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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le vendredi 4 octobre 1996

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-55. Reprise de l'étude de la motion dedeuxième lecture 5097

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LES PRIX D'EXCELLENCE DE GRAVENHURST

LA LUTTE CONTRE LE SIDA

L'ÎLE KUPER

LA CONFÉRENCE FÉDÉRALE SUR LA JEUNESSE

    M. Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing) 5105

MARY LOU CARROLL

LA SEAGER WHEELER HISTORICAL FARM SOCIETY

LES FRANCOPHONES HORS QUÉBEC

LE CENTRE CANADIEN DE FUSION MAGNÉTIQUE

LA JUSTICE

LA HAUTE TECHNOLOGIE

M. ROBERT BOURASSA

LE MINISTRE DE LA COOPÉRATION INTERNATIONALE

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DU SIDA

    M. Harper (Churchill) 5107

LE FRASER INSTITUTE

    M. Harper (Calgary-Ouest) 5107

LE GOUVERNEMENT LIBÉRAL

LES AÎNÉS

YVONNE TOUSEK

LA COLOMBIE-BRITANNIQUE

QUESTIONS ORALES

LA CRÉATION D'EMPLOIS

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 5108
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 5108
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 5109

LA CONTREBANDE

LES LANGUES OFFICIELLES

    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 5111
    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 5111

LE PATRIMOINE CANADIEN

LA JUSTICE MILITAIRE

    M. Leroux (Shefford) 5112
    M. Leroux (Shefford) 5112

LE PATRIMOINE CANADIEN

    M. Hill (Prince George-Peace River) 5112
    M. Hill (Prince George-Peace River) 5112

LE TRANSPORT AÉRIEN

GENERAL MOTORS

LE PATRIMOINE CANADIEN

    M. White (North Vancouver) 5113
    M. White (North Vancouver) 5114

LE TRANSPORT FERROVIAIRE

LE PATRIMOINE CANADIEN

LES MINES TERRESTRES

    M. LeBlanc (Cap-Breton Highlands-Canso) 5115

L'AÉROPORT PEARSON

LE PATRIMOINE CANADIEN

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

LES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA PÉRIODE DES QUESTIONS ORALES

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 5116
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 5117

AFFAIRES COURANTES

LA LOI SUR L'ÉQUITÉ EN MATIÈRE D'EMPLOI

    Projet de loi C-332. Adoption des motions de présentation etde première lecture 5117
    M. White (North Vancouver) 5117

LA LOI SUR L'IMMIGRATION

    Projet de loi C-333. Adoption des motions de présentationet de première lecture 5117
    M. White (North Vancouver) 5117

PÉTITIONS

LES GROUPES D'INTÉRÊTS

LA CONDUITE AVEC FACULTÉS AFFAIBLIES

LA JUSTICE

LE SÉNAT

LES DROITS DE LA PERSONNE

L'UNITÉ NATIONALE

LES PRODUITS DE LA CRIMINALITÉ

    M. White (North Vancouver) 5118

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-55. Reprise de l'étude de la motion dedeuxième lecture 5118
    M. Hill (Prince George-Peace River) 5121
    M. White (North Vancouver) 5125

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LA LOI SUR LA CONCURRENCE

    Projet de loi C-267. Motion de deuxième lecture 5128
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projet de loiet renvoi à un comité 5134

ANNEXE


5097


CHAMBRE DES COMMUNES

Le vendredi 4 octobre 1996


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 3 octobre, de la motion: Que le projet de loi C-55, Loi modifiant le Code criminel (délinquants présentant un risque élevé de récidive), la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, la Loi sur le casier judiciaire, la Loi sur les prisons et les maisons de correction et la Loi sur le ministère du Solliciteur général, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui sur ce projet de loi. C'est une importante mesure en matière de justice pénale dont on parle depuis longtemps et qu'on attendait aussi depuis longtemps. Les députés de ce côté-ci de la Chambre et les Canadiens réclament certains de ces changements depuis longtemps.

Il y a du bon et du mauvais dans ce projet de loi, comme c'est le cas pour beaucoup de mesures législatives que présente le gouvernement. Je voudrais aborder certaines des améliorations qu'il propose et certaines choses que nous considérons comme des erreurs. Je donnerai mon avis et je me prononcerai sur la question de savoir si le projet de loi C-55 mérite d'être appuyé.

Habituellement, lorsqu'il s'agit d'un projet de loi de forme, j'essaie de bien représenter mes électeurs en faisant part à la Chambre de ce que seraient, à mon avis, leur analyse de la question et leurs préoccupations. Le système de justice pénale est de la plus grande importance pour une majorité de gens de ma circonscription. D'après les sondages téléphoniques et d'autres sondages plus approfondis que j'ai pu faire et d'après les lettres et les appels que j'ai reçus à mon bureau, je peux dire que les gens ne sont pas convaincus que le système de justice pénale protège bien les intérêts des citoyens respectueux de la loi. Dans de nombreuses régions du pays et de toute évidence dans ma circonscription, les gens pensent que l'on met trop l'accent sur les droits des prisonniers, leurs demandes et les possibilités qui leur sont offertes, et pas assez sur les droits des citoyens respectueux des lois.

(1005)

Je voudrais vous parler d'un cas qui s'est produit dans ma circonscription et qui a un rapport avec ce projet de loi. Nombre de députés auront vraisemblablement des histoires comme celle-là à raconter, car ce sont des situations que l'on voit tous les jours.

Il s'agit d'une femme qui s'appelle Carol. Elle était mariée à un homme qui la maltraitait. Son histoire est celle de milliers de femmes partout au Canada, et sans doute de certains hommes. Jour après jour, ils ne vivent pas seulement en silence dans la crainte qu'on les maltraite, mais aussi, comme dans le cas de Carol, ils craignent pour leur vie. En 1993, son mari l'a battue violemment. Elle a réagi comme elle devait le faire, comme j'encourage toujours les conjoints à le faire, dans les cas de violence, et a contacté la police. Elle a appelé la police, et son mari a été inculpé.

Malheureusement, comme c'est souvent le cas, cela a mis son mari en furie. Au lieu de se calmer et de reconnaître ses erreurs, il est devenu fou de rage au point d'être dangereux. Et c'est là que le système de justice pénale a trahi mon électrice.

Entre parenthèses, le 3 octobre, le Citizen d'Ottawa rapportait que même les policiers étaient en colère contre les tribunaux parce qu'ils avaient mis en liberté provisoire sous caution un homme accusé d'avoir poussé une femme par la fenêtre d'un appartement situé au 10e étage. N'y a-t-il aucune justice dans le système judiciaire? Les gens doivent se demander comment diable on peut mettre en liberté sous caution des gens aussi horribles. Ils doivent se demander comment le ministre de l'Immigration peut accorder une liberté sous caution à des délinquants dangereux. Un individu reconnu coupable d'un crime qui a échappé à la justice américaine peut se réfugier au Canada, implorer la clémence de notre système et demander le statut de réfugié sous prétexte qu'il a été mal traité dans son pays.

Le système de justice n'est pas équilibré. Il ne tient pas compte du fait que, lorsqu'un individu a commis un crime grave, surtout un crime pouvant entraîner des blessures corporelles, un tel crime doit être pris au sérieux. Ce n'est pas ce qui s'est passé jusqu'à maintenant.

C'est ainsi que le système a trahi Carol, mon électrice. Son mari, qui l'avait déjà battue, est revenu se venger. Il avait reçu une injonction restrictive mais, comme c'est souvent le cas dans des situations similaires, cela n'a servi à rien. La seule protection que les tribunaux ont offerte à cette pauvre femme est une infonction restrictive contre un individu qui l'avait déjà rouée de coups. Cet être abject a fini par kidnapper son ex-femme, après l'avoir suivie, la poignarder de six coups de couteau et la laisser à moitié morte. Il s'en est sorti avec deux ans de prison moins un jour.


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Cette peine n'a pas l'air trop horrible, mais voici la suite. Il venait régulièrement frapper à sa fenêtre avec un couteau de boucher. Quand elle ouvrait les rideaux, il était là. Bien que cela ait été de notoriété publique, on n'a rien fait pour l'empêcher. Ce qu'il a fait subir à Carol lui a valu d'être accusé de voies de fait graves. Il aurait dû être accusé de tentative de meurtre, mais, comme il a été accusé de voies de fait graves, il n'a été condamné qu'à deux ans de prison. Il va être libéré incessamment et son ex-femme, Carol, qui a changé de nom, vit de nouveau dans la peur.

Cette dame, qui s'est remise de façon remarquable, est venue me voir à mon bureau avec son père. Comme beaucoup d'autres députés, je n'avais jamais eu à traiter de cas semblables. Je ne savais vraiment pas comment me comporter. Je garde une boîte de Kleenex sur mon bureau pour ceux qui viennent me raconter ces histoires si difficiles à croire.

(1010)

Ces gens étaient là, assis devant moi. Comme ce père qui m'a dit: «Chuck, qu'est-ce que vous voulez que je fasse lorsque cela se reproduira, puisqu'il n'y a pas de justice dans notre système judiciaire? La police savait qu'il avait essayé de tuer ma fille. Il l'a poignardée six fois et, pour ça, il a été condamné à deux ans moins un jour pour voies de fait graves. Je vais vous dire ce que je vais faire. S'il frappe une autre fois sur la fenêtre de ma fille, je vais le tuer. M. Strahl, qu'est-ce que vous feriez dans cette situation?» Je lui ai dit qu'il écoperait alors de 25 ans pour avoir protégé votre fille, parce que ce serait considéré comme un meurtre prémédité.

M. Ramsay: Oui, mais il pourra faire appel après 15 ans.

M. Strahl: Comme le dit mon collègue, il pourra faire appel après 15 ans en vertu de la nouvelle réglementation, mais je ne veux pas me lancer là-dedans.

Qu'est-ce que je pouvais dire à ce père qui m'a demandé ce que je ferais si quelqu'un tapait sur la fenêtre de ma fille avec un couteau de boucher et la police disait: «Débrouillez-vous.»

J'ai écrit au ministre de la Justice et au procureur général de la province de Colombie-Britannique pour leur demander s'il y avait quelque chose que nous pourrions faire pour modifier le système. Le système ne fonctionne pas. Il ne protège pas des gens comme Carol.

Je voulais que le fardeau de la preuve prévu dans le Code criminel soit abaissé dans le cas des tentatives de meurtre. Je voulais aussi qu'on permette l'imposition d'une probation en même temps que toute peine supérieure à deux ans moins un jour, ce qui n'était pas permis à cette époque, de sorte que les juges soient libres de donner aux condamnés des peines plus longues en sachant qu'ils pourraient être supervisés après. Laissez-moi vous raconter ce qui s'est produit après cela pour vous montrer dans quelle triste situation se trouve la justice.

Le procureur général de Colombie-Britannique, avec lequel je ne suis pas d'accord politiquement sur un grand nombre de choses, a eu le courage d'entreprendre une étude du Code criminel. Il n'est pas en charge du droit criminel, mais il a entrepris une étude en mon nom et il a fait deux suggestions au ministre de la Justice.

Lorsque j'ai rencontré le ministre de la Justice, ici dans l'édifice du Centre, il m'a donné ce conseil: «Pourquoi n'essayez-vous pas une injonction restrictive civile au lieu de demander à un tribunal criminel une injonction restrictive?» C'est ça la totalité de son conseil et de son aide pour cette dame: «La dernière fois qu'il faisait l'objet d'une injonction restrictive des tribunaux, il l'a poignardée six fois. Cette mesure n'a pas donné de trop bons résultats. Pourquoi ne pas essayer l'ordonnance civile d'interdiction? Cela devrait le remettre à sa place.» Voilà la seule réponse qu'elle a reçue et c'est totalement insuffisant.

Cette dame se cache, se terre, change de nom. Elle a été battue à coup de crosse de fusil. Il a tenté de la lancer dans la rivière. Il l'a poignardée à six reprises. Elle vit dans la peur et la fuite. Et elle se fait dire qu'elle doit obtenir une ordonnance civile d'interdiction parce que les tribunaux ne peuvent rien pour elle. Ce n'est certes pas satisfaisant et c'est pourquoi j'ai présenté les requêtes en question à l'époque.

C'était l'un des premiers cas dont je me suis occupé lorsque j'ai été élu député. Nous sommes maintenant trois ans plus tard et le procureur général de la Colombie-Britannique et moi-même avons harcelé le ministre de la Justice. Il a demandé que l'on tienne compte de cette question durant l'examen fédéral-provincial du Code criminel. Enfin, au bout de trois ans, nous commençons à voir des changements, dont certains sont proposés dans le projet de loi C-55.

Cependant, encore une fois, le ministre n'est pas allé assez loin. Je ne trouve rien dans le projet de loi C-55, rien dans le programme législatif et rien dans les travaux en cours qui porte sur le problème des tentatives de meurtre. On ne s'attaque pas à ce problème dans ce projet de loi, bien entendu, ni dans tout autre projet de loi. Nous devons simplement nous en accommoder.

(1015)

La raison pour laquelle on n'arrive presque jamais, en Colombie-Britannique, à faire condamner les auteurs de tentatives de meurtre, c'est parce qu'il faut prouver, hors de tout doute, que l'individu voulait tuer sa victime.

Je vais donner cet exemple à nouveau. Cette femme a été victime de harcèlement criminel pendant des mois. Elle a été battue à coups de crosse de fusil. On l'a poignardée alors qu'elle sortait de son appartement. Heureusement, elle n'avait pas ses enfants avec elle. On l'a poignardée à six reprises jusqu'à ce qu'elle s'effondre inconsciente.

L'agresseur a dit au procureur de la Couronne qu'il l'avait poignardée à quelques reprises, qu'il l'avait suivie et harcelée, qu'il avait frappé à sa fenêtre avec un couteau de boucher, qu'il l'avait battue avec la crosse d'un fusil, et qu'elle était tombée au sol inconsciente et baignant dans son sang, mais qu'il n'avait pas voulu la tuer. Il a dit au procureur de la Couronne qu'il ne faisait que lui transmettre un message, qu'il l'avertissait.


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C'est pire que pire. Que faut-il donc? Qu'est-ce qu'une personne doit faire pour être condamnée pour tentative de meurtre? Trancher la tête de sa victime?

C'est tout à fait inadmissible. Le ministre doit se pencher là-dessus. Le procureur général de la Colombie-Britannique a exigé qu'on modifie la loi pour empêcher que cela ne se reproduise. En Colombie-Britannique, on négocie régulièrement des plaidoyers dans le cas de tentatives de meurtre, parce qu'on doit prouver, hors de tout doute raisonnable, que l'individu voulait bien tuer.

Que faut-il donc? Dans le cas de cet homme, on a fini par négocier un plaidoyer. Pire encore, on l'a fait malgré les objections de Carol. On ne l'a même pas avisée. On a négocié un plaidoyer alors qu'on lui avait promis de n'en rien faire car elle avait dit aux autorités qu'elle voulait aller jusqu'au bout de cette affaire. Cet animal doit disparaître, non seulement pour la protection de cette femme, mais également pour la protection de ses enfants.

Cela ne s'est pas produit. Je me demande ce que cela prend. J'en ai discuté avec le ministre et il a sympathisé avec moi. Il a reconnu que c'était un cas difficile et m'a demandé pourquoi je ne cherchais pas à obtenir une injonction contre cet individu. Ce n'est pas ce que je veux. Ce n'est pas ce que les Canadiens souhaitent. Ils veulent plutôt qu'on traite les animaux comme celui-ci comme tels.

Je crois que tous les députés pourraient citer des cas dans lesquels une victime a demandé à être avisée du transfert de son agresseur à une prison voisine. Les victimes veulent être au courant pour leur propre sécurité. J'ai suivi ces cas en remontant jusqu'au directeur de la prison où l'individu est incarcéré. J'ai demandé au directeur de signaler le gars afin que, quand il sera transféré à Chilliwack par exemple, je sache ce qui s'est passé et que mes électeurs soient mis au courant eux aussi. Cela peut se produire, mais nous avons besoin de savoir.

Les victimes ont-elles des droits? Non. Les prisonniers sont transférés. Il nous arrive de lire dans les journaux que le type s'est évadé. Les autorités nous disent alors: «Ma foi, il a filé en douce.» On n'a pas avisé les victimes. Celles-ci n'ont pas de droits. On se borne trop souvent à dire: «Il faudrait les aviser.» Elles peuvent finir par être avisées. Mais ce n'est pas suffisant. C'est la raison pour laquelle nous, de ce côté-ci de la Chambre, parlons sans cesse au nom des personnes qui sont d'avis que le ministre a raté le coche.

Le projet de loi fait état d'une surveillance obligatoire. Il stipule que certains délinquants présentant un risque élevé fassent l'objet d'une surveillance pendant dix ans, une fois qu'ils ont purgé leurs peines. C'est à mi-chemin de ce que je réclame du ministre.

Jusqu'à ce que ce projet de loi ne soit introduit, les juges tenaient souvent ces propos: «Écoutez, je vais lui infliger une peine de deux ans moins un jour, comme ça il devra faire l'objet d'une surveillance obligatoire après.» Si le gars est condamné à 10 ans, comme il le mérite, il ne peut faire l'objet d'une surveillance. On le libère et il est libre comme l'air. Ce projet de loi a au moins ça de bon.

(1020)

Qui sait, les trois ans que j'ai passées à écrire et à cogner aux portes y sont peut-être pour quelque chose. Je l'espère. On ne sait jamais. Bien sûr, le ministre ne va me féliciter pour ça. À tout le moins voilà quelque chose que j'ai réclamé à cor et à cri à maintes reprises. Et puis voici que c'est chose faite.

Cela étant dit, je signale que je ne suis pas d'accord avec certaines dispositions du projet de loi. C'est le cas des dispositions prévoyant la libération conditionnelle accélérée des délinquants que l'on considère à faible risque, non violents, lesquels seront remis en liberté après avoir purgé seulement un sixième de leur peine, soit un maximum de six mois en prison.

Il me semble qu'il y a quelque chose qui cloche. Je ne sais pas si c'est l'idée que le ministre se fait de la vérité lorsqu'il s'agit de détermination de la peine. J'ignore ce que cela signifie. Il me semble qu'on met en accusation tout notre système pénal.

Pourquoi imposer des peines d'emprisonnement à des criminels si les peines ne veulent essentiellement rien dire, si, quel que soit le crime, on impose seulement quelques années d'emprisonnement? Si on impose une peine à un criminel, on devrait s'en tenir à cela.

Cependant, on ne veut pas les punir et, bien sûr, on ne va pas réellement les réadapter. On ne veut tout simplement pas les avoir, de sorte qu'on suspend la peine. Ils sont libérés après avoir purgé le sixième de leur peine.

Ce projet de loi accorde également aux tribunaux le pouvoir de placer des gens sous surveillance électronique, même ceux qui n'ont jamais été accusés d'une infraction. Est-ce que je veux que les dispositions du système de justice pénale soient resserrées? Assurément. Mes électeurs disent-ils que le système de justice pénale laisse tomber l'honnête citoyen? Très certainement.

Ils demandent: «Devrait-on pouvoir superviser et surveiller les délinquants dangereux, les pédophiles, les pervers sexuels, les contrevenants violents?» Certainement. Ils veulent qu'on les supervise. Ils veulent savoir où ils se trouvent et qui ils sont. Ils veulent être mis au courant lorsque des personnes de ce genre postulent un emploi dans une garderie. C'est sûr qu'ils veulent savoir tout cela.

Cependant, je ne crois pas qu'ils veulent aller plus loin, c'est-à-dire mettre les fers à quelqu'un qui n'a jamais été accusé, sans qu'il puisse se défendre. Que dire? Il faut punir sévèrement les criminels, mais ceux qui ont été condamnés pour un crime. Nous devons respecter la règle du droit.

Les éléments de preuve laissent présager une condamnation, dans le cas que j'ai mentionné. À mon avis, c'est assez clair. Si le gars a fait une tentative de meurtre, je le jetterais au moins en prison et je perdrais les clés. À part cela, les gens diraient que nous devons suivre les voies de droit régulières en permettant aux accusés de consulter un avocat et de comparaître devant un tribunal. S'ils sont trouvés coupables, il faut appliquer la loi dans toute sa rigueur. Il est essentiel de protéger les victimes.


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Dans notre système, les gens sont innocents jusqu'à ce qu'ils soient prouvés coupables. J'espère que le gouvernement répondra aux préoccupations de nombreux Canadiens en ce qui concerne les libertés fondamentales. Ces gens nous disent: «Nous comprenons pourquoi vous faites cela. Nous voyons que vous voulez protéger le public.»

Je conviens que l'accusé doit pouvoir se défendre devant le tribunal, qu'une accusation formelle doit être portée, qu'il doit y avoir une audience, que l'accusé doit avoir le temps de se défendre. Je ne suis pas d'accord avec un représentant de l'ordre qui dirait: «Je pense que cette personne devrait porter une marque spéciale, qu'il faudrait l'enchaîner et pouvoir la suivre jusqu'au bout du monde.»

L'attitude du gouvernement dans ce dossier est schizophrénique. D'un côté, il dorlote le criminel. D'un autre côté, il les libère après qu'ils ont purgé un sixième de leur peine et il refuse d'abolir l'article 745.

Le gouvernement dorlote les criminels de plusieurs façons. Nous pourrions parler de ce qui se passe dans le système pénal. Je pourrais vous parler des prisonniers qui se sont échappés d'établissements correctionnels dans ma région. Certains prisonniers refusent de porter des tee-shirts d'une certaine couleur. Une émeute a récemment éclaté à Kent. Les prisonniers ne veulent pas porter de tee-shirts qui les identifient comme des prisonniers; ils veulent être libres de choisir leurs vêtements. Et on les laisse faire.

(1025)

J'aurais aimé en dire plus. J'ai d'autres projets de loi d'initiative parlementaire touchant la justice pénale que je compte présenter au cours des prochaines semaines. J'ai dans mon bureau une pétition signée par 25 000 personnes au sujet des prédateurs sexuels et de la façon dont ils sont traités par notre système de justice, qui explique les mesures que les gens de ma circonscription voudraient voir appliquées. Je suis heureux de transmettre ces préoccupations de mes électeurs et j'espère que le ministre de la Justice ou ses collaborateurs sont à l'écoute des Canadiens. Cela n'est pas évident dans ce projet de loi.

M. Rey D. Pagtakhan (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, en écoutant le député de Fraser Valley-Est, je n'ai pu m'empêcher de penser au truisme selon lequel ne pas fournir d'information, c'est mal, mais verser dans la désinformation, c'est pire. Le député de Fraser Valley-Est vient de nous dire qu'il n'y avait rien dans le projet de loi, et il a insisté sur ce point.

Je voudrais dire au député que tous mes collègues ministériels sont bien résolus à garantir la sécurité de tous les citoyens canadiens. Encore une fois, le député ne dit pas la vérité.

Une voix: Foutaise.

M. Pagtakhan: Si le député de Fraser Valley-Est et son compère pouvaient faire preuve d'un peu de politesse, nous pourrions avoir un débat raisonnable. C'est une autre forme de civisme.

D'après le député de Fraser Valley-Est, il n'y a rien dans le projet de loi à l'étude. Je me demande si le député a lu le paragraphe 9(1)

du projet de loi portant sur la crainte de sévices graves à la personne? Il s'agit d'une modification spéciale qui est apportée au Code criminel. Il n'y a rien de plus faux que de dire qu'il n'y a rien dans le projet de loi. S'il croit qu'il existe des motifs raisonnables de craindre que des personnes seront victimes de sévices graves à la personne, au sens défini ailleurs dans le projet de loi, le procureur général peut déposer une dénonciation devant un juge d'une cour provinciale, même si les personnes en question n'y sont pas nommées.

Sont énumérés dans cet article les nombreuses conditions qui peuvent être imposées dans l'ordonnance de la cour, y compris l'interdiction de posséder une arme à feu.

Je pense que le député de Fraser Valley-Est doit avoir la franchise de reconnaître, devant la Chambre et le public canadien, que ce projet de loi marque un progrès en matière de protection des Canadiens. Je vois que le député est enfin d'accord avec moi.

M. Strahl: Monsieur le Président, je n'ai jamais dit qu'il n'y avait rien de bon dans ce projet de loi. Au contraire, je me suis réjoui de voir qu'après m'être évertué à faire pression auprès du ministre pendant trois ans, je vois dans le projet de loi des dispositions que j'approuve. Je l'ai dit dans mon discours. J'apprécie qu'on propose une surveillance obligatoire pouvant aller jusqu'à dix ans. C'est excellent. Je suis d'accord avec cela. Je le réclame depuis trois ans. Le procureur général de la Colombie-Britannique l'a demandé.

Je n'ai jamais dit qu'il n'y avait rien de bon dans ce projet de loi. Mais le système de justice pénale présente certains problèmes auxquels on ne s'est pas vraiment attaqué et j'ai profité de l'occasion pour en rappeler quelques-uns. Est-ce qu'il faut enlever les armes à feu à ceux qui profèrent des menaces en faisant allusion à une arme à feu? Cela va de soi, j'en conviens.

En ce qui concerne les armes à feu et les menaces impliquant des armes, je crois fermement en la politique de tolérance zéro. S'il y avait eu un meilleur système en Colombie-Britannique, la tragédie de Kelowna ne se serait pas produite. D'une façon ou d'une autre, un individu a été autorisé à posséder une arme de poing, même s'il avait menacé de tuer sa femme. Non seulement il l'a tuée, mais il a également tué neuf membres de sa famille. Quelle tragédie!

(1030)

Or, la véritable tragédie, c'est que le gouvernement a choisi la facilité, soit le recours à la publicité, surtout pour ce qui est des armes à feu. Il soutient qu'il faut s'en prendre aux chasseurs, aux tireurs et aux athlètes olympiques canadiens et les obliger à enregistrer leurs armes, de sorte que la sécurité de tous puisse être améliorée. Voilà le véritable problème du système pénal: on prend les gens qui sont respectueux des lois et on les dresse, comme au cirque.

Je vais vous raconter un autre incident qui est arrivé dans ma circonscription. Un individu a franchi en douce la frontière dans la vallée du fleuve Columbia, entre le Canada et les États-Unis. La police a dépêché un agent pour l'arrêter. C'était une policière. L'individu l'a immobilisée, il a pris son arme et la lui a mise dans la


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bouche en disant: «C'est fini pour toi, la belle.» Heureusement, un passant est intervenu et l'a convaincu d'abandonner son projet.

