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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 5 avril 1995

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

WILLIAM SHAKESPEARE

LES RELATIONS DE TRAVAIL

LES SOINS DE SANTÉ

L'ÎLE PARTRIDGE

L'HÔPITAL GRAND RIVER

LES MINISTRES

LA JOURNÉE MONDIALE DE L'HÉMOPHILIE

LE BURUNDI

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DU CANCER

LES TAUX D'INTÉRÊT

LA CITOYENNETÉ CANADIENNE

    Mme Ringuette-Maltais 11523

LES JEUNES QUÉBÉCOIS

LE BLOC QUÉBÉCOIS

    M. Lavigne (Verdun-Saint-Paul) 11524

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 11524

LE SYNDROME DE POST-POLIOMYÉLITE

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 11524

LE BLOC QUÉBÉCOIS

LE CHAMPIONNAT MONDIAL DE CURLING FORD

LE PARTI LIBÉRAL

QUESTIONS ORALES

LES PÊCHES

LE TRANSFERT SOCIAL CANADIEN

    M. Gauthier (Roberval) 11526
    M. Martin (LaSalle-Émard) 11526
    M. Gauthier (Roberval) 11526
    M. Martin (LaSalle-Émard) 11526

LES AFFAIRES INDIENNES

LES JETS DE WINNIPEG

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 11527
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 11528

LES AFFAIRES INDIENNES

L'ACDI

LES AFFAIRES INDIENNES

L'ACDI

LES AFFAIRES INDIENNES

LA SOMATOTROPINE BOVINE

LES CONTRATS GOUVERNEMENTAUX

LES AFFAIRES INDIENNES

LES DÉPENSES PUBLIQUES

L'IMMIGRATION

LES FORÊTS

LA SANTÉ

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

AFFAIRES COURANTES

LA DÉFENSE NATIONALE

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA

    Projet de loi C-320. Adoption des motions de présentation et de première lecture 11533

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-321. Adoption des motions portant présentation et première lecture 11533
    Mme Gagnon (Québec) 11533

LA LOI SUR LA TAXE D'ACCISE

    Projet de loi C-222 11533
    Annulation de l'ordre; retrait du projet de loi 11533

PÉTITIONS

LA DÉCONTAMINATION DU CANAL LACHINE

    M. Lavigne (Verdun-Saint-Paul) 11533

LES DÉPENSES DU GOUVERNEMENT

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

LA SANTÉ

LE CODE CRIMINEL

LA JUSTICE

LES RELATIONS SEXUELLES ENTRE PERSONNES DU MÊME SEXE

LES JEUNES CONTREVENANTS

QUESTIONS AU FEUILLETON

DEMANDES DE DOCUMENTS

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA LOI SUR LES ARMES À FEU

PROJET DE LOI C-68-MOTION D'ATTRIBUTION DE TEMPS

    Adoption de la motion par 133 voix contre 100 11538

LOI SUR LES ARMES À FEU

    Projet de loi C-68. Reprise de l'étude de la motion de deuxième lecture ainsi que de l'amendement 11538
    Rejet de l'amendement par 173 voix contre 55 11555
    Adoption de la motion par 173 voix contre 53 11556

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LE MULTICULTURALISME

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 11558
    Mme Gagnon (Québec) 11562
    M. Breitkreuz (Yellowhead) 11565

MOTION D'AJOURNEMENT

LA JUSTICE

    Mme Stewart (Brant) 11567

L'ENVIRONNEMENT

ANNEXE


11521


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mercredi 5 avril 1995


La séance est ouverte à 14 heures.

_______________

Prière

_______________

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

WILLIAM SHAKESPEARE

M. John Richardson (Perth-Wellington-Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, je rends hommage aujourd'hui au barde de l'Avon, William Shakespeare, dont on souligne la naissance le 23 avril.

Pour bien marquer l'occasion, des gens de ma circonscription ont organisé un week-end d'événements spéciaux, dont une vente aux enchères par écrit, un concours de décoration de gâteaux et un dîner de gala. Les personnes âgées de Lakeside, l'école Hamlet, qui met en scène une pièce de théâtre, et un grand nombre de personnes ont collaboré à l'organisation de cette commémoration. Je tiens à féliciter tout le monde, en particulier, Ted Blowes et Debra Huggins.

Juste après ces célébrations, le festival de Stratford entamera sa 43e saison le 29 mai. J'invite tous les députés et tous les Canadiens à assister aux représentations théâtrales qui seront données cet été. Je suis convaincu qu'ils repartiront heureux et satisfaits.

Des membres d'organisations bénévoles sont les grands responsables du festival Shakespeare, qui devra composer, cette année, avec l'absence d'un des plus grands comédiens classiques de l'Occident, M. Nicholas Pennell, qui est décédé. Il nous manquera cet été.

Je souhaite néanmoins que la prochaine saison du festivalsoit un franc succès et que l'aventure de Stratford se poursuive. J'ai déposé le programme sur le bureau de chaque député aujourd'hui.

* * *

[Français]

LES RELATIONS DE TRAVAIL

M. Bernard St-Laurent (Manicouagan, BQ): Monsieur le Président, les travailleurs de la minoterie Ogilvie ont une fois de plus réclamé de la ministre du Travail une loi antibriseurs de grève pour les entreprises sous juridiction fédérale. La ministre a réagi comme son prédécesseur en disant simplement qu'elle étudiait la question.

Il y a près d'un an et demi que le gouvernement étudie la question et rien ne justifie un tel retard, sinon un manque total de volonté politique. Le gouvernement fédéral connaît bien ce type de dispositions déjà en vigueur au Québec, en Ontario et en Colombie-Britannique.

Le Bloc québécois, de son côté, a d'ailleurs récemment déposé un projet de loi en Chambre qui protégerait adéquatement les travailleurs actuellement victimes de pratiques déloyales de la part de leur employeur. Lorsqu'il s'agit de bafouer les droits des travailleurs, comme ce fut le cas dans le conflit de travail du rail, la ministre sait faire vite, mais lorsqu'il s'agit de répondre à leurs revendications légitimes, elle se complait dans un attentisme inacceptable.

* * *

[Traduction]

LES SOINS DE SANTÉ

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Monsieur le Président, il y a un demi-siècle, le tout premier régime d'assurance-santé en Amérique du Nord était créé dans la région sanitaire no 1 de la Saskatchewan, qui allait devenir ma circonscription.

Il s'agissait d'une expérience, d'un prototype et d'une véritable bénédiction. Le régime fonctionnait bien et ne coûtait pas très cher, en partie parce que les gens habitués à se passer de soins de santé n'exploitaient pas le système et en partie parce que le régime était essentiellement géré au niveau local par les médecins de famille et les maires des municipalités.

Malheureusement, nous avons vite oublié cette leçon et avons laissé les bureaucrates politiques et fédéraux suffoquer un bon régime.

Les libéraux affirment que rien ne cloche dans notre régime de soins de santé, mais les Canadiens ne sont pas dupes. Ils sont à même de constater les longues files d'attente et l'inaccessibilité des services.

Le temps est venu pour nous d'être aussi audacieux que les pionniers de la Saskatchewan, de faire preuve de bon sens au lieu d'élaborer des projets invraisemblables et de réviser la Loi canadienne sur la santé pour permettre aux provinces de remettre le régime de soins de santé sur pied.

* * *

L'ÎLE PARTRIDGE

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, Transports Canada a déclaré que l'île Partridge constituait des terrains excédentaires et Travaux publics Canada prévoit la vendre.


11522

L'île Partridge, petite île située au milieu du port de Saint John, fait partie du patrimoine canadien. Elle a servi de poste de quarantaine et a accueilli plus de trois millions d'immigrants et de marins entre 1785 et 1942. Deux mille immigrants en quarantaine sont décédés sur l'île et leurs tombes s'y trouvent. L'île Partridge a été désignée lieu historique national en 1974.

L'année 1977 a marqué la célébration officielle du 150e anniversaire de la grande famine en Irlande. La communauté irlandaise de Saint John tiendra des célébrations sur l'île pendant les trois prochaines années, notamment des expositions spéciales et un service commémoratif irlandais en 1997.

Avec la population de Saint John, la ville la plus irlandaise du Canada, et de tout le Nouveau-Brunswick, j'exhorte le gouvernement à revenir sur sa décision de vendre le lieu historique national qu'est l'île Partridge et je lui demande de le confier au ministère du Patrimoine canadien à des fins de conservation.

* * *

L'HÔPITAL GRAND RIVER

M. Andrew Telegdi (Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'annoncer à la Chambre qu'un nouvel hôpital est né dans ma circonscription le 1er avril 1995, l'hôpital Grand River. Ce nouvel établissement de soins de santé dans la région de Waterloo est le fruit de la fusion des hôpitaux Kitchener-Waterloo et Freeport. Ces deux hôpitaux comptent ensemble 175 années de service auprès des malades. Ils ont chacun leurs spécialités et sont fiers du travail qu'ils accomplissent.

L'hôpital Grand River sera dirigé par un conseil d'administration et géré par une seule et même administration. Il continuera de fournir aux habitants de la région de Waterloo des services innovateurs de grande qualité. Ce qui est unique au sujet de cette initiative, c'est qu'elle a été lancée par deux anciens hôpitaux qui voulaient offrir les meilleurs services possibles tout en faisant une utilisation optimale des ressources existantes.

Nous devons féliciter les dirigeants de ces deux anciens hôpitaux qui ont eu l'idée de s'unir pour former l'hôpital Grand River. Leurs efforts méritent d'être applaudis par tous les Canadiens.

* * *

LES MINISTRES

Mme Brenda Chamberlain (Guelph-Wellington, Lib.): Monsieur le Président, les gens de Guelph-Wellington comprennent que les vrais leaders savent prendre des risques et ne reculent pas devant les mesures qui s'imposent. C'est pourquoi ils sont fiers du premier ministre, de son ministre des Pêches et de la ministre du Travail.

Ces leaders ont agi et réussi là où beaucoup d'autres ont échoué. L'un n'a pas ménagé ses efforts pour faire comprendre au monde les répercussions de la surpêche et l'autre, sachant à quel point le pays souffrait de la grève du rail, a fait le nécessaire pour y mettre fin.

Ces ministres auraient pu écouter les habituels propos négatifs du Parti réformiste et les positions destructrices du Bloc. Ils ont plutôt couru des risques et agi dans l'intérêt supérieur du Canada, car ce qu'ils ont fait était juste.

Nous avons la chance d'avoir de tels leaders qui n'ont pas froid aux yeux. Nous les remercions de leur détermination.

* * *

(1405)

[Français]

LA JOURNÉE MONDIALE DE L'HÉMOPHILIE

M. Nick Discepola (Vaudreuil, Lib.): Monsieur le Président, le 17 avril prochain est la Journée mondiale de l'hémophilie. En cette occasion j'aimerais rendre hommage à la Société canadienne de l'hémophilie pour l'excellent travail qu'elle accomplit.

[Traduction]

La Société canadienne d'hémophilie a été fondée en 1953 par des hémophiles, et elle était au départ un simple groupe d'entraide. Aujourd'hui, sa clientèle et les formes d'aide qu'elle propose se sont considérablement diversifiées.

Dans les années 80, environ 40 p. 100 des hémophiles et 1 200 autres transfusés ont été infectés par du sang contaminé au VIH. L'objectif premier de la Société canadienne d'hémophilie est de faire en sorte que les réserves de sang au Canada soient sûres.

[Français]

De nombreux progrès ont été accomplis. Aujourd'hui, grâce à une plus grande conscientisation et aux perfectionnements techniques, les risques de contamination par tranfusion sanguine sont presque nuls.

[Traduction]

Nous pouvons aider nous aussi en donnant du sang, du temps et de l'argent. Après tout, nous sommes tous apparentés par le sang.

* * *

[Français]

LE BURUNDI

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, faisant référence à la situation très tendue qui prévaut au Burundi, j'ai demandé au ministre des Affaires étrangères, hier, s'il ne reconnaissait pas l'urgence d'intervenir concrètement, notamment en favorisant le déploiement d'une force d'interposition dans ce pays, comme le réclamait d'ailleurs l'ambassadeur du Burundi au Canada, le 23 mars dernier, devant le Comité permanent des affaires étrangères.

Pour toute réponse, le ministre a signalé que le gouvernement burundais n'avait formulé aucune requête allant dans le sens de l'appel pathétique lancé par l'ambassadeur du Burundi. Le mi-


11523

nistre devrait pourtant savoir que le gouvernement burundais n'a aucune marge de manoeuvre.

Cette réponse du ministre a confirmé nos appréhensions les plus sombres: le gouvernement ne veut pas comprendre la nature de la tragédie qui se prépare au Burundi. L'optimisme de façade du ministre, qui parle d'une illusoire volonté de réconciliation, nous donne l'impression d'assister à une désolante répétition du drame rwandais, où la communauté internationale a été confrontée à une crise qu'elle n'a pas su prévenir.

* * *

[Traduction]

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DU CANCER

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, avril marque le début du printemps. La nature et l'espoir renaissent. Il est donc particulièrement heureux qu'avril soit le mois de la Société canadienne du cancer.

La société travaille avec diligence à la recherche de traitements contre le cancer, et s'efforce d'ouvrir de nouvelles avenues de recherche et de modifier le mode de vie des Canadiens. Chaque année, des milliers de Canadiens profitent des recherches faites par la Société canadienne du cancer.

Depuis 1948, la campagne de financement que la société mène en avril mobilise les Canadiens pour lutter contre le cancer. L'an dernier, la campagne a permis de recueillir plus de 44,2 millions de dollars. L'objectif de cette année est de 47,6 millions de dollars.

J'invite mes collègues députés à se joindre à moi aujourd'hui pour appuyer les efforts de la société, d'autant plus que, en ce moment, la députée de Nepean se rétablit de cette maladie.

Grâce au travail de la Société canadienne du cancer et à la détermination des Canadiens, nous vaincrons le cancer.

* * *

LES TAUX D'INTÉRÊT

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, la politique des taux d'intérêt des libéraux est en train de tuer les espoirs et les rêves des Canadiens de devenir propriétaires et de freiner la reprise économique.

Depuis que le gouvernement libéral a fait monter les taux d'intérêt l'automne dernier, le secteur résidentiel a connu ses pires résultats de l'histoire durant le deuxième semestre de 1994. La politique imprévisible des taux d'intérêt élevés a également fait plonger la construction résidentielle, causant la perte de milliers d'emplois.

Le gouvernement libéral actuel n'a pas tiré de leçons de la politique appliquée par le gouvernement libéral qui l'a précédé, laquelle a précipité le pays dans la récession de 1980.

Que le gouvernement libéral écoute. Le maintien des taux d'intérêt à un niveau élevé se traduira par une baisse de la vente de maisons, une baisse des dépenses des consommateurs, une croissance économique plus faible et une diminution des emplois. Cette politique de l'argent cher annihile toutes les possibilités de reprise économique et frappe durement les familles.

Les Canadiens s'inquiètent de leur avenir, mais ce gouvernement n'a que faire des acheteurs de maisons ou des consommateurs. Il ne s'intéresse qu'au bien-être et à la prospérité des banques et des spéculateurs sur le marché des changes.

* * *

[Français]

LA CITOYENNETÉ CANADIENNE

Mme Pierrette Ringuette-Maltais (Madawaska-Victoria, Lib.): Monsieur le Président, une cérémonie a eu lieu aujourd'hui au hall d'honneur afin de marquer notre réaffirmation à la citoyenneté canadienne. Cette réaffirmation nous permet de démontrer l'importance qu'on accorde à nos droits, à nos privilèges et à nos responsabilités en tant que citoyens de ce beau pays, le Canada.

En ce moment, je désire remercier mon collègue libéral de Don Valley-Nord pour l'organisation de cette cérémonie qui nous permet, malgré notre diversité culturelle, de s'unir et de démontrer notre fierté canadienne.

[Traduction]

Cette réaffirmation souligne non seulement l'importance de demeurer unis pour être prospères, mais elle prouve encore une fois au monde entier que le Canada et ses citoyens sont la priorité absolue du Parlement. Nous devrions être fiers de nos réalisations à titre de jeune nation jouant un rôle de chef de file à l'échelle mondiale et ayant à offrir une qualité de vie enviable.

Vive le Canada. Long live Canada.

* * *

[Français]

LES JEUNES QUÉBÉCOIS

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Monsieur le Président, on apprenait récemment que 92 p. 100 des jeunes Québécois et Québécoises de 18 à 35 ans se sentent heureux et qu'ils sont d'abord préoccupés par le monde du travail.

(1410)

Soulignons que la séparation ne figure pas parmi leurs priorités. En effet, les séparatistes ont beaucoup de plomb dans l'aile ces jours-ci. Une étude menée par l'Université McGill confirme que l'appui pour la séparation parmi les jeunes Québécois a diminué de façon dramatique depuis le référendum de 1980.

Le gouvernement libéral se penche sur les préoccupations de cette génération, c'est-à-dire créer des emplois, tandis que le Bloc Québécois et le Parti Québécois sont pris dans leur option largement démodée.

Les jeunes Québécois sont heureux dans le Canada et veulent y demeurer, car ils savent que c'est le pays où il fait le mieux vivre. Encore une fois, nous voyons clairement que les séparatistes sont complètement débranchés des préoccupations réelles des jeunes.


11524

LE BLOC QUÉBÉCOIS

M. Raymond Lavigne (Verdun-Saint-Paul, Lib.): Monsieur le Président, est-ce l'air d'Ottawa, sa culture bilingue, son architecture, son festival des tulipes ou le canal Rideau qui amènent de plus en plus de députés bloquistes à vouloir s'y installer de façon permanente.

À deux jours de l'ouverture de leur congrès général, on apprend que certaines associations de comtés du Bloc québécois veulent voir modifier le statut de leur parti afin de conférer à celui-ci un caractère permanent.

Cet intérêt soudain pour la politique canadienne est pour le moins étonnant, surtout lorsqu'on se rappelle les propros tenus par le chef bloquiste le 27 novembre dernier, et je le cite: «On ne nous a pas envoyés à Ottawa pour que des députés fassent carrière. Cela ne doit jamais s'inscrire dans l'ordre des solutions permanentes.»

* * *

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, hier, Mme Michèle Fortin, vice-présidente de la télévision française à la Société Radio-Canada, prononçait un discours devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Certains de ses propos rejoignent les préoccupations du Bloc québécois pour une télévision généraliste, diversifiée et accessible. De plus, elle a réitéré sa mise en garde contre les coupures à Radio-Canada annoncées dans le Budget, et a rappelé que la SRC est une institution d'une importance capitale pour les francophones du Québec et des autres provinces, dont l'impact est beaucoup plus grand que celui de la CBC auprès de l'auditoire anglophone.

Maintenant que M. Beatty est prêt à appliquer les coupures budgétaires, il est impératif qu'il prenne en compte la performance de la télévision française et le succès qu'elle remporte auprès de ses auditeurs et auditrices avant de prendre ses décisions. Des coupures draconiennes dans le réseau français mettraient en péril le développement et l'épanouissement de notre culture.

* * *

[Traduction]

LE SYNDROME DE POST-POLIOMYÉLITE

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, un nouveau cauchemar médical revient hanter des personnes dans la quarantaine qui ont été victimes de la polio durant leur enfance.

Bon nombre d'entre nous tenons pour acquis la vie active que nous menons en tant qu'adultes en bonne santé et autonomes, mais le syndrome de post-poliomyélite vient assombrir l'avenir de ceux qui en souffrent. Les personnes victimes du SPP ne peuvent en effet aspirer à ce genre d'existence. La faiblesse musculaire, la fatigue, les douleurs articulaires et les problèmes respiratoires dont elles souffrent les obligent à modifier radicalement leur mode de vie.

Je tiens à souligner le courage de Dodie Spittal, de Charly O'Brien, de Reny Chamberlain et de Vern Hamm, qui sont avec nous aujourd'hui et qui sont venus à Ottawa expliquer ce que c'est que de vivre en souffrant du syndrome de post-poliomyélite.

Je rends aussi hommage à Paul Martin père, qui a veillé à ce que des centaines de milliers d'enfants canadiens reçoivent le vaccin du Dr Salk. Sa détermination à faire en sorte que le vaccin soit disponible est clairement ressortie de la déclaration qu'il a faite le 7 mai, au Calgary Herald: «Compte tenu de la vaste expérience que nous possédons et des mesures de protection qui existent, les autorités provinciales responsables de la santé sont unanimes à dire que le vaccin est sûr, et des changements sont envisagés dans le cadre du programme d'immunisation.»

La polio n'est pas. . .

* * *

[Français]

LE BLOC QUÉBÉCOIS

M. Robert Bertrand (Pontiac-Gatineau-Labelle, Lib.): Monsieur le Président, le chef bloquiste a toujours maintenu que le Bloc québécois était à Ottawa de façon temporaire. L'automne dernier, il déclarait, et je le cite: «Et pour maintenir la clarté des choix, je pense qu'il faut qu'il soit déjà acquis que les Québécois ne pensent pas que le Bloc québécois c'est un accessoire qui vient avec le fédéralisme aussi bien qu'avec la souveraineté; on ne peut se permettre d'être fédéraliste et de maintenir le Bloc québécois à Ottawa indéfiniment.»

Aujourd'hui, des associations bloquistes veulent donner un caractère permanent à leur parti. Le chef du Bloc québécois aura un choix déchirant à faire: Appliquer sa vision d'un parti temporaire ou répondre aux désirs de sa base de rester à Ottawa indéfiniment.

* * *

[Traduction]

LE CHAMPIONNAT MONDIAL DE CURLING FORD

M. Glen McKinnon (Brandon-Souris, Lib.): Monsieur le Président, du 8 au 16 avril 1995, au Centre Keystone de Brandon, au Manitoba, aura lieu le championnat mondial de curling Ford.

La manifestation sera dominée par les champions canadiens chez les hommes et les femmes, tous du Manitoba, qui lanceront la pierre ou se serviront de leur balai.

(1415)

Ainsi, nous verrons des représentants de plus de 30 pays se disputer le titre mondial.

Cette manifestation internationale de première classe sera suivie chaque jour par plus de 12 000 supporters auxquels s'ajouteront, à chacune des extrémités de la piste, plus d'un millier de visiteurs venus d'un peu partout.

C'est la troisième fois de son histoire que Brandon reçoit des épreuves nationales et internationales de curling. D'innombrables objets ayant trait au monde du curling, dont le premier drapeau des jeux Olympiques, seront exposés.

11525

Que ce soit autour de la piste ou ailleurs, le jour ou jusque tard dans la nuit, j'invite et j'encourage tout le monde à prendre part à ces neuf jours de fête qui se dérouleront à Brandon, la capitale mondiale du curling.

* * *

LE PARTI LIBÉRAL

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, nous avons assisté à tout un spectacle, hier, alors que les libéraux ont célébré le 32e anniversaire de vie politique du premier ministre. Imaginez notre surprise lorsque nous avons appris que le premier ministre a été élu le 8 avril 1963, et non le 4 avril, et qu'il est au Parlement depuis 28 ans et non 32.

Je suppose que la ministre de la Santé était trop occupée à protéger son propre poste pour vérifier les données. En fait, les réformistes ne sont pas surpris de voir les libéraux s'embrouiller dans les chiffres. Après tout, c'est à ce parti que nous devons notre déficit considérable, notre dette énorme et des dépenses publiques hors de tout contrôle.

Le premier ministre a minimisé l'erreur en disant: «Que signifie une différence de quatre jours entre amis?» Il a dit ensuite qu'il n'y avait pas un si grand écart entre 28 et 32 ans. Les chiffres ont leur importance, et j'en ai ici quelques-uns dont le gouvernement devrait tenir compte.

La dette nationale s'élève maintenant à 548 milliards de dollars. Pour rembourser la dette, le gouvernement fédéral dépense neuf fois la somme qu'il consacre à l'éducation et cinq fois ce qu'il consacre à la santé. Le taux de chômage national se chiffre à 9,6 p. 100. Au Canada, 1,5 million de personnes sont sans emploi.

_____________________________________________


11525

QUESTIONS ORALES

[Français]

LES PÊCHES

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement continue de prétendre que l'entente de principe intervenue entre le Canada et l'Union européenne débouchera rapidement sur un véritable accord. Or, l'Espagne et le Portugal rejettent les termes mêmes de l'entente de principe.

Ma question s'adresse au ministre des Pêches et des Océans. Le ministre peut-il faire le point sur les négociations entre le Canada et l'Union européenne et nous indiquer si c'est l'instauration de mécanismes de contrôle et de conservation qui fait toujours problème?

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre s'est entretenu avec le président de la commission de l'Union européenne. Les négociateurs sont en réunion encore aujourd'hui et la conservation de la ressource est la priorité. Notre objectif premier est d'obtenir une entente de conservation et une application qui a des dents.

[Traduction]

Le Canada entend continuer d'appliquer un régime de conservation efficace. Je peux dire au chef de l'opposition que nous avons négocié en détail ce que nous considérons être un régime efficace de conservation et de contrôle. Comme le chef de l'opposition le sait pertinemment, nous attendons maintenant que l'Union européenne mène le processus à terme de son côté, ce qui est long, car ses mécanismes d'action sont plutôt complexes.

[Français]

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, je pense que nous soutenons tous l'action du gouvernement et du ministre, qui fait un très bon travail d'ailleurs, pour doter les partenaires de pêche, les différents pays qui participent à cette opération, de l'instauration de contrôles vigoureux pour conserver la ressource.

Mais ceci étant dit, qu'est-ce qui justifie l'optimisme du ministre de réussir ce genre de résultats de négociations, alors que deux États membres de l'Union européenne, l'Espagne et le Portugal, en l'occurrence les intéressés principaux, rejettent les termes mêmes de l'accord envisagé?

[Traduction]

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a déjà remarqué et remarque à nouveau aujourd'hui que le Bloc québécois et le chef de l'opposition appuient clairement la position du gouvernement.

Le chef de l'opposition a donné des conseils au gouvernement, il y a quelque temps. Il a déclaré qu'il faudrait faire preuve de détermination, prendre des mesures très fermes et user de diplomatie pour trouver une solution fructueuse à ce différend. C'est, bien entendu, exactement la façon dont le gouvernement aborde ce problème.

Je tiens à dire au chef de l'opposition que le Canada négocie bilatéralement avec l'Union européenne et que ces négociations progressent à grands pas. Elles ne sont pas encore terminées, mais on avance un peu plus chaque jour. Un texte détaillé est maintenant sur la table. En toute franchise, c'est à l'Union européenne qu'il incombe de s'assurer que chacun des États membres respecte les dispositions de l'entente de principe.

(1420)

Pour l'instant, l'Union européenne n'a pas encore donné son accord officiel à cette entente.

Je tiens à préciser au chef de l'opposition que les négociateurs ont, dans une large mesure, terminé leur travail et soumis un texte provisoire conjoint. Ce document répond aux objectifs des Canadiens de tout le pays. Nous nous attendons à ce que l'Union européenne y souscrive sans réserve, tout comme nous.


11526

[Français]

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, il faut convenir que le ministre a raison quand il dit que nous négocions de façon bilatérale avec l'Union européenne comme une entité globale, mais comment pense-t-il surmonter la difficulté qui vient du fait incontournable et têtu que le représentant de l'Union européenne a déclaré hier qu'il ne peut conclure d'accord sans l'appui des deux pays membres de l'Europe que sont l'Espagne et le Portugal?

[Traduction]

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, le Canada a négocié de bonne foi.

Il n'a jamais abordé ces négociations dans un autre but que de parvenir à mettre en place un régime de conservation et de se donner les moyens d'empêcher que la destruction des ressources halieutiques ne se poursuive, ainsi que de reconstituer les stocks de ces six espèces qui font maintenant l'objet d'un moratoire.

Partout dans le monde et même dans la grande majorité des États membres de l'Union européenne, les gens en général appuient fermement cette mesure, car ils sont conscients du fait que c'est une question qui touche le patrimoine commun de l'humanité.

Même lorsque la volonté politique fait quelque peu défaut, la ferme intention de la population de préserver une ressource qui appartient à la planète finira par l'emporter et nous parviendrons à un régime efficace et acceptable pour les deux parties.

* * *

[Français]

LE TRANSFERT SOCIAL CANADIEN

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Par la mise sur pied du Transfert social canadien, qui réunit l'ensemble des paiements de transfert pour la santé, l'enseignement postsecondaire et l'aide sociale, le gouvernement fédéral se donne ainsi un pouvoir accru d'imposer des normes nationales, tout en poursuivant la réduction des paiements de transfert versés en espèces aux provinces pour le financement des programmes sociaux.

Le ministre des Finances confirme-t-il que le Transfert social canadien lui permet de continuer de réduire ses paiements de transfert aux provinces, et cela tout en se donnant les moyens d'une plus grande mainmise sur les programmes sociaux en imposant de nouvelles normes non seulement dans la santé, comme c'est le cas actuellement, mais aussi dans l'aide sociale et dans l'enseignement postsecondaire.

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, lors du dernier Budget, nous avons donné au gouvernement fédéral et aux gouvernements provinciaux un mécanisme pour permettre aux deux paliers de gouvernement de tailler leur déficit à leurs moyens. Il a été très clair que nous faisions cela en collaboration et on leur a donné l'avis nécessaire.

Au point de vue des normes nationales, c'est très clair, nous avons dit dans le Budget qu'il était de notre intention que la Loi canadienne sur la santé continue d'exister, ainsi que la question de résidence en ce qui concerne l'aide sociale. Mais pour le reste, c'est le ministre du Développement des ressources humaines qui va négocier avec les provinces. Il va s'asseoir avec elles et en discuter.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, deux choses sont évidentes. D'abord, le ministre des Finances réduit ses paiements aux provinces et, deuxièmement, il tente d'accroître sa mainmise sur les programmes provinciaux pour imposer ses buts. C'est clair pour tout le monde.

Des voix: Bravo!

