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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 23 avril 2002




¿ 0935
V         Le président (M. Andy Scott (Fredericton, Lib.))
V         M. Howard Barbaree (directeur des services cliniques, Programme de droit et de santé mentale, Centre de toxicomanie et de santé mentale; professeur, Département de psychiatrie, Université de Toronto)

¿ 0940

¿ 0945
V         Maître Gail Czukar (avocate générale, Centre de toxicomanie et de santé mentale)
V         Le président
V         M. David Griffin (directeur exécutif, Association canadienne des policiers et policières)

¿ 0950

¿ 0955

À 1000
V         Le président
V         M. Hill (Prince George--Peace River)
V         M. Howard Barbaree
V         M. Jay Hill
V         M. Howard Barbaree
V         M. Jay Hill
V         M. Howard Barbaree
V         M. Jay Hill

À 1005
V         M. Howard Barbaree
V         Le président
V         M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ)
V         M. Howard Barbaree

À 1010
V         Mme Gail Czukar
V         Le président
V         M. Robert Lanctôt
V         M. Howard Barbaree

À 1015
V         Le président
V         M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.)
V         M. Howard Barbaree

À 1020
V         M. John McKay
V         M. Howard Barbaree
V         M. John McKay
V         M. Howard Barbaree
V         M. John McKay
V          Me Gail Czukar
V         M. John McKay
V          Me Gail Czukar
V         M. Howard Barbaree

À 1025
V         Le président
V         M. David Griffin
V         Le président
V         M. Jay Hill
V         M. David Griffin
V         M. Howard Barbaree

À 1030
V         M. Jay Hill
V         M. Howard Barbaree
V         M. Jay Hill
V         M. Howard Barbaree
V         

À 1035
V         M. Jay Hill
V         M. Howard Barbaree
V         Le président
V         M. John McKay

À 1040
V         Le président
V          Me Gail Czukar
V         
V         Le président
V         M. Robert Lanctôt

À 1045
V         Le président
V         M. Howard Barbaree

À 1050
V         Le président
V         M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC)
V         M. Howard Barbaree
V         M. Peter MacKay
V         M. Howard Barbaree
V         M. David Griffin
V         M. Peter MacKay

À 1055
V          Me Gail Czukar
V         Le président
V         M. David Griffin
V         Le président
V         M. Jay Hill
V         Le président
V         M. David Griffin

Á 1100
V         Le président
V         M. Howard Barbaree
V         Le président










CANADA

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 079 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 23 avril 2002

[Enregistrement électronique]

¿  +(0935)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Andy Scott (Fredericton, Lib.)): Je déclare ouverte le 79e séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Conformément à l'ordre de renvoi de la Chambre du 26 février 2002, le comité reprend un examen prévu dans la loi des dispositions du Code criminel sur les troubles mentaux.

    Pour nous aider dans nos travaux, nous accueillons aujourd'hui des représentants du Centre de toxicomanie et de santé mentale et de l'Association canadienne des policiers et policières. Ce sont nos premiers témoins de 9 h 30 à 11 h. Nous accueillons donc du Centre de toxicomanie et de santé mentale, Mme Gail Czukar, avocate générale, et M. Howard Barbaree, professeur et directeur des Services cliniques des programmes de droit et de santé mentale, Département de psychiatrie, Université de Toronto. De l'Association canadienne des policiers et policières, nous accueillons M. David Griffin, directeur exécutif.

    Je pense que vous savez comment nous procédons. Chaque groupe dispose d'environ dix minutes. Je vous ferai signe quand votre temps sera presque écoulé, ainsi les membres du comité auront l'occasion de discuter avec vous.

    Cela dit, puisque sur la liste, le Centre de toxicomanie et de santé apparaît en première place, je vais inviter les représentants de cet organisme à nous faire leur exposé.

+-

    M. Howard Barbaree (directeur des services cliniques, Programme de droit et de santé mentale, Centre de toxicomanie et de santé mentale; professeur, Département de psychiatrie, Université de Toronto): Merci beaucoup.

    J'aimerais commencer par vous remercier de l'occasion qui m'est donnée de faire un exposé devant vous aujourd'hui et de vous présenter un mémoire écrit. Il y a en effet un mémoire que vous recevrez lorsqu'il aura été traduit.

    Permettez-moi de vous parler un peu des antécédents du centre. Le Centre de toxicomanie et de santé mentale a été créé en 1998 par la fusion de la Fondation de la recherche sur la toxicomanie, de l'Institut psychiatrique Clarke, de l'Institut Donwood et du Centre de santé mentale de la rue Queen. Le Centre de toxicomanie et de santé mentale est le plus grand établissement de ce genre au Canada.

    Le programme Loi et santé mentale fait partie du Centre de toxicomanie et de santé mentale. Ce programme est mené auprès des accusés présentant des troubles mentaux en application du Code criminel. À l'heure actuelle, nous disposons de 139 lits et en tout temps, nous avons entre 60 et 70 malades externes. Le plus souvent, nous traitons environ 225 délinquants souffrant de troubles mentaux.

    Situé au centre-ville de Toronto, le centre dessert la zone urbaine la plus importante et la plus peuplée du pays et notre population cliente est l'une des plus diversifiées. Environ 50 p. 100 de notre clientèle est né sur ce continent, ce qui vous donne une idée de la diversité. Cet environnement urbain se caractérise également par un pourcentage plus élevé que la moyenne d'itinérance et de pauvreté.

    Nous travaillons avec un plus grand nombre de tribunaux que la plupart des installations semblables. Dans notre sphère, nous desservons environ sept tribunaux: deux dans le centre-ville et cinq dans les régions suburbaines.

    Vu les contraintes qui nous sont imposées par le temps aujourd'hui et le fait que je dois parler un peu lentement pour les interprètes, je vais m'en tenir à ce que j'estime être la question la plus importante dont il faille tenir compte dans cet examen du Code criminel dans l'optique d'éventuelles modifications à y apporter.

    À l'heure actuelle, le tribunal peut ordonner qu'un accusé soit envoyé dans un établissement désigné comme patient en remplissant un formulaire 48. Les ordonnances d'évaluation n'entraînent aucun consentement de la part de l'hôpital alors que les autres formulaires, par exemple le formulaire 49, une ordonnance de traitement, supposent que le tribunal a obtenu le consentement de l'hôpital traitant avant d'y envoyer l'accusé. Ce n'est pas le cas des ordonnances d'évaluation.

    Nous avons une longue tradition de collaboration avec les tribunaux de Toronto, fonctionnant dans la cordialité, ce qui comprend une liste d'attente que nous tenons. Dans le cas de cette liste d'attente, le tribunal date l'ordonnance en fonction du jour où nous nous engageons à recevoir le patient. Ce système de liste d'attente fonctionne très bien depuis de nombreuses années, mais récemment, les tribunaux deviennent impatients à cause du système de liste d'attente et ils ont commencé à délivrer ce que l'on appelle les «ordonnances sur-le-champ» d'hospitalisation.

¿  +-(0940)  

    Voici comment fonctionne une ordonnance d'évaluation sur-le-champ. Le jour où la personne comparaît au tribunal, si la question de trouble mental est soulevée, le juge peut en fait ordonner que cette personne soit conduite sur-le-champ à l'hôpital, lequel est tenu de faire une place à l'accusé.

    Je le répète, par le passé, le système de la liste d'attente fonctionnait bien. Toutefois, au cours du dernier trimestre de 2001-2002, 35 p. 100 des admissions se faisaient en vertu d'ordonnance du tribunal pour que l'évaluation se fasse sur-le-champ. En fait, il est arrivé une fois le mois dernier que nous commencions la journée avec la section d'évaluation remplie à craquer et que nous devions plus tard dans la journée accueillir six détenus faisant l'objet d'une telle ordonnance. Et si ce n'était le conflit de travail qui a empêché le transport des accusés depuis le tribunal, je ne sais pas comment nous aurions fait pour trouver de la place à ces six personnes.

    Nos services internes tournent à pleine capacité. Lorsque les patients arrivent à l'improviste nous sommes obligés de les admettre dans des salles d'isolement, celles que nous utilisons pour gérer le risque. Il y a une limite au nombre de patients que nous pouvons gérer en toute sécurité dans les services internes. En dernier ressort, ces ordonnances d'évaluation sur-le-champ menacent la sécurité du personnel et des patients de nos services.

    Dans notre mémoire, nous demandons qu'on modifie le Code criminel de façon à prévoir le consentement de l'hôpital lorsqu'un tribunal délivre une ordonnance d'évaluation. L'autre disposition du Code criminel qui permet au tribunal de rendre une ordonnance d'évaluation sans prévoir d'exigence de consentement est l'article 672.29, en vertu duquel un tribunal peut nous demander de soigner un accusé jusqu'à la date de son procès.

    Dans les cas où l'hôpital ne peut pas contrôler l'admission aux lits disponibles et où les tribunaux l'obligent à accueillir des personnes, si celles-ci risquent d'être violentes et dangereuses et si les ressources de l'hôpital sont restreintes, les hôpitaux ne sont pas en mesure de gérer le risque qu'on leur demande de gérer.

    Ces derniers mois, nous nous sommes trouvés dans des situations où les risques auxquels sont exposés nos services ont augmenté au-delà d'un niveau raisonnable et supportable. Nous craignons que, à moins de modifier les dispositions pertinentes du Code criminel, ou que notre situation ne change, nous ne soyons obligés de faire des choses qui présentent pour nous des risques inacceptables.

    Sur ce, je vais donner la parole à Gail Czukar, qui a d'autres observations à faire.