Grâce à ce passant, l'individu a fini par relâcher la policière, il a sauté dans la voiture de patrouille à quatre roues motrices et s'est enfui dans la montagne. Il a ensuite mis le feu à l'auto de patrouille, ainsi qu'aux fusils, à la carabine, à son propre fusil qui n'était pas enregistré et qu'il possédait illégalement, et à l'arme de la policière. Avec l'aide de chiens, on a retracé l'individu et on l'a arrêté.

Au Canada, le simple fait de posséder un chargeur de cartouches non enregistré pour un fusil est passible de cinq ans de prison. Cet individu a écopé d'une peine de deux ans. Il n'est pas si méchant, aparès tout. Il est simplement entré illégalement au Canada, il a agressé une policière, il a menacé de la tuer, il lui a mis une arme dans la bouche, il a détruit des biens du gouvernement fédéral qui valaient 50 000 $, il a résisté à une arrestation, il avait des possessions illégales et il avait déjà un casier judiciaire. Il est inutile d'en rajouter. Quel châtiment a-t-il eu pour son crime? Deux ans d'emprisonnement, mais il sera libéré dans six ou huit mois.

On peut toujours demander aux policiers de mon coin ce qu'ils pensent du système judiciaire. Il n'en pensent pas grand-chose. Un individu comme celui-là est un animal et il ne devrait probablement jamais sortir de prison. Pendant ce temps-là, nous adoptons des lois pour dresser les citoyens respectueux des lois à agir comme des animaux de cirque. Un grand nombre de ces citoyens deviendront des criminels par inadvertance alors qu'un individu comme celui dont j'ai parlé, au lieu de subir un châtiment, pourra circuler librement d'ici quelques mois. C'est inadmissible.

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de discuter du projet de loi C-55, surtout parce que je suis un membre du parti ministériel. À ce titre, il va de soi que, lorsqu'une mesure législative est proposée par le gouvernement, je préférerais appuyer celle-ci. C'est d'ailleurs ce que je m'efforce de faire dans tous les cas.

Cela dit, en tant que ministériel, j'ai aussi l'obligation fondamentale d'exprimer mes réserves lorsque je vois quelque chose dans une mesure proposée par le gouvernement qui me préoccupe beaucoup. C'est une responsabilité importante des membres du gouvernement parce que, lorsqu'une loi est adoptée, les tribunaux consultent les débats parlementaires et examinent les discussions qui ont eu lieu, en accordant une attention particulière aux propos des ministériels. Les tribunaux estiment que ce qui a été dit par les députés des deux côtés de la Chambre reflète l'opinion du Parlement relativement à la mesure législative. Les juges se servent de ces observations pour interpréter la loi.

Des voix: La loi sur le contrôle des armes à feu.

M. Bryden: Si vous voulez bien patienter un instant, j'y arrive.

La préoccupation que j'ai relativement à ce projet de loi concerne le recours à des moyens électroniques de surveillance. Ironiquement, je suis d'accord avec certaines des observations formulées par le député de Fraser Valley-Est.

Hier soir, à mon appartement, j'ai pris le temps de lire le fameux roman de George Orwell intitulé 1984. Vous savez sans doute que c'est à George Orwell que nous devons l'expression «big brother». Le roman a été écrit en 1949, juste après que le monde ait eu à composer avec la tyrannie d'Hitler et soit entré dans l'étape la plus tumultueuse de la guerre froide, lorsque les troupes de l'armée rouge ont envahi l'Europe de l'Est. La plupart des anciennes démocraties et des anciens pays de l'Europe orientale étaient tombés sous le joug du régime totalitaire de Staline. Le roman d'Orwell décrit l'État totalitaire ultime, au sein duquel «big brother», l'État, contrôle tous les aspects du comportement humain. Orwell crée un personnage-Winston-dont le seul problème est de rechercher un certain degré d'individualité. En d'autres mots, il veut pouvoir se comporter comme un être humain.

(1035)

Toutefois, l'État a prescrit le genre de comportement que doivent avoir ses citoyens, et il a mis sur pied un système élaboré pour surveiller leurs faits et gestes. À la limite, la raison d'être de l'État, du «big brother» d'Orwell, c'est d'entraver la liberté de mouvement des membres de la collectivité, de telle sorte que ceux-ci doivent toujours agir conformément à ce que l'État estime être un comportement convenable.

Dans son roman, Orwell a imaginé le cauchemar ultime. Cette oeuvre a donné naissance à une série d'autres livres et créations populaires sur le sujet du contrôle par l'État du comportement de l'individu au moyen d'implants électroniques permettant de surveiller et de contraindre l'individu. Nous pouvons tracer les parallèles avec 1984, roman qui, à l'époque, a été considéré comme l'horreur ultime pour une société, le contrôle étatique.

Je lis dans le projet de loi que mon gouvernement envisage maintenant de recourir à la surveillance électronique. On utilisera une sorte de bracelet comme dispositif de surveillance. On obligera certaines à porter ces bracelets afin de prévenir certains comportements. Ce dispositif pourra servir à contrôler leurs allées et venues. Si le juge veut empêcher une personne de s'approcher d'une maison quelconque parce qu'elle constitue une menace pour quelqu'un, le bracelet permettrait une surveillance électronique de ses allées et venues.

Lorsqu'on accepte ce type d'entrave électronique, car ce n'est rien d'autre, une entrave électronique, un boulet au pied, toutes sortes de possibilités orwelliennes se présentent. Nous pouvons avoir un bracelet qui provoque une douleur lorsque la personne tente de se livrer à un comportement que l'État veut prévenir.

Dans l'état actuel du projet de loi, on s'intéresse essentiellement aux personnes qui risquent de commettre des crimes de violence. Mais le dispositif pourrait aussi bien servir pour un héroïnomane. Au moyen d'une puce électronique insérée dans le bracelet, on pourrait faire en sorte que, si le toxicomane approche d'un trafiquant, l'odeur de l'héroïne soit détectée, déclenchant un choc électrique pour empêcher la personne d'acheter de la drogue. Avec une puce électronique, une foule de possibilités semblables sont ouvertes. Nous pourrions, à distance, réprimer toutes sortes de comportements.


5102

Le projet de loi ne propose d'utiliser cette méthode que pour un certain type de délinquant. L'ennui, c'est qu'en abordant ce genre de mesures, nous avons affaire à des libertés très fondamentales. Nous allons droit au fondement de nos libertés essentielles. Le problème est le même que pour notre liberté d'expression, comme en témoigne la lutte incessante entre la volonté d'imposer des limites à la pornographie et celle de préserver la liberté d'expression.

Un bracelet électronique constitue l'ultime entrave à la liberté. Il permet à l'individu de se déplacer dans une certaine mesure dans la société, mais il s'agit en fait du même genre d'entrave que celle qu'utilisaient les Romains et qui était utilisée à l'époque de l'esclavage.

Je vais expliquer ce qu'est une entrave par rapport à une corde ou à une cellule de prison, par exemple. Une entrave constitue une contrainte. Nous utilisons la charmante expression contrainte judiciaire. En fait, une entrave est quelque chose qui restreint les déplacements.

(1040)

Je vais vous donner un exemple classique. Quand les esclaves travaillaient dans les champs de coton ou de canne à sucre, on les entravait par une barre de fer, dans l'idée que si l'esclave tentait de fuir à travers champs, l'entrave se prendrait dans les broussailles, ce qui limiterait ses mouvements et l'empêcherait de s'enfuir. La chaîne et le boulet procédaient de la même idée. Le boulet était un poids que le forçat devait traîner de sorte qu'il ne pouvait pas aller bien loin avant de devenir complètement épuisé. Tels étaient les moyens utilisés par les surveillants pour contraindre les esclaves à rester dans les champs à travailler plutôt que de les garder emprisonnés. Il s'agissait d'un instrument économique très utile à l'époque de l'esclavage.

À mes yeux, il n'y a pas grande différence entre le bracelet électronique et la chaîne et le boulet d'autrefois. Je voudrais simplement terminer ce que j'avais commencé à expliquer. Selon le projet de loi, ce bracelet électronique ne s'appliquerait qu'à certaines catégories d'individus présentant certains types de risque.

Depuis trois ans que je siège à la Chambre des communes, j'ai notamment appris que le grand danger quand nous adoptons une mesure législative dont un sous-sous-alinéa empiète sur des libertés fondamentales, c'est que, bien que cette disposition se limite peut-être à un groupe d'individus, il est toujours possible que la Chambre adopte plus tard une autre mesure législative visant à étendre l'application de la disposition.

Je vais donner un exemple. À l'heure actuelle, la mesure à l'étude s'applique aux individus dont on craint qu'ils ne causent des sévices graves à autrui. Je pense que cette disposition vise principalement les délinquants sexuels. Or, ceux qui conduisent un véhicule en état d'ébriété représentent un risque pour la société, car ils peuvent causer des blessures et la mort. Pourquoi n'imposerait-on pas un jour le port de ce genre de bracelet à ceux qui ont été trouvés coupables à deux reprises ou plus de conduite avec les facultés affaiblies? Comme peuvent le voir les députés, il est facile d'étendre cette mesure à de plus en plus de contrevenants jusqu'à ce que nous vivions dans un monde orwellien où toute forme de dissidence est punie par le port d'un bracelet électronique. On peut faire beaucoup de choses avec la surveillance électronique. On peut prévenir toutes sortes de comportements.

D'où nous vient ce concept? Je pense qu'encore une fois, cela vient de nos voisins du Sud, qui sont aux prises avec un taux élevé de criminalité. Le problème a même atteint des proportions épidémiques là-bas. Les États-Unis construisent des prisons plus vite que n'importe quel autre pays et connaissent de grandes difficultés économiques, parce qu'ils ont du mal à loger tous les détenus.

L'une des mesures que les Américains ont prises pour lutter contre la criminalité, et qui a fait l'objet de bien des discussions à cette Chambre, est l'accès illimité aux armes à feu. Le Canada, quant à lui, a choisi une solution bien canadienne. La Chambre des communes a tenu un débat assez animé sur la question des armes à feu. Peu importe leurs allégeances, les dirigeants politiques reconnaissent tous que les Canadiens ne veulent pas qu'il y ait autant d'armes à feu en circulation au Canada qu'aux États-Unis. Le gouvernement s'est donné beaucoup de mal pour présenter un projet de loi sur le contrôle des armes à feu qui lutte contre la violence, sans inciter les gens à se procurer des armes à feu pour se protéger. Par conséquent, pour contrer la menace des éléments criminels, les Canadiens ont trouvé un moyen bien différent de celui qu'utilisent les Américains.

Par contre, les Américains ont mis au point le bracelet électronique pour économiser de l'argent. Ils construisent beaucoup de prisons et ils se sont rendu compte qu'il était moins dispendieux et plus rentable de faire porter un bracelet électronique aux délinquants que de les jeter en prison. Je ne dis pas qu'ils en sont déjà là, mais la possibilité existe. On peut voir qu'il est avantageux pour les Américains de recourir aux bracelets électroniques pour empêcher des vols à main armée. Ou dans le trafic de drogues. Ces bracelets pourraient permettre de restreindre la criminalité dans certains secteurs.

(1045)

Le problème, c'est que, aux États-Unis, la criminalité est concentrée dans un groupe social. Les Américains recueillent des statistiques fondées sur la race. Je suis désolé de soulever cette question, mais il faut parler des Américains. Ils estiment avoir démontré que les noirs sont incarcérés dans une plus grande proportion que tout autre groupe de leur société.

C'est là une statistique effrayante. Je me réjouis de ce qu'on ne recueille pas des statistiques de ce genre au Canada. Néanmoins, comme les Américains sont très conscients de cela, si l'on pousse la question des bracelets électroniques au bout, l'esclavage va refaire surface aux États-Unis. Les noirs n'auront plus aux pieds un boulet, comme cela se faisait autrefois dans les plantations de coton, mais un bracelet électronique qu'ils seront plus nombreux que les blancs à porter. On risque ainsi de voir un retour épouvantable au XIXe siècle, à une époque qu'il vaudrait mieux ne pas ressusciter.


5103

Nous, Canadiens, et nous, parlementaires de tous les partis représentant tous les points de vue, ne devons pas nous laisser guider par les forces et les dilemmes sociaux avec lesquels les Américains sont aux prises, qu'il s'agisse de la disponibilité des armes à feu ou de l'utilisation des bracelets électroniques, des boulets électroniques. Cela m'inquiète beaucoup que mon gouvernement ait évoqué la possibilité de recourir à des bracelets électroniques.

Je conviens avec mon collègue, le député de Fraser Valley-Est, qu'il est particulièrement dangereux qu'on songe à utiliser ces bracelets non seulement pour des criminels notoires, mais aussi pour des personnes qui peuvent être perçues comme des criminels potentiels et cela, avant même qu'elles aient commis un délit. C'est là franchir un pas énorme, un pas dangereux et effrayant.

Il existe une solution facile au problème. On peut recourir à ce genre de moyen de restriction en précisant dans la loi que l'individu visé par l'ordonnance y consent. Celui-ci aurait le choix entre aller en prison, par exemple, et porter le bracelet électronique.

Je crois que le bracelet électronique serait choisi dans certains cas. L'héroïnomane qui veut se débarrasser de sa toxicomanie ou encore le ou la pédophile qui n'arrive pas à se maîtriser opteraient peut-être pour le port du bracelet. Cette mesure devient alors positive parce que nous respectons la volonté de l'être humain concerné.

J'espère que les membres du Comité de la justice comprendront les préoccupations que moi et d'autres avons à propos de cette disposition. J'espère qu'ils réfléchiront attentivement à la possibilité de la rendre volontaire.

Je voudrais faire une autre analogie. Tous les agriculteurs savent ce qu'est une grille à bétail. Lorsqu'un agriculteur a du bétail dans un champ et qu'il veut pouvoir aller et venir avec son tracteur sans avoir à se donner la peine d'ouvrir la barrière chaque fois qu'il passe, il enlève cette barrière et la remplace par ce que l'on appelle une grille à bétail. Celle-ci est constituée de quelques barreaux espacés au-dessus d'un fossé d'environ un pied de profondeur. Le bétail ne traverse jamais la grille. Lorsqu'il s'en approche, il voit la grille. Il sait que s'il essaie de la franchir, il risque d'en rester prisonnier et de se briser les pattes. Les animaux reconnaissent cela et, par conséquent, sont confinés dans le champ.

(1050)

La grille fonctionne très bien pour tous les animaux à sabots. Elle est excellente pour le bétail. Elle fonctionne pour les porcs, les chevaux et les moutons. Ce que nous voulons éviter en adoptant tout projet de loi à la Chambre, c'est de réduire la place qui est accordée à la volonté humaine. Nous sommes des êtres humains avec une certaine latitude, une certaine capacité de décider entre le bien et le mal. Lorsque nous ramenons l'être humain au niveau de l'animal par une entrave électronique ou toute autre forme de contrainte, nous créons, à mon avis, un problème très regrettable et désespérant.

M. Rey D. Pagtakhan (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais faire des observations sur le discours très rationnel du député de Hamilton-Wentworth. J'ai toujours apprécié sa sincérité quand il traitait de questions risquant de porter à controverse, et c'est de cette manière que je voudrais aborder cette question.

Je comprends son point de vue voulant que pareil contrôle judiciaire puisse constituer une restriction de la liberté; c'est un fait. Cependant, même la Charte canadienne des droits et libertés permet des restrictions à la liberté s'il peut être démontré que pareille limite est raisonnable dans une société démocratique. Qui interprétera cette restriction? Ce sera la Cour suprême du Canada, en dernière analyse. Par exemple, les lois interdisant la propagande haineuse représentent certes une restriction de la liberté de parole.

La Cour suprême du Canada aimerait statuer que l'objectif visé dans toute restriction des libertés est un objectif fort louable pour la société en général. Quant à la question dont nous sommes maintenant saisis, la restriction s'appliquerait dans les cas de préjudice grave causé à un citoyen canadien et où il n'existe pas d'autre solution de rechange. Je suis convaincu qu'en pareil cas, tout tribunal canadien en tiendrait compte dans ses jugements sur une telle demande faite par un procureur général d'une province donnée. Je suis convaincu que les tribunaux aimeraient avoir la certitude que le recours à un tel moyen permettrait d'atteindre cet objectif final.

Comme je ne suis pas avocat, je ne me rappelle pas de tous les critères que les tribunaux appliquent quand un équilibre doit être atteint, quand des restrictions à la liberté doivent être imposées. Je continue d'avoir foi en notre système judiciaire.

Le très savant député a parlé d'entraves. Je peux imaginer de vraies entraves placées aux pieds d'un individu pour l'empêcher de se déplacer. Je me souviens d'avoir vu des photos. Mais si on utilisait une surveillance électronique, ce serait sans doute invisible et donc impossible à détecter par quiconque. Il est probable que seule la personne à qui le tribunal aurait imposé cette forme de surveillance le saurait. Nul doute que l'on tiendra compte de ce facteur. Comparer la surveillance électronique à une entrave telle que nous l'imaginions habituellement, c'est faire une comparaison pour le moins boiteuse.

Le député a fait valoir que cela pourrait constituer un retour à l'esclavage. La seule forme d'esclavage que je vois là-dedans, c'est celle qui s'applique au risque. Autrement dit, nous disposerons maintenant d'un outil supplémentaire pour contrôler le risque que des personnes causent des blessures graves à autrui.

C'est un pas de géant, mais il faut dire que le défi que représente la sécurité de la société est de taille. C'est pourquoi je suis d'avis qu'une telle disposition dans le projet de loi est raisonnable. Étant donné que la question doit être, en dernière analyse, déterminée par le procureur général d'une province, si ce dernier a des motifs raisonnables de croire que la personne en cause est sur le point de

5104

causer des blessures graves à autrui, cela sera examiné durant les audiences.

(1055)

Le dernier point que je voudrais souligner, c'est que la surveillance électronique ne sera pas imposée pour le reste de la vie du délinquant. Ce ne sera que pour une période de 12 mois. En d'autres termes, c'est pour une période déterminée. Si le comportement du délinquant est tel qu'il est vraisemblable qu'il ne commettra pas de nouvelles infractions, le délinquant sera libéré de la surveillance électronique.

Je suis d'avis que c'est là une approche raisonnable à un problème grave avec lequel la société est aux prises. Par conséquent, je souscris à cette initiative du gouvernement.

M. Bryden: Monsieur le Président, je reconnais que le député fait toujours preuve de jugement et de sincérité toutes les fois qu'il aborde une question.

Il a, si je puis dire, mis le doigt sur le problème précis que pose ce genre de mesure législative. Ce problème, ce sont les consultations avec les tribunaux. Il a dit que les tribunaux avaient été consultés avant la rédaction du projet de loi.

À mon sens, cela nous pose un grave problème, à nous les législateurs. Il ne faut pas oublier que la Chambre des communes est le plus haut tribunal du pays. C'est nous, les législateurs, qui nous occupons de nos électeurs, qui tentons de comprendre la nation et de savoir qui sont les Canadiens et que c'est nous qui rédigeons les lois. À mon avis, il est répréhensible de chercher à savoir comment les tribunaux interpréteront une loi plutôt que de tenir compte de l'effet de cette loi sur les valeurs morales de notre société. C'est mettre la charrue devant les boeufs.

Je ne suis pas prêt à reconnaître que les juges, qui siègent dans leurs tribunaux, savent mieux que les députés ce qu'est le Canada. C'est nous qui avons pour devoir d'interpréter les valeurs morales de la société et de décider ce qu'il convient de mettre dans les lois.

Le Président: Vous semblez être sur une lancée. J'ai hésité un instant à vous interrompre, mais comme il est 11 heures, nous passons aux déclarations de députés.

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5104

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LES PRIX D'EXCELLENCE DE GRAVENHURST

M. Andy Mitchell (Parry Sound-Muskoka, Lib.): Monsieur le Président, de nombreuses localités de ma circonscription ont des programmes spéciaux visant à honorer des résidents et des bénévoles pour leur contribution et leurs réalisations exceptionnelles, ce qui constitue l'une des plus belles traditions de l'Ontario rural.

Par exemple, ma ville, Gravenhurst, remet des prix d'excellence pour honorer les gens qui ont fait leur marque dans des domaines aussi variés que la musique, le sport, les arts et l'architecture. Le programme a pour objectif de reconnaître publiquement les réalisations des habitants de la ville afin de promouvoir un sentiment de fierté au sein de la collectivité.

J'applaudis à cette belle manifestation de solidarité communautaire et j'encourage toutes les localités de ma circonscription à poursuivre leur bon travail.

Je félicite les gagnants des prix d'excellence décernés par la ville de Gravenhurst cette année: Stephen Brackley, David Dawson, Erin Edwards, Christine Harris, Wayne Hill et Nancy Snider.

* * *

[Français]

LA LUTTE CONTRE LE SIDA

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir aujourd'hui de rendre hommage aux organisateurs de l'événement «Ça marche», qui s'est déroulé dimanche dernier à Montréal et dans plus de 30 villes et municipalités du Québec.

Cet événement annuel a pour objectif d'amasser des fonds pour la Fondation Farah qui les redistribue ensuite à des dizaines d'organismes oeuvrant auprès des personnes atteintes du VIH-sida. Au fil des ans, cet événement est devenu un moment privilégié pour exprimer sa solidarité envers les personnes ayant, de près ou de loin, vécu les conséquences de cette terrible maladie.

L'édition de cette année a connu à Montréal un succès sans précédent. Les organisateurs estiment à près de 30 000 le nombre de participants et de participantes et les sommes recueillies se chiffrent à 582 000 $, soit 22 000 $ de plus que l'an dernier.

Cet événement démontre hors de tout doute l'importance que revêt, pour la population québécoise et canadienne, la lutte au sida. La recherche en ce domaine doit être une priorité gouvernementale.

Je voudrais, en terminant, remercier chaleureusement les organisateurs, la Fondation Farah, les dizaines de bénévoles qui ont permis la réalisation de cet événement et tous les groupes communautaires qui, jour après jour, travaillent au mieux-être des personnes atteintes.

* * *

[Traduction]

L'ÎLE KUPER

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, je veux informer la Chambre que le chef Randy James et la bande de Penelakut qui habite l'île Kuper dans la circonscription de Nanaïmo-Cowichan, que je représente, tiendront un service commémoratif demain, le 5 octobre, à la mémoire des enfants morts au pensionnat de l'île Kuper.


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La bande de Penelakut estime que des centaines d'élèves ont perdu la vie entre 1890 et 1984, mais on ne connaîtra peut-être jamais le nombre exact à cause de la façon dont les registres étaient tenus.

Après le service commémoratif, il y aura une cérémonie de guérison selon la tradition autochtone pour les survivants et leurs familles. Au nom du chef James, j'invite les députés à penser à la tragédie de l'île Kuper aujourd'hui et demain pour honorer la mémoire de ceux qui sont morts non seulement à l'île Kuper, mais dans tous les pensionnats d'un bout à l'autre du Canada, et pour demander la guérison de ceux qui ont survécu.

* * *

LA CONFÉRENCE FÉDÉRALE SUR LA JEUNESSE

M. Chris Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing, NPD): Monsieur le Président, la semaine dernière, le gouvernement fédéral a accueilli à une réception plus de 100 délégués triés sur le volet qui participaient à une conférence nationale de trois jours à Ottawa. La rencontre visait à obtenir des jeunes délégués des propositions de solution aux difficultés grandissantes que connaissent les jeunes au Canada.

Le problème, c'est que le gouvernement fédéral n'a invité aucun groupe d'étudiants, mais a accueilli les sociétés à bras ouverts, montrant une fois de plus que, pour lui, seuls les riches et les grandes sociétés comptent vraiment.

Le gouvernement semble croire, de toute évidence, que l'augmentation des droits de scolarité, la baisse de la qualité de l'enseignement, l'endettement élevé des étudiants, le chômage chronique qui les afflige et l'accès de plus en plus restreint aux études universitaires ne sont pas des questions importantes et préoccupent peu les jeunes.

Le président de la conférence a omis fort à propos de mentionner que le gouvernement revenait sur la promesse du livre rouge libéral de verser 100 millions de dollars dans le programme Service Jeunesse pour créer 10 000 emplois par année. Il s'est également gardé de parler du projet du gouvernement de privatiser le Programme canadien de prêts au étudiants et des compressions de sept milliards de dollars sur le chapitre des transferts sociaux aux provinces.

Les sociétés et le gouvernement ont tellement bien réussi leur coup que la deuxième institution bancaire en importance au Canada, la BCIC, a généreusement offert de tenir la deuxième conférence nationale sur la jeunesse en mars prochain. Pourquoi pas? Le gouvernement a déjà abandonné la classe moyenne et les travailleurs au profit des banques et des grandes entreprises.

* * *

MARY LOU CARROLL

M. Larry McCormick (Hastings-Frontenac-Lennox and Addington, Lib.): Monsieur le Président, Mme Mary Lou Carroll, de Adolphustown, est une bénévole exceptionnelle, et je suis heureux de reconnaître son action humanitaire à l'occasion du Mois de l'histoire des femmes.

Mme Carroll a communiqué avec mon bureau pour la première fois en octobre 1994 parce qu'elle voulait obtenir de l'aide pour expédier des fournitures sur un avion de la Défense nationale aux Soeurs de l'Orphelinat St-Joseph, à Haïti. Depuis cet envoi, Mme Carroll a poursuivi ses efforts en vue d'aider le village de San Rafael.

Mme Carroll m'a récemment écrit la note suivante:

Quand Soeur Cecilia Tallach a fondé l'école, les parents étaient très peu enthousiastes à l'idée d'y envoyer leurs enfants. Toutefois, lorsque la communauté s'est rendue compte de ce que les enfants qui fréquentaient l'école étaient maintenant capables de faire, tous les parents ont voulu que leurs enfants aillent à l'école.
Cette année, l'établissement compte 90 nouveaux étudiants, dont certains élèves de première année qui sont âgés de 20 ans.

Mme Carroll organise actuellement un quatrième envoi de fournitures. Elle a réussi à motiver d'innombrables personnes et a obtenu un appui considérable au sein de la communauté. Elle peut compter sur l'aide de particuliers aussi bien que de groupes.

