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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 192

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 27 mai 2002




1100
V     Les travaux de la Chambre
V         Le président suppléant (M. Bélair)

1105
V INITIATIVES PARLEMENTAIRES
V     Loi sur les prédateurs d'enfants
V         M. Jim Pankiw (Saskatoon--Humboldt, Ind.)

1110
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne)

1115

1120
V         Mme Marlene Jennings (secrétaire parlementaire de la ministre de la Coopération internationale, Lib.)

1125

1130
V         Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno--Saint-Hubert, BQ)

1135
V         M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC)

1140

1145
V         M. Gary Lunn (Saanich--Gulf Islands, Alliance canadienne)

1150

1155
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         M. Jim Pankiw (Saskatoon--Humboldt, Ind.)

1200
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         M. Peter MacKay
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V INITIATIVES MINISTÉRIELLES
V     LOI SUR LA PROCRÉATION ASSISTÉE
V         M. Reed Elley (Nanaimo--Cowichan, Alliance canadienne)

1205

1210
V         M. John Bryden (Ancaster--Dundas--Flamborough--Aldershot, Lib.)

1215

1220
V         M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne)

1225

1230
V         M. Jim Gouk (Kootenay--Boundary--Okanagan, Alliance canadienne)

1235

1240
V         M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC)

1245

1250
V         Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne)

1255

1300
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne)

1305

1310
V         M. Paul Szabo (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.)

1315

1320
V         M. Reed Elley (Nanaimo--Cowichan, Alliance canadienne)

1325

1330
V         M. John Bryden (Ancaster--Dundas--Flamborough--Aldershot, Lib.)

1335
V         M. Jim Gouk (Kootenay--Boundary--Okanagan, Alliance canadienne)

1340

1345
V         M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne)

1350

1355
V DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
V     L'aide juridique
V         L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.)
V     La coupe Mémorial
V         M. Jim Abbott (Kootenay--Columbia, Alliance canadienne)

1400
V     La Marche des partenaires mondiaux
V         Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce--Lachine, Lib.)
V     Jesse Rosensweet
V         Mme Sarmite Bulte (Parkdale--High Park, Lib.)
V     Le mois de la sensibilisation à l'hépatite
V         Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.)
V     Le député de York-Centre
V         M. Brian Pallister (Portage--Lisgar, Alliance canadienne)
V         Le Président
V     La Féria du vélo de Montréal
V         Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.)

1405
V     Les contrats gouvernementaux
V         Mme Diane Bourgeois (Terrebonne--Blainville, BQ)
V     Le Centre hospitalier pour enfants de l'est de l'Ontario
V         M. Mauril Bélanger (Ottawa--Vanier, Lib.)
V     Le député de Glengarry--Prescott--Russell
V         Mme Betty Hinton (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, Alliance canadienne)
V     La défense nationale
V         M. Janko Peric (Cambridge, Lib.)
V     La communauté juive d'Ottawa
V         Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD)

1410
V     Le remaniement ministériel
V         Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno--Saint-Hubert, BQ)
V     La communauté juive d'Ottawa
V         Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.)
V     Les pêches
V         M. Rex Barnes (Gander--Grand Falls, PC)
V     Le collège Kenner
V         M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)
V     Le Parti libéral du Canada
V         Mme Diane Ablonczy (Calgary--Nose Hill, Alliance canadienne)

1415
V     L'indice UV
V         Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.)
V QUESTIONS ORALES
V     Les marchés publics
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne)
V         L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.)
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne)
V         L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.)
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne)
V         L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.)
V         M. Gerry Ritz (Battlefords--Lloydminster, Alliance canadienne)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         M. Gerry Ritz (Battlefords--Lloydminster, Alliance canadienne)

1420
V         L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.)
V         M. Gilles Duceppe (Laurier--Sainte-Marie, BQ)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         M. Gilles Duceppe (Laurier--Sainte-Marie, BQ)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         M. Michel Gauthier (Roberval, BQ)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         M. Michel Gauthier (Roberval, BQ)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)

1425
V         M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD)
V         L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.)
V         M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD)
V         Le Président
V         L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.)
V         Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC)
V         Le Président
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC)

1430
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         M. John Reynolds (West Vancouver--Sunshine Coast, Alliance canadienne)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         M. John Reynolds (West Vancouver--Sunshine Coast, Alliance canadienne)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         M. Rahim Jaffer (Edmonton--Strathcona, Alliance canadienne)

1435
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         M. Rahim Jaffer (Edmonton--Strathcona, Alliance canadienne)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ)
V         L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.)
V         Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ)
V         L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.)
V         Mme Diane Ablonczy (Calgary--Nose Hill, Alliance canadienne)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         Mme Diane Ablonczy (Calgary--Nose Hill, Alliance canadienne)

1440
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V     La recherche et le développement
V         Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.)
V         L'hon. Allan Rock (ministre de l'Industrie, Lib.)
V     La santé
V         Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD)
V         L'hon. Anne McLellan (ministre de la Santé, Lib.)
V         Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD)
V         L'hon. Anne McLellan (ministre de la Santé, Lib.)
V     Les marchés publics
V         M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC)

1445
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC)
V         Le Président
V         L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.)
V         M. James Moore (Port Moody--Coquitlam--Port Coquitlam, Alliance canadienne)
V         L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.)
V         M. James Moore (Port Moody--Coquitlam--Port Coquitlam, Alliance canadienne)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ)

1450
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V         M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne)
V         L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.)
V         M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V     Le bois d'oeuvre
V         M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.)
V         L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.)
V     Les marchés du gouvernement
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne)
V         L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.)
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne)

1455
V         L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.)
V         Le Président
V     Le remorquage des bateaux
V         M. Mario Laframboise (Argenteuil--Papineau--Mirabel, BQ)
V         L'hon. Robert Thibault (ministre des Pêches et des Océans, Lib.)
V     La Soirée du hockey
V         M. Mauril Bélanger (Ottawa--Vanier, Lib.)
V         L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.)
V     Le conseiller en éthique
V         M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V     Les services de traversiers
V         M. Paul Crête (Kamouraska--Rivière-du-Loup--Témiscouata--Les Basques, BQ)

1500
V         L'hon. Allan Rock (ministre de l'Industrie, Lib.)
V     Les affaires autochtones
V         M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD)
V         L'hon. Robert Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.)
V     Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration
V         Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.)
V Affaires courantes
V     L'assurance-emploi
V         L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.)
V     Réponse du gouvernement à des pétitions
V         Mme Karen Redman (secrétaire parlementaire du ministre de l'Environnement, Lib.)
V     Les comités de la Chambre
V         Pêches et Océans
V         M. Wayne Easter (Malpeque, Lib.)
V     Les Travaux de la Chambre
V         L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)

1505
V         Le Président
V         Adoption de la motion
V     Pétitions
V         Le transport aérien
V         M. Mario Laframboise (Argenteuil--Papineau--Mirabel, BQ)
V         L'assurance-emploi
V         M. Yvon Godin (Acadie--Bathurst, NPD)
V         La santé
V         M. Svend Robinson (Burnaby--Douglas, NPD)
V         Les maladies du rein
V         M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)

1510
V     Questions au Feuilleton
V         Mme Karen Redman (secrétaire parlementaire du ministre de l'Environnement, Lib.)
V         Mme Marlene Catterall
V         Le Président
V     Le Règlement
V         Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest--Nepean, Lib.)
V         Le Président
V         Adoption de la motion
V     Demande de débat d'urgence
V         L'éthique
V         Le Président
V         M. John Reynolds (West Vancouver--Sunshine Coast, Alliance canadienne)
V         Décision de la présidence
V         Le Président

1515
V Initiatives ministérielles
V     Loi sur la procréation assistée
V         Mme Lynne Yelich (Blackstrap, Alliance canadienne)

1520

1525
V         M. James Moore (Port Moody--Coquitlam--Port Coquitlam, Alliance canadienne)

1530

1535
V         M. Rahim Jaffer (Edmonton--Strathcona, Alliance canadienne)

1540

1545
V         Mme Cheryl Gallant (Renfrew--Nipissing--Pembroke, Alliance canadienne)

1550

1555
V         M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne)

1600

1605
V         M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne)

1610

1615
V         M. Paul Crête (Kamouraska--Rivière-du-Loup--Témiscouata--Les Basques, BQ)

1620

1625
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         M. Jim Abbott (Kootenay--Columbia, Alliance canadienne)

1630

1635
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         M. Jim Abbott (Kootenay--Columbia, Alliance canadienne)

1640

1645
V         M. Paul Crête (Kamouraska--Rivière-du-Loup--Témiscouata--Les Basques, BQ)

1650

1655
V         Le président suppléant (M. Bélair)

1700
V      Loi de 2002 sur la sécurité publique
V         M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ)

1705

1710
V         M. Svend Robinson (Burnaby--Douglas, NPD)

1715

1720
V         M. Bill Casey (Cumberland--Colchester, PC)

1725
V         M. Jim Abbott (Kootenay--Columbia, Alliance canadienne)

1730

1735
V         M. Paul Crête (Kamouraska--Rivière-du-Loup--Témiscouata--Les Basques, BQ)

1740

1745
V         Mme Diane Ablonczy (Calgary--Nose Hill, Alliance canadienne)

1750

1755
V         M. Yvon Godin (Acadie--Bathurst, NPD)

1800

1805
V         Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ)

1810

1815
V         M. Peter MacKay
V         Le vice-président
V         M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, Alliance canadienne)

1820

1825
V         Le vice-président
V MOTION D'AJOURNEMENT
V         Les marchés publics
V         M. Jim Pankiw (Saskatoon--Humboldt, Ind.)

1830
V         M. Paul Szabo (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.)

1835
V         M. Jim Pankiw
V         M. Paul Szabo
V         Les campagnes à la direction
V         M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne)

1840
V         M. Paul Harold Macklin (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.)
V         M. James Rajotte
V         M. Paul Harold Macklin
V         L'enregistrement des armes à feu
V         M. Garry Breitkreuz (Yorkton--Melville, Alliance canadienne)

1845
V         M. Paul Harold Macklin (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.)

1850
V         M. Garry Breitkreuz
V         M. Paul Harold Macklin
V         Le vice-président






CANADA

Débats de la Chambre des communes


VOLUME 137 
NUMÉRO 192 
1re SESSION 
37e LÉGISLATURE 

COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)

Le lundi 27 mai 2002

Présidence de l'honorable Peter Milliken

    La séance est ouverte à 11 heures.


Prière


*   *   *

  +(1100)  

[Français]

+Les travaux de la Chambre

[Travaux de la Chambre]
+

    Le président suppléant (M. Bélair): Conformément au paragraphe 81(14) du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre la motion qu'elle abordera demain, lors de la prise en considération des travaux des subsides.

[Traduction]

Que la Chambre a perdu confiance dans le gouvernement parce qu'il n'a pas su persuader le gouvernement des États-Unis de mettre fin aux politiques protectionnistes causant préjudice aux secteurs canadiens de l'agriculture et du bois d'oeuvre et qu'il a omis d'appliquer des mesures compensatrices contre les préjudices commerciaux subis par ces deux secteurs.

    Cette motion, inscrite au nom de l'honorable député d'Île de Vancouver-Nord, fera l'objet d'un vote. Des copies de la motion sont disponibles au Bureau.

[Français]

    Comme il est 11 h 5, la Chambre abordera maintenant l'étude des affaires émanant des députés, selon l'ordre indiqué au Feuilleton d'aujourd'hui.


+INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Initiatives parlementaires]

*   *   *

  +-(1105)  

[Traduction]

+-Loi sur les prédateurs d'enfants

+-

    M. Jim Pankiw (Saskatoon--Humboldt, Ind.) propose: Que le projet de loi C-437, Loi prévoyant que l'auteur d'une infraction d'ordre sexuel à l'égard d'un enfant purge entièrement sa peine sans libération anticipée ou conditionnelle et soit déclaré prédateur d'enfants, et modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition ainsi que le Code criminel, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

    --Monsieur le Président, en résumé, la Loi sur les prédateurs d'enfants définit l'expression «acte de prédation contre un enfant», qui vise une infraction à l'égard d'un enfant lors de laquelle le délinquant s'adonne à une activité sexuelle. Elle modifie la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition pour interdire, tant aux personnes ayant commis un acte de prédation contre un enfant qu'aux personnes ayant été déclarées prédateurs d'enfants aux termes des nouvelles dispositions du Code criminel, toute permission de sortir sans escorte, semi-liberté, libération conditionnelle totale ou libération d'office. Cette modification contraint les délinquants ayant commis un acte de prédation contre un enfant à purger en détention la totalité de leur peine.

    Le texte modifie également le Code criminel pour prévoir la possibilité de demander au tribunal de déclarer prédateur d'enfants une personne qui a commis un acte de prédation contre un enfant et qui a démontré soit son incapacité à contrôler ses impulsions sexuelles, soit son indifférence quant aux conséquences que son comportement peut avoir sur ses victimes.

    En cas de récidive, le tribunal peut imposer au délinquant déclaré prédateur d'enfants une peine de détention pour une période indéterminée. Le tribunal doit également ordonner à tout délinquant déclaré prédateur d'enfants de recevoir des services de consultation et, pour une période d'au moins cinq ans après sa mise en liberté, d'éviter de se retrouver en présence d'enfants, de se soumettre à une surveillance électronique et de se présenter en personne tous les mois à un officier de police pour indiquer son lieu de résidence et son lieu de travail.

    Si le délinquant n'est pas déclaré prédateur d'enfants, le tribunal, au moment de prononcer la peine pour l'acte de prédation contre un enfant, peut rendre toute ordonnance mentionnée dans le texte et déclarer l'accusé délinquant à contrôler; il doit dans tous les cas ordonner que le délinquant évite de se retrouver en présence d'enfants et se présente tous les mois à un officier de police.

    Le ministre de la Justice serait tenu d'instaurer des procédures pour veiller à ce que tout défaut de se conformer à une ordonnance, y compris l'omission de se présenter aux policiers, entraîne l'émission immédiate d'un mandat d'arrestation et la transmission d'un avis de cette omission aux services policiers pertinents.

    L'une des principales faiblesses du gouvernement libéral a été son refus de renforcer le système de justice pénale et sa rigueur à l'égard des délinquants violents et récidivistes. Il en découle que nous nous sentons moins en sécurité dans nos maisons et nos collectivités.

    Selon le Centre canadien de la statistique juridique, la criminalité a augmenté constamment depuis 1993. Cependant, ce n'est que tout récemment, lorsque le centre de psychiatrie régional de Saskatoon a été obligé d'accepter le pédophile condamné Karl Toft, que les gens de cette collectivité ont vraiment compris dans quelle mesure le Code criminel ne protégeait pas adéquatement notre société.

    Toft est le prédateur d'enfants notoire qui a été condamné à 13 ans d'emprisonnement pour 34 agressions sexuelles commises contre des jeunes garçons alors qu'il travaillait dans un centre de formation pour les jeunes. Ce qui est vraiment troublant, c'est que Toft, dont les victimes pourraient finalement se compter par centaines, est devenu admissible à une libération conditionnelle après avoir purgé une fraction de sa peine. Non seulement est-il devenu admissible à une libération conditionnelle, même si ses possibilités de réadaptation étaient très minces et qu'il était très susceptible de récidiver, mais il a eu droit à une libération avec hébergement en maison de transition.

    On aurait dû conclure d'emblée qu'un prédateur comme Toft devrait passer le reste de sa vie derrière les barreaux. Cependant, au moment de la détermination de la peine, le juge lui avait accordé des peines concurrentes et non des peines consécutives. Par conséquent, malgré l'odieux des crimes qu'il a commis contre des enfants, Toft a eu droit à la libération conditionnelle après avoir purgé seulement les deux tiers de sa peine, soit neuf ans.

    Après un bref séjour d'évaluation à Saskatoon, Toft a discrètement été libéré par les agents de la Commission nationale des libérations conditionnelles. Ils l'ont libéré malgré les objections de ses victimes, qui doivent vivre avec les séquelles physiques et psychologiques des traitements qu'il leur a infligés.

    C'est pourquoi j'ai présenté ce projet de loi conçu pour empêcher qu'une telle situation se reproduise. Le projet de loi C-437, Loi sur les prédateurs d'enfants, ferait en sorte que tout individu reconnu coupable d'une infraction d'ordre sexuel à l'égard d'un enfant purge entièrement sa peine et soit déclaré contrevenant dangereux. Cette désignation est essentielle pour garder les pédophiles indéfiniment derrière les barreaux. Les dispositions concernant l'imposition de la peine s'appliqueraient à la première infraction, ce qui aurait un effet de dissuasion.

    Du point de vue judiciaire et de la sécurité de nos localités, la Loi sur les prédateurs d'enfants est une approche pleine de bon sens qui place la sécurité de nos enfants avant les droits des pédophiles.

    Tant que le gouvernement fédéral refuse d'envisager de modifier le Code criminel, il incombe aux représentants élus de tous les ordres de gouvernement de continuer à dire exactement ce qu'il en est dans l'espoir que l'opinion publique l'oblige à apporter des modifications.

    J'ai entre les mains l'évaluation psychiatrique du pédophile Karl Toft. Je n'ai pas le temps de la lire en entier, mais je vais en citer un paragraphe qui souligne la gravité de la situation. Le voici:

Vous avez été diagnostiqué comme étant un homosexuel pédophile...soit la catégorie pour laquelle le risque de récidive est le plus élevé, même après un traitement intensif, du fait que vous souffrez de troubles de la personnalité et que vous avez des tendances schizoïdes et anti-sociales. Le pronostic pour les gens qui ont ce profil est généralement médiocre car la thérapie est difficile.

    En dépit de cette évaluation, ce type, reconnu coupable de 34 infractions contre des enfants, a été remis en liberté après avoir servi seulement deux tiers de sa peine.

  +-(1110)  

    Relâcher des pédophiles dans la collectivité est extrêmement dangereux et je suis épouvanté qu'ils passent si peu de temps en prison. Le projet de loi empêcherait que les contrevenants sexuels déviants soient remis en liberté et s'attaquent aux enfants.

    Les études prouvent que les pédophiles sont incurables et qu'ils constituent une menace pour nos enfants. Leur place est derrière les barreaux. Le gouvernement libéral refuse que les prédateurs d'enfants soient automatiquement déclarés contrevenants dangereux quand ils sont condamnés, ce qui garantirait qu'ils passent le reste de leurs jours en prison.

    J'ai bien entendu comparu devant le comité qui étudie les initiatives parlementaires afin de demander que mon projet de loi puisse faire l'objet d'un vote, mais les libéraux membres du comité ont refusé. J'aimerais maintenant demander le consentement unanime de la Chambre pour que le projet de loi soit mis aux voix.

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Le député a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour que le projet de loi soit mis aux voix?

    Des voix: D'accord.

    Des voix: Non.

+-

    M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur cette mesure d'initiative parlementaire, le projet de loi C-437, parrainée par le député de Saskatoon--Humboldt. Je tiens à féliciter mon collègue d'avoir présenté ce projet de loi d'initiative parlementaire. C'est une mesure qui vient au bon moment.

    Le projet de loi vise à modifier la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition pour interdire, tant aux personnes ayant commis un acte de prédation contre un enfant qu'aux personnes ayant été déclarées prédateurs d'enfants aux termes des nouvelles dispositions du Code criminel, toute permission de sortir sans escorte, semi-liberté, libération conditionnelle totale ou libération d'office. Autrement dit, si le projet de loi était adopté, les prédateurs sexuels à l'égard d'enfants auraient à purger en détention la totalité de leur peine. Voilà une idée originale: obliger les violeurs et les prédateurs sadiques à rester toute la durée de leur peine derrière les barreaux, où ils ne constitueront plus une menace pour les enfants.

    Je recommanderais en toute déférence pour le député de Saskatoon--Humboldt que ce projet de loi ou un autre similaire aille encore plus loin afin d'éliminer la libération d'office pour tous les délinquants et d'accorder la semi-liberté et les permissions de sortir sans escorte avec beaucoup plus de réserve. Comme le projet de loi n'est pas votable, il ne prendra malheureusement pas force de loi. Il est très improbable que ce projet de loi ou toute autre mesure visant à éliminer la libération d'office ou à limiter la semi-liberté et les permissions de sortir sans escorte devienne un jour réalité tant que ce gouvernement sera au pouvoir.

    Il y a amplement raison d'appuyer des mesures comme celles qui figurent dans le projet de loi. D'après les chiffres de Service correctionnel Canada pour les années 1989 à 1994, quelque 4 980 individus, soit 60 p. 100 de ceux qui ont été jugés coupables d'infractions avec violence telles qu'agression d'enfants, homicide, viol ou tentative de meurtre, ont récidivé pendant qu'ils étaient en libération conditionnelle.

    Les chiffres ne montrent pas adéquatement comment les récidivistes deviennent progressivement plus violents. Je voudrais donc donner à la Chambre quelques exemples qui démontrent d'excellente façon pourquoi il faut éliminer ou limiter la libération d'office, la semi-liberté et même les permissions de sortir sans escorte pour les délinquants sexuels à l'égard d'enfants. Voici un exemple:

En 1975, Allan Wayne Walsh, de Mission, en Colombie-Britannique, a été trouvé coupable de plus de 60 infractions, dont des séquestrations de femmes, des agressions sexuelles, des vols et des infractions liées aux armes. En 1983, il a été trouvé coupable de 26 autres infractions, dont deux viols, et il a été condamné à 25 ans de pénitencier. Dix ans plus tard, il a obtenu une libération conditionnelle et, quelques mois après, il a utilisé un couteau pour tenter de violer une femme, puis il en a violé et volé une autre. Le 21 septembre 1995, il a été inculpé de sept nouvelles infractions, y compris une agression sexuelle, qui ont amené la Couronne à le déclarer délinquant dangereux. Ces sept infractions supplémentaires n'auraient jamais été perpétrées si Walsh avait purgé sa peine de 25 ans au complet. Sept personnes innocentes n'auraient pas été attaquées si ce dangereux délinquant avait purgé sa peine de 25 ans en totalité.

    Sept familles dévastées auraient été épargnées.

    L'Alliance canadienne croit au principe qui veut que les peines soient réellement appliquées pour tous les délinquants violents et dangereux. Or, ce principe n'est pas respecté aujourd'hui. Pour qu'elles aient un sens, les peines de 25 ans doivent être purgées dans leur totalité. Essentiellement, nous nous opposons aux libérations conditionnelles et aux réductions de peine accordées par les tribunaux après étude du dossier du délinquant.

    Un autre exemple qui illustre mon point de vue a trait à Ronald Richard McCauley, un autre violeur de la Colombie-Britannique, qui a été condamné à 17 ans de pénitencier pour deux viols sauvages où les victimes ont été laissées pour mortes. McCauley avait, lui aussi, un dossier criminel très lourd au moment de la détermination de la peine. En 1992, lorsqu'il est devenu admissible à une libération conditionnelle, McCauley a révélé que, s'il n'avait pas été arrêté, il serait devenu un meurtrier en série comme Clifford Olson. Estimant que McCauley n'avait, apparemment, profité de son traitement que de façon superficielle, la commission a rejeté sa demande. Cependant, deux ans plus tard, en 1994, McCauley a obtenu une libération d'office. En 1995, il a fait l'objet d'une enquête pour le meurtre de deux femmes de Vancouver.

  +-(1115)  

    Dans un autre cas, en 1983, James Ronald Robinson, d'Ottawa, a été trouvé coupable d'homicide involontaire après la mort d'une jeune fille de 17 ans qui avait été poignardée, en l'occurrence Roxanne Nairn, étudiante de douzième année. Robinson s'est vu imposer une peine de trois années d'emprisonnement pour homicide involontaire. Il a toutefois bénéficié d'une libération anticipée en dépit du fait qu'il ait essayé de faire passer du hachisch en contrebande en prison, à son retour d'une sortie sans surveillance. En 1990, Robinson a passé deux autres années en prison pour avoir violé et menacé de mort une femme avec qui il avait vécu après sa sortie de prison. Le 6 mars 1995, il a été accusé d'une nouvelle agression sexuelle et une autre victime voyait sa vie basculer et ternie à jamais.

    Dans un autre cas, en dépit de peines consécutives totalisant 27 ans, et d'infractions commises pendant sa libération conditionnelle, Claude Forget a reçu, en 1993, une permission de sortir sous surveillance pour rendre visite à sa soeur. Il s'est échappé. Forget a oublié le chemin de la maison, mais deux mois plus tard, il a tiré sur deux agents de police. En septembre 1995, il a eu droit à la libération conditionnelle après avoir purgé uniquement une très petite partie de sa peine parce que des lacunes dans le système ont fait en sorte que les nouvelles peines soient combinées à celles qui précédaient. Forget était admissible à la libération conditionnelle presque aussitôt après avoir été trouvé coupable de deux tentatives de meurtre parce que les peines n'étaient pas traitées comme consécutives. C'est ainsi qu'en décembre 1995, Forget a fait l'objet d'une audience de libération conditionnelle totale.

    Permettez-moi de donner à la Chambre un autre exemple encore. Il remonte à 1986, et il en a été question dans beaucoup de journaux. Martin Dubuc, un entraîneur de hockey de Montréal, a été condamné pour agression sur des joueurs de son équipe:

Après sa sortie de prison, l'interdiction à vie de travailler comme entraîneur au Québec ne l'a pas découragé. Il a changé de ville, il est devenu entraîneur, et il a fini par accéder à la présidence de l'association de hockey mineur du sud-ouest de Montréal. De surcroît, trois conseils scolaires différents de la région montréalaise l'ont engagé comme enseignant suppléant. En septembre 1995, il a plaidé coupable à l'accusation d'avoir proféré des menaces par téléphone contre des garçons de 10 à 13 ans.

    Les cas semblables se sont multipliés, et il continuera d'y en avoir à moins qu'on n'apporte à la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition des modifications semblables à celles que propose le projet de loi C-437 d'initiative parlementaire.

    Le taux de récidive ne bougera pas à moins que le gouvernement ne soit disposé à faire un effort supplémentaire. L'approche conciliante que les libéraux adoptent à l'égard du crime ne donne rien. Il nous faut appliquer le principe de la tolérance zéro pour les délinquants violents et les délinquants sexuels. Autrement dit, il faut réprimer avec fermeté les criminels sadiques qui s'attaquent aux membres les plus faibles et les plus vulnérables de notre société.

    La seule façon de vraiment protéger nos enfants contre les délinquants sexuels consiste à les incarcérer pendant toute la durée de leur peine, puis à les surveiller de près après leur mise en liberté et à consigner leur nom et leurs allées et venues dans un registre national des délinquants sexuels que le gouvernement fédéral promet depuis des mois, mais qui ne s'est toujours pas concrétisé.

    En dehors du meurtre, il n'y a probablement pas de crime qui va plus directement à l'encontre de la sensibilité et des valeurs d'une collectivité que l'agression sexuelle contre un enfant. Cet acte criminel est d'autant plus impardonnable qu'il a pour victime les membres les plus faible, les plus vulnérables, les plus innocents de notre société. Pourtant, le gouvernement ne semble pas chercher de solution à ce problème.

    Aujourd'hui, je félicite de nouveau le député de Saskatoon—Humboldt, et j'appuie sans réserve le projet de loi C-437.

  +-(1120)  

[Français]

+-

    Mme Marlene Jennings (secrétaire parlementaire de la ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-437, qui crée une nouvelle catégorie de prédateurs d'enfants et restreint la mise en liberté sous condition des délinquants appartenant à cette catégorie.

    À la lecture de la Loi sur les prédateurs d'enfants, que le député nous demande d'appuyer, on pourrait penser qu'il n'existe actuellement aucun instrument législatif pour contrer ce genre de délinquants, ce qui n'est pas du tout le cas.

    Contrairement à ce que certains pourraient laisser entendre, ce n'est pas par laxisme envers ceux qui commettent des infractions sexuelles à l'égard d'enfants que je me prononce contre ce projet de loi aujourd'hui. En vérité, je ne sais pas trop où on veut en venir en créant une nouvelle catégorie de délinquants. Le comportement déviant dont il est question est déjà, par définition, visé par les dispositions du Code criminel relatives aux délinquants dangereux. Or, les délinquants dangereux, dont la vaste majorité sont effectivement des délinquants sexuels, peuvent se voir imposer des peines d'une durée indéterminée.

    Un délinquant dangereux est un délinquant dangereux. Le fait de l'appeler «prédateur d'enfants» ne changera rien.

    Si un délinquant ne peut être déclaré délinquant dangereux selon les critères établis, il reste quand même la possibilité de le déclarer «délinquant à contrôler» et de le soumettre ainsi à une surveillance d'une durée maximale de dix ans après la fin de sa peine. On a créé cette catégorie en pensant expressément aux délinquants sexuels qu'il y a lieu d'assujettir à une longue période de surveillance dans la collectivité pour réduire le risque de récidive.

    Ces dispositions, qui n'existent qu'au Canada,—je répète qu'elles n'existent qu'au Canada—, ont été citées en exemple par des experts d'autres pays qui y voyaient un excellent moyen de surveiller de près les délinquants à risque élevé, compte tenu des limites imposées par notre Charte des droits et libertés. Il nous arrive trop souvent d'essayer d'implanter de nouvelles solutions calquées sur les façons de faire d'autres pays où l'on ne trouve pas les mesures judicieuses déjà en place au Canada.

    Je me permets de dire que le projet de loi fait particulièrement fausse route lorsqu'il propose de limiter la mise en liberté graduelle et sous condition des délinquants sexuels visés, ce qui, à mon sens, est contraire à son soi-disant objectif de protéger les Canadiens.

    D'abord, le projet de loi part de l'idée que la sécurité du public est moins menacée par un délinquant qui purge la totalité de sa peine, puis est contraint de se présenter à la police une fois par mois lorsqu'il recouvre sa liberté. Mon collègue ne le sait peut-être pas, mais le délinquant en liberté sous condition est soumis à des conditions beaucoup plus strictes que cela et il peut être retourné derrière les barreaux s'il est jugé susceptible de récidiver. Une fois que la peine est terminée, la police ne peut intervenir sur un simple soupçon.

    Qu'il soit en semi-liberté, en liberté conditionnelle totale ou en liberté d'office, le délinquant doit se présenter à un agent des libérations conditionnelles. Il doit respecter les conditions fixées par la Commission nationale des libérations conditionnelles, sinon il risque de voir sa liberté suspendue par son agent et d'être réincarcéré. En outre, l'agent des libérations conditionnelles peut discuter du comportement du délinquant avec l'entourage de celui-ci, comme sa famille et son employeur, et déceler ainsi une augmentation de la probabilité de récidive. La police n'a certainement pas le temps d'exercer une surveillance aussi étroite sur tous les délinquants sexuels.

    L'autre idée à la base du projet de loi est que la détention de longue durée est une meilleure garantie de la sécurité du public, ce qui est faux.

  +-(1125)  

    D'après une recherche datant de mai 2002, plus une personne reste longtemps en prison, plus elle risque de récidiver quand elle en sortira. Cette recherche s'appuie sur 111 études, qui portaient sur plus de 442 000 délinquants. Je pense que des conclusions si largement étayées valent la peine d'être prises en compte. Elles disaient plus précisément qu'une période d'emprisonnement plus longue était associée à un léger accroissement de la possibilité de récidive, soit d'environ 3 p. 100, et que le taux de récidive passait à 7 p. 100 si la durée de la peine était supérieure à deux ans. Ce n'est donc pas en enfermant les criminels plus longtemps qu'on va protéger la population à long terme.

    En supposant que le présent projet de loi soit adopté, la plupart des délinquants retourneraient quand même un jour dans la collectivité. Nous savons par expérience que la meilleure manière de réintégrer un délinquant consiste à lui accorder une mise en liberté progressive, et à le surveiller et à l'encadrer comme il se doit pour l'aider à vivre dans le respect des lois.

    Ce n'est pas par hasard que le programme de libérations graduelles débute par de courtes sorties avec escorte. Suivent des sorties sans escorte destinées à évaluer la capacité du délinquant de s'adapter à la vie en société. La semi-liberté est une forme de liberté moins restreinte, mais comportant néanmoins un degré appréciable de surveillance et de contrôle puisque le délinquant est tenu de rentrer chaque soir dans un foyer de transition. La libération conditionnelle totale rapproche le détenu de son élargissement complet, mais l'agent de libération conditionnelle peut faire un suivi et intervenir s'il juge que la situation se détériore.

    Intervenir ne veut pas nécessairement dire réincarcérer le délinquant immédiatement. Cela peut consister aussi à lui faire suivre un programme de counseling, resserrer les conditions de sa libération ou l'obliger à se présenter plus souvent à son agent de libération conditionnelle. Mais cela peut aussi vouloir dire de renvoyer le délinquant en prison s'il y a un sérieux danger de récidive.

    Il ne faut pas non plus mettre tous les délinquants sexuels dans le même panier. Le risque de récidive varie d'un individu à l'autre. Notre système est fondé sur cette réalité. Nous pouvons évaluer le risque que présente un individu et pas un groupe homogène et, suivant la gravité de ce risque et notre capacité de le contrôler dans la collectivité, décider du moment de la libération. Si le délinquant est libéré d'office, ce qui est souvent critiqué, il sera sous surveillance jusqu'à l'expiration de sa peine, alors que s'il demeure incarcéré jusqu'à la fin, nous n'aurons plus le droit de le surveiller une fois qu'il sera en liberté.

    Lorsqu'un délinquant nécessite une surveillance de longue durée, deux choix s'offrent à nous, comme je le mentionnais précédemment. Un délinquant dangereux se voit nécessairement imposer une peine d'une durée indéterminée et demeure sous la surveillance des services correctionnels durant le reste de ses jours et ce, même s'il obtient une libération.

    Si un individu est déclaré délinquant à contrôler—et c'est une option qui existe déjà—, il peut être soumis à une surveillance pour une période maximale de dix ans après la fin de sa peine.

    Finalement, ces statistiques nous montrent combien il est important que les délinquants demeurent dans la collectivité sans rechuter. Un excellent moyen de les aider à y parvenir est justement de les surveiller dans le cadre d'un programme de liberté sous condition.

    En terminant, il n'est nullement nécessaire de créer de nouvelles catégories et de supprimer le pouvoir discrétionnaire dans tout le système. Ce qu'il faut, c'est faire des choix avisés à la lumière des connaissances actuelles, des choix qui contribueront réellement à accroître la sécurité du public. Ce sujet est très important. C'est dommage qu'il n'y ait pas plus de temps alloué pour en débattre, mais c'est comme cela.

  +-(1130)  

+-

    Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno--Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui sur le projet de loi C-437. Je dois dire qu'il a été extrêmement difficile pour moi de prendre position sur ce sujet, à cause de la distinction qu'il faut toujours faire entre la fin poursuivie par une saine législation, soit la protection des enfants, et les moyens utilisés par cette législation pour atteindre cette fin, soit la création d'un nouveau régime ou d'un nouveau statut pour celui ou celle qui commet une agression sexuelle contre un enfant. En amenant la déclaration de «prédateur d'enfants», le prédateur d'enfants devra alors purger entièrement sa peine, sans possibilité de libération anticipée ou de libération conditionnelle.

    Ce n'est qu'après avoir longuement réfléchi sur l'objectif fondamental visé par le projet de loi C-437, soit la protection des enfants, que je me déclare favorable, en principe—et uniquement en principe—, au projet de loi C-437, jugeant non valables les moyens utilisés par ce projet de loi pour atteindre l'objectif déjà mentionné de la protection des enfants.

    Précisons tout d'abord, qu'il est impossible de ne pas être sensible au bien-être des enfants et, en particulier, à la sécurité des enfants qui doivent être protégés contre toute tentative d'agression sexuelle et encore plus contre les attaques possibles des «prédateurs sexuels».

    On n'a qu'à regarder la définition de «prédateur» figurant au dictionnaire, c'est-à-dire: «animal qui se nourrit de proies», selon Le Nouveau Petit Robert, et joindre cette notion à celle d'«enfant» pour constater tout de suite le très grand danger qu'un «prédateur sexuel» peut d'abord faire courir à tout être humain, qu'il s'agisse d'une femme ou d'un homme, et constater que ce danger augmente encore beaucoup lorsqu'il s'agit d'un prédateur sexuel d'enfants, puisque, comme le dit un adage bien connu, «un enfant, c'est sans défense».

    Tous peuvent se rappeler la tragédie terrible survenue il y a quelques années en Belgique, lorsque le prédateur sexuel d'enfants, Marc Dutroux, a été arrêté pour l'enlèvement et le meurtre de plusieurs jeunes enfants. On se rappelle ensuite la manifestation où 300 000 Belges, hommes, femmes et enfants, sont descendus dans la rue pour la Marche blanche de 1996, afin de lutter contre toutes les formes de pédophilie et contre de tels crimes qu'il aurait peut-être été possible d'empêcher si un système rigoureux de contrôle avait été mis en place pour réduire un Marc Dutroux à l'impuissance.

    Toutefois, nul besoin de se tourner uniquement vers des pays étrangers pour sentir le souffle terrible de tels prédateurs. Nous n'avons qu'à regarder chez nous. L'histoire récente de Paul Bernardo et de sa femme, tous deux des prédateurs sexuels de l'Ontario, et de Conrad Brossard, un prédateur sexuel du Québec, dont le dernier crime crapuleux vient d'être présumément commis contre une femme de la région de Trois-Rivières, démontre qu'aucune société civilisée n'est vraiment à l'abri des ravages et des méfaits commis par ces êtres monstrueux qu'il faudrait rendre impuissants pour préserver la vie de leurs futures victimes.

    Or, il n'existe pas beaucoup de moyens de neutraliser ces êtres dangereux non seulement pour la société, mais surtout pour leurs victimes potentielles. Cela peut être soit de leur imposer la peine de mort, comme c'est le cas aux États-Unis et dans bien d'autres pays, soit de les emprisonner, quand la peine de mort a été abolie comme c'est le cas au Canada.

    Mais, dans ce dernier cas, se pose tout de suite la question de la réhabilitation possible de ces prédateurs sexuels et, éventuellement, de leur remise en liberté conditionnelle, cette dernière possibilité soulevant des craintes énormes lorsqu'il s'agit d'un prédateur sexuel d'enfants.

    Beaucoup de citoyens et de citoyennes sont fermement convaincus que les prédateurs sexuels d'enfants ne guérissent jamais et restent des dangers perpétuels à cause du phénomène de délinquance dans ce domaine.

    C'est cette crainte qui a incité le député de Saskatoon—Humboldt à proposer le projet de loi C-437, lorsqu'il a constaté que le «notorious child sex offender, Karl Toft» venait d'être remis en liberté. Le Centre psychiatrique régional de Saskatoon ayant été forcé, selon le député de Saskatoon—Humboldt, d'accepter ce «pédophile reconnu coupable de 34 agressions sexuelles sur de jeunes garçons et dont les victimes pourraient ultimement se chiffrer par centaines», toujours selon l'auteur du projet de loi C-437.

    Le député a d'ailleurs déclaré ce qui suit:

Les études prouvent que les pédophiles sont incurables et sont une menace pour nos enfants; ils doivent demeurer derrière les barreaux. Le gouvernement libéral a refusé que les prédateurs d'enfants soient l'objet d'une déclaration automatique de «délinquant dangereux» quand ils reçoivent leurs sentences, ce qui aurait assuré qu'ils restent indéfiniment en prison.»

  +-(1135)  

    En conséquence, même si l'objectif du projet de loi C-437 est éminemment louable, il faut toutefois savoir que les moyens utilisés pour atteindre cet objectif posent de graves problèmes et sont mal ajustés aux principes fondamentaux de notre système de droit criminel et de notre système pénal. En effet, la définition d'«un acte de prédation contre un enfant» manque de clarté en ce sens qu'elle ne définit pas de façon assez rigoureuse la gravité des infractions sexuelles visées et le degré de délinquance qui doit être sanctionné pour infliger le statut de «prédateur d'enfant», avec les très graves conséquences qui peuvent en découler. La rédaction législative proposée semble permettre d'appliquer rétroactivement le statut de «prédateur d'enfant», ce qui est contraire à la norme usuelle de non-rétroactivité de la loi. Pour ces deux raisons, le projet de loi est inacceptable dans sa version actuelle.

    De plus, ce projet de loi crée un système d'exception pour le «prédateur d'enfant». Je ne vois aucune raison d'exclure les femmes ou les hommes d'un tel genre de protection contre tout prédateur sexuel, puisque la vie d'une femme ou d'un homme mérite certainement autant d'attention de la part du législateur que celle d'un enfant. On n'a qu'à penser aux femmes de la région de Vancouver, dont une cinquantaine auraient été enlevées et assassinées, pour se convaincre qu'il faut protéger tous les humains, homme, femme et enfant, contre tout prédateur d'humains et ne pas restreindre cette protection aux seuls enfants.

    D'autre part, il faut aussi souligner que le projet de loi C-437 comporte un système douteux et inhabituel de procédure imposant au ministre de la Justice un fardeau de «veille» contre le délinquant qui contrevient à une ordonnance qui le vise, tel que spécifié à l'article projeté 753.11. Il y aurait lieu de prévoir un système de contrôle administratif plus simple et plus efficace, le cas échéant.

    Enfin, il faut se demander si le système mis en place par le Code criminel pour contrôler les délinquants dangereux n'est pas entièrement suffisant pour faire face à la situation, très grave il est vrai, des prédateurs sexuels d'enfants, et s'il est vraiment nécessaire de constituer ce nouveau régime d'exception uniquement pour les enfants.

[Traduction]

+-

    M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC): Monsieur le Président, j'aimerais préciser, comme l'a fait la députée qui vient de prendre la parole, que notre parti appuie entièrement le projet de loi à l'étude. Nous sommes d'accord avec l'idée que nous devons faire tout ce que nous pouvons pour protéger notre bien le plus cher et le plus précieux, c'est-à-dire nos enfants. J'ai toutefois de sérieuses réserves quant à la façon dont on compte s'y prendre avec le projet de loi C-437.

    Je félicite le député qui a déposé le projet de loi. C'est une cause qu'il défend depuis longtemps et à laquelle il croit sincèrement. Le projet de loi C-437 doit accroître la protection des enfants. Il doit mettre en application bon nombre des mesures qu'on serait en droit d'attendre du système de mise en liberté, du régime de libération conditionnelle et du système carcéral. S'il était adopté, le projet de loi permettrait de définir plus précisément l'expression «prédateur d'enfants» dans le Code criminel en vue de couvrir toutes les infractions d'ordre sexuel à l'égard d'un enfant lors desquelles le délinquant s'adonne à une activité sexuelle.

    Les députés de notre parti appuient les sentiments sur lesquels le projet de loi s'appuie. Nous encourageons bien sûr tous les efforts visant à protéger les enfants et à assurer le maintien de l'esprit de justice pour la victime. C'est un aspect dont on ne tient souvent pas compte. Les victimes sont souvent confrontées à la peur, non seulement de ce qui s'est passé, mais aussi du système juridique qui peut s'avérer extrêmement froid et difficile à déchiffrer. C'est un système qui peut parfois être cruel et manquer de compassion et d'information. J'ai souvent entendu ce commentaire de la part des victimes.

    Le projet de loi C-437 créerait un nouveau genre d'infraction dans le Code criminel. Les termes de l'amendement sont très clairs; il modifierait la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition pour interdire tant aux personnes ayant commis un acte de prédation contre un enfant qu'aux personnes ayant été déclarées prédateurs d'enfants aux termes des nouvelles dispositions du Code criminel toute permission de sortir sans escorte, semi-liberté, libération conditionnelle totale ou libération d'office.

    Il faudra absolument clarifier la définition, pour éviter toute mauvaise interprétation. Il y a une gradation d'infractions sexuelles dans le Code criminel. Il ne faut jamais l'oublier. Cela peut paraître obscur, mais je dis qu'il y a une progression dans les catégories d'infractions. Cela va de l'attouchement inapproprié, catégorie d'infraction à ne pas excuser pour autant, jusqu'aux viols, meurtres et viols et meurtres en série comme on en a déjà vu au Canada.

    Pour ce qui est de la détermination de la peine, le projet de loi C-437 a pour objet de voir à ce que toute la peine soit purgée en détention quand il est question d'un acte de prédation contre un enfant. Oui, l'application régulière de la loi serait toujours pleinement protégée. L'accusé pourra toujours s'en prévaloir dès la divulgation de la preuve et jusqu'au verdict. Il faut veiller à ce que toutes les protections actuellement consenties restent en place et à ce que rien n'entrave l'application régulière de la loi.

    Toutefois, le projet de loi C-437 concerne ce qui se passe après coup, après un verdict de culpabilité. Il est important de le souligner. À cause de la nature spéciale de l'infraction et du tort spécial que subissent la société et l'enfant, il faut absolument changer la réaction et l'attitude du ministère de la Justice. Ce besoin est implicite dans le projet de loi.

    Le projet de loi C-437 modifierait le Code criminel pour prévoir la possibilité de demander au tribunal de déclarer prédateur d'enfants une personne qui a commis un acte de prédation contre un enfant ou qui a démontré son incapacité à contrôler ses impulsions sexuelles. Le fait d'être reconnu coupable et d'être déclaré prédateur d'enfants aurait pour le contrevenant des répercussions très nettes. Il est donc question de demander au tribunal de reconnaître que l'individu est un contrevenant dangereux, ce qui est déjà permis en vertu du Code criminel. Mais dans les cas qui nous intéressent ici, l'individu est le pire d'entre les pires.

  +-(1140)  

    Je frémis en mentionnant les noms de Olson et de Bernardo, mais il s'agit là des types d'infractions prédatrices, sexuelles et violentes au sujet desquelles on propose de modifier le Code criminel. Nous pouvons envisager une réadaptation dans le cas de certains délinquants, mais dans les cas extrêmes, une réadaptation ne peut plus être envisagée. La réadaptation de ces délinquants est pratiquement impossible.

    Lorsqu'on examine l'objectif de notre système de justice, on constate qu'il faut accorder la priorité à la protection de la population. La dissuasion et la dénonciation contribuent à assurer cette protection. C'est pourquoi je reconnais l'intention du député. Il tente d'établir une distinction plus claire à l'égard des types d'infractions qui sont horribles et qui ont de graves conséquences psychologiques et physiques pour les victimes. Ces infractions exigent un traitement particulier. Les délinquants ne devraient pas bénéficier d'une libération anticipée ou d'une quelconque clémence qui pourraient être interprétées comme si on tolérait ou approuvait une telle conduite.

    Le projet de loi C-437 permettrait aux tribunaux d'imposer aux délinquants une peine de détention pour une période indéterminée. Cela rejoint les demandes actuelles qui visent à déclarer un délinquant dangereux. Le projet de loi prévoit un traitement obligatoire. Cela devrait se faire dans tous les cas. C'est une question de ressources. C'est une question de priorité au sein du système pénal et de la Commission nationale des libérations conditionnelles.

    Aux termes du projet de loi, des services de consultation seraient ordonnés dans tous les cas, après la mise en liberté, pour éviter que les délinquants ne se trouvent en présence d'enfants. Ils pourraient devoir se soumettre à une surveillance électronique et se présenter tous les mois à un officier de police. Certains paramètres du système, qui sont actuellement discrétionnaires, deviendraient obligatoires dans les cas où des prédateurs sexuels ont été identifiés.

    J'ai un projet de loi semblable, qui vise à interdire à des délinquants sexuels reconnus coupables de se trouver en présence d'enfants dans des maisons d'habitation. C'est dans les maisons d'habitation que ce genre de contacts est fréquent. C'est là où la majeure partie de ces infractions sont commises.

    Le projet de loi C-437 oblige le ministre de la Justice à prévoir une procédure garantissant que toute contravention à une ordonnance, y compris l'omission de se présenter à un officier de police, entraîne la délivrance immédiate d'un mandat d'arrestation. C'est le simple bon sens. C'est ainsi que les choses devraient d'ailleurs se passer actuellement. Le projet de loi C-437 codifierait certains principes offrant une certaine latitude et nécessitant la discrétion sur le terrain et au sein du Service correctionnel du Canada. Conformément au projet de loi, les contrevenants identifiés comme étant des prédateurs sexuels seraient traités avec prudence et dans certains cas sans indulgence.

    Nous devrions adhérer au sentiment exprimé dans la motion. Le Parti progressiste-conservateur félicite l'auteur de la motion à cet égard. C'est un lieu commun de dire à quel point les enfants sont importants dans notre société. Tout le monde est d'accord là-dessus. C'est avec empressement que tous devraient adhérer au sentiment exprimé dans la motion.

    Selon des estimations prudentes, une fille sur trois est agressée sexuellement avant l'âge de 18 ans et un garçon sur six l'est avant l'âge de 16 ans. Ces chiffres sont renversants. Ce qui est plus effrayant encore, c'est que la plupart des enfants agressés et négligés n'attirent pas l'attention des autorités. Nous n'entendons parler que d'une fraction de ces cas d'agression.

    Les prédateurs sexuels ne sont pas toujours pris. Cela est triste, il va sans dire. Ils récidivent s'il n'y a pas de mesures de dissuasion ou de sanctions. On trouve ces prédateurs dans toutes les provinces. Ce n'est pas un problème de centres urbains ou ruraux. Le problème ne touche pas plus certaines provinces que d'autres, il les concerne toutes. Le taux de récidive est élevé. Voila un autre point important de la motion dont nous sommes saisis. Les conséquences de telles agressions marquent un enfant pour la vie, et c'est quelque chose de tout à fait répugnant pour les Canadiens. Nous avons entendu maintes et maintes fois parler de ces agressions horribles qui marquent profondément des enfants.

  +-(1145)  

    Nous devrions renvoyer le projet de loi au Comité de la justice, où des amendements pourraient y être apportés. Je respecte l'objectif du député. Néanmoins, nous devrions modifier les détails du projet de loi de manière à le rendre conforme à la Charte et applicable.

+-

    M. Gary Lunn (Saanich--Gulf Islands, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi C-437. Je félicite le député de Saskatoon—Humboldt, qui a présenté ce projet de loi.

    Il s'agit d'une mesure importante. Le projet de loi ferait en sorte que les auteurs d'infractions sexuelles à l'égard des enfants soient inadmissibles à la libération conditionnelle. Il prévoit la création d'un registre des délinquants sexuels qui obligerait les délinquants à rendre des comptes pendant cinq sur des choses comme leur lieu de résidence, leur emploi et autre.

    Un certain nombre de députés ont participé à ce débat à la Chambre. Le député de Crowfoot a dit qu'il appuyait entièrement le projet de loi. Il a félicité le député de l'avoir présenté même s'il a affirmé qu'il aimerait voir des changements. Le député de Pictou—Antigonish—Guysborough a dit de façon très éloquente que le projet de loi n'était pas parfait, mais que c'était quelque chose dont nous avions besoin. Il a mentionné que nous devrions le renvoyer au comité où nous pourrions y apporter des changements et travailler ensemble de façon non partisane pour voir à ce qu'il devienne loi. Malheureusement, les ministériels se sont assurés que le projet de loi ne pourrait pas faire l'objet d'un vote. Le député a demandé le consentement unanime, mais le gouvernement a refusé.

    Le projet de loi C-437 cherche à protéger les personnes les plus vulnérables dans notre société: nos enfants. Le député de Pictou—Antigonish—Guysborough a parlé des statistiques et du nombre troublant d'enfants qui sont victimes de prédateurs sexuels. Et le fait que le gouvernement ait refusé d'agir à cet égard avant que la Chambre ne soit saisie du projet de loi est tout aussi troublant. Il a refusé que le projet de loi soit renvoyé au comité afin qu'on puisse le modifier pour le rendre conforme à la Charte. Il avait besoin qu'on y apporte des changements.

    Dans ma province, la Colombie-Britannique, nous avons eu l'affaire Robin Sharpe. Cet homme s'en prenait aux êtres les plus innocents et les plus vulnérables : nos enfants. Il a subi divers procès, en commençant par le tribunal de première instance. Il a été acquitté de possession de pornographie juvénile. L'affaire est ensuite allée devant la Cour d'appel et s'est rendue jusqu'à la Cour suprême du Canada. Durant tout ce processus, il est devenu évident que le gouvernement devait adopter une loi claire pour protéger les enfants. Toutes les causes ont été rejetées parce que l'article 164 du Code criminel violait les droits de l'accusé aux termes de la Charte.

    Le gouvernement aurait pu intervenir en présentant un projet de loi solide et à toute épreuve. Les députés de l'opposition s'efforcent de combler le vide. Le député de Saskatoon--Humboldt a présenté le projet de loi C-437, afin de protéger les enfants. Il a parlé avec éloquence du cas, survenu dans sa province, d'un pédophile, M. Karl Toft, qui a été condamné pour 34 agressions sexuelles contre des garçons. Il a lu à la Chambre une partie du rapport psychiatrique concernant M. Toft, qui le classe parmi les cas les plus gaves. Le document indique qu'il n'y a aucune possibilité de réadaptation pour M. Toft et que ce dernier présente un risque extrêmement élevé de récidive.