M. Gauthier: Le ministre des Finances confirme-t-il qu'à cause de son désengagement financier, il lui faut absolument modifier les règles du jeu actuelles, comme il est en train de le faire d'ailleurs avec le Transfert social canadien pour se donner les moyens de continuer d'imposer le respect des normes nationales actuelles et à venir, notamment en matière de santé, d'enseignement postsecondaire et d'aide sociale?

Va-t-il accepter enfin d'avouer son intention?

(1425)

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, une chose est claire, c'est que nous avons répondu au désir des provinces de leur donner la flexibilité de pouvoir baisser leurs coûts. On leur a donné la flexibilité dont elles ont besoin pour avoir une meilleure gestion de leurs programmes. Alors on a répondu aux attentes des provinces, des Canadiens et des Canadiennes.

* * *

[Traduction]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, trois de mes collègues réformistes rentrent tout juste d'une mission d'enquête sur l'exploitation forestière sans discernement effectuée dans la réserve de Stoney, en Alberta.

Le député de North Island-Powell River, qui a plus de 20 ans d'expérience en foresterie, a dit qu'il n'a jamais vu autant d'arbres coupés en même temps, à un seul endroit.

Aux termes de la Loi sur les Indiens et du Règlement sur le bois de construction des Indiens, le ministre des Affaires indiennes est tenu d'assurer une exploitation forestière judicieuse et d'empêcher des désastres environnementaux au sein des réserves. Le ministre était au courant de l'exploitation forestière dans la réserve, mais il n'a rien fait pour y mettre un terme.

Pourquoi le ministre n'a-t-il pas pris des mesures pour empêcher la destruction de la forêt dans la réserve de Stoney en Alberta?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, l'affirmation du chef réformiste est inexacte. Nous avons pris des mesures. Quelqu'un est sur place. Nous avons un garde forestier là-bas.


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Nous faisons de la surveillance aérienne. Je suis allé sur place personnellement et j'ai dit au chef ce que je pensais de ce qu'il faisait.

Nous rencontrons les chefs. À mon avis, ce qu'ils ont fait n'est pas bien. Nous le leur avons dit très directement. S'ils agissent convenablement, comme dans le nord de la Saskatchewan ou à l'Association nationale de foresterie autochtone, nous les appuyons. Cependant, lorsqu'ils n'agissent pas correctement, nous sommes là pour le leur dire.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, quand j'ai demandé au ministre pourquoi il n'a pas pris de mesures, je voulais dire pourquoi n'applique-t-il pas les plans de gestion forestière de son propre ministère?

Le ministère a délivré des permis autorisant annuellement 600 charges complètes de camion pour le transport des billes de bois. Or, depuis le printemps dernier, on a coupé dans les forêts anciennes l'équivalent d'au moins 14 000 charges complètes. Des fonctionnaires du ministère savaient que des infractions flagrantes étaient commises à l'endroit du plan de gestion, mais ils ont refusé d'y mettre un terme.

Pourquoi n'a-t-on pas déchargé ces fonctionnaires de leurs responsabilités pour assurer une exploitation forestière judicieuse dans la réserve de Stoney, en Alberta?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, le député laisse sous-entendre qu'il n'y a que des autochtones en cause. Des exploitants blancs sont aussi allés offrir de l'argent aux autochtones pour qu'ils les laissent prendre les arbres.

Voyons maintenant qui sont ces gens. Ils ne sont pas exclusivement autochtones. Si vous ne voulez pas écouter, cela vous regarde, mais si vous êtes disposé à entendre la réponse, je vais vous la donner.

La GRC procède actuellement à une enquête dans la réserve. Je ne peux intervenir d'aucune façon dans son enquête. Des accusations seront peut-être portées. Quoi qu'il en soit, nous avons fait preuve de fermeté et nous considérons que ce qui a été fait n'était pas bien.

Le Président: Comme toujours, je rappelle gentiment aux députés de bien vouloir adresser leurs réponses et leurs questions à la présidence.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, nous ne blâmons pas les gens de la réserve de Stoney. Nous ne blâmons personne. Nous demandons comment il se fait que le ministère n'ait pas appliqué ses propres règles.

Par leur inaction, le ministre et son ministère ont permis la destruction d'une forêt ancienne dans la réserve de Stoney. Parce que le gouvernement fédéral ne semble pas disposé à traiter tous les Canadiens également en ce qui concerne la réglementation touchant l'environnement, les Canadiens ont perdu des arbres centenaires. Nous ne pouvons plus laisser cette situation se produire à nouveau.

Que compte faire le ministre pour garantir que les plans de gestion des forêts approuvés pas son ministère seront non seulement valables, mais aussi rigoureusement appliqués?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, le chef du Parti réformiste ménage la chèvre et le chou.

À la conférence de presse qu'il a organisée, il a essayé d'expliquer sa politique, que personne n'a comprise du reste, et il a dit qu'il fallait démanteler le ministère que je dirige et décentraliser ses fonctions visant les paiements de transfert aux administrations et aux organismes autochtones locaux.

Des voix: Encore!

M. Irwin: Cela étant dit, il a envoyé son choeur grec partout en Colombie-Britannique. Voici ce qu'ils ont fait selon des membres du clergé.

(1430)

«L'évêque anglican du nord de la Colombie-Britannique a accusé les députés réformistes d'éveiller inutilement des craintes au sujet des négociations sur les revendications territoriales des Nishgas. Lors d'une série d'assemblées publiques parrainées par le député de Skeena, Mike Scott, on a répandu des demi-vérités au sujet des revendications territoriales des Nishgas et on a inquiété les Blancs à ce sujet.»

«L'évêque de Caledonia, Don Hannen, a dit que c'est exactement ce qui se produit actuellement.» On impute toujours la faute aux Indiens, jamais à d'autres. Des demi-vérités sont véhiculées.

Le chef réformiste devrait parler à ses laquais et les envoyer dire la vérité aux Canadiens.

Le Président: Je suis certain que tous les députés ont à coeur la vérité. Nous disons la vérité à la Chambre.

* * *

[Français]

LES JETS DE WINNIPEG

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'Économie de l'Ouest canadien.

L'avenir de certaines concessions d'équipes canadiennes de la Ligue nationale de hockey est compromis en raison de difficultés financières et de marchés aux possibilités restreintes. Selon certaines sources, le ministre du Développement des ressources humaines se serait engagé à verser une contribution fédérale de 10 millions de dollars aux Jets de Winnipeg pour la construction d'un nouvel amphithéâtre.

Le ministre responsable de la Diversification de l'Économie de l'Ouest canadien confirme-t-il si des discussions ont eu lieu, ou ont lieu présentement visant à octroyer le versement d'une subvention de 10 millions de dollars pour la construction d'un nouvel amphithéâtre destiné aux Jets de Winnipeg?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais confirmer que le groupe du secteur privé qui recueille actuellement des fonds auprès de ce secteur a présenté, dans le cadre du programme d'infrastructure, une demande analogue à


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celles qu'ont soumises les villes de Québec, Calgary, Edmonton et bien d'autres villes qui désirent obtenir une aide de ce genre pour construire des installations.

À mon avis, l'initiative que le secteur privé a prise à Winnipeg ne diffère pas de celle qu'on a prise dans la ville du député.

[Français]

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, si je comprends bien la réponse est affirmative dans le cas des Jets de Winnipeg.

Est-ce que le ministre serait en mesure de confirmer que, dépendant de l'issue des élections provinciales au Manitoba, il pourrait accroître la participation fédérale jusqu'à une somme de 20 millions de dollars?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, le député se rappelle fort bien que le gouvernement fédéral a contribué largement à la construction, dans sa ville, du Centre des congrès, qui représente un ajout très important à cette collectivité.

Il y a un certain nombre d'autres villes dans le pays qui ont bénéficié à la fois de la création d'emplois et de l'aménagement de nouvelles installations, par suite de la mise en oeuvre du programme d'infrastructure.

Toute ville a certes le droit de présenter une demande en ce sens. C'est ce que font ces gens de Winnipeg. Ils suivent simplement le bon exemple que donnent les bonnes gens de la ville de Québec.

* * *

LES AFFAIRES INDIENNES

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, ma question fait suite à celle que mon chef vient de poser et s'adresse également au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien.

Je voudrais dire, rapidement, que nous encourageons le dialogue sensé et que, lorsque se sont tenues les assemblées publiques que nous avons organisées à l'intention des autochtones en Colombie-Britannique, nous avons présenté un point de vue nouveau et très apprécié.

Le ministre pourrait-il répondre à la question concernant la réserve de Stoney et dire à la Chambre quelle est la valeur marchande du bois d'oeuvre qui a été retiré l'an dernier de la réserve, comment il entend récupérer le manque à gagner que la bande a subi au cours de la dernière année et ce qu'il entend faire pour composer avec la réduction éventuelle des recettes de la bande dans l'avenir?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, le député réformiste a posé une question très détaillée.

J'aurais aimé qu'il m'en informe avant la période des questions. Je prends sa question en note et je tenterai d'y répondre de la façon la plus complète possible.

(1435)

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, le bois d'oeuvre qui a été retiré de la réserve au cours des douze derniers mois vaut, au bas mot, plus de trente-cinq millions de dollars. Le ministère dont le ministre est responsable savait, en avril dernier, il y a un an, qu'on faisait une exploitation forestière plus grande que celle autorisée.

Le ministre peut-il dire à la Chambre qui est responsable de ce manque à gagner?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'ai déjà répondu à trois questions distinctes du chef réformiste. Le député devrait lire le compte rendu quand il paraîtra.

Je devrais peut-être ajouter que c'est le même député qui a dit, lorsque nous avons présenté la mesure législative concernant les Indiens du Sahtu, que le ciel s'effondrerait, même s'il n'en a rien été, et que, si nous procédions au démantèlement, au Manitoba, le ciel s'effondrerait aussi, mais il n'en a rien été non plus. C'est le même député qui a dit que les mesures que nous avons prises au Yukon ne fonctionneraient pas, mais elles ont fonctionné. C'est le même député qui passe son temps à dire qu'il faudrait mettre fin aux revendications territoriales en Colombie-Britannique.

Nous ne l'avons pas écouté à trois occasions différentes et nous n'allons pas commencer à le faire maintenant.

* * *

[Français]

L'ACDI

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

Récemment, l'ACDI faisait part de son intention de couper totalement le financement des organismes de sensibilisation au développement international auprès du public, ne participant pas à des programmes outre-mer, et cela à seulement une semaine d'avis.

Le ministre est-il conscient que ce faisant, le gouvernement vient de sabrer dans près de la moitié du réseau canadien de développement international des ONG, même si le financement de ces organismes ne repose que sur la demie de 1 p. 100 du budget de l'aide publique au développement?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, l'honorable député doit comprendre que lorsqu'il faut faire des choix et lorsqu'il faut décider de dépenser dans les pays les plus pauvres, que, évidemment, l'ACDI avait raison de décider d'arrêter de subventionner des organismes qui font la sensibilisation du public, ici au Canada, mais


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qui, pour le faire, s'ils sont vraiment conscients de l'importance de sensibiliser le public à l'aide au développement, n'ont pas besoin d'être payés pour le faire.

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, comment le ministre, après avoir dépensé près de un million de dollars pour la révision de la politique étrangère canadienne, peut-il faire fi d'une recommandation du comité mixte qui souhaitait voir augmenter les ressources pour le programme de participation du public canadien?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, il y a une multitude d'organismes, au Québec en particulier, et partout au Canada qui font un travail extraordinaire de développement international. Je pense à OXFAM Québec, la Fondation Léger, la Fondation Lajoie, à plusieurs autres organismes qui font des projets de développement qui rendent des services à l'étranger.

Or, ce que nous disons, c'est que nous allons continuer, non seulement allons continuer, mais nous allons appuyer encore davantage ces organismes dans leurs programmes de développement à l'étranger. Nous espérons que pour ce qui est de la sensibilisation du public, ces organismes peuvent faire le travail sans prendre l'argent qui normalement doit aller aux plus pauvres dans les pays qui en ont le plus besoin.

* * *

[Traduction]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, je représente la circonscription de Wild Rose où se trouve la réserve Stoney. L'autre jour je me suis rendu à la réserve par avion. Je m'y connais très peu en exploitation forestière, mais j'ai emmené deux experts avec moi.

Je n'ai jamais vu une situation aussi déplorable. C'est un désastre. C'est pire que la morue. C'est vous dire! Pourquoi le ministre refuse-t-il d'expliquer à la Chambre pourquoi, pendant douze mois, rien n'a été fait?

(1440)

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, pourquoi le député ne s'en prend-il pas à ceux qui, les premiers, sont allés là-bas? Des compagnies d'exploitation forestière de Colombie-Britannique sont allées là en grand renfort, avec tout un tas d'argent pour payer des pots-de-vin. Il fallait bien partager les billes.

Ce qui est arrivé à la réserve n'est pas juste. Ce n'est pas entièrement la faute des Indiens. Où sont allées les billes? À de grosses compagnies en Colombie-Britannique.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, peut-être pourrons-nous changer un jour la période des questions en période des réponses.

Je n'ai blâmé personne. Je n'ai blâmé personne en particulier. Je veux seulement savoir pourquoi ce ministère a laissé les choses aller si longtemps sans réagir.

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je vais essayer de calmer les choses.

Mgr Hannen, de Caledonia, a dit en ce qui concerne les autochtones qu'il était du devoir des Chrétiens de mettre fin à plus de 100 ans d'injustice. . .

Des voix: Oh, oh!

* * *

[Français]

L'ACDI

M. Richard Bélisle (La Prairie, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. On vient de mentionner que l'ACDI a entièrement coupé son aide aux organisations non gouvernementales pour la sensibilisation du public au développement international. Elle menace ainsi directement l'existence de plus de 80 de ces organisations au Québec et au Canada, et même la survie de l'Association québécoise des organismes de coopération internationale.

Comment le ministre des Affaires étrangères peut-il justifier de couper dans l'aide aux organismes non gouvernementaux de coopération internationale, en même temps qu'il accorde un généreux contrat de 99 510 $ à son ami et candidat libéral défait dans La Prairie, M. Jacques Saada, pour l'élaboration d'un simple plan de commnunication du programme de l'ACDI au Maghreb?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, il me fait plaisir de dire à l'honorable député qui a été élu à la dernière élection qu'il fait mieux d'attendre et de bien se préparer, parce que la prochaine fois, il ne sera pas élu.

Des voix: Oh! Oh!

M. Ouellet: Ce n'est pas avec ce genre d'accusations qu'il va impressionner les électeurs de son comté.

M. Richard Bélisle (La Prairie, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais dire au ministre qu'en attendant la prochaine élection, il fait vivre le candidat libéral défait en octobre 1993 et ce, avec l'argent des contribuables canadiens et québécois.

Des voix: Bravo!

M. Bélisle: Le ministre confirme-t-il qu'en fixant le montant du contrat à 99 510 $, il s'assurait que celui-ci soit accordé à son ami Jacques Saada, parce qu'en dépassant 100 000 $, il aurait été obligé d'aller en appel d'offres pour l'octroi du contrat?

(1445)

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, ce. . .

Des voix: Oh! Oh!

Le Président: Alors, nous voulons écouter la réponse. L'honorable ministre des Affaires étrangères à la parole.


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M. Ouellet: Monsieur le Président, il me fait plaisir de dire que le contrat octroyé a été fait selon les normes établies. . .

Des voix: Oh! Oh!

M. Ouellet: . . .les normes qui existaient à l'ACDI à l'époque où le chef de l'opposition faisait partie du gouvernement conservateur. Ces normes d'attribution de contrats n'ont pas été changées. Elles étaient les mêmes à l'époque où il faisait partie du gouvernement précédent.

M. Saada est compétent, M. Saada a fait un excellent travail, et M. Saada est rémunéré pour le travail qu'il fait.

* * *

[Traduction]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement libéral nous parle très souvent de développement durable.

Vendredi dernier je suis allé à la réserve Stoney. La limite de coupe en vertu du plan de développement durable de cette réserve avait été fixée à 600 camions par an. En réalité, on a en a coupé suffisamment pour remplir 14 000 camions, c'est-à-dire que l'équivalent de 25 à 30 ans d'exploitation a été récolté en une année.

Pourquoi le ministre des Affaires indiennes permet-il cela?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, c'est toujours la même question et je vais donner la même réponse. Pourquoi ce parti ne peut-il pas être assez direct pour demander au solliciteur général et au gouvernement d'envoyer la GRC en Colombie-Britannique afin d'inculper les sociétés qui étaient là avec l'argent, en sachant que ce qu'elles faisaient était répréhensible? Pourquoi n'a-t-il pas fait cela? Pourquoi donne-t-il l'impression que c'est la faute des Indiens?

La responsabilité des compagnies forestières de Colombie-Britannique est beaucoup plus grande, car elles connaissent la loi, elles ont des avocats, elles ont de l'argent et elles savent parfaitement ce qu'elles font. Ce sont leurs tronçonneuses qui ont fait le travail.

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, le ministre voudrait nous faire croire que des gens de Colombie-Britannique sont venus comme ça dans cette réserve et y ont coupé tous les arbres. Où est la responsabilité du ministre? Où est la responsabilité du ministère des Affaires indiennes?

Je lui repose la même question: Pourquoi a-t-il laissé cela se faire sur cette réserve indienne alors que sa responsabilité est d'empêcher qu'une telle chose ne se produise?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'espère que c'est la dernière question complémentaire. Je peux dire au député que la GRC s'est présentée là-bas le 31 mars, qu'elle a opéré une saisie et qu'une inculpation a été portée.

Des voix: Bravo!

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Une bonne chose qu'il n'y ait qu'un mercredi par semaine.

* * *

LA SOMATOTROPINE BOVINE

M. John O'Reilly (Victoria-Haliburton, Lib.): Monsieur le Président, je suis conscient de la chance que j'ai eue d'obtenir de poser une question le mercredi.

Ma question s'adresse à la ministre de la Santé. Comme la ministre le sait, la somatotropine bovine recombinante ne peut être vendue ou utilisée à des fins commerciales au Canada.

(1450)

Connaissant la controverse qui divise même les producteurs laitiers au sujet de l'usage de cette substance, la ministre peut-elle dire à la Chambre où en est son ministère dans le processus de prise de décision à ce sujet, et quand les producteurs laitiers du Canada peuvent-ils s'attendre à recevoir une réponse de la ministre là-dessus?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, la vente de la somatotropine bovine recombinante n'est pas autorisée au Canada. En fait, il est illégal d'utiliser cette substance dans notre pays.

Les scientifiques du Bureau des médicaments vétérinaires étudient actuellement ce produit pharmaceutique. Il ne sera approuvé que lorsque les scientifiques auront la preuve qu'il est efficace et sans danger.

Un moratoire est actuellement en vigueur sur une base volontaire, auquel la société qui produirait normalement cette substance a accepté de se soumettre. Cependant, ce moratoire ne touche absolument pas le processus d'approbation de ce produit, qui se poursuit au ministère de la Santé du Canada.

* * *

[Français]

LES CONTRATS GOUVERNEMENTAUX

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.

Depuis l'élection du gouvernement libéral en octobre 1993, le ministre de la Justice a accordé 186 contrats de services professionnels et spéciaux, d'une valeur de 7 millions de dollars. Cet argent finance la recherche en criminologie et en droit.

Le ministre de la Justice peut-il nous dire pourquoi les individus et entreprises du Québec n'ont obtenu que 5 p. 100 de la valeur de ces contrats octroyés par son ministère, soit 15 fois moins que les individus et entreprises de l'Ontario?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je me ferai un plaisir de prendre la question de la députée en considération, d'y trouver une réponse détaillée et de la lui communiquer aussi tôt que possible.

Je peux lui dire dès maintenant que l'une des responsabilités du ministère de la Justice est de retenir de temps à autre les services de juristes travaillant dans le privé pour défendre les


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intérêts du gouvernement dans des affaires précises; il se peut que le travail qu'ils ont à faire soit en grande partie à l'extérieur de cette région.

Je vais obtenir toutes les précisions voulues et j'en ferai part à la député en temps utile.

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, le ministre devra peut-être prendre note également de la deuxième question.

Dans la région d'Ottawa-Hull, c'est encore pire. La valeur des contrats accordés aux Québécois se chiffre à 2 p. 100, contre 98 p. 100 pour l'Ontario. En plus, 99 p. 100 de tous les travaux de recherche sont rédigés en anglais seulement.

Comment le ministre de la Justice explique-t-il ce parti pris des fonctionnaires de son ministère en faveur des fournisseurs du Canada anglais et en faveur de l'unilinguisme anglais?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je prends note de la question, et je vais obtenir les précisions voulues pour y répondre.

Toutefois, en attendant, je ne peux m'empêcher de préciser tout de suite que les activités du ministère de la Justice dans notre pays se déroulent dans les deux langues officielles.

* * *

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Darrel Stinson (Okanagan-Shuswap, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien.

Dans son rapport de 1992, le vérificateur général recommandait au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien de bien s'informer en ce qui concerne les pratiques d'exploitation forestière sur les réserves. Tout était en place pour que les événements survenus sur la réserve de Stoney se produisent.

Avez-vous lu ce rapport? Avez-vous prêté attention à ce rapport?

Le Président: Je demande à tous les députés d'adresser leurs questions à la présidence.

(1455)

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je vais répondre par une ou deux comparaisons. Nous sommes confrontés à un problème à la réserve de Stoney. Je m'y suis rendu, de même que la police et des fonctionnaires de mon ministère. Le problème existe depuis un an.

Le député intervient aujourd'hui à la Chambre. Avec tous ces camions chargés qu'une première nation a sortis de sa circonscription, pour la première fois la semaine dernière, il vient probablement de découvrir l'existence du problème.

En Colombie-Britannique, où celui qui me critique siège. . .

M. Abbott: Il est question de l'Alberta.

M. Irwin: La philosophie est la même, peu importe où se trouvent les circonscriptions des réformistes ou des Nishgas, qui tentent de régler leurs revendications depuis au moins deux décennies. Les réformistes restent assis paisiblement à titre de représentants des Nishgas, alors que toutes les quatre minutes, un chargement de bois quitte le territoire de ces derniers. Pourtant, le député qui me critique et le Parti réformiste gardent le silence. J'y suis allé et je m'occupe de ce dossier. Les réformistes auraient avantage à faire la même chose.

M. Darrel Stinson (Okanagan-Shuswap, Réf.): Monsieur le Président, comme la situation dure depuis un an et comme le ministre a eu beaucoup de temps pour s'en occuper, pourrait-il veiller à ce qu'elle ne se répète pas ailleurs?

Le Président: La députée de Beaches-Woodbine.

* * *

LES DÉPENSES PUBLIQUES

Mme Maria Minna (Beaches-Woodbine, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au président du Conseil du Trésor.

Tous les Canadiens veulent avoir la certitude que l'argent des contribuables est dépensé de façon responsable. Nombreux sont ceux qui affirment qu'il faudrait mieux surveiller et contrôler les achats de dernière minute que font les ministères vers la fin de l'exercice financier.

Le ministre peut-il nous décrire les mesures prises par le Conseil du Trésor pour mettre fin aux folles dépenses du mois de mars?

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, je partage les inquiétudes de la députée en ce qui concerne les dépenses effectuées en fin d'exercice financier. La question préoccupait également le vérificateur général du Canada qui en a parlé dans deux rapports qu'il a déposés dans les années 80.

En abordant la question, le vérificateur général ne cherchait pas à réprouver les dépenses qui étaient effectuées. Il a constaté que les objectifs étaient bien définis, mais que de nombreux achats étaient effectués vers la fin de l'exercice et qu'il fallait donc adopter une meilleure méthode de gestion de trésorerie.

Je suis heureux d'informer la Chambre que nous avons autorisé le report de 5 p. 100 du budget de fonctionnement des ministères afin d'éviter ces dépenses effrénées en fin d'exercice. De plus, j'ai écrit aux autres ministres et mon sous-ministre a communiqué avec ses homologues pour veiller à ce que la procédure visant à mettre fin aux achats massifs en fin d'exercice soit respectée.

Nous avons exigé que les bilans de chacun des ministères soient vérifiés et que ces vérifications nous soient remises au


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plus tard le 30 juin 1995, afin de pouvoir mieux contrôler la gestion de la trésorerie dans l'administration fédérale.

* * *

[Français]

L'IMMIGRATION

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration.

Ce matin, les autorités de l'immigration devaient, encore une fois, déporter une famille de réfugiés roumains, la famille de Carmen et Alexandru Dima. Ces derniers, parfaitement intégrés à la société québécoise, lancent, en dernier recours, un appel au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration pour qu'il intervienne.

Comment le ministre peut-il justifier son refus de donner suite à la requête de la famille Dima, une famille très bien intégrée au Québec, alors qu'il l'avait fait dans d'autres cas de familles qui ont pu rester au Canada et qui se sont bien adaptées?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, le député a besoin de connaître le système de l'immigration et l'accord Canada-Québec parce que nous avons déclaré que ces personnes ne sont pas des réfugiés. On leur a donné le droit d'accéder au meilleur système au monde.

M. Dima a fait appel; il a demandé au ministère de faire preuve de compassion et d'humanisme. Nous avons dit qu'il n'y avait pas de circonstances spéciales pour que lui et sa famille ne retournent pas en Roumanie.

(1500)

Monsieur le Président, c'est la province de Québec qui a le devoir de faire de l'immigration indépendante. J'avais déclaré que la personne n'est pas un réfugié. Nous ne pouvons pas accepter que toutes les personnes refusées en tant que réfugiés puissent être acceptées en tant qu'immigrants au Canada, parce que, l'année dernière, il y a eu 3 000 personnes de la Roumanie qui sont venues au Canada par le processus normal.

* * *

[Traduction]

LES FORÊTS

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, ma circonscription, Kootenay-Est, et les entreprises et les bûcherons qui s'y trouvent ont prélevé environ 60 p. 100 des billes de bois dont nous parlons.

Ils assument une responsabilité morale, mais le ministre a une responsabilité juridique, étant donné les 35 millions de dollars payés à la bande indienne. Pourquoi n'assume-t-il pas sa responsabilité? À mon avis, le ministère a fait preuve d'une incompétence crasse.

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, à mon avis, le Parti réformiste a, une fois de plus, montré ses vraies couleurs.

Je répète que le ministère s'occupe du dossier. Nous avons un garde forestier sur place. Nous survolons la région. La GRC est là aussi et des accusations ont été portées.

* * *

LA SANTÉ

M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Santé qui sait sans doute que, selon des nouvelles diffusées ce matin, le gouvernement conservateur de l'Alberta a fait savoir qu'il allait demander des modifications à la Loi canadienne sur la santé pour permettre l'implantation d'hôpitaux privés et que le premier ministre de cette province a déclaré qu'il appuyait l'idée d'un régime de santé à deux niveaux.

Elle sait sans doute aussi que, en fin de semaine dernière, un vote a été pris en faveur de la cession au secteur privé des hôpitaux abandonnés.

Puisque la ministre de la Santé a réduit si radicalement les paiements au titre des soins de santé aux provinces, comment peut-elle faire quoi que ce soit pour mettre fin à la terrible érosion du régime d'assurance-maladie et des services de santé à laquelle nous assistons au Canada depuis quelques décennies?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, j'ai répété à maintes reprises que nous allions protéger le système de soins de santé en maintenant les principes de la Loi canadienne sur la santé.

Pas une seule commission créée au Canada pour étudier la question n'a déclaré qu'il fallait plus d'argent. La commission royale d'enquête sur la santé de la Colombie-Britannique a déclaré qu'il fallait une meilleure gestion et non plus d'argent.

Nous savons que le premier ministre de l'Alberta soumet différentes propositions. Nous lui répondrons lorsque nous saurons ce qu'il propose.

Je rappelle à tous et à toutes que le régime de soins de santé ne devient pas plus abordable tout simplement parce que nous transférons les budgets et les fonds du secteur public au secteur privé. Ce n'est pas le cas et nous ne le permettrons pas.

Le Président: Cela termine la période des questions.

* * *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Chers collègues, je veux vous signaler la présence à notre tribune de l'honorable Patricia L. Black, ministre de l'Énergie de l'Alberta.

Des voix: Bravo!

11533


11533

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Fred Mifflin (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale et des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 32(2) du Règlement, je veux présenter, dans les deux langues officielles, deux documents décrivant les politiques du ministère de la Défense nationale, l'un intitulé «Logement des membres des Forces canadiennes» et l'autre, «Rémunération des membres des Forces canadiennes».

Monsieur le Président, j'ai déposé les deux documents simultanément. Je dépose donc maintenant officiellement le deuxième document.

* * *

(1505)

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 40 pétitions.

* * *

LOI ÉLECTORALE DU CANADA

Mme Anna Terrana (Vancouver-Est, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-320, Loi modifiant la Loi électorale du Canada (enregistrement des partis politiques).

-Monsieur le Président, je suis heureuse de présenter un projet de loi d'initiative parlementaire intitulé Loi modifiant la Loi électorale du Canada.

Cette mesure législative vise trois objectifs. Premièrement, le projet de loi modifie la Loi électorale du Canada pour permettre l'enregistrement d'un parti politique par le directeur général des élections lorsque le parti présente des candidats dans au moins 12 circonscriptions électorales d'un bout à l'autre du pays. Actuellement, le nombre minimum est de 50.

Aux termes de la loi, le directeur général des élections doit radier du registre un parti qui ne satisfait pas aux conditions énoncées au paragraphe 28(2) de la loi. Auparavant, cette décision était laissée à la discrétion du directeur général des élections.

Deuxièmement, le projet de loi supprime l'obligation qu'avait l'agent principal d'un parti politique de liquider les actifs de ce parti lorsqu'il était radié du registre par le directeur général des élections du Canada.

Enfin, le projet de loi abaisse le montant devant être versé en guise de dépôt au directeur du scrutin au moment où les déclarations de candidature sont présentées.

Ce projet de loi a été accueilli favorablement partout au Canada. J'inviterais tous les députés de la Chambre à appuyer cette importante initiative démocratique.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

[Français]

LE CODE CRIMINEL

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) demande à présenter le projet de loi C-321, Loi modifiant le Code criminel (prostitution juvénile à l'étranger).

-Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer aujourd'hui un projet de loi intitulé: Loi modifiant le Code criminel, (prostitution juvénile à l'étranger). Ce projet de loi, qui se veut un moyen de combattre une pratique criminelle, vise à interdire le recours à des services de prostitution offerts à l'étranger par des personnes de moins de 18 ans; le transport de personnes à des maisons de débauche situées à l'étranger pour des fins de relations sexuelles avec des personnes de moins de 18 ans; certains actes de proxénétisme commis à l'étranger et dirigés à l'encontre de personnes de moins de 18 ans. C'est mon souhait le plus cher que tous les députés de cette Chambre appuient éventuellement ce projet de loi.

(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

[Traduction]

LOI SUR LA TAXE D'ACCISE

L'ordre du jour appelle: Initiatives parlementaires

Deuxième lecture et renvoi au Comité permanent des finances du projet de loi C-222, Loi modifiant la Loi sur la taxe d'accise (dispositifs de compression).
M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, il y a eu des consultations entre les partis, et vous constaterez que la Chambre donnerait le consentement pour que le projet de loi C-222, Loi modifiant la Loi sur la taxe d'accise (dispositifs de compression), inscrit au Feuilleton au nom de la députée de Nepean, soit retiré et que l'ordre de deuxième lecture soit annulé.

Le vice-président: D'accord?

(L'ordre est annulé et le projet de loi est retiré.)

* * *

[Français]

PÉTITIONS

LA DÉCONTAMINATION DU CANAL LACHINE

M. Raymond Lavigne (Verdun-Saint-Paul, Lib.): Monsieur le Président, je dépose une pétition signée par 4 600 de mes commettants qui demandent au gouvernement de ne pas retarder le projet de la décontamination du canal Lachine. Le canal


11534

Lachine est tellement contaminé que si un enfant y tombe, il devra être décontaminé, de peur d'infection.

Une fois décontaminés, ce canal et les terrains avoisinants pourraient servir comme lieux de récréation. Durant et après la décontamination, ce projet créera une multitude d'emplois. J'aimerais ajouter que je suis tout à fait en accord avec cette pétition.

(1510)

[Traduction]

LES DÉPENSES DU GOUVERNEMENT

M. Jag Bhaduria (Markham-Whitchurch-Stouffville, Lib. ind.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter une pétition signée par des habitants de la circonscription de Markham-Whitchurch-Stouffville.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de réduire le déficit en supprimant le gaspillage et en réduisant d'au moins 5 p. 100 les dépenses globales de tous les ministères.

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, je prends la parole, en conformité avec l'article 36 du Règlement, pour présenter une pétition signée par des habitants de la ville de Fredericton, au Nouveau-Brunswick.

La pétition s'énonce ainsi: «Étant donné que la vie humaine avant la naissance n'est pas protégée dans la société canadienne, les pétitionnaires prient le Parlement d'agir immédiatement pour protéger les enfants à naître en modifiant le Code criminel afin d'accorder à ces enfants la même protection dont jouissent les autres êtres humains.»

LA SANTÉ

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je prends la parole pour présenter une pétition signée par des habitants de ma circonscription de même que des localités de North Battleford, Aberdeen, Melville, Ituna, Herschel et d'autres localités de la Saskatchewan.

Cette pétition vise à faire abroger la loi C-91 qui a fait doubler le prix que paient les Canadiens pour les médicaments d'ordonnance et qui met en péril les régimes d'assurance-médicaments de plusieurs gouvernements au Canada.

Les pétitionnaires demandent au gouvernement, qui était en faveur de l'abrogation de la loi C-91 lorsqu'il était dans l'opposition, de tenir sa promesse et de l'abroger.

LE CODE CRIMINEL

M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Monsieur le Président, j'ai une fois de plus l'honneur de présenter, en vertu de l'article 36 du Règlement, une pétition au nom des citoyens de la région de Kamloops, qui sont maintenant près de 27 000 à avoir signé ce document. Ils font valoir que de nombreux criminels violents et délinquants sexuels obtiennent prématurément une libération conditionnelle et sont remis en liberté sans avoir subi un traitement adéquat ou s'être réadaptés. Les pétitionnaires croient que les personnes reconnues coupables de ce genre de crime doivent rester derrière les barreaux tant qu'elles n'ont pas suivi un traitement fructueux et ne peuvent prouver clairement qu'elles sont complètement réadaptés.

Les pétitionnaires demandent donc à la Chambre des communes et au gouvernement du Canada de modifier le Code criminel afin de prendre toutes les mesures nécessaires et veiller à ce que ces modifications soient mises en oeuvre.

LA JUSTICE

M. Bob Kilger (Stormont-Dundas, Lib.): Monsieur le Président, aux termes de l'article 36 du Règlement, je présente une pétition signée par plus de 600 électeurs de ma circonscription, celle de Stormont-Dundas. Les pétitionnaires demandent au gouvernement de légiférer relativement à la décision que la Cour suprême a rendue le 30 septembre 1994-je suis heureux de dire que c'est chose faite-et pour corriger les conséquences de cette décision.

La pétition porte sur la décision de la Cour suprême au sujet de la défense fondée sur l'état d'ébriété.

LES RELATIONS SEXUELLES ENTRE PERSONNES DU MÊME SEXE

M. Bob Kilger (Stormont-Dundas, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une autre pétition signée par plus de 70 habitants de la circonscription de Stormont-Dundas qui exhortent le gouvernement à ne pas adopter de dispositions législatives visant à modifier le code des droits de la personne, la Loi canadienne sur les droits de la personne ou la Charte des droits et libertés d'une manière pouvant donner l'impression que la société approuve les relations sexuelles entre personnes de même sexe.

LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Bob Kilger (Stormont-Dundas, Lib.): Enfin, monsieur le Président, quelque 400 pétitionnaires demandent au gouvernement d'examiner et de modifier nos lois concernant les jeunes contrevenants afin de permettre aux tribunaux d'intenter des poursuites et de sévir contre les jeunes qui enfreignent la loi. Les pétitionnaires demandent aussi que les autorités puissent divulguer le nom des jeunes contrevenants et abaisser l'âge limite de manière que les poursuites puissent être proportionnelles à la gravité du crime.

* * *

[Français]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, on répondra aujourd'hui aux questions nos 155 et 156.

[Texte]

Question no 155-M. Althouse:

Pour chacune des 20 dernières années, quelle proportion de son produit intérieur brut le Canada a-t-il consacré aux postes suivants: programmes d'assurance-chômage; pensions de sécurité de la vieillesse; Régime de pensions du Canada; régimes de pensions de la fonction publique (notamment ceux des militaires, de la GRC et des parlementaires); allocations familiales et crédits d'impôt pour enfants; soins de santé; «protection des biens» (police, militaire et prisons) et intérêt sur le remboursement de la dette?


11535

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Selon Statistique Canada, la question traite du rapport, au cours des vingt dernières années, entre l'importance de certains programmes de dépenses de l'administration fédérale et la taille de l'économie canadienne globale, telle que mesurée à Statistique Canada par le produit intérieur brut. Le tableau démontre les estimations du PIB de Statistique Canada, celles demandées des programmes de dépenses de l'administration fédérale et le ratio de ces valeurs au PIB, pour la période 1975 à 1994. On y trouve aussi des notes explicatives sur la source des données et autres faits qui peuvent en influencer leur interprétation.






































Question no 156-M. Althouse:

Pour chacune des 20 dernières années, quelle proportion de son produit intérieur brut le Canada a-t-il reçue en recettes fiscales grâce aux sources suivantes: impôt sur le revenu des particuliers; impôt sur le revenu des sociétés; taxes sur les ventes de fabricants; taxe sur les produits et services; remboursement des services rendus par des organismes fédéraux; cotisations au Régime de pensions du Canada et cotisations aux régimes de pensions de la fonction publique (militaire, GRC et parlementaire)?
L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Selon Statistique Canada, la question traite du rapport, au cours des vingt dernières années, entre l'importance de certains revenus de l'administration fédérale et la taille de l'économie canadienne globale, telle que mesurée à Statistique Canada par le Produit intérieur brut. Le tableau démontre les estimations du PIB de Statistique Canada, celles demandées des recettes de l'administration fédérale et le ratio de ces valeurs au PIB, pour la période 1975 à 1994. On y trouve aussi des notes explicatives sur la sources des données et autres faits qui peuvent en influencer leur interprétation.













[Français]

M. Milliken: Monsieur le Président, je demande que les autres questions soient réservées.

Le vice-président: Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.

[Traduction]

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Aux termes de l'article 39 du Règlement, j'ai fait inscrire la question no 91 au Feuilleton le 4 octobre 1994. C'était il y a 186 jours.

La semaine dernière, quand j'ai invoqué le Règlement pour la même raison, le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre a dit que le ministre des Approvisionnements et Services étudiait avec soin la question et qu'il serait en mesure de répondre à ma question sous peu.

À ma connaissance, en ce qui concerne les questions au Feuilleton, le gouvernement tente d'y répondre dans le délai de 45 jours. J'estime qu'un délai de 186 jours est inacceptable.

11538

Le député aurait-il l'obligeance de préciser ce qu'il entend par «sous peu» et de me dire quand je recevrai une réponse à la question que j'ai posée il y a six mois?

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que j'aide la députée à exercer ses fonctions.

Comme je l'ai dit, le ministre étudie cette question avec soin. Je crois savoir que la réponse sera acheminée cet après-midi par le bureau qui rend compte à la Chambre par mon entremise. J'espère pouvoir communiquer la réponse à la députée demain.

(1515)

Sinon, je le ferai après l'ajournement de Pâques. J'espère que ce sera demain. Je ferai l'impossible pour que ce soit demain.

* * *

DEMANDES DE DOCUMENTS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les motions portant production de documents soient reportées.

Le vice-président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

_____________________________________________


11538

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LOI SUR LES ARMES À FEU

PROJET DE LOI C-68-MOTION D'ATTRIBUTION DE TEMPS

L'hon. Alfonso Gagliano (secrétaire d'État (Affaires parlementaires) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) propose:

Que, relativement au projet de loi C-68, Loi concernant les armes à feu et certaines autres armes, au plus un jour de séance supplémentaire soit accordé aux délibérations à l'étape de la deuxième lecture; et
Que, quinze minutes avant l'expiration du temps prévu pour les affaires émanant du gouvernement au cours du jour de séance attribué pour l'étude en deuxième lecture de ce projet de loi, toute délibération devant la Chambre soit interrompue, s'il y a lieu, aux fins de cet ordre et, par la suite, toute question nécessaire pour disposer de l'étape à l'étude à ce moment soit mise aux voix immédiatement et successivement, sans plus ample débat ni amendement.
Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion.

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent

Et plus de cinq députés s'étant levés.

Le vice-président: Convoquez les députés.

(La motion, mise aux voix, est adoptée)

(Vote no 188)

POUR

Députés
Alcock
Allmand
Anderson
Arseneault
Assadourian
Augustine
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellemare
Bevilacqua
Bhaduria
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Bélanger
Calder
Campbell
Cannis
Catterall
Cauchon
Chamberlain
Chan
Clancy
Cohen
Crawford
Culbert
DeVillers
Dhaliwal
Discepola
Dromisky
Duhamel
Easter
Eggleton
English
Fewchuk
Finestone
Finlay
Flis
Fontana
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Godfrey
Goodale
Gray (Windsor West)
Harvard
Hickey
Hopkins
Ianno
Irwin
Jackson
Jordan
Karygiannis
Keyes
Kilger (Stormont-Dundas)
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
MacAulay
MacDonald
MacLaren
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Maheu
Malhi
Manley
Marchi
Marleau
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
McCormick
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)
McTeague
Mifflin
Milliken
Minna
Mitchell
Murphy
Murray


11539

Nunziata
O'Brien
Ouellet
Pagtakhan
Paradis
Patry
Payne
Peric
Peters
Peterson
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Regan
Richardson
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Robillard
Rock
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Serré
Sheridan
Skoke
Speller
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Szabo
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney
Ur
Valeri
Vanclief
Verran
Volpe
Wappel
Whelan
Wood
Young
Zed-133

CONTRE

Députés
Abbott
Ablonczy
Asselin
Bachand
Bellehumeur
Benoit
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Blaikie
Bouchard
Breitkreuz (Yellowhead)
Bridgman
Brien
Brown (Calgary Southeast)
Bélisle
Canuel
Caron
Chatters
Chrétien (Frontenac)
Crête
Cummins
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
de Savoye
Dubé
Dumas
Duncan
Epp
Fillion
Forseth
Frazer
Gagnon (Québec)
Gauthier (Roberval)
Gilmour
Godin
Grey (Beaver River)
Grubel
Guay
Guimond
Hanrahan
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hayes
Hermanson
Hill (Macleod)
Hill (Prince George-Peace River)
Hoeppner
Jacob
Jennings
Johnston
Lalonde
Landry
Langlois
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Leblanc (Longueuil)
Lefebvre
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loubier
Manning
Marchand
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
Mercier
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Ménard
Nunez
Paré
Penson
Picard (Drummond)
Pomerleau
Ramsay
Riis
Ringma
Rocheleau
Sauvageau
Schmidt
Solberg
Solomon
Speaker
St-Laurent
Stinson
Strahl
Taylor
Thompson
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Venne
Wayne
White (Fraser Valley West)
White (North Vancouver)
Williams-100

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Deshaies
Duceppe
Gaffney
Grose
Harper (Churchill)
Plamondon

(1525)

[Traduction]

Le Président: Je déclare la motion adoptée.

* * *

LOI SUR LES ARMES À FEU

La Chambre reprend l'étude, interrompue le mardi 28 mars, de la motion: Que le projet de loi C-68, Loi concernant les armes à feu et certaines autres armes, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité, ainsi que de l'amendement.

Le Président: La dernière fois que la Chambre a discuté du projet de loi C-68, il restait au député de Medicine Hat sept minutes de participation au débat.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, malheureusement, je ne pourrai pas faire le discours que j'aurais souhaité présenter aujourd'hui, car le gouvernement a proposé une forme de clôture, une mesure que les députés du gouvernement ont pourtant décriée énergiquement durant la législature précédente. Je parlerai donc maintenant contre cette mesure.

(1530)

Toute la question du contrôle des armes à feu tient franchement à coeur aux Canadiens. Bien des gens de tous les coins du pays sont surtout opposés à l'idée de l'enregistrement.

À mon avis, c'est une décision politique extrêmement cynique, de la part du gouvernement, que de recourir à une certaine forme de clôture juste avant un congé, où les députés doivent retourner dans leur circonscription pour consulter leurs électeurs. Il empêche ainsi les Canadiens d'avoir les discussions qui s'imposent, étant donné l'importance que la question présente pour eux. Je crois vraiment que le gouvernement joue un jeu politique dans cette affaire. Je voudrais aborder la question dans une perspective plus large.

Comme je l'ai mentionné, c'est un dossier qui préoccupe beaucoup les gens. Sous bien des rapports, le pays est divisé suivant des critères ruraux et urbains. J'ai le sentiment que toute cette affaire va provoquer une vive controverse, si on ne la traite pas comme il faut.

C'est pour cette raison que le Parti réformiste a proposé un très bon amendement, un amendement mûrement réfléchi qui vise à scinder le projet de loi en deux. Il serait alors possible de se prononcer sur les propositions qui alourdiraient les peines infligées pour les crimes perpétrés avec des armes à feu. De nombreux Canadiens s'entendent là-dessus.

Or, là où la population ne suit plus le gouvernement, c'est quand il est question de l'enregistrement des armes à feu. S'il voulait vraiment être juste dans ce dossier, le gouvernement reconnaîtrait qu'il y a ici deux enjeux distincts et que les Cana-


11540

diens ont le droit de se prononcer séparément sur ces deux questions distinctes.

J'aimerais toucher un mot de tout le processus qui nous vaut la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui. Pour commencer, avant de proposer une mesure législative si sujette à controverse et qui soulève les passions à ce point, il ne serait que juste que le gouvernement soit tenu de prouver que l'enregistrement des armes est un moyen efficace de réduire la criminalité.

Nous avons posé de nombreuses questions en ce sens à la Chambre. À maintes reprises, nous avons demandé au ministre de la Justice de nous fournir des preuves. Tout ce qu'il a pu faire, pour emprunter au vocabulaire des cours de logique, c'est d'invoquer une autorité à l'appui de sa thèse, un argument qui n'en est pas un. Les chefs de police disent que ce serait une bonne chose, mais il n'y a pas de preuve. Nous sommes revenus à la charge maintes et maintes fois. Que voilà une attitude cynique!

Cynique également est la façon dont le processus de consultation s'est déroulé. Certes, le ministre a organisé quelques réunions avec certains groupes au cours de l'été, ce qui est formidable, mais il faut alors rechercher un compromis. Nous ne pouvons pas procéder en décidant d'avance d'être totalement inflexibles.

Les choses ont empiré. Après un certain temps, ces réunions avaient lieu sur invitation. Quel cynisme! Les gens voulaient avoir voix au chapitre, mais le ministre a dit: «Non, nous allons dire que certaines personnes ne peuvent pas venir à ces réunions, car nous voulons nous assurer que les choses se passent comme nous l'entendons.» Ensuite, nous avons ce projet de loi d'ensemble où le gouvernement cherche à nous faire accepter le bon et le mauvais. Encore une fois, c'est très cynique et très politique, et nous sommes entièrement en désaccord avec cela.

Le comble, c'est qu'on nous impose cette attribution de temps tout juste avant un congé, alors que les députés devraient pouvoir discuter de ces questions très importantes et revenir pour en reparler avant que la loi ne soit adoptée. Malheureusement, en invoquant cette forme de clôture, le gouvernement empêche les députés de le faire.

Nous avons parlé à maintes reprises de cette question. Nous avons demandé au gouvernement de donner la preuve que cela contribuera à réduire le crime. Nous avons dit que, s'il pouvait fournir cette preuve, il aurait notre appui. Cependant, comme il en est incapable, nous ne l'appuierons pas. Je termine mes observations là-dessus.

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de dire, aujourd'hui, que j'appuie ce projet de loi.

Cette mesure représente l'aboutissement de l'un des points du livre rouge. Je voudrais, à ce sujet, vous lire le passage suivant du livre rouge: «Nous adopterons une batterie de mesures pour lutter contre la délinquance. Pour muscler la réglementation des armes à feu, à titre d'exemple, nous ferons obstacle à l'importation clandestine d'armes à feu prohibées ou à utilisation restreinte et nous interdirons à toute personne reconnue coupable d'une infraction à la loi sur les stupéfiants, de harcèlement ou de violence, la possession ou le port d'une arme à feu.» Cette promesse était bel et bien formulée dans le livre rouge. Nous la tenons, aujourd'hui, grâce à cette mesure législative.

(1535)

C'est cette mesure législative que le Parti réformiste essaie de détruire en proposant à la Chambre cet amendement ridicule. Les réformistes ont induit les Canadiens en erreur en leur disant que cet amendement diviserait le projet de loi en deux questions distinctes. C'est on ne peut plus faux.

La députée de Beaver River n'a pas toujours été ici. Cependant, elle a sûrement entendu les fausses déclarations que ses collègues ont faites à propos des répercussions que cet amendement aura dans tout le pays. Si elle prend la parole au cours de l'après-midi, elle voudra sûrement se dissocier de ces propos.

En ce qui concerne le projet de loi, je voudrais tout d'abord parler des allégations que le député de Medicine Hat a faites à propos de l'attribution de temps dans le débat de cet après-midi.

Nous avons à maintes reprises demandé de l'aide pour débattre de ce projet de loi. Nous avons offert de prolonger les séances pour donner à tous les députés qui voulaient participer au débat la chance de le faire. Les députés réformistes ont décliné ces offres poliment, mais catégoriquement. Nous n'avons donc pas besoin de nous poser de questions sur leur désir réel de débattre de ce projet de loi.

Ils ont beau se plaindre, cet après-midi, et prétendre qu'on réduit leur temps de débat, mais permettez-moi de faire le point. La Chambre a examiné ce projet de loi le 16 février, le 27 février, le 13 mars, le 27 mars et le 28 mars, ce qui représente au total, selon le compte rendu officiel, 17 heures et 46 minutes de débat. Quatre-vingt-quatre personnes ont participé à ce débat avant aujourd'hui, et je suis la 85e à le faire.

Une voix: Cela montre l'intérêt que cette question suscite.

M. Milliken: Le député dit que cela montre l'intérêt que cette question suscite. Cela montre surtout que le Parti réformiste a monté une campagne d'obstruction.

Si l'on regarde la répartition des intervenants, on constate que, jusqu'à présent, il y a eu 35 libéraux, 12 bloquistes, 34 réformistes, 2 néo-démocrates et 1 conservateur. Autrement dit, presque tous les députés réformistes ont parlé, tandis que chez les libéraux, en dépit des différences d'opinion, 35 seulement ont participé au débat. Ce n'est rien d'autre que de l'obstruction. Le Parti réformiste a opté pour l'obstruction et le gouvernement a dû recourir à la solution logique, c'est-à-dire limiter le débat. Nous avons choisi de cesser de faire souffrir les réformistes.


11541

Voilà pour l'argument voulant que nous soyons injustes. Nous avons offert au Parti réformiste la possibilité de tenir des débats prolongés, mais cette offre a toujours été refusée. La raison, c'est qu'il voulait que le gouvernement impose la clôture. Le Parti réformiste veut que le gouvernement limite le débat, de façon à en finir avec son opposition plutôt ridicule au projet de loi.

Le député de Medicine Hat et des douzaines d'autres dans ce parti n'ont pas cessé de répéter que rien ne prouvait que les propositions du gouvernement réduiront la criminalité. J'ai des preuves et je voudrais les citer aux députés, particulièrement aux réformistes et à quelques autres Thomas ailleurs à la Chambre.

La proposition courageuse du ministre de la Justice, face à l'opposition persistante des réformistes et d'autres personnes au pays, est fondée en partie sur une promesse contenue dans le livre rouge, mais elle a aussi l'appui de l'Association canadienne des policiers dont les membres sont des spécialistes de l'application des lois. Ce sont eux qui veillent à l'application du Code criminel dans notre pays. Pourtant, les députés réformistes claironnent que ce sont eux les experts. La plupart d'entre eux n'y connaissent absolument rien. Ils ne connaissent absolument rien à la question et pourtant ils tempêtent toute la journée à la Chambre, demandant des preuves.

Je les invite à écouter le témoignage du président de l'Association canadienne des chefs de police. Celui-ci, M. VincentMacDonald, a fait certaines déclarations après que son association, à sa conférence annuelle en août dernier, eut réclamé des sanctions plus rigoureuses pour l'utilisation d'armes à feu à des fins illicites, l'interdiction des fusils d'assaut militaires et de copies d'armes à feu, l'enregistrement de toutes les armes à feu, des mesures afin de contrôler la vente de munitions, et le plein recouvrement des coûts. Ce sont là les cinq mesures réclamées par l'Association canadienne des chefs de police à son congrès en août 1994. Ce sont eux qui veillent à l'application de la loi, qui sont au premier rang, et voilà les mesures qu'ils réclament.

Les députés réformistes ignorent tout de ces suggestions qui se trouvent toutes dans le projet de loi qui a été présenté par le ministre de la Justice et que la Chambre examine aujourd'hui. S'ils étaient en faveur de faire respecter la loi au Canada, ils appuieraient ce projet de loi. Ce sont des hypocrites.

Le président de l'association a déclaré: «Nous devons insister sur le fait que, même si cette question peut être sujette à controverse, l'enregistrement de toutes les armes à feu est, à notre avis, le pivot autour duquel tout tourne et est essentiel si l'on veut contrôler le commerce illégal d'armes à feu, appuyer les mesures préventives et appliquer la loi.» On a la preuve que cette mesure sera efficace.

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Le 24 février 1995, le chef de police MacDonald a dit: «L'enregistrement des armes à feu permettra de contrôler de plusieurs façons importantes la contrebande, le vol d'armes à feu, et l'utilisation d'armes à feu légales à des fins illicites.» C'est un spécialiste du maintien de l'ordre qui le dit. Les députés réformistes ne peuvent assurément que s'incliner devant les capacités et la compétence du président de l'Association canadienne des chefs de police et devant la sagesse collective de cette association dont les membres appuient tous ce projet de loi dont ils estiment qu'il va dans la bonne direction.

J'aimerais citer une autre déclaration de M. MacDonald qui a dit ceci: «Comme l'exemple américain ne le prouve que trop bien, s'armer pour se protéger est une erreur qui ne fait que contribuer à l'escalade de la violence. Pour cette raison, nous pensons que le Canada a l'occasion unique d'ouvrir une voie nouvelle différente de celle suivie par les États-Unis. Non seulement cette mesure législative offre de nombreuses solutions aux problèmes actuels, mais en outre elle représente un investissement dans notre avenir.» Je suis convaincu que M. MacDonald a raison.

Et si cela ne suffit pas à convaincre les députés de cette Chambre que c'est la voie à suivre, ils n'ont qu'à consulter les sondages faits à ce sujet. Selon le sondage entrepris par la maison Environics, en octobre 1994, 90 p. 100 des Canadiens sont en faveur d'une loi exigeant que toutes les armes à feu soient en- registrées. Cette proportion est de 95 p. 100 au Québec; de 92 p. 100 en Ontario; de 88 p. 100 en Colombie-Britannique; de 83 p. 100 en Alberta.

Les réformistes n'arrêtent pas de se vanter qu'ils représentent les souhaits de leurs électeurs. Il n'en est rien. Ils ne s'intéressent pas plus aux souhaits de leurs électeurs qu'à la lune.

Le député réformiste d'Edmonton a admis ici même que selon son propre sondage, 69 p. 100 de ses électeurs étaient en faveur du projet de loi ministériel. Cela ne l'a pas empêché de dire: «Je me moque pas mal de ce qu'ils ont à dire. Je voterai non parce que j'en sais plus long qu'eux.» Tous les députés réformistes régurgitent les mêmes inepties, parfois dans des termes différents. Ils se drapent dans leur vertu et protestent que leur opposition à ce projet de loi est parfaitement justifiée. Et pourtant, ils savent que leurs électeurs l'appuient et qu'ils voteraient oui en grand nombre.

Si les réformistes faisaient ce qu'ils prétendent faire, soit représenter leurs électeurs et soutenir leurs intérêts, ils voteraient en masse en faveur de ce projet de loi. Ils seraient tous ici. Ils ne se contenteraient pas d'envoyer six ou sept des leurs pour représenter leurs 50 députés à la Chambre, comme ils l'ont fait la fin de semaine dernière. Ils seraient tous ici pour voter en faveur de ce projet de loi. Mais on les entend plutôt s'emporter, dans des discours pleins d'emphase, contre les mesures prises par le gouvernement dans ce projet de loi et les propositions très pertinentes du ministre de la Justice.

Je reconnais que cette mesure législative suscite beaucoup d'opinions très opposées. Tout ce que je peux dire, c'est que le gouvernement a agi dans l'intérêt supérieur des Canadiens en présentant ce projet de loi, que la grande majorité de la population approuve, dans toutes les régions du Canada. Il a présenté un projet de loi que les spécialistes de l'application de la loi réclamaient, eux qui savent mieux que quiconque de quoi on a besoin pour contrer la contrebande des armes à feu et le commerce des armes prohibées et tous les problèmes que les armes peuvent poser.


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C'est un projet de loi sensé. Je sais que le comité y apportera quelques changements. Le ministre a déjà dit qu'il était disposé à accepter certaines améliorations que le comité pourrait proposer.

Le député dénonce la confiscation. Il sait bien que lorsqu'il parle de confiscation, il essaie seulement de gagner des alliés pour son parti. Il sait qu'aux rassemblements pour la défense des droits de ceux qui possèdent des armes, il en profitait pour vendre des cartes de membre du Parti réformiste, dans un effort pour stimuler la popularité déclinante de son parti. C'est une attitude choquante.

La députée de Beaver River a manqué certaines des bouffonneries qui se sont produites à la Chambre. Je le regrette. La députée aurait eu honte de la conduite de la plupart de ses collègues, si elle avait été présente au cours du débat. Je suis heureux de la revoir à la Chambre et j'espère qu'elle pourra faire entendre raison à ses collègues, parce qu'ils en ont grandement besoin.

Il s'agit réellement d'un bon projet de loi, qui a reçu l'appui d'une grande partie de la population. Le ministre de la Justice a maintes fois prouvé qu'il était disposé à discuter et à se montrer raisonnable et flexible à l'égard de cette mesure. Aucun autre ministre n'a passé plus de temps à parcourir le pays pour recueillir les opinions des Canadiens. Il a présenté le projet de loi. . .

M. Hill (Prince George-Peace River): Il n'écoute pas.

M. Milliken: Le député dit qu'il n'écoute pas. Ce qui est certain, c'est que ce n'est pas eux qu'il écoute, parce qu'ils ne représentent personne. Ils parlent pour une petite minorité.

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La vaste majorité des Canadiens approuvent ce que fait le ministre. Si les députés réformistes regardaient les sondages que leurs propres membres ont effectués ainsi que les sondages nationaux qui ont été réalisés sur la question, ils seraient d'accord avec tout ce que je dis, parce qu'ils savent que j'ai raison.

Encore une fois, le ministre de la Justice a indiqué qu'il était disposé à modifier le projet de loi. Il a déclaré qu'au comité, il ferait bon accueil aux arguments logiques. Le comité a été formé et il est prêt à se pencher sur ce dossier. Il a l'intention d'entendre un grand nombre de témoins. D'ailleurs, le budget que le comité a prévu pour entendre un nombre important de témoins a été soumis au Sous-comité du budget du Comité de liaison et fait actuellement l'objet d'un examen.

Je crois que ce projet de loi sera étudié de façon équitable. Les propriétaires d'armes à feu qui n'ont pas encore eu l'occasion de faire part de leur avis au ministre et à la population canadienne pourront expliquer leur point de vue au comité.

M. Taylor: Chacun d'entre eux?

M. Milliken: Ils en auront amplement l'occasion. Le projet de loi sera de nouveau débattu à la Chambre à l'étape de la troisième lecture.