* * *

LA SEAGER WHEELER HISTORICAL FARM SOCIETY

Mme Georgette Sheridan (Saskatoon-Humboldt, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais rendre hommage à la Seager Wheeler Historical Farm Society. Nommée d'après Seager Wheeler, phytogénéticien de renommée mondiale, elle est l'une des dix organisations qui existent à recevoir un prix de Parcs Canada en 1996.

Ces prix sont remis par le gouvernement du Canada en reconnaissance de réalisations exceptionnelles ou innovatrices dans le domaine de la protection, de la préservation et de la présentation du patrimoine naturel et culturel canadien.

Les récipiendaires doivent avoir fait une contribution dans au moins un des domaines suivants: administration responsable, éducation, recherche ou élaboration de politiques. La Seager Wheeler Historical Farm Association a excellé dans toutes ces catégories.

Aujourd'hui, Larry et Doreen Janzen, assisteront à Banff, en Alberta, à une cérémonie spéciale de remise des prix de Parcs Canada au cours de laquelle ce prix prestigieux leur sera remis au nom de nombreux bénévoles comme eux, dont les efforts soutenus ont permis de sauvegarder et de rehausser ce précieux patrimoine de l'Alberta.

* * *

[Français]

LES FRANCOPHONES HORS QUÉBEC

M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface, Lib.): Monsieur le Président, les francophones à l'extérieur du Québec se penchent davantage sur le développement de stratégies économiques qui leur permettront de contribuer encore plus à l'épanouissement de leur communauté.

Des forums économiques régionaux organisés pour déterminer les meilleures façons de procéder au développement économique de notre collectivité auront lieu à Saint-Boniface, au Manitoba, les 4 et 5 octobre, le deuxième à Saint-André, au Nouveau-Brunswick, et le troisième, à Ottawa. Ces forums régionaux seront suivis d'un forum


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national qui aura lieu à Saint-Georges, au Québec, en novembre, celui-ci pour conclure la planification nécessaire.

Ces rencontres jumelleront les élus municipaux et les gens d'affaires et faciliteront l'établissement de liens économiques et d'accords de coopération dans la francophonie canadienne en matière de développement économique à travers le Canada.

Je souhaite bonne chance et bon succès à tous les participants. Merci de votre collaboration.

* * *

(1105)

LE CENTRE CANADIEN DE FUSION MAGNÉTIQUE

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, lors du Conseil général du Bloc québécois tenu samedi dernier au lac Delage, les délégués ont unanimement appuyé une proposition d'urgence pressant le gouvernement fédéral de maintenir sa participation financière de 7,2 millions de dollars au projet Tokamak de Varennes.

Le retrait fédéral signifie, à terme, la mort du projet, puisque les avis de licenciement commenceront à être émis à la fin du présent mois. Les chercheurs de talent qui y travaillent devront donc inévitablement se trouver un nouvel emploi à l'étranger. Ainsi, les compétences développées chez nous et les 70 millions de dollars investis depuis 20 ans dans ce projet seront à jamais perdus, et le Canada sera privé des retombées découlant du développement des nouvelles technologies reliées au Tokamak.

Il est donc impératif que le gouvernement fédéral revienne sur sa décision de mettre fin à sa participation financière, laquelle constitue une partie importante des investissements fédéraux déjà trop insuffisants en matière de recherche et développement au Québec.

J'en appelle au bon sens des représentants du gouvernement fédéral afin que cette décision, que nous risquons de regretter amèrement, soit réévaluée dans les plus brefs délais. Le temps presse pour sauver le Tokamak.

* * *

[Traduction]

LA JUSTICE

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, comment se fait-il que la loi punit les citoyens non violents qui luttent pour la défense de la liberté, alors que les criminels violents qui s'introduisent dans nos foyers par effraction pour en détruire le caractère sacré ont seulement droit à quelques remontrances?

Darren Watson, de Saskatoon, a plaidé coupable pour avoir pénétré par effraction dans une ferme de la région de Leask, en avril, et volé deux camions. Durant le vol, trois chiens ont été battus à mort et un camion a été incendié. Invoquant loi sur la détermination de la peine, l'avocat de Watson a demandé au juge de le condamner à des travaux communautaires.

En revanche, Andy McMechan, un producteur de blé du Manitoba, a été reconnu coupable sous cinq chefs d'accusation portés contre lui dans le cadre d'un conflit concernant le monopole de la Commission canadienne du blé dans le domaine de la vente du grain. Il a été condamné à une amende de 13 000 $, à quatre mois d'emprisonnement, à la confiscation de son tracteur et à deux ans de probation sous surveillance.

C'est encore un autre exemple de l'hypocrisie de notre système judiciaire. Il est clair, à mes yeux, que l'un de ces deux hommes constitue une menace pour la société, mais l'autre pas. Pourquoi n'a-t-on pas proposé des mesures de rechange dans le cas d'Andy McMechan?

* * *

[Français]

LA HAUTE TECHNOLOGIE

M. Robert Bertrand (Pontiac-Gatineau-Labelle, Lib.): Monsieur le Président, il me fait plaisir de vous informer que le gouvernement canadien vient d'annoncer la mise en place d'un nouveau service qui favorisera le développement économique du Québec dans le secteur de la haute technologie.

Annoncé hier par le ministre de l'Industrie, le Bureau des partenaires pour l'investissement au Canada s'appliquera à identifier et à intéresser les investisseurs étrangers à venir s'établir au Canada et au Québec.

Les catégories d'investissements recherchées par les membres de ce Bureau varieront d'une province à l'autre. On sait déjà que les secteurs de l'industrie pharmaceutique, de l'aérospatiale, de la biotechnologie et des télécommunications seront priorisés pour le Québec.

En annonçant cette nouvelle initiative, le gouvernement du Canada confirme une fois de plus sa détermination à agir activement afin de favoriser la relance de l'emploi et la création d'une économie forte et porteuse d'avenir pour le Canada et pour le Québec.

* * *

M. ROBERT BOURASSA

Mme Anna Terrana (Vancouver-Est, Lib.): Monsieur le Président, instinctivement, lorsqu'on évoque le nom de Robert Bourassa, la population revoit immédiatement celui que l'on a baptisé «le père de la Baie James». C'est de toute évidence ce qui marquera le plus l'histoire de son long passage à la tête de la province de Québec.

Mais parler de Robert Bourassa, c'est aussi parler des deux récessions majeures qu'il a dû affronter à titre de premier ministre, c'est parler de ses luttes épiques qu'il a été amené à livrer aux grandes centrales syndicales afin de préserver le fragile équilibre entre les besoins des travailleurs et les besoins économiques de l'État.


5107

Parler de Robert Bourassa, c'est reconnaître l'acharnement et la détermination d'un homme à propulser sa province dans un nouvel univers économique en la dotant des outils essentiels à sa prospérité.

Les Québécoises et les Québécois reconnaissent son exceptionnelle contribution au développement économique du Québec et lui en seront à jamais reconnaissants.

On a perdu un grand Canadien qui a servi son pays et sa province de manière exceptionnelle. Je voudrais exprimer à la famille Bourassa, en mon nom personnel et au nom des habitants de ma province, la Colombie-Britannique, mes condoléances les plus profondes.

* * *

LE MINISTRE DE LA COOPÉRATION INTERNATIONALE

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, lors de récentes communications publiques, souvent partisanes, le ministre de la Coopération internationale a reproché à l'opposition officielle de ne pas lui avoir posé de questions en Chambre depuis sa nomination.

Or, dans ses discours, le ministre parle peu de coopération internationale, préférant le plus souvent entretenir ses auditoires de questions reliées à l'unité canadienne ou au débat constitutionnel, conscient que son collègue des Affaires intergouvernementales a bien peu de crédibilité au Québec.

(1110)

Pourtant, il aurait intérêt à travailler davantage ses propres dossiers et à remettre en cause les décisions inacceptables de son prédécesseur, André Ouellet, telles que l'abolition du Programme de sensibilisation du public, l'application du double langage quant à la défense des droits de la personne, l'affaiblissement de l'aide publique au développement véhiculée par les ONG et la propension à favoriser le seul secteur privé.

Comme vous le voyez, il y a urgence en la demeure.

* * *

[Traduction]

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DU SIDA

M. Elijah Harper (Churchill, Lib.): Je prends aujourd'hui la parole pour féliciter la Société canadienne du SIDA à l'occasion de la Semaine nationale de sensibilisation au SIDA, qui se tient depuis six ans et qui se termine demain. Cette semaine annuelle de sensibilisation au SIDA favorise une meilleure connaissance du SIDA et permet de recueillir des fonds pour certains services et programmes.

Beaucoup de gens pensent que le SIDA est un problème typique des villes, mais c'est aussi une grave menace pour nos collectivités du Nord. L'ignorance de ce danger ne fait qu'empirer les choses, et nos gens croient qu'ils n'ont pas à s'inquiéter à ce sujet. Les programmes liés au SIDA sont rares dans les régions rurales.

Healthy Thompson, un organisme bénévole de la ville de Thompson, collabore avec Santé Canada pour faire connaître ce problème dans cette région. Il s'est donné pour mission d'améliorer le traitement du SIDA, ainsi que les mesures de prévention et de sensibilisation dans la région de Thompson. Je félicite Healthy Thompson et tous les Canadiens qui ont contribué au succès des activités tenues aux quatre coins du Canada à l'occasion de la Semaine nationale de sensibilisation au SIDA.

* * *

LE FRASER INSTITUTE

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je veux attirer l'attention de la Chambre sur le numéro de septembre du Fraser Forum. Pour déjouer le jargon administratif, le Fraser Institute a créé, il y a deux ans, un indicateur de rendement budgétaire permettant de contrôler le bilan financier des 11 principaux gouvernements de notre pays.

Cet indicateur est composé d'un grand nombre de variables ayant trait aux dépenses, aux recettes fiscales, aux déficits et aux dettes. Les provinces ayant eu les meilleurs résultats en 1995, selon cet indicateur, étaient l'alberta et la Saskatchewan. On prévoit qu'ils resteront les meilleures en 1996.

Sur cette période de deux ans, on prévoit aussi que le gouvernement ayant le pire rendement sera le gouvernement fédéral, qui s'est classé dixième sur 11 en 1995 et qui ne devrait pas obtenir mieux que la neuvième place cette année. Le plus fascinant, c'est qu'une grande partie de l'amélioration de la situation budgétaire du gouvernement fédéral s'est faite sur le dos des provinces au cours des deux dernières années.

Il y a deux leçons à en tirer. D'abord, les Canadiens ne devraient pas s'y tromper quant à la situation financière du gouvernement fédéral. Les libéraux fédéraux font des prodiges de propagande et du travail médiocre. Ensuite, il faut rappeler à la Chambre, une fois de plus, la valeur inestimable du travail du Fraser Institute, qui fait connaître régulièrement aux Canadiens la qualité des administrations gouvernementales.

* * *

LE GOUVERNEMENT LIBÉRAL

M. Maurizio Bevilacqua (York-Nord, Lib.): Monsieur le Président, se montrer impitoyable dans la lutte contre la violence faite aux femmes et aux enfants, renforcer la législation sur le contrôle des armes à feu, réformer la Loi sur les jeunes contrevenants, améliorer le système de détermination de la peine, enrayer les crimes haineux, adopter des mesures à l'égard des délinquants dangereux présentant un risque élevé de récidive, renverser la tendance du taux de criminalité au Canada, voilà la liste des promesses que le gouvernement a faites, en 1993, pour améliorer la vie et la sécurité des Canadiens.

En 1996, c'est la liste des choses que le gouvernement a faites. Il avait promis qu'il rendrait les rues et les foyers des Canadiens plus sûrs, et il l'a fait. En 1995, le taux de criminalité a diminué pour la quatrième fois de suite, après avoir augmenté presque sans arrêt pendant 30 ans. Les crimes violents sont en baisse pour la troisième année consécutive et le taux d'homicide est le plus bas qu'il n'a jamais été depuis 1969.

Le gouvernement a vraiment changé les choses.

5108

[Français]

LES AÎNÉS

M. Maurice Dumas (Argenteuil-Papineau, BQ): Monsieur le Président, l'Assemblée générale des Nations Unies désignait, en 1990, le 1er octobre comme Journée internationale des personnes âgées.

En tant que critique de l'opposition officielle pour les organismes du troisième âge et également enseignant retraité, je tiens à souligner particulièrement l'importance que l'on doit accorder au rôle des aînés à travers le monde.

D'ailleurs, les Nations Unies demandent aux gouvernements et aux organisations non gouvernementales de contribuer au Fonds d'affectation spécial des Nations Unies concernant le vieillissement afin de sensibiliser les gens à travers le monde.

Dans un monde où le travail et la productivité font loi, les personnes âgées ne doivent pas être perçues comme un fardeau pour la société. Cette journée internationale pour les personnes âgées nous rappelle chaque année que celles-ci ont contribué au développement de notre environnement et qu'elles continuent de le faire selon leur capacité.

Je tiens à rendre hommage à tous les aînés de la planète et particulièrement à ceux qui ont bâti ce pays.

* * *

[Traduction]

YVONNE TOUSEK

M. Janko PeriG (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, pour sensibiliser davantage les gens à la contribution des femmes à l'essor du Canada, le gouvernement fédéral a déclaré que le mois d'octobre serait le Mois de l'histoire des femmes. C'est pourquoi je tiens à rendre hommage aujourd'hui à Yvonne Tousek qui, avec une grande détermination, a représenté le Canada aux Jeux olympiques d'été à Atlanta.

Yvonne est membre du Cambridge Kips Gymnastics Club et, en 1995, elle a été nommée athlète de l'année par l'Association canadienne de gymnastique. Elle a été la seule canadienne à se rendre en finale aux compétitions de gymnastique, qui réunissaient l'élite mondiale dans ce domaine, et elle s'est classée au 26e rang, ce qui est fort impressionnant.

(1115)

Au nom des gens de Cambridge, je félicite Yvonne de ses efforts remarquables et de son excellente performance comme membre de l'équipe de gymnastes du Canada.

* * *

LA COLOMBIE-BRITANNIQUE

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Monsieur le Président, lundi, alors que la Chambre étudiait une motion portant sur les mesures fédérales qui nuisent à la province de Colombie-Britannique, nous avons entendu tout un groupe de députés libéraux qui ont fait savoir à la Chambre qu'ils étaient responsables de l'économie florissante de la Colombie-Britannique. Indépendamment du fait que l'économie de la Colombie-Britannique était en plein essor avant l'élection du gouvernement, en 1993, les libéraux voulaient vraiment faire croire à tout le monde que c'était grâce à eux.

Toutefois, hier, le gouvernement provincial de la Colombie-Britannique a annoncé qu'il avait révisé à la baisse les prévisions concernant la croissance économique de la province, de sorte que celle-ci est maintenant estimée à 1,0 p. 100 au lieu de 2,7 p. 100.

Quand on veut s'accorder le mérite de ce qui va, il faut aussi accepter la reponsabilité de ce qui ne va pas. Est-ce qu'on peut s'attendre à ce que le ministre des Transports admette devant les habitants de la Colombie-Britannique que ce sont les politiques de son gouvernement qui sont la cause de cette baisse importante du taux de croissance de la Colombie-Britannique? Bien sûr que non, parce que le gouvernement a l'habitude d'accepter la gloire, mais de rejeter le blâme sur quelqu'un d'autre.

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5108

QUESTIONS ORALES

[Français]

LA CRÉATION D'EMPLOIS

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre.

Vantant les performances de son gouvernement en matière de création d'emplois, le ministre des Finances a déclaré, et je cite: «Ça va bien pour les Canadiens.» Pourtant, dans son dernier rapport, le Conference Board estime qu'en 1995, deux millions de Canadiens étaient sans travail et que 500 000 avaient quitté la population active. Ainsi, selon le Conference Board, le taux de chômage réel en 1995 n'était pas de 9,5 p. 100, mais bien de 12,5 p. 100.

Malgré le discours triomphant du gouvernement sur la création d'emplois, comment la vice-première ministre peut-elle nous expliquer que le taux réel de chômage au Canada, incluant les chômeurs découragés, ait atteint 12,5 p. 100?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, on n'est sûrement pas triomphants. On est toujours en train de chercher des façons de renouveler l'emploi. C'est pour cela que j'ai été un peu étonnée de savoir que le chef du Bloc québécois n'appuie pas entièrement la démarche du gouvernement fédéral pour le Programme d'infrastructures qui a créé 80 000 emplois partout au pays, dont plusieurs au Québec.

Cela m'étonne qu'il n'endosse pas le deuxième Programme d'infrastructures qui aurait pu quand même créer encore de nouveaux emplois.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, je voudrais corriger une tendance de la vice-première ministre qui répète les choses autrement qu'elles ont été dites. Le chef de l'opposition a dit qu'il était prêt à appuyer un programme d'infrastructures pour autant qu'on ne fasse pas comme la dernière fois, créer des jobs qui ne durent pas et que, cette fois-ci,


5109

on cherche des emplois stables et de qualité. C'est ce que le chef de l'opposition a dit.

Comment la vice-première ministre peut-elle affirmer, comme son ministre des Finances, que tout va bien pour les Canadiens, alors qu'il y a encore, selon le Conference Board, deux millions de personnes sans travail et que les chiffres de Statistique Canada, écoutez bien, indiquent que le gouvernement n'a créé que 153 000 emplois depuis le début de 1996? Ce sont les chiffres de Statistique Canada, et non ceux du Bloc.

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, c'est sûr que tant et aussi longtemps qu'il y a un chômeur au pays, on n'est pas triomphants. Un chômeur, c'est quelqu'un qui ne peut nourrir sa famille, et c'est pourquoi nous voulons aller de l'avant avec le Programme d'infrastructures.

Je veux m'assurer que malgré le manque d'appui du Bloc québécois à un programme qui a créé 80 000 emplois partout au pays, nous, du gouvernement du Canada, espérons que nous aurons procédé avec un programme qui avait l'appui des gens de leurs comtés.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, je croyais que la vice-première ministre manquait de mémoire, mais là, je me demande si elle entend ce qu'on dit.

(1120)

J'ai dit que le Bloc appuyait le Programme d'infrastructures pour autant qu'il y avait des jobs durables et de qualité. Avez-vous entendu, madame?

Le Président: Chère collègue, c'est moi qui dois entendre.

Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, j'aimerais bien que vous vous assuriez un jour qu'elle a bien compris.

La vice-première ministre refuse de voir la réalité. Non seulement le marché du travail n'est toujours pas ce qu'il était en 1989, mais le taux réel d'activité est en chute libre et le rapport emploi-population stagne. Pire encore, la population canadienne est plus pauvre de 7 p. 100 qu'avant la dernière récession, c'est-à-dire 1989. Si on appelle ça aller bien au Canada, je me demande où on s'en va.

La ministre réalise-t-elle que la situation du marché du travail est désastreuse et que le peu d'emplois créés par son gouvernement n'a pas réussi à enrichir les Québécois et les Canadiens? Ça presse de créer des jobs stables et de qualité.

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, selon le maire de Montréal, un des problèmes actuels, c'est l'instabilité politique. J'invite la députée d'en face à réfléchir aux paroles de propre chef, hier, qui a qualifié le Programme d'infrastructures, «de bonbon électoral».

Je veux m'assurer que nous irons de l'avant avec un programme, même si, actuellement, le Bloc québécois est en train de bloquer un programme qui a créé du travail dans tous les comtés du pays, y compris les comtés les plus pauvres et les plus touchés par le chômage de la province de Québec.

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, ce que le Conference Board affirme, c'est que la faible productivité est d'abord la cause du manque d'investissements dans la recherche et développement et le manque de formation professionnelle. Il ne faudrait pas confondre.

Ma question s'adresse à la vice-première ministre. Pour retrouver la qualité du marché du travail que la population du Québec et du Canada a connue en 1989, en termes de taux de chômage et de taux de participation, c'est plus d'un million et demi d'emplois que ce gouvernement aurait dû créer depuis son arrivée au pouvoir. Selon ses propres chiffres, la performance du gouvernement en matière de création d'emplois n'est que de 669 000 emplois. Il manque donc plus de 800 000 emplois.

La vice-première ministre réalise-t-elle qu'au rythme où ce gouvernement crée de l'emploi, il faudrait encore au moins quatre ans avant de retrouver des conditions semblables à celles qu'on a connues il y a sept ans avant la dernière récession?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, quand on voit le taux de chômage chez les jeunes, et surtout quand on voit que la majorité de ceux qui sont partis de la province de Québec cette année sont des jeunes, c'est une perte qui n'est pas supportable.

Ce que nous voulons faire, par la voie de programmes comme le Programme d'infrastructures qui, d'ailleurs, n'est pas appuyé par le Bloc jusqu'à ce jour, on veut restaurer un peu la stabilité économique. Mais pour ce faire, on a besoin que le Bloc et le Parti québécois respectent les engagements du premier ministre du Québec de mettre de côté les chicanes de séparation et de travailler à plein bras sur l'économie.

C'est ce que nous voulons. Malheureusement, ce n'est pas ce que fait actuellement le Bloc québécois qui crée, lui, de l'instabilité politique.

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, l'instabilité politique est-elle la cause d'un taux de chômage encore plus élevé qu'au Québec dans les provinces du Nouveau-Brunswick, de l'Île-du-Prince-Édouard et de Terre-Neuve? Pourtant, on ne parle pas de séparation dans ces provinces.

Après 2 ans et 10 mois de pouvoir, ce gouvernement se vante d'avoir créé 669 000 emplois. Pourtant, l'ancien gouvernement avait déjà créé 930 000 emplois dans la même période. Pour un gouvernement qui s'est fait élire pour créer des emplois, on a déjà vu beaucoup mieux.

Quand ce gouvernement arrêtera-t-il de se vanter et admettra qu'il n'a pas encore réalisé sa principale promesse électorale?


5110

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, ce qui crée l'instabilité politique, c'est ce qu'on appelle maintenant le référendum. On a fait un référendum, le Canada a gagné. On en a fait un deuxième, le Canada a gagné. Maintenant, ils essaieront encore de faire des référendums. Tant et aussi longtemps qu'ils continuent à vouloir tenir des référendums, ce sont le Parti québécois et le Bloc québécois qui créent le climat d'instabilité politique dont on voit actuellement les résultats.

* * *

(1125)

[Traduction]

LA CONTREBANDE

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, mercredi, une personne qui faisait partie d'un groupe de dix, arrivé du Pakistan au Canada, est morte parce que le bateau qui transportait ces gens aux États-Unis a chaviré dans les eaux agitées du Saint-Laurent, près de Cornwall.

Hier, la police d'Akwesasne et la Police provinciale de l'Ontario ont porté des accusations d'homicide involontaire contre un Canadien, relativement à cette tentative ratée de passage en fraude. Cet incident illustre un problème déjà bien documenté, celui d'une contrebande non contrôlée qui se fait par la réserve d'Akwesasne.

Pourquoi le solliciteur général n'est-il pas intervenu pour mettre un terme à cette activité? Combien faudra-t-il de morts encore avant qu'il n'agisse?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, c'est un drame que ces pertes de vie survenues l'autre soir au cours d'une tentative de passage en fraude à la frontière.

Le député sait que toutes ces activités sont des infractions pénales aux termes des lois en vigueur au Canada, et que la GRC travaille en étroite collaboration avec les services américains de l'immigration et de la naturalisation. Nous faisons tous les efforts pour décourager et dépister ces activités illégales et intenter des poursuites.

En réalité, le gouvernement a pris il y a trois ans une initiative anti-contrebande qui prévoyait un accroissement des budgets et du personnel de la GRC et de services connexes pour lutter contre la contrebande en général, dont le passage en fraude de personnes.

Nous ne sommes pas moins déterminés aujourd'hui. Nous ferons tout notre possible pour déceler ces activités illégales et intenter des poursuites.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, la triste réalité, c'est que les policiers ont peur de patrouiller le fleuve la nuit à cause des activités criminelles et des menaces qui pèsent sur leur propre sécurité. Les membres du crime organisé, les trafiquants de drogue et les contrebandiers pullulent à Akwesasne et dans l'île de Cornwall. Il est évident que la police de la réserve n'est pas efficace dans son travail.

Les Canadiens commencent à se demander si la police ne ferme pas les yeux sur la contrebande et le trafic de drogue. Si la police d'Akwesasne ne fait pas son travail, il est peut-être temps d'envoyer la GRC ou même les Forces canadiennes.

Le solliciteur général va-t-il dépêcher la GRC sur les lieux pour faire le ménage? Ou est-ce qu'il va continuer à tolérer le crime organisé et à lui laisser libre cours à Akwesasne?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je puis garantir au député que la GRC participe directement à ces efforts, non seulement dans cette région, mais aussi tout le long de notre frontière, pour lutter contre la contrebande et faire respecter les lois canadiennes.

Le week-end dernier, le solliciteur général et moi étions les hôtes d'un forum sur le crime organisé au Canada. Des représentants des forces policières, des gouvernements provinciaux, des procureurs, des avocats de la défense et des policiers actifs sur le terrain y ont participé. Nous avons fait le point et étudié des mesures spécifiques qu'on peut envisager pour donner de nouveaux moyens d'action aux policiers dans leur lutte contre le crime organisé.

Je suis sûr que, grâce à cette conférence et à la détermination du gouvernement à lutter efficacement contre la contrebande, nous prendrons de nouvelles mesures encore plus efficaces dans les mois à venir pour résoudre ce problème.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, les policiers, dans cette région et ailleurs au Canada, ont cherché désespérément à obtenir l'aide et le soutien du gouvernement fédéral, mais en vain.

Cet incident tragique est la preuve que le gouvernement utilise une double échelle de valeurs dans l'application de nos lois. Il s'est donné comme priorité d'arrêter, de détenir, de frapper d'amendes et même de harceler les agriculteurs de l'Ouest qui veulent simplement vendre leurs céréales aux États-Unis au meilleur prix possible. Le solliciteur général ferme les yeux, année après année, même lorsque des gens meurent à cause de la criminalité qui règne à Akwesasne.

