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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 20 janvier 1994

AFFAIRES COURANTES

DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES

    Mme Finestone 71

PÉTITIONS

LA FISCALITÉ

LA CONSTITUTION

LA VIOLENCE

    M. Mills (Broadview-Greenwood) 71

LA BASE MILITAIRE DE MONCTON

LA CONSTITUTION

LE JEU DU TUEUR EN SÉRIE

    M. DeVillers 72

LOI SUR LE PARLEMENT DU CANADA

    Projet de loi C-201. Les motions visant à la présentationetà la première lecture sont réputées adoptées 72
    M. Bellemare 72

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE DISCOURS DU TRÔNE

REPRISE DU DÉBAT SUR L'ADRESSE EN RÉPONSE

    Reprise du débat 72
    M. Leroux (Shefford) 75
    M. Althouse 75
    M. Thompson 76
    M. Lavigne (Beauharnois-Salaberry) 76
    M. Harper (Calgary-Ouest) 77
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 78
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 84
    M. Deshaies 84
    M. McWhinney 87
    M. Rocheleau 90
    M. Lavigne (Beauharnois-Salaberry) 93

REPRISE DE LA SÉANCE

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

L'AGRICULTURE

LES FORÊTS

LE QUAI DE GRONDINES

    M. de Savoye 96

LE FILM SCHINDLER'S LIST

LE SÉISME DE LOS ANGELES

    M. Assadourian 97

LA SOCIÉTÉ INTER-CITY PRODUCTS CANADA LIMITED

LES CASQUES BLEUS CANADIENS

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER

    M. Lavigne (Verdun-Saint-Paul) 97

LE DÉBAT SUR LE DISCOURS DU TRÔNE

    M. Harper (Simcoe-Centre) 98

L'AGRICULTURE

LA VIOLENCE

LES POMMES DE TERRE DE L'ÎLE D'ORLÉANS

LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

LE RÉGIME ENREGISTRÉ D'ÉPARGNE-RETRAITE

LA CONTREBANDE DE CIGARETTES

QUESTIONS ORALES

LES SOINS DE SANTÉ

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 99
    M. Bouchard 99
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 99
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 100

LA GESTION DES PÊCHES

    M. Bernier (Gaspé) 100
    M. Bernier (Gaspé) 100

LA CONSTITUTION

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 101
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 101
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 101

LA MAIN-D'OEUVRE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 101
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 101

LES MOTIONS DE CENSURE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 102
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 102

LE REVENU NATIONAL

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 102
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 102

LE COMMERCE EXTÉRIEUR

LES TAXES SUR LE TABAC

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 103
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 103

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

LES PÊCHERIES DE SAUMON

LA CONTREBANDE DE CIGARETTES

INVESTISSEMENT CANADA

L'ÉQUIPE OLYMPIQUE DE HOCKEY

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 105
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 105

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

    M. White (Fraser Valley-Ouest) 105
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 106

LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

L'ÉQUITÉ SALARIALE

    Mme Gagnon (Québec) 106
    Mme Gagnon (Québec) 106

LES ESSAIS DE MISSILES DE CROISIÈRE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 107

L'AÉROPORT INTERNATIONAL PEARSON

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

LE DÉCÈS DE L'HONORABLE STEVE PAPROSKI

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 111

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

DÉCLARATION HEDBOMADAIRE

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE DISCOURS DU TRÔNE

REPRISE DU DÉBAT SUR L'ADRESSE EN RÉPONSE

    Reprise de l'étude 113
    M. Leroux (Shefford) 113
    Mme Gagnon (Québec) 114
    M. Harper (Calgary-Ouest) 114
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 119
    M. Harper (Calgary-Ouest) 122
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 125
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 126
    Rejet du sous-amendement par 214 voix contre 52 132

71


CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 20 janvier 1994


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Français]

DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES

L'hon. Sheila Finestone (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme)): Monsieur le Président, conformément à l'article 34(1) du Règlement, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre, dans les deux langues officielles, le rapport du Groupe canadien de l'Union interparlementaire.

Il s'agit du rapport de la délégation officielle qui a représenté le Canada à la 90e conférence interparlementaire, tenue à Canberra, Australie, du 13 au 18 septembre 1993.

* * *

[Traduction]

PÉTITIONS

LA FISCALITÉ

M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface): Monsieur le Président, j'ai ici une pétition signée par mes électeurs qui demandent au gouvernement de procéder sans délai à un examen approfondi du régime fiscal afin de redresser les injustices actuelles.

Les pétitionnaires signalent une injustice particulière dans la loi en vigueur. Les familles à revenu unique avec des enfants qui éprouvent des besoins particuliers sont victimes de discrimination du fait qu'elles ont décidé qu'il fallait qu'un des conjoints reste à la maison.

Ils font observer l'importance du coût que doivent assumer les familles à qui les médecins recommandent de confier leurs enfants à des garderies de jour spécialisées. Je ferai remarquer que les frais restent les mêmes, qu'il s'agisse d'une famille qui touche un ou deux salaires. Cette situation, de l'avis des pétitionnaires, est injuste et discriminatoire.

(1005)

[Français]

Ce que ces électeurs et électrices demandent, c'est un rapport de ce qu'on fait dans le domaine des impôts. Ils veulent que les injustices soient enlevées.

[Traduction]

LA CONSTITUTION

M. Myron Thompson (Wild Rose): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je suis heureux de déposer une pétition au nom des électeurs de Wild Rose qui habitent à Sundre et dans les environs. Cette pétition se lit ainsi: «Les soussignés, vos pétitionnaires, demandent humblement qu'il plaise au Parlement d'adopter une mesure législative prévoyant la tenue d'un référendum sur l'utilisation des deux langues officielles, le français et l'anglais, au sein du gouvernement et au Canada, référendum dont les résultats seraient exécutoires pour le Parlement. L'acceptation ou le rejet des amendements proposés serait déterminé par un vote à la majorité de la population du Canada et d'une majorité de provinces, les territoires étant considérés comme ayant le statut d'une province. Et vos pétitionnaires ne cesseront de prier.»

Je présente cette pétition au nom de ces personnes.

LA VIOLENCE

M. Dennis J. Mills (Broadview-Greenwood): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre des pétitions qui ont été signées par des habitants non seulement de ma circonscription, mais aussi de la région métropolitaine de Toronto. Les pétitionnaires demandent au Parlement de reconnaître l'inadmissibilité de la violence faite aux femmes et aux enfants.

Ils demandent humblement qu'il plaise au Parlement d'adopter des mesures législatives pour éliminer la violence faite aux femmes et aux enfants, encourager les femmes à dénoncer les agressions et les mauvais traitements dont elles sont victimes, fournir aide et appui aux femmes qui dénoncent ces situations et veiller au traitement des agresseurs.

Les pétitionnaires réclament que des efforts spéciaux soient faits pour renseigner les policiers, les avocats et les travailleurs sociaux oeuvrant auprès des tribunaux sur les abus commis à l'endroit des femmes et des enfants et sensibiliser l'opinion publique à ce problème très important qui est ignoré depuis trop longtemps.

LA BASE MILITAIRE DE MONCTON

M. George S. Rideout (Moncton): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de

72

présenter une pétition signée par des travailleurs de la base de Moncton qui demandent au gouvernement de maintenir le dépôt qui s'y trouve.

LA CONSTITUTION

M. George S. Rideout (Moncton): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, conformément à l'article 36 du Règlement, certaines pétitions concernant la question linguistique et les référendums.

LE JEU DU TUEUR EN SÉRIE

M. George Proud (Hillsborough): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter une pétition au nom des électeurs et des habitants de ma province qui demandent au gouvernement d'interdire la vente du jeu du tueur en série et d'empêcher que de tels jeux ou produits ne soient introduits sur le marché canadien.

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord): Monsieur le Président, j'ai une pétition similaire signée par des électeurs de ma circonscription, Simcoe-Nord. Elle porte sur l'importation de cartes de collection sur les tueurs en série. Elle dénonce l'importation et la vente de ces cartes au Canada.

Je connais les risques du contrôle de la liberté d'expression dans une société démocratique, mais je me dois néanmoins d'appuyer cette pétition et la dénonciation de l'horreur de ces crimes, surtout lorsque l'on sait que la plupart des victimes de ces criminels sont des femmes et des enfants.

(1010)

Le Président: Mes chers collègues, pourrions-nous revenir, avec votre consentement, aux projets de loi d'initiative parlementaire?

Des voix: D'accord.

* * *

[Français]

LOI SUR LE PARLEMENT DU CANADA

M. Eugène Bellemare (Carleton-Gloucester) demande la permission de déposer un projet de loi intitulé Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada (serment ou déclaration solennelle).

-Monsieur le Président, c'est pour moi un grand honneur de présenter un projet de loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada demandant que, dorénavant, les serments prêtés par les députés soient faits à la Reine, comme cela se fait habituellement, mais que, en plus, on prêterait serment au pays, c'est-à-dire le Canada, et à la Constitution.

(La motion est réputée adoptée, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)


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INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE DISCOURS DU TRÔNE

REPRISE DU DÉBAT SUR L'ADRESSE EN RÉPONSE

La Chambre reprend l'étude, interrompue le mercredi 19 janvier, de la motion proposant qu'une Adresse soit présentée à Son Excellence le Gouverneur général en réponse au discours qu'il a prononcé à l'ouverture de la session, ainsi que de l'amendement et du sous-amendement.

Mme Ablonczy: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Conformément à l'article 43(2) du Règlement, je désire aviser la Présidence que les membres du Parti réformiste qui participeront à ce débat partageront en deux leur période d'intervention. Chaque période de 20 minutes sera donc répartie entre deux orateurs qui prendront la parole pendant dix minutes chacun durant le reste du présent débat sur le discours du Trône.

Le Président: Je prends note de cet avis.

[Français]

M. Duceppe: Monsieur le Président, j'imagine que les cinq minutes de questions et commentaires suivront immédiatement après les premiers dix minutes et non pas à la fin.

Le Président: C'est la procédure habituelle, et elle sera suivie de cette façon aujourd'hui.

[Traduction]

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire): Monsieur le Président, je suis très fier de participer à ce débat sur l'Adresse en réponse au discours du Trône, au moment de commencer une nouvelle législature et le premier mandat de notre nouveau gouvernement.

Au sein de ce gouvernement, je suis heureux de représenter les habitants de Regina-Wascana. Je tiens à les remercier de m'avoir accordé leur confiance aux élections du 25 octobre.

La circonscription de Regina-Wascana comprend la moitié sud de la ville de Regina et des régions rurales qui s'étendent vers le sud et l'est de la ville. Je suis fier de représenter la capitale provinciale de la Saskatchewan en plus de quelques milliers d'habitants de la campagne. Je tiens à vous signaler que la plupart des électeurs ruraux qui habitent dans Regina-Wascana faisaient partie d'une circonscription qu'on appelait Assiniboia au cours des législatures précédentes. J'ai d'ailleurs eu l'honneur de représenter cette circonscription à la Chambre, dans les années 1970. Je suis heureux qu'un de mes collègues de cette époque, que je considère comme un ami, ait été choisi par la Chambre pour y agir à titre de président. J'en profite donc pour vous féliciter, monsieur le Président, pour votre élection à ce poste qui comporte beaucoup de responsabilités.

Je veux aussi féliciter les deux députés qui ont proposé et appuyé la présentation de l'Adresse en réponse au discours du Trône. Ces deux députés témoignent de la diversité et de la vigueur du caucus du gouvernement, dont j'ai l'honneur d'être membre. Les membres de notre caucus ont travaillé fort pour pouvoir siéger à la Chambre et former le gouvernement et ils sont


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déterminés à jouer un rôle énergique et positif. Ils en ont déjà fait la preuve en travaillant avec moi en ma qualité de ministre de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire du Canada. Ils ont fait preuve de vigilance et de maturité et se sont révélés très efficaces dans la défense des intérêts et des préoccupations de leurs électeurs dans le domaine agricole.

(1015)

En ma qualité de ministre de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire, je suis chargé d'un pan important de l'économie canadienne et d'une source de croissance appréciable. Le secteur emploie plus de 1,8 million de Canadiens et génère 8 p. 100 du PIB. La production et la transformation des aliments représentent des activités importantes dans toutes les parties du pays: Est, Ouest et Centre, régions urbaines et rurales. Notre politique agro-alimentaire est très bien expliquée dans notre livre rouge.

Les deux idées principales qui animent cette politique sont de fournir au secteur la stabilité et l'assurance en l'avenir et d'aider du mieux possible à faire en sorte que l'agriculture contribue à la croissance économique et à la création d'emplois. Nous avons fait campagne sur cette plate-forme. Nous avons été élus à partir de celle-ci. Nous allons la mettre en place. Nous allons mettre tous les efforts avec le secteur et les provinces pour que cela se réalise.

Un secteur solide signifie des aliments salubres accessibles aux Canadiens à des prix raisonnables, une stabilité financière pour les producteurs, la protection de nos ressources de base et un milieu commercial prévisible.

Au chapitre de la croissance économique, nous devons tirer parti des possibilités d'exportation de produits, favoriser l'innovation, appuyer le développement des marchés et réviser les politiques qui freinent la croissance.

Dans cette optique, le commerce international doit sous-tendre toute tentative de reconstruction de l'économie canadienne et de développement des débouchés en agriculture et dans le secteur agro-alimentaire. Un million et demi de Canadiens, soit un travailleur sur cinq, comptent directement sur le secteur des exportations pour leur gagne-pain. L'ensemble des échanges bilatéraux de biens et services représente près de la moitié de notre PIB. Parmi les pays du Groupe des Sept, seule l'Allemagne dépend davantage des échanges commerciaux que le Canada.

Compte tenu de ces faits, la conclusion d'un nouvel Accord du GATT était essentielle à l'avenir du Canada. Cet Accord représente une étape sur la voie de la réalisation de nos objectifs en matière de création d'emplois et de développement économique.

Le gouvernement actuel est entré dans les négociations du GATT presque à la toute fin du processus. Il restait à peine six semaines entre le moment où le Cabinet a été assermenté et la fin des négociations du GATT prévue pour le 15 décembre. Toutefois, une fois arrivés à la table de négociations à Genève, nous nous sommes battus ferme pour obtenir le meilleur accord possible pour le Canada. Mon collègue, le ministre du Commerce extérieur, et moi-même sommes allés un certain nombre de fois à Genève afin de transmettre en personne le message du Canada aux négociateurs commerciaux et aux dirigeants des autres pays. Nous avons bataillé ferme et je crois que nous en sommes arrivés à une bonne entente.

Il est vrai que nous n'avons pas obtenu tout ce que nous voulions, mais nos gains dépassent de beaucoup nos pertes.

Bien que l'agriculture ait été au centre d'une grande partie de l'Uruguay Round, l'accord n'en sera pas moins bénéfique à l'ensemble des Canadiens. Il stimulera l'économie mondiale et contribuera à créer chez nous les emplois tant souhaités. L'OCDE estime que l'accord injectera 8 milliards de dollars dans l'économie canadienne d'ici l'an 2002. Voilà pourquoi, à mon sens, l'accord est bon pour le Canada.

L'agriculture a été bien entendu un élément important de l'Uruguay Round. Pour la première fois dans l'histoire du GATT, les pays membres ont négocié un accord qui assujettit l'agriculture à des règles commerciales efficaces. L'accord réduira le risque de mesures commerciales préjudiciables parce que les règles s'appliqueront sans distinction à tous les pays et que les exceptions propres à un pays seront éliminées. L'existence d'un cadre de règles contribuera à empêcher les pays de se servir des mesures sanitaires et phytosanitaires comme obstacles déguisés au commerce.

Un nouvel organisme international fort, l'Organisation mondiale du commerce, résoudra les différends commerciaux. Les agriculteurs et les transformateurs canadiens seront moins victimes de la concurrence déloyale qui découlera des subventions aux exportations. L'amélioration de l'accès aux marchés du Japon, de la Corée, de l'Europe et des pays nouvellement industrialisés ouvrira d'autres débouchés intéressants aux exportateurs canadiens. Bien que le calendrier des réductions des subventions à l'exportation soit plus long que nous ne le voudrions, les réductions obtenues permettront d'abaisser de beaucoup les subventions d'ici à la fin de la période d'application de six ans. Elles aideront à stabiliser et à améliorer les prix dans le secteur des céréales et des oléagineux de notre économie.

(1020)

Malgré le manque d'appui, au cours du processus de négociation, à renforcer et à clarifier l'article XI, qui est notre instrument privilégié pour préserver les systèmes de gestion de l'offre au Canada, nous sommes convaincus que ces systèmes continueront de bien fonctionner en vertu du nouveau régime de tarifications détaillées.

Les secteurs de l'élevage et des viandes rouges sortiront gagnants parce que le GATT leur assurera un accès plus sûr aux marchés. Le remplacement, par des tarifs, des restrictions à l'importation, des prélèvements à l'importation et des autres mesures ayant un effet de distorsion sur le commerce accroîtra les possibilités d'exportation pour les produits de boeuf et de porc canadiens à destination de l'Europe, du Japon et de la Corée et, avec le temps, instaurera un cadre commercial plus équitable pour les exportateurs canadiens.


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Sans être parfait, le nouveau régime commercial devrait permettre la stabilité et la prévisibilité dont nous avons besoin pour planifier et investir à l'avenir. Il nous faut maintenant unir nos efforts pour tirer du nouvel accord le maximum d'avantages pour tous les segments de l'industrie agro-alimentaire.

Nous disposons de 18 mois pour nous préparer avant l'entrée en vigueur de l'accord. Celui-ci recèle une foule de possibilités à exploiter, pour peu que nous nous préparions bien. L'avenir de notre industrie agricole et agro-alimentaire s'annonce vraiment très prometteur.

Pour répondre aux besoins particuliers des secteurs agricoles soumis à la gestion de l'offre, j'ai demandé à mon secrétaire parlementaire de diriger un petit groupe de travail consultatif composé de producteurs, de transformateurs et de représentants du gouvernement, qui, ensemble, s'attèleront à la tâche de renouveler les régimes de gestion des approvisionnements. Mes collègues provinciaux de tout le pays ont appuyé cette démarche. Le groupe de travail aura pour mission de cerner pour les gouvernements tous les problèmes sur lesquels il faudra se pencher et de recommander des solutions à ces problèmes et cela, dans les 18 mois précédant l'entrée en vigueur du GATT, car les gouvernements fédéral et provinciaux veulent tous être fin prêts pour juillet 1995.

La transformation de l'économie mondiale modifiera en profondeur notre façon de commercer. Nous assistons à une mondialisation croissante des marchés. Il n'est plus rare de nos jours de voir des produits frais de la Nouvelle-Zélande ou de l'Asie du Sud-Est dans nos épiceries. En outre, les prix des produits primaires tendent à diminuer à long terme en valeur réelle.

Aussi, le Canada doit-il éviter de dépendre aussi fortement que par le passé des exportations de produits primaires si nous voulons améliorer notre niveau de vie. Nous devrons de plus en plus miser sur l'exportation de produits à valeur ajoutée vers des marchés nouveaux et changeants.

Je crois que le secteur de la transformation recèle un énorme potentiel. Après tout, les trois quarts des emplois dans l'industrie agro-alimentaire se trouvent en aval de l'exploitation agricole. Mon ministère, Agriculture et Agro-alimentaire Canada, dispose maintenant de tous les moyens nécessaires pour aider le secteur à exploiter les nouveaux débouchés internationaux.

Il s'est doté d'une nouvelle direction générale, Services à l'industrie et aux marchés, qui compte des bureaux dans toutes les provinces et est spécifiquement conçue pour collaborer avec le secteur afin de l'aider à accroître sa compétitivité sur la scène mondiale et à s'approprier une plus grande part des marchés, au pays comme à l'étranger.

Le gouvernement fédéral compte également 50 employés à plein temps qui travaillent au développement du commerce agro-alimentaire dans plus de 150 pays. Cette équipe comprend 13 spécialistes des questions agricoles dans les pays qui constituent des marchés d'exportation prioritaires, dont le Japon et Taïwan. Leur travail consiste à améliorer notre accès aux marchés et à fournir aux exportateurs canadiens des renseignements à jour sur les marchés. Des spécialistes de l'agro-alimentaire devraient aussi être nommés sous peu en d'autres points chauds du commerce international.

L'une des premières démarches du premier ministre après son entrée en fonction a été de se rendre à Seattle pour rencontrer les dirigeants de l'Organisation de coopération économique Asie-Pacifique, qui regroupe 17 pays. Ceux-ci forment la zone économique qui connaît la croissance la plus vigoureuse et la plus rapide au monde.

(1025)

Alors que les économies des pays industrialisés de l'Ouest stagnent depuis quelques années, ces pays d'Asie maintiennent une croissance annuelle de l'ordre de 6 à 9 p. 100 et représentent quelque 40 p. 100 du commerce mondial total. Selon les chiffres de la Banque mondiale, la moitié de la croissance de la richesse mondiale et du commerce international d'ici l'an 2000 sera le fait des pays asiatiques. Il existe d'énormes possibilités pour le Canada sur ce marché en effervescence, en particulier pour la viande de porc et les produits à valeur ajoutée.

Alors qu'il s'adressait à la Fédération de l'agriculture de l'Ontario en novembre dernier, Dennis Avery, de l'Institut Hudson, a décrit le marché asiatique comme étant celui qui offrait le plus de possibilités dans toute l'histoire de l'agriculture. À mesure que les pays asiatiques s'enrichissent, leur demande d'aliments riches en protéines s'accroît. Et comme ils seraient bien en peine d'y répondre eux-mêmes, le Canada doit leur prêter main-forte. Nous avons acquis une réputation enviable de producteur de denrées alimentaires de la plus haute qualité à l'échelle mondiale. À nous de miser sur cette réputation pour conquérir de nouveaux marchés.

Après l'Asie, l'Amérique latine représente la zone commerciale dont la croissance est la plus explosive. Et pour les exportateurs de produits agro-alimentaires canadiens, elle n'est devancée que par les États-Unis pour ce qui est de la croissance des débouchés. Conscient de l'importance du commerce et de la nécessité de développer les marchés des produits canadiens, le premier ministre a nommé, à l'intérieur du ministère des Affaires étrangères, deux secrétaires d'État chargés du commerce avec l'Asie, l'Amérique latine et l'Afrique.

Fort de l'Accord du GATT et de l'ALENA, le gouvernement tourne maintenant son attention vers les autres questions commerciales en suspens, et en particulier vers nos litiges bilatéraux avec les États-Unis. Lorsque j'étais à Genève, en décembre, j'ai eu l'occasion de discuter de certaines de ces questions avec mon homologue américain, le secrétaire à l'Agriculture, M. Mike Espy. Je l'ai rencontré de nouveau ce mois-ci à Toronto, et j'ai communiqué avec lui par téléphone depuis.

Je demeure optimiste que nos divers litiges, du blé au beurre d'arachide, en passant par le sucre et certains produits laitiers, pourront être éliminés à la satisfaction des deux pays, mais le gouvernement du Canada défendra assurément les intérêts du Canada avec vigueur et vigilance.


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La question de nos droits en suspens à l'égard du blé et de l'orge face à la Communauté européenne est également prioritaire. Les fonctionnaires du ministère et moi collaborerons avec les Européens afin d'obtenir une compensation adéquate pour les droits historiques que nous confère le GATT à l'égard de ces produits.

Une autre priorité sera d'élaborer de nouveaux programmes de protection du revenu axés sur l'ensemble de l'exploitation agricole. Dans deux semaines, je rencontrerai les représentants des provinces et de l'industrie à Winnipeg pour commencer à réfléchir sur l'avenir des régimes de sécurité du revenu pour les agriculteurs canadiens. À mon avis, il nous faut un mécanisme de sécurité du revenu qui réponde aux besoins fondamentaux de toutes les composantes du secteur agro-alimentaire et qui n'a pas d'effet de distorsion sur les signaux du marché; un mécanisme qui permettra aux agriculteurs de prendre des décisions éclairées en se fondant sur l'avantage relatif qu'ils détiennent plutôt que seulement sur les programmes de l'État. Nos ressources financières sont très restreintes. Nous ne pouvons pas nous permettre des programmes inefficaces. Cependant, je crois que nous pouvons nous permettre des programmes de soutien du revenu qui fonctionnent et c'est ce sur quoi nous allons travailler.

Et même si nous cherchons à réduire nos dépenses, j'ai bien l'intention de mettre davantage l'accent sur la recherche. Une recherche bien faite n'est pas un luxe qu'il faut abandonner lorsque les temps deviennent difficiles, mais plutôt une condition essentielle si nous voulons faire du Canada un chef de file dans le secteur agro-alimentaire, à l'échelle mondiale. Nous soulignions dans notre programme électoral l'importance de la recherche et la nécessité d'accroître les fonds consacrés aux coentreprises. Étant donné que nous avons peu d'argent à notre disposition, j'essaierai plutôt de réaménager les priorités au sein de mon ministère de façon à ce que nous puissions mettre de l'avant nos projets dans le domaine de la recherche.

Je crois que le gouvernement fédéral peut être un chef de file dans les domaines innovateurs de la recherche et du développement, par exemple, en biotechnologie, qui jouit d'une excellente réputation dans ma province, et dans d'autres secteurs comme la recherche sur l'éthanol.

Financer la recherche et le développement ne signifie pas ouvrir et fermer le robinet des fonds au gré des circonstances. À mon avis, le financement insuffisant et inégal de la recherche nous a déjà fait rater des occasions.

(1030)

Ce qu'il nous faut, c'est un heureux mariage entre, d'une part, la force motrice et le dynamisme de l'entrepreneurship et, d'autre part, les ressources intellectuelles de nos universités et de nos laboratoires de recherche. Je crois que ce jumelage serait une combinaison gagnante pour le Canada dans le domaine de l'agriculture.

Il y a 90 ans cette semaine, sir Wilfrid Laurier déclarait en substance que le XXe siècle serait le siècle du Canada. Il est de bon ton maintenant de confronter cette vue avec la réalité actuelle pour affirmer que sir Wilfrid Laurier avait tort.

Mais si nous examinons soigneusement ce que les Canadiens ont réalisé au cours de ce siècle-un pays démocratique et pacifique, un pays qui fait l'envie du reste du monde-nous conclurons que l'ancien premier ministre n'était peut-être pas si loin de la réalité après tout.

Au cours des quatre prochaines années, nous aurons l'occasion de montrer que le XXe siècle appartenait effectivement au Canada. Nous aurons l'occasion de poser des jalons historiques, de rétablir la foi des Canadiens en eux-mêmes et en leur pays, de préparer le Canada à aborder le prochain siècle avec la même confiance qu'il affichait au début de celui-ci.

Le gouvernement a hâte de s'attaquer au défi.

[Français]

M. Jean H. Leroux (Shefford): Madame la Présidente, je voudrais d'abord féliciter le député de Regina-Wascana pour le discours qu'il a prononcé dans cette Chambre. Il nous a souligné l'importance du ministère qu'il occupe et, en tant que critique adjoint de l'opposition officielle en agriculture et en agro-alimentaire, je voudrais lui faire part des préoccupations de mes électeurs du comté de Shefford. En effet, Shefford est un comté où il y a beaucoup d'agriculteurs, et actuellement ils sont très inquiets.

Au mois de décembre dernier, j'ai assisté au congrès de l'UPA du Québec, et je dois vous dire que les agriculteurs du Québec et de l'Ontario sont particulièrement concernés par ce qui se passe actuellement suite aux accords du GATT et de l'ALENA. En effet, les producteurs de poulet, de l'industrie laitière et des oeufs sont très inquiets puisque pour eux l'avenir semble très incertain.

Je pense que le ministre a évoqué clairement dans cette Chambre son intention de développer le ministère de l'Agriculture. Or, madame la Présidente, vous savez sûrement que l'agriculture n'a jamais été un ministère important lorsque les libéraux étaient au pouvoir. Nous espérons que cette fois-ci, suite au discours du ministre, qui a été très éloquent, nous espérons que l'agriculture aura une place importante puisque, au Québec, plus de 350 000 personnes dépendent de l'agriculture et de l'agro-alimentaire. Et, comme le disait le ministre si éloquemment, c'est un domaine dans lequel on peut développer, c'est un domaine dans lequel on peut être compétitifs au niveau mondial, grâce à la qualité de nos produits. J'encourage donc le ministre à poursuivre ce qu'il a entrepris.

Quant à nous, de l'opposition, nous allons surveiller très fermement les décisions qui seront prises par ce gouvernement-là. Et, s'ils font bien, madame la Présidente, vous pouvez être assurée, qu'au nom de tous les agriculteurs de Shefford, du Québec et du Canada, nous allons appuyer les bonnes mesures qui seront prises.

[Traduction]

M. Vic Althouse (Mackenzie): Madame la Présidente, je veux féliciter le ministre de l'Agriculture de son premier discours à la Chambre des communes.

Durant ce discours, il a parlé du GATT en disant que c'était merveilleux que nous ayons signé cet accord. Il a mentionné de nouvelles règles et ajouter que «les règles s'appliqueront de façon égale à tous les pays». Pourtant, en signant l'accord, nous semblons avoir renoncé à nos droits en vertu de l'article XI, qui protégeait nos industries visées par la gestion de l'offre. Par contre, les Américains semblent avoir gardé le droit de déroger à l'article XXII, ce qui leur permet de fermer la porte à nos


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produits laitiers, à nos arachides, à notre coton, à notre sucre, etc. Et malgré le fait que les règles soient censées s'appliquer de façon égale à tous les pays, il y a une situation qui reste inchangée: la constitution des États-Unis permet encore au Congrès d'invalider presque n'importe quand toute entente internationale signée par le président et son gouvernement.

(1035)

Étant donné que la constitution américaine n'a pas changé et que les États-Unis continuent de déroger à certaines dispositions de l'accord, comment le ministre peut-il dire que notre situation s'est améliorée? Si c'est le cas, pourquoi sommes-nous maintenant en train de négocier au lieu d'insister sur notre droit de vendre de l'orge et du blé aux États-Unis? C'est l'un des marchés où le prix de ces produits est le plus élevé, et ce, en grande partie à cause du programme de stimulation des exportations qui incite les producteurs américains à exporter, créant ainsi une merveilleuse occasion pour nous de vendre nos produits à un bon prix sur le marché américain.

M. Goodale: Madame la Présidente, j'apprécie l'observation faite par le député qui est intervenu tout à l'heure et la question que vient de poser le député de la Saskatchewan, ma province.

À propos de la situation prévalant à l'heure actuelle, je pourrais évidemment commencer par répondre au député que le nouveau régime prévu par l'Accord du GATT n'est pas encore en application. Son entrée en vigueur est prévue pour juillet 1995; les avantages que nous espérons récolter et que j'ai mentionnés dans mon intervention viendront donc après sa mise en application. J'aimerais bien que nous puissions en bénéficier plus tôt, mais nous ne pouvons malheureusement pas y compter avant la mise en place du processus.

Quant à savoir si nous avons renoncé à notre pouvoir d'imposer des mesures de contrôle des importations en vertu de l'article XI là où d'autres pays n'ont pas renoncé à des mesures correspondantes, le fait est que tous les pays ont renoncé, pour ainsi dire, à leur droit d'imposer ce genre de restrictions à la frontière. Au Canada, ces restrictions avaient trait à nos secteurs assujettis à la gestion de l'offre sous les auspices de l'article XI.

Aux États-Unis, il s'agit de l'exemption prévue à l'article 22 de la loi américaine sur l'ajustement agricole. En Europe, il s'agit du système des prélèvements variables. Au Japon et en Corée, il s'agit du système de limitation imposé à l'égard du riz. En vertu du nouvel Accord du GATT, une fois entré en vigueur en 1995, on ne pourra plus avoir recours à tous ces moyens dont on pouvait auparavant se servir comme barrières non tarifaires. Nous avons tous renoncé à quelque chose à cet égard pour adopter à la place ce système de tarification générale.

Y aura-t-il des aberrations en cours de route? Sans aucun doute. Il faudra être vigilant pour nous assurer que les règles du jeu soient aussi équitables que possible. Pour nous aider à cet égard, une fois que l'Accord du GATT entrera en vigueur, nous pourrons compter sur une nouvelle Organisation mondiale du commerce qui devrait constituer une amélioration considérable par rapport au système ponctuel et indiscipliné qui existait autrefois.

M. Myron Thompson (Wild Rose): Madame la Présidente, l'an dernier, de nombreux producteurs d'orge de ma circonscription et des environs ont goûté la liberté d'un marché continental ouvert pour cette céréale. Pour la première fois depuis bien des années, on a laissé la libre entreprise fonctionner et les producteurs en ont été enchantés. Bien que cela n'ait été que de courte durée, les agriculteurs ont pu augmenter leurs ventes dans une large mesure.

Le ministre de l'Agriculture peut-il nous expliquer pourquoi cette possibilité n'existe plus et peut-il nous dire si le marché sera rouvert dans un proche avenir, ce que souhaitent ardemment les producteurs d'orge?

M. Goodale: Madame la Présidente, je sais pertinemment que certaines régions de l'Ouest du Canada ont des opinions diamétralement opposées sur ce mode de commercialisation de l'orge.

(1040)

Pour répondre succinctement au député qui s'interroge sur les raisons de la disparition de ce système, je me contenterai de dire que le gouvernement précédent a, de l'avis des tribunaux, outrepassé ses pouvoirs lorsqu'il a temporairement mis en place ce système durant la dernière partie de 1993. Les tribunaux ont jugé que la démarche suivie par le gouvernement précédent était illégale.

Quant à savoir s'il faudra revoir ou réexaminer le système, certains Canadiens de l'Ouest proposent de tenir un plébiscite sur la question. Je suppose qu'il sera toujours possible d'envisager, en temps opportun, la tenue d'un plébiscite auprès des producteurs. Je veux toutefois mettre en garde les députés qui seraient tentés d'en arriver prématurément à cette conclusion, car les plébiscites ne sont pas toujours des solutions aussi claires et simples que certains pourraient le croire.

Ainsi, dans le cas présent, je crois qu'il faudrait une structure législative garantissant le bon déroulement du plébiscite. Avant d'amorcer cette forme de consultation, il faudrait en définir les paramètres. Il faut accorder une attention particulière au libellé de la question. Comme le député le sait sûrement, le fait de formuler une question positivement ou négativement peut infléchir profondément l'issue du processus. Il faut aussi répondre à des questions épineuses, par exemple, déterminer s'il y a des restrictions concernant les personnes pouvant être inscrites sur les listes et ayant le droit de se prononcer sur la question.

Un plébiscite comporte de nombreux aspects complexes, et je crois que nous voulons tous bien réfléchir à cette question avant de voir là la solution qui s'impose en l'occurrence.

[Français]

M. Laurent Lavigne (Beauharnois-Salaberry): Madame la Présidente, j'ai bien écouté le discours que vient de prononcer le ministre de l'Agriculture. En tant que député de Beauharnois-Salaberry, qui est un comté très largement agricole, où, entre autres, la production des céréales se développe de plus en plus depuis les dernières années, je voudrais savoir de la part du ministre de l'Agriculture, à partir des dernières ententes du GATT et de l'ALENA, ce qu'il adviendra des assurances de stabilisation, de l'assurance-récolte, ainsi que le transport des grains de l'Ouest en ce qui a trait au Nid-de-Corbeau?


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Est-ce que ces assurances et ce transport seront considérés comme étant des subventions? Est-ce que ce sera accepté dans le cadre des dernières ententes? Il n'y a, semble-t-il, pas trop de problèmes, mais advenant le cas où ces assurances devraient être considérées comme étant des subventions et que cette aide aux agriculteurs devait tomber, qu'est-ce que vous anticipez faire dans l'avenir pour les producteurs de grain qui bénéficient actuellement de ces assurances?

La présidente suppléante (Mme Maheu): À l'ordre! Malheureusement, la période des questions et commentaires est maintenant expirée. La Chambre est-elle d'accord pour que le ministre donne une courte réponse?

Des voix: D'accord.

[Traduction]

M. Goodale: C'est avec plaisir que je vais répondre brièvement à la question. Je suis persuadé que nous aurons l'occasion de revenir plus longuement sur les questions soulevées par le député. Le député a abordé quelques questions vitales pour l'avenir de l'agriculture au Canada.

J'ai dit au cours de mon intervention que nous reverrions de fond en comble tous les programmes de sécurité prévus pour les agriculteurs dans l'espoir d'évoluer vers une conception plus globale de la sécurité du revenu de ces producteurs, ce qui présenterait de nombreux avantages sur le plan intérieur, mais aurait aussi le grand avantage d'avoir une influence à peu près nulle sur la production et le marché. Nous risquerions donc moins de contrevenir au nouveau texte du GATT. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous nous intéressons vivement à toute cette notion de sécurité du revenu des agriculteurs, qui fait intervenir beaucoup de programmes de soutien dont le député a parlé, notamment l'assurance-récolte.

Toute la question est à l'étude. Nous tiendrons une conférence en février pour entamer cet examen. Je crois que, en collaboration avec les provinces, les agriculteurs et les organismes qui les représentent, nous pourrons, d'ici la fin de 1994, nous faire une idée beaucoup plus nette des moyens à prendre pour adapter nos programmes afin qu'ils remplissent correctement leur rôle auprès des agriculteurs canadiens.

(1045)

À propos de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, il faudrait que ma réponse soit longue, mais je puis garantir au député que, selon toute probabilité, le GATT aura des effets quelconques sur cette loi. C'est une question que nous devrons certainement aborder à la Chambre à de nombreuses reprises, et je consulterai, comme je dois le faire, avant d'apporter quelque modification que ce soit.

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest): Madame la Présidente, comme vous le savez, c'est la première fois que j'ai l'occasion de prendre vraiment la parole à la Chambre. Ce sont sûrement des mots que vous avez entendus à profusion, mais vous savez que les deux tiers d'entre nous sont nouveaux et que nombre d'entre nous qui étaient déjà députés assument maintenant de nouvelles fonctions. C'est aussi votre cas et je vous félicite de votre nomination à votre poste.

En assumant ces nouvelles fonctions, au début de notre carrière, nous avons l'occasion d'envisager les problèmes du pays à plus long terme que ne l'ont peut-être fait les députés par le passé.

Je connais beaucoup d'électeurs de ma circonscription qui ont réussi dans leurs entreprises et dans leur vie familiale en pensant à long terme. Ils ont maintenant posé un geste courageux en choisissant un membre d'un nouveau parti politique pour les représenter pour les quatre ou cinq prochaines années au Parlement.

Je dois dire que c'est un grand honneur pour moi d'avoir reçu leur appui. C'est un insigne honneur, et j'espère que je répondrai à leurs attentes. Nous savons fort bien ce qui arrive quand les députés oublient qui les a élus. Le premier ministre y a fait allusion hier, et j'espère que le Parlement ni moi ne laisserons pas tomber la population canadienne comme le Parlement précédent l'a fait à mon avis.

Pour ma part, j'ai été élu dans une circonscription urbaine, une circonscription de 100 000 habitants, située en totalité dans la ville de Calgary, dans sa banlieue ouest plus précisément. Elle comprend une importante base militaire et deux établissements postsecondaires.

Malgré cela, c'est le secteur privé qui domine dans ma circonscription et ma ville. Nous n'avons pas de grands services fédéraux ou provinciaux. En fait, Calgary est l'une des grandes villes canadiennes à ne pas en avoir.

Évidemment, l'Alberta vit depuis dix ans largement au rythme des fluctuations de son industrie pétrolière. Il n'empêche que l'industrie de la ville s'est diversifiée de l'agriculture à l'énergie, puis aux services. Cette diversification reflète l'esprit d'entreprise de l'Ouest, de l'Alberta et, plus particulièrement, de Calgary.

Aux yeux de la plupart des Albertains, et c'est aussi ma conviction personnelle, si la province se trouve dans une situation favorable, ce n'est pas tant grâce à l'aide du gouvernement qu'à l'absence de l'intervention du gouvernement, en particulier du gouvernement fédéral.

Je venais de m'installer en Alberta quand un gouvernement lointain a cru bon d'imposer des politiques qui ont mis fin à une période de prospérité m'ayant justement amené à y emporter mes pénates. Je fais allusion, bien sûr, au Programme énergétique national. Pas un seul Canadien ne saurait vivre une expérience semblable sans que sa vision du gouvernement et du pays en soit profondément marquée. En dépit de cette vision et en dépit du fardeau que le gouvernement fédéral a souvent imposé aux Albertains, ceux-ci n'ont jamais renoncé à leur patriotisme ou à leur optimisme face à l'avenir.

Ce que le gouvernement fédéral offre aujourd'hui, ce ne sont pas des espoirs, mais plutôt des obstacles à la relance économique. Les plus criants de ces obstacles sont la dette nationale et les déficits qui s'ajoutent à ceux que nous connaissons actuellement et que nous avons connus également ces dernières années. Je ne vais pas refaire les statistiques. Étant moi-même économiste, je sais que les chiffres doivent être manipulés avec soin. Je vais plutôt me concentrer sur la signification de ces chiffres.


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Pendant la campagne électorale, mes collègues et moi, du Parti réformiste, avons soutenu vigoureusement qu'il fallait d'abord saisir le lien entre une mauvaise gestion des finances, d'une part, et la récession économique et le ralentissement des affaires, d'autre part. Nous nous opposions à l'argument selon lequel la création d'emplois devait avoir la préséance sur le redressement de nos finances. Certes, nous ne sommes pas contre la création d'emplois, mais nous croyons qu'il ne s'agit pas de deux problèmes diamétralement opposés. Ils constituent un seul et même objectif.

(1050)

À l'instar des sociétés et des ménages, les pays qui gèrent mal leurs finances ne créent pas d'emplois. Bien au contraire, ils les suppriment. Les ménages, les entreprises, les familles et les gouvernements qui gèrent mal leurs affaires ne réalisent pas de rêves. Ceux qui gèrent mal leurs affaires voient leurs rêves s'évanouir.

Bien des gens de ma génération, de jeunes professionnels- l'assise de l'avenir du pays, dirais-je-ont quitté le Canada, sont sur le point de partir ou songent à le faire parce qu'ils craignent les augmentations d'impôts et de taxes, la baisse des services que cette mauvaise gestion a entraînée et qui risque de s'intensifier encore.

