longueur d'avance.
    À partir de là, les processus habituels au sein du ministère de la Justice et le processus de consultation nous ont permis de proposer quelque chose assez rapidement en nous appuyant sur la feuille de route de la Cour suprême.
    Je suis très sensible à cela. Je comprends la réflexion qui est nécessaire pour examiner les arrêts de la Cour suprême et s'y conformer, ainsi que l'approche chirurgicale que vous avez adoptée dans ce cas particulier, au lieu d'utiliser une méthode générale pour remédier à la situation.
    Je vous interroge à ce sujet parce que le grand public n'est pas au fait des démarches complexes que le gouvernement, et en particulier le ministère de la Justice, a dû entreprendre. Je vous en remercie sincèrement.
    Merci, monsieur Naqvi. Votre temps est écoulé.
    La parole est maintenant à M. Fortin, qui dispose de deux minutes et demie.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, j'aimerais obtenir votre avis sur une question un peu plus large que le projet de loi C‑28.
     Lorsqu'on étudie certains aspects de la législation en matière de droit criminel, le principal écueil est souvent que les victimes ont l'impression de ne pas avoir été consultées et de ne pas être prises en compte dans le processus judiciaire.
    En examinant le projet de loi C‑28 sur l'intoxication volontaire extrême, je me dis que les critiques les plus virulentes à son égard viendront sans doute des victimes, et ce, probablement avec raison. Elles vont dire avoir été violées, blessées ou autre par une personne, homme ou femme, prétextant avoir été dans un état d'intoxication extrême involontaire. Cet aspect du projet de loi risque de prêter le flanc à des critiques de la part des victimes. L'avez-vous examiné?
     Les victimes de ces crimes, surtout de crimes violents, ne devraient-elles pas être prises davantage en considération dans le processus judiciaire? Par exemple, elles pourraient être parties au procès et participer aux décisions si elles le souhaitent. Je sais que l'administration de la justice relève des provinces et vous comprendrez que je ne veux pas vous amener sur ce terrain. Cependant, en matière de législation de fond en droit criminel, n'y a-t-il pas certains aspects qui pourraient être couverts par le gouvernement fédéral, par exemple dans le Code criminel, afin que les victimes soient davantage prises en considération?
(1155)
    Je vous remercie de la question.
    Je crois que c'est exactement ce que nous sommes en train de faire. Nous sommes en train de donner aux victimes un maximum de possibilités pour faire reconnaître la culpabilité de quelqu'un en fonction des normes connues de notre système juridique.
    Il est difficile d'établir qu'un accusé est en état d'intoxication extrême en fonction des normes actuelles, que nous sommes donc en train de renforcer. Nous tentons de minimiser les possibilités qu'une autre défense soit invoquée une fois l'intoxication extrême établie. Je crois donc...
    Les victimes ne devraient-elles pas participer...

[Traduction]

    Merci, monsieur Fortin. Malheureusement, votre temps est écoulé.
    Monsieur Garrison, vous disposez de deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, je vais vous poser une question que je n'avais pas l'intention de vous poser, mais nos collègues ont élargi la portée de la discussion.
    Nous venons de recevoir un rapport selon lequel la violence conjugale est en hausse pour la septième année consécutive, et la gravité de cette violence augmente aussi. En 2019, par exemple, 77 homicides ont été commis par des partenaires intimes. En 2020, il y en a eu 84, et en 2021, 90. Ce comité a recommandé à deux reprises au gouvernement un ensemble de mesures visant à lutter contre la violence conjugale, et l'une des choses suggérées était de criminaliser le contrôle coercitif.
    Pensez-vous que la criminalisation du contrôle coercitif dans les relations entre partenaires intimes serait un outil utile pour combattre la violence conjugale?
    Tout d'abord, en ce qui concerne la violence conjugale, j'ai les mêmes préoccupations que tout le monde. Nous avons essayé un certain nombre de mesures. Nous sommes ouverts à un certain nombre de mesures, et je suis ouvert à la création d'une infraction criminelle de contrôle coercitif et à un examen de ce qui se fait ailleurs. Je sais que c'est ce que faisait le Comité, et c'est ce que nous devons faire. Je suis évidemment ouvert à cette idée et je pense que cela pourrait être un ajout très utile aux outils dont nous disposons.
    En ce qui concerne les mesures pangouvernementales — je déteste le terme « pangouvernemental » —, l'un des problèmes semble résider dans les différentes façons dont les provinces offrent des services et du soutien aux victimes de violence conjugale.
    A‑t‑on envisagé la création d'un groupe de travail qui se pencherait sur les meilleures pratiques et les normes minimales pour les provinces et territoires du pays?
    Je serais certainement ouvert à cette idée. Je reviens tout juste d'une réunion fédérale-provinciale-territoriale des premiers ministres, et ils nous ont félicités pour ce projet de loi — nous tous collectivement, pour avoir travaillé ensemble —, alors merci.
    Nous avons également discuté, entre autres sujets, de la façon dont nous soutenons... Le Québec, par exemple, fait l'essai de tribunaux spécialisés, ce qui me semble être une bonne idée. Une grande partie de l'administration de la justice est entre les mains des provinces et des territoires, alors nous sommes là en tant que partenaire désireux d'aider, mais je serais ouvert à des idées qui nous permettraient de faire reconnaître les meilleures pratiques dans tout le pays et de faire respecter ces normes.
(1200)
    Merci, monsieur le ministre.
    Merci, monsieur Garrison.
    Il nous reste un tour. Je n'ai pas le nom du conservateur qui est censé prendre la parole, mais je vais demander au greffier de nous dire qui souhaite utiliser les cinq premières minutes.
    C'est M. Caputo. Je vous fais mes excuses.
    Je l'ai peut-être.
    Monsieur Caputo, je suis désolé. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre, d'être ici. C'est toujours un plaisir de vous recevoir.
    J'aimerais revenir sur vos premières affirmations, à savoir que l'intoxication n'excuse pas les agressions sexuelles. Je pense que c'est une chose sur laquelle nous sommes tous d'accord autour de cette table. Ce problème est une véritable épidémie, non seulement en ce qui concerne l'éducation, mais aussi la fréquence des agressions.