(1130)

Le solliciteur général s'engagera-t-il à éliminer cette double échelle de valeurs, à appliquer la loi également à tous et à dépêcher sur les lieux les forces nécessaires pour éliminer le crime aux frontières? Autrement dit, peut-il s'engager à faire son travail?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je peux simplement donner au député l'assurance que la GRC prend ses responsabilités très au sérieux. Il y a près de trois ans, ses ressources ont été accrues grâce à l'initiative anti-contrebande.

On ne pourra jamais empêcher toutes les infractions occasionnées par cette frontière. C'est une frontière ouverte, qui fait 3000 milles. Le député sait fort bien qu'il est difficile d'exercer une surveillance parfaite.


5111

Nous croyons que la GRC fait son travail le plus efficacement possible dans des circonstances extrêmement difficiles, et la détermination du gouvernement à lutter de son mieux contre la contrebande ne fait pas de doute.

* * *

[Français]

LES LANGUES OFFICIELLES

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe, BQ): Monsieur le Président, hier, le président du Conseil du Trésor alléguait que la fonction publique fédérale au Québec devait avoir 54 p. 100 de postes bilingues, afin de desservir les anglophones et les allophones. En associant ainsi les allophones à la minorité anglophone, le président du Conseil du Trésor, un député ministre francophone du Québec, avoue clairement qu'il travaille à l'anglicisation des allophones du Québec.

Ma question s'adresse au président du Conseil du Trésor. Pourquoi le président du Conseil du Trésor, qui est un francophone, travaille-t-il à angliciser les allophones du Québec, allant ainsi à l'encontre de toutes les politiques linguistiques adoptées par les gouvernements québécois depuis les années 1960 et qui ont pour objectif leur intégration à la société québécoise par leur francisation?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, le député de l'opposition fait des allégations qui sont entièrement non fondées et, en plus de cela, il attaque ma qualité de francophone. Mais laissez-moi lui dire que ce n'est pas parce qu'il porte un nom francophone qu'il défend toutes les traditions des francophones.

Ma famille est ici depuis 1648. Toute ma famille a défendu la littérature, la culture, la langue, les institutions francophones, et il n'y a aucun député du Bloc québécois ou du Parti québécois qui peut se permettre de me donner des leçons sur ce que ma famille, sur ce que les gens qui ont été avec moi ont fait au point de vue des francophones.

Je dirais que ce sont les députés du Bloc québécois qui, actuellement, travaillent contre les intérêts du Québec et qui font que la culture et la langue françaises vont, peu à peu, avoir moins d'influence au Québec. Ce sont eux qui rendent un mauvais service aux francophones.

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe, BQ): Monsieur le Président, visiblement, la vérité choque. Et ce serait au président du Conseil du Trésor d'assumer ses propres positions, parce que c'est lui qui a clairement déclaré hier «pour desservir les allophones». Alors, il est incapable d'assumer ses propres positions.

Je lui demande ceci: s'il est bon pour les anglophones du Québec d'avoir cinq fois leur poids démographique en fonctionnaires fédéraux bilingues, serait-il logique que la même règle s'applique aux francophones du Nouveau-Brunswick qui représentent 34 p. 100 de la population, ou encore à ceux de l'Ontario qui forment la minorité francophone la plus importante au Canada? Pourquoi le fédéral et le président du Conseil du Trésor, député francophone du Québec, continuent-ils à défavoriser systématiquement les francophones du Canada anglais?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, il est évidemment faux que le gouvernement ou moi-même défavorisons les minorités francophones au Canada. L'opposition ne fait que circuler des bruits que, malheureusement, ils savent être contraires à la vérité.

Ce que le rapport du président du Conseil du Trésor démontre et démontre clairement avec des chiffres, pas avec des allégations mensongères, c'est que les minorités linguistiques au Canada ont reçu, dans les dernières années, un bien meilleur service qu'auparavant.

(1135)

En fait, au point de vue du service au public, au point de vue de la langue de travail et au point de vue de leur participation numérique dans la fonction publique, les minorités francophones sont bien mieux traitées maintenant qu'elles ne l'ont été auparavant ou qu'elles ne l'étaient il y a 20 ans. J'en suis moi-même un témoin et ce n'est pas les allégations de l'opposition qui rendront les faits incorrects.

* * *

[Traduction]

LE PATRIMOINE CANADIEN

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, les arguments qu'utilise la ministre du Patrimoine pour justifier son programme de distribution gratuite de drapeaux sont des foutaises.

Nous sommes fiers que le personnel du Parti réformiste soit formé pour aider les électeurs, ce qui ne change rien au fait que son programme n'est que du vent, et ce, depuis les tout débuts. Ses fonctionnaires ont commencé par dire que le programme allait coûter 6 millions de dollars. Il nous a déjà coûté 23 millions et ce n'est pas fini.

La ministre a dit aux Canadiens que les drapeaux étaient gratuits et pourtant, sur les documents qui accompagnent les drapeaux, elle les informe qu'ils peuvent obtenir un reçu pour fins d'impôt s'ils font un don de 10 $ ou plus.

Pourquoi refuse-t-elle de fournir des détails sur ces dépenses à la Chambre? Ces dépenses s'établissent à 23 millions de dollars et augmentent toujours. Combien d'argent a-t-on reçu jusqu'à maintenant?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député d'avoir attiré l'attention du Parlement sur le programme le plus populaire de notre gouvernement.

Jusqu'à maintenant, 613 420 familles de toutes les régions du Canada ont participé au programme.

Des voix: Bravo!

Mme Copps: Cela signifie qu'un ménage canadien sur seize a reçu un drapeau du Canada. Dans certaines circonscriptions, le taux de participation est même plus élevé.


5112

Dans la circonscription de Beaver River, un ménage sur onze a reçu un drapeau. Dans la circonscription de Calgary-Sud-Ouest, un ménage sur seize a reçu un drapeau. Dans la circonscription de Fraser Valley-Est, un ménage sur treize a reçu un drapeau. Dans la circonscription de Calgary-Nord. . .

Le Président: Le député de Kootenay-Est.

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, la ministre ne semble pas comprendre que les libéraux ne détiennent pas le monopole du patriotisme; ils ne font qu'utiliser l'argent des contribuables à leurs fins.

Comme ces drapeaux coûtent cher, la ministre peut-elle dire à la Chambre combien d'hôpitaux seront fermés, combien de livres seront taxés, combien de Canadiens âgés perdront leurs prestations pour permettre au gouvernement de payer ce programme?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Pas un seul, monsieur le Président.

* * *

[Français]

LA JUSTICE MILITAIRE

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, étant donné la rareté, ma question s'adresse à la vice-première ministre.

Le scandale des détournements de fonds à la base militaire de Valcartier remet en question, une fois de plus, l'efficacité de la pertinence du système de la cour martiale. Alors que le même genre de fraude serait pratiqué dans plusieurs autres bases militaires au Canada, et ce, depuis au moins 15 ans, très peu d'accusations ont été portées. La légèreté des peines encourues et les limites des enquêtes menées mettent en doute la crédibilité de ce système de justice.

Puisque tout le système de justice militaire est rudement mis à l'épreuve depuis l'arrivée en poste du ministre de la Défense et de l'actuel chef d'état-major, le général Boyle, qu'attend le gouvernement pour mandater un comité parlementaire afin qu'un examen complet et minutieux soit entrepris à cet égard, et ce, dans les plus brefs délais?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, reconnaissant la gravité des allégations et reconnaissant le fait qu'une enquête se déroule actuellement, on ne fait pas de commentaires ici en Chambre.

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, la question que j'ai posée à la ministre est tout à fait pertinente et ne concerne pas l'enquête en cours présentement.

La tentative visant à réduire le caporal Purnelle au silence et le privant de ses droits les plus élémentaires, alors que l'armée voulait le traduire devant le conseil de révision des carrières plutôt qu'en cour martiale, témoigne de façon éloquente des ratés de la justice militaire.

(1140)

Voici ma question supplémentaire. Plutôt que de minimiser les problèmes, la ministre admet-elle, oui ou non, que l'application de la justice militaire souffre de plusieurs maux et que ce n'est pas dans six mois qu'il faut y remédier, mais c'est maintenant.

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, d'un côté, le député dit qu'il ne parle pas des problèmes, mais en effet, c'est justement de ça dont il parle. Nous, on prend ces accusations très au sérieux. C'est pourquoi l'enquête se poursuit, et c'est pourquoi on ne veut pas faire de la justice ici, au Parlement.

* * *

[Traduction]

LE PATRIMOINE CANADIEN

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Monsieur le Président, la ministre du Patrimoine canadien nous a donné une très bonne idée de sa vraie nature au cours des deux derniers jours. Elle a gaspillé 160 millions de dollars pour des drapeaux, de la propagande et des annonces télévisées alors que son gouvernement impose les livres et sabre dans l'assurance-maladie. La seule réponse qu'elle a à donner aux Canadiens, c'est d'agiter sa liste. Les Canadiens méritent beaucoup mieux de leur vice-première ministre.

Permettez-moi d'essayer à nouveau. La ministre est en train d'établir une liste d'électeurs à partir des formules de commande de drapeaux. Cette liste va-t-elle servir à envoyer de la propagande électorale libérale?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, le drapeau n'est pas libéral, mais bien canadien.

Lorsque le député parle du fonds de financement d'émissions de télévision, il devrait savoir que ce fonds, pour lequel on a prévu des crédits de 100 millions de dollars dans le budget, devrait entraîner des investissements de 600 millions de dollars dans de nouvelles émissions canadiennes.

Ce même programme devrait créer des millions d'emplois dans tout le pays. De plus, il aidera les Canadiens à mieux se connaître les uns les autres, chose dont nous avons désespérément besoin en ces temps difficiles pour notre pays.

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Monsieur le Président, je me demande combien d'élections partielles il faudra à la ministre pour apprendre l'importance de l'honnêteté en politique.

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Chers collègues, je vous inviterais à ne pas faire de réflexions sur l'honnêteté d'un député. On tient pour acquis que vous êtes tous d'honorables députés. J'invite le député à faire bien attention à ses mots.

M. Hill (Prince George-Peace River): Monsieur le Président, le programme de distribution de drapeaux n'est rien d'autre qu'une manoeuvre électorale flagrante de la part du gouvernement.


5113

N'est-il pas vrai que la vice-première ministre a jugé que sa réputation était tellement ternie parce qu'elle n'avait pas tenu sa promesse au sujet de la TPS qu'elle a dû voler 23 millions de dollars aux Canadiens pour redorer son blason?

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Une fois de plus, si l'honorable vice-première ministre souhaite répondre à cette question, je vais lui en laisser le loisir.

* * *

[Français]

LE TRANSPORT AÉRIEN

M. André Caron (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.

Nous apprenions, en juillet dernier, que le ministre des Transports enlevait à Air Canada la route de Prague afin de la remettre à Canadian le jour même où Air Canada annonçait son nouveau service vers Prague, en partenariat avec Lufthansa.

Comment le ministre des Transports peut-il justifier cette décision autrement que par un parti pris éhonté en faveur de Canadian au détriment d'Air Canada, qui a son siège social à Montréal et qui emploie 5 500 personnes dans l'Ouest et plus de 14 000 en Ontario et au Québec?

L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, il est assez facile de répondre. La politique pour des villes comme Prague, c'est presque automatique. Si la première ligne d'aviation n'emploie pas la route, comme Air Canada ne l'a pas fait, alors elle va à l'autre ligne d'aviation. C'est presque automatique. Il n'y a aucune décision de ma part. Ça marche comme ça.

(1145)

Air Canada le savait car mon collègue, l'ancien ministre des Transports, leur a envoyé une lettre, l'année dernière, quand ils ont indiqué que les routes de Hong Kong seraient là pour Air Canada et aussi pour Canadian International.

M. André Caron (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, c'est curieux que ce soit arrivé le jour même où Air Canada avait une entente avec Lufthansa pour justement utiliser la route de Prague.

Comment le ministre des Transports peut-il justifier devant cette Chambre qu'Air Canada n'a jamais eu l'occasion de se faire entendre avant de décider de lui retirer la route vers Prague et de la donner à Canadian? On aurait pu au moins entendre Air Canada.

L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, comme je viens de dire, il n'est pas question d'examiner et de prendre une décision. C'est automatique. Si la route n'est pas établie dans 365 jours, alors, ça va à l'autre ligne d'aviation. C'est très clair. C'est connu par Air Canada, il le sait.

Oui, ils ont envoyé un communiqué de presse disant qu'ils étaient en train d'établir un bureau et c'est dommage, mais ils ne l'ont pas indiqué clairement bien avant l'opération automatique de la politique qui a été établie par mon prédécesseur, l'ancien ministre des Transports.

* * *

[Traduction]

GENERAL MOTORS

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Travail.

Plus de 15 000 travailleurs de l'automobile sont maintenant en grève à Oshawa, Durham et Ste-Thérèse. Les travailleurs canadiens de l'automobile ont le sentiment qu'ils ne sont que des pions aux mains des négociateurs de General Motors et du syndicat des travailleurs unis de l'automobile aux États-Unis. Les voitures sont fabriquées par des Canadiens et ceux-ci ne veulent rien savoir d'ententes conclues à Detroit.

Le ministre expliquera-t-il à Washington que les Canadiens exigent des solutions canadiennes à leurs problèmes de relations de travail?

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre du Travail et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, les négociations de travail entre General Motors du Canada et les travailleurs canadiens de l'automobile sont de compétence provinciale et ne sont pas assujetties au Code canadien du travail. Je ne peux donc pas intervenir dans ce différend.

Néanmoins, je suis très préoccupé par les répercussions que cette grève aura sur les Canadiens et l'économie canadienne. Voilà pourquoi j'invite les parties à poursuivre les négociations et à faire diligence pour trouver une solution canadienne.

* * *

LE PATRIMOINE CANADIEN

M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, quoi qu'en dise la vice-première ministre, les Canadiens d'un océan à l'autre se plaignent du coût du programme de distribution de drapeaux. En général, ils disent que les certificats ont coûté à eux seuls plus d'un million de dollars et que cette somme aurait certainement pu être employée à meilleur escient.

Puisque, au début, la ministre du Patrimoine canadien a déclaré que le programme serait financé par les entreprises, pourrait-elle dire à la Chambre combien d'argent les entreprises ont versé pour l'achat de drapeaux dans le cadre de ce programme et, par la même occasion, pourrait-elle dire à la Chambre quelle somme elle a personnellement versée dans ce programme?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je dois contredire le député qui parle d'une avalanche de plaintes en provenance de partout au Canada. En fait, ce sont les appels qui affluent de partout. Durant les huit premiers mois du programme, nous avons reçu plus de trois millions d'appels de Canadiens qui croient, de toute évidence, que le programme présente un intérêt.


5114

J'ajouterai que nous avons aussi reçu un engagement d'un très grand nombre de présidents de sociétés au sujet du défi aux entreprises qui sera lancé, si je ne m'abuse, le 1er novembre.

M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, j'en déduis donc que les entreprises n'ont rien donné. Il est intéressant de souligner que, sur les trois millions d'appels, deux millions et demi sont restés sans réponse parce que la ligne était occupée.

Il a fallu les impôts de 1 600 familles canadiennes pour financer ce programme. En outre, le gouvernement prive de travail les propriétaires et les employés des boutiques qui vendent des drapeaux au Canada, en instituant un programme qui les concurrence directement. Un sondage Léger et Léger montre maintenant une hausse spectaculaire des appuis à la cause séparatiste depuis la création du programme.

La ministre est-elle tellement aveuglée par son initiative qu'elle ne se rend pas compte que son programme de distribution de drapeaux sert la cause des séparatistes et contribue à l'éclatement du Canada?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je devrais dire, je suppose, que, comme d'habitude, le Parti réformiste se trompe sur toute la ligne. En fait, le sondage Léger et Léger rendu public aujourd'hui révèle une baisse importante des appuis au Parti québécois et au Bloc québécois. Comme d'habitude, les sondages du député sont probablement dépassés.

* * *

(1150)

[Français]

LE TRANSPORT FERROVIAIRE

M. René Canuel (Matapédia-Matane, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.

Au début de juillet, le Canadien National annonçait son intention de vendre ou d'abandonner le tronçon Matapédia-Gaspé. De ce tronçon, la partie entre Chandler et Gaspé n'a, jusqu'ici, trouvé aucun acheteur et risque de disparaître.

Le ministre se rend-il compte que ce réseau gaspésien est carrément menacé de disparition et que des communautés locales sont privées, surtout l'hiver, du seul moyen de transport sécuritaire dans notre région?

L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, les chemins de fer de toute la province de Québec sont dans la même situation que ceux du reste du Canada. Si nous avons des questions de sécurité, on ne peut pas continuer de laisser les passagers utiliser ces routes.

S'il est question que l'entretien ne soit pas fait ou s'il est question d'un accident qui crée un danger, alors, c'est comme dans les autres régions du pays, il faut interrompre le service. C'est impossible de faire autrement et en même temps de protéger les voyageurs canadiens.

M. René Canuel (Matapédia-Matane, BQ): Monsieur le Président, ce n'est pas partout pareil. En Gaspésie, on vient de couper, ou presque, Radio-Canada des communications. Là, on veut couper également dans les transports. Ce n'est pas la même chose partout.

Le ministre des Transports peut-il au moins nous garantir aujourd'hui en cette Chambre qu'il prendra les moyens nécessaires pour que le service du train de passagers soit maintenu sur toute la ligne Matapédia-Gaspé?

L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, à ce moment-ci, on examine plusieurs routes différentes, surtout les routes assez courtes. Nous sommes en train d'étudier les moyens de continuer le service dont parle le député. Ce n'est pas maintenant que l'on peut prendre la décision, parce que les examens et les études ne sont pas encore complétés.

* * *

[Traduction]

LE PATRIMOINE CANADIEN

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, nous continuons de poser des questions sur le programme des drapeaux parce que c'est un programme qui est un parfait symbole de ce que le gouvernement fait mal. Il illustre deux choses. Premièrement, c'est que les priorités du gouvernement en matière de dépenses sont déplorables. Il fermera des phares et retirera la garde côtière de ma province en prétendant que c'est pour économiser, mais il dépense beaucoup plus d'argent que ce que représentent ces économies pour distribuer des drapeaux. Deuxièmement, aucune stratégie sur l'unité nationale n'est sortie du bureau de la ministre. Ni plan A, ni plan B. Il y a cependant le plan D, pour drapeaux, et c'est tout.

La ministre finira-t-elle par produire une stratégie sur l'unité nationale ou devrons-nous nous contenter de ses demi-mesures?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je crois que le député a eu tout à fait raison de parler de symbole. De toute évidence, il y a quelque chose de symbolique dans le fait que un foyer sur 13 dans la circonscription de Fraser Valley-Est ait jugé le programme utile.

Je crois avoir établi hier que le programme des drapeaux n'était qu'un élément de la stratégie globale que le gouvernement a adoptée pour susciter chez les Canadiens le sentiment qu'ils possèdent leur pays. Faire flotter des drapeaux ne sauvera pas le Canada, mais cela peut certainement donner aux Canadiens le moyen d'exprimer publiquement leur confiance en notre grand pays. Ce programme a fait vibrer une corde chez beaucoup de Canadiens, y compris chez le député, qui s'est servi du télécopieur de son bureau de la Colombie-Britannique pour transmettre à mon bureau d'Ottawa, à grands frais pour les contribuables, des formulaires de demande de drapeaux.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, les gens à qui la ministre doit parler d'unité nationale, ce sont les séparatistes du Québec. Le reste de la population est composée de fiers Canadiens et nous n'avons pas besoin de drapeaux pour le prouver. Son programme de drapeaux est un échec. De tous les drapeaux que la ministre a envoyés, seulement 8 p. 100 sont allés à des Québécois. Lorsque les habitants de l'Ouest veulent comman-


5115

der des drapeaux, ils doivent passer par le bureau de circonscription de leur député ou par la ligne sans frais en français seulement parce que c'est la seule à laquelle on répond.

D'après la ministre, combien de séparatistes du Québec réussira-t-elle à persuader de devenir fédéralistes avec son programme de drapeaux?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, c'est malheureux que le député fait montre d'étroitesse d'esprit lorsqu'il croit qu'il n'y a qu'une seule région du pays où il faut travailler pour renforcer les liens qui nous unissent.

(1155)

En fait, 2 677 foyers de sa circonscription pensent de toute évidence que le drapeau canadien est assez important pour l'arborer.

Je dois dire que le Parti réformiste fait preuve d'étroitesse d'esprit et je trouve déplorable que, plutôt que de collaborer avec le gouvernement pour construire notre pays, ses membres ne pensent qu'à des moyens mesquins de se faire du capital politique.

* * *

LES MINES TERRESTRES

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères.

Le Canada joue un rôle de premier plan dans l'interdiction mondiale des mines terrestres, encore tout récemment cette semaine, avec l'annonce du ministre de la Défense nationale de la destruction des deux tiers des stocks de mines terrestres du Canada, et celle du ministre de la Coopération internationale de 2 millions de dollars supplémentaires pour le déminage terrestre dans le monde.

La conférence tenue à Ottawa cette semaine nous a-t-elle permis de réaliser de véritables progrès à cet égard? Y a-t-il une raison d'espérer qu'on pourra enrayer de la planète le fléau que représentent les mines terrestres?

M. Francis LeBlanc (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, la conférence avait pour objectif de réunir des pays de toutes les régions du monde qui partagent les mêmes idées pour viser l'interdiction mondiale des armes haineuses que sont les mines antipersonnel.

La conférence a déjà eu un effet démontrable. Le nombre de pays qui se sont engagés à favoriser cette interdiction est passé d'environ 14, il y a un an, à 47 aujourd'hui, à temps pour qu'ils participent à cette conférence. Nous espérons qu'un plus grand nombre de pays s'empresseront de suivre ce mouvement, pour que les Nations Unies puissent déposer une résolution très énergique sur ces armes dès cet automne.

En outre, la conférence a réuni non seulement des gouvernements, mais également des parlementaires et des ONG qui sont actifs dans ce secteur, pour élaborer un plan d'action visant à éliminer ces armes dans le monde entier.

* * *

[Français]

L'AÉROPORT PEARSON

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.

Le gouvernement fait toujours face à des poursuites judiciaires de l'ordre de 660 millions de dollars à la suite de l'annulation de la privatisation de l'aéroport Pearson. Tout cela, parce que depuis leur prise du pouvoir, les libéraux refusent d'écouter l'opposition officielle qui leur demande de faire toute la lumière sur ce scandale politico-financier. Le ministre n'a manifestement pas l'intention d'agir dans ce dossier.

Le ministre n'est-il pas en train d'avouer que le gouvernement fédéral se croise les bras et attend passivement la décision des tribunaux sur le montant que devront payer les contribuables canadiens pour les erreurs de ce gouvernement qui tente de protéger ses amis impliqués dans la privatisation de l'aéroport Pearson?

L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, oui, il faut attendre les cours de temps en temps, mais je peux assurer l'honorable député qu'aussitôt qu'on en sera au point où il sera possible de prendre une bonne décision qui prendra en considération tous les êtres et les individus affectés, on va le faire.

* * *

[Traduction]

LE PATRIMOINE CANADIEN

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, j'ai des nouvelles pour la ministre du Patrimoine: Rien n'est gratuit et ses drapeaux ne font pas exception à la règle. Les 23 millions de dollars qu'ils ont coûté auraient pu servir à prévenir la fermeture d'une douzaine d'hôpitaux au Canada ou encore à embaucher assez de policiers pour que la société soit vraiment beaucoup mieux protégée.

Quand la ministre va-t-elle se réveiller, mettre de l'ordre dans ses priorités et arrêter de gaspiller l'argent de mes petits-enfants? Ne voit-elle donc pas que ce sont mes petits-enfants et les siens qui devront payer pour ces drapeaux prétendument gratuits achetés avec de l'argent que l'on n'a pas?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, ma priorité, et celle du gouvernement, est de faire en sorte que mes petits-enfants aient un pays. Nous ferons tout pour donner aux Canadiens ordinai-


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res le moyen d'exprimer leur amour pour leur pays. Ce n'est pas en faisant flotter un drapeau que l'on sauve un pays, soit, mais c'est un début, car nous devons, en tant que Canadiens, commencer à célébrer qui nous sommes et faire voir que nous habitons le meilleur pays du monde. C'est à cela que sert le drapeau ici. Je pense que le député devrait donner son adhésion au programme, comme nombre de ses collègues l'ont, de toute évidence, déjà fait.

* * *

(1200)

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, en ce moment, le ministre de l'Agriculture tient une conférence de presse à Regina, où il doit faire une annonce au sujet de la Commission canadienne du blé.

D'après les rumeurs qui circulaient ce matin, le ministre annoncera la tenue d'un plébiscite coûteux sur la commercialisation de l'orge.

Le secrétaire parlementaire peut-il confirmer ces rumeurs et, dans l'affirmative, va-t-il reconnaître que cette importante décision a été prise sans que soit consulté le comité consultatif de la Commission canadienne du blé, dont les membres sont élus par les producteurs?

[Français]

L'hon. Fernand Robichaud (secrétaire d'État (Agriculture et Agroalimentaire, Pêches et Océans), Lib.): Monsieur le Président, il est vrai que le ministre de l'Agriculture est actuellement dans la ville de Regina et qu'il devrait, d'un moment à l'autre, commencer sa conférence de presse où il annoncera sa réponse au rapport de la Commission.

Plutôt que d'affirmer ou de réfuter les rumeurs que le député semblent vouloir mettre de l'avant, je l'inviterais à se rendre à son bureau pour écouter le ministre donner sa conférence de presse où toutes les réponses qu'il désire lui seront communiquées.

* * *

[Traduction]

LES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

M. Mauril Bélanger (Ottawa-Vanier, Lib.): Monsieur le Président, les députés et leur personnel ainsi que les particuliers et les associations d'un bout à l'autre du pays utilisent couramment l'annuaire téléphonique du gouvernement, dont la dernière mise à jour remonte à 1994.

Le secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux peut-il nous dire si le gouvernement a l'intention de publier une version à jour et, dans l'affirmative, préciser quand celle-ci sera publiée?

M. John Harvard (secrétaire parlementaire de la ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. J'apprécie son vif intérêt dans ce dossier.

J'ai de bonnes nouvelles pour lui. Le public pourra se procurer une nouvelle version papier de l'annuaire téléphonique dès janvier, c'est-à-dire dans trois mois environ. Je précise qu'il s'agit de la nouvelle version papier parce que l'annuaire est déjà accessible sur Internet à partir de la page d'accueil du gouvernement du Canada. Il suffit de cliquer sur le petit téléphone rouge à l'écran. L'adresse Internet est http://canada.gc.ca.

