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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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37e Législature, 1ère Session

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 021

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 26 février 2001

. 1100

VPRIVILÈGE
VL'immigration
VL'hon. Alfonso Gagliano

. 1105

VLe Président
VINITIATIVES PARLEMENTAIRES
VLA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU
VProjet de loi C-244. Deuxième lecture
VM. Leon Benoit

. 1110

. 1115

. 1120

VM. Roy Cullen

. 1125

VM. Michel Bellehumeur

. 1130

. 1135

VM. Pat Martin

. 1140

. 1145

VM. John Herron

. 1150

VM. Ken Epp

. 1155

. 1200

. 1205

VINITIATIVES MINISTÉRIELLES

. 1210

VLE RÈGLEMENT
VL'hon. Don Boudria
VMotion

. 1215

. 1220

. 1225

. 1230

VM. Ken Epp

. 1235

. 1240

. 1245

. 1250

. 1255

. 1300

. 1305

. 1310

. 1315

. 1320

. 1325

. 1330

. 1335

VAmendement

. 1340

VM. Michel Gauthier

. 1345

. 1350

. 1355

VDÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
VSAMUEL DE CHAMPLAIN
VM. Denis Paradis

. 1400

VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VM. Jim Pankiw
VLES RESSOURCES NATURELLES
VM. Guy St-Julien
VLE CURLING
VM. Geoff Regan
VLE CURLING
VL'hon. Diane Marleau
VLA JUSTICE
VM. Chuck Cadman
VLE COMMERCE
VM. Andy Savoy

. 1405

VLES ATHLÈTES QUÉBÉCOIS
VM. Robert Lanctôt
VLE CONCOURS INTERNATIONAL DE LABOUR
VM. Ovid Jackson
VLE COMMERCE
VMme Carol Skelton
VLE GALA DES JUTRA
VM. Marcel Proulx
VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VMme Judy Wasylycia-Leis

. 1410

VLE GALA DES JUTRA
VMme Diane Bourgeois
VLA SOCIÉTÉ IMMOBILIÈRE DU CANADA
VM. Derek Lee
VLA FISCALITÉ
VM. Loyola Hearn
VLE MOIS DES GRANDES SOEURS
VM. Mark Assad
VLE CONTRÔLE DES ARMES À FEU
VM. Garry Breitkreuz

. 1415

VLE CURLING
VMme Alexa McDonough
VQUESTIONS ORALES
VL'IMMIGRATION
VM. Stockwell Day
VL'hon. Elinor Caplan
VM. Stockwell Day
VL'hon. Elinor Caplan
VM. Stockwell Day
VL'hon. Alfonso Gagliano

. 1420

VMme Diane Ablonczy
VL'hon. Alfonso Gagliano
VMme Diane Ablonczy
VL'hon. Elinor Caplan
VLES RESSOURCES NATURELLES
VM. Gilles Duceppe
VM. Benoît Serré
VM. Gilles Duceppe
VL'hon. Herb Gray

. 1425

VM. Serge Cardin
VM. Benoît Serré
VM. Serge Cardin
VM. Benoît Serré
VLE SOMMET DES AMÉRIQUES
VMme Alexa McDonough
VM. Denis Paradis
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Herb Gray
VLA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA
VLe très hon. Joe Clark

. 1430

VL'hon. Herb Gray
VLe très hon. Joe Clark
VL'hon. Herb Gray
VMme Deborah Grey
VL'hon. Herb Gray
VMme Deborah Grey
VL'hon. Herb Gray
VLE COMMERCE INTERNATIONAL
VM. Pierre Paquette

. 1435

VM. Pat O'Brien
VM. Pierre Paquette
VM. Pat O'Brien
VLA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA
VMme Val Meredith
VM. John Cannis
VMme Val Meredith
VL'hon. Herb Gray
VLE SOMMET DES AMÉRIQUES
VMme Francine Lalonde
VM. Denis Paradis
VMme Francine Lalonde
VM. Denis Paradis

. 1440

VL'IMMIGRATION
VMme Diane Ablonczy
VL'hon. Elinor Caplan
VMme Diane Ablonczy
VL'hon. Elinor Caplan
VLA GESTION FINANCIÈRE
VMme Anita Neville
VM. Alex Shepherd
VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VMme Judy Wasylycia-Leis
VM. Yvon Charbonneau

. 1445

VLA SANTÉ
VMme Libby Davies
VM. Yvon Charbonneau
VLE COMMERCE
VM. André Bachand
VL'hon. Lyle Vanclief
VM. André Bachand
VL'hon. Lyle Vanclief
VL'AGENCE DE PROMOTION ÉCONOMIQUE DU CANADA ATLANTIQUE
VM. Charlie Penson
VM. John Cannis

. 1450

VM. Charlie Penson
VM. John Cannis
VL'OFFICE NATIONAL DU FILM
VMme Suzanne Tremblay
VL'hon. Sheila Copps
VMme Suzanne Tremblay
VL'hon. Sheila Copps
VLE SÉNAT
VMme Lynne Yelich
VL'hon. Herb Gray
VMme Lynne Yelich
VL'hon. Herb Gray
VLES TRANSPORTS
VM. David Pratt

. 1455

VL'hon. David Collenette
VM. Jay Hill
VL'hon. David Collenette
VM. Jay Hill
VL'hon. David Collenette
VLE LAC SAINT-PIERRE
VM. Marcel Gagnon
VL'hon. Art Eggleton
VLA SANTÉ
VM. John Godfrey
VM. Yvon Charbonneau

. 1500

VL'IMMIGRATION
VMme Madeleine Dalphond-Guiral
VL'hon. Elinor Caplan
VMme Diane Ablonczy
VL'hon. Elinor Caplan
VAFFAIRES COURANTES

. 1505

VLA LOI SUR LA RESPONSABILITÉ CIVILE DE L'ÉTAT ET LE
VProjet de loi C-277. Présentation et première lecture
VM. Art Hanger
VLE CODE CRIMINEL
VProjet de loi C-278. Présentation et première lecture
VM. Art Hanger
VLOI SUR LA COMMERCIALISATION DE VIA RAIL
VProjet de loi C-279. Présentation et première lecture
VM. Jim Gouk
VLA LOI CANADIENNE SUR LA SANTÉ
VProjet de loi C-280. Présentation et première lecture
VM. Jim Gouk

. 1510

VLA LOI SUR LA PREUVE AU CANADA
VProjet de loi C-281. Présentation et première lecture
VM. Ken Epp
VLOI SUR L'ÉLIMINATION DE LA DOUBLE IMPOSITION DU
VProjet de loi C-282. Présentation et première lecture
VM. Ken Epp
VLOI SUR LA COMMISSION DES PRIX DE L'ÉNERGIE
VProjet de loi C-283. Présentation et première lecture
VMme Bev Desjarlais
VLE CODE CRIMINEL
VProjet de loi C-284. Présentation et première lecture
VMme Bev Desjarlais

. 1515

VPÉTITIONS
VLes droits de l'enfant
VMme Libby Davies
VLa toxicomanie
VMme Libby Davies
VLes enfants victimes de la pauvreté
VMme Libby Davies
VLa Loi sur le divorce
VM. Rick Borotsik
VLes soins de santé
VMme Judy Wasylycia-Leis
VQUESTIONS AU FEUILLETON
VM. Derek Lee
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLA LOI SUR L'IMMIGRATION ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS
VProjet de loi C-11. Deuxième lecture
VL'hon. Elinor Caplan

. 1520

. 1525

. 1530

. 1535

VM. Inky Mark

. 1540

. 1545

. 1550

. 1555

. 1600

. 1605

. 1610

. 1615

VMme Madeleine Dalphond-Guiral

. 1620

. 1625

. 1630

. 1635

. 1640

VMme Judy Wasylycia-Leis

. 1645

. 1650

VM. Inky Mark

. 1655

VM. Pat Martin

. 1700

. 1705

VL'hon. Elinor Caplan

. 1710

VM. John Herron

. 1715

. 1720

. 1725

. 1730

VARTICLE NO 2 DES AFFAIRES ÉMANANT DU GOUVERNEMENT
VAvis de motion de clôture
VL'hon. Don Boudria
VLA LOI SUR L'IMMIGRATION
VProjet de loi C-11. Deuxième lecture
VM. John Herron
VM. Inky Mark

. 1735

VM. Gurmant Grewal

. 1740

. 1745

. 1750

. 1755

VM. Ken Epp

. 1800

VL'hon. Elinor Caplan
VM. Bernard Bigras

. 1805

. 1810

. 1815

. 1820

VM. Inky Mark

. 1825

VL'hon. Elinor Caplan

. 1830

VMOTION D'AJOURNEMENT
VLa santé
VM. Peter MacKay
VM. Yvon Charbonneau

. 1835

VLes ressources naturelles
VM. Loyola Hearn

. 1840

VM. Benoît Serré
VLa défense nationale
VM. Peter Goldring

. 1845

VM. John O'Reilly

(Version officielle)

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 021


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 26 février 2001

La séance est ouverte à 11 heures.



Prière


 

. 1100 +

[Français]

PRIVILÈGE

L'IMMIGRATION

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, vendredi dernier, j'étais absent de la Chambre en raison d'un décès dans ma famille.

Or, pendant la séance de vendredi, j'ai été victime d'attaques fausses et vicieuses de la part de certains députés de l'opposition. Mes privilèges de députés ont été brimés et, aujourd'hui, je veux rétablir clairement les faits ici à la Chambre.

Ces députés se sont basés sur un article truffé d'erreurs et d'insinuations du quotidien La Presse de Montréal. Sans tenir compte du démenti catégorique que j'ai émis tôt vendredi matin, certains députés de l'opposition ont non seulement répété les faussetés de l'article, ils sont allés encore plus loin. Regardons les faits.

Au mois de mai de l'année dernière, une dame d'origine italienne, que je ne connais pas et que mon personnel ne connaissait pas, s'est adressée à mon bureau de comté pour s'enquérir de son dossier d'immigration.

La démarche n'étonne personne, car du fait que je suis le seul député fédéral italophone de Montréal, des centaines de personnes de la grande région de Montréal s'adressent spontanément à mon bureau de comté pour leurs cas d'immigration ou tout autre dossier qui les concerne.

La demande d'immigrant investisseur de la dame avait été acceptée par le gouvernement du Québec et elle voulait savoir où en était la portion fédérale de son dossier.

Mon adjointe a donc suivi la procédure habituelle, soit d'envoyer une note facsimilée au Service à la clientèle de Citoyenneté et Immigration Canada.

Je signale que la note n'est pas adressée à une personne déterminée, mais bien à un service du ministère.

Dans le seul paragraphe de la note, il est écrit: «Seulement pour savoir où est rendu le dossier de résidence.» Comment peut-on indiquer plus clairement qu'il s'agit d'une simple démarche d'information, sans aucune forme d'appui ou de référence?

 

. 1105 + -

La note poursuit avec trois questions, et je cite: «Est-ce que les vérifications sont rentrées?»—et j'insiste sur le point d'interrogation—«et les résultats médicaux?»—encore là avec un point d'interrogation. Enfin, la troisième question: «Voyez-vous que les visas sont pour être émis bientôt?» Là, encore une fois, c'est un point d'interrogation.

Dans cette note, il n'y a pas l'ombre d'une pression, pas le moindre soupçon d'intervention dans la décision. Cette note est signée par mon adjointe de comté.

La note est claire, sans aucune fioriture. Elle est en tout point semblable à plus de 40 000 notes du genre envoyées chaque année à Citoyenneté et Immigration Canada par l'ensemble des députés de cette Chambre. D'ailleurs, avec la permission de la Chambre, je vais déposer une copie de cette note à la fin de mon intervention.

On peut donc se demander quelle est la motivation des journalistes qui, visiblement, avaient une copie de cette note en main, mais ont choisi d'écrire que j'avais personnellement envoyé une lettre, ce qui n'était pas le cas, et d'insinuer, de façon très pernicieuse, que j'aurais fait des pressions dans ce dossier.

Ce cas sera réglé devant une autre instance, puisque j'ai demandé à mes avocats de mettre le journal La Presse et ses journalistes concernés en demeure de se rétracter dans les plus brefs délais.

Ce n'est pas la première fois que je suis l'objet d'attaques aussi pernicieuses. À chaque fois, il y a eu enquête et, à chaque fois, j'ai été exonéré de tout blâme.

Dans notre travail de député, nous ne pouvons pas vérifier à l'avance les antécédents de tous ceux et celles qui font appel à notre personnel pour faire le suivi d'un dossier fédéral. Nous sommes donc tous vulnérables. C'est pourquoi mon personnel suit des procédures très strictes, afin de servir la population avec diligence et efficacité, sans favoritisme ni discrimination.

Néanmoins, considérant le comportement de certains députés de l'opposition et des journalistes, il est facile de dire, comme un célèbre commentateur le disait ce matin à la radio: «Si mon nom était Lapierre ou Arcand, ce genre de chose n'arriverait pas.»

De toute évidence, je n'ai pas du tout l'intention de quitter mes responsabilités ministérielles car, dans ce dossier, mon personnel n'a fait que son devoir et je n'ai absolument rien à me reprocher.

De fait, j'espère que mes collègues de l'opposition vont se rétracter et faire des excuses.

[Traduction]

M. Monte Solberg: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le député a proposé de déposer un document. Je me demande s'il serait prêt à déposer tous les autres documents concernant cette affaire?

L'hon. Alfonso Gagliano: Monsieur le Président, c'est le seul document que j'aie, et je l'ai déjà dit, je suis prêt à le déposer.

Le Président: Le document a été déposé. Le ministre a fait sa déclaration en soulevant la question de privilège et a présenté un grief. Je crois que l'affaire est close. La présidence s'en tiendra à cela.

Comme il est 11 h 10, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.



INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

 

M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne) propose que le projet de loi C-244, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (déduction des dépenses afférentes à la fourniture d'outils par un mécanicien) soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

—Monsieur le Président, c'est pour moi un honneur de prendre de nouveau la parole au sujet de ce projet de loi, que j'ai d'abord présenté il y a quatre ans, en 1997. Depuis, la Chambre en a débattu durant au moins cinq jours, et j'ai moi-même fait quatre ou cinq interventions à son sujet.

Pourtant, le gouvernement n'a donné aucune suite à ce projet de loi. Je reste confiant qu'il en sera autrement après le débat d'aujourd'hui. Je crois que le projet de loi sera renvoyé prochainement à un comité et qu'il aura une suite. Toutefois, les mécaniciens, techniciens et autres dans le pays devront certainement poursuivre leurs efforts pour que l'initiative aboutisse. Nous ne saurions tenir les choses pour acquises.

 

. 1110 + -

Depuis que j'ai présenté mon projet de loi il y a quatre ans, en fait dans les deux mois qui en ont suivi la présentation, j'ai reçu plus de 7 000 lettres de la part de techniciens, de propriétaires d'ateliers de mécanique automobile et d'autres un peu partout au Canada, de la Colombie-Britannique à Terre-Neuve. Le soutien accordé à ce projet de loi a été général, à vrai dire. Depuis que le député du Bloc québécois a présenté son propre projet de loi, un peu avant les élections, nous avons reçu plus de 70 000 cartes postales d'un peu partout au Canada. Ce projet de loi rallie indéniablement la faveur populaire. J'y reviendrai.

Il est question dans ce projet de loi des techniciens et des mécaniciens qui, tenus en vertu de leurs conditions d'emploi d'acheter et d'entretenir leurs outils de travail, ne sont pas autorisés à en déduire le coût aux fins de l'impôt. C'est là où le bât blesse.

Il me paraît tout à fait incohérent de permettre à certains groupes de personnes, par exemple les artistes, et pas à d'autres, de déduire de leur revenu le matériel dont ils doivent faire l'acquisition pour poursuivre leur activité. Cela me paraît également contradictoire quand on sait que les entrepreneurs peuvent déduire certaines dépenses au titre de leurs dépenses d'affaires, qu'ils exploitent le garage du coin ou une concession de gros équipement ou de machines agricoles. Ces entrepreneurs peuvent bien entendu déduire la totalité de leurs dépenses d'affaires, notamment le coût de leurs outils.

Le problème découle, j'imagine, de la disparition des outils. Comme agriculteur, j'ai souvent dû me transformer en mécanicien et Dieu sait que j'en ai perdu des outils. Je ne m'en plaignais pas, mais quand mes enfants ont été assez vieux, chaque fois qu'un outil disparaissait, je pouvais jeter le blâme sur eux, évitant ainsi de me blâmer moi-même. Le problème est que, dans les conditions dans lesquelles nous travaillons, il arrive souvent que des outils disparaissent et, s'ils appartiennent à l'employeur, ils disparaissent probablement un peu plus souvent, parce que le travailleur ne rassemble pas les outils avec autant d'attention quand il a fini son travail.

Dans certains cas, il s'agit vraiment de vols, mais c'est généralement de la négligence. Le mécanicien laisse parfois des outils sur le véhicule ou l'équipement agricole, de sorte que lorsqu'il effectue des essais sur la route ou dans les champs, les outils tombent par terre. La perte d'outils peut totaliser plusieurs milliers de dollars, ce qui est un coût important.

C'est ce qui justifie que les conditions d'emploi partout au Canada exigent généralement qu'un mécanicien achète ses propres outils. C'est une condition d'emploi et le problème est là. Les gens d'affaires procèdent avec logique et ils savent que les techniciens et les mécaniciens font un peu plus attention quand ils utilisent leurs propres outils et quand ils doivent payer pour remplacer tout outil perdu. Pourtant, les techniciens et les mécaniciens n'ont pas droit à une déduction d'impôt pour compenser le coût de leurs outils.

Tout le problème est là et il est important. C'est justement à cause de ce problème qu'il y a actuellement une pénurie de mécaniciens et de techniciens partout au Canada, et rien n'indique une amélioration de la situation. Le problème est grave.

Ce que je veux faire dans le reste de mon exposé d'aujourd'hui, c'est montrer qu'il y a un large appui pour ce changement, expliquer en quoi il s'agit d'une question d'équité fiscale et préciser que le comité des finances de la Chambre a signalé à diverses occasions que c'est une modification qui devrait être apportée par souci d'équité fiscale.

Je voudrais ensuite parler un petit peu du processus qui a été appliqué jusqu'à maintenant à la Chambre au sujet de ce projet de loi, afin d'expliquer aux Canadiens et aux techniciens que le processus a été long, trop long, selon moi.

Je tiens aussi à m'arrêter sur l'appui que reçoit cette mesure. J'ai déjà parlé de plus de 7 000 lettres que j'ai reçues personnellement de techniciens relativement à cette question et de 70 000 cartes postales. Je sais que tous les députés ont reçu des lettres et des coups de téléphone de techniciens relativement à cette mesure législative. Je doute qu'un seul n'en ait pas reçu.

 

. 1115 + -

Lorsque notre collègue de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans a présenté ce projet de loi qui devait faire l'objet d'un vote au cours de la dernière législature, cette mesure a reçu un large appui des députés de tous les partis politiques à la Chambre, y compris le parti au pouvoir. L'appui à cette mesure législative prend toutes les formes imaginables. Il est inutile de s'étendre là-dessus.

Ce projet de loi parle d'équité fiscale. Il s'agit d'accorder aux mécaniciens ce qu'on offre déjà à certains autres groupes dans notre société et aux gens d'affaires qui engagent des mécaniciens, s'ils choisissent d'acheter des outils à leur intention. C'est nettement une question d'équité.

Je voudrais citer un passage du rapport prébudgétaire que le comité des finances de la Chambre des communes a présenté en décembre 1997. Voici ce qu'on y disait:

    Le Comité croit que tous les employés canadiens devraient pouvoir déduire de leurs revenus les dépenses obligatoires importantes liées à leur emploi. À cet égard, des dispositions spéciales de la Loi de l'impôt sur le revenu s'appliquent déjà aux artistes, aux musiciens et aux opérateurs de scie à chaîne. En refusant le même traitement aux apprentis et aux techniciens de l'industrie automobile, non seulement on commet une injustice, mais on crée un obstacle supplémentaire à l'emploi, notamment des jeunes intéressés par ce métier. Une correction fiscale à ce chapitre permettrait d'éliminer une barrière inhérente aux règles actuelles.

Le comité des finances a été très clair et il a repris les mêmes propos par la suite. Le comité des finances est contrôlé par une majorité de députés ministériels et ces derniers reconnaissent la nécessité d'apporter des changements. Je ne comprend pas d'où vient la résistance.

Curieusement, le gouvernement semble soucieux d'équité salariale seulement lorsqu'il s'agit de hausser ses revenus ou d'alourdir le fardeau fiscal d'un groupe social. Dans le cas actuel, nous proposons d'abaisser le fardeau fiscal des techniciens et mécaniciens, mais le gouvernement ne semble pas très empressé de le faire. C'est la réalité, aussi déplorable soit-elle.

Normalement, je citerais des extraits de lettres provenant de personnes qui m'ont écrit sur cette question, mais j'emploierai plutôt mon temps à dresser un historique du projet de loi. Cela en vaut la peine.

J'ai présenté pour la première fois ce projet de loi en 1997. Il y a quelques semaines, j'ai appris qu'en 1992 un député libéral, qui siégeait alors dans l'opposition, avait présenté un projet de loi similaire, quoiqu'il ne comportait pas de conditions précises. Il s'agissait d'un énoncé général indiquant que les mécaniciens ou les techniciens devraient être autorisés à déduire le coût d'achat d'outils. La Chambre des communes avait été saisie du projet de loi en 1992. En 1997, j'ai présenté à mon tour un projet de loi qui a été débattu à la Chambre, puis le projet de loi d'un député bloquiste a choisi pour faire l'objet d'un débat. J'avais alors participé au débat qui avait eu lieu à la Chambre. Seul le montant avancé dans son projet de loi était différent.

Le projet de loi présenté par le député bloquiste proposait que le montant d'achat d'outils d'une valeur de 225 $ ou moins soit entièrement déduit pour les fins de l'impôt de l'année en cours et que le coût des outils de plus de 225 $ soit admissible à la déduction pour amortissement. Les montants ont été légèrement modifiés. Le projet de loi bloquiste a été débattu il y a quelques mois, avant les dernières élections, et adopté par la Chambre. C'est la preuve que la Chambre est favorable à ce genre de projet de loi, et nous ne devrions plus avoir à revenir sur ce point, à mon avis.

Or, la Chambre est maintenant saisie d'un nouveau projet de loi, le projet de loi C-244. Les montants qui y sont proposés sont les mêmes que ceux qui figuraient dans le projet de loi que j'avais présenté en 1997 et qui avait fait l'objet d'un débat à la Chambre. Le montant des outils de moins de 200 $ pourrait être pleinement déduit pour l'année en cours et le coût des outils de 200 $ ou plus pourrait être admissible à la déduction pour amortissement. L'assurance et autres choses de ce genre peuvent faire l'objet d'une demande de déduction à titre de frais professionnels. Les agriculteurs et autres petites entreprises font aussi des déductions de cette nature. Mon projet de loi est en tout point conforme à la Loi de l'impôt sur le revenu.

 

. 1120 + -

À deux reprises, j'ai choisi ce projet de loi quand mon nom a été tiré. Je ne comprends pas pourquoi il a été décidé que mon projet de loi ne ferait pas l'objet d'un vote alors qu'un député bloquiste a présenté un projet de loi identique, à l'exception du numéro, qui a fait l'objet d'un débat à deux occasions. Je ne comprends pas cela.

Le temps est venu de faire avancer ce projet de loi. Je sais que mon temps de parole est écoulée, et je voudrais terminer en demandant le consentement unanime de la Chambre pour renvoyer le projet de loi au Comité des finances.

Nous pourrions ainsi étudier cette question au comité. Nous cesserions de remettre la question à plus tard et nous mettrions un terme à l'hésitation du gouvernement. Nous pouvons le renvoyer au comité, qui le modifiera ou rédigera sa propre mesure législative, et celle-ci pourrait aller de l'avant au nom des techniciens et des mécaniciens du pays et, en fait, en notre nom à tous qui dépendons d'eux pour voyager par air, par terre ou par rail.

Nous devrions agir rapidement afin qu'ils soient traités équitablement en vertu des lois fiscales. Je demande le consentement unanime de la Chambre pour que le projet de loi C-244 soit renvoyé au comité, ce qui mettrait fin à l'hésitation qui entoure cette question.

Le président suppléant (M. Bélair): Y a-t-il consentement unanime pour que le projet de loi soit directement renvoyé au Comité des finances?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Monsieur le Président, je félicite le député de Lakeland de sa ténacité concernant ce projet de loi. Il va de soi qu'un autre projet de loi, qui est presque identique, a été jugé votable et sera soumis au comité.

Ce projet de loi d'initiative parlementaire propose des modifications à la Loi de l'impôt sur le revenu afin de permettre aux mécaniciens de déduire le coût de leurs propres outils lorsque leur acquisition constitue une de leurs conditions d'emploi. Les changements permettraient aux mécaniciens de déduire les coûts d'acquisition, de location, d'assurance ou d'entretien de leurs outils.

Une déduction d'impôt pourrait être demandée pour les outils de moins de 200 $. Ce montant pourrait être corrigé selon l'inflation. La déduction pour amortissement s'appliquerait aux outils d'une valeur supérieure à 200 $, et ces déductions seraient déterminées par règlement.

[Français]

Les employeurs canadiens fournissent habituellement aux travailleurs les outils et les ressources dont ils ont besoin pour faire leur travail. Malgré cela, tous les travailleurs canadiens doivent assumer des coûts relatifs à leur emploi, qu'il s'agisse des coûts engagés pour se rendre au travail ou en revenir, du coût d'achat d'uniformes ou d'autres vêtements de travail, du coût des repas pris à l'extérieur ou du coût d'achat des publications professionnelles. Ces coûts, tous les Canadiens et Canadiennes doivent les assumer quand ils acceptent un emploi.

[Traduction]

Dans le régime fiscal, l'exemption personnelle de base tient compte des dépenses normales liées au travail. Le gouvernement a haussé substantiellement cette déduction depuis l'élimination du déficit.

Je suis ravi de rappeler aux députés que les budgets de 1998 et 1999 ont fait progresser de 675 $ l'exemption personnelle de base. Le budget de l'an 2000 a été encore plus loin et prévoit des mesures en vertu desquelles, en 2004, le montant libre d'impôt sera supérieur de 1 500 $ à ce qu'il était en 1997. L'accroissement du revenu libre d'impôt aide les travailleurs à faible revenu à éponger les dépenses normales liées à un emploi.

Le projet de loi soumis à la Chambre vise à reconnaître le fait que les mécaniciens employés font face à des coûts exceptionnels liés au travail. Le gouvernement du Canada sait que ces coûts peuvent parfois constituer un important fardeau, en particulier au début d'une carrière.

L'été dernier, par exemple, un journal de Nouvelle-Écosse faisait état du cas d'un jeune apprenti mécanicien. Il touchait 18 000 $ par année comme employé dans le garage d'une station-service. Il avait investi quelque 10 000 $ dans ses outils. Celui-ci a souligné qu'il devait en outre payer des frais d'assurance de 100 $ par tranche de 1 000 $ du coût total des outils. Cela représentait dans son cas 1 000 $ par année. Tous les députés conviendront que c'est une somme importante pour une personne qui ne gagne que 18 000 $ par année.

Je suppose que ce jeune homme devait aussi régler d'autres factures comme celles de l'épicerie, du chauffage et du loyer. De toute évidence, les frais engagés par ce jeune homme en valaient la peine pour lui. Les outils qu'il a achetés lui seront utiles pendant des années.

 

. 1125 + -

Ces coûts représentaient certes aussi un lourd fardeau financier. Les coûts initiaux ne devraient pas empêcher une personne de se lancer dans un métier qui, à long terme du moins, rapportera suffisamment pour la faire vivre.

[Français]

Bref, le gouvernement comprend le délicat problème qu'essaie de résoudre ce projet de loi, et nous pouvons appuyer le principe qu'il sous-tend. Je dois néanmoins souligner que ce projet de loi en particulier ne s'attaque pas au problème de la bonne façon.

[Traduction]

Je m'explique. Le projet de loi permet aux mécaniciens de déduire toutes les dépenses afférentes à la fourniture d'outils, aussi petites soient-elles. Je le répète, toutefois, la plupart des travailleurs canadiens doivent assumer eux-mêmes des dépenses liées directement à leur emploi. Que dire des charpentiers et des opérateurs d'ordinateurs, par exemple?

Je rappelle aussi aux députés que le régime fiscal en tient compte dans une certaine mesure au moyen de l'exemption personnelle de base. Le projet de loi ne se contente pas de couvrir les dépenses exceptionnelles afférentes à la fourniture d'outils par un mécanicien; il accorde aux mécaniciens un traitement fiscal préférentiel à l'égard de dépenses normales d'emploi. Cela serait tout bonnement injuste pour les autres travailleurs canadiens qui paient des impôts. Tout allégement fiscal accordé à des groupes spécifiques devrait se limiter à des dépenses extraordinairement élevées.

Le projet de loi ouvre aussi la voie à d'autres injustices. Par exemple, il ne garantit pas suffisamment que le dégrèvement fiscal visera seulement les articles qui sont vraiment essentiels à l'emploi. Les employeurs devraient avoir à certifier que les dépenses en question sont une condition d'emploi. Le principe d'équité voudrait que l'avantage fiscal soit ajusté si les outils achetés pour le travail servent ultérieurement à d'autres fins ou sont vendus, par exemple. Rien, dans ce projet de loi d'initiative parlementaire, ne le garantit.

[Français]

Enfin, je signalerai brièvement que ce projet de loi crée des complexités administratives inutiles. Plutôt que d'utiliser le régime actuel pour les dépenses en capital—les déductions pour amortissement et la réglementation afférente—, ce projet de loi établirait un régime parallèle pour les mécaniciens salariés. Rien ne justifie ce changement étant donné que les actuelles déductions pour amortissement permettent d'obtenir essentiellement les mêmes résultats que le projet de loi d'initiative parlementaire.

[Traduction]

Les dépenses très considérables que doivent absorber certains mécaniciens salariés posent certes un problème. L'idée qui sous-tend ce projet de loi d'initiative parlementaire est valable. Le fait que le régime fiscal ne tienne pas compte de dépenses professionnelles exceptionnellement élevées ne devrait pas constituer un obstacle à la participation à l'économie.

Je crois aussi que les députés ici présents conviendront que le projet de loi créerait des inégalités et des injustices fiscales. C'est pourquoi il faut s'efforcer de trouver une solution à cet important problème.

Le gouvernement se propose d'examiner la question en collaboration avec des représentants de l'industrie automobile, notamment pour ce qui concerne les défis que doivent relever les apprentis, afin d'arriver à combler les lacunes de ce projet de loi d'initiative parlementaire.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de commenter le projet de loi C-244 du député de l'Alliance canadienne qui représente la circonscription de Lakeland, compte tenu que nous avons un député au Bloc québécois qui s'intéresse à cette question depuis fort longtemps et qui a déjà, par le passé, déposé un projet de loi quasi identique.

Lors de cette 37e législature, on aura la chance de se prononcer à nouveau sur le projet de loi du député du Bloc québécois qui représente la circonscription de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, puisque le projet de loi du Bloc québécois traite directement du même sujet. La seule différence est la déduction. Au lieu de 200 $, comme le propose l'Alliance canadienne, ce serait de l'ordre de 250 $. Mais la grande différence, c'est que celle du Bloc québécois, du député de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, pourra faire l'objet d'un vote.

On pourra donc faire en sorte que la Chambre se prononce sur cette déduction fiscale qui est, somme toute, importante pour ces travailleurs. Ce ne sont pas des millionnaires qui oeuvrent dans ce domaine.

 

. 1130 + -

À cet effet, je suis un peu surpris par rapport au discours que je viens d'entendre du côté ministériel puisque, grâce au travail du député bloquiste de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, les parlementaires se sont déjà prononcés sur un projet de loi semblable visant à accorder une déduction fiscale de 250 $ pour l'achat d'outils, d'assurance et tout ce qui est relatif à ce travail.

À l'exception peut-être de quelques députés des banquettes avant, les libéraux avaient voté, en grande partie, en faveur de ce projet de loi. De mémoire, je pense qu'il avait été adopté ici, à la Chambre, en deuxième lecture, par 180 voix contre seulement 11.

Une voix: Même des ministres avaient voté pour.

M. Michel Bellehumeur: Comme me le fait remarquer une de mes collègues, certains ministres du Cabinet avaient voté en faveur de ce projet de loi.

J'invite le député à relire les notes et à voir ce que le gouvernement a fait, puisque c'est fort important pour ces travailleurs. Il dit que cela créerait de l'iniquité. Moi, je dis que le système, à l'heure actuelle, crée déjà des iniquités à leur égard. Il faudrait vérifier de nouveau.

J'invite le député à regarder ce qui s'est fait, non seulement au cours de la 36e législature, mais aussi au cours des 35e, 34e et 33e législatures. Les députés libéraux, qui formaient l'opposition, à l'époque, ont déposé un projet de loi quasi identique à celui que nous étudions aujourd'hui et que nous étudierons également un autre jour, le projet de loi du député du Bloc québécois.

C'est un projet de loi qui fait l'unanimité dans les partis, puisque les libéraux en ont déposé un semblable lorsqu'ils étaient dans l'opposition. L'Alliance canadienne dépose un projet de loi semblable, le NPD a déjà déposé un projet de loi semblable, et le Parti progressiste-conservateur en a fait autant. Ce qui est étrange, c'est que, dès qu'on change de bord dans cette Chambre, on oublie ce qu'on a déposé antérieurement.

Très honnêtement, j'invite le député à relire les discours que les libéraux ont prononcés dans ce dossier. Il verra qu'effectivement, il y a une iniquité pour ces travailleurs et que cela doit être corrigé, ce qui, somme toute, peut être fait assez facilement.

On n'a pas besoin d'une commission royale d'enquête pour vérifier si on va accorder 250 $ de crédit à des mécaniciens. On n'a pas besoin d'étudier la question pendant des années, c'est déjà fait. On parle de ce sujet depuis au moins 15 ans à la Chambre des communes, mais jamais un parti, une fois au pouvoir, pense à ces travailleurs qui font un travail extrêmement important dans une société comme la nôtre, une société de consommation.

Qui dans cette Chambre n'a pas un véhicule? Qui dans cette Chambre n'utilise pas un véhicule pour son travail? Il est très important d'avoir de bons mécaniciens. Il est drôlement important d'avoir des mécaniciens à la fine pointe de toute la mécanique. Les composantes des autos aujourd'hui sont fort différentes d'il y a 20 ans. Les outils que les mécaniciens achètent, ce ne sont pas des tournevis achetés au magasin du dollar. Ce sont des équipements très coûteux.

Durant la dernière campagne électorale, je suis persuadé que le député ministériel a sûrement eu une oreille attentive pour tous ces techniciens qui lui ont fait part que ces outils coûtent maintenant une fortune. Oui, ces gens sont des passionnés de la mécanique. Oui, ils font ce travail parce qu'ils l'aiment et parce que c'est valorisant dans bien des cas.

Mais il faut penser également à la relève. Lorsqu'un jeune sort de l'école et qu'il doit s'acheter pour 5 000 $, 10 000 $, 15 000 $ d'outils—on parle même de 20 000 $ à 25 000 $ d'outils, dépendamment de la spécialisation—parce que ces outils lui sont nécessaires pour obtenir un emploi, il faudrait au moins qu'on lui permette de déduire une certaine somme d'argent.

Ce que j'ai entendu ce matin de la part du gouvernement, c'est qu'ils ne comprennent pas ou ne veulent pas comprendre.

 

. 1135 + -

Les libéraux ont déjà pensé à aider de grands clubs sportifs, des millionnaires du sport. Pour eux, il y en avait des millions. Une chance que l'opposition était là pour les arrêter et les ramener à la raison, mais on voulait aider les millionnaires du sport.

Pour ce qui est des petits mécaniciens, des petits travailleurs, eux, on ne veut pas les aider. Ce ne sont pourtant pas des millionnaires, ce sont des gens qui gagnent honorablement leur argent. Ces gens travaillent parfois dans des conditions très difficiles. Présentement, je ne voudrais pas être mécanicien, faire des changements d'huile, faire des réparations sur un véhicule qui a circulé sur les routes du Québec et du Canada. L'été, il fait très chaud. Tout le monde connaît les conditions de travail de ces mécaniciens. Pourtant, ils sont fort utiles pour l'économie du Canada et du Québec. Il faudrait que le gouvernement soit un peu plus à l'écoute de ces personnes et qu'il soit également cohérent.

Tantôt, le député disait que cela créerait de l'injustice, mais il y a déjà de l'injustice dans le système. Comment expliquer à ces mécaniciens—cela m'est arrivé lorsque j'ai fait le tour de mon comté pour la dernière campagne électorale—qu'ils ne peuvent rien déduire, alors que leur patron, qui a une compagnie incorporée, qui leur demande d'avoir des outils pour travailler, peut amortir l'achat de ses outils, parce qu'il a une compagnie incorporée? C'est difficile à expliquer.

Une voix: Oh, oh!

M. Michel Bellehumeur: Je comprends que le député n'aime pas entendre la vérité. Cela fait toujours mal d'entendre des choses qu'on ne veut pas entendre.

Comment expliquer également qu'un mécanicien ne puisse rien déduire, alors que quelqu'un qui travaille en forêt peut déduire l'achat de scies à chaîne. Les travailleurs forestiers peuvent déduire certaines choses.

Les musiciens peuvent déduire l'achat de certains instruments. Je ne dis pas qu'on ne doit pas le faire, c'est normal de le faire, parce qu'ils gagnent leur pain quotidien de cette façon, au même titre que le mécanicien gagne son pain quotidien avec ses outils. S'il n'a pas d'outils, il ne peut pas travailler. S'il ne travaille pas, il n'a pas d'argent, et comme il ne travaille pas, il ne paie pas d'impôt.

Comment expliquer cela à ces mécaniciens? Au cours de la campagne électorale, je n'ai pas été capable de le faire. Je leur ai simplement promis qu'à la première occasion, le député de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans déposerait de nouveau ce projet de loi, pour qu'enfin le gouvernement et la Chambre des communes puissent voter sur cette déduction fiscale extrêmement importante.

Heureusement, avec toute la compétence du député du Bloc québécois, il a déposé rapidement ce projet de loi. Il a plaidé sa cause et ce sera voté à la Chambre. D'ici là, j'espère que le gouvernement d'en face aura une oreille plus attentive, qu'il aura plus de compassion et que ses représentants en viendront à la raison en votant favorablement pour une telle mesure, comme l'a fait la grande majorité des députés au cours de la 36e législature, pour qu'enfin les mécaniciens et les mécaniciennes du Québec et du Canada puissent au moins déduire une partie de l'achat des assurances et de l'équipement dont ils ont besoin pour exercer quotidiennement leur profession.

[Traduction]

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, tout d'abord, je tiens moi aussi à remercier le député de Lakeland de la possibilité qu'il nous donne de débattre une nouvelle fois de cette importante question.

Comme d'autres députés l'ont fait remarquer, c'est une question d'un énorme intérêt pour tout le pays, et à plus forte raison pour la Chambre. La preuve, c'est que tous les partis politiques actuellement représentés à la Chambre ont soulevé cette question. Même le Parti libéral, quand il formait l'opposition, avait estimé bon d'essayer de réduire le fardeau financier pour les travailleurs ordinaires qui s'efforcent de gagner leur vie en leur permettant de déduire le coût des outils nécessaires à leur emploi.

Je ne suis pas d'accord avec le secrétaire parlementaire. C'est une question d'équité fiscale. L'iniquité du régime fiscal n'en serait pas plus grande. Réduire le fardeau financier pour les travailleurs ordinaires serait reconnaître que ces derniers méritent qu'on leur donne la capacité d'exercer leurs métiers sans être gênés par le coût élevé des outils dont ils ont besoin pour le faire.

 

. 1140 + -

Le projet de loi fait référence aux mécaniciens, pour une bonne raison d'ailleurs, car leurs difficultés sont sans doute les plus flagrantes. Un apprenti mécanicien doit s'acheter des outils relativement chers, qui lui coûtent entre 10 000 $ et 20 000 $, notamment des outils de diagnostic, au fur et à mesure que son apprentissage technique se perfectionne. Aujourd'hui, il ne s'agit plus de simplement faire la mise au point d'un vieux six cylindres en ligne avec des outils ordinaires. Les choses sont devenues beaucoup plus complexes et techniques. On ne reconnaît pas cette exigence.

Ce qui m'irrite le plus, c'est la réticence du gouvernement à reconnaître ainsi les travailleurs manuels. Cela contribue à stigmatiser les cols bleus, en donnant l'impression que le gouvernement n'en apprécie pas à sa juste valeur le travail et qu'il sous-estime les différents corps de métier. Cela rend d'autant plus difficile d'attirer et de retenir les jeunes dans ce secteur. Nous en avons la preuve.

Je suis moi-même un compagnon charpentier et l'âge moyen d'un charpentier est de 49 ans aujourd'hui. Nous ne réussissons pas à intéresser les jeunes à ce métier. C'est en partie du fait de l'impression généralisée que ce travail n'est pas utile. Seuls les emplois de haute technologie semblent aujourd'hui porteurs. Les jeunes estiment qu'ils doivent obtenir un diplôme de premier cycle universitaire, même si, du fait de leurs compétences, ils devraient opter pour un métier spécialisé.

Le problème de savoir qui peut déduire ses dépenses et qui n'y est pas autorisé tient au fond à la définition que nous donnons à la notion d'entrepreneur indépendant. Qu'est-ce qu'un véritable entrepreneur indépendant par rapport à un employé? Un mécanicien qui s'affiche du jour au lendemain comme un entrepreneur indépendant peut tout déduire, de l'espace qu'il loue aux outils qu'il doit acheter, en passant par la dépréciation de ces outils et la camionnette qu'il conduit. Toutes ces choses sont déductibles d'impôt parce qu'il est maintenant une personne qui exploite une petite entreprise.

L'industrie a pris avantage de cet état de fait. Les mécaniciens se distinguent du salarié moyen dans la plupart des ateliers. Ils n'ont plus de salaire horaire; ils sont maintenant payés à la pièce. S'il faut 2,1 heures de main-d'oeuvre pour réparer le moteur d'une Honda Civic, par exemple, alors ils sont payés pour 2,1 heures, qu'ils prennent 3 heures ou 1,5 heure pour faire le travail. Dans ce sens, leur relation avec l'employeur est différente. Ils sont indépendants dans une certaine mesure. Mais le système fiscal n'en tient pas compte. C'est un des problèmes fondamentaux. D'autres travailleurs au pays souffrent également de la même ambiguïté dans la définition d'un entrepreneur indépendant.

Je rappelle à la Chambre le triste sort des facteurs des régions rurales, qui se trouvent dans la même situation. Même s'ils ne comptent véritablement que sur une seule source de revenu, ils ne sont pas considérés comme des employés. Ils sont donc pénalisés de deux façons. Ils sont dépendants, mais ils n'obtiennent aucun des avantages d'être un employé.

Cette iniquité fondamentale au plan fiscal accentue le problème du manque de compétences dans tous les métiers spécialisés. C'est parce qu'on ne reconnaît pas à quel point il est difficile pour un apprenti mécanicien d'obtenir ce qui, en somme, constitue un prêt à la petite entreprise, soit jusqu'à 20 000 $, juste pour pouvoir commencer à exercer son métier.

On peut penser que la plupart des personnes de métier sont mieux rémunérées que le travailleur industriel moyen et que leur salaire plus élevé compense les frais additionnels qu'elles doivent engager afin d'exercer leur métier. C'est faux. Si l'on menait une enquête sur le salaire des mécaniciens, on verrait qu'il se situe entre 15 et 21 dollars l'heure. Dans les usines de pâte à papier où le facteur de risque ne joue pas et où les outils sont fournis, il y a des travailleurs qui sont mieux rémunérés que cela. Le programme de rémunération ne compense pas les dépenses additionnelles engagées pour s'établir.

Le refus du gouvernement libéral de consentir cet allégement fiscal très modeste est des plus renversants quand on sait que ce même gouvernement vient d'annoncer des réductions d'impôt de l'ordre de 100 milliards de dollars. Le gouvernement se propose de consentir des réductions d'impôt de l'ordre de 100 milliards de dollars d'un bout à l'autre du pays, notamment aux entreprises. Le secteur des entreprises va obtenir un bénéfice extraordinaire lorsque le taux d'imposition des sociétés passera de 17 à 16 p. 100. Les salariés à revenu élevé vont aussi bénéficier de la réduction de l'impôt sur les gains en capital. Ne me dites pas qu'il y a ici des salariés à revenu élevé pour applaudir. En tout cas, les mécaniciens qui ne trouvent aucun réconfort dans ces mesures sont nombreux.

Ne me dites pas que les bureaucrates qui ont préparé le programme de réduction des impôts ne savaient pas qu'il s'agissait d'un enjeu national urgent. Chaque année, tous les partis politiques représentés à la Chambre des communes leur ont rappelé l'urgence de la situation.

 

. 1145 + -

Le député de Lakeland a dit qu'il avait reçu quelque 70 000 lettres venant non seulement d'employés, mais aussi d'employeurs qui craignent que le fait que le gouvernement actuel ne reconnaît pas ce métier spécialisé à sa juste valeur ne nuise à leur capacité d'attirer des jeunes vers une carrière dans cette industrie.

Le Parti libéral parlait d'apprentissage dans le discours du Trône, mais en ne reconnaissant pas un des problèmes les plus pressants auxquels les apprentis se heurtent aujourd'hui et en n'accordant pas d'allégements fiscaux aux travailleurs lorsqu'il avait la possibilité de le faire, il nous montre bien que ce n'était que des paroles en l'air. Les libéraux ne saisissent pas bien la question des métiers de cols bleus, des industries fondées sur les programmes d'apprentissage. Ils se préoccupent davantage du secteur de la haute technologie ou de la nécessité pour eux d'accorder des allégements fiscaux aux sociétés afin que les travailleurs ordinaires puissent en retirer quelque chose en bout de ligne.

Il s'agit ici d'une question qui a été soulevée auprès de pratiquement tous les députés à la Chambre. Je doute qu'il y ait une personne ici qui n'a pas été en contact avec un mécanicien, un charpentier ou un électricien industriel qui doit dépenser beaucoup d'argent juste pour pouvoir exercer son métier, pour pouvoir se lever le matin, aller travailler et faire ce qu'il a appris à faire. Ces gens n'ont pas la reconnaissance que même un petit homme d'affaires ou un entrepreneur qui décide d'ouvrir sa propre entreprise peut avoir.

Il y a une autre question d'équité fiscale ou plutôt d'injustice fiscale qui touche les travailleurs. En tant que compagnon charpentier, j'ai eu à parcourir le pays bien des fois à la recherche de travail. Il fallait que j'aille là où le travail se trouvait. Je mettais donc mes outils à l'arrière de ma camionnette et je conduisais de la Colombie-Britannique jusqu'à Thunder Bay, à la recherche d'un emploi. Aucune dépense ainsi engagée ne peut être déduite. Si je me déplaçais pour aller faire un travail et que j'étais embauché à l'autre bout du pays et pouvais produire une preuve attestant que j'avais un travail, je pouvais alors déduire mes frais de déplacement. Par contre, si je faisais preuve d'assez d'esprit d'initiative pour aller à la recherche d'un travail et que je me déplaçais jusqu'à ce que j'en trouve un, mes frais de déplacement ne pouvaient pas être déduits. Voilà un autre exemple qui montre bien à quel point on néglige tout un segment de la population qui gagne sa vie grâce à un métier qui l'oblige à se rendre là où il y a du travail et qui n'est pas reconnu par le gouvernement.

Le dernier exemple que je veux présenter afin de prouver que le gouvernement ne se préoccupe pas vraiment des apprentis, des travailleurs spécialisés ni même des industries qui emploient de tels travailleurs, c'est le traitement que l'assurance-emploi réserve aux apprentis. Lorsque je fréquentais l'école de métiers, quand j'ai quitté mon emploi pour aller au collège communautaire suivre des cours théoriques, j'ai immédiatement touché de l'assurance-emploi. Il n'y avait pas d'interruption. J'avais un revenu de subsistance pour survivre pendant cette période de six semaines.

C'est là un des changements qui ont été apportés en 1996. Maintenant, lorsqu'un apprenti quitte son emploi pour aller au collège communautaire, il s'expose à une période d'attente de deux semaines, comme s'il était sans emploi. Or, il n'est pas sans emploi, il accomplit simplement le volet didactique de son apprentissage. Cette lacune a été signalée à maintes occasions au gouvernement. Ce dernier a maintenant proposé des amendements au projet de loi sur l'assurance-emploi et il a choisi de ne pas régler le problème auquel se heurtent les apprentis, le seul problème que les Conseils des métiers du bâtiment ont porté à son attention.

Je félicite le député de Lakeland de nous permettre à nouveau de discuter de cette question. Il est honteux que le gouvernement libéral ne juge pas utile de répondre aux besoins de l'industrie en réglant ce problème pressant.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui au nom de notre porte-parole en matière de finances, le député de Kings—Hants, qui s'est exprimé par le passé en faveur de cette initiative.

Je félicite le député de Lakeland d'avoir uni sa voix à celle de presque tous les parlementaires qui appuient cette initiative.

De prime abord, le Parti progressiste conservateur et moi-même croyons que notre régime fiscal est bien trop complexe d'un point de vue très large.

Cela dit, j'hésite beaucoup à dire que nous obtiendrons l'allégement fiscal général dont le Canada a besoin pour conserver sa capacité à être concurrentiel. Je ne pense pas que dans un proche avenir le gouvernement nous accorde un tel allégement de quelque façon que ce soit. Le moins que nous puissions faire pour les mécaniciens et travailleurs de ce secteur c'est accepter les recommandations proposées par le député de Lakeland et d'autres parlementaires de la Chambre.