    Le taux de récidive dépasse largement les 50 p. 100 chez les prédateurs sexuels de cette catégorie. Or, les législateurs refusent de s'attaquer à ce problème. Le projet de loi C-437 n'est pas parfait. Le député de Crowfoot a dit que nous pourrions le renforcer et en faire une mesure positive à certains égards. Le député conservateur a applaudi le député et a dit comprendre ce qu'il s'efforce de faire, tout en souhaitant que certains amendements soient apportés au projet de loi en comité. Nous pourrions, à cette étape, renforcer le projet de loi. Or, les députés ministériels s'y refusent. Les membres les plus vulnérables de notre société, les enfants, n'ont pas la possibilité de se défendre eux-mêmes. Il est regrettable que nous ne le fassions pas pour eux.

  +-(1150)  

    C'est un grave problème et le Code criminel accuse des lacunes évidentes. Notre législation comporte des trous. Les cas de récidive sont monnaie courante. Mis à part les cas comme ceux de Karla Homolka et Paul Bernardo, qui vous donnent froid dans le dos, il y a des dizaines de milliers d'individus à l'égard desquels la loi devrait être resserrée, pour empêcher leur remise en liberté. L'un des principaux objectifs du projet de loi est d'empêcher les prédateurs sexuels d'être admissibles à la libération conditionnelle. Compte tenu du niveau très élevé de récidive, ces individus pourraient être suivis après avoir purgé leur peine. Nous saurions ainsi où ils travaillent et où ils habitent.

    L'Alliance canadienne a proposé, dans des motions de l'opposition, la création d'un registre national des délinquants sexuels. La question a même fait l'objet d'un vote à la Chambre. La motion a été adoptée, mais on n'y a toujours pas donné suite, et c'est frustrant. De nombreux députés, encore qu'il s'agisse de députés de l'opposition, ont saisi la Chambre de la question parce qu'ils sont conscients des lacunes de la législation pénale. Or, le gouvernement a systématiquement refusé d'agir, pendant que la sécurité des plus vulnérables de notre société est mise en péril.

    Le projet de loi comporte de nombreux aspects positifs. Je me demande toutefois si cette mesure législative est parfaitement conforme à la Charte, mais nous pourrions faire en sorte qu'elle le soit. Nous pourrions la renvoyer à un comité. Je suis certain que le député serait disposé à écouter les députés de tous les partis pour autant que nous respections son intention de protéger nos enfants et de veiller à ce que les prédateurs sexuels ne récidivent pas.

    Nous pourrions apporter les amendements nécessaires. Je suis sûr que le député serait plus que disposé à prendre en considération ces amendements et les arguments avancés, dans la mesure où nous essaierions de respecter son intention. Mais ce ne sera pas possible, le projet de loi sera débattu pendant une heure aujourd'hui et il ne peut faire l'objet d'un vote. Le député a demandé le consentement unanime de la Chambre afin que cette question grave puisse faire l'objet d'un vote.

    Je pense aux centaines de milliers de dollars que nous avons dépensés seulement dans l'affaire Robin Sharpe qui, au fil des ans, est passée d'un tribunal de première instance à la Cour d'appel, puis à la Cour suprême pour revenir au tribunal de première instance. Les enfants qui ont été victimes de prédateurs sexuels ont vu pendant des années que toute cette fumisterie n'a donné aucun résultat.

    Nous avons le devoir, à titre de législateurs, de veiller à ce que le Code criminel contienne des dispositions législatives pertinentes. Lorsqu'elles ne sont pas efficaces, nous devrions faire quelque chose pour y remédier. J'ai parlé d'un cas en particulier, mais il en existe de nombreux autres.

    Je félicite le député de Saskatoon—Humboldt d'avoir présenté ce projet de loi, de même que le député de Crowfoot et les autres qui ont parlé de cette mesure législative. Malheureusement, nous n'avons pas entendu beaucoup de députés du parti ministériel. J'exhorte tous les députés à faire abstraction de sectarisme politique et à laisser le projet de loi être renvoyé à un comité, pour l'amour de tous les enfants, de leurs propres enfants et petits-enfants qui pourraient être victimes de prédateurs sexuels.

    J'invite les députés à réfléchir à nouveau à la situation, à la réévaluer et à laisser le projet de loi être renvoyé à un comité. Je demande le consentement unanime afin que le projet de loi puisse faire l'objet d'un vote, ce qui lui permettrait d'être soumis à un comité qui pourrait y apporter les amendements nécessaires. Ce serait quelque chose de positif pour l'ensemble des Canadiens, quelque chose dont tous les députés pourraient être fiers.

  +-(1155)  

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): La Chambre accorde-t-elle au député son consentement unanime afin que le projet de loi puisse faire l'objet d'un vote?

    Des voix: D'accord.

    Des voix: Non.

+-

    M. Jim Pankiw (Saskatoon--Humboldt, Ind.): Monsieur le Président, j'aimerais remercier mes collègues de Saanich—Gulf Islands, Crowfoot et Pictou—Antigonish—Guysborough d'avoir exprimé un certain soutien à l'objet de mon projet de loi.

    Je suis profondément déçu, cependant, que les députés libéraux aient refusé de laisser le projet de loi suivre le processus législatif. Je précise que la députée de Notre-Dame-de-Grâce—Lachine s'est élevée contre l'objet du projet de loi, ce que je commenterai dans un instant.

    Je souligne également que le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et le député de Brossard—La Prairie ont tous deux privé le projet de loi du consentement unanime de la Chambre, qui aurait permis d'étudier plus avant ces dispositions législatives proposées. J'exhorte les électeurs qu'ils sont supposés représenter de s'en rappeler à la prochaine élection fédérale. Les députés libéraux s'intéressent plus à chouchouter les agresseurs sexuels d'enfants qu'à protéger les enfants.

    J'ai été renversé d'entendre les propos de la députée de Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, qui dit que l'emprisonnement des criminels ne protégera pas la population et qu'il est important de renvoyer les contrevenants dans la société. Il est clair qu'elle a perdu tout contact avec la réalité. Elle ne se rend pas compte à quel point il est obscène de libérer un type comme Karl Toft, qui a été reconnu coupable de 34 agressions sexuelles sur des enfants, bien que, comme je l'ai mentionné dans mon discours, il ait probablement à son actif plus d'une centaine d'agressions. Toft ne passera que neuf ans derrière les barreaux, puis il sera remis en liberté dans notre collectivité. C'est à la fois obscène et choquant.

    Les députés libéraux se dérobent devant leur responsabilité, en tant que représentants de leurs électeurs, en empêchant le projet de loi d'aller de l'avant. Encore une fois, je tiens à exprimer ma profonde déception face au peu de cas qu'ils font de leurs électeurs, qui, de façon pratiquement unanime, jugent totalement inacceptable de libérer un perverti de ce genre après seulement neuf ans de prison, en sachant le nombre de victimes qu'il a fait. Leur refus de permettre à ce projet de loi sur les prédateurs sexuels d'être examiné en comité est inexplicable et extrêmement décevant.

  +-(1200)  

[Français]

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée. Puisque la motion n'a pas été choisie pour faire l'objet d'un vote, l'ordre est rayé du Feuilleton.

    Nous passons maintenant aux ordres émanant du gouvernement.

[Traduction]

+-

    M. Peter MacKay: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Avant de passer à l'ordre du jour, je voudrais parler du dernier remaniement ministériel. La Chambre devrait savoir pourquoi ce remaniement a eu lieu avant d'examiner les affaires dont le gouvernement veut la saisir.

    Je demande que le gouvernement dépose la lettre de démission du ministre de la Défense nationale et informe la Chambre des raisons de ce remaniement ministériel. Qu'il le veuille ou non, le premier ministre est responsable devant la Chambre et lui doit des explications.

    La présidence confirmera-t-elle qu'il serait conforme au Règlement que le premier ministre présente à la Chambre une déclaration ministérielle complète et qu'il serait raisonnable que le gouvernement dépose cette lettre de démission?

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Je dois dire au député de Pictou—Antigonish—Guysborough que ce n'est pas là un recours au Règlement.

    Le whip adjoint du gouvernement veut-il donner les raisons du remaniement ministériel? Je crois comprendre que la réponse est non.


+-INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Initiatives ministérielles]

*   *   *

[Traduction]

+-LOI SUR LA PROCRÉATION ASSISTÉE

    La Chambre reprend l'étude, interrompue le 24 mai, de la motion: Que le projet de loi C-56, Loi concernant la procréation assistée, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

+-

    M. Reed Elley (Nanaimo--Cowichan, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de participer à cet important débat. Le projet de loi C-56 est une mesure législative qui s'est longtemps fait attendre. Les Canadiens réclament l'adoption d'une telle mesure depuis 1993, année où la Commission royale sur les nouvelles techniques de reproduction a présenté son rapport.

    Un long historique sous-tend cette question. En juillet 1995, des techniques de reproduction ont été soumises à un moratoire volontaire par la ministre Marleau. En juin 1996, le gouvernement a présenté un projet de loi prévoyant 13 cas où il serait interdit d'utiliser des techniques génétiques et de procréation assistée, mais il a laissé ce projet de loi mourir au Feuilleton au moment des élections de 1997. Un avant-projet de loi a ensuite été soumis pour étude au Comité de la santé, le 3 mai 2001. Le comité a de son côté présenté en décembre 2001 son rapport intitulé «Bâtir la famille».

    En mars 2002, les Instituts de recherche en santé du Canada ont court-circuité toute mesure législative du Parlement et publié des règles visant à approuver le financement d'expériences sur des embryons humains et des foetus avortés. Le financement a été repoussé d'un an par suite des protestations élevées par l'opposition devant ce geste.

    Je tiens à préciser clairement que l'Alliance canadienne est fermement en faveur de l'amélioration de la santé humaine. Nous appuyons la recherche chaque fois qu'elle est compatible avec la dignité et la valeur de la vie humaine. Nous nous efforcerons de protéger la valeur de la vie humaine et de défendre les intérêts supérieurs des enfants nés grâce aux techniques de procréation assistée ainsi que de veiller à ce que les parents éventuels aient accès aux meilleures techniques de procréation assistée que la science est en mesure d'offrir sur le plan éthique.

    Les députés de tous les partis devraient avoir le droit de se prononcer librement sur un projet de loi abordant des enjeux aussi importants. Il est important que nous écoutions le point de vue de tous les Canadiens sur cette question et que, ensuite, lorsque nous aurons pris connaissance de tous les faits, nous puissions voter librement sur cet important sujet sans avoir à tenir compte de la discipline de parti.

    J'accueille favorablement certaines parties du projet de loi. J'appuie ce document en ce qui concerne la technique de reproduction et le cadre législatif qu'il créerait pour cet important enjeu. Toutefois, je ne veux pas faire d'excès de zèle, car le projet de loi comprend certaines parties que je ne peux appuyer.

    J'espère que le comité manifestera vraiment une attitude énergique sur le plan politique et permettra l'adoption d'amendements afin que nous puissions peut-être en bout de piste appuyer la mesure législative.

    Ce qui m'inquiète au sujet de cette mesure législative? Je crois que l'insémination artificielle par donneur présente de très sérieux risques pour l'unité des familles. Récemment, le magazine Maclean's a publié un article de six pages sur les pères naturels. L'auteur de l'article déclare qu'à part certaines exceptions, environ 14 000 Canadiens issus d'insémination artificielle, réalisée au cours des deux dernières décennies, sont prisonniers d'un système qui protège l'anonymat du donneur. Le journaliste ajoutait que jusqu'à tout récemment, certains médecins avaient encouragé leurs patients à ne pas dire à leurs enfants comment ils avaient été conçus. L'article faisait état du cas de plusieurs enfants issus d'insémination et qui désiraient connaître l'identité de leur père biologique. Au Canada, plus d'un million de familles sont monoparentales et environ 900 000 d'entre elles sont dirigées par des femmes.

    Trop d'enfants canadiens ont peu de possibilités de connaître leur père naturel. Je crains que cette mesure législative ne fasse augmenter ce nombre et ne soit pas dans le meilleur intérêt des enfants issus de la procréation assistée. Les enfants nés d'insémination artificielle par donneur doivent avoir accès à l'information relative à leur père biologique.

    La recherche sur les cellules souches constitue une autre source de préoccupation. Des progrès considérables ont été réalisés dans ce secteur de la technologie médicale. C'est un domaine prometteur susceptible de mener à des découvertes révolutionnaires. Toutefois, cette mesure législative ne présente aux Canadiens que la moitié de l'histoire. Or, un projet de loi reposant uniquement sur la moitié des faits risque de faire que nombre de personnes atteintes de maladies terminales ne voient jamais de cure à leur mal.

  +-(1205)  

    C'est ce qui risque de se produire si l'on compte d'un peu trop près sur la recherche effectuée sur les cellules souches d'embryons pour guérir toutes ces maladies débilitantes. En d'autres mots, les cellules souches peuvent être prises à des sources autres que les embryons. Pour l'information des députés, je voudrais leur dire que j'ai passé en revue une partie des travaux de recherche publiés sur la question. J'ai appris que les scientifiques et les médecins canadiens découvrent peu à peu que les cellules souches extraites de sources comme les placentas, les cordons ombilicaux, la moelle épinière et même les cellules adipeuses de l'homme présentent le même potentiel que celles provenant d'embryons.

    Ainsi, une équipe de chercheurs de l'Université de l'Alberta ont récemment isolé et extrait des cellules des îlots pancréatiques d'un individu adulte. Il s'agit des cellules qui produisent l'insuline. Ces cellules ont été transplantées avec succès dans le pancréas de 25 personnes souffrant de diabète juvénile.

    Ce n'est pas là le seul exemple. Un chercheur de l'Université McGill a découvert aussi que les cellules souches prélevées sur la peau d'un individu adulte avaient la capacité de se transformer en tissus pour le cerveau et d'autres organes.

    D'autres chercheurs ont découvert que les cellules souches en circulation dans le sang peuvent fabriquer des tissus nouveaux si greffées dans le foie, l'intestin et le tissu cutané. Les cellules souches adultes ont donc plus de possibilités qu'on ne le croyait jusque-là.

    Enfin, des chercheurs du Stem Cell Institute de l'Université du Minnesota ont démontré que les cellules souches extraites de la moelle épinière d'un individu adulte peuvent se transformer en vaisseaux sanguins. D'après eux, ces constatations donnent à croire que les cellules souches adultes pourraient être une source idéale de cellules pour la thérapie clinique.

    Des chercheurs du Duke University Medical Centre ont transformé des cellules souches extraites des cellules adipeuses d'un genou en cartilage, os et autres cellules adipeuses. D'après eux, «différents problèmes cliniques pourraient être réglés grâce aux cellules souches adultes prélevées à différents endroits du corps, sans que cela ne suscite les préoccupations éthiques associées aux cellules souches d'embryons.»

    Ce ne sont là que quelques exemples des progrès réalisés dans le domaine de la recherche sur les cellules souches adultes. Mais comment s'expliquer que le gouvernement libéral mette tous ses oeufs dans un seul et même panier, pour ainsi dire, notamment ce projet de loi, et qu'il néglige de reconnaître que, même si les scientifiques travaillent depuis plus de 20 ans avec des cellules souches d'embryons sans avoir réalisé de percée dans le traitement des maladies, il ne semble nullement s'intéresser aux percées scientifiques de la recherche sur les cellules souches adultes, observées au Canada et ailleurs dans le monde?

    Selon Derek Rogusky, directeur du service de la recherche de l'association Focus on the Family:

La recherche sur les cellules souches d'embryons est porteuse d'un certain espoir pour les Canadiens affectés par la maladie, certes, mais il demeure que la recherche sur les cellules souches adultes est déjà en train de transformer des vies, et pour le mieux. Nous devrions mettre à profit ces succès en investissant dans la recherche sur les cellules souches adultes, plutôt que de nous entêter sur les difficultés de la recherche sur les cellules souches d'embryons.

    La recherche sur les cellules souches a tout à voir avec ce projet de loi et les Canadiens ont hâte que le gouvernement agisse. Je propose que le gouvernement libéral prenne au sérieux la recommandation de l'Alliance canadienne à l'effet d'imposer un moratoire de trois ans sur la recherche sur les embryons humains pour exploiter plutôt le plein potentiel de la recherche sur les cellules souches adultes. Cette recherche n'a donné que de bons résultats jusqu'à maintenant et son avenir est prometteur.

    Le comité permanent a déclaré:

Le Comité a été stupéfait d’apprendre que la recherche sur les cellules souches humaines adultes a fait des progrès remarquables durant la dernière année. Nous avons également appris qu’après bien des années de recherche sur les cellules souches embryonnaires animales, les résultats ont déçu les attentes. Par conséquent, nous encourageons le financement de la recherche dans le domaine des cellules souches adultes.

    Le rapport minoritaire de l'opposition officielle demandait un moratoire de trois ans sur les expériences faites à partir d'embryons humains, afin qu'on ait le temps d'explorer pleinement le potentiel de la recherche sur les cellules souches adultes. Il recommandait que:

...le gouvernement encourage fortement ses organismes subventionnaires et le milieu scientifique à mettre l’accent sur la recherche sur les cellules souches adultes (postnatales).

    La Chambre doit reconnaître le recours à la recherche sur les cellules souches adultes et les progrès importants déjà accomplis dans ce domaine. Je prie donc le gouvernement d'imposer le moratoire de trois ans sur les expériences sur les embryons humains. Bien que cette mesure législative soit importante et se soit déjà fait attendre pendant longtemps, n'essayons pas de l'adopter à toute vapeur, car cela créerait tout simplement de nouveaux problèmes. Ceux qui souffrent de maladies débilitantes méritent la meilleure recherche scientifique, le meilleur traitement et le meilleur projet de loi. Si le travail mérite d'être fait, il mérite d'être bien fait.

  +-(1210)  

+-

    M. John Bryden (Ancaster--Dundas--Flamborough--Aldershot, Lib.): Monsieur le Président, le débat m'a fourni l'occasion de réagir à certains commentaires formulés par mon collègue d'en face. Je respecte tout à fait la position adoptée par l'opposition et certains députés libéraux sur le projet de loi C-56, particulièrement en ce qui concerne la recherche sur les cellules souches.

    Dans un raisonnement très solide, le député d'en face se demande si la société ne va pas trop vite relativement à l'expérimentation sur des cellules souches embryonnaires et aux perspectives qu'elles ouvrent. Il laisse entendre que le gouvernement, la société et les scientifiques devraient d'abord miser sur les possibilités des cellules souches adultes pouvant être prélevées du corps humain, cellules que la recherche pourrait d'ailleurs trouver aussi efficaces que les cellules souches embryonnaires pour le traitement éventuel de certaines maladies.

    En ce qui me concerne, ce raisonnement pose le problème suivant. Il suscite une inquiétude d'ordre éthique. Je crois d'ailleurs qu'il s'agit d'un débat éthique avant tout. Compte tenu du fait qu'on a accès à des cellules souches embryonnaires, qui seraient autrement mises au rebut, puisque personne ne préconise la création de cellules souches embryonnaires aux seules fins de la recherche, mais compte tenu du fait que des cellules souches embryonnaires sont mise au rebut de façon routinière à l'heure actuelle, est-ce que, en n'encourageant pas les scientifiques à faire de la recherche sur ces cellules pour les laisser se concentrer sur les cellules souches adultes, comme mon collègue d'en face le suggère, est-ce que nous ne retardons pas le traitement de personnes qui souffrent de maladies débilitantes?

    Par exemple, j'ai un parent qui est atteint de la maladie de Parkinson. Il est très difficile de voir un proche souffrir d'une maladie pour laquelle il n'existe pas de remède. Quand je le vois, j'ai très hâte que l'on découvre un traitement avant que la maladie ne progresse jusqu'à un stade avancé et ne soit encore plus débilitante.

    Un de mes concitoyens souffre de la maladie de Lou Gehrig. Il a fait preuve d'un courage extraordinaire dans la façon dont il vit avec cette maladie depuis dix ans. Il est vraiment exceptionnel dans le sens où il a vécu beaucoup plus longtemps qu'on s'y était attendu. Il est complètement paralysé. Il en a peut-être encore pour quelques semaines ou quelques mois avant que cette maladie finisse par l'emporter, mais il ne lui reste que peu de temps.

    Si, sur le plan scientifique, on peut raisonnablement penser que les cellules souches embryonnaires peuvent offrir un meilleur moyen de guérir les gens de ces terribles maladies, ce que nous ne savons pas de façon certaine mais la possibilité existe, je suis absolument convaincu que nous avons, sur le plan moral, l'obligation de tirer profit de cette possibilité telle qu'elle se présente actuellement.

    L'ennui avec l'idée de retarder la recherche, comme l'opposition le recommande dans son opinion dissidente du rapport du Comité de la santé, et je ne conteste pas la sincérité de ses auteurs, c'est que des gens mourront. Le traitement de leur maladie progressera énormément, et nous pourrions découvrir, après coup, que les cellules embryonnaires sont meilleures et beaucoup plus efficaces pour apporter les remèdes que nous espérons découvrir grâce à la recherche sur les cellules souches. Voilà mon dilemme. Je ne suis pas convaincu que nous puissions attendre.

    Je voudrais faire remarquer autre chose. Il y a une certaine hésitation à aborder la question morale, la question de foi, qui est derrière tout le débat sur les cellules souches embryonnaires. Il y a beaucoup de Canadiens qui, de par leur foi, croient que la vie commence dès la conception, et la résistance à l'utilisation de cellules souches embryonnaires pour la recherche vient en partie de l'idée que nous avons affaire à des cellules qui possèdent les propriétés fondamentales d'un être humain individuel.

  +-(1215)  

    Je ne puis que dire comment je réagis à cela. Je reconnais que la vie commence à la conception. Quand survient une procédure au cours de laquelle la mort fait suite à cette conception, même si les cellules en cause n'ont qu'une semaine, elles doivent être rejetées. C'est un décès, et j'estime que si, en mourant, ces cellules--que l'on pourrait considérer comme des êtres vivants--peuvent servir à donner la vie, n'est-ce pas là ce que nous devrions tous vouloir? J'ignore comment exprimer cela de façon adéquate, mais je crois vivement que le meilleur don que l'on puisse faire à un être humain, c'est lui donner la vie. Si ce don de la vie est rendu possible par cette mort, je pense que c'est moralement acceptable.

    Le problème que j'ai avec le projet de loi, c'est que je reconnais la passion et la détermination qu'affichent toutes les parties, et j'ai lu le hansard, mais, en définitive, à mon avis, c'est une question d'éthique et de morale. Quand le projet de loi sera mis aux voix et que je devrai décider d'appuyer ou non l'idée selon laquelle il est acceptable que la mort offre la chance de donner la vie, je sais où ira mon vote.

    Il faut donc, à mon sens, appuyer le projet de loi puisqu'il préconise l'usage limité des cellules embryonnaires dans la mesure où ce sont des cellules reconnues excédentaires, du point de vue de l'éthique.

  +-(1220)  

+-

    M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je remercie les deux députés qui viennent de parler du projet de loi. Ils nous ont livré des propos mûrement réfléchis.

    J'interviens aujourd'hui pour parler du projet de loi C-56 sur la procréation assistée, qui traite de questions médicales, scientifiques et éthiques fort difficiles.

    Le projet de loi se fait attendre depuis fort longtemps, depuis que la Commission royale sur les nouvelles techniques de reproduction a déposé son rapport, en 1993. Il est aussi une réponse directe au rapport du Comité permanent de la santé des Communes, qui a étudié un avant-projet de loi et formulé une série de recommandations le 12 décembre 2001.

    Je tiens à féliciter publiquement tous les membres de ce comité, et plus particulièrement notre porte-parole en matière de santé, le député de Yellowhead, ainsi que l'ancien député de Calgary-Sud-Ouest et ancien chef de l'opposition, M. Preston Manning.

    Comme les deux députés qui m'ont précédé l'ont dit, il s'agit ici d'une des questions les plus importantes que nous discuterons au cours de cette législature. Que fait au juste ce projet de loi? Il interdit des pratiques inacceptables comme le clonage humain, pour quelque motif que ce soit, reproduction ou fins thérapeutiques; l'identification du sexe d'un embryon créé pour reproduction, sinon pour des raisons médicales, afin de déceler des troubles liés au sexe; la création d'hybrides à des fins de reproduction; le versement d'une rémunération à une femme pour qu'elle soit mère porteuse; le paiement des donneurs de sperme et d'ovules ou le don de biens ou services en échange; la vente ou l'achat d'embryons humains ou le don de biens ou services en échange. L'opposition officielle est généralement d'accord sur ces mesures.

    J'attire l'attention plus particulièrement sur l'interdiction du choix du sexe à des fins de reproduction. En 1994, à titre d'adjoint de l'ancien député de Surrey-Nord, j'ai travaillé sur une motion d'initiative parlementaire qui ne proposait pas autre chose. Je félicite le gouvernement d'avoir enfin prévu cette interdiction dans une loi.

    Le projet de loi va également créer l'Agence canadienne de contrôle de la procréation assistée, qui fonctionnera comme une entité organisationnelle distincte de Santé Canada et qui relèvera du ministre de la Santé. Elle sera dirigée par un conseil d'administration composé d'au plus 13 membres représentant une vaste gamme de compétences et de disciplines. Je suggère à ceux, comme la ministre, qui devront choisir les membres du conseil d'envisager de nommer une personne comme l'ancien député de Calgary-Sud-Ouest, Preston Manning.

    L'agence sera responsable de délivrer des autorisations, de surveiller et d'appliquer la loi et le règlement. Elle tiendra un registre des donneurs et des descendants. Enfin, elle fournira à la population canadienne de l'information fiable sur la procréation assistée.

    Notre principale préoccupation relativement à l'agence réside dans le fait qu'elle fera rapport au ministre de la Santé. Nous nous demandons si elle aura l'indépendance nécessaire à une telle agence pour vraiment être efficace.

    L'aspect le plus controversé du projet de loi est évidemment la recherche sur les cellules souches embryonnaires, en particulier le fait que les embryons de trop seront utilisés à des fins de recherche. Le projet de loi va interdire la création d'embryons à des fins de recherche seulement, chose avec laquelle je suis tout à fait d'accord.

    Je voudrais répondre au député qui m'a précédé et dont le discours était tout à fait réfléchi, selon moi. Si nous devions permettre l'utilisation des embryons excédentaires provenant de la fécondation in vitro, comment pourrions-nous être certains qu'ils n'ont pas été simplement créés à des fins de recherche?

    Le député a également dit que l'embryon était la vie et il s'est demandé si, lorsqu'un embryon excédentaire est créé et tué ensuite, sa mort ne servirait pas à aider d'autres vies. C'est en partie vrai sur le plan de l'éthique, mais la question est de savoir si nous ne tuons pas un embryon sans que ce soit voulu. Il ne s'agit pas d'une personne donnant volontairement sa vie pour le bénéfice d'un autre être humain. Il n'y a aucun consentement et nous devons en tenir compte.

    C'est une situation médicale extrêmement difficile. Mon oncle est un chercheur sur le diabète à Edmonton. Je sais que beaucoup de scientifiques voient d'énormes possibilités dans la recherche sur les cellules souches embryonnaires. Ils cherchent à aider les gens grâce à cette recherche.

    Ma principale préoccupation relativement à ce projet de loi et d'autres dont la Chambre est saisie réside dans le manque d'orientations fondées sur des principes directeurs. Dans son rapport majoritaire, le Comité de la santé a proposé d'inclure dans le préambule du projet de loi le respect de la dignité de l'être humain. Cela doit figurer au tout début du projet de loi. Nous devons nous laisser guider par ce principe directeur.

  +-(1225)  

    Cela a été demandé tant dans le rapport majoritaire des libéraux que dans le rapport minoritaire de l'opposition officielle. Cette expression devrait figurer à l'article 22 du projet de loi dans la description de la mission de la nouvelle agence.

    Cela m'amène à la question la plus importante à laquelle nous devons répondre, question qui est en filigrane dans le projet de loi. Il semble que beaucoup ne veulent pas répondre à la question de savoir quelle est la distinction entre la vie humaine, un être humain et une personne humaine. Fait intéressant, les philosophes anciens définissaient toujours les termes dans leur préambule ou avant d'entrer dans le vif du sujet. C'est ce que nous devons faire en l'occurrence. Nous devons définir les termes.

    La définition d'un être humain que donne l'article 223(1) du Code criminel, tel que libellé actuellement, se lit comme suit:

Un enfant devient un être humain au sens de la présente loi lorsqu'il est complètement sorti, vivant, du sein de sa mère:

a) qu'il ait respiré ou non;

b) qu'il ait ou non une circulation dépendante;

c) que le cordon ombilical soit coupé ou non.

    Franchement, cette définition est inacceptable à mes yeux et à ceux de la majorité des spécialistes en éthique et des membres de la communauté médicale canadienne.

    J'attire l'attention de la Chambre sur une question que M. Preston Manning a posée au Comité de la santé pendant le débat sur l'avant-projet de loi. Il voulait savoir quel serait le statut moral de l'embryon dans la nouvelle loi et comment on définirait ce statut en droit. C'est une excellente question.

    Mme Françoise Baylis, du Département de bioéthique de l'Université de Dalhousie, a donné la réponse suivante:

En philosophie, on appellerait cette question un concept essentiellement litigieux. Il n'y a pas de solution parce que ce n'est pas une question de fait et il n'y a pas d'autres faits à mettre sur la table qui résoudront la question, même s'il y a davantage de faits à propos du développement humain.

La première chose à reconnaître dans la loi et dans toutes les discussions, c'est que les embryons sont des être humains.

    Sa réponse contredit la définition qui se trouve actuellement dans le Code criminel.

    Elle a ensuite ajouté:

Cela est un fait biologique admis. Ils font partie de l'espèce humaine. Ce qui est contesté, c'est leur statut moral. Le langage que nous employons ici est de nature technique, et c'est ici que nous parlons de personnes.

    Elle fait la différence entre un être humain et une personne humaine.

    Elle a ajouté:

Ce qui est très clair, c'est que, lorsque vous parlez d'embryon, vous n'avez pas besoin de débattre de la question de savoir s'ils sont ou non des êtres humains. La réponse est oui.

    Selon elle, la question est réglée. Affirmant qu'il s'agit d'une affirmation biologique, elle a déclaré:

Le mot «personne», toutefois, n'est pas un terme de biologie. Ce n'est pas un terme à propos duquel il y a des faits. C'est un terme moral. C'est un terme chargé de valeur à propos duquel les avis divergent et chacun alléguera des faits pour soutenir que sa définition est la bonne.

    Cet échange entre Preston Manning et Françoise Baylis me paraît très éclairant. Pour moi, c'est le coeur de la question. Si, comme l'affirme Mme Baylis, il est entendu que l'embryon est un être humain même s'il ne répond pas à la définition de personne humaine, voilà sur quoi devrait porter le débat d'aujourd'hui.

    Si nous reconnaissons tous que l'embryon est une vie humaine naissante quoique pas nécessairement une personne, qu'est-ce qui distingue une personne humaine d'un être humain? Quels critères ou caractéristiques? Quand l'embryon devient-il une personne et où est la distinction?

    En fouillant la question, je suis tombé sur certains essais que j'avais rédigés autrefois. L'un d'eux portait sur un philosophe canadien, George Grant, l'un des plus éminents philosophes que le Canada ait jamais eus. Traitant d'un autre sujet, il a dit que nous devons, en tant que société, réfléchir à ce qui nous est commun en tant qu'espèce, mais unique également, pour que nous puissions invoquer une charte des droits à l'appui de notre droit à la vie en tant qu'êtres humains. Nous ne l'avons pas encore fait. Le Code criminel donne de la vie une définition biologique mais non éthique. Nous devrions débattre cette question.

    La raison pour laquelle l'Alliance canadienne et l'opposition officielle ont tant de réserves au sujet de la recherche sur les cellules souches embryonnaires ne tient pas uniquement aux possibilités qu'offre la recherche sur les cellules souches adultes mais également au fait que, en vertu de la philosophie traditionnelle, nous définissons les choses, comme le faisait Aristote, non seulement selon ce qu'elles sont actuellement mais aussi selon ce qu'elles ont la possibilité de devenir. Cela correspond au fameux principe de l'actus et potentia, en vertu duquel nous ne nous contentons pas de regarder un gland mais nous l'examinons, sachant qu'il deviendra un chêne. De même, lorsque nous regardons un embryon, nous n'y voyons pas qu'un embryon mais aussi un être humain en puissance.

  +-(1230)  

    En terminant, j'encourage tous les députés à débattre ces questions médicales, scientifiques et éthiques très complexes.

+-

    M. Jim Gouk (Kootenay--Boundary--Okanagan, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je crois qu'il est important que tous les députés participent au débat en cours. C'est une question controversée sur laquelle je pense que chacun de nous a déjà réfléchi.

    Il y a une chose que je considère essentielle. Le gouvernement l'a fait jusqu'à présent et j'espère qu'il continuera dans cette veine, c'est-à-dire qu'on doit pouvoir tenir un débat complet et libre sur cette mesure législative. Nous ne pouvons pas imposer la clôture ou tenter de faire adopter ce projet de loi à toute vapeur. J'espère que le gouvernement le reconnaît. Rien n'indique qu'il compte le faire et j'espère bien qu'il n'y aura pas de changement à ce sujet.

    Indépendamment du débat, pour ce qui est de l'étude en comité, il est essentiel que nous puissions tenir des consultations publiques. Nous avons eu récemment une certaine mésentente, si l'on peut dire, avec les membres du comité des transports. Les députés de l'Alliance ont refusé de se déplacer dans le cadre de l'étude d'un certain projet de loi. Je suis d'accord avec cette décision pour la simple raison que chaque fois que j'ai participé à de telles rencontres de comité à l'extérieur, j'ai eu connaissance de cas où nous avons entendu des témoignages très percutants, d'un côté ou de l'autre, de la part du public dans des cas où il y avait consensus. Toutefois, la mesure législative ou les amendements adoptés au niveau du comité ne tenaient pas compte de ce que le public nous avait dit, ce qui nous pousse bien sûr à nous demander pourquoi nous nous donnons la peine de consulter et de prétendre vouloir obtenir l'opinion des gens si nous n'avons pas l'intention d'en tenir compte.

    Pour ce projet de loi en particulier, il importe beaucoup que non seulement nous consultions la population, mais que la mesure législative reflète au bout du compte la volonté exprimée par la population par suite de ces consultations. Au-delà de cela, lorsque le projet de loi reviendra à la Chambre pour y faire l'objet d'un vote, il est absolument essentiel que ce vote soit libre. On interprète souvent mal un vote libre. Un vote libre ne devrait pas être l'occasion pour des députés comme mon collègue qui vient de prendre la parole, les députés d'en face ou moi-même de voter comme nous l'entendons, sans tenir compte de l'opinion des autres.

    Nous sommes 301 députés à la Chambre et nous représentons ensemble tous les Canadiens. Le vote libre devrait refléter le résultat de nos consultations auprès de nos électeurs respectifs. Nous devrions prendre le temps et la peine d'expliquer ces questions, de bien informer nos électeurs, de prendre leur pouls et de voter au bout du compte de façon à refléter l'opinion de ces électeurs une fois qu'ils auront été informés le plus honnêtement possible du pour et du contre de ce projet de loi.

    Nous appuyons le report de trois ans de toute expérience sur des cellules souches embryonnaires, et cela, d'abord parce qu'il y a eu de grandes percées dans la recherche sur les cellules souches adultes et dans l'utilisation des cellules souches adultes pour des traitements. Rien n'indique ni ne prouve que les cellules souches embryonnaires sont supérieures aux cellules souches adultes. On nous parle sans cesse du potentiel des cellules souches embryonnaires mais, en fait, rien ne prouve encore qu'elles sont supérieures.

    Au contraire. Nous savons que les cellules souches embryonnaires présentent de nombreux problèmes de rejet. Parce qu'il s'agit de tissu étranger, il y a un phénomène de rejet. Des connaissances et des amis se sont fait transplanter des organes que leur organisme a fini par rejeter, de telle sorte qu'il leur faut une autre opération. Le rejet est un phénomène grave que nous voulons éviter à tout prix.

    Il y en a probablement qui souhaitent que le problème se règle par enchantement. En réalité, dans le traitement qui résulte de la recherche sur les cellules souches adultes, les cellules souches sont prélevées chez le sujet traité, de sorte que le problème de rejet ne se pose pas, mais il s'agit vraiment de régiospécificité. Il n'y a pas nécessairement de problème dans la mesure où l'on réussit finalement à produire les médicaments et les traitements nécessaires pour faire face à des maladies que l'on peut actuellement traiter.

    J'espère que lorsqu'ils se prononceront, les députés tiendront compte des renseignements qui ont été diffusés ainsi que des opinions dont leurs électeurs leur auront fait part.

  +-(1235)  

    Il va sans dire que certaines dispositions dont nous avons besoin sont inscrites dans le projet de loi, mais il en manque d'autres, notamment celle qui interdirait totalement et absolument la création d'hybrides. Un hybride résulte de la fertilisation d'un ovule humain par du sperme animal. Il est bien de dire que nous n'en permettrons pas sa réalisation, mais rien ne justifie même sa création. Autrement, on ouvre la porte à toutes sortes d'horreurs. Nous sommes d'avis qu'il faut l'interdire absolument dès le départ. Je doute qu'il y ait beaucoup d'appuis de la part des Canadiens. Je suis certain que si les députés se donnaient la peine de consulter ne serait-ce que brièvement leurs électeurs, ils constateraient que la plupart de ces derniers seraient scandalisés et horrifiés par l'idée même d'une telle possibilité.

    Une chose me préoccupe également à cet égard. Il faudrait imposer des limites aux donneurs. Cette nécessité est bien évidente. Je ne crois pas que le projet de loi en fasse mention, mais il le devrait. Il y a eu des cas, notamment aux États-Unis, où un individu sans scrupules, qui agissait prétendument au nom de plusieurs donneurs, a tout simplement donné son propre sperme. En fin de compte, il a produit des centaines de rejetons qui ignoraient qu'ils avaient tous un lien de parenté, avec tous les problèmes que cela risque de causer. Il faut mettre en place des lignes directrices et des mesures de précaution pour que cela ne puisse jamais se produire.

    Au-delà de cet aspect, mais toujours dans le même esprit, notre parti fait une proposition, que j'approuve, pourvu qu'on fasse les mises en garde appropriées, au sujet des droits de l'enfant né à la suite de la fécondation d'embryons de divers donneurs. Notre parti est d'avis que, lorsque cet enfant grandira et voudra savoir qui sont ses parents, les renseignements devraient impérativement être fournis à l'enfant. Je conviens que nos antécédents et la connaissance de nos ancêtres et de notre patrimoine sont très importants. Il faut que le projet de loi l'énonce très clairement et très expressément. Les donneurs doivent bénéficier d'une protection juridique pour qu'il n'y ait absolument aucune méprise, pour que l'enfant ne puisse pas, des années plus tard, dire à quelqu'un qu'il est son père et qu'il doit payer toutes ses études ou d'autres coûts. Il semble que cette intention ait été énoncée dans le projet de loi, mais nous savons que, souvent, l'intention et la réalité sont deux choses différentes.

    En ce qui concerne l'intention, le gouvernement a présenté toutes sortes de projets de loi. Un de ceux que je ne peux oublier, c'est celui ayant trait à l'octroi du sursis. C'est le cas où une personne n'a pas à aller en prison. Des délinquants violents ont pu repartir librement par suite de l'adoption de cette mesure. Lorsque nous avons abordé de nouveau la question à la Chambre, la ministre ayant présenté cette mesure législative a dit que l'intention n'avait jamais été qu'elle s'applique aux délinquants violents. La réalité, c'est que cela n'ayant jamais été dit clairement dans le projet de loi, celui-ci a effectivement été appliqué dans le cas des délinquants violents.

    Le projet de loi doit préciser très clairement que les enfants nés grâce à l'utilisation de ces techniques peuvent avoir accès aux antécédents de leurs parents, mais que ces derniers ne peuvent, de ce fait, avoir à subir des conséquences juridiques ou financières.

    Selon moi, le gouvernement manifeste aussi un peu d'arrogance dans la méthode choisie pour assurer le fonctionnement de l'Agence canadienne de contrôle de la procréation assistée. J'espère que nous conviendrions tous qu'il existe un aspect fondamentalement répréhensible dans la création d'une agence au sein de laquelle le gouvernement se réserve le droit de nommer tout le personnel, pour permettre ensuite à la ministre elle-même de donner à cet organisme n'importe quelles directives. De plus, l'agence est obligée de suivre les directives de la ministre et de veiller à ce que ces dernières demeurent secrètes. Cela veut essentiellement dire que nous nommerons à la Chambre une personne qui décidera elle-même de l'orientation de l'agence et qui n'aura de compte à rendre à absolument personne et qui n'aura même pas à divulguer de l'information concernant les décisions prises, si ce n'est pour donner des directives aux personnes qui mettront cette volonté à exécution. C'est fondamentalement répréhensible. C'est une façon de faire qui doit cesser.

    Je constate que mon temps de parole est écoulé, mais je pense que c'est le genre de sujet sur lequel nous devons nous pencher longuement et attentivement. Nous devons écouter ce que chacun d'entre nous a à dire et tenir compte de nos points de vue mutuels. J'espère que chacun prendra le temps de consulter ses électeurs et de réfléchir à leurs besoins et à leurs désirs au lieu de tout simplement donner suite aux directives de son parti. Je souhaite enfin que nous puissions en bout de piste tenir un vote libre qui sera le reflet véritable des désirs de nos électeurs.

  +-(1240)  

+-

    M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC): Monsieur le Président, j'oserais dire que ce projet de loi, plus que tout autre mesure dont nous ayons été saisis ces dernières années peut-être, nous a amenés à réfléchir profondément, à consulter un grand nombre d'électeurs et à écouter beaucoup de groupes qui, je crois, ont un attachement très viscéral et émotif au contenu et aux implications de cette mesure législative. Beaucoup de députés ont exprimé des opinions très songées, personnelles et presque philosophiques sur l'impact que ce projet de loi aura sur eux, sur leurs électeurs et sur l'ensemble du pays.

    Comme je l'ai déjà dit, c'est un projet de loi auquel nous devons réfléchir très sérieusement. Même si cette mesure était attendue depuis longtemps, j'espère que le gouvernement ne l'étudiera pas à la hâte sans y accorder toute l'attention nécessaire. Ce projet de loi nécessiterait un apport important de nombreux secteurs de la société, y compris les groupes religieux, le milieu scientifique et les groupes qui s'intéressent à la protection de la vie privée, sans compter les nombreux groupes qui travaillent à la recherche médicale en vue d'améliorer la vie humaine.

    Le processus d'élaboration de ce projet de loi a débuté il y a longtemps, mais je tiens à dire que nous ne devrions pas nous précipiter pour en arriver à une version définitive. En mai, lorsque le projet de loi a été présenté, il a suscité beaucoup d'intérêt et de consternation. Je m'empresse de signaler que le projet de loi interdit le clonage et la création d'un embryon in vitro à des fins autres que la création d'un être humain. Il interdit aussi la création d'un embryon à partir d'un embryon ou d'un foetus dans l'intention de créer un être humain.

    Il constitue l'Agence canadienne de contrôle de la procréation assistée, l'ACCPA, qui exercerait les pouvoirs énoncés à l'article 24 relativement aux autorisations qui lui sont conférées en vertu du projet de loi. Le paragraphe 25(1) dit ceci:

Le ministre peut donner à l'Agence des instructions impératives en matière d'orientation quant à l'exercice de ses pouvoirs.

    Des préoccupations ont été exprimées au sujet de l'obligation de rendre compte de cette agence. Quelle en sera la composition? Quelle sera l'étendue de ses pouvoirs? Quels freins et contrepoids seront en place? Ce sont là des questions très légitimes. Le projet de loi nous apprend que le gouverneur en conseil peut prendre des règlements concernant l'usage de matériel reproductif humain ou d'un embryon in vitro, c'est-à-dire de cellules souches embryonnaires, à des fins de recherche. Il prévoit également que l'agence en question devra délivrer un permis autorisant de telles recherches.

    Bien que le projet de loi interdise, à l'article 6, la rétribution des mères porteuses, celles-ci peuvent se faire rembourser certaines dépenses aux termes des règlements établis suivant l'alinéa 65(1)e).

    Il est important d'examiner et de mettre en relief autant ce que le projet de loi interdit que ce qu'il permet ou autorise. Ces dispositions législatives qui nous sont proposées soulèvent des questions qui, comme je l'ai indiqué, peuvent paraître incomplètes pour l'instant et peuvent même s'avérer dangereuses. Elles sonderont l'intellect et la fibre morale des particuliers et des députés, feront ressortir le conflit pouvant exister entre leurs croyances religieuses et leur perception rationnelle des éléments scientifiques du projet de loi, et mettront à l'épreuve leurs convictions personnelles. Je pense qu'elles répondent à moins de questions qu'elles n'en soulèvent. Il faut faire preuve de prudence.

    Le projet de loi donne au gouvernement une vaste gamme de pouvoirs de réglementer ce genre de recherches, ce qui risque de marginaliser le Parlement ou de l'écarter une fois que le projet de loi aura obtenu force de loi. Voilà pourquoi il est important que le Parlement fasse bien son travail dès le départ. En gros, nous devons prendre tout de suite les mesures qui s'imposent pour tenir le Parlement bien au fait de la situation, car l'occasion de réfléchir à nouveau à ces questions pourrait bien ne plus se représenter. Du moins, le projet de loi actuel ne prévoit rien en ce sens.

    Il est aussi contraire à l'esprit de la recommandation 14 du Comité permanent de la santé que les recherches sur les cellules souches embryonnaires soient autorisées à titre exceptionnel, après qu'il a été démontré que ces recherches peuvent être effectuées sans l'aide d'autre matériel biologique. Cela va également à l'encontre de la recommandation concernant la capacité du gouvernement d'intervenir dans ces recherches ou de les entreprendre.

  +-(1245)  

    L'agence dont j'ai parlé plus tôt, l'Agence canadienne de contrôle de la procréation assistée, délivrera des autorisations, conseillera le gouvernement et surveillera l'application de la loi. Cette agence n'est pas indépendante, mais elle relève du ministre, comme on le précise clairement à l'article 25. Sous sa forme actuelle, le projet de loi n'établit pas des limites sur le nombre acceptable d'embryons créés et entreposés à des fins de reproduction. Le gouvernement établira ces limites comme bon lui semble, à l'abri de l'examen rigoureux qui est censé se produire dans le cadre du processus parlementaire.

    Le projet de loi suit également de près les règlements et directives que les Instituts de recherche en santé du Canada ont émis le 4 mars, bien avant la présentation du projet de loi. Au niveau du comité, le docteur Bernstein, le président des IRSC, a confirmé que le ministre était bien au courant à l'avance de l'émission de ces directives. Selon toute probabilité, les directives sont une sorte de baromètre des relations publiques et de l'opinion publique au sujet de cette proposition. Cette méthode est tout à fait antidémocratique. Je prétends qu'une fois de plus, on écarte le Parlement et on nous empêche de procéder à l'examen rigoureux qui est exigé et requis dans une démocratie.

    Le comité a également recommandé qu'au moins la moitié des membres de l'agence soient des femmes. Le projet de loi n'aborde pas cette question.

    En examinant le projet de loi, je voudrais souligner, comme d'autres députés l'ont fait, qu'un certain nombre de pratiques sont interdites. Il est important de les souligner à nouveau. Ce sont: le clonage humain; la création d'un embryon in vitro à des fins autres que la création d'un être humain ou l'amélioration des techniques de procréation assistée; la création d'un embryon à partir d'un autre embryon; la détermination du sexe de l'embryon à des fins non médicales; la création d'un hybride humain ou non humain en vue de la reproduction. D'autres députés ont parlé des horreurs de ce type de manipulation de l'oeuvre de Dieu. Le fait de créer d'une certaine façon des cellules souches ou des formes de vie qui n'étaient pas prévues au départ est extrêmement inquiétant pour de nombreux Canadiens.

    Il est interdit également d'effectuer des manipulations génétiques sur le sperme, sur un ovule ou sur des embryons; de conserver un embryon en dehors du corps d'une femme après le quatorzième jour du développement; de prélever du matériel reproductif humain sur un donneur après sa mort sans le consentement écrit du donneur; d'avoir recours à la maternité de substitution à des fins commerciales, c'est-à-dire de payer des donneurs de sperme ou d'ovules et d'acheter ou de vendre un embryon humain. Toutes ces pratiques sont tout à fait interdites aux termes de ce projet de loi. Je prétends que lorsqu'on examine cette mesure législative, on peut s'apercevoir qu'on répond dans une certaine mesure aux graves préoccupations légitimes qui ont été exprimées en interdisant ces activités.

    Il importe aussi de signaler les éléments dissuasifs. Ceux qui sont trouvés coupables d'avoir contrevenu à ces interdictions sont coupables d'infractions criminelles passibles d'amendes pouvant atteindre 500 000 $ ou d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à 10 ans. Les conséquences sont graves, réelles, et il en est fait état dans la loi.

    Parmi les activités réglementées, mentionnons la conservation, la manipulation et l'utilisation de sperme, d'ovules et d'embryons ainsi que le versement d'une indemnité à une mère porteuse pour des dépenses raisonnables, par exemple, pour des vêtements de maternité, des traitements médicaux et pour toute autre dépense justifiée par des reçus.

    Il s'agit indiscutablement d'un projet de loi exhaustif qui obligera inévitablement les députés à tenir de vastes consultations légitimes, ce qu'ils devraient faire, comme je l'ai mentionné dans mon introduction. Il est important que nous examinions le projet de loi de manière très systématique et attentive tout au long du processus. Ce projet de loi sera ensuite renvoyé au comité où certains députés qui faisaient partie du comité précédent auront l'occasion de mettre leurs connaissances à contribution, des connaissances qu'ils ont acquises, afin d'examiner rigoureusement les témoignages de ceux qui seront invités à comparaître devant eux, des témoins ayant des compétences que bon nombre de députés, dont moi-même, ne possèdent peut-être pas. Ces gens-là ont des points de vue très importants qui doivent être pris en considération.

  +-(1250)  

    Je le répète, nous ne devrions pas passer outre à ce projet de loi de quelque façon que ce soit, mais nous devrions l'examiner et le respecter en raison des éléments qu'il contient et qui ont trait à la vie humaine.

+-

    Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'apprécie de pouvoir intervenir; c'est un moment très important que nous attendons depuis des années. En fait, la question a été soulevée depuis plusieurs années déjà. Lorsque le premier ministre est arrivé au pouvoir en 1993, certaines questions fondamentales avaient déjà été soulevées. Or, presque neuf ans plus tard, nous traitons encore de la question.

    Il semble très étrange de procéder ainsi à toute vitesse, juste avant que la Chambre ne fasse relâche pour l'été. On parle même de prorogation. Il faut certainement se demander jusqu'à quel point c'est important pour le gouvernement, à la lumière des événements récents. Je suis convaincue que le gouvernement a de véritables préoccupations à cet égard; il serait terrible de croire qu'il s'agit d'une sorte de tactique pour étouffer une affaire brûlante et la reléguer à l'arrière-plan. Quoi qu'il en soit, nous devons nous pencher sur la question, mais pas de façon précipitée. Il faut l'examiner attentivement.

    Il y a dix ou quinze ans, nous n'aurions pas eu un tel débat parce que la technologie n'était pas disponible pour cerner certaines questions éthiques et technologiques très délicates, mais non moins importantes. De toute évidence, nous devons étudier la question parce que les progrès réalisés dans le domaine de la médecine sont absolument phénoménaux.

    Je prends quelques minutes pour parler des percées considérables et étonnantes qui ont présentement lieu dans le domaine de la recherche sur les cellules souches non-embryonnaires ou, autrement dit, la recherche sur les cellules souches adultes. Ensuite, je m'interroge sur la grande question qui se pose, sur la direction vers laquelle nous mènera la recherche et sur la définition de la vie. Ma thèse repose sur ces éléments et j'estime indispensable de souligner que l'Alliance canadienne appuie la recherche sur les cellules souches. Comme je l'ai déjà mentionné, au cours des dernières années, les percées dans les secteurs de la médecine et de la recherche ont été absolument phénoménales et nous pouvons nous en réjouir.

    Ceci dit, rien n'est encore définitif parce que dans le domaine de la recherche sur les cellules souches, il y a des percées tous les jours, toutes les semaines et tous les mois et des événements emballants se produisent régulièrement. L'histoire ne fait que commencer.

    En optant, dans la loi, pour la recherche sur les cellules souches embryonnaires, sans avoir au préalable pleinement compris et souligné l'importance des découvertes extraordinaires amenées par la recherche sur les cellules souches non embryonnaires, nous nous pénaliserions nous-mêmes, les Canadiens et toutes les personnes dont la vie en dépend.

    Des progrès exceptionnels ont été réalisés dans le traitement de la maladie de Parkinson et de la sclérose en plaques. Nous avons reçu il n'y a pas longtemps, ici, sur la Colline, des personnes atteintes de sclérose latérale amyotrophique. Ces personnes existent bel et bien; elles sont en chair et en os, portent chacune un nom, ont des familles et pourraient voir leur vie transformée par ce type de recherche.