Voilà que maintenant les néo-démocrates se lancent dans la mêlée. Le NPD intervient dans le débat. Pendant des décennies, ce parti a appuyé le contrôle des armes à feu, mais voilà qu'aujourd'hui ses membres changent d'idée et font marche arrière. Les néo-démocrates ont décidé que le projet de loi ne correspond pas vraiment à ce qu'ils veulent, même si le contrôle des armes à feu figure dans le programme de leur parti. Auparavant, ils se disaient liés par les décisions prises au cours des congrès de leur parti. Aujourd'hui, ils ne le sont plus, ils ne tiennent plus compte des obligations formulées au cours des congrès de leur parti et confiées à leur caucus.

Seule la députée de Beaver River se souviendra de l'époque où les néo-démocrates pontifiaient et se targuaient d'être des plus démocrates et de suivre toutes les directives de leur parti. Aujourd'hui, ils délaissent les principes de leur parti; ils les rejettent. Je crois que les néo-démocrates ne savent plus ce que sont les principes d'un parti.

C'est honteux de les voir ainsi renoncer à leurs obligations envers leurs membres, car les membres du NPD vivant dans ma circonscription appuient fortement le projet de loi que propose le ministre de la Justice pour resserrer le contrôle des armes à feu. Ces électeurs pensent que leurs députés ont perdu la boule. Ils n'ont peut-être pas tort. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans leur parti. Seul le député de Burnaby-Kingsway semble avoir toute sa tête.

Les députés du Parti réformiste qui sont censés représenter leurs électeurs devraient se ranger du côté de leurs collègues néo-démocrates dans ce dossier. C'est incroyable. Je n'arrive pas à comprendre comment deux partis politiques réputés responsables peuvent en venir à adopter une attitude aussi irresponsable au sujet d'une question d'une telle importance pour la nation.

Depuis un an, nous avons eu amplement le temps de discuter de la question. Le débat sur le projet de loi a duré plus longtemps que tout autre débat à la Chambre des communes. Il est temps de prendre une décision. . .

M. Harper (Calgary-Ouest): Il nous a été présenté il y a deux mois seulement.

M. Milliken: Nous sommes ici depuis plus d'un an. Le député de Calgary-Ouest dit qu'il a été présenté et n'y a que quelques mois. Il sait très bien que c'est faux.

Nous siégeons depuis février 1994. Cela fait donc bien plus d'un an. C'est une période assez longue.


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M. Harper (Calgary-Ouest): Quand avez-vous déposé le projet de loi?

M. Milliken: En janvier.

Le député a eu amplement le temps de discuter de ce sujet. L'opposition aurait pu soulever la question pendant ses journées désignées si elle l'avait voulu, mais elle ne l'a pas fait.

Nous avons proposé de siéger en soirée. Le député ne veut pas cela non plus. Pourquoi? Parce qu'il veut faire de l'obstruction le plus longtemps possible et retenir le projet de loi jusqu'à l'an prochain ou jusque dans deux ans.

Le gouvernement est déterminé à aller de l'avant. Nous avons fait des promesses dans le livre rouge. Nous avons fait des promesses aux Canadiens lorsque nous avons présenté le projet de loi. Le gouvernement sait comment gouverner. Il montrera du leadership aux Canadiens et il fera adopter le projet de loi. Il fera quelque chose de très positif en promulguant un projet de loi qui aidera à lutter contre le crime au Canada et apportera à un problème auquel est confrontée notre société une solution sérieuse et intelligente. Nous ne tomberons pas dans les divagations et les discours destructeurs des réformistes.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour participer au débat sur le projet de loi sur le contrôle des armes à feu proposé par le gouvernement, et, plus particulièrement, pour appuyer la proposition d'amendement du Parti réformiste voulant qu'on scinde le projet de loi en deux parties qui feraient chacune l'objet d'un vote distinct.

Je proteste avec véhémence contre les limites que le gouvernement a imposées au débat sur le projet de loi afin d'en accélérer l'étude au Parlement. Je trouve suprêmement ironique qu'un gouvernement qui semble incapable d'imposer la moindre discipline aux éléments criminels de la société n'hésite pas à imposer une discipline rigoureuse à son propre caucus et aux débats de la Chambre.

Voici plus de cinq ans que les réformistes sillonnent le pays en tout sens pour savoir ce que veulent les Canadiens, et notamment quel genre de pays ils veulent pour eux-mêmes et pour leurs enfants à la veille du XXIe siècle. Selon une des réponses que nous obtenons le plus fréquemment à cette question, les Canadiens veulent pouvoir se sentir en sécurité dans la rue, chez eux et dans leur collectivité.

(1550)

Cela m'a été dit de façon très éloquente il y a plusieurs années lors d'une assemblée à Toronto quand, en réponse à ma question de savoir ce que veulent les Canadiens, un homme dans l'auditoire s'est levé et a dit: «Ce que je veux, c'est que ma femme soit capable de quitter cet hôtel à 10 heures du soir et de se rendre à notre voiture au garage aérien situé à un coin de rue sans risquer de se faire agresser, voler ou violenter. Je veux que l'État s'acquitte de la plus élémentaire de ses responsabilités, c'est-à-dire protéger la vie et la propriété de ses citoyens. Je veux vivre dans un pays où les droits et la sécurité des citoyens respectueux des lois et des innocentes victimes de crime l'emportent dans le droit pénal et dans la Constitution sur les droits et la sécurité des criminels.»

Rares sont les députés à la Chambre qui ne seraient pas d'accord pour dire qu'une sécurité publique accrue doit constituer une priorité de la présente législature. Les désaccords entre nous surgissent quand il s'agit de déterminer la meilleure façon de parvenir à ce résultat.

Quant au projet de loi C-68 et à la motion visant à le scinder en deux, la question essentielle qu'il faut se poser est de savoir quel rôle le contrôle des armes à feu doit jouer pour faire du Canada un pays plus sûr. Deux réponses différentes sont données à cette question en cette 35e législature: la position des réformistes et la position des libéraux. Les Canadiens doivent décider laquelle des deux assure le mieux la sécurité publique.

Selon la position réformiste, que mes collègues ont exposée avec éloquence, le contrôle des armes à feu contribuera à assurer la sécurité publique uniquement s'il s'attaque surtout à l'utilisation criminelle des armes à feu. La mobilisation des services policiers et de ressources financières pour appliquer une réglementation excessive sur l'utilisation non criminelle des armes à feu n'améliorera en rien la sécurité publique. Les électeurs canadiens disent aux réformistes et aux sociétés de sondage que leur toute première priorité en matière de justice est une action énergique face aux auteurs d'actes criminels violents. C'est pourquoi les députés réformistes ont pris l'initiative en proposant des mesures pour resserrer la réglementation de l'utilisation criminelle des armes à feu.

Ces mesures comprennent ce qui suit: politique de tolérance zéro à l'égard des crimes commis avec des armes à feu; obligation de porter des accusations pour tous les crimes commis avec des armes à feu et interdiction du marchandage de plaidoyers; imposition d'une peine d'emprisonnement d'au moins un an pour utilisation d'une arme à feu pour commettre un crime avec violence; imposition de peines de plus en plus lourdes pour les récidivistes violents qui commettent des crimes avec des armes à feu; imposition de peines à purger consécutivement pour crime violent et usage d'armes à feu; interdiction à toutes les personnes reconnues coupables de crimes avec violence de jamais posséder des armes à feu pendant le reste de leur vie; imposition de peines identiques, que les crimes de violence aient été commis avec une réplique ou une vraie arme à feu; création d'une nouvelle infraction, le vol d'armes à feu, punissable de trois à 14 ans d'emprisonnement; imposition de peines analogues pour l'importation ou la vente illégale d'armes à feu à des fins criminelles; imposition d'une peine, à titre de complice du crime commis ultérieurement, à quiconque vend une arme à un criminel et, enfin, renvoi devant les tribunaux pour adultes des jeunes contrevenants qui utilisent des armes à feu pour commettre un crime.

En somme, le Parti réformiste s'oppose aux contrôles des armes à feu qui ne sont pas efficaces, compte tenu de leur coût, pour combattre les crimes de violence, améliorer la sécurité publique et sauver des vies, et il abrogerait toutes les dispositions prévoyant ce type de contrôle.

La position adoptée par le gouvernement en matière de contrôle des armes à feu était tout à fait prévisible, puisqu'elle est typique des libéraux. Chaque fois qu'une décision difficile doit être prise entre deux options, dans ce cas-ci il s'agit de décider si nos ressources limitées doivent servir à réglementer l'utilisation des armes à feu à des fins criminelles ou à des fins non criminel-


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les, les libéraux optent invariablement pour les deux solutions, même si l'une nuit à l'autre. Ils suivent l'avis du grand philosophe américain Yogi Berra, qui disait: «Si vous arrivez à une intersection, prenez-la».

Ainsi, le ministre de la Justice a déposé le projet de loi C-68, dont la lettre C signifie compromis. Vingt pour cent de son contenu est le résultat des pressions exercées par les réformistes et inclut des mesures partielles visant à exercer un contrôle plus sévère de l'utilisation des armes à feu à des fins criminelles. Par contre, le reste, soit 80 p. 100 du projet de loi, prévoit une réglementation accrue de l'utilisation des armes à feu à des fins non criminelles telles que la chasse, le tir ou la constitution d'une collection. L'établissement d'un registre national universel, dont on dit qu'il pourrait coûter de 85 à 500 millions de dollars, est l'une des mesures prévues. L'écart énorme au niveau des estimations de coûts s'explique notamment par le fait que le gouvernement libéral sous-estime le nombre d'armes à feu au Canada.

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En 1976, le ministère de la Justice estimait qu'il y avait 10 millions d'armes à feu au pays et qu'environ 250 000 nouvelles armes s'ajoutaient à cet inventaire chaque année. Si l'on se fie à ces données, il y aurait maintenant plus de 15 millions d'armes à feu au Canada. Pourtant, le ministre de la Justice nous dit qu'il n'y en a que six ou sept millions.

Il est impossible d'évaluer adéquatement l'efficacité et les coûts du projet de loi C-68, tant et aussi longtemps que le ministre de la Justice n'expliquera pas ce qu'il est advenu des huit ou neuf autres millions d'armes à feu.

Les réformistes s'opposent à la partie principale de cette mesure pour trois raisons. La première est le fait que le registre ne sera pas universel. Les criminels entre les mains desquels les armes à feu constituent une grave menace à la sécurité publique ne souhaiteront malheureusement pas faire enregistrer celles-ci. Le ministre ne peut comprendre cette réticence. Il enverra des lettres polies à la mafia et il fera paraître des annonces dans les publications qui s'adressent aux trafiquants d'armes pour leur demander de bien vouloir remplir diverses formules en trois exemplaires, dans la langue officielle de leur choix, puis de les remettre à la police. Au bout du compte, le registre ne renfermera aucune donnée sur le groupe dangereux de propriétaires d'armes à feu.

La deuxième raison pour laquelle nous nous opposons au projet de loi est le fait que sa mise en oeuvre coûtera beaucoup plus cher que ne le prétend le ministre de la Justice. Il est bien connu que les ministres libéraux sont particulièrement inaptes à faire des estimations. C'est d'ailleurs ce qui explique que la dette fédérale s'élève à près de 550 milliards de dollars et que, cette année, les dépenses du gouvernement excéderont de 35 milliards les recettes publiques.

Le Parti réformiste a élaboré une table de multiplication pour aider à calculer le coût réel de toute nouvelle proposition faite par un ministre libéral. Plus le ministre est faible d'esprit, plus le multiplicateur est élevé.

Ainsi, dans le cas du ministre du Développement des ressources humaines, il est de 10. Si ce ministre dit que quelque chose va coûter 100 millions de dollars, nous multiplions ce montant par 10, car le coût réel sera plus proche d'un milliard de dollars. Le ministre de la Justice ne vient pas loin derrière. Le multiplicateur à utiliser dans son cas, c'est le sept. Lorsqu'il dit que son registre va coûter 85 millions de dollars, nous multiplions ce montant par sept, et le coût réel dépassera les 500 millions de dollars, 500 millions que nous n'avons pas.

La troisième raison pour laquelle il faut s'opposer au projet de loi C-68, mais aussi la plus importante, c'est que le registre national des armes à feu proposé pour les armes de collection, les armes de chasse et celles utilisées à des fins récréatives n'améliorera pas la sécurité publique. Le registre des armes à feu qui existe actuellement depuis 60 ans n'a pas amélioré la sécurité publique. À Washington, D.C., l'interdiction des armes à feu et le registre à cet égard n'ont pas empêché les meurtres et les viols d'atteindre des niveaux effarants là-bas. Les corps policiers de la Nouvelle-Zélande et de l'Australie ont recommandé l'abandon de ces registres d'armes à feu coûteux et inefficaces précisément pour cette raison.

Même s'il a été invité à maintes reprises à le faire, le ministre n'a présenté aucune preuve démontrant que le registre qu'il propose améliorera la sécurité publique, et il n'a même pas proposé de critères en fonction desquels on pourrait évaluer la contribution du registre à l'amélioration de la sécurité publique.

En conclusion, si les Canadiens veulent être plus en sécurité dans leurs rues, leurs foyers et leurs collectivités, si c'est vraiment la sécurité publique qui nous tient à coeur, le projet de loi C-68 devrait alors être scindé comme l'a proposé le député de Yorkton-Melville. Les aspects inefficaces du projet de loi qui traitent du système canadien d'enregistrement devraient être rejetés, et les articles qui traitent de l'utilisation d'une arme à feu à des fins criminelles devraient être renforcés et adoptés sur-le-champ. Voilà ce qui fera du Canada un endroit plus sûr.

M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion d'intervenir dans le débat sur le projet de loi C-68, Loi concernant les armes à feu et certaines autres armes. Je voudrais, plus particulièrement, donner mon avis sur des points que le chef du tiers parti a soulevés il y a quelques instants. J'y reviendrai dans un moment.

Ce débat revêt une très grande importance, et des opinions bien arrêtées ont été exprimées des deux côtés de la Chambre et au sein de la population.

Une fois adopté à l'étape de la deuxième lecture, le projet de loi sera renvoyé à un comité, qui l'étudiera et fera des propositions d'amendement, après quoi le projet de loi sera renvoyé à la Chambre pour une décision définitive. Nous connaissons tous les faits liés à ce projet de loi.

L'étude en comité sera extrêmement importante relativement aux préoccupations des Canadiens et à celles que j'ai exprimées à l'égard de ce projet de loi.

(1600)

Mes électeurs m'ont certainement fait part de leurs préoccupations à l'égard du projet de loi C-68, et je les ai transmises aux députés de mon parti. Mes électeurs appuient certaines mesures prévues dans le projet de loi pour contrôler le crime, promouvoir la santé et la sécurité publiques et imposer des peines de prison minimales sévères pour une série d'infractions liées aux armes à feu. Mes électeurs appuient fermement pareilles mesures.


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Tous s'entendent également pour dire que le gouvernement devrait adopter des mesures pour renforcer les contrôles à la frontière et modifier le Code criminel afin de s'attaquer aux problèmes de la contrebande et de l'importation illégale d'armes. Voici deux des quatre principes du projet de loi qu'ils appuient fermement.

Je parlerai de la division du projet de loi dans un moment. En proposant une telle division, le Parti réformiste ne cherche qu'à tromper la population quant à l'objectif véritable de sa proposition. Le chef du Parti réformiste a pris la parole il y a quelques instants pour parler de l'adoption de mesures de sécurité. Il a certes fait des suggestions. Cependant, l'objectif de l'amendement proposé par le Parti réformiste est en réalité non pas de diviser le projet de loi, mais de le défaire. Les bonnes suggestions faites par le chef du Parti réformiste ne pourront être ajoutées au projet de loi pour la raison qu'il en serait fait de ce dernier si ces suggestions étaient acceptées.

Revenons aux principes qui ont recueilli de larges appuis: par suite de la modification des dispositions du Code criminel sur les infractions et la détermination de la peine, l'usage d'armes à feu dans la perpétration d'une dizaine d'infractions criminelles particulières deviendra une infraction passible d'une peine de prison minimale de quatre ans. Voilà qui est bien.

Les dix infractions sont la tentative de meurtre, l'homicide involontaire coupable, le fait de causer la mort par négligence criminelle, le vol qualifié, l'enlèvement, la prise d'otage, l'agression sexuelle armée, l'agression sexuelle grave, l'extorsion et le fait de décharger une arme à feu dans le but de causer intentionnellement des lésions corporelles. S'il est condamné, le délinquant se verra interdire à vie de posséder une arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte.

L'autre principe important sur lequel les gens s'entendent généralement, c'est l'importation illégale ou la contrebande. On s'attaquera à ce phénomène grâce à des modifications législatives et à l'élaboration de programmes destinés à contrôler l'importation et l'exportation, ainsi que le transport au Canada d'armes à feu. Il s'agit notamment d'enregistrer les armes aux frontières et de prévoir de nouvelles infractions en vertu du Code criminel en ce qui concerne l'importation illégale et le trafic d'armes à feu. Ce sont de bons principes auxquels de nombreux députés et moi-même souscrivons.

Je reconnais qu'il y a d'autres aspects de ce projet de loi qui sont beaucoup plus controversés. Ils ont trait aux répercussions sur les propriétaires d'armes à feu tout à fait honnêtes, les chasseurs, les collectionneurs et les sportifs qui utilisent des armes à feu. J'ai déjà présenté une pétition à la Chambre au nom de mes électeurs qui s'opposaient à ce projet de loi dans sa forme actuelle.

Permettez-moi de revenir sur les questions que j'ai soulevées alors. La pétition demandait au Parlement de s'abstenir d'adopter d'autres lois restrictives sur les armes à feu ou sur les munitions et de se préoccuper plutôt d'arrêter ceux qui utilisent des armes à feu ou d'autres armes meurtrières à des fins criminelles, ainsi que de les punir comme il se doit.

Mes électeurs ont vraiment le sentiment que le projet de loi, dans la version actuelle, ne donnera pas la possibilité d'atteindre les objectifs que vise le ministre. Ils se préoccupent du fait que les citoyens respectueux des lois croulent déjà sous le fardeau d'une législation sur les armes à feu à la fois inutile et inefficace. Ils ont le sentiment que les nouvelles propositions prévoyant la mise en place d'un système d'enregistrement obligatoire des armes à feu va punir les mauvaises personnes. Beaucoup de mes électeurs et d'autres habitants de l'île ont des réserves au sujet de ce projet de loi.

J'ai déposé cette pétition pour faire part de leurs préoccupations et je souhaite maintenant que mes électeurs aient la possibilité de témoigner devant un comité pour exprimer leurs réserves eux-mêmes ou par l'entremise d'organisations nationales qui les représentent. Contrairement à ce qui s'est fait jusqu'à maintenant, je ne veux pas que le Parti réformiste puisse transmettre des renseignements trompeurs sur l'objectif de ces modifications et organiser des réunions dans tout le pays pour des motifs politiques.

(1605)

Le Parti réformiste parle de criminalité. Tous les jours que le bon Dieu nous amène, ses députés se lèvent à la Chambre pour dire que la criminalité les préoccupe. En revanche, leur amendement aurait pour effet d'empêcher ce projet de loi d'atteindre l'étape de l'étude en comité, afin de réprimer le crime et le mauvais usage des armes à feu au Canada.

C'est qu'on interprète mal l'amendement du Parti réformiste. Certains de mes électeurs m'ont suggéré d'appuyer l'idée de scinder le projet de loi, croyant que l'amendement du Parti réformiste aurait cet effet. Or, il n'en est rien.

J'ai prêté une oreille attentive aux propos du chef du troisième parti. Il a émaillé son discours de mille et une suggestions de nature à améliorer la sécurité publique, ce que ne fait pas l'amendement de son parti. J'inviterais le chef du Parti réformiste à relire l'amendement. Permettez-moi de rappeler au chef du troisième parti que l'amendement dit ceci: «Que la Chambre refuse de donner deuxième lecture du projet de loi C-68.» Cela équivaudrait à couler le projet de loi. Les députés d'en face le savent et ils induisent la population canadienne en erreur. Pour un parti qui parle de lutte contre le crime, ce serait l'effet contraire.

Bref, je tiens à ce que des amendements soient apportés à ce projet de loi et qu'ils le soient à l'étape de l'étude en comité. À mon avis, le processus est loin d'être parfait. Le projet de loi à l'étude doit être amélioré.

Dans les entretiens que j'ai eus avec des collègues et le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice, on m'a donné l'assurance que le projet de loi dépénaliserait à tout le moins la première infraction, dans le cas des propriétaires d'armes à feu légitimes, des collectionneurs, des sportifs et des chasseurs. Fort de cette assurance, je suis d'accord pour que le projet de loi soit renvoyé à un comité où on l'améliorera pour qu'il réponde aux besoins de l'ensemble des Canadiens.

Je trouve dégoûtant que le Parti réformiste ait tenté, par le truchement de cet amendement, de se livrer à des manoeuvres bassement politiques, mais j'imagine que c'est la règle dans le monde de la politique. Les réformistes induisent les Canadiens en erreur quant à leurs vraies intentions.

En renvoyant ce projet de loi à un comité, on donnera aux Canadiens l'occasion de formuler leurs réserves devant une tribune publique, devant un comité légitime, afin qu'on améliore cette mesure législative pour qu'elle réponde aux besoins de l'ensemble des Canadiens.


11546

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir la parole, mais je ne me réjouis pas beaucoup de traiter, à l'étape de la deuxième lecture, du projet de loi C-68, la mesure fédérale mal conçue sur le contrôle des armes à feu.

Je ne me réjouis pas de prendre la parole aujourd'hui, d'autant plus que le gouvernement a invoqué la clôture sur ce projet de loi. Il a mis fin au débat à la Chambre, de sorte que, maintenant, les parlementaires qui ont discuté de ce projet de loi avec leurs électeurs ne pourront pas faire part aux autres députés et, surtout, au ministre de la Justice et à ses collègues du Cabinet, de tout ce qu'ils ont entendu dans leur circonscription. Mettre fin au débat à cette étape-ci est un geste très honteux. Le gouvernement a d'abord limité l'accès au projet de loi et, maintenant, il limite l'accès au débat.

J'ai écouté attentivement une bonne partie du débat depuis que le projet de loi a été déposé. Je dois avouer que, bien qu'il ait parfois soulevé les passions, on en a dit beaucoup de choses qui sont dignes de mention. J'espérais que le ministre écouterait avec un esprit ouvert. Malheureusement, je constate que, comme bien des Canadiens, il accepte tout simplement l'idée que le contrôle des armes à feu est une fin en soi.

(1610)

Le projet de loi porte sur le contrôle des armes à feu. Par conséquent, le ministre semble dire qu'il vaut la peine de l'appuyer pour cette seule raison. Peu importe si ce projet de loi est bon, mauvais ou insatisfaisant, il vaut la peine de l'appuyer simplement parce qu'il a trait au contrôle des armes à feu. Nous sommes tous censés nous lever et l'appuyer en nous fondant sur ce principe. Il ne semble pas pertinent de se pencher sur tous les problèmes et les insécurités des Canadiens.

Je suis d'avis que ces questions sont pertinentes et je voudrais en examiner quelques-unes aujourd'hui. Au cours des derniers jours et des dernières semaines, j'ai entendu à la Chambre de nombreuses histoires, des histoires personnelles et des extraits d'articles de journaux qui racontaient ce qui était arrivé à des personnes de diverses collectivités en Amérique du Nord. Dans ces histoires, il était question de tragédies mettant en cause des amis, des proches ou des personnes dont les noms ont été publiés dans le journal et qui avaient été victimes d'accidents ou d'événements délibérés où on avait utilisé une arme à feu.

Quand on prête bien attention à ces propos et qu'on lit entre les lignes, on en déduit que, pour éviter de telles tragédies personnelles, il faut non pas enregistrer les armes à feu, mais s'en débarrasser.

Les gens qui ont raconté ces histoires au Parlement et le ministre savent qu'il n'est nullement question, dans la mesure législative dont nous sommes saisis aujourd'hui, de se débarrasser des armes à feu. À toutes fins utiles, les histoires que l'on a racontées au cours de ce débat, aussi importantes soient-elles pour les personnes qu'elles concernent, détournent notre attention du vrai débat que nous devons avoir. Elles détournent notre attention, parce que les tragédies qu'elles rapportent et qui sont réellement des tragédies peuvent se produire aussi bien si l'arme à feu est enregistrée que si elle ne l'est pas.

Je n'ai pas assez des dix minutes qui me sont accordées aujourd'hui pour parler de tout ce que prévoit cette mesure législative. J'appuie l'amendement dont nous sommes saisis et qui divise le projet de loi en deux parties, parce qu'on peut clairement comprendre la nécessité d'examiner ces deux questions séparément. Ce que je reproche à cette mesure législative, c'est son système d'enregistrement et la façon dont le gouvernement le présente aux Canadiens.

On ne présente pas le système d'enregistrement universel des armes à feu sous son véritable jour. On demande aux propriétaires d'armes à feu qui utilisent leurs armes à des fins légales et légitimes de payer pour ce faux objectif.

Le gouvernement dit aux Canadiens que, si toutes les armes à feu sont enregistrées, ils pourront se sentir davantage en sécurité chez eux et dans leurs rues. Ce n'est tout simplement pas vrai. Il est presque malhonnête de répandre un faux espoir de la sorte, tout en ne faisant rien, par ailleurs, pour apaiser les craintes des Canadiens ou pour remédier aux causes profondes de la criminalité et de la violence dans notre société.

Les députés savent que je crois fermement à la sécurité dans l'utilisation des armes à feu. Étant donné que je n'appuie pas le projet de loi du ministre de la Justice, certains m'ont accusé de ne pas être en faveur de la sécurité. Les députés se souviendront que c'est justement par souci de sécurité que j'ai appuyé le projet de loi du gouvernement précédent sur les armes à feu. Je l'ai fait malgré l'opinion contraire de bon nombre de mes électeurs, qui n'ont pas manqué de se faire clairement entendre à ce sujet. Ce projet de loi traitait vraiment de la sécurité des armes à feu. Aujourd'hui, ceux-là mêmes qui m'avaient critiqué à l'époque admettent que le cours de sécurité offert est excellent et que les règlements sur la sécurité dans le rangement, la manipulation et le transport des armes à feu sont raisonnables.

Le projet de loi C-68 dont nous sommes saisis aujourd'hui, surtout les dispositions concernant l'enregistrement, n'ajoute rien aux dispositions actuelles sur la sécurité. Il ne les améliore d'aucune façon. Il ne faut donc pas prétendre que tel est son but. En outre, nous devons faire baisser le nombre de morts violentes et de blessures. Nous devons attaquer cette question par tous les côtés et remédier, entre autres, aux causes socio-économiques du problème.

Le projet de loi C-68 et les dispositions qu'il renferme sur l'enregistrement des armes à feu ne changeront rien à la violence, aux homicides et aux suicides. Si notre nation a vraiment l'intention de combattre le suicide, la violence conjugale et la violence criminelle dans nos rues, elle ne peut pas se contenter de discuter de la constitution d'un registre.

Nous devons faire tout notre possible pour lutter contre les suicides et les homicides, mais, comme chacun à la Chambre le sait très bien, il se commettra quand même des suicides et des homicides avec des armes à feu enregistrées, à moins que nous prenions des mesures pour régler les autres problèmes socio-économiques.

(1615)

Les députés se souviendront, puisqu'il vient d'être publié il y a juste quelques semaines, du rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones sur le suicide parmi les peuples autochtones, en particulier parmi les jeunes. Jusqu'ici, le gou-


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vernement n'a pratiquement rien fait pour donner suite aux recommandations faites dans cet important rapport dans lequel il était indiqué que le gouvernement était saisi de cette question depuis plus de dix ans.

Si le gouvernement fédéral voulait vraiment chercher à mettre fin au suicide parmi les jeunes, il donnerait immédiatement une suite favorable à la recommandation de la commission royale.

C'est un peu surprenant que le gouvernement dise que l'enregistrement des armes à feu est essentiel si l'on veut réduire le suicide et la violence, et propose en même temps de rendre cette mesure obligatoire en l'an 2003. Si le gouvernement était vraiment sérieux à ce sujet, si l'enregistrement était effectivement important pour réduire le suicide et la violence, ne rendrait-il pas cette mesure obligatoire immédiatement?

Pourquoi attendre huit ans si cette mesure est tellement importante? La réponse est simple. Il n'existe aucune preuve à l'appui de ce que prétend le gouvernement. L'enregistrement des armes à feu n'est pas important pour réduire le suicide et la violence, et le gouvernement le sait.

Je suis aussi pour que la police punisse les vrais criminels. J'accepte l'argument voulant que les personnes qui commettent des crimes contre le reste de la société doivent être recherchées, condamnées et punies. Toutefois, je rappelle à la Chambre et au ministre que tous les policiers du nord-ouest de la Saskatchewan auxquels j'ai parlé et tous les policiers auxquels j'ai affaire régulièrement dans ma circonscription, me disent qu'en ce qui les concerne, l'enregistrement des armes à feu n'est pas la solution.

Quand on les appelle pour un problème de violence familiale ou dans un endroit où ils ne savent pas très bien ce qui les attend à leur arrivée, ils partent du principe qu'il y a une arme. Ils ne prennent aucun risque lorsqu'ils répondent à un appel. Le projet de loi ne prévoit pour eux aucune mesure de sécurité supplémentaire.

La police me dit que si une personne est prête à tirer sur un policier, elle peut tout aussi bien le faire avec une arme illégale qu'avec une arme enregistrée. La police du nord-ouest de la Saskatchewan me dit qu'elle a besoin de plus de temps sur le terrain, de meilleurs services d'appui et de plus d'occasions de travailler à des stratégies communautaires de prévention. Il faut mettre sur pied des programmes qui aideront à prévenir la violence plutôt que des programmes qui entrent en jeu lorsque la violence a été commise. Le projet de loi et les autres déclarations du gouvernement ne laissent pas espérer que l'on aura quelque chose dans cette veine.