Laissons de côté ce que dit le guide de la politique du Parti réformiste et voyons ce que dit le gouvernement. Voici, à l'intention des députés qui ne l'auraient pas lu, le document qui s'intitule «Les défis économiques du Canada». Il renferme un très bon résumé de la situation de notre économie et de nos finances. Il expose, bien mieux que je ne pourrais le faire, tous les chiffres concernant le déficit et la dette. On y insiste sur les conséquences qu'ils ont sur notre économie, c'est-à-dire qu'ils absorbent notre épargne intérieure, augmentent notre endettement vis-à-vis de l'étranger, aggravent davantage la situation de notre compte courant, réduisent notre revenu national et notre croissance potentielle, amenuisent notre flexibilité financière, font peser une menace sur nos programmes sociaux, intensifient notre fardeau fiscal, relèvent les coûts d'intérêt réels, atténuent notre compétitivité et quoi encore. Tout est là.

Or, il ne s'agit pas de problèmes de courte durée. Ils ne sont pas attribuables à la récession. Ce n'est pas un bref regain de croissance ou d'activité qui va les résoudre. Le chapitre est bourré de statistiques.

Alors, pourquoi le même gouvernement qui a publié ce livre prononce-t-il aussi le discours du Trône cette semaine et porte-t-il plutôt son attention sur les priorités de dépenses, notamment sur le programme d'infrastructures, dont on a fait beaucoup de battage, un engagement de six milliards de dollars, un montant de deux milliards de dollars qu'on demande au Parlement pour donner un coup de fouet à l'économie canadienne, comme s'il était possible de donner un coup de fouet à une économie?

Si vous lisez les notes d'information concernant ce programme, vous remarquerez qu'il comporte au moins quatre objectifs et neuf critères connexes. En fait, il comporte beaucoup d'objectifs, mais pas de priorités claires. Aucun de ces objectifs n'est nouveau pour ce qui est des dépenses de programmes que les Parlements précédents ont adoptées antérieurement. Nous sommes donc portés à nous demander pourquoi le gouvernement croit que deux milliards de dollars supplémentaires donneront un coup de fouet à l'économie, alors que les premières dépenses de 160 milliards n'ont pas réussi à le faire.

Soyons clairs au sujet de l'importance des chiffres en question. Dans le cas de l'Alberta, il s'agit d'injecter environ 88 millions de dollars dans une économie de 70 milliards, alors que les investissements annuels dans l'infrastructure s'élèvent à au moins un milliard de dollars. Ce ne sont guère là des montants qui donneront un coup de fouet à l'économie. Voilà pourtant à quoi ils se résument dans ce programme.

Je ne dis pas que le programme d'infrastructure ne constitue pas une priorité, et même plus haute que par le passé. Je dis simplement qu'il ne répondra pas à l'objectif qu'a énoncé le gouvernement et aux attentes suscitées chez les consommateurs, les contribuables et les investisseurs. Il s'agit là d'une vision à court terme qui aura des conséquences à long terme sur les emplois et l'activité économique, et l'expérience nous l'a déjà prouvé.

Je demanderais aux députés, notamment aux ministériels, de réfléchir sérieusement à cette question avant de voter sur notre sous-amendement et sur le programme législatif qui découlera du discours du Trône. La population tiendra les députés d'en face responsables de la performance de l'économie canadienne au cours des quatre prochaines années.

Il est possible que le programme d'infrastructure procure certains avantages et une certaine visibilité à court terme, mais à long terme, aux prochaines élections-nous considérons au moins cela comme le long terme-le programme d'infrastructure sera terminé depuis longtemps et nous serons obligés d'en payer la facture.

À mon avis, le gouvernement devrait réexaminer ces priorités jusqu'à ce qu'il ait trouvé un moyen de financer ces projets de façon crédible et de les inclure dans le plafond de dépenses de 153 milliards de dollars.

Je demanderais aux ministériels d'examiner sérieusement la possibilité de voter pour le sous-amendement que nous proposons au sujet de cet aspect de la discipline financière et de l'insérer dans le discours du Trône. J'estime que nous serons alors prêts à établir un programme gouvernemental plus efficace, ce qui ne sera pas seulement à notre avantage, puisque cela profitera aussi au gouvernement qui voudra être réélu dans quatre ans.

(1055)

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie): Madame la Présidente, je voudrais tout d'abord féliciter le député de Calgary-Ouest pour sa première intervention à la Chambre des communes. Je suis sûr que ces quatre ou cinq prochaines années seront fort constructives.

Je voudrais poser ma question en allant droit au but, car je connais le député de réputation et je sais qu'il s'intéresse beaucoup aux petites et moyennes entreprises au Canada, notamment dans sa province et dans sa collectivité. J'ai noté qu'il ne s'était


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guère étendu dans son introduction sur les problèmes d'accès aux capitaux que connaissent actuellement les petites entreprises.

Pendant la campagne électorale, le premier ministre a dit à plusieurs reprises-il l'a mentionné dans le livre rouge et l'a redit dans le discours du Trône-que les petites et moyennes entreprises seraient le moteur qui permettrait de redonner du travail aux Canadiens. C'est dans les entreprises que nous mettons tout notre espoir pour redonner du travail aux Canadiens. Or, nous savons tous que les banques ne sont pas vraiment prêtes à coopérer avec ce secteur.

Le député pourrait-il expliquer à la Chambre si le Parti réformiste partage notre opinion, à savoir que les institutions financières de notre pays doivent vraiment s'attaquer à la relance de l'économie? Le député pourrait-il dire à la Chambre si le Parti réformiste joindra ses efforts à ceux de notre parti pour faire en sorte que les banques fassent ce qu'elles sont censées faire, c'est-à-dire venir en aide aux petites entreprises?

M. Harper (Calgary-Ouest): Madame la Présidente, je remercie le député de ses félicitations ainsi que de sa question. Je connais le député depuis un certain temps et j'ai toujours plaisir à travailler avec lui dans cette enceinte.

Je n'ai malheureusement pas assez de temps pour répondre à tous les points qu'il a soulevés, ce que je ferais avec bonheur si jamais les règles de la Chambre étaient modifiées et me permettaient d'avoir la parole plus longtemps.

Le député a parlé des petites et moyennes entreprises, ainsi que des capitaux mis à leur disposition. Mes partisans, en particulier les membres de mon association, travaillent pour la plupart dans des petites et moyennes entreprises. S'ils ont voté pour notre parti, c'est parce qu'ils avaient les mêmes préoccupations que nous.

Je tiens à souligner au gouvernement que le secteur bancaire pose effectivement des problèmes en ce qui concerne l'accès aux capitaux. Cependant, je pense qu'avant même d'essayer de diriger les banques, les petites et moyennes entreprises et autres types d'institutions, le gouvernement devrait d'abord apprendre à se diriger de façon à permettre aux petites et moyennes entreprises d'avoir accès à des capitaux.

Selon les prévisions du ministre des Finances, au cours du présent exercice, nous allons emprunter jusqu'à 45 milliards de dollars sur les marchés financiers. Ces fonds seraient en partie, voire en grande partie, mis à la disposition des petites et moyennes entreprises si le gouvernement mettait en place un programme crédible pour réduire le déficit, comme celui que nous proposons dans notre sous-amendement. Faute de quoi, il est, à mon avis, ridicule de vouloir modifier les règles du système bancaire quand les capitaux sont en fait immobilisés par le gouvernement du Canada qui engloutit littéralement les épargnes intérieures. Tout cela figure dans le livre que le gouvernement a présenté.

Pour régler le problème de l'accès aux capitaux pour les petites et moyennes entreprises, nous devrions avant tout, comme le proposent les habitants de ma circonscription, libérer ces fonds en réduisant le déficit et seulement ensuite nous attaquer aux problèmes posés par les autres arrangements institutionnels.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Le temps de parole du député est écoulé.

M. Mills (Broadview-Greenwood): Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. La période des questions et commentaires n'est-elle pas de dix minutes?

La présidente suppléante (Mme Maheu): Non, elle est de cinq minutes, lorsque le discours est de dix minutes. Dans le cas présent, les députés partagent le temps d'une intervention.

M. Riis: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. J'ai écouté attentivement les observations très judicieuses de mon collègue. Vu l'importance et la nature du régime fiscal et du financement de la petite entreprise, la Chambre ne permettrait-elle pas deux ou trois autres questions? Pourrions-nous avoir le consentement unanime pour pouvoir poser quelques questions de plus au député?

(1100)

La présidente suppléante (Mme Maheu): La Chambre est-elle d'accord pour autoriser quelques questions supplémentaires?

[Français]

M. Robichaud: Madame la Présidente, je croyais qu'il y avait eu entente et que l'on avait avisé la Présidence que nous allions partager le temps des discours, soit dix minutes et une période de questions de cinq minutes. J'aimerais que l'on s'en tienne à cette formule afin de donner l'opportunité à plus de gens de pouvoir s'exprimer dans ce débat. Autrement, cela pourrait prolonger de beaucoup le temps alloué à chaque député. J'aimerais qu'on permette à autant de députés que possible de s'exprimer.

[Traduction]

La présidente suppléante (Mme Maheu): Il n'y a malheureusement pas consentement unanime.

M. Riis: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je comprends mon collègue. Si l'idée est de permettre à autant de députés que possible de prendre la parole dans cet important débat, nous pourrions fort bien prolonger les heures.

Ce que je voulais faire ressortir, c'est que le dernier intervenant est un représentant important du Parti réformiste et une personne à qui il serait bon de poser des questions.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Il y aura d'autres occasions de poser des questions. Pour l'instant, je ne peux en autoriser que si le prochain intervenant est prêt à céder de son temps.

M. John Williams (St-Albert): Madame la Présidente, permettez-moi d'abord de vous féliciter pour votre élection à la présidence de cette Chambre.


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Bien que vous ayez dû retenir votre souffle pendant que vos collègues réfléchissaient avant de vous attribuer le fauteuil, je ne doute aucunement de votre capacité à diriger nos travaux et à imposer le décorum et le respect.

J'aimerais aussi féliciter le premier ministre et ses collègues. Qui aurait pu prédire que le livre rouge, si faible en contenu malgré l'abondance de belles phrases, aurait pu donner lieu à une victoire si fracassante?

Je voudrais aussi remercier les électeurs de la circonscription de St-Albert pour la confiance qu'ils m'ont accordée. Durant la campagne électorale, j'ai parlé de prudence budgétaire et de bonne gestion des fonds publics et ce sont eux qui m'ont confié le mandat de transmettre ce message au gouvernement.

Les députés peuvent être assurés que je défendrai sans relâche le principe de la responsabilité financière durant mon mandat à la Chambre.

Permettez-moi de féliciter le député de Calgary-Sud-Ouest. De tous les défis qu'il aurait pu choisir, il a opté pour une circonscription considérée comme la plus difficile à conquérir et malgré cela, il a triomphé magistralement. Je serai heureux de travailler en collaboration avec lui et avec tous mes collègues du Parti réformiste pour expliquer à tous les Canadiens notre façon de voir le nouveau Canada. D'ailleurs, le député de Calgary-Sud-Ouest l'a fort bien présentée en disant que notre pays devrait être une fédération de provinces démocratique et équilibrée, qui se distingue par la protection de son magnifique environnement, la solidité de son économie, l'acceptation de ses responsabilités sociales et la reconnaissance de l'égalité et de la spécificité de chacune de ses provinces et de chacun de ses habitants.

Permettez-moi de saluer aussi le député de Lac-Saint-Jean et ses collègues. Leur programme diffère du nôtre, mais j'espère qu'avant la fin de la présente législature, les questions qui à l'heure actuelle divisent notre pays nous rapprocheront éventuellement dans un effort commun en vue de la réalisation d'un nouveau Canada.

Son Excellence le Gouverneur général a mentionné que son gouvernement voulait créer des emplois pour les centaines de milliers de Canadiens qui perdent espoir et confiance et ne croient plus au miracle économique que l'on a connu au Canada jusqu'à tout récemment. Nous avons été témoins de piètres tentatives visant le raffermissement de notre économie. La philosophie selon laquelle on parviendrait à la prospérité à coups d'emprunts et de dépenses, on atteindrait ce faux dieu de la prospérité sans efforts, a dirigé le pays vers ce long tunnel menant à la ruine économique. Nous connaissons maintenant un taux de chômage supérieur à 10 p. 100, une augmentation fulgurante du nombre d'assistés sociaux, une dépendance des régions à l'égard de l'aide gouvernementale et, à toutes fins pratiques, des chefs de famille qui ne peuvent plus subvenir aux besoins des leurs. Cette histoire se répète un million de fois dans tous les coins du Canada. Les Canadiens réclament du leadership, des perspectives d'avenir, de l'espoir, mais surtout des emplois et des possibilités de carrière. Que leur reste-t-il quand leur espoir diminue de jour en jour? Il n'existe pas de programme qui leur donne une chance de réaliser leurs aspirations.

(1105)

Plus de 30 p. 100 de chaque dollar perçu en impôts par notre gouvernement est actuellement versé aux banquiers et aux investisseurs, à titre d'intérêt sur l'argent que nous avons emprunté et dépensé. Quand la dette s'accroît à une vitesse folle, le coût du service de la dette fait de même. De la façon dont vont les choses sur le plan économique, les Canadiens ne peuvent que s'attendre à un avenir marqué par les hausses d'impôts et la diminution des services, alors qu'ils travailleront au profit des prêteurs et des investisseurs.

Le vérificateur général dit dans le rapport qu'il a déposé hier à la Chambre qu'il ne suffit pas de regarder d'où nous venons. Il faut aussi regarder où nous allons. Et nous allons droit au désastre économique. Il dit aussi que nous devrons faire des choix difficiles.

Le gouvernement doit choisir la voie d'un budget équilibré. C'est cela, le choix difficile qu'il lui faut faire. Mais cette voie ne passe pas par les méandres de nouveaux programmes sociaux qui détruisent le désir de travailler des Canadiens et ce ne sont pas non plus les solutions faciles comme le programme d'infrastructure de six milliards de dollars qui nous mèneront où nous voulons aller. Pour équilibrer notre budget, il faut que nous, en tant que Canadiens, acceptions les conséquences des folies qu'ont faites les gouvernements précédents. Si le choix est difficile à faire, c'est que seulement 70 p. 100 de l'argent des impôts peut être rendu aux Canadiens sous forme de services. Si nous n'acceptons pas cette conséquence aujourd'hui, demain il n'en restera plus que 60 p. 100, ou même moins, qu'on pourra investir dans les services aux Canadiens.

Le choix difficile à faire, c'est de décider si nous nous attaquons au problème maintenant ou si nous attendons qu'il soit trop tard.

Au cours de la campagne électorale, nous, les réformistes, avons conçu un programme complet pour équilibrer le budget. Deux millions et demi de Canadiens ont voté en faveur de ce programme. Les Canadiens sont prêts à faire ce choix difficile. Pourtant, le discours du Trône nous a donné peu d'indices que le gouvernement avait même entendu le message. Combien de temps faudra-t-il avant que le gouvernement fasse ce qu'il doit faire et exerce ce choix?

Nous voulons des emplois dans notre pays. On a depuis longtemps détruit le mythe que le financement du déficit créait des emplois. Si cette théorie était valable, il ne resterait plus un seul chômeur au Canada, à l'heure qu'il est.

Donc, où allons-nous? Je demande au gouvernement de s'engager dès maintenant à équilibrer le budget d'ici la fin de la présente législature. Le milieu des affaires attend un signe que la spirale ascendante des dépenses du gouvernement a atteint son sommet. Ce signe nous fera savoir que l'ère des augmentations d'impôts est terminée et que l'avenir nous réserve autre chose que des diminutions de services. Si les gens d'affaires sont convaincus que le gouvernement a le courage de faire ces choix difficiles, alors ils se remettront à investir. C'est là le secret de la


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véritable création d'emplois. Le secteur privé prendra la relève du secteur public.

Le Canada a été façonné par des gens désireux de s'assurer un avenir, pour eux et pour leurs enfants. Si je suis venu m'installer dans ce pays, c'est que je voulais faire partie d'une nation jeune et pleine d'allant. Mais, sous mes yeux, le socialisme a lentement étouffé sa vitalité. Notre économie est malade; pour nos enfants, nous devons lui redonner vigueur. La libre entreprise, dont nous tenons notre prospérité, fait partie de notre patrimoine. Nous lui devons les innovations et les produits grâce auxquels notre niveau de vie n'a cessé de s'améliorer. Notre richesse ne vient pas des programmes sociaux mais de notre dur labeur et de la possibilité de garder nos bénéfices. C'est comme ça qu'on a construit ce pays.

En faisant des choix difficiles, nous assurerons notre avenir. Si nous parvenons à équilibrer le budget, la fiscalité sera moins lourde, de nouveaux emplois seront créés, l'horizon sera illimité et nous aurons de quoi instruire nos enfants, prendre soin des malades, des vieillards et des pauvres tout en soutenant la concurrence sur le marché international. Ce sont les échanges commerciaux qui créent des emplois, pas les programmes d'infrastructures.

En résumé, nous devons repartir à zéro et remettre ce pays sur le bon chemin. J'attends de mes honorables collègues d'en face qu'ils fassent preuve de leadership et de vision. Ces choix difficiles, il faut les faire. L'histoire a toujours été généreuse pour les dirigeants qui ont su aller au-delà d'eux-mêmes et conduire leur pays à travers les épreuves vers la lumière, dans notre cas, la prospérité libre de dettes.

(1110)

Je lance le défi suivant au gouvernement: est-il prêt à s'engager à équilibrer son budget d'ici la fin de cette législature? Le premier pas dans cette direction est d'approuver le sous-amendement du député de Calgary-Sud-Ouest visant à limiter le total des dépenses fédérales à 153 milliards de dollars. J'invite tous les députés à le faire.

M. Nelson Riis (Kamloops): Madame la Présidente, je tiens à féliciter mon collègue pour son premier discours à la Chambre. Un des principaux éléments dont il a traité est la nécessité de maîtriser le déficit.

Le manque à gagner du gouvernement constitue évidemment une des principales causes de ce déficit. Nous devrions être plus nombreux à prendre cette question très au sérieux car de nombreux Canadiens achètent maintenant des cigarettes et des spiritueux en contrebande.

Le rapport du vérificateur général nous a révélé hier que des dizaines de milliers d'entreprises percevraient la TPS sans la remettre au gouvernement fédéral. Cela témoigne évidemment d'une perte de confiance dans notre système fiscal, sans parler de l'économie parallèle à laquelle tous les Canadiens participent probablement d'une façon ou d'une autre, que ce soit sous forme de transactions en espèces ou par troc dans le but d'éviter l'impôt.

Je voudrais demander à mon collègue s'il croit lui aussi qu'une des principales mesures à prendre pour réduire le déficit consiste à supprimer certaines des exemptions les plus injustes du système fiscal canadien. Cette mesure permettrait de rétablir la confiance du public qui, jugeant le système plus juste et plus équitable, serait de nouveau disposé à contribuer au financement des dépenses de l'État.

M. Williams: Madame la Présidente, en réponse à la question du député de Kamloops, je rappelle que j'ai mentionné dans mon discours que l'économie canadienne était faible. Les impôts sont trop élevés et c'est la raison pour laquelle les entreprises ont de la difficulté à payer les taxes dont le gouvernement a besoin pour se maintenir à flot. Malgré tout, le gouvernement devra aller chercher 40 milliards de dollars supplémentaires pour payer ses comptes.

Si nous voulons une économie dynamique et forte, il nous faut faire en sorte que les investissements soient plus importants que les dépenses du gouvernement. Nous devons également voir à ce que les impôts diminuent et se situent à un niveau acceptable pour que chacun puisse payer sa juste part.

Évidemment, l'égalité nous apparaît toujours comme une nécessité, mais je crois que le gouvernement doit privilégier un budget équilibré et, pour y parvenir, percevoir les impôts qui sont dus. Par ailleurs, nous devons également parvenir à réduire les impôts afin d'inciter les Canadiens à mieux contribuer au financement des dépenses publiques du gouvernement.

[Français]

M. André Caron (Jonquière): Madame la Présidente, j'ai écouté avec attention le message de l'honorable député. J'ai été par ailleurs surpris de la position qu'il a développée par rapport aux programmes sociaux. J'ai cru comprendre qu'il a précisé que les programmes sociaux détruisent l'initiative des Canadiens et j'ai cru entendre dans son discours un plaidoyer pour l'abolition des programmes sociaux.

Je suis désolé de constater une telle prise de position parce que le message que mes électeurs m'ont transmis pendant la campagne électorale, c'est que le Canada et le Québec se sont toujours préoccupés des plus faibles, des plus démunis. Mes électeurs m'ont clairement dit qu'ils ne croient pas que les gens qui s'enrichissent en faisant des profits par le biais de l'entreprise privée vont avoir la générosité de s'occuper des plus faibles, des malades et des pauvres.

(1115)

Alors, voici la question que je pose à l'honorable député. J'espère qu'il aura le temps d'y répondre; je serai bref. Est-ce qu'il connaît beaucoup d'exemples où des personnes qui se sont enrichies, par leur travail, leur entreprise, tout ça, ont réussi à monter des programmes ou donner des services de santé, des services sociaux, des services aux chômeurs, des services aux démunis, de l'ampleur de ceux qu'on a actuellement au Canada?

[Traduction]

M. Williams: Madame la Présidente, en guise de réponse au député, je rappelle que nous devons tous admettre que l'évolution même du Canada n'aurait pu se faire sans un esprit d'initiative. Nous sommes parfaitement conscients de nos obligations sociales envers les Canadiens âgés, malades ou mal pris et incapables de gagner leur vie. À mon avis, toute société adulte doit assumer ses responsabilités à cet égard et je serais bien le dernier à proposer que nous les évitions.


82

Or, nous sommes aussi responsables de ceux qui sont prêts à assumer la direction de la croissance économique du Canada. Nous devons admettre que la prospérité résulte de leur leadership. Comme je l'ai dit, nous ne voulons pas que le gouvernement anéantisse les possibilités et les initiatives qui permettront à des Canadiens de faire avancer notre pays pour continuer à assurer sa croissance et à créer les emplois dont nous avons tant besoin.

M. John Maloney (Erie): Madame la Présidente, je veux tout d'abord dire à la Chambre à quel point je suis honoré de représenter ici la circonscription d'Erie. Je tiens à remercier mes électeurs pour la confiance qu'ils m'ont accordée. Sans eux, je ne serais pas ici. Je suis conscient de mes responsabilités à leur égard et, en fait, à l'égard de tous les Canadiens, et j'espère être à la hauteur de la tâche. Je n'oublierai pas d'où je viens ni à qui je dois d'être ici. Je vais faire valoir la cause de mes commettants au gouvernement suprême de notre pays. Je ne peux promettre la perfection, mais je saurai être accessible, honnête et intègre.

Sur une note plus personnelle, je veux aussi remercier mon épouse, Sherrie, et mes enfants, Megan, Patrick, Alanna, Andrew et Sarah, de m'avoir permis de solliciter cet honneur. Je veillerai à ce que leur sacrifice personnel soit le moins grand possible.

Je vous félicite, madame la Présidente, pour votre nomination à un poste prestigieux dont vous êtes des plus dignes.

Je profite aussi de l'occasion qui m'est ici offerte pour féliciter le député de Welland-St.Catharines-Thorold pour son élection à la présidence de cette trente-cinquième législature, poste offrant le plus de prestige et le plus de responsabilités à la Chambre. J'ai bénéficié de ses sages conseils au fil des années et je regrette que l'impartialité à laquelle son poste l'oblige me prive désormais de ses lumières.

Je tiens en outre à féliciter le député qui a proposé l'Adresse en réponse au discours du Trône, le député de Bruce-Grey, et la députée qui a appuyé la proposition, la député de Madawaska-Victoria, pour leurs allocutions respectives.

C'est effectivement un grand honneur pour moi de siéger ici, en particulier sous la direction d'un chef aussi honorable que le premier ministre. C'est avec plaisir qu'en ce premier discours à la Chambre je vais présenter la circonscription d'Érie à mes collègues députés.

Comme je suis né et que j'ai été élevé dans la circonscription d'Erie, il semblait tout naturel que j'y retourne à la fin de mes études. Pendant des années, j'ai siégé à un grand nombre de comités et de commissions du coin. Le fait d'avoir fréquenté les gens de la région et d'avoir été mêlé aux problèmes locaux m'a incité à prendre la décision de me lancer en politique fédérale. Je crois qu'Erie mérite la meilleure représentation possible à Ottawa et j'espère me montrer digne du poste de représentant d'Erie.

Comme on le devinera sans doute, la circonscription d'Erie s'étend le long de la rive nord du lac Erie, un des Grands lacs parmi les plus beaux, de la petite ville de Fort Erie, à l'est, à la municipalité régionale de Niagara, à l'ouest. C'est une circonscription à la fois rurale et urbaine qui englobe la ville de Port Colborne, le sud de la ville de Welland, ainsi que les localités de Fort Erie, Pelham, West Lincoln et le canton de Wainfleet.

Ces coordonnées purement géographiques ne disent rien de la beauté de cette circonscription. Celle-ci a le bonheur de posséder nombre des richesses caractéristiques du Canada. À mon humble avis, nulle autre région du Canada ne bénéficie d'une situation aussi enviable en ce qui concerne l'histoire, l'agriculture, le climat, le potentiel économique et les traditions.

Beaucoup de batailles historiques de la Guerre de 1812 ont été livrées sur le sol d'Erie. Erie a également vu des gens comme William Lyon MacKenzie pendant la rébellion du Haut-Canada en 1837 et les raids des Féniens dans les années 1860.

(1120)

Les premiers colons installés dans Erie ont été suivis par les United Empire Loyalists, un groupe de partisans d'une cause qui devait plus tard donner naissance au Dominion du Canada. Au fil des ans, notre circonscription a également profité des riches immigrants venus des pays européens et, plus récemment, des pays du Pacifique. Des gens attirés par le luxe et les possibilités qu'Erie pouvait offrir sont aussi venus d'autres régions du Canada, de l'Ouest, des Maritimes et de la belle province, Québec. La circonscription reflète l'héritage multiculturel qui fait la force de notre pays. J'espère réussir à représenter l'esprit indépendant, enthousiaste et industrieux des électeurs de ma circonscription en travaillant pour eux et en me dévouant pour ma collectivité et mon pays.

Tout à fait à l'est de la circonscription d'Erie, se trouve la rivière Niagara qui sépare le Canada des États-Unis. Cette proximité crée toutes sortes de possibilités commerciales et industrielles pour ma circonscription et l'aidera à stimuler et à diversifier son économie pour entrer dans le XXIe siècle.

Mis à part l'importance historique, les possibilités économiques et la beauté de ma circonscription, son climat modéré et son sol fertile l'ont rendu célèbre pour ses produits agricoles frais, ses vergers et ses vignobles. La région du Niagara est l'une des meilleures régions pour la culture de la vigne dans le monde et constitue l'épine dorsale de l'industrie viticole au Canada. La volaille et les produits laitiers constituent un pilier de l'économie d'Erie et de toute notre nation.

La température clémente et le charme d'Erie attirent beaucoup de touristes qui viennent profiter de l'eau et des plages du lac Érié, flâner dans nos musées et nos sites historiques, s'émerveiller devant les navires qui empruntent le canal Welland, une partie intégrante de la voie maritime du Saint-Laurent, et à échanger quelques paroles avec notre population amicale.

En raison du caractère rural de ma circonscription, beaucoup d'habitants ont adopté un mode de vie traditionnel. Ce mode de vie fait partie de leur patrimoine et doit être protégé. Protéger ce patrimoine est un objectif de mon premier mandat de député. J'appuie le maintien des services ferroviaires et postaux dans ma circonscription. Je suis heureux d'être membre d'un parti qui encourage le mode de vie des habitants des régions rurales.


83

Je m'en voudrais de ne pas féliciter les Canadiens qui ont élu un gouvernement libéral majoritaire. Ils savaient que le Parti libéral était un parti qui possédait un programme, ce que nous avons pu voir dans le discours du Trône de Son Excellence. Il est évident que le gouvernement veut avant tout redonner des emplois aux Canadiens en chômage, leur redonner leur fierté. La circonscription d'Erie est aux prises avec un taux de chômage d'environ 15 p. 100, ce qui est totalement inacceptable.

Le discours du Trône énumère plusieurs initiatives fondamentales pour cette nouvelle assemblée, une nouvelle assemblée qui, j'ajouterai, est en mesure de changer beaucoup de choses pour les Canadiens. Ces grandes propositions, qui ont comme thèmes l'intégrité, l'économie et la société, auront des répercussions dans chacune des localités du pays, quelle que soit l'affiliation politique du député qui la représente.

L'intégrité au sein du gouvernement est une question que nous devons régler avant de commencer à discuter de nos importantes réformes. La façon dont ces débats se dérouleront dépendra de la mesure dans laquelle le Parlement respecte les règles de conduite et d'éthique établies. Nous n'arriverons à rien si nous ne permettons pas aux députés d'exprimer leurs opinions et leurs préoccupations.

Dans son allocution à la Chambre lundi, le Président a dit:

Nous n'avons peut-être jamais été aussi impopulaires auprès des Canadiens.
Avant de pouvoir faire quoi que ce soit de valable à la Chambre, nous devons d'abord gagner la confiance des Canadiens.

Comme il l'a promis, notre gouvernement accorde la plus haute importance à l'intégrité et à l'honnêteté. Nous avons proposé de réduire les services et les allocations dont bénéficient les députés, de réduire le personnel politique, d'éliminer les avantages indirects, de réformer le régime de pension des députés, de nommer un conseiller en matière d'éthique, de présenter une mesure législative visant à faire en sorte que le lobbying se fasse au grand jour et de prendre d'autres mesures de réforme pour donner aux députés de la Chambre des communes un plus grand rôle au sein du Parlement. Ce sont tous là des changements très intéressants et très nécessaires.

À titre de député nouvellement élu, j'apprends vite à quel point certaines des demandes de mes électeurs peuvent être complexes. Cependant, lorsque les circonstances échappent à notre volonté, je suggère que nous soyons francs avec nos électeurs.

Comme nous représentons tous des circonscriptions différentes, il est peu probable que nous soyons d'accord sur chacune des mesures proposées à la Chambre. Néanmoins, nous devons respecter les opinions des autres et accepter les décisions de la majorité.

Mardi, le gouvernement a annoncé son intention de créer une économie plus active. C'est le but que recherchent tous les Canadiens.

(1125)

Je le répète, la circonscription d'Erie est en faveur de la création d'emplois par l'entremise de programmes visant le renouvellement et l'expansion des infrastructures. Je suis heureux de pouvoir dire que j'ai déjà communiqué avec les maires de la circonscription d'Erie, relativement aux mesures que l'actuel gouvernement a déjà prises pour amorcer ce renouvellement au niveau municipal.

Je félicite le gouvernement d'avoir promptement lancé le programme d'infrastructure et conclu des accords à cet égard.

Le remplacement de la taxe sur les produits et services, communément appelée TPS, est aussi au nombre des changements annoncés hier. Il s'agit là d'une des taxes les plus horribles à avoir jamais été imposées, taxe dont les Canadiens réclament la suppression. Nous ne pouvons pas leur imposer une taxe qu'ils décrient avec autant de véhémence. Ils nous ont choisis pour communiquer et exprimer leurs opinions. Le gouvernement n'a pas à faire preuve d'une telle arrogance.

Les jeunes de notre pays sont notre plus grande richesse. Étant père de cinq enfants, je comprends parfaitement le désarroi de nos jeunes face à leur avenir. Je me réjouis donc de la création d'un Service Jeunesse et d'un programme national d'apprentissage qui aideront nos enfants et nos jeunes et qui créeront des emplois pour eux.

Je suis aussi particulièrement heureux des nombreuses mesures visant à renforcer le tissu social de notre pays et grâce auxquelles notre extraordinaire société canadienne continuera de faire l'envie du monde entier.

Tous les Canadiens accueilleront favorablement la loi sur l'évaluation environnementale, et les générations à venir bénéficieront des avantages qui en découleront. Comme les Grands Lacs ont des répercussions sur ma circonscription, j'espère qu'il y aura dans cette loi des dispositions nous permettant de poursuivre l'assainissement de nos eaux et d'interdire toute nouvelle pollution.

Même si j'exerce mes fonctions de député depuis peu, j'ai constaté que la criminalité, la justice et la sécurité personnelle préoccupent énormément les électeurs de ma circonscription et de nombreuses autres régions du Canada.

Mardi, le gouvernement a annoncé son intention d'adopter à l'intention de tous les Canadiens, et plus particulièrement des femmes et des enfants, des mesures visant à favoriser la sécurité publique. À mon avis, aucun Canadien, quel que soit son sexe, ne devrait craindre pour sa sécurité. Je sais toutefois que cette peur existe et qu'elle est très réelle pour bien des Canadiens. Je suis heureux de faire partie d'une équipe qui comprend l'importance d'examiner et de résoudre les problèmes de criminalité et de justice pénale.

Je me réjouis par ailleurs de l'annonce faite quant à la mise en oeuvre du droit inhérent des peuples autochtones à l'autonomie gouvernementale. La circonscription d'Erie comprend une forte proportion d'autochtones, et j'ai hâte de savoir quelles répercussions l'autonomie gouvernementale aura sur elle.


84

Je constate que, indépendamment de notre appartenance politique, les députés qui m'entourent et moi-même poursuivons le même objectif, celui de servir de notre mieux la population de notre circonscription. De nombreux députés ayant des intentions semblables sont passés ici avant nous. Je salue tous ceux qui sont venus ici afin de représenter les Canadiens. Comme chacun le sait, ce n'est pas une mince tâche.

Un homme d'une grande valeur a un jour pris la parole à la Chambre. Voici ce qu'il a dit dans son premier discours: «Je crois que le moment est venu d'agir. Nous avons une chance extraordinaire. Les Canadiens comptent sur nous. Ils nous font confiance. Pour l'amour du ciel, ne les décevons pas.» Cet homme, un précurseur du libre arbitre qui existe maintenant à la Chambre, c'est M. Tommy Douglas. Il avait une vision d'un nouveau Canada. J'espère que chacun d'entre nous en a une également.

L'inauguration de cette législature coïncide avec le début de la nouvelle année et c'est très bien, car c'est le moment où l'on prend des résolutions. Dans une lettre de Dignité rurale du Canada que j'ai reçue récemment, il y avait une citation tirée d'une publication des 4H. Voici la citation en question: «Que la compassion tempère notre raison afin que nos mains restent pures et qu'ainsi nous ne puissions souiller les choses qui nous sont précieuses, les êtres qui nous sont chers ainsi que le milieu où nous évoluerons durant l'année à venir.»

J'invite les députés à se souvenir de cette pensée aussi bien concrètement que sur le plan abstrait, lorsque, dans les mois et les années à venir, ils seront au service des Canadiens et qu'ils défendront le principe d'un Canada fort et uni. Ainsi, quand viendra le moment où nous quitterons cette Chambre pour une dernière fois, chacun d'entre nous pourra alors affirmer fièrement que sa présence ici a fait une différence.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Madame la Présidente, je suis très heureuse de voir qu'il y a chez nos amis d'en face des députés qui ont aussi la préoccupation de ce qui se passe dans leur circonscription et qui sont décidés à défendre les intérêts de leurs commettants.

Donc, ils pourront se joindre à notre groupe puisque nous sommes venus ici pour défendre les intérêts des Québécois et des Québécoises. Bienvenue, monsieur, dans notre club.

(1130)

Je voudrais également en profiter pour dire au député que dans nos régions à nous, il y a des problèmes graves et que nous entendons en parler et en reparler à plusieurs reprises. Entre autres, dans ma région, le gouvernement précédent a fermé Radio-Canada et depuis ce temps, la région ne peut plus se parler. Donc, à chaque occasion que j'aurai ici dans cette Chambre, je rappellerai l'indécence de ce gouvernement qui a fermé les régions. Maintenant, les régions ne peuvent plus se faire entendre auprès du gouvernement parce qu'elles ne peuvent plus communiquer. Je le ferai chaque fois que je prendrai la parole en cette Chambre jusqu'à ce que Radio-Canada et le nouveau gouvernement aient compris qu'il faut redonner aux régions le moyen de communiquer, d'abord entre elles, et ensuite avec l'ensemble des Canadiens d'une côte à l'autre.

M. Bernard Deshaies (Abitibi): Madame la Présidente, chers collègues de cette Chambre, je suis content de constater le grand intérêt du député pour son comté. Je représente le comté d'Abitibi, peut-être pas un aussi beau comté que celui du député, mais pour moi, il est le plus beau.

Le comté d'Abitibi, le plus grand au Canada peut-être après les Territoires du Nord-Ouest, renferme une population qui a su, au départ, au début du XXe siècle, développer la colonisation, soit défricher les terres et développer l'agriculture. Toutes ces personnes ont réussi, par leur travail, leurs efforts quotidiens, à former cette région, qui n'est pas aussi vieille que celle du député, mais dont je suis très fier.

Je voudrais également souligner que je suis agréablement surpris de voir ici des députés qui ont une famille nombreuse. J'ai sept enfants. Donc pour moi, la priorité du Canada et du Québec, c'est de voir à l'avenir de nos enfants.

Dans un comté comme l'Abitibi où le développement régional est très important, je voudrais souligner les difficultés que j'ai connues lors de ma campagne électorale, non pas d'affronter un adversaire, mais la difficulté de rencontrer les citoyens et d'écouter leurs doléances, doléances de gens qui désiraient se trouver un emploi, des gens qui vivaient de prestations sociales et qui désespéraient, à 50 ans, de se trouver un nouvel emploi.

J'aimerais qu'ici en cette Chambre, et aujourd'hui c'est un honneur car c'est ma première intervention, vous parler des difficultés de mon comté afin que les gens au pouvoir, le gouvernement libéral, démontrent la ferme intention d'être à l'écoute de tous ces comtés, ces comtés qui attendent une réussite. C'est vrai que de ce côté-ci de la Chambre, nous serons à l'écoute de vos lois. Si les projets de loi sont bons, il est certain que nous les appuierons. Tout comme les députés du Parti réformiste le disaient, nous ne ferons pas exprès pour dénoncer des lois qui seront bonnes. Au contraire, on va les appuyer.

Mais soyez certains que les gens de mon comté, qui m'ont élu pour les représenter ici en cette Chambre, veulent que le Canada s'améliore indépendamment du choix qu'ils auront à faire dans les années qui viennent.

Madame la Présidente, j'aimerais faire savoir au député d'Erie que les actions et les produits de ce pays s'échangent d'une province à l'autre. Dans le commerce familial où j'étais, nous achetions régulièrement, comme grossistes, des produits de votre région, soit les fruits ou les légumes. Je pense qu'on a à se voir vivre les uns et les autres.


85

Hier, par exemple, j'ai assisté à l'allocution du député de Renfrew-Nipissing-Pembroke, le doyen de cette Chambre, qui parlait de communication. J'espère que tout au long de cette session, les députés des deux côtés de cette Chambre sauront communiquer de plus en plus et échanger, de façon à mieux comprendre les intérêts de chacun.

Pour terminer, j'aimerais souligner mon intérêt pour cette Chambre et, dans les prochaines allocutions, apporter encore plus de substance à mes questions.

(1135)

[Traduction]

Mme Rose-Marie Ur (Lambton-Middlesex): Madame la Présidente, je tiens à féliciter le député d'Erie qui vient de faire son premier discours. Je suis fière moi aussi de dire que j'ai été élue pour représenter une des plus belles régions du sud-ouest de l'Ontario, la circonscription de Lambton-Middlesex à prédominance rurale.

Je suis d'accord avec la teneur de son intervention, et je souligne que nous travaillons tous ensemble à maintenir un soutien solide en faveur de l'agriculture et de la petite entreprise au Canada afin d'assurer la croissance pour le Canada et pour les Canadiens. Je félicite le député.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Madame la Présidente, c'est un honneur pour moi que cette occasion de réagir au discours du Trône. Les citoyens et citoyennes de la circonscription de Kamouraska-Rivière-du-Loup, qui se regroupent dans les municipalités régionales de comté de Kamouraska, Rivière-du-Loup et des Basques ainsi que dans la municipalité de Pohénégamook, m'ont accordé le mandat de porter au gouvernement fédéral la volonté québécoise d'obtenir un changement fondamental des relations entre le peuple du Québec et celui du Canada.

Depuis 1980, j'ai choisi de vivre dans l'est du Québec, résident de La Pocatière. Partout, j'ai senti que les besoins des populations en région sont peu compris. L'urgence d'agir ne semble pas encore faire consensus chez les membres du gouvernement, car le discours du Trône ne laisse voir aucune vision régionale du développement.

Au nom des populations rurales et urbaines laissées pour compte, permettez-moi d'exprimer ma plus profonde déception devant cet oubli.

L'insensibilité du gouvernement aux conditions particulières du développement, autant à Rivière-du-Loup qu'à Amos ou à Lotbinière, enlève tout espoir de voir le fédéral réagir rapidement. Cela souligne la nécessité, pour les régions du Québec, du rapatriement de tous les pouvoirs politiques et financiers pour s'assurer que des actions soient prises dès maintenant.

Non prévu dans la Constitution, le développement économique régional est une compétence dans laquelle le gouvernement fédéral s'est engouffré sans tenir compte de la volonté du gouvernement du Québec d'en assurer pleinement la responsabilité.

Les régions du Québec ont été, depuis plus de 30 ans, un laboratoire d'expériences malheureuses qui se sont butées fondamentalement à la non-fonctionnalité du système fédéral actuel.

Au début, l'intervention a été orientée vers la centralisation économique; rappelons-nous le rapport Higgins-Raynauld-Martin. Cette approche dévastatrice a été renforcée par la création du ministère de l'Expansion industrielle régionale, dont le processus décisionnel était dominé par des préoccupations sectorielles, sans égard aux caractéristiques propres des régions.

En 1987, même le Comité permanent de l'expansion industrielle régionale de la Chambre des communes, ici même, a reconnu que des programmes fédéraux ne répondaient pas aux besoins du milieu parce que les critères retenus étaient mal adaptés aux besoins des régions. Faute de participation des régions au processus, l'argent était accordé à des projets inutiles, tandis que des initiatives valables sur le plan local restaient sans suite. Un exemple de cela: on a construit dans ma circonscription un magnifique manège militaire de 7 millions de dollars. C'est intéressant, mais si on avait eu le contrôle dans la région sur le choix où dépenser ces 7 millions de dollars, je peux vous assurer qu'il y a bien du monde qui aurait trouvé d'autres projets beaucoup plus intéressants.

Le fédéral prétend avoir corrigé son tir par une nouvelle stratégie basée sur les ententes-cadres. La recette ne marche pas. Nos taux de chômage sont là pour le prouver. Les régions peuvent et doivent faire plus qu'approvisionner les marchés domestiques et étrangers en matières premières. L'emploi est lié au développement des industries de transformation qui mettent en valeur les ressources du milieu. C'est entre autres sur ces résultats que nous jugerons l'action du gouvernement dans la mise en place du GATT. La façon dont il a défendu le GATT nous laisse songeurs. Autrement, le gouvernement accentue davantage la dépendance des régions.