* * *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je voudrais signaler aux députés la présence à notre tribune des membres du Groupe d'amitié Canada-Allemagne du Bundestag allemand, dirigé par M. Siegfried Hornung.

Des voix: Bravo!

* * *

[Français]

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA PÉRIODE DES QUESTIONS ORALES

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Conformément à Beauchesne qui est très clair, le président du Conseil du Trésor a affirmé tantôt que mon collègue a fait des affirmations mensongères, ce qui équivaut à accuser le député de Richmond-Wolfe de mentir à la Chambre.

Or, le député a travaillé honnêtement en faisant référence à des propos tenus par le ministre qui sont reproduits dans le hansard d'hier, et qu'on peut lire à la page 5059:

Au Québec, il y a une proportion d'anglophones et d'allophones qui est tout près de 20 p. 100; par conséquent, nous avons une proportion de fonctionnaires bilingues qui correspond aux besoins de la province.
Nous citions le ministre. Donc, mon collègue n'a pas fait d'allégations mensongères. Monsieur le Président, je demande au président du Conseil du Trésor de retirer ses paroles.

Le Président: Ma chère collègue, le président du Conseil du Trésor est ici, s'il désire ajouter quelque chose à ces commentaires, je l'invite à le faire.

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, les allégations mensongères qui ont été faites sont visibles dans la question du député, parce que dans sa question, il a fait des accusations personnelles qui, à mon avis, portent atteinte à la dignité de la Chambre et au respect des autres députés.

(1205)

C'est une tendance qui est malheureuse, qui ne devrait pas exister dans cette Chambre. Les députés de l'opposition devraient cesser de faire des allégations personnelles qui sont fausses, devraient cesser d'imputer des motifs qui sont incorrects, devraient cesser, par exemple, de dire que les Québécois qui ne pensent pas comme eux, pour une raison quelconque, sont en train de trahir leur race et leur origine.

Qu'on relise bien la question du députés de l'opposition et on va voir qu'elle contenait des allégations qui ne sont pas fondées sur des faits, qui sont contraires à la réalité et qui indiquent une effronterie et une arrogance qui ne devraient pas être tolérées dans cette Chambre.

5117

Le Président: Je crois, mes chers collègues, que les mots dont il est question sont «allégations mensongères». Nous employons des mots parfois dans nos débats qui coupent, qui tranchent, qui sont presque proches de ne pas être acceptables de façon parlementaire.

J'aimerais, s'il vous plaît, demander à tous les députés de cesser d'employer ces mots qui nous fâchent quand nous tenons nos débats. Nous avons vu aujourd'hui qu'il y a eu une interprétation d'un côté et une autre interprétation de l'autre. J'aimerais tout simplement vous demander de ne pas utiliser des mots comme «mensongères», puisque cela nous incite ici dans la Chambre.

Mais je trouve qu'au sujet du rappel au Règlement, le ministre a expliqué ce qu'il voulait dire, ce qui était moins que les allégations en employant le mot «mensongères». Je crois que dans son explication, il aurait dû ou il a retiré ses mots, et je le lui demanderais directement. Je demanderais au ministre, puisqu'il l'a expliqué, s'il retirerait le mot «mensongère» ici à la Chambre.

M. Massé: Monsieur le Président, maintenant que vous m'avez donné l'occasion d'expliquer clairement pourquoi j'ai répondu de la façon dont je l'ai fait, je considère l'allégation retirée.

Le Président: D'accord. S'il y a un autre rappel au Règlement, je vais l'écouter, mais pour ce rappel au Règlement, je considère que c'est terminé.

Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, je voudrais vous demander de prendre ce rappel au Règlement en délibéré, parce que dans sa première réponse, il en a rajouté, et trop, c'est trop. Si de dire que le ministre est député et ministre francophone du Québec, c'est mensonger, je voudrais qu'il se démasque.

Le Président: Oui. Si l'honorable députée veut que je regarde le hansard, je vais le regarder, et si c'est nécessaire, si je trouve que c'est nécessaire, je reviendrai à la Chambre.

______________________________________________


5117

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LA LOI SUR L'ÉQUITÉ EN MATIÈRE D'EMPLOI

M. Ted White (North Vancouver, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-332, Loi modifiant la Loi sur l'équité en matière d'emploi (élimination des notions de groupe désigné et d'objectifs numériques) et la Loi canadienne sur les droits de la personne.

(1210)

-Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui pour présenter un projet de loi d'initiative privée, conformément aux souhaits exprimés par mes électeurs.

Le projet de loi modifie la Loi sur l'équité en matière d'emploi, afin d'élimination le principe des groupes désignés et des objectifs numériques, et de supprimer l'obligation faite aux employeurs de présenter des rapports à cet égard. Cette mesure entrera en vigueur en même temps que la Loi sur l'équité en matière d'emploi.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

LA LOI SUR L'IMMIGRATION

M. Ted White (North Vancouver, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-333, Loi modifiant la Loi sur l'immigration et le Code criminel (revendicateurs du statut de réfugié ou candidats immigrants déclarés coupables d'un acte criminel par mise en accusation).

-Monsieur le Président, je présente un projet de loi très important qui a été élaboré avec l'aide d'un avocat de ma circonscription qui appuie le Parti libéral. Si la mesure est adoptée par le gouvernement, elle autorisera les juges des cours provinciales à châtier les réfugiés criminels en exigeant leur expulsion.

Cette mesure reçoit l'appui des avocats de la Couronne de la région de Vancouver. Je suis d'avis que c'est un excellent projet de loi et j'ai hâte qu'il soit débattu à la Chambre.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

PÉTITIONS

LES GROUPES D'INTÉRÊTS

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de présenter une pétition qui a circulé partout au pays de façon tout à fait spontanée et dans laquelle on demande au Parlement de prendre des mesures afin que le statut d'organisme de charité soit retiré à certains groupes d'intérêts.

Les pétitionnaires visent ceux qui font du lobbying au nom de groupes d'intérêts particuliers et qui bénéficient quand même d'un financement de la part du gouvernement en raison de leur statut d'organisme de charité.

Les Canadiens d'un bout à l'autre du pays appuieraient sans réserve la mesure proposée dans cette pétition.

LA CONDUITE AVEC FACULTÉS AFFAIBLIES

M. Janko PeriG (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le privilège de présenter à la Chambre deux pétitions provenant de résidants de ma circonscription de Cambridge.

La première pétition, qui compte environ 400 signatures, demande au Parlement du Canada de modifier le Code criminel de façon à faire en sorte que quiconque trouvé coupable d'avoir causé la mort d'une personne en conduisant en état d'ébriété se voit imposer une peine d'emprisonnement allant de sept à quatorze ans.

LA JUSTICE

M. Janko PeriG (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième pétition exhorte le gouvernement à adopter des mesures législatives afin d'empêcher les criminels condamnés de tirer un bénéfice financier de la vente des détails de leurs crimes à d'autres, aux fins de publication sous forme de livre, de film ou de vidéo.

5118

[Français]

LE SÉNAT

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, de toutes les institutions canadiennes, l'autre Chambre est sûrement celle qui est la plus controversée.

En vertu de l'article 36 du Règlement, les pétitionnaires, au nombre de 2 379, demandent au Parlement d'entamer des mesures visant à abolir le Sénat.

[Traduction]

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, c'est un peu comme si l'on demandait à quelqu'un de fermer les portes de l'écurie après que les chevaux se sont échappés, mais malgré cela, je prends aujourd'hui la parole pour présenter une pétition signée par 97 de mes électeurs qui tiennent à dire à la Chambre qu'ils estiment que les privilèges que la société accorde aux couples hétérosexuels ne devraient pas être reconnus aux couples homosexuels, et qu'ils craignent que l'ajout de l'expression «orientation sexuelle» dans la Loi canadienne sur les droits de la personne ne donne l'impression que la société approuve les mariages entre personnes de même sexe.

L'UNITÉ NATIONALE

Mme Maria Minna (Beaches-Woodbine, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais déposer une pétition signée par des Canadiens qui encouragent le gouvernement à faire en sorte que le Canada demeure uni et indivisible à l'avenir.

(1215)

LES PRODUITS DE LA CRIMINALITÉ

M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui une pétition de la part deM. Bob Hackett et de 32 autres électeurs de North Vancouver qui font remarquer qu'à l'heure actuelle, la loi canadienne n'interdit pas aux criminels condamnés de bénéficier financièrement de leurs crimes en écrivant des livres, en tournant des vidéos, en exploitant une ligne téléphonique 1-900 ou autrement.

Les pétitionnaires demandent au Parlement d'adopter aussitôt que possible le projet de loi C-205, présenté par le député de Scarborough-Ouest, afin de stipuler dans la loi canadienne que les criminels ne peuvent pas tirer des avantages des crimes qu'ils ont commis.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Rey Pagtakhan (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le Président: D'accord?

Des voix: D'accord.


5118

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-55, Loi modifiant le Code criminel (délinquants présentant un risque élevé de récidive), la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, la Loi sur le casier judiciaire, la Loi sur les prisons et les maisons de correction et la sur le ministère du Solliciteur général, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement les observations que mes collègues de tous les partis représentés à la Chambre ont présentées sur le projet de loi C-55. Je tiens à dire que ce projet de loi comporte de bonnes dispositions. Toutefois, nous croyons qu'il ne va pas assez loin, comme je vais vous l'expliquer ici aujourd'hui.

Le 14 septembre 1995, le Financial Post a publié un article comportant des statistiques établies par le Service correctionnel du Canada. Je conviens avec l'auteur de l'article en question que ces statistiques sont inquiétantes et qu'elles montrent clairement que le système ne protège pas la population contre les assassins reconnus et les autres dangereux prédateurs. Ces statistiques appellent des modifications du Code criminel plus importantes que celles prévues dans le projet de loi C-55.

Selon un tableau que le solliciteur général a fourni à la rédactrice en chef du Financial Post, Diane Francis, entre 1989 et 1994, pas moins de 78 individus ont commis un meurtre pendant qu'ils étaient en libération conditionnelle. Cela signifie que 15 innocentes personnes ont été tuées chaque année durant cette période par des gens qui bénéficiaient d'une libération conditionnelle.

Les mêmes chiffres révèlent que quelque 4 960 personnes trouvées coupables d'une infraction violente moins grave, comme un attentat à la pudeur contre un enfant, un homicide involontaire, un viol ou une tentative de meurtre, ont récidivé pendant qu'elles étaient en libération conditionnelle. Mme Francis a conclu que ces chiffres étaient horribles. Je suis d'accord avec elle.

Les statistiques ne donnent pas une image fidèle de la façon dont les récidivistes deviennent progressivement plus violents. Par conséquent, je voudrais présenter à la Chambre des preuves qui montrent la nécessité non seulement d'adopter le projet de loi C-55, mais encore d'apporter d'autres modifications au Code criminel.

Depuis 1975, Allan Wayne Walsh, de Mission, en Colombie-Britannique, a été trouvé coupable de plus de 60 chefs d'accusation pour enlèvement, séquestration d'une femme, crime sexuel, vol et possession illégale d'arme. En 1983, il a été condamné pour 26 infractions, y compris deux chefs d'accusation de viol, et a été condamné à 25 ans de prison. Dix ans plus tard, il était libéré sous condition. Quelques mois plus tard, il s'est servi d'un couteau pour tenter de violer une femme et en a ensuite violé et volé une autre. Le 21 septembre 1995, il a été trouvé coupable de sept infractions, y compris une agression sexuelle qui a incité la Couronne à le faire déclarer délinquant dangereux.


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Cet individu n'aurait jamais perpétré ces sept nouveaux crimes s'il avait purgé au complet sa peine de 25 ans. Sept innocents n'auraient pas été agressés si ce délinquant dangereux avait purgé intégralement sa peine de 25 ans. Pourquoi donc continuons-nous de libérer des délinquants à risque élevé qui peuvent ainsi récidiver?

Le Parti réformiste est d'avis que les peines doivent avoir un sens pour les criminels violents, en l'absence de désignation de délinquant dangereux. Pour qu'une peine de 25 ans ait un sens, il faut qu'elle soit purgée au complet. Essentiellement, nous sommes contre la libération conditionnelle pour les délinquants violents, contre la réduction de la peine imposée par le tribunal après avoir examiné les faits.

(1220)

Pourquoi les ministériels voudraient-ils qu'on demande à un tribunal, à un juge et peut-être à un jury d'examiner tout les faits et d'imposer une peine en conséquence si on est pour demander ensuite à une commission des libérations conditionnelles de reconsidérer cette décision et de réduire la période de temps qu'un délinquant violent doit passer derrière les barreaux? Ils ne veulent pas répondre à cette question.

Ronald Richard McCauley, un autre violeur de la Colombie-Britannique, a été condamné à 17 ans d'emprisonnement pour deux viols crapuleux où les victimes ont été laissées pour mortes. Au moment de la détermination de la peine, McCauley avait un casier judiciaire qui remontait à 1969. Lorsque McCauley s'est présenté devant la commission des libérations conditionnelles en 1992, il a admis que, s'il ne s'était pas fait prendre, il serait devenu un tueur en série comme Clifford Olson. La commission, remarquant que le traitement ne semblait avoir eu qu'un effet superficiel sur McCauley, a rejeté sa demande de libération conditionnelle anticipée.

En 1994, deux ans plus tard, McCauley a été libéré d'office. Selon un article paru dans le journal le 25 septembre 1995, McCauley est maintenant un suspect dans le meurtre de deux prostituées de Vancouver.

Le Parti réformiste propose qu'on modifie le projet de loi C-55 en éliminant la libération d'office. Melanie Carpenter n'aurait pas été tuée si M. Auger n'avait pas été libéré d'office.

En 1983, James Ronald Robinson, d'Ottawa, a été reconnu coupable d'homicide involontaire après avoir poignardé à mort Roxanne Nairn, une étudiante de 12e année âgée de 17 ans. Il a été condamné à trois ans d'emprisonnement, mais a bénéficié d'une libération anticipée même s'il avait été pris à essayer de faire entrer clandestinement du hachisch au pénitencier en revenant d'une sortie sans surveillance.

En 1990, Robinson a passé deux ans en prison pour avoir violé et menacé de tuer une femme qui avait vécu avec lui après sa sortie de prison. Le 6 mars 1995, une autre accusation d'agression sexuelle a été portée contre lui.

Malgré des peines consécutives totalisant 27 ans et malgré le fait qu'il avait commis des crimes pendant qu'il était en libération conditionnelle, Claude Forget a reçu la permission de sortir sous surveillance pour aller visiter sa soeur en 1993. Il s'est échappé. Deux mois plus tard, il a tiré sur deux policiers.

En septembre 1995, il était admissible à la libération conditionnelle après avoir purgé seulement une fraction de sa peine parce que les règles relatives à la libération conditionnelle exigeaient que toute nouvelle peine soit fusionnée avec la peine imposée antérieurement. Dans le cas de Forget, cela voulait dire qu'il était admissible à la libération conditionnelle presque immédiatement après avoir été reconnu coupable de ces tentatives de meurtre. Forget a obtenu une audition en vue d'une libération conditionnelle totale en décembre 1995.

En 1986, Martin Dubuc, un entraîneur de hockey de Montréal, a été reconnu coupable d'attentat à la pudeur contre des joueurs de son équipe. Après sa remise en liberté, il ne s'est pas laissé intimider par la radiation à vie comme entraîneur dont il faisait l'objet au Québec. Il a déménagé et est devenu entraîneur, puis président de l'association de hockey mineur du sud-ouest de Montréal. En outre, trois conseils scolaires de la région de Montréal l'ont embauché comme enseignant suppléant. En septembre 1995, il a plaidé coupable à l'accusation d'avoir menacé des jeunes de dix à treize ans au téléphone.

Les cas de ce genre vont se multiplier, à moins d'apporter au Code criminel des modifications qui vont plus loin que le projet de loi C-55. Le nombre de crimes commis par des récidivistes ne diminuera de façon sensible que si le gouvernement est prêt à aller encore plus loin.

L'attitude laxiste des libéraux à l'égard de la criminalité est inefficace. Nous devons appliquer une politique de tolérance zéro aux auteurs de crimes avec violence et de crimes sexuels, c'est-à-dire réprimer sévèrement les criminels qui s'en prennent aux personnes faibles et vulnérables.

Le projet de loi C-55 continuera de permettre la remise en liberté de délinquants à risque élevé et la sécurité des Canadiens continuera d'être menacée, même si des formes minimales de surveillance sont appliquées. La seule façon de protéger efficacement les Canadiens contre les délinquants à risque élevé est de les garder en prison pour les empêcher de récidiver. Tous les individus reconnus coupables de sévices graves à la personne devraient purger la totalité de leur peine.

(1225)

Pour plus de certitude, le Parti réformiste propose d'amender le projet de loi C-55 pour obliger les tribunaux à déclarer délinquant dangereux toute personne qui aurait commis à au moins deux reprises une infraction causant des sévices graves à la personne et à lui imposer une peine d'emprisonnement d'une durée indéterminée.

Le Parti réformiste recommande également, en guise d'appui au projet de loi C-254 d'initiative parlementaire présenté par la députée de Surrey-White Rock-South Langley, que le projet de loi C-55 soit amendé pour permettre de déclarer une personne délinquant dangereux à n'importe moment, pendant que cette personne purge sa peine. La couronne doit avoir le droit d'obtenir que quelqu'un qui a été reconnu coupable de crimes graves ayant causé


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des blessures graves puisse être déclaré délinquant dangereux en tout temps pendant la durée de sa peine d'emprisonnement.

Pourquoi libérerait-on un délinquant, si l'on sait à coup sûr qu'il n'a pas été réadapté et qu'il continuera de s'en prendre à d'innocentes victimes, enfants et adultes, lorsqu'il sera libéré? C'est ce que fera le projet de loi C-55.

Le Parti réformiste appuie aussi la partie du projet de loi C-55 qui élargit la liste des infractions criminelles permettant de classer un criminel «délinquant dangereux» pour y ajouter les pédophiles et autres délinquants sexuels. Il n'y a probablement pas de crime, à part le meurtre, qui s'attaque plus profondément aux émotions et aux valeurs d'une communauté que les agressions sexuelles commises contre des enfants. Sur bien des plans, c'est le pire des actes criminels, parce que les victimes sont choisies parmi les plus faibles, les plus vulnérables et les plus innocentes d'entre nous.

Ce n'est pas surprenant que les gens soient horrifiés à la nouvelle de la libération dans leur quartier d'un pédophile qui a purgé toute sa peine, surtout quand on considère que le pédophile en question présente un grand risque de récidive.

En décembre 1995, les Manitobains ont été avertis du danger que représentait un agresseur sexuel venant d'être libéré. La police affirmait qu'il représentait un gros risque de récidive. Les policiers de Winnipeg craignaient qu'Osborne s'attaque à une de ses connaissances ou même à un étranger. Douglas James Osborne a été libéré de la prison de Stoney Mountain le 23 novembre 1995 après avoir purgé une peine de trois ans pour agression sexuelle. Aucune surveillance n'avait été prévue à sa libération.

Aussi, en décembre 1995, le service de police régional de York, chez nous, en Ontario, a émis un avis public avertissant tous les habitants de York et Durham de la libération de Donald John Jones. La police considérait que ce sadique sexuel, comme la police l'avait décrit, risquait fort de s'attaquer à d'autres femmes. Jones a refusé de se soumettre à un traitement pour déviance sexuelle durant son incarcération au pénitencier de Kingston. Jones avait un casier judiciaire qui remontait à 1970 lorsqu'il a été condamné à cinq ans pour avoir agressé sexuellement en 1981 une femme de 59 ans, de Whitby. En 1986, Jones a attaqué un commis de 18 ans chez un dépanneur alors qu'il avait obtenu une autorisation de sortie du pénitencier de Kingston. En 1987, il a agressé sexuellement une femme de 78 ans, également alors qu'il avait obtenu une autorisation de sortie. N'est-ce pas fantastique que l'on délivre des autorisations de sortie à des gens comme ça sans avoir la garantie qu'ils sont réadaptés? Et donc, ces gens continuent à commettre infraction après infraction contre des gens innocents.

Le Parti réformiste propose que le projet de loi C-55 soit modifié de façon à éliminer les permissions de sortir dans le cas des délinquants sexuels. Comme il a été mentionné plus tôt, nous proposons que le projet de loi C-55 soit modifié de façon à ce que les délinquants sexuels soient désignés délinquants dangereux. Nous proposons également que, dans le cas des délinquants dangereux, la révision des peines d'emprisonnement pour une durée indéterminée soit fondée sur l'examen et la recommandation d'au moins deux psychiatres.

Le taux de récidive chez les délinquants sexuels, en particulier les pédophiles, est élevé. La seule façon de protéger nos enfants, la seule façon d'empêcher les prédateurs sexuels de faire des victimes et de détruire la vie d'un autre enfant innocent, est de les garder sous les verrous, de les laisser en prison, de les tenir à distance des personnes qu'ils visent. De les garder en prison indéfiniment en tant que délinquants dangereux jusqu'à ce qu'il n'y ait plus aucun risque qu'ils ne récidivent.

Je ne crois pas que qui que ce soit au Canada, en tous cas à la Chambre, voudrait voir une personne maintenue sous les verrous une fois qu'elle a purgé la totalité de sa peine et qu'elle est complètement réadaptée. Ce n'est pas ce que nous voulons. Ce que nous voulons c'est protéger la société en nous assurant que ceux qui présentent un risque élevé de récidive ne sont pas remis en liberté.

(1230)

Quiconque présente des signes indiquant qu'il va récidiver ne devrait pas être remis en liberté. Nous avons le pouvoir de protéger les Melanie Carpenter de ce pays. Nous avons le pouvoir de protéger tous les citoyens de ce pays. Le projet de loi C-55 est un pas dans cette direction, mais il ne va pas assez loin.

Pour terminer, j'aimerais lire, pour la gouverne des députés de cette Chambre, un éditorial paru dans le Sun d'Edmonton sous la plume de Linda Slabodian qui écrit:

Le 16 juillet, à Edmonton, un homme de 36 ans a été condamné à sept ans et demi de prison pour avoir agressé sexuellement deux membres de sa famille à plusieurs reprises lorsqu'elles étaient petites.
Bien qu'ayant été trouvé coupable de nombreux délits sexuels il y a à peine trois mois, il a déjà recouvré sa liberté. Il n'est pas étonnant que l'une de ses victimes, âgée maintenant de 26 ans, se sente trahie par le système judiciaire.
«Je pensais que justice avait été faite,» dit la victime qui a témoigné que les agressions avaient débuté lorsqu'elle avait trois ou quatre ans, qu'elles avaient très vite consisté en rapports sexuels et qu'elles avaient duré un certain nombre d'années.
Et d'ajouter: Maintenant il est libre. «Pourquoi donc ai-je perdu mon temps à aller témoigner devant tous ces gens. C'était très dur, c'était embarrassant, humiliant de donner tous ces détails.»
Le tribunal a appris que l'accusé avait commencé à agresser sexuellement l'autre victime, la soeur de la première, qui a maintenant 24 ans, alors qu'elle avait environ quatre ans et qu'il avait aussi fini par avoir des rapports sexuels avec elle.
Reconnu coupable de ces crimes, il est maintenant accusé d'actes similaires sur d'autres jeunes membres de sa famille; son procès devrait commencer au milieu du mois.
Comment se peut-il qu'un individu condamné à une peine si longue pour avoir commis des crimes déplorables sur des enfants puisse être libéré si rapidement?
Il a demandé la permission d'interjeter appel. Il ne l'a pas encore obtenue, mais, le 27 septembre, il a été libéré sous caution.
Cette situation n'est pas inhabituelle dans notre système de justice.
L'agent de libération conditionnelle a téléphoné aux victimes le mardi pour les avertir que le détenu avait été libéré quelques jours auparavant.
«J'ai été complètement abasourdie» a affirmé la mère des victimes. «Il avait été trouvé coupable notamment de viol. Nous avons téléphoné au ministre de la Justice, Brian Evans. Les membres de son personnel ont tout simplement répondu que tel était le fonctionnement de notre système judiciaire.»
Voilà donc le système judiciaire que nous devons supporter au pays; nous le déplorons et nous prions le ministre de la Justice de faire quelque chose à ce sujet. C'est à cause de cette mentalité de coeurs sensibles qui règne toujours en cet endroit que les droits des criminels ont eu préséance sur ceux des deux innocentes victimes de viol. Cette situation existe à cause du ministre fédéral de la Justice, qu'un père pleurant sa fille victime de meurtre a appelé l'«ami des


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criminels». La population du pays a donc dénommé notre ministre de la Justice l'ami des criminels.

Le Parti réformiste propose une réforme en profondeur du système de justice. Notre principale priorité sera de veiller à ce que les principes directeurs de la justice au pays soient la protection de la société et les droits des victimes.

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement le discours de mon collègue sur cette importante mesure législative.

Je me demande si le député pourrait apporter quelques précisions sur une chose qui a été dite à la Chambre, hier, lorsque nous débattions du projet de loi C-55. Le député de Cap-Breton-The Sydneys parlait d'un incident malheureux dans une circonscription du Canada où un délinquant dangereux avait été libéré dans la collectivité. Ce n'est que lorsque la population a attiré l'attention des autorités sur le fait qu'elle ne voulait pas de cette personne chez elle que quelque chose a été fait et que les pressions ont abouti. Éventuellement, M. Oatway est volontairement retourné en prison, en Colombie-Britannique.

Si je comprends bien, le projet de loi C-55 ne peut pas s'appliquer rétroactivement aux délinquants dangereux, quels que soient leurs antécédents et qu'ils acceptent ou non d'entreprendre volontairement un traitement pendant qu'ils sont incarcérés. Si je comprends bien, donc, le projet de loi ne s'applique tout simplement pas dans ce cas.

(1235)

Le député d'en face voulait nous faire croire hier qu'il s'appliquerait aux délinquants actuellement en prison.

Cela inquiète beaucoup les Canadiens qui savent que nous avons beaucoup de personnes foncièrement mauvaises, qui sont actuellement incarcérées et qui achèvent de purger leur peine ou vont avoir droit à la libération conditionnelle. Ils vont par conséquent être libérés dans la société.

