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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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37e LÉGISLATURE, 3e SESSION

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 039

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 22 avril 2004




1000
V AFFAIRES COURANTES
V     Réponse du gouvernement à des pétitions
V         L'hon. Roger Gallaway (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)

1005
V     Les comités de la Chambre
V         Procédure et affaires de la Chambre
V         M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)
V     Questions au Feuilleton
V         L'hon. Roger Gallaway (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)
V Initiatives ministérielles
V     Loi sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank
V         L'hon. Andy Scott
V         L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.)

1010
V         M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)
V         Le Président
V Affaires courantes
V     Pétitions
V         Les maladies du rein
V         M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)
V         Les affaires étrangères
V         M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)
V         M. Jason Kenney
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V Initiatives ministérielles
V     Loi sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank
V         L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.)

1015
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         L'hon. Larry Bagnell

1020

1025

1030
V SANCTION ROYALE
V         Le président suppléant (M. Bélair)

1035
V Initiatives ministérielles
V     Loi sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank
V         M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, PCC)

1040

1045

1050

1055
V         L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.)
V         M. John Duncan

1100

1105
V         L'hon. Larry Bagnell
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         M. John Duncan
V         M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ)

1110

1115

1120

1125
V         L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.)

1130
V         M. Yvan Loubier

1135
V         M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD)

1140

1145

1150

1155
V         L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.)

1200
V         M. Pat Martin
V         L'hon. Larry Bagnell
V         M. Pat Martin

1205
V         L'hon. Andrew Telegdi (secrétaire parlementaire du premier ministre (Affaires autochtones), Lib.)

1210

1215
V         M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC)

1220

1225

1230

1235

1240
V         L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.)
V         M. Stockwell Day

1245
V         L'hon. Larry Bagnell
V         M. Stockwell Day

1250
V         M. Werner Schmidt (Kelowna, PCC)

1255

1300
V         L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.)

1305
V         M. Werner Schmidt
V         L'hon. Larry Bagnell

1310
V         M. Werner Schmidt
V         L'hon. Larry Bagnell
V         M. Werner Schmidt
V         M. John Cummins (Delta—South Richmond, PCC)

1315

1320

1325
V         L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.)
V         M. John Cummins
V         L'hon. Larry Bagnell

1330
V         M. John Cummins
V         M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, PCC)

1335
V         M. John Cummins
V         M. Ted White (North Vancouver, PCC)

1340

1345
V         L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.)

1350
V         M. Ted White

1355
V         L'hon. Larry Bagnell
V         M. Ted White
V DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
V     Les oiseaux migrateurs
V         L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.)
V     Le projet de loi C-250
V         M. Leon Benoit (Lakeland, PCC)

1400
V     L'industrie des assurances
V         M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)
V     Haïti
V         M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.)
V     La sclérose en plaques
V         M. Janko Peric (Cambridge, Lib.)
V     L'industrie minière
V         M. Andy Burton (Skeena, PCC)
V     L'environnement
V         M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ)

1405
V     RAI International
V         Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.)
V     Le dalaï-lama
V         M. Rob Anders (Calgary-Ouest, PCC)
V     Transparency International
V         M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.)
V     Le Jour de la terre
V         M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD)
V     Le dalaï-lama
V         Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ)

1410
V     Le syndrome de fatigue chronique
V         M. Rodger Cuzner (Bras d'Or—Cape Breton, Lib.)
V     Le Jour de la terre
V         M. Bob Mills (Red Deer, PCC)
V     Le Jour de la terre
V         M. Raymond Simard (Saint-Boniface, Lib.)
V     Le gouvernement du Canada
V         M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, PCC)
V     Les sans-abri
V         L'hon. Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)

1415
V QUESTIONS ORALES
V     Les affaires étrangères
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC)
V         Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.)
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC)
V         Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.)
V     Le programme de commandites
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC)
V         Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.)
V         M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC)
V         L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.)
V         M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC)

1420
V         L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.)
V     La fiscalité
V         M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ)
V         L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.)
V         M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ)
V         L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.)
V         M. Pierre Paquette (Joliette, BQ)
V         L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.)
V         M. Pierre Paquette (Joliette, BQ)
V         L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.)
V     Les droits de la personne
V         L'hon. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD)

1425
V         Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.)
V         L'hon. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD)
V         Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.)
V     Le programme de commandites
V         M. Vic Toews (Provencher, PCC)
V         L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.)
V         M. Vic Toews (Provencher, PCC)
V         L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.)
V         Le Président
V     Les marchés publics
V         M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC)

1430
V         Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.)
V     Les affaires étrangères
V         M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC)
V         Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.)
V     Le peuple arménien
V         Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ)
V         L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.)
V         Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ)
V         L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.)
V     Le bois d'oeuvre
V         M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ)
V         L'hon. Jim Peterson (ministre du Commerce international, Lib.)

1435
V         M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ)
V         L'hon. Jim Peterson (ministre du Commerce international, Lib.)
V     Les marchés publics
V         M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PCC)
V         L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.)
V         M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PCC)
V         Le Président
V         M. Loyola Hearn
V         L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.)
V         M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, PCC)
V         L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.)

1440
V         Le Président
V         M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, PCC)
V         Le Président
V         M. Rahim Jaffer
V         L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.)
V     L'industrie de l'éthanol
V         Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.)
V         L'hon. R. John Efford (ministre des Ressources naturelles, Lib.)
V     La santé
V         Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD)
V         L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.)
V     L'assurance-emploi
V         M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD)
V         L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.)

1445
V     Le programme de commandites
V         Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC)
V         L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.)
V         Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC)
V         L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.)
V         M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, PCC)
V         Le Président
V         L'hon. Reg Alcock (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.)
V         M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, PCC)
V         L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.)
V     Les travailleurs âgés
V         Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Neigette-et-la Mitis, BQ)

1450
V         L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.)
V         Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Neigette-et-la Mitis, BQ)
V         L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.)
V     Le Parti libéral du Canada
V         M. Ken Epp (Elk Island, PCC)
V         Le Président
V         M. Ken Epp (Elk Island, PCC)
V         Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.)
V     Le développement des ressources humaines
V         Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.)
V         Le Président

1455
V         Mme Judi Longfield
V         L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.)
V     Les affaires étrangères
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC)
V         Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.)
V     Les marchés publics
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC)
V         Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.)
V     La fonction publique
V         Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ)
V         Le Président
V         Mme Christiane Gagnon
V         L'hon. Hélène Scherrer (ministre du Patrimoine canadien, Lib.)
V     La santé
V         M. Eugène Bellemare (Ottawa—Orléans, Lib.)
V         Le Président
V         M. Eugène Bellemare

1500
V         L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.)
V     Présence à la tribune
V         Le Président
V     Les travaux de la Chambre
V         M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, PCC)
V         L'hon. Jacques Saada (leader du gouvernement à la Chambre des communes et ministre responsable de la réforme démocratique, Lib.)
V     Recours au Règlement
V         L'honorable député de New Westminster—Coquitlam—Burnaby
V         L'hon. Mauril Bélanger (leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)
V         Le vice-président

1505
V INITIATIVES MINISTÉRIELLES
V     Loi sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank
V         M. Lawrence O'Brien (Labrador, Lib.)

1510

1515
V         M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.)
V         M. Lawrence O'Brien
V         L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.)
V         M. Lawrence O'Brien

1520
V         L'hon. Larry Bagnell
V         M. Lawrence O'Brien
V         L'hon. Roger Gallaway (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)

1525

1530

1535
V         M. Ted White (North Vancouver, PCC)

1540
V         L'hon. Roger Gallaway
V         M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.)
V         L'hon. Roger Gallaway

1545
V         M. John Cummins (Delta—South Richmond, PCC)
V         L'hon. Roger Gallaway
V         M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.)

1550

1555

1600
V         L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.)

1605
V         M. Rick Laliberte

1610
V         L'hon. Ethel Blondin-Andrew (ministre d'État (Enfance et Jeunesse), Lib.)

1615

1620

1625

1630
V         Le vice-président
V         M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, PCC)
V         L'hon. Ethel Blondin-Andrew

1635
V         M. Charlie Penson
V         Le vice-président
V         L'hon. Ethel Blondin-Andrew
V         L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.)

1640
V         L'hon. Ethel Blondin-Andrew
V         Le vice-président
V         Le vice-président
V         L'hon. Mauril Bélanger
V         Le vice-président
V     Le Code criminel
V         L'hon. Gar Knutson (ministre d'État (Marchés nouveaux et émergeants), Lib.)

1645
V         M. Myron Thompson (Wild Rose, PCC)
V         L'hon. Gar Knutson

1650
V         M. Ken Epp (Elk Island, PCC)
V         L'hon. Gar Knutson
V         M. Myron Thompson (Wild Rose, PCC)

1655

1700

1705

1710
V         L'hon. Sue Barnes (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.)

1715
V         M. Ken Epp
V         La présidente suppléante (Mme Hinton)
V         L'hon. Sue Barnes
V         M. Myron Thompson

1720
V         M. Ken Epp (Elk Island, PCC)
V         M. Myron Thompson
V         M. Paul Harold Macklin (Northumberland, Lib.)

1725

1730
V         La présidente suppléante (Mme Hinton)
V Initiatives parlementaires
V     La Loi sur les langues officielles
V         L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.)

1735

1740
V         M. Scott Reid (Lanark—Carleton, PCC)

1745
V         L'hon. Don Boudria
V         M. Scott Reid (Lanark—Carleton, PCC)

1750

1755
V         M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ)

1800

1805

1810
V         M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD)

1815

1820
V         M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ)

1825

1830
V         Le président suppléant (Mme Hinton)
V Motion d'ajournement
V         L'environnement
V         M. Serge Cardin (Sherbrooke, BQ)
V         L'hon. Dan McTeague (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.)

1835
V         M. Serge Cardin

1840
V         L'hon. Dan McTeague
V         La présidente suppléante (Mme Hinton)






CANADA

Débats de la Chambre des communes


VOLUME 139 
NUMÉRO 039 
3e SESSION 
37e LÉGISLATURE 

COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)

Le jeudi 22 avril 2004

Présidence de l'honorable Peter Milliken

    La séance est ouverte à 10 heures.


Prière



+AFFAIRES COURANTES

[Affaires courantes]

*   *   *

  +(1000)  

[Traduction]

+Réponse du gouvernement à des pétitions

+

    L'hon. Roger Gallaway (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à deux pétitions.

*   *   *

  +-(1005)  

+-Les comités de la Chambre

+Procédure et affaires de la Chambre

+-

    M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le 19e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet de la sécurité sur la colline parlementaire. Plus tard aujourd'hui, un rapport identique sera déposé au Sénat.

*   *   *

+-Questions au Feuilleton

+-

    L'hon. Roger Gallaway (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

    Le Président: D'accord?

    Des voix: D'accord.


+-Initiatives ministérielles

[Initiatives ministérielles]

*   *   *

[Traduction]

+-Loi sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank

+-

    L'hon. Andy Scott (au nom du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien) propose: Que le projet de loi C-11, Loi portant mise en vigueur de l'Accord d'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank, soit lu pour la troisième fois et adopté.

+-

    L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je vais mettre de l'ordre dans mes notes. Compte tenu de notre système de sécurité, les gens ne peuvent être immédiatement prêts à entrer pour écouter. Pendant qu'ils entrent, je vais organiser mes notes.

    Entre-temps, je félicite les députés du gouvernement et ceux de l'opposition de l'appui qu'il ont exprimé, hier, en vue de l'adoption de ce projet de loi. Les députés de tous les partis ont énormément coopéré pour appuyer cette mesure législative.

  +-(1010)  

+-

    M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.

    Je ne vous critique pas, mais je signale que je me suis effectivement levé quand vous avez annoncé la présentation des pétitions. Je soupçonne qu'à cause de l'angle où j'étais placé, vous ne m'avez pas vu. De ce fait, je demande le consentement unanime de la Chambre pour revenir à la présentation des pétitions.

+-

    Le Président: Y a-t-il consentement unanime pour revenir aux pétitions?

    Des voix: D'accord.


+-Affaires courantes

[Affaires courantes]

*   *   *

[Traduction]

+-Pétitions

+-Les maladies du rein

+-

    M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais présenter deux pétitions. Tout d'abord, je suis heureux de présenter une autre pétition au nom de tous ceux au Canada qui souffrent de maladies du rein.

    J'ai, dans le passé, présenté des pétitions pour appuyer la recherche dans le domaine du rein bio-artificiel. Je suis très heureux de constater que la recherche conduit à l'utilisation de cellules rénales vivantes pour reproduire pratiquement toutes les fonctions d'un rein en santé. Tout cela est encore au stade expérimental, mais les pétitionnaires sont très heureux de cela.

    Dans ce cas-ci, les pétitionnaires signalent que les maladies du rein constituent un problème de taille qui continue à prendre de l'ampleur au Canada. Néanmoins, de véritables progrès sont réalisés à maints égards pour prévenir et traiter des maladies du rein. Les pétitionnaires prient le Parlement d'inciter les Instituts canadiens de recherche en santé à inclure explicitement la recherche sur les maladies du rein en nommant l'un d'eux l'Institut des maladies du rein et du tractus urinaire.

*   *   *

+-Les affaires étrangères

+-

    M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, ma deuxième pétition vient de citoyens de la région de Peterborough qui s'inquiètent de la condition de Mahmoud Jaballah, qui a été placé en isolement cellulaire en 1999 sans être avisé des accusations portées contre lui.

    Les pétitionnaires signalent que M. Jaballah a été exonéré par un juge en fonction de ses excellentes références morales. Il a été replacé en détention en 2001.

    Les pétitionnaires précisent que si M. Jaballah est renvoyé en Égypte, qu'il a quitté en tant que réfugié, il risque d'être soumis à la torture et d'être exécuté, et son épouse et ses six enfants seront alors laissés seuls au Canada. Ils demandent au Parlement de libérer M. Jaballah conformément à la décision prise par le tribunal ou de lui accorder son droit à un procès équitable dans le cadre duquel on dévoilera toutes les prétendues preuves qu'on détient contre lui.

+-

    M. Jason Kenney: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement pour demander le consentement unanime à la Chambre pour proposer: Que notre Chambre, en reconnaissance de ses grands efforts pour préserver le patrimoine culturel et historique du peuple tibétain par des moyens pacifiques, accepte que Sa Sainteté, le 14e dalaï lama, Tenzin Gyatso, qui est également récipiendaire du prix Nobel de la paix, soit déclaré citoyen honoraire du Canada.

    Je crois que les leaders parlementaires et les représentants de tous les partis ont été avisés à l'avance de cette motion.

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Y a-t-il consentement unanime pour déposer la motion?

    Des voix: D'accord.

    Des voix: Non.


+-Initiatives ministérielles

[Initiatives ministérielles]

*   *   *

[Traduction]

+-Loi sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank

    La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-11, Loi portant mise en vigueur de l'Accord d'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank, soit lu pour la troisième fois et adopté.

+-

    L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais dans un premier temps rendre hommage aux membres de la première nation de Westbank qui sont à Ottawa depuis un certain temps déjà.

    Le processus a été long, et je salue la détermination et l'enthousiasme dont ils ont fait preuve ainsi que les efforts qu'ils ont déployés pour réaliser cette entente qui contribuera grandement à faire progresser la collectivité. Elle se porte déjà fort bien, mais en progressant encore davantage, elle constituera, à bien des égards, un modèle à suivre pour de nombreuses autres collectivités.

    Je tiens à féliciter le chef Robert Louie, les conseillers Rafael DeGuevara, Michael Westuik et Larry Derrickson, M. Tim Raybould, l'un des négociateurs de l'autonomie gouvernementale, Deana Hamilton, ex-conseillère, ainsi que Micha Menczer et Brenda MacGregor.

    Aux aînés, j'aimerais dire:

    [Note de la rédaction: le député s'exprime en okanagan.]

    (Traduction)

    Je tiens également à féliciter les partis d'opposition. Les députés de toutes allégeances ont fait preuve de bonne volonté pour aider cette première nation à réaliser cet accord d'autonomie gouvernementale et améliorer le sort de ce peuple. Nous en avons eu la preuve hier soir.

    J'espère que nous réussirons à avoir le même esprit de collaboration avec l'entente concernant le peuple tlicho qui est, bien entendu, complètement différente mais qui prévoit un certain nombre d'éléments très créatifs. Nous serions heureux de donner aux députés de l'opposition des séances d'information à ce sujet, car il s'agit de points complexes et difficiles. Les députés qui ne siègent pas au comité pourraient avoir beaucoup de questions à ce sujet. Il va sans dire qu'elles feront l'objet de discussions en comité.

    Nous serions heureux de donner des séances d'information aux députés qui ne siègent pas au comité et de répondre aux questions qu'ils pourraient avoir sur des aspects uniques et des plus intéressants de l'accord.

    Je félicite également le ministre Andy Mitchell qui n'a pas cessé de faire des pressions pour que ce projet de loi figure au programme...

  +-(1015)  

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): À l'ordre, s'il vous plaît. Le secrétaire parlementaire vient de désigner nommément le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, même s'il sait que cela n'est pas acceptable à la Chambre. Je lui demande donc de faire attention.

+-

    L'hon. Larry Bagnell: Monsieur le Président, comme cela est plutôt nouveau pour moi, je vous remercie de m'avoir corrigé.

    Je veux également féliciter les adjoints du ministre et le personnel du ministère qui ont travaillé si fort sur ce dossier pendant plusieurs années. Je m'attends à certaines opinions contraires, mais je suis impatient de les entendre. Lorsqu'il s'agit d'un dossier aussi complexe et d'aussi grande portée, les points de vue de diverses circonscriptions doivent être exprimés, ce qui est tout à fait approprié.

    Aujourd'hui, j'espère apporter certains éclaircissements relatifs à certaines inquiétudes ainsi qu'à des éléments qui n'ont peut-être pas été compris. Lorsque toutes sortes de juristes et de gens de divers paliers de gouvernement passent des années à élaborer un accord, des préoccupations sont exprimées pendant le processus et nous tentons de les prendre en compte. Je pense qu'en réponse à certaines préoccupations nous fournirons de la bonne information dont les gens n'étaient sans doute pas au courant.

    J'appuie aujourd'hui avec enthousiasme le projet de loi C-11 et j'exhorte la Chambre à l'adopter. Je remercie les membres du Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles, qui ont approuvé avec célérité le projet de loi C-11. En n'apportant que trois amendements de nature technique, le comité reconnaît clairement l'importance de la gouvernance effective des premières nations et démontre nettement la sincérité de son engagement à atteindre cet objectif valable.

    La collaboration dont ont fait preuve les membres du comité fait écho à celle du gouvernement du Canada et de la première nation de Westbank pendant les discussions et les négociations qui ont abouti à l'Accord sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank. En tant que secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, j'ai particulièrement à coeur la collaboration étroite avec les Canadiens d'origine autochtone et les dirigeants des premières nations.

    J'estime que seul un partenariat sincère entre le gouvernement fédéral et les premières nations permettra aux collectivités autochtones de réaliser une véritable autonomie politique. Seuls des gouvernements ouverts, transparents et responsables permettront aux premières nations de construire des économies dynamiques et robustes et des sociétés saines et durables. En donnant effet à l'Accord sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank, le projet de loi C-11 est une étape cruciale sur la voie de la réalisation des aspirations de la première nation de Westbank.

    La première nation de Westbank a déjà prouvé qu'elle sait comment gérer ses affaires judicieusement. Après tout, il s'agit d'une communauté autochtone exceptionnellement progressiste. Cette première nation exploite son propre centre de garderie et de formation de la petite enfance titulaire d'un permis provincial et son propre centre ce soins intermédiaires pour les aînés. Elle exploite aussi sa propre école et son centre communautaire et elle entretient diverses installations de loisirs comme des plages, des terrains de camping et des champs de baseball.

    La première nation de Westbank habite un lieu d'une magnifique beauté naturelle. Située sur les rives du lac Okanagan, près de la ville de Kelowna, elle occupe un site qui bénéficie de l'essor économique de la région et elle a su tirer profit de cet avantage.

    La première nation, et ses membres, a autorisé le développement sur ses terres et est ainsi devenue un chef de terres fort occupé. Aujourd'hui, le district commercial de Westbank compte de nombreux centres commerciaux qui génèrent des revenus de location substantiels et procurent des occasions d'emplois aux gens de la bande. Westbank a acquis une réputation de propriétaire juste, de partenaire fiable et de voisin sur lequel on peut compter. Lorsque le feu a ravagé la vallée de l'Okanagan l'été dernier, les gens de Westbank ont offert le gîte et le couvert aux pompiers.

    Je tiens à faire une chose que je n'ai jamais faite car je veux répéter certains propos que je viens de tenir au sujet de la garderie, de la formation de la petite enfance, du centre de soins pour les aînés, de l'école et des installations de loisirs. Je tiens à souligner encore une fois certains de ces aspects commerciaux car ils me semble très emballants.

    Au cours de la dernière semaine, dans le cadre du sommet autochtone, nous avons entendu dire que l'objectif logique était de réduire les terribles disparités. Nous avons vu les situations déplorables qui règnent partout au Canada et dans bon nombre de premières nations, mais nous n'entendons pas assez parler des bonnes nouvelles. Voilà un modèle de ce qui pourrait exister. Je crois que chaque député, chaque membre du personnel parlementaire et du personnel ministériel est ici pour aider les gens à améliorer leur vie. Lorsqu'on voit un exemple comme celui-ci, on constate que c'est possible. Qui pourrait s'opposer à une telle chose?

  +-(1020)  

    Quand une première nation a la chance d'avoir un secteur commercial comptant un certain nombre de centres commerciaux, cela lui procure des revenus de location et des emplois pour ses membres. Elle peut en outre acquérir la réputation d'un bon propriétaire, d'un partenaire en qui on peut avoir confiance et un voisin fiable. Je le répète, quand la vallée de l'Okanagan a été ravagée par les incendies l'été dernier, la première nation de Westbank a offert le gîte et le couvert aux pompiers.

    Tous les dirigeants des premières nations, des peuples autochtones, des Inuits et des Métis peuvent obtenir les mêmes succès et prendre leur place au sein des collectivités canadiennes.

    Ce qui est le plus remarquable avec le succès remporté par cette première nation, c'est qu'il a été obtenu malgré les limites de la Loi sur les Indiens. La première nation de Westbank veut maintenant nouer une nouvelle relation avec la population du Canada, une relation plus équitable qui lui permettra de réaliser son plein potentiel.

    L'accord d'autonomie gouvernementale donne à la première nation de Westbank les outils dont elle a besoin pour poursuivre son développement. Il lui permettra de se doter de structures gouvernementales à la fois efficaces et représentatives. L'accord favorisera une plus forte croissance économique en jetant les bases d'un gouvernement et d'institutions stables, une condition essentielle pour attirer des investisseurs et des partenaires commerciaux et les conserver.

    Un examen plus poussé de l'accord révèle dans quelle mesure il renforcera l'obligation de rendre compte et l'indépendance au sein de la première nation de Westbank.

    En vertu de l'accord, les décisions clés seront prises par ceux qui connaissent le mieux les questions locales et qui sont le plus touchés par elles. Je ne doute pas que cela se traduira par d'importantes améliorations du bien-être économique et social des membres de la première nation de Westbank.

    Les dirigeants de Westbank estiment que ces améliorations sont plus susceptibles de voir le jour si ce sont les membres de la première nation de Westbank qui tentent de les obtenir, par le truchement d'un gouvernement représentatif et capable d'exercer le pouvoir législatif et de nouvelles responsabilités. Je le pense aussi.

    Le projet de loi à l'étude aidera à établir précisément ce type de gouvernement. La première nation de Westbank se gouvernera elle-même, assumant les compétences et responsabilités à l'égard de ses propres affaires.

    En vertu de l'accord d'autonomie gouvernementale, la première nation de Westbank possédera un ensemble de pouvoirs. Elle pourra légiférer dans des domaines comme la gestion des terres et des ressources, et la langue et la culture autochtones, entre autres choses. C'est là que réside un des éléments clés de l'accord. Grâce à ces nouveaux pouvoirs, la première nation de Westbank prendra le contrôle de ses ressources.

    L'accord d'autonomie gouvernementale définit les exigences à satisfaire à l'égard de la mise en place et du contenu d'une constitution, qui sera ratifiée par la première nation de Westbank au même moment et de la même manière que l'accord d'autonomie gouvernementale. Des années ont été consacrées aux consultations sur l'accord, et la même chose s'est passée pour la constitution.

    Cette constitution est essentielle, car elle consacre les structures et processus gouvernementaux de la collectivité, depuis l'élection des dirigeants jusqu'à l'établissement des normes de responsabilité financière en passant par la démarche à suivre dans l'élaboration des lois. Elle établit également les principes directeurs de la collectivité et son orientation fondamentale.

    La constitution, sur laquelle la première nation de Westbank a travaillé avec diligence, est d'autant plus importante qu'elle a été élaborée par la collectivité. Elle reflète les aspirations de cette première nation et non les opinions de consultants et de juristes. Elle est le produit des consultations menées par la première nation. Un groupe de bénévoles dévoués a travaillé inlassablement pendant presque un an, jour après jour, nuit après nuit, pour rédiger cette loi.