(1140)

Le gouvernement fédéral aurait intérêt à admettre que son intervention dans le domaine du développement régional n'est pas appropriée. La base économique s'effrite, le tissu social se désagrège, l'exode rural se poursuit et les jeunes sont les premiers à quitter leur région.

Le nombre de municipalités dont la population diminue s'est accru de façon alarmante depuis 25 ans, au point où il dépasse maintenant celui des localités en croissance démographique. Pourtant, les populations des régions se prennent en main. Le cri fut lancé par l'Union des producteurs agricole du Québec et les 25 groupes signataires de la déclaration des États généraux du monde rural tenus en 1991.

Permettez-moi de vous rappeler certains éléments primordiaux de cette déclaration. La valorisation de la personne; la prise en charge, par le milieu, de son avenir; le respect et la promotion des valeurs régionales et locales; la concertation des partenaires locaux et régionaux; la diversification de la base économique régionale; la protection et la régénération des ressources; le rééquilibrage des pouvoirs politiques du haut vers le bas; la promotion de mesures alternatives pour un développe-


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ment durable. Voilà des principes auxquels le Bloc québécois souscrit, et il appuie ce consensus.

Pour soutenir le développement régional, il faut bien plus que la construction de routes. Les Québécois savent que ça ne sera pas suffisant. Le dynamisme et la créativité des ressources locales sont les sources du progrès. Le gouvernement doit fournir l'appui financier requis. Pour cela, la recherche et développement sont des voies d'avenir pour les régions. L'éloignement géographique n'est plus une excuse pour empêcher l'implantation d'entreprises de haute technologie.

L'intervention éparse du gouvernement fédéral a donné des actions aussi contradictoires que la politique de fermeture des bureaux de poste, privant ainsi des communautés de base d'un service essentiel en même temps que se faisait la mise en place des comités d'aide au développement des collectivités qui visent justement à doter les communautés locales d'outils adéquats de développement. Lorsqu'on se rappelle que 83 p. 100 des employés des bureaux de poste sont des femmes et que l'on passe cela dans de beaux discours sur les politiques d'équité en matière d'emploi, on peut facilement dire que la main gauche ne sait pas ce que la main droite fait.

L'action du Bureau fédéral de développement régional n'est pas intégrée à une vision globale du développement local; ses actions ressemblent souvent à du saupoudrage. Pour relancer l'économie des régions, il faut savoir utiliser les ressources humaines qui sont en place. Le travailleur forestier, chassé de la forêt par la machinerie, doit pouvoir y retourner la tête haute pour travailler à l'aménagement de cette même forêt pour les générations à venir. Les gains de productivité réalisés par les entreprises doivent servir à relancer l'emploi.

Le milieu qui est le plus victime de l'inefficacité des interventions en matière de formation de la main-d'oeuvre est certainement celui des régions où il est plus compliqué d'obtenir un programme de formation pour un groupe de travailleurs que de les relocaliser ailleurs. J'en ai vécu personnellement l'expérience dans le cadre d'un comité de reclassement, où pour une vingtaine d'employés de l'usine de Bombardier qui avaient été mis à pied, il a fallu au moins deux grandes interventions politiques pour s'assurer que ces gens-là puissent avoir un programme de formation en soudure, alors que l'usine même de Bombardier qui est de renommée internationale était à quelques kilomètres de l'endroit où se tenait la formation.

Qu'y a-t-il dans le discours du Trône pour simplifier la vie d'un jeune entrepreneur de Saint-Hubert de Rivière-du-Loup qui veut lancer un nouveau produit? Qui peut l'aider? Le Centre d'aide aux entreprises, le Comité d'aide au développement des collectivités, le Service d'aide aux jeunes entrepreneurs, la Corporation de développement économique, la Corporation touristique, le BFDR, la Société de développement industriel, sans oublier les deux bureaux de députés. Toutes les agences de développement sont de bonne foi, mais c'est un cauchemar pour notre jeune «patenteux» de trouver la clé de ce dédale administratif. Il retourne trop souvent au pays des rêves après avoir cogné inutilement à toutes ces portes. Ce qui est plus grave encore, c'est qu'on crée en région une compétition malsaine entre les organismes.

(1145)

Le développement régional doit reposer aussi sur des projets intégrateurs, tels le TGV dans le corridor Québec-Windsor. On ne le répétera jamais assez. Ce projet permettrait de créer des emplois tout autant dans le Montréal métropolitain qu'à l'usine Bombardier à La Pocatière que chez nos voisins canadiens. L'impact de ce projet est majeur. Il permettrait l'utilisation du potentiel de nos jeunes spécialisés dans des domaines de pointe et développerait une expertise exportable partout dans le monde. Ce serait aussi une contribution majeure à la reconversion de l'industrie militaire.

L'isolement géographique est bien peu de chose en regard de l'isolement des grands réseaux décisionnels. Pour le Québec, l'avenir du développement régional passe par le respect de la juridiction québécoise en la matière et, tel qu'exprimé par la Commission Bélanger-Campeau, par la reconnaissance du droit des régions au contrôle des leviers de leur développement.

L'intervention fédérale en matière de développement régional est très coûteuse. L'enchevêtrement des juridictions nécessite une telle dépense d'énergie qu'il n'en reste plus suffisamment pour s'attaquer aux véritables problèmes. En créant des structures intermédiaires, trop de temps est consacré à l'administration des programmes afin de coordonner la prise de décisions entre organismes. Pendant ce temps, l'argent ne va pas au milieu, il reste dans la tuyauterie.

La part des revenus que perçoit directement le gouvernement par ses taxes et ses impôts devrait diminuer, dans la mesure où les instances locales obtiennent l'accès à des sources de revenu que supportent ces mêmes citoyens. L'exemple du programme des infrastructures là-dessus est éloquent. Quel bel effort semble-t-il des gouvernements, sans trop, pour mettre de l'argent dans le développement?

Mais ne vous semble-t-il pas que dans un modèle idéal, les municipalités devraient elles-mêmes avoir les moyens de recueillir les impôts, de lever les sommes nécessaires à leur développement, et non pas se demander si le Parlement fédéral à Ottawa doit participer à la décision pour un garage ou un bout de route dans la région de Rivière-du-Loup?

Cela m'apparaîtrait beaucoup plus pertinent que l'on décentralise de façon significative les budgets et les sommes disponibles pour assurer à nos élus locaux leurs décisions en ces domaines.

Dans le système fédéral actuel, un geste conforme à cette volonté serait de remettre au Québec les points d'impôt correspondant à l'investissement fédéral dans ce domaine, c'est-à-dire plus de 200 millions de dollars, et à reconnaître l'exclusivité de la compétence du Québec en cette matière.

Nous nous retrouvons dans une situation paradoxale, où le gouvernement fédéral, qui a le droit de prélever des impôts, n'a jamais développer les outils adéquats pour répondre aux besoins des régions pour soutenir leur développement.

De la campagne électorale de 1993, nous retenons que les gens ont soif d'une voie d'avenir, celle d'un décideur unique qui rapatrie toutes les taxes et les impôts, élimine les duplications et les chevauchements et les incohérences des ministères. Les gens veulent miser sur les valeurs déjà présentes dans leur milieu.


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Cette voie d'avenir c'est la souveraineté du Québec, une occasion unique d'un transfert massif vers les régions des 28 milliards d'impôts que les Québécois paient à Ottawa. Nous allons donc voter contre le sous-amendement proposé par le député de Calgary-Sud-Ouest car il ne saurait être question de donner un chèque en blanc au gouvernement pour décider des coupures, sans au préalable avoir mis sur pied un comité pour faire l'étude approfondie des projets de coupures.

[Traduction]

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra): Madame la Présidente, je commencerai par vous féliciter de votre nomination à cette fonction éminente et je vous prierai de transmettre mes félicitations au Président que nous avons élu il y a quelques jours.

(1150)

Je trouve significatif que, dans un Parlement et dans un Canada en pleine évolution, nous soyons engagés dans le processus de modification de la constitution de la Chambre, c'est-à-dire de son Règlement. Cela témoigne du principe de base de la common law dont provient le régime parlementaire, c'est-à-dire qu'il ne s'agit pas d'un pavé de doctrine constitué une fois pour toutes à une époque révolue, mais plutôt d'un processus permanent d'adaptation créatrice des vieilles règles aux nouvelles circonstances sociales.

Nous avons été témoins de changements inattendus. C'était la deuxième fois que la Chambre élisait son Président, mais lors de cette élection-ci, il y a eu de nombreuses réunions entre les candidats et les partis politiques, c'est-à-dire le Bloc québécois, le Parti réformiste et, sur la recommandation spéciale du premier ministre, avec le Parti libéral. Il n'en est peut-être résulté aucun changement de vote, mais cela a constitué un excellent processus éducatif.

Nous sommes tous mieux informés des possibilités de choix qui s'offrent à nous pour l'élaboration ultérieure du Règlement de la Chambre et de la procédure parlementaire. Le processus de concessions mutuelles permet un progrès cumulatif de notre réflexion, car les règles du droit constitutionnel parlementaire, je le répète, ne sont pas immuables. Elles ne sont pas gravées dans la pierre. Elles évoluent et doivent évoluer.

Les précédents dont nous avons hérité du XIXe siècle doivent être appréciés au regard de ceux dont nous avons hérité à d'autres époques, des XVIIe et XVIIIe siècles par exemple. À certains égards, ils sont beaucoup plus dynamiques et créateurs en matière d'évolution du parlementarisme britannique. La constitution américaine s'en est également inspirée.

Il en ressort que la Chambre continuera d'enrichir la procédure parlementaire, de créer de nouvelles règles qui s'ajouteront aux plus anciennes. Nous comptons sur la collaboration des partis de l'opposition pour renforcer le rôle des simples députés et des comités en leur confiant de nouvelles responsabilités. Il est bon de pouvoir compter sur l'entière collaboration du premier ministre, comme il l'a promis pendant la campagne électorale, de même que sur celle du leader parlementaire afin que nous puissions jouer véritablement notre rôle de législateurs.

J'estime que c'est un événement marquant pour nous parce que le discours du Trône comporte deux thèmes principaux. Le premier, c'est que le monde traverse une période de transition, de bouleversements, comme le montrent l'effondrement de l'Union soviétique et le démantèlement du mur de Berlin. Ce sont des changements importants qui touchent autant le Canada que les autres pays. Nos institutions doivent réagir à ces changements.

Le discours du Trône a fait écho au thème énoncé dans le livre rouge du Parti libéral et voulant que le changement soit inhérent à notre société. Il ne faut pas résister au changement. Il importe plutôt de le guider, de le canaliser d'une façon constructive.

Le second thème énoncé dans le discours du Trône, c'est qu'on ne peut isoler les problèmes sociaux. Les sociologues parlent de la polycentricité et du règlement des problèmes. En d'autres termes, les problèmes individuels ne se produisent pas en vase clos. Les problèmes sociaux sont inséparables des problèmes économiques tout comme les problèmes internes le sont des problèmes de politique étrangère.

Nous vivons dans le village planétaire, et les événements survenant à des lieues de distance du Canada influent sur son développement. C'est dans cette perspective que se situe mon intervention dans ce débat.

Je représente la circonscription de Vancouver Quadra, qui a eu l'honneur d'avoir pour représentant un premier ministre, John Turner, mon prédécesseur, mais aussi un éminent ministre des Affaires étrangères, le conservateur Howard Green, qui a vécu jusqu'à un âge vénérable après sa retraite de la vie parlementaire. On se souviendra que M. Green a renforcé un principe d'abord conçu par le premier ministre Pearson et Paul Martin, père, à savoir que l'engagement du Canada en politique étrangère comprend une préoccupation envers les peuples étrangers et les droits de la personne. Howard Green, vous vous en souviendrez, à titre de ministre des Affaires étrangères dans le Commonwealth, a pris l'initiative de soulever la question des relations raciales dans un pays membre de l'organisation, disant qu'une politique de transparence, d'ouverture devait être une condition préalable à l'adhésion au Commonwealth.

(1155)

Je poursuis donc dans cette tradition. Je dois dire que l'une des caractéristiques les plus frappantes de ma circonscription est qu'elle est le fidèle reflet de l'évolution qui transforme l'ensemble du Canada. Nous sommes devenus soudain une société planétaire par un simple fait dont il faut se réjouir, l'immigration et l'intégration de nouvelles collectivités dans la société canadienne.

Des Canadiens d'origine grecque habitent dans ma circonscription, où il y a aussi des gens d'origine polonaise, dont certains sont venus chez nous comme anciens combattants après la Seconde Guerre mondiale. D'autres ont fui les derniers soubresauts d'une régime communiste inefficace et incompétent. Nous avons accueilli des réfugiés de la mer il y a 10 ou 15 ans, et leurs enfants fréquentent aujourd'hui nos collèges. C'est une belle réussite, car ces gens-là sont partis de rien. Nos concitoyens d'origine indienne et les sikhs ont énormément contribué à enri-


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chir notre culture. Il y a également les Canadiens d'origine chinoise, venus de la Chine continentale, de Taïwan et de Hong Kong, et qui sont unis ici pour nourrir une nouvelle tradition canadienne de pluralisme.

Tout cela témoigne de la croissance et des mutations qui transforment la Colombie-Britannique. Par le passé, celle-ci se préoccupait surtout de l'exploitation des forêts et autres ressources naturelles. Elles sont toujours là, fondement de notre richesse, mais leur exploitation relève maintenant de nouvelles politiques de gestion dynamiques et, j'oserais dire, prévoyantes.

Les gens des autres régions du Canada ne savent peut-être pas que nous sommes les chefs de file dans le développement scientifique, notamment dans le domaine des relations entre la science, la recherche scientifique, la technologie de pointe et les applications industrielles, toutes choses que les Japonais ont perfectionnées, mais que nous faisons maintenant.

Ainsi, le projet TRIUMF/KAON est un monument dédié au nouveau dynamisme dans les domaines de l'éducation, de la science et de la recherche en Colombie-Britannique. Il réunit les plus grands physiciens du Canada et du monde. Il a suscité des projets connexes auxquels travaillent des généticiens, comme le lauréat du prix Nobel, Michael Smith. Il a créé une importante source d'exportations. C'est ainsi que la société Epco de Richmond, jadis une petite entreprise spécialisée dans la fabrication d'outils, vend maintenant pour plusieurs millions de dollars à l'étranger et, du même coup, crée des emplois pour les Canadiens et génère des richesses, contribuant ainsi au bien-être national.

La Colombie-Britannique est donc le lieu de rencontre de nouvelles communautés au sein d'une plus grande. Cette expression, que l'on attribue parfois à des personnages politiques canadiens, nous la devons à Martin Buber, un universitaire d'Europe centrale qui s'est installé par la suite en Israël et qui a vu la nécessité, pour les communautés, de travailler ensemble. Ce nouveau pluralisme a pour effet d'enrichir simultanément chacune des communautés.

Il n'y a plus, s'il y en a déjà eu un, de problème linguistique en Colombie-Britannique. L'objectif des parents dont les enfants ont suivi le cours d'immersion en français, c'est de leur faire apprendre une troisième langue. C'est peut-être le rêve canadien, reflet du nouveau Canada, de la nouvelle orientation si chère au coeur des habitants de la Colombie-Britannique. Il faut bien comprendre que le centre de gravité de la communauté mondiale se déplace de l'Europe vers le Pacifique et le bassin du Pacifique, et nous y sommes.

Tant au sein de notre parti qu'au Parlement, nous allons donc parler sans cesse de la nécessaire reconnaissance du nouveau rôle qui échoit à la Colombie-Britannique. Nous avons parfois l'impression que les hauts fonctionnaires et même certains dirigeants politiques du Centre ou de l'Est du Canada ne saisissent pas que la balance du pouvoir au Canada a changé du tout au tout dans notre pays.

(1200)

Il est important, à mon avis, de rappeler à la Chambre que l'idée que nous nous faisons du fédéralisme correspond, ainsi que je vous l'ai dit, à l'idée que nous nous faisons de la common law. Le fédéralisme ne s'est pas fixé une fois pour toutes, en 1867, dans une série de relations statiques entre institutions. Il ne s'est pas non plus limité à glorifier les anciens systèmes pour la simple raison qu'ils étaient là.

Nous acceptons le point de vue du juge Holmes, qui trouve révoltant de n'avoir de meilleur argument pour justifier une règle qu'il s'agit d'une règle établie à l'époque d'Henri II. Il y a des siècles qu'Henri II a disparu. Et donc, nous croyons à la nécessité de continuer de moderniser les institutions fédérales.

Comme l'a dit le premier ministre Trudeau, le fédéralisme est une affaire de pragmatisme. Il s'agit d'un processus d'adaptation permanente des anciennes institutions et des anciennes règles aux nouveaux problèmes. Nous croyons au fédéralisme et à la possibilité que transparaisse notre caractère distinct, en tant que partie de la société canadienne, dans des lois institutionnelles qui changeront dans le cadre de la Constitution canadienne et grâce à un processus qui n'obligera pas forcément à modifier officiellement la Constitution. La dynamique de l'évolution constitutionnelle dans une société vient des changements et de l'adaptation nécessaires pour faire face aux problèmes des temps modernes.

En cette période de changements que nous traversons, j'ai parlé du mouvement de la communauté mondiale, du déplacement du centre de gravité de l'Europe vers la région du Pacifique. C'est un fait. Cela veut dire qu'il faudra dorénavant insister sur le commerce et la coopération avec les pays de la région du Pacifique.

C'est aussi le reflet de l'un des plus grands dilemmes auxquels se trouve confrontée la communauté mondiale dans une période de transition. On se trouve parfois dans la situation où ce qui est ancien coexiste avec ce qui est nouveau. Cette coexistence peut être difficile. Elle peut même engendrer des conflits.

Nous espérons, au XXIe siècle, voir se réaliser notre idéal: un gouvernement mondial viable. Ce n'est pas le cas à présent. C'est l'un des objectifs auxquels les Canadiens aspirent en politique étrangère depuis l'âge d'or de Saint-Laurent, de Pearson et de Paul Martin père, soit que les Nations Unies doivent faire contrepoids aux tendances régionalistes qui existent au sein de la communauté mondiale.

Il est très bien que les négociations du GATT aient mené à la proposition de créer une organisation mondiale du commerce, mais ce n'est pas la première fois. L'un des espoirs nourris par les pères fondateurs des Nations Unies en 1946 était la création d'une organisation mondiale du commerce. C'est l'échec-en partie inattendu-de ce projet qui a mené à la création du GATT, un compromis pas très satisfaisant. Or, comme bon nombre de compromis insatisfaisants, celui-ci a permis la mise en place d'une organisation qui a rempli une fonction indispensable et à


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laquelle nous devons rendre hommage pour les mesures qu'elle a prises depuis 1946 afin d'empêcher un commerce autarcique.

Mais pour en revenir au point essentiel, il n'est pas suffisant de s'en remettre à une Organisation mondiale du commerce et au GATT pour régler les problèmes économiques actuels. Le gouvernement a sûrement bien fait de croire à l'ALENA sur le plan historique.

Les organisations régionales, les tendances observées dans l'histoire, l'introduction de l'acte unique qui a fait de la Communauté européenne une communauté régionale fermée à maints égards nous obligent à aller chercher les marchés extérieurs là où nous le pouvons. Et je n'ai que des éloges à faire en ce qui concerne le livre rouge et l'engagement que le gouvernement a pris à l'égard de l'ALENA. Bien sûr, il y avait des problèmes internationaux à prendre en considération, une foule de problèmes qui auraient peut-être pu être examinés plus en profondeur au cours des dernières années. Par contre, ce ne sont pas des problèmes insurmontables. Les traités ne sont pas coulés dans le béton. Il existe, en vertu du droit international, des moyens de les adapter aux nouvelles réalités.

Personnellement, il m'a été donné, à un autre titre, d'examiner la question de savoir si l'exportation d'eau douce allait ou non être visée par l'ALENA. Ma conclusion évidente a été qu'elle ne l'était pas. Cependant, je comprends les préoccupations des Canadiens qui pensaient le contraire.

(1205)

À ce sujet, il me semble que la solution retenue par le gouvernement canadien, l'échange de déclarations, est, en vertu du droit international, un moyen d'obtenir de nouvelles garanties sur la question de l'eau ainsi que d'autres changements. Permettez-moi de dire à tous ceux qui s'inquiètent de la réaction des États-Unis que le gouvernement américain, plus que n'importe quel autre gouvernement, a su parfaire les moyens d'apporter des changements aux traités une fois ceux-ci signés, scellés et déposés.

Nous nous dirigeons vers une situation où la création de la nouvelle Organisation mondiale du commerce, par suite des changements apportés au GATT, et notre participation constructive à de nouvelles organisations régionales comme l'ALENA nous placent devant la coexistence de tendances, au sein de la communauté mondiale, à former des blocs.

Nous devrions tous, je pense, féliciter le ministre du Commerce international pour les efforts qu'il déploie en vue de voir si le Chili et d'autres pays désirent adhérer à l'ALENA, ce qui nous permettrait d'étendre nos débouchés commerciaux. Cependant, nous devrions aussi envisager sérieusement l'adhésion, à titre de membres associés, de nos partenaires commerciaux actuels ou futurs de la région du Pacifique.

L'un des grands avantages présentés par le nouveau Canada, le nouveau Canada pluraliste, ce sont les ressources naturelles énormes que constituent les immigrants qui connaissent la langue et les habitudes en matière de commerce et de relations commerciales. C'est un élément qu'il faudrait exploiter au maximum. J'espère que le gouvernement tiendra pleinement compte de cet avantage pour l'expansion des initiatives commerciales.

Que ce soit en politique étrangère ou dans d'autres secteurs, il est évident que la transition n'est pas facile. Nous devons reconnaître que, après la période de croissance économique qui a suivi la guerre et après le Plan Marshall, l'ensemble de la politique étrangère de l'Occident et les conceptions brillantes et novatrices au sujet d'un nouvel ordre mondial ont quelque peu manqué d'imagination et de vision au cours des dernières années.

Il est clair que nous n'avions mis en place aucun plan stratégique pour réagir à l'effondrement de l'empire soviétique, voire de l'Europe. Nous n'avons pas su prévoir cet effondrement et, pourtant, tous les spécialistes nous avaient abondamment prévenus.

Nous n'avons pas su prévoir non plus qu'en l'absence d'un plan en prévision de la constitution d'États indépendants, nous assisterions encore une fois à l'émergence de conflits nationaux ou ethniques comme il en régnait dans le sud-est de l'Europe avant 1914, lors des deux guerres des Balkans et pendant la Première Guerre mondiale.

Un des problèmes au sujet de la politique étrangère du Canada, c'est que nous ne pourrons plus revivre la belle époque des années 1950 et 1960, l'époque des Saint-Laurent, Pearson et Martin, où nous menions le monde libre avec nos idées nouvelles. Nous étions là-bas parce que la colonisation n'avait pas encore eu lieu, mais nous nous y attendions et nous avons montré la voie pour qu'elle se fasse d'une manière pacifique.

Toutes proportions gardées, notre position sur la scène économique mondiale était plus forte qu'à l'heure actuelle. Bien sûr, nous pourrions dire cela encore plus des États-Unis, qui cherchent également à adopter une politique étrangère plus imaginative qu'au cours des dernières années.

Quelques-uns des problèmes qui assaillent un nouveau gouvernement et un nouveau Parlement découlent de l'incapacité de reconnaître les contradictions qui existent et d'y réagir à temps. C'est là un des défis que doivent relever un nouveau gouvernement et un nouveau Parlement.

Pour ce qui est du maintien de la paix, notion que le Canada a inventée-on la doit à M. Pearson et il a reçu un prix Nobel pour cette raison-nous devons reconnaître qu'il y a trop de missions disparates dans trop de régions différentes et que, à certains égards, les forces de défense sont trop préoccupées par le matériel militaire et n'accordent pas suffisamment d'attention au nouveau rôle très politique que joue le maintien de la paix de nos jours. En outre, on n'a pas su reconnaître la distinction entre le maintien de la paix, notion que nous, M. Pearson et le Canada avons inventée, et l'établissement de la paix, qui suppose le recours non déguisé à la force armée.

(1210)

Voilà quelques-uns des problèmes avec lesquels nous sommes actuellement aux prises, la tragédie en Somalie, la tragédie en Bosnie-Herzégovine, des problèmes que nous aurions pu prévoir et que nous n'avons pas réellement. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette, mais votre temps est écoulé.


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[Français]

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières): Madame la Présidente, au nom de tous mes collègues, je voudrais présenter mes plus sincères félicitations à mon collègue de Kamouraska-Rivière-du-Loup pour l'excellent exposé qu'il nous a présenté concernant le développement régional.

Je retiens trois aspects de son exposé avec lesquels je suis parfaitement d'accord, ayant oeuvré moi-même pour le compte du gouvernement du Québec en terme de développement régional pendant 25 ans. Je fais miens trois points de vue qu'il a exposés, qu'il a mis de l'avant, le premier concernant le développement régional ou plutôt le non-développement des régions où c'est la politique du laisser-faire ou du laisser-aller qui tient lieu de politique dans ce pays présentement.

Le deuxième point que je fais mien d'emblée, c'est que le plus tôt possible, le gouvernement du Québec puisse rapatrier ce champ de juridiction avec tous les points d'impôt qui en découlent pour faire en sorte qu'enfin il y ait un semblant de planification économique dans ce nouveau pays qui s'en vient.

Le troisième point est à l'effet qu'il est évident que je fais d'emblée le dernier point de vue exprimé, que le plus tôt possible aussi, les Québécois fassent leur la seule voie de développement totale et globale qui puisse s'offrir à eux sur une base rationnelle, soit la souveraineté et son accession le plus tôt possible à la souveraineté nationale.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Pour la gouverne du député, il est normal et essentiel de faire des commentaires et de poser des questions sur le discours qui précède et non pas sur celui d'un confrère qui a pris la parole avant le député. Est-ce qu'il y a d'autres questions et commentaires?

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans): Madame la Présidente, étant donné qu'il s'agit de ma première intervention en cette Chambre, j'aimerais remercier les citoyens et citoyennes de Beauport-Montmorency-Orléans d'avoir fait de moi leur représentant lors des élections générales du 25 octobre dernier.

Comme commentaire ou question qui s'adresse à mon collègue de Vancouver Quadra, je veux lui dire que j'ai énormément apprécié son exposé et que j'aurais apprécié qu'il souligne l'importance du transport ferroviaire pour le développement des régions. Je crois que mon collègue de Kamouraska-Rivière-du-Loup, qui est un grand régionaliste, a tout à l'heure insisté énormément sur l'appauvrissement des régions et je crois que la province et la région d'où il vient a été entre autres développée par un chemin de fer qui s'est étendu A mari usque ad mare, coast to coast, d'un océan à l'autre.

On a vu dans les discours du premier ministre et de l'honorable ministre des Affaires étrangères comment ils étaient attachés à ce pays. Cela me rappelait alors que j'avais 14 ans, pendant la campagne du centenaire du Canada en 1967, où on disait Canada Stand Together, Understand Together, mais j'aurais aimé et j'espère que le député de Vancouver Quadra fera en sorte qu'au Canada il existe encore un transport ferroviaire pour les prochaines années.

J'inscris aussi dans la même foulée le commentaire que faisait mon collègue de Kamouraska-Rivière-du-Loup, au niveau de la nécessité d'avoir un train à grande vitesse pour le corridor Québec-Windsor.

(1215)

[Traduction]

M. Speller: Madame la Présidente, permettez-moi de formuler une objection; deux députés du Bloc québécois ont posé des questions à mon collègue qui n'a pas encore pu répondre. En vertu de quelle règle l'empêchez-vous de répondre?

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je remercie le député. Le député de Quadra n'était pas debout. J'ai supposé qu'il ne voulait pas répondre et j'ai donc décidé de passer au débat.

Le député voudrait-il avoir la parole? Il reste cinq minutes. Pour demander la parole, vous devez vous lever.

[Français]

M. McWhinney: Madame la Présidente, je remercie mon collègue de son intervention. Je suis très conscient de la souplesse du système fédéral canadien. Je suis moi-même régionaliste. Je suis convaincu qu'on peut faire des changements importants au sein de notre système canadien.

Je ne voudrais pas anticiper les projets en train d'être développés par notre collègue, M. Massé, mais je suis convaincu qu'on aura des possibilités fructueuses d'épanouissement du régionalisme au sein du Canada dans un avenir rapproché.

[Traduction]

M. Jim Silye (Calgary-Centre): Madame la Présidente, j'aimerais me joindre aux députés qui m'ont précédé afin de féliciter le député de Welland-St. Catharines-Thorold et vous-même pour votre élection aux postes à la présidence de la Chambre.

Comme l'a déjà déclaré J. J. Green, ancien ministre libéral qui représentait ma ville natale d'Arnprior en Ontario, je suis convaincu que vous occuperez avec distinction un poste que tant de nos distingués collègues ont occupé auparavant.

Je tiens à féliciter aussi le motionnaire et le comotionnaire de l'Adresse en réponse au discours du Trône. Je leur souhaite à tous deux une carrière fructueuse dans le domaine public et ici à la Chambre.

J'aimerais profiter aussi de cette occasion pour remercier les électeurs de Calgary-Centre qui m'ont choisi comme leur représentant pour cette trente-cinquième législature. C'est véritablement un honneur et un privilège de représenter ce groupe diversifié de citoyens d'une ville si riche en traditions et si typique de l'Ouest.

Mes électeurs viennent de tous les milieux et la majorité d'entre eux sont très motivés et instruits; ils ne croient plus au fédéralisme exécutif. Ils en ont assez des formulations de politiques secrètes, de l'usage abusif du patronage gouvernemental, des avantages et des pensions accordés à une époque où ils doivent payer sans cesse davantage de taxes.

Mes électeurs veulent des réformes budgétaires et sociales et veulent aussi que la population ait une influence plus directe sur les politiciens, et ils le veulent immédiatement. En ma qualité de représentant au Parlement, j'ai l'intention de prêter une oreille


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attentive à ce qu'ils demandent et, plus encore, j'ai l'intention de leur rendre des comptes tout au long de mon mandat et non seulement au moment des élections.

Nous avons amené environ 200 nouveaux visages à la Chambre des communes, mais si nous changeons uniquement les personnes et ne touchons pas au système, nous n'aurons rien accompli.

Les électeurs de notre merveilleux pays ne tolèrent plus les tentatives de correction superficielle ou cosmétique des injustices pour ce qui est de l'obligation de rendre des comptes sur des questions budgétaires et politiques.

Le temps est d'une importance vitale au Parlement. Il est maintenant temps de répondre aux attentes de la majorité et non plus uniquement à celles des petits groupes d'intérêt et de l'élite. Pour ma part, je compte analyser le programme législatif du gouvernement du point de vue de la responsabilité budgétaire et de la réforme de la fiscalité.

La dette nationale augmente sans cesse et nous savons qu'elle menace la santé future de notre nation.

(1220)

Le déficit systématique constant forcera les futures générations de Canadiens, nos enfants et nos petits-enfants, à assumer la responsabilité de la dette. Ce handicap se répercutera sur la capacité du Canada de faire concurrence au reste de la planète et nuira à sa croissance et à sa prospérité intérieures. On ne peut pas, au Canada, demander au contribuable moyen de payer davantage de taxes, sous quelque forme que ce soit.

Dans le discours du Trône, on ne trouve nulle mention du déficit ou de la dette, ni de solution de rechange à la TPS. Il y a de quoi s'inquiéter. Le premier ministre lui-même a dit que le régime fiscal actuel ne fonctionne pas.

La nécessité d'une réforme saute aux yeux. Premièrement, le régime actuel est trop compliqué. La plupart des gens sont incapables de remplir leur propre formule de déclaration et doivent avoir recours à des spécialistes. Deuxièmement, le régime n'est pas équitable. Ce régime progressif favorise les riches avec ses nombreuses échappatoires. Troisièmement, il n'existe pas de mécanisme vraiment efficace pour empêcher qu'on affecte des budgets illimités à des programmes inefficaces et inutiles. Quatrièmement, nos taux d'imposition élevés, ajoutés à la TPS, ont grandement contribué à la création d'une économie souterraine de 60 milliards à 80 milliards de dollars qui échappent au fisc. Nous devons présenter des mesures qui feront que les contribuables n'auront plus besoin de chercher à éviter les impôts. Comme on a pu le voir hier dans le rapport du vérificateur général, plus de 900 millions de dollars de TPS ne sont jamais versés. Cinquièmement, c'est injuste de financer les programmes actuels aux dépens des générations futures, qui n'ont pas voix au chapitre.

Nos enfants et petits-enfants pourraient ne jamais nous pardonner si nous ne reconnaissons pas que c'est leur argent que nous sommes en train d'engager et de dépenser.

Comme on le sait, nos banques à charte hésitent à prêter de l'argent, ces temps-ci, à cause de l'incertitude économique. Pourquoi ne pas montrer la voie et faire preuve de leadership? La trente-cinquième législature devrait s'engager à trouver des solutions et à dire ce que les investisseurs, les créanciers et les contribuables veulent entendre. Ce n'est pas en nous contentant de hausser les impôts et en comptant sur les dépenses d'infrastructure que nous réduirons notablement le déficit, ni que nous favoriserons la reprise.

En examinant le régime fiscal que je m'apprête à vous exposer, qui contribuerait à régler certains de nos problèmes, le gouvernement fédéral montrerait qu'il est capable de composer avec les responsabilités et les contraintes matérielles. Il faut absolument élargir l'assiette fiscale si l'on veut abaisser le taux moyen d'imposition dans un nouveau régime qui traiterait toutes les personnes et les sociétés sur le même pied. Les Canadiens seront sûrement séduits par ce régime, puisque c'est une question de bon sens.

Je propose un impôt uniforme sur le revenu personnel ou, comme mon chef se plaît à l'appeler, un impôt proportionnel doublé d'une généreuse exemption entièrement indexée à l'intention des petits salariés.

Monsieur le Président, certains, comme le député de Broadview-Greenwood, préfèrent l'expression «impôt unique» pour décrire cette idée. Mon collègue a écrit un livre, intitulé simplement The Single Tax, qui nous donne une description réaliste et intéressante de la façon dont cette méthode pourrait être appliquée au Canada. Il est regrettable que sa proposition n'ait pas trouvé preneur dans son propre parti. Son chef est malheureusement un inconditionnel du vieux système complexe et manipulateur. J'encourage tout de même les membres de son parti à y repenser.

En conclusion, nous devrions nous engager à équilibrer le budget, à réserver les fonds pour les vrais besoins et à limiter les dépenses à 153 milliards de dollars pour l'exercice financier 1994-1995. Ces changements présenteraient des avantages considérables. D'abord, ils entraîneraient une hausse des recettes fiscales pour le gouvernement; ensuite, ils feraient disparaître les facteurs motivant l'économie souterraine; enfin, ils stimuleraient la croissance économique et permettraient de créer des emplois, ce qui est, après tout, l'objectif numéro un du livre rouge du premier ministre.

Je termine en m'inspirant du slogan de feu le sénateur Stan Waters, qui disait: «Maintenons la cadence». Je dirais pour ma part: «Mettons-nous en branle.»

M. Jack Iyerak Anawak (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, le député disait à l'instant que ses électeurs proviennent de tous les milieux de la société et qu'il ne suffit pas de renouveler les députés, encore faut-il changer les intentions du gouvernement.

Mon collègue, qui regarde dans ma direction, sait très bien que la députation du parti ministériel s'est elle-même considérablement renouvelée; il fait lui-même parti des nouveaux venus. Les députés ne doivent pas oublier que le fait de remplacer les députés ou de changer la couleur de leur peau contribue de façon importante à modifier la façon dont le gouvernement fonctionnera au cours des prochaines années.


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(1225)

Le député disait que ses électeurs proviennent de toutes les couches de la société; aussi j'aimerais savoir s'il a consulté des groupes d'autochtones de sa circonscription au sujet du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, et quel est le point de vue de son parti sur la question. Le discours du Trône faisait état de la reconnaissance du droit inhérent des peuples autochtones à l'autonomie gouvernementale.

J'aimerais que mon collègue nous dise, même s'il n'est peut-être pas responsable des questions autochtones, quelle est la politique de son propre parti à ce sujet.

M. Silye: Monsieur le Président, en ce qui concerne le fait de remplacer les députés sans modifier le système, je ne me suis peut-être pas bien expliqué. Si nous nous contentons de changer la députation sans modifier la façon dont la Chambre fonctionne, la manière de dépenser l'argent, d'évaluer les programmes, de faire les meilleurs choix dans l'intérêt des Canadiens, nous n'aurons rien accompli. Aussi, peu importe que la députation soit composée d'autochtones, de Hongrois ou de personnes de différentes races, l'important est d'apporter des modifications systémiques à la Chambre.

Le nombre de nouveaux députés qui siègent maintenant à la Chambre témoigne de la volonté de changement des électeurs canadiens et le renouvellement de la députation commande, logiquement, un changement du système.

En réponse au second volet de la question de mon collègue sur les droits des autochtones, mon parti et moi-même sommes tout à fait disposés à aider les autochtones à atteindre l'autonomie gouvernementale et à réaliser leurs rêves.

[Français]

Mme Pauline Picard (Drummond): Monsieur le Président, j'ai apprécié les commentaires du député quand il a souligné que nous devons balancer le budget du gouvernement. Par contre, tout réside dans la façon de le faire. Nous sommes persuadés que le député et son parti, le Parti réformiste, seront d'accord pour que la diminution du budget ne se fasse pas sur le dos des plus démunis. Que l'on convoque un comité parlementaire pour étudier les comptes un à un.

[Traduction]

M. Silye: Monsieur le Président, comme ma collègue j'estime qu'un budget équilibré constitue une priorité. Je suis également d'accord pour dire que la révision des prévisions des dépenses, programme par programme et ligne par ligne, est très importante et que la Chambre aurait tout avantage à le faire.

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound): Monsieur le Président, avant d'être élu à cette Chambre, j'étais professeur d'économie. Comme j'aimerais pouvoir menacer cet auditoire d'une mauvaise note pour attirer son attention! Malheureusement, je dois avoir recours à d'autres moyens.

Mon siège m'a coûté très cher. En apprenant que j'avais été élu, mon ami et ex-collègue, Milton Friedman, a dit que j'étais devenu un économiste douteux. Imaginez mon désarroi lorsque l'autre jour le député de LaSalle-Émard a déclaré devant un vaste auditoire que je devais m'attendre à me retrouver au bas de l'échelle, étant à la fois député et économiste.

Avant de vous livrer mes réflexions sur le discours du Trône, monsieur le Président, j'aimerais vous expliquer à vous ainsi qu'aux députés de cette Chambre, d'où je viens, dans tous les sens du terme.

Je suis arrivé en Amérique du Nord en 1956, à l'âge de 22 ans, avec une petite valise, qui contenait mes vêtements, et un très fort accent allemand.

(1230)

À force de travail, grâce à la chance et après une longue succession de postes dans des universités américaines, en 1971, j'ai eu la clairvoyance d'accepter un poste de professeur en économie à l'Université Simon Fraser à qui l'an dernier, vous le savez sans doute, la revue Maclean's a décerné le titre de meilleure université canadienne dans sa catégorie.

J'adore le Canada, mon pays d'adoption. Son régime démocratique, la liberté dont on y jouit et les occasions qui s'y présentent m'ont permis de me retrouver au poste que j'occupe aujourd'hui en cette illustre enceinte. Grâce à son régime économique, le Canada compte le plus grand nombre d'habitants ayant le niveau de vie le plus élevé au monde, de toute l'histoire de l'humanité. Je me suis consacré à la défense de ce système contre l'ingérence excessive du gouvernement dans la vie des Canadiens ainsi qu'à la lutte contre le déficit écrasant qui menace son existence même.

Il n'y a pas au monde un seul régime socio-économique qui soit parfait. Mais je pense que les efforts visant à perfectionner le nôtre sont allés trop loin. Certains des problèmes socio-économiques les plus graves dont souffre notre pays sont dus à des programmes gouvernementaux pleins de bonnes intentions mais mal conçus au départ. C'est pourquoi je suis convaincu que la solution à ces problèmes est de ralentir l'intervention gouvernementale et non l'inverse.

Du point de vue géographique, je viens de la circonscription de Capilano-Howe Sound, l'une des plus spectaculairement belles au Canada. Elle englobe les communautés dortoirs de Vancouver-Ouest et Vancouver-Nord où les revenus par habitant sont parmi les plus élevés au pays. En font également partie la ville industrielle de Squamish et son port, la communauté rurale de Pemberton et, enfin mais pas des moindres, la station de ski de Whistler qui depuis des années passe pour la meilleure d'Amérique du Nord et qui, selon un sondage récent, vient d'être reconnue comme la meilleure au monde. Je suis fier et profondément honoré de pouvoir représenter les électeurs de Capilano-Howe Sound.


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Dans le discours du Trône et bien d'autres communications du gouvernement, on nous a promis que la restructuration des programmes sociaux du Canada serait un des principaux programmes légiférés de cette session parlementaire. Dans les quelques minutes qu'il me reste, je voudrais communiquer à la Chambre certaines réflexions qui me sont venues en étudiant ces programmes.

Auparavant, permettez-moi cependant de régler une question fondamentale très importante. L'expérience m'a appris depuis longtemps que la discussion de programmes sociaux entraîne souvent des adversaires à douter réciproquement de leurs intentions. De grâce, évitons que cela se produise dans nos délibérations à la Chambre. Ni le député de Winnipeg-Sud-Centre ni celui de Burnaby-Kingsway n'ont le monopole de la compassion. Comme je m'inquiète vivement de la capacité du gouvernement de venir en aide à ceux qui en auront besoin à l'avenir, je fais les observations qui suivent.

Les membres du Parti réformiste et moi-même ne nous demandons pas si notre société doit prendre soin des malheureux; nous cherchons plutôt la meilleure façon de les aider aujourd'hui et demain. Au Canada, les programmes sociaux font face à trois problèmes.

Premièrement, les dépenses qui y sont consacrées avantagent beaucoup trop les familles qui jouissent d'un revenu élevé. Par exemple, les familles dont le revenu annuel était supérieur à 100 000 $ en 1992 ont reçu 2,5 milliards et 1,5 milliard de dollars en prestations d'assurance-chômage et de sécurité de la vieillesse respectivement. Ces transferts ne sont pas conformes à l'objectif qui consiste à assurer un filet de sécurité pour les Canadiens aux prises avec des difficultés financières. Ils représentent une subvention à ceux qui gagnent un revenu élevé, ce que les Canadiens ne peuvent plus se payer. Ils sont la conséquence non recherchée de la noble volonté d'assurer l'universalité des avantages sans tenir compte des ressources.