 

. 1150 + -

Il y a au Canada au moins 115 000 mécaniciens qui travaillent et paient des impôts. Ces mécaniciens font une contribution très importante à notre économie mais ont des frais initiaux substantiels pour se lancer dans leur métier. Je sais que beaucoup de Canadiens seront estomaqués ou choqués d'apprendre que pour pouvoir exercer ce métier, un Canadien doit dépenser entre 15 000 et 40 000 dollars pour acquérir les outils nécessaires.

Le député du NPD qui est intervenu il y a un instant a fait remarquer qu'on assistait actuellement à un mouvement démographique massif dans de nombreux métiers. Que ce soit la charpenterie, la mécanique, la soudure ou d'autres domaines, ces métiers n'attirent plus autant de jeunes qu'ils le devraient. Cela s'explique, entre autres, du fait des investissements initiaux prohibitifs que ces métiers supposent au départ.

Au nom du Parti progressiste conservateur du Canada, j'appuie l'initiative du député de Lakeland, une initiative qui avait été lancée par le comité des finances une première fois en 1996 et une deuxième fois en 1997. On peut arguer que cela complique le code fiscal, cela accorderait également un allégement fiscal substantiel aux personnes exerçant ces métiers qui sont essentiels.

Nous appuyons cette initiative, tout comme nous sommes en faveur d'un allégement général des impôts. Le gouvernement ne comprend toujours pas que nous avons à l'heure actuelle le deuxième taux d'imposition des particuliers le plus élevé de tous les pays du G7 en proportion de notre économie. Il devrait se rendre compte du fait que nos partenaires commerciaux font des progrès incroyables à ce chapitre. Il devrait accorder aux Canadiens les allègements fiscaux généraux qui nous permettront de maintenir notre position dans le monde. Le gouvernement est d'avis que les réductions fiscales prévues dans le mini-budget déposé en septembre dernier suffisent à régler ces problèmes.

Alors que les autres pays de l'OCDE prennent des mesures importantes au chapitre de la réduction des impôts, le gouvernement fédéral dirigé par le Parti libéral du Canada ne fait pas preuve de beaucoup de sérieux dans ce domaine. En conséquence, le Canada traîne de plus en plus de l'arrière et perd de sa compétitivité.

Nous devons voir à accorder aux Canadiens les allègements fiscaux généraux dont nous avons tant besoin. Nous savons que le gouvernement du Canada ne fournit pas à l'économie tous les outils qu'il devrait lui fournir. Nous savons que nous nous dirigeons tout probablement vers un ralentissement quelconque de l'activité économique dont nous ne pouvons pas encore évaluer l'importance.

Je profite de l'occasion pour lancer un défi au gouvernement. Si nous faisons face à un certain ralentissement de l'économie, nous devons envoyer aux investisseurs un message fort pour leur faire prendre conscience du fait que le Canada est un endroit propice aux investissements. Je veux aussi dire au ministre des Finances que non seulement il devrait appuyer la position défendue par le député de Lakeland dans ce dossier, mais aussi qu'il n'est presque jamais arrivé que le gouvernement du Canada ne dépose pas de budget au moment où il devrait le faire.

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de souscrire à ce projet de loi d'initiative parlementaire. C'est une question qui a été soulevée dans ma circonscription à de multiples reprises. Un certain nombre de gens de ma circonscription travaillent dans des ateliers d'usinage, chez des concessionnaires d'automobiles et à d'autres endroits où cette question de la déductibilité du coût des outils se pose de façon tout à fait concrète.

 

. 1155 + -

On a déjà mentionné aujourd'hui que la Chambre avait déjà été saisie de cette question à un certain nombre de reprises. Je ne ferai pas une longue digression, mais je vais prendre 30 secondes environ pour dire que c'est une question qui montre bien l'inefficacité du Parlement.

Depuis sept ans que je siège ici, cette question a été soulevée à de multiples reprises et chaque fois, des députés de tous les partis se sont prononcés en faveur de cette mesure législative. Même les libéraux ont souscrit au projet de loi lorsqu'ils siégeaient dans l'opposition. Il s'agit de traiter de façon équitable un groupe de Canadiens qui, à l'heure actuelle, sont traités de façon inéquitable par la Loi de l'impôt sur le revenu. Toutefois, pour une raison quelconque, lorsque les gens siégeant de ce côté-ci se retrouvent de l'autre côté, comme cela s'est produit en 1993, j'ignore ce qui arrive, mais les choses changent. Y a-t-il une machine au milieu de l'allée qui pratique sur ces gens une lobotomie frontale qui fait qu'ils ne sont plus en mesure de penser ni de parler d'eux-mêmes?

Comme je ne veux pas les offenser, je ne vais pas me lancer dans cette voie. Je vais simplement leur lancer un appel. Nous sommes des députés d'arrière-ban et il s'agit d'une mesure d'initiative parlementaire. La Chambre sera saisie de cette question tant qu'on ne prendra pas les mesures correctrices qui s'imposent. Les députés qui siègent maintenant de l'autre côté pourraient peut-être faire preuve de leadership au nom des mécaniciens du Canada qui sont traités de façon injuste, et se prononcer en faveur de ce projet de loi lorsqu'il sera mis aux voix.

Mon collègue de Lakeland a saisi la Chambre de la question peu après les élections de 1993. À l'époque, je me rappelle en avoir parlé aux gens de ma circonscription. Certains de mes électeurs travaillent chez Petersen Pontiac Buick, un grand concessionnaire à Sherwood Park. Je ne crois pas que les propriétaires de cette entreprise soient parents avec le député d'en face qui saute dès qu'on prononce son nom. C'est certainement une bonne entreprise. Chez Petersen Pontiac, les mécaniciens doivent posséder leurs propres outils.

Il semble que ce soit tout simplement logique d'exiger que chaque mécanicien possède ses propres outils. De cette façon, ils en prennent davantage soin.

J'ai fait mon propre travail de mécanique pendant des années. Le samedi, j'aimais me glisser sous mon auto et me salir les mains en changeant l'huile ou en exécutant d'autres petites mises au point. Je suis méticuleux, mais il m'est arrivé de perdre un outil que j'utilisais et j'ai été obligé de le remplacer. Je ne suis pas un mécanicien de profession. Pour me procurer un nouvel outil, je me rends donc chez le détaillant et je l'achète avec des dollars nets d'impôt. Le mécanicien qui gagne sa vie avec ces outils n'a pas le choix de les remplacer au besoin. Il doit acheter des outils avec des dollars nets d'impôt.

Voilà une autre question cruciale. Nous devons reconnaître l'importance de ce secteur pour notre pays. Nous dépendons terriblement des appareils mécaniques de toutes sortes, des automobiles, des autocars, des camions pour le transport, non seulement pour nous déplacer d'un endroit à un autre, mais pour assurer le transport des biens et des services que nous produisons au Canada. S'il n'y avait pas de mécaniciens et un nombre raisonnable de personnes oeuvrant dans ce domaine, nous serions en bien mauvaise posture. Il est essentiel d'avoir suffisamment de personnel dans ce métier. Franchement, je crois qu'on décourage les gens de choisir ce métier, à cause des coûts considérables en cause.

La plupart des mécaniciens, dès qu'ils terminent leur formation d'apprentis ou même durant leur formation, doivent se procurer leurs propres outils et ils les achètent avec des dollars après impôt, ce qui est totalement injuste. Dans tous les autres métiers ou professions, les gens peuvent déduire le coût de leur équipement du résultat net de l'entreprise. Un mécanicien travaillant comme employé n'est pas autorisé à le faire.

 

. 1200 + -

Selon le secrétaire parlementaire, cette mesure inquiète le gouvernement parce qu'elle va ouvrir les vannes et rendre le code fiscal très compliqué. Je vous souligne qu'il l'est déjà.

À mon avis, ce léger amendement ne froissera personne et réjouira énormément un grand nombre de mécaniciens. Selon les députés d'en face, c'est une question d'équité et, par conséquent, ils vont refuser cette déduction aux mécaniciens parce qu'ils ne l'accordent pas à d'autres groupes. Pourtant, nous savons tous que d'autres groupes ont droit à ces déductions. À titre d'exemple, les musiciens et les artistes tirent leur subsistance de leur métier. Ils utilisent des outils. On pourrait soutenir qu'un violon est un outil de travail. Il est déductible, et c'est ainsi qu'il doit en être.

Je ne saisis pas comment on peut aboutir à la conclusion qu'un mécanicien tenu de posséder ses outils devrait en faire l'acquisition avec son revenu après impôt.

Voici une leçon d'arithmétique. Lorsqu'il est question d'impôt, nous avons tendance à parler de pourcentages et de taux. Il est bien connu que, dans la majorité des provinces, le taux marginal d'imposition se situe autour de 50 p. 100 lorsque l'on combine les impôts fédéral et provincial. Étant donné que c'est imposable, et compte tenu des accords fiscaux actuels intervenus entre les provinces et le gouvernement fédéral, toute taxe fédérale est aussi automatiquement une taxe provinciale.

Du point de vue du consommateur et du mécanicien, il y a maintenant une facture à régler qui, s'il gagne de l'argent lui permettant d'acquérir un produit, correspondra pour la moitié à des taxes. Je vais donner un exemple de ce raisonnement avec des chiffres. Imaginons qu'une personne ait besoin d'acquérir des outils d'une valeur de 1 000 $. Elle doit gagner 2 000 $ pour en régler le coût parce qu'après l'application du taux marginal d'imposition de 50 p. 100, il ne lui reste que 1 000 $.

L'erreur que nous commettons, c'est de mesurer cela comme s'il s'agissait d'un pourcentage du revenu gagné. Lorsque nous réglons la TPS, c'est un pourcentage du produit que nous achetons. Si nous envisageons cela comme un pourcentage du produit que le mécanicien achète, c'est un taux d'imposition de 100 p. 100. Pour acquérir des outils d'une valeur de 1 000 $, le mécanicien a dû verser 1 000 $ d'impôt, ce qui correspond à un taux d'imposition de 100 p. 100. C'est très discriminatoire. Je prie instamment tous les députés de voter en faveur de cette motion lorsqu'elle reviendra à la Chambre.

Le président suppléant (M. Bélair): Conformément au paragraphe 95(2) du Règlement, le motionnaire et député de Lakeland a droit à une période de réponse de cinq minutes.

M. Leon Benoit: Monsieur le Président, je voudrais d'abord remercier non seulement mes collègues de l'Alliance canadienne, mais aussi les députés de tous les autres partis politiques, à l'exception du parti au pouvoir, d'avoir appuyé massivement le projet de loi.

J'ai écouté le secrétaire parlementaire, marionnette du ministre des Finances. Curieusement, presque tous les députés du parti au pouvoir ont voté en faveur du projet de loi juste avant les élections. Sauf erreur, 11 ministres ont voté contre. Certains ministres l'ont appuyé avant les élections. Bien sûr, aujourd'hui, c'est une autre histoire.

C'est ainsi que le parti au pouvoir voit la démocratie. C'est répréhensible et inconvenant. C'est antidémocratique et inacceptable.

Aujourd'hui, le secrétaire parlementaire du ministre des finances a prononcé un discours, probablement préparé par le ministre, et c'était un triste discours pour s'opposer au projet de loi au motif qu'il existait déjà une exemption personnelle pour tenir compte de questions de ce genre. Il a dit que le projet de loi créerait une injustice dans la Loi de l'impôt sur le revenu. Il a dit aussi que cela permettrait aux mécaniciens de déduire même des coûts négligeables. Il a ajouté que les outils peuvent servir à d'autres fins que le travail. En d'autres termes, il a dit que les mécaniciens tricheraient et demanderaient une déduction pour des outils destinés à leur usage personnel.

 

. 1205 + -

Je vais répliquer à certaines des affirmations du secrétaire parlementaire. À propos des exemptions personnelles, ce type de déduction ne sert pas à couvrir des dépenses comme celle-là. Les employés qui n'ont pas à acheter quoi que ce soit en vertu de leurs conditions d'emploi, soit la plupart des employés, bénéficient de l'exemption personnelle, car tous les employés en bénéficient. C'est un argument absurde, et je ne puis croire que le secrétaire parlementaire l'ait invoqué.

L'Alliance canadienne lutte pour faire augmenter le montant des exemptions personnelles afin de les majorer d'environ 3 000 $ par rapport à ce que propose le gouvernement, et d'environ 4 000 $ dans le cas de l'exemption de conjoint. Le gouvernement a été très faible sur ce point, mais cela n'a rien à voir avec l'objet du débat. Il s'agit qu'une question importante, et l'Alliance canadienne juge important d'augmenter le montant des exemptions personnelles, mais le gouvernement ne fait cependant aucun effort véritable à cet égard. Cela n'a d'ailleurs rien à voir avec le sujet du débat, de sorte que je ne peux comprendre que le secrétaire parlementaire en parle.

Il a ensuite affirmé que la mesure à l'étude créerait de l'injustice. J'inviterais le secrétaire parlementaire à réfléchir à ces paroles. Quand un mécanicien ou un technicien décide de travailler à son compte, il peut déduire tous ces coûts. Il peut déduire le coût de tous les outils qu'il achète et les coûts liés à son activité. Cependant, s'il travaille en tant qu'employé, peut-être dans le même atelier, même si ses conditions d'emploi exigent qu'il achète ses propres outils, il n'est pas autorisé à déduire ces dépenses. Comment la mesure à l'étude pourrait-elle créer plus d'injustice? Elle permet d'introduire une certaine mesure de justice dans la législation fiscale. Voilà une autre réponse absolument mal réfléchie.

Le secrétaire parlementaire a présenté des arguments contre la possibilité de déduire des menus frais aux mécaniciens. Qu'y a-t-il de mal à ces déductions? Les mécaniciens utilisent beaucoup d'outils qui, pris séparément, ne coûtent pas cher, mais qui, mis tous ensemble, peuvent représenter des milliers de dollars. C'est exactement pour cela que le projet de loi a été présenté. Qui a-t-il de mal à permettre ces déductions?

Le secrétaire parlementaire a déclaré que les outils pouvaient servir ailleurs qu'au travail. C'est la même chose dans tous les domaines de la Loi de l'impôt sur le revenu. Si quelqu'un est porté à tricher—et j'imagine que le secrétaire parlementaire croit que tous les contribuables sont des tricheurs—il est évident que les outils serviront à des fins personnelles. Cependant, la plupart des techniciens sont des contribuables honnêtes qui travaillent dur et ils méritent notre respect. Il est honteux que le secrétaire parlementaire laisse entendre le contraire. C'est tout à fait inacceptable.

Qu'arrivera-t-il au projet de loi? Avant les élections, tous les députés de l'opposition et pratiquement tous les députés ministériels ont voté en faveur du même projet de loi. Cependant, le secrétaire parlementaire vient de changer la donne.

Je me demande si les simples députés du parti ministériel voteront contre le projet de loi maintenant que les élections sont passées. Je me le demande. J'ai peine à croire qu'ils feraient cela, mais ils ont voté contre une promesse de leur livre rouge reprise textuellement dans une motion de l'opposition. Après cela, qui sait ce qu'ils feront? Ils pourraient très bien voter contre le projet de loi. Ce serait alors très regrettable.

Qu'en est-il de l'équité envers les techniciens et les mécaniciens dont l'achat de leurs propres outils fait partie des conditions d'emploi? Cela représente une dépense de 15 000 $ à 70 000 $ dont l'impôt ne tient pas compte. C'est injuste. C'est une question d'équité. Que le gouvernement fasse quelque chose à ce sujet le plus rapidement possible.

Je demande le contentement unanime de la Chambre pour que le projet de loi puisse être mis aux voix.

Le Président: Y a-t-il contentement unanime?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: La période prévue pour l'examen des initiatives parlementaire est maintenant expirée. Puisque la motion ne pouvait pas faire l'objet d'un vote, elle est rayée du Feuilleton.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

 

. 1210 + -

[Traduction]

LE RÈGLEMENT

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) propose:  

    Que les paragraphes (5) des articles 76 et 76.1 du Règlement soient modifiés par adjonction, à la fin des nota qui les suivent, de ce qui suit:

    Il est entendu que l'Orateur ne choisit pas, pour la tenue d'un débat, une motion ou une série de motions à caractère répétitif, frivole ou abusif ou de nature à prolonger inutilement les délibérations à l'étape du rapport. Dans l'exercice de son pouvoir de choisir les motions, l'Orateur s'inspire de la pratique de la Chambre des communes du Royaume-Uni.

—Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir traiter de la motion dont nous sommes saisis.

[Français]

L'objectif de cette motion est simple. Elle vise à confirmer de nouveau le pouvoir du Président de la Chambre de choisir les motions qui feront l'objet du débat à l'étape du rapport et, bien sûr, l'objet du vote, ainsi qu'il est prévu dans notre procédure actuelle, adoptée il y a déjà 32 ans.

Au cours de mes discussions avec les autres leaders à la Chambre, nous avons étudié une vaste gamme d'approches qui pourraient être suivies pour faire de l'étape du rapport une partie plus efficace du processus législatif. Nous avons envisagé de changer le mode de fonctionnement des comités, des règles d'attribution de temps ainsi que de modifier les règles régissant les étapes du rapport.

Cependant, il est devenu évident à mes yeux qu'une telle démarche devrait plutôt être abordée dans le contexte de la modernisation de la Chambre des communes et qu'aujourd'hui, nous devrions tout simplement nous limiter à réaffirmer, en quelque sorte, l'autorité que le Président a toujours eue, ou enfin, depuis 32 ans que nous avons cette procédure.

Nous sommes donc restés aujourd'hui avec un seul point, mais un point de portée très étroite qui constitue un problème pour la Chambre depuis quelques années. Mes honorables collègues des autres partis m'ont convaincu de limiter mon intervention sur ce seul point, et c'est ce que je ferai.

[Traduction]

Au cours des dernières années, les Présidents qui se sont succédé se sont sentis de moins en moins en droit d'exercer leur pouvoir de choix, ce qui a eu pour conséquence que l'étape du rapport est devenue vulnérable à des utilisations discutables et, disons, qui dérogent aux objectifs de départ.

[Français]

En décembre 1999, la Chambre a été forcée de consacrer 42 heures consécutives à voter sur 469 motions faisant suite à l'étape du rapport, en majorité déposées dans le seul but de retarder les travaux de la Chambre. Et, non, cela n'a rien à voir avec la démocratie de changer des virgules en points-virgules, de vouloir empêcher le Parlement de fonctionner. Ce n'est pas de la démocratie, c'est l'inverse. Et les députés le savent tous.

M. Michel Bellehumeur: C'est ça, la démocratie.

L'hon. Don Boudria: Celui qui est en train de chahuter le sait mieux que les autres. En mars 2000, nous avons assisté au même phénomène. La Chambre a dû voter pendant 36 heures d'affilée sur 411 motions. Qui plus est, en décembre 2000, la Chambre s'est trouvée confrontée à la possibilité de devoir voter sur 3 133 motions, ce qui l'aurait obligé, en théorie, à siéger sans interruption pendant plus de deux semaines pour en disposer.

En fait, ce qu'un député a décidé de faire, en septembre 2000, c'est de s'accaparer d'une sorte de droit de veto qu'il aurait lui-même sur les autres 300 députés, puisque, à toutes fins pratiques, il est bien sûr impossible de voter sur 3 133 motions, sauf si nous siégions des mois et des mois seulement sur l'étape du rapport d'un projet de loi.

Nous ne pouvons certainement pas prétendre que la démocratie est améliorée par un geste semblable, tout comme il serait impossible de prétendre que de chahuter aujourd'hui à la Chambre change la démocratie autrement.

M. Michel Bellehumeur: Eh bien non, c'est de la dictature.

L'hon. Don Boudria: Il est clair que la visée du Règlement n'a jamais été d'ouvrir la voie à de telles manoeuvres. Nous le savons tous.

 

. 1215 + -

D'ailleurs, accompagné d'un parlementaire d'une autre formation politique que la mienne, je me suis rendu au Parlement de Grande-Bretagne, duquel nous avons emprunté la règle il y a 32 ans pour l'adapter à notre Chambre, et j'ai pu constater comment cette règle fonctionnait. Il était tout à fait évident que la règle n'avait jamais eu pour but d'empêcher le Parlement de fonctionner.

[Traduction]

C'est en décembre 1968 que la Chambre a adopté la procédure de l'étape du rapport. Des députés me rappellent que peut-être ce que nous avons fait est plus important que l'origine de la règle, c'est-à-dire le Royaume-Uni. Admettons. Limitons-nous donc à ce qui se faisait ici lorsque nous avons adopté la règle, en décembre 1968. L'ancien président de ce qui était le Comité de la procédure a proposé ces règles. Il a déclaré, lorsqu'il a fait adopter ces règles, et ce sont ses propos, non les miens: «La description du processus s'applique dans les grandes lignes aux délibérations du Parlement du Royaume-Uni.»

En d'autres termes, lorsque la règle a été adoptée, en 1968, le président du Comité de la procédure a reconnu qu'il était allé chercher cette règle au Royaume-Uni pour l'appliquer au Parlement canadien.

Au cours du même débat, le grand spécialiste reconnu du parlementarisme, à l'époque, qui était aussi membre du Comité spécial de la procédure—je suis persuadé que mon collègue de Winnipeg voudra en parler—, le regretté Stanley Knowles, a parlé de l'application de la règle:

    En termes généraux, cependant, la teneur de nos recommandations a consisté à tenter d'éliminer le dédoublement des débats et à faciliter le processus d'examen des affaires de la nation devant le Parlement pour que celui-ci en dispose.

Le premier ministre de l'époque, M. Trudeau, a affirmé au sujet de l'étape du rapport:

    Les nouveaux pouvoirs qui seront conférés au Président pour l'autoriser à mettre de l'ordre dans les propositions d'amendement et à choisir celles qui permettent le mieux à la Chambre d'exprimer son point de vue contribueront à focaliser et à améliorer les délibérations. Si cette mesure est adoptée, ce sera l'une des premières occasions où la Chambre aura tiré parti du nouveau statut de son Président pour améliorer sa propre procédure.

Voilà ce que le premier ministre Trudeau disait lorsque nous avons adopté cette règle, en 1968.

Je viens donc de citer trois sources: le président du comité qui a proposé la règle, un député de l'opposition et porte-parole très éloquent, le regretté Stanley Knowles, et l'ancien premier ministre, le regretté très honorable Pierre Elliott Trudeau.

Il me semble évident que les concepteurs de la règle régissant l'étape du rapport voulaient que tout soit très clair. Permettez-moi de rappeler maintenant les propos d'un ancien Président et député conservateur, Marcel Lambert:

    Il vous reviendra, monsieur le Président, de mettre de l'ordre dans ces amendements et, franchement, sauf le respect que je vous dois, il ne s'agit pas d'une tâche que je vous envie.

Voilà ce que disait Marcel Lambert, qui avait lui-même été Président. Sauf erreur, c'était à l'époque Diefenbaker, vers 1962.

Ce que M. Lambert disait, c'était que vous, monsieur le Président, auriez beaucoup de mal à faire un choix pour que seuls les amendements convenables fassent l'objet d'un vote, par exemple. Ce sont les propos d'un député conservateur.

Nous constatons donc que, à l'époque où la procédure de l'étape du rapport a été adoptée au Canada, on prévoyait que le Président de la Chambre exercerait les pouvoirs de choix très larges qui sont d'usage au Royaume-Uni.

Erskine May, à la page 466 de la 20e édition de son ouvrage, Parliamentary Practice, traite du pouvoir de sélection en ces termes:

    Le titulaire de la présidence opère un choix qui vise à mettre en évidence les points saillants des critiques afin de prévenir les répétitions et les chevauchements et, lorsque plusieurs amendements traitent du même point, à choisir le plus efficace et le mieux rédigé.

 

. 1220 + -

C'est exactement le même point.

    L'expérience a montré que, dans la plupart des cas, le pouvoir de décision conféré à la présidence pour qu'elle choisisse quels amendements doivent être mis aux voix est la meilleure manière d'offrir à toute la gamme des points de vue une chance raisonnable de s'exprimer.

C'est ce qu'on lit dans Erskine May. Ce livre se trouve sur notre pupitre devant nous à titre d'ouvrage de référence. Je n'invente rien de nouveau en matière de règle parlementaire. Il est clair que les conceptions de l'étape du rapport telle qu'on la pratique au Canada voulaient que le travail portant sur les détails soit effectué en comité, que la plus grande partie des amendements y soit discutée et que l'étape du rapport se limite aux amendements sur lesquels il n'aurait pas été possible de faire des propositions en comité ou qui permettraient à la Chambre de traiter des critiques importantes.

Ainsi que l'indique le guide de procédure Marleau-Montpetit, à la page 663, les concepteurs de ce processus voulaient que tous les députés, et non seulement ceux qui siègent au comité, aient la possibilité de proposer des amendements pertinents, mais «la visée n'est pas que cette étape devienne une répétition du travail en comité». Cette citation n'est pas tirée d'Erskine May, mais plutôt de notre manuel, celui de Marleau et Montpetit. Avec le temps, cependant, les Présidents ont cessé d'exercer les pouvoirs qui leur avaient été conférés, et je ne contesterai pas la façon dont ils ont agi.

Tour à tour, chaque Président a exercé sa prérogative moins énergiquement que son prédécesseur—mais je ne veux pas critiquer la façon dont les Présidents ont exercé leurs fonctions, ce sont des choses qui arrivent. En conséquence, l'étape du rapport du processus d'adoption des projets de loi occupe maintenant une place exagérée dans le processus législatif, au détriment des autres étapes.

En 1985, le Comité spécial sur la réforme de la Chambre des communes, aussi appelé comité McGrath—un membre de ce comité siège toujours à la Chambre et il prendra sans doute la parole plus tard—, a demandé instamment que le Président exerce son pouvoir de choix, mais la seule conséquence réelle a été que les amendements battus en comité n'étaient pas choisis à l'étape du rapport. Le député était un membre important de ce comité, comme je l'ai dit, et il est encore un député important et fort respecté à la Chambre.

En conséquence de cette évolution, les députés ont adopté pour pratique de ne pas proposer leurs amendements au moment de l'étude en comité et de les réserver plutôt à l'étape du rapport. Ce n'est là qu'un des problèmes. Cette pratique a contribué à amoindrir la valeur de l'étude en comité parlementaire et à gonfler davantage l'importance déjà exagérée de l'étape du rapport.

Mais il y a pire. Il n'a pas fallu longtemps avant que les étapes normales du processus du rapport ne commencent à être utilisés à des fins qui n'étaient pas prévues au départ, ce qui a contribué à rendre ce processus extrêmement déplaisant pour tous les députés, tout en jetant le discrédit sur la Chambre des communes. Je ne pense pas que les Canadiens qui nous voient voter 24 heures sur 24, trois jours d'affilée, pour changer des virgules pour des points-virgules sont très impressionnés par notre comportement collectif.

Par le passé, nous avons constaté que lorsqu'un député découvre par accident une méthode dysfonctionnelle pour exprimer son désaccord sur le plan politique, celle-ci peut d'abord jouer le rôle de l'arme nucléaire dans l'arsenal parlementaire. Elle est utilisée une première fois parce qu'elle est la plus puissante à avoir été utilisée au Parlement, mais, avant longtemps, elle devient la voie obligée de toute opposition parlementaire. Autrement dit, elle est utilisée une première fois à cause de ses effets dévastateurs, la deuxième fois, parce qu'il s'agit d'une affaire importante, mais, la troisième fois, parce qu'on n'a plus choix, sinon personne ne croit que vous parlez sérieusement. C'est un peu comme l'incident du timbre.

M. Bill Blaikie: C'est comme l'attribution de temps.

L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, je parlerai avec plaisir de l'attribution de temps à une autre occasion parce que, en fait, si on se reporte à la Chambre des communes du Royaume-Uni, on constate que tous les projets de loi font l'objet d'une motion d'attribution de temps d'une journée, comme on sait. Certes, la présidence peut prolonger le débat d'une heure à la fin de la journée, s'il le faut.

Comme je l'ai dit plus tôt, au cours des discussions que j'ai eues avec d'autres leaders parlementaires, il est devenu évident qu'il existe une foule de problèmes dans le processus législatif. Je veux attirer l'attention de mes collègues et des autres partis là-dessus.

 

. 1225 + -

Toutefois, ce n'est pas ce que nous faisons aujourd'hui. Aujourd'hui, nous ne faisons que réparer ce qui ne marche pas dans le Règlement pour que le Parlement fonctionne.

Nous avons eu un cas au cours du débat sur la Loi sur les jeunes contrevenants pendant la dernière législature où des centaines d'amendements ont été proposés uniquement pour modifier la date d'entrée en vigueur de la loi. Gardant à l'esprit ce que nous avons dit sur l'objectif que voulaient atteindre les auteurs de cette réforme parlementaire d'il y a 32 ans, il est clair qu'ils n'ont jamais pensé que 3 133 amendements seraient un jour présentés pour un projet de loi. Personne n'avait prévu que cette disposition serait utilisée pour présenter de multiples amendements à l'étape du rapport ne visant qu'à changer la date d'entrée en vigueur de la loi et, surtout, personne n'a jamais conçu ce système pour qu'il permette à un député d'exercer un droit de veto sur tout le processus législatif.

Si c'était cela que les auteurs de la réforme avaient à l'esprit, pourquoi l'auraient-ils fait? Pourquoi, dans toute leur sagesse en 1968, auraient-ils conçu une procédure où un seul député, sous prétexte de ne pas aimer un projet de loi, pouvait accoucher d'assez d'amendements pour empêcher le Parlement d'adopter ce projet de loi? Soyons sérieux. Personne n'a jamais voulu pareille chose.

On peut peut-être apporter d'autres améliorations à l'étape du rapport. Si c'est le cas, il faudra le faire à une autre occasion parce que cela constituerait une sorte de réforme parlementaire dont je voudrai m'entretenir avec les autres partis, mais c'est une autre question et c'est pourquoi la présente motion ne le fait pas.

Je dois dire que j'aurais aimé qu'on apporte des correctifs en même temps, et j'en ai discuté avec d'autres. Je ne vais pas décrire la nature de chacun de ces correctifs parce que je divulgue jamais ce qui s'est dit pendant une réunion des leaders parlementaires, et je ne le ferai pas, ni maintenant ni plus tard. Parfois, à mes risques et périls, je n'ai pas rendu publique la teneur de mes discussions avec d'autres leaders parlementaires, mais j'estime que c'est la seule manière d'arriver à des résultats à la Chambre, alors je ne le ferai pas non plus maintenant.

[Français]

Dans les mois et même les jours qui viendront, j'aimerais dialoguer avec mes homologues des autres formations politiques pour pouvoir mettre en place un système de modernisation des règles parlementaires, où il y aurait de la réciprocité et, ultimement, offrir un meilleur Parlement au peuple canadien. Je pense que c'est ce que nous voulons tous.

C'est une discussion qui est pour une autre fois et non pas pour aujourd'hui.

[Traduction]

Entre-temps, l'une des règles qui régissent nos travaux ne fonctionne pas correctement, et les difficultés que cela entraîne mettent en péril la capacité de tous les député de siéger dans des conditions raisonnables, tout en jetant le discrédit sur la Chambre des communes. Je manquerais à mon devoir envers la Chambre si je ne proposais pas que l'on remédie immédiatement à cette situation, alors c'est ce que je vais faire.

[Français]

En soumettant cette proposition, je ne tente pas de modifier la procédure de la Chambre, je me contente seulement de réaffirmer les pouvoirs de son président, selon les visées des rédacteurs du Règlement, il y a déjà 32 ans. C'est tout ce que je ferai aujourd'hui. Je me contente de réaffirmer le point de vue du président du comité qui a jugé que ces règles étaient préférables. Je parle de Gordon Blair.

Je me contente de réaffirmer le point de vue de grands parlementaires comme Stanley Knowles, comme l'honorable Marcel Lambert, un ancien président de la Chambre. Je me contente de réaffirmer les conclusions du comité McGrath. Je me contente de réaffirmer ma confiance dans le jugement et le sens de l'équité du président de la Chambre des communes. Je demande à tous mes collègues de bien vouloir adopter cette motion, pour le bon fonctionnement du Parlement, un point c'est tout.

 

. 1230 + -

C'est tout ce que je demande aujourd'hui. Pour le reste, nous aurons un bon dialogue, une bonne conversation entre les leaders, possiblement entre tous les députés aussi, au sujet d'un changement substantiel aux règles. Mais cela, ce n'est pas pour aujourd'hui.

Aujourd'hui, il est de notre devoir de «réparer» le Parlement pour qu'il fonctionne, en attendant d'apporter de plus grands changements. Donc, faisons-le, c'est notre devoir à tous et à toutes.

[Traduction]

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, quand nous nous levons pour participer à un débat, nous commençons souvent notre discours en disant: «Je suis heureux d'intervenir dans ce débat.» Moi, j'ai l'insigne honneur aujourd'hui d'être le premier député de l'opposition à prendre la parole concernant la motion parrainée par le gouvernement. J'ai bel et bien l'intention d'utiliser toute la période dont je dispose, en vertu de l'article 43 du Règlement, de crainte que le gouvernement ne nous impose le bâillon.

Le leader à la Chambre semble très fier de dire que nous avons pour modèle le Parlement du Royaume-Uni. Il sourit en disant: «Là-bas, tout projet de loi fait l'objet d'une motion d'attribution de temps.» Il semble s'en réjouir beaucoup. Cela m'inquiète énormément.

Élu pour la première fois en 1993, je suis donc à la Chambre depuis environ sept ans. Depuis ce temps, j'ai réfléchi sérieusement à ce que représente la Chambre. Je regrette souvent de ne pas avoir appris le français dans ma jeunesse. J'ai grandi très loin de francophones et les sciences et les mathématiques m'intéressaient tellement que j'ai étudié ces matières plutôt que le français.

Mais il y a une expression que je connais en français, soit «parlez-vous». Cela vient de parler, n'est-ce pas? Il y a un lien avec le fait de tenir un débat. Si le Parle-ment n'est pas le lieu pour tenir un débat, quel est donc ce lieu? Pourquoi sommes-nous ici, si ce n'est pas pour débattre comme il faut les problèmes qui se posent?

Je suis parfaitement conscient que la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui n'a rien à voir directement avec un débat. Cette motion a pour objet de déterminer si les députés de l'opposition, entre autres, peuvent proposer des motions. Les députés de l'arrière-ban ne sont pas vraiment libres de proposer des amendements encore que, je suppose, ils le pourraient en vertu du Règlement. En fait, ce que propose cette motion, c'est d'empêcher les députés qui ne font pas partie du petit cercle d'initiés de proposer des amendements à l'étape du rapport.

Je voudrais interrompre mes remarques juste une seconde. Je sais que des centaines, probablement des milliers de Canadiens suivent ce débat. Nous sommes lundi matin. Dans l'Ouest, il est environ 10 h 30 du matin. Beaucoup de gens ont dit qu'ils allaient interrompre leur travail pendant un moment pour suivre cet important débat sur la chaîne parlementaire. Tout l'avenir de notre système parlementaire repose sur ce débat. Ils doivent avoir les yeux rivés sur leur écran de télévision à l'heure qu'il est.

Je voudrais décrire brièvement à leur intention la façon dont les choses fonctionnent ici. Il faut que les gens qui nous écoutent sachent que chaque projet de loi est soumis à trois lectures. La première consiste généralement en la présentation du projet de loi. Quand je suis arrivé à la Chambre en 1993, je trouvais étrange qu'il n'y ait pas de vote à l'étape de la première lecture.

Le Président se lève et demande si le ministre est présent. Le ministre ne prend généralement pas la parole. Le Président lit la motion ou le projet de loi, après quoi le greffier atteste la lecture du projet de loi, puis on déclare le projet de loi adopté ou quelque chose du genre. Le leader du gouvernement à la Chambre ne semble pas être d'accord avec moi.

 

. 1235 + -

Le projet de loi a franchi l'étape de la première lecture, le stade où il est réputé avoir été accepté sans avoir été soumis à un vote. J'ai trouve la chose étrange, mais j'en comprends le pourquoi. La présentation du projet de loi doit simplement être acceptée d'office par la Chambre. Je puis comprendre pourquoi ni le gouvernement ni les autres députés sans doute n'accepteraient de venir à la Chambre pour simplement se prononcer sur une motion qui dirait que le projet de loi sera présenté.

Une fois présenté par le gouvernement, le projet de loi est inscrit au Feuilleton. À une date ultérieure, fixée par le leader du gouvernement à la Chambre, le projet de loi revient pour la deuxième lecture. L'étape la deuxième lecture porte essentiellement sur les principes sous-jacents du projet de loi. Le débat est relativement court car les règles qui le régissent normalement en limitent la durée. La plupart des députés font des discours de 10 minutes à cette étape. L'étape de la deuxième lecture se termine par un vote, puis l'initiative est renvoyée à un comité.

J'ai beaucoup apprécié le travail en comité. J'y ai connu des déceptions, mais, en soi, ce travail est à la fois utile et agréable. Il peut constituer un point tournant crucial du processus démocratique, celui qui nous permet de présenter des projets de loi et des motions.

À l'étape du comité, celui-ci fait un certain nombre de choses. Généralement, il donne au public, qu'il s'agisse d'un groupe de personnes, de membres d'une association ou de particuliers, la possibilité de lui faire part de leur point de vue. Selon l'importance du projet de loi ou sa portée, le nombre de témoins peut être relativement petit ou assez grand.

Par exemple, lors de la dernière législature, j'ai participé à l'étude du projet de loi C-38 à titre de membre du Comité des finances. Malheureusement, ce projet de loi est mort au Feuilleton. Le projet de loi C-38 aurait modifié le fonctionnement des structures bancaires. Le comité a recueilli de l'information de nombreux invités très intéressants et très bien informés.

Je résume les étapes de l'étude d'un projet de loi. Le projet de loi est présenté, puis il franchit ensuite l'étape de la deuxième lecture. Après le débat en deuxième lecture, il fait l'objet d'un vote et est renvoyé à un comité; les membres du comité l'examinent alors à l'étape de l'étude en comité. Avant de renvoyer le projet de loi à la Chambre, le comité examine les différentes suggestions et présentations qui sont faites à son sujet. En utilisant non seulement leurs propres compétences, mais aussi celles d'autres employés et de spécialistes, les membres du comité peuvent proposer des amendements à apporter au projet de loi ou à la motion. Il peut s'agir d'un amendement qui propose de modifier ou de supprimer tel article ou d'ajouter telle chose. Voilà le type d'amendement qui peut provenir du comité.

Lorsque le comité fait rapport du projet de loi à la Chambre, cela signifie simplement que le comité a terminé son travail. Le projet de loi revient à la Chambre pour y être débattu et pour que les amendements qui y sont proposés fassent l'objet d'un vote. C'est ce qu'on appelle l'étude du projet de loi à l'étape du rapport. À cette étape, on examine les amendements que le comité a proposés. C'est ici que le système dérape.

Je crois que la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui tente de tuer une mouche avec un canon. Parce que l'étude en comité ne fonctionne pas, les libéraux veulent invoquer des règles ou des dispositions du Règlement de la Chambre qui empêcheraient les députés d'arrière-ban et de l'opposition de bien présenter leurs motions ou leurs amendements à un projet de loi ou à une motion.

Si cette motion est adoptée, et je crois qu'elle le sera compte tenu de la majorité parlementaire dont le gouvernement jouit, je pense qu'elle fera l'objet d'une attribution de temps. J'en reparlerai un peu plus tard.

 

. 1240 + -

La motion empêchera les députés de débattre de leurs problèmes sur le parquet de la Chambre. Il existe déjà une règle à laquelle a fait allusion le leader parlementaire du gouvernement, un article du Règlement qui empêche les députés de proposer des amendements qui ont déjà été examinés au comité.

Lorsque le comité fait rapport d'un projet de loi, tout amendement qui a été rejeté au comité ne peut pas être proposé à nouveau ici. Cela a un certain sens, puisque le cas d'un tel amendement aura probablement déjà été réglé. Par contre, en plus du projet de loi, le comité fera rapport à la Chambre de tout amendement qu'il aura adopté et sur lequel la Chambre se penchera.

Depuis sept ans que je siège ici, j'ai remarqué que, lorsque le comité adopte des amendements, c'est presque toujours parce que le secrétaire parlementaire qui siège au comité rapporte l'information du ministre et de ses laquais voulant que le gouvernement tienne à l'amendement. Très souvent, il s'agit d'amendements proposés par le gouvernement, lesquels sont évidemment adoptés. Toutefois, un amendement proposé par un député de l'opposition est presque automatiquement rejeté, parce que le comité compte à l'heure actuelle plus de députés libéraux, et donc ministériels, que de députés de tous les partis de l'opposition réunis.

Il s'ensuit que les seuls amendements qui sont proposés sont ceux qui ont l'approbation du ministre. L'influence de celui-ci s'étend au comité. Le ministre maîtrise fondamentalement ce qui s'y passe. Les libéraux présents à la Chambre peuvent bien hurler leurs protestations, mais c'est mon observation. C'est ce que j'ai constaté.

Je me rappelle avoir proposé des amendements très peu de temps après avoir été élu pour la première fois en 1993. Je ne me souviens pas à propos de quel projet de loi, mais je me souviens avoir proposé de bons amendements au tout début du processus. Ces amendements étaient tellement bons que les députés ministériels au sein du comité où je siégeais m'ont confié en privé que j'avais soulevé de bonnes idées. Ils étaient même allés jusqu'à dire qu'ils les appuyaient.

Une ou deux semaines plus tard, après avoir entendu d'autres témoins au comité, nous avons entrepris l'étude article par article du projet de loi. Pour les milliers de gens qui sont à l'écoute de CPAC aujourd'hui, quand on étudie le projet de loi article par article, le président du comité lit tous les articles et demande, pour chacun, s'il est adopté. Parfois, il parle beaucoup plus vite que je ne le fais maintenant. J'essaie de penser un peu aux interprètes que je fais travailler tellement fort ce matin.

Nous voyons donc les articles très rapidement. Si l'on a un amendement à proposer pour lequel on a donné avis, il faut être fin prêt quand le président demande si l'article peut être adopté. Il faut alors se lever immédiatement et dire qu'on a un amendement à proposer parce, même si on a déjà donné avis de cet amendement, si on ne le propose pas à ce moment précis, l'article sera adopté sans être amendé. Voilà comment cela fonctionne en comité. La dernière chose à adopter est le titre.

Une fois l'étude article par article terminée, le président du comité demande s'il doit en faire rapport à la Chambre. Bien sûr, il y a habituellement suffisamment de députés au sein du comité qui acquiescent. Le projet de loi revient ainsi à la Chambre, et c'est là que nous en sommes maintenant. Le projet de loi ou la motion revient à la Chambre après avoir passé les étapes de la présentation, de la deuxième lecture et de l'étude article par article en comité. Puis le projet de loi revient ici pour l'étape du rapport.

Comme je l'ai dit plus tôt, afin d'éviter les dédoublements, les amendements sur lesquels le comité s'est penché ne peuvent pas être représentés à la Chambre. Tout amendement qui n'a pas été étudié en comité peut être présenté par un député de l'opposition ou un simple député du gouvernement. Le gouvernement peut aussi proposer, à l'étape du rapport, des amendements que n'ont pas été étudiés en comité. Ces amendements concerneraient des modifications d'ordre technique de dernière minute ou des changements dont il vient de prendre conscience.

 

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Ensuite, nous devons voter sur chacun des amendements. C'est là que le problème surgit. C'est là que le gouvernement devient désespéré. S'il y a beaucoup d'amendements et si nous, de ce côté-ci de la Chambre, exigeons un vote par assis et debout, et non pas simplement un vote oral, où l'amendement est rejeté à la majorité, les députés du gouvernement sont littéralement forcés de se lever un à un pendant des heures pour voter contre nos amendements afin d'empêcher qu'ils soient adoptés.

Encore une fois, si je peux faire une observation, dans toutes les années que j'ai passées ici jusqu'à maintenant, il y a peut-être eu trois ou quatre amendements présentés par des députés de l'opposition qui ont été adoptés à la Chambre. Je me souviens qu'un de ces amendements venait de moi. C'était le premier à être adopté durant la 35e législature.

M. John Bryden: Il y en a eu deux.

M. Ken Epp: Mon collègue d'en face dit qu'il y en a eu deux. Je ne me souviens pas. Il y a déjà longtemps de cela et beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis ce temps. De toute façon, il y en a eu très peu. La plupart de ces amendements sont simplement rejetés d'emblée.

Je veux revenir au coeur de la question, et c'est que l'étape de l'étude en comité ne fonctionne pas. Selon moi, c'est ça le problème. Si nous avions un comité véritablement indépendant, qui n'était pas contrôlé par le ministre, son bureau, son secrétaire parlementaire et ses serviteurs, si nous pouvions vraiment nous exprimer librement et voter librement sur les amendements proposés, nous pourrions très souvent améliorer les mesures législatives. Si nous pouvions agir sans aucune contrainte, ce serait mieux pour nos électeurs et pour le pays tout entier et cela contribuerait à accroître le respect que les Canadiens ont à l'égard de la Chambre des communes.

J'aimerais clore ma petite digression et dire comment se termine l'étude du projet de loi. Après l'étude à l'étape du rapport à la Chambre, on passe à la troisième et dernière lecture. Comme nous le savons, cela comprend un débat. Une fois le débat est terminé, nous votons sur le projet de loi. Si un nombre suffisant de députés le demande, un vote par assis et levés peut être tenu. Dans ce cas, nous sommes tous convoqués de nouveau à la Chambre. En même temps que nous exprimons nos oui ou nos non, le greffier appelle successivement les députés, exploit remarquable puisqu'il le fait de mémoire, et consigne les votes.

Une fois le projet de loi adopté par la Chambre des communes, celle-ci le transmet au Sénat, lequel reprend un processus identique. Un projet de loi amendé au Sénat est renvoyé ici. Un projet de loi adopté sans amendement au Sénat obtient la sanction royale, et ainsi de suite.

Or, il se trouve que le leader du gouvernement à la Chambre bousille le processus en disant qu'il souhaite que cet endroit soit comme la Chambre des communes en Grande-Bretagne. Bien sûr, il se montre très sélectif. Il prend grand soin de choisir les seuls éléments qui servent son but, de même que le but du gouvernement, et d'écarter tous les autres.

Par exemple, en Grande-Bretagne, il n'est pas du tout rare de voir des députés de l'opposition présider des comités. Comment cela se passe-t-il ici? Le gouvernement intervient dans la formation des comités. Il décide qui en sera le président. Puis le seul moment où les députés ministériels se présentent en masse au comité, c'est lorsqu'ils veulent faire basculer le vote de tous les autres.

Et que dire de ce mode absurde d'élection des présidents des comités. Il y a habituellement une liste de candidats lorsqu'il y a une élection. Chaque fois où je me suis présenté à une élection, nous étions quatre ou cinq candidats, voire six, dont le nom figurait sur le bulletin de vote. Les électeurs devaient choisir entre ces candidats. En fait, il y avait les noms de plus que six candidats sur le bulletin de vote en 1993. En fait, il y en avait plus de six en 1993. Il y avait également des partis marginaux. D'ailleurs, certains voudraient bien nous considérer comme un parti marginal. Toutefois, ce n'est évidemment pas le cas puisque nous sommes le seul parti, avec le Parti libéral, à avoir accru notre pourcentage du vote populaire au cours des élections de 2000.

 

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Nous n'élisons pas notre président en nous servant d'une liste et d'un bulletin de vote. Nous ne votons pas pour qui nous voulons comme c'est le cas à la Chambre des communes et dans nos circonscriptions. On ne peut inscrire qu'un seul nom sur le bulletin. Le nom qui est inscrit sur le bulletin est celui de la première personne qui se manifeste une fois que le greffier assume la présidence de l'organisation du comité. L'un des députés ministériels se dépêche alors de dire qu'il nomme untel comme président. C'est ainsi que cela se passe. Il n'est pas nécessaire que la motion soit appuyée. On tient alors un vote. Tous les députés en faveur disent oui et tous ceux qui sont contre disent non. Il n'y a pas de listes de candidats. Il n'y a pas de scrutin secret.

Nous l'avons fait récemment au comité des finances. Je me suis prononcé très fortement en faveur d'un scrutin secret pour permettre aux députés des deux côtés de voter librement sans récrimination. De façon assez incroyable, dès qu'on leur en a donné l'ordre, les députés ministériels ont refusé le scrutin secret.

S'ils sont vraiment d'avis que tous les votes devraient être publics, ces députés devraient se présenter dans leur circonscription au moment des élections, monter sur une tribune et laisser les électeurs se prononcer à voix haute pour le candidat de leur choix. Pourquoi y tiennent-ils autant? Pourquoi le scrutin secret leur fait-il si peur? Il est assez étonnant de constater que des députés qui aiment bien parler de réformes parlementaires dans le but de rendre nos travaux plus constructifs ne sont pas même en mesure de reconnaître l'importance d'un scrutin secret et de la préparation d'une liste de candidats.

Dans le cas particulier du Comité des finances, j'ai dit que je voterais pour celui qui a gagné. Je ne peux dire son nom et je ne connais pas le nom de sa circonscription. Le président élu du Comité des finances avait mon appui. Dans l'ensemble, il a fait preuve d'équité, a été d'un commerce agréable au travail et a bien dirigé le comité. Il va parfois un peu vite, mais il agit comme il convient la plupart du temps. Je l'aurais appuyé. Je ne voyais là rien à redire. À mon avis, ce n'est pas un endroit où devrait régner la partisanerie.

Les députés d'arrière-ban ne sont pas disposés à s'affranchir en comité afin de s'exprimer sans craindre les récriminations. Même s'ils ont eu la possibilité de tenir un vote secret, ils l'ont refusé. Il est intéressant de constater que la demande de tenir un vote secret sur l'opportunité d'élire le président par scrutin secret a été rejetée. Il aurait fallu le consentement unanime, et il a été refusé.