Si j'avais plus de temps je mettrais d'autres observations au compte rendu. Heureusement, d'autres députés ont aussi commencé à le faire. Je dirais que je reste très critique à l'égard de cette mesure. Je suis critique parce que les libéraux se sont fixé un programme qui est censé traiter de sécurité, mais ils demandent à mes électeurs qui possèdent des armes légales et utiles de payer pour ce programme par le biais du système d'enregistrement.

Le gouvernement procède de cette façon sans apporter la moindre preuve que leur plan fonctionnera mieux que les règles existantes, qui n'ont pas été complètement évaluées. Je trouve que c'est une politique anormale et même honteuse, dans une certaine mesure.

J'ai déjà démontré que j'appuie les mesures de contrôle des armes à feu susceptibles d'avoir des effets réels et significatifs sur le pays et ses citoyens. Comme je l'ai dit plus tôt, il y a un rôle pour les critiques légitimes du projet de loi C-68 et les critiques du faux espoir que les libéraux donnent, et j'ose espérer que la nation, la Chambre et plus spécialement le ministre permettront non seulement que l'on exprime ces critiques, mais s'efforceront aussi de les prendre en considération.

M. Russell MacLellan (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi de prendre la parole aujourd'hui sur ce projet de loi. C'est un grand moment que nous vivons actuellement à la Chambre, tandis que nous discutons de cette question, à une époque qui, selon moi, marque la fin d'un débat que nous tenons depuis des mois et même des années pour modifier notre loi sur le contrôle des armes à feu.

Nous sommes en train de déterminer le type de société que nous voulons pour notre pays.

(1620)

Le ministre de la Justice a présenté une mesure législative sur les jeunes contrevenants et la détermination de la peine. Il s'est engagé à apporter des changements aux lois qui régissent les actes des criminels dangereux. C'est pourquoi nous sommes aujourd'hui saisis du projet de loi sur le contrôle des armes à feu.

Je ne veux pas critiquer nos voisins du Sud, parce que je les aime beaucoup. Toutefois, nous avons été témoins de circonstances où des citoyens américains qui voulaient modifier leur loi n'ont pas pu le faire. Aussi, le nombre de décès par balles a atteint un niveau absolument catastrophique dans leur pays.

En 1992, aux États-Unis, 35 000 personnes ont été tuées ainsi. Au cours de la même année, 150 000 de leurs concitoyens ont été blessés au moyen d'une arme à feu. C'est alarmant. Ceux qui ont été blessés seraient peut-être morts si les lunettes de visée infrarouge avaient existé à l'époque. Ces dispositifs sont maintenant disponibles aux États-Unis, ce qui permet beaucoup plus de précision dans les coins sombres ou la nuit, et facilite les choses pour ceux qui ne sont pas habiles au maniement des armes à feu.

On nous a dit que ce n'était pas la même chose, aux États-Unis. On nous a dit que c'était à cause du deuxième amendement à la Constitution des États-Unis. On nous a dit qu'aux États-Unis, le port d'arme était permis en vertu de la Constitution. Mais la vérité n'est pas tout à fait celle que la National Rifle Association des États-Unis voudrait nous faire croire.

Le droit de porter une arme, tel que défini par la Cour suprême des États-Unis, s'applique aux membres de la milice et des forces de police, qui doivent être capables de s'armer pour se défendre contre une armée nationale. C'est l'interprétation de base que la Cour suprême des États-Unis a faite du droit de porter une arme. Les citoyens américains ne jouissent pas d'une


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autorisation sans réserve de posséder légalement une arme personnelle.

Je veux donner un exemple de l'application de cette interprétation dans une petite localité de l'Illinois, Morton Grove, au début des années 80, en 1982 je crois. Les gens avaient décidé qu'il était temps de faire quelque chose pour arrêter la prolifération des armes à feu dans leur localité. Ils ont donc décidé d'interdire les armes à feu et ont adopté un règlement municipal à cet effet.

La National Rifle Association s'en est alarmée et à la suite des pressions exercées par l'association, l'État de l'Illinois a adopté une loi précisant que les règlements municipaux ne pouvaient pas être plus prohibitifs à l'égard des armes à feu que les lois de l'État. Cela a mis fin à l'espoir que d'autres municipalités de l'Illinois emboîtent le pas à Morton Grove.

Des lois similaires existent dans d'autres États. Elles n'ont jamais été contestées. Le droit de Morton Grove d'adopter un tel règlement n'a jamais été contesté en vertu du deuxième amendement. Ce qui s'est passé, c'est que la National Rifle Association a immédiatement exercé des pressions pour faire en sorte que ce genre de choses ne se reproduise pas ailleurs dans cet État ni dans aucun autre État de l'Union.

La National Rifle Association est un groupe de pression très important à Washington. L'association, qui emploie une cinquantaine de personnes, a un budget annuel d'environ 100 millions de dollars. Lors des élections de 1992 au Congrès, elle a dépensé 1,7 million pour appuyer des candidats favorables à sa position.

Tant qu'il existera des groupes de pression aussi puissants que la NRA, les Américains n'arriveront jamais à renforcer leur législation sur le contrôle des armes à feu.

(1625)

Il suffit de regarder la loi Brady. M. Brady, un collaborateur très apprécié et admiré du président des États-Unis, a été handicapé pour la vie quand il a été atteint par une balle lors de l'attentat contre le président Reagan. Lui et sa femme ont travaillé sans relâche pour faire adopter une loi renforçant le contrôle des armes à feu. La loi qui a finalement été adoptée n'était pas aussi sévère qu'il l'aurait voulu, mais c'est seulement à cause de la forte personnalité de M. Brady et de son épouse qu'une loi a finalement été adoptée.

Le Congrès américain veut maintenant annuler certaines des dispositions de la loi Brady. Le président Clinton-et c'est tout à son honneur-a annoncé qu'il opposerait son veto à toute mesure du genre. Cela va à l'encontre des principes démocratiques. Les citoyens américains se verraient empêchés de choisir.

Nous, au Canada, n'avons pas une telle opposition au libre choix et à la capacité des Canadiens de prendre leurs propres décisions, mais les choses deviennent de plus en plus difficiles. L'opposition organisée prend des forces. Si les Canadiens veulent renforcer le contrôle des armes à feu, il faut le faire dès maintenant.

Nous voulons laisser les Canadiens décider. Nous voulons renvoyer ce projet de loi au comité. Nous voulons que le comité étudie ce projet de loi en profondeur. Nous sommes prêts à écouter des témoins et des députés et à apporter certains amendements au projet de loi.

Le ministre de la Justice a dit que les questions telles que les fusils à poudre noire, les compétitions certifiées et les armes anciennes devaient être examinées et peut-être définies un peu plus clairement, qu'elles pouvaient même faire l'objet d'amendements. Il a également donné à l'Association canadienne des policiers des assurances relatives aux pénalités, à la criminalisation du non-enregistrement. Il veut que ces questions soient examinées. Ce sont là des directives très importantes. Je suppose qu'il donnera d'autres instructions au comité lors de sa comparution.

Il a également déclaré que, lors de sa comparution devant le comité, il donnera les informations détaillées sur lesquelles il se base pour dire que le système d'enregistrement coûtera environ 85 millions de dollars. Je suis sûr que ceux qui soutiennent que ce système va coûter 500 millions voudront entendre ce que le ministre a à dire. C'est équitable.

Le député néo-démocrate qui m'a précédé a dit que cela n'avait pas marché avant et se demandait pourquoi nous essayions encore. Nous essayons encore justement à cause de l'échec antérieur. Nous essayons d'instaurer un système d'enregistrement efficace. Non pas parce qu'il s'agit d'un système d'enregistrement mais parce que, grâce aux progrès technologiques, le système d'enregistrement. . .

Mlle Grey: Les criminels peuvent entrer par effraction.

M. MacLellan: Non, ils ne peuvent pas entrer par effraction. C'est de la foutaise. C'est de la pure invention; cela n'a pas le moindre bon sens.

Les permis relatifs à la possession et les certificats d'enregistrement des armes à feu seront de simples cartes, comme des cartes de crédit. Sur chaque carte, il y aura une bande magnétique contenant les renseignements nécessaires et il suffira de passer la carte dans une machine, semblable à celle qui sert à vérifier une carte Visa, pour enregistrer l'arme à feu. Cet enregistrement pourra être effectué au moment de l'acquisition, par exemple, dans un magasin Canadian Tire. Les données seront entrées dans un ordinateur central doté de dispositifs empêchant leur sortie.

Ce système sera sûr. C'est notamment pour cette raison que nous ne commençons pas l'enregistrement avant janvier 1998. Nous voulons que les Canadiens sachent que le système est non seulement sûr et avantageux, mais qu'il coûtera aussi moins cher qu'on a pu leur laisser entendre.

Une voix: Va-t-il servir à lutter contre le crime?

(1630)

M. MacLellan: Il servira aussi à combattre le crime.

Malheureusement, je n'ai que dix minutes à ma disposition. Si le député en doute, il pourra assister aux réunions du comité et c'est ce qu'il entendra. En ce qui concerne les coûts, ceux qui procéderont à un enregistrement dès janvier 1996 n'auront rien à


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payer pour le permis relatif à la possession, car il n'y aura pas de frais au début, ces derniers entreront en vigueur de façon graduelle et modérée tout au long des cinq premières années. Au moment du renouvellement, au bout de cinq ans, chaque personne devra assumer un coût de renouvellement d'environ 60 $.

Ce ne sera pas 100 $ par arme à feu, comme bien des députés l'ont soutenu à la Chambre. Il y aura des frais de 10 $ l'arme à feu et une personne pourra enregistrer dix armes à feu. C'est bien différent de ce que des députés d'en face ont déclaré.

Le projet de loi permettra aussi de lutter contre le crime. Si nos vis-à-vis ne le savent pas encore, ils devraient se donner la peine d'examiner les statistiques pour s'en rendre compte.

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, j'imagine tous les criminels impatients de se présenter au bureau d'enregistrement le plus près pour dire: «Je possède cette arme à feu. Notez bien mon nom, parce que je tiens à être inscrit dans votre ordinateur.» Les criminels doivent vraiment avoir hâte de remplir cette formalité.

Mon propos peut paraître ironique, mais la situation est tragique. De même, j'imagine que les futures victimes de crimes commis avec une arme à feu trouveront réconfort dans le fait que le délit aura été commis au moyen d'une arme enregistrée. Encore une fois, j'ai l'air de plaisanter, mais je suis très sérieux.

La motion déposée par le député de Yorkton-Melville propose de diviser le projet de loi C-68 en deux parties. À mon avis, il est indispensable de discuter séparément et de façon approfondie du bien-fondé de l'enregistrement de toutes les armes à feu, ainsi que des améliorations qu'il y a lieu d'apporter au Code criminel pour traiter adéquatement des auteurs d'actes criminels commis au moyen d'une arme à feu. Il importe donc de diviser le projet de loi. Les Canadiens doivent avoir la chance de se faire entendre relativement aux deux volets de cette mesure législative. Le fait de traiter des deux questions dans un même projet de loi prive les Canadiens et les députés de la possibilité de s'opposer aux mauvais aspects de cette mesure tout en approuvant certains bons points.

Je pense que, s'ils en avaient la possibilité, certains députés libéraux s'opposeraient à l'enregistrement universel des armes à feu, tout en appuyant l'adoption de peines et de mesures plus sévères à l'égard de ceux qui commettent des crimes en se servant de telles armes. Nous prions instamment le Parti libéral d'appuyer la division du projet de loi C-68.

À mon avis, les députés devraient s'interroger lorsque des changements au Code criminel sont associés à d'autres mesures qui empiètent sur le droit des Canadiens respectueux des lois de posséder des biens et d'en jouir. Pris globalement, le projet de loi C-68 a effectivement pour effet d'empiéter sur ce droit, en imposant des formalités administratives, une réglementation accrue et des peines plus lourdes aux Canadiens qui possèdent des armes à feu tout en étant respectueux des lois. Par ailleurs, cette mesure législative comporte peu de changements prévoyant l'imposition de peines plus sévères et plus appropriées à ceux qui commettent des crimes en se servant d'une arme à feu. Nous devrions tenter de prévenir les crimes commis avec des armes à feu au lieu de bafouer les droits des propriétaires d'armes à feu respectueux de la loi.

(1635)

La motion du député de Yorkton-Melville, qui propose de diviser en deux le projet de loi, répond aux attentes des Canadiens. Si le projet de loi était divisé en deux, notre parti pourrait appuyer avec enthousiasme la partie de la mesure législative qui prévoit des peines plus sévères dans le cas d'infractions relatives aux armes à feu tout en s'opposant farouchement au reste du projet de loi, à l'instar de bien des députés libéraux d'arrière-ban qui rêvent de le faire. Malheureusement, à cause de la discipline de parti, ces députés libéraux ne pourront pas s'opposer à l'enregistrement des armes à feu.

Malgré toutes les belles paroles qu'ils ont pu prononcer, le ministre de la Justice et les députés libéraux ont été incapables de fournir la moindre preuve que l'enregistrement universel des armes à feu contribuera à prévenir les crimes commis avec des armes à feu au Canada. Les députés libéraux n'ont pas été en mesure de fournir la moindre preuve que l'enregistrement des armes à feu allait réduire la criminalité au Canada.

Il incombe au ministre de la Justice et à son gouvernement de prouver clairement aux citoyens respectueux de la loi qui seront touchés par ce nouveau système d'enregistrement que le projet de loi aura des répercussions positives. C'est le but que vise tout bon projet de loi. S'il est impossible de prouver que le projet de loi aura des répercussions positives, c'est donc dire qu'il n'est pas bon.

Le ministre de la Justice avait le devoir de prouver hors de tout doute que l'enregistrement des armes à feu allait réduire la criminalité. Il ne l'a pas fait. Le ministre soutient toujours que le système d'enregistrement contribuera à accroître la sécurité publique. Encore une fois, il n'a pu fournir aucune preuve à ce sujet.

Il dit qu'il a l'appui de l'Association des chefs de police. Je risque de rendre certains de ces chefs de police furieux contre moi, mais j'aimerais rappeler à la Chambre que cette association a reçu environ 150 000 $ en subventions du gouvernement. On peut invoquer toutes sortes de raisons pour expliquer cet appui dont bénéficient le projet de loi C-68 et le ministre de la Justice.

Cependant, les faits tendent à contredire le ministre. En Nouvelle-Zélande, on a cessé d'enregistrer les armes à feu après avoir mis à l'essai un tel système. En 1983, les policiers de la Nouvelle-Zélande-et je suppose qu'ils sont assez intelligents-se sont rendu compte que l'enregistrement des armes à feu ne faisait rien pour réduire la criminalité. Au Canada, les policiers de la Saskatchewan-et j'ose croire qu'ils sont aussi intelligents que leurs collègues de n'importe quelle autre région du Canada-

M. Taylor: Peut-être même plus.

M. Harris: Oui, peut-être même plus.


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Les policiers de la Saskatchewan ont montré qu'ils n'avaient aucune confiance dans la capacité du projet de loi C-68 d'avoir un impact sur le taux de criminalité.

Avec le temps, d'autres services de police dans certaines autres provinces en arriveront à la même conclusion.

Nous avons un système d'enregistrement des armes de poing au Canada depuis une soixantaine d'années. Ce système a été révisé en 1977 au moyen du projet de loi C-51, qui a été présenté par un autre gouvernement libéral dans le but, comme il le disait,-c'est merveilleux-d'accroître la sécurité publique. Ces paroles me sont familières. Nous avons entendu le gouvernement et le ministre de la Justice lui-même dire la même chose au cours des dernières semaines. Ces changements visent à «accroître la sécurité publique». Depuis 1977, des études de Sproule et Kennett, de Robert Mundt et de Mouser et Holmes ont révélé que les modifications apportées en 1977 n'ont eu aucun effet sur le taux d'homicide commis à l'aide d'une arme à feu au Canada.

C'est ce que nous appelons des preuves concluantes. C'est bien différent des paroles en l'air que lancent les libéraux sans statistiques à l'appui.

(1640)

Il est clair que, même si le projet de loi C-68 renferme certaines mesures qui prévoient des peines plus sévères pour les criminels et les gens qui commettent des infractions liées aux armes à feu, mesures que nous appuyons, nous aurions aimé que le gouvernement et le ministre soient plus impitoyables encore. Il y a donc certaines dispositions de ce projet de loi qui sont bonnes et que nous pouvons appuyer, mais je suis contre la partie qui porte sur l'enregistrement des armes à feu.

J'ai participé à plusieurs émissions-débats avec des gens qui sont contre les armes à feu et, bien que je leur aie donné l'occasion de présenter des preuves concluantes montrant que l'enregistrement des armes contribuera à réduire la criminalité, ils n'ont jamais été capables de le faire. La réponse la plus courante était: «Si nous enregistrons les voitures, pourquoi n'enregistrerions-nous pas les armes à feu?» C'est la réponse typique de ces gens et du gouvernement.

Analysons cette réponse. Monsieur le Président, pouvez-vous me dire et dire à mes collègues si l'enregistrement des véhicules automobiles contribue à réduire le nombre de vols de voitures et le nombre d'accidents sur nos routes? Est-ce que l'enregistrement empêche les gens de voler des voitures et de commettre des crimes avec des voitures? Pas du tout.

Je demande au gouvernement, à n'importe quel député d'en face, de me montrer clairement comment l'enregistrement universel contribuera à réduire la criminalité. C'est le défi que je leur lance en mon nom personnel et au nom des millions de propriétaires d'armes à feu au Canada qui ne voient pas l'utilité d'un système d'enregistrement universel des armes à feu.

[Français]

Le vice-président: Chers collègues, conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir: l'honorable députée de Brant-La justice; l'honorable député de The Battlefords-Meadow Lake-L'environnement.

[Traduction]

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part au débat de deuxième lecture sur le projet de loi C-68.

Le fait d'être membre du comité de la justice me donne un avantage sur beaucoup de députés. Lorsque le projet de loi sera renvoyé au comité, j'aurai donc beaucoup de temps pour poser des questions très précises aux témoins. Je pourrai interroger et contre-interroger ces témoins et obtenir des précisions sur certains faits que mes collègues réformistes, par exemple, ont niés, et je pourrai aussi poser certaines questions qu'ils souhaitent poser.

Je ne veux pas, aujourd'hui, répondre, ou tenter de répondre, à des questions que mes collègues réformistes ont soulevées. J'examinerai le but du débat d'aujourd'hui et j'essaierai de faire comprendre aux Canadiens de quoi il retourne. Je dois franchement dire que je m'élève contre la désinformation que mes collègues réformistes essaient de répandre au Canada sur ce qui se passerait si nous adoptions leur motion.

Je veux parler de l'aspect légal de ce qui se passerait si nous appuyions la motion réformiste. Je veux que nous laissions ensuite l'ensemble des Canadiens décider de la justesse des propos des réformistes.

On nous demande d'examiner la motion du gouvernement. Elle est très simple. Nous n'approuvons peut-être pas le projet de loi et ses principes, mais la motion est très simple. Elle dit: que le projet de loi soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé au Comité permanent de la justice et des questions juridiques. Tout ce que le gouvernement dit, c'est «d'accord, renvoyons le projet de loi au Comité permanent de la justice et des questions juridiques pour que nous puissions entendre des témoins et toutes les personnes qui veulent donner leur appui au projet de loi ou s'y opposer».

Mes amis du Parti réformiste ont proposé un amendement très précis. Ils veulent faire croire à la population que leur amendement aurait pour effet de diviser le projet de loi en deux. Ce n'est pas vrai. La motion d'amendement est très précise. Elle propose de retrancher tous les mots suivant le mot «Que» de la motion initiale qui propose, comme les députés se rappellent: «Que le projet de loi soit lu une deuxième fois et renvoyé au comité.» Les réformistes veulent donc faire retrancher ces mots. Par quoi veulent-ils les remplacer? Est-ce par une motion proposant «que le projet de loi soit scindé en deux parties distinctes»? Non. Voici par quoi ils veulent les remplacer:


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«la Chambre refuse de donner deuxième lecture du projet de loi C-68, Loi concernant les armes à feu et certaines autres armes, parce que le principe de l'établissement d'un système de délivrance de permis et d'enregistrement pour toutes les armes à feu et le principe de la création d'une série d'infractions constituent deux questions distinctes qui doivent être traitées séparément.»
(1645)

Elles devraient peut-être être traitées séparément; mais si cette motion était adoptée, elle ne permettrait pas à la Chambre de traiter ces deux questions séparément. Si nous adoptions cette motion, nous ne traiterions tout simplement pas du projet de loi C-68. La Chambre ne lirait pas le projet de loi pour la deuxième fois et ne le renverrait pas au Comité permanent de la justice et des questions juridiques. Par conséquent, il n'y aurait pas de projet de loi C-68, et donc rien à scinder, rien à débattre.

Je ferai remarquer en toute déférence aux réformistes qu'il est abusif de leur part de soutenir que leur motion aurait pour effet de scinder le projet de loi. Rien n'est moins vrai. Elle aurait plutôt pour effet de le couler, non de le scinder. Tenons-nous en donc aux faits.

Les réformistes se targuent de parler franchement aux gens. Qu'ils soient donc francs avec eux: s'ils veulent proposer une motion qui aura pour effet de couler le C-68, qu'ils disent aux gens que telle est bien l'intention de la motion qu'ils proposent au lieu de faire croire qu'elle vise à scinder le projet de loi. C'est pure absurdité parlementaire.

Quiconque vote en faveur de la motion en pensant que le projet de loi sera scindé se trompe lamentablement, car voter en faveur de cet amendement aura véritablement pour effet de couler le projet de loi C-68.

Si nous le coulons, le comité de la justice n'aura absolument pas l'occasion d'examiner les mérites du projet de loi, ni d'examiner les amendements qu'on pourrait proposer. Il n'aura pas la possibilité d'essayer de supprimer certaines parties du projet de loi.

Soyons honnêtes avec les Canadiens. Si le projet de loi ne plaît pas aux députés, qu'ils le disent. Si vous n'aimez pas le projet de loi, dites aux Canadiens que l'amendement aurait pour effet de rejeter le projet de loi. Il ne faut pas leur raconter que le projet de loi serait scindé en deux. Ce n'est pas vrai.

Mme Grey: C'est tout?

M. Wappel: Non, ce n'est pas tout.

Parlons de ce qui arrivera si le bon sens l'emporte et si le projet de loi est renvoyé au comité. Le projet de loi n'est pas parfait. Aucune loi adoptée par le Parlement ne l'est. Il y a des problèmes qui se posent. Le ministre a avoué dans un communiqué qu'il voudrait que le comité étudie au moins trois amendements.

Un de ces amendements porte sur les armes anciennes et leur transmission de génération en génération. Le deuxième porte sur l'attitude à adopter en ce qui concerne les armes prohibées qui sont utilisées en compétition. C'est une préoccupation bien normale. Nous pourrions étudier ce problème et proposer un amendement afin de permettre cette utilisation d'armes prohibées. Il n'y a rien de mal à ça, rien d'impossible. Le ministre nous a aussi demandé d'examiner la question des reconstitutions historiques avec des armes anciennes.

Il y a aussi quelques problèmes que je voudrais étudier avant de proposer mes amendements. Je dois admettre que j'ai des possibilités que n'ont pas tous les députés, puisque je siège au comité de la justice. Je puis donc y proposer toutes sortes d'amendements. Je peux ensuite en proposer d'autres à l'étape du rapport à la Chambre. J'ai donc deux chances, à la différence des autres députés, et je l'avoue.

Un problème que je remarque dans le projet de loi est la possibilité de confiscation sans indemnisation. C'est une abomination, et c'est fort peu libéral. Il faut régler ce problème. Il faut examiner ce que dit le projet de loi et prendre des décisions difficiles. À mon avis, il faut verser une indemnisation si, conformément aux décisions de la Chambre, on confisque au nom de l'intérêt public un bien légalement acquis. C'est ce qui se passe pour l'immobilier. Il n'y a pas de raison qu'il en aille autrement ici.

Je voudrais entendre des témoignages à ce sujet. Je voudrais entendre le pour et le contre. J'aimerais entendre tous ceux qui voudront venir témoigner devant le comité de la justice pour nous dire ce qu'ils considèrent positif et ce qu'ils déplorent.

(1650)

J'ai des réserves au sujet des peines obligatoires. Prenons un article au hasard. Prenons le nouvel article 244 du Code criminel qui est proposé à l'article 138 du projet de loi. Cette disposition est ainsi libellée:

244. Est [. . .]passible d'un emprisonnement maximal de quatorze ans et d'une peine minimale d'emprisonnement de quatre ans quiconque, dans l'intention:
a) soit de blesser, mutiler ou défigurer une personne,
b) soit de mettre en danger la vie d'une personne,
c) soit d'empêcher l'arrestation ou la détention d'une personne,
décharge une arme à feu contre quelqu'un [. . .]
Qu'est-ce que cela signifie du point de vue juridique? Cela veut-il dire que celui qui blesse quelqu'un se voit infliger une peine pour les blessures, puis une autre peine de quatre ans consécutive? Ou cela signifie-t-il que celui qui a blessé quelqu'un ou qui est trouvé coupable d'avoir blessé quelqu'un en vertu de cet article se verra infliger une peine minimale de quatre ans? La différence est énorme. Il faut que les fonctionnaires du ministère de la Justice et d'autres juristes puissent nous expliquer ce que cela signifie exactement.

Certains ont peut-être l'impression qu'une peine obligatoire de quatre ans s'ajoute à l'autre peine prévue pour le crime. D'autres pensent peut-être que la peine totale est de quatre ans. C'est ce qu'on appelle le principe de la totalité. Ce sont là des préoccupations et des questions légitimes.

Il y a une autre préoccupation légitime, et c'est celle qu'ont exprimée les députés du Parti réformiste quant à l'objectif véritable du registre. Celui-ci permettrait-il de réduire les crimes perpétrés au moyen d'armes à feu? Comment le savoir autrement qu'en entendant des spécialistes?


11552

Au sein du comité, nous pourrons entendre des gens des deux camps: l'Ontario Handgun Association, la National Rifle Association ou les propriétaires d'armes à feu. Nous pourrons entendre les représentants des chefs de police du Canada. Nos collègues du Parti réformiste pourront leur poser des questions sur les subventions consenties depuis dix ou vingt ans. Laissons faire les insinuations au sujet des chefs de police. Ils ne sont pas nommés par le gouvernement fédéral, mais par leur municipalité. Ces insinuations sont insultantes pour les chefs de police.

Quoi qu'il en soit, ces questions pourront être posées directement. Nous pourrons demander s'il existe une corrélation entre l'enregistrement et la réduction des crimes perpétrés avec une arme à feu. Sinon, il faudra peut-être trouver d'autres raisons justifiant les dispositions sur l'enregistrement.

Je n'arrive pas à concevoir qu'une personne raisonnable refuse de renvoyer cette question au comité de la justice afin qu'il l'étudie en profondeur et que tous les groupes et Canadiens d'un océan à l'autre qui le souhaitent puissent faire part de leur opinion sur ce projet de loi. Tout ce que les réformistes peuvent dire, mis à part le fait que leur motion sonnera le glas de ce projet de loi, est parfaitement insensé.

En terminant, je m'adresse aux gens de ma circonscription, celle de Scarborough-OUEST. J'ai discuté de la question avec eux à de nombreuses occasions. Je veux leur rappeler que je leur ai envoyé un bulletin parlementaire qui contient un sondage. Ils le trouveront dans leur boîte à lettres au cours des deux prochaines semaines. Je leur demande de se prononcer directement sur les questions que j'ai posées au sujet du contrôle des armes à feu.

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, j'ai bien hâte, moi aussi, de parler de cette question. Je suis heureuse d'être de retour à la Chambre. Je me réjouis particulièrement de pouvoir intervenir sur un sujet dont j'ai entendu parler il y a seulement 24 heures. Ça tombe bien.

Cette question a trait à un débat qui s'est tenu il y a quelques années. Il me semble que ça fait 40 ans, mais c'était en fait il y a 4 ans. Mon collègue de Burnaby-Kingsway a dit que la députée de Beaver River était favorable à l'enregistrement des armes à feu. C'est certainement nouveau pour moi, parce que je ne l'ai jamais été. Je me suis dit qu'il valait mieux vérifier la chose.

J'ai bien ri lorsque je l'ai vu dans le hansard du 6 novembre 1991. Le député de Kingston et les Îles me l'a signalé cet après-midi. . .

Le vice-président: Je demanderais au secrétaire parlementaire de bien vouloir cesser de chahuter pendant que la députée fait ses observations.

Mme Grey: Monsieur le Président, je vous remercie et je remercie aussi le député de Kingston et les Îles de me laisser parler.

Selon le député, j'ai dit que j'étais en faveur de l'enregistrement des armes à feu. Je voudrais faire une mise au point. Je voudrais citer le hansard du 6 novembre 1991, à la page 4687. Je venais de terminer mon discours et la période des questions et des observations était commencée. On se souvient que j'étais toute seule là-bas dans le fond et que j'étais constamment la cible du chahutage de la part des députés.

(1655)

Le secrétaire parlementaire d'alors, un dinosaure conservateur, m'a demandé de faire part de mes préoccupations à la Chambre. Voici ce que je lui ai répondu à la page 4687 du hansard:

J'attire l'attention du député sur les recommandations de l'Association canadienne des policiers, qui disait notamment que plus de 90 p. 100 des personnes interrogées croient que tous les types d'armes à feu devraient être enregistrées.
C'était ce que disait l'Association canadienne des policiers. Cette dernière disait que 90 p. 100 des personnes interrogées croyaient que toutes les armes à feu devraient être enregistrées. J'ai dit ensuite que j'étais d'accord et qu'à mon avis tous les Canadiens le seraient également. Ce sont les données obtenues par l'Association canadienne des policiers, comment pourrais-je les contester? Je ne les conteste pas. Si j'avais été d'accord sur l'enregistrement des armes à feu, j'aurais dit que j'étais d'accord avec elle. Je serais d'accord avec elle si j'étais en faveur de l'enregistrement des armes à feu. Cela tombe sous le sens.