    Ma collègue, Mme Diab, a abordé ce point, et je veux éclaircir les choses. J'ai interprété votre déclaration comme étant une déclaration d'ordre moral: si vous avez bu quelque chose, ou si vous avez beaucoup bu, cela ne vous excuse pas d'avoir porté atteinte à la dignité sexuelle d'une personne et de ne pas avoir obtenu son consentement pour le faire. En réalité, ce que nous avons — et l'article 33.1 le reconnaît —, c'est une défense d'intoxication extrême. Elle est peut-être rarement utilisée, mais elle existe quand même.
    Est‑ce que ce que je dis a du sens?
    Vous savez, en tant qu'ancien procureur, que cela n'est possible que dans des circonstances très rares et particulières, parce que l'accusé doit d'abord établir, selon le test de Daviault, qu'il était dans un état d'intoxication extrême. Il doit le faire en s'appuyant sur des preuves d'expert, et ce n'est qu'une fois qu'il l'a fait que la Couronne peut le réfuter. Si c'est ce qui se produit, sa défense est terminée. Sinon, il passe alors au point dont nous discutons aujourd'hui, c'est‑à‑dire à la norme applicable à la négligence criminelle concernant la façon dont vous vous êtes trouvé dans cet état.
    Par conséquent, seul un ensemble de circonstances très rares pourrait mettre l'accusé dans cette situation. Selon la Cour et la jurisprudence — et nous l'avons dit autour de cette table —, l'intoxication ne peut pas servir de défense dans le cas de crimes comme l'agression sexuelle. Comme je l'ai dit — et vous le savez en tant qu'ancien procureur —, il s'agit d'une défense fondée sur l'intention générale. Ce ne sera donc pas une défense, et il faut que ce soit clair.
    Je retiens votre argument parce qu'à la base, je ne comprends pas — et ma perspective est celle d'un être humain et non d'un avocat — comment quelqu'un peut être dans un état d'intoxication extrême proche de l'automatisme, c'est‑à‑dire ne pas savoir ce qu'il fait, où il va et ce qu'il dit, et quand même commettre une agression sexuelle. Sur un plan humain élémentaire, je ne comprends pas comment cela est possible.
    J'ajouterai que s'il s'agit d'alcool, il vous serait probablement impossible d'atteindre cet état et de continuer à fonctionner, n'est‑ce pas? Il s'agit ici de certains types de drogues, et nous sommes en train de mettre au point ces normes. Encore une fois, l'exemple typique que j'utilise est le médicament sur ordonnance que vous prenez parce que le médecin vous dit de le prendre, et il n'y a aucun moyen de savoir que cela se produirait. S'il y a des effets secondaires potentiels connus et que vous les connaissiez, cela annule probablement votre défense.
    La raison pour laquelle je parle d'intoxication par l'alcool est que, si je me souviens bien, c'était le cas dans l'affaire Daviault.
    Cet aspect me préoccupe beaucoup. C'est pourquoi, il y a deux semaines, j'ai proposé le projet de loi C-299, qui porterait la peine maximale à l'emprisonnement à vie pour toutes les infractions sexuelles, ou plutôt presque toutes ces infractions sexuelles, qui font l'objet d'une mise en accusation. On tiendrait ainsi compte de l'épidémie et de la gravité de la situation, ainsi que du fait que les victimes elles-mêmes sont souvent condamnées à un emprisonnement à vie de nature psychologique après avoir été agressées sexuellement.
    Est‑ce que vous envisageriez d'appuyer cela?
    Je serai heureux de l'examiner. Comme vous le savez, j'ai un problème avec les peines minimales obligatoires. Nous avons augmenté les peines maximales dans d'autres domaines. Je m'engage à examiner votre projet de loi avec un esprit ouvert.
    Merci. Nous pourrions en discuter à une date ultérieure.
    L'un des problèmes que nous rencontrons avec les nouvelles lois — comme vous le savez —, c'est que nous avons 10 provinces et 3 territoires, et que la loi sera mise à l'épreuve dans chacun d'entre eux. Elle sera mise à l'épreuve dans les tribunaux de première instance. Elle ira ensuite en cour d'appel, puis à la Cour suprême du Canada. Le coût de ces litiges se chiffre probablement en centaines de millions de dollars.
    Il y a un moyen de contourner cette situation, et c'est par un renvoi à la Cour suprême du Canada, laquelle pourrait trancher la question de savoir si l'article 33.1 modifié est, à son avis, constitutionnel ou inconstitutionnel. Est‑ce qu'on a pensé à cela? L'une des choses qui ressortent des consultations, à mon avis, et dont nous parlons aujourd'hui, c'est l'incertitude. Un renvoi nous apporterait la certitude.
    Ce que je veux savoir, c'est si on a pensé à un renvoi à la Cour suprême du Canada.
(1205)
    Je vais être honnête: dans ce cas particulier, non, parce que le tribunal nous a donné une feuille de route très claire. Nous avions le choix entre A et B, et nous avons choisi B. C'est aussi parce qu'il y a très peu d'affaires pour lesquelles cette défense particulière est invoquée. En 20 ans, il y en a eu moins de 10, si je ne m'abuse.
    Je pense qu'il est très peu probable que nous voyions quelqu'un invoquer cette défense avec succès, sauf dans des circonstances extrêmes, ou dans les circonstances les plus rares, en fait. Je ne veux pas dire « extrêmes ».
    Merci, monsieur Caputo.
    Pour terminer, Mme Brière dispose de cinq minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, merci d'être des nôtres aujourd'hui.
    Nous venons de terminer l'étude de la Charte canadienne des droits des victimes. Pensez-vous que le nouvel article 33.1 du projet de loi C‑28 établit un juste équilibre entre les droits de l'accusé et la protection de la victime?
    Merci de votre question.
    Je crois que oui, sur le plan juridique. Comme je viens de le dire à M. Fortin, nous sommes justement en train d'élargir le plus possible le champ d'action permettant d'établir la culpabilité d'une personne intoxiquée.