Deuxièmement, le régime actuel a donné lieu à des incitatifs qui ont provoqué chez les Canadiens des réactions qui atterrent grandement les socialistes au Canada et ailleurs dans le monde.

(1235)

La plupart des députés se souviennent de la décision qu'une mère célibataire de Toronto a prise et qu'elle a communiquée aux médias l'été dernier. Ces derniers n'ont pas saisi son message et se sont simplement demandé si elle perdait des revenus en abandonnant son emploi, et un salaire annuel de 42 000 $, pour vivre de l'aide sociale. Ce qu'il fallait comprendre, ce n'est pas la perte de 6 000 $ qu'elle subissait, mais le fait qu'elle travaillait pour gagner 500 $ par mois. Comme bien d'autres Canadiens, elle a décidé que cela ne valait pas la peine de travailler pour si peu. Je ne blâme ni cette femme ni les chômeurs ni les assistés sociaux qui font de tels choix; la société ne les blâme pas non plus. C'est pourquoi, en dépit des sorties de fonds sans précédent au chapitre des programmes sociaux, les difficultés actuelles semblent pires qu'elles l'étaient il y a 20 ans.

Troisièmement, les concepteurs de nos vastes programmes d'assurance sociale universels savaient bien que, sauf dans le cas des personnes gravement handicapées, l'aide gouvernementale devrait être provisoire. Ils savaient qu'à long terme l'aide pouvait entraîner la dépendance des bénéficiaires et finalement leur faire plus de tort que de bien. On constate aujourd'hui que cette dépendance est devenue un grave problème pour un grand nombre de personnes.

Cette analyse des faiblesses des programmes sociaux du Canada exige un remède. J'avoue publiquement, monsieur le Président, que je ne connais pas ce remède; je doute même qu'il existe.

J'ai néanmoins des idées sur la façon d'alléger les problèmes que je viens de relever. Or, je ne peux exposer ces idées tout de suite. En attendant, je souhaite au député de Winnipeg-Sud-Centre et au gouvernement toute la chance possible dans leur propre recherche d'éventuels remèdes ou palliatifs.

[Français]

M. Laurent Lavigne (Beauharnois-Salaberry): Monsieur le Président, je voudrais faire quelques remarques suite à l'allocution du député du Parti réformiste.

À mon avis, il a touché deux points essentiels. Il s'agit de la question de l'aide sociale, l'aide aux plus démunis, aux plus pauvres de notre société qui coûte effectivement très cher et l'inquiétude face à l'administration gouvernementale. Les coûts gouvernementaux, le déficit que nous connaissons présentement et qui, depuis hier, dépasse les 500 milliards de dollars, c'est aberrant, c'est inquiétant et c'est même dangereux dirais-je.

Bien sûr, il faut s'inquéter à savoir ce qui va advenir de cette dette canadienne monstrueuse. À eux seuls, les intérêts quotidiens sont déjà astronomiques. Pourquoi le premier réflexe que nous avons quand il s'agit de mettre de l'ordre dans nos finances est-il de penser aux plus démunis?

Il me semble qu'il y a tout un champ qui devrait être examiné avant de penser aux démunis, aux pauvres, aux malades, aux assistés sociaux, etc. Il suffit de regarder le Quorum de ce matin; au moins cinq ou six pages traitent de la mauvaise gestion du gouvernement.

Il y est question des 25 millions de dollars pour le transport des ministres l'an passé, 25 millions et même peut-être plus, nous dit le vérificateur général. On parle d'une négligence administrative sur le plan des coûts fiscaux aux pétrolières qui représente-j'ai oublié le chiffre-mais là encore, c'est une somme énorme. Il s'agirait de 900 millions de dollars, je pense. Au niveau du coût de nos ambassades, c'est énorme cela aussi.

Donc, ce que nous suggérons, nous du Bloc québécois, c'est de prendre tous les items administratifs du gouvernement un à un et de faire le ménage, ce qui permettrait de récupérer, j'en suis convaincu, des sommes énormes et surprenantes même. Ensuite, s'il venait à en manquer, là nous pourrions peut-être penser à nos plus démunis, si toutefois nous y étions obligés. Mais il ne faut pas commencer par les plus démunis, il faut commencer par le superflu.


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(1240)

On nous parlait d'une cuisinette et d'une salle de bains qu'on a fait installer pour la Présidence ce qui coûterait, semble-t-il, d'après ce qu'on disait ce matin, 125 000 $. C'est énorme. Ce sont des bagatelles, vous me direz, dans l'ensemble du budget canadien. Mais ce sont tous ces montants qu'il faut aligner et enlever de nos dépenses avant de. . .

[Traduction]

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je vois que le député de Capilano-Howe Sound est debout. J'attendais que le député de Beauharnois-Salaberry termine son intervention. Je suis conscient du fait qu'il ne lui reste pas beaucoup de temps pour répondre.

[Français]

Si l'honorable député de Beauharnois-Salaberry voulait bien terminer de façon brève, le député de Capilano-Howe Sound pourrait à ce moment-là répondre à son intervention. En êtes-vous à la conclusion?

M. Lavigne (Beauharnois-Salaberry): Je vais conclure immédiatement, monsieur le Président, pour permettre au député de répliquer à mes propos, s'il le veut bien.

[Traduction]

M. Grubel: Monsieur le Président, je déplore que l'on discute de l'importante question qui consiste à trouver une solution pour empêcher le Canada de faire faillite en s'acharnant sur des faits qui n'en sont pas.

La réalité en ce qui a trait à notre déficit c'est que 60 p. 100 de l'ensemble des dépenses prennent la forme de transferts à des particuliers. Nous devons corriger cette situation. C'est là que va l'argent. Nous ne pourrons sauver notre pays en procédant aux examens et aux compressions de dépenses prônées par le député. Même si nous éliminions toutes les dépenses gouvernementales, le problème ne serait toujours pas réglé.

Tôt ou tard, et en tout cas le plus vite possible, nous devrons nous attaquer aux racines de nos maux financiers, à savoir les dépenses excessives au moyen de transferts aux particuliers dans le cadre des soit-disant programmes sociaux. Contrairement à ce qu'a déclaré le député, j'ai constaté que nous ne pouvions nous en prendre aux avantages accordés aux pauvres. C'est parce que nous, du Parti réformiste, nous préoccupons du maintien de ces avantages pour les pauvres que nous estimons qu'il y a lieu de se pencher sur les lacunes de notre système actuel auxquelles j'ai fait allusion.

L'hon. Charles Caccia (Davenport): Monsieur le Président, avant d'intervenir dans le débat d'aujourd'hui, j'aimerais demander la permission de la Chambre de terminer mon allocution dans vingt minutes, même si je dépasse la limite de 13 heures.

Le Président: La Chambre a entendu la demande du député. Y a-t-il consentement unanime pour que l'on poursuive au-delà de 13 heures?

Des voix: D'accord.

M. Caccia: Monsieur le Président, le débat porte sur le Canada, son économie et son avenir. Comme on l'a observé, les discours prononcés hier illustraient assez bien l'opinion des libéraux au sujet de la situation économique. Nous devons créer des emplois qui permettront aux Canadiens de dépenser et de payer des taxes et des impôts, et à l'économie de redémarrer. Il faut cesser de toujours avoir recours aux compressions.

À mon avis, le problème tient au manque de revenu. Le problème n'est pas lié aux dépenses, contrairement à ce qu'ont déjà laissé entendre plusieurs représentants du Parti réformiste.Hier, j'ai entendu le chef du Parti réformiste qui recommandait de réduire les dépenses dans ce domaine-ci, d'éliminer les dépenses dans ce domaine-là, réduire et éliminer, sabrer ici et là, un peu partout, toutes des mesures qui favorisent inévitablement le chômage et la stagnation. Hier, le député de Calgary-Sud-Ouest nous a proposé une autre solution qui consiste à plafonner les dépenses de divers programmes. Tant que ceux qui ont un emploi vont bien, tout le monde va bien.

(1245)

Hier, le chef du Parti réformiste, le député de Calgary-Sud-Ouest, a ressorti une vieille idée formulée il y a de cela déjà plusieurs années par deux sénateurs américains, les sénateurs Gramm et Rudman, et a proposé comme solution aux malaises économiques le plafonnement des dépenses. Et pour donner une saveur canadienne à sa solution importée, le député nous a servi une autre vieille rengaine, en prônant l'élimination des pensions de vieillesse versées aux Canadiens dont le revenu est supérieur à un certain niveau. Cela correspond à des principes que les députés de ce côté-ci de la Chambre rejettent d'emblée, soit la création de deux classes de citoyens, l'introduction de l'examen des moyens et le relâchement du tissu social.

J'ai l'impression que l'élimination des pensions de vieillesse est une solution à laquelle le Parti réformiste songe depuis longtemps. On se souviendra que, pendant la campagne électorale, au début du mois d'octobre, l'un des grands journaux canadiens a rapporté qu'un candidat du Parti réformiste en Colombie-Britannique avait déclaré que le versement des pensions de vieillesse était une forme d'aide sociale. C'est ce qu'a déclaré le candidat, il ne faut pas l'oublier. Cela fait partie du programme du Parti réformiste. Les écrits le prouvent. Par conséquent, nous ne devons pas aujourd'hui nous laisser berner ou enchanter par les déclarations faites par le représentant du parti au sujet de leur programme et de leurs promesses électorales.

On ne peut pas accuser le Parti réformiste d'être incohérent. L'admiration que le député de Calgary-Sud-Ouest voue au système de soins de santé des États-Unis est bien connue. Ce système divise la société en deux, avec d'un côté les bien nantis et de l'autre les démunis. C'est l'accès à un programme social qui les distingue. Aucun doute que cela est cohérent avec leur discours.

Revenons à l'économie. Force nous est de conclure que le Parti réformiste a une façon plutôt étroite de percevoir le malaise économique et ses solutions. Il devrait retrouver le sens des réalités. J'invite le chef du Parti réformiste à entrer dans le XXIe siècle, ou du moins dans le XXe siècle. S'il en faisait l'effort, il découvrirait peut-être que le gouvernement n'est pas diabolique


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et que le chômage n'est pas une maladie qu'on doit guérir pour faire redémarrer l'économie.

Autrement dit, le chef du Parti réformiste se trompe dans son diagnostic des maux qui frappent le Canada. Je maintiens que le problème n'est pas rattaché aux dépenses. Le problème du Canada en est un de revenu. Pour assurer la reprise économique, il faut premièrement favoriser directement ou indirectement la création d'emplois. Contrairement à ce que prétendait le député de Calgary ce matin, cela ne se fait pas en tentant d'équilibrer le budget. C'est impossible. Je vous renvoie à votre manuel d'économie de base en espérant que cela vous rafraîchira la mémoire.

Deuxièmement, il faudra s'attaquer à l'économie souterraine, autrement dit, redonner confiance aux Canadiens dans notre régime fiscal.

(1250)

Troisièmement, la relance exige qu'on supprime le plus possible les privilèges fiscaux, mieux connus sous le nom de dépenses fiscales, qui coûtent des milliards de dollars en manque à gagner au Trésor public.

Quatrièmement, il faut abroger la loi peu judicieuse qui a été adoptée en 1991, soit la Loi sur les banques et les opérations bancaires, qui incitait les banques à charte à investir dans les obligations plutôt que dans les entreprises.

S'il y a un point que je tiens à faire valoir avant tout aujourd'hui, c'est que le Canada n'a surtout pas besoin qu'on réduise ses programmes sociaux, comme le prêchent les porte-parole du Parti réformiste. Un bon filet de sécurité sociale donne une économie saine et forte, comme l'ont déjà prouvé les économies prospères du monde entier, à l'exclusion de l'Amérique du Nord.

Le problème, ce ne sont pas les dépenses. Le ministère des Finances a publié la semaine dernière un rapport des plus intéressants sur la situation du déficit canadien en novembre, rapport qui a même été reproduit à la page des affaires de l'un de nos journaux nationaux, à savoir nul autre que le Globe and Mail. On y apprend que le déficit a diminué depuis un an, de même que les recettes, les dépenses, les dépenses de programme et les frais de la dette. Oui, c'est bien ce que rapporte l'article sur le Dow Jones publié en page B3 du Globe and Mail de samedi dernier, qui est inspiré d'un rapport du ministère des Finances.

On peut voir que les symptômes sont que les dépenses aussi bien que les recettes sont à la baisse. Il faut donc en conclure que le remède ne consiste pas à réduire encore les dépenses, mais bien à accroître les recettes. Voilà ce qu'il faut faire.

On y parviendra notamment en supprimant les privilèges fiscaux qui coûtent très cher chaque année à l'ensemble des Canadiens. Permettez-moi de vous citer quelques exemples.

Il n'y a pas d'impôt sur les gains de loterie et de jeu. A-t-on idée de ce que cela coûte aux Canadiens chaque année? En 1991, soit la dernière année pour laquelle les chiffres sont disponibles, cela a coûté 860 millions de dollars aux contribuables.

Il y a ensuite l'exemption de 100 000 $ pour gains en capital qui a entraîné une perte de revenus de 665 millions de dollars la même année. Ce n'est pas moi qui le dis, mais le ministère des Finances dans le rapport qu'il a rendu public la semaine dernière et dont des extraits ont été publiés dans le cahier des affaires du Globe and Mail.

Il y a ensuite les dividendes, les majorations et les crédits qui entraînent des pertes de revenus de 700 millions de dollars. Il y a l'inclusion partielle des gains en capital qui entraîne des pertes de revenus de 665 millions de dollars. Il y a aussi le crédit d'impôt à l'investissement qui représente 49 millions de dollars.

Si nous voyons maintenant du côté de l'impôt des entreprises, les chiffres du ministère des Finances publiés tout juste la semaine dernière font état de déductions pour repas et frais de représentation, par exemple pour une loge au SkyDome de Toronto qui coûte 100 000 $ ou peu importe, et pour des services d'escorte. Cela représente des pertes de revenus de 357 millions de dollars.

(1255)

Il y a ensuite les subventions aux multinationales qui investissent outre-mer, notamment les exemptions pour dépôts en devises étrangères. Cela représente 505 millions de dollars par année. Il y a encore l'inclusion partielle des gains en capital qui représentait 417 millions de dollars en 1991.

Il y a d'autres choses aussi: les subventions pour les activités de lobbying, la publicité des entreprises, les avantages fiscaux consentis aux entrepreneurs immobiliers et aux professionnels. Assez étrangement, le ministère des Finances est incapable de fournir des chiffres sur tous ces avantages fiscaux en dépit, prenez-en note, des demandes pressantes en ce sens faites par le vérificateur général depuis cinq ou six ans, si ma mémoire est juste. Nous ignorons encore l'ampleur de ces dépenses fiscales. À mon sens, il s'agit là de privilèges fiscaux inacceptables en période de difficultés économiques.

Il y a un autre aspect du dossier noir des pertes de revenus que je veux aborder. Dans le moment, il n'y a pas d'impôt minimum pour les sociétés au Canada. Certains pensent que nous devons concurrencer les géants américains. Nous ne pouvons pas avoir une taxe qu'ils n'ont pas. Eh bien, il se trouve que les sociétés doivent payer un impôt minimum de 20 p. 100 aux États-Unis.

Nous ne connaissons pas exactement l'ampleur des pertes de recettes attribuables à l'absence d'un tel impôt chez nous ni de celles attribuables à une exemption fiscale qui touche les fiducies au Canada et qu'on appelle la règle des 21 ans. Avez-vous déjà entendu parler de la règle des 21 ans que les conservateurs ont renouvelée durant les derniers jours de leur mandat? Oui, il existe une règle qui s'appelle la règle des 21 ans. On estime à des centaines de millions de dollars les pertes de recettes que cette règle entraîne, mais le ministère des Finances n'est pas capable de nous donner le montant exact. Il ne peut tout simplement pas. N'est-ce pas étrange?

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En résumé, puisque mon temps de parole s'achève, je dirai qu'il serait juste de supposer que, si on éliminait les principaux avantages fiscaux qui existent actuellement dans le régime fiscal canadien, le Trésor fédéral augmenterait de plusieurs milliards de dollars chaque année. C'est une question de volonté politique.

En conclusion, si nous voulons réduire le déficit, l'élimination des dépenses fiscales serait une bonne façon de procéder. Nous pourrions le faire sans pénaliser les Canadiens ordinaires qui, actuellement, sont écrasés sous le fardeau d'un régime fiscal qui, au cours des dix dernières années, est devenu régressif et injuste envers les plus défavorisés au profit des privilégiés.

Notre régime fiscal fait pitié. Il est absolument essentiel que nous le modernisions le plus rapidement possible, que nous en fassions un régime juste et progressif dans lequel les Canadiens peuvent avoir confiance. Si nous faisons cela, l'économie parallèle diminuera graduellement et finira par disparaître. Une telle réforme éliminera aussi la nécessité de sabrer dans les programmes sociaux qui sont le fruit du travail des divers gouvernements libéraux qui se sont succédé depuis un demi-siècle, en commençant par Mackenzie King, qui a ouvert la voie en 1939 en mettant sur pied le régime d'assurance-chômage et qui a été suivi dans cette voie par ses successeurs, Saint-Laurent, Pearson et Trudeau.

Le système canadien de sécurité sociale est né de l'idéologie libérale. C'est un bon système qui doit être renforcé et non affaibli. C'est un système qui revitalisera notre économie. Monsieur le Président, c'est un système dont nous devrions être fiers.

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il est 13 heures, je quitte maintenant le fauteuil pour le reprendre à 14 heures, conformément au paragraphe 24(2) du Règlement.

(La séance est suspendue à 13 h 1.)

_______________

REPRISE DE LA SÉANCE

La séance reprend à 14 heures.


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DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

L'AGRICULTURE

M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre): Monsieur le Président, nous, de ce côté-ci de la Chambre, notons avec inquiétude dans le discours du Trône l'absence de précisions sur un certain nombre de questions nationales vitales. Nous ne nous attendions cependant pas à ce que le gouvernement néglige à ce point un sujet de la plus haute importance pour le monde rural canadien, l'agriculture. En fait, elle brille par son absence. Nous ne pouvons qu'espérer que cela ne dénote pas l'intention du gouvernement de mettre l'agriculture en veilleuse.

Les agriculteurs comme moi éprouvons avec inquiétude le sentiment d'être mis en attente. Nous sommes ceux qui risquons d'en souffrir. Pendant ce temps, les conseillers du gouvernement nous mitonnent des déficits plus élevés et un accroissement de la bureaucratie d'après une recette empruntée à la vieille doctrine keynésienne.

Le gouvernement actuel ne peut se permettre d'ignorer de vastes régions de notre grand pays. Les Canadiens, tant urbains que ruraux, méritent un traitement égal. Tous les députés d'opposition l'exigeront du gouvernement.

* * *

LES FORÊTS

L'hon. Charles Caccia (Davenport): Monsieur le Président, au fil du temps, la superficie continentale occupée par les forêts est passée de 34 à 12 p. 100. Dans la majeure partie du monde, le déboisement continue de causer l'érosion des sols, des glissements de terrain, des pénuries d'eau et du tort aux poissons et à la faune. Les forêts fournissent un habitat pour la biodiversité et absorbent le gaz carbonique. La vie est menacée sur la planète quand les forêts sont menacées.

La communauté mondiale reconnaît cependant de plus en plus la valeur des forêts. Il faut leur accorder une priorité élevée à l'agenda international, tant sur le plan politique que sur le plan scientifique. Le projet de commission royale d'enquête sur les forêts et le développement durable, sur le modèle de la Commission Brundtland, constituerait un excellent départ en ce sens. Malheureusement, la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement, tenue à Rio en 1992, a donné lieu à une déclaration anémique.

Par conséquent, j'exhorte le gouvernement à persuader les pays de même opinion à établir une commission internationale des forêts. Un tel organisme ferait rapport sur les moyens de soutenir la biodiversité en forêt, d'assurer une gestion forestière respectueuse de l'environnement et de protéger les systèmes socio-écologiques.

* * *

[Français]

LE QUAI DE GRONDINES

M. Pierre de Savoye (Portneuf): Monsieur le Président, le quai de la municipalité de Grondines, dans Portneuf, est présentement en voie de dégradation. La municipalité a offert au ministère des Pêches et Océans d'en contracter l'enrochement, ce qui mettrait fin à la dégradation pour plusieurs décennies. Hydro-Québec, de son côté, s'est engagé à fournir gratuitement la roche qui proviendra du démantèlement d'une traverse fluviale. La municipalité désire acquérir le quai et l'exploiter à des fins récréatives.

Ce projet permettrait au ministère de prolonger considérablement la vie utile du quai en économisant environ la moitié de ce qu'il lui en coûterait autrement, tout en se libérant des coûts récurrents.

Puisque Hydro-Québec compte livrer la roche pas plus tard que cet été, j'offre à l'honorable ministre des Pêches et des Océans de lui apporter ma collaboration pour que son ministère et la municipalité de Grondines puissent tirer profit de cette occasion unique immédiatement.


97

(1405)

[Traduction]

LE FILM SCHINDLER'S LIST

M. Dan McTeague (Ontario): Monsieur le Président, le film Schindler's List montre bien ce qui peut se produire lorsqu'on laisse faire le racisme sans protester ou, pire encore, lorsqu'on l'ignore.

[Français]

L'aggravation du racisme et l'augmentation de la propagande haineuse auxquelles on assiste au Canada, ainsi que les tragiques événements en Europe de l'Est, prouvent que les atrocités de la Seconde Guerre mondiale relatées dans le film ne peuvent être considérées comme une tragédie isolée, ni comme une aberration de l'histoire.

Les horreurs du passé peuvent se répéter, et d'ailleurs elles l'ont déjà été, si le racisme n'est pas combattu. J'ai obtenu l'autorisation de MCA Universal de faire procéder, à l'intention de tous les parlementaires, à une projection du film Schindler's List ce soir. Nous, législateurs et représentants des diverses régions du pays, avons le devoir, envers nos électeurs et tous les Canadiens, de soutenir les efforts de ceux qui luttent contre le racisme, ici et dans le monde entier.

[Traduction]

Je remercie la MCA/Universal de sa collaboration, ainsi que mes collègues députés et sénateurs.

* * *

LE SÉISME DE LOS ANGELES

M. Sarkis Assadourian (Don Valley-Nord): Monsieur le Président, le 17 janvier 1994, vers 7 h 30, heure normale de l'Est, un grave tremblement de terre d'une amplitude de 6,6 sur l'échelle Richter a secoué la ville de Los Angeles.

Ce terrible séisme a jusqu'à maintenant fait plus de 25 000 sans-abri, 45 morts et plus de 2 000 blessés.

Je tiens à exprimer toute ma sympathie aux sinistrés et, par la même occasion, j'exhorte le premier ministre à transmettre, au nom de la Chambre, nos plus sincères condoléances au président Clinton ainsi qu'aux parents et amis des victimes du désastre.

Dans les jours qui viennent, lorsque nous aurons toutes les informations sur les conséquences du tremblement de terre, nous pourrons mieux saisir l'ampleur de cette tragédie.

* * *

LA SOCIÉTÉ INTER-CITY PRODUCTS CANADA LIMITED

Mme Jane Stewart (Brant): Monsieur le Président, c'est à regret et avec beaucoup d'émotion que j'annonce aujourd'hui la fermeture d'une usine dans ma circonscription, celle de Brant.

Aujourd'hui, l'Inter-City Products Canada Limited ferme son usine de la rue Elgin, à Brantford. Trois cents hommes et femmes seront à la recherche d'un emploi demain. Inter-City était présente dans notre circonscription depuis 45 ans, mais elle a dû rationaliser ses activités et faire des compressions en raison de la conjoncture économique actuelle.

Le Centre d'emploi du Canada et le Service d'aide à l'adaptation de l'industrie de la localité essaient, avec les représentants patronaux et syndicaux, d'aider les employés. J'invite toutefois nos ministres à continuer de promouvoir le programme d'infrastructure en Ontario ainsi que les mesures visant à aider les petites et moyennes entreprises et à créer de nouvelles perspectives d'emplois pour nos jeunes.

La circonscription de Brant en a besoin, comme le Canada du reste.

* * *

[Français]

LES CASQUES BLEUS CANADIENS

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg): Monsieur le Président, à l'instar de mes collègues, je profite de ma première intervention pour vous féliciter de votre élection à la Présidence de cette Chambre.

Je veux signaler une situation qui, sans nul doute, préoccupe tous mes collègues de cette Chambre. Il s'agit des Casques bleus canadiens qui font un travail exceptionnel afin de maintenir et promouvoir la paix sur la scène internationale.

Toutefois, je voudrais exprimer ma plus grande inquiétude au nom des Québécois et des Canadiens en ce qui concerne leur sécurité. Je demande donc au gouvernement de s'engager à garantir que toute intervention de l'OTAN n'aura pas pour effet de compromettre la sécurité ou de mettre en danger la vie des 150 Casques bleus enclavés â Srebrenica, lesquels viennent en grande partie de la base de Valcartier qui est située dans mon comté de Charlesbourg.

* * *

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER

M. Raymond Lavigne (Verdun-Saint-Paul): Monsieur le Président, je voudrais vous féliciter pour votre élection à la Présidence, et je voudrais, par le même fait, remercier toute la population du comté de Verdun-Saint-Paul, incluant Pointe-Saint-Charles, de me faire confiance pour les quatre prochaines années.

[Traduction]

Je remercie tous les électeurs de la circonscription de Verdun-Saint-Paul, y compris ceux de Pointe-Saint-Charles, du mandat qu'ils m'ont confié pour les quatre prochaines années.

[Français]

Aujourd'hui simultanément à Montréal et à Calgary, l'Association olympique canadienne a annoncé la composition de l'équipe canadienne. J'aimerais saluer ces 105 athlètes, les meilleurs, 31 femmes et 74 hommes, dont une large représentation provenant du Québec, qui représenteront le Canada aux Jeux d'hiver de Lillehammer, en Norvège, en février prochain.


98

(1410)

J'aimerais profiter de cette occasion pour féliciter nos athlètes, leurs entraîneurs, leurs parents et leurs familles, ainsi que tous ceux qui ont participé à la formation de notre équipe olympique.

Réjouissons-nous et souhaitons-leur la meilleure des chances.

* * *

[Traduction]

LE DÉBAT SUR LE DISCOURS DU TRÔNE

M. Ed Harper (Simcoe-Centre): Monsieur le Président, je tiens à soulever, à propos de nos délibérations d'hier, une question qui préoccupe des millions de Canadiens.

À ma grande déception, c'est l'avenir constitutionnel du Québec qui a été au centre de nos débats hier. Les trois partis présents à la Chambre ont pourtant déclaré pendant la dernière campagne électorale que la priorité du nouveau Parlement serait l'économie et la relance de l'emploi.

À titre de député de l'Ontario, je rappelle aux députés que le moment viendra où les relations entre le Québec et le reste du Canada figureront en meilleure place à notre ordre du jour. Mais pour l'instant, la Chambre doit faire porter ses efforts sur les problèmes économiques et sociaux. Elle en a l'obligation envers les Canadiens de toutes les provinces, les chômeurs et tous ceux qui font face à un avenir incertain.

* * *

L'AGRICULTURE

Mme Rose-Marie Ur (Lambton-Middlesex): Monsieur le Président, le plus important secteur d'activité économique de ma circonscription, Lambton-Middlesex, est l'agriculture, dont la production a atteint près de 750 millions de dollars en 1991.

Depuis la fin de l'Uruguay Round, dans les négociations du GATT, en décembre dernier, j'ai reçu de nombreuses demandes de renseignements de la part d'électeurs inquiets qui ont exprimé des doutes au sujet de l'avenir du régime canadien de gestion de l'offre. Ce régime a été avantageux pour les agriculteurs, et il a également garanti aux consommateurs un approvisionnement constant en denrées alimentaires de choix.

Les propositions tarifaires du Canada au sujet des produits agricoles ont été déposées récemment à Genève. Je m'inquiète vivement des rumeurs selon lesquelles les droits proposés pour la crème glacée et le yogourt seraient abaissés.

J'exhorte le ministre de l'Agriculture à veiller à ce que le niveau des droits et les mécanismes prévus pour les imposer protègent efficacement les produits agricoles canadiens.

* * *

LA VIOLENCE

L'hon. Roger Simmons (Burin-Saint-Georges): Monsieur le Président, on nous dit dans le discours du Trône que des mesures seront prises pour lutter contre le problème de la violence faite aux femmes et aux enfants. C'est à peu près temps. Les statistiques sont absolument effarantes.

Une Canadienne sur deux a été victime de violence. Quatre fois sur cinq, c'est arrivé dans leur enfance. Six femmes sur dix au Canada craignent pour leur sécurité, pour leur vie si elles se promènent la nuit dans leur propre voisinage.

La liberté de mouvement est un merveilleux idéal démocratique. Cependant, pour des millions de Canadiennes, c'est encore une utopie. Nous pouvons faire mieux. Nous le devons. En cette année de la famille, voyons-y en commençant à enrayer la violence faite aux femmes et aux enfants.

* * *

[Français]

LES POMMES DE TERRE DE L'ÎLE D'ORLÉANS

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans): Monsieur le Président, les producteurs de pommes de terre de l'Île d'Orléans, dans le magnifique comté de Beauport-Montmorency-Orléans, ont subi en 1991 d'importantes pertes financières causées par un virus. Ces pertes sont d'environ 546 000 $ pour les pommes de terre entreposées à la ferme, et de près de 468 000 $ pour celles entreposées chez les grossistes, au-delà d'un million de dollars.

Les producteurs de l'Île d'Orléans ont acheminé à l'ancien ministre de l'Agriculture un dossier complet qui présentait les causes de ces pertes, une évaluation des dommages, ainsi que les compensations demandées. Le ministre actuel de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire du Canada a lui aussi reçu une copie de ce dossier.

Dans le passé, des compensations monétaires ont été accordées aux producteurs des Maritimes qui ont connu des difficultés semblables. Le traitement inégal accordé aux producteurs agricoles du Québec par rapport à ceux des Maritimes est inacceptable. Nous exigeons que le dossier reçoive toute l'attention qu'il mérite et que les producteurs de pommes de terre de l'Île d'Orléans obtiennent les compensations auxquelles ils ont droit et ce, dans les meilleurs délais.

* * *

LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

M. Jean-Robert Gauthier (Ottawa-Vanier): Monsieur le Président, le vérificateur général du Canada ne peut publier qu'un seul rapport annuel, rapport annuel qui est très important, sur la gestion stratégique et opérationnelle du gouvernement fédéral.

(1415)

Je crois, comme beaucoup de Canadiens, qu'il est temps, pour mieux comprendre ce que veulent dire les déficits et la dette, pour mieux gérer les budgets des ministères et des agences, pour mieux renseigner les Canadiens et les Canadiennes sur les programmes fédéraux et leur efficacité, pour mieux amender nos lois, afin que les Canadiens et les Canadiennes puissent mieux comprendre, je propose que le gouvernement étudie sérieusement la possibilité d'amender la Loi sur le vérificateur général du Canada afin que cette loi permette au vérificateur général du Canada de publier plus d'un rapport annuel, rapports ponctuels qui donneront à cette Chambre l'information dont elle a besoin pour bien administrer le pays.

99

[Traduction]

LE RÉGIME ENREGISTRÉ D'ÉPARGNE-RETRAITE

Mme Sharon Hates (Port Moody-Coquitlam): Monsieur le Président, je voudrais aborder une question d'une grande importance pour des millions de Canadiens qui s'inquiètent sérieusement de leur bien-être financier quand ils prendront leur retraite.

C'est un secret de polichinelle que les gouvernements précédents ont sous-estimé les réserves financières dont disposeront les retraités après l'an 2000. C'est pourquoi une foule de Canadiens, dont un grand nombre de ceux qui ont voté pour les libéraux, se sont empressés de cotiser à leur régime enregistré d'épargne-retraite privé.

Hier, en réponse à une question du député de Calgary-Centre, le ministre des Finances n'a pu garantir aux Canadiens qu'on ne toucherait pas au montant que les contribuables peuvent verser dans leur REER.

Les Canadiens et les députés doivent savoir sans équivoque que le gouvernement ne touchera pas au REER, qu'il ne fera pas de ponction fiscale ou. . .

Le Président: Je regrette, mais le temps de parole de la députée est expiré.

* * *

LA CONTREBANDE DE CIGARETTES

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell): Monsieur le Président, la contrebande de cigarettes est un crime qui n'est pas sans faire de victimes au Canada. Lorsque des gens se livrent à cette activité, le Canada perd des impôts et des recettes. Or, notre pays a besoin de ces recettes pour financer ses programmes sociaux, réduire son déficit et, bien sûr, financer ses programmes de création d'emplois.

Il y a même des raisons encore plus importantes pour lesquelles nous voulons lutter contre la contrebande de cigarettes: l'activité criminelle que constituent la vente et l'achat illicites de cigarettes est liée à la violence et au mépris des lois. Ce qui est encore plus sinistre, c'est que l'argent qui provient de cette activité se retrouve directement dans les poches des gangs de motards, de la pègre et d'autres personnes indésirables. Cet argent sert à financer d'autres crimes, d'autres actes de violence, le trafic d'armes, etc.

Travaillons tous ensemble pour mettre fin à la contrebande de cigarettes au Canada.


99

QUESTIONS ORALES

[Français]

LES SOINS DE SANTÉ

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, hier, en réponse à une question que je lui ai posée, le premier ministre a franchement admis sa volonté de réduire les dépenses de santé, et je cite sa réponse: «Si nous pouvons, en collaboration avec les gouvernements provinciaux, réduire le niveau des dépenses de tous les gouvernements en matière de soins de santé, il y aura des économies.»

Par ailleurs, nous savons que le ministre des Finances est présentement à Montréal, dans la première de deux journées d'une réunion en conférence fédérale-provinciale avec ses homologues provinciaux.

Je voudrais demander au premier ministre si, conséquemment à sa position sur la réduction des dépenses en soins de santé, il a donné instruction à son ministre des Finances de convaincre, voire de contraindre ses collègues provinciaux de réduire le niveau des soins de santé dans les provinces en acceptant une réduction des transferts aux provinces.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, je dis et je répète qu'il est dans l'intérêt de tous les niveaux de gouvernement d'essayer de réduire les dépenses dans tous les secteurs, y compris les secteurs de la santé. Alors, si les gouvernements pouvaient réduire les dépenses dans ce domaine, les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral amélioreraient leur situation financière. S'ils ne réussissent pas, les dépenses resteront au même niveau.

Toutefois, ce que je souhaite, c'est d'essayer de réduire. Et c'est la volonté de cette Chambre que tout le secteur public au Canada réduise le niveau des dépenses. À cet égard, tous les secteurs doivent être examinés, y compris celui de la santé.

[Traduction]

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, comment peut-on prendre au sérieux l'attachement manifesté par le gouvernement dans le discours du Trône aux principes sacrés de l'universalité du régime de soins de santé quand, pas plus tard qu'hier, le premier ministre déclarait qu'il avait décidé de réduire les ressources affectées aux soins de santé?

(1420)

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, il y a, en Europe, des pays qui possèdent des régimes universels de soins de santé et qui dépensent moins que le Canada pour ces programmes, en proportion de leur PNB. Les États-Unis n'ont pas de régime universel de soins de santé, mais les dépenses pour les soins de santé représentent tout de même 14 p.


100

100 du PNB. Au Canada, nous consacrons, dans ce domaine, 9 p. 100 de notre PNB.

Il y a, en Europe, des pays qui dépensent 7 à 8 p. 100 de leur PNB pour des régimes de soins de santé universels qui s'appliquent à tous leurs habitants. Si nous en faisions autant, tout le monde épargnerait de l'argent.

[Français]

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, je vois que le premier ministre accorde plus d'importance, est plus sensible aux questions monétaires qu'à la question du service de santé à rendre aux citoyens.

Est-ce que le premier ministre se rend compte que la situation est déjà très inquiétante pour les bénéficiaires de soins de santé-par exemple, au Québec, et je suis sûr que c'est à peu près la même chose partout au Canada, la durée d'attente pour les cas de chirurgie cardiaque est de cinq mois et les cas de radiothérapie de trois mois-et qu'en forçant la réduction des dépenses dans les transferts aux provinces qu'il se propose, il va encore allonger ces délais qui sont déjà inacceptables?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, le service de santé au Canada est administré par les gouvernements provinciaux, et nous participons au financement de ces programmes. L'administration interne à l'intérieur d'une province quant aux priorités pour donner à tel ou tel service relève de la juridiction du gouvernement provincial, et chaque gouvernement doit décider des priorités. Nous, nous faisons un transfert de paiements pour payer une quote-part pour nous assurer qu'à travers le Canada il y ait des services de santé qui soient accessibles et universels à tous les Canadiens. Mais, à l'intérieur de l'administration, les priorités concernant les budgets relèvent des autorités provinciales. Ce faisant, on respecte la Constitution canadienne qui leur donne juridiction en la matière.

* * *

LA GESTION DES PÊCHES

M. Yvan Bernier (Gaspé): Monsieur le Président, à l'instar de ma première intervention dans cette Chambre, je voudrais vous offrir mes félicitations pour votre nomination.

Ma question s'adresse au ministre des Pêches et des Océans. Monsieur le Président, peu importe les gouvernements fédéraux qui se sont succédé, la gestion des pêches est faite à court terme, à courte vue et de façon chaotique. Et cela est vrai, à un tel point que le vérificateur général nous apprenait hier que des subventions d'Ottawa ont été versées à des pêcheurs décédés ou illégaux. Or, non seulement le ministère est incapable de gérer les ressources marines, mais il semble aussi incapable de gérer les ressources financières.

Ma question est donc la suivante: Quelles mesures concrètes, à court terme, le ministre entend-il prendre pour remettre de l'ordre dans la gestion des programmes de son ministère, comme le demande le vérificateur général, et j'ajoute, puisque ses 6 000 fonctionnaires n'ont plus de morue à gérer?

[Traduction]

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question et le félicite pour les nouvelles responsabilités qu'il assume.

Soyons clairs. Le député demande quelles mesures notre gouvernement entend prendre pour remettre de l'ordre dans la gestion des programmes de mon ministère. Le rapport du vérificateur général évalue le travail du gouvernement précédent. En outre, le vérificateur général lui-même a précisé que la plupart des cas problématiques ont déjà été réglés.

Par ailleurs, il est question de subventions versées à des personnes décédées. J'ai lu le rapport et je n'ai trouvé nulle mention de ce fait. À ma connaissance, un fonctionnaire a dit à un moment donné que la chose était possible.

J'informe le député que des avis exigeant un remboursement intégral ont été envoyé à 1 300 particuliers. Le processus est en cours. Quand il mettra son programme en vigueur le 15 mai, notre gouvernement agira avec professionnalisme et compétence, ce qui plaira, je le sais, au député.

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé): Monsieur le Président, ma deuxième question, c'est quand? Quand les pêcheurs québécois et canadiens, qui vivent présentement dans une incertitude totale, pourront-ils avoir une idée de ce que fera le ministre après le 15 mai, c'est-à-dire après la fin du Programme d'adaptation et de redressement des pêches? Est-ce qu'on va avoir droit à la traditionnelle improvisation du ministère des Pêches, c'est-à-dire à une présentation au 14 mai? Alors je répète. Quand le ministre lèvera-t-il le voile sur l'incertitude? Quand?

(1425)

[Traduction]

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans): Monsieur le Président, je tiens à donner l'assurance au député d'en face qu'il ne s'agira pas d'une opération improvisée. Nous prendrons des décisions seulement après avoir largement consulté tous les gouvernements provinciaux visés, y compris celui du Québec.

Il y a quelques semaines, j'ai rencontré à Québec les ministres des Pêches de toute la région de l'Atlantique. La semaine dernière, mon collègue, le ministre responsable des programmes d'emploi au Canada, en un mot celui des Ressources humaines, a rencontré des représentants de tous les pêcheurs du Canada, y compris ceux du Québec.

C'était une démarche de consultation. Il s'agit d'écouter, de réfléchir sur les conseils qui nous sont donnés et de tout mettre en oeuvre pour que le programme adopté soit bien le fruit d'une large consultation de la population dans son ensemble.

* * *

LA CONSTITUTION

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Le premier ministre a déclaré à maintes reprises qu'il ne voulait pas rouvrir le dossier constitutionnel et que la priorité de son gouvernement, c'était les emplois et la croissance économique. Pourtant, hier, lui-même et d'autres députés libéraux ont été


101

entraînés dans des échanges animés avec des députés bloquistes sur l'avenir constitutionnel du Québec.

Il y a des millions de Canadiens, y compris des Québécois, qui veulent que le Parlement mette l'accent sur la réduction du déficit, l'emploi et la sauvegarde des services sociaux.

Le premier ministre a-t-il renoncé à sa promesse de rester à l'écart du bourbier constitutionnel? Est-il encore déterminé à s'occuper des priorités économiques, financières et sociales?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, ma réponse est oui à la deuxième partie de la question du député.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, j'ai une question supplémentaire à poser au premier ministre.

Le premier ministre a-t-il une stratégie, un plan ou des suggestions à présenter à la Chambre, qui permettraient de régler les préoccupations constitutionnelles des députés bloquistes sans prendre une trop large portion du temps de la Chambre?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, la réponse est très simple. Je ne peux pas les empêcher de parler de séparation. Ils sont libres de le faire.

Je sais très bien que, si les députés de l'opposition officielle s'obstinent à parler de séparation et de problèmes constitutionnels, ils ne sont pas à la hauteur de leur mandat. Les électeurs de toutes les circonscriptions du Québec veulent que tous les députés travaillent ensemble en faveur de la croissance économique et de la création d'emplois.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, j'ai une autre question supplémentaire à poser au premier ministre.

Le ministre des Affaires intergouvernementales a-t-il un rôle particulier à jouer à cet égard? Ce ministre consacrera-t-il la majeure partie de son temps aux relations Canada-Québec ou aux relations entre le gouvernement fédéral et tous les gouvernements provinciaux?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, le ministre a la responsabilité des rapports avec toutes les provinces et il lui incombe de trouver le moyen d'éliminer tous les chevauchements qui existent entre les deux paliers de gouvernement. C'est d'ailleurs ce qu'il fera parce que c'est là un sujet de préoccupation dans tout le Canada. Les chevauchements ne sont pas vus comme un problème uniquement au Québec, mais dans toutes les provinces. Nous aimerions éliminer beaucoup de chevauchements.