    Il y a eu des réunions communautaires pour exposer des idées, discuter des enjeux et travailler avec le Parlement. Lorsqu'on est enfin parvenu à un consensus et que la constitution a été rédigée, le texte a été distribué à tous, et chacun a de nouveau été invité à faire des observations. Après la dernière série de consultations, les membres de la première nation de Westbank ont ratifié et adopté la constitution.

    Cette recherche de consensus a renforcé la constitution et améliorera la gestion des affaires publiques. Il y a de meilleures chances que les gens respectent les lois et participent aux structures de gouvernement s'ils ont aidé à les élaborer.

  +-(1025)  

    La première nation de Westbank a démontré par ce processus constitutionnel qu'il est possible de résoudre des questions difficiles par la consultation et une authentique compréhension. Elle a démontré qu'il est possible de parvenir à un accord adapté aux besoins locaux tout en respectant les droits et les intérêts de chaque partie.

    Afin d'accentuer les relations avec les non-résidents des terres de Westbank, la première nation de Westbank va créer un mécanisme pour permettre aux résidents non-membres de prendre part à l'élaboration des lois qui les toucheront directement.

    Je veux maintenant parler de cette disposition tout à fait originale du projet de loi, qu'on ne trouve pas dans les autres accords.

    Westbank compte plus de 7 000 résidents qui ne sont pas membres de cette première nation. En fait, Westbank ne compte que quelques centaines de membres. C'est une situation tout à fait unique et un remarquable partenariat. Cette disposition ferait en sorte que les résidents, après avoir reçu une formation juridique obligatoire, auraient leur mot à dire au sujet de la gestion des affaires. Il existe déjà un conseil consultatif, mais si l'accord est signé les gens pourront participer encore de plus près à la gestion des affaires. S'il est adopté, le projet de loi ne pourra être modifié sans leur consentement. Ce n'est pas qu'il existe des problèmes majeurs, mais ce mécanisme très intéressant permettra aux personnes qui ne sont pas des membres de la première nation d'avoir plus de poids que ce n'aurait normalement été le cas. Ces personnes ne seraient cependant pas restées sur leurs terres si elles n'avaient pas été satisfaites de la façon professionnelle dont leurs impôts sont gérés et leurs terres administrées par les dirigeants de Westbank. Le porte-parole de l'opposition l'a très bien expliqué dans un article.

    Le projet de loi constitue une amélioration importante par rapport à la Loi sur les Indiens, qui ne comporte pas d'exigences semblables. En résumé, l'accord de Westbank permettra de mettre en place et d'administrer un gouvernement efficace et responsable dans le cadre constitutionnel canadien.

    Le gouvernement respectera la loi canadienne et il reconnaît que, comme les Canadiens qui vivent ailleurs au pays, tous les membres de la première nation de Westbank sont assujettis au Code criminel et à la Charte canadienne des droits et libertés.

    Je précise à l'intention des personnes qui ignorent comment ces accords fonctionnent, que le Code criminel du Canada s'applique à tout le monde au Canada. La Charte des droits et libertés continuera de s'appliquer sur la réserve, de façon aussi intégrale à l'égard des premières nations que pour l'ensemble des Canadiens. Il en va de même des droits de la personne. C'est ce qu'ont voulu les gens, et il continuera d'en être ainsi. L'une des modifications a soulevé quelques préoccupations, mais on a clairement expliqué que la Charte des droits et libertés continuera de s'appliquer pleinement, comme elle l'a toujours fait.

    Je suis convaincu que l'adoption de l'accord sur l'autonomie gouvernementale sera avantageux non seulement pour les membres et les non-membres de la première nation qui réside sur le territoire de Westbank, mais également pour l'ensemble de la population canadienne. Des premières nations fortes et autonomes ont beaucoup à apporter au Canada, notamment par leur contribution économique, sociale et culturelle.

    Les habitants de Westbank sont véritablement prêts à assumer leurs obligations. Ils travaillent à cet accord depuis plus de 10 ans. Ils ont organisé 400 séances d'information et de consultation. Ils ont obtenu l'appui des administrations municipales et régionales, des Chambres de commerce, des syndicats et d'un vaste éventail des groupes d'intérêts. L'adoption de l'accord de Westbank aura certainement un effet positif à l'extérieur de la province.

    Bien qu'il s'agisse du troisième accord d'autonomie gouvernementale établi en Colombie-Britannique, et du dix-septième au Canada, c'est le premier accord distinct d'autonomie gouvernementale conclu en vertu de la politique canadienne relative aux droits inhérents. C'est un jalon important.

    Cet accord prouve que le gouvernement du Canada et les premières nations peuvent parvenir à des accords taillés sur mesure répondant aux besoins particuliers d'une collectivité. Cet accord a été signé au nom des Canadiens et le gouvernement du Canada fera tout son possible pour s'assurer que le dur travail d'une décennie n'aura pas été accompli en vain.

  +-(1030)  

    Je veux aborder brièvement un autre sujet de préoccupation exprimé au comité à l'étape du rapport, soit l'agrandissement des réserves et le rôle de l'administration municipale à cet égard, quoique je pense que ce point a déjà été clarifié.

    Le gouvernement du Canada détient le pouvoir d'agrandir les réserves. Il le fait parfois lorsque les besoins sont évidents. À mesure que les premières nations grandissent et que leurs besoins changent, il faut agrandir les réserves pour que la première nation concernée dispose effectivement de terres, qu'elle reçoive des services et que ses besoins soient satisfaits.

    C'est un pouvoir que le gouvernement fédéral exerce partout au Canada, et il continuera à le faire avec ou sans cet accord. Donc, l'accord n'a aucune incidence sur ce pouvoir. Cette inquiétude n'est pas justifiée. On ne peut changer ce pouvoir pour une communauté en particulier. On ne peut dire à une municipalité canadienne qu'elle ne peut percevoir d'impôts fonciers quand toutes les autres le font et nous ne pouvons modifier le droit pénal dans une collectivité, pour y introduire la notion de crime grave, par exemple. La loi s'applique partout au Canada.

    Il s'agit d'une politique nationale par laquelle le gouvernement agrandit le territoire des réserves. Toutefois, la politique dit que le gouvernement doit consulter les gouvernements des premières nations et des provinces ou des territoires ainsi que la municipalité touchée. En fait, le territoire de la réserve a été agrandi, mais cela a pris beaucoup de temps à cause des consultations avec la municipalité. Les municipalités sont protégées par la politique. Si le territoire des réserves est agrandi, cela est fait de façon coopérative et consultative.

    Dans les réserves urbaines, dont nous avons discutées plus tôt ce mois-ci, il y a des ententes sur les services et toute sorte d'ententes coopératives établies avant la mise en place.

    Cette merveilleuse première nation nous a transmis ses aspirations, et je demande à la Chambre son entière collaboration afin de fournir les outils nécessaires au développement de sa communauté et de pouvoir investir dans la première nation de Westbank à partir de cette vision.

    Il règne une ambiance joyeuse dans la ville cette semaine. D'abord à cause du sommet autochtone lors duquel des partenariats historiques ont été conclus. Nous nous sommes également consacrés aux questions autochtones et aux projets de loi, et ce, tous les jours cette semaine à la Chambre. Les députés de la Chambre ont très bien collaboré hier soir. Tout ceci crée une excellente dynamique puisque tous désirent aider la première nation à aller de l'avant.

    C'est avec une grande fierté et une grande joie que je prpose aujourd'hui la troisième lecture du projet de loi C-11. Je demande l'appui enthousiaste de tous les députés.


+-SANCTION ROYALE

[La sanction royale]

*   *   *

[Traduction]

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): À l'ordre, s'il vous plaît. J'ai l'honneur d'informer la Chambre que j'ai reçu le message suivant:

Résidence de la Gouverneure générale,

Ottawa

Le 22 avril 2004

Monsieur le Président,

    J'ai l'honneur de vous aviser que la très honorable Adrienne Clarkson, Gouverneure générale du Canada, a octroyé la sanction royale par déclaration écrite aux projets de loi mentionnés à l'annexe de la présente lettre le 22 avril 2004, à 9 h 52.

    Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de ma haute considération.

La secrétaire de la Gouverneure générale,

Barbara Uteck

    L'annexe précise que la sanction royale a été donnée au projet de loi C-8, Loi constituant Bibliothèque et Archives du Canada, modifiant la Loi sur le droit d'auteur et modifiant certaines lois en conséquence; et au projet de C-14, Loi modifiant le Code criminel et d'autres lois.


+-Initiatives ministérielles

[Initiatives ministérielles]

*   *   *

  +-(1035)  

[Traduction]

+-Loi sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank

    La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-11, Loi portant mise en vigueur de l'Accord d'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank, soit lu pour la troisième fois et adopté.

+-

    M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, PCC): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre parole à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-11.

    Je désire brosser un bref portrait de la situation à l'intention des députés. La première nation de Westbank est adjacente à la ville de Kelowna, dans la vallée de l'Okanagan, en Colombie-Britannique. La bande a acquis, avec raison, la réputation d'être l'une des plus progressistes du Canada. Certains s'opposent à l'autonomie gouvernementale, mais leur opposition est sans fondement.

    La réserve de Westbank compte parmi ses habitants 7 500 qui ne sont pas membres de la bande, soit le quart de tous ceux au Canada qui choisissent d'habiter dans une autre réserve que la leur, ces non-membres; de même que 200 entreprises, ont choisi de s'établir sur les terres de Westbank parce qu'ils estiment que le gouvernement de la première nation de Westbank est compétent, prévisible et stable, et par conséquent, qu'il s'agit d'un endroit où ils peuvent investir sans danger.

    La première nation de Westbank perçoit de l'impôt foncier depuis 1990, et les non-membres de la bande ont accès à tous les rapports financiers relatifs aux comptes des impôts fonciers. La première nation de Westbank a un système indépendant d'évaluation foncière ainsi que des mécanismes d'appel des évaluations, un système semblable à ceux utilisés par des municipalités situées hors des réserves. Elle a passé un contrat avec service d'évaluation foncière de la C.-B. pour que celui-ci s'occupe de faire ces évaluations et cela a facilité la tâche aux sociétés immobilières. Celles-ci peuvent compter sur un processus très simple. Elles peuvent recommander à leurs clients d'investir dans Westbank et c'est qu'elles font.

    La mise en oeuvre de cette politique d'imposition, il y a 14 ans, en application de l'article 83 de la Loi sur les Indiens, puis la soumission volontaire à la Loi sur la gestion des terres des premières nations, ont contribué à augmenter rapidement le nombre de non-membres résidant sur le territoire de Westbank. Aucun aspect du régime d'imposition foncière découlant de l'article 83 de la Loi sur les Indiens ne changera à la suite de cet accord. L'autonomie gouvernementale, dans les faits, améliorera la capacité de chaque membre à gérer ces transactions dans le cadre de l'autonomie gouvernementale, parce que le ministère des Affaires indiennes n'imposera pas de démarche additionnelle ni d'obstacle.

    Un excellent exemple nous est fourni ailleurs en Colombie-Britannique. La bande des Sechelts a acquis l'autonomie gouvernementale et le pouvoir d'imposition au cours des années 80. Presque sans exception, on considère son gouvernement comme un modèle d'autonomie gouvernementale et de développement économique. Les accords avec les bandes des Sechelts et de Westbank comportent une disposition selon laquelle les résidants non autochtones sont représentés par un groupe consultatif auprès du chef et du conseil.

    Ceux qui dénoncent l'accord aiment également invoquer la Charte des droits et libertés, sous prétexte que l'accord de Westbank modifiera l'application de celle-ci à l'égard du gouvernement et des résidants de Westbank.

    Nous avons débattu cette question à la Chambre et cet accord prévoit sans aucun doute l'application de la charte. Je suis fermement convaincu, tout comme beaucoup de juristes, que les difficultés, si on en constate, proviennent de la Constitution canadienne et de la charte, mais certainement pas d'une mesure législative comme l'accord de Westbank. Nous savons tous que notre constitution et notre charte prévalent, alors inutile pour moi d'en dire davantage.

    Le résultat net pour les non-membres de la bande résidant sur le territoire de Westbank, c'est que la charte s'applique ou s'appliquera de la même façon, que la première nation de Westbank invoque les dispositions de la Loi sur les Indiens, comme elle le fait actuellement, ou après que l'accord aura reçu la sanction royale.

  +-(1040)  

    La bande de Westbank est en voie de devenir responsable de sa propre gouvernance et de son avenir. Le projet de loi établit un gouvernement qui constitue une entité légale et qui sera en mesure de poursuivre en justice et d'être poursuivi, contrairement aux chefs et aux conseils relevant de la Loi sur les Indiens, qui sont à l'abri de toute responsabilité juridique. J'ai été très étonné que les dispositions portant sur la responsabilité démocratique et financière et sur la propriété privée, qui sont si importantes dans l'accord de Westbank, aient été virtuellement ignorées par les critiques du projet de loi.

    Les critiques se plaignent également du fait que les lois adoptées par la bande de Westbank pourraient avoir préséance sur les lois fédérales et provinciales. En fait, les règles établies actuellement par les chefs et les conseils au Canada l'emportent sur les lois provinciales aux termes de l'article 88 de la Loi sur les Indiens. L'accord de Westbank suit la même disposition. Les lois de la première nation de Westbank l'emportent sur les lois fédérales dans certains secteurs bien particuliers seulement.

    Nous devons également reconnaître que, parce qu'il s'agit de terres fédérales, il y a un vide dans certains secteurs qui relèvent normalement de la compétence provinciale, la location d'immeubles entre autres. La bande de Westbank a profité de ces vides juridiques, antérieurement ou par suite de cette entente, ce qui a accru la confiance et le niveau de sécurité des investisseurs.

    Je trouve fort intéressant que la bande de Westbank ait fait des choses emballantes à cause d'un vide juridique et qu'elle ait tout de même été critiquée pour s'être servie de ce vide. Toutefois, les vrais raisons n'ont jamais été liées à la critique. Je voulais le souligner.

    Prenons l'exemple des substances intoxicantes. La première nation de Westbank a compétence pour interdire les substances intoxicantes sur les terres de Westbank. La Loi de Westbank l'emporte sur la loi fédérale en ce qui a trait à la culture et à la langue okanaganes, à l'éducation aux niveaux primaire et secondaire, à la médecine traditionnelle okanagane et les procédures d'application de la loi, à condition qu'elles soient comparables, mais non supérieures, à celles qui sont prévues dans les lois fédérales ou provinciales traitant de questions semblables. L'octroi de permis d'affaires aux entreprises, le transport, les travaux publics ainsi que les testaments et les biens des membres sont autant de domaines incontestés, dans l'ensemble.

    Je le répète, il semble que ce soit le principe qui suscite des critiques, non pas les détails. Selon moi, si l'on examine les détails, on constate que ces questions ne sont pas sujettes à controverse.

    Par ailleurs, la première nation de Westbank a compétence en ce qui a trait aux ressources renouvelables, mais cette compétence ne comprend pas le poisson et l'habitat du poisson. Elle a aussi compétence en ce qui a trait aux ressources non renouvelables telles que les minéraux et le gravier. Elle a les privilèges d'un propriétaire en ce qui a trait à la gestion des ressources des terres de Westbank, bien que le Canada en demeure propriétaire. Il existe une différence entre la première nation de Westbank et la première nation sechelte. Cette dernière bénéficie d’un titre en fief simple à l’égard de la totalité de ses terres, qui ne sont plus des terres fédérales.

    La ville voisine de Kelowna, la troisième plus grande ville de la Colombie-Britannique, et selon nombre de ses habitants la ville la plus importante de cette province, ainsi que le district régional où se trouvent les terres de la première nation de Westbank, ont avalisé l'accord.

  +-(1045)  

    L'accord de Westbank devrait être examiné dans sa globalité. Il mérite d'être appuyé car il est un modèle pour d'autres bandes.

    J'ai eu un rôle important à jouer au chapitre de l'autonomie gouvernementale et d'autres mesures législatives. Ce projet de loi a été présenté à la Chambre en novembre dernier, je crois. En janvier, j'ai rencontré des représentants du district régional, le maire de Kelowna, le chef et le conseil de la première nation de Westbank ainsi que le groupe consultatif de la première nation. Cela m'a donné une bonne idée non seulement de la loi, mais des collectivités.

    Pour ce qui est de mon expérience dans le domaine des affaires autochtones, je remonterai à 1997. Deux ministres se sont succédé depuis. Le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien de l'époque occupait cette fonction depuis 1993. Au moment où son mandat tirait à sa fin, le gouvernement n'a pas dérogé à son habitude et il a tenté de faire adopter à toute vapeur un projet de loi sur la gestion des terres des premières nations. J'ai résisté. Ce projet de loi n'a été adopté qu'en 1999.

    Je voudrais dire à ce stade-ci que je me suis trompé au sujet de ce projet de loi. Cette mesure législative s'est révélée être très importante et progressiste. Elle a appliqué beaucoup des avantages de l'autonomie gouvernementale, sans exiger l'autonomie gouvernementale, à la location de terres. Si je ne m'abuse, 14 premières nations faisaient partie de cela et la première nation de Westbank a été signataire. Cette capacité aux termes de la Loi sur la gestion des terres des premières nations explique en grande partie la croissance du nombre de non-autochtones établis à Westbank.

    De plus, dans le passé, j'ai représenté le territoire sechelt sur la côte de la Colombie-Britannique durant la législature de 1993 à 1997. C'était avant qu'on ne modifie les limites de ma circonscription à la suite du recensement de 1991. Il était très clair lorsque je représentais la grande région qu'il y avait un fort appui à l'accord d'autonomie gouvernementale de la bande indienne sechelte, accord qui existe depuis 1986. Je suis persuadé que cela se reproduira aussi à Westbank dans l'Okanagan.

    Il y a un domaine qui, selon moi, est très important pour bien des gens, qui croient fermement qu'il faut s'en occuper. C'est un autre de ces oublis dans la loi. Il est question des biens matrimoniaux. Le droit sur les biens matrimoniaux au Canada est de compétence provinciale. Chaque province traite cette question à sa façon.

  +-(1050)  

    Dans le cas des terres de réserve fédérales, il n'y a pas de droit sur les biens matrimoniaux. Il n'y a aucune loi précisant ce qui arrive des biens matrimoniaux à la suite d'un décès, d'un divorce ou d'une séparation. C'est une question qui a été soulevée à de multiples reprises au cours des 20 dernières années au moins au Comité permanent des affaires autochtones de la Chambre des communes et à d'autres tribunes. Je sais que le Sénat examine cette question et ce, depuis pas mal de temps. Des organisations représentant des femmes autochtones réclament des changements à cet égard. Je pense que tout le monde veut qu'on corrige la situation, mais c'est une question complexe qui continue de se poser.

    Je tiens à dire qu'il n'y a pratiquement aucun doute que les membres de la première nation de Westbank sont les premières personnes vivant dans une réserve au Canada qui seront visées par le droit sur les biens matrimoniaux, car une autre partie de l'accord précise que, dans les 12 mois suivant l'entrée en vigueur de l'accord, cette question devra être réglée. Il faut mettre en oeuvre une loi pour viser les membres de la première nation de Westbank et cette loi ne doit pas être discriminatoire en fonction du sexe.

    Je sais que des travaux préliminaires ont été effectués et que des consultations ont eu lieu et que cela se fera. Je pense que peu importe ce qui se produira relativement à la première nation de Westbank à cet égard, cela sera très utile en tant que modèle pour d'autres et permettra peut-être d'accélérer le règlement de cette question pour les 632 autres bandes au Canada. J'espère certes que ce sera le cas.

    On a récemment laissé entendre que, le vote de ratification de l'accord par la première nation de Westbank ayant nécessité trois tentatives pour le ratifier à l'échelle locale, cela signifie que nous sommes en présence d'une communauté en proie à des dissensions internes et cela entache toute cette démarche. Je signale que, si nous voulons former une municipalité, par exemple, et la constituer en personne morale en Colombie-Britannique, il nous faut, pour exprimer cette volonté, un oui de la part de 50 p. 100 plus un des électeurs qui vont voter, par référendum ou par scrutin secret.

    Dans le cas de Westbank, il y a eu trois votes. Les trois ont fait ressortir une majorité claire de personnes souhaitant que l'accord soit ratifié, mais, dans leur idéalisme à la première tentative, ils voulaient une supermajorité, en d'autres termes, 50 p. 100 des personnes inscrites sur la liste des électeurs, croyant que cela était tout à fait réalisable. Bien sûr, cela ne s'est pas fait. Et à une de ces deux premières occasions, il a manqué deux voix, je crois.

  +-(1055)  

    Ce que cela veut dire, c'est que toute personne qui ne se présente pas pour voter, ou est incapable de le faire ou ne peut se rendre au bureau de vote est comptabilisée comme votant non. Pour l'essentiel, Westbank a aligné son système de vote sur ce que tout le monde fait. C'est une majorité simple des électeurs ayant voté. Donc, je ne crois pas que ce processus soit entaché de quelque façon que ce soit, bien au contraire.

    Mon temps est écoulé. Pour conclure, je dirai qu'il s'agit d'un accord très éclairé. Il marque une tentative de réaliser toutes les choses qui seront bonnes pour la population et bonnes pour les résidants de Westbank. Je crois qu'ils ont fait preuve de courage et ont réussi.

+-

    L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): D'abord, monsieur le Président, je félicite le député d'avoir prononcé un excellent discours, d'avoir développé quelques-uns des sujets que je n'ai pas abordés et d'avoir dissipé quelques-uns des mythes. Je voudrais donner au député le temps de terminer ce qu'il n'a pas pu dire, car il a traité de façon remarquable quelques-unes des questions que les gens ont soulevées.

    Au cas où il aurait terminé, je vais aussi mentionner une des lettres que j'ai reçues d'un membre de la bande, dans la région ou dans les environs, qui désirait obtenir d'autres détails au sujet de l'accord. Bien sûr, certains des secteurs sur lesquels la première nation de Westbank aura un pouvoir de gouvernance font partie de l'infrastructure communautaire, de services locaux semblables à ceux dont peuvent s'occuper les municipalités, par exemple, la collecte des eaux usées, le traitement et l'entreposage de l'eau, l'élimination des déchets, les parcs et les édifices communautaires, les déchets solides, les centres de loisirs, les galeries d'art, la prévention des incendies, les systèmes d'éclairage des rues, l'inspection des transports, le contrôle des animaux, la lutte contre les nuisances et les systèmes d'alarme-incendie.

    De toute évidence, il ne serait pas logique que les parlementaires continuent de s'occuper de la prestation de ces services à partir de notre immeuble—qui se trouve actuellement à Gatineau, mais peut-être qu'en juin, il sera de nouveau à Hull—pour le compte d'une municipalité ou d'une première nation. Le député pourrait peut-être parler des avantages de l'autonomie gouvernementale en général, car il possède une expérience de ce domaine, ainsi que de tout ce dont il n'a pas eu la chance de parler.

+-

    M. John Duncan: Monsieur le Président, le secrétaire parlementaire me donne l'occasion de parler quelques minutes de plus, ce dont je lui sais gré.

    Dans certains domaines fondamentaux, les lois fédérales primeront toujours. Il est bon de le souligner. Il s'agit de la paix, de l'ordre et du bon gouvernement. Le droit criminel du Canada continue de s'appliquer.

    Il a été suggéré que, en quelque sorte, Westbank pouvait rendre légitimes des choses qui ne le sont pas ailleurs au Canada. C'est tout simplement inexact. Westbank a adopté le droit criminel du Canada.

    Les autres domaines sont la protection de la santé et de la sécurité des Canadiens, la propriété intellectuelle, la radiodiffusion et les télécommunications, la défense nationale, la sûreté et la sécurité publiques. Certains des domaines dont je n'ai pas parlé et dans lesquels Westbank a compétence touchent au testament et à la succession des membres de la bande résidant habituellement sur les terres de Westbank. Cela se rattache parfois à ce dont je parlais concernant les biens des époux, en cas de décès, évidemment. C'est important. C'est un domaine non négligeable.

    La première nation de Westbank a compétence en matière de travaux publics, d'infrastructure communautaire et de services locaux. Il est dit dans l'accord que la loi de Westbank l'emporte sur les dispositions incompatibles de toute autre loi fédérale tant que les normes de santé et de sécurité ainsi que les codes techniques de la première nation de Westbank sont au moins équivalents à ceux du fédéral.

    Il en va de même du trafic et du transport. La première nation de Westbank a compétence dans ces domaines, mais pour plus de certitude, les règlements, les normes de sécurité et les codes techniques seront conçus de manière à être au moins équivalents à ceux du fédéral et des provinces. Il en va de même de l'octroi de licences et de permis d'affaires, de la réglementation et du fonctionnement des entreprises commerciales.