Quand j'ai revu toute cette question hier, je me suis demandé pourquoi, s'il était si évident le 7 novembre 1991 que j'appuyais l'enregistrement des armes à feu, pourquoi la situation n'avait suscité aucune réaction de la part des groupes de ma circonscription et des propriétaires d'armes à feu absolument sérieux, comme ceux de l'association de tir du lac La Biche et de l'association de chasse et de pêche de Grand Centre's Cold Lake. Croit-on que si j'avais approuvé l'enregistrement des armes à feu, ces gens m'auraient laissée même descendre de l'avion pour retourner chez moi? Cette histoire ne tient pas debout.

Si le député de Burnaby-Kingsway s'inquiète du fait que j'appuie l'enregistrement universel des armes à feu, c'est qu'il a dû en trouver la preuve dans mon discours, dans ma thèse. Il n'a trouvé rien de la sorte. Il ne trouvera rien en ce sens aujourd'hui. Il a beaucoup de difficultés avec son petit caucus.

S'ils veulent parler de revirements, monsieur le Président, parlons donc de ce que disaient Ian Waddel, Margaret Mitchell et tous les autres durant la dernière législature. Je pourrais nommer tous les 43 députés en cause. Je suis convaincue que je pourrais me souvenir de chacun. Je me souviens aussi d'Audrey qui répétait sans cesse à quel point c'était terrible. Soudainement, en 1995, tout a changé. Le caucus du NPD n'appuiera pas ce projet de loi. Je dois l'admirer pour ce geste. Le député de Burnaby-Kingsway ne pourra pas le faire. S'il peut justifier son choix dans sa circonscription, fort bien. La situation était bien différente en


11553

1991. Je n'appuyais pas l'enregistrement universel des armes à feu à cette époque et je ne l'appuie toujours pas maintenant.

Écoutons ce que l'Association canadienne des policiers a dit très récemment au sujet de l'enregistrement des armes à feu: «L'Association canadienne des policiers reconnaît la valeur des informations qui seraient accessibles à tous les policiers, si les armes à feu étaient enregistrées, et elle favorise un système universel d'enregistrement des armes à feu, mais elle ne peut appuyer le système d'enregistrement proposé dans le projet de loi C-68, à moins que le gouvernement fédéral ne garantisse que les coûts de mise en oeuvre et d'administration d'un tel système ne seront pas imputés aux présents budgets de fonctionnement des services policiers.» Je suis d'accord là-dessus aussi.

Je suis contre l'enregistrement des armes à feu, mais je me rallie à l'avis de l'Association canadienne des policiers. Ou bien les policiers seront en mesure de faire respecter la loi, ou bien il faudrait puiser cet argent dans les budgets de fonctionnement. S'il y a moins de policiers dans nos grandes villes, dans nos petites villes et sur nos routes, pendant que des criminels se promènent avec des armes, voilà à quoi devrait servir l'argent.

Le projet de système canadien d'enregistrement des armes à feu comportera des données sur six à vingt millions d'armes à feu. C'est beaucoup d'armes; cela veut dire que de trois à sept millions de personnes possèdent une arme. Nous venons d'entendre mon collègue des Maritimes, le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice, dire que cette carte à bande magnétique ressemblera à une carte Visa.

Y a-t-il quelqu'un dans cette enceinte à qui on a déjà volé une carte Visa? Est-ce que tout le monde aura l'assurance que c'est sûr qu'on ne va pas pouvoir l'utiliser pour entrer par effraction dans notre système Internet et s'en servir pour des achats par catalogue? Qu'est-ce qui nous garantit que quelqu'un ne va pas entrer par effraction dans le système? Il nous a promis que ça serait sûr à 100 p. 100.

À propos de sécurité, je voudrais faire observer que, lorsqu'on est victime d'un crime perpétré avec une arme à feu, on ne se soucie pas de savoir si l'arme était enregistrée ou bien si un membre d'une bande de criminels rôdant dans nos grands centres urbains ne va pas pouvoir entrer par effraction dans ce système. On en entend parler constamment. Pour quelle raison l'enregistrement des armes à feu serait-il la mesure la plus sûre?

Ce qui me préoccupe, c'est qu'on pourrait savoir qui possède des armes à feu, où elles sont entreposées, combien et comment y avoir accès. Ces gens ne vont pas enregistrer leurs armes à feu. Nous nous faisons des illusions, si nous pensons que cela va se produire.

(1700)

Une personne traversant la frontière va-t-elle remettre son arme à feu? Qui va saisir ces armes?

Une voix: La police.

Mlle Grey: La police va saisir ces armes. On tourne en rond, car l'Association canadienne des policiers a demandé, dans son plus récent document: «Qui va saisir ces armes, qui va s'assurer de l'application de la loi?» Combien de temps les policiers vont-ils consacrer à cette tâche et pendant combien d'heures un policier dans n'importe laquelle des circonscriptions visées pourrait-il s'occuper de la paperasserie? Les policiers devraient être dans leurs voitures de patrouille pour lutter contre le crime.

Un système universel d'enregistrement serait une énorme entreprise fort coûteuse. Certains députés ont fait des blagues, plus tôt, lorsque mon chef a déclaré que nous n'avions aucune idée des coûts. Nous aimerions bien avoir certaines indications à ce sujet. Le ministre de la Justice peut bien faire des affirmations, mais nous n'avons absolument aucune preuve.

Dans son récent budget, le ministre des Finances nous a donné une idée de ce à quoi nous pouvions nous attendre au sujet des déficits. Pour chaque dollar que nous allons économiser, nous allons dépenser neuf millions de dollars en paiements d'intérêts. Cela fait boule de neige. On va ajouter 100 milliards de dollars à notre déficit. On a donc une idée des coûts. C'est beaucoup d'argent.

Ce sont les contribuables canadiens qui vont faire les frais de tout cela. Le gouvernement affirme que ce sont les utilisateurs qui vont payer, plutôt que les contribuables. Qu'est-ce que cela signifie? Tout simplement qu'il va falloir que je paie 10 $ pour enregistrer ma carabine .22. Cela revient à donner mon argent au gouvernement ou à quelqu'un pour enregistrer mon arme. Est-ce que cela va me coûter de l'argent? Bien entendu que oui. Je préfère verser 10 $ pour rendre notre régime de soins de santé plus efficace que de savoir que les gens vont payer pour enregistrer leurs armes.

Les associations de propriétaires d'armes à feu à des fins récréatives dans deux provinces ont d'énormes doutes à ce sujet et le ministre en est conscient. J'ai participé à la manifestation en question, en septembre, et j'ai été fière de tous ces propriétaires d'armes à feu tout à fait responsables. Personne n'a agi de façon irréfléchie, ce jour-là.

Je dois dire que j'admire le ministre de s'être rendu là-bas pour faire face à ces gens. Dans ma circonscription, on a trouvé que c'était très courageux de sa part. Quoi qu'il en soit, il s'est rendu là et il a fait face à des propriétaires dont aucun ne s'est comporté de façon répréhensible. Ce n'est pas aux propriétaires d'armes à feu responsables qu'on devrait s'attaquer dans ce projet de loi. On doit plutôt s'en prendre à l'utilisation d'armes à feu à des fins criminelles et un système d'enregistrement ne fera rien pour éliminer la criminalité ou remédier, même en partie, à ce problème.

Ce nouveau programme représentera une attaque massive de la part de l'État et de sa police contre le droit à la propriété et le droit à la vie privée de millions de Canadiens respectueux des lois. En toute franchise, je ne pense pas avoir à m'étendre davantage là-dessus. Quoi qu'en dise mon collègue de Burnaby, je n'ai jamais appuyé l'enregistrement universel des armes à feu. Je ne suis pas d'accord avec les estimations de l'Association des policiers. Je conviens que ces chiffres sont données par l'association, mais je ne suis pas d'accord avec cette opinion. Beaucoup de gens dans ma circonscription et de nombreux policiers également partagent mon point de vue.


11554

Il faut s'attaquer à la criminalité et non à l'enregistrement des armes à feu. L'enregistrement n'est pas la solution. Ainsi, scindons ce projet de loi en deux parties et assurons-nous de ne pas étiqueter les propriétaires d'armes à feu responsables comme des criminels, contrairement à ce que fait le projet de loi, tel qu'il existe actuellement.

M. Bob Speller (Haldimand-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, je suis ravi de prendre la parole sur cette motion, car j'ai passé mon temps, ces derniers jours, à écouter une partie du débat sur ce sujet.

Je dois dire que les députés d'en face ont présenté quelques bonnes idées. Les députés de ce côté-ci en ont également présenté des bonnes au sujet des changements que nous pourrions apporter pour bien tenir compte de quelques-unes des préoccupations de certains de nos électeurs.

Ces derniers mois, je suis retourné dans ma circonscription et j'ai discuté avec un certain nombre de mes électeurs et d'autres personnes, ailleurs dans le pays, qui ont entendu beaucoup de fausses informations au sujet de ce projet de loi. Il a été très difficile d'en débattre d'une façon ouverte et sérieuse, car je finis par passer la moitié du temps à tenter d'expliquer aux électeurs des choses qu'ils croient se trouver dans le projet de loi, mais qui n'y sont pas. Cela rend la tâche fort difficile.

J'ai un certain nombre de préoccupations au sujet de ce projet de loi, mais avant de les aborder, je voudrais parler des aspects qui, à mon avis, recueillent l'appui de tous les députés. Lorsque le gouvernement conservateur précédent a déposé le projet de loi C-17, je ne pouvais pas appuyer l'accroissement des peines prévues en cas d'utilisation illégale d'armes à feu et j'ai donc voté contre. Une des raisons pour lesquelles j'ai voté contre, c'est que je ne croyais pas qu'il traitait suffisamment de l'utilisation d'armes à feu dans un but criminel. Selon mes électeurs, il y avait également d'autres questions qui n'y étaient pas examinées.

(1705)

J'ai soulevé ces questions et je tiens à remercier le ministre d'avoir au moins écouté les Canadiens qui estimaient que les peines imposées à ceux qui utilisent des armes à feu pour commettre des crimes n'étaient pas assez sévères. Je lui suis reconnaissant, ainsi qu'au premier ministre, d'avoir tenu compte de nos propositions.

Comme les députés le savent, la peine moyenne infligée en général est d'environ 16 mois. Le ministre la fait passer à quatre ans. J'aurais aimé qu'elle soit plus longue encore, mais je considère tout de même qu'il s'agit d'une mesure positive et d'un progrès valable.

Je souscris aussi à ce que le ministre fait à propos de la contrebande. J'ai discuté de la chose avec le ministre du Revenu national et il m'a dit qu'il avait formé, avec le solliciteur général et le ministre de la Justice, un groupe de travail qui allait se pencher sur la question de la contrebande.

Bon nombre des mesures prévues ne fonctionneront pas, à moins que l'on n'intercepte les armes à la frontière. À la frontière, il y a un endroit important où l'on fait traverser la plupart de ces armes. Je demanderais au ministre de la Justice et au solliciteur général d'examiner cette situation et de retirer ces armes de la circulation. Je suis aussi d'accord pour que l'on saisisse les biens des personnes qui font de la contrebande. Si nous pouvons saisir les biens de ces personnes et mettre fin à la contrebande, cela fera beaucoup pour nous aider à régler certains des problèmes.

Je n'ai entendu aucun député d'en face remercier le ministre pour ce qu'il fait au sujet des jeunes contrevenants qui utilisent des armes de poing. J'estime qu'il s'agit là d'une mesure positive que nous pourrions appuyer.

J'en viens maintenant aux points qui, à mon avis, ne sont pas très bien étayés. Je veux parler, plus précisément, de toute la question de l'enregistrement. C'est probablement le point qui a le plus inquiété les habitants de ma circonscription. J'ai toujours dit, quand je présentais des propositions à ce sujet, qu'il faudrait que l'on me prouve que l'enregistrement est efficace, efficient et abordable. Quand je regarde certaines des propositions que le ministre a présentées sur la question, je me demande si elles satisfont réellement à ces critères.

J'espère que les membres du comité de la justice déchireront ce projet de loi, qu'ils feront comparaître le ministre devant eux et qu'ils vérifieront si de tels critères sont respectés. Je le vois comme un rôle important du comité et j'espère qu'il acceptera ce défi.

Moi aussi, je voulais diviser ce projet de loi en deux parties distinctes. Beaucoup de députés voulaient diviser le project en deux. Je dois pourtant dire à mes collègues d'en face que leur motion n'aura pas l'effet de diviser le projet de loi en deux.

Mlle Grey: Proposez une motion.

M. Speller: Je proposerai une motion. Je me demande si la Chambre consentirait à l'unamimité à ce qui suit. Je propose:

Que l'on supprime du projet de loi les articles 80 (page 36) à 112 (page 51) pour les présenter en tant que projet de loi distinct sur le système canadien d'enregistrement des armes à feu.
Le vice-président: La Chambre consent-elle à l'unanimité à ce que le député propose sa motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Il n'y a pas consentement unanime. Le député a la parole.

M. Stinson: Un libéral a dit non.

M. Speller: Monsieur le Président, plusieurs députés des deux côtés de la Chambre appuieraient une motion semblable. Alors que l'étude de ce projet de loi suivra son cours, j'espère que nous pourrons unir nos efforts afin de convaincre le ministre de faire quelque chose de la sorte.

Mlle Grey: Tout à fait.

M. Speller: Monsieur le Président, j'ai remarqué que vous aviez rabroué notre collègue tantôt parce qu'il ne cessait pas de chahuter.

Le vice-président: Le député a bien raison. La députée de Beaver River reconnaîtra que j'ai demandé au député de ne pas l'interrompre. Je demanderais aux députés réformistes d'arrêter d'interrompre leur collègue.


11555

(1710)

M. Speller: Monsieur le Président, en ce qui concerne les dispositions du Code criminel et l'enregistrement des armes à feu, un certain nombre de députés craignent que si une personne ne fait pas enregistrer une arme à feu comme l'exige la loi, elle va se retrouver avec un casier judiciaire. J'espère que le comité va se pencher sur cette question. Je sais que le ministre a fait savoir à l'Association canadienne des chefs de police qu'il est prêt à examiner cette question. Je suis moi-même prêt à le faire. Les députés du caucus libéral vont travailler avec le ministre au cours des jours qui viennent pour veiller à ce que cette question soit examinée.

J'aimerais bien que le projet de loi prévoie une disposition de temporarisation. Nous avons observé certaines difficultés au niveau du système d'enregistrement des armes de poing. Honnêtement, je ne sais pas très bien comment ça va fonctionner. Si, dans dix ans, on voit que ça ne fonctionne pas, éliminons-le. Si le ministre peut prouver qu'il fonctionne, gardons-le. Cependant, une disposition de temporarisation ne serait pas une mauvaise idée.

Les armes de poing sont aussi interdites. Certaines sont maintenant utilisées dans des clubs de tir. Je sais que le ministre a fait savoir qu'il était prêt à examiner avec les associations nationales les armes de poing qu'elles estiment devoir pouvoir utiliser. J'espère que le ministre et peut-être le comité écouteront ce qu'en pensent les autres clubs locaux dont les membres utilisent des armes de poing mais qui ne respectent peut-être pas toujours les critères des associations nationales.

Je me demande vraiment ce qui va se passer avec les décrets et les armes longues dont on ne tient pas compte habituellement, par exemple le Ruger Mini-14. Je sais qu'il n'en n'est pas question dans ce projet de loi. Cependant, une disposition sera ajoutée afin d'en interdire l'utilisation.

Dans ma région, beaucoup de fermiers s'en servent pour tuer des coyotes. C'est le fusil qu'ils préfèrent pour tuer les coyotes. Il y en a un bon nombre qui vont s'inquiéter à savoir si le ministre permettra l'usage de ces armes pour la chasse ou pour l'entraînement dans les clubs de tir. J'espère qu'il nous donnera du temps pour régler cette question.

J'ai écouté aujourd'hui les députés du Parti réformiste parler de ce projet de loi et nous dire que leurs électeurs s'y opposent. En tant que députés, nous devons tenir compte de ce fait. Le Parti réformiste nous dit qu'il est ici pour nous faire part des voeux de ses électeurs. Je suis tout à fait d'accord. C'est pour cela que je discute avec mes électeurs et que j'essaie d'aborder autant de sujets que je le peux.

Tous les députés doivent prendre connaissance des sondages provinciaux. Je veux citer un sondage effectué par le ministre de la Justice de l'Alberta. Tout le monde sait que les sondages ont montré que les Albertains étaient contre cette mesure. Ce n'est pas ce que ce sondage a révélé en ce qui concerne les régions rurales. Ce sont celles qui m'intéressent, parce que beaucoup de régions de l'Alberta ressemblent au sud-ouest de l'Ontario. Nous avons beaucoup en commun.

Prenons la question «Êtes-vous d'accord ou fortement en désaccord avec l'enregistrement des armes à feu?» Les résultats montrent que 50 p. 100 des répondants étaient d'accord et que 48 p. 100 étaient un peu d'accord ou un peu contre.

Cependant, dans certaines localités rurales, 58 p. 100 des répondants étaient fortement d'accord et 43 p. 100, fortement en désaccord. Cela montre bien que même dans les régions rurales de l'Alberta, les Canadiens appuient le ministre sur la question de l'enregistrement des armes longues.

En tant que députés, nous devons non seulement tenir compte de l'avis de nos électeurs, mais aussi de l'importance du projet de loi.

Le vice-président: Comme il est 17 h 15, conformément à l'ordre adopté aujourd'hui et en conformité avec le paragraphe 78(3) du Règlement, j'ai le devoir d'interrompre les délibérations et de mettre immédiatement aux voix toutes les motions nécessaires pour mettre fin à l'étude en deuxième lecture du projet de loi dont la Chambre est maintenant saisie.

[Français]

La première mise aux voix porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter cet amendement?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de cet amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés.

Le vice-président: Convoquez les députés.

(L'amendement, mis aux voix, est rejeté.)

(Vote no 189)

POUR

Députés
Abbott
Ablonczy
Benoit
Blaikie
Breitkreuz (Yellowhead)
Bridgman
Brown (Calgary Southeast)
Chatters
Crawford
Cummins
Duncan
Epp
Forseth
Frazer
Gilmour
Grey (Beaver River)
Grubel
Hanrahan
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hayes
Hermanson
Hill (Macleod)
Hill (Prince George-Peace River)
Hoeppner
Jennings
Johnston
Manning
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Murphy
Penson
Ramsay
Riis
Ringma
Schmidt
Serré
Solberg
Solomon
Speaker
Steckle
Stinson
Strahl
Taylor
Thompson
Wayne
White (Fraser Valley West)
White (North Vancouver)
Williams-55


11556

CONTRE

Députés
Alcock
Allmand
Anawak
Anderson
Arseneault
Assad
Assadourian
Asselin
Augustine
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Bachand
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellehumeur
Bellemare
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bertrand
Bevilacqua
Bhaduria
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Bouchard
Boudria
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Bélanger
Bélisle
Campbell
Cannis
Canuel
Caron
Catterall
Cauchon
Chamberlain
Clancy
Cohen
Crête
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
de Savoye
DeVillers
Dhaliwal
Discepola
Duhamel
Dumas
Easter
Eggleton
English
Fewchuk
Fillion
Finestone
Finlay
Flis
Fontana
Fry
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gagnon (Québec)
Gallaway
Gauthier (Roberval)
Godfrey
Godin
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Guay
Guimond
Harvard
Hickey
Hubbard
Ianno
Irwin
Jackson
Jacob
Jordan
Karygiannis
Keyes
Kilger (Stormont-Dundas)
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lalonde
Lastewka
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Leblanc (Longueuil)
Lee
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loubier
MacAulay
MacDonald
MacLaren
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Maheu
Malhi
Maloney
Manley
Marchand
Marchi
Marleau
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)
McTeague
Mercier
Mifflin
Milliken
Minna
Murray
Ménard
Nunez
Nunziata
O'Brien
Pagtakhan
Paradis
Paré
Patry
Payne
Peric
Peters
Peterson
Phinney
Picard (Drummond)
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Pomerleau
Proud
Regan
Richardson
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Robillard
Robinson
Rock
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Sheridan
Simmons
Skoke
St-Laurent
St. Denis
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Szabo
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Tobin

Torsney
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Ur
Valeri
Vanclief
Venne
Verran
Volpe
Wappel
Whelan
Young
Zed-173

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Chrétien (Saint-Maurice)
Copps
Deshaies
Dubé
Duceppe
Gaffney
Grose
Harper (Churchill)
Plamondon
Sauvageau

(1745)

[Traduction]

Le Président: Je déclare l'amendement rejeté. Le vote suivant porte sur la motion principale. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 190)

POUR

Députés
Alcock
Allmand
Anawak
Anderson
Arseneault
Assad
Assadourian
Asselin
Augustine
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Bachand
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellehumeur
Bellemare
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bertrand
Bevilacqua
Bhaduria
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Bouchard
Boudria
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Bélanger
Bélisle
Campbell
Cannis
Canuel
Caron
Catterall
Cauchon
Chamberlain
Clancy
Cohen
Crête
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
de Savoye
DeVillers
Dhaliwal
Discepola
Duhamel
Dumas
Easter
Eggleton
English
Fewchuk
Fillion
Finestone
Finlay
Flis
Fontana


11557

Fry
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gagnon (Québec)
Gallaway
Gauthier (Roberval)
Godfrey
Godin
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Guay
Guimond
Harper (Calgary West)
Harvard
Hickey
Ianno
Irwin
Jackson
Jacob
Jordan
Karygiannis
Keyes
Kilger (Stormont-Dundas)
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lalonde
Lastewka
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Leblanc (Longueuil)
Lee
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loubier
MacAulay
MacDonald
MacLaren
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Maheu
Malhi
Maloney
Manley
Marchand
Marchi
Marleau
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)
McTeague
Mercier
Mifflin
Milliken
Minna
Murphy
Murray
Ménard
Nunez
Nunziata
O'Brien
Pagtakhan
Paradis
Paré
Patry
Payne
Peric
Peters
Peterson
Phinney
Picard (Drummond)
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Pomerleau
Proud
Regan
Richardson
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Robillard
Robinson
Rock
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Sheridan
Simmons
Skoke
St-Laurent
St. Denis
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Szabo
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Valeri
Vanclief
Venne
Verran
Volpe
Wappel
Whelan
Young
Zed-173

CONTRE

Députés
Abbott
Ablonczy
Benoit
Blaikie
Breitkreuz (Yellowhead)
Bridgman
Brown (Calgary Southeast)
Chatters
Crawford
Cummins
Duncan
Epp
Forseth
Frazer
Gilmour
Grey (Beaver River)
Grubel
Hanrahan
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hayes
Hermanson
Hill (Macleod)
Hill (Prince George-Peace River)
Hoeppner
Jennings
Johnston
Manning
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)

Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Penson
Ramsay
Riis
Ringma
Schmidt
Serré
Solberg
Solomon
Speaker
Steckle
Stinson
Strahl
Taylor
Thompson
Wayne
White (Fraser Valley West)
White (North Vancouver)
Williams-53

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Chrétien (Saint-Maurice)
Copps
Deshaies
Dubé
Duceppe
Gaffney
Grose
Harper (Churchill)
Plamondon
Sauvageau

(1755)

Le Président: Je déclare la motion adoptée. En conséquence, le projet de loi est renvoyé au Comité permanent de la justice et des questions juridiques.

Chers collègues, la présidence est dans l'embarras. Un certain nombre de députés m'ont demandé d'enregistrer leur abstention.

J'ai deux possibilités. Je peux leur demander de se lever, de faire état de leur position et déclarer que c'est irrecevable ou, je peux demander à ceux qui veulent s'abstenir de se lever tous ensemble et leur dire que c'est irrecevable.

Je ne veux pas prendre cela à la légère. Vu que nous n'avons pas de mécanisme pour enregistrer les abstentions, je demanderais au comité sur les procédures de vote de prendre cela en considération dans ses délibérations futures.

M. Iftody: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'aimerais que le compte rendu indique que je suis resté assis et que je n'appuie ni la motion visant à défaire le projet de loi ni ce dernier dans sa forme actuelle. J'aimerais que la présidence se prononce là-dessus.

Mme Ur: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'aimerais que le compte rendu indique que j'étais présente lors du vote mais que je me suis abstenue.

[Français]

M. Gauthier: Monsieur le Président, les traditions dans cette Chambre ont une importance qui est loin d'être indéniable. Nous devons respecter, je pense, les habitudes et les façons de faire.

La présence en Chambre suppose qu'un député donne son opinion, comme ses électeurs le mandatent de le faire, qu'il soit pour ou contre un projet de loi. L'abstention n'existe pas à notre point de vue, et nous nous opposons.

Des voix: Bravo.

Le Président: Je remercie l'honorable député de Roberval pour son avis. Il a raison. La raison pour laquelle je me suis levé était pour expliquer mon dilemme. C'était simplement pour vous en informer. Je remercie tous mes collègues.

11558

[Traduction]

Comme il est 18 heures, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

_____________________________________________


11558

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LE MULTICULTURALISME

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.) propose:

Que, de l'avis de cette Chambre, le gouvernement devrait remettre aux particuliers la responsabilité de conserver leur culture en mettant fin aux programmes fédéraux de multiculturalisme et en abandonnant le contrôle du multiculturalisme, ce qui lui permettrait de prospérer parce que les particuliers auraient la liberté de poursuivre leurs propres idéaux culturels.
-Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je propose cette motion aujourd'hui. D'un bout à l'autre du pays, les Canadiens débattent des mérites de la politique fédérale du multiculturalisme. Elle a ses défenseurs et ses détracteurs, mais qui plus est, les gens n'acceptent plus aveuglément le statu quo selon lequel le financement du multiculturalisme est sans reproche et ne devrait même pas être remis en question.

La position du Parti réformiste est exprimée par la motion dont je viens de donner lecture aux députés. En abandonnant le contrôle, au niveau fédéral, du financement des projets de multiculturalisme, nous donnerions également aux particuliers l'occasion de choisir eux-mêmes les manifestations culturelles qu'ils désirent encourager.

En tant que gouvernement, nous disposons de moins en moins de ressources, et en tant que contribuables, nos revenus disponibles vont en diminuant. Devant cet état de choses, nous devons, en notre qualité de législateurs, nous efforcer de donner aux particuliers la plus grande liberté de choix possible en ce qui concerne l'utilisation de leurs revenus disponibles.

Dans le Canada d'aujourd'hui, n'est-il pas quelque peu arrogant de la part du gouvernement de décider quels programmes, quels groupes et quels particuliers seront financés? Ne serait-il pas mieux de laisser ce choix aux Canadiens plutôt qu'au gouvernement? Comment se fait-il que ce gouvernement libéral évite de prendre les difficiles décisions qui importent le plus aux yeux des Canadiens?

J'ai présenté deux motions dont il a été décidé que ni l'une ni l'autre ne pouvait faire l'objet d'un vote. En juin dernier, j'ai présenté une motion sur la SRC. Je recommandais que la société soit en partie privatisée. Lors du débat, j'ai suggéré que nous apportions des modifications substantielles à la SRC, y compris une réduction du financement.

Cette idée fut assez froidement reçue par les députés d'en face. En fait, je me rappelle avoir entendu des rires et des moqueries. Néanmoins, le budget 1995 ayant été déposé, j'ai été surprise de voir que certaines de mes recommandations avaient été suivies, particulièrement en ce qui concerne la réduction du financement et les possibilités de restructuration.

Une autre proposition réformiste que les libéraux ont récemment empruntée est la recommandation de fusionner toutes les organisations de femmes en une seule, la Condition féminine. J'ai même suggéré que nous démantelions ensuite toute l'organisation.

Toutefois, pour ce qui est du débat d'aujourd'hui, je voudrais partager avec la Chambre certains sentiments d'une Canadienne ordinaire. J'ai récemment parlé à un groupe de Kingston en Ontario, de ma vision du Canada. Une femme qui m'avait entendue ce jour-là m'a envoyé une lettre dans laquelle elle exprimait des pensées qui rejoignent les miennes. Je voudrais partager ces pensées avec la Chambre aujourd'hui. Elle m'a écrit au sujet de ce qu'elle appelle le «comportement acceptable dans le village global». Voici ce qu'elle écrivait:

Le monde des êtres humains devient de plus en plus petit et les peuples du monde entier se sont tellement mélangés que nous devons apprendre à vivre ensemble dans la paix. Le village global n'est pas ailleurs, il est ici, et nous en faisons tous partie. Peu importe si quelqu'un d'une race ou d'une nation différente vit à côté de chez nous, dans la même rue, dans un autre quartier ou à l'autre bout du monde, nous devons apprendre à vivre en paix avec tous ceux dont les origines raciales ou nationales sont différentes des nôtres. Faire autrement mettrait fin à notre monde. L'intolérance, les conflits, les combats et les guerres entre les peuples auront raison de notre civilisation et de la planète Terre beaucoup plus rapidement que la pollution et les catastrophes naturelles.
Tous les peuples ont des membres exceptionnels dont les réalisations ont bénéficié à toute l'humanité. Tous les peuples ont des membres difficiles qui rendent la vie misérable pour ceux qui les entourent. Personne n'est parfait. La plupart des gens, quelle que soit leur race, ont du bon et du mauvais. Il faut reconnaître ce qu'il y a de mieux et de positif chez les autres, peu importe leur apparence, leur langue ou leur origine. L'honnêteté, l'intégrité, la capacité de faire le travail exigé, de prendre soin de sa famille et de son prochain, et de vivre en harmonie avec les autres sont autant de valeurs positives qui sous-tendent une société bonne et valable.
Toutes les races et les nations au monde comprennent des individus qui excellent dans toutes ces valeurs. Toutes les races et les nations comprennent de nombreux membres qui ne respectent pas ces valeurs positives. Nous devons modifier nos attitudes afin de devenir plus objectifs et de ne pas porter de jugements anticipés. Nous devons nous montrer plus accueillants envers tous les êtres humains.
(1805)

La dame termine sa lettre par la réflexion suivante:

Je sais que c'est difficile, mais si nous sommes suffisamment nombreux à juger important de le faire, à adopter nous-mêmes de telles attitudes et à encourager les gens autour de nous à faire de même, le monde ne s'en portera que mieux.
Voilà ce qu'en pense une Canadienne ordinaire. La dame qui a écrit cette lettre n'est pas titulaire d'un doctorat en questions relatives à la paix. Aucun diplôme ne la sacre experte en élimination de la discrimination raciale, mais il ne fait aucun doute qu'en matière de gros bon sens, elle s'y connaît. Si seulement nous pouvons mettre ce bon sens en bouteilles et expédier celles--


11559

ci partout au Canada et dans le monde, combien meilleur serait le monde dans lequel on vit!