Est-ce que le député pourrait nous dire avec précision si le projet de loi C-55 va vraiment aider la société à cet égard? Je répète que, si je comprends bien, en vertu du système actuel le procureur de la Couronne doit demander la désignation de délinquant dangereux au moment du procès, alors que le projet de loi C-55 va donner un créneau de six mois après la condamnation, mais sans que cela s'applique aux personnes qui sont actuellement dans le système et sont là depuis plus de six mois après leur condamnation. Je voudrais savoir s'il est d'accord avec cela?

M. Ramsay: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de porter cette question à notre attention. Il n'y a pas de doute dans mon esprit que ce projet de loi, s'il est adopté sous sa forme actuelle, ne permettra pas à un procureur de revenir sur le cas des personnes déjà condamnées en ce qui concerne la disposition concernant les délinquants dangereux.

Cette disposition est là pour les cas qui viendront devant la justice après l'adoption du projet de loi. On a donc étendu à six mois le créneau, le délai pendant lequel la Couronne peut demander la désignation de délinquant dangereux.

Naturellement, ce que nous aimerions faire, c'est amender le projet de loi dans ce domaine pour que le statut de délinquant dangereux puisse être demandé n'importe quand pendant la période d'incarcération et, en particulier, à la fin de la peine d'un délinquant violent.

La raison pour cela, c'est simplement que si la demande de désignation comme délinquant dangereux n'a pas été acceptée ou n'a pas été faite, et si une personne qui a commis une infraction violente a purgé sa peine mais n'est pas réadaptée, s'il est fort probable qu'elle récidive, pourquoi devrions-nous la libérer?

Si nous élargissions l'application de cette disposition dont parle mon collègue, de sorte que le procureur puisse demander aux tribunaux l'application d'une peine pour une période indéterminée, la demande de désignation comme délinquant dangereux à la fin de la peine nous donnerait un outil pratique pour déterminer si un type comme Auger, le principal suspect du meurtre de Melanie Carpenter, devrait être libéré.

Dans ce cas, Auger a été libéré en vertu des dispositions sur la libération d'office. Les autorités s'inquiétaient du fait qu'il représentait un risque élevé pour la société. Mais, il n'y avait rien qu'on puisse faire contre ça, parce qu'il n'y avait rien dans la loi qui leur permettait d'agir.

Nous proposerons cet amendement au moment opportun, pour élargir ce créneau de six mois à toute la période d'incarcération de façon à avoir l'outil que je viens de décrire dans le système de justice criminelle.

(1240)

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de parler du projet de loi C-55.

Les efforts du ministre de la Justice, le champion des ingénieurs sociaux de ce côté-là de la Chambre, sont probablement un petit peu meilleurs que ce qu'ils ont été dans n'importe quelle mesure dont j'ai été saisi au cours des trois dernières années.

Cependant, comme d'habitude, il y a certaines lacunes qu'on doit corriger, certaines modifications qu'on doit apporter. On peut espérer que nous serons en mesure de le faire au comité.

Ce qui est regrettable dans tout cela et la crainte que j'ai, c'est que derrière les portes closes, au ministère de la Justice, on prend déjà des décisions au sujet des modifications qu'on est prêt à apporter à ce projet de loi. C'est ce qui arrive dans le cas de projets de loi revenant des comités.

Si le ministre de la Justice décide qu'on n'apportera aucun amendement à ce projet de loi et le dit aux membres de son caucus


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qui siègent à ce comité, c'est ce qui va se passer, peu importe le débat, peu importe ce que diront les témoins. J'ai déjà vu cela se produire et malheureusement, cela va se répéter, selon moi.

Ce projet de loi doit être amendé, mais les dictateurs de ce gouvernement ont déjà décidé qu'il n'en serait rien. On prend les décisions derrière des portes closes et ensuite, tous les membres du parti ministériel devront intervenir et voter comme le ministre de la Justice-l'ingénieur social-le leur dit. Cela semble être le processus démocratique qu'on suit, si on peut parler de démocratie dans ce cas-là. Le gouvernement ne semble pas comprendre ce qu'est un processus démocratique.

Ce serait merveilleux pour les Canadiens si la démocratie existait vraiment lorsqu'il s'agit de prendre des décisions au nom de la population canadienne. On pourrait remonter à quelques années, sous le régime Trudeau, alors que les gens disaient clairement ce qu'ils souhaitaient et ce qu'ils ne voulaient pas. Ils se faisaient entendre. Ils essayaient de participer au processus.

Je me rappelle lorsque le gouvernement a adopté le système métrique, ce qui a soulevé tout un tollé. Les gens n'en voulaient pas, mais cela n'a eu aucune importance. Les députés savent mieux que quiconque ce qui convient. Ainsi, on a imposé le système métrique aux Canadiens, qu'ils le veuillent ou non.

Je me rappelle des lois linguistiques qu'on a adoptées et des grands débats qui ont eu lieu dans tout le pays. Ces débats ont été inutiles. Le gouvernement a fait à sa tête.

Je me rappelle de la TPS. Les gens n'auraient pu s'opposer avec plus de vigueur à la TPS dans tout le pays, mais on leur a imposé cette taxe malgré tout, car les petits dictateurs qui siègent à la Chambre ont pris la décision, un point c'est tout.

C'est la façon dont les choses se sont passées sous le régime Trudeau, sous le régime Mulroney et au cours de la dernière législature. On prend les décisions à huis clos et le gouvernement agit comme bon lui semble, que les gens soient d'accord ou pas.

J'ai parlé à un certain nombre de députés de l'arrière-ban qui ont déclaré qu'ils aimeraient bien se prononcer contre un projet de loi, mais qu'ils n'osent pas le faire. Ils voudraient bien rejeter cette mesure, mais ils n'osent pas le faire, car au Parti libéral, on punit les députés qui ne font pas ce qu'on leur dit.

Une voix: Et Silye?

M. Thompson: Je comprends qu'il y a des gens qui siègent ici, qu'il y a beaucoup de bons membres de comités qui ont déjà siégé. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre! La présidence n'acceptera pas que le député qui a la parole ou les députés qui attendent de l'obtenir désignent des collègues par leur nom. Je vous demande de garder cela à l'esprit.

M. Thompson: Monsieur le Président, j'entends par là qu'il faut faire ce qu'on nous dit de faire quand on appartient à un parti dans cette enceinte. C'est dommage car il y a quantité de députés de ce côté-ci de la Chambre et de l'autre qui aimeraient bien représenter leurs électeurs même quand il s'agit du projet de loi C-55. Ils souhaiteraient connaître les opinions de leurs électeurs à l'égard des divers dossiers et pouvoir les exprimer dans le cadre d'un vote à la Chambre, mais ce n'est pas ainsi que ça se passe.

(1245)

Trois choses me préoccupent dans le projet de loi C-55. Il y a d'abord la surveillance électronique. Une disposition de la mesure législative prévoit qu'il suffit qu'on vous soupçonne pour que vous fassiez l'objet d'une surveillance. Il n'est pas nécessaire d'avoir été déclaré coupable ou de posséder un casier judiciaire, ni même d'avoir été accusé. La disposition stipule que si on pense que vous êtes une personne susceptible de commettre tel ou tel crime, vous risquez de faire l'objet d'une surveillance électronique.

Bien des gens estimeraient que c'est une bien étrange façon de faire de la part d'un pays comme le Canada. Certains iraient même jusqu'à dire qu'on se dirige tout droit vers un État policier quand on se met à surveiller par des moyens électroniques des gens ont été ni accusés ni reconnus coupables de rien. Je trouve cela assez étrange.

Je me demande si pareil processus pourrait même subir l'épreuve d'une contestation en vertu de la Charte. Il y a bien des choses dans ce pays qui, à mon avis, auraient dû faire l'objet d'une contestation en vertu de la Charte. Mais dans ce cas-ci, il s'agit, selon moi, d'une disposition franchement contestable. Il faudrait sûrement y apporter quelques modifications. Comment peut-on proclamer dans tout le pays qu'il n'y a pas de mal à procéder à une surveillance électronique pour la simple raison qu'on croit qu'une personne pourrait faire telle ou telle chose? Il y a là une grave lacune à laquelle il faut à tout prix remédier.

Mon deuxième sujet d'inquiétude a trait aux dispositions relatives aux autochtones. On se rendra dans une collectivité où un autochtone a été remis en liberté et on mettra tout en oeuvre pour assurer sa réintégration sociale. Je ne dirai pas que c'est mauvais en soi. Je ne trouve rien à redire à cela. Mais ce qui est bon pour une collectivité, pourquoi serait-ce moins bon pour une autre?

Pourquoi le gouvernement est-il toujours si empressé à désigner un groupe dans une mesure législative, à lui réserver un traitement de faveur sous prétexte que ces gens sont ceci ou cela? Si je proposais quelque chose de ce genre à la Chambre, je suis certain qu'on crierait au racisme, au parti pris et à tout ce qu'il est possible d'imaginer. Cela se produirait si j'osais choisir un groupe de personnes et proposer que nous prenions des mesures spéciales à leur endroit, mais pas pour le reste des Canadiens. Je trouve cela plutôt étrange. Mais si l'idée est bonne, et je pense qu'elle l'est, et si l'on juge qu'elle est bonne, pourquoi s'arrêter là? Pourquoi ne pas l'appliquer dans toutes les collectivités? Pourquoi ne pas passer par toute la liste et le faire? J'estime qu'il faut se pencher sur cette question, et j'espère qu'on le fera.


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Le troisième point, qui est probablement le pire de tous, me préoccupe. C'est la disposition voulant qu'un criminel puisse être déclaré délinquant dangereux jusqu'à six mois après la déclaration de culpabilité. On aura six mois après la déclaration de culpabilité pour demander qu'un criminel condamné soit déclaré délinquant dangereux. Si j'ai bien compris, au terme des six mois, s'il n'est pas déclaré délinquant dangereux, il ne sera plus jamais possible de le faire. À mon avis, c'est réellement stupide. Je ne peux pas trouver d'autre mot pour le dire.

Lorsque j'étais directeur d'école, les élèves auraient adoré qu'une règle dise: «Au cours d'une année scolaire de 10 mois, nous allons vous évaluer au sixième mois et, si vous avez été de bons élèves jusque-là, nous vous ferons passer au niveau supérieur.» Ils n'auraient pas à s'inquiéter des quatre mois suivants. Beaucoup de personnes qui sont en prison pensent sûrement la même chose.

Si les ministériels croient que ces condamnés ne savent pas comment jouer le jeu, comment éviter certaines choses, comment obtenir certaines faveurs, je leur propose de se rendre dans les prisons et de s'entretenir avec les gardiens, avec les agents chargés des cas et avec les travailleurs en première ligne pour se rendre compte à quel point ils font erreur.

(1250)

Quel mal y a-t-il à laisser la porte ouverte, afin de pouvoir les faire déclarer criminels dangereux n'importe quand? On doit pouvoir en faire la demande.

Si je remonte deux ou trois ans en arrière, je pense à la famille et aux amis de Melanie Carpenter, qui ne souffrirait probablement pas de l'absence de cette jeune femme aujourd'hui, si l'on avait disposé d'un mécanisme pour dire à l'homme qui l'a tuée:«Auger, on ne peut pas te libérer parce que tu es un criminel dangereux.»

Tous, psychologues, travailleurs de première ligne, gardiens, même le directeur de l'établissement, s'entendaient pour dire, dans des dossiers psychologiques ou ailleurs: «Cet homme ne devrait pas être remis en liberté. Il n'est pas prêt à réintégrer la société. Quelqu'un va en pâtir.» Mais personne ne pouvait rien y faire, tous avaient les mains liées parce qu'il avait fait son temps, comme on dit. Résultat, Melanie Carpenter n'est plus.

Quel mal y a-t-il donc à laisser la porte ouverte? S'il a été possible d'établir, six ou sept ans après avoir emprisonné Auger, l'homme qui allait tuer Melanie Carpenter, que celui-ci était effectivement un criminel dangereux susceptible de faire d'autres victimes, pourquoi ne pas avoir prévu la possibilité de le faire déclarer criminel dangereux? Pourquoi ne pas le faire dans ce projet de loi-ci?

Les ingénieurs sociaux d'en face ne cessent de nous répéter qu'ils accordent la priorité absolue à la protection de la population, laquelle passe par la prévention du crime. Qu'y a-t-il de mieux en fait de prévention que de garder une personne violente derrière des barreaux? Cela ne vaut rien cependant, si l'on n'a que six mois pour faire déclarer la personne en question criminel dangereux.

Qu'arrive-t-il si, une fois les six mois écoulés, après qu'il a été décidé de ne pas faire déclarer cette personne criminel dangereux, celle-ci change son fusil d'épaule, nous dit d'aller au diable avec nos programmes de réadaptation et refuse tout traitement, traitement que nous ne pouvons pas la forcer à subir de toute façon? Il faudrait pouvoir rouvrir le dossier de tout détenu qui refuse de se faire traiter et qui n'a jamais rien voulu faire pour se réadapter. Il pense être remis en liberté un jour. Faisons-le donc déclarer criminel dangereux.

Il serait préférable, à mon avis, de prévoir la possibilité de renverser la décision si, après un bon bout de temps, le détenu a prouvé qu'il ne méritait plus cette étiquette plutôt que de ne pas pouvoir le faire déclarer criminel dangereux, après un certain laps de temps, en raison du projet de loi C-55.

Si la protection et la prévention tiennent tellement à coeur au gouvernement, pourquoi ne pas choisir cette voie? Je suis sûr que les Canadiens seraient d'accord avec cette décision. Comme mon collègue de Calgary-Nord-Est le sait après avoir visité beaucoup de prisons, les gardiens, les premiers intervenants, les agents chargés des cas et les psychologues aimeraient tous pouvoir influencer les décideurs qui libèrent ces individus. C'est pourquoi nous croyons que le système de libération conditionnelle devrait être placé entre les mains des intervenants, de ceux qui savent ce qui en est.

Je reviens à ma comparaison lorsque j'étais directeur d'école. Il aurait été bien pour mon personnel et moi-même de nommer, parmi les membres de la collectivité-parce qu'ils ont été gentils avec nous ou parce qu'ils nous ont rendu service-, un comité ayant le pouvoir de décider si un élève devrait réussir ou échouer son année. À la fin de l'année scolaire, les élèves passeraient un à la fois devant le comité, qui déciderait de son sort. Je sais ce que les gens diraient. Ils diraient: «Comment peuvent-ils savoir? C'est vous qui les avez côtoyés toute l'année. C'est à vous de prendre la décision.»

Je crois que si quelqu'un côtoie un prisonnier pendant des années, cette personne devrait avoir la plus grande influence lorsqu'il s'agit de déterminer si un détenu est prêt à réintégrer la société. Cela me semble tout à fait sensé. Mais non. Il faut nommer des vieux amis à une commission qui, à mon avis, fait aujourd'hui du meilleur travail que par le passé. Dans le passé, c'était un échec colossal, simplement parce que les membres de cette commission prenaient des décisions sans savoir exactement ce qu'il fallait faire. Cela ne relève-t-il pas du bon sens?

(1255)

Imaginez. Chaque année au 30 juin, mon personnel enseignant et moi-même aurions pu rentrer chez nous et laisser une demi-douzaine de membres de la collectivité décider si les élèves devaient réussir ou échouer. Nous aurions pu leur remettre quelques documents et les laisser décider.

Il faut cesser d'esquiver la responsabilité de nos décisions. Il faut rendre des comptes. Qui est responsable de la mort de Melanie Carpenter? Le tueur? Oui. Mais il n'aurait jamais dû être remis en liberté.


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Le gouvernement connaît de nombreux cas. Il connaît les cas des Oatway, Auger et beaucoup d'autres. Pourquoi ne veut-il pas les empêcher de nuire? Pourquoi ne veut-il pas amender le projet de loi de manière qu'on puisse déclarer quelqu'un délinquant dangereux n'importe quand?

Les sondages menés auprès des Canadiens révèlent les uns après les autres que 70 p. 100 des répondants sont favorables au rétablissement de la peine de mort. Qu'y a-t-il de mal à ce que les députés écoutent les gens et leur donnent la possibilité d'exprimer leur sentiment à l'occasion d'un référendum? Donnons-nous l'occasion de le constater. Laissons la population s'exprimer. Mais pas les libéraux, qui disent avoir toujours raison.

Faisons savoir aux Darlene Boyd, aux Debbie Mahaffy, aux victimes et à ceux qui leur survivent partout au Canada que nous appuyons la mesure que les contribuables souhaitent nous voir adopter, à savoir l'abrogation de l'article 745.

Lorsqu'il a présenté le projet de loi C-55, le ministre était entouré des chefs de police. Il souriait, fort de leur appui, et c'est très bien. Je me réjouis qu'il bénéficie de leur appui. Mais où étaient-ils lors de la présentation du projet de loi C-45? Nous ne les avons pas vus. J'ai vu la plupart d'entre eux et Scott Newark, le dirigeant de l'Association canadienne des policiers, assis là-haut à la tribune, qui attendaient de nous voir voter en faveur de l'abolition de l'article 745. Quand ils ont vu les résultats du vote sur la mesure d'initiative parlementaire qui aurait permis de l'abroger, ils en ont été très heureux et ont eu l'impression que la voix de la population avait été entendue.

Soudain, l'homme-miracle, le champion des ingénieurs sociaux, est sorti d'un huis-clos en disant qu'il avait quelque chose de mieux à proposer. Le pire, c'est qu'il a réussi à en convaincre tous ses collègues qui étaient initialement favorables à l'abrogation de l'article 745. Ils se sont soudainement prononcés en faveur du projet de loi C-45. Je me demande s'ils l'appuyaient vraiment ou s'ils continuaient tout simplement de faire ce qu'on leur disait. Je suis persuadé que c'est plutôt le dernier cas.

Quant la mesure à l'étude sera renvoyée au comité et que des témoins comparaîtront devant lui, j'espère vraiment que le gouvernement fera réellement l'effort de permettre aux témoins, dont la plupart sont des Canadiens ordinaires, d'exprimer leur opinion et de contribuer aux décisions que l'on prendra. Ce serait un heureux changement. J'espère que cela se fera.

Le projet de loi accuse des lacunes. Il a besoin d'améliorations. Donnons aux Canadiens l'occasion de s'exprimer et améliorons-le.

(1300)

M. Rey Pagtakhan (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je veux dire quelques mots au sujet de l'allocution du député de Wild Rose. Je signale au député que, à la page 5 du projet de loi, le paragraphe 753(4) prévoit ceci: «S'il déclare que le délinquant est un délinquant dangereux, le tribunal lui impose [. . .] une peine de détention dans un pénitencier pour une période indéterminée.» Je souligne le mot «indéterminée». C'est une phase alarmante.

M. Hill (Prince George-Peace River): Oh, oh!

M. Pagtakhan: Le député devrait être poli et respecter le débat. Il devrait se tenir tranquille et observer le décorum de la Chambre.

Je tiens à assurer au député que le gouvernement est absolument déterminé à garantir la sécurité de la collectivité. Cela demeure une de ses priorités. Il n'y a aucun doute là-dessus. D'où le projet de loi visant à modifier le Code criminel et d'autres lois.

Le député a fait allusion à la surveillance électronique, que celle-ci pourrait être contestée en vertu de la Charte, etc. Je lui rappelle que l'article 1 de la Charte elle-même prévoit que les libertés peuvent être restreintes si un objectif supérieur, comme la protection de la société en général, s'impose. Ces limites aux libertés ne sont pas prises à la légère par les tribunaux.

Le député voudra peut-être s'enquérir de quelques précédents qui ont été établis par la Cour suprême du Canada. Le but à atteindre doit être louable. Nous convenons tous qu'il faut protéger les citoyens canadiens contre les délinquants dangereux. Ensuite, la surveillance électronique doit être raisonnablement efficace et moins restrictive.

M. Hanger: Comment cela va-t-il fonctionner?

M. Pagtakhan: Si le député ne sait pas comment cela va fonctionner, comment peut-il dire que cela ne marchera pas? Il devrait être courtois et écouter. Le député appartient à un parti qui prétend craindre la libération de délinquants présentant un risque élevé de récidive et pourtant, il conteste une contrainte judiciaire, la surveillance électronique, qui restreindra la liberté d'une façon qui ne sera probablement pas visible. Le Parti réformiste ne peut pas tout avoir.

Je crois que le Parti réformiste s'inquiète seulement après coup, après qu'un délit a été commis, après qu'un citoyen canadien a été gravement blessé, et qu'il n'est pas disposé à appuyer une disposition de l'amendement qui empêcherait, en fait, la commission d'un tel délit. Même en médecine, il vaut mieux prévenir que guérir.

Je demande au député de bien vouloir reconsidérer sa position pour la plus grande sécurité de tous les Canadiens.

M. Thompson: Monsieur le Président, le député ne regardait pas dans ma direction lorsqu'il a dit qu'on le chahutait et qu'on ne l'écoutait pas, et j'en suis heureux. J'écoutais attentivement.

Il est dommage que le député n'ait pas été présent pendant tout mon discours. Il est entré en tempêtant il y a quelques minutes et a voulu, ma foi, couvrir tous les aspects de la question. S'il avait écouté tout mon discours, il aurait compris que je n'ai rien dit contre la surveillance électronique.

Je me suis simplement demandé si une disposition législative qui permettra de surveiller électroniquement ceux qui n'ont pas été accusés ni trouvés coupables, mais qui sont seulement des suspects, sera jugée conforme à la Charte. Le député le pense certainement. Quant à moi, je n'en suis pas convaincu. Les concepteurs du projet


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de loi auraient dû être un peu plus prudents. Si le projet de loi doit être contesté, il le sera.

Bien des gens à qui j'ai parlé m'ont dit que, lorsqu'on commence à surveiller électroniquement ceux qui ne sont que des suspects, cela ressemble drôlement à un État policier. Ce n'est pas ce que nous voulons au Canada. Dans ce cas, nous devons discuter de l'idée et y renoncer si c'est ce sur quoi elle débouche.

(1305)

Une limite de six mois est prévue. Nous pouvons, dans les six mois, déclarer quelqu'un délinquant dangereux. Pourquoi se limiter à six mois? C'est tout ce que je demande. Pourquoi le projet de loi précise-t-il une limite de six mois? Pourquoi ne pas laisser cela ouvert? Qui nous dit que, dans 10 mois, ce n'est pas ce que le gouvernement aura souhaité faire, mais il sera alors trop tard? Pourquoi vouloir nous limiter? Laissons aux gens qui travaillent dans les établissements carcéraux le soin de décider. Laissons les gardiens et les spécialistes nous dire à quel moment un détenu est prêt à sortir et s'ils le considèrent dangereux. Si c'est le cas, pour l'amour de Dieu, ne le laissons pas sortir.

S'ils avaient agi ainsi pour Melanie Carpenter, que le député connaît bien, cette dernière serait toujours en vie. Le député sait pertinemment que l'assassin de cette fille a été déclaré comme étant un vrai danger le jour où il a été libéré. Il le sait et il est prêt à laisser ce projet de loi être adopté sans parler de tous les cas semblables à ceux de Melanie Carpenter. De quel côté sont ces gens-là, du côté des criminels? Ils protègent sans arrêt les droits des criminels. Qu'en est-il des droits des victimes?

Quand allons-nous arrêter d'adopter des lois écrites par les avocats pour les avocats et d'avoir des procès et des appels à répétition? Déclarons qu'un individu donné est un délinquant dangereux, lequel en appellera de la décision. Cela entraînera un autre procès. Il faut bien faire travailler nos travailleurs judiciaires. Favorisons l'essor du secteur judiciaire. Nous sommes d'avis qu'il faut mettre un peu de bon sens là-dedans. Cette question des six mois dont le député a parlé est ridicule.

Ce projet de loi est un pas dans la bonne direction. C'est la meilleure mesure que le ministre de la Justice ait présenté jusqu'à maintenant. C'est ce que je crois, mais le projet de loi doit être amélioré.

Si on permet au député et à ses collègues de faire leur travail, ce dont je doute fort, il se peut que nous finissions pas avoir un projet de loi qui aura du bon sens. Mais tel qu'il est actuellement libellé, ce n'est pas le cas.

M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir dans le débat sur le projet de loi C-55.

Il y a deux jours, je crois, lors de mon intervention sur le projet de loi C-45, j'ai parlé de l'inquiétude du député de Kingston et les Îles devant la façon dont il se faisait berner par les projets de loi présentés ici. Je crains qu'il se fasse à nouveau avoir par le projet de loi C-55.

Je sais qu'il a déclaré publiquement ne pas lire tous les projets de loi, mais il devrait lire celui-ci parce qu'il est sur le point de s'en faire mettre plein les yeux, mais pas comme l'ensemble des Canadiens, puisqu'il croit, lui, que c'est un bon projet de loi. Il se fera berner parce qu'il pense que nous sommes en train de devenir trop durs avec les criminels. Il a voté contre le projet de loi C-45 parce qu'il craignait que nous devenions trop durs. Je trouve cela renversant. Il est peut-être très déçu que le Parti réformiste ait une telle influence sur les députés ministériels que le gouvernement commence à faire avancer la réforme de la justice.

Faire preuve de fermeté envers les criminels donne des résultats. Je sais que le député de Kingston et les Îles a l'impression de se faire duper par de telles mesures, mais qu'il sache que la fermeté envers les criminels donne de véritables résultats.

L'autre jour, j'ai cité quelques statistiques qui, à mon avis, méritent d'être citées à nouveau dans le débat d'aujourd'hui. Ces chiffres démontrent bien que lorsque nous restons fermes face aux criminels, ils s'amendent. Mes chiffres prouvent aussi que nous ne devrions pas imposer de délai de six mois, comme le fait le projet de loi, pour déterminer si oui ou non quelqu'un est un délinquant dangereux.

Cette disposition sera invoquée. Les criminels se serviront du système. Ils étudieront les ouvrages de droit pendant qu'ils sont derrière les barreaux. Ils comprendront qu'il leur suffit de bien se conduire pendant seulement six mois et que, après ce délai, ils peuvent faire tout le mal qu'ils veulent puisqu'on ne pourra plus rien contre eux.