    Westbank veut qu'il soit très clair que les lois fédérales et provinciales s'appliquent en matière d'accréditation et de certification des professions et des métiers, y compris en ce qui a trait aux professionnels de l'éducation. Les rédacteurs de l'accord ont été très minutieux à bien des égards.

    Quant à l'exécution de la loi de Westbank, j'ai déjà mentionné que les procédures d'application seront comparables, mais non supérieures, à celles qui sont prévues dans les lois fédérales ou provinciales semblables. L'accord précise que la GRC sera chargée de ces services. En gros, c'est déjà ce qu'elle fait, en vertu du protocole d'entente conclu en 1992 entre le Canada, la Colombie-Britannique et Westbank ainsi que du protocole d'entente conclu en 1993 au sujet des services de police communautaires des premières nations. Ce sont là certains des domaines.

    En ce qui a trait aux services de santé, la première nation de Westbank aura compétence pour réglementer de la pratique et les praticiens de la médecine traditionnelle de l'Okanagan.

  +-(1100)  

    Il en est de même de la culture et de la langue. L'environnement est un domaine très important sur lequel la première nation de Westbank aura compétence. La seule réserve est que les normes devront être au moins équivalentes à celles qui sont prévues dans les lois fédérales et provinciales d'application générale. En cas de conflit ayant trait à la protection de l'environnement, la loi fédérale s'appliquera. Il en sera de même des évaluations environnementales. Il est important que les gens soient au courant de ces points.

    Des questions ont été soulevées relativement à la reddition de comptes en matière de finances. L'Accord d'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank est très clair en ce qui a trait à cette responsabilité. Les normes appliquées seront celles qui sont recommandées par l'Institut canadien des comptables agréés.

    Un autre point à l'égard duquel certains se sont posés des questions est le droit des gens à avoir accès au système judiciaire. L'accord traite de cet aspect et précise que la Judicial Review Procedure Act de la Colombie-Britannique s'applique à la première nation de Westbank. Cette disposition permet aux particuliers de recourir au système judiciaire provincial, indépendamment de tout mécanisme d'appel. Les poursuites liées à des infractions à la loi de la première nation de Westbank sont entendues par la cour provinciale de la Colombie-Britannique en vertu des procédures sommaires prévues dans le Code criminel du Canada.

    Ce sont là les principaux points dont je n'avais pas parlé durant ma première période de 20 minutes.

  +-(1105)  

+-

    L'hon. Larry Bagnell: Monsieur le Président, je tiens à féliciter le député pour l'article qu'il a fait paraître dans le numéro du 1er avril du Vancouver Province. Je ferai peut-être allusion par la suite, au cours du débat, à certains des points de son argumentation. Le député présente dans cet article d'excellents arguments. Il y conclut en gros qu'il est temps que le public appuie cet accord et il préconise d'en faire un modèle pour d'autres bandes, ce qui est tout à fait louable.

    Dans mon intervention, j'ai dit qu'un grand nombre d'administrations locales, de particuliers et d'organisations avaient été consultés, de même que divers groupes d'intérêts. Si j'étais un député de l'opposition, j'aimerais savoir qui se retrouvaient dans cet ensemble. Je voudrais parler de la première nation Sechelt, d'autres premières nations de la région d'Okanagan, la Okanagan Nation Alliance, le B.C. First Nations Summit et d'autres premières nations du Canada qui sont en train de négocier des accords similaires.

    Qu'en pense le député? Combien de temps reste-t-il?

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Plus rien, mais je vais permettre au député de l'Île de Vancouver-Nord de répondre très brièvement, s'il le veut.

+-

    M. John Duncan: Monsieur le Président, je n'ai pas entendu la question. Le député n'a pas eu le temps de la poser.

    Je crois que le député voulait que je dise un mot sur les entreprises qui sont actives au sein de la première nation de Westbank. D'après ce que je sais, plus de 200 entreprises y sont actives et elles ont beaucoup de succès.

    Ce ne sont pas seulement les résidants de la première nation de Westbank qui expriment leur confiance dans son régime fonciers et dans la stabilité de son gouvernement, mais également les milieux des affaires. Oui, je crois qu'il s'agit d'un élément important de ce processus.

[Français]

+-

    M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, il m'est arrivé à plusieurs reprises d'intervenir sur ce type d'entente d'autonomie gouvernementale avec les premières nations, et en particulier celle de Westbank. En effet, en décembre dernier, nous avions la possibilité de procéder rapidement à l'adoption de ce projet de loi qui doit concrétiser de nombreuses années de travail de négociations. Cela a été aussi un long travail de la première nation de Westbank qui n'a pas lésiné sur les consultations. Tous les habitants du territoire ont été consultés, même à plusieurs reprises sur des points précis. C'est un bel exercice démocratique auquel ont été conviés les gens de Westbank.

    J'en profite pour saluer l'importante délégation de Westbank qui est derrière moi, dans les tribunes. Ils sont ici depuis le début de ce débat crucial pour leur avenir. Ils viennent depuis le mois de décembre assister à nos délibérations. Malheureusement en décembre, on les a déçus parce qu'un député conservateur a refusé de donner son consentement pour que nous puissions procéder rapidement à l'adoption de ce projet de loi.

    Je n'aurai de cesse de répéter que la plus belle chose qui puisse arriver au Québec, comme au Canada, c'est de faire en sorte que les principales recommandations du rapport de la Commission royale d'enquête sur les peuples autochtones—communément appelée la Commission Erasmus-Dussault—soient concrétisées.

    Une de ces recommandations, que l'on retrouve dans le travail de la communauté de Westbank, était de permettre qu'au cours des 20 prochaines années, donc jusqu'en 2018, on mette en place un énorme chantier. Ce chantier devrait avoir les ressources adéquates pour que toutes les premières nations, du Québec et du Canada, puissent bénéficier d'ententes d'autonomie gouvernementale sur la base d'un principe majeur, celui du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.

    Depuis deux ans, j'ai la responsabilité de ce dossier. En comité autant qu'ici, lorsque j'entends certains de mes collègues qui disent: «Est-ce qu'on doit leur concéder ceci ou cela? On ne doit pas leur donner trop de pouvoirs», je dis et je répète qu'on n'a pas à leur concéder ou à leur donner plus ou moins de pouvoirs. Ils ont ces pouvoirs en fonction de ce principe reconnu dans la Constitution même qui est celui du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.

    Les membres des premières nations vous diront aussi que c'est un droit qui leur a été donné par le Créateur. Cela peut paraître spirituel mais quelquefois c'est bon d'avoir un peu de spiritualité dans ce Parlement pour rappeler des vérités philosophiques fondamentales.

    Les premières nations étaient ici bien avant l'arrivée des premiers Européens. Elles avaient non seulement des droits, mais elles étaient propriétaires des lieux. Au fil des ans, les Européens du temps leur ont imposé des façons de vivre et des institutions qui n'étaient pas les leurs. Sur le plan démocratique, ils leur ont imposé des principes qui n'étaient pas défendu par eux. Fait assez surprenant, à l'arrivée des premiers Européens, la plupart des premières nations avaient des systèmes démocratiques, des institutions et même des collèges électoraux très développés. On s'en est même inspiré, en quelque sorte, pour adopter notre propre système parlementaire et démocratique.

    On a tout saccagé. On a dit que ce n'était pas la façon de faire, que cette culture-là n'était pas la bonne. On leur a imposé nos vues. Il y a à peu près 130 ans, on leur a aussi imposé une loi, la loi la plus détestable que j'ai vue dans ma vie, après celle de l'apartheid en Afrique du Sud, c'est la Loi sur les Indiens. On leur a imposé des façons de faire. On leur a dit qu'on allait les parquer dans des réserves, sur des territoires très limités mais qu'ils ne devaient pas s'en faire car on allait leur donner à boire et à manger. C'est ce que nous faisons avec eux depuis 130 ans.

    On les a inféodés. On leur a enlevé tous les moyens de pouvoirs se développer eux-mêmes. On leur a aussi enlevé les droits que doit avoir tout humain au XXIe siècle. On parle d'un droit de regard sur leurs propres affaires, un droit de décision, un droit de gestion et même un droit d'emprunt dans les institutions bancaires. On leur a enlevé la possibilité de se développer avec leurs territoires, avec leurs ressources également.

  +-(1110)  

    Combien de sociétés forestières au Québec et au Canada ont fait en sorte que le Parlement ou les gouvernements successifs au Canada délogent les premières nations et les déménagent ailleurs que sur les terres ancestrales qu'elles avaient occupées pendant des décennies auparavant. Tout cela, pour permettre aux sociétés forestières, souvent des sociétés étrangères, de faire des coupes à blanc sur leurs territoires ancestraux, leur enlevant la possibilité de développer elles-mêmes leurs ressources, leur enlevant souvent leurs territoires pour les activités traditionnelles, telles la chasse et la pêche?

    Combien d'injustices les premières nations ont-elles dû vivre depuis les 130 dernières années, en particulier depuis l'application de la Loi sur les Indiens? De quelle façon a-t-on traité les enfants des premières nations, en les enlevant littéralement de leur famille, en les plaçant dans des collèges, en leur donnant une éducation qui n'était pas conforme à leur culture, les empêchant aussi de parler leur propre langue? Comment voulez-vous développer une fierté et le goût de construire dans des circonstances comme celles-là?

    Combien de sociétés pétrolières, en faisant des pressions et beaucoup de lobbying, et, dans certaines période de l'histoire du Canada, en soudoyant carrément le gouvernement, ont réussi à déloger des peuples entiers de leurs territoires ancestraux pour exploiter les ressources du sous-sol? Il y a aussi les compagnies minières.

    On n'a jamais donné de redevances sauf récemment, et je pourrais vous parler des cas du Québec. On n'a jamais fait participer les premières nations à ces richesses du sol et du sous-sol. On les a déménagées, on les a parquées dans des réserves et on s'est dit: «À vous la pauvreté et à nous la croissance économique.»

    Il y a eu un éveil chez les premières nations, en particulier au cours des deux dernières décennies. En effet, celles-ci ont commencé à considérer qu'elles avaient des droits en vertu de la Constitution canadienne, qu'elles avaient aussi des droits en fonction du droit international, qu'elles avaient aussi un pouvoir, comme premières nations, de faire en sorte que leur développement, leur croissance et leur existence puissent leur appartenir dans l'avenir. Elles ont fait des démarches de reconnaissance jusque sur la scène internationale.

    Je pense à certains leaders autochtones du Québec qui sont allés jusqu'à l'ONU pour faire valoir leurs droits. Quelquefois, ils y allaient de façon brutale, mais qui n'aurait pas été brutal en ressassant justement tous les éléments de l'histoire qui ont fait en sorte que les premières nations ont été bafouées dans leurs droits et ont même été victimes d'une espèce d'omerta pour les faire disparaître à plusieurs moments de l'histoire? Qui n'aurait pas été brutal pour dénoncer sur la scène international le traitement que le Canada imposait à ses premières nations?

    Nous aurions fait la même chose. Il y a justement eu un éveil de cette dénonciation tant et si bien que des organisations, comme l'Organisation des Nations Unies, ont décidé d'octroyer aux peuples autochtones du Canada et de l'ensemble du monde des droits sur le plan international. Elles ont décidé de les reconnaître comme de vraies nations au sens des Nations Unies. Elles ont aussi décidé de marcher avec les peuples autochtones de la Terre, justement pour faire pression sur les gouvernements, en particulier ceux du monde industrialisé, pour qu'on reconnaisse des droits aux peuples autochtones, pour qu'on leur donne tous les outils de développement.

    Quelquefois, le Canada a ignoré ces appels venant d'une organisation respectueuse comme celle de l'Organisation des Nations Unies. Encore tout récemment, lors du débat que nous avions sur le projet de loi C-7 relativement à la gouvernance, l'ex-ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien voulait imposer aux peuples autochtones du Canada une entente sur la gouvernance dont ils ne voulaient pas, qui allait à leur encontre. Il y avait unanimité contre ce projet de loi. Il aura fallu que deux députés, en l'occurrence mon collègue du NPD de Winnipeg-Centre et moi-même, votre serviteur au nom du Bloc québécois, mènent un combat pour faire entendre raison aux députés libéraux du comité et au gouvernement, à savoir que ce projet de loi ne convenait pas aux premières nations.

  +-(1115)  

    Il a fallu déployer des énergies et du temps pour faire comprendre au gouvernement des vérités fondamentales, des choses qui tiennent de la compréhension 101 de la vraie réalité du monde moderne, pour leur faire comprendre que nous n'étions pas ici en Afrique du Sud, du temps de l'apartheid. Comme le monde le demandait aux gouvernements du monde industrialisé, il fallait s'ouvrir aux réalités des premières nations et il fallait leur donner des moyens de se réaliser et de réaliser le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.

    Croyez-le ou non, pour que le gouvernement comprenne uniquement ces principes de base, qui sont en outre reconnus dans la Constitution, il aura fallu faire ce qu'on appelle communément un «filibuster», qui a duré 55 jours. On parle de jours, mais c'était souvent en soirée ou la nuit. Il aura fallu tenir ce «filibuster» pendant 55 jours. J'ai justement demandé aux greffiers au Bureau l'année dernière s'il y avait des précédents de «filibusters» aussi longs, et ils m'ont assuré qu'à leur connaissance, en faisant une recherche pas trop approfondie, mais selon la mémoire accumulée par les greffiers du Bureau au cours des années, c'était un des plus longs «filibusters» de l'histoire du Parlement.

    C'était tout simplement pour faire comprendre au gouvernement ces vérités fondamentales du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, qu'on avait supposément reconnu dans ce Parlement, soit le droit donné par le Créateur aux premières nations. C'était pour leur faire comprendre qu'en 2003, à ce moment-là, on ne pouvait pas imposer à des peuples reconnus comme nations au sens même de l'Organisation des Nations Unies des choses qu'ils ne voulaient pas.

    En outre, si l'on discutait de leur avenir, il aurait été normal d'accueillir des représentants des premières nations autour de la table du comité, pour qu'ils viennent nous expliquer leur réalité qui nous échappe quelquefois, leur mode de vie, qui nous échappe aussi, et l'histoire qu'ils ont vécue, qui nous échappe même si l'on connaît, par l'entremise des livres d'histoires, les atrocités commises envers les peuples autochtones du Québec et du Canada.

    Il aura fallu 55 jours pour nous permettre d'expliquer à des députés ministériels, supposément sensibles à la souveraineté des pays et des peuples, les principes de base de ce qu'est la souveraineté des peuples. Bien entendu, nous en avons profité pour parler aussi de la souveraineté du peuple québécois. Qui est mieux placé qu'un député souverainiste québécois du Bloc québécois pour l'expliquer à des députés libéraux qui croient savoir ce qu'est la valeur de la souveraineté d'un pays?

    Cela a été une occasion en or d'expliquer aussi aux premières nations ce que le peuple québécois vit également comme peuple depuis des décennies. Nous leur avons expliqué les tentatives que nous faisions pour prendre en main notre destinée et ne pas dépendre d'un autre peuple, le peuple canadien, pour des décisions qui concernent notre avenir. Nous leur avons expliqué les orientations qui font consensus au Québec et qui nous sont refusées ici, par exemple les congés parentaux, un simple transfert d'une partie de l'assurance-emploi permis par la Loi sur l'assurance-emploi.

    Nous en avons également profité pour expliquer que le déséquilibre fiscal est en train d'écraser le peuple du Québec, tout comme le manque de fonds que nous transférons aux peuples autochtones pour réaliser des défis incroyables sur le plan de la santé, du développement économique et du développement social. Ces fonds insuffisants sont préjudiciables à l'avenir des peuples autochtones.

    Nous avons parlé de la situation vécue par le Québec, qui a absorbé à lui seul 51 p. 100 des coupures au niveau de la santé, de l'éducation et de l'aide sociale imposées par l'actuel premier ministre lorsqu'il était ministre des Finances. Nous en avons aussi parlé. Nous avons pu échanger avec les premières nations, dont mon collègue de Winnipeg-Centre et moi-même sommes devenus des frères, puisque nous avons été honorés de la plume d'aigle.

  +-(1120)  

    Si des ententes doivent être favorisées, ce sont des ententes comme celle de Westbank. Non seulement faut-il favoriser les ententes d'autonomie gouvernementale, mais il faut les accélérer pour donner aux premières nations les outils leur permettant de se développer elles-mêmes à tous égards, les outils pour relever les nombreux défis auxquels elles sont confrontées. Il n'y a pas que des problèmes chez les peuples autochtones. Il y a aussi des défis incroyables à relever. Ils ont le talent voulu pour relever ces défis et gagner.

    Certaines communautés vivent des horreurs au quotidien. Avec mon collègue de Champlain, j'ai eu l'occasion d'aller visiter certaines réserves sur son territoire dont une en particulier, Weymontachie. Là, il y a des problèmes incroyables au niveau du logement. Presque toutes les maisons sont atteintes de moisissure chronique. Je suis aussi allé avec mon collègue de Berthier—Montcalm à Winneway, en Abitibi. C'est une autre première nation qui vivait des problèmes à ce moment-là au niveau de l'éducation. Elle aurait bien voulu avoir une entente d'autonomie gouvernementale et des ressources également, des compensations pour réparer les préjudices des 130 dernières années vécues à cause du Parlement fédéral. Ces premières nations auraient voulu avoir ces outils, mais elles ne les avaient pas pour relever ces défis.

    Au Québec, assez curieusement, il n'y a pas mieux placé qu'un député souverainiste québécois pour parler de la valeur fondamentale des principes de la souveraineté des peuples. La première entente conclue au Canada avec les premières nations l'a été par le plus grand leader souverainiste que le Québec a connu, M. René Lévesque. Lors de son premier mandat, il a signé une entente avec la première nation crie de la Baie-James, une entente de développement économique, mais aussi de développement social adjacente à la première entente. Le plus grand leader souverainiste a tendu la main au peuple cri à ce moment-là. De même, tous les souverainistes québécois, mais aussi tous les Québécois en général, sauf quelques exceptions, tendent la main aux peuples autochtones.

    Il y a eu d'autres exemples par la suite, mais l'exemple le plus connu est la ratification de l'entente qu'on a appelée la Paix des braves. C'est un complément à la première entente réalisée par le gouvernement de M. Lévesque à la fin des années 1970. La Paix des braves a été signée par Bernard Landry, un autre grand leader souverainiste au Québec. Hydro-Québec a même ajouté un complément à cette entente avec la signature d'un traité, il n'y a pas tellement longtemps, sur le développement des ressources hydroélectriques et le respect des peuples autochtones et de leurs prérogatives sur le territoire qui leur appartient.

    Il y a aussi un processus qui a duré une quinzaine d'années et qui a conduit à une entente de principe avec les communautés innues du Québec. Encore une fois, c'est sous Lucien Bouchard que ce mouvement a été enclenché. M. Parizeau avait fait la même tentative avec les Attikamek-Montagnais auparavant, en 1994, si ma mémoire est bonne.

    Comment se fait-il que ce soit les leaders souverainistes, des gouvernements souverainistes à Québec qui aient amorcé ce dialogue, qui aient accéléré les négociations avec les premières nations pour leur donner leur autonomie, leur donner des outils de développement et permettre à leur communauté, en pleine croissance démographique, de pouvoir se développer? C'est justement cela. Un souverainiste qui se bat pour la liberté et l'émancipation de son peuple—en l'occurrence le peuple québécois—est plus que sensibilisé à l'importance de cette liberté. Il est sensibilisé à l'importance de prendre ses décisions pour lui-même, comme peuple, à l'importance de prendre son avenir en main, à l'importance de donner une fierté à ses enfants pour l'avenir. On ne parle pas d'une fierté provinciale, mais d'une fierté nationale.

    L'Assemblée nationale s'appelle l'Assemblée nationale et pas l'assemblée législative. C'est cet enthousiasme, cette fierté que j'ai retrouvée chez les membres des premières nations qui fait en sorte que je mets autant d'enthousiasme, avec mes collègues du Bloc québécois, à travailler d'arrache-pied pour accélérer les ententes d'autonomie gouvernementale, pour comprendre ce qu'ils vivent et pour faire comprendre ce que nous vivons aussi.

  +-(1125)  

    De cette façon, je suis sûr que tous les peuples sur ce territoire pourront dans l'avenir vivre en harmonie, y compris les peuples autochtones, le peuple québécois souverain et le peuple canadien souverain.

[Traduction]

+-

    L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de son discours. J'ai été ravi de l'entendre dire qu'il souhaitait aborder l'aspect spirituel. Je voudrais lui poser une question d'ordre philosophique.

    Au commencement du débat quelqu'un a dit que, parmi les pouvoirs octroyés aux termes de l'accord de Westbank, il y a celui de faire de cette communauté une communauté sans alcool. Hier soir, je disais à certains que j'essaierais de les amener dans un certain village du Yukon pour le Nouvel An. La personne assise à côté de moi a dit qu'ils ne devraient pas y aller parce que c'est une communauté sans alcool et qu'il est difficilement concevable de s'amuser sans alcool au Nouvel An.

    J'ai expliqué à cette personne qu'elle ne comprenait tout simplement pas. On voit les gens faire des danses carrées, les jeunes et les vieux s'amuser et festoyer et on est témoin de cette culture où tout le monde a beaucoup de plaisir sans penser à consommer de l'alcool. Je ne me suis jamais autant amusé et je n'ai jamais eu autant de plaisir à une fête.

    Ce que je veux dire, c'est que les cultures différentes sont assorties de réponses différentes, et c'est là une des raisons pour lesquelles je me suis rendu à la manifestation de Washington. J'étais là le 11 septembre pour tenter de protéger la Réserve faunique nationale de l'Arctique afin que le peuple gwich'in et sa culture puissent survivre. Il faut que ces cultures survivent parce qu'elles proposent des façons différentes de faire les choses et des solutions différentes qui nous aideront à régler les problèmes du monde très complexe dans lequel nous vivons.

    Je sais que les députés bloquistes sont férus de philosophie et j'aimerais que le député parle des avantages de l'autonomie gouvernementale, notamment du fait qu'elle permettra aux gens d'exprimer leur propre culture et d'enrichir la mosaïque culturelle du Canada.

  +-(1130)  

[Français]

+-

    M. Yvan Loubier: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question. Je n'entrerai pas dans les détails au sujet de l'alcool, car je pense que la question est plus large et plus fondamentale que cela.

    L'avantage de l'autonomie gouvernementale, c'est que c'est le premier droit. En fait, ce n'est même pas un avantage, c'est le premier droit de tout peuple du monde de pouvoir s'auto-déterminer, de pouvoir choisir lui-même tous les paramètres de son présent et de son avenir, et d'essayer d'effacer une partie de son passé, quand ce passé est peu reluisant, comme celui des premières nations depuis 130 ans.

    C'est un droit fondamental, mais c'est surtout l'exercice de ce droit qui est intéressant. En effet, on entend toutes sortes de choses concernant les premières nations non seulement depuis que je m'occupe du dossier autochtone, mais depuis plusieurs années: elles ont un taux de chômage élevé, donc elles ne veulent pas travailler; il y a des problèmes de polytoxicomanies, donc elles ne savent pas élever leurs enfants. On entend des choses comme ceci: «Ils ne paient ni taxe ni impôt.» Combien de fois a-t-on entendu ce genre de choses, et ce, à tort 99 p. 100 du temps?

    Prenons l'impôt. Par exemple, la plupart des membres des premières nations travaillent à l'extérieur de leurs réserves et paient des impôts et des taxes comme tout le monde. Il n'y a pas que des communautés problématiques; il y a des communautés qui fonctionnent bien, qui s'épanouissent et qui se développent.

    Justement, quelles sont les communautés qui s'épanouissent et qui se développent? Ce sont les communautés où on exerce justement l'autonomie gouvernementale, ce droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Allez voir à la Baie-James de quelle façon, depuis la fin des années 1970, la première nation crie de la Baie-James—on a eu l'occasion de rencontrer M. Ted Moses à plusieurs reprises de même que M. Saganash, son principal conseiller—s'est développée. De fait, elle s'est développée de façon incroyable avec des entreprises qui leur sont propres, avec de la création d'emploi, avec de la formation chez les jeunes.

    Tout à l'heure encore, je vous parlais de l'entente avec Hydro-Québec. C'est l'exercice de leur droit à l'autonomie gouvernementale qui fait en sorte qu'elles peuvent parler comme un gouvernement à un organisme comme Hydro-Québec ou au gouvernement du Québec pour déterminer ce qu'il faut pour former les jeunes par exemple, pour les faire travailler dans des chantiers spécialisés, pour former des administrateurs cris qui feront en sorte de promouvoir et réaliser la croissance économique et le développement social de leur communauté.

    Telle est l'autonomie gouvernementale: d'une part, c'est de faire en sorte que les gens qui colportent toutes sortes de demi-vérités sur les premières nations se taisent un jour et, d'autre part, qu'ils ne fassent pas que se taire, mais que les premières nations donnent l'exemple de leur capacité à se développer et à donner un avenir à leurs jeunes. À l'heure actuelle, dans la plupart des communautés autochtones, on ne peut pas dire que les jeunes ont un avenir qui est rose: ils naissent en sachant qu'ils ont un avenir bouché.