    Il y avait évidemment beaucoup plus d'éléments dans les réponses que j'ai données à M. Garrison. Il faut en faire plus pour appuyer les victimes.
    Ce nouvel article prévoit que, pour décider si la personne s'est écartée de façon marquée de la norme de diligence, le tribunal pourra prendre en compte toute circonstance pertinente, notamment ce que la personne a fait afin d'éviter les risques.
    À quelles circonstances fait-on référence? Pensez-vous que cette précision permettrait par exemple aux tribunaux de prendre en compte la situation d'accusés faisant partie d'un groupe marginalisé et disproportionnellement visé par le système pénal, ou de personnes autochtones ou racialisées?
    La réponse courte est oui.
    Il faut toujours faire une analyse contextuelle des circonstances au moyen d'une norme objective, comme celle de la responsabilité criminelle.
    Les facteurs possibles sont le milieu, la nature et la quantité des substances consommées, l'état d'esprit de l'individu, ainsi que les mesures prises pour minimiser le risque, s'il y a lieu. Cependant, on laisse les tribunaux déterminer si la personne répond à la norme objective. Cette façon de faire a bien fonctionné dans le passé. Ces cas sont assez rares, et je crois que les tribunaux rempliront bien leur devoir.
    En pratique, sur le terrain, qu'est-ce que cela va exiger de la part des policiers impliqués et des procureurs en ce qui a trait au fardeau de la preuve? Quelle charge de travail cela va-t-il leur ajouter?
    Avant tout, l'accusé aura l'obligation de présenter une preuve d'expert confirmant qu'il était dans un état d'intoxication extrême. Ensuite, il reviendra au procureur d'établir que ce n'était pas le cas ou que l'accusé s'est écarté de la norme selon l'article 33.1 et qu'il ne peut donc pas invoquer ce motif de défense.
    Les procureurs connaissent déjà ces normes et y sont habitués. Cela devrait donc assez bien fonctionner. Les juges y sont également habitués, surtout depuis l'arrêt Daviault et la version précédente de l'article 33.1. La précision apportée par le projet de loi C‑28 facilitera leurs délibérations.
(1210)
     Dans quel autre contexte du Code criminel utilise-t-on cette norme de négligence criminelle prévisible?
    On l'utilise dans le cas d'infractions découlant de comportements précis, comme la conduite dangereuse ou l'omission de fournir les soins nécessaires à la vie, notamment des jeunes enfants. Cette norme est connue et utilisée. Je crois qu'on vise ici le même type d'infractions.
    Merci, monsieur le ministre.
    J'ai terminé, monsieur le président.

[Traduction]

    Merci, madame Brière.
    Je tiens à remercier M. Lametti d'être venu et de s'être généreusement attardé un peu plus longtemps, car nous avons commencé avec un peu de retard. Nous vous remercions.
    Je pense que ses collaborateurs vont rester avec nous. Je vais donc lui donner une minute pour partir.
    De la Section de la politique en matière de droit pénal, nous accueillons Matthew Taylor, avocat général et directeur, et Joanne Klineberg, avocate-conseil. Je pense que Mme Klineberg est en vidéoconférence. De la même section, nous avons également Chelsea Moore, avocate. Ce sont nos témoins pour la dernière heure.
    Merci encore une fois, monsieur Lametti.
    La parole est maintenant à M. Caputo, sur Zoom, pour le premier tour de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup de votre présence, madame Moore et monsieur Taylor. J'avais une autre question pour le ministre, alors c'est à vous que je vais la poser. Elle concerne le renvoi.
    Je ne suis absolument pas un expert des litiges constitutionnels. D'après ce que j'ai compris — et corrigez-moi si je me trompe —, si on veut contester la loi, il n'est pas nécessaire de se fonder sur le cas précis dont le tribunal est saisi. La contestation peut être fondée sur un cas hypothétique raisonnable. Est‑ce que c'est ce que vous comprenez aussi?
    Oui.
    Le ministre a effectivement souligné — et je paraphrase ses propos — que ces cas seront assez rares, mais qu'il n'est pas nécessaire que le tribunal soit saisi d'un cas hypothétique raisonnable, compte tenu de la rareté des cas; on peut simplement plaider dans ce rare cas.
    Est‑ce que vous me suivez? D'accord.
    Il n'est pas simplement question d'une cause rare qui va être plaidée, ou même d'une cause rare qui va se traduire par une invalidation; il est possible qu'une cause rare soit plaidée et présentée comme un cas hypothétique raisonnable dont la Cour n'est pas saisie.
    Est‑ce que cela ne signifie pas que nous devrions peut-être faire un renvoi à la Cour suprême du Canada, afin de nous assurer que nous faisons bien les choses? J'ai évidemment voté en faveur de la loi, alors vous connaissez ma position, mais je veux simplement avoir la loi la plus rigoureuse possible.
    J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet, s'il vous plaît.
    Je pense que le ministre Lametti a déjà parlé du processus de réflexion qu'il a suivi pour prendre la décision de présenter le projet de loi et de ne pas faire un renvoi à la Cour.
    Comme il l'a dit, la Cour suprême et l'arrêt Brown nous ont fourni une sorte de feuille de route. Cela a évidemment influencé le travail que le ministère a fait pour aider le gouvernement à présenter le projet de loi, en notant que les considérations relatives à la Charte sont détaillées dans l'Énoncé concernant la Charte. Comme vous le savez, la loi adoptée avec le projet de loi C-28 s'inspire de la loi qui l'a précédée.
    La dernière chose que je pourrais dire — et mes collègues peuvent intervenir —, c'est que la norme en matière de négligence criminelle est un critère minimal utilisé pour établir la culpabilité de l'accusé qui est bien compris et accepté, et qui est également fondé sur les directives de la Cour suprême.
    Je pense que tous ces éléments pris ensemble fournissent le contexte qui explique la voie choisie.
(1215)
     Merci.
    Jesuis désolé. Je n'ai pas souhaité la bienvenue aux témoins qui comparaissent par vidéoconférence. Je regarde l'écran maintenant. Mes plus plates excuses pour cet oubli.