¿  +-(0945)  

+-

    Maître Gail Czukar (avocate générale, Centre de toxicomanie et de santé mentale): Merci, Howard.

    Je vais simplement aborder quelques autres points de notre mémoire, et nous pourrons ensuite approfondir certains aspects lors de la discussion qui suivra.

    Nous avons trois autres observations à faire. Je tiens à dire simplement que les préparatifs d'un mémoire comme celui-ci exigent la participation d'un certain nombre de gens au Centre de toxicomanie et de santé mentale. Nous essayons de consulter nos intervenants, à l'interne comme à l'externe. Cela englobe nos patients et nos groupes de consommateurs clients.

    Le Conseil de responsabilisation a témoigné devant votre comité jeudi dernier et je crois savoir que la séance a été quelque peu animée; toutefois, ses responsables ont témoigné et ont fait valoir leurs positions propres. Avant de préparer notre mémoire, nous les avons consultés ainsi que les patients hospitalisés. Par conséquent, nos opinions sont assez restreintes, car nous n'avons pas eu suffisamment de temps pour approfondir les choses comme nous l'aurions souhaité. Nous vous soumettons donc quelques idées. Si des propositions de modifications sont formulées, nous espérons avoir le temps d'élaborer une réponse stratégique approfondie à ce sujet.

    Nous aimerions dire maintenant que pour ce qui est des dispositions relatives aux périodes de détention d'une durée maximale pour les accusés dangereux atteints de troubles mentaux, nous ne voulons pas qu'elles soient mises en vigueur car elles nous paraissent inutiles. À notre avis, si l'on adopte dans la loi des périodes de détention d'une durée maximale, ces dispositions visant les accusés dangereux atteints de troubles mentaux devraient être proclamées en même temps. C'est une condition sine qua non. À notre avis, la décision Winko permet de mieux gérer les contrevenants atteints de troubles mentaux que la disposition relative à la détermination d'une période de détention d'une durée maximale et les questions visant la sécurité publique.

    S'agissant des pouvoirs desa commissions d'examen, nous n'avons pas eu l'occasion de prendre connaissance de leurs mémoires et de leur demandes. Nous sommes toutefois en faveur de pouvoir relâcher des accusés jugés inaptes à long terme. On devrait pouvoir rendre des ordonnances de mise en liberté absolue pour les personnes qui présentent peu de risque et ont peu de besoin. La commission est mieux placée pour juger. Elle est à même d'évaluer si une personne présente une menace constante pour la sécurité du public. Si elle pense que ce n'est pas le cas, elle devrait pouvoir libérer cette personne.

    Il existe des services mieux adaptés aux besoins dans la collectivité. Bon nombre de ces personnes ont des problèmes de développement et divers services communautaires seraient mieux placés pour répondre à leurs besoins qu'un hôpital.

    Enfin, en ce qui concerne les ordonnances d'évaluation avant détermination rendues par les commissions d'examen, je ne ferais que répéter ce qu'a dit Howard. En fait, si la commission d'examen détient ce pouvoir, nous craignons qu'on utilise nos ressources à cette fin. Notre centre a pour pratique d'effectuer les évaluations dont la commission a besoin avant de prendre une décision. Il ne s'agit donc pas du tout de savoir si la commission a besoin de cette information pour rendre la décision la meilleure, car c'est indubitable. Nous le faisons couramment.

    Nous craignons, en ce qui a trait aux personnes qui sont dans la collectivité, que nos ressources ne soient mises à rude épreuve pour faire ce genre d'évaluation avant que la commission ne puisse rendre sa décision. Cela nous préoccupe vivement.

    Voilà l'essentiel de nos remarques. J'ajoute que, à notre avis, votre mandat est restreint pour ce qui est de recommander des modifications au Code criminel. Nous en sommes conscients.

    La solution aux problèmes liés au système de santé mentale et de médecine légale est systémique et doit mettre en cause toutes les principales parties prenantes: le système judiciaire, tant au niveau fédéral que provincial, les juges, les commissions d'examen, la Couronne, le régime de santé, le ministère de la Santé, en tant que source de financement et décideur et nous, en tant que fournisseurs de services, au même titre que les organismes communautaires, le système correctionnel, qui doit garder les gens en prison lorsqu'ils ne peuvent pas être hospitalisés. Nous recommandons que les accusés ne soient hospitalisés qu'aux fins d'évaluation de traitement, et pas simplement comme méthode de détention. Il faut donc que ces personnes restent dans le système carcéral. Bien sûr, le système qui concerne les personnes atteintes de troubles du développement doit également participer à la solution.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur Griffin.

+-

    M. David Griffin (directeur exécutif, Association canadienne des policiers et policières): Merci, monsieur le président.

    En tant que porte-parole national de ces 275 associations-membres regroupant quelques 29 000 adhérents du personnel policier de première ligne au Canada, l'Association canadienne des policiers et des policières se réjouit d'avoir l'occasion de comparaître devant le comité parlementaire dans le cadre de son examen des dispositions du Code criminel du Canada relatives aux troubles mentaux.

    L'APC s'est tout particulièrement intéressée à ce dossier, en sa qualité d'intervenante dans le pourvoi la Reine contre LePage sur lequel la Cour suprême du Canada s'est prononcée lors des pourvois Winko, Onlowski et Bese. Comme le comité l'a entendu, cet arrêt de la Cour suprême du Canada maintenait les dispositions actuelles du Code criminel du Canada, rejetant les arguments voulant que ces dispositions violent les droits individuels à la liberté, la sécurité de la personne et l'égalité, garantis par les articles 7 et 15 de la Charte canadienne des droits et libertés.  

    C'est dans cet esprit que nous comparaissons aujourd'hui. Notre premier objectif est d'exhorter le comité à recommander l'abrogation des dispositions non promulguées du Code criminel, en plus d'offrir d'autres propositions concernant l'application efficace de cette partie du Code.

    Comme le comité le sait sans doute, l'arrêt Winko de la Cour suprême du Canada a considérablement servi de guide quant à l'application de dispositions actuelles en vigueur, et nous maintenons respectueusement qu'il appuie abondamment et irréfutablement notre affirmation que les dispositions non promulguées ne sont pas nécessaires et qu'elles ne sont pas dans l'intérêt public, ce qui importe encore davantage. Dans son arrêt Winko, la Cour suprême confirme que «toute restriction de la liberté d'un accusé non responsable criminellement lui est infligée pour protéger la société et pour lui permettre de se faire traiter, et non à des fins pénales».

    Un régime distinct a été établi en vertu de la partie XX.1 visant les personnes inaptes à subir un procès ou non responsables criminellement en raison de troubles mentaux. En vertu de ce régime, tout accusé non responsable criminellement est soumis à cette procédure spéciale où l'accent est mis sur la réalisation des deux objectifs que sont la protection du public et le traitement juste et approprié du contrevenant atteint de troubles mentaux. La cour a énoncé une interprétation claire des obligations imposées à tout tribunal ou à toute commission d'examen chargé de déterminer l'issue de la comparution d'un accusé non responsable criminellement. La cour nota que le tribunal ou la commission d'examen a en effet l'obligation de rechercher et d'évaluer non seulement les éléments qui sont favorables à la restriction de la liberté de l'accusé, mais aussi ceux qui militent en faveur de la libération inconditionnelle ou de la libération assujettie à des conditions minimales.

    Le comité a demandé aux témoins de répondre à certaines questions dans leur exposé, et nous y répondrons dans l'ordre. La première question portait sur l'application par les tribunaux de la défense fondée sur les troubles mentaux que prévoit l'article 16 du Code criminel. Nous sommes satisfaits de l'application par les tribunaux et, à notre avis, aucune modification ne s'impose. L'ACP, en tant qu'intervenante lors du pourvoi LePage qui accompagnait l'arrêt du pourvoi Winko, a présenté des propositions étoffées à l'appui de l'application de la défense fondée sur les troubles mentaux prévue à l'article 16 et maintenue par la Cour suprême du Canada. Nous sommes d'accord avec l'arrêt de la cour et nous enjoignons le comité de recommander l'abrogation formelle des dispositions non promulguées à l'égard de la durée maximale de détention et des accusés dangereux atteints de troubles mentaux.

    La deuxième question portait sur la définition et/ou les critères établissant l'aptitude à subir un procès. Certaines préoccupations ont été exprimées relativement au fait qu'il incombe à la Couronne de revenir tous les deux ans pour démontrer qu'elle possède encore tous les éléments de preuve nécessaires pour intenter un procès contre une personne accusée d'avoir commis une infraction, si cette dernière est déclarée apte à subir un procès. Cela s'ajoute aux évaluations menées tous les ans au bas mot pour déterminer si la personne accusée est apte à subir un procès.

    Quoique nous n'ayons pas connaissance d'un cas particulier mettant en cause cette obligation, il est évidemment concevable qu'un accusé dangereux pourrait être relâché au sein de la collectivité en raison de contestation des éléments de preuve intentée contre la Couronne dans des affaires plus anciennes. Dans cette éventualité, il est possible que l'accusé soit soumis à la Loi sur la santé de compétence provinciale. Les lois provinciales sur la santé mentale ne sont pas structurées de façon à protéger le public, dans telles circonstances; les lois provinciales sur la santé mentale sont centrées sur des objectifs différents et n'ont pas pour objet de remédier à ce genre de circonstances.

¿  +-(0950)  

    Nous recommandons que le comité étudie s'il est approprié de dispenser la Couronne de cette obligation après le premier examen au bout de deux ans, lorsque la personne accusée demeure inapte à subir un procès et représente un risque important pour la sécurité du public. La personne accusée demeurerait assujettie à des examens annuels, au minimum, pour déterminer si son état a changé.