    Il serait prématuré de prétendre que le gouvernement connaît la réponse à toutes les questions et qu'il nous faudra opter pour cette solution, alors que nous n'avons pas pleinement exploré toutes les possibilités recelées par la recherche sur les cellules souches adultes. Du fait de ces découvertes extraordinaires, il est indispensable de prévoir un examen au bout de trois ans, comme l'a proposé le gouvernement. Je trouve cela formidable, mais je crains de devoir me montrer cynique à cet égard. Les députés qui siègent aux Communes depuis plus de trois ans savent comment se sont déroulés certains de ces examens. Nous sommes quelques-uns à avoir observé certains de ces cycles de trois ans. L'Alliance canadienne réclame un moratoire de trois ans, pour que nous puissions observer sur le long terme les progrès scientifiques réalisés dans le domaine.

    La recherche sur les cellules souches adultes, la recherche sur les cellules souches non embryonnaires, si l'on veut, comporte trois avantages. Il y en a probablement beaucoup d'autres, mais nous pourrions déjà parler de trois d'entre eux. Premièrement, les cellules sont facilement accessibles et les adultes sont nombreux.

    Deuxièmement, il n'y a pas de risque de rejet de tissus. Ce sont des cellules qui se sont développées et, dans certains cas, certaines beaucoup plus longtemps que d'autres. Elles présentent un énorme potentiel de réalisation. Et il est vraiment merveilleux que ces cellules ne présentent pas de risque de rejet de tissus. On pourrait faire de la recherche et des tests sur les cellules souches. Comme il ne s'agit pas de cellules souches embryonnaires, les gens pourraient aller de l'avant, car il n'y a pas de risque de rejet de tissus, ce qui est grave et peut être dévastateur pour beaucoup de greffés.

    Troisièmement, leur utilisation soulève peu de problèmes d'ordre éthique. Chacun de nous reconnaîtra sûrement que la question suscite de grandes préoccupations d'ordre éthique. Comme je l'ai déjà dit, cela ne constituait même pas un facteur il y a 10 ou 15 ans. Comme ce genre de choses n'était pas possible, cela ne présentait pas de véritables problèmes d'ordre éthique. Ces problèmes se posent maintenant.

  +-(1255)  

    Nous abordons la question de savoir ce qu'il est important et essentiel de comprendre quand nous disons que des embryons sont des embryons et quand nous cessons de dire qu'un embryon a été conçu par des parents. Ne les appelons pas simplement des donneurs, car, qui qu'ils soient, ils ont un nom, un visage, une famille et des êtres chers également. Quand passe-t-on du développement de l'embryon à la culture de tissus à des fins purement scientifiques ou à des fins de transplantation?

    Nous parlons de cela et de la transition de la recherche sur les cellules souches embryonnaires à la définition de la vie humaine, car je pense que c'est probablement la question qui nous préoccupe tous. Je sais que le comité, qui a fait un travail remarquable, a discuté de cette question, certainement en profondeur, et il a dû se prononcer sur ce qu'est vraiment la vie humaine et quand elle commence. Ce sont des questions qu'on se pose depuis très longtemps et je ne vais pas entrer dans ce débat.

    Je donnerai simplement quelques exemples pour montrer à quel point je suis reconnaissante et à quel point je suis convaincue, à cause de l'ADN et d'autres facteurs, que la vie commence au moment de la conception. Nous pouvons vérifier l'ADN d'un embryon grâce à une technologie mise au point il y a quelques années seulement. L'ADN n'est pas créée à la naissance, ni au bout de 27 semaines de gestation ou de 13 jours et demi. L'ADN est constitué au moment de la conception. C'est à ce moment que commence vraiment la vie, comme la recherche scientifique a permis de l'établir. Il s'agit ensuite de décider si nous voulons commencer à cultiver des embryons, ou si nous les considérons comme des êtres humains.

    Permettez-moi de vous parler de mon frère, Sean, qui a été adopté. Il est arrivé chez nous à l'âge de deux ans ou deux ans et demi; j'avais alors six ans. Du jour au lendemain, je me suis retrouvée avec un frère. Je suis très heureuse qu'une personne qui, un jour, s'est trouvée en difficulté a choisi de donner son enfant à l'adoption. Cela m'a permis d'avoir un frère. Peu m'importe que son ADN soit différente de celle du reste de la famille. Cela n'a aucune importance. Ce qui compte, c'est que quelqu'un, quelque part, a vu cet enfant comme un être humain.

    Il est aujourd'hui un être humain vivant. Il est depuis longtemps mon frère, et j'en suis heureuse. Une vraie vie, un vrai visage, une vraie personne, voilà réellement de quoi il s'agit et j'en suis reconnaissante. Cette personne est mon frère depuis toujours et continuera de l'être. Je suis heureuse que quelqu'un, quelque part, se soit rendu compte que même s'il n'était alors encore qu'un embryon, il était tout de même un être humain.

    Permettez-moi de parler pendant quelques minutes d'un article que j'ai lu dans le journal d'hier. Lorsqu'on parle du véritable début de la vie humaine, on dit que le foetus doit avoir atteint tel poids ou telle durée de gestation, ou toute autre chose de ce genre. J'ai donc lu l'histoire d'une petite fille qu'on nommait Pearl dans le journal pour préserver l'anonymat. L'événement s'est passé en France. Elle est née en février et pesait 10 onces. C'est un record de tout les temps pour un bébé vivant et capable de respirer.

    Je pense à une livre de beurre. Je ne suis pas trop bonne en mathématiques, mais je pense à mon assistant électronique, par exemple, et à la facilité avec laquelle je peux le prendre dans ma main. Il semble peser un peu moins qu'une livre de beurre, alors il doit peser autour de 10 onces, mais je ne le sais pas exactement. Les fabricants du Palm Pilot le sauraient sans doute, mais ce n'est pas un gros appareil. Pourtant, son poids équivaut à celui de cette petite fille. Elle est rentrée chez elle en fin de semaine. Elle pèse maintenant quatre livres et quatre onces. C'est un être humain tout à fait formé et vivant. Je trouve cela absolument enthousiasmant.

    Voilà ce que nous devons débattre et célébrer: le fait que la vie humaine commence dès le premier instant de la conception, car c'est alors que notre ADN est créé. C'est ainsi qu'a commencé la vie de la petite Pearl. Elle a maintenant quitté l'hôpital et est rentrée chez elle et je suis certaine qu'elle apportera de grandes joies et satisfactions à sa famille.

    En terminant, je dirai simplement que je propose:

    Que la motion soit modifiée par suppression de tous les mots suivant le mot «que», lesquels seront remplacés par ce qui suit:

«cette Chambre refuse de procéder à la deuxième lecture du projet de loi C-56, Loi concernant la procréation assistée, étant donné que le principe de ce projet de loi ne reconnaît pas la valeur de la recherche sur les cellules souches non embryonnaires qui a permis de réaliser des progrès remarquables au cours de la dernière année.»

  +-(1300)  

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): L'amendement est recevable.

+-

    M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne): Monsieur le Président, d'abord, je voudrais revenir un an en arrière et expliquer le processus d'élaboration du projet de loi. Il est très important que nous examinions en quoi consiste le projet de loi C-56 et comprendre pourquoi. Tout a commencé il y a un an, le 4 mai lorsque le projet de loi a été renvoyé directement à un comité. C'est le premier projet de loi à avoir été renvoyé directement à un comité. Il a été renvoyé directement à un comité, et je félicite le ministre de l'époque de l'avoir fait. C'est une question très controversée qui est importante pour tous les députés et tous les Canadiens.

    Ce fut une très sage façon de procéder, car on a ainsi évité que les députés prennent position en fonction de la ligne de leur parti et arrêtent leur point de vue avant d'avoir pleinement compris la question. Pendant neuf mois, le comité a étudié la question. Il a entendu les meilleurs témoins d'un bout à l'autre du pays et de partout dans le monde, qui ont examiné le projet de loi sous toutes ses coutures et de tous les points de vue, à savoir l'aspect scientifique, l'aspect éthique et l'aspect lié aux valeurs familiales. À la fin, il a conclu que le projet de loi était peut-être mal nommé et qu'il fallait plutôt l'appeler mesure en faveur de l'édification de la famille.

    Il se compose en fait de deux parties. Il y a la partie qui concerne la fertilisation in vitro, à laquelle ont recours les couples qui ne peuvent concevoir d'enfants. Nous avons examiné ce que nous pourrions faire pour les aider à fonder une famille, à créer de nouveaux Canadiens en santé qui se transformeraient en individus prospères qui contribueraient à l'avancement de la société au Canada.

    L'autre partie, de l'avis de certains, ne serait même pas applicable au projet de loi. C'est la partie toute scientifique fondée sur l'idée qu'il faut faire de la recherche pour atténuer les souffrances des gens, ce qui n'a rien à voir avec la reproduction, sauf en ce qui concerne l'obtention de matériel qui pourrait être utilisé pour les cellules souches. C'est important à comprendre.

    Nous avons écouté tout le monde. Pour les scientifiques, la réussite dans le domaine de la fécondation in vitro est la naissance d'un gentil bébé fille ou garçon. Toutefois, pour la société, cela va beaucoup plus loin que cela. Des gens nés d'un donneur anonyme sont venus dire au comité que le fait de ne pas connaître leurs parents ou de ne pas savoir d'où ils venaient avait laissé un grand vide qu'ils avaient beaucoup de mal à gérer plus tard dans leur vie. Il était très important que nous comprenions la structure du corps humain, qui est très complexe, ainsi que les effets psychologiques sur plusieurs personnes. La réussite ne correspondait pas du tout à la même réalité pour tous et nous devions donc étudier tous les aspects de la question.

    Pour ce qui est des cellules souches embryonnaires, si nous voulons détruire un embryon, c'est-à-dire détruire la vie à ses tout débuts pour extraire les cellules souches dans les 14 jours, tuer l'embryon et faire de la recherche, pour plusieurs personnes, cela représente un réel terrain miné du point de vue éthique. Nous prenons la vie humaine à une étape préliminaire, au moment où elle est le plus vulnérable, et nous la détruisons. Il ne s'agit pas de déterminer si c'est à ce moment que la vie commence ou non. Biologiquement, c'est le cas et, que nous le voulions ou non, il n'y a rien que nous puissions y faire. La question est plutôt de savoir quelle importance nous accordons à la vie à cette étape. C'est le dilemme éthique que la Chambre devra résoudre. C'est une question sur laquelle nous avons beaucoup travaillé en comité pendant un an.

    À la fin de cette période, nous avons reconnu qu'il y avait d'autres possibilités. Des scientistes sont venus nous dire que nous ne devrions pas nous lancer dans cette voie. D'après les recherches scientifiques effectuées et pour ce qui est de la souffrance humaine, il était à leur avis plus efficace d'utiliser des cellules souches adultes.

    Le comité a publié en décembre son rapport intitulé Assistance à la procréation: Bâtir la famille. C'était un comité multipartite. Il comportait une majorité de députés libéraux, de même que trois députés de l'Alliance, deux du Bloc, un du NPD et un Conservateur. Après avoir entendu tous les témoins, nous avons présenté nos recommandations.

  +-(1305)  

    La recommandation dit ceci:

Que la recherche faisant appel à des embryons soit une activité réglementée nécessitant une autorisation. Même si les autres critères du règlement sont tous respectés, aucune autorisation ne sera délivrée à moins que le demandeur ne démontre clairement qu'il ne peut effectuer sa recherche avec aucun autre matériel biologique.

    Auparavant, nous étions parvenus à cette conclusion parce qu'on nous avait dit que la recherche sur les cellules souches embryonnaires présentait des possibilités. D'autres sources dont le sang du cordon ombilical ou les cellules souches adultes sont plus facilement disponibles, plus faciles à obtenir, et moins controversées du point de vue de l'éthique. Certains témoins ont dit que la recherche sur les cellules souches à partir de sources autres que l'embryon pourrait suffire à réaliser le potentiel des cellules souches.

    Le comité a été frappé par le témoignage selon lequel, au cours de l'année dernière, la recherche sur les cellules souches adultes chez l'homme avait fait des progrès énormes. Nous avons également appris que, après des années de recherche sur les cellules souches embryonnaires animales, les résultats étaient décevants. Par conséquent, nous voulons encourager le financement de la recherche sur les cellules souches adultes.

    Après avoir passé neuf mois à écouter les plus brillants et les meilleurs spécialistes du Canada et du monde, le comité, qui n'avait aucun intérêt particulier dans la question, a conclu que nous avions le choix entre deux voies. Nous pouvions détruire la vie au tout début et faire la recherche sur l'embryon, qui présente des possibilités scientifiques très limitées à ce moment-là, ou nous pouvions suivre l'autre voie, celle de la recherche sur les cellules souches adultes ou non embryonnaires, provenant du sang du cordon ombilical, du liquide amniotique et autre. Le comité a opté pour cette solution. Le projet de loi ne reflète pas cette décision, d'où le problème et la nécessité d'un amendement. Nous avons besoin d'une mesure législative qui reconnaisse la valeur de la recherche sur les cellules souches adultes ou non embryonnaires.

    Que s'est-il passé depuis le mois de décembre? Comme je l'ai dit à la Chambre il y a deux ou trois jours, au cours des 60 derniers jours, des progrès ont été faits concernant des personnes souffrant de la maladie de Parkinson. Les résultats ne sont pas uniquement des propositions ou des espoirs, les malades ont réellement été guéris. Ces découvertes s'appliquent également à la sclérose en plaques et à la résistance auto-immunitaire et autre. Des progrès considérables ont été accomplis ces 60 derniers jours, plus qu'à n'importe quel autre moment de l'histoire. Ce qui s'est passé dans ce domaine de la recherche au cours de l'année dernière est absolument phénoménal. Les progrès n'arrêtent pas.

    Nous devons considérer les développements réalisés au cours des 60 prochains jours ou de l'année qui vient. Nous devons être très prudents au plan éthique en ce qui concerne la destruction de la vie à ses débuts. Tout cela est important.

    Ce qui est intéressant, c'est que nous entendons parler de traitements découlant de la recherche sur les cellules souches adultes. Cela a fait l'objet d'un article à la page quatre ou cinq du Globe and Mail. Si la guérison de patients atteints de la maladie de Parkinson et de la sclérose en plaques était due à la recherche sur des embryons et à l'utilisation de cellules souches embryonnaires, nul doute que le monde entier en aurait été saisi.

    L'empressement des scientifiques et de la société à l'égard de la recherche sur les embryons est absolument étonnant. Nous n'avons pas assez d'information dans le domaine. Il est essentiel que nous prenions notre temps. Nous devons délibérer. La société doit réfléchir aux mêmes questions que nous avons examinées en comité, de manière à ce que les erreurs puissent être évitées. Nous devons aborder cet enjeu éthique avec sagesse.

    Toute la question de la Loi sur les brevets ne touche pas le projet de loi puisque celle-ci relève du ministre de l'Industrie. Cela est malheureux. La mesure devrait comporter certaines dispositions relatives au brevetage du corps humain, qui ne devrait pas être permis. Le corps humain est précieux et il doit le rester. On peut breveter nos découvertes, mais on ne devrait certainement pas permettre le brevetage du corps humain.

    L'aspect le plus important de cette mesure ne porte pas sur l'embryon en soi, mais sur l'agence qui délivrera des autorisations de recherche à l'aube du XXIe siècle. Si nous voulons vraiment légiférer et aborder des domaines aussi délicats au plan éthique, nous devons faire en sorte que cette agence rende des comptes et inspire confiance aux Canadiens. Il faut examiner cet aspect de la mesure et la changer. L'agence doit être aussi ouverte et transparente que possible. J'invite tous les députés à faire preuve de sagesse dans nos délibérations dans ce domaine.

  +-(1310)  

+-

    M. Paul Szabo (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, le projet de loi C-56 a trait aux techniques de reproduction et à la recherche connexe. À mon avis, la plupart des députés conviendront que la vaste majorité du projet de loi comprend des dispositions importantes méritant d'être appuyées. Toutefois, certains aspects devraient être analysés en vue d'une modification.

    Un de ces aspects a trait aux cellules souches. Simplement dit, ce sont des cellules qui peuvent être ajustées et devenir des cellules saines presque partout dans le corps humain. C'est donc dire que ces cellules pourraient servir à réparer des cellules endommagées.

    Les cellules souches peuvent être tirées des embryons. Elles peuvent aussi être tirées des foetus avortés, des cordons ombilicaux, du sang des cordons ombilicaux, du placenta, du liquide amniotique et, en réalité, de presque tout organe du corps humain. On peut facilement en obtenir, mais la question qui se pose, c'est de savoir si le fait de tirer des cellules souches d'embryons humains est acceptable ou non sur le plan éthique.

    Il existe dans le domaine de l'éthique un adage selon lequel, en cas de conflit entre l'inacceptable au plan éthique et le possible au plan scientifique, le point de vue éthique doit prévaloir. Je vais également citer le Dr Françoise Baylis, bioéthicienne à l'Université McGill. Dans son témoignage devant le Comité permanent de la santé, le 31 mai 2001, si je ne me trompe pas, elle a dit: «Les embryons sont des êtres humains. Cela est un fait biologique admis. Ils font partie de l'espèce humaine.»

    Sur le plan éthique, je ne crois pas qu'il y ait de désaccord quant à savoir si un embryon est ou non un être humain. Toutefois, on cherche à trancher sur le plan éthique si cet être humain est ou non une personne. C'est une discussion éthique profonde sur laquelle je n'ai pas le temps de m'étendre. Il existe des raisons d'être préoccupé par la recherche sur les cellules souches embryonnaires.

    La province de Québec, lorsqu'elle a pris connaissance de l'orientation adoptée par les Instituts de recherche en santé du Canada, a immédiatement demandé l'interdiction et interdit toute recherche sur les cellules souches embryonnaires. C'était en janvier.

    En février, il y a eu un autre fait nouveau important. Le secrétaire aux services de santé humaine des États-Unis a présenté une modification à un règlement définissant le terme enfant. À des fins de santé, un enfant se définit aux États-Unis comme une personne de moins de 19 ans, y compris la période s'étendant de la conception jusqu'à la naissance. C'est un changement très important aux États-Unis en ce qui concerne la politique relative à l'enfant à naître.

    Le grand débat porte sur le problème éthique qui consiste à savoir quand la vie commence. Les embryons humains peuvent fournir des cellules souches, mais il y a là un problème éthique car, pour les prélever, il faut détruire l'embryon. C'est un point important. De plus, comme les cellules souches embryonnaires ont un ADN étranger au patient qui en bénéficiera, il y aura des problèmes de rejet par le système immunitaire, et le patient devra prendre des médicaments anti-rejet le reste de sa vie, ce qui n'est pas facile.

    En outre, les cellules souches embryonnaires qui sont injectées sous la peau ont tendance à créer des tumeurs spontanées. Le problème est très difficile à maîtriser. Dans une monographie que j'ai écrite, The Ethics and Science of Stem Cells, je rapporte un cas où des cellules souches embryonnaires ont été injectées dans le cerveau d'un patient atteint de la maladie de Parkinson. Le patient est décédé environ un an plus tard, et l'autopsie a révélé que des tissus pileux et osseux se développaient dans le cerveau. Cela donne une idée des problèmes qui doivent nous préoccuper lorsque nous commençons à manipuler les gènes.

    Par ailleurs, les cellules souches provenant de l'adulte ne posent pas de problèmes. Comme elles viennent du patient lui-même, il n'y a pas de problème immunitaire et on n'a pas besoin de médicaments. Les cellules souches sont facilement disponibles. Au lieu de les injecter directement dans la zone malade, on les injecte dans le sang, et elles peuvent aller s'y implanter d'elles-mêmes.

  +-(1315)  

    Il est tout à fait logique de poursuivre les recherches sur les cellules souches embryonnaires. C'est sur ce point que portait la motion du député, pour mettre en évidence l'importance des recherches sur les cellules souches des adultes, comme le Comité de la santé l'a dit.

    Toute la question porte sur les recherches effectuées sur les embryons surnuméraires des cliniques de fertilité. S'il n'existait pas d'embryons surnuméraires, la question ne se poserait pas. Je vais donner à la Chambre une idée ce qui se passe.

    Le Dr Baylis, dont j'ai déjà parlé, a dit qu'il y a environ 500 embryons congelés dans toutes les cliniques spécialisées dans le traitement de la stérilité au Canada. Actuellement, environ 250 servent à des fins de procréation, et il en reste 250 autres. Dans son exposé, elle a aussi dit que la moitié des embryons congelés ne survivraient pas à la décongélation. Il en reste donc 125. Elle a ajouté que sur les 125 restants, seulement neuf pourraient produire une lignée de cellules souches, et environ cinq seulement pourraient produire une lignée de cellules souches d'une qualité propice à la recherche. Ainsi, seulement cinq embryons sur 250 sont utiles, et il faut détruire 250 embryons pour en obtenir simplement cinq qui serviront à la recherche. Il s'agit d'un taux de 2 p. 100 qui est inacceptable pour la recherche scientifique. Nous devons faire quelque chose à ce sujet.

    Que pouvons-nous faire à cet égard? S'il n'y avait pas d'embryons excédentaires provenant des cliniques spécialisées dans le traitement de la stérilité, la question serait purement hypothétique. Nous serions saisis d'une motion prévoyant que des embryons peuvent être créés expressément à des fins de recherche, et la Chambre devrait se prononcer sur cette question.

    Le projet de loi à l'étude propose que nous utilisions des embryons excédentaires qui ne devraient pas exister. On essaie ainsi d'obtenir de manière détournée ce que les chercheurs ne peuvent obtenir directement, c'est-à-dire des embryons à des fins de recherche. Nous devrions étudier cette question directement. Je voudrais que la Chambre puisse examiner une motion en ce sens.

    Nous pouvons faire quelque chose à cet égard. Il y a eu de vastes recherches concernant les méthodes de conservation des ovules. Les cliniques spécialisées dans le traitement de la stérilité administrent des médicaments aux femmes pour qu'elles ovulent au maximum. Elles produisent ainsi une grande quantité d'ovules. De dix à 20 ovules seraient alors prélevés. Tous ces ovules seraient fécondés. Certains serviraient pour la fécondation in vitro. Les autres seraient congelés pour des opérations in vitro ultérieures. Si le premier essai fonctionne, que le couple ne veut pas avoir de deuxième enfant ni donner l'ovule à une autre personne souhaitant l'avoir, les embryons deviendraient alors excédentaires.

    Que signifie la conservation d'ovules humains? Cela veut dire que l'on obtiendra seulement quelques ovules. Ceux qui seront nécessaires au processus de fertilisation in vitro seront fertilisés et conservés. Quand le premier processus sera terminé et qu'il faudra d'autres ovules pour le processus suivant, les ovules seront dégelés, fertilisés et implantés. L'idée est de n'avoir aucun excédent. Il est très important que l'on investisse davantage dans le processus de conservation des ovules humains.

    Dans un précédent discours, j'ai fait part de ma crainte concernant toute la question de la commercialisation. Le 24 mai, j'ai reçu une réponse à cet égard du Dr Timothy Caulfield, qui a comparu devant le Comité de la santé. Il m'a écrit ce qui suit:

Plus particulièrement, moi aussi je crains l'impact du processus de commercialisation dans ce contexte. Mes travaux ont en grande partie eu pour objet de faire ressortir les répercussions que pourrait avoir la commercialisation de la recherche génétique, qui consisteraient, par exemple, à créer des conflits d'intérêts uniques, à biaiser la recherche universitaire, à contribuer au resserrement de la définition sociale de la «normalité» et à élargir les notions de maladie et déficience.

    Ce projet de loi suppose bien des problèmes, dont celui de la possibilité d'obtenir des brevets et l'établissement d'une agence à laquelle nous confierions la responsabilité de définir un cadre éthique pour la recherche. Le projet de loi doit faire l'objet d'une étude approfondie. Je tiens à signaler aux Canadiens qu'aucun groupe, aucune organisation, aucune personne ne s'oppose à la recherche sur les cellules souches embryonnaires. La question consiste à se demander si on la fera correctement.

  +-(1320)  

+-

    M. Reed Elley (Nanaimo--Cowichan, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est avec un plaisir renouvelé que je participe à l'important débat que nous tenons aujourd'hui, maintenant que la Chambre est saisie d'un amendement voulant qu'elle ne lise pas pour la deuxième fois le projet de loi C-56, Loi concernant la procréation assistée, parce que celui-ci ne reconnaît pas en principe la valeur de la recherche sur les cellules souches non embryonnaires, qui a fait d'importantes percées au cours de la dernière année.

    L'amendement me donne l'occasion de développer les observations que j'ai présentées plus tôt aujourd'hui, lorsque j'ai dit que, dans sa forme actuelle, le projet de loi ne tient pas compte des larges assises scientifiques dont on dispose au Canada et dans le monde entier en ce qui concerne tout particulièrement la recherche sur les cellules souches. Ceux d'entre nous que le projet de loi préoccupe voudraient signaler aux députés que le projet de loi devrait être renvoyé au comité pour qu'on y établisse une démarche plus équilibrée quant aux meilleurs résultats scientifiques que l'on peut obtenir de la recherche sur les cellules souches embryonnaires et les cellules souches adultes.

    Nous souhaitons tous qu'on trouve un remède à des maladies aussi débilitantes et fatales que la sclérose latérale amyotrophique, par exemple. Je ne voudrais pas prendre la responsabilité de ne pas permettre à la science de trouver un tel remède, dans un certain cadre réglementaire, s'il était effectivement possible de trouver un tel remède grâce à la recherche sur les cellules souches adultes. Le recours à des cellules souches embryonnaires nous pose certes un dilemme éthique que la recherche sur les cellules souches adultes ne nous pose pas.

    Je dois dire que j'ai été frappé par les observations de mon collègue, le député de Hamilton, un diplômé de McMaster avec lequel je suis allé à l'école. J'ai été renversé par ses observations sur l'utilisation des cellules souches adultes et embryonnaires et notamment lorsqu'il dit que nous ne voudrions pas ne pas tout envisager dans le présent débat pour que la science progresse. En fait, il dit être d'accord pour qu'on mette fin à une vie afin d'en prolonger une autre.

    Je suis d'accord pour que nous encouragions les dons d'organes et de tissus. Je tiens cependant à rappeler au député que ni le foetus ni l'embryon n'ont le choix. On ne leur donne pas la possibilité de décider s'ils seront des donneurs ou non, la possibilité, en fait, d'accepter de donner la vie à quelqu'un au prix de leur propre survie. La question nous pose un problème d'éthique sur lequel nous devrions nous pencher plus longuement. Je suis persuadé que les députés en tiendront compte lorsqu'ils réfléchiront à la question.

    Nous avons parlé de la SLA, la sclérose latérale amyotrophique, de la maladie de Parkinson et d'autres. Dans un article paru le 8 avril 2002, l'agence de presse Reuters dit ceci:

Des chercheurs ont révélé lundi qu'un homme atteint de la maladie de Parkinson a été soigné avec une greffe de cellules extraites de son propre cerveau, laquelle greffe a eu pour résultat de le débarrasser du tremblement et de la rigidité musculaires qui caractérisent cette affection.

Ils attribuent ce résultat aux cellules souches adultes qu'ils ont extraites du cerveau du patient pour les lui réinjecter par la suite afin de restaurer ses fonctions normales.

«De toute évidence, d'autres études s'imposent», a déclaré le Dr Michael Levesque, du centre médical Cedars-Sinai de Los Angeles, qui a dirigé les travaux. «Ce cas est le premier à prouver que cette technique prometteuse pourrait fonctionner. La procédure est expérimentale et doit être explorée plus à fond, avant qu'elle ne devienne pratique courante.»

Plus de deux ans après ce traitement expérimental, le patient en question ne manifeste plus de symptômes de la maladie de Parkinson, cette maladie incurable et fatale qui atteint le cerveau, provoque des tremblements aux premiers stades et finit par priver la victime de toutes ses capacités.

  +-(1325)  

    C'est merveilleux. Si la recherche médicale permet effectivement de réaliser de tels exploits aujourd'hui et si, dans ce cas, comme dans d'autres que nous pourrions citer, nous avons obtenu de tels résultats grâce à la recherche médicale sur les cellules souches adultes, il nous incombe, en notre qualité de parlementaires, de veiller à ce que tout soit mis en oeuvre pour que l'ensemble de la recherche effectuée dans ce domaine soit prise en compte dans la loi. Tâchons de ne pas trop mettre l'accent sur un seul aspect de la recherche consacrée aux cellules souches, ce qui semble être le cas dans l'actuel projet de loi.

    N'oublions pas non plus la question du consentement du donneur. Dans l'état actuel des choses, les enfants nés de l'insémination artificielle n'ont accès ni à leur dossier médical ni à celui des donneurs. Le projet de loi est absolument lacunaire à cet égard.

    Je me suis entretenu récemment au téléphone avec une électrice de Nanaimo. Cette jeune dame a 20 ans. Elle est en excellente santé et est un membre productif de la société. Elle est issue de l'insémination artificielle. Ce qui la préoccupe, c'est qu'elle n'a pas accès aux dossiers médicaux et aux renseignements qui pourraient lui être utiles, au moment où elle atteint l'âge adulte et désire fonder une famille.

    Par ce projet de loi, le gouvernement refuse d'ouvrir la porte à cette possibilité. Elle a proposé, et je transmets cette proposition aux députés et, surtout, au comité, que nous n'envisagions que les donneurs qui acceptent que leur identité soit révélée aux personnes issues de l'insémination artificielle qui, à l'âge de la majorité, auront besoin de renseignements sur leurs parents biologiques.

    Plusieurs facteurs entrent en jeu. Lorsque nous comparons cette situation à celle de l'adoption, nous savons que les personnes qui ont été adoptées disposent de recours juridiques pour obtenir ces renseignements. Les personnes qui sont issues de l'insémination artificielle et qui, rendues à l'âge adulte, veulent savoir d'où proviennent l'oeuf ou le sperme qui les ont conçues doivent avoir le même accès à ces renseignements que les personnes qui ont été adoptées. Les règles du jeu devraient être équitables.

    Il faut vraiment clarifier certains aspects importants du projet de loi. Nous espérons que, lorsque le comité sera saisi du projet de loi, il voudra accepter des amendements qui permettront encore davantage de protéger ceux qui désirent bénéficier d'une protection aux termes du projet de loi et qui cherchent des remèdes qui n'existent pas à l'heure actuelle.

  +-(1330)  

+-

    M. John Bryden (Ancaster--Dundas--Flamborough--Aldershot, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux d'avoir l'occasion encore une fois de répondre à un discours du député de Nanaimo—Cowichan parce que le dialogue que nous avons ici est très important. Le projet de loi dont la Chambre est saisie traite d'une question de moralité. Il convient que le Parlement débatte une question de moralité lorsqu'il y a interface entre la moralité, la science et d'autres aspects de la société.

    Je signale que le député de Nanaimo—Cowichan a réclamé un vote libre sur ce projet de loi et, à cet égard, je vais lui présenter un argument en espérant qu'il en tiendra compte au moment de voter.

    Cet argument se fonde sur deux prémisses. Premièrement, on doit accepter, aux fins de ce projet de loi, que la vie commence au moment de la conception. Deuxièmement, on doit accepter que mettre fin à une vie arbitrairement est un meurtre. Nous ne parlons pas d'obtenir des cellules souches embryonnaires en créant des êtres humains pour les tuer ensuite.

    L'obtention de cellules souches embryonnaires aux fins de la recherche sur la maladie de Parkinson ou d'autres maladies se ferait uniquement dans le contexte où les cellules souches embryonnaires seraient autrement mises au rebut, soit par une clinique spécialisée dans le traitement de la stérilité ou, et le projet de loi ne fait pas mention de cela, par suite d'un avortement spontané, ou dans toute autre circonstance où du matériel embryonnaire devient disponible par suite d'un acte médical exécuté dans un hôpital de façon tout à fait conforme aux règles.

    À mon avis, l'argument moral est que nous avons grandement intérêt en bout de ligne à préserver la vie humaine. J'ai de la difficulté à concevoir certaines propositions venant de l'opposition ainsi que de députés de mon propre parti. Il y en a qui pensent qu'on devrait empêcher la recherche sur les cellules souches embryonnaires, contrairement à ce qui est proposé dans le projet de loi, jusqu'à ce que l'on voie si la recherche sur les cellules souches adultes peut produire les mêmes résultats. Ce qui m'ennuie avec cela, c'est que, comme je l'ai mentionné précédemment, on risque de condamner à mort ou à l'invalidité des gens que l'on pourrait peut-être sauver si la recherche sur les cellules souches embryonnaires s'avérait fructueuse pour trouver des moyens de soigner des maladies comme le Parkinson, la SLA, par exemple.

    J'aimerais encore une fois illustrer mes propos par un exemple. Il y a dans mon village un couple que nous connaissons très bien. La femme est gravement atteinte de la maladie de Parkinson. Son mari est venu me voir pour me dire: «John, je t'en prie, appuie le projet de loi C-56 parce que si les cellules souches embryonnaires pouvaient servir un jour à guérir les gens du Parkinson, j'aimerais que ce soit à temps pour sauver ma femme, qui est très mal en point à l'heure actuelle.»

    Alors le dilemme moral, selon moi, est le suivant: même si ses chances de succès ne sont que 5 p. 100 supérieures à celles de la recherche sur les cellules adultes, je pense que nous n'avons pas le droit, au plan moral, de retarder la recherche sur les cellules souches embryonnaires, puisqu'elle pourrait sauver les vies des personnes qui souffrent de ces terribles maladies.

    Après notre échange plus tôt, le député de Nanaimo--Cowichan est venu me voir et m'a dit qu'il m'avait écouté très attentivement, et je me permets de dire que c'est un excellent député. Nous voulons vraiment connaître la vérité dans le cas présent. Il a déclaré que le problème, de son point de vue, c'est que l'embryon n'a pas le choix. Il a fait allusion dans le discours qu'il vient de prononcer au fait que nous encourageons bien entendu les transplantations. Nous pouvons donner nos reins, notre foie ou tout autre organe. Nous pouvons signer un formulaire et lorsque nous sommes tués dans un accident, cet organe peut alors être utilisé pour sauver une autre vie. Nous reconnaissons que c'est une bonne chose. Cependant, comme notre vis-à-vis l'a fait remarquer, le problème réside dans le fait que l'embryon n'a pas ce choix. Si nous supposons qu'une personne est créée au moment de la conception et que cette personne meurt inévitablement--car nous ne parlons que d'une situation où cette personne, sous la forme d'un embryon, meurt--, cet embryon n'a pas le choix de créer une nouvelle vie.

  +-(1335)  

    Nous reconnaissons que la création d'une nouvelle vie est une bonne chose. En fait, c'est le plus grand bien moral auquel on puisse penser. Et c'est là où la distinction morale vraiment subtile entre en jeu. Je ne veux pas me lancer dans la religion et ce genre de choses, mais je pense qu'on a vraiment le sentiment que ceux qui sont en vie, ceux qui sont des personnes avant la naissance, sont les êtres les plus innocents du monde. En d'autres termes, si un être est une personne entre la conception et la naissance, nous pouvons tous reconnaître que cet être humain est moralement pur dans tous les sens du terme.

    Si nous prenons ce principe et l'appliquons à la logique voulant que le fait de donner la vie dans la mort est l'un des plus grands dons qu'on puisse faire, alors, sûrement, un embryon, qui est l'être le plus innocent qui soit, voudra choisir de faire le plus grand bien possible et pour ce faire, de servir à donner une nouvelle vie et une nouvelle chance de vivre au lieu d'être simplement détruit.

    Pour moi, c'est le dilemme éthique ultime. Il ne s'agit pas de savoir si la vie commence à la conception ou non. Le dilemme éthique ultime auquel nous devons faire face dans cette enceinte est le fait que nous devons faire un choix pour ceux qui en sont incapables et nous devons faire le bon choix moral pour ceux qui ne peuvent choisir. Un embryon ne peut choisir, mais nous savons que, dans son innocence, ce qu'il voudrait faire à sa mort, c'est donner la vie.

+-

    M. Jim Gouk (Kootenay--Boundary--Okanagan, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'avais à l'esprit les propos que je voulais tenir, mais l'intervention du député d'en face me fait modifier mon message. Je réponds à ses propos. J'apprécie sa sincérité, mais j'avoue ne pas être entièrement d'accord avec lui.

    Nous abordons tellement d'éléments que l'on pourrait considérer comme des mesures esthétiques. En fait, je veux dire que nous nous concentrons sur ce qui est populaire ou d'actualité et que nous avons tendance à oublier le reste. S'en tenir à la suggestion du député et prétendre que la recherche sur les cellules souches embryonnaires est une cure potentielle risque de créer des problèmes. C'est la décision que prendrait la Chambre si le projet de loi était adopté dans son état actuel. Nous irions immédiatement de l'avant avec la recherche sur les cellules souches embryonnaires sans poursuivre plus avant la recherche sur les cellules souches adultes. En d'autres termes, la recherche sur les cellules souches adultes serait mise de côté. Les scientifiques et les chercheurs se concentreraient plutôt sur la recherche sur les cellules souches embryonnaires et nous laisserions passer une belle occasion de découvertes.

    Par exemple, et certains diront que c'est un peu radical, mais j'essaie de faire valoir un point de vue, nombre de personnes ont besoin de greffes d'organes et les besoins dépassent souvent l'offre. Pourrions-nous prendre des gens qui ont commis des infractions graves, les abattre et prélever leurs organes afin de sauver la vie de citoyens dont la réputation est plus irréprochable sur le plan moral car ils n'ont pas commis d'infraction? Deux raisons nous empêchent de procéder ainsi. En premier lieu, c'est une question d'ordre moral. En second lieu, il y a d'autres solutions.

    Il en est exactement de même de la recherche sur les cellules souches. Primo, c'est une question d'ordre moral. Est-il correct de détruire des embryons afin de recueillir des cellules souches et de trouver des traitements pour certaines maladies qui autrement ne pourraient être guéries? Cela soulève nombre de questions d'ordre moral. Ce n'est pas uniquement un argument moral, comme l'a laissé entendre le député, et les embryons non utilisés pour l'insémination artificielle ne cessent pas simplement d'exister.

    Certains diront que dans les confins des contrôles les plus poussés, où les précautions et les garanties sont absolues, ce n'est que par accident qu'un embryon supplémentaire pourrait exister. Les gens en cause croyaient peut-être que cet embryon serait nécessaire, mais, pour une raison fortuite, il ne l'a pas été. Ayant donc cet embryon supplémentaire, ils se demanderaient alors quoi faire et comment agir pour le plus grand bien de tous. On peut effectivement formuler cet argument. Le problème vient du fait que rien dans ce projet de loi n'empêcherait ces gens de dire qu'il leur faut plusieurs embryons supplémentaires au cas où certains ne pourraient pas s'implanter. Ils auraient donc des embryons supplémentaires en nombre considérable. Ils assureraient un approvisionnement pour répondre à un besoin qu'ils auraient eux-mêmes créé.

    Comme dans l'exemple un peu farfelu que j'ai donné où il existe un facteur moral, dans ce cas, il y a aussi d'autres possibilités. Il y a d'autres possibilités quant aux donneurs. Il y a une rareté de l'approvisionnement. Nous devons faire tout notre possible pour que les donneurs d'organes se manifestent. Peut-être devons-nous mieux renseigner les gens sur la santé des donneurs? Quelles difficultés pourrait connaître une personne qui donnerait un rein par exemple?

    En ce qui concerne les gens qui décèdent, on craint que ceux qui souhaitent ardemment obtenir un organe décident un peu trop tôt qu'une personne ne pourra probablement pas survivre. Ils pourraient aussi décider de prélever un organe trop rapidement, pendant qu'il est encore très frais. Ce sont de véritables craintes qui surgissent dans l'esprit de certaines personnes. Nous devons peut-être augmenter la publicité pour bien faire comprendre aux gens à quel point il y a une pénurie d'organes et un véritable besoin à cet égard. Nous pourrions leur montrer que consentir ce sacrifice, d'une façon ou d'une autre, pourrait sauver une vie humaine.

    Il y a d'autres avenues possibles dans le cas de la recherche sur les cellules souches. La recherche sur les cellules souches adultes est déjà en voie de mener à des guérisons potentielles. Des traitements sont déjà effectués au moyen de cellules souches adultes. Étant donné qu'elles ne sont pas des tissus étrangers, elles ne créent pas le problème de rejet qu'on constate, ironiquement, dans le cas des transplantations d'organes. La recherche sur les cellules souches adultes est très prometteuse. Dans notre proposition, nous disons tout simplement qu'il faudrait explorer l'autre possibilité, celle qui entraîne le moins d'incidences morales et le moins de problèmes de santé éventuels pour les receveurs.

  +-(1340)  

    Si nous passions trop rapidement à la recherche sur les cellules souches embryonnaires, beaucoup de gens écarteraient la recherche sur les cellules souches adultes, qui leur paraîtrait ancienne alors que la recherche sur les cellules souches embryonnaires leur semblerait nouvelle. Ils voudraient se consacrer à ce qui est nouveau sans se préoccuper de l'autre. Les subventions publiques se tariraient et disparaîtraient. Il n'y aurait plus d'effort de recherche, qui s'étiolerait et cesserait. Tout le monde miserait sur la recherche sur les cellules souches embryonnaires et la demande à cet égard augmenterait. Les gens seraient portés à tricher et à créer beaucoup plus d'embryons que nécessaire. Des embryons seraient créés à seule fin de les détruire pour la recherche médicale. Voilà le problème moral.

    Je ne dis pas qu'à un moment donné il nous faut examiner la possibilité pour le plus grand bien de l'humanité ou traiter le vivant sans détruire la vie ce faisant. Cependant, tant que nous avons d'autres solutions, et nous en avons effectivement, nous nous devons à nous-mêmes et au public de les explorer complètement pour veiller à ce qu'elles aient une chance équitable.

    Nous ne disons pas qu'il faut écarter la question indéfiniment ou pour toujours. Nous disons qu'il faut nous accorder trois ans pour faire un effort concerté afin de déterminer si nous pouvons effectuer des traitements grâce à une autre méthode, moralement supérieure et peut-être médicalement plus sûre. Si, à la fin de cette période, il est démontré qu'elle n'est pas efficace et que les cellules souches embryonnaires présentent un meilleur potentiel, nous nous engagerons prudemment dans cette direction et élaborerons un projet de loi qui établit des garanties. Il faudrait cependant avoir la conviction que nous avons épuisé les autres solutions avant de passer à cette dernière. C'est une demande raisonnable.

    Le député a partagé quelques idées avec nous. Je l'apprécie. C'est ce que nous sommes censés faire ici. Nous sommes censés partager des idées, non de nous combattre. Les idées sont bien partagées des deux côtés de la Chambre sur cette question. Nous avons affaire à un projet de loi troublant et controversé à propos duquel il faut procéder sans précipitation.

    Je vais réfléchir aux arguments du député et je suis convaincu qu'il réfléchira aux miens. J'espère que tout le monde à la Chambre écoute attentivement les idées de chacun. Cela finira par nous aider à mettre au point un projet de loi qui reflète les besoins et les voeux des Canadiens.

  +-(1345)  

+-

    M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'apprécie les propos de mon collègue.

    Je vais parler de l'amendement au projet de loi C-56 qui se lit comme suit:

[...] la Chambre refuse de donner deuxième lecture au projet de loi C-56, Loi concernant la procréation assistée, puisque le principe du projet de loi ne reconnaît pas la valeur de la recherche sur les cellules souches non embryonnaires, laquelle a énormément progressé au cours de la dernière année.

    Comme l'a fait remarquer mon collègue, c'est réellement l'un des points principaux du rapport de l'opposition officielle au Comité de la santé qui a étudié l'avant-projet de loi: que l'on impose un moratoire de trois ans sur la recherche sur les cellules souches embryonnaires, que l'on traite ces questions d'éthique graves et sérieuses avec circonspection et que, dans les domaines comme celui de la recherche sur les cellules souches adultes dont le potentiel est franchement presque illimité pour le moment et inconnu, on mette à profit ces trois années pour réellement examiner les solutions de rechange. Comme le disait l'ancien chef de l'opposition, Preston Manning, quand la voie scientifique et la voie éthique convergent, c'est cette voie que nous devrions suivre.

    J'aimerais citer de longs passages d'un article publié dans le New York Times du 7 mars 2002 parce qu'il donne une idée du potentiel de la recherche sur les cellules souches adultes. Il y est dit en particulier:

Ajoutant un élément important à l'image sans cesse changeante que nous avons des cellules souches humaines, les chercheurs ont découvert que des cellules extraites du sang pouvaient régénérer non seulement le sang, mais les tissus de la peau, du foie et des intestins.

    Cela signifie que les cellules souches adultes peuvent être extrêmement puissantes, critère dont on pensait auparavant qu'il ne s'appliquait qu'aux cellules embryonnaires.

Cette découverte renforce l'idée toute nouvelle que le corps pourrait posséder une réserve de cellules réparatrices universelles qui pourraient rapiécer à peu près n'importe quel tissu endommagé. Ces cellules réparatrices, probablement situées dans la moelle épinière et relativement faciles à récolter, peuvent se déplacer dans le sang et contribuer à la régénération des tissus qui lancent un signal de détresse.

Cette théorie est loin d'être prouvée, mais si elle s'avère elle pourrait conduire, comme le pensent certains scientifiques, à des nouvelles thérapies dont le but serait de renforcer le processus naturel.

    Cela pourrait être une réponse possible aux requêtes des gens qui, comme chacun d'entre nous, connaissent des gens qui souffrent de maladies dégénératives comme la maladie de Parkinson. Cela pourrait être une source d'espoir pour elles. Les cellules souches embryonnaires leur sont présentées comme le seul espoir de guérir ces maladies alors qu'en fait il pourrait y en avoir un autre.

    Plus loin l'article cite le Dr Helen Blau, spécialiste des cellules souches à l'Université Stanford, qui dit ceci:

Il semble y avoir une réaction de régénération dont nous n'étions pas au courant. Cela nous porte à croire qu'il pourrait exister un mécanisme de réparation qui fonctionne tout au cours de la vie, mais qu'il serait trop faible dans le cas de maladie grave. Si nous pouvions amplifier ce mécanisme, cela pourrait donner lieu à une toute nouvelle forme de médecine basant le traitement des malades sur le recours à leurs propres cellules.

    Certains chercheurs sont même d'avis que nous devrions faire de la recherche sur les cellules souches embryonnaires parce que nous en avons besoin pour faire une étude comparative aux fins de la recherche sur les cellules souches adultes, mais là encore, dans un domaine aussi sensible, nous croyons que nous devrions faire preuve de prudence.

    J'aimerais continuer de citer cet article que je considère des plus intéressants.

Cette nouvelle découverte se base sur des patients qui ont reçu des cellules hématopoïétiques de parents juste après des traitements de lutte contre le cancer ayant détruit leurs propres cellules de moelle osseuse.

[...] Dans une étude similaire qui a paru en janvier, on a découvert que les cellules des patients s'étaient incorporées dans un coeur greffé. Mais c'est la première fois qu'on reconnaît que des cellules souches d'un donneur humain, vraisemblablement de la moelle osseuse, peuvent se reproduire dans plusieurs types de tissus différents.

    J'ai une autre citation, d'un certain Dr Donald Orlic du National Institutes of Health, le conseil consultatif du président, qui a dit:

Ce qu'il y a d'extraordinaire dans cette étude, c'est qu'elle démontre que les cellules souches dérivées de la moelle osseuse ont un niveau élevé de plasticité parce qu'elles ont alimenté trois organes différents.

    Selon l'article:

La plasticité est l'aptitude de la cellule souche à se convertir en divers types de cellules mûres.

Les biologistes ont cru jusqu'à tout récemment que chaque tissu humain avait une source spécifique de cellules souches qui ne servaient qu'à réparer ce tissu. Si cette théorie continue d'être maintenue, la moelle osseuse commence à être perçue comme une source générale de cellules souches qui peuvent servir à réparer les dommages où qu'ils se trouvent. Il n'est pas clair toutefois si le système de cellules souches que l'on trouve dans certains tissus est entièrement distinct ou s'il dépend d'une façon ou d'une autre du système de la moelle osseuse.

Ce qui semble clair, c'est que les cellules souches de la moelle osseuse sont beaucoup plus versatiles que les cellules souches particulières à un tissu.

Les médecins ont déjà appris comment extirper des cellules souches hématopoïétiques de la moelle osseuse pour les réinsérer dans le circuit sanguin en injectant une protéine naturelle, la cytokine, connue sous le nom de GCSF. Les cellules souches peuvent alors être prélevées dans le système sanguin du donneur et utilisées à la place de la moelle osseuse.

  +-(1350)  

Les patients traités par (cette) équipe ont reçu des cellules à diffusion hématogènes recueillies de cette façon sur les donneurs. On suppose que les cellules ayant contribué à former la peau, les intestins et le foie de patients provenaient de la moelle osseuse des donneurs, mais cela n'a pas été prouvé.

    Il faudra donc poursuivre les recherches dans ce domaine pour voir exactement quelles sont les possibilités.

    L'article ajoute:

Néanmoins, les expériences effectuées sur les souris ont révélé que la moelle osseuse constitue une source de cellules souches versatiles qui peuvent s'incorporer à divers tissus, notamment cardiaques.

Les cellules souches provenant de la moelle osseuse peuvent effectivement réparer de nombreux tissus, voire tous les tissus, et cela de façon continue. Toutefois, le système de reconstitution ne réussit de toute évidence pas à réparer assez rapidement les tissus ayant subi des dommages majeurs, notamment lors d'attaques cardiaques. L'utilisation de cytokines comme les GCSF pourrait peut-être permettre au système de reconstitution utilisant la moelle d'être mis à contribution dans de nombreux types de maladies.

Les chercheurs ont dit qu'ils examinaient plusieurs approches de ce type, notamment le prélèvement de cellules de la moelle dans le sang d'un donneur et leur injection directe dans un organe endommagé. Le docteur Körbling a déclaré qu'on pourrait disposer des premières données cliniques d'ici deux ou trois ans. Le docteur Orlic travaille dans la même optique et suit les mêmes plans d'action, afin de voir si des cellules de moelle stimulées par GCSF peuvent prévenir des attaques cardiaques chez des singes rhésus, avant de soumettre des humains à ce traitement.

    Au moment où nous abordons ce nouveau secteur de la recherche, où les cellules souches adultes offrent de grandes possibilités, je crois que nous devrions faire porter nos efforts et utiliser nos ressources dans ce domaine plutôt que de nous engager dans la recherche sur les cellules souches embryonnaires, qui soulève beaucoup de questions éthiques. Cela me ramène à une observation que j'ai faite dans un discours précédent. Le projet de loi ne tient pas compte des principe de base; autrement dit, nous discutons des questions de façon superficielle sans définir au préalable certains aspects fondamentaux.

    L'opposition officielle a demandé d'amender le préambule du projet de loi en y incluant les mots «la dignité et le respect de la vie humaine». Ces mots doivent figurer dans le projet de loi. Le rapport majoritaire libéral et le rapport minoritaire de l'opposition officielle l'ont recommandé. Ces mots doivent aussi figurer à l'article 22 du projet de loi, en tant qu'objectif fondamental de la nouvelle Agence de contrôle de la procréation assistée. Ces mots doivent faire partie de ses lignes directrices.

    Je reviens à toute la question qui a été soulevée, comme je l'ai déjà dit, durant la discussion entre Preston Manning et Mme Françoise Baylis, de l'Université Dalhousie. Mme Baylis a dit:

La première chose qu'il faut reconnaître dans le projet de loi et dans toutes nos conversations, c'est que les embryons sont des êtres humains. C'est une donnée biologique incontestable. Ils font partie de l'espèce humaine. Ce qui est contesté, c'est leur statut moral. Les termes que nous utilisons sont techniques et c'est là qu'intervient la notion de personne.

    En conséquence, elle fait une distinction entre l'être humain qu'est l'embryon et la personne humaine. Cependant, ce que nous devons faire dans le projet de loi et dans tout le pays en ce qui concerne toutes ces questions liées à la vie, c'est faire la distinction entre un être humain et une personne humaine, si distinction il y a. Il n'y a peut-être pas de distinction. C'est ce dont nous devons débattre dans cette enceinte.

    Mme Baylis a dit:

Je pense qu'il est très clair, quand il est question d'embryons, que la question de savoir si les embryons sont des êtres humains ou non ne se pose pas. La réponse est oui. C'est une donnée biologique. Le mot «personne», toutefois, n'est pas un terme biologique. Ce n'est pas un terme qui se fonde sur des faits. C'est un terme moral. C'est un terme ayant une valeur subjective au sujet duquel les gens sont en désaccord; et ils fondent leur désaccord sur des raisons particulières.

    Il me semble que c'est là la principale question à débattre. Franchement, je ne prétends pas avoir toutes les réponses et savoir exactement ce que constitue une personne humaine et un être humain, mais j'ai étudié la question. J'ai lu les écrits d'auteurs comme George Grant, l'un des plus éminents philosophes canadiens de tous les temps, qui a dit que c'est là la question la plus fondamentale pour toute société parce qu'elle a des répercussions sur tellement de mesures législatives et sur la valeur que nous attachons à la vie. Il a dit que nous devons déterminer ce que les êtres humains ont en commun et ce qui les caractérise afin que nous puissions dire à la Chambre que nous avons un charte des droits qui dit que la personne humaine a droit à la vie.