(1310)

Je voudrais présenter certaines statistiques qui prouvent l'efficacité de la stratégie consistant à prendre des mesures sévères pour lutter contre la criminalité. En 1989, le Bureau of Justice Statistics a publié des estimations du nombre de crimes qui ont été évités aux États-Unis pendant que les criminels étaient derrière les barreaux au lieu d'être dans les rues. Cette étude approfondie, qui s'est échelonnée sur une période de 16 ans, soit de 1973 à 1989, a été faite par Patrick Langan, analyste au Bureau for Justice Statistics.

Selon lui, entre 1973 et 1989, le fait d'incarcérer les criminels au lieu de les laisser en liberté a réduit le nombre de viols de 66 000, le nombre de vols qualifiés de 323 000, le nombre d'agressions de 380 000 et le nombre de cambriolages de 3,3 millions. La conclusion du rapport était que l'incarcération contribue clairement à réduire de façon importante le nombre de crimes de violence et leur coût. Cela ne tient même pas compte des blessures et des dommages matériels liés à ces crimes.

Une autre étude a été effectuée en 1995 à Princeton. Les criminologues John DiIulio et Anne Morrison Piehl ont rédigé un rapport dans lequel ils estimaient les coûts qu'on épargnait à la société en incarcérant les délinquants au lieu de les laisser en liberté. Leur étude portait sur 100 délinquants reconnus et était basée sur le taux d'infraction médian, c'est-à-dire que certains d'entre eux ont récidivé après avoir été libérés et d'autres n'ont pas récidivé. Leur étude a révélé qu'un délinquant en liberté coûtait en moyenne 4,6 millions de dollars à la société, alors qu'un délinquant incarcéré coûtait en


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moyenne 2,5 millions de dollars, soit presque deux fois moins. Comme je l'ai mentionné plus tôt, cela ne tient même pas compte de tous les dommages physiques, qui détruisent la vie des gens.

Je voudrais mentionner une autre étude publiée le 29 août 1995 dans le Investors Business Daily. Elle contient une pleine page sur la justice, intitulée: «Le crime paie-t-il? Pas si les criminels paient vraiment pour leurs crimes.» M. Barnes écrit qu'en 1994, un économiste de l'Université de l'Arizona, M. Michael Block et son collègue, le recherchiste Steven Twist, ont comparé les taux d'actes criminels contre des personnes aux taux d'emprisonnement entre 1960 et 1992, soit sur une période de 32 ans. Ils ont constaté que les dix États qui avaient les taux d'emprisonnement les plus élevés avaient enregistré une baisse de huit p. 100 du taux de crimes avec violence pendant la même période, tandis que les dix États ayant les taux d'emprisonnement les plus faibles avaient vu le nombre de crimes avec violence grimper de 51 p. 100 pendant cette même période.

Quelle preuve de plus faut-il pour comprendre que le fait de garder les criminels en prison permet d'éviter des dommages, de réaliser des économies de coûts et d'aider la société? Les députés d'en face qui interviennent constamment en faveur des droits des femmes et des moins favorisés de notre société seront sûrement intéressés par ces statistiques qui montrent que le maintien de criminels en prison a permis de prévenir 66 000 viols et 323 000 agressions.

Je n'ai pas de statistiques concernant le Canada, mais en toute logique la transposition chez nous de ces chiffres à raison d'au moins 10 p. 100 des statistiques américaines montre que nous pourrions économiser énormément d'argent, prévenir des sévices physiques considérables et des souffrances énormes si nous traitions les criminels avec plus de rigueur.

Comme mes collègues le disaient, certaines dispositions du projet de loi à l'étude représentent un progrès. Le Parti réformiste est très fier d'avoir réussi à amener le ministre de la Justice jusque là. Je souhaite réellement que le projet de loi vise également les récidivistes, qui ne font qu'utiliser le système judiciaire à leurs propres fins. Je vais donner quelques exemples qui illustrent ce dont je parle.

Dans son édition d'hier, le Sun de Vancouver publiait un article intitulé: «Un trafiquant de drogue autorisé à rester au Canada». L'article indiquait ce qui suit: «La Cour fédérale a différé l'exécution d'une ordonnance d'expulsion d'un Iranien reconnu coupable de trafic de cocaïne et d'agression. Abdul Nasser Taher Azar a obtenu un sursis mardi en attendant l'issue d'autres procédures judiciaires dont il fait l'objet. Taher Azar, qui s'oppose à sa déportation, fait valoir qu'il s'expose à la peine de mort s'il est renvoyé en Iran.»

(1315)

J'ai probablement la plus importante communauté iranienne du Canada dans ma circonscription. Les premiers mots formulés par ces gens qui revendiquent le statut de réfugié-généralement sans raison valable-quand ils appellent à mon bureau pour demander de l'aide sont: «Si l'on me renvoie en Iran, je me ferai tuer.» C'est leur toute première phrase.

Ce gars a donc prétendu qu'il se ferait tuer si on le renvoyait en Iran. Les responsables de l'immigration considèrent qu'il pose un risque pour la société canadienne. Que s'est-il passé? Le tribunal fédéral lui a permis de rester ici.

Il a une femme et trois enfants qui vivent à Victoria. Il a dit qu'il avait changé ses habitudes et qu'il deviendrait un membre productif de la société canadienne. Je ne sais pas combien de fois j'ai entendu de telles insanités, car c'en est.

Je pourrais parler à la Chambre tout l'après-midi, et citer l'un après l'autre tous les cas de personnes qui exploitent le système parce qu'elles savent comment en tirer les ficelles. Ces gens arrivent en revendiquant le statut de réfugié, même sans raison, puis soudain, ils se marient et ont des enfants. On sait ce que ça fait. Ensuite, ils peuvent se séparer. Ils passent alors des années en cour à tâcher de démêler les histoires de garde d'enfants, tandis qu'on leur donne de l'aide sociale pour leur permettre de rester ici, parce qu'ils continuent à dire qu'ils se feront exécuter s'ils sont renvoyés dans leur pays.

Qu'arrive-t-il en bout de ligne? Deux personnes de ma circonscription sont retournées en Iran de leur plein gré après avoir prétendu pendant quatre ans qu'on les tuerait là-bas. C'est la pire foutaise qu'on puisse entendre, et les cas comme ceux-là sont innombrables.

Il s'agit là de récidivistes comme on en voit souvent, et non de délinquants dangereux comme ceux dont il est question dans ce projet de loi. J'aimerais bien qu'il y ait quelque chose dans le projet de loi qui vise ces personnes qui ne cherchent qu'à exploiter notre système.

Il y a en ce moment même, dans ma circonscription, un cas typique de ceci, un cas au sujet duquel j'ai essayé d'obtenir que le ministre de l'Immigration fasse quelque chose. Il s'agit d'un homme arrivé au Canada à la fin des années 70, à l'époque où nos lois étaient un peu plus musclées et où nous traitions les criminels en tant que tels. Très vite, on s'est rendu compte que cet homme était un criminel. Et donc, il a été expulsé.

Car alors on expulsait vraiment les gens, pas comme aujourd'hui. Rien qu'à Vancouver, 1 300 personnes, dont 906 viennent de la Chine continentale, attendent d'être expulsées.

Qu'a fait cet homme? Après avoir été renvoyé en Iran, il a sauté sur la première occasion pour se précipiter à Paris. Comment a-t-il pu payer le voyage? Je n'en sais rien, il prétendait qu'il n'avait pas d'argent. Quelques années plus tard, il est allé à l'ambassade du Canada pour faire une nouvelle demande de visa. A-t-il dit aux autorités qu'il avait déjà été expulsé du Canada? Pas du tout. Peu de temps après, il était de retour ici.

Quatre années environ se sont écoulées. La police le filait parce qu'il fabriquait de faux passeports pour permettre à ses copains, criminels comme lui, de venir d'Iran. Un jour, une dame m'appelle pour me dire: «Tout le monde savait en Iran que c'était un criminel. Pourquoi l'avez-vous laisser entrer?»

J'ai contacté la police et découvert qu'elle était en train de mener une enquête à son sujet pour fabrication de faux passeports. Ils l'ont cueilli pour fabrication de faux passeports le jour de la cérémonie de remise des certificats de citoyenneté, alors qu'il devait recevoir le sien. Ce qui est intéressant dans cette histoire, c'est qu'il a demandé à quelqu'un de le remplacer à la cérémonie d'assermentation. Ce


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n'est donc pas lui qui a en fait été assermenté. Il est allé à la cérémonie uniquement à titre de spectateur. C'est incroyable ce que ces gens peuvent faire.

L'affaire de fabrication de faux passeport a traîné pendant un an et demi avant que le juge ne le condamne à trois mois d'assignation à résidence avec probation. J'aurais pensé que la fabrication de faux passeports est une atteinte directe à la citoyenneté. Il aide des criminels à venir au Canada en leur fabricant de faux passeports et de quoi écope-t-il? De trois mois d'assignation à résidence. C'est à sa résidence qu'il fabriquait des faux passeports. C'était une affaire à domicile. Il travaillait chez lui et ne payait ni impôts ni TPS.

Finalement, une autre ordonnance d'expulsion ayant été émise à son endroit, il a fait appel, en vertu de la Charte des droits. Les députés ne le croiront sans doute pas, mais lorsqu'il avait été déporté pour la première fois, dans les années 70, il n'y avait pas d'interprète. Il prétend donc que ses droits n'avaient pas été respectés.

Maintenant son cas traîne devant les tribunaux. La première audience est prévue pour le mois de mars. Je suis prêt à parier que ça va prendre huit ans de plus avant qu'on arrive finalement à s'en débarrasser. Et pendant ce temps, nous lui versons des prestations d'aide sociale et il se promène dans des voitures toutes neuves. Avec quoi les achète-t-il? J'aimerais bien qu'on enquête sur ses sources de revenu.

Ce genre de situations est typique de ce qui se passe sous ce gouvernement permissif dénué d'épine dorsale. Il ne voit pas les problèmes. Il n'arrête pas de nous parler de l'enfance malheureuse de ces pauvres gens, ajoutant que le mal n'existe pas en ce bas monde. Le seul mal est que de temps à autre nous incarcérons des gens. Il estime qu'on ne devrait pas les mettre en prison. On devrait les laisser se promener en toute liberté, leur offrir des séances de counselling de temps à autre et ils finiront par changer. Et leur faire porter un bracelet, comme dit mon collègue.

(1320)

Je me suis un peu éloigné de mon sujet, le projet de loi C-55, mais je crois que les députés ont compris ce que je voulais dire. Le problème est beaucoup plus vaste que le projet de loi. Le système est pourri.

Aujourd'hui, durant la période consacrée aux affaires courantes, j'ai présenté à la Chambre un nouveau projet de loi d'initiative parlementaire qui sera choisi lors du tirage au sort, je l'espère. Nous savons que le choix des projets de loi ressemble un peu à la loterie. On essaie actuellement d'obtenir que certains de ces projets fassent l'objet d'un vote. Ce serait magnifique s'ils pouvaient tous être mis aux voix. Au fait, j'ai déclaré à la commission que tous ces projets de loi devraient faire l'objet d'un vote. J'aimerais que ce soit le cas pour le mien car il porte justement sur ce problème. Si la Chambre l'adoptait, il permettrait aux juges provinciaux d'expulser les criminels au lieu de leur attribuer une peine; ainsi, nous pourrions nous débarrasser de ces personnes immédiatement. Dès que ces faux réfugiés commettent un crime, nous devons les expulser du pays.

La ministre de l'Immigration a affirmé que ces gens devraient purger leur peine ici afin qu'ils paient pour leur crime chez nous, au Canada. Cependant, ce ne sont là que des balivernes. En réalité, ils profitent d'une libération conditionnelle puisque celle-ci fait partie intégrante de la peine. Ils circulent en toute liberté au sein de la société et les responsables de l'immigration ne peuvent même pas les expulser.

Dès que la fin de leur période de libération conditionnelle approche et que les agents de l'immigration les attendent, menottes en mains, prêts à partir, ils défoncent la vitrine du bijoutier le plus près ou ils assènent un bon coup de poing à quelqu'un pour que leur cause soit reprise depuis le début. Ils retournent en prison pour quelque temps en attendant une autre période de probation.

Je pourrais citer des douzaines de cas semblables dans ma seule circonscription. Lorsqu'on songe qu'il y a 1 300 cas de la sorte dans la région de Vancouver, il est aisé de deviner combien il y en a dans chaque circonscription. Vu que certains groupes ont davantage tendance à profiter ainsi du système, on peut facilement comprendre l'ampleur du problème.

Ces gens demandent probablement tous un drapeau gratuit. Je ne serais pas du tout surpris si ces milliers de drapeaux gratuits dans la circonscription de Fraser-Est avaient été tous commandés par ces personnes, de sorte qu'elles puissent se promener en arborant leur drapeau comme si elles étaient Canadiennes.

La seule chose qui m'a gêné pendant la période des questions aujourd'hui c'est lorsque la vice-première ministre s'est levée et a déclaré au député de Fraser Valley-Est qu'il avait utilisé l'argent des contribuables pour commander certains de ces drapeaux gratuits par télécopieur. C'est malheureux qu'il n'ait pas sorti un billet de 10 $ de sa poche et qu'il n'ait pas dit: «Monsieur le Président, je vais payer pour le télécopieur si elle paie pour les drapeaux.» Cela n'aurait été que justice.

Mais je digresse une fois de plus, cette question est vraiment reliée à tout le problème des questions judiciaires au Canada. Je pense que je vais en terminer là parce que je voudrais que mes collègues aient la possibilité de parler également. Toutefois, je voudrais dire quelques mots un peu plus tendres à l'égard des députés d'en face, parce qu'ils n'aiment pas qu'on leur parle sur un ton trop brutal.

Il y a, de fait, quelques bonnes dispositions dans ce projet de loi. Elles ne vont pas assez loin mais, malgré tout, je ne pense pas que nous allons bloquer l'adoption du projet de loi. Nous allons travailler avec le gouvernement, dans l'espoir de l'améliorer un peu. J'espère que les députés de l'autre côté de la Chambre, qui ne peuvent pas nier qu'ils reçoivent des appels téléphoniques et des lettres de leurs électeurs leur demandant de se montrer plus fermes à l'égard des criminels, appuieront quelques-uns des amendements à ce projet de loi pour le renforcer un peu.

Mme Maria Minna (secrétaire parlementaire de la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais simplement dire au député ceci que ce n'est pas parce qu'il s'est permis d'exagérer, de manipuler les données, de

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tout mélanger et de diffamer des communautés, qu'il est dans le vrai.

Que le député se soit permis de diffamer globalement des communautés entières d'immigrants et de réfugiés, voilà qui est tout à fait irresponsable.

(1325)

Une voix: Il n'a jamais dit ça.

Mme Minna: Il a fait une allusion en ce sens et ce n'est pas acceptable à mes yeux. Vous devez. . .

Le président suppléant (M. Kilger): Chers collègues, je vous demanderais pour le peu de temps qu'il reste à la période de questions et observations de faire en sorte qu'on puisse entendre à la fois la question et la réponse.

Mme Minna: Pendant qu'il évoquait un cas particulier, plusieurs députés ont fait des allusions relativement à des communautés. Le député croit-il vraiment que les réfugiés et les immigrants de ce pays sont tous, ou dans leur immense majorité, des criminels?

M. White (Vancouver-Nord): Monsieur le Président, au cas où la députée ne l'ait pas remarqué, je parle bizarrement, et c'est parce que je suis de Nouvelle-Zélande. Étant moi-même un immigrant, je suis bien placé pour parler d'immigration.

Je sais ce que c'est que de faire des démarches pour venir au Canada. Il nous a fallu, à mon épouse et à moi, deux ans pour obtenir ce privilège. Nous avons présenté une demande à trois reprises. Nous avions de bons antécédents, pas de casier judiciaire, l'argent nécessaire pour acheter une maison et des emplois en perspective. Je ne vois donc rien de mal à ce qu'on mette la barre haute en imposant des normes élevées.

Je ne vais pas non plus m'excuser d'avoir dit la vérité. Par contre, je n'ai jamais dit à la Chambre que les immigrants ou les réfugiés sont tous des criminels. Il n'en est rien, mais si nous ne reconnaissons pas l'existence d'un problème, nous récolterons ce que nous avons semé.

Je rappelle à la députée qu'il y a trois ans, lorsque les réformistes de la région de Vancouver ont affirmé qu'un problème se posait avec les familles dites «cosmiques» qui ne payaient pas leurs impôts et laissaient leur famille ici, on nous a traités de racistes. Aujourd'hui, le député de Richmond reconnaît qu'il y a un problème avec les familles «cosmiques».

Si la députée lisait les journaux de Vancouver de la semaine dernière, elle verrait que c'est un grave problème qui touche les agents immobiliers, les comptables et toute la collectivité, parce que nous n'en avons pas parlé et nous n'avons pas réglé ce problème au départ.

Il y a une leçon à tirer de tout cela. Nous ferions mieux de commencer à parler à la Chambre des sujets que nos vis-à-vis ne veulent pas aborder, car autrement, la situation ne va cesser d'empirer. Nos collègues d'en face ne veulent pas se pencher sur ces questions. Ils se cachent derrière le drapeau et prétendent faire preuve de compassion et de tolérance, mais ils devraient laisser de côté cette idéologie un instant et voir ce qui se produit vraiment dans la réalité.

Personne ne s'oppose à une bonne politique d'immigration pour le Canada, mais ayons au moins des normes acceptables. Il faut faire en sorte que ceux qui entrent au Canada veuillent devenir des Canadiens, au lieu de songer à voler les Canadiens, comme certains le font.

Si la députée se rendait à l'aéroport Pearson comme mon collègue de Wild Rose l'a fait, elle s'apercevrait que de faux revendicateurs du statut de réfugié arrivent tous les jours, par avion, à raison de 100 par jour, et que les agents d'immigration sont forcés de les laisser passer si quelqu'un est là pour les accueillir et se porter garant d'eux. Monsieur le Président, avez-vous déjà entendu parler d'un réfugié qui était attendu par quelqu'un à l'aéroport?

L'ennui, c'est que les libéraux refusent d'examiner les faits. Ils restent là à nous accuser de tous les maux, mais s'ils prenaient seulement la peine d'examiner les faits, ils constateraient qu'il y a d'importants problèmes à résoudre. Je pense en fait que la démarche prévue dans le projet de loi C-55 indique qu'ils commencent enfin à saisir le message. Ils savent que les Canadiens veulent qu'ils s'attaquent vraiment à la criminalité.

Le président suppléant (M. Kilger): Avant de passer aux travaux de 13 h 30, je voudrais donner un avis préalable à la Chambre. En prévision de la prochaine fois que ce projet de loi sera étudié à la Chambre, je précise que les cinq heures de débat permettant des interventions de 20 minutes et des observations et des questions de 10 minutes étant expirées, les députés pourront faire des interventions de 10 minutes pendant le reste du débat.

Comme il est 13 h 30, la Chambre passe maintenant aux initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

______________________________________________


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INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LA LOI SUR LA CONCURRENCE

M. Dan McTeague (Ontario, Lib.) propose: Que le projet de loi C-267, Loi modifiant la Loi sur la concurrence (prix de l'essence), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Monsieur le Président, nous sommes saisis du projet de loi à un moment où la Chambre des communes semble divisée sur bien des questions. Celle du prix de l'essence et les préoccupations des consommateurs et de nos électeurs à ce sujet nous unit tous. Elle nous unit dans la reconnaissance commune qu'il y a quelque chose qui ne va manifestement pas dans le prix de l'essence.

Le projet de loi essaie de donner quelques réponses très simples aux consommateurs canadiens et à ceux qui sont préoccupés par le prix élevé de l'essence. Cela peut se faire par la voie de l'information.

Nous approchons rapidement du XXIe siècle, où l'information occupera une place encore plus importante. Très peu de consommateurs ou de députés peuvent affirmer qu'il existe une alternative à


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l'essence. Nous devons savoir pourquoi il y a des augmentations de prix, pourquoi elles surviennent les fins de semaine, et pourquoi l'industrie du pétrole refuse toute explication.

Précisons d'abord que le projet de loi C-267 modifie la Loi sur la concurrence en obligeant les sociétés pétrolières à donner un préavis de 30 jours de toute augmentation de plus de 1 p. 100 du prix de l'essence. Cela prend six mois aux augmentations de prix pour se rendre du puits de pétrole aux pompes à essence où les automobilistes font le plein. En tant que députés, nous ne pouvons pas expliquer pourquoi les prix changent si rapidement. Ce que les consommateurs veulent par-dessous tout, c'est une certaine prévisibilité.

Le projet de loi ne réglemente aucune industrie. J'insiste sur ce point, parce que je sens que certains ont des doutes. Certains pourraient sympathiser avec l'industrie, qui nous accuse de vouloir lui transmettre le fardeau. C'est peut-être un des arguments du ministère.

Je pense qu'une société socialement responsable qui veut garder ses clients devrait d'abord et avant tout s'assurer que les consommateurs reçoivent toute l'information pertinente. C'est une simple question de bonnes relations publiques et cela nous permettrait aussi de rendre compte à nos électeurs.

J'ai quelques arguments à soulever. Le budget présenté par le ministre des Finances il y a un an et demi prévoyait une augmentation de la taxe d'accise de 1,5 p. 100. Des deux côtés de la Chambre, les députés peuvent utiliser cette hausse à des fins positives ou négatives, mais l'argent est versé au Trésor et sert notamment à payer les hôpitaux, à réduire la dette ou à prendre toutes sortes de mesures qui favorisent l'économie, l'intérêt et le bien-être de tous les Canadiens.

Au moment où la hausse de 1,5c. a été appliquée, les pétrolières ont pris des libertés et imposé une autre hausse de 4,5c. En février, mars, avril, mai et juin 1995, les Canadiens ont donc payé 6c. le litre de plus. Est-ce que c'était justifié? Ce n'est pas à moi à poser la question. Si je le faisais, je suppose que certains diraient que c'est à la limite des règlements. Je suis d'avis que les consommateurs aimeraient bien entendre l'explication des pétrolières une fois pour toutes.

J'ai cherché à percer le mystère qui entoure l'établissement des prix du pétrole au Canada. Quand on enlève les nombreuses pelures de l'oignon que représente ce dossier, si je peux m'exprimer ainsi, on constate qu'il y a un aspect sinistre dans la façon dont les prix de l'essence sont établis au Canada. Pour la première fois depuis longtemps, de nombreux habitants des régions de Toronto et Montréal ainsi que de certaines parties de l'ouest du Canada ont constaté que le prix de l'essence fluctue de façon uniforme. Il n'y a pratiquement plus ce type de concurrence qui existait d'un poste d'essence à un autre. Pourquoi?

Des députés s'étonneront peut-être d'apprendre que, depuis 15 ans, un certain nombre des raffineries importantes ont disparu au Canada. La prise de contrôle de BP par Petrofina, l'effondrement de Texaco et la prise de contrôle de Gulf Canada, tout cela veut dire que l'offre se retrouve vraiment entre les mains de très peu de compagnies.

(1335)

En même temps, l'offre en ce qui concerne l'essence ne donnerait pas lieu à une grande controverse, s'il ne semblait pas y avoir ce nouveau phénomène qu'on appelle l'intégration verticale du marché. Les raffineurs de pétrole brut ne sont pas seulement des distributeurs, mais, sous bien des aspects, ce sont maintenant des détaillants. C'est le lien continu d'un bout à l'autre de la chaîne qui donne l'impression qu'il y a un monopole pétrolier.

Si l'offre, la distribution et la vente au détail sont contrôlées par une compagnie, il est logique de croire qu'à un moment donné, les prix sont contrôlés. Par conséquent, ce n'est par accident que les prix uniformes et élevés se maintiennent au Canada.

Les Canadiens exhortent le Parlement à trouver une solution. À défaut d'autres remèdes, le Parlement agit comme s'il était les yeux, les oreilles et la conscience des consommateurs.

[Français]

J'ai une certaine difficulté à admettre le fait que certains parmi nous pensent qu'on n'a pas d'outil pour assurer la concurrence dans l'industrie pétrolière.

[Traduction]

Nous avons la possibilité avec ce projet de loi de fournir non seulement des réponses aux consommateurs, mais de leur permettre de se rendre compte, en l'absence de tout autre choix, de l'impossibilité d'utiliser d'autres modes de transport. Les consommateurs ne peuvent pas tout à coup mettre du jus de citron dans leurs réservoirs d'essence. Chaque Canadien a intérêt à savoir pourquoi le prix de l'essence est ce qu'il est.

Lorsqu'on a parlé des prix qui sont élevés partout et de la question de savoir pourquoi ils atteignent des niveaux sans précédent, on a regardé ce qui se passe dans les Maritimes depuis quelques mois. Au Québec, le prix a en fait diminué.

Cet exemple devrait inquiéter tous les députés de la Chambre, parce qu'il montre très clairement qu'il existe une possibilité réelle de fixation de prix abusifs. Les grossistes qui avaient un intérêt dans ce qui se passe au niveau du détail ont voulu contrôler l'offre au cours de l'été dernier et ont amorcé un processus visant à faire baisser les prix au niveau du détaillant, de façon à se débarrasser des propriétaires indépendants qui, depuis toujours, ont permis d'assurer un équilibre en matière de concurrence, au sein de l'industrie.

Pour avoir discuté avec un grand nombre de ces fournisseurs indépendants, de Sudbury à Windsor et du Cap-Breton jusqu'à la région du Saguenay, au Québec, je sais qu'il s'agit d'une situation très grave qui mérite au moins un examen superficiel de la part des députés.


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Si nous ne croyons pas que la notion de marché libre s'applique à l'industrie du pétrole, où cela s'arrêtera-t-il? Allons-nous dire que cette situation peut aussi avoir cours dans l'industrie pharmaceutique? Allons-nous dire qu'il est bien de ne pas avoir de concurrence et de laisser une poignée de personnes, ou un cartel, fixer les prix comme bon lui semble?

Il importe de comprendre la situation du propriétaire indépendant de station-service, de celui qui se lève le matin et qui sait que s'il ne travaille 18 heures par jour il ne va pas toucher un chèque à la fin de la semaine. Le problème c'est que ce chèque a été sciemment et froidement diminué. Comment une personne qui achète son essence d'une compagnie de pétrole peut-elle joindre les deux bouts lorsque son concurrent est une station-service qui appartient à son grossiste?