Lorsque j'ai rencontré les premiers ministres, en décembre, nous avons étudié une liste de chevauchements qu'il serait possible d'éliminer. Le ministre des Affaires intergouvernementales travaille très activement sur ce dossier pour le faire progresser.

[Français]

LA MAIN-D'OEUVRE

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, puisque le premier ministre veut parler d'économie, hier, le premier ministre du Québec, un bon fédéraliste celui-là, vous le connaissez bien, lançait un appel pressant à son homologue. . .

Le Président: À l'ordre! Veuillez s'il vous plaît poser vos questions par l'entremise de la Présidence.

M. Gauthier Je m'excuse, monsieur le Président, mais vous comprendrez qu'il ne s'agit que d'inexpérience.

Je reprendrai donc ma question en m'adressant à vous, monsieur le Président. Ma question s'adresse au premier ministre. Je lui rappellerai qu'hier le premier ministre du Québec, un excellent fédéraliste celui-là, bien connu du premier ministre, lançait un pressant appel à son homologue fédéral pour régler la question des chevauchements de responsabilités dans le domaine de la main-d'oeuvre. C'était un appel pressant.

Pendant ce temps-là, mardi dernier, son ministre des Affaires intergouvernementales associait cette entente à la grande révision de l'ensemble des programmes sociaux du Canada.

(1430)

Monsieur le Président, ma question est la suivante: Comment le premier ministre concilie-t-il l'urgence de la démarche et de la demande du premier ministre du Québec et la stratégie à petits pas de son ministre des Affaires intergouvernementales?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, nous avons déjà discuté de ce problème avec le premier ministre du Québec. Nous aimerions trouver une solution à ce problème, mais c'est un dossier très compliqué. Il y a un élément aussi de péréquation dans ce dossier-là, c'est-à-dire que ce dossier fonctionne en regard des besoins de chaque partie du Canada. Comme, malheureusement, les provinces de l'Atlantique et la province de Québec ont plus de chômeurs, proportionnellement, que le reste du pays, elles reçoivent plus d'argent.

Donc, il faut trouver un mécanisme qui permette de se servir des fonds fédéraux pour aider les chômeurs qu'elles veulent former et que la proportion des fonds soient distribués en fonction des besoins régionaux. Pour faire la distribution régionale, il faut que l'autorité fédérale soit maintenue en cette matière, sinon, si nous faisons un transfert strictement de juridiction, les transferts seront faits per capita et la province de Québec y perdra beaucoup.

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, ma question supplémentaire est la suivante: Est-ce que le premier ministre serait prêt à s'engager personnellement, dès aujourd'hui, pour faire en sorte que ce dossier trouve un aboutissement rapide, tel que demandé par le premier ministre du Québec, et ce, pour dissiper les doutes qui sont entretenus par son ministre des Affaires intergouvernementales?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Il n'est pas question, monsieur le Président, d'agir rapidement, mais il est


102

important de bien agir. Nous allons prendre le temps nécessaire pour trouver la bonne solution afin de nous assurer que le Québec ne soit pas pénalisé, parce que si nous faisons un transfert per capita, le Québec paiera le prix pour sortir de ce programme fédéral.

* * *

[Traduction]

LES MOTIONS DE CENSURE

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Le premier ministre va-t-il aujourd'hui prendre la parole pour dire aux députés qu'ils sont libres de représenter leurs électeurs et déclarer que le gouvernement ne considérera pas le rejet d'une motion ministérielle, dont une mesure visant à autoriser des dépenses, comme un défi à son endroit, à moins que cela ne soit immédiatement suivi d'un vote de censure officiel?

[Français]

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, nous avons des règles de procédure qui existent depuis très longtemps, ici à la Chambre, et nous les suivons. Si on s'embarque à ce moment-ci dans un processus à savoir que le gouvernement n'est plus responsable des décisions qu'il prend, à ce moment-là, avec la majorité que nous détenons, cela nous serait aisé. Mais il faut tenir compte aussi des conséquences d'un Parlement qui pourrait, dans un avenir très lointain, accueillir un gouvernement minoritaire.

[Traduction]

Nous ne devons pas perdre de vue l'incidence qu'une telle proposition pourrait avoir à long terme pour le Parlement.

Nous avons fait bien du chemin. Je me souviens de la fois où nous avons perdu un vote sur le budget, alors que Mitchell Sharp était ministre des Finances. M. Caouette, qui était créditiste-les ancêtres des réformistes-avait fait une proposition. Il avait réussi à faire rejeter une proposition concernant une question budgétaire, après quoi il avait déclaré que ce n'était pas une marque de défiance à l'égard du gouvernement. Grâce à cette excellente initiative de M. Caouette, nous sommes non seulement restés au pouvoir, mais nous avons remporté les élections quelques mois plus tard.

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam): Monsieur le Président, je voudrais remercier le premier ministre pour sa réponse. Je m'incline devant son expertise.

Néanmoins, je me demande si le premier ministre ne pourrait pas expliquer aux Canadiens pourquoi il refuse de permettre aux députés de les représenter fidèlement à la Chambre.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, la Chambre n'est pas constituée d'indépendants élus individuellement. Nous sommes membres d'un parti et nous avons un programme.

(1435)

Ce que le gouvernement est en train de faire, c'est de présenter le programme à la Chambre afin de pouvoir mettre en oeuvre les mesures exposées dans le livre rouge. Nous tiendrons toutes les promesses que nous avons faites. Serrons-nous donc les coudes, car notre politique est la bonne!

* * *

[Français]

LE REVENU NATIONAL

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert): Monsieur le Président, le ministre du Revenu national a annoncé le retrait de sa poursuite contre le gouvernement. Vérifications faites, il appert du dossier de la Division d'appel de la Cour fédérale qu'une partie de la poursuite est toujours pendante et devra être plaidée en appel.

Est-ce que le ministre convient que la poursuite pendante concernant ses frais de déplacement le place toujours en situation de conflit d'intérêts au Cabinet puisqu'il oblige son collègue de la Justice à plaider contre lui?

[Traduction]

M. Anderson: Monsieur le Président. . .

Le Président: La question paraît irrégulière. Je la jugerais irrecevable. Elle devrait s'adresser au ministre chargé des conflits d'intérêts puisque c'est une question de droit, mais vous pourriez peut-être la reformuler.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, c'est une question qu'il convient au premier ministre de répondre.

[Français]

J'ai été informé par le ministre du Revenu national que le ministre avait retiré sa cause. Alors, ce sont les instructions qu'il a données à son avocat. Est-ce que l'avocat a agi selon les instructions du ministre, je ne le sais pas, et nous allons vérifier. Le ministre a été très clair: il a donné instruction à ses avocats de mettre fin aux poursuites. Est-ce que l'avocat a été négligent ou qu'il n'a pas fait son devoir? Les informations que j'ai sont à l'effet que le ministre lui a donné des instructions précises de mettre fin à la cause.

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert): Monsieur le Président, j'ai en main le désistement en question et le désistement est uniquement sur l'appel incident. Donc, il demeure toujours un appel qui est présentement pendant devant la Cour fédérale.

J'aimerais savoir de la part du premier ministre, dans l'application de ses nouvelles règles d'éthique, s'il convient que son ministre du Revenu soit en conflit d'intérêts, suite à ce que je viens de dire et d'exposer, ce que j'ai vérifié ce matin à la Cour fédérale, et que le ministre du Revenu national doit faire un choix entre démissionner du Cabinet ou se désister de son jugement porté en appel?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, je ne crois pas qu'en aucun moment le ministre ait été en conflit d'intérêts. Le ministre a été un simple citoyen qui avait des droits contre la Couronne. Dans les circonstances, il avait


103

une poursuite contre le gouvernement, tout aussi bien que n'importe quel d'entre nous.

Si nous étions sur une propriété fédérale et qu'à cause d'une négligence d'un employé du gouvernement nous allions subir des dommages ou devenir handicapés, nous aurions un recours contre la Couronne, qu'il s'agisse de moi, d'un autre ministre ou du chef de l'opposition. Cependant, pour éviter la controverse, le ministre a décidé de retirer son appel. Et si l'avocat n'a pas exécuté le mandat de son client comme il aurait dû le faire, s'il m'écoute aujourd'hui, il n'a qu'à regarder le visage et l'approbation du ministre du Revenu. Il aurait dû terminer sa cause de A à Z, comme on dit en anglais.

* * *

[Traduction]

LE COMMERCE EXTÉRIEUR

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord): Monsieur le Président, j'adresse ma question au ministre du Commerce international.

Une femme, qui se nomme Shelly Anne Clark et qui est employée du gouvernement fédéral, a publiquement fait des accusations graves au sujet de l'Accord de libre-échange en déclarant entre autres que le texte véritable de cet accord n'avait jamais été rendu public. Elle soutient que le texte renferme des modalités qui limitent la souveraineté du Canada sur ses ressources.

Au nom des Canadiens qui ont communiqué avec moi et avec d'autres députés pour vérifier la véracité de ces allégations, je demande au ministre de régler la question aujourd'hui en déclarant catégoriquement que le texte de l'Accord de libre-échange qui a été distribué est le texte véritable et complet de l'accord.

L'hon. Roy MacLaren (ministre du Commerce international): Monsieur le Président, l'ancien gouvernement a enquêté sur les allégations de Madame Shelly Anne Clark et il les a jugées non fondées. En raison de nos pratiques sur le caractère confidentiel des renseignements, je ne peux ajouter le moindre commentaire sur ces allégations.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord): Monsieur le Président, le ministre pourrait-il déclarer catégoriquement que le texte qui a été rendu public est effectivement le texte véritable et complet de l'accord? C'est ce que les Canadiens veulent savoir.

(1440)

L'hon. Roy MacLaren (ministre du Commerce international): Monsieur le Président, si je ne m'abuse, le texte que l'ancien gouvernement a rendu public est le texte véritable.

* * *

[Français]

LES TAXES SUR LE TABAC

M. Pierre Brien (Témiscamingue): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Revenu national. Pendant que les ministres libéraux s'amusent à se renvoyer la balle dans le dossier de la contrebande de cigarettes, le premier ministre du Québec a, pour sa part, réitéré son intention de réduire le taux de taxation afin d'enrayer la contrebande.

Ma question est la suivante: Est-ce que le ministre reconnaît qu'un des meilleurs moyens pour endiguer la contrebande est de réduire le taux excessif de taxation? Et qu'est-ce que le ministre répond au fait que le premier ministre du Québec revienne à la charge avec sa proposition?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, au mois de décembre, j'ai eu une conversation avec le premier ministre du Québec à ce sujet et les deux gouvernements, comme d'autres gouvernements, en discutent à ce moment-ci. Nous avons l'intention de prendre les dispositions qui s'imposent afin de réduire la contrebande dans les plus brefs délais.

M. Pierre Brien (Témiscamingue): Monsieur le Président, ma question supplémentaire s'adresse au premier ministre, puisqu'il semble avoir pris le contrôle de la période des questions cet après-midi.

Le premier ministre reconnaît-il que le taux excessif de taxation a fait perdre au Trésor public fédéral au moins 600 millions de dollars, selon les estimations du ministère des Finances pour l'année 1992 seulement et que de ce fait, les consommateurs de ce produit contribuent beaucoup moins au régime de soins de santé?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): C'est évident que les gouvernements, monsieur le Président, ont perdu des sommes considérables. C'est pourquoi nous avons décidé de consulter les gouvernements provinciaux pour s'attaquer au problème causé par ces contrebandiers, de concert avec le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. Si les deux gouvernements ne travaillent pas ensemble ou si l'un agit et l'autre pas, cela ne produira pas les effets escomptés. Alors nous tentons à ce moment-ci d'obtenir l'accord nécessaire afin d'agir collectivement, pour que l'action portant sur l'élimination de la contrebande soit très efficace.

* * *

[Traduction]

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien.

D'après le Sun de Toronto, le ministre aurait dit hier que le gouvernement va mettre en place d'ici six mois des programmes d'autonomie gouvernementale des autochtones.

Le ministre pourrait-il expliquer à la Chambre et aux Canadiens, plus précisément aux peuples autochtones, en fait, ce qu'il faut entendre par autonomie gouvernementale?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, j'ai annoncé hier six mois de discussions avec les provinces, les territoires et les administrations régionales afin de faciliter la mise en oeuvre du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale que notre gouvernement entend faire valoir.

Pour répondre à la question du député, je dirai qu'il s'agit d'une triple formule: autodétermination, autosuffisance et autonomie gouvernementale dans un Canada unique. Nous comptons faire preuve de justice et laisser place à un processus de guérison. Au bout du compte, c'est notre pays qui s'en trouvera amélioré.


104

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, nous voulons que notre pays soit amélioré.

Hier soir, aux actualités télévisées du réseau anglais de Radio-Canada, le ministre n'a pas précisé si cela voulait dire que le gouvernement va créer un troisième ordre de gouvernement, ce qui suscite un malaise certain au sein des provinces, des municipalités et chez les autochtones eux-mêmes.

Après une nuit de réflexion, le ministre dira-t-il aux Canadiens si la déclaration qu'il a faite hier signifie effectivement qu'on va créer un troisième ordre de gouvernement au Canada?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, on m'a posé la question hier soir à Radio-Canada. J'ai répliqué qu'il était difficile d'y répondre. Ce l'est toujours.

Nous n'avons pas l'impression que nous allons créer un troisième ordre de gouvernement. Nous estimons que nous allons élargir ce qui existe déjà en conséquence des traités Two Row Wampum conclus il y a des centaines d'années avec les autochtones, de la Constitution, de l'affaire Guerin et de l'affaire Sparrow. D'après notre gouvernement, le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale existe déjà. Nous le reconnaissons et nous entendons le mettre en oeuvre de façon juste et équitable d'ici les quatre prochaines années.

* * *

LES PÊCHERIES DE SAUMON

Mme Anna Terrana (Vancouver-Est): Monsieur le Président, c'est la première fois que j'interviens à la Chambre. Je tiens à vous féliciter de votre élection aux fonctions de Président de la Chambre des communes.

(1445)

En ce qui concerne l'interception du saumon, la balance semble pencher en faveur des pêcheurs américains depuis la signature du Traité sur le saumon du Pacifique en 1985, et la situation ne fait qu'empirer. Les pêcheurs des États-Unis profitent de l'augmentation du stock de saumon sockeye canadien tandis que les prises de saumon soho et chinook américain effectuées par des Canadiens continuent de diminuer.

En 1993, le Canada et les États-Unis ne sont pas parvenus à conclure un accord concernant des plans de gestion à long terme des pêcheries de saumon. Le plan de gestion d'un an qui avait été accepté a pris fin cette année. Jusqu'à maintenant, les négociations ont été longues et ardues.

Peut-on savoir où en sont les négociations?

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans): Monsieur le Président, je remercie la députée de Vancouver-Est pour son excellente question et l'intérêt qu'elle prête aux pêches.

Malgré tous les efforts que le gouvernement du Canada a déployés pour négocier avec les Américains des ententes concernant non seulement le conservation des stocks mais également la question du traitement équitable des pêcheurs que soulève la députée, c'est l'impasse.

Par conséquent, j'ai eu des discussions avec mes collègues, le ministre des Affaires étrangères et le ministre du Commerce international, ainsi que mes collègues de la Colombie-Britannique.

Après avoir écouté l'avis de notre négociateur et des représentants du Canada à la Commission des pêcheries du saumon du Pacifique, j'ai demandé à notre négociateur, Guy Fortier, d'informer son homologue américain que nous ne participerons pas à la prochaine ronde des négociations et qu'il sera impossible de faire des progrès dans ce domaine tant que les États-Unis ne seront pas disposés à négocier un accord garantissant un traitement équitable à tous.

Notre gouvernement se soucie de la conservation des stocks et de la mise en oeuvre d'un plan de gestion raisonnable, certes, mais il veut également défendre les intérêt des pêcheurs canadiens en Colombie-Britannique.

* * *

[Français]

LA CONTREBANDE DE CIGARETTES

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Monsieur le Président, ma question s'adresse au solliciteur général du Canada.

J'ai appris, avec stupéfaction hier, au Téléjournal, que des dépanneurs de Saint-Eustache, acculés au pied du mur, allaient ouvertement défier la loi pour vendre des cigarettes de contrebande dans leur commerce. C'est là une preuve évidente que la population est de plus en plus impatiente devant l'inaction du gouvernement pour régler ce problème de contrebande.

Ma question est celle-ci: Le ministre a-t-il l'intention de faire intervenir aujourd'hui la GRC afin que la loi soit respectée à Saint-Eustache?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, j'enquêterai auprès de la GRC au sujet de la question de l'honorable député. Je pense, comme lui, que nous devons faire respecter la loi et je lui donnerai une réponse plus complète aussitôt que possible.

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Monsieur le Président, dans ce cas-là, est-ce que le ministre pourrait également me dire ce qu'il entend faire pour faire respecter la loi, à la fois par tous les Canadiens, y compris par des contrevenants qui, à huit kilomètres de Saint-Eustache, d'une façon très claire, mais illicite, font de la vente de cigarettes un commerce?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, nous avons l'intention de faire respecter la loi par tous les citoyens de ce pays.


105

[Traduction]

INVESTISSEMENT CANADA

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie, et je reconnais qu'elle se rapporte à quelque chose qui s'est passé sous le gouvernement précédent.

Selon le rapport du vérificateur général, le président d'Investissement Canada a dépensé 132 000 $ de l'argent des contribuables pour rénover une salle de bains et une cuisinette dans son bureau. Le week-end dernier, on annonçait une maison à vendre pour 105 900 $ dans le Citizen d'Ottawa.

Le ministre peut-il rassurer la Chambre et expliquer quelles mesures précises son ministère prend pour freiner enfin ces dépenses extravagantes et ce gaspillage éhonté des deniers publics?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, je suis heureux que le député ait posé cette question parce qu'il me donne ainsi l'occasion de lui souligner que, à mon avis, chaque dollar que nous recevons des contribuables canadiens est d'une importance vitale et que notre façon de dépenser cet argent peut toujours être remise en question.

Je considère cette dépense comme extravagante et injustifiée.

(1450)

Je tiens à rappeler au député qu'il y a eu un changement d'équipe et que nous allons prendre des mesures pour améliorer la situation.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest): Monsieur le Président, j'ai une question supplémentaire à poser.

Je remercie le ministre de sa réponse. Je me demande toutefois s'il pourrait dire à la Chambre si le président d'Investissement Canada a dû rendre compte de cette dépense. Comment une personne qui occupe un poste aussi important peut-elle gaspiller de l'argent de cette façon et arriver quand même à faire preuve de parcimonie dans son travail quotidien?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, je sais que le fonctionnaire qui a autorisé cette dépense n'est plus dans mon ministère. Cependant, il a été dit clairement à tout le personnel du ministère que les dépenses de ce genre sont inacceptables.

* * *

[Français]

L'ÉQUIPE OLYMPIQUE DE HOCKEY

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien.

Hier, dans sa participation au débat sur le discours du Trône, le premier ministre n'a cessé de souligner la place des Québécois et des francophones dans l'ensemble des institutions canadiennes. Ce matin on pouvait entendre le ministre des Affaires étrangères répéter que les Québécois étaient bien traités au Canada. Pourtant, au sein de Hockey Team Canada qui va défendre l'honneur du Canada aux Jeux olympiques de Lillehammer, les Québécois sont encore une fois absents.

Ma question est la suivante: Le ministre peut-il expliquer pourquoi Hockey Team Canada n'a aucune place pour un représentant du Québec, et quelles mesures concrètes il entend prendre afin de mettre un terme, une fois pour toutes, à cette discrimination indécente?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, je remercie notre collègue de me donner cette occasion de rendre hommage aux athlètes canadiens qui vont aller montrer leurs talents aux XVIIe Jeux olympiques d'hiver à Lillehammer. Je crois qu'ils vont là, incidemment, pour gagner des médailles dont nous serons tous fiers, pas pour faire de la politique.

Comme notre collègue de Verdun-Saint-Paul nous le disait tout à l'heure, l'Association canadienne des jeux olympiques, un peu plus tôt aujourd'hui, a donné la liste des athlètes qui se rendaient à Lillehammer. Cette liste, qui a été publiée il y a quelques heures, indique clairement qui participera, et j'ai le grand plaisir de constater qu'il y a plus de 30 p. 100 de ces athlètes qui sont d'origine québécoise.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): J'ai une question supplémentaire, monsieur le Président. Si je comprends bien, monsieur le ministre, peut-être parce que vous avez vécu comme ambassadeur à l'extérieur du pays, mais le hockey c'est notre sport. . .

Le Président: Il faut toujours s'adresser à la Présidence, s'il vous plaît.

Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, doit-on comprendre que le ministre s'en lave les mains et qu'il ne prendra aucune mesure concrète pour corriger les injustices flagrantes à l'endroit des Québécois, à commencer par Mario Lemieux, Alexandre Daigle, qui n'étaient pas assez bons. . .

M. Ouellet: Ce sont différentes équipes.

Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata): . . .pour jouer dans l'équipe de Team Canada.

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, je condamne quand il y a des raisons de condamner, mais la règle du jeu c'est que l'équipe olympique de hockey ne déclare ses joueurs que quelques heures avant le premier match. Ils sont encore en train de recruter, et lorsque le recrutement sera terminé, alors nous passerons des jugements.

* * *

[Traduction]

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien.


106

(1455)

Le rapport du vérificateur général signalait hier que le programme quinquennal de développement économique des autochtones, au coût d'un milliard de dollars, visant à remédier aux inégalités économiques entre les autochtones et les autres Canadiens, présentait au moins trois graves lacunes. Il pèche par manque de leadership et d'imputabilité, il manque de plans de mise en oeuvre globale et il témoigne d'un manque de coordination. Le discours du Trône laissait par ailleurs entendre que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien allait proposer d'autres nouveaux programmes.

Je voudrais que le ministre assure à la Chambre qu'il fera enquête sur les lacunes antérieures du programme et prendra des mesures pour y remédier avant de dépenser davantage de deniers publics pour en arriver aux mêmes résultats.

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, le programme de développement économique des autochtones relève de la compétence du ministère de l'Industrie. Je tiens à dire au député que nous nous efforçons de surveiller très attentivement l'application des fonds à ce programme.

Le député devrait savoir qu'une étude effectuée par la firme de consultants indépendante Goss Gilroy en est arrivée à la conclusion que le programme de développement économique des autochtones était très fructueux. Maintenant que nous connaissons le jugement du vérificateur général, nous avons évidemment l'occasion d'examiner ce qu'il en pense et de veiller à ce que ces programmes donnent des résultats.

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, je voudrais répéter ma question au ministre. Le ministre peut-il nous donner l'assurance qu'il fera enquête sur les lacunes antérieures du programme avant de mettre en oeuvre les nouveaux programmes auxquels le discours du Trône faisait allusion?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Oui, monsieur le Président, nous ferons enquête.

* * *

LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

M. Stan Dromisky (Thunder Bay-Atikokan): Monsieur le Président, le premier ministre peut-il donner aux Canadiens l'assurance qu'il réexaminera les politiques et programmes de rationalisation du gouvernement précédent, lesquels ont entraîné la perte de milliers d'emplois dans la fonction publique, et que, dans la mesure du possible, il les modifiera ou les supprimera carrément afin que la qualité des services offerts dans la fonction publique cesse de se détériorer et que les personnes directement touchées cessent de souffrir et de vivre dans l'incertitude?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir dire que nous avons déjà pris des dispositions en ce qui concerne la réorganisation.

Nous sommes revenus sur certaines décisions prises par le gouvernement précédent afin d'améliorer les relations avec la fonction publique et la qualité de vie des fonctionnaires. Nous poursuivons nos efforts en ce sens.

La suppression des postes de chefs de cabinet et la réduction du nombre de ministères ainsi que la déclaration du premier ministre, selon laquelle un ministre ne peut bien s'acquitter de ses fonctions sans le concours de ses fonctionnaires, ont contribué à améliorer les relations et nous aident maintenant à mieux administrer les affaires du pays.

* * *

[Français]

L'ÉQUITÉ SALARIALE

Mme Christiane Gagnon (Québec): Monsieur le Président, ma question s'adresse au président du Conseil du Trésor.

Statistique Canada a dévoilé cette semaine les statistiques les plus récentes par rapport au salaire moyen des Canadiens et des Canadiennes. L'écart entre le salaire moyen annuel gagné par un homme en 1992 et celui d'une femme est frappant: 39 468 $ pour un homme, comparativement à 28 350 $ pour une femme, soit un écart de 11 000 $.

Ma question est la suivante: Le ministre a-t-il des propositions concrètes à avancer pour rectifier cette grave injustice envers les femmes dans tous les secteurs de l'économie qui relèvent de sa compétence?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure): Monsieur le Président, je remercie la députée de sa question, car celle-ci concerne un engagement que le gouvernement a pris et qui lui tient à coeur. Au chapitre de l'équité salariale, c'est-à-dire de l'équité en matière d'emploi, le gouvernement veut en effet donner à tous les Canadiens et Canadiennes la possibilité de gravir les échelons de la fonction publique fédérale.

Les mêmes statistiques citées par la députée montrent aussi une amélioration de la situation. Même si nous avons encore des progrès à faire, je dois dire que nous sommes déterminés à respecter notre engagement.

(1500)

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec): Monsieur le Président, si j'ai bien compris, le ministre s'engage envers ses propres employés de la fonction publique à donner l'exemple au niveau de l'équité salariale.

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure): Oui, monsieur le Président.


107

LES ESSAIS DE MISSILES DE CROISIÈRE

M. Svend J. Robinson (Burnaby-Kingsway): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Il a dit qu'il était important que les libéraux tiennent les promesses qu'ils ont faites lorsqu'ils étaient dans l'opposition.

Ma question concerne une promesse du député de Winnipeg-Sud-Centre, selon laquelle le Parti libéral allait reconnaître la fin de la guerre froide et s'opposer aux essais de missiles de croisière au Canada.

Le premier ministre respectera-t-il la promesse qui a été faite aux Canadiens et annulera-t-il les essais de missiles de croisière ou, à tout le moins, acquiescera-t-il à la demande que le député de Winnipeg-Sud-Centre a faite le 15 février dernier, lorsqu'il a préconisé la tenue d'audiences parlementaires complètes qui permettraient aux habitants du Nord, aux autochtones et aux groupes pacifistes de se prononcer sur cette question très importante pour les Canadiens, au lieu que cela demeure la prérogative exclusive des politiciens dans le cadre d'un débat parlementaire?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, un débat sur cette question aura lieu très prochainement à la Chambre, et une annonce à ce sujet pourrait être faite plus tard aujourd'hui ou demain. Comme nous l'avons dit, nous voulons revoir cette politique, mais nous voulons aussi savoir ce que tout le monde en pense.

La question sera débattue à la Chambre de communes. Nous voulons tenir un débat sur les orientations en matière de défense nationale et discuter brièvement des décisions à prendre. Un engagement a été pris en août ou en septembre dernier, mais nous voulons réévaluer la situation. La question sera pleinement débattue à la Chambre. Par ailleurs, je suis certain que les membres des comités seront tout à fait disposés à entendre les témoignages des autres groupes désireux de se prononcer sur la question avant qu'une décision ne soit prise.

* * *

L'AÉROPORT INTERNATIONAL PEARSON

M. John Nunziata (York-Sud-Weston): Monsieur le Président, m'entendez-vous bien?

Le Président: Nous vous entendons où que vous soyez.

M. Nunziata: Monsieur le Président, il m'a fallu près de dix ans pour accéder à la première rangée. Le seul inconvénient, c'est que je suis maintenant juste à côté de la porte.

Le Président: Le député voudrait peut-être poser une question aujourd'hui?

M. Nunziata: Je vous remercie. En fait, j'en aurais beaucoup à poser, mais il y a cet obstacle qui m'en empêche.

Trêve de plaisanteries, monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports et concerne l'indemnisation à verser par suite de l'annulation du contrat visant l'aéroport Pearson.

Comme le ministre le sait, il a été démontré que le contrat était déraisonnable parce qu'il a été signé au beau milieu de la campagne électorale, après que le chef de l'opposition de l'époque et actuel premier ministre eut signalé aux promoteurs le risque d'annulation du contrat.

Par conséquent, le ministre n'est-il pas d'accord pour dire qu'il ne faut pas indemniser l'autre partie ou, à tout le moins, fera-t-il le nécessaire pour qu'elle ne soit pas indemnisée pour les bénéfices perdus et les honoraires de lobbyistes? Par ailleurs, présentera-t-il un projet de loi à la Chambre pour annuler le contrat si les conditions d'annulation de ce dernier vont à l'encontre de l'intérêt public?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports): Monsieur le Président, nous avons décidé d'annuler l'entente concernant l'aéroport Pearson comme le recommandait M. Nixon. Le député a certainement lu le rapport à ce sujet avec beaucoup d'intérêt, comme bon nombre d'entre nous du reste.

Les paramètres du rapport indiquent clairement que l'indemnité devrait être très limitée. Or, je suis persuadé que le négociateur compétent qui a été nommé saura protéger les intérêts des contribuables canadiens. S'il était toutefois impossible d'en arriver à une entente satisfaisante, le gouvernement présenterait un projet de loi pour remédier à cela.

* * *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je signale aux députés la présence à la tribune de l'honorable Chuck Furey, ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie de la province de Terre-Neuve et du Labrador.

Des voix: Bravo!

(1505)

[Français]

Le Président: Je désire également souligner la présence à la tribune de l'honorable Gérald Tremblay, ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie, de la province de Québec.

Des voix: Bravo!

[Traduction]

Le Président: Chers collègues avant que nous ne passions à d'autres travaux de la Chambre, nous avons été invités à rendre hommage à un ancien député et président suppléant, M. Steve Paproski.


108

LE DÉCÈS DE L'HONORABLE STEVE PAPROSKI

L'hon. Anne McLellan (ministre des Ressources naturelles): Monsieur le Président, je suis persuadée que beaucoup de députés voudront prendre quelques minutes pour évoquer le souvenir d'un député très aimé de tous qui a représenté pendant de longues années la ville d'Edmonton et qui est décédé soudainement vers la fin de l'automne dernier.

L'honorable Steve Paproski était tout enfant lorsqu'il est arrivé de Pologne à Edmonton. Jeune homme, tout en se taillant une belle carrière dans le monde des affaires, il a été un joueur populaire de notre équipe championne de football, les Eskimos.

Il a été élu aux Communes en 1968, et il a pris sa retraite avant les dernières élections, après sept victoires électorales consécutives. Député pendant un quart de siècle, il a été whip en chef de son parti, ministre du Conditionnement physique et du Sport amateur et président suppléant à la Chambre.

Il comptait des amis non seulement dans son propre parti, mais dans toute la députation. Bien que ses moyens aient été comparables à ceux de quiconque et supérieurs à ceux d'un grand nombre, il savait s'abstenir de toute insulte et de toute attaque personnelle dans le feu des débats politiques. Il était intimement convaincu que tous les députés ont le droit d'exprimer leur point de vue et que tous sont soucieux de servir leur pays.

Il était très fier de ses origines polonaises, mais, et cela était typique de sa conception de la vie, il est devenu célèbre pour ses réceptions de la Saint-Patrick.

Steve Paproski était, dans tous les sens du terme, un grand homme. Tant à Edmonton qu'à la Chambre des communes, sa générosité de coeur était sans égale et elle se traduisait par des gestes concrets. Il était un père de famille fier, un pilier pour son Église, un serviteur dévoué de ses concitoyens.

Il est regrettable qu'il n'ait pas vécu assez longtemps pour jouir de cette retraite qu'il abordait avec enthousiasme. Sa personnalité chaleureuse et joviale et ses sages conseils nous manqueront, tout comme ils manqueront à sa femme, Betty, à ses enfants et à ses petits-enfants.

[Français]

M. Louis Plamondon (Richelieu): Monsieur le Président, je voudrais également, au nom du Bloc québécois, rendre hommage à notre ami Steve. J'ai eu l'honneur de le connaître et de le côtoyer, mais surtout de l'apprécier, de 1984 à 1993.

En 1984, pour les nouveaux députés conservateurs, il fut un conseiller précieux, un motivateur exceptionnel, et il a contribué beaucoup à notre apprentissage des règles de la Chambre et du parlementarisme britannique.

À titre de vice-président des comités pléniers de la Chambre, il a su obtenir immédiatement le respect de tous les parlementaires. Patient, impartial, gentilhomme, connaissant bien les règlements de la Chambre, il savait toujours trouver les mots, l'amabilité et l'argumentation justes pour faire accepter ses décisions.

À mes premiers pas comme leader du Bloc québécois-c'était pourtant un parti qui n'était pas reconnu-chaque fois que je lui demandais une rencontre pour réclamer des droits, il me recevait toujours de façon aimable et de façon affable. C'est à ce moment-là que j'ai appris à apprécier cet homme, homme sincère, démocrate, humaniste, intègre, faisant toujours passer les intérêts de la Chambre et des individus qui y siègent avant tout.

Je voudrais terminer en disant un mot à sa famille. Nous comprenons votre douleur et le lourd chagrin que vous ressentez. Que d'interrogations, que de questions ont dû passer par votre tête pour essayer de comprendre et d'accepter que quelqu'un de si près de vous puisse mourir.

(1510)

Y a-t-il une réponse acceptable lorsqu'une telle tragédie croise notre chemin? Je ne crois pas. Il n'y a que le courage et la détermination de poursuivre sa vie, avec l'assurance que, de l'autre côté, il est toujours fier de nous.

Le grand auteur français Alexandre Dumas disait un jour: Ceux que nous avons aimés et que nous avons perdus ne sont plus où ils étaient, mais ils sont toujours et partout où nous sommes.

Bon courage à toute la famille de Steve. Nos condoléances les plus sincères. Merci à toi, Steve, pour ton incommensurable apport à la démocratie canadienne.

[Traduction]

Mme Deborah Grey (Beaver River): Monsieur le Président, c'est avec plaisir, mais aussi avec tristesse, que je prends la parole au nom de mon parti pour rendre hommage à Steve Paproski, qui a fait une contribution à la Chambre.

Il est né en septembre 1928 et nous a quittés le 3 décembre 1993. C'est un ami que tous les députés et les Canadiens ont perdu.

Il a déjà été fait mention de sa femme, Betty, et de ses cinq enfants, Patrick, Peter, Anna Marie, Alexandra et Elizabeth. Même si plusieurs semaines se sont écoulées depuis le départ de Steve, nous devons prendre conscience que sa femme et ses enfants ressentent encore vivement, quoiqu'avec moins d'acuité, la douleur que leur cause le décès de cet être aimé.

Quand ils jettent un coup d'oeil à la carrière professionnelle de Steve Paproski, ceux d'entre nous qui sont fiers des Eskimos d'Edmonton savent sûrement que Steve était connu partout pendant les années où il a porté les couleurs de cette équipe comme joueur de ligne, soit de 1949 à 1954. Ces années-là ont sans doute été électrisantes pour lui.

Je l'entends encore crier aussi fort que nous pour les Eskimos le jour du match de la Coupe Grey: «Go Esks, go.» Quelle façon merveilleuse pour lui de suivre son dernier match de la Coupe Grey.

Il était directeur général des ventes à la société Alberta Concrete Products et a été élu député en 1968, comme il a déjà été dit. Il a passé 25 ans à la Chambre des communes.


109

Comme chacun sait, il a décidé de ne pas solliciter un nouveau mandat aux dernières élections. Je suis sûre que c'était une décision bien mûrie. Il a choisi lui-même de prendre sa retraite plutôt que d'y être forcé plus tard.

Je n'ai que de bons souvenirs de Steve Paproski, et ils sont légion. Je voudrais le dire sans équivoque. Son sourire était sans doute sa principale marque de commerce, et je l'aimais bien ce sourire quand je venais à la Chambre au cours de mon mandat précédent. Il était bon de voir quelqu'un qui soit encore capable d'arborer un sourire malicieux face à tout ce qui se passait dans cette enceinte.

Le souvenir le plus vivace que j'aie de Steve Paproski, c'est lorsqu'il annonçait les pour et les contre. Puis il disait: «À mon avis, les non l'emportent.» Le ton de sa voix était si relaxant que je n'oublierai jamais ces mots qui sonnent encore à mes oreilles: «À mon avis, les non l'emportent.»

L'an dernier, Steve Paproski a appelé mon nom et j'ai pensé qu'il allait me donner la parole. Évidemment, c'était alors très excitant que de se faire donner la parole par la Présidence. Il m'a demandé si une localité donnée était dans ma circonscription. Il a nommé une petite localité. J'ai répondu que oui, qu'elle se trouvait à tant de kilomètres de chez moi et qu'elle comptait un petit secteur résidentiel.

Il a dit qu'il venait tout juste d'acheter un terrain dans ce secteur et que j'allais être sa nouvelle députée. Il se demandait bien comment il allait expliquer cela. Nous avons bien ri à ce sujet.

Tout dernièrement, cet automne, j'ai reçu un appel de Steve qui m'appelait de l'Ouest pour me féliciter pour mon mariage et ma réélection. J'étais très contente de lui parler. J'ignorais que c'était la dernière fois. Ces souvenirs sont précieux et je les chéris.

Le dernier souvenir que j'ai de Steve, c'est quand j'ai acheté le journal après le lunch et la messe à Edmonton le dimanche 5 décembre. Avant même de sortir le journal de la distributrice, j'ai lu les gros titres qui disaient que Steve Paproski venait de mourir d'une crise cardiaque.

Mon propre coeur a bien failli arrêter de battre. Quelque chose d'horrible venait d'arriver, et personne n'y pouvait rien, ni moi, ni sa famille, ni personne d'autre. Il n'était plus. Il est décédé, mais son souvenir restera toujours bien vivant parmi nous.

(1515)

Au nom de mon parti et de tous les députés, je voudrais exprimer mes condoléances à sa femme, Betty, et à sa famille. Comme je l'ai dit pour d'autres à la Chambre, je remercie encore la famille Paproski de nous avoir prêté Steve.

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke): Monsieur le Président, je prends la parole au nom de collègues qui ont siégé avec Steve Paproski. Je parle aussi au nom d'un parti politique qui a eu l'honneur de compter M. Paproski comme candidat, comme député et même, à un moment, comme ministre.

En dernier, monsieur le Président, comme vous le savez, il était parvenu au rang d'un des plus grands honneurs, celui que l'on confère à la personne qui s'assoit dans le fauteuil que vous occupez. Il était un des présidents suppléants.

Non seulement Steve Paproski a eu la chance de siéger dans cette enceinte et de contribuer à la vie politique nationale, mais il a aussi été, on l'a mentionné, un athlète. Il y a d'autres faits marquants de sa carrière qui ne sont pas aussi connus, comme la bourse qu'il avait obtenue pour poursuivre des études à l'Université d'Arizona.

Je devrais parler aussi de quelque chose que j'ai appris à l'occasion de l'éloge funéraire prononcé par Son Excellence le Gouverneur général. Pendant ses études, sa bourse étant modeste, il arrondissait ses fins de mois en se produisant de temps à autre comme lutteur amateur. Il devint un amateur connu sous le nom de Masked Marvel. Son adversaire était souvent un certain Gene Kiniski. Si Gene gagnait un jour, invariablement c'était Steve qui gagnait le lendemain, par pure coïncidence, naturellement. Dans certains combats à quatre, ils ont d'ailleurs fait équipe. Je dois dire que cela me paraît une excellente préparation pour venir ici. D'ailleurs, j'ai moi-même ma coéquipière ici, aujourd'hui.

Ce qui était également remarquable chez Steve Paproski, c'est qu'il aimait et comprenait la Chambre. Je me rappelle qu'à mon arrivée ici, en 1984, j'ai eu aussi le privilège d'être président suppléant. Vu que nous avions d'autres fonctions et que j'étais le plus jeune, on me réservait souvent le vendredi et il m'est arrivé fréquemment d'aller voir Steve pour lui demander s'il pouvait me remplacer. Selon son habitude, familière à ceux qui le connaissaient, il s'asseyait dans son fauteuil et disait: «Alors, jeune homme, qu'est-ce qu'il y a, aujourd'hui? Qu'est-ce que tu veux?» Il bougonnait un peu, mais il disait toujours oui. C'est dire que j'ai bénéficié plus d'une fois de sa générosité.

Tout ce dont nous voudrions nous souvenir de Steve, c'est de sa joie de vivre, de sa conviction que ce pays était vraiment une terre privilégiée. Aussi souvent qu'il le pouvait, il faisait visiter aux gens le magasin que son père avait ouvert à Edmonton. Steve était né en Pologne. J'ai lu son premier discours à la Chambre des communes. Il mentionne ses origines polonaises et son expérience de la liberté, quelque chose que les gens nés ici tiennent pour acquis. Lui savait ce que cela signifie de pouvoir siéger à cet endroit et même de devenir ministre. Ce qu'il disait est révélateur de la nature de Steve Paproski, mais aussi de notre pays.

Pour terminer, je désire présenter mes sincères condoléances à Betty et à ses enfants, mais le faire avec un sourire, car Steve Paproski, dans sa vie, a distribué des millions de sourires. Il nous laisse des souvenirs mémorables.


110

(1520)

M. Nelson Riis (Kamloops): Monsieur le Président, je me joins aux autres députés pour dire combien la nouvelle du décès de Steve en décembre nous a affligés.

Steve était un député pas comme les autres. J'avais observé que chaque fois qu'il occupait le fauteuil, il semblait entouré de gens qui conversaient, qui passaient et repassaient, qui racontaient de petites histoires et ainsi de suite. Comme mon collègue le faisait remarquer, Steve avait toujours une bonne anecdote à nous raconter sur sa vie.

Un jour, il m'a dit qu'après sept élections, il avait trouvé une stratégie pour ses campagnes. Lui ayant demandé d'où lui venait son succès, il m'a révélé son secret: «Il faut passer beaucoup de temps dans son coin de pays, Nelson. Il faut connaître son monde. Ainsi, quand je fais campagne, en bordure de l'autoroute, je plante simplement une pancarte sur laquelle on peut lire «Steve s'en vient». De cette façon, tout le monde sait qui est Steve.» Il saluait ses électeurs le matin lorsqu'ils se rendaient au travail ou le soir lorsqu'ils rentraient à la maison.

Voilà le genre d'homme qu'il était. Tout le monde savait qui était Steve Paproski lorsqu'il se présentait dans sa circonscription. Dans cette enceinte, nous nous sentions tous très près de Steve Paproski. Et ce qui explique les nombreuses années qu'il a passées ici, c'est le type d'homme qu'il était, sa personnalité.