    Vous avez parlé de la feuille de route. Comme mon collègue, M. Garrison, l'a fait remarquer, il y avait deux avenues, et nous en avons emprunté une. Je répète que j'ai voté en faveur du projet de loi, mais je m'en voudrais de ne pas poser une question qui mérite d'être soulevée.
    Je vous cite un extrait du paragraphe 98 de la décision Brown:
Le problème du caractère volontaire pourrait peut-être être évité si le Parlement créait une infraction d'intoxication dangereuse ou d'intoxication causant des lésions dont l'un des éléments serait l'intoxication volontaire. Dans le cas de cette infraction hypothétique, l'essence de l'infraction est l'intoxication volontaire, et non l'acte involontaire qui s'ensuit.
    En voici un autre:
Ce n'est toutefois pas ce que le Parlement a édicté, en ce sens que l'article 33.1 expose l'accusé au risque d'une déclaration de culpabilité à l'égard de l'infraction visée au paragraphe 33.1(3) et non de l'intoxication extrême, qui n'est pas en soi un acte illégal.
    Ces extraits constituent pratiquement une invitation de la Cour à suivre cette avenue. Je sais très bien, comme vous tous dans cette salle, que nous adhérons au principe de souveraineté parlementaire voulant que nous prenions nos propres décisions. Je me souviens également des commentaires du ministre, qui a souligné qu'il faudrait porter des accusations pour deux infractions au lieu d'une. Il y aurait tout d'abord l'agression sexuelle, puis la négligence criminelle causée par l'intoxication extrême, à savoir l'agression sexuelle.
    Y avait‑il des préoccupations concernant la possibilité que la Cour nous invite à aller dans cette direction, ou qu'elle nous dise, peut-être, que c'était la voie la plus sûre?
    J'aimerais entendre vos commentaires à ce propos.
    Comme vous l'avez mentionné, deux choix ont été fournis par la Cour suprême du Canada, et le Parlement a choisi une de ces solutions.
    Quant à l'infraction distincte, l'option dont vous venez de parler, ce serait une infraction distincte d'intoxication dangereuse, par exemple. La personne ne serait pas reconnue coupable de l'infraction de violence sous-jacente, telle que l'agression sexuelle ou les voies de fait, mais plutôt d'intoxication dangereuse.
    Lorsque cette question a refait surface à la suite de la rédaction de la disposition originale en 1995, la similitude avec les peines à rabais pour ivresse a suscité des préoccupations, puisque l'individu n'allait peut-être pas porter les mêmes stigmates ou écoper de la même gamme de sentences que s'il était inculpé de l'infraction sous-jacente d'agression sexuelle.
    L'autre problème avec l'infraction distincte est que seul l'accusé aurait en sa possession la preuve de son intoxication, en l'occurrence les substances qu'il a consommées. Comme la Couronne ne serait pas forcément en possession de cette preuve, ce serait très ardu pour elle de prouver l'intoxication dangereuse.
    Je crois que nous avons dépassé le temps. Je ne voulais pas vous interrompre.
    Merci pour les clarifications. Je vous remercie de votre temps.
    Merci, monsieur Caputo.
    Nous passons maintenant à Mme Dhillon pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais continuer avec Mme Moore. Vous avez expliqué à mon collègue que seul le défendeur serait en possession de la preuve, et non pas le poursuivant.
    Pourriez-vous nous dire quelle serait cette preuve concrètement? Est‑ce que ce serait des indications d'intoxication extrême comme des tests sanguins?
    La preuve pourrait en effet être tirée de tests sanguins. Il est peu probable que l'accusé dispose de ce type de preuve. Ce serait probablement lors de son témoignage que l'accusé pourrait divulguer ce qu'il a consommé. D'autres personnes pourraient témoigner sur l'état dans lequel se trouvait l'individu à ce moment‑là. C'est parce qu'il est en possession de ce type de preuve que le prévenu doit établir la prépondérance des probabilités et présenter un témoignage d'expert. Voilà pourquoi la règle de la common law dit que l'accusé doit d'abord prouver qu'il était dans cet état pour que la Cour accepte la défense.
(1220)
    Cela ressemble beaucoup à une défense d'alibi, lorsque l'accusé doit prouver la présence d'un facteur atténuant.
    Oui. Pour la défense d'intoxication extrême, il incombe à l'accusé de prouver qu'il était dans cet état.
     Pourriez-vous donner une explication pour les non-initiés? J'ai entendu un témoin parler, dans la même veine que ce qu'a dit notre collègue, Mme Diab, de la différence entre l'intoxication et l'intoxication extrême. J'ai constaté également que vous employiez indistinctement le terme intoxication dangereuse. Ces trois termes désignent-ils trois différents niveaux d'intoxication?
    J'ai employé le terme « intoxication dangereuse » parce que c'est le terme employé dans le raisonnement de la Cour suprême, qui constitue une des deux démarches pouvant mener à une infraction distincte. Il existe par contre certaines règles dans la common law sur les différents degrés d'intoxication, qui ont été établies dans une décision de 2007, R. c. Daley, si je ne m'abuse. Cette décision de la Cour suprême du Canada passe en revue les trois degrés d'intoxication pertinents en droit criminel.
    L'intoxication légère n'est jamais invoquée en défense pour les crimes commis au Canada. En revanche, l'intoxication avancée peut l'être à l'égard des crimes d'intention spécifique, comme le meurtre. Enfin, l'intoxication extrême peut être invoquée en défense à l'égard de crimes d'intention générale, c'est‑à‑dire des crimes violents tels que l'agression sexuelle ou les voies de fait. Ce sont les trois degrés d'intoxication prévus dans la common law.
    Je souligne que même l'intoxication avancée, où l'individu est ivre au point de ne plus pouvoir lacer ses chaussures ou de prendre le volant ne peut pas constituer une défense dans la vaste majorité des infractions d'intention générale avec violence du Code criminel.
    Comme le ministre l'a mentionné, il est très rare que ce type de défense soit invoqué et accepté.