    Si les humains ont le droit à la vie, il vaut mieux expliquer pourquoi. Est-ce parce qu'ils sont doués de raison? Parce qu'ils peuvent utiliser leur raison? Est-ce à cause du libre-arbitre? De la capacité de faire des choix libres?

  +-(1355)  

    Nous devons décider pourquoi au juste nous disons que les êtres humains ont le droit à la vie, le droit de ne pas être privés de la vie, et pourquoi, avec certaines choses comme un embryon, même un embryon surnuméraire créé par fertilisation in vitro, nous pouvons détruire cette vie et nous en servir pour les recherches. Nous devons répondre à cette question fondamentale et en débattre avant de nous prononcer sur les détails du projet de loi. C'est pourquoi l'opposition officielle a proposé un amendement. Il faut faire en sorte que cette question soit débattue à fond, et il faut faire preuve de la plus grande prudence dans ce domaine.


+-DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Article 31 du Règlement]

*   *   *

[Traduction]

+-L'aide juridique

+-

    L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, les honoraires de l'aide juridique n'ont apparemment pas augmenté depuis 1987. On a signalé la semaine dernière que cela avait incité 46 comités juridiques régionaux de l'Ontario à éliminer leurs services en matière d'aide juridique.

    De plus, lors de la plus grande assemblée de gens de robe de l'histoire de la Colombie-Britannique, les avocats ont exigé que le procureur général rétablisse les 48 millions de dollars prévus pour l'aide juridique qu'il avait l'intention d'affecter à d'autres fins.

    Prenant la parole devant l'organisme Defence Counsel Association of Ottawa, l'avocat David Scott a dit que les honoraires peu élevés versés aux avocats avaient réduit nos programmes d'aide juridique à l'état symbolique, de sorte que les droits des démunis sont régulièrement violés.

    Les gouvernements auraient dû garantir un financement équitable à l'aide juridique depuis longtemps déjà. Riches ou pauvres, tous les Canadiens doivent avoir accès à un avocat.

*   *   *

+-La coupe Mémorial

+-

    M. Jim Abbott (Kootenay--Columbia, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les Ice de Kootenay ont remporté hier la coupe Mémorial à Guelph, en Ontario.

    Regardons un peu l'histoire de cette équipe. Existant à Cranbrook depuis seulement quatre ans et jouant les deux premières années dans le vieux stade Memorial où il n'y avait que 1 500 places assises, les Ice ont gagné le championnat de la ligue de hockey de l'Ouest dès leur deuxième année, avant de déménager au nouveau complexe récréatif de Cranbrook.

    Encouragés désormais par les cris de 4 500 partisans, ils ont remporté de façon décisive le championnat de la ligue de hockey de l'Ouest, cette année. Les Ice de Kootenay ont perdu leurs deux premières parties de la série éliminatoire disputées dans leur ville, mais, comme les autres électeurs de ma circonscription, ils n'ont pas abandonné. Ils sont revenus à la charge, battant d'abord Prince George, puis Kelowna et finalement une équipe très forte de Red Deer.

    Sous la direction de leur entraîneur, Ryan McGill, les Ice ont ensuite gagné la coupe Mémorial, l'emportant 6-3 contre les Tigres de Victoriaville. Je félicite le propriétaire de l'équipe, Ed Chynoweth, et, d'une façon particulière, les joueurs, qui ont fait preuve de caractère en jouant un style de hockey cohérent, discipliné et robuste.

    J'ai eu la fierté d'accompagner les centaines d'habitants de Kootenay qui sont allés à Guelph, en Ontario, encourager les Ice. Les joueurs et les partisans ont prouvé qu'ils n'avaient pas froid aux yeux.

*   *   *

  +-(1400)  

+-La Marche des partenaires mondiaux

+-

    Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce--Lachine, Lib.): Monsieur le Président, hier, des milliers de Canadiens dans des villes aux quatre coins du pays ont participé à la 18 Marche des partenaires mondiaux. La Fondation Aga Khan organise cette marche annuelle au Canada, au Royaume-Uni, aux États-Unis et au Portugal. Elle lève des fonds pour des projets de développement dans les régions les plus pauvres d'Afrique et d'Asie.

    On estime à 2,6 millions de dollars les sommes recueillies au Canada cette année, soit 25 p. 100 de plus que l'année dernière. Plusieurs villes ont aussi enregistré une participation record.

    Au cours des 18 dernières années, cet événement entièrement bénévole a permis de recueillir des millions de dollars pour le financement du développement de la petite enfance, l'amélioration des soins de santé et le développement rural.

    J'invite les députés à se joindre à moi pour féliciter la Fondation Aga Khan, dont la Marche des partenaires mondiaux a été couronnée de succès encore cette année, et à l'applaudir en reconnaissance du travail très important qu'elle fait.

*   *   *

[Français]

+-Jesse Rosensweet

+-

    Mme Sarmite Bulte (Parkdale--High Park, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir et fierté que je me lève aujourd'hui pour annoncer à la Chambre que c'est un Canadien qui a remporté l'un des prix les plus convoités du Festival de Cannes 2002, qui a pris fin hier en France.

    Originaire de Toronto, le cinéaste Jesse Rosensweet a mérité le prix du jury pour son court métrage intitulé The stone of folly, lors de la cérémonie de clôture du 55e Festival de Cannes.

    Son film d'animation d'une durée de 8 minutes est une comédie d'humour noir portant sur les péripéties dans un hôpital à l'époque médiévale. Des 11 courts métrages présents dans la compétition officielle, The stone of folly a nettement été le film préféré du public.

    J'invite la Chambre à se joindre à moi pour féliciter Jesse Rosensweet pour cet accomplissement de taille. Je suis convaincue que nous entendrons encore parler de lui sous peu.

    Bravo Jesse!

*   *   *

[Traduction]

+-Le mois de la sensibilisation à l'hépatite

+-

    Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir d'informer la Chambre que la Fondation canadienne du foie a proclamé le mois de mai le Mois de la sensibilisation à l'hépatite.

    L'hépatite est la maladie du foie la plus courante au Canada. Elle touche plus d'un demi-million de Canadiens, hommes, femmes et enfants. On s'attend à ce que l'hépatite C, qui se transmet par contact direct avec du sang contaminé, atteigne des proportions épidémiques d'ici 2008 au Canada, alors que le nombre de décès reliés à des maladies du foie aura augmenté de 126 p. 100 et que la demande de dons d'organe se sera accrue de 61 p. 100.

    L'hépatite A et B sont les seules formes de maladie du foie qui peuvent être prévenues par des vaccins, mais chaque année des milliers de personnes les contractent parce qu'elles ne sont pas sensibilisées aux risques ou ne se protègent pas.

    La Fondation canadienne du foie a été la première organisation dans le monde à s'engager à réduire l'incidence et l'impact de l'hépatite et d'autres formes de maladie du foie.

    La Fondation a 30 sections de bénévoles d'un bout à l'autre du pays offrant information et soutien aux personnes vivant avec l'hépatite. J'invite la Chambre à se joindre à moi pour saluer la Fondation canadienne du foie et ses bénévoles à l'occasion du Mois de la sensibilisation à l'hépatite.

*   *   *

+-Le député de York-Centre

+-

    M. Brian Pallister (Portage--Lisgar, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je me souviens qu'il y a quelques mois, lorsque nous le pressions de questions, le ministre de la Défense nationale avait de la difficulté à expliquer si nos militaires avaient fait prisonniers des membres d'Al-Quaïda en Afghanistan. Il n'avait pas pu indiquer clairement quand il avait été mis au courant la première fois, puis une seconde fois, ni quand il avait prévenu le caucus, quand il avait mis au courant le premier ministre et pourquoi il ne l'avait pas avisé plus tôt. Le premier ministre s'était quand même obstiné à ne pas remplacer son ministre.

    Ce n'est pas tout. Le ministre de la Défense n'était pas certain au sujet des uniformes, il n'était pas très clair à propos des règles d'engagement et il s'est montré peu convaincant sur la question des hélicoptères. Franchement, il n'a impressionné personne à ce moment-là. Pourtant, il est demeuré en poste jusqu'à dimanche, malgré une incompétence à la mesure de son incroyable manque d'éthique.

    Les Canadiens méritent mieux que cela.

+-

    Le Président: Je pense que le député sait que l'article 31 du Règlement interdit les attaques contre des députés.

*   *   *

[Français]

+-La Féria du vélo de Montréal

+-

    Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, samedi dernier, la onzième édition du Tour des enfants a lancé la Féria du vélo de Montréal. Lors de cet événement, plus de 6 500 jeunes ont parcouru 20 kilomètres à vélo dans les rues de Montréal.

    C'est avec beaucoup de courage et de persévérance que les enfants ont bravé mère nature et ont relevé ce défi. C'est avec un plaisir évident qu'ils ont ensuite profité des célébrations prévues pour eux.

    Tout au long de cette semaine, les Montréalais sont invités à préconiser l'utilisation du vélo pour leurs déplacements dans les rues de la métropole.

    Les adultes sont aussi conviés à relever le défi du Tour de l'île, qui doit se dérouler à la fin de la semaine et clore cette édition de la Féria du vélo de Montréal. Des kilomètres de rues seront grandes ouvertes aux cyclistes. Profitez-en!

*   *   *

  +-(1405)  

+-Les contrats gouvernementaux

+-

    Mme Diane Bourgeois (Terrebonne--Blainville, BQ): Monsieur le Président, depuis maintenant plusieurs semaines, les médias, les partis d'opposition et tous ceux qui croient en la transparence demandent que le gouvernement mette sur pied une enquête publique.

    À chaque jour, de nouvelles révélations sont faites. Les rapports de Groupaction, les contrats à L'Almanach du peuple et les relations liant l'ex-ministre des Travaux publics et le ministre de l'Immigration à une firme de publicité semblent n'être que la pointe de l'iceberg.

    On apprenait d'ailleurs cette fin de semaine qu'un autre ex-ministre, celui de la Défense, avait fait preuve de favoritisme, attribuant un contrat de 36 500 $ à son ancienne amie de coeur.

    Combien d'autres scandales devront être déterrés avant que le premier ministre se rende compte de la nécessité d'une enquête publique?

*   *   *

[Traduction]

+-Le Centre hospitalier pour enfants de l'est de l'Ontario

+-

    M. Mauril Bélanger (Ottawa--Vanier, Lib.): Monsieur le Président, le 23 mai, le ministre ontarien de la Santé, Tony Clement, a annoncé que le département de chirurgie cardiaque et vasculaire du Centre hospitalier pour enfants de l'est de l'Ontario fermera ses portes en avril 2003.

    À partir de ce moment-là, les enfants de l'Est ontarien ayant besoin d'une chirurgie vasculaire ou d'une chirurgie cardiaque d'urgence devront parcourir environ 400 milles pour se rendre à l'Hôpital pour enfants de Toronto, afin d'y recevoir les soins médicaux dont ils ont désespérément besoin.

    Le CHEEO sert une population d'environ 1,5 million d'habitants dans l'Est de l'Ontario. Pourquoi quelque 140 enfants devraient-ils se rendre chaque année à Toronto pour y subir une chirurgie cardiaque ou vasculaire quand il existe déjà au CHEEO un département efficace offrant ce genre de services? En plus de poser un danger pour certains enfants, cela accentuera le stress quasiment insupportable que subissent déjà les enfants et leurs familles. La centralisation n'est pas le meilleur moyen d'améliorer la prestation des soins de santé en Ontario.

    En tentant d'expliquer cette nouvelle aux Ontariens de l'Est, je me demande si M. Clement ira jusqu'à affirmer que l'Hôpital pour enfants de Toronto offrira ses services dans les deux langues officielles, ce que le CHEEO a pour mission de faire.

*   *   *

+-Le député de Glengarry--Prescott--Russell

+-

    Mme Betty Hinton (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, Alliance canadienne): Monsieur le Président, revenons à jeudi dernier qui s'est avéré extrêmement difficile pour le ministre des Travaux publics. Il a passé la journée à expliquer à la Chambre qu'il avait commis une petite erreur en acceptant un week-end en famille dans le domicile d'un entrepreneur faisant affaire avec son ministère, mais qu'il n'y avait là rien de véritablement répréhensible.

    Dans toutes ses interventions, l'opposition a insisté pour que le ministre agisse de façon honorable et donne sa démission. Non, non, répondait-il, je ne vois pas de raison de démissionner. Non, non, répondait le premier ministre, le ministre a toute ma confiance.

    Deux jours plus tard, tout a basculé. Le ministre a été démis de ses fonctions, n'étant plus jugé crédible pour remettre de l'ordre dans les affaires du ministère.

    Toutefois, par un étrange revirement de situation, il réintègre ses fonctions précédentes et les Canadiens ne savent plus s'il a été renvoyé, puni, ou récompensé, ou encore si le premier ministre ne lui aurait pas tout simplement permis de s'en sortir à bon compte.

    En matière d'éthique et de morale, il y a vraiment de quoi s'interroger au sujet du présent gouvernement.

*   *   *

+-La défense nationale

+-

    M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais souhaiter la bienvenue à l'escadron des cadets de l'air 136 Kiowa, de Ayr, et aux cadets de l'armée du 21 Royal Highland Fusiliers of Canada, de Cambridge.

    Créé il y a deux ans, l'escadron 136 Kiowa est le dernier né des escadrons canadiens des cadets de l'air, alors que le corps de cadets du 21 Royal Highland Fusiliers of Canada existe depuis 1887. La succursale no 21 de Galt de la Légion royale canadienne parraine les deux groupes.

    L'Organisation des cadets du Canada encourage le leadership, la prise de responsabilités, la discipline, le civisme, la condition physique, la communication et suscite de l'intérêt pour les Forces canadiennes. Les cadets reçoivent une formation pratique en complément de leur scolarité, et certains conseils scolaires leur accordent des crédits pour les matières qui leur sont enseignées par l'armée.

    Cambridge, ma circonscription, participe depuis longtemps au programme national de formation des cadets et c'est avec plaisir que j'accueille ces cadets à Ottawa où ils découvriront le Parlement et les institutions fédérales.

*   *   *

+-La communauté juive d'Ottawa

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, la communauté juive d'Ottawa vit aujourd'hui dans la peur et ses institutions religieuses sont assiégées, car les forces policières prévoient une attaque imminente contre une synagogue locale. C'est d'autant plus troublant que cela fait partie d'un ensemble de crimes motivés par la haine contre des institutions juives de tout le Canada.

    Il y a une semaine à peine, la seule synagogue de la ville de Québec a été la cible d'une bombe incendiaire. D'autres attaques contre des institutions juives ont eu lieu à Saskatoon, à Toronto, à Montréal et à Edmonton. Sans parler de la recrudescence du vandalisme et des voies de fait antisémites. Cette année seulement, on a rapporté 110 incidents antisémites. À Winnipeg, des membres de la communauté juive observent une recrudescence des incidents de violence verbale, de propos racistes et de graffiti dégradants.

    Ces événements horribles exigent notre attention immédiate. Comme l'a dit la Jewish Federation of Winnipeg, la situation exige que le gouvernement fédéral condamne de façon énergique, décisive et sans équivoque ce qui se révèle une campagne bien orchestrée de haine et de diffamation.

    Condamnons aujourd'hui la montée de l'antisémitisme et de toute haine raciale et religieuse, où qu'elle se manifeste au Canada.

*   *   *

  +-(1410)  

[Français]

+-Le remaniement ministériel

+-

    Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno--Saint-Hubert, BQ): Malmené depuis plusieurs mois par des scandales, le premier ministre a été obligé de procéder hier à un remaniement ministériel d'urgence, le deuxième en quatre mois, au cours duquel il a rétrogradé le ministre des Travaux publics.

    Pourtant, ce dernier avait été nommé en janvier pour faire le ménage dans le ministère après le départ, sur fond d'accusations d'ingérence politique, du controversé Alfonso Gagliano.

    Par ce nouveau remaniement, le premier ministre espère encore une fois blanchir son gouvernement des multiples accusations qui l'entachent.

    Or, personne n'est dupe. Il s'agit d'un remaniement cosmétique, une tentative malheureuse pour détourner l'attention du vrai problème, c'est-à-dire la corruption qui mine le gouvernement. Nous savons tous que le fond du problème n'est pas réglé et, que le premier ministre se le tienne pour dit, le Bloc québécois ira au fond des choses.

*   *   *

[Traduction]

+-La communauté juive d'Ottawa

+-

    Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je veux parler moi aussi d'événements intéressant la communauté juive d'Ottawa.

    En fin de semaine, la communauté juive d'Ottawa s'est hissée au-dessus de la peur et de l'intimidation et a prouvé que l'espoir et le courage seront toujours vainqueurs.

    En dépit de menaces de violence, 700 personnes ont participé hier au festival Aviv. Ce festival du printemps comportait un marathon de marche, une course à relais, un concours d'orthographe, des divertissements et divers stands au marché.

    L'esprit manifesté aux événements tenus hier montre que les Canadiens sont déterminés à ne pas laisser l'atmosphère d'intolérance et de peur qui frappe d'autres pays influencer notre société ouverte et intégrée. Face à l'intolérance, les Canadiens doivent rester toujours vigilants sans pour autant céder à la peur et à la haine.

    Je félicite toutes les personnes qui ont participé hier au festival. J'invite la Chambre à condamner avec moi tous ceux qui menacent la liberté de qui que ce soit d'entre nous.

*   *   *

+-Les pêches

+-

    M. Rex Barnes (Gander--Grand Falls, PC): Monsieur le Président, encore une fois, la surpêche vient hanter la province de Terre-Neuve-et-Labrador. Cela pourrait se produire dans n'importe quel port au Canada, mais aujourd'hui, ce sont des ports de Terre-Neuve-et-Labrador qui sont visés.

    Les mesures insuffisantes adoptées par le MPO et l'inertie du cabinet du ministre causent des difficultés économiques généralisées aux localités de pêche de ma circonscription. Le ministre a interdit l'accès aux ports canadiens aux équipages de pêche des îles Féroé qui avaient pratiqué la surpêche, mais ce sont les localités visées qui se sentent flouées.

    Le moment est venu pour le ministre de commencer à prendre de véritables sanctions au lieu de pactiser avec l'ennemi. Le moment est venu pour le ministre de protéger les stocks de poisson du Canada ainsi que les milliers de Canadiens qui travaillent dans le secteur des pêches.

    Le moment est venu pour le Canada de saisir les prises des pays qui pratiquent la surpêche et de les transformer dans les ports canadiens, à l'intention de la population canadienne. De plus, les capitaines de ces navires devraient être condamnés à payer de lourdes amendes. Le moment est venu de prendre des mesures concrètes dans l'intérêt de nos localités de pêche.

*   *   *

+-Le collège Kenner

+-

    M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, cet été, le collège Kenner de Peterborough célébrera son 50e anniversaire. Cet établissement a ouvert ses portes en 1952, à titre d'école secondaire de premier cycle et, à la demande générale, il est vite devenu une école couvrant tous les cycles du secondaire.

    Le collège a été nommé en l'honneur de Hugh Kenner, un éminent érudit de notre localité.

    Au fil des ans, le collège Kenner a desservi la population de l'extrémité sud de Peterborough et celle des cantons environnants. Ses élèves, son personnel et ses diplômés ont enrichi la communauté. Ses installations scolaires, techniques et sportives sont devenues un centre pour les activités communautaires. Ses programmes spécialisés occupent une place spéciale dans notre système scolaire.

    Le premier directeur du collège Kenner a été M. Eldon Ray. Lui ont succédé des directeurs et un personnel qui ont contribué à l'édification du collège Kenner pour en faire le solide établissement qu'il est actuellement. Ses équipes collégiales, ses troupes de théâtre, ses musiciens et ses élèves ont remporté des succès extraordinaires au fil des ans.

    J'invite les députés à se joindre à moi pour féliciter le collège Kenner de ce qu'il a accompli pendant ses 50 premières années d'existence. Nous entrevoyons avec confiance le prochain demi-siècle.

*   *   *

+-Le Parti libéral du Canada

+-

    Mme Diane Ablonczy (Calgary--Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le premier ministre jette de l'eau froide sur les préoccupations des Canadiens au sujet des flambées des libéraux en matière d'éthique, mais l'épaisse fumée noire du scandale est partout.

    Les ministres soupçonnés d'irrégularités sont envoyés au Danemark ou à un nouveau poste, où l'on ne peut pas les interroger.

    La vérificatrice générale a découvert que toutes les règles avaient été violées sur les ordres des libéraux.

    La GRC mène de nouvelles enquêtes complètes sur des contrats douteux accordés par les libéraux.

    Les Canadiens ont vu s'accumuler les pratiques des libéraux qui suscitent la controverse: le cafouillage de 1 milliard de dollars; le Shawinigate, la lettre adressée par le premier ministre à un président de la Banque fédérale pour qu'il consente un mauvais prêt; un luxueux gîte du passant, exclusivement pour les libéraux proches de l'assiette au beurre; des chèques non encaissés sur le plateau à offrandes; des contrats commodes pour les copains; et maintenant, des petits cadeaux pour les amies de coeur.

    Les libéraux font pire que brûler des croix, ils immolent la crédibilité et la confiance.

*   *   *

  +-(1415)  

+-L'indice UV

+-

    Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec une saine dose de fierté nationale que je prends la parole à la Chambre aujourd'hui pour souligner le 10e anniversaire de l'invention canadienne qu'est l'indice UV.

    L'indice, qui a été élaboré par trois scientifiques d'Environnement Canada, James Kerr, Tom McElroy et David Wardle, mesure les niveaux de rayonnement ultraviolet, principale cause des cancers de la peau.

    Adoptée comme norme internationale par l'Organisation mondiale de la santé et l'Organisation météorologique mondiale, l'indice est déjà utilisé par 26 pays.

    Je demande aux députés de se joindre à moi pour féliciter ces trois remarquables scientifiques canadiens de leur précieuse contribution.


+-QUESTIONS ORALES

[Questions orales]

*   *   *

[Traduction]

+-Les marchés publics

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, tard dans la journée de vendredi, la GRC a ordonné la tenue d'une enquête sur l'affaire Groupaction. De nouvelles révélations ont fait surface ce matin. Il semblerait que la firme Communications Coffin a reçu un paiement de plus de 100 000 $ sans qu'on sache exactement pourquoi. Nous apprenons maintenant que cette firme a ensuite commencé à faire de généreux dons au Parti libéral.

    Le nouveau ministre des Travaux publics a-t-il pris des mesures pour demander à la GRC de faire enquête sur les contrats accordés à la firme Coffin?

+-

    L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.): Monsieur le Président, je ne dispose pas actuellement de renseignements qui m'amèneraient à la conclusion suggérée par le chef de l'opposition.

    Toutefois, je tiens à lui assurer sincèrement que j'examine ce dossier de très près. Si de telles circonstances se produisaient, il peut être certain que les mesures nécessaires seraient prises dans les plus brefs délais.

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, cette nouvelle révélation ne fait qu'ajouter à ce que nous disons depuis des semaines, soit que le gouvernement doit prendre des mesures à l'égard du nombre croissant de scandales liés à l'octroi de contrats en échange de dons politiques au ministère des Travaux publics.

    Pendant que le nouveau ministre examine ces renseignements, fera-t-il ce que son prédécesseur n'a pas fait, soit ordonner un gel des dépenses discrétionnaires au titre de la publicité et des commandites en attendant que les enquêtes de la police et de la vérificatrice générale soient terminées?

+-

    L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.): Monsieur le Président, je ne suis pas en mesure de donner une réponse précise au député en ce qui concerne la partie de sa question portant sur la publicité.

    Cependant, sur la question des commandites, tant que je ne serai pas convaincu que les critères du programme sont corrects et que chaque projet respecte effectivement ces critères, je n'approuverai aucun nouveau projet.

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est là quelque chose de positif. Nous insisterons pour que des mesures soient prises également pour ce qui est de la publicité.

    Fera-t-on également ce qui suit? Nous croyons qu'une politique de transparence est la meilleure arme possible contre des accusations de corruption. Pour mettre fin à la culture du secret au gouvernement, le nouveau ministre des Travaux publics fera-t-il ce que son prédécesseur n'a pas fait, encore une fois, soit déposer dès aujourd'hui une liste complète des contrats de publicité et de commandite?

+-

    L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.): Monsieur le Président, comme le député le sait, cette demande nécessiterait qu'on prépare une quantité très considérable de documents. Je peux lui garantir que je m'engage personnellement à assurer la plus grande transparence. Je tiens à ce que les Canadiens soient pleinement informés à l'égard de ces questions. J'examinerai attentivement la situation afin de déterminer quelles mesures sont nécessaires pour en arriver là.

+-

    M. Gerry Ritz (Battlefords--Lloydminster, Alliance canadienne): Monsieur le Président, cela ne nous surprend pas du tout de ce côté-ci. Si les rapports n'existent pas, pourquoi y aurait-il des listes? Pas surprenant qu'il ait de la difficulté à les trouver.

    Le premier ministre a mentionné l'autre jour que certains sièges à la Chambre étaient munis de boutons d'éjection. Je suppose que le Canada tout entier se demande si le ministre du mois sera capable de rester en place pendant un certain temps.

    Le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux ordonnera-t-il immédiatement la tenue d'une enquête publique indépendante sur tout ce gâchis?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, je rappelle au député que la vérificatrice générale a été invitée à examiner les contrats problématiques qui sont ressortis des enquêtes internes. Je lui rappelle que la responsabilité de la vérificatrice générale consiste à examiner les activités du gouvernement. Nous avons montré notre volonté de voir à ce qu'on donne suite rapidement à ces rapports et notre volonté de collaborer avec la vérificatrice générale. Je ne comprends pas pourquoi le député voudrait répéter le travail qui est déjà effectué par la vérificatrice générale.

+-

    M. Gerry Ritz (Battlefords--Lloydminster, Alliance canadienne): Monsieur le Président, tout le monde sait certainement qu'une enquête publique indépendante aurait une portée plus vaste et une liste de témoins plus complète que quoi que ce soit que nous puissions faire à la Chambre. Nous ne cesserons pas de réclamer une telle enquête.

    Le plus récent squelette à être découvert dans le cimetière de l'éthique des libéraux concerne une autre maison de publicité de Montréal et d'autres rapports manquants. Même si elle n'avait jamais fait de dons auparavant, cette entreprise n'a pas oublié de faire un chèque de 20 000 $ au Parti libéral après avoir obtenu le contrat. Elle a fait 38 000 $ de commission, et les libéraux lui ont ensuite donné 116 000 $ pour la production d'un rapport d'analyse des résultats. Nous n'arrivons pas à trouver ce rapport. Où sont les rapports?

  +-(1420)  

+-

    L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.): Monsieur le Président, l'affaire concernant la firme Coffin a été mise en lumière durant une vérification interne entreprise par le ministère des Travaux publics lui-même. Les résultats généraux de cette vérification sont accessibles sur le site Web depuis le mois d'octobre 2000.

    Des correctifs ont été pris par mes deux prédécesseurs dans ce dossier. Comme je l'ai dit plus tôt au chef de l'opposition, je suis en train d'examiner quelles autres mesures pourraient être prises.

[Français]

+-

    M. Gilles Duceppe (Laurier--Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, à l'instar de l'ex-ministre des Travaux publics, le ministre de l'Immigration a lui aussi profité de l'hospitalité du président du Groupe Everest. En effet, le ministre a admis vendredi qu'il a habité au condo de Claude Boulay à l'Île-des-Soeurs, en 1997. Pourtant, interrogé à ce sujet en l'an 2000, le ministre avait catégoriquement nié avoir séjourné chez Claude Boulay.

    Le ministre de l'Immigration pourrait-il expliquer à la population pourquoi, pendant deux ans, il a délibérément tenté de cacher ses liens avec Claude Boulay?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, les événements que le député cite sont survenus avant que le député soit ministre. Le code d'éthique ne s'applique pas aux autres députés ici au Parlement.

    Nous avons proposé d'avoir un code d'éthique pour les députés et sénateurs, mais cela n'existait pas en 1997.

+-

    M. Gilles Duceppe (Laurier--Sainte-Marie, BQ): Justement, monsieur le Président, le député est devenu ministre et, tout de suite après sa nomination à titre de secrétaire d'État au Sport amateur, une de ses premières décisions a été d'annoncer, en mai 2000, la tenue d'une vaste consultation pancanadienne sur le sport. Et qui a obtenu le contrat de 500 000 $ pour organiser la consultation? Je vous le donne en mille: Groupe Everest.

    Puisque cela découle d'une initiative qu'il a pilotée et qu'il a lui-même profité du condo de Claude Boulay, le ministre de l'Immigration admettra-t-il que le contrat de 500 000 $ accordé à Groupe Everest a toutes les caractéristiques d'un retour d'ascenseur?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, il est possible, si on accepte un certain standard, que les ministres n'aient pas le droit à une vie privée.

    Cependant, les députés ont le droit à une vie privée. Il n'était pas ministre, alors il n'était pas obligé de se conformer à un code d'éthique applicable à un ministre.

+-

    M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, la réponse du vice-premier ministre est bien faible. À partir du moment où un ministre, qui était député, avait des liens privilégiés avec quelqu'un qu'il a par la suite avantagé, je considère que ce ministre s'est placé en situation de conflit d'intérêts.

    Je demande ceci au ministre de l'immigration: est-ce qu'il n'a pas nié avoir séjourné une première fois au condo de Claude Boulay, parce qu'il savait très bien qu'il s'était placé dans une position intenable en accordant des contrats dès qu'il a été nommé ministre?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, cela n'a jamais été la norme ici, à savoir que les députés ne soient pas capables d'entretenir des relations avec le secteur privé. En fait, je crois que l'expérience des individus qui sont ici est valable. Toutefois, quand ils sont ministres, le code s'applique.

+-

    M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, est-ce que le vice-premier ministre n'admettra pas que le fait pour le ministre d'avoir séjourné dans le condo de Claude Boulay pour une période de six semaines avant d'être nommé ministre, d'avoir la femme de Claude Boulay, vice-présidente d'Everest, comme organisatrice de ses campagnes de 1997 et de 2000 et d'avoir donné un de ses premiers contrats à Claude Boulay et à Everest quand il a été nommé ministre, cela place le ministre en plein coeur d'une situation de conflit d'intérêts et de retour d'ascenseur aux petits amis?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, la question est de savoir si le contrat a été donné à ce groupe selon les règles du Conseil du Trésor. Si oui, alors je crois qu'il n'y a pas d'autres questions.

    Comme je l'ai déjà dit, les députés ont le droit d'entretenir des relations avec le secteur privé. Il ne s'agit pas d'une question relevant d'un code d'éthique quand ils sont simplement députés.

  +-(1425)  

[Traduction]

+-

    M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, avant de poser mes questions, je désire souhaiter la bienvenue au nouveau ministre de la Défense nationale, qui se voit confier un portefeuille très exigeant.

    Dans ce qui semble être une convergence de portefeuilles frappés par le scandale, nous avons appris que le MDN, par l'entremise du ministère des Travaux publics, avait confié à Groupaction le mandat d'effectuer du travail dans le domaine des communications pour le compte des forces armées.

    Le nouveau ministre de la Défense nationale est-il en mesure de confirmer que Groupaction effectue du travail pour le compte des militaires canadiens? Quelle est la valeur globale des marchés adjugés? Le ministre va-t-il amorcer ses nouvelles fonctions sur le bon pied et déposer ces marchés ainsi que les calendriers de facturation s'y rattachant?

+-

    L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.): Monsieur le Président, en ce qui concerne le lien entre Groupaction et le programme de commandites, mon prédécesseur a adopté la mesure pertinente en y mettant fin.

    Pour ce qui est de toute activité de Groupaction liée à tout autre ministère, cela n'a manifestement rien à voir avec les commandites. S'il y a de l'information, elle devrait être communiquée au gouvernement à cet égard. Le député peut avoir l'assurance que le gouvernement adoptera les mesures appropriées.

+-

    M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, à moins que j'aie raté quelque chose, ce n'est pas lui le nouveau ministre de la Défense nationale.

    Nous savons déjà que Groupaction avait notamment pour mandat de concevoir et de mettre à l'essai un nouveau logo désastreux pour les militaires. Il a été jugé inutilisable parce que, premièrement, le mot «canadien» n'y figurait pas et, deuxièmement, le mot «forces» ressemblait à «farces». Il va de soi que la farce concerne les liens incestueux du gouvernement avec des entreprises de communication du Québec.

    Cette fois-ci, je veux que le ministre de la Défense nationale nous dise combien il a dépensé pour ce logo inutilisable. Combien d'autres dépenses du MDN ont déjà été préapprouvées dans le cadre de quatre marchés conclus avec Groupaction? Le ministre conviendra-t-il alors...

+-

    Le Président: Le ministre de la Défense nationale a la parole.

+-

    L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, j'occupe mon poste depuis une dizaine d'heures et je ne connais donc pas la réponse à cette question, mais je vais me renseigner.

    Mon père ayant participé à la libération de la Hollande, il y a plus de 50 ans, je ressens beaucoup de fierté et d'humilité d'être nommé ministre de la Défense nationale. Je ferai tout en mon pouvoir pour bien m'acquitter de cette fonction.

    Nous pouvons à mon avis être tous très fiers de la façon dont nos soldats se sont comportés au cours des dernières années.

+-

    Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, je voudrais poser une question au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration au sujet de la capacité de la Chambre de le croire sur parole.

    Le Globe and Mail a interrogé le ministre sur le fait qu'il aurait exercé des pressions pour que deux marchés soient accordés au Groupe Everest. Le ministre reconnaît que le Globe and Mail lui a demandé s'il était vrai que le Groupe Everest lui avait prêté un condominium. Le ministre a répondu que ce n'était absolument pas le cas. Il a maintenant changé d'idée. Il reconnaît avoir séjourné dans un condominium appartenant au Groupe Everest auquel son ministère a ensuite accordé des contrats. Il a donc obtenu un avantage, comme le Groupe Everest d'ailleurs.

    Pourquoi le ministre a-t-il changé son fusil d'épaule? Reconnaît-il que le fait d'accepter l'hospitalité d'une entreprise qui a obtenu par la suite certains avantages donne l'impression que le ministre devait quelque chose à une organisation qui...

+-

    Le Président: L'honorable vice-premier ministre a la parole.

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, nous avons déjà noté que les contrats ont été accordés conformément aux directives du Conseil du Trésor par le ministère du Patrimoine canadien. Ce qui est essentiel en l'occurrence, c'est que le député n'était pas ministre à l'époque où il a obtenu ce prétendu avantage. Il n'était donc pas assujetti au code à l'époque où il n'était qu'un simple député. D'ailleurs, aucun député n'est assujetti à un tel code, ce qui explique pourquoi nous proposons l'adoption d'un code de ce genre

+-

    Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, le ministre se devait de dire la vérité, ce qu'il n'a pas fait. Il a obtenu un avantage, tout comme le Groupe Everest.

    Permettez-moi de poser cette question au vice-premier ministre. Depuis sa nomination à titre de ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, ce ministre est-il resté dans une résidence ou une propriété appartenant au Groupe Everest ou à Claude Boulay? En fait, n'importe quel autre ministre a-t-il séjourné dans une résidence ou propriété appartenant au Groupe Everest ou à Claude Boulay?

  +-(1430)  

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, le ministre n'était pas obligé de donner une réponse en ce qui concerne ce qu'il a fait lorsqu'il n'était pas ministre. Il a droit à sa vie privée en tant que député. Je pense que notre vis-à-vis devrait être de ceux qui respectent cela.

    En ce qui concerne la conduite des ministres, le premier ministre a précisé très clairement hier qu'il veut qu'on respecte une norme élevée et que si certains se sont sentis trop confortables dans le passé, ils le sont sûrement moins aujourd'hui.

+-

    M. John Reynolds (West Vancouver--Sunshine Coast, Alliance canadienne): Monsieur le Président, donner de l'argent pour du travail fictif est une chose déplorable et c'est un signe d'incompétence. Donner de l'argent pour du travail fictif et recevoir une ristourne pour le Parti libéral est tout simplement malhonnête et corrompu.

    Nous avons entendu bien des questions. Nous avons vu des ministres démissionner ou être destitués. Quand le gouvernement va-t-il commander une enquête indépendante afin qu'on puisse aller au fond de cette question?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, je n'arrive pas à comprendre pourquoi l'Alliance canadienne ne croit pas que la vérificatrice générale est indépendante. La nature des rapports qu'elle a présentés jusqu'à maintenant, le fait qu'ils soient divulgués publiquement et la réaction qu'elle a exigée de la part du gouvernement et d'autres organismes suffisent amplement pour illustrer la rigueur de son travail et son indépendance dans l'exécution de sa tâche.

+-

    M. John Reynolds (West Vancouver--Sunshine Coast, Alliance canadienne): Monsieur le Président, lorsque les libéraux étaient dans l'opposition, ils ne considéraient pas que le travail du vérificateur général était suffisant et ils ont demandé une enquête indépendante sur le gouvernement conservateur de l'époque. Permettez-moi de citer le député de Glengarry—Prescott—Russell; il a dit un jour:

Je demanderais donc ceci au ministre: Quand ce vieux gouvernement fatigué va-t-il apprendre que l'argent des contribuables n'est pas l'argent du Parti conservateur pour récompenser ses amis?

    Il s'est exprimé ainsi pour demander la tenue d'une enquête indépendante. Cette Chambre veut une telle enquête. Pourquoi le gouvernement refuse-t-il?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, dans le bon vieux temps, lorsque ce député était membre de ce parti, le vérificateur général ne présentait qu'un rapport par année. Ce rapport paraît maintenant quatre fois par année.

    En outre, quant aux questions précises qui ont été débattues à la Chambre, la vérificatrice générale agissait en vertu d'un mandat spécial. Et qui donc lui avait donné ce mandat? Le gouvernement lui-même. La norme est donc totalement différente de celle que le député respectait lorsqu'il était un conservateur.

[Français]

+-

    M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, la semaine dernière, le premier ministre avait déclaré, dans l'affaire du ministre des Travaux publics, que si le ministre n'avait pas payé, c'était grave, mais que s'il avait payé, ce n'était pas grave.

    Le ministre de l'Immigration, lui qui n'a pas payé pour le condo du président de Groupe Everest, n'admettra-t-il pas que ce qu'il a fait est grave selon les critères mêmes de son patron, le premier ministre?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Assurément, monsieur le Président, avec une question comme celle-là, le Bloc va appuyer un code d'éthique pour les députés et pour les sénateurs. Cela n'existait pas en 1997 et le ministre, qui était simplement député à ce moment-là, n'était pas obligé de respecter quelque code que ce soit.

+-

    M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, je ferai remarquer au vice-premier ministre que lorsqu'il a donné ces contrats, il était bel et bien ministre.

    En retirant un bénéfice personnel important du président d'Everest et en ayant la vice-présidente d'Everest comme organisatrice personnelle pour ses campagnes électorales, est-ce que le ministre ne s'est pas créé une dette importante envers Everest, une dette qu'il s'est empressé de régler dès qu'il en a été capable, c'est-à-dire au moment où il a été nommé ministre?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, est-ce que les contrats ont été donnés au Groupe Everest selon les règlements du Conseil du Trésor? Je crois que oui.

    Nous n'avons eu aucune indication à l'effet qu'il y a eu un manque de respect des règles en donnant des contrats. Puisque le ministre n'était pas un membre du Cabinet lorsqu'il a reçu ces bénéfices, ce n'est pas une question relative au code d'éthique.

+-

    M. Rahim Jaffer (Edmonton--Strathcona, Alliance canadienne): Monsieur le Président, l'ancien ministre des Travaux publics n'était pas le seul à avoir des connexions pratiques avec M. Boulay et le Groupe Everest. Nous savons que le ministre de l'Immigration a séjourné gratuitement chez Boulay et que, quand il est devenu ministre de second rang du Sport, l'une des premières choses qu'il a faite a été d'allouer un juteux contrat au Groupe Everest.

    Le gouvernement peut-il expliquer pourquoi le ministre de l'Immigration ne doit pas respecter les mêmes normes que le ministre de la Défense, ou même le ministre des Travaux publics?

  +-(1435)  

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, c'est la même question et c'est la même réponse.

[Traduction]

+-

    M. Rahim Jaffer (Edmonton--Strathcona, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le gouvernement récompense le comportement contraire à l'éthique plus souvent qu'il ne le punit, parce que la norme qu'applique le premier ministre change selon les résultats des sondages et les grands titres des journaux. Le gouvernement a récompensé Alfonso Gagliano pour avoir commis des abus et gaspillé l'argent des contribuables, en le nommant ambassadeur au Danemark.

    Maintenant que l'enquête de la GRC est en cours et que le premier ministre a décidé de punir certains de ses ministères, le gouvernement va-t-il faire ce qu'il doit, c'est-à-dire annuler la nomination de M. Gagliano et le rappeler immédiatement au Canada?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, il ne s'agit pas de punir mais de préserver la confiance de la population canadienne. Le député lui-même sait bien qu'il vaut mieux, parfois, confier d'autres responsabilités à une personne lorsque sa crédibilité est atteinte.

    Les mesures annoncées par le premier ministre dans son discours de jeudi dernier et les efforts que le ministre des Travaux publics et son prédécesseur ont déployés pour régler les questions qui ont été soulevées nous permettront de conserver la confiance de la population canadienne.

[Français]

+-

    Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, l'affaire des contrats attribués à la firme Coffin ressemble étrangement à l'affaire de Groupaction. Dans l'affaire de Groupaction, le gouvernement fédéral a obtenu un rapport pour le prix de trois, tandis que dans l'affaire de Coffin, il n'a obtenu aucun rapport en en payant deux.

    Le vice-premier ministre ne reconnaîtra-t-il pas que cette nouvelle et troublante affaire justifie, encore une fois, la tenue d'une enquête publique?

[Traduction]

+-

    L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.): Monsieur le Président, les faits concernant l'affaire Coffin ont été révélés grâce à une vérification interne lancée par le ministère des Travaux publics.

    Suite à cette vérification, des mesures correctives ont été prises par au moins deux de mes prédécesseurs. Comme je l'ai dit plus tôt à la Chambre, j'examine actuellement l'opportunité de prendre d'autres mesures au sujet de cette affaire ou des questions plus générales qu'elle soulève.

[Français]

+-

    Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, chaque jour apporte son nouveau cas. Ce qui est particulièrement troublant, ce sont les liens entre les ministres, les cabinets, les firmes et la nature des contrats obtenus par ces dernières.

    Compte tenu que ce que nous avons découvert jusqu'à maintenant ressemble beaucoup plus à un système bien organisé qu'à un fait isolé, est-ce que le vice-premier ministre n'admettra pas que la décence la plus élémentaire commande une enquête publique pour que toute la lumière soit faite sur cette affaire?

[Traduction]

+-

    L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.): Monsieur le Président, je puis assurer à la députée que je porte à cette question un intérêt aussi complet et sincère que le sien. La vérificatrice générale a entrepris un examen approprié. D'autre part, certaines questions ont été confiées à la GRC.

    Je tiens à donner l'assurance à la Chambre et à tous les Canadiens que le gouvernement collaborera pleinement à toutes les enquêtes afin d'assurer une transparence totale.

+-

    Mme Diane Ablonczy (Calgary--Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre de l'Immigration a fait une spectaculaire volte-face au sujet des faits concernant les liens personnels qu'il entretient avec l'homme qui a ramassé des millions en contrats accordés par les libéraux et qui, en échange, leur a fait des dons généreux. Le ministre a nié catégoriquement avoir reçu la moindre aide de Boulay. Il en a réfuté l'idée même, la traitant de «foutaise» et jurant ses grands dieux qu'il n'en était rien.

    Hier, le ministre a dû admettre qu'il avait séjourné chez Boulay. Il est clair qu'il n'a été ni ouvert ni honnête. Pourquoi les Canadiens devraient-ils encore lui confier un portefeuille aussi important que celui qu'il occupe?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, premièrement, le contrat en question n'a pas été accordé par la personne qui est maintenant ministre de l'Immigration. Il a été accordé par le ministère du Patrimoine.

    Deuxièmement, comme je l'ai dit à maintes reprises, il n'était pas obligé de répondre à des questions concernant sa vie privée du temps où il était simple député. Le critère du code d'éthique n'est pas basé sur les normes que laisse entendre la députée. Après tout, pourquoi devrait-on croire les membres d'un parti qui avaient dit qu'ils n'adhéreraient pas au régime de retraite des parlementaires?

+-

    Mme Diane Ablonczy (Calgary--Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, pendant la première année où il était ministre, les largesses des libéraux envers son ami Boulay, par l'intermédiaire de son ministère, ont plus que doublé. Le ministre savait que la situation violait l'interdit contre «les conflits d'intérêts réels, potentiels ou apparents».

    Voici ce qu'il a dit dernièrement à une question qu'on lui posait concernant un autre ministre: «Entre vous et moi, je ne séjourne pas chez les gens qui cherchent à obtenir des contrats du gouvernement.» Cette déclaration ne cadre pas avec son séjour secret chez Boulay. 

    En quoi ces nouveaux faits reflètent-ils le discours du premier ministre sur l'intégrité et la confiance du public?

  +-(1440)  

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, je comprends le goût du sang qu'ont les députés d'en face car on dit que la politique est un sport sanglant. Toutefois, je trouve difficile d'accepter que l'Alliance refuse de reconnaître que les normes imposées aux ministres ne s'appliquent pas aux simples députés. Je trouve malhonnête que les alliancistes ne s'imposent pas de normes concernant leurs déclarations et qu'ils en inventent pour un ministériel de l'arrière-ban.

*   *   *

+-La recherche et le développement

+-

    Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Monsieur le Président, il y a plus de quinze ans que le héros canadien Rick Hansen a entrepris sa tournée mondiale l'Homme en mouvement, dans le but de sensibiliser le public aux lésions de la moelle épinière. D'emblée, Rick Hansen avait recueilli la somme record de 24 millions de dollars. Depuis, il a réuni 137 millions de dollars.

    Le ministre de l'Industrie pourrait-il nous dire ce que le gouvernement du Canada a fait pour soutenir cette importante démarche entreprise par Rick Hansen?

+-

    L'hon. Allan Rock (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, il y a quinze ans, le courage et la détermination de Rick Hansen ont inspiré la nation. J'irais même au-delà en disant qu'il a déclenché un mouvement ici et ailleurs dans le monde pour trouver un traitement pour les lésions de la moelle épinière.

    Cette année, le gouvernement du Canada s'enorgueillit d'une contribution de 13 millions de dollars dans un fonds de partenariat pour la recherche en santé avec l'Université de Colombie-Britannique et l'hôpital général de Vancouver. Cette initiative permettra d'accélérer la recherche, par l'entremise de l'institut Rick Hansen, pour soigner les personnes atteintes de lésions de la moelle épinière.

    Rick Hansen est un homme extraordinaire que nous respectons et considérons comme un grand Canadien.

*   *   *

+-La santé

+-

    Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, samedi dernier, 40 000 Britanno-Colombiens ont manifesté contre la vision horrifiante que Gordon Campbell a de la province. C'est une vision où l'on n'a pas les moyens de devenir malade ni de fréquenter l'école et où même le droit fondamental à l'aide est détruit.

    Pourquoi la ministre de la Santé n'appuie-t-elle pas les efforts des Britanno-Colombiens pour stopper la destruction de notre système de santé public? Le gouvernement est-il maintenant si dégonflé qu'il ne veut même plus défendre sa propre vision et sa propre mission en matière de santé telles qu'établies dans la Loi canadienne sur la santé? Pourquoi ne défend-elle pas notre système de santé public?

+-

    L'hon. Anne McLellan (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, les cinq principes de la Loi canadienne sur la santé sont fondamentaux pour notre système de santé et son renouvellement. Mes hauts fonctionnaires surveillent la situation et collaborent avec leurs homologues de la Colombie-Britannique pour veiller à ce que la restructuration en cours dans la province ne viole pas les cinq principes de la Loi canadienne sur la santé.

    Je me permets de rappeler à la députée que nous tous, les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de la Santé et nos gouvernements respectifs, travaillons d'arrache-pied pour le bien de nos concitoyens afin de renouveler notre système de santé et d'avoir un système de santé qui soit là pour tous ceux qui en ont besoin.

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, je ne pense pas que la ministre de la Santé saisisse vraiment la question. Les Canadiens attendent du gouvernement et de la ministre qu'ils passent à l'action. Ils se demandent quand la ministre de la Santé, après quatre mois d'inaction, s'engagera enfin dans le débat crucial d'aujourd'hui sur la santé.

    Les résultats du sondage annuel sur la santé au Canada ont été rendus publics aujourd'hui. Le sondage révèle que les trois quarts des Canadiens croient maintenant que le régime d'assurance-maladie est sous-financé. Soixante-dix pour cent se disent même prêts à payer davantage d'impôts pour financer les changements qui s'imposent dans le domaine de la santé.

    Les Canadiens sont disposés à faire leur part. La ministre de la Santé fera-t-elle la sienne?

+-

    L'hon. Anne McLellan (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, comme la députée le sait, abstraction faite de ses fleurs de rhétorique, nous sommes très engagés dans le renouvellement du système de santé, en association avec nos collègues provinciaux et territoriaux, les autres parties prenantes et les usagers de notre système de santé. D'ailleurs, la Commission Romanow est en train de conclure ses consultations nationales avec les Canadiens partout dans le pays.

    Le sénateur Kirby et son comité sénatorial sont en train de consulter les citoyens de notre pays et d'ailleurs sur l'avenir de la santé.

    En septembre 2000, le premier ministre et ses homologues provinciaux ont conclu un accord prévoyant la dépense de 21,1 milliards de dollars de fonds nouveaux dans le domaine de la santé.

*   *   *

+-Les marchés publics

+-

    M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC): Monsieur le Président, tentant cyniquement de détourner l'attention de la conduite non éthique de ses ministres, le premier ministre s'est contenté de brasser les cartes. Les changements précipités au Cabinet ont pour effet de rendre les Canadiens plus méfiants du gouvernement libéral. Le ministre devrait se rendre compte que la question de la confiance du public, réelle et perçue, n'a pas été réglée.

    Le nouveau leader parlementaire du gouvernement, qui renoue avec une fonction qu'il a déjà exercée, peut-il dissiper les doutes une fois pour toutes en déposant les chèques numérotés. Les Canadiens pourront ainsi déterminer par eux-mêmes si le week-end au chalet de M. Boulay a été payé avant l'éclatement du scandale.

  +-(1445)  

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, on s'étonne parfois de ce que le député est prêt à faire pour obtenir des réponses.

    Il est clair que le ministre a précisé non seulement comment il a payé son séjour au chalet, mais encore que ce n'est pas lui qui a fait le chèque. En outre, le député d'en face n'a pas le droit de prendre connaissance des autres chèques tirés du chéquier de la bru du ministre. Il dépasse vraiment les bornes.

+-

    M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC): Monsieur le Président, ce n'est rien à côté de ce que le député et son gouvernement sont prêts à faire pour éviter de rendre compte à la Chambre.

    Conformément à la pratique habituelle, au mois de novembre 1996, Jean Carle, qui était alors le directeur des opérations du premier ministre, et Chuck Guité ont assisté à une réunion avec les organisateurs du Molson Indy où il a été question du programme de commandite du gouvernement. Fidèle à son habitude, le gouvernement a par la suite octroyé un programme de commandite de 850 000 $ à Molson, y compris une commission de 12 p. 100 à M. Lafleur.

    Le vice-premier ministre peut-il expliquer pourquoi le cabinet du premier ministre s'est occupé de cette affaire? Est-ce la pratique usuelle? Depuis 1996, y a-t-il eu d'autres réunions relativement à d'autres programmes de commandite auxquelles Jean Carle a assisté ou...

+-

    Le Président: Le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux a la parole.

+-

    L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai aucune connaissance des questions que soulève le député. Je ferai certainement mon enquête pour voir si je puis fournir d'autres renseignements au député.

[Français]

+-

    M. James Moore (Port Moody--Coquitlam--Port Coquitlam, Alliance canadienne): Monsieur le Président, ce matin, les nouvelles nous confirment de nouveaux abus relatifs à l'argent du public. On parle en effet de plus de 150 000 $. De plus, ces dépenses ont engendré un profit de 20 000 $ pour le Parti libéral du Canada, ceci des poches mêmes de la compagnie qui a gagné le contrat.

    Peut-on compter sur une enquête de la GRC sur cette compagnie, oui ou non?

[Traduction]

+-

    L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.): Monsieur le Président, je suppose que le député fait allusion à l'affaire Coffin. Il n'a pas précisé dans sa question à quoi il faisait allusion.

    Je me contenterai de lui dire que, si sont portés à ma connaissance des faits qui doivent être communiqués à la GRC, à la vérificatrice générale ou à toute autorité publique, je ne manquerai pas de le faire.

+-

    M. James Moore (Port Moody--Coquitlam--Port Coquitlam, Alliance canadienne): Monsieur le Président, 70 p. 100 des Canadiens estiment que la politique fédérale est corrompue et que le gouvernement et le premier ministre perdent une belle occasion d'y mettre bon ordre. Le remaniement ministériel d'hier est une demi-mesure qui ne suffit pas à blanchir la réputation du gouvernement et de nos institutions politiques fédérales. Les Canadiens méritent mieux que cela.