Je parle ici du grand contexte à l'origine de la motion que nous étudions aujourd'hui. Elle a été présentée parce que les comités ne fonctionnent pas. La motion serait tout à fait inutile si le gouvernement au pouvoir, ou si les conservateurs qui ont exercé auparavant le pouvoir pendant neuf ans, avaient fait leur boulot. Depuis que les libéraux sont au pouvoir, il y a eu deux élections en sept ans. Tenir tous les trois ans et demi des élections qui coûtent 200 millions de dollars témoigne d'un manque total d'égard pour l'argent des contribuables. C'est un aparté.

Nous sommes en présence d'un gouvernement qui, au cours des sept dernières années, ne s'est pas montré disposé à accepter des amendements. Nous aimerions voir une lueur qui nous permettrait d'espérer que des amendements soient étudiés avec soin et ne fassent pas simplement l'objet d'un débat.

Cette question s'est posée parce que les partis de l'opposition ont utilisé l'étape du rapport à la Chambre pour exiger un vote par assis et levé au sujet de bon nombre de motions d'amendements jugés frivoles, non seulement de l'avis du leader du gouvernement à la Chambre, mais aussi selon la motion à l'étude.

 

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Voici un passage de la motion:

      ...l'Orateur ne choisit pas, pour la tenue d'un débat, une motion ou une série de motions à caractère répétitif, frivole ou abusif ou de nature à prolonger inutilement les délibérations à l'étape du rapport.

Pourquoi les députés d'opposition font-ils cela? Je songe à ce qui s'est passé il y a environ un an, quand nous étions saisis du désormais célèbre traité des Nisga'a. Le projet de loi avait suscité beaucoup de protestation. Le leader du gouvernement à la Chambre et certains députés des partis conservateur et néo-démocrate ont dit que nous avions perdu notre temps. Je suis d'accord avec eux. Nous avions commencé à voter un lundi soir et fini le jeudi matin. Nous nous sommes levés et nous sommes rassis durant des heures et des heures.

Ce n'est pas le genre de chose qui peut contribuer à faire grandir le respect pour notre institution. Si, pour y remédier, nous nous contentons de taper sur le problème à coup de maillet pour le faire disparaître sans nous attaquer à sa cause profonde, nous ferons comme le chirurgien qui, au lieu de faire disparaître une verrue sur une main, prend une hache et coupe la main au niveau du poignet. D'accord, il a fait disparaître la verrue, mais c'est une solution extrêmement exagérée. C'est pourtant ce que fait la motion à l'étude. Elle ne s'attaque pas à la raison fondamentale pour laquelle nous, de l'opposition, proposons une aussi longue liste d'amendements.

Je me rappelle quand nous débattions du traité des Nisga'a. Voici comment je l'ai expliqué aux gens de ma circonscription. J'ai dit qu'il s'agissait d'un accord important qui allait dorénavant avoir une incidence fondamentale sur le bien-être des autochtones. Il allait également avoir pour toujours des répercussions sur leurs voisins non autochtones, car il rendait notamment nécessaire d'apporter des modifications à la Constitution. Des modifications permanentes ont été apportées à la façon de traiter ces questions.

Il est répréhensible d'agir ainsi sans accorder suffisamment de temps non seulement à la Chambre pour qu'elle tienne un débat, mais également aux Canadiens pour qu'ils puissent participer à un débat plus large.

Selon un vieil adage, la démocratie ne fonctionne que lorsque les gouvernés consentent à se laisser gouverner. On appelle cela le consentement des gouvernés. C'est on ne peut plus vrai. Je m'adresse souvent à des écoliers et je leur explique que, dans notre pays, nous avons un régime de gouvernement entièrement différent de ceux qui ont existé au cours de l'histoire. Au lieu d'avoir un roi doté d'un pouvoir absolu, dont les soldats et d'autres personnes faisaient la volonté et l'imposaient à la population, nous avons la possibilité d'avoir un vrai cercle de responsabilité et de reddition de comptes, dans lequel les députés sont élus par la population.

Les députés viennent à la Chambre et tiennent compte de la volonté et des désirs de la population. Ils établissent des règles qui régissent notre société. Comme elle a accepté une motion ou un projet de loi par l'entremise des parlementaires, la population consent à être régie par cette règle. Qu'arrive-t-il si nous brisons le cercle de la responsabilité? Que se produit-il si, en cours de route, nous imposons un dictateur, une personne dotée d'un pouvoir absolu? Le cercle de la responsabilité est brisé, et nous ne pouvons plus espérer que les Canadiens consentiront de plein gré à être gouvernés lorsqu'une personne en dehors du cercle de la responsabilité leur dicte sa volonté. Il faut que ce soit la population et le Parlement qui décident.

Les Canadiens doivent obéir aux lois du pays qui sont élaborées par le Parlement. Cependant, le Parlement doit rendre des comptes à l'électorat et est responsable devant ce dernier. Si nous perdons ce cercle, le système est défectueux et il échouera. Je suis certain que, s'il y a si peu de respect envers cet endroit, c'est notamment parce qu'en définitive, elle ne reflète pas la volonté de la population.

 

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Passons maintenant à la question concernant ce qui incite les députés de l'opposition à proposer une série de motions. Comme je le viens de le dire, c'est ce que j'ai expliqué à mes électeurs quand nous avons eu ce long scrutin, ou tout de suite après. J'ai dit que la question était tellement importante pour les Canadiens qu'il fallait que le Parlement s'y arrête. Nous informons le gouvernement que la question est tellement importante que, d'une façon ou d'une autre, nous allons y consacrer une semaine du calendrier du Parlement. Cette notion est valide.

Au lieu de voter pendant trois jours ou trois jours et demi, j'aurais préféré de loin débattre cette question ici à la Chambre des communes. Nous n'avions pas eu le temps de tenir un bon débat. On sait maintenant que le gouvernement a l'habitude de recourir constamment à la motion d'attribution de temps alors que ce débat vient à peine de commencer. Il est même arrivé qu'il le fasse alors que le débat n'était même pas encore commencé.

On peut voir dans les comptes rendus qu'à quelques occasions, le gouvernement a proposé une motion d'attribution s'appliquant à l'étape en cours et à toutes celles qui devaient suivre. Autrement dit, le gouvernement nous oblige à ne pas discuter de la mesure en question et à simplement l'adopter. Il agit comme le tyran de la cour d'école. C'est un dictateur. Il se moque de l'obligation de rendre des comptes et d'assumer ses responsabilités. Ce n'est pas dans l'intérêt de la démocratie.

Je me dois de revenir aux comptes rendus, car un discours très éloquent a été prononcé à la Chambre, il y a presque trois ans.

Mme Colleen Beaumier: Ce ne pouvait pas être par vous.

M. Ken Epp: La députée dit que ce n'était pas par moi. Je l'admets, ce n'est pas moi qui ai prononcé ce discours. C'est quelqu'un de bien supérieur à moi. En fait, c'est l'ancien chef de l'opposition officielle qui avait alors abordé une question fort semblable à celle dont nous discutons aujourd'hui.

Même si son discours se trouve déjà au hansard, je tiens à en citer certains extraits aujourd'hui. Je veux en relire des parties car c'est une histoire très intéressante que nous avait racontée le chef de l'opposition de l'époque, le député de Calgary-Sud-Ouest. Voici essentiellement ce qu'il a dit:

    Il était une fois un roi nommé Jean I qui régnait sur un château entouré de douves qu'on pouvait franchir grâce à un pont-levis. Les habitants de ce château étaient divisés en deux classes: les lords et les ladies qui occupaient les premières banquettes de la salle du Trône lors des cérémonies d'État et les paysans, qui occupaient les banquettes arrières.

    Un jour, un groupe de paysans ou des gens d'arrière-ban, comme on les appelait, sont allés travailler dans les champs. Après avoir franchi les douves, ils ont emprunté le chemin. Ils sont alors passés devant une cave d'où est sorti un énorme dragon qui crachait du feu et de la fumée. Cinquante d'entre eux ont été tués par le feu et les autres se sont précipités vers le château.

    Lorsque le roi Jean a été mis au courant de cette terrible tragédie, il a décidé de faire enquête lui-même. Pour l'aider, il a amené avec lui deux de ses chevaliers dans lesquels il avait le plus confiance. Il s'agissait de lord Bob, le gardien du fouet royal, et de lord Boudriavere, qui avait déjà été aide-serveur dans la cafétéria du château et qui s'était élevé dans la hiérarchie en servant fidèlement le roi Jean.

    En contemplant la scène de la tragédie, ils ont remarqué trois choses. Ils ont vu les 50 gens d'arrière-ban dont le corps était carbonisé et ils ont trouvé cela malheureux. Ils ont vu le dragon gisant mort d'épuisement. Ils ont également remarqué que le feu craché par le dragon avait enflammé un filon de charbon dans la cave d'où continuait de s'échapper de la fumée. Lord Bob, qui était une personne directe et qui avait été un arbitre lors de duels à l'épée dans le passé, a dit une évidence: «Le dragon est mort. C'est une bonne nouvelle. Allons le dire aux gens d'arrière-ban.» Cependant, lord Boudriavere, qui avait déjà été aide-serveur dans la cafétéria du château et avait gravi les échelons en servant loyalement le roi a dit: «Un instant». Se tournant vers le roi Jean, il a ajouté: «Voilà une occasion de maintenir et d'accroître notre contrôle sur les paysans. Insinuons, de façon indirecte, bien entendu, que le terrible dragon vit encore. Nous pouvons nous servir de la fumée sortant de la cave comme preuve. Disons donc aux gens d'arrière-ban que, de ce fait, ils ne peuvent sortir du château qu'avec la permission du roi et sous la surveillance de votre serviteur et de lord Bob pour assurer leur sécurité et leur protection, bien entendu, ainsi que celle du château.»

    Le roi Jean a trouvé que c'était une merveilleuse idée et c'est de là que vient le mythe du terrible dragon. On l'a utilisé pour contraindre à l'obéissance et contrôler les gens d'arrière-ban du royaume jusqu'à ce que le roi Jean soit battu lors d'une bataille par un chevalier de l'Ouest, mais c'est une autre histoire que je vous raconterai à une autre occasion.

    Il y a à la Chambre un mythe voulant que se tapisse quelque part le dragon féroce de la convention de la confiance, la croyance erronée et soigneusement cultivée par le gouvernement voulant que, si un projet de loi ou une motion ministériels sont rejetés ou si un projet de loi, une motion ou un amendement de l'opposition sont adoptés, le gouvernement sera obligé de démissionner. On se sert de ce mythe pour forcer les députés ministériels, notamment ceux de l'arrière-ban, à voter pour les projets de loi et les motions du gouvernement que leurs électeurs et eux-mêmes désapprouvent et à voter contre les projets de loi, motions et amendements de l'opposition qu'ils approuvent en substance.

    En réalité, le dragon féroce de la convention de la confiance dans sa forme traditionnelle est mort. Plus tôt la Chambre le reconnaîtra officiellement et le mieux ce sera pour tout le monde. Il fut un temps, il est vrai, où les règles appuyaient la convention traditionnelle de la confiance, mais ce n'est plus le cas.

 

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Puis le chef de l'opposition a cité la sixième édition du Beauchesne, où l'on décrit la pratique qui a cours à la Chambre:

    La question de confiance n'est affaire ni de procédure, ni de Règlement, et ne fait aucunement appel aux attributions du président en matière d'interprétation.

Je vais cesser de le citer, mais il fait ensuite remarquer que seul le gouvernement peut recourir à la confiance et qu'il ne revient pas à la présidence d'en décider.

Il faut que je parle de cela car c'est très important pour la motion d'aujourd'hui. On est en train de nous dire que, parce que le gouvernement maîtrise les comités, aucun amendement ne peut y être examiné rationnellement, raisonnablement ni honnêtement.

En tant que députés de l'opposition, nous avons tous eu à décider de ne pas proposer un amendement au comité parce que nous savions que les membres ministériels du comité le rejetteraient et que personne n'en saurait jamais rien. Nous décidons rationnellement de le proposer à l'étape du rapport pour qu'on puisse en débattre au moins un peu et le faire valoir auprès des Canadiens, qui sont habituellement plus attentifs à ce qui se passe ici qu'à ce qui se passe aux comités de la Chambre.

C'est ce que voulait dire le chef de l'opposition lorsqu'il parlait du dragon de la confiance. Il parlait du fait que, si les députés ministériels devaient d'une façon ou d'une autre voter en faveur d'un projet de loi, d'une motion ou d'un amendement de l'opposition, cela entraînerait automatiquement le déclenchement d'élections. C'est une des choses que j'ai trouvées terriblement frustrantes au fil des années. Quel que soit l'objet du vote, nous votons toujours, au fond, sur l'opportunité de déclencher des élections. La question à l'étude importe peu.

Les simples députés ministériels—des libéraux pour le moment mais ce peut être n'importe quel parti au pouvoir—ont les mains liées. Ils ne peuvent voter contre une mauvaise motion ou pour une bonne motion s'il arrive que la motion en question est présentée par l'opposition. C'est un immense handicap qui nuit à l'efficacité du Parlement.

Avant mon arrivée au Parlement, j'ai, notamment, fait du bénévolat. Pendant sept ans, j'ai été président d'une commission scolaire. Cette commission scolaire comprenait entre 15 et 20 membres. C'était un forum démocratique très intéressant. La plupart de ses membres étaient parents d'élèves de notre école. Ils étaient là pour représenter les intérêts de leurs enfants et aussi pour assurer le bien-être de l'école. J'ai été président de la commission pendant sept ans. Cela a été une grande occasion de servir la population.

 

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J'ai pensé à cela en rétrospective maintenant que je suis ici depuis sept ans. Sept ans à la commission scolaire et sept ans au Parlement.

Durant mes sept années à la commission scolaire, je ne sais combien de motions ont été rejetées. Il arrivait parfois qu'un parent, un enseignant ou un étudiant fasse part d'une idée à un membre du conseil qui la retenait et la soumettait ensuite au conseil. Afin de respecter les règles du Roberts Rules of Order, j'avais adopté une règle selon laquelle, pour discuter d'une question, il fallait qu'elle fasse l'objet d'une motion. Si quelqu'un voulait présenter une motion et qu'une autre personne était prête à l'appuyer, nous commencions à en discuter.

Disons qu'une motion a été présentée et que nous devions commencer à en discuter. Un ou deux membres du conseil parleraient en faveur de la motion qui, à première vue, semblait une bonne idée. Puis un membre du conseil scolaire se demanderait ce qui arriverait si nous l'adoptions. Il commencerait à s'inquiéter de conséquences non souhaitées et à craindre que, même si nous avions de bonnes intentions en agissant de la sorte, il pourrait y avoir des conséquences néfastes.

Un autre intervenant peut ensuite mentionner un autre motif à prendre en considération pour ne pas l'adopter. Au bout de 10 ou 15 minutes de débat sur cette question, notre conseil en arriverait à un consensus clair sur la motion et déterminerait que celle-ci ne serait pas bonne pour notre école, nos étudiants, notre personnel, les parents, voire la collectivité.

Qu'arrive-t-il en pareil cas? Eh bien, je suis le président. Lorsque le débat est clos et que tout le monde a pu se prononcer, je demanderais le vote. Il n'y a qu'une seule personne qui voterait en faveur de la motion, son auteur, qui se sent en quelque sorte tenu de le faire. Les quatorze ou quinze autres membres rejetteraient la motion.

Ce que nous avons fait alors correspond exactement à ce que les parlementaires sont censés faire. Ils sont censés adopter de bonnes lois et empêcher l'adoption de mauvaises mesures législatives. Voilà une motion qui laissait à désirer et, dans notre grande sagesse, nous nous en sommes rendu compte et nous l'avons rejetée.

En tant que président du conseil, ai-je demandé aux membres de ne pas voter contre la motion parce qu'elle venait d'un des nôtres et que, si nous la rejetions, nous devrions démissionner et exiger l'élection d'un nouveau conseil scolaire? Ce serait le comble de la stupidité si un conseil scolaire agissait de cette façon.

Lorsqu'une motion est présentée, nous la débattons. Une fois le débat terminé, nous votons sur la motion. Si elle est bonne, nous l'adoptons et passons au prochain point à l'ordre du jour. Si elle est mauvaise ou stupide, nous la rejetons et nous nous félicitons ensuite d'avoir rejeté une motion qui n'aurait jamais dû être présentée, puis nous passons au prochain point à l'ordre du jour.

Que faisons-nous ici? Disons que la Chambre est saisie d'une motion visant à modifier un projet de loi et que beaucoup de députés estiment que celui-ci s'en trouvera amélioré. Nous avons des motions qui sont très bonnes en soi, mais elles viennent de ce côté-ci de la Chambre.

Les députés d'en face sont-ils libres de voter en faveur de cette motion parce que c'est une bonne idée? Sont-ils libres de voter en faveur de cette motion parce que moi-même ou certains de mes collègues avons été capables de présenter des arguments convaincants à l'appui de cette idée? Non. Le premier ministre dit que c'est une motion de censure. Voilà le dragon. Il leur dit que s'ils votent en faveur de cette motion et que le gouvernement est défait, il faudrait déclencher des élections.

Même si nous, de ce côté-ci de la Chambre, proposons une motion qui serait bonne pour le Canada et pour tous les Canadiens, les députés d'en face votent sur l'opportunité de déclencher des élections.

 

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Pas étonnant que la Chambre des communes soit dysfonctionnelle. Pas étonnant que les ministériels doivent prendre les grands moyens pour faire adopter la moindre petite mesure. Ils n'arrivent pas à comprendre que la nécessité de ces changements se faisait sentir bien avant que nous soyons saisis de la question à l'étude aujourd'hui.

Ce n'est pas que les députés ne travaillent pas à l'étape du rapport. C'est que nous sommes incapables de nous prononcer de façon honnête, ouverte et franche sur les amendements proposés au comité au moyen de votes libres. C'est là que le bât blesse.

Lorsque j'ai dû, au cours des sept dernières années, aborder des questions comme celle-ci, j'ai toujours éprouvé énormément de désarroi, sentiment que partagent d'ailleurs d'autres députés. J'en ai observé certains qui éprouvent la même déception et les mêmes difficultés que moi.

Par exemple, notre leader parlementaire a récemment prononcé un discours très important sur la clôture dans lequel il implorait la présidence d'empêcher l'attribution de temps, parce que la Chambre n'avait pas eu suffisamment de temps pour débattre une question. Sa requête n'a pas été entendue. Le vote a quand même eu lieu.

Mes collègues et moi, ainsi que d'autres députés de l'opposition, y compris les libéraux lorsqu'ils siégeaient dans l'opposition, n'ont pu cacher, au fil des ans, leurs déceptions devant les problèmes que pose un Parlement aussi dysfonctionnel que le nôtre.

Je voudrais vous rappeler quelques observations faites au sujet de la clôture, car il faut reconnaître que c'est bien de la clôture dont il est question ici. Nous discutons de la façon dont se déroulent les débats parlementaires. Lorsque les libéraux siégeaient dans l'opposition et que la clôture était proposée, je me souviens qu'un certain Lloyd Axworthy, que je peux maintenant nommer puisqu'il ne siège plus à la Chambre, avait déclaré: «Cela traduit le mépris total avec lequel le gouvernement traite les Canadiens.» C'est ce que déclarait le député à cause de l'impossibilité de tenir un débat.

Toute mon argumentation repose sur le fait que cette motion est nécessaire parce que nous ne sommes pas autorisés à tenir de débat ou d'avoir des votes libres au comité. Nous ne pouvons pas tenir de débats et de votes libres à la Chambre afin d'obtenir les meilleurs règles. Dans ce cas, que pouvons-nous faire si la Chambre est saisie d'un projet de loi ou d'une motion ayant des effets nuisibles ou négatifs?

Les décisions sont prises par un groupe restreint de personnes qui n'entendent même pas les arguments qui sont présentés. Ces gens sont occupés dans leurs bureaux, pendant que nous discutons ici de ces projets de loi et motions. Ils vont de l'avant aveuglément et obstinément, déterminés à ce qu'on fasse les choses comme ils l'avaient décidé au départ. Ils ne font aucune concession et menacent les députés de déclencher des élections s'ils s'opposent à la mesure proposée. En agissant de la sorte, ces gens contrôlent et méprisent totalement le Parlement.

Celui qui est aujourd'hui le leader du gouvernement à la Chambre a déclaré, en 1992, être outré. Il a dit que c'était tout simplement épouvantable. Il a dit: «C'est une honte pour les conservateurs, de l'autre côté.» C'était à l'époque où l'actuel leader du gouvernement à la Chambre siégeait dans l'opposition. Il s'adressait aux députés du gouvernement conservateur. Les libéraux voulaient parler d'une importante mesure législative et les conservateurs refusaient de les laisser en débattre.

J'ai plusieurs autres citations qui se trouvent toutes dans le hansard. J'ai ici un extrait de ce qu'a déclaré une personne, que je ne nommerai pas. Comment faire pour qu'on la reconnaisse? Je ne prendrai pas de détour. Il s'agit de l'actuel Président de la Chambre. Nous avons tous un bon souvenir de lui. Lorsque le Président siégeait comme député ministériel, il avait une façon bien à lui de lancer des diatribes contre mon parti.

Ceux d'entre nous qui siègent à la Chambre depuis 1993 se souviendront qu'il avait l'habitude de lire des citations prises dans un petit livre vert de citations, ou quelque chose de ce genre. Cela l'amusait beaucoup. Nous sommes heureux qu'il ait maintenant atteint à un niveau d'impartialité élevé et qu'il remplisse aujourd'hui la fonction de Président, c'est-à-dire de juge impartial de ce qui se passe à la Chambre.

 

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Je vous cite quelques-unes de ses déclarations. Je le cite tout simplement parce qu'il est un député honorable et respectable qui a parlé à la Chambre des limites imposées à la capacité des députés de discuter convenablement des sujets quand il siégeait de ce côté-ci. Voici ce qu'il a dit:

    C'est un véritable scandale. Cela montre bien que le gouvernement n'est pas disposé à écouter les représentants du peuple à la Chambre des communes. Jamais auparavant nous n'avons eu un gouvernement si peu enclin à discuter des projets de loi qu'il présente à la Chambre.

C'est exactement ce que nous disons nous aussi. Nous avons décidé que l'on se lèverait et s'assoirait pour voter pendant quatre jours parce que nous avons déclaré au gouvernement que la question était si importante que nous étions déterminés à le forcer à y consacrer une semaine, peu importe comment. On aurait dû y consacrer plus que cela, mais nous allions y consacrer au moins une semaine.

Si le Parlement ne voulait pas nous permettre de parler, c'était ce que nous allions faire. Nous avons donné un préavis. C'est le leader du gouvernement qui a décidé pour nous de passer quatre jours à voter. Il a ensuite l'audace de prendre la parole pour dire que nous perdons du temps. Ce délai aurait pu servir à la tenue de débats s'il l'avait permis. Il n'a pas voulu. Pas étonnant que nous soyons rendus où nous en sommes.

J'ai quelque chose à ajouter au sujet du débat. Le débat ne se déroule pas uniquement au Parlement, qui est un forum de discussion et un lieu où les discours sont longs. Aujourd'hui, mon intervention ne sera pas brève, mais je ne m'en sens pas coupable. Je profite d'une rare occasion où le temps dont je dispose n'est pas limité à 10, 20 ou 40 minutes. Je ne fais que profiter de cette rare occasion où je n'ai pas à limiter mon intervention à 10, 20 ou 40 minutes, et où je peux vraiment dire tout ce que je pense. Voilà ce que je fais aujourd'hui.

Je vais revenir à ma déclaration précédente au sujet du consentement du gouvernement. Il est important, quand on traite de questions vraiment importantes pour le pays, telles que l'Accord Nisga'a ou d'autres questions du genre, que la Chambre dispose de suffisamment de temps pour en débattre. Il faut ensuite que l'on accorde suffisamment de temps aux parlementaires pour qu'ils puissent discuter de ces questions dans leur circonscription avec les gens qu'ils représentent.

Il ne serait pas raisonnable de convenir précipitamment de tels accords ou traités, ou d'autres questions, sans réunir les personnes concernées. On ne saurait apporter l'unité ou l'harmonie au Canada en entrechoquant les têtes des adversaires en présence. Non. Il faut les amener à se parler et à faire des compromis, à parler et à régler leurs différends.

Quand je songe à certaines des questions qui ont été soulevées par des citoyens à la Chambre des communes, par l'entremise de leurs députés, il est vraiment dommage que l'on n'ait pas la possibilité d'en débattre, de persuader nos pairs et de les amener à répondre à un argument rationnel, plutôt qu'à une réaction émotive, parce que nous sommes du mauvais côté, ou une réaction dictée par une obéissance aveugle à un régime des partis qui n'a plus sa place dans une société moderne.

Il est temps qu'on commence à réfléchir à ce que cela signifie que d'avoir un représentant au Parlement. Si les députés ont les mains complètement liées et qu'ils ont en plus un bâillon sur la bouche, à quoi servent-ils au juste? On pourrait économiser l'argent qu'on leur donne. Proclamons un roi qui régira le pays et éliminons le Parlement.

M. Darrel Stinson: Nous avons déjà un roi.

M. Ken Epp: Nous en avons déjà un. J'ignore ce qu'en pensent les libéraux, mais j'ai été exaspéré d'apprendre que le premier ministre, lors de sa visite en Chine, avait dit qu'il aimerait avoir des statues de pierre au Parlement, car elles seraient debout pour voter. Il pourrait mettre les statues à la place des sièges, elles seraient toujours debout. Le premier ministre trouve cela bien.

Si j'étais un député libéral et que le chef de mon parti avait dit une chose pareille, je ne lui en ferais peut-être pas le reproche publiquement, mais en privé, je lui demanderais si c'était là ce qu'il pensait de moi. Si c'était cela qu'il pensait, alors je me demanderais pourquoi je suis devenu membre de son parti, pourquoi je me suis présenté aux élections comme candidat de ce parti et pourquoi je suis venu à la Chambre. Selon l'idée qu'il se fait du Parlement, je suis totalement inutile. Ce serait ma réaction. Je lui en parlerai en privé.

 

. 1325 + -

À mon avis, la façon du gouvernement de légiférer est une honte. Il réduit le temps dont dispose la Chambre pour débattre et impose la clôture pour limiter le débat.

Je ne sais pas si quelqu'un à la Chambre l'a remarqué, mais le gouvernement a très rarement invoqué la clôture. Au lieu de cela, il a recours à la disposition du Règlement, intitulée «Attribution de temps».

Je suppose qu'à la Chambre, le Règlement fait figure d'accessoire, comme le drapeau canadien. Je dois donc le cacher. Toutefois, j'ai ici les dispositions du Règlement sur l'attribution de temps et la clôture. Monsieur le Président, vous les connaissez fort bien, mais il se pourrait que quelques-uns parmi les milliers de téléspectateurs de la chaîne CPAC ne les connaissent pas. Je vais donc expliquer brièvement, pour leur information, ce qui distingue la clôture de l'attribution de temps et expliquer aussi pourquoi le gouvernement a opté pour l'allocation de temps, de préférence à la clôture, dans quelque 99 p. 100 des cas. Je pense que nous n'avons connu la clôture qu'à une ou deux reprises, mais c'est presque toujours l'allocation de temps.

Ce qui différencie l'allocation de temps de la clôture, c'est qu'avec la clôture, la motion porte que le débat ne soit plus ajourné. C'est essentiellement cela. La Chambre compte 301 députés. En vertu de la motion de clôture, en théorie, les députés pourraient tous prendre la parole les uns après les autres, et le débat aurait lieu. Au lieu de se lever pour voter à tour de rôle jusqu'au petit matin, jusqu'au lendemain matin, jusqu'à midi, jusque tard dans la soirée suivante et tout la nuit d'après, nous pourrions débattre pendant tout ce temps. C'est cela la clôture telle que je la comprends.

Passons maintenant à l'allocation de temps. L'allocation de temps précise qu'on ne peut consacrer au débat qu'un seul jour de séance, un point c'est tout.

M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'ai cru comprendre que le débat prendrait fin à 14 heures. Le député qui s'oppose tant à la clôture ne chercherait-il pas à imposer aux députés des autres partis sa propre vision de la clôture avec ses explications interminables?

Le vice-président: Avec tout le respect que je lui dois, l'intervention du député de Winnipeg—Transcona n'est pas un rappel au Règlement et le député de Elk Island dispose d'un temps de parole indéterminé d'après ce même Règlement.

M. Ken Epp: Monsieur le Président, je le reconnais. À mon avis, il y aurait lieu d'en débattre plus longtemps. Je ne pense pas que nous devrions clore le débat à 14 heures aujourd'hui. C'est au gouvernement de décider de remettre la question sur le tapis, et à ce moment-là, tous auront voix au chapitre.

L'enjeu est tellement important et pour une fois j'ai les moyens d'en débattre. C'est la première fois de ma carrière que je peux m'exprimer sans contrainte de temps. Je ne veux pas pour autant le faire au détriment de mes collègues de ce côté-ci de la Chambre, particulièrement, ou d'en face. D'ailleurs, j'invite quiconque souhaite prendre la parole à s'assurer que le leader du gouvernement ramènera la question dans cette Chambre. Débattons-en. Que le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre en débatte et remonte à la source du problème au lieu de chercher comment imposer la clôture.

Il est très important que nous abordions ces questions rationnellement. Plutôt que de laisser les discussions et le vote libre avoir lieu au sein des comités, plutôt que de laisser les discussions et le vote libre avoir lieu ici, ce qui réglerait le problème, le gouvernement dit qu'il ne nous laissera pas présenter des amendements qu'il juge frivoles. Autrement dit, s'il veut seulement essayer d'attirer l'attention du public sur la question, je dirai alors qu'il abuse du Parlement.

Je ne suis pas d'accord avec le gouvernement. Si nous avions agi autrement que nous l'avons fait lors de l'Accord avec les Nisga'a, il y aurait moins de gens informés sur ces questions qu'il y en a maintenant. C'est donc dire que cela a servi un but, encore que secondaire, car le but principal a été mis sur une voie de garage par le leader du gouvernement à la Chambre et par le gouvernement qui refusaient d'écouter nos discussions par ailleurs rationnelles.

 

. 1330 + -

De temps à autre, nous entendrons l'autre côté de la Chambre nous qualifier d'obstructionnistes. Je sais que ce qualificatif a été utilisé à l'endroit des députés bloquistes. On les traite d'obstructionnistes quand ils veulent parler de la Loi sur les jeunes contrevenants. Nous aussi nous avons été étiquetés de la sorte.

Je veux que ceux qui nous écoutent ainsi que tous les députés ici sachent que nous sommes une opposition officielle responsable. Nous nous opposons à des mesures lorsque nous estimons qu'il est nécessaire de le faire et nous appuyons les mesures qui méritent de l'être. Je ne suis pas certain, mais je crois que l'actuelle opposition officielle est particulière en ce sens qu'elle a appuyé davantage de projets de loi et de motions du gouvernement que les oppositions précédentes. Je crois que c'est exact.

Nous avons appuyé environ 50 p. 100 des mesures proposées par le gouvernement. Je pense notamment au projet de loi C-8, le nouveau projet de loi sur les banques. Essentiellement, nous l'approuvons, quoique nous aimerions que certaines modifications y soient apportées. Nous ne sommes pas une opposition qui se borne à jouer un simple rôle d'opposition. Nous voulons être, et c'est ce que nous sommes, une opposition constructive qui signale au gouvernement les éléments à corriger et lui propose des solutions positives pour ce faire.

Si ceux d'en face pouvaient voter librement et si nous n'arrivions pas à les persuader intellectuellement, que ce soit au moyen d'un débat ou de pourparlers, et qu'ils votent contre, je dirais que nous avons perdu la bataille. Cependant, si j'arrive à les persuader et s'ils m'affirment individuellement qu'ils sont persuadés, mais qu'ils votent contre la mesure, je me sens alors frustré. J'estime que ce genre de philosophie fondamentale à propos de la façon dont notre Parlement fonctionne contrevient à son objet.

J'ai beaucoup à dire. Je n'ai pas envie de m'arrêter. Je sais que je parle depuis près d'une heure maintenant. D'autres députés se seraient arrêtés pour une pause-déjeuner, mais j'ai des réserves et je n'ai pas vraiment besoin de faire cela. Il n'est que 13 h 30 et je pense donc que je vais ajouter quelques petites choses qui me viennent à l'esprit.

Je veux signaler quelque chose de très important. Comment vais-je m'exprimer pour ne pas avoir à le regretter. Je n'aime pas utiliser le terme «arrogant», car lorsqu'on traite quelqu'un d'arrogant, cela finit par se refléter sur nous. Je ne l'utilise pas au sens péjoratif. Je m'en sers pour décrire les députés ministériels, en ce sens qu'ils s'isolent des Canadiens et ils font fi de la nécessité de rendre des comptes aux gens qui les ont élus. Ils ne croient pas dans les éléments fondamentaux de la démocratie et d'un gouvernement représentatif. C'est ce qui explique tout ceci.

Si je peux résumer franchement ce que j'essaie de dire depuis un certain moment déjà, je veux simplement dire ceci: Dans le cas présent, nous utilisons un marteau pour tuer une mouche, car nous ne sommes pas disposés à nous pencher sur la cause profonde du problème, soit le fait que le gouvernement ne veut pas permettre la tenue d'un véritable débat ouvert et libre, de votes libres, surtout au comité.

Les comités devraient avoir la liberté d'examiner un projet de loi ou une motion afin de l'améliorer dans l'intérêt des Canadiens. Si, dans le cadre d'un débat, je peux persuader mes collègues, je suis révolté de constater que le système dans cette enceinte les empêche d'appuyer la mesure en question en se prononçant en faveur de cette dernière. Je trouve cela vraiment déplorable. Il faut remédier à cette situation. C'est l'essentiel du problème.

De plus, le gouvernement a eu recours à l'attribution de temps à la Chambre à plus de 70 reprises maintenant. Il a battu des records. Il utilise cette pratique de façon courante. Je le répète, il a recours à l'attribution de temps avant même qu'on en arrive à une étape donnée d'un projet de loi. Il annonce l'attribution de temps à l'avance pour que cela s'applique dès le premier jour. J'utilise le terme arrogance dans un sens intellectuel et non dans un sens péjoratif quand le gouvernement fait fi des droits des parlementaires de discuter de ces questions.

 

. 1335 + -

Le ministre libéral des Travaux publics est d'accord avec le principe de l'amendement. Il a recommandé dans le 81e rapport du Comité de la gestion de la Chambre en 1993 que l'on modifie le Règlement. Je parle de l'actuel ministre des Travaux publics.

Il a appuyé la motion visant à considérer comme recevables les motions d'attribution de temps et de clôture sauf lorsque le Président estime qu'elles constituent un abus du Règlement de la Chambre ou une violation des droits de la minorité.

Si l'on se penche sur l'amendement qui a été lu officiellement un peu plus tôt et que je ne relirai pas, ce qui fera sûrement plaisir à mes collègues, il prévoit essentiellement que si nous avons recours à un moyen qui nous permet de faire entendre notre voix lorsque le gouvernement, dans toute son arrogance, n'est pas prêt à l'entendre, le Président peut, selon le leader du gouvernement à la Chambre, déclarer nos amendements irrecevables.

Il revient au Président de la Chambre de voir à ce que les parlementaires ait la chance de représenter leurs électeurs au cours des votes et des débats. C'est la tâche du Président que la motion vise à modifier. Cela mettra le Président du côté du gouvernement qui pourra ainsi contrôler le débat encore plus qu'il ne le fait à l'heure actuelle.

En 1993, le ministre des Travaux publics a appuyé la motion, avec une réserve disant que «sauf lorsque le Président estime qu'elles constituent un abus du Règlement de la Chambre ou une violation des droits de la minorité». Il incombe au Président de veiller à ce que les députés d'opposition jouissent de leurs pleins droits à la Chambre pour représenter leurs électeurs et les électeurs de même opinion partout au Canada qui ne sont peut-être pas représentés par un député d'opposition au parlement.

Nous recevons des milliers de lettres de gens de tous les coins du pays qui nous écrivent, à nous de l'opposition officielle, parce que le gouvernement prend des mesures qui leur paraissent mauvaises. Ils veulent que nous signalions ce qui ne va pas et que nous fassions apporter les modifications voulues. Nous représentons également ces gens-là.

Si le gouvernement impose l'attribution de temps au débat sur un projet de loi et que nous sommes forcés d'arrêter d'en discuter, les Canadiens ne seront pas bien servis par cette motion. J'invite donc tous les députés libéraux assis à leur place, réelle ou imaginaire, à bien réfléchir avant de voter. Le premier ministre et ses larbins leur diront sans doute qu'il s'agit d'un vote de confiance. Il leur dira qu'il faudra déclencher des élections si la motion n'est pas adoptée. Je tiens à assurer à ces députés que c'est pures foutaises. Ce n'est pas vrai.

Je les invite à bien réfléchir au problème et à voter en leur âme et conscience. Qu'ils votent librement et se libèrent des chaînes qui les empêchaient d'être de vrais parlementaires depuis qu'ils ont été élus. Nous leur demandons de voter contre la motion.

Pour terminer, je suppose que le gouvernement se servira de sa majorité pour faire adopter la motion à toute allure. Dans le but de l'améliorer afin qu'elle soit moins dure à avaler et moins choquante, je propose l'amendement suivant:  

    Que l'on modifie la motion en ajoutant:

      «Qu'il soit en outre entendu que l'Orateur peut choisir, pour la tenue d'un débat, toutes les motions, peu importe leur caractère, s'il juge que la majorité a empiété de quelque façon que ce soit sur les droits de la minorité.»

 

. 1340 + -

Le vice-président: Le débat porte sur l'amendement.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, je ne voudrais pas me trouver à votre place en ce moment, mais surtout après que la motion gouvernementale sera adoptée par cette Chambre, parce qu'on peut présumer, avec le poids du nombre de députés du côté gouvernemental, que cette motion risque d'être adoptée assez rapidement. Et c'est là que réside tout le problème.

J'écoutais le leader du gouvernement dire: «Nous allons importer du Parlement de Grande-Bretagne un élément intéressant pour la conduite de nos débats.» D'entrée de jeu, j'aimerais vous expliquer que, d'aucune façon, à moins qu'on veuille que ce Parlement ne finisse par ressembler davantage à une foire d'empoigne qu'à un parlement, nous ne pouvons pas importer à la pièce des parties de règlement, pigées çà et là dans d'autres parlements, dans d'autres règlements.

Il faut comprendre essentiellement que le Règlement qui régit les débats à la Chambre des communes, que ce soit ici ou ailleurs dans un autre parlement, est un ensemble de règles qui, prises individuellement, n'ont probablement pas beaucoup de sens, mais prises dans leur totalité, sont complémentaires et permettent de préserver ce qu'on doit préserver dans un système parlementaire, c'est-à-dire une juste répartition du pouvoir et de la capacité d'influencer les décisions soumises à l'attention de la Chambre.

J'ai personnellement mis en garde mon collègue, le leader du gouvernement, du danger de briser un équilibre déjà trop fragile qui existe dans ce Parlement. Je l'ai mis au fait du danger qui nous guettait de fragiliser encore davantage le rapport de force des députés de l'opposition par rapport aux députés ministériels.

À moins qu'on ne veuille absolument que les citoyennes et les citoyens conviennent qu'il n'est plus utile d'élire des députés pour les activités parlementaires, à moins que ce soit là notre objectif, on ne doit pas briser l'équilibre entre les parlementaires. On ne doit surtout pas, à la pièce, changer les morceaux en pensant qu'un changement de petits morceaux n'a pas de conséquences.

Les règles parlementaires et le fonctionnement de cette Chambre, c'est un peu comme une immense construction de blocs ou un château de cartes; cela tient. C'est même, à certains égards, agréable à regarder; cela peut être artistique. Mais le changement de la moindre pièce au centre de la construction ne peut avoir comme résultat que la destruction complète de l'oeuvre ou de la construction. C'est cela, les Règlements de la Chambre des communes.

Oui, cela a l'air banal. Cela a l'air tout à fait banal. La motion du leader du gouvernement stipule:

    Il est entendu que l'Orateur ne choisit pas, pour la tenue d'un débat, une motion ou une série de motions à caractère répétitif, frivole ou abusif ou de nature à prolonger inutilement les délibérations à l'étape du rapport. Dans l'exercice de son pouvoir de choisir les motions, l'Orateur s'inspire de la pratique de la Chambre des communes du Royaume-Uni.

 

. 1345 + -

Tout le monde qui fait la lecture de cela ou qui nous écoute aujourd'hui se dit: «Est-ce qu'on peut être contre le fait que le Président puisse mettre de côté des motions à caractère répétitif, frivole ou abusif?»

La deuxième question qu'il faut se poser, c'est de donner un bien grand pouvoir à la personne que vous êtes, monsieur le Président, et dont la responsabilité est de permettre à tous les parlementaires, et principalement à ceux qui ne bénéficient pas de la protection du pouvoir, de s'exprimer, d'exprimer le point de vue de leurs électeurs et d'influencer les débats qui se déroulent ici à la Chambre.

Qu'est-ce qu'un amendement frivole, de l'avis et du jugement d'un président de la Chambre des communes? Est-on prêts à dire aujourd'hui que tous les présidents, les vice-présidents et les personnes qui sont appelés à se succéder au fauteuil auront le même jugement et la même qualification pour dire qu'un amendement est frivole ou ne l'est pas? Combien d'amendements, parmi les 200 qui ont été soumis par le gouvernement sur son propre projet de loi sur les jeunes contrevenants, seront jugés frivoles? Est-ce que la frivolité ne réside pas dans le fait que le gouvernement n'a pas été capable de «maturer» suffisamment, de mûrir la question suffisamment pour déposer à la Chambre un projet de loi qui se respecte, qui est respectueux des règles et des volontés des citoyens et citoyennes?

Si on se fait accuser, en déposant 200 amendements, d'être des gens qui veulent retarder le débat, qui utilisent des mesures dilatoires, je déclare aujourd'hui, et les citoyens doivent le savoir, que le gouvernement libéral du Canada se torpille lui-même. Il dépose ses propres mesures dilatoires.

La raison est la suivante et voilà où je veux en venir: le gouvernement ne vise que les amendements proposés par l'opposition. Il est bien sûr que dans la motion d'aujourd'hui, en aucun instant le leader du gouvernement n'aura eu derrière la tête que la présidence puisse juger que 25, 50 ou 75 amendements, parmi les 200 qu'il a déposés pour amender son propre projet de loi, sont des amendements frivoles.

Je suis certain que le leader du gouvernement serait absolument dans tous ses états s'il fallait que la présidence déclare un amendement gouvernemental frivole ou de nature à retarder le débat. Il s'agit donc des amendements déposés par les députés d'opposition.

Est-ce qu'on va admettre dans ce Parlement que tout ce qui est bien conçu ne vient que du Parti libéral? Est-ce que tout ce qui vient des alliancistes, des bloquistes, des députés du Nouveau Parti démocratique ou des conservateurs est frivole et est de nature à faire perdre le temps des gens?

Le point de vue des bloquistes, quand on défend le système des jeunes contrevenants en vigueur au Québec, c'est que c'est un système qui donne des résultats fantastiques et exemplaires, qui sont bien meilleurs que ce qui se fait dans le reste du Canada. Est-ce que les bloquistes sont frivoles?

Tous les intervenants, qu'ils soient d'allégeance libérale, bloquiste ou conservatrice au Québec, sont d'accord pour dire que le système est menacé. Est-ce que les bloquistes sont frivoles de défendre cela? Est-ce qu'on est frivoles, quand on dépose des amendements pour modifier un projet de loi qui, d'entrée de jeu, était tout croche et ne répondait pas à la réalité?

 

. 1350 + -

Le temps nous a donné raison, parce que le travail du Bloc québécois, particulièrement celui de mon collègue de Berthier—Montcalm qui a déposé des amendements, a permis au gouvernement de réfléchir et d'amender son propre projet de loi à plus de 200 reprises.

Voilà ce qu'on veut éviter. Voilà ce que le gouvernement ne veut plus. L'opinion de l'opposition n'a plus d'importance. C'est frivole. Nos débats son frivoles. À plus d'une occasion, malheureusement, mon collègue du gouvernement a déclaré que le temps qu'on prenait, ici au Parlement, pour débattre de ces questions frivoles—selon lui—et pour voter pendant des heures et des heures sur ces amendements, coûtait 27 000 $ de l'heure.

J'aurais une suggestion à lui faire. S'il veut faire une vraie économie, il pourrait commencer par abolir l'autre Chambre qui coûte 50 millions de dollars par année. Ce serait déjà quelque chose.

M. Michel Gauthier: On pourrait ainsi récupérer les crédits pour les choses utiles, c'est-à-dire laisser s'exprimer ceux et celles qui représentent des citoyens, qui ont été élus démocratiquement sur des programmes politiques et qui ont quelque chose à dire. Concernant l'argument de 27 000 $ de l'heure, je suggère au leader du gouvernement de commencer par abolir l'autre Chambre où personne n'est élu et où personne ne représente que lui-même ou le gouvernement.

C'est en 1971, à la Chambre, que les motions d'attribution de temps ont été mises en place pour la première fois. À l'époque, on disait: «Ah, cela ne sera utilisé qu'exceptionnellement. Cela servira «à l'occasion», histoire de simplifier les choses pour permettre au gouvernement de gouverner, pour empêcher l'opposition de stopper les initiatives gouvernementales de façon irréfléchie. De temps en temps, rarement, on présentera des motions d'attribution de temps.» Hélas, les choses ont évolué, et le leader de ce gouvernement est un expert dans l'évolution des choses à cet égard.

De 1984 à 1993, sous le gouvernement conservateur, 49 bâillons ont été imposés à la Chambre, pour 519 projets de loi. Quarante-neuf baillons. Ce sont les vraies statistiques; ce n'est pas moi qui les ai inventés, ce sont les chiffres de la Chambre des communes. Ces 49 bâillons ont tous été dénoncés avec force et arguments par l'opposition d'alors, qui est aujourd'hui le gouvernement qui, lui, nous en impose. Donc, ce sont 49 bâillons pour 519 projets de loi, soit 9,4 p. 100. Sous le règne conservateur, 9,4 p. 100 des initiatives législatives se sont terminées par l'imposition d'un bâillon en seulement sept ans de pouvoir.

Pourtant, ce gouvernement-ci a imposé plus d'une soixantaine de bâillons pour seulement 350 projets de loi présentés à la Chambre, soit une proportion de 17,4 p. 100.

On reprochait aux conservateurs du règne précédent d'être des antidémocrates, parce que 9,4 p. 100 des initiatives parlementaires se terminaient à la suite de l'imposition d'un bâillon. Mais ce gouvernement a une proportion de 17,4 p. 100, presque le double. C'est inquiétant quand un gouvernement a doublé, à toutes fins utiles, le nombre de bâillons pour régler les projets de loi et les débats à la Chambre, et que ce même gouvernement, aujourd'hui, veut maintenant empêcher l'opposition de présenter des amendements ou, du moins, accorder au président le droit de décider si un amendement est valable ou non.

Monsieur le Président, je prétends que ce gouvernement tente de vous transférer la responsabilité qui est la nôtre ici, soit celle de voter et de décider en tout temps si ce qui est soumis à l'attention du Parlement est valable ou non, si cela doit être retenu ou rejeté, surtout dans le contexte de l'adoption d'un projet de loi.

 

. 1355 + -

Jamais nous ne pourrons accepter que le président de la Chambre des communes se substitue au pouvoir qui a été donné à ses députés par les électeurs de faire connaître leurs points de vue, d'exercer leur jugement et de décider si, oui ou non, un amendement ou un projet de loi doit être accepté ou doit être rejeté.

Jamais nous n'accepterons que la présidence de la Chambre des communes se voie investie d'un tel pouvoir par le gouvernement, non pas parce que le président de la Chambre désire ce pouvoir, mais parce que le gouvernement veut lâchement se défaire de ses responsabilités en transférant à la présidence le devoir et l'obligation d'imposer elle-même la clôture aux députés d'opposition eu égard aux amendements et aux débats dans cette Chambre.

Ma collègue me disait tout à l'heure, alors que le débat avait cours, que dans le Parlement actuel, les débats qui sont les nôtres, ce n'est que du temps, du temps en attendant que le projet de loi soit adopté. C'est bien loin de ce qu'était le Parlement au départ. On dit que c'est du temps en attendant que le projet de loi soit adopté. C'est vrai que c'est rendu comme cela.

Nous sommes loin des grands débats, où l'ouverture d'esprit et l'intelligence humaine s'exerçaient dans cette Chambre, où on écoutait les adversaires, comme ceux des tiers partis, donner des points de vue quant à la façon dont les choses devaient être menées. On est loin du temps où les citoyens étaient convaincus de mandater ici, à Ottawa, des députés qui venaient travailler avec ouverture dans le sens de leur donner ce qui est le meilleur pour eux.

Nous sommes à une époque où les initiatives gouvernementales sont trop souvent amorcées par des équipes de fonctionnaires coupés de la réalité et véhiculées par des ministres qui manquent de sens critique. Des initiatives sont présentées dans cette Chambre et on ne laisse pas et on ne souhaite pas s'ouvrir l'esprit.

J'aurais aimé que la ministre de la Justice accepte un tant soit peu de manifester de l'ouverture à l'endroit de mon collègue de Berthier—Montcalm, qui a proposé des amendements on ne peut plus significatifs, on ne peut plus intéressants et de nature à enrichir le projet de loi qu'elle déposait et que ses fonctionnaires avaient préparé derrière des portes closes. Mais non, comme dans tous les débats dans cette Chambre, la ministre de la Justice nous a écoutés et le temps lui était difficile à supporter. C'était déjà trop long.

Même si le débat n'est que du temps en attendant d'adopter les projets de loi, pour le gouvernement, c'en est rendu que c'est une période trop souffrante. Il est difficile de se faire dire pendant des jours et des jours, par des députés d'opposition, avec de nombreux arguments et démonstrations logiques, que le projet de loi que l'on pilote n'est pas un projet de loi valable.