Il aimait sa famille. Il aimait sa femme et ses enfants. Et ceux-ci le lui rendaient bien. Il avait un immense appétit de vivre. On a parlé de son sourire. Il avait toujours l'air heureux. Il avait toujours un mot gentil et accueillait tout le monde à bras ouverts. Je considère qu'il était un grand inspirateur pour nous tous. Dans les moments difficiles à la Chambre, il savait ramener le calme par une petite remarque humoristique.

Nous regretterons Steve Paproski. Certes, tous ceux qui l'ont connu le regretteront. Le Canada le regrettera. Il a fait tant de bien autour de lui. Néo-canadien, élu à sept reprises, il a servi la Chambre et son pays, le Canada, de tellement de façons.

Nos coeurs et nos prières vont aujourd'hui à son épouse Betty et à ses enfants.

M. David Berger (Saint-Henri-Westmount): Monsieur le Président, moi aussi je me souviens fort bien de Steve Paproski. Je me rappelle son sourire. Je me rappelle ses yeux pétillants, dont des députés ont parlé ici aujourd'hui. Je me souviens que lorsqu'il présidait la Chambre, il était très cordial et très respectueux envers tous les députés. Il était toujours prêt à encourager quelqu'un.

Comme Steve, j'ai des antécédents dans le football. Il y jouait, tandis que j'étais dans l'administration. Je lui parlais souvent de ce sport. En cette période de bouleversements dans le football canadien, je crois qu'il vaut la peine de mentionner que Steve rêvait du jour où le football canadien retournerait à Montréal.

[Traduction]

Il me demandait souvent pourquoi nous ne pourrions pas ramener à Montréal une équipe que nous serions allés gérer. S'il y a une chose qu'il aurait préférée à son poste de député, c'est bien de gérer une équipe de football.

Des députés ont parlé de ses convictions à l'endroit du Canada. Si je me souviens bien, lorsqu'il était ministre, il était chargé de transférer Lotto Canada aux provinces, et je pense qu'il l'a toujours regretté. Il comprenait que nous avions besoin d'institutions nationales pour garder les Canadiens unis, pour cimenter un peu le pays.

Je voudrais me joindre à tous les autres députés pour exprimer mes condoléances et rendre hommage aux membres de sa famille.

M. John Loney (Edmonton-Nord): Monsieur le Président, je me joins moi aussi aux autres députés pour présenter à la famille du regretté Steve Paproski non seulement mes condoléances personnelles, mais également celles des électeurs d'Edmonton-Nord, la circonscription qu'il a servie avec loyauté au cours de son long mandat.

Nul hommage ne peut être plus éloquent que celui qu'ont rendu à Steve Paproski non seulement les nombreux amis qui sont venus lui dire un dernier adieu à l'occasion du service religieux, mais également les gens d'Edmonton-Nord, qui ont pleuré sa disparition.

(1525)

J'aimerais ajouter que Steve Paproski était respecté et aimé du personnel de la Chambre des communes. À sa famille et à ses amis, je voudrais dire que de l'avoir connu a été pour nous un honneur.

M. William Blaikie (Winnipeg Transcona): Monsieur le Président, on a dit beaucoup de choses à propos de Steve. Je ne suis pas ici pour les redire.

J'estime qu'il serait bien, puisque la nouvelle législature entre dans sa deuxième ou troisième journée, de profiter de l'occasion du décès de Steve pour rappeler aux nouveaux députés et aux Canadiens l'esprit de collégialité sous-jacent qui règne depuis longtemps à la Chambre, un esprit de collégialité dont Steve Paproski était le meilleur symbole, l'incarnation même. C'est un endroit où les partis forment entre eux des liens d'amitié, où la coopération tient une place importante et où de nombreux députés entretiennent le même type de relations que celui dont on a parlé aujourd'hui entre Steve Paproski et d'autres députés.

Une des choses regrettables de la vie publique et de la vie parlementaire dans ce pays, c'est qu'on ne rapporte jamais ce genre de choses, que ce genre de choses n'attire jamais l'attention. Ce que nous pouvons faire de mieux pour honorer la mémoi-


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re de Steve Paproski, c'est de nous en souvenir et d'essayer de faire fond sur l'esprit qu'il a su instaurer au Parlement.

Tout le monde a parlé de ses yeux pétillants. C'était visible, et c'était un pétillement de malice. Nous en étions souvent les victimes. Il avait une façon de faire qui faisait sourire même ceux qui avaient l'impression de s'être fait avoir.

Je le regretterai assurément. Je ne pourrai, monsieur le Président, faire avec vous ce que j'avais coutume de faire avec Steve, à moins que vous ne compreniez l'ukrainien. Venant de Winnipeg, je le parle un peu et je pouvais dire parfois à Steve qui connaissait bien cette langue des choses que le hansard n'a jamais relevées. Cette possibilité que j'avais de m'adresser au Président dans notre code personnel va me manquer. Il m'appelait souvent Raspoutine, un nom qu'il aimait bien me prêter. En tant que député de Winnipeg Transcona, je tiens à faire savoir à sa famille que Raspoutine le regrettera, que nous le regretterons tous. Sa présence parmi nous pendant toutes ces années a été bénéfique pour le Parlement.

M. Leonard Hopkins (Renfrew-Nipissing-Pembroke): Monsieur le Président, je veux simplement dire que je suis d'accord sur tout ce qui a été dit aujourd'hui au sujet de Steve. Je le connaissais depuis son arrivée à la Chambre. C'était un grand ami, un homme extrêmement jovial, extrêmement gentil et, disons-le, très spécial. Il était très fier de ses origines polonaises et de ses antécédents.

Si je me souviens bien, il est venu un jour dans ma circonscription, dans le petit hameau de Wilno, la plus ancienne communauté polonaise du Canada. Les gens ne juraient que par lui.

Il a fait en coulisses beaucoup plus qu'aucun d'entre nous pour rapprocher les gens et créer de bons liens d'amitié.

Je remercie sincèrement son épouse, Betty, ses cinq enfants et ses petits-enfants d'avoir bien voulu nous laisser profiter de sa présence. J'adresse également à son épouse et à sa famille les condoléances de la communauté polonaise de ma circonscription, une communauté qui lui tenait beaucoup à coeur.

Nous, qui avons connu Steve, pouvons dire aujourd'hui que nous pensons à lui, à son épouse et à sa famille. Il aurait pu être un excellent joueur pour les Eskimos d'Edmonton, mais j'avoue qu'il a été un excellent joueur pour notre équipe sur la colline du Parlement. Il a sûrement été un excellent joueur dans sa circonscription. Nous ne jurions tous que par lui. À mon avis, nous avons vraiment de la chance d'avoir connu une personne qui laisse un tel souvenir.

(1530)

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Perfectionnement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, j'aimerais vous faire part d'un message que j'ai reçu. L'automne dernier, en ouvrant mon courrier, je suis tombé sur une note manuscrite de notre ami Steve, nous nous connaissions depuis 1968, disant ceci: «Ravi de savoir que tu es de retour. Tu peux compter sur moi quand je serai en ville. Je te donnerai quelques tuyaux maintenant que tu es de l'autre côté de la Chambre.»

J'ai mis la lettre dans ma serviette pour la montrer ce soir-là à ma femme qu'il connaissait très bien. Puis je me suis mis à parcourir les journaux, et c'est alors que j'ai vu l'annonce du décès de Steve. Je n'ai jamais eu l'occasion de le remercier.

C'est pourquoi, sachant que Steve, où qu'il soit, est probablement en train d'écouter ce débat, je veux lui dire merci pour toutes ces années qu'il a données à la Chambre, merci pour les bons conseils qu'il a prodigués à tous les députés. L'esprit des gens comme Steve Paproski est pour toujours avec nous en cette enceinte.

M. Svend Robinson (Burnaby-Kingsway): Monsieur le Président, j'aimerais ajouter rapidement quelques mots car, en notre qualité de députés, nous avons le privilège de pouvoir exprimer, dans cette Chambre, notre affection et notre respect pour notre collègue Steve Paproski et de pouvoir dire à quel point nous sommes attristés de son départ.

Je sais que de nombreux députés ont déjà mentionné que Steve faisait preuve de respect à notre égard. Je voulais simplement rappeler à la Chambre que Steve Paproski, en sa qualité de président suppléant et de député de cette Chambre pendant plusieurs années, a aussi traité avec beaucoup de respect et d'affection le personnel de la colline du Parlement: les messagers, les préposés de la cafétéria et tous ceux qui ne peuvent prendre la parole ici aujourd'hui.

J'étais sur la colline peu de temps après le décès de Steve. J'ai été étonné de voir le grand nombre d'employés qui étaient sincèrement bouleversés et parlaient du sentiment de perte qu'ils ressentaient à la suite de la disparition de leur ami, Steve Paproski. Je sais que tous ces gens voudraient que les députés de la Chambre fassent état aujourd'hui du respect que Steve, en sa qualité de président suppléant, mais aussi à titre personnel, portait à tous les employés de la colline.

C'était un grand homme, un homme fort et solide, mais très doux. On a déjà parlé de son sourire. J'ai appris il y a déjà longtemps que plus il souriait, plus vous deviez faire attention. Il avait un sourire contagieux, mais derrière ce sourire se cachait un esprit astucieux, perspicace et calculateur. On savait que s'il s'apprêtait à faire un bon coup ou à marquer un point, il souriait un peu plus. Il traitait tout le monde avec respect et adorait sa famille.

Au plan personnel, j'ai profondément apprécié l'appui qu'il m'a accordé au printemps de 1988, quand j'ai pris la décision de sortir du placard et de faire connaître mon orientation sexuelle. Ce ne fut pas facile, certains de mes collègues étaient très mal à l'aise à ce sujet. Je n'oublierai jamais que peu après ma déclaration, Steve m'a pris par l'épaule et m'a dit: «Tu sais Svend, je ne comprends pas vraiment ces choses-là, mais tu es mon ami et à mes yeux, tu demeures exactement la même personne.»


112

Il me manquera énormément. Je sais qu'il adorait sa famille et je tiens à offrir mes condoléances les plus sincères à Betty et aux enfants. Nous l'aimions tous beaucoup et sa disparition laissera un très grand vide.

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord): Monsieur le Président, je voudrais exprimer brièvement ma profonde sympathie et mes condoléances à la famille de Steve Paproski.

Je l'ai connu avant mon entrée en politique; c'était durant les années 1980, à l'époque du comité parlementaire itinérant sur la participation des minorités visibles au Canada. J'avais alors été frappé par son sens de la collégialité et son allure paternelle.

Lorsque je suis arrivé à la Chambre des communes en 1988 et qu'il m'a rencontré, il m'a abordé avec les mots suivants: «Comment allez-vous, mon gars». Je me suis alors dit que puisque j'étais un nouveau venu, l'expression était juste, mais il a continué de m'appeler ainsi jusqu'à la toute fin de la trente-quatrième législature. Ce fait illustre la bienveillance qui animait M. Paproski à l'égard de ses collègues à la Chambre.

Je me souviens qu'il nous disait que les députés de l'autre côté n'étaient pas des ennemis mais des adversaires et que le rôle de la Chambre consistait justement à tenir des débats animés sur des questions d'intérêt national.

Je tiens à exprimer à sa famille ma plus profonde sympathie et mes condoléances. Je suis convaincu que M. Steve Paproski s'est mérité une place de choix dans l'au-delà.

(1535)

Le Président: Je voudrais dire quelques mots au sujet de Steve Paproski qui a été pour moi un ami et un collègue précieux pendant de nombreuses années.

On me permettra de faire un petit aveu, à savoir qu'il m'arrive de temps à autre de faire de petits paris. Steve Paproski et moi-même avions l'habitude de parier l'un contre l'autre à l'occasion des finales de la Coupe Grey. L'enjeu n'était pas très élevé; le montant était à la portée de nos moyens. Steve prenait toujours pour Edmonton et si l'équipe d'Edmonton était éliminée, il prenait pour une équipe de l'Ouest. Évidemment, j'étais partisan d'une équipe de l'Est. Notre petit pari a débuté en 1974 et s'est poursuivi sans interruption jusqu'à l'an dernier.

Ma défaite de 1984 et mon absence jusqu'en 1988 ne nous ont pas empêchés de poursuivre dans la même veine. Lorsque l'équipe de l'Est gagnait, Steve m'envoyait un chèque de 5 $, et je faisais de même à son endroit lorsque l'Ouest l'emportait. Curieusement, Steve Paproski n'a jamais encaissé un seul de mes chèques.

Il accordait son amitié à tous les députés. Cet homme qui a occupé le fauteuil et présidé les débats de la Chambre était un homme chaleureux et bon. Il était comme nous un député de cette Chambre. Il fut certainement l'un des plus honorables et des plus aimés de nous tous.

Nous avons beaucoup à apprendre d'un homme comme Steve Paproski, notamment en ce qui concerne le service envers notre pays. Ce n'est pas à la légère que j'affirme qu'il fut un grand Canadien car il a aimé son pays de tout son coeur.

Je tiens à dire à son épouse et à sa famille, sans aucun doute au nom de tous les députés, que nous nous souviendrons de Steve dans nos prières. Que Dieu le bénisse. Nous Lui rendons grâce de l'avoir partagé avec nous pendant de nombreuses années.

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke): Monsieur le Président, je n'ai consulté personne, mais comme on n'a eu que des bons mots et des panégyriques sur le compte de notre ami Steve Paproski, je suggère au Président, si la Chambre y consent à l'unanimité, d'ajouter à notre compte rendu d'aujourd'hui les propos qu'a tenus Son Excellence le Gouverneur général au service funèbre de notre ami dont il était très proche.

Je pense qu'il serait bon de donner aux Canadiens la possibilité de lire ces paroles que le Gouverneur général a prononcées à la mémoire d'un ami et d'un collègue.

Le Président: La Chambre consent-elle à l'unanimité à ce que nous fassions inscrire l'éloge du Gouverneur général du Canada dans le compte rendu?

Des voix: D'accord.

* * *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Chers collègues, vous avez été fort patients avec moi jusqu'ici. Aujourd'hui, j'ai fait une erreur. Je veux m'en excuser et tenter de la corriger.

Le ministre du Tourisme et du Développement économique de Nouvelle-Écosse nous a honorés de sa présence à la tribune. Je n'ai pas reçu le message à temps. Quand on me l'a remis, nous étions déjà passés à un autre point de l'ordre des travaux.

J'espère que les députés de Nouvelle-Écosse qui sont toujours présents ainsi que le ministre accepteront mes excuses pour n'avoir pas signalé sa présence, comme j'aurais dû le faire. J'espère que vous me permettrez de me rattraper un peu plus tard, à cet égard.

Des voix: Bravo!

113

[Français]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

DÉCLARATION HEDBOMADAIRE

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, conformément à la tradition et aux habitudes de cette Chambre, à ce moment-ci de nos travaux, il convient de demander de façon habituelle à mon collègue, le leader du gouvernement à la Chambre, s'il veut nous donner quelque éclairage sur la poursuite des travaux pour cette semaine et la semaine prochaine?

(1540)

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, nous poursuivrons le débat sur l'Adresse aujourd'hui, demain et lundi. Le sous-amendement présenté par le député de Calgary-Sud-Ouest sera mis aux voix ce soir et l'amendement du leader de l'opposition officielle sera mis aux voix lundi soir.

Mardi, nous aurons un débat sur le maintien de la paix. Mercredi, la Chambre discutera des essais de missiles de croisière.

S'il y a des changements à l'ordre des travaux, j'en informerai évidemment dès que je le pourrai les leaders des autres partis à la Chambre.

M. Nelson Riis (Kamloops): Monsieur le Président, j'aimerais que le leader du gouvernement à la Chambre me dise s'il ne pourrait pas s'entendre avec ses collègues pour que tous les députés qui le désirent puissent prendre la parole dans les importants débats sur le maintien de la paix et les essais de missiles de croisière. Cela supposera qu'on passe outre aux contraintes de temps ou que l'on prolonge le débat en soirée.

Le premier ministre a déclaré aujourd'hui que la question serait débattue à fond et que tous les députés auraient l'occasion d'exprimer leur point de vue. Le leader du gouvernement à la Chambre aurait-il l'amabilité d'étudier cette possibilité avec ses collègues?

M. Gray: Monsieur le Président, j'ai déjà fait savoir à titre officieux aux leaders parlementaires du Parti réformiste et du Bloc québécois que le gouvernement se ferait un plaisir de donner son consentement pour que le débat se prolonge au-delà de l'heure normale d'ajournement mardi et mercredi prochains.

Je proposais de repousser l'ajournement jusqu'à 22 heures peut-être. Je ne verrais pas d'objection à laisser le débat se poursuivre tant qu'il y aura des députés qui voudront prendre la parole sur l'objet de ces deux débats spéciaux.


113

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE DISCOURS DU TRÔNE

REPRISE DU DÉBAT SUR L'ADRESSE EN RÉPONSE

La Chambre reprend l'étude de la motion: Qu'une Adresse soit présentée à Son Excellence le Gouverneur général en réponse au discours qu'il a prononcé à l'ouverture de la session; ainsi que de l'amendement et du sous-amendement.

Le président suppléant (M. Kilger): À la suspension de la séance, le député de Davenport avait terminé son intervention. Nous aurons maintenant une période de dix minutes réservée à vos questions et à vos commentaires.

[Français]

M. Jean H. Leroux (Shefford): Monsieur le Président, je voudrais d'abord féliciter le député de Davenport pour sa réélection. Je voudrais également dire à cette Chambre que j'ai bien apprécié les propos qu'il a tenus ce matin.

En effet, le député de Davenport nous a parlé qu'il était important de maintenir toutes les mesures sociales dont le Canada jouit présentement. Ce que j'ai apprécié le plus, lorsqu'il répondait à un député du Parti réformiste qui disait que les pensions pour personnes âgées n'étaient qu'une forme de bien-être social, c'est lorsque le député a répondu que ce n'était pas le cas.

Dans notre pays, recevoir un chèque ne veut pas dire qu'on soit riche. Dans la période que nous vivons actuellement, une période de crise intense, je pense qu'il ne faut pas couper-et cela on ne le dira jamais assez-dans les services et les mesures sociales. Le gouvernement doit s'attaquer plutôt aux abris fiscaux dont bénéficient les mieux nantis de notre société. Le gouvernement devrait couper dans le gras de l'administration et examiner point par point, budget par budget, l'administration publique. Il faut s'attaquer au chômage et non aux chômeurs.

En terminant, j'aurais une question à poser à mon honorable collègue, ayant oeuvré dans le domaine de l'enseignement pendant plus de 22 ans. J'aimerais poser cette question à mon collègue: Qu'est-ce que le gouvernement va faire, ou peut faire pour donner de l'espoir à nos jeunes qui terminent des études et n'ont pas de travail?

(1545)

M. Caccia: Monsieur le Président, je voudrais remercier le député pour son intervention, ainsi que pour la question qu'il a posée. J'espère que la réponse à sa question sera bien prise en considération lorsque le ministre des Finances présentera le Budget, dans lequel, nous espérons, la politique économique du Canada donnera un espoir aux jeunes qui cherchent du travail. Comme beaucoup le savent, on a lancé le programme des infra-


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structures municipales qui, j'espère, pourra donner l'occasion aux jeunes de travailler, ainsi qu'à tous les chômeurs de tous les âges.

Comme il l'a vu dans le discours du Trône, la ministre d'État à la Jeunesse est en train de lancer un programme d'emplois pour les jeunes, modelé sur l'ancien programme proposé et appuyé par le sénateur Hébert, qui a été bien accueilli par le public canadien, d'un bout à l'autre du pays. Je me réfère au programme Katimavik. J'espère que l'ensemble de cette initiative accordera une possibilité à la jeunesse du Canada de se trouver un emploi.

Naturellement, nous espérons que la politique du gouvernement et de mon parti correspondra bien aux aspirations socio-économiques de tous les députés de cette Chambre.

Mme Christiane Gagnon (Québec): Monsieur le Président, dans le discours du député de Davenport, il a été question de la crise de l'emploi et de la volonté du gouvernement d'y remédier. Permettez-moi de douter du bon vouloir du gouvernement quant à sa détermination de créer de l'emploi durable pour la grande majorité de la population.

Le discours du Trône, lu mardi, témoigne largement de l'inaction du gouvernement en matière de création d'emplois. À part le programme d'infrastructure, il n'y a rien de concret à cet égard.

Par ailleurs, le député de Davenport relevait tout à l'heure le manque de revenu de la population. J'abonde dans le même sens, mais j'aimerais donc revenir sur la question de l'équité salariale. C'est un enjeu majeur pour l'autonomie économique des femmes. Le président du Conseil du Trésor a affirmé qu'il verrait à l'application de la Loi sur les droits de la personne, particulièrement les disproportions touchant à l'équité salariale.

Donc, ma question est la suivante: Comment le président du Conseil du Trésor entend-il procéder, et surtout dans quel délai, en ce qui concerne la Loi sur les droits de la personne? Est-ce que le gouvernement actuel a l'intention de corriger les abus du gouvernement conservateur en ce qui touche l'application de l'équité salariale concernant la fonction publique fédérale?

M. Caccia: Monsieur le Président, je trouve cette question très intéressante et très complexe. Elle devrait être posée à la période des questions orales au ministre responsable. J'invite la députée à faire cela afin d'obtenir une réponse que je ne peux donner dans le peu temps dont je dispose. Mais de façon générale, ma réponse est la même que celle que j'ai déjà donnée au député de la circonscription de Québec-Est. On va attendre le Budget du ministre des Finances afin d'obtenir des réponses plus précises à cette question.

(1550)

[Traduction]

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest): Monsieur le Président, je félicite aussi le député de Davenport pour sa réélection. Comme membre de l'opposition, il a été très efficace. De toute évidence, il joue un rôle différent maintenant qu'il fait partie du gouvernement. Je lui demande, en tant que ministériel, de clarifier ses observations sur deux ou trois sujets.

D'une part, il a dit qu'il fallait préserver les programmes à l'intention des personnes âgées et aussi qu'il s'opposait aux allégements fiscaux. Approuverait-il son gouvernement qui envisage la possibilité de faire des coupes dans les programmes à l'intention des personnes âgées en s'en prenant aux REER? Ce programme bénéficie d'un bon financement et il est bien implanté au Canada. Est-il d'accord pour qu'on l'examine?

D'autre part, au sujet de la sécurité de la vieillesse, maintenant qu'il fait partie du gouvernement, approuve-t-il la disposition de récupération adoptée par la législature précédente à cet égard? S'attend-il à ce que le gouvernement retire cette disposition dans le prochain budget? Sinon, serait-il prêt à se prononcer contre ce budget?

M. Caccia: Monsieur le Président, au sujet de la mesure adoptée par le Parti conservateur vers la fin de la trente-quatrième législature, le REER a subi une telle distorsion qu'il offre un avantage fiscal considérable aux Canadiens à revenu élevé alors qu'il n'en offre aucun aux Canadiens moins fortunés. J'insisterai donc pour qu'on supprime cette distorsion et pour qu'on récupère les recettes fiscales au profit du Trésor public.

Quant à la sécurité de la vieillesse, je suis convaincu que la société bénéficie davantage d'un régime auquel tous ses membres contribuent et reçoivent une pension à l'âge de la retraite. Nous ne versons pas tous des cotisations directes au régime de sécurité de la vieillesse et je crois que les avantages de ce régime devraient être redistribués à tous les Canadiens de façon égale, sans tenir compte de leurs revenus.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier): Monsieur le Président, permettez-moi tout d'abord de m'adresser aux gens de la circonscription de Mercier qui m'ont donné, à moi et au Bloc québécois, une si forte majorité, un mandat si clair pour défendre, dans cette Chambre, leurs intérêts et ceux de tout le Québec. Je tiens à les remercier vivement de cette confiance qu'ils m'ont accordée et dont j'essaierai à tout moment de me montrer digne.

La circonscription de Mercier est cette circonscription de l'extrême est de Montréal qui a fortement souffert des transformations de l'économie mondiale, et c'est cette circonscription qui, en pleine transformation, aurait bien besoin de politique d'emploi, ce dont je m'appliquerai à parler cet après-midi.

Je ne peux m'empêcher, au début de ce premier discours dans cette Chambre, de souligner une certaine émotion qui m'étreint, cette Chambre issue de celle de l'union forcée de 1840 où les Patriotes, compagnons de Louis-Joseph Papineau, ont cessé de s'appeler «Canadiens» pour devenir des Canadiens français, en contrepartie des anglais devenus des Canadiens anglais.

Les Patriotes devenus Canadiens français n'avaient alors d'autre choix-et Lafontaine en était, on le sait, Laurier aussi-que celui de composer avec le gouvernement colonial et d'essayer de faire des alliances avec les députés du Haut-Canada. Et ils l'ont fait.


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(1555)

Je peux témoigner comme personne ayant fréquenté l'histoire et cherchant à y contribuer, que les Canadiens français ont tout fait pour tenter de prendre leur place au Canada. Comme individus, ils y sont parvenus dans certains cas, parfois au prix de l'assimilation. Comme peuple devenu québécois, non.

Monsieur le Président, permettez-moi à mon tour d'expliquer pourquoi une si grande partie des Québécoises et Québécois ne voient d'avenir pour le Québec que dans sa souveraineté. Je pense que pour les honorables députés de cette Chambre, ce n'est pas peine perdue. Il me semble qu'il est important qu'ils comprennent ce qui se passe dans cette partie du territoire canadien où logent 25 p. 100 de la population.

L'élection du Bloc québécois vient d'établir avec force que la mise en minorité du peuple canadien, devenu canadien-français puis québécois sur le territoire du Québec, n'est pas parvenue à éteindre sa volonté collective, au long des rebuffades constitutionnelles. Au contraire.

Les députés du Bloc québécois sont aujourd'hui l'opposition officielle parce qu'ils représentent ce peuple fondateur jamais reconnu comme tel. Les députés du Bloc québécois ne peuvent prendre le pouvoir ni gouverner le Canada mais ils peuvent exprimer cette vérité longtemps contenue et pourtant si extraordinairement importante pour tout le Canada: il y a deux pays au Canada. Le Québec, reconnu ou pas, est l'autre pays.

Monsieur le Président, ce n'est pas pour prendre sa revanche sur le passé que le peuple québécois, pour la première fois de son histoire, a élu pour le représenter à la Chambre des communes, le fort contingent de députés souverainistes qui se sont fait élire comme tels. C'est pour préparer l'avenir dans un Québec doté des pouvoirs suffisants, dans un Québec enfin capable de mettre ses capacités au service de ses immenses besoins.

Je veux donc aujourd'hui devant mes pairs, mes électeurs, les gens de Mercier et tout le Canada, dire d'abord la pauvreté et le chômage du Québec. À la description de cette pauvreté et du chômage québécois, vous comprendrez que nombeux sont les Québécoises et Québécois qui sont devenus souverainistes pour s'attaquer efficacement et rapidement à ce fléau. Il y a urgence, monsieur le Président.

Le chômage endémique du Québec, structurellement plus élevé que celui de l'Ontario, ne donne même pas une idée suffisante de l'effet dévastateur des politiques fédérales. Il faut parler, pour bien comprendre la différence entre l'Ontario et le Québec, du taux d'emploi, du nombre de personnes en âge de travailler, dans la population qui ont un emploi, pour bien comprendre l'écart de richesse et de développement qui sépare les deux provinces dites du centre qui ont été indistinctement la cible des attaques des autres provinces canadiennes.

Monsieur le Président, un fort taux de chômage, un faible taux d'emploi, mais aussi une portion démesurée des pauvres du Canada. Voilà le portrait qu'il faut dresser pour voir à quel point la condition économique a influencé l'orientation du développement social. Sans le portrait économique, les risques sont grands qu'on ne retienne de la participation du Québec dans le Canada que la proportion des dépenses sociales qui y sont faites. Il faut lire que c'est l'empêchement du développement économique qui a provoqué au Québec un état de sous-développement relatif qui a profondément marqué la société elle-même.

Un peu d'histoire. Le niveau de pauvreté au Québec, faut-il le rappeler, a été mesuré et comparé peut-être pour la première fois, certainement pour la première fois, avec celui du reste du Canada par la Commission Boucher. Certains s'en souviennent peut-être. La commission concluait en 1963 que le Québec avec alors 28 p. 100 de la population canadienne, comptait 36 p. 100 et un peu plus des sommes versées au Canada au chapitre de la nouvelle loi de l'assurance-chômage.

Eh bien, monsieur le Président, le rapport du Conseil scolaire de l'Ile de Montréal, rendu public cette semaine, présente des chiffres absolument dramatiques pour le Québec. J'en ai pris connaissance au complet hier soir.

(1600)

Pour la première fois depuis que Statistique Canada fait la cueillette de ces données, le Québec gagne le douteux championnat de la pauvreté canadienne. En effet, aussi bien pour la proportion que le nombre de familles vivant sous le seuil de faible revenu, le Québec arrive premier. Oui, devant Terre-Neuve et le Nouveau-Brunswick avec lesquels il disputait ce triste championnat. On retrouve donc au Québec un peu plus maintenant de 25 p. 100 de la population canadienne mais près du tiers des familles à faible revenu.

Les données tirées du recensement de 1991 montrent que la région de Montréal, parmi les 25 considérées, arrive aussi au premier rang des familles vivant sous le seuil de faible revenu. Et quand on parle de la région de Montréal, on comprend non seulement l'île mais la couronne qui est notablement et depuis longtemps plus riche. Alors cela donne une idée de ce qu'est le niveau de cette vie à Montréal même sur l'île et dans certains de ses quartiers. La situation est insoutenable. On peut en déduire que ces années de révolution tranquille, dont nous sommes si fiers au Québec, ont permis un développement, mais ce développement n'a pas changé la structure des rapports entre le Québec et le Canada et cette pauvreté du Québec et le sous-développement relatif sont un poids décisif dans l'orientation du développement social.

Le ministre des Ressources humaines comprendra donc tout le poids de l'intervention sociale de redistribution du Régime d'assistance publique du Canada qui finance à 50 p. 100 l'aide sociale et différents programmes à frais partagés dont s'enorgueillit le Canada. Or, ce régime, il faut le dire avec force, a lui-même joué dans le sens du maintien de la pauvreté au lieu de sa diminution. Globalement, il a accru la dépendance du Québec à l'endroit du Canada et des individus à l'endroit de la société.

Le Rapport Boucher, dans son analyse des causes de la plus grande pauvreté au Québec, en soulignait trois principales: le développement économique,-le PIB-la mauvaise santé et les mentalités. Sa principale conclusion appelait à ce qu'on nommerait aujourd'hui une politique de plein emploi. L'établissement du droit fondamental, pour lui, à une aide de dernier recours ne pouvait d'aucune façon permettre de s'attaquer à un niveau de pauvreté carrément inacceptable.


116

C'est toujours vrai. L'aide de dernier recours ne peut qu'être une aide de dernier recours. Mais, de souligner cette vérité m'oblige à dire que le Régime d'assistance publique du Canada a lui-même contribué à cette dépendance. Il a empêché, par exemple, le Québec de se faire rembourser à 50 p. 100 l'aide aux travailleurs à faible revenu que le gouvernement du Québec dans les années 1980 avait voulu instaurer pour aider les travailleurs à faible revenu à rester au travail. L'aide dispensée en vertu de ce régime ne pouvait en aucune façon s'adresser à des gens qui ne répondaient pas aux critères du test de revenu. En somme, le Canada ne subventionne l'aide aux pauvres qu'à la condition qu'ils n'essaient pas de s'en sortir ou qu'ils déclarent forfait et qu'ils décident d'arrêter de travailler au salaire minimum et prennent la décision monétairement intelligente de se mettre sur le BS, comme on dirait au Québec.

La gestion de l'assurance-chômage par le gouvernement fédéral a aussi entraîné une dysfonction dans l'utilisation des programmes sociaux encouragée par le gouvernement fédéral lui-même depuis les années 1970 par la création de programmes d'emplois subventionnés de courte durée et menant ensuite à l'assurance-chômage. Deux auteures bien connues au Québec pour leur travail sur le plein emploi, Lise Poulin-Simon et Diane Bellemare, dans leur premier bouquin Le plein emploi, pourquoi? soulignaient qu'aucun des deux gouvernements n'a d'intérêt budgétaire à investir dans la création d'emplois puisque l'autre niveau de gouvernement profite plus que lui de ces retombées. Constat important s'il en est.

Au-delà donc des effets absolument négatifs des politiques fédérales sur l'économie du Québec, les politiques de redistribution ont produit des effets pervers qui, loin de corriger les différences relatives, ont eu plutôt tendance à les maintenir et, par conséquent, à maintenir les personnes concernées dans la dépendance et la pauvreté.

(1605)

La Chambre comprend mieux, j'espère, que le Québec n'ait jamais cessé d'exiger le rapatriement de tous les pouvoirs dans le domaine de la sécurité du revenu, y compris la gestion de l'assurance-chômage. De son côté, le gouvernement fédéral a toujours voulu conserver le contrôle sur l'argent perçu par lui et redistribué en dépenses sociales, au nom de l'imputabilité, maintenant ou même accentuant ainsi constamment les écarts au lieu de les réduire.

Mais, en tant que critique des Ressources humaines, en tant que personne concernée par le sort du monde ordinaire et démuni où qu'il se trouve, ce ne sera pas que contre la pauvreté québécoise, que contre le chômage québécois que je voudrai lutter avec acharnement. Mais pour le faire efficacement, il faut identifier les bons moyens de s'y attaquer. La lutte au chômage et à la pauvreté est affaire de volonté collective. Cette lutte est donc intimement liée, qu'on le veuille ou non, aux structures de pouvoir. Elle suppose aussi l'implication des communautés. Les moyens préconisés au Québec et dans le reste du Canada ne seront donc pas nécessairement les mêmes. Pourtant, quelques grandes lignes semblent déjà se dégager.

La proposition faite récemment par la Economic Recovery Commission de Terre-Neuve, et reprise par le premier ministre de cette province, vient confirmer, à mon sens, la nécessité de gérer conjointement l'assurance-chômage et les divers programmes sociaux. Il faudra d'ailleurs voir, malgré l'intérêt manifesté par le ministre du Développement des ressources humaines, comment cette réforme serait faisable sans amendement à la Constitution et sans renégociation en profondeur du régime.

On peut actuellement penser d'ailleurs que la proposition de Terre-Neuve nécessite une gestion conjointe dirigée de la région, en tenant compte de ses caractéristiques particulières. Le premier ministre Clyde Wells, le tombeur de Meech, pourrait ainsi se retrouver à demander plus que ce qu'il lui apparaissait alors impossible de céder au Québec.

Une question subsidiaire mais qui est au coeur de ce débat des politiques sociales est celle de l'imputabilité du gouvernement fédéral à l'endroit des sommes qu'il redistribue en fonction de son pouvoir de dépenser. Il faut en profiter pour rappeler que même la négociation de rapatriement de points d'impôt par Jean Lesage, en 1964, a finalement été assortie des fameuses normes nationales qui ont conduit aux aberrations relatées plus haut.

En fait, si le gouvernement fédéral ne peut redistribuer sans contrôler l'observance de normes nationales, le Canada semble condamné à un choix entre deux maux aussi graves l'un que l'autre: ou une inefficacité coûteuse écnomiquement, budgétairement et socialement, ou l'acceptation de l'inégalité fondamentale entre les régions et les personnes au Canada. Tout le reste est bavardage.

Prenons l'exemple de cette politique qu'on appelle au Québec le plein emploi et qu'on pourrait appeler politique active de marché du travail, voulue et préconisée par de nombreux groupes au Québec et le Parti québécois. Elle ne pourrait, pour le Québec, être mise en oeuvre dans le cadre du Canada où chevauchements, dédoublements et l'incapacité subséquente à prendre les bonnes décisions au bon moment empêchent de maximiser les efforts sociaux et économiques centrés sur l'emploi. Les autres provinces qui acceptent la centralisation pourraient-elles espérer une politique canadienne de plein emploi qui ait quelque efficacité? Nous l'espérons, bien sûr.

Il faut dire que déjà la prospérité de l'Ontario et, par moment, de l'Alberta, sur laquelle le modèle canadien de redistribution a été fondé, ne s'expliquent que par le fait que toutes les politiques gouvernementales se coordonnaient pour donner à l'Ontario cette densité industrielle et d'emplois qui en fait de loin la province la plus riche, malgré la dureté de la récession qui l'a touchée.

Pour des raisons culturelles, incluant la langue, cette stratégie canadienne n'est pas adaptée à la réalité québécoise. Le Québec, depuis plusieurs années, a développé sur l'emploi et le développement de nombreux mécanismes de concertation. Les syndicats, les entreprises, les organismes régionaux et les gouvernements ont appris à se concerter, un mot dont on sait qu'il a de la difficulté à être traduit en anglais. Ceux-ci, pourtant, privés des leviers de décision détenus à Ottawa, où les politiques adoptées sont parfois même contradictoires, n'ont pas encore, loin de là, donné tous les fruits qu'on peut en escompter.


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(1610)

On n'a qu'à rappeler la triste saga de la formation professionnelle. Innombrables sont celles et ceux au Québec qui piaffent d'impatience devant les projets à réaliser, les pertes de temps et d'énergie dans ces dédoublements, ces lenteurs décisionnelles, cette glu fédérale-provinciale qui tue toute initiative. Le Québec a un projet qu'il nous presse de réaliser.

Il est donc urgent, comme le réclamait encore hier le premier ministre du Québec, que le gouvernement fédéral transfère rapidement au Québec les responsabilités au titre du développement de la main-d'oeuvre, y compris la gestion de l'assurance-chômage.

Le Bloc va défendre avec acharnement les programmes sociaux, mais sans perdre de vue que sans l'emploi en bout de course, les personnes si nombreuses qui veulent sortir de la dépendance sont flouées. Nous ne pensons pas qu'il ne peut pas y avoir des améliorations dans les programmes sociaux. Au contraire. Mais quand le ministère des Finances parle des programmes sociaux en fonction des coupures à y faire et de la diminution du déficit, on ne peut pas rêver que ce soit pour les améliorer.

Il faut être clair: quand on veut faire disparaître l'aspect de désincitation au travail que comportent certains programmes sans plonger les gens démunis dans une plus grande insécurité, on ne fait pas d'économie, on augmente les coûts, temporairement du moins. Quand on veut aider les gens à se former, à se créer un emploi, à devenir employables, il faut investir pour le faire. Quand on veut que la période de chômage soit un actif et non une période d'attente, il faut investir dans l'orientation, la formation et le support aux personnes. Mais surtout, quand on veut aider à relancer l'emploi, il faut que les politiques monétaires, économiques, commerciales et le cadre réglementaire ne tendent pas à le décourager.

Le ministre du Développement des ressources humaines devra lui aussi être clair. Ou la réforme qu'il envisage vise à réduire les coûts comme l'indique fermement le ministère des Finances dans son document, ou ce qu'il cherche est véritablement à aider les personnes au chômage à se retrouver un emploi et alors ce n'est pas dans les programmes sociaux qu'il pourra faire des économies.

Il y a une coupure dramatique, accrue après cette dure récession, entre ceux qui veulent réduire les programmes sociaux et qui, étant riches, ne connaissent ni insécurité ni manque d'argent et ceux qui veulent en améliorer l'efficacité et qui sont susceptibles à un moment ou à un autre d'y avoir recours pour une période plus ou moins longue. Les premiers ne pensent qu'au déficit, les seconds pensent à la nécessité de survivre dans un pays en pleine mutation économique où il n'est pas évident que la destruction de nombreux emplois rémunérateurs sera compensée par les fameux emplois promis dans les secteurs de la technologie.

Il faut choisir. Le Canada veut-il, dans l'ordre des pays, se comparer aux pays d'Europe de l'Ouest ou aux États-Unis où les quartiers chics s'entourent de clôtures infranchissables et protégés par des gardes armés ou plutôt aux pays d'Europe où le capitalisme a même compris qu'il y allait de son intérêt d'avoir un filet de sécurité efficace.

Monsieur le Président, assurez le ministre du Développement des ressources humaines qu'il pourra compter sur mon appui indéfectible à chaque fois qu'il voudra aider les personnes dans le besoin mais que je m'efforcerai d'être une parlementaire au moins aussi féroce qu'il l'a été dans l'opposition, à chaque fois qu'il dérogera de cette ligne de conduite. Et j'agirai aussi bien pour les gens de Mercier que pour les Québécoises et Québécois et Canadiens et Canadiennes.

Notre formation politique va voter contre le sous-amendement proposé par le député de Calgary-Sud-Ouest car il ne saurait être question d'accepter une limite de dépenses gouvernementales sans baliser et surtout sans que ces dépenses n'aient été soumises à l'examen d'un comité de parlementaires.

M. Mac Harb (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international): Monsieur le Président, tout d'abord, j'aimerais féliciter la députée du Bloc québécois pour son discours assez intéressant. Il y a plusieurs points qui m'ont un peu intrigué dans son discours, surtout la question de gestion des différents programmes provinciaux vis-à-vis les programmes fédéraux. Plusieurs de ces programmes-là, finalement, sont de responsabilité fédérale et provinciale à la fois, comme la question de la formation de la main-d'oeuvre. Elle dit qu'on parle partout dans le monde de l'Ouest et même dans le monde de l'Est qu'il faut vraiment avoir le libre-échange, la mobilité des employeurs et des employés, partout.

(1615)

D'une part, ne serait-il pas vraiment très important d'avoir, dans les domaines de formation de main-d'oeuvre, un standard national de formation, où les gouvernements fédéral et provinciaux pourraient travailler ensemble, en convergence, dans le même schéma, plutôt que de travailler en divergence.

D'autre part, on parle de développement économique. Je veux juste mentionner à ma collègue qu'étude après étude, il a été démontré que le développement économique est vraiment fonction du système d'éducation, partout, dans tous les pays du monde. Par exemple, au Japon, le développement économique est fonction de leur système d'éducation; en Allemagne, la même chose. Même ici, au Canada, j'avais souligné que, pour s'assurer d'un développement économique fort, rassurant et suffisant, il faut vraiment faire de l'éducation une priorité numéro un.

Je veux souligner à ma collègue que, dans la Constitution canadienne, l'éducation relève du provincial. Alors, il n'y a rien qui empêche n'importe quelle province ou territoire du Canada de faire de l'éducation leur priorité numéro un et d'engager la discussion aux alentours de cela pour s'assurer que le système d'éducation réponde aux besoins du secteur privé et de la population.


118

Ce faisant, ma collègue peut être assurée qu'on peut répondre à une des difficultés sur la question économique dans la province de Québec, et je peux lui dire que c'est la même chose dans les autres provinces. Donc, le système d'éducation, c'est le premier endroit où il faut commencer à mettre l'accent, à mettre notre énergie.

D'un autre côté, si on parle de formation de main-d'oeuvre, je veux féliciter le premier ministre et le ministre responsable, parce que je pense que ce gouvernement va engager une discussion extraordinaire, et je peux dire qu'il s'agit d'une discussion historique dans le domaine de la formation, de la gestion de l'assurance-chômage, toutes ces choses-là.

Je pense que c'est une occasion extraordinaire que tous les membres de cette Chambre travaillent ensemble pour s'assurer un plan d'action pour les prochaines 10, 20 ou même 50 années. Ainsi, le Canada continuera à être non seulement le meilleur pays au monde où il fait bon vivre, mais également le pays le plus fort au monde, économiquement parlant.

Je demanderais à ma collègue de me dire comment elle voit la question de mobilité des employés quand elle parle de sa proposition de la gestion de l'assurance-chômage ainsi que de la gestion de la formation de la main-d'oeuvre au Québec?

Mme Lalonde: Monsieur le Président, je dois commencer par dire que nous avons réfléchi longuement à toutes ces questions que vous avez posées. Si M. Bouchard pouvait dire avec tellement de force, hier, ce qu'il disait, c'est qu'il nous semble que l'évolution de l'économie, où la culture est de plus en plus liée aux atouts principaux, va dans le sens du projet qui s'impose de plus en plus à nous.

Vous avez dit vous-même concernant l'éducation que maintenant on ne peut pas aller à l'OCDE sans entendre dire que ce qui est dominant c'est l'éducation et que les pays qui veulent performer investissent dans l'éducation. Oui, c'est un champ constitutionnel du Québec. On sait cependant que le niveau de gouvernement fédéral est le seul qui peut utiliser son pouvoir de dépenser-même si ça lui a servi à beaucoup nous endetter-pour forcer justement des engagements que les provinces ne voudraient pas nécessairement prendre.

Alors, il est évident que le gouvernement fédéral va avoir le goût de s'immiscer dans l'éducation et qu'au Québec on voudra cela le moins possible parce que c'est lié à notre survie. On veut d'ailleurs en sortir de cette survie, ce qu'on veut c'est vivre. On en a marre de la survie. On en a marre des dédoublements et des chicanes. On a hâte de se lancer dans des projets.

(1620)

Alors, on est en ce moment dans un fouillis. Si je m'exprime ainsi, c'est le sentiment de tellement de monde, quand je dis qu'il y a du monde qui piaffe d'impatience, on en a marre parce que tout piétine. La SQDM tourne un peu dans le yogourt en ce moment faute d'ententes, de fonds. Le sous-ministre me disait la semaine dernière que tout est au beau fixe, c'est-à-dire que rien ne se passe. Et oui, l'éducation c'est majeur. Mais que fait-on pour cela? On coupe.

Bien sûr, la mobilité c'est quelque chose de relativement important, mais vous comprendrez qu'au Québec on veuille développer. Nous sommes 2 p. 100 de francophones en Amérique du Nord, concentrés sur un territoire. Et, pour vivre comme francophones, on veut développer au maximum le bassin d'emplois. On a développé plein de moyens, de projets, je dirais, et ce qui nous manque pour les activer c'est souvent non pas de l'argent qui n'existe pas, mais qui est dépensé autrement et qu'on voudrait dépenser comme on le veut.

Alors, si je pouvais dire que de seulement avoir ce débat-là me semble utile pour la compréhension des partis du Canada.

M. David Berger (Saint-Henri-Westmount): Monsieur le Président, j'aurai peut-être l'occasion d'intervenir dans ce débat au cours des prochaines semaines.

J'ai écouté avec intérêt le discours de la députée, mais il me semble que son discours fait abstraction de la mondialisation. Son analyse économique est assez simpliste. Bien entendu, elle attribue la pauvreté économique à notre système fédéral sans tenir compte de changements économiques à travers le monde auxquels le Québec et le Canada dans son ensemble ne peuvent pas échapper.

Je dois dire aussi que je trouve assez drôle de voir comment en tant que députée fédérale elle veut se départir des responsabilités que lui ont confiées ses électeurs. Pourquoi ne pas faire des recommandations justement sur l'amélioration du programme d'assurance-chômage. Le ministre est présent et il écouterait, probablement avec intérêt, ses suggestions ou celles de ses collègues. Mais non, sa solution en tant que députée fédérale nouvellement élue c'est de transférer toutes les responsabilités au gouvernement du Québec.

Est-ce qu'elle ne reconnaît pas que le fédéral a un rôle important à jouer en ce qui concerne l'interdépendance de l'économie, la mobilité, telle que mentionnée par mon collègue il y a quelques minutes, et la répartition des richesses? Est-ce qu'elle ne reconnaît pas, comme l'a dit aujourd'hui le premier ministre, que si on donnait pleins pouvoirs au Québec pour gérer l'assurance-chômage, que cela priverait les Québécois de ressources importantes qui proviennent peut-être de l'ensemble de la richesse du Canada?

Ce sont quelques questions qui me viennent à l'esprit, Monsieur le Président. J'aurai l'occasion d'en poser d'autres dans les jours qui viennent.

Mme Lalonde: Je voudrais dire qu'au contraire la mondialisation nous confirme dans la nécessité de développer ce projet québécois. Où qu'on regarde, la façon de réagir face à ces exigences nouvelles doit se décider localement, compte tenu des avantages locaux sur lesquels il faut travailler. Par un mécanisme qu'on observe constamment dans l'histoire, cette mondialisation de l'économie va correspondre une spécialisation des régions.


119

Alors nous ne sommes pas du tout à contre-courant, je dirais au contraire. Et regardez ce qui se passe là justement où on s'organise pour faire face. L'Europe n'est pas l'Europe sans les souverainetés. Les souverainetés européennes sont là, mais se concertent. Nous, souverains, seront absolument heureux de nous entendre avec vous sur des standards qui nous apparaîtraient en effet nécessaires.

(1625)

Mais si vous me permettez d'ajouter sur la gestion de l'assurance-chômage, vous savez, monsieur le Président, que c'est un consensus au Québec que cette revendication, pas de toute l'assurance-chômage, bien sûr, dans le cadre actuel. Vous comprendrez que nous savons que le Québec a besoin de développer encore son économie et d'y consacrer les ressources nécessaires. Il n'est pas question de ne pas le faire.

Par contre, il y a une chose à laquelle je veux répondre. Je n'abandonne pas mes prérogatives et je ne céderai pas d'un pouce la défense des droits de mes concitoyens du comté du Québec et des Canadiens pour lesquels j'ai accepté d'être critique officiel, mais cependant, dans ce premier discours, il est important d'expliquer aux honorables députés de la Chambre pourquoi ce qui se passe au Québec s'y passe et que ce n'est pas parce qu'ils ne le voient pas que ça ne se passe pas.

Des voix: Bravo!

Mme Lalonde: Cependant, monsieur le Président, le ministre du Développement des ressources humaines peut être assuré que nous serons là pour veiller à ce qu'il fasse les réformes qu'il doit faire.

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Perfectionnement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, je veux d'abord vous féliciter d'avoir été choisi pour assumer les fonctions honorables mais difficiles de la présidence. Nous vous souhaitons la bienvenue au fauteuil.

[Français]

Aussi je tiens à offrir mes félicitations à l'honorable députée de Mercier. En écoutant son premier discours à la Chambre, j'ai apprécié sa force de conviction. J'ai également apprécié son offre de collaborer dans un esprit de coopération au processus de réforme des programmes de sécurité sociale. J'y compte bien.

[Traduction]

Monsieur le Président, vous savez fort bien que ce n'est pas mon premier discours à la Chambre, ni la première fois que j'assiste à la lecture d'un discours du Trône. Néanmoins, je suis toujours quelque peu fébrile à ces occasions.

Je voudrais en premier lieu remercier ma famille, sans le soutien et les encouragements de laquelle je ne pourrais jouer un rôle public.

Cette année est l'Année internationale de la famille. J'espère que, dans leur déclaration officielle, les Nations Unies feront brièvement allusion à la famille politique, dont la contribution ne peut véritablement être comprise et mesurée que par ceux qui en font partie.

Je veux aussi remercier mes électeurs de la ville de Winnipeg, qui me font confiance depuis deux bonnes décennies déjà. C'est un honneur pour moi que de les représenter et de m'exprimer en leur nom.

Comme on l'a mentionné, un grand nombre de députés découvrent pour la première fois qu'ils ont un téléphone pour répondre aux volontés de leurs électeurs. Ceux d'entre nous qui sont ici depuis une bonne vingtaine d'années savent que cette responsabilité demeure une tâche fondamentale.

Je tiens à dire combien je suis heureux d'avoir la chance de faire partie d'un gouvernement dirigé par l'actuel premier ministre. Je lui suis d'ailleurs reconnaissant de l'occasion qu'il m'a fournie de remplir les fonctions de mon poste.

Je me suis lancé en politique il y a 22 ans à cause de ce que je voyais dans mon quartier, notamment la situation des enfants et celle de la ville comme telle. Je parle ici de la pauvreté qui régnait.

Il est tout à l'honneur de notre système démocratique qu'une personne se voit un jour confier le mandat, même si c'est pour une période relativement brève, de concrétiser les espoirs qu'elle entretenait de nombreuses années auparavant de faire quelque chose pour ses concitoyens.

[Français]

En acceptant le poste de ministre du Développement des ressources humaines, j'ai accepté le mandat d'aider tous les Canadiens, monsieur le Président, tous les Canadiens: les pêcheurs de l'Atlantique, l'enfant pauvre de l'est de Montréal, les chômeurs de l'Ontario, les autochtones des Prairies et les décrocheurs de Colombie-Britannique.

(1630)

À ce moment-là, tous les Canadiens, pas seulement les Québécois ou les gens de l'Ouest, mais tous les Canadiens soulignent le besoin d'avoir un nouveau système de sécurité sociale au niveau de l'emploi qui leur donnerait un peu d'espoir.

[Traduction]

C'est donc dire que je ne parle pas aujourd'hui simplement au nom de mes électeurs, les habitants de la région du Canada que je représente, mais que nous avons, pour une fois, l'occasion de parler au nom de tous les Canadiens. J'aimerais que les députés n'oublient pas cette obligation qui leur a été confiée le soir de leur élection.

J'ai écouté attentivement l'intervention de la députée de Mercier qui a décrit avec beaucoup d'émotion les problèmes qu'elle observe dans sa ville et dans sa province. Je voudrais signaler à la députée que ces problèmes touchent tous les Canadiens, d'un océan à l'autre, pas seulement les Québécois. Ces problèmes ne sont pas uniques à sa région.


120

Malheureusement, de nos jours, les problèmes liés au chômage, à l'insécurité, au désillusionnement, à la pauvreté ne se font pas rares. S'il y a un élément qui a pu unifier le pays ces dix dernières années, c'est que les Canadiens n'avaient pas tellement l'occasion de sentir qu'ils avaient leur place au sein de notre société. Voilà pourquoi nous nous devons de représenter tous les Canadiens, de leur redonner espoir et de les stimuler.

En ce qui a trait à la sécurité sociale, il est intéressant de noter l'un des grands changements survenus au cours de la présente génération, soit le fait que les gens ont l'impression que ce sur quoi reposait leur existence auparavant, c'est-à-dire le travail, a disparu. Pour le meilleur ou pour le pire, le travail a toujours été l'élément fondamental qui suscitait chez les gens un sentiment d'appartenance et préservait leur dignité.

Un récent sondage a montré que près de 50 p. 100 des Canadiens n'ont plus ce sentiment de sécurité. Ils l'ont perdu, parce qu'ils croient qu'ils n'auront plus l'occasion d'exercer des choix à l'avenir. Il leur semble aussi que les règles du jeu au Canada ne sont plus justes et équitables.

Mon idéologie en tant que libéral, c'est que l'équité est un principe, que la justice doit être au centre de notre société de telle sorte que chacun d'entre nous ait la chance de modeler à sa guise sa vie et celle de sa famille tout en respectant le droit des autres à faire de même. Et pour qu'il en soit ainsi, il faut établir des règles qui assurent à chacun les mêmes possibilités, un sens du franc-jeu et un sens de la justice.

Ce sens de la justice a disparu au cours des dix dernières années. Il est arrivé trop souvent qu'il y ait de bons emplois stables et très rémunérateurs pour une minorité de Canadiens alors que la grande majorité vit d'insécurité, d'emplois à temps partiel et de chômage.

L'écart s'est creusé entre les niveaux de revenu. La classe moyenne diminue sans cesse. Plus d'un million d'enfants vivent sous le seuil de la pauvreté. Je me souviens avec tristesse d'un article du Globe and Mail qui m'est apparu comme de l'excellent journalisme. On y disait que, au Canada, 40 p. 100 des enfants partent aujourd'hui pour l'école sans avoir bien mangé ni reçu l'attention dont ils ont besoin. Beaucoup d'amour se perd dans ce monde parce qu'il ne se trouve personne pour le donner.

Or, si vous estimez qu'il faut protéger ce qui existe, je vous répondrai d'aller dire cela aux enfants qui ont le ventre creux et qui manquent d'attention, d'aller dire cela aux jeunes gens et jeunes filles de cette génération perdue qui ont fait tout ce qu'on leur a demandé de faire, qui sont allés à l'école, qui ont obtenu un certificat, qui ont décroché un bon diplôme et qui ne trouvent pas de travail après leurs études.

Je vous enverrai dire cela aux travailleurs déplacés de notre secteur des pêches qui ont vu toute une industrie disparaître sous leurs yeux. Ce qu'ils veulent, ce n'est pas seulement toucher un chèque toutes les semaines. C'est aussi s'habiller tous les jours pour aller travailler dans l'intérêt de leur société, de leur famille et de leur collectivité. Mais on ne leur en donne pas l'occasion. Ce n'est pas tout de toucher un chèque d'assurance-chômage. Il faut pouvoir espérer qu'on retrouvera un jour un bon travail honnête dans la société. Voilà pourquoi nous devons changer des choses.

(1635)

Nous entendons beaucoup parler de déficit financier au Canada. Il y a aussi un déficit humain.

[Français]

Il y a un manque de ressources à investir pour les Canadiens. Il y a un manque de programmes efficaces et essentiels pour la formation des chômeurs et des assistés sociaux.

[Traduction]

Ce serait une erreur, une terrible erreur de tout effacer. Je n'ai pas beaucoup de patience avec ces gens en complet-veston qui viennent me dire qu'il faut sabrer dans les programmes sociaux, mais qui ne sont pas prêts, eux-mêmes, à faire des sacrifices. Il ne s'agit pas de sabrer dans les programmes sociaux, mais d'aller à la racine des problèmes de notre société et de réformer nos programmes en conséquence. C'est ce que fera notre gouvernement.

J'invite tous les députés à collaborer. Comme nos amis du Parti réformiste le disent: oubliez un instant l'idéologie ou la plate-forme électorale qui vous a amenés ici. Ce que nous disons, c'est que chacun d'entre nous a un rôle à jouer au Parlement pour aider à réformer un système, pour faire en sorte que les Canadiens se sentent à nouveau en sécurité, qu'ils retrouvent leur sens de l'équité et qu'ils reprennent espoir. Nous comprenons que nous avons une responsabilité particulière à cet égard, parce que c'est le mandat qui nous a été donné.

Dans le livre rouge, nous avons touché une corde sensible lorsque nous avons déclaré que nous voulions un pays où les gens vivent dans l'espoir et pas dans la crainte, un pays où tous les citoyens se voient comme des collaborateurs et des participants et pas comme des fardeaux, où les adultes peuvent trouver de bons emplois et où les enfants peuvent tirer le maximum de leur potentiel. Lorsque le premier ministre parle du livre rouge, c'est de cela qu'il parle, car c'est l'esprit qui s'en dégage: que tous aient leur juste chance.

Je demande aux députés de ne pas susciter de craintes. Nous devons miser sur la confiance. Je demande aux députés, surtout parce que beaucoup de gens nous regardent aujourd'hui, de traiter la question avec tout le sérieux qu'elle mérite. Je crois fermement qu'il existe aujourd'hui une véritable volonté de changement.

J'ai parlé du livre rouge. Nous voulons que les Canadiens connaissent nos intentions dès le départ. Nous avons proposé la création du Service Jeunesse. La ministre d'État à la Formation et à la Jeunesse vient de terminer une série de consultations avec tout un éventail d'intéressés. Nous annoncerons au cours des prochains mois une série de projets concernant des organismes existants et prêts à collaborer. . .


121

[Français]

-à travers tout le pays-

[Traduction]

. . .dans chacune des régions.

Notre livre rouge propose très clairement un programme d'apprentissage. Nous croyons que l'un des véritables échecs de notre système actuel, c'est qu'il ne s'occupe pas des Canadiens durant les périodes où ils sont le plus vulnérables, soit les enfants avant qu'ils commencent l'école et les jeunes au moment où ils quittent l'école pour entrer sur le marché du travail. C'est pourquoi nous proposons un programme d'apprentissage ou, comme je préfère l'appeler, un programme de transition.

Encore une fois, nous consultons constamment divers groupes du secteur privé d'un bout à l'autre du pays pour voir si nous pouvons les amener à participer à un vaste programme visant à aider les jeunes à acquérir des compétences en leur offrant une formation en cours d'emploi avec la collaboration des employeurs, des gouvernements et des systèmes d'éducation.

[Français]

Je l'ai dit à mes collègues de l'autre côté de cette Chambre, nous devons avoir un programme national parce que la responsabilité est partagée par tous les groupes, dans toutes les régions et de tous les secteurs du Canada.

(1640)

Ce n'est pas un problème pour une région unique, c'est un problème pour tous les Canadiens. Il faut donc demander l'effort et la collaboration de tous les secteurs, des gens de toutes les régions.

[Traduction]

Je veux simplement vous signaler que ces efforts qui s'adressent particulièrement aux jeunes s'inscrivent dans un cadre beaucoup plus vaste, car nous constatons aussi que nous devons presque garantir à nos jeunes du travail ou de la formation parce que le monde du travail a tellement changé qu'on ne peut plus s'attendre à ce que 16 années de scolarité suffisent. Nous devons devenir une société d'apprentissage qui permettra aux jeunes et aux adultes de se recycler continuellement afin de pouvoir relever avec vigueur et compétence les défis du nouveau monde du travail.

C'est pourquoi, lorsque nous parlons de réformer le filet de sécurité sociale, nous devons aussi discuter sérieusement de la formation et de l'éducation offertes au niveau fédéral et de la nécessité de lier ces deux activités aux régimes d'assurance-chômage et d'aide sociale. Ce ne sont pas des programmes distincts. Ce ne sont pas des tuyaux de poêle qui ne servent qu'à envoyer la fumée dans l'air. Ces programmes sont tous liés entre eux et doivent nous permettre d'offrir aux Canadiens des possibilités à tous les niveaux.

C'est pourquoi l'un des premiers principes de notre réforme, c'est qu'elle doit être globale. Nous ne pouvons plus procéder comme avant. Nous ne pouvons plus nous pencher sur ces programmes un à un. Cela a été notre principal problème au cours des dix dernières années. Le gouvernement était toujours en train d'apporter diverses modifications au régime d'assurance-chômage ou au Régime d'assistance publique du Canada.

Personne ne le sait mieux que le chef de l'opposition qui faisait partie du gouvernement qui modifiait sans cesse les programmes sociaux quand il en faisait partie. Il reconnaîtra maintenant que c'était une erreur de procéder ainsi. Nous devons procéder d'une façon générale et globale.

Nous devons également procéder d'une façon transparente pour le public. On ne peut plus avoir d'agendas cachés maintenant. Voilà pourquoi notre gouvernement s'est engagé à faire en sorte que la discussion et la décision se fassent ici, au Parlement, lorsqu'il s'agira de réforme de notre système de sécurité sociale, de nos programmes de formation et d'emploi, d'assistance sociale, d'assurance-chômage et d'aide aux étudiants.

Ce sera ici que se tiendront les discussions et que se prendront les décisions. Ce sera ici que les Canadiens auront l'occasion d'exprimer leurs opinions et de se faire entendre. J'entends les députés d'en face dire que nous devons redonner de l'importance au Parlement et qu'ils ont toutes sortes de solutions automatiques. Le véritable moyen de redonner de l'importance au Parlement, c'est d'y discuter de sujets importants et de faire en sorte que les Canadiens se rendent compte que c'est l'endroit où seront examinés, discutés et décidés les sujets d'intérêt essentiels pour leur vie. Voilà pourquoi le droit fondamental à la sécurité sociale constituera un sujet fondamental de discussion à la Chambre au cours de l'année qui vient. Nous en prenons l'engagement.

Nous devons également veiller à ce que les propositions, les solutions et les idées que nous formulons soient élaborées au Canada. Nous avons mis notre fierté dans notre pays au fil des années. Nous avons accompli de véritables progrès.

[Français]

Contrairement à la position de la députée de Mercier, nous avons fait de grands progrès pour les personnes âgées. Nous avons augmenté le taux de sécurité pour les personnes âgées, et ce grâce aux grands efforts fournis par le gouvernement du Canada et les gouvernements provinciaux.

[Traduction]

C'est un véritable accomplissement.

Nous avons également été capables de dire à nos jeunes gens dans une large mesure que nous leur avons fourni de bonnes possibilités de s'instruire. Nous avons assuré de véritables services de sécurité de base en période de récession.

Les temps ont maintenant changé et nous devons évoluer avec eux. Nous devons modifier nos programmes. Nous devons commencer par examiner des solutions vraiment canadiennes. Un sujet d'irritation constante pour moi durant les neuf ou dix années où j'ai siégé dans l'opposition, c'était de voir les ministres de l'époque proposer pour remédier à nos problèmes économiques des solutions qu'ils avaient empruntées ailleurs. Ils utilisaient toujours le modèle de quelqu'un d'autre, les idées et l'idéologie de quelqu'un d'autre. Il est temps encore une fois que les Canadiens se chargent d'élaborer un système de sécurité sociale qui leur donne le sentiment de leur propre identité et de leur propre importance.


122

(1645)

Je vois que vous me faites signe, monsieur le Président, et je respecte cela, mais je voudrais faire remarquer une dernière chose. Je crois que, si nous nous acquittons bien de notre travail, si nous arrivons à bien harmoniser toutes les voix qui se font entendre au Canada et redonnons l'espoir à une foule de Canadiens, rien ne saurait mieux nous unir, rien ne saurait mieux ranimer l'espérance parmi les Canadiens que de voir leurs députés, venus de toutes les régions du pays, coopérer pour bâtir un système qui sera proprement canadien, qui révélera aux Canadiens qui ils sont et ce qu'ils peuvent faire, en y apportant cette touche spéciale qui est la nôtre, celle de la compassion, de la compréhension, de l'humanité.

Ainsi, les Canadiens pourront voir pourquoi nous sommes différents: non parce que nous adoptons des positions différentes de celles des autres pays, mais parce que nous pouvons créer pour les Canadiens le mode de vie qu'ils veulent et leur donner, dans le vaste tumulte qu'est devenu le monde, le sentiment qu'il existe un pays bien à eux où tous ont les mêmes chances.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Monsieur le Président, ma question s'adresse à l'honorable ministre. J'ai écouté le discours du ministre du Développement des ressources humaines, et à l'entendre, tout semble baigner dans l'huile au Canada. La productivité des travailleurs semble bien en place, la compétitivité des entreprises aussi, le besoin d'améliorer de façon fondamentale la compétitivité des entreprises face à la mondialisation des marchés, donc la productivité des travailleurs, semble passer outre aux considérations du ministre.

Le ministre ne reconnaît-il pas que le système canadien de double intervention, de chevauchement en matière de ressources humaines, en matière de formation professionnelle, en matière de formation d'entreprises, en matière de sécurité de revenu par l'assurance-chômage, notamment, avec deux bureaux d'emploi, avec une quarantaine de normes liées à 12 ou 14 programmes aux deux paliers de gouvernement, ne croit-il pas qu'il est temps de changer fondamentalement cet aspect de l'approche canadienne en matière de développement de la formation des ressources humaines?

Je demande au ministre s'il serait prêt, considérant l'urgence d'intervenir en matière de développement de l'emploi, de développement aussi de la productivité des travailleurs et des travailleuses du Québec comme du Canada, à envisager que le fédéral se retire, qu'il offre à toutes les provinces canadiennes de se retirer de tous les champs qui touchent de près ou de loin l'établissement d'une vraie politique du marché du travail par les provinces canadiennes, répondant de ce fait aux revendications du Québec, au consensus qui s'est développé au Québec pour l'établissement d'un guichet unique, géré par le gouvernement du Québec, offrant ainsi cette perspective à toutes les provinces canadiennes? Le Québec serait satisfait et pourrait répondre à un état d'urgence au niveau de l'emploi et espérer, du moins à court terme, jusqu'à ce que l'accession du Québec à la souveraineté devienne un fait, par voie démocratique, au moins développer son emploi?

M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre): Monsieur le Président, tout d'abord, lors de l'énoncé de mon discours, je n'ai pas dit que tout allait bien, au contraire. J'ai exprimé mon souci concernant la pauvreté au Canada et le manque de formation afin que les jeunes aient l'occasion de se trouver du travail. Peut-être que l'honorable député était occupé ailleurs, mais dans mon discours j'ai exprimé et souligné ce problème sérieux pour le Canada.

(1650)

Je pense que la solution à ce problème n'est pas de diviser le Canada, mais de l'unifier afin de pouvoir collaborer ensemble pour trouver la solution. Je crois qu'il y aurait lieu d'avoir une bonne discussion avec les provinces, car elles sont nos partenaires dans ce grand processus de réforme. En même temps, je pense que le problème des dédoublements est une bonne question à débattre dans le contexte de la réforme sociale. Il n'est pas possible de diviser les sujets quand il s'agit de mesures de formation et de mesures relatives à l'assurance-chômage, comme de mesures d'aide sociale.

Comme le premier ministre l'a dit pendant la période des questions, s'il y a un transfert immédiat dans les fonds de formation, ce sera une grande perte pour la province de Québec, si on se fie aux allocations per capita. Je ne pense pas que les Québécois et les Québécoises désirent une réduction de l'appui qu'ils obtiennent du gouvernement canadien.

J'aimerais pouvoir me réunir avec les nouveaux ministres du Travail et de la Main-d'oeuvre du Québec, comme je voudrais avoir une même discussion avec les autres ministres. En effet, je pense que nous aurons peut-être une réunion de tous les ministres quelque temps en février, et ce sera le moment d'avoir une discussion entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. À ce moment-là, nous ferons un bon examen du problème des dédoublements.

[Traduction]

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest): Monsieur le Président, je remercie le ministre de son discours; je le félicite aussi d'avoir encore une fois été réélu dans sa circonscription de Winnipeg-Sud-Centre et de s'être vu confier au sein du Cabinet des responsabilités qui en disent long sur la confiance que lui témoignent son parti et son chef.

Nous sommes heureux que le gouvernement veuille créer un régime de sécurité sociale global et qu'il soit prêt à en discuter librement durant cette législature.

Le ministre des Finances a récemment rendu public un document dans lequel il est dit que notre régime d'assurance-chômage est l'un des plus généreux du monde. Cela peut dissuader de le faire ceux qui devraient se perfectionner et chercher du travail.


123

Le ministre est-il d'accord avec ce jugement concernant le régime d'assurance-chômage? Le cas échéant, peut-il expliquer aux députés comment un nouveau régime global de sécurité sociale nous permettra de remédier aux lacunes que comporte le régime d'assurance-chômage?

M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre): Monsieur le Président, je remercie le député de ses bonnes paroles. Elles nous seront certainement d'un grand réconfort tôt ou tard.

Je me réjouis de ce que les membres de son caucus nous aient assurés de leur entière coopération dans le cadre des réformes importantes que nous voulons entreprendre.

Au fil des ans, la vocation du régime d'assurance-chômage a changé: le régime qui, à l'origine ne devait fournir qu'une aide temporaire aux travailleurs entre deux emplois s'est dans une large mesure transformé en un programme de sécurité du revenu, notamment pour les industries où la situation de l'emploi fluctue beaucoup selon les saisons et où les arrêts de travail sont longs.

C'est la situation qui existe actuellement dans le secteur des pêches. Dans la province que le député représente, les travailleurs de l'industrie forestière, pétrolière ou gazière se sont aussi largement prévalus du régime d'assurance-chômage à un moment donné. C'est également ce régime qui, pour une large part, a permis au marché du travail de fonctionner rondement.

Permettez-moi de faire une petite digression. Il existe au Canada une fausse idée selon laquelle la politique sociale et la politique économique sont deux choses tout à fait distinctes. Il n'en est rien. Un bonne politique sociale est le gage d'une bonne politique économique et vice versa. Si les travailleurs sentent qu'ils ont une certaine sécurité d'emploi et qu'ils peuvent changer de travail, cela contribue au bon fonctionnement du marché du travail.

(1655)

Le député a raison de dire que le régime d'assurance-chômage comporte certains problèmes. Il est vrai que, avec le temps, il a fini par ne plus satisfaire à bien des besoins pour lesquels il avait d'abord été institué. Le premier ministre a dit quelque chose qui nous tient à coeur: comment amorcer la réforme d'un régime d'assurance-chômage de manière que, comme l'ancien régime de sécurité du revenu, il puisse remettre les gens sur le marché du travail et favoriser la création de nouveaux emplois.

Il faut pour cela établir un lien entre les programmes d'aide sociale et les programmes de formation. Ils sont en effet indissociables. Voilà pourquoi je demande aux députés d'en face de se montrer coopératifs. Il faut entreprendre ces réformes globalement. Il existe des liens entre tous ces programmes. Il faut pour un instant cesser de penser à l'assurance-chômage, au régime d'assistance publique du Canada ou au programme de bourses d'étude pour réfléchir aux problèmes des travailleurs déplacés, à l'évolution de la situation dans l'industrie, aux changements démographiques et aux problèmes des jeunes. Si nous commençons à cerner la véritable cause de ces problèmes, nous pourrons alors commencer à mettre en place des programmes visant à les résoudre. Voilà ce à quoi s'emploiera le Parlement.

Je peux simplement dire au député de se tenir prêt, car nous allons très bientôt entreprendre de grands changements.

M. Dale Johnston (Wetaskiwin): Monsieur le Président, c'est un grand honneur pour moi que de prendre part à ce débat sur le discours du Trône.

Je voudrais profiter de l'occasion pour féliciter le Président de son élection. Je félicite également le vice-président. J'assure au Président que nous allons tout faire pour lui faciliter la tâche et qu'il peut toujours compter sur nous.

Monsieur le Président, avec votre permission, puisque c'est mon premier discours à la Chambre, je voudrais dédier mes propos d'aujourd'hui à la mémoire de mon défunt père, Glen Johnston, qui a été député de 1952 à 1967 à l'Assemblée législative de l'Alberta pour le parti auquel le premier ministre a fait allusion ce matin en parlant de l'ancêtre du Parti réformiste. Mon père représentait le comté de Ponoka-Rimby.

C'est avec plaisir que je poursuis l'oeuvre de mon père, qui n'a jamais ménagé les efforts pour bien représenter ses électeurs, dont un bon nombre sont aussi les miens aujourd'hui. Je tiens à remercier les électeurs de la circonscription de Wetaskiwin de m'avoir massivement appuyé et de me faire confiance. Je tiens à les assurer que je suis déterminé à bien les servir et à défendre leurs intérêts à la Chambre.

Je voudrais maintenant dire quelques mots sur ma circonscription. La circonscription de Wetaskiwin est située au centre de l'Alberta tout juste au nord de celle de Red Deer et au sud de celles d'Edmonton. Elle est bordée au nord et au nord-ouest par la rivière Saskatchewan-Nord. À l'ouest, elle est très boisée, tandis qu'à l'est ce sont les champs de céréales qui dominent. Je suis fier de dire que notre région regorge de ressources naturelles. L'agriculture, le gaz et le pétrole sont les moteurs de notre économie. Nos riches terres arables conviennent parfaitement bien à l'élevage du boeuf de premier ordre de l'Alberta.

Le stampede de Ponoka se tient tous les ans. C'est le deuxième stampede en importance dans l'Ouest. Je voudrais inviter le Président ainsi que tous les députés à se joindre à nous durant la fin de semaine de la Fête du Canada pour assister à un stampede et à un rodéo exceptionnels.

Depuis un an, j'ai sillonné ma circonscription et je me suis entretenu avec nombre de gens. Leur message est on ne peut plus clair. Ils s'inquiètent de l'avenir économique du Canada et se demandent dans quel état ils vont laisser le pays à leurs enfants et à leurs petits-enfants.


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Il y a deux jours, Son Excellence le Gouverneur général a divulgué aux Canadiens, qui attendaient avec impatience, le plan du gouvernement pour les quatre années à venir. Les résultats des élections d'un bout à l'autre du pays ont révélé une volonté de changement et il semble bien que les députés ministériels aient reçu le même message. Je voudrais féliciter le gouvernement d'avoir créé un climat de dialogue favorable au consensus.

Nous approuvons l'initiative de réduction de 5 millions de dollars le budget de la Chambre des communes. Je me réjouis que le gouvernement ait fait siennes quelques suggestions énoncées dans le document du Parti réformiste sur les pensions et les privilèges. Nous encourageons le ministre des Finances à intégrer nos autres recommandations à son budget.

(1700)

Les Canadiens ne font plus confiance à leurs politiciens. Le moment est venu pour les élus de regagner cette confiance. Le fait d'être élu ne signifie pas automatiquement qu'on est respecté. Il nous faut reconquérir cette confiance.

Les Canadiens ont le droit d'exiger que leurs représentants agissent avec la dignité et le décorum de leur emploi. Dans cet ordre d'idées, il convient de mettre fin au cumul de pension et de retraite et de fixer à 55 ans la limite d'âge pour toucher sa pension.

C'est à toute la question du régime de retraite des députés qu'il faut s'attaquer. Les électeurs nous ont dit qu'ils n'admettaient pas un régime qui accorde beaucoup plus d'avantages aux députés qu'à la moyenne des Canadiens. Il faut réformer la Loi sur les allocations de retraite des parlementaires. Je dis bien la réformer, pas seulement lui faire des retouches. Il faut la réformer de façon à la rendre conforme à la situation qui a cours dans le secteur privé.

Le régime de retraite des députés ne s'autofinance pas. Comment pouvons-nous en toute bonne foi demander aux contribuables canadiens, qui n'en peuvent plus, de subventionner un régime de retraite aussi généreux? Monsieur le Président, je suis convaincu que vous êtes de mon avis.

Les Canadiens attendent du gouvernement qu'il leur redonne espoir et qu'il leur redonne des emplois. Le programme d'amélioration des infrastructures, évalué à six milliards de dollars et dont on a tant parlé, doit être reconnu pour ce qu'il est, c'est-à-dire un programme conjoint financé également par le gouvernement fédéral, les provinces et les municipalités. Ce projet à court terme, le contribuable va devoir le payer en triple. Il y a peut-être trois paliers de gouvernement qui participent à ce projet, mais il n'y a qu'un seul et même contribuable qui est mis à contribution.

Les propos sur la création d'emplois et sur la restauration de la confiance ne sont que de petits pas en faveur de la croissance économique. Nous ne pouvons plus dire aux petites entreprises qu'elles peuvent constituer la force qui relancera l'économie, alors qu'elles continuent de crouler sous le poids des impôts.

Le gouvernement compte remplacer la taxe sur les produits et services, mais par quoi? La TPS, la taxe la plus méprisée dans l'histoire du Canada, rapporte tout de même des recettes nettes de près de 15 milliards de dollars. C'est une question que les députés réformistes qui siègent au comité des finances ont hâte d'examiner. Plus tôt aujourd'hui, vous avez entendu mon collègue de Calgary-Centre dire que notre parti propose le remplacement de la taxe sur les produits et services par un régime de taxe uniforme.

M. Mills (Broadview-Greenwood): Une taxe unique.

M. Johnston: Cela me paraît raisonnable.

Ma notion du Canada est un pays économiquement fort et autonome. Si nous voulons être autonomes, nous devons éliminer le déficit fédéral. Mais voilà que cette année seulement, il risque de grimper à 46 milliards de dollars. La dette nationale a atteint la marque des 500 milliards et augmente chaque minute de 85 600 $. Il est temps de prendre des mesures sérieuses pour réduire les dépenses. Pourtant, les ministères fédéraux continuent de dépenser pour des programmes frivoles et inutiles.

En voici un exemple. Il y a à peine quelques jours, on déclarait dans un reportage que les ministères fédéraux avaient commandé des vidéocassettes qui avaient coûté 18 millions de dollars aux contribuables du Canada. Qu'on ajoute à cela d'autres exemples de dépenses irresponsables qui ont été signalées dans le rapport du vérificateur général et l'on se retrouve devant un scénario qui rend perplexes tous les Canadiens moyens. Il faut que cela cesse.

Le gouvernement doit mettre un frein à ce genre de dépenses extravagantes. Le contribuable canadien n'en a pas les moyens, monsieur le Président, et vos électeurs autant que les miens méritent mieux.

Je voudrais demander au gouvernement ce qu'il entend faire pour contrôler les dépenses ministérielles. Les nouvelles initiatives annoncées dans le discours du Trône sont louables et valables, mais en avons-nous les moyens? Qui va payer pour leur mise en place? Devrons-nous, pour cela, faire de nouveaux emprunts et accroître encore la dette?

Tous les partis représentés à la Chambre reconnaissent qu'il faut absolument réduire le déficit, mais ne sont pas d'accord sur la méthode. J'estime que nous n'arriverons à rien si nous refusons d'admettre la réalité, à savoir que nous ne pouvons continuer de vivre au-delà de nos moyens. Les Canadiens ne veulent pas compter sur le gouvernement pour leur retraite. Aussi, suis-je inquiet d'entendre le gouvernement dire qu'il a l'intention d'éliminer l'exemption pour gains en capital. Est-ce que ça veut dire que l'on va également supprimer l'exemption pour gains en capital de 500 000 $ accordée aux agriculteurs et aux petites entreprises?

Les gens qui travaillent pour de grandes entreprises et les gouvernements ont souvent accès à un régime de pensions. Ce qui n'est pas le cas de l'agriculteur et du petit entrepreneur qui, la plupart du temps, comptent sur la vente de biens accumulés au cours d'une vie entière pour financer leur retraite et garder leur indépendance financière.

Nous devons ensemble faire un effort afin de représenter les Canadiens le mieux possible. Il est important que nous soyons productifs et que nous fassions preuve de coopération si nous voulons non seulement que le Parlement fonctionne mieux, mais aussi qu'il donne l'impression de mieux fonctionner en étant moins offensif.


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(1705)

Les habitants de Wetaskiwin peuvent compter sur moi. Je serai toujours disponible, je leur rendrai des comptes et je maintiendrai une politique d'austérité. J'ai l'intention de les servir de la même façon que mon père l'a fait.

M. Vic Althouse (Mackenzie): Monsieur le Président, je voudrais féliciter le député de Wetaskiwin pour son premier discours à la Chambre.

Comme il ne reste qu'une heure avant que nous ne nous prononçions sur l'amendement que son parti a proposé au discours du Trône, je me demande s'il aurait l'amabilité de répondre à certaines questions que je me pose au sujet du plafond qu'il est proposé d'imposer aux dépenses.

Malgré la loi qui avait été présentée par l'ex-ministre des Finances, Don Mazankowski, député de Végréville, et qui avait été adoptée par la Chambre au cours de la dernière législature, ce pays a un déficit record. Je me demande pourquoi le député pense, ou pourquoi son parti pense, que la répétition de ce type d'exigence légale sans utilité aucune de la part de la Chambre, de cette orientation et de cette loi absolument inefficaces, va marcher cette fois-ci.

M. Johnston: Il n'y a aucune chance que cela marche, à moins que nous n'imposions un plafond aux dépenses dans le budget et que nous nous y tenions.

Ignorer le problème ne va certainement pas le régler. Reconnaissons donc tous que c'est un problème et que ce n'est pas un problème de recettes. Mon parti est fermement convaincu que nous n'avons pas un problème de recettes. Nous avons un problème de dépenses. C'est ce qu'on fait quand on dirige une entreprise. C'est ce que je ferais si je dirigeais une entreprise. Quand les dépenses dépassent les recettes, la première chose à faire, c'est d'examiner les dépenses dans le grand livre.

[Français]

Le vice-président: La députée de Laurentides dispose de deux minutes et demie. La députée désire-t-elle poser une question ou faire un commentaire?

Mme Monique Guay (Laurentides): J'aimerais faire un commentaire, monsieur le Président. Mais tout d'abord, j'aimerais vous féliciter pour votre élection, c'est la première fois que je prends la parole aujourd'hui.

Pour ce qui est des dépenses. . .

Le vice-président: Vous ne voulez pas poser une question au député de Wetaskiwin, vous voulez reprendre le débat, semble-t-il?

Mme Guay: Je n'ai pas de question, il s'agit d'un commentaire.

Le vice-président: Dans ce cas, je pense que suite à une entente entre les partis, c'est le député de Fraser Valley-Ouest qui a le droit de parole maintenant.

Mme Guay: D'accord.

Le vice-président: Alors, s'il n'y a pas de question, je donnerai la parole à l'honorable député de Fraser Valley-Ouest.

[Traduction]

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, je voudrais saisir cette occasion pour vous féliciter très sincèrement, vous et tous mes collègues, d'avoir été élus députés de cette trente-cinquième législature.

Je voudrais aussi remercier tous les gens de Langley, Aldergrove et Matsqui, en Colombie-Britannique, qui m'ont exprimé leur confiance en me choisissant comme représentant.

C'est le moment où tous les yeux sont braqués sur le nouveau gouvernement. Je pense que c'est le moment tout choisi pour parler de vision.

Je suis sûr que les historiens verront ces élections du 25 octobre 1993 comme un tournant. Auparavant, les Canadiens n'avaient jamais manifesté aussi clairement leur désir de changement. Les anciennes façons de procéder ne conviennent plus.

Certains minimisent l'importance de ces élections en disant qu'elles représentent simplement un vote de protestation, à quoi je répondrais: En quoi un vote de protestation serait-il inférieur à un autre? Les électeurs s'élevaient contre la façon dont le gouvernement conduit ses affaires, et il nous appartient de leur démontrer que l'on peut faire mieux.

Depuis deux décennies, les divers gouvernements fédéraux ont vécu au-dessus de leurs moyens. Il est grand temps de mettre un terme à cela et de responsabiliser les politiciens. Plutôt que de regarder la passé avec rage, il est préférable de regarder l'avenir avec espoir.

(1710)

Le discours du Trône d'avant-hier renfermait une lueur d'optimisme, ce qui est rare en cette période d'incertitude économique. Nous avons entendu parler d'une nouvelle transparence et de coopération entre les partis politiques et je ne peux que m'en réjouir. Toutefois, le discours du Trône de 1984 promettait la même chose et cela n'a duré que deux semaines environ. Espérons que les bonnes intentions seront plus durables cette fois-ci.

Je voudrais insister particulièrement sur un point; si l'on ne s'engage pas sincèrement à ouvrir les livres du gouvernement et à les soumettre à un examen minutieux, ces belles paroles concernant la collaboration et la nouvelle façon de gouverner ne produiront rien qu'un autre écho se répercutant dans ces lieux historiques.

Tous les députés devraient participer à l'analyse détaillée et critique des dépenses gouvernementales. Si le gouvernement respecte son engagement de donner aux députés l'occasion de participer plus étroitement aux travaux des comités, ce changement pourrait entraîner des résultats très positifs.

Cela me réconforte aussi de voir que le gouvernement a adopté, bien que ce soit en partie seulement, nos recommandations sur les avantages consentis aux députés. Toutefois, puisque le gouvernement a déjà pris sa décision, je comprends mal pourquoi il y a une étude de 200 000 $ en cours pour évaluer la rémunération et les avantages dont jouissent les députés.


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Je suis heureux de voir que le gouvernement s'engage à réformer le régime de retraite des députés, mais il ne suffit pas de mettre fin au cumul de pension et de traitement.

Notre parti a formulé des recommandations importantes en vue de la réforme du régime de retraite. Nous fournirons volontiers les résultats de ce travail à la Chambre et cela ne coûtera absolument rien.

D'autres idées, par exemple la nomination d'un conseiller chargé de l'éthique, semblent excellentes à première vue, mais je ne peux m'empêcher de me demander s'il est vraiment nécessaire de créer encore un autre poste d'une telle nature politique. Si tous les députés se comportaient comme les Canadiens le souhaitent, c'est-à-dire avec l'intégrité dont faisait état le discours du Trône, il ne serait pas nécessaire d'avoir recours à un chien de garde.

La véritable réforme émane d'abord de l'individu. On n'obtient pas l'intégrité par voie législative, pas plus qu'on ne peut espérer créer des emplois véritablement durables en jetant des milliards de dollars dans un soi-disant programme d'infrastructure. Le mot infrastructure désigne les routes, ponts et égouts. Or, une des premières dépenses décidées par le gouvernement porte sur la construction d'un centre municipal. Le gouvernement a reconnu que l'annonce de ce projet était motivée par des raisons politiques. Est-ce que le programme d'infrastructure va créer des emplois de qualité et durables? Nous verrons bien. Soyez assurés que nous serons aux aguets.

Le problème du chômage au Canada ne se réglera pas par un accroissement des dépenses publiques. Ceux qui le croient vivent dans un monde de rêve, et nous n'avons plus les moyens de nous payer ce genre de monde.

Quand je vois autour de moi plus de 200 nouveaux parlementaires, dont je suis, je ne peux qu'être stupéfait non seulement par le sens de l'histoire qu'on trouve dans ces murs mais aussi par la responsabilité que comportent nos fonctions. Je vois autour de moi des représentants qui ont plusieurs conceptions différentes de l'avenir du Canada. Il y a peut-être plusieurs façons de voir les choses, mais de quelque point de vue qu'on se place, l'essentiel demeure toujours le même.

Si nous persistons sur la voie actuelle, nous n'aurons plus le loisir de discuter pour savoir si la bouteille est à demi pleine ou à demi vide. Elle sera tout simplement vide. Le gouvernement devra rendre compte de l'argent qu'il dépense, et les députés ont des comptes à rendre à leurs électeurs.

Les statuts du Parti réformiste stipulent que le devoir des représentants élus envers leurs électeurs l'emporte sur leurs obligations envers leur parti politique. Afin de voir à ce que je respecte cet engagement, nous avons constitué, dans la circonscription de Fraser Valley-Ouest, des groupes composés d'électeurs de divers milieux et d'opinions politiques différentes. Ces groupes n'en sont encore qu'à leurs débuts, mais tout indique déjà que je serais rappelé à l'ordre si jamais je m'écartais de la voie qui m'est tracée.

Si nous sommes prêts à accroître les pouvoirs des députés à la Chambre des communes, faisons donc un pas de plus et demandons aux Canadiens d'intervenir dans le processus.

(1715)

Les électeurs de Colombie-Britannique que je représente n'acceptent plus le statu quo. Le gouvernement fédéral n'est jamais parvenu à vivre selon ses moyens et mes électeurs veulent maintenant avoir leur mot à dire sur la façon dont leurs impôts sont dépensés. Les gens veulent avoir l'assurance que les budgets seront équilibrés, que la dette à long terme sera fortement réduite et que les dépenses effectuées seront nécessaires et justifiées. Il ne suffit plus de se contenter de dépenser. Nous devons savoir d'où vient et où va l'argent, pourquoi on le dépense ainsi et pourquoi nous ne veillons pas à payer d'abord nos comptes.

La plupart des programmes sociaux sont très valables, mais ce n'est pas suffisant. Au point où nous en sommes, la valeur d'un programme n'est plus le principal critère à considérer. Il faut réduire les dépenses fédérales jusqu'au point où nous recommencerons à vivre dans les limites de nos moyens. En plafonnant les dépenses, nous franchirons ce premier pas.

Si l'on insiste pour freiner les dépenses, ce n'est pas dans le seul but de relancer l'entreprise canadienne. Au contraire, on devrait obtenir la participation de tous les jeunes Canadiens dans ce genre de décisions. Pour la première fois de notre histoire, on demande aux jeunes d'accepter un niveau de vie inférieur à celui de leurs parents. C'est inacceptable.

Notre niveau de vie élevé ne tient pas seulement à des considérations financières. Nos programmes sociaux ont aussi permis de nous distinguer comme une nation qui croit à l'entraide. Le seul moyen de préserver les éléments qui font notre fierté, en tant que Canadiens, c'est de faire en sorte qu'on puisse se les payer, maintenant et dans le futur.

Les entreprises canadiennes doivent vivre selon leurs moyens. Les familles canadiennes doivent vivre selon leurs moyens, et nous devons insister pour que le gouvernement en fasse autant. Ce que dicte la prudence à toutes les familles du Canada vaut également pour le gouvernement du Canada. On n'a tout simplement pas le choix.

En terminant, je veux vous parler d'une attitude que j'ai observée chez les Canadiens, depuis quelque temps, face à eux-mêmes. Il est très rare qu'on entende les gens dire à quel point le Canada est un pays fantastique. On dirait que cela se produit surtout quand on parle à des Canadiens qui reviennent d'un voyage à l'étranger. Comment se fait-il que le Canada ait un tel air de terre promise, vu de l'étranger, mais qu'on l'oublie quand on s'y trouve?

Le livre rouge des libéraux s'intitule Pour la création d'emplois. J'espère que, dans le cadre de la création d'emplois, on s'est donné pour objectif premier d'appliquer un programme de réduction du déficit et de la dette.

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, pour commencer j'aimerais vous féliciter d'avoir accédé à ce poste. Je tiens également à


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féliciter le député de Fraser Valley-Ouest pour son premier discours.

J'aimerais lui rappeler quelque chose qui va tenir tous les députés très occupés. À plus d'une reprise, le député a mentionné au cours de son intervention que l'essentiel demeurait toujours le même. Venant du milieu des affaires, je sais bien qu'en affaires, l'essentiel c'est le rendement des actions. C'est de savoir combien on a gagné et combien on doit investir ou réinvestir. Toutefois, dans la salle du conseil qu'est le Parlement, ce qui compte ce n'est pas cela. Ce qui compte pour nous, ce sont les gens. C'est tout à fait différent.

Quand on pense aux préoccupations de nos électeurs-et mon rôle c'est de m'occuper de mes électeurs-, on pense à tous ceux qui sont au chômage et aux assistés sociaux. Ils attendent de nous que nous créions un climat de confiance pour redonner vigueur à l'économie qui souffre d'un manque de confiance depuis quatre ou cinq ans.

(1720)

On a mentionné la construction d'un centre des congrès à Québec, qui serait un point de rencontre pour les gens d'affaires qui vont ouvrir des marchés, créer de nouveaux débouchés, échanger des idées, exporter des produits. Cela entraînera la création d'emplois, et pas seulement à court terme pendant la construction de ce centre. Il se formera un climat propice aux rencontres, un climat dans lequel les choses bougent, des marchés sont conclus, de nouveaux débouchés explorés. Ce sera un endroit idéal pour que se produise tout ce qui fera que les gens retrouveront du travail et que nous pourrons enfin réduire cette saignée de 30 milliards de dollars consacrés l'an dernier à l'assurance-chômage et à l'assistance sociale.

Le député ne voit-il donc pas que c'est une façon de s'attaquer aux problèmes et de parvenir à nos objectifs?

Le vice-président: Le député de Fraser Valley-Ouest a une minute et demie environ.

M. White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, je remercie le député de m'avoir laissé assez de temps pour répondre à la question. Je me rends compte que nous ne disposons que de dix minutes et qu'il en a pris cinq.

Il n'y a pas de doute que les gens constituent une importante richesse de ce pays. Il faut se demander pourquoi ils manquent de confiance à l'endroit de notre gouvernement et de notre régime parlementaire. Le facteur le plus important dans cette perte de confiance, au moins dans ma circonscription, et je suis sûr que cela s'applique à beaucoup d'autres circonscriptions du pays, c'est que notre gouvernment dépense trop et qu'il dépasse de loin nos moyens.

Dans mon discours, j'ai abordé une préoccupation importante de notre pays et de mes électeurs. Si nous ne maîtrisons pas cette situation, il y aura beaucoup plus de chômeurs. Les dépenses gouvernementales ne suffisent pas à restaurer la confiance au pays.

Je voudrais remercier le député de sa question parce que je veux lui faire savoir que si le gouvernement ne maîtrise pas les finances, la dette et le déficit, il aura un problème encore plus grave, avec un plus grand nombre de chômeurs et pas moins.

M. Andy Mitchell (Parry Sound-Muskoka): Monsieur le Président, j'aimerais profiter de ma première intervention à la Chambre des communes pour vous féliciter, vos adjoints et vous, d'avoir été élus aux postes que vous occupez.

C'est tout un honneur pour moi de représenter à la Chambre la belle circonscription de Parry Sound-Muskoka et les milliers de personnes qui y vivent. J'aimerais également remercier tous ceux qui m'ont témoigné leur confiance en m'élisant.

Ma circonscription englobe les lacs Muskoka et la baie Georgienne. Porte d'accès au parc Algonquin, elle est aussi le lieu où le nord et la sud se rencontrent en Ontario. Les visiteurs affluent de partout pour profiter de la nature à son meilleur et de la vie à son meilleur.

C'est aussi la circonscription que représentait, jusqu'au 25 octobre dernier, ce patriarche de la Chambre des communes qu'est Stan Darling. Je tiens à le remercier publiquement, en mon nom et en celui des résidents de Parry Sound-Muskoka, même si nous ne sommes pas du même parti, pour ses 21 années de service à la Chambre des communes et ses 50 années de vie publique. Stan personnifiait le député entièrement dévoué à sa circonscription, qui rentrait chez lui toutes les fins de semaine, ne manquait pas une réception et se montrait toujours prêt à rendre service à un commettant, peu importe que le problème soit gros ou petit.

Ceux d'entre vous qui ont été élus avant 1993 connaissent le travail acharné que Stan a fait dans le dossier du traité sur les pluies acides. Ce traité va permettre aux gens de ma génération ainsi qu'à nos enfants de continuer à profiter de la splendeur de Parry Sound-Muskoka. Le dernier libéral à représenter cette circonscription à la Chambre était Bucko MacDonald, un bon libéral et ancien joueur des Toronto Maple Leafs qui a été élu en 1953. Elle a ensuite été représentée par Stan et son prédécesseur, Gordon Aiken, un autre conservateur, jusqu'à ce que je sois élu à mon tour.

Bucko est décédé il y a trois ans, mais je suis certain que, s'il a pu mettre fin à quarante années de disette libérale dans ma circonscription, il devrait être capable d'user de son influence pour mettre fin à la disette un peu moins longue qu'a connue son autre équipe et qu'en 1994, les Toronto Maple Leafs remporteront la Coupe Stanley.

(1725)

Je profite de l'occasion pour remercier ma femme, Danielle, et mes enfants, Christopher, Peter et Lisa, qui m'ont appuyé tout au long de la campagne. Ils ont fait des sacrifices pour que je puisse servir mes électeurs à titre de député. Je reconnais en même temps que les proches de tous les députés font de tels sacrifices et je leur rends hommage.

Aujourd'hui, nous devons débattre le discours du Trône et analyser la voie que le gouvernement compte adopter au cours de la trente-cinquième législature. Notre programme se résume très


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simplement: nous croyons en chaque Canadien et chaque Canadienne.

Le gouvernement entend investir dans les jeunes, en lançant un programme d'apprentissage et un Service Jeunesse.

Il entend investir dans les petites entreprises en mettant à leur disposition les capitaux que nécessite leur expansion et en allégeant le fardeau de règlements inutiles et d'impôts inéquitables.

Le gouvernement investira dans les chômeurs en leur donnant l'occasion de collaborer sans tarder au programme d'infrastructure et en créant un environnement qui garantira la création d'emplois durables.

Le gouvernement investira dans les membres moins fortunés de notre société en reconstituant notre filet de sécurité sociale, en aidant ces gens à s'en sortir et en leur donnant la formation dont ils ont besoin pour devenir des membres productifs de la société.

Le gouvernement veut investir dans les femmes et les jeunes enfants en adoptant des mesures législatives qui renforceront l'interdiction de la pornographie et mettront un terme à la violence faite aux femmes et aux enfants. La réforme de la Loi sur les jeunes contrevenants vise à établir un lien de cause à effet entre un comportement inapproprié et des conséquences inévitables.

Plutôt que de se contenter d'investir dans les ressources humaines, le gouvernement libéral entend appliquer une politique globale équilibrée. Nous ne nous fondons pas aveuglément sur une idéologie. Nous ne nous inspirons pas d'une doctrine de contrôle social de la gauche, ni d'un capitalisme débridé de droite.

Nous ne cherchons pas à détruire le pays en l'amputant de la province de Québec et nous n'allons pas aliéner cette province et sa population par l'indifférence ou par l'incompréhension des aspirations légitimes de la société canadienne-française. Nous avons l'intention, en tant que gouvernement, d'appliquer cette politique équilibrée face aux défis économiques auxquels le Canada est confronté.

Nous sommes conscients, comme tous les gens d'affaires au pays, qu'un budget comporte deux volets: les rentrées et les dépenses. Si nous devions nous borner à réduire les dépenses sans essayer d'augmenter les rentrées par la création d'emplois, nous échouerions sûrement dans nos efforts pour équilibrer le budget.

Nous allons réduire les coûts et commencer à alléger l'énorme fardeau fiscal de la classe moyenne. Nous nous attaquerons à ces deux tâches en étant pleinement conscients du fait que plus il y a de contribuables et de personnes qui travaillent, plus léger est le fardeau assumé par chacun.

Je suis particulièrement heureux de voir que, dans le discours du Trône, on a promis de redonner au gouvernement son intégrité. Nous nous sommes engagés à prendre plusieurs mesures à cette fin. Nous allons rapidement modifier le Règlement afin de permettre aux députés de jouer un plus grand rôle dans la rédaction des textes législatifs.

Nous allons aussi confier des pouvoirs plus grands aux comités de la Chambre des communes et nous allons constamment discuter à la Chambre des questions importantes qui surgissent.

Le programme de mon gouvernement ne s'attaque pas seulement à des préoccupations nationales. Il est très important pour la circonscription de Parry Sound-Muskoka que je représente. Dans ma circonscription, le taux de chômage est supérieur à 15 p. 100, ce qui ne tient pas compte des gens qui travaillent à temps partiel et préféreraient un emploi à temps plein ou même des gens qui ont simplement cesser de chercher un emploi.

Dans certaines localités de ma circonscription, une personne sur quatre voudrait travailler mais en est incapable. C'est leur désir ou plutôt leur volonté de changer la situation qui a incité les électeurs de Parry Sound-Muskoka à élire un député libéral pour les représenter au cours de la trente-cinquième législature.

L'économie locale de Parry Sound-Muskoka repose sur le tourisme. Un emploi sur deux est relié directement ou indirectement à ce secteur d'activité. Toute augmentation de 1 p. 100 de l'activité touristique rapporte 1,9 million de dollars en avantages économiques directs et 39 années-personnes. Les milliers de touristes qui se rendent dans notre région chaque année pour profiter de nos lacs et de nos cours d'eau, s'émerveiller devant les couleurs automnales ou parcourir les pistes de randonnée en motoneige l'hiver constituent le point d'appui de l'économie de ma circonscription.

(1730)

L'engagement de notre gouvernement, qui a promis de redonner du travail aux Canadiens et de réformer notre régime fiscal, contribuera à relancer l'activité touristique. Je me suis engagé à collaborer avec tous les habitants de ma circonscription pour concevoir des initiatives visant à créer une industrie touristique quatre-saisons.

Nous viserons à élaborer une stratégie de commercialisation adéquate qui non seulement réussira à attirer des visiteurs de toutes les régions du Canada, mais qui s'inscrira également dans le cadre d'initiatives fédérales et atteindra les touristes des États-Unis et même de nouveaux marchés, comme l'Europe et l'Extrême-Orient. Je m'emploierai également à trouver de l'aide financière pour les exploitants de nos entreprises touristiques et doter nos sites naturels d'une nouvelle infrastructure touristique.

Si le tourisme est le moteur de notre économie, les exploitants de petites entreprises en sont les pilotes. Les petites entreprises fournissent plus de 90 p. 100 de tous les emplois dans la circonscription de Parry Sound-Muskoka. Des hommes et des femmes risquent chaque jour leur fortune familiale, leur sécurité financière, et dans bien des cas ils n'ont que les ressources nécessaires sur lesquelles puisse reposer notre renouveau économique.

J'ai consacré toute ma carrière professionnelle à collaborer avec le secteur des petites entreprises. J'ai vu des gens jouer le jeu et travailler jusqu'aux limites de leurs forces pour finalement tout perdre. Et ce n'était absolument pas leur faute. J'ai vu la souffrance et la dévastation qu'a causées un nombre record de faillites industrielles. Grâce à sa politique et à ses programmes,


129

notre gouvernement va veiller à ce que cela ne se reproduise pas et à ce que cette terrible tendance soit renversée.

Le secteur canadien des petites entreprises nécessite et mérite notre appui. Notre gouvernement est résolu à trouver le moyen de fournir des capitaux aux entrepreneurs en détresse. En tant qu'ancien banquier, je suis doublement déterminé à travailler dur pour que le gouvernement et les banques collaborent afin d'assurer des prêts aux petits entrepreneurs, à veiller à ce que les Canadiens qui méritent qu'on leur accorde du crédit ne se le voient pas refuser simplement parce qu'ils exploitent une entreprise dans une région rurale, ou encore dans un secteur industriel que ne prisent pas les gnomes de Bay Street.

Je vais collaborer avec mes commettants et mon gouvernement en vue de réduire les tracasseries administratives qui étouffent les petits entrepreneurs. Je ne veux pas voir de bonnes possibilités d'emploi sacrifiées sur l'autel de la bureaucratie.

En tant que membre d'un gouvernement libéral, je vais travailler à réformer notre fiscalité de telle sorte que les petits entrepreneurs n'aient plus à faire office de percepteurs d'impôt. Il nous faut amasser des recettes de façon à ne pas décourager les consommateurs ni à perdre les bénéfices du tourisme dont Parry Sound-Muskoka a si désespérément besoin au profit des États-Unis.

Le tourisme ainsi que le commerce au détail et les services qui le soutiennent sont très importants pour ma région et il en faut encore plus. Le tourisme sera toujours notre principale industrie. Cependant, nous devons faire des efforts pour doter Parry Sound-Muskoka d'une économie équilibrée.

Pendant de nombreuses années, j'ai travaillé pour le développement économique à titre de représentant de la chambre de commerce et en tant que membre du comité municipal de développement économique.

J'ai pris l'engagement de travailler de concert avec la petite entreprise et avec les gens, et de servir de pont avec le gouvernement pour parvenir à diversifier les bases de l'économie. Nous instaurerons un climat propice à la création de petites entreprises, ce qui est important pour le Canada et plus encore pour moi et pour Parry Sound-Muskoka.

Nous miserons sur notre qualité de vie, sur la proximité de grands marchés, sur la supériorité de notre infrastructure de transport et sur l'esprit d'innovation et le zèle de notre population pour attirer de nouvelles industries et de nouveaux manufacturiers qui constitueront les bases d'un renouveau économique.

Le ministre du Développement des ressources humaines vient de s'engager à la Chambre à introduire de nouvelles initiatives d'adaptation de la main-d'oeuvre. Nous travaillerons pour créer un milieu où ceux qui ont été exclus de la population active peuvent acquérir de nouvelles compétences et se préparer à occuper les emplois que le développement et la diversification de l'économie créeront.

(1735)

Les habitants de ma circonscription, voire tous les Canadiens, se trouvent maintenant devant une alternative. Nous avons de grands défis à relever et pour réussir, il faudra, collectivement, faire appel à notre énergie, à nos connaissances et à notre détermination.

Nous, les Canadiens, avons un choix à faire. Nous pouvons choisir la voie facile, nous pouvons croire que nous ne réussirons jamais à surmonter les problèmes auxquels nous sommes confrontés. Nous pouvons rechercher des solutions simplistes et nous laisser abattre parce qu'elles ne fonctionnent pas. Nous pouvons demander à d'autres de faire des sacrifices en refusant nous-mêmes d'en faire. Nous pouvons rendre d'autres personnes responsables de nos difficultés et refuser d'admettre que nous avons eu notre rôle à jouer. Nous pouvons aussi prendre l'autre voie, celle qui consiste à admettre que nous pouvons faire mieux, que nous ne sommes pas à la merci des problèmes, que nous sommes responsables de nos actions et que chacun d'entre nous devra faire des sacrifices et ne pas exiger que tous les sacrifices soient faits par le même groupe.

Dans son discours du Trône, le gouvernement a clairement démontré qu'il a choisi la deuxième voie, qu'il ne se soustraira pas à ses responsabilités, qu'il donnera un leadership à tous les Canadiens, qu'il fera preuve d'innovation en tirant des leçons du passé, mais sans craindre l'avenir, qu'il sera généreux et, par-dessus tout, qu'il se soucie d'abord et avant tout de chaque Canadien.

Le Canada est un pays magnifique. Les Canadiens forment un grand peuple. Nous pouvons faire mieux que ce que nous avons fait dans le passé et nous nous surpasserons. Avec l'aide de tous les Canadiens et de tous les députés, nous construirons un avenir d'espoir et de prospérité pour nous-mêmes et pour nos enfants.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest): Monsieur le Président, je veux féliciter le député de Parry Sound-Muskoka. Sa région est certes l'une des plus belles et des plus pittoresques du pays. Je suis certain que les autres députés apprécient comme moi les remarques qu'il a faites au sujet des sacrifices que font nos familles pendant que nous sommes ici. C'était très gentil de sa part de le mentionner.

En tant que patron de petite entreprise, j'étais heureux de voir à quel point il se préoccupe des petites entreprises. Son expérience de banquier lui donne certainement une vision intéressante qui est totalement différente de celle des entrepreneurs. C'est un peu comme une personne qui sait conduire mais qui ne peut pas obtenir son permis de conduire.

La question que je veux poser au député de Parry Sound est la suivante. On peut lire dans le livre rouge que le gouvernement libéral augmentera les garanties personnelles à 25 p. 100. Si j'ai bien lu, la garantie s'appliquerait à la première tranche de 25 p. 100.


130

En tant que banquier, le député a-t-il songé à l'effet que cela pourrait avoir sur l'exploitation d'une entreprise si le gouvernement devait garantir la première tranche de 25 p. 100? Si le gouvernement doit offrir des garanties, ce qui est évidemment discutable, ne devrait-il pas garantir la dernière tranche de 25 p. 100 et non la première? Si c'est mon argent et celui de mes électeurs qui sert de garantie, je voudrais bien que le patron de la petite entreprise qui a obtenu ce prêt passe ses nuits entières à essayer de trouver des façons de rembourser l'argent.

M. Mitchell: Monsieur le Président, la Loi sur les prêts aux petites entreprises actuellement en vigueur offre une garantie de 20 p. 100, mais cela ne fonctionne pas exactement comme le député l'a décrit.

Aux termes de la loi, s'il y a défaut de paiement sur le prêt, la banque essaiera de se servir de toutes les autres garanties avant de faire appel au gouvernement. Autrement dit, toutes les autres garanties doivent être épuisées pour que le gouvernement soit obligé de payer. En réalité, le gouvernement intervient en dernier lieu et c'est l'entrepreneur qui est le premier perdant.

(1740)

[Français]

M. Jean Landry (Lotbinière): Monsieur le Président, c'est la première fois que je m'adresse à cette Chambre. Je suis nouveau, mais je vais apprendre, moi aussi, durant mon mandat, au cours des quatre prochaines années. J'aimerais tout d'abord vous féliciter pour votre nouveau poste.

Ma question s'adresse au député: Comment allez-vous faire pour redonner concrètement des emplois permanents, non pas des emplois à temps partiel, ce que suggère votre programme, mais redonner cette confiance aux Québécoises et Québécois ainsi qu'aux Canadiens et Canadiennes? À titre d'exemple, prenons les petites entreprises; elles ont besoin d'aide et d'argent, mais les budgets sont coupés. Par conséquent, j'aimerais avoir une réponse, monsieur le Président.

[Traduction]

M. Mitchell: Monsieur le Président, à propos du programme de création d'emplois du gouvernement, il faut se rappeler qu'il se compose de deux éléments. J'entends les députés d'en face reprocher constamment qu'il s'agit d'un programme d'infrastructure, qu'il vise le court terme, qu'il sera révolu d'ici un an ou deux, mais le programme ne se résume pas à cela.

Quand on investit dans les travaux d'infrastructure, on crée un environnement favorable à la création d'emplois à long terme. Dans ma circonscription, si l'on fait des travaux d'infrastructure dans un parc industriel et si on y installe des canalisations d'eau et d'égout, on pourra par la suite y attirer de nouvelles entreprises. En effet, le programme d'infrastructure n'aura pas créé uniquement des emplois à court terme pendant la phase de construction, il aura également contribué à créer des emplois à long terme quand de nouvelles entreprises pourront venir s'y établir.

M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, je voudrais d'abord, en tant qu'ami et collègue, vous féliciter de votre nomination au poste de vice-président. Comme vous le savez, il y a longtemps que nous nous connaissons. Ma femme et moi avons eu l'occasion de faire partie de votre équipe pendant votre première campagne électorale alors que nous étions tous deux membres d'une autre formation politique-mais c'est une autre histoire.

Je voudrais aussi féliciter le député de Parry Sound-Muskoka de son premier discours à la Chambre. J'ai eu la chance d'en faire autant ce matin et, comme je l'ai dit alors, le livre rouge des libéraux contient beaucoup de grands principes, mais bien peu de mesures concrètes. Nous l'avons entendu parler des besoins de sa circonscription, mais ceux du pays tout entier sont encore plus grands.

C'est pourquoi la question que je pose au député par rapport au discours du Trône est: Qu'est-ce que son gouvernement et lui vont faire pour créer des emplois non seulement dans sa circonscription, mais dans le pays tout entier? Car nous savons que le programme d'infrastructure de 6 milliards de dollars ne suffira pas.

M. Mitchell: Monsieur le Président, comme je l'ai dit plus tôt en réponse à la dernière question, il ne convient pas de critiquer notre programme de création d'emplois en se limitant à un seul de ses éléments, soit le programme d'infrastructure. Ce dernier est la bougie d'allumage, le point de départ, mais il n'est qu'un élément parmi une foule d'autres.

Si nous parvenons, en tant que gouvernement, et nous réussirons, à canaliser plus d'argent vers les petites entreprises, nous créerons ainsi des emplois à long terme. Quand nous réformerons le régime fiscal, nous créerons des emplois à long terme. Quand nous réduirons les tracasseries administratives avec lesquelles les petits entrepreneurs sont aux prises tous les jours, nous créerons des emplois à long terme. Quand nous aiderons les entreprises à la fine pointe de la technologie, nous créerons des emplois à long terme. Le livre rouge regorge de détails spécifiques sur les moyens que nous prendrons pour créer des emplois à long terme.

Le vice-président: Nous allons essayer d'utiliser ce qu'il nous reste de temps d'ici 17 h 45. Vous avez donc à peu près trois minutes tous les deux. Le député de Fraser Valley-Est.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, j'ai trouvé intéressante la description que le député a faite de votre circonscription. Tous les députés qui ont pris la parole jusqu'ici ont sans doute présenté la leur comme la plus belle de tout le Canada. J'en ferai peut-être autant la semaine prochaine.

Je félicite le député de son premier discours à la Chambre. Chose intéressante, il a signalé que 90 p. 100 des entreprises sont créées par de petits entrepreneurs. Évidemment, l'intervention gouvernementale n'y est pour rien. L'initiative vient de la petite entreprise.

Autre point intéressant, le député a parlé des sacrifices que tous les éléments de l'économie devraient faire. Je me demande


131

quels sacrifices il attend au juste des petites entreprises pour financer ce programme.

M. Mitchell: Monsieur le Président, en fait, les petites entreprises de ma circonscription créent 90 p. 100 des emplois. Elles ont dû faire des sacrifices pour créer ces emplois. Tous les députés, tous les Canadiens, tous les groupes d'électeurs, tous les groupes d'intérêts devront unir leurs efforts. Il leur faudra prendre conscience que, pour revitaliser l'économie canadienne, pour créer des emplois, pour régler les plus graves problèmes auxquels nous faisons face, nous devrons tous nous épauler.

(1745)

Chaque député, au fur et à mesure que les problèmes seront abordés, chaque citoyen devra se demander non seulement en quoi il sera touché, mais aussi: «Que puis-je faire pour aider le pays à régler ces problèmes.» Lorsque cette attitude règnera à la Chambre et dans tout le pays, nous arriverons à relancer notre économie. Nous arriverons à créer des emplois, et les Canadiens retrouveront la prospérité à laquelle ils ont droit.

Le vice-président: Comme il est 17 h 45, il est de mon devoir, en vertu du paragraphe 50(5) du Règlement, d'interrompre les délibérations et de mettre aux voix toute question nécessaire pour disposer du sous-amendement.

Plaît-il à la Chambre d'adopter le sous-amendement?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur du sous-amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Convoquez les députés.

(1810)

Après l'appel du timbre:

M. Riis: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je sais que nous allons voter sur une motion visant à limiter les dépenses gouvernementales, mais je me rappelle que le 18 juin 1992, le projet de loi C-56 a reçu la sanction royale. Ce projet de loi limitait les dépenses gouvernementales à 107 milliards de dollars pour le prochain exercice.

Ma question est la suivante. Si nous avons déjà une loi qui limite les dépenses gouvernementales à 107 milliards de dollars, pourquoi est-ce que nous. . .

Le Président: À l'ordre. L'argument du député est très valable, mais il ne s'agit pas d'un rappel au Règlement, d'après moi. Bien sûr, j'invite le député à faire de telles déclarations dans son discours, dès qu'il aura l'occasion.

Le vote porte sur le sous-amendement.

(Le sous-amendement, mis aux voix, est rejeté.)

(Vote no 1)

POUR

Députés
Abbott
Ablonczy
Benoit
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Bridgman
Brown (Calgary Southeast)
Chatters
Cummins
Duncan
Epp
Forseth
Frazer
Gilmour
Gouk
Grey (Beaver River)
Grubel
Hanger
Hanrahan
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hayes
Hermanson
Hill (Macleod)
Hill (Prince George-Peace River)
Hoeppner
Jennings
Johnston
Kerpan
Manning
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Penson
Ramsay
Ringma
Schmidt
Scott (Skeena)
Silye
Solberg
Speaker
Stinson
Strahl
Thompson
White (Fraser Valley West)
White (North Vancouver)

CONTRE

Députés
Adams
Alcock
Allmand
Althouse
Anawak
Anderson
Arseneault
Assadourian
Augustine
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Bachand
Baker
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellehumeur
Bellemare
Berger
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bertrand
Bethel
Bevilacqua
Bhaduria
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Bouchard
Boudria
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Bélisle
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Canuel
Caron
Catterall
Chamberlain
Chan
Chrétien (Frontenac)
Chrétien (Saint-Maurice)
Clancy
Cohen
Collenette
Collins
Comuzzi
Copps
Cowling
Crawford
Culbert
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
de Jong
de Savoye
Deshaies


132

DeVillers
Dhaliwal
Discepola
Dromisky
Dubé
Duceppe
Duhamel
Dumas
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Fewchuk
Fillion
Finestone
Finlay
Fontana
Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Québec)
Gallaway
Gauthier (Roberval)
Gerrard
Godfrey
Godin
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Grose
Guarnieri
Guay
Harb
Harper (Churchill)
Harvard
Hickey
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jackson
Jacob
Jordan
Keyes
Kilger (Stormont-Dundas)
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lalonde
Landry
Langlois
Lastewka
Laurin
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lee
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Lincoln
Loney
Loubier
MacAulay
MacDonald
MacLaren (Etobicoke North/Nord)
MacLellan (Cape Breton-The Sydneys)
Maheu
Malhi
Maloney
Manley
Marchand
Marchi
Marleau
Massé
McCormick
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)
McTeague
McWhinney
Mercier
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Minna
Mitchell
Murphy
Murray
Ménard
Nault
Nunez
Nunziata
O'Brien
O'Reilly
Pagtakhan
Parrish
Paré
Patry
Payne
Peric
Peters
Peterson
Phinney
Picard (Drummond)
Pillitteri
Plamondon
Pomerleau

Proud
Péloquin
Reed
Regan
Richardson
Rideout
Riis
Ringuette-Maltais
Robichaud
Rocheleau
Rock
Rompkey
Sauvageau
Scott (Fredericton-York Sudbury)
Serré
Shepherd
Sheridan
Simmons
Skoke
Solomon
Speller
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Szabo
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Ur
Valeri
Vanclief
Venne
Verran
Volpe
Walker
Wayne
Wells
Whelan
Wood
Young

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Députés
Assad
Asselin
Cauchon
Crête
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Guimond
Karygiannis
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Leblanc (Longueuil)
Lefebvre
Martin (LaSalle-Émard)
Ouellet
St-Laurent
Wappel
Zed-214
Williams-52

Le Président: Je déclare le sous-amendement rejeté.

M. Hermanson: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je tiens à faire une observation au nom des députés présents. Je voudrais remercier M. Bill Corbett et son fils pour avoir reconnu chaque député sans faire une seule erreur au cours de ce premier vote par appel nominal.

Des voix: Bravo!

Le Président: Je l'ai bien formé, n'est-ce pas?

Comme il est 18 h 24, la Chambre s'ajourne jusqu'à convocation par la présidence.

(La séance est levée à 18 h 24.)


133

134

Nous sommes tous réunis ici pour dire un dernier adieu à l'honorable Steven Eugene Paproski, époux affectueux et bien-aimé de Betty, père chéri et admiré de Patrick, Peter, Anna, Alexandra et Elizabeth, grand-père adoré de Steven, Colin et Kathleen.

Permettez-moi d'abord de rendre hommage au parlementaire distingué que fut Steve, dont le dévouement envers l'institution lui valut l'admiration, même l'amitié de tous les députés.

C'est en siégeant à la Chambre des communes, pratiquement côte à côte, que Steve et moi sommes devenus bons amis. À cette époque, il était whip en chef pendant que moi, je prêtais main forte au leader parlementaire. De sorte que nos tâches respectives nous amenaient à siéger ensemble du matin jusqu'au soir. C'est ainsi que nous avons appris à bien nous connaître.

Nous prenions beaucoup de plaisir à évoquer l'histoire du nouveau député, fraîchement élu, qui prend place pour la première fois à la Chambre. «Quel honneur pour moi, se dit-il, de pouvoir siéger à deux longueurs de bras de mes ennemis politiques et de leur faire face enfin.» Ce à quoi un vétéran de la politique ne manque jamais de répliquer: «Mon fils, les députés qui vous font face ne sont pas vos ennemis. Ce sont des adversaires politiques. Vos ennemis, ils sont assis tout autour de vous.»

Mais si Steve aimait bien raconter cette histoire, il en était lui-même l'antithèse vivante. Il était l'un des quelques parlementaires, l'une des rares personnes que je connaisse, qui n'avait pas d'ennemis. Son enthousiasme communicatif, sa gentillesse spontanée, son désintéressement total le rendaient irrésistible à tous.

Pour moi, Steve était ce que je considère comme un vrai millionnaire. Son sourire, sa voix chaude valaient bien un million. Qui d'entre vous ici ne peut voir et entendre Steve chanter Hello Dolly? Il avait aussi un million d'amis et il a sûrement accompli un million de bonnes actions dans sa vie.

Rares sont ceux qui ont connu Steve sans bénéficier de sa bonté et de sa générosité. J'en ai été témoin maintes et maintes fois, à l'égard de sa famille, de ses amis et même envers des étrangers.

Je me souviens d'un voyage en Bulgarie que Gerda et moi avons fait en compagnie de Steve et de Betty, durant les jours sombres du communisme. Steve a commencé par partager sa nourriture avec les employés de l'hôtel et a fini par donner sa dernière chemise, ne conservant que les vêtements qu'il portait sur lui.

Le temps me manque pour vous faire part de toutes ses bontés, de toutes ses générosités à mon égard. Je vous donne seulement comme exemple cet incident survenu en 1989, par une journée glaciale de février. J'étais hospitalisé à l'hôpital St-Paul de Saskatoon. Voilà qu'apparaît Steve en compagnie de deux copains, Jim Hole et le juge Howard Irving. Il les avait convaincus de louer un petit avion pour faire le voyage depuis Edmonton, par 40 degrés sous zéro. Steve avait imaginé que j'avais besoin d'un remontant. Voilà qui résume assez bien la personnalité du genre d'homme qu'il était.

Il a toujours été égal à lui-même. Il s'est dévoué sans compter tout au long de sa vie. Il était fier de son père et montrait volontiers aux visiteurs la cordonnerie que ce dernier avait occupée, avenue Jasper, à Edmonton. Son père étant décédé quand Steve avait seize ans, il a dû s'occuper de ses trois frères plus jeunes et veiller à leur éducation.

La carrière de footballeur de Steve a commencé quand il a reçu une bourse pour aller étudier l'éducation physique à l'Université de l'Arizona. Nombreux sont ceux qui se souviennent des cinq années qu'il a joué avec les Eskimos d'Edmonton. Ses activités de lutteur sont cependant moins connues. Steve avait besoin d'arrondir ses maigres revenus d'étudiant sans risquer pour autant son statut d'athlète amateur ni sa bourse d'étude. Imaginez-vous Steve portant un masque, affublé en lutteur professionnel, incognito, du moins le croyait-il. Il avait comme adversaire un copain, Killer Gene Kiniski. Pure coïncidence bien sûr, un jour c'était Steve le vainqueur, le lendemain c'était Gene Kiniski. Pour les matches par équipe, on les baptisait les Masked Marvels. Quel début pour une carrière politique !

C'est avec fierté que Steve mesurait souvent le chemin parcouru depuis sa naissance en Pologne jusqu'à son rôle de parlementaire, de ministre de la Couronne et de vice-président à la Chambre des communes.

En qualité de député, il était totalement dévoué aux intérêts de ses commettants. Il n'est donc pas étonnant que les électeurs d'Edmonton l'aient appuyé fidèlement pendant vingt-cinq années.

Comme membre du Cabinet, il a servi tous les Canadiens. L'amour profond et la fierté qu'il éprouvait pour son pays lui venait de son immense reconnaissance pour ce qu'il avait pu accomplir, pour lui et les enfants qu'il a élevés avec Betty.

Naturellement, sa famille l'a toujours soutenu. Il adorait son épouse, ses cinq enfants, ses petits-enfants qui le lui rendaient bien. S'il a su éclairer la vie de Betty, elle a ensoleillé son existence. Ensemble, ils débordaient de chaleur et de générosité, et dès le moment qu'on les voyait ensemble, on se doutait bien de ce qui unissait leurs destinées.

Gerda et moi, nous nous souvenons très bien de cet autre voyage au Mexique cette fois fait en leur compagnie. Cette année-là, Betty célébrait son cinquantième anniversaire. Et ce fut le party pendant les dix jours que dura le voyage. Chaque jour, Steve organisait la fête, sans oublier les présents.

Beaucoup d'entre vous savent sans doute que Steve était profondément religieux. Lui et Betty étaient des pratiquants fidèles et des croyants fervents. Sa foi imprégnait toute sa vie, et il m'arrivait parfois de partager cette ferveur. Je suis certain que Steve connaissait les noms de tous les évêques et cardinaux de l'Église.

Je me rappelle cette scène qui se déroulait à l'occasion de l'assemblée annuelle de la Conférence des évêques catholiques, à Ottawa. Il faisait chaud et humide et, assis autour de la piscine de Steve, on retrouvait Lincoln Alexander, un baptiste, moi-même, un grec orthodoxe, assis entre le Cardinal Carter et le Cardinal Flahiff, ainsi qu'une vingtaine d'évêques; nous étions tous en manches de chemise, discutant de morale et de politique tout en savourant des martinis. Et pendant ce temps, Steve lui s'affairait à nous faire griller des steaks.

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Si l'Église a quelque influence là où Steve se trouve présentement, il est certain qu'il occupe une très bonne place.

Steve nous a quittés au beau milieu de sa vie. Nous pensons tous qu'il aurait pu passer encore de nombreuses années parmi nous. Aujourd'hui, alors que nous pleurons son départ, nous devons le remercier pour la joie et le bonheur qu'il nous a donnés.

À Betty, et à vous tous enfants, petits-enfants, frères, belle-famille, à ses nombreux amis-dont Gerda et moi-même qui avons toujours été fiers d'en être-je vous offre du fond du coeur, et au nom de tous les Canadiens, nos plus sincères condoléances.

Que le temps de l'Avent, avec ses messages d'espoir et d'amour renouvelés, soit pour vous tous un motif de réconfort.