    Le gouvernement peut faire mieux en permettant que l'enquête soit du domaine public. Le gouvernement permettra-t-il la tenue d'une enquête publique? Sinon, quel argument invoque-t-il pour cacher ce gâchis aux Canadiens qui doivent pourtant être tenus au courant des activités de leur gouvernement?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, le préambule à la question du député ne nous apprend rien. Il nous annoncerait une primeur s'il nous disait que le remaniement a été satisfaisant. Je pense qu'il n'y a aucune surprise.

    Encore une fois, si la vérificatrice générale n'est pas indépendante, qui l'est? Si ses rapports n'ont pas été rendus publics, quels rapports l'ont été? En fait, toutes les discussions à la Chambre et les mesures que nous avons prises ont fait suite à l'examen méticuleux et indépendant de la vérificatrice générale, qui s'est acquittée des responsabilités lui ayant été confiées en vertu de la loi. Pourquoi devrait-on refaire ce travail?

[Français]

+-

    M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, hier, en perdant son poste de ministre des Travaux publics, le leader du gouvernement à la Chambre a déclaré avec satisfaction: «Enfin, je n'aurai plus à répondre aux questions», faisant ainsi allusion aux contrats accordés aux firmes amies du Parti libéral.

    Cette phase de soulagement n'est-elle pas révélatrice qu'il y a encore beaucoup de questions sans réponse, et que le prochain ministre aura fort à faire pour expliquer comment et pourquoi autant de liens existent entre les ministres de ce gouvernement et des firmes amies généreusement pourvues en contrats de toutes sortes?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, si le député veut poser des questions de substance, il peut les poser et nous allons y répondre.

    C'est une simple règle de cette Chambre que le ministre responsable du ministère donne des réponses.

+-

    M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, est-ce que ces paroles de l'ex-ministre des Travaux publics ne sont pas encore une confirmation qu'une enquête publique, avec plus de pouvoirs que ceux dont dispose la vérificatrice générale, est nécessaire pour qu'on sache vraiment les dessous de toute cette affaire?

  +-(1450)  

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, la vérificatrice générale, qui a préparé le rapport dont on discute, est déjà indépendante. Elle fait un travail qui est d'une excellente qualité.

    Nous avons répondu et nous continuons de répondre aux recommandations de la vérificatrice générale.

[Traduction]

+-

    M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est une bonne chose que la GRC fasse enquête sur Groupaction, mais les Canadiens ne peuvent avoir l'assurance qu'il n'y aura pas d'ingérences politiques. Le juge Ted Hughes a réclamé une mesure législative pour mettre la GRC à l'abri de ces ingérences, mais le gouvernement a rejeté la recommandation.

    Le solliciteur général va-t-il faire ce qui s'impose et donner suite aux recommandations de Ted Hughes, garantissant ainsi aux Canadiens que le gouvernement ne s'ingérera pas dans l'enquête sur Groupaction comme il l'a fait dans les affaires de l'APEC, du Shawinigate et des Airbus?

+-

    L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, mon honorable collègue est au courant du contenu du rapport sur l'APEC.

    Le député sait également que, comme je l'ai dit bien des fois à la Chambre, le solliciteur général et le gouvernement n'interviennent pas dans les enquêtes policières.

+-

    M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il faut que les Canadiens puissent croire que la GRC est en mesure d'accomplir son travail et de faire enquête sur le gouvernement, dans des affaires où il pourrait y avoir eu des irrégularités, sans craindre ni représailles ni ingérence.

    Le vice-premier ministre va-t-il lancer immédiatement une enquête publique complète pour faire la lumière sur les allégations de corruption?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, je sais que l'Alliance canadienne est dépensière, mais je ne vois pas vraiment pourquoi nous dépenserions des millions de dollars pour refaire un travail déjà accompli par la vérificatrice générale, qui a prouvé son indépendance et la rigueur de son travail. Le gouvernement prend ses recommandations au sérieux et y donne suite.

*   *   *

+-Le bois d'oeuvre

+-

    M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international.

    Une campagne a été lancée à plusieurs postes-frontières entre le Canada et les États-Unis dans le but de faire mieux connaître les effets des droits compensateurs punitifs imposés à nos producteurs de bois d'oeuvre et de dissiper les mythes propagés par de très actifs lobbyistes aux États-Unis.

    Le ministre pourrait-il nous dire si le gouvernement Canadien compte aider l'industrie canadienne dans ses efforts visant à mieux faire connaître les préjudices injustes que lui fait subir l'industrie américaine du bois d'oeuvre?

+-

    L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, j'ai eu le plaisir d'annoncer aujourd'hui que le gouvernement du Canada consacrerait 20 millions de dollars au cours des prochaines années pour aider l'industrie canadienne à intensifier la campagne de sensibilisation qu'elle mène aux États-Unis.

    Le but de cette campagne est de mieux faire connaître à des secteurs clés aux États-Unis les répercussions que l'imposition de droits punitifs sur le bois d'oeuvre a sur eux et leurs intérêts.

    Ces fonds s'ajoutent aux 75 millions de dollars déjà annoncés par le ministre des Ressources naturelles. Le gouvernement travaillera avec son industrie.

*   *   *

+-Les marchés du gouvernement

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, plus tôt au cours de la période des questions, j'ai parlé du dossier de Communications Coffin et des ressemblances qu'il présentait avec le dossier Groupaction. La perte des documents a été soulignée dans le cadre d'une enquête interne, de l'argent a été versé au Parti libéral et l'entente a été signée par le même fonctionnaire.

    Puisque les faits sont presque identiques dans ces deux dossiers, le ministre est-il prêt à reconsidérer la réponse qu'il a faite plus tôt et à accepter de soumettre immédiatement la question à la GRC?

+-

    L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.): Monsieur le Président, j'ai eu le privilège de parler à Mme Fraser plus tôt aujourd'hui et je dois la rencontrer au cours de la semaine. En plus de l'étude exhaustive entreprise par le bureau de la vérificatrice générale, les fonctionnaires de mon ministère revoient de nouveau tous les dossiers qui ont trait au programme de commandites.

    Je peux garantir à mon collègue que, si j'obtiens quelque renseignement que ce soit qui mérite d'être soumis à la GRC, cette dernière en sera aussitôt informée.

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'aimerais également obtenir des précisions sur une autre affaire. Dans une réponse précédente, le ministre a souligné qu'il n'autoriserait pas d'autres contrats de commandite pour l'instant. Toutefois, le ministre précédent avait affirmé ne pas autoriser de contrats de commandite puisque ces derniers étaient accordés selon la liste d'offres permanentes.

    J'aimerais des précisions à ce sujet. Le ministre veut-il dire qu'il n'autorisera pas lui-même d'autres contrats ou bloque-t-il complètement tout nouveau contrat?

  +-(1455)  

+-

    L'hon. Ralph Goodale (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.): Monsieur le Président, je continue d'examiner le processus administratif pertinent, mais si j'ai bien compris, lorsque des groupes communautaires et des organismes présentent une demande dans le cadre du programme de commandites, comme cette demande qui a été faite dans la circonscription du chef de l'opposition, et que l'approbation de ces demandes est recommandée par les fonctionnaires compétents, cette liste est alors transmise au ministre qui doit donner son approbation.

    Ce que j'ai dit plus tôt en réponse à une question, c'est que je n'ai pas l'intention d'approuver d'autres demandes tant que je ne serai pas convaincu que les critères du programme et que tous...

+-

    Le Président: Le député d'Argenteuil--Papineau--Mirabel a la parole.

*   *   *

[Français]

+-Le remorquage des bateaux

+-

    M. Mario Laframboise (Argenteuil--Papineau--Mirabel, BQ): Monsieur le Président, hier après-midi, près de 200 propriétaires de bateaux de pêche et de plaisance ont manifesté à Cap-aux-Meules pour dénoncer la décision de la Garde côtière de confier à l'entreprise privée le remorquage de bateaux. Ce service essentiel, qui était offert gratuitement en tout temps depuis 1982, représentait pourtant l'an dernier 90 p. 100 des sorties en mer de la Garde côtière aux Îles-de-la-Madeleine.

    Le ministre des Pêches et des Océans peut-il s'engager à maintenir 24 heures sur 24 le service gratuit de remorquage de bateaux par la Garde côtière aux Îles-de-la-Madeleine?

+-

    L'hon. Robert Thibault (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à assurer le député que la Garde côtière sera disponible 7 jours par semaine, 24 heures par jour, pour assurer le remorquage de n'importe quel bateau en détresse ou en situation potentielle de détresse.

    C'est quand même la politique de la Garde côtière de ne pas faire concurrence au secteur privé. Quand leur prix sera justifié, on ne s'y opposera pas.

*   *   *

+-La Soirée du hockey

+-

    M. Mauril Bélanger (Ottawa--Vanier, Lib.): Monsieur le Président, dans un tout autre ordre d'idée, depuis 50 ans déjà, des centaines de milliers de Canadiens s'installent dans leur salon le samedi soir pour écouter la Soirée du hockey. On y retrouve au réseau français le Canadien de Montréal, et au réseau anglais, d'autres équipes canadiennes. Il semblerait que dès l'an prochain, ces parties de hockey seront seulement disponibles au réseau RDS. C'est une tradition qui disparaît.

    La ministre du Patrimoine compte-t-elle intervenir soit auprès du club, soit auprès de la ligue ou peut-être même de Radio-Canada pour s'assurer que cette tradition vieille de 50 ans puisse continuer chez nous?

+-

    L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, étant donné l'importance de la Soirée du hockey en français et en anglais, je pense qu'il est important que les Canadiennes et Canadiens s'adressent non seulement à Radio-Canada, mais aussi au bureau de la Ligue nationale de hockey, à Gary Bettman.

    J'ai moi-même l'intention de parler directement à M. Bettman si on n'est pas capables de régler ce dossier. C'est sûr et certain que Radio-Canada doit être la place où on peut écouter la Soirée du hockey au Canada.

*   *   *

[Traduction]

+-Le conseiller en éthique

+-

    M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le premier ministre a demandé à l'ancien ministre de la Défense de démissionner, après que le conseiller en éthique eut jugé qu'il y avait eu violation des Lignes directrices concernant les conflits d'intérêts. Or, le contrat en question a été octroyé en juillet 2001 et le rapport, présenté en novembre dernier, mais le conseiller en éthique n'a absolument rien fait pendant des mois. Il a agit seulement une fois que les médias ont jeté la lumière sur ce dossier et qu'il a consulté le premier ministre.

    Cela montre bien l'inefficacité de ce conseiller en éthique qui n'a aucun compte à rendre. Quand le gouvernement honorera-t-il finalement son engagement et nommera-t-il un conseiller en éthique indépendant faisant rapport au Parlement et ayant la confiance des Canadiens?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Au contraire, monsieur le Président, cette affaire montre que le conseiller en éthique joue un rôle important. Il a fait une recommandation au premier ministre concernant le code de conduite des titulaires d'une charge publique et le premier ministre y a donné suite immédiatement.

    Je n'accepte pas l'argument du député. D'ailleurs, le conseiller en éthique est censé conseiller le premier ministre qui, en vertu du régime parlementaire britannique, répond de la conduite de ses ministres.

*   *   *

[Français]

+-Les services de traversiers

+-

    M. Paul Crête (Kamouraska--Rivière-du-Loup--Témiscouata--Les Basques, BQ): Monsieur le Président, suite à une question que je posais au ministre des Transports, le 23 mai dernier, concernant la paralysie des services de traversiers entre Trois-Pistoles et les Escoumins, celui-ci m'a répondu qu'il pensait trouver une solution au mois de juin. Or, une lettre de son ministère datée de ce même 23 mai dit le contraire et confirme que Transports Canada n'est pas en mesure d'autoriser la reprise du service de traversier à partir des Escoumins pour la saison estivale 2002.

    Le vice-premier ministre peut-il m'assurer que le ministre des Transports n'a pas induit la Chambre en erreur jeudi dernier, et qu'il va permettre la reprise des travaux du traversier dès la présente saison?

  +-(1500)  

+-

    L'hon. Allan Rock (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, des réunions ont eu lieu la semaine dernière avec les gens impliqués dans ce dossier.

    Comme l'a dit le ministre des Transports jeudi dernier, on espère régler la situation bientôt.

*   *   *

[Traduction]

+-Les affaires autochtones

+-

    M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, le rapport final sur la tragédie de Walkerton nous révèle que des cas semblables risquent de se produire dans 83 localités au Canada en ce moment même. Je parle de 83 localités des premières nations qui ont été avisées de faire bouillir l'eau et qui n'ont pas accès à de l'eau potable. Cette situation ne serait jamais tolérée si ces localités étaient habitées par des Blancs.

    Au lieu de dépenser des millions de dollars pour promouvoir le projet de gouvernance des premières nations dont personne ne veut, parlons des besoins essentiels de milliers de familles autochtones.

    Le ministre des Affaires indiennes s'engagera-t-il aujourd'hui à faire en sorte que la qualité de l'eau de ces collectivités soit la première priorité de son ministère?

+-

    L'hon. Robert Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je signale au député, qui est assez fort sur les grands discours, mais habituellement pas très au courant des faits, que, en 1995, à la suite d'une importante étude menée par Santé Canada et le ministère des Affaires indiennes et du Nord Canadien, nous avons décidé de prendre des mesures en raison de l'analyse faite dans le rapport des questions de qualité de l'eau dans les collectivités autochtones. Nous avons consacré à ces mesures plus de 500 millions de dollars depuis 1995.

    S'agit-il d'une priorité du gouvernement? Absolument. Allons-nous agir? Nous agissons et nous continuerons de prendre toutes les mesures possibles.

*   *   *

+-Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

+-

    Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Immigration. Pourquoi le ministre de l'Immigration a-t-il dit qu'il n'avait pas séjourné dans l'appartement du Groupe Everest, puis a dit qu'il l'avait fait? Il était ministre lorsqu'il a fait ces deux déclarations. Pourquoi n'a-t-il pas dit la vérité la première fois?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, un député aussi chevronné que celui-là devrait savoir qu'il n'a pas le droit de poser des questions aux députés à l'égard de leur conduite lorsqu'ils n'étaient pas ministres, conduite qui n'a rien à voir avec leurs fonctions.


+-Affaires courantes

[Affaires courantes]

*   *   *

[Français]

+-L'assurance-emploi

+-

    L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 3(3) de la Loi sur l'assurance-emploi, j'ai le plaisir de soumettre, dans les deux langues officielles, deux copies du rapport annuel de contrôle et d'évaluation du régime d'assurance-emploi pour l'année 2001.

*   *   *

[Traduction]

+-Réponse du gouvernement à des pétitions

+-

    Mme Karen Redman (secrétaire parlementaire du ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer dans les deux langues officielles la réponse du gouvernement à deux pétitions.

*   *   *

+-Les comités de la Chambre

+Pêches et Océans

+-

    M. Wayne Easter (Malpeque, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le huitième rapport du Comité permanent des pêches et des océans.

    Conformément à son ordre de renvoi du 28 février 2002, votre comité a examiné les crédits 1, 5 et 10 sous Pêches et Océans dans le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2003, et fait rapport à ce sujet, sauf sur les sommes votées au titre de crédits provisoires.

*   *   *

+-Les Travaux de la Chambre

+-

    L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, vous constaterez qu'il y a consentement unanime de la Chambre à propos d'un sujet dont j'ai discuté précédemment avec les différents leaders à la Chambre. Je remercie ceux-ci d'avoir pris le temps de participer à cette conversation non officielle plus tôt dans la journée. Je propose:

    Que, nonobstant les dispositions de tout article du Règlement ou toute pratique habituelle, l'étude des crédits du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux, conformément à l'article 81(4)a) du Règlement, soit différée du mardi 28 mai 2002 au mardi 4 juin 2002.

  +-(1505)  

+-

    Le Président: Le leader du gouvernement à la Chambre a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour proposer la motion?

    Des voix: D'accord.

    Le Président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre de l'adopter?

    Des voix: D'accord.

    (La motion est adoptée.)

*   *   *

[Français]

+-Pétitions

+-Le transport aérien

+-

    M. Mario Laframboise (Argenteuil--Papineau--Mirabel, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de présenter à la Chambre une pétition au nom de mon collègue, le député de Manicouagan, qui est en convalescence.

    Cette pétition est présentée par tout près de 2 000 citoyens et citoyennes de la Côte-Nord, qui s'opposent farouchement à l'implantation de la fameuse taxe de 24 $ sur les aéroports. Les gens de la Côte-Nord ont souvent besoin d'utiliser l'avion, non seulement pour des raisons économiques, mais surtout pour des services essentiels, souvent pour des raisons de santé. On comprendra que pour les gens des régions éloignées, ce n'est pas un luxe que de prendre l'avion.

    Donc, les citoyens et les citoyennes de la Côte-Nord et les habitants de la circonscription de Manicouagan appuient le député de Manicouagan, qui m'a permis de déposer cette pétition à la Chambre.

    Ils demandent que les aéroports de Sept-Îles et de Blanc-Sablon ne soient pas assujettis à la taxe de 24 $.

*   *   *

+-L'assurance-emploi

+-

    M. Yvon Godin (Acadie--Bathurst, NPD): Monsieur le Président, il me fait plaisir de présenter une pétition au nom des travailleurs et des travailleuses de la Fédération du travail du Nouveau-Brunswick, qui représente 33 000 travailleurs. Ils demandent au Parlement de rejeter les changements proposés aux règlements de l'assurance-emploi, qui imposeront des intérêts sur les trop-payés, surtout que l'assurance-emploi a un surplus de 42 milliards de dollars.

*   *   *

[Traduction]

+-La santé

+-

    M. Svend Robinson (Burnaby--Douglas, NPD): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer une pétition signée par des résidents de la Colombie-Britannique, dont plusieurs centaines de ma propre circonscription, Burnaby—Douglas, concernant le système de santé public du Canada.

    Les pétitionnaires demandent au Parlement d'empêcher la mise en place au Canada d'un système de santé à deux vitesses sur le modèle de celui qui existe aux États-Unis. Ils font part de leurs préoccupations au sujet des compressions effectuées par le gouvernement fédéral dans le financement des soins de santé, ce qui porte à 13,5 p. 100 la participation de celui-ci au paiement des frais de santé. Ils soulignent l'importance d'agir immédiatement pour sauver le système de santé public au Canada et faire obstacle à un système à deux vitesses à l'américaine.

    Les pétitionnaires prient le Parlement de dire non aux hôpitaux à but lucratif, de rétablir immédiatement à 25 p. 100 le niveau de financement des soins de santé par le gouvernement fédéral et, finalement, de mettre sur pied des programmes nationaux de soins à domicile et de médicaments d'ordonnance.

*   *   *

+-Les maladies du rein

+-

    M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition signée par des citoyens de la région de Peterborough qui sont préoccupés par l'incidence des maladies du rein au Canada et par la souffrance et les problèmes qui y sont liés. Les pétitionnaires soulignent que c'est un problème important qui prend des proportions croissantes. De véritables progrès ont été réalisés pour améliorer la situation des personnes atteintes de maladies du rein et pour, espérons-le, trouver un traitement à cette maladie.

    Les pétitionnaires expriment leur admiration à l'égard du travail réalisé par un des Instituts de recherche en santé du Canada pour aider les personnes souffrant de maladies rénales, mais ils estiment que la désignation Institut de la nutrition, du métabolisme et du diabète est trop compliquée et confuse pour que le grand public l'adopte. Ils croient que la recherche serait mieux soutenue et plus efficace si le nom de l'institut était modifié.

    Ces pétitionnaires prient donc le Parlement d'inciter les Instituts canadiens de recherche en santé à inclure explicitement la recherche sur les maladies du rein dans le nom de l'un des instituts du réseau; l'institut en cause pourrait s'appeler institut des maladies du rein et du tractus urinaire.

*   *   *

  +-(1510)  

[Français]

+-Questions au Feuilleton

+-

    Mme Karen Redman (secrétaire parlementaire du ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions soient réservées.

    Le Président: Est-on d'accord?

    Des voix: D'accord.

[Traduction]

+-

    Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'aimerais que la Chambre consente à ce que nous revenions aux motions parce que j'aimerais présenter une motion demandant le consentement unanime de la Chambre pour accepter une modification au Règlement visant à créer le comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires.

+-

    Le Président: Y a-t-il consentement unanime pour que nous revenions aux motions?

    Des voix: D'accord.

*   *   *

+-Le Règlement

+-

    Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest--Nepean, Lib.): Monsieur le Président, je propose:

    Que l'on modifie le Règlement de la Chambre des communes

a) en supprimant les mots «et des opérations gouvernementales», à l'alinéa 104(2)p); 

b) en ajoutant le texte qui suit après l'alinéa 104(2)p) :

«q) le Comité des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires (seize membres).»

c) en supprimant l'alinéa 108(1)c);

d) en ajoutant le texte qui suit après l'alinéa 108(3)e):

f) celui du Comité des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires comprend notamment:

(i) l'étude de l'efficacité, de l'administration et du fonctionnement des ministères et agences gouvernementales centraux ainsi que de leurs plans opérationnels et de dépenses, et la présentation de rapports à ce sujet;

(ii) l'étude de l'efficacité, de l'administration et des activités afférentes à l'utilisation par le gouvernement des technologies naissantes en matière d'information et de communications ainsi que des plans opérationnels et de dépenses s'y rapportant, et la présentation de rapports à ce sujet;

(iii) l'étude de l'efficacité, de l'administration et des activités afférentes à certains postes opérationnels et de dépense dans tous les ministères et agences et la présentation de rapports à ce sujet;

(iv) l'étude des budgets des programmes dont la prestation est assurée par plus d'un ministère ou agence et la présentation de rapports à ce sujet;

(v) en ce qui concerne les postes budgétaires étudiés en vertu des sous-alinéas 108(3)f)(i), (ii) ou (iii), en coordination avec le(s) comité(s) qui en est (sont) chargé(s) et conformément à l'article 79 du Règlement, le Comité est habilité à modifier les crédits budgétaires déférés à d'autres comités permanents;

(vi) l'étude des rapports du Commissaire à la protection de la vie privée, du Commissaire à l'accès à l'information, de la Commission de la fonction publique et du Conseiller en éthique sur les responsabilités qui lui incombent aux termes de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes, rapports tous réputés être déférés en permanence au Comité dès leur dépôt sur le Bureau de la Chambre, et la présentation de rapports à ce sujet;

(vii) l'étude du processus d'examen des prévisions budgétaires et des crédits, y compris la forme et la teneur de tous les documents budgétaires, et la présentation de rapports à ce sujet;

(viii) l'étude de l'efficacité, de l'administration et des activités, ainsi que des plans opérationnels et de dépenses, se rapportant au budget des dépenses supplémentaires et la présentation de rapports à ce sujet;

(ix) l'étude de l'efficacité, de l'administration et du fonctionnement, ainsi que des plans opérationnels et de dépenses, des sociétés d'État et agences gouvernementales dont l'examen n'a pas été spécifiquement déféré à un autre comité permanent et la présentation de rapports à ce sujet, et

(x) de concert avec d'autres comités, l'étude de l'efficacité, de l'administration et des activités relatives aux programmes législatifs, aux dépenses fiscales, aux garanties d'emprunt, aux fonds de prévoyance et aux fondations privées dont la majeure partie du financement provient du gouvernement du Canada, ainsi que des plans opérationnels et de dépenses s'y rapportant, et la présentation de rapports à ce sujet.

    Et

    Que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre dresse les listes des députés devant composer les nouveaux comités permanents créés en vertu du présent ordre et en fasse rapport à la Chambre dans les cinq jours de séance suivant l'adoption du présent ordre, et

    Que le Greffier soit autorisé à modifier tout ordre de renvoi ou projet d'ordre de renvoi pour le rendre conforme à l'objet du présent ordre.

+-

    Le Président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

    Des voix: D'accord.

    (La motion est adoptée.)

*   *   *

+-Demande de débat d'urgence

+-L'éthique

[Article 52 du Règlement]
+-

    Le Président: La présidence a reçu un avis de demande de débat d'urgence de la part du député de West Vancouver--Sunshine Coast.

+-

    M. John Reynolds (West Vancouver--Sunshine Coast, Alliance canadienne): Monsieur le Président, conformément à l'article 52 du Règlement, je demande la permission de proposer l'ajournement de la Chambre.

    Les scandales et les allégations de corruption qui pèsent contre le gouvernement constituent une question urgente. La situation est devenue tellement critique que, selon les médias, elle est en train de détruire le gouvernement. Les Canadiens sont en train de perdre confiance dans la capacité des libéraux de continuer à assumer leur responsabilité constitutionnelle d'assurer un bon gouvernement.

    Il nous faut discuter des normes éthiques du gouvernement et des mesures qui doivent être prises pour les redresser. Si l'on en juge par la controverse qu'a suscité récemment la conduite peu éthique de ministres, on ne sait plus ce qui constitue la norme. M. Gagliano a été nommé ambassadeur au Danemark. Le député de York-Centre a été congédié du Cabinet. Le député de Glengarry--Prescott--Russell a été congédié, puis admis de nouveau au Cabinet.

    Comme il l'a promis il y a neuf ans, le premier ministre doit établir immédiatement un code d'éthique uniforme pour les ministres et les députés, dont un commissaire à l'éthique ferait directement rapport au Parlement. Cela traîne depuis tellement longtemps que c'est en train de dégénérer en crise. Si le premier ministre attend que tous ses amis soient récompensés avant de couper les canaux de la corruption, il sera alors trop tard.

    Si vous êtes tenté de tenir compte du fait qu'une journée de l'opposition est prévue pour demain, monsieur le Président, je vous ferai remarquer que cette journée de l'opposition concerne une autre question grave dont il faut discuter d'urgence. Le débat d'urgence que je demande conformément à l'article 52 du Règlement concerne une urgence parlementaire et démocratique.

    Si les libéraux ne peuvent pas faire la preuve qu'ils peuvent assurer un bon gouvernement, un gouvernement honnête, le débat prévu pour la journée de l'opposition de demain ou tout autre débat d'urgence seront inutiles. Nous devons immédiatement discuter de l'éthique gouvernementale. Nous devons déterminer si le gouvernement a la compétence éthique de cerner et de satisfaire les préoccupations des Canadiens autres que les amis du Parti libéral. Nous devons débattre du fait que le premier ministre a promis il y a neuf ans au Parlement de nommer un commissaire à l'éthique indépendant qui ferait rapport au Parlement. Les Canadiens l'exigent. Le moment ne saurait être mieux choisi.

*   *   *

+-Décision de la présidence

[Décision de la présidence]
+-

    Le Président: La présidence a étudié attentivement la demande du député de West Vancouver—Sunshine Coast, mais, si ma mémoire est fidèle, il y a eu un débat précisément sur la même question jeudi dernier, toute une journée d'un débat fort stimulant. Il ne fait pas de doute que, si j'ordonnais la tenue d'un débat ce soir, il serait également très stimulant.

    Malheureusement, la nature plus ou moins stimulante d'un débat ne figure pas parmi les critères prévus à l'article 52 du Règlement pour la tenue de débats d'urgence. Si c'était effectivement l'un des critères, je serais plus porté à accéder à la demande du député, mais, dans les circonstances, j'estime qu'il n'a pas établi l'urgence de la question de façon à satisfaire aux exigences de l'article 52. Je remercie cependant le député de Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam de son précieux concours.


+-Initiatives ministérielles

[Initiatives ministérielles]

*   *   *

  +-(1515)  

[Traduction]

+-Loi sur la procréation assistée

    La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-56, Loi concernant la procréation assistée, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité; ainsi que de l'amendement.

+-

    Mme Lynne Yelich (Blackstrap, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il arrive parfois que le législateur doive prendre des décisions difficiles intéressant la vie, l'éthique et la morale. C'est précisément notre cas aujourd'hui. En qualité de porte-parole de mes électeurs, j'estime de mon devoir de m'assurer que le juste équilibre entre l'éthique et la science sera effectivement instauré par le projet de loi C-56.

    J'ai l'impression que, plus nous cherchons à comprendre la recherche sur les cellules souches, plus la question nous apparaît complexe. Ce qui me console cependant, c'est de savoir que je ne suis pas seule à être déchirée par ce dilemme d'ordre éthique. J'ai lu avec grand intérêt le discours prononcé par le président Bush l'automne dernier, au moment où son pays entreprenait d'adopter une loi concernant la recherche sur les cellules souches. Dans ce discours, M. Bush avait dit de cette question que c'était l'une des plus graves de notre époque. Je vais donner lecture de certains passages de ce discours:

La recherche sur les cellules souches extraites d'embryons humains suscite un débat national qui prend de l'ampleur et anime les conversations aux repas du soir. La question revient tous les jours sur le tapis dans les laboratoires où les scientifiques s'interrogent sur les ramifications éthiques de leur travail. Elle tourmente les parents et de nombreux couples qui essayent d'avoir des enfants, ou de sauver des enfants déjà au monde.

La question suscite un débat au sein de l'Église, chez les gens de différentes confessions, et même chez des gens de même confession, ayant cependant abouti à des conclusions différentes.

Tandis que je réfléchissais sur la question, des questions fondamentales me sont venues à l'esprit avec insistance. Premièrement, ces embryons cryoconservés sont-ils une forme de vie humaine et, à ce titre, deviennent-ils quelque chose de précieux à protéger? Deuxièmement, s'ils doivent finir par être détruits de toute façon, ne devraient-ils pas servir pour le bien commun et être utilisés dans le cadre de travaux de recherche susceptibles de sauver et d'améliorer des vies?

Au fond, la question nous oblige à nous poser la question fondamentale de savoir où commence la vie et où doit s'arrêter la science. La question est délicate à trancher dans un sens ou dans l'autre sur le plan moral, car il n'est pas aisé de juxtaposer la nécessité de protéger la vie à tous ses stades et la perspective de sauver et d'améliorer la vie à toutes ses étapes.

    Ce sont les questions que nous nous posons, en tant que parlementaires canadiens. Il est important de légiférer sans tarder, avec logique et ordre. Le Canada ne doit pas être à la traîne des autres pays à cet égard. Même si la question est controversée, nous devons unir nos efforts au Parlement, pour arriver à une conclusion dans les plus brefs délais. Si nous ne le faisons pas, nous risquons d'agir d'une manière réactive, et non proactive, pour adopter des mesures législatives bien pensées.

    Cela dit, je profite de l'occasion pour exprimer certaines inquiétudes que j'éprouve à l'égard de la version actuelle du projet de loi. Je déclare sans équivoque que je suis totalement favorable aux progrès de la science, de la recherche et de la technologie. Je crains que ce projet de loi permette la recherche sur des embryons humains, si leur utilisation s'avère nécessaire. Il est significatif que la nécessité ne soit pas clairement définie dans la loi existante. Je vais donc consacrer le reste de mon discours à la notion de la nécessité scientifique.

    Les scientifiques et les groupes de revendication ont récemment établi qu'il existe des solutions de rechange aux cellules souches embryonnaires pour traiter certaines des pires maladies débilitantes qui affectent l'humanité. Carrie Gordon Earll, analyste en bioéthique, a décrit plusieurs réussites médicales prometteuses obtenues au moyen d'autres solutions aux cellules souches embryonnaires. Ces autres solutions peuvent se trouver dans les cellules souches adultes qui proviennent de régions dans le corps humain développé, comme la moelle épinière et le sang du cordon ombilical. Ces solutions n'exigent pas la perte d'une vie humaine ou d'une vie humaine à naître. Dans ses travaux, Mme Earll cite les exemples suivants:

Les chercheurs de la Faculté de médecine de l'université Harvard ont utilisé des cellules souches adultes animales pour cultiver des cellules des îlots pancréatiques, afin de lutter contre le diabète. Ils ont déclaré avoir inversé la maladie sans avoir à recourir à des greffes. Des plans sont actuellement dressés pour effectuer des essais sur des humains.

Âgée de 36 ans, Susan Stross fait partie du groupe de plus de 20 patients atteints de sclérose en plaques dont l'état est resté stable ou s'est amélioré après une transplantation de cellules souches adultes. Des résultats similaires ont été signalés dans plusieurs centaines de cas aux quatre coins du monde.

    Outre les avantages manifestes que présente sur le plan moral l'utilisation de cellules souches adultes, la recherche semble aussi prouver qu'elles sont plus sûres que les cellules foetales. Le Dr Helen Hodges, chercheuse britannique, a récemment constaté que les cellules souches adultes se rendent aux endroits qui doivent être réparés alors que les cellules souches embryonnaires restent là où elles ont été injectées. Elle soutient que, parce que les patients peuvent fournir leurs propres cellules souches adultes aux fins de leur traitement, leur système immunitaire ne les rejettera pas.

  +-(1520)  

    En 1999, le journal Science citait un professeur Prentice qui aurait écrit:

Alors que nous croyions auparavant qu'il n'existait que quelques cellules souches dans notre corps, au cours des deux dernières années, nous avons découvert que bon nombre d'organes, et peut-être la majorité d'entre eux, conservent tout un réservoir de cellules souches.

    Le professeur Prentice a déclaré ensuite que les cellules souches adultes avaient donné de meilleurs résultats que les cellules souches embryonnaires parce qu'elles peuvent se transformer en toute une variété de tissus différents et parce qu'elles sont plus faciles à obtenir.

    À contrario, les cellules souches embryonnaires n'ont pas encore soulagé ou guéri de maladies. En fait, les scientifiques nous disent maintenant que les cellules souches embryonnaires peuvent parfois être un peu trop flexibles, et qu'elles se transforment souvent en toutes sortes de tissus, certains étant désirables et certains autres ne l'étant pas. Lorsqu'on les a injectées sous la peau de souris, il est arrivé qu'elles croissent en devenant des tumeurs formées de nombreux types de tissus, comme du tissu intestinal, de la peau ou même des dents.

    Les femmes de ma circonscription membres de l'organisation REAL Women of Canada ont soulevé cette question dans leur bulletin de l'automne 2001. L'article en question disait:

    Il nous semble curieux qu'on fasse fortement pression en faveur du potentiel de l'utilisation expérimentale de cellules souches embryonnaires alors qu'il a déjà été prouvé qu'on avait d'autres sources de cellules souches comme la moelle osseuse, le cordon ombilical, le placenta, les tissus adipeux des êtres humains, la peau et même les cellules du cerveau d'adultes décédés, pour ne nommer que celles-là, qui font que la recherche sur les cellules souches embryonnaires est totalement injustifiée. C'est particulièrement vrai vu que ces autres sources éliminent le difficile problème du rejet de tissu étranger constaté lors de l'implantation de cellules souches embryonnaires. Contrairement aux réussites obtenues avec les cellules souches adultes, les cellules souches embryonnaires humaines n'ont jamais donné de bons résultats dans le cadre d'essais cliniques.

    Il importe de noter que la presse scientifique de grande diffusion constate aussi le potentiel des cellules souches adultes. Un article paru récemment dans le New Scientist intitulé «Découverte de la cellule souche parfaite» disait:

On a trouvé chez les adultes une cellule souche qui peut prendre les caractéristiques de toutes les cellules du corps. Ce pourrait être la cellule la plus importante jamais découverte.

Jusqu'à maintenant, on pensait que seules des cellules souches prélevées sur de jeunes embryons présentaient cette propriété. Si la découverte est confirmée, cela voudrait dire que des cellules de votre propre corps pourraient un jour servir à créer des tissus de remplacement parfaitement compatibles et même des organes.

Si c'est le cas, il ne serait pas nécessaire de se tourner vers le clonage thérapeutique, c'est-à-dire le clonage de personnes, pour obtenir des cellules souches compatibles des embryons découlant de cette opération. Il ne serait pas nécessaire non plus de modifier génétiquement des cellules souches embryonnaires en vue de créer une «cellule universelle» ne déclenchant pas de rejet immunitaire. La découverte de cellules souches adultes d'une telle polyvalence ravivera aussi le débat visant à déterminer si la recherche sur les cellules souches embryonnaires est justifiée.

    Il convient de souligner qu'une partie de cette recherche innovatrice se déroule chez nous, soit à l'Université McGill de Montréal.

    Le Canada devrait s'engager à demeurer un chef de file dans ce secteur innovateur de la recherche et de la technologie. C'est vers ces activités que nous devrions orienter notre argent et nos efforts.

    Enfin, j'ai toujours à l'esprit les électeurs de Blackstrap, qui ont pris le temps de m'écrire pour me faire connaître leur opinion à ce sujet. Je vais partager avec vous quelques-unes des idées qu'ils ont exprimées.

    AndreW et Louise Novecosky, de Viscount, m'ont fait parvenir une lettre dans laquelle ils disent ce qui suit:

En ce qui concerne la recherche sur les cellules souches, nous espérons qu'elle ne sera pas autorisée. Elle mènera à la récolte de cellules souches. Je crains que cela ne se produise déjà, mais en autorisant la recherche, on accroîtra la récolte de jeunes humains.

    Mme Donna Hundeby, d'Elbow, en Saskatchewan, m'écrit ce qui suit:

Je tiens à vous faire savoir que je suis opposée à toute forme de recherche médicale entraînant l'interruption de la vie humaine. Étant donné que je crois qu'un embryon représente une vie humaine, et que la vie humaine est sacrée, je vous exhorte à interdire la destruction d'embryons humains à des fins de recherche sur les cellules souches.

    Kevin Dyck, de Saskatoon, m'a fait parvenir ce qui suit:

C'est animé d'un grand sens de l'urgence que je vous écris aujourd'hui. Étant donné que la nouvelle mesure législative sur la procréation assistée sera bientôt étudiée aux Communes, je crois fermement que les dirigeants de notre pays doivent se prononcer contre ces pratiques dangereuses et souvent contraires à l'éthique proposées par les chercheurs et les cliniques du pays.

  +-(1525)  

    En résumé, j'aimerais souligner le volet le plus important de mon message. Nous devons agir de façon rapide, mais néanmoins prudente, en mettant au point une mesure législative sur une question présentant un aspect moral si profond.

+-

    M. James Moore (Port Moody--Coquitlam--Port Coquitlam, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis toujours ravi de prendre la parole à la Chambre, surtout lorsque les pages sont plus nombreux que les députés. Quoi qu'il en soit, ce sujet est important. Je suis heureux d'en parler, même si la Chambre est tellement vide qu'on pourrait entendre le vent siffler.

    L'opposition réclame une mesure législative sur ce sujet depuis 1993, année où la Commission royale d'enquête sur les nouvelles techniques de reproduction a déposé son rapport. En juillet 1995, le ministre de la Santé de l'époque, et, sauf erreur, nous en avons eu trois ou quatre autres depuis, a présenté un moratoire volontaire sur certaines techniques. Le 14 juin 1996, le gouvernement a présenté un projet de loi interdisant 13 utilisations de techniques de procréation assistée et de techniques génétiques, mais le projet de loi est resté en plan lorsque des élections ont été déclenchées en 1997.

    Cet aspect est important. Nous parlons souvent à la Chambre de l'importance de certaines mesures législatives. Rien n'est plus crucial que la réglementation et l'examen gouvernemental de la création et de la disposition de la vie humaine. Qu'y a-t-il de plus essentiel? Cependant, dans sa précipitation, le gouvernement a déclenché des élections anticipées en 1997, car il a estimé pouvoir les remporter à ce moment-là. Un tel opportunisme a sonné le glas d'un projet de loi très important et d'un débat très important que la Chambre et les Canadiens attendaient de leurs législateurs.

    Voilà les subtilités et les réalités: le gouvernement a fait preuve d'opportunisme politique en déclenchant des élections anticipées. C'est une des raisons pour lesquelles l'Alliance canadienne et son prédécesseur, le Parti réformiste, ont toujours cru au principe de dates d'élections fixes. Ce principe s'appliquerait justement à des situations comme celle-ci, afin que des projets de loi importants ne souffrent pas des caprices politiques du premier ministre de l'heure.

    Après la campagne de 1997, un avant-projet de loi a été soumis à l'étude du Comité permanent de la santé le 3 mai 2001, soit quatre ans plus tard. Le comité a présenté son rapport intitulé Bâtir la famille en décembre 2001. En mars 2002, les Instituts de recherche en santé du Canada, suivis par Génome Canada, ont pris de vitesse le Parlement en publiant des règles aux fins de l'approbation du financement d'expériences sur des embryons et des foetus avortés.

    Nous avons là un cas où un projet de loi était prêt, mais il est mort au Feuilleton parce que le premier ministre voulait pouvoir dire qu'il avait obtenu un autre gouvernement majoritaire. Il a déclenché une campagne électorale anticipée de façon tout à fait opportuniste et le projet de loi est mort au Feuilleton.

    On est arrivé au point en mars 2002 où le gouvernement n'avait toujours pas déposé de projet de loi, ce qui a forcé des gens à l'extérieur de la Chambre des communes à s'acquitter du travail du gouvernement. Les provinces ont dû combler le vide et remplacer le gouvernement dans le domaine des soins de santé. Maintenant, sur les questions les plus fondamentales quant à savoir à quel moment la vie commence, comment tout cela est réglementé et le reste, ce sont des gens du secteur privé qui font le travail du gouvernement.

    Je veux passer le gros de mon temps à parler de l'agence qui va surveiller l'application des règlements. Tout d'abord, je voudrais m'arrêter brièvement sur la question soulevée par notre collègue de Blackstrap, en Saskatchewan, c'est-à-dire le développement de la recherche sur les cellules souches adultes et les promesses de cette recherche.

    Le Canada est déjà un chef de file dans la recherche sur les cellules souches adultes. Par exemple, en surdynamisant des cellules souches sanguines adultes avec un gène leur permettant de se reproduire rapidement, une équipe de chercheurs de l'Université de la Colombie-Britannique a réussi à guérir des souris dont le système sanguin était affaibli. Un jour, les cellules souches adultes pourraient remplacer les greffes de moelle épinière chez les humains. Ce sont des progrès prometteurs dans le domaine médical.

    Il y a un grand nombre d'exemples de progrès récents dans la recherche sur les cellules souches adultes qui vont au-delà de cela également; en voici quelques-uns.

    Des chercheurs ont trouvé la preuve que des cellules souches circulant dans le sang pourraient produire de nouveaux tissus dans le foie, l'intestin et sur la peau. Les cellules souches adultes sont donc plus versatiles que ce qu'on pensait au départ.

    Des chercheurs de l'institut des cellules souches de l'Université du Minnesota ont montré que les cellules souches d'une moelle épinière peuvent être transformées en vaisseaux sanguins. Les chercheurs ont déclaré que cela montrait que ces cellules souches adultes pouvaient être une source idéale de cellules pour des thérapies cliniques.

    Des chercheurs du centre médical de l'Université Duke ont transformé des cellules souches provenant du gras du genou en des cellules de cartilage, d'os et de gras. Les chercheurs ont déclaré que plusieurs problèmes cliniques pourraient être résolus grâce à l'utilisation des cellules adultes provenant de diverses parties du corps, sans qu'on fasse face aux mêmes préoccupations éthiques reliées aux cellules souches embryonnaires.

    Le rapport minoritaire de l'opposition officielle réclamait qu'on interdise pendant trois ans l'expérimentation sur les embryons humains afin de laisser le temps de bien explorer l'utilisation des cellules souches adultes. Il recommandait «que le gouvernement encourage fortement ses organismes subventionnaires et le milieu scientifique à mettre l’accent sur la recherche sur les cellules souches adultes (postnatales». Une interdiction de trois ans coïnciderait d'ailleurs très bien avec l'examen après trois ans déjà prévu dans le projet de loi.

    L'idée d'imposer un moratoire de trois ans est parfaitement justifiée. Je sais que des députés libéraux sont d'accord. Le député de Mississauga-Sud a distribué à tous les députés un document sur l'idée d'imposer un moratoire de trois ans sur la recherche sur les cellules souches embryonnaires.

  +-(1530)  

    C'est éminemment sensé, car, tout bien réfléchi, la science est transnationale. Elle traverse les frontières. L'important, ce n'est pas où sont effectuées les découvertes, mais le fait qu'elles le soient. Ce n'est pas parce que d'autres pays ont libéralisé davantage leur capacité d'expérimenter en matière de recherche sur les cellules souches embryonnaires que le Canada doit se précipiter à l'avant-garde. À mon avis, et de l'avis de la majorité de mes collègues au sein de l'Alliance canadienne, au lieu de nous précipiter dans la recherche scientifique et espérer respecter l'éthique et la vie, nous devrions nous précipiter dans le respect de l'éthique et de la vie humaine et espérer faire de bonnes découvertes scientifiques. Voilà le bon équilibre que la plupart des Canadiens souhaiteraient vraiment, si on leur demandait leur opinion.

    Un des aspects du projet de loi dont nous nous réjouissons, c'est l'interdiction de la commercialisation de la maternité de substitution. Bien qu'il soit raisonnable de rembourser les dépenses réellement encourues par les mères porteuses, la commercialisation de ce type de maternité pourrait se produire simplement en gonflant les dépenses qui y sont reliées. Le paragraphe 12(2) devrait veiller à ce que cela ne se produise pas en précisant «et s'il ne s'agit pas de dépenses raisonnables, nécessaires et liées directement aux fins décrites ci-dessus».

    Nous appuyons entièrement l'interdiction visant le clonage humain et thérapeutique, les chimères, les hybrides animal-humain, le choix du sexe, la modification de la lignée germinale, l'achat et la vente d'embryons et la rétribution des mères porteuses. Ce sont autant de pas dans la bonne direction.

    Comme il ne me reste pas beaucoup de temps, je voudrais parler de l'agence comme j'ai dit que je le ferais. À l'article 21 du projet de loi, on lit que l'agence a pour mandat de «protéger et promouvoir la dignité humaine et les droits de la personne au Canada». Si cela ne se reflète pas dans le préambule du projet de loi, la contradiction peut être résolue par l'inclusion de la déclaration qui suit dans le préambule. La proposition que nous allons présenter est tirée presque mot pour mot du rapport majoritaire du Comité de la santé. La voici:

Par les présentes, nous reconnaissons et déclarons: que l’assistance à la procréation et la recherche connexe doivent être régies par des principes et des pratiques qui respectent la vie humaine, l'individualité, la dignité et l’intégrité de l’être humain.

    L'agence canadienne de contrôle de la procréation assistée ne relèvera pas du Parlement, mais seulement du ministre. Elle devrait être constituée en organisme indépendant pour des raisons évidentes. La principale, c'est qu'il incombe à la Chambre et, par conséquent, à l'ensemble de la population de prendre la décision lorsqu'il s'agit de la vie humaine, du moment où elle commence, de la façon dont elle est réglementée et contrôlée, car c'est une décision qui nous concerne tous. Telle est la fonction fondamentale du gouvernement. Ainsi qu'un de mes mentors l'a dit, gouverner, c'est poser des questions et y répondre : qu'est-ce que la nature humaine? Quels sont les liens entre la nature humaine et le pouvoir? En conséquence, comment le pouvoir peut-il naître des réalités de la nature humaine? C'est un cycle qui se poursuit sans cesse.

    La recherche sur les cellules souches adultes et les cellules souches embryonnaires se trouve au coeur même de ce cycle. C'est une question qui nécessite le plus large débat possible auquel le plus possible de gens devraient participer.

    L'article 25 du projet de loi autorise le ministre à donner à l'agence des instructions impératives en matière d'orientation. De plus, aux termes de ce même article, ces instructions demeurent secrètes. Si l'agence était un organisme indépendant responsable devant le Parlement, il serait plus difficile de lui donner des instructions de ce genre. L'article au complet doit être supprimé.

    Les membres du conseil d'administration devraient avoir un mandat fixe de trois ans, renouvelable deux fois, afin que le ministre ne puisse pas simplement se débarrasser d'administrateurs récalcitrants ou garder indéfiniment des administrateurs complaisants. C'est là une recommandation qui figure dans le rapport du comité. Le président de l'agence devrait être nommé pour un mandat de cinq ans au lieu de trois ans, de telle sorte que ce mandat dépasse le cycle des élections. L'agence serait ainsi soumise à moins de pressions politiques.

    Le rendement de l'agence devrait être évalué par le vérificateur général plutôt que par l'agence elle-même et les résultats de la vérification devraient être rendus publics.

    Ce sont là des sujets de toute évidence soumis à une obligation redditionnelle. Si nous demandions à des enfants de six ans de se constituer en groupe pour construire une maison dans un arbre et de contribuer chacun 25¢ par semaine, ils sauraient sûrement mieux gérer le fonds que le gouvernement ne semble savoir gérer et réglementer la création et la destruction de la vie humaine.

    Le processus de délivrance des autorisations à des cliniques de fertilité devra être transparent et public.

    Le projet de loi n'impose aucune obligation de faire rapport au sujet des dossiers tenus par l'agence. La loi devrait exiger, à tout le moins, un rapport annuel au Parlement.

    Il ne faudrait pas oublier que les technologies de procréation sont un sujet de compétence provinciale en vertu de la Constitution. Si nous étudions et comprenons les articles 91 et 92 de la Constitution, comme tous les députés devraient le faire, nous reconnaîtrons qu'il s'agit d'une responsabilité provinciale. Le gouvernement fédéral doit exercer une surveillance pour assurer une uniformité entre les divers paliers de gouvernement, mais l'application comme telle des techniques de procréation relève des provinces.

  +-(1535)  

    La tentative du gouvernement de limiter l'apport des députés, du comité et des provinces n'est pas une façon de réduire les implications morales du projet de loi. Nous devons plutôt élargir le débat et faire en sorte que davantage de Canadiens puissent avoir le plus possible leur mot à dire dans la création et, éventuellement, la destruction de la vie humaine.

+-

    M. Rahim Jaffer (Edmonton--Strathcona, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi de prendre la parole aujourd'hui et de contribuer au débat. Les intérêts spéciaux et les préoccupations sectaires de nature religieuse et morale pourraient aisément faire dérailler le débat.

    En tant que parlementaires, nous avons le devoir et l'obligation de traiter le projet de loi d'un point de vue équilibré. Nous avons tous des idées très arrêtées sur l'avortement et autres questions fondamentales touchant la foi et la morale. À cet égard, je dois admettre que je suis impressionné par le degré de décorum et de respect avec lequel ont été traités tous les députés qui ont contribué au débat à la Chambre.

    Les députés ont tous parlé avec éloquence et du fond du coeur de leurs croyances et de leur expérience personnelle dans ce domaine.

    Il n'est pas inhabituel que les débats sur des questions controversées dégénèrent en chahut et en échanges irrespectueux. Je félicite mes collègues de la Chambre de s'être élevés au-dessus de la partisanerie et de respecter vraiment la réalité pluraliste du Canada. J'espère que le haut degré de décorum continuera pendant tout le cycle de vie du projet de loi C-56. Je crois que cet exercice peut servir à rapprocher les Canadiens en trouvant un terrain commun.

    Je tiens à préciser que le projet de loi C-56 concerne le statut d'un embryon indépendant à l'extérieur du corps de la femme et que, en tant que tel, il n'a rien à voir avec l'avortement ou la liberté de choix.

    Comme tous les députés, plusieurs facteurs influenceront ma décision. En tant que libertaire, je crois au droit fondamental de l'individu à être maître de son corps et de ses biens. En tant que musulman, je crois que la vie est sacrée. Sauver la vie est un devoir et supprimer une vie est un péché grave.

    La bioéthique islamique permet les dons d'organes et la fertilisation in vitro. Pour ce qui est des origines de la vie, la plupart des savants musulmans s'entendent pour dire que l'âme se joint au corps 120 jours après la conception. Mais plus important encore, je suis un parlementaire résolu à consulter mes électeurs et à voter en fonction de leur volonté. Je dois dire que je n'ai pas encore décidé comment je voterai sur ce projet de loi.

    Je me pose plusieurs questions sur des sujets qui ont été abordés au cours du débat. Pour répondre à ces préoccupations, je vais consulter mes électeurs et étudier le dossier en plus grand détail. J'espère que plusieurs de mes questions trouveront une réponse au cours du processus législatif que va suivre le projet de loi C-56, et plus probablement cet été.

    À premier abord, la question de la procréation assistée invoque des images orwéliennes de laboratoires stériles où les générations futures sont déterminées par manipulation génétique. Le projet de loi interdit le clonage, les hybrides homme-animal, la sélection du sexe et tout autre tabou popularisé par la science-fiction. En réalité, la PA donne aux gens qui ne peuvent pas avoir d'enfant la possibilité de réaliser leur rêve; c'est un service d'une valeur sociétale incommensurable pour les personnes concernées.

    Récemment, deux membres de mon personnel sont devenus parents. Je constate à quel point le fait d'avoir des enfants a enrichi leur vie et à quel point ils aiment leur rôle de parents. Les parlementaires doivent faire tout leur possible pour que le plus grand nombre de Canadiens possible puissent réaliser leur rêve de devenir parents.

    La question est inévitable: jusqu'où peut-on aller pour atteindre cet objectif? Selon moi, le rapport du comité permanent sur la question était équilibré et reflétait fidèlement l'opinion de la majorité des Canadiens.

    Le projet de loi C-56 doit concilier l'éthique, les progrès scientifiques et les droits et libertés des Canadiens. Par-dessus tout, il doit incarner la responsabilité et la transparence.

    L'agence proposée dans le projet de loi a des comptes à rendre au Parlement uniquement par l'entremise du ministre, et nous savons tous à quel point les ministres rendent bien leurs comptes, depuis quelque temps. Je crois que l'agence doit être directement comptable au Parlement, de façon que les préoccupations des Canadiens au sujet de cette question délicate soient prises en considération à la Chambre.