Je disais tout à l'heure que le multiculturalisme est très à la mode depuis quelque temps dans les médias. J'ai lu récemment dans India Abroad un article du professeur Milton Israel, dans lequel il dit ceci au sujet de l'identité en regard du multiculturalisme:

D'aucuns considèrent que l'importance accordée à l'ethnicité est facteur de division; d'autres y voient un moyen de s'adapter qui laisse entrevoir la possibilité de réaliser l'unité à de meilleures conditions. D'autres encore soutiennent que les frontières nationales ainsi que l'identité distincte et étroite qu'elles créent sont en train de tomber et que l'avenir appartient aux «transnationaux», ces personnes qui se sentent à l'aise dans plusieurs sociétés. Il n'y a pas lieu de déplorer la perte d'une ancienne patrie que l'on quitte soi-même ou dans laquelle d'autres immigrent en masse. Il convient plutôt de se réjouir du nationalisme cosmopolite nouveau genre qui en résulte.
Je partage cet avis. Nous n'avons pas besoin de dispense spéciale du gouvernement pour encourager cette façon de voir les choses. Les membres des communautés ethniques partagent également ce point de vue. Je m'en suis rendu compte lors de la conférence à laquelle j'ai assisté au centre des droits de la personne et des relations interraciales, à Toronto; il s'agit d'un organisme privé qui lutte contre la discrimination au Canada. C'était le 21 mars, journée soulignant l'opportunité d'une société où il ne se fait pas de distinctions fondées sur la race, désignée justement «Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale».

Les gens que j'ai rencontrés ce jour-là m'ont vraiment impressionnée. Ce sont tous des bénévoles, des leaders de la communauté ethnique de Toronto qui se sont courageusement affranchis de l'aide du gouvernement fédéral pour amener d'autres leaders de la communauté à venir parler de discrimination raciale et de l'espoir de la voir disparaître d'ici la fin du siècle.

Parmi les documents qui nous ont été remis à la conférence se trouvait une lettre exquise, signée Paul Martin. Le ministre disait tenir à souligner le travail accompli par le centre ainsi que sa contribution à l'élimination de la discrimination raciale au Canada. Il saluait le dévouement et l'engagement du personnel et des bénévoles-en fait, tout le monde est bénévole au centre-qualifiant leurs efforts d'exemplaires et ajoutant qu'ils méritaient tous des félicitations.

Cela illustre à merveille comment un groupe de Canadiens, sans l'aide de fonds du gouvernement, a pu travailler de concert à faire avancer la lutte contre la discrimination.

Le Président: Uniquement parce que je m'intéresse particulièrement à ce que dit la députée, je me demande si elle pourrait préciser s'il s'agit de l'honorable Paul Martin père ou fils?

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, il s'agit de l'honorable Paul Martin fils et de la lettre qu'il a rédigée le 13 mars 1995 pour appuyer ce groupe de Toronto. Je tenais à en faire part à la Chambre, parce que c'est une lettre formidable.

Le Parti réformiste s'oppose aux principes actuels du multiculturalisme et du canadianisme avec composés; il est favorable au démantèlement du ministère du Multiculturalisme et du Secrétariat du multiculturalisme.

Si le ministre des Finances veut vraiment des idées pour réduire son déficit, il saura qu'en arrêtant de financer de tels intérêts spéciaux, du coup, il fera faire aux Canadiens des économies de quelque 38,8 millions de dollars par an. Je voudrais aussi faire comprendre à tous les intéressés qu'au Canada, nous encourageons et valorisons l'autosuffisance, cette conviction invincible selon laquelle il faut tendre à l'autonomie et à l'indépendance.

(1810)

Le multiculturalisme a fait son apparition à la Chambre des communes le 8 octobre 1971. Au cours des 23 années qui ont suivi, il était politiquement incorrect de remettre ce principe en question. Je n'hésiterai jamais à le répéter. Il était politiquement incorrect de remettre le principe du multiculturalisme en question, surtout à la Chambre des communes. J'ignore combien de fois on m'a étiquetée comme étant intolérante, parce que j'exprimais un point de vue différent. Je n'ai pas la moindre patience à cet égard et tout ce que je veux, c'est un débat raisonnable et logique sur cette question.

À mon avis, les députés fédéraux, qu'il s'agisse des conservateurs, des libéraux ou des néo-démocrates, se sont tous servis de la politique du multiculturalisme d'une façon non sincère et superficielle afin de se gagner l'appui des communautés ethniques.

Nous voulons tous préserver nos racines, mais nous devons composer avec un multiculturalisme qui a été imposé parM. Trudeau, qui n'est qu'une farce, et dont les coûts sont excessifs. Les groupes ethniques sont ligués les uns contre les autres et le pays est fragmenté en centaines de minorités. Les idées deM. Trudeau sur le multiculturalisme continuent d'être un facteur prépondérant de l'érosion du fédéralisme et de l'unité canadienne. Le fait d'accorder aux groupes d'intérêts un traitement à la Trudeau a pour résultat de miner le fédéralisme. Ce phénomène est pratiquement inévitable, tant et aussi longtemps que nous encouragerons de façon officielle des groupes nombreux à s'écarter de la tradition canadienne.

La politique canadienne du multiculturalisme consiste à «reconnaître le fait que le multiculturalisme reflète la diversité culturelle et raciale de la société canadienne et reconnaît la liberté de tous ses membres de maintenir, de favoriser et de partager leur patrimoine culturel ainsi qu'à sensibiliser la population à ce fait». Cette politique vise à «promouvoir la participation entière et équitable des individus et des collectivités de toutes origines» dans tous les aspects de la vie canadienne, y compris à «faire en sorte que la loi s'applique également et procure à tous la même protection, tout en faisant cas des particularités de chacun». Le libellé de cette politique est relativement inoffensif tout en étant fondé sur de bons sentiments. Toutefois, dans la pratique, il endosse le programme des groupes d'intérêts, aux frais des contribuables.

Les Canadiens ne savent toujours pas au juste à quoi rime la politique du multiculturalisme, quel est son but, ni son utilité dans une société libre et démocratique comme la nôtre. Le multiculturalisme peut englober les chants folkloriques, la danse, la cuisine, les festivals, l'artisanat, les musées, les langues ancestrales, les études ethniques, la presse allophone, les relations


11560

raciales, le partage des cultures et les droits de la personne. L'opposition au multiculturalisme tient essentiellement à l'application trop générale du terme à toutes sortes de situations, de pratiques, d'attentes et d'objectifs ainsi qu'à l'institutionnalisation du multiculturalisme en tant que politique nationale, politique coûteuse d'ailleurs.

L'appui que la population accorde au multiculturalisme n'a pas été facile à évaluer. Au début des années 70, lorsque la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme a recommandé au gouvernement d'adopter une politique ethnoculturelle, environ 76 p. 100 de la population appuyait le multiculturalisme.

Puis, selon un sondage mené par la firme Angus Reid, cette proportion n'avait guère changé en 1991 et s'élevait à 78 p. 100. Que doit-on retenir de ces statistiques? Peu de choses, à mon avis. Au moment où ce sondage était effectué, le Forum des citoyens sur l'avenir du Canada signalait que l'attitude des Canadiens envers la politique de multiculturalisme était quelque peu ambigu. Il disait:

C'est là l'opinion de l'énorme majorité des participants qui nous ont rappelé que, pour édifier un pays uni, il convient de mettre l'accent sur nos traits communs plutôt que de nous accrocher à nos différentes origines. Bien qu'ils acceptent et apprécient la diversité culturelle du pays, les Canadiens ne prisent pas la plupart des activités prévues dans le cadre du programme du multiculturalisme. Ils les perçoivent comme coûteuses et comme source de divisions, du fait qu'elles rappellent aux Canadiens leurs origines diverses plutôt que leurs symboles, leur société et leur avenir communs.
Par ailleurs, en octobre 1993, la firme Decima a mené un sondage au nom du Conseil canadien des chrétiens et des juifs. Selon ce sondage, trois Canadiens sur quatre préfèrent, en matière d'immigration, une politique de creuset à l'américaine plutôt que la mosaïque multiculturelle que préconise officiellement le Canada depuis les années 70.

(1815)

Le sondage a également révélé que les Canadiens, en général, sont de plus en plus intolérants à l'égard des demandes des groupes d'intérêts et sont d'avis que les minorités, particulièrement les minorités ethniques, raciales ou religieuses, devraient faire davantage d'efforts pour s'adapter au Canada au lieu d'insister pour préserver leurs différences, spécialement aux frais de l'État. Des pourcentages à peu près semblables de membres de minorités visibles ont exprimé les mêmes sentiments.

Le sondage semble indiquer que les groupes à qui s'adressent les subventions au multiculturalisme sont généralement d'avis que ces subventions créent des divisions au lieu de favoriser l'unité. Ce ne sont pas là mes paroles, mais celles d'autres personnes.

Comme je l'ai mentionné, les groupes qui sont censés bénéficier de cette politique critiquent de plus en plus ouvertement le statu quo. Par exemple, un homme du nom de Jimmy qui a émigré du Vietnam en 1980 et qui est aujourd'hui technicien dans un laboratoire de développement photographique a fait la remarque suivante: «Le gouvernement consacre trop d'argent à quelque chose qui n'est pas nécessaire. Le Canada offre la liberté et du travail à tous ceux qui veulent travailler, et c'est tout ce dont les nouveaux venus ont besoin.» À Richmond, un rédacteur en chef de magazine du nom d'Anthony reconnaît que la ségrégation sanctionnée par le gouvernement est mauvaise pour le Canada.

Ce qui semble clair, c'est qu'il y a une érosion de l'appui des Canadiens à l'égard du multiculturalisme, phénomène qui touche aussi les minorités elles-mêmes. Le multiculturalisme ne fait rien pour promouvoir l'harmonie et l'unité au Canada parce qu'il ne reconnaît pas que tous les Canadiens sont égaux.

Notre vision du Canada devrait tendre vers l'atteinte d'un bien-être social et individuel où la personnalisation joue un rôle et où on priorise des thèmes comme la responsabilisation de la famille et de la collectivité ainsi que la résolution de problèmes. De telles valeurs doivent être propagées pour améliorer la vie de notre société. Cependant, les droits d'un groupe ne doivent jamais avoir préséance sur les droits des individus, à moins que le groupe ne forme la majorité des Canadiens.

J'ai tenté de démontrer pourquoi le gouvernement fédéral doit cesser de soutenir le multiculturalisme comme il le fait maintenant. Nous ne pouvons plus dépenser de l'argent que nous n'avons pas pour financer de telles politiques. Le sondage Angus Reid de 1991 démontre clairement que non seulement le programme de multiculturalisme a échoué, mais que les Canadiens s'y opposent. L'une des principales raisons de cette opposition, c'est que le programme crée des divisions.

Cela m'amène à parler d'Arthur Slessinger fils. M. Slessinger n'est pas un théoricien conservateur que j'invoque ici pour donner plus de poids à mon opinion. C'est un libéral réputé, un démocrate américain. Il est l'archétype du libéral. Slessinger croit que, par sa nature même, le multiculturalisme crée de dangereuses divisions. Il encourage les gouvernements à pratiquer la ségrégation en fonction de la race, de l'origine ethnique et de la langue. Il les oblige ensuite à accorder des droits et à verser de l'argent en se fondant uniquement sur les étiquettes.Slessinger conseille plutôt de mettre l'accent sur les forces unificatrices, d'accentuer les caractéristiques, les aspirations et les croyances que les citoyens ont en commun. Sans cela, les antagonismes tribaux divisent la société.

Le soin de sauvegarder l'héritage culturel de chaque groupe doit être laissé aux individus, aux familles et aux organisations auto-financées.

En conclusion, je tiens à préciser que je suis moi-même issue d'une famille multiculturelle. J'ai une fille qui a une double citoyenneté, étant à la fois Australienne et Canadienne, j'ai une autre fille qui est mariée à un jeune homme d'origine mexicaine, Fernando Rodriguez. J'ai moi-même des racines européennes, étant d'ascendance croate et norvégienne. Mon mari lui aussi a des origines européennes. Notre famille est multiculturelle. Elle reflète très bien la diversité et la richesse des différentes cultures dont elle provient.


11561

Je parle ici en tant que réformiste. Pour le bien de notre société, je crois que le gouvernement fédéral ne peut pas continuer de financer le multiculturalisme. Cependant, je crois que lorsque l'on veut forger une nouvelle nationalité à partir d'éléments divers, il faut investir pour y parvenir. En termes simples, tous doivent y mettre une bonne dose de tolérance et de bonne volonté. Mon expérience personnelle m'a enseigné cela.

[Français]

L'hon. Sheila Finestone (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui afin de participer à ce débat et mettre les choses sur la table, comme elles le sont d'ailleurs. Au Canada, le multiculturalisme est non pas un idéal, mais bien notre réalité.

(1820)

[Traduction]

Certains préfèrent parler de diversité ou de pluralisme et qualifier les programmes, les politiques et les problèmes d'interculturels, de transculturels ou d'ethnoculturels. Ils peuvent s'amuser avec les mots tant qu'ils voudront, mais une rose restera toujours une rose, peu importe comment on l'appelle.

L'auteur de la motion à l'étude a dit que nous ne devrions jamais appuyer des droits collectifs à moins que ce ne soient les droits de la majorité. À mon sens, et c'est toujours ce que j'ai appris, on juge les démocraties à la manière dont elles traitent leurs minorités.

Le multiculturalisme ne se résume pas au droit de choisir-que nous avons tous dans notre démocratie-de préserver nos racines culturelles. Il s'agit aussi de respecter ce droit pour tous les Canadiens sans égard à leur race, à leur religion, à leur langue ou à leur pays d'origine. Il s'agit d'instaurer un climat de respect mutuel dans un pays où tous sont égaux, où tous ont des droits, où tous ont des responsabilités. Il s'agit d'égalité. Comme l'a dit notre premier ministre, l'égalité n'est pas une affaire d'intérêts particuliers et de droits spéciaux. C'est une affaire de justice sociale et économique.

[Français]

Le Canada a une riche tradition démocratique. Les idéaux que constituent la justice, les choix personnels, le respect mutuel, l'ouverture d'esprit, la liberté, l'intégration et les notions communes essentielles de la justice ont orienté et façonné nos structures sociales, nos lois, nos institutions et notre mode de vie.

[Traduction]

Ce sont là des valeurs canadiennes collectives et fondamentales. Je rappelle à mon honorable collègue. . .

[Français]

-que le premier ministre du Canada a souvent dit que l'unité de notre pays repose sur notre diversité et la diversité est aussi notre force. Elle est, en fait, la caractéristique fondamentale de notre nation.

[Traduction]

Nous savons qu'il ne suffit pas de s'en remettre aux voeux pieux, pas plus qu'aux lois du marché ou aux impressions personnelles si nous voulons instaurer la paix et l'harmonie sociale et assurer la prospérité. Ces objectifs sont peut-être liés à cette entreprise. D'après moi et d'après mon parti, les seuls moyens d'atteindre cet objectif sont une bonne politique, la collaboration du secteur privé, l'engagement, la détermination et la bonne volonté de tous.

[Français]

Les programmes multiculturels fédéraux visent à encourager la compréhension parmi les différentes communautés culturelles. Qui peut s'opposer au bien-fondé de cet objectif? Ces programmes intraculturels visent à favoriser l'intégration des nouveaux venus au pays, visent à triompher des obstacles qui se dressent contre la participation de tous les Canadiens et Canadiennes et visent aussi à abattre les frontières et à faire échec à la discrimination raciale.

[Traduction]

D'un point de vue commercial, nous trouvons que ces politiques présentent de grands avantages économiques. Plus nous en savons au sujet des marchés mondiaux, plus nous pouvons utiliser les connaissances culturelles et linguistiques des Canadiens pour soutenir la concurrence sur les marchés mêmes où nous faisons maintenant des affaires à l'échelle mondiale, et plus nous en bénéficions tous.

Voilà certains des aspects essentiels du multiculturalisme. Il s'agit de bien plus que simplement rehausser et préserver la culture. La députée se rend sûrement compte que nous ne vivons pas dans une société parfaite.

Il existe de la discrimination, et même si nous nous classons au premier rang au palmarès de l'ONU, nous n'avons pas encore atteint le nirvana ni réalisé l'utopie, que je sache. Il y a encore des gens talentueux et des citoyens qui sont privés de l'accès complet à la vie économique normale. Il y a encore des gens qui vivent en marge de la société et qui ont une contribution essentielle à apporter, mais qui en sont empêchés parce qu'ils se heurtent à la discrimination ou à l'incompréhension.

[Français]

Les tensions linguistiques, raciales et religieuses conduisent à l'incompréhension. On abuse parfois du bien collectif. On aime bien souvent faire les choses à sa façon et on trouve difficile de se mettre dans la peau des autres.

[Traduction]

Une bonne politique gouvernementale et de bons programmes peuvent nous aider tous à garder la tête haute et à agir avec confiance et avec fierté comme si nous étions à la place de l'autre.

(1825)

Je crois que la politique et les programmes du Canada en matière de multiculturalisme ont contribué à établir un climat de paix et de stabilité dans tout notre vaste pays. Le reste du monde semble certes le penser.

En entrelaçant les diverses cultures qui se rencontrent dans notre pays, nous avons créé une magnifique tapisserie canadienne reflétant notre culture canadienne, dont la valeur est supérieure à la somme de toutes ses composantes dynamiques. À un coût qui n'a rien d'extravagant, moins de 1 $ par Canadien par année, cette politique contribue à abattre les barrières et à promouvoir les progrès institutionnels, donnant ainsi aux particuliers, comme le dit la députée, la liberté de poursuivre leurs propres idéaux


11562

culturels dans une société capable d'accueillir les différences, de bâtir des ponts et de bénéficier de son pluralisme.

Le multiculturalisme, ce n'est pas vivre séparément l'un à côté de l'autre, mais plutôt vivre ensemble. Ce n'est pas ériger des murs, mais les abattre. Il s'agit d'inclusion et non d'exclusion. Il s'agit du fait que nous sommes tous des Canadiens. C'est une question de respect mutuel.

Notre gouvernement fait preuve de leadership en profitant des avantages actuels et en puissance de la diversité. Les politiques et programmes multiculturels, je le répète, constituent une bonne pratique gouvernementale. Ces pratiques ont évolué et elles ont maintenant pour compléments des partenariats avec des particuliers, des sociétés, des organismes et d'autres paliers de gouvernement, que je remercie, comme je remercie aussi les personnes qui les ont aidés à titre de bénévoles.

À titre d'information pour la députée, nous ne chantons ni ne dansons ni n'organisons de festivals, contrairement à ce qu'elle prétend.

C'est avec plaisir que j'informerai la députée des initiatives que nous avons prises avec le Canadian Advertising Council et son étude, Colour Your Money, qui montre qu'avec sensibilité, de bonnes pratiques d'embauche et le genre de pratiques publicitaires que devraient adopter les milieux de la publicité, la diversité peut très bien être une entreprise rentable parce que les gens se sentent chez eux et bienvenus. C'est avec grand plaisir que je l'informerais des partenariats couronnés de succès que nous avons conclus avec l'Association canadienne des chefs de police, le Conference Board du Canada, la Fondation Asie-Pacifique, la Fédération canadienne des municipalités, l'Association canadienne des radiodiffuseurs, Cineplex-Odeon et une foule d'autres organismes qui sont trop nombreux pour qu'on puisse tous les nommer.

Nous préparons l'avenir en travaillant avec les jeunes, les commissions scolaires et les commissaires d'école, en contribuant à l'élaboration de films et de livres et en les mettant à la disposition des enfants dans les écoles et les bibliothèques publiques. Nous créons un environnement qui les aidera à modeler leur vie. En incitant les jeunes à la compréhension et à la coopération, nous contribuons à forger l'avenir du pays, un avenir marqué par le respect mutuel, la compréhension et la coopération.

J'invite la députée, qui a parlé de l'élimination du racisme, à se pencher sur ce groupe. C'est un excellent groupe dont nous contribuons au financement. Nous sommes très satisfaits du travail que nombre de ces groupes font dans leur rôle tant professionnel que bénévole.

[Français]

Nous devons affirmer et réaffirmer les valeurs canadiennes telles qu'elles sont exprimées dans notre Constitution et dans la Charte des droits et libertés, soit les libertés que nous considérons comme acquises: le droit et le devoir de chacun des citoyens de protéger et de promouvoir cette démocratie exceptionnelle et d'y participer pleinement et entièrement sur un pied d'égalité.

[Traduction]

Récemment, dans son émouvant discours d'assermentation, le gouverneur général a dit ceci: «Je crois qu'aujourd'hui encore nos différences nous en apprennent autant que nos ressemblances. Quand nous parlons seulement entre nous, seuls des échos nous répondent [. . .]La seule façon de grandir c'est en prenant le temps de nous écouter attentivement les uns les autres.»

[Français]

Il a ajouté, et je cite: «Au Canada, nous reconnaissons un fait de l'existence. Les gens sont fidèles à leurs origines. Et ils nous apportent justement leurs origines: une infinie variété de traditions et de cultures qui créent une mosaïque canadienne exceptionnelle constituant un bon exemple pour le monde.»

[Traduction]

À la députée qui a présenté à la Chambre une approche que j'estime non éclairée, je dirai qu'il n'y a pas de Canadiens d'origine ceci ou cela, et que notre politique ne fait pas de ségrégation. Si quelqu'un décide de s'isoler ou de se distinguer, il a la liberté et le droit de le faire. C'est dommage qu'ils aient l'impression de devoir se dissocier du grand projet de cet extraordinaire pays, de cette merveilleuse nation qui fait l'envie du monde entier à cet égard.

(1830)

En terminant, je dirai à la députée que l'essentiel, c'est que les valeurs nationales puissent transcender les barrières raciales, religieuses et culturelles au Canada, permettant au multiculturalisme de se développer dans l'intérêt de tous. Cela garantira la transmission du «bon sens» aux futures générations de Canadiens.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, c'est à titre de critique pour l'opposition officielle en matière de multiculturalisme que j'interviens et je remercie la députée de Calgary-Sud-Est de l'occasion qu'elle me fournit de réitérer la position du Bloc québécois sur la politique fédérale de multiculturalisme. Nous croyons que cette politique doit être abolie et ce, pour plusieurs raisons.

Afin de bien situer le débat, il y a lieu de reproduire la définition officielle de cette politique de multiculturalisme, telle qu'on la retrouve dans un bulletin d'actualité de la Bibliothèque du Parlement: «Le terme «multiculturalisme», au Canada, évoque la présence et la survie de diverses minorités raciales et ethniques qui se définissent comme différentes et tiennent à le demeurer.»

Voyons maintenant le contexte historique entourant l'adoption de la politique de multiculturalisme. Nous sommes en 1971, sous le gouvernement Trudeau. Le rapport de la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme vient de paraître. Toujours selon le bulletin d'actualité de la bibliothèque: «(. . .) le quatrième livre du rapport portait sur la contribution des groupes ethniques à l'enrichissement de la culture canadienne et recommandait d'intégrer (et non d'assimiler) dans la société canadienne les groupes ethniques non fondateurs, en leur reconnaissant tous les droits du citoyen et en les faisant partici-


11563

per sur un pied d'égalité à l'intérieur de la structure institutionnelle du Canada.»

Il faut également rappeler qu'un nouveau parti politique est né au Québec, qu'il a comme objectif avoué la souveraineté du Québec et qu'il a recueilli, lors de l'élection tenue l'année précédente, pas moins de 22 p. 100 du vote populaire.

Quelle ironie! Sous le coup de la pression provoquée par cette nouvelle volonté autonomiste québécoise, peu après la célèbre crise d'octobre, l'équipe de M. Trudeau, dont faisait déjà partie l'actuel premier ministre, réorientera légèrement la recommandation du rapport. C'est ainsi qu'on passera d'une notion d'intégration, telle que prévue au rapport et qui visait à la reconnaissance des droits des membres des groupes ethniques et leur participation égale à la société, à une notion de promotion des différences culturelles. C'est ainsi qu'on évacue toute la dialectique des deux nations fondatrices, avec leur langue et leur culture propres, pour les diluer ad nauseam dans une mer d'autres langues et cultures.

Ce fut un beau tour de passe-passe et les Canadiens n'y virent généralement que du feu sauf, naturellement, les Québécois et Québécoises. Ceux-ci, par l'entremise du premier ministre de l'époque, M. Robert Bourassa, s'en sont résolument dissociés.

Dans une lettre ouverte à M. Trudeau, M. Bourassa rappelait d'abord à son homologue fédéral que sa proposition trahissait les travaux de la commission, qui avaient porté sur le bilinguisme et le multiculturalisme, et donc l'égalité entre les deux peuples. Il regrettait ensuite la dissociation effectuée par M. Trudeau entre la culture et la langue. Ensuite, il rejetait complètement une politique qui aurait pour objectif de faire, au Québec, la promotion de langues autres que le français. Enfin, il rappelait au chef fédéral qu'il s'agissait, en l'occurrence, de domaines de compétence purement provinciale.

Le Québec n'a jamais changé d'avis, même si les chefs et les options politiques se sont succédés au cours des années. Bien au contraire, le Québec a développé sa propre politique d'intégration des communautés culturelles, politique qui ressemble d'ailleurs à celle proposée par la Commission royale d'enquêteLaurendeau-Dunton.

Au Québec, l'accent est mis sur l'intégration. Pas l'assimilation, mais l'intégration. Voici la définition officielle de l'intégration: «L'intégration est un processus d'adaptation à long terme, multidimensionnel et distinct de l'assimilation. Il s'agit d'un processus dans lequel la connaissance et l'usage de la langue commune de la société québécoise jouent un rôle moteur fondamental; il se consolide au sein d'une société où la participation de tous les Québécois et Québécoises est garantie et où les immigrants et immigrantes et les membres des communautés culturelles s'identifient et sont reconnus comme membres à part entière de la vie collective, sociale et politique d'une société francophone pluraliste.»

(1835)

Cette politique fait l'objet d'un consensus au Québec, et n'est nullement remise en question, contrairement à la politique canadienne.

En effet, on ne peut s'empêcher de noter que le multiculturalisme est loin de faire l'unanimité. Deux sondages, Décima et Gallup, publiés à l'automne 1993, révélaient que 75 p. 100 des Canadiens rejetaient la politique de multiculturalisme et préféraient une approche d'intégration semblable à l'approche québécoise.

C'est un bien triste constat d'échec quand on considère les investissements gouvernementaux effectués. Le budget affecté au multiculturalisme pour l'année 1993-1994 seulement était de 38 846 millions de dollars. Le programme existe depuis 20 ans. Combien de milliards de dollars ont été investis jusqu'à ce jour pour une politique qui ne fonctionne pas et dont les citoyens ne veulent pas?

La politique ne fonctionne pas et est critiquée même par ceux et celles qu'elle vise: les membres des communautés ethniques. À titre d'exemple, mentionnons les appuis innombrables qu'a reçus M. Neil Bissoondath, après la publication de son dernier livre. Ses supporters étaient unanimes à dire que le gouvernement canadien devrait n'avoir comme préoccupation que d'aider les immigrants à s'intégrer à leur nouvelle terre d'accueil et combattre le racisme, point à la ligne. Il constate que la politique fédérale a tendance à créer des ghettos ethniques qui ne favorisent nullement l'adaptation et la participation entière à la vie politique, économique et sociale.

Il ne faudrait pas non plus passer sous silence les aberrations que la politique multiculturelle peut engendrer. Il y a à peine six mois, on retrouvait, dans un document de consultation du ministre de la Justice, l'hypothèse de créer une défense dite de culture ou de religion pouvant être invoquée face à des accusations criminelles. En réponse au tollé de protestations suscité par le document, le ministre a dû se raviser et écarter cette possibilité. Voilà jusqu'où la volonté de promouvoir les différentes cultures peut mener.

En conclusion, je tiens à préciser que dans un Québec souverain, l'approche québécoise en demeurera une d'intégration et de respect. C'est d'ailleurs ce que confirmait, il y a à peine un mois, l'actuel ministre des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles, M. Bernard Landry.

Permettez-moi de le citer: «Le Québec ne subventionnera pas la différence à même les deniers publics. Notre gouvernement est contre le multiculturalisme. Bien que le gouvernement québécois prenne acte du fait que le Québec est multiethnique, il privilégie plutôt une politique de convergence culturelle dans un tronc culturel commun, enrichi d'apports étrangers.» Voilà qui résume bien la position québécoise et qui dispose efficacement du multiculturalisme.

[Traduction]

M. Stan Dromisky (Thunder Bay-Atikokan, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole dans cette Chambre afin de discuter de la motion M-364 que la députée de Calgary-Sud-Est a déposée et qui préconise de transférer aux particuliers la responsabilité de conserver leur culture en mettant fin aux programmes fédéraux de multiculturalisme. Je profite de l'occasion pour répondre à quelques arguments avancés par ceux qui s'opposent au programme canadien de multiculturalisme.