C'est extrêmement difficile, mais le gouvernement en est rendu au point où il ne veut même plus souffrir cette responsabilité qui est la sienne, soit celle d'écouter ce qu'ont à dire les représentants des citoyens qui n'ont pas choisi un député libéral, mais qui ont choisi un député du Bloc québécois, un député de l'Alliance canadienne, un député du NPD ou un député du Parti progressiste-conservateur pour les représenter.



DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Français]

SAMUEL DE CHAMPLAIN

M. Denis Paradis (Brome—Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, courage, leadership, ténacité, dévouement, de grandes qualités que possédait Samuel de Champlain, qui est devenu l'explorateur et le colonisateur que l'on connaît aujourd'hui.

Samuel de Champlain était un homme aux multiples talents.

L'historien Samuel Eliot Morison rappelle que Champlain était un artiste, un illustrateur, un ingénieur, un inventeur militaire, un cartographe et un auteur de talent, dont le livre Les voyages en Nouvelle-France est une riche source documentaire sur l'histoire du Canada.

Champlain nous a aussi légué de belles descriptions de la vie des Amérindiens qu'il a côtoyés, de la nature et des paysages de la Nouvelle-France.

 

. 1400 + -

J'aime penser que nous avons hérité, comme peuple, de sa détermination, de son courage et de son âme de conquérant.

Nous avons tous ensemble bâti un pays qui suscite l'admiration et où la qualité de vie est l'une des meilleures au monde. Tout cela, c'est grâce à notre volonté, à notre esprit combatif et inventif, à notre dynamisme, des qualités à l'image de ceux qui ont colonisé notre pays.

*  *  *

[Traduction]

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Alliance canadienne): Monsieur le Président, dans une décision scandaleuse, la Cour d'appel de l'Ontario a consacré encore davantage les droits fondés sur la race dans notre pays.

Cette fois, les bénéficiaires de droits de chasse et de pêche fondés sur la race sont les Métis de l'Ontario. Cette décision a ouvert la porte à l'exploitation des ressources naturelles et à l'extorsion d'autres concessions fondées sur la race.

Entre-temps, le gouvernement du Canada continue d'engouffrer des milliards de dollars provenant de l'argent des contribuables dans des programmes indiens et métis où la corruption le dispute à l'incompétence. Des croisières, des pots-de-vin, du népotisme et des largesses administratives sont en train d'ébranler la générosité des contribuables canadiens.

Les discours moralisateurs du gouvernement libéral ne peuvent pas occulter ce fait. La Loi sur les Indiens est un échec lamentable, et l'approche raciste de la cour fait de l'égalité de tous les Canadiens une parodie.

*  *  *

[Français]

LES RESSOURCES NATURELLES

M. Guy St-Julien (Abitibi—Baie-James—Nunavik, Lib.): Monsieur le Président, comme député de cette grande région qu'est Abitibi—Baie-James—Nunavik, je demande à tous d'agir ensemble pour accentuer la présence et l'action du gouvernement du Canada dans les régions de ressources qui éprouvent des difficultés d'adaptation dans le contexte de la nouvelle économie.

Il faut assouplir les règles des programmes existants et s'assurer qu'ils soient utilisés, mettre en place un programme d'aide financière pour les mines à petite capitalisation restreinte, et ceci, pour les juniors.

*  *  *

[Traduction]

LE CURLING

M. Geoff Regan (Halifax-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, quelle victoire, ce week-end, aux championnats canadiens de curling, le Scott Tournament of Hearts, et quel retour pour Team Nova Scotia, menée par Colleen Jones, ainsi que ses coéquipières Kim Kelly, Mary-Anne Waye et Nancy Dalahunt qui, après un retard de 5 à 2, sont sorties victorieuses d'une supplémentaire aux championnats nationaux, à Sudbury.

Colleen Jones et son quatuor du Mayflower Curling Club de Halifax représenteront le Canada à Lausanne, en Suisse, le mois prochain, aux championnats mondiaux.

Au nom de tous les Néo-Écossais et de tous les parlementaires, qui se joignent sûrement à moi, je félicite l'équipe de son succès et lui souhaite un succès retentissant aux championnats mondiaux.

*  *  *

LE CURLING

L'hon. Diane Marleau (Sudbury, Lib.): Monsieur le Président, le Tournoi de coeurs de Scott a marqué son 20e anniversaire le week-end dernier à Sudbury, où l'on a pu voir les meilleures joueuses de curling au Canada ainsi que les championnes des 20 dernières années venues assister à l'incroyable partie finale.

Nous avons été témoins de la création de la Fondation Sandra Schmirler, en mémoire de notre médaillée d'or aux Jeux olympiques de 1998. De plus, tous les Canadiens peuvent entendre aujourd'hui Hearts of Fire, la nouvelle chanson thème du Tournoi de coeurs de Scott, écrite par le compositeur de Sudbury, Tom Hewlett.

Le Tournoi de coeurs est un événement de classe mondiale auquel participent des compétitrices de toutes les provinces et tous les territoires. Je voudrais que les Canadiens sachent que les habitants de Sudbury sont vraiment fiers des participantes et des organisateurs de l'événement de cette année.

Je félicite les championnes de 2001, c'est-à-dire les membres de l'équipe de Colleen Jones de la Nouvelle-Écosse et je dis merci à Sudbury d'avoir été l'hôte de ce magnifique événement.

*  *  *

LA JUSTICE

M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'attire de nouveau l'attention sur l'injustice de nos lois concernant l'octroi du sursis.

Il a souvent été question à la Chambre de l'octroi du sursis dans le cas de délinquants violents. Le dernier exemple de cette injustice concerne la jeune Veronique Lauzon, âgée de 20 ans, qui a récemment été condamnée à une peine 21 mois de travaux communautaires.

Qu'a-t-elle fait pour mériter un tel traitement de faveur? Elle a été reconnue coupable de vol à main armée, d'évasion alors qu'elle était sous garde légitime, de vol d'auto et de conduite dangereuse causant des blessures—blessures à un policier qu'elle a traîné sur une distance de plusieurs pâtés de maisons alors qu'elle était au volant de l'auto volée.

Son avocat a soutenu que Lauzon était traumatisée par la mort subite de son père. Malgré ma sympathie, je pense qu'il y a chaque jour de nombreux Canadiens qui sont traumatisés par la perte subite d'un être cher, mais qui ne réagissent pas pour autant en commettant des crimes violents. Cette excuse est une insulte.

Puisque le gouvernement semble peu disposé à protéger nos collectivités contre les criminels dangereux et violents, défendra-t-il au moins nos policiers qui risquent quotidiennement leur vie pour lutter contre le crime dans nos rues?

*  *  *

LE COMMERCE

M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.): Monsieur le Président, la société Aliments McCain Ltée va s'installer en Chine. Dans la foulée de la mission commerciale très réussie d'Équipe Canada en Chine, ce conglomérat du Nouveau-Brunswick a récemment annoncé un projet visant la construction d'une usine de transformation de la pomme de terre de 90 millions de dollars dans la région du nord-est de la Chine.

 

. 1405 + -

La société McCain a été fondée en 1957 à Florenceville; à cette date, elle comptait une seule petite usine. Aujourd'hui, elle est le plus grand producteur de frites au monde; elle possède 50 usines dans 13 pays sur 5 continents.

Le Canada est un pays exportateur et son commerce avec les autres pays de la planète se chiffre à 2,2 milliards de dollars quotidiennement. Le gouvernement s'est engagé à améliorer le commerce international et à faciliter l'accès aux marchés pour les entreprises canadiennes comme McCain.

Je félicite tous les participants à la mission commerciale de cette année et aussi le gouvernement pour son travail acharné et son engagement à créer des emplois pour les Canadiens.

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[Français]

LES ATHLÈTES QUÉBÉCOIS

M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Monsieur le Président, de grandes victoires de nos athlètes québécois méritent d'être soulignées. Pensons à la cycliste Geneviève Jeanson qui a remporté deux victoires à Mesa, en Arizona.

Le skieur Stéphane Rochon, quant à lui, a remporté la médaille d'or dans l'épreuve des bosses en parallèle, lors des championnats de la Coupe du monde, et Pierre-Alexandre Rousseau a remporté la médaille d'argent dans l'épreuve des bosses.

Félicitons les gagnants de la 20e édition du Gala du mérite sportif du Québec. L'haltérophile Maryse Turcotte a été nommée l'athlète féminine de l'année, et le volleyeur Sébastien Ruette, l'athlète masculin de l'année. La biathlète Judith Chaput a été nommée la révélation de l'année, et chez les hommes, ce titre est allé à Nicolas Beaudoin, champion du canoë-kayak de vitesse.

Les patineurs artistiques Jamie Sale et David Pelletier ont remporté leur deuxième victoire en autant de semaines, la première à Salt Lake City et la deuxième au Japon.

Le Bloc québécois félicite ces athlètes qui ne ménagent pas leurs efforts et qui sont, pour le Québec, de bons ambassadeurs.

*  *  *

[Traduction]

LE CONCOURS INTERNATIONAL DE LABOUR

M. Ovid Jackson (Bruce—Grey—Owen Sound, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour féliciter Al Bye, ancien président du conseil du comté de Grey, pour la merveilleuse présentation qu'il a faite ce week-end à Ottawa, qui nous a valu d'être choisis comme lieu où sera présenté le concours de labour de 2004.

Le concours international de labour rassemble des citadins et des ruraux et des agriculteurs qui montrent aux gens du pays qu'ils sont les gardiens de la terre et qu'ils nous procurent des aliments formidables à des prix formidables.

Dans ma circonscription, il y a le Summer Folk Music Festival à Owen Sound; à Durham, il y a le Wood Show; à Flesherton, on trouve le Split Rail Festival et à Meaford, le Apple Harvest Festival.

J'invite tous mes collègues à venir visiter la circonscription de Bruce—Grey—Owen Sound en 2004. Les députés ont amplement le temps d'économiser en prévision de cet événement et je peux leur dire que leurs familles s'amuseront ferme.

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LE COMMERCE

Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les producteurs canadiens de wapitis et de chevreuils ont bâti une industrie dynamique d'animaux reproducteurs d'une grande valeur et un marché prometteur pour le velours des bois de cervidés.

Les bois sont renommés depuis des siècles dans les pays asiatiques pour offrir de nombreux avantages sur le plan de la santé en général et ils se taillent une réputation enviable en Amérique du Nord en tant qu'aliments fonctionnels aux effets bénéfiques.

La Corée et la Nouvelle-Zélande sont les marchés les plus importants pour le velours des bois des cervidés canadiens, mais récemment, les deux pays ont annoncé une interdiction sur les importations de ces bois à cause de la présence d'encéphalopathie des cervidés dans les Prairies.

L'Agence canadienne d'inspection des aliments est persuadée de contrôler la maladie et de pouvoir la faire disparaître. Cependant, si cette interdiction commerciale se poursuit, l'industrie canadienne sera placée dans une situation catastrophique.

Aujourd'hui, je demande aux ministres de l'Agriculture, des Affaires étrangères et du Commerce international d'entreprendre immédiatement le dialogue avec la Corée et la Nouvelle-Zélande pour faire lever le plus tôt possible cette interdiction qui frappe les bois des wapitis canadiens.

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[Français]

LE GALA DES JUTRA

M. Marcel Proulx (Hull—Aylmer, Lib.): Monsieur le Président, hier avait lieu la troisième édition du Gala des Jutra.

Ce gala a été l'occasion de saluer le travail effectué par les artisans du septième art au Québec, le cinéma, durant la dernière année. La soirée a été animée avec dynamisme et panache, à l'image de notre cinéma.

Je profite de l'occasion qui m'est donnée pour féliciter les organisateurs de la soirée et tous les récipiendaires de prix, surtout M. Denis Villeneuve et Mme Marie-Josée Croze pour le film Maelström qui a récolté huit trophées pour autant de nominations. Cette soirée fait suite aux nombreuses récompenses méritées par M. Villeneuve sur la scène internationale. Un tel succès demeurera dans la légende.

Il est indéniable que le Québec regorge de talents. Nous devons continuer d'encourager la tenue de tels événements. Ils sont une vitrine de premier choix pour nos artistes et pour l'expansion de la relève.

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[Traduction]

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, il est temps que le gouvernement rende des comptes au sujet de la mauvaise gestion de la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits qui relève de Santé Canada.

Il est temps de procéder à un examen externe, à une enquête indépendante sur l'administration de ce service. Si on n'en fait rien, on nuira grandement aux efforts déployés pour régler les graves problèmes de santé dans les collectivités autochtones et on causera un tort irréparable pour ce qui est de l'objectif de donner aux premières nations et aux Inuits le contrôle de leurs programmes de santé.

 

. 1410 + -

Tout au cours des événements qui ont entouré la Virginia Fontaine Addictions Foundation à Sagkeeng, l'Anishinaabe Mino-Ayaawin de Winnipeg et maintenant, les déficits qui seraient accumulés dans le programme de services de santé non assurés, le gouvernement n'a pas assumé ses responsabilités à l'égard des problèmes qui surgissent et a essayé de donner l'impression que seul son ministère n'avait rien à se reprocher.

Pourtant, les causes profondes du problème se trouvent au gouvernement. Les faits montrent une mauvaise gestion chaotique, une reddition de comptes insuffisante et un total mépris pour un très grand nombre de recommandations faites par le vérificateur général. Le gouvernement n'a pas rendu des comptes et n'a pas utilisé de bonnes pratiques de gestion et il n'a pas su soutenir les premières nations à la suite de la signature d'accords de transfert.

Le temps presse. Il est temps que le gouvernement agisse, qu'il reconnaisse que...

Le Président: La députée de Terrebonne—Blainville a la parole.

*  *  *

[Français]

LE GALA DES JUTRA

Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ): Monsieur le Président, hier, au Théâtre Saint-Denis, c'était la fête du cinéma québécois. Une fête, mais aussi une occasion de mieux connaître notre cinéma et une invitation à en faire.

La 3e Soirée des Jutras, baptisée la Grande nuit du cinéma, habilement animée par Élyse Guilbault et Yves Jacques, nous a donné un aperçu du dernier cru qui est tout à l'honneur du 7e art québécois.

Un hommage fut rendu au maître cinéaste Gilles Carle pour l'excellence de son oeuvre. Moment émouvant où fut chaleureusement applaudi le prolifique cinéaste, auteur de 47 films.

Les Maelström, Hochelaga, La vie après l'amour, La beauté de Pandore, La bouteille, Le petit ciel, Full Blast, The Art of War, La moitié gauche du frigo, Stardom, Possible Worlds, Les muses orphelines et autres films aussi ont mis en valeur le talent original de la colonie artistique québécoise et la capacité de ces créateurs de rendre universel notre regard.

Le public a bien raison de soutenir le film québécois.

*  *  *

[Traduction]

LA SOCIÉTÉ IMMOBILIÈRE DU CANADA

M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais féliciter la Société immobilière du Canada pour avoir remporté le grand prix Sam Nationaux, le prix le plus prestigieux dans l'industrie canadienne de l'aménagement du territoire, qui récompense la meilleure performance en matière de marketing, de publicité, de promotion, de techniques marchandes et d'argumentation.

Le projet gagnant, Garrison Woods, est un village urbain situé sur l'ancienne base des Forces canadiennes à sept minutes du centre de Calgary. C'est une collectivité intégrée où les gens peuvent vivre, travailler, se distraire et recevoir une éducation. Elle célèbre et reflète l'héritage militaire de Calgary. Les Calgariens ont tenu des consultations pendant trois ans pour planifier ce projet visant à créer une collectivité très spéciale.

La Société immobilière du Canada, au nom des Canadiens, s'acquitte de son mandat sur une base d'autofinancement, encourageant les projets immobiliers innovateurs et la responsabilité à l'égard de l'environnement. L'équipe gagnante de la société fait ainsi une contribution à la vitalité économique de toutes les collectivités à travers le Canada.

*  *  *

LA FISCALITÉ

M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, le ministre des Finances rencontre aujourd'hui ses homologues provinciaux à Halifax. La principale question à l'ordre du jour est la péréquation.

Terre-Neuve et les autres provinces de l'Atlantique réclament des changements. Elles veulent que l'arrangement en matière de récupération soit modifié de façon à ce que le gouvernement arrête de prélever entre 75 et 90 p. 100 des recettes qu'elles tirent des ressources.

Nous ne voulons pas être la Cendrillon du Canada. Nous n'avons pas besoin de l'être. Nous avons trouvé le soulier de verre. Tout ce que nous voulons, c'est pouvoir le chausser.

*  *  *

[Français]

LE MOIS DES GRANDES SOEURS

M. Mark Assad (Gatineau, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais souligner de manière spéciale le Mois des Grandes Soeurs, cet organisme qui rend de multiples services à nos communautés.

Rappelons d'abord que la mission des Grandes Soeurs est d'offrir à des enfants des relations de qualité avec des adultes bénévoles responsables afin de les aider dans leur développement psychosocial.

Je veux surtout souligner l'engagement de milliers de ces bénévoles qui investissent leur temps, leurs talents et leurs ressources, car une Grande Soeur est avant tout une amie qui désire partager, avec un jeune issu de famille monoparentale, quelques heures de son temps par semaine.

Un gros merci à toutes ces personnes qui contribuent à l'amélioration de la qualité de vie d'autant de jeunes au Québec et au Canada.

*  *  *

[Traduction]

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Alliance canadienne): Monsieur le Président, des sources bien informées nous apprennent que le budget affecté par la GRC au registre canadien des armes à feu a été réduit de 40 p. 100. Vingt vérificateurs ont déjà été mis en disponibilité. Il a même été annoncé au personnel et aux représentants syndicaux qu'on envisagerait de licencier la totalité des employés. Entre temps, ces derniers ont reçu l'ordre de tripler leur productivité.

Au cours des deux dernières années, la GRC a délivré seulement 550 000 certificats d'enregistrement d'arme à feu, et elle accuse aujourd'hui un retard de plus de 180 000 demandes.

 

. 1415 + -

Il lui reste entre 7 millions et 20 millions d'armes à feu à enregistrer au cours des deux prochaines années. Le directeur de l'enregistrement a indiqué que le taux d'erreur dans le traitement des demandes reçues est de 90 p. 100 et qu'il faudra jusqu'à 2010 pour enregistrer toutes les armes à feu détenues en toute légalité au Canada.

Pourquoi le solliciteur général sabre-t-il dans le budget consacré au registre et licencie-t-il le personnel? J'aurais voulu que ce soit pour la raison que les libéraux commencent à regretter les milliards de dollars qu'ils s'apprêtent à dilapider avec cet exercice futile et qu'ils préféreraient les consacrer plutôt à la lutte contre le crime proprement dit. Malheureusement, plutôt qu'au bons sens, les licenciements sont probablement attribuables au programme de privatisation qu'envisage la ministre de la Justice.

*  *  *

LE CURLING

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, je félicite de tout coeur une championne, Colleen Jones et ses camarades de l'équipe de curling Mayflower, Nancy, Mary-Anne et Kim, pour avoir remporté trois fois le Tournoi de coeurs de Scott.

Ce coup du chapeau de Colleen Jones lui permet de se classer dans la catégorie des Sandra Schmirler, Connie Laliberté et Vera Pezer. En ma qualité de députée provinciale de la circonscription de Halifax—Chebucto, foyer du Mayflower Curling Club, j'avais eu la joie, en 1982, d'accueillir Colleen de retour chez elle après avoir remporté son premier championnat national.

Je regrette de ne pas pouvoir me rendre à Halifax pour les célébrations qui seront organisées cette semaine en son honneur, mais je suis vraiment ravie de féliciter aujourd'hui à la Chambre Colleen et son équipe formidable et leur souhaiter un égal succès lors du prochain championnat mondial de curling qui doit avoir lieu à Lausanne, en Suisse.

Colleen, avec ses nombreux succès sportifs, suit dans les traces de Sandra Schmirler, qui en inspire beaucoup d'autres aussi.



QUESTIONS ORALES

[Traduction]

L'IMMIGRATION

M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous espérons avoir une réponse directement du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux aujourd'hui, car nous allons poser de nouveau la question concernant le fait que le gouvernement du Canada a accordé un visa à Gaetano Amodeo.

On dit que M. Amodeo est un tueur à gages et qu'il est sur la liste des personnes les plus recherchées d'Interpol. Pourquoi le gouvernement permettrait-il qu'un des criminels les plus dangereux au monde vienne se réfugier dans notre pays?

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, le député d'en face a tort et il devrait savoir que les habitants d'Europe de l'Ouest n'ont pas besoin de visa de visiteur pour entrer au Canada.

Dès que nous avons appris que cet homme était recherché, nous avons vu à ce qu'il soit incarcéré, ce qui a pris moins de trois semaines, et il attend maintenant son audience d'expulsion.

M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous ne parlons pas ici d'une simple visite. On sait que l'épouse de M. Amodeo a cherché à obtenir de l'aide du ministre des Travaux publics relativement à la demande de visa même s'il n'est pas son député. Il est impossible que ce soit une question de langue parce que le député de la circonscription de Mme Amodeo, qui n'est pas celle du ministre des Travaux publics, offre les services en question en italien.

Pourquoi Mme Amodeo a-t-elle pensé qu'elle pourrait obtenir un traitement de faveur du ministre au lieu de s'adresser à son propre député?

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, le chef de l'opposition a tort, et je peux lui dire que mon ministère a reçu, l'an dernier, plus de 40 000 demandes de renseignements de tous les députés de la Chambre.

Il devrait aussi savoir que, aux termes de l'accord Canada-Québec, lorsqu'un individu présente une demande dans cette province en tant qu'immigrant indépendant, le Québec doit produire un document de sélection avant que l'individu ne puisse obtenir le statut de résident permanent au Canada. Cela a été fait dans ce cas, et le temps de traitement de la demande a été conforme à la moyenne dans les bureaux de visas partout dans le monde. On n'a rien fait dans ce dossier qui puisse être considéré comme irrégulier.

[Français]

M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, ce n'est pas une situation normale parce cette lettre n'est pas une lettre normale. Ce n'est pas la lettre d'un député demandant l'état d'un dossier à Immigration Canada au nom d'un citoyen du comté. Cette lettre réclame clairement que le visa soit, et je cite: «bientôt émis».

Le ministre reconnaît-il qu'il a agi dans ce dossier non pas comme un député mais comme un activiste?

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai déposé à la Chambre ce matin, mon adjointe de comté a envoyé un mémo et je le cite directement.

 

. 1420 + -

Je peux le déposer encore pour le chef de l'opposition. Il se lit comme suit: «Seulement pour savoir où en est rendu le dossier de résidence permanente avec le fédéral. Je sais que le CSQ est valide jusqu'en juin 2000 et que le visa de visiteur est bon jusqu'en 2001. Est-ce que les vérifications sont rentrées? Et les résultats médicaux? Voyez-vous que les visas sont pour être émis bientôt?»

Voilà, monsieur le Président.

[Traduction]

Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis consciente de la situation difficile où se trouve le ministre et nous devons faire preuve de responsabilité en l'examinant plus en profondeur. Il me semble curieux cependant que le dossier se soit retrouvé entre les mains du député, qui n'est pas le député de l'épouse de ce présumé membre de la pègre. Il semble curieux que la demande ait fait l'objet d'un traitement accéléré après que la lettre eut été écrite.

Le ministre peut-il nous dire s'il connaissait cette femme ou son époux, les Amodeo, de quelque façon que ce soit avant que la note de service ne soit envoyée à Immigration Canada?

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, je ne connaissais ni la dame ni l'homme. Le personnel de mon bureau ne la connaissait pas avant qu'elle s'y présente.

J'ai seulement pris connaissance de cette affaire, dans une note déposée à mon bureau, la journée avant que le journal La Presse ne publie l'article. C'était donc jeudi après-midi, parce que le journaliste a appelé à mon bureau. Autrement, j'ignorais même l'existence du dossier.

Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, toute cette question a fait surface parce qu'un individu qui figure sur la liste des 500 personnes les plus recherchées par Interpol se trouve au Canada depuis 1998. Apparemment, la ministre de l'Immigration n'en savait rien. Les Canadiens trouvent inquiétant que des criminels puissent trouver refuge chez nous et que les fonctionnaires ignorent apparemment leurs allées et venues.

J'aimerais que la ministre explique aux Canadiens comment cela a pu se produire. Comment se fait-il que cette personne se trouve au Canada à l'insu de la ministre?

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, la députée d'en face doit savoir que les ressortissants d'Europe de l'Ouest, notamment la France, le Royaume-Uni, l'Allemagne et l'Italie, n'ont pas besoin de posséder un visa de visiteurs pour entrer au Canada. C'est le cas depuis longtemps déjà.

Dans ce cas-ci, cependant, une fois que mon ministère a été informé que l'individu était recherché, ce dernier a été appréhendé au bout de trois semaines et placé en détention en attendant son audience d'expulsion. Nous avons fait précisément ce qui devait être fait.

*  *  *

[Français]

LES RESSOURCES NATURELLES

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Ressources naturelles est présentement à Washington afin de discuter avec les États-Unis de l'établissement d'un pacte nord-américain dans le domaine de l'énergie.

Puisqu'il n'a jamais été question d'une telle négociation ici, au Parlement, à la Chambre des communes, le premier ministre peut-il nous dire quelle position défendra son ministre lors de ces discussions avec les représentants américains?

M. Benoît Serré (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, le Canada et les États-Unis ont, depuis longtemps, bénéficié d'un rapport commercial avec très peu de contraintes.

Aujourd'hui, le ministre va s'assurer, et nous avons été très clairs là-dessus, que dans toute négociation et dans toute entente avec quelque pays que ce soit, la souveraineté et les besoins du Canada seront toujours défendus et viendront en premier lieu.

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, c'est très clair comme réponse.

Comme on le sait, cependant, les ressources naturelles relèvent des compétences des provinces.

Est-ce que le premier ministre, ou le secrétaire parlementaire dans ce cas-ci, peut nous dire si les provinces ont été associées, consultées quant aux négociations qu'entreprend le ministre avec les États-Unis sur la question des ressources naturelles?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la visite du ministre n'est pas une visite pour entamer des négociations. C'est une visite pour faire la connaissance du nouveau ministre, l'ancien sénateur Abraham. Il s'agit au tout début d'avoir un échange de vues.

Si, en temps et lieu, il y a des négociations, nous allons utiliser les formules normales pour informer les provinces.

 

. 1425 + -

M. Serge Cardin (Sherbrooke, BQ): Monsieur le Président, lors des discussions sur l'établissement d'une entente portant spécifiquement sur les différentes formes d'énergie, il devrait normalement être question de pétrole et de gaz naturel.

Ma question s'adresse au premier ministre. Parmi les ressources naturelles qui feront l'objet de ces négociations, est-ce que le premier ministre peut nous assurer que l'eau potable sera exclue de toutes discussions sur un éventuel pacte énergétique?

M. Benoît Serré (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, comme le vice-premier ministre vient de le dire, il n'y a pas de négociations formelles à ce moment-ci. Je peux toutefois assurer la Chambre et l'honorable député que dans toutes les ententes que nous avons signées avec les pays étrangers—dans toutes les ententes commerciales—, nous avons toujours protégé les besoins des Canadiens, que ce soit pour l'eau ou pour les ressources, et nous allons continuer de le faire.

M. Serge Cardin (Sherbrooke, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre peut-il nous dire si ces questions énergétiques feront l'objet de discussions à l'une des tables sectorielles de négociation de la Zone de libre-échange des Amériques? Et si oui, est-ce que la visite des deux ministres canadiens à Washington est une visite préparatoire aux négociations de la Zone de libre-échange des Amériques pour ce qui est des questions énergétiques?

M. Benoît Serré (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, les États-Unis ont une nouvelle administration. Il est normal que les ministres de notre gouvernement aillent visiter leurs homologues aux États-Unis pour se familiariser avec les dossiers et pour discuter de façon générale.

Quand il y aura des discussions formelles, l'opposition le saura. Je tiens à réitérer le fait suivant: que ce soit les ministres ou le gouvernement en général, nous allons toujours défendre les droits et les besoins des Canadiens en premier lieu.

*  *  *

LE SOMMET DES AMÉRIQUES

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, le droit des citoyens de s'exprimer et de manifester pacifiquement, c'est fondamental.

L'attitude des gouvernements vis-à-vis du Sommet des Amériques est inquiétante. Il y a des barricades, des règlements absurdes, des points de contrôle et ainsi de suite. Évidemment, il faut assurer l'ordre et la sécurité pendant le Sommet des Amériques.

Nous cherchons aussi l'assurance que les manifestations pacifiques seront protégées à Québec. Est-ce que ce gouvernement donnera cette assurance?

M. Denis Paradis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le Sommet des Amériques, qui aura lieu à Québec en avril 2001, sera une occasion pour nous tous, Canadiens, de réaffirmer notre engagement au sein des Amériques et sera aussi une occasion pour accroître les possibilités des Canadiens de tous les secteurs.

Dans le cadre des préparations de ce Sommet, le ministre du Commerce international et le secrétaire d'État pour l'Amérique latine et l'Afrique ont rencontré des gens de la société civile, et ce, pas plus tard que vendredi dernier.

[Traduction]

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, je répète que les Canadiens veulent avoir l'assurance que les droits des manifestants pacifiques ne seront pas bafoués lors du Sommet de Québec. Ils veulent avoir l'assurance qu'on ne recourra pas à une force excessive, notamment la détention illégale, les fouilles à nu et les gaz poivrés.

La GRC veille aux préparatifs de sécurité en vue du Sommet, et à juste titre. Est-ce que le gouvernement peut assurer le public qu'on trouvera le juste équilibre entre la responsabilité de maintenir l'ordre et la sécurité et le droit des citoyens de se faire entendre en manifestant de façon pacifique pendant la durée du Sommet?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la réponse est oui. Toutefois, je me permettrai de rappeler à la députée ce qu'a dit le premier ministre de la Grande-Bretagne Tony Blair lors de sa récente visite:

    Aussi sincères que soient les protestations, elles ne doivent pas nuire à une démarche rationnelle. Nous devrions commencer à l'affirmer avec force et détermination.

Voilà le message adressé par le premier ministre Blair, chef du Parti travailliste de Grande-Bretagne, aux membres du Nouveau Parti démocratique du Canada. Ceux-ci devraient être attentifs à ces propos sensés.

*  *  *

LA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA

Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au vice-premier ministre. Il sait que la Loi sur la Banque de développement du Canada est entrée en vigueur le 13 juillet 1995. Cette loi exige que le ministre désigné examine les dispositions et le fonctionnement de la loi en consultation avec le ministre des Finances tous les cinq ans. Selon cette loi, l'examen aurait dû être entrepris en juillet dernier, soit il y a sept mois. Un rapport doit être présenté au Parlement au plus tard en juillet de cette année.

 

. 1430 + -

Le vice-premier ministre peut-il dire à la Chambre si le ministre de l'Industrie a commencé cet examen? Nous dira-t-il quand le rapport d'examen sera présenté à la Chambre, comme l'exige la loi? Si le ministre n'a pas commencé son examen, le vice-premier ministre peut-il nous dire pourquoi il n'a pas respecté la loi?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai pas tous les renseignements que demande le député, mais je ne doute pas que les ministres compétents respecteront la loi.

Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, j'essaie autre chose.

Avant que l'on retire au président de la Banque de développement du Canada son pouvoir à l'égard des prêts, il avait recommandé que la banque envisage le rappel du prêt consenti à l'Auberge Grand-Mère, qui était en défaut de paiement.

Le vice-premier ministre peut-il dire à la Chambre—je suis certain qu'il en a été question au Cabinet—si le premier ministre savait que M. Beaudoin avait recommandé de rappeler le prêt avant que les pouvoirs du président soient modifiés? Le premier ministre connaissait-il à l'avance l'intention du conseil d'administration de retirer au président le pouvoir qu'il détenait à l'égard des prêts?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'obtiendrai une réponse détaillée à l'intention du député, mais je me demande s'il sait que M. Beaudoin fait l'objet d'une demande reconventionnelle dans la cause qui est devant les tribunaux parce que le vérificateur général a constaté qu'il avait gonflé sa pension d'environ un demi-million de dollars.

Pourquoi le député fonde-t-il ses questions sur quelque chose d'aussi litigieux que les commentaires de M. Beaudoin?

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, puisqu'il est question de la Banque de développement du Canada, rappelons que le 21 avril 1997, Yvon Duhaime faisait parvenir au premier ministre une lettre dans laquelle il lui demandait d'intervenir au sujet du prêt dont la banque avait recommandé le refus.

Nous avons obtenu aujourd'hui des documents montrant que, le 6 mai 1997, DRHC a dit que le financement était assuré par la Banque de développement du Canada. C'est la vitesse de l'éclair. Il n'a fallu que quelques jours. Il avait déjà été recommandé de ne pas consentir ce prêt.

La question qui se pose est la suivante: Comment se fait-il que, dans les dédalles de la bureaucratie, cette demande de prêt ait cheminé jusqu'à bon port et ait été acceptée en quelques jours, à la vitesse de l'éclair?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je rejette les prémisses de la question de ma collègue qui dit que le prêt a été accordé à la vitesse de l'éclair.

J'ai été informé, par ailleurs, que ce prêt a été approuvé par la Caisse populaire locale et le Fonds des travailleurs du Québec, organismes qui y ont participé et qui ne sont liés ni au gouvernement fédéral ni au premier ministre. Selon eux, ce prêt correspondait à une opération commerciale valide. La députée devrait tenir compte de ces faits avant de poser des questions creuses comme elle le fait chaque fois que l'occasion se présente.

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, voici un extrait du document en question:

[Français]

    Le financement est assuré par la Banque de développement du Canada.

[Traduction]

Il semble assez clair que le financement est assuré.

Nous savons que c'était pendant une période électorale et que le premier ministre menait le combat politique de sa vie. Il cherchait non seulement à se faire réélire, mais aussi à conserver sa participation financière dans le terrain de golf voisin de l'Auberge Grand-Mère.

La question est très simple: Pourquoi le premier ministre est-il intervenu dans le fonctionnement d'une société d'État?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la députée, que je félicite pour son français, n'a pas indiqué clairement la source de sa citation. Elle devrait le faire.

Le conseiller en éthique a jugé que le premier ministre ne s'était pas immiscé dans le fonctionnement d'une société d'État. Celui-ci ne faisait rien de plus que ce que font les députés de tous les côtés de la Chambre, soit se renseigner et faire part de doléances au nom d'un électeur.

Si la députée pense que c'est mal, elle devrait revenir à la case départ et réapprendre quelles sont ses tâches comme députée.

*  *  *

[Français]

LE COMMERCE INTERNATIONAL

M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement a toujours dit qu'à la fin de l'accord actuel sur le bois d'oeuvre, ce serait le retour intégral au libre-échange.

Or, jeudi dernier, le ministre du Commerce international nous a laissés passablement perplexes en disant, à la Chambre, qu'il prévoyait des mesures transitoires.

Je voudrais savoir de la part du premier ministre si on peut nous confirmer que la position du Canada est toujours le retour pur et simple au libre-échange et qu'aucune autre solution n'est envisageable.

 

. 1435 + -

[Traduction]

M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, la question est manifestement fort complexe. Le point de vue de toutes les régions du Canada sera pris en compte.

Comme ne l'ignore pas mon collègue, le ministre du Commerce international rencontre aujourd'hui à Washington le représentant au Commerce, M. Zoellick, et le secrétaire au Commerce, M. Evans.

Le ministre et moi avons dit maintes fois que l'objectif à long terme pour le Canada est le libre-échange dans le secteur du bois d'oeuvre.

[Français]

M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Monsieur le Président, j'aurais le goût de demander au secrétaire parlementaire ce qu'il entend par l'objectif à long terme, mais j'attendrai pour ce faire.

Je veux savoir si ce que nous devons comprendre de la position du gouvernement, c'est qu'avant même de commencer la négociation, nous assistons à un recul de la part de ce gouvernement par rapport à la position et au consensus qui font le tour du Canada dans l'industrie du bois d'oeuvre?

[Traduction]

M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je ne vois pas très bien ce que mon collègue entend par recul. De vastes consultations sont en cours à l'heure actuelle, dans tout le Canada, auprès de représentants du secteur du bois d'oeuvre. Cette question a fait un certain nombre de fois l'objet de discussions entre les ministres provinciaux du Commerce et le ministre du Commerce international. Elle fait aujourd'hui l'objet de discussions internationales. L'objectif à long terme demeure le libre-échange dans le secteur du bois d'oeuvre.

*  *  *

LA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA

Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je voudrais rétablir les faits un instant.

Le 21 avril, Yvon Duhaime a demandé au premier ministre d'user de son influence pour l'aider à obtenir un prêt de la Banque de développement du Canada relativement à un hôtel dans lequel ils avaient tous deux des intérêts. Moins de deux semaines plus tard, l'argent était assuré.

Qu'a fait le premier ministre ou son cabinet pour que ces fonds soient assurés en dedans de deux semaines?

M. John Cannis (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, il a été dit maintes fois à la Chambre, par le conseiller en éthique et par la GRC, qu'il n'y avait pas de conflit d'intérêts. Le parti de la députée ne comprend tout simplement pas.

Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il faut bien que quelque chose se soit passé dans ces deux semaines. La demande d'emprunt avait été refusée par la Banque de développement du Canada et, deux semaines après que le premier ministre eut usé de son influence, le prêt était garanti.

Je le demande à nouveau: Qu'a fait au juste le premier ministre ou son cabinet pour que ces fonds soient assurés en dedans de deux semaines?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la question de la députée ne donne rien parce qu'elle est fondée sur une allégation de trafic d'influences par le premier ministre. Il a été maintes fois confirmé que le premier ministre n'a pas usé d'une influence «indue» et je crois qu'il faudrait en tenir compte. La députée devrait trouver de nouvelles questions et commencer par présenter des faits.

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[Français]

LE SOMMET DES AMÉRIQUES

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, depuis plusieurs mois, le gouvernement du Québec réclame que le premier ministre du Québec puisse prendre la parole devant les chefs d'État qui se réuniront à Québec, du 20 au 22 avril prochain, dans le cadre du Sommet des Amériques.

Est-ce que le premier ministre peut nous dire si la position de son gouvernement consiste toujours à nier au premier ministre du Québec le droit de s'adresser aux chefs de gouvernement réunis à Québec lors du Sommet des Amériques?

M. Denis Paradis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, c'est le Canada qui est le pays hôte du Sommet des Amériques et je pense que c'est assez extraordinaire que nous puissions recevoir les 33 autres pays.

M. Bouchard en avait glissé un mot, je pense, au premier ministre lors du voyage en Chine. Mais à l'heure actuelle, les règles du jeu sont en train d'être discutées avec M. Lortie, qui est le sherpa, le représentant personnel du premier ministre, et les gens à Québec.

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre peut-il nous confirmer si lui ou son chef de cabinet, Jean Pelletier, ont transmis au premier ministre Bouchard, lors du dernier voyage d'Équipe Canada en Chine, une réponse à cette demande en lui disant «qu'il n'était absolument pas question que le premier ministre du Québec s'adresse aux chefs d'État à quelque moment que ce soit lors du Sommet des Amériques»?

M. Denis Paradis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais simplement rappeler que c'est le Canada qui est le pays hôte, que nous recevons 33 autres pays au Sommet de Québec. Ce sont des chefs d'État de l'ensemble des Amériques. Les règles du jeu veulent que ce soit le premier ministre du pays hôte, le premier ministre du Canada, qui reçoive les premiers ministres des autres pays, et c'est ainsi que cela fonctionne.

*  *  *

 

. 1440 + -

[Traduction]

L'IMMIGRATION

Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la ministre de l'Immigration a dit à la Chambre aujourd'hui que les citoyens d'un certain nombre de pays européens n'ont pas besoin de visas pour venir au Canada et en sortir. Cela me laisse un peu perplexe, étant donné que M. Amodeo est venu au Canada avec un visa de tourisme et que sa femme est venue au Canada avec un visa de visiteur. De toute évidence, ils avaient des visas.

La ministre pourrait-elle expliquer ce qu'il en est et dire à la Chambre si les gens peuvent enter dans notre pays et en sortir sans être assujettis à aucun contrôle, à aucune surveillance ni à aucune autre mesure? Nos frontières sont-elle grandes ouvertes?

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je suis surprise que la députée soit si peu au fait de la situation. C'est peut-être pour cela que sa question est si mal fondée. En fait, il y a certains pays dans le monde où des visas de visiteurs sont exigés et où les vérifications de sécurité sont faites avant l'émission de ces visas.

Cependant, il est de notoriété publique que les Américains, les Européens de l'Ouest et les habitants de nombreux pays dans le monde ne sont pas tenus d'avoir un visa de visiteur pour entrer au Canada. De la même façon, nous n'exerçons pas de contrôle lors de leur sortie. La députée devrait le savoir.

Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'apprécie la condescendance de la ministre, mais l'objectif de la période des questions, c'est justement de rendre publique cette information.

J'ai une autre question pour la ministre: L'Italie est-elle un des pays européens dont les habitants peuvent entrer au Canada et en sortir à leur guise? La ministre pourrait-elle aussi nous dire s'il n'y a personne de son ministère qui, à nos frontières, surveille de quelque façon que ce soit ceux qui entrent dans notre pays et qui en sortent?

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, il est important que la députée sache et comprenne, comme je l'ai dit dans ma première réponse à la Chambre, que les habitants de la plupart des pays d'Europe de l'Ouest, dont la France, l'Allemagne et l'Italie, et je ne prendrai pas le temps de les énumérer tous, peuvent entrer au Canada sans visa de visiteur.

Les agents d'immigration au point d'entrée se font leur idée lorsque la personne se présente devant eux. Ils tamponnent alors son passeport et l'autorisent à entrer au Canada.

J'ajouterai ceci à l'intention de la députée: l'enquête qui a été menée par tous les députés a révélé que 40 000...

Le Président: La députée de Winnipeg-Centre-Sud a la parole.

*  *  *

LA GESTION FINANCIÈRE

Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au secrétaire parlementaire de la présidente du Conseil du Trésor.

Dans son rapport récent, le vérificateur général affirme que le gouvernement a apporté des améliorations importantes à la gestion financière de l'administration publique. La présidente du Conseil du Trésor peut-elle expliquer quelles autres mesures le gouvernement adopte pour tirer parti de ces réalisations?

M. Alex Shepherd (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, la présidente du Conseil du Trésor a annoncé récemment l'adoption de procédures d'évaluation interne améliorées dans toute l'administration, ce qui renforcera le rôle de fiduciaire de notre gouvernement.

Nous savons que les Canadiens travaillent fort pour gagner leur argent. C'est pourquoi le gouvernement tient à ce que l'administration fasse ses dépenses de façon efficace et judicieuse. Ces rapports seront mis à la disposition du public, qui pourra ainsi se prononcer, et il témoigneront de la transparence dont le gouvernement fait preuve dans l'utilisation de l'argent des contribuables.

*  *  *

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, chaque jour qui passe apporte de nouvelles preuves de la mauvaise gestion et du chaos qui règnent à la Direction générale des programmes de santé des premières nations et des Inuit, au ministère de la Santé.

Les recommandations répétées du vérificateur général, réclamant une comptabilité correcte et de saines pratiques de gestion, sont restées lettre morte. La conséquence est qu'on risque de créer un tort énorme à la capacité des premières nations et du peuple inuit de se donner les services de santé qu'ils veulent et dont ils ont besoin.

Ma question s'adresse au ministre de la Santé suppléant. Va-t-il examiner les problèmes qui se posent dans son ministère et se prononcer en faveur d'une enquête indépendante sur cette direction générale?

[Français]

M. Yvon Charbonneau (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, comme on le sait, l'administration des dossiers reliés à la santé dans les régions éloignées à l'endroit des populations autochtones, c'est une question extrêmement complexe.

Certains articles de journaux font état de déficits. Je tiens à dire que ces déficits étaient autorisés, et qu'il y a plusieurs raisons qui peuvent permettre d'autoriser de tels déficits, dans ce cas comme dans d'autres provinces.

Lorsqu'il y a lieu de se poser des questions, comme l'a fait le représentant de Santé Canada, nous faisons des enquêtes et nous tentons de récupérer l'argent qui pourrait avoir été mal dépensé.

*  *  *

 

. 1445 + -

[Traduction]

LA SANTÉ

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, les maires des grandes villes se réunissent aujourd'hui pour attirer l'attention sur les grandes questions urbaines, comme le transport en commun et la pénurie de logements abordables.

Je sais également que le maire de Vancouver, Phillip Owen, est venu demander le soutien du gouvernement fédéral pour donner suite à son excellent rapport sur une stratégie à quatre volets pour lutter contre le terrible fléau de la drogue à Vancouver. L'entente de Vancouver est un premier pas dans la bonne direction, mais il reste encore énormément de travail à faire.

Le secrétaire parlementaire du ministre de la Santé peut-il nous dire si le gouvernement aura le courage d'appliquer les recommandations du maire Owen et de veiller notamment à l'organisation d'essais cliniques du traitement assisté à l'héroïne?

[Français]

M. Yvon Charbonneau (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je veux rassurer la députée de l'opposition en lui mentionnant que le ministère de la Santé suit de très près l'évolution de cette situation. Il se considère un partenaire pouvant contribuer au règlement de ces problèmes, en concertation avec les autorités de la Colombie-Britannique et les autorités locales.

Au sein de Santé Canada, nous fournissons tous les conseils, tous les services et tout l'éclairage requis pour permettre aux autorités locales de prendre leurs responsabilités face à ce grave problème.

*  *  *

LE COMMERCE

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, dans le dossier du boeuf brésilien, quelques heures après que les États-Unis aient levé l'interdiction contre l'importation du boeuf brésilien, le Canada décide de faire la même chose.

Le ministre de l'Agriculture peut-il dire à cette Chambre si, à ce moment-là, il avait toutes les réponses au fameux questionnaire qui a déclenché cette quasi-guerre commerciale entre le Brésil et le Canada?

[Traduction]

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, l'équipe d'agents techniques s'est entendue sur la suite à donner à l'évaluation des risques. Les trois pays ont donné leur accord. Les conditions qui ont été annoncées ont reçu le consentement des trois pays.

[Français]

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, j'ai une question bien simple pour le ministre.

On entend beaucoup de choses sur la raison qui a déclenché ce différend commercial entre le Canada et le Brésil. Lorsqu'on a passé trois semaines au Brésil, est-ce qu'on a posé la question aux Brésiliens à savoir pourquoi ils avaient omis ou refusé de répondre au questionnaire dont le gouvernement du Canada avait besoin. Pourquoi? Est-ce qu'il y a une réponse à cette question?

[Traduction]

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, tout le monde s'est rendu compte, surtout le 30 janvier dernier, que le Brésil reconnaissait avoir importé 4 100 têtes de bétail de pays membres de l'Union européenne où sévit la maladie qu'on appelle l'ESB. L'évaluation des risques a permis de porter ce nombre à 6 000.

Selon les conditions clairement associées à la levée de l'interdiction, aucun des produits provenant de ces animaux ne peut être importé au Canada. Protéger la santé et la sécurité des Canadiens demeure l'une de nos grandes priorités.

*  *  *

L'AGENCE DE PROMOTION ÉCONOMIQUE DU CANADA ATLANTIQUE

M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, selon les bulletins de nouvelles, au moins 14 bénéficiaires de fonds de l'APECA font l'objet d'une enquête criminelle de la GRC. C'est trois de plus que l'an dernier. On dit que les 11 premiers ont coûté près de 4 millions de dollars aux contribuables.

Le ministre peut-il informer la Chambre du nombre de cas de fraude liés à l'APECA qui font maintenant l'objet d'une enquête de la GRC? À combien s'élèvent ces cas de fraude?

M. John Cannis (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je tiens d'abord à souligner que les enquêtes ne portent pas sur l'APECA, mais bien sur les bénéficiaires. Je voudrais également souligner que c'est l'APECA qui, après avoir été informée des cas de fraude, en a fait part à la GRC. Voilà le genre de travail qu'accomplit l'APECA.

Permettez-moi aussi de faire ressortir que les 61 000 emplois créés grâce aux programmes gouvernementaux dans le Canada atlantique seraient tout simplement supprimés par l'Alliance canadienne, comme elle l'a dit au cours de la campagne électorale.

 

. 1450 + -

M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les 14 cas de fraude sous enquête et le taux d'impayés de 20 p. 100 de l'APECA sont tout simplement inacceptables.

L'APECA n'est pas le seul programme par lequel le gouvernement libéral gaspille l'argent des contribuables. Il le fait avec toutes sortes de programmes partout au Canada. Selon les comptes publics, les trois organismes de développement régional ont radié plus de 300 millions de dollars d'impayés depuis 1995. Et les libéraux veulent maintenant accorder encore 300 millions de dollars à l'APECA pour le fonds d'innovation de l'Atlantique.

Comment les Canadiens peuvent-ils croire que l'APECA administrera ce fonds mieux que dans le passé?

M. John Cannis (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, j'ai entendu le député de Medicine Hat dire que nous devrions l'éliminer tout simplement. Cette plainte n'est qu'une manifestation de la faiblesse de son parti, et non de sa force.

Nous allons continuer de soutenir les provinces de l'Atlantique. Nous allons y créer des milliers d'emplois. Le chômage a diminué de 3 p. 100. Ce sont de bons programmes, mais les députés d'en face ne veulent pas qu'on parle du taux de succès de 88 p. 100. Ils ne veulent parler que des 12 p. 100 de cas qu'on essaie de remettre sur la bonne voie.

*  *  *

[Français]

L'OFFICE NATIONAL DU FILM

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Neigette-et-la Mitis, BQ): Monsieur le Président, une quinzaine de jeunes cinéastes de Montréal ont lancé un document choc intitulé: «Les dernières minutes du Patrimoine».

Ce court vidéo dénonce avec force l'absence de volonté de l'Office national du film à soutenir le documentaire d'auteur.

La ministre convient-elle qu'en imposant des compressions de 25 p. 100 à l'Office national du film, elle a elle-même présidé aux décisions qui ont réduit la capacité de soutenir le documentaire d'auteur de l'Office national du film?

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Au contraire, monsieur le Président. J'endosse le principe que lorsque des décisions sont prises, elles doivent l'être au niveau de l'Office national du film.

Jamais une politicienne ou un politicien ne doit se mêler de ces décisions.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Neigette-et-la Mitis, BQ): Monsieur le Président, la ministre est directement responsable.

En ayant pris la décision de couper, elle a forcé l'Office national du film à couper. Sans qu'elle intervienne pour aller leur dire: «Faites ça», elle le leur a dit. Il y a quand même des limites.

Qu'entend faire la ministre pour mieux appuyer l'Office national du film et développer de nouveaux talents créateurs dans le domaine cinématographique en leur donnant, entre autres, du budget?

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, on peut être fiers du fait que durant les cinq dernières années, on a augmenté le budget de Patrimoine Canada dans beaucoup de domaines, ce qui est à peu près le contraire de ce qui est fait actuellement au Québec.

C'est pourquoi il y a le mouvement MAL au Québec. Ça fait mal chez Mme Maltais.

*  *  *

[Traduction]

LE SÉNAT

Mme Lynne Yelich (Blackstrap, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la semaine dernière, le sénateur Eric Berntson a perdu son dernier appel et a promis d'abandonner son siège à l'autre endroit. Qu'en est-il de son remplaçant?

Si le premier ministre est conscient qu'il faut que les Canadiens puissent tenir leurs représentants responsables, permettra-t-il aux habitants de la Saskatchewan d'élire leur prochain sénateur?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre a l'obligation de respecter la Constitution du Canada. Le Parti réformiste, maintenant l'Alliance canadienne, s'était prononcé contre le Sénat élu, quand il y a eu un vote à ce sujet à la Chambre. La députée devrait rappeler cela à ses électeurs et s'en souvenir elle-même. Je crois qu'il s'agit d'un fait que nous devrions garder en tête.

Mme Lynne Yelich (Blackstrap, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il n'est pas nécessaire de rouvrir la Constitution ou de tenir des discussions à huis clos pour réformer le Parlement.

La Colombie-Britannique et l'Alberta possèdent des lois sur l'élection de sénateurs. La Saskatchewan serait très heureuse de pouvoir élire ses représentants. Le premier ministre voudrait-il s'engager aujourd'hui à permettre aux Canadiens d'élire leurs propres sénateurs?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, pourquoi la députée soutient-elle qu'il est démocratique qu'une personne soit élue jusqu'à l'âge de 75 ans sans droit de destitution? Ce n'est pas ce que signifie la démocratie pour la plupart des Canadiens ni pour moi-même. Je crois qu'elle doit retourner à sa table de travail.

*  *  *

LES TRANSPORTS

M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports. Le ministre sait que la population locale s'intéresse vivement au projet d'aménagement d'une nouvelle gare de VIA Rail dans l'ouest d'Ottawa. Des rencontres ont eu lieu entre VIA Rail et OC Transpo, afin d'étudier la faisabilité de ce projet dans la partie sud de Nepean.

Le ministre pourrait-il dire à la Chambre où en est rendu ce projet, ce qu'il en pense et si quelque chose pourrait être fait très bientôt?

 

. 1455 + -

L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, le député fait allusion à un excellent projet qu'il préconise depuis plus de dix ans, d'abord comme conseiller municipal de Nepean et maintenant comme député de Nepean—Carleton. Il mérite des félicitations pour les efforts infatigables qu'il déploie au nom de ses électeurs et de ceux qui voyagent par train.

VIA Rail et OC Transpo sont actuellement en pourparlers en vue d'aménager une gare ferroviaire à Barrhaven. J'espère qu'une annonce pourra être faite sous peu. J'ai aussi demandé à VIA Rail d'étudier la faisabilité d'un départ des trains de Montréal d'une nouvelle gare de Barrhaven.

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, à la suite de pressions du Bureau de la concurrence, Air Canada a accepté hier de rétablir ses anciens tarifs sur trois circuits aériens. Toutefois, la plainte déposée par CanJet il y a deux semaines touchait deux autres circuits, dont le corridor principal reliant Toronto et Halifax.

Une seule semaine de rabais abusifs des tarifs peut avoir des conséquences tragiques pour une nouvelle compagnie aérienne, sans parler de ce que deux semaines ou plus peuvent faire. Pourquoi le gouvernement continue-t-il à ne rien faire pendant qu'Air Canada tente d'anéantir la concurrence?

L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais rappeler au député que son parti s'est rallié à tous les autres partis représentés à la Chambre au cours de la dernière législature pour appuyer le projet de loi C-26 portant sur l'établissement de prix abusifs.

En conséquence, la Loi sur la concurrence a été modifiée. Cela fonctionne bien. Je suis persuadé que le commissaire à la concurrence se penchera attentivement sur chacun des cas.

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est une bien faible consolation pour les concurrents, CanJet dans le cas présent. En septembre 1999, CanJet a déposé une plainte pour abus de position dominante auprès du Bureau de la concurrence. Six mois plus tard, la plainte n'a toujours pas été traitée et il pourrait y avoir une protection permanente.

D'un côté, la société Air Canada veut qu'on la protège contre les grosses sociétés aériennes américaines voraces, mais de l'autre, M. Milton n'est pas d'avis que les petites sociétés internes qui commencent ont besoin de protection contre lui et ses transporteurs à rabais. Le ministre est-il prêt à laisser M. Milton gagner sur les deux tableaux?

L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je rappelle au député que le Bureau de la concurrence est indépendant du gouvernement. La Loi sur la concurrence a été modifiée en juin dernier. Le parti du député a travaillé avec tous les autres partis pour faire adopter ces modifications.

Laissons le Bureau de la concurrence faire son travail et voir à ce que l'amélioration perçue dans le milieu aérien au chapitre de la concurrence se poursuive et à ce que les petites sociétés aient une chance de concurrencer Air Canada.

*  *  *

[Français]

LE LAC SAINT-PIERRE

M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Monsieur le Président, la faune et la flore du lac Saint-Pierre est extrêmement riche. Ce plan d'eau a été pollué depuis plusieurs années par l'armée canadienne qui y a tiré plus de 300 000 obus depuis les années 1950.

En 1982, un homme est décédé après avoir découvert un obus. Nous savons que les enfants jouent également avec ces armes. Ces obus représentent un danger pour les pêcheurs commerciaux et sportifs.

Le ministre de la Défense étudie actuellement la possibilité de dépolluer ce plan d'eau. Peut-il nous dire quelles sont les mesures qu'il entend prendre pour assurer à la population un accès sécuritaire au lac Saint-Pierre?

[Traduction]

L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, depuis le début des années 90, nous avons réduit les tirs d'essai dans la région. Nous avons installé une butte d'arrêt au lieu de tirer directement dans le lac. Nous tirons maintenant dans un remblai de manière à éviter de polluer le lac davantage.

Entre-temps, un examen très détaillé est en cours afin de voir ce qu'il faut faire afin d'éliminer la pollution qui existait auparavant et qui a été causée par les munitions tirées dans l'eau. Nous avons changé la pratique. Nous sommes déterminés à dépolluer le lac.

*  *  *

LA SANTÉ

M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, comme les députés le savent, les maladies du coeur sont une cause importante de décès et d'invalidité au Canada. Comme février est le mois du coeur, il convient de demander au secrétaire parlementaire du ministre de la Santé de dire à la Chambre quelles initiatives nouvelles le gouvernement a prises pour encourager la recherche sur ces maladies.

[Français]

M. Yvon Charbonneau (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à remercier mon collègue de Don Valley-Ouest de cette question très importante et très pertinente.

Cela me donne l'occasion d'annoncer la décision du gouvernement canadien d'investir 24,4 millions de dollars dans la recherche sur les maladies du coeur. J'ajoute qu'à ce montant s'ajoute un investissement de 9,2 millions de dollars déjà annoncé en Alberta, il y a quelque temps, pour le domaine particulier des maladies cérébrovasculaires et des accidents cérébrovasculaires.

Ces fonds démontrent l'engagement du gouvernement du Canada à ce qu'il se fasse de la recherche de pointe ici, au Canada, dans ce domaine très important.

*  *  *

 

. 1500 + -

L'IMMIGRATION

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration vient de justifier la présence de M. Amodeo au Canada parce que, dit-elle, ce dernier avait été accepté dans le programme des immigrants investisseurs au Québec.

La réponse de la ministre n'est-elle pas inquiétante quand on sait que, dans le cadre de ce programme, les enquêtes de sécurité ne sont aucunement de la responsabilité du Québec?

Doit-on comprendre qu'elle pensait le contraire et qu'elle se fiait au Québec pour faire, à sa place, ce qui est de sa propre responsabilité?

[Traduction]

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je veux qu'on me comprenne bien. D'après le processus existant de demande du statut d'immigrant reçu, si quelqu'un veut adresser sa demande au Québec, il doit recevoir un certificat de sélection, appelé CSQ, de la part des autorités québécoises.

Le gouvernement fédéral maintient les exigences réglementaires, incluant l'examen de santé et la vérification de sécurité, mais personne n'obtient le statut de résident permanent au Québec à moins d'avoir reçu un CSQ. C'est ce que prévoit l'accord Canada-Québec. C'est ainsi que cela fonctionne.

Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la ministre vient de confirmer que son ministère est responsable des vérifications de sécurité. J'aimerais donc qu'elle nous explique comment quelqu'un figurant sur la liste des 500 personnes les plus recherchées d'Interpol a pu obtenir un visa de visiteur pour le Canada en 1998 et se trouve encore au pays. Comment un tel visa a-t-il été délivré quand on est censé effectuer des vérifications de sécurité?

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, la députée de l'opposition est mal informée, parce que des personnes venant de certains pays, dont l'Italie, la France, des pays d'Europe de l'Ouest et d'ailleurs, arrivent au Canada avec leur passeport seulement, qui est estampillé au port d'entrée. Cela leur tient lieu de visa et elles n'ont pas à en demander un à l'avance. Elles n'ont que l'agent au port d'entrée à convaincre sur le motif de leur séjour au Canada.

C'est différent du statut de résident permanent. Je dirais à la députée d'en face...

Le Président: Je crains que le temps ne soit écoulé. Voilà qui conclut la période des questions aujourd'hui.



AFFAIRES COURANTES

 

. 1505 + -

[Traduction]

LA LOI SUR LA RESPONSABILITÉ CIVILE DE L'ÉTAT ET LE CONTENTIEUX ADMINISTRATIF

 

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Alliance canadienne) demande à présenter le projet de loi C-277, Loi modifiant la Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif.

—Monsieur le Président, c'est avec plaisir et optimisme que je présente à nouveau ce projet de loi aujourd'hui. Il vise à faire en sorte que les détenus qui purgent des peines d'emprisonnement ne puissent poursuivre en justice le gouvernement fédéral ou ses employés, aux termes d'une loi fédérale, pour une perte subie pendant leur peine d'emprisonnement.

S'il est adopté, le projet de loi empêchera les prisonniers d'entreprendre des poursuites farfelues contre le gouvernement fédéral et d'exploiter le régime juridique.

J'exhorte tous les députés à examiner sérieusement le projet de loi et à l'appuyer.

(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

LE CODE CRIMINEL

 

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Alliance canadienne) demande à présenter le projet de loi C-278, Loi modifiant le Code criminel (actes sexuels interdits).

—Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir présenter à nouveau ce projet de loi d'initiative parlementaire. Il vise à faire passer de 14 à 16 ans l'âge légal du consentement à des relations sexuelles. Un adulte commettrait dès lors un délit criminel s'il avait des relations sexuelles avec des enfants de moins de 16 ans.

Le projet de loi a été présenté pour la première fois en 1996, une autre fois en 1997, et encore en 1999.

J'interviens encore une fois à la Chambre et je dois malheureusement en appeler aux valeurs supérieures de chaque député. La préoccupation croissante des Canadiens à l'égard de la pornographie et de la prostitution juvéniles rend encore plus urgente la promulgation de ce projet de loi afin de protéger les jeunes et les plus vulnérables de notre société contre les prédateurs qui les menacent.

Au nom de nos enfants, je demande aux députés d'examiner sérieusement le projet de loi et de l'appuyer.

(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

LOI SUR LA COMMERCIALISATION DE VIA RAIL

 

M. Jim Gouk (Kootenay—Boundary—Okanagan, Alliance canadienne) demande à présenter le projet de loi C-279, Loi concernant la commercialisation de VIA Rail Canada Inc.

—Monsieur le Président, je présente à nouveau ce projet de loi que j'ai présenté lors de la législature précédente. Il traite de divers problèmes de VIA Rail, le principal étant l'utilisation qui est faite de l'argent des contribuables.

VIA Rail reçoit une subvention de 500 000 $ par jour, 365 jours par année, et a récemment dû recevoir 400 millions de dollars en fonds publics pour pouvoir continuer à fonctionner.

Elle fait concurrence au secteur privé. Le secteur privé serait parfaitement en mesure d'exploiter cette entreprise. Pourquoi devrait-on continuer à le faire à même les fonds publics? Le projet de loi mettra fin aux subventions et confiera l'entreprise au secteur privé, qui saura la faire fonctionner sans dépenser l'argent des contribuables.

(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

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LA LOI CANADIENNE SUR LA SANTÉ

 

M. Jim Gouk (Kootenay—Boundary—Okanagan, Alliance canadienne) demande à présenter le projet de loi C-280, Loi modifiant la Loi canadienne sur la santé (conditions de versement).

—Monsieur le Président, ce projet de loi d'initiative parlementaire avait aussi été présenté lors de la précédente législature. Nous avons, au Canada, des employés des services d'intervention d'urgence fort dévoués qui se rendent sur les lieux d'accidents et affrontent toutes sortes de situations d'urgence. Ils peuvent parfois entrer en contact avec des maladies infectieuses ou contagieuses.

Il n'existe aucun protocole officiel d'avertissement qui oblige les intervenants à aviser ces employés de la possibilité qu'une telle maladie puisse leur avoir été transmise et les affecter eux-mêmes ou affecter leurs collègues de travail, leurs familles ou d'autres membres de leurs collectivités. Ce projet de loi instaure un protocole d'avertissement pour que les hôpitaux soient tenus d'aviser ces travailleurs, tout en protégeant la confidentialité des patients eux-mêmes.

 

. 1510 + -

Ces gens qui risquent leur vie pour protéger la vie des autres méritent certainement qu'on leur assure que leur vie aussi est prise en considération.

(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

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LA LOI SUR LA PREUVE AU CANADA

 

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne) demande à présenter le projet de loi C-281, Loi modifiant la Loi sur la preuve au Canada.

—Monsieur le Président, je suis très heureux de présenter ce projet de loi qui dissipera la confusion qui règne depuis la fin de l'an 2000. Que veut dire l'expression 02-04-03? Le 3 avril 2002? Le 4 mars 2002? Le 4 février 2003? Le 2 avril 2003? La liste continue. Il y a six permutations possibles.

Mon projet de loi amènerait les Canadiens à respecter la logique et la norme internationale, c'est-à-dire la séquence suivante: année, mois, jour. Ce ne serait pas une exigence. Le projet de loi tend à modifier la Loi sur la preuve pour dire simplement que, en cas de différend et s'il n'y a aucune indication contraire, c'est la séquence année, mois, jour qui s'appliquera.

(Les motions sont réputées adoptées, et le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

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LOI SUR L'ÉLIMINATION DE LA DOUBLE IMPOSITION DU PROPRIÉTAIRE D'UNE RÉSIDENCE PRINCIPALE

 

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne) propose: Que le projet de loi C-282, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (déduction des impôts fonciers payés sur une résidence principale).

—Monsieur le Président, la description du projet de loi est fort succincte. Il permettrait aux propriétaires de maison de déduire de leur revenu imposable le montant de leurs impôts fonciers. Le thème du projet de loi et sa conséquence sont que les Canadiens n'auraient pas à payer des impôts sur le revenu pour de l'argent qu'ils gagnent simplement pour payer des impôts fonciers.

(Les motions sont réputées adoptées, et le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

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LOI SUR LA COMMISSION DES PRIX DE L'ÉNERGIE

 

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD) demande à présenter le projet de loi C-283, Loi portant constitution de la Commission des prix de l'énergie.

—Monsieur le Président, comme, j'en suis persuadée, la plupart des députés qui siègent ici aujourd'hui le savent, les Canadiens de tout le pays, de toutes les provinces et de tous les territoires sont vraiment préoccupés et même dégoûtés par l'augmentation constante des prix des carburants. Ils croient que le gouvernement devrait intervenir pour veiller à ce que les consommateurs ne se fassent pas exploiter et ne soient pas victimes de pratiques déloyales.

Je pense que la Commission des prix de l'énergie donnerait au gouvernement la possibilité de pouvoir intervenir si les entreprises augmentent les prix tout simplement pour accroître leurs profits encore davantage et non parce qu'elles y sont forcées.

(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

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LE CODE CRIMINEL

 

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD) demande à présenter le projet de loi C-284, Loi modifiant le Code criminel (infractions commises par des personnes morales, administrateurs et dirigeants).

—Monsieur le Président, avant les dernières élections et juste avant les vacances d'été, la Chambre et tous les parlementaires ont souscrit à la présentation par le gouvernement d'une mesure législative pour s'attaquer à la question de la responsabilité criminelle des sociétés.

Pratiquement tous les Canadiens sont au courant de ce qui s'est passé à la mine Westray il y a un certain nombre d'années, lorsque 26 mineurs ont été tués. Il ne fait aucun doute que ces morts étaient attribuables à la négligence des gestionnaires, de la société et des inspecteurs des lieux de travail, ainsi que des gouvernements en général, qui n'ont pas veillé à ce que le milieu de travail soit sûr. On n'a pas suivi des méthodes sûres.

À l'époque, le juge Richard a déclaré que le gouvernement devait présenter une mesure législative pour tenir les sociétés responsables de négligence criminelle. Il a également ajouté que les sociétés et leurs gestionnaires devraient être accusés et tenus responsables devant un tribunal pénal.

Le projet de loi ferait ce que le gouvernement a négligé de faire. Les libéraux ont pris un engagement avant les élections et ils nous ont garanti que cela allait se produire, mais la ministre ne nous a donné aucun signe qu'elle entendait s'attaquer à cette question maintenant. C'est pourquoi ce projet de loi d'initiative parlementaire va une fois de plus donner aux parlementaires la possibilité de se prononcer sur le projet de loi.

(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

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PÉTITIONS

LES DROITS DE L'ENFANT

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, je veux aujourd'hui présenter trois pétitions.

La première exhorte le Parlement à abroger l'article 43 du Code criminel, un article désuet qui n'est rien de moins qu'une approbation légale de la violence contre les enfants et qui est contraire au droit fondamental des enfants à la sécurité de la personne, tel que garanti dans la Charte canadienne des droits et libertés et dans la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant.

LA TOXICOMANIE

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, ma deuxième pétition est signée par des personnes très préoccupées par le coût excessif que doivent payer les individus et nos collectivités en raison du manque de services de traitement et d'intervention adéquats auprès des personnes frappées par une toxicomanie.

Les pétitionnaires exhortent tous les députés du côté gouvernemental à travailler de concert pour assurer la disponibilité de ce que nous appelons un traitement sur demande afin qu'il y ait des ressources suffisantes pour les personnes aux prises avec un problème d'accoutumance, ce qui est une épouvantable situation.

LES ENFANTS VICTIMES DE LA PAUVRETÉ

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, la troisième pétition est signée par des Canadiens très préoccupés par l'augmentation du nombre d'enfants vivant dans la pauvreté au Canada et par le fait que le Parlement n'a pas réussi à s'acquitter de l'obligation qu'il s'était faite en adoptant la proposition présentée en 1989 par M. Ed Broadbent, qui demandait que la Chambre des communes mette fin à la pauvreté infantile avant l'an 2000. La situation empire et les pétitionnaires exhortent le Parlement à dégager des ressources et à s'employer à éliminer la pauvreté infantile au Canada.

LA LOI SUR LE DIVORCE

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition concernant une question très importante pour tous. En cette ère où les divorces se multiplient, nous nous rendons compte que la garde des enfants peut faire l'objet de conflits entre les parents, mais nous oublions que cette question peut aussi toucher les grands-parents.

Dans la pétition que j'ai ici, les pétitionnaires demandent au gouvernement de modifier la Loi sur le divorce de façon à ce que, lorsqu'il y a procédure de divorce, les grands-parents puissent voir leurs petits-enfants. C'est une question très importante et j'espère que le gouvernement la traitera comme telle.

LES SOINS DE SANTÉ

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition signée par un certain nombre de mes électeurs et d'autres habitants de Winnipeg, au Manitoba, qui s'inquiètent de l'état dans lequel se trouve aujourd'hui notre système de soins de santé. Les pétitionnaires demandent au gouvernement de faire de la santé une priorité et de prendre les mesures nécessaires pour préserver notre système de santé public.

Les pétitionnaires estiment que le gouvernement libéral fédéral a ouvert la porte à un système de santé à deux vitesses à l'américaine. Ils aimeraient qu'il redresse la situation et prenne des mesures efficaces pour freiner la tendance à la privatisation et à l'ouverture d'hôpitaux et de cliniques à but lucratif au Canada.

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[Français]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions soient réservées.

Le Président: Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI SUR L'IMMIGRATION ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS

 

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.) propose: Que le projet de loi C-11, Loi concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

—Monsieur le Président, je suis heureuse de présenter à la Chambre, à l'étape de la deuxième lecture, le projet de loi C-11, Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Le déclenchement des élections a évidemment mis un terme à l'étude du précédent projet de loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, le projet de loi C-31 que j'avais présenté à la Chambre au printemps dernier.

Dans l'intervalle, j'ai examiné en détail le contenu des nombreuses discussions qui ont suivi et des nombreuses observations reçues après le dépôt du précédent projet de loi.

 

. 1520 + -

J'ai pu, en particulier, examiner attentivement ce que disaient les Canadiens au sujet du projet de loi, tant sur son orientation générale que sur son contenu et j'ai constaté avec plaisir qu'ils étaient généralement très favorables au précédent projet de loi C-31.

Ils ont cependant exprimé quelques préoccupations, et je suis heureuse de pouvoir dire que j'ai tenu compte de ces préoccupations et des questions qui ont été soulevées. Je crois que le projet de loi C-11 répond aux plus sérieuses d'entre elles. J'y ai intégré un certain nombre de propositions récentes, que je décrirai tout à l'heure. Le projet de loi C-11 s'inspire des mêmes principes et contient les mêmes dispositions que le projet de loi précédent.

Cette importante mesure législative sera grandement utile à l'ensemble du pays. Et cela pour une raison fort simple. En refoulant plus rapidement ceux qui voudraient abuser des règles, nous pourrons accueillir plus aisément les immigrants et les réfugiés dont le Canada aura besoin pour pouvoir continuer de croître et de prospérer dans l'avenir.

Le projet de loi actuel est le fruit de quatre années de consultations. Nous avons consulté nos partenaires constitutionnels dans le domaine de l'immigration, à savoir les provinces et les territoires, et les autres parties intéressées par les questions d'immigration. Ces consultations ont été à la fois substantielles et longues.

Les provinces ont rapidement fait valoir que le Canada ne pourra accroître les niveaux d'immigration globaux, comme le gouvernement s'y est engagé, que si nous sommes disposés à améliorer notre capacité d'absorber et d'intégrer les nouveaux venus. Je le comprends et l'accepte totalement.

Nous avons aussi consulté judicieusement, largement et abondamment de nombreux groupes non gouvernementaux et d'autres organismes offrant des services d'établissement aux immigrants et aux réfugiés. J'ai rencontré des Canadiens, des résidents permanents, des familles qui sont ici depuis des générations et des nouveaux arrivants. Nous avons aussi consulté des dirigeants d'entreprise à propos du besoin de travailleurs qualifiés. Nous avons élaboré des moyens novateurs de faire en sorte que les travailleurs hautement qualifiés en déplacement partout dans le monde considèrent le Canada comme leur destination de choix en raison de nos collectivités, de notre culture et de notre société.

Notre économie a largement bénéficié de l'immigration, par le passé. Les preuves en sont partout. Nous devons continuer à accueillir les nouveaux arrivants afin que le Canada continue de progresser, de prospérer et d'être reconnu dans les années à venir comme le meilleur pays au monde où vivre.

Bien sûr, nous savons que le Canada est de plus en plus en concurrence avec d'autres pays qui tentent d'attirer chez eux les travailleurs les plus brillants à la recherche de possibilités à l'étranger. Cette concurrence ne fera que s'intensifier dans les années à venir à mesure qu'un nombre croissant de pays voudront bénéficier des avantages de l'immigration et vivront les changements démographiques auxquels font face, je le sais, la plupart des pays occidentaux.

Le nouveau siècle appartiendra à ceux qui sauront le mieux développer et accroître leur capital humain collectif. L'économie axée sur le savoir est désormais une réalité. Afin que le Canada puisse concurrencer les autres pays et réussir, nous devons continuer d'attirer des travailleurs qualifiés des quatre coins de la planète, de partager leurs connaissances et leurs compétences et d'établir des liens avec le reste du monde. Il faut pour cela non seulement attirer des personnes compétentes et vaillantes, mais faire venir le plus vite possible les membres de leur famille et les accueillir dans la famille canadienne. Il faut respecter notre fière tradition humanitaire qui commence par notre engagement d'offrir un refuge sûr aux personnes qui ont vraiment besoin de notre protection.

Dans le dernier discours du Trône, le gouvernement a promis de moderniser et de rationaliser les systèmes de l'immigration et de la protection des réfugiés. C'est ce que nous faisons avec le projet de loi C-11, qui simplifie l'actuelle Loi sur l'immigration. Le projet de loi rehausse la sécurité des Canadiens et de la frontière du Canada. Il nous permet d'attirer encore plus les immigrants dont nous avons besoin et il réaffirme notre accueil traditionnel des nouveaux venus.

Bref, il nous donne tout ce dont nous avons besoin pour remplir notre double mandat, à savoir fermer la porte aux personnes qui abusent de notre générosité et qui n'obéissent pas à nos règles et l'ouvrir toute grande aux immigrants et aux réfugiés qui, à l'instar de leurs prédécesseurs, viennent édifier notre magnifique pays.

 

. 1525 + -

Ce projet de loi nous permettra de relever les défis et de tirer parti des énormes possibilités que le nouveau siècle réserve à notre pays.

Le projet de loi C-11 demeure un projet de loi sévère, toutefois, à l'endroit des personnes qui abusent de nos systèmes de l'immigration et de la protection des réfugiés. Il crée des peines sévères pour les passeurs et les trafiquants de personnes, dont les activités sont déplorables. Les coupables seront passibles d'amendes pouvant aller jusqu'à 1 million de dollars et de peines d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à l'emprisonnement à vie. Le projet de loi permettra aussi aux tribunaux d'ordonner la confiscation de l'argent et des biens saisis aux trafiquants.

Le projet de loi clarifie les motifs de détention et les critères d'inadmissibilité au Canada. Il donne aux agents de l'immigration les moyens d'empêcher l'entrée au Canada des criminels, des terroristes, des personnes qui représentent une menace pour la sécurité nationale, des auteurs de violation des droits de la personne, des membres de la criminalité organisée ou d'organisations terroristes.

Le projet de loi C-11 permet de soumettre tous les demandeurs du statut de réfugié à un contrôle sécuritaire préliminaire, de réduire le nombre d'appels accordés aux grands criminels et de suspendre le droit d'appel des personnes accusées d'actes criminels jusqu'à ce que les tribunaux aient statué sur leur cas. C'est ce que veulent les Canadiens et c'est ce que nous avons prévu.

Le projet de loi C-11 simplifie également l'évaluation des demandes. Les demandes seront renvoyées à la Commission d'immigration et du statut de réfugié dans les trois jours ouvrables. En regroupant plusieurs étapes et critères de protection sous le pouvoir de décision unique de la Commission d'immigration et du statut de réfugié, et en combinant l'utilisation accrue de groupes spéciaux à membre unique au processus d'appel interne par écrit fondé sur le mérite, le projet de loi fera en sorte que les demandes du statut de réfugié puissent faire l'objet de décisions plus rapides et plus équitables.

En regroupant les motifs de protection sous l'autorité de la Commission d'immigration et du statut de réfugié, le projet de loi C-11 contribue à maintenir l'application régulière de la loi et à assurer des audiences équitables pour tous les demandeurs du statut de réfugié, tout en réduisant les possibilités d'examen judiciaire prolongé. Là encore, c'est un bon exemple de simplification.

Je précise ici que le projet de loi C-11 n'accroît pas le nombre de motifs de protection. Il regroupe tout simplement plusieurs critères actuels et décisions pertinentes correspondantes en une seule étape. es motifs nécessitant la protection resteront les mêmes que maintenant, conformément aux obligations internationales du Canada en matière de droits humains.

Le projet de loi C-11 renferme également des mesures visant à éliminer le syndrome des demandes à répétition. Les demandeurs expulsés du Canada après avoir obtenu une audience et épuisé tous leurs recours ne pourront plus se présenter devant la Commission de détermination du statut de réfugié s'ils reviennent au Canada pour faire une autre demande. Au contraire, s'ils reviennent au Canada pour demander sa protection six mois plus tard, ils feront l'objet d'une évaluation des risques avant le renvoi pour déterminer si les circonstances de leur demande initiale ont changé. Avant six mois, ils pourront chercher refuge uniquement à nos missions à l'extérieur du Canada.

Le projet de loi C-11 renforcera également l'intégrité du système de l'immigration. Il resserrera les dispositions relatives au parrainage afin que l'on ait la certitude que les parrains des personnes désireuses d'immigrer au Canada sont à la fois en mesure d'assumer les responsabilités financières auxquelles ils s'engagent et disposés à le faire. Ils seront tenus de remplir leurs promesses.

Le projet de loi C-11 améliorera notre capacité de recouvrement des coûts de l'aide sociale en cas de défaut de paiement du parrain. Dans le règlement d'application du projet de loi C-11, nous interdirons de parrainage les personnes qui négligent leurs obligations en matière de pension alimentaire pour conjoint ou enfant, les assistés sociaux et les personnes trouvées coupables de mauvais traitements infligés au conjoint ou à des enfants.

Le projet de loi C-11 crée également une nouvelle catégorie d'inadmissibilité pour ceux qui se rendent coupables de fraude ou de fausses déclarations dans le dossier de demande d'immigration, et crée une nouvelle infraction pour ceux qui, par fraude ou fausses déclarations, aident un individu à obtenir un statut au Canada.

 

. 1530 + -

Pour conserver le statut de résident permanent au Canada, les nouveaux arrivants seront tenus de manifester un attachement raisonnable à notre pays. Le projet de loi C-11 exigerait la présence physique au Canada des nouveaux immigrants pendant au moins deux ans pour chaque période de cinq ans, pour qu'ils puissent conserver leur statut de résident permanent.

Ces changements sont importants pour une raison toute simple. Il s'agit d'une question de respect. D'après les nombreux entretiens que j'ai eus avec des particuliers et des organismes canadiens, je puis assurer à la Chambre que l'on a énormément insisté sur la question. Les Canadiens veulent d'un système basé sur le respect, tant de nos lois que de notre esprit traditionnel d'accueil des nouveaux venus. C'est ce qu'apporterait le projet de loi C-11.

J'ai parlé des mesures destinées à fermer la porte arrière, mais le projet de loi C-11 nous permettrait d'ouvrir encore plus grand la porte du devant. Nous allons améliorer notre aptitude à attirer en territoire canadien des travailleurs plus qualifiés et accélérer la réunification des familles. Le règlement connexe nous permettra de moderniser notre système de sélection des travailleurs immigrants qualifiés. Grâce à ce nouveau système, les immigrants seront sélectionnés en fonction de leur adaptabilité, de leur niveau d'éducation et de formation, de leur aptitudes linguistiques et de leur niveau général d'employabilité.

Dans un marché du travail en rapide évolution, nous devons pouvoir compter sur des gens qui peuvent s'adapter à de nouvelles responsabilités puisque les besoins du marché du travail changent avec le temps. Nous avons besoin de gens prêts à réussir et à contribuer à notre prospérité collective dans l'économie du nouveau siècle.

Le projet de loi C-11 permettrait également d'avoir plus facilement accès à des employés étrangers temporaires hautement spécialisés pour que les entreprises canadiennes puissent continuer de soutenir la concurrence et saisir toutes les occasions de croissance. Bon nombre des travailleurs spécialisés qui viennent au Canada pour une période de temps limitée se voient offrir des poste permanents.

Les règlements d'application du projet de loi C-11 permettraient à ces employés, dans certaines conditions, de faire une demande de droit d'établissement alors qu'ils se trouvent au Canada, tout comme ils permettraient à des étudiants étrangers qui ont obtenu leur diplôme et travaillé au Canada de demander, depuiis le Canada, le droit de s'y établir.

Le projet de loi C-11 reconnaît également que la réunification familiale a toujours été à la base de la politique canadienne d'immigration. Les Canadiens savent que les nouveaux arrivants s'établissent plus rapidement au pays lorsqu'ils peuvent compter sur l'appui de la famille étendue. Le projet de loi C-11 et les règlements qui en découlent permettraient aux époux, aux conjoints de fait et aux enfants à charge de faire une demande d'établissement alors qu'ils se trouvent au Canada, à condition de ne pas s'y trouver illégalement et de respecter certains critères d'admissibilité.

J'ai parlé au début des améliorations que j'ai apportées au projet de loi à la suite des préoccupations qui avaient été soulevées au sujet du projet de loi C-31. Je vais parler brièvement des changements.

Une des principales préoccupations soulevées concernait l'idée d'une loi cadre. Je comprends cette préoccupation, mais à mon avis, cela revient au même, car j'estime qu'une loi cadre reste essentielle pour l'administration efficace du programme d'immigration, notamment si l'on tient compte de l'environnement mondial en évolution dans lequel il fonctionne actuellement et continuerait de fonctionner dans l'avenir. La loi cadre nous donne la souplesse voulue pour apporter des changements par le biais de règlements, lorsque, tout à coup, des circonstances imprévues l'exigent. Je me suis toutefois engagée à ce que tous les principes et politiques clés soient explicitement énoncés dans la loi plutôt que dans les règlements.

Le projet de loi C-11 énonce dans la loi les principes de l'égalité, de la non-discrimination et de l'égalité du français et de l'anglais à titre de langues officielles du Canada. Il contient aussi une disposition reconnaissant explicitement que les parents font partie de la catégorie de la famille. Le projet de loi contient aussi une disposition explicite qui précise que les époux, conjoints de fait et enfants à charge des répondants et les réfugiés réinstallés de l'étranger ainsi que leurs personnes à charge ne verraient pas leur demande d'admission refusée sous prétexte qu'ils constitueraient un fardeau excessif pour nos services médicaux.

Le projet de loi C-11 reconnaît aussi le principe selon lequel les enfants ne devraient être détenus qu'en dernier recours. Il définit clairement ce qu'est un résident permanent, de manière à distinguer les droits des résidents permanents de ceux des autres étrangers.

 

. 1535 + -

On a prévu le rétablissement des audiences pour ceux qui risquent de perdre le statut de résident permanent et clarifié les modalités relatives au dépôt de nouvelles preuves pour ces appels.

Le projet de loi C-11 faciliterait le retour des immigrants admis dont la carte de résident permanent n'est plus valide lorsqu'ils ont été absents du pays pendant moins d'une année.

Nous avons prévu des seuils plus élevés pour les examens tenus au Canada dans les cas de non-admissibilité, et les agents d'immigration devraient désormais avoir un mandat pour procéder à l'arrestation d'un immigrant admis pour toute question reliée à l'immigration.

Avant de refuser l'accès au système de détermination du statut de réfugié à toute personne reconnue coupable d'une infraction criminelle grave à l'extérieur du Canada, le projet de loi exige qu'on obtienne un avis ministériel de danger. Cette disposition constitue une mesure de protection à l'intention de ceux qui auraient pu être reconnus coupables d'accusations fabriquées de toutes pièces pour des motifs politiques.

Le projet de loi précise également notre politique prévoyant que toute personne s'étant vu refuser le statut de réfugié à l'étranger par un agent canadien des visas pourrait tout de même faire une demande de statut de réfugié à partir du Canada.

Enfin, je suis heureuse de dire que le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés pourra observer les audiences de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié et intervenir dans les causes devant la Division d'appel. Je crois que ces améliorations renforcent l'intégrité du projet de loi tout en protégeant les droits des personnes en vertu des systèmes d'immigration et de protection des réfugiés.

Le projet de loi C-11 nous permet une approche équilibrée face à la politique d'immigration et de protection des réfugiés.

Depuis l'adoption initiale de la loi actuelle sur l'immigration, en 1976, le monde s'est transformé considérablement, comme nous en convenons tous. Plus que jamais, les gens migrent pour faire du commerce, du tourisme, des investissements et des études, pour se perfectionner, pour partager leurs connaissances, pour réaliser leurs rêves, pour trouver la sécurité et pour retrouver des membres de leur famille.

Le Canada a profité énormément de ce mouvement universel de migration.

L'adoption rapide du projet de loi C-11 nous permettrait de moderniser nos systèmes d'immigration et de protection des réfugiés. Cette mesure nous permettrait de relever les défis et de tirer parti des occasions que nous réserve l'avenir.

Je donne à la Chambre l'assurance que les règlements venant appuyer le projet de loi C-11 seront élaborés d'une façon tout aussi ouverte et consultative que le présent projet de loi. Cela donnera aux députés, aux principaux intervenants en matière d'immigration et aux Canadiens amplement l'occasion d'exprimer leurs points de vue.

Les questions d'immigration et de protection des réfugiés sont très importantes pour notre pays. Elles représentent beaucoup de valeurs fondamentales que nous partageons. Un processus de réglementation ouvert et transparent permettrait de garantir que les Canadiens appuient les nouvelles règles.

Je garantis également à la Chambre que le projet de loi C-31 reconnaît que l'immigration est un domaine de compétence partagé par les gouvernements fédéral et provinciaux. Dans ce projet de loi, le gouvernement s'engage à continuer de consulter les provinces et territoires au sujet de ces questions et de collaborer avec elles à cet égard.

Le gouvernement est déterminé à appliquer l'entente-cadre sur l'union sociale et reconnaît que l'immigration a des répercussions sur des domaines de compétences provinciales comme les soins de santé, l'éducation et les services sociaux.

L'immigration apporte également au Canada, aux provinces et aux villes d'énormes avantages sur les plans socio-économique et culturel. Il faut mettre ces avantages en balance avec les coûts à court terme. En fait, c'est l'une des raisons pour lesquelles tant de provinces cherchent à l'heure actuelle à attirer plus d'immigrants. Elles savent comme nous que ce sont les immigrants et les réfugiés qui ont bâti notre pays.

Aux termes des nouvelles dispositions du projet de loi C-11, les immigrants et les réfugiés continueraient de participer à l'édification du pays dans l'avenir. Je suis fière de proposer l'adoption et la deuxième lecture du projet de loi C-11.

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat de deuxième lecture du projet de loi C-11, concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger. Nous voici en fait saisis de nouveau du projet de loi C-31 qui était mort au Feuilleton lors du déclenchement des dernières élections générales.

 

. 1540 + -

Comme j'entame aujourd'hui ma première longue intervention en cette 37e législature, j'en profite pour remercier les électeurs de Dauphin—Swan River de m'avoir réélu à la Chambre. Je vous félicite, monsieur le Président, de votre élection à la présidence et j'adresse mes félicitations tardives à tous les députés à la Chambre. Je me réjouis de la nomination des deux porte-parole adjoints qui m'aideront à m'occuper de ce dossier, la nouvelle députée de Blackstrap et le député de Surrey-Centre.

Je vais dire aux téléspectateurs comment j'ai l'intention d'utiliser les 40 minutes à venir dans le débat du projet de loi C-11. Je vais parler de la politique de l'Alliance canadienne en matière d'immigration, expliquer pourquoi l'immigration est l'affaire de tout le monde, examiner les problèmes auxquels nous faisons face actuellement en la matière, rappeler les critiques sévères du vérificateur général et décrire les mesures qui s'imposent pour améliorer le système.

Je commencerai par dire à quel point je me sens honoré de pouvoir prendre la parole à la Chambre en 2001 pour parler d'immigration. Je suis fier non seulement de représenter le Parti de l'Alliance canadienne, mais aussi de dire que je suis moi-même un immigrant.

Mon grand-père était un travailleur chinois du rail qui est arrivé ici à la fin des années 1800. Mon père est arrivé en 1922, un an avant la mise en application de la loi visant à restreindre l'immigration chinoise, qui a été adoptée ici à la Chambre des communes. Cette loi a servi à refuser l'entrée aux immigrants chinois durant 24 ans, avant d'être abrogée en 1947.

J'ai immigré au Canada en 1955, à l'âge de sept ans. À mon avis, mon grand-père n'aurait jamais imaginé que son petit-fils serait un jour à la Chambre des communes en train de débattre un projet de loi sur l'immigration. C'est pour moi un double honneur que de prendre la parole à la Chambre aujourd'hui.

Il est très regrettable que, lors des dernières élections fédérales, une ministre d'État ait fait des remarques désobligeantes à l'égard de l'Alliance canadienne. Il est possible que ces remarques aient été faites dans le feu du combat. Nous agissons tous ainsi à l'occasion. Malheureusement, ces remarques irritent toujours plus de trois millions de Canadiens qui ont voté pour l'Alliance canadienne. J'espère avoir raison lorsque je dis que la ministre ne pensait pas ce qu'elle a dit. Je souhaite seulement qu'elle fera ce qu'il faut pour corriger le problème.

L'Alliance canadienne est en faveur de l'immigration. Je vais lire nos déclarations de principe sur l'immigration qui ont été faites aux dernières élections. L'Alliance canadienne a promis d'accueillir de nouveaux Canadiens, tout en rejetant les criminels. Le Canada est un pays d'immigrants. Nous avons toujours été enrichis par l'arrivée de nouveaux immigrants sur nos côtes. Un gouvernement allianciste maintiendrait le niveau actuel d'immigration. Les immigrants qui possèdent des compétences et une formation avancées auraient plus de facilité à entrer au Canada, et nous veillerions à ce que le processus de réunion des familles réponde vraiment à leurs besoins.

Les Canadiens sont également mécontents de politiques qui ont permis à de dangereux criminels d'entrer au Canada et à des passeurs sans scrupules de faire venir au Canada des migrants illégaux qui font du resquillage et nuisent à l'intégrité du système. La politique d'immigration de l'Alliance canadienne ferait une place aux immigrants légitimes et à leurs familles qui veulent apporter une contribution au Canada, tout en resserrant le système pour ceux qui cherchent à en abuser.

L'immigration est indissociable de l'histoire du Canada. Des immigrants arrivent ici depuis l'époque de Cartier et de Champlain. Le Canada a été construit par des immigrants venus des quatre coins du globe. Nous avons la chance que, après les années 1900, le Canada ait ouvert assez grande la porte à l'immigration.

Il est vrai que notre histoire est jalonnée d'épisodes sombres dont les victimes ont été les autochtones, les Chinois, les Japonais, les Ukrainiens, les juifs et les noirs. Malgré tous ces tristes épisodes de notre histoire, nous nous sommes assez bien tirés d'affaire. Chose certaine, ces 50 dernières années, le Canada est devenu un exemple pour le reste du monde. Notre diversité est un atout, pas une faiblesse. Nous avons montré au monde que des humains venus de tous les coins du monde pouvaient vivre et travailler ensemble.

Notre identité de Canadiens devrait toujours primer notre appartenance à notre pays d'origine. Autrement, le Canada deviendra un assemblage disparate de communautés ethniques, ce qui affaiblira notre sens national. Je suis d'accord avec John Boyko, auteur d'un ouvrage intitulé Last Steps to Freedom:

    L'unité devrait être le but de la diversité, et la diversité ne devrait pas être une fin en soi.

À mon sens, c'est là le maillon faible de l'initiative multiculturelle du Canada.

Je félicite le député de Kitchener—Waterloo de la principale position qu'il a soutenue au cours de la 36e législature pour défendre, au cours de l'étude de la Loi sur la citoyenneté, ceux d'entre nous qui sont des Canadiens par choix. Il ne fait pas de doute que ce député s'exprimera de nouveau lorsque nous discuterons de la citoyenneté canadienne à l'avenir.

Le Canada a besoin d'attirer les meilleurs éléments à l'étranger. Dans l'économie mondialisée d'aujourd'hui, tous les pays se disputent la main-d'oeuvre qualifiée.

 

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La seule solution pour le Canada pour accroître sa population est d'avoir recours à l'immigration. De bonnes politiques d'immigration donneront au pays la possibilité de créer de la richesse. Nous devons mieux suivre les divers groupes pour voir comment ils s'en sortent au Canada, à court et à long termes.

L'Alliance canadienne croit qu'il doit y avoir un équilibre entre l'accès au Canada et la sécurité de notre pays qu'il faut défendre contre les criminels et les terroristes internationaux.

Il faut mettre l'accent sur l'intégration dans la société canadienne des immigrants et des réfugiés. La loi parle d'intégration, mais elle ne précise pas comment on va procéder. Le Canada a eu de nombreuses initiatives d'intégration, à long terme et administrées par le gouvernement. Elles sont à la fois, dans une certaine mesure, une réussite et un échec.

Cependant, étant donné que le nombre de réfugiés et d'immigrants est important, nous devons avoir une approche cohérente pour aider les immigrants à s'intégrer à la société canadienne. Nous savons que la plupart des réfugiés ont de nombreux besoins, notamment linguistiques. Il faut avoir un plan d'action clair pour répondre aux besoins fondamentaux des réfugiés sur le plan linguistique et sur le plan de la formation, de l'éducation et de la formation spécialisée afin qu'ils puissent s'intégrer à tous les secteurs de la vie canadienne.

La population souhaite que les nouveaux arrivants soient répartis dans tout le pays et qu'ils n'aboutissent pas tous à Toronto, Vancouver et Montréal. Toutes les régions du pays ont besoin d'une croissance démographique. Le gouvernement fédéral doit proposer un nouveau programme d'intégration en consultation avec les municipalités et les provinces.

Le secrétaire parlementaire, le député de Gatineau, et moi-même, ainsi que d'autres députés, avons déjeuné avec une délégation danoise pour parler de questions d'immigration. C'est intéressant que le gouvernement danois a mis en place une nouvelle loi sur l'intégration.

La politique danoise d'intégration est basée sur le fait que les immigrants et les réfugiés dans leur ensemble, et surtout les nouveaux arrivants, sont désavantagés sur les plans linguistique et professionnel, ce qui les empêche de participer à l'essor de la société de la même façon que le restant de la population.

La politique danoise était nécessaire pour mettre en oeuvre, tout en respectant le principe de la non-discrimination, des mesures spéciales d'intégration qui visent à garantir que les immigrants et les réfugiés puissent, en fait, participer pleinement à la société, dans le domaine de l'éducation, sur le marché du travail et dans tous les autres domaines.

La loi d'intégration a transféré la responsabilité des mesures d'intégration des nouveaux venus du gouvernement fédéral aux municipalités, car on estimait que ces dernières étaient les mieux placées pour mettre en oeuvre un ensemble complet et coordonné de mesures d'intégration concernant le logement, l'information communautaire, l'éducation, la formation professionnelle et l'introduction au marché du travail.

C'est plein de bon sens. Au Canada, malheureusement, la plupart des immigrants se retrouvent, un an après leur arrivée, dans les grands centres urbains comme Vancouver, Toronto et Montréal. Il sera intéressant de voir les résultats de l'expérience danoise.

L'Alliance canadienne croit que le Canada doit faire sa part pour accueillir les réfugiés. Des réfugiés ne sont pas des immigrants. Ces derniers vont vivre dans un autre pays par choix. Les réfugiés sont forcés de s'enfuir, et ils doivent souvent laisser leurs familles et leurs biens derrière eux.

Quatre-vingt pour cent des réfugiés dans le monde sont des femmes et des enfants. Le Canada devrait appliquer, dans le cadre du processus de détermination du statut de réfugié, l'alinéa Fb) de l'article premier de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés, qui dispose que le statut de réfugié ne devrait pas être accordé aux personnes qui ont commis un acte criminel grave, de nature non politique, à l'extérieur du pays de refuge avant d'être admis dans ce pays. Le Canada ne peut pas se permettre d'accueillir des criminels étrangers, peu importe qu'ils soient immigrants ou réfugiés.

Le gouvernement a qualifié le projet de loi C-11 de document cadre. Ce projet de loi n'est précisément rien de plus qu'un cadre: son contenu est faible. Ce genre de loi habilitante reste beaucoup à désirer. Malheureusement, les règlements sont autorisés par décret et ils ont souvent peu de choses en commun avec la loi elle-même. Des lois habilitantes comme le projet de loi C-11 laissent trop de pouvoirs aux mains du ministre.

Examinons la situation de l'immigration au Canada. Comme le savent les députés, j'ai été nommé porte-parole de l'Alliance canadienne en matière de citoyenneté et d'immigration en août dernier. Depuis, les histoires d'immigration n'ont pas manqué.

La plupart des Canadiens reconnaîtront qu'une refonte sérieuse du système d'immigration canadien s'impose. Le projet de loi C-11 le fera-t-il? Je ne le crois pas. Des histoires d'immigration se produisent presque quotidiennement et elles mettent en évidence les lacunes de notre système.

J'aimerais passer en revue quelques-uns des problèmes qui se sont produits au cours de la dernière année. En août dernier, la Cour suprême a rendu une décision dans une affaire de contrebande d'immigrants en Colombie-Britannique. Cette affaire aurait dû sonner le réveil et faire comprendre au gouvernement fédéral qu'une réorganisation du système d'immigration s'imposait. Le gouvernement fédéral continue de dire que sa loi a du mordant, mais il n'est guère douteux qu'après ce verdict le Canada continuera d'être la cible de choix des passeurs.

Le projet de loi C-11 prévoit une amende de 1 million de dollars, mais la difficulté est de prendre les coupables. L'exécution est le principal problème. Toutes les lois du monde n'amélioreront pas la situation s'il n'y a pas de ressources pour venir à bout du problème. Le personnel mérite des félicitations pour le travail qu'il accomplit en dépit des ressources qui diminuent constamment. Il faut beaucoup de temps pour traiter ceux qui entrent au Canada. Il faut agir rapidement pour déterminer si ces immigrants sont de bonne foi.

 

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Les ressortissants étrangers sans statut ne devraient pas bénéficier de la protection de la Charte canadienne. La nouvelle Loi sur l'immigration élargit la définition de ceux qui peuvent devenir réfugiés au Canada et va bien au-delà de la définition établie par les Nations Unies. Un criminel ne devrait pas être admis comme réfugié au Canada. Cela est prévu dans la convention.

Même si d'autres pays occidentaux s'efforcent pour resserrer leurs lois, le Canada restera la cible la plus facile dans le monde développé. N'oublions pas que c'est le pauvre contribuable qui paie la facture.

Le gouvernement a bien peu appris depuis l'arrivée sur nos côtes l'an dernier de pleins bateaux d'illégaux en provenance de la Chine. Dans son rapport d'avril 2000, le vérificateur général a relevé de graves lacunes dans la gestion et la prestation du service canadien de l'immigration. Ces launes l'amenaient à conclure que l'intégrité du programme était menacée et à se demander si le ministère pouvait traiter les demandes et garantir l'observation de la loi.

Le 28 août dernier, les médias ont fait état d'allégations de corruption au Haut-commissariat du Canada à Hong Kong, au moment où circulaient des rapports selon lesquels des fonctionnaires de l'Immigration acceptaient des cadeaux quand ils étaient en poste à Hong Kong. On rapportait aussi que le représentant de la GRC qui avait dénoncé le scandale risquait d'être congédié. Cela aurait dû suffire à ordonner une enquête par un tiers.

En septembre, le ministère a dû faire face à des problèmes de santé liés aux tests. Après le signalement d'une épidémie de malaria au Québec, le gouvernement aurait dû insister sur l'obligation de soumettre à des tests les réfugiés et les demandeurs se trouvant à l'étranger.

Le vérificateur général a demandé, il y a dix ans, une hausse importante des normes de santé. Le personnel médical qui administre ces tests cruciaux a été réduit, de sorte qu'il y a des épidémies comme celle dont on a entendu parler au Québec.

Selon le rapport d'avril 2000 du vérificateur général, on a mis au jour plusieurs lacunes dans le programme d'immigration du Canada. Le vérificateur a soulevé des questions au sujet des tests normalement utilisés au ministère de l'Immigration et du nombre de médecins chargés du dépistage des maladies infectieuses. Quelque 240 réfugiés d'Afrique centrale, arrivés au Canada en août, avaient été exposés au virus de la malaria. Plusieurs d'entre eux se sont présentés dans les hôpitaux après avoir été reçus dans leurs familles d'accueil à leur arrivée au pays.

Encore en septembre, la ministre a déclaré qu'elle appliquerait la recommandation de Santé Canada visant à faire subir à tous les immigrants le test du VIH et à refuser l'entrée aux porteurs du virus.

La menace du sida n'est pas un nouveau phénomène. Le gouvernement n'a pas protégé la santé des Canadiens en tardant à agir. En 1994, le député de Calgary-Nord-Est avait présenté à la Chambre une motion demandant qu'on procède au dépistage du sida et le gouvernement a rejeté cette motion.

Est-ce là le genre de leadership auquel les Canadiens peuvent faire confiance en ce XXIe siècle?

Il y a cinq ans, 44 médecins assuraient le dépistage des maladies infectieuses. Aujourd'hui, il n'y en a que 22 environ et on s'attend à ce qu'ils traitent plus de 200 000 demandes. Le gouvernement n'a rien fait par rapport à l'énorme charge de travail des médecins du ministère de l'Immigration.

En novembre, le Canada était devenu le lieu de résidence de M. Lai Changxing, arrêté parce qu'on le soupçonnait d'avoir introduit illégalement en Chine des milliards de dollars. On a découvert qu'il habitait frauduleusement au Canada depuis 15 mois.

M. Lai est un exemple probant de ce qui cloche au sein de notre système d'immigration. Voilà un criminel recherché originaire de Chine qui est entré au Canada sans même qu'on vérifie ses antécédents; ce faisant, il a compromis la sécurité des gens de notre pays. S'il est trouvé coupable hors de tout doute raisonnable, il devrait être expulsé et retourné vers son pays d'origine qui n'attend que son retour.

La décision de la Cour suprême sur l'expulsion a vraiment tout détraqué dans cette cause. Un criminel recherché de l'envergure de M. Lai n'aurait jamais dû être admis au Canada. Le seul message que l'on puisse tirer de la décision de la cour, c'est qu'en cas d'infraction à la loi, on peut venir se réfugier ici. C'est pourquoi le Canada est la destination privilégiée des criminels du monde entier. En vertu du système en vigueur, une personne peut revendiquer le statut de réfugié et Immigration Canada lui permettra de rester au Canada, quel que soit son casier judiciaire.

Allons-nous créer une nouvelle catégorie, celle des réfugiés criminels?

Mon collègue, le député de Provencher, ancien procureur général du Manitoba et porte-parole de l'Alliance canadienne pour les questions de justice, a exprimé sa vive désapprobation à l'égard de la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Ministre de la Justice c. Burns et Raffay.

 

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Le député de Provencher a dit que cette décision allait faire du Canada un refuge pour les criminels violents, Canadiens ou autres, fuyant la peine de mort aux États-Unis ou dans d'autres pays. Selon lui, cette décision va faire jurisprudence et le Canada va devenir un sanctuaire pour les meurtriers et autres criminels violents, ce qui va poser un risque pour la sécurité des citoyens respectueux des lois.

Je suis d'accord avec le député de Provencher. À mon avis, si une décision devait être rendue, ce n'était pas par la Cour suprême, mais par cette Chambre. Il ne fait aucun doute que cette décision lie les mains de la ministre de l'Immigration et empêche l'application efficace de la Loi sur l'immigration.

En décembre, les habitants de Hamilton ont été terrifiés lorsqu'il a été annoncé que quelque 1 200 personnes avaient été exposées à une souche mortelle de tuberculose chimio-résistante dont un nouvel immigrant était porteur. C'est là un autre exemple de la qualité du dépistage préalable à l'admission au Canada. Encore là, la toute première priorité du gouvernement devrait être de protéger la vie de ses administrés.

Après la frousse de Hamilton, je me demande si le ministère de l'Immigration a résolu les problèmes liés à la qualité du dépistage des maladies. Dans son rapport d'avril 2000, le vérificateur général recommandait d'améliorer la collaboration entre le ministère de l'Immigration et le ministère de la Santé, de prévoir des ressources suffisantes pour administrer les tests de dépistage et de définir clairement le genre de tests à administrer avant d'autoriser l'admission au Canada.

Dès 1990, le vérificateur général a signalé au ministère de l'Immigration d'importants risques et lacunes du système. Fort peu d'améliorations ont été apportées depuis. Il est temps de prendre les conseils du vérificateur général au sérieux. Il faut dresser la liste des maladies à dépister, tant ici qu'à l'étranger, et prévoir les ressources nécessaires pour employer un nombre suffisant de médecins.

Il faut à tout le moins préciser une norme minimale définitive d'exigences d'ordre médical pour l'admission au Canada, un ensemble de techniques de diagnostic pour chacun des tests administrés et une façon responsable de contrôler les immigrants admis au Canada en cours de traitement.

En ce qui concerne le processus de dépistage des maladies suivi par Immigration Canada avant d'admettre des immigrants et des réfugiés au Canada, il faut se demander en outre: comment le tient-on à jour? Existe-t-il des normes minimales? Comment elles sont appliquées? Y a-t-il un suivi?

Voici d'autres recommandations qu'a présentées le vérificateur général en vue d'améliorer le système. La première portait sur l'établissement d'un système d'examen régulier, afin que la liste des maladies interdites aille de pair avec les problèmes de santé à l'échelle mondiale.

La deuxième portait sur l'établissement des exigences minimales à respecter en matière de santé pour être admis au Canada, examiner ces exigences et veiller à les faire respecter rigoureusement.

La troisième portait sur l'établissement des conditions et des exigences minimales à l'intention des médecins qui compilent ou interprètent les résultats de tests visant à certifier l'admissibilité d'un demandeur.

La quatrième portait sur l'établissement d'une procédure de diagnostic minimale qui doit être achevée avant que l'entrée du demandeur ne soit autorisée, par exemple, tests cutanés de dépistage de la tuberculose, radiographies pulmonaires, tests sanguins.

La dernière portait sur l'établissement des normes et des lignes directrices à respecter pour les arrivants qui sont acceptés pendant qu'ils suivent des traitements.

En avril 2000, le vérificateur général a aussi déclaré ce qui suit, et je cite:

    Nous sommes aussi très préoccupés par le manque de rigueur et d'uniformité de la gestion globale des activités d'évaluation médicale, y compris les pratiques entourant la supervision des médecins locaux désignés qui effectuent à l'étranger les examens médicaux des immigrants éventuels.

Je demande aux députés s'il y a, au chapitre de l'immigration, quelque chose de plus important que les normes de santé. Le moment est peut-être venu d'inclure ces principes fondamentaux dans la loi.

Des statistiques fédérales rendues publiques la semaine dernière ont révélé que le nombre de personnes expulsées est à la hausse et qu'il y a environ 15 000 personnes qui manquent à l'appel et qui font l'objet de mandats. Sur les 8 640 personnes expulsées l'an dernier, 2 000 étaient des criminels violents qui ont dû être escortés personnellement par des agents canadiens parce qu'ils constituaient une menace pour la population. On croit que les 15 000 personnes qui manquent à l'appel ont opté pour la clandestinité et qu'elles se cachent.

Quiconque suit les actualités ne verra là rien d'étonnant. Il se passe rarement une journée sans que les journaux parlent d'immigration. Les Canadiens devraient savoir que nous ne conservons pas de données sur les sorties. Nous ne savons pas combien il y a de ressortissants étrangers au Canada à une date donnée. Même s'ils sont venus au Canada avec un visa, nous ne savons pas s'ils ont quitté le pays à l'expiration de leur visa. Pourquoi donc alors les Canadiens devraient-ils se surprendre du nombre élevé de personnes faisant l'objet d'un mandat?

Le Canada est la destination la plus populaire pour les criminels qui tentent d'échapper à la justice de leur pays. Il ne faudrait pas se surprendre qu'après le récent arrêt de la Cour suprême sur l'expulsion le nombre d'expulsions diminue.

 

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Il semble bien que le Canada deviendra la destination de choix pour les criminels du monde entier. Même le chef de police de Toronto Julian Fantino est d'accord. Voici ce qu'il a dit: «Vous commettez un crime dans un pays, puis vous cherchez un endroit où vous enfuir. Où allez-vous? Au Canada.»

Dans le projet de loi C-11, le gouvernement s'est bien inspiré du projet de loi d'initiative parlementaire C-333, Loi modifiant la Loi sur l'immigration (renvoi des personnes déclarées coupables d'une infraction criminelle grave). Cette mesure a été déposée au cours de la 35e législature par le député de Vancouver-Nord.

J'ai apprécié la fermeté dont la ministre a fait preuve la semaine dernière devant les médias, lorsqu'elle a parlé de déporter les criminels. Malheureusement, il est plus difficile de passer à l'action, surtout aujourd'hui après le jugement de la Cour suprême.

Pas plus tard que vendredi dernier, le quotidien montréalais The Gazette nous apprenait qu'un présumé tueur à gages au service de la mafia italienne avait traversé en toute liberté la frontière canado-américaine alors qu'il était accusé de meurtre en Europe. Le ministère de l'Emploi et de l'Immigration a déclaré que l'homme en question était au courant des accusations dont il faisait l'objet, mais qu'il avait omis d'en faire état lors du renouvellement de son visa, ce qui constitue une violation de la Loi sur l'immigration du Canada.

D'après la presse écrite, le Service canadien du renseignement de sécurité et Interpol n'ont pas échangé d'informations sur ce criminel dangereux. Que se passera-t-il si, lors de l'audience d'expulsion, cet homme prétendait craindre d'être maltraité et craindre pour sa vie s'il était expulsé? Les exemples sont innombrables. Ils tendent tous à prouver une seule et même chose, que le système canadien de l'immigration mérite d'être remanié à fond, ce qui est bien plus qu'une nouvelle loi.

Mêmes les avocats canadiens dénoncent le système de l'immigration en vigueur. Je voudrais citer le numéro d'août-septembre 2000 de la revue The National publiée par l'Association du Barreau canadien. En fait, il y est question de la ministre de l'Immigration. Voici ce qu'en ont dit certains membres du barreau lorsqu'il leur a été demandé d'indiquer les lacunes du système canadien de l'immigration.

Le premier passage que je cite est d'Allen Ruben, de Fredericton, au Nouveau-Brunswick. Il a dit: «Les compressions budgétaires imposées au ministère de l'Immigration ont entraîné la réduction d'un tiers de ses effectifs et de ses ressources financières, causant des retards allant jusqu'à trois ans dans le traitement des demandes d'admission de travailleurs étrangers dont le pays avait besoin d'urgence.»

Le deuxième est d'Isabelle Dongier, de Montréal. Elle a dit: «Les règles en matière d'immigration sont très compliquées et il faut comprendre qu'elles sont interprétées et appliquées de façon très irrégulière. Si vous présentez un dossier à la frontière, vous pouvez faire face à cinq agents différents et obtenir cinq interprétations différentes de la même situation.»

La dernière citation nous vient de Michael Greene de Calgary. Il a dit: «Il n'existe pratiquement aucune règle pour les consultants en immigration peu scrupuleux. Certains d'entre eux sont des avocats qui ont été radiés du tableau de l'ordre et qui abusent d'immigrants vulnérables et peu informés. Il est étonnant de constater qu'un ministère s'occupe si peu des gens avec lesquels il fait affaire, surtout sachant que ces derniers traitent avec des gens qui connaissent très peu nos lois et nos coutumes.»

Notre système d'immigration arrive même à frustrer les avocats. Comme nous le savons tous, le plus fiable critique du gouvernement actuel est le vérificateur général du Canada. Un bonne partie de ce que le vérificateur général disait des dossiers de l'immigration il y a dix ans se retrouve de nouveau dans son rapport d'avril 2000.

Aux fins de compte rendu, je vais lire le communiqué de presse du vérificateur général paru le 11 avril 2000 à Ottawa sous le titre: «Les services d'immigration à l'étranger éprouvent de graves problèmes—Cette situation mérite une attention immédiate»—Chapitre 3 du rapport. Voici le texte:

    Dans son rapport déposé aujourd'hui à la Chambre des communes, le vérificateur général du Canada, Denis Desautels, constate de graves lacunes dans la gestion et l'exécution du volet économique du Programme canadien d'immigration qui vise à recruter des travailleurs qualifiés et des gens d'affaires. Les bureaux d'immigration à l'étranger ne suffisent pas à la tâche, les contrôles visant à protéger la santé et la sécurité des Canadiens sont insuffisants et le Ministère est vulnérable à la fraude et à l'abus. De plus, le Ministère s'expose à des critiques concernant la qualité et l'uniformité de ses décisions.

    «Les immigrants contribuent de façon continue à l'enrichissement de la qualité de notre main d'oeuvre. Les lacunes que nous avons constatées limitent de façon importante la capacité du Canada à profiter pleinement des avantages économiques et sociaux que procure l'immigration; elles compromettent le niveau de protection des Canadiens prévu par la Loi», a déclaré M. Desautels. Il a ajouté qu'il y a lieu de s'interroger sérieusement, à savoir si le Ministère a la capacité requise pour atteindre les niveaux annuels d'immigration établis par le gouvernement.

 

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Nous savons que les niveaux d'immigration ont été fixés pour les deux dernières années entre 200 000 et 225 000. En 1999, environ 190 000 immigrants ont été acceptés au Canada. De ce nombre, 56 p. 100 étaient des immigrants de la composante économique, c'est-à-dire des travailleurs qualifiés, des entrepreneurs, des investisseurs et des travailleurs autonomes.

Voici quelques conclusions du rapport. Premièrement, les critères et le processus choisis ne permettaient pas une sélection rigoureuse des immigrants hautement qualifiés et capables de contribuer à notre économie. Deuxièmement, les demandeurs pouvaient attendre jusqu'à trois ans avant d'obtenir une décision. C'est intolérable. Troisièmement, l'évaluation médicale des immigrants potentiels comportait des lacunes considérables. Les mêmes tests courants sont exigés depuis 40 ans en dépit de l'apparition de nouvelles maladies. Les Canadiens devraient s'inquiéter de leur santé. Quatrièmement, certains immigrants avaient été admis au Canada sans garantie raisonnable qu'ils n'avaient commis aucun crime à l'étranger. Cinquièmement, les contrôles relatifs au revenu, aux formulaires de visa et aux systèmes informatiques dans les bureaux à l'étranger étaient inadéquats.

Le vérificateur général a exhorté le ministère et le gouvernement à intervenir immédiatement pour régler à la fois les questions de nature politique et administrative. Le communiqué en date d'avril 2000 ajoutait:

    «Il est décevant de constater la similitude entre plusieurs des problèmes soulevés aujourd'hui et ceux dont nous avions fait état en 1990, c'est-à-dire, il y a 10 ans», a indiqué M. Desautels. «Les employés des bureaux à l'étranger responsables du traitement des demandes d'immigration sont très inquiets de la situation actuelle et je partage leur inquiétude.»

Comme les députés peuvent le constater, notre système d'immigration a grand besoin d'une réforme générale. Il s'agit donc de savoir comment la mesure à l'étude réussira à remédier à de vieux problèmes qui remontent à 1990. À quel point la ministre sera-t-elle responsable des mesures prises pour remédier à ces problèmes? La responsabilité commence en effet chez la ministre.

Selon le vieux dicton, la critique est aisée, et l'art est difficile. Autrement dit, qu'est-ce que ferait l'Alliance canadienne pour remédier aux problèmes? Je me permets, au nom de l'Alliance canadienne, de présenter quelques solutions. Je commencerai par dire que nous ferons fonctionner le système. Le système d'immigration actuel peut marcher; il y a seulement qu'il est mal administré et sous-financé.

Le ministère fonctionne de concert avec au moins trois autres ministères fédéraux: Santé, Affaires étrangères et Développement des ressources humaines. Plus de coopération et de meilleures communications avec ces autres parties constitueraient un excellent premier pas pour corriger ce qui ne va pas au ministère.

Les membres du personnel à tous les niveaux doivent être mieux formés à remplir leur rôle. Les rôles doivent être normalisés partout au ministère. Les employés qui ont le plus d'expérience en matière de sécurité, par exemple, devraient probablement s'occuper des questions de sécurité. Si la GRC et le SCRS sont mis à contribution pour venir en aide à tous les bureaux d'immigration dans le monde, il faudrait utiliser leur expertise pour établir les risques pour la sécurité. Si la GRC et le SCRS n'utilisent pas leur expertise pour établir les risques pour la sécurité, il est grand temps qu'ils le fassent.

Une réforme du système à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié se fait attendre depuis longtemps; il faudrait commencer par rendre le système plus transparent, moins partisan et plus crédible. Les membres de la CISR devraient être recrutés en fonction de leur mérite, non en fonction de considérations politiques.

Le ministère a besoin de subir une vérification financière complète pour déterminer les secteur de chevauchement et de gaspillage. Il n'y a pas assez de personnel actuellement pour venir à bout du volume de travail. Les dernières coupes budgétaires ont réduit le personnel médical tant au Canada que dans les missions à l'étranger. Curieusement, le vérificateur général a déploré la même chose il y a 10 ans. Il faut instaurer un mécanisme d'évaluation pour déterminer si le système fonctionne comme un tout. Il ne fait aucun doute qu'une meilleure coordination s'impose entre les bureaux situés à l'étranger et ceux qui sont au Canada.

Il faut donner une définition claire de réfugié de bonne foi. Nous devons respecter la convention des Nations Unies, dont nous sommes signataires. À l'heure actuelle, presque tous ceux qui entrent au Canada peuvent revendiquer le statut de réfugié. Bien des années s'écoulent avant que leur cas ne soit examiné et qu'ils ne bénéficient d'une audition. La plupart des Canadiens s'entendent pour dire que les réfugiés ne devraient pas être détenus pendant de longues périodes et estiment que le processus de détermination doit être comprimé.

Les Canadiens veulent un système d'immigration qui protège leurs frontières contre les criminels et les terroristes de ce monde. Il faut examiner notre système de sécurité. Une bonne formation dans la vérification des antécédents criminels et dans l'évaluation des risques devrait être obligatoire pour tous ces agents.

Comme je l'ai illustré tout au long de ce débat, la sécurité pose d'innombrables problèmes. La question qu'on soulève toujours est comment ces indésirables ont-ils pu entrer au Canada? Selon notre recherche, la communication ou le partage de renseignements entre la GRC, le SCRS et d'autres organismes de sécurité internationaux comme Interpol n'existe pratiquement pas. Un cas récent, à Montréal, en est un bon exemple.

 

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Un autre problème dont nous avons été mis au courant, c'est que, parfois, le peu de renseignements qui est partagé n'est pas divulgué au tribunal lorsqu'on fait appel d'une demande. Les agents des visas hésitent donc à rejeter des demandes pour le motif qu'elles sont inadmissibles pour des raisons de sécurité. Il est très difficile de faire la preuve des normes d'inadmissibilité. En outre, il n'existe aucune mesure de dissuasion contre les demandeurs qui présentent sans cesse de fausses demandes, augmentant ainsi leurs chances de déjouer le système. Il faut que les renseignements soient partagés entre la GRC, le SCRS et les agents des visas.

Dans son rapport intitulé Protection des réfugiés et sécurité des frontières: Trouver un juste milieu, le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration a recommandé que le gouvernement du Canada augmente les ressources de Citoyenneté et Immigration Canada, du Service canadien du renseignement de sécurité et de la GRC pour qu'ils puissent faire obstacle à ceux qui font le trafic d'êtres humains et garantir la sûreté et la sécurité du Canada et des Canadiens. Il est peut-être temps que le Canada ait en permanence des agents de la GRC et du SCRS dans nos bureaux à l'étranger.

Nous croyons toutefois qu'une fois qu'on a déterminé qu'un revendicateur a volontairement présenté une fausse demande, ce qui contrevient à la loi, cette personne ne devrait pas pouvoir présenter une nouvelle demande pour entrer au Canada. Si nous prenons notre sécurité au sérieux, la sanction imposée aux menteurs devrait être aussi sévère. Le ministre doit avoir le pouvoir d'expulser un individu ou de lui interdire l'entrée au Canada, en fonction de son passé criminel, violent ou terroriste sans que ce dernier puisse faire appel.

Tout le système de traitement des demandes de statut de réfugié doit être réexaminé. Nous devons traiter les demandes rapidement. Il est inhumain de détenir ou de renfermer des réfugiés pendant de longues périodes comme cela a été le cas sur la côte ouest, lorsque des ressortissants étrangers qui réclamaient le statut de réfugié ont été emprisonnés pendant plus d'un an.

Le processus fonctionnerait mieux si nous nous en tenions à la définition des Nations Unies qui veut qu'un réfugié ne soit pas une personne qui arrive dans un pays par choix, à des fins économiques, mais plutôt parce qu'elle est persécutée à cause de sa race, de sa religion, de ses origines ethniques ou de ses opinions politiques. Je dois dire que 95 p. 100 des revendications du statut de réfugié sont crédibles. Ce sont les 5 p. 100 qui restent qui nous inquiètent et bon nombre des intéressés sont des criminels dont nous n'avons que faire.

Une des façons de traiter ces criminels qui réclament le statut de réfugié consiste à ne pas leur accorder la pleine protection de la Charte tant qu'ils n'ont pas été reconnus comme des réfugiés véritables. Les Canadiens se demandent comment des ressortissants étrangers peuvent bénéficier de la protection complète de la Charte avant même d'avoir été reconnus comme des réfugiés véritables.

Les sanctions imposées à ceux qui abusent du système de revendication du statut de réfugié devraient être sévères pour dissuader à l'avenir toute revendication frauduleuse.

Je voudrais soulever un autre point. Il est peut-être temps que le Canada tienne des données sur les sorties pour que nous sachions qui est au Canada. Autrement, le Canada est un endroit où il est facile de se cacher une fois qu'on est à l'intérieur de ses frontières. Il est peut-être temps de photographier tous ceux qui entrent au Canada.

La ministre doit rendre des comptes au sujet du fonctionnement de son ministère. Les Canadiens en ont assez d'entendre parler quotidiennement aux nouvelles des problèmes d'immigration. Ils voudraient savoir qui est aux commandes. Il y a un consensus selon lequel le système d'immigration au Canada doit être révisé de fond en comble. Le projet de loi C-11 n'est qu'une étape pour ce qui est d'aider à redresser la situation. On attend depuis longtemps que le gouvernement en place propose un projet de loi pour modifier la loi actuelle, qui date de 1976. Comme n'importe quel projet de loi à l'étape de la deuxième lecture, ce projet de loi doit être amendé.

En guise de conclusion, je dirai que l'immigration est l'affaire de tout le monde. Je suis d'avis que la plupart des Canadiens ont un lien avec l'immigration, si ce n'est pas au sein de leur famille, c'est sans contredit dans l'héritage de leurs parents, de leurs grands-parents ou de leurs arrière-grands-parents. Tout le monde sait que l'immigration jouera un rôle capital dans l'avenir de notre pays.

Au comité, l'Alliance canadienne adoptera une approche constructive. Nous allons continuer de tenir le gouvernement responsable de son immobilisme. Nous allons proposer des amendements pour renforcer le projet de loi. Nous allons prêter l'oreille aux Canadiens qui viendront proposer des améliorations. L'immigration est l'affaire de tout le monde. Tous les Canadiens doivent savoir qu'une nouvelle loi sur l'immigration est en voie d'élaboration. Pour obtenir un exemplaire du projet de loi, on devrait s'adresser à son député.

J'invite tous ceux qui suivent nos travaux et tous les Canadiens à communiquer à leur député ou à moi, qui suis le principal porte-parole de l'opposition, leurs préoccupations à l'égard du projet de loi C-11 ainsi que les amendements qu'ils souhaitent.

 

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Le comité permanent parcourra tout le pays, probablement au printemps, pour entendre les Canadiens. On invite toute personne qui ne peut témoigner devant le comité à faire parvenir un mémoire au greffier du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration. Pour comparaître devant le comité permanent, il suffit de communiquer avec son député, moi-même ou le greffier du comité permanent.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir, à titre de porte-parole du Bloc québécois en matière de citoyenneté et d'immigration, d'intervenir à l'étape de la deuxième lecture sur le projet de loi C-11, Loi concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger.

Déposé en première lecture le 21 février dernier, ce projet de loi reprend presque intégralement le projet de loi C-31, déposé en avril 2000, lors de la dernière législature.

Nous reviendrons d'ailleurs plus tard sur les modifications entre la version du projet de loi C-31 et le projet de loi C-11 dont nous débattons aujourd'hui.

La Loi actuelle sur l'immigration date de 1976 et elle a été amendée à une trentaine de reprises. Il est donc important de la modifier en profondeur pour répondre aux besoins des immigrants et des réfugiés du XXIe siècle.

Au début du mois de février, la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration déposait à la Chambre des communes la projection retenue par son ministère en ce qui concerne les niveaux d'immigration prévus au Canada pour 2001 et les prévisions pour 2002.

Un coup d'oeil rapide sur les vingt dernières années révèle qu'en 1980, 150 000 personnes voyaient leur demande d'immigration acceptée. Les cinq années suivantes ont été marquées par une baisse du nombre d'immigrants admis: en 1985, ils étaient moins de 100 000. À partir de 1986, une augmentation se fit sentir jusqu'en 1992, pour atteindre, à ce moment-là, un sommet dépassant largement les 200 000 personnes. Dans les années subséquentes, le nombre décroît jusqu'à moins de 175 000 personnes.

Pour l'année en cours, soit 2001, le ministère prévoit entre 200 000 et 225 000 immigrants et réfugiés, dont près de 18 p. 100 iront au Québec. Pour 2002, les prévisions sont majorées de quelque 10 000 personnes.

Le Canada et le Québec sont des terres d'accueil. L'actuel projet de loi devant nous devrait viser à encadrer cet accueil de façon juste et équitable, de manière à répondre le plus humainement possible aux besoins des nouveaux arrivants, qu'ils soient immigrants ou réfugiés, dans le respect des conventions internationales et des valeurs signifiantes, tant pour la population canadienne que pour la population québécoise.

Avec la libéralisation des échanges commerciaux, l'éclatement des structures politiques comme, par exemple, l'Europe de l'Est, les conflits sérieux en Asie, en Afrique ou en Europe, et l'internationalisation des communications, de plus en plus d'individus seront tentés, sinon obligés de vivre l'aventure du nouveau pays à s'approprier.

Cette nouvelle législation devrait leur ouvrir la porte pour qu'ils contribuent à enrichir la communauté à laquelle ils s'intégreront. Leurs compétences, leurs expériences, leurs qualités personnelles sont autant d'éléments essentiels au développement, tant de l'État canadien que de l'État québécois.

Le Bloc québécois est donc en faveur du principe de ce projet de loi. Nous devrons cependant nous pencher plus en détail sur ce projet de loi, en comité, car il y a des éléments qui doivent changer.

Comme dans le cas de son ancêtre le projet de loi C-31, le projet de loi C-11 a comme fer de lance la sévérité envers les immigrants clandestins. Une bonne partie du projet de loi met l'accent sur la fermeture de la porte aux éventuels immigrants: le renforcement des mesures destinées à contrer les fraudes; les fausses déclarations et les abus; l'interdiction au territoire des criminels et à ceux qui représentent un risque pour la sécurité; et l'aggravation des peines.

De prime abord, ce projet de loi, tel qu'il est présenté, laisse croire que le Canada est envahi par des criminels de tout acabit et que la porte est trop grande ouverte.

Le Bloc québécois ne partage pas cette analyse qui ne peut que renforcer les préjugés envers les réfugiés et les immigrants.

Par ce projet de loi, la ministre cherche notamment à contrer un fort courant de l'opinion publique aux États-Unis qui croit que le Canada est devenu un club-med pour terroristes.

 

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Parmi les mesures visant à décourager la migration clandestine, le projet de loi prévoit l'imposition de lourdes peines, soit des amendes allant jusqu'à un million de dollars, ainsi que la prison à perpétuité pour les passeurs qui font entrer des immigrants au pays et pour ceux qui se livrent au trafic des personnes.

La refonte de la loi, en plus de serrer la vis aux illégaux, vise aussi—et c'est une bonne nouvelle—à désengorger un système qui ne permet pas au Canada d'atteindre ses objectifs, probablement optimistes, de 300 000 nouveaux arrivants par année.

Actuellement, il y a plus de 400 000 personnes au Canada et ailleurs dans le monde qui attendent de savoir si elles pourront venir s'installer au Canada. Le Canada est une destination populaire. Il y a donc un problème de délai et je crois que plusieurs députés de cette Chambre auraient l'embarras du choix pour citer un exemple issu de leur circonscription.

Le besoin d'agir avec plus de célérité dans le processus de détermination du statut de réfugié est au nombre des mesures les plus positives du projet de loi. En effet, la ministre a souligné qu'il faudra dorénavant 72 heures, au lieu de trois mois—c'est vraiment extraordinaire—pour déférer une demande de statut de réfugié à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, laquelle devra rendre sa décision dans un délai allant de six à neuf mois.

La ministre a également rappelé que son projet de loi simplifiera le processus de traitement des demandes des réfugiés, réduisant les délais maximums de cinq ans à deux ans.

De nouvelles mesures seront également mises en place pour moderniser le mode de sélection des travailleurs immigrants qualifiés et des travailleurs temporaires. Il faut préciser que ces mesures ne s'appliqueront pas au Québec, puisqu'en vertu de l'Entente Canada-Québec de 1991, le Québec sélectionne ses propres immigrants économiques.

La sélection des réfugiés et la réunification des familles restent néanmoins de juridiction fédérale. Il serait cependant temps que la loi reconnaisse explicitement la compétence du Québec. À ce chapitre, l'article 10 de l'actuelle loi est bien faible.

Comme signataire de textes internationaux des droits de la personne, le Canada a aussi des obligations en matière des droits des non-citoyens. Le nouveau projet de loi doit tenir compte des normes établies dans ces textes. Malheureusement, et bien qu'il y soit fait référence, le projet de loi n'intègre pas les textes pertinents.

Les conventions internationales sont au nombre de trois. Ainsi, la première, la Convention de 1951 sur les réfugiés, stipule «que le mandat du Haut-Commissariat pour les réfugiés de protéger les réfugiés incombe également aux États partie à la Convention», ce qui est le cas du Canada.

L'instrument fondamental, voire la clé de voûte du système de protection internationale des réfugiés, est le respect du principe du non-refoulement reconnu par les États et consacré à l'article 33, qui précise que: «Aucun des États contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières d'un territoire où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques.»

Le projet de loi actuellement devant la Chambre devrait aussi inclure explicitement comme motif l'orientation sexuelle.

Relativement à la Convention contre la torture, le projet de loi, à l'alinéa 97(1)a), se réfère à cette Convention et prévoit la protection des personnes qui sont menacées de torture, tel que défini à l'article 1 de la Convention. Cependant, le projet de loi ne respecte pas complètement l'article 3 de la Convention qui interdit le refoulement de toute personne vers la torture. En effet, l'actuel projet de loi n'interdit pas de refouler les personnes jugées non admissibles pour motif de grande criminalité et de sécurité.

 

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Quant à la Convention relative aux droits de l'enfant, l'article 3 oblige les gouvernements à faire de l'intérêt supérieur de l'enfant une «considération primordiale» dans toutes les décisions qui le concerne. Le projet de loi C-11 parle de tenir compte de l'intérêt supérieur de l'enfant.

Par ailleurs, le projet de loi prévoit la détention automatique de toute personne qui arrive au Canada dans le cadre d'une opération organisée par des trafiquants. L'ancien projet de loi n'accordait aucun statut particulier au demandeur du statut de réfugié d'âge mineur. Dans le projet de loi C-11, on prévoit que la détention d'un mineur ne se fera qu'en dernier recours.

J'aurais très envie de faire la lecture relative aux droits de l'enfant, mais comme j'ai encore beaucoup à dire, je vais donc passer par-dessus. Les parlementaires intéressés pourront communiquer avec mon bureau et je vais les leur transmettre avec grand plaisir.

Récemment, la Commission interaméricaine des droits de l'homme rendait public un rapport sur le système canadien de reconnaissance du statut de réfugié. Le projet de loi C-11 répond à deux des recommandations de ce rapport en associant l'appel sur le fond pour les revendicateurs de statut à la révision du risque avant renvoi à la décision prise par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

Cependant, il reste beaucoup de recommandations auxquelles le projet de loi ne répond pas du tout, voire aggrave la situation actuelle. Ainsi, par exemple, le rapport demande que la décision sur la recevabilité soit placée sous la compétence de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Le projet de loi élargit les catégories de personnes dont la demande sera déclarée irrecevable, qui n'auront donc, par le fait même, jamais l'occasion d'être entendues par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

Le Bloc québécois s'inquiète particulièrement du fait que le projet de loi prévoit la détention automatique de toute personne qui arrive au Canada dans le cadre d'une opération organisée par des trafiquants.

Le Bloc reprochait au projet de loi C-31 de n'accorder aucun statut particulier au demandeur de statut de réfugié d'âge mineur, et ce, en dépit du fait que le Haut-Commissariat pour les réfugiés a déjà signalé à Immigration Canada qu'il était contraire aux règles internationales d'emprisonner de jeunes réfugiés, sauf exception, et dans ce cas, pour un très court laps de temps.

La ministre semble avoir entendu raison, le projet de loi C-11 prévoyant que la détention de mineurs ne peut se faire qu'en dernier recours. Il reste à définir ce que signifie le «dernier recours».

Outre le cas des immigrants clandestins, le projet de loi prévoit trois motifs principaux de détention, soit le risque de fuite, le danger pour la sécurité publique et la question d'identité. Ces trois motifs se retrouvent déjà dans la loi actuelle. Cependant, à plusieurs égards, le projet de loi devant nous élargit les dispositions relatives à la détention.

En effet, il accorde aux agents d'immigration de nouveaux pouvoirs de détention aux points d'entrée sur la base de la «convenance administrative». Les agents pourront également détenir des gens lorsqu'ils ont des motifs raisonnables de soupçonner leur non-admissibilité pour motif de sécurité ou d'atteinte aux droits de la personne. Or, à cet égard, on peut se demander s'il n'est pas inquiétant d'ajouter de nouveaux motifs de détention fondés sur la convenance et les soupçons. Il nous semble que les motifs reliés à la sécurité publique et au risque de fuite couvrent déjà toutes les situations où la détention est nécessaire.

Le projet de loi élargit également les mesures relatives à la détention pour motif d'identité. Or, toute exigence de pièces d'identité est un obstacle de taille pour nombre de réfugiés. En effet, ces derniers sont souvent obligés de fuir sans leurs documents, car c'est précisément leur identité qui les expose à la persécution.

Actuellement, les détentions pour motif d'identité ne peuvent se faire qu'aux points d'entrée. Avec ce projet de loi, on pourra détenir une personne qui n'établit pas son identité dans le cadre de n'importe quelle procédure prévue par la loi.

 

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Cela signifie, par exemple, que les demandeurs du statut de réfugié pourraient être détenus s'ils n'établissent pas leur identité lors de l'audience sur le statut de réfugié.

Dans le projet de loi C-11, les deux décisions distinctes actuelles, soit la détermination du statut de réfugié et la révision des risques de retour, feront l'objet d'une seule décision par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Pour chaque demande d'asile ainsi que dans le cadre de chaque demande d'examen des risques avant renvoi, la Commission décidera si le requérant est un réfugié au sens de la Convention, si elle est une personne à protéger, ce qui signifie si elle est une personne exposée au risque de torture dans son pays d'origine et, enfin, si elle est membre d'une catégorie de personnes dont le besoin de protection est reconnu par règlement.

Il est à noter que les clauses d'exclusion de la Convention sur les réfugiés s'appliquent aux réfugiés au sens de la Convention ainsi qu'aux personnes à protéger. Ces exclusions visent les criminels, ceux qui ont commis un crime grave de droit commun en dehors du pays d'accueil et toute personne qui s'est rendue coupable d'agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies.

L'unification de la prise de décisions à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié aura sans aucun doute pour effet de rendre le processus plus efficace et plus rapide.

La référence à la Convention contre la torture est nouvelle et importante. Notons cependant que la définition de «personne à protéger», que l'on retrouve dans le projet de loi, n'est pas absolument conforme à la Convention contre la torture qui, à la différence de la Convention sur les réfugiés, ne contient pas de clause d'exclusion. L'article 3 de la Convention contre la torture interdit de refouler toute personne qui risque la torture, et ce, indépendamment de ce que la personne aurait pu faire dans le passé ou pourrait faire éventuellement.

Selon le projet de loi et conformément à la situation actuelle, seules les demandes de statut de réfugié jugées recevables par la citoyenneté et l'immigration pourront être entendues. Cependant, le projet de loi prévoit qu'un contrôle des antécédents judiciaires du demandeur, pouvant mener à la non-recevabilité de la demande, se fera dorénavant dès l'entrée au pays, et non plus à la fin du processus, soit lorsque le demandeur a obtenu son statut de réfugié. Le projet de loi élargit également les catégories de personnes dont les demandes seront jugées irrecevables, ce qui signifie qu'elles ne seront pas référées à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié pour une audience.

Actuellement, les seules demandes irrecevables le sont pour des motifs de criminalité et si la ministre émet un certificat de «danger public». Or, les demandes seront dorénavant jugées irrecevables, si le demandeur a été déclaré coupable au Canada d'un crime punissable d'un emprisonnement maximal d'au moins dix ans et pour lequel un emprisonnement d'au plus deux ans a été infligé. Une personne sera également jugée irrecevable si elle a été déclarée coupable à l'extérieur du Canada d'un crime qui aurait été punissable au Canada d'un emprisonnement maximal d'au moins dix ans.

Il importe de souligner que l'exclusion automatique des personnes déclarées coupables de crimes à l'extérieur du Canada n'est pas sans danger pour les réfugiés. En effet, le système de justice criminelle sert souvent comme mécanisme de persécution. Il n'est pas rare que des personnes victimes de persécution soient condamnées sur la base de fausses accusations fabriquées de toutes pièces pour les rendre coupables de crimes qu'elles n'ont pas commis.

En vertu du projet de loi, les demandes d'asile seront entendues par la Section de la protection des réfugiés. Les demandeurs auront une audience devant un seul commissaire au lieu de deux, comme c'est le cas actuellement. Une décision rendue par la Section de la protection des réfugiés pourra être portée en appel par le demandeur ou la ministre à la nouvelle Section d'appel des réfugiés. Cette section n'aura pas d'audience mais prendra sa décision sur la base de soumission écrite. Nous déplorons également que ce projet de loi n'apporte aucune modification au processus de nomination des commissaires.

 

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Depuis plusieurs années, le Bloc reproche aux libéraux la règle des nominations politiques au sein de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Il apparaît essentiel au Bloc que toute transformation du processus de demande d'asile vise à garantir l'intégrité du système de détermination du statut de réfugié.

Pour ce faire, il est primordial que soit instaurée une procédure transparente de nomination et de renouvellement pour assurer une entière impartialité et un choix fondé sur la compétence et l'expérience professionnelle des candidats, et non, comme c'est souvent le cas actuellement, sur leurs compétences politiques. Comme le projet de loi prévoit que les décisions seront prises par un seul commissaire, il devient encore plus essentiel que les décideurs soient tous d'une compétence de haut niveau.

L'introduction d'un appel sur le fond vient pallier l'une des failles fondamentales du système actuel. L'absence d'un mécanisme d'appel a été critiqué très récemment par la Commission interaméricaine des droits de l'homme dans son rapport sur le système canadien. Notons cependant que l'appel proposé n'offre qu'une protection limitée aux demandeurs de statut, puisqu'il ne se base que sur des soumissions écrites.

Or un pourcentage important des décisions négatives qui sont rendues est fondé sur la crédibilité. Il sera donc extrêmement difficile de contester par écrit de tels constats de non-crédibilité. Par ailleurs, des procédures par écrit posent également problème aux revendicateurs qui n'ont souvent pas d'avocat à cause de l'insuffisance de l'aide juridique.

Le projet de loi n'offre aucune garantie de l'indépendance de la Section d'appel des réfugiés, ni de l'expertise supérieure de ses membres dans le domaine. Si l'appel doit corriger adéquatement les erreurs de la première instance, la Section d'appel devrait manifestement être une instance hiérarchiquement distincte et supérieure.

Il apparaît en effet difficile de garantir l'impartialité ou l'apparence d'impartialité du processus, lorsque les membres de la Section d'appel doivent se prononcer sur les décisions de leurs propres collègues de la section de première instance. Une structure par laquelle les membres de la section sont appelés à se réviser eux-mêmes n'est pas compatible avec un regard critique et ne peut donc, à notre avis, présenter les garanties d'indépendance nécessaires.

Le Bloc québécois regrette donc la rigidité du discours adopté par le gouvernement pour présenter son projet de loi et les annonces publiques qui l'ont accompagné. Par sa façon d'aborder la question, le gouvernement semble chercher à rassurer la droite canadienne en renforçant les préjugés envers les réfugiés et les immigrants. Il suscite ainsi la division, exacerbe les sentiments de xénophobie et de racisme au sein de la société.

Au cours des dernières années, le Bloc québécois a fait valoir à plusieurs reprises que le système canadien de reconnaissance du statut de réfugié devait comporter deux caractéristiques essentielles: il doit être diligent et juste envers la personne qui sollicite l'asile de bon droit et, dissuasif à l'égard des personnes qui engorgent le système par la formulation de demandes non fondées.

La lenteur du processus administratif dans le traitement des demandes entraîne des drames humains inacceptables et place les personnes et les familles dans des situations très difficiles à vivre.

À titre d'exemple, pour le seul bureau de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié à Montréal, le délai de traitement moyen des demandes est de 10 mois. De plus, il y avait à la fin décembre 1999, à Montréal seulement, plus de 7 000 demandeurs d'asile en attente d'une audience, soit le tiers de tous les cas au Canada.

Nous sommes également d'avis que le nouveau projet de loi sur l'immigration ne traduit pas de façon assez explicite la portée réelle de tous les pouvoirs acquis par le Québec en matière d'immigration. Selon l'ancien ministre québécois des Relations avec les citoyens et de l'immigration, M. Robert Perreault:

      [...] il faudra que la loi comporte des engagements fermes à cet égard. Des dispositions devront être ajoutées au projet de loi actuel pour s'assurer, notamment, du respect des pouvoirs du Québec touchant la sélection des travailleurs temporaires ou du maintien d'un programme distinct pour les immigrants investisseurs.

Il faudrait donc que le projet de loi comporte une mesure explicite à cet effet. Outre la question des pouvoirs du Québec, il importe de mentionner que, bien que le projet de loi propose des modifications concernant les demandes de revendicateurs de statut de réfugié, nulle part Ottawa ne s'engage à assumer les frais engagés par sa gestion.

 

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En effet, si le gouvernement fédéral croit à l'efficacité des mesures proposées dans son projet de loi, il devrait pouvoir s'engager à assumer ces coûts, et ce, jusqu'à ce que les personnes en cause aient été reconnues comme réfugiées, aient obtenu la résidence permanente ou jusqu'à ce qu'elles aient quitté le territoire.

En février l'année dernière, le Québec s'est joint à l'Ontario et la Colombie-Britannique pour dénoncer la gestion fédérale du mouvement des demandeurs d'asile, réclamer que des correctifs majeurs soient apportés et que le gouvernement fédéral, seul responsable de tout le processus de reconnaissance, assume tous les coûts des services rendus à ces personnes, soit l'aide sociale, l'aide juridique, l'éducation et ainsi de suite.

Rappelons qu'il en coûte actuellement au Québec plus de 100 millions de dollars par année pour prendre en charge les personnes en attente d'une décision fédérale à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

Enfin, le Bloc québécois se préoccupe particulièrement du fait que de nombreuses règles cruciales seront reléguées aux règlements et non intégrées à la loi. En les soustrayant au droit de regard des parlementaires, le gouvernement ouvre la porte aux modifications des règles suivant son bon plaisir, sous la pression populaire ou face à un mécontentement devant une décision judiciaire.

À l'étape de la deuxième lecture, nous sommes en faveur du principe du projet de loi. Beaucoup de travail reste cependant à faire à l'étape du comité. Nous souhaitons vivement que l'étude en comité permette d'améliorer ce projet de loi pour répondre aux besoins de ceux et celles qui choisissent une nouvelle vie sous de nouveaux cieux et non seulement une estampille automatique pour le gouvernement libéral.

[Traduction]

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Winnipeg-Centre qui fut porte-parole du NPD en matière d'immigration et de citoyenneté au cours de la dernière année. Il a joué un rôle fort important dans la préparation du précurseur de ce projet de loi et il continuera de veiller à ce que le processus aboutisse à la meilleure mesure législative possible.

Je suis très fière d'intervenir aujourd'hui en ma qualité de nouvelle porte-parole du NPD pour l'immigration et la citoyenneté. Nous amorçons à peine le processus et j'ai beaucoup à apprendre. Je suis convaincue que la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, comme les autres collègues à la Chambre, sera indulgente si je me trompe quant aux faits ou si je ne saisis pas parfaitement tous les éléments du dossier. Nous allons travailler ensemble et je compte sur la compréhension et la patience de tous.

Je veux expliquer ce qui me motive et quel point de vue j'apporte au débat. C'est un point de vue que je partage avec le député de Winnipeg-Centre en partie à cause du genre de circonscriptions que nous représentons. Il est juste de dire que Winnipeg-Centre et Winnipeg-Centre-Nord sont probablement deux des régions les plus diversifiées du pays, où le nombre de groupes ethnoculturels est très élevé.

Winnipeg-Centre-Nord est incroyablement diversifiée sur le plan des groupes ethnoculturels qu'on y trouve. Les gens y sont solidement enracinés dans leur milieu multiculturel et la circonscription a toujours accueilli les immigrants de tous les continents. Au fil de l'histoire, elle a reçu en grand nombre d'immigrants ukrainiens, polonais, juifs et allemands. Plus récemment, les immigrants sont venus très nombreux des Philippines, de l'Inde, du Portugal et de bien d'autres pays asiatiques, latino-américains, africains et est-européens.

Ma circonscription abrite de nombreux groupes ethnoculturels, de nombreuses organisations multiculturelles et de nombreux services qui s'occupent de sauvegarder et de célébrer notre patrimoine riche et diversifié.

 

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Ensemble, ce genre d'apports, cette diversité ethnique contribuent à rendre la collectivité très active et dynamique, qui favorise la compréhension des différences et le respect mutuel. Beaucoup d'églises, de synagogues, de temples, de gurdwaras, de groupes philanthropiques et d'associations de bénévoles s'occupent de l'établissement des immigrants, du parrainage des réfugiés et des programmes de lutte contre le racisme. J'attribue une grande valeur à la contribution de ces organisations à ma collectivité et je leur suis reconnaissante de m'avoir aidée à comprendre les grands paramètres des politiques sur la citoyenneté et l'immigration.

Au cours du débat et pendant les séances du comité qui suivront, j'espère être en mesure d'illustrer et d'exposer les valeurs de mes électeurs, qui sont, je crois, les valeurs de tous les Canadiens. J'ai écouté attentivement le porte-parole de l'Alliance canadienne, qui a soigneusement pesé ses mots, et je dirais que s'il est une chose qui nous unit aujourd'hui à la Chambre, c'est que nous sommes tous convaincus de la valeur du multiculturalisme. Nous voulons tous poursuivre la tradition que le Canada s'est donnée dans le monde en étant un pays ouvert à de nouveaux citoyens, qui applique les principes humanitaires dans l'accueil des demandeurs d'asile, des nécessiteux et de ceux qui veulent retrouver des membres de leur famille.

J'apporte aussi dans ce débat une conviction personnelle qui me vient de ma propre expérience. Beaucoup d'entre nous, tous autant que nous sommes, avons des antécédents ethnoculturels multiples. Pour ma part, je suis fière de dire que ma mère est Hollandaise, qu'elle est mariée à un Canadien d'origine ukrainienne et que j'ai moi-même épousé un Mennonite amish. Je le dis parce que cela fait partie de moi et que cela colore ma contribution au présent débat et les précieuses valeurs que j'espère transmettre aux autres députés.

Je le dis aussi parce que cela m'inquiète lorsque des journalistes, voire des députés, laissent entendre que nous devons être vigilants à l'égard des différentes enclaves ethnoculturelles que présente aujourd'hui le Canada parce que celles-ci risquent de créer une mosaïque et de nous faire oublier l'objectif de l'unité nationale.

Je vois les choses d'une autre façon. C'est là que mon collègue, le porte-parole de l'Alliance, et moi-même sommes en désaccord. J'ai tendance à croire que la diversité ethnoculturelle de mes antécédents et de ceux de tellement d'autres Canadiens constitue un atout, un avantage de plus, quelque chose dont il faut se réjouir plutôt que s'inquiéter. En fait, j'estime être deux fois plus riche au plan humain à cause des antécédents que j'ai.

Au lieu de nous inquiéter de la présence d'enclaves ethnoculturelles, nous devrions songer à la valeur de la diversité. Nous devrions ensuite nous assurer que notre politique favorise la célébration de cette diversité de telle sorte que notre pays en soit plus fort et que nous puissions relever des défis que nous ne pourrions pas relever autrement.

Je dis tout cela parce que ma principale préoccupation en ce qui concerne le projet de loi C-11, qui est la même que celle de mon collègue de Winnipeg-Centre relativement au projet de loi C-31, c'est que, dans cette mesure, le gouvernement semble chercher d'abord à interdire l'entrée à certaines personnes et à protéger le Canada du monde extérieur, plutôt qu'à réunifier des familles et à veiller au respect de nos traditions humanitaires.

Je sais que la ministre a apporté des changements. Je sais qu'elle a apporté des améliorations au projet de loi en fonction des propositions faites par des députés et une variété de groupes. Cependant, il existe une préoccupation que nous partageons tous, du moins au sein du caucus néo-démocrate, au sujet du ton du projet de loi et de son objectif qui consiste à protéger le Canada du monde extérieur, au lieu de réunifier les familles qui se trouvent au Canada aujourd'hui.

Cela arrive parfois quand les députés, comme c'est arrivé assez régulièrement avec l'Alliance, ont tendance à ne s'intéresser qu'aux exceptions, à ces quelques exemples où un élément criminel s'introduit dans la société ou des gens introduisent une maladie dans notre pays, plutôt qu'à penser aux avantages que nous procurent les milliers et les milliers d'immigrants et de réfugiés qui ont contribué à faire de ce pays ce qu'il est aujourd'hui.

 

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À cause de cela et des attaques que subit tous les jours la ministre de la part de l'Alliance et d'autres éléments extrémistes de la société aujourd'hui, je crains que nous ne perdions de vue l'important rôle humanitaire que joue le Canada sur la scène mondiale ainsi que la mesure dans laquelle ceux qui ont obtenu refuge ont contribué au développement économique, social et culturel de notre pays.

Monsieur le Président, je ne peux croire que je ne dispose plus que de deux minutes pour exposer mes premières observations sur le projet de loi. Je tiens à dire qu'un certain nombre de problèmes devront être réglés au cours de l'étude du projet de loi. J'espère que le processus d'étude en comité sera ouvert aux nombreux organismes et groupes qui ont beaucoup de connaissances et d'intérêts dans ce domaine.

Le NPD cherchera à obtenir des réponses à certaines questions qui ne sont pas traitées dans le projet de loi. Par exemple, il y a la question des visas de visiteurs, une question dont nous traitons quotidiennement dans nos bureaux de circonscription. Il y a la question de la taxe d'entrée. Bien que levée par le gouvernement dans le cas des réfugiés, elle continue de constituer un obstacle pour les gens qui veulent venir s'établir au Canada.

Nous soulèverons des questions au sujet du programme d'aide à la vie autonome, également au sujet du respect de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés, des documents de voyage et de l'admission de réfugiés au Canada.

Nous soulèverons aussi des questions au sujet de la catégorie de la famille et de l'inclusion des parents dans cette catégorie. Nous avons déjà soulevé cette question et nous appuyons cette modification. Toutefois, nous nous demandons, étant donné que ce pays a besoin d'immigrants, pourquoi le gouvernement ne définit pas la catégorie de la famille de façon plus large, et pourquoi nous ne prenons pas de mesures pour réduire les barrières auxquelles se heurtent les immigrants et les réfugiés ainsi que pour nous assurer que ce pays respecte son passé et est prêt à célébrer la diversité qui fait sa force.

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je prends la parole pour réfuter les allégations de la députée néo-démocrate qui prétend que l'Alliance canadienne fonde son opinion sur les criminels qui sont très peu nombreux. Je tiens à dire à la députée que 15 000 personnes qui font l'objet d'un mandat, ce n'est pas négligeable, loin de là.

En fait, l'Alliance canadienne adopte une position très équilibrée. Nous avons un programme favorable à l'immigration et nous partageons l'avis du vérificateur général qui estime que la santé des Canadiens est très importante et que leurs besoins à ce chapitre doivent être protégés. Voilà pourquoi il faut améliorer le processus de présélection.

Les Canadiens ne veulent pas non plus que des migrants débarquent chez eux, réclament le statut de réfugié et soient incarcérés pendant un an ou plus. Premièrement, c'est injuste pour le demandeur. Deuxièmement, cela coûte cher aux contribuables.

En terminant, je voudrais demander à la députée si elle ne reconnaît pas le bien-fondé des lacunes que le vérificateur général mentionne dans son rapport d'août 2000.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Monsieur le Président, je tiens d'abord à dire que je ne visais pas particulièrement l'Alliance ni le député de Dauphin—Swan River lorsque j'ai parlé des opinions générales qui sont transmises à la ministre et qui, de ce fait, ont certainement une influence sur ses politiques.

Ce que je voulais dire par rapport aux problèmes que l'Alliance a soulevés ici à la Chambre et aux comptes rendus des médias qui concernent les exceptions à la règle, c'est que nous nous retrouvons dans une situation où le gouvernement estime nécessaire d'insister dans le projet de loi sur les éléments de protection et d'application, au lieu de faire en sorte que nos politiques, nos programmes et nos pratiques aident les gens qui désirent venir s'établir au Canada à le faire sans se heurter à des obstacles financiers ou autres.

 

. 1655 + -

Je dis simplement que si nous négligeons de régler ce problème de message négatif et que nous ne cessons pas de mettre constamment l'accent sur l'application de la loi, nous finirons par apporter de l'eau au moulin des racistes et des xénophobes. Or c'est bien la dernière chose que nous voulions. Grâce à ce projet de loi et au processus proposé, nous voulons plutôt éduquer et informer les Canadiens, les sensibiliser à l'utilité de l'immigration et à la nécessité d'augmenter le nombre des immigrés pour accroître la démographie du pays, et leur faire comprendre à quel point nous tenons aux principes et aux traditions de nos politiques antérieures en matière d'immigration et d'accueil de réfugiés.

Il ne fait aucun doute que nous sommes tous préoccupés par le rapport du vérificateur général. Nous voulons tous nous assurer d'avoir en place les meilleures mécanismes pour séparer le bon grain de l'ivraie, mais nous ne pouvons pas laisser cela dominer le débat. Nous ne pouvons pas permettre que la situation apporte de l'eau au moulin de l'intolérance et du racisme dans le Canada d'aujourd'hui.

Nous devons nous concerter pour faire comprendre à la ministre et à son gouvernement qu'ils devraient profiter de ce moment historique pour faire valoir les mérites de l'immigration et s'assurer que tout sera mis en oeuvre pour réduire les obstacles à l'immigration et encourager l'établissement dans notre pays des personnes qui souhaitent y vivre ou y retrouver leur famille et apporter leur contribution à ce pays.

[Français]

Le vice-président: Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera au moment de l'ajournement ce soir, à savoir: l'honorable député de Pictou—Antigonish—Guysborough, La santé; l'honorable député de St. John's-Ouest, Les ressources naturelles; et l'honorable député d'Edmonton-Centre-Est, La défense nationale.

[Traduction]

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, je désire d'abord féliciter la députée de Winnipeg-Nord-Centre de l'excellent premier discours qu'elle a livré dans son rôle de porte-parole du NPD dans un nouveau domaine, soit la citoyenneté et l'immigration.

À mon avis, elle a énoncé avec beaucoup d'exactitude certaines des préoccupations du NPD concernant le projet de loi C-11. Celles-ci ne se limitent pas au contenu, comme elle l'a dit, et ont trait au ton ainsi qu'à l'impression générale qui se dégagent d'un projet de loi se préoccupant presque exclusivement d'exécution de la loi.

En réalité, nous exprimons un point de vue critique depuis des années. Le gouvernement libéral semble céder devant ceux qui sont contre l'immigration, un point c'est tout. Il cède en affectant une part disproportionnée de son énergie et des ressources à des mesures visant à garder les gens hors du pays ou à capturer les personnes susceptibles d'être entrées subrepticement dans le pays, au lieu de proposer le Canada comme terre d'accueil d'un plus grand nombre d'immigrants.

Il est clair que le caucus du NPD est favorable à l'immigration. Nous y voyons un moteur de croissance économique et même, dans des régions comme les circonscriptions de Winnipeg-Centre et de Winnipeg-Nord-Centre, nous estimons que nous ne recevons pas notre juste part de nouveaux venus au pays. En réalité, selon les ratios et proportions, le Manitoba devrait accueillir de 8 000 à 10 000 nouveaux immigrants par année s'il obtenait sa part du nombre total de nouveaux arrivants au Canada. Nous recevons à l'heure actuelle moins de la moitié de cela.

Il est assuré que, dans nos circonscriptions et selon notre vision du monde, nous sommes favorables à la venue d'un plus grand nombre de nouveaux Canadiens. Nous espérons que le gouvernement profitera de la présentation d'un nouveau projet de loi en matière d'immigration pour signifier au monde que le Canada pratique une politique de porte ouverte et qu'il accueille favorablement les nouveaux immigrants ainsi que leur apport éventuel au pays.

En outre, nous n'aimons pas le ton du projet de loi, qui semble être centré sur l'accueil de spécialistes en mesure de combler des postes spécialisés dans des secteurs de pénurie précis. En d'autres termes, c'est une immigration commandée par le marché du travail. Cela dénote un changement important dans notre politique au cours des années. Déjà, nous invitions les immigrants à venir dans notre pays et, qu'importaient leurs aptitudes ou leur niveau d'alphabétisation, ils pouvaient apporter leur contribution le jour même de leur arrivée en agissant comme des consommateurs actifs et en achetant des biens de consommation. Ensuite, ils pouvaient apporter la contribution qu'ils étaient en mesure de faire à mesure qu'ils progressaient avec notre économie.

De nos jours, il est étonnant de constater le nombre d'entrepreneurs, de gens d'affaires et de personnes ayant largement contribué à notre société qui ont des origines aussi humbles. Je pense qu'en nous montrant trop sélectifs, non seulement limitons-nous le nombre total de personnes que nous accueillons, mais nous risquons également d'écarter d'excellents talents. Je suis heureux de rappeler aux gens de l'Alliance canadienne que Einstein était un réfugié. Bien des gens compétents et qualifiés sont aussi des réfugiés. Notre propre gouverneure générale en était une. Des membres de mon personnel en étaient aussi. Personne ne leur a demandé s'ils avaient fait des études postsecondaires avant de les accueillir ici. Ils ont commencé à apporter leur contribution dès leur arrivée au pays.

 

. 1700 + -

Nous espérions que le projet de loi C-11 serait fondamentalement différent de son prédécesseur, le projet de loi C-31. Nous avons entendu des présentations de qualité à l'étape de l'étude en comité, où les lacunes du projet de loi C-31 ont été signalées. La ministre a pris des notes et nous pensions avoir un accord assez général sur au moins certaines questions.

En toute justice, je dois admettre que l'une des choses que nous aurions proposée, à titre d'amendement, a été incorporée dans le nouveau projet de loi, soit de considérer les parents comme faisant partie de la catégorie de la famille. L'unification des familles est l'un des trois grands volets de notre politique d'immigration. Nous sommes certainement heureux de voir cet amendement apporté au projet de loi, et pas seulement au Règlement.

Mais il y a d'autres points qui n'ont pas été traités. Nous avons signalé à maintes reprises les éléments du projet de loi visant à empêcher que toute personne ayant déjà été reconnue coupable d'un crime grave puisse entrer au Canada. Par définition, un crime grave est un crime qui entraîne une peine de 10 années d'emprisonnement, ou une peine pouvant aller jusqu'à 10 ans d'incarcération dont deux années ont déjà été purgées. Une personne qui a été reconnue coupable d'un crime grave dans son pays d'origine ne pourrait jamais être admise au Canada. Nous avons fait remarquer l'anomalie à ce sujet en soutenant qu'une personne comme Nelson Mandela n'aurait pas pu obtenir le droit d'entrer au Canada à titre de réfugié.

Nous devons penser que certaines personnes qui, dans leur pays, sont jugées comme des criminels sont en fait des dissidents politiques qui défendent les droits et les principes que nous serions fiers de détenir dans notre propre pays. Nous devrions tenir compte du fait que de nombreux migrants dans le monde sont de bonnes gens qui ont été forcées de prendre part à des activités qui sont considérées comme criminelles dans leur pays. Il ne fait aucun doute que Nelson Mandela a participé à une insurrection armée destinée à renverser un gouvernement despotique. Ce n'est là qu'un seul exemple.

Les peines accrues et la règle de tolérance zéro en ce qui concerne ceux qui s'adonnent au trafic d'êtres humains peuvent aussi s'avérer injustes. Le Canada est fier de l'épisode de son histoire concernant le chemin de fer clandestin. Qu'avons-nous fait à cette époque, si ce n'est faire passer des gens de la persécution à la liberté? Ceux qui ont caché Anne Frank dans leur grenier auraient été coupables d'une certaine façon d'avoir pris part à du trafic illégal de personnes.

Il nous faut reconnaître qu'il existe des situations politiques dans le monde actuel qui poussent des gens désespérés à prendre des mesures désespérées pour trouver un asile où ils pourront vivre en liberté. Le projet de loi ne contient pas suffisamment de protections, compte tenu des réalités que l'on vit dans bien des endroits au monde.

Nous sommes d'avis qu'on aurait dû inclure dans le projet de loi C-11 des dispositions modifiant le projet de loi C-31 ainsi que d'autres aspects connexes. Bon nombre de témoins ayant comparu devant le comité ont soulevé le fait que les évaluations des risques devraient être menées par les fonctionnaires du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration plutôt que par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Aucune de ces recommandations n'a été incorporée dans le projet de loi C-11, bien qu'il semblait que tous soient d'avis que cela constituerait une amélioration.

Nous voulons également souligner que le projet de loi C-11 aurait dû faire écho aux nombreux témoignages qui ont été déposés voulant que soit précisé que nous observons la Convention des Nations Unies contre la torture selon laquelle nous ne devons jamais renvoyer qui que ce soit dans un endroit où il risquerait de faire face à la torture. Lorsqu'on a questionné les hauts fonctionnaires venus nous présenter leur exposé à l'étape de l'étude en comité et qu'on leur a demandé s'ils pouvaient nous nommer un seul autre pays au monde ayant signé la Convention de l'ONU contre la torture où on pourrait même penser à renvoyer des gens dans des endroits où ils risqueraient de subir des tortures, ils n'ont pas pu répondre. Ils ont affirmé qu'ils ne pouvaient pas penser à un seul endroit. Là encore, nous aurions aimé que le projet de loi C-11 tienne compte au moins de cela.

 

. 1705 + -

Un autre des amendements que nous aurions désirés concernait la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant. Comme le faisait remarquer un député du Bloc québécois dans son discours, nous ne sommes pas à la hauteur des exigences du texte de la convention, aux termes duquel les droits d'un enfant doivent être une considération primordiale dans toute décision mettant son avenir en jeu. Nous disons que la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant doit être une considération principale. N'étant pas avocat, je me demande si ce langage pourrait résister à celui de la convention, qui parle de considération primordiale. Je crois que notre texte est beaucoup plus faible et je me demande pourquoi il faudrait hésiter à employer le langage le plus fort possible en vertu de ce concept louable.

Je voudrais faire écho à ce que disait le député de Winnipeg-Nord-Centre, qui déclarait que nous ne voulons pas céder à la xénophobie dont nous avons été témoins au Canada il y a seulement 18 mois, lorsque des Chinois ont débarqué sur les côtes de la Colombie-Britannique. L'Alliance canadienne avait alors demandé au gouvernement canadien de ne pas donner suite à la décision de la Cour suprême qui avait statué que dès lors qu'un réfugié mettait le pied sur le sol canadien, il devrait avoir droit à une audience.

Des députés de l'Alliance avaient participé à une conférence de presse au cours de laquelle ils avaient demandé qu'on renvoie ces réfugiés d'où ils étaient venus. Pour ces députés, il n'était pas question de dépenser de l'argent pour détenir ces gens ou les nourrir jusqu'à la tenue d'une audience. Ils voulaient qu'on les renvoie chez eux, dans le rafiot qui les avait amenés chez nous, et cela même s'ils risquaient de couler. Des irresponsables au sein du Parti réformiste ou de l'Alliance se sont livrés à ce genre d'hystérie, à laquelle faisait précisément référence le député de Winnipeg-Nord-Centre.

Nous ne voulons pas céder à cette tendance. Nous ne voulons pas de politique inspirée par une hystérie xénophobe entretenue par des gens qui sont tout simplement contre l'immigration.

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté très attentivement les présentations des porte-parole des partis de l'opposition. Je tiens d'abord à dire que, même si je ne suis pas d'accord avec tout ce que j'ai entendu, je reconnais le sérieux des propos, et qu'il me tarde de répondre aux questions qui me seront posées et de me retrouver devant le comité pour l'examen complet de la question.

Le projet de loi C-31, le prédécesseur du projet de loi C-11, a été renvoyé à un comité en juin dernier. Toutefois, comme les députés le savent, il n'a pas fait l'objet de vastes audiences et débats publics en raison du déclenchement des élections. Durant l'été et l'automne, nous avons eu l'occasion d'examiner attentivement les mémoires qui ont été soumis au ministère et à mon cabinet.

Je crois que le projet de loi C-11, dont la Chambre est saisie aujourd'hui, répond bien aux questions et aux préoccupations concernant les mesures législatives initiales en matière d'immigration et de protection des réfugiés.

Après avoir écouté les judicieuses observations faites par les porte-parole de l'opposition, je peux dire que certains des points soulevés sont abordés dans le projet de loi, ou à tout le moins qu'ils ne manqueront pas de l'être dans les dispositions réglementaires qui accompagneront le projet de loi.

Il est important que ceux qui ne sont pas familiers avec la procédure parlementaire sachent que le processus officiel de réglementation ne débute qu'une fois la loi promulguée. J'ai toutefois pris l'engagement, comme je l'avais fait, d'ailleurs, avec le projet de loi précédent, de remettre un document de discussion au comité, de manière à ce que nous puissions commencer les discussions sur le type de règlements envisagés ainsi que sur la manière dont ils peuvent éclairer le débat et les politiques contenues dans cet important cadre législatif.

Je remercie les porte-parole. Ils ont fait des observations très judicieuses. Il me tarde de participer aux débats en comité. Je profite de la période de questions et commentaires pour dire à quel point je leur suis reconnaissante des propos qu'ils ont tenus. Il me tarde vraiment de poursuivre la discussion au sein d'un comité.

M. Pat Martin: Monsieur le Président, je sais gré à la ministre de ses observations et du fait qu'elle est restée pour entendre ce que les porte-parole des partis avaient à dire à propos du projet de loi C-11.

Lorsque nous débattions du projet de loi C-31, le prédécesseur du projet de loi C-11, on nous disait souvent que le règlement d'application de la loi aborderait les problèmes que nous soulevions et que nous ne devrions pas nous inquiéter car nous obtiendrions probablement satisfaction à propos de ces problèmes. Nous n'avons jamais eu l'occasion d'en arriver à cette étape dans le cas du projet de loi C-31. Dans un certain sens, on nous demandait de l'approuver à l'aveuglette car nous n'avions pas de véritable assurance ou garantie que ces problèmes trouveraient une solution.

 

. 1710 + -

Si ce que dit la ministre est exact, et je n'ai aucune raison de ne pas le croire, accepterait-elle de déposer le projet de règlement dès le début de notre étude du projet de loi C-11 de sorte que nous puissions en faire un examen éclairé, contrairement à ce qui s'est passé dans le cas du projet de loi C-31?

M. Inky Mark: Monsieur le Président, je trouve stupéfiant que le député de Winnipeg-Centre passe son temps à attaquer un autre député de l'opposition et continue d'appeler «réformiste» le parti d'opposition officielle. Le nom officiel de notre parti est l'alternative unie.

Des voix: Oh, oh!

M. Inky Mark: Le Parti de l'Alliance canadienne. Je me suis trompé, monsieur le Président.

Je ferai remarquer que, puisque le député siège de ce côté-ci de la Chambre, il serait plus productif qu'il critique ce que fait le gouvernement. C'est pour cela qu'on nous appelle l'opposition.

M. Pat Martin: Monsieur le Président, si j'ai appelé l'opposition officielle le Parti réformiste, c'est qu'à l'époque où les réfugiés de la mer chinois ont abouti sur les côtes de la Colombie-Britannique et où ces conférences de presse ont été tenues pour réclamer qu'on renvoie ces gens dans leurs pays d'origine sans aucune audience, l'Alliance canadienne s'appelait en fait le Parti réformiste. Je connais le nom du parti. Il est gravé dans mon esprit, mais je ne suis pas certain que ce soit le cas du député.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, je suis heureux de participer à ce débat cet après-midi.

À l'instar du porte-parole du NPD, je viens juste d'assumer les responsabilités du dossier de l'immigration au sein de notre parti. Je dois dire qu'il y a beaucoup de choses à apprendre et que j'essaie de façon proactive d'acquérir le plus de connaissances possible sur le sujet depuis quelque temps.

Avant de commencer, je voudrais féliciter la ministre de l'approche qu'elle a adoptée jusqu'à maintenant relativement à ce débat en cherchant à obtenir le point de vue de tous les députés de la Chambre et en les écoutant.

Dans une très large mesure, le Parti conservateur souscrit au projet de loi proposé par le gouvernement, mais il nous incombe aussi, à titre de parti d'opposition, de signaler les endroits où le projet de loi va dans le mauvais sens, où des améliorations s'imposent et, parfois, où des dispositions ne sont peut-être pas vraiment justifiées.

La ministre s'est montrée assez coopérative, mais je veux envoyer un signal que ma collègue néo-démocrate a abordé également. Je mets en garde la ministre et ses fonctionnaires contre la tentation de se laisser entraîner dans le débat entourant l'immigration.

J'ai été très inquiet lorsque j'ai lu le premier communiqué de presse portant sur le projet de loi. On y dit que «la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a déposé aujourd'hui à la Chambre des communes le projet de loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Elle a en même temps réaffirmé son engagement à faire preuve de sévérité à l'égard des criminels et à améliorer les mesures pour attirer les immigrants hautement qualifiés.»

Je ne pense pas que ce soit le fond de la pensée de la ministre. Au Canada, l'immigration est une nécessité. Nous devrions nous montrer accueillants. La diversité humaine devrait nous inspirer plus de confiance et de respect, de façon que nous ne nous laissions pas entraîner dans un débat où on se sent toujours obligé d'employer le mot criminel dans un paragraphe sur l'immigration. Je tiens à souligner cet aspect de la question.

L'objet du projet de loi est d'encadrer efficacement l'immigration tout en veillant à ce que la société canadienne, étant donné ce qu'elle est, demeure un refuge sûr pour ceux qui fuient les persécutions dont ils peuvent être victimes pour une foule de raisons. C'est notre travail, notre responsabilité d'êtres humains, de société responsable.

 

. 1715 + -

Aujourd'hui, je vais parler de domaines dans lesquels le projet de loi propose des mesures qui sont de beaux ajouts à notre politique sur l'immigration et sur la protection des réfugiés. Je voudrais aussi aborder des problèmes qui ne sont pas pris en compte dans le projet de loi et devraient l'être, des problèmes de la situation actuelle que le projet de loi ne règle pas nécessairement.

Je voudrais aussi dire un mot de la question des réfugiés, en l'abordant sous l'angle de la décision Singh, rendue en 1985. Notre société a alors établi pour la première fois que nous devions avoir des commissions de l'immigration et du statut de réfugié pour que les intéressés puissent faire un exposé de vive voix sur des questions qui peuvent avoir un effet sur leur vie. Ce fut un pas dans la bonne direction. Jusque là, je regrette de dire que nous avons très souvent rendu nos décisions uniquement en nous fiant aux dossiers et aux documents. Au bout du compte, les réfugiés, ce sont des êtres humains. C'est ce qui confère à la question un aspect particulier.

Bien sûr, l'immigration est une nécessité démographique pour le Canada. Nous devons continuer à améliorer la structure administrative de cet élément crucial de notre société. L'importance du projet de loi C-11 a augmenté de façon exponentielle en raison notamment du fait que le Canada a besoin de ressources humaines.

La génération de l'après-guerre sait fort bien qu'avant longtemps ses membres vont commencer à prendre massivement leur retraite. Il faudra attirer de nombreux immigrants pour nous attaquer à ce changement démographique dans notre économie et permettre à notre société et notre pays de continuer à croître comme ils le doivent.

Le principe fondamental du programme canadien est qu'il ne fait pas de distinction raciale. Nous avons donc des points d'accès partout dans le monde qui garantissent l'immigration et la protection des réfugiés. C'est le noble but de notre politique égalitaire, mais la réalité administrative est tout autre.

Je ferai remarquer cette réalité à la ministre. Parmi tous les bureaux du Canada à l'étranger, il y en a très peu dans les régions d'où proviennent la majorité de nos immigrants et réfugiés. Il y a des bureaux en Afrique, en Inde, aux Philippines, en Chine et même à Hong Kong. Il y en a dans les grandes villes comme Manille, Bangkok, Beijing, Shanghai et New Delhi. Il y en a dans des villes africaines comme Nairobi ou Pretoria, même si l'Afrique renferme plus de 30 pays.

Comment espérer que des milliers de personnes trouvent le moyen de traverser des frontières pour se rendre aux quelques endroits où il existe un bureau du Canada? Nous ne pouvons pas affirmer que notre système ne discrimine pas en fonction de la couleur si nous ne prenons aucune mesure pour que l'accès à notre système soit beaucoup plus universel. Le Canada doit dès maintenant ouvrir d'autres bureaux et offrir aux immigrants plus de points d'accès. La ministre a besoin de ces ressources pour pouvoir faire cela.

Non seulement nos bureaux sont-ils peu nombreux dans les régions où les immigrants et les réfugiés sont légion, mais ceux qui existent sont submergés. Comme le vérificateur général l'a souligné dans son rapport d'avril 2000:

    Nous avons constaté que les bureaux d'immigration à l'étranger ne suffisent pas à la tâche. Ils éprouvent beaucoup de difficultés à assumer la charge de travail et les responsabilités qui leur sont assignées. Les niveaux d'immigration que le gouvernement a établis ne sont pas respectés et les requérants attendent de plus en plus longtemps avant que leur demande ne soit finalisée.

Je peux rappeler une autre promesse du livre rouge. L'autre jour, nous avons rejeté une promesse du livre rouge, mais je vais essayer de m'en tenir au sujet du présent débat. La promesse du livre rouge en question dit ceci:

    Un nouveau gouvernement libéral portera l'immigration au Canada à un niveau annuel se rapprochant de 1% de la population et s'assurera que les familles ont suffisamment de ressources pour bien s'établir au Canada.

J'espère que la ministre reconnais la faveur que je lui fais en présentant ce discours. La pression politique qu'elle subit en ce moment indique nettement qu'elle ne dispose pas, ni à l'étranger ni au pays, des ressources financières nécessaires pour remplir son mandat tel que le voulait et tel que l'avait décrit le Parti libéral du Canada. Le Parti progressiste conservateur du Canada est toujours disposé à aider le Parti libéral et à lui montrer la voie, comme il l'a fait pour le libre-échange et d'autres initiatives semblables.

 

. 1720 + -

Les derniers chiffres indiquent qu'environ 225 000 immigrants ou réfugiés sont arrivés au Canada en 2000, et une légère hausse est prévue pour l'année suivante.

Le vérificateur général a également fait état d'une lacune, dont il convient de parler. Son rapport indique ce qui suit:

      ...des faiblesses importantes dans la gestion des évaluations médicales des immigrants éventuels. Depuis notre dernière vérification en 1990, le Ministère et Santé Canada ont été incapables de prendre position sur la question suivante, à savoir s'il est nécessaire de modifier les normes en matière d'examens médicaux, lesquelles servent à déterminer si un requérant représente un danger pour la santé et la sécurité publiques ou pourrait engendrer un fardeau excessif pour le système de soins de santé.

Dans le cadre du débat, nous devrons aborder cette question, afin de voir quelles maladies devraient faire l'objet de tests de dépistage. Il est impératif que nous examinions la question dans le contexte de l'année 2001, alors que nous appliquons encore un cadre vieux d'un quart de siècle.

Je soulève la question suivante parce que je sais qu'elle va mettre le gouvernement mal à l'aise. Le Parti progressiste conservateur et d'autres partis de l'opposition considèrent la taxe d'entrée de 975 $ appliquée par le gouvernement comme une mesure radicale. Je déteste l'expression, mais qu'on le veule ou non, il s'agit d'un impôt de capitation à l'endroit des nouveaux Canadiens. S'il s'agissait de frais administratif, ce montant de 975 $ figurerait dans un compte distinct. Il serait utilisé comme compte de service pour la formation linguistique et autres formes d'aide apportée aux immigrants. Si le montant de la taxe est versé dans le Trésor et ne figure pas dans un compte distinct, par définition, c'est un impôt par capitation.

Les titres de compétence sont une autre question dont j'aimerais parler. Je dois cependant reconnaître, en toute franchise, que cette question n'est pas dans la portée du projet de loi C-11. Je félicite le gouvernement pour l'approche qu'il a adoptée à cet égard. Il a remplacé l'ancien critère, la profession, qui était utilisé pour attirer des immigrants économiques, par le critère de la compétence. Il faut que les compétences soient transférables dans le cadre d'une économie moderne. Il s'agit là d'un pas dans la bonne direction.

Je demanderais à la ministre de collaborer avec la ministre du Travail, la ministre du Développement des ressources humaines, ainsi qu'avec les provinces, pour veiller à ce que les titres de compétences des ingénieurs, des professionnels de la santé ou d'autres membres de groupes professionnels puissent être intégrés dans l'économie canadienne. Ainsi, les immigrants seront mieux en mesure d'avoir un plus grand impact dès le début. Ils pourront contribuer à la croissance de notre grand pays.

Je voudrais soulever une préoccupation qu'a le Parti progressiste conservateur au sujet de l'alinéa 36(3)b, à la Section 4 du projet de loi, qui dit que «la déclaration de culpabilité n'emporte pas interdiction de territoire en cas de verdict d'acquittement». Comment peut-on savoir s'il s'agit d'un acquittement valable? Qu'en est-il des crimes avec violence? Qu'en est-il des cas où une personne a été acquittée, au sein d'un quelconque régime, pour avoir commis des actes persistants et répétés de violence conjugale ou un crime de ce genre?

De toute évidence, la ministre aurait la souplesse et le pouvoir voulus pour rejeter ce cas, car elle pourrait concevoir que la personne risque d'être violente et de présenter un danger pour la société canadienne.

 

. 1725 + -

Pendant l'étude du projet de loi en comité, j'aimerais qu'on puisse y apporter un amendement ou une disposition à l'égard de l'acquittement. Si une personne a été acquittée d'un crime grave ou d'un crime avec violence, elle devrait être assujettie à un examen plus approfondi que celui qui est prévu dans le projet de loi. La ministre devrait examiner cette possibilité au moment où nous débattons cet aspect du projet de loi.

Une autre disposition qui m'inquiète, même si je crois que le gouvernement a raison dans son approche, c'est celle prévoyant qu'un étranger, autre qu'un résident permanent, soit interdit de territoire pour inadmissibilité familiale. Je veux parler du cas où un individu a menti ou déformé les faits d'une manière quelconque et est renvoyé dans son pays d'origine après s'être vu interdit de territoire.

Voyons ce cas. En vertu du projet de loi que nous examinons, les enfants ou le conjoint de l'individu en question seraient également interdits de territoire. Prenons le cas d'une personne de 20 ans qui est au Canada depuis un certain temps, que par la suite, nous découvrons que l'un de ses parents n'aurait pas dû se voir accorder l'entrée au Canada. Cette personne de 20 ans pourrait être renvoyée dans son pays d'origine. Cette personne aurait pu vivre toute sa vie au Canada. Nous nous inquiétons de ce lien possible. Nous estimons que c'est injuste.

Il faut reconnaître que ce projet de loi laisse moins de place aux règlements que son prédécesseur, le projet de loi C-31. Il laisse pas mal de liberté à la ministre sur le plan législatif. Nous aimerions en savoir plus sur le régime de réglementation avant d'appuyer aveuglément ce projet de loi. La ministre a dit qu'elle nous fournirait des détails à ce sujet. Nous la prendrons au mot et travaillerons parallèlement sur le Règlement et le projet de loi. C'est un pas dans la bonne direction.

Nous applaudissons les initiatives que le gouvernement a prises pour mettre fin aux réclamations multiples, obligeant les ressortissants étrangers autres que les résidents permanents à répondre franchement à toutes les questions qu'on leur pose et à produire tous les documents que l'agent a raison d'exiger. Cette initiative, notamment, mérite aussi des félicitations.

Une autre disposition du projet de loi qu'appuie fermement le Parti progressiste conservateur est la modernisation du statut des partenaires de même sexe. C'est un pas dans la bonne direction dans le contexte de la société moderne, ouverte et tolérante que nous avons au Canada.

Le projet de loi C-11 établit aussi qu'une personne est inadmissible si elle ment ou omet de fournir de l'information, si elle commet une infraction visée par la Loi sur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre, et si elle est reconnue coupable, à l'extérieur du Canada, d'une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction punissable d'un emprisonnement maximal d'au moins dix ans. Il s'en trouvera peut-être pour trouver cela plutôt draconien. Au bout du compte, si une personne est reconnue coupable d'une telle infraction criminelle, il est nettement du ressort du gouvernement fédéral de prendre les mesures qui s'imposent pour l'expulser immédiatement.

*  *  *

 

. 1730 + -

ARTICLE NO 2 DES AFFAIRES ÉMANANT DU GOUVERNEMENT

AVIS DE MOTION DE CLÔTURE

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 57 du Règlement, je voudrais donner avis que, en ce qui a trait à l'étude de la motion sous la rubrique des Ordres émanant du gouvernement, au no 2 des Affaires émanant du gouvernement, à la prochaine séance de la Chambre, je proposerai que le débat ne soit plus ajourné.

*  *  *

LA LOI SUR L'IMMIGRATION

 

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-11, Loi concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, comme je le disais en ce qui concerne ces très rares cas d'exceptions, les situations qui ne se produisent pas tous les jours, contrairement à ce qu'a dit notre collègue de l'Alliance dans son discours, il est manifestement de la compétence du gouvernement du Canada d'adopter des initiatives lorsqu'il y a lieu.

Ce projet de loi comprend également des mesures de sauvegarde. On a mentionné le cas de Nelson Mandela. Le gouvernement du Canada se préoccuperait manifestement d'accusations politiques de ce genre, fabriquées de toutes pièces. Il existe assez de latitude ministérielle pour traiter de tels cas.

Je tiens à féliciter le gouvernement pour sa façon d'aborder le trafic d'êtres humains et les gens qui profitent de semblable initiative. À mon avis, le gouvernement a fait un pas dans la bonne direction en ce qui concerne l'éradication de ces actions tout à fait inacceptables.

En conclusion, le Parti progressiste conservateur appuiera le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture, son appui aux étapes du rapport et de la troisième lecture étant fonction de sa capacité d'améliorer le projet de loi et de veiller à ce qu'on adopte la meilleure mesure législative qui soit pour les Canadiens.

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'applaudis à la demande du député de Fundy—Royal de supprimer la taxe d'entrée. Les députés de l'Alliance sont du même avis.

J'espère que notre pays aura tiré des enseignements de notre histoire centenaire, car il s'agit bien de cela. Comme le député de Fundy—Royal l'a dit dans son discours, l'argent est versé au trésor public et la dernière chose dont un nouveau Canadien ait besoin, c'est bien d'un nouvel impôt qu'il est incapable de payer, même si, dans les circonstances actuelles, le gouvernement lui prêtera l'argent pour payer la taxe. Cela n'a aucun sens.

On estime que 150 millions de personnes se déplacent dans le monde. Il ne fait pas de doute que le Canada constitue une importante destination. Quelle est la position du parti du député quant au nombre d'immigrants que nous devrions accepter dans notre pays?

M. John Herron: Monsieur le Président, l'immigration dans notre pays est une nécessité économique. Les données que nous possédons actuellement et une étude universitaire montrent clairement que le nombre de personnes que nous acceptons est carrément trop faible.

Le Parti libéral du Canada a fixé le minimum à 1 p. 100 de la population canadienne. Je pense que nous devons nous employer plus énergiquement à atteindre cet objectif, mais je pense que le fait de fixer un objectif peut aussi avoir un effet négatif. Quoi qu'il en soit, nous pouvons amplement accroître les chiffres actuels et nous devons reconnaître ainsi la nécessité économique que constitue l'immigration.

Pour être franc avec le député de l'Alliance, je n'ai pas de chiffres précis en tête. Nous serions à l'aise avec un niveau supérieur à celui fixé par le gouvernement, soit 1 p. 100 de notre population.

 

. 1735 + -

Je pense que le député sera d'accord pour dire qu'il faut une coopération accrue avec les provinces, de manière à ce que toutes les régions de notre pays accueillent leur juste part de néo-Canadiens, et non pas seulement les centres urbains.

Je tiens à dire au député de l'Alliance que nous rendons directement service à la ministre en dénonçant la taxe d'entrée. S'il ne s'agit pas d'une taxe d'entrée, alors ces fonds devraient relever directement de son ministère. Si ce n'est pas une taxe d'entrée, s'il s'agissait de frais administratifs supplémentaires, ils relèveraient de son ministère.

Cela ne satisfait ni le Parti progressiste conservateur ni l'Alliance canadienne, je crois. Nous préférerions plutôt éliminer carrément les frais de 975 $. Tant que cela n'est pas au moins versé dans un compte distinct du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, c'est une taxe d'entrée.

M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est au nom de la population de Surrey-Centre que je prends part au débat sur le projet de loi C-11, Loi concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger.

Le projet de loi a pour objet de remplacer la Loi sur l'immigration de 1976. Il prend en compte les divers aspects de la loi en vigueur, et vise à les renforcer. Bien que l'intention du projet de loi soit bonne au départ, notre analyse révèle que le résultat final ne sera pas celui escompté. Notre principal porte-parole en matière d'immigration nous l'a expliqué tout à l'heure avec beaucoup d'éloquence.

Mais avant de procéder à l'analyse approfondie de ce discours, je tiens à dire à la Chambre et aux Canadiens qui nous écoutent que je suis moi-même un immigrant de date récente.

Comme moi, l'Alliance canadienne respecte la diversité multiculturelle de ce pays. Nous reconnaissons également la contribution des immigrants à la société canadienne. En fait, le Canada est un pays d'immigrants.

Contrairement à ce qu'ont laissé entendre certains députés pendant le débat, nos politiques sont favorables à l'immigration. Je rappelle à la Chambre qu'il y a deux ou trois ans, j'ai présenté au comité de l'immigration une motion proposant d'abolir cette mesure discriminatoire qu'est la taxe d'entrée. Les ministériels siégeant à ce comité s'y sont opposés. Le gouvernement a aboli la taxe d'entrée dans le cas des réfugiés. Mais cette taxe d'entrée discriminatoire continue d'être exigée des immigrants. Voilà qui prouve que les alliancistes et moi savons, quand c'est nécessaire, donner notre appui aux mesures utiles.

Je suis intervenu à quelques reprises au sujet du projet de loi C-31, probablement à toutes les étapes. Dans mon premier discours, il y a trois ans, j'avais déclaré qu'il fallait tenir grandes ouvertes aux immigrants les portes d'entrée, tout en les surveillant de près. J'ai également précisé que nous devrions fermer les portes d'en arrière, les fenêtres et tous les endroits par où l'on peut s'introduire de façon détournée.

Aujourd'hui, la ministre a utilisé mon analogie. Elle a déclaré à la Chambre qu'elle entendait ouvrir les portes d'en avant et fermer les portes d'en arrière. Cependant, je crois qu'elle a laissé passer une autre occasion de corriger la loi. Elle n'a ni ouvert les portes d'en avant ni fermé les portes d'en arrière.

Je vais vous dire pourquoi j'affirme cela. La ministre a installé une troisième porte, une porte tournante. Ceux qui passent par la porte d'en arrière se retrouvent pris dans une porte tournante. Les immigrants éventuels qui essaient d'entrer au Canada par la porte d'en avant sont également pris dans cette porte tournante, au même titre que leurs répondants. Il y a des retards inutiles. On harcèle les gens pour des motifs médicaux notamment et pour toutes sortes d'autres raisons.

 

. 1740 + -

La ministre n'a réussi ni à ouvrir la porte d'en avant ni à fermer la porte d'en arrière avec son projet de loi, mais elle a installé une porte tournante qui va causer d'autres problèmes.

Je voudrais parler de l'approche que nous devrions utiliser dans la loi sur l'immigration. Nous avons besoin d'un système de traitement des demandes d'immigration plus rapide et plus équitable également. Il doit être ouvert à l'égard des nouveaux arrivants et s'attaquer également aux abus du système. Nous avons besoin d'un système qui reflète clairement nos valeurs sociales et humanitaires, mais qui tient compte comme il se doit des intérêts économiques du Canada. Nous avons donc besoin d'une mesure législative équilibrée en ce qui concerne les immigrants et les réfugiés pour répondre à nos besoins d'immigration.

Durant la fin de semaine, au cours des consultations qui ont eu lieu à Ottawa dans le cadre de la Conférence mondiale contre le racisme, le groupe sur l'immigration et les réfugiés s'est dit extrêmement insatisfait du projet de loi C-11. Selon la déclaration en question, dont j'ai une copie, ces critiques sont attribuables à des questions allant d'un langage négatif et de stéréotypes à la discrimination contre certains groupes. Il a également été question du manque de protection accordée aux apatrides ainsi que de la détention et de l'emprisonnement d'enfants.

La déclaration a également mis en lumière que le projet de loi C-11 ne respecte pas les engagements internationaux du Canada en matière de droits humains. J'ai été étonné de constater que cette mesure législative n'avait pas été appréciée, même à la Conférence mondiale contre le racisme. Elle a été critiquée de toutes parts, même par notre vérificateur général.

Ce projet de loi est très peu transparent. Il y a tellement de choses qui ne sont pas claires dans ce projet de loi. La faiblesse de cette mesure au chapitre de l'exécution finira par causer plus de problèmes que la loi qu'elle vise à remplacer, tout simplement parce que le projet de loi n'est pas clair et qu'il est basé sur toute une série de règlements.

Le projet de loi passe sous silence la question de la taxe d'entrée discriminatoire qui est exigée des immigrants éventuels. Il ne tient pas compte non plus de la reconnaissance par le ministère de l'Immigration, par d'autres ministères et par l'industrie en général, des attestations relatives aux études faites à l'étranger.

La décision prise récemment par la Cour suprême a également d'importantes répercussions sur tout pouvoir que la ministre de l'Immigration avait autrefois en matière d'expulsion. L'efficacité, l'efficience et la solidité du projet de loi en sont ainsi invalidées.

Le projet de loi permet de longues absences du Canada. Il limitera à une par année le nombre de demandes transmises pour des raisons humanitaires. De même, la période de parrainage pour les nouveaux immigrants éventuels a été réduite de 10 à 3 ans.

Certaines des mesures que prévoit le projet de loi sont assez bonnes, mais voyons un peu comment nous pouvons faire fonctionner le système actuel. De la façon dont les libéraux gèrent actuellement notre système d'immigration, il se présente comme une tuyauterie bloquée. Un bon nettoyage s'impose pour qu'il fonctionne convenablement. Il faudra y apporter des améliorations, ajouter des choses et en faire disparaître d'autres.

Le personnel des bureaux d'immigrations est réduit, il manque de formation et est trop débordé pour pouvoir satisfaire à la demande. Des délais et des erreurs inacceptables sont inévitables.

La sécurité est un élément important de ce projet de loi. Les problèmes de personnel créent également des risques au niveau de la sécurité, comme nous l'avons vu dans le cas de Lai Changxing, accusé d'avoir dirigé un réseau d'immigration clandestine. Il a été reçu au Canada par resquillage et n'a pas été découvert par les agents des visas. Il y a également un homme souffrant de tuberculose qui est entré au pays et qui a exposé quelque 1500 personnes à cette bactérie mortelle.

 

. 1745 + -

Il est essentiel que les employés soient suffisamment bien formés sur le plan de l'application de la loi afin qu'ils puissent accomplir leur travail efficacement. Il faut bien enseigner aux agents des visas, notre première équipe de défense, à identifier les indésirables souhaitant immigrer au Canada. La loi et les critères relatifs au traitement des demandes doivent être clairs. Dans son discours, la ministre a parlé du contrôle sécuritaire préliminaire. Ce contrôle ne s'applique qu'aux réfugiés, et non pas aux candidats à l'immigration. C'est ce dont les fonctionnaires du ministère nous parlent lors des séances d'information.

Rien ne nous indique dans le projet de loi C-11 si les employés recevront la formation nécessaire leur permettant d'effectuer ce contrôle sécuritaire. Le projet de loi ne renferme aucune mesure visant à décourager la présentation à répétition de demandes frauduleuses qui engendrent énormément de paperasse pour nos agents des visas.

De nombreux cas de fraude commise par des employés, en particulier des employés recrutés sur place, ont été signalés dans nos missions à l'étranger. Parfois, ces employés peuvent faire plus d'argent qu'en toute une année en fraudant une seule demande d'immigration. Le projet de loi ne prévoit aucune peine à l'intention des demandeurs ou des employés qui commettent des activités frauduleuses.

Le projet de loi promet une meilleure application des mesures de sécurité à l'égard des demandeurs du statut de réfugié et des demandeurs de l'immigration, mais il ne referme aucun plan d'action à ce sujet.

La GRC, le SCRS et d'autres services internationaux d'enquêtes criminelles devraient être forcés de se communiquer des renseignements. Je ne vois rien dans le projet de loi à ce propos. C'est très important, compte tenu surtout de la question qui a été débattue pendant la période des questions au sujet d'une personne qui est entrée au Canada sans qu'on la reconnaisse au point d'entrée.

Le vérificateur général insiste dans son rapport pour dire que cette communication est impérative. M. Lai Changxing ne serait peut-être jamais entré au Canada s'il y avait eu une communication avec Interpol, car il est une des personnes les plus recherchées dans la liste d'Interpol.

Personne ne devrait être autorisé à entrer au Canada sans qu'on n'ait bien vérifié les risques qu'il pourrait présenter pour notre pays. Il s'agit là d'une demande légitime que nous faisons à la ministre.

L'immigration au Canada devrait être simple: les immigrants répondent aux critères ou ils n'y répondent pas. C'est l'un ou l'autre. Il n'y a pas de compromis. Soit ils répondent aux critères, soit ils ne répondent pas aux critères.

L'immigration est un aspect important. Nous devons examiner très sérieusement le projet de loi. Si, au cours d'une année, nous n'atteignons pas les objectifs ou les contingents d'immigration promis par les libéraux, ce n'est pas une catastrophe. Il ne faut pas compromettre ou sacrifier la qualité en faveur de la quantité. Nous devons savoir qui sont les gens qui viennent au Canada. Bien sûr, nous accueillons à bras ouverts les réfugiés authentiques et les immigrants, mais nous parlons ici des indésirables qui ne devraient pas être autorisés à entrer au Canada et qui mettent nos citoyens en danger.

Le gouvernement devrait encourager la tenue d'une discussion ouverte et responsable entre la CIC, Santé Canada, DRHC, le MAECI, de même que les provinces et les organisations non gouvernementales, les ONG, chargées de l'immigration. Le gouvernement rate cette occasion avec les modifications qu'il propose d'apporter dans le projet de loi.

Pour changer, le Code criminel fera du trafic de personnes et de l'introduction de clandestins des infractions fédérales. La peine prévue pour ces infractions sera l'emprisonnement à perpétuité ou une amende allant jusqu'à 1 million de dollars. Des infractions répétées de ce genre, comme la possession de passeports, de visas ou de tout autre document de voyage frauduleux, feraient également l'objet d'amendes et de peines d'emprisonnement. Il s'agit là d'une mesure positive prévue dans le projet de loi.

Le projet de loi propose d'infliger une peine très sévère aux trafiquants de personnes.

 

. 1750 + -

Les personnes reconnues coupables de crimes politiques ou d'autres crimes graves pourront maintenant faire l'objet d'une évaluation de risque préalable à leur renvoi. Le Canada risque de devenir un refuge pour ces criminels.

Au sujet du traitement des demandes de statut de réfugié, une des principales modifications contenues dans le projet de loi prévoit le renvoi des réfugiés à la Commission d'immigration et du statut de réfugié dans un délai de trois jours ouvrables. Or, le délai de traitement d'une demande continuera d'être de 90 jours ou plus. L'expérience nous a appris que le libellé de la Convention des Nations Unies relative au traitement des réfugiés est tout simplement trop vague. Nous devons définir clairement ce qu'est un réfugié.

La plupart des Canadiens savent reconnaître un véritable réfugié et nous voulons faire notre part pour aider ceux qui ont véritablement besoin d'aide. Nous n'aiderons pas les gens en les laissant bloqués dans le système, surtout ceux qui se voient refuser le statut de réfugié et qui sont expulsés. Ces gens voient leur vie brisée après des mois, voire des années d'attente.

Dans ma propre circonscription, je me suis occupé de 45 cas de réfugiés. Comme je le disais plus tôt, les réfugiés se trouvent dans une porte tournante et, dans certains cas, depuis sept, huit, neuf et même dix ans. Ces gens ne peuvent retrouver les membres de leurs familles. Ils ne peuvent pas non plus avoir un véritable emploi. Tant qu'ils se trouvent dans cette porte tournante, ils n'ont pas la tranquillité de l'esprit. Ils ne voient pas la vie comme nous la voyons.

Le projet de loi reconnaît également aux réfugiés, ainsi qu'aux demandeurs du statut de réfugié, la pleine protection de la Charte, ce qui fait que si, pour une raison ou une autre, une personne se voit refuser l'accès au Canada ou le statut de réfugié, elle pourra se prévaloir de tous les appels et franchir toutes les étapes du système, un peu comme on épluche successivement les pelures d'un oignon. Ces personnes auront également tous les droits d'un citoyen canadien. Aucun autre pays au monde ne va jusque-là.

Bien sûr, le projet de loi refuse le droit d'appel aux auteurs d'actes criminels graves, aux personnes qui présentent un risque pour la sécurité, aux membres d'organisations criminelles, aux criminels de guerre et aux auteurs d'actes frauduleux.

Les tests médicaux représentent un autre élément important concernant les immigrants en puissance qui arrivent au Canada. Le projet de loi ne contient aucune mesure prévoyant la mise à jour des examens courants effectués sur tous les demandeurs du statut d'immigrant; il ne contient pas non plus de dispositions permettant de hausser le nombre de médecins du ministère, au Canada ou dans nos missions à l'étranger. Le ministère compte actuellement 22 médecins, 11 au Canada et 11 à l'étranger. Ces médecins sont responsables de la paperasse après les examens de santé. Ils sont aussi chargés de confier des contrats aux médecins locaux qui effectuent les examens médicaux.

Les examens standardisés dont je parle peuvent avoir jusqu'à 40 ans. Nous savons à quel point le monde a changé en 40 ans et à quel point la technologie a évolué, surtout dans le domaine médical. Il arrive souvent que des médecins, dans d'autres pays, ne connaissent pas les critères d'admissibilité au Canada.

Afin d'assurer que des délits ne sont pas commis, on doit aussi soumettre les médecins étrangers à des contrôles périodiques. Plusieurs plaintes ont été déposées à mon bureau de circonscription relativement à des manquements déontologiques de la part de médecins étrangers, allant de la corruption à toutes sortes de fautes professionnelles.

Actuellement, le Canada accepte les demandeurs qui ne posent pas de danger pour la population canadienne ou qui ne seront pas un poids pour le système de santé canadien. Nous devons avoir une liste des conditions et maladies que nous sommes prêts à accepter ou non, et le projet de loi ne renferme pas une telle liste.

Aucune disposition ne prévoit la rationalisation des examens médicaux des familles. Dans mon bureau de circonscription, j'ai vu un certain nombre de cas où les examens médicaux des membres d'une même famille étaient faits sans aucune coordination. On examinait un membre de la famille, puis on attendait de trois à quatre mois avant de traiter les résultats. Il était alors trop tard, l'examen médical n'était plus valable. On examinait ensuite les autres membres de la famille et ainsi de suite, de sorte que le processus pouvait parfois durer quatre ans. Mon bureau de circonscription a reçu la demande d'une famille dont les membres avaient subi trois examens médicaux. Or, leur état de santé a été jugé bon chaque fois. Qu'on pense aussi que ces gens devaient payer des frais dans leur pays chaque fois qu'ils devaient subir ces examens médicaux. Cela impose non seulement des difficultés financières inutiles aux immigrants éventuels, mais cause également de longs retards.

 

. 1755 + -

Comme mon temps de parole tire à sa fin, monsieur le Président, je vais récapituler.

Dans le cadre des pouvoirs discrétionnaires prévus dans le projet de loi, la double intention du requérant est maintenant reconnue. Cela veut dire que quelqu'un peut être à la fois un visiteur au Canada et un immigrant au Canada. Je crois que cela causera des difficultés touchant le visa de visiteur. Cela causera un grave problème à l'égard du visa de visiteur, dont il n'est jamais question nulle part dans le projet de loi.

Sans un système plus ouvert et un ministère qui communique beaucoup plus, le projet de loi ne pourra atteindre son but.

Il n'y a pas de normes établies pour le fonctionnement de nos bureaux à l'étranger.

Les normes de santé, comme je l'ai dit, n'ont pas été mises à jour.

Pour terminer, je tiens à répéter que l'Alliance canadienne augmenterait les effectifs.

Le projet de loi C-11 promet de moderniser le système de sélection, mais à moins que les amendements ne soient acceptés, nous ne pourrons pas appuyer le projet de loi.

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai beaucoup aimé l'intervention de notre collègue, qui a une riche expérience de première main des questions d'immigration. Je voudrais qu'il explique un peu plus la dernière partie de son intervention. Il a semblé manquer de temps, et je crois qu'il avait des choses très importantes à ajouter. Aurait-il d'autres observations à faire avant de céder ses notes?

M. Gurmant Grewal: Monsieur le Président, je vous remercie. Je crois qu'il me faudrait le consentement unanime pour poursuivre pendant dix minutes, mais je vais essayer de terminer dans le peu de temps qu'il me reste.

Je voudrais parler de la responsabilité, qui est un autre aspect très important du projet de loi. Pour les postes de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié et pour tous les postes au ministère de l'Immigration, comme ceux des juges de la citoyenneté, des médecins du ministère et des agents des visas, il faut lancer des avis publics avant d'engager les titulaires. Il ne devrait pas revenir au ministre de nommer les titulaires de ces postes importants, parce que c'est là un critère qui pèche par le manque de responsabilité, de clarté et d'efficacité.

Je voudrais signaler autre chose. Dans son exposé de cet après-midi, la ministre a parlé de règlements. Le projet de loi est assorti de 89 pages de règlements. Quand nous sommes saisis d'un projet de loi plutôt superficiel, qui ne renferme que l'intention, mais pas de plan d'action solide, nous devons établir nos propres règlements sans quoi la mesure ne sera efficace que par le biais des règlements; aussi bien dire qu'elle ne sera jamais efficace.

Je suis coprésident du Comité mixte permanent d'examen de la réglementation. Il y a plus de 900 règlements à étudier et les députés seront peut-être étonnés d'apprendre qu'un grand nombre de ces règlements sont à étudier depuis 25 ans. Personne ne s'y est attaqué.

Quand on gouverne par règlements, on fait erreur. Tous ces règlements devraient être renvoyés à la Chambre avec leurs projets de loi respectifs pour que nous puissions en débattre à la Chambre. Les règlements ne font pas l'objet de débats. Pas un seul député n'a l'occasion de prendre connaissance des règlements et d'en débattre.

Un autre aspect important concerne une décision judiciaire. L'Alliance canadienne approuve l'expulsion d'individus indésirables sans hésitation ou sans délai dans le cas d'activité criminelle ou de non-observation de la Loi sur l'immigration. On présente le projet de loi comme si l'on était d'accord avec cela. Toutefois, la ministre qui exerçait si peu de pouvoir à cet égard, perd complètement son droit d'expulser quiconque a violé la loi ou qui est venu au Canada pour échapper à la loi de son pays. La décision rendue le 15 février 2001 par la Cour suprême du Canada, dans l'affaire de la ministre de la Justice c. Burns et Rafay, s'applique aux individus dont la vie est menacée si le Canada les expulse. Je suis d'avis que cette décision aura pour effet de limiter le pouvoir de la ministre d'expulser tout élément indésirable de la société canadienne.

 

. 1800 + -

J'aurais encore d'autres arguments à faire valoir, mais je vais laisser du temps au cas où les députés veulent poser des questions.

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je crois qu'il faut absolument que tous les députés et les gens qui suivent nos travaux à la télévision comprennent à quel point il est important que le projet de loi soit renvoyé à un comité pour que la population puisse dire ce qu'elle en pense.

Le projet de loi C-31, son prédécesseur, a fait l'objet d'un long débat à la Chambre, et je sais qu'il avait alors suscité de nombreuses questions qui ne cadrent plus avec le projet de loi actuel. Certains changements ont été apportés au projet de loi à l'étude, et je sais que la population voudra avoir son mot à dire. De plus, des spécialistes de l'immigration voudront avoir la possibilité de comparaître devant le comité et de livrer leur témoignage.

Il y a toutefois une chose que je tiens à dire, c'est que le Canada est un chef de file mondial quant à sa capacité d'expulser ceux qui n'ont pas le droit de rester chez nous. Conformément à notre politique et à nos principes, nous croyons que nous pouvons respecter nos obligations au chapitre des droits de la personne ainsi que la primauté du droit au Canada, tout en pouvant expulser ceux qui n'ont rien à faire chez nous. Ces deux principes, la primauté du droit et le respect des droits de la personne, vont de pair. Ce sont des valeurs chères aux Canadiens, et nous croyons que le projet de loi englobe ces principes.

M. Gurmant Grewal: Monsieur le Président, je peux me vanter un peu d'avoir une vaste expérience des immigrants, car Surrey-Centre, ma circonscription, est la circonscription la plus populeuse du Canada puisque les circonscriptions sont divisées en fonction des citoyens inscrits qui peuvent voter—les électeurs. Les immigrants sont nombreux dans ma circonscription.

J'ai lu très attentivement le projet de loi C-11. En outre, j'ai assisté à la séance d'information de la ministre, qui était excellente, je le reconnais. La ministre a dit que le projet de loi va être renvoyé au comité. Nous nous réjouissons de pouvoir proposer des amendements. J'espère, toutefois, que la ministre écoutera ces amendements.

La dernière fois que nous avons débattu le projet de loi dans sa forme antérieure, soit en tant que projet de loi C-31, la ministre ne nous a pas vraiment écoutés ni n'a accepté nos amendements. Notre principal porte-parole en matière d'immigration a proposé d'excellents amendements, mais en vain. Voilà pourquoi nous sommes maintenant dans un tel pétrin et devons étudier à nouveau le projet de loi.

En outre, la ministre a dit que le Canada est un chef de file pour ce qui est d'expulser les personnes indésirables. Cela n'est pas vrai. D'après le vérificateur général, 15 000 de ces personnes sont encore au Canada et nous n'en connaissons pas les allées et venues. La ministre peut-elle les dépister? Non. Elle n'a pas réussi à dépister ces indésirables qui se cachent quelque part dans le système. Ils sont là quelque part. On ne peut pas les expulser parce qu'on ne peut pas mettre la main dessus.

D'après le vérificateur général, 60 p. 100 des visiteurs qui viennent au Canada demander le statut de réfugié n'ont pas de documents. Ils en ont quand ils prennent l'avion, car les compagnies aériennes ne leur permettraient pas autrement d'embarquer, mais 60 p. 100 d'entre eux atterrissent sans documents. Que fait la ministre à cet égard? Rien. Cela fait dix ans que le vérificateur général signale cela dans son rapport, mais la ministre a décidé de ne prendre aucune véritable mesure.

On nous assure ici de bonnes intentions, mais nous demandons à la ministre de présenter un plan d'action pertinent, de régler les dossiers vraiment chauds dont traite le projet de loi de telle sorte que le système soit vraiment efficace, absolument responsable et clair.

[Français]

M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ): Monsieur le Président, c'est avec une grande joie que je prends aujourd'hui la parole sur le projet de loi C-11 qui porte sur la Loi sur l'immigration et sur le statut de réfugié. C'est un projet de loi que je connais assez bien et sur lequel ma collègue a eu la chance de présenter son point de vue, il y a quelques minutes. Elle l'a fait de façon assez éloquente. C'est un projet de loi qui ressemble en grande partie au défunt projet de loi C-31.

Pendant mon intervention, j'aborderai un certain nombre de questions, entre autres toutes celles reliées aux mouvements de population qui, au cours du XXe siècle, ont été des éléments assez importants de notre réalité pour des raisons souvent économiques, mais également pour des raisons d'ordre politique.

 

. 1805 + -

Un autre aspect que j'aborderai dans mon intervention concerne toute la question de la détention des enfants. Durant l'étude du projet de loi C-31, j'ai été de ceux qui ont cru qu'il fallait spécifiquement accorder une importance à cette question, pour toutes sortes de raisons. Par exemple, parce que le Canada avait signé la Convention internationale sur le droit de l'enfant. À mon avis, il fallait être rigoureux et respectueux des droits des enfants, mais aussi des conventions internationales que le Canada avait signées.

À mon avis, toute la question de la détention des enfants devait être précisée, non pas dans certains règlements, comme le gouvernement fédéral songe à le faire actuellement, mais plutôt dans la Loi actuelle sur l'immigration, soit le projet de loi C-11.

J'aborderai également la question des lenteurs administratives de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. C'est une réalité, lorsqu'on est représentant dans des comtés urbains. On vit cette réalité. Il y a des réalités de plus en plus présentes, où des citoyens viennent nous voir dans nos circonscriptions et font face à des délais d'attente inacceptable, ce qui crée, il ne faut pas se le cacher, des drames humains importants.

Souvent, des familles sont les principales victimes de ce laxisme et de cette lenteur administrative dans le processus de l'étude des demandes auprès de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

J'aborderai aussi la question des immigrants clandestins. Lorsque le gouvernement avait déposé le projet de loi C-31 à l'époque, c'était un peu une réponse à une nouvelle réalité présumée, qui est particulièrement caractérisée dans l'Ouest canadien, où on voyait de plus en plus d'immigrants clandestins arriver au pays, entre autres, de l'Asie.

Il faut se rappeler que ce phénomène, qui est effectivement nouveau, représente une certaine forme de marginalité. Ce n'est pas vrai que la majorité des citoyens qui veulent venir s'établir ici, soit comme résidants permanents ou en ayant un statut de réfugié, passent par la voie illégale. Oui, le phénomène existe, mais il est inexorablement mineur. Malheureusement, le gouvernement tente d'utiliser des modifications législatives à la Loi sur l'immigration pour répondre à un courant de l'Ouest canadien alors que, véritablement, le phénomène est léger et mineur.

Un autre aspect de la question, ce sont tous les coûts engendrés par la lenteur du processus de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Je reviendrai tout à l'heure sur un certain nombre de chiffres, qui caractérisent particulièrement les bureaux de Montréal, en termes de délais d'attente des demandeurs, mais aussi du nombre de demandeurs en attente.

Inévitablement, ce délai et cette lenteur administrative entraînent, pour les provinces et pour le gouvernement du Québec, des coûts administratifs importants pour lesquels le gouvernement fédéral devra, à un moment donné, assumer la responsabilité, dans la mesure où la loi ne vient pas accélérer le processus et répondre adéquatement à l'ensemble des demandes qui sont actuellement faites à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

Le dernier aspect de mon intervention sera les objectifs que se fixe le Canada en termes d'immigration et d'accueil de nouveaux immigrants.

On sait que le gouvernement vient d'atteindre, pour la première fois depuis de nombreuses années, ses objectifs d'immigration au Canada.

Il faut rappeler que le Québec a lui aussi des objectifs qui dépassent très largement la trentaine de mille immigrants qu'il souhaiterait accueillir. Souvent, la lenteur dans le processus encombre les demandes qui se font actuellement à l'étranger.

 

. 1810 + -

Je pense, entre autres, à l'immigration et à l'ambassade de Paris, où le Québec souhaiterait attirer une immigration francophone. Malheureusement, le Québec ne peut pas atteindre ces objectifs en raison d'une lenteur administrative importante dans le processus.

Je reviens donc à ce que j'affirmais tout à l'heure. Le premier aspect porte sur la question des mouvements de population. Les mouvements de population en quête d'une terre d'asile sont un phénomène marquant du XXe siècle qui, loin de régresser, s'est accru au cours des décennies, suite à la multiplication des situations de violence organisée, de violations des droits humains, de guerres et de conflits civils sur la scène internationale.

En 1996, le Haut-Commissariat aux réfugiés évaluait à 26 millions le nombre de réfugiés dans le monde et à 30 millions le nombre de personnes déplacées à l'intérieur de leur pays. C'est vers les pays les plus pauvres, proches de chez eux, que se dirigent en grande majorité les réfugiés, les pays occidentaux n'en recevant, pour leur part, qu'une très faible proportion.

Néanmoins, les gouvernements de ces derniers en sont venus à estimer la demande trop forte pour leur capacité d'accueil. Plusieurs ont adopté des mesures très restrictives et dissuasives qui ont orienté les demandeurs d'asile vers d'autres lieux de refuge.

Le Canada est aujourd'hui l'un des rares pays occidentaux auprès duquel les personnes en danger peuvent encore tenter d'exercer le droit d'asile qui leur est reconnu par la Convention de Genève.

Je précise que la Convention de Genève entérine le droit d'une personne à demander asile à un tiers pays mais n'oblige pas le pays sollicité à l'accueillir, en respect des droits et privilèges des nations, d'où la notion courante que l'accueil des réfugiés n'est pas un droit, mais un privilège qui leur est accordé.

Toutefois, l'ouverture qui leur est offerte tend à se resserrer de plus en plus, comme le montrent tant les politiques et pratiques relatives à leur processus d'entrée, de demande de statut et d'accès à la résidence permanente que les politiques relatives aux programmes et services de soutien auxquels ils sont admissibles.

Au cours des années 1980, le Canada a vu s'accroître le nombre de personnes qui se sont présentées à ses portes pour y demander l'asile. La moyenne, depuis 1989, est passée de 25 000 à 30 000 personnes par année, dont un tiers environ s'est établi au Québec.

Bien que leur accueil ne représente qu'une mince part du fardeau mondial, cet afflux de personnes en détresse, massivement issues des pays du Sud, donc plus visibles qu'auparavant parce que présentant un profil culturel et linguistique non familier, contrairement à celles accueillies au cours des décennies précédentes, n'a pas été sans déranger tant les responsables gouvernementaux que la population en général.

C'est alors qu'ont commencé à se répandre dans les discours des politiciens, dans les médias et donc dans le public, au Québec comme dans l'ensemble du Canada, des vocables tels que «faux réfugiés», «abuseurs de système», «fraudeurs». Dix ans plus tard, ces notions, devenues des lieux communs, ne suffisent plus à frapper l'imagination de l'opinion publique. On y ajoute donc celles de «terroristes» et de «criminels» contre lesquels les gouvernements doivent protéger la population.

C'est donc un des nouveaux arguments qu'utilise le Canada pour justifier l'application de politiques de plus en plus sévères à l'égard des personnes qui cherchent refuge sur son territoire, l'argument majeur demeurant le poids économique que représentent ces demandeurs d'asile.

Bien que reconnu à travers le monde pour ses traditions humanitaires, le Canada a rapidement pris pour tendance, au cours des années 1980, de restreindre son ouverture aux personnes en recherche de protection.

Aujourd'hui, de multiples obstacles entravent les possibilités d'admission et de rétablissement, au Canada, des personnes en quête d'un refuge, qu'elles présentent leur demande à l'extérieur du pays ou en territoire canadien. Le gouvernement fédéral a même mis en place des mesures pour intercepter, dans les lieux de transit étrangers—des aéroports, par exemple—les personnes qui ont fui leur pays sans pouvoir se procurer les documents valides exigés par le Canada.

 

. 1815 + -

Or, souvent, les personnes qui fuient leur pays n'ont pas accès à ces documents, soit parce qu'elles risquent leur vie si elles tentent de se rendre là où elles pourraient les obtenir ou si elles s'adressent aux autorités qui les délivrent, soit parce qu'il n'existe aucune instance où elles peuvent se les procurer, à cause de l'instabilité gouvernementale ou de l'état de guerre du pays.

Les personnes qui ont réussi à atteindre le Canada sont confrontées à un processus légal dont la lourdeur, la lenteur et les effets anxiogènes sont extrêmement pénibles pour elles: d'abord, la complexité de la présentation de la demande du statut de réfugié, assortie d'obstacles financiers à l'obtention du support d'un avocat pour préparer et présenter la demande devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié; ensuite, le fonctionnement de cette Commission, incluant la façon dont se déroulent les audiences, l'attitude des commissaires et la nature des arguments apportés en cas de refus; également, l'absence de possibilités d'appel sur le fond lorsqu'une demande est refusée; et, enfin, les possibilités en cas de refus, d'être déportées vers leur pays de provenance, même si leur vie y est menacée, parce que ce pays est en guerre ou aux prises avec des violations massives des droits de la personne.

Il est à noter que le Canada a suspendu les renvois au Burundi, depuis juin 1993, en Afghanistan et au Rwanda, depuis avril 1994. Puis, suite à de multiples démarches, le Conseil canadien des réfugiés et la Table de concertation des organismes de Montréal ont obtenu que soient suspendues les déportations vers l'Algérie et la République démocratique du Congo, l'ex-Zaïre. Le Canada détourne néanmoins son engagement en déportant vers les États-Unis les personnes qui y ont transité, tout en sachant que les États-Unis les renvoient dans leur pays d'origine.

Même lorsque la personne est reconnue comme réfugié, donc que son statut est régularisé—après avoir été sélectionnée à l'extérieur ou reconnue par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié—les politiques relatives à sa demande de résidence permanente et à la réunification des familles peuvent constituer un désincitatif majeur à tenter de s'y établir définitivement.

En somme, la période pendant laquelle les demandeurs d'asile ont le plus besoin de services est précisément celle pendant laquelle ils n'y ont pas droit. La période cruciale où s'amorce leur adaptation à la société d'accueil et au cours de laquelle se construit leur perception de cette dernière est précisément celle où cette société leur nie le droit à être soutenus.

La période pendant laquelle ils sont le plus déstabilisés, où le niveau de risques en termes de santé mentale et de santé physique est le plus élevé, est précisément celle où toutes les portes leur seraient fermées, si ce n'était de la conscience humaine et sociale des organismes, entre autres, non gouvernementaux qui militent, justement afin de faire reconnaître ces droits. C'est une réalité que j'avais abordée, entre autres, lors de l'étude du projet de loi C-31.

Il y a un autre aspect que j'avais abordé en comité, et je me rappelle avoir alors posé un certain nombre de questions au gouvernement, aux fonctionnaires et à la ministre. C'était au sujet de la question de la détention des personnes mineures et des enfants.

On se rappellera que le Canada a signé la Convention internationale sur le droit des enfants. Cette Convention interdit cette détention d'enfants dans un certain nombre de contextes. J'avais alors demandé au gouvernement que cette protection puisse être reconnue par un article dans la loi, non pas simplement dans des règlements, comme le gouvernement s'apprête à le faire, mais que ce soit vraiment reconnu dans un article de loi. Force m'est de constater que cela ne semble pas nécessairement être fait, encore une fois.

 

. 1820 + -

Je rappellerai que ce projet de loi, et c'est important, doit à cet égard correspondre à un certain nombre d'articles et ne pas simplement nous ramener à un certain nombre de règlements.

Ce qui est fondamental, c'est que ce projet de loi puisse correspondre à la Convention, plus particulièrement à l'article 37b) de la Convention sur le droit des enfants, qui dit:

    Les États parties veillent à ce que nul enfant ne soit privé de liberté de façon illégale ou arbitraire. L'arrestation, la détention ou l'emprisonnement d'un enfant doit être en conformité avec la loi, n'être qu'une mesure de dernier ressort et être d'une durée aussi brève que possible.

L'autre aspect de la Convention est l'article 22, qui dit:

    Les États parties prennent les mesures appropriées pour qu'un enfant qui cherche à obtenir le statut de réfugié ou qui est considéré comme réfugié en vertu des règles et procédures du droit international ou national applicable, qu'il soit seul ou accompagné de ses père et mère, ou de toute autre personne, bénéficie de la protection et de l'assistance humanitaire voulues pour lui permettre de jouir des droits que lui reconnaît la présente convention.

Ce que l'on souhaite dans ce projet de loi, c'est que cette protection soit inscrite dans la loi. Naturellement, nous aurons des travaux en comité et je suis convaincu que ma collègue s'assurera que ces garanties seront clairement inscrites dans la loi pour que le Canada puisse être lui-même en conformité avec la Convention qu'il a signée.

L'autre aspect est toute la question de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Par ce projet de loi et par les énoncés de la ministre, on sent une volonté certaine d'améliorer le processus d'étude des demandes à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

On est tout à fait ouverts à cette volonté d'amélioration. Lorsque l'on regarde la situation actuelle, il est clair que le système ne fonctionne pas. Il ne faut pas nécessairement peser nos mots; c'est clair, il faut tous vivre dans une situation, dans une circonscription électorale où un certain nombre de citoyens font des demandes de statut de réfugié, pour se rendre compte que le système ne fonctionne pas.

Simplement pour le bureau de Montréal de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, on estimait que le délai moyen de traitement d'une demande était de dix mois. Il faut dix mois, ce qui est le délai moyen d'attente. Cela veut dire que pendant ce temps, des gens sont en attente et des drames humains importants sont vécus. L'autre aspect est toute la question des demandeurs. Il y en avait plus de 7 000 au bureau de Montréal à la fin de 1999.

Dans l'ensemble, nous accueillons ce projet de loi avec ouverture. Nous souhaitons que la volonté du gouvernement puisse permettre de trouver des résultats probants dans l'application de la loi. Il est clair que nous travaillerons en comité pour améliorer ce projet de loi.

[Traduction]

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je remercie le député de Rosemont—Petite-Patrie pour avoir rappelé que les chiffres ne reflètent pas toujours la réalité.

Il a cité l'exemple des réfugiés de la mer arrivés sur la côte ouest au cours des deux dernières années. Les chiffres réels indiquent qu'ils étaient environ 600 réfugiés à débarquer sur notre territoire. Dans l'ensemble, quelques 24 000 réfugiés sont arrivés au Canada pendant cette même période. J'estime par conséquent que les données qui nous sont communiquées sont contradictoires.

Nous en avons eu un bon exemple lors des dernières élections fédérales. Je n'ai pas à rappeler aux députés l'incident concernant Betty Granger, une candidate allianciste, qui a parlé à Winnipeg de l'invasion asiatique. Je crois sincèrement que ce commentaire a été pris hors contexte. Je peux assurer la Chambre qu'il était assez courant vers la fin des années 70 et le début des années 80, lorsque des gens de la composante à caractère économique de Hong-Kong se sont dépêchés de fuir la colonie par crainte d'une prise de pouvoir par les communistes.

 

. 1825 + -

Dans ma propre famille, mes soeurs aînées, qui ont environ 20 ans de plus que moi, ont fait la même chose. Elles ont liquidé tous leurs biens et apporté toute leur fortune au Canada à cette époque. C'était logique de faire cela, et les gens parlaient assez souvent de «l'invasion asiatique» à la fin des années 70 et au début des années 80.

Malheureusement, lorsqu'on utilise cette expression hors de son contexte normal, comme cela est arrivé aux dernières élections fédérales, les résultats peuvent être catastrophiques. Et à cause de l'absence de mesure dans les reportages, une interprétation donnée à deux petits mots non seulement crée-t-elle beaucoup de problèmes, mais elle donne aussi du Canada l'image d'une société intolérante. Je pense que c'est ce qui est triste au sujet des événements qui sont survenus, car nous formons une société en grande partie tolérante et nous acceptons des immigrants de partout dans le monde.

J'ai une question pour le député de Rosemont—Petite-Patrie. Il a parlé de soutien aux personnes qui arrivent dans notre pays. Je crois que c'est une carence du gouvernement. Nous avons besoin d'une meilleure planification. J'ai consulté l'histoire et j'ai constaté que, dans le passé, il y a eu des programmes gouvernementaux et bénévoles à la petite semaine. Quel genre de programmes de soutien existe-t-il pour intégrer les nouveaux Canadiens au Québec?

[Français]

M. Bernard Bigras: Monsieur le Président, je veux revenir à la première intervention de mon collègue. Les chiffres parlent d'eux-mêmes: 600 personnes sont arrivées par bateau—il vient de le dire—sur 24 000. C'est à peine 2 à 3 p. 100. C'est donc un courant minoritaire. Le problème est justement celui-là, à savoir que nous avons tendance à faire en sorte que quelques courants minoritaires comme ceux-là nous amènent à renforcer une loi. C'est un danger.

Je continue à dire que l'arrivée illégale de bateaux, entre autres dans l'Ouest canadien, constitue un courant minoritaire qui est non fondé. Il y a, bien sûr, des failles dans le système. Mais de là à renforcer la loi et d'en arriver à un processus de détention, c'est aller un peu trop loin. Je suis également d'accord avec mon collègue quand il affirme qu'il faudra aussi renforcer l'ensemble de nos politiques de sorte que les nouveaux arrivants puissent s'intégrer à une société qui réponde véritablement aux besoins modernes.

Je pense, entre autres, à la question du Québec. Le Québec a besoin de ressources importantes pour que les immigrants et les nouveaux arrivants qui se joignent à la société québécoise puissent s'intégrer de façon chaleureuse, cordiale et solidaire à une société francophone. À cet égard, les ressources du gouvernement fédéral sont essentielles, entre autres pour les organismes qui intègrent ces nouveaux citoyens à la société québécoise.

Le président suppléant (M. Bélair): L'honorable ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a demandé la parole. Je dois l'informer qu'il reste deux minutes avant la fin du débat. Je lui demande de faire une intervention qui sera brève et de donner une réponse qui sera également brève.

[Traduction]

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais faire quelques commentaires au sujet des excellentes remarques qu'a faites mon collègue, l'ancien porte-en matière d'immigration. Il a dit que les chiffres étaient éloquents. À mon avis, il est important de rappeler certaines statistiques.

Par exemple, les cibles que le Québec s'est fixées pour l'immigration ont été atteintes ces dernières années. Mon ministère s'est mobilisé et, l'an dernier, nous avons atteint les niveaux qui avaient été établis l'année précédente. Nous l'avons fait grâce aux 139 millions de dollars prévus dans le budget et aussi grâce aux efforts considérables que nous avons faits pour nous assurer que les cibles étaient atteintes en ce qui concerne non seulement l'immigration, mais aussi les réfugiés parrainés par le gouvernement et par d'autres.

J'espère que tous nos détracteurs prendront un moment pour remercier les fonctionnaires qui, dans le monde entier, s'efforcent de nous aider à atteindre ces objectifs, des objectifs qui sont dans l'intérêt du Canada.

 

. 1830 + -

[Français]

M. Bernard Bigras: Monsieur le Président, on souhaite aussi que cela continue. On espère que le gouvernement fédéral puisse reconnaître les programmes distincts du Québec relatifs à l'encadrement.

C'est une demande répétée du gouvernement du Québec, par l'entremise de son ministre. Il demande un plus grand contrôle quant à la sélection des travailleurs temporaires.

Oui, il faut aller plus loin dans le domaine des ressources, reconnaître la distinction des programmes québécois, mais faire en sorte aussi que le Québec ait sa responsabilité dans la sélection des travailleurs temporaires.


MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LA SANTÉ

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, il y a un certain temps j'ai posé une question au ministre de la Santé à propos de la clinique Virginia Fontaine au Manitoba qui a reçu une subvention de 37 millions de dollars du gouvernement. Cette clinique appartient à un certain Perry Fontaine.

Il a été prouvé que des pratiques très douteuses de financement et de dépense ont entouré le versement de cette somme exorbitante approuvé par Paul Cochrane, sous-ministre adjoint de la Santé à l'époque. Plus tard, en janvier, M. Cochrane a donné sa démission. On a découvert que son épouse avait acheté des condos à Mont Tremblant au nom de ce même M. Fontaine qui a obtenu la subvention du gouvernement.

Le 6 février, quand j'ai posé une question au ministre de la Santé à propos de ce cas et que je lui ai demandé comment son ancien sous-ministre adjoint a pu autoriser le versement d'un tel montant d'argent avec peu ou pas du tout d'examen du ministère, il m'a répondu que les transactions faisaient l'objet d'une enquête de la part de la police ou de vérificateurs ou des deux à la fois et que la question était devant les tribunaux du Manitoba afin que le ministère puisse obtenir accès à tous les documents nécessaires pour comprendre comment ces fonds publics ont été dépensés.

Il a assuré à la Chambre que le ministère ferait tout son possible pour retrouver la trace de tous les fonds publics dépensés et que, s'il y avait eu dépense à mauvais escient, il les recouvrerait au nom des contribuables. Nous voudrions savoir si le ministre le savait et ce qu'il a fait. Pourquoi cela traîne tant dans cette importante affaire? Nous avons été témoins depuis sept ans de compressions massives des dépenses de la santé. Pendant ce temps, nous avons recueilli de plus en plus de preuves de dépenses irresponsables de la part du gouvernement.

À la lumière du scandale du ministère du Développement des ressources humaines, nous avons constaté qu'être proche du premier ministre au sein du gouvernement libéral constitue souvent un grand avantage et un grand privilège pour ceux qui touchent cet argent. Qu'il s'agisse de croisières extravagantes, de fontaines dans la circonscription du premier ministre, de musées du canot, de pavillons de singes ou d'un hôtel, tout cela éveille bien des préoccupations et des doutes chez les Canadiens sur la façon dont sont dépensés leurs impôts.

J'ai demandé au ministre à l'époque si une vérification judiciaire serait faite sur la question de savoir pourquoi les fonctionnaires du ministère ont attendu si longtemps avant d'agir. Je n'ai obtenu aucune réponse. Le ministre s'est contenté d'esquiver la question en disant que le ministère avait suspendu les paiements au centre jusqu'à l'obtention d'une réponse à toutes ses questions. Or, certaines questions n'ont pas encore été élucidées.

La clinique Virginia Fontaine constitue tout simplement un autre exemple des pratiques de dépenses très discutables de la part du gouvernement libéral, lesquelles soulèvent aussi une question d'éthique, ce qui nous ramène aux problèmes liés au scandale de DRHC, au cas de Pierre Corbeil, qui a été trouvé coupable au criminel dans ses activités de collecte de fonds et à la controverse du prêt bancaire du premier ministre concernant l'auberge. Toutes ces affaires soulèvent des questions d'éthique et nous poussent à nous interroger sur les priorités du gouvernement et sur la façon dont il dépense l'argent des contribuables.

Il n'y a rien qui cloche dans le fonds d'emploi traditionnel, mais c'est plutôt la façon dont est réalisé le suivi qui fait problème. Cela éveille les soupçons quand il s'agit de l'argent durement gagné des contribuables que le gouvernement dépense de manière hautement discutable dans des programmes qui vont à vau-l'eau.

Je remercie la présidence de son indulgence et de m'avoir permis de m'étendre sur une question que j'ai posée à la Chambre.

[Français]

M. Yvon Charbonneau (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, comme le ministre de la Santé l'a indiqué, le traitement de ce dossier a été très clair.

En effet, aussitôt que des allégations de mauvais usage de fonds ont été portées à l'attention du ministre, celui-ci a pris immédiatement trois mesures.

 

. 1835 + -

[Traduction]

Premièrement, il a demandé une expertise légale. Deuxièmement, il a demandé aux avocats du gouvernement de s'adresser aux tribunaux et de faire en sorte que nous ayons en main tous les documents permettant de retracer les fonds. Troisièmement, il a pris les dispositions nécessaires pour que soient suspendus les paiements qui étaient prévus à la Virginia Fontaine Addictions Foundation tant que les questions en instance n'auraient pas obtenu de réponse.

Le gouvernement croit fermement en la reddition de comptes à l'égard des deniers publics, et le Ministère assure la Chambre qu'il fera tout en son pouvoir pour retracer les montants dépensés indûment par cet organisme.

[Français]

Santé Canada croit fermement que les meilleurs programmes de santé sont ceux qui sont offerts par les gens qui en sont le plus touchés. Ce transfert se fait souvent par le truchement d'accords de contribution et d'accords de transfert, dont l'accord conclu avec cette fondation.

Le transfert est une initiative relativement nouvelle qui a connu une certaine crise de croissance. Santé Canada, fort de la participation des dirigeants des Premières nations et des Inuits, s'est employé à renforcer les mesures de responsabilisation figurant dans les accords de transfert.

À l'automne 2000, Santé Canada a entrepris l'élaboration d'un cadre de contrôle de la gestion interne afin d'améliorer la gérance des négociations et l'exécution des accords.

De plus, tous les nouveaux accords de plus de 100 000 $ seront maintenant assujettis à un examen par un comité d'examen et, à compter du 1er avril de cette année, tous les nouveaux accords seront conformes à la nouvelle politique du Conseil du Trésor visant à protéger les intérêts de l'État.

[Traduction]

Les allégations concernant la Virginia Fontaine Addictions Foundation sont troublantes. Je puis assurer à la Chambre que Santé Canada a pris ces allégations au sérieux et qu'elle a agi sans tarder, de manière à assurer que toutes les données soient rassemblées pour que l'on recouvre les fonds publics dépensés de façon indue.

LES RESSOURCES NATURELLES

M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, il y a quelque temps, j'ai posé une question au ministre des Ressources naturelles concernant la construction d'une ligne de transmission entre le Labrador et Terre-Neuve. En fait, je voulais des renseignements sur le projet de développement du cours inférieur du Churchill.

Le ministre a contourné la question, surtout parce qu'à ce moment il ne pouvait se rappeler l'état exact de l'avancement du rapport auquel faisait allusion la question et qui faisait suite à une étude de faisabilité entreprise par son ministère sur la construction d'une telle ligne de transmission.

En mars 1998, le premier ministre alors en place à Terre-Neuve, qui est aujourd'hui ministre de tout à la Chambre, et le premier ministre du Québec s'étaient rencontrés au Labrador pour ce qui a finalement été une séance de photo, mais qui avait pour but de discuter de l'aménagement du cours inférieur du Churchill. Leurs plans ont désorganisés par les autochtones qui étaient extrêmement bouleversés, avec raison d'ailleurs, parce qu'on ne les avait pas invités à participer aux pourparlers.

Dans le cadre de tout cela, le premier ministre et le premier ministre de Terre-Neuve et Labrador de l'époque avaient promis d'ordonner une étude de faisabilité concernant la construction d'une ligne de transmission entre la centrale du bas Churchill et l'île de Terre-Neuve.

Bien des gens ne se rendent pas compte que Terre-Neuve ne dispose plus de beaucoup d'énergie propre. La même chose vaut peut-être pour le reste du pays. Le cours inférieur du Churchill est peut-être une des plus grande, sinon la plus grande, source d'énergie propre qui reste au Canada.

Une ligne de transmission vers la province fournirait à l'île de Terre-Neuve et à la partie visée du Labrador une énorme quantité d'énergie propre, à bon compte et de manière continue, une énergie pour laquelle il existe une forte demande. Récemment, les États-Unis, en particulier la Californie, se sont montrés préoccupés par un certain nombre de pannes d'électricité.

De nombreuses entreprises dans le domaine de la technologie de l'information ont dit très clairement qu'elles ne pouvaient continuer de fonctionner dans un milieu où il y a des pannes d'électricité parce qu'elles sont tributaires de cette source d'énergie, précisant qu'elles chercheraient à mettre en place des installations auxiliaires dans des régions qui peuvent fournir de l'énergie propre et à bon compte, de manière continue. Terre-Neuve pourrait être cet endroit.

 

. 1840 + -

Le gouvernement du Canada doit comprendre que les régions de notre pays, que ce soit l'Ouest ou les provinces de l'Atlantique, ont énormément à offrir au chapitre des ressources naturelles, mais qu'elles ont besoin d'aide pour les mettre en valeur. Le ministre, dans la réponse qu'il m'a adressée, et je le remercie d'ailleurs d'avoir ainsi assuré un suivi de cette question, parle d'une entente entre le Québec et Terre-Neuve. Il y a bien d'autres partenaires que le Québec pour nous aider à mettre en valeur nos ressources. L'étude qui a été commandée est extrêmement importante, car elle établit le travail de base à accomplir.

J'espère que le ministre a fouillé un peu la question et qu'il peut nous en dire un peu plus sur l'état d'avancement de l'étude qui a été commandée par le gouvernement du Canada et celui de Terre-Neuve.

M. Benoît Serré (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, au nom du ministre, je suis heureux de répondre au député de St. John's-Ouest qui soulève des questions tout à fait légitimes.

Le potentiel du cours inférieur du fleuve Churchill comme source d'approvisionnement en électricité du marché nord-américain est bien connu. Il s'agit d'une source renouvelable concurrentielle au plan des coûts qui entraîne peu ou pas d'émissions de gaz à effet de serre.

Le gouvernement du Canada reconnaît que le développement de l'hydroélectricité peut être une solution importante pour réduire les émissions de gaz à effet de serre au Canada.

[Français]

Le gouvernement fédéral est déterminé à remplir son rôle d'intendance afin de s'assurer que les projets du Labrador se réalisent dans le respect de l'environnement. Celui du fleuve Churchill ferait l'objet d'une évaluation environnementale. Le gouvernement a fait des progrès considérables dans l'élaboration d'un processus d'évaluation environnementale uniforme en collaboration avec les gouvernements du Québec et de Terre-Neuve.

Le gouvernement a également souligné l'importance d'une participation concrète des autochtones qui ont un intérêt dans le développement du projet et dont les revendications territoriales sont actuellement examinées.

[Traduction]

En ce qui concerne la construction d'une ligne de transmission entre le Labrador et Terre-Neuve, la province de Terre-Neuve et du Labrador et le gouvernement du Canada se sont entendus pour que des fonctionnaires fédéraux et provinciaux effectuent ensemble des études de faisabilité sur les plans économique et financier des solutions qui s'offrent en ce qui concerne l'approvisionnement en électricité.

Des études conjointes Canada-Terre-Neuve ont été entreprises pour déterminer la meilleure solution pour répondre aux besoins futurs d'électricité de Terre-Neuve. On a examiné deux solutions. La première consistait à construire une ligne de transmission, d'alimentation, à partir du nouveau projet hydroélectrique proposé au Labrador. La deuxième consistait à accroître la capacité de l'île et à vendre toute l'électricité provenant du Labrador sur d'autres marchés.

Ces travaux se sont poursuivis jusqu'à mai 2000, lorsque les gouvernements du Québec et de Terre-Neuve et du Labrador ont émis un communiqué conjoint dans lequel ils annonçaient qu'on allait restreindre les négociations et les travaux à la suite des incertitudes concernant le prix de l'électricité sur les marchés américains déréglementés.

À la suite de la décision des premiers ministres de Terre-Neuve et du Labrador et du Québec de restreindre les négociations sur le projet hydroélectrique du Labrador, les travaux sur les études conjointes de faisabilité relatives aux solutions d'approvisionnement en électricité ont été interrompus tant qu'on ne connaîtra pas exactement la portée et la structure du projet hydroélectrique. Étant donné que la taille, le contrôle et le financement du projet demeurent incertains, l'étude d'une ligne de transmission ne peut être terminée à ce stade-ci.

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Peter Goldring (Edmonton-Centre-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'interviens pour réagir aux commentaires formulés par le ministre de la Défense nationale le 21 février durant la période des questions.

Je crois que sa réponse ne tenait pas compte de l'ampleur de la situation des militaires canadiens quant à leur état de préparation et à leur capacité opérationnelle. Mes commentaires étaient fondés sur le fait que, depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement libéral, en 1993, la durée de patrouille des patrouilleurs Aurora et Arcturus est passée de 19 200 heures à 11 500 heures et que le ministre souhaite la réduire encore davantage, jusqu'au niveau inacceptable de 8 000 heures par année. Tout cela, malgré une recommandation écrite du chef d'état-major de la Force aérienne qui affirme résolument qu'une durée de moins de 11 500 heures entraînerait, et je cite, un impact inacceptable.

Je crois que la réponse ne tenait pas compte du véritable problème et de l'un des principaux objectifs des patrouilles, c'est-à-dire la souveraineté de l'Arctique. Le passage du Nord-Ouest est de plus en plus utilisé et le nombre de vols polaires augmente de jour en jour; on pourrait donc soutenir que, pour affirmer notre présence et notre souveraineté dans le Grand Nord, il faudrait faire plus d'heures de patrouille et non pas moins. Rappelons-nous le Manhattan et la manière dont il a défié notre présence dans l'Arctique il n'y a pas si longtemps.

 

. 1845 + -

Or, les compressions des libéraux ont aussi érodé l'état de préparation de nos militaires dans bien d'autres domaines. Nos camions ne peuvent pas remorquer des obusiers ou des canons parce que leurs pneus ne sont pas en bon état. Ils ne peuvent pas toujours faire appel à l'entreprise de remorquage locale comme on le fait à Ottawa. Que peuvent faire nos militaires en Bosnie? Est-ce que l'Association canadienne des automobilistes a une filiale en Europe?

Voilà un problème de plus. De même, nos CF-18 ont des difficultés dues à l'humidité. De l'eau reste coincée dans la structure alvéolée des ailes et cela cause de graves difficultés aux volets de courbure. Ils manquent de pièces de rechange, alors ils fouillent dans les réserves des autres unités pour obtenir les pièces dont ils ont besoin.

On apprend aussi que les coques des chars d'assaut Leopard sont tellement usées sur le dessous qu'on peut les percer à l'aide d'un tournevis. On y soude des plaques de métal, mais il reste que ce sont des véhicules des années 70 qui posent de graves inquiétudes.

J'ai appris dernièrement que les casernes en Alberta étaient abandonnées après seulement quatre ans en raison des centaines de fissures dangereuses qui apparaissent dans les fondations. Les logements familiaux à Edmonton ont besoin de réparations majeures.

Il y a aussi la façon honteuse dont le gouvernement traite nos soldats en leur disant qu'ils sont responsables de leurs propres maux, apparemment parce qu'ils se causent beaucoup de stress en s'inquiétant de leurs maux.

Le ministre doit répondre à toutes ces préoccupations concernant la réduction des patrouilles pour assurer la souveraineté du Canada dans le Grand Nord, les volants des camions, la moisissure dans les ailes des CF-18, l'usure des chars d'assaut Leopard, les casernes qui tombent en ruines, les logements familiaux qui ont besoin de réparations, les problèmes de santé des soldats, le manque de capacité de transport lourd et, bien sûr, la question des hélicoptères toujours en suspens.

Le public a besoin de réponses à ces questions sur l'état de préparation des militaires et sur nos forces armées canadiennes.

Le président suppléant (M. Bélair): J'allais être très généreux avec vous comme je l'ai été avec mon collègue, mais vous avez choisi de ne pas continuer.

M. John O'Reilly (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je sais que vous m'accorderai ce soir autant de temps qu'aux autres secrétaires parlementaires afin que je puisse dire tout ce que j'ai à dire.

Le député s'inquiète de l'état de préparation opérationnelle des forces canadiennes. Le gouvernement est déterminé à s'assurer que les forces canadiennes obtiennent les effectifs, l'équipement et la formation dont elles ont besoin.

En fait, nous avons entrepris un nouveau programme ambitieux visant à préparer les forces canadiennes pour le XXIe siècle, y compris un nouvel investissement de 2,5 milliards de dollars dans les deux derniers budgets. C'est ainsi qu'un certain nombre d'initiatives sont en cours pour que les forces canadiennes puissent remplir leur mandat à l'avenir.

Pour continuer à investir dans les gens, l'équipement et la formation, il faut cerner les capacités essentielles dont les Forces canadiennes ont besoin pour accomplir leurs tâches et missions de base, et c'est ce que nous faisons.

À mon avis, tous les Canadiens devraient être très fiers du travail que fournissent les membres de la force aérienne, tant au Canada qu'à l'étranger. D'un bout à l'autre du pays et aux quatre coins du monde, ces hommes et ces femmes poursuivent quotidiennement leurs activités dans le cadre de missions variées et difficiles.

Ils remplissent un de leurs principaux rôles ici même, au Canada, en patrouillant la côte maritime la plus longue du monde, les approches maritimes et le territoire, lourde tâche qui exige un appareil d'une endurance hors du commun. Pour s'en acquitter, ils utilisent l'Aurora CP-140, avion de patrouille de longue portée capable de parcourir plus de 9 000 kilomètres sans avitaillement.

La flotte des CF-140 achetée en 1980 est utilisée par la 14e escadre de Greenwood, en Nouvelle-Écosse, et par la 19e escadre de Comox, en Colombie-Britannique. Dans la mythologie, Aurora était la déesse de l'aube, de la lumière. Passant de la surveillance et du contrôle des mers à la surveillance et au contrôle sous-marin, l'Aurora joue un rôle dynamique pour les Forces canadiennes.

Initialement conçu pour la guerre antiaérienne, l'Aurora peut également faciliter diverses fonctions gouvernementales dont la surveillance de l'espace aérien, du territoire et des approches maritimes du Canada; les opérations de recherche et de sauvetage; le secours aux sinistrés; l'aide aux autres ministères gouvernementaux dans les régions de protection de la pêche, de surveillance environnementale et de lutte contre le trafic des stupéfiants.

En ce qui concerne ce dernier rôle, on a eu une excellente illustration des capacités de nos appareils Aurora et de leurs équipages, quand mercredi dernier un Aurora de la 19e escadre de Comox a aidé la garde côtière américaine à arrêter un navire soupçonné de servir au trafic de stupéfiants sur la côte ouest.

[Français]

Le président suppléant (M. Bélair): Comme il est 18 h 50, la motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 50.)