    Mon collègue d'Esquimalt—Juan de Fuca s'intéresse vivement à la cause des dons d'organes, et il a fait à ce sujet un travail de sensibilisation considérable. Le don d'organes est une pratique largement acceptée et considérée comme honorable. De chaque décès peut jaillir une vie nouvelle pour plusieurs personnes, grâce au don d'organes vitaux. Nous estimons que c'est un drame, lorsque des tissus humains sains sont enterrés au lieu de servir à d'autres personnes, grâce aux greffes.

  +-(1540)  

    Les pratiques actuelles de reproduction in vitro impliquent la destruction des embryons surnuméraires. Au moment de la destruction des embryons, on se prive aussi de la possibilité de sauver des vies et de guérir des maladies. Je ne peux comprendre le raisonnement des personnes opposées à la recherche sur les cellules souches embryonnaires qui appuient la destruction des embryons mais non leur utilisation à des fins de recherche médicale.

    Comme dans la plupart des autres débats, les intéressés des deux parties défendent des intérêts sectoriels. Les partisans de la recherche médicale voudraient nous faire croire que les cellules souches embryonnaires serviront à guérir tous les maux dont sont affligés les hommes et les femmes. Les opposants à la recherche sur les cellules souches embryonnaires répliquent en adoptant une attitude qui correspond essentiellement à un rejet massif du tissu embryonnaire. Les faits se situent quelque part entre ces deux points de vue.

    À mon avis, la recherche sur les cellules souches embryonnaires devrait se poursuivre. L'évolution de cette recherche devrait être suivie par la Chambre et examinée tous les trois ans. Ce faisant, nous pourrions veiller à ce que le cadre législatif progresse au même rythme que la technologie et aussi garantir un financement approprié.

    Je ne suis pas un parent et je n'ai jamais cherché à fonder une famille. Toutefois, je veux disposer du plus grand nombre de choix et de solutions thérapeutiques disponibles lorsque j'atteindrai cette étape dans ma vie. J'accueille très favorablement la mesure législative dans la mesure où elle donne à un parent le choix de déterminer le sort réservé aux embryons inutilisés. Nous devons veiller à ce que les parents bénéficient de toutes les possibilités.

    Je suis un ardent défenseur des droits de la protection des renseignements personnels. Bon nombre se sont plaints du fait que la mesure législative ne prévoyait pas la divulgation de l'identité des donneurs. À mon avis, l'identité d'un donneur ne devrait pas être requise. Si une telle exigence est fixée, elle entraînera une réduction directe du nombre de donneurs.

    Même si l'agence conservait de l'information sur l'identité du donneur, les enfants conçus grâce à la PA n'auraient pas le droit de connaître l'identité de leurs parents sans que ces derniers consentent par écrit à ce qu'elle soit divulguée.

    Cela étant dit, j'estime que l'on devrait fournir de l'information en sus de l'identité du donneur, y compris les antécédents médicaux familiaux et les prédispositions à des maladies et à des malaises.

    Je m'interroge au sujet de l'interdiction des accords commerciaux avec des mères porteuses dans le projet de loi. La grossesse et l'accouchement ont des effets débilitants durables sur le corps d'une femme. Je ne vois pas le problème qu'il peut y avoir à fournir une indemnisation équitable en sus du paiement des dépenses réelles engagées par une mère porteuse. Au lieu d'adopter une interdiction, j'estime qu'il y aurait lieu d'élaborer des règlements et des lignes directrices claires portant sur la question de l'indemnisation. Ces règlements devraient être transmis automatiquement au Comité de la santé à des fins d'examen public et de transparence. Le ministre doit être obligé d'étudier les recommandations du comité permanent, et non en faire fi comme c'est la pratique actuelle.

    Comme la plupart des Canadiens, je suis fasciné par l'habilité à manipuler la vie. En même temps toutefois, je crains les conséquences que tout cela peut entraîner. Le Canada est un leader mondial dans le domaine de l'innovation. La puissance créatrice de nos concitoyens n'a pas de limite. À titre de parlementaires, nous devons nous demander si nous pouvons mais aussi si nous devrions agir.

    Ce projet de loi ne doit pas faire l'objet d'un traitement accéléré. Il doit être soumis à un examen minutieux et à un vote libre et pouvoir être modifié. Le débat peut constituer un sain exercice dans le cadre de la mise au point de la politique générale, mais pour ce faire, il doit être vraiment ouvert et transparent.

    Comme je l'ai souligné au début de mon discours, je n'ai pas encore décidé si j'appuierai le projet de loi ou non. Je consulterai mes électeurs et j'étudierai personnellement la question de plus près avant de prendre une telle décision.

    De même, il est très sain de constater que dans ce dossier, les parlementaires se réunissent pour exprimer leur avis, leurs croyances morales et leurs opinions sur la question au fur et à mesure que nous prenons connaissance des conséquences que cela risque d'entraîner. On ne nous posera pas de questions embarrassantes, pas plus qu'on nous critiquera ou qu'on fera preuve de discrimination à notre égard pour les opinions que nous aurons formulées. Toutefois, ces dernières auront d'importantes conséquences sur les technologies de l'avenir, sur la santé et sur les générations de demain.

    Il est évident que les parlementaires doivent s'unir. Nous devons être en mesure d'exprimer nos opinions ouvertement et honnêtement. Nous devons prendre des décisions en nous basant sur des principes scientifiques sûrs et sur ce en quoi nous croyons fondamentalement. Je suis heureux de constater que ce genre d'esprit peut exister à la Chambre lorsqu'on prend un engagement dans ce sens au nom de tous les députés. Cela ne se produit pas aussi souvent que nous le voudrions, mais c'est le cas dans le dossier actuel et j'en suis très heureux.

  +-(1545)  

+-

    Mme Cheryl Gallant (Renfrew--Nipissing--Pembroke, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureuse de participer au débat sur l'amendement au projet de loi C-56 qui propose que:

...la Chambre refuse de procéder à la deuxième lecture du projet de loi C-56, Loi concernant la procréation assistée, puisque le principe du projet de loi ne reconnaît pas la valeur de la recherche sur les cellules souches non embryonnaires, laquelle a énornmément progressé au cours de la dernière année.

    Au cours du week-end dernier, cette question a été mise en lumière par l'entremise de la Catholic Women's League of Canada du diocèse de Pembroke et de la région. Ce groupe a présenté la résolution suivante, qui interdit la recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines.

Le gouvernement du Canada proposera bientôt des dispositions législatives sur les techniques de procréation, y compris la recherche sur les cellules souches humaines, et

Attendu que les questions morales, éthiques et scientifiques impérieuses qui entourent la recherche sur les cellules souches embryonnaires nécessitent des lignes directrices claires pour éviter qu'on s'appuie sur le principe déshumanisant et commode selon lequel la fin justifie les moyens;

Attendu que l'on tue des embryons humains, de minuscules êtres humains, pour obtenir des cellules souches;

Attendu que le fait d'attenter à la vie humaine à n'importe quelle étape de son développement est foncièrement condamnable; et

Attendu que l'intérêt public ne saurait en aucun cas justifier le meurtre délibéré d'un être humain, notamment dans la mesure où la documentation scientifique montre que des cellules souches provenant de sources autres que d'embryons humains sont employées avec succès pour le traitement thérapeutique d'êtres humains;

Il est donc résolu que le conseil provincial ontarien de la Catholic Women's League of Canada, réuni à l'occasion de sa 55e assemblée annuelle, exhorte la ministre fédérale de la Santé à élaborer des dispositions législatives qui interdiraient, aux termes du Code criminel du Canada, la recherche sur les cellules souches d'embryon humain; et par conséquent

Il est résolu que cette proposition soit envoyée au conseil national de la Catholic Women's League of Canada pour qu'elle l'étudie à son assemblée annuelle de 2002.

Résolution présentée par le conseil de la CWL de la paroisse Notre-Dame-de-Lourdes.

    Les membres du conseil régional du diocèse sont: Margaret Maloney, présidente; Andria Dumouchel, vice-présidente; Inie Schlievert, secrétaire; Silvia Smith, trésorière; Irene Perrault, présidente sortante; et Donna Shaddock, responsable des résolutions. Elles présenteront cette proposition qui se rendra peut-être au niveau fédéral. Cependant, si le projet de loi est adopté, les Canadiens n'auront pas eu la chance de se prononcer sur cette question.

    À l'instar de Wesley Smith et de la Catholic Women's League, je tiens à faire valoir que les médias font habituellement tout un plat des percées de la recherche sur les cellules souches embryonnaires. Lorsque des progrès encore plus grands sont accomplis dans la recherche sur les cellules souches adultes, toutefois, les médias se montrent en général moins enthousiastes et presque blasés.

    Il s'ensuit que beaucoup de Canadiens continuent de croire que les cellules souches embryonnaires offrent le meilleur espoir de mettre au point de nouveaux traitements médicaux au moyen de cellules humaines. C'est ce qu'on appelle la médecine régénérative. En réalité, les cellules souches adultes et d'autres cellules souches offrent de bien meilleures perspectives.

    Cette mauvaise perception a de réelles conséquences sociétales, fausse le débat politique sur le clonage humain et la recherche sur les cellules souches embryonnaires et influe peut-être sur les niveaux de financement public et privé que reçoit la recherche de thérapies au moyen de cellules souches adultes.

    Par exemple, cette attitude des médias a été encore très évidente dans l'annonce de deux percées très importantes de la recherche au cours des deux dernières semaines. Si l'on n'y avait pas fait attention, elles seraient presque passées inaperçues.

    Des personnes atteintes de la maladie de Parkinson et de la sclérose en plaques ont grandement bénéficié de protocoles expérimentaux de médecine régénérative au moyen de cellules souches adultes. Ce sont là des avantages que les partisans des traitements fondés sur les cellules souches embryonnaires n'ont pas encore produits, pas même grâce à leur expériences sur des animaux. Et pourtant, les cellules souches adultes commencent à vraiment alléger les souffrances d'êtres humains.

    Des célébrités comme Michael J. Fox et Michael Kingsley font vraiment la promotion de la recherche sur les cellules souches embryonnaires dans le Washington Post et à l'émission Crossfire. Et pourtant, ces grandes percées sont presque complètement négligées par la presse américaine et dans une moindre mesure par la presse canadienne.

  +-(1550)  

    Au cas où certains députés auraient raté cette histoire, je vais la répéter. On avait diagnostiqué dès l'âge de 49 ans la maladie de Parkinson chez un homme qui était alors au milieu de la cinquantaine. La maladie avait progressé rapidement, provoquant des tremblements et de la rigidité, surtout dans le bras droit du patient. La pharmacothérapie habituelle n'avait rien donné. On a donc recueilli des cellules souches du cerveau du patient par une procédure habituelle de biopsie du cerveau. Ces cellules furent mises en culture et produisirent des millions de cellules. Environ 20 p. 100 de ces cellules sont devenues des neurones à dopamine. Les gens atteints de la maladie de Parkinson ont une carence de dopamine neurotransmettrice. En mars 1999, ces cellules furent injectées dans le cerveau du patient.

    Trois mois après cette procédure, les habiletés motrices du patient s'étaient améliorées de 37 p. 100, et la production de dopamine avait augmenté de 55,6 p. 100. Un an après la procédure, l'échelle d'évaluation globale unifiée de la maladie de Parkinson chez le patient s'était améliorée de 83 p. 100. Cela, à une période où il ne suivait aucun autre traitement pour la maladie de Parkinson. Voilà un cas de réussite étonnant et remarquable. On aurait pensé que cette histoire aurait donné lieu à des manchettes éclatantes dans le pays et dans le monde entier. Si l'on avait obtenu le même traitement au moyen de cellules souches embryonnaires, nous aurions sûrement vu de ces manchettes.

    Malheureusement, le reportage à propos de ce cas de réussite du traitement de la maladie de Parkinson a été bizarrement atténué. Il est vrai que le Washington Post a publié un article à ce sujet en pages intérieures et que cette histoire a fait l'objet de quelques dépêches de journaux, mais, tout compte fait, personne n'en a jamais vraiment entendu parler.

    Les victimes de sclérose en plaques ont également bénéficié de la médecine regénérative ayant recours aux cellules souches adultes. La sclérose en plaques est une maladie autoimmune dans laquelle le corps du patient attaque l'enveloppe protectrice des neurones.

    Le Washington Medical Center de Seattle a réalisé une étude auprès de 26 personnes atteintes de sclérose en plaques dont l'état de santé se détériorait rapidement. En premier lieu, les médecins ont stimulé les cellules souches de la moelle épinière des patients pour qu'elles s'infiltrent dans le système sanguin. Ils ont ensuite recueilli des cellules souches et ont administré aux patients des traitements de chimiothérapie à fortes doses pour détruire leur système immunitaire.

    Enfin, les chercheurs ont réintroduit les cellules souches chez les patients dans l'espoir que leur corps crée un nouveau système immunitaire sain et ne présente plus de symptômes de sclérose en plaques. L'expérience a réussi; 20 des 26 patients ont vu leur état se stabiliser et les six autres l'ont vu s'améliorer. Trois patients ont été victimes d'infections graves et un est décédé.

    Cette expérience constitue une avancée porteuse de très grands espoirs, mais au lieu de faire la manchette, elle a été oubliée. Elle a suscité moins d'intérêt que des recherches réussies sur les cellules souches embryonnaires menées sur des animaux. Le Los Angeles Times et le New York Times ont publié des articles sur le sujet, mais il ne s'agissait que de brefs comptes rendus.

    Entre-temps, au Canada, de plus jeunes victimes de la sclérose en plaques, dont l'état n'était pas aussi détérioré que celui des patients ayant participé à l'expérience menée à Washington, ont encore mieux réagi au même traitement. Six mois après le traitement, les examens IRM d'une première patiente ne montraient aucune trace de la maladie. Trois autres patients ont reçu avec succès des greffes de cellules souches adultes et ne présentent aucune manifestation active de la maladie.

    Les recherches sur la maladie de Parkinson et sur la sclérose en plaques donnent des preuves phénoménales des effets potentiels remarquables de la recherche sur les cellules souches adultes et de la médecine regénérative.

    Il vaut la peine de souligner et de rappeler que la recherche sur les cellules souches adultes offre des traitements. Il n'est pas nécessaire de créer la vie pour simplement la détruire.

  +-(1555)  

+-

    M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de formuler quelques commentaires sur ce projet de loi et sur les questions dont la Chambre est saisie.

    Cette question va au-delà de la science, de la technologie médicale ou de ce que nos scientifiques ou nos médecins peuvent faire. Les possibilités ouvertes par la science semblent indéfinies; elles se multiplient chaque semaine, chaque mois et chaque année

    Pourtant, bien qu'elle s'approfondisse au même rythme, non pas au plan de la science médicale mais au plan de l'éthique et de la morale, notre compréhension de ces questions ne semble pas susciter autant d'attention.

    J'ai relevé la décision du juge Duncan Shaw dans l'affaire Sharpe portant sur la pornographie juvénile. En examinant les questions dont il était saisi ainsi que le matériel qui dépeignait l'exploitation brutale d'enfants par des adultes, le juge a indiqué que les écrits de M. Sharpe, même s'ils ne faisaient pas la promotion de ce type de violence, glorifiaient les actes en question.

    J'ai beaucoup de difficulté à comprendre la différence entre promotion et glorification en ce qui concerne ces actes, mais le reste du jugement est tout aussi renversant. Le juge a en effet déclaré qu'en examinant les écrits et la défense invoquant la valeur artistique, il avait dû examiner la question sans égard à la morale. J'ai trouvé étonnant qu'un savant juge d'une cour supérieure canadienne fasse une telle déclaration, à savoir que nous devions examiner l'exploitation des enfants sans égard à la morale.

    Comment peut-on examiner ainsi une loi alors que la société désapprouve au plan moral et éthique l'exploitation des enfants par les adultes? Comment examiner cette question autrement qu'en faisant intervenir des valeurs morales? En décidant que la loi devait être examinée sous l'angle d'un vide moral, le juge n'avait d'autre choix que celui d'acquitter M. Sharpe. Il n'y a là rien de surprenant.

    Toutes nos lois sont assorties de valeurs morales. Je ne parle pas au sens religieux étroit ou partisan du terme, je parle au sens large. Toutes nos lois reflètent notre compréhension morale de diverses questions. La différence entre l'autorisation de tuer un animal pour sa survie ou pour d'autres motifs et l'interdiction de tuer un être humain n'est pas tant une décision rationnelle qu'une distinction morale.

  +-(1600)  

    Nos lois qui interdisent le meurtre montrent bien que nous désapprouvons moralement que l'on tue notre prochain. Nos lois qui interdisent le vol indiquent que, pour notre société, il est moralement répréhensible de faire main basse sur le bien d'autrui. Les valeurs morales sont sous-jacentes à toutes nos lois.

    Sans connaître la philosophie du système juridique, il nous aurait été impossible de justifier l'adoption de lois comme celles interdisant la pornographie juvénile ou la prostitution. Ces lois, entre autres, nous disent qu'il est moralement répréhensible d'exploiter sexuellement son prochain.

    En ce qui concerne le projet de loi qui nous occupe aujourd'hui, nous sommes conscients des progrès scientifiques et de l'ampleur de la recherche médicale en cours et pourtant, en tant que société, nous n'en sommes toujours pas arrivés à un consensus éthique ou moral sur cette question fort troublante.

    Ce qui me chiffonne, c'est que le ministre cherche à esquiver la question du consensus moral qui justifie ce projet de loi sur la procréation assistée, sur la recherche sur les cellules souches. Le gouvernement s'emploie habilement à court-circuiter la question. D'une façon qui leur est typiquement propre, que font les libéraux? Ils s'en remettent à un organisme, une agence en fait, pour trancher ces questions.

    Il n'appartient pas à une agence gouvernementale de se prononcer sur ce genre de question, mais bien à la Chambre, dans le cadre de débats, d'entretiens, de consultations, d'audiences et surtout de consultations auprès des Canadiens dont le point de vue doit être pris en compte dans le projet de loi.

    Nous voulons, avec ce projet de loi, faire davantage que simplement améliorer la santé de l'homme. Je n'accuse personne d'avoir prétendu que le législateur aurait eu des motifs cachés ou malencontreux avec ce projet de loi. Ce n'est pas du tout ce que je veux dire. Je dis simplement que les Canadiens et les parlementaires ne sont pas en mesure d'aller de l'avant pour ce qui concerne certaines de ces questions des plus délicates. La science médicale ou les capacités de recherche ne sont pas remises en cause. C'est simplement que les Canadiens ne se sont pas encore penchés sur les valeurs morales qui sous-tendent ce projet de loi.

    L'utilisation des embryons humains pour la recherche est très perturbante. Nous ne savons pas ce qu'en pensent les Canadiens. Je serais partisan d'un moratoire sur la recherche effectuée sur des cellules souches et nécessitant la destruction d'embryons humains.

  +-(1605)  

    Je termine en invitant les députés à réfléchir sur ces dernières paroles: montrons-nous très prudents avant de nous engager dans cette voie.

+-

    M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir pour la deuxième fois dans le débat à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-56. Dans mes observations initiales sur le projet de loi, j'ai décrit longuement mes objections à l'égard des mesures prises ou plutôt non prises dans le projet de loi pour protéger les embryons contre la manipulation et la destruction dans le cadre de la recherche.

    À l'instar de beaucoup de mes collègues, j'ai proposé que le gouvernement prenne note du potentiel énorme qu'offrent les expériences sur les cellules souches adultes et la recherche sur ces dernières dans le domaine de la science médicale. Lorsque je parle de cellules souches adultes, je veux dire fondamentalement des cellules souches non embryonnaires et non foetales. Même les cellules souches prélevées sur les cordons ombilicaux des nouveau-nés offrent les énormes possibilités de réaliser des progrès scientifiques qui semblent tant intéresser les partisans de la recherche sur les cellules souches embryonnaires.

    Je voudrais là encore souscrire au principe que le Comité permanent de la santé a établi dans son rapport, à savoir que des cellules souches ne devraient être prélevées sur des embryons vivants que s'il n'y a manifestement aucune autre solution. Cette norme élevée établie par le comité multipartite ne se retrouve pas dans le projet de loi dont la Chambre est saisie aujourd'hui.

    En fait, cette mesure législative ne prend aucune position à cet égard. Au lieu de cela, on laisse toute cette question entre les mains d'une agence indépendante, qui sera vraisemblablement composée en partie de chercheurs scientifiques qui, en toute franchise, ont un intérêt professionnel et personnel à acquérir et manipuler des cellules souches embryonnaires et dont la principale préoccupation, lorsqu'ils abordent cette question extrêmement sensible, n'est pas nécessairement la considération morale de l'inviolabilité de la vie humaine, mais plutôt le cadre éthique utilitaire qui régit la volonté de tant de scientifiques d'utiliser la vie à des fins de recherche.

    Dans mes premières observations, j'ai laissé entendre également que le gouvernement devrait au moins proposer un moratoire de trois ans sur la recherche sur les cellules souches embryonnaires pour donner à la communauté scientifique plus de temps pour démontrer les énormes avantages présentés par la recherche sur les cellules souches non embryonnaires.

    En fait, j'irais un peu plus loin et dirais que si l'objectif du gouvernement, comme il le prétend dans le projet de loi, est notamment de faire avancer ce type de recherche, il devra accroître le financement pour cette recherche et faire du développement de la recherche sur les cellules souches non embryonnaires une priorité afin que dans trois ans d'ici, nous puissions, en tant que Parlement, réexaminer la question de savoir si en fait les embryons doivent être créés, recueillis, manipulés et détruits pour, prétendument, faire avancer la science médiale.

    Lors de ce discours, j'ai aussi répondu au point soulevé par la ministre de la Santé lorsqu'elle avait défendu le projet de loi qu'elle présentait; elle avait alors déclaré que si les embryons créés et congelés aux fins de la fécondation in vitro n'étaient pas utilisés pour la recherche ou implantés dans l'utérus de leur mère à un moment donné, ils étaient jetés «à la poubelle». Elle avait laissé entendre, à tort je crois, que les seuls choix étaient la recherche ou la destruction arbitraire de ces vies humaines naissantes.

    La ministre et ses conseillers avaient oublié une troisième possibilité je crois, celle qui nous permettrait de choisir et de promouvoir le nouveau domaine émergeant de l'adoption d'embryons. Cela semble un peu absurde à première vue, mais ça ne l'est pas.

  +-(1610)  

    Je vous donnerai seulement trois raisons. La principale objection pratique serait que ces embryons sont tout simplement jetés à la poubelle, comme la ministre l'a déclaré. Trois arguments s'opposent à cela.

    Premièrement, s'il existe un nombre assez notable d'embryons en surplus dans les cliniques de fécondation in vitro, la véritable question n'est pas de savoir ce qu'on doit faire avec ces embryons, mais bien de savoir pourquoi ils sont créés en si grand nombre. En vertu de cette mesure législative, les cliniques de fécondation in vitro seraient au moins tenues de produire le nombre minimum d'embryons requis pour réussir une conception. Il faudrait promouvoir vigoureusement les recherches permettant aux cliniques de fécondation in vitro de réduire le nombre d'embryons qu'elles doivent créer pour réussir une implantation. L'agence devrait punir les cliniques qui semblent produire un trop grand nombre d'embryons. C'est un point entièrement légitime car bien des chercheurs ont fourni des preuves au Comité permanent de la santé démontrant que les cliniques de fécondation in vitro produisent bien plus d'embryons que nécessaire pour l'implantation. Cela soulève de graves inquiétudes morales.

    Idéalement, chaque embryon créé par fécondation in vitro devrait pouvoir être implanté avec succès dans l'utérus. Ce devrait être le but recherché par la recherche sur la fécondation in vitro, et sans doute qu'un jour la technologie sera tellement avancée qu'on parviendra à ce résultat. Il n'y aura plus à ce moment-là d'embryons de rechange. La ministre pense-t-elle que les sociétés de biotechnologie et les laboratoires de recherche décideront soudainement à ce moment-là qu'ils n'auront plus besoin ou ne voudront plus de cellules souches embryonnaires? Non, ils voudront encore que l'on crée des embryons, mais seulement à des fins de recherche. Les scientifiques trouvent déjà le projet de loi trop restrictif et ils pensent que si on veut vraiment que les recherches soient fructueuses, il faudra aussi recourir au clonage thérapeutique.

    Par conséquent, la position de la ministre suivant laquelle ne sont utilisés que les embryons excédentaires, qui seraient détruits autrement, constitue une habile diversion. D'une part, l'amélioration de la technologie réduira ou éliminera éventuellement l'approvisionnement en embryons excédentaires produits par fécondation in vitro. D'autre part, le gouvernement crée une demande de cellules souches embryonnaires dans les milieux de la recherche ainsi qu'au sein de l'industrie de la biotechnologie. Si on coupe leur approvisionnement en embryons produits par fécondation in vitro, ces derniers reviendront prier le gouvernement dans quelques années pour qu'il permette la création ou le clonage de nouveaux embryons uniquement à des fins de recherche.

    Deuxièmement, je dirais qu'il n'est pas indigne, au plan moral, de laisser mourir des embryons non implantés. Il est beaucoup plus digne de laisser mourir naturellement des êtres humains incapables de vivre sans soutien artificiel que de les détruire en les dépouillant de certaines parties de leur corps. Dans le cas des mourants qui veulent faire don de leurs organes, l'éthique médicale exige que l'on attende qu'ils soient en état de mort cérébrale, et donc tout à fait inconscients, avant de prélever leurs organes. Et même là, on dispose du reste du corps avec beaucoup de soin et de dignité. Un embryon n'est pas un corps mort, mais un être humain vivant. Ce ne peut être que cela: un être vivant apparenté à l'homme. Il est beaucoup plus digne de laisser mourir un embryon hors de l'utérus qui ne peut survivre par ses propres moyens, que de s'en servir pour des recherches. Je suggère que l'on trouve une autre méthode pour disposer de ces embryons humains que ce que la ministre a si éloquemment décrit comme une mise au rebut. Une mort naturelle est une mort naturelle à quelque stade que ce soit de la vie humaine.

    En troisième lieu, il y a une autre solution de rechange au fait de laisser un embryon mourir ou de l'utiliser pour la recherche, et j'en ai déjà parlé. Il s'agit du don d'embryons, qui recueille de plus en plus d'appuis. L'objectif global du gouvernement, dans ce projet de loi, consiste à donner de l'espoir aux couples infertiles et à les aider. Si tel est réellement l'objectif du gouvernement, plutôt que de faire la promotion de l'utilisation d'embryons excédentaires obtenus par fécondation in vitro, le gouvernement devrait inciter les couples ayant réussi à concevoir des embryons par fécondation in vitro à en faire don aux couples infertiles dans la même situation.

    L'été dernier, quand le Sénat américain a été aux prises avec la même question dont nous sommes maintenant saisis, un des sénateurs favorables à la recherche sur les cellules souches embryonnaires a fait valoir que la destruction d'un embryon n'équivalait pas à mettre fin à une vie. Il a brandi une feuille de papier sur laquelle il avait dessiné un tout petit point, disant qu'un embryon n'était plus gros que cela. Cependant, ce jour-là, est venu témoigner devant le comité un couple avec un bébé bien vivant né à l'aide du processus d'adoption d'un embryon. De nombreuses centaines d'enfants sont nés grâce au don d'un embryon par un couple fertile à un couple complètement infertile.

  +-(1615)  

    En terminant, je demande au gouvernement de ne pas ouvrir la porte à une éthique relativiste, utilitaire justifiant la création de la vie afin de permettre sa manipulation et sa destruction quand il existe d'autres options de don de la vie plus nobles, comme l'adoption d'embryons.

[Français]

+-

    M. Paul Crête (Kamouraska--Rivière-du-Loup--Témiscouata--Les Basques, BQ): Monsieur le Président, je vous remercie de me donner la parole sur ce projet de loi, qui fait appel à des valeurs très personnelles et à des questions morales sur lesquelles il est important que chacun des députés de la Chambre des communes puisse se pencher à titre personnel pour prendre une position qui, en bout de ligne, ne sera pas nécessairement une position de parti, mais qui risque d'être une position personnelle faisant appel à l'ensemble des valeurs que nous avons héritées de notre éducation et que nous avons développées au cours de notre vie.

    Sur quoi porte le projet de loi sur la procréation assistée? Il porte sur l'utilisation des cellules souches embryonnaires. Comme on le sait, c'est un secteur de la recherche médicale qui est à saveur hautement polémique.

    Que sont les cellules souches? Ce sont des cellules qui ne sont pas parvenues à maturité et qui ont la capacité soit de se spécialiser pour former divers tissus ou organes humains, soit de se renouveler. Selon les Instituts de recherche en santé du Canada, elles offrent un potentiel énorme pour aider à mieux comprendre le développement humain et traiter des maladies dégénératives, comme la maladie de Parkinson, la maladie d'Alzheimer et la sclérose en plaques.

    On dit que les cellules souches utilisées par la recherche peuvent provenir de trois sources principales: les embryons à un stade très précoce, les organes reproductifs foetaux, qui contiennent également des cellules souches offrant plusieurs potentiels, et les tissus adultes, comme la peau et les muscles, qui sont des cellules souches offrant des possibilités limitées.

    Lorsqu'on aborde cette question, il y a des pour et des contre. Ce n'est pas une question qu'il est nécessairement facile de régler. Toutefois, il est évident que l'absence de législation dans ce domaine fait qu'il y a des possibilités d'excès. On ne peut pas se fermer les yeux et décider de ne pas légiférer en la matière. En ce sens, il est pertinent que l'on ait un projet de loi ici.

    D'ailleurs, le Bloc a fait avancer ce dossier de façon important ces dernières années, particulièrement par le biais de la députée de Drummond, qui a déjà déposé un projet de loi qui a été étudié, mais qui est mort au Feuilleton avant une élection.

    Ensuite, on a décidé de ne pas présenter de nouveau le projet de loi parce que le gouvernement, à ce moment-là, s'était engagé à présenter un projet de loi. Cela a pris beaucoup de temps. On l'a devant nous aujourd'hui et on a à l'évaluer.

    Quant à moi, le vote à l'étape de la deuxième lecture sera un vote qui dira davantage si oui ou non on veut qu'il y ait une législation dans ce domaine. Le détail et la position méritent d'être étudiés encore plus en profondeur. J'ai l'intention de tenir, dans ma circonscription, une table ronde qui me permettra d'obtenir l'avis d'experts, mais aussi l'avis de citoyens et de citoyennes sur cette réalité.

    Parce qu'à certains égards—et on le relève dans les arguments en faveur—, comme argument historique, on dit que dans les années 1970 la recherche sur l'ADN était fortement décriée. Cependant, à la suite de l'établissement de lignes directrices gouvernementales, cela a permis non seulement d'avoir un bon encadrement, mais de mettre au point de l'insuline humaine pour les personnes diabétiques.

    Il y a donc des aspects comme ceux-là sur lesquels il faut se pencher pour voir si, effectivement, on n'aura pas une situation plus avantageuse qui permettra de guérir les maladies, de corriger des situations et d'améliorer le sort des humains en général. En contrepartie, il ne faudra pas que cela se fasse sans condition et sans un encadrement très spécifique.

    Dans les arguments en faveur, plusieurs affirment que la recherche sur les cellules souches embryonnaires offre un très grand potentiel sur le plan de la médecine curative. Comme argument humanitaire, la Fondation de la recherche sur le diabète juvénile note que la recherche est indispensable au mieux-être des personnes atteintes.

    Plusieurs experts soulignent que des centaines d'embryons congelés fondent dans les cliniques de fertilité du Canada parce qu'ils sont devenus inutiles, alors que leur utilisation pourrait aider à trouver des traitements pour des maladies comme le cancer, le diabète et la maladie de Parkinson.

    En donnant cet exemple, on voit comment la situation n'est ni noire ni blanche. C'est une situation grise, qui mérite un certain encadrement pour éviter les excès qu'on peut rencontrer de ce côté.

    Il y a un autre argument en faveur. Il s'agit du fait que certains groupes féministes et certains juristes avancent que dans notre régime juridique actuel, depuis 1988, la Cour suprême a obligé à reconnaître que non seulement le foetus n'est pas un être humain—ce que le droit civil reconnaît aussi—, mais qu'il ne saurait être considéré viable avant la 20e semaine.

    Donc, si le foetus n'est pas un être humain, les tissus qui en sont issus ne sont pas davantage des tissus provenant d'êtres humains. On voit comment on touche à des choses très fondamentales et à des valeurs de base que chacun peut avoir.

    Il y a des arguments contre. Cette recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines suscite la controverse, surtout parce qu'on a à détruire l'embryon utilisé. C'est une réalité avec laquelle il faut composer.

  +-(1620)  

    Selon l'Église catholique, la création d'embryons à des fins de recherche et l'utilisation de cellules souches embryonnaires sont contraires à la volonté de Dieu pour qui la procréation doit toujours être un acte conjugal. Je pense que cette position ne reflète peut-être pas la perception générale de la population, mais elle nous interpelle fortement sur des questions fondamentales, notamment sur la question de la croyance en Dieu qui peut avoir des conséquences. Des gens de cette Chambre peuvent avoir des croyances différentes. En conséquence, cela justifie d'autant plus un vote libre. Dans ces circonstances, je crois que la Loi sur la procréation assistée, que l'on a mis du temps à présenter, mérite d'être étudiée.

    Dans le but d'assurer la sécurité et la santé des gens qui font appel à la procréation assistée, ce projet de loi stipule que les personnes qui songent à faire un don d'ovule ou d'embryon pour des activités de procréation assistée ou à des fins de recherche doivent donner leur consentement éclairé par écrit avant tout traitement. Effectivement, on évite une certaine forme de charlatanisme si on autorise ces choses-là.

    Les enfants nés grâce à du matériel reproductif donné auront accès aux renseignements médicaux sur les donneurs, mais ils n'auront pas nécessairement accès à son identité, le donneur étant libre d'autoriser la divulgation ou non de son identité. Beaucoup de questions devront être étudiées en comité. Le comité devra recevoir des experts et voir si, effectivement, la loi va suffisamment loin. Je pense qu'il faut vraiment prendre le temps d'étudier cette loi, de recevoir des avis et de voir ce que les citoyens et les citoyennes du Québec et du Canada souhaitent à ce sujet.

    La loi propose aussi d'interdire des pratiques inacceptables, telles que la création d'un clone humain, pour quelque raison que ce soit, c'est-à-dire à des fins de reproduction ou à des fins thérapeutiques. La loi interdit aussi de créer un embryon à des fins autres que la création d'un être humain ou l'amélioration des techniques de procréation assistée, la création de combinaisons humano-humaines à des fins de reproduction ou le fait de donner un incitatif financier à une femme pour être une mère porteuse. Cette situation existe dans notre société. On veut que ce soit bien encadré et il est donc pertinent que le débat se fasse.

    Il y a aussi un aspect très important de réglementation des activités de procréation assistée. Dans ce domaine, quant à moi, il serait très important qu'on ait très rapidement la réglementation devant en découler et les lignes directrices de cette réglementation pour ce qui est des aspects les plus litigieux de façon que l'on sache vraiment ce qui va exister dans la réglementation.

    Comme c'est une loi très délicate qui aura des conséquences à long terme, qui va sûrement poser les jalons d'une politique qui sera en vigueur pour plusieurs années, il est important de ne pas arriver avec une réglementation venant contredire la volonté du législateur. Il est donc important que l'on se penche sérieusement sur cette question et que, autant que possible, on soit capables d'avoir la réglementation préalable.

    Dans le projet de loi proposé, on retrouve les principales recommandations du Comité permanent de la santé, formulées en décembre 2001, que le Bloc québécois a cautionnées. On en a déjà parlé, ces recommandations se retrouvent en gros dans le projet de loi.

    Toutefois, il y a aussi des lacunes et des faiblesses dans le projet de loi C-56. Par exemple, on dit que Santé Canada consultera les provinces quant à la réglementation instaurée en matière de recherches connexes et d'activités de procréation assistée. Il faudra s'assurer que cette promesse sera respectée. Il faut trouver le moyen de donner des dents au projet de loi pour que cette mesure soit garantie.

    Il est primordial que la politique canadienne en cette matière soit faite en coordination avec les provinces et qu'il y ait une reconnaissance non ambiguë qu'il s'agit d'un domaine de juridiction partagée.

    Je voudrais dire que c'est un projet de loi qui touche des questions fondamentales. Je pense que chacun des députés de cette Chambre devrait être appelé à voter selon sa conscience, par un vote libre. Cela n'empêche pas les discussions en caucus, cela n'empêche pas les discours à la Chambre, mais il faut qu'en bout de ligne on puisse avoir un projet de loi dont la Chambre des communes serait fière et qui refléterait la vision de notre société sur un sujet aussi controversé.

    En terminant, j'invite tous mes collègues à se pencher avec intérêt sur ce projet de loi et à participer aux différents débats qui auront lieu. Moi-même, j'ai l'intention d'organiser la tenue d'une table ronde sur ce sujet dans mon comté.

  +-(1625)  

[Traduction]

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): En conformité de l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir, à savoir: le député de Saskatoon--Humboldt, Les marchés publics; le député d'Edmonton-Sud-Ouest, Les campagnes à la direction; le député de Yorkton--Melville, L'enregistrement des armes à feu.

+-

    M. Jim Abbott (Kootenay--Columbia, Alliance canadienne): Monsieur le Président, lorsqu'une personne entre dans la vie publique, elle doit posséder certaines convictions. Nous n'y venons pas comme une page blanche; nous sommes des personnes à part entière. Nous avons des croyances et des valeurs. Ce sont précisément ces valeurs que nos électeurs voient et qu'ils appuient ou rejettent au moment de voter. Mais surtout, lorsque nous entrons dans la vie publique, nous devons faire preuve de courage, et notamment avoir le courage de nous exprimer sur des questions que nous jugeons importantes.

    Depuis que j'ai l'honneur de représenter la population de Kootenay--Columbia, je crois n'avoir vu aucun projet de loi qui touche d'aussi près à notre valeur en tant que personnes et à celle des gens que nous représentons. Ce projet de loi rejoint les fondements mêmes de la vie humaine.

    Tout au long de ma carrière politique, j'ai été très impressionné par M. Preston Manning, et notamment par la clarté et le caractère incisif de sa pensée. On me permettra de citer ce qu'il disait lors de son dernier discours à la Chambre.

Au Canada, nous avons eu tendance, depuis longtemps, à éviter les questions morales et éthiques dans l'arène politique, craignant qu'elles ne nous divisent au lieu de nous unir ou qu'on ne pense, à tort, que nous cherchons à imposer nos valeurs propres aux autres. De la même façon, nous avons confiné à peu près complètement au domaine de la vie privée l'expression de la foi religieuse, parce que, tout simplement, nous ne savons pas comment l'aborder dans l'arène publique.

Le Parlement s'apprête à légiférer pour réglementer la révolution génétique, l'une des étapes les plus passionnantes et prometteuses de l'histoire de l'humanité. Cependant, comme la génétique porte sur les débuts de la vie humaine et sur sa transmission de génération en génération, il y a forcément de très graves questions morales et éthiques que le Parlement doit discuter ouvertement et sérieusement. J'estime pour ma part que c'est là une bonne chose, non une chose à craindre ou à éviter. C'est une occasion à saisir. Dans ces délibérations, je souhaite au Parlement transparence et honnêteté, sagesse et succès.

    Ce sont là les réflexions profondes d'un homme très sage.

    En parcourant les journaux et en lisant différents commentaires, j'essaie de comprendre le point de vue de mes électeurs. Comme député, il me semble très important de comprendre leur point de vue. Je les encourage à me parler. Lorsqu'ils me font part de leurs opinions bien mûries sur le sujet, je les écoute avec beaucoup d'attention et de respect. J'écoute aussi avec respect les autres députés, quel que soit leur parti. Voilà l'enjeu, en somme. Il s'agit du respect non seulement de nous-mêmes, mais aussi de nos valeurs et de nos convictions les plus chères.

    Au gré de mes lectures, je suis tombé sur un article qui a paru dans le Calgary Sun du 26 mai. L'article, intitulé «Nous ne devons pas tuer au nom de la science» est signé par l'évêque Fred Henry. Il y traite de ce qui me semble être le dilemme éthique le plus pressant, les recherches sur les cellules souches embryonnaires. Nous n'avons pas idée de l'orientation que les recherches prendront, notamment sur les cellules souches adultes. Permettez-moi de citer l'article:

Comment réglons-nous ce dilemme éthique? Fort simple. Nous interdisons les pratiques sur lesquelles il est facile de se prononcer, comme le clonage des humains, la création d'hybrides humain-animal, la sélection du sexe des bébés pour des raisons non médicales. Deuxièmement, nous créons un nouvel organisme, l'Agence canadienne de contrôle de la procréation assistée pour réglementer les utilisations scientifiques et médicales du matériel reproductif humain. Bien entendu, l'agence pourrait permettre les recherches sur des cellules souches d'embryons surnuméraires après les traitements pour infertilité, mais les scientifiques devraient montrer que le recours aux embryons est nécessaire aux recherches. Qui prendrait la décision? Les membres de l'agence seraient nommés par le gouvernement.

D'après la loi, cette nouvelle agence aurait aussi une autre tâche. Il serait illégal d'accorder un incitatif financier à une mère porteuse, mais on pourrait l'indemniser pour ses dépenses raisonnables (voilà qui nécessite quelques acrobaties mentales). Mais vous avez vu juste: la nouvelle agence établirait ce que sont les dépenses admissibles.

  +-(1630)  

    L'article ajoute:

[Les auteurs du projet de loi], obsédés par les possibilités technologiques, oublient que ce qui est conservé sous gel, ce sont des organismes humains complets. Ils renferment une série complète de chromosomes. Ce sont des êtres humains à un stade très précoce de développement. Être un être humain n'a rien à voir avec la taille ou l'emplacement dans le monde matériel.

    Voici l'élément central, et là-dessus je suis entièrement d'accord avec l'auteur:

Il ne s'agit pas d'une «éventuelle» vie humaine. C'est précisément ce à quoi ressemblent des êtres humains à ce moment-là de leur vie. Geler un embryon ne le tue pas, mais arrête simplement son développement.

    Nous devons être fermes et directs en discutant de ce dossier qui nous pose beaucoup de problèmes. L'article se poursuit de la façon suivante:

Les scientifiques reconnaissent depuis longtemps le principe voulant qu'aucun processus expérimental ou de recherche ne devrait être mené sur un sujet humain, s'il ne produit aucun avantage direct ou s'il expose le sujet à des risques excessifs.

Dans une expérience sur un embryon humain, non seulement il n'y a aucun avantage direct pour le sujet, mais l'embryon est éliminé. Cela ne peut se faire pour quelque raison que ce soit, même si cela permettait de faire des progrès qui en avantageront d'autres. Le bien public ne justifie jamais le meurtre délibéré d'un être humain. L'argument est particulièrement spécieux quand les mêmes résultats peuvent être obtenus par d'autres moyens, par exemple le recours à des cellules souches adultes ou de cellules souches dérivées de cordons ombilicaux ou de placentas. La recherche n'aurait alors aucune répercussions éthiques et elle a déjà donné des résultats prometteurs.

Aucun être humain, aucun embryon, ne devrait être utilisé comme moyen d'arriver à une fin; aucune être humain ne devrait être considéré comme  «excédentaire» ou «de rechange».

Il est toujours mal de détruire un être humain, même pour en aider un autre. Les moyens et l'objectif doivent être bons--il n'y a pas moyen terme.

On ne peut pas tuer au nom de la science.

    Sur ce point, je ne pourrais être plus catégorique. Un tout nouveau monde s'ouvre à nous en tant qu'êtres humains dans le domaine de la génétique et des techniques de reproduction. Les possibilités de faire le bien dans ce domaine sont absolument incroyables. Je crois avec toute la passion dont je suis capable que la recherche doit se faire sans tuer la vie humaine. Pour reprendre ce que cet auteur a dit, et je suis tout à fait d'accord avec lui, ces soi-disant embryons sont tout simplement une forme de vie humaine mis en état temporaire de mort apparente par la congélation.

    Le préambule du projet de loi inclut l'expression «la dignité et le respect de la vie humaine» qui se retrouve tant dans le rapport majoritaire que dans le rapport minoritaire du Comité permanent de la santé et dans l'article 22 du projet de loi décrivant la mission de l'Agence de contrôle de la procréation assistée. Sans ce préambule, sans l'expression «la dignité et le respect de la vie humaine», le Parlement passerait à côté de la question.

    Remarquez que je n'ai pas dit le gouvernement ou les libéraux. Je ne fais pas intervenir l'esprit de parti. Les 301 personnes qui forment cette assemblée et qui représentent le peuple canadien doivent résoudre cette question. Nous ne pouvons l'esquiver. Soit nous respectons la dignité de la vie humaine soit nous ne la respectons pas. Si nous ne réglons pas cette question, nous l'esquivons; nous sommes des poltrons et nous nous dérobons.

    L'envers de la médaille, je le répète, c'est que je représente les habitants de Kootenay—Columbia, et que je dois respecter pleinement les différents points de vue représentés ici. Je dois respecter pleinement et écouter avec intelligence et intégrité les interventions des habitants de ma circonscription. Ma position est nette: je respecte la dignité de la vie humaine.

  +-(1635)  

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

    Des voix: Le vote.

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Le vote porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

    Des voix: D'accord.

    Des voix: Non.

    Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.

    Des voix: Oui.

    Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

    Des voix: Non.

    Le président suppléant (M. Bélair): À mon avis, les non l'emportent.

    Des voix: Avec dissidence.

    Le président suppléant (M. Bélair): Je déclare l'amendement rejeté.

+-

    M. Jim Abbott (Kootenay--Columbia, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je prends la parole encore une fois pour débattre la question présentée dans la motion principale. Cette question transcende tous les partis. Elle est tellement importante que, je l'espère, le gouvernement et tous les leaders de la Chambre jugeront bon d'accorder aux députés la possibilité de voter comme bon leur semble et selon leur conscience. Il serait déraisonnable que la discipline de parti ou toute autre force musellent les députés sur cette question importante.

    Notre parti a eu l'occasion d'examiner le projet de loi C-56 et est préoccupé par certains de ses aspects. Le projet de loi vise à améliorer la vie humaine. L'Alliance canadienne appuie fortement la recherche en ce sens lorsqu'elle est compatible avec la dignité et la valeur de la vie humaine. Comme je l'ai dit lorsque nous débattions l'amendement, c'est l'élément clé. Tous les députés doivent faire preuve de beaucoup de courage et examiner la question de la dignité et de la valeur de la vie humaine. L'Alliance canadienne s'efforcera de protéger ce principe.

    Le projet de loi C-56 vise à protéger les intérêts supérieurs des enfants issus de techniques de procréation assistée. L'Alliance canadienne s'emploiera à protéger ces intérêts. Le projet de loi prévoit l'accès, par les parents éventuels, aux meilleures techniques de procréation assistée que la science puisse offrir. L'Alliance canadienne s'efforcera de préserver cet accès. Comme je l'ai dit au début, les députés de tous les partis devraient voter librement sur le projet de loi à toutes ses étapes.

    Selon l'article 40 du projet de loi, des embryons humains pourraient être utilisés si la nouvelle agence était convaincue que cette utilisation était nécessaire aux fins de la recherche projetée. Il faut réduire ce pouvoir discrétionnaire en définissant dans le projet de loi le terme «nécessaire». Depuis que je suis en politique, des gens m'entretiennent de diverses décisions qui ont été rendues dans le système judiciaire. N'étant pas avocat, je suis frustré lorsque j'examine des projets de loi et que j'y trouve tout à coup les termes  «nécessaire» ou «intention». Ces termes sont peut-être courants pour les députés, mais leur signification dans les discussions ordinaires et devant un tribunal peut être totalement différente. C'est pourquoi il ne faut pas laisser la réglementation ou l'agence définir le terme «nécessaire».

    Le but de la recherche sur les embryons humains n'est pas précisé dans le projet de loi. Il doit être limité à la création de thérapies médicales destinées à aider à soigner le corps humain. Mais plus important encore, nous souhaitons que le projet de loi ne soit pas adopté tout de suite en raison de l'évolution rapide de la recherche à l'heure actuelle. Le monde médical dans son ensemble vit cette évolution rapide en ce qui concerne l'utilisation des cellules souches adultes par rapport aux cellules souches embryonnaires.

    La phrase modifiée dans le rapport majoritaire du comité permanent devrait être remplacée pour se lire ainsi dans l'article 40 du projet de loi: «À moins que le demandeur ne démontre clairement qu’aucun autre matériel biologique ne permet de créer des thérapies pour l'humain». Il ne s'agit pas d'une modification accessoire, mais bien d'une modification clé, au nom du respect de la vie humaine. Or, la vie embryonnaire est la vie humaine.

    Afin d'interdire aux titulaires de produire plus d'embryons que nécessaire et de les récolter pour la recherche, une nouvelle disposition devrait être ajoutée: «Les titulaires d'autorisation seront tenus de limiter la création d'embryons au nombre raisonnablement nécessaire pour mener à bien les traitements de reproduction souhaités par les donneurs.» Encore là, il s'agit du respect de la vie humaine.

  +-(1640)  

    Nous sommes créatifs. Je trahis mon âge en disant que je me souviens d'être arrivé au travail tôt un matin et d'avoir lu au kiosque à journaux le grand titre suivant « L'homme a marché sur la lune. » Les progrès que nous avons accomplis depuis sont inimaginables. L'idée de pouvoir se rendre sain et sauf sur la lune, de s'y poser et d'y marcher comme l'a fait Armstrong dépassait alors mon entendement. Quels progrès avons-nous accomplis depuis? Nous sommes 100 ou 1 000 fois plus avancés avec nos recherches actuelles.

    Je le répète, la recherche recèle de multiples possibilités. Même s'il s'agit de recherche fondamentale, des percées peuvent se produire dans la recherche sur les cellules souches adultes, sur les cellules du placenta et sur d'autres matières, sans qu'il faille pour cela mettre un terme à une vie humaine.

    Le projet de loi C-56 précise que le consentement du donneur serait exigé pour l'utilisation d'un embryon humain à des fins expérimentales. Le projet de loi prévoit que le donneur serait défini par règlement. Il y a toutefois deux donneurs pour tout embryon humain: un homme et une femme. Les deux donneurs ou parents, et non pas un seul, devraient consentir par écrit à ce que l'embryon soit utilisé. La femme et l'homme ont tous deux le droit d'accepter ou de refuser que l'embryon soit utilisé.

    C'est ce qui semble nous diviser à titre de société. Nous semblons nous éloigner du principe de la procréation entre un homme et une femme dans le cadre d'un mariage qui se traduit par la naissance d'enfants dans une famille dite nucléaire. C'est maintenant l'ère de la sexualité divertissement, et je n'ai rien contre. Cependant, il est maintenant vieux jeu de parler de sexualité dans un but de procréation. C'est pour cela que Dieu a créé la sexualité en premier lieu. Si nous parlons de donneurs, pourquoi ne pas employer le mot juste, le mot « parents »? C'est ce qu'ils sont. Si un parent oppose son refus, l'embryon ne devrait pas servir à des fins expérimentales.

    Une des choses qui me préoccupe le plus avec le jargon ou l'interprétation juridique, en particulier dans le domaine politique, c'est l'utilisation d'euphémismes. L'expression récolter des embryons à des fins expérimentales semble très scientifique, n'est-ce pas? Toutefois, on se livre ici à l'interruption de la vie humaine. On ne la récolte pas. On l'interrompt, on s'en sert à des fins d'expérience et on la rejette. Même le mot récolte présente selon moi un problème. C'est pourquoi le langage utilisé est si important. Pour que l'embryon humain bénéficie de la dignité et du respect auxquels il a droit, il faudrait substituer le mot «parents» au mot impersonnel «donneur» chaque fois que le projet de loi parle des hommes et des femmes ayant contribué à la création d'un embryon viable.

    Ce sont là des préoccupations concernant des expériences menées sur des être humains. Les cellules souches tirées des embryons et implantées chez un receveur sont des tissus étrangers et, partant, sujettes à un rejet immunitaire, qui pourrait exiger des années de pharmacothérapie antirejet coûteuse. Des cellules souches tirées d'embryons et injectées à des rats ont abouti à des tumeurs du cerveau dans 20 p. 100 des cas. Le Dr Roger Barker, chercheur à l'Université de Cambridge, a déclaré ce qui suit:

Je ne crois pas que ce sera un traitement applicable aux humains avant encore un bon bout de temps.

    Dans un éditorial de septembre 2001, le rédacteur en chef de la revue Stem Cells a écrit ce qui suit:

Je continue de croire que l'application clinique n'est pas pour demain pour au moins deux raisons. Avant de passer à l'utilisation clinique des cellules souches embryonnaires et foetales, il sera nécessaire d'analyser dans le détail la possibilité que les cellules souches embryonnaires mènent à un cancer malin. En outre, il faudra comprendre beaucoup plus en profondeur la réaction immunitaire en vue d'empêcher les cellules souches transplantées et leur descendance d'être rejetées par le receveur.

    Il est important de le souligner. Les cellules souches embryonnaires n'ont pas encore donné lieu à des applications thérapeutiques réussies.