    Au sujet de l'automatisme, nous soutenons que le Parlement devrait définir la portée de cette défense dans le Code criminel et conférer aux tribunaux le pouvoir d'imposer les ordonnances de surveillance dans les cas d'automatisme sans aliénation mentale.

    Afin d'aider les commissions d'examen à administrer efficacement ces dispositions, nous recommandons les modifications suivantes, entre autres, une disposition de sauvegarde permettant à un tribunal ou à une commission d'examen de conserver sa compétence malgré un manquement au délai imparti, ou de prolonger ce délai en vertu de cette partie; le pouvoir d'ajournement, par exemple, pour obtenir des renseignements supplémentaires; et le pouvoir d'ordonner des évaluations psychiatriques. Le pouvoir de libération inconditionnelle d' un accusé inapte devrait, toutefois, être uniquement du ressort des tribunaux, et devrait être assujetti aux procédures d'appel et aux autres procédures judiciaires prévues pour les tribunaux de droit.

    En ce qui concerne les durées maximales de détention, on ne devrait pas promulguer les dispositions concernant ces durées, et nous le croyons fermement. Celles-ci devraient être abrogées. Les ministres de la justice qui se sont succédé ont fait preuve de jugement et de prudence en ne se prévalant pas de ces dispositions.

    La Cour suprême du Canada a rejeté les arguments voulant que les dispositions actuellement en vigueur du Code criminel violent les droits conférés par la Charte dans les dispositions relatives aux durées maximales de détention. Cette intervention donne d'importantes indications au comité puisque les dispositions initiales à l'égard de ces durées maximales de détention et des accusés dangereux atteints de troubles mentaux, avaient été introduites sous la forme d'un train de mesures législatives visant à répondre aux préoccupations suscitées par la Charte lorsqu'une loi antérieure avait été annulée. Nous soutenons qu'il n'y a aucune raison valable de promulguer les dispositions relatives à la durée maximale de détention et que leur promulgation entraînerait d'énormes conséquences sur la sécurité publique.

    Comme le comité l'a entendu, les durées maximales de détention n'ont pas été promulguées au moment où la loi a été adoptée, de telle sorte que les provinces puissent apporter les modifications nécessaires à leur législation en matière de santé mentale. Depuis lors, on a déterminé que la législation des provinces en matière de santé mentale n'a pas une portée suffisante et n'est pas conçue pour protéger le public de la même façon que le régime figurant au Code criminel. La fusion uniforme souhaitée entre les lois fédérales et provinciales en matière de santé mentale ne s'est pas réalisée et ne se réalisera pas.

    La Cour suprême a qualifié le régime du Code criminel de régime traitant le contrevenant avec dignité en lui accordant la liberté maximale qui soit compatible avec les objectifs de protection du public et d'équité envers l'accusé. La loi ne viole pas les droits fondamentaux ni les libertés fondamentales; elle les protège. Tout contrevenant déclaré non responsable criminellement qui représente un risque important pour la sécurité du public est retiré de la voie pénale et assujetti uniquement aux restrictions qui s'imposent pour protéger la société et permettre à l'accusé de se faire traiter. Cette décision doit être examinée une fois par année, au moins. Si un tribunal ou une commission d'examen conclut par la suite que l'accusé est non responsable criminellement, ne représente plus un risque important pour la sécurité du public, le tribunal ou la commission doit ordonner la libération de l'accusé.

    Par conséquent, nous soutenons que les dispositions relatives à la durée maximale de détention n'ajoutent rien de valable ni de constructif à la procédure et qu'elles soulèvent des préoccupations sérieuses quant à la sécurité du public. Elles devraient être abrogées.

    Sixièmement, si on promulguait les dispositions concernant la durée maximale de détention, serait-il nécessaire ou utile de promulguer en même temps les dispositions sur les accusés dangereux atteints de troubles mentaux? En plus de nos préoccupations à l'égard des dispositions concernant la durée maximale de détention, les dispositions relatives aux accusés dangereux atteints de troubles mentaux ont une valeur restreinte pour protéger la société, puisque ces dispositions nécessitent qu'on prenne une décision au moment où l'accusé est déclaré non responsable criminellement et non au moment où la durée maximale de détention prend effet.

    En raison du seuil élevé requis pour être déclaré accusé dangereux atteint de troubles mentaux, il est improbable qu'un grand nombre de contrevenants soient classés ainsi. Un accusé dont la santé mentale se détériore avec le temps représentera en fait un risque plus élevé pour le public au moment de sa libération qu'il ne représentait au moment de la décision initiale du tribunal.

    Le régime actuel est éminemment préférable aux dispositions concernant les durées maximales de détention et les accusés dangereux atteints de troubles mentaux. Nous vous exhortons donc fortement à abroger ces dispositions non promulguées. Nous ne possédons pas l'expertise voulue pour donner un avis au comité en ce qui a trait aux questions sur les statistiques et les dispositions relatives aux ordonnances de détention dans un hôpital.

    Nous avons par contre deux autres recommandations à soumettre au comité. La première porte sur le rôle des victimes. En tant que professionnels oeuvrant à l'avant-poste de l'appareil judiciaire, les policiers sont vivement conscients des frustrations que peuvent ressentir les victimes d'actes criminels lorsque des systèmes juridiques aussi complexes sont mis en application.

¿  +-(0955)  

    Bien que nos lois répondent de plus en plus aux besoins des victimes et leur confèrent le rôle légitime qu'elles réclament de notre appareil judiciaire, cet octroi nm'est pas universel. Les victimes devraient avoir le droit d'être informées de la progression du cas d'un accusé et avoir l'occasion de fournir une déclaration sur les répercussions du crime au moment où la libération est envisagée.

    Pour ce qui est des contrevenants dangereux et à risque élevé, nous sommes aussi préoccupés par les dispositions du Code criminel qui les concernent que par celles qui portent sur les délinquants dangereux atteints de troubles mentaux.

    Ce qui nous préoccupe, c'est la possibilité qu'on libère des détenus ayant totalement purgé leur peine mais qui présentent encore un risque élevé de récidive, puissent être relâchés au sein de la communauté sans que des recours soient prévus. Bien que cette question ne soit pas spécifiquement liée aux questions qu'étudie le comité, nous la signalons tout de même, en tant que préoccupation sur laquelle le comité pourrait se pencher.

    Je vous remercie. Je suis tout à fait disposé à répondre aux questions qu'on voudra me poser.

À  +-(1000)  

+-

    Le président: Merci beaucoup à nos deux témoins.

    Je vais maintenant céder la parole à M. Hill pour sept minutes.

+-

    M. Jay Hill (Prince George--Peace River, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

    Je remercie chacun des membres de la délégation de sa présence ici ce matin.

    Je vais peut-être demander d'abord à M. Barbaree de développer quelque peu les idées de son mémoire. Monsieur Barbaree, si je vous ai bien compris, d'après vous, les tribunaux manifestent leur impatience face aux longues listes d'attente, et en raison de cela, ils recourent plus souvent aux formulaires 48 que par le passé. Lorsqu'on est en liste d'attente, combien de temps faut-il attendre?

+-

    M. Howard Barbaree: L'attente varie entre une et quatre semaines, et c'est ainsi depuis à peu près 10 ans.

+-

    M. Jay Hill: L'attente ne s'est donc pas prolongée.

+-

    M. Howard Barbaree: Non, elle s'est prolongée brièvement pour atteindre jusqu'à cinq semaines. Nous avons donc réagi en augmentant le nombre de lits disponibles à Toronto pour les besoins des ordonnances des tribunaux. En 1998, nous disposions de 23 lits pour répondre aux évaluations ordonnées par les tribunaux et maintenant il y en a 38. Nous avons presque doublé le nombre de lits disponibles, mais en dépit de cela, nous n'avons pas réussi à réduire la période d'attente.

    Évidemment, dans l'idéal, nous serions en mesure d'hospitaliser immédiatement les personnes visées par l'ordonnance, mais la demande s'est accrue, en partie en raison des modifications apportées à la loi en 1992. À la suite de cela, les tribunaux ont en effet ordonné un bien plus grand nombre d'évaluations.

    En 1998, ou peut-être au milieu des années 90, le Centre de toxicomanie et de santé mentale, disposait de 20 à 30 lits occupés par les accusés atteints de troubles mentaux, soit pour des besoins d'évaluation, soit de réadaptation. Leur nombre s'établit maintenant à une centaine et...

+-

    M. Jay Hill: Ai-je bien compris? Si l'on donnait suite à votre recommandation voulant qu'on obtienne le consentement de l'hôpital avant de faire admettre quelqu'un, qu'arriverait-il à la personne concernée? Est-ce qu'elle demeurerait en garde à vue au centre de détention municipal, par exemple, jusqu'au moment de son hospitalisation?

+-

    M. Howard Barbaree: Oui. À notre avis, le fait de garder un accusé en prison en attente d'une évaluation est une question grave. Il faut qu'on augmente nos ressources de manière à abréger le plus possible cette durée, et qu'on réorganise aussi le système à cette fin. On pourra y arriver en partie en augmentant le nombre de lits disponibles à des fins d'évaluation, mais aussi en effectuant certaines de ces évaluations dans les prisons et en fournissant de meilleures évaluations aux tribunaux.

    Pour ce qui est du nombre de lits d'hôpital réservés aux cas d'évaluation, le tribunal semble recourir à un seul moyen quand on pourrait en mettre d'autres en oeuvre.