    C'est exact. Cela s'explique par le fardeau de la preuve qui pèse sur l'accusé, par exemple l'obligation de présenter une preuve d'expert, mais aussi par le critère à remplir. L'accusé doit, en effet, démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu'il était, selon toute vraisemblance, dans un état d'intoxication extrême au moment où les actes de violence ont été commis. La prépondérance des probabilités est le critère le plus rigoureux du droit criminel à remplir pour se prévaloir d'un moyen de défense. Comme ce critère est très difficile à satisfaire, ce type de défense peut rarement réussir dans le cas dont nous parlons.
    Par ailleurs, comme l'ancienne version de l'article 33.1, entrée en vigueur en 1995, empêchait ce type de défense de réussir, très peu de données ont été produites au cours des 20 dernières années.
    C'est dans l'affaire R. c. Brown que la Cour suprême a parlé des deux avenues.
    Pourriez-vous énumérer les avantages et les inconvénients?
    Je regrette, mais vous parlez des avantages et des inconvénients de...
    Je parle de la création de l'infraction d'intoxication dangereuse ou de l'infraction d'intoxication causant un préjudice.
    Je ne peux pas vraiment parler des avantages de l'option stratégique qui a été retenue. Comme je l'ai mentionné, l'infraction distincte ne permettrait pas nécessairement d'infliger la même échelle de peines ou le même niveau de stigmate que le permettrait l'option proposée à l'article 33.1.
    Ce sera tout. Merci.
    Merci.
    Je demanderais à tous les témoins de donner un exemple de cas où ce type de défense a été accepté, et peut-être dans quel état était l'individu, comparativement aux cas où cette même défense a été rejetée. Je voudrais seulement avoir un exemple concret.
    À ma connaissance, ce moyen de défense a toujours été rejeté depuis l'adoption de l'article 33.1 en 1995. Il a été invoqué plusieurs fois, mais sans succès.
    Dans environ 12 à 15 cas, la Cour suprême a examiné la constitutionnalité de la disposition, ce qui s'est soldé par les décisions Brown, Sullivan et Chan. Je pense que dans six ou sept de ces cas, la disposition a été abrogée et la défense a pu reprendre. Dans tous les cas, toutefois, la défense a été rejetée au fond. Depuis l'entrée en vigueur de la disposition initiale en 1995, il n'y a eu aucun cas, avant Brown, Sullivan et Chan, où le moyen de défense a réussi.
(1225)
    Merci, madame Dhillon.
    Nous allons passer à M. Fortin pour six minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je vais poursuivre dans le même ordre d'idées que Mme Dhillon. En fait, elle m'a un peu volé ma question.
    Ne trouvez-vous pas un peu paradoxal qu'un individu s'étant volontairement placé dans une situation d'intoxication extrême, une situation très rare selon les dires du ministre, puisse commettre un crime, mais prétendre ensuite qu'il ne peut pas en être reconnu coupable puisqu'il était dans un état d'intoxication extrême?
    Dans le cas d'une intoxication involontaire, comme si quelqu'un mettait de la drogue dans mon verre, je peux comprendre. Par contre, on parle ici d'un individu qui s'est volontairement intoxiqué, pas de quelqu'un qui a pris cinq verres de vin et dont l'alcoolémie dépasse la limite permise de 0,08 % pour conduire, mais de quelqu'un en état d'intoxication extrême et qui s'est volontairement placé dans cette situation.
    Je sais qu'on peut invoquer ce motif de défense sans succès. Cependant, avez-vous des exemples de cas où on pourrait l'invoquer avec succès? J'ai beaucoup de difficulté à en imaginer.
    Je vous remercie de votre question. Je vais demander à ma collègue Mme Klineberg d'y répondre.
     Je parle de la loi actuelle, après l'entrée en vigueur du nouvel article 33.1. Il est vrai que c'est un peu paradoxal, parce que l'accusé doit prouver à la fois qu'il était dans un état d'automatisme et que le risque de se retrouver dans un tel état n'était pas prévisible.
    Selon ce que nous comprenons de l'arrêt Brown et après l'entrée en vigueur du nouvel article 33.1, les seules circonstances pouvant mener à une déclaration de non-culpabilité, signifiant donc que le motif de défense a été invoqué avec succès et qu'il n'y a pas eu de preuve de négligence, sont celles où il est démontré qu'une personne raisonnable n'aurait pas pu prévoir que se produirait un état où elle n'a pas conscience de ce qu'elle fait ou n'est pas en contrôle de ses actions. En d'autres mots, cet effet ou ces conséquences sur son état mental n'étaient pas prévus ni raisonnablement prévisibles. Ce sont ces circonstances qui ont motivé la Cour suprême à conclure à une violation des droits en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés.
    Bien que ce soit possible d'un point de vue théorique, il est extrêmement improbable qu'une personne raisonnable ne prévoie pas de tels risques.
    Merci.
    Je conviens que c'est possible sur le plan théorique, mais, encore une fois, sur le plan pratique, je n'arrive pas à imaginer une telle situation. Je me demande donc si nous ne sommes pas en train de travailler sur quelque chose de purement virtuel et intéressant pour les professeurs de droit dans les facultés. Sur le plancher des vaches, comme on dit, il va être à peu près impossible d'invoquer ce motif.
    Je comprends de vos témoignages que vous n'avez pas, vous non plus, d'exemples à me donner de situations où on aurait valablement pu invoquer une telle défense d'intoxication volontaire extrême. Il n'y a pas d'exemple connu, si je comprends bien.
(1230)
     Tout dépend des faits, de la preuve et de la qualité de la preuve. Il est donc difficile de présumer un verdict ou le déroulement du procès, parce que, si un petit élément de la preuve est changé, le verdict pourrait changer. C'est vraiment un calcul qui doit se faire à chaque procès en fonction des éléments de preuve qui sont présentés et de leur qualité.
     Nous pensons qu'il est très rare que quelqu'un soit en mesure de prouver qu'il était dans un état d'intoxication extrême sans que la Couronne puisse établir le risque de se retrouver dans un état semblable ou de commettre un acte violent à l'endroit des personnes présentes.