  +-(1645)  

    Nous semblons nous précipiter vers l'avant à la vitesse de la lumière. La ministre de la Santé a déclaré vouloir que le projet de loi franchisse l'étape de la Chambre des communes et soit renvoyé au comité afin que l'on puisse en faire l'étude cet été. À mon avis, nous devrions modérer nos transports, car les cellules souches embryonnaires n'ont pas encore donné lieu à des applications thérapeutiques réussies. Par conséquent, pourquoi nous précipitons-nous vers l'avant à la vitesse de la lumière?

    Une des grandes leçons que j'ai apprise, c'est qu'il n'est pas rare qu'une mesure législative progresse moins vite lorsqu'elle aboutit à la Chambre.

    En conclusion, je suis ravi d'avoir eu la possibilité d'intervenir à ce sujet et j'ai hâte d'entendre les interventions des autres députés.

[Français]

+-

    M. Paul Crête (Kamouraska--Rivière-du-Loup--Témiscouata--Les Basques, BQ): Monsieur le Président, j'ai eu l'occasion de prendre la parole sur l'amendement préalable dont la Chambre a disposé il y a quelques minutes, mais je veux profiter de l'opportunité d'intervenir dans le débat en deuxième lecture pour préciser quelques notions que j'avais mises de l'avant dans mon discours et que je souhaite maintenant faire connaître plus en profondeur.

    Je reviens donc au projet de loi sur la procréation assistée. Nous en sommes au débat en deuxième lecture qui porte principalement sur l'utilisation des cellules souches embryonnaires.

    Je répète que les cellules souches sont des cellules qui ne sont pas parvenues à maturité et qui ont la capacité, soit de se spécialiser pour former divers tissus ou organes humaines, soit de se renouveler.

    Selon les Instituts de recherche en santé du Canada, elles offrent un potentiel énorme pour aider à mieux comprendre le développement humain et traiter des maladies dégénératives comme la maladie de Parkinson, la maladie d'Alzheimer et la sclérose en plaques. Ces cellules souches peuvent provenir de différentes sources principales: les embryons à un stade très précoce, les organes reproducteurs feotaux et également les cellules souches pluripotentes, c'est-à-dire qui ont plusieurs possibilités de développement.

    Au plan de ce projet de loi, depuis plusieurs années, le Bloc québécois a mis ses énergies pour que cette question fasse l'objet d'une législation. Cela nous apparaît toujours pertinent qu'elle le soit, même si c'est un sujet très complexe qui demande, je crois, de faire appel aux valeurs de chacun des députés. C'est pourquoi je pense qu'un débat sur cette question devrait faire l'objet d'un vote libre.

    Depuis juin 1996, le Bloc québécois a consacré beaucoup d'énergie à la réalisation de la législation nécessaire. En octobre 1997, la députée de Drummond avait déposé un projet de loi qui rendait le clonage humain illégal. Ce projet de loi était identique à l'article concernant le clonage que l'on retrouvait dans le projet de loi C-47 du gouvernement. Malheureusement, des élections ont été déclenchées et le projet de loi est mort au Feuilleton. Cela n'empêche pas que depuis ce temps, les idées ont continué d'évoluer et qu'aujourd'hui, on est devant ce projet de loi

    J'ai déjà avancé que je mènerais une consultation dans ma circonscription à ce sujet. Cela m'apparaît important que toutes les composantes de la société, qui peuvent avoir le goût de nous faire connaître leur point de vue sur une question très délicate comme la procréation assistée, puissent le faire.

    Je mènerai donc une consultation avec les gens qui représentent, par exemple, l'Église et également des groupes de femmes et des scientifiques, qui peuvent m'aider comme député à bien comprendre l'impact des termes utilisés et la nécessité de la réglementation. C'est souvent dans le détail qu'on se rend compte si l'esprit d'un projet de loi a été respecté ou non. Je consulterai également des citoyens et citoyennes qui, selon moi, peuvent donner leur avis comme toute autre personne parce que c'est une question qui nous préoccupe tous et toutes. Pour les gens de mon âge, on a vu, dans la littérature dite «du futur» écrite au début du siècle, des phénomènes qui se réalisent aujourd'hui et qui font partie de la réalité que l'on vit. Dans l'avenir, il y aura donc ce même type de progrès qui va continuer à se développer.

    Dans le cadre de ces consultations individuelles que je veux mener, j'ai également l'intention de tenir une table ronde qui va permettre à ces gens, évidemment sur une base volontaire, d'échanger, de voir si des positions qui, à première vue, peuvent paraître inconciliables ne peuvent pas être ramenées à une position défendable, d'expliquer également le projet de loi devant l'ensemble de ces gens sans entrer dans des détails trop précis, de donner la chance aux citoyens et aux citoyennes de s'exprimer, d'enrichir ma réflexion à ce sujet de sorte que lorsqu'on votera aux différentes étapes, elle ait été nourrie par celle des gens de ma circonscription.

    Il ne s'agit pas d'un projet de loi traditionnel qui fait intervenir la position d'un parti politique ou des positions assez partisanes qui se sont développées à travers les ans. Dans le domaine de la procréation assistée, on est plutôt dans un secteur qui ne fait d'aucune façon référence à des notions partisanes, mais à des choix qui vont être faits sur les avancées de la science au cours des prochaines années, sur la façon dont on va pouvoir les faire et sur la réglementation qui va venir encadrer ce domaine. C'est probablement le point principal en deuxième lecture.

  +-(1650)  

    Que quelqu'un soit favorable ou défavorable à ce projet de loi, pour moi, il n'y a qu'une position qui ne soit pas acceptable, soit celle de ne pas vouloir légiférer. Je pense qu'il faut légiférer dans ce domaine. On peut prendre le temps de le faire comme il faut. On peut prendre le temps de tenir des audiences publiques. On doit s'assurer qu'on aura toute l'information nécessaire et que les citoyens pourront se prononcer.

    D'ailleurs, c'est un défi d'amener les citoyens, le commun des mortels, à exprimer leur point de vue sur ces questions, dans leurs mots, avec leur vocabulaire, de telle sorte que l'on ait un projet de loi reflétant la volonté de notre société. Un tel projet de loi donnera les grandes lignes de ce que l'on veut comme société par rapport à ces choses-là. La santé est une question quotidienne dans nos débats. Les progrès faits dans le traitement de certaines maladies, particulièrement les maladies associées au vieillissement, sont un phénomène très important.

    Il faut se poser la question: quel soutien veut-on avoir pour combattre ces maladies? De quelle façon veut-on développer les outils? Comment pouvons-nous nous assurer de développer les outils nécessaires? Comment pouvons-nous nous assurer que cela ne deviendra pas à l'occasion un commerce inacceptable? Est-ce qu'il y a des comportements moraux qui seraient inacceptables? Il faut se poser toutes ces questions et s'assurer que la loi y répondra.

    Lorsqu'on aura complété l'étude du projet de loi en deuxième lecture, le vote permettra de l'étudier en détail en comité, de voir les différents éléments dont on a parlé, avec toute la complexité qu'il comporte. On traite ici de toute l'utilisation des embryons au plan de la recherche et de quelle façon cela se fera. Ce sont des éléments importants et très complexes. Ils sont aussi une vision de l'avenir.

    On léguera à nos enfants notre façon de voir ces choses au plan moral vis-à-vis de l'évolution de la science. Il faut se nourrir du passé, aller voir les débats qui ont précédé, que ce soit au XVIIIe, au XIXe ou au début du XXe siècle. Des notions ont été mises de l'avant et pouvaient paraître hérétiques au moment où on les a présentées. Cependant, on pouvait se rendre compte quelques années plus tard qu'on avait fait un très bon ou un très mauvais choix de permettre que cela se développe. Dans ce domaine, on a intérêt à ce que cela se fasse en pleine connaissance de cause. Il n'y aura pas que des impacts scientifiques. Il y aura aussi des impacts sur la façon dont les gens vont agir dans le futur et sur l'importance accordée au phénomène de la procréation assistée et sur l'impact qu'elle peut avoir dans notre société.

    Devant l'ensemble de ces situations, je souhaite que la consultation que je tiendrai me permettra de voter en fonction de ma conscience, mais également en étant éclairé par l'avis de ceux et celles qui auront bien voulu me donner leur perception de la situation. Peut-être aussi que je pourrai contribuer, par l'apport d'amendements et de suggestions au sujet de la réglementation, pour que les lignes directrices que le législateur aura mises dans la loi ne puissent pas être interprétées de façon erronée par ceux qui appliqueront la loi, afin que nous puissions obtenir les résultats souhaités.

    C'est la consultation que je veux mener pour que, lorsque la loi sera adoptée, elle puisse être une pierre d'angle solide du sens que l'on veut donner à la recherche et à l'utilisation de la procréation assistée.

  +-(1655)  

[Traduction]

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

    Des voix: Le vote.

    Le président suppléant (M. Bélair): Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

    Des voix: D'accord.

    Des voix: Non.

    Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

    Des voix: Oui.

    Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

    Des voix: Non.

    Le président suppléant (M. Bélair): À mon avis, les oui l'emportent.

    Et plus de cinq députés s'étant levés:

    Le président suppléant (M. Bélair): Convoquez les députés.

[Français]

    Et la sonnerie s'étant arrêtée:

    Le président suppléant (M. Bélair): À la demande du whip adjoint du gouvernement, le vote par appel nominal est différé jusqu'à demain, après les ordres émanant du gouvernement.

*   *   *

  +-(1700)  

- Loi de 2002 sur la sécurité publique

    La Chambre reprend l'étude, interrompue le 21 mai 2002, de la motion: Que le projet de loi C-55, Loi modifiant certaines lois fédérales et édictant des mesures de mise en oeuvre de la convention sur les armes biologiques ou à toxines, en vue de renforcer la sécurité publique, soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé à un comité; ainsi que de l'amendement.

+-

    M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Monsieur le Président, on sait que ce projet de loi C-55 est la suite du projet de loi C-42. C'est à la suite de remarques, de pressions et même d'interrogations que nous avons fait prendre conscience au gouvernement libéral fédéral de l'ampleur de ce projet de loi C-42 et du caractère dangereux d'adopter un tel projet de loi.

    Le gouvernement a fait un pas en arrière et a présenté le projet de loi C-55. Il est évident qu'à la suite des représentations du Bloc québécois, notamment concernant plusieurs points, le gouvernement a, à tout le moins, minimisé l'ampleur des problèmes. Cependant, on n'a pas réglé en entier la portée de ces problèmes.

    À mon avis, il existe un problème très important concernant tous les arrêtés d'urgence. Pour le bénéfice des contribuables et des personnes qui nous écoutent, cela veut dire que plusieurs ministres se donnent, par ce projet de loi, la possibilité de faire des arrêtés d'urgence. Que sont des arrêtés d'urgence?

    Par ce projet de loi—je donne un exemple—, si un ministre trouve une situation dangereuse pour la sécurité du pays ou pour la santé des personnes ou des contribuables, il peut mettre immédiatement en application un arrêté en conseil. Le problème de cet arrêté demeure dans le fait qu'un arrêté fait partie de la Loi sur la réglementation. En effet, un arrêté est obligé de s'exprimer selon les critères de la Loi sur la réglementation. Sauf que dans ce projet de loi, on exclut les articles 3, 5 et 11 de ladite Loi sur la réglementation.

    Qu'est-ce que cela veut dire? Je vous ferai part de ces trois articles importants de cette loi. Lorsqu'on regarde l'examen d'un projet de loi relatif à un règlement, autrement dit un arrêté en conseil—c'est la même chose, c'est un terme différent—, on applique la même loi, soit la Loi sur la réglementation. Cependant, on dit que l'article 3 ne s'applique pas.

    L'article 3 nous dit entre autres que «l'autorité réglementante envoie chacun de ses projets de règlements en trois exemplaires, dans les deux langues officielles, au greffier du Conseil privé.»

    Que fait-on à ce moment-là au Conseil privé? On doit regarder, premièrement, si le règlement est pris dans le cadre du pouvoir conféré par sa loi habilitante. Deuxièmement, on doit regarder s'il ne constitue pas un usage inhabituel ou inattendu du pouvoir ainsi conféré. Troisièmement, on doit regarder s'il n'empiète pas indûment sur les droits et libertés existants ou, en tout état de cause, s'il n'est pas incompatible avec les fins et les dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés et de la Déclaration canadienne des droits.

    On voit donc qu'on exclut la possibilité et l'obligation de regarder, entre autres, si cet arrêté en conseil est contre la Charte. C'est donc vraiment un abus, parce qu'un ministre aura le pouvoir de faire un arrêté en conseil, de passer outre cet aspect qui consiste à voir si cela dépasse ou correspond à la Charte.

    Un ministre, du jour au lendemain, et ce, pendant une certaine période, peut donc faire un arrêté en conseil et permettre qu'on déploie une zone militaire d'accès interdit à un certain endroit, parce que, comme je le disais un peu plus tôt, il existe une crainte objective relative à un problème de sécurité et de santé pour les gens dans cette zone. Ainsi, il peut établir cette zone pendant un certain temps.

    Tout cela est vraiment antidémocratique. Pour quelle raison? On a eu le bel exemple du ministre de la Défense. Lui-même, dans ce projet de loi C-55, se donne ce pouvoir de faire des arrêtés et de mettre en place cette zone de sécurité.

  +-(1705)  

    On a vu comment un seul homme, le ministre de la Défense lui-même, a admis ses erreurs en comité. Un homme peut commettre une erreur. Ce n'est pas parce qu'il est ministre de la Défense et ce n'est pas parce qu'on est ministre de la Justice qu'on ne commet pas des erreurs. C'est un être humain qui peut commettre des erreurs. On a fait la preuve à plusieurs occasions que ces erreurs existent. Ce projet de loi est donc dangereux et antidémocratique pour cette raison.

    Pour quelle raison veut-on créer une zone de sécurité? Je donne un exemple. Cela peut être au moment du Sommet du G-8, dans des endroits où il peut y avoir des problèmes. Cela peut être au Sommet des Amériques. On a vu, lors de l'étude du projet de loi C-42, que c'était très important de le retirer à cause de son libellé. En vertu de ce projet de loi, on pouvait même créer cette zone de sécurité à l'échelle d'une province. Maintenant, cela n'existe plus. On a rétréci la zone et c'est simplement pour protéger des équipements de défense.

    Cependant, on peut aller de l'avant dans l'interprétation. Un danger peut exister malgré tout, malgré le fait qu'on ait restreint la zone uniquement pour protéger ces équipements militaires. Le ministre peut donc créer cette zone et peut lui-même demander à son état-major de le faire, et ce, sans demander par exemple au Québec ce qu'il en pense? Quelle est la situation d'urgence et où est la discussion? On va donc sur le territoire même et on peut aller sur ses plans d'eau, dans son espace aérien et même dans le sous-sol du territoire québécois et de toutes les autres provinces sans discuter avec elles pour savoir ce qu'elles en pensent. C'est le seul ministre de la Défense qui peut créer cette zone militaire d'accès contrôlé sans avoir besoin de l'assentiment du Québec, des provinces et des territoires.

    Encore une fois, ce projet de loi mine la démocratie et les relations entre ce gouvernement, le Québec et les provinces. Comment peuvent-ils oser se donner autant de pouvoirs sans consulter le Québec pour savoir si une zone aussi importante peut être décrétée?

    Essayons d'imaginer si cette zone était située dans un axe ou un territoire tellement important que c'est plutôt la Loi sur la défense qui va s'appliquer. Avec ce projet de loi sur la sécurité, on va brimer les droits de toutes les personnes qui seront incluses à l'intérieur de cette zone d'accès contrôlé.

    Lorsqu'on parle de zones d'accès contrôlé, le problème est le suivant. Cette zone n'a pas de limites. On nous dit: «On a limité la zone pour protéger des équipements militaires.» On prend l'exemple du président Bush qui vient au Québec. Il est protégé par l'armée ou par des gens avec de l'équipement militaire nécessaire. Qu'arrive-t-il? Ce projet de loi permet au ministre d'établir cette zone et, encore une fois, elle n'est pas limitée. On nous parle d'un temps raisonnable pour protéger des équipements militaires. Essayons d'imaginer cependant si on reçoit des menaces quelconque et que le président vient à un endroit comme le Québec. Qu'est-ce que cela veut dire «immédiat pour protéger»? Est-ce que ce sont toutes les frontières ou toute la ville de Montréal, s'il vient à Montréal? Est-ce que c'est tout le fleuve Saint-Laurent parce que le président se promène en bateau? On n'a aucune façon de démontrer la limitation de ce projet de loi.

    Encore une fois, ce qui est déplorable, c'est qu'on a reculé sur le projet de loi C-42 à cause des interventions que nous avons faites, mais que ce projet de loi n'apporte pas de changements substantiels. Avant de prévoir faire des arrêtés en conseil pour établir des zones, il faut faire en sorte de consulter le Québec et le Parlement afin que ce ne soit pas le ministre ou les seuls ministres qui détiennent le pouvoir qui puissent décider, que ce soit celui de la Santé ou un autre. Avec ce projet de loi, on modifie plusieurs lois.

    Je vois que le temps qui m'est alloué est écoulé et c'est dommage. Ce projet de loi crée une situation d'urgence et on doit voter contre ce projet de loi

  +-(1710)  

+-

    M. Svend Robinson (Burnaby--Douglas, NPD): Monsieur le Président, c'est un privilège de participer à ce débat sur ce projet de loi profondément important et, en même temps, profondément antidémocratique. Je partage le point de vue de mon collègue du Bloc québécois sur cette question. J'aimerais dire très clairement, comme l'a déjà souligné ma collègue, notre porte-parole dans le dossier des transports, la députée de Churchill, que les députés du Nouveau Parti démocratique voteront contre ce projet de loi. Nous allons faire tout notre possible pour essayer de le bloquer et pour qu'il ne soit jamais adopté au Canada.

[Traduction]

    Depuis le 11 septembre, nous avons été les témoins de très graves atteintes aux libertés civiles et aux droits les plus fondamentaux des Canadiens. Nous appuyons évidemment tous une lutte contre le terrorisme ciblée et respectueuse des droits humains fondamentaux. En fait, comme l'a signalé ma collègue, la députée de Churchill, nous appuyons des éléments de ce projet de loi.

    Par exemple, nous appuyons les dispositions relatives au recyclage des produits de la criminalité, les nouvelles infractions criminelles pour les alertes à la bombe, la mise en oeuvre des conventions internationales sur la prolifération des armes biologiques, les explosifs et le passage clandestin d'immigrants par le crime organisé.

    Nous ne contestons pas ces dispositions. Toutefois, nous avions espéré que le gouvernement écoute les Canadiens qui, d'un bout à l'autre du pays, se sont dits outrés par le projet de loi C-42. Au lieu de cela, il dépose le projet de loi C-55 qui, tout en visant à améliorer le projet de loi C-42, comporte des dispositions très draconiennes et très dangereuses qui n'étaient pas prévues dans le projet de loi C-42.

    Trop souvent, au Canada comme à l'étranger, on prétexte la lutte au terrorisme pour supprimer les droits humains fondamentaux.

[Français]

    On l'a déjà vu dans le cas du projet de loi sur l'antiterrorisme, soit le projet de loi C-36. Il n'y a qu'un parti politique dans ce Parlement qui a voté contre ce projet de loi en deuxième lecture, c'est le Nouveau Parti démocratique. J'ai été franchement très déçu de voir que mes collègues du Bloc québécois n'ont pas entendu les voix très fortes des Québécois et des Québécoises qui se sont prononcés contre les abus possibles du projet de loi C-36. Ils ont même voté pour ce projet de loi en deuxième lecture. Ce n'était pas du tout acceptable.

[Traduction]

    Comme un certain nombre d'organisations internationales de défense des droits de la personne l'ont signalé, c'est précisément à des moments comme celui-ci que les libertés civiles et les droits humains sont les plus vulnérables. Comme la haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Mary Robinson, l'a déclaré:

Des mesures excessives ont été prises dans plusieurs parties du monde qui suppriment ou limitent les droits individuels dont le droit au respect de la vie privée, la liberté de pensée, la présomption d'innocence, le droit à un procès équitable, le droit à l'asile et à la participation politique, ainsi que la liberté d'expression et d'assemblée pacifique.

    Mes collègues ont déjà signalé certaines des préoccupations au sujet de cette loi, comme le pouvoir discrétionnaire très étendu qu'on accorde aux ministres qui n'ont aucun compte à rendre, qui ne doivent faire rapport au Parlement qu'après un certain nombre de jours. On a également parlé du fait que rien ne garantit qu'il y ait une reddition de comptes au Parlement. Tout ce que les ministres ont à faire, c'est de déposer leurs rapports.

    Nous savons également que les préoccupations au sujet des zones militaires d'accès contrôlé sont très graves. Les Canadiens ont parlé contre cela dans le cadre de l'étude du projet de loi C-42. Même s'il y a eu certaines modifications, dans l'ensemble, il y a toujours une grave possibilité d'abus dans ce domaine également.

    En ce qui concerne Kananaskis, notre collègue bloquiste a signalé que ces dispositions pourraient y être, en fait, utilisées malgré ce que prétend le ministre. Beaucoup d'entre nous sont très inquiets du climat croissant d'intimidation à l'égard de ceux qui veulent exprimer pacifiquement, de façon non violente, leur dissension à l'occasion du prochain sommet du G-8 à Kananaskis.

    En fait, encore la semaine dernière, un brigadier-général de premier plan de l'armée canadienne a menacé d'utiliser une force mortelle, des armes mortelles à Kananaskis. C'est honteux. Il a dit que l'armée était très sérieuse, qu'elle avait des armes mortelles et qu'elle aurait recours à la force en cas de menace grave. Il a averti les manifestants et les autres qu'ils allaient risquer leur vie en manifestant dans le cadre du sommet du G-8.

    Nous ne voulons pas donner au gouvernement ce type de pouvoirs très vastes sans reddition de comptes, comme ceux qu'on propose dans le projet de loi C-55.

    L'une des dispositions les plus dangereuses dans ce projet de loi est un nouvel article qui ne figurait pas dans le projet de loi C-42. C'est la possibilité pour la GRC et le SCRS d'avoir un accès très vaste à la liste des passagers des compagnies aériennes. On peut se demander pourquoi cela est nécessaire. Est-ce seulement utile pour cibler des terroristes possibles? En fait, ce n'est pas le cas. Le projet de loi comprend quelque 150 infractions aux termes du Code criminel pour lesquelles cette expansion très marquée des pouvoirs policiers d'ingérence dans la vie privée est possible.

    Je tiens à rendre hommage au commissaire à la protection de la vie privée, M. George Radwanski, qui nous a prévenus en des termes des plus vigoureux et des plus éloquents du caractère dangereux et abusif des dispositions du projet de loi C-55. Dans une mise en garde adressée directement au Parlement, il a déclaré:

Cela ne semble être rien d'autre qu'un coup de force de la police. Plus précisément, puisque la police dans une société libre et démocratique comme le Canada ne peut s'arroger des pouvoirs, l'entrée dans la loi d'une nouvelle disposition de ce genre constituerait l'octroi à la police de nouveaux pouvoirs inutiles et non justifiés, par des autorités politiques naïves ou indifférentes.

    Comment certains députés libéraux ont-ils réagi à ce cri du coeur, à ce coup de colère du commissaire à la protection de la vie privée à qui a été confié le mandat de protéger la vie privée des Canadiens? Ont-ils cherché à réexaminer le projet de loi, à revenir sur la question en se disant qu'il a peut-être signalé au Parlement des questions préoccupantes? Non, hélas, car ils s'en sont plutôt pris à lui et, dans certains cas, de manière très personnelle.

    Le député libéral d'Aldershot, par exemple, a dit que le commissaire condamnait le Parlement et qu'il avait dépassé la mesure. George Radwanski, le commissaire à la protection de la vie privée, ne condamne pas le Parlement. Il condamne le gouvernement libéral, qui n'hésitera pas à abuser de son pouvoir pour enfreindre nos droits au respect de la vie privée les plus fondamentaux. En fait, loin de condamner le Parlement, il lui sert une mise en garde sur laquelle les libéraux sont tout à fait disposés à fermer les yeux.

  +-(1715)  

    Une voix: Nous ne sommes pas d'accord avec lui.

    M. Svend Robinson: C'est bien beau de ne pas être d'accord, et le député de Mississauga dit qu'ils ne le sont pas. Il reste que les députés libéraux ne se contentent pas de ne pas être d'accord; ils s'en prennent au messager. Ils s'en prennent au commissaire à la vie privée, ce qui n'est assurément pas acceptable.

    Le commissaire a, comme on le sait, fait part de ces préoccupations au solliciteur général. Et au ministre des Transports aussi. Comme mon collègue de Churchill l'a fait remarquer, le ministre des Transports n'a pas dit un mot au sujet de cette importante mesure législative. Où est le leadership dans cette charge contre la vie privée?

    Le commissaire à la vie privée a commenté en ces termes la réponse du solliciteur général à ses préoccupations à l'égard du projet de loi: déclarations trompeuses, demi-vérités et conjectures. Le commissaire y est allé fort.

    Les députés néo-démocrates souhaitent exprimer leur plus vive opposition au projet de loi. Lorsque le gouvernement a présenté le projet de loi C-42, nous l'avons invité à refaire ses devoirs, à rejeter cette atteinte aux droits les plus fondamentaux des Canadiens et des Canadiennes.

  +-(1720)  

[Français]

    Ce fut fait sans consultation avec les gouvernements provinciaux et le gouvernement du Québec, sans consultation avec les Canadiens et les Canadiennes.

[Traduction]

    Au lieu de refaire ses devoirs et de nous revenir avec une mesure législative bien rédigée, le gouvernement a rapporté une mesure draconienne qui porte atteinte aux droits de la personne et aux droits à la protection de la vie privée des Canadiens et des Canadiennes. Nous, les néo-démocrates, allons faire tout notre possible pour mettre fin à cet abus de pouvoir de la part du gouvernement libéral.

+-

    M. Bill Casey (Cumberland--Colchester, PC): Monsieur le Président, je félicite ceux qui ont pris la parole avant moi de leurs observations fort excellentes et pertinentes.

    L'ironie de la chose, dans cette entreprise, c'est que nous parlons d'un projet de loi qui fait suite aux attaques du 11 septembre et qui, en fin de compte, comme bien d'autres projets de loi venant des libéraux, constitue lui-même une attaque contre le Parlement. Il essaie de limiter la surveillance exercée par le Parlement et le rôle de ce dernier dans bien des domaines. Il y a quelques minutes, nous avons parlé du projet de loi C-56 et, pendant ce débat, les mêmes inquiétudes ont été mentionnées. Les députés ont aussi fait état des mêmes inquiétudes lors de l'étude du projet de loi qui a précédé le C-56. Le gouvernement essaie d'empêcher le Parlement de faire son travail et tente de faire disparaître le rôle du Parlement dans bien des aspects du processus législatif gouvernemental.

    L'ironie du projet de loi C-55, c'est qu'il existe uniquement parce que le Parlement a tellement déploré le projet de loi C-42 que le gouvernement l'a retiré et remplacé par le C-55. Cela prouve hors de tout doute que le Parlement joue un rôle important et représente effectivement les intérêts et les préoccupations des Canadiens. Cependant, ce projet de loi limite encore une fois le rôle du Parlement à bien des égards et il s'inscrit dans la série d'interventions du gouvernement en vue d'établir des agences hors du contrôle des parlementaires et des comités. Il a créé des fondations qui distribuent de l'argent et il a privatisé des organismes comme Nav Canada pour que nous n'ayons plus, par le truchement de l'accès à l'information, la possibilité de lire les rapports sur la sécurité et les autres aspects du transport aérien qui importent tant pour les Canadiens. C'est une tendance marquée. Chaque projet de loi qui nous est présenté semble comporter un élément qui réduit le rôle du Parlement, même si l'existence même de ce projet de loi prouve hors de tout doute que le Parlement joue effectivement un rôle important.

    Le projet de loi retire des pouvoirs considérables au Parlement pour les donner au ministre. Il est difficile de croire que le gouvernement ait même présenté ce projet de loi. Les arrêtés d'urgence qu'un ministre peut prendre pourront rester secrets pendant 23 jours et n'être soumis à l'approbation du Cabinet qu'au bout de 45 jours. Un ministre pourra créer une zone de sécurité militaire et attendre 45 jours avant d'en faire approuver la création par le Cabinet. Qu'est-ce qui peut justifier cela? Pourquoi faudrait-il attendre 45 jours si une urgence justifie pareille mesure? Pourquoi pas seulement quelques heures? Quelqu'un avait proposé 72 heures. Pourquoi n'est-ce pas acceptable? Pourquoi faut-il attendre 45 jours pour obtenir l'approbation du Cabinet, sans parler du fait qu'un arrêté pourra demeurer secret pendant 23 jours? Ce genre de mesure est tout à fait stupéfiante et injustifiée. Ce doit être une tentative des libéraux, des fonctionnaires qui travaillent pour eux ou de quelqu'un d'autre pour enlever des pouvoirs au Parlement et les donner au gouvernement.

    Si on compare ce projet de loi à la Loi sur les mesures d'urgence, qui fait essentiellement la même chose, quoique peut-être pour des raisons différentes, on constate les différences, les anomalies et les conditions inacceptables du projet de loi C-55. Les mesures d'urgence doivent être approuvées par le Parlement dans les 7 jours, et non pas dans les 45 jours. Elles doivent être de nouveau soumises à l'examen du Parlement afin d'y faire l'objet d'un vote. En vertu du projet de loi C-55, il n'y aurait pas de vote. Pourquoi? Pourquoi les mesures prises en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence devraient-elles faire l'objet d'un vote au Parlement, mais pas celles qui seront prises en vertu du projet de loi C-55?

    Le Parlement peut rejeter une recommandation concernant des mesures d'urgence ou un arrêté pris par un ministre. En vertu du projet de loi C-55, le Parlement ne pourrait même pas être saisi d'une recommandation. La Loi sur les mesures d'urgence prévoit que toute mesure de réglementation doit être soumise à l'examen du Parlement et faire l'objet d'un rapport dans les deux jours de séance. Aux termes du projet de loi C-55, le Parlement ne serait jamais saisi des mesures prises. Le projet de loi C-55 entrerait en vigueur immédiatement. Il ne contient même pas de déclaration concernant la mise en oeuvre des mesures visées. Il ne serait même pas nécessaire de présenter une pétition concernant son application. Le projet de loi C-55 devra être rapporté seulement 15 jours après le retour de la Chambre. Si la Chambre ne revient pas, le projet de loi ne fera l'objet d'aucun rapport. Il n'y a aucune obligation. Aucun débat, aucune responsabilité, rien. Tous les aspects du projet de loi C-55 baignent dans le secret. Le Parlement est complètement écarté.

    C'est un projet de loi sur la sécurité publique, mais il nous faudrait presque un projet de loi sur la sécurité parlementaire pour protéger le Parlement. Nous devrions présenter un projet de loi visant à protéger le Parlement et notre rôle pour veiller à ce que nous ayons encore un rôle à jouer concernant des enjeux comme ceux-ci, des enjeux comme la sécurité, un rôle que le projet de loi tente de nous enlever.

  +-(1725)  

    Comme l'orateur précédent l'a rappelé, le commissaire à la protection de la vie privée trouve énormément à redire à ce projet de loi en disant que les libéraux tentent de créer une société totalitaire. Ces derniers ont eu pour réaction de s'attaquer au commissaire. Voilà une nouvelle stratégie de la part des libéraux. Ils ont récemment fait intervenir une batterie de députés qui s'en sont pris à la vérificatrice générale lorsqu'elle a publié un rapport qui leur a déplu. Voilà maintenant qu'ils s'en prennent au commissaire à la protection de la vie privée. Les libéraux instituent ces postes et les appuient, mais si leurs titulaires ne sont pas d'accord avec eux, ils les attaquent. Puis il y a le conseiller en éthique, qui fait exactement ce que le premier ministre lui demande de faire.

    C'est une affaire grave. Beaucoup de Canadiens s'inquiètent de la direction que prend le gouvernement. Ils s'inquiètent de l'intrusion des États-Unis dans notre sécurité avec tout ce dossier de la sécurité et les exigences des Américains qui veulent placer leurs agents de douane dans nos ports et nos aéroports partout au Canada. Ils veulent prendre le contrôle de nos forces militaires en imposant cette notion de périmètre de sécurité. Ce qu'ils veulent en réalité, c'est le contrôler; ils ne veulent pas le partager. Ils veulent contrôler les agents de douane au Canada. Là encore, il semble que les libéraux approuvent l'idée et la mettent en application. Même si les États-Unis sont pour le Canada un ami très important, nous devons garder nos distances et notre souveraineté. J'espère que nous ne nous rapprocherons pas davantage et que nous ne nous conformerons pas à certaines des demandes que les Américains n'arrêtent pas de faire.

    Nos industries constatent maintenant que les Américains changent les règles tous les jours. Quand les camionneurs arrivent à la frontière avec un chargement de marchandises ou même de graines ou de produits agricoles, ils constatent que les règles ont changé et qu'ils ne peuvent procéder de la même façon que les semaines précédentes. Les Américains tentent de tout contrôler, le commerce, la sécurité, la police et l'armée. C'est une très dangereuse tendance, et le projet de loi C-55 joue le jeu des Américains.

    Aux termes du projet de loi, en vertu des pouvoirs conférés au ministre, le Cabinet ne doit être informé qu'après 45 jours. J'y reviens encore parce que j'estime qu'il est inacceptable que le Cabinet n'ait pas à approuver certains des actes d'un ministre. Cela confère beaucoup de pouvoir au ministre. Cela doit être modifié, si ce n'est que cela.

    Nous appuyons l'amendement aujourd'hui à cause de ces actes, parce qu'ils confèrent trop de pouvoir à un ministre alors que cela n'est pas nécessaire. J'ignore pourquoi les libéraux ont prévu ces conditions dans le projet de loi pour le transfert de pouvoir aux ministres. Ce n'est pas nécessaire. Ils n'ont plus aucun respect pour le Parlement. Ils veulent exclure le Parlement. Ils veulent qu'un groupe restreint de ministres, pas même le Cabinet dans son entier, prenne toutes les décisions et dispose de tout ce pouvoir. Ils veulent en outre que tous les députés libéraux se contentent d'entériner sans discussion les décisions prises par ce groupe restreint. C'est incroyable qu'ils puissent continuer d'agir ainsi.

+-

    M. Jim Abbott (Kootenay--Columbia, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir parler du projet de loi C-55. C'est un projet de loi intéressant en ce sens qu'il illustre bien un art dans lequel le gouvernement excelle: regrouper une foule de choses dans un projet de loi omnibus. Le projet de loi ne porte pas sur un sujet précis, et il comporte bien des éléments fort problématiques. Cependant, avant de voir les textes réglementaires, nous ne saurons pas vraiment à quoi nous en tenir sur les intentions du gouvernement.

    Cette habitude est tellement ancrée chez les libéraux que nous en sommes presque au point où, pour reprendre ce que l'ancien premier ministre Trudeau disait, les députés sont d'obscurs inconnus lorsqu'ils s'éloignent de la colline du Parlement. J'ai l'impression que, pour l'actuel premier ministre, les députés ne comptent pas non plus lorsqu'ils sont au Parlement, puisqu'on nous demande d'adopter des projets de loi omnibus en connaissant fort peu ou pas du tout les règlements d'application. Nous ne connaissons que l'intention très générale du gouvernement à l'égard du projet de loi, et nous sommes censés nous prononcer de façon intelligente. C'est honteux, car c'est là une habitude flagrante, surtout dans le cas du projet de loi C-55.

    Je propose une comparaison dans le domaine des transports. Ce que nous avons fait n'est que le pâle reflet de ce qu'ont réalisé les Américains. Les États-Unis ont présenté, débattu, amendé et promulgué une loi sur la sécurité bien plus complète en seulement huit semaines. Il a fallu à notre gouvernement huit mois pour présenter un projet de loi.

    Le problème, c'est que le projet de loi laisse de côté les problèmes qui se posent au Canada. Il existe un problème de documents non valides. Toutes les personnes sans documents devraient être automatiquement détenues jusqu'à ce qu'elles puissent prouver leur identité ou jusqu'à ce qu'une vérification de leurs antécédents criminels se fasse à l'étranger. Notre gouvernement n'a pas assez de cran pour prendre position au nom des Canadiens et de tous ceux qui devraient être bien protégés dans notre pays. Cela ne veut pas dire qu'une personne qui a des documents non valides devrait être automatiquement mise en détention. Si des personnes produisent des documents valides lorsqu'ils montent à bord de l'avion, comment se fait-il que les documents ne sont plus valides à l'arrivée au Canada?

    Il y a un changement du fait que le projet de loi ne prévoit pas le renvoi d'une personne qui arrive d'un tiers pays sûr. En particulier en ce qui concerne les Américains, nous disons depuis une éternité qu'il est illogique pour nous de penser que des gens puissent transiter par les États-Unis après y être arrivés. La différence est qu'ils sont arrivés aux États-Unis, qu'ils ont regardé quel pays pouvait les accueillir comme réfugiés et qu'ils sont venues au Canada.

    Malheureusement, même si l'Alliance canadienne a soulevé la question, si elle a mis le vice-premier ministre sur la sellette en ce qui concerne le projet de loi et si des commentaires scandaleux ont été prononcés par le ministre de l'Immigration, nous défendons toujours la même position. À peine une semaine après que nous eumes soulevé la question, le gouvernement a modifié les règles et négocié un accord avec les États-Unis. D'ailleurs, ce que nous recommandions comme étant conforme au gros bon sens sera maintenant en place, de sorte que les gens ne pourront plus se chercher un pays d'asile.

    Ma crainte, et ce qui me pousse précisément à intervenir sur ce projet de loi, est que cette mesure confie beaucoup de pouvoir aux ministres en vertu des arrêtés d'urgence, car elle les autorise à prendre des arrêtés d'urgence équivalents à des règlements pris par le Cabinet. C'est un abus de pouvoir. Les arrêtés d'urgence doivent être approuvés par le Cabinet dans un délai de 45 jours après avoir été pris. Cela représente 31 jours de plus que les 14 jours actuellement requis en vertu de l'article 6.41 de la Loi sur l'aéronautique. Étant donné que la Loi sur les mesures d'urgence confère déjà de larges pouvoirs permettant de déclarer un état d'urgence ou un état de guerre à l'échelle internationale, les nouveaux arrêtés d'urgence seront probablement inutiles dans la plupart des cas.

    Je m'inquiète toujours quand je vois le gouvernement juger bon de s'accaparer inutilement des pouvoirs. J'ai été porte-parole du Parti réformiste pour les questions relevant du solliciteur général au moment de l'APEC, quand on a vu clairement que le cabinet du premier ministre dirigeait les activités policières contre certains manifestants plus agressifs à Vancouver, en 1997.

  +-(1730)  

    J'adhère au concept selon lequel notre démocratie se définit comme un pays où nous sommes protégés par la police mais aussi où nous sommes protégés contre la police. Quand les politiciens donnent des ordres à la police, c'est le début de l'anarchie, même dans un pays civilisé comme le Canada. Le premier ministre s'est livré à cette activité par l'intermédiaire de son agent Jean Carle. Je l'ai vu, je l'ai entendu et j'ai assisté aux témoignages devant le juge Hughes dans le cadre de l'enquête sur le sommet de l'APEC.

    J'ai énormément de mal à accepter cet article du projet de loi. Ne serait-ce qu'à cause de cet article, je serais forcé de voter contre le projet de loi. Donner un pouvoir accru aux politiciens et la possibilité de s'en prendre aux citoyens ordinaires est tout simplement inacceptable.

    Il y a de bonnes dispositions dans le projet de loi. Protéger l'emploi des réservistes s'ils sont appelés en service lors d'un état d'urgence est une disposition importante qu'on réclame depuis longtemps, mais des précisions devront y être apportées pour qu'elle soit suffisante. Nous attachons une grande importance aux réservistes des Forces canadiennes. Ce sont des hommes et des femmes qui sont prêts à sacrifier leur temps et leur travail pour nous. Nous devons respecter le fait que ces gens sont prêts à mettre leur vie en danger. Par conséquent, la protection leur emploi constitue une partie très importante du projet de loi.

    Les dispositions concernant le partage de l'information entre les institutions financières et les autorités pour respecter la législation sur le blanchiment de l'argent soulèvent très peu de controverse. J'ai participé, lors d'une législature précédente, aux négociations en coulisse entre partis politiques particulièrement au sujet de la loi sur le blanchiment de l'argent. La Loi du Canada sur le blanchiment de l'argent offre actuellement un équilibre approprié. Le lien entre ce projet de loi et la Loi sur le blanchiment de l'argent ne pose pas du tout de problème.

    Je vais réitérer la raison principale qui m'a poussé à prendre la parole sur ce projet de loi. Nous devons toujours protéger nos foyers et nos droits. Notre hymne national dit que nous devons protéger nos foyers et nos droits. C'est le rôle et la responsabilité des membres du Parlement de protéger le Canada. C'est notre rôle de nous assurer que les projets de loi dont nous sommes saisis ne donnent pas au gouvernement du jour plus de pouvoir que ce dont il a absolument besoin pour que notre société civile soit civilisée.

    Je voterai contre cette mesure législative, mais j'attends avec impatience les amendements qui seront proposés en comité.

  +-(1735)  

[Français]

+-

    M. Paul Crête (Kamouraska--Rivière-du-Loup--Témiscouata--Les Basques, BQ): Monsieur le Président, le projet de loi devant nous, le projet de loi C-55, pour ceux qui voudraient faire un petit exercice de mémoire, c'est le projet de loi C-42 qui avait été retiré par le gouvernement à la suite des pressions du Bloc québécois. On s'était rendu compte que le ministre de la Défense s'arrogeait des pouvoirs absolument démesurés. En effet, il aurait pu décider qu'une zone militaire d'accès contrôlé aurait pu s'étendre sur l'ensemble du territoire d'une province. Il pouvait décréter cette zone sans même consulter la province concernée afin d'obtenir son accord.

    Pour ces raisons et pour beaucoup d'autres encore, le gouvernement a décidé de retirer le projet de loi. Cependant, aujourd'hui, on se rend compte qu'au sein de ce gouvernement, la bureaucratie, c'est très fort.

    En effet, les gens qui veulent demander plus de contrôle ont réussi à remettre le projet de loi à l'agenda, par le biais d'un ministre de la Défense qui, on l'a vu, n'avait pas nécessairement toutes les capacités voulues pour s'acquitter de sa tâche. Ainsi, on nous présente un projet de loi où, en bout de ligne, on a apporté quelques modifications.

    Le gouvernement s'est rendu aux arguments du Bloc en resserrant les critères d'admissibilité pour la création des zones militaires d'accès contrôlé. Mais—et c'est un «mais» important—c'est toujours le ministre seul qui a le pouvoir de mettre en place des zones militaires d'accès contrôlé. De même, dans le cas présent, c'était le même ministre qui avait omis d'aviser son gouvernement dans l'affaire des prisonniers de guerre afghans.

    Il semble que, au sein de ce gouvernement, des erreurs de jugement, il peut s'en faire de façon répétée. Le Canada a un engagement international en Afghanistan, et on apprend, par des photos dans le Globe and Mail, que des Afghans ont été faits prisonniers par des militaires canadiens. Le premier ministre lui-même n'avait pas été informé de cela en temps et lieu.

    On s'imagine ce que cela donne comme évaluation des erreurs qui peuvent être faites et qui pourraient pénaliser beaucoup les citoyens du Québec et du Canada. Aujourd'hui, on a un nouveau ministre de la Défense qui ne possède pas d'expertise particulière dans ce domaine et qui risque d'avoir à prendre des décisions rapidement.

    Imaginons que le projet de loi est adopté tel quel. Cela veut dire que, dès l'automne prochain, le nouveau ministre de la Défense, qui aura tout juste eu le temps de faire le tour de ses dossiers, aura peut-être à prendre une décision par rapport à des choses comme celles-là sans nécessairement être suffisamment encadré par cette législation pour être sûr qu'il ne se produira pas d'erreurs.

    On ne parle pas d'erreurs qui auraient des effets mineurs. On parle de conséquences concernant le fait de déterminer des zones militaires d'accès contrôlé. À ce moment-là, si des erreurs sont commises par les militaires, le citoyen, qui est la victime de ces erreurs, n'aura pas le droit d'intenter des poursuites. Il est clairement établi qu'il ne pourra pas revenir contre le gouvernement et obtenir des compensations.

    On peut effectivement s'interroger beaucoup sur ce qui fait que, après avoir retiré le projet de loi C-42, ce gouvernement, qui avait vraiment devant lui tous les arguments pour effectivement le retirer, nous en ramène un qui n'est pas plus clair que cela.

    Qu'est-ce qui fait qu'encore une fois, quelque part dans la haute fonction publique fédérale, on ait décidé qu'on pesait sur l'accélérateur et qu'on voulait des normes de contrôle? À mesure qu'on mettait de telles normes de contrôle, cela donnait plus de pouvoirs à l'appareil.

    On devait se dire que si on avait la chance d'avoir un ministre qui n'allait pas jusqu'au fond des choses, il devenait notre haut-parleur et, de cette façon, on s'attribuait un pouvoir qui est démesuré.

    Cette question était bien soulevée par le Bloc québécois. Je souhaite que le gouvernement en vienne à amender sa position et à corriger la situation de telle façon que ce ne soit pas un ministre seul qui ait le pouvoir de mettre en place des zones militaires d'accès contrôlé.

    Il y a un autre aspect, soit que l'approbation du gouvernement du Québec ou d'une autre province n'est toujours pas requise quant à l'établissement d'une zone militaire d'accès contrôlé sur son territoire.

    Est-ce que ce ne serait pas un bon mécanisme de tampon de s'assurer que lorsque le ministre, par l'influence de ses hauts fonctionnaires et des officiers de haut rang, en arrive à vouloir établir une zone militaire d'accès contrôlé, il puisse aller vérifier si la province concernée est d'accord?

    Si c'est justifié, si c'est une décision qui est pertinente, ils sont tous capables de prendre des positions qui soient correctes en bout de ligne. Cependant, si on ne se donne pas cette marge, à ce moment-là, cela devient un pouvoir qui est trop large, qui n'est pas acceptable pour le Bloc québécois et qui ne permet pas d'assurer le gouvernement du Québec d'un rôle suffisant. Cela nous apparaîtrait important.

  +-(1740)  

    Souvenons-nous de tout ce qui est autour de la Citadelle, à Québec. À l'Assemblée nationale du Québec, on est donc très près des installations militaires. Lorsque les militaires vont décider de la zone—même si on dit toujours qu'on va protéger particulièrement tout ce qui est la propriété militaire—, c'est évident que dans des zones tampons très restreintes, comme celles que l'on voit par exemple entre le manège militaire et l'Assemblée nationale du Québec, on pourrait créer une situation tout à fait inacceptable, créer des étincelles et des provocations qui pourraient être très peu raisonnables et qui font que ce projet de loi ne peut pas être accepté comme tel.

    On nous parle également du critère du «raisonnablement nécessaire» pour la création des ces zones de sécurité militaire. Cela n'a pas vraiment changé par rapport au projet de loi C-42. C'est toujours très discrétionnaire. La discrétion est utilisée dans ce gouvernement. On l'a vu dans toutes sortes de dossiers au cours des derniers mois. On voit comment cela peut être dangereux. Parfois, cela leur permet d'encourager leurs petits amis, mais cela pourrait également amener des décisions qui pénalisent des citoyens et des citoyennes de façon inacceptable. Je pense qu'il faut un resserrement de ce côté-là.

    Il y a un autre aspect que je mentionnais, soit que les citoyens qui peuvent être lésés n'ont pas de droit d'appel et de possibilités d'intenter des poursuites pour dommages, pertes ou blessures. Tout à l'heure, on parlait de zones protégées d'accès contrôlé dans des secteurs urbains. Il pourrait facilement arriver qu'un officier ou un soldat pose des gestes inacceptables. Tel que le projet de loi est rédigé, c'est: «Endure mon garçon. Tu fais partie d'un pays où, quand les militaires ont ce type de pouvoir, ils peuvent l'exercer même s'ils font une erreur.» Ils ne sont pas obligés de s'en défendre. Cela a pour conséquence d'encourager l'état d'esprit suivant: «C'est le «free for all». Allons-y comme bon nous semble. De toute façon, on ne peut pas être poursuivis.»

    Dans ce sens, je pense que le projet de loi est encore mal fignolé. Il devrait retourner à l'étude. On devrait s'assurer cette fois-là qu'il sera vraiment le résultat du travail des parlementaires plutôt que de celui de la haute fonction publique.

    Dans le projet de loi, on nous parle aussi des motifs de relations internationales, de défense ou de sécurité nationale pour lesquelles les zones de sécurité militaire pouvaient être créées en vertu du projet de loi C-42. Ils ne sont pas repris dans le projet de loi C-55. Au lieu d'énumérer une liste de critères et de motifs pour la création de ces zones, il n'y en a plus d'aussi précis. On accroît la marge de manoeuvre de la discrétion du ministre et on va plus loin encore dans l'aberration qu'on avait dans le projet de loi C-42. C'est une autre situation qui mérite d'être corrigée.

    Je pense que c'est également bon pour l'ensemble des citoyens et citoyennes de bien réfléchir à l'échange de lettres qu'il y a eu entre les ministres concernés et le commissaire à la protection de la vie privée. On s'est rendu compte qu'il y avait beaucoup de lacunes dans ce projet de loi et que le commissaire à la protection de la vie privée craignait beaucoup qu'on en arrive à créer l'équivalent d'un État policier. Il y a des choses importantes à corriger à cet égard.

    En ce qui concerne les arrêtés d'urgence, encore là, il y a trop d'imprécisions. Au plan des renseignements, beaucoup d'éléments font en sorte que des informations peuvent être fournies à la GRC et au SCRS. On n'a pas véritablement une démarche claire, précise et nette pour les comprendre.

    En vertu de l'ensemble de ces arguments, il nous apparaît que le projet de loi, tel que rédigé et même s'il porte un autre numéro, n'est qu'une autre mauvaise version de l'idée originale contenue dans le projet de loi C-42.

    Effectivement, il faut faire la guerre au terrorisme et s'assurer qu'il puisse être combattu, mais il ne faut pas le faire en faisant disparaître des droits et en créant un État qui, en bout de ligne, fait l'affaire des terroristes parce qu'il crée une société moins libre et moins équilibrée.

    Dans ce sens, je pense que les arguments d'opposition présentés par le Bloc québécois, qui ont amené le retrait du projet de loi C-42, méritent ici d'être encore entendus afin qu'on modifie le projet de loi C-55 de façon très importante.

    C'est pour cette raison que je vais voter contre le projet de loi et inciter les députés de cette Chambre à faire de même afin que beaucoup de corrections soient apportées. Si jamais le projet de loi n'est pas retiré, il faut à tout le moins que des amendements en profondeur soient présentés en comité pour qu'il devienne acceptable.

  +-(1745)  

[Traduction]

+-

    Mme Diane Ablonczy (Calgary--Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le projet de loi C-55 remplace le projet de loi initial de lutte contre le terrorisme qui a été mis à la poubelle en raison de toute l'opposition et l'indignation qu'il a soulevées.

    Cette mesure vise à renforcer la loi contre le terrorisme. Tous les Canadiens désirent de vigoureuses mesures les mettant à l'abri d'attaques ou d'activités terroristes possibles au pays. Nous voulons vivre en sécurité.

    Malheureusement, le projet de loi présente aussi des lacunes criantes. Il modifierait 19 lois différentes, mettrait en oeuvre un traité international et aurait une incidence sur neuf ministères distincts.

    Le projet de loi soulève trois problèmes. Le premier, c'est qu'il s'agit en grande partie d'une mauvaise imitation de la loi américaine sur la sécurité du transport aérien. C'est un gouvernement qui aime toujours ridiculiser et décrier tout ce qui vient des États-Unis, mais voici qu'il présente un important projet de loi qui n'est vraiment qu'une imitation d'un projet de loi américain, qui laisse d'ailleurs à désirer.

    Le deuxième problème que pose le projet de loi, et le plus important, c'est qu'il représente somme toute une façon pour le Cabinet de s'arroger d'énormes pouvoirs.

    Le troisième problème que présente le projet de loi, c'est que c'est trop peu, trop tard. Les États-Unis, que les libéraux imitent en l'occurrence, ont mis à peu près six semaines à établir un projet de loi dans la foulée des événements du 11 septembre, pendant même qu'ils faisaient face à une alerte à la maladie du charbon et que des membres du gouvernement recevaient de l'anthrax par la poste.

    Le gouvernement a maintenant eu huit mois pour agir, et le projet de loi ne fait que mettre en place de timides demi-mesures et prévoir une concentration de pouvoirs.

    Le problème que présente le projet de loi en ce qui concerne la concentration de pouvoirs, c'est qu'il autorise certains ministres à prendre ce qu'il est convenu d'appeler des arrêtés d'urgence. Ces arrêtés autoriseraient ces ministres à agir sans consulter qui que ce soit. Ils n'auraient pas à consulter le Cabinet, et encore moins le Parlement ou qui que ce soit d'autre.