Malheureusement, il y a eu beaucoup de désinformation au sujet de la politique fédérale de multiculturalisme ces dernières années. Le plus grand mythe, c'est, premièrement, que le multiculturalisme, un programme subventionné par l'État, paie les


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gens pour leur permettre de préserver leur langue maternelle et leur culture et, deuxièmement, que les activités du programme servent à fractionner le pays. Une nouvelle parution, le livre de M. Neil Bissoondath, intitulé Selling Illusions: The Cult of Multiculturalism propage dans une certaine mesure ces mythes. Bien que je sois très heureux de voir que cette publication intéressante ait ravivé le débat sur ce sujet, je dois exprimer mes doutes quant aux affirmations non soutenues par des faits là-dedans.

M. Bissoondath interprète mal les retombées du multiculturalisme en laissant sous-entendre que le budget pour les événements multiculturels servira à ancrer davantage les stéréotypes et éventuellement à défaire le tissu social du pays.

Je serais très curieux de savoir au juste comment la danse traditionnelle d'une communauté, par exemple, pourrait être source de mésentente et renforcer des stéréotypes négatifs. On ne peut ajouter foi à cette conclusion. Tout le monde sait que le multiculturalisme ne promeut ni ne renforce les stéréotypes négatifs.

(1840)

À propos de la danse, ma famille et moi-même, à titre individuel et collectif, avions le sentiment qu'il nous fallait conserver certaines coutumes, traditions et croyances. Mus par ces besoins, en raison de notre origine ethnique, nous avons conservé ce que nous aimions, ce que nous jugions honorable et souhaitable de conserver et de transmettre de génération en génération. La danse ukrainienne comptait parmi ces choses à conserver. Tous les membres de ma famille ont appris à danser la kolemyka, la hopokola et d'autres danses dont nous raffolions, et ce, non seulement avec les membres de la famille, mais également avec d'autres membres de la collectivité.

Prenaient part à ces danses non seulement des Ukrainiens, mais également une foule de personnes de divers horizons ethniques. C'était ainsi, dans le milieu où j'ai grandi. Nous vivions tous en parfaite harmonie les uns avec les autres. Personne n'avait eu l'idée de dresser une barrière entre les Italiens, les Allemands, les Japonais, les Ukrainiens ou les Slovaques. Essentiellement, nous avions tous les mêmes besoins.

Par ailleurs, M. Bissoodath a établi un lien entre le multiculturalisme et la marginalisation des immigrants. Il raconte le cas du sprinter canadien Ben Johnson qui, dans le milieu du sport médiatique, est passé, en l'espace de 24 heures, du «Canadien qui a remporté la médaille d'or aux jeux Olympiques grâce à ses efforts» à «cet immigrant jamaïcain qui a perdu l'or pour avoir consommé des drogues». On passait d'une image positive à une image négative, du Canadien à l'immigrant jamaïcain. Il ne fait aucun doute, dans mon esprit, que pareille couverture médiatique est le fruit de l'ignorance et d'un préjugé inconscient. Cela n'a absolument rien à voir avec le facteur de marginalisation que constituerait le multiculturalisme.

La réalité, c'est que le multiculturalisme renforce notre pays. Cependant, il est tout à fait humain de réagir de façon émotive et instinctive face à des rumeurs non confirmées au sujet de certaines collectivités. Nous ne voudrions pas laisser des rumeurs et des ouï-dire déterminer notre politique. Les histoires non corroborées ne sont pas basées sur une opinion éclairée ni, chose certaine, sur des faits.

Selon moi, la position du Parti réformiste est le fruit d'une recherche inexacte et bâclée, car je ne veux certes pas croire que les réformistes induisent intentionnellement les Canadiens en erreur. Je ne peux vraiment pas l'imaginer.

Cependant, dans son livre, M. Neil Bissoondath dit ceci, lorsqu'il parle de l'opposition du Parti réformiste au multiculturalisme:

Au mieux, j'ai certains doutes. Le Parti réformiste m'apparaît être un parti qui souffre d'un manque incroyable de générosité sociale et il compte parmi ses membres beaucoup trop de radicaux ou, si on peut dire, de gens mal informés.
On a lancé officiellement le multiculturalisme au Parlement, le 8 octobre 1971. Ce devait être un moyen de parvenir à une mosaïque culturelle, par opposition au creuset américain. De nos jours, 42 p. 100 des Canadiens ont des origines autres que britanniques ou françaises. Même si les gens d'origine européenne forment la grande majorité des Canadiens, de plus en plus d'immigrants arrivent de l'Asie, de l'Afrique, du Moyen-Orient, des Caraïbes, de l'Amérique centrale et de l'Amérique du Sud.

La population canadienne change. Lors du recensement de 1986, les minorités visibles représentaient 6,3 p. 100 de la population. En 1991, cette proportion était passée à presque 10 p. 100. Dans les grands centres, le pourcentage de membres de minorités visibles est encore plus grand. Ainsi, il est de 26 p. 100 à Toronto, de 24 p. 100 à Vancouver et de 11 p. 100 à Montréal.

La politique de multiculturalisme du Canada reflète bien le rôle de chef de file de notre pays. Elle est enracinée dans les valeurs canadiennes. Elle va dans le sens de la Charte canadienne des droits et libertés qui établit les libertés fondamentales et les droits démocratiques de tous les Canadiens, quelle que soit leur origine ethnique ou nationale. La politique sur le multiculturalisme est aussi conforme à la Loi canadienne sur les droits de la personne, la Loi sur les langues officielles et la Loi sur la citoyenneté.

(1845)

L'objectif du multiculturalisme, comme il est défini dans cette politique, est d'aider les gens à participer pleinement à la vie du Canada. Il ne vise certainement pas la sauvegarde obligatoire de chacune des cultures et n'encourage pas l'isolement culturel, comme certains critiques l'ont affirmé à tort. Il existe, dans nos collectivités, certains ghettos, comme on les appelle, par exemple, à Thunder Bay, où se regroupent un grand nombre de personnes de même origine ethnique. Il en est ainsi parce que ces gens choisissent d'être voisins. Pour faciliter la vie quotidienne, ils décident de demeurer à proximité les uns des autres et de s'entraider, jusqu'au moment où ils peuvent communiquer avec tous les autres habitants du quartier dans la langue commune de


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l'endroit. Dans notre cas, ça pourrait être l'anglais et au Québec, le français.

En 1993-1994, le gouvernement a consacré 25,5 millions de dollars au programme fédéral de multiculturalisme, une somme inférieure à ce que Brian Mulroney a dépensée uniquement pour l'avion du premier ministre. Il est difficile de croire que la somme de 25,5 millions de dollars par année, soit moins d'un dollar par citoyen, pourrait parvenir à isoler les Canadiens dans divers ghettos ethnoculturels. De plus, il ne faut pas oublier qu'un élément important de la politique initiale reposait sur l'hypothèse que, si l'on encourage un peuple à affirmer sa propre culture, il sera plus apte à accepter la culture des autres. La politique officielle encourage les Canadiens de toutes origines ethniques à participer entièrement à la vie socio-économique du Canada et à mettre en commun leurs cultures et leurs histoires respectives.

Il est malheureux que les députés d'en face insinuent que le multiculturalisme et la diversité culturelle s'opposent en quelque sorte à l'unité nationale et à notre aptitude à nous intégrer dans la collectivité. Rien ne saurait être plus loin de la vérité. Les Canadiens de toutes les origines conservent le sentiment de leur identité culturelle et, en même temps, respectent la démocratie et la tolérance qui sont des valeurs canadiennes. Il n'y a pas de raison de croire que cela s'exclut mutuellement. Cette idée a été propagée par des personnes qui étaient contre le multiculturalisme, et c'est extrêmement trompeur et irresponsable. On en a la preuve avec le Canada d'aujourd'hui. Nous avons des cultures diverses et, pourtant, la plupart des immigrants, si on leur posait la question, nous diraient qu'ils sont avant tout des Canadiens.

Pour terminer, je voudrais vous lire un extrait d'un article paru dans le Toronto Star du 21 juin 1991. L'auteur, Myrna Kostash, petite-fille d'immigrants ukrainiens qui se sont établis en Alberta, raconte son expérience dans les termes suivants:

La politique de multiculturalisme et les institutions qui s'y rattachent m'ont permis de participer à la vie canadienne. Elles m'ont permis de sortir du ghetto. Dans mon enfance, les cultures ethniques se pratiquaient en privé et s'exprimaient dans les églises ukrainiennes et dans les groupes de jeunes. J'étais consciente du fait que je délaissais mon groupe d'amis pour être ukrainienne. Cependant, avec l'avènement du multiculturalisme, j'ai senti que, lorsque je prenais la parole, en tant qu'auteure canadienne-ukrainienne, je le faisais dans le courant principal de la vie littéraire canadienne. Je suis devenue canadienne, grâce à ce sentiment d'appartenance. Je n'ai pas eu à choisir entre la pratique de ma culture en privé ou en public. Le multiculturalisme me permettait de faire les deux.
M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Monsieur le Président, je suis ravi de prendre la parole pour appuyer la motion d'initiative privée no 364 que ma collègue a présentée. La motion prévoit de remettre aux particuliers le contrôle du multiculturalisme, dont le gouvernement fédéral est actuellement chargé. Essentiellement, la motion présentée par la députée de Calgary-Sud-Est demande que le gouvernement fédéral cesse de financer les groupes multiculturels.

Je suis favorable à cet objectif. Cependant, même si j'estime que l'État ne devrait pas financer ces divers groupes culturels, cela ne veut pas dire que j'éprouve de l'antipathie pour ces groupes. Ce n'est pas parce que je suis en désaccord avec des politiques multiculturelles imposées par le gouvernement que je n'aime pas d'autres groupes linguistiques ou ethniques. Je m'élève contre la politique du gouvernement, et non contre d'autres groupes culturels.

(1850)

Après tout, mes racines sont différentes de celles de bien d'autres personnes. Des générations de diverses souches sont venues ensemble au Canada pour s'y établir et pour bâtir un pays qui est maintenant de loin le meilleur au monde. Elles ont développé, peuplé et construit ce pays sans politique multiculturelle. En fait, je doute même que le terme «multiculturalisme» existait lorsque mes parents sont arrivés au Canada dans les années 20.

Mes racines sont très diverses. La langue de mes ancêtres est l'allemand de Prusse, mais mes ancêtres viennent non seulement de l'Europe centrale, mais également de l'Europe orientale. J'ai aussi un patrimoine slave-ukrainien, polonais et russe. Mes parents comprenaient et parlaient ces langues, en plus de ce qu'ils appelaient le yiddish. Je crois que le yiddish est un mélange d'allemand et d'hébreu. Je ne sais vraiment pas si tout cela se tient sur le plan linguistique. Qui suis-je pour m'interroger sur ce qui se tient dans une région du monde qui comprend une grande partie de la masse terrestre et qui compte plus de 150 groupes multiculturels? À bien y penser, il y a peut-être des leçons à en tirer, étant donné les troubles qui ont régné pendant des siècles dans la Russie impériale tsariste, puis dans l'ancienne Union soviétique et, maintenant, dans le nouvel État de Russie.

Mes parents ont quitté leur patrie avec des centaines de milliers d'autres gens de cette région, où leur lignée remonte à près de 200 ans. Ils sont partis pour échapper à la tyrannie qui a réduit leur peuple en esclavage pendant 70 ans, et ils sont venus au Canada, un pays où tout était nouveau et étrange. Ils n'avaient rien lorsqu'ils sont arrivés.

Cependant, ils avaient la liberté. Une liberté dont les gens du pays d'où venaient mes parents ne pouvaient que rêver. Mes parents ont fait de ce pays le leur avec un enthousiasme et un zèle typiques des nouveaux arrivants de cette époque. Comme tout le monde, du moins les non-Britanniques, ils ont rapidement appris l'anglais. Parmi les jeunes, certains n'ont commencé à parler anglais qu'à l'école.

Pendant des années, des générations, comme des milliers de familles non seulement d'Europe de l'Est, mais du monde entier, ils sont restés attachés à certains aspects de la culture qu'ils avaient connue avant d'arriver ici.

Voulez-vous savoir une chose, monsieur le Président? Ces gens sont venus avec peu ou pas d'argent, et ils n'ont pas reçu un sou du gouvernement, pas le moindre sou noir. Non seulement ils n'ont rien demandé au gouvernement, mais ils n'en attendaient rien. Ils sont venus ici pour y trouver la liberté et les occasions extraordinaires que ce beau et grand pays leur offrait. Ils se sont installés et ont construit des collectivités qui ont contribué à bâtir le pays.

Je voudrais dire à la ministre du Multiculturalisme que ce que nous avions à cette époque, pendant ces décennies de colonisation, c'était un multiculturalisme authentique et sans fioritures. Tous ces gens, toutes ces familles d'horizons divers ont collaboré pour construire des églises, des écoles et des collectivités. Ensemble, ils ont contribué à construire un pays.


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C'était le multiculturalisme à son meilleur, sans argent du gouvernement. Tous étaient fiers d'être devenus des Canadiens.

Depuis que le gouvernement finance toutes sortes de programmes, beaucoup de collectivités sont divisées. Des frictions et de l'animosité sont nées. On a créé la dépendance à l'égard de l'État. Apparemment, la ministre du Multiculturalisme est du même avis puisqu'elle s'est récemment demandée s'il y avait une culture canadienne.

(1855)

Je lui conseillerais de quitter Montréal et Ottawa et d'aller se promener dans la campagne canadienne, dans l'Ouest et dans l'a région de l'Atlantique. Elle serait agréablement surprise, si elle y restait suffisamment longtemps, d'y découvrir une culture florissante qu'il lui serait donné non seulement de voir mais aussi de ressentir. Je crois que la culture serait encore plus florissante dans ce pays et rapprocherait davantage les Canadiens de toutes les régions, si l'État sortait son vilain petit nez non seulement de la culture, mais aussi de son proche parent, le multiculturalisme.

Mme Maria Minna (Beaches-Woodbine, Lib.): Monsieur le Président, je sais que j'ai très peu de temps. Je vais donc essayer d'être brève. C'est très difficile de rester bref.

Le multiculturalisme est en fait une question de participation à la démocratie. Les députés d'en face ramènent constamment des idées toutes faites pour défendre une position plutôt que d'accepter les faits véridiques invoqués par le ministère. Ils savent bien que ce sont des faits véridiques.

Mon collègue et moi parlions justement de ce que nous avions vécu dans notre enfance. À cette époque, et ça se produit encore aujourd'hui au Canada, des enseignants incitaient des classes entières d'enfants à choisir des métiers, parce qu'ils étaient Italiens, Portugais, Ukrainiens, Polonais ou tout ce que vous voudrez. Cela se produisait à l'époque, et cela se produit encore maintenant à Toronto, avec les enfants portugais. Cela se produit avec les enfants noirs. On en trouve des exemples partout.

Le multiculturalisme vise en fait à abolir ce genre de barrières auxquelles se butent ces enfants. Il veut leur donner des chances égales d'accès en permettant la création de programmes de relations raciales, en suscitant des discussions dans les écoles et en favorisant la compréhension des différences. Il vise à faire comprendre que ces enfants ne sont absolument pas inférieurs. Nous ne l'étions pas. Toute ma génération a été poussée vers les écoles de métiers à son arrivée au Canada. Le multiculturalisme a réhabilité toute ma génération et beaucoup d'autres Canadiens de différentes origines, qui n'avaient pas de moyens de s'affirmer.

Je vous fais part d'une autre anecdote. À Harbourfront, dont nous avons parlé aujourd'hui, des auteurs étaient invités à lire leurs poèmes. Il n'y a pas longtemps de cela. C'était à la fin des années 80. On était en train de choisir des poètes qui avaient été publiés mais qui n'étaient pas encore bien connus dans tout le Canada. L'un des employés, d'origine ukrainienne, a dit qu'il connaissait un très bon poète de Toronto, qui avait été publié dans cette ville, mais dont les livres n'avaient pas été diffusés dans tout le pays. Ce poète s'appelait Pier Giorgio DeCicco. On lui a répondu que cette manifestation culturelle était pour les Canadiens, pas pour les étrangers.

La politique de multiculturalisme a pour but de créer une démocratie de participation, de donner l'accès, d'assurer l'égalité, de permettre à ce pays de devenir une nation solide où tous les Canadiens seront des partenaires égaux.

Nous disons être Canadiens et avoir en commun tous ces symboles. Ce sont des balivernes, ce ne sont que des mots. Tout ça ne veut rien dire quand on voit ce qui se passe en réalité, la vie des Canadiens dans ce pays, la discrimination systémique qui existe dans toutes les institutions.

J'ai passé vingt ans de ma vie à travailler à Toronto avec des groupes multiculturels et des groupes d'immigrants. J'ai passé la plupart de ce temps à me battre contre la discrimination invisible et les barrières systémiques qui existent au niveau du système scolaire et des services sociaux auxquels des gens ne pouvaient pas avoir accès parce qu'ils ne venaient pas d'un milieu anglophone. Jusqu'à ce jour dans l'agglomération torontoise, une personne ne peut avoir accès à la majeure partie des fonds consacrés aux programmes sociaux à moins de venir d'un milieu anglophone.

Est-ce là ce qu'on entend par une démocratie de participation, par les droits, par l'égalité et par le fait d'être Canadien? Les députés d'en face feraient bien de se renseigner avant de parler de tous ces mythes.

(1900)

Mme Brown (Calgary Sud-Est): Monsieur le Président, j'aurais deux points à soulever. Pour commencer, je suis très heureuse de pouvoir participer au débat aujourd'hui, car je vois que les députés sont passionnés et qu'ils souhaitent débattre la question plus à fond. Je demanderais donc le consentement unanime de la Chambre pour que la motion à l'étude soit transformée en affaire faisant l'objet d'un vote et renvoyée dès que possible à un comité pour un examen plus approfondi.

Le Président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: Non.

Le Président: Il n'y a pas de consentement unanime. Le temps réservé à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulé. Conformément au paragraphe 96(1) du Règlement, l'article est rayé du Feuilleton.

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MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LA JUSTICE

Mrs. Jane Stewart (Brant, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais revenir sur une question que j'ai posée au ministre de la Justice, le 15 février dernier, au sujet d'une pratique inquiétante qui consiste pour les avocats de la défense à mettre les conseillers qui travaillent dans les centres d'aide aux victimes d'agression sexuelle, les psychiatres, les médecins et d'autres intervenants en demeure de leur communiquer des dossiers ou d'autres documents personnels et confidentiels afin de s'en servir pour assurer la défense de leurs clients.

Je voudrais remercier le ministre de l'attention qu'il a portée à cette question et de sa réponse informée. J'aimerais toutefois partager avec la Chambre l'angoisse et les préoccupations de mes électrices face à la possibilité que ces renseignements personnels soient communiqués aux tribunaux.

Je voudrais partager avec la Chambre un extrait d'une lettre que j'ai reçue de l'une d'elles: «Pour beaucoup d'entre nous, le seul endroit où nous pouvons parler de nos traumatismes, c'est en thérapie. C'est là que la victime apprend à recouvrer son estime de soi et à éviter les mauvais traitements dans l'avenir. Le conseiller offre le soutien dont nous avons tellement besoin pour apprendre comment fixer des limites, retrouver notre confiance en nous-mêmes, reconnaître que nous avons le droit de protéger notre vie privée, de dire non, de faire valoir nos propres besoins, de ressentir un sentiment de colère, et apprendre comment exprimer cette colère de façon constructive et non dangereuse.

«En thérapie, nous apprenons que nous ne sommes pas impuissantes devant notre agresseur et que celui-ci n'avait pas le droit de nous maltraiter. Nous avons un endroit où nous pouvons exprimer nos émotions en toute sécurité, même si nous sommes seules à le faire. Pour beaucoup d'entre nous, c'est le seul soutien sécuritaire dont nous disposions.

«Malheureusement, les avocats de la défense veulent maintenant retirer le peu de protection dont nous jouissons en tant que victimes et nous faire subir un autre genre de viol. Ma thérapie est une chose très personnelle. Je peux parler de ma douleur et de mes objectifs, de mes espoirs et de mes craintes. Je paye assez cher pour que ce soutien me permette de fixer mes propres limites. Je vous exhorte à intervenir auprès du gouvernement pour stopper cette injustice.»

Ces mots sont à la fois poignants et instructifs. Ils nous apprennent que les victimes de la violence s'opposent à ce que ces conversations thérapeutiques très privées soient communiquées aux tribunaux.

En 1992, la Chambre a adopté une excellente loi protégeant la vie privée des victimes de viol. Nous savons que cette loi a récemment été contestée en Nouvelle-Écosse. Heureusement, le ministre de la Justice est intervenu et l'intégrité de la mesure législative a été préservée. Toutefois, nous voyons dans ce pouvoir d'assignation une façon détournée d'obtenir des renseignements confidentiels dans les salles d'audience, ce qui ne devrait pas se faire et ce qui pose des problèmes pour des personnes comme celle qui m'a écrite.

Je sais que le ministre travaille très fort sur ce dossier. Je sais aussi qu'il est intervenu dans une cause que la Cour suprême est en train d'examiner. Il s'agit d'une décision rendue par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique qui prévoit un contrôle strict de l'utilisation des renseignements de cette nature devant les tribunaux. Je remercie le ministre de son intervention et j'espère que la Cour suprême confirmera la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique et fera en sorte que celle-ci s'applique dans tout le Canada.

J'exhorte le ministre à poursuivre son étude assidue de ce dossier. Je suis consciente du fait qu'il s'agit de questions complexes. Néanmoins, je demande au ministre d'essayer de trouver un compromis heureux entre la nécessité d'assurer un procès équitable à l'accusé et celle de préserver la vie privée de la victime.

M. Russell MacLellan (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la députée de Brant a dit qu'il s'agissait d'une question troublante et complexe, mettant en conflit deux ensembles d'intérêts indiscutables.

D'une part, les victimes ont besoin de pouvoir obtenir des conseils et de l'aide médicale sous le sceau de la confidence et du parfait respect pour leur vie privée et leur intégrité personnelle, tant au moment de la consultation que plus tard lors de poursuites judiciaires. D'autre part, les individus accusés d'infractions graves ont besoin de pouvoir exposer les faits pertinents pouvant établir leur innocence. Les tribunaux canadiens se débattent dans les affaires particulières avec le très difficile équilibre à maintenir entre les intérêts des victimes et ceux des accusés.

(1905)

La Cour suprême du Canada a entendu des arguments sur ce point dans l'affaire O'Connor c. la Reine le 1er février. Le gouvernement fédéral est intervenu dans cette affaire pour exhorter le tribunal à approuver une version renforcée des lignes directrices élaborées par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique. La Cour suprême a réservé son jugement.

Les lignes directrices préconisées par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'affaire O'Connor visent à prévenir les enquêtes sur le passé de la plaignante. Elles obligent la personne qui veut avoir accès aux dossiers à prouver que leur contenu est pertinent. On a recours pour cela à une procédure en deux étapes qui peut se dérouler à huis clos, avec une interdiction de publication. Le plaignant et le détenteur des dossiers ne sont pas des témoins contraignables.

Dans le moment et sous réserve de la décision de la Cour suprême, la procédure O'Connor n'est obligatoire qu'en Colombie-Britannique. Lors d'une réunion fédérale-provinciale-territoriale des ministres responsables de la justice qui a eu lieu en janvier, on s'est entendu pour examiner les lignes directrices de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans le but de les faire adopter dans chacun des secteurs de compétence. Cela réglerait la situation en attendant la décision de la Cour suprême dans l'affaire O'Connor et en attendant l'adoption de toute nouvelle mesure législative à cet égard.

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On s'est également entendu sur le fait qu'il s'agit là d'une question urgente. Par conséquent, on a demandé aux fonctionnaires de se pencher sur la question et de faire rapport aux sous-ministres à leur prochaine réunion au printemps.

Le ministère de la Justice consulte actuellement les personnes et les groupes intéressés pour déterminer comment les dossiers personnels sont utilisés, pour examiner attentivement tous les aspects de la question et toutes les préoccupations exprimées à cet égard et pour trouver des façons d'assurer un bon équilibre entre les intérêts du plaignant et ceux de l'accusé.

L'ENVIRONNEMENT

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, le 29 mars, j'ai pris la parole à la Chambre pour poser une question à la ministre de l'Environnement. À ce moment-là, les dirigeants mondiaux commençaient des pourparlers à Berlin en vue de stabiliser les concentrations de gaz à effet de serre qui menacent actuellement le climat de la planète.

Les pourparlers découlent du sommet qui a eu lieu à Rio de Janeiro en juin 1992. Des représentants de 106 pays du monde s'étaient rencontrés là-bas pour signer la convention-cadre sur le changement climatique.

Depuis le sommet de Rio, plus de 100 pays ont ratifié le traité, et les dirigeants mondiaux sont maintenant réunis à Berlin afin d'évaluer les progrès réalisés depuis 1992 et d'étudier des propositions visant à renforcer l'accord.

Malheureusement, aussi importante, voire aussi critique que cette question puisse être, il n'y a pas beaucoup de progrès à évaluer. Le Canada, à l'instar de nombreux autres pays qui se sont engagés à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, a été loin d'honorer cet engagement. Pendant que nous discutons ce soir, la ministre de l'Environnement est vraisemblablement à Berlin et est sans doute gênée d'être la porte-parole d'un pays qui a fait peu de cas des engagements qu'il avait pris à Rio.

Quand on examine ce qui s'est passé depuis la conférence de Rio, il n'est pas nécessaire de chercher de midi à quatorze heures pour constater que près de neuf milliards de tonnes de carbone de plus se sont accumulées dans l'atmosphère et que s'accentuent les indices d'un changement climatique. Devant ces faits, la ministre de l'Environnement a reconnu l'existence d'une crise et est même allée jusqu'à dire que, si le Canada et les autres pays qui émettent des gaz à effet de serre n'y voient pas, le changement climatique et le réchauffement de la planète créeront une situation telle qu'une partie de la côte est du Canada sera inondée et que la minuscule mais magnifique Île-du-Prince-Édouard sera pratiquement submergée.

J'ai du mal à croire que la ministre de l'Environnement saurait qu'une pareille catastrophe pourrait éventuellement survenir et qu'elle ne serait pas prête à prendre immédiatement des mesures énergiques pour l'éviter. J'espère que nous n'attendrons pas, avant de prendre cette question au sérieux, que nos amis de l'île-du-Prince-Édouard aient à se chercher une maison en Ontario ou en Saskatchewan.

Les émissions de gaz carbonique augmentent. La situation va en s'aggravant dangereusement.

Selon le dernier numéro du magazine Worldwatch, les scientifiques estiment que, pour mettre fin à l'accumulation des gaz à effet de serre et permettre à la Terre de retrouver son équilibre en quelques siècles, et j'ai bien dit quelques siècles, monsieur le Président, il faudra réduire les émissions de gaz carbonique au taux où elles peuvent être absorbées par les océans, c'est-à-dire les réduire de 60 à 80 p. 100 par rapport à ce qu'elles sont aujourd'hui.

Pourtant, si on continue comme on est parti, les émissions devraient augmenter de 60 p. 100 au cours des deux prochaines décennies. Il est évident que l'atmosphère terrestre exigera des réductions marquées des émissions dans les pays industrialisés et un fort ralentissement de la croissance des émissions dans les pays en développement. Il faut donc que tous les pays du monde mettent en place des plans d'action pour guider les progrès dans ce domaine essentiel. Aucun pays ne peut rester les bras croisés.

Il est clair que le monde est confronté à un problème qui a des conséquences extrêmement importantes et irréversibles. Les délégués à Berlin doivent absolument profiter de l'occasion pour prendre le virage qui s'impose. Par conséquent, je demande à la ministre pourquoi les mesures que le Canada prend au sujet du changement climatique sont loin d'être aussi fermes que notre intention bien arrêtée de préserver les stocks de poisson au large de la côte de l'Atlantique?

J'espère que le gouvernement est prêt à dire aujourd'hui que nous devons faire mieux.

M. Russell MacLellan (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral, en collaboration avec les provinces et les territoires, a réalisé un consensus sur la direction que le Canada suivra pour répondre aux défis posés par les changements climatiques.

Lors d'une réunion à Toronto, le 20 février, les ministres de l'Énergie et de l'Environnement des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux se sont entendus sur le programme d'action nationale du Canada en ce qui concerne les changements climatiques. La vice-première ministre a déposé le plan d'action aujourd'hui à la première conférence des parties à la convention-cadre sur les changements climatiques, à Berlin.

Ce plan d'action expose les orientations stratégiques que s'est fixées le Canada pour remplir l'engagement qu'il a pris de stabiliser les émissions de gaz à effet de serre aux niveaux de 1990 d'ici à l'an 2000. Il est fondé sur le principe du développement durable préconisé par la Commission Brundtland-une approche où politiques environnementales, sociales et économiques sont pleinement intégrées.

Il donne par conséquent aux diverses autorités au Canada la possibilité de prendre chacune des mesures adaptées aux circonstances de leur région. C'est un document vivant. Le gouvernement fédéral et les gouvernements des provinces et des territoires se sont engagés à revoir le plan régulièrement pour s'assurer que le Canada remplit bien son engagement.

À cette fin, tous les ministres se sont engagés à examiner les progrès qui auront été réalisés à la fin des années 90 et ont convenu de continuer de mettre au point des solutions pour refermer l'écart de 13 p. 100 qui existe actuellement entre le taux des émissions et le taux de stabilisation. La publication aujourd'hui du plan d'action du Québec sur le changement

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climatique est un bon exemple de mesures prises par d'autres ordres de gouvernement au Canada.

Le but de ce gouvernement, tel que déclaré dans le livre rouge, est de travailler en coopération avec les provinces et les municipalités afin d'améliorer l'efficacité énergétique et d'accroître l'utilisation de sources d'énergie renouvelables.

Relever le défi que représente le changement climatique est, pour les Canadiens, une occasion remarquable de faire appel à leur esprit d'initiative et à leur créativité pour offrir des solutions crédibles, acceptables pour l'environnement et l'économie.

[Français]

Le Président: Mes collègues, conformément au paragraphe 38(5) du Règlement, la motion portant que la Chambre s'ajourne est maintenant réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

La séance est levée à 19 h 14.