    Je vous remercie.
    En quelques secondes...

[Traduction]

     Merci, monsieur Fortin. Malheureusement, votre temps est écoulé.
    Nous passons ensuite à M. Garrison pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'ai une question sur les données sur le nombre de cas. Je pense que vous avez déjà répondu à cette question, mais je voudrais vérifier si j'ai bien compris.
     Depuis son entrée en vigueur, la constitutionnalité de l'article 33.1 a été examinée dans seulement 12 à 15 cas. Aucun de ces cas n'a eu gain de cause, sauf les trois plus récents. Est‑ce exact?
     À notre connaissance, c'est exact.
    Le ministre a dit que depuis l'entrée en vigueur de cette disposition, la Cour n'a été saisie d'aucun cas. J'aimerais que vous me confirmiez la véracité de cette information.
    C'est exact. Le nouvel article 33.1 n'a été utilisé dans aucun cas qui a été publié.
    Excellent. Merci.
    J'aimerais poser une question sur le libellé du nouvel article, qui dit:
[Le tribunal] prend aussi en compte toute circonstance pertinente, notamment ce que la personne a fait afin d'éviter ce risque.
    J'ai deux questions au sujet de cet article.
    Sur les mesures prises par la personne afin d'éviter ce risque, y a‑t‑il des normes juridiques sur l'évitement d'un risque que nous pourrions utiliser?
    Comme la disposition n'a pas encore été testée et que les cas de négligence ont tendance à être largement tributaires des faits, ce que le tribunal juge pertinent au chapitre des mesures prises par l'accusé varie selon les circonstances. Les tribunaux peuvent examiner certaines choses comme l'état de l'accusé à l'époque.
    Sur les mesures prises, nous pourrions nous attendre à ce que la personne qui consomme des substances intoxicantes veuille connaître les effets possibles de ces substances et les précautions à prendre lors de leur consommation. Les tribunaux peuvent s'attendre à ce que la personne qui consomme des substances intoxicantes retire ses armes. Ils pourraient s'attendre à ce que la personne s'isole ou demande à une personne sobre de la superviser, par exemple.
    Voilà le genre de choses que les tribunaux vont examiner.
    Ma deuxième question porte sur des situations encore plus rares, mais lorsqu'il est question des circonstances pertinentes, qu'en est‑il du lien avec les principes de l'arrêt Gladue? Autrement dit, comme ces principes exigent que les juges examinent les circonstances pertinentes, je voudrais savoir s'ils entreraient en ligne de compte dans cette infraction.
    Je vais commencer. Si j'ai bien compris votre question, je pense que Mme Moore en a peut-être déjà parlé, ou le ministre Lametti.
     L'évaluation qui permet de déterminer si l'individu a fait preuve de négligence criminelle n'est pas personnalisée; elle n'est pas seulement axée sur les circonstances particulières.
    Je répondrais que les principes n'interviennent pas, mais peut-être que je n'ai pas bien compris la question.
(1235)
    Vous avez bien compris. C'est la réponse que j'espérais obtenir.
    Encore une fois, je reconnais que nous avons innové, et vu la rareté de ces cas, il pourrait s'écouler un certain temps avant que nous ne puissions répondre à bon nombre de ces questions.
    Monsieur le président, je n'ai pas d'autres questions pour les témoins.
    Très bien, monsieur Garrison.
    Je cède maintenant la parole à M. Van Popta pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président. Je remercie les témoins d'être présents parmi nous aujourd'hui.
    Nous parlons de la défense d'intoxication extrême, et dans quelles circonstances et à quel moment elle peut être invoquée par le prévenu.
    Dans son témoignage plus tôt aujourd'hui, le ministre a expliqué que pour invoquer cette défense, l'accusé doit d'abord produire une preuve d'expert indiquant qu'il était bel et bien en état d'intoxication extrême. M. Lametti a vulgarisé le concept en disant que l'individu qui se trouve dans cet état ne contrôle plus son corps, même si ce dernier fonctionne. Si je comprends bien, dès que le juge ou le jury est satisfait de la preuve, c'est ensuite à la Couronne de prouver que l'accusé a fait preuve de négligence.
    Nous avons un commentaire de la professeure Kerri Froc, de l'Université du Nouveau-Brunswick, qui a relevé les aspects problématiques du projet de loi. Mme Froc craint que ces aspects érigent des obstacles presque insurmontables pour la poursuite d'individus en état d'intoxication qui commettent des actes de violence envers les femmes. Elle propose ensuite de réviser encore plus l'article 33.1 pour inverser le fardeau de la preuve de façon à ce que l'accusé doive prouver qu'il n'a pas agi déraisonnablement. Il est plus facile pour l'accusé de se défendre que pour la Couronne d'établir la preuve. Qu'en pensez-vous? Cela me semble une option raisonnable.
    Je ne peux pas parler des avantages de cette approche, mais je peux vous fournir des considérations juridiques concernant le fardeau de la preuve.
    Tout d'abord, dans le droit criminel, la plupart du temps, c'est la Couronne qui doit prouver hors de tout doute raisonnable les éléments de l'infraction. Tout doute raisonnable doit se solder par l'acquittement de l'accusé. Ce principe a été reconnu pour la première fois en 1935 par la Chambre des lords à Woolmington. Également connu sous le nom de présomption d'innocence, il a été inscrit dans la Charte canadienne des droits et libertés en 1992. La jurisprudence sur la présomption d'innocence ne fait pas dans la nuance: dès qu'une personne peut être déclarée coupable sans doute raisonnable, les tribunaux concluent à une violation de la présomption d'innocence, qu'il faut ensuite justifier au titre de l'article 1 de la Charte.