    Les ministres détenteurs de ce pouvoir seraient le ministre de l'Environnement, le ministre de la Santé, le ministre des Pêches et des Océans et le ministre des Transports. Toutefois, l'augmentation des pouvoirs conférés à ces ministres ne s'accompagne pas de mesures précises. Nul cadre ne précise les circonstances dans lesquelles les ministres pourraient exercer ce genre de pouvoir débridé.

    Les Canadiens qui regardent le débat peuvent se dire que cela est insensé. Ils se disent probablement qu'en cas de crise grave, quelqu'un devrait être capable de réagir sur-le-champ.

    Tous sont peut-être d'accord là-dessus, mais j'entrevois trois problèmes. Premièrement, les ministres du gouvernement n'ont pas le type de compétence et n'inspirent pas la confiance qui nous permettraient d'être à l'aise s'ils détenaient d'aussi vastes pouvoirs.

    Je ne me réjouis pas de dire cela, même en tant que députée de l'opposition. Comme Canadienne, je veux avoir la certitude que les ministres avec lesquels je peux fort bien être en désaccord ou que je peux critiquer de temps à autre soient des personnes fondamentalement compétentes, honnêtes et dignes de foi.

    Comme nous l'avons vu au cours des dernières semaines, nous devons nous demander s'il en est ainsi. Pas plus tard qu'hier, le premier ministre a destitué un ministre très important, le ministre de la Défense, qui avait perdu toute crédibilité et la capacité d'agir au nom des Canadiens.

    D'autres ministres ont dû renoncer à des fonctions dont ils n'étaient clairement pas à la hauteur.

    Si le gouvernement veut conférer ce type de pouvoir à des ministres, il ne pourra le faire que si ceux-ci affichent un comportement susceptible d'inspirer aux Canadiens un niveau élevé de confiance.

  +-(1750)  

    Je dirais, et malheureusement je crois que la plupart des Canadiens seraient d'accord avec moi, que nous n'avons pas vu nos ministres afficher le niveau de compétence, de confiance, de sérieux et de capacité qui nous inciterait à accepter qu'ils détiennent ce type de pouvoir.

    Deuxièmement, les pouvoirs dont il est question sont tout simplement trop vastes. Si l'on confie des pouvoirs sans contrôle, il faudrait au moins définir les circonstances et le cadre de leur exercice. Le projet de loi ne précise même pas les circonstances. Les ministres pourraient agir unilatéralement sans même consulter leurs collègues du Cabinet.

    On soutiendra peut-être que, en cas d'urgence, il pourrait arriver qu'un ministre doive le faire. N'empêche, il faudrait quand même essayer de cerner ou de définir ces pouvoirs ou de formuler des lignes directrices sur les circonstances justifiant des décisions unilatérales de la part des ministres.

    Il est renversant de voir un projet de loi prévoir qu'un ministre peut agir unilatéralement sans même indiquer dans quelles circonstances cela pourrait être approprié.

    Je dirais que même les ministres aimeraient avoir des lignes directrices quelconques pour les guider et les aider, eux et leurs conseillers, à déterminer quand ils peuvent se permettre d'agir sans parler à personne et quand ils doivent prendre quelques minutes pour consulter avant d'agir.

    Le Parlement abdique ses responsabilités en confiant ce genre de pouvoirs à un ministre sans lui fournir des directives, de l'aide ou des conseils en la matière.

    Le troisième problème que je vois avec ce genre de pouvoir non contrôlé, c'est qu'on ne suggère pas le type de ressources qu'un ministre peut mettre en oeuvre. Si le ministre fait intervenir certaines ressources, telles que des employés, des règles, des lois ou quoi que ce soit d'autre, il devra en faire part aux gens de son ministère ainsi qu'aux autres ministères, car aucun ministère n'agit seul. Si le ministre consulte toutes les personnes intéressées par sa décision et communique avec elles, pourquoi ne prendrait-il pas le temps de faire cela, et pourquoi les autres élus qui assument des responsabilités supérieures ne sont-ils pas mis au courant? Personne n'a posé la question.

    Si vous ou moi étions ministre, monsieur le Président, je suis sûre qu'avant de prendre une mesure ferme, immédiate et unilatérale, nous tâcherions au moins de connaître l'avis des personnes les plus expérimentées, les plus sensées, les plus respectées et les plus averties que l'on puisse trouver.

    Il me semble que toute la prémisse sur laquelle s'appuie le pouvoir accordé par le projet de loi n'a aucun sens. Elle est contraire à ce que ferait une personne raisonnable, réfléchie et compétente.

    Il m'apparaît très risqué de permettre à un ministre d'agir à sa guise. Cela n'a aucun sens. C'est ouvrir la porte à des irrégularités. Le gouvernement fédéral ne fait qu'affirmer par là qu'il fera bien ce qu'il entend et que nous ne pouvons remettre en question ses actions parce qu'il agit dans l'intérêt supérieur du pays.

    Je ne crois pas que les Canadiens avalent ce genre de choses et que de telles pratiques apportent de bons résultats. Je ne pense pas que cela va mieux nous protéger. Je dirais aux députés qu'il faut traiter sérieusement de la question avant d'adopter ce projet de loi.

  +-(1755)  

[Français]

+-

    M. Yvon Godin (Acadie--Bathurst, NPD): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui sur le projet de loi C-55. Tout comme mes collègues qui ont pris la parole avant moi l'ont mentionné, ce projet de loi ne fait que démontrer le besoin de ce gouvernement à tout vouloir contrôler en justifiant que c'est pour le bien de la population. Par les temps qui courent, je suis inquiet quand on dit que le gouvernement veut tout contrôler.

    Avec les derniers faits que nous avons tous appris dernièrement sur ce gouvernement, il est bien difficile de croire que ses actions se font dans un esprit de bien-être pour la population. Disons plutôt que c'est pour le bien-être d'une minime partie de la population. Comment justifier que c'est pour le bien de la population, alors qu'une seule personne sera en mesure d'en juger?

    Pour ma part, je résumerai cela en disant que ce sera un ticket de non-retour si le mandat de juger de ce qui est sécuritaire pour la population canadienne est entre les mains d'une seule personne. Avec un projet de loi aussi antidémocratique, le gouvernement ne fera que contourner ce que le pays a essayé de construire depuis un siècle, soit un réel processus démocratique. La population canadienne doit être rassurée, mais ce projet de loi n'est pas le meilleur outil pour le faire.

    Des milliers de personnes meurent à chaque année, que ce soit au travail, à cause d'un individu, d'un membre de la famille ou d'une connaissance. Ces vies perdues méritent toute notre attention, mais cela doit être étudié dans un processus parlementaire démocratique, tout comme ce projet de loi devrait l'être.

    Le NPD n'est pas catégoriquement en désaccord avec ce projet de loi et appuie quelques aspects spécifiques comme: la chasse au financement des groupes terroristes; les nouveaux délits criminels quant aux menaces de bombe; l'implantation de conventions internationales pour combattre la prolifération d'armes biologiques, explosives et le passage clandestin d'individus par le crime organisé.

    Cependant, le projet de loi implique beaucoup plus que cela. Pour le reste, nous jugeons que le contenu de ce projet de loi va beaucoup trop loin que ce qu'un ministre devrait avoir comme pouvoir ministériel.

    On peut se rappeler de ce qui est arrivé lors du Sommet de l'APEC. On n'avait même pas un projet de loi comme celui que le gouvernement a présentement et la GRC a utilisé du poivre de Cayenne. On a vu les images à la télévision. La personne était assise tranquillement et le policier de la GRC est arrivé avec le poivre de Cayenne et lui a dit: «Tu sors de là!» Elle s'est levée pour partir et a reçu du poivre de Cayenne. Avec le nouveau projet de loi, il n'aurait même pas de recours pour se défendre. C'est inacceptable. C'est incroyable dans un pays démocratique comme le Canada que l'on soit rendu à ce point.

    Partout les gens disent: «Vous vivez dans le plus beau pays du monde», et on veut venir nous enlever notre démocratie de cette façon. On a questionné notre cher premier ministre là-dessus—aujourd'hui les gens remettent en question son gouvernement— et il a eu la réponse suivante: «Moi, du poivre, je mets ça sur mes steaks.» C'est comme si ce qui était arrivé en Colombie-Britannique était une blague; c'est comme si c'était une blague qu'il ne prenait pas au sérieux.

    Le G-8 va avoir lieu à Kananaskis. Le premier ministre nous dit: «On va être protégés, on a les ours dans le bois qui vont empêcher les manifestants de venir.» On devrait avoir un projet de loi qui permet aux ours d'aller partout au Canada pour protéger le gouvernement. C'est une vraie honte d'avoir un premier ministre qui dit des choses de la sorte.

    On va mettre notre démocratie en jeu pour un gouvernement qui n'est pas plus sérieux que ça! Dans les dernières semaines, on a vu ce qui s'est passé ici. Il a fait perdre la crédibilité des parlementaires avec tous les scandales, alors qu'il y a encore des parlementaires honnêtes. Aujourd'hui, les Canadiens et les Canadiennes disent dans les sondages que les parlementaires sont à 18 p. 100. C'est inacceptable et incroyable. Et on va mettre notre démocratie en jeu dans un tel projet de loi, alors que les Canadiens ont toujours le droit de manifester en vertu de la Charte des droits et libertés et en vertu des droits civils. Pourtant, aujourd'hui, on donne tout cela.

  +-(1800)  

    C'est pour cela que nous sommes obligés d'être contre ce projet de loi parce qu'il nous enlève des droits fondamentaux.

    Avec tout le respect que je vous dois, monsieur le Président, ce n'est pas au Canada que les avions ont percuté les édifices. Au Canada, on jouit d'une démocratie qu'on ne veut pas perdre. Je pense que partout dans le monde on nous respecte pour cela.

    Je ne parlerai pas de certaines choses qui m'ont été dites la semaine dernière quand j'étais à l'étranger, mais je peux dire qu'ils respectent les Canadiens et les Canadiennes et la manière dont nos lois sont faites et la liberté dont nous jouissons.

    Avec ce projet de loi, la GRC pourra tout connaître sur les gens qui prennent un avion. Pourquoi ont-il besoin de savoir cela? Pourquoi ont-il besoin de connaître la liste de tous ceux qui vont prendre l'avion aujourd'hui, alors que ce qui est important, c'est de faire en sorte que les personnes qui vont prendre l'avion ne sont pas dangereuses?

    Des mesures de sécurité ont été mises en place. Je pense que ce n'est pas facile de déjouer les mesures de sécurité au Canada. J'ai voyagé dans d'autres villes, notamment à Londres, à Bucarest et à Belgrade, et je peux affirmer que la sécurité n'était pas aussi renforcée qu'elle l'est ici au Canada. Le Canada n'est pas un pays en guerre. Il n'a pas les problèmes que l'on retrouve dans d'autres pays. Aujourd'hui, nous pourrions perdre notre démocratie à cause de ce qui se passe ailleurs.

    C'est pour cela qu'il faut faire attention. Notre démocratie repose entre les mains de personnes auxquelles les Canadiens ne font confiance que dans une proportion de 18 p. 100. On a un moyen problème. Il faut regarder cela sérieusement.

    Le député libéral de Mont-Royal dit—j'ai beaucoup de respect pour lui—à propos des droits civils:

Tout d'abord, même si le projet de loi tente de circonscrire les pouvoirs conférés initialement au ministre de la Défense nationale, dans le projet de loi C-42, pour qu'il puisse désigner toute partie du territoire du Canada comme zone militaire, la portée de ce pouvoir et son application continuent de faire problème.

    Le député libéral de Mont-Royal lui-même le reconnaît. Il est à souhaiter que ses collègues de l'autre côté de la Chambre le reconnaissent également. Il y a un libéral qui a le courage de se lever à la Chambre et de dire non aux libéraux et de leur dire que ce qu'ils font n'est pas correct. Je félicite le député de Mont-Royal. Il continuait en disant:

Il est vrai que le nouveau projet de loi marque un progrès par rapport au précédent, car l'application de ce pouvoir est limitée à la protection du matériel et des effectifs militaires canadiens et alliés et son exercice est limité à ce qui est raisonnablement nécessaire à cette fin, alors que le projet de loi C-42 disait simplement que le ministre pouvait l'utiliser s'il le jugeait nécessaire pour des raisons de relations internationales, de défense ou de sécurité nationales.

    Cependant, à la minute où le ministre de la Défense nationale décide d'envoyer des militaires au cours d'une manifestation, automatiquement, on se retrouve dans une zone militaire. C'est ce qui est arrivé à Québec lorsque les gens ont protesté lors du Sommet. Ils ont utilisé des fusils avec des balles de caoutchouc qui ont frappé des personnes innocentes qui exerçaient leurs droits.

    C'est arrivé alors qu'il n'y avait pas un projet de loi comme le projet de loi C-55. Au Canada, le problème c'est que le gouvernement a vendu le pays à cause de la globalisation. C'est ce qui est arrivé. Maintenant, ils sont soumis aux autres pays et veulent essayer de les protéger quand ils veulent venir ici et prendre nos acquis. Ils veulent les protéger avec des projets de loi semblables. Les Canadiens ne pourront même pas se défendre et se présenter devant ces groupes-là qui veulent détruire notre pays et notre démocratie canadienne.

    C'est à souhaiter que ce gouvernement change d'idée, que le projet de loi ne soit pas approuvé de la façon qu'il le veut et que des amendements positifs soient présentés dans le cadre du projet de loi C-55 de façon à assurer la protection des droits civils des Canadiens et des Canadiennes.

  +-(1805)  

+-

    Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, il m'apparaît très important de parler de ce projet de loi sur le terrorisme, qui est l'ancien projet de loi C-42 qui a été modifié en tenant compte d'un certain nombre de vives critiques faites par la Chambre, par le Bloc québécois en particulier. Ce projet de loi C-55 n'est pas du tout acceptable dans l'état dans lequel il est. C'est pourquoi nous préférons qu'il soit étudié en comité et fasse l'objet d'importants amendements.

    Je voudrais prendre un autre biais pour remettre en question le projet de loi. Je suis critique du Bloc québécois dans le dossier des Affaires étrangères. Il y a quelque temps, j'ai eu à débattre d'un projet de loi, soit le projet de loi C-35, dont l'ensemble des articles étaient appuyés à l'unanimité par tous les partis de la Chambre, sauf un article comportant trois éléments.

    Que disait ce projet de loi? Je ferai référence au fait que dans les fameuses zones militaires, on pense à la protection de Kananaskis. Or, dans le projet de loi C-35, on a adopté ceci:

    

10.1(1) La Gendarmerie royale du Canada a la responsabilité première d'assurer la sécurité pour le déroulement [...] de toute conférence intergouvernementale à laquelle plusieurs États participent et à laquelle assistent des personnes qui bénéficient de privilèges et d'immunités en vertu de la présente loi, et visée par un décret pris ou prorogé au titre de la présente loi.

    On dit bien «lors du déroulement d'une conférence intergouvernementale».

    Dans les paragraphes subséquents on dit:

    

(2) Dans l'exercice de ses responsabilités en vertu du paragraphe (1), la Gendarmerie royale du Canada peut prendre les mesures qui s'imposent, notamment en contrôlant, en limitant ou en interdisant l'accès à une zone dans la mesure et selon les modalités raisonnables dans les circonstances.

    

(3) Il est entendu que le paragraphe (2) est sans effet sur les pouvoirs que les agents de la paix possèdent en vertu de la common law ou de toute autre loi ou tout autre règlement fédéral ou provincial.

    Je veux soumettre à votre attention que les zones de sécurité militaire du projet de loi C-42, qui sont devenues des «zones militaires d'accès contrôlé» dans le projet de loi C-55, se voient proposer, entre autres fonctions, de protéger des personnes ou des biens qui seraient déployés ici à l'occasion de conférences internationales ou lors de la présence de personnalités sur le territoire.

    Pour commencer, je pourrais poser la question suivante: laquelle des deux lois aura priorité? Comment se négocieront les protections que doivent donner et la GRC et l'armée, d'autant plus que dans le cas du projet de loi C-55 on dit également, à l'article 260.1(12), et je cite:

    

(12) Les Forces canadiennes peuvent permettre, contrôler, limiter ou interdire l'accès à une zone militaire d'accès contrôlé.

    C'est d'ailleurs le cas pour un périmètre décidé par la GRC.

    Les arguments utilisés sont les mêmes. On peut se poser la question: qui, en effet, sera responsable? Ce qui est encore plus inquiétant, c'est que l'esprit est le même. L'esprit, c'est d'empêcher l'accès. Or, sur cette question, au Comité permanent des affaires étrangères, nous avons eu plusieurs témoignages très directs et très crus. On nous disait qu'on ne peut, de la sorte, interdire sans brimer les droits qui existent, pour ce qui est du Québec, en vertu de la Charte des droits et libertés, et quand on parle du Canada, en vertu de la Charte des droits de la personne. On ne peut donc le faire sans s'attaquer aux droits.

  +-(1810)  

    Or, rien dans ces projets de loi, que ce soit les projets de loi C-35 ou C-55, ne permet de penser que les citoyens seraient dans la situation de se défendre, de négocier et de discuter. Même les provinces ne sont pas dans cette situation.

    Quand nous avons débattu du projet de loi C-35, qui crée des zones ou des périmètres de sécurité, nous disions: «Pourquoi changer la dynamique actuelle». Concernant la dynamique actuelle—prenons l'exemple du Sommet de Québec, qui n'a pas été parfait, mais dont on a pu tirer certaines leçons pour ne pas les recommencer—, il y a des choses qui ont bien fonctionné.

    En effet, il y a eu négociations entre le Québec, la GRC et les forces de sécurité de la ville de Québec. On a fini par s'entendre avec le respect des forces policières qui, d'habitude, sont celles qui font respecter la loi dans la ville de Québec.

    Avec le projet de loi C-35, cette obligation de tenir compte des forces policières locales ne tient plus. Le projet de loi C-35 donne la pleine autorité à la GRC.

    En ce qui a trait à la création des zones militaires d'accès contrôlé, d'abord, la pleine autorité est donnée au ministre de la Défense. Le ministre de la Défense peut les créer. Maintenant, on dit que c'est plus limité que dans le projet de loi C-42 qu'on avait auparavant.

    Cependant, il faut quand même voir que cette limite peut bouger. C'est toujours intéressant de lire les textes de loi. J'aime toujours lire les textes de loi. Si c'est parfois un peu obscur, cela permet quand même de voir les intentions du législateur.

    On dit au paragraphe 260.1(3) du projet de loi C-55 que:

La zone militaire d'accès contrôlé est créée par désignation d'un terrain, d'un plan d'eau, d'un espace aérien ou d'une installation qui se rattache à un élément visé au paragraphe (1),

    Cela concerne les établissements de défense, et cetera.

ou qui le comprend, que cette zone soit fixe ou attachée à l'élément en cause;

    Donc, la zone peut se déplacer.

sont automatiquement compris dans la zone militaire d'accès contrôlé l'espace aérien, le sous-sol et les espaces sous-marins correspondants.

    Le paragraphe 260.1(2) du même projet de loi dit que:

Le ministre ne peut créer une zone militaire d'accès contrôlé qu'à la condition que la décision soit raisonnablement nécessaire:

    On retrouvait aussi, dans le projet de loi C-35, le mot «raisonnable». Il serait utile si on pouvait aller en cour pour faire établir ce que «raisonnablement» ou «raisonnablement nécessaire» veulent dire. Cependant, ce n'est qu'après coup qu'on pourra le faire. Et encore, on sait le temps que cela prend.

    Cela veut dire que ces mots pourront être utilisés à la discrétion totale du ministre de la Défense, dans le cas du projet de loi C-55, et de la GRC, dans le cas du projet de loi C-35.

    Il est clair qu'une telle zone militaire d'accès contrôlé peut être créée. Par exemple, on dit que cela peut se faire lorsqu'on retrouve:

[...] les navires, aéronefs ou autres biens sous l'autorité de toute force étrangère légalement présente au Canada au titre de la Loi sur les forces étrangères présentes au Canada ou à tout autre titre.

    Il est clair que l'avion du président Bush qui se déplace peut être une raison suffisante pour créer une zone militaire.

    Les citoyens doivent retenir que cela n'a pas de bon sens que le ministre de la Défense puisse, de lui-même, décider de ces zones avec toute sa discrétion et qu'il n'est tenu de venir devant le Parlement que dans les 15 jours si on siège. Si on ne siège pas, il peut prendre 15 jours, mais il peut s'installer, décider et, de toute façon, on sait qu'avec l'accord du parti d'en face, le débat qu'on fera sera un débat théorique.

  +-(1815)  

    Cela veut dire que le pouvoir, sans l'accord du Québec—je parle pour le Québec—ou sans l'accord d'une province, d'installer où bon lui semble des zones militaires d'accès contrôlé est entre les mains d'une façon totale et complète du ministre de la Défense. Il peut utiliser la force pour en extraire les personnes qui ne devraient pas être là. Celles-ci n'ont aucun droit même si elles habitent sur ce territoire. Elles n'ont droit à aucun dédommagement. C'est bien dommage.

[Traduction]

+-

    M. Peter MacKay: Monsieur le Président, avant d'entamer mes observations, je tiens à féliciter l'intervenante précédente. Cette députée contribue toujours grandement au débat. Elle prépare longuement ses observations, comme en témoigne son exposé.

    Ce projet de loi, tout comme bien d'autres, est présenté à la Chambre en raison d'événements qui ont secoué le monde, et il suscite une certaine agitation. Le projet de loi sur la sécurité publique est une reprise...

+-

    Le vice-président: À l'ordre. Je suis désolé d'informer le député qu'il a déjà pris la parole à l'étape de l'amendement du même projet de loi. Je dois donc demander à un autre député d'intervenir. Le député de Prince Albert a la parole.

+-

    M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous avons adopté le projet de loi C-36 et nous en sommes maintenant au projet de loi C-55. Comme le député allait le dire, ces projets de loi visent à traiter d'un nouveau paradigme, d'un nouveau phénomène qui existe actuellement dans le monde, soit la menace du terrorisme international, qui est devenue si évidente le 11 septembre dernier.

    Nous avons ce nouveau paradigme, mais comment le monde civilisé affronte-t-il ce problème? Quels sont les faits qui caractérisent ce phénomène de terrorisme international?

    Depuis dix ans ou dix ans et demi, dans divers endroits du Proche-Orient, des milliers de personnes reçoivent une formation pour devenir des terroristes internationaux. Elles sont disséminées partout dans le monde, dans des cellules latentes. Il s'agit d'un réseau très complexe. Il a été conçu pour fonctionner sans système de commandement central. Nous avons peut-être détruit ou fragmenté le commandement central et l'objectif du réseau, mais les cellules latentes existent.

    Comment le gouvernement a-t-il réagi à ce nouveau paradigme? Il semble penser que, s'il y a davantage de bureaucratie, de règlements, de lois, d'impôts, de violation des droits et d'intrusion dans la vie privée des citoyens canadiens, le problème disparaîtra, il aura été réglé en quelque sorte.

    Cette mesure législative laisse à désirer, tout comme le projet de loi C-36. Nous passons à côté de la plaque. La façon de régler ce problème, c'est par le biais de la sécurité, de nos forces armées et de la politique concernant l'immigration et les réfugiés. Il y a peut-être quelque chose qui m'échappe, mais je n'ai pas vu le gouvernement adopter bien des mesures dans ces trois domaines. Les forces armées et les services de sécurité manquent désespérément de ressources. Les politiques concernant l'immigration et les réfugiés semblent pratiquement inchangées.

    M. Warren Buffet, le président de Berkshire Hathaway, a des intérêts dans certaines des plus grandes compagnies d'assurance du monde entier. À l'occasion de l'assemblée annuelle de l'entreprise qui a eu lieu récemment, il a dit très clairement qu'il est absolument certain que les cellules en veilleuse frapperont de nouveau et causeront des dommages incommensurables au monde occidental. Il y a une dizaine de jours, le vice-président des États-Unis, M. Cheney, a réitéré qu'il est absolument certain que ces individus frapperont de nouveau et qu'ils frapperont très fort.

    Ce qui m'inquiète et ce qui devrait inquiéter le gouvernement, c'est l'inconscience dont ce dernier semble faire preuve dans tout cela. À mon avis, de nombreux députés du parti ministériel croient que la crise est terminée, qu'elle est chose du passé et que nous pouvons reprendre nos activités habituelles. Ils semblent penser qu'une taxe de 24 $ pour la sécurité aérienne réglera le problème.

    Ce qui va finir par arriver, même si j'espère qu'il n'en sera rien, c'est que nous allons nous réveiller un bon jour avec une reprise des événements du 11 septembre. Quelque chose d'autre va se produire. J'espère que les auteurs de ces attentats ne viendront pas du Canada. Si c'était le cas, je pense que nos échanges commerciaux avec les États-Unis cesseraient en 24 heures. Notre pays serait en grave difficulté. Les gens examineraient la situation en rétrospective et se diraient que le gouvernement a eu la possibilité de mettre en place des mesures pour venir à bout de cette menace, mais qu'il n'a rien fait. Ils se diraient que le gouvernement était trop occupé à accorder des marchés lucratifs et ce genre de choses pour régler les problèmes si flagrants aux yeux des Canadiens.

  +-(1820)  

    Je parle ici de prévoyance. L'analyse a posteriori est parfaite, mais le gouvernement n'a pas réglé la véritable cause de la menace terroriste internationale. Il fait fi du problème central et oublie l'essentiel. Je ne le dirai jamais assez.

    S'il survenait un autre 11 septembre et si l'on découvrait que le problème tient à une faiblesse du système canadien d'immigration et du statut de réfugié, je suis presque sûr que notre frontière avec les États-Unis ne serait plus jamais la même. Nous en paierions le prix dans tous les secteurs de l'économie. Les problèmes que nous éprouvons depuis un an ne seraient rien à côté de ce que nous aurions alors à subir.

    Je voudrais que, au moyen d'un projet de loi comme le C-55, le gouvernement fasse vraiment quelque chose à l'égard des trois secteurs que j'ai mentionnés. Ce n'est pas le cas, toutefois. Ce n'est pas en créant des zones militaires ni en conférant davantage de pouvoirs aux ministres qu'on résoudra le problème. C'est là réagir plutôt qu'agir. Le gouvernement devrait plutôt veiller à prendre les mesures qui s'imposent pour empêcher qu'il n'arrive quoi que ce soit plutôt que d'essayer de réagir après coup. Il serait alors trop tard. Notre pays serait déjà dans un sérieux pétrin.

    Ce qui est plutôt troublant avec le projet de loi, c'est qu'au lieu de régler les vrais problèmes qui assaillent les Canadiens et de prévoir des mesures pour minimiser les risques, il concentre davantage de pouvoirs dans un moins grand nombre de personnes sans obliger celles-ci à rendre davantage de comptes. Ce n'est pas une bonne chose en démocratie.

    Notre société a été bâtie sur l'ouverture. Elle a été bâtie sur la primauté du droit et la transparence. Elle a été bâtie sur la liberté et sur la capacité de prendre des décisions qui ont été données aux citoyens. Ce sont là des éléments clés de notre mode de vie occidental. Chaque fois qu'un gouvernement obtient davantage de pouvoir et n'est pas tenu de rendre des comptes, il peut agir dans le secret, se placer au-dessus de la loi et ne pas tenir compte du droit à la vie privée et d'autres questions. Ce n'est pas bon signe. Dans une société démocratique, un gouvernement qui emprunte la voie dans laquelle s'est engagé le gouvernement libéral aide les terroristes internationaux de bien des façons.

    Les terroristes internationaux veulent détruire notre mode de vie. Ils n'accordent aucune importance à la liberté de l'individu. Ils ne respectent pas notre liberté économique et politique. Ils ne respectent pas la primauté du droit ou notre société civile ouverte. Dans leur esprit, c'est là l'ennemi et ils vont tout faire pour le détruire.

    Le gouvernement s'empresse de donner plus de pouvoir au Cabinet et au premier ministre dans une atmosphère de secret dénuée de transparence. Ce faisant, il ne s'occupe pas de questions importantes comme le besoin d'accroître nos ressources militaires et les forces de sécurité. Il ne cherche pas à vraiment corriger notre système d'immigration et de détermination du statut de réfugiés. Sous prétexte de s'occuper de sécurité, le gouvernement cherche à donner plus de pouvoir au premier ministre et à son petit groupe de collaborateurs. Ce n'est pas ainsi qu'on va régler le problème. Ce n'est pas ainsi qu'on va trancher la question.

  +-(1825)  

+-

    Le vice-président: Comme il ne reste qu'un minute pour la période réservée aux initiatives ministérielles, y a-t-il consentement unanime pour dire qu'il est 18 h 30?

    Des voix: D'accord.

-MOTION D'AJOURNEMENT

[Ajournement]

*   *   *

    L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

*   *   *

[Traduction]

+-Les marchés publics

+-

    M. Jim Pankiw (Saskatoon--Humboldt, Ind.): Monsieur le Président, des ministres libéraux ont été pris en flagrant délit de manquement aux lignes directrices du gouvernement en matière de conflits d'intérêts en aidant des amis et des partisans à obtenir des emplois dans la fonction publique et des marchés publics. La vérificatrice générale a demandé à la GRC d'enquêter sur l'octroi de contrats de la part de Travaux publics et Services gouvernementaux sous la direction entachée de scandales d'Alfonso Gagliano et de son successeur à la tête du ministère des Travaux publics, qui est maintenant redevenu leader du gouvernement à la Chambre.

    Étant donné les nouvelles révélations de scandales entourant l'ex-ministre de la Défense limogé, la situation semble n'être que la partie émergée de l'iceberg. Il existe une longue histoire libérale de corruption, en commençant par la condamnation de l'ancien ministre libéral Pierre Corbeil pour trafic d'influence pour culminer avec les récents scandales aux Travaux publics et à la Défense.

    Les problèmes de corruption illustrent encore davantage le manque de normes d'éthique et d'intégrité manifesté par le gouvernement libéral. Une enquête en bonne et due forme s'impose. Les Canadiens méritent de connaître la vérité et de savoir jusqu'à quel point les ministres libéraux ont abusé des fonds publics en attribuant par favoritisme des contrats à leurs amis et à leurs partisans. Il est clair que les libéraux devraient respecter leur promesse électorale de 1993 d'instituer un poste de conseiller en éthique responsable devant le Parlement. M. Wilson n'est rien de plus qu'une figure de proue sans aucun pouvoir réel.

    Les Canadiens doivent savoir l'étendue de la corruption chez les libéraux. Pour cela, il faut tenir une enquête indépendante approfondie sur les abus de l'attribution des marchés publics par le gouvernement. On sait maintenant l'étendue des abus commis par les libéraux qui se sont servis du programme de commandites du gouvernement comme d'une caisse noire. Ce programme a donné lieu à tant de corruption que la vérificatrice générale a été appelée à ouvrir une enquête. Les marchés publics doivent être soumis à l'examen par le Parlement plutôt que de faire l'objet de tractations entre les argentiers des libéraux et leurs partisans.

    J'ai demandé au cours de la période des questions pourquoi les libéraux, lorsqu'ils étaient dans l'opposition, sautaient sur chaque rumeur de conflit d'intérêts, de favoritisme politique ou de scandale de cette nature pour réclamer une enquête indépendante approfondie alors que maintenant qu'ils forment le gouvernement ils refusent de tenir de telles enquêtes quoique les situations de conflits d'intérêts abondent.

    Le ministre s'est contenté de répondre que ma question était aussi claire que de la boue. J'ai répété textuellement ce que le ministre avait dit à la Chambre lorsqu'il était dans l'opposition. Il avait réclamé que la Chambre examine tous les aspects de l'attribution des marchés publics et notamment ceux concernant la fourniture de services de publicité. Il avait mentionné expressément les contrats de publicité. Il avait présenté une motion à la Chambre pour exiger une enquête parlementaire.

    J'ai terminé ma question en demandant si le ministre garantirait qu'un comité parlementaire examine tous les contrats attribués avec la caisse noire du programme de commandites et que le gouvernement applique les recommandations de la vérificatrice générale au sujet du scandale. Il a répondu que ma question était deux fois moins claire que ne l'était celle que j'avais posée précédemment.

    Le ministre évite totalement de répondre à mes questions. Celles-ci sont claires, simples et explicites. Je veux savoir pourquoi il y a deux poids et deux mesures. Les libéraux réclamaient des enquêtes indépendantes sur les cas de conflit d'intérêts, de favoritisme politique et de scandale quand ils étaient dans l'opposition. Maintenant qu'ils forment le gouvernement et qu'ils sont empêtrés dans les mêmes problèmes, pourquoi ne veulent-ils plus d'enquêtes? La question est simple et explicite. J'aimerais obtenir une réponse.

  +-(1830)  

+-

    M. Paul Szabo (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, le député soulève plusieurs questions qui ont évolué depuis quelques jours et quelques semaines.

    Je rappelle au député que, lorsque ces allégations ont été faites concernant Groupaction, le dernier ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux a collaboré ouvertement avec la Chambre. Il a fourni des documents à tous les partis. De plus, pour éviter l'exacerbation de la situation, il a immédiatement pris des mesures, dont le moratoire sur tout autre versement de fonds en vertu d'offres à commandes au titre des programmes de commandites.

    À mesure que le dossier évoluait, le ministre s'est demandé s'il aurait à sa disposition les ressources et les renseignements nécessaires pour répondre à toutes les questions de tous les députés. Le ministre a conclu que non et il a renvoyé le dossier à la vérificatrice générale aux fins d'une étude exhaustive et approfondie.

    Le député sait que la vérificatrice générale a rédigé son rapport et l'a présenté. Il est regrettable que la vérificatrice générale ait précisément nommé deux hauts fonctionnaires qui semblent avoir contrevenu aux procédures ministérielles et toute la question fait maintenant l'objet d'une enquête par la GRC.

    Le gouvernement n'a pas hésité à réagir aux circonstances à mesure qu'elles évoluaient.

  +-(1835)  

+-

    M. Jim Pankiw: Monsieur le Président, la vérificatrice générale n'a pas dit que ces personnes semblaient avoir enfreint les règles. Elle a dit que les hauts fonctionnaires avaient enfreint à peu près toutes les règles. C'est pourquoi elle a renvoyé la question à la GRC.

    On n'a toujours pas répondu à ma question. Quand ils étaient dans l'opposition, en réponse aux accusations de corruption, de pot-de-vin, de gratification pour service rendu et de conflit d'intérêts, les libéraux ont réclamé la tenue d'enquêtes publiques indépendantes complètes. Aujourd'hui, le gouvernement libéral est secoué par de multiples scandales, comme celui dont les médias nous ont informés ce week-end et qui concerne le ministre de la Défense nationale, qui a été forcé de démissionner pour avoir accordé un contrat sans appel d'offres à son ancienne amie de coeur.

    Compte tenu de ces scandales, des allégations relatives aux programmes de commandite et aux apparences de conflits d'intérêts, pourquoi les libéraux ne font-ils pas ce qu'ils demandaient lorsqu'ils étaient dans l'opposition, à savoir tenir une enquête publique indépendante, transparente, approfondie et complète sur toute la question?

+-

    M. Paul Szabo: Monsieur le Président, la vérificatrice générale est une mandataire du Parlement; elle est indépendante et parfaitement capable de s'occuper de la question. Elle s'est engagée à procéder à un examen approfondi de la question et elle en fera rapport dans le délai prescrit. De plus, en ce qui concerne la question examinée initialement et qui a trait aux trois contrats de Groupaction, une enquête de la GRC est actuellement en cours pour déterminer si des choses illégales ont été faites, bien qu'on ne soit au courant d'aucune illégalité.

    En guise de conclusion, je ferai remarquer que les termes utilisés par le député, soit corruption, pot-de-vin, gratification pour service rendu, etc., renvoient à des actes illégaux dont on doit être non seulement accusé, mais encore trouvé coupable. Ce n'est pas le cas. Le député devrait donc utiliser des termes moins forts et être plus respectueux de l'institution qu'est le Parlement.

*   *   *

+-Les campagnes à la direction

+-

    M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui parce que je n'ai pas eu de réponse du ministre de l'Industrie aux questions précises que je lui ai posées trois jours d'affilée. Par conséquent, j'estime que je dois intervenir à ce moment-ci de la journée. Le problème a été soulevé fin avril. Il a été révélé par le journal Free Press de Winnipeg dans un article sur le ministre de l'Industrie et son collaborateur M. Satpreet Thiara. L'article précisait:

Le ministre de l'Industrie...n'a pas remis de relevés de voyage pour expliquer l'achat de billets d'avion d'une valeur supérieure à 5 200 $ pour un de ses collaborateurs qui se trouve au centre d'allégations que l'argent des contribuables sert à financer la campagne [du ministre] à la direction du Parti libéral. Après une enquête de trois mois, y compris une demande en vertu de la Loi sur l'accès à l'information pour obtenir les relevés de voyage en question, le Free Press a révélé que, au cours de la dernière quinzaine de novembre, le précédent ministère du ministre, Santé Canada, avait réservé six billets d'avion d'une valeur supérieure à 5 200 $ pour Satpreet Thiara, son adjoint spécial. Cinq des billets étaient pour Winnipeg. On ne sait pas à quelle date les billets ont été utilisés ni s'ils l'ont même été. Le cabinet du ministre n'a toujours pas remis de note de frais indiquant qui a autorisé l'achat des billets d'avion, ni le moindre détail concernant les dépenses encourues par Thiara pour ses repas et son logement. Le cabinet du ministre a refusé les nombreuses demandes d'explications de Free Press concernant l'absence de demande de remboursement et autres documents de voyage reliés aux billets d'avion.

    Plus loin, l'article dit:

Thiara est un personnage central de la campagne à la direction du Parti libéral fédéral au Manitoba. Dans une interview donnée à l'automne dernier, Thiara admettait que la campagne à la direction du parti du ministre avait dépensé plus de 60 000 $ pour acheter des cartes de membres et de délégués afin d'inonder les élections à l'organe exécutif du parti au Manitoba le 1er décembre.

Thiara a confirmé au cours de cette entrevue qu'il s'était souvent rendu au Manitoba pendant le mois de novembre pour le gouvernement, ce qui lui permettait fréquemment de travailler à la campagne du ministre à ses moments perdus, le soir et pendant les week-ends. Thiara a dit qu'il n'avait pas demandé un congé parce qu'il travaillait principalement pour le gouvernement.

    Pendant trois jours d'affilée, l'opposition est intervenue à la Chambre et a posé des questions très simples au ministre de l'Industrie, qui revenaient tout simplement à savoir ce que son adjoint spécial fait pour lui. Que fait Satpreet Thiara? Quelle est sa description de poste? Les Canadiens pourraient enfin savoir s'il travaille vraiment pour le gouvernement ou s'il ne travaille pas plutôt à temps plein à la campagne du ministre à la direction du Parti libéral.

    J'aimerais que le gouvernement réponde à cette question très précise que nous avons posée à maintes reprises. Qu'est-ce que ce collaborateur du ministre de l'Industrie fait quand il est en voyage d'affaires officiel au nom du gouvernement du Canada?

  +-(1840)  

+-

    M. Paul Harold Macklin (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec attention les propos du député, que je trouve plutôt déroutants. Comme c'est une question complexe, je pourrais peut-être lui en décortiquer les éléments essentiels.

    Plus tôt ce printemps, le Conseil du Trésor a clarifié ses lignes directrices concernant la communication de renseignements personnels, aux termes de la Loi sur l'accès à l'information, par les ministres et le personnel exonéré. Selon ces lignes directrices, les noms des intéressés et leurs dépenses peuvent être divulgués. Le premier ministre a précisé que ses ministres et le personnel exonéré devraient consentir à dévoiler leurs dépenses effectuées à même les fonds publics.

    Le ministre de l'Industrie a toujours affirmé que son bureau s'était conformé à l'esprit et à la lettre des lignes directrices en vigueur.

    Je reviens maintenant aux points précis soulevés par le député dans sa question.

    À la lumière de la courte explication que j'ai donnée, les députés peuvent conclure que la divulgation faite par le cabinet du premier ministre est tout à fait conforme aux lignes directrices émises par le Conseil du Trésor, ainsi qu'à la directive du premier ministre concernant la divulgation des dépenses. En fait, le ministre de l'Industrie l'a lui-même confirmé à de nombreuses occasions, comme l'a mentionné le député.

    Je sais que le ministre prend sa responsabilité de rendre compte de l'utilisation des fonds publics très au sérieux. Il a souvent expliqué que seules les dépenses engagées pour des activités pour le compte du gouvernement sont remboursées et que les dépenses qui ne sont pas reliées à de telles activités ne font pas l'objet d'une demande de remboursement.

    Le remboursement de toutes les dépenses engagées pour des affaires de l'État a été réclamé et toute l'information pertinente a été produite. Franchement, le ministre et son cabinet ont fait preuve d'une grande ouverture.

+-

    M. James Rajotte: Monsieur le Président, le fait est que ces renseignements n'ont pas été présentés. C'est ce dont il est question.

    Au-delà de cela, revenons-en à la question que j'ai posée, sauf erreur, à trois reprises à la Chambre. Le ministre de l'Industrie pourrait-il préciser aux Canadiens aujourd'hui le travail précis que M. Thiara accomplit pour le ministère de l'Industrie? On n'a pas répondu à cela. Le ministre ne veut-il pas expliquer aux Canadiens ce que son collaborateur, M. Thiara, fait aux frais du contribuable?

    Je pose à nouveau la question au ministre et je ne veux pas savoir si des documents ont été déposés ou non. C'est une simple question au sujet de ses collaborateurs. Que fait M. Thiara pour Industrie Canada? Quelles sont ses fonctions?

    Il est évident que nous, à la Chambre, qui sommes des députés ou des ministres, connaissons les descriptions de travail de nos collaborateurs. Je ne veux pas entendre parler de documents, car il y a un désaccord là-dessus. C'est une question très simple. Que fait M. Thiara pour le gouvernement du Canada afin de justifier son salaire payé par les contribuables?

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    M. Paul Harold Macklin: Monsieur le Président, j'ai examiné le hansard. En fait, j'étais présent à la Chambre au moins une des journées où cette question a été soulevée. Il m'a semblé que la question montrait qu'il se pouvait qu'on n'ait pas réclamé suffisamment de dépenses. En fait, des questions ont été soulevées, comme cela vient de se faire, quant à savoir pourquoi d'autres dépenses n'avaient pas été déclarées.

    Je le répète, le ministre prend ses responsabilités au sérieux. Il a rendu des comptes au sujet des fonds publics de façon ouverte et constructive comme le veulent les règles du Conseil du Trésor et la directive du premier ministre. Le ministre a fait une divulgation complète.

*   *   *

-L'enregistrement des armes à feu

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    M. Garry Breitkreuz (Yorkton--Melville, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le 23 avril, le ministre de la Justice a mal compris ma question, car il n'y a pas répondu. Je la pose donc de nouveau.

    Les provinces ont enregistré 18,1 millions de véhicules au Canada en précisant chaque fois le nom du propriétaire. Le ministère de la Justice a dépensé 700 millions de dollars pour n'enregistrer que 3,3 millions d'armes à feu sans préciser le nom des propriétaires. Comment les provinces peuvent-elles si bien faire et le ministère de la Justice et le gouvernement fédéral, si mal faire?

    Le ministre en a profité pour se vanter, et voici un extrait de sa réponse:

Le système d'enregistrement et de délivrance des permis et tous les mécanismes marchent très bien.

    Ce n'est pas une farce. C'est ce qu'il a dit. Ses propos vont grandement étonner les policiers patrouilleurs qui continuent de ridiculiser le registre des armes à feu et toutes les erreurs crétines commises par le ministre de la Justice et ses bureaucrates.

    Chacun sait ce qui se produit lorsqu'un agent de police vérifie le permis d'un conducteur et l'immatriculation d'un véhicule. Il sera intéressant de voir ce qui se produira lorsqu'un agent de police vérifiera une personne ayant une arme à feu dans son automobile.

    Après avoir confirmé l'identité du conducteur de l'automobile et établi une lien entre celui-ci et le permis d'arme à feu, l'agent s'occupera de l'arme à feu se trouvant dans le véhicule. Le conducteur déclarera qu'il s'en va à la chasse aux spermophiles dans un champ situé à proximité de là. L'agent examinera le permis afin de déterminer si le chasseur est autorisé à posséder le genre d'arme à feu se trouvant dans le véhicule.

    Le policier demandera ensuite le certificat d'enregistrement et le chasseur le présentera parce que la loi l'exige. L'agent de police constatera que le certificat d'enregistrement d'arme à feu ne précise pas le nom du propriétaire enregistré et il demandera au chasseur si c'est son arme. Lorsque le conducteur répondra oui ou non, l'agent de police devra consulter son ordinateur afin de déterminer si le conducteur dit vrai.

    Dans ce cas, le conducteur qui est en possession de l'arme à feu dira à l'agent qu'il a emprunté l'arme de son voisin, ce qui est parfaitement légal, pour autant que l'arme soit accompagnée de son certificat d'enregistrement. Pour confirmer si le conducteur dit la vérité, l'agent devra retourner vérifier ce renseignement dans le système informatique de la police.

    Il y a deux issues possibles à la vérification du certificat d'une arme à feu dans le système informatique de la police. L'agent peut trouver le fichier de l'arme à feu ou ne pas le trouver.

    Dans le premier scénario, en raison des centaines de milliers d'erreurs que contient le registre, l'agent ne trouvera pas le fichier de l'arme à feu dans le système d'enregistrement. Il saisira l'arme à feu jusqu'à ce que le nom de son propriétaire soit confirmé.

    Dans le deuxième scénario, la vérification faite par l'agent du registre informatisé des armes à feu confirmera que l'arme appartient bel et bien au voisin du chasseur. Pour être certain que le chasseur dit la vérité, l'agent téléphonera au voisin, mais le propriétaire de l'arme enregistrée sera absent de la maison à ce moment-là et sa femme ne sera pas au courant du fait qu'il a prêté son arme à feu au voisin. Par mesure de prudence, l'agent saisira l'arme à feu jusqu'à ce qu'il puisse confirmer auprès du propriétaire que celui-ci possède bien une arme à feu enregistrée.

    Une ou deux semaines plus tard, cette opération courante du policier trouve sa conclusion lorsque, tout d'abord, l'agent s'y retrouve enfin dans les erreurs de l'ordinateur et confirme que l'arme est effectivement enregistrée au nom du voisin ou lorsqu'il est confirmé que le chasseur a effectivement emprunté le fusil à son voisin.

    Dans ces scénarios, le policier embarrassé, qui a perdu un temps énorme à vérifier le prêt parfaitement légal d'une arme entre deux personnes et a profondément exaspéré deux propriétaires d'armes respectueux des lois, sera forcé de rendre l'arme légale au chasseur à qui il l'a confisquée et de présenter des excuses.

    Tout ce surcroît de travail parce que le nom du propriétaire enregistré ne figure pas sur le certificat d'enregistrement de l'arme, ce qui est une bourde bureaucratique colossale attribuable à des politiques qui essaient de respecter, pour l'enregistrement, des délais arbitraires et impossibles.

    Quelqu'un croit-il vraiment que l'agent va répéter une deuxième fois ce processus compliqué, long et inutile? Pour ma part, je ne le crois pas.

  +-(1845)  

+-

    M. Paul Harold Macklin (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à remercier le député de Yorkton--Melville de me donner l'occasion de rappeler à nouveau au Parlement et à tous les Canadiens, en fait, les avantages du programme canadien d'enregistrement des armes à feu pour la sécurité publique.

    J'ai le plaisir d'annoncer ici que notre approche pratique en matière de sécurité a déjà commencé à réduire le nombre de crimes commis à l'aide d'armes à feu au Canada. En effet, le programme d'enregistrement des armes à feu empêche que des armes se trouvent entre les mains d'individus qui ne devraient pas en avoir en leur possession et encourage les propriétaires légitimes à faire preuve de prudence et de responsabilité dans le maniement de leurs armes. Ces objectifs importants sont atteints grâce en partie à un système d'enregistrement et d'obtention de permis.

    La première phase du programme visait à faire que les propriétaires d'armes à feu au Canada détiennent un permis. Comme ne l'ignorent pas les députés, les propriétaires d'armes à feu devaient demander un permis de possession d'armes à feu avant le 1er janvier 2001. La seconde phase, soit l'enregistrement des armes à feu, est presque terminée. Une majorité écrasante de propriétaires d'armes à feu du Canada auront obtenu un permis et enregistré leurs armes à feu bien avant la date limite du 31 décembre.

    Tel est le résultat de la démarche adoptée par le Centre canadien des armes à feu. Nous avons mis en oeuvre les leçons que nous avions apprises au cours de la première phase du programme. Nous nous sommes efforcés de simplifier le plus possible l'enregistrement.

    Par exemple, le Centre canadien des armes à feu a envoyé des formulaires personnalisés à tous les propriétaires d'armes à feu au Canada. Ainsi, tous les propriétaires d'armes ont eu la possibilité de s'inscrire gratuitement au registre. Il était également possible de s'inscrire en direct sur le Web. Plus de 100 000 Canadiens se sont prévalu de cette possibilité.

    Pour ce qui est de la question du député au sujet des erreurs dans le système, je souligne qu'à ce jour, les erreurs signalées au Centre canadien des armes à feu représentent une infime proportion des permis délivrés. Au 27 avril 2002, dans le cas de 99 p. 100 des armes enregistrées, les renseignements relatifs à l'identification et à la classification des armes à feu étaient exacts. De surcroît, 99 p. 100 des permis avaient été délivrés à la bonne personne, à la bonne adresse et faisaient état des privilèges et de la formation de sécurité appropriés.

    Il y a peut-être quelques erreurs pour lesquelles nous n'avons pas de statistiques, mais dès leur signalement, elles sont corrigées avec diligence, en collaboration avec le client. Les propriétaires d'armes à feu devraient vérifier l'exactitude de l'information qui figure sur leur permis et communiquer immédiatement avec nous au 1-800-731-4000 pour signaler toute anomalie et faire apporter les corrections nécessaires.

    À l'heure actuelle, la base de données sur les armes à feu renferme le nom de 2,1 millions de personnes et un nombre sans précédent de propriétaires d'arme à feu ont envoyé leur demande d'enregistrement d'arme. Compte tenu du nombre élevé des demandes, il est normal que certaines erreurs d'entrée de données se glissent ici et là. Nous demeurons néanmoins vigilants, et des améliorations ont été apportées récemment en vue de réduire davantage les risques d'erreur.

    Au cours des derniers mois, les responsables du programme canadien d'enregistrement des armes à feu ont procédé à une restructuration complète du processus d'enregistrement et mis en vigueur des mesures rigoureuses visant à assurer l'intégrité de l'information. Lorsqu'une demande d'enregistrement personnalisée est envoyée au traitement, on balaie le formulaire, y compris le code à barres identifiant le détenteur du permis. Il n'y a plus d'entrée manuelle de données, ce qui minimise les risques d'erreur.

    À la demande des propriétaires d'armes à feu, et je tiens à souligner ce qui suit, le certificat d'enregistrement n'affiche pas le nom du détenteur du permis, de manière à assurer la protection des renseignements personnels et la sécurité publique. Le numéro du certificat d'enregistrement fournit, au besoin, un lien électronique fournissant le nom du propriétaire d'une arme à feu. Cette mesure évite la divulgation de localisation d'une arme à feu au cas où une personne autre que son propriétaire légitime prendrait possession du certificat d'enregistrement.

  -(1850)  

+-

    M. Garry Breitkreuz: Monsieur le Président, le député ferait mieux de vérifier auprès des fonctionnaires de son ministère. Il affirme qu'il y a une infime fraction d'erreurs, mais, grâce à l'accès à l'information, nous avons déjà découvert que plus de 90 p. 100 des certificats et des demandes d'enregistrement réceptionnés contiennent des erreurs. Ce n'est pas précisément une infime fraction d'erreurs.

    Le député soutient que les propriétaires d'armes à feu ont à charge de s'assurer que l'information fournie est exacte. Qu'il fasse lui-même l'essai du système. La frustration ressentie par les propriétaires d'armes à feu est inconcevable lorsqu'il s'agit de transmettre une information exacte.

    La GRC a confirmé que, pour le seul descriptif des armes à feu devant être fourni dans les demandes d'enregistrement, le taux d'erreur est de 42 p. 100. Cela signifie que quelque 222 000 armes à feu portent le même nom de fabricant et le même numéro de série.

    Cette réponse qu'on m'a fournie tourne en dérision notre travail dans cette institution. On n'a pas le droit de nous servir de tels faits présumés.

    Ça ne marche pas.

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    M. Paul Harold Macklin: Monsieur le Président, de toute évidence, les données statistiques sont interprétées différemment par les uns et par les autres, comme on le voit parfois à la Chambre. Manifestement, le député refuse d'accepter les chiffres que j'ai cités. Libre à lui.

    À vrai dire, selon les statistiques les plus récentes, au 4 mai de l'année en cours, nous avions enregistré plus de 3 871 000 armes à feu. Une certaine marge d'erreur se glissera certainement dans le processus d'enregistrement, mais je crois que le député a tendance à exagérer les erreurs ultimes dans le système.

[Français]

-

    Le vice-président: La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.

    (La séance est levée à 18 h 55.)