+-

    M. Jay Hill: En un mot, quel est le problème maintenant? Vous dites que de plus en plus, les tribunaux ont recours à des ordonnances sur-le-champ parce que manifestement, ils estiment que la liste d'attente est trop longue et on veut que les choses se fassent de façon plus expéditive. Les juges vous disent que vous devez accepter ces gens et faire l'évaluation immédiatement. Je pense que c'est l'expression que vous avez utilisée. Où est le problème?

À  +-(1005)  

+-

    M. Howard Barbaree: En partie le problème découle du fait que les tribunaux font une sorte de triage partiel en fonction de la santé mentale tout à fait à part de l'administration de la justice. Regardez les renvois pour évaluation de 30 jours des patients en milieu hospitalier. Dans presque 30 p. 100 des cas, il s'agit d'évaluation de la condition du patient. Or, cela peut se faire en quelques minutes, ou au plus, en quelques heures. Occuper un lit pendant 30 jours pour ce genre d'évaluation n'est pas un usage approprié des ressources de l'hôpital.

    Les tribunaux rendent souvent ce genre d'ordonnances parce qu'on tient à ce l'intéressé reçoive des soins à l'hôpital plutôt que d'être incarcéré. Toutefois, cela se produit avant que le tribunal n'ait décidé si cette personne est soit inapte soit non responsable criminellement. Si j'ai bien compris, on se fonde sur l'hypothèse que la personne est apte et criminellement responsable et ce n'est qu'après cette décision qu'intervient l'idée que la personne devrait occuper un lit d'hôpital plutôt que d'être incarcérée.

    Dans leur utilisation de nos ressources, les tribunaux prévoient qu'il sera décidé que la personne souffre de troubles mentaux et utilisent l'ordonnance d'évaluation comme unmoyen de faire hospitaliser ces personnes avant que la décision n'ait étéprise.

    Si nous pouvions faire un usage plus efficace et approprié de nos lits dans le but de faciliter l'administration de la justice, je ne pense pas que nous aurions ce problème de ressources insuffisantes pour répondre à la demande. Mais nos lits sont occupés par des personnes qui attendent de comparaître devant le tribunal, des personnes que nous avons évaluées le jour-même de leur arrivée.

+-

    Le président: Merci, monsieur Barbaree et monsieur Hill.

    Monsieur Lanctôt.

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Merci, monsieur le président.

    Je vous remercie tous les trois, mais particulièrement M. Barbaree et Mme Czukar. Vous rendez très concrète la problématique du manque de ressources et de financement dans les hôpitaux. Je pense que pour la première fois depuis le début de cette étude, où il est constamment question du manque de ressources et de financement, nous avons une meilleure idée du problème grâce à vos explications. C'est très important et j'espère que le comité en prendra acte parce que le manque de ressources est très évident et inquiétant. C'est inquiétant même pour vous, en tant qu'administrateurs d'hôpitaux. Vous nous dites que cette évaluation peut se faire en quelques heures ou en quelques jours et que vous devez prendre au-delà de 30 jours pour la faire.

    Nous ne sommes ni médecins ni psychiatres. Dites-nous comment on peut faire cette évaluation en quelques heures ou quelques jours de manière à ce qu'elle soit crédible pour les tribunaux, les avocats et tout le monde.

[Traduction]

+-

    M. Howard Barbaree: Je pense que les évaluations de la condition du patient se font en quelques minutes, voire quelques heures, souvent au tribuanl même. Plusieurs de nos psychiatres sont envoyés sur place. À la cour du centre-ville, nous avons un psychiatre sur place, quotidiennement, qui effectue des évaluations et qui témoigne ensuite immédiatement devant le tribunal de cette évaluation. Ce genre d'évaluation, je crois, est crédible, même si c'est fait rapidement. Je ne pense pas que nous lésions le tribunal du point de vue de la durée de l'évaluation. En fait, je pense qu'à l'origine, la loi prévoyait une évaluation de cinq jours au maximum. L'évaluation de 30 jours n'était demandée qu'avec le consentement des deux parties et dans des circonstances particulières et spéciales.

    Maintenant, l'évaluation de 30 jours est devenue la norme plutôt que l'exception. Nous pensons que ce n'est pas vraiment à des fins d'évaluation que l'on demande l'évaluation de 30 jours. On la demande dans le cas de personnes que le tribunal considère avoir des troubles mentaux afin que ces personnes soient hospitalisées plutôt que détenues.

    Nous avons vu que la demande originelle du tribunal est présentée sous forme d'ordonnance de traitement, un formulaire 49. Lorsque nous indiquons que nous ne disposons pas de lit, que nous n'acceptons pas l'ordonnance de traitement, nous avons vu le tribunal émettre une ordonnance d'évaluation de façon à ce que la personne puisse être expédiée à l'hôpital «sans délai».

    Je pense que si l'hôpital est en mesure de gérer cette ressource de façon plus économique et plus efficace, tout en aidant les tribunaux dans l'administration de la justice, il nous resterait plus de ressources pour les traitements qu'on nous demande. Nous nous trouvons dans une situation où nous devons nous inquiéter de trouver des lits pour respecter les ordonnances sans délai, ce qui nous empêche, en fait, de gérer nos ressources efficacement.

À  +-(1010)  

+-

    Mme Gail Czukar: J'aimerais ajouter qu'il est paradoxal qu'un grand nombre de ces ordonnances sont délivrées par des juges très bien intentionnés qui considèrent que la personne qui se trouve devant eux a besoin d'aide. C'est le rôle de l'hôpital, de fournir un traitement et de l'aide. Mais lorsque le juge ordonne qu'une personne soit traitée par le système médico-légal, il faut beaucoup plus de ressources pour aider cette personne, en raison des coûts supplémentaires et du personnel supplémentaire qu'il faut simplement pour administrer toutes ces formalités. Howard dispose d'un effectif à temps plein qui s'occupe d'aviser les commissions d'examen et la police. Rien de cela ne serait nécessaire si la personne était traitée par le système général de santé mentale.

    On se trouve ainsi à transférer ces ressources au système de santé mentale et de médecine légale. Je crois que vous avez entendu des témoins vous parler de la criminalisation accrue des malades mentaux. Comme je l'ai dit, nous reconnaissons que cela part d'une bonne intention, en ce sens que les juges, les avocats de la Couronne, les avocats de la défense estiment qu'ils agissent pour le bien de la personne, mais ce faisant le système finit par se retrouver avec des ressources insuffisantes.

    Nous sommes entièrement partisans de ne pas séparer le système médico-légal et le système de santé mentale. Nous estimons que si le système médico-légal était séparé du système général de santé mentale, le problème ne ferait que s'aggraver: les gens seraient de plus en plus criminalisés; on accorderait plus de ressources au système médico-légal, parce qu'il traite de la question très importante de la sécurité publique. Nous préférons conserver un maximum de ressources—c'est-à-dire des ressources pour le traitement et des ressources pour le soutien—dans la collectivité et le système hospitalier de santé mentale, pour pouvoir continuer à aider les gens afin qu'ils ne se retrouvent pas dans le système pénal lorsqu'ils n'ont pas de raison d'y être.

+-

    Le président: Monsieur Lanctôt, vous avez une demi-minute.

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt: Monsieur le président, j'aimerais savoir qui a créé cette nouvelle norme de 30 jours, au lieu de quelques heures ou de quelques jours. Est-ce que ce sont les psychiatres eux-mêmes, ou si c'est le système judiciaire qui l'a imposée?

[Traduction]

+-

    M. Howard Barbaree: C'est une très bonne question. Je ne suis pas tout à fait sûr de la façon d'y répondre.

    Depuis que je fais partie de ce système, la norme d'évaluation a été de 30 jours. Nous tâchons, nos psychiatres en collaboration avec les tribunaux, de faire une évaluation aussi complète que possible selon la formule brève. Avant que l'on établisse le tribunal de la santé mentale au centre-ville de Toronto, nous avions l'habitude d'amener l'accusé à l'hôpital pour un jour au cours duquel nous tâchions de faire autant d'évaluations que possible dans le service dit d'évaluations brèves. Mais en ce qui concerne les malades hospitalisés, depuis toujours les évaluations ont été de 30 jours.

    Pour nous aider à utiliser plus efficacement nos ressources, nous avons aussi proposé d'avoir la possibilité de renvoyer l'accusé en détention une fois l'évaluation terminée. Et je crois que c'est ce que la loi envisageait à l'origine.

    Nous recevons un certain nombre d'ordonnances des tribunaux ou dans l'espace au bas de la page le tribunal a inscrit des instructions nous demandant de garder la personne jusqu'à sa date de comparution devant le tribunal, et on nous indique une date de comparution. Donc, nous sommes limités jusqu'à un certain point pour ce qui est de raccourcir à moins de 30 jours le séjour des malades hospitalisés.

    Simplement pour reprendre une observation faite par Gail, je crois que nous sommes dans la regrettable situation ici de devoir critiquer la façon dont le système fonctionne à l'heure actuelle. Nous n'avons absolument aucune intention de critiquer les tribunaux qui prennent les mesures qu'ils estiment nécessaires dans le contexte de la loi actuelle et compte tenu de la situation dans laquelle ils se trouvent. Et nous comprenons certainement pourquoi un juge, dans le cadre de son travail quotidien, déciderait de transférer un accusé souffrant de troubles mentaux à un milieu hospitalier afin qu'il ne soit pas renvoyé en détention où il ne recevrait aucun soin de santé mentale.

    Notre problème, c'est que nous desservons sept tribunaux différents et aucun d'entre eux ne comprend vraiment les pressions que cela exercent sur nos services ni le fait que les autres tribunaux de la ville y envoient des gens en même temps. Telle que la loi est structurée à l'heure actuelle, nous nous sentons tenus de nous occuper de toutes les patients qui arrivent chez nous un jour donné.