    Il faut se demander si l'inversion du fardeau de la preuve exigeant que l'accusé invoque la défense d'intoxication extrême est préconisée parce que ces cas comportent un élément de déficience mentale — par exemple, si un individu qui souffre de troubles mentaux ou qui se trouve dans un état d'automatisme sans aliénation mentale commet une infraction lors d'une crise de somnambulisme ou d'épilepsie. La Cour suprême a indiqué que dans ces cas, ce serait extrêmement difficile pour la Couronne de prouver une déficience mentale due à un dysfonctionnement du cerveau de l'accusé. La Cour suprême a justifié, pour ce type de cas, l'inversement du fardeau de la preuve qui contraint l'accusé à démontrer par prépondérance des probabilités qu'il était dans cet état, car il est très important de vérifier que l'inversement du fardeau de la preuve dans ces circonstances est justifiable au titre de l'article 1 de la Charte.
    Voilà certaines choses que vous pourriez vouloir examiner.
    En effet, et ce sont des considérations très importantes. Je comprends la complexité et la façon dont l'article 1 de la Charte fonctionne, pourtant, cette professeure de droit affirme qu'il est à peu près impossible pour la Couronne d'en faire la preuve. Prenons par exemple l'affaire R. c. Brown. La Couronne pourrait présenter des preuves assez accablantes démontrant que M. Brown devait savoir quels effets aurait la consommation de grandes quantités d'alcool en combinaison avec la consommation de champignons magiques et elle devrait le prouver au‑delà de tout doute raisonnable, mais M. Brown, selon la prépondérance des probabilités, aurait seulement à prouver qu'il n'agissait pas de façon déraisonnable — peut-être qu'il n'avait jamais consommé de champignons magiques auparavant, par exemple, alors il ne pouvait pas savoir quels seraient les effets — et il serait alors un homme libre. Cela ne semble pas raisonnable aux yeux des gens qui ne sont pas des avocats. Avez-vous un commentaire à formuler à ce sujet?
(1240)
    Comme le ministre l'a mentionné durant son exposé, le niveau de risque n'a pas à être probable ni même davantage probable que non probable. La question n'est pas de savoir si l'accusé aurait dû savoir que la drogue en question « mènerait » à une perte de contrôle violente, mais plutôt s'il aurait dû savoir que la drogue « pouvait » mener à une perte de contrôle violente, et le tribunal se penchera sur cette question du point de vue d'une personne raisonnable. Une personne raisonnable ne témoignera pas relativement à ce qu'elle savait ou à ce qu'elle a fait. La situation sera évaluée au cas par cas.
    Le concept de « personne raisonnable » est très bien connu des cours pénales. Il s'agit d'une personne prudente, qui réfléchit avant d'agir, et qui prend des mesures pour prévenir des préjudices qu'elle observe. Les tribunaux vont prendre une décision au sujet de la personne raisonnable en tirant des conclusions à partir des faits et des preuves présentés, alors, le fait que…
    Merci.
    D'accord, je vais m'arrêter là.
    Merci.
    Je suis désolé d'avoir à vous interrompre. Je vous ai laissé un peu plus de temps.
    Merci, monsieur Van Popta. La parole est maintenant à Mme Brière pour cinq minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Moore, pouvez-vous nous expliquer pour quels motifs la première version de l'article 33.1 a été déclarée inconstitutionnelle sur le plan de l'actus reus, du mens rea et de la présomption d'innocence?
    De plus, en quoi la nouvelle mouture comble-t-elle ces lacunes?
    Merci. Je vais demander à ma collègue Joanne Klineberg de répondre à cette question.
    Je vous remercie de votre question.
    Selon la Cour suprême, l'ancienne version de l'article 33.1 présumait que l'accusé avait fait preuve de négligence au moment de la consommation, sans que la Couronne ait à le prouver. L'ancienne version permettait donc de déclarer coupable un individu en état d'intoxication s'apparentant à l'automatisme, mais qui ne pouvait pas prévoir qu'il le serait et ayant commis un acte de violence à l'endroit d'une autre personne pendant qu'il l'était. L'ancien article 33.1 avait pour objectif de reconnaître un individu coupable de cet acte de violence, comme une agression sexuelle ou un homicide involontaire.
     Par contre, cette ancienne version pouvait aussi mener à la condamnation d'un individu ayant commis un acte de violence alors que son état mental était altéré et qu'il n'était pas en mesure de contrôler ses actes. C'était la raison principale invoquée pour parler d'une violation des droits fondamentaux.
    La nouvelle version de l'article 33.1 rectifie la situation en redéfinissant les infractions d'agression sexuelle, de voies de fait et d'homicide involontaire. La nouvelle définition repose non pas sur la nature intentionnelle et volontaire de l'acte de violence commis par l'individu, mais sur la nature négligente de la consommation d'une substance intoxicante pouvant mener l'individu à perdre le contrôle et à devenir violent.
     Désormais, la Couronne doit prouver qu'il y a eu négligence en lien avec la consommation, créant le risque de violence. C'est maintenant un élément essentiel. Si la Couronne établit que l'individu n'a pas fait preuve de suffisamment de diligence pendant la période de consommation et si la violence qui en est découlée diminue une heure plus tard, l'individu peut être déclaré coupable de cette violence pour cause de négligence de sa part lors de la période de consommation.
(1245)
    Vous dites qu'il faut prouver la négligence lors de la consommation. A-t-on des données sur la quantité d'alcool ou de drogue que la personne doit avoir consommée avant que l'on puisse parler d'intoxication extrême?
    La science relative à cette question est en constante évolution. C'est une question compliquée.
    Le niveau d'intoxication dépend notamment de la nature de la substance qui a été ingérée, qui peut avoir un effet différent selon la personne. L'état mental de la personne au moment où elle consomme la substance intoxicante pourrait aussi avoir un effet. Pendant une poursuite, la Couronne doit en faire la preuve.
    Il existe beaucoup de documents publics qui montrent aux gens comment consommer ces substances de manière sécuritaire.
     Il ne faut pas oublier qu'on parle de la nature volontaire de l'intoxication, parce que...

[Traduction]

    Je vous remercie, madame Brière.
    Pour terminer, la parole est à M. Fortin pour deux minutes et demie.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vais poursuivre dans la même veine que Mme Brière.