Si cette situation ne soulève pas de préoccupations relativement aux abus découlant de cette domination dans l'industrie pétrolière, je ne sais pas ce qui le fera. Les Canadiens peuvent trouver un léger réconfort dans le fait qu'ils peuvent, de temps à autre, obtenir de l'essence moins chère, comme on l'a vu dans les Maritimes.

Voyons par exemple ce qui s'est passé à Grand Falls, à Terre-Neuve, qui compte onze stations d'essence. De ces onze stations, dix étaient exploitées par les grandes sociétés pétrolières. Il n'y avait qu'un seul détaillant indépendant, et l'essence se vendait à environ 48c. le litre il y a un an et demi. Une fois cet indépendant éliminé, le prix a grimpé à 68,9c. Si les consommateurs tiennent vraiment à avoir du pétrole et de l'essence à des prix dictés par la concurrence, ils feraient mieux de comprendre que cela est possible grâce à l'existence de détaillants d'essence indépendants qui sont prêts à transmettre aux consommateurs toutes les économies possibles et qui étaient l'une des principales raisons qui faisaient que nous avions de l'essence à des prix raisonnables et déterminés concurrentiellement.

(1340)

J'ai été un peu étonné d'apprendre que certains députés croient encore que la libre concurrence ou les marchés libres existent vraiment dans le secteur pétrolier. Je ferai remarquer qu'à l'échelle nationale, il n'existe vraiment que trois grands joueurs: Petro Canada, Imperial Oil et Shell. À l'échelle régionale, il existe des joueurs de moindre calibre, mais néanmoins importants: Irving dans les Maritimes, Ultramar au Québec, Sunoco en Ontario et Mohawk Oil dans l'Ouest.

Il existe entre les raffineries des ententes permettant de s'approvisionner mutuellement. Ce serait se tromper que de croire qu'il n'existe pas d'ententes entre les raffineries, mieux connues dans le secteur sous l'appellation d'ententes d'approvisionnement réciproque en produit pétrolier. Pourtant, le Bureau de la politique de concurrence semble incapable de se rendre compte que beaucoup de ces raffineries sont réellement en mesure non seulement de convenir entre elles du prix du produit, mais aussi et surtout de convenir de la quantité qu'elles livreront.

L'industrie ressort des arguments usés à la corde. Malheureusement, certains députés tombent dans le panneau et croient par exemple que le fuel domestique peut coûter plus cher parce que nous avons eu un long hiver froid. Ils devraient se demander si cela ne veut pas dire que le prix, en toute logique, baissera si nous avons un hiver doux.

Il semble y avoir beaucoup de confusion au sujet du prix que le consommateur devrait payer pour les produits pétroliers de consommation courante. Tous les députés et tous leurs électeurs sont concernés, il n'y a pas de mystère ici.

Aujourd'hui, le prix au comptant du pétrole utilisé pour produire l'essence est d'environ 24 $ le baril. On tire environ 200 litres d'essence d'un baril. Nous croyons savoir que tout cela ne sert pas à la production de l'essence bon marché des voitures. Une partie sert à la fabrication de polystyrène et de produits plus coûteux.

Prenons le pire des scénarios. Disons que l'industrie pétrolière paie au plus 12c. le litre pour se procurer du pétrole. Selon l'association canadienne des producteurs pétroliers, il en coûte 5,2c. pour raffiner le produit, le vendre et le distribuer. Cela couvre toutes les dépenses de l'industrie et porte le prix à 17,2c. le litre. Ajoutons à cela les taxes de vente fédérale et provinciale, et nous savons où va cet argent-même qu'on discute beaucoup à la Chambre des communes des fins auxquelles devrait servir cet argent-et cela fait 29c. à ajouter aux 17c. Le tout revient donc à 45c. ou 46c. le litre.

Accordons un profit de 2,2c. au garagiste indépendant ou au propriétaire et cela fait au plus 47c. ou 48c. le litre. Aujourd'hui, lorsque le litre d'essence se vend 57c. ou 58c. le litre à Ottawa, 61c. dans les maritimes ou encore 58c. à Toronto, qui encaisse les profits? Je veux qu'on m'explique l'écart entre les chiffres.

Je n'ai rien contre les gens qui font des profits. Au contraire, je m'en réjouis. Toutefois, ils ont la responsabilité et le devoir de ne pas profiter de leur position de force, de leur oligopole ou de leur cartel pour rouler les électeurs, pour exploiter les consommateurs et pour perpétuer cette escroquerie.

Aussi difficile que cela soit à accepter ou à avaler, le secteur pétrolier est très manifestement à la veille de ne laisser absolument aucun choix aux consommateurs en ce qui concerne le prix de l'essence-comme certains de ses membres ont espéré le faire dans d'autres pays, notamment aux États-Unis.

(1345)

J'ai reçu des milliers de lettres depuis que j'ai présenté ce projet de loi à la Chambre des communes. Celui-ci a été présenté en tant que projet de loi C-361 au cours de la dernière session et il a été présenté à nouveau dernièrement comme projet de loi C-267. Nonobstant le fait qu'il ne peut pas faire l'objet d'un vote, je dirai à la Chambre qu'il constitue néanmoins un important pas en avant.

Nous devrions décider aujourd'hui d'essayer au moins d'obtenir des réponses du secteur pétrolier. Beaucoup de députés présument que la question en est une de fixation des prix, mais ils se trompent. Ils manquent le coche. Les députés qui pensent que le problème dont les consommateurs devraient se préoccuper aujourd'hui est celui de la fixation des prix par les sociétés pétrolières font complè-


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tement fausse route, car il existe déjà un cartel au niveau des fournisseurs. Il n'est pas nécessaire de fixer les prix quand il y a si peu de joueurs en cause.

J'exhorte les députés à réfléchir, à moderniser leur pensée et à se mettre au diapason de la réalité telle qu'elle se présente actuellement dans l'industrie pétrolière canadienne.

[Français]

Je dois dire aussi pour mes collègues députés, surtout ceux de la province de Québec, que je suis très inquiet, même déçu du comportement des industries pétrolières, de la manière dont elles ont traité les détaillants indépendants.

Les jeunes qui essaient d'avoir un emploi ont la capacité de donner une concurrence aux consommateurs. C'est quelque chose que nous retrouvons, non seulement dans les petits villages que j'ai visités cet été, mais aussi dans les autres régions du pays, comme je l'ai expliqué tout à l'heure.

[Traduction]

Dans les Maritimes, nous avons entendu des gens dire: «C'est merveilleux, voyez les prix! Ils baissent à 29c. le litre.» Je viens de lire, dans le magazine Maclean's, un article du chroniqueur économique D'Arcy Jenish. Il dit avoir rencontré plusieurs propriétaires de stations-service des Maritimes et un de la Nouvelle-Écosse qui lui ont dit que, durant 28 des 38 premières semaines de 1996, le prix au détail a été inférieur au prix d'achat dans le gros. C'est de l'établissement de prix abusifs et cela mène droit au désastre.

Dans mon esprit, il est très clair qu'il nous faut une sorte de mécanisme qui va au-delà des beaux discours que nous entendons à propos du Bureau de la politique de la concurrence et qui protégera réellement ceux qui défendent les intérêts des Canadiens et des consommateurs.

Si nous ne croyons pas aujourd'hui que le prix de 68c. le litre sera une réalité dans les années à venir, je vous invite à considérer ce qui est arrivé à Gander, à Terre-Neuve, ou à Toronto, l'an dernier. De Burlington à Clarington, région qui comprend quelque 4,5 millions d'habitants, il reste si peu d'indépendants que ceux-ci n'ont aucune influence sur la fixation des prix.

Les indépendants qui restent tentent simplement de survivre. Ils ne sont pas en position d'offrir des prix concurrentiels aux consommateurs. Ils font l'objet d'une concurrence déloyale de la part des pétrolières, qui peuvent recourir à des armes très brutales comme le retrait des conditions de crédit. Les pétrolières ont en fait retiré aux indépendants le crédit de 45 jours qu'elles leur avaient accordé auparavant. Elles leur ont enlevé la compensation fondée sur la température. Je pourrais continuer encore longtemps à parler des méthodes que les pétrolières ont utilisées pour ruiner les indépendants. Le fait qu'elles ne les compensent plus pour les pertes par évaporation en est une. Elles ont demandé des seuils plus élevés.

Pensons, par exemple, au cas où un indépendant vend 5 000 litres par jour, mais où la pétrolière juge cela insuffisant parce que ses stations de vente au détail en vendent le double. La pétrolière fait savoir à l'indépendant qu'il a intérêt à doubler ses ventes la semaine suivante, même si le prix ne baisse pas, à défaut de quoi son approvisionnement sera interrompu. C'est injuste.

J'en appelle au Parlement de revenir sur la décision de ne pas faire de ce projet de loi une mesure pouvant faire l'objet d'un vote en demandant le consentement unanime de la Chambre à l'égard de la motion suivante. Je propose:

Que le projet de loi C-267, Loi modifiant la Loi sur la concurrence (prix de l'essence), soit désigné comme une affaire qui fait l'objet d'un vote.
Je présente cette motion dans l'intérêt de tous les consommateurs.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre a entendu le libellé de la motion du député d'Ontario, qui visait à faire de ce projet de loi une mesure pouvant faire l'objet d'un vote.

Y a-t-il consentement unanime à ce que ce projet de loi soit considéré comme une mesure pouvant faire l'objet d'un vote?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Le consentement unanime n'est pas accordé.

(1350)

[Français]

M. René Canuel (Matapédia-Matane, BQ): Monsieur le Président, je remercie le député d'en face qui présente le projet de loi C-267, parce que quand les députés libéraux et le gouvernement présentent quelque chose de valable, soyez assurés que nous les appuyons.

C'est vrai qu'il y a un problème énorme et, à ce moment-là, il faut être capable de défendre les plus faibles contre les multinationales. Il faut à tout prix une réglementation du prix de l'essence. J'aurais cru quand même que les grandes pétrolières permettraient une concurrence loyale avec les détaillants d'essence indépendants. Je m'aperçois depuis quelques mois, et surtout depuis l'été, que cette concurrence est tout à fait déloyale.

Que veulent les grandes pétrolières? Elles veulent tout simplement faire disparaître les détaillants d'essence indépendants, et ça, pour le Québec et les Maritimes, c'est tragique. Mais vous avez vu, depuis quelques mois, elles veulent à tout prix la fermeture des petits détaillants, possiblement les faire disparaître. Elles en ont déjà fait trop disparaître, et elles voudraient les faire disparaître presque totalement.

Face à cela, bien sûr que les consommateurs peuvent penser que c'est très bien. Si je vais à la pompe et que je paie le litre d'essence 20c. de moins, à ce moment-là, je peux dire que j'en profite. Cependant, on sait très bien que ces multinationales, dans quelques mois, dans quelques années, comme elles veulent avoir le contrôle,


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vont étouffer le consommateur comme elles ont étouffé les détaillants indépendants.

Vous comprenez qu'il faut un contrôle quelque part. Cette tentative de mettre les détaillants indépendants hors combat jette à nouveau une lumière crue sur cet harmonieux concert d'intérêts, de pratiques et de prix convergents qui rassemble les grandes pétrolières: Ultramar, Shell, Petro-Canada et Esso, l'Impériale au Québec. Mais ils sont à la fois des raffineurs, des grossistes et des détaillants. Ces grandes pétrolières ont chambardé les règles tacites d'un marché, où les grandes pétrolières acceptent de bonne grâce la concurrence des petits indépendants.

Autrefois, la libre concurrence était correcte. Les indépendants pouvaient, à l'occasion, vendre l'essence un peu moins cher et donnaient des services supérieurs également. Quand les grandes pétrolières ont vu cela, elles se sont demandé ce qu'il fallait faire et elles ont dit: «Allons-y, faisons-les disparaître.» Cet été, Ultramar a été particulièrement féroce dans la concurrence au niveau des prix.

Les détaillants, comme ils perdaient énormément d'argent, ne pouvaient pas suffire et certains qui avaient des hypothèques assez élevées ont dû fermer leurs portes. J'appelle ça dégueulasse, j'appelle ça une concurrence déloyale, j'appelle ça être un monstre, quand on veut faire disparaître le petit pour prendre le contrôle.

Depuis des années, vous le savez, les détaillants d'essence, les indépendants, comme on les appelle habituellement, sont passés de 20, 25 p. 100 et ont augmenté leur part du marché et pour nous, particulièrement dans le monde rural, dans mon comté de Matapédia-Matane, c'était excellent, parce que ce n'est pas uniquement pour eux une vente d'essence, c'est tous les services à côté que ces gens peuvent nous rendre, n'en déplaise à ceux qui croient que le capitalisme et le libre-marché coexistent nécessairement. Quant à moi, je crois que ça n'existe pas du tout.

(1355)

Il faut en effet que le gouvernement protège les indépendants. Seule la présence d'indépendants efficaces garantit aux consommateurs québécois d'obtenir des prix de produits pétroliers justes et équitables. Si on les fait disparaître, si les grandes pétrolières prennent le contrôle, à ce moment-là, gare aux consommateurs. On mettra les prix qu'on voudra et on n'aura plus qu'à s'incliner ou à marcher.

L'enjeu est encore pire pour les indépendants. Il s'agit de 300 entreprises québécoises oeuvrant dans la distribution d'essence et d'huile à chauffage; c'est 2 423 entreprises oeuvrant majoritairement en région dans le commerce de détail auprès de leurs communautés respectives. Dans une paroisse, quand il n'y a plus d'essence, quand il n'y a plus d'école, la paroisse est aussi bien de fermer.

De plus, il s'agit de 10 000 emplois semi spécialisés ou non spécialisés. Cela veut dire que beaucoup de jeunes qui ne sont pas scolarisés, ou pas tellement scolarisés, peuvent trouver un emploi, et un bon emploi. Ce sont 200 millions de dollars de masse salariale, dont 82 p. 100 peut être attribué aux régions du Québec situées à l'extérieur de Montréal et à l'extérieur de Québec. Cela représente à peu près 164 millions, une présence commerciale complémentaire significative: dépanneurs, ateliers mécaniques et autres répartis sur l'ensemble du territoire québécois.

La protection des consommateurs est menacée par la disparition de la saine concurrence et des hausses de prix en découleront. L'objectif des multinationales-je vais le répéter-est non seulement de récupérer la part du marché perdue depuis une dizaine d'années aux mains des indépendants plus efficaces qu'eux, on le sait les indépendants sont beaucoup plus efficaces parce qu'ils rendent de nombreux services, mais c'est surtout d'éliminer ceux-ci afin d'avoir un maximum d'emprises sur le marché du détail.

La situation, particulièrement au Québec: le développement économique du Québec depuis plus d'une décennie passe notamment par le développement des régions, l'entrepreneurship local. Lorsqu'on supprime les indépendants, à ce moment-là, c'est extrêmement dur pour les petites paroisses en particulier. Les 2 423 entrepreneurs indépendants distributeurs d'essence et d'huile à chauffage au Québec en témoignent par leurs performances et leur efficacité. Je dis qu'à ce moment-là, il faut que les indépendants puissent vivre et bien vivre, même s'ils ne deviennent pas forcément des multinationales, je dirais bravo, dans un sens ils peuvent quand même vivre et bien vivre.

En effet, en plus d'accroître leur part du marché de 15 p. 100 à31 p. 100 de 1984 à 1993, ceux-ci ont vu leur nombre moyen de litres vendus par station augmenter également de 31 p. 100 de 1991 à 1995, affirmant d'autant leur présence économique dans le monde rural.

Cependant, après cinq ans de guerre des prix et de résistance face aux multinationales qui, injustement, contrôlent les marges bénéficiaires de tous les acteurs de ce secteur d'activité au Québec, les entreprises indépendantes du Québec se retrouvent économiquement vulnérables. Elles sont impuissantes face à l'affaissement de la juste valeur marchande de leur entreprise.

Pendant ce temps, malheureusement, les multinationales compensent les pertes de cette guerre planifiée des prix de détail par l'amélioration de leur marge bénéficiaire consolidée, grâce à leurs activités intégrées du raffinage et de la pétrochimie qui compensent largement leurs pertes sur les ventes au détail découlant de la guerre de l'essence.

(1400)

Dans leur cas, ils peuvent se reprendre avec leurs raffineries, puisqu'ils ne sont pas simplement des détaillants. Comme ils ont plusieurs cartes dans leur jeu, ils peuvent s'en sortir beaucoup mieux que d'autres.

Cette situation leur permet de fixer des prix, des prix élevés, sachant très bien que, même s'ils subissent des pertes pendant un an ou deux, ils se reprendront pendant je ne sais combien d'années, des dizaines d'années, pour finalement s'enrichir de plus en plus.

Les indépendants acceptent volontiers la concurrence parce qu'ils savent qu'ils sont capables d'offrir des services supplémentaires. Il le savent très bien et ils l'ont prouvé en prenant une part du marché très respectable. Ils augmentaient justement leur part du marché et c'est ce qui fait mal aux multinationales qui, en retour, se sont donné comme objectif de faire disparaître des indépendants parce que ceux-ci, étant en mesure de rendre plus de services que les autres, pouvaient quand même, avec des bénéfices respectables, évidemment moindres, être capables de survivre.

5133

Je dis que c'est vrai qu'il faut que le gouvernement puisse présenter une réglementation qui permettra que tout le monde puisse vivre dans une libre concurrence, mais une concurrence loyale et non pas la concurrence déloyale qu'on a vue depuis un certain temps.

[Traduction]

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat. Mais puisqu'il est pratiquement inutile de discuter de la question si nous ne pouvons pas prendre une décision, je demande à la Chambre de réfléchir à nouveau et de déclarer qu'il y aura un vote sur le projet de loi C-267. Je demande s'il y a consentement unanime.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre a entendu la proposition du député d'Elk Island. Plaît-il à la Chambre de consentir à ce qu'il y ait un vote sur le projet de loi?

Des voix: D'accord.

Le président suppléant (M. Kilger): Il y a consentement unanime.

M. Epp: Monsieur le Président, c'est une bonne nouvelle. Je tiens à féliciter le député de la circonscription d'Ontario d'avoir présenté ce projet de loi. J'imagine que le prix de l'essence ne touche pas uniquement ceux qui possèdent une automobile, mais qu'ils touche tout le monde. La qualité de vie d'un très grand nombre de Canadiens est en effet liée à la consommation d'essence puisque les véhicules qui servent à livrer les produits et les services fonctionnent à l'essence.

Partout au Canada, les gens sont atterrés par le prix de l'essence. L'autre jour seulement, je disais à quelqu'un que, si le gouvernement ne nous avait pas imposé le système métrique, je doute fort que nous nous réjouirions du prix de l'essence, qui atteint environ 2,40 $ le gallon. Je pense que la plupart d'entre nous trouvent cela excessif. Nous nous opposerions à ce prix élevé et, pourtant, c'est à peu près ce que nous payons maintenant. En fait, je crois que l'essence coûte environ 80 p. 100 de plus le gallon au Canada qu'aux États-Unis. Évidemment, il faut faire des rajustements pour tenir compte des différences dans la valeur du dollar et la taille du gallon, mais il y a quand même une différence énorme dans le prix de l'essence.

C'est honteux que l'essence coûte si cher. Compte tenu du climat très rigoureux que nous avons dans la partie nord de l'hémisphère nord, nous dépendons vraiment de l'énergie venant des carburants. Nous vivons aussi dans un pays où la population est clairsemée, et il n'est pas facile de se déplacer sans véhicule.

Je veux partager une expérience personnelle qui, je l'espère, saura intéresser les députés. Il y a quelque 26 ans, nous sommes allés nous installer à la campagne, à environ 20 milles de la ville la plus proche.

(1405)

Lorsque j'habitais la ville, j'allais travailler à bicyclette. Je parcourais 6,8 milles chaque jour. J'ai toujours aimé utiliser ma bicyclette. Je ne causais pas de pollution et j'économisais de l'argent. Croyez-le ou non, il ne me fallait pas plus de temps pour traverser environ le tiers de la ville d'Edmonton à bicyclette que si j'avais utilisé le soi-disant système de transport en commun rapide d'Edmonton. J'étais très en forme à l'époque. Les députés pensent probablement que je suis encore en forme, mais je ne le suis simplement pas autant qu'avant. La bicyclette était un très bon exercice et quelque chose d'agréable à faire.

Lorsque nous avons déménagé à la campagne, je n'ai utilisé ma bicyclette qu'une fois parce que les distances étaient trop grandes. Deux heures pour aller et deux heures pour revenir, je n'avais tout simplement pas le temps. Je regrette aujourd'hui de ne pas l'avoir fait parce que cela m'aurait gardé en excellente forme. Malheureusement, j'ai acheté une motocyclette Honda et il ne faut pas beaucoup d'énergie pour changer les vitesses sur ce genre d'engin.

Une des raisons pour lesquelles j'utilisais cette motocyclette pour me rendre au travail, après avoir déménagé à la campagne, tenait justement au prix de l'essence. À l'époque, les automobiles consommaient plus d'énergie qu'aujourd'hui. Ma petite moto me permettait de parcourir 100 milles au gallon. En utilisant ma moto plutôt que ma grosse voiture, j'ai pu économiser beaucoup d'argent, même si l'essence ne coûtait alors que 20c. ou 25c. le litre.

L'essence se vend maintenant entre 50c. et 65c. le litre au Canada. L'autre jour en Saskatchewan, j'ai été consterné de constater que les prix atteignaient 62c. ou 63c. le litre en certains endroits. C'est un prix excessif.

Nous devons admettre que cela ralentit notre économie. Nous devons admettre aussi que nos entreprises et nos particuliers ont plus de mal à faire face à la concurrence mondiale à cause du prix élevé du carburant.

Même si le député d'Ontario a de bonnes intentions lorsqu'il propose de limiter le pouvoir des sociétés pétrolières quant à la fluctuation du prix de l'essence, je dois revenir sur un thème cher à mon coeur: d'où vient le prix de l'essence? Quels éléments composent le prix total de l'essence? Que nous le voulions ou non, nous devons avouer qu'une très grande partie du prix de l'essence provient des taxes.

J'ai préparé un petit tableau, il y a un peu plus d'un an; les prix ont changé quelque peu, mais les proportions n'ont pas varié sensiblement depuis lors. Le prix de l'essence à la pompe se répartit comme suit: environ 30 p. 100 pour le coût du produit, près de 25 p. 100 pour les taxes fédérales, près de 25 p. 100 pour les taxes provinciales et de 20 à 25 p. 100 pour le raffinage, la mise en marché et les profits; à cela s'ajoute la marge de profit des détaillants.

Je ne sais pas si les députés se rendent compte que la taxe provinciale est d'environ 25 p. 100, bien qu'elle varie d'une province à l'autre. Au Québec elle est d'environ 36 p. 100. La taxe fédérale varie d'une province à l'autre également, puisqu'elle représente un pourcentage du prix total, mais elle est d'environ 25 p. 100 également.

Je proteste contre l'utilisation par ce gouvernement, comme les précédents, d'une taxe sur l'essence comme source de recettes. Je ne pense pas que taxer les carburants, un produit qui est nécessaire pour que nous soyons compétitifs à l'échelle internationale dans les secteurs industriel, agricole ou touristique, soit justifié ou valable. Nous ne devrions pas taxer le carburant pour en tirer des recettes. Cela ne devrait pas être un produit spécialement visé pour obtenir des recettes supplémentaires.

5134

Environ quatre milliards par année se trouvent extraits de l'économie et versés dans les coffres du gouvernement par le biais de la taxe fédérale de vente sur l'essence.

(1410)

Je dois ajouter une autre chose. Dans le cas de l'essence, le gouvernement fédéral fait une chose particulièrement curieuse. Il ajoute une taxe sur une taxe. Après que la taxe de vente fédérale est ajoutée à l'essence, ce qui amène le prix dans la plupart des provinces à environ 50c. il ajoute la TPS. Il facture la TPS sur le prix total ce qui signifie qu'il impose la TPS sur la taxe de vente fédérale. Il est inconcevable que l'on force les Canadiens à payer des taxes sur les taxes qu'ils paient avec l'argent qu'ils ont gagné et sur lequel ils ont déjà payé l'impôt sur le revenu.

À cet égard, j'ai fait quelques calculs. Suivez-moi bien. Je gagne 3,33 $. Mon taux marginal d'imposition, quand j'étais instructeur au collège comme quand je suis député, est d'environ 50 p. 100, mais j'utilise un taux de 40 p. 100. Sur mes gains qui, à l'origine, sont de 3,33 $, je paie 40 p. 100 ou 1,33 $ d'impôt sur le revenu fédéral et provincial. Il me reste alors 2 $. Je vais à la station-service acheter de l'essence. Les taxes de vente fédérale et provinciale totalisent environ 50 p. 100 du prix à la pompe, ce qui signifie que, sur un achat de 2 $ d'essence, je paie encore 1 $ de taxe.

J'ai donc 1 $ d'essence dans mon réservoir. C'est la valeur d'essence que j'ai, car j'ai dû payer 1 $ de taxe et 1,33 $ d'impôt sur le revenu pour un achat de 2 $ d'essence à la station-service. Au total, j'ai gagné 3,33 $ pour pouvoir acheter 1 $ d'essence. J'ai payé 2,33 $ de taxe et d'impôt. C'est inacceptable. C'est trop élevé.

Le projet de loi du député part d'une bonne intention, mais il est encore plus important que nous, parlementaires, limitions les dépenses gouvernementales, de manière à pouvoir être moins exigeants envers les contribuables et à réduire les taxes et les impôts. Je commencerais par réduire la taxe sur l'essence. Quel élan extraordinaire cela donnerait à notre économie! Quelle mesure créatrice d'emplois ce serait! Quel soulagement s'ensuivrait pour les familles canadiennes qui trouvent la situation difficile.

Je suis heureux d'avoir pu participer au débat sur ce projet de loi.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Le président suppléant (M. Kilger): Je déclare la motion adoptée. Par conséquent, le projet de loi est renvoyé au Comité permanent de l'industrie.

(La motion est adoptée, et le projet de loi est lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.)

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il est 14 h 15, la Chambre s'ajourne à 11 heures, lundi prochain, conformément à l'article 24 du Règlement.

(La séance est levée à 14 h 15.)