À  +-(1015)  

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur McKay.

+-

    M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président, et je tiens aussi à remercier les témoins. Je m'excuse de mon retard.

    J'ai deux ou trois questions que je vais adresser aux deux groupes de témoins. Elles concernent les autres témoignages que notre comité a entendus.

    J'aimerais tout d'abord que vous commentiez une observation faite par un des témoins qui a comparu devant nous, selon laquelle la norme d'aptitude était tout simplement trop faible, qu'il suffit d'avoir un coeur qui bat et de savoir ce que fait un juge et ce que fait un avocat pour être considéré apte à subir un procès. Il considérait que c'était une norme insuffisante. C'est donc ma première question.

    La deuxième observation concerne la façon dont on s'occupe des personnes qui ne sont pas aptes à subir un procès et qui ne le seront probablement jamais. Le témoin estimait que la commission d'examen devrait prévoir un mécanisme quelconque de libération de façon à ce que... Au départ, je croyais qu'il voulait dire que la commission d'examen puisse les libérer, mais après l'avoir questionné davantage, nous avons constaté que le témoin ne proposait pas que la commission d'examen les libère mais qu'elle les renvoie au tribunal en lui indiquant que cette personne ne serait jamais apte à subir un procès. C'est un exemple assez simpliste.

    Ma troisième question concerne la personne qui est jugée apte à subir un procès mais qui, au cours du procès, est jugée inapte à se voir imposer une peine. Il est fort possible que l'on constate—étant donné que la norme est si faible—que la personne est apte à subir un procès mais simplement inapte à se voir imposer une peine.

    Ce sont les observations intéressantes présentées par nos témoins précédents. Je vous serais reconnaissant si vous pouviez tous les deux commenter ces trois aspects.

+-

    M. Howard Barbaree: Je vous remercie.

    En ce qui concerne les normes d'aptitude, au centre nous ne préconisons pas de changement aux normes actuelles. Nous considérons qu'elles fonctionnent assez bien pour l'instant. En bout de ligne, nous nous trouvons à soigner des personnes qui appartiennent à la catégorie dont nous devons nous occuper.

    Je crois que nous avons fait valoir dans notre mémoire que les commissions d'examen devraient pouvoir libérer les personnes inaptes. Nous considérons qu'elles sont tout autant en mesure de le faire que les tribunaux.

À  +-(1020)  

+-

    M. John McKay: Si on dit qu'elles n'ont pas le pouvoir de libérer ces personnes, est-ce parce qu'on a mal interprété leur compétence?

+-

    M. Howard Barbaree: Non. Je crois qu'à l'heure actuelle elles n'ont pas le pouvoir de libérer les personnes inaptes. Nous faisons valoir qu'un changement raisonnable à la loi leur accorderait ce pouvoir.

+-

    M. John McKay: Lorsque vous parlez de libération, voulez-vous dire les absoudre inconditionnellement de toute responsabilité, y compris la responsabilité criminelle?

+-

    M. Howard Barbaree: Oui.

+-

    M. John McKay: Donc,selon votre argument, la commission empiéterait sur le pouvoir du droit pénal?

+-

     Me Gail Czukar: Voulez-vous que je commente cette question?

    Je ne suis pas sûre que cela constituerait une ingérence dans le domaine du droit pénal. Je crois que le rôle de la commission d'examen est de décider, en fonction de preuves d'experts, si la personne sera un jour apte à subir un procès. C'est essentiellement la décision qu'elle doit prendre. Il ne fait aucun doute qu'en bout de ligne elle décide de libérer des personnes qui n'ont pas été jugées criminellement responsables pour cause de troubles mentaux. Si le cas n'est pas renvoyé devant le tribunal, la commission d'examen peut prendre ce genre de décision.

    En ce sens, il ne nous semble pas qu'il s'agit d'une situation différente. La Couronne a la possibilité tous les deux ans de faire valoir ses arguments contre la personne. C'est une question de suffisance de la preuve, entre autres. Cela peut se faire ou non.

    En ce qui concerne la possibilité que la personne devienne apte à subir un procès, nous estimons qu'à un certain stade, la commission d'examen est en mesure de prendre cette décision.

+-

    M. John McKay: Cela aurait-il quelque chose à voir avec les préoccupations de la police en matière de sécurité publique?

+-

     Me Gail Czukar: Les préoccupations de la Couronne seraient représentées à une audience. À Toronto, ses représentants sont toujours présents. La décision que prend la commission consiste à déterminer si la personne représente une menace sérieuse pour la sécurité publique. La Couronne est là pour présenter des preuves à cet égard. La commission prend la preuve en considération, comme elle le fait à chaque audience.

+-

    M. Howard Barbaree: En ce qui concerne la troisième question, c'est-à-dire s'assurer que la personne demeure apte une fois qu'elle a atteint un niveau d'aptitude, qu'elle demeure apte pendant tout le procès, cela reflète très bien à nouveau notre préoccupation à propos de l'utilisation des ressources hospitalières et de la difficulté que nous éprouvons à utiliser ces ressources de façon rentable dans le système actuel.

    Une façon raisonnable de procéder consisterait à ce que nous amenions ces personnes à l'hôpital afin de les traiter jusqu'à ce qu'elles deviennent aptes, puis de les renvoyer en détention et de faire en sorte qu'elles demeurent aptes grâce à des soins psychiatriques réguliers administrés dans le centre de détention. Dans bien des cas, l'hospitalisation n'est pas nécessaire pour que ces personnes demeurent aptes à subir un procès. Dans la collectivité, ces personnes ne seraient pas malades au point de devoir être hospitalisées.

    Les tribunaux nous envoient des personnes et nous demandent de faire en sorte qu'elles demeurent aptes. Nous avons récemment eu le cas d'une personne apte à subir un procès qui a été renvoyé devant le tribunal à plusieurs reprises. Pour diverses raisons, le procès a été reporté. Il s'agit d'une personne qui pourrait demeurer apte très facilement et raisonnablement dans un autre cadre, mais qui occupe un lit que nous pourrions utiliser pour l'une des personnes gravement psychotiques, qui attend en prison.

    Cela soulève aussi une autre question qui se rapporte à la question des tribunaux qui veulent que ces personnes soient hospitalisées plutôt qu'emprisonnées. Il s'agit du niveau de soins psychiatriques offerts dans des centres de détention. À l'heure actuelle, les soins offerts sont minimes. Les juges hésitent—et je crois avec raison—à renvoyer en prison des personnes atteintes de troubles mentaux. Il est stressant pour ces personnes d'être en prison et pour un grand nombre d'entre eux, l'hôpital est une option nettement préférable.

    S'il était possible de leur offrir des soins de santé mentale appropriés en détention grâce à l'établissement de services spéciaux, il s'agirait d'une façon nettement préférable de traiter les personnes dont les troubles ne sont pas extrêmement graves, qui ont été traitées de façon efficace et dont s'occupe l'hôpital pour s'assurer qu'elles demeurent aptes. Il serait relativement facile d'offrir ces mêmes conditions dans un centre de détention ce qui nécessiterait moins de ressources qu'un séjour à l'hôpital.

À  +-(1025)  

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur Griffin, les questions ont été posées à vous deux. Souhaitez-vous répondre? Ne vous sentez pas obligés.

+-

    M. David Griffin: Je serai bref, monsieur le président.

    En ce qui concerne la norme d'aptitude, de toute évidence M. Barbaree est beaucoup plus qualifié que moi pour y répondre, mais comme il l'a dit, je considère que la norme semble fonctionner.

    En ce qui concerne la troisième question, je n'ai pas d'information ni de conseil à donner au comité. J'estime que le M. Barbaree a bien exposé la situation.

    Pour ce qui est du sort réservé à ceux qui ne seront jamais aptes à subir un procès, pour des raisons de convenance on pourrait soutenir qu'il faudrait autoriser les commissions d'examen à prendre simplement cette décision, mais nous continuons de considérer qu'il s'agit d'un rôle important que doit assumer le tribunal.

    Cela est nettement différent de la situation où l'accusé a subi un procès, le tribunal a rendu sa décision et la commission d'examen a alors le pouvoir de déterminer si cette personne peut réintégrer la collectivité. Quant au verdict concernant l'accusation criminelle, cette responsabilité doit continuer à relever du tribunal et ne doit pas être transférée à la commission d'examen.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur Hill.

+-

    M. Jay Hill: Merci, monsieur le président. J'ai plusieurs questions à poser à M. Griffin.

    Tout d'abord, pour ce qui est de la non-responsabilité criminelle, cela semble permettre à des criminels de ne pas avoir à payer pour leurs crimes. Je veux parler bien sûr des agressions sexuelles et des meurtres, de ce genre de crimes horribles.

    L'Association canadienne des policiers et policières a-t-elle des données sur le taux de récidive de ces individus par rapport à ceux qui subissent un procès et doivent se soumettre à la procédure judiciaire habituelle, ce qui les oblige à rendre des comptes et à assumer la responsabilité de leurs actes? Je veux parler du processus d'évaluation selon lequel une commission d'examen décide qu'une personne qui n'a pas été tenue criminellement responsable ne constitue plus une menace pour le public et peut être libérée. A-t-on fait un suivi et une comparaison entre les deux?

+-

    M. David Griffin: J'avoue que je n'ai pas étudié la question et que j'ignore ce que les données pourraient révéler.

+-

    M. Howard Barbaree: Un projet de recherche à grande échelle réalisé par le service de recherche de la division d'Oak Ridge du Centre de santé mentale de Penetanguishene a examiné les taux de récidive de l'ensemble des prévenus qui ont été déclarés «non coupables pour cause d'aliénation» en Ontario. Cette étude a duré une quinzaine ou une vingtaine d'années. Ces personnes ont été comparées avec celles qui ont été envoyées dans des établissements correctionnels.

    En moyenne, les prévenus qui ont bénéficié d'un verdict de non-culpabilité pour cause d'aliénation ou de non-responsabilité criminelle, ont un taux de récidive plus bas que l'échantillon en établissement correctionnel. Ce sont toutefois des populations assez différentes à bien des égards.

    Ce qui détermine le taux de récidive, ce sont les caractéristiques personnelles, par exemple les antécédents criminels et les événements survenus pendant l'enfance et l'adolescence. Ces facteurs déterminent davantage le risque de récidive que les troubles mentaux.

    Dans l'échantillon de Penetanguishene suivi par les chercheurs, les schizophrènes avaient un taux de récidive plus bas que les autres. Il semble donc que les individus qui ont des troubles de la personnalité risquent davantage de récidiver.

À  +-(1030)  

+-

    M. Jay Hill: Il y a une chose qui m'intrigue et qui soulève également des questions. Le public se fait sans doute des idées fausses à cet égard. Savez-vous quelle est la durée minimum de la sentence imposée à quelqu'un qui n'est pas tenu criminellement responsable d'un meurtre, qu'il s'agisse d'une hospitalisation, d'un traitement ou d'autres mesures? C'est le genre de question que nous pose le public.

    Les gens craignent que si quelqu'un commet un meurtre horrible... Je me souviens de l'affaire Chaulk et Morrissette au Manitoba, où l'un des coupables a passé quelques années dans un établissement de traitement. L'autre—je ne sais plus lequel c'était—a été relâché et a de nouveau tué par la suite.

+-

    M. Howard Barbaree: Je ne sais pas à qui vous adressez cette question.

+-

    M. Jay Hill: Savez-vous, l'un ou l'autre, quelle est la sentence minimum? Quelqu'un peut-il subir une évaluation, suivre un traitement pendant une certaine période, être accusé de meurtre au second degré, de meurtre non prémédité et passer seulement un an dans un hôpital ou autre établissement de ce genre? Est-ce possible?

+-

    M. Howard Barbaree: C'est possible. Telle qu'elle se présente actuellement, la loi sépare ces deux systèmes qui reposent sur des idéologies entièrement différentes. Dans le système de justice pénale, la durée de l'incarcération doit être proportionnelle à la gravité du crime ou du tort causé par l'accusé.

+-

     En ce qui concerne la santé mentale, je crois que la décision Winko indique très bien comment ces personnes doivent être traitées. Elle dit que tant qu'elles représentent une menace importante pour la sécurité publique, nous devons les garder sous notre surveillance.

À  +-(1035)  

+-

    M. Jay Hill: Les soumet-on à une évaluation avant de les libérer pour déterminer s'ils sont guéris ou non?

    M. Howard Barbaree: Oui.

    M. Jay Hill: Cherche-t-on seulement à établir non pas qu'ils sont guéris, mais qu'ils risquent peu de récidiver?

+-

    M. Howard Barbaree: L'arrêt Winko établit les critères à suivre et ces cas sont réexaminés chaque année. Une personne qui a commis un crime aussi grave qu'un meurtre fera l'objet d'un examen particulièrement détaillé et approfondi. Les audiences des commissions d'examen durent parfois plusieurs jours, car on fait témoigner les experts, les psychiatres qui ont soigné la personne en question. Souvent, les victimes viennent témoigner. La commission d'examen doit donc examiner très attentivement ce genre de cas et appuyer les critères établis dans l'arrêt Winko.

    Pour répondre à votre question, une personne qui a commis un crime aussi grave qu'un meurtre mais qui a été jugée non criminellement responsable et placée dans un établissement psychiatrique pourrait être libérée par une commission d'examen au bout d'un an. Ce serait effectivement la période minimum de détention. Par conséquent, pour répondre à votre question, le côté psychiatrique du système part du principe que l'individu a commis son crime en raison de ses troubles mentaux. Si ses troubles mentaux peuvent être traités efficacement et si, suite à ce traitement, les experts estiment que le risque est maintenant suffisamment faible selon les critères établis dans l'arrêt Winko, les commissions d'examen n'ont plus tellement le choix.

    Quand je dis que ces personnes sont libérées, il est important de vous décrire la façon dont cette libération se déroule dans la plupart des cas. Il s'agit d'un processus très graduel. Les mesures que prennent les commissions d'examen se situent à trois niveaux différents. Au premier niveau, la personne est détenue en milieu hospitalier. Au deuxième, elle est libérée sous condition. Dans ce cas, elle vit dans la collectivité, mais doit se présenter régulièrement à l'hôpital. Le troisième niveau est celui de l'absolution inconditionnelle.

    En général, celui qui commet un crime aussi grave qu'un meurtre est détenu dans un hôpital pendant une longue période. Je ne suis pas en mesure de vous dire quelle est la durée moyenne de cette détention, mais la plupart des patients de notre hôpital que je connais et qui ont commis ce genre de crime sont là depuis plus de 10 ou 15 ans.

    L'une des caractéristiques de la détention dans un hôpital psychiatrique est que la commission accorde à l'intéressé le privilège de vivre dans la collectivité pendant sa détention. Cela veut dire que d'après les preuves fournies à la commission d'examen et les recommandations de l'hôpital et des psychiatres, l'intéressé a fait suffisamment de progrès pendant sa détention à l'hôpital pour pouvoir vivre dans la collectivité sans être un danger pour le public. Ces personnes résident pendant un certain temps dans des logements autorisés, sous certaines conditions très strictes. Elles vont souvent à l'hôpital participer à des séances pour les patients externes et parfois, au départ, elles y vont tous les jours. Ensuite, quand on constate que leur réinsertion se fait bien, les visites à l'hôpital se feront un jour sur deux, tous les trois jours puis une fois par semaine, une fois toutes les deux semaines, et ainsi de suite.

    En général, la commission décide d'accorder l'absolution conditionnelle lorsqu'une personne a été détenue dans un hôpital pendant une certaine période. Elle a ensuite obtenu le privilège de vivre dans la collectivité pendant un certain temps après quoi elle obtient la libération conditionnelle puis l'absolution inconditionnelle. Mais la période de détention en hôpital psychiatrique, surtout pour ceux qui ont commis des crimes graves, dure souvent des années et non pas des mois.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Barbaree.

    Je rappelle aux membres du comité que les règles n'ont pas changé. C'était un tour de trois minutes. C'était toutefois une réponse très intéressante qui nous a tous permis, je pense, d'y voir plus clair.

    Monsieur McKay.

+-

    M. John McKay: Je voudrais revenir à deux questions que j'ai déjà posées. Tout d'abord, pour ce qui est de l'aptitude à subir un procès, si vous pensez tous deux que les critères donnent des résultats raisonnablement satisfaisants, est-il nécessaire qu'un médecin fasse cette détermination? Si ces critères sont si peu exigeants, pourquoi ne pas confier cette tâche à des infirmières ou à du personnel non médical?

    Ma deuxième question concerne la réponse de Mme Czukar. J'ai cru vous entendre dire que la commission pouvait libérer quelqu'un ultérieurement, mais pas directement. Si la commission a cette capacité, pourquoi ne peut-elle pas le faire tout de suite?

    Je voudrais non seulement que vous répondiez à cela, mais aussi à ce que nous a dit un représentant du Bureau du procureur général de l'Ontario. Il a déclaré que les procureurs avaient le devoir de soustraire ces personnes à la justice pénale et qu'ils possédaient, si vous voulez, beaucoup plus de renseignements sur ceux qui présentent vraiment un risque pour la sécurité du public.

    Ma troisième question concerne certains témoignages radicaux que nous avons entendus la semaine dernière. Une personne a dit que le système actuel qui régit les homicides est ridicule parce qu'on peut être trouvé coupable d'homicide, de meurtre au premier ou second degré, et ainsi de suite. Elle proposait d'appeler les choses par leur nom à savoir que s'il y a décès, il s'agit d'un homicide. Ce monsieur suggérait de tenir compte de l'état mental du prévenu au moment de prononcer la sentence plutôt que de savoir s'il était coupable ou non. Selon lui, la défense d'intoxication extrême oblige les experts à deviner quel était l'état mental du prévenu lorsqu'il a commis son geste. Également, en ce qui concerne la provocation, cela ne veut pas dire grand-chose.

    Voilà mes trois questions en trois minutes.

À  +-(1040)  

+-

    Le président: Les témoins ont le temps de vous répondre en 10 secondes.

    Madame Czukar.

+-

     Me Gail Czukar: En ce qui concerne l'aptitude à subir un procès, dans notre mémoire, que vous avez reçu, nous disons qu'il n'est pas toujours nécessaire de faire faire l'évaluation par des psychiatres et que les psychologues devraient pouvoir s'en charger. Avec une formation adéquate, les travailleurs sociaux et les infirmières devraient pouvoir également procéder à cette évaluation. Nous sommes donc d'accord avec ceux qui vous ont déjà dit qu'il faudrait autoriser d'autres professionnels de la santé à évaluer l'aptitude à subir un procès non pas parce que les critères sont peu stricts, mais parce que ces professionnels peuvent devenir des experts dans ce domaine.

    En ce qui concerne le témoignage du représentant du Bureau du procureur général de l'Ontario selon lequel les procureurs possèdent des renseignements sur le danger qu'un individu représente, mais que les commissions d'examen n'en tiennent pas suffisamment compte pour prendre la décision de libérer une personne qui a été déclarée inapte, je trouve étonnant que la Couronne ne communique pas à la commission d'examen toutes les preuves qu'elle possède. La commission est censée déterminer si l'individu en question représente une menace importante pour la sécurité du public. Si la Couronne possède des renseignements à ce sujet, elle devrait les communiquer.

    J'ai les procès-verbaux des audiences du comité, mais malheureusement pas pour cette journée-là et je ne sais donc pas qui est le représentant du Bureau du procureur général qui est venu vous voir. Je n'ai pas pu lire ce qui a été dit. Mais j'ai pris connaissance de la question que vous aviez posée à ce sujet.

    Je voudrais également clarifier ma réponse de tout à l'heure. Je n'ai pas dit que les commissions d'examen devraient pouvoir accorder immédiatement la libération. Je faisais la distinction entre le pouvoir qu'elles possèdent d'accorder une libération inconditionnelle à une personne qui a été déclarée non responsable criminellement, mais non pas à une personne qui a été déclarée inapte à subir un procès. En effet, cette dernière a été jugée inapte par un tribunal et, pour cette raison, elle a été placée en détention dans un hôpital psychiatrique. Normalement, la Couronne réexamine le dossier tous les deux ans. L'intéressé reste donc en détention parce qu'il est inapte à subir son procès, mais tout le monde sait qu'il ne deviendra jamais apte. La théorie du droit pénal ne tient donc plus.

+-

     Ce que nous disons, c'est que lorsqu'il est clair que la personne qui est en détention ne deviendra pas apte à subir son procès, ce n'est pas du tout dans un établissement psychiatrique qu'il convient de la placer, car on fait ainsi une mauvaise utilisation des ressources, on ne sert pas l'intérêt de la personne et on viole sans doute ses droits. La personne devrait être libérée et recevoir une absolution inconditionnelle. La commission d'examen est parfaitement en mesure de faire une détermination en ce sens, en sa qualité de tribunal. Voilà ce que j'ai voulu dire, et j'espère que ces précisions vous permettront de comprendre notre position.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur Lanctôt, vous avez trois minutes.

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt: Si je comprends bien, on a trois minutes pour les questions et trois autres minutes pour les réponses.

    Lors de notre rencontre de mercredi dernier avec l'Association canadienne des commissions d'examen, les gens de cette association ne demandaient pas le pouvoir d'accorder des absolutions inconditionnelles lorsque les personnes sont inaptes ou qu'il n'y a pas de possibilité de traitements. Ils sont venus nous dire qu'ils souhaitent avoir la possibilité de faire des recommandations en disant que les personnes ne posent pas un risque pour le public et de les renvoyer devant le tribunal pour que ce dernier décide, à la lumière de la preuve présentée, si elles sont aptes à subir leur procès. C'est impossible. Donc, est-ce qu'on accordera une absolution inconditionnelle? Je pense que ce serait beaucoup plus habile que de remettre cela entre leurs mains, parce qu'ils pourraient se débarrasser de ces cas et donner au tribunal le pouvoir de le faire.

    J'ai beaucoup apprécié cette façon de voir, parce que plusieurs autres personnes qui viennent témoigner à leur place demandent à la commission de donner cette absolution, mais la commission nous a dit bien que, bien au contraire, elle ne veut pas ce pouvoir de donner des absolutions inconditionnelles; cependant, elle veut avoir la possibilité de faire des recommandations et de renvoyer les personnes devant le tribunal.

    Qu'est-ce que vous en pensez? J'avais trouvé brillante cette idée de l'Association canadienne des commissions d'examen.

    Je vais utiliser le reste de mes trois minutes.

    On parle toujours du manque de ressources, mais je suis un peu surpris lorsque vous nous dites qu'il vaudrait mieux continuer les traitements dans un milieu carcéral. Ce serait peut-être bon au point de vue des ressources, au point de vue financier, mais il ne faut pas oublier que ces personnes, même celles qui ne sont pas aptes à subir leurs procès, sont accusées mais ne sont pas encore des criminels. Là, on parle de les mettre dans un milieu carcéral. Je suis un peu étonné. Si quelqu'un que je connais avait des troubles mentaux, je voudrais qu'il soit traité dans un hôpital et non dans un milieu carcéral.

À  +-(1045)  

[Traduction]

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Lanctôt.

+-

    M. Howard Barbaree: Je peux peut-être répondre d'abord à votre deuxième question, qui rejoint en fait une des questions qu'on a posée tout à l'heure et qui visait à déterminer si l'actuel système de justice pénale permet de bien faire la distinction, parmi les personnes souffrant de troubles mentaux, entre celles qui sont responsables criminellement et celles qui ne le sont pas.

    Le fait est que, quand on essaie de séparer ces personnes qui ont de graves troubles mentaux en deux groupes et qu'on essaie de faire des comparaisons entre les deux groupes pour déterminer quelles sont les différences psychologiques, mentales, sociales ou démographiques entre les deux, nous n'arrivons pas à détecter vraiment de différences importantes. On a publié récemment une étude sur le sujet en Grande-Bretagne. Les lois britanniques ne diffèrent pas tellement des nôtres. Il s'agit d'une étude très vaste qui montre qu'il n'y a pas de différences importantes entre les deux groupes.

    On trouve dans les prisons un grand nombre de personnes qui souffrent de troubles mentaux graves et qui ont besoin de traitement. Dans l'actuel système, je crois que c'est aux instances correctionnelles, fédérales et provinciales, d'assurer à ces personnes les soins de santé mentale dont elles ont besoin dans l'établissement carcéral où elles se trouvent.

    Je crois que la plupart d'entre nous seraient d'accord pour dire que ces personnes ne devraient pas, du fait qu'elles sont incarcérées, se voir imposer des restrictions quant à l'accès aux soins de santé mentale. Si elles ont besoin de ces soins ou si elles ont besoin de soins de santé tout court, le fait d'être incarcérées ne devrait pas les empêcher d'avoir droit aux mêmes soins auxquels elles auraient droit si elles n'étaient pas détenues.

    Je crois qu'il n'en est pas ainsi à l'heure actuelle. Il n'en est pas ainsi en tout cas pour les personnes qui sont en détention à Toronto—ce sont celles dont nous connaissons le mieux la situation—, car elles n'ont pas accès aux soins et aux traitements auxquels elles devraient avoir droit dans le milieu carcéral.

    Le fait est qu'il ne s'agit pas simplement d'une question de principe humanitaire—c'est bien plus que cela—, car si nous avions dans les établissements pénitentiaires les moyens d'assurer à ces personnes les soins de santé mentale dont elles ont besoin, les soins que nous dispensons dans les établissements hospitaliers pourraient être dispensés à un coût bien moindre dans les prisons. Je reviens à mon argument de tout à l'heure. La procédure en place à l'heure actuelle est telle que nous ne sommes pas censés transférer ces personnes de la prison à l'hôpital tant qu'il n'a pas été décidé si elles sont responsables criminellement. Tant que cette décision n'a pas été rendue, les ressources hospitalières ne sont censées être utilisées que pour seconder l'administration de la justice. Les soins dont ces personnes ont besoin peuvent très bien leur être dispensés en prison dans la vaste majorité des cas.

    Les psychiatres qui dispensent des soins en milieu hospitalier sont les mêmes que nous enverrions dispenser des soins dans les prisons. Pour que ces personnes reçoivent les soins dont elles ont besoin en prison, il faudrait créer dans les prisons des unités spéciales où des infirmiers ou infirmières psychiatriques pourraient leur dispenser les soins de santé dont elles ont besoin, notamment les soins psychiatriques.

    Nous sommes actuellement en négociation avec le ministère provincial des Services correctionnels. Nous envisageons de créer un centre de détention provisoire de 100 lits à Toronto. Les soins psychiatriques pourraient ainsi être dispensés dans le milieu correctionnel, et nous pourrions résoudre certains des problèmes qui se posent.

À  +-(1050)  

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Peter MacKay.

+-

    M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC): En ce qui concerne justement votre dernier point, monsieur Barbaree, le but visé n'est manifestement pas le même dans un établissement correctionnel que dans un service de médecine légale. Le premier accorde bien sûr plus d'importance à la protection du public, tout en cherchant à réhabiliter le détenu et à favoriser sa réinsertion, tandis que, dans l'autre, c'est le traitement qui prime.

    Étant donné cette différence fondamentale—et j'invite tous les témoins à répondre—, pensez-vous que les commissions d'examen pourraient très bien décider elles-mêmes d'accorder l'absolution inconditionnelle ou prendre une décision finale sans qu'elles doivent ensuite soumettre leur décision ou leur recommandation à un juge qui aurait le dernier mot comme c'est le cas à l'heure actuelle? Mme Czukar nous a présenté son opinion à elle, mais c'est presque le contraire que nous avons entendu de la part des avocats de la défense au criminel—l'Association du Barreau canadien, l'Association des avocats au criminel—et des commissions d'examen qui disent: «Nous préférerions de beaucoup nous en tenir à notre mandat actuel qui est de faire une recommandation en vue d'une décision finale.» Je ne sais pas s'ils disent cela pour éviter les poursuites au civil qui pourraient découler de leur décision ou parce qu'ils ont tout simplement l'impression d'après leur expérience que c'est ce qui marche le mieux.

+-

    M. Howard Barbaree: Je vais répondre rapidement avant de céder la parole aux autres témoins.

    Il me semble que, quand on regarde les cas des personnes jugées inaptes à subir leur procès qui pourraient recevoir une absolution inconditionnelle d'une commission d'examen, on constate que beaucoup d'entre elles ont commis des infractions que la plupart des gens ne considéreraient pas comme des infractions criminelles graves. Cela étant, on pourrait peut-être envisager de faire une distinction selon le type d'infraction. Les commissions d'examen se prononceraient sur les infractions les moins graves, tandis que pour les autres, on s'en remettrait aux tribunaux. Ce serait là un compromis raisonnable.

+-

    M. Peter MacKay: Cela permettrait aussi de réduire l'arriéré.

+-

    M. Howard Barbaree: Tout à fait. Et de réduire aussi les coûts.

+-

    M. David Griffin: L'idée de confier aux commissions d'examen le pouvoir décisionnel qui appartient à l'heure actuelle aux juges nous inquiète. Une fois que l'inculpé a été jugé non responsable criminellement, le rôle de la commission d'examen n'est pas tellement de se prononcer sur la culpabilité criminelle mais plutôt de déterminer si la personne peut être libérée et réintégrée dans la société. Aussi je pense que nous devrions continuer à laisser aux tribunaux le soin de se prononcer sur cette question.

    Finalement, ce dont il est question ici, sans que nous l'ayons dit de façon directe, c'est de la personne qui n'a aucune chance de devenir un jour apte à subir son procès et ce que le système doit prévoir dans un cas comme celui-là. Je crois que c'est un problème à l'heure actuelle. Tout le monde a parlé de ce qu'il convenait de faire de ces examens bisannuels. Chacun sait que la personne a peu de chance d'être un jour apte à subir son procès. Ce que nous souhaitons d'abord et avant tout, c'est que, si la personne constitue une menace importante pour la sécurité publique, il y ait des mesures en place pour éviter qu'elle ne soit libérée à cause de considérations qui ne devraient pas entrer en ligne de compte ou qu'elle ne passe entre les mailles du filet. C'est pourquoi le système exige que la personne revienne périodiquement devant les tribunaux.

    Par contre, quand il s'agit d'une infraction moins grave, d'une infraction qui n'inquiéterait guère la majorité des gens, il ne paraît pas raisonnable de faire revenir ainsi la personne tous les deux ans pour passer par cette procédure exhaustive. Il y aurait peut-être lieu de faire une distinction selon la gravité de l'infraction, mais quand il s'agit d'infractions graves, meurtre, agression sexuelle, etc., nous estimons qu'il faut continuer de s'en remettre aux tribunaux.

+-

    M. Peter MacKay: Je voudrais poser rapidement une question au sujet des victimes. Je sais que vous avez abordé la question dans votre mémoire, monsieur Griffin, et c'est pourquoi je m'adresse aux autres témoins: pensez-vous que la commission d'examen a un rôle à jouer pour permettre aux victimes de venir témoigner verbalement ou au moins de faire connaître leurs préoccupations, particulièrement dans les cas de crimes avec violence?

    Je crois que la discussion sur la possibilité de diviser les crimes entre ceux qui sont graves et ceux qui le sont moins est très valable. C'est d'ailleurs ce que nous envisageons pour les jeunes contrevenants dans le cadre de la nouvelle Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, ce qui devrait nous permettre de simplifier de beaucoup la façon dont nous traitons les cas.

À  +-(1055)  

+-

     Me Gail Czukar: Notre centre ne s'est pas vraiment prononcé officiellement là-dessus, et c'est pourquoi c'est surtout une question de pratique et d'opinions personnelles. Je sais que M. Barbaree a expliqué qu'on faisait place parfois aux victimes aux audiences de la commission d'examen. Lorsque nous avons consulté nos collègues à l'interne, notamment l'avocat qui s'occupait des clients et l'avocat du conseil d'habilitation, ceux-ci ne pensaient pas que les déclarations des victimes avaient leur place lors des audiences de la commission d'examen. Je ne sais pas ce qu'en pensent les autres, mais j'ai l'impression que l'un dans l'autre, nous ne serions pas d'accord pour qu'il y ait des déclarations des victimes.

    Comme l'a si bien expliqué M. Barbaree, il existe une différence de philosophie entre le système de justice pénale, d'une part, et le milieu de la santé mentale, d'autre part. L'important pour la commission d'examen, c'est d'évaluer la menace que représente l'accusé pour la collectivité, mais aussi l'état de santé de celui-ci. Or, la déclaration de la victime tend à mettre l'accent plutôt sur l'aspect pénal que sur l'aspect santé. S'il s'agit de déterminer si l'accusé est suffisamment sain et a suffisamment la maîtrise de soi pour rester dans la collectivité sans représenter une menace pour celle-ci, alors la déclaration de la victime... Quand le crime a été commis 10 ou 15 ans auparavant, cette déclaration de la victime pourrait être très préjudiciable à l'égard d'une décision qui pourrait aujourd'hui favoriser de façon raisonnable la réinsertion dans la collectivité.

+-

    Le président: Monsieur Griffin.

+-

    M. David Griffin: Nous avons réfléchi à la question parce que tout dépend de l'objectif que l'on fixe à la commission d'examen et du rôle qu'on veut lui faire jouer.

    Il faut d'abord et avant tout que les victimes comprennent la démarche suivie et soient conscientes du fait que l'individu peut être renvoyé dans la collectivité. Or, dans bien des cas, il y a des relations familiales ou autres particulières et il peut y avoir des éléments d'information qui manquent à la commission d'examen et certaines personnes qui savent des choses qui ne sont pas révélées à la commission d'examen. Il est évident que les victimes devraient être au fait des différentes étapes du processus suivi, qu'elles devraient être averties et qu'elles devraient être informées de ce qui surviendra probablement. On devrait leur demander si elles ont en main des informations au sujet de l'individu en question.

    Mais les déclarations de la victime soulèvent en soi quelques préoccupations. Les victimes doivent avoir voix au chapitre, mais peut-être pas au point où leur intervention pourrait nuire à la démarche suivie; mais en même temps, elles ne devraient pas être reléguées au simple rôle de spectateur. Il s'agit de trouver le juste équilibre.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Griffin.

    La dernière question doit revenir au membre le plus récent de notre comité, M. Hill, que j'ai oublié de présenter officiellement en tant que membre de notre comité. Il a donc droit à une question supplémentaire.

+-

    M. Jay Hill: Une question supplémentaire? Merci, monsieur le président. Il faut bien que ma présence ici représente quelque avantage.

    En dernier lieu, j'aimerais revenir à la déclaration de la victime. Randy White, un de mes collègues, a déployé énormément d'efforts au cours des dernières années pour essayer de faire reconnaître par la loi une charte des droits des victimes. J'avais l'impression que des modifications apportées il y a un an environ accordaient plus de place en droit aux déclarations des victimes.

    M. Griffin, dans son exposé, laissait entendre que ce n'est peut-être pas le cas et qu'il arrive encore que les victimes soient parfois laissées pour compte, du moins dans les cas d'accusés non responsables criminellement. Y a-t-il une différence entre, d'une part, ce cas que je viens d'exposer et, d'autre part, les audiences en vue de libération conditionnelle d'autres contrevenants au cours desquelles on laisse plus de place aux victimes et on leur reconnaît un plus grand rôle? D'après ce que vous avez dit, on ne leur reconnaît pas un rôle à jouer en ce qui concerne les crimes commis pour raison de troubles mentaux.

+-

    Le président: Merci, monsieur Hill.

    Monsieur Griffin.

+-

    M. David Griffin: Je pense au contraire qu'il y a eu une évolution énorme dans le rôle que les victimes peuvent jouer dans notre système judiciaire—qu'il s'agisse des audiences en vue de la libération conditionnelle, de la détermination de la peine, ou de ce qui se passe devant les tribunaux. Mais d'après ce que je comprends, on ne leur reconnaît pas encore de rôle accru lorsque les accusés ne sont pas responsables criminellement. Nous croyons pourtant que cela devrait être le cas et que les victimes ne devraient pas entendre parler de ce qui se passe au tribunal par les médias ou par des tiers. On devrait communiquer avec elles directement et leur faire savoir quelle est la démarche suivie.

Á  -(1100)  

+-

    Le président: Monsieur Barbaree.

+-

    M. Howard Barbaree: Les victimes jouent un rôle lors des audiences en vue de la libération conditionnelle, dans le système correctionnel. En effet, elles peuvent présenter leur point de vue, alors que cela leur est impossible, en tout cas officiellement, dans notre système à nous. En effet, l'information sur les préjudices causées à la victime et sur les répercussions du crime sur elle sont présentées au tribunal par le ministère public.

    Comme le signalait M. Griffin, il arrive souvent que la victime fasse partie de la famille dans laquelle on veut réintégrer l'individu. La victime est souvent présente à la commission d'examen et on lui demande souvent de parler, non pas officiellement en tant que victime, mais comme quelqu'un qui appuie la réinsertion de l'individu dans la collectivité.

-

    Le président: Merci beaucoup.

    Pour la gouverne des membres du comité, sachez qu'il existe effectivement une disposition permettant que les déclarations de victime soient faites aux commissions d'examen. La démarche qui est prévue n'est pas la même que celle qui se ferait dans le système de justice pénale. Je vous renvoie à l'article 672.541 du chapitre en question.

    Je remercie maintenant les témoins d'avoir comparu. Leur témoignage a été très utile car c'est un dossier très complexe. Au fil des jours, nous nous rendons compte de la complexité de l'enjeu, mais nous comprenons toujours aussi un peu plus la question. Nous en remercions les témoins d'aujourd'hui et les autres aussi.

    Je suspends maintenant le comité, puisque nous passons à huis clos.

    [Note de la rédaction—La séance se poursuit à huis clos]