    La situation me semble tellement rare qu'on n'arrive pas à trouver d'exemple où quelqu'un pourrait invoquer efficacement un tel motif de défense. Ne craignez-vous pas que ce soit si difficile d'invoquer ce motif que la Cour suprême finira par nous dire que c'est encore inconstitutionnel? La difficulté d'imaginer une situation où ce serait applicable ne fait-elle pas que les dispositions de l'article 33.1 pourraient être jugées non conformes à la Charte?
    Je vais demander à Mme Klineberg de répondre.
    Je n'ai malheureusement pas bien compris votre question, monsieur Fortin. Pouvez-vous la poser de nouveau, s'il vous plaît?
    Nous avons de la difficulté à trouver des exemples valables. Je vous considère tous comme des experts en la matière et il y a même quelques juristes parmi les membres du Comité. Or, sauf erreur, personne n'a réussi à citer des exemples de situations pour lesquelles ce motif de défense pourrait être invoqué.
    Il existe un principe d'interprétation. On dit que le législateur n'est jamais censé parler pour ne rien dire et que les lois que nous adoptons doivent avoir une fin utile.
    Nous plaçons-nous dans une situation où l'article 33.1 risque d'être invalidé puisqu'il est impossible d'utiliser cette défense? L'article 33.1 pourrait-il être considéré comme étant sans valeur juridique? N'y a-t-il pas une crainte à cet effet?
    Je pense que je comprends votre question.
    La Cour suprême a rendu sa décision dans la cause R. c Brown il y a quelques mois seulement. La Cour croyait qu'il pourrait y avoir des circonstances où une personne serait en mesure d'établir qu'elle était dans un état d'intoxication extrême volontaire s'apparentant à l'automatisme, mais qu'elle n'était pas en mesure de prévoir qu'elle pourrait tomber dans cet état.
    L'article 33.1 ne crée pas le motif de défense. Il ne définit pas le motif de défense ni le processus permettant de l'invoquer. L'article 33.1 ne compromet donc pas de manière directe la disponibilité du motif de défense. Il crée plutôt une règle de responsabilité pénale et il définit les éléments de culpabilité.
    La question est plutôt celle-ci: est-ce que les éléments de culpabilité contenus dans l'article 33.1 sont constitutionnels ou non? Comme le ministre l'a dit, c'est la Cour suprême qui a suggéré cette option comme étant constitutionnelle.
(1250)

[Traduction]

    Merci, monsieur Fortin.
    Je tiens à remercier tous les témoins pour leur excellent témoignage aujourd'hui et pour nous avoir aidés à comprendre le projet de loi C‑28. Nous vous en sommes reconnaissants.
    Nous devons discuter de certains points d'ordre administratif. Les témoins peuvent quitter la réunion. Vous pouvez très bien rester pour nous écouter, mais vous êtes libres de partir.
    J'aimerais parler du programme des prochaines réunions. Le jeudi 27 octobre, nous allons accueillir durant la première heure les professeures Elizabeth Sheehy, Kerri Froc et Isabel Grant. Durant la deuxième heure, un seul témoin est prévu pour l'instant, et il s'agit de Suzanne Zaccour.
    Le lundi 31 octobre, nous allons recevoir Hugues Parent, de l'organisme Action Now Atlantic. Durant la deuxième heure, nous allons accueillir Farrah Khan du Fonds d'action et d'éducation juridiques pour les femmes.
    Jusqu'à maintenant, trois témoins ont décliné notre invitation. Il s'agit de l'Association du Barreau canadien, du Barreau du Québec et de Robin Parker.
    Je tiens aussi à vous informer que le Service des poursuites du Manitoba a demandé à témoigner, même s'il n'a pas reçu d'invitation à comparaître. Je vous demande s'il y a consensus pour l'inviter à témoigner. À moins que quelqu'un ne s'y oppose, je vais l'inviter à comparaître lors de cette réunion ou celle du 3 novembre. Je pense qu'il est possible d'ajouter un témoin le 3 novembre.
    Puisque personne ne s'y oppose, je vais inviter cet organisme à comparaître.
    Il y aura donc cet autre témoin à notre réunion du 3 novembre, qui devrait être une réunion de deux heures. Ensuite, nous fournirons à notre analyste des instructions pour la rédaction du rapport.
    Monsieur le greffier, est‑ce que j'ai oublié quelque chose?
    Monsieur le président, il serait possible de proposer d'autres témoins pour la réunion du 3 novembre.
    D'accord. Avez-vous des suggestions, monsieur Anandasangaree ou monsieur Moore?
    Puisqu'il est possible d'ajouter des témoins, le greffier pourrait‑il nous donner une idée du nombre de témoins que chaque parti pourrait ajouter, de sorte que nous ayons suffisamment de témoins pour une réunion de deux heures le 3 novembre.
    Oui, bien sûr. Si le 3 novembre nous tenons une réunion de deux heures, il serait bien d'avoir cinq ou six témoins supplémentaires, afin que nous ne soyons pas pris au dépourvu si certains déclinent notre invitation.
    Monsieur le greffier, pouvez-vous nous dire combien de témoins chaque parti peut proposer? Est‑ce qu'il y a un parti qui peut encore proposer des témoins ou combien de témoins chaque parti devrait proposer? Je pense que c'est ce que M. Anandasangaree cherche à savoir.
    Voulez-vous dire combien de témoins ont confirmé leur présence à la réunion du 3 novembre jusqu'à maintenant?
    Essentiellement, tout dépend du nombre de témoins qui ont confirmé leur présence et du nombre de témoins qui ont refusé notre invitation. Si un parti... Vous pouvez peut-être nous envoyer la répartition cet après-midi. Si nous proposons six témoins, alors, il y en aurait deux proposés par les libéraux, deux par les conservateurs, etc. Si vous pouviez nous fournir cette répartition, alors, nous pourrions vous transmettre nos propositions d'ici 17 heures mercredi.
    Oui, je peux faire cela.
    Est‑ce que j'ai oublié quelque chose ou est‑ce que quelqu'un a quelque chose à dire?
    Monsieur le greffier, pouvez-vous vérifier? Non, tout est beau?
    Je vous remercie, mesdames et messieurs. Nous nous reverrons jeudi.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU