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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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37e Législature, 1ère Session

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 042

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 3 avril 2001

VAFFAIRES COURANTES

. 1005

VRÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
VM. Derek Lee
VLOI SUR LA REPRÉSENTATION NUMÉRIQUE DE LA DATE
VProjet de loi C-327. Présentation et première lecture
VM. Peter Adams
VPÉTITIONS
VLe libre-échange
VM. Pat Martin
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES

. 1010

VLES CRÉDITS
VJour désigné—La tenue d'une enquête judiciaire indépendante
VM. Stockwell Day
VMotion

. 1015

. 1020

VM. Joe Jordan

. 1025

VM. Paul Szabo
VMme Val Meredith

. 1030

. 1035

VAmendement
VM. Janko Peric
VLe très hon. Joe Clark

. 1040

VM. Joe Jordan
VM. John Reynolds
VMotion
VL'hon. Don Boudria

. 1045

. 1050

VM. Stockwell Day

. 1055

VM. Peter MacKay
VL'hon. Brian Tobin

. 1100

. 1105

VM. John Reynolds
VL'hon. Lorne Nystrom

. 1110

VM. Gilles Duceppe

. 1115

. 1120

. 1125

. 1130

VM. Eugène Bellemare

. 1135

VM. Paul DeVillers
VMme Alexa McDonough

. 1140

. 1145

VL'hon. Denis Coderre

. 1150

VM. John Cannis
VM. Bill Blaikie

. 1155

. 1200

VM. Paul DeVillers

. 1205

VM. Bob Speller

. 1210

VLe très hon. Joe Clark

. 1215

. 1220

VM. Dominic LeBlanc

. 1225

VM. John Cannis
VM. Peter MacKay

. 1230

. 1235

VM. Art Hanger

. 1240

VM. Paul DeVillers

. 1245

VM. Charlie Penson

. 1250

. 1255

VM. Paul Szabo
VM. Art Hanger

. 1300

VMme Diane Ablonczy
VMme Diane Ablonczy

. 1305

. 1310

VL'hon. Don Boudria

. 1315

VM. Joe Jordan
VM. Steve Mahoney

. 1320

. 1325

. 1330

VM. Grant Hill
VM. Ghislain Lebel

. 1335

VM. Paul Szabo

. 1340

. 1345

VM. Werner Schmidt

. 1350

VMme Deborah Grey

. 1355

VDÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
VROBERT GAUTHIER
VM. Eugène Bellemare

. 1400

VLA LOI SUR LES LANGUES OFFICIELLES
VM. Jim Pankiw
VLE PRIX MERCADOR
VMme Raymonde Folco
VLE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE
VM. Denis Paradis
VL'ÉCOLE POLYMÉCANIQUE DE LAVAL
VMme Carole-Marie Allard
VLA SANTÉ
VM. Leon Benoit

. 1405

VLA SPORTHÈQUE DE HULL
VM. Marcel Proulx
VLE TRAVAIL INVISIBLE
VM. Paul Crête
VLE CONSEIL DES 4-H
VM. Paul Steckle
VLE BOIS D'OEUVRE
VM. Andy Burton
VRICHMOND HILL
VM. Bryon Wilfert
VBELL CANADA
VMme Judy Wasylycia-Leis

. 1410

VL'ÉQUITÉ SALARIALE
VMme Monique Guay
VVAISAKHI
VM. Gurbax Malhi
VLA SOCIÉTÉ CANADIENNE DU CANCER
VM. Greg Thompson
VL'ÉCONOMIE
VM. John McCallum
VLE REVENU NATIONAL
VM. John Reynolds

. 1415

VQUESTIONS ORALES
VLE PREMIER MINISTRE
VM. Stockwell Day
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Stockwell Day
VL'hon. Brian Tobin
VM. Stockwell Day
VL'hon. Brian Tobin

. 1420

VMme Diane Ablonczy
VLe très hon. Jean Chrétien
VMme Diane Ablonczy
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Gilles Duceppe
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Gilles Duceppe
VLe très hon. Jean Chrétien

. 1425

VM. Stéphane Bergeron
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Stéphane Bergeron
VLe très hon. Jean Chrétien
VLE COMMERCE
VMme Alexa McDonough
VLe très hon. Jean Chrétien
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Lawrence MacAulay

. 1430

VLE PREMIER MINISTRE
VLe très hon. Joe Clark
VLe très hon. Jean Chrétien
VL'AGENCE CANADIENNE DE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL
VLe très hon. Joe Clark
VLe très hon. Jean Chrétien
VMme Deborah Grey
VLe très hon. Jean Chrétien
VMme Deborah Grey
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Michel Gauthier

. 1435

VL'hon. Maria Minna
VM. Michel Gauthier
VL'hon. Maria Minna
VLE PREMIER MINISTRE
VMme Val Meredith
VL'hon. Brian Tobin
VMme Val Meredith
VL'hon. Brian Tobin
VLA FISCALITÉ
VM. Yvan Loubier
VM. Roy Cullen

. 1440

VM. Yvan Loubier
VLe très hon. Jean Chrétien
VLE PREMIER MINISTRE
VM. Charlie Penson
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Charlie Penson
VLe très hon. Jean Chrétien
VLES PÊCHES
VM. Wayne Easter
VL'hon. Herb Dhaliwal
VLA DÉFENSE NATIONALE
VM. Peter Stoffer

. 1445

VL'hon. Art Eggleton
VM. Peter Stoffer
VLe très hon. Jean Chrétien
VL'INDUSTRIE DU BOIS D'OEUVRE
VM. Gerald Keddy
VL'hon. Pierre Pettigrew
VM. Bill Casey
VL'hon. Pierre Pettigrew
VL'ÉCONOMIE
VM. Jason Kenney

. 1450

VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Jason Kenney
VLe très hon. Jean Chrétien
VLA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE DES AMÉRIQUES
VMme Francine Lalonde
VL'hon. Pierre Pettigrew
VMme Francine Lalonde
VLe très hon. Jean Chrétien
VL'INDUSTRIE DU BOIS D'OEUVRE
VM. Stockwell Day

. 1455

VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Stockwell Day
VLe très hon. Jean Chrétien
VLES INFRASTRUCTURES ROUTIÈRES
VM. Guy St-Julien
VL'hon. Martin Cauchon
VL'INDUSTRIE DU BOIS D'OEUVRE
VM. Gary Lunn
VL'hon. Pierre Pettigrew
VM. Gary Lunn

. 1500

VL'hon. Pierre Pettigrew
VL'URANIUM
VM. Claude Bachand
VL'hon. Art Eggleton
VLE LOGEMENT
VM. Tony Tirabassi
VL'hon. Alfonso Gagliano
VPRÉSENCE À LA TRIBUNE
VLe Président

. 1505

VRECOURS AU RÈGLEMENT
VLes observations d'un ministre
VM. Chuck Strahl
VMme Val Meredith
VL'hon. Brian Tobin
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLES CRÉDITS
VJour désigné—La tenue d'une enquête judiciaire
VMotion
VMme Deborah Grey

. 1510

VM. Paul Bonwick

. 1515

VM. Peter MacKay
VM. Reed Elley

. 1520

. 1525

VM. Mac Harb

. 1530

VMme Carole-Marie Allard

. 1535

. 1540

VM. Paul Crête

. 1545

VM. Howard Hilstrom
VM. Paul DeVillers

. 1550

. 1555

VM. Howard Hilstrom
VM. John Williams

. 1600

VM. Ken Epp
VM. Paul Forseth

. 1605

. 1610

VM. Roy Cullen

. 1615

VM. Roy Bailey
VM. Keith Martin

. 1620

. 1625

VM. Mac Harb

. 1630

VM. John Bryden
VM. Joe Jordan

. 1635

. 1640

VM. Pat Martin

. 1645

VM. Ken Epp
VM. Gar Knutson

. 1650

. 1655

VM. Roy Bailey
VM. Philip Mayfield

. 1700

VM. Ken Epp

. 1705

. 1710

VM. John Bryden

. 1715

VDemande et report des votes par appel nominal
VSuspension de la séance

. 1730

VReprise de la séance
VINITIATIVES PARLEMENTAIRES
VLA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

. 1735

. 1740

. 1745

. 1750

VM. Roy Cullen

. 1755

. 1800

VM. Leon Benoit

. 1805

. 1810

VM. Yvon Godin

. 1815

. 1820

VM. Scott Brison

. 1825

. 1830

VSuspension de la séance

. 2000

VReprise de la séance
VDÉBAT D'URGENCE
VLA FIÈVRE APHTEUSE
VM. Rick Borotsik
VMotion

. 2005

. 2010

VM. Greg Thompson

. 2015

. 2020

VL'hon. Lyle Vanclief

. 2025

. 2030

VL'hon. Art Eggleton

. 2035

VM. Howard Hilstrom

. 2040

. 2045

VM. Garry Breitkreuz

. 2050

. 2055

VMme Suzanne Tremblay

. 2100

. 2105

VM. Marcel Gagnon

. 2110

. 2115

VM. Dick Proctor

. 2120

. 2125

VMme Judy Wasylycia-Leis

. 2130

. 2135

VMme Sophia Leung

. 2140

. 2145

VM. Claude Duplain

. 2150

VM. David Anderson

. 2155

. 2200

VM. Rick Casson

. 2205

. 2210

VM. Murray Calder

. 2215

. 2220

VMme Jean Augustine

. 2225

VM. Peter Stoffer

. 2230

. 2235

VM. John Bryden

. 2240

. 2245

VMme Sue Barnes

. 2250

VM. Monte Solberg

. 2255

. 2300

VM. Kevin Sorenson

. 2305

. 2310

VM. Brent St. Denis

. 2315

(Version officielle)

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 042


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 3 avril 2001

La séance est ouverte à 10 heures. .TUC Prière



AFFAIRES COURANTES

 

. 1005 +

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à deux pétitions.

*  *  *

LOI SUR LA REPRÉSENTATION NUMÉRIQUE DE LA DATE

 

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-327, Loi établissant une norme nationale pour la représentation numérique de la date.

—Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une nouvelle fois ce projet de loi. Il est très simple. Il concerne le ministère de l'Industrie et je suis donc ravi que le ministre soit ici.

Le projet de loi a pour but d'établir une norme nationale pour la représentation numérique de la date de sorte à éviter toute confusion, surtout en cette ère de l'informatique.

Le système que je propose est celui établi par l'Organisation internationale de normalisation, à savoir, dans l'ordre, l'année, le mois et le jour. Par exemple, la date d'aujourd'hui est le 01-04-03. Si nous appliquions tous cette norme, cela éviterait toute confusion sur les factures d'électricité ou de gaz naturel ou encore sur les permis de conduire.

Ce projet de loi est particulièrement important en cette ère de l'informatique et je suis heureux de le présenter.

(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

PÉTITIONS

LE LIBRE-ÉCHANGE

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de déposer une pétition volumineuse portant la signature de nombreux Canadiens qui sont préoccupés par les conséquences négatives possibles de l'Accord de libre-échange des Amériques. Ils réclament le droit de prendre connaissance de l'intégralité du texte en cours de négociation entre le gouvernement du Canada et les 34 autres États.

Les signataires réclament également que 5 000 exemplaires de ce texte soient diffusés partout au Canada, dans les deux langues officielles, et sur l'Internet.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

 

. 1010 + -

[Traduction]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ—LA TENUE D'UNE ENQUÊTE JUDICIAIRE INDÉPENDANTE

M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne) propose:  

    Que la Chambre demande la tenue d'une enquête judiciaire indépendante pour déterminer si le premier ministre a enfreint les règles relatives aux conflits d'intérêts concernant sa participation dans le club de golf Grand-Mère et l'Auberge Grand-Mère et que les enquêteurs aient de larges pouvoirs dont celui d'exiger la production de tous les documents et témoignages pertinents.

—Monsieur le Président, je signale que je partagerai mon temps de parole avec la députée de South Surrey—White Rock—Langley.

J'interviens aujourd'hui au sujet de la motion déposée par l'opposition pour réclamer la tenue d'une enquête judiciaire indépendante sur les activités du premier ministre dans le domaine des affaires, activités qu'on en est malheureusement venu à désigner du nom de Shawinigate, nom qui a la connotation négative que l'on sait.

Plus précisément, nous voulons que l'enquête détermine si le premier ministre s'est mis directement dans une situation de conflit d'intérêts lorsqu'il a usé de son influence auprès de certaines sociétés d'État pour obtenir des fonds pour l'hôtel dont il a déjà été copropriétaire et qui est voisin d'un terrain de golf dans lequel il avait un intérêt financier.

[Français]

Depuis plusieurs semaines, le gouvernement libéral a affirmé à la Chambre qu'il fallait passer à autre chose que le Shawinigate afin de débattre des vrais enjeux.

Aujourd'hui, la motion de l'opposition officielle offre cette possibilité, au gouvernement et au premier ministre, de sortir de ce marasme dans lequel ils se sont enfoncés et d'enlever le Shawinigate des mains des politiciens pour le remettre entre les mains d'une commission d'enquête indépendante.

[Traduction]

Nous offrons la possibilité de retirer le dossier des mains des politiciens et de le confier à une commission d'enquête indépendante.

Le premier ministre n'a que lui à blâmer pour le fait que cette question traîne depuis deux ans. Si tous les renseignements avaient été divulgués dès le début, nous ne serions pas en train de réclamer, deux ans plus tard, une enquête judiciaire afin de connaître enfin tous les faits.

Depuis deux ans, le scandale du Shawinigate est le bruit de fond de la politique canadienne. Depuis deux ans, nous demandons loyalement des comptes au gouvernement à propos de cette affaire.

Pendant que le gouvernement, avec son attitude désinvolte, faisait comme si de rien était, de temps à autre le scandale du Shawinigate refaisait surface comme un mal de dent qui n'a jamais été traité. La situation ne cesse d'empirer. Nous proposons un traitement de canal. Nous voulons que la question fasse l'objet d'une enquête publique indépendante.

Chaque jour, la question attire l'attention d'un nombre croissant de Canadiens. Toutes les histoires relatives aux sociétés à numéro, aux transactions financières et aux actionnaires secrets semblent, complexes. Pourtant, le problème est fort simple: le premier ministre a exercé des pressions auprès d'une société d'État afin que l'hôtel adjacent au terrain de golf dans lequel il détenait des intérêts financiers reçoive des centaines de milliers de dollars, précisément 615 000 $.

Le problème est très clair. Le premier ministre semble avoir utilisé son propre poste pour protéger sa situation financière et c'est incorrect.

[Français]

Mais pire encore, le premier ministre a tenté de camoufler toute cette affaire. L'opposition officielle a posé des questions depuis deux ans, toujours sans obtenir de réponses satisfaisantes. Ses employés et même son cabinet politique semblent avoir tenté de nous induire en erreur pour couvrir le patron.

Le premier ministre lui-même a affirmé certaines choses qui se sont par la suite avérées fausses. Le Shawinigate, c'est tout cela. Ce n'est pas seulement un président de banque, une compagnie à numéros ou une entente légale, c'est surtout un premier ministre qui semble abuser des pouvoirs de sa fonction et qui, par la suite, veut conclure toute l'affaire.

 

. 1015 + -

[Traduction]

Cela est inacceptable. Cela m'afflige, cela afflige la Chambre et je pense aussi que les Canadiens sont affligés de voir la plus haute charge publique du pays traitée aussi irrespectueusement et abusivement.

Il importe que nous examinions quelques-unes des nombreuses contradictions qui ont émané du premier ministre et de ceux qui le défendent dans ce dossier.

D'abord, le premier ministre a dit que tous ses actifs étaient dans une fiducie sans droit de regard. Il l'a affirmé très clairement. Dans sa déclaration publique des actifs à déclarer du 1er mars 1994, le premier ministre a déclaré:

    Je déclare détenir un tiers des actions de J&AC Consultants Inc., une société privée gérée par une tierce partie, sans lien de dépendance et sans droit de regard de ma part.

C'est ainsi que l'on décrit une fiducie sans droit de regard. Sans droit de regard, mon oeil. Le premier ministre jette aussi un regard de mépris sur les Canadiens.

J&AC Consultants détenait les actions du club de golf de Grand-Mère. M. Jonas Prince devait toujours 300 000 $ à J&AC Consultants après la soi-disant vente des actions en novembre 1993.

Le 23 mars 1999, le premier ministre a dit à la Chambre: «Tous mes avoirs sont dans la fiducie. C'est un fonds fiduciaire sans droit de regard. J'ai fait cela justement pour ne pas avoir à répondre à des questions de ce genre.» Il ne voulait pas répondre à la question, cela semble évident, mais nous savons maintenant que son fonds fiduciaire sans droit de regard avait une vision périphérique.

Le conseiller en éthique nous a appris que le premier ministre et son avocate, agissant en tant que son agent, ont essayé activement de trouver de nouveaux acheteurs pour les actions que le premier ministre n'était plus censé posséder après le 1er novembre 1993. C'est ce qu'il a essayé de nous dire.

À la même époque, le premier ministre exerçait des pressions auprès de la Banque de développement du Canada pour qu'elle verse de l'argent à l'auberge et rencontrait des immigrants-investisseurs dont certains étaient sous enquête pour des raisons criminelles, alors que les collaborateurs du premier ministre essayaient d'obtenir des subventions du ministère du Développement des ressources humaines, tout cela pour aider l'Auberge Grand-Mère, voisine du terrain de golf.

De plus, il y a des contradictions au sujet de la propriété des actions elles-mêmes. Le premier ministre a soutenu de façon répétée avoir vendu ses parts dans le club de golf le 1er novembre 1993. Or, nous savons maintenant que le soi-disant acheteur de ces actions, M. Jonas Prince, a reconnu lui-même n'avoir jamais considéré que la note rédigée à la main au dos d'une serviette de papier constituait un contrat d'achat. Dans l'esprit de M. Jonas Prince, il s'agissait simplement d'une option d'achat.

Nous savons également que M. Prince a versé à la société du premier ministre 40 000 $ en novembre 1997 pour régler cet accord saboté. Selon M. Prince, il voulait se sortir de cet accord et faire savoir qu'il n'avait plus rien à voir avec cela. Seul le premier ministre était concerné. C'est ce que M. Prince a dit de ses propres mots.

Nous savons maintenant que le registre du club de golf n'a jamais été modifié pour montrer que M. Prince était le propriétaire des actions. Autant qu'on sache, la société J&AC Consultants était peut-être inscrite comme la propriétaire de ces actions jusqu'à la semaine dernière.

Mélissa Marcotte, une amie de toujours du premier ministre et la fille d'un des copropriétaires du club de golf, a reconnu dans le National Post il y a deux semaines que le premier ministre n'avait jamais vendu ses actions. Ensuite, après que des pressions eurent été exercées, nous ne savons pas comment exactement, elle a changé son fusil d'épaule et dit qu'il les possédait peut-être. Le cabinet du premier ministre a exercé d'énormes pressions.

Après tout ce processus qui n'était qu'une farce, une danse des sept voiles, nous n'avons toujours pas de réponse. Nous pensons que les Canadiens méritent d'obtenir des réponses à toutes ces questions.

Certains des disciples du premier ministre, les quelques rares qui siègent sur les banquettes d'en face, ont déclaré que le premier ministre était incapable d'une telle chose, qu'il serait impossible qu'il fasse autre chose que de dévoiler tous les faits, en toute honnêteté. Il est important de noter que nous parlons d'un premier ministre qui, dans le cadre d'un vote sur le conseiller en éthique, a ordonné à ses députés de voter à l'encontre de leurs propres paroles. Nous parlons d'un premier ministre qui leur a ordonné de manquer à leur parole. Serait-il capable de se contredire dans ce dossier? Absolument, et il l'a prouvé. Il faut instituer une enquête indépendante.

 

. 1020 + -

Nous sommes au courant d'autres contradictions au sujet du premier ministre et du lobbying qu'il a fait à propos de l'auberge. Le premier ministre, le ministre de l'Industrie et le porte-parole du premier ministre, M. Donolo, ont tous dit que le premier ministre ne s'était pas ingéré dans la BDC, qu'elle avait agi avec indépendance et selon les modalités habituelles. Ils ont tous déclaré cela publiquement.

Peter Donolo a dit:

    Le gouvernement ne se mêle pas directement aux décisions de prêt de la BDC. Les décisions en cette matière sont prises entièrement par les autorités compétentes de la BDC.

Or, nous savons, à la suite des pressions que nous et d'autres personnes avons exercées, que des employés de la BDC ont déclaré que le prêt n'avait pas été accordé conformément aux orientations habituelles, que le premier ministre avait rencontré le président de la banque au 24, promenade Sussex pour en discuter et lui avait téléphoné à cet égard.

Il n'est guère étonnant que, dans tous les sondages, la majorité des Canadiens demandent l'institution d'une enquête indépendante.

Ce ne sont là que quelques-unes des contradictions que nous constatons. Les Canadiens ont besoin de connaître la vérité. Il est trop tard pour que le premier ministre respecte sa promesse d'obliger la Chambre des communes à rendre des comptes. Ce jour-là est passé. Il faut maintenant ouvrir une enquête indépendante.

M. Joe Jordan (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, l'exposé que vient de faire le leader de l'opposition aux Canadiens se compare à une série de points. Il reste maintenant à tracer les lignes entre ces points. C'est que les gens d'en face font des déclarations farcies de ouï-dire.

Je ferai remarquer une chose. Le chef de l'opposition a parlé d'une «note au dos d'une serviette de papier» en disant qu'il ne pouvait s'agir d'un acte de vente.

Il a peut-être oublié l'affaire Multicorp. Il y a cinq ans, le premier ministre de l'Alberta faisait la promotion d'une société établie dans sa province. Or, les épouses du premier ministre provincial et de M. Rod Love avaient reçu en cadeau des actions de cette société. Quand la valeur de ces actions a monté en flèche, on a commencé à s'interroger sur la légalité de ce don et on a présenté les renseignements au chef de l'opposition en lui demandant de dire si, oui ou non, il pouvait y avoir conflit d'intérêts. À l'époque, il avait déclaré fermement qu'il n'y avait rien de louche, qu'il jugeait acceptable la vente conclue verbalement et que l'affaire ne pouvait pas faire l'objet d'une enquête judiciaire car c'était une façon normale de faire des affaires.

Je voudrais donc savoir comment il explique qu'en Alberta, quand des motivations politiques et des intérêts sont en jeu, les ventes verbales sont correctes, mais que, lorsqu'il est question d'un acte de vente légal ici, où ses motivations politiques sont différentes, il verse tout à coup des larmes de crocodile. Je me demande s'il pourrait nous en parler un moment.

M. Stockwell Day: Monsieur le Président, la recherche est pire que minable. Le député a parlé de tracer une ligne entre tous les points. Or on nous a présenté du côté ministériel tellement de points qui restent sans lien qu'on dirait un labyrinthe dont personne ne peut comprendre le tracé, mais une enquête publique pourrait permettre de comprendre.

Dans le cas qu'il a évoqué, il existait un commissaire à l'éthique relevant de l'assemblée législative, pas un entraîneur personnel en matière d'éthique n'ayant de comptes à rendre qu'au premier ministre. Par ailleurs, ce commissaire à l'éthique a lavé le premier ministre provincial de tout soupçon. Or, savez-vous ce qu'a fait ce dernier? Il est même allé plus loin et a dit que puisqu'il y avait apparence de conflit d'intérêts, il se devait de rendre ces actions, une chose que le premier ministre n'a jamais faite et dont il n'a jamais évoqué la possibilité.

Qu'a fait le premier ministre? Il a ordonné à ses députés de voter contre une promesse libérale. Chacun des députés libéraux a voté contre leur propre engagement. Ils avaient promis d'instituer un commissaire à l'éthique, mais ils ont voté contre leur proposition. Ils ont publiquement rompu leur promesse, et ils doivent rendre des comptes à cet égard.

Le député a évoqué l'exemple d'un homme qui a fait preuve de responsabilité contre un homme qui refuse d'en faire autant.

Le président suppléant (M. Bélair): Je demande à tous mes collègues de garder leur calme. Comme nous le savons tous, ce débat peut susciter beaucoup d'émotions; j'invite donc les députés à s'efforcer de discuter calmement.

 

. 1025 + -

M. Paul Szabo (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, le chef de l'opposition a parlé d'un prêt pour lequel le premier ministre avait exercé des pressions. Sait-il et pourrait-il dire à la Chambre quel était le montant initial du prêt que l'Auberge Grand-Mère sollicitait auprès de la BCD, à combien a fini par se chiffrer le prêt et à quel taux d'intérêt cet argent a été prêté?

M. Stockwell Day: Monsieur le Président, c'est là une des nombreuses questions qui doivent être soumises à une enquête indépendante puisque depuis deux ans, lorsque nous posons des questions à ce sujet, nous obtenons d'abord une réponse, puis nous en découvrons une autre.

Nous avons d'abord posé une question très simple. Nous avons demandé au premier ministre s'il était déjà intervenu auprès de la BDC. Lui et ses collaborateurs nous ont répondu que non, puis nous avons découvert qu'il l'avait fait. Nous avons ensuite demandé si le premier ministre avait confié ses affaires à un fonds fiduciaire sans droit de regard, ce à quoi on nous a répondu que c'était bien sûr le cas, puis nous avons appris qu'il avait en fait un droit de regard et que son avocat travaillait en son nom pour tenter de vendre ses actions.

Chaque fois que nous posons une question, nous ne pouvons jamais obtenir une réponse franche. C'est pour cette raison que cette question doit être posée. C'est l'une des nombreuses questions que nous devrons soumettre à une enquête indépendante parce que, quand nous l'avons posée, nous n'avons pas obtenu de réponse franche. Une enquête indépendante nous fournira la réponse franche que nous recherchons.

Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, quelle honte d'avoir à débattre d'une telle question à la Chambre des communes. Il est vraiment dommage qu'on ne puisse réformer le Parlement et retirer ce dossier des mains du premier ministre puisque rien ne prévoit que la Chambre peut traiter de la question. Une enquête privée devrait automatiquement être exigée dans une telle situation.

Il est vraiment malheureux que les députés ne se rendent pas compte que les Canadiens veulent que cette question soit soumise à une enquête indépendante. Ils font tout ce qu'ils peuvent pour l'empêcher.

La question que nous nous posons ici à la Chambre est de savoir si le premier ministre du Canada s'est placé en situation de conflit d'intérêts ou non. C'est sur quoi nous devons nous pencher.

Il est très clair que l'Auberge Grand-Mère a reçu de l'aide financière de la Banque de développement du Canada en raison de l'intervention du premier ministre du Canada.

L'Auberge Grand-Mère est adjacente au terrain de golf Grand-Mère, dont on ne connaissait pas exactement les actionnaires au moment où le premier ministre a exercé des pressions auprès de la BDC en vue de l'octroi d'un prêt. Le prêt avait été refusé avant l'intervention du premier ministre. Le premier ministre a déclaré à la Chambre avoir vendu ses actions en novembre 1993, trois jours avant de devenir premier ministre du Canada.

Les Canadiens s'interrogent au sujet du prétendu acte de vente conclu avec Jonas Prince, propriétaire de la chaîne Hôtels Delta. Il est incroyable que deux avocats de société apposent leur signature sur une entente rédigée à la main en l'absence de tout témoin, sans bloc de signature et sans timbre d'une société, et les Canadiens ne pensent pas que c'est la vérité. Il n'y a pas eu de versement initial. Il n'y a même pas eu de dépôt. À l'occasion de toute vente, même lors de la cession de la propriété d'une automobile, de l'argent doit changer de mains.

M. Prince n'a pas effectué un remboursement d'emprunt de 75 000 $ le 1er novembre 1994 tel que le prévoyait l'entente. Il n'a pas non plus fait de paiement semblable en novembre 1995, soit deux ans plus tard. C'est le 27 janvier 1996 que le premier ministre a communiqué pour la première fois avec le conseiller en éthique pour l'informer qu'il n'avait pas été payé. Si les actions étaient dans une fiducie sans droit de regard, comment aurait-il pu savoir qu'il n'avait pas été payé? Il n'était pas censé être informé de ce qui se passait.

Selon le conseiller en éthique, le premier ministre et son avocat devaient chercher une façon de voir à ce qu'il soit payé. S'il ne s'agit pas d'une intervention dans une fiducie sans droit de regard, je me demande bien ce que c'est. Si le contrat était vraiment valide, pourquoi l'avocat censé s'occuper du dossier ne s'est-il pas adressé aux tribunaux? Cela ne s'est pas produit. Trois ans et demi plus tard, ces actions ont enfin été transmises, vendues, transférées à un des partenaires originaux dans le terrain de golf.

 

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Il faut se demander pourquoi on trouve en 1999 un document d'accompagnement signé par le premier ministre concernant sa société, J&AC Consultants. Pourquoi ce document existait-il en 1999 s'il ne détenait pas une participation? Il est fort manifeste pour les Canadiens qui assistent à l'étalement de cette affaire que le premier ministre avait un intérêt financier dans le sort non seulement du terrain de golf, mais aussi de l'hôtel adjacent.

Les députés libéraux peuvent penser que les coïncidences incroyables sont possibles, mais moins d'un mois après avoir informé le conseiller en éthique qu'on lui devait toujours de l'argent, le premier ministre a tenu une rencontre privée avec des immigrants investisseurs en vue de discuter de placements dans un hôtel. Assez curieusement, une des coïncidences est que l'hôtel Grand-Mère a reçu en bout de piste 2,5 millions de dollars de fonds des investisseurs.

Un ou deux mois plus tard, autre coïncidence, le premier ministre appelle la BDC au sujet de l'hôtel. Une fois rejetée la demande de prêt faite à la BDC, le premier ministre poursuit ses démarches au nom de l'hôtel et, ciel!, que se passe-t-il? La banque se ravise et consent un prêt.

Cela ne s'est pas passé sans que le premier ministre du Canada s'ingère dans le dossier et fasse jouer son influence. Il ne s'agit pas d'un simple député, mais du premier ministre du Canada. Il a rencontré à l'occasion le président de la BDC au 24, promenade Sussex. Je ne peux pas inviter qui que ce soit au 24, promenade Sussex pour présenter des instances. Le premier ministre a fait des pieds et des mains pour tenir à flot l'Auberge Grand-Mère. La question s'impose: pourquoi? Je me le demande bien.

C'est se leurrer de prétendre que le sort de la propriété voisine n'a rien à voir avec la santé financière de la nôtre. Avant d'être députée, j'ai été dans l'immobilier pendant des années, et j'ai aussi fait partie d'une administration municipale. Je peux dire à la Chambre que les municipalités informent les propriétaires voisins lorsque des changements touchent une propriété donnée, car ils ont un intérêt à cet égard. Dans l'immobilier, je n'aurais jamais vendu une maison avec un simple document rédigé à la main, sans témoins, sans certificat d'emplacement, sans sceau officiel. Ce genre de document ne tiendrait pas devant une cour de justice et il ne lierait pas les parties.

Nous parlons d'intérêt, car c'est là que le conflit d'intérêts entre en ligne de compte. Cela ne fait aucun doute dans l'esprit des Canadiens, le premier ministre et ses associés avaient des intérêts financiers dans le terrain de golf et l'établissement hôtelier. Si ce dernier avait fait faillite, le premier ministre aurait essuyé des pertes bien plus considérables que la baisse de valeur de ses parts. Si...

Une voix: Avec des si...

Mme Val Meredith: Les libéraux prétendent que ces coïncidences ne sont que normales et courantes. Malheureusement, on discerne ici un enchaînement d'événements dont on commence à avoir l'habitude. C'est une habitude dans la circonscription du premier ministre, on troque argent et influence, et des gens qui sont des amis et des collègues se retrouvent bénéficiaires de grosses sommes d'argent venant d'investisseurs, de banques et de DRHC. Ça arrive tout le temps.

C'est une habitude, mais cette affaire regarde les Canadiens car il y a conflit d'intérêts. L'intervention du premier ministre du Canada auprès de la BDC pour obtenir un prêt lui a profité financièrement. Son intérêt dans cette affaire est de nature financière.

Je dirai en conclusion que ce que nous avons ici, c'est un tas de questions sans réponse, un tas de choses qui doivent être tirées au clair. Elles ne le seront pas par ce gouvernement. Le gouvernement refuse que les principaux intéressés comparaissent devant le Comité de l'industrie pour répondre à certaines de ces questions et faire la lumière sur cette affaire. Le gouvernement refuse de coopérer et ne laisse pas d'autre choix à l'opposition que de demander la tenue d'une enquête judiciaire indépendante afin d'obtenir les réponses nécessaires.

 

. 1035 + -

Il est regrettable que l'on en soit arrivé là. Il est regrettable que la vérité n'ait pas été révélée et que ce scandale n'ait pu être dissipé plus tôt de manière à ce que la Chambre des communes puisse passer à d'autres questions importantes. Toutefois, les Canadiens redoutent que le poste prestigieux qui est celui de premier ministre ne soit entaché par un scandale du fait que toutes ces questions restent sans réponse. Les Canadiens veulent que la lumière soit faite dans toute cette affaire. Les Canadiens veulent la vérité et ils la veulent le plus tôt possible. Ils veulent une enquête indépendante, échappant au contrôle du premier ministre, du cabinet du premier ministre et du leader parlementaire du gouvernement. Les Canadiens veulent savoir si le premier ministre était directement en conflit d'intérêts lorsqu'il est intervenu pour obtenir un prêt.

J'aimerais dire maintenant aux Canadiens que nous espérons que le gouvernement appuiera cette motion et verra à ce qu'une enquête ait lieu.

J'aimerais proposer l'amendement suivant. Je propose:  

    Que la motion soit modifiée par adjonction du mot «immédiate» après le mot «tenue».

Le président suppléant (M. Bélair): Je déclare l'amendement recevable.

M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, le chef de l'opposition a pris la liberté de dire dans sa déclaration qu'il parlait au nom des Canadiens. Par votre entremise, monsieur le Président, je transmettrai au chef de l'opposition des observations d'électeurs...

Le président suppléant (M. Bélair): Je regrette de devoir le dire au député, mais c'est la députée de South Surrey—White Rock—Langley qui est la principale intervenante et c'est donc à elle qu'il faut, par mon entremise, adresser ses observations.

M. Janko Peric: Monsieur le Président, à l'un ou l'autre, je tiens à transmettre des observations d'électeurs de ma circonscription. Ceux-ci disent que l'opposition devrait cesser, qu'assez, c'est assez. Un électeur dit ceci: «Assez, c'est assez! L'opposition devrait cesser de s'en prendre à Chrétien. Chrétien ne mérite pas cela. C'est stupide et ridicule.»

L'intervenant précédent a fait des observations qui étaient des insultes à mon endroit. En effet, il a dit que j'avais été forcé de voter avec le gouvernement. Mon bilan montre—et je vais le prouver aux députés d'en face—que, plus souvent que n'importe quel député de l'opposition, j'ai voté librement au cours des deux derniers mandats et demi, et au sein du gouvernement.

Le président suppléant (M. Bélair): Je rappelle au député qu'il ne faut pas appeler ici les autres députés par leur nom. Le député devrait savoir cela, lui qui siège ici depuis sept ans.

Mme Val Meredith: Monsieur le Président, le fait est que les Canadiens veulent que cette affaire soit éclaircie. S'ils n'ont rien à cacher, s'ils n'ont aucune raison de ne pas déposer ces documents, pourquoi les députés ministériels et le premier ministre sont-ils alors tellement opposés à la tenue d'une enquête indépendante? S'ils n'ont rien à cacher, qu'y a-t-il de mal à tenir une enquête indépendante?

Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au député qui vient de prendre la parole à propos du prétendu acte de vente. Celui-ci a-t-il été signé devant témoin? Dans quelle ville ou quel village a-t-il été signé? Un registre montre-t-il que la vente a bel et bien eu lieu?

 

. 1040 + -

Mme Val Meredith: Monsieur le Président, je répondrai à la question du député que je ne sais même pas encore si les deux parties étaient dans la même pièce lorsque l'acte de vente a été rédigé. Aucun témoin n'a confirmé que les deux signatures sont bien les bonnes. Il n'y a aucun témoin et aucun seau d'entreprise confirmant que les deux personnes étaient dans la même pièce en même temps et précisant dans quelle province l'acte a été signé, donc, dans quelle province il pourrait être contesté.

C'est pourquoi nous avons besoin d'une enquête judiciaire afin que les données de base qui confirmeraient ou infirmeraient la valeur de cet acte puissent être présentées. Je le répète, ni une société immobilière ni une administration municipale n'auraient accepté un tel document.

M. Joe Jordan (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je dois féliciter l'opposition pour sa stratégie. Les deux premiers députés qui sont intervenus ont une vaste expérience de la question puisque je crois qu'ils ont tous deux perdu des poursuites pour libelles diffamatoires. L'opposition a vraiment confié le dossier à des professionnels.

J'ai cependant une question à poser à la députée qui, hier, à la Chambre, a fait de très sérieuses allégations contre le premier ministre. Elle a déclaré que le propriétaire de l'Auberge Grand-Mère avait juré sur la Bible qu'il existait une relation d'affaires entre son établissement et le terrain de golf Grand-Mère. J'ai ici la déposition de cet homme. La députée serait-elle prête à répéter ce qu'elle a dit à l'extérieur de la Chambre?

Mme Val Meredith: Monsieur le Président, il est intéressant de voir que les libéraux sont prêts à dire des choses sur nous ici. J'aimerais savoir si le député serait également prêt à répéter ses paroles à l'extérieur de la Chambre.

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je crois que vous constaterez qu'il y a unanimité sur la motion suivante:  

    Qu'à la conclusion du présent débat sur la motion de l'opposition, toutes les questions nécessaires pour disposer de cette motion soient réputées mises aux voix, que le vote par appel nominal soit réputé demandé et différé à mercredi, le 4 avril 2001, à la fin de la période prévue pour les ordres émanant du gouvernement.

Le président suppléant (M. Bélair): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Français]

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui au sujet de la motion du chef de l'opposition officielle demandant une soi-disant commission d'enquête indépendante sur les présumés conflits d'intérêts dans le dossier du club de golf et de l'Auberge Grand-Mère.

[Traduction]

Comme l'a expliqué le député et secrétaire parlementaire du premier ministre, le débat d'aujourd'hui repose essentiellement sur la crédibilité.

Les deux intervenants alliancistes qui m'ont précédé ont tous les deux fait l'objet de poursuites et été condamnés pour avoir dit des choses fausses sur des Canadiens. Évidemment, les deux ont fait des excuses publiques, dont certaines à la Chambre, comme chacun de nous s'en souvient fort bien.

Permettez-moi d'expliquer clairement l'objectif de la motion présentée aujourd'hui. Malgré le fait que le premier ministre ait été exonéré de tout blâme par le conseiller en éthique, malgré le fait qu'il ait répondu à d'innombrables questions à la Chambre, malgré le fait que la GRC ait déterminé que rien ne justifie la tenue d'une enquête criminelle à la suite de cet interrogatoire à l'aveuglette mené par l'homme à l'origine de ce débat et malgré le fait que le premier ministre ait pris des mesures sans précédent en déposant à la Chambre de nombreux documents personnels, l'opposition continue. Elle déplace sans cesse sa cible. Chaque fois qu'elle obtient ce qu'elle demande, elle veut autre chose.

[Français]

On ne peut que conclure que ce qui préoccupe le chef de l'opposition, c'est qu'il n'arrive pas à faire coïncider la réalité avec son imagination et ses désirs.

[Traduction]

Permettez-moi de réitérer ce que le premier ministre et le gouvernement disent depuis deux ans. La famille du premier ministre, avant les élections de 1993, détenait des parts dans un club de golf. Il y a à côté de là l'Auberge Grand-Mère, qui n'a absolument rien à voir avec le terrain de golf, si ce n'est le fait que, avec cinq autres terrains de golf, elle est située à proximité.

 

. 1045 + -

Le 1er novembre 1993, la société de portefeuille de la famille du premier ministre a vendu ses actions dans le club de golf à la société Akimbo Development, propriété de M. Jonas Prince. La transaction a été effectuée avant que le député de Saint-Maurice ne soit assermenté en tant que premier ministre. Au terme de la vente, la société de M. Prince devait de l'argent au premier ministre qui n'avait toutefois plus aucun intérêt dans le club de golf, comme nous le savons tous.

Le chef de l'opposition est au courant de tous ces faits. Il a vu l'accord de 1999 où la société Akimbo Development reconnaît ceci:

    Attendu qu'Akimbo a maintenant reçu avis juridique l'informant qu'elle est restée légalement titulaire des actions depuis le 1er novembre 1993, même si elle n'a participé à aucune des...

C'est donc dire que les propriétaires reconnaissent qu'ils détenaient les parts. Ils les ont vendues et il faut donc s'attendre à ce qu'ils aient été payés pour les parts qu'ils ont vendues. Tout le monde aura donc compris que le premier ministre et sa famille ne détiennent plus de parts dans l'entreprise dont il est question depuis 1993. Ces faits gênent-ils le chef de l'opposition? Bien sûr que non.

Le très hon. Joe Clark: Ils ne sont pas véridiques.

L'hon. Don Boudria: Le député de Calgary-Centre soutient que ces faits ne sont pas véridiques. Les faits ne coïncident pas avec tout ce qu'il a imaginé. La créance du premier ministre n'était aucunement touchée par la valeur du club de golf, nous le savons.

Le très hon. Joe Clark: Payait-il la même somme à la fin qu'au début?

L'hon. Don Boudria: Nous connaissons tous l'imagination qui anime le député de Calgary-Centre, qui soutenait que l'hôtel bénéficiait de la présence du club de golf, alors qu'il a été démontré au député que c'était l'inverse. Le club de golf, où je suis déjà allé, possède un bar qui fait concurrence à l'hôtel voisin. Ce que nous avons entendu il y a quelques semaines n'était donc que pure invention.

Je rappelle à la Chambre que lorsque le premier ministre a appris, en 1996, que la dette qui lui était due n'avait toujours pas été réglée, il a fait preuve à mon avis d'une très grande rigueur morale en informant le conseiller en éthique de la situation. Est-ce là l'attitude d'une personne qui entend violer un code de déontologie? Certainement pas. A-t-il tenté alors d'accroître de quelque façon que ce soit son profit? De toute évidence, non. Ce n'est pas ce qui s'est passé, et tout le monde le sait.

L'information est publique depuis deux ans. L'information divulguée la semaine dernière confirme ce que je viens de dire. Un contrat de vente exécutoire a été déposé à la Chambre des communes.

Une députée d'en face a dit qu'il n'y avait pas d'aspect financier. Elle est apparemment agent d'immeuble de profession. Je connais moi-même assez bien cette profession. Est-elle au courant qu'il ne s'agissait pas d'une transaction immobilière? La transaction portait sur des actions. Le sait-elle? S'en soucie-t-elle? Est-elle capable de faire la différence? Non. Elle prétend être spécialiste du droit civil du Québec...

Une voix: Achèteriez-vous une maison de cette femme?

L'hon. Don Boudria: Est-ce que j'achèterais une maison? C'est là une autre question. Je m'abstiendrai de parler d'immobilier, pour des raisons personnelles et familiales. Je ne me lancerai pas dans ce sujet.

Aucune des allégations ne s'est avérée.

Monsieur le Président, je précise que je partage mon temps de parole avec le ministre de l'Industrie.

M. Jay Hill: Pas question.

L'hon. Don Boudria: Il n'y a aucune règle qui précise quand il faut le dire et le député le sait bien.

[Français]

Je rappelle aux députés qu'en plus du prêt qu'elle a reçu de la Banque de développement du Canada, l'Auberge Grand-Mère, laquelle est la présumée raison pour les députés d'en face de soulever ce dossier, avait emprunté de l'argent de la caisse populaire locale et du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec.

Est-ce que ce sont des organismes qui sont reconnus pour être des amis personnels du premier ministre? On parle du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec. On n'a pas à être un génie pour comprendre la motivation de certains députés d'en face.

[Traduction]

Les faits sont clairs et le gouvernement les a exposés de façon claire et cohérente. La GRC a clairement fait savoir qu'aucune preuve de méfait n'a été établie relativement à cet interrogatoire à l'aveuglette. L'opposition a-t-elle une position claire? Pas du tout.

 

. 1050 + -

L'opposition fait preuve d'une mentalité de lynchage et change constamment les règles du jeu. La députée d'Edmonton-Nord a dit que le premier ministre pourrait mettre un terme à cette affaire en un clin d'oeil s'il déposait le certificat de vente. C'est ce qui a été fait. Le chef du Parti conservateur a fait une déclaration semblable.

[Français]

Le leader du Bloc québécois à la Chambre a dit clairement à la Chambre qu'il ne poserait plus de questions si les documents étaient déposés. Personne, de l'autre côté de la Chambre, n'a tenu parole dans ce dossier.

[Traduction]

Le comble de la stupidité a été atteint il y a une semaine à la Chambre lorsqu'un député de l'Alliance a demandé au premier ministre de déposer sa déclaration de revenu et celle de son épouse à la Chambre des communes, pour prouver leur innocence. C'est incroyable! Sur quel genre de principe juridique a-t-il donc fondé cette demande?

[Français]

Les gens d'en face, qui se disent défenseurs de l'intégrité et de la moralité, demandent au premier ministre et à sa femme de prouver leur innocence. A-t-on déjà entendu un concept comme celui-là? C'est une absurdité. C'est une insulte à l'endroit de ce grand serviteur du pays qu'est le premier ministre qui, dans quelques jours, célébrera 38 ans de service intègre à toute la population canadienne.

J'en profite aujourd'hui pour le féliciter pour la qualité de son travail, pour son dévouement aux Canadiens et pour son intégrité personnelle. On saura toujours que ce premier ministre est un grand premier ministre, qu'il a fait un boulot exceptionnel en remettant les finances du pays en ordre, en guidant ce pays et en menant, bien sûr, son travail à bon port, comme premier ministre.

Le premier ministre du Canada est un premier ministre intègre et on n'aura pas de cette sorte de cour de kangourou que le député d'en face veut à son endroit.

M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, chaque fois qu'il essaie de répondre aux questions, il soulève encore plus de questions, tout le temps. Les bloquistes, les alliancistes et les conservateurs, nous demandons tous les documents.

[Traduction]

Nous voulons tous les documents. Ils ne peuvent s'en tirer ainsi en déposant quelques lignes rédigées sur une serviette de papier et en laissant entendre que cela suffira.

Le premier ministre a affirmé que tous les documents avaient été déposés. Or, le lendemain, le propre conseiller en éthique privé du premier ministre a déclaré que tous les documents n'avaient pas été déposés. Il faut noter qu'il existe un document crucial, celui qui montrerait les noms inscrits au registre. Nous avons demandé précisément ce document. Je l'ai demandé par lettre écrite.

Le conseiller en éthique a dit que, lorsqu'il a reçu cette lettre et a demandé le registre pour voir les noms, on lui a répondu qu'on ne pouvait lui montrer le document ainsi que les noms qui y sont inscrits avant d'y avoir apporté quelques changements mineurs. C'est ridicule.

Le député, qui vient de faire une faible tentative en vue de défendre une série de contradictions et de conflits d'intérêts, a-t-il une vague idée du contenu de ce registre qui, en ce moment même semble-t-il, est en train d'être retouché, d'être modifié?

L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, l'honorable chef de l'opposition savait qu'il serait illégal pour moi d'avoir accès à ce document. Comment peut-on poser une question aussi ridicule en me demandant si je connais le contenu d'un document alors qu'il serait illégal pour moi de le connaître? De quel type de question stupide s'agit-il?

Le très hon. Joe Clark: Vous êtes ministre.

L'hon. Don Boudria: Le député, qui a été pendant une très brève période premier ministre jusqu'à ce qu'il finisse par savoir comment compter les voix à la Chambre des communes en 1979, devrait savoir qu'il a tort de se ranger du côté du chef de l'opposition. Le très honorable député de Calgary-Centre devrait adopter une position plus appropriée que celle que vient de défendre le chef de l'opposition.

 

. 1055 + -

Les documents ont été déposés et le chef de l'opposition le sait. Nos vis-à-vis demandent divers renseignements tout le temps. Ils se conduisent comme des lyncheurs qui tentent timidement d'attaquer ce grand homme qu'est le premier ministre du Canada.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, il y a la voix de la raison et de l'objectivité.

Chaque fois que les députés d'en face disent qu'il s'agit d'une campagne de détraction, d'une sorte d'attaque délibérée contre l'intégrité du premier ministre, ils devraient savoir à quoi s'en tenir là-dessus. Ces gens ont aiguisé leurs compétences quand ils étaient dans l'opposition en tant que membres de la «meute». Ils ont lancé des attaques personnelles sans précédent.

Ma question, qui s'adresse à l'honorable leader du gouvernement à la Chambre, concerne des transactions réalistes. Le leader du gouvernement à la Chambre a laissé entendre qu'il n'y a aucun lien entre cette auberge en difficulté et le club de golf. Pense-t-il vraiment que les Canadiens vont croire cela? S'attend-il à ce que les Canadiens acceptent que cet hôtel, qui a reçu plus de 600 000 $ de deniers publics, n'avait aucune incidence sur la réussite financière du club de golf que possédait le premier ministre? S'attend-il vraiment à ce que les Canadiens croient que si l'hôtel avait fait faillite, le club de golf n'aurait pas été touché? Est-ce là ce qu'il veut faire avaler aux Canadiens?

L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, la question est erronée. Le député a dit que le premier ministre était propriétaire d'un hôtel. C'est faux, et le député le sait fort bien. Les actions ont été vendues en 1993. Je viens de lire l'acte de vente daté du 29 septembre 1999, dans lequel la société Akimbo reconnaît qu'elle était propriétaire des parts et qu'elle les a vendues. Akimbo aurait eu beaucoup de difficulté à vendre quelque chose qu'elle ne possédait pas. On me dit que le député connaît bien le droit. On pourrait penser qu'il sait qu'on ne peut pas vendre quelque chose qu'on ne possède pas. C'est un concept qui n'est pas très difficile à comprendre.

Des voix: Oh, oh!

Le président suppléant (M. Bélair): À l'ordre, s'il vous plaît. Étant donné la nature délicate du débat, la présidence doit entendre ce que disent les députés. C'est un débat qui joue beaucoup sur les émotions. J'aimerais entendre ce que disent les députés, alors je vous demanderais de bien vouloir collaborer.

L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de prendre la parole pour participer à ce débat sur la motion du chef de l'opposition réclamant essentiellement la tenue d'une enquête publique sur les questions entourant l'affaire Shawinigan.

Il est déjà très clair que, quoi qu'on dise durant ce débat d'un côté ou de l'autre de la Chambre, les chances qu'on arrive à amener les députés d'en face à changer d'idée sont très minces. Les députés de l'opposition, sauf le NPD semble-t-il, ont uni leurs efforts dans ce qui est une campagne de salissage visant à ternir la réputation du premier ministre. Les députés de ce côté-ci de la Chambre croient que c'est ce qui se passe. Nous nous attendons à ce que cela continue pendant encore un certain temps, mais nous croyons que les Canadiens finiront pas insister pour que les députés des deux côtés se concentrent de nouveau sur les affaires du pays. Tout cela n'impressionne pas du tout les Canadiens.

Je m'adresse maintenant aux Canadiens et leur demande de considérer la source des allégations qui ont été faites ici aujourd'hui. Il vaut la peine de se rappeler que l'homme qui a déposé la motion, le chef de l'opposition, et celui qui l'a appuyée, également de l'opposition, ont, en l'espace de quelques années, soit eu affaire à la justice ou, dans un cas du moins, été menacés d'une poursuite devant les tribunaux.

M. Peter MacKay: Faites attention à ce que vous dites.

L'hon. Brian Tobin: Ce sont des faits. Le chef de l'opposition a coûté 800 000 $ aux contribuables de l'Alberta parce qu'il a fait de fausses allégations. Il a fallu procéder à un règlement à l'amiable et les Albertains ont dû payer une facture de 800 000 $.

 

. 1100 + -

L'homme qui, au nom de l'opposition officielle, réclame la tenue d'une enquête, est le même qui a coûté 800 000 $ aux contribuables de l'Alberta, à cause d'autres fausses accusations qu'il a faites ailleurs en tant que député d'une autre chambre.

Mais il a appris quelque chose. Il ne réitère plus maintenant ses fausses allégations en dehors de la Chambre. Il abuse des privilèges et de l'immunité que lui confère la Chambre.

Le chef de l'opposition a quitté parce que je l'ai prévenu qu'il venait de faire une déclaration. Il a prétendu que, au moment même où on se parle, Industrie Canada est en train de trafiquer les livres. Je lui ai crié que j'aimerais bien qu'il répète en dehors de la Chambre ce qu'il a dit à l'intérieur. Se voyant mis au défi, il s'est levé et a quitté la Chambre. Avec son intégrité et son courage habituels, il s'est enfui devant la bataille pour la vérité.

M. Philip Mayfield: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Sauf erreur, le Règlement interdit de parler de la présence ou de l'absence d'autres députés.

Le président suppléant (M. Bélair): Le message est fait. Le député a raison.

L'hon. Brian Tobin: Monsieur le Président, au sujet de la députée qui a appuyé la motion, les Canadiens se rappelleront l'allégation faite il y a quelques années par une députée, la même, qui avait affirmé qu'un fonctionnaire de longue date au sein des services de sécurité du Canada était un «espion russe».

Elle avait découvert, disait-elle, qu'il existait une taupe au sein des services de sécurité du Canada. Elle était allée à l'extérieur de la Chambre et avait rendu public un document qui salissait la réputation d'un fonctionnaire de longue date en affirmant qu'il y avait un espion au sein des services de sécurité du Canada. La députée qui vient d'appuyer cette grave motion a présenté des excuses sous la menace de poursuites. La députée a retiré son allégation parce qu'elle avait tort.

Quand nous entendons une grave allégation, il faudrait commencer par en considérer la source. L'allégation en l'occurrence provient de deux députés, qui ont tous deux fait de fausses affirmations, l'un à l'époque où il était député à l'assemblée législative de l'Alberta, et l'autre alors qu'elle était députée ici à la Chambre. Les deux en sont arrivés à un arrangement sous la menace de poursuites judiciaires. On a jugé que les deux avaient tenu des propos diffamatoires, et ce sont ces deux mêmes députés qui sont maintenant les principaux accusateurs du premier ministre. Nous devrions tenir compte de la source.

Un autre très honorable député s'est associé à cette petite charade, le très honorable chef du Parti conservateur, que je vois de l'autre côté de la Chambre depuis 20 ans. Il se dit intéressé à la vérité, à la justice et à la conduite selon les règles. Il dit qu'il n'est pas intéressé à disputer au faible chef de l'opposition, en voie d'effacement et de disparition, le titre de leader de la nouvelle droite unie lorsque la droite, aussi indisciplinée soit-elle, s'unira. Il dit que ce n'est pas ce qui est en train de se passer.

Non, il s'agit plutôt de la recherche acharnée, tenace, inlassable de la vérité. À quel point le député tient-il à rechercher la vérité? L'émission The Fifth Estate de la CBC a fait un documentaire soulignant que des fonds allemands, relativement à l'affaire Airbus, ont été utilisés pour transporter par avion des délégués, leurs femmes et leurs familles à un congrès du Parti conservateur et que des fonds ont servi à une série de dépenses pour emmener des délégués loin de celui qui était alors le chef du Parti conservateur. Quand on lui a demandé si tout cela était vrai, s'il s'inquiétait de ce que des partis politiques canadiens aient profité de fonds étrangers, il a dit qu'il répondrait dans ses mémoires.

Si l'on doit prendre au sérieux l'auto-description du chef du Parti conservateur comme étant quelqu'un qui se lève tous les matins avec la pensée de rechercher la vérité, peut-être bien que le chef de ce parti devrait commencer par sa propre cour et exiger la tenue d'une enquête pour déterminer ce qui s'est passé ce jour-là il y a si longtemps et où, selon une entrevue donnée par M. Karlheinz Schreiber lui-même à l'émission de la CBC The Fifth Estate, la direction de son parti lui a échappé à cause de fonds étrangers.

On ne peut croire le député quand il dit vouloir le respect de nos règles parlementaires, de nos institutions parlementaires et de nos partis politiques alors qu'il ferme les yeux sur cette histoire dont il est la victime au sein de son propre parti.

 

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Les faits sont simples. Les voici, et je conclurai là-dessus. Le premier ministre a vendu ses actions avant de devenir premier ministre ou du moins au moment où il l'est devenu, en 1993. C'est un fait. La GRC a enquêté sur l'affaire à la demande du chef du Parti conservateur. Elle a examiné les faits et fermé le dossier. Elle a fait savoir publiquement qu'il était inutile de pousser l'enquête plus loin, que rien ne justifiait la tenue d'une enquête. C'était une enquête indépendante.

Le conseiller en éthique est un fonctionnaire de longue date. C'est un ancien délégué et négociateur commercial qui a passé près de 30 ans de sa vie dans la fonction publique du Canada. Il a également examiné l'affaire à plusieurs reprises et fermé le dossier. La majorité des Canadiens, 82 p. 100 d'entre eux, disent qu'il est temps de tourner la page. Et 75 p. 100, soit plus que le nombre de Canadiens ayant voté pour le premier ministre aux dernières élections, disent que le premier ministre ne devrait pas démissionner. Le message des Canadiens aux députés est qu'ils veulent que nous nous occupions des vraies questions qui touchent le Canada et que nous mettions fin à cette farce.

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il est toujours intéressant d'entendre les interventions du député d'en face, un ancien membre de la «meute», qui était connu pour ses attaques personnelles mesquines à l'époque où il faisait partie de l'opposition.

Le ministre parle du chef de mon parti et d'une certaine action en libelle diffamatoire en Alberta. Je lui rappelle que le chef de mon parti y est allé de sa poche pour payer une partie des frais engagés. Il va également les rembourser, ce que je n'ai jamais vu faire chez les députés ministériels.

Le gouvernement a envoyé à un gouvernement étranger une lettre fallacieuse au sujet d'un ancien premier ministre. Il n'y avait rien de vrai dans cette lettre. Le gouvernement savait pertinemment qu'il était en train de dénigrer et de calomnier un ancien premier ministre. Il a dû, par la suite, verser aux avocats de ce premier ministre un dédommagement de 2 millions de dollars et payer de 3 à 4 millions de dollars en frais juridiques. Personne chez les gens d'en face ne s'en est excusé.

J'en viens à ma question, mais il est de notre droit de rappeler les faits. C'est ce même gouvernement qui a dépensé des millions de dollars pour l'aéroport Pearson, ce même gouvernement qui a dépensé des dizaines de millions de dollars pour l'acquisition d'hélicoptères.

Quand le ministre va-t-il cesser de dénigrer tous les députés de ce côté-ci de la Chambre et se décider à répondre aux questions graves qui lui sont posées? Les députés de ce côté-ci ont posé plusieurs questions auxquelles on n'a jamais répondu. La solution n'est pas dans le dénigrement. Personne ne cherche à dénigrer qui que ce soit à la Chambre. Nous voulons simplement obtenir des réponses à des questions fort simples. C'est ce que nous voulons entendre à la Chambre.

L'hon. Brian Tobin: Monsieur le Président, je suis heureux que le whip de l'autre côté se soit levé pour s'exprimer sur ce dossier. Je signale pour les députés qui ne le savent pas, et surtout pour les Canadiens qui regardent ce débat, que le député n'a pas toujours été dans les rangs de l'Alliance. Il était député conservateur sous la direction du l'ancien premier ministre Brian Mulroney.

Ce que le député déclare maintenant, et les Canadiens l'ont entendu eux-mêmes, je n'ai pas à m'en faire l'interprète, c'est que l'heure de la vengeance est arrivée. On assiste à l'explosion de la colère qui a attisé les débats qui ont eu lieu sur ce parquet durant la dernière administration conservatrice, au sein de laquelle le chef progressiste-conservateur actuel était député et ministre.

Le député qui vient de parler au nom de l'Alliance est aussi un ancien conservateur. Il vient de nous expliquer la raison d'être de ce débat à la Chambre. Il a décrit une bonne part des motifs qui animent son propre parti, dont plusieurs députés ont déjà été dans les rangs conservateurs, ainsi que les motifs qui animent le chef actuel du parti conservateur.

C'est l'heure de la vengeance. Oeil pour oeil dent pour dent. En visant l'actuel premier ministre, on cherche, de façon malencontreuse, dirais-je, à venger l'ancien gouvernement conservateur. Le Parlement n'a rien à voir là-dedans. Les allégations fantaisistes n'ont pas leur place ici. Bien honnêtement, les Canadiens n'accepteront pas cela.

L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, j'ai deux questions à poser au ministre de l'Industrie. Il a dit que nous devrions passer à autre chose, et je suis certes d'accord.

Selon un sondage diffusé en fin de semaine, la majorité des gens veulent que nous passions à autre chose. Toutefois, le même sondage précise également que 60 p. 100 des Canadiens souhaitent la tenue d'une enquête publique ou indépendante. Le ministre est-il d'accord? Cette façon d'agir permettrait d'évacuer cette question de la Chambre des communes et de revenir à d'autres sujets.

 

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Par ailleurs, dans chacune des provinces, le conseiller en éthique ou le titulaire d'un poste équivalent relève de l'assemblée législative et non du premier ministre. Le député ne convient-il pas que nous devrions mettre en oeuvre ce qui fut jadis une politique du parti libéral et veiller à ce que le conseiller en éthique relève du Parlement du Canada et non du premier ministre? Je m'attends à ce qu'il réponde de façon très brève et concise à ces deux questions.

L'hon. Brian Tobin: Monsieur le Président, je remercie le député de ses questions. Ces questions sont valables et, à mon avis, ont pour objet d'obtenir une réponse authentique.

Le député vient de la magnifique province de la Saskatchewan. Un des grands apports de la Saskatchewan au pays est la formation, le professionnalisme et l'intégrité de la GRC. La GRC est un des symboles du pays.

Dans tous les échanges bruyants qui ont marqué ce débat, nous avons oublié que c'est le chef du Parti conservateur qui a écrit à la GRC pour lui dire qu'il souhaitait dans cette affaire la tenue d'une enquête indépendante du Parlement ou des politiciens.

La GRC a donné suite à cette demande et a conclu que rien ne justifiait une enquête plus approfondie. Dès qu'il a pris connaissance de cette réponse, le chef du Parti conservateur, sans doute en raison de sa propre formation policière, s'est demandé si l'enquête avait été menée de façon appropriée.

La majorité des Canadiens reconnaissent que la GRC est irréprochable et qu'elle définit le sens même des mots intégrité et professionnalisme. Lorsque la GRC s'exprime, la majorité des gens acceptent ce qu'elle dit. C'est pourquoi les Canadiens disent qu'ils ne croient pas cette allégation et qu'il est temps de tourner la page et de revenir aux préoccupations réelles du Canada.

M. John Reynolds: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Lorsqu'il a répondu à ma question, le ministre a dit que j'ai siégé à la Chambre avec l'ancien premier ministre Brian Mulroney. Je n'ai jamais siégé à la Chambre avec l'ancien premier ministre.

Le président suppléant (M. Bélair): L'observation du député est notée.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, si le premier ministre avait agi avec respect et responsabilité envers cette Chambre, nous n'aurions pas ce débat aujourd'hui, puisqu'il y aurait déjà une commission d'enquête indépendante.

Je veux revenir à ce qui est à la base de cette affaire, en regardant ce qui est inscrit au code régissant les conflits d'intérêts, et citer quelques extraits. Parlant des ministres ou du premier ministre, la première exigence précise que:

    Il agira avec honnêteté ainsi que selon des normes supérieures en matière d'éthique de façon à préserver et à faire croître la confiance du public dans l'intégrité, l'objectivité et l'impartialité du gouvernement.

Le premier ministre a échoué à cette première exigence. La deuxième exigence dit que:

    Il doit exercer ses fonctions officielles et organiser ses affaires personnelles d'une manière si irréprochable qu'elle puisse résister à l'examen public le plus minutieux; pour s'acquitter de cette obligation, il ne lui suffit pas simplement d'observer la loi.

Cela prend plus que ça. C'est un deuxième échec du premier ministre en regard de cette exigence. Et je poursuis:

    Dès sa nomination, il doit organiser ses affaires personnelles de manière à éviter les conflits d'intérêts réels, potentiels ou apparents; l'intérêt public doit toujours prévaloir dans les cas où les intérêts du titulaire entrent en conflit avec ses fonctions officielles.

C'est un échec flagrant à ce titre aussi.

Revenons au premier conflit d'intérêts. Le premier ministre est intervenu auprès de la Banque de développement du Canada en faveur de l'Auberge Grand-Mère. Il a commis une faute à ce moment-là, parce qu'il savait fort bien qu'il y avait des liens d'intérêt financier entre l'auberge et le club de golf, tant et si bien que si l'auberge avait été fermée, imaginez la situation de ce premier ministre qui cherchait depuis six ans—il l'a admis à la Chambre—à se faire payer. On lui doit de l'argent. Il a intérêt à se faire payer.

Il l'a dit, je le comprends. Mais que fait-il? Ce n'est pas d'un citoyen dont on parle, c'est du premier ministre. Est-ce que le premier ministre a de bonnes chances de trouver un acquéreur après six ans d'efforts, si l'auberge était fermée pour cause de faillite? Il est là, le premier conflit d'intérêts.

Les intérêts personnels du premier ministre sont en conflit avec son rôle. Il aurait dû s'abstenir, plutôt que d'intervenir directement auprès du président de la Banque de développement du Canada. Rien ne l'obligeait à agir ainsi. Au départ, il y avait même un avis contraire de la direction régionale de la Banque de développement du Canada.

 

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Or, le premier ministre n'est pas n'importe lequel des députés. Il passe par-dessus l'avis de la direction régionale et appelle lui-même le directeur de la Banque, lequel il a lui-même nommé. Il le rencontre à trois reprises chez lui, entre autres, pour lui dire: «Il serait peut-être important que vous investissiez dans cette auberge.»

C'est cela, être en conflit d'intérêts, quand on s'assure que l'auberge soit ouverte, et pas en faillite, surtout lorsqu'on cherche un acquéreur pour ses actions, pour lesquelles on n'a pas réussi à se faire payer depuis six ans. Ce sont là des faits indéniables. Il est navrant de voir l'opposition à cette enquête, opposition qui vient du gouvernement, et qui nie ces faits.

J'ai rencontré un député libéral tout à l'heure et je lui demandais: «Avez-vous lu le contrat de 1999?» «Non, non. J'ai foi dans le premier ministre.» C'est ça; j'ai foi. Très responsable, comme attitude.

Le premier ministre s'est placé deux fois en conflit d'intérêts, soit en 1996-1997 et, en 1998, quand le premier ministre intervient, cette fois, auprès du ministère du Développement des ressources humaines pour lui demander de faire tout ce qui est légalement possible afin que la compagnie Placeteco reçoive une subvention de 1,2 million de dollars. Tout ce qui est légalement possible. Rappelons-nous une des exigences du code: non pas simplement d'observer la loi, mais qu'il n'y ait pas de conflit d'intérêts, même apparent.

Or, à qui appartient cette compagnie Placeteco? Elle appartient à M. Claude Gauthier, dont l'avocat est aussi actionnaire de la même compagnie alors en faillite, qui sera nommé, à l'encontre de toutes les règles, fiduciaire du ministère du Développement des ressources humaines—alors que cela ne doit pas exister—et qui se retrouve à être négociateur, en plus, de Placeteco. Le même homme s'assoyait deux fois avec lui-même pour obtenir un prêt de 1,2 million de dollars.

Au moment où le premier ministre cherche quelqu'un pour payer les parts pour lesquelles il n'a pas été payé, M. Gauthier, ce propriétaire de Placeteco, injecte dans le golf de Grand-Mère la modique somme de 525 000 $. Et cela se produit au moment même où le premier ministre cherche quelqu'un pour payer ses parts, où le golf ne doit pas faire faillite, et puis, ni l'auberge. Et M. Gauthier arrive avec 525 000 $, il se retourne et reçoit 1,2 million de dollars de la part du ministère du Développement des ressources humaines. Mais ce ne sont là que des hasards, vous en conviendrez.

Les intérêts du premier ministre sont directement en conflit avec son rôle de premier ministre. Non seulement ne devait-il pas intervenir auprès de la Banque, mais il ne devait pas intervenir non plus dans le cas de Placeteco pour obtenir une subvention, laquelle a été obtenue en vertu d'un fonctionnement qui n'a pas été régulier, et cela, même la ministre du Développement des ressources humaines a dû l'admettre en cette Chambre. Voilà le deuxième conflit d'intérêts.

Le troisième conflit d'intérêts, c'est quand on a déposé ces documents, et pas tous les documents, parce qu'entre 1993 et 1999, de l'avis même du supposé conseiller en éthique, qui n'a que le nom—c'est un as du camouflage, ce haut fonctionnaire, c'est le conseiller politique du premier ministre—qui dit que, pendant six ans, M. Chrétien disait: «Ces parts ne m'appartiennent pas» et M. Prince, le supposé acheteur disait: «Ces actions ne m'appartiennent pas», les parts étaient dans les limbes.

Pendant ce temps, le premier ministre se croyait au paradis, j'imagine, entouré de libéraux qui ne pouvaient pas le questionner. Il intervenait directement, parce qu'il cherchait quelqu'un pour payer ses parts. M. Prince ne l'avait pas fait, et le premier ministre l'a admis.

Or, le premier ministre signe ce contrat, en 1999—contrat tout à fait extraordinaire—où il dit, à l'article 2.1, qu'il renonce à tous droits de propriété. Dans mon livre à moi, quand quelqu'un renonce à des droits de propriété, c'est parce qu'il en a. Et en droit, on dit: «Les parties n'ont pas écrit pour ne rien dire.» Si on a écrit qu'il renonçait à des droits de propriété, il devait toujours bien en avoir.

 

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Le premier ministre, dans cette même convention, offre la garantie du vendeur. Si vous offrez une garantie de vendeur, c'est parce que vous avez quelque chose à vendre. Toutefois, le plus beau dans toute l'affaire, c'est qu'il trouve une âme charitable, un M. Michaud, un ami de longue date, qui, lui, va finalement supposément acheter les parts de M. Prince. Finalement, M. Prince est un intermédiaire dans l'histoire du golf. Il a agi comme caddy pour le premier ministre. C'est à peu près cela que fait M. Prince dans l'histoire.

Cela passe donc de la poche droite de M. Prince, à la poche gauche de M. Prince et, finalement, dans les culottes de M. Michaud. C'est tellement évident que le premier ministre, dans ce contrat, à l'article 3.6, prévient M. Michaud: «Écoutez, si jamais il y a une enquête, des préjudices, des dommages, ne vous en faites pas, ma compagnie, J&AC Consultants, va vous payer, paiera l'avocat s'il y a enquête.»

En connaît-on beaucoup de gens qui ne sont pas mêlés à une affaire et qui disent: «S'il y a un problème dans votre affaire, je vais payer pour vous». Moi, je n'en connais pas, des hommes charitables à ce point, qui se promènent, qui cherchent des gens en leur demandant: «Avez-vous un problème? Si vous en avez un, je ne suis pas mêlé là-dedans, mais je vais payer.» Voyons donc! À qui veut-on faire croire de telles choses?

Ce qui est le plus grave, c'est qu'on dit qu'il n'y aura pas d'enquête. Or, dans un premier temps, on a vu le premier ministre aider l'actionnaire, qui est lui-même, dans ce cas-ci. L'actionnaire—en signant ce contrat, parce qu'il est partie intégrante au contrat du 29 septembre 1999—empêche le premier ministre d'agir, parce que c'est très clair, si le premier ministre déclenche une enquête—il est le seul à pouvoir le faire, ce qui est aberrant aussi—, il doit déclencher une enquête sur lui-même et, qui plus est, si cela arrive, il va payer pour M. Michaud. C'est cela un conflit d'intérêts.

Les intérêts personnels du premier ministre lui interdisent d'agir en premier ministre responsable et intègre. C'est ça, le problème et le troisième conflit d'intérêts.

Pourquoi doit-il y avoir ce respect fondamental des règles d'éthique? Le premier ministre est celui qui occupe la fonction la plus importante. C'en est rendu que la population veut une enquête publique et ne croit pas le premier ministre. Bien sûr, la population dit: «Pourrait-on passer à autre chose?» Elle a raison. Quelle est la façon de passer à autre chose? Les libéraux lisent des contrats à moitié, comme ils lisent les sondages à moitié et comme ils font leur job à moitié.

Qu'est-ce que cela dit? Cela dit que si on veut mettre fin à ce débat-ci, il faudrait qu'il y ait une enquête, il faudrait que tous les documents soient rendus publics. La population dit: «On veut sortir de l'auberge, et c'est le premier ministre qui a la clé.» Il est temps qu'il ouvre la porte, qu'il décrète une enquête et on passera à autre chose. D'ailleurs, il ne répondront pas plus aux questions si importantes quand on les leur posera. Ce sera leurs vieilles habitudes de dire qu'on se trompe tout le temps. Mais tout le monde ne peut pas se tromper tout le temps. Et là, le premier ministre ne peut plus nous tromper.

Le message qu'il envoie en ne respectant pas les normes d'éthique, c'est qu'il est en train de nier tout ce qui faisait, selon lui, la base de sa carrière, soit l'intégrité. Il disait en 1993:

    Nous allons ramener l'honnêteté en politique. Un politicien n'est pas élu pour se servir, il est élu pour servir.

Je pense qu'il a oublié des mots. Cela lui arrive. Il a dû inverser les termes et il a compris que le politicien était là pour se servir, parce que c'est ce qu'il a fait. Il s'est servi dans cette affaire.

Il ajoute, ce cher premier ministre:

    J'ai fait la campagne électorale en parlant beaucoup d'intégrité et d'honnêteté. J'ai fait carrière en politique en sachant les dangers de la vie politique, et je pense que lorsqu'on est bien avisé, on ne succombe pas à la tentation.

D'abord, il était mal avisé, parce que s'il se fie sur le conseiller en éthique, on ne va pas loin avec cela. Cet homme n'avait même pas lu les documents qu'il disait avoir lu en campagne électorale, l'automne dernier. Il a dit: «J'ai tout vu». Il a tout vu ce qu'on a voulu lui montrer. C'est cela le problème. Il n'a pas vu grand-chose, le supposé conseiller en éthique.

 

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Le premier ministre méprise les règles d'éthique élémentaires. Il s'est fait élire deux fois sur ces règles d'éthique. J'ai toujours dit qu'il avait déclenché cette campagne électorale à l'automne parce qu'il ne voulait pas que ces choses-là sortent. C'est une des vingt enquêtes qui portent sur ce gouvernement.

Imaginons si on était maintenant à quelques semaines des élections. Ne pensez-vous pas que ça chaufferait dans l'auberge? Il y aurait au moins deux candidats à la succession, le ministre des Finances et celui de l'Industrie, qui feraient tout pour avoir un congrès, parce qu'ils se diraient: «Avec cet homme qui a joué avec les règles, on ne gagnera pas.»

C'est pour cela qu'il y a eu des élections à l'automne. On voulait agir pendant que la population était dans l'ignorance de ces choses, corroborées par un complice qui est le conseiller en éthique. C'est pour cela que la population en a assez. Elle en a assez des contradictions du premier ministre qui dit qu'il n'y a aucun rapport entre l'auberge et le golf. Eh bien, non. Quand vous avez une pancarte devant l'auberge, sur le terrain d'à côté, qui dit: «Fermé pour faillite», pensez-vous que cela aide beaucoup le golf?

M. Duhaime, qui témoignait sous serment le 2 novembre 2000 disait: «C'est bien évident, les clients, on les a à l'auberge, parce que les soupers du golf se passent à l'auberge.» L'auberge sert d'intermédiaire. Il n'y a pas de lien légal, bien sûr. On parle de liens financiers, de liens apparents, de liens qui peuvent exister, qui ont un intérêt à exister au-delà des liens légaux.

Il faut enlever le voile légal et juridique et voir ce qui se passe dans la vraie vie. Et cela, le propriétaire de l'auberge nous l'a dit.

Le premier ministre, qui était à l'inauguration de l'auberge, intervient deux fois auprès du ministère du Développement des ressources humaines et auprès de la Banque de développement. L'adjointe de comté du premier ministre intervient dans les négociations entre M. Duhaime et la Banque de développement. Lui-même supervise les transactions pour le nouvel acquéreur. Devinez qui est le nouvel acquéreur? C'est un des exploitants du golf, un ami du premier ministre. C'est un hasard, encore une fois. C'est plein de hasards cette histoire.

Le premier ministre dit qu'il n'avait plus de lien financier avec le golf. Quand j'ai demandé au supposé conseiller en éthique, M. Wilson, si le premier ministre avait un intérêt financier avec le golf, il m'a répondu: «Oh, yes!» C'est sorti très rapidement, tout naturellement. Il n'avait pas pensé à la camoufler celle-là. «Oh, yes», il a un intérêt.» Oui, il a un intérêt. Il a un grand intérêt et tout le monde comprend cela.

Ce fut confirmé par la suite, par M. Corriveau, qui est porte-parole de la famille Michaud, par Mme Mélissa Marcotte, qui a commencé à parler. Quand elle a commencé à parler et qu'on a vu que ce qu'elle disait avait du bon sens, on lui a dit: «Pourrais-tu te taire ma chère.» C'est en plein ce qu'elle a fait.

Le premier ministre nie toutes ces évidences. Il refuse de publier ses documents. Je disais au départ que son attitude était navrante. C'est tellement navrant, que lorsqu'il répète depuis une quarantaine d'années que sa carrière est bâtie sur l'intégrité, est-ce qu'il se rend compte qu'il est en train de la détruire?

Avec la dernière campagne électorale—probablement qu'elle sera sa dernière—, il l'a fait justement pour ne pas que cela sorte pendant la campagne. Pourquoi ne pas être à la hauteur de sa tâche, avoir la noblesse essentielle de dire: «On va faire une enquête. On va déposer tous les documents, pas les documents qui conviennent, pas les documents choisis par un supposé conseiller en éthique, qui est un conseiller politique, mais tous les documents. On aura cette commission d'enquête et, pendant ce temps-là, on passera à d'autres questions»? C'est cela exercer son devoir de premier ministre de façon responsable, avec du respect pour la tâche, au lieu faire comme il a toujours fait depuis 1993.

Rappelons-nous la TPS. On a entendu le premier ministre dire à la télévision, dans un vocabulaire particulier: «On va «scraper» la TPS.» Une fois rendu ici, il a mentionné qu'il n'avait jamais dit cela. Tout le monde l'a vu, c'était aux nouvelles. Il y a des vidéos. Si ce n'était pas lui, c'est un gars qui lui ressemblait pas mal. Tout le monde était convaincu que c'était lui.

À moins que le premier ministre ait fait comme ce député de l'Alliance canadienne, qui se faisait remplacer par son adjoint, et que son adjoint lui ressemblait beaucoup. Peut-être que c'était cela. C'était un gars qui disait qu'on allait «scraper» la TPS. Le député de l'Alliance, lui, s'est excusé. Il a pris ses responsabilités, alors que le premier ministre continue de nier l'évidence. Il pense qu'en niant continuellement, le monde va finir par oublier.

 

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Au Québec, il y a un poète, Gilles Vigneault, qui a écrit une chanson sur un M. Lachance—je ne donnerai pas son prénom, ici, à la Chambre, car ce ne serait pas tellement bien—qui se terminait ainsi: «Si tu penses qu'on ne s'en n'aperçoit pas...» Eh bien, on s'en aperçoit.

De notre côté, tout ce que nous avons dit à la Chambre, nous l'avons répété à l'extérieur. J'en ai dit beaucoup plus à l'extérieur qu'ici. On ne peut pas dire que quelqu'un nous a menti ici, donc, je ne l'ai pas dit. Mais à l'extérieur, je ne m'en suis pas privé. Or, je suis prêt à affirmer tout ce que j'ai affirmé ici.

Quand nous avons demandé de publier l'acte de vente, parce que cela mettrait fin au dossier, c'est parce qu'on croyait le premier ministre de bonne foi. Quand nous avons tout vu, on s'est aperçu que ce n'était pas le cas. Les documents nous prouvent le contraire, et la bonne foi du premier ministre n'existe plus.

M. Eugène Bellemare (secrétaire parlementaire de la ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, le chef du Bloc québécois associe le club de golf Grand-Mère à l'Auberge Grand-Mère pour des raisons purement politiques.

J'aimerais lui poser une série de questions. L'auberge a obtenu un emprunt de la caisse populaire et un emprunt du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec. Je lui demande quel était le montant des demandes d'emprunt? N'était-ce pas de deux millions de dollars? Quel a été le montant de l'emprunt à la Banque de développement? N'était-il pas de 615 000 $? À quel taux d'intérêt? N'est-ce pas à un taux de 25 p. 100, alors qu'aujourd'hui, les taux d'intérêt se situent entre 7, 8 ou 9 p. 100? Quelle faveur a eue l'auberge?

Il y a des centaines de clubs de golf au Québec. Les clubs de golf n'ont pas besoin d'un hôtel avoisinant. Très peu de clubs de golf n'ont pas leur propre club house. En ce qui concerne le premier ministre, il n'était pas propriétaire du club de golf Grand-Mère, il en était copropriétaire. Il détenait peut-être 25 p. 100 des parts.

Je demande au chef de l'opposition quel était le pourcentage des parts que le premier ministre détenait et à quelle date a-t-il vendu ses parts, et non pas à quelle date a-t-il possiblement vendu tout le club de golf qui ne lui appartenait pas?

M. Gilles Duceppe: Monsieur le Président, je trouve intéressante la dernière remarque du député qui me demande à quelle date le premier ministre a vendu tout le club de golf qui ne lui appartenait pas. Je trouve qu'il y a là une logique intrinsèque que je recherche encore.

Deuxièmement, quelles étaient ses parts dans le club de golf? Justement, c'est une bonne question. Nous ne le savons pas. Dans un document, on dit 25 p. 100, et dans un autre, c'est 22 p. 100. C'est une contradiction, je l'avais oubliée celle-là. Je remercie le député de m'y avoir fait penser.

Troisièmement, il dit qu'il y a beaucoup de clubs de golf au Québec. Oui, mais combien y a-t-il de clubs de golf où le premier ministre est intervenu directement pour en favoriser la vente? Combien y en a-t-il à part celui de Grand-Mère?

Il nous dit que le Fonds de solidarité et la caisse populaire ont versé de l'argent à l'Auberge Grand-Mère. So what? Il y a cependant une chose que je sais: le président du Fonds de solidarité, M. Bachand, lui, n'avait pas d'intérêts dans le club de golf, parce qu'il aurait été en conflit d'intérêts. Le président de la caisse populaire n'avait probablement pas d'intérêts non plus. La différence est là.

Le premier ministre, qui est premier ministre d'une affaire qui s'appelle «le Canada»—ce n'est pas une «peanut shop»—c'est la fonction la plus importante au pays, intervient directement alors qu'il a des liens financiers dans l'affaire.

Troisièmement, quel lien y a-t-il? Je demanderais au député s'il pense qu'une auberge adjacente au club de golf...

M. Benoît Sauvageau: Qui a la même adresse.

M. Gilles Duceppe: Bof, oublions même l'adresse. Vous cherchez quelqu'un pour payer vos parts—22 p. 100 ou 25 p. 100, on ne le sait pas, mais si jamais le député le demande au premier ministre peut-être lui répondra-t-il à lui, ce qu'il pourrait lui demander demain matin au caucus—pensez-vous que c'est une bien bonne nouvelle s'il entre, à un moment donné, à son chalet, et qu'il passe devant l'hôtel et voit «Fermé pour cause de faillite»?

 

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Que pense le premier ministre? Il dit: «Il faudrait que je m'occupe de ça, parce que je ne serai jamais payé. Je ne trouverai pas d'acquéreur pour mes parts si c'est fermé pour cause de faillite.» C'est cela la réalité.

Il n'est pas nécessaire d'avoir un baccalauréat en économie des HEC pour comprendre cela. N'importe qui peut le comprendre.

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Monsieur le Président, j'ai ici la lettre des avocats de la société à laquelle appartient le club de golf. Cette lettre a été présentée au Comité permanent de l'industrie.

Le quatrième paragraphe dit:

    Le conseil d'administration a approuvé le 1er novembre 1993 le transfert en faveur de Akimbo Development Corporation de toutes les actions de la société détenue par J.C. Consultants Inc. À partir de cette date, J.C. Consultants Inc. n'apparaît plus aux résolutions des actionnaires de la société et [...]

Ici, on nomme le premier ministre.

      [...] n'apparaît plus aux résolutions des administrateurs de la société;

Pourquoi le chef du Bloc n'accepte-t-il pas cette lettre des avocats bien connus, Pouliot et Mercure, qui sont les avocats de la société? Pourquoi n'accepte-t-il pas que la vente ait eu lieu en 1993?

M. Gilles Duceppe: Monsieur le Président, d'abord, ce n'est pas J.C. Consultants, c'est J&AC Consultants. Je voudrais le lui faire remarquer.

Ensuite, pourquoi je ne l'accepte pas? Parce que je n'accepte pas les choses de bonne foi. Je prends le temps de vérifier et je ne gobe pas des choses qui masquent la réalité.

Entre autres, sur cette feuille, je m'en rappelle fort bien, les avocats parlent du 29 février 1999. C'est une date qui n'existe même pas. Ils pourraient toujours consulter un calendrier. Cela fait partie de ce sérieux document.

Mais si je ne l'accepte pas, c'est aussi parce qu'il y a un autre document, la clause 2.1, du 29 septembre 1999, où le premier ministre dit qu'il renonce à ses droits de propriété en 1999. Comment pouvez-vous renoncer à des droits si vous n'en avez plus depuis 1993?

Deuxièmement, pourquoi le premier ministre, dans sa grande bonté j'imagine, dit: «Si jamais il y a un problème pour celui qui a supposément acheté les parts de celui à qui je les avais vendues, mais qui ne m'a jamais payé, s'il se retrouve dans le trouble, ma grande bonté d'âme va m'amener à payer pour ses avocats»?

Trouvez-vous cela normal? Vous pensez que cela se passe ainsi dans la vraie vie? Si vous trouvez ça normal, si jamais j'ai un problème, je vais vous inviter, cher ami, à payer mes avocats.

[Traduction]

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, tout d'abord, je vous informe de mon intention de partager mon temps de parole avec le leader du NPD à la Chambre, le député de Winnipeg—Transcona.

Permettez-moi de dire, tout à fait clairement et sans équivoque, que le Nouveau Parti démocratique appuie la demande de mettre sur pied une commission d'enquête indépendante chargée de se prononcer sur le comportement du premier ministre en ce qui concerne ses intérêts financiers liés à l'Auberge Grand-Mère.

En outre, nous convenons aussi que les pouvoirs de la commission d'enquête et son mandat doivent être suffisamment larges afin que tous les documents nécessaires puissent être présentés à la commission et que tous les témoins pertinents puissent comparaître devant elle de sorte que toute la vérité soit connue.

Une enquête est devenue nécessaire afin de régler la question de manière satisfaisante, de jeter la lumière sur les allégations au sujet du comportement du premier ministre et, de façon tout aussi importante, de permettre aux députés de revenir aux questions nationales.

Permettez-moi de dire qu'il est regrettable que l'affaire de l'Auberge Grand-Mère ait atteint ce stade, car cela aurait pu être évité.

Si le premier ministre avait respecté son engagement envers les Canadiens de faire en sorte que le conseiller en éthique ne relève plus de lui, mais plutôt du Parlement, et qu'il soit sous la supervision d'un comité multipartite, le Parlement ne serait pas rendu à un point où ce dossier l'empêche presque de continuer de s'acquitter de ses responsabilités.

 

. 1140 + -

Si le premier ministre ne s'était pas livré à un strip-tease juridique virtuel ces derniers mois, en divulguant des documents un à un et choisis avec soin, pendant que de nombreux autres sont toujours retenus, les Canadiens n'en seraient pas rendus aujourd'hui à regarder cette affaire avec horreur et à se demander ce qu'il faut faire pour aller au fond des choses, comme il se doit.

Le Parlement ne serait pas paralysé aujourd'hui si on avait rapidement donné suite à la plainte qui a été déposée et à la demande d'enquête faite par le député de Regina—Qu'Appelle au conseiller en éthique. Je le dis avec regret parce que mes collègues et moi avons tenté de donner le bénéfice du doute au conseiller en éthique, dont le mandat est indûment limité et qui a vu son indépendance restreinte par le refus du premier ministre de créer une charge de conseiller en éthique sur une base adéquate.

Il y a deux ans et deux semaines, le 19 mars 1999, mon collègue de Regina—Qu'Appelle a écrit au conseiller en éthique pour lui faire part de ses inquiétudes au sujet de la conduite du premier ministre. Permettez-moi de citer brièvement la lettre qu'il a envoyée à Howard Wilson, le conseiller en éthique. Le député se demandait si le premier ministre n'avait pas contrevenu à certaines dispositions du code sur les conflits d'intérêts, plus précisément à l'article 2 de la partie I, qui stipule que le code a pour objet:

      ...d'accroître la confiance du public dans l'intégrité des titulaires de charge publique et dans le processus de prise de décisions du gouvernement.

Dès le départ, le premier ministre a semblé faire preuve d'un grave manque de jugement dans l'affaire de l'Auberge Grand-Mère.

L'affaire a fini par soulever des questions plus graves et le député de Regina—Qu'Appelle a écrit, dans la même lettre adressée au conseiller en éthique, qu'à son avis le premier ministre ne s'était pas conformé au paragraphe 23(1) de la partie II du code, qui stipule:

    Le titulaire d'une charge publique doit éviter de se placer ou de sembler se placer dans des situations où il serait redevable à une personne ou à un organisme, ou encore au représentant d'une personne ou d'un organisme, qui pourrait tirer parti d'un traitement de faveur de sa part.

La réponse du conseiller en éthique, selon qui il n'y avait aucun problème, était pour le moins troublante. Il n'est pas nécessaire d'avoir un diplôme en droit ou de posséder beaucoup d'expérience politique, mais seulement d'avoir un peu de bon sens, pour comprendre que le premier ministre s'est placé, par sa conduite, dans une situation pour le moins douteuse, en raison des intérêts financiers qui risquaient d'être mis en cause et des avantages évidents que le premier ministre était susceptible d'en retirer.

Il est regrettable que nous en soyons arrivés là dans cette affaire car, au moment même où nous parlons, le premier ministre et son gouvernement sont très occupés à vendre des pans entiers de l'avenir du Canada en signant des accords commerciaux désavantageux et en permettant l'érosion d'importants services publics, de programmes et d'institutions.

À quoi passons-nous notre temps? Nous sommes empêtrés dans un débat sans fin, incapables de résoudre la question de la vente, ou de la non-vente, des actions détenues par le premier ministre dans un terrain de golf et des intérêts financiers associés à cette vente. Pour l'amour du ciel!

 

. 1145 + -

Les Canadiens ont dit clairement qu'ils voulaient que cette affaire soit tirée au clair, mais aussi qu'ils voulaient que le Parlement s'attaque aux vraies questions qui touchent la vraie vie des vraies personnes.

Je ne suis pas d'accord avec grand-chose qu'ait dit le ministre de l'Industrie ces derniers mois au sujet de cette sordide affaire. Toutefois, je suis d'accord avec lui quand il dit que cette farce doit prendre fin. Ce que ne dit pas le ministre de l'Industrie, et il sait pertinemment que c'est la vérité, comme le savent aussi tous les autres députés de la Chambre, c'est que la seule manière de mettre fin à ce spectacle est que le premier ministre, la seule personne qui ait le pouvoir et l'autorité, et indubitablement la responsabilité de mettre fin à cette affaire, prenne les mesures qui s'imposent. Il doit ordonner la tenue d'une enquête indépendante afin que la vérité sorte.

C'est l'entêtement et l'acharnement avec lesquels le premier ministre refuse de faire la lumière sur cette affaire qui sèment la consternation parmi les Canadiens. Ce n'est pas le moment pour nous, parlementaires, que nous soyons sur les banquettes ministérielles ou sur celles de l'opposition, de nous payer le luxe de ne pas tenir compte de l'érosion de la confiance du public dans les politiciens et la politique.

Je veux qu'il soit clair que, dans cette affaire, tous les membres de l'opposition font front commun. C'est probablement l'une des rares fois dans la vie du Parlement où nous soyons tous du même avis, à savoir que le premier ministre doit mettre fin à la paralysie qui immobilise le Parlement et lancer le processus qui permettra de restaurer la confiance du public dans les titulaires de charge publique et dans la conduite de leurs représentants élus. Il doit ordonner la tenue d'une enquête indépendante de manière à ce que nous puissions recommencer à nous occuper des préoccupations des vraies personnes au sujet des vraies questions.

[Français]

L'hon. Denis Coderre (secrétaire d'État (Sport amateur), Lib.): Monsieur le Président, quand on énonce des propos, on doit avoir une certaine crédibilité.

Ce chef du NPD qui prône la désobéissance civile—elle prend des cours de désobéissance civile présentement—et qui dit aux Canadiens de désobéir à la loi, cette même personne vient entacher la crédibilité de notre premier ministre. C'est honteux.

Étant donné que non seulement on a décidé de cet enjeu lors de la dernière campagne électorale, et que, depuis les deux dernières années, on a répété les mêmes affaires et que cela a toujours été la même cassette, je dirais à cette députée que, si elle ne veut pas faire partie du cirque, elle n'a qu'à ne pas embarquer dans cette chose. Je pensais qu'elle était beaucoup plus sérieuse.

Croit-elle qu'il soit intègre et correct de faire de la désobéissance civile, quand elle essaie de faire des remontrances à notre premier ministre, qui est un modèle d'intégrité et de crédibilité de la vie publique depuis les 40 dernières années?

[Traduction]

Mme Alexa McDonough: Monsieur le Président, quelles tactiques de diversion! Je vais répondre directement à la question et aux allégations.

Je fais partie des nombreux Canadiens, des centaines de milliers et peut-être même des millions de Canadiens qui considèrent qu'il est abominable qu'un membre du gouvernement puisse se lever à la Chambre des communes et qualifier de cirque la protestation paisible, légitime et éloquente de Canadiens contre un accord commercial qui menace d'hypothéquer gravement notre avenir.

 

. 1150 + -

La Chambre se trouve maintenant dans un état de paralysie parce que le premier ministre refuse obstinément de résoudre une question gravement dommageable à la confiance de la population envers sa conduite et son gouvernement. Pendant ce temps, les libéraux tentent de faire passer l'accord sur la zone de libre-échange des Amériques sans véritable consultation des citoyens et sans transparence aucune quant à l'objet des négociations, ce qui dénote que les droits du gouvernement d'agir au nom des citoyens du pays et d'être responsable envers eux s'effritent de plus en plus.

Si le député veut qualifier de cirque une protestation paisible, légitime et éloquente, alors j'affirme que ses propos seront retenus comme étant du même acabit que le refus du premier ministre de faire le point sur le Shawinigate.

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une brève observation à faire. La députée a évoqué la démocratie. La démocratie, c'est diriger selon des règles. J'ai été consterné, car j'ai cru in instant que le Nouveau Parti démocratique avait décidé de ne pas s'engager dans cette enquête maccarthyste.

Permettez-moi juste de citer ce qu'a déclaré la députée du NPD l'autre jour quand le chef du Parti conservateur voulait la recruter. Elle a dit qu'elle ne voulait pas s'engager. Elle voulait que la Chambre s'occupe des affaires de la nation.

La GRC et le conseiller en éthique ont exonéré le premier ministre. On a répondu non pas une fois, mais trois fois, au député de Regina—Qu'Appelle. À quand la fin?

Mme Alexa McDonough: Monsieur le Président, je me suis efforcée d'entendre une question, mais je n'en ai pas entendue. Cependant, permettez-moi de saisir l'occasion pour dire de nombreux journalistes m'ont demandé à plusieurs reprises, pas plus tard que ce matin, si je pense vraiment que les députés d'arrière-ban se sentent à l'aise devant le refus du premier ministre de mettre les choses au clair à la Chambre.

Il y a deux grands sujets que suivent les Canadiens quelque peu horrifiés. Est-ce que je pense que tous les députés d'arrière-ban approuvent la décision du gouvernement de diaboliser la dissension autour des négociations de la ZLEA? Je ne peux pas répondre à cette question à la place des députés d'arrière-ban, mais je sais que, s'ils défendaient sérieusement les intérêts des citoyens et faisaient preuve du moindre courage, ils n'agiraient pas comme des singes savants pour le gouvernement au sujet de la ZLEA ou de Shawinigate. Ils se lèveraient et exprimeraient les préoccupations de leurs électeurs au sujet de la paralysie du Parlement.

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, c'est pour moi un plaisir et un honneur de participer au débat d'aujourd'hui avec mon chef, la députée de Halifax.

J'ai écouté avec attention, mais non sans dégoût, bien des choses qui se sont dites du côté ministériel non seulement aujourd'hui, mais aussi à d'autres occasions, pour défendre le premier ministre.

C'est probablement à cause de ma formation, mais cela m'a rappelé des passages de la Bible au sujet de ceux qui ont des oreilles pour entendre et des yeux pour voir, mais qui n'entendent et ne voient rien. Une formulation plus moderne serait de dire qu'il n'y a pas de pire aveugle que celui qui ne veut pas voir.

Les députés ministériels me semblent atteints de ce type de cécité dlibérée. Ils refusent de voir qu'il y a un vrai problème dans la façon dont le premier ministre s'est comporté relativement à ses parts dans le terrain de golf Grand-Mère et dans les différentes démarches qu'il a faites pour garantir l'avenir de l'Auberge Grand-Mère. Je songe notamment à ses appels au président de la Banque de développement du Canada et à ses démarches auprès de lui pour obtenir un prêt pour cet établissement.

Je me rappelle aussi la parabole qui condamne ceux qui voient la paille dans l'oeil du voisin mais non la poutre dans le leur.

 

. 1155 + -

On a souvent vu des députés s'en prendre personnellement à d'autres députés, ce qui ternit la réputation de la Chambre et explique en partie le peu de considération des Canadiens envers la politique et les politiciens.

Quand des députés se sont levés, on a fréquemment entendu des ministériels faire des commentaires sur le chef de l'opposition et les problèmes qui lui a causés une action en libelle diffamatoire en Alberta. On a fait allusion à ce qui était arrivé au député qui siège à ma gauche quand il fréquentait la faculté de droit. On a fait toutes sortes d'observations qui n'avaient absolument rien à voir avec le caractère légitime ou illégitime d'une demande d'enquête, ou encore avec les allégations qui sont à l'origine de cette demande.

Personne n'y gagne à entendre le ministre de l'Industrie parler de ceux qui ont fait ces allégations et qui réclament la tenue d'une enquête. On a vu récemment un député libéral se lever et, au lieu d'interroger le chef de mon parti sur son discours, alléguer que les néo-démocrates suivaient une formation pour recourir à la désobéissance civile au sommet de Québec. D'abord, cette allégation est fausse parce que la formation a trait à la manière de se comporter quand la police vient au-devant des manifestants, et n'a rien à voir avec le recours à la désobéissance civile et le fait de se faire arrêter. Même si c'était vrai, qu'est-ce que cela aurait à voir avec la qualité ou la légitimité de la demande d'enquête? Tout cela ressemble à un jeu inutile. Quelqu'un fait une demande légitime et certains se lèvent pour dire que sa mère, son père ou son grand-père a fait ceci ou cela hier. Il ne faut pas s'étonner si les Canadiens n'ont pas une haute opinion de la Chambre.

À mon avis, les libéraux ont tellement l'habitude du népotisme, tellement l'habitude de garnir leur propre nid et celui de leurs amis qu'ils n'arrivent même plus à se rendre compte du moment où le favoritisme, qui est discutable en lui-même, particulièrement au niveau auquel les libéraux le pratiquent, se transforme en conflit d'intérêts. Je crois franchement que c'est ce qui est arrivé dans le cas du premier ministre. À un certain point, le favoritisme est devenu conflit d'intérêts et il ne s'en est pas réellement rendu compte en raison de l'arrogance manifeste dans tout cela. On semble croire que notre échiquier politique ne compte qu'un seul parti. Notre culture politique semble basée sur un seul parti et les libéraux peuvent faire pratiquement tout ce qu'ils veulent.

C'est le genre d'attitude qui imprègne tout ce qui a trait à l'affectation des fonds publics. On le constate non seulement dans les agissements du premier ministre, mais également dans les interventions de la Banque de développement en général. On le constate aussi dans le cas de la Société pour l'expansion des exportations et dans celui de l'Agence canadienne de développement international. On l'a également constaté à de nombreuses reprises l'an dernier lorsqu'il a été question de la façon dont les fonds publics étaient dépensés à DRHC.

Tout est fait dans une optique politique, que ce soit dans le sens collectif du terme ou qu'on veuille récompenser des amis libéraux de leur appui. Dans le cas présent, cet argent devait servir à un hôtel, une affaire dans laquelle le premier ministre avait des intérêts personnels.

L'un des arguments les plus curieux que j'aie entendus, et ce de la bouche du ministre de l'Industrie encore une fois, c'est que puisque le premier ministre a perdu de l'argent, cela réglait le cas. Le ministre de l'Industrie n'a-t-il pas pensé que ces actions pouvaient prendre de la valeur ou en perdre, contrairement à ce que le vice-premier ministre a laissé croire lorsqu'il a affirmé en Chambre que le prix des actions était fixé et quoi que le premier ministre fasse, cela ne changeait rien?

 

. 1200 + -

Nous avons découvert que ce n'était pas vrai, comme d'ailleurs bien d'autres choses qui ont été dites ces derniers mois. Le prix des actions pouvait changer. À la fin, les actions valaient moins que le prix que demandait à l'origine le premier ministre. Cet argument était censé nous clouer le bec, mais si la valeur des actions fluctuait, alors, le premier ministre a perdu de l'argent. Toutefois, il aurait pu en perdre plus comme il aurait pu en perdre moins.

Le ministre de l'Industrie croit-il que les Canadiens, les membres des médias et les députés sont nés de la dernière pluie? Si la valeur des actions pouvait changer, il est évident qu'elle pouvait augmenter ou diminuer. C'est exactement pourquoi on s'intéresse au comportement du premier ministre entre 1993 et 1999, entre la signature de l'acte de vente original et le moment où la vente a été finalisée. Nous voulons savoir ce qui s'est passé entre-temps. Est-ce si déraisonnable?

Je me souviens que je suis intervenu à la Chambre pour réclamer que le premier ministre diffuse tous les documents pertinents. Le problème, c'est qu'il ne les a pas tous diffusés et qu'il ne semble pas avoir l'intention de le faire. Il faut absolument une enquête pour déterminer ce qui s'est produit pendant cette période. Pourquoi le faut-il? Pour un certain nombre de raisons.

Personnellement, je préférerais que l'enquête finisse par blanchir le premier ministre. Je ne veux pas vivre dans un pays où le premier ministre se trouve dans une situation de conflits d'intérêts. Je ne veux pas vivre dans un pays où l'on ne sait jamais de façon certaine si le premier ministre s'est mis en situation de conflit d'intérêts. Je préférerais de beaucoup vivre dans un pays où toute allégation sérieuse de conflit d'intérêts fait l'objet d'une enquête et où une affaire de ce genre est résolue et éclaircie au bénéfice de tous.

Une autre raison est que le Parlement doit pouvoir faire davantage ce qu'il est censé faire. Les députés ministériels ont été très malins à cet égard. Ils demandent pourquoi l'opposition ne s'enquiert pas de telle ou telle autre chose, mais, lorsque nous le faisons, nous n'obtenons pas une meilleure réponse de toute manière. C'est certes ce qui est arrivé la semaine dernière. On l'a bien rapporté et les députés ministériels ont dû répondre de cela.

J'attire l'attention de la Chambre sur des allégations de conflit d'intérêts qui ont été faites dans un autre endroit, en mai 1986, contre mon bon ami, l'ancien ministre manitobain de l'Énergie, Wildon Parasiuk. Qu'a fait celui-ci? Il a tout de suite démissionné. L'ancien juge en chef du Manitoba, Samuel Freedman, a été chargé de mener une enquête. En août, Wildon Parasiuk faisait à nouveau partie du Cabinet manitobain parce qu'il avait été établi que les allégations n'étaient pas fondées. N'est-ce pas là un meilleur scénario pour le premier ministre?

Je ne veux pas dire que le premier ministre devrait démissionner, mais on pourrait certes tenir une enquête. On pourrait obtenir à un moment donné un jugement sur ce qui s'est passé au juste. Ce serait beaucoup mieux que ce que le premier ministre a fait jusqu'à maintenant.

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec un certain amusement que j'ai écouté les néo-démocrates exprimer leur position là-dessus. Notre collègue vient de mentionner qu'il n'y a pas plus aveugle que celui qui ne veut pas voir, mais je pense qu'avec cette alliance peu orthodoxe entre les partis d'opposition, il s'agit davantage pour nos vis-à-vis de s'imiter les uns les autres.

Le chef des conservateurs, des progressistes-conservateurs, a lancé une inquisition personnelle contre le premier ministre, et les autres partis d'opposition ne veulent pas être en reste.

Le député a dit que le gouvernement jouait au malin dans cette affaire. Je pense que le NPD essaie pour sa part de souffler le chaud et le froid en même temps. Il essaie de faire partie de l'attaque, mais il reconnaît qu'il est nécessaire de se pencher sur les problèmes importants auxquels notre pays doit faire face. Il cherche à ménager la chèvre et le chou.

J'ai demandé au chef du Bloc québécois pourquoi il n'accepte pas la lettre du 20 mars du cabinet Pouliot, Mercure, les avocats de la société qui possèdent le club de golf de Grand-Mère. Cette lettre confirme qu'on a adopté une résolution confirmant la vente en 1993. Pourquoi cela ne met-il pas un terme à l'affaire?

 

. 1205 + -

M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, j'ignore si le député parlait d'une question qu'il a posée au chef du Bloc dans le passé ou s'il me pose la même question qu'il a adressée au Bloc. Je ne pensais pas être devenu séparatiste au cours de mon discours.

Le député a parlé de la position du NPD à cet égard. Notre position se défend. Comme le député le sait, nous avons parlé du «Shawinigate» à la Chambre. Nous avons demandé au premier ministre de déposer les documents. Nous avons réclamé une commission d'enquête. Nous l'avons fait à un certain nombre de reprises. Avons-nous fait cela à l'exclusion de toute autre chose? Non. Nous reconnaissons que d'autres problèmes se posent.

Nous avons posé des questions sur l'eau, sur l'accord de Kyoto, sur le Sommet des Amériques à Québec, sur les soins de santé et sur l'infrastructure. Nous avons posé un certain nombre de questions. Je ne pense pas que c'est essayer de ménager la chèvre et le chou. Il s'agit plutôt de faire son travail.

On doit discuter de bien des choses dans cette enceinte. Nous avons contribué au débat sur le «Shawinigate» à la Chambre, ainsi qu'au débat sur d'autres questions. C'est un comportement approprié de notre part.

Le document dont le député parle est une des choses qui devrait faire l'objet d'une enquête, pour voir si ce document concorde avec beaucoup d'autres documents qui ont été déposés et s'il est aussi suffisant que le député le prétend.

M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.): Monsieur le Président, je veux revenir brièvement sur ce que le député a dit. Il a parlé du niveau du débat à la Chambre. En venant à la Chambre aujourd'hui, j'espérais que l'opposition ait de nouvelles informations à présenter pour me convaincre que les électeurs de ma circonscription ont eu tort de ne pas m'inonder d'appels sur cette question et de considérer qu'il n'y a là rien de nouveau.

Le député a parlé des observations en provenance d'en face. D'une part, il parle des remarques désobligeantes que le gouvernement fait au sujet de cette initiative. D'autre part, il dit que nous nous enrichissons et il fait d'autres commentaires dans cette veine à notre endroit. Cela n'apporte rien au débat.

Ce qui serait utile, c'est que le député présente des renseignements qui sont inédits. Le premier ministre a déposé toute l'information pertinente. La GRC s'est penchée sur la question. La personne chargée d'examiner les conflits d'intérêts a étudié la situation. Les remarques désobligeantes que les députés font au sujet du conseiller en éthique sont erronées. Celui-ci est un fonctionnaire de longue date et très estimé. Ils devraient retirer ces allégations calomnieuses.

Qu'est-ce que le député a de nouveau à présenter qui pourrait convaincre mes électeurs de la nécessité de mener une enquête plus approfondie sur cette question?

M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, c'est justement là le coeur du litige, n'est-ce pas? Il y a énormément d'information qui a été déposée. De toute évidence, cela ne suffit toutefois pas pour qu'un des deux camps change de perception sur ce qui a été dit. Voilà pourquoi nous avons besoin d'une enquête. Nous ne pouvons pas dénouer cette impasse ici.

Je pense que les électeurs de la circonscription du député ne se désintéressent peut-être pas autant de cette question qu'il le prétend. À mon avis, nous ne pourrions présenter ici aucune information qui amènerait les députés d'arrière-ban libéraux à se rallier, à tout le moins publiquement, à notre point de vue, car ils craignent trop le pouvoir du premier ministre. Je terminerai là-dessus. Le premier ministre n'a pas...

Des voix: Oh, oh!

Le président suppléant (M. Bélair): À l'ordre, s'il vous plaît.

M. Charlie Penson: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'écoutais très attentivement, mais je n'ai pu entendre la réponse du député de Winnipeg—Transcona. Je suis intéressé. Je trouve que ce dernier devrait pouvoir répondre de manière à ce que les autres députés l'entendent.

Le président suppléant (M. Bélair): Y a-t-il consentement unanime pour donner la parole au député?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

 

. 1210 + -

Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec mon collègue le leader parlementaire et député de Pictou—Antigonish—Guysborough.

Je regrette vraiment beaucoup de prendre part au débat d'aujourd'hui sur une question qui, comme le leader du Nouveau Parti démocratique vient tout juste de le dire, aurait pu être réglée il y a des mois, voire des années si le premier ministre avait simplement dit la vérité, non pas une partie de la vérité, mais toute la vérité. Toute cette affaire a sans doute commencé par une erreur de jugement du premier ministre. Si c'est le cas, il aurait dû avoir le courage de dire la vérité à la population du Canada et à la Chambre des communes.

Le plus révoltant dans tout cela, ce sont les constantes tentatives de camouflage, le manque d'informations données à la Chambre, les renseignements parcellaires donnés à la Chambre et la tentative d'étouffer la démocratie.

Il s'agit d'un conflit d'intérêts. Le premier ministre a-t-il continué d'avoir un intérêt financier dans le club de golf de Grand-Mère pendant qu'il faisait du lobbying auprès de la Banque de développement du Canada pour l'Auberge Grand-Mère, l'hôtel adjacent au golf qui est inextricablement liée à celui-ci?

J'ai justement une copie des publicités réalisées actuellement par l'Auberge Grand-Mère.

[Français]

L'annonce dit, en français, que l'Auberge Grand-Mère est à deux minutes du club de golf Grand-Mère.

L'auberge et le club de golf sont situés l'un à côté de l'autre. La viabilité et le succès d'une entreprise affectent la viabilité et le succès de l'autre. La valeur marchande de l'une affecte directement la valeur marchande de l'autre. Les deux entreprises se promeuvent l'une et l'autre. L'auberge fait de la publicité et offre, dans cette publicité, des forfaits golf-coucher. Le club de golf réserve des banquets et des soupers à l'auberge, suivant des tournois de golf. La publicité de l'auberge annonce le dix-huit trous du club de golf Grand-Mère.

Yvon Duhaime, le propriétaire actuel du club de golf Grand-Mère, est très certain qu'il existe une interdépendance entre l'auberge et le club de golf. Devant la Régie des alcools du Québec, en novembre dernier, Yvon Duhaime a déclaré, en défense à sa cause, qu'il avait besoin d'un permis d'alcool, car plusieurs golfeurs allaient souper à l'auberge suite à leurs tournois de golf, et que la majeure partie des revenus de l'auberge provenait de la clientèle en forfait golf et de la clientèle touristique.

La presse a également publié les propos de M. Duhaime à l'effet que «des ententes, des dépôts et des contrats» étaient intervenus entre l'auberge et ses clients.

De plus, en 1999, M. Duhaime a déclaré, et je cite: «Nous envoyons notre monde jouer au golf et ils envoient leur monde souper à l'auberge. Pourquoi devrais-je l'expliquer? Si ce n'était pas profitable, est-ce qu'on continuerait?»

[Traduction]

Le premier ministre prétend avoir vendu ses actions dans le club de golf en 1993. En 1996, il n'avait reçu aucun paiement pour ces actions. Pas de paiement, pas de vente. C'est à ce moment qu'il a commencé à faire pression sur la Banque de développement afin qu'elle accorde des prêts à l'auberge adjacente pendant que son avocat, agissant en qualité d'agent du premier ministre, essayait activement de vendre les actions dans le club.

La valeur desdites actions dépendait de la bonne marche des affaires de l'auberge adjacente. La dette remboursable au premier ministre constituait un intérêt financier permanent dans le club de golf. Les pressions exercées sur le président de la Banque de développement du Canada constituaient un conflit d'intérêt.

La déclaration du premier ministre au conseiller en éthique a été faite en vertu du code régissant les conflits d'intérêts de 1985. L'article 24 du code de 1985 stipule:

    Le titulaire d'une charge publique doit présenter au SRGA (sous-registraire général adjoint) un rapport confidentiel indiquant tous les biens lui appartenant qui ne font pas partie des biens exemptés visés à l'article 19.

Le premier ministre aurait dû déclarer au conseiller en éthique soit la dette, soit les actions, selon ce qu'il prétend avoir été sa situation à l'époque. Cela faisait partie des biens pouvant être déclarés. Le nouveau code introduit par le premier ministre stipule que les biens qui ne sont pas des biens exemptés sont soit des biens pouvant être déclarés, soit des biens contrôlés.

Quel que soit le code qu'on utilise, le premier ministre aurait dû déclarer les actions qu'il détenait dans le club de golf ou la dette provenant de la vente de ces actions. Il n'a déclaré ni l'un ni l'autre.

 

. 1215 + -

Le premier ministre a indiqué qu'il avait rendu publics tous les documents pertinents. Pourtant, plus le nombre des documents rendus publics augmente, plus les questions se multiplient.

Les signatures figurant sur l'acte de vente manuscrit ne sont pas authentifiées. Le calendrier de remboursement n'est pas précisé. Nous ignorons dans quelle province ce document a été signé.

Le lieu où il l'a été peut être crucial, si le premier ministre a décidé d'intenter des poursuites pour non-exécution de l'accord de vente, car les lois diffèrent d'une province à l'autre. Le Québec accorde, pour ce faire, trois ans à compter de la date de la signature, alors que l'Ontario en accorde six. Mais le gouvernement refuse de nous donner des précisions là-dessus, comme il refuse de répondre à la plupart des questions.

La valeur des parts a fluctué. Nous savons, des documents rendus publics, que le premier ministre a touché en 1999 une somme inférieure à celle dont il avait convenu avec Jonas Prince en 1993. À quel moment le premier ministre a-t-il déclaré la vente de ses parts aux fins de l'impôt? Était-ce en 1993 ou bien en 1999? La question est très pertinente. Le premier ministre a-t-il su que M. Gauthier avait acheté un terrain qui ayant appartenu au club de golf? L'a-t-on consulté, lui-même ou son avocat, quant à la manière dont les 525 000 $ payés par M. Gauthier, qui est devenu un bénéficiaire à répétition de marchés publics, seraient redistribués aux actionnaires ou utilisés par la société?

Ces questions et bien d'autres demeurent sans réponse.

Une enquête publique, menée dans le cadre de la Loi sur les enquêtes, permettrait de citer des témoins à comparaître et de réunir des preuves, notamment des dossiers financiers et des déclarations de revenus. Une enquête publique permettrait de déterminer de façon indépendante si le premier ministre était en conflit d'intérêts réel ou apparent quand il a exercé des pressions auprès du président de la Banque de développement au nom de l'Auberge Grand-Mère.

Dans le cadre de la commission d'enquête Sinclair Stevens, le juge Parker a défini le conflit d'intérêts comme suit:

    Un conflit d'intérêts survient lorsqu'un ministre de la Couronne a connaissance d'un intérêt économique privé suffisant pour influer sur l'exercice de ses fonctions et de ses responsabilités publiques.

C'est la définition qui a été donnée lorsque la question a fait l'objet d'une enquête, comme ce devrait être le cas du présent dossier.

Le premier ministre avait admis qu'il possédait des intérêts économiques privés. Son avocat a ouvertement discuté avec lui de la vente des parts dans le terrain de golf. Le premier ministre savait en janvier 1996 qu'il n'allait pas être payé pour la vente effectuée en 1993, et pourtant, 90 jours plus tard, il exerçait des pressions auprès du président de la Banque de développement au nom de l'Auberge Grand-Mère.

L'examen par le juge Ted Hughes de la vente du jardin fantastique du premier ministre Vander Zalm a révélé que ce dernier était en conflit d'intérêts en partie parce que:

    Les Vander Zalm avaient conservé des intérêts financiers dans Asiaworld.

Asiaworld est le nom de la société privée.

Le juge Hughes a aussi découvert que le premier ministre était en conflit d'intérêts car:

    Le premier ministre, l'élu occupant le poste le plus élevé en Colombie-Britannique, a téléphoné au cadre le plus haut placé chez Petro-Canada le 20 août 1990 pour discuter...

[Français]

L'hon. Denis Coderre: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'aimerais seulement m'assurer que, dans sa liste, il ajoutera aussi son frère. Lorsqu'il voulait que ce dernier devienne juge, il a appelé le premier ministre.

Le très hon. Joe Clark: Monsieur le Président, il me semble que, dans le Parti libéral, le vrai talent n'est pas au au Cabinet mais qu'il se retrouve chez les députés d'arrière-ban.

[Traduction]

Le juge Ted Hughes a aussi trouvé que le premier ministre Vander Zalm se trouvait en conflit d'intérêts. Dans son jugement, il a indiqué ceci:

    Le premier ministre, le représentant élu le plus haut placé en Colombie-Britannique, a téléphoné au plus haut dirigeant de Petro-Canada le 20 août 1990, afin de discuter de la vente d'un terrain vague pouvant abriter un poste d'essence à côté de la propriété du premier ministre.

Le premier ministre se trouve dans une situation semblable. Il détient la plus haute charge au pays, et pourtant il a téléphoné au président de la Banque de développement du Canada, une personne dont le poste dépend de son bon plaisir, pour faire du lobby en faveur d'un hôtel situé à côté d'un terrain de golf et avec lequel il fait affaire. À ce moment-là, le premier ministre avait toujours des intérêts financiers dans le terrain de golf en question.

D'autres administrations, comme celle de la Colombie-Britannique, ont créé des postes de commissaires à l'éthique indépendants. Le commissaire à l'éthique peut donner des avis, tenir des enquêtes et recommander l'imposition de sanctions.

Malheureusement, notre système ne jouit pas du même degré d'indépendance.

 

. 1220 + -

La motion déposée aujourd'hui exige la tenue d'une enquête judiciaire indépendante en vue d'examiner tout ce qui touche l'Auberge Grand-Mère et le terrain de golf. J'appuie cette motion.

J'espère sincèrement que le gouvernement actuel imitera un gouvernement libéral des années 60, dont le premier ministre suppléant, l'honorable Paul Martin, père de l'actuel ministre des Finances, avait accepté de consulter la Chambre sur les paramètres d'une telle enquête. On était alors en présence d'une situation identique. Le gouvernement avait donné des réponses évasives et l'opposition avait forcé la tenue d'une enquête. Il y avait eu consultation pour s'assurer que les paramètres de l'enquête seraient justes. Je réclame une enquête publique d'urgence.

M. Dominic LeBlanc (Beauséjour—Petitcodiac, Lib.): Madame la Présidente, c'est plutôt triste d'entendre le chef du cinquième parti parler d'éthique. Parlons-en. Parlons de sa pension de 85 000 $ et de la dette de 10 millions de dollars de son parti. Il a exigé 200 000 $ de plus pour être chef de son parti. L'an dernier, il a obtenu le vote populaire le plus faible de toute l'histoire du parti. Le nombre de sièges est passé de 20 à 12, mais cela ne l'a pas empêché d'exiger 160 000 $ en sus de son salaire de député de 130 000 $. Avec tout cet argent, il pourrait peut-être retenir les services de son épouse en tant conseillère en matière de conflits d'intérêts.

L'épouse du député a des opinions très arrêtées sur les conflits d'intérêts. Elle a dit que les lignes directrices du Parti progressiste-conservateur en matière de conflits d'intérêts constituaient une intrusion massive dans sa vie privée. Mme McTeer, l'épouse du très honorable député de Calgary-Centre, a également dit, lorsqu'elle cherchait à devenir candidate conservatrice dans la circonscription de Carleton—Gloucester, que la mesure législative proposée entraînait une perte d'indépendance considérable. Ce qui est le plus choquant, c'est qu'elle a dit que, en exigeant que les députés et leurs conjoints déclarent leurs actifs et leur revenu, la mesure législative «suppose en quelque sorte que nous sommes malhonnêtes».

Nous sommes d'accord avec...

M. Art Hanger: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je ne sais pas en quoi les remarques du député se rapporte à la motion à l'étude, qui dit ceci:

    Que la Chambre demande la tenue d'une enquête judiciaire indépendante pour déterminer si le premier ministre a enfreint les règles relatives aux conflits d'intérêts concernant sa participation dans le Club de golf Grand-Mère et l'Auberge Grand-Mère et que les enquêteurs aient de larges pouvoirs dont celui d'exiger la production de tous les documents...

Le président suppléant (Mme Bakopanos): Je tiens à signaler que la présidence a toujours donné beaucoup de latitude aux députés en ce qui a trait aux questions et aux observations. Je demanderais toutefois au député de poser sa question au chef du cinquième parti.

M. Dominic LeBlanc: Madame la Présidente, le député de Calgary-Centre a parlé de déclarations de revenus et a même utilisé, je crois, l'expression bénéficiaires à répétition de marchés publics.

Si on parle des bénéficiaires à répétition des marchés publics, j'aimerais bien vous parler du frère du député. Le député de Calgary-Centre a-t-il fait des démarches pour que son frère soit nommé représentant légal de la Société canadienne d'hypothèques et de logement? Une fois qu'il ne restait plus à son parti que deux sièges et qu'il n'était plus ministre, a-t-il appelé...

Le président suppléant (Mme Bakopanos): Je suis désolée d'interrompre mon collègue, mais le député de St. Albert invoque le Règlement.

M. John Williams: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Mon collègue de Calgary-Nord-Est a fait observer que le débat d'aujourd'hui porte sur le premier ministre et son code d'éthique, ou plutôt son manque d'éthique. Cette question nous paraît suffisamment grave pour réclamer la tenue d'une enquête judiciaire concernant le premier ministre. Nous pourrons traiter d'autres questions un autre jour, mais nous parlons aujourd'hui du premier ministre et de son manque d'éthique.

Le président suppléant (Mme Bakopanos): Comme la période des questions et des observations ne dure que cinq minute, je voudrais permettre au chef du Part progressiste-conservateur de répondre à la question qui lui était posée. Il est libre de répondre comme il le voudra.

 

. 1225 + -

Le très hon. Joe Clark: Madame la Présidente, je serai bref. D'abord, je suis prêt non seulement à défendre ma feuille de route, mais aussi à la faire scruter à la loupe par les députés de la Chambre. Je suis dans l'arène politique depuis quatre décennies, et je n'ai rien à cacher.

Deuxièmement, je suis plutôt étonné de voir le député tomber aussi bas, jusqu'à attaquer mon épouse et mon frère. Il ne connaît pas mon chien. Il aimerait peut-être s'en prendre à lui. Je dois dire au député que même son père ne se laisserait jamais tomber aussi bas à la Chambre des communes. J'espère qu'il rehaussera ses normes de conduite dans l'avenir.

Enfin, je veux signaler ce qui suit: nous avons posé des questions sérieuses. J'invite la Chambre et le public à prendre connaissance des questions que j'ai posées jour après jour à la Chambre. Or, j'ai obtenu à répétition, comme tous les partis qui ont posé des questions d'ailleurs, des réponses détournées ne visant qu'à insulter, à salir et à noyer le poisson. C'est la réaction d'un gouvernement pris de panique.

C'est la réaction d'un gouvernement dont le mépris pour la Chambre des communes ne laisse à cette dernière aucune option parlementaire. C'est ce qui rend cette initiative absolument essentielle. Cette affaire touche au coeur de l'autorité morale du premier ministre. Elle soulève la question de savoir si ce dernier est capable ou non d'assumer une responsabilité aussi banale que le renvoi d'une ministre dont le comportement est inacceptable. Cette question touche au coeur de l'autorité morale du premier ministre. S'il ne nous est pas possible de résoudre le problème ici même à la Chambre des communes, voilà un argument de plus à l'appui de l'enquête publique, que tous les partis de ce côté-ci de la Chambre, oubliant leurs différences, ont réclamé à l'unisson.

M. John Cannis (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Madame la Présidente, cette requête se fonde sur la crédibilité. Je vais faire deux brèves citations.

Voici ce que le député a dit le 7 février. Le chef du Parti conservateur a avoué à la presse qu'il n'avait absolument pas de preuve qu'une faute avait été commise et a dit aux journalistes: «Pour le moment, je cherche à recueillir des renseignements.»

Puis, à la fin de février, après l'enquête de la GRC, il a ajouté:

    La GRC semble avoir décidé qu'il n'y a pas eu d'activités criminelles et, à la lumière des données dont nous disposons, j'accepte cette décision.

Est-ce qu'il insinue que la GRC n'a aucune crédibilité, et a-t-il exercé des pressions en faveur de son frère?

Le très hon. Joe Clark: Bien sûr que non, madame la Présidente. Je suppose que ce genre d'excès trahit simplement le désespoir des défenseurs du gouvernement.

Nous parlons en l'occurrence d'une question de conflit d'intérêts. Y a-t-il des preuves? Oui, il y en a de plus en plus, mais pas tout à fait assez. Le gouvernement a rendu publics certains documents. Il y a cependant un trou de six ans dans les documents. Ce qu'ils disent soulève de nouvelles questions.

S'il reste le moindrement de conscience, le moindrement de décence aux députés d'arrière-ban du Parti libéral, ils voteront pour faire tirer cette affaire au clair. Ils voteront pour la tenue d'une enquête afin que le Parlement puisse passer à autre chose.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Madame la Présidente, je suis très honoré de pouvoir intervenir dans le débat sur cette motion et aussi, et surtout, de partager le temps dont je dispose avec l'ancien premier ministre, dont la carrière, le dévouement pour le Canada et la réputation sont sans tache.

D'autres l'ont souligné, il est triste et je dirais même affligeant de voir le gouvernement tenter de détourner l'attention en faisant des allusions désespérées et en allant même jusqu'à tenter d'insulter la famille d'un individu. Je suis très étonné que les libéraux applaudissent de façon aussi grossière et puérile les tentatives faites pour détourner l'attention du véritable sujet.

Nous savons quel est le sujet du débat. Il a été défini clairement dans la motion. Il s'agit de demander une enquête judiciaire publique indépendante sur certaines transactions commerciales faites par le premier ministre dans sa circonscription, Shawinigan.

Les faits maintenant du domaine publics constituent un dossier tel que, devant l'opinion publique aussi bien que devant une cour de justice pénale, on pourrait conclure que le premier ministre s'est clairement mis délibérément en situation de conflit d'intérêts par ses transactions financières et par ses interventions directes auprès de la Banque de développement du Canada.

 

. 1230 + -

Depuis de nombreuses années, la tradition veut que le gouvernement ne traite pas directement avec des organismes indépendants mis sur pied pour servir le public. Mais il y a eu des rapports avec la BDC.

Le premier ministre a téléphoné directement au président de la Banque de développement du Canada, sachant pertinemment qu'il avait un intérêt dans un terrain de golf situé juste à côté de l'hôtel. Il a fait du lobbying au nom de cet hôtel dans lequel il avait déjà détenu des parts afin que des deniers publics—et c'est la clé, des deniers publics—lui soient accordés. Une somme de 615 000 $ a été accordée à cet établissement adjacent au terrain de golf dans lequel le premier ministre détenaient encore un intérêt financier. Ce n'est pourtant pas difficile à comprendre. On risquerait fort peu de se tromper, du point de vue juridique, si on disait que le premier ministre avait un intérêt dans l'approbation du prêt à l'Auberge Grand-Mère.

Les éléments de preuve qui ont été réunis et les efforts qu'a déployés le gouvernement libéral pour obscurcir, embrouiller et occulter la preuve flagrante que le premier ministre est intervenu, ses dénégations directes à la Chambre, ses lettres et la manipulation des médias dont lui et quelques-uns de ses partisans malveillants, comme Warren Kinsella, se sont rendus responsables devraient assurément préoccuper les Canadiens. Les efforts démesurés qu'a déployés le gouvernement pour dissimuler la vérité devraient les préoccuper.

Les efforts pour découvrir la vérité qui ont été déployés au moyen de questions claires posées à la Chambre, des questions très directes et pénétrantes, ont été balayés du revers de la main. Les atteintes publiques répétées contre la réputation de personnes, contre leur rendement et contre leur famille avivent encore une fois la frustration et, je dirais même, l'acrimonie du débat.

Il y a maintenant des indications claires que les actions du premier ministre n'étaient pas déposées dans une fiducie sans droit de regard, même si lui et son protecteur bien dressé, le ministre de l'Industrie, ont affirmé le contraire à la Chambre des communes. Il y a eu des contradictions évidentes, qui sont rapportées dans les médias, au sujet des actes de M. Jean Carle, qui habitait dans le sous-sol de la résidence du premier ministre, qui le considérait comme un fils, celui-là même qui a été dépêché à la Banque de développement du Canada pour transmettre le message du BPM au président de la banque. Le premier ministre a déclaré à la Chambre que M. Carle n'avait rien eu à voir dans ce dossier, ce qui est entièrement faux.

Il est démontré que même Jean Pelletier, le Raspoutine personnel du premier ministre, s'est mêlé de l'affaire. Il a affirmé qu'il n'avait pas présenté M. Carle au président de la Banque de développement du Canada au cours d'une partie de hockey à Montréal, ce qui est faux.

Le premier ministre aurait pu être franc à plusieurs reprises. Il aurait pu s'adresser aux Canadiens, en utilisant la Chambre comme tribune, pour tirer la situation au clair. Toutefois, il a choisi de ne pas le faire. Au contraire, chaque fois qu'il en a eu l'occasion, il a choisi de dissimuler la vérité, d'ajouter de l'huile sur le feu en ne rendant publics que certains documents choisis afin de tenter de se disculper. Il est maintenant clair que tout cela a été une tentative visant à corroborer, après coup, la dénégation de conflit d'intérêts ou d'exonérer d'une certaine façon le premier ministre. Nous savons que tous les documents n'ont pas été rendus publics.

En droit, devant un tribunal criminel, tout doit être divulgué. La Couronne ne peut pas décider de ne donner que des bribes de renseignements à la défense pour préparer sa cause. Elle doit tout divulguer. Ce n'est évidemment pas ainsi que les choses se sont passées dans le cas présent. Nous avons obtenu des documents qui ressemblaient davantage, dans le cas du supposé contrat de vente, à ce que quelques enfants auraient pu écrire au crayon à l'endos d'une serviette de table dans un kiosque de rafraîchissements qu'à un document signé par deux millionnaires ayant une formation juridique.

Démystifions un peu toute cette histoire du «petit gars de Shawiningan». C'est du grand manitou d'Ottawa dont nous parlons. C'est un multimillionnaire qui voulait simplement se faire payer. Il a d'ailleurs affirmé très clairement à la Chambre qu'il voulait tout simplement se faire payer.

Qu'est-ce que tout cela démontre? Un intérêt financier, même s'il a maintenu à plusieurs reprises et s'il maintient toujours qu'il avait vendu ses parts en 1993. Il y a une chose qui n'est toujours pas claire. Pourquoi le nom de la compagnie de M. Chrétien apparaît-il toujours sur les documents de 1999, soit six ans plus tard? Il est évident qu'il avait toujours un intérêt financier.

 

. 1235 + -

Les contradictions se multiplient de plus en plus. Plus on avance, plus les questions surgissent. Le gouvernement a tout fait pour empêcher ce qui est arrive. La pléthore des contradictions persiste.

On sait qu'en entrant en fonction, on est censé mettre tout son avoir dans une fiducie. En devenant membre du Cabinet, un député doit placer tous ses biens en fiducie. De toute évidence, ça ne s'est pas passé comme cela. Une dette de 300 000 $ n'a pas été déclarée. À eux seuls, les efforts incroyables qui ont été déployés dans ce cas justifiaient qu'on s'inquiète. Les Canadiens méritent mieux que cela, en particulier de la part du premier ministre. Ils assistent depuis plusieurs années au lamentable spectacle de leur premier ministre qui se débat dans cette affaire de l'auberge.

L'affaire semble très complexe, mais elle tourne autour d'une question fort simple, celle d'un conflit d'intérêts. Le premier ministre a conservé un intérêt financier dans une propriété pendant qu'il s'efforçait de rehausser la valeur d'une propriété voisine. Le gouvernement a même tenté de nier l'existence d'un lien entre le club de golf et l'hôtel, à l'instar du ministre de l'Industrie et du très partial et très intéressé conseiller en matière d'éthique. Il est absolument faux de prétendre, de quelque manière que ce soit, que l'hôtel ne profite pas de la proximité du terrain de golf, ou que le terrain de golf ne profite pas de la proximité de l'hôtel. Les Canadiens ne sont pas si naïfs.

Il n'est pas nécessaire d'être dans les affaires ou dans l'immobilier pour comprendre. Les documents de promotion de l'hôtel font état de la proximité du terrain de golf. Des documents publics montrent maintenant que le propriétaire actuel, M. Duhaime, un bon ami du premier ministre qui a acheté l'hôtel alors qu'il appartenait au premier ministre, a déclaré sous serment que le club de golf jouait un rôle important dans l'achalandage de l'hôtel. Il est triste de voir que le gouvernement tente de nier l'évidence.

La crédibilité du premier ministre est en jeu, tout comme celle des autres personnes en cause. Je ne veux pas attaquer personnellement le conseiller en éthique, mais on ne peut lui accorder un iota d'objectivité ou de crédibilité dans ce dossier. Il rend compte directement au premier ministre. Il dépend entièrement du premier ministre. Il est injuste de laisser croire qu'il pourrait être un juge impartial des circonstances. Même s'il le pouvait, il ne pourrait en rendre compte au Parlement parce que le premier ministre a créé son poste de manière à ce qu'il ne puisse pas le faire.

La vérité existe. Il suffit de créer un forum pour la faire éclater au grand jour. Une enquête judiciaire publique serait le moyen d'y parvenir. Il suffirait de présenter les faits à un juge objectif et l'opposition serait satisfaite. La population canadienne demande une enquête publique.

Que se serait-il passé dans les causes de Milgaard, Morin et Marshall s'il n'y avait eu aucune possibilité de revoir les faits et si ces gens n'avaient pas eu le droit de présenter de nouvelles preuves, de faire la lumière sur leur cause, d'en finir une fois pour toutes et de passer à autre chose?

Selon un vieil adage, la culpabilité fuit toujours la lumière. Les tentatives du gouvernement en vue de garder la population dans le noir indiquent clairement qu'il y a anguille sous roche. La population mérite mieux et une enquête judiciaire complète permettrait à la population, et au premier ministre, d'en finir avec cette question.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je sais que le député qui vient de prendre la parole a une formation juridique. Il est avocat et il a peut-être été procureur à un moment donné, je n'en suis pas sûr. Quoi qu'il en soit, on a beaucoup fait allusion chez les libéraux à une prétendue enquête de la GRC, qui a classé l'affaire.

Y a-t-il des dispositions du Code criminel qui portent exclusivement sur les conflits d'intérêts et qui justifieraient la participation de la GRC à une grande enquête ou cela est-il en dehors du champ de ses compétences? Je suis sûr que le député peut faire la distinction, car, si la question n'est pas du ressort de la GRC, qui devrait enquêter sur une affaire comme celle qui fait l'objet du débat d'aujourd'hui?

 

. 1240 + -

M. Peter MacKay: Madame la Présidente, je remercie mon collègue de Calgary qui a aussi travaillé en droit pénal, je crois, comme policier. Il a été au service des Canadiens à ce titre. Sa question est fort pertinente.

À mon sens, la GRC n'a fait aucune enquête. Aucun témoin n'a été interrogé. La GRC n'est pas allée très loin. Elle n'a interrogé personne, que je sache, qui aurait pu éclairer l'affaire.

Pour en venir directement à ce point, le conflit d'intérêts allégué ici ne relève pas du droit pénal. Le problème découle du code d'éthique que le premier ministre s'est engagé à respecter. Plus important encore, le premier ministre a pris cet engagement envers les Canadiens. Son devoir envers les Canadiens consiste à éviter tout conflit d'intérêts réel ou apparent. Or, c'est ce qui est arrivé ici. Même si le premier ministre n'avait aucun intérêt dans ce terrain de golf, ce qu'il a fait pour soutenir les entreprises d'un ancien associé et ses associés du terrain de golf, et le fait qu'il était mêlé de près à tout ce qui concerne cette propriété auraient dû lui interdire toute intervention auprès de la Banque de développement du Canada. Il n'aurait pas souillé son nom ni ses fonctions s'il s'en était tenu à ce simple précepte.

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Madame la Présidente, comme son chef avant lui, le député de Pictou—Antigonish—Guysborough reproche d'un ton plutôt moralisateur à des députés ministériels d'avoir mentionné d'autres personnes. Puis, au beau milieu de son allocution, il parle du chef de cabinet et d'anciens collaborateurs du premier ministre, allant jusqu'à traiter quelqu'un de Raspoutine. Je dois dire que cela manque un peu d'esprit de suite.

Toutefois, j'ai une question précise à poser au député. Il prétend dans son allocution que la question est confuse ou n'est pas claire. Nous avons un acte de vente très clair. L'opposition essaie de soulever de nombreuses questions, mais nous avons un acte de vente. Les avocats de l'entreprise ont confirmé que le conseil d'administration avait accepté, dans une résolution, le transfert des actions de la compagnie du premier ministre à la société Akimbo.

Compte tenu de ces deux faits, il s'agit manifestement ici d'une créance non garantie. Comment le recouvrement d'une créance non garantie peut-il constituer un intérêt financier dans l'exploitation d'un terrain de golf? Je voudrais bien le savoir.

M. Peter MacKay: Madame la Présidente, je voudrais d'abord parler des atteintes aux proches d'autres personnes ou des attaques personnelles. Il est évident que MM. Carle et Pelletier, notamment, qui font partie de la garde du palais du cabinet du premier ministre, sont directement impliqués dans cette affaire. Il ne s'agit donc pas d'attaques gratuites à leur endroit. Ces gens-là ont agi au nom du premier ministre. Ils sont intervenus directement en sa faveur. C'est donc parfaitement idiot de prétendre d'une façon ou d'une autre que je m'en suis pris à quelqu'un d'autre que les collaborateurs immédiats du premier ministre.

En réponse à la question proprement dite, je dirai que le député a aussi une formation d'avocat. Il sait que ce document est fort suspect. Personne n'a été témoin de sa signature. Nous ne savons pas où il a été signé. Aucune résolution n'y était jointe. Il y est question à tort de 22 p. 100 des actions, alors que nous savons qu'il s'agissait en fait de 25 p. 100 de celles-ci. Il y a bien des choses qui clochent dans le document. Pour avoir lui-même une formation juridique, le député sait qu'un document aussi spéculatif ne vaudrait peut-être pas grand-chose devant un tribunal.

Le président suppléant (Mme Bakopanos): Avant de reprendre le débat, je tiens à apporter la précision suivante. Je sais que la majorité d'entre vous n'a pas à portée de la main l'ouvrage de Marleau et Montpetit, mais comme on a fait allusion par leur nom à des particuliers qui ne sont pas députés, j'aimerais vous lire l'extrait suivant:

    Les députés doivent s'abstenir de nommer par leur nom des personnes qui ne sont pas parlementaires et qui ne jouissent donc pas de l'immunité parlementaire, sauf lorsque des circonstances exceptionnelles l'exigent, dans l'intérêt national. Le Président a jugé qu'il incombe aux députés de protéger les innocents, non seulement contre les calomnies pures et simples, mais également contre toute attaque directe ou indirecte et il a insisté sur le fait que les députés devraient s'abstenir dans la mesure du possible de nommer par leur nom des gens qui ne sont pas à la Chambre et qui ne peuvent donc par répliquer et se défendre.

 

. 1245 + -

Je rappelle ce fait au député. Je sais que bon nombre d'entre vous sont à la Chambre depuis beaucoup plus longtemps que moi.

M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec le député de Calgary—Nose Hill. Je suis ravi de prendre part au débat.

L'Alliance canadienne a présenté une motion dans laquelle elle demande la tenue d'une enquête judiciaire indépendante pour déterminer si le premier ministre a enfreint les règles relatives aux conflits d'intérêts. C'est une affaire sérieuse et importante pour les Canadiens. Ils veulent savoir ce qui se passe, et c'est pourquoi nous demandons la tenue d'une enquête judiciaire.

Il est de plus en plus évident que le premier ministre est en conflit d'intérêts dans l'affaire de l'Auberge Grand-Mère. Les Canadiens devraient être préoccupés par le fait que le premier ministre a exercé des pressions en vue de l'octroi de subventions et de prêts à un hôtel en difficulté situé à côté d'un terrain de golf de sa circonscription dans lequel il avait une participation de 300 000 $.

Toutefois, les Canadiens devraient même se préoccuper encore davantage du fait que d'une fois à l'autre le premier ministre s'est directement contredit dans l'énoncé des faits. Un des plus récents exemples a été donné par la Presse canadienne le 2 avril 2001. Après avoir nié l'existence d'un lien entre le terrain de golf et l'hôtel, le propriétaire de l'Auberge Grand-Mère a déclaré sous serment le 2 novembre 2000:

    Des ententes, comptes et contrats ont été passés entre l'Auberge et les clients du [terrain de golf]. Comme vous pouvez le comprendre, cela représente une grande partie des recettes de [l'Auberge].

Les Canadiens sont préoccupés. Un sondage Compass diffusé le 30 mars révèle que 63 p. 100 des Canadiens pensent que le premier ministre a eu tort d'exercer des pressions; 60 p. 100 des Canadiens veulent la tenue d'une enquête publique indépendante; et 85 p. 100 des gens estiment qu'il est nécessaire de faire toute la lumière dans cette affaire.

Comment en sommes-nous arrivés là? Le premier ministre a lui-même fixé la norme, mais il n'a pas respecté les règles qu'il avait établies en 1993. Voici quelques extraits du livre rouge de 1993:

    Visiblement, la désaffection des citoyens et des citoyennes est grande à l'égard du gouvernement et le crédit des institutions publiques s'effrite progressivement.

    Cette désaffection semble tenir à plusieurs causes: certains élus ont commis des indélicatesses, d'autres ont gouverné avec arrogance.

À l'époque, les libéraux parlaient de M. Mulroney, mais je crois que le passage qui suit s'applique encore davantage au gouvernement actuel:

    Les citoyens sont mécontents parce qu'ils ne sont pas consultés, parce que leurs vues ne sont pas prises en compte, parce que les affaires publiques, lorsqu'elles deviennent cruciales, sont traitées à huis clos.

Comment tout cela a-t-il commencé? Pour le savoir, il faut remonter un peu en arrière.

En 1986, le député de Saint-Maurice abandonne la politique et se consacre à ses intérêts financiers privés. En mai 1988, sa compagnie, J&AC Consultants Inc., s'associe à deux entrepreneurs et achète le club de golf de Grand-Mère pour 625 000 $.

En avril 1993, l'Auberge Grand-Mère, déficitaire et située à proximité du club de golf, est vendue à un ami du premier ministre, Yvon Duhaime. La transaction est effectuée juste avant l'assermentation du premier ministre.

Le premier ministre soutient qu'il a vendu, le 1er novembre 1993, sa participation dans le club de golf de Grand-Mère, dont il détenait 25 p. 100 des actions, à un riche promoteur immobilier de Toronto, Jonas Prince, au coût de 300 000 $ plus les intérêts.

L'acte de vente passé avec Jonas Prince est daté du 1er novembre 1993. Il s'agit d'une note griffonnée sur un bout de papier. L'acte n'a pas été signé en présence de témoins et n'est pas notarié. La date n'est confirmée par aucune source indépendante. Nous ne savons même pas dans quelle province le contrat a été signé, ni sous quel régime juridique, même s'il a été rédigé par deux avocats spécialistes du droit des sociétés. Nous avons là toute une note, tout un contrat.

Or, dans deux lettres au National Post, datées de décembre 1998, Jonas Prince nie avoir acheté les actions et soutient qu'il s'agissait uniquement d'une option d'achat. Il a renvoyé les registres non signés du club de golf, n'a joué aucun rôle dans la gestion de l'entreprise et, en 1997, il a versé 40 000 $ en guise d'indemnité pour mettre fin à l'entente, croyant mettre ainsi un terme à toute l'affaire.

Mais ce n'était pas le cas. Lorsque le premier ministre a eu besoin d'argent, il a téléphoné à son avocat et s'est rendu compte que la dette était toujours en souffrance. Il a ensuite appelé le conseiller en éthique chez lui le samedi 27 janvier 1996. Il devait avoir quelque chose de très important à lui dire pour l'appeler chez lui un samedi. Le conseiller en éthique a conseillé au premier ministre soit de vendre ses actions soit d'annoncer publiquement qu'il en était propriétaire.

 

. 1250 + -

Pendant trois ans, le premier ministre n'a fait ni l'un ni l'autre jusqu'à ce qu'un journal révèle l'affaire en janvier 1999. Au lieu de suivre l'avis du conseiller en éthique, il s'est mis à exercer des pressions pour que l'on accorde des subventions et des prêts à l'Auberge Grand-Mère, voisine du terrain de golf. Le 28 février 1996, il a rencontré des immigrants prêts à investir; à maintes reprise en 1996 et en 1997, il a appelé la Banque de développement du Canada et est intervenu auprès de DRHC pour chercher à obtenir des subventions à la création d'emplois.

Sept mois après que le premier ministre ait appris qu'on lui devait encore de l'argent pour les actions, l'un de ses riches amis, Claude Gauthier, a acheté un terrain appartenant au Club de golf Grand-Mère pour la somme de 525 000 $. Cela se passait en septembre 1996, quelques jours seulement après que Gauthier se soit vu attribuer un contrat de 6 millions de dollars par l'ACDI alors qu'il ne répondait même pas aux critères pour présenter une soumission.

En 1997, l'entreprise de Gauthier, Transelec, a alors fait un don de 10 000 $ à la caisse électorale personnelle du premier ministre. Je rappellerais à la Chambre que le premier ministre a remporté son siège avec une majorité de tout juste 1 600 voix. Pendant la campagne électorale, ça chauffait à Grand-Mère et à Shawinigan.

Plus tard en 1998, DRHC a créé un fonds en fiducie illégal pour y verser une subvention de 1,2 million de dollars pour que M. Gauthier puisse acheter une entreprise au bord de la faillite. Six mois plus tard, il a quand même déclaré faillite et a rouvert l'entreprise avec moins d'employés.

Une amie du premier ministre a dit récemment que le club de golf appartenait toujours au premier ministre, qu'il en était toujours un actionnaire inscrit. Le National Post du 23 mars 2001 rapporte que Melissa Marcotte a dit que le registre des actions n'avait pas été signé depuis 1994. Je suppose que cette omission a été maintenant corrigée par Industrie Canada. J'aimerais bien voir ce registre, mais cela nous est impossible.

Pendant toute cette période, le premier ministre savait qu'on lui devait 300 000 $ pour la vente de ses actions. Les actions qu'il détenait dans le terrain de golf ne lui avaient pas été payées. Il savait que Jonas Prince pensait qu'elles ne lui appartenaient pas. Il était tenu au courant des efforts pour vendre ces actions par le conseiller en éthique et par son avocate, Debbie Weinstein.

Les affirmations du premier ministre ne sont tout simplement pas crédibles. Jonas Prince a vendu sa chaîne d'hôtels pour 90 millions de dollars. Il avait largement de quoi payer les actions du Club de golf Grand-Mère. Pourquoi ne l'a-t-il pas fait? Parce qu'il n'a jamais cru qu'il était propriétaire des actions. Six ans se sont écoulés, et il n'a jamais payé les actions. Il ne l'a pas fait parce qu'il ne croyait pas en être le propriétaire.

Depuis ce temps, d'énormes pressions se sont exercées. M. Prince a, de toute évidence, changé son fusil d'épaule. Il était clair qu'il ne croyait pas être propriétaire de ces actions, autrement, il les aurait payées. Pourquoi un homme d'affaires prospère comme M. Prince risquerait-il de s'exposer à la colère du premier ministre du Canada en n'honorant pas un acte de vente?

Cela ne tient pas debout. Cela sent mauvais. Autrement dit, il y a quelque chose qui ne tourne pas rond. Cela décrit parfaitement la situation actuelle.

Passons à autre chose. Examinons la question de la fiducie sans droit de regard, qui est, elle aussi, fort intéressante. Le 1er mars 1994, le premier ministre a confié toutes les affaires de sa société de portefeuille, J&AC Consultants Inc., à une fiducie sans droit de regard.

Voici la déclaration du premier ministre qui figure sur le site Web du conseiller en éthique:

    Je déclare être le propriétaire du tiers des actions de J&AC Consultants Inc, une entreprise privée gérée par une tierce partie qui ne dépend pas de lui et à l'égard de laquelle il n'a aucun droit de regard.

Le premier ministre a pourtant enfreint les règles de la fiducie sans droit de regard pour téléphoner à son avocat et au conseiller en éthique le 27 janvier 1996, relativement à la vente avortée de ses actions. C'est toute une fiducie sans droit de regard! Cela ressemble un peu à l'affaire Sinclair Stevens et, j'ajouterais, aux raisons qui ont obligé ce dernier à quitter la Chambre.

Si le premier ministre avait pris ses distances à l'époque, la controverse aurait fort bien pu être terminée. S'il s'agissait d'une fiducie sans droit de regard, les Canadiens sont évidemment en droit de se demander comment le premier ministre a pu savoir que ces actions lui étaient revenues. C'est une question assez claire à laquelle on n'a pas répondu.

Le conseiller en éthique a dit que la créance n'avait pas à être déclarée parce que c'était une «forme déficiente» qui ne l'exigeait pas. Cependant, le premier ministre a volontairement transféré ses parts dans une fonds fiduciaire sans droit de regard. Il n'était pas obligé de le faire. Il l'a fait de son plein gré. Il a manqué à sa promesse quand il a voulu avoir un droit de regard.

Le 23 mars 1999, le premier ministre a déclaré à la Chambre qu'il avait volontairement placé sa créance dans un fonds fiduciaire sans droit de regard:

    J'ai mis tous mes actifs dans la fiducie. C'est un fonds fiduciaire sans droit de regard. Je n'ai pas été forcé à lui en confier la gestion. J'ai fait cela pour éviter pareille question.

Le conseiller en éthique a confirmé que le premier ministre avait manqué à sa promesse.

 

. 1255 + -

Parlons maintenant du prêt de la Banque de développement du Canada. À deux reprises, le premier ministre a téléphoné au président de la Banque de développement du Canada et il l'a invité une fois 24 de la promenade Sussex. Il y a des choses à éclaircir. C'est pourquoi il doit y avoir une enquête publique.

Le premier ministre n'est tout simplement pas crédible dans cette affaire. Beaucoup de questions demeurent sans réponse. Il n'est pas normal de téléphoner au président de la Banque de développement du Canada. Les députés n'ont pas cette possibilité. Le premier ministre l'a fait et il a fait pression sur le président de la banque. Il en est résulté que le prêt a été accordé. Quand le prêt a été résilié deux ans plus tard parce qu'aucun remboursement n'avait été effectué, le président de la Banque de développement du Canada a été congédié. Quelle étrange coïncidence.

M. Paul Szabo (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Madame la Présidente, le député pourrait-il nous dire si la créance qui a été créée relativement à la vente des parts est un article qui est enregistrable aux termes des règles régissant les fiducies sans droit de regard? A-t-il vérifié cela? Sait-il ce qu'il en est?

M. Charlie Penson: Madame la Présidente, je sais que le premier ministre n'a jamais été payé pour ces parts. Même si elles étaient censées avoir été vendues le 1er novembre 1993, il n'a jamais été payé. Ainsi, il avait un intérêt manifeste dans ces parts. Que M. Jonas Prince les ait possédées ou non durant cette période, il n'en demeure pas moins qu'il ne les avait pas payées. Ainsi, lorsque le premier ministre a exercé des pressions sur le président de la Banque de développement du Canada en 1996 et en 1997, il était manifestement en conflit d'intérêts.

Pour ce qui est de la fiducie sans droit de regard, il est tout à fait clair que le premier ministre n'aurait pas dû s'ingérer sur une fiducie de ce genre. Il n'était pas obligé de mettre ses parts dans cette fiducie. Il l'a fait volontairement, ce qui est encore plus grave car il n'a pas abordé cette question comme il se doit. Il a agi de façon contraire à l'esprit de la fiducie sans droit de regard.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je tiens à dire au député de Peace River que plusieurs gens d'affaires sont venus à mon bureau pour savoir le type de prêts et de subventions qui étaient offerts aux entreprises pour traverser une période difficile ou pour prendre de l'expansion. J'ai reçus peut-être une dizaine de ces gens depuis que je siège au Parlement et je leur ai dit de s'adresser à la Banque de développement du Canada.

Des représentants de la banque m'ont informé sur les services que la banque offre. Jamais je n'ai eu la chance, si on peut dire, de forcer ou de fortement inciter des représentants de la BDC à offrir des prêts aux gens qui sont venus à mon bureau pour obtenir de l'aide.

Voyons la séquence des événements qui ont eu lieu dans le cas du prêt de la Banque de développement du Canada. Au départ, le premier ministre a contacté le président de la Banque de développement du Canada, d'abord par téléphone et ensuite en exerçant des pressions sur lui à sa résidence du 24 de la promenade Sussex, pour obtenir un prêt pour ce club de golf et l'hôtel.

Qu'est-ce que le député voit d'anormal à cela comparativement à ce qui pourrait se produire dans n'importe quel bureau de député où on peut transmettre des demandes de prêts au nom de tiers à la Banque de développement du Canada?

M. Charlie Penson: Madame la Présidente, je remercie mon collègue pour sa question. C'est une très bonne question.

Comme le premier ministre voudrait nous le faire croire, nous n'avons pas affaire à une situation normale, loin de là. Le président de la Banque de développement du Canada est, indirectement, un employé du Parlement. La BDC est une société d'État. Elle appartient donc au gouvernement. Le premier ministre du pays se permet de téléphoner à son président et de le presser d'accorder un prêt à un ami qui par hasard est propriétaire de l'hôtel adjacent au terrain de golf du premier ministre.

 

. 1300 + -

Si les démarches échouent et s'il n'obtient pas le prêt, la valeur du terrain de golf va évidemment diminuer. C'est loin d'être une situation normale. Je ne connais pas d'autres députés qui ont ce genre d'influence et la possibilité de téléphoner au président de la Banque de développement du Canada pour lui demander de telles faveurs.

Le président de la BDC, M. Beaudoin, n'a pas aimé non plus se retrouver dans cette situation. Il a fallu deux coups de fil et beaucoup de lobbying à la résidence du premier ministre pour que le prêt soit accordé. Même que le taux d'intérêt a été fixé à 25 p. 100, parce que le président trouvait qu'il s'agissait d'un prêt très risqué. Et effectivement, deux ans et demi après que le prêt a été consenti, aucun remboursement n'avait encore été effectué. Voilà pourquoi le président de la Banque de développement du Canada a recommandé la résiliation du prêt. Sauf que dès qu'il a fait cela, il a perdu son emploi.

Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Madame la Présidente, nous devrions prendre quelques minutes pour nous demander pourquoi les Canadiens devraient se préoccuper de voir que le premier ministre a enfreint le code d'éthique.

Pourquoi les Canadiens devraient-ils s'en soucier? Ces temps-ci, nos vis-à-vis, particulièrement ceux des premières banquettes, disent que nous devrions parler d'autre chose à la Chambre et que les Canadiens s'intéressent à d'autres sujets. Il est important de rappeler pourquoi les Canadiens devraient se soucier de savoir si leur premier ministre a enfreint ou non le code d'éthique. Les nouvelles qui nous arrivent aujourd'hui de Belgrade, en Yougoslavie, font bien ressortir pourquoi le débat que nous avons ici est si important pour les Canadiens.

Je vous lis quelques lignes d'une dépêche sur l'arrestation de M. Milosevic. La dépêche cite des gens...

[Français]

L'hon. Denis Coderre: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Vous connaissez très bien le Règlement, c'est totalement hors contexte.

[Traduction]

Cela n'a aucun rapport avec le débat. Nous devrions nous en tenir au sujet du débat et éviter ce genre de foutaise.

Le président suppléant (Mme Bakopanos): J'ai déjà lu un renvoi à Marleau Montpetit concernant les références à des personnalités publiques. Je permettrai à la députée de poursuivre son intervention et les questions pourront être posées à la fin.

Mme Diane Ablonczy: Madame la Présidente, il est intéressant de voir à quel point nos vis-à-vis tiennent désespérément à faire cesser le débat ou, à tout le moins, à l'interrompre. Ils devraient avoir honte.

Aujourd'hui, la population de la Yougoslavie déclare qu'elle forme un peuple civilisé. Pourquoi éprouve-t-elle le besoin de faire une telle déclaration? C'est en raison des événements peu civilisés qui ont eu lieu dans ce pays récemment. Un spécialiste des Balkans a répondu à la question de savoir pourquoi M. Milosevic a fait ce qu'il a fait en disant que c'était pour le pouvoir, pour de l'argent et par cupidité. C'est aussi simple que cela. Il était motivé par la volonté de rester au pouvoir.

Le diplomate américain Richard Holbrook révélait dans ses mémoires sur les négociations de paix en Bosnie que M. Milosevic était spirituel, perspicace et malheureusement sans aucun scrupule. Il ajoute que:

    Les analystes reconnaissent que l'Europe méridionale...

M. Steve Mahoney: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Ce n'est pas le désespoir qui me pousse à intervenir ici, mais bien le sentiment de honte que je ressens en pensant que la députée essaiera d'une façon ou d'une autre d'assimiler cet endroit ou notre premier ministre à M. Milosevic, qui a été arrêté et qui sera accusé de crimes contre l'humanité.

Cette comparaison n'est pas du tout pertinente. Je demande à la députée de retirer ses remarques et de s'excuser auprès de la Chambre et des Canadiens pour avoir tenté de faire une comparaison aussi horrible...

Le président suppléant (Mme Bakopanos): Le député n'était pas présent plus tôt lorsque j'ai lu un extrait du Marleau-Montpetit sur les allusions à des personnages. Dans le cas présent, la députée fait un parallèle.

Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Madame la Présidente, si ce n'est pas vraiment pertinent, les députés d'en face ne seraient pas aussi désespérés de m'empêcher de faire cette allusion. Je poursuis la citation:

    Les observateurs s'entendent pour dire que le sud de l'Europe serait fort différente aujourd'hui si les talents de M. Milosevic avaient été tempérés par des principes moraux. La chute de Milosevic aura au moins eu le mérite de faire comprendre aux politiciens futurs que le pouvoir ultime n'élimine pas l'obligation de rendre des comptes.

 

. 1305 + -

Le pouvoir ultime n'élimine pas l'obligation de rendre des comptes. Le premier ministre a le pouvoir ultime sur pratiquement tout ce qui se passe au sein du gouvernement. Pour beaucoup de gens, l'honnêteté des gens auxquels ils ont affaire, sans parler de ceux qui détiennent le pouvoir ultime, peut sembler une idée abstraite jusqu'au moment où ils commencent à bien y réfléchir.

Si nous ne pouvons pas faire confiance aux gens auxquels nous avons affaire, c'est toute la base des relations, toute la base d'une société civilisée qui s'écroule. Soljenitsine, qui était pratiquement le seul à combattre un système politique corrompu et immoral, a dit:

    Une parole de vérité vaut plus que le monde entier.

Au Canada et à la Chambre des communes, il semble que nous ayons renoncé à la vérité au profit des jeux du pouvoir. Ce n'est plus la vérité qui guide nos actions, ce sont les doreurs d'images et les spécialistes de la communication. Les interjections des ministériels pour essayer de dissimuler les arguments de l'opposition sont plus importantes que les efforts en vue de chercher à savoir la vérité. La vérité est extrêmement importante parce que sans elle, la confiance n'existe pas.

La confiance est ce qui fait que la démocratie fonctionne. C'est la base de la liberté. C'est ce qui fait que les conventions parlementaires fonctionnent. La situation au Canada est loin d'être ce qu'elle a été en Yougoslavie, mais les principes sont exactement les mêmes. C'est pourquoi ce débat est terriblement important pour les Canadiens, leurs familles, leur avenir et notre pays. Sans la vérité, qu'avons-nous? Simplement de la manipulation. Nous avons seulement un...

L'hon. Andy Mitchell: Vous ternissez la réputation d'une personne. Voilà ce que vous avez en l'absence de la vérité. Vous avez l'Alliance canadienne...

Le président suppléant (Mme Bakopanos): À l'ordre, s'il vous plaît. Faisons une trêve.

Mme Diane Ablonczy: Madame la Présidente, je veux que les Canadiens sachent que l'on se demande depuis deux ans si le premier ministre du Canada n'aurait pas négligé de faire un usage impartial et équitable des pouvoirs exceptionnels et considérables que lui confère sa charge, car certaines de ses initiatives lui ont permis de réaliser des gains personnels ou de subir des pertes, notamment lorsqu'il a fait en sorte que des fonds publics soient versés à des amis et des entreprises dans sa circonscription. Nous avons posé des questions à ce sujet.

Rappelons également le nombre inquiétant et déconcertant d'occasions où les déclarations que le premier ministre a faites à la Chambre sur la question n'ont pas concordé avec les faits qui nous ont été révélés par la suite. Les Canadiens sont directement intéressés par l'issue de cette affaire. Premièrement, la vérité est le ciment de la société civilisée. Deuxièmement, seules l'éthique et l'honnêteté permettent de protéger les liens existants entre les gouvernants et les gouvernés.

C'est, à mon sens, une convention très importante de la tradition parlementaire consacrée. Il est juste de dire que, du point de vue de nos traditions parlementaires, le ministre qui induit la Chambre en erreur, ou y fait de fausses déclarations, se rend coupable de la faute la plus grave qui soit. En agissant ainsi, il fait absolument fi des valeurs de l'institution parlementaire. Comment un gouvernement peut-il être tenu responsable de ses actes, s'il manque d'honnêteté dans ses déclarations à la Chambre?

 

. 1310 + -

On a considéré comme faisant partie des principes fondamentaux du système parlementaire le fait que le gouvernement ferait toujours preuve d'honnêteté à la Chambre des communes. Cela a toujours été jugé essentiel et absolument fondamental.

On en a un exemple pendant l'administration Pearson. Le premier ministre Pearson a traité de façon très sérieuse une occasion où il a induit la Chambre en erreur par inadvertance et en toute innocence. Cet événement est évoqué dans l'ouvrage de Gardon Robertson intitulé Memoirs of a Very Civil Servant, qui raconte les faits entourant l'affaire Rivard.

À la Chambre des communes, on a demandé à M. Pearson quand il avait été averti de la situation. Il a répondu, mais sa réponse était inexacte. Il avait été mis au courant de la situation par son ministre de la Justice deux semaines plus tôt. Il était préoccupé par autres choses et il avait oublié cette conversation.

Personne ne savait qu'il avait été avisé plus tôt qu'il ne l'avait dit à la Chambre. Personne ne le savait, sauf lui et son ministre. Pourtant, le premier ministre a pris cette affaire tellement au sérieux et était si préoccupé d'avoir induit la Chambre en erreur, même s'il avait agi en toute innocence, qu'il a mis sur pied la Commission Dorion pour faire enquête dans cette affaire. Lorsque tous les faits ont été connus, la commission a conclu que le premier ministre n'avait absolument pas agi de façon répréhensible dans cette affaire.

C'est un cas où la Chambre avait été induite en erreur en toute innocence. Cela avait été fait par inadvertance et de façon involontaire, et personne n'était au courant de quoi que ce soit. Ce n'était pas du domaine public. Le premier ministre Pearson a pris ses responsabilités en matière d'éthique tellement au sérieux qu'il a chargé une commission publique de se pencher sur sa propre déclaration à la Chambre qui avait été faite en toute innocence et par inadvertance. Les députés devrait mettre cela en parallèle avec la situation que nous connaissons aujourd'hui.

Le premier ministre a sans cesse fait à la Chambre des communes des déclarations qui ne concordent manifestement pas avec les faits divulgués ultérieurement. Nous demandons l'instauration d'une commission du type de celle qu'avait établie Pearson dans des circonstances beaucoup moins graves.

Que fait le gouvernement libéral? Soutient-il les conventions parlementaires? Applique-t-il les normes éthiques de l'administration Pearson? Non, il est tombé si bas que la vérité sera camouflée. Il est important que les Canadiens sachent la vérité car sans cela, il ne peut y avoir de sécurité, de reddition de comptes et de démocratie.

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, j'ai eu l'occasion de voyager dans l'ex-Yougoslavie il y a un an et demi. J'ai pu constater sur place les projets de développement canadiens qui ont pour objet d'éliminer un million de mines antipersonnel qui se trouvent encore en Croatie, une petite partie de l'ex-Yougoslavie.

Cela ne tient pas compte des efforts de reconstruction en Bosnie-Herzégovine ni des souffrances infligées au peuple du Kosovo, aux Albanais de souche du Kosovo. J'en ai rencontré certains; d'autres vivent aujourd'hui au Canada. Peut-être même ont-ils écouté le discours que vient de prononcer la députée.

La députée pourrait-elle, en toute conscience, expliquer à des gens dont le pays est ravagé par la guerre et qui ont tant souffert ce qui lui permet de tourner en dérision les épreuves qu'ils ont subies, et cela dans un but politique mesquin? Comment peut-elle porter une accusation, ridicule au demeurant, contre le premier ministre du plus merveilleux pays du monde, pays qui a accueilli ces réfugiés victimes de méfaits dont, selon le tribunal international de La Haye, Milosevic lui-même serait l'auteur? Ce n'est pas nous qui portons qui cette accusation, mais un tribunal international.

 

. 1315 + -

Comment la députée va-t-elle expliquer ses propos à ses électeurs, aux autres Canadiens, à tous les gens qui oeuvrent dans le domaine du développement international, auprès de la Croix-Rouge ou qui risquent leur vie pour défendre les valeurs démocratiques? Comment peut-elle tourner tous ces gens en dérision? Je ne sais pas si la députée a déjà eu l'occasion de constater à quoi ressemble la vie là-bas; si elle ne l'a pas fait, je crois qu'elle ferait bien d'aller constater sur place. Peut-être s'abstiendrait-elle, après cela, de tenir le genre de propos qu'elle a tenus.

M. Jay Hill: Vous auriez dû écouter ce qu'elle a dit.

L'hon. Don Boudria: J'ai écouté tout ce qu'elle a dit. Que la députée ait ou non un point à débattre avec les autres députés à la Chambre, il est injustifié de tenir le genre de discours qu'elle vient de tenir. Ses propos discréditent la Chambre, mais surtout ils constituent une insulte à l'intelligence des nombreux habitants de cette planète qui ont souffert.

Mme Diane Ablonczy: Madame la Présidente, je suis heureuse de voir que le leader du gouvernement à la Chambre a saisi le point que je voulais faire, car ce point est important. Je cite toujours les mémoires de Richard Holbrooke. Il dit ceci:

    Les observateurs s'entendent pour dire que l'Europe du Sud serait fort différente aujourd'hui si les talents de M. Milosevic avaient été tempérés par des principes moraux. La chute de Milosevic aura au moins eu le mérite de faire comprendre aux politiciens que le pouvoir ultime n'élimine pas l'obligation de rendre des comptes.

Il est essentiel que le gouvernement s'appuie sur des principes moraux et éthiques et qu'il se montre intègre, d'autant plus que la sincérité est le ciment d'une société civilisée. C'est elle aussi qui cimente la démocratie. Seules des valeurs d'éthique et d'intégrité peuvent servir de rempart aux gouvernés contre les gouvernants.

J'espère que le gouvernement se montrera à la hauteur des valeurs d'éthique et d'intégrité et qu'il offrira aux Canadiens le cadeau de savoir que leur premier ministre est entièrement et irréfutablement intègre. Il n'y a qu'une enquête indépendante pour faire, après tous les mensonges, les déclarations trompeuses et les approximations...

Le président suppléant (Mme Bakopanos): Le député dispose de 23 secondes pour une courte question ou réponse.

M. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.): Madame la Présidente, les fanatiques sont des personnes qui redoublent d'efforts lorsqu'elles perdent de vue leurs objectifs.

J'ai travaillé en Europe de l'Est pendant trois ans. Comme Canadien, je me sens insulté par les propos de la députée qui compare notre premier ministre actuel à des gens comme Milosevic. Elle doit des excuses aux Canadiens. Elle devrait se lever et présenter des excuses aux habitants de sa circonscription et aux Canadiens pour être tombée aussi bas. On voit bien le manque de rigueur à l'appui de l'accusation des députés de l'autre côté.

Mme Diane Ablonczy: Madame la Présidente, la vérité est importante tant en Yougoslavie qu'au Canada. Si le gouvernement ne se préoccupe pas de la vérité, il peut au moins se préoccuper assez des Canadiens pour leur permettre de tirer cette affaire au clair et pour répondre à toutes les questions qui ont été soulevées à propos des gestes et des déclarations de notre propre premier ministre.

M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Madame la Présidente, je vais partager mon temps de parole avec mon collègue de Mississauga-Sud.

Je croyais avoir été témoin du pire dans cet endroit jusqu'à ce que j'entende le dernier discours. J'espère que les électeurs de Nose Hill étaient à l'écoute et qu'ils ont entendu les propos ignobles de la députée d'en face.

Non seulement elle abaisse le niveau du débat en tentant de comparer un député à quelqu'un accusé de crimes contre l'humanité, de fraude, de vol, quelqu'un qui sera peut-être jugé par le tribunal international de La Haye pour les crimes les plus violents, elle tient en outre des propos tels que: «les réponses doivent concorder avec les faits».

 

. 1320 + -

Elle dit que la vérité est le lien qui unit notre société, que nous ne devrions pas induire les gens en erreur ou faire de fausses déclarations. Combien y a-t-il de façons de traiter les gens de menteurs? C'est ce que j'ai entendu, mais je ne vois personne de l'autre côté qui a le courage de se lever et de le dire. Au contraire, l'opposition se cache derrière des grands mots, des supercheries et des discussions.

Je dois dire tout d'abord que, contrairement à bon nombre de mes collègues, je ne suis pas avocat. Cela me donne une façon différente d'interpréter toutes les absurdités qui sont lancées de part et d'autres et qui ne sont que du verbiage juridique.

Les faits sont clairs. L'opposition a demandé que le conseiller en éthique se penche sur la question après avoir accusé le premier ministre de s'être placé en situation de conflit d'intérêts. C'est ce qui a été demandé et cela a été fait. Comme l'opposition n'a pas aimé la réponse qu'elle a obtenue, la seule arme qui lui restait était d'attaquer l'intégrité du conseiller en éthique, qui est une personne sans reproche. C'est tout ce qu'elle pouvait faire. N'aimant pas la réponse obtenue, elle s'en prend maintenant au messager.

Le chef du cinquième parti, la seule autre personne à la Chambre qui a droit au titre de très honorable, a demandé que la GRC fasse enquête et se penche sur la possibilité qu'il y ait eu activité criminelle. Et que fait-il lorsque la GRC lui répond qu'il n'y a pas eu activité criminelle? Il se fait un peu pharisien et affirme qu'il n'a jamais voulu dire que le premier ministre était malhonnête, tout en disant qu'il ne croyait pas qu'il disait la vérité.

Les députés d'en face disent que le premier ministre n'est pas un menteur, mais ajoutent que la vérité doit l'emporter. Ils disent que la vérité finira par l'emporter, mais qu'il ne ment pas. À quel genre de jeu jouent-ils?

Les Canadiens ne se laisseront pas duper par ces absurdités. Cela tient simplement de la chasse aux sorcières et je n'ai jamais rien vu de pareil en 23 ans de vie publique. L'opposition cherche à détruire un homme. Pourquoi? Parce qu'elle ne peut vaincre autrement. Les députés d'opposition ont tenté de prendre le pouvoir en se faisant élire au Parlement, mais ils n'ont réussi qu'à occuper des banquettes du côté de l'opposition.

Comme ils ne peuvent pas parvenir au pouvoir au moyen du processus électoral, ils recourent à une autre stratégie. Ils démolissent l'institution. Ils disent aux Canadiens que le Parlement est dysfonctionnel et que rien ne fonctionne. Ils en font la démonstration en se livrant à du harcèlement et en proposant continuellement des motions qui rendent extrêmement difficile de travailler ici. Ils se détruisent eux-mêmes pour pouvoir renaître. C'est une stratégie étonnante à voir. Comment démolit-on l'institution parlementaire? En s'attaquant au sommet de la hiérarchie au sein de l'institution.

Les députés voulaient voir l'acte de vente. Des députés de tous les partis ont dit que s'ils pouvaient voir l'acte de vente, cela mettrait fin à l'affaire en un clin d'oeil. Ce n'est pas nous qui l'avons dit. Ils ont dit que cela mettrait fin à l'affaire en un clin d'oeil. Le premier ministre en a discuté avec le conseiller en éthique et a décidé de rendre les documents publics. Il a rendu publics non seulement l'acte de vente mais aussi dix documents connexes à l'acte de vente qui font la lumière sur toutes les questions que les députés d'en face ont posées. Était-ce acceptable? Non.

 

. 1325 + -

Maintenant ils le dénigrent disant qu'il a été écrit sur une serviette en papier à un stand de Kool-Aid. Les Canadiens ne sont pas dupes. C'est un document écrit à la main. Ce n'est pas inhabituel. J'ai moi-même signé des accords rédigés à la main sur une feuille de papier à lettre. C'est l'intention qui compte et les députés le savent. Le premier ministre a vendu ses actions en 1993. C'est on ne peut plus clair.

Un député d'en face a dit que le premier ministre avait volontairement mis ses actions dans une fiducie sans droit de regard. C'est absolument faux. C'est une affirmation fallacieuse sans fondement dans les faits. Il n'avait pas d'actions à mettre dans une fiducie sans droit de regard. Elles n'étaient pas en sa possession. On lui devait de l'argent et l'ironie, c'est que, en fin de compte, il y a perdu de l'argent. C'est probablement l'une des pires affaires qu'il ait jamais conclues. Il a perdu près de 50 000 $ dans la vente de ces actions. Pourquoi M. Prince ne l'a-t-il pas payé? Comment peut-on le savoir? Comment peut-il le savoir?

Le premier ministre a confié l'affaire, le recouvrement de la dette, et c'est tout ce dont il s'agissait, à sa fiduciaire. Cette dernière a travaillé en coopération avec le commissaire pour essayer de recouvrer l'argent qui était dû, en bonne et due forme, au premier ministre et à sa famille. Devrait-il être pénalisé parce qu'il est premier ministre ou député? Devrait-il oublier la dette, s'en laver les mains, et ne pas essayer de recouvrer son argent parce qu'il occupe une charge publique? Ne devrait-il pas être en mesure de représenter ses électeurs et de faire son travail de député?

Personne n'a parlé du fait que la première demande d'emprunt pour l'hôtel s'élevait à 2 millions de dollars. La banque a dit non. Combien ont-ils obtenu quand leur demande a été approuvée? Combien ont-ils obtenu avec l'aide de leur député? Seulement 615 000 $, bien loin des 2 millions demandés.

Est-il inhabituel qu'une demande d'emprunt soit refusée et que le requérant se fasse dire de rédiger un autre plan d'affaires, de réévaluer ses priorités et de revenir avec une autre proposition pour un montant moindre? C'est aussi normal que n'importe quelle autre transaction commerciale à laquelle je puisse penser. La caisse populaire leur a prêté de l'argent. Y a-t-il quelque chose de mal là-dedans?

Je ne comprends pas pourquoi les gens veulent la ruine des entreprises dans la circonscription du premier ministre. Je comprends que l'on veuille sa ruine pour des motifs politiques. C'est la seule façon pour eux de prendre le pouvoir. Les torts qui sont causés aux gens innocents qui ne pratiquent pas le sport violent qu'est la politique, qui n'ont rien à gagner dans tout ceci, sont tout à fait regrettables.

Si l'opposition veut une enquête, voici un motif possible. Lorsqu'il était député en Alberta, le chef de l'opposition a lancé une fausse accusation contre un avocat local. Il a fait des observations méprisantes pour lesquelles il a été poursuivi, et il a été forcé de régler de peur d'être déclaré coupable. Cependant, ce sont les contribuables qui ont dû payer la note de près de 800 000 $. De ce montant, 400 000 $ sont allés au cabinet d'avocats qui a défendu le chef de l'opposition. N'est-ce pas quelque peu surprenant, quand on sait qu'ensuite, ce cabinet d'avocats a versé 70 000 $ à l'Alliance canadienne pour financer sa campagne électorale?

Lorsqu'on a appris l'existence de cette contribution de 70 000 $ à l'Alliance canadienne, le même cabinet d'avocats est revenu sur sa position et a déclaré qu'il n'avait rien à voir là-dedans, que c'était l'un de ses associés. Il a repris son reçu et demandé qu'un autre reçu soit émis au nom de la personne en question. C'est un avocat, associé dans le cabinet d'avocats qui a représenté le chef de l'opposition dans le cadre d'une poursuite en diffamation, qui a fait don de 70 000 $. J'invite les députés à y réfléchir. Cet homme a besoin d'aide; il a fait un don de 70 000 $ à un parti politique.

 

. 1330 + -

Je trouve que c'est une coïncidence incroyable que le don de 70 000 $ à un parti politique corresponde à ce que le cabinet d'avocats avait touché. C'est le même montant pour lequel le cabinet d'avocats a demandé que le reçu soit retiré et qu'on en émette un nouveau au nom d'un particulier. Y a-t-il quelque chose de répréhensible là-dedans? Une enquête s'impose peut-être.

En terminant, je tiens à dire et à répéter qu'il s'agit manifestement d'une des tentatives les plus ignobles faites par l'opposition, d'accord une opposition unie, qui n'a qu'un seul objectif, détruire le premier ministre du pays.

M. Grant Hill (Macleod, Alliance canadienne): Madame la Présidente, le député d'en face a fait de la politique municipale, comme il l'a dit dans son intervention. Je voudrais lui poser une question au sujet de son expérience en politique municipale.

J'ai également été conseiller municipal pendant un bout de temps. Chaque fois que surgissait une question sur laquelle je pouvais exercer une quelconque influence, comme une propriété que j'avais possédée ou dans laquelle j'avais un intérêt, ou une voie d'accès adjacente, ou encore, une entreprise dans laquelle j'avais un intérêt, je m'abstenais toujours de voter ou de discuter de questions de ce genre au conseil municipal.

Le député a-t-il déjà eu la même occasion de s'abstenir de voter sur une question de politique municipale? Voit-il, et je voudrais vraiment le savoir, une différence entre le palier municipal et le palier fédéral? À mon avis, il existe une différence. Je ne constate pas une telle approche dans le cas qui nous occupe.

Le député a-t-il eu l'occasion de s'abstenir de voter sur une question dans laquelle il a peut-être eu un intérêt? Estime-t-il que les mêmes normes éthiques devraient s'appliquer au Parlement fédéral?

M. Steve Mahoney: Madame la Présidente, tout le monde peut facilement se renseigner sur ce que j'ai fait au gouvernement municipal. En réponse à la question du député, je vais citer un texte. Il s'agit d'une disposition du Règlement de la Chambre des communes portant sur des choses à éviter et selon laquelle:

    Le fait d'offrir de l'argent ou quelque autre avantage à un député à la Chambre des communes, en vue de favoriser toute opération pendante ou devant être conduite au Parlement, constitue un délit qualifié de «high crime and misdemeanour» et tend à la subversion de la Constitution.

Je ferai remarquer au député qu'il y a quelqu'un ici qui, à mon avis, a violé cette disposition. Il s'agit du chef du cinquième parti. Il a accepté de l'argent de son parti, de l'argent provenant de contributions publiques ou privées au parti et il a accepté cet argent en tant que rétributions s'ajoutant à son traitement.

Est-ce qu'une autre enquête s'impose? Pourquoi ne nous pencherions-nous pas sur ce conflit d'intérêt pour voir au juste d'où vient l'argent, à combien s'élèvent ces rétributions, qui fait les contributions et comment le député peut-il expliquer qu'il touche des rétributions additionnelles pour s'acquitter de ses fonctions à la Chambre?

[Français]

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Madame la Présidente, je ne sais pas si le député d'en face a réussi à se convaincre, mais en tout cas, il ne m'a convaincu.

Pendant vingt ans, j'ai fait des transactions, j'ai fait ce genre de vente d'actions. Lorsqu'il y a une vente d'actions avec 300 000 $ de balance de prix de vente impayée, on y met normalement des garanties. Normalement, ce genre de contrat comprend au moins 20 pages.

Mais si le député d'en face prétend connaître toute la vérité sur l'histoire du premier ministre, pourrait-il nous expliquer comment il se fait que la compagnie du premier ministre, une compagnie à numéro, ait acheté de la Consolidated Bathurst, à un moment donné, à peu près la moitié du comté de Shawinigan pour un dollar et autres bonnes et valables considérations? Peut-il nous expliquer en quoi consistaient ces considérations, lui qui prétend tout connaître de l'histoire et du vécu du premier ministre sur ses transactions personnelles?

Je soulève cette question, lui qui allègue les déboires de certains députés d'autres partis. Il s'agit d'un contrat de 300 000 $; une balance de prix de vente de 300 000 $. C'est vrai que l'intention des parties est capitale; c'est vrai qu'on peut écrire cela sur le coin d'une «napkin» comme il dit, sauf qu'on a généralement des garanties.

Mais si la logique du député est vraie, comment se fait-il que le premier ministre soit intervenu dans la deuxième vente de 1999, et là, venir supporter des charges plus onéreuses que celles qui étaient contenues au premier contrat de vente qui était une vente absolue, semble-t-il, en 1993?

 

. 1335 + -

S'il ne les avait plus en 1993, comment pouvait-il participer à la vente en 1999? Ce serait suffisant, s'il est de bonne foi, pour se poser des questions, et les bonnes, et tâcher de trouver une réponse à cela.

[Traduction]

M. Steve Mahoney: Madame la Présidente, il faut reconnaître que le député a au moins le mérite d'aborder les questions, contrairement aux autres députés d'en face que nous avons entendus aujourd'hui.

Il existe, dans le milieu des affaires et le secteur juridique, un dicton disant qu'un contrat ne vaut jamais mieux que ceux qui le signent. Les gens admettent cela je crois. Le député peut bien rire, mais c'est ainsi qu'on fait des affaires d'un bout à l'autre du pays. J'ajouterais même qu'on s'engage parfois par une simple poignée de mains. Cependant, je ne suis pas convaincu que les gens d'en face peuvent comprendre un tel degré de confiance.

Voilà un contrat nettement signé par deux personnes, toutes deux considérées comme des gens de bonne foi. Je crois que le premier ministre avait de bonnes raisons de faire confiance à M. Prince et il ne fait aucun doute que M. Prince avait de bonnes raisons de faire confiance au premier ministre.

M. Paul Szabo (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Madame la Présidente, jeudi dernier, la Chambre a voté sur une motion d'ajournement. Après ce vote, je me rappelle avoir vu, dans le couloir, un député qui riait, avec d'autres, de ce qui venait de se passer à la Chambre.

J'ai aussi vu un journaliste arriver près du groupe avec sa caméra et, dès que les lumières se sont allumées, toute la scène a changé. Il y a eu soudainement beaucoup plus d'animation. Je dirais franchement que tout le monde a commencé à jouer un rôle et cela n'a certes pas donné une bonne image des parlementaires.

C'est ce qui se passe quotidiennement durant la période des questions à la Chambre. Les journalistes se trouvent à la tribune et ils observent pour guetter un événement qui fera les nouvelles. Ils guettent la déclaration digne d'être citée et les députés se bousculent pour être en bonne position. Cela ne nous montre pas sous un bon jour, et c'est dommage.

J'ai écouté le débat et j'ai entendu ici des choses qui me préoccupent. Le chef du Bloc québécois a dit très catégoriquement qu'il n'accepte rien sans preuve. Il ne croit tout simplement à rien de ce qui se dit ici. Il n'accepte pas les faits et il veut continuer à douter de tout. La confiance n'existe donc pas.

Madame le chef du NPD a parlé d'un certain nombre de choses. Elle a notamment parlé de quelqu'un qu'elle appelle le commissaire à l'éthique. Au moins trois fois, elle a fait allusion au commissaire à l'éthique et lui a attribué un certain nombre de déclarations.

Une voix: Il n'existe pas de tel poste.

M. Paul Szabo: Comme le signale à juste titre le député, il n'existe pas de poste de commissaire à l'éthique. Je me demande pourquoi madame le chef du NPD ne vérifie pas les faits à cet égard. Y a-t-il d'autres faits qu'elle n'a pas vérifiés avant de les présenter à la Chambre?

J'ai écouté le chef et le leader parlementaire des conservateurs dire de l'acte de vente qu'il avait l'air d'avoir été écrit au crayon de plomb sur une serviette de table, et qu'il ne porte pas la signature d'un témoin, qu'il s'agisse d'une personne ou de la province. L'acte de vente est un document qui témoigne d'une entente entre deux personnes. On ne s'est pas demandé s'il s'agissait d'une entente juridiquement valide. Tous les autres renseignements corroborent qu'il s'agit bien là de l'entente intervenue entre deux parties.

Dans notre système, même un contrat oral, un simple engagement entre deux personnes, est valable en loi. Sans témoin. Sans signature. Sans document. Rien que la parole donnée.

Les conservateurs n'acceptent même pas qu'il y a eu vente, et cela, en dépit des faits.

Le chef de l'Alliance canadienne a pris la parole ce matin et passé en revue un certain nombre de faits. Je lui ai demandé s'il pouvait confirmer certains faits au sujet du montant du prêt demandé par l'Auberge Grand-Mère à la BDC. Il a tout bonnement refusé de répondre. Il a refusé d'admettre des faits élémentaires.

 

. 1340 + -

La motion à l'étude propose une enquête dont le mandat serait le plus large possible pour que nous puissions continuer à chercher dans toutes les directions. Cependant, l'opposition a montré très clairement qu'elle n'était pas disposé à accepter la parole d'un autre député ni les faits présentés à la Chambre. C'est là le point crucial dans cette affaire. À mes yeux, il s'agit de savoir si, oui ou non, comme la députée de Calgary—Nose Hill l'a dit, la confiance est ce qui permet aux institutions parlementaires de fonctionner. Nous devons faire confiance et nous comptons qu'on nous fasse confiance.

Lorsque je suis devenu député, j'ai trouvé frappant qu'on nous désigne toujours comme les honorables députés. Le Président nous rappelle souvent que nous devons croire les députés sur parole. Lorsqu'ils disent des choses qu'ils croient être vraies, nous acceptons cela. Voilà, en partie, ce que la députée de Calgary—Nose Hill tentait de faire valoir. Je partage son avis.

Comment cet endroit peut-il fonctionner si nous ne nous faisons pas confiance? Si le premier ministre du Canada prend la parole à cet endroit, ce qu'il a fait à maintes occasions, et qu'il dit qu'il a vendu ses actions le 1er novembre 1993, allons-nous le croire ou allons-nous, par des allusions, des sous-entendus, des propos diffamatoires ou des condamnations, ne pas accorder foi à ce qui a été dit? C'est certainement facile de poursuivre ainsi le dialogue, mais quand allons-nous croire ce que quelqu'un dit?

À mon avis, si une personne prend la parole à cet endroit et qu'elle fait une déclaration, je vais, à titre de député, la croire sur parole. Contrairement à ce que certains font actuellement, je n'adopterai pas le point de vue selon lequel on peut déclarer quelqu'un coupable tant qu'il n'a pas prouvé son innocence. Déposons tous les documents.

Les médias ont eu un grand rôle à jouer dans ce dossier. Ils sont partis du principe que l'opposition ne faisait pas son travail et que, de ce fait, ils devaient intervenir et faire le travail à sa place. Les députés de l'opposition ont du mal à accepter cela, mais il est vrai que les médias ont eu tendance à aiguillonner une partie du débat. Certaines des questions posées par des députés alliancistes s'inspiraient directement de citations des journaux.

En venant à Ottawa, cette semaine, nous avons pu lire à la une des journaux que la grande priorité des députés était d'obtenir une autre semaine de congé. Est-ce là une juste représentation de la réalité? Bien sûr que non. Des députés ont dit qu'ils aimeraient passer une semaine avec leur famille pendant le congé scolaire de mars et ils ont demandé s'il était possible de réaménager le calendrier pour revenir une semaine plus tôt afin de pouvoir s'absenter durant le congé de mars et passer du temps avec leur famille. Comment les médias ont-ils rendu compte de cela? Ils ont dit que la grande priorité des députés, c'était d'obtenir une autre semaine de congé. Le représentant de la Fédération des contribuables canadiens a sali notre réputation sous prétexte que nous voulons une autre semaine de congé.

Comment se fait-il que la presse s'en sorte toujours avec ces non-sens? Peut-être que la citation importe peu pour Winnipeg—Transcona, mais comment la presse peut-elle toujours s'en sortir avec cela? Telle est pourtant la situation. Ce n'est pas une représentation juste.

Si nous nous laissons entraîner dans cette affaire, nous nous laisserons entraîner dans d'autres affaires comme la représentation des propos tenus par M. Duhaime dans des poursuites à Québec relativement à un permis d'alcool. Les médias ont dit qu'il s'agissait là d'un nouveau témoignage du propriétaire de l'Auberge Grand-Mère. Qu'y a-t-il de nouveau? Rien évidemment. Cela datait du mois de novembre dernier. S'agissait-il d'une question privée? Non, il s'agissait de poursuites publiques. Cela figurait dans le compte rendu.

Mme Deborah Grey: Ces propos contredisaient-ils ceux du premier ministre?

M. Paul Szabo: La députée veut savoir si ces propos étaient contradictoires. Non, bien sûr. M. Duhaime a dit qu'il était propriétaire d'un hôtel et qu'il avait besoin du club de golf dont le premier ministre était un des propriétaires. Mais au mois de novembre dernier, le premier ministre n'était pas un des propriétaires du golf. Il a vendu ses actions en 1993. Il y a une contradiction dans les propos de M. Duhaime, et les députés se demandent si M. Prince ou M. Duhaime ont dit des choses. S'ils ont un problème avec les faits présentés par d'autres ailleurs qu'à la Chambre, qu'ils aillent voir ces personnes.

Je voudrais conclure en disant ce qui est en train de se produire, à mon avis. Je pense que, dans cette affaire, l'opposition a utilisé la Chambre à de multiples reprises pour porter de fausses accusations, répandre des rumeurs outrageantes et ternir la réputation non seulement du premier ministre, mais encore celle des membres de sa famille et de quiconque est en désaccord avec l'opposition.

 

. 1345 + -

C'est exactement ce qui se passe ici. La presse, qui n'a pas de normes de conduite à respecter ni de commissaire ou de conseiller en matière d'éthique pour la guider, ne respecte aucune règle, sauf celle de vendre le plus de journaux possibles. Laissons-la rapporter les faits et jugeons-la sur la façon dont elle rapporte les allégations non fondées de l'opposition.

Dans la motion à l'étude aujourd'hui, l'opposition demande la tenue d'une enquête judiciaire et veut que les enquêteurs aient le plus de pouvoirs possibles. Elle veut que les enquêteurs puissent fureter partout, quand la question est simplement de savoir si le premier ministre s'est retrouvé en situation de conflit d'intérêts pendant son mandat. Les faits sont clairs: les actions ont été vendues le 1er novembre 1993. Après cela, le seul lien du premier ministre dans cette affaire a trait au fait que M. Jonas Prince lui devait de l'argent.

M. Jonas Prince et la société d'experts-conseils du premier ministre, son entreprise, étaient les deux seules parties à cette entente. Par la suite, aucun prêt, aucune démarche, absolument rien de ce que le premier ministre a pu faire ou a pu dire n'a pu modifier la somme qui lui était due. Par conséquent, il n'a plus aucun intérêt financier dans le club de golf ou l'auberge.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Madame la Présidente, j'ai trouvé le dernier échange très intéressant. Je connais le député depuis un certain temps déjà et je suis très étonné par la nature de ses interventions, parce qu'il me semble que le premier ministre avait déjà déclaré à la Chambre qu'il n'était qu'un député qui faisait ce que tout député doit faire pour aider les électeurs de sa circonscription.

Un député doit s'occuper des intérêts des électeurs de sa circonscription et établir des contacts. Cependant, le premier ministre a prétendu n'être qu'un député ordinaire. Le premier ministre est le plus haut mandataire du Canada et du gouvernement. Il a le pouvoir de dire à un député s'il peut continuer de faire partie du caucus ou pas, s'il peut rester membre du parti libéral ou pas et comment il doit voter à la Chambre. Pourtant, le premier ministre lui-même affirme n'être qu'un simple député.

Le député est un simple député, mais pas le premier ministre. Jusqu'à quel point une déclaration doit-elle être mensongère pour être un mensonge?

Le président suppléant (Mme Bakopanos): Je vous prie de m'excuser. Avant que le député réponde, je souligne que le mot «mensonge» a été utilisé assez souvent au cours des dernières minutes. Je demande aux députés de bien choisir leurs mots. Cependant, je permets au député de répondre à la question.

M. Paul Szabo: Madame la Présidente, nous venons de voir un exemple classique de ce qui se passe exactement depuis quelque temps. Je ne pense pas que la question du député de Kelowna mérite une réponse.

Par contre, la question de fond, elle, mérite quelques commentaires supplémentaires. Le premier ministre a démontré à la Chambre et à tous les Canadiens qu'il avait vendu ses actions le 1er novembre 1993. Le montant de ces actions, l'identité de l'acheteur, la date et d'autres détails ont été précisés et portés à la connaissance des députés. Par suite de cette transaction, survenue avant que le premier ministre n'accède à la fonction qu'il occupe actuellement, le premier ministre n'avait plus d'actions dans le terrain de golf et ne pouvait donc plus déclarer ces actions.

Il y a un autre fait à noter concernant la créance relative au produit de la vente. Des députés ont fait valoir que cela représente l'intérêt financier de longue durée du premier ministre. D'abord, il faut préciser que c'est M. Jonas Prince qui, par l'entremise de sa société, doit acquitter cette créance pour les actions. C'est sa société. Les deux parties ont convenu de la vente des actions pour la somme de 300 000 $.

 

. 1350 + -

Rien ne va changer le montant qu'obtiendra le premier ministre en bout de ligne. Il a droit à seulement 300 000 $. Quoi qu'il arrive à l'hôtel ou au terrain de golf, il ne recevra pas une somme inférieure ou supérieure à ce montant. La seule chose qui puisse modifier le montant de sa créance a trait aux conditions de la transaction avec la tierce partie, M. Jonas Prince.

Une voix: Comment expliquer alors qu'il ait perdu 50 000 $?

M. Paul Szabo: Madame la Présidente, le député demande comment le premier ministre a pu perdre 50 000 $. Il devrait savoir que cette somme n'a rien à voir avec les 300 000 $. Elle est relative au montant payé initialement pour les actions, et je ne crois pas que le député soit au courant du montant en question. Quand nous déclarons, dans une déclaration d'impôt, les gains ou les pertes réalisés, il ne s'agit pas du prix de vente des actions, mais du montant des gains réalisés par rapport au coût initial plus les commissions.

Le député de Pictou—Antigonish—Guysborough essaie d'arguer—et je voudrais bien qu'il précise sa pensée—qu'il existe clairement un rapport financier entre Jonas Prince et le premier ministre en termes de montant et que rien de ce qui a à voir avec le terrain de golf ou l'auberge ne peut y changer quoi que ce soit.

Si le remboursement est inférieur à 300 000 $, le premier ministre pourrait poursuivre M. Prince en justice pour le solde. C'est un contrat légal. Le député le sait. Si M. Prince honore la totalité du contrat, il y a aussi des intérêts à payer. Ensuite, ils peuvent conclure une entente qui modifie ces conditions. Le député le sait.

Le Parlement va-t-il s'immiscer dans les affaires financières de deux personnes qui n'ont rien à voir avec les activités ou les opérations de l'auberge Grand-Mère ou du terrain de golf? À mon avis, ce ne sont pas nos affaires.

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Madame la Présidente, j'aimerais bien dire que je suis heureuse de participer à ce débat aujourd'hui, mais vous conviendrez que ce n'est pas très gai comme sujet.

C'est une question qui, à mon avis, préoccupe les Canadiens. Nous entendons des gens dans la rue qui demandent pourquoi nous accordons tant d'importance à cette affaire. Ils se demandent pourquoi la Chambre doit passer tant de temps sur cette question. Certains disent même que nous devrions nous concentrer de nouveau sur les affaires du pays.

Évidemment, la réponse à ces questions est que c'est l'intégrité du cabinet du premier ministre qui est en jeu ici. Et si cela n'est pas les affaires du pays, je ne sais pas ce qu'on entend par les affaires du pays.

Au cours de chaque exercice financier, environ 160 milliards de dollars passent d'abord par cet endroit pour ensuite être distribués d'un bout à l'autre du pays. C'est une somme incroyable. Je crois que les Canadiens dans la rue disent que, s'il y a quoi que ce soit de louche dans le Shawinigate, dans quelle mesure peut-on faire confiance à celui qui est à la tête et qui distribue tout cet argent par l'intermédiaire du ministre des Finances et du Cabinet.

C'est ce qui fait que cette affaire est de la plus haute importance pour les Canadiens. Si cet endroit est le siège du gouvernement, celui qui est à la tête devrait non seulement être perçu comme n'ayant rien à se reprocher, mais dès que le scandale du Shawinigate a éclaté, il aurait dû être le premier à dire qu'il doit s'assurer que tout est clair et que rien n'est caché aux Canadiens.

Nous avons vu un certain nombre de contradictions dans les faits. Le premier ministre s'est contredit lui-même. Il a dit qu'il n'y avait aucun lien entre le terrain de golf et l'hôtel.

Le 2 novembre, Yvon Duhaime, le propriétaire de l'Auberge Grand-Mère, a déclaré sous serment, comme le député vient de le dire, que des ententes, comptes et contrats avaient été passés entre l'auberge et les clients du club de golf. Comme on peut le comprendre, cela représente une grande partie des recettes de l'auberge.

Cela me paraît incroyable, car le premier ministre a nié l'existence de tout lien. Vous avez certainement vu, madame la Présidente, même si vous n'y êtes pas allée en personne, qu'il n'y a qu'un seul et même panneau pour indiquer la direction à prendre pour se rendre à ces deux endroits. Le panneau dit que l'Auberge Grand-Mère est par ici et le terrain de golf, par là. J'étais à l'émission counterSpin quand Peter Blaikie a déclaré que même s'il n'était pas un golfeur fantastique, il pourrait, du terrain de golf, envoyer une balle dans le bar de l'Auberge Grand-Mère. Les deux propriétés sont attenantes.

Le premier ministre ne dit tout simplement pas la vérité lorsqu'il prétend qu'il n'existe absolument aucun lien entre les deux. Le Parlement a besoin d'aller au fond de cette affaire.

 

. 1355 + -

En ma qualité de députée de l'opposition officielle, je recommanderais volontiers de ne pas laisser aux politiques le soin de régler ce dossier. Nous devrions sortir l'affaire du Parlement, et la soumettre à une enquête judiciaire indépendante dans le cadre de laquelle on effectuera un examen plus approfondi que celui fait par le conseiller en éthique, ce personnage qui, je le rappelle, est payé par le premier ministre.

D'après le livre rouge sur lequel a porté la campagne de 1993, si mon souvenir est bon, le conseiller en éthique devait rendre compte au Parlement, et non pas uniquement au premier ministre. Pourtant, voici où nous en sommes bien des années après. En fait, le conseiller en éthique s'est contredit à maintes reprises. J'y reviendrai peut-être dans un instant. Toutefois, il a ensuite pris un café avec le premier ministre et a déclaré que tout avait été fait dans les règles. On repassera pour la crédibilité.

Faisons en sorte que le conseiller en éthique soit plutôt un commissaire à l'éthique qui a du pouvoir, qui n'a pas peur de dire qu'il y a anguille sous roche quand il le faut et qui est capable de donner suite à ses dossiers. Nous le savons, en plus d'avoir pris un temps fou à la Chambre, toutes ces discussions teintent la moindre décision du gouvernement, car la population veut avoir la certitude que son gouvernement est intègre. Les gens qui assistent aux débats, non seulement pour entendre mon discours mais aussi pour la période des questions, veulent avoir confiance dans la Chambre.

Immédiatement avant que je prenne la parole, le député de Toronto a demandé comment cet endroit pouvait fonctionner sans la confiance. Excellente question, mais la véritable question consiste à savoir comment cet endroit peut fonctionner si nous ne pouvons pas mériter la confiance. La confiance se mérite. On n'arrive pas comme un cheveu sur la soupe en disant: Faites-moi confiance. Cela s'est tout de même produit souvent au gouvernement.

Il est essentiel que la population canadienne voie les élus gagner sa confiance. Franchement, le premier ministre s'est lui-même tiré dans le pied, car la confiance à son égard est loin de régner. Il n'a pas gagné la confiance de la population. Cette affaire est allée si loin qu'il me semble qu'on en a un peu perdu le contrôle.

Je vois d'autres contradictions. Le premier ministre a dit qu'il avait vendu les actions qu'il possédait, le quart de toutes les actions. En vérité, nous ne savons pas exactement s'il s'agit de 22 ou de 25 p. 100, mais en gros c'est le quart des actions dans le club de golf Grand-Mère. Le premier ministre jure à qui mieux mieux, et ses troupes font le perroquet derrière lui, qu'il a vendu ces actions au coût de 300 000 dollars, majorés des intérêts, à Jonas Prince, riche promoteur immobilier de Toronto, le 1er novembre 1993.

M. Sarkis Assadourian: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement, et ma question s'adresse à vous. La présidence peut-elle décider de la tenue d'une enquête, que je demande, sur l'entente conclue par le chef du parti de l'opposition avec un député de l'époque, Jim Hart, selon laquelle le chef du parti a versé 50 000 $ au député pour qu'il démissionne afin qu'il puisse se présenter dans sa circonscription? Y a-t-il matière à enquête?

Le président suppléant (Mme Bakopanos): Reprise du débat. La parole est à la députée d'Edmonton-Nord.

Mme Deborah Grey: Madame la Présidente, je crois que nous pourrions dire: «bien essayé». En tant que député ministériel, le député pourrait certes en faire l'objet d'un projet de loi. Il n'a pas besoin d'une journée de l'opposition pour cela.

Avant de me faire interrompre, je disais, de façon plaisante et certes pas impolie, que le premier ministre avait affirmé avoir vendu ses parts le 1er novembre...

Le Président: Je regrette d'interrompre la députée d'Edmonton-Nord, mais comme elle le sait, à ce stade-ci de la journée, nous devons passer aux déclarations de députés. C'est ce que nous nous apprêtons à faire, mais je lui assure qu'il lui restera trois minutes et demie pour terminer son intervention lorsque le débat reprendra au terme de la période des questions. Nous avons tous hâte d'écouter la députée d'Edmonton-Nord.



DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Français]

ROBERT GAUTHIER

M. Eugène Bellemare (Ottawa—Orléans, Lib.): Monsieur le Président, Robert Gauthier, le plus illustre des éducateurs de l'Ontario français, est décédé, le 25 mars 2001, dans sa 99e année. Il a consacré sa vie à faire avancer l'éducation en français en Ontario, à l'époque où tout était à faire au sein des écoles ayant survécu à l'infâme Règlement 17.

Diplômé des universités d'Ottawa, Laval, Montréal et Toronto, il est devenu inspecteur d'écoles à 25 ans, pour ensuite devenir le premier directeur provincial de l'enseignement français en Ontario.

Robert Gauthier a lancé le concours provincial de français, l'Olympiade de la langue française, a créé l'Association des enseignants franco-ontariens, a développé les jardins d'enfants, les écoles intégrées et la méthode TAN-GAU pour l'enseignement d'une langue seconde.

L'avenir du français en Ontario était sa passion. C'était, pour Robert Gauthier, «question de langue, question de fierté».

*  *  *

 

. 1400 + -

[Traduction]

LA LOI SUR LES LANGUES OFFICIELLES

M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai le regret d'informer la Chambre que l'intolérance et la discrimination des libéraux ne se limitent pas aux gestes et aux déclarations de la ministre subalterne du Multiculturalisme. Il est vrai qu'elle favorise ouvertement des programmes d'embauche fondés sur la race et qu'elle est bien connue pour sa propension à fabriquer des histoires qui encouragent effectivement le racisme, mais l'intolérance et la discrimination sont également des traits distinctifs des lois linguistiques du gouvernement libéral.

L'application actuelle du bilinguisme officiel coûte inutilement cher, est foncièrement discriminatoire et constitue une source de division à l'échelle nationale.

C'est pourquoi j'ai présenté mon projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi C-286, qui insufflerait du bon sens à la Loi sur les langues officielles et mettrait un terme à la discrimination caractérisant le bilinguisme officiel.

Comme on pouvait le prévoir, des députés libéraux s'en sont pris à moi pour détourner l'attention des gens de cette question. J'informe la Chambre que j'accepte le défi que m'a lancé le député d'Ottawa—Vanier. J'accepte son offre de m'aider à soumettre cette question à la Chambre des communes aux fins de la tenue d'un débat et d'un vote.

*  *  *

[Français]

LE PRIX MERCADOR

Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, le 22 mars dernier, le Comité Export Laval décernait, pour la troisième année consécutive, le prix MercadOr à neuf entreprises de Laval.

Ce prix souligne les efforts des nouveaux exportateurs à se démarquer sur les marchés internationaux. Il est le témoignage de la contribution de ces entreprises lavalloises à l'essor de notre région.

Je me joins donc aux Lavalloises et aux Lavallois pour souligner, encore une fois, la participation exceptionnelle de ces entreprises bien de chez nous à l'essor économique de la communauté lavalloise.

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LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE

M. Denis Paradis (Brome—Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, plusieurs maires, élus municipaux, responsables de développement économique de l'Outaouais, de Lanaudière, de la Mauricie et des Laurentides sont à Ottawa, aujourd'hui, afin de participer à une journée à caractère international, comme je l'ai fait dans le passé pour les maires de Brome—Missisquoi.

Je tiens à les remercier d'avoir répondu en aussi grand nombre à mon invitation. Leur présence confirme leurs préoccupations constantes de développer de nouvelles avenues pour leurs villes et municipalités.

À l'ère de la mondialisation, il devient urgent d'informer nos gens, de leur donner les outils et le soutien nécessaires, afin de faire face aux nouveaux défis de ce millénaire, tout en demeurant près de nos concitoyens.

Nos collectivités locales seront de plus en plus appelées à prendre leur place sur la scène internationale, c'est pourquoi nous leur avons préparé des ateliers sur le libre-échange, Contrats Canada, le Programme des infrastructures, les programmes culturels et académiques, et finalement, les stratégies d'exportation dans le domaine agricole.

Je remercie mes collègues qui m'ont appuyé dans ma démarche, et je tiens à féliciter les élus et les responsables de Développement économique pour leur dynamisme et leur volonté commune d'assurer la croissance de nos régions.

*  *  *

L'ÉCOLE POLYMÉCANIQUE DE LAVAL

Mme Carole-Marie Allard (Laval-Est, Lib.): Monsieur le Président, à titre de députée de Laval-Est, je veux féliciter l'École polymécanique de la Commission scolaire de Laval qui vient d'obtenir une reconnaissance exemplaire de l'OCDE, l'Organisation de coopération et de développement économique.

Cette reconnaissance exemplaire a été octroyée à cette école pour la qualité exceptionnelle de ses aménagements intérieur et extérieur. L'École polymécanique de Laval a obtenu le deuxième Florilège international d'établissement d'enseignement exemplaire. Elle était en compétition avec 54 autres établissements à travers le monde.

Les études démontrent que la qualité de l'aménagement intérieur et extérieur d'une école a un effet bénéfique sur l'apprentissage des étudiants. Il faut donc se réjouir que les étudiants de l'École polymécanique de Laval puissent être ainsi favorisés pour leurs études.

Je tiens également à féliciter la firme d'architectes Viau Bergeron pour son travail, et la direction de cette école, pour sa vision d'avenir.

*  *  *

[Traduction]

LA SANTÉ

M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la fièvre aphteuse est une des plus sérieuses menaces auxquelles ait eu à faire face le pays au cours des 50 dernières années. Elle présente un caractère sérieux pour les éleveurs de bétail, les producteurs de porc, les éleveurs de wapitis, et autres.

Elle présente aussi un caractère grave pour tous les contribuables, auxquels on pourrait demander de verser jusqu'à concurrence de 20 milliards de dollars afin d'éponger les pertes, et pour les milliers de gens risquant de perdre leur emploi par suite de cette infection.

Le gouvernement ne fait rien pour éviter cette catastrophe possible. Des gens et des produits carnés en provenance de zones infectées entrent toujours au pays sans être vérifiés. Il faut que cela cesse. Il faut améliorer les inspections.

Il est très possible que cette maladie dévastatrice se répande dans les troupeaux canadiens. Pourtant, le gouvernement n'a pas présenté de plan d'action. Il est maintenant temps que le gouvernement rende public un plan global visant à réduire au minimum les dommages afin que tous les intéressés soient prêts à agir si jamais le pire se produit.

*  *  *

 

. 1405 + -

[Français]

LA SPORTHÈQUE DE HULL

M. Marcel Proulx (Hull—Aylmer, Lib.): Monsieur le Président, l'année 2001 marque le vingtième anniversaire d'une entreprise solidement implantée à Hull, la Sporthèque.

La Sporthèque emploi 125 personnes et compte plus de 5 400 membres en plus des 2 000 abonnés à ses différents programmes.

En plus d'avoir su s'entourer d'une équipe de professionnels, M. Larry Greene, son directeur général et copropriétaire, a toujours eu comme priorité de faire de la Sporthèque de Hull un citoyen corporatif exemplaire.

S'il participe activement à la remise en forme de ses concitoyens, M. Greene s'est également servi de la Sporthèque comme véhicule pour aider plusieurs organismes communautaires de l'Outaouais.

Longue vie à la Sporthèque de Hull, et longue vie à M. Larry Greene, qui a d'ailleurs été choisi personnalité du mois de mars 2001 par la Chambre de commerce et d'industrie de l'Outaouais.

*  *  *

LE TRAVAIL INVISIBLE

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, à l'initiative de l'AFÉAS, le 3 avril sera dorénavant la Journée du travail invisible, c'est-à-dire l'ensemble du travail au foyer accompli au sein de la famille et du bénévolat réalisé dans la communauté, quel que soit le statut de la personne travailleuse ou travailleur au foyer, sur le marché du travail, aux études, en recherche d'emploi ou retraité.

Pourquoi comptabiliser le travail invisible? Pour faire preuve d'équité envers les femmes qui assument majoritairement ce travail; pour reconnaître et revaloriser les personnes qui l'effectuent, car leur rôle est bénéfique et indispensable à toute la société; pour répondre aux besoins spécifiques des personnes qui le font par mesure de soutien aux aidants et aidantes ou de conciliation entre la famille et le travail pour les parents; pour rendre visible le travail non rémunéré en l'intégrant au produit intérieur brut et surtout pour enrayer la pauvreté chez les femmes.

Le travail invisible, ça compte.

*  *  *

[Traduction]

LE CONSEIL DES 4-H

M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais profiter de l'occasion pour souhaiter la bienvenue dans la capitale nationale aux 55 délégués du Conseil des 4-H et à leurs accompagnateurs, qui doivent assister au séminaire national des 4-H sur la citoyenneté.

Le Conseil des 4-H est un groupe international de jeunes qui compte plus de sept millions de membres dans 80 pays du monde. Les racines historiques des 4-H sont solidement ancrées dans les secteurs ruraux du pays. Le programme a été mis sur pied dans le but d'améliorer l'agriculture, d'accroître la production et d'enrichir la vie rurale.

Les jeunes qui sont ici aujourd'hui viennent d'un peu partout au pays. Cette semaine, entre les séminaires auxquels ils doivent assister, ils visiteront la Chambre des communes et la Cour suprême, ils assisteront à un déjeuner avec des parlementaires et ils participeront à un débat simulé à la Chambre des communes.

Le Conseil des 4-H est un excellent organisme qui est voué à la croissance et au développement de la jeunesse agricole.

J'ai eu ce matin le plaisir de rencontrer ces jeunes étudiants et je dois dire que les 4-H contribuent certainement à faire de nos jeunes des citoyens intègres, responsables et indépendants. Ces jeunes sont les leaders de demain.

*  *  *

LE BOIS D'OEUVRE

M. Andy Burton (Skeena, Alliance canadienne): Monsieur le Président, comme nous le savons tous, l'accord sur le bois d'oeuvre a expiré samedi soir dernier. Hier, le gouvernement des États-Unis a pris des mesures contre les producteurs canadiens.

On nous impose maintenant des droits qui pourraient être rétroactifs et atteindre les 76 p. 100. Cela pourrait entraîner la perte de l'industrie canadienne du bois d'oeuvre. Les Canadiens doivent trouver une solution à ce problème avant que des fermetures d'usine et des mises à pied ne se produisent au pays.

Le gouvernement libéral atermoie depuis trop longtemps déjà. Il est temps que nous entreprenions des négociations avec les Américains et que nous nous penchions sérieusement sur la question.

Dans quelques jours, les gouvernements de tous les pays des Amériques discuteront de la mise sur pied de la ZLEA. Comment pouvons-nous songer à participer à cet accord de libre-échange liant tout l'hémisphère, alors que nous ne sommes même pas certains que les règles de l'ALENA seront respectées avec les États-Unis dans le dossier du bois d'oeuvre?

Quand le gouvernement prendra-t-il des mesures dans ce dossier très important?

*  *  *

RICHMOND HILL

M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec une grande fierté que j'interviens aujourd'hui pour féliciter l'équipe responsable du budget de la ville de Richmond Hill, qui s'est vu décerner, pour la deuxième année d'affilée, le prestigieux prix de l'exposé budgétaire de l'Association des agents financiers gouvernementaux des États-Unis et du Canada.

L'équipe des services financiers de la ville a respecté les lignes directrices, reconnues à l'échelle nationale, à suivre pour présenter un bon exposé budgétaire. Je voudrais féliciter de cet exploit l'ex-directeur général Steve Zorbas, le directeur général suppléant Steve Fairweather et chacun des membres de l'équipe. Je tiens en très haute estime leurs compétences et leurs capacités non seulement à manipuler les chiffres mais aussi à communiquer et dialoguer facilement et efficacement avec les intéressés, dont les citoyens et les échevins.

Je tiens à adresser mes félicitations personnelles aux fonctionnaires municipaux qui ont accompli un excellent travail.

*  *  *

BELL CANADA

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, nous voici en avril 2001, et il faut encore que les femmes protestent pour bénéficier d'une chose aussi fondamentale que l'équité salariale.

C'est ce que les téléphonistes de la société Bell doivent faire aujourd'hui. Cela fait dix ans qu'elles luttent pour obtenir justice et dix ans qu'elles tâchent de faire régler un conflit avec Bell Canada en matière d'équité salariale.

Cela fait une décennie que Bell Canada crée des obstacles pour éviter de payer ce qu'elle doit à ses téléphonistes. La plupart des téléphonistes sont des femmes et beaucoup d'entre elles sont chefs de famille monoparentale.

 

. 1410 + -

Les efforts de cette entreprise ont maintenant fait échouer tout le processus de reconnaissance des droits de la personne et fait dérailler des centaines d'initiatives en vue de demander réparation de la discrimination.

Les tactiques de blocage de Bell Canada ont-elles l'air familières? Elles devraient. Elles ont été la pratique, l'habitude et le mode d'opération du gouvernement libéral du Canada, qui a rendu un très mauvais service aux Canadiennes.

Le concept est simple. Il s'agit d'offrir une rémunération égale pour un travail de valeur égale. Faisons ce qui s'impose. Que le gouvernement montre l'exemple.

*  *  *

[Français]

L'ÉQUITÉ SALARIALE

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, en février dernier, le rapport spécial de la Commission canadienne des droits de la personne, déposé à la Chambre, critiquait vivement le gouvernement fédéral pour son inaction au chapitre de la parité salariale.

L'approche fondée sur le dépôt de plaintes ne favorise aucunement l'atteinte de l'équité salariale dans des délais raisonnables et engendre la multiplication de procédures judiciaires complexes et parfois dilatoires.

Les téléphonistes de Bell Canada en sont un bel exemple. Depuis les premières plaintes déposées en 1988, il n'y a toujours rien de réglé.

Le Bloc québécois demande que l'on mette en application les cinq principes directeurs du rapport de la Commission canadienne des droits de la personne afin de s'attaquer vraiment à l'injustice sociale qu'est la non-reconnaissance, à sa juste valeur, du travail principalement effectué par des femmes.

Soyez assurés que le Bloc québécois continuera de s'attaquer à cette injustice sociale et s'assurera que la Chambre adopte une véritable politique proactive d'équité salariale.

*  *  *

[Traduction]

VAISAKHI

M. Gurbax Malhi (Bramalea—Gore—Malton—Springdale, Lib.): Monsieur le Président, ce mois-ci, la communauté sikhe du Canada et de partout dans le monde célèbre le Vaisakhi, le 302e anniversaire de la naissance de la nation sikhe.

Je tiens à remercier le premier ministre de son appui constant aux célébrations du Vaisakhi sur la colline du Parlement chaque année depuis huit ans et de son appui à la production du timbre canadien sur lequel figure le kanda sahib, symbole sikh. Le timbre reconnaît et honore la contribution de la communauté sikhe à la société canadienne.

J'invite tous les députés à profiter de l'occasion pour féliciter les Sikhs canadiens et célébrer le Vaisahki en assistant à une réception aujourd'hui, à la salle du Commonwealth, après la période des questions.

*  *  *

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DU CANCER

M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Monsieur le Président, en choisissant le mois d'avril et la jonquille comme symboles pour sa campagne de financement, la Société canadienne du cancer a reconnu l'importance d'une attitude positive dans la lutte contre le cancer.

Ce mois-ci, les milliers de bénévoles de la Société canadienne du cancer cogneront aux portes et organiseront des événements spéciaux partout au Canada afin d'atteindre leur objectif, qui est de recueillir 19 millions de dollars. L'an dernier, la société a versé plus de 41 millions de dollars à son partenaire de recherche, l'Institut national du cancer du Canada, qui a réparti ces fonds entre de nombreux projets diversifiés.

Cette organisation nationale a de fortes assises locales, s'occupe de recherche en matière de cancer, d'éducation et de services aux patients et défend ardemment l'adoption d'une saine politique publique.

Au nom de tous les députés, je remercie sincèrement tous les bénévoles de la Société canadienne du cancer.

*  *  *

L'ÉCONOMIE

M. John McCallum (Markham, Lib.): Monsieur le Président, à l'exception de quelques séparatistes du Québec, je n'ai jamais rencontré quelqu'un d'aussi peu rigoureux dans la présentation de ses faits que le porte-parole de l'Alliance canadienne en matière de finances.

[Français]

Selon lui, notre dette étrangère et notre dette gouvernementale sont au deuxième rang parmi les pays de l'OCDE. C'est faux et encore une fois faux.

[Traduction]

Le fait est que notre dette étrangère n'a jamais été aussi basse depuis 50 ans. Le fait est que notre dette nationale a baissé plus que celle de tout autre pays de l'OCDE au cours des cinq dernières années.

Pour couronner le tout, le député dit que notre impôt sur le revenu est plus élevé qu'à toute autre époque de notre histoire. C'est carrément impossible, car nous avons réduit les impôts le 1er janvier.

Le député devrait s'abstenir de dénigrer l'économie canadienne en faisant des affirmations carrément fausses.

*  *  *

LE REVENU NATIONAL

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la propension du gouvernement à s'immiscer dans la vie privée des Canadiens est sans limites.

En mars, en réponse à ma question, le ministre du Revenu national a confirmé que ses collaborateurs ouvraient non seulement les lettres des Canadiens, mais aussi les lettres confidentielles des avocats et de leurs clients, les photocopiant sans discernement, pour maintenir une base de données secrètes, semblable à celle que nous avons découverte l'année dernière, lors du scandale au ministère du Développement des ressources humaines.

 

. 1415 + -

Non content d'intercepter et d'ouvrir les lettres que reçoivent les Canadiens, le gouvernement libéral a, encore une fois, mine de rien, choisi un moyen détourné et a présenté le projet de loi S-23 au Sénat pour se donner un pouvoir encore plus grand de porter atteinte à la vie privée des Canadiens.

Le projet de loi donnerait au gouvernement libéral le droit d'ouvrir les lettres qu'envoient tous les Canadiens. Le ministre du Revenu national a déclaré que l'ouverture des lettres a été rentable. S'il est si fier de ses réalisations, pourquoi se sert-il du Sénat non élu pour cacher ses traces?

Il faut un mandat de perquisition pour écouter un appel téléphonique. Il faudrait un mandat de perquisition pour examiner des lettres confidentielles entre des avocats et leurs clients. Le projet de loi est antidémocratique. Il aurait dû être présenté à la Chambre. Il devrait être amendé de fond en comble avant de devenir une loi.



QUESTIONS ORALES

[Traduction]

LE PREMIER MINISTRE

M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je veux d'abord saluer le ministre de la Santé. Je lui souhaite un bon retour parmi nous et un prompt rétablissement.

Des voix: Bravo!

[Français]

M. Stockwell Day: Monsieur le Président, pendant que le premier ministre continue de camoufler le Shawinigate en tentant de faire croire qu'il n'y a pas de lien financier entre l'auberge et le club de golf, son ami, M. Yvon Duhaime, a confirmé sous serment, et je cite: «[...] que des ententes, des acomptes et des entreprises ont été pris entre l'auberge et les clients du club de golf.»

Pourquoi le premier ministre refuse-t-il d'admettre qu'il y a bel et bien des liens financiers entre l'auberge et le golf Grand-Mère?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, ce n'est pas ce qu'il a dit.

De toute façon, la réalité est très simple. Le 1er novembre 1993, j'ai vendu mes intérêts dans le golf. J'avais vendu les intérêts que nous avions dans l'auberge au mois de février précédent. Depuis ce temps-là, il est clairement confirmé—comme l'avait demandé l'opposition: «Déposez donc le contrat», le contrat est déposé—depuis 1993, que je n'ai aucun intérêt ni dans l'un ni dans l'autre des deux endroits.

[Traduction]

M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je signale que le conseiller en éthique lui-même a dit que tous les documents pertinents n'avaient pas été déposés et qu'un document très important, celui qui pourrait nous dire quels noms figurent au registre, devait en fait être modifié avant de pouvoir être rendu public.

Étant donné toutes ces contradictions, pourquoi le premier ministre ne permet-il pas tout simplement la tenue d'une enquête publique indépendante sur cette affaire? la !! Régie des alcools, des jeux et je ne sais plus quoi du Québec) !! dans le Soleil. La partie qui n'était pas là est entre

L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, dans sa première question, le chef de l'opposition a parlé de liens financiers entre le terrain de golf et l'hôtel, puis il a présenté sa version de ce qui a été dit.

Voici ce qui a été dit en réalité:

    Plusieurs soupers après tournois de golf, réceptions de mariage, anniversaires de mariage, danses de finissants et congrès sont réservés depuis plus d'un an. Des ententes, des acomptes et des contrats ont été pris entre l'auberge et ses clients.

Des réceptions de mariage, des danses de finissants, des soupers après les tournois de golf, cela prouve-t-il...

Le Président: Le chef de l'opposition a la parole.

M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ajouterai que le site Web parle aussi de forfaits golf, coucher et petit déjeuner. Alors, si le ministre veut lire des choses à la Chambre, qu'il les lise au complet.

Nous avons entendu des députés libéraux, notamment ceux d'Oshawa, de Guelph et de Vaudreuil, dire qu'ils aimeraient que cette affaire fasse l'objet d'une enquête publique indépendante. Nous aimerions qu'ils puissent voter librement sur cette motion. Je serais intéressé de voir comment le ministre des Finances voterait s'il pouvait voter librement sur cette motion.

Étant donné que, il y quelques semaines à peine, le premier ministre a forcé ses députés à voter contre une promesse qu'ils avaient faite eux-mêmes, pourquoi ne se rachète-t-il pas aujourd'hui en leur permettant de voter librement sur cette motion réclamant la tenue d'une enquête publique indépendante sur cette affaire?

L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je signale encore une fois que les soi-disant preuves citées par le chef de l'opposition parlent de danses de finissants, de congrès, d'anniversaires de mariage, de réceptions de mariage et de gens qui vont manger un repas après avoir joué au golf.

Il n'y a pas un seul terrain de golf ni un seul hôtel dans tout le pays qui ne fait pas de publicité de toutes les façons possibles pour attirer la clientèle durant la saison touristique. On ne peut certainement pas parler de conspiration. C'est simplement du bon marketing.

 

. 1420 + -

Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, deux bailleurs de fonds libéraux du premier ministre ont comparu hier devant un tribunal de Shawinigan pour répondre à des accusations de fraude et de vol de sommes pouvant atteindre 300 000 $. Les sommes en cause proviennent du ministère du Développement des ressources humaines, du Fonds de développement régional du Groupe Force. En 1997, ces deux individus avaient également acheminé 200 000 $ de prêts du fonds à l'Auberge Grand-Mère.

Le premier ministre ou un membre de son entourage ont-ils eu des discussions avec MM. Pépin et Lemire au sujet de l'octroi à l'auberge de fonds provenant de Groupe Force?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la réponse à cette question est non.

Je rappelle ce que la députée d'Edmonton-Nord a dit à la Chambre le 15 mars 2001. Elle a dit:

    Le premier ministre pourrait mettre un terme à cette affaire en un clin d'oeil s'il déposait le certificat de vente de ses parts en 1993.

C'est ce que j'ai fait et 81 p. 100 des Canadiens souhaitent que l'opposition passe maintenant à autre chose. Toutefois, cette dernière refuse de le faire parce qu'elle n'a aucune politique à proposer aux Canadiens au cas où elle formerait le gouvernement.

Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, cela aurait peut-être été vrai s'il y avait effectivement eu un acte de vente final, mais comme il n'y en a pas, les choses n'ont pas été tirées au clair, n'est-ce pas?

MM. Pépin et Lemire étaient directeurs, à Shawinigan, du Groupe Force, un organisme financé par le fédéral qui a accordé à l'Auberge Grand-Mère deux prêts d'une valeur totale de 200 000 $. Or, ces deux hommes subissent aujourd'hui un procès pour fraude et vol de subventions fédérales.

Je pose ma question directement au premier ministre: A-t-il, à quelque moment que ce soit, utilisé son influence pour obtenir des prêts du Groupe Force à l'Auberge Grand-Mère?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, si ces deux personnes se retrouvent aujourd'hui devant la justice, c'est parce que le personnel de mon cabinet a eu connaissance de rumeurs et en a informé la police.

Je rappelle également que lorsque des rumeurs de méfaits ont couru, ce ne sont pas les vérificateurs ni l'opposition, mais bien mon cabinet qui a pris ses responsabilités et qui a appelé la police.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, il est clair qu'il y a une contradiction flagrante entre les déclarations du premier ministre et celles du propriétaire de l'Auberge Grand-Mère, Yvon Duhaime.

Le premier ministre affirme, dans une lettre au chef du Parti progressiste-conservateur, que le club de golf est un compétiteur pour l'auberge, alors qu'Yvon Duhaime affirme sous serment que plusieurs des clients du club de golf et de l'auberge sont les mêmes.

Comment le premier ministre peut-il expliquer que le propriétaire de l'auberge déclare sous serment que le lien financier prouvant le conflit d'intérêts existe bel et bien entre le club de golf et son établissement, alors que lui prétend le contraire?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, ce que j'ai dit, et je le répète, au dix-neuvième trou—tout le monde sait ce que veut dire le dix-neuvième trou—s'il n'y a pas d'auberge, tous les clients restent au dix-neuvième trou du club de golf.

Si certains clients se rendent à l'auberge, ce sont des gens qui ne prennent pas une deuxième ou une troisième bière au dix-neuvième trou. Je pense qu'il connaît cela. Il n'y a pas beaucoup de monde qui verraient un club de golf dire aux gens: «Allez prendre vos consommations alcooliques dehors» quand vous pouvez les prendre au club de golf même.

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, il n'y a pas beaucoup d'actionnaires non plus, surtout des premiers ministres, qui pensent qu'une auberge fermée, en faillite, c'est une bonne chose pour le club de golf situé juste à côté. Tout le monde comprend cela. C'est pour cela que les gens veulent une enquête publique. Cela ressort dans les sondages qu'ils veulent une enquête publique.

S'il n'y a pas d'enquête publique, est-ce que ce n'est pas parce que le premier ministre, dans un contrat en 1999, avise M. Michaud que s'il y a une enquête publique, c'est sa compagnie à lui qui va payer tous les frais d'avocats? Est-il généreux...

Le Président: Le premier ministre a la parole.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons répondu à toutes ces questions. Encore une fois, probablement pour la septième ou huitième fois cet après-midi, le conseiller en éthique va répondre. Il a dit clairement qu'il n'y avait aucun conflit d'intérêts. Il l'a fait en 1999. Depuis ce temps, on a continué, et c'est le député de Roberval qui disait, le 15 mars de cette année: Ne comprend-il pas que la seule façon de régler ce dossier [...]—il n'y en a pas 50, il y en a une seule—c'est de déposer l'acte de vente [...].»

 

. 1425 + -

C'est exactement ce que nous avons fait. Nous avons accédé à toutes les requêtes de l'opposition. La GRC a regardé le dossier...

Le Président: L'honorable député de Verchères—Les-Patriotes a la parole.

M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, les documents qui ont été déposés devaient dissiper tous les doutes dans cette affaire et, bien au contraire, ils ont ajouté encore plus d'obscurité dans le dossier.

Selon les sondages, près de 60 p. 100 des gens souhaitent une enquête dans l'affaire de l'Auberge Grand-Mère, et même 54 p. 100 des électeurs libéraux interrogés veulent aussi une enquête.

Or, le premier ministre a répété plusieurs fois qu'il avait bâti sa carrière sur l'intégrité. Le premier ministre ne réalise-t-il pas maintenant qu'en refusant une enquête dans l'affaire où il est personnellement impliqué, il est en train de détruire tout ce qu'il prétend avoir bâti?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je ne crois pas.

Bien au contraire, c'est moi-même qui ai créé un précédent, parce que c'est la première fois qu'un premier ministre dépose des documents personnels devant la Chambre des communes. Je l'ai fait la semaine dernière en répondant à la demande de l'opposition.

Quatre-vingt-un ou 82 p. 100 des gens au Canada veulent que l'opposition s'occupe des vraies affaires. Il y a des problèmes dans ce pays, mais tout ce qu'ils ont comme attaque, c'est d'essayer de détruire une réputation plutôt que de s'attaquer aux vrais problèmes du pays, ce dont le gouvernement s'occupe pas mal bien.

M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, quand ça va mal, généralement ça se lève puis ça applaudit en trombe de l'autre côté.

Le premier ministre peut bien parler de son intégrité, mais ne peut-il pas comprendre que le moment est maintenant venu où il faut cesser d'en parler et le démontrer?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tous les députés de cette Chambre devraient s'occuper des vrais problèmes de la nation.

*  *  *

[Traduction]

LE COMMERCE

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, le gouvernement alimente sciemment la crainte et l'insécurité en ce qui concerne le sommet de la ZLEA et cela a de terribles conséquences.

Des agents de police communiquent avec les propriétaires de compagnies d'autobus pour les dissuader de transporter des gens à Québec. Ils font du porte à porte pour dissuader les habitants de la ville d'accueillir des visiteurs. Ils interrogent même des Canadiens en fonction des opinions qu'ils ont exprimées.

Il est impossible que le gouvernement ne soit pas au courant de cette campagne d'intimidation. Le premier ministre pourrait-il nous dire quelles instructions le gouvernement a données pour assurer la sécurité au sommet de Québec et quelles mesures on prend pour que les Canadiens puissent exercer leurs droits démocratiques au Sommet des peuples?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le chef de parti pour sa question. Le gouvernement veut que les Canadiens s'expriment. Il y a eu de nombreux pourparlers avec toutes sortes de groupes au Canada pendant des mois. À Québec, des organisations verront à ce que les Canadiens manifestent pacifiquement.

La police doit toutefois garantir la sécurité des habitants de la ville de Québec ainsi que celle des visiteurs. C'est le travail que doit accomplir la police. Je sais que la police fédérale, la GRC, la police provinciale et la...

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, les Canadiens ne pensent pas que les interrogations et l'intimidation soient le travail de la police.

Le professeur Anthony Hall, de l'Université de Lethbridge, est un défenseur du libre-échange. Il a effectué des recherches concernant la ZLEA et il a diffusé son analyse au sein de la communauté universitaire et sur Internet. Jeudi dernier, M. Hall a été stupéfait de recevoir la visite d'un agent de la sécurité nationale. Le sergent Cramer de la GRC a interrogé M. Hall pour connaître ses opinions concernant la ZLEA et son rôle au Sommet des peuples. Il lui a également demandé d'identifier d'autres personnes qui s'intéressent au sommet.

Une telle intimidation...

L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement reconnaît clairement que les Canadiens ont le droit de manifester pacifiquement. Le chef du NPD ne s'attend certainement à ce que le gouvernement ou moi disions à la GRC ou à un autre corps policier comment garantir la sécurité publique au Canada. J'espère que ce n'est pas le cas.

*  *  *

 

. 1430 + -

LE PREMIER MINISTRE

Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, le 28 mars, le ministre de l'Industrie a dit à la Chambre:

      ...nous savons que, en réalité, le premier ministre a perdu de l'argent dans la vente d'actions dont son fiduciaire s'est chargé.

Le premier ministre pourrait-il dire à la Chambre combien il a payé initialement, en 1988, pour les actions du club de golf? Dans sa déclaration de revenus, a-t-il fait état de gains en capital ou d'une perte en capital par rapport à ces transactions? Dans l'affirmative, en quelle année l'a-t-il fait?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, quelle expédition de pêche. Je dois dire à la Chambre des communes que, lorsque ce député-ci est devenu chef de son parti, celui-ci était lourdement endetté et il a refusé de se faire payer.

Par contre, celui-là s'est versé un salaire de 200 000 $ alors que son parti croulait sous une dette de dix millions de dollars. Il ne veut pas avouer aux Canadiens combien il reçoit maintenant. Cet argent est de l'argent subventionné, car chaque contribution à un parti politique donne droit à un crédit d'impôt. Il s'agit, pour les trois quarts, d'argent du gouvernement.

*  *  *

[Français]

L'AGENCE CANADIENNE DE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL

Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, je peux...

Des voix: Oh, oh!

[Traduction]

Le Président: À l'ordre s'il vous plaît. Le député de Calgary-Centre a la parole et la présidence doit pouvoir entendre la question.

[Français]

Le très hon. Joe Clark: Monsieur le Président, j'ai une autre question à poser au premier ministre. C'est une question à l'égard du contrat de 6,3 millions de dollars accordé par l'ACDI à l'une des compagnies de Claude Gauthier pour l'installation d'un système de distribution électrique au Mali.

Le premier ministre peut-il indiquer à la Chambre si un de ses ministres ou lui-même est intervenu de quelque façon que ce soit en faveur de Claude Gauthier ou une de ses compagnies auprès de l'ACDI dans le cadre de ce dossier?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Absolument pas, monsieur le Président. C'est un contrat qui a été octroyé alors que le monsieur en question était le plus bas soumissionnaire avec 2,5 millions de dollars de moins. Ce qui veut dire que le travail fait par M. Gauthier a épargné 2,5 millions de dollars au gouvernement canadien.

[Traduction]

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le contrat de vente que j'ai réclamé récemment aurait dû suffire. Il aurait pu suffire. Sauf qu'il était rédigé à la main, qu'il n'y avait aucun témoin, qu'il n'était pas notarié, qu'il ne mentionnait pas d'acompte et qu'il n'était pas revêtu d'un sceau officiel.

Le contrat a d'ailleurs été dénoncé par l'autre signataire. Il est incroyable que le premier ministre ait pu penser que ce document était officiel. Qui a été témoin de la signature et dans quelle province la signature a-t-elle eu lieu?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tout avocat sait qu'un contrat est l'expression de la volonté des parties.

Nous savons une chose: la députée a fait campagne à deux reprises en disant à tout le monde à Edmonton qu'elle n'accepterait jamais de pension de retraite. Quelques semaines après les élections, après avoir reproché à tous les autres députés de s'empiffrer, elle a adhéré au régime et n'en a rien dit à ses électeurs.

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, lorsqu'il est acculé au mur, le premier ministre est prêt à attaquer n'importe qui.

La question était fort simple et je vais la répéter. Qui a assisté à la signature et dans quelle province a-t-elle eu lieu?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, elle va chercher loin. Je vois mon nom sur le contrat. C'est le mien. J'ai signé ce contrat il y a longtemps. C'était probablement à Ottawa, parce que c'était le lendemain de notre victoire contre les conservateurs et j'étais en train de former un excellent gouvernement pour les Canadiens.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre nous refuse une enquête publique dans le dossier de l'Auberge Grand-Mère et, en plus, le gouvernement fait tout ce qu'il peut pour nous empêcher d'avoir accès aux informations entourant cette affaire.

Comment le gouvernement peut-il justifier que l'ACDI refuse toujours, 13 mois après notre requête, de nous fournir quelque information que ce soit sur Claude Gauthier, cet autre ami du premier ministre impliqué aussi dans le golf Grand-Mère?

 

. 1435 + -

[Traduction]

L'hon. Maria Minna (ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit à de nombreuses reprises à la Chambre, les fonctionnaires du ministère ont présenté à la ministre une liste de sept sociétés.

Trois d'entre elles ont envoyé une soumission. Transelec était l'un des soumissionnaires. Sa soumission était inférieure de 30 p. 100, 2,5 millions de dollars de moins que celles des autres soumissionnaires et on a ainsi épargné tout cet argent au pays. Ce sont les faits.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, cela fait 13 mois qu'on demande les documents à l'ACDI, mais l'ACDI contrevient à la Loi sur l'accès à l'information. C'est cela, la question. La ministre n'a rien compris.

En 1996, Claude Gauthier est celui qui a acheté une parcelle des terrains adjacents au golf Grand-Mère à un prix nettement exagéré de 525 000 $. Or, les liens entre Gauthier, le golf, Placeteco, Transelec et le premier ministre sont des plus évidents.

Le refus de l'ACDI de nous transmettre de l'information depuis plus de 13 mois ne doit-il pas être perçu comme un autre effort gouvernemental de brouiller les pistes, de nous empêcher de comprendre les dessous de l'affaire du golf?

[Traduction]

L'hon. Maria Minna (ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit à de nombreuses reprises à la Chambre, les faits dans cette affaire sont très clairs. On a soumis au bureau de la ministre le nom de sept entreprises. C'était la procédure à l'époque.

Nous procédons maintenant par adjudication publique. C'était l'ancien système dont nous avions hérité du Parti conservateur.

*  *  *

LE PREMIER MINISTRE

Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le premier ministre et ses défenseurs prétendent qu'il n'avait absolument aucun intérêt dans le club de golf après novembre 1993. Pourtant, du même souffle, ils reconnaissent que son avocate a essayé activement de vendre ces actions jusqu'en 1999.

Cela indique en soi que le premier ministre avait en fait un intérêt financier dans les actions en question. N'est-il pas vrai que si le premier ministre n'avait pas trouvé de nouveaux acheteurs, il n'aurait pas été payé?

L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre a cessé d'être un administrateur de la compagnie 161341 Canada Inc. à compter du 25 octobre 1993, comme le confirme l'Avis de changement des administrateurs, formule no 6, daté du 8 mars 1994, envoyé au directeur des corporations et rendu public le 14 mars 1994.

Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, Jonas Prince a été en mesure de vendre sa chaîne d'hôtels au Canadien Pacifique pour 90 millions de dollars. Il est à parier que cette transaction n'a pas été confirmée par un seul petit bout de papier rédigé à la main.

M. Prince savait certainement comment vendre des biens sans l'aide du premier ministre ou de son avocate. N'est-il pas vrai que M. Prince a dit au premier ministre que s'il voulait être payé pour ses actions, il ferait mieux de trouver un autre acheteur?

L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, ces allégations, et celles du chef de l'opposition, viennent de deux parlementaires—en fait, il en va de même de la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui. Ces allégations sont faites par deux parlementaires qui ont tous deux été reconnus coupables d'avoir calomnié des particuliers, un alors qu'il siégeait dans une autre assemblée législative, celle de l'Alberta, et l'autre à cet endroit.

On ne fait donc que répéter ce qu'ils ont fait dans le passé. Les Canadiens ne l'acceptent pas. Ils disent qu'il est temps de s'occuper à nouveau des affaires du pays.

*  *  *

[Français]

LA FISCALITÉ

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, depuis plusieurs années, l'OCDE, le vérificateur général et le Bloc québécois dénoncent les pratiques fiscales dommageables et abusives, tels les paradis fiscaux et les conventions fiscales signées avec ces pays.

Le Canada a une telle convention avec La Barbade, qui profite aux plus fortunés, mais qui coûte chaque année des centaines de millions de dollars à Revenu Canada en taxes et en impôts impayés.

Pendant que les ministres des Finances des 34 pays de la future Zone de libre-échange des Amériques sont à Toronto pour discuter des pratiques fiscales dommageables, ne serait-il pas une bonne idée que le gouvernement dénonce cette convention fiscale entre le Canada et La Barbade comme signe de sa bonne volonté de combattre ces pratiques abusives?

[Traduction]

M. Roy Cullen (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je crois que le député d'en face mélange plusieurs choses.

Le Canada participe vigoureusement à une initiative de l'OCDE sur la concurrence fiscale. En fait, l'an dernier, nous avons présenté une mesure législative très stricte sur le blanchiment de l'argent. Dans le cadre de l'OCDE nous luttons contre la concurrence fiscale. Nous avons conclu des traités fiscaux avec certains pays et cela est très nettement à l'avantage de tous nos concitoyens.

 

. 1440 + -

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, est-ce que le premier ministre trouve normal que le troisième pays où les investissements canadiens sont les plus élevés, après les États-Unis et le Royaume Uni, soit la Barbade, paradis fiscal par excellence de 269 000 habitants?

Est-ce que le premier ministre ne trouve pas qu'assez, c'est assez? Est-ce que c'est parce que le ministre des Finances a huit filiales d'entreprises de transport maritime à la Barbade que le dossier ne bouge pas depuis 1994?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Encore une fois, monsieur le Président, lorsqu'on n'a rien d'autre à offrir à la population, on essaie de salir des réputations.

Le ministre des Finances a clairement établi, lorsqu'il est devenu ministre des Finances, qu'il avait mis tous ses actifs en fiducie. Il a respecté toutes les règles depuis qu'il est ministre des Finances, et on s'attaque à sa réputation.

Mais je dois dire que le ministre des Finances est un homme avec une réputation intègre et respecté par tous les Canadiens.

*  *  *

[Traduction]

LE PREMIER MINISTRE

M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, en septembre 1996, l'ami du premier ministre, Claude Gauthier, a acheté à la société à dénomination numérique du premier ministre un terrain valant plus d'un demi million de dollars.

Cela s'est passé trois jours seulement après que l'entreprise de M. Gauthier ait obtenu un contrat de 6,3 millions de dollars de l'ACDI, contrat pour lequel il n'aurait même pas dû pouvoir soumissionner. N'est-il pas clair qu'il s'agissait là d'un marché, un contrat de l'ACDI en échange d'avoir débarrassé le premier ministre d'un terrain situé à proximité du golf?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le député va retirer ce qu'il vient de dire. Il a dit que M. Gauthier avait acheté un terrain appartenant à une société à dénomination numérique dont j'étais propriétaire. Ce n'est pas du tout vrai. Je n'étais plus membre de la société propriétaire du golf depuis le 1er novembre 1993. Ce qu'il vient de dire est complètement faux.

M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, si le premier ministre ne connaît pas la réponse, il peut sans doute la demander à son caddie là-bas.

Après avoir obtenu un contrat de l'ACDI et acheté un terrain appartenant au premier ministre, Transelec a fait don de 10 000 $ à la caisse électorale de ce dernier. À la grande surprise de tout le monde, un an plus tard, le propriétaire de Transelec a reçu une subvention de 1,2 million de dollars de DRHC, subvention qui a été placée dans un fonds en fiducie illégal pour qu'il puisse acheter Placeteco, une société sous séquestre.

Si le premier ministre ne demande pas la tenue d'une enquête judiciaire sur l'affaire de l'Auberge Grand-Mère, va-t-il demander la tenue d'une enquête sur l'affaire Gauthier?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, encore une allégation non fondée. En fait, la police a fait enquête sur l'affaire Placeteco et a dit qu'il n'y avait absolument rien d'anormal dans cette transaction. Elle a fait l'objet d'une enquête policière.

L'opposition refuse d'accepter ce qu'on lui dit. Elle n'a qu'un désir, calomnier les gens et essayer de détruire leur réputation, mais elle n'y arrivera pas parce que ce parti est synonyme de bon gouvernement et qu'il gouverne bien les Canadiens.

*  *  *

LES PÊCHES

M. Wayne Easter (Malpeque, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Pêches et des Océans. Les pêcheurs du Nouveau-Brunswick et de l'Île-du-Prince-Édouard qui ont comparu devant le Comité des pêches ont choqué le comité quand ils ont déclaré qu'ils devaient parfois fournir du carburant et payer des heures supplémentaires aux fonctionnaires du ministère pour que ces derniers puissent faire leur travail.

Ils ont dit craindre que l'insuffisance des fonctionnaires et du matériel ne débouche sur des activités accrues de braconnage du homard. Que fait le ministre dans l'immédiat pour régler le problème et renforcer les moyens de surveillance des pêches sur la côte est?

L'hon. Herb Dhaliwal (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, ce dossier est très important. Il est extrêmement important de protéger nos ressources marines et notre poisson.

Je remercie les députés libéraux qui se sont consacrés à ce dossier depuis ma nomination au poste de ministre des Pêches et des Océans. Grâce à leur travail, nous avons annoncé l'année dernière l'octroi de 41 millions de dollars sur les trois prochaines années et nous avons dépensé 13 millions de dollars l'année dernière pour augmenter le nombre de nos agents sur le terrain, améliorer le matériel et les technologies, afin de mieux protéger les ressources dans l'intérêt de tous les Canadiens et de poursuivre l'excellent travail qui a été fait jusqu'ici dans le secteur des pêches.

*  *  *

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, j'ai un autre exemple du traitement cavalier du gouvernement envers les hommes et les femmes qui font partie de notre armée.

Tout récemment, les militaires les moins bien rémunérés ont obtenu une augmentation de 2,5 p. 100. Cependant, Dieu donne et Dieu reprend. Le coût des loyers a été augmenté de 50 $, 75 $ et 100 $, ce qui annule l'augmentation récemment accordée.

Notre armée a le moral à plat. Il est difficile de recruter et, avec une attitude comme celle du ministre envers les militaires, cela n'est pas du tout étonnant.

 

. 1445 + -

Le ministre éliminera-t-il au moins les augmentations du coût des loyers du personnel de l'armée?

L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, le député sort les données de leur contexte. Il est vrai qu'une augmentation de solde a été accordée le 1er avril, mais il y a également eu une augmentation rétroactive d'un an. Ces augmentations dépassent de beaucoup les augmentations de loyer.

La vérité c'est que les militaires sont soumis aux conditions du marché locatif. Soixante-dix pour cent d'entre eux paient leur loyer à des entreprises privées. Pour les 30 p. 100 restants, le loyer est établi équitablement selon une formule de la SCHL fondée sur le marché locatif. Cependant, toute augmentation de loyer est limitée à 25 p. 100 du revenu des militaires.

M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, la prochaine question sera posée au patron du ministre. Ma question complémentaire s'adresse au premier ministre.

Le gouvernement n'est pas censé donner l'impression d'être en conflit d'intérêts. Récemment, David Miller, un lobbyiste pour Eurocopter, a été rattaché au cabinet du premier ministre en tant que conseiller spécial.

Tout le projet d'hélicoptères maritimes est entaché d'ingérence politique par le gouvernement libéral. Le premier ministre reconnaîtra-t-il que la présence de David Miller d'Eurocopter au sein de son personnel crée au moins une apparence de conflit d'intérêts?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons enclenché le processus d'appel d'offres. Il y aura des soumissions. Ça prendra des mois. Nous avons vérifié et on nous a fait savoir que M. Miller pouvait passer de son poste à celui-ci. Il a travaillé longtemps sur la Colline. Lorsque les soumissions seront prêtes, je demanderai à M. Miller de ne pas participer aux discussions.

Il a le droit de travailler pour le gouvernement. Il a travaillé pour le gouvernement auparavant et il voudrait y revenir. Nous croyons que cet homme de l'ouest du Canada est un atout et nous aimerions qu'il fasse partie de notre personnel.

*  *  *

L'INDUSTRIE DU BOIS D'OEUVRE

M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, le ministre responsable de l'APECA est dans l'erreur lorsqu'il dit que le système de surveillance du Bureau du bois de sciage des Maritimes ne vise pas toutes les exportations de bois d'oeuvre du Canada atlantique. Il est dans l'erreur lorsqu'il dit que les scieries des Maritimes bénéficieront des nouvelles mesures d'observation s'appliquant aux exportations.

Comment le ministre peut-il penser que les scieries dans les Maritimes bénéficieront du double emploi inutile de la paperasse et d'une hausse des tarifs, qui passent de 2 à 25 dollars la charge?

L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, nous avons eu des discussions très étroites avec le Bureau du bois de sciage des Maritimes. Nous collaborons aussi avec les provinces de l'Atlantique et avec d'autres provinces d'un bout à l'autre du pays.

Nous avons décidé d'inscrire le bois d'oeuvre sur la liste des exportations contrôlées parce que nous avons besoin de données nationales cohérentes. Pas plus tard qu'hier soir, j'ai reçu un appel téléphonique de Don Evans, secrétaire au Commerce américain, qui voulait justement comparer le système de surveillance américain avec le nôtre. Je pense qu'il est important que les deux systèmes soient compatibles, de manière à ce que nous puissions comparer des pommes avec des pommes.

M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, dans une pétition en faveur de l'imposition de droits compensateurs, le secteur américain du bois d'oeuvre déclare ceci:

    Les pétitionnaires n'allèguent pas que la production de bois d'oeuvre dans les provinces de l'Atlantique bénéficie de subventions compensables. Cette partie de la production canadienne devrait continuer d'être traitée comme en 1991-1992.

Le gouvernement américain convient que la région canadienne de l'Atlantique ne devrait pas être soumise à des droits compensateurs. C'est ce que souhaite le secteur industriel de la région canadienne de l'Atlantique, et les premiers ministres des quatre provinces de l'Atlantique demandent que l'accord des Maritimes soit reconduit. Le ministre leur emboîtera-t-il maintenant le pas et entreprendra-t-il de faire reconduire l'accord des Maritimes?

L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Soyons clairs, monsieur le Président. Nous examinons depuis hier la pétition que les producteurs américains ont présentée et nous estimons que leurs statistiques sont absolument farfelues et insensées.

J'ai été ravi de constater que, aussi excessifs qu'ils puissent être, les producteurs américains ne s'en prennent à aucun programme de la région canadienne de l'Atlantique, comme le veut la tradition vieille de 20 ans de ne pas menacer de lui imposer des droits compensateurs. C'est un premier pas dans la bonne direction.

*  *  *

L'ÉCONOMIE

M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est un bien triste jour pour le dollar canadien qui, aujourd'hui, s'est échangé à son plus bas niveau jamais enregistré, soit 0,6320 $.

Depuis 25 ans, le premier ministre applique délibérément une politique qui se résume à taxer, emprunter et dépenser et qui se traduit par la faiblesse de notre dollar, ce qui a entraîné le déclin de notre productivité et une diminution de 25 p. 100 de la valeur de notre dollar depuis 30 ans.

 

. 1450 + -

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons des monnaies flottantes et nous ne ferons pas d'observations sur la décision du marché.

C'est une réalité que toutes les monnaies du globe sont en baisse par rapport au dollar américain. Depuis deux ans, la devise qui a réussi le mieux à maintenir sa position par rapport au dollar américain est le dollar canadien. Nous avons mieux fait que l'euro, le yen et la livre, mais c'est au marché de décider, pas à moi.

M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, cela n'a aucun sens. Nous avons perdu du terrain par rapport au peso mexicain.

Ce parti semble être celui du nationalisme économique, mais, sous sa gouverne, le Canada est devenu la meilleure aubaine de l'économie nord-américaine. Je me souviens que John Turner disait que le Canada n'était pas à vendre. Sous le gouvernement actuel, le Canada a été mis en vente à des prix de vente de feu. En effet, tout investisseur américain peut acheter des actifs canadiens à 40 p. 100 de rabais.

Que fera le premier ministre pour empêcher les Américains d'acheter des actifs canadiens à 40 p. 100 de rabais et rétablir la valeur du dollar canadien?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, jamais le Canada n'a autant investi aux États-Unis. Il y a une libre circulation de capitaux entre nos deux pays.

Même le chef de l'opposition a parlé d'un dollar faible il n'y a pas très longtemps. Je puis citer ce qu'il a dit en 1998, tel que le rapportait le Sun d'Edmonton:

    Le principal avantage d'un dollar faible, c'est que cela donne un bon coup de pouce à notre secteur manufacturier et à nos exportateurs. Toute augmentation de la dette est contrebalancée par les recettes que nous tirons de la hausse de la fabrication et des exportations.

C'est excellent pour le pétrole. C'est excellent pour le gaz. C'est excellent pour...

Le Président: La députée de Mercier a la parole.

*  *  *

[Français]

LA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE DES AMÉRIQUES

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, un économiste de réputation mondiale, Ricardo Petrella, exprimait des craintes sérieuses quant au danger que l'eau puisse faire l'objet de discussions au cours des négociations sur la Zone de libre-échange des Amériques, puisque seuls les services contrôlés à 100 p. 100 par le gouvernement seraient protégés. Ainsi, le Québec pourrait perdre son autorité sur cette ressource stratégique.

Compte tenu de ces craintes, qu'attend le ministre pour rendre publique la position du gouvernement sur les services?

L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je crois comprendre que l'opposition me pose une question sur le commerce des services.

Dans le domaine du commerce des services à la Zone de libre-échange des Amériques, nous n'avons pas encore développé l'architecture même de cette négociation. C'est quelque chose sur laquelle nous allons nous pencher, la semaine prochaine, à Buenos Aires.

Ce dont je peux assurer la députée cependant, c'est que nous le faisons en étroite collaboration avec les provinces que nous avons consultées et que, dans le domaine des services, tout engagement et toute direction que nous prendrons respecteront parfaitement le mandat et la position que nous avons annoncés dans les négociations d'un accord au GATT sur les services.

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, c'est une question grave.

Un intellectuel de réputation internationale, dont on ne peut pas dire que c'est un extrémiste, vient nous dire que le Québec risque de perdre le contrôle sur ses services et son eau. Les gens en ont assez de ces cachotteries.

Puisque le ministre refuse encore la divulgation des textes de négociation, peut-il au moins, en attendant, déposer à la Chambre la liste de tous les sujets qui sont à l'ordre du jour de la négociation de la ZLEA pour que nous sachions si l'eau en fait partie?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je ferai remarquer à l'honorable députée qu'en 1993, juste avant qu'on signe définitivement l'accord avec les Américains, nous avons retardé la signature de l'accord avec les Américains et les Mexicains parce nous avons exigé, et des États-Unis et du Mexique, que l'eau soit exclue de l'ALENA. Cela a été fait en 1993 et cela détermine clairement la position du gouvernement quant à l'eau dans les négociations internationales.

*  *  *

[Traduction]

L'INDUSTRIE DU BOIS D'OEUVRE

M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il y a cinq ans, nous savions que l'entente sur le bois d'oeuvre arriverait à échéance le 31 mars 2001. L'Alliance canadienne a signalé cette échéance au gouvernement et lui a demandé pendant des mois s'il avait prévu un plan. Le 1er avril, nous constatons que des milliers de Canadiens ont été victimes du poisson d'avril.

 

. 1455 + -

Nous sommes sur le point d'être frappés de plein fouet, comme par une remorque pleine de billes de bois, par des milliards de dollars de droits compensateurs et nous apprenons que le premier ministre n'a pas insisté pour que son gouvernement adopte un plan. Pourquoi ne l'a-t-il pas fait?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, lorsque j'ai rencontré le président des États-Unis il y a quelques semaines, j'ai abordé cette question. J'ai parlé avec lui de pétrole, de gaz et de différents sujets de nature commerciale. Je lui ai dit très clairement que les Canadiens veulent vendre non seulement leur pétrole et leur gaz aux États-Unis, mais aussi leur bois.

Nous avons discuté de cela. Nous savions que l'entente arrivait à échéance. Il est étonnant de voir le chef de l'opposition se réveiller et se rendre compte tout à coup des véritables problèmes du Canada.

M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, cela montre bien l'influence que le premier ministre exerce sur le président des États-Unis. Nous allons être frappés de plein fouet par des droits compensateurs accablants, et le premier ministre n'a rien fait à ce sujet.

Nous n'avons pas besoin de la permission des États-Unis pour désigner un émissaire qui sera chargé de régler le problème pour nous. Qui est cet émissaire?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous négocions actuellement avec l'administration américaine. Pour que nous désignions un émissaire, il faudrait que l'autre partie en désigne un aussi. Notre émissaire devra rencontrer un responsable qui sera l'émissaire américain. Le chef de l'opposition devrait comprendre que, si nous voulons poursuivre un dialogue, il faut que l'autre partie veuille aussi poursuivre le même type de discussion.

Nous espérons arriver prochainement à une entente. Le nom de l'émissaire canadien est déjà connu, mais nous ne pouvons le rendre public avant de savoir ce que les Américains voudront faire de cette question.

*  *  *

[Français]

LES INFRASTRUCTURES ROUTIÈRES

M. Guy St-Julien (Abitibi—Baie-James—Nunavik, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Revenu national et ministre responsable de l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec.

La société minière McWatters a déposé une demande au gouvernement du Canada et au gouvernement du Québec pour la relocalisation de la route transcanadienne 117 dans le but d'avoir accès aux réserves d'or sur cette route pour la mine Sigma-Lamaque, pour le 1er mai 2001.

Est-ce que le ministre peut nous indiquer aujourd'hui s'il maintient des discussions positives avec le gouvernement du Québec pour que les travaux débutent pour le mois de mai? Le député péquiste ne voulait pas que cette route soit déplacée l'année passée, en 1999 et en l'an 2000.

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, voilà enfin une question sérieuse qui touche l'ensemble des régions.

Tout d'abord, j'aimerais féliciter mon collègue pour l'excellent travail qu'il fait dans l'ensemble des régions ressources, plus particulièrement dans son comté.

Évidemment, à Développement économique Canada, nous sommes préoccupés par la situation dans son comté et dans l'ensemble de la région de l'Abitibi. Nous travaillons actuellement de concert avec le ministère des Ressources naturelles pour trouver d'autres façons de bonifier nos interventions puisque nous avons développé une initiative particulière de 8,5 millions de dollars.

Maintenant, pour ce qui est de la route pour la mine McWatters, on analyse la situation à travers le Programme d'infrastructures Canada...

Le Président: L'honorable député de Saanich—Gulf Islands a la parole.

*  *  *

[Traduction]

L'INDUSTRIE DU BOIS D'OEUVRE

M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, Alliance canadienne): Monsieur le Président, analysons quelques faits concernant le différend lié au bois d'oeuvre. Au cours des 20 dernières années, les frais juridiques ont totalisé 100 millions de dollars, et nous sommes revenus à la case départ. Plus d'un million de Canadiens sont affectés par ce différend. Des dizaines de milliers d'emplois sont en jeu.

David Emerson, PDG de Canfor, Duncan Davies de la société Interfor, Jake Ker de la société Lignum et de nombreux autres ont tous dit que, si des droits compensateurs de l'ordre de 20 p. 100 sont imposés, ils devront fermer des scieries. Hier, le ministre a laissé entendre que leur situation s'améliorerait à long terme.

Le ministre peut-il nous dire en quoi la situation des travailleurs canadiens va s'améliorer s'ils n'ont plus d'emploi?

L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je suis tout à fait renversé d'entendre aujourd'hui l'opposition demander où nous nous situions le 1er avril dans le dossier du bois d'oeuvre. Nous sommes exactement là où l'opposition et le gouvernement voulaient nous voir, soit en train de tenir compte de ce que nous entendons d'un bout à l'autre du pays, de veiller à ce que le commerce du bois d'oeuvre soit régi par l'ALENA.

L'ALENA s'appliquera désormais au commerce du bois d'oeuvre. Cela signifie, bien sûr, que les Américains pourraient faire des allégations et lancer des accusations inconsidérées, mais nous y répondrons. Je continuerai à travailler avec M. Emerson et M. Davies.

M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, Alliance canadienne): Monsieur le Président, voici ce qui est renversant. Le gouvernement a eu un an et demi pour se préparer. Il ne discute même pas avec les Américains. Il n'a pas encore demandé la tenue d'une rencontre avec l'industrie canadienne. Il n'a pas convoqué les deux parties à une rencontre.

 

. 1500 + -

Hier, le ministre a déclaré qu'il ne peut nommer un émissaire parce qu'il n'est pas au courant du mandat. S'il ne connaît pas le mandat, comment peut-il s'attendre à ce que l'industrie ait le moindrement confiance que le gouvernement pourra résoudre le problème alors qu'elle fait face à des milliards et des milliards de dollars en droits compensateurs et que nos travailleurs vont rentrer chez eux sans chèque de paie? Que fait le gouvernement?

L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, j'ai parlé avec les responsables du British Columbia Lumber Council ce midi. Je suis en mesure de dire qu'ils font beaucoup plus confiance au leadership dont fait preuve le gouvernement qu'aux propos que tient l'opposition à l'heure actuelle. Le British Columbia Lumber Council est d'accord avec ce que nous faisons. Ce sont les membres du Conseil qui me l'ont dit, car je leur ai parlé ce midi.

J'ai dit au chef de l'opposition que j'avais parlé à Don Evans hier soir, l'opposition ne devrait donc pas dire que nous ne parlons pas aux Américains. Je rencontre Bob Zoellick vendredi à Buenos Aires. Nous discutons, et nous défendrons l'industrie canadienne.

*  *  *

[Français]

L'URANIUM

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, selon des données du Pentagone, un biologiste britannique, Roger Coghill, a calculé que 500 000 obus à l'uranium tirés dans les Balkans ont libéré assez de radioactivité pour provoquer plus de 10 000 décès.

Le Dr Asaph Durakovic, spécialiste en médecine nucléaire, a, quant à lui, examiné 16 anciens combattants de la guerre du Golfe. Il affirme que neuf ans après le conflit, l'uranium 236 est toujours présent dans le corps des patients.

Comment le ministre de la Défense nationale peut-il rester si passif dans le dossier de l'uranium appauvri, quand des spécialistes confirment que ceux qui ont été en contact avec les résidus de ce métal dangereux risquent d'être malades...

Le Président: L'honorable ministre de la Défense nationale a la parole.

[Traduction]

L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, les ennuis de santé de certains de nos militaires ne nous laissent pas indifférents. Toutefois, toutes les études effectuées sur la question n'ont pas établi de rapport entre les niveaux élevés d'uranium et ces problèmes de santé.

Nous faisons certainement tous les efforts voulus pour continuer à examiner les besoins de nos militaires en matière de soins de santé. Nous participons également avec les pays de l'OTAN à une étude sur la question, mais les preuves scientifiques n'ont pas établi de lien jusqu'à présent.

*  *  *

LE LOGEMENT

M. Tony Tirabassi (Niagara-Centre, Lib.): Monsieur le Président, faute de questions de la part des chefs de parti d'opposition sur d'importants sujets d'intérêt pour la majorité des Canadiens, je poserai au ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux une question au sujet du financement abordable de l'achat d'une maison.

La Société canadienne d'hypothèques et de logement a annoncé récemment un nouveau moyen de financement hypothécaire appelé obligations hypothécaires du Canada. Ces obligations rendront-elles plus abordable l'acquisition d'une maison?

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, voilà enfin une très bonne question. Je suis heureux d'annoncer que les obligations hypothécaires du Canada contribueront à donner aux Canadiens l'accès à un financement hypothécaire abordable.

Ces obligations inciteront à investir davantage dans les prêts hypothécaires à l'habitation et fourniront aux marchés hypothécaires une nouvelle source concurrentielle de fonds qui contribueront à réduire les coûts de financement hypothécaire pour les Canadiens. Je me permets d'ajouter que l'assurance hypothécaire de la SCHL a aidé un Canadien sur trois à financer l'acquisition d'une maison.

*  *  *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je signale aux députés la présence à notre tribune de Mme Sari Bermudez, présidente du Conseil national de la culture et des arts du Mexique et représentante mexicaine au Réseau international sur la politique culturelle.

Des voix: Bravo!

*  *  *

 

. 1505 + -

RECOURS AU RÈGLEMENT

LES OBSERVATIONS D'UN MINISTRE

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, dans la réponse initiale du gouvernement, c'est-à-dire dans le discours qu'a prononcé aujourd'hui le leader du gouvernement à la Chambre en réponse à la motion d'opposition que nous avons présentée, et de nouveau aujourd'hui pendant la période des questions, deux députés ont complètement déformé un fait concernant la députée de South Surrey—White Rock—Langley, en affirmant qu'elle avait perdu une action en justice et que cela soulevait en quelque sorte un problème.

Ces deux députés devraient savoir que ma collègue n'a jamais perdu d'action en justice. Elle ne s'est jamais retrouvée devant les tribunaux et n'a donc jamais réglé d'action en justice. Les deux députés devraient retirer immédiatement ce qu'ils ont dit.

Le Président: Je ne sais pas à qui le leader de l'opposition à la Chambre fait référence, sauf que...

M. Chuck Strahl: Au ministre de l'Industrie et au leader du gouvernement à la Chambre.

Le Président: Cela me semble constituer un élément du débat plutôt qu'un sujet de rappel au Règlement. Des désaccords surviennent souvent au sujet de faits mentionnés pendant des discours à la Chambre. Nous en avons tous été témoins à l'occasion. Nous sommes constamment témoins, durant la période des questions, d'allégations selon lesquelles telle ou telle déclaration serait inexacte. Les députés parlent même parfois de «faussetés».

Je sais que des députés estiment parfois que des faits sont déformés. Ce n'est là qu'un sujet de débat. Je regrette, mais je ne pense pas qu'il y ait lieu pour la présidence d'intervenir.

La députée de South Surrey—White Rock—Langley désire-t-elle dire quelque chose à ce sujet?

Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Alliance canadienne): Oui, monsieur le Président. J'ai fait l'objet d'une fausse accusation et je vous avise que je soulèverai la question de privilège plus tard.

Le Président: Nous entendrons la question de privilège plus tard.

L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je respecte votre décision, à savoir qu'il s'agit d'un sujet de débat plutôt que de rappel au Règlement.

Je précise à la députée d'en face que je m'en tiens à ce qui a été dit, à savoir qu'elle a formulé une allégation au sujet d'un fonctionnaire et qu'elle a dû lui présenter des excuses publiques, sous la menace d'être poursuivie en justice. Cela dit, j'ignore si l'affaire s'est retrouvée devant les tribunaux. Ce que je sais, c'est que la députée a retiré ce qu'elle avait dit et a présenté des excuses.

Le Président: Cette précision tire peut-être les choses au clair. Je ne sais pas. Ce que je sais, c'est qu'il s'agit d'un sujet de débat. Mon opinion initiale s'en trouve confirmée. Nous pouvons maintenant peut-être passer à autre chose.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ—LA TENUE D'UNE ENQUÊTE JUDICIAIRE

 

La Chambre reprend l'étude de la motion et de l'amendement.

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est drôle, je viens juste de comprendre le dernier argument du ministre. Il a prononcé très clairement le mot «calomnie». C'est un mot que les libéraux utilisent assez librement.

Pendant la période des questions, le premier ministre a longuement divagué. Il a dit que nous devrions revenir aux vrais problèmes du pays. Les députés savent-ils que l'un des vrais problèmes du pays est le manque d'intégrité du cabinet du premier ministre? C'est exactement ce à quoi nous nous intéressons aujourd'hui.

Le premier ministre va râler et dire que son terrain de golf n'avait aucune relation financière avec l'auberge, mais il y a des contradictions dans toute cette affaire. Le certificat de vente est la plus importante. Il est difficile de croire en ce document. Deux avocats l'ont pourtant signé.

Je ne suis qu'une humble enseignante qui essaie de lire ce texte manuscrit. Il est difficile de croire que c'est un document préparé par deux avocats. Le nom du premier ministre y figure, même si je suis incapable de le lire. Le premier ministre a signé son nom au complet et il a apposé ses initiales au bas du document. Les lettre J et C sont complètement différentes de celles qui apparaissent au haut du document.

Je pourrais poser de nouveau les questions que j'ai posées pendant la période des questions, puisqu'on n'y a pas répondu. Qui étaient les personnes présentes à la signature de ce document et dans quelle province ce dernier a-t-il été signé? Autrement dit, où étaient les signataires? Le premier ministre a dit que la signature du document a eu lieu à Ottawa. Nous allons certainement vérifier cela. On se demande où était Jonas ce jour-là. Nous allons vérifier cela aussi.

 

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Le contrat de vente est rédigé sur un papier sans en-tête, il n'est signé par aucun témoin, n'est ni validé, ni notarié, et il ne porte pas de seau social. De plus, il n'est nullement fait mention d'un dépôt.

Monsieur le Président, si vous deviez vendre des actions que vous avez achetées dans un club de golf, je ne crois pas que vous auriez écrit quelque chose comme ce qui suit sur le contrat de vente: Le calendrier de paiement sera le suivant: Paiements du principal en quatre versements annuels égaux avec intérêts aux taux de première hypothèque pour établissements. C'était en 1993, comme le premier ministre continue de déclarer.

Comme je suis persuadée que vous avez lu ces dossiers, vous savez, monsieur le Président, qu'il n'y a eu aucun paiement en novembre 1994, aucun en novembre 1995 et ainsi de suite. Aucun montant n'a jamais été versé. En fait, nous savons que Jonas Prince voulait être certain de pouvoir se sortir de cette affaire pour que quelqu'un d'autre se porte acquéreur des actions.

Le fait que ce contrat de vente ait été rédigé à la main peut sembler louche. Il faut se dire que ce genre de serviette de papier est difficile à faire passer dans une machine à écrire ou une imprimante. Je suis persuadée que si cela était officiel en 1993, quelqu'un aurait pu faire un peu mieux.

Nous voyons tout cela monter graduellement, comme l'a mentionné la presse. Je termine mes propos en parlant de Warren Kinsella, qui était l'acolyte du premier ministre pendant la campagne électorale. Il écrivait un document et on en a parlé la fin de semaine dernière. Lorsque le rapport de Warren Kinsella est sorti, une directive prévoyait que l'article devait être publié dans tous les journaux de CanWest. Si quelqu'un a pensé pouvoir ainsi se mêler à la lutte pour venir à la défense du premier ministre, cela ne fait que compliquer l'affaire et empirer la situation du premier ministre. La seule façon pour le premier ministre de s'en sortir est de consentir à ce qu'une enquête indépendante fasse la lumière sur tout cela et prouve une fois pour toutes que le premier ministre n'a rien à se reprocher.

M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Monsieur le Président, je ne défends certes personne. Je mets simplement les choses au point. Malheureusement, il se trouve aujourd'hui que des députés d'en face nous lancent des calomnies qui sont entièrement inexactes et dénuées de fondement. Je suis profondément troublé que le débat à la Chambre se dégrade à ce point parce que l'Alliance profère ces accusations odieuses.

J'ai écouté la députée d'Edmonton-Nord faire quelques observations inquiétantes à la Chambre aujourd'hui. Elle disait quelque chose comme—j'ai essayé d'écrire ses propos, mais elle parlait très rapidement, de façon incohérente, de sorte qu'il était difficile de consigner textuellement ses propos— qu'«ils n'ont pas confiance en ce qu'il dit». Je présume qu'elle parlait des Canadiens.

Examinons le bilan. Cet homme a consacré 38 ans de sa vie au Canada, au fédéralisme, et à rehausser la qualité de vie de tous les Canadiens. À trois reprises, les Canadiens ont manifesté leur appui et leur confiance envers cet homme, et envers notre parti, en élisant trois gouvernements majoritaires d'affiliée. Nous devons extrapoler ici et ne pas oublier que, en raison de ces trois majorités d'affilée, les députés d'en face ont connu trois défaites d'affilée.

Nous pouvons maintenant en venir aux faits. Ils ne font que reporter sur une personne le blâme pour les pertes qu'ils ont subies lors de trois élections d'affilée.

Je voudrais tout simplement rappeler une chose à la députée d'Edmonton-Nord et lui demander de faire une observation. En 1996, pendant qu'elle se trouvait dans ma circonscription, elle a dit très clairement qu'elle estimait qu'il était honteux et tout à fait ridicule que les députés libéraux acceptent une pension de la Chambre. Elle a dit cela et ajouté qu'elle ne ferait jamais rien de tel. Elle a dit que son parti ne ferait jamais cela. Or, elle a fait exactement le contraire. À qui les Canadiens peuvent-ils faire confiance? Peuvent-ils faire confiance à quelqu'un qui a pris un engagement, à la télévision et à la radio, et qui est revenu sur sa parole, ou à un gouvernement qui gouverne bien le pays depuis sept ans?

Mme Deborah Grey: Monsieur le Président, le député a commencé son intervention en faisant remarquer qu'il ne défendait personne. Je comprends pourquoi il ne veut pas défendre le premier ministre.

 

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J'ai dit dans mon intervention que les gens ne croyaient pas ce qu'il raconte. Je pense que le député a raison de dire que les Canadiens sont mécontents. Il serait, j'en suis sûre, absolument époustouflé de savoir qu'en fait, selon des sondages effectués récemment, 54 p. 100 des personnes qui appuient le Parti libéral veulent que cette affaire fasse l'objet d'une enquête tout à fait objective.

Je sais qu'il est maintenant exorcisé, mais je voudrais parler de la question de la pension. J'étais dans sa circonscription en 1996—j'ai visité des tas d'endroits dans ce pays—pour expliquer que, lorsque j'ai renoncé à ma pension de députée, cela m'était parfaitement égal de continuer toute ma vie à cotiser à mon REER. Le député sait très bien, cependant, qu'à la suite des négociations qui ont eu lieu au printemps dernier, le Parti libéral a obligé tous les députés, y compris moi-même, à recommencer à cotiser au régime de pensions des députés. Du fait que je dois maintenant cotiser au régime de pension des députés, je ne peux plus cotiser à mon REER. Le député pourrait peut-être le mentionner aux habitants de sa circonscription.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, j'ai une brève question à poser afin d'orienter le débat.

Il est malheureux que nous soyons tombés dans le sarcasme ces dernières heures. Cependant, pour revenir à la motion, la solution devient de plus en plus claire. Il existe suffisamment de raisons pour retirer ce dossier de la fosse aux ours qu'est la Chambre des communes et le mettre entre les mains d'un comité impartial et objectif.

J'affirme que la seule façon de régler la question, c'est de la retirer de cet endroit partisan et de la confier à une commission d'enquête judiciaire ou publique. Si cela se produisait, le député ne conviendrait-il pas que le premier ministre aurait alors amplement la possibilité de s'innocenter? Si en effet il existe des preuves concluantes qui donnent à penser qu'il n'y a pas eu de conflit d'intérêts, une telle tribune indépendante serait le moyen idéal d'établir la vérité.

Mme Deborah Grey: Monsieur le Président, c'est probablement la meilleure solution. Nous observons de la partisanerie de l'autre côté de la Chambre et de côté-ci également. Il vaut mieux que la question soit examinée ailleurs, car ici, c'est la politique qui règne.

J'ai subi des attaques à propos du régime de pension. Je trouve cela étrange quand quelqu'un parle de revenir sur sa parole. Une promesse avait été faite d'abolir la TPS. Il y a eu l'affaire à propos des Airbus. Ce n'était pas joli, n'est-ce pas? Je trouve cela très étrange que le député ne soit même pas à son fauteuil, car il ne cesse de se promener dans la Chambre à insulter les gens. Si le chapeau lui fait, qu'il le porte.

M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux d'aborder la motion proposée aujourd'hui par mon parti. Je ne suis pas vraiment heureux d'avoir à traiter de la teneur de la motion, mais il faut en finir avec cette question. Je tiens à préciser que nous avons été obligés de tenir ce débat à cause du comportement des libéraux et du premier ministre.

C'est un jour triste, parce que la plupart des gens respectent un code de conduite qui les aurait amenés à répondre il y a plus de deux ans à toutes les questions soulevées dans cette affaire, de façon ouverte et transparente. L'opposition officielle suit ce dossier depuis deux ans. Bien des gens sont consternés d'apprendre que cet exercice de camouflage dure depuis si longtemps. Je dis qu'ils sont consternés, parce que la question aurait pu être réglée si le premier ministre avait simplement reconnu les faits lorsqu'ils ont été rendus publics.

Les députés d'en face nous ont souvent accusés aujourd'hui de tenir des discours vides. Ils ont prétendu qu'il n'y avait aucune substance à nos allégations et que la réputation du premier ministre avait été ternie inutilement. C'est vrai qu'il y a eu des discours vides auxquels sont venus s'ajouter des arguments creux. Mais, malheureusement, tout cela venait des gens d'en face.

Les ministériels s'insurgent contre le fait qu'on monopolise le temps de la Chambre des communes pour discuter d'un problème qui n'en est pas un. C'est insensé. Si la Chambre est désoeuvrée, le gouvernement n'a qu'à s'en prendre à lui-même. D'ailleurs, même lorsque la Chambre étudie des initiatives importantes, on a souvent du mal à y faire participer les libéraux. Il suffit de penser à ce qui s'est produit jeudi dernier.

 

. 1520 + -

C'est un triste jour que celui où la Chambre des communes doit débattre une motion qui remet en question non seulement la personne du premier ministre, mais aussi la réputation de son poste.

Tout comme de nombreux Canadiens de toutes les sphères d'activité, de toutes les régions de notre beau pays et de toutes les allégeances politiques, je m'interroge sur l'aptitude du gouvernement et du premier ministre à gouverner de manière transparente et responsable. Il faut trouver la vérité et la révéler. Elle manque depuis un certain temps, dans ce dossier.

Les députés d'en face peuvent fulminer autant qu'ils veulent, citer de vieux sondages et faire de grandes déclarations, les faits sont indéniables. D'après le dernier sondage Compas, 85 p. 100 des Canadiens estiment qu'il est important d'élucider cette affaire et 63 p. 100 des personnes interrogées croient que le premier ministre a eu une conduite répréhensible lorsqu'il a cherché à obtenir de l'argent pour une entreprise de Shawinigan dans laquelle il est accusé d'avoir des intérêts financiers.

Les Canadiens sont des électeurs intelligents et rationnels. Ils connaissent les faits et veulent que les choses soient claires. Le plus révélateur, c'est peut-être que 91 p. 100 des gens estiment que le premier ministre doit se comporter d'une façon qui semble juste. C'est là le noeud du problème. Il n'y a pas apparence d'équité; en réalité, il y a même apparence d'injustice.

Les faits montrent clairement qu'il y a au moins apparence d'un grave conflit d'intérêts et que, selon toute probabilité, la Chambre a été induite en erreur.

Ces allégations doivent être dissipées avant que le gouvernement ne retrouve le droit moral de diriger les Canadiens. Si j'en juge d'après les actions des ministres de premier ou de second rang ces dernières semaines ou derniers mois, je pense que j'ai le droit de le dire à la Chambre aujourd'hui. Quand je vois que certains font sciemment de fausses déclarations à la Chambre et que le premier ministre ne sévit pas, je repense au vieil adage selon lequel un chef doit prêcher par l'exemple. C'est un piètre exemple de leadership que le l'on donne aux Canadiens et aux députés.

La situation dont nous sommes saisis aujourd'hui résulte de certains facteurs:l'absence d'obligation de rendre compte du gouvernement; un recours sans précédent aux motions de clôture; la dictature imposée à la Chambre et aux députés par le premier ministre et ses conseillers non élus qui n'ont aucun compte à rendre; et l'insupportable concentration du pouvoir au cabinet du premier ministre, un processus entamé il y a plus de 30 ans sous le premier ministre Trudeau, à l'époque où le premier ministre actuel se faisait la main à la politique fédérale.

On a parlé de réforme parlementaire. Franchement, grand parleur, petit faiseur. Il est temps que tous les députés, voire tous les Canadiens reprennent le gouvernement en main. Le gouvernement de ce grand pays ne devrait pas être dirigé par l'entourage du premier ministre. Ce n'est pas la situation qu'ont envisagée les Pères de la Confédération.

La réforme de la Chambre des communes doit commencer et elle doit commencer avec nous. Nous avons désespérément besoin d'un conseiller à l'éthique qui soit un vrai chien de garde, et non le chien de salon du premier ministre. Quel être sensé et indépendant d'esprit croira qu'une personne qui est nommée par le premier ministre et qui ne rend de comptes qu'à lui seul pourra faire toute la lumière sur la conduite de ce dernier? Les députés d'en face ne pourront faire valoir l'intégrité de la Chambre que s'ils secouent leur laisse et leur muselière et que s'ils réapprennent à penser par eux-mêmes.

La réforme de la Chambre doit aussi viser les comités, là où les députés sont censés être les maîtres de leur destinée. Au lieu de cela, nous voyons régulièrement la présidence et le secrétaire parlementaire agir au nom du cabinet du ministre. Pourquoi? Tout simplement à cause d'un désir de pouvoir et de contrôle insatiable à tous les niveaux. Le premier ministre a décidé de centraliser au cabinet du premier ministre le moindre levier de commande.

Le résultat, c'est que le gouvernement s'est accaparé une multitude de pouvoirs et qu'il se comporte comme s'il était au-dessus des règles, des règlements et des lois de notre pays. Quelle honte consternante! Nous avons vu une tendance se dessiner au fil des ans. Nous avons vu les piètres excuses qui ont été invoquées dans la débâcle de Développement et Ressources humaines Canada. Nous avons découvert que DRHC disposait d'une caisse noire secrète qui servait pour les demandes ministérielles spéciales. Les Canadiens sont généralement très inquiets du manque de franchise et de clarté de la part du gouvernement.

J'ai un conseil à donner aux députés du parti ministériel. Ils devraient cesser leurs beaux discours sur la réforme parlementaire et faire en sorte que celle-ci devienne réalité avant qu'il ne soit trop tard pour les Canadiens. Il faut commencer aujourd'hui.

 

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Mes collègues à la Chambre et les Canadiens d'un bout à l'autre du pays veulent uniquement savoir la vérité sur le Shawinigate. Si le premier ministre n'a rien à cacher ou à se reprocher, tirons les choses au clair. Si les accusations sont fondées, il faut que des mesures correctives soient prises. Nous voulons tout simplement savoir la vérité.

L'éthique et l'obligation de rendre compte doivent bien commencer quelque part. Franchement, c'est à partir du sommet qu'elles doivent commencer. Notre gouvernement et notre premier ministre doivent rendre des comptes à la nation. Malheureusement, pour des milliers de Canadiens, cette obligation de rendre compte n'est pas évidente aux plus hauts niveaux du pays.

Quand des accusations de double langage et d'anomalies pèsent sur le premier ministre, à quoi devons-nous nous attendre en tant que parlementaires et Canadiens de ceux qui nous entourent?

Les principales questions demeurent sans réponse. Que faire maintenant? Je pense que tous les députés conviendront qu'il faut régler la question une fois pour toutes. Aucun député, y compris les députés de l'opposition, ne veut que cela se poursuive indéfiniment. Néanmoins, nous sommes saisis de la question, et nous devons trouver une solution.

Nous devons placer la fonction du premier ministre au-dessus de la personne qui l'exerce actuellement. La fonction de premier ministre existe depuis plus longtemps que n'importe lequel d'entre nous et elle existera encore bien longtemps après nous. La réputation de la fonction de premier ministre a été ternie et nous devons tous ensemble lui redonner tout son lustre. Cela va bien plus loin que les attaques et les valeurs partisanes. La fonction de premier ministre est tributaire de la bonne volonté du public pour sa préservation.

Nous arrivons à la motion d'aujourd'hui, où on réclame une enquête judiciaire indépendante. Les députés sont appelés à se prononcer sur cette question qui, malheureusement, préoccupe aussi la majorité des Canadiens. Seule une personne responsable, vue par l'ensemble des Canadiens comme un individu honorable, impartial et au-dessus de tout soupçon pourrait déterminer de façon définitive s'il y a eu irrégularité ou non.

Soixante pour cent des Canadiens croient que le Parlement devrait tenir une enquête judiciaire indépendante pour révéler tous les faits entourant le Shawinigate. Rejeter la motion d'aujourd'hui ne ferait que soulever de nouvelles questions sur les actions du premier ministre.

S'il n'y a rien à cacher, comment se fait-il que depuis deux ans, des faits nouveaux émergent constamment? Pourquoi le premier ministre n'a-t-il pas réussi à produire des éléments de preuve clairs et précis pour laver sa réputation? Si le gouvernement et le premier ministre n'ont rien à cacher, ils ne s'opposeront pas à la tenue d'une enquête publique.

Il faut prendre les mesures qu'il faut pour vider la question une fois pour toutes. Si le premier ministre n'a commis aucun acte irrégulier, je l'exhorte à appuyer la motion à l'étude aujourd'hui. S'il y a de simples députés libéraux indépendants, je les exhorte à mettre de côté leur esprit de parti et à régler la question de l'intégrité de la fonction de premier ministre.

J'exhorte tous les députés à se demander où se situent les intérêts des Canadiens.

Si les députés croient, comme moi, qu'il est dans l'intérêt de tous les Canadiens de régler rapidement et clairement la question, je les exhorte à voter en faveur de la motion d'aujourd'hui. Faisons toute la lumière sur cette affaire. Demandons une enquête judiciaire indépendante.

M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je n'arrive pas à croire les propos de mon collègue. La Chambre des communes est la plus haute instance au pays. Jour après jour, mois après mois, nous sommes sans cesse revenus sur cette question. Aujourd'hui à la Chambre nous écoutons mes collègues de l'opposition avancer toutes sortes d'éléments de preuve suggérant que le premier ministre a fait tout sauf servir ses électeurs dans l'affaire Grand-Mère.

Le jour où, en notre qualité de députés, nous nous arrêterons de faire des appels téléphoniques et d'écrire des lettres au nom de nos électeurs, que ce soit aux fonctionnaires du gouvernement fédéral, au secteur privé, aux banques, aux sociétés d'État ou autres, pas un d'entre nous ne sera réélu. Mon collègue n'est-il pas d'accord avec moi? Notre rôle en tant que députés est de prendre la défense de nos électeurs et d'intervenir en leur nom. Le jour où je m'arrêterai de le faire sera le jour où je devrai m'arrêter d'être député. C'est exactement ce que le premier ministre a fait pour créer des emplois dans sa circonscription et défendre les intérêts de ses électeurs.

Je ne vois aucun intérêt à ce qu'une autre enquête publique engloutisse des millions de dollars pour que, en fin de compte, nous n'apprenions rien de plus que ce que nous avons déjà lu dans le National Post et appris de certains de nos collègues. Cela n'a rien apporté au débat, mais a fait perdre beaucoup de temps à la Chambre des communes et aux Canadiens.

Quatre-vingt-un pour cent des Canadiens nous disent de passer à autre chose et de parler de questions qui sont importantes pour eux comme, par exemple, le bois d'oeuvre, la pêche, l'agriculture et l'économie. Ce sont des questions qui sont importantes pour les Canadiens et dont ils veulent que nous parlions. Dans l'intérêt du public, nous devrions passer à autre chose. Nous devrions débattre la question aujourd'hui, la mettre aux voix et nous en débarrasser une fois pour toutes. Nous pourrons alors commencer à parler des questions qui sont importantes pour les Canadiens. C'est pour ça qu'ils nous ont élus. Les élections portaient sur cette question. Les gens ont voté et ont dit au premier ministre qu'ils lui faisaient confiance. N'en convient-il pas?

 

. 1530 + -

M. Reed Elley: Monsieur le Président, c'était vraiment quelque chose. Je suis heureux de voir que le député continue d'être aussi animé à la Chambre des communes, comme il l'est certainement aussi à l'extérieur de la Chambre.

Je suis d'accord avec le député pour dire que la Chambre est le plus haut tribunal du pays, mais je trouve ces propos très étranges venant du député d'en face. Il fait partie du gouvernement au pouvoir depuis 1993. Or, les mesures que le gouvernement a prises ou n'a pas prises à la Chambre durant cette période ont entraîné une diminution constante de la capacité du Parlement de jouer son rôle de législateur. Combien de fois avons-nous vu ce gouvernement ne pas prendre position sur une question qui préoccupe les Canadiens et, au lieu de présenter une mesure législative, soumettre la question aux tribunaux? Les tribunaux sont devenus la plus haute instance du pays. C'est absolument honteux. Cela mine le genre d'influence que nous avons à la Chambre en tant que députés.

C'est le gouvernement actuel qui est responsable de cette diminution, et c'est l'Alliance canadienne, avec d'autres partis de l'opposition, qui essaie de redonner du pouvoir au Parlement pour que nous puissions prendre des mesures contre ce genre de gouvernement.

[Français]

Mme Carole-Marie Allard (Laval-Est, Lib.): Monsieur le Président, je vous avise que je partagerai le temps qui m'est alloué avec le député de Simcoe-Nord.

Ces derniers mois, les Canadiens ont été les témoins d'un spectacle des plus déshonorants à la Chambre des communes, le spectacle d'une opposition amère dans la défaite et dépourvue d'idées ou de solutions constructives, ayant complètement abandonné les questions d'intérêt public dans la poursuite effrénée d'une campagne de destruction personnelle.

Alors que les Canadiens veulent entendre parler de l'état de l'économie, l'opposition est obsédée par les finances personnelles du premier ministre. Alors que les Canadiens veulent connaître la position de leurs partis fédéraux sur l'avenir des services de santé, sur l'aide aux familles et aux enfants, sur l'état de notre environnement et sur l'incidence de la mondialisation et de la nouvelle économie, l'opposition ne pense qu'à imaginer des conspirations de plus en plus farfelues au sujet d'une transaction commerciale des plus banales, une transaction qui a été menée, du début à la fin, en toute conformité avec l'esprit et la lettre du code régissant les conflits d'intérêts des ministres.

À l'abri de l'immunité juridique que leur confère la Chambre des communes, ils ont multiplié les allégations sans fondement, répandu de folles insinuations et sali la réputation, non seulement du premier ministre et de sa famille, mais aussi de tous ceux qui ont examiné les faits et exonéré le premier ministre de tout blâme. Ils ont même mis en doute l'intégrité de la Gendarmerie royale du Canada. Pourquoi? C'est qu'à titre de député de Saint-Maurice, le premier ministre a fait des démarches auprès de la Banque de développement du Canada en vue d'obtenir un prêt pour un hôtel qui a créé de l'emploi pour 20 de ses commettants, l'Auberge Grand-Mère.

Cet hôtel est situé près du club de golf Grand-Mère, appartenant à d'autres propriétaires, un club de golf dans lequel il a, lui, cessé d'avoir des intérêts financiers avant de devenir premier ministre.

 

. 1535 + -

Sa fiduciaire et avocate, en consultation étroite avec le conseiller fédéral en éthique, M. Wilson, a travaillé au recouvrement d'une créance résultant de la vente des parts qu'il détenait dans ce club de golf, une vente qui a eu lieu avant qu'il ne devienne premier ministre, je le répète encore une fois, une vente quitte de toutes dettes et charges, ainsi qu'en attestent les documents. Et les parts ne sont jamais redevenues sa propriété, ni revenues sous son contrôle.

Promouvoir la croissance économique et la création d'emplois pour les gens qui nous élisent directement constitue la plus haute priorité de tous les députés.

Je travaille sans relâche en vue d'assurer à mes électeurs de Laval-Est l'accès à de bons emplois pour l'avenir et je m'arrange pour veiller à ce que nous obtenions notre juste part de l'aide fédérale disponible à cette fin. Le premier ministre a fait de même.

Les gens de la circonscription de Saint-Maurice connaissent depuis longtemps un taux de chômage élevé. Le premier ministre, en tant que député de Saint-Maurice, les municipalités locales, les entreprises et le gouvernement du Québec se sont concertés et ont décidé de donner à cette région un élément clé de promotion, le tourisme, afin de promouvoir l'avenir économique de leur région.

Le premier ministre s'est employé à veiller à ce que sa circonscription reçoive une aide fédérale entièrement appropriée à l'appui des nombreux projets touristiques tout à fait légitimes. Il en va de même dans toutes les circonscriptions, partout au pays, dont la situation économique est comparable. C'était là sa seule et unique motivation quand il a appuyé le projet d'expansion de l'Auberge Grand-Mère.

M. Wilson, le conseiller en éthique, s'est penché à maintes reprises sur la vente du club de golf et les contacts du premier ministre avec la Banque de développement du Canada et n'a constaté aucun conflit d'intérêts. Mais ce n'était pas la réponse que l'opposition souhaitait entendre.

Par conséquent, elle a lancé une attaque hargneuse et acharnée contre le premier ministre, contre le caractère et l'intégrité de M. Wilson, un fonctionnaire émérite et une autorité de réputation internationale en matière d'éthique publique.

L'opposition a demandé à la GRC de mener une enquête. De nouveau, aucun méfait n'a été constaté. De nouveau, l'opposition a rejeté cette réponse en contestant de manière irresponsable l'intégrité de l'examen de la Gendarmerie royale du Canada.

Et quand le premier ministre a pris la mesure extraordinaire et sans précédent de permettre au conseiller en éthique de rendre publics des documents privés qui prouvent, au-delà de tout doute raisonnable, l'absence de conflit d'intérêts dans ce dossier, l'opposition n'a fait qu'exiger plus de documents. Et, comme d'habitude, elle s'en est prise à l'intégrité du fiduciaire du premier ministre et de la personne qui a acheté les parts que détenait le premier ministre dans le club de golf.

Le premier ministre siège au Parlement depuis 38 ans. Depuis tout ce temps, il s'astreint aux plus hautes normes d'intégrité personnelle. Pendant le plus grand nombre de ses années à Ottawa, il a occupé des postes de confiance clés au sein du Cabinet. Et jamais l'ombre d'un scandale ne l'a effleuré dans l'exécution de ses fonctions.

Notre gouvernement et notre premier ministre tiennent par-dessus tout à préserver la confiance de la population canadienne. Quant à nous, l'intégrité, c'est plus qu'un beau principe, c'est notre idéal. C'est un mode de vie. C'est le socle sur lequel repose l'ensemble de notre action.

Nous considérons que la confiance dans les institutions est aussi vitale dans une démocratie que l'air que nous respirons. Une fois détruite, elle est difficile, et parfois impossible à rebâtir. Quand la confiance est perdue, le système ne peut plus fonctionner.

Au cours de l'administration Mulroney, les Canadiens avaient acquis la perception que les titulaires de charges publiques plaçaient leurs intérêts financiers personnels avant l'intérêt public. Et c'est précisément pour contrer cette perception que le premier ministre a créé la fonction de conseiller en éthique en 1994.

 

. 1540 + -

Le premier ministre nous a souvent dit que son père lui avait appris très tôt dans la vie que ni la fortune, ni la position sociale, ni la gloire, ni la célébrité n'était plus précieux qu'une bonne réputation. En bout de ligne, c'est tout ce que nous possédons vraiment. Elle ne peut se vendre ni s'échanger, et une fois perdue, elle ne peut se retrouver.

Il en a fait le credo de sa vie politique. Il l'a érigée en norme et en exemple pour les membres de son gouvernement. C'est la raison pour laquelle pas un seul de ses ministres n'a dû démissionner en raison d'un conflit d'intérêts.

Compte tenu de cette haute fonction à laquelle il a été élu, compte tenu de la droiture irréprochable de sa conduite personnelle, le premier ministre mérite mieux que d'être la cible d'un tel barrage d'allégations sans fondement et de calomnies.

Plus encore, les Canadiens méritent mieux que cela. Ils ont un gouvernement qui est déterminé à s'occuper des vrais besoins, des besoins et des enjeux qui les intéressent. Ils méritent une opposition qui soit prête à en faire autant.

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, au début de son discours, je pense que ma collègue a fait un peu de démagogie, en disant que l'opposition ne s'occupait que de cette question.

Elle oublie, par exemple, qu'au Comité permanent du développement des ressources humaines, une motion a été adoptée à l'unanimité—à laquelle les libéraux ont contribué—pour dire qu'il fallait apporter d'autres modifications au régime d'assurance-emploi et les proposer d'ici au 1er juin.

Je pourrais citer en exemple aussi l'intervention très positive du député de Rosemont—Petite-Patrie concernant l'enlèvement international d'enfants et celle du député de Berthier—Montcalm au sujet des jeunes contrevenants. Donc, quand on dit que l'opposition ne s'occupe que de la question de l'enquête, je pense qu'on est capables de marcher et de mâcher de la gomme en même temps.

Mais là où ça ne va plus du tout, c'est lorsqu'on dit que les Canadiens ne veulent plus qu'on parle de cette question. Pourtant, selon les sondages rendus publics, plus de 50 p. 100 de la population voudraient qu'il y ait une enquête, tel que demandé dans la motion, pour qu'effectivement, la lumière soit faite sur cette question.

Est-ce qu'on n'a pas vu, cette semaine, depuis que les documents ont été rendus publics, qu'il y a plus de questions qui se posent qu'auparavant?

Comment peut-on dire qu'il n'y a pas un conflit d'intérêts lorsque, dans les documents rendus publics, on dit que si jamais il y a une enquête de ce type, ce sera la compagnie J&AC Consultants Inc.—compagnie maîtresse du premier ministre—qui devra, en bout de ligne, défrayer les coûts de cette enquête? Est-ce qu'à ce moment-là, ce n'est pas un conflit d'intérêts à la face même de cette question?

La députée ne devrait-elle pas admettre que oui, l'intégrité du premier ministre est effectivement en question, mais que c'est lui qui, présentement, fait vivre quotidiennement les arguments à ce sujet en refusant que la lumière soit faite et qu'on ait effectivement quelque chose qui corresponde à la volonté des citoyens de ce pays?

Demain, lorsqu'on votera sur cette motion, ceux qui représenteront la volonté de la majorité de la population, ce ne sera pas la majorité libérale qui votera contre la motion, mais ceux qui reçoivent l'appui de plus de 50 p. 100 de la population au fait qu'il faut qu'il y ait une enquête publique pour qu'effectivement, on sorte cette question de la Chambre et que l'on permette à des gens, en dehors de la période des questions orales—question d'une durée de 30 ou 35 secondes et dont la réponse est d'égale durée—de faire la lumière sur toute cette question. Il en va de l'intégrité du premier ministre, mais il en va aussi de l'intégrité de tout l'appareil politique.

En conclusion, lorsque la députée lit un témoignage comme celui de M. Yvon Duhaime, paru dans le journal Le Soleil de la fin de semaine dernière, qui dit: «Oui, il y a un lien direct dans les activités économiques entre l'Auberge Grand-Mère et le club de golf» et qu'on voit que le premier ministre aura à payer des frais d'avocat si jamais il y a une enquête, est-ce qu'il ne lui serait pas possible d'admettre que la motion qui est proposée est pertinente et qu'elle permettrait de faire la lumière sur une situation tenue cachée depuis trop longtemps par l'attitude du premier ministre?

Mme Carole-Marie Allard: Monsieur le Président, je pense que le député d'en face lit trop les journaux et ne rencontrent pas assez ses électeurs.

 

. 1545 + -

Mes électeurs me demandent: «Quand l'opposition va-t-elle passer à autre chose? On a des problèmes dans nos comtés. Nos familles manquent d'argent, les enfants sont laissés pour compte, il y a plein de problèmes.» C'est ce qu'on nous dit.

Je pense que de trop lire les journaux, par les temps qui courent, cela fait l'affaire de l'opposition.

[Traduction]

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis entièrement d'accord; il y a effectivement d'importantes questions dont il faudrait débattre et dont on a débattu à la Chambre. On a même tenu des votes fort importants.

Je veux demander à la députée, et au ministre de l'Agriculture, ce qui s'est produit. Où était donc l'intégrité? Pourquoi les députés n'ont-ils pas défendu les agriculteurs lorsque, avec mon chef, j'ai proposé qu'on vote à la Chambre pour accorder une autre somme de 400 millions de dollars aux agriculteurs?

De ce côté de la Chambre, les députés se sont levés, les uns après les autres, pour indiquer qu'ils appuyaient les agriculteurs et qu'ils voulaient leur accorder ces 400 millions de dollars. Comment la députée a-t-elle voté sur ce point? Ne croit-elle pas que nous faisions tout simplement notre travail?

[Français]

Mme Carole-Marie Allard: Monsieur le Président, je répondrai là-dessus que l'aide accordée aux agriculteurs canadiens l'a été en raison des pressions exercées par le caucus libéral et non par l'opposition.

Depuis les élections du 27 novembre, à tous les caucus auxquels j'ai assisté, il y a des députés de ce côté-ci de la Chambre, du Parti libéral, qui ont supplié le gouvernement d'aider les agriculteurs. Ce ne sont pas les pressions de l'opposition...

[Traduction]

Le vice-président: Le député de Simcoe-Nord a la parole.

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Monsieur le Président, voilà que nous débattons d'une motion de l'opposition encore une fois. Nous traitons d'un sujet qui est dans l'actualité depuis deux ans, qui a fait l'objet d'une étude approfondie par le conseiller en éthique, qui a traversé une campagne électorale et qui a aussi été soumis à un examen par la GRC et, durant tout ce temps, personne n'a pu démontrer que le premier ministre s'était placé en position de conflit d'intérêts.

Le premier ministre a déposé ses documents personnels à la Chambre. Il s'agit d'un précédent. À ma connaissance, dans toute l'histoire du Parlement, on n'a jamais vu cela. Nous avons traversé toutes ces étapes et pourtant, alors que l'Alliance canadienne a l'occasion de choisir le sujet du débat à la Chambre, alors qu'elle peut tenir un débat utile sur des questions importantes et pertinentes pour les Canadiens, on parle du Shawinigate.

J'ai ici l'éditorial du Packet and Times d'Orillia paru dans ma circonscription hier, le 2 avril. Le titre se lit comme suit: «Lassitude par rapport à l'obsession du Shawinigate». Il fait valoir à l'opposition qu'il est temps de passer à autre chose, qu'il n'y a rien là. Pourquoi entraver les affaires de notre pays pour une question qui n'a aucun mérite?

Nous savons pourquoi. Nous savons qu'il s'agit en fait ici d'un concours pour le Parti progressiste-conservateur et son chef, qui s'est fait le champion de cette obsession et qui ne lâche pas prise. Le chef de l'Alliance canadienne a été distrait pendant un certain temps par ses problèmes personnels, mais voici qu'il est entré dans la course.

Pourquoi? C'est bien simple. Les médias ont en général rapporté que Bay Street avait menacé la droite et l'extrême droite de leur couper les vivres si elles ne s'unissaient pas. Dans ce concours, c'est évidemment à qui, de la droite ou de l'extrême droite, fera le plus en ce sens.

Cela a pris les dimensions d'une alliance impie avec le Bloc québécois et, dans une certaine mesure, le NPD. Le NPD essaie de jouer sur les deux tableaux car, si l'aventure était couronnée de succès, il voudrait être considéré comme faisant partie de la coalition. Mais, si elle échoue, comme j'en suis sûr, il voudra alors garder ses distances. Le NPD joue donc de prudence.

 

. 1550 + -

Il faut examiner les faits, et ceux-ci sont très clairs. L'opposition a dit que, si l'on dévoilait l'identité du quatrième actionnaire, elle laisserait tomber la question. Nous savons qui est le quatrième actionnaire et ce n'est pas le premier ministre. Pourtant, l'opposition n'a pas cessé ses attaques.

L'opposition a dit que si on lui montrait les documents et le certificat de vente, elle laisserait tomber la question. Le certificat de vente a été déposé et elle n'a toujours pas laissé tomber la question. Elle ne veut pas s'arrêter parce qu'elle souhaite se faire du capital politique avec cette affaire.

L'opposition veut salir la réputation du premier ministre, un homme qui a servi la population pendant 38 ans sans jamais avoir été impliqué dans le moindre scandale. Pour des raisons purement politiques et méprisables, l'opposition veut salir sa réputation. C'est une disgrâce pour toute la Chambre. Les Canadiens en sont conscients et ils savent bien que ces choses ne devraient pas arriver.

L'opposition a ensuite indiqué qu'elle examinerait les documents et l'acte de vente. Voilà maintenant qu'elle critique l'acte de vente. Des députés ont dit qu'il n'y a pas de date, d'indication du lieu, de sceau et d'autres détails dans le document. Or, légalement, ces éléments ne sont pas nécessaires. On peut même vendre des actions en passant un contrat verbal.

Toute la discussion sur l'acte de vente devient superflue puisque nous avons la lettre des avocats de la société 161341 Canada Inc., qui est la propriétaire du terrain de golf. Cette lettre, remise au Comité de l'industrie le 20 mars dernier, dit ceci:

[Français]

    Le conseil d'administration a approuvé le 1er novembre 1993 le transfert en faveur de Akimbo Development Corporation de toutes les actions de la société détenues par J&AC Consultants Inc. À partir de cette date, J&AC Consultants Inc. n'apparaît plus aux résolutions des actionnaires de la société et [...]

Ici, le premier ministre est nommé.

      [...] n'apparaît plus aux résolutions des administrateurs de la société;

[Traduction]

Cela prouve que les actions ont été transférées et que la société l'a reconnu par une résolution. La lettre vient des avocats de la société.

L'opposition va maintenant dire que ces avocats sont soit incompétents soit malhonnêtes, qu'ils sont à la solde du premier ministre ou qu'ils fument trop de marijuana. Les députés de l'opposition vont trouver une façon de discréditer les avocats de la société, car ils ne disent pas à l'opposition ce qu'elle veut entendre. Il est clair que rien ne va satisfaire l'opposition.

La motion présentée par l'opposition aujourd'hui réclame une enquête indépendante. Même si l'opposition obtenait une enquête indépendante, je suis persuadé que nos vis-à-vis diraient qu'elle n'est pas effectuée comme il se doit, que les personnes nommées ne sont pas les bonnes et le reste.

Dans notre système juridique, il y a ce qu'on appelle le fardeau de la preuve. Au Canada, les gens ne doivent pas prouver leur innocence. C'est à la personne qui parle d'un conflit d'intérêts à prouver son affirmation. Dans ce cas-ci, nous avons suivi tout le processus pendant deux années complètes et personne n'a pu prouver qu'il y avait un conflit d'intérêts.

Il est question d'une créance. Le premier ministre a vendu ses actions. C'était une créance non garantie. M. Prince devait de l'argent au premier ministre. Le premier ministre ou son entreprise n'avaient aucun intérêt dans ces actions. Ils ne pouvaient reprendre les actions quoi qu'il advienne de la valeur de ces actions dans le club de golf. Si le club de golf avait fait faillite ou si la valeur des actions avait triplé, le premier ministre n'aurait pu que récupérer sa créance initiale.

Les faits montrent que le fiduciaire du premier ministre a essayé de récupérer la créance. Dans le cadre de l'accord de règlement, il était question du rachat des actions par quelqu'un d'autre de la société Akimbo. Les preuves montrent que M. Prince avait tort de penser qu'il avait une option d'achat. Il a reconnu dans un des accords subséquents qu'il avait obtenu un avis juridique qui l'avait persuadé. Je ne sais pas pourquoi cela n'a pu satisfaire l'opposition, mais cela a convaincu M. Prince qu'il se trompait sur le plan juridique et que les actions lui appartenaient; il les a donc revendues.

Les députés de l'opposition ergote sur le libellé des clauses de dédit dans l'accord ou des clauses d'indemnisation. Ils affirment qu'il y a un double conflit d'intérêts, car l'entreprise du premier ministre a déclaré que, si l'opposition était assez stupide pour la poursuivre devant les tribunaux, elle serait indemnisée pour ses frais juridiques. C'est un accord juridique type dans le cadre de tout règlement.

 

. 1555 + -

En tant que solliciteur, j'ai signé ou préparé plusieurs reçus libératoires pour le compte de clients. Toute entente de règlement prévoit une clause d'indemnisation. C'est la pratique courante, mais l'opposition n'arrête pas de poser des questions.

Qu'y a-t-il à gagner à demander la tenue d'une enquête indépendante comme le fait l'opposition dans cette motion? À mon avis, rien. Ce serait dépenser beaucoup d'argent du Trésor public alors que l'on devrait s'occuper de questions plus importantes.

Pendant tout le débat, les députés ont fait référence au vote de jeudi dernier, lorsque l'opposition a proposé l'ajournement de la Chambre. Le gouvernement est responsable de n'avoir pas été représenté en assez grand nombre, et la Chambre a donc ajourné. Les députés de l'opposition non seulement ont fait perdre son temps à la Chambre durant la période des questions où tout a porté sur cette question précise, mais lui en font perdre maintenant en proposant des motions d'ajournement à des fins malicieuses alors que nous devrions concentrer notre attention sur les affaires de la nation.

J'ai dit aux habitants de ma circonscription que j'assumais une part de la responsabilité du gouvernement pour ne pas avoir été présent à la Chambre afin de protéger les Canadiens de ce mauvais tour de la part de l'opposition. J'assume cette responsabilité mais je puis assurer à la Chambre que je ne permettrai pas que l'opposition l'emporte. Je compte sur les députés de ce côté-ci de la Chambre pour voter contre cette motion de façon à ce que nous puissions nous occuper des affaires de la nation.

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je me demande si le député ne saisit pas vraiment bien la cause première de la motion et ce que les Canadiens nous demandent de faire à la Chambre.

Les Canadiens ont fait beaucoup trop de liens entre les subventions et l'argent que le gouvernement accorde à des gens, d'une part, et le fait que ces gens reversent de l'argent au parti libéral ou à un député. Il y a manifestement un lien.

Le parti libéral du Canada a accepté un don d'un groupe commercial de Shawinigan, au Québec, qui se trouve par hasard près de la circonscription du premier ministre. Ce groupe, qui subsistait à l'aide d'une subvention de 2,5 millions de dollars du gouvernement, a fait un don au parti libéral pour une raison donnée.

Les Canadiens voient un lien avec ce genre d'activité où l'argent des contribuables est versé à quelqu'un et revient ensuite au gouvernement. C'est ce que je veux faire valoir, et j'aimerais que le député réponde à la question suivante: n'y voit-il pas là quelque chose de répréhensible?

M. Paul DeVillers: Monsieur le Président, les gens font des dons à tous les partis politiques, mais il ne s'agit pas ici de déterminer qui a fait un don au Parti libéral du Canada.

On allègue que le premier ministre avait une participation financière dans le terrain de golf lorsqu'un prêt a été consenti à une entreprise avoisinante. C'est forcer la note. Si le premier ministre avait eu une participation dans le terrain de golf, ce qui n'était pas le cas en droit, toute la prémisse de l'allégation de l'existence d'un conflit d'intérêts serait grandement tirée par les cheveux.

Le terrain de golf comprenait son propre 19e trou, où l'on trouve un bar et une salle à manger. La salle à manger et le bar de l'auberge étaient en concurrence avec ceux du terrain de golf. Même si le premier ministre avait une participation, l'affaire serait loin d'être entendue, étant donné que l'auberge était un concurrent.

Le député soulève la question des dons politiques. Nous pourrions nous y arrêter. Nous pourrions parler des quelque 70 000 $ donnés à l'Alliance canadienne par un cabinet d'avocats de Calgary, mais je ne veux pas vraiment aborder ce sujet.

M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, permettez-moi de revenir sur le point que le député vient de soulever, à savoir les motions malicieuses et frivoles que mon parti présente à la Chambre. Il a parlé précisément de la motion d'ajournement de la semaine dernière.

Sur les quelque 172 libéraux élus à la Chambre, 95 étaient présents pour le vote sur cette motion. Nous avons vu dans les journaux des photos montrant des taxis obligés de faire demi-tour et de ramener des députés libéraux ici plutôt que les conduire à l'aéroport. Ils étaient disparus immédiatement après la période des questions, jeudi après-midi.

 

. 1600 + -

Si ces députés estiment qu'il n'y a rien de frivole dans le fait de quitter la Chambre à 15 h 30 le jeudi après-midi, alors pourquoi se plaignent-ils de ne pas avoir pu se pointer lorsque nous avons demandé la tenue du vote? C'est ici que le devoir appelle les députés, mais ils se dépêchaient d'aller prendre l'avion pour rentrer chez eux pour le long week-end. Il pense que nous avons présenté une motion frivole. Le député pourrait-il nous dire le fond de sa pensée?

M. Paul DeVillers: Monsieur le Président, il s'agit de toute évidence d'une motion frivole et malicieuse. Pourquoi voudrait-on présenter une motion d'ajournement, puis se réjouir de ce qu'on n'ait pas réussi à la contrecarrer, sinon pour jouer les malins? Et cela sur l'initiative du parti dont le chef s'est empressé de déclarer dès son élection que la Chambre ne devrait pas siéger cinq jours par semaine mais quatre. D'aucuns sont peut-être d'accord, mais pourquoi jouer les malins pour ensuite blâmer l'autre côté de ne pas avoir voté contre la motion? Les Canadiens n'acceptent pas ce genre d'inepties. Ils voient bien ce qui se passe.

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le député, comme d'autres avant lui, parle continuellement de commissaire à l'éthique. Comme on sait, un commissaire a beaucoup plus de pouvoirs qu'un conseiller. La personne en question est un conseiller en éthique. Pourquoi les députés d'en face persistent-ils à employer l'autre expression?

M. Paul DeVillers: Monsieur le Président, le conseiller en éthique a été nommé avec l'approbation des partis de l'opposition. Le conseiller en éthique a voulu avoir le titre de conseiller et non pas de commissaire, en raison du principe de l'indépendance et de la responsabilité du gouvernement. Si nous avons un commissaire qui dit au premier ministre quoi faire, pourquoi ne pas voter simplement pour le commissaire? Pourquoi tenir des élections tous les quatre ans et voter pour un premier ministre?

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je trouve triste d'avoir à livrer mes réflexions sur des questions qui préoccupent un grand nombre de mes électeurs, à savoir l'éthique, la vérité et les normes fondamentales de gestion publique.

Je sais que les libéraux ne veulent tout simplement pas regarder au fond de l'abîme pour y voir ce que le chef de leur parti et eux-mêmes ont fait. Ils ont beau reculer, faire diversion et invoquer des prétextes, et la situation a beau être délicate, nous devons l'affronter pour le bien du pays, défendre la crédibilité du Parlement et préserver l'idée fondamentale qui définit le Canada.

La motion dont nous sommes saisis propose:

    Que la Chambre demande la tenue d'une enquête judiciaire indépendante pour déterminer si le premier ministre a enfreint les règles relatives aux conflits d'intérêts concernant sa participation dans le Club de golf Grand-Mère et l'Auberge Grand-Mère et que les enquêteurs aient de larges pouvoirs dont celui d'exiger la production de tous les documents et témoignages pertinents.

Malheureusement, les occasions de faire de l'argent, la convoitise et les besoins apparents ont souvent causé la perte de chefs parlementaires et même de premiers ministres. Or, les déclarations que le premier ministre a faites à la Chambre donnent à penser que tous ces éléments ont joué dans son cas.

Les Canadiens se sont fait un devoir de renoncer à l'ancienne façon de faire les choses, qui consistait, pour un député, à forcer la main aux gens dans l'intérêt de sa propre circonscription, à avoir recours au favoritisme et à utiliser son influence personnelle, plutôt que de se conformer aux critères rationnels de programmes indépendants des titulaires de charges publiques. Les libéraux de la vieille école, eux, ne semblent pas l'avoir compris.

Je signale, monsieur le Président, que je partage mon temps de parole.

Qu'a fait le premier ministre pour obtenir des fonds pour sa circonscription? L'expérience nous apprend que, pour obtenir des centaines de milliers de dollars, voire des millions de dollars de fonds publics, il faut commencer par faire l'objet d'une enquête judiciaire. Ceux qui s'intéressent au Shawinigate ne seront peut-être pas d'accord et diront qu'un mauvais dossier professionnel est plus indiqué. D'autres diront que le secret pour obtenir de tels fonds, c'est une contribution politique appropriée. Toutefois, lorsque l'on passe en revue le dossier de ceux qui ont obtenu des fonds, on a l'impression que le fait d'avoir un casier judiciaire, de s'installer à Shawinigan, et d'offrir d'acheter les parts du premier ministre contribue à vous faire obtenir des fonds publics conséquents.

Prenons le cas du propriétaire de l'Auberge Grand-Mère, M. Yvon Duhaime. Il compte à son actif un certain nombre de condamnations au criminel, de la conduite en état d'ébriété à des menaces proférées à l'endroit de certains électeurs. Son échec précédent avec l'Hôtel des chutes, pour lequel il s'est retrouvé avec une note de 150 000 $ en impôts non payés et autres factures, lui aura certainement été utile pour obtenir un prêt de la Banque de développement du Canada et un complément de 189 000 $ en subventions fédérales dans le cadre du Fonds transitoire pour la création d'emplois.

 

. 1605 + -

Pierre Thibault, récemment immigré de Belgique, a touché 700 000 $ au titre du Fonds transitoire pour la création d'emplois, et des garanties d'emprunt de 925 000 $ du gouvernement fédéral pour l'Auberge des Gouverneurs de Shawinigan. Il aurait certainement pu obtenir un financement du fédéral quand il a reconnu par écrit avoir gaspillé près d'un million de dollars de l'argent de ses anciens associés en Belgique.

Si nous voulions nous servir dans l'assiette au beurre des libéraux, nous pourrions prendre exemple sur Paul Lemire et Mario Pépin, deux des partisans du premier ministre à Shawinigan, qui dirigeaient Groupe Force, un organisme fédéral de développement commercial.

Lemire avait déjà été condamné notamment pour avoir fraudé le fisc et pour une affaire de chèques, mais lui-même et son partenaire ont été accusés de vol et de fraude pour avoir systématiquement détourné des millions de dollars versés par le gouvernement fédéral à des fins de développement.

Je ne sais pas si l'allié politique du premier ministre, René Fugère, trouverait plus difficile d'obtenir des fonds fédéraux si l'enquête policière sur ses affaires n'aboutissait à aucune accusation. Peut-être est-il vrai que, à certaines occasions, il a représenté le premier ministre, ce qui lui a permis de recevoir un traitement équivalent à cinq ou dix pour cent des subventions fédérales qu'il semble avoir été capable de garantir à ses collègues du milieu des affaires.

Peut-être devrions nous suivre l'exemple de Claude Gauthier, qui a eu la chance en 1996 d'acheter une portion de terrain du club de golf Grand-Mère, dont le premier ministre a peut-être été propriétaire, mais dans lequel il a avoué détenir un intérêt financier. M. Gauthier a payé 525 000 $ pour la portion de terrain, ce qui a aidé le club de golf à acquitter une dette de 300 000 $. En 1997, c'est M. Gauthier qui a contribué le plus à la caisse de réélection du premier ministre.

L'année suivante, une des entreprises de M. Gauthier, Placeteco Inc., a reçu 1,2 million de dollars par l'entremise du Programme transitoire de création d'emplois, bien qu'elle n'ait apparemment pas créé un seul emploi durable et qu'elle ait plutôt fait abstraction des lignes directrices fédérales et utilisé les fonds pour payer un prêt existant. Cependant, cette fois-ci, on s'est écarté du modèle et le bureau du premier ministre est intervenu en vue d'obtenir pour M. Gauthier des fonds tirés des impôts, malgré le fait qu'il ne possédait aucun casier judiciaire.

Voilà un parti politique de la vieille école qui n'a aucun scrupule. Quelles valeurs les libéraux mettent-ils de l'avant? Au cours des dernières élections, le premier ministre a déclaré que le parti libéral du Canada représentait les valeurs canadiennes. Quelles valeurs le premier ministre tentait-il de représenter lorsqu'il a refusé d'avouer qu'il était intervenu pour faire obtenir un prêt de la Banque de développement du Canada à un homme qui a acheté l'hôtel de Grand-mère en son nom?

Il y a un aspect purement économique à toute cette affaire de Shawinigan. Même si on prend le premier ministre au mot, comment peut-on justifier le fait qu'on ait donné 615 000 $ de l'argent des contribuables à une entreprise accumulant les échecs? Le premier ministre et ses défenseurs affirment que c'était dans un but de développement économique, mais même si nous acceptons cette explication, peut-on dire que l'Auberge Grand-Mère avait beaucoup de chances de produire des avantages économiques à long terme pour la région? La Banque de développement du Canada avait déjà refusé ce prêt à deux reprises pour des raisons valables.

Peut-on s'étonner qu'un hôtel qui a eu toutes sortes de problèmes financiers et qui a été incapable de payer ses factures ait du mal à respecter de nouveaux titres de créance? Il ne faut pas oublier que l'Auberge Grand-Mère n'a jamais fait un seul paiement d'intérêt sur le prêt consenti par la Banque de développement que le premier ministre a travaillé si fort pour obtenir.

De quel genre de connaissances financières a-t-on besoin pour défendre un tel programme? Est-ce réellement là ce qu'on doit considérer comme un programme de développement économique? Je crains fort que, beaucoup trop souvent, la réponse à cette question ait été oui. J'ai bien peur que tout cet épisode nous mène au coeur des valeurs libérales. Lorsqu'on pèle l'oignon blanc, on se rend compte qu'il est tout noir au centre.

Il ne s'agit pas d'un incident isolé. Le vérificateur général a clairement indiqué en octobre qu'il y avait un groupe secret de dirigeants libéraux non élus qui contrôlent et approuvent toutes les subventions au Québec. La GRC mène actuellement quatre autres enquêtes sur des subventions accordées par le gouvernement fédéral dans cette circonscription.

Au cours de la dernière décennie, des milliards de dollars ont été distribués soi-disant pour le développement économique, mais à des fins purement politiques. Cela constitue de l'achat pur et simple de votes avec les fonds publics, et il ne vient même pas à l'esprit du premier ministre que tout cela est mal.

Nous voyons là en action les valeurs politiques libérales à l'ancienne. La question qu'il est le plus important de se poser est de savoir à quel point ces valeurs reflètent étroitement les valeurs des Canadiens moyens.

Au vu des faits, une personne raisonnable en arriverait à la conclusion qu'un conflit d'intérêts ne fait absolument aucun doute et n'est même plus démenti, au fond. Le premier ministre s'est vanté de ce qu'il a fait et a admis qu'il avait un grand motif personnel puisqu'il voulait se faire payer et qu'il avait besoin de cet argent car il n'avait pas de supplément de rémunération comme le chef conservateur.

À cause de la dette non remboursée pour ses actions, le premier ministre avait un intérêt financier dans le club de golf, mais il faisait déverser des fonds publics dans l'auberge voisine. Après avoir tenté à contrecoeur de dissiper toute notion de conflit en prétendant que l'auberge n'avait aucun lien commercial avec le club de golf, chose qui fut prouvée complètement fausse soit dit en passant, le premier ministre et ses défenseurs en sont revenus à raconter purement et simplement des balivernes.

Par delà le Shawinigate s'étend la vaste terre inculte et inexplorée de Développement des ressources humaines Canada et ses programmes, représentant un coffre au trésor d'un milliard de dollars dont la distribution fut supervisée non seulement par des députés libéraux mais aussi par des valets du parti non élus.

 

. 1610 + -

On pourrait peut-être dire que le club de golf de Grand-Mère représente le point zéro d'un phénomène de gouvernement beaucoup plus vaste: la politisation des dépenses publiques et des institutions publiques, comme la Banque de développement du Canada et d'autres sociétés d'État dont le conseil d'administration est rempli d'amis du Parti libéral, ce qui contribue à en corrompre l'objet fixé par la loi et se fait au détriment de l'intérêt public.

On ne peut cependant pas nier la constante de sordidité qui s'est établie au fil des années de la part des gouvernements libéraux et conservateurs d'hier, et le gouvernement actuel ne déçoit pas du tout à cet égard; les affaires continuent.

Le premier ministre, par sa conduite, donne le ton, tout comme l'a fait Mulroney avant lui. Personne n'accuse le premier ministre d'un crime. Pas encore. Néanmoins, au lieu de comparer la conduite du premier ministre à celle d'un criminel, il serait préférable de se demander ce qu'un dirigeant ayant le sens des valeurs aurait fait.

Lorsque Duhaime a abordé le premier ministre, ce dernier aurait dû le faire sortir de son bureau et lui dire qu'il ne pouvait intervenir à cause de leurs intérêts commerciaux communs. Un homme ayant le sens des valeurs, de surcroît un avocat, se serait efforcé d'éviter même qu'il y ait apparence de conflit d'intérêts, surtout s'il est premier ministre et a l'obligation supplémentaire de donner l'exemple. En effet, les titulaires d'une charge publique y sont tenus par le code régissant les conflits d'intérêts.

Cependant, une personne éduquée n'aurait pas besoin de telles directives ou de telles règles. Ceux qui occupent un poste de confiance savent qu'il ne revient pas à d'autres de respecter des normes et des valeurs. Il leur appartient à eux seuls d'être au-dessus de tout soupçon.

Pour tenter de se disculper, le premier ministre peut soutenir que, sur le plan technique, sa conduite n'a pas été à l'encontre du code et que la question comporte de nombreuses zones grises, qu'il a peut-être été négligent en tant qu'avocat et dirigeant du pays.

Cependant, une personne éthique n'a pas besoin de se réfugier derrière des zones grises et des déclarations floues. Un vrai dirigeant insiste pour dire que son intégrité ne devrait pas être mise en doute, en adoptant une conduite irréprochable. Un premier ministre digne de ce nom prend toutes les mesures nécessaires pour faire preuve de droiture, afin qu'on ne puisse jamais le traiter d'escroc.

Je demande au premier ministre, dans l'intérêt des Canadiens, d'accepter la motion présentée aujourd'hui à la Chambre.

M. Roy Cullen (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir dans ce débat. J'ai entendu plus tôt des remarques qui m'ont laissé perplexe et je voudrais y revenir en posant une question au député d'en face, car je sais qu'il vient de la Colombie-Britannique.

Le chef du cinquième parti a parlé plus tôt de l'ancien premier ministre de la province, M. Bill Vander Zalm, ainsi que d'un rapport rédigé par M. Ted Hughes. Si j'ai bien compris, le député a dit que M. Hughes avait déclaré dans son rapport que le premier ministre occupait le poste élu le plus élevé dans la province et qu'il avait une responsabilité en matière de conflit d'intérêts.

Le député a oublié de mentionner que, et je vivais en Colombie-Britannique à l'époque, il y avait une affaire concernant une somme d'environ 15 000 $ en billets de banque qui était dans le coffre-fort des jardins Fantasyland—ou quel que soit leur nom—du premier ministre et qui venaient par hasard d'un promoteur immobilier, et ainsi de suite.

Dans ce cas particulier, il est assez clair que le premier ministre n'avait aucun intérêt personnel. Il détenait un prêt non remboursé, mais il est clair que les actions avaient été vendues, même si le registre des actionnaires n'avait pas été mis à jour. En ma qualité de comptable agréé, j'ai eu affaire à de nombreuses entreprises dont le registre des actionnaires n'avait pas été mis à jour depuis des années. Je devais leur dire de le faire.

Donc, les actions ont clairement été vendues. Le premier ministre a déposé les actes de vente. Il avait un prêt non remboursé. Il avait un montant à recevoir d'un cadre ayant des moyens, de sorte qu'il était possible de recouvrer le prêt en s'adressant aux tribunaux. Cela n'avait rien à voir avec l'interdépendance du terrain de golf et de l'hôtel. Cela avait tout à voir avec un montant à recevoir d'une personne qui avait les moyens de verser ce montant. Il s'agissait d'une somme déterminée.

Je trouve que le débat nous échappe vraiment. Je sais que le député est de la Colombie-Britannique, de sorte qu'il se souviendra de l'incident impliquant l'ancien premier ministre Bill Vander Zalm. Je pense qu'il est absolument ignoble de faire un rapprochement entre les deux cas.

M. Paul Forseth: Monsieur le Président, ce que j'essayais de dire c'est que ce qui se passe dans la circonscription du premier ministre n'est que la pointe de l'iceberg et fait partie d'une longue habitude des libéraux qui remonte très loin. Ce sont des moeurs politiques d'antan.

 

. 1615 + -

Il est également clair, je crois, que le Canadien moyen comprend que, si la circonscription du premier ministre ne recevait pas de subventions des divers ministères et programmes, le premier ministre ne serait pas payé. Il a pris la parole à la Chambre, a mis la main sur la poitrine et a avoué son désir et son envie d'être payé. Il est certainement intervenu auprès de toutes les instances du gouvernement pour s'assurer qu'il serait effectivement payé. C'est l'impression que ça donne.

Toutefois, si on replaçait cette affaire dans le contexte de la Colombie-Britannique, je dirais que si elle se déroulait à l'Assemblée législative de cette province, le débat d'aujourd'hui n'aurait pas lieu. La question serait déjà réglée parce que, en Colombie-Britannique, les normes concernant l'apparence de conflit d'intérêts sont beaucoup plus strictes que celles de la Chambre des communes.

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je reviendrais aux propos de mon collègue, mais j'aimerais dire d'abord que pendant au moins 21 ans de ma carrière professionnelle j'ai été régi par des règles de conduite et de comportement professionnels extrêmement strictes. Quand j'étais jeune, j'étais directeur d'une école. J'aurais pu engager ma femme comme membre de mon personnel, mais je ne l'ai pas fait parce que je savais que, en tant qu'administrateur, nous avions un code d'éthique. Du temps où j'étais député à l'Assemblée législative, j'avais devant les yeux un code d'éthique très précis. Si un administrateur avait appelé une banque pour qu'un entrepreneur obtienne un contrat, il aurait été immédiatement remercié.

Le premier ministre a admis avoir appelé la Banque de développement du Canada. Il était en plein conflit d'intérêts. Ce fait ne peut être nié par quiconque au Canada.

J'aimerais demander au député si ses électeurs ne voient pas là un conflit d'intérêts total et si, à son avis, le premier ministre ne devrait pas admettre sa culpabilité maintenant et dire la vérité au sujet du code d'éthique qui est censé s'appliquer à tous les députés.

Le vice-président: Je suis devant un dilemme car le temps est écoulé. Je vais considérer comme des observations à la Chambre les propos du député qui avait la parole.

M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de parler de cette motion aujourd'hui. Il est malheureux qu'on en vienne à cela et que la Chambre ne puisse se pencher sur des questions plus constructives. Cependant, à titre de parti de l'opposition, avec nos collègues de ce côté de la Chambre, notre devoir est de chercher à débusquer la vérité.

Contrairement à ce qu'affirme le gouvernement, la population veut avoir des réponses. Huit personnes sur dix souhaitent la fin de cette affaire. Elles veulent qu'on vienne à bout de ce dossier pour pouvoir ensuite se pencher sur les véritables questions qui préoccupent les Canadiens. Cependant, huit Canadiens sur dix veulent aussi que la Chambre obtienne la divulgation complète de tous les documents du premier ministre. Ils ont dit très clairement au premier ministre qu'ils veulent obtenir les réponses aux questions qu'on lui pose, qu'ils veulent une divulgation complète et qu'ils veulent la vérité— qu'après, on pourra passer à autre chose.

Je suis convaincu que le premier ministre, après 38 ans de service à la Chambre des communes, à l'hiver de sa carrière politique, ne veut pas que l'ombre du Shawinigate le poursuive lorsqu'il quittera sa fonction. Il serait très préjudiciable pour lui, et pour les nombreuses années qu'il a consacrées à la Chambre des communes et au pays, qu'il ne réponde pas aux questions posées non seulement par mes collègues ici à la Chambre, mais par les députés de son propre caucus et par la population. Les gens veulent qu'on passe à autre chose, mais ils veulent aussi obtenir les réponses.

La tactique du premier ministre de se fier à la lassitude de la population et de l'opposition ne réussira pas. Ce n'est pas ainsi qu'il réglera la question. Mes collègues ont amplement démontré pourquoi il devrait divulguer entièrement les documents.

Toute cette question témoigne d'une tendance beaucoup plus troublante en politique de nos jours au Canada. Elle révèle le pouvoir sans égal du premier ministre dans notre soi-disant démocratie. En effet, aucun autre chef de démocratie occidentale n'a autant de pouvoir que le premier ministre du Canada. Les Canadiens seront intéressés d'apprendre que le président des États-Unis ferait la roue sur les pelouses de la Maison blanche s'il avait les mêmes pouvoirs que notre premier ministre. Cela doit changer.

 

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En fait, toute cette affaire reflète le pouvoir débridé et inexplicable qu'a aujourd'hui au Canada le titulaire de ce poste. Lorsque M. Trudeau disait que les députés étaient des nullités passé 50 pieds de la colline, il ne faisait que témoigner du pouvoir qu'il commençait lui-même accumuler. En fait, ce pouvoir s'est centralisé de plus en plus avec le temps.

Beaucoup de députés, y compris des députés ministériels, en face, ont parlé avec beaucoup d'éloquence du pouvoir débridé et inexplicable qui est associé aujourd'hui au premier ministre et au poste de premier ministre. Il n'y a pas de quoi être fier. Cela n'a rien de positif pour les députés ou, plus important encore, pour les Canadiens en général. Ce pouvoir musèle et compromet le pouvoir créateur et les capacités de chacun des députés, y compris les membres du Cabinet.

Les ministres ne peuvent malheureusement pas faire valoir leurs capacités et leurs droits compte tenu des freins et contrepoids employés. Les Canadiens seront très intéressés d'apprendre que le bras droit d'un ministre est un sous-ministre qui n'est pas nommé ni approuvé par le ministre, mais qui est, en fait, nommé par le premier ministre et son cabinet. Cela constitue tout un frein à la capacité de tout ministre de faire preuve de perspicacité, de responsabilité et de leadership dans son domaine.

Cela témoigne aussi d'un manque de responsabilité et de respect à l'égard de la population. Comme l'a signalé mon collègue, nous avons un conseiller en éthique nommé par le premier ministre et responsable envers ce dernier plutôt qu'un conseiller en éthique indépendant. Des fonds sont dépensés sans qu'il en soit rendu compte ou qu'ils soient soumis à un examen public. En fait, le vérificateur général a, à maintes reprises, mis la Chambre et le public en garde contre les dangers que cela comporte. Année après année, il a proposé des solutions constructives pour résoudre ce problème. Est-il écouté? Non. Ses recommandations sont-elles mises en oeuvre? Non, elles ne le sont pas.

Quelle tragédie pour M. Denis Desautels, cet homme de qualité qui quitte maintenant ses fonctions après 10 ans. Il a travaillé fort dans l'intérêt public et il a donné à tous les députés des conseils sur les façons d'améliorer l'utilisation des fonds publics. Le drame dans tout cela, et je pense que le public devrait en être informé, c'est que ces solutions sont rarement, voire jamais adoptées ni mises en application. Comme cela doit être démoralisant pour une excellente équipe qui s'emploie à défendre l'intérêt public.

Comme mon collègue l'a mentionné, nous avons vu à quoi servent les deniers publics—la Société pour l'expansion des exportations, la Banque de développement du Canada, les sociétés d'État, la nouvelle fondation pour l'innovation; il s'agit ici de 1,25 milliard de dollars dont il n'est pas rendu compte et qui n'est soumis à aucun examen public. Nous avons vu des contrats de l'ACDI qui ont été adjugés non pas en fonction de ce qui est utile ou de ce qui serait sage, mais selon les amis du parti au pouvoir ou pour des raisons politiques.

Tout cela fait qu'il y a moins de personnes qui se portent candidates pour assumer des charges publiques et moins de gens qui se prévalent de leur droit de vote. Lors des dernières élections fédérales, seulement trois cinquièmes des Canadiens sont allés voter. Pourquoi cette désaffection? Parce que la population trouve que cette institution est de plus en plus déconnectée de leur vie et qu'elle est incapable de régler les grands problèmes qui nous concernent tous.

Nous avons vu des ministres parler d'épisodes fictifs où des croix auraient été brûlées. Nous avons vu des ministres insulter un membre de mon caucus. Pourquoi? Parce que les députés d'en face s'ennuient, je crois. Ils s'ennuient et on ne leur propose aucune orientation, aucune vision d'avenir. Le premier ministre cherche plus à perpétuer la fragmentation de l'opposition qu'à définir une vision pour régler les problèmes auxquels notre pays fait face.

Tandis que Rome brûle, voici ce que nous négligeons. Il ne se fait rien pour sauver un système de santé qui est dans un état lamentable. Nous avons sur les bras une crise d'effectifs médicaux, car le spécialiste moyen a entre 45 et 50 ans: chirurgiens, urologues, obstétriciens et gynécologues sont tous en fin de carrière. Il existe une grave pénurie dans ces spécialités d'importance cruciale. Il faut agir dès maintenant pour former ceux qui les remplaceront.

Nous avons un régime de retraite qui ne peut tenir le coup et qui ne subviendra pas aux besoins des Canadiens qui prendront leur retraite. Ils comptaient avoir des pensions pour les faire vivre. Comme nous le savons, ceux qui ont élaboré le système étaient conscients que c'était une combine à la Ponzi et savaient qu'il ne pourrait pas fournir les pensions de retraite escomptées.

 

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Il en résultera qu'un très grand nombre de membres des générations futures n'auront pas assez d'argent. Ils gonfleront les rangs des personnes âgées pauvres, de ceux qui n'arriveront pas à joindre les deux bouts pour le reste de leur vie.

Nous avons un dollar dont la valeur se situe à un centième de cent de son plus bas niveau jamais atteint. Le gouvernement réagit-il à la crise? Non.

Sur le plan de l'environnement, on nous considère comme l'un des pires pollueurs pour un pays membre de l'OCDE. Notre gouvernement est partiellement responsable de cette situation.

Nous avons un régime parlementaire qui n'est pas démocratique.

Nous avons un système d'éducation dont les coûts sont si élevés que, de plus en plus, seuls les riches et les privilégiés y ont accès. Nous sommes aux prises avec une pénurie d'enseignants telle que si nous ne nous y attaquons pas maintenant, nos enfants n'auront personne pour leur donner des cours. Nous ne pourrons pas alors cultiver l'excellence qui fera avancer le pays dans les années à venir.

Dans notre système de défense, nos soldats ont obtenu une augmentation, mais les Canadiens ne savent peut-être pas que ces augmentations sont annulées par les hausses des loyers des logements des soldats mariés et les coûts supplémentaires imposés aux soldats. Ces gens-là sont surmenés et fatigués et ils ne sont pas assez nombreux pour remplir toutes les fonctions que leur impose le ministère des Affaires étrangères. Ces hommes et ces femmes qui mettent leur vie en danger pour notre pays sont surmenés, fatigués, et nombre d'entre eux souffrent de stress post-traumatique.

Pendant qu'il y a péril en la demeure, les députés s'amusent comme des enfants. Il nous incombe à tous de changer cela. Tout ce que je dis c'est que le premier ministre a la capacité de répondre aux questions concernant le Shawinigate. Il est le seul à pouvoir mettre cartes sur table pour que nous puissions enfin mettre un terme à un chapitre de l'histoire de la politique canadienne et passer aux questions importantes dont j'ai parlé.

Au nom de tous les Canadiens, monsieur le premier ministre, ouvrez les livres, répondez aux questions et passons à autre chose.

M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, notre collègue semble un député raisonnable. Je voudrais lui lire trois citations.

La première vient du chef de l'opposition lorsqu'il était en Alberta, en 1996. Lorsqu'un problème touchant une situation à la Chambre a surgi, il a déclaré: «Nous abdiquerions notre rôle de législateurs si, au lieu de nous pencher nous-mêmes sur le fonctionnement de notre Chambre, nous confions cette tâche à un autre organe judiciaire.»

La deuxième citation vient de la députée de Calgary—Nosehill. Le 2 janvier, dans le National Post, la députée a fait un commentaire sur la situation actuelle. Elle a dit: «Je ne pense pas que ça mérite une enquête criminelle. Pour être crédible, surtout dans le domaine de la vie publique, il faut s'en tenir aux faits. [...]Je ne pense pas qu'il soit responsable de faire ce type de suggestions.»

La troisième et dernière citation sur laquelle je voudrais que mon collègue nous donne son opinion vient de la députée d'Edmonton-Nord, qui a déclaré à la Chambre le 15 mars: «Le premier ministre pourrait mettre un terme à cette affaire en un clin d'oeil s'il déposait le certificat de vente de ses parts en 1993.»

Je demande à mes collègues de mettre de côté tout sectarisme. En ce qui concerne toutes ces déclarations, le premier ministre a répondu de façon très efficace et efficiente. Il a répondu dans tous les cas de façon ouverte à la Chambre et à l'extérieur, ainsi que durant la campagne électorale. En même temps, en ce qui concerne l'enquête et une infraction criminelle possible, la GRC s'est penchée sur ces questions et un de nos collègues a déclaré qu'il n'y avait aucun problème à cet égard. Pour ce qui est du troisième point, le dépôt du certificat de vente, le premier ministre a déposé le certificat de vente.

Nous pouvons discuter de cette question à la Chambre et nous le faisons depuis longtemps. Quant au deuxième point, il n'y a aucune poursuite au criminel. En ce qui concerne le troisième point, le premier ministre a déposé tous les documents pertinents.

Dans ces circonstances, le député croit-il vraiment que la Chambre devrait se prononcer en faveur d'une enquête publique qui coûterait des millions de dollars inutilement?

M. Keith Martin: Monsieur le Président, le chef de l'opposition avait raison de dire que ces choses doivent être réglées à l'interne. Par contre, les mécanismes internes de la Chambre sont inadéquats pour traiter de ces questions.

 

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Nous avons voulu que le conseiller en éthique soit un fonctionnaire indépendant, mais le gouvernement en a décidé autrement, allant même en cela à l'encontre des promesses faites dans son livre rouge. Si les mécanismes internes de la Chambre fonctionnaient comme le chef de l'opposition le souhaitait quand il était le trésorier de l'Alberta, nous ne parlerions pas de cela aujourd'hui parce qu'on aurait déjà solutionné le problème. Mais ces mécanismes ne fonctionnent pas et ces questions restent sans réponse.

L'opposition ne fait que répéter ce que disent les propres collègues du premier ministre, soit les députés d'Oshawa, de Guelph—Wellington et de Vaudreuil—Soulanges, qui souhaitent tous la tenue d'une enquête publique indépendante sur cette affaire.

Une telle enquête ne coûterait pas des millions de dollars. En fait, elle ne coûterait pas un sou. Le premier ministre n'a qu'à déposer tous les documents pertinents, à répondre aux questions, et on pourra ensuite passer à autre chose.

M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.): Monsieur le Président, une des choses qui m'agacent dans ce débat, c'est que même si le premier ministre a déposé des preuves complètes, on continue de porter des accusations à son endroit. J'ai toujours cru que toute personne avait droit à la présomption d'innocence.

Le député n'est-il pas d'avis qu'en réclamant une enquête, on demande au premier ministre de prouver son innocence? N'est-ce pas ce qu'on demande?

M. Keith Martin: Monsieur le Président, le député a parfaitement raison. Les gens sont innocents tant que leur culpabilité n'a pas été prouvée. Dans toutes les accusations et devant un tribunal, les gens doivent présenter leur version des faits.

Le fait est que le premier ministre n'est pas un simple député. Il s'agissait d'affaires privées, mais des fonds publics ont été utilisés. Peut-être n'y a-t-il rien eu. Cependant, des questions se posent et il faut y répondre. Ces questions ont trait à l'utilisation de fonds publics. Beaucoup de gens ont posé ces questions, y compris des députés du parti du premier ministre.

Puisque nous convenons tous qu'il faut répondre à ces questions, le député devrait demander au premier ministre d'y répondre ou de tenir une enquête judiciaire.

M. Joe Jordan (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à préciser que je partagerai le temps dont je dispose avec le très compétent député d'Elgin—Middlesex—London.

J'interviens aujourd'hui dans le débat sur la motion de l'opposition qui commence par ces mots:

    Que la Chambre demande la tenue d'une enquête judiciaire indépendante pour déterminer si le premier ministre a enfreint les règles relatives aux conflits d'intérêts concernant sa participation dans le Club de golf Grand-Mère et l'Auberge Grand-Mère...

Cette motion présuppose que le premier ministre avait une association financière personnelle avec l'hôtel qu'il a aidé, en qualité de député de Saint-Maurice, en appuyant sa demande de subvention pour un agrandissement visant à favoriser le tourisme dans sa circonscription.

Emmenons l'opposition en terrain inconnu et examinons les faits.

Avant de devenir premier ministre de ce pays, le premier ministre a vendu les actions qu'il détenait dans une compagnie propriétaire d'un golf situé à côté d'un hôtel. Il n'a jamais repris possession de ces actions et l'opposition a beau s'évertuer à essayer de prouver le contraire, elle n'a aucune preuve crédible pour le faire. En guise de repli, l'opposition semble se dire qu'à force de répéter les choses, les gens finiront par les croire. Elle a droit à ses opinions, mais les Canadiens méritent des arguments basés sur des faits.

Ces faits, dont il a été question pour la première fois à la Chambre il y a deux ans, ont refait surface durant la campagne électorale de novembre dernier, dans le cadre de la stratégie menée par l'opposition en vue de jeter le discrédit sur le premier ministre.

Durant cette campagne, le conseiller en éthique a examiné la situation à la demande des partis d'opposition. Le chef de l'opposition officielle et le chef du Parti conservateur avaient alors fait grand cas du fait que le conseiller en éthique examinait la question. Pendant environ trois jours, l'opposition s'est servi de cette enquête pour jeter le discrédit sur le premier ministre durant la campagne électorale.

Le conseiller en éthique n'était pas n'importe qui. C'était un sous-registraire adjoint, un fonctionnaire de carrière aux antécédents irréprochables. À l'époque de sa nomination, nous avions consulté M. Lucien Bouchard, alors chef de l'opposition, conformément à ce que nous avions promis dans le livre rouge. Il a dit:

    Je dois tout de suite ajouter que nous souscrivons d'emblée à la nomination du conseiller en éthique, M. Howard Wilson. Nous savons qu'il s'agit de quelqu'un qui a fait une carrière éminemment respectable au sein de la fonction publique fédérale, et que nous pouvons avoir toute confiance en lui pour piloter ce dossier à un moment crucial.

 

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À l'époque, le député d'Elk Island a dit:

    La personne qui occupe ce poste actuellement est honorable. [...] C'est un homme intègre, un homme en qui on peut avoir confiance.

Après le branle-bas des élections, après avoir vanté les qualités de cet homme, des députés de ce parti ont pourtant dit, en réaction à une décision qui ne plaisait pas à l'opposition, que le conseiller en éthique était un chien de poche. Du coup, ce haut fonctionnaire de carrière est devenu un chien de poche. Dans ma circonscription, le candidat qui se présentait contre moi s'amusait à montrer des photos de chiens. Il n'y a rien d'amusant dans cela. La seule personne qui en a ri est le regretté sénateur Joe McCarthy.

Quelle disgrâce de recourir à cette logique selon laquelle qui veut la fin veut les moyens. Sans se préoccuper de qui que ce soit, ils n'ont qu'une idée en tête, discréditer l'un des premiers ministres les plus populaires dans l'histoire de ce pays. Ils n'ont pas pu le battre aux élections, alors ils vont essayer d'avoir sa peau coûte que coûte, à leur façon. Nous ne laisserons pas faire ça sans rien dire.

Le chef du Parti progressiste-conservateur de l'époque, insatisfait de l'enquête du conseiller à l'éthique, a prié la GRC, la Gendarmerie royale du Canada, d'intervenir. Encore là, il a dit que toute l'affaire et le premier ministre faisaient l'objet d'une enquête et que son parti remporterait cette guerre de relations publiques. Dans son rapport, la GRC a déclaré que rien ne révélait l'existence d'activités criminelles. Fidèles à leur habitude, les députés de l'opposition ont encore une fois changé la cible. C'est la stratégie qu'ils ont adoptée.

Puis la députée d'Edmonton-Nord a dit que le certificat de vente devrait être déposé. Elle a dit:

    Le premier ministre pourrait mettre un terme à cette affaire en un clin d'oeil s'il déposait le certificat de vente de ses parts en 1993.

Quant à lui, le chef conservateur a dit:

    Le premier ministre pourrait régler cette affaire en déposant à la Chambre des communes le contrat de vente qu'il a conclu avec Jonas Prince.

Le député de Roberval a dit:

    Ne comprend-il pas que la seule façon de régler ce dossier, de se disculper—il n'y en a pas 50, il y en a une seule—c'est de déposer l'acte de vente comme nous le lui avons demandé tant de fois dans le passé? Qu'il dépose l'acte de vente et il n'y aura plus de problème.

Le premier ministre leur a fourni l'acte de vente et d'autres documents pertinents. N'ayant personne contre qui se lancer, ils ont dirigé leurs attaques contre le document lui-même en disant qu'il était rédigé au crayon à l'endos d'une serviette de table, que cela ne pourrait passer dans une machine à écrire. Ils ne vont pas jusqu'à dire que ce n'est pas un document légal parce qu'ils savent bien qu'il est légal. S'ils étaient le moindrement courageux, ils sortiraient de cette enceinte et feraient cette accusation.

S'ils veulent une enquête judiciaire, ils l'obtiendront en un rien de temps. C'est un document tout à fait légal. Il assure le transfert des actions. Le conseiller en éthique l'a confirmé et rien de ce qui a été dit aujourd'hui ou au cours des deux dernières semaines ne peut changer cela. C'est la base sur laquelle ils ont fondé toutes leurs allégations subséquentes et elle n'est pas très solide.

Le député d'Esquimalt—Juan de Fuca a été très éloquent. J'ai beaucoup de respect pour lui. J'ai écouté tout le débat aujourd'hui et ce qu'il disait, c'était qu'on devait se montrer prudent et demander une enquête uniquement pour clarifier les choses.

Un juge éminent et respecté de la Cour suprême du Canada, le regretté juge Sopinka, a critiqué ce genre de procédure. Il a réprouvé la procédure s'en prenant directement à une action fautive dont on accuse certaines personnes et qui avait besoin de s'exercer dans les limites d'un procès pénal. Le juge Sopinka a dit que ce genre d'enquête fondée uniquement sur des allégations était répugnante.

Je n'ai pas besoin d'imaginer la répugnance, car j'en ai été témoin aujourd'hui. J'en ai été témoin quand un député du Parti conservateur a comparé à Raspoutine le chef de cabinet du premier ministre. Je demande aux députés s'ils le regrettent. Je vois maintenant qu'ils font tous signe que oui de la tête. J'accepte ces excuses de leur part. Cela est un bon point en leur faveur et je l'apprécie. Je pense qu'ils se sont un peu laissés emporter.

Puis nous avons entendu la députée de Calgary—Nose Hill comparer le premier ministre du Canada à Slobodan Milosevic. Voilà le genre d'absurdités auxquelles mènent ces chasses aux sorcières, ces inquisitions et ces enquêtes faites par des adversaires politiques. Au bout du compte, il n'y a pas lieu à poursuites. La GRC le leur a dit.

 

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C'est une opération partisane de salissage motivée par la vengeance. Les députés néo-démocrates sont fâchés parce que nous avons critiqué le rôle qu'ils entendent jouer au Sommet des Amériques. Les conservateurs sont vexés parce qu'ils ne se sont toujours pas remis de la raclée que les Canadiens leur ont infligée à cause de Mulroney. Si j'ai bien compris ce qu'a dit le député d'Esquimalt—Juan de Fuca, nous devrions tenir ce genre d'enquête parce que nous nous ennuyons. C'est par ennui que nous devrions soumettre le premier ministre du pays à une enquête judiciaire. C'est vraiment absurde.

Le premier ministre n'a rien fait de plus qu'agir en bon député envers les habitants de sa circonscription. La motion dont la Chambre est saisie est une insulte à sa bonne réputation, une insulte à sa réputation de longue date d'excellente conduite morale. Le député de Leeds—Grenville ne se laissera pas attirer dans cette absurdité.

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, je n'ai pas encore participé au débat, et je ne l'ai pas fait pour une raison précise. Parfois, j'estime n'avoir vraiment pas beaucoup de chance, car j'ai été obligé de me présenter aujourd'hui, pensez donc, et d'écouter ce débat qui n'en finit plus.

Je crois honnêtement que tous les arguments qui auraient pu être présentés ou qui devaient l'être ont été présentés au cours des deux premières interventions. Cela s'est passé beaucoup plus tôt aujourd'hui, et j'ai été obligé de demeurer ici à mon siège. La population est probablement fatiguée d'entendre parler de tout cela. Honnêtement, j'ignore si ces allégations sont fondées ou non, et la population et tout le monde dans cette Chambre l'ignorent également. C'est une raison de plus pour laquelle les Canadiens sont de plus en plus nombreux à demander que le Parlement en finisse avec cette question et qu'il passe à des questions importantes.

Cependant, si la Chambre des communes est saisie d'une question aussi futile, c'est peut-être parce que le programme législatif du gouvernement libéral est tellement mince qu'il n'y a pas grand-chose d'autre à débattre. La nature a horreur du vide et, lorsqu'il y a un vide, on recourt à toutes sortes de moyens pour le combler. C'est ce qu'on fait avec le temps précieux de la Chambre des communes.

Le secrétaire parlementaire du premier ministre ne convient-il pas que nous devrions examiner des questions beaucoup plus importantes? Nous devrions examiner les articles que nous avons vus récemment et qui ont été rédigés par des groupes comme les militants contre la pauvreté, qui attirent l'attention sur l'écart grandissant entre les riches et les pauvres. Le secrétaire parlementaire ne pourrait-il pas admettre que son gouvernement est en partie responsable du fait qu'il n'y a aucune question de fond à débattre et qu'il crée ainsi un vide qu'on essaie de combler en gaspillant du temps précieux, comme c'est le cas aujourd'hui?

M. Joe Jordan: Monsieur le Président, je dirai au député, que je respecte beaucoup par ailleurs, que si nous sommes coupables de cela et bien, soit. Cependant, les frustrations que bon nombre d'entre nous ressentons du fait d'être coupés de nos électeurs ne devraient pas se traduire par une enquête judiciaire attribuable à un esprit revanchard. Je ne pense pas que le système fonctionne comme cela. Il faut maintenir la distinction entre ces questions.

Je reviens à mon premier argument. L'élément fondamental qui manque dans toute cette histoire montée par l'opposition, c'est le fait que les actions ont été vendues en 1993. Sans ce lien, sans la possibilité d'un profit financier, les gens d'en face n'ont rien. Ordonner une enquête judiciaire visant le poste le plus élevé au Canada, sans pouvoir se baser sur des faits, serait, comme l'a dit le juge Sopinka, un acte répugnant et un mauvais service à rendre à nos électeurs, aux Canadiens.

Les questions que soulève le député sont valides. Je suis d'avis que les Canadiens veulent que la Chambre commence à s'attaquer aux problèmes qui se posent. Je ne pouvais que rire aujourd'hui quand le chef de l'opposition a dit que ses collègues et lui parlent du dossier du bois d'oeuvre depuis des mois. Il devait faire allusion aux pins qui se trouvent sur le terrain de golf, parce qu'ils n'ont pas parlé d'autre bois depuis environ quatre mois. Ils sont obsédés par ce dossier, comme un chien par son os.

Le chef du Parti conservateur a lui-même avoué qu'il allait à la pêche. J'espère qu'il est sorti parce qu'il fait beau, la glace fond et je sais qu'il n'est pas bon nageur. Il va tomber dans un trou profond s'il ne prend pas garde.

Les Canadiens veulent que nous passions à autre chose. Il n'existe aucun fait, aucun élément de preuve. Nous avons un document du conseiller en éthique et un autre de la GRC, selon lesquels il n'y a aucune faute criminelle, aucun fondement qui permette d'aller plus loin. Ce n'est rien de plus que de la basse politique.

 

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Le vice-président: Comme le député d'Elk Island s'est montré coopératif plus tôt dans une situation semblable, je lui donne la parole.

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le député libéral m'honore en citant un des discours que j'ai prononcés en 1994, quand le conseiller en éthique a été nommé.

J'ai probablement prononcé les paroles qu'il a citées. Je ne me souviens pas parfaitement de ce que j'ai bien pu dire il y a bien des années de cela. Je n'arrive pas à croire qu'il ait rapporté tout ce que j'ai dit parce que j'ai presque certainement dit qu'il était dommage qu'il ne soit pas indépendant. Sur le plan personnel, le conseiller en éthique m'inspire confiance, mais il n'est pas aussi indépendant qu'on nous l'avait promis lors de la campagne électorale.

Je voudrais que le député nous dise ce qu'il pense du fait que le conseiller en éthique a été engagé par le premier ministre et qu'il n'a de comptes à rendre qu'au premier ministre, et non pas au Parlement directement.

M. Joe Jordan: Monsieur le Président, le député parlait-il de moi? J'ai été élu par les électeurs de Leeds—Grenville pour les représenter à la Chambre.

J'ai rapporté les paroles exactes du député. Pour l'amour du ciel, je n'ai pas l'intention de fouiller dans les archives pour relire les discours du député afin de corriger la citation.

M. Gar Knutson (Elgin—Middlesex—London, Lib.): Monsieur le Président, je félicite le député qui vient de prendre la parole. Il a fait un excellent travail. Je voudrais aussi revenir sur un thème du député néo-démocrate.

Le débat est répétitif parce que les faits ne sont pas très compliqués. Toute l'histoire gravite autour de faits très simples. Nous en avons parlé pendant la campagne. Pourquoi donc l'opposition tient-elle à revenir sur une question qui a été discutée à fond? Elle a fait ce que les partis d'opposition font pendant les campagnes électorales: essayer de présenter les libéraux et leur chef sous un jour défavorable.

Les Canadiens ont entendu dire que le premier ministre avait appelé un directeur de banque pour qu'une entreprise de sa circonscription obtienne un prêt. Le premier ministre a expliqué que c'est là une démarche normale pour tout député. Les députés interviennent auprès d'entreprises comme la Banque de développement du Canada. J'ai appelé la banque au nom de certains électeurs.

Il y a peut-être eu un certain malaise parce que l'influence du cabinet du premier ministre a joué, mais les Canadiens reconnaissent que le premier ministre est aussi un député, qu'il siège comme simple député et qu'il se conforme aux règles. Il savent qu'il a des électeurs à représenter, tout comme nous. Les Canadiens se sont prononcés et ils ont maintenu le premier ministre au pouvoir avec une majorité encore plus forte qu'aux élections précédentes.

Toutefois, l'opposition estime qu'il y a peut-être là un petit quelque chose à exploiter ou bien un énorme scandale. Après avoir discuté avec des électeurs de ma circonscription, je peux dire à la Chambre que les Canadiens en ont assez de cette question. Ils en ont marre des tactiques de l'opposition. Ils ne comprennent pas pourquoi nous ne discutons pas de questions importantes.

Les députés se rappellent-ils le débat que nous avons eu sur le libre-échange il y a des années? C'était un énorme dossier pour les parlementaires. ette question a fait l'objet d'un grand débat au Canada. Dans quelques semaines, nous discuterons du prolongement de cet accord à Québec. L'opposition soulève-t-elle la question? Il est vrai que le quatrième parti en parle. Les néo-démocrates en font leur cheval de bataille, mais les autres députés de l'opposition restent généralement muets à ce sujet.

À l'instar de mes collègues libéraux, je n'appuierai pas la motion. Ce n'est que de la comédie. Cela ne peut être utile ni au Parlement ni à l'opposition, et les sondages le prouveront. S'il y avait des élections aujourd'hui, je crois que nous obtiendrions une majorité encore plus forte. Ce n'est, évidemment, qu'une hypothèse que je formule.

Je m'oppose à la motion car nous avons déjà tous les documents pertinents. Le conseiller en éthique a confirmé qu'il n'y avait pas de conflit d'intérêts. Le premier ministre a-t-il fait quelque chose de mal? Certainement pas. Il n'avait aucun intérêt dans l'auberge. L'opposition a tenté de faire un lien entre l'auberge et le club de golf pour faire croire que le premier ministre avait un intérêt dans l'auberge, mais cela ne prend pas.

Après que le premier ministre eut vendu ses actions en 1993, une certaine somme lui était due. La fluctuation de la valeur du club de golf n'a eu aucune incidence sur la somme qui lui était due. Cela figure dans tout bon contrat.

L'opposition pourrait très bien aller jusqu'à prétendre que le premier ministre avait un intérêt dans toutes les affaires de M. Prince. Que voulons-nous faire? Voulons-nous examiner toutes les affaires de M. Prince pour déterminer si le premier ministre est intervenu afin de permettre à M. Prince de rembourser sa dette? Ce serait toute une enquête à l'aveuglette à mener.

La députée d'Edmonton-Nord a déclaré que le premier ministre pourrait rapidement régler cette question en déposant l'acte de vente conclu en 1993. ien qu'il n'avait pas à le faire, le premier ministre a déposé le certificat de vente. Quand il l'a déposé, l'opposition a déclaré que cela ne voulait rien dire. C'est ce qui s'est passé tout au long de cette affaire.

 

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Si une enquête judiciaire avait lieu et qu'elle blanchissait le premier ministre ou révélait qu'il n'a rien fait de mal, qu'il a agi comme un parlementaire ordinaire, je suis certain que l'opposition critiquerait l'enquête. Elle demanderait qui étaient les juges et elle ferait valoir qu'ils ont été nommés par le premier ministre et qu'ils étaient en quelque sorte partiaux. Cela pourrait continuer éternellement.

Les députés d'en face ont fait beaucoup de bruit à propos du certificat de vente. Les députés de Roberval, d'Edmonton-Nord, de Pictou—Antigonish—Guysborough et de Calgary-Centre ont déclaré que le problème serait réglé si le premier ministre présentait le certificat de vente à la Chambre. La question est-elle réglée? Non, car l'opposition continue de s'y acharner.

C'est comme continuer à frapper un mort. L'opposition a obtenu le certificat de vente et elle n'est pas satisfaite puisque ça prouve que le premier ministre ne détenait pas d'intérêt personnel dans cette affaire. Le premier ministre s'intéressait à un de ses électeurs en tant que député et il a fait ce que chacun d'entre nous aurait fait. Il est intervenu au nom de sa circonscription. C'est ce que font les députés. C'est ce que fait l'opposition.

Le premier ministre a-t-il fait quelque chose de mal? Demandez à d'autres députés qui sont intervenus au nom de leurs électeurs s'ils estiment qu'ils ont fait quelque chose de mal. Il a été question du coup de téléphone à la banque lors des rencontres de tous les candidats qui ont eu lieu pendant la campagne. Il en a probablement été question quand mes collègues faisaient campagne. C'est une chose qu'il a fallu expliquer pendant la campagne et les Canadiens se sont prononcés.

J'ai été réélu avec une plus grande majorité et une marge plus importante que lors des dernières élections. Les Canadiens le comprennent même si l'opposition ne le comprend pas.

J'espère que l'opposition sera suffisamment honnête pour dire que, dans notre système constitutionnel, l'une des responsabilités les plus importantes qu'ont les députés est de défendre les intérêts de leurs électeurs. C'est un principe fondamental de notre forme de démocratie. Nous sommes élus par la collectivité et nous sommes censés représenter la collectivité.

Le premier ministre a-t-il fait quelque chose de mal? Nous pouvons poser la question au conseiller en éthique qui a déjà dit au chef de l'opposition officielle et au chef de l'opposition non officielle:

      ...le premier ministre n'avait pas d'intérêt financier personnel en jeu. Il a agi en tant que député au nom d'un commettant.

Dans sa déclaration du 1er mars, il dit ceci:

    La dette légale qui devait être acquittée au premier ministre n'était pas assujettie à la valeur du terrain de golf. Si la valeur devait augmenter, le premier ministre ne pouvait pas exiger la majoration du paiement. De même, si la valeur du terrain devait baisser, la dette envers le premier ministre demeurait inchangée.

L'opposition a essayé de discréditer le conseiller en éthique, un fonctionnaire respecté qui se contente de faire son travail. Je tiens à dire que je crois ce qu'il nous a dit quand il a prononcé les paroles suivantes:

      ...il serait injuste pour les commettants du ministre d'étendre aux sociétés d'État les règles qui s'appliquent à des tribunaux quasi judiciaires et qui limitent la capacité d'un ministre à représenter ses commettants.

Autrement dit, voulons-nous désavantager les électeurs du ministre de la Défense nationale, de la ministre de la Justice ou du premier ministre parce qu'ils ont élu des gens qui sont qualifiés et honorés de servir au sein du Cabinet? Je ne le crois pas. Est-ce que l'opposition croit vraiment que les électeurs de Saint-Maurice ont moins droit au service de leur député que les électeurs d'un autre député?

L'Auberge Grand-Mère a reçu un prêt de la BDC, de la caisse populaire et du Fonds de solidarité. La BDC n'était pas le seul organisme à considérer que l'Auberge Grand-Mère représentait un investissement valable.

Le premier ministre a-t-il influé sur ces autres organismes? Y avait-il là quelque chose de répréhensible? Bien sûr que non. Laisser entendre le contraire serait ridicule. Le premier ministre a-t-il posé un geste répréhensible? Nous pouvons le demander aux personnes pour lesquelles l'agrandissement de l'hôtel a créé quelque 20 nouveaux emplois. Nous pouvons le demander aux gens venant d'une région où le chômage est relativement élevé et bénéficiant d'une source d'emploi aujourd'hui parce que l'hôtel a pu demeurer en affaires.

Le premier ministre a-t-il posé un geste répréhensible? Nous pouvons le demander à la Gendarmerie royale du Canada, qui a fait enquête dans cette affaire à la demande du chef du Parti progressiste-conservateur.

 

. 1655 + -

La GRC a constaté que rien ne justifiait la tenue d'une enquête criminelle. Par conséquent, pourquoi devrions-nous tenir une enquête? Les enquêtes judiciaires ne devraient pas être déclenchées pour satisfaire aux intérêts politiques de l'opposition. Il n'y avait pas un soupçon de preuve d'activité criminelle. Il n'y en avait pas, et la GRC nous l'a dit.

Quel serait le motif d'une telle enquête? L'opposition a demandé au conseiller en éthique de se prononcer sur la question et elle n'a pas aimé sa réponse. Elle s'est adressée à la GRC qui n'a pas trouvé de raison de tenir une enquête, mais ce n'était pas ce que l'opposition voulait entendre non plus.

Le premier ministre a été soumis à un examen et à des questions inimaginables et a pris la décision sans précédent de déposer à la Chambre les documents personnels demandés par l'opposition. Celle-ci est toujours insatisfaite. L'opposition veut que nous dépensions des milliers, voire même des millions de dollars venant des goussets des contribuables afin qu'il lui soit peut-être possible de trouver un élément sur lequel se fonder pour attaquer le premier ministre. Il n'y a rien, absolument rien à trouver. L'opposition ne serait toujours pas satisfaite.

Le gouvernement n'a pas été élu pour consacrer inutilement du temps et de l'argent à ce genre d'entreprise ridicule. Le gouvernement et tous les députés ont été élus pour consacrer temps, énergie et ressources aux questions qui préoccupent les Canadiens: environnement, soins de santé, commerce international et bien-être du secteur agricole. Les Canadiens préfèrent que le temps et leur argent soient consacrés à ce genre d'enquête publique.

Nous sommes prêts à vaguer aux affaires du Canada dès que l'opposition en aura terminé avec cette affaire et décidera de s'occuper des préoccupations des Canadiens. J'exhorte tous les députés à voter contre la motion.

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, chaque organisme professionnel que je connais au Canada rédige son propre code de déontologie. Les avocats, les médecins, les enseignants, ainsi que chaque commission d'un gouvernement local où j'ai siégé, ont tous leur propre code de conduite. Ils possèdent un document évolutif. Nous à la Chambre ne possédons pas de document évolutif indiquant ce qui constitue notre code de déontologie.

Le député qui vient de parler n'est-il pas d'avis que la Chambre, le palier supérieur de gouvernement au Canada, devrait posséder un document évolutif décrivant son code de conduite? Ne devrions-nous pas participer à l'élaboration d'un tel code pour montrer aux Canadiens que les deux côtés de la Chambre adhèrent à une même politique, contrairement à ce qui se passe maintenant? En notre qualité de groupe parlementaire, ne devrions-nous pas choisir le conseiller en éthique comme on choisit le Président?

M. Gar Knutson: Monsieur le Président, le député demande si nous avons besoin d'un code de conduite. Je comprends cela et il est certes possible de soutenir qu'il nous faut un tel code.

Le député ne siégeait pas à la Chambre entre 1993 et 1997, mais il existait alors un comité qui a étudié la question d'un code de conduite commun pour les députés et les sénateurs. Il a examiné certains points, comme le fait d'accepter de l'argent pour les déplacements et diverses autres questions.

Nous ne parlons pas aujourd'hui d'un code de conduite pour les parlementaires. Nous parlons d'un code de conduite pour le premier ministre.

Je rappelle au député que le premier ministre, pour demeurer premier ministre, doit avoir la confiance de la Chambre. C'est lui qui, en définitive, doit veiller à ce que son gouvernement respecte des normes de conduite. Il lui appartient d'assumer cette responsabilité en sa qualité de premier ministre. Il n'est pas mon égal. Il est le premier ministre et, par conséquent, il est responsable.

S'il n'est pas à la hauteur des attentes à son égard, il peut perdre la confiance de la Chambre et cela peut entraîner certaines conséquences.

M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il subsiste de nombreuses questions qui nous empêchent de mettre un terme à cette affaire. Lorsque les gens examinent un problème et constatent que les questions qui sont posées font l'objet de demi-réponses, qu'on évite les questions ou encore que les réponses ne correspondent pas aux questions qui sont posées, ils posent d'autres questions. Les questions persisteront tant que nous n'aurons pas de réponses claires.

Par exemple, pourquoi y a-t-il un acte de vente alors qu'aucun montant ne semble avoir été versé? Cet acte de vente semble être un document sans aucune signification. Pourquoi un banquier qui a été congédié ou rétrogradé porte-t-il sa cause devant les tribunaux?

 

. 1700 + -

Pourquoi Mme Marcotte a-t-elle déclaré dans l'entrevue accordée au National Post que cet homme, qui fait figure de père, voulait avoir cette propriété pour sa retraite? Ce sont toutes des questions auxquelles les Canadiens veulent des réponses.

Mes électeurs disent que nous devrions passer à autre chose, mais il y a un problème. Nous devons obtenir les réponses, sinon nous n'aboutirons nulle part. Que pense le député de la nécessité d'obtenir des réponses claires aux questions?

M. Gar Knutson: Monsieur le Président, je suis tout à fait en désaccord avec le député. Toutes les questions ont été posées et on y a répondu.

Le député parle de l'acte de vente. Il arrive souvent que le montant de l'achat d'un produit ne soit pas transféré immédiatement. Je vais au magasin tous les jours et il m'arrive d'acheter à crédit. Le crédit est une merveilleuse chose. Est-ce que j'ai en main une facture lorsque je sors du magasin, même si je n'ai pas payé? Il se peut que j'aie acheté à crédit et que je n'aie pas encore remboursé MasterCard ou une autre société de crédit. C'est une pratique commerciale courante.

Il a parlé de ce directeur de banque qui avait été congédié et qui a porté sa cause devant les tribunaux. Je rappelle au député que cet homme croit avoir un grief. Il avait été nommé par M. Mulroney, et non pas par le gouvernement libéral. Cet homme croit avoir été congédié injustement et il va soulever autant de problèmes qu'il le pourra afin de projeter l'image d'une victime.

Il a peut-être été congédié pour des raisons tout à fait justifiées, je l'ignore, mais cela ne change rien à la question de fond. Les détails du congédiement de cette personne n'affectent pas le fond de la question. Dans ce cas-ci, nous avons pleinement discuté du fond de la question. On a répondu à toutes les questions. L'affaire a été discutée pendant une campagne et les Canadiens ont fait savoir qu'ils étaient satisfaits de la réponse.

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Je fais appel à votre indulgence, monsieur le Président. Je manque un peu de voix aujourd'hui. Je suppose que je ne serai pas en mesure de faire comme d'autres députés, à savoir crier d'autant plus fort que l'argumentation est faible. Je me suis donc assuré d'avoir de solides arguments. Je partagerai le temps mis à ma disposition avec le député de St. Albert.

J'ai aujourd'hui une tâche très difficile à assumer. Ce sera un miracle, en fait, si j'y arrive. Il s'agit de convaincre suffisamment de députés libéraux de voter en faveur de cette motion. Je crois que tous les députés de l'opposition ou la plupart d'entre eux voteront en faveur de la motion. Ma tâche est de convaincre suffisamment de députés libéraux que la motion vaut la peine d'être appuyée.

Si ma tâche est tellement difficile, c'est que le premier ministre, qui est visé par cette motion, a, conformément à la tradition de la Chambre, le pouvoir de dire à ces députés comment voter. J'ai une idée. Je n'en ai pas la preuve, mais je soupçonne vivement que tous les libéraux voteront aujourd'hui sur commande contre cette motion. Je sais que le vote a été reporté à demain soir. Nous verrons ce qui arrivera.

Tout d'abord, il faut voir ce que prévoit la motion modifiée, à savoir:

    Que la Chambre demande la tenue d'une enquête judiciaire indépendante pour déterminer si le premier ministre a enfreint les règles relatives aux conflits d'intérêts concernant sa participation dans le Club de golf Grand-Mère et l'Auberge Grand-Mère et que les enquêteurs aient de larges pouvoirs dont celui d'exiger la production de tous les documents et témoignages pertinents.

Je vais maintenant présenter des arguments en faveur de cette motion. Bon nombre des intervenants des deux côtés de la Chambre qui ont pris la parole aujourd'hui ont parlé de différents aspects de cette affaire qui devraient, à mon avis, être abordés devant une commission judiciaire indépendante.

Jusqu'à maintenant, les députés de ce côté-ci de la Chambre ont porté des accusations que les députés d'en face ont niées avec véhémence, ou alors ils ont posé des questions auxquelles leurs vis-à-vis ont refusé de répondre. À mon avis, cela rend plus plausible l'idée selon laquelle les députés d'en face éprouvent de la culpabilité. Lorsque quelqu'un élude une question, c'est que la réponse est incriminante. Je ne devrais peut-être pas employer un mot aussi lourd de sens, mais c'est ce qui se produit.

 

. 1705 + -

Lorsque nous posons des questions aux députés d'en face, qu'il s'agisse du ministre de l'Industrie ou du premier ministre, ils ne répondent absolument pas aux questions. Ils parlent d'autre chose.

Cela me fait penser à quand j'étais jeune, il y a quelques décennies. Je me souviens d'une blague qui avait cours alors. Il s'agissait de la petite énigme suivante: Combien faut-il de crêpes pour couvrir le toit d'une niche? La réponse était la suivante: Vingt-quatre, car une vache n'a pas de plumes. Si vous pouvez trouver un sens à cela, monsieur le Président, je vais vous décerner une note parfaite. C'est le sens de l'humour un peu bizarre que nous avions, en Saskatchewan, lorsque nous étions jeunes.

Cependant, la Chambre peut voir l'analogie, en ce sens que la réponse n'avait absolument rien à voir avec la question. En fait, même la question n'avait pas de sens. Qui utiliserait des crêpes pour couvrir le toit d'une niche? La question et la réponse étaient toutes deux absurdes.

Les députés libéraux disent que nos questions sont absurdes et qu'ils donnent donc des réponses absurdes. Par contre, nous croyons que nos questions ont beaucoup de mérite. Donc, nous posons les questions, mais les députés d'en face les trouvent absurdes et croient qu'elles méritent des réponses absurdes. Lorsque nous entendons leurs réponses absurdes, nous disons que les députés d'en face ne font que contourner les faits.

Je lance aujourd'hui un appel à une cinquantaine de députés libéraux. Je sais que je ne les convaincrai pas tous. Ils disent qu'ils font confiance au premier ministre. Ils pensent qu'il n'a rien à se reprocher dans cette affaire. Ils en ont assez de tout ce gâchis. Ils estiment par conséquent que le temps est venu de régler cette question une fois pour toutes et, pour ce faire, une enquête indépendante s'impose.

Durant la 35e législature, j'ai fait partie du comité mixte de la Chambre des communes et du Sénat qui examiné la possibilité de produire un code d'éthique pour les parlementaires, c'est-à-dire les députés et les sénateurs. J'avais beaucoup d'expérience à ce moment-là. Même à cette époque, nous parlions déjà de la nécessité d'avoir un commissaire à l'éthique indépendant, qui, évidemment, n'a rien à voir avec le conseiller en éthique que nous avons maintenant.

D'ailleurs, pendant la campagne électorale de 1993, les libéraux promettaient de créer un poste de conseiller en éthique indépendant qui ferait rapport au Parlement, tout comme le vérificateur général fait rapport au Parlement. Au lieu de cela, nous avons un conseiller en éthique qui n'est pas indépendant.

Le secrétaire parlementaire du premier ministre a cité mes paroles lorsque j'ai dit que nous faisions confiance à Howard Wilson. Il est un homme bien. J'ai probablement dit cela. Je sais que c'est ce que je pensais alors. Je présume que le député m'a bien cité.

Même lorsque j'ai dit cela, je tenais catégoriquement à ce que le conseiller soit indépendant du premier ministre. Le premier ministre a fait preuve à maintes reprises d'un indécent niveau de loyauté envers ses ministres. J'ignore si les ministres agissent de leur propre chef ou à l'instigation du premier ministre, mais la ministre de l'Immigration, par exemple, a fait des déclarations totalement fausses pendant la campagne électorale. Elle a porté des accusations qui n'étaient tout simplement pas vraies contre des députés de notre parti. Le premier ministre lui a-t-il demandé de rendre des comptes sur ces paroles? Non.

On pourrait dire la même chose de la ministre de second rang responsable des questions féminines et de je ne sais pas quoi encore, je ne me souviens pas de tous ses titres. Elle a fait des déclarations tout à fait révoltantes contre un groupe de personnes il y a peu de temps. Le premier ministre s'est porté à sa défense.

Le premier ministre dit que ses ministres peuvent faire à peu près ce qu'ils veulent et que son travail à lui est de les défendre parce que le Parti libéral ne peut jamais commettre d'erreurs. Voilà qui amoindrit la position du conseiller en éthique. Même lorsque le conseiller en éthique dit des choses exactes, on ne le croit pas en raison de ses rapports avec le premier ministre.

 

. 1710 + -

Nombreux sont ceux qui pensent que le conseiller en éthique fait partie de l'équipe chargée de la limitation des dégâts. C'est très malheureux et cela neutralise une bonne partie des avantages que nous pourrions tirer du fait d'avoir un vrai commissaire à l'éthique indépendant, qui aurait le droit d'examiner des documents et de demander aux gens des renseignements justes. Au lieu de cela, nous avons un conseiller en éthique qui, occasionnellement, donne des entrevues aux médias, mais qui, autrement, n'a de comptes à rendre qu'au premier ministre.

Il est intéressant que le conseiller en éthique remette en question son rôle. J'ai été intrigué en lisant dans des notes rédigées à notre intention qu'il a prononcé un discours en Australie il y a un peu plus d'un an. Il est intéressant qu'il ait dit, quand on lui a parlé de son rôle, qu'essentiellement il ne disposait d'aucun statut légal et ne détenait aucun pouvoir d'enquête. Il n'a de comptes à rendre qu'au premier ministre et se considère comme le défenseur de ce dernier. Il a dit, dans son discours prononcé en Australie en février 1999:

    Le système a évolué dans un sens qui fait qu'on s'attend à ce que ce soit moi qui assume cette défense. J'ai dû le faire pour expliquer les intérêts du premier ministre dans un terrain de golf.

Il dit simplement qu'en raison de sa relation avec le premier ministre, c'est ce à quoi on s'attend de lui.

J'en appelle seulement an bon sens des députés libéraux. Nous n'avons pas un commissaire à l'éthique indépendant. Nous avons un conseiller en éthique, et il semble bien que les avis soient partagés en parts égales, même au sein des médias. Le Globe and Mail dit une chose, le Star de Toronto renchérit, puis le National Post dit le contraire. Nous voici en train de nous parler de part et d'autre.

Il est temps que l'on ait une enquête judiciaire indépendante, telle que proposée dans la motion, qui pourra obliger des témoins à comparaître et ordonner la production de documents, et déposer un rapport qui sera crédible parce qu'elle sera vraiment indépendante.

M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.): Monsieur le Président, je vais reprendre, à l'intention du député d'en face, les paroles prononcées par son chef à l'ouverture de ce débat pour justifier la tenue d'une enquête. Il avait alors dit que certains des disciples du premier ministre avaient déclaré que le premier ministre était incapable d'une telle chose, qu'il serait impossible qu'il fasse autre chose que de dévoiler tous les faits, en toute honnêteté. «Il est important de noter que nous parlons d'un premier ministre qui, dans le cadre d'un vote sur le conseiller en éthique, a ordonné à ses députés de voter à l'encontre de leurs propres paroles. Nous parlons d'un premier ministre qui leur a ordonné de manquer à leur parole. Serait-il capable de se contredire dans ce dossier? Absolument.»

Personne ne m'a demandé de manquer à ma parole. Quand je parle à la Chambre, je le fais en mon âme et conscience. En contestant l'honnêteté du premier ministre, le chef de l'opposition conteste l'honnêteté de tous les députés de la Chambre. Voilà de quoi retourne ce débat. C'est l'histoire d'un chef qui a manqué à son propre huitième commandement, non pas en racontant des mensonges—nous n'avons jamais dit qu'il mentait—mais en salissant la réputation d'une autre personne. C'est précisément ce qui a été dit ici.

Il est difficile de ne pas s'emporter, mais la majorité des députés de ce côté-ci de la Chambre, et même dans toute la Chambre, font ce que leur dicte leur conscience. Ceux qui s'attaquent au premier dirigeant de ce pays et qui mettent en doute son honnêteté en prétendant qu'il a forcé des députés à manquer à leur parole, sont tout simplement dans l'erreur.

M. Ken Epp: Monsieur le Président, si nous pouvions en discuter entre nous, je me contenterais de mettre le député au défi. À l'occasion des élections de 1993, il a fait campagne en faveur de la nomination d'un commissaire à l'éthique indépendant. Le vote auquel il fait référence...

M. John Bryden: Non, ce n'est pas le cas. Lisez mon discours.

M. Ken Epp: Je me laisse emporter par le chahut du député et je ne devrais pas. C'est précisément ce que je compte faire. Le député a fait campagne là-dessus. Nous avons présenté une motion reprenant mot pour mot cette promesse électorale et il a voté contre. Voici ma question: pourquoi a-t-il voté contre?

 

. 1715 + -

M. John Williams: Monsieur le Président, nous avons beaucoup entendu parler de l'efficacité de la Chambre et de la nécessité de faire des efforts. Je sais que nous devons ajourner nos travaux pendant un quart d'heure. Je demande donc le consentement unanime pour poursuivre le débat jusqu'à 17 h 30, soit l'heure à laquelle commence l'étude des initiatives parlementaires.

Le vice-président: La Chambre accorde-t-elle son consentement unanime au député de St. Albert?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Comme il est 17 h 15, conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, toutes les motions relatives aux crédits sont proposées d'office et le vote par appel nominal est demandé et reporté au mercredi 4 avril 2001, à la fin de la période prévue pour les initiatives ministérielles.  

[Français]

M. Jacques Saada: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je suggère que nous considérions qu'il est effectivement 17 h 30, de façon à ce que nous puissions passer directement à l'étude du projet de loi de mon collègue du Bloc québécois.

[Traduction]

M. Ken Epp: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement au sujet de la motion portant sur l'interruption de la période consacrée à l'étude des initiatives ministérielles. Le vote ayant déjà été reporté, n'aurions-nous pas dû poursuivre notre débat jusqu'à 17 h 30, puisque nous savions que cette motion ne ferait pas l'objet d'un vote?

Le vice-président: La question du député d'Elk Island est très importante et très appropriée. Si le vote avait été tenu aujourd'hui, le débat se serait clos à 17 h 15. Le vote ayant été reporté, la période réservée à l'étude des initiatives ministérielles se termine quand même à 17 h 15, sans prolongation de 15 minutes.

Je reviens au whip adjoint du gouvernement qui demande le consentement pour que la Chambre fasse comme s'il était 17 h 30, de manière à ce que nous passions immédiatement à l'étude des initiatives parlementaires.

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

SUSPENSION DE LA SÉANCE

Le vice-président: La séance est suspendue jusqu'à 17 h 30.

(La séance est suspendue à 17 h 17.)

 

. 1730 + -

[Français]

REPRISE DE LA SÉANCE

La séance reprend à 17 h 30.

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Comme il est 17 h 30, la Chambre abordera maintenant l'étude des affaires émanant des députés, selon l'ordre indiqué au Feuilleton d'aujourd'hui.



INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Français]

LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ) propose: Que le projet de loi C-222, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (déduction des dépenses engagées par un mécanicien pour la fourniture d'outils nécessaires à son emploi), soit maintenant lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

—Monsieur le Président, dès le départ, je désire remercier mon collègue, le député de Sherbrooke, qui m'appuie dans ce projet de loi. J'aimerais dire, au nom des citoyens et citoyennes de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans que j'ai l'honneur de représenter à la Chambre, qu'il me fait énormément plaisir d'intervenir sur ce projet de loi.

Pour bien situer les collègues présents et les personnes qui nous écoutent, il s'agit d'un projet de loi qui émane d'un député, mais avec la particularité qu'il fera l'objet d'un vote, au terme de trois heures de débat en deuxième lecture.

J'aimerais également profiter de l'occasion pour remercier les collègues membres du Sous-comité des affaires émanant des députés d'en être venus à mes arguments à l'effet que ce projet de loi est très important et qu'il se devait de faire l'objet d'un vote pour avoir une orientation claire de ce Parlement.

Je veux les remercier, parce que le Sous-comité des affaires émanant des députés, par définition, est un sous-comité non partisan. La plus belle preuve, c'est que le gouvernement est représenté par deux personnes et les quatre partis de l'opposition y sont également représentés. Donc, les décisions qui sont prises au Sous-comité des affaires émanant des députés sont avant tout des décisions de type consensuel.

C'est la deuxième fois que je dépose un projet de loi à ce sujet. On se rappellera qu'avant les élections, j'avais déposé le projet de loi C-205, mais j'aurai l'occasion d'y revenir.

Ce projet de loi vise à faire en sorte que les mécaniciens puissent déduire le coût d'achat des outils nécessaires à leur travail. Au cours des 15 dernières années, des députés de presque tous les partis ont déposé à la Chambre des communes des projets de loi d'initiative parlementaire visant à accorder cette déduction fiscale au titre d'outils achetés par des mécaniciens.

En fait, au cours de la dernière législature, j'ai déposé un projet de loi identique à celui-ci, le projet de loi C-205, qui a non seulement été mis aux voix, donc, il avait été jugé votable, mais qui avait reçu une majorité parlementaire en termes de votes, puisque 213 collègues de cette Chambre avaient voté en faveur et 11 collègues s'y étaient opposés.

Je vois le secrétaire parlementaire du ministre des Finances et député de Etobicoke-Nord qui avait parlé contre mon projet de loi en deuxième lecture. Mais on voit que les collègues députés ont été capables de s'élever au-dessus de la partisanerie et que les députés de tous les partis ont été capables de faire fi au mot d'ordre qui avait été donné par le ministre des Finances.

Je crois que ce vote sur le projet de loi C-205, où 213 députés ont voté en faveur et 11 députés ont voté contre, constitue une large reconnaissance des difficultés économiques des jeunes mécaniciens et un effort concerté pour que le gouvernement leur offre une modeste forme d'allégement fiscal.

Cependant, comme ce projet de loi est mort au Feuilleton, suite à l'appel aux urnes du 27 novembre dernier, me voilà à nouveau en train d'en faire la promotion.

Les dispositions de ce projet de loi jouissent d'un appui si large que pendant la dernière législature, même le Comité permanent des finances, dominé par le Parti libéral, a recommandé, dans son rapport prébudgétaire, d'accorder cet allégement fiscal aux mécaniciens de l'industrie de l'automobile au Canada et au Québec.

Cependant, l'appui dont ce projet de loi bénéficie n'est qu'un aspect de l'importance des questions qu'il met en jeu. Il existe plusieurs autres questions qui méritent à nouveau d'être discutées et portées à l'attention du public dans le cadre d'un débat à la Chambre des communes.

 

. 1735 + -

On pourrait citer les difficultés de l'industrie de l'automobile à attirer des jeunes dans ses rangs, les pressions auxquelles font face les mécaniciens, dont la plupart gagne un salaire très modeste lorsqu'ils se doivent d'acheter les meilleurs outils à un prix raisonnable.

On pourrait parler aussi du manque d'équité d'un régime fiscal qui permet à d'autres professions de déduire le coût de leurs outils ou de leurs équipements et qui l'interdit à d'autres.

Plus le temps passe, plus ce projet de loi s'impose. Ce qu'il en coûtait à un mécanicien pour acheter ses outils, lorsque la Chambre a été saisie pour la première fois de cette question il y a 15 ans, a augmenté considérablement.

On sait qu'il y a 10 ans, les voitures étaient beaucoup moins complexes. Les composantes réglées par ordinateur, qui sont aujourd'hui devenues la norme dans la plupart des voitures, font tout autant partie intégrante de la nouvelle économie que les technologies de l'Internet les plus récentes et les services fournis par les nouvelles sociétés de haute technologie qui installent leur siège social à Montréal ou à Ottawa.

Avec ce projet de loi, je fais appel au bon sens de mes collègues des deux côtés de la Chambre puisqu'il s'agit, avant tout, d'accorder une reconnaissance et une aide aux jeunes, ces jeunes qui choisissent cette profession.

Dans la société, il ne peut pas y avoir que des cols blancs. Il ne peut pas y avoir uniquement des gens qui travaillent avec des ordinateurs ou dans des entreprises où existent des conditions de travail exemplaires. On ne peut pas avoir uniquement des cols blancs et on ne peut pas avoir, dans notre société, uniquement des professionnels.

Certains jeunes acceptent de se salir les mains. Parce qu'ils aiment la mécanique automobile, ces jeunes acceptent d'aller en dessous des autos. En raison du climat que l'on a ici au Canada, il arrive souvent que les autos dégoulinent, que des huiles ou des liquides de réfrigération dégoulinent littéralement dans la face de ces jeunes. Je vous fais grâce des mécaniciens d'expérience, ces hommes qui ont passé 20, 25, 30 ou 35 ans à exercer ce métier.

Malheureusement, étant donné que c'est un emploi traditionnel qui est souvent réservé aux hommes, nous sommes obligés de dire que ce sont des hommes qui exercent ce métier puisque les femmes, dans le domaine de la mécanique automobile, sont très peu nombreuses. Il y en a quelques-unes mais, malheureusement, elles sont trop rares.

Les mécaniciens sont des personnes qui, rendues à l'âge de 50 ou 55 ans, ont une qualité de vie très amoindrie. Ce sont des gens qui ont forcé très fort sur des pièces de moteur, qui ont fréquemment le dos, comme on dit par chez nous, littéralement fini, des disques écrasés, qui ont forcé sur des pièces de transmission, sur des pièces de moteur, sur des pneus. Ce sont des gens qui doivent être reconnus pour la valeur de leur travail.

Il n'est donc pas rare qu'un jeune mécanicien, qui vient de terminer ses études, doive payer entre 3 000 $ et 4 000 $ pour un coffre d'outils des plus élémentaires, un coffre d'outils de base. Pour être embauché dans un poste de distribution d'essence ou chez un concessionnaire automobile, un apprenti se doit d'avoir son coffre d'outils.

La première chose qu'un directeur du personnel, un propriétaire ou une gérante de service va lui demander, c'est: «Est-ce que tu as ton coffre d'outils?» Pour être embauché, il n'a pas le choix, il doit encourir des dépenses de 3 000 $ à 4 000 $ pour acheter son coffre d'outils, sans oublier les dépenses qu'il a souvent encourues pour payer ses études.

Certains jeunes qui étudient en mécanique automobile peuvent avoir des parents à l'aise, des parents qui ont assumé tous les frais des études, mais un certain nombre de jeunes terminent leurs études lourdement hypothéqués, lourdement endettés au terme d'un cours secondaire professionnel long comme celui que nous avons au Québec.

Quant au spécialiste, ce dernier devra débourser près de 40 000 $, et je peux vous dire que ce n'est pas un chiffre exagéré.

Lorsque les gens de mon bureau et moi avons préparé le discours—j'en profite pour remercier mon stagiaire parlementaire, Jonathan Weier, qui a travaillé très fort à la recherche dans le cadre du présent discours—, je tiens à dire que, lorsque j'ai vu le chiffre de 40 000 $, j'ai trouvé cela légèrement élevé.

Cependant, j'ai vérifié ce chiffre. Je suis allé dans des stations-service et chez des concessionnaires automobiles et j'ai demandé à voir le coffre d'outils d'un mécanicien expérimenté. On a ouvert tous les tiroirs.

 

. 1740 + -

Quand je parle de 40 000 $, ne pensez pas, monsieur le Président, que c'est un chiffre exagéré—je ne veux pas vous accuser de faire de l'exagération, parce que je suis persuadé que, comme député de Stormont—Dundas—Charlottenburgh, vous avez eu l'occasion, vous aussi, d'aller chez des concessionnaires automobiles et de vous convaincre de la justesse de mes propos—parce qu'un coffre d'outils, pour un spécialiste, peut facilement aller jusqu'à 40 000 $.

Les automobiles, maintenant, en sont rendues avec des systèmes de propulsion hybrides. Selon toute probabilité, dans le futur, plus les voitures seront dotées de composantes informatisées ou encore de systèmes de traction hybrides, plus les pièces et les coffres d'outils des mécaniciens pour réparer ces systèmes hybrides devront être ajustés en conséquence. Rappelons que l'an passé, la compagnie Toyota nous avait fait essayer la Prius qui était en partie électrique, en partie à essence. Donc, ce seront encore des dépenses additionnelles.

La seule différence entre un mécanicien nouvellement embauché et un jeune travailleur de chez Bombardier ou d'ailleurs, c'est que l'employé de Bombardier gagne sans doute passablement plus d'argent et que tous les outils dont il a besoin lui sont fournis par son employeur.

Chose intéressante, dans le discours du Trône du 30 janvier le gouvernement actuel s'est engagé à «soutenir les programmes d'apprentissage, à appuyer la nouvelle économie et à encourager l'éducation permanente chez les travailleurs canadiens.» Cependant, il pourrait y avoir, de la part du gouvernement, une manifestation concrète du respect général à l'égard des travailleurs des secteurs traditionnels. L'éducation permanente et l'apprentissage semblent s'appliquer seulement à cette nouvelle population active.

Cependant, il est injuste et imprévoyant d'ignorer ceux et celles qui jouent un rôle tout aussi important dans l'économie du Québec et du Canada au XXIe siècle, même s'ils occupent des emplois dans un secteur plus traditionnel.

Dans une société beaucoup plus égalitaire, beaucoup plus juste, on devra reconnaître que nous avons besoin de toutes les professions. Pour gagner mes études, j'ai travailler à l'entretien ménager à l'Hôpital de Chicoutimi. C'est vrai que j'étais étudiant, mais j'ai été à même de comprendre que dans un hôpital, il y a des médecins et des chirurgiens qui opèrent, mais s'il n'y a pas de balayeur ou de «moppologiste», comme on disait à l'époque à Chicoutimi, pour nettoyer la salle d'urgence et la salle d'opération, aucun chirurgien, fut-il le plus grand, ne pourra opérer s'il ne le fait pas dans des conditions minimales de salubrité.

Nous nous devons, comme parlementaires, de reconnaître l'apport de certaines catégories de citoyens dans des emplois plutôt traditionnels. C'est vrai que nous devons être ouverts à la nouvelle économie et que nous devons faire place aux nouveaux secteurs d'emplois—je n'essaie pas de dire que nous allons devoir revenir aux charrettes à boeufs, ce n'est pas ce que j'essaie de dire—mais nous devrons reconnaître qu'il y a des travailleurs qui se doivent d'être aidés, même s'ils oeuvrent dans des secteurs plus traditionnels.

Les coûts élevés associés au travail des mécaniciens vont continuer de faire pression sur l'industrie de l'automobile et rendre la vie particulièrement difficile aux jeunes professionnels.

Dans une publication de juin 1999, le Conseil du service d'entretien et de réparation automobile du Canada déclare que: «Le plus grand défi que devra relever l'industrie à la fin du XXe siècle sera d'attirer des jeunes dans ses rangs.» C'est là une des questions les plus importantes qui se posent dans ce dossier, à savoir la grave pénurie de jeunes désireux d'entrer dans la profession, pénurie qui ne semble pas vouloir diminuer de sitôt.

Parmi les facteurs qui influent directement sur l'attrait qu'exerce cette industrie, il y a le coût des outils pour les jeunes apprentis et les mécaniciens.

C'est ce que je disais tout à l'heure. Un jeune qui sort de l'école secondaire à 21 ou 22 ans et qui va travailler comme apprenti doit investir plusieurs milliers de dollars pour son travail. Après avoir remboursé ces milliers de dollars de frais d'études, il va gagner en moyenne 23 000 $—c'est environ ce que gagne un apprenti au Canada—tandis qu'un mécanicien avec une certaine expérience gagne 29 000 $. Je ne pense pas que nous parlions ici de travailleurs qui gagnent 50 000 $ ou 60 000 $.

 

. 1745 + -

Avant d'être élu député, j'étais directeur du personnel dans l'industrie des pâtes et papiers. Si on connaît l'échelle des salaires qui sont payés dans l'industrie des pâtes et papiers—je ne veux pas dire que les travailleurs du papier ne travaillent pas fort, ils font un bon travail consciencieux, de qualité,—on est en mesure de dire qu'on parle de catégories de citoyens, de travailleurs qui ne sont pas nécessairement en haut de l'échelle des salaires, avec des apprentis qui gagnent 23 000 $.

La plupart des professionnels au Canada se font fournir les outils dont ils ont besoin dans l'exercice de leurs fonctions, mais pas les mécaniciens. Pour une raison ou pour une autre, l'industrie de l'automobile, les stations-service, les garages et les autres entreprises qui emploient des mécaniciens ont décidé que l'une des conditions d'emploi était de posséder ses propres outils.

L'idée, c'est que les mécaniciens seront plus diligents avec leurs propres outils et pourront les entretenir et les modifier de manière à mieux accomplir le genre de travail qu'ils ont à faire, ce qui est particulièrement injuste, car il y a beaucoup d'autres professions où les travailleurs sont autorisés à déduire leurs instruments de travail de leur impôt sur le revenu.

Je sais que l'argument que le secrétaire parlementaire du ministre des Finances va me servir c'est: qu'est-ce qu'on répond aux électriciens? Qu'est-ce qu'on répond aux plombiers? Un électricien n'a pas le même coffre d'outils qu'un technicien de l'automobile.

J'aimerais que le secrétaire parlementaire, lors de son discours que nous entendrons tantôt—et j'ose espérer qu'il a changé d'avis; j'ose espérer qu'à la lumière du vote de 213 députés favorables, il a évolué dans son discours—réfléchisse à la situation des artistes, des musiciens, des opérateurs de scies à chaîne qui, eux, sont tous autorisés à déduire le coût de leurs outils.

Ce qu'on demande, ce que les techniciens de l'automobile demandent et ce que les associations des industries de l'automobile demandent aussi, c'est tout simplement une question de justice et d'équité.

Cette mesure jouit de l'appui des députés de tous les partis politiques. Cela ne concerne aucun différend qu'on pourrait avoir entre la gauche et la droite, entre les souverainistes et les fédéralistes. Je veux, par ce projet de loi—et c'est pour cela que j'ai réussi à convaincre le Sous-comité des affaires émanant des députés—, m'élever au-dessus de la ligne de parti. Il n'y en a pas de parti. Oui, je suis un député du Bloc québécois et j'ai soulevé cette question. J'ai réussi à convaincre. J'ai eu la chance de voir mon nom être pigé. J'ai réussi à convaincre mes collègues, mais cela étant dit, je ne suis que le porteur d'une idée et le porteur d'une idée d'équité et de justice.

Je veux dire, soit dit en passant, que je ne suis pas un maniaque de l'automobile. Je vous invite chez moi à venir voir mon coffre d'outils. C'est très élémentaire. J'ai de la difficulté à ajouter de l'huile dans le moteur de mon automobile. Je ne suis pas un gourou, je ne suis pas un crack de l'automobile. Il y a des gens, par le biais des visites en campagne électorale ou des visites lorsqu'on est en relâche parlementaire, qui m'ont convaincu que c'était quelque chose qui était important dans la société.

À ceux qui doutent de la possibilité d'implanter le projet de loi C-222, je rappelle que la Loi de l'impôt est modifiée régulièrement au cours d'une année afin de l'adapter aux nouvelles réalités sociétales. Quant à la capacité de surveillance des autorités afin d'empêcher l'utilisation des outils à des fins personnelles, je dirais qu'il faut faire confiance aux citoyens. Leur honnêteté et leur bonne foi n'ont pas à être mises en doute.

Malgré une certaine sympathie, le gouvernement, dans les budgets qu'il a déposés depuis le rapport du Comité permanent des finances, en 1997, n'a toujours pas posé les gestes nécessaires à la résolution du problème en créant cette déduction fiscale.

En plus du large appui dont jouit cette mesure à la Chambre des communes, j'ai reçu un grand nombre de lettres d'appui d'organisations de l'industrie, de particuliers, de syndicats et de presque tous les groupes qui s'intéressent à la question. L'Association des industries de l'automobile souligne, par exemple, la difficulté croissante à trouver des mécaniciens qualifiés dans ce secteur.

L'accroissement du nombre de propriétaires d'automobiles au Canada et au Québec augmente notre dépendance à l'égard de l'industrie de l'automobile. Nous devons nous préoccuper de ce grave problème auquel est confrontée l'industrie. En ce qui me concerne, ce projet de loi est une affaire de bon sens, de justice et de saine planification financière. De toute évidence, la majorité des députés des deux côtés de cette Chambre sont d'accord avec moi, j'en suis persuadé.

 

. 1750 + -

Je demande à tous les députés qui ont voté en faveur de mon dernier projet de loi d'en faire autant pour celui-ci. Au nom de la justice et du bon sens, je demande aux 45 nouveaux députés élus lors de l'élection générale du 27 novembre 2000 de voter en faveur de ce projet de loi.

Finalement, je demande aux onze députés libéraux qui ont voté contre un projet de loi semblable de reconsidérer leur décision.

M. Roy Cullen (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je ne sais pas si j'ai changé d'avis, mais cette initiative a reçu l'attention du gouvernement et je félicite le député pour sa ténacité avec cette mesure.

[Traduction]

Permettez-moi de parler de certaines des lacunes du projet de loi. Premièrement, ce projet de loi d'initiative parlementaire propose des changements à la Loi de l'impôt sur le revenu afin d'aider les mécaniciens à assumer les coûts associés au fait d'avoir à fournir leurs propres outils quand cela constitue une condition d'embauche.

Les changements permettraient aux mécaniciens de déduire de leur revenu le coût de l'achat, de la location, de l'assurance ou de l'entretien de leurs outils. Si le coût des outils s'élève à moins de 250 $, cette somme pourrait être déduite du revenu. Ce montant pourrait être modifié en fonction de l'inflation. Dans le cas de sommes plus importantes, une forme de déduction pour amortissement serait prévue. Cette déduction serait établie par une disposition réglementaire spéciale.

Les employeurs canadiens fournissent normalement aux travailleurs les outils et autres ressources dont ils ont besoin pour accomplir leur travail. Il demeure que les travailleurs canadiens doivent assumer certains coûts associés à leur emploi, qu'il s'agisse du coût du transport, de l'achat d'uniformes ou autres vêtements de travail, des repas ou des revues spécialisées. Tous les Canadiens qui travaillent ont de tels coûts.

Le projet de loi vise à reconnaître que les mécaniciens doivent assumer des coûts exceptionnels liés à leur travail. Le gouvernement du Canada comprend que le coût des outils peut s'avérer important, particulièrement en début de carrière.

Aujourd'hui, je vais mettre certaines de ces questions en perspective. Premièrement, je vais parler du coût des outils. Nous avons entendu beaucoup de chiffres estimatifs. Selon le député d'en face, le coût s'élève à 40 000 $. Quand nous avons débattu de ce projet de loi antérieurement, la grande différence entre les chiffres donnés par les députés m'a frappé. Selon les députés, un mécanicien peut payer 10 000 $ ou peut-être 25 000 $ ou encore 75 000 $ pour ses outils.

[Français]

C'est peut-être bien possible. Examinons plutôt les coûts normaux. Le Conseil du service et d'entretien et de réparation automobile du Canada a procédé, il y a quelques années, à un sondage auprès des techniciens et des apprentis. Il a conclu que la moitié de ces mécaniciens possédaient des outils d'une valeur d'environ 20 000 $. Mais c'est seulement une moyenne. Près du tiers des mécaniciens ont dit qu'ils possédaient des outils d'une valeur supérieure à 30 000 $, par exemple. D'une façon ou d'une autre, que le montant soit de 20 000 $ ou même supérieur, les coûts de ces outils sont évidemment assez élevés.

[Traduction]

Examinons la question d'un autre point de vue. Supposons qu'un mécanicien dépense 20 000 $ pour l'achat d'outils qu'il utilisera ensuite sur une période de 40 ans. Ces coûts ne semblent pas forcément considérables. Je ne pense pas que l'un ou l'autre de ces chiffres soit valable. Je crois qu'il faut plutôt tenir compte des coûts annuels, qui sont plus révélateurs de la réalité. Ils tiennent compte de la nécessité de remplacer et de moderniser les outils au fil du temps. Folio.

Un compagnon mécanicien qui possède déjà une trousse d'outils de base l'a probablement constituée pendant son apprentissage. Combien devra-t-il débourser pour conserver son équipement intact et à jour? Le sondage du Conseil du service d'entretien et de réparation automobiles du Canada auquel je faisais référence plus tôt fait état d'un coût annuel moyen d'environ 1 500 $.

 

. 1755 + -

Quatre mécaniciens sur dix disent qu'ils dépensent moins de 1 000 $ par année et 23 p. 100 des mécaniciens affirment dépenser plus de 2 500 $ par année. Il y a cependant deux éléments fondamentaux à prendre en compte. Les coûts ne sont pas les mêmes pour tous, et la capacité de chacun de les supporter dépend de son salaire.

[Français]

Les députés de cette Chambre savent que tous les mécaniciens ne sont pas riches. Toutefois, les mécaniciens gagnent mieux leur vie que beaucoup d'autres travailleurs. Essayons de placer leur situation dans sa juste perspective. En 1996, le salaire annuel moyen d'un technicien d'entretien d'automobiles était d'environ 38 000 $, pas 26 000 $ comme l'a mentionné le député du Bloc québécois.

La même année, le salaire moyen d'un diplômé universitaire était légèrement supérieur à 42 000 $. Les travailleurs ne possédant pas de diplôme universitaire gagnent en moyenne 26 000 $. Ce sont là des chiffres réels fondés sur le recensement de 1996.

[Traduction]

Les mécaniciens ne sont pas riches, mais ils se tirent bien d'affaire comparativement à la moyenne nationale, et aux gens de métier, comme les briqueteurs et les menuisiers, qui gagnent environ 34 000 $ par année.

Permettez-moi de revenir encore une fois au sondage du Conseil du service d'entretien et de réparation automobiles du Canada. Les sondeurs ont demandé aux membres d'indiquer leur salaire. Quelque 15 p. 100 des répondants ont déclaré faire moins de 25 000 $ par année. Il s'agissait probablement, pour la plupart, d'apprentis, mais 13 p. 100 des répondants ont déclaré faire plus de 55 000 $ par année. C'est dire que la situation peut varier beaucoup d'une personne à l'autre.

Cela m'amène à soulever un autre aspect. Lors du récent débat que nous avons tenu sur un projet de loi semblable, j'ai remarqué que tous les orateurs, sauf un, ont mis en évidence l'incidence du coût des outils sur le nombre de nouveaux apprentis mécaniciens. Je voudrais m'attarder un instant au montant que les apprentis consacrent à l'achat d'outils et à leur salaire.

[Français]

Je suppose que la première question qu'il faut nous poser est de savoir combien coûtent les outils d'un débutant. Selon le Conseil du service d'entretien et de réparation automobile du Canada, le coût peut se situer entre 3 000 $ et 4 000 $. Il s'agit bien entendu d'un coffre d'outils de base. L'apprenti se procurera d'autres outils au fur et à mesure qu'il ou elle progressera dans son programme d'apprentissage. Au cours d'une période type d'apprentissage de quatre ans, il ne serait pas rare de dépenser 15 000 $ et parfois davantage. Donc, comparons ce montant au revenu. Le revenu annuel moyen est d'environ 20 000 $.

[Traduction]

Il est très certainement difficile pour un apprenti mécanicien d'acheter pour 3 000 $ d'outils alors qu'il gagne 20 000 $ par année. Nous le comprenons. Je peux même imaginer que, parfois, ces coûts peuvent porter un jeune à y penser à deux fois avant de s'inscrire en mécanique.

[Français]

Je désire simplement appuyer mon point, en ce sens que le projet de loi ne tient pas compte de la situation différente des divers types de mécaniciens. D'une part, certains apprentis paient environ 3 000 $ par année pour leurs outils, alors qu'ils gagnent annuellement 20 000 $. Et certains mécaniciens dépensent environ 1 500 $ pour leurs outils, alors qu'ils gagnent 38 000 $ par année.

[Traduction]

À un autre niveau, nous avons différents travailleurs manuels qui ont des revenus et des dépenses en outillage variables. Est-ce que le député de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans veut aider un mécanicien qui gagne 60 000 $ par année en lui permettant de déduire 500 $ en outillage? C'est peut-être ce qu'il souhaite, mais, dans ce cas, que va-t-il répondre au plombier ou au menuisier salariés qui doivent eux aussi payer leurs outils?

 

. 1800 + -

L'idée qui sous-tend le projet de loi du député n'est pas sans valeur. Les très importantes dépenses d'emploi que doivent assumer certains mécaniciens salariés sont assurément préoccupantes. J'ajouterais que des dépenses exceptionnellement élevées ne devraient pas être une entrave à la participation à l'économie.

Toutefois, le projet de loi ne fait aucune distinction entre ceux qui peuvent raisonnablement payer leurs outils et ceux qui ont vraiment besoin d'aide. Le gouvernement entend travailler avec des représentants de l'industrie automobile pour trouver de meilleures solutions, notamment pour les apprentis. Dans sa recherche d'autres solutions, le gouvernement espère trouver le moyen de combler les lacunes du projet de loi du député. Par conséquent, je demande aux députés de réfléchir sérieusement avant d'appuyer ce projet de loi.

M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir dans le débat sur le projet de loi à l'étude. Depuis sept ans que je siège dans cette Chambre, j'ai eu l'occasion de traiter de ce sujet une bonne demi-douzaine de fois, mais je considère la question assez importante pour avoir envie d'en parler chaque fois que j'ai la chance de le faire.

Je viens d'entendre le secrétaire parlementaire du ministre des Finances faire part de ses commentaires en sa qualité de député d'Etobicoke-Nord. La dernière fois qu'il est intervenu, il y a environ deux semaines, quand nous avons parlé de mon projet de loi d'initiative parlementaire qui ressemblait beaucoup à celui auquel le député répondait, il avait une liste d'excuses bien différente. Il s'agit réellement d'excuses, des raisons les plus idiotes pour ne pas appuyer ce projet de loi que j'aie jamais entendues à la Chambre.

Ces raisons sont effectivement des plus idiotes. Il a affirmé que les mécaniciens se débrouillaient bien, que certains gagnaient 50 000 $ ou même plus par année, et qu'ils n'avaient donc pas besoin d'amortissements. Cela n'a rien à voir avec leurs besoins. Cela porte plutôt sur ce qui est juste en vertu de la Loi sur l'impôt. Cela porte sur ce qui est juste comparativement à la façon dont les autres sont traités.

Il ne s'agit pas de dire que les revenus des mécaniciens ne sont pas très élevés et que nous devons donc considérer qu'ils ont besoin qu'on leur fasse la charité et qu'on leur lance des miettes. Cela n'a rien à voir. Le député devrait le savoir. Il devrait avoir honte de lui-même pour avoir dit des choses de ce genre.

M. Roy Cullen: Je n'ai pas honte.

M. Leon Benoit: Il dit qu'il n'a pas honte, mais il le devrait pourtant. À mon avis, c'est un bien triste commentaire.

Voyons un peu de quoi il retourne. Il s'agit d'assurer une certaine équité fiscale pour les techniciens et les mécaniciens qui doivent fournir leurs propres outils dans le cadre de leur emploi.

Dans les commentaires qu'il a formulés, le secrétaire parlementaire a affirmé que ce sont les frais annuels dont nous devrions tenir compte et que le coût d'achat des outils, qui peut aller de 20 000 à 70 000 $ pour la trousse au complet, n'importe pas vraiment parce qu'on doit l'étaler sur 40 ans. Si le député connaissait quoi que ce soit dans ce domaine, il saurait que, premièrement, les outils finissent par s'user et que, deuxièmement, on les perd. Voilà pourquoi les employeurs exigent comme condition d'emploi que les mécaniciens achètent leurs propres outils. Les propriétaires d'atelier ont constaté au fil des années que des outils disparaissent lorsque les mécaniciens ne possèdent pas leurs propres outils. Peut-être que certains outils sortent de l'atelier avec les mécaniciens, bien que ce ne soit sans doute pas le problème le plus courant. Les mécaniciens ne prennent tout simplement pas autant soin des outils qui ne leur appartiennent pas.

Le problème vient de ce qu'il s'agit d'une condition d'emploi. La loi de l'impôt autorise d'autres catégories professionnelles à déduire le coût de leurs instruments de travail. Le député le sait. Nous parlons d'équité fiscale.

Par exemple, les artistes, les opérateurs de scie à chaîne et les musiciens peuvent déjà le faire. Outre cela, n'importe quel chef de petite entreprise, un exploitant agricole ou un travailleur à son compte exploitant un atelier dans une petite ville peuvent, dans cette situation, déduire tous les coûts associés à l'achat d'outils, quelle qu'en soit la valeur. N'importe quel chef d'entreprise peut le faire.

Si les gens choisissent de s'organiser de cette façon, quand ils ont leur propre atelier et effectuent dans leur atelier des travaux pour des clients, ils peuvent déduire toutes leurs dépenses. Ils devraient pouvoir le faire. Cela fait partie du coût d'exploitation d'une entreprise.

Les mécaniciens et les techniciens fonctionnent dans des conditions exceptionnelles, car les outils qu'ils doivent fournir coûtent cher. Ce n'est pas comme pour les plombiers et les charpentiers, je crois. Je dirais que le secrétaire parlementaire a raison sur un point, à savoir que tous ceux à qui il en coûte cher d'acheter leurs outils devraient être autorisés à en déduire le coût. Je soutiens cependant qu'il y a très peu de gens de métiers dans la même situation.

 

. 1805 + -

Les mécaniciens sont effectivement dans une situation très inhabituelle, car le coût de leurs outils est extrêmement élevé. Les frais annuels de 1 300 $ dont le député a parlé ne sont qu'une partie de tout cela. Comme l'outillage d'un mécanicien peut facilement valoir entre 30 000 $ et 50 000 $, ce dernier se trouve dans une situation très difficile.

J'ai un peu de difficulté lorsque j'entends le secrétaire parlementaire, le député d'Etobicoke, dire que les mécaniciens ne s'en tirent pas trop mal, qu'ils gagnent 50 000 $ par année et que, de ce fait, nous ne devrions pas les traiter sur le même pied que les gens d'affaires ou les opérateurs de scie à chaîne et certains autres groupes.

Le secrétaire parlementaire devrait peut-être réfléchir à son propre salaire. À titre de député, il gagne environ 68 000 $ par année, c'est-à-dire à peu près la même chose qu'un enseignant au maximum de l'échelle salariale en Ontario, mais il gagne aussi un supplément assez considérable parce qu'il est secrétaire parlementaire. Il a aussi une indemnité non imposable qui ne sert généralement pas à payer ce que l'on considérerait comme des dépenses d'emploi légitimes s'il travaillait dans une entreprise où il aurait un compte de dépenses. Une bonne partie de cette indemnité non imposable—et sur une période remontant certainement à beaucoup plus de cinq ans—s'ajoute tout simplement à son salaire.

Le député dit qu'un revenu de 50 000 $ est élevé et que, par conséquent, nous devrions laisser tomber cette question d'équité. Cela m'agace. Voyez qui parle: quelqu'un qui touche un salaire très élevé. Je n'ai rien contre cela.

La question n'est pas de savoir si certains mécaniciens ont un bon revenu ou non et si nous devrions leur accorder certaines concessions ici et là. C'est une question d'équité fiscale.

Le Comité des finances, qui est dominé par les députés libéraux, a dit, à diverses occasions, que c'était ce qu'il fallait faire. Dans son rapport prébudgétaire de décembre 1997 à la Chambre des communes, le Comité des finances, formé d'une majorité de députés libéraux, des collègues du secrétaire parlementaire, on lit:

    Le Comité croit que tous les employés canadiens devraient pouvoir déduire de leurs revenus les dépenses obligatoires importantes liées à leur emploi. À cet égard, des dispositions spéciales de la Loi de l'impôt sur le revenu s'appliquent déjà aux artistes, aux musiciens et aux opérateurs de scie à chaîne. En refusant le même traitement aux apprentis et aux techniciens de l'industrie automobile, non seulement on commet une injustice, mais on crée un obstacle supplémentaire à l'emploi, notamment, des jeunes intéressés par ce métier. Une correction fiscale à ce chapitre permettrait d'éliminer une barrière inhérente aux règles actuelles.

Cette citation est tirée du rapport du Comité des finances de 1997. Les collègues du député détenaient sûrement une position dominante au sein de ce comité. Et ils étaient appuyés par les députés du Parti réformiste de l'époque, qui s'appelle maintenant l'Alliance canadienne.

C'est une idée que tous les partis politiques, y compris les collègues du secrétaire parlementaire, ont appuyée durant le débat. Le secrétaire parlementaire du ministre des Finances semble bien être la seule personne à s'opposer au projet de loi. Comme le député du Bloc qui a parrainé le projet de loi l'a dit, un vote s'est tenu à la Chambre des communes tout juste avant le déclenchement des élections. À cause de ces élections, qui n'auraient pas dû avoir lieu si tôt, le projet de loi n'est jamais devenu loi. Seulement 11 personnes ont voté contre à la Chambre. La plupart des collègues du secrétaire parlementaire, y compris des ministres, ont appuyé le projet de loi.

Que faisons-nous alors? Le projet de loi ne devrait donner lieu à aucune résistance. Il jouit d'un bon appui et il est temps qu'il soit mis en application. Je suis tout à fait en faveur du projet de loi et je sais que tous mes collègues l'appuient également. Ils estiment que c'est une question d'équité fiscale.

N'est-il pas drôle que le gouvernement ne parle d'équité fiscale, n'envisage l'équité fiscale et ne la mette en oeuvre que lorsque cela signifie accroître les impôts d'un groupe de manière à ce que ce soit équitable par rapport à un autre. Ce n'est que lorsqu'il peut mettre la main sur des impôts supplémentaires qu'il parle d'équité fiscale. Ce n'est pas dans cette direction que notre pays devrait se diriger. Nous devrions envisager de réduire les impôts de manière substantielle. Malheureusement, ce n'est pas le cas.

Cela conduit à plusieurs problèmes graves. D'abord, des gens qui pourraient devenir techniciens et faire tourner notre pays en voyant à l'entretien des voitures, des camions, des avions et d'autres véhicules vont chercher du travail ailleurs. Qui va faire tourner notre pays si cette pénurie augmente? La responsabilité devrait carrément en être imputée au gouvernement, qui refuse de bouger sur cette question d'équité fiscale.

 

. 1810 + -

J'encouragerais les députés, lorsque le projet de loi sera mis aux voix après la troisième heure de débat, à l'appuyer unanimement. C'est une excellente mesure législative qui est presque identique à celle que j'ai présentée et qui a été débattue à au moins deux occasions à la Chambre.

Je suis heureux d'avoir l'occasion de parler de ce projet de loi. Je suis très déçu par le secrétaire parlementaire et par ses propos. Comme je l'ai dit, il a invoqué de nouvelles excuses. Je me ferais un plaisir de reprendre les excuses qu'il avait invoquées la dernière fois, mais allons plutôt de l'avant. Il faut appuyer le projet de loi, le renvoyer au comité et le mettre en application de manière à ce que les techniciens et les mécaniciens de notre pays soient traités de manière équitable aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[Français]

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, tout d'abord, je tiens à féliciter mon collègue de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans pour son projet de loi C-222. C'est la deuxième fois qu'il présente un tel projet de loi à la Chambre des communes.

Il est aussi intéressant de voir que c'est la deuxième fois que ce projet de loi peut faire l'objet d'un vote. Il y a une volonté politique d'apporter un changement pour accorder aux gens une déduction d'impôt pour les outils des mécaniciens.

Comme on s'en rappellera sans doute, j'avais déposé la motion M-248 et, lors du débat sur cette motion, le secrétaire parlementaire avait fait le même discours. Au lieu de venir passer du temps à la Chambre des communes, il pourrait simplement appuyer sur le bouton et cela répéterait ce qu'il a déjà dit. Il pourrait aller faire autre chose pour sa circonscription.

Le secrétaire parlementaire disait alors: «Ce n'est pas correct, parce que les gens qui reçoivent moins d'argent, qui ont des salaires de 20 000 $, peuvent payer plus pour leurs outils, parce que ce sont des apprentis. Ils recevront moins d'argent de l'impôt, du gouvernement, du ministère du Revenu. Avec 35 000 $, il dépensera peut-être seulement 1 500 $ par année, et ce n'est pas correct.»

Je me demande si le gouvernement se pose la même question pour les grandes compagnies qui font des milliards et celles qui font des petits montants ou qui perdent de l'argent. Tout le monde a droit à des déductions d'impôt dans les compagnies.

Le secrétaire parlementaire avait présenté ces arguments lors du débat sur ma motion M-248, quand j'avais demandé d'enlever la TPS sur les outils, dans tous les corps de métiers, qu'il n'y ait aucune discrimination. Aujourd'hui, il dit: «C'est de valeur, mais c'est seulement les mécaniciens.»

Il y a quelques semaines, alors que je parlais de tous les métiers, il avait le même argument. Je pense que le secrétaire parlementaire a un petit problème. Mais il faudrait que je sois un peu plus fair avec lui; ce doit être le ministre des Finances, car c'est lui qui a la caisse, qui dit au secrétaire parlementaire: «C'est cela que je veux que tu dises, alors tu vas aller me défendre ce soir, à 17 h 30, à la Chambre, pour dire qu'on n'a pas d'argent à donner aux travailleurs et aux travailleuses.»

Le représentant du gouvernement a parlé plus tôt des salaires. J'ai fait une enquête chez nous. Les mécaniciens de la mine Brunswick dépensent 2 500 $ par année en outils. Peut-être que ce n'est pas la fin du monde, mais il faut penser à un mécanicien qui s'en va le matin avec sa boîte à lunch; il va travailler dur, il est dans la graisse jusqu'au cou, il en a plein le visage, pour la production dans notre pays, pour aller arranger l'équipement, que ce soit dans une mine ou dans un garage. Quand on parle de salaire, c'est sûrement pas dans une station-service—pas seulement au Nouveau-Brunswick, mais partout dans le pays—que c'est le mieux payé. Surtout quand ces mécaniciens sont en apprentissage.

Le député qui a présenté le projet de loi demande seulement que, par respect, le gouvernement reconnaisse un peu que ces gens vont travailler toute leur vie à une production. Il demande qu'on leur accorde un petit montant. Une personne qui gagne 35 000 $ paie, je ne sais pas, environ 10 000 $ ou 12 000 $ en impôt. Ce travailleur pourrait dire: «Au moins, avec tous les impôts que je paie, accordez-moi un petit montant de 175 $.»

 

. 1815 + -

Le gouvernement dit: «On ne peut pas, parce qu'on craint de faire de la discrimination envers les autres. On ne peut pas le faire, parce qu'on sait que des mécaniciens gagnent moins que d'autres. On ne peut pas faire cela.»

Mais c'est drôle, ils n'ont jamais ce problème, comme je le disais tantôt, quand il s'agit de corporations qui font de l'argent et de celles qui n'en font pas. Pour ces dernières, ils amendent la formule et elles n'ont pas besoin de s'obstiner. Elles n'ont rien d'autre à faire.

Par contre, si un mécanicien va travailler pour une compagnie qui fournit les outils, il est chanceux, parce que cette compagnie bénéficie d'une déduction d'impôt.

Mais le mécanicien qui est obligé de payer ses propres outils, qui gagne un petit salaire, qui est allé à l'école pendant quatre ans au collègue communautaire, qui a appris son métier et qui s'est endetté de 40 000 $, on ne peut pas lui donner cela, on ne peut pas lui donner ce «break». On ne peut pas lui accorder une réduction de 175 $ ou 200 $ par année parce qu'il achète des outils. Ce n'est pas correct, parce que c'est seulement une personne ordinaire.

Comme on le disait, les bûcherons ont obtenu une déduction, et je suis content qu'ils l'aient obtenue. Par exemple, un bûcheron doit dépenser à peu près 750 $ ou 850 $ pour l'achat d'une scie mécanique. Il n'a pas travaillé tout l'hiver et quand arrive le printemps, il est obligé de l'acheter. Au moins, il obtient une petite réduction d'impôt qui lui donne un peu d'argent pour acheter la prochaine scie mécanique.

Lors de la présentation de ma motion M-248, il y a quelques semaines, j'ai dit que tous les métiers devraient obtenir une réduction de la TPS.

Le secrétaire parlementaire, qui est le même ce soir, disait à ce moment-là que ce serait trop difficile à gérer. Je lui disais que ce ne serait pas difficile si les libéraux avaient suivi leur idée de 1992. Quand ils ont présenté leur plate-forme électorale, en 1993, ils avaient dit qu'ils élimineraient la TPS. C'est facile à gérer puisqu'on l'enlève.

Mais ils ne l'ont pas fait. Alors, avec le projet de loi de notre collègue du Bloc québécois, on pourra toujours dire qu'au moins cette petite déduction d'impôt pourrait les aider.

Comme le disait le député, qu'un projet de loi émanant des députés soit présenté par un député du Bloc québécois, du NPD, de l'Alliance canadienne, du Parti libéral ou du Parti progressiste-conservateur, il s'agit de quelque chose de personnel. C'est une chose sur laquelle chaque député est capable de se prononcer.

Si les libéraux de l'autre côté de la Chambre refusent d'adopter le projet de loi C-222 prévoyant la réduction d'impôt pour les mécaniciens, cela voudra dire qu'ils disent à tous les mécaniciens de l'Ontario qui travaillent dans l'industrie de l'automobile: «On se fiche carrément de vous.»

Lors de l'élection du 27 novembre 2000, les libéraux ont dû obtenir des votes chez les mécaniciens de l'Ontario. On sait qu'il y a des députés de l'Ontario de l'autre côté de la Chambre.

Est-ce que les mécaniciens de l'Ontario savent que mon collègue du Bloc québécois a présenté un projet de loi prévoyant une réduction d'impôt pour eux, un petit 175 $? Je suis certain que certains travailleurs de l'industrie automobile ont payé des impôts pouvant aller jusqu'à 20 000 $ par année. D'autres en ont peut-être payés plus en raison du temps supplémentaire.

Il est à souhaiter que ce projet de loi sensibilisera les députés de l'Ontario ici présents. Je sais qu'ils ont de la difficulté à se tourner la tête présentement. Je ne sais pas s'ils sont gênés. D'habitude, ils sont vite sur leurs patins.

Je souhaite que les discours prononcés aujourd'hui vont les «shaker» un peu et qu'ils appuieront le projet de loi, qu'ils cesseront de se plaindre d'être des députés d'arrière-ban, qu'ils n'ont pas la chance de voter et qu'ils doivent suivre ce que le premier ministre leur dit de faire. C'est bien dommage. Les députés sont du côté du pouvoir. Ils peuvent avoir des choses, mais ils pleurent et pleurent de ne pouvoir prendre de décisions.

Ce soir, je tiens à dire aux Canadiens et Canadiennes que chacun des députés peut prendre sa propre décision au sujet de ce projet de loi émanant des députés. Ils ne peuvent se cacher derrière l'excuse que le secrétaire parlementaire est contre le projet de loi C-222, que le ministre des Finances ne veut pas faire de changements aux déductions d'impôt pour les mécaniciens. Ils ne peuvent pas se cacher. Chaque décision sera une décision individuelle.

[Traduction]

Je veux simplement m'assurer que cette décision sera une décision individuelle—et j'insiste là-dessus—lorsque viendra le temps de voter sur le projet de loi C-222, parce que c'est un projet de loi qui aura éventuellement force de loi.

 

. 1820 + -

Les députés qui se cachent et qui disent devoir suivre la position officielle du parti ont maintenant l'occasion de dire ce qu'ils pensent.

Une voix: Ils pourraient se tenir debout.

M. Yvon Godin: Ils pourraient. J'encourage les députés, dont la majorité sont de l'Ontario, où se trouvent tous ces constructeurs de voitures, à se tenir debout et à voter en faveur de la motion afin de montrer au ministre des Finances que l'on peut avoir un peu de démocratie à la Chambre des communes. Ça peut se faire, et nous pourrions en avoir la preuve avec ce projet de loi.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, je suis heureux de parler aujourd'hui du projet de loi C-222, qui pourrait corriger une injustice flagrante dans le traitement fiscal que l'on réserve aux mécaniciens canadiens.

Il y a 115 000 mécaniciens au pays, qui investissent en moyenne entre 15 000 $ et 40 000 $ chacun pour leurs outils et équipements. Le salaire moyen de ces travailleurs n'est pas aussi élevé que ce que prétendent certains députés libéraux. Il s'élève en fait, en moyenne, à 29 000 $ par année.

J'ai entendu un des députés d'en face, le secrétaire parlementaire du ministre des Finances, je crois, dire que le salaire moyen des mécaniciens est de 60 000 $, ou quelque chose du genre. Je ne sais pas quelle sorte de véhicule il conduit, mais moi je conduis une Volvo familiale vieille de 10 ans et je n'ai pas les moyens de la confier à des mécaniciens qui gagnent autant d'argent. Le secrétaire parlementaire investit manifestement beaucoup plus d'argent dans les voitures que certains des députés de l'opposition.

Le fait est qu'avec un revenu moyen de 29 000 $ et la nécessité d'investir entre 15 000 $ et 40 000 $ pour devenir un mécanicien et pour avoir les outils nécessaires, il est peu surprenant que nous ayons une pénurie très grave de mécaniciens dans tout le pays. Cela devient un véritable problème. Cela va causer bien des difficultés à long terme et nous toucher tous car nous avons besoin des services d'un mécanicien dans notre vie quotidienne.

Il est manifeste que ce projet de loi est équitable. Il est tout à fait sensé. Il offre aux mécaniciens le même traitement dont jouissent les membres des professions libérales qui, dans bien des cas, peuvent aux termes du code fiscal déduire les dépenses professionnelles nécessaires à l'exercice de leur métier ou de leur profession. C'est tout à fait insensé.

En fait, le Comité des finances de la Chambre des communes a, en 1996 et 1997, soumis cette recommandation au ministre des Finances dans son rapport sur les consultations prébudgétaires. On parviendrait ainsi dans une large mesure à améliorer l'équité du traitement fiscal accordé aux mécaniciens, dans ce cas-ci. Si nous améliorons le traitement fiscal ou l'équité de notre régime fiscal pour un groupe à l'intérieur de notre société, nous en profitons tous.

Cette proposition représente une idée, dans ce cas-ci venant d'un député, de ce que nous pouvons faire pour améliorer notre régime fiscal, pour le rendre plus équitable et plus efficace et offrir du même coup de plus grands débouchés aux Canadiens.

Je voudrais profiter de l'occasion pour aborder un sujet connexe, soit un discours prononcé par Jack Mintz, le président de l'Institut C.D. Howe. Il a déjà dirigé la rédaction d'un rapport destiné au ministre des Finances sur la réforme fiscale au Canada. Non pas à titre de parlementaire, mais à titre de particulier versé dans les questions de politique publique au Canada, il a donné récemment un discours dans lequel il a fait part d'un plan en quatre points sur la façon dont le Canada pourrait devenir un pays plus fort et plus prospère au XXIe siècle.

 

. 1825 + -

Tout comme le député a présenté son projet de loi d'initiative parlementaire, qui propose un moyen précis pour nous doter d'un régime fiscal meilleur et plus équitable, je voudrais présenter d'autres propositions, en l'occurrence, celles de Jack Mintz, président de l'Institut C.D. Howe. Il décrit son plan en quatre points.

Ce plan en quatre points ressemble à des visites répétées chez un mécanicien qui répare une automobile. Le premier point vise à récompenser le succès, et non l'échec, et à évaluer les programmes publics en fonction de leur succès. Les programmes qui connaissent du succès sont financés et continuent de l'être. Les programmes qui connaissent un échec ne sont plus financés. De toute évidence, DRHC ou quelques-uns des programmes d'aide qui relèvent de la ministre de DRHC auraient du mal à être financés si un tel examen avait lieu.

Les travailleurs du secteur public doivent être rémunérés et récompensés par des moyens pécuniaires et d'autres, en fonction de leurs succès dans la réalisation de leurs objectifs. Ces travailleurs comprennent les fonctionnaires, les enseignants, les professeurs, les travailleurs de la santé et toute personne rémunérée par l'État. Il laisse entendre qu'une concurrence s'impose dans la prestation des services publics et qu'en fait, les forces du marché doivent être mieux en mesure d'influer sur la prestation des services publics.

Dans le deuxième point de son plan, il propose également de s'attaquer à la dette publique au Canada. Nous avons une dette énorme qui a augmenté au fil des ans. La dette totale de l'État s'élève à 850 milliards de dollars. Si nous y ajoutons le passif non capitalisé des régimes de retraite publics et du régime de santé public, cela représente au total environ 2 billions de dollars. Cela ne comprend pas les autres éléments de passif éventuels. Si on ne fait rien pour régler le problème, nous devrons prélever des impôts équivalents à huit pour cent du PIB simplement pour assurer le service de ces dettes d'ici 2015.

M. Mintz propose une approche très musclée à l'égard de la dette fédérale. Pour réduire le fardeau fiscal de l'avenir, il propose qu'on s'attaque au problème, qu'on profite de la réduction de la dette fédérale et des sommes recueillies grâce à la diminution des paiements d'intérêts, qui constituent des dépenses que doivent payer les contribuables canadiens chaque année.

Si nous adoptions une approche plus musclée envers la dette publique, nous pourrions nous engager dans un cercle vertueux et profiter de cette baisse des dépenses, issue des intérêts moindres à payer sur le capital de notre dette, pour financer la diminution des impôts, dont les Canadiens profiteraient bien entendu, et générer ainsi une plus forte croissance économique.

Cela ne permettrait pas uniquement de réduire la dette en termes réels, mais également de réduire la dette exprimée en pourcentage du PIB puisque le PIB augmenterait en raison de mesures fiscales dynamiques qui stimuleraient la croissance économique.

Au Canada, les gouvernements ont la mainmise sur plus de 40 p. 100 de l'économie. C'est plus qu'en Australie, en Islande, en Irlande, en Suisse et dans d'autres pays où ce pourcentage n'est que d'environ 33 p. 100 ou moins. Aux États-Unis, c'est environ 30 p. 100. Il est évident que nous devons réduire la mainmise du rôle du gouvernement exprimée en pourcentage de notre PIB.

Il faut corriger le régime fiscal dysfonctionnel du Canada. Ce régime a besoin d'une réforme majeure. Le député a proposé une mesure précise qui rendrait le régime plus équitable envers les mécaniciens. À mon avis, il nous faut aller beaucoup plus loin, adopter une approche globale de la réforme fiscale et commencer à penser à une réforme de la politique fiscale comme moyen de stimuler la croissance économique et d'augmenter les possibilités des Canadiens.

M. Mintz est président de l'Institut C.D. Howe. Avant d'accéder à ce poste, il a écrit le rapport Mintz, commandé par le ministre des Finances, mais mis sur les tablettes par ce même ministre parce qu'il ne contenait pas de recommandations ayant un potentiel politique. M. Mintz avait beaucoup à offrir parce qu'il a eu le courage d'aborder certaines questions de compétitivité à long terme auxquelles les Canadiens seront confrontés.

 

. 1830 + -

Au sujet de la fiscalité, il est allé jusqu'à suggérer que le Canada devait réduire ses impôts dans les secteurs où ils sont élevés par rapport à ses concurrents. Cela inclut l'impôt des entreprises et l'impôt sur le capital qui privent les entreprises des capitaux dont elles auraient besoin pour atteindre une plus grande productivité et mieux tirer leur épingle du jeu dans une économie mondiale extrêmement concurrentielle.

[Français]

Le vice-président: La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est reporté au bas de la liste de priorité au Feuilleton.

SUSPENSION DE LA SÉANCE

Le vice-président: Comme il est 18 h 30, je quitte maintenant le fauteuil jusqu'à 20 heures, alors que la Chambre abordera le débat d'urgence relatif à la fièvre aphteuse.

(La séance est suspendue à 18 h 30.)

 

. 2000 + -

[Traduction]

REPRISE DE LA SÉANCE

La séance reprend à 20 heures.


DÉBAT D'URGENCE

[Traduction]

LA FIÈVRE APHTEUSE

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Conformément à l'article 52 du Règlement et à l'ordre adopté le lundi 2 avril 2001, la Chambre procédera maintenant à l'étude d'une motion d'ajournement de la Chambre, en vue de discuter d'une affaire déterminée et importante dont l'étude s'impose d'urgence, à savoir la fièvre aphteuse.

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC) propose:  

    Que la Chambre s'ajourne maintenant.

—Monsieur le Président, je vous remercie de nous offrir l'occasion de discuter ce soir à la Chambre de la question de la fièvre aphteuse. Je remercie le Président et son bureau d'avoir fait preuve de souplesse en autorisant ce débat d'urgence. C'est certes à l'honneur de la présidence et cela témoigne de votre aptitude à veiller à ce que les députés puissent s'exprimer librement à la Chambre. Nous vous en remercions.

La question soumise aujourd'hui à la Chambre est très sérieuse. Je souligne au départ que je partagerai mon temps de parole avec le député de Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest.

J'espère que tous les députés qui prendront la parole ce soir sauront accepter le fait que c'est une question non partisane. Il ne devrait pas y avoir de gesticulations, de grincements de dents et d'accusations concernant ce qui n'a pas été fait, ce qui a été accompli et ce qui devrait l'être.

J'aimerais que les députés qui prendront ce soir la parole à ce sujet essaient d'offrir des critiques quelque peu constructives, le cas échéant, et qu'ils présentent des suggestions positives sur la façon de nous attaquer à ce problème, non seulement dans les collectivités rurales, mais aussi dans les collectivités urbaines au Canada et à l'échelle internationale. Nous savons fort bien que le problème risque de venir notamment d'un pays comme la Grande-Bretagne.

Ma circonscription de Brandon—Souris est entièrement tributaire de l'agriculture. C'est un centre urbain, mais il est entouré d'une collectivité rurale qui se livre à la fois à l'élevage du porc et du bétail. Ma circonscription compte des exploitations laitières ainsi qu'un nombre assez appréciable de moutons. Tous les animaux dont je parle sont susceptibles d'être affectés par la fièvre aphteuse.

Le secteur de l'élevage pèse présentement environ 15 milliards de dollars dans l'économie canadienne. Le fait est que nous ne déplorons pas de fièvre aphteuse à l'heure actuelle au Canada. Cela en soi est tout à l'honneur du gouvernement, de l'ACIA, du service des douanes et des gens qui rentrent présentement au pays. Cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas et ne devrions pas être absolument vigilants à l'égard de ce qui se passe et de ce qui peut arriver.

La fièvre aphteuse, pour l'information des gens qui ne savent peut-être pas de quoi il s'agit, est une maladie virale extrêmement contagieuse qui s'attaque aux animaux à onglons. J'ai mentionné les animaux que cette maladie pourrait toucher, mais je ferai remarquer également qu'elle pourrait toucher des animaux sauvages comme le chevreuil, l'élan et l'orignal. Si jamais elle entrait dans la chaîne des animaux sauvages, il serait presque impossible de l'enrayer.

Mes électeurs me demandent constamment ce qu'on fait, ce qu'on peut faire et ce qu'on devrait faire pour empêcher cette terrible maladie de toucher notre économie. Le public veut savoir quelles précautions il faudrait prendre.

 

. 2005 + -

On a dit que ce débat aurait pu se tenir plus tôt, et j'ai reçu un courriel qui m'a finalement décidé à saisir la Chambre de cette question.

J'ai en effet reçu un courriel d'une de mes électrices qui fait un stage au Pays de Galles. Elle dit qu'elle ne pouvait pas trouver d'information nulle part à propos de ce qu'elle devrait faire quand elle rentrera au Canada. Elle dit qu'elle ne sait pas ce qu'elle trouvera quand elle se présentera aux douanes. Comme elle ne sait pas ce qu'elle pourrait rapporter, elle me demandait de l'aider à cet égard. Je lui ai envoyé de l'information. Cependant, un élément de son courriel m'a fait peur. On lui a dit qu'elle ne pourrait pas rapporter de souvenirs. Elle voulait savoir s'il y avait moyen de tourner cette prescription de sorte qu'elle puisse en rapporter. Cela m'a glacé le sang. Elle parlait de souvenirs.

Je lui ai dit qu'elle pouvait rapporter des souvenirs, mais pas de viande, de produits alimentaires comme le fromage, ni de plantes. La seule pensée que quelqu'un puisse demander s'il y avait moyen de contourner la règle m'a vraiment glacé le sang. Quand on y pense, un seul virus suffit à nous faire perdre toute notre industrie.

En 1952, les ravages de la fièvre aphteuse en Saskatchewan, la dernière au Canada, ont coûté un milliard de dollars. Aujourd'hui, ce montant représenterait environ 35 milliards de dollars pour notre industrie, seulement pour enrayer l'épidémie. Mieux vaut prévenir que guérir ou que tenter de limiter les dégâts après coup.

Il est importe de tenir ce débat, parce que c'est un débat de sensibilisation. Ce n'est pas l'occasion de s'en prendre au gouvernement. Des gens des médias m'ont téléphoné aujourd'hui pour savoir si j'allais accuser le gouvernement de n'avoir rien fait. Je leur ai dit que je n'en avais pas la moindre intention. À mon avis, l'Agence canadienne d'inspection des aliments fait un bon travail, mais elle peut faire davantage. Permettez-moi de parler de ce que nous pouvons faire de plus comme société, au Canada.

L'industrie agricole est partie intégrante de la solution. Je me suis entretenu avec des membres d'une entreprise céréalière l'autre jour. Ils m'ont dit que toutes leurs installations étaient fermées aux visiteurs parce qu'ils ne pouvaient pas savoir pas d'où ces gens venaient. Voilà une bonne mesure de précaution que les autres membres de l'industrie agricole devraient suivre comme mesure initiale.

Chez moi, la semaine dernière, j'ai parlé à un type qui vend des terres agricoles. Son entreprise, qui a vendu beaucoup de terres agricoles à des clients d'Écosse, d'Irlande et du Royaume-Uni, écrit maintenant à ces gens ou leur téléphone pour leur dire de ne pas venir ici. L'entreprise veut bien leur vendre des terres agricoles, mais pas maintenant. La compagnie préfère assumer les conséquences financières pendant six mois ou douze mois plutôt que de voir ces gens venir au pays et peut-être y répandre la maladie.

Les agents de voyage ont la responsabilité de dire aux gens qui partent à l'étranger quelles mesures ils doivent prendre à leur retour. Ils devraient conseiller aux gens qui se rendent d'une région rurale à une autre de reporter leur voyage. Dans le cas des personnes qui se rendent d'une région urbaine à une autre région urbaine, le risque est faible, mais ces personnes devraient néanmoins prendre certaines précautions. Elles devraient laver leurs vêtements dans une solution au vinaigre et marcher sur le tapis désinfectant installé à l'aéroport au lieu de le contourner. Ce sont les recommandations que les agents de voyage devraient faire aux voyageurs.

L'ACIA a pris beaucoup de mesures et je sais qu'elle continuera d'en prendre. J'apprécie que le ministre de l'Agriculture et le ministre de la Défense soient ici aujourd'hui pour parler des mesures de prévention prises dans leurs ministères respectifs. C'est très positif et très sage.

L'ACIA devrait faire une campagne publicitaire, en fait il est possible qu'elle en ait planifié une. Elle devrait aussi publier des avertissements en plusieurs langues, et non pas seulement en anglais et en français, car beaucoup de visiteurs en provenance de pays contaminés ne parlent aucune de ces deux langues. Il est important que ces visiteurs sachent ce que nous exigeons d'eux à leur arrivée pour éviter que notre pays ne soit contaminé par ce terrible virus de la fièvre aphteuse.

Les voyageurs eux-mêmes doivent prendre conscience de leurs responsabilités. Ils doivent faire partie de la solution, non pas du problème.

 

. 2010 + -

Comment peuvent-ils faire partie de la solution? Comme je le disais tout à l'heure, ils ne devraient pas importer des produits alimentaires et des produits laitiers. De plus, si l'on doit se rendre dans une région contaminée, il ne faut surtout pas qu'on en rapporte des matières organiques, de la tourbe, de la salive ou des taches de lait. C'est très sérieux. Toute personne qui visite des exploitations agricoles doit s'imposer une quarantaine de 14 jours avant de retourner sur sa propre exploitation.

J'ai reçu, il y a quelques semaines, un coup de fil intéressant de la part d'un agriculteur de ma circonscription. Sa femme comptait rendre visite à de la famille en Grande-Bretagne. Il lui a dit qu'il n'y voyait pas d'inconvénient, à la condition qu'au retour, elle s'abstienne de revenir à la ferme familiale avant 14 jours. Il l'a encouragée à rendre visite à sa famille, mais il lui a fait comprendre qu'il fallait demeurer particulièrement vigilant.

Nous voulons empêcher que cette maladie n'entre au Canada. Nous ne voulons pas qu'elle atteigne nos localités. Nous attendons des habitants des villes et des campagnes qu'ils fassent preuve de la même vigilance face à ce terrible fléau.

Il ne s'agit certainement pas de semer la panique. J'ai proposé des solutions et d'autres dispositions à prendre. Le ciel est loin de nous tomber sur la tête. Nous ne sonnons pas l'alarme. Nous voulons simplement sensibiliser la population à la gravité des enjeux.

M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Monsieur le Président, je tiens à vous remercier moi aussi d'avoir permis la tenue de ce débat. C'était une décision judicieuse et opportune. Je remercie également le député de Brandon—Souris, qui n'hésite pas à faire valoir la position des agriculteurs, comme il le fait souvent lorsqu'ils sont aux prises avec une crise. Je crains que cette question ne fasse bientôt l'objet d'une crise elle aussi.

Tant qu'à distribuer des remerciement libéralement—et j'utilise le terme délibérément—je tiens à remercier le ministre de l'Agriculture, ce membre du Cabinet qui est ici ce soir pour écouter le débat et y prendre part. Cela en dit long sur lui et sur son ministère.

Le Canada joue un rôle de premier plan dans ce dossier. Un grand nombre de nos scientifiques, qui relèvent du ministère, sont actuellement en Europe pour tenter de maîtriser la situation et aider d'autres pays à le faire. Il faut en féliciter le gouvernement. En tant que Canadiens, nous devrions tous faire notre part pour empêcher cette maladie très contagieuse de gagner le Canada.

Revenons quelques années en arrière, et je sais que le ministre l'appréciera. En 1988, quand je suis arrivé à la Chambre, il y avait un ministre qui s'appelait John Crosbie. Les députés et de nombreux Canadiens s'en souviennent probablement, certains avec affection, d'autres moins, mais je n'ai pas oublié la première fois où j'ai participé au caucus en tant que nouveau député. Je venais d'arriver à la Chambre, et je voulais faire du bon travail. Je pensais qu'il était formidable de faire partie du gouvernement, que ce devait être très satisfaisant du fait que c'est de ce côté que se prennent les décisions.

Je me souviens que M. Crosbie s'était levé en caucus et qu'il avait lancé un avertissement aux jeunots et à certains députés plus âgés également, déclarant qu'un missile se dirigeait vers l'industrie des pêches de l'Atlantique. D'une manière qui lui était propre, M. Crosbie avait poursuivi en expliquant ce qui se passait. Selon lui, nous vivions dans un monde utopique si nous croyions que tout allait suivre son cours normalement dans l'industrie des pêches. Il savait ce qui se passait, et nous avons vu les stocks de morue s'effondrer. Être député ministériel était très amusant.

Les députés se souviendront de ce qui s'est produit. Des milliers de personnes ont perdu leur emploi. La main-d'oeuvre a été perturbée, non seulement à Terre-Neuve, mais aussi dans l'ensemble des provinces atlantiques. Il y eut une crise.

 

. 2015 + -

Nous en avons débattu à la Chambre environ un an après que M. Crosbie ait tenu ces propos.

Comment en sommes-nous arrivés là? L'une des erreurs que nous avons commises, comme d'autres gouvernements avant nous, car je ne crois pas que nous pouvons jeter le blâme sur un gouvernement ou un parti en particulier, a été de faire abstraction de ce qui arrivait à nos stocks. Nous n'avons pas interprété les connaissances scientifiques et compris ce qui se produisait aussi bien que nous aurions pu. Dans la région de l'Atlantique, nous avons payé très cher cette erreur.

Comme l'a dit le député de Brandon—Souris, le temps est venu d'en parler afin de prévenir une crise. Je n'en connais pas plus au sujet de la fièvre aphteuse que la plupart des députés. Nous en avons entendu parler, mais nous n'avons jamais vu de près cette maladie. Comme nous le savons tous, la dernière épizootie s'est produite en 1952 au Canada. Vous n'étiez qu'un bébé, monsieur le Président. Je ne suis pas convaincu que le ministre était né à cette date, mais le député de Brandon—Souris portait certainement encore des couches. Ce fut dévastateur pour l'économie. Il en coûta un milliard de dollars à l'époque. La perte, exprimée en dollars d'aujourd'hui, serait de l'ordre de 30 à 50 milliards de dollars.

Aujourd'hui, l'industrie laitière et le secteur de l'élevage bovin à eux seuls valent 15 milliards de dollars, sans parler des industries connexes comme le transport, la livraison et la vente des produits. Le coût pour l'économie canadienne serait incommensurable. Voilà pourquoi, pour une rare fois, nous allons intervenir de façon non-partisane en renseignant la population.

Il a certaines mesures élémentaires que nous pouvons tous prendre. Si nous recevons des visiteurs de pays étrangers, nous devons leur montrer ce qu'ils doivent faire. Par exemple, si nous sommes propriétaires d'une ferme, nous devons veiller à ajouter notre propre désinfectant sur la ferme en plus des désinfectants qui ont pu être utilisés dans les aéroports. De toute évidence, il est crucial de prendre conscience du danger.

La vérité, c'est que les personnes peuvent transporter cette maladie, de sorte que celui qui soupçonne avoir pu être exposé à ce virus doit s'assurer de prendre toutes les précautions, y compris les précautions par rapport aux aliments importés, qui pourraient être contaminés. En 1952, l'épidémie a commencé à cause d'un petit morceau de saucisse qu'on a jeté au hasard et qu'un animal a mangé; il a ensuite communiqué la maladie à un troupeau de boeufs.

Si les animaux viennent en contact avec des produits contaminés comme le foin, la pâture, l'eau, de la semence ou des produits biologiques, cela peut suffire à répandre la maladie. Une fois que la propagation a commencé, et je ne veux pas être alarmiste car c'est déjà le cas en Grande-Bretagne, le virus peut se transporter très rapidement dans l'air, jusqu'à 100 kilomètres de distance.

Aujourd'hui même, 946 foyers d'infection ont déjà été identifiés au Royaume-Uni. L'éradication du virus a nécessité l'abattage préventif d'animaux sains, car c'est le seul moyen de protection connu. Cette solution crée une perspective horrible pour les personnes qui élèvent du bétail, de quelque espèce que ce soit. À l'heure actuelle au Royaume-Uni, le nombre d'animaux abattus ou destinés à l'être avoisine le million.

 

. 2020 + -

Les rapports indiquent que, jusqu'à maintenant, un peu moins de 630 000 bêtes ont été abattues. Près de 400 000 animaux attendent d'être tués. Les chiffres sont ahurissants. On peut voir à la télévision les énormes tranchées, creusées par des excavatrices, pour recevoir les bêtes abattues. Cela dépasse l'imagination. Les agriculteurs vivent un véritable cauchemar.

Beaucoup parmi eux subissent rien moins qu'une dépression. Il est terrible pour un agriculteur de penser que toute l'oeuvre de sa vie, tout son troupeau, ses bêtes qu'il aime et dont il a pris soin, puissent être réduits à néant, car une fois que le virus a commencé à se propager, il n'y a plus grand-chose à faire.

Il incombe à tous les Canadiens, qu'ils aillent à l'étranger ou qu'ils reçoivent des visiteurs chez eux, de prendre les précautions de base en collaborant avec le gouvernement du Canada afin d'aider la communauté agricole.

Encore une fois, je crois que le gouvernement du Canada a pris jusqu'à maintenant les mesures qui s'imposaient. Nous voulons cependant nous assurer qu'il continuera de le faire. C'est le but du débat actuel. Nous comptons sur les paroles d'encouragement du ministre. La Chambre peut avoir l'assurance que les députés de mon parti feront tout ce qu'ils pourront pour aider le ministre, le ministère et les Canadiens à faire face à cette horrible maladie.

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le ministre de la Défense nationale. J'aimerais tout d'abord souligner que je suis très heureux d'avoir la chance de répondre à cette motion proposée par le député de Brandon—Souris. Je le remercie de ses commentaires et je remercie également ses collègues pour les commentaires qu'ils ont formulés sur cette importante session d'information que nous tenons ici ce soir.

Je suis certain que, si tous les députés à la Chambre n'ont pas eux-mêmes des électeurs qui élèvent des animaux, tous connaissent au moins des gens dans leur circonscription qui font affaire avec des propriétaires de bétail. C'est une question très importante qui préoccupe tous les Canadiens.

Je suis heureux d'être à la Chambre ce soir pour expliquer aux Canadiens certaines des mesures de précaution qui ont été adoptées pour nous assurer que la terrible maladie de la fièvre aphteuse n'entre pas au Canada. Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour réduire le risque au maximum.

Comme les orateurs précédents l'ont dit, nous risquons beaucoup. Je ne m'étendrai pas sur l'importance de notre industrie dans le secteur des artiodactyles, mais je dirai tout de même qu'il s'agit d'une industrie considérable et qu'elle touche non seulement les producteurs de ce secteur, mais également toutes les parties afférentes de notre économie qui pourraient être touchées et qui le sont.

Le simple fait de parler d'aliments canadiens invoque de très hautes normes de sécurité alimentaire, de santé des animaux et de protection des végétaux. Nous ne pouvons tenir cette réputation pour acquise. C'est une réputation que nous devons soigner. Nous devons la protéger et nous devons la développer. Cette réputation de salubrité peut disparaître en un instant, comme en témoigne l'épidémie de fièvre aphteuse au Royaume-Uni et, dans une mesure moindre, mais tout de même importante, dans d'autres pays.

Au Canada, nous n'avons pas eu de fièvre aphteuse depuis 1952. Elle avait été très grave, mais avait été confinée au sud de la Saskatchewan. Elle a été très dure pour beaucoup de monde, financièrement et moralement. Nous ne voulons donc pas que cela se reproduise.

 

. 2025 + -

Elle a éclaté au début de février au Royaume-Uni, puis s'est propagée à d'autres pays d'Europe. Elle est présente en Argentine, en Arabie Saoudite et dans certains autres pays. Cependant, je dois souligner que, à ma connaissance, il n'y a jamais eu une époque où la fièvre aphteuse n'a pas été présente dans un pays ou un autre. Au Canada, notre système de protection nous préserve contre cette maladie depuis 1952.

Lorsqu'elle frappe, c'est une grande catastrophe non seulement pour les agriculteurs, mais aussi pour toute l'économie. On estime que les coûts, pour le Royaume-Uni, et nous savons que d'autres coûts s'ajouteront, s'élèvent déjà à 20 milliards de dollars.

La fièvre aphteuse n'a pas d'effets importants pour la santé des êtres humains, mais la viande ou les animaux, les produits infectés par le virus, ou les produits alimentaires crus ou mal cuits contenant de la viande infectée peuvent la propager.

Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour protéger nos frontières. Je vais souligner seulement certaines des choses, pas toutes les choses, que font les agents de l'Agence des douanes et du revenu ainsi que les inspecteurs de l'Agence canadienne des aliments. De nombreuses mesures d'urgence sont déjà en place et nous continuerons à les renforcer au fur et à mesure des besoins. On ne peut pas tout faire dès la première heure, mais nous renforçons le système chaque jour. Nous oeuvrons en partenariat et en coopération avec les différents ordres de gouvernement, les voyageurs, les producteurs, les fermiers et les visiteurs.

Nous avons suspendu l'importation de produits susceptibles d'être porteurs de la fière aphteuse tels que les animaux vivants, les embryons, le sperme, la viande, le fromage non pasteurisé et tout matériel pouvant transporter de la terre. Nous avons pris des mesures d'inspection supplémentaires dans les aéroports et dans les ports maritimes. Nous avons accru nos activités d'inspection dans les usines de tri du courrier international et dans les ports d'entrée des services de messagerie. Nous avons accru la surveillance des passagers et des bagages arrivant par les vols internationaux. Des agents interrogent les voyageurs. Des panneaux informent les voyageurs et les invitent à passer sur des tapis désinfectants.

Les voyageurs venant d'ailleurs que des États-Unis sont soumis à une deuxième inspection par des agents de douane. Je ferais toutefois remarquer que les voyageurs eux-mêmes ont une part de responsabilité. Comme on l'a fait remarquer, ils cherchent à s'informer. Nous informons du mieux que nous pouvons tous les gens qui arrivent au Canada. Les tapis désinfectants sont en place. Nous utilisons au maximum les chiens détecteurs de l'ACIA qui sont capables de détecter les produits alimentaires et les plantes. Nous avons accru les inspections relatives à la manutention et à l'élimination des déchets internationaux dans les aéroports.

Je sais que le ministre de la Défense nationale parlera des efforts que fait le MDN. Cette semaine une cargaison de matériel militaire en provenance du Royaume-Uni a été renvoyée dans son pays d'origine parce que le matériel n'était pas aussi propre qu'il aurait dû l'être pour être admis au Canada.

Les médias ont été invités à observer les procédures de désinfection et je les remercie de nous avoir aidés à diffuser l'information. Des articles sur cette maladie ont été publiés dans le journal de l'Association canadienne des médecins vétérinaires. La question figure sur le site Web de l'ACIA. On a publié une nouvelle brochure expliquant aux voyageurs ce qu'ils peuvent apporter au Canada. L'ACIA a émis un avis à l'intention des visiteurs et des propriétaires de bétail.

Des messages publicitaires sont en cours d'élaboration et ils seront télévisés dès qu'ils seront terminés. Seront complétés d'ici un ou deux jours des films vidéos qui seront projetés dans les avions en français, en anglais, en espagnol et en allemand.

Il y a un plan d'urgence. Des gens m'ont demandé quel est le plan d'urgence. Nous sommes membres de la banque nord-américaine de vaccins anti-aphteux et nous y ferons appel au besoin. Nous savons qu'il y a un débat en ce moment au Royaume-Uni sur la question de savoir si la vaccination s'impose.

L'ACIA a écrit à tous les membres du secteur industriel du Canada. Nous avons déjà envoyé une équipe de vétérinaires au Royaume-Uni. Une fois ces vétérinaires revenus, et quand leur quarantaine sera terminée, ils iront dans tout le Canada parler aux vétérinaires, aux éleveurs et aux Canadiens en général.

 

. 2030 + -

Nous sommes en partenariat avec le système de protection de l'infrastructure essentielle, aussi connu sous le nom de Protection civile Canada, afin de faire appel à ses centres de commandement, ses compétences et ses ressources. La Défense nationale, la GRC et les forces policières provinciales et municipales sont toutes comprises là-dedans.

Nous établissons aussi des liens avec les vétérinaires de tout le Canada. Je pourrais continuer encore et encore. Comme un dépistage précoce s'impose, c'est à cela que s'affaire le personnel des services extérieurs. Nous avons la collaboration de tout le monde au Canada, y compris des voyageurs et des représentants du secteur industriel.

Je suis heureux d'avoir pu exposer les grandes lignes de mesures qui sont prises. Je termine en disant à quel point les Canadiens, les éleveurs et moi-même sommes reconnaissants en voyant le travail fantastique qui a été accompli. Pour employer le cliché habituel, je dirai que les gens de l'Agence canadienne d'inspection des aliments et de l'Agence des douanes et du revenu ont travaillé fort avant dans la nuit pour mettre toutes ces mesures en place le plus vite possible afin de réduire le plus possible les risques.

[Français]

L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, le sujet du débat de ce soir est une question qui me touche directement en tant que député de la Chambre aussi bien qu'à titre de ministre de la Défense nationale.

[Traduction]

Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a déjà expliqué les mesures mises en place par l'Agence canadienne d'inspection des aliments pour tous ceux qui arrivent au Canada. La Défense nationale partage la responsabilité de prévenir la propagation de la fièvre aphteuse. Elle doit notamment réduire au minimum le risque que la maladie ne soit introduite par des militaires étrangers qui s'entraînent à divers endroits au Canada.

Comme la Chambre le sait, la formation des militaires étrangers est une activité importante pour les Forces canadiennes et le Canada. Nos alliés reconnaissent la valeur de l'entraînement qui se fait chez nous. Les vastes installations d'entraînement militaire du Canada et son espace aérien peu encombré sont l'idéal.

Les possibilités d'entraînement et d'exercice que nous offrons sont une importante participation de notre pays comme membre actif de l'OTAN. Elles contribuent aussi à la préparation générale de nos forces alliées, mais le Canada profite également de la présence de troupes étrangères. En effet, en ayant des entraînements communs, comme cela arrive parfois avec les forces alliées qui viennent chez nous, nous renforçons directement l'interopérabilité des Forces canadiennes, ce qui est vital pour l'efficacité de nos forces lorsqu'elles se déploient avec celles de nos alliés.

Des localités des quatre coins du Canada profitent aussi de l'activité économique suscitée par la présence de plus des 13 000 militaires étrangers qui s'entraînent au Canada chaque année. Par exemple, à Suffield, en Alberta, les installations d'entraînement des Britanniques injectent quelque 30 millions de dollars par année dans l'économie locale. Les Britanniques ont investi quelque 200 millions de dollars à Suffield et ils ont un bail sur les installations où ils s'entraînent année après année. L'OTAN fait de l'entraînement au vol à Moose Jaw, en Saskatchewan, et à Cold Lake, en Alberta, et il y a des vols à basse altitude à Goose Bay. Comme le député de Brandon—Souris le sait bien, les Allemands s'entraînaient auparavant à la base de Shilo.

Dans les circonstances actuelles, je comprends et je partage les préoccupations de bien des Canadiens quant à la possibilité de propager la fièvre aphteuse dans notre pays. C'est pourquoi les forces canadiennes travaillent en étroite collaboration avec l'Agence canadienne d'inspection des aliments et nos alliés pour voir, dans la mesure du possible, à ce que le personnel militaire européen ne propage pas la fièvre aphteuse au Canada.

Un certain nombre de mesures de précaution ont déjà été prises. Tout membre du personnel militaire de l'Union européenne et des pays de l'OTAN doit présenter une déclaration écrite attestant qu'il n'a pas visité une ferme ou une zone d'entraînement utilisée pour l'élevage de bétail ni une zone de quarantaine dans la région de l'UE de l'OTAN dans les 14 jours précédant son arrivée au Canada. À cause de la situation particulière qui existe au Royaume-Uni, cette période a été portée à 28 jours pour le personnel militaire britannique.

 

. 2035 + -

De plus, des mesures de décontamination préventive ont été mises en oeuvre par nos alliés, particulièrement le Royaume-Uni, avant l'arrivée du personnel au Canada. Cela veut dire que tous les vêtements ont été lavés avant le départ, que tous les articles personnels ont été nettoyés et que toutes les chaussures ont été emballées séparément dans des sacs scellés. En arrivant au Canada, le personnel militaire étranger doit marcher sur un tapis désinfectant, et toutes les chaussures transportées dans les sacs sont également désinfectées. C'est un processus très minutieux.

[Français]

Nous sommes aussi à l'écoute des inquiétudes des communautés qui se situent à proximité des zones d'entraînement.

[Traduction]

En raison du volume et du type d'activité militaire étrangère qui s'y déroule ainsi que de la proximité de grands nombres d'animaux d'élevage, certaines régions du Canada sont certainement plus exposées que d'autres au risque de transmission de la maladie. Nous comprenons ces inquiétudes et nous sommes conscients de la responsabilité qui nous incombe afin de veiller à ce que toutes les mesures soient prises pour empêcher la propagation de la maladie au Canada.

Permettez-moi de réitérer que nous prenons cette question très au sérieux. Vigilance et comportement proactif sont les mots d'ordre.

Les Forces canadiennes ont aussi pris des précautions à l'égard de leur personnel qui arrive par avion dans nos bases militaires aériennes, en provenance du Royaume-Uni ou après avoir transité par là. Dès qu'ils descendent de l'appareil des Forces armées canadiennes, les passagers doivent nettoyer et désinfecter à fond leurs chaussures. Les Forces armées retardent aussi le retour au Canada de tout véhicule militaire qui a été utilisé au Royaume-Uni ou dans toute autre région touchée par la maladie. Cette mesure sera en vigueur jusqu'à ce que l'épizootie ait été stabilisée.

En résumé, de concert avec nos collègues de l'Agence canadienne d'inspection des aliments qui travaillent en étroite coopération avec nous, nous prenons toutes les mesures possibles afin de gérer ce risque et d'empêcher la propagation de la maladie au Canada. Comme nous pouvions nous y attendre, nos alliés européens se montrent très coopératifs. Ils comprennent certainement nos inquiétudes dans ce dossier et nous travaillons en étroite collaboration avec eux.

En conclusion, nous croyons que les mesures prises par le gouvernement, y compris le ministère de la Défense nationale, et par nos alliés, suffisent à éviter le risque de propagation de la maladie au Canada. Je puis donner aux Canadiens l'assurance que nous continuerons de suivre la situation de très près et de prendre tous les mesures qui pourraient s'avérer justifiées.

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux d'être ici ce soir pour débattre l'épizootie de fièvre aphteuse qui frappe la Grande-Bretagne. Comme il a déjà été dit, le premier cas de fièvre aphteuse a été signalé le 20 février. Environ 40 jours plus tard, la fièvre s'était répandue en Irlande et dans les pays limitrophes.

Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Yorkton—Melville.

L'Alliance canadienne appuie pleinement le ministre et le gouvernement dans cette affaire. Il importe pour l'instant de prévenir l'entrée du virus au Canada. En outre, nous appuyons sans réserve l'Agence canadienne d'inspection des aliments et le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Toutefois, en raison de la gravité de la question, il faut maximiser les efforts déployés par ces organismes. Je ne doute pas que des suggestions seront faites à cet égard ce soir.

Nous avons qualifié ce débat d'urgent ce soir, mais c'est le Règlement de la Chambre qui le veut ainsi. La situation n'a rien d'urgente pour le moment et nous ne voulons pas que le public croie qu'une catastrophe est arrivée. Il n'y a pas d'épizootie de fièvre aphteuse au Canada.

La Canadian Cattlemen's Association a fait savoir que le risque était minime si les précautions qui s'imposent sont prises. Elle a déclaré:

    La Canadian Cattlemen's Association (CAA) rappelle aux éleveurs que le risque d'introduction de la fièvre aphteuse au Canada est minime si on prend les précautions voulues.

 

. 2040 + -

Depuis une semaine ou deux, je me suis employé, au nom de l'Alliance canadienne, à faire en sorte que le Comité permanent de l'agriculture, le ministre et les divers ministères maximisent leurs efforts dans ce sens.

On a entendu quelques petits cris d'alarme. Par exemple, le vérificateur général a indiqué que les services vétérinaires de l'Agence canadienne d'inspection des aliments manquent de personnel et que la préparation de la prochaine génération d'inspecteurs des animaux laisse à désirer.

C'est là une indication que nous devons nous assurer de faire le maximum d'efforts. Le Dr McLeod, qui est allé en Angleterre, estime que, comme le Canada manque de vétérinaires et de personnel de formation, il faut revoir nos plans d'urgence et nous assurer de disposer du personnel dûment formé et des ressources nécessaires. C'est ce que nous devons faire.

Ce que je voulais voir ce soir et ce que j'ai tenté d'amorcer au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire, c'est que l'on soumette au comité le plan proposé par l'Agence canadienne d'inspection des aliments, afin que les députés puissent en faire une analyse.

Je souligne que je suis moi-même éleveur. Les députés élus comme moi, et les exploitants de ranch, les éleveurs et les producteurs de porcs que nous représentons, ont beaucoup à offrir au ministre.

La maladie, comme on l'a souligné, peut être véhiculée par de la terre, des aliments infectés, des vêtements, des chaussures, ou même le vent. Je sais qu'en 1952, c'est un bout de saucisse contaminé qui a causé l'épizootie en Saskatchewan.

Une autre statistique inhabituelle que j'ai apprise dans le cadre du débat, c'est que le virus peut survivre jusqu'à trois jours dans les voies respiratoires des êtres humains. Par conséquent, toute personne ayant été en contact avec un animal malade devrait éviter de s'approcher d'autres ruminants pendant au moins trois jours.

Je suppose qu'il est presque impossible de mesurer ce qu'il en coûterait de ne pas empêcher la maladie d'arriver au Canada. Selon les estimations actuelles, il n'est pas déraisonnable de croire que l'industrie du bétail et l'industrie de l'exportation du boeuf, du porc et de l'agneau feraient face à des coûts directs de 20 à 30 milliards de dollars s'il y avait une épizootie. En Grande-Bretagne, selon les estimations, le tort causé à l'industrie du tourisme est environ huit fois plus élevé que dans le cas de l'industrie du bétail. Ce préjudice va se répercuter pendant de nombreuses années.

Que devrait faire le gouvernement? Le ministre de la Défense et le ministre de l'Agriculture ont pris la parole dans cette enceinte. Toutefois, j'ai souligné que les efforts du gouvernement doivent être maximisés afin d'éviter que la fièvre aphteuse ne gagne le Canada. Il doit donc se préparer à mettre en oeuvre un plan de confinement et d'élimination si jamais une épizootie se déclarait au Canada.

Ce qui me rend un peu nerveux, c'est ce qu'a dit le vérificateur général et le fait que nous n'avons pas été en mesure d'examiner le plan. Ce dernier n'est peut-être pas aussi infaillible qu'il pourrait et devrait l'être. Il faut l'examiner dans l'avenir immédiat, car tant que la menace venant d'Angleterre ne se sera pas atténuée ou n'aura pas disparu, nous sommes en danger de faire face à une épizootie au Canada.

Le gouvernement devrait mieux renseigner les voyageurs. Je sais que les choses s'améliorent avec le temps, mais il faut faire le maximum dès maintenant.

 

. 2045 + -

La campagne nationale de publicité que je préconise pour que tous les Canadiens soient bien informés des risques que pose la maladie et des moyens d'empêcher qu'elle se répande est en train d'être mise en place. Je comprends que, dans les aéroports, de la documentation est remise aux voyageurs et que les inspecteurs des premières lignes interrogent plus à fond les visiteurs étrangers et les Canadiens qui reviennent d'Europe.

L'Agence canadienne d'inspection des aliments ne fait pas tout ce qu'elle devrait faire pour bien communiquer les moyens de circonscrire une épidémie. L'ACIA a préparé un manuel détaillé sur les moyens de circonscrire une épidémie, mais, à ma connaissance, puisque je suis à la fois producteur et député, cette information n'a pas été communiquée aux agriculteurs, aux collectivités rurales et aux vétérinaires.

C'est bien beau que le directeur de l'ACIA sache comment les choses sont censées se passer, mais si j'étais un agriculteur dont l'exploitation se trouve près du lieu où s'est déclarée une épidémie et que je voyais tout à coup arriver des inspecteurs gouvernementaux dans des Suburban bleues, je me demanderais pourquoi on ne m'a pas averti et indiqué quoi faire.

À mesure que nous examinerons la question au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire, qui est probablement le meilleur forum pour étudier cette question, les agriculteurs seront mieux informés de ce qui se passe, du rôle qu'ils doivent jouer et du rôle des autres intervenants.

Je crois comprendre que le ministre vient tout juste de recevoir le manuel. Comme il n'a pas encore été remis aux députés, je m'inquiète un peu de voir que les médias semblent avoir accès à l'ensemble ou à une partie des renseignements contenus dans ce document. Cette initiative impartiale à laquelle nous participons en tant que députés est, à mon avis, l'occasion pour l'Alliance canadienne et les autres partis d'opposition d'obtenir tous les renseignements pertinents sur la situation.

À mon avis, l'Agence canadienne d'inspection des aliments devrait tenir de nombreuses assemblées régionales pour expliquer aux agriculteurs et aux collectivités les effets que la maladie pourrait avoir.

Dans le temps qu'il me reste, je veux parler du niveau de financement accordé à l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Pour pouvoir prendre les mesures préventives qui s'imposent et appliquer le plan de mise en oeuvre, l'agence doit disposer des ressources nécessaires. Les millions de dollars que cet exercice coûtera ne sont rien comparativement aux milliards de dollars de pertes qu'occasionnerait cette maladie si une épidémie se déclarait.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'aimerais reprendre là où mon collègue de Selkirk—Interlake s'est arrêté.

La majorité des Canadiens souscrivent une assurance contre le feu en espérant ne jamais avoir à s'en servir. Ils se protègent et ils ont bien raison de le faire. Nous sommes d'avis que nous devons faire la même chose dans le cas qui nous occupe. Nous avons une industrie qui vaut 20 milliards de dollars, peut-être même plus, et qui doit être protégée. Quelques millions de dollars, peut-être 100 millions, consacrés à la protection de l'industrie, ce n'est pas trop pour s'assurer qu'elle est en sécurité. Cela touche notre industrie laitière, notre industrie du boeuf et du bétail et notre industrie porcine. Ce sont les industries qui sont directement touchées par l'éruption de la fièvre aphteuse.

J'ai reçu de nombreux appels de gens de ma circonscription à ce sujet. Les gens s'inquiètent de la sécurité dans nos aéroports. Ils s'inquiètent de voir des agriculteurs venir d'outre-mer pour s'établir dans notre secteur agricole. Ils veulent être certains que le gouvernement fait tout ce qu'il peut pour les protéger dans ce domaine. C'est ce que nous voulons dire quand nous parlons d'une petite assurance pour protéger l'industrie.

 

. 2050 + -

Nous devons aussi rassurer les consommateurs, leur dire qu'ils n'ont pas besoin de s'inquiéter au sujet de la qualité des aliments. Nous pensons que des mesures de protection suffisantes ont été mises en place pour que les consommateurs de ces produits n'aient pas à s'inquiéter.

Pour commencer, j'aimerais faire quelques remarques au sujet de ce que pensent les producteurs et les éleveurs de la question et du message qu'ils adressent au gouvernement.

La Canadian Cattlemen's Association a publié un communiqué. Voici ce qu'on peut y lire:

    La Canadian Cattlemen's Association rappelle aux éleveurs de bétail que le risque d'importation de la fièvre aphteuse au Canada est minime tant que l'on prend les précautions qui s'imposent. Ces précautions sont notamment de tenir à l'écart des fermes toute personne qui est allée dans un pays contaminé par la fièvre aphteuse au cours des 14 derniers jours et, si cette personne doit se rendre dans une ferme ou un ranch, de s'assurer que ses chaussures, ses vêtements et son matériel sont bien désinfectés.

    «Plusieurs pays du monde sont contaminés par la fièvre aphteuse. Nous avons réussi à préserver le Canada de cette maladie pendant près de 50 ans» a déclaré Carl Block, du comité de la santé animale de la Canadian Cattlemen's Association. «Grâce à la sensibilisation accrue à cette maladie et aux mesures de surveillance mises en place aux points d'entrée dans notre pays, il est possible que nous soyons moins à risque à présent que par le passé, lorsque qu'il était pratiquement impossible d'amener les voyageurs à prendre cette maladie au sérieux.»

    M. Block fait remarquer qu'il n'est ni pratique ni possible d'interdire la circulation des personnes à destination et en provenance de pays contaminés. «N'oublions pas que nous ne parlons pas seulement de l'Europe. La fièvre aphteuse est présente dans bien des pays, y compris en Inde, en Chine, dans des pays de l'Amérique du Sud, en Afrique et en Asie. Nous ne pouvons pas nous couper du reste du monde.»

    M. Block souligne que la plus importante mesure de précaution consiste à prendre la menace de cette maladie au sérieux et à ne pas essayer de faire entrer illégalement de la viande et d'autres produits agricoles au Canada. Les personnes appréhendées pour avoir fait entrer illégalement des produits agricoles au Canada risquent de se voir imposer sur-le-champ une amende allant jusqu'à 400 $ et de faire face à d'autres poursuites si elles ont commis des infractions plus graves. L'industrie de l'élevage du bétail approuve l'imposition d'amendes à toutes les personnes qui enfreignent la loi.

    La Canadian Cattlemen's Association se réjouit des précautions supplémentaires que prennent actuellement l'Agence canadienne d'inspection des aliments et l'Agence canadienne des douanes et du revenu pour veiller à ce que cette maladie ne soit pas introduite au Canada. La CCA préconise depuis longtemps une surveillance plus rigoureuse aux postes de douane. La CCA demande instamment que ces mesures de précaution soient maintenues après que la flambée actuelle en Europe sera maîtrisée.

Si j'ai cité ce communiqué, c'est que ces gens ont trouvé les mots pour exprimer notre pensée. Nous devons faire preuve de bon sens. Nous devons être vigilants. La fièvre aphteuse existe depuis toujours dans le monde. Nous devons constamment faire preuve de vigilance face à cette maladie. Nous exhortons donc le gouvernement à recourir à toutes les ressources nécessaires, à prendre toutes les mesures de précaution voulues et à mettre en place un plan d'attaque si, par impossible, cette maladie était introduite dans notre pays.

Je tiens à souligner qu'une des raisons pour lesquelles un débat comme celui-ci est important, c'est qu'il offre l'occasion de sensibiliser la population à cette question et de l'informer d'une manière rationnelle et raisonnable de ce qui se passe réellement. Nous devons faire savoir aux touristes qu'ils constituent l'un des risques les plus importants pour notre notre industrie de l'élevage du boeuf et du porc et notre industrie laitière. Leur négligence pourrait amener au Canada un problème qui mettrait potentiellement en péril le gagne-pain de certaines personnes.

Nous devons mettre cette question en contexte. Notre industrie agricole vit à l'heure actuelle l'une des pires crises qu'elle ait connue depuis longtemps. Si une telle maladie faisait son apparition au Canada, elle dévasterait une partie de l'industrie agricole qui est actuellement rentable. Nous devons veiller à ce que cela ne se produise pas, et un débat comme celui-ci contribue à sensibiliser le public.

Que peuvent faire les voyageurs s'ils constituent l'un des plus grands risques pour le Canada? Les voyageurs qui entrent au Canada devraient veiller à déclarer à la frontière la viande, les produits laitiers et les produits d'origine animale afin que les douaniers soient au courant. Si les voyageurs ont visité une ferme à l'étranger, ils devraient s'assurer que les vêtements et les chaussures qu'ils ont portés durant leur visite ne sont pas souillés de terre ou de fumier et ils devraient nettoyer et désinfecter leurs chaussures et faire nettoyer à sec leurs vêtements. C'est le moindre qu'ils puissent faire pour protéger notre industrie de l'élevage. Ils devraient non seulement se préoccuper de ce qu'ils portent au moment d'entrer au Canada, mais également de ce qu'ils transportent dans leurs valises. Ils ne devraient pas visiter de fermes canadiennes pendant au moins 14 jours après leur retour au Canada, comme le recommande l'Organisation mondiale de la santé animale. Nous les prions d'agir ainsi pour protéger nos agriculteurs.

 

. 2055 + -

Les personnes qui ont des entreprises agricoles ou des ranchs au Canada doivent en refuser l'accès à quiconque est allé au cours des 14 derniers jours dans des pays où des cas de fièvre aphteuse ont été recensés.

Bien que les humains ne soient pas susceptibles de contracter la fièvre aphteuse, ils peuvent en être porteurs. Les Canadiens se rendant à l'étranger doivent être conscients de cela, et les agriculteurs doivent se protéger en refusant l'accès à leur propriété à des gens qui rentrent d'un voyage à l'étranger.

Lorsqu'ils doivent visiter une entreprise agricole, les gens doivent prendre des précaution sanitaires additionnelles telles que le lavage et la désinfection de tous les effets personnels et du matériel qu'ils ont avec eux. Je le répète, il est particulièrement important de nettoyer et de désinfecter les chaussures.

Les propriétaires de bétail devraient rehausser les mesures de précaution à l'égard de leurs troupeaux. Par exemple, les agriculteurs doivent se montrer prudents avant de laisser des visiteurs entrer dans leur entreprise. De même, les visiteurs doivent être sensibilisés au mode de transmission de la maladie et adopter des précautions supplémentaires. Ils doivent laver et désinfecter tous les effets personnels et le matériel qu'ils ont avec eux. Je le répète, il est particulièrement important de nettoyer et de désinfecter les chaussures.

Tous les visiteurs, y compris les vétérinaires et les acheteurs de bétail, devraient utiliser les chaussures que les entreprises agricoles mettent à leur disposition.

Enfin, je voudrais signaler ce que nous, les députés de l'Alliance canadienne, avons fait, dans un esprit de précaution et de sécurité en vue d'assurer que le gouvernement prend des mesures adéquates.

Nous avons bien sûr été les premiers à soulever la question de la fièvre aphteuse à la Chambre des communes. Nous avons déjà posé des questions ou fait des déclarations à au moins huit reprises à la Chambre des communes. Nous avons fait des démarches à maintes reprises auprès du ministre intéressé, au moyen de lettres entre autres, pour veiller à ce qu'on mette en place et fasse universellement observer les mesures appropriées.

Le 29 mars, nous avons publié un plan d'action invitant le gouvernement à améliorer ses mesures de sécurité aux ports d'entrée et à améliorer également sa campagne d'information. J'espère que le débat de ce soir y contribuera.

L'Alliance canadienne a poussé l'ACIA à faire connaître son plan d'action au public et aux députés. Grâce à nos efforts, l'ACIA et le ministère de la Défense nationale comparaîtront devant le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire.

L'Alliance canadienne a également lancé sa propre campagne de communication qui prévoit des envois postaux directs aux électeurs de même qu'une information détaillée fournie sur notre site web concernant l'agriculture. Je tiens à faire savoir aux Canadiens qu'ils pourront en apprendre davantage sur cette question en consultant notre site à l'adresse suivante: www.canadianalliance.ca/agriculture.

J'exhorte le gouvernement à continuer de diffuser de l'information sur cette question et à veiller à ce que nos agriculteurs soient bien protégés.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Neigette-et-la Mitis, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole dans le cadre de ce débat. Je partagerai le temps qui m'est imparti avec mon collègue, le député de Champlain, qui est aussi adjoint au porte-parole à l'agriculture.

Je crois qu'il était extrêmement important que nous ayons ce débat, ce soir, d'une part, parce qu'il faut sensibiliser la population à l'importance de la fièvre aphteuse, mais aussi, d'autre part, pour lui demander de ne pas presser le bouton de panique. Autant il est important d'en parler, autant cette expression de «débat d'urgence» est un peu disproportionnée par rapport à ce qui se passe au Canada à l'heure actuelle.

 

. 2100 + -

D'entrée de jeu, je dois féliciter l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Nous avons rencontré les responsables au Comité permanent de l'agriculture et ils viendront nous rencontrer encore cette semaine.

La décision que les autorités ont prise de retourner en Angleterre le bateau qui contenait le matériel de l'armée britannique est une mesure qui nous rassure. Il est assez inquiétant de voir que la Grande-Bretagne n'ait pas pris toutes les mesures qu'on voulait qu'elle prenne en envoyant son armée ici. On avait bel et bien demandé que tout soit propre, mais elle avait oublié de faire le ménage.

Quelqu'un me disait aujourd'hui: «On aurait pu leur permettre de laver leurs choses ici. Ce n'était pas la peine de retourner le bateau.» Mais si on leur avait demandé de laver leurs choses ici, ils risquaient d'infecter nos lieux en lavant leurs produits. Il était donc légitime de retourner le bateau en Grande-Bretagne pour leur demander de faire leur ménage.

J'irais même jusqu'à dire qu'il faudrait peut-être s'interroger devant ce manque de conscience sociale de l'armée britannique et s'il ne vaudrait pas mieux annuler complètement tout cet exercice qui se déroulera au coeur même de nos grands cheptels, dans l'Ouest canadien.

Nous avons été rassurés également par les responsables de l'Agence qui sont venus nous expliquer comment le Canada a expérimenté, avec le Mexique et les États-Unis, le plan d'urgence qu'il possède. Il est rassurant de voir qu'on pourrait prendre des mesures. Quand on prend connaissance également du plan américain, on se dit quand même que nos spécialistes sont en contact les uns avec les autres et qu'on doit prendre tous les moyens pour éviter que cette maladie arrive ici.

Qu'est-ce qu'on pourrait faire pour enrayer cette maladie si un cas se déclarait? J'espère que cela ne viendra jamais, mais s'il devait y avoir un cas, une série de mesures pourraient s'enchaîner, pouvant aller jusqu'à isoler la ferme ou mettre un périmètre de sécurité et abattre les troupeaux s'il le faut. Comme on le voit, il existe un plan sur papier qui prévoit toute une série de mesures à prendre afin d'intervenir en cas d'urgence.

Il est également important de savoir que, à l'heure actuelle, un drame se vit en Europe pour lequel il faut être extrêmement sensible.

J'ai personnellement eu l'occasion de vivre un drame épouvantable dans ma propre circonscription en ce qui a trait à un autre type de maladie qu'on appelle la tremblante du mouton. Les cheptels de chez nous ont été particulièrement affectés par cette maladie. J'ai assisté à des rencontres avec des familles, des parents et leurs enfants qui étaient censés prendre la relève et qui ont dû prendre la décision d'accepter que l'Agence vienne abattre le troupeau de moutons au complet.

On n'a pas idée des drames humains qui sont vécus à ce moment-là. Je l'ai vu de près. Au moment où ils doivent faire disparaître un troupeau au complet, les gens n'ont plus de revenu et ils n'ont plus de bête non plus. Si on leur donne une compensation pour remplacer les bêtes, on ne leur donne pas forcément un revenu pour le temps qu'ils prendront à rebâtir leur cheptel.

D'après certaines informations que j'ai obtenues, il semblerait qu'à l'heure actuelle, les gens vivent des drames humains épouvantables en Europe. Certaines personnes vont même jusqu'au suicide parce qu'elles ne savent plus exactement comment s'en sortir.

Il faut penser à cette dimension du problème. Même si on a entendu parler de mesures prophylactiques au plan de la santé, de la maladie ou pour enrayer l'épizootie, cette dimension humaine m'est apparue absente de nos débats jusqu'à maintenant.

Je pense qu'il faudrait prévoir tout de suite un plan de secours pour ces gens-là, un plan d'appui dans les démarches qu'ils auraient à entreprendre si jamais on devait en venir à ce genre de conclusion à laquelle nous en sommes arrivés avec la maladie de la tremblante du mouton.

 

. 2105 + -

Il est important de réaliser que le gouvernement aussi a pris une mesure extrêmement intéressante. La dernière épidémie que nous avons eue ici a eu lieu en 1952. D'ailleurs, maintenant, on a inventé un nouveau mot, «épizootie». Moi, je ne le connaissais pas avant cela, mais c'est quand même plus juste de parler d'épizootie. Les personnes qui occupaient la fonction de vétérinaire, en 1952, ont bien de la chance d'avoir pris, tous et toutes, leur retraite depuis.

C'était une excellente initiative de la part du gouvernement canadien que d'envoyer de jeunes vétérinaires donner un coup de main à leurs collègues de Grande-Bretagne, et en même temps, leur permettre de se faire la main, de prendre de l'expérience, et de voir, de visu, à quoi ressemble cette maladie, pour mieux la connaître, être mieux en mesure de la diagnostiquer, l'identifier et de prendre les moyens nécessaires pour agir plus rapidement.

Quand on fait des études très théoriques et qu'on n'a jamais l'occasion de voir aucune de ces maladies, on fait bien notre possible, mais quand on a la chance—c'est malheureux de dire «la chance»—d'aller prendre de l'expérience dans une situation comme celle qu'ont vécue nos vétérinaires en Grande-Bretagne, c'est quand même intéressant de penser qu'ils sont allés prendre de l'expérience. On espère qu'ils n'auront jamais à la mettre à profit ici. Mais au cas où cela arriverait, je pense qu'ils auront pris là une expérience intéressante.

Cette maladie, d'où vient-elle? Il serait bien difficile de dire d'où elle vient. Apparemment, d'après les données que nous avons, elle est venue du Japon, elle est passée en Mongolie, en Russie, pour finalement aboutir en Grande-Bretagne. Le gouvernement britannique a pris des mesures, mais cela n'a pas suffi, c'est passé en France, en Hollande et dans d'autres pays probablement.

Le gouvernement canadien a prévu des mesures. Je pense que ce qui est important, c'est que chacune des personnes qui habite au Canada soit consciente que c'est sa propre responsabilité à elle qui nous permettra de ne pas avoir cette maladie, en étant raisonnable, en étant prudent, en suivant les directives, à savoir de ne pas rapporter d'aliment d'Europe et de désinfecter convenablement les choses au retour. Chaque personne doit se sentir impliquée dans cette opération.

Je connais certains agriculteurs qui ont pris des mesures extrêmement intéressantes. Par exemple, ils ont refusé de recevoir des stagiaires cet été dans leur ferme, parce qu'ils ne veulent pas prendre de risques; ils ont changé leurs habitudes. Maintenant, ils rencontrent les fournisseurs dans leur cuisine, plutôt que d'accepter qu'ils viennent dans leur étable. Il y a toutes sortes de mesures très pratico-pratiques et très simples qu'on peut prendre pour se sentir soi-même impliqué dans la prévention de cette maladie.

M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Monsieur le Président, je remercie ma collègue de partager le temps qui lui est alloué avec moi pour ajouter ma voix à ce débat intéressant, mais surtout superbement important, que nous avons ce soir.

Je voudrais féliciter le député qui a amorcé ce débat. Comme on vient de le dire, ce n'est pas un débat «d'urgence» au sens de panique; non, il ne faut pas paniquer, mais je pense qu'il faut réaliser jusqu'à quel point on est en danger quand même. Il faut avoir suffisamment froid dans le dos, si vous me permettez l'expression, pour prendre les précautions nécessaires pour ne pas être touchés par cette épidémie.

On a mentionné qu'on avait eu une telle épidémie en 1952, transmise par un saucisson rapporté par un voyageur. Il avait probablement jeté ce saucisson, alors qu'il était contaminé. Il ne faut pas oublier qu'en 1952, cette épidémie avait coûté un milliard de dollars au gouvernement canadien.

Je ne suis pas économiste, mais je connais suffisamment l'économie pour savoir qu'un milliard de dollars en 1952, cela représente, aujourd'hui, plusieurs milliards de dollars.

 

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À mon avis, cela représente l'équivalent de 16 à 20 milliards de dollars de l'argent d'aujourd'hui, sans compter que les troupeaux de 1952 ne sont pas les mêmes que ceux d'aujourd'hui. Aujourd'hui, nous avons des mégafermes; il n'est donc pas rare de voir une porcherie de 10 000 porcs et plus.

Sans vouloir se faire peur, tentons d'imaginer quels seraient les effets d'une épidémie ici, au Canada, et en particulier au Québec, où on a vraiment des mégafermes. On peut croire que cette épidémie coûterait une fortune que je n'ose pas calculer.

Le débat de ce soir permet justement d'essayer de se sensibiliser et de sensibiliser tout le monde. Je pense, entre autres, aux voyageurs. On est à la période où le tourisme commence.

L'an dernier, en revenant de Paris où j'avais visité des forêts près du Château de Versailles, je suis rentré à Mirabel avec les bottes tachées de sable et de terre. Je dois dire bien honnêtement que j'ai trouvé les inspecteurs un peu zélés lorsqu'ils m'ont demandé d'aller à l'arrière pour désinfecter mes bottes. Aujourd'hui, je réalise que ces inspecteurs ont bien fait leur travail.

Je suis d'avis que tous les touristes, tous ceux qui ont à entrer au pays après une visite, pas nécessairement des fermes mais du territoire, devraient prendre toutes les précautions imaginables pour ne pas transmettre ce virus extrêmement facile à transmettre.

On dit que les animaux qui attrapent cette maladie sont des bêtes qui possèdent deux ongles, comme les bêtes à cornes. On dit que le chien ou le chat ne peut attraper cette maladie, mais peut la transporter. Les cheveux peuvent transporter la maladie. Alors, c'est une maladie extrêmement facile à transporter et c'est la raison pour laquelle l'épidémie est si grave.

J'ai été heureux d'entendre le ministre de l'Agriculture dire qu'il prenait toutes les précautions nécessaires, au moment où on se parle, pour avertir, par exemple, les voyageurs dans les avions. Il a parlé de vidéos et de différentes autres mesures qui sont prises. J'espère que cela sera mis en vigueur le plus rapidement possible.

Quelqu'un mentionnait qu'un voyageur avait pu pénétrer sur une ferme, la semaine dernière, sans avoir pris les précautions nécessaires pour le faire. Il ne faut prendre aucun risque avec cette maladie.

Je pense qu'une bonne police d'assurance—et c'est une police d'assurance bon marché par rapport aux risques que l'on court—c'est de prendre les mesures dont le ministre a parlé tantôt. Comme l'a également souligné ma collègue plus tôt, le fait d'avoir retourné le bateau de l'armée, c'est aussi une bonne décision, mais il faut également augmenter le nombre d'inspecteurs.

Je me souviens avoir posé la question au Comité permanent de l'agriculture. Il est vrai que l'Agence canadienne d'inspection des aliments fait un bon travail, mais le vérificateur général a mentionné qu'il manquait de personnel. Il est peut-être temps d'augmenter le personnel à l'Agence canadienne d'inspection des aliments pour s'assurer qu'on met toutes les chances de notre côté.

Nous savons qu'une épidémie comme celle-là ne viendra pas ici, j'en suis persuadé, mais il faut prendre tous les moyens pour nous en assurer. S'il y avait une telle épidémie, ce serait grave pour le producteur agricole, mais ce le serait tout autant pour le consommateur. Il faut que tout le monde se sente impliqué.

Des consommatrices et des consommateurs me disaient que le prix des aliments avait commencé à augmenter.

 

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Je n'ose pas penser à ce qui se produirait si la maladie arrivait ici. On ne peut pas détruire constamment des cheptels complets de bovins, de moutons et de porcs sans finalement créer une rareté quelque part.

Toutes les précautions doivent être prises pour empêcher l'épidémie de venir en Amérique. Il faut qu'il y ait une collaboration du public. Il faut qu'il y ait une collaboration des touristes. Il faut peut-être qu'on s'abstienne d'aller visiter des fermes ou le territoire européen, là où la maladie existe.

Je veux demander au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire d'examiner la possibilité d'ajouter de la sécurité, par exemple, en comblant le manque d'inspecteurs à l'Agence canadienne d'inspection des aliments. C'est quelque chose à propos de quoi on se plaint et à dont plusieurs se plaignent. Il importe de voir à ce que ces inspecteurs soient les mieux formés possible et de voir à ce que la population soit le plus informée possible, pour que chacun sente que c'est son devoir de faire en sorte que notre territoire reste exempt de cette maladie. Je pense que c'est pour le plus grand bien de tout le monde.

Encore une fois, je remercie le député qui a amorcé ce débat ce soir. Je pense que, pour une fois, on voit qu'on fait l'unanimité ici. On ne blâme personne, mais tout le monde ensemble, on se dit qu'il faut mettre l'épaule à la roue. Il faut qu'on fasse tous le travail nécessaire pour réussir à passer au travers, c'est-à-dire à ne pas avoir cette maladie.

[Traduction]

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part au débat ce soir. Je vais partager mon temps de parole avec ma collègue de Winnipeg-Centre-Nord. À voir le nombre de mes collègues néo-démocrates présents ce soir, on peut constater l'importance que nous attachons à cette question. Certains d'entre eux participeront au débat plus tard.

Il est bon que nous tenions ce débat, car je crois que de nombreux Canadiens ont le sentiment que cette question les inquiète plus que cela semble être le cas des politiciens, de l'Agence canadienne d'inspection des aliments et du gouvernement.

Je ne dis pas que c'est le cas, mais compte tenu des fax, des coups de téléphone, des lettres et des courriels que certains d'entre nous reçoivent, on peut en conclure que les Canadiens sont extrêmement inquiets de la possibilité d'une épizootie de fièvre aphteuse en Amérique du Nord et plus particulièrement au Canada.

Ils savent que dans le secteur de l'agriculture, des milliards de dollars sont en jeu. Ceux qui viennent de la Saskatchewan et de l'Alberta et qui connaissent ce que nous appelons le couloir des parcs d'engraissement, dans la région de Lethbridge, savent qu'il s'y trouve des centaines de milliers de bovins et sont conscients des torts catastrophiques que pourrait subir ce secteur si ce virus se répandait au Canada.

Les Canadiens auxquels j'ai parlé voudraient obtenir plus de détails du gouvernement. J'ai écouté attentivement les deux ministres qui sont intervenus ce soir et j'accueille avec plaisir les engagements qu'ils ont pris et leur contribution au débat. Les Canadiens voudraient être rassurés. Ils voudraient savoir que lorsque des voyageurs reviennent de l'étranger, ils utilisent tous, sans exception, les produits désinfectants qui sont censés être aux aéroports. J'en dirai un peu plus là-dessus dans un instant.

Dans l'ensemble, ils voudraient connaître les règles du jeu. Que fait l'Agence canadienne d'inspection des aliments à ce sujet? Qu'est-ce que les services des douanes et de l'immigration exigent de leurs employés? Les Canadiens nous disent qu'ils pourront nous faire savoir si ces instructions sont suivies.

Hier, j'ai reçu un appel d'un électeur de la région de Moose Jaw qui transporte beaucoup de bovins dans tout l'ouest du pays et aux États-Unis. Il m'a fait part d'une conversation qu'il a eue récemment avec une garde-frontière américaine. Elle lui a demandé s'il croyait qu'on faisait preuve de toute la vigilance voulue pour éviter que la fièvre aphteuse ne se répande. Il a répondu que, à son avis, les choses ne se passaient pas aussi bien qu'on l'aurait espéré, et elle l'a assuré que c'était le cas effectivement.

 

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Je suis rassuré par le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et le ministre de la Défense nationale, mais je puis assurer à la Chambre que les Canadiens sont très préoccupés par une épizootie possible. Nous savons que des étudiants de l'ouest du Canada ont annulé des voyages en Europe, notamment au Royaume-Uni. Ils en ont peut-être été de leur poche, mais cela ne les a pas empêchés de le faire, car ils ne tiennent pas à être responsables de l'introduction de cette maladie contagieuse en territoire canadien.

Soit dit en passant, nous savons qu'Air Canada revoit au cas par cas le dossier de ces personnes à qui on avait dit qu'elles ne seraient pas remboursées intégralement. Mes collaborateurs ont communiqué aujourd'hui avec les responsables d'Air Canada, qui ont indiqué que les annulations seraient examinées au cas par cas. Compte tenu de la situation, je crois que les étudiants de la région d'Edmonton et de Shauvanon, en Saskatchewan, finiront par être intégralement remboursés.

Mes collaborateurs ont également communiqué avec une autre personne qui a déclaré être arrivé à Vancouver par avion la semaine dernière, en provenance de Belgique et des Pays-Bas. Ce voyageur a été pris à part lorsqu'il a signalé qu'il avait visité une exploitation agricole au cours des deux semaines précédentes et qu'il comptait se rendre sur une exploitation agricole au Canada, car cela fait partie de son travail. Il a affirmé qu'on lui a posé de nombreuses questions très pertinentes, mais qu'on ne lui a jamais demandé d'utiliser du désinfectant.

En l'occurrence, il avait pris des précautions avant de quitter les Pays-Bas. Il avait fait nettoyer à sec ses vêtements et désinfecté ses chaussures; il s'était douché et avait fait tout ce qu'il était nécessaire de faire. Il demeure cependant qu'on ne lui a pas demandé de passer sur un tapis désinfectant quand il est arrivé à l'aéroport de Vancouver.

S'agissait-il d'un cas isolé? Voici ce qu'écrivait un certain Morris W. Dorosh dans le numéro d'hier de la publication Agriweek:

    L'autre jour, je suis descendu d'un avion qui avait effectué un vol international jusqu'à l'aéroport de Toronto. La semaine de relâche du printemps venait de prendre fin et l'endroit était encore plus bondé que d'habitude. Les gens passaient aux postes de Douanes Canada par rangs de quatre ou cinq personnes. Un représentant de l'Agence canadienne d'inspection des aliments se tenait à proximité de ce fleuve humain et demandait doucement si quelqu'un avait apporté de la viande de l'étranger. Moins d'un passager sur cinq lui prêtait attention. Les maladies et les infections de toutes sortes sont propagées par les gens. On croit maintenant que le virus de la fièvre aphteuse a été apporté au Royaume-Uni dans les bagages d'un voyageur en provenance de Chine, qui a franchi l'inspection des douanes sans qu'on détecte la présence de viande, et qui l'aurait ensuite apportée à un restaurant chinois dans le nord-est de l'Angleterre. Le virus s'est peut-être propagé pendant 10 ou 15 jours avant que le premier diagnostic ne soit posé.

Il ne s'agit pas d'un cas isolé. Les Canadiens veulent avoir l'assurance qu'il y a des règles et que ces règles seront respectées rigoureusement.

J'ai l'honneur de représenter la base aérienne de Moose Jaw, qui est située dans ma circonscription. La semaine dernière, en raison de la crainte engendrée par la fièvre aphteuse en Europe, des inspecteurs ont examiné au peigne fin des avions à réaction de fabrication britannique qui venaient d'arriver. Ce centre d'entraînement des pilotes de l'OTAN est devenu la base de la quinzième escadrille. Le centre a pris livraison de plusieurs avions d'entraînement en provenance d'Angleterre et transportés sur des avions cargos russes. Parmi les précautions prises, on s'est assuré qu'il n'y avait pas de terre collée aux chaussures des membres d'équipage. Les déchets produits à l'intérieur de l'avion y sont restés et les supports de bois sur lesquels reposaient les ailes des avions ont été brûlés.

Je sais que le député de Brandon—Souris a dit que ce débat serait non partisan, et j'ai bien l'intention de respecter les règles du jeu, mais je voudrais néanmoins parler d'un appel qu'un vétérinaire de l'Ontario a adressé au caucus du NPD et auquel mon bureau a répondu. Le vétérinaire se disait très préoccupé par le fait que le gouvernement provincial semble transférer la responsabilité du dossier des vétérinaires à de soi-disant inspecteurs profanes.

 

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Une question de coût est en jeu. Ils soutiennent qu'il est trop coûteux de recourir à des vétérinaires. La pratique est particulièrement répandue dans les ventes aux enchères locales, à la sélection avant la vente. On met à part les animaux qui ne semblent pas sains. Ils sont mis en quarantaine ou isolés pour qu'un vétérinaire les examine plus tard.

Le vétérinaire est extrêmement inquiet. Il travaille lui-même dans ce domaine, mais il remarque que ces inspecteurs non vétérinaires n'ont reçu à peu près aucune formation. Cela a des conséquences très graves pour la sécurité de l'alimentation et des animaux, selon le vétérinaire. Il exhorte le gouvernement de l'Ontario à envisager sérieusement de réévaluer ce remplacement des vétérinaires par des inspecteurs non vétérinaires dans les ventes aux enchères.

Le secteur canadien de l'élevage et plus particulièrement la Canadian Animal Health Coalition ont joué un rôle de premier plan pour faciliter les échanges entre l'industrie et l'ACIA afin de préparer des plans, au cas où la maladie se propagerait au Canada. Un grand crédit leur revient, parce qu'ils ont conçu un plan d'interruption volontaire du transport qui a été approuvé par la coalition pour élaboration immédiate. Ils ont aussi travaillé de concert avec les Mexicains et les Américains.

Comme mon temps de parole est terminé, je ne vais pas entrer dans les détails, à propos de la coalition, mais elle mérite notre profonde reconnaissance pour le travail qu'elle a accompli.

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD); Monsieur le Président, je suis heureuse d'intervenir après mon collègue, député de Palliser et porte-parole en matière d'agriculture pour le Nouveau Parti démocratique. Le député est bien renseigné et la question dont nous sommes saisis aujourd'hui le préoccupe au plus haut point.

Avant de présenter mes observations, je voudrais remercier le député de Brandon—Souris, qui a entamé ce débat à la Chambre ce soir. Je veux aussi dire un mot de la décision de la présidence de permettre la tenue de ce débat pour que la Chambre ait la chance de s'attaquer à une question qui préoccupe gravement la population et qu'il faut traiter de toute urgence.

Je doute que quiconque ici puisse nier la gravité de la fièvre aphteuse. Nous avons affaire à un problème de taille qui risque de faire des ravages au Canada. Il est temps que la Chambre traite de ce qui fait problème pour nous et pour nos électeurs partout au Canada.

Le Parlement a un rôle de premier plan à jouer pour identifier les problèmes, avant qu'ils ne s'aggravent. Il est indispensable que les députés parlent d'une telle question dès son apparition. On nous a dit souvent de ne pas soulever les questions avant qu'elles deviennent des problèmes, parce que cela suscite plus de crainte, d'inquiétude et d'anxiété que la situation ne le justifie. Nous convenons tous aujourd'hui qu'il est préférable d'agir tôt que d'avoir des regrets plus tard. Il vaut mieux prévenir que guérir. C'est le message que nous apportons à la Chambre ce soir.

Nous reconnaissons que le gouvernement a pris des mesures pour prévenir l'entrée au Canada de la fièvre aphteuse. Nous sommes ici pour manifester notre vigilance et pour donner au gouvernement notre encouragement et nos suggestions, afin d'assurer notre entière protection contre une maladie dévastatrice qui pourrait se répandre d'un bout à l'autre du Canada.

 

. 2130 + -

Le Parlement a un rôle à jouer dans le but non seulement de sensibiliser la population, objectif que mentionnait l'Alliance et auquel contribuera sûrement le débat de ce soir, mais aussi de relever le niveau du débat et de faire comprendre au gouvernement qu'il est urgent d'agir, qu'il lui faut prendre toutes les mesures les plus sévères et courageuses possibles afin d'éviter la crise qui menace notre pays.

Mes collègues à la Chambre ont mentionné les leçons que nous pouvons tirer de la crise que vivent les Britanniques. Il ont décrit la gravité de la crise qui secoue le Royaume-Uni à cause de la fièvre aphteuse. Le débat de ce soir doit nous faire comprendre qu'il est urgent d'agir et de planifier en fonction du pire des scénarios.

Les statistiques que nous venons d'entendre concernant l'incidence de la fièvre aphteuse au Royaume-Uni sont certainement alarmantes. Pas plus tard qu'hier, nous apprenions que 946 cas de fièvre aphteuse avaient été diagnostiqués dans ce pays. Selon les chiffres disponibles hier, bien au-delà de un million de bêtes avaient été ou devaient être abattues à cause de la fièvre aphteuse. Cela représente environ 2 p. 100 des bovins, des moutons et des porcs de ce pays.

Nous avons également appris ce soir que, selon les médias, le virus se serait répandu en France, aux Pays-Bas et en Irlande. Nous avons aussi appris ce soir que la maladie pourrait frapper chez nous. Il n'y a peut-être pas de cas de fièvre aphteuse au Canada actuellement, et nous avons fort probablement réussi à garder cette maladie hors de notre pays depuis 50 ans, mais nous savons aussi, à la lumière de l'expérience de la Grande-Bretagne et d'autres pays, qu'une grave flambée de cette maladie aujourd'hui pourrait entraîner l'abattage de milliers de bêtes, qu'elle occasionnerait des coûts faramineux pour notre secteur agricole et qu'elle coûterait des milliards de dollars au gouvernement fédéral.

Les questions que nous devons nous poser ce soir et auxquelles le gouvernement doit répondre concernent notre préparation. Sommes-nous vraiment prêts, dans l'éventualité où le virus entrerait au Canada? Certains spécialistes du domaine doutent que nous soyons prêts, et je pense que notre travail ce soir consiste à faire état de certaines de ces inquiétudes et à encourager le gouvernement à prendre ces préoccupations très au sérieux.

Je pense, par exemple, à un article qui a été publié dans le Citizen d'Ottawa la semaine dernière et qui citait Otto Radostits, un des plus grands professeurs de médecine vétérinaire de notre pays. Ce professeur de médecine vétérinaire spécialiste des animaux de ferme enseigne à l'Université de la Saskatchewan et il est le coauteur d'un ouvrage sur les maladies qui attaquent le bétail, les moutons, les porcs, les chèvres et les chevaux. Voici ce qu'il dit:

    Il est vrai que nous n'avons pas eu à gérer ce genre de crise au Canada, mais il ne fait pas l'ombre d'un doute que nous ne sommes pas aussi préparés à le faire que nous le devrions.

Il croit que le gouvernement doit prendre cette question plus au sérieux et qu'il doit élaborer un plan d'une vaste portée dans l'éventualité où le virus ferait son apparition au Canada.

Nous avons aussi entendu, au cours des deux dernières semaines, le président de l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada, M. Steve Hindle, dire qu'il y a, en fait, une pénurie de vétérinaires aujourd'hui au Canada et que cette pénurie pourrait constituer un risque en cas d'épizootie de fièvre aphteuse. Il a dit ceci, le 13 mars, dans un communiqué:

    L'incapacité de l'Agence canadienne d'inspection des aliments de régler les graves problèmes de recrutement et de maintien en poste de ses vétérinaires risque de mettre en danger le bétail canadien.

Il a ajouté que l'épizootie de fièvre aphteuse qui balaie à l'heure actuelle le Royaume-Uni et qui menace l'Europe a amené les membres de son syndicat, qui représente quelque 500 vétérinaires et autres professionnels de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, à se demander si le Canada était prêt à affronter une menace similaire. Il est une source digne de foi et on doit le prendre au sérieux. C'est le but du débat de ce soir et j'espère que le gouvernement écoutera ces préoccupations.

Le député de Palliser a mentionné aussi les inquiétudes de la Société des éleveurs de bovins canadiens, telles que rapportées dans le Western Producer. Selon eux, aucun plan d'action en cas d'urgence, accessible à tous les intervenants, ne pourrait être appliqué en dedans de quelques heures du dépistage de la maladie. C'est un autre problème grave que soulève là une organisation très crédible aujourd'hui au Canada et qu'il faut prendre au sérieux.

 

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Le gouvernement doit répondre précisément à la question de savoir si nous sommes prêts. Pourquoi les Canadiens sont-ils inquiets et pourquoi le Parlement reconnaît-il ici ce soir ces inquiétudes? C'est clair. Nous savons, grâce aux rapports du vérificateur général, que l'Agence canadienne d'inspection des aliments éprouve des problèmes. Cet organisme manque de ressources. Nous savons qu'il manque beaucoup d'inspecteurs. Nous savons qu'on se demande vraiment si le double mandat de cet organisme ne risque pas de nuire à la prise de décisions rapide qui s'impose dans l'intérêt de la santé et du bien-être des animaux et des Canadiens.

Nous savons aussi que le gouvernement présente parfois, sur le plan de l'ouverture et de la transparence, des lacunes qui doivent être comblées, car cela se trouve au coeur même de la question qui nous occupe. Le secret et le silence ne produisent que doute et inquiétude, et non l'inverse. Ce n'est qu'en étant ouverts et transparents qu'on pourra rassurer les Canadiens et qu'on sera mieux préparés que maintenant.

Je voudrais souligner un autre exemple. Souvent, lorsque nous soulevons des préoccupations relativement à de possibles problèmes, le gouvernement nous accuse d'alarmer pour rien la population. C'est arrivé dans le cas de la maladie de la vache folle, où des préoccupations semblables ont été soulevées et où le gouvernement a eu une réaction comparable en ce qui concerne le secret et le silence et la tendance à ne pas tout dire sur les problèmes ou les mesures prises. Nous avons sûrement été témoins de cela en santé, et je connais bien certaines des difficultés à cet égard.

Ce soir, nous avons l'occasion d'ouvrir les portes, de lever le voile du secret, de veiller à ce que le public soit pleinement informé et que les plans du gouvernement, relativement à la fièvre aphteuse, soient pleinement divulgués et expliqués au public. Ainsi, tous les Canadiens peuvent être prêts et faire leur part pour empêcher à tout prix l'entrée de ce virus au Canada.

Mme Sophia Leung (secrétaire parlementaire du ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec un collègue.

Je suis heureuse de pouvoir appuyer le ministre de l'Agriculture au cours de ce débat crucial, puisque nos ministères travaillent ensemble à empêcher la fièvre aphteuse d'entrer au Canada.

L'Agence canadienne des douanes et du revenu joue depuis longtemps un rôle de première ligne important en aidant l'Agence canadienne d'inspection des aliments à faire observer les conditions d'importation. La menace de cette maladie qui se rapproche de nos frontières a intensifié nos rapports dans les dernières semaines.

Je souligne que les deux agences ont formé une équipe qui s'emploie jour et nuit à prévenir une épidémie de fièvre aphteuse au Canada. Ce partenariat n'est pas un phénomène nouveau. Nous avons aussi, avec succès, travaillé en étroite collaboration dans le passé pour protéger le Canada contre la maladie de la vache folle et les dégâts causés par les cérambycidés.

Même avant que la fièvre aphteuse ne fasse son apparition au Royaume-Uni, l'Agence canadienne des douanes et du revenu renvoyait normalement tous les chargements commerciaux de viande et de produits d'origine animale à l'Agence canadienne d'inspection des aliments, peu importe leur lieu d'origine. Lorsque l'épidémie a été confirmée, l'ACIA a immédiatement interdit toutes les importations commerciales de viande et de produits à base de viande, et les inspecteurs de l'ACDR ont été prévenus de resserrer les contrôles de ces chargements. En outre, des fonctionnaires supérieurs de l'ACDR ont immédiatement rencontré leurs collègues de l'ACIA en vue de trouver des moyens de garantir la sécurité des Canadiens, qui représente l'une de leurs principales priorités.

 

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Nous réagissons. Avec l'aide de l'ACIA, nous prenons des précautions partout où la fièvre aphteuse pourrait pénétrer au Canada, que ce soit par bateau, par avion, par le système postal ou les services de messagerie, ou encore par la frontière. Nous allons bien au-delà des procédures habituelles pour minimiser les risques que la maladie n'arrive dans notre pays.

Comme beaucoup des députés l'auront vu d'eux-mêmes, l'ACIA a placé des tapis désinfectants dans les aéroports. Nous avons également recours aux chiens détecteurs de l'ACIA. L'une des manières dont l'ADRC aide l'ACIA est en questionnant de manière plus intense tous les voyageurs dans les principaux aéroports, y compris ceux qui arrivent des États-Unis.

Nous posons à tous les voyageurs les mêmes questions qui se trouvent dans leurs déclarations de douanes sur les produits alimentaires, à savoir s'ils ont l'intention de se rendre dans une ferme canadienne et s'ils ont visité une ferme dans l'Union européenne ou en Argentine au cours des 15 derniers jours. S'ils répondent oui à l'une de ces questions, ils sont dirigés vers un agent de l'ACIA pour examen de leurs effets personnels pour voir si la maladie y est présente.

Face à la menace de la fièvre aphteuse, l'ADRC a établi un partenariat avec la Société canadienne des Postes, car nous craignons que des Européens ou des Argentins n'envoient à leurs parents au Canada des colis contenant des produits d'origine animale ou de la viande. Nous, à l'ADRC, avons intensifié nos efforts afin que presque tous les colis en provenance de l'Union européenne et de l'Argentine soient examinés. Nous ne voulons pas prendre de risques.

Nos craintes ne sont pas sans fondement. Au cours des deux dernières semaines, l'ADRC a découvert plus de 120 kilos de produits à base de viande, 100 kilos de fromage, 38 plantes et même un litre de lait dans les colis qui sont arrivés au centre de courrier des Douanes.

Dans le cas des envois par service de messagerie, le risque est faible. Néanmoins, nous avons intensifié nos inspections des envois en provenance de l'Europe et de l'Argentine et nous ouvrons un plus grand nombre de colis.

En ce qui concerne les points de passage frontaliers, nous savons que la fièvre aphteuse n'existe pas aux États-Unis. Nous savons que le ministère américain de l'Agriculture a annoncé qu'il avait intensifié la surveillance et les inspections aux postes de frontières. Le ministère américain de l'Agriculture a également interdit l'arrivage de produits d'origine animale en provenance des pays à haut risque. Ces mesures nous ont permis de conclure que le risque en provenance des États-Unis est faible.

Toutefois, l'ADRC est très consciente que la fièvre aphteuse n'est pas quelque chose qu'il faut prendre à la légère. L'ADRC est prête à aider les autres ministères et organismes du gouvernement à maintenir la sécurité, la santé et la prospérité de notre pays. Nous continuerons à travailler de concert avec l'ACIA et à surveiller la situation aux points de passage frontaliers.

Je tiens à souligner, à l'intention de mes collègues, que l'ADRC prend très au sérieux sa responsabilité de protéger les Canadiens. C'est notre toute première priorité. Durant cette période de tension, nous continuons de travailler sans relâche pour assurer la fluidité du commerce et du tourisme, mais la lutte contre la fièvre aphteuse passe avant tout.

L'ADRC est prête à prendre des mesures additionnelles en coopération avec l'ACIA pour contrer la menace de la fièvre aphteuse. Non seulement nous sommes prêts à aider les autres ministères et organismes, mais nous recevons l'appui d'autres organisations, comme l'Association canadienne des éleveurs de bovins. En fait, cette association a récemment rendu hommage à l'ADRC et à l'ACIA dans une lettre où elle disait:

    Nous avons été heureux et satisfaits de l'empressement et du dévouement du personnel des deux organismes durant cette période difficile. Nous tenons à souligner tout particulièrement la mise en place des systèmes de désinfection aux points d'entrée, lesquels sont extraordinaires.

 

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Je dois dire que l'ADRC reconnaît le dévouement de l'ACIA et appuie les efforts qu'elle faits pour empêcher la fièvre aphteuse d'entrer au Canada. Nous aiderons volontiers de toutes les façons possibles.

[Français]

M. Claude Duplain (Portneuf, Lib.): Monsieur le Président, il me fait extrêmement plaisir de pouvoir prendre la parole, ce soir, sur ce sujet. Portneuf étant un milieu rural, l'agriculture y revêt une grande priorité.

Lors de mon arrivée ici, j'ai choisi de faire partie du Comité permanent de l'agriculture. J'ai aussi choisi de faire partie du caucus rural. Ces deux comités nous permettent d'avoir beaucoup de discussions relatives aux problèmes agricoles.

Nous avons entendu le ministre de l'Agriculture et le ministre de la Défense nationale nous présenter différents points relatifs au problème dont nous discutons ce soir, soit la fièvre aphteuse.

Permettez-moi de vous assurer que le foyer de fièvre aphteuse qui sévit dans l'Union européenne et en Argentine compte parmi les priorités absolues de notre gouvernement. En effet, tout comme l'honorable député de Brandon—Souris, et comme tous les représentants de la Chambre, nous tenons à empêcher cette terrible maladie de pénétrer au Canada.

J'aimerais rappeler à la Chambre les démarches que nous avons entreprises pour promouvoir la santé des animaux dans notre pays. Il faut dire que le Canada s'est forgé une réputation mondiale pour la qualité de son système de salubrité des aliments. Le respect dont nous jouissons découle en grande partie de l'attention que nous portons aux questions de santé animale.

L'Agence canadienne d'inspection des aliments a pour mandat d'offrir des services d'inspection fédérale efficaces et rentables, et d'autres services reliés à la santé des animaux, à la salubrité des aliments et à la protection des végétaux.

L'expertise de l'ACIA est reconnue à l'échelle internationale. Les normes d'inspection qu'elle a établies, en se fondant sur la science et sur des règles, sont réputées partout dans le monde. Grâce à ces normes, le Canada peut être certain d'importer des produits salubres et de qualité, et d'exporter des produits tout aussi salubres et de qualité sur les marchés internationaux.

En ce qui concerne la santé des animaux, l'ACIA établit des politiques, procède à des inspections, surveille l'application de la loi et vérifie le rendement de l'industrie en ce qui a trait au maintien de la santé des animaux et des végétaux.

Nous avons pu constater, ces dernières années, à quel point les maladies animales présentaient une menace sérieuse pour les ressources animales du Canada. En fait, de nombreux facteurs sont venus accroître cette menace. Citons par exemple la croissance du commerce international et l'augmentation des mouvements de population. Les changements climatiques ont aussi des répercussions sur les habitats et la santé des animaux. Récemment, nous avons été témoins de l'émergence de nouvelles maladies animales et du retour d'anciennes maladies, comme la fièvre aphteuse.

Face à tous ces défis, l'ACIA a su garder le Canada exempt de maladies transmissibles considérées comme étant les plus graves en termes de santé publique et de conséquences socioéconomiques.

Par ailleurs, le Canada est l'un des chefs de file de l'Office international des épizooties, l'OIE. Il s'agit d'une organisation internationale dont les normes en matière de maladies animales font autorité sur la scène mondiale. Les pays signataires sont tenus de rapporter à l'OIE les cas de maladies sur leur territoire, tel que le prescrit le Code zoosanitaire international.

 

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Les maladies répertoriées dans la liste A de ce code sont des maladies transmissibles dont la propagation rapide risque d'être très marquée, ainsi que d'avoir une incidence grave sur la santé publique ou sur la situation économique. Ces maladies revêtent une importance primordiale pour le commerce international des animaux et les produits animaux. La fièvre aphteuse est un bon exemple d'une maladie de la liste A.

Nous pouvons être fiers du fait que le Canada est l'un de seulement quelques pays qui peuvent se déclarer exempts des maladies de la liste A de l'OIE. Il s'agit d'un accomplissement de premier ordre. De surcroît, grâce à ses activités de dépistage et d'éradication, le Canada contrôle et restreint la propagation des autres maladies animales au pays.

Nous avons connu passablement de succès à ce jour, en partie en raison de l'empressement et du travail acharné de l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Cette dernière s'occupe de surveillance et d'identification des maladies, ainsi que de lutte contre ces dernières. Elle gère les services zoosanitaires, elle inspecte les importations dans le but de dépister les ravageurs et maladies exotiques et de garantir le transport sans cruauté des animaux.

Les activités zoosanitaires de l'ACIA jouent un rôle de premier plan dans la protection de la santé publique et animale au Canada. Le foyer de fièvre aphteuse qui sévit au Royaume-Uni et en Europe mettra notre régime de santé animale à l'épreuve. Le Canada est exempt de fièvre aphteuse depuis 1952, et nous avons l'intention de maintenir cet état sanitaire.

L'Agence canadienne d'inspection des aliments prend des mesures rigoureuses pour empêcher la maladie d'atteindre le Canada. L'Agence a suspendu tous les permis d'importation des produits vulnérables provenant des pays de l'Union européenne et d'Argentine. Ces produits englobent non seulement les animaux vivants, la viande et le fromage non pasteurisé, mais également les embryons et la semence animale.

Les voyageurs doivent répondre à une série de questions et déclarer tous les aliments, végétaux, animaux et autres produits à leur arrivée au Canada. Des inspecteurs patrouillent les grands aéroports accompagnés de chiens spécialement dressés pour détecter à l'odeur les produits alimentaires, végétaux et animaux, ainsi que les produits du poisson qui pourraient être dissimulés.

L'ACIA exécute des mesures spéciales aux aéroports où des vols internationaux pourraient rapporter la maladie d'Europe. Elle lancera également une campagne de publicité-médias pour avertir les voyageurs internationaux des risques qu'ils courent de rapporter par mégarde la maladie au Canada.

Et ici, j'aimerais souligner que malgré toutes ces mesures, il est très important que la population elle-même prenne garde et que les gens fassent attention lors de leur retour de voyage.

L'ACIA a récemment délégué au Royaume-Uni des vétérinaires canadiens qui participeront à la lutte contre le foyer de fièvre aphteuse et son éradication. Il s'agit d'une occasion précieuse pour nos vétérinaires d'acquérir directement de l'expérience d'une maladie qui n'existe pas encore au Canada. Cette expérience nous aidera à mieux nous préparer à la manifestation possible de maladies animales exotiques, plus particulièrement dans le domaine de la surveillance, des diagnostics et de la gestion des foyers de maladie.

Je désire également rassurer la Chambre que les vétérinaires qui reviennent du Royaume-Uni sont assujettis à une quarantaine et une désinfection complète avant de quitter le Royaume-Uni. Ils sont fortement sensibilisés à l'importance du nettoyage et de la désinfection du matériel organique comme le sol, le fumier et le foin.

Nous pouvons nous féliciter que le Canada ait été épargné par bon nombre des plus graves infections qui ont frappé l'industrie de l'élevage d'un grand nombre de nos partenaires commerciaux. Mais notre bonne fortune a un prix, et c'est celui de la vigilance constante. Le foyer de fièvre aphteuse qui sévit en Europe nous force à intensifier notre vigilance. Nous sommes chanceux de pouvoir d'ores et déjà compter sur un régime de santé animale de première classe. Nous devons l'appuyer sans réserve.

[Traduction]

M. David Anderson (Cypress Hills—Grasslands, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il est bon d'être ici ce soir pour parler de la fièvre aphteuse. Je voudrais féliciter le député de Brandon—Souris de nous avoir saisis de cette question ce soir.

 

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J'ai lu avec intérêt dans le journal qu'il n'y a eu au total que 991 cas de fièvre aphteuse en Angleterre. Cependant, les conséquences de cela, c'est qu'un million d'animaux ont été abattus ou vont l'être.

Je voudrais parler un petit peu ce soir de la maladie à laquelle nous devons faire face. Comme nous le savons, il s'agit d'un virus très facilement transmissible qui a une période d'incubation de 14 jours environ. Lorsqu'on découvre la maladie, les animaux sont déjà infectés.

Cette maladie affaiblit énormément les animaux et cause des cloques sur les sabots et la bouche des animaux. Elle touche les bovins, les porcs, les moutons, les cerfs, les chèvres et tous les ruminants. Elle n'affecte pas les humains, mais nous pouvons transporter ce virus pendant un temps limité sur nos vêtements et nos chaussures. On peut le trouver dans la poussière, dans les produits alimentaires, dans notre appareil respiratoire et il peut être également transporté par le vent. Chose intéressante, il peut survivre au gel.

Les coûts de cela ont été énormes. Si on prend l'Union européenne et les montagnes de carcasses brûlées qu'on voit à la télévision, on s'aperçoit que tout cela a un coût économique. Cependant, il y a d'autres coûts également. Il y a un coût politique en Europe à l'heure actuelle. Les élections ont été retardées à cause de cette maladie. Nous avons lu aujourd'hui que des animaux sont déterrés et brûlés à nouveau, car les gens avaient peur d'une contamination des approvisionnements en eau.

Les dommages psychologiques en Europe sont également énormes. On voit un mode de vie détruit. Une dame m'a dit que si on devait prendre à son mari ses vaches on ferait aussi bien de le brûler avec ses animaux. Nous comprenons ce que les agriculteurs européens traversent lorsqu'ils voient leur bétail être détruit.

Les États-Unis ont ressenti les effets financiers de cette crise également. Ils ont pris certaines mesures pour réagir à la récente poussée de fièvre aphteuse. Ils ont agi rapidement pour protéger leurs frontières. Ils ont interdit les importations de produits venant de pays à risque élevé et augmenté le personnel et la surveillance aux points d'entrée. Les États-Unis ont resserré l'application des règlements et renforcé la coordination entre le gouvernement fédéral et les États, ils ont accéléré la recherche et ont lancé des campagnes de sensibilisation. Ils ont également envoyé des experts en Grande-Bretagne, comme nous l'avons fait, pour étudier cette maladie.

Les coûts pourraient être élevés au Canada également. Je citerai un extrait du communiqué de presse que nous avons émis jeudi dernier, après la conférence de presse. Je citerai les paroles du député de Selkirk—Interlake, principal porte-parole du Parti de l'Alliance canadienne en matière d'agriculture. Il a dit ceci:

    Selon des experts de l'industrie de l'élevage, le coût d'une poussée de cette maladie pourrait atteindre 20 milliards de dollars la première année. Nous devons tous travailler ensemble pour empêcher que cette maladie ne se propage ici.

Les gens sont inquiets. L'Alliance canadienne travaille avec le gouvernement dans ce dossier. J'ai soulevé cette question au moins quatre fois à la Chambre et, ce soir, c'est la cinquième fois que j'en parle. C'est bon de voir qu'elle a été ajoutée à la liste des questions qui préoccupent les Canadiens.

Il est important de ne pas politiser cette question. Nous devons éviter cela. Cependant, j'aimerais avoir quelques éclaircissements de la part du gouvernement ce soir relativement à deux situations en particulier où j'ai perçu certains problèmes découlant du fait qu'on donne un caractère politique à cette question.

Un des députés de l'Alberta a demandé aux gens de l'ACIA de venir à des réunions dans sa circonscription pour discuter du problème avec les éleveurs. Il a eu beaucoup de mal à obtenir la permission nécessaire. C'est le cabinet du ministre qui doit la donner. Il a des problèmes car on craint qu'il ne s'agisse d'une réunion politique. Le député fait tout pour s'assurer que ce ne soit pas le cas.

J'ai appris par les médias certains détails au sujet de la façon dont le gouvernement avait l'intention de lutter contre la fièvre aphteuse. Reste à voir le plan. Je demande au gouvernement de présenter son plan à la Chambre afin que nous puissions voir ce qui va se passer si nous devons faire face à ce problème.

Il est temps de parler publiquement de la question. Nous avons besoin de leadership de la part du gouvernement. Nous avons besoin de mesures prudentes mais rigoureuses. Nous devons éviter une réaction excessive.

La fièvre aphteuse ne date pas du printemps. Seuls 48 pays n'étaient pas contaminés au début de l'épidémie. Nous devons trouver une façon équilibrée et sûre de combattre la maladie. Une réaction excessive ne peut qu'entraîner des conséquences, surtout pour le commerce, dont ne veulent pas les éleveurs. Nous avons besoin de mesures d'inspection rigoureuses et d'une bonne patrouille à la frontière.

Je voudrais parler un peu ce soir des mesures qui ont été prises. Les importations de porc et de ruminants ainsi que de produits carnés frais, réfrigérés ou congelés ont été interdites. C'est un bon début. Nous avons imposé certaines restrictions à la réimportation de produits au Canada. Nous avons renforcé les mesures d'inspection. La question, toutefois, est de savoir si nous avons assez de personnel.

 

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Le député de Palliser a demandé un peu plus tôt si notre personnel est qualifié et s'il a reçu une formation adéquate. La question mérite d'être étudiée sérieusement. Le consensus veut que les effectifs sur le terrain soient aujourd'hui insuffisants.

Je voudrais en donner un exemple ce soir. Il y a une dizaine de jours, une de mes électrices est revenue d'un voyage en Europe et m'a écrit une lettre dont voici un extrait:

    Les agents de bord ont également distribué aux passagers des formulaires de déclaration. Au nombre des questions posées, il y avait celle-ci: «Avez-vous l'intention de visiter une exploitation agricole canadienne dans les deux semaines à venir?» J'ai répondu oui. J'avais répondu non à toutes les autres questions, et la réponse à celle-ci se détachait nettement du lot, sans compter que c'était la dernière.

    À notre arrivée à l'aéroport, nous nous sommes dirigés vers la douane; le douanier a examiné mon passeport et mon formulaire de déclaration et m'a laissée passer. Je ne sais même pas s'il a remarqué que j'avais répondu oui à la question concernant la visite d'une exploitation agricole.

    En posant les pieds sur le tapis désinfectant, j'ai déclaré au responsable que j'avais intérêt à désinfecter convenablement mes chaussures puisque j'avais l'intention de me rendre sur une ferme dans les deux semaines. C'est seulement après que je le lui ai dit qu'il a entrepris de me rappeler les précautions à prendre.

Dans sa lettre, elle se pose la question suivante:

    Que serait-il arrivé si je n'avais pas signalé à l'homme affecté aux tapis nettoyants que j'allais visiter une ferme dans 14 jours? Il ne m'aurait rien dit, je serais passée comme les milliers d'autres personnes en provenance de l'Europe qui entrent au Canada.

Le personnel aux frontières doit faire preuve d'une grande vigilance au sujet de cette maladie.

J'ai été heureux d'apprendre ce matin que nous avons renvoyé un navire transportant des véhicules militaires. Selon ce qu'on nous avait laissé croire, ces véhicules avaient été lavés et désinfectés en Angleterre. Apparemment, ce n'était pas le cas. Ils étaient souillés de terre. J'ai été heureux de constater qu'on s'en est rendu compte et qu'on les a renvoyés.

Il faut aussi sensibiliser le public. Le plus grand danger vient des touristes qui entrent au Canada et qui ne comprennent pas ce qu'ils font ou ce qu'ils apportent avec eux. Les voyageurs doivent connaître les faits. Des affiches doivent être posées dans nos aéroports et des brochures doivent être distribuées dans les avions. C'est ce qui se passe et il est pas grand temps qu'il en soit ainsi. Il est bien que ce débat ait lieu maintenant.

Les agriculteurs devraient aussi assumer leur part de responsabilité. Ils doivent restreindre l'accès à leur bétail. Un grand nombre d'entre eux ont mis des années à établir leurs troupeaux. Leurs bêtes font partie de la famille et ils doivent voir à ne pas se mettre dans une position où la maladie pourrait atteindre leur ferme.

Je partage mon temps de parole avec le député de Lethbridge. Je voudrais soulever un autre point. Je tiens à reconnaître le sacrifice que font certains de nos citoyens. J'ai soulevé la question avec le secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture. J'ai aussi soulevé la question vendredi soir pendant la période réservée aux déclarations des députés. Je parle de nos jeunes qui essaient de prendre la bonne décision.

Dans ma circonscription, il y a des étudiants de Swift Current, de Shaunavon et de Bengough qui doivent décider s'ils iront en Europe avec leur école durant le congé de Pâques. Ils essaient de prendre la bonne décision, car ils se sentent responsables à l'égard de leurs collectivités, qui en retour, comme elles le font toujours, n'hésitent pas à les aider.

Je voudrais savoir si le gouvernement émettra un avis aux voyageurs au sujet de la fièvre aphteuse, de manière à ce que ceux qui renoncent à leur voyage puissent se faire rembourser leur billet d'avion par Air Canada. Nombre d'entre eux ont de la difficulté à traiter avec les sociétés aériennes et avec les voyagistes, et ils n'obtiennent pas de remboursement intégral. J'estime qu'on devrait les rembourser.

Pour conclure, je tiens à m'assurer que le débat de ce soir ne tournera pas en débat partisan. Nous arrivons à la fin d'une longue journée qui a été, dans un sens, assez conflictuelle. Je suis un nouveau député. Je suis ici pour travailler avec les gens et pour collaborer sur les dossiers dont nous sommes saisis. Permettez-moi de dire, ce soir, que j'aimerais travailler en collaboration avec les autres partis. Je suis heureux que la motion ait été proposée de ce côté-ci de la Chambre, et que nous en discutions ensemble. Tous les députés devraient travailler ensemble, de manière à assurer que le Canada ne soit pas aux prises avec cette maladie. Nous ne pouvons pas nous permettre les ravages de cette maladie, nous n'en avons pas besoin. Elle ne doit pas franchir nos frontières.

M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que j'interviens dans le présent débat pour attirer l'attention des Canadiens. Nous devons nous pencher sur la gravité de la situation et j'appuie les commentaires de mon collègue qui vient de dire que c'est une question non partisane que nous devons aborder au meilleur de notre connaissance.

Je viens de la ville de Picture Butte dans le sud de l'Alberta. La devise que nous avons adoptée il y a quelques années alors que j'étais maire de la ville soulignait que nous étions la capitale de l'alimentation du bétail. C'est une devise que nous portons fièrement puisque nous avons cette industrie dans notre région. Nous sommes heureux d'avoir cette industrie chez nous. Nous travaillons très fort pour en assurer la sécurité et pour protéger l'environnement. Bon nombre de personnes participent à cette industrie.

 

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L'Alberta compte pour 25 ou 26 p. 100 de tout le secteur des animaux d'élevage. Nous avons du gros bétail et des veaux, plus de cinq millions de têtes dans la province seulement. Il y a aussi 1,7 million de porcs et 167 000 agneaux et moutons. Les revenus des ventes de viande atteignent les 3,2 milliards. On recueille 1,5 milliard pour les produits laitiers et 533 millions pour la fabrication de moulée. La valeur à la ferme est de 3,3 milliards pour le gros bétail et les veaux, de 505 millions pour les porcs et de 14 millions pour les moutons et les agneaux et les achats globaux de bétail comptent pour 970 millions.

S'il devait y avoir une éclosion de l'épizootie au Canada, nos frontières seraient immédiatement fermées. Toute l'industrie serait totalement immobilisée et nous ne parlons pas uniquement de la production de viande, mais aussi de la production laitière.

L'Alberta exporte pour 1,4 milliard de dollars de boeuf et de veau, pour 177 millions de dollars de porc, pour 511 millions de bovins sur pied et pour 92 millions de dollars de porcs. C'est une énorme industrie. Ces chiffres représentent le quart de ce qui se fait au Canada.

Si ce fléau atteint le Canada, il fera baisser le niveau de vie de tous les Canadiens. Il est important de diffuser cette information. Ce n'est pas un problème rural. C'est un problème à l'échelle du Canada tout entier. Il est absolument essentiel que tous les Canadiens contribuent à faire en sorte que le Canada demeure à l'abri de la fièvre aphteuse.

Voici quelques chiffres de l'emploi en Alberta: 40 000 personnes travaillent dans le secteur de la production d'animaux, 8 000 dans le secteur de l'agriculture mixte, et 10 000 dans celui de la transformation. Ces travailleurs seraient touchés immédiatement. Je ne parle pas du transport par camion, des installations de manutention, des enceintes de mise aux enchères ou des services de douanes. Tous ces gens se retrouveraient sans emploi le lendemain de la découverte de cas de fièvre aphteuse dans notre pays.

Il est impérieux de faire tout ce que nous pouvons pour garder cette maladie hors du Canada. Notre parti a fait quelques suggestions au gouvernement. Il est bon de voir qu'il les met en application et qu'une campagne de publicité est en cours pour faire savoir à tous les Canadiens ce qui arriverait si cette maladie entrait au Canada.

L'information doit être communiquée aux agents de voyage pour informer les voyageurs qui sortent du Canada ou qui y arrivent. Dans ma circonscription, j'ai envoyé de l'information à toutes les commissions scolaires. Je suis heureux que mon collègue ait dit que le gouvernement devrait publier un feuillet de renseignements et avis aux voyageurs de sorte que les étudiants qui prévoient sortir du Canada à l'occasion du congé de Pâques aient le choix de partir ou non. Beaucoup d'entre eux n'iront pas à l'étranger parce qu'ils apprécient ce que l'industrie représente pour eux et leur famille. Cela les aiderait à arrêter leurs plans de voyage s'ils avaient le choix et si le gouvernement publiait un feuillet de renseignements et avis aux voyageurs qui leur déconseillait de sortir du pays. Les compagnies aériennes seraient favorables à une mesure comme celle-là. Les sociétés aériennes appuieraient une mesure semblable.

Nous recevons chaque jour des appels de gens témoins de passe-droits dans les aéroports. Nous devons absolument veiller à ce que cela ne se produise pas. Quiconque transporte de la viande ou tout autre article illégal au pays devrait se voir enlever ses bagages en vue de leur désinfection. Nous devons veiller à ce que chaque article soit saisi. Nous devons avoir un nombre maximal de patrouilles dans les aéroports et un nombre maximal d'inspections de tout le matériel et de tous les gens qui entrent au pays. Des milliers de touristes arrivent chaque semaine du Royaume-Uni et d'Europe. Nous devons être tout à fait sûrs que la maladie ne peut être transportée au Canada.

L'ACIA doit travailler sans relâche. Nous devons tous appuyer le gouvernement pour qu'il dégage les ressources nécessaires à la protection de nos frontières. Notre parti y travaillera, en collaboration avec le gouvernement. Nous devons veiller à ce que l'information soit diffusée par tous les moyens possibles.

J'ai de l'information provenant des États-Unis, de la Nouvelle-Zélande et de l'Australie. Ces pays se sont servi d'Internet pour diffuser de l'information soulignant à leurs producteurs ce qui arriverait si la maladie faisait son apparition chez eux. Ils soulignent les mesures qu'ils adoptent pour empêcher la maladie d'entrer dans leur pays et les mesures que les producteurs doivent connaître, si jamais la maladie s'y propage. C'est le genre d'information que nous devons communiquer au public.

Nous avons besoin d'une stratégie nationale à laquelle participent tous les ministères, soit l'Agriculture, les Douanes et la Santé. Tous ces gens doivent se réunir et établir un plan pour empêcher que cette maladie n'entre au pays. Nous en avons empêché l'entrée au Canada durant 50 ans. Cette maladie existe dans le monde depuis 50 ans, et le Canada en a été épargné. Si nous faisons preuve de diligence, nous pouvons éviter que cela se produise maintenant.

Si nous nous dotons d'une stratégie nationale regroupant tous les intervenants et toutes les ressources de tous les ministères, nous pouvons obtenir de meilleurs résultats. Nous pouvons ramener la possibilité de l'entrée de cette maladie au Canada aussi près de zéro que possible.

J'espère que le gouvernement acceptera notre offre de soutien. Je n'ai pas mentionné le député de Brandon—Souris. Je le remercie d'avoir soulevé cette question. Ne en sommes fort aise, et nous nous penchons nous-mêmes sur la question. Nous devons élaborer un plan commun et à une stratégie nationale faisant appel à tous les ministères.

 

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À deux ou trois reprises, des groupes d'élèves sont venus nous voir dans ma circonscription et ont dit qu'ils ne voulaient pas partir en voyage, mais qu'ils ne pouvaient pas se faire rembourser et qu'ils cherchaient d'autres solutions. Il faut établir immédiatement une stratégie de consultation sur les déplacements. J'ignore quel ministère devrait s'en charger. Espérons que le ministre de l'Agriculture pourra s'entretenir avec ses collègues du Cabinet et mettre cette stratégie en place afin que les gens aient des options.

Je ne saurais trop insister sur le fait qu'il s'agit là d'une question nationale qui touchera tous les Canadiens. Si nous pouvons imaginer que notre niveau de vie baisserait brusquement de 20 p. 100, peu importe qui nous sommes ou notre lieu de résidence, cela nous donne une idée de l'importance et de l'ampleur de la question. Il coûterait 20 milliards de dollars et, selon certaines estimations, jusqu'à 26 milliards de dollars, au cours de la première année seulement, pour enrayer cette maladie si elle se propageait au Canada. Il faudrait des années pour s'en remettre.

Dans ma circonscription, les gens ne dorment plus. Ils font des cauchemars juste à penser à ce qui se produirait si cette maladie se répandait au Canada, comme en témoignent certaines photos prises en Angleterre que nous avons vues. Nous ne pouvons pas permettre cela dans notre pays. Empêcher la prolifération de cette maladie au Canada coûterait très peu, alors que son introduction au Canada coûterait très cher.

Travaillons tous ensemble. Investissons l'argent nécessaire. Mettons les ressources nécessaires en place. Faisons tout ce qu'il faut pour garder cette maladie en dehors de nos frontières, afin que nous ne soyons pas obligés de voir des photos comme celles qui nous viennent d'Europe.

M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Monsieur le Président, nous avons pris conscience ce soir à quel point il serait grave que la maladie se propage chez nous. Nous avons vu ce qui se passe au Royaume-Uni, où des dizaines de milliers d'animaux ont dû être abattus et enterrés. Il est également possible que la population de cerfs de ce pays ait été contaminée. Nous savons que les Britanniques ne pourront pas résoudre ce problème rapidement. La maladie a traversé la Manche et se propage maintenant sur le continent. Elle est présente en France, aux Pays-Bas, en Islande et en Argentine, ce qui nous donne une idée de l'ampleur du phénomène.

Le ministre a déclaré ce soir que le Royaume-Uni devra débourser plus de 20 milliards de dollars pour contrôler le virus, non pas pour l'éliminer, mais simplement pour le contrôler. Les coûts pourraient dépasser les 100 milliards de dollars sur le continent. Le gouvernement prend la question très au sérieux.

Le député a parlé de la vague d'infection qui avait frappé la Saskatchewan en 1951. J'ai fait des recherches pour avoir une idée de ce qui s'est produit, car je n'avais qu'un an à l'époque. En 1952, l'éradication de la maladie a coûté un milliard de dollars à la Saskatchewan. Le député parlait de 20 milliards de dollars. L'épizootie qui a frappé la Saskatchewan en 1952 aurait coûté, en dollars de 1995, au-delà de 30 milliards de dollars. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous devons être très prudents.

Il s'agit d'un virus étonnant. Le site web du ministère ontarien de l'agriculture, de l'alimentation et des affaires agricoles nous apprend que le virus de la fièvre aphteuse survit au gel. Sa période d'incubation est de 8 à 21 jours. On a retrouvé des virus vivants dans du lait pasteurisé à 72 degrés Celsius pendant 15 secondes. On en a aussi trouvé dans des stalles à bétail 14 jours après le départ des bêtes. En outre, on en a trouvé dans l'urine après 39 jours, dans le sol après 28 jours à l'automne et 3 jours à l'été. J'en conclus que le virus est sensible aux rayons ultraviolets. On en a trouvé dans du foin séché à 22 degrés Celsius, emmagasiné depuis 20 semaines.

 

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Une personne peut être porteuse de la maladie jusqu'à 14 jours après être venue en contact avec elle. Le virus peut être inhalé et retenu dans les voies respiratoires de l'être humain pendant une période allant jusqu'à 36 heures et en être expulsé dans la salive ou la respiration. Il peut franchir une distance de 300 kilomètres dans l'eau et de 80 kilomètres sur terre. Il peut s'attacher aux vêtements, aux chaussures ou aux bagages pendant au moins neuf semaines.

À son entrée au Canada, voici ce que devrait faire le voyageur en provenance du Royaume-Uni et de l'Europe: il devrait déclarer toute viande, tout produit laitier ou produit animal qu'il apporte. Il devrait laisser ces articles à l'aéroport pour qu'ils y soient détruits.

Si le voyageur doit se rendre sur une ferme, il devrait voir à ce que ses vêtements et chaussures soient exempts de saleté ou de fumier; il devrait nettoyer et désinfecter ses chaussures au moyen d'une solution moitié vinaigre et moitié eau, laver ses vêtements à la machine dans l'eau chaude ou les faire nettoyer à sec. On recommande également de ne pas s'approcher d'une ferme pendant au moins 14 jours après la date de l'entrée au Canada.

Les éleveurs et les organisateurs de foires, où de nombreuses bêtes sont rassemblées, devraient prendre des mesures de précaution avant de permettre la venue de visiteurs à diverses activités agricoles. Ils devraient les mettre au courant des risques et des précautions à prendre. Même si les humains ne sont pas victimes de la fièvre aphteuse, ils la transportent. On devrait recommander aux touristes de prendre des mesures additionnelles, par exemple laver et désinfecter tous leurs effets personnels ainsi que le matériel qui les accompagne.

Il est particulièrement important de nettoyer et de désinfecter les souliers selon ces directives et de fournir des couvre-chaussures et des habits de protection. Les organisateurs des foires et des événements doivent prendre des précautions supplémentaires lorsqu'ils installent des pédiluves et des tapis désinfectants dans les divers bâtiments.

À quelques reprises ce soir des députés ont demandé si on prenait suffisamment de mesures. Je tiens à dire à tous les députés que, en novembre 2000, nous avons procédé à un exercice de simulation à l'échelle nationale et internationale. On a fait appel aux représentants du secteur de l'élevage, aux provinces et à Protection civile Canada. Ce fut un exercice de grande envergure. On a montré comment isoler et éradiquer le virus afin qu'il ne se répande pas. Nous offrons maintenant un atelier de suivi pour confirmer ce que nous avons appris durant cet exercice.

Ensuite, nous avons publié un guide des maladies des animaux étrangers. Il sera présenté sur le site web de l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Le site se trouve à l'adresse www.inspection.gc.ca

À titre de vice-président du comité permanent, j'aimerais aussi qu'on prenne une autre mesure. Il faudrait qu'un plan d'urgence soit présenté au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire pour qu'on puisse l'évaluer. J'aimerais qu'on le fasse le plus tôt possible. Je crois que c'est important.

Je dois répéter que nous sommes déterminés à assurer de la formation permanente. On l'a fait en déléguant des vétérinaires. Ils se sont rendus au Royaume-Uni, ont vu sur place quelles étaient les manifestations de la maladie, sont revenus au Canada, ont exécuté toute la procédure de désinfection et sont restés à distance du bétail. Maintenant, nous voulons qu'ils discutent avec nos experts en zootechnie et qu'ils donnent des conférences pour expliquer ce qu'ils ont vécu au Royaume-Uni.

Qui peut enseigner mieux que celui qui a fait lui-même l'expérience d'une situation? Ils ont vécu la douleur, l'épreuve de devoir entrer dans une ferme et abattre tout le bétail. Ils ont vu les rangées d'animaux, de moutons, de porcs dans les champs. Ils étaient présents lorsqu'on a dû creuser une immense fosse sur le site d'une ancienne base aérienne pour enterrer les carcasses. Ils ont vu tout cela de près. Ils ont aussi constaté à quel point le service de vétérinaires de la Grande-Bretagne a dû lutter pour essayer de contenir le virus. Ils ont rapporté une mine de renseignements très pertinents pour nous aider à élaborer un plan d'urgence afin que, si jamais le pire survenait, nous pourrions maîtriser la situation le plus rapidement possible. C'est essentiel.

 

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L'Agence canadienne d'inspection des aliments interdit également l'importation de l'Union européenne ou de l'Argentine d'animaux vulnérables et de produits provenant de ces animaux. Elle a aussi suspendu l'émission de permis d'importation d'animaux vivants, de sperme, d'embryons et de produits provenant d'animaux vulnérables. Nous avons le contrôle des permis d'importation qui avaient été émis mais pas encore été utilisés. Ces permis sont en train d'être annulés. Nous tentons de retracer tous les produits importés au Canada, afin de savoir exactement où ils se trouvent.

En terminant, je tiens à préciser que nous sommes conscients qu'il s'agit d'une question très importante. Nous ne voulons pas que ce problème dégénère. En toute franchise, je suis persuadé que notre gouvernement fait tout ce qui est physiquement et humainement possible de faire pour éviter que la fièvre aphteuse ne fasse son apparition au Canada.

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre part au débat lancé par le député de Brandon—Souris.

Lorsqu'il a demandé ce débat sur la fièvre aphteuse, le député a rendu hommage à l'Agence canadienne d'inspection des aliments et l'a félicitée de sa campagne de publicité. Je suis tout à fait d'accord: cet organisme s'occupe fort bien de ce problème qui risque de se poser.

La fièvre aphteuse n'a pas d'effets importants chez les humains, elle se communique facilement à eux. L'agent pathogène peut se propager par les vêtements, les véhicules, les personnes et les aliments préparés. Une importante mesure de défense à adopter pour protéger le Canada est d'informer les gens des précautions à prendre pour éviter que cette maladie terrible ne se propage au Canada.

C'est pourquoi le gouvernement a pris l'initiative d'informer les Canadiens et les visiteurs qui viennent au Canada des mesures qu'ils peuvent prendre à leur arrivée pour éviter de propager la maladie.

Je voudrais m'attarder ce soir au plan de communication du gouvernement.

L'Agence canadienne d'inspection des aliments, l'ACIA, a mis sur pied un groupe de travail pour coordonner la diffusion de l'information sur la fièvre aphteuse. Elle collabore avec l'Association canadienne des médecins vétérinaires et d'autres instances fédérales et provinciales pour fournir aux vétérinaires, aux éleveurs et au grand public l'information sur la maladie. Il suffit de composer un numéro sans frais pour obtenir de l'information. Peut-être puis-je profiter de mon intervention à la Chambre pour le donner, monsieur le Président. Il s'agit du 1-877-227-0677.

Beaucoup de mes électeurs se rendent à l'étranger pour affaires ou comme touristes. Ils doivent être au courant des précautions à prendre. Le gouvernement intensifiera donc sa campagne contre la fièvre aphteuse en publiant des annonces dans le cahier tourisme des grands quotidiens au Canada.

La semaine dernière—je suis sûre que les députés ont regardé l'émission—, l'ACIA a diffusé un segment de cinq minutes à l'émission de CTV Canadian Farm Show, et d'autres annonces télévisées sont prévues.

L'agence a aussi versé de la documentation au sujet de la maladie sur son site Web, notamment des bulletins d'information et des fiches sur des sujets clés.

 

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Ces fiches de renseignements sont affichées à divers endroits dans les aéroports. La plupart d'entre nous arrivons par l'aéroport de Toronto et l'aéroport d'Ottawa. L'information est là pour nous. L'Agence a établi une ligne d'information sans frais pour répondre aux inquiétudes des Canadiens. Un avertissement aux voyageurs a été remis aux agents de douanes dans l'ensemble du pays pour qu'ils le distribuent dans les aéroports. Il y a des panneaux dans les aéroports informant les voyageurs de la procédure de désinfection, et plus tôt des députés ont parlé de ces procédures de désinfection.

Dans la presse écrite, deux articles sur la fièvre aphteuse ont été publiés dans le journal de l'Association des médecins vétérinaires du Canada et un article a été publié dans le journal d'un supermarché qui est distribué à plus de 10 000 détaillants au Canada. La plupart d'entre nous, quand nous irons au supermarché ce week-end, pourront être sûrs d'y trouver l'information.

Par ailleurs, un article a été rédigé et sera distribué électroniquement à plus de 1 000 journaux communautaires. Des réclames seront diffusées sur les postes de télévision des avions et dans des revues spécialisées en agriculture. Nous voulons prévenir les voyageurs et les fermiers des dangers de la maladie. Nous voulons faire passer un message clair. C'est à nous tous d'empêcher cette maladie hautement contagieuse d'arriver au Canada.

Nous avons pris d'autres mesures. Nous avons l'intention de remettre des cartes d'information aux passagers, d'alerter les agences de voyage et d'accroître la teneur du site Web de l'ACIA.

Voilà certaines des initiatives prises récemment dans le domaine des communications, mais d'autres sont en voie de préparation. Nous prenons très au sérieux les activités de communication telles que la diffusion de l'information sur l'épidémie en Europe. Nous reconnaissons que chacun a un rôle à jouer pour contribuer à empêcher la maladie d'arriver au Canada. Nous voulons que les Canadiens soient au courant du rôle qu'ils doivent jouer en matière de prévention. C'est notre responsabilité à tous. Nous devons tous participer à la prévention.

Le Canada est parvenu à empêcher la maladie d'entrer dans notre pays depuis plus de 50 ans. Nous allons intensifier la surveillance. Nous allons continuer à demander aux passagers en provenance de l'étranger de passer dans un pédiluve désinfectant. Nous allons continuer à éduquer le public et les voyageurs. Nous allons utiliser la communication, moyen puissant de prévention de la maladie. Nous allons en parler dans nos localités, dans nos écoles, dans nos églises et dans nos forums publics.

Je suis heureuse que, de tous les côtés de la Chambre, nous nous entendions pour dire que la prévention est réellement la voie à suivre.

M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, je me réjouis de pouvoir prendre la parole sur cette question très importante au Canada. Mon parti et moi-même remercions le député de Brandon—Souris d'avoir attiré l'attention de la présidence sur l'importance d'en débattre ici.

Beaucoup de gens se demandent pourquoi quelqu'un de la Nouvelle-Écosse voudrait participer à un débat sur la fièvre aphteuse. Il y a de nombreux producteurs laitiers dans la vallée de la Musquodoboit et ils sont extrêmement inquiets de ce qui risquerait de leur arriver si cette maladie se déclarait en Nouvelle-Écosse et, quant à cela, dans le reste du Canada.

Nous avons entendu beaucoup de statistiques sur ce que cela coûterait au Canada, soit entre 20 et 26 milliards de dollars. Ce ne sont là que les pertes estimées des producteurs eux-mêmes. Tout le monde semble oublier ce que cela ferait au tourisme et aux autres aspects de l'économie. En fait, les pertes seraient incommensurables, car les conséquences seraient absolument horribles. Nous avons entendu parler de groupes scolaires de tout le Canada qui ont annulé, ou prévoient annuler, des voyages en Angleterre et dans d'autres parties de l'Europe. Cela se chiffre aussi en pertes économiques.

Je fais écho au sentiment exprimé ici ce soir par de nombreux intervenants, à savoir que notre Parlement, notre pays, doit tout faire pour empêcher que la fièvre aphteuse ne se déclare au Canada.

Des députés ont aussi parlé ce soir de courriels, de télécopies ou d'appels de diverses personnes qui ont passé la douane à divers points d'entrée aéroportuaires du Canada et qui ont remarqué que divers agents en douane ne prêtaient pas attention aux détails.

 

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Parce que j'ai travaillé 18 ans à l'aéroport de Watson Lake au Yukon et huit ans à l'aéroport de Halifax, je puis donner à la Chambre l'assurance que le personnel des douanes fait un excellent travail pour essayer d'empêcher l'entrée dans notre pays non seulement de drogues et d'immigrants illégaux, mais aussi de diverses maladies qui ne devraient pas arriver chez nous par le biais de viandes, de fromages ou d'autres biens passés en contrebande. Encore une fois, le problème vient de ce que nos agents des douanes n'ont tout simplement pas les ressources humaines et financières nécessaires pour empêcher cela.

Ce soir, nous sommes conscients que le ministre de l'Agriculture s'occupe avec diligence de ce dossier. Il a dit très clairement ce soir que les inspecteurs des douanes feront tout ce qu'ils peuvent pour être extrêmement vigilants à tous les points d'entrée partout au Canada, cela, pour empêcher l'entrée de la maladie dans notre pays.

Il faut féliciter le ministre de ce qu'il a dit ce soir. Nous, les néo-démocrates, travaillerons avec lui et avec tous nos collègues de l'opposition afin de veiller à ce que les diverses agences de notre pays disposent des ressources humaines et financières dont elles ont besoin pour accomplir le travail qu'elles aimeraient faire.

À titre d'ancien employé d'aéroport, j'annonce à la Chambre que, demain, je communiquerai avec les transporteurs aériens, avec Air Canada et d'autres, pour voir s'ils ne pourraient pas adopter une politique aux termes de laquelle ils rembourseraient en totalité quiconque souhaite annuler un voyage outre-mer par crainte de propager la fièvre aphteuse.

À mon avis, les transporteurs aériens pourraient faire cela en signe de bonne volonté. Ce serait aussi une excellente pratique commerciale. Je ne crois pas qu'une loi du Parlement soit nécessaire pour qu'ils le fassent. À titre d'employé d'une ligne aérienne, j'appellerai mes contacts demain pour voir si des lignes aériennes comme Air Canada pourraient prendre les devants et devenir de bons citoyens en faisant leur part pour l'éradication de cette maladie au Canada.

Je voudrais féliciter le porte-parole de notre parti pour l'agriculture, le député de Palliser, de son discours de ce soir sur la maladie. Comme d'autres députés, il vient des provinces des Prairies. Pour ma part, je viens d'une petite région où l'on pratique l'agriculture à petite échelle, la vallée de Musquodoboit. Pour les producteurs de l'Ouest, ce serait absolument effrayant de voir ce qu'ils auraient à vivre. Je sais, comme il a déjà été dit, qu'une foule d'entre eux n'en dorment pas la nuit tellement ils s'inquiètent de ce qui pourrait arriver à leur bétail et des pertes qu'ils pourraient subir.

Il y a quelques semaines, nous avons tenu un débat d'urgence sur la crise agricole, sur les céréales et les oléagineux, et sur ce qui arrive à nos agriculteurs et aux autres producteurs. Nous avons parlé des ramifications des ententes commerciales, du manque à gagner des producteurs, des gens qui quittent leur ferme par milliers et des jeunes qui ne deviennent pas agriculteurs. Imaginons maintenant ce que pensent les éleveurs et le stress qui les ronge actuellement. Cela fait qu'on se demande bien ce qui peut pousser un jeune à choisir l'agriculture comme gagne-pain.

Nous encourageons les jeunes à se lancer en agriculture parce que c'est une carrière merveilleuse et un gagne-pain exceptionnel. Ils peuvent gagner de l'argent tout en nourrissant le reste du pays.

Je voudrais également dire quelques mots au nom de la population de la Nouvelle-Écosse. Un grand nombre de gens venant de divers points du globe, comme l'Islande, l'Angleterre, l'Europe, les États-Unis et d'autres régions, passent par l'aéroport de Halifax.

Au cours d'une conversation privée, le député de Windsor—St. Clair a fait remarquer que bien des gens de Windsor partent de Détroit pour voyager outre-mer. À leur retour à Détroit, ils montent dans leur voiture et reviennent à la maison.

Je recommande au gouvernement d'être très vigilant avec tous ces voyageurs qui reviennent par les États-Unis. Nous avons des frontières plutôt poreuses que bien des gens franchissent à leur guise. Afin d'empêcher la maladie d'entrer au Canada, nous devons aussi nous montrer vigilants avec les gens qui reviennent des États-Unis. Une bonne partie de nos exportations vont aux États-Unis. Nous savons que, si la fièvre aphteuse venait à se répandre dans ce pays, nos frontières seraient immédiatement fermées. Cela aurait des répercussions catastrophiques pour nos producteurs agricoles en ce qui a trait au boeuf et au bétail en général.

Le Parlement canadien doit prendre toutes les mesures nécessaires pour convaincre nos producteurs et leur assurer que nous allons les appuyer par tous les moyens possibles pour empêcher la maladie d'entrer au Canada.

Toute personne qui a du coeur devrait prier aujourd'hui pour le peuple anglais. Nous voyons des scènes horribles où des milliers de carcasses de bêtes qui semblaient en santé sont transportées par des rétrocaveuses dans des fosses pour y être brûlées. Les choses ne sont pas censées se dérouler ainsi, mais c'est la seule façon d'empêcher la propagation de la maladie.

 

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Voilà le genre d'images que nous montrent les actualités télévisées et que nous ne voulons pas voir dans notre pays. Nous devrions faire tout ce que nous pouvons pour aider les Britanniques à empêcher que la maladie se propage. Elle est déjà présente dans d'autres parties de l'Europe. Nous devrions faire tout notre possible pour empêcher que cette maladie ne se propage davantage.

L'éducation est synonyme de prévention. On l'a déjà dit, nous devons rappeler à nos ambassades et à nos consulats de se montrer très vigilants lorsqu'ils expliquent aux gens ce qu'ils doivent faire lorsqu'ils viennent au Canada. Quiconque vient au Canada doit s'assurer qu'il a fait tout ce qui est possible pour empêcher l'entrée de la maladie dans notre pays.

Je veux encore une fois remercier le député de Brandon—Souris d'avoir proposé la tenue de ce débat important. Je remercie aussi le Président de nous avoir accordé du temps pour que nous puissions nous exprimer. Je sais que je ne peux répondre à des questions ou observations, mais je vous remercie, madame la Présidente, d'avoir été ici avec nous pour suivre cet important débat. En travaillant ensemble, je suis certain que nous réussirons à empêcher cette terrible maladie d'entrer au Canada.

M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.): Madame la Présidente, ils l'appellent l'île des larmes ou l'île de la mort. Il s'agit de Grosse Île, une île située dans le Saint-Laurent, à 50 kilomètres en aval de Québec. Cette île a été la station de quarantaine du Canada de 1832 jusqu'à 1937. C'est là que tous les immigrants arrivant au Canada devaient rester en quarantaine avant de pouvoir entrer véritablement au Canada.

Je mentionne cela parce que je crois que le débat sur la fièvre aphteuse et le problème, en fait la crise, que nous vivons en ce moment renvoie à une question plus vaste qui rendra perplexe la prochaine génération de Canadiens. Selon moi, l'épidémie de fièvre aphteuse que nous traversons aujourd'hui est en fait une illustration des risques qu'entraîne le village mondial qui est en train de se créer.

Tout d'abord, madame la Présidente, je voudrais vous raconter un peu l'histoire de Grosse Île. La station de quarantaine de Grosse Île a été établie en 1832, après une épidémie de choléra ayant débuté en Inde en 1826 et s'étant répandue par le Moyen-Orient pour atteindre Moscou en 1831 et la Grande-Bretagne en 1832.

À cette époque, les gens savaient peu de chose de la maladie. Ils n'en voyaient que les effets. Cette épidémie, baptisée épidémie de choléra asiatique, a fait des milliers de victimes. Devant les grands navires et les voiliers qui arrivaient au Canada au moment des vagues d'immigration, les autorités canadiennes étaient confrontées à un dilemme puisque les immigrants pouvaient être porteurs de la maladie, sans l'être nécessairement, et risquaient d'infecter le reste de la population. Elles ont donc décidé de construire les installations de Grosse Île pour y garder les immigrants plusieurs semaines et pour stériliser leurs vêtements.

Madame la Présidente, vous pouvez visiter Grosse Île aujourd'hui. On en a fait un parc national. Vous pouvez y voir les installations où sont arrivés les immigrants. Ils étaient réunis dans de vastes constructions et ils devaient ensuite se dévêtir et se mettre totalement nus. Ils entraient par une porte et traversaient une pièce sous une série de jets d'eau chaude pour être lavés. Leurs bagages étaient transportés par une autre porte et passaient par un autoclave primitif où leurs vêtements étaient stérilisés à la vapeur.

En dépit de ces précautions, beaucoup de gens sont tombés malades et sont morts à Grosse Île. On estime que 20 000 Irlandais qui voulaient immigrer au Canada sont morts entre 1832 et 1937.

 

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La pire époque a été les années 1840 avec le typhus. Cette maladie est transmise par les poux. On n'a pas compris à l'époque que c'était le problème. On savait, cependant, que certaines procédures de stérilisation primitives semblaient permettre de combattre la maladie.

La raison pour laquelle il est important de faire un petit peu d'historique, c'est que 60 ans plus tard, on s'aperçoit que des gens arrivent au Canada par nos ports et surtout nos aéroports, qu'il n'y a pas de période de quarantaine, qu'on ne pense pas à des mesures de stérilisation, qu'on ne prend aucune mesure de sécurité jusqu'à ce que cette crise de la fièvre aphteuse éclate et qu'on craint que ces gens qui entrent au Canada transportent des maladies infectieuses.

Cette épidémie de fièvre aphteuse nous dit qu'à l'heure actuelle, nous vivons dans ce village global où les maladies sont mondiales. De nos jours, nous faisons face à une crise relativement à une maladie animale qui menace de détruire une grande partie de notre secteur agricole. Elle pourrait dévaster notre secteur de l'élevage. On voit évidemment les images en Grande-Bretagne de milliers d'animaux abattus et brûlés.

Je voudrais ouvrir une parenthèse pour dire que je vais partager mon temps de parole. C'est un sujet si intéressant que j'aimerais bien parler longuement, mais je suis un historien et je suis toujours intéressé par la façon dont le passé nous renseigne sur le présent et l'avenir.

Ce que j'essaie de dire, c'est que maintenant, tout à coup, Agriculture Canada, le gouvernement et la population commencent à comprendre la nécessité de veiller à la sécurité de nos ports d'entrée lorsqu'il s'agit de lutter contre la possibilité de l'arrivée chez nous de maladies infectieuses. Tout à coup, nous sommes confrontés à une urgence.

J'ai écouté les députés qui m'ont précédé et je suis persuadé que le gouvernement fait tout ce qu'il peut dans les circonstances. Je pense que nous sommes maintenant confrontés à des signes avant-coureurs d'autres dangers à venir, des dangers qui pourraient toucher nos cultures vivrières et qui pourraient également affecter la santé des gens.

Dans ma circonscription, encore récemment, nous avons vécu une grande peur lorsqu'une personne en provenance de la République démocratique du Congo est soudainement tombée malade. Elle présentait tous les symptômes du virus d'Ebola. Elle saignait par les pores de sa peau et tous les symptômes laissaient présager qu'elle était porteuse de la maladie la plus infectieuse et la plus mortelle qu'on connaisse.

Heureusement, après l'avoir placée en isolement et avoir fait appel à tous les experts médicaux possibles, on s'est aperçu qu'il ne s'agissait pas de cette maladie infectieuse. On ignore encore de quoi elle souffrait.

Ce que cette histoire et la crise de la fièvre aphteuse nous apprennent, c'est qu'en tant que pays, en tant que gouvernement et en tant que peuple, nous devons être conscients que nous amorçons un nouveau siècle comprenant un nouveau genre de menace à la sécurité nationale. Il ne suffit pas de subitement mettre en oeuvre des moyens de défense prévoyant le recours à des matelas dans les corridors des aéroports pour stériliser les semelles des chaussures.

Nous devons constituer un plan d'attaque nous plaçant dans une situation où nous sommes prêts à réagir à une autre crise susceptible d'affecter nos cultures vivrières. Des maladies affectent le riz et d'autres, le blé. Je ne veux pas être alarmiste, mais il y a aussi des maladies très effrayantes qui affectent les humains.

À mon avis, une des conséquences positives de la crise à laquelle nous faisons face à l'heure actuelle, c'est qu'en notre qualité de parlementaires et de Canadiens nous devrions aider notre gouvernement à établir des stratégies à long terme non seulement en ce qui concerne les industries agricoles, mais également en ce qui a trait à la sécurité nationale dans son sens le plus large.

Nous devons collaborer avec d'autres organismes gouvernementaux. Le ministère de l'Agriculture ne devrait pas être le seul intervenant simplement parce qu'il s'agit d'une maladie qui affecte le bétail. Les mesures devraient être coordonnées par Protection civile Canada et faire appel à tous les ministères, y compris à Santé Canada. Cela devrait aussi influer sur la façon dont nous formons nos agents des douanes. Qui plus est, ce n'est pas seulement un problème national, ce n'est pas seulement un problème fédéral, c'est aussi un problème provincial.

 

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Je pense que le moment est venu pour les provinces et le gouvernement fédéral d'unir leurs efforts. Ils doivent se parler et ils doivent élaborer ensemble des stratégies et partager les coûts liés non seulement à la sécurité de nos aliments et des industries agricoles, madame la Présidente, mais aussi à la sécurité des prochaines générations de Canadiens.

Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureuse de me trouver parmi mes collègues à la Chambre pour participer à un débat qui, je crois, nous réunit autour d'un objectif commun. Nous voulons tous empêcher que la tragédie qui frappe actuellement des pays d'Europe ne rejoigne le Canada.

Nous devons nous demander non seulement ce que le gouvernement peut faire pour nous, et ce que l'industrie et tous les organismes qui communiqueront le message peuvent faire, mais ce que chacun d'entre nous peut également faire. Nous devons aussi nous interroger sur les gestes que nous posons individuellement et qui peuvent, par inadvertance, nuire au Canada?

Je pense au nombre de fois où je suis passée par l'aéroport Pearson et où j'ai indiqué, sur le formulaire à remplir, que je ne prévoyais pas me rendre sur une ferme dans les 14 prochains jours. Je me demande combien de fois, après avoir coché la case correspondant à cette information, je me suis rendue à mon chalet sur les rives du lac Huron pour la fin de semaine. Sur la route qui m'y conduisait, j'ai traversé les régions rurales du magnifique sud-ouest de l'Ontario. Je pense aux nombreuses fois où je me suis arrêtée dans les fermes locales pour acheter une douzaine d'oeufs ou pour marcher le long des sentiers.

Il s'agit d'une région rurale. Je représente une région urbaine. La plupart de mes électeurs diraient qu'ils ne visitent pas souvent des fermes. Je ne crois pas que ce soit vrai. Les Canadiens se déplacent beaucoup. Mes propres enfants participent souvent, au printemps, à des excursions dans des fermes organisées par leur école. Je pense à ce qui pourrait arriver ce printemps. Je crois qu'il faudrait cesser cette année ces excursions scolaires que nos enfants effectuent innocemment dans des fermes laitières ou des fermes d'élevage. Il y aurait peut-être lieu de prévenir les agriculteurs de mieux protéger leur bétail, qui est leur gagne-pain, en empêchant les gens qui ne sont pas nécessaires à l'exploitation de leur entreprise agricole d'y accéder.

De retour d'un voyage d'affaires ou d'agrément à l'étranger, des gens se rendent à leur lieu de travail et entament des discussions avec certains de leurs collègues qui vivent en milieu rural. Ils savent qu'il serait plus sage, pour le bien l'ensemble de la population, d'éviter tout contact avec ces gens pendant 48 heures et de ne pas rendre visite à leurs amis qui habitent en campagne, même si, en général, ils iraient les voir dès leur retour d'un voyage à l'étranger.

Voilà des mesures que nous pouvons prendre. Il faut connaître les mesures à prendre et éviter de paniquer. Quand on me fait marcher sur un tapis à ma descente d'avion, je pourrais penser aux deux autres paires de souliers qui se trouvent dans mes valises. Avant de rentrer au pays, je pourrais tenter de les désinfecter. Je sais que les agents de douane ont des chiens qui, grâce à leur formation, parviennent à détecter toute trace de fumier ou de terre qui pourrait se trouver dans les valises. Je pourrais prendre moi-même des précautions. De retour à la maison, je pourrais laver ou faire nettoyer mes vêtements. Je pourrais me laver les cheveux et utiliser la solution composée, en parts égales, de vinaigre et d'eau pour nettoyer mes chaussures et l'extérieur de mes valises ou d'autres articles. Je crois qu'il ne faut pas paniquer, mais que nous pouvons tous faire notre part. Pas besoin d'être des spécialistes en la matière, mais il faut simplement être vigilants.

Au Canada, le tourisme rapporte 50 milliards de dollars par année. En tout, 70 p. 100 des touristes sont des Canadiens qui visitent leur propre pays et 30 p. 100 sont des étrangers. Nous affichons encore un déficit dans le secteur touristique. Cette année est peut-être le bon moment pour prendre des vacances au Canada, pour visiter ce beau pays d'un océan à l'autre. Je pourrais faire découvrir à mes enfants ce que signifie vraiment le Canada. Je pourrais visiter le Québec ou alors le Canada atlantique, le nord ou l'ouest du pays. Peut-être pourrais-je faire cela, et d'autres familles aussi.

 

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Je ne veux pas voir disparaître notre industrie touristique. Je sais ce qui va arriver en Grande-Bretagne cet été. Je sais que l'accès aux régions rurales est fermé. Je sais que Stonehenge est fermé. C'est une tragédie sur le plan économique, mais c'est aussi une tragédie pour beaucoup de gens à des niveaux différents.

Nous pouvons faire quelque chose pour prévenir une telle tragédie au Canada. Nous faisons confiance au gouvernement, aux organisations agricoles, et aux outils de communication. Nous cherchons à obtenir la coopération de la presse, des compagnies aériennes, des producteurs, des vétérinaires et des experts. Nous assurons la protection grâce à la formation et aux mesures mises en oeuvre aux frontières.

Beaucoup de gens travaillent ensemble à cet objectif. C'est au niveau de la société civile, au niveau de la population civile que se situe, je crois, la base, la responsabilité de s'assurer que la maladie ne gagne pas notre pays.

Nous pouvons faire notre part. Je pense qu'il incombe à chacun de nous de bien réfléchir aux décisions que nous prenons et à chaque chose que nous faisons pour nous assurer de ne pas servir de point d'entrée à la maladie alors qu'il existe des moyens de prévention très simples, dont beaucoup ont été décrits ce soir à la Chambre par les députés.

Je sais gré au député à l'origine de ce débat. Je suis heureuse de pouvoir travailler à la Chambre de façon collégiale et de constater que nous débattons enfin d'une question qui vaut la peine qu'on intervienne.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Madame la Présidente, c'est un plaisir de prendre la parole ce soir au sujet de la fièvre aphteuse, problème très grave qui préoccupe grandement les agriculteurs et les éleveurs de ma circonscription, Medicine Hat.

Comme vous le savez sans doute, madame la Présidente, et je ne doute pas que vous le sachiez, Medicine Hat produit des quantités énormes de viande de boeuf, exportées en grande partie aux États-Unis. Non seulement c'est une préoccupation pour les gens au Canada, mais si la fièvre aphteuse devait se déclarer au Canada, cela aurait des répercussions importantes sur notre capacité d'exporter de la viande de boeuf et, par conséquent, sur l'économie canadienne. Rien qu'en Alberta, c'est une industrie de plusieurs milliards de dollars, des dizaines de milliards de dollars sont en jeu quand on parle des répercussions que cela aurait sur le secteur de l'élevage dans l'ensemble du pays.

J'aimerais situer la question dans son contexte, si vous me le permettez. J'ai entre les mains un communiqué de presse de la Canadian Cattlemen's Association, qui est le porte-parole de l'industrie et dont les membres ont gros à perdre. Ce sont des éleveurs. Je pense que cela met bien les choses en perspective. Le communiqué de presse dit entre autres:

    La Canadian Cattlemen's Association rappelle aujourd'hui aux éleveurs de bétail que le risque d'importer la fièvre aphteuse au Canada est minime tant que l'on respecte certaines précautions.

Suit une description de certaines des précautions que peuvent prendre les gens. Puis vient ceci:

    «La fièvre aphteuse existe dans plusieurs pays du monde, et nous avons réussi depuis presque 50 ans à en empêcher l'arrivée au Canada», dit Carl Block, président du Comité de la santé animale de la CCA.

Carl Block vient de la circonscription de mon collègue, de la région de Cypress, en Saskatchewan.

M. Block ajoute ce qui suit:

    Avec la sensibilisation accrue à cette maladie et l'intensification de la surveillance aux points d'entrée au Canada, nous sommes probablement moins vulnérables maintenant que nous ne l'avons été dans le passé, lorsqu'il était presque impossible d'arriver à ce que les voyageurs prennent cette maladie au sérieux.

Plus loin dans le communiqué, on dit:

    Block fait remarquer qu'il n'est ni pratique ni possible d'interdire la circulation des gens en provenance de pays où la maladie aphteuse existe.

Il dit:

    N'oublions pas que nous ne parlons pas uniquement de l'Europe. La fièvre aphteuse existe dans de nombreux pays du monde, dont l'Inde, la Chine, certaines régions de l'Amérique du Sud, de l'Afrique et de l'Asie. Nous ne pouvons pas nous isoler du reste du monde.

Ce sont là de sages paroles. Le public doit mettre le problème en perspective. La fièvre aphteuse existe depuis toujours. Nous avons réussi à la contrôler en prenant de simples précautions. Aujourd'hui, étant donné la sensibilisation accrue, nous prenons de bien plus grandes précautions, ce qui devrait rassurer la population.

Cela étant dit, nous devons veiller à ce que les précautions annoncées par le gouvernement soient mises en application. C'est ce qui préoccupe l'Alliance canadienne et j'ose espérer qu'il en va de même pour le parti d'en face. Il ne s'agit pas d'une question partiale. Je crois que tous les députés veulent faire en sorte que le Canada fasse tout ce qu'il peut pour empêcher que la fièvre aphteuse ne se répande, ce qui de toute évidence pourrait avoir une incidence dévastatrice au Canada ou dans tout autre pays touché.

 

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En ce qui a trait à ce que nous pouvons faire, nous devons mettre l'accent sur deux éléments. L'un est l'information et l'autre l'action. S'il est une chose que le gouvernement aurait pu faire mieux et ce qu'il pourrait encore faire mieux en ce qui concerne la maladie, c'est de voir à renseigner la population sur la fièvre aphteuse.

Le gouvernement s'est surtout fié aux médias jusqu'à présent pour informer la population. Je pense que cela est peut-être un peu dangereux. Les médias ont tendance à tracer un portrait plutôt déformé, voire même exagéré de la situation. La télévision nous montre des amas de cadavres d'animaux que l'on brûle. Ces font frissonner bien des gens. Il y lieu de s'inquiéter de la situation, mais on ne nous dit pas vraiment toute la vérité.

Comme le signale l'association canadienne des éleveurs de bovins, la maladie existe depuis toujours. Les risques qu'elle vienne au Canada sont minimes, si on prend les précautions nécessaires. Le gouvernement doit faire de la publicité et indiquer à la population ce qu'il faut faire pour empêcher la fièvre aphteuse de se propager. Il doit expliquer que cette maladie n'est pas dangereuse pour l'homme, mais que celui-ci peut en être porteur. Il lui faut prendre ces mesures, qu'il tarde à prendre.

Il a fait des annonces dans le passé pour des choses un peu moins essentielles, à mon avis. Maintenant que nous avons un problème sérieux sur lequel les Canadiens doivent être renseignés avant d'aller en Europe ou de planifier un voyage en Europe ou dans n'importe quel pays où sévit la maladie, il reste silencieux. Les gens doivent savoir comment prévenir la propagation de la maladie si elle entre au Canada, et quelles précautions ils doivent prendre à la ferme et ailleurs. Le gouvernement doit réagir. Il peut réellement aider en diffusant et en publiant des annonces, mais il ne l'a pas fait jusqu'à présent. Mes collègues, dont un grand nombre sont assis autour de moi maintenant, et moi avons tenu une conférence de presse l'autre jour pour souligner que ce serait une mesure positive que le gouvernement pourrait également prendre.

Je suis revenu du Royaume-Uni il y a quelques semaines. L'une des choses qui m'ont le plus surpris, c'était l'absence d'affiches dans les aéroports pour informer les voyageurs et les sensibiliser au fait que s'ils sont allés dans des régions rurales en Europe et ailleurs, ils devraient faire savoir par exemple qu'ils ont de la terre sous les chaussures qu'ils ont dans leurs valises. Ça me semblerait être une mesure logique, une chose simple que les agents des douanes et du revenu pourraient faire aux aéroports. On vérifie les chaussures, elles sont désinfectées sur le tapis nettoyant. Puis les voyageurs sont libres de partir. Ce serait réglé.

Toutefois, il n'y a rien à cet effet. Non seulement n'y avait-il aucune affiche, mais quand je suis passé aux douanes, on ne m'a pas posé une seule question à ce sujet. On m'a demandé si j'avais de la nourriture, ce que j'ai été heureux d'entendre. Toutefois, ils n'ont rien mentionné sur la possibilité que j'aie des vêtements boueux. Ils ne m'ont pas demandé si j'avais visité une ferme. J'ai tout de même dû remplir un formulaire sur lequel je devais préciser si je devais me rendre dans une ferme, mais on ne m'a demandé si j'étais allé sur une ferme.

Ce sont là les questions que les agents de douanes pourraient poser et qu'ils ne posent pas à venir jusqu'à maintenant. Nous aimerions beaucoup les encourager à le faire. C'est une mesure logique qu'ils pourraient adopter.

On pourrait également sensibiliser les écoles au fait qu'il y a un risque que les élèves qui vont faire un voyage d'études en Europe puissent être porteurs de la fièvre aphteuse à leur retour. Dans certains cas, il y a de l'argent en cause et les élèves partent de toute façon. S'ils doivent partir, il est important qu'ils connaissent les précautions à prendre. C'est également là une chose que le gouvernement pourrait faire. Il pourrait faire passer le message aux jeunes.

Il y a aussi les interventions que nous pouvons faire. J'ai déjà abordé la question. Nous devons nous assurer d'avoir des tapis nettoyants partout dans les aéroports. Nous avons reçu récemment des rapports selon lesquels ces tapis ne sont toujours pas installés dans bon nombre d'aéroports. Ce n'est pas acceptable.

Nous avons envoyé dix vétérinaires au Royaume-Uni pour les aider à combattre l'épizootie. C'est fantastique. Je m'en réjouis, mais une des choses qu'ils auront sûrement constatées, c'est avec quelle facilité cette maladie se répand. On penserait que le gouvernement communiquerait avec ces vétérinaires et en apprendrait que nous devrions avoir mis en place les mesures de précaution nécessaires.

Je ne comprends pas pourquoi nous n'aurions pas en place des tapis-décrottoirs enduits d'un mélange de vinaigre pour tuer les germes de fièvre aphteuse. C'est tellement simple. C'est une chose pour le gouvernement d'annoncer ces mesures, mais c'en est une autre de les mettre réellement en application.

 

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Nous devons nous assurer que ces tapis-décrottoirs sont en place 24 heures par jour dans les aéroports. Je suis convaincu que les députés insisteront auprès du gouvernement pour qu'il s'en assure. Quand les voyageurs descendent d'un avion en provenance d'un pays où sévit la fièvre aphteuse, spécialement le Royaume-Uni où la maladie est hors de contrôle, ils doivent marcher sur le tapis.

Je vais parler brièvement des soldats britanniques. La BFC Suffield est située dans ma circonscription. Beaucoup de gens craignent que les soldats britanniques n'apportent la fièvre aphteuse du Royaume-Uni chez nous. Cependant, les précautions qu'ils prennent sont bien plus grandes que celles que prend le voyageur ordinaire. L'équipement et les vêtements des soldats sont complètement désinfectés non seulement en sol britannique mais aussi à leur arrivée ici.

Aujourd'hui, comme nous avons pu le constater, le système semble bien fonctionner. Une cargaison de véhicules en provenance du Royaume-Uni, des véhicules flambants neufs qui n'avaient jamais roulé dans des régions rurales, est arrivée à Montréal, où l'on a découvert de la boue sur certains véhicules. Dans leur sagesse, nos douaniers ont jugé cela inacceptable et ils ont renvoyé les véhicules.

J'ai reçu un appel téléphonique du haut-commissariat de Grande-Bretagne aujourd'hui. On y est sensible au fait que la base de Suffield se trouve dans ma circonscription. On s'est dit désolé, m'assurant que la situation ne se reproduirait plus. Les véhicules auraient été transportés à partir d'une base britannique à bord d'un camion à plate-forme surbaissée. C'est sur la route qui menait au port qu'ils auraient été éclaboussés de boue. Il aurait suffi de les nettoyer au port pour que l'affaire en reste là. Malheureusement, les véhicules se sont rendus au Canada, où nos douaniers ont repéré le problème et pris les mesures nécessaires.

Tous le tissu a été désinfecté. Tout s'est fait selon les règles. Le système a fonctionné, et nous avons l'assurance que les Britanniques seront plus prudents dans l'avenir et que la situation ne se reproduira pas.

Nous tentons d'appliquer des mesures qui font preuve de bon sens dans tous les cas. Nous pressons le gouvernement de veiller à ce que les mesures qu'il a annoncées soient mises en oeuvre, autrement il est fort possible que nous aurons des problèmes. C'est bien la dernière chose que nous voulons voir.

M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Madame la Présidente, c'est pour moi un honneur de participer à ce débat d'urgence, un débat qui a des conséquences étendues pour l'industrie albertaine de l'élevage et dans tous les secteurs de l'économie.

Il y a quelques semaines, nous avons étudié la motion d'opposition sur la situation de l'agriculture. Une bonne partie de la recherche en vue du débat de ce soir est la même que celle qui a été faite dans le cadre de la motion d'opposition. Je suis heureux de dire que beaucoup de choses positives se sont produites et que nous avons vu le gouvernement passer à l'action dans ce dossier qui n'est pas sectaire.

Le gouvernement a réagi dans une certaine mesure aux préoccupations présentées par les agriculteurs et d'autres groupes visés, mais nous nous demandons toujours si cela est suffisant. Il s'agit là d'une maladie qui suscite des craintes, et dont nous croyons, comme le député de Medicine Hat l'a dit, pouvoir minimiser la menace si nous prenons les mesures de précaution qui s'imposent.

C'est la quatrième fois que je prends la parole à la Chambre pour exprimer les préoccupations de mes électeurs, qui téléphonent et écrivent pratiquement tous les jours à mon bureau. Il ne serait pas exagéré de dire que nous avons reçu des centaines d'appels. Il y a eu de nombreuses lettres, de nombreux appels et des gens se sont arrêtés à mon bureau pour exprimer leur horreur et leur crainte au sujet de cette maladie infectieuse.

Bien que je sois heureux de la tenue du débat de ce soir, je doute un peu qu'il contribue à disséminer ces renseignements des plus importants et des plus nécessaires, vu l'heure tardive. Je voudrais inviter les députés des deux côtés de la Chambre, notamment ceux qui habitent dans des régions surtout rurales, où le secteur des affaires dépend d'une forte industrie d'élevage, à envisager de poursuivre le débat avec leurs électeurs, dans leur localité, dans des assemblées publiques, et à rencontrer les gens les plus inquiets.

La semaine dernière, j'ai pris l'initiative d'organiser des assemblées publiques dans ma circonscription à compter de mercredi prochain, en commençant à Stettler, qui est presque au centre géographique de ma circonscription. Parmi les conférenciers invités, il y aura un représentant de l'association des éleveurs de bétail et un spécialiste de l'import-export de l'Agence canadienne d'inspection des aliments.

 

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Je félicite le gouvernement. Ce soir, nous avons entendu des députés dire que nous ne voulions pas faire preuve d'esprit de parti dans cette affaire. On a hésité à permettre à un agent de l'ACIA de venir dans ma circonscription. Cependant, son représentant a finalement été autorisé et il viendra à Stettler, dans Crowfoot, le 11 avril. Le lendemain, le 12, il sera à Camrose, le plus grand centre urbain de ma circonscription, pour une autre séance d'information sur cette maladie infectieuse.

Le moyen le plus efficace de toucher les gens au Canada, d'atteindre nos électeurs, c'est d'aller à eux. Nous ne pouvons pas avoir un dialogue avec les gens les plus touchés par les décisions que nous prenons et les orientations que nous donnons si nous restons ici à la Chambre. Les électeurs de nos circonscriptions ont peut-être des questions précises à poser et ils ont peut-être de très bonnes solutions à proposer. Le seul moyen de réagir à leurs préoccupations et d'entendre leur point de vue, c'est de les rencontrer en personne.

Par conséquent, j'exhorte tous les députés à suivre mon exemple et à tenir des assemblées publiques pendant l'ajournement de Pâques. Je les encourage également à parler abondamment de la maladie dans leurs bulletins parlementaires et à expliquer la gravité de la menace pour le secteur de l'élevage bovin au Canada.

Comme je le répète à la Chambre et dans les journaux locaux de ma circonscription depuis deux ou trois semaines, les agriculteurs font face à suffisamment de problèmes qui nuisent à leur industrie et à leur capacité de produire des aliments salubres de première qualité. Il n'est pas nécessaire d'importer un problème susceptible de ravager un secteur agricole déjà fragile. Il faut prendre des précautions pour empêcher la fièvre aphteuse d'entrer et de se répandre au Canada.

Comme je viens de le dire, chaque jour des électeurs de toute ma circonscription me font part de leurs inquiétudes face à cette maladie. Je les comprends et je partage leurs craintes. Le secteur agricole de l'Alberta tire son plus gros revenu de l'industrie de l'élevage du bovin. Si ce virus attaquait notre bétail, ce serait vraiment catastrophique pour le bien-être financier de notre province et de notre pays.

La catastrophe ne se limiterait pas à l'industrie de l'élevage du bovin. Toute l'économie de notre pays en souffrirait, de même que tout le secteur agricole et celui du tourisme. Toute la vie rurale serait affectée, de même que la ferme familiale.

Comme de nombreux députés l'ont déjà fait remarquer, les spécialistes de l'industrie des productions animales estiment le coût de cette maladie à plus de 20 milliards de dollars, et cela seulement pour la première année.

Pour lutter contre cette maladie qui était apparue en Saskatchewan en 1952 et qui avait affecté seulement 42 fermes, il avait fallu abattre 1 300 bovins, 300 cochons et 100 moutons. Pour le contribuable canadien, pour le gouvernement fédéral, cette lutte avait coûté un million de dollars. Dans l'économie d'aujourd'hui, pour ces 42 fermes, le coût atteindrait presque sept millions de dollars, mais il est peu probable qu'il n'y aurait pas plus de 42 fermes affectées. Dans ma circonscription, certains petits comtés renferment nettement plus que 42 fermes.

L'Organisation des Nations Unies pour l'agriculture et l'alimentation a déclaré qu'aucun pays n'était parfaitement à l'abri de la fièvre aphteuse, en raison d'un certain nombre de facteurs, à savoir, l'augmentation des échanges internationaux, l'expansion du tourisme et le transport d'animaux et de produits d'origine animale.

Il y a trois semaines, mes électeurs étaient très préoccupés par l'arrivée imminente de militaires dans la circonscription. Les militaires ont mesuré l'ampleur des préoccupations de la population à l'égard de cette maladie. Ils ont pris acte de ses préoccupations et ont fait le nécessaire pour corriger le problème. Il faut cependant continuer d'être vigilant.

D'après les informations confirmées par l'Agence canadienne d'inspection des aliments, la fièvre aphteuse a été diagnostiquée au Royaume-Uni le 20 février. Elle l'a été en France et en Argentine le 13 mars. Depuis, elle a été diagnostiquée dans les Pays-Bas, en Arabie saoudite et dans toute l'Europe continentale. La fièvre aphteuse est extrêmement grave. C'est l'une des maladies animales les plus contagieuses et fait subir des pertes à l'industrie.

 

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D'après l'Agence canadienne d'inspection des aliments, les animaux canadiens y sont très sensibles. En cas d'épizootie, le virus pourrait se propager rapidement à toutes les régions du Canada par le seul fait de la libre circulation habituelle du bétail. À moins d'un diagnostic précoce et de la prise immédiate de mesures d'éradication, les pertes pourraient atteindre les milliards de dollars, et ce dès la première année.

Il a été question des espèces sauvages. Le député de Cypress Hills—Grasslands a parlé des chevreuils, des wapitis et des bisons, et de ce qui risque de se produire si ces animaux deviennent porteurs du virus. Ils en seraient le réservoir, pour ainsi dire.

La semaine dernière, des représentants de la Canadian Cattlemen Association étaient ici, à Ottawa. J'ai eu le plaisir de rencontrer Dave Salverson, Wilbur Stewart, Kevin Boone, Arno Doerksen et d'autres, de Camrose, que la poussée de fièvre aphteuse inquiète beaucoup.

Les éleveurs de l'ouest du Canada sont nerveux au sujet de la possibilité de propagation de cette maladie dans notre pays, mais leur plus grande crainte est que, si la maladie entrait en Amérique du Nord par les États-Unis, nos frontières seraient fermées. Le protectionnisme pourrait entrer en jeu, et cela aurait un effet dévastateur sur l'industrie.

Compte tenu du fait que 50 p. 100 de nos exportations de boeuf sont destinées aux États-Unis, les éleveurs de l'Ouest disent que leur industrie prendrait un dur coup si le marché américain leur était fermé. L'industrie de l'élevage bovin est un des secteurs de l'agriculture canadienne où les choses vont bien. Le prix du boeuf est meilleur qu'il ne l'a été depuis longtemps. Environ un bouvillon canadien sur deux est exporté vers les marchés étrangers. Le Canada n'a pas une forte demande intérieure comme les États-Unis.

Nous devons empêcher que la maladie ne se propage ici. J'implore le gouvernement de prendre toutes les précautions nécessaires et de voir à ce que ces mesures soient respectées de façon stricte afin d'empêcher que la fièvre aphteuse ne se propage au Canada.

Que pouvons-nous faire sans créer un climat de panique dans tout le pays? Tout d'abord, nous devons voir à ce que le public soit informé. Nous devons voir des affiches, et toute personne qui voyage à l'étranger doit avoir une brochure qui l'aidera à comprendre le genre de maladie dont il s'agit. Nous devons être certains que les gens comprennent les conséquences que cela pourra avoir s'ils enfreignent la loi et rapportent, comme l'a dit le député d'en face, des viandes et des produits laitiers d'autres pays. Ils doivent comprendre que la situation est grave.

Je demande aussi au gouvernement de préparer un plan d'intervention. Le secteur de l'élevage le comprendrait. Les gens pourraient voir que leur gouvernement les écoute.

Nous pouvons combattre la maladie et nous pouvons l'empêcher d'entrer chez nous en prenant des précautions. Nous devons réduire le danger le plus possible, mais nous devons reconnaître à quel point il est menaçant.

La semaine prochaine sera la Semaine de protection civile. Les collectivités de tous les coins discuteront de plans de redressement en cas de sinistres comme les phénomènes météorologiques violents, les incendies, les inondations et les autres événements du genre, mais rien ne peut avoir un impact aussi considérable que cette maladie sur notre société. Nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre. Nous devons être prêts si jamais la maladie frappe.

Je remercie le député qui a demandé la tenue de ce débat à la Chambre ce soir. Je crois que c'est le sujet dont les Canadiens entendent parler dans les médias tous les soirs. Je suis satisfait de la motion présentée et je suis heureux d'avoir eu l'occasion d'intervenir à ce sujet.

M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): Madame la Présidente, compte tenu de l'heure tardive, je serai très bref. La question est fort grave et je me réjouis de voir que de nombreux députés participent ce soir au débat d'urgence.

Je tiens à m'assurer que mes collègues de tous les partis représentés à la Chambre savent qu'il se fait beaucoup d'agriculture dans ma circonscription du nord de l'Ontario. Il y a des fermes laitières depuis le district d'Algoma jusque dans l'ouest du district de Sudbury, près de Massey, dans la région de Lee Valley, et jusque dans l'île Manitoulin. Un nombre étonnamment important d'agriculteurs élèvent aussi du bétail. En outre, de vastes secteurs de ma circonscription abritent des orignaux et des cerfs. Il est à espérer que la tragédie de l'épizootie de fièvre aphteuse, qui fait présentement rage au Royaume-Uni, n'atteindra jamais notre pays. Si cela arrivait, il faudrait protéger non seulement les animaux domestiques qu'élèvent nos agriculteurs, mais encore le gibier, qui relève aussi de notre responsabilité

 

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Des électeurs, dont M. et Mme Hoback de Thessalon, m'ont fait part de leurs observations. Un agriculteur de l'île Manitoulin, Bill Orford, m'a aussi exprimé ses inquiétudes. Ils se demandent si nous ne devrions pas fermer notre frontière aux touristes.

Je ne suis pas sûr que nous en soyons là, mais je crois que le gouvernement est disposé à examiner sérieusement le problème, et nous verrons ce qui arrivera. Nous savons que nous devons protéger notre industrie agricole et notre industrie touristique. Nous avons un gouvernement très responsable. Je suis convaincu que tous les députés, quelle que soit leur affiliation politique, mettent de côté leur esprit de parti.

Cette crise qui sévit en Europe, en Angleterre et en Argentine ressemble à un volcan. Nous ne pouvons rien planifier dans le cas d'un volcan. Quand un volcan entre en éruption, tout se passe rapidement et furieusement. J'espère que la présente crise ne sera pas aussi fulgurante qu'un volcan, mais elle pourrait bien l'être.

Je voudrais, en quelques mots, appuyer les efforts du gouvernement en ce qui concerne la protection des Canadiens, les agriculteurs canadiens et la faune canadienne. Nous avons vu aujourd'hui qu'un bateau britannique a été renvoyé parce qu'il avait à son bord du matériel destiné aux troupes britanniques s'entraînant à Suffield et qu'il y avait de la terre sur les pneus et les chenilles des véhicules.

Le gouvernement a pris la question très au sérieux et je suis heureux d'avoir participé quoique brièvement, au débat de ce soir.

Le président suppléant (Mme Bakopanos): Comme aucun autre député ne souhaite intervenir, je déclare la motion adoptée.

(La motion est adoptée.)

Le président suppléant (Mme Bakopanos): En conséquence, la Chambre s'ajourne jusqu'à 14 heures, demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 23 h 17.)