    À Weymontachie, c'est incroyable! À Winneway, à Lac-Barrière, qu'offre-t-on aux enfants autochtones? Justement, quand on regarde une première nation qui, souvent à cause de l'inertie du gouvernement, n'a pas cette autonomie gouvernementale, qui n'a pas la possibilité de se prendre en main, de déterminer ses propres lois et ses propres paramètres de développement économique, d'emploi et d'éducation et ainsi de suite, c'est elle qui souffre le plus.

    C'est pour cela qu'en 1998, la Commission Erasmus-Dussault nous disait: «Il faut accélérer la cadence.» C'est pour cela que j'étais non pas déçu, mais que j'avais la rage au coeur lorsque j'ai vu, l'année dernière, que ce fichu de gouvernement imposait le projet de loi C-7 sur la gouvernance. Il nous faisait travailler sur un projet dont personne ne voulait et qui n'apportait justement rien à l'accélération de l'autonomie gouvernementale chez les peuples autochtones. On tentait d'enfoncer dans la gorge de toutes les premières nations du Canada un projet de loi dont personne ne voulait alors qu'en même temps, d'un autre côté, on manquait de ressources aux 80 tables de négociation sur l'autonomie gouvernementale pour accélérer la cadence de l'autonomie. C'est cela qui est fâchant.

    Si on avait eu un autre ministre que celui qui a précédé celui qui est là aujourd'hui, qui eût compris cette vérité, à savoir qu'il faut accélérer l'autonomie gouvernementale car c'est la seule issue pour le développement des premières nations pour faire en sorte qu'on vive en harmonie et qu'on brise le triangle de pauvreté qu'on leur impose depuis 130 ans, peut-être qu'on aurait réalisé deux ou trois autres ententes sur le plan de l'autonomie gouvernementale, plutôt que de faire niaiser tout le monde au Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles au sujet d'un projet de loi dont personne ne voulait.

  +-(1135)  

    Pour revenir à l'autonomie gouvernementale, c'est la première condition. Lorsque je vois une entente comme celle de Westbank, quand cette communauté est venue me rencontrer, avant même d'avoir lu l'entente, sur le principe, j'étais déjà plein de ferveur à l'idée de les appuyer. Quand j'ai lu l'entente, j'étais encore plus content, parce que cette entente a du sens et est équilibrée.

    C'est la même chose avec les Innus au Québec. C'est une entente équilibrée qui n'enlève rien au territoire québécois, qui donne la possibilité aux Innus de déterminer leurs propres lois sur leur territoire et qui fait en sorte qu'à l'extérieur de leur territoire propre, ils peuvent partager avec les non-autochtones les activités traditionnelles de chasse, de pêche, et autres. Ces règles sont plus claires qu'elles ne le sont aujourd'hui.

    Il y a des choses dans ces ententes pour nous émouvoir, pour nous dire qu'il est vrai qu'on est rendu au XXIe siècle, qu'on a évolué au cours des décennies et qu'on en est à la reconnaissance du droit inhérent depuis quelques années.

    Il faut maintenant arrêter de se mettre le doigt dans l'oeil, comme on dit. Il faut accélérer ces ententes d'autonomie gouvernementale. On a bien commencé, c'est bien amorcé au Québec pour la plupart des premières nations. Il faut faire en sorte qu'à l'intérieur de ce pays, nous nous respections, que nous vivions dans la dignité de chaque côté, que nous puissions nous développer avec notre culture propre, nos institutions qui nous sont propres et aussi avec les moyens que nous déterminons chacun dans nos communautés. C'est cela, l'autonomie. C'est cela, la souveraineté. C'est cela, l'indépendance.

    C'est ce que nous visons. Cela arrivera au Québec, pour le peuple québécois. Advenant la souveraineté du Québec, et cela arrivera dans quelques années, soyez-en certain, les premières nations sur le territoire québécois auront compris que le respect des peuples autochtones au Québec est quelque chose d'acquis. Elles auront compris que le respect de la dignité des peuples autochtones, le fait de se considérer d'égal à égal entre nations, est maintenant acquis pour la grande majorité de la population.

    Quand j'ai vu, au Conseil général du Bloc québécois l'an passé, une ovation lorsqu'on a parlé de respect des premières nations et de négociations d'égal à égal, je me suis dit que, pendant les 30 dernières années, nous avions fait un bon bout de chemin.

    Ici, je ne l'ai pas retrouvé au comité, ou parfois seulement. C'est pour cela que mon enthousiasme a peut-être été débordant à quelques reprises, tout comme celui de mon collègue de Winnipeg-Centre. C'est parce que nous voulions le transmettre à nos collègues. Nous pensons avoir réussi peut-être à moitié.

[Traduction]

+-

    M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, j'apprécie de pouvoir exprimer aujourd'hui, au nom du Nouveau Parti démocratique, l'appui enthousiaste de notre caucus au projet de loi, à cette étape du débat à la Chambre des communes.

    En qualité de porte-parole du NPD en matière de questions autochtones, je suis ravi de me pencher sur une question aussi positive à la Chambre des communes, car, souvent, ce sont des questions controversées que nous abordons ici. Or, cette mesure législative devrait tous nous réjouir. Si nous nous apprêtons à abroger cette 37e législature, pour appeler les Canadiens aux urnes, nous pourrions peut-être la clore sur une note positive et sur une décision dont nous pouvons tous être fiers.

    D'entrée de jeu, je rends hommage au chef de la première nation de Westbank, Robert Louie, dont je salue le travail patient et soutenu. Je salue également le dévouement de quelques conseillers que j'ai rencontrés lorsqu'ils ont exercé de patientes pressions politiques sur la colline parlementaire. Ils ont fait preuve de disponibilité et se sont avérés une précieuse ressource auprès des parlementaires. Le conseiller Larry Derrickson figurait au nombre de ces personnes. Je remercie également les négociateurs qui ont patiemment orienté le processus, au cours de ses diverses étapes, à un rythme qui a dû paraître atrocement et douloureusement lent. J'admire la patience et le dévouement dont ils ont fait preuve, notamment dans le cas de M. Tim Raybould et du conseiller juridique, Micha Menczer. Sans la participation dynamique et enthousiaste de ces intervenants, je crois que le projet de loi aurait très difficilement franchi certains obstacles, dont celui, qui n'est pas le moindre, du refus apparemment intentionnel de certaines personnes de considérer cette mesure législative pour ce qu'elle est vraiment.

    J'aimerais présenter, dans le peu de temps de je dispose, non seulement les aspects positifs du projet de loi, mais également tenter de déboulonner certains des mythes q'une infime minorité de détracteurs ont créés autour de ce projet de loi, au sujet duquel ils y trouvent encore à redire.

    Je crois que nous devrions être beaucoup plus avancés dans l'étude de ce projet de loi. Le gouvernement a demandé le consentement unanime à cet effet en novembre dernier, mais le consentement a été refusé à cause d'un seul député qui n'était même pas objectif quant au contenu détaillé du projet de loi, parce qu'il avait eu des problèmes par rapport à la pêche des autochtones de la Colombie-Britannique. Ce ne fut pas juste à l'égard des gens de Westbank de retarder ainsi l'étude du projet de loi à cause des doléances de quelqu'un dans un autre dossier autochtone n'ayant vraiment rien à voir avec le cas en cause.

    À titre de préambule à mes propos, permettez-moi de dire que cet accord sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank est novateur pour plusieurs raisons.

    Premièrement, il pose un jalon fondamental dans le processus de négociation d'accords d'autonomie gouvernementale car c'est le premier accord qui traite spécifiquement d'autonomie gouvernementale. Je le précise parce qu'il n'est absolument pas question de revendications territoriales dans cet accord. Par ailleurs, c'est la première fois qu'un accord d'autonomie gouvernementale de cette nature est négocié en vertu de la politique de 1995 sur les droits inhérents. Voilà pourquoi l'événement d'aujourd'hui est important et remarquable.

    En se rapprochant de la pleine autonomie gouvernementale, la première nation de Westbank aura un régime de gouvernance plus solide et, contrairement à ce que certains députés ont dit au sujet de ce projet de loi, elle sera plus responsable et transparente à l'égard de ses membres.

    Puisque les thèmes et les mots à la mode en cette trente-septième législature sont «transparence» et «reddition de comptes», voilà une mesure dont les députés devraient se réjouir. Je crois que le jury a délibéré et qu'il est indubitable que, sous ce nouveau régime de gouvernance, il y aura plus de transparence et de reddition de comptes non seulement à l'égard des membres de la première nation de Westbank, mais aussi à l'égard des non-autochtones habitant cette région géographique et des autres parties en cause, à savoir le milieu des affaires, le conseil municipal, le maire de Kelowna et les nombreux intervenants que nous avons entendus qui n'étaient pas des Indiens inscrits, mais qui ont appuyé ce projet de loi.

    Je débattrai volontiers avec tout député qui le désire, dans n'importe quel cadre ou forum, de la responsabilité et de la transparence. Nous savons que ce projet de loi favorisera la transparence et la reddition de comptes.

  +-(1140)  

    L'accord bénéficie du ferme appui des voisins de Westbank et des habitants de la réserve qui ne sont pas membres de la première nation. Ils reconnaissent que l'accord fournira une assurance accrue dans l'exercice de la gouvernance et de l'autorité à tous les paliers de gouvernement.

    On a présenté au Parlement le projet de loi sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank pour qu'il mette en vigueur l'Accord sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank. Aujourd'hui, nous ne faisons qu'adopter la loi habilitante permettant enfin de faire entrer pleinement en vigueur un accord qui a déjà été ratifié dans le cadre d'un processus exhaustif de consultation et de ratification réunissant toutes les parties touchées, les membres de la première nation n'étant qu'une de ces parties.

    Je crois qu'il est généralement reconnu à la Chambre que l'accord de Westbank incarne la démocratie locale à son meilleur. Lors de la cérémonie de signature, en octobre 2003, les députés de la région d'Okanagan et de Kelowna étaient présents et ont parlé favorablement. L'ancien ministre progressiste conservateur, M. Tom Siddon, qui était responsable de la mise en branle des négociations, était présent. C'était bien qu'il soit là pour constater l'aboutissement de ce long processus qui a duré 14 ans.

    Nous croyons que beaucoup d'aspects de l'accord sont positifs et qu'ils l'emportent clairement sur les objections qui pourraient être soulevées. Comme les informations erronées ne manquent pas, je voudrais en réfuter quelques-unes.

    Certains critiques ont dit que cet accord est une copie conforme de l'accord Nisga'a de 1999. Je ferai remarquer que les deux accords sont fondamentalement différents. J'expliquerai cela plus en détail à mesure que j'aborderai les arguments juridiques qui ont été présentés.

    Je commencerai par le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Comme je l'ai noté, ceci est le premier accord négocié en vertu de la politique de 1995 concernant le droit inhérent des autochtones à l'autonomie gouvernementale, qui trouve son origine à l'article 35 de la Constitution du Canada. Il faut comprendre que cet accord a été négocié dans le cadre du droit inhérent des autochtones à l'autonomie gouvernementale. L'accord a été négocié par le Canada sur la base de sa politique de 1995 qui stipule clairement que:

    Le gouvernement du Canada reconnaît que le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale est un droit ancestral existant au sens de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

    La politique prévoit des négociations avec les premières nations en vue d'arriver à des accords qui reconnaissent la compétence et les pouvoirs des premières nations en matière de gouvernance.

    Notamment, il n'est pas obligatoire que tous les accords d'autonomie gouvernementale fassent l'objet d'un traité car la politique prévoit des accords d'autonomie gouvernementale non soumis à un traité. L'Accord sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank n'est manifestement pas un traité. Cela devrait être établi et reconnu dès le départ.

    Le droit ancestral à l'autonomie gouvernementale est reconnu par le système juridique canadien en vertu de la common law constitutionnelle du Canada et en vertu de l'article 35. Ce droit trouve sa source dans le paragraphe 35(1) et est actuellement reconnu en droit canadien.

    Ceux qui s'opposent à cette mesure législative, notamment M. Mark Milke qui a fait valoir son point de vue dans le Calgary Herald et M. Gordon Gibson qui a exprimé ses réserves dans un article publié dans le Vancouver Sun et ailleurs, citent l'affaire Campbell, l'appel interjeté par le gouvernement libéral de la Colombie-Britannique ou la contestation du traité avec les Nisga'a.

    Ceux qui s'opposent au projet de loi C-11 se fondent en grande partie sur l'hypothèse générale selon laquelle le droit ancestral à l'autonomie gouvernementale ne peut exister parce que la constitution divise tous les pouvoirs législatifs entre le Canada et les provinces.

  +-(1145)  

    Malgré que la décision rendue dans cette affaire va à l'encontre de ce point de vue, les droits des peuples autochtones et en particulier celui à l'autonomie gouvernementale, qui ressemblent aux pouvoirs de légiférer, ont été préservés en tant que valeurs non écrites qui sous-tendent la Constitution à l'extérieur du cadre des pouvoirs conférés au Parlement et aux assemblées législatives en 1876.

    MM. Milke et Gibson s'opposent à la décision rendue dans l'affaire Campbell. Comme ils sont d'avis que tous les pouvoirs législatifs appartiennent au gouvernement fédéral ou aux provinces, ils considèrent que les pouvoirs des gouvernements autochtones ne peuvent être que des pouvoirs délégués. Autrement dit, les compétences d'une première nation ne peuvent découler que des pouvoirs qui lui ont été délégués par le gouvernement du Canada ou par les gouvernements provinciaux.

    Le NPD rejette ce point de vue, car nous estimons qu'il est beaucoup trop étroit et qu'il est inexact au sens de la loi. Nous appuyons les opinions exprimées par la Commission royale sur les peuples autochtones. Notre interprétation est plus conforme à celle du gouvernement fédéral en ce sens que nous respectons et appuyons la politique des droits inhérents énoncée dans la politique de 1995, au moins jusqu'à ce qu'on donne un vrai sens et une vraie définition à l'article 35 de la Constitution.

    Je fais partie de ceux qui croient que c'est une première étape essentielle à la conclusion d'un accord plus vaste à l'échelle nationale sur les questions d'autonomie gouvernementale. Je crois que plutôt que d'attendre que les tribunaux nous donnent une définition des droits ancestraux et des droits issus de traités, le Parlement et la Chambre des communes devraient revenir un peu en arrière et définir clairement l'article 35 pour que nous n'ayons pas à subir toutes sortes de confrontations et de processus onéreux, qui s'étirent parfois sur quelque 20 ans, avant d'arriver, un cas à la fois, à une définition.

    J'aimerais commenter certains des aspects de la loi sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank qui ont, je crois, donné lieu à certains malentendus. Un accord qui devrait, à notre avis, être source de réjouissances, fait actuellement l'objet de critiques, davantage par désinformation que pour toute autre raison tangible.

    Aux termes de cet accord bilatéral d'autonomie gouvernementale, la nation de Westbank assumera la responsabilité de la plupart des secteurs actuellement régis par la Loi sur les Indiens. S'il y a une chose sur laquelle nous pouvons tous nous entendre, c'est que la Loi sur les Indiens est une mesure législative oppressive, fondamentalement viciée, désuète et périmée que nous devrions tous souhaiter faire disparaître le plus rapidement possible. Ces secteurs seront progressivement transférés et les dispositions correspondantes de la Loi sur les Indiens cesseront de s'y appliquer. Autrement dit, cette mesure assure l'émancipation de la région de la première nation de Westbank d'une mesure législative coloniale qui n'a pas sa raison d'être dans un contexte moderne.

    Pour ce qui est des lois, la première nation de Westbank aura le pouvoir de faire des lois dans certains domaines comme la gestion des terres, la langue et la culture autochtones, la gestion des ressources, l'environnement et autres. Nous devons préciser très clairement, s'il reste quelque doute que ce soit ici, que la Charte canadienne des droits et libertés doit s'appliquer et s'appliquera dans le cadre de cet accord d'autonomie gouvernementale. Je ne sais pas comment le dire plus clairement. Ceux qui propagent des faussetés sont peut-être ceux qui s'opposent au projet de loi parce qu'ils croient qu'à certains égards, la Charte des droit et libertés ne s'applique pas. J'exhorte ces députés à consulter l'article 32 de cet accord qui dit dès le début:

    Le gouvernement de la Première Nation de Westbank et le Conseil sont liés, pour toutes les questions relevant de leur pouvoir, par les dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés...

    Je ne vois pas comment nous pourrions être plus clairs pour satisfaire tous ceux qui se demanderaient si la charte est applicable ou non. Pour plus de clarté et de certitude, la dernière partie de cet article se lit comme suit:

[...] et les droits et libertés garantis par la Charte sont opposables en ce qui concerne le gouvernement de la Première Nation de Westbank et le Conseil.

  +-(1150)  

    Selon moi, ces énoncés montrent très clairement que la charte s'applique. Il y a cependant un avis juridique dissident. M. Harvey, agissant au nom de certaines personnes de la région de Kelowna qui s'opposent au projet de loi, souligne que l'article 32 de l'accord fait référence à l'article 25 de la charte, qui précise qu'il faut tenir compte des droits autochtones et issus de traités dans l'interprétation de la charte. Toutefois, il ne reconnaît pas que l'article 32 de l'accord ne fait qu'énoncer ce qui est déjà dans la charte, et que cette dernière doit être abordée comme un tout et non en prenant seulement les articles qui font notre affaire. J'espère que c'est la dernière fois que nous entendons parler de cette question dans ce débat. Je ne vois pas comment quiconque pourrait de quelque façon que ce soit prétendre que la charte ne s'applique pas.

    Pour les non-membres de la bande, la charte dit que:

    Toute personne, victime de violation ou de négation des droits ou libertés qui lui sont garantis par la présente charte, peut s'adresser à un tribunal compétent pour obtenir la réparation que le tribunal estime convenable et juste eu égard aux circonstances.

    Il est donc toujours possible d'avoir recours aux tribunaux si la situation se produit. J'espère que nous avons su dissiper certaines des idées fausses à l'égard de l'application de la charte.

    Je ne vais pas m'éterniser sur cette question. Je crois que nous avons clairement illustré les raisons pour lesquelles le projet de loi reçoit l'appui inconditionnel du NPD. Nous espérons qu'il sera adopté rapidement.

    Pour terminer, je dirais que certaines personnes plus sages que moi ont indiqué que les nations autochtones ont sur cette terre féconde des droits et des intérêts qui existent bien avant les traités et qu'elles sont réellement les peuples fondateurs du Canada. Le Canada doit sa complexité et sa diversité non seulement à la variété de gens qui y sont venus d'autres pays, mais aussi à ses premiers habitants aux nombreuses langues et cultures.

    Percevoir le Canada comme une simple société d'accueil, c'est ignorer et nier le rôle prépondérant et ancien des peuples autochtones dans les assises juridiques et politiques du Canada. Il est inutile de revenir constamment sur notre passé tragique, mais nous pouvons changer notre mode de pensée en reconnaissant les erreurs commises et en adoptant des initiatives progressistes en matière d'autonomie gouvernementale, comme le projet de loi sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank.

    Par conséquent, je suis très fier d'affirmer que les députés du NPD voteront en faveur du projet de loi. Je désire encore une fois rendre hommage au chef Robert Louie, au conseil de la bande et aux négociateurs, en reconnaissance du travail herculéen qu'ils ont accompli pour que le projet de loi en soit où il en est aujourd'hui. Je les félicite et j'espère qu'ultimement, le projet de loi sera adopté à l'unanimité par la Chambre.

  +-(1155)  

+-

    L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député d'avoir fait une intervention très sérieuse et d'avoir démasqué certains mythes. Je conviens avec lui que les problèmes surgissent d'une mauvaise compréhension de certaines questions complexes.

    Comme le député l'a fait remarquer avec grande conviction, certaines des préoccupations qui peuvent surgir concernent la responsabilité et la transparence. Je n'ai aucune inquiétude, et lui non plus, je le sais. Toutefois, pourrait-il donner des explications plus détaillées pour ceux qui ne sont pas très au courant?

    On exige des dirigeants de la première nation de Westbank des contrôles rigoureux de la transparence et de la reddition des comptes, comme ceux de tout autre gouvernement. Le député pourrait-il donner plus de détails pour mieux rassurer ceux qui ne sont pas très au courant? Non pas qu'il y ait eu des problèmes aujourd'hui.

    Comme je l'ai déjà dit, beaucoup de non-autochtones qui ont eu des entreprises et des résidences soumises à ce régime de propriété foncière sont satisfaits, et ils sont heureux d'investir. Il s'agit d'une région très prospère.

    Les gens savent, à propos de la question fiscale qui a été soulevée pendant le débat, qu'un impôt foncier s'applique depuis un certain temps. Il ne faut pas oublier qu'il y a seulement quelques centaines de membres de la première nation sur place, mais des milliers de non-résidents. Comme on l'a dit plus tôt, ils sont soumis au régime d'impôt foncier, qui a été une réussite. Cela est prévu à l'article 83 de la Loi sur les Indiens, disposition qui sera abrogée.

    Le projet de loi ne change rien à cet égard et n'impose aucun autre fardeau. Il permettra à ces citoyens de participer davantage à l'élaboration des lois, comme l'accord le prévoit, et rien ne pourra être changé par la suite sans qu'ils aient leur mot à dire. Le député pourrait-il nous parler de la transparence et de la reddition des comptes?

  +-(1200)  

+-

    M. Pat Martin: Monsieur le Président, je voudrais simplement ajouter que ceux qui s'opposent au projet de loi se trompent complètement quand ils disent qu'il y aura moins de poids et contrepoids dans l'accord de Westbank.

    Soit dit en passant, en 1986, il y a eu de sérieux problèmes relativement à l'obligation de rendre compte. Une enquête a été réalisée sur les affaires de la première nation de Westbank, et des rumeurs d'irrégularités ont circulé tant pour le gouvernement fédéral que pour la bande. Autrement dit, il y a eu de graves problèmes en 1986, et l'autonomie gouvernementale a été recommandée comme moyen pour la première nation de prendre en main sa destinée et d'établir des poids et contrepoids. Le projet de loi constitue donc la réponse à une recommandation faire en 1986.

    Par ailleurs, l'accord de la première nation de Westbank prévoit l'établissement d'un gouvernement élu pour la première nation. L'accord prévoit des règles électorales strictes, entre autres choses, qui sont identiques à celles d'Élections Canada, voire meilleures. Pour les non-membres, l'accord établit un conseil consultatif législatif. Il n'y a pas d'obligation juridique pour un tel conseil. C'est une mesure que la première nation de Westbank a prise spontanément, voulant aller plus loin que nécessaire.

    La constitution établie par l'accord crée un processus clair pour la participation de la population et assure une transparence et une obligation de rendre compte totales sur le plan financier. La constitution prévoit des lignes directrices en matière de conflits d'intérêt qui sont aussi strictes que partout ailleurs au Canada. En fait, elles sont plus strictes que celles qui s'appliquent au Parlement du Canada.

    C'est une chose qui devrait intéresser les gens. Le chef du conseil ne peut même pas prévoir un déficit sans d'abord obtenir l'approbation publique au moyen d'un référendum. La première nation de Westbank disposera d'une loi sur les budgets équilibrés, à l'instar de quelques gouvernements provinciaux seulement. Nombre de municipalités ont une telle loi. La plate-forme électorale du NPD prévoit que l'adoption d'une loi sur les budgets équilibrés est la voie de l'avenir. Combien de gouvernements peuvent-ils prétendre assurer un tel degré de responsabilité et de transparence?

    J'espère que cela dissipera les mythes autour de la Loi sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank.

+-

    L'hon. Larry Bagnell: Monsieur le Président, j'ai ici la Constitution à laquelle le député s'est référé et tout le monde peut voir à quel point le document est épais. Il a 99 pages et il est très bien présenté. Comme le député l'a suggéré, le gouvernement du Canada se porterait probablement mieux si on ne l'avait pas amené à s'endetter.

    J'aimerais donner au député l'occasion de répondre à ma question, car je sais qu'il se passionne pour les avantages de l'autonomie gouvernementale. J'ai posé la même question au député du Bloc. Ma question commence par des paroles que le chef Robert Louie a prononcées devant un comité permanent.

    Alors, que signifie dans les faits l'autonomie gouvernementale? D'abord et avant tout, cela nous permet d'être maître sur notre propre territoire. La Première nation de Westbank est allée aussi loin que le lui permet la Loi sur les Indiens. Notre histoire nous a amenés à reconnaître il y a longtemps qu'il nous fallait de meilleurs outils pour promouvoir le développement social et économique aux bénéfices de tous ceux qui habitent sur notre territoire. Ce sont les outils qui permettent de gouverner et que la plupart des gens tiennent pour acquis, à moins qu'ils ne vivent dans une réserve indienne en vertu de la Loi sur les Indiens.

    Le député pourrait peut-être expliquer les avantages de l'autonomie gouvernementale comme modèle du progrès à venir des premières nations en général. Cela s'appliquerait en particulier à la première nation de Westbank.

+-

    M. Pat Martin: Monsieur le Président, je suis heureux de prendre les quelques minutes qu'il me reste pour abonder dans le même sens que le secrétaire parlementaire. Toutes les données empiriques montrent que ce sont les collectivités autochtones qui jouissent d'un haut niveau d'autonomie qui parviennent le mieux à développer leur économie. Il existe une corrélation directe entre l'autonomie gouvernementale et l'essor économique. Cela ne tient pas de l'anecdote. Des études effectuées par l'Université Harvard, qui portaient sur un certain nombre de premières nations des États-Unis et du Canada, ont clairement établi ce lien.

    Pour tous les motifs moraux et éthiques que je pourrais vous citer, l'autonomie gouvernementale est l'option intelligente à retenir. À ceux qui se préoccupent surtout de développement économique et qui veulent amener les autochtones à participer à l'économie générale, nous pouvons désormais leur signaler que les données empiriques prouvent que l'autonomie gouvernementale est l'un des éléments qui contribuent à l'essor économique.

    Je termine simplement en disant que l'Accord d'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank apportera la stabilité, un gouvernement stable, à cette collectivité. Les règles sont tellement sévères et rigoureuses que les gens de la collectivité affirment qu'il sera difficile de trouver des candidats qui accepteront de se présenter aux élections.

    Le chef Robert Louie, les conseillers de la bande et les négociateurs ont rédigé une constitution qui met nettement l'accent sur l'examen minutieux, la transparence et la reddition de comptes. Ils ont prévu l'un des régimes de gouvernance les plus évolués en Amérique du Nord au XXIe siècle , régime qui pourra certes nous servir de modèle à tous. Même si toutes les premières nations doivent négocier leur propre accord d'autonomie gouvernementale, l'accord de Westbank soutiendra fort bien la comparaison avec toute autre entente du genre.

  +-(1205)  

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    L'hon. Andrew Telegdi (secrétaire parlementaire du premier ministre (Affaires autochtones), Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de débuter en disant que je suis très satisfait du niveau des débats à la Chambre et, il va sans dire, de l'extraordinaire appui reçu par l'accord.

    Permettez-moi également de féliciter le chef Robert Louie et les membres du conseil pour tout leur travail. Je sais qu'ils doivent vivre un moment excitant, pour eux-mêmes et le peuple qu'ils représentent.

    Le projet de loi C-11 vise à donner effet à l'accord sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank. Cet accord, qui constitue la pièce maîtresse du projet de loi, est le premier de son genre et crée un précieux précédent pour les futures relations entre le Canada et les autochtones.

    L'accord met l'accent sur l'autonomie gouvernementale. Il ne s'agit ni d'un traité ni du règlement d'une revendication territoriale. En vertu de cet accord, la première nation de Westbank exercera un certain nombre de pouvoirs législatifs et assumera de nouvelles responsabilités qui lui permettront d'exercer un contrôle rigoureux sur son économie, sa culture et sa collectivité.

    Je crois que le projet de loi C-11 représente une étape importante dans l'histoire des relations entre la première nation de Westbank et le Canada. Pour apprécier l'importance de ce projet de loi, il convient d'abord de connaître un peu l'histoire de Westbank.

    Bien avant que le Canada ne devienne un pays, plusieurs collectivités, au sein du peuple Salish--ceux que l'on appelle les Okanagan--vivaient sur un vaste territoire qui englobe aujourd'hui le centre et le sud de la Colombie-Britannique et le nord de l'État de Washington. Lorsque les colons blancs ont commencé à pratiquer l'agriculture dans cette région, au XIXe siècle, ils ont vécu paisiblement aux côtés de la population autochtone locale. Le gouvernement du Canada a créé des réserves dans la région au début du XXe siècle.

    La première nation de Westbank, de l'autre côté du lac, en face de Kelowna, s'est séparée en 1963 de la bande des Okanagan qui regroupait plusieurs tribus. Les dirigeants de Westbank estimaient pouvoir mieux répondre aux aspirations particulières de leur collectivité si celle-ci était indépendante.

    Depuis lors, la ville de Kelowna s'est agrandie et a prospéré, offrant plusieurs possibilités économiques à Westbank. La capacité de la première nation à tirer parti de ces possibilités est cependant restreinte par la Loi sur les Indiens, d'après laquelle une bande doit obtenir la permission du gouvernement fédéral avant de pouvoir négocier des baux ou d'autres accords. La Loi sur les Indiens limite non seulement les pouvoirs, mais également la reddition de comptes du conseil de bande de Westbank. Les membres du conseil, en fait, ne peuvent pas être tenus légalement responsables de leurs actes.

    Cette combinaison de faiblesse du gouvernement local--due aux lacunes de la Loi sur les Indiens--et de prospérité croissante a donné lieu à une série de scandales et de difficultés au cours des années 1980. Des accusations de conflit d'intérêts ont été portées contre certains membres du conseil et le climat de méfiance qui s'est installé a entravé la croissance de Westbank.

    Ces problèmes ont incité le gouvernement du Canada à ordonner la tenue d'une enquête officielle en 1986. C'est ce qui a mené à la création de la commission Hall, qui a constaté que les problèmes de Westbank provenaient du fait que la bande indienne de l'endroit avait été «gouvernée par des hommes et non régie par des lois».

    Soucieuse de résoudre les problèmes et d'établir un gouvernement régi par des lois, la commission a recommandé des changements et, en fin de compte, l'établissement d'une loi sur l'autonomie gouvernementale pour Westbank. L'Accord d'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank tient compte de la plupart des recommandations de la commission Hall, notamment en ce qui concerne la nécessité d'établir une constitution prévoyant l'élection démocratique et légitime du gouvernement, la gestion financière interne et l'obligation de rendre compte aux membres, ainsi que des règles régissant les conflits d'intérêts.

  +-(1210)  

    Depuis ce temps, la population de Westbank a travaillé fort pour atteindre ses aspirations. En 1990, des négociations officielles débutaient entre la première nation de Westbank et le gouvernement du Canada. Elles se sont poursuivies avec les conseils de bande successifs.

    Pendant le déroulement de ce processus, la première nation de Westbank s'est employée à améliorer l'économie locale et les services sociaux. Pour promouvoir le développement économique, la bande a lancé deux entreprises, la société d'aménagement urbain de la première nation de Westbank et Construction Nu-Arc. Sous la supervision du gouvernement, la première nation est aussi devenue un locateur très actif, louant des terrains à des centaines d'entreprises et de particuliers. Dans les années 90, la bande a commencé à percevoir des impôts fonciers conformément à la Loi sur les Indiens.

    La prospérité croissante de Westbank a été profitable à tous les membres de la première nation. Cette dernière possède et exploite sa propre école, son centre commercial, une garderie et un centre de la petite enfance et un centre de soins intermédiaires pour les personnes âgées. Westbank possède également plusieurs installations récréatives, notamment des plages, des terrains de camping et de baseball.

    Westbank a réussi à négocier plusieurs ententes avec les secteurs privé et public. Les services d'égout sont le résultat d'un partenariat avec l'administration régionale. La Banque de Montréal collabore à un programme de prêts pour l'accès à la propriété.

    La façon de faire de la première nation en matière d'autonomie gouvernementale s'est inspirée du même principe coopératif. Les chefs de Westbank ont travaillé fort et longtemps avec les membres pour établir une constitution pour la collectivité, avec les non-membres pour créer un mécanisme de représentation, et avec les collectivités voisines pour créer des partenariats solides.

    Des protocoles de relation politique ont été signées aussi bien avec le district régional de Central Okanagan qu'avec la ville de Kelowna. La première nation de Westbank, tout comme le gouvernement fédéral, a consulté la Union of British Columbia Municipalities, des groupes de travailleurs et des associations de propriétaires de maison.

    Au cours des dernières années, plus de 400 séances d'information et de consultation ont été tenues pour communiquer le détail de l'accord d'autonomie gouvernementale et sa signification pour la première nation, pour la Okanagan Nation Alliance, dont fait partie la première nation de Westbank, ainsi que pour les non-membres résidents et les collectivités avoisinantes. Les gens ont été invités à poser des questions et à proposer des idées. Ces consultations ont inspiré un certain nombre d'améliorations à l'accord proposé, notamment le renforcement des dispositions sur les non-membres résidents.

    L'accord a été ratifié par la première nation de Westbank en mai 2003 par une double majorité. C'est là un seuil plus élevé que les députés de la Chambre des communes doivent respecter pour un scrutin. Une majorité des électeurs de la première nation de Westbank a également approuvé une constitution pour celle-ci, dans laquelle sont fixées les procédures électorales et les structures de gouvernance.

    L'accord intervenu entre le Canada et la première nation de Westbank est entre nos mains. J'estime que nous devons ratifier cette mesure législative parce qu'elle dote la population de Westbank d'un gouvernement moderne et efficace.

    Ensemble, le projet de loi C-11 et l'accord constituent un énorme progrès par rapport à la Loi sur les Indiens et vont renforcer la démocratie dans la communauté. Les conseillers au sein du gouvernement de la première nation seront soumis à des exigences d'imputabilité beaucoup plus strictes, énoncées dans la constitution de Westbank. En vertu de cette nouvelle constitution, les électeurs peuvent destituer leurs représentants élus, et les conseillers qui dépensent de l'argent sans autorisation peuvent en être tenus personnellement responsables.

    Par ailleurs, le gouvernement de la première nation de Westbank ne sera plus à l'abri d'une poursuite civile, comme c'était le cas sous l'empire de la Loi sur les Indiens. Selon les dispositions du projet de loi C-11, le gouvernement de la première nation de Westbank devient une personne morale qui peut poursuivre et être poursuivie. Entre autres améliorations, mentionnons des pratiques strictes de gestion comptable et financière. Les livres de la première nation de Westbank seront ouverts à la consultation publique.

  +-(1215)  

    Pour la première fois, les habitants des Terres de Westbank qui ne sont pas membres de la bande, soit quelque 8 000 personnes, disposeront d'un mécanisme officiel en vertu de la loi leur permettant d'avoir leur mot à dire dans les décisions prises par le gouvernement de la première nation. L'accord prévoit l'établissement d'un mécanisme permettant aux non-membres de protéger leurs intérêts. Il exige que la première loi de Westbank qui sera adoptée après l'entrée en vigueur de l'accord établisse le mécanisme en question.

    L'accord prévoit aussi plusieurs autres mesures de protection tant pour les membres que pour les non-membres. Le gouvernement de la première nation de Westbank et ses institutions sont liés par les dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés. En outre, toutes les décisions ou les lois de la première nation de Westbank peuvent être contestées devant les tribunaux de la Colombie-Britannique.

    Ces dispositions auront pour effet de raffermir la confiance du public dans le gouvernement et d'éclaircir le processus de prise de décision et de règlement des différends. Cela contribuera à attirer d'autres investissements dans des projets de la bande et entraînera de nouvelles perspectives pour la première nation de Westbank.

    Tout compte fait, en permettant à la première nation de tenir solidement les rênes de sa destinée, le projet de loi permettra aux dirigeants de la première nation de Westbank d'atteindre les buts de la bande: l'autonomie et la transparence. Comme le dit le chef Robert Louie:

    L'autonomie gouvernementale est la voie de l'avenir, [...], la voie de la stabilité, la voie de toute collectivité où le travail acharné et l'initiative sont récompensés. Notre objectif est de créer une collectivité sûre et dynamique qui sait qui elle est et où elle va.

    Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui porte les aspirations originelles et fondées d'un peuple. J'invite mes collègues à appuyer le projet de loi C-11, l'aboutissement d'un projet à long terme qui bénéficiera non seulement à la première nation de Westbank, mais aussi à tous les Canadiens.

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    M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC): Monsieur le Président, je remercie les députés ici présents aujourd'hui qui participent à ce débat. En outre, j'exprime mon appréciation et ma reconnaissance aux personnes qui oeuvrent depuis environ 14 ans en faveur de la conclusion de cet accord visant la première nation de Westbank. Les divers chefs, conseils et non-autochtones méritent tous des félicitations.

    Cela a certainement été un long processus, qui n'a pas été exempt d'émotions. Il y a eu beaucoup d'émotion pendant toute la durée du processus. Beaucoup de pensées rationnelles lui ont été consacrées, mais il s'est présenté des moments où il a fallu jeter des ponts de confiance, parce que les gens des deux côtés ont vécu des expériences susceptibles d'entraver leur capacité de réellement se faire confiance.

    À n'en pas douter, lorsque j'examine un accord de ce type, j'accorde une très grande importance aux libertés et aux droits individuels. Il s'est présenté des situations où j'ai dit que certaines revendications autochtones n'étaient pas justifiées parce qu'elles portaient gravement atteinte à ces libertés individuelles. Je prends ces situations au cas par cas, comme d'autres le font.

    À certains moments, des débats comme celui-ci ont été truffés d'accusations. Si quelqu'un a tendance à voter en faveur, ou souhaite qu'une demande autochtone soit acceptée, cette personne est perçue comme coupable de braderie devant des exigences irréalistes. Si quelqu'un s'oppose à certains éléments relatifs à des traités ou revendications autochtones, cette personne se fait traiter d'anti-autochtone, ou pire encore.

    Le débat sur cette question au cours des deux derniers jours a été assez courtois et je l'apprécie. Cela nous aide à nous intéresser au texte même de l'accord. Si on ne met pas l'accent sur ce qui est vraiment écrit et proposé, les mots et les étiquettes planent au-dessus des délibérations, peuvent fausser ce qu'on propose et provoquer des réactions stéréotypées d'un côté ou de l'autre. Je souhaite donc commenter précisément la teneur de l'accord et du projet de loi.

    J'ai dû m'interroger moi-même au sujet de mes opinions concernant les expressions générales. Nous employons l'expression «droit inhérent», notamment dans le cas de l'autonomie gouvernementale. Est-ce une chose en laquelle je crois?

    En tant qu'élus, les paroles que nous prononçons en cet endroit nous suivent pour toujours et nous obligent à faire preuve de cohérence par la suite. Si on remonte à l'époque où je siégeais à l'assemblée législative de l'Alberta, plus précisément lorsque j'étais ministre responsable des affaires autochtones, j'avais dit au sujet des droits inhérents que nous avons tous le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, mais que ces droits doivent être définis. J'avais dit que je ne pouvais accepter, aussi bien de la part des autochtones que des non-autochtones, une revendication du droit inhérent absolu à l'autonomie gouvernementale--l'autonomie gouvernementale touche chacun d'entre nous--sans réfléchir aux conséquences possibles pour ceux qui m'entourent. Ce droit doit être défini. J'avais dit qu'il fallait en donner une définition claire avant que je puisse l'appuyer. Après toutes ces années, les paroles que j'ai prononcées m'ont obligé à démontrer un esprit de suite.

    Je me rappelle l'une des premières rencontres que j'ai eues avec un ancien chef de la première nation Westbank. C'est une chance unique de pouvoir discuter de ce projet de loi avec tous mes collègues à la Chambre, un projet de loi qui, selon moi, aura des répercussions à l'échelle nationale. L'ensemble de la première nation de Westbank chevauche des limites constitutionnelles fédérales sur lesquelles s'appuient les personnes que je représente.

    L'une des premières rencontres que j'ai eues avec un chef de la première nation de Westbank a eu lieu avant la campagne au leadership fédéral. J'essuyais alors de nombreuses critiques, pour des raisons que je ne m'explique pas pleinement--en fait, je sais pourquoi, sachant à quelle enseigne logent certains médias nationaux; on me reprochait d'être «anti-autochtone», quelle que soit la signification de cette expression. Lorsque j'ai rencontré ce chef, il m'a notamment dit que ce qu'il savait de moi, notamment, c'est que je n'étais foncièrement pas contre les autochtones. J'ai évidemment acquiescé et je lui ai demandé comment il était arrivé à cette opinion, compte tenu de tout ce qu'il pouvait lire dans les médias. Il m'a répondu qu'il avait parlé avec des chefs en Alberta qui avaient eu affaire à moi et qui lui avaient dit que j'étais une personne honnête et directe, que je ne partageais pas toujours l'avis des autres, mais qu'on pouvait me faire confiance, que j'étais quelqu'un de franc et que je n'étais pas contre les autochtones. Je l'en ai remercié, car c'était effectivement le cas.

    On peut dire que, dans ce dossier, mes paroles reviennent me hanter, car j'ai déjà affirmé que je n'étais pas contre le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, mais qu'il faudrait bien le définir.

  +-(1220)  

    De nombreuses définitions ont été insérées dans l'accord. Je veux en passer quelques-unes en revue, parce que je suis un peu sceptique au sujet de cet accord. J'ai déclaré aux médias et au cours de rencontres avec nos amis autochtones et non autochtones que, d'après ce que j'entends au sujet de cet accord, je nourris certaines réserves et que je dois analyser ces problèmes avant de pouvoir appuyer l'accord.

    Prenons des exemples précis. Évidemment, les avocats représentant tant ceux qui sont en faveur de l'accord que ceux qui sont contre ont émis des avis, comme ils sont en droit de le faire et comme ils le font sur tous les sujets. Lorsque quelqu'un dit «selon les avocats», il faut savoir qu'il parle d'un groupe d'avocats. Comme nous le savons, les avocats ont la capacité et le talent de formuler une grande variété de positions sur un sujet donné, et je le dis avec tout le respect que j'ai pour les avocats. Examinons le libellé de l'accord.

    Les sceptiques et ceux qui sont contre l'accord ont soutenu qu'ils n'appuieraient pas l'accord parce qu'il ne respecte pas la Charte des droits et libertés. En fait, la charte est respectée. Permettez-moi de citer un extrait de l'accord:

    Le gouvernement de la Première Nation de Westbank et le Conseil sont liés, pour toutes es questions relevant de leur pouvoir, par les dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés.

    C'est pas mal simple. Qu'on aime ou pas le libellé de cette disposition, elle est claire et nette. Qu'est-ce que cela signifie quand un groupe dit qu'il est lié par les dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés? L'article 52 de la Loi constitutionnelle dit ceci:

    La Constitution du Canada est la loi suprême du Canada; elle rend inopérantes les dispositions incompatibles de toute autre règle de droit.

    C'est assez clair pour ce qui est de l'application de la charte.

    Certains disent qu'il y a cette petite chose dans notre Constitution qui s'appelle l'article 25 et qui dit que l'on doit tenir dûment compte des droits ancestraux. C'est dans la Constitution. On peut aimer ou non que cette disposition figure dans la Constitution. On peut vouloir la modifier. Si on pensait pouvoir un jour modifier la Constitution, c'est sans doute quelque chose que l'on aimerait changer.

    Quoi qu'il en soit, l'article 25 figure dans notre Constitution et la première nation de Westbank y fait référence dans son accord. Il y est dit qu'il faut tenir dûment compte de l'article 25 concernant les droits ancestraux . C'est là, qu'on l'aime ou non. Ce que nous avons à dire, je le répète, est ce qui est défini ici. Jusqu'où ira-t-on dans l'application de l'article 25?

    Une des raisons pour lesquelles j'appuie cet accord est que lorsqu'il prendra force de loi, quand nous l'adopterons, il ne sera pas automatiquement constitutionnalisé comme certains autres accords avec les autochtones. Une fois qu'ils sont adoptés, ils font automatiquement partie de la Constitution du Canada et sont très difficiles à modifier. Ce n'est pas le cas de cet accord. Il pourra être modifié. Il n'est pas constitutionnalisé.

    Passons maintenant à d'autres définitions. Nous avons parlé de celle qui concerne le fait que la charte ne s'applique pas. L'article 25 figure certainement dans l'accord. Demandons-nous si la première nation de Westbank a défini spécifiquement les domaines auxquels elle convient, sans aucune discussion, que la loi fédérale s'applique. Voyons cela. Que dit l'accord? C'est une chose de dire que rien ne s'applique. Voyons l'accord lui-même.

    Non seulement l'accord prévoit des normes minimums pour les lois de la première nation de Westbank, mais il indique clairement dans quels domaines la loi fédérale s'applique et l'emporte. Il prévoit également des règles pour résoudre les conflits dans les domaines où il risque d'y en avoir.

    Pour ceux qui veulent des précisions, tout comme moi, je vais énumérer les secteurs auxquels les lois fédérales s'appliqueront. La partie V de l'accord dit expressément que les lois fédérales concernant la paix, l'ordre et le bon gouvernement, article 31, les espèces en voie de disparition, le poisson et les habitats du poisson, article 37, et la collecte des statistiques et les rapports sur les ressources naturelles, article 38, s'appliquent toujours.

    Les compétences de la première nation de Westbank ne s'étendent pas au droit criminel. C'est un aspect très important. Certains critiques ont dit que l'accord s'appliquait au droit criminel. Il ne s'applique pas au droit criminel. Si on lit l'accord, on le voit très clairement,

    Il ne s'applique pas à la protection de la santé et de la sécurité de tous les Canadiens. Il ne s'applique pas à la propriété intellectuelle, à la radiodiffusion et aux télécommunications. Les dispositions fédérales s'appliquent toujours. C'est peut-être dommage. J'aurais pu dire à la première nation de Westbank qu'elle devrait prévoir une disposition la protégeant contre la société Radio-Canada, mais elle risque encore d'y être exposée. Les lois fédérales s'appliquent toujours.

    L'article 40 dit qu'aucune disposition de l'accord ne touche, et cela est très important, la défense nationale, la sécurité nationale et la sécurité publique, l’application des prérogatives de la Couronne. La première nation de Westbank doit prendre toutes les mesures nécessaires pour que ses lois et ses actions soient conformes aux obligationsjuridiques internationales du Canada. Dans le secteur de l'agriculture, à l'article 141, les compétences de la première nation de Westbank ne comprennent pas celles qui sont liées au trafic et au commerce interprovincial et international deproduits agricoles.

  +-(1225)  

    C'est très précis. Lorsqu'il existe un risque de conflit, la partie pertinente de l'accord prévoit des mesures pour traiter d'une telle éventualité. En ce qui a trait à de nombreux domaines, notamment la protection de l'environnement, à l'article 150, l'évaluation environnementale, à l'article 166, l'agriculture, à l'article 144, le trafic et le transport, à l'article 211, et la certification des professions et métiers, à l'article 289, l'accord prévoit que les lois fédérales ont préséance en cas de conflit. En outre, il est prévu que toute norme établie relativement à ces domaines doit être au moins aussi rigoureuse que les normes fédérales. Ceci vaut pour tous ces secteurs. En ce qui a trait aux lois provinciales, l'article 34 dit clairement que la compétence provinciale s'applique. La charte s'applique. L'article 24(1) de la charte dit:

    Toute personne, victime de violation ou de négation des droits ou libertés qui lui sont garantis par la présente charte, peut s'adresser à un tribunal compétent pour obtenir la réparation que le tribunal estime convenable et juste eu égard aux circonstances.

    En plus de la protection accordée en vertu de la charte, auquel l'accord fait expressément allusion, celui-ci prévoit que les poursuites ayant trait à la loi de Westbank seront entendues par la cour provinciale de la Colombie-Britannique. Certains disent que si des poursuites sont intentées dans la première nation de Westbank, celles-ci ne se rendront jamais au stade de l'appel devant les tribunaux si l'appelant n'est pas un autochtone. Ce n'est tout simplement pas vrai. Les non-autochtones qui vivent dans la réserve ont droit à la même protection et aux mêmes avantages que les non-autochtones qui vivent hors de la réserve.

    Le paragraphe 48(a) de l'accord dit que la Judicial Procedure Review Act de la Colombie-Britannique s'applique à la première nation de Westbank et que les demandes de contrôle judiciaire sont portées devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique en vertu de cette loi. L'accord renferme aussi des dispositions relativement à la compétence provinciale.

    Y a-t-il d'autres domaines qui sont traités de façon très précise? Je me pose une question face à la mesure législative. D'une façon générale, les choses vont-elles être meilleures du point de vue des droits et des responsabilités des autochtones et des non-autochtones dans cette réserve, ou vont-elles être pires? Voyons quelques-uns des domaines où il y a amélioration.

    Jusqu'à maintenant, le droit matrimonial dans les réserves autochtones d'un océan à l'autre n'était pas défini. Nous avons entendu bien des gens dire qu'au moment de la dissolution d'un mariage, un moment regrettable et difficile à vivre, de nombreuses femmes dans les réserves n'avaient aucun recours juridique pour déterminer à qui iraient les biens et qui obtiendrait la maison ou la propriété.

    Des règlements qui s'appliqueront en cas de dissolution d'un mariage seront inclus. Les femmes seront alors dans une meilleure situation. Elles bénéficieront ainsi d'un traitement comparable à celui prévu dans les lois non autochtones.

    La question des droits de propriété a quelque chose de novateur. Je trouve cela très enthousiasmant. Fondamentalement, on ne saurait aspirer à la prospérité dans un pays ou un secteur de compétence à moins de bénéficier de droits de propriété. C'est une condition fondamentale de la prospérité. L'accord fait mention des droits de propriété d'une manière inédite. Si l'on pouvait établir que quelqu'un était propriétaire d'une maison ou d'un bien, il était à la merci du bon vouloir du ministre ou, comme les membres du conseil le reconnaîtront, à la merci du chef ou du conseil. Ceux-ci pouvaient décider si la personne allait garder ou non sa maison ou si elle allait obtenir ou non une terre ou un terrain.

    Il y aura désormais un système de registre foncier. Des règles courantes en matière d'acquisition de biens seront mises en place. Les droits de propriété seront prévus dans l'accord concernant la première nation de Westbank. Il y aura un système codifié d'enregistrement des terres. Des valeurs hypothécaires s'appliqueront. L'autochtone possédera cette terre et il n'aura pas à craindre de perdre celle-ci advenant des changements au sein du conseil ou une brouille entre lui et le chef ou un membre du conseil.

    Je trouve tout cela un peu ironique. La première nation de Westbank veut inclure les droits de propriété. La Chine communiste l'a fait il y a quelques mois et notre propre gouvernement fédéral refuse de le faire. Si le gouvernement fédéral écoute, il pourrait peut-être songer à codifier aussi nos propres droits de propriété.

    Il y a d'autres domaines où les améliorations sont considérables. Certains ont cru que les gens au pouvoir dans la nation de Westbank se précipiteraient pour acheter des terres avant que les terres et les droits de propriété ne soient codifiés. Eh bien non. Toute attribution nouvelle de terres est interdite jusqu'à ce que le système d'enregistrement des titres de propriétés ne soit en vigueur dans la réserve.

  +-(1230)  

    La taxation sans représentation a aussi soulevé un certain questionnement, surtout de la part des non-autochtones. Il est clair que, au Canada, les non-autochtones qui habitent ou habiteront des terres de réserves doivent accepter les contrats de location offerts. Ils doivent aussi accepter le fait qu'ils n'ont pas droit à la représentation directe par rapport à la taxation. Il en est ainsi depuis 1867. Nous devons malheureusement dire à nos amis non autochtones habitant les réserves qu'ils sont en situation de taxation sans représentation, mais ils devraient essayer le contraire, c'est-à-dire la taxation avec la représentation, pour voir s'ils préfèrent cela. Ce n'est pas toujours merveilleux.

    Mon épouse et moi habitons un petit condominium. Il y a quelques semaines, lors d'une réunion de notre association des résidants de condominium, les propriétaires des unités ont élaboré un budget. Nous avons dû parler aux locataires des unités de notre ensemble condominial et leur dire que leur loyer augmenterait peut-être. Nous les avons mis au fait de nos projets, mais, en tant que locataires, ils n'ont pas le droit de vote. Ils ne sont pas propriétaires et n'ont aucun droit sur ce terrain. Ils ne bénéficient pas de la taxation avec représentation. Ils ont dû prendre une chance en espérant que les propriétaires les traitent bien, et c'est ce que nous avons fait. Mais ils ne bénéficient pas de la taxation avec représentation.

    Les autochtones n'ont pas ce droit sur les terres ancestrales, mais cet accord est pour eux une amélioration. Il y est stipulé qu'un conseil consultatif sera formé de non-autochtones qui éliront parmi eux--ce ne seront pas des nominations--leurs représentants au conseil consultatif, qui auront pour mandat de collaborer avec la bande en matière de consultation et de participation. Ils n'auront pas le dernier mot. Ils ne l'ont jamais eu depuis 1867. Nous pouvons essayer de changer cela si nous sommes prêts à attendre encore 100 ans et à tenter de modifier la Constitution. Cet accord confère aux non-autochtones une capacité accrue de se prononcer sur les questions relatives à la taxation.

    Il y a dans ce nouvel accord des dispositions qui n'existent pas actuellement pour les non-autochtones et qui ressemblent à ce que nous appelons les dispositions entre propriétaire et locataire. Les non-autochtones sauront mieux à quoi s'en tenir.

    La première nation de Westbank a prouvé qu'elle est responsable sur le plan financier. Deux cents entreprises non autochtones ne seraient pas enregistrées et en exploitation dans cette réserve si elle ne possédait pas un sens de la responsabilité financière. La première nation de Westbank a établi sa crédibilité dans ce secteur.

    Les gens d'affaires, dans cette réserve et à l'extérieur, respectent beaucoup le sens aigu des affaires et de responsabilité des bandes de la première nation de Westbank. Malgré cela, des dispositions concernent la responsabilité financière, la transparence, la gestion des fonds, leur affectation et l'entière accessibilité aux registres.

    Une disposition de révocation a été incorporée dans le processus électoral de la première nation. S'il est jugé que des membres ne gèrent pas bien les finances, ils peuvent être révoqués après avoir été élus. Je voudrais que le gouvernement fédéral prête l'oreille. Notre parti réclame depuis longtemps des dispositions de révocation. La première nation de Westbank a prévu des dispositions permettant de révoquer des membres. Elle a également prévu des élections à une date fixe, ce qui est une excellente idée. La première nation de Westbank prévoit ces dispositions et bien d'autres et, pourtant, le gouvernement fédéral refuse d'en faire autant.

    Tout comme il y a des non-autochtones qui aiment cet accord, il y a des autochtones qui s'y opposent. Il y en a qui ne sont tout simplement pas d'accord sur les dispositions. Il y a des autochtones dans la réserve qui ont dit au chef et au conseil de la première nation de Westbank qu'ils ont le sentiment qu'on cède tout, et cela ne leur plaît pas. Ils ont l'impression qu'il ne leur reste rien et qu'on leur enlève tous leurs pouvoirs. Certains disent vouloir toujours être assujettis à la Loi sur les Indiens et ne veulent aucun pouvoir, sauf celui de se faire malmener par le gouvernement fédéral.

    J'ai rencontré des autochtones qui avaient une importante préoccupation. Ils reconnaissent la culture et la tradition autochtones, mais veulent également des garanties qu'on respectera diverses croyances spirituelles dans les réserves. Beaucoup de membres de la première nation de Westbank et d'autres réserves sont chrétiens depuis des générations, et certains sont nouvellement chrétiens. Ils veulent veiller à ce que cette tradition soit respectée, de même que d'autres traditions. La charte et notre Constitution s'appliquent. Le préambule de la Constitution canadienne reconnaît la suprématie de Dieu et elle s'applique, tout comme la Charte des droits. Nous ne pouvons pas exercer de discrimination contre des personnes en raison de leurs croyances particulières.

  +-(1235)  

    Je répète encore une fois que presque à chaque fois que j'assiste à une réunion dans une réserve autochtone, la séance commence par une prière. Parfois, on récite une prière chrétienne très précise. À d'autres occasions, la prière est adressée à un créateur ou à un esprit. Il y a une variété de prières. Néanmoins, je souligne qu'elles font l'objet de plus de respect que ce que nous voyons dans la société non autochtone. Je tiens simplement à m'assurer que ces dispositions sont présentes.

    Le dernier point que j'aborde ici--qui illustre vraiment le manque de confiance qui règne parfois--est que le projet de loi comporte une disposition sur l'utilisation de substances intoxicantes dans la réserve, qui habilite la première nation de Westbank à prendre des mesures à ce chapitre et, notamment, à interdire certaines substances que, dans notre société, on ne songe peut-être même pas à interdire, mais qui constituent une menace dans la réserve.

    Mon épouse et moi avons collaboré dans le passé avec des organisations oeuvrant auprès des collectivités, principalement non autochtones et dans certains cas autochtones, qui font face à des problèmes d'abus d'alcool ou d'autres drogues. Il est très douloureux, tant pour une personne que pour un groupe, d'avouer des problèmes de consommation d'alcool ou d'autres drogues. Or, la nation de Westbank reconnaît très clairement la situation à cet égard. Ses dirigeants ont pris des mesures pour faire face aux difficultés qui pourraient survenir. Certains députés ont dit que ces mesures avaient en fait pour objet de permettre la vente de marijuana. De telles allégations doivent être fort blessantes pour les dirigeants de la nation de Westbank qui soutiennent vouloir protéger leur peuple.

    En conclusion, lorsque je me demande si ces dispositions et les autres qui sont contenues dans le projet de loi améliorent la situation des autochtones, je réponds que oui. Est-ce qu'elles constituent une amélioration également pour les non-autochtones? Oui, c'est une amélioration. Le projet de loi est-il parfait? Non, il ne l'est pas, à l'instar des autres mesures législatives élaborées dans cette enceinte. Cependant, il constitue une manifestation de responsabilité de la part de ceux qui veulent aller de l'avant et concrétiser leurs rêves et leurs espoirs en faisant preuve de transparence et de sens des responsabilités. J'appuie cette démarche.

  +-(1240)  

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    L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais remercier notre collègue d'avoir, à l'instar de beaucoup d'autres députés, dissipé beaucoup de mythes et de craintes. Chaque fois que nous avons quelque chose de nouveau et de créatif, et il est évidemment très complexe de gouverner un pays, cela soulève chez les gens toutes sortes de craintes tant qu'elles ne sont pas dissipées, et le député a fait un excellent travail à cet égard. Je voudrais lui donner la possibilité de parler davantage, car c'est son domaine, s'il a encore des choses à dire.

    Je suis heureux qu'il ait parlé de l'aspect spirituel des membres des premières nations. Leur spiritualité est vraiment incroyable. Je me rappelle avoir assisté à une séance dans un tout petit village. Le programme prévoyait notamment un service religieux. Il y avait alors plus de ministres anglicans que je n'en avais vus dans tout le reste du territoire. Ils viennent nous voir de nos jours, je suppose, pour nous guider sur le plan spirituel, et je ne pense donc pas que les gens aient à s'inquiéter de la spiritualité. La Loi canadienne sur les droits de la personne s'applique et, comme tous les députés le savent, elle protège les droits religieux.

    Je voulais également féliciter le député d'avoir soulevé la question de la taxation sans représentation. Je ne vais qu'ajouter à ce qu'il a dit. Il a soulevé d'excellentes questions. Le fait est que les lois fiscales sont visées par l'article 83 de la Loi sur les Indiens, qui fait bien entendu partie du droit canadien, et il y a donc représentation en l'occurrence. La Cour suprême a également établi que les lois fiscales ne conduiront pas à une taxation sans représentation. La Loi sur les Indiens et cet accord sont passés par une assemblée législative. Même si cet accord ne touche pas la question de l'imposition, il fait quand même appel à l'article 83 de la Loi sur les Indiens. Il a découlé d'une loi fédérale et. évidemment, tous les citoyens qui vivent là sont représentés par le gouvernement fédéral.

    Le député voudrait peut-être poursuivre.

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    M. Stockwell Day: Monsieur le Président, quelques mots, très rapidement, sur l'intention que traduisent les observations du député. J'examine tous les textes de loi à la lumière de certains critères. D'abord, respecte-t-il les droits fondamentaux et les libertés individuelles? Je crois que le projet de loi le fait. Est-il conforme à la charte et aux lois provinciales et fédérales? Bien sûr, je le crois.

    Hier, lorsque nous avons voté, à l'étape du rapport, sur l'accord de la première nation de Westbank, nous nous sommes aussi prononcés sur un autre accord sur l'autonomie gouvernementale et les revendications territoriales d'une autre bande. J'ai appliqué les mêmes critères, et j'ai voté contre. Selon moi, ce projet de loi ne satisfaisait pas aux critères. Il n'était pas conforme. Hier, nous avons donc voté sur deux accords d'autonomie gouvernementale se rapportant à des revendications territoriales. J'en ai appuyé un et j'ai voté contre l'autre,

    Le projet de loi améliore-t-il la situation des autochtones? Oui. Celle des non-autochtones? Aussi. Tient-il compte des préoccupations des opposants? Voilà un critère très clair. Il y a toujours des opposants. Ce qui frappe bien des gens, c'est qu'il y a dans cette réserve quelque 7 500 non-autochtones qui, si les libéraux déclenchent des élections, comme ils le feront bientôt, croyons-nous, devront décider s'ils votent pour moi ou pour quelqu'un d'autre.

    J'ai consulté ces gens, les députés peuvent me croire. J'ai reçu aujourd'hui six appels téléphoniques de gens qui n'appuient pas cet accord. Je respecte leur point de vue. J'ai fait des recherches et j'ai essayé de leur répondre aujourd'hui comme je l'ai déjà fait à d'autres occasions. J'ai reçu six appels, mais il y a peut-être d'autres opposants. Je dis simplement que ma circonscription sait exprimer ses vues. Je reçois des appels, et six personnes ne sont pas d'accord.

    Les représentants du district régional ont donné leur appui au projet de loi. Le Conseil de développement économique et la Chambre de commerce de Westbank l'ont fait aussi. Ce sont des dirigeants de petites entreprises pragmatiques qui ne font pas de sentiment.

    J'ai fait du porte-à-porte dans cette région la semaine dernière encore. Oui, il y a des opposants. Ils ne sont pas très nombreux, mais leurs préoccupations sont légitimes. Voilà les critères que j'ai appliqués et continuerai d'appliquer dans l'étude de ce projet de loi et des autres. Or, il me semble que le projet de loi respecte ces critères.

  +-(1245)  

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    L'hon. Larry Bagnell: Monsieur le Président, pour faire suite aux propos du député, un sondage a récemment eu lieu également. J'ai reçu, je crois que c'était le 22 mars, les résultats pour la population non autochtone et, bien sûr, la majorité dans ce sondage s'est déclarée favorable.

    Le député a fait allusion à l'autre vote que nous avons eu hier soir sur l'accord de revendication territoriale et d'autonomie gouvernementale du peuple tlicho. J'espère que, lorsque nous tiendrons des séances d'information et que nous mettrons les choses au clair en comité, le même genre de raisonnement et de connaissances prévaudront, car, bien que cet accord diffère totalement, il comporte certains éléments extrêmement emballants.

    À titre d'exemple, des non-autochtones peuvent être élus au conseil aux termes de cet accord. Je ne suis pas sûr que nous disposions d'un modèle semblable ailleurs. Donc, non seulement ils jouissent d'une représentation garantie au comité grâce à cet accord, mais ils peuvent aussi se faire élire aux conseils de la communauté. S'ils sont élus, cela va de soi, ils auront leur mot à dire dans les questions d'imposition et d'autres qui influent sur leur communauté. J'ai hâte au débat sur cet aspect.

    J'aimerais poser au député une question à l'intention de ceux qui nous regardent depuis leur demeure. Je sais que beaucoup d'aînés nous observent et ils ne connaissent peut-être pas très bien ce dont nous parlons. Puisqu'il s'agit de la circonscription du député, pourrait-il rappeler les données de base et décrire le contexte et la région pour les gens qui ignorent de quoi nous parlons? Pourrait-il décrire les liens avec la communauté et les gouvernements voisins, notamment l'administration régionale et le groupe des nations d'Okanagan qui oeuvrent ensemble? Les gens comprendront alors comment tout cela s'emboîte et, comme je l'ai dit, comment cela fonctionne si bien et avec une telle coopération.

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    M. Stockwell Day: Monsieur le Président, il est assez rare que j'aie la chance de parler très précisément de ma circonscription ou qu'un député ministériel m'invite à le faire, et je suis donc très heureux et très honoré d'accéder à sa demande.

    Pour ceux qui ne connaissent pas bien la région, j'aimerais préciser, pour qu'ils aient une idée de ce que cet accord signifie, que la Vallée de l'Okanagan se trouve dans la partie centre et sud de la province et qu'elle borde un lac magnifique, un parmi plusieurs, c'est-à-dire le lac Okanagan.

    Pour ceux qui connaissent la ville de Kelowna, lorsqu'on traverse le pont Kelowna qui enjambe le lac Okanagan, dès qu'on se retrouve de l'autre côté, on se trouve sur l'autoroute principale qui traverse les terres de la première nation de Westbank. Il est difficile de savoir que nous passons alors dans un territoire de compétence distinct.

    Ces terres abritent quelque 7 500 non-autochtones et environ 600 autochtones. Il y a environ 200 entreprises qui sont très actives dans cette région. Une partie de ces terres sont très bien situées sur le bord du lac et certains autochtones et non-autochtones y vivent, et une autre partie est boisée. Elles couvrent un grand territoire.

    Les liens entre les autochtones qui vivent sur les terres de la première nation, la bande et le conseil, les entreprises et la collectivité, sont très positifs. Un important complexe communautaire et récréatif est actuellement en construction dans la partie non-autochtone et la première nation de Westbank a donné plusieurs milliers de dollars pour la réalisation de ce projet. Cela n'a rien de nouveau. Ces liens uniques et positifs existent depuis un bon nombre d'années. L'Accord de la première nation de Westbank ne fera que solidifier ces liens, bien qu'il ne soit pas consacré dans la Constitution.

    On ne peut pas décider d'appliquer cet accord à toutes les régions autochtones, mais je suis persuadé que les gens se pencheront sur cet accord, sur les droits de propriété et autres points qui ont été définis, et qu'ils en reconnaîtront les aspects positifs. Je crois que si les gens adoptaient certains de ces principes de base et qu'ils respectaient les droits et libertés individuels, il serait beaucoup plus facile d'établir des liens positifs et solides entre les peuples au pays.

  +-(1250)  

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    M. Werner Schmidt (Kelowna, PCC): Monsieur le Président, c'est d'un honneur que de prendre la parole au sujet du projet de loi. Je souscris, c'est certain, à de nombreuses observations que mon collègue vient de faire. Un des éléments sur lequel nous sommes entièrement d'accord, c'est le statut et le respect dont la bande indienne de Westbank jouit dans la collectivité.

    La première nation de Westbank a eu la chance d'avoir été gérée par un conseil qui a mis en oeuvre des politiques de développement économique et des pratiques administratives extrêmement judicieuses. Il a eu une vision prospective de la participation communautaire. Il a fait un excellent travail.

    Je souhaite vraiment faire écho une fois de plus à l'observation formulée au sujet de la contribution de la première nation de Westbank au complexe récréatif. Je sais que je m'ingère dans la circonscription du député en disant cela, car ce complexe n'est pas dans mon comté, mais dans le sien. Toutefois, en ce moment, la première nation de Westbank se trouve dans ma circonscription de Kelowna. Les nouvelles délimitations des circonscriptions électorales vont changer cela.

    Je voudrais commencer mon allocution en renvoyant à la formation du conseil consultatif. L'accord indique clairement qu'il faut créer ce conseil consultatif. On a fait valoir que l'accord indique que les membres de ce conseil seront élus. J'ai le document officiel contenant l'accord. Je souhaite lire le texte exact relatif à la représentation des non-membres. L'article 54 comprend quatre paragraphes et prévoit ce qui suit:

a) La Loi de Westbank doit prévoir des mécanismes permettant aux non-Membres qui vivent sur les Terres de Westbank ou qui ont un intérêt sur les Terres de Westbank de contribuer aux projets de Loi de Westbank et aux modifications législatives à la Loi de Westbank qui les touchent directement et de façon importante.

    Il y aura un conseil consultatif. Le texte se poursuit:

b) La Première Nation de Westbank doit édicter la Loi de Westbank qui établit les mécanismes exigés par l'alinéa 54a) avant que le Conseil édicte toute autre nouvelle Loi de Westbank après la Date d'Entrée en Vigueur ou dans les 30 jours suivant la Date d'Entrée en Vigueur, selon la première éventualité.

    Cela donne à penser que dans un délai de 30 jours suivant l'entrée en vigueur de cet accord donné, un conseil consultatif sera créé. Le texte se poursuit:

    La Loi de Westbank édictée afin de remplir les obligations mentionnées à l'alinéa 54(a) ne peut être modifiée ou remplacée qu'avec le consentement des non-Membres vivant sur les Terres de Westbank ou ayant un intérêt sur les Terres de Westbank.

    Ce type de disposition est très louable. Enfin, l'accord prévoit ceci:

    La Loi de Westbank édictée afin de remplir les obligations mentionnées à l'alinéa 54(a) doit prévoir le processus par lequel le consentement des non-Membres est obtenu pour les fins mentionnées à l'alinéa 54(c).

    Là où je veux en venir est que l'accord prévoit un conseil consultatif. Certains diront que ce détail n'est guère important, mais je suis d'avis, et je crois que les non-membres partagent cet avis, que ce détail est très important parce qu'il porte sur le mode de nomination des membres de ce conseil consultatif.

    On a dit que l'accord prévoit qu'ils seront élus. Les passages que j'ai lus ne le disent aucunement. On m'a remis un exemplaire du projet de loi rédigé par la première nation de Westbank. L'article 3 de l'accord indique clairement que la première nation de Westbank envisage de donner aux membres du conseil un mandat de trois ans à compter d'une date demeurant indéterminée. L'article 3 dit ceci:

    À compter de [...] et tous les trois ans après cette date, on choisit, dans le cadre d'une élection en vertu de la partie [...] du code électoral de la première nation de Westbank, les cinq membres du conseil consultatif qui se verront confier un mandat de trois ans à compter de l'expiration du mandat des membres nommés par le chef et le conseil de la première nation de Westbank.

    C'est la première fois que l'on indique que les membres du conseil consultatif seront élus. C'est une bonne chose. Ils doivent absolument être élus. Cependant, l'accord en soi ne prévoit pas cette élection.

  +-(1255)  

    L'accord prévoit la création d'un tel conseil. Il s'agit ici d'une loi faite par les premières nations et précisant de quelle façon les membres doivent être élus. Il importe de préciser que cette loi peut être modifiée, mais que l'accord fera maintenant partie de la législation du Parlement du Canada. C'est là un point important.

    Je veux aussi dire que j'ai énormément de respect pour la première nation de Westbank et que j'ai confiance qu'elle va développer davantage son projet de loi en ce qui a trait au rôle et au fonctionnement du conseil consultatif.

    Cela dit, il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'un document qui peut être modifié selon la volonté du conseil de bande et que ce document ne fait pas partie de l'accord comme tel. C'est là une considération d'ordre technique, mais elle est importante.

    Je ne vous apprendrai rien, mais j'aimerais aller un peu plus loin dans ma démarche et vous lire l'article 25 de la Charte des droits et libertés. Cet article dit:

    Le fait que la présente charte garantit certains droits et libertés ne porte pas atteinte aux droits ou libertés—ancestraux, issus de traités ou autres—des peuples autochtones du Canada, notamment:

a) aux droits ou libertés reconnus par la Proclamation royale du 7 octobre 1763;

b) aux droits ou libertés acquis par règlement de revendications territoriales.

    Même si l'article 25 mentionne clairement que ces droits et libertés existent, il est aussi tourné vers l'avenir. Tout droit ou toute liberté accordé dans le cadre d'un accord découlant de revendications territoriales est maintenant protégé en vertu de l'article 25 de la charte.

    Certains ont fait valoir que cela signifiait que la charte ne s'applique pas. C'est tout à fait le contraire. Je pense que la charte s'applique. Toutefois, celle-ci crée des droits et libertés pour un groupe de citoyens qui peuvent ne pas être les mêmes que ceux qui sont accordés à d'autres citoyens du Canada. C'est un point important qu'il convient de souligner.

    Je veux aborder un autre aspect qui concerne la création d'un troisième ordre de gouvernement. Certains trouveront là matière à discussion. Le simple fait qu'on ne s'entende pas sur la question de savoir s'il s'ensuit la création d'un troisième ordre de gouvernement obligera les tribunaux à rendre de nombreuses décisions à cet égard et de nombreux avocats s'enrichiront en essayant d'interpréter cette disposition.

    Je voudrais dire comment j'interprète cela par rapport à la Constitution du Canada. De toute évidence, la Constitution du Canada établit tous les pouvoirs qui existent dans notre pays pour quelque gouvernement que ce soit, parce que c'est ainsi que notre pays fonctionne. Ces pouvoirs sont clairement divisés en deux. Il y a d'abord ceux du gouvernement fédéral, puis ceux des provinces.

    Tous les pouvoirs sont prévus dans la Constitution. Les pouvoirs qui existent actuellement pour le gouvernement fédéral et les provinces sont interprétés en fonction du principe de l'exclusion ou de la doctrine de l'exclusivité. Il est prévu très clairement que le pouvoir de légiférer qui est conféré à un palier de gouvernement ne saurait être assumé par un autre palier ou ordre de gouvernement. En l'occurrence, il est très clair que les lois du Canada et celles des provinces seront, dans certains cas, assujettis à la législation de la première nation de Westbank.

    Il y aura d'interminables discussions sur ce point. À mon avis, ce qui va se produire, c'est que les gens feront valoir que le Parlement a clairement défini dans l'accord l'existence de certains pouvoirs pour les provinces, de certains autres pour le gouvernement fédéral et enfin, de certains autres pour la première nation de Westbank.

    Cela me porte à croire qu'un nouvel ordre ou palier de gouvernement a été créé. Je suis certain qu'il y en aura qui ne partageront pas mon avis, mais j'imagine que nous devrons simplement accepter nos divergences de vues. Quoi qu'il en soit, les tribunaux seront probablement appelés à se prononcer là-dessus à maintes occasions dans l'avenir.

  +-(1300)  

    Je voudrais aussi parler brièvement de la question de la responsabilité financière et de la transparence. L'accord visant la première nation de Westbank prévoit indiscutablement une structure privilégiant la transparence et l'obligation de rendre compte. Dans mon esprit, il ne fait aucun doute que la première nation de Westbank a, dans le passé, été responsable et transparente et qu'elle a fait de l'excellent travail à ce chapitre.

    Il y a toutefois certains éléments qui ne sont pas tout à fait clairs en l'occurrence. Je pense que c'est ce manque de clarté qui me fait éprouver de très sérieuses réserves au sujet d'une disposition particulière. Tout d'abord, les revenus et les dépenses de la bande sont divisés en deux parties ou deux groupes. Il y a d'abord les dépenses et les revenus locaux, puis les dépenses et les revenus non locaux. Ils sont regroupés dans un document budgétaire, mais certaines dispositions ont pour effet de créer une très nette distinction. Il y a tout d'abord la disposition sur les dépenses en immobilisations. Les fonds perçus localement proviennent de deux sources. On pourrait faire valoir que c'est du pareil au même, mais ce n'est pas le cas parce qu'on établit une distinction par rapport aux dépenses en immobilisations.

    Tout d'abord, il y a les recettes locales qui viennent des membres de la première nation, puis il y a celles qui viennent des non-membres de la première nation. On fait une distinction entre les deux. Dans le cas des dépenses en immobilisations faites avec l'argent venant des membres de la première nation, s'il s'agit d'une dépense supérieure à 500 000 $, il faut tenir une assemblée spéciale et un référendum pour que la dépense proposée puisse être faite.

    Dans le cas des dépenses en immobilisations faites avec l'argent venant des non-membres de la première nation, le plafond de 500 000 $ n'existe pas. En fait, il n'y a aucune limite. C'est pourquoi le conseil consultatif devient si important. Il faut reconnaître que le conseil consultatif n'a aucun apport direct; sa fonction se limite à la consultation. La loi de Westbank devrait et doit en fait, à mon avis, définir clairement la relation entre le conseil consultatif et les non-membres. La majeure partie des recettes locales viendront des non-membres de la première nation. Par conséquent, il est vraiment important que ces gens soient consultés et puissent se faire entendre lorsqu'il s'agit de décisions qui les touchent directement.

    Mon souci n'est pas tellement qu'ils aient un vote au conseil, mais bien qu'il y ait une participation et une représentation démocratique réaliste et raisonnable. Au fond, c'est ça la question. Ce sera un défi de taille pour la première nation de Westbank que de rédiger cette loi de manière à ce qu'il y ait une représentation démocratique raisonnable.

    Je dirais donc qu'il y a effectivement d'importantes omissions qui doivent être signalées et corrigées avant que nous puissions adopter ce projet de loi dans son intégralité. Encore une fois, je répète qu'il ne s'agit pas ici de s'opposer au fonctionnement de la première nation de Westbank ou au travail qu'elle a fait. Je veux plutôt critiquer le projet de loi pour deux raisons bien précises. Premièrement, on cherche indûment à le faire adopter à la hâte, et j'ignore pourquoi. L'autre raison est qu'il n'est pas assez complet pour que nous soyons convaincus qu'il peut en fait servir de modèle pour les futures ententes d'autonomie gouvernementale. C'est ce qui me préoccupe.

+-

    L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je vais tenter de dissiper les préoccupations du député et avoir une bonne discussion. Je veux m'assurer que tout est clair, parce que ces questions sont très techniques. Il est bien qu'il les ait soulevées parce que nous ne les avons pas vraiment abordées aujourd'hui. Son argument est fort valable.

    En premier lieu, évidemment, j'exprime mon désaccord en ce qui concerne ses commentaires sur la précipitation. Cela fait maintenant dix ans que nous négocions, comme je l'ai mentionné. Comme il y a déjà eu 400 consultations, j'estime qu'il n'y a pas précipitation.

    Sur la question du comité, une fois la loi mise en place, le député a fait mention de certains éléments positifs contenus dans l'avant-projet de loi de la première nation de Westbank. Il est fort bien de mentionner qu'on se penchera sur les préoccupations si cet avant-projet est adopté. En ce qui concerne le paragraphe 54 d) dont il a fait lecture, le député soutient que c'est une disposition admirable, louable, et qu'une fois adoptée, mise en oeuvre et entrée en vigueur, elle ne pourra être modifiée sans le consentement des citoyens non autochtones. Voilà qui renforce autant la disposition que si elle figurait dans l'accord lui-même.

    En vertu de ce système, les non-autochtones jouissent certainement d'une bien meilleure représentation qu'avant l'accord. Comme nous le savons et comme je l'ai mentionné dans mon intervention, avant l'accord, et probablement à cause des capacités de la première nation de Westbank, ces quelque 7 500 personnes et 200 entreprises ont déjà choisi de s'établir sur les terres de Westbank. Ils ont fait ce choix à la lumière de la bonne gouvernance qui y règne.

    À l'origine, il n'y avait pas de représentation, en dépit de l'existence du conseil consultatif. J'estime qu'il faut réagir positivement compte tenu de cette expérience. Le conseil consultatif a déjà tenu 43 séances à ce jour, montrant ainsi sa bonne foi dans ses rapports avec les non-autochtones. Évidemment, la première nation a également besoin d'eux. C'est un excellent partenariat. Nous devons croire que cette bonne foi se maintiendra et, bien sûr, une fois cette loi mise en oeuvre, elle ne pourra être modifiée sans l'assentiment des non- autochtones, même s'ils sont en désaccord avec le conseil.

    Je me demande si le député pourrait commenter cette disposition en particulier et la protection qu'elle assure quant à ses préoccupations.

  +-(1305)  

+-

    M. Werner Schmidt: Monsieur le Président, effectivement le fait est louable. Le député invoque le paragraphe 54(d) et j'approuve entièrement ses observations. Là n'est pas la question. La difficulté vient de l'élection initiale des membres du conseil consultatif. Voilà ce qui cloche et non pas le paragraphe 54(d). Cet article est tout à fait correct; ce sont seulement les étapes initiales antérieures à cela qui posent problème.

    Quant aux autres articles concernant le conseil consultatif, il existe déjà un conseil consultatif et il a donné d'assez bons résultats nonobstant les nombreux arguments sur la qualité de la représentation. Tout cela est dû au processus de nomination. Ce qu'on dit, je crois, c'est que si ce texte devient loi, il divisera la région en cinq secteurs; or, rien ne laisse croire qu'il n'en sera pas ainsi et, le cas échéant, nous devrons nous conformer à ce texte législatif. Il propose que chacun de ces cinq secteurs élise un membre du conseil.

    Cependant, le mot clé en l'occurrence est «élire» au lieu de «nommer». Je crois que l'élection est prévue dans la loi. Si la loi est édictée et dit «élire», on ne peut pas la modifier. Selon moi, cette disposition est excellente, mais elle n'est pas en vigueur maintenant. Voilà ce qui m'inquiète. Elle devrait déjà être en vigueur.

    Je voudrais ajouter une autre observation. J'ai ici un exemplaire de la constitution subséquente à l'accord et un exemplaire de l'accord lui-même. L'accord est un document beaucoup plus petit que la constitution élaborée à partir des dispositions de celui-ci. Pour cela, je tiens à féliciter les gens qui ont fait un excellent travail. Cette partie est fort louable, mais j'aimerais qu'on donne autant de crédibilité à la procédure de nomination des membres du conseil de Westbank. Voilà ce qui me préoccupe.

+-

    L'hon. Larry Bagnell: Monsieur le Président, je poursuis en affirmant que je serais probablement d'accord avec les préoccupations du député si nous travaillions entièrement en isolation. Une fois que la loi sera en vigueur, si elle répond aux désirs du député, il n'y aura aucun problème, puisqu'elle ne pourra pas être modifiée. Compte tenu du fait que la loi est élaborée avec l'entière collaboration des non-membres, du conseil consultatif et des premières nations, elle reflétera probablement les désirs du député, mais surtout ceux du peuple non autochtone de la région.

    Cependant, si, pour quelque raison que ce soit, nous perdions les pédales ou que nous subissions une mauvaise influence, la loi pourrait toujours être contestée en vertu de la charte. La loi doit être à l'épreuve de la charte et, ainsi, des contestations. Évidemment, tous les autres éléments de l'accord peuvent être contestés en cour. Tout le monde est protégé à cet égard, alors je demande au député de faire preuve d'indulgence.

    Compte tenu du réseau de collaboration en place, puisque des non-autochtones élaborent cette loi et puisqu'elle ne pourra plus être modifiée une fois adoptée, cette composante à la fois libérale et flexible permet aux parties concernées d'adopter le meilleur processus électoral et les meilleurs dispositions—dans le cas présent, lorsqu'elles ont d'aussi bonnes relations de travail—, et pourrait mener à un processus créatif qui saurait satisfaire le député. 

  +-(1310)  

+-

    M. Werner Schmidt: Monsieur le Président, je n'ai rien contre le contexte actuel. J'aimerais assurer la Chambre que ce n'est pas le cas. Le problème, c'est qu'il ne s'agit pas uniquement du contexte actuel, mais aussi de la situation future.

    Je suis certain que le député s'empressera de dire que c'est précisément la raison d'être du paragraphe 54(d). C'est tout à fait juste, mais il faut avoir un bon point de départ et je veux faire ressortir l'importance d'un point de départ solide et positif.

    Je l'ai déjà fait à deux reprises déjà et je le referai encore. Je crois que l'actuel conseil de la première nation est animé de très bonnes intentions et qu'il fera probablement ce qui s'impose. Je l'espère. Mais si nous adoptons un projet de loi en nous disant que c'est ce que le conseil fera, ce n'est pas suffisant.

    La Constitution est claire et l'accord est clair en soi, mais il ne va pas assez loin. Cet élément est essentiel, parce qu'il touche environ 93 p. 100 des personnes qui vivent sur les terres de Westbank. On ne peut pas passer cela sous silence et se dire que cela importe peu. Je crois au contraire que c'est très important.

+-

    L'hon. Larry Bagnell: Monsieur le Président, nous pourrions peut-être réfléchir encore à la question. Je pense que si le député examine mes arguments et considère comment cela fonctionne jusqu'à maintenant, il pourrait être davantage rassuré, mais passons à une autre question qu'il a soulevée, la charte.

    Un député a soulevé une question au sujet de la charte, d'une déclaration disant «pas moins que les dispositions de la charte», déclaration qui a soulevé des préoccupations parmi les députés. Je me contenterai de dire, en guise de clarification, que cette déclaration a été faite non pas pour qu'il y ait moins de dispositions que la charte pour protéger la population, mais pour qu'il y en ait plus.

    Une voix: C'était dans le projet de loi sur les Tlichos.

    L'hon. Larry Bagnell: C'était dans le projet de loi sur les Tlichos. La charte et les droits de la personne s'appliquent à tous. Il n'y a pas de problème là.

    Je voudrais que le député fasse une dernière déclaration sur le troisième ordre de gouvernement, qui constitue un problème pour lui. Il est assez clair, et c'est d'ailleurs ce que la Cour suprême a décidé, que même s'il y a des relations entre gouvernements en ce qui concerne les questions administratives, la Constitution considère qu'il n'y a que deux ordres de gouvernement et que cette loi n'en crée pas un troisième. C'est seulement sur le plan administratif et comme le gouvernement fédéral peut changer cela à tout moment, celui-ci ne cède pas de pouvoirs à tout jamais.

    

+-

    M. Werner Schmidt: Monsieur le Président, le député a simplement exposé avec précision, à mon avis, le débat qui va se poursuivre sur le troisième ordre de gouvernement. C'est une question d'interprétation. Les uns interprètent d'une façon et les autres, d'une autre.

    Il est vraiment important pour nous de reconnaître que la charte est établie pour tous les Canadiens, que des droits particuliers ont été accordés aux premières nations et que la Constitution définit tous les pouvoirs accordés à tout gouvernement au Canada. Selon moi, lorsque le droit est accordé aux premières nations de légiférer dans des domaines qui, en vertu de la Constitution, relèvent de la compétence fédérale ou provinciale, cela est inconstitutionnel.

+-

    M. John Cummins (Delta—South Richmond, PCC): Monsieur le Président, permettez-moi de faire quelques petites observations, en guise de préambule, avant de me lancer dans le débat. Premièrement, de nombreux aspects de cet accord me plaisent. En fait, j'aurais pu facilement voter en faveur du projet de loi si l'amendement que j'ai proposé, et que malheureusement la présidence n'a pas retenu, avait été adopté. Mon amendement visait simplement à retirer de l'accord toute mention d'un droit inhérent et tout autre obstacle à l'application de la charte et de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Si ma proposition avait été approuvée, je n'aurais eu aucun mal à appuyer le projet de loi.

    Deuxièmement, je signalerai très brièvement que cet accord est le premier accord négocié conformément à la politique gouvernementale visant à reconnaître le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Il s'agit d'une politique que le Parti libéral préconise depuis près de 20 ans. Chose certaine, en 1993, cette politique faisait partie du programme du parti. Pourtant, cette notion et tout ce qu'elle englobe n'ont jamais fait l'objet d'un débat à la Chambre. Voilà l'essence du discours que je veux tenir aujourd'hui.

    Nous croyons tous que les autochtones canadiens, à l'instar des autres Canadiens, doivent pouvoir gérer leur propre administration locale. Nous sommes saisis d'un projet de loi remarquable, puisqu'il est le résultat d'efforts bien intentionnés visant à améliorer la capacité de la première nation de Westbank de gérer ses propres affaires.

    Toutefois, l'accord va plus loin que le modèle habituel. Il repose sur un concept que les Canadiens ont rejeté dans le cadre du référendum sur l'accord de Charlottetown, soit le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale qui crée un troisième ordre de gouvernement.

    Le gouvernement fédéral qualifie ce projet de loi de modèle d'accord d'autonomie gouvernementale que pourraient négocier les autochtones de toutes les régions du Canada. Cela crée plutôt une enclave quasi féodale soustraite à l'application de la charte des droits ainsi qu'aux décisions du Parlement.

    Il y a quelques semaines, le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien a admis que la protection des droits des autochtones vivant dans des réserves canadiennes posait de plus en plus de problèmes. Il a mentionné que certains invoquaient la protection des droits des autochtones garantie à l'article 25 de la charte pour se mettre à l'abri de contestation aux termes de la Charte canadienne des droits et libertés. Sa solution, et semble-t-il la solution du gouvernement, consistait à fermer les yeux.

    Le ministre a déclaré:

    Nous pourrions plutôt envisager l'autonomie gouvernementale. Certains sont d'avis que la question doit être réglée par les collectivités visées.

    Le sénateur Beaudoin, un érudit et un spécialiste de la Constitution et des droits de la personne, n'est pas de cet avis. Sa réponse au ministre allait droit au coeur du problème:

    Vous affirmez qu'il incombe aux autochtones de faire cela. Je ne suis pas de cet avis. C'est notre devoir de le faire. Il y a deux paliers de gouvernement dans ce pays, le fédéral et le provincial. La population autochtone jouit de droits collectifs, mais le pouvoir d'améliorer la situation appartient au Parlement du Canada, et je ne pense pas que nous devrions attendre l'émergence d'un troisième palier de gouvernement, car ce pouvoir incombe au Sénat et à la Chambre des communes.

    Voilà mon point de départ. Ce projet de loi modifierait la Constitution du Canada et annulerait les droits garantis par la charte à environ 8 000 citoyens canadiens vivant à Westbank, soit quelque 500 autochtones et 7 500 non-autochtones.

    En vertu de la Constitution du Canada, il y a deux paliers de gouvernement, à savoir le fédéral et le provincial. Toute loi que nous adoptons doit être compatible avec la Constitution, qui établit que tous les pouvoirs sont divisés entre les législatures fédérale et provinciales.

    Deuxièmement, tout gouvernement autochtone doit être clairement assujetti à la Charte canadienne des droits et libertés et aucun obstacle ne doit empêcher un citoyen, soit-il autochtone ou non-autochtone, d'accéder à la charte.

    Améliorons-nous vraiment les choses en créant des gouvernements autochtones assimilables à des zones non assujetties à la charte où des centaines et des milliers d'autochtones canadiens verront compromis les droits que leur confère la Charte des droits? Je vais maintenant aborder la question d'un troisième palier de gouvernement.

    La partie VI de la Constitution canadienne est intitulée «Distribution des pouvoirs législatifs». Elle divise les pouvoirs législatifs entre les législatures fédérale et provinciales. L'article 91 énumère les pouvoirs fédéraux en 28 points. Le point 24 traite des pouvoirs et responsabilités liés aux Indiens et aux terres réservées pour les Indiens.

  +-(1315)  

    Outre les 28 catégories de pouvoirs fédéraux énumérés, l'article stipule que le Parlement fédéral peut «faire des lois pour la paix, l'ordre et le bon gouvernement du Canada.» Cette disposition a été interprétée comme signifiant que le Parlement peut légiférer à l'égard des enjeux supplémentaires de portée nationale ou interprovinciale.

    L'article 92 énumère les pouvoirs des assemblées législatives provinciales. Ces pouvoirs sont regroupés sous 16 catégories. Le dernier paragraphe de l'article 91, qui concerne les pouvoirs fédéraux, et l'article 92 stipulent que la province peut adopter des lois concernant «généralement toutes les matières d'une nature purement locale ou privée dans la province».

    La Constitution dresse donc la liste complète des pouvoirs législatifs, qui sont répartis entre le Parlement fédéral et les assemblées législatives provinciales.

    Ce n'est pas seulement mon point de vue mais également celui des juges de la Cour suprême du Canada, notamment Willard Estey et William McIntyre; de l'ancien juge de la Colombie-Britannique, Michael Goldie; du sénateur Beaudoin, et même d'Alex Macdonald, l'ancien procureur général néo-démocrate de la Colombie-Britannique.

    Il est possible de renforcer l'autonomie gouvernementale, pour les autochtones qui le désirent, tout en respectant la Constitution. C'est le modèle de Sechelt. Aussi étrange que cela puisse paraître, je crois que, en 1986, mon vieil ennemi le gouvernement conservateur avait bien saisi la portée de la loi concernant le gouvernement local Sechelt. Il a eu raison de refuser de fonder le gouvernement local sur ce que le Parti libéral appelait à l'époque, et persiste à appeler, le «droit inhérent à l'autonomie gouvernementale».

    De fait, le Parti progressiste-conservateur d'avant la fusion de l'automne dernier avait adopté une position juste au sujet de Westbank, à savoir que la Charte des droits et libertés doit s'appliquer à tout gouvernement local, qu'il doit s'agir d'une forme déléguée de gouvernement local, comme tous les gouvernements locaux au Canada et que, compte tenu de la distribution des pouvoirs entre les gouvernements fédéral et provinciaux, aucun autre ordre de gouvernement ne peut être créé.

    Les conservateurs avaient bien compris les choses, et croyez-le ou non, je le reconnais volontiers.

    Ne perdons jamais de vue le cadre constitutionnel que nous ont légué les Pères de la Confédération. Nous devons également respecter la vraie nature des communautés autochtones et leurs besoins. Cet accord et les autres accords semblables ne confèrent-ils pas des pouvoirs à quelques groupes au détriment des nombreux autres?

    Les communautés autochtones comptent rarement plus de quelques centaines de personnes et, comme on peut s'en douter, elles sont presque toujours constituées de nombreuses familles élargies. Les membres de ces communautés sont en difficulté. Le gouvernement fédéral verse à ces communautés plus de dix milliards de dollars, mais leurs membres reçoivent rarement, sinon jamais, l'aide dont ils ont besoin.

    Le petit secret bien gardé dont nous sommes tous au courant mais dont nous ne voulons pas parler, c'est qu'une bonne partie de ces 10 milliards servent à financer les chefs, les conseils, ainsi que leurs amis, avocats et consultants. Il est inacceptable que le chef d'une bande de quelques centaines d'habitants gagne plus cher que le premier ministre du Canada, surtout lorsque sa communauté vit dans la misère. Plus souvent qu'autrement, le chef et sa famille contrôlent le conseil et toutes ses dépenses. Ce projet de loi pourrait bien envenimer la situation encore davantage.

    Ce que les Indiens veulent, et à mon avis ce dont ils ont besoin, c'est d'obtenir les outils que le reste de la population tient pour acquis. Le Parlement ne peut pas garantir que le gouvernement local sera efficace, mais il peut et il doit donner à chacun de ces Indiens les outils dont ils ont besoin pour forcer leur gouvernement à leur rendre des comptes.

    Les Indiens avec lesquels je me suis entretenus au cours des dernières semaines, dont bon nombre de femmes, ont dit croire qu'ils n'avaient aucun moyen de contester les décisions de leur chef et d'exiger qu'il leur rende des comptes. Ils sont d'avis que le projet de loi ne fera qu'empirer les choses. Ces gens inquiets qui ont communiqué avec moi ne sont pas plus intéressés par la propriété collective que ne l'étaient les paysans du Moyen-Âge avant la réforme agraire entreprise en Europe il y a à peine quelques siècles. Ils veulent un gouvernement transparent qui soit tenu de leur rendre des comptes. Toutefois, ici à la Chambre, nous semblons plutôt vouloir les lancer dans la gueule du loup.

    À titre de parlementaires, nous avons l'obligation de nous pencher sur trois problèmes fondamentaux que l'on retrouve dans le projet de loi.

    D'abord, les résidents de Westbank, aussi bien autochtones que non autochtones, perdraient la protection de la Charte des droits et libertés, et de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

    Deuxièmement, le projet de loi reconnaît et établit un troisième ordre de gouvernement fondé sur le droit inhérent qui est incompatible avec le cadre constitutionnel du Canada.

    Troisièmement, le projet de loi éliminerait toute obligation de rendre des comptes au sujet des millions de dollars de l'argent des contribuables fédéraux qui, selon le projet de loi, doivent être versés au gouvernement de Westbank chaque année.

  +-(1320)  

    En outre, le projet de loi n'établit pas de mécanismes garantissant l'équité, l'ouverture et la transparence à l'échelle locale, outils nécessaires à l'autonomisation des résidents locaux.

    Enfin, le projet de loi interdirait aux 7 500 résidents non autochtones de Westbank de voter ou de participer d'une autre façon aux aspects du gouvernement de Westbank qui auront des incidences sur eux.

    Les résultats du référendum tenus récemment à Westbank donnent à penser que de nombreux résidents ont des préoccupations. Je crois que ces membres de la première nation de Westbank veulent une certaine dose d'autonomie gouvernementale, mais qui soit assujettie aux lois fédérales et provinciales. L'autre partie de l'alternative les effraie: être assujettis au gouvernement de chefs de bande locaux, qui mettent en oeuvre leurs propres lois devant leurs propres tribunaux. Les opposants à l'accord de Westbank affirment que ce dernier les prive de droits et de protections fondamentaux.

    L'autonomie gouvernementale doit être adaptée à notre constitution, de manière à ce que les populations autochtones puissent avoir l'assurance qu'elles conservent leurs droits comme Canadiens et pour que le maintien de l'unité canadienne puisse être assurée.

  +-(1325)  

+-

    L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, il y a là suffisamment de matière pour tenir un débat très intéressant durant la période qu'il nous reste.

    D'abord, je ne saisis pas bien en quoi cela porterait atteinte à la Constitution canadienne ou à la Charte des droits et libertés. Depuis l'accord du Lac Meech et l'accord de Charlottetown, les gens savent à quel point il est difficile de modifier la Constitution. Beaucoup de gens aimeraient pouvoir la modifier plus facilement, mais on ne peut pas jouer ainsi avec la Constitution.

    Je ne comprends pas non plus ce qui a été dit à maintes reprises au sujet de la Charte des droits et libertés. Le fait est que la charte s'applique et continuera de s'appliquer de la même manière à tous les habitants de la réserve de Westbank et du reste du Canada. Je ne comprends pas l'argument concernant la charte et j'aimerais obtenir des précisions de façon à ce que je puisse en discuter.

+-

    M. John Cummins: Monsieur le Président, j'apprécie cette question, qui me donne l'occasion de clarifier ce point litigieux.

    Comme je l'ai déjà indiqué, l'article 91 de la Constitution confère au gouvernement fédéral certains pouvoirs, notamment le droit d'adopter certaines lois s'appliquant aux Indiens. L'article 92 traite des droits et des obligations des gouvernements provinciaux. Tous les pouvoirs législatifs au Canada sont prévus dans ces deux articles, 91 et 92. Les gouvernements provinciaux délèguent des pouvoirs aux administrations municipales. C'est là une forme déléguée de gouvernement et j'estime que c'est le genre de gouvernement qui devrait être conféré aux autochtones.

    Ce que le gouvernement dit par cette politique de droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, c'est qu'on ne devrait pas tenir compte des articles 91 et 92 et que les pouvoirs rattachés à ce droit inhérent à l'autonomie gouvernementale découlent de l'article 35 de la Constitution, qui reconnaît les droits inhérents autochtones.

    Voilà le coeur de la question, parce que, si le droit à l'autonomie gouvernementale découle de l'article 35, alors cet article est assujetti à l'article 25 de la charte, qui précise, en fait, que les droits autochtones ne sont pas assujettis à la charte, ce qui protège contre la contestation toute mesure adoptée par un gouvernement autochtone, puisque les pouvoirs et les droits de celui-ci découlent de l'article 35.

    En termes simples, le pouvoir d'agir d'un gouvernement autochtone provient de l'article 35. Cela entraîne l'application de l'article 25 de la Charte des droits et libertés est invoqué, qui a pour but de protéger les droits inhérents autochtones. En fait, il met les mesures adoptées par un gouvernement autochtone à l'abri de toute contestation s'appuyant sur la charte et la Loi canadienne sur les droits de la personne.

    Le contenu de l'accord ne signifie rien. Ce qui est intéressant, c'est que l'avocat des Indiens, dans un document rédigé en réponse à un autre que j'avais rédigé, a laissé entendre la même chose.

+-

    L'hon. Larry Bagnell: Monsieur le Président, l'article 35 ne fait pas intervenir l'article 25. L'article 25 s'applique déjà dans l'ensemble du Canada. Rien ne change. L'accord de Westbank ne modifie rien. S'il y avait un problème l'article serait toujours là, mais il n'y a pas de problème. L'article 25 ne soustrait personne à l'application de la charte, mais la charte doit tenir compte de certains droits autochtones.

    Au cours de son intervention, le député a dit qu'il fallait en revenir à la Loi constitutionnelle de 1867. S'il faut ainsi remonter le cours de l'histoire, que peut me dire le député de la proclamation royale de 1763 et des droits qu'elle prévoyait? Faut-il en revenir à ce type de gouvernance? Et avant cette proclamation royale, les premières nations ont eu sur ce continent, pendant des milliers d'années, des gouvernements qui fonctionnaient fort bien, à leur point de vue. Que se passerait-il si nous remontions aussi loin dans le passé?

    Je ne crois pas que nous puissions en revenir à un moment arbitrairement choisi du passé et prétendre que nous devons nous en tenir au nombre de gouvernements qui existaient alors. De toute façon, les juristes ont déjà dit que ces dispositions ne créaient pas un nouvel ordre de gouvernement.

  +-(1330)  

+-

    M. John Cummins: Monsieur le Président, je ne suis pas certain de comprendre ce que veut dire le député. Je ne fais pas allusion au passé lorsque je dis qu'il existe deux ordres de gouvernement. Cela fait partie de notre Constitution. C'est ainsi qu'est géré notre pays. En tant que député à la Chambre, il devrait comprendre cela.

    Ce que j'explique très clairement est qu'une forme déléguée de gouvernance qui devrait s'appliquer aux autochtones pourrait découler de la catégorie 24 de l'article 91 de la Constitution, qui rend le gouvernement fédéral responsable des Indiens et des terres réservées pour les Indiens. Cette forme déléguée de gouvernance pourrait s'en inspirer comme l'administration municipale s'inspire de celle des provinces.

    Ce que le gouvernement nous dit, c'est que le droit à l'autonomie gouvernementale des autochtones n'est pas consacré par l'article 91 ou 92, mais qu'il s'agit d'un droit inhérent aux autochtones aux termes de l'article 35 de la Constitution, qui reconnaît les droits existants issus des traités des peuples autochtones du Canada.

    Le droit découle de cette disposition. Revenons ensuite à l'article 25. Je crois que le député a dit que l'article 25 devrait tenir compte des droits autochtones reconnus à l'article 35, mais ce n'est pas la formulation utilisée ici. Il ne s'agit pas de tenir compte, l'article 25 prévoit plutôt ceci:

    Le fait que la présente charte garantit certains droits et libertés ne porte pas atteinte aux droits ou libertés--ancestraux, issus de traités ou autres--des peuples autochtones du Canada, notamment:

    Suit ensuite l'énumération. Il s'agit d'une couverture directe, d'une protection. L'article fait intervenir la charte pour protéger les autochtones et leurs droits contre toute intrusion de la charte. L'article 25 sert de protection des droits des peuples autochtones contre toute intrusion de la charte.

+-

    M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, PCC): Monsieur le Président, on a parlé de vote et du processus de ratification. J'ai une observation à laquelle mon collègue voudra sûrement répondre.

    La première nation de Westbank n'est pas différente d'autres démocraties, en ce sens que le conseil de bande doit concilier des intérêts contradictoires. Il est évident, mais je le dirai quand même, qu'il y a dans la bande un groupe facilement identifiable qui s'oppose à cet accord et qui comprend ceux qui estiment que la première nation de Westbank devrait être souveraine. C'est certes beaucoup plus que notre Parlement ou moi-même serions probablement prêts à accepter.

    On peut cerner un groupe d'opposants qui estiment que la première nation de Westbank devrait demeurer assujettie à la Loi sur les Indiens, car ils craignent de perdre ces liens d'attachement. Un autre groupe s'y oppose et ne sait plus où donner de la tête.

    La ratification de cet accord et les divisions que cela entraîne au sein de la première nation de Westbank ne sont pas différents que s'il s'agissait d'une autre collectivité ou d'une autre initiative. C'est le propre d'une démocratie.

  +-(1335)  

+-

    M. John Cummins: Monsieur le Président, je ne sais pas au juste où le député voulait en venir. Je ne m'élève pas contre le processus de ratification. Je ne crois pas en avoir discuté.

    Le député a parlé de souveraineté. Dans plus d'une dizaine de secteurs, l'accord dit que, s'il y a conflit entre les lois de la première nation de Westbank et les lois fédérales et provinciales, les lois de la première nation l'emporteront. Ainsi, la première nation de Westbank n'est pas assujettie à l'autorité du gouvernement fédéral. Bref, l'accord déclare que le gouvernement de Westbank est un droit autochtone et, s'il agit en tant que droit autochtone, ses actions seront protégées contre des contestations s'appuyant sur la charte. C'est aussi simple que cela.

+-

    M. Ted White (North Vancouver, PCC): Monsieur le Président, c'était un échange très intéressant qui touchait davantage les aspects juridiques que mon discours ne le fera.

    J'interviens parce que je tenais à parler d'une réunion qui s'est tenue après le caucus de mercredi. J'ai participé à cette réunion où étaient présents des représentants de la première nation de Westbank. Je crois que ces derniers sont tous venus à la tribune pour écouter nos discours sur le projet de loi. J'ai aussi eu le plaisir de rencontrer le chef Louie dans l'antichambre de l'opposition, hier.

    Je tiens à dire tout cela car je veux mettre mon opposition au projet de loi en perspective. En fait, ce projet de loi ne dégage aucun consensus. Je signale que ceux qui s'y opposent ont le droit de s'exprimer dans cet endroit sans se faire crier des noms ou susciter des réactions de colère. En tant que parlementaires, nous avons le devoir de veiller à ce que les opinions contradictoires soient formulées à la Chambre.

    La rencontre d'hier avec les membres de la bande a été très agréable. Nous avons eu une excellente discussion après le caucus. Plusieurs questions ont été posées et il n'y avait aucune animosité. On a énoncé des idées et répondu à des questions. C'était très sain.

    J'ai participé à cette réunion parce que j'avais des questions à poser, mais je voulais aussi jauger les réactions suscitées par l'opposition que j'avais exprimée lors des débats tenus aux étapes précédentes du projet de loi. À cet égard, je signale que je n'ai senti aucune hostilité, j'ai plutôt senti un véritable intérêt et un grand respect pour une opinion différente.

    Les représentants de la bande ont même dit qu'il était loin d'exister un consensus au sein de la bande. Mon collègue d'Île de Vancouver-Nord vient d'en parler. D'après ce que j'ai cru comprendre hier, des opinions contradictoires au sein de la bande ont rendu difficiles certaine étapes du processus et la tenue de votes, mais ceux qui ont réussi à aller aussi loin dans le processus croient en la démocratie et estiment très sain d'engager ce type de débat au niveau de la bande. Les opinions discordantes que nous avons formulées ici ne les ont pas contrariés.

    Je les en félicite car je crois sincèrement, comme l'ont dit mes collègues, que cet accord fonctionnera pour la bande de Westbank. Il fonctionnera grâce à l'attitude de ce groupe particulier de chefs de bande qui est très différente de celle de nombreuses autres bandes.

    C'est également une attitude très différente de celle que nous constatons chez certains députés libéraux, et parmi les députés néo-démocrates, qui lancent des insultes, utilisant des épithètes comme «honteux», à ceux d'entre nous qui osent exprimer les inquiétudes ressenties par d'autres. Ils ont l'esprit tellement étroit qu'ils refusent de reconnaître qu'un pourcentage important des membres de la première nation de Westbank ont eux-mêmes exprimé leur opposition, pour une raison ou pour une autre.

    Quant à savoir si leur désaccord est justifié ou non, ce sera le sujet d'un autre débat. Il n'en demeure pas moins qu'on ne s'entendait pas parfaitement. Les dispositions du projet de loi n'ont pas toutes été adoptées à l'unanimité à tous les niveaux. Il serait donc mal de notre part de donner l'impression que tous les aspects du projet de loi ont fait l'unanimité de la Chambre. Je trouve déplorable que certains ministériels et les députés néo-démocrates n'aient pas jugé bon de faire part des préoccupations des membres de la bande qui ont voté contre le projet de loi.

    Les représentants de la bande nous ont expliqué hier que certains membres s'inquiétaient de l'allocation des ressources foncières, et plus particulièrement des certificats de possession, dont nous qui n'habitons pas sur des terres de réserve n'avons pas à nous soucier, mais qui sont similaires à un titre de propriété. Ces certificats de possession et le droit de vivre dans une maison ou sur un terrain donnés sont toujours des sujets de préoccupations.

    Il y a trois réserves dans ma circonscription. Toutes les semaines, je reçois les doléances de membres de la bande au sujet du transfert de leur maison si leur mari venait à mourir, ou en cas de divorce ou de désaccord avec les dirigeants de la bande. Il semble que ce soit une source intarissable d'inquiétude, une véritable épée de Damoclès, pour les membres des bandes de la région où j'habite.

    Dans le cas de Westbank, tout semble indiquer que cet accord fonctionnera. Les responsables semblent clairement favoriser le processus démocratique, la création de richesse, le droit à la propriété privée et la transparence dans le gouvernement; mais comme je l'ai dit également, les habitant des réserves de ma circonscription ne croient pas qu'un accord de ce genre leur serait utile.

  +-(1340)  

    On m'a confirmé hier par courriel que mes pancartes électorales seront installées une fois de plus sur le terrain d'un aîné de la nation squamish parce que j'appuie les positions des Squamish sur l'autonomie gouvernementale. Ce genre d'accord d'autonomie gouvernementale suscite des inquiétudes bien réelles au sein de cette collectivité.

    Pour que la création de richesses et les droits à la propriété privée puissent exister, par exemple, dans la réserve Squasmish de ma circonscription, il faudrait d'abord, d'après ce que m'ont dit des membres de la bande, qu'il y ait un changement majeur d'attitude des chefs de la bande afin qu'on puisse mettre en place des processus vraiment démocratiques dans la réserve.

    À l'heure actuelle, toujours selon des membres de la bande, on achète les votes des participants aux scrutins et aux réunions en échange de boissons alcoolisées, de promesses de rénovations domiciliaires ou d'autres faveurs. Des membres de la bande prétendent que parfois ils ne sont pas informés de la tenue de réunions ou de rencontres secrètes au cours desquelles on approuve des mesures qui leur sont par la suite imposées. Ils souhaiteraient faire partie d'un système de bande comme celui qu'on trouve à Westbank, mais ce n'est pas le cas. Ils craignent que si j'appuie ce genre d'accord je serai nécessairement en faveur d'un accord semblable pour eux.

    J'ai le devoir d'exprimer leurs préoccupations et de voter contre le projet de loi en m'appuyant sur les principes qu'ils ont énoncés.

    En ce qui a trait à un autre point, l'avocat de la bande de Westbank, qui était présent à la réunion d'hier, a reconnu, comme l'a mentionné le député de Delta—South Richmond, qu'il existe des avis juridiques contradictoires quant à l'application de la Charte des droits et libertés, en dépit de ce que le ministre dit. Il y a quelques minutes, le ministre a mentionné que les avocats disent qu'il n'y a pas de problème. Certains avocats disent qu'il n'y a pas de problème, mais il y en a beaucoup d'autres qui disent qu'il y a des problèmes.

    À mon avis, cet accord va entraîner des litiges qui vont s'étendre sur plusieurs décennies. En fait, je crois savoir qu'une contestation judiciaire est déjà en voie de préparation.

    Nous ne savons pas non plus où cela nous mènera, étant donné la façon dont les lois s'appliquent dans les réserves. Par exemple, hier, le National Post publiait un article en première page intitulé «Passez votre IRM dans une réserve autochtone». L'article faisait mention d'une bande de la Saskatchewan qui envisage d'offrir des services médicaux dans la réserve afin de réaliser des profits parce que, selon cette bande, la Loi canadienne sur la santé ne s'applique pas dans les réserves.

    À cet égard, je suis surpris que les députés néo-démocrates, qui critiquent constamment le gouvernement libéral parce qu'il permet que des services médicaux soient dispensés en vue de réaliser des profits, comme dans le cas d'une entreprise, ne dénoncent pas le fait qu'une bande indienne de la Saskatchewan veut faire la même chose. Peut-être est-ce parce qu'ils refusent de voir les divergences d'opinion qui existent relativement aux bandes et qu'ils ne voient jamais rien de mal lorsqu'il s'agit des réserves indiennes.

    Toutefois, c'est en raison du caractère imprévisible de l'application des lois dans les réserves et hors de celles-ci que le projet de loi dont nous sommes saisis risque d'entraîner des litiges qui pourraient s'étendre sur plusieurs décennies. Cette situation aurait pu être évitée, du moins en bonne partie, si nous avions adopté l'amendement proposé par le député de Delta—South Richmond. Malheureusement, celui-ci a été rejeté par la Chambre.

    Lors de la réunion d'hier, j'ai aussi demandé à un représentant de bande si l'on avait envisagé d'adopter un modèle de propriété foncière en fief simple, semblable au modèle qui existe hors des réserves, en vertu duquel nous sommes propriétaires de notre terrain, nous le faisons enregistrer dans un bureau des titres de biens-fonds et celui-ci est ensuite annexé à la municipalité existante.

    On m'a répondu que les membres de la bande voulaient préserver leur culture. Je respecte cette décision, mais je continue de penser que l'idée a peut-être été rejetée parce que la bureaucratie au sein de la bande aurait dû se fusionner à une autre.

    J'entends ce genre de discussions dans ma propre circonscription qui compte trois conseils municipaux, celui du district municipal de Vancouver-Nord, celui de la cité de North Vancouver et celui de Vancouver-Ouest. Il n'y a absolument rien qui justifie l'existence de trois conseils différents sur la rive nord de Vancouver. Nous pourrions probablement fonctionner très bien avec un seul.

    De temps à autre, certains disent qu'il pourrait y avoir une fusion, que cela permettrait de réaliser des économies et qu'il serait plus simple qu'un seul conseil traite de toutes ces questions. Évidemment, les groupes d'intérêts spéciaux formés des membres des conseils s'y opposent et empêchent même la tenue d'un scrutin public à ce sujet. La nature humaine est ainsi faite. Je ne dis pas cela méchamment, mais je pense qu'il y a toujours en filigrane ce genre de lutte de pouvoirs.

    Lors de notre rencontre, un des représentants de bande a reconnu que les lois fondées sur des considérations raciales sont une réalité au Canada. C'est le dernier facteur qui m'incite à continuer de m'opposer au projet de loi au nom des électeurs autochtones et non autochtones de ma circonscription.

  +-(1345)  

    Il y a trois réserves dans ma circonscription et une farouche opposition à tout gouvernement fondé sur des considérations raciales ou ethniques. Ce que la majorité préconise, c'est que tous soient traités comme des Canadiens égaux, assujettis aux mêmes lois et bénéficiant des mêmes possibilités, indépendamment des distinctions raciales.

    Un grand nombre d'électeurs de ma circonscription croient que l'approche visant l'autonomie gouvernementale laisse grandement à désirer, qu'elle s'apparente à une forme d'apartheid et qu'elle est complètement inacceptable, en 2004, dans un pays civilisé. Ils croient aussi que nos voisins autochtones de North Vancouver auraient une existence beaucoup plus agréable et de bien meilleures conditions de vie s'ils se libéraient du carcan de la Loi sur les Indiens et de la menace d'autonomie gouvernementale.

+-

    L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'ignore où commencer, car il y avait beaucoup de questions. La première chose que j'ai mentionnée ce matin dans mes observations préliminaires, c'est que s'il y avait une opposition quelconque à cet accord, j'espérais que les intéressés se feraient entendre aujourd'hui pour que nous puissions en discuter.

    Comme notre collègue l'a mentionné et je l'ai dit plus tôt, au fur et à mesure que nous avançons, il y a une adhésion de plus en plus grande à l'accord. Au fur et à mesure que les gens commencent à comprendre les diverses dispositions, ce qui donne à l'accord une plus grande force exécutoire, ainsi que leurs avantages, ils souscrivent à l'accord.

    Les gens avaient des préoccupations quant aux rencontres et à la possibilité d'avoir leur mot à dire, mais cet accord avec cette constitution de 99 pages comme l'a dit ce matin un autre député qui est entré dans les détails sur la transparence et la reddition de comptes, prévoit une beaucoup plus grande reddition de comptes, une bien meilleure transparence et la garantie que les gens vivant dans la réserve auront leur mot à dire et que les choses se passeront de façon ordonnée. Je n'ai pas entendu de plaintes à ce sujet, mais elles seront encore plus réglementées à cet égard à la suite de l'adoption d'une constitution excessivement détaillée.

    En ce qui concerne les nombreuses contestations juridiques, le député pourrait peut-être nous préciser ce qui pourrait être une contestation juridique, car bien entendu, toutes sortes d'avocats travaillent là-dessus. Je crois qu'il y a 17 accords sur l'autonomie gouvernementale en vigueur au Canada à l'heure actuelle. Certains sont protégés par la Constitution et n'ont pas été contestés. Je ne pense pas qu'il faudra des années de disputes si la seule question qui se pose concerne la santé, car cela pourrait être réglé en cinq minutes par un avocat. La santé n'est pas l'un des pouvoirs dans cet accord, même s'il en est question dans d'autres accords sur l'autonomie gouvernementale.

    Cela inquiète peut-être davantage notre collègue, mais l'article 222 renferme une liste de questions que nous pourrons aborder dans des négociations futures et parle des pouvoirs qui pourraient être conférés. Il y a notamment l'article 8 qui parle de la santé, en plus de ce qui est prévu en ce qui concerne la médecine traditionnelle autochtone dans cet accord.

    Pourquoi des gens seraient-ils opposés à ce qu'on donne à un certain groupe de personnes, peu importe qui elles sont, la capacité de réglementer leur propre langue, leur culture et toutes ces choses dans leur région, lorsque la majorité des gouvernements avoisinants sont d'accord, lorsque les municipalités, le gouvernement de la Colombie-Britannique et tous les gens qui vivent à côté des intéressés n'ont rien contre cela?

    Je le répète, le député a raison de dire qu'il y a des gens qui sont en désaccord dans la réserve et à l'extérieur, mais c'est loin d'être une majorité. Il pourrait peut-être se pencher sur certains de ces domaines.

  +-(1350)  

+-

    M. Ted White: Monsieur le Président, je pourrais probablement faire le même commentaire que le ministre, c'est-à-dire que je ne sais où commencer.

    Je suppose que je pourrais commencer par dire que nous devrions nous pencher sur la structure gouvernementale. Hier, au cours de la réunion avec les représentants de la bande, j'ai demandé pourquoi nous ne permettons pas à des non-autochtones de poser leur candidature pour le conseil, puisque ce serait ainsi un exercice réellement démocratique.

    Je fais une comparaison avec ma propre circonscription. Il s'agit d'un exemple qui m'a été signalé à plusieurs reprises par plus d'un électeur. Imaginons qu'un membre de la bande de Squamish ou de la bande de Burrard se présente aux urnes le jour des élections dans la municipalité de Vancouver Nord et qu'on lui dit que, parce qu'il est autochtone, il n'a pas le droit de voter au bureau de scrutin. Si on inverse les rôles, ce n'est pas beau à voir.

    C'est ce type de situation qui préoccupe mes électeurs, tant autochtones que non autochtones: on fait une distinction en fonction de la race, ce qui est malsain.

    Comme je l'ai déjà dit, je crois que l'accord donnera de bons résultats pour la bande de Westbank pourvu que la bonne volonté qu'on y trouve maintenant se maintienne. La mise en application de l'accord dépend entièrement de la bonne volonté des gens qui dirigent le conseil. Il serait très difficile, pour la première nation de Westbank, de faire marche arrière maintenant. Elle a déjà adopté une culture de création de richesse et d'esprit d'entrepreneuriat qui améliore la qualité de vie de tous les membres.

    Cependant, ce n'est pas le cas ailleurs au pays et c'est l'une des raisons pour lesquelles je me suis opposé à cette mesure au nom de mes électeurs et de bien d'autres Canadiens. Cela dépasse largement l'approbation par le conseil de Kelowna ou les habitants de la région environnante qui ne voient aucun problème pour le moment. Les conséquences prennent une envergure différente lorsqu'on songe à ce qui pourrait se produire si la bonne volonté n'était pas là et si l'on appliquait le même accord à d'autres conseils de bandes ailleurs au pays.

    Durant mon discours un peu plus tôt, j'ai omis un point que j'avais soulevé lors d'une étape précédente du débat sur ce projet de loi et il s'agit de la première page de l'accord lui-même. Il y est dit que les règlements pris par ce conseil ne seront pas assujettis à un examen.

    En ma qualité de membre du Comité mixte permanent d'examen de la réglementation, cela me préoccupe énormément. Au comité, nous avons notamment constaté que les ministères font souvent des erreurs lorsqu'ils élaborent des règlements. Parfois, ils créent des situations illégales et parfois ils prélèvent de l'argent de manière inappropriée. Il est donc souhaitable que ces règlements soient examinés en détail et que quelqu'un fasse ressortir les problèmes afin qu'ils soient réglés.

    Il est donc très inquiétant de voir une situation où des règlements seront à l'abri de tout examen. En Colombie-Britannique, il y a plus de bandes autochtones que n'importe où ailleurs au pays; si toutes ces bandes avaient un accord comme celui-ci leur permettant de mettre en oeuvre des règlements non assujettis à un examen, personne ne saurait plus quelle loi s'applique en un point donné. De la région de Westbank jusqu'à celle de North Vancouver, il n'y aurait plus d'uniformité.

    Cela me préoccupe. Il y a sans doute peu de gens qui pensent à cela. Je le mentionne parce que je fais partie du comité. Le ministre pourrait peut-être réfléchir aux points que j'ai soulevés en réponse à sa question, soit, premièrement, le gouvernement fondé sur la race et les incidences d'une telle situation sur le Canada tout entier et, deuxièmement, l'examen des règlements.

  +-(1355)  

+-

    L'hon. Larry Bagnell: Monsieur le Président, je serais heureux de répondre à toutes ces préoccupations. D'abord, pour l'examen, le député a raison. C'est un bon système. Nous avons des lois et un système d'examen de la réglementation. Rien ne nous permet de dire que la première nation de Westbank ne pourrait pas développer le même système à l'égard de ses lois. Des provinces pourraient en faire autant. Il n'y a donc aucun problème à jeter un deuxième coup d'oeil à la réglementation.

    Ensuite, pourquoi ne pas permettre aux non-autochtones de se présenter au conseil? Hier, nous avons présenté l'accord, très novateur, sur l'autonomie gouvernementale du peuple tlicho et, en vertu de cet accord, les non-autochtones sont autorisés à se présenter pour faire partie des administrations communautaires. Le député a voté contre cet accord.

    M. Leon Benoit: Pourquoi ce manque de cohérence?

    L'hon. Larry Bagnell: Je vais répondre à cette question dans une minute, mais je veux d'abord répondre à la question du député. Il a parlé d'une plus grande protection dans le cadre de cet accord. Les non-autochtones n'ont aucune protection actuellement, sauf par l'intermédiaire du conseil consultatif. Cet accord leur fournit une protection. De plus, cette protection n'est pas arbitraire, comme il laisse entendre que ce sera le cas à l'avenir. Ce n'est pas seulement de la bonne volonté; ils seront soumis à cette constitution de 99 pages et devront la respecter. Ils ont conclu l'accord, lequel est une loi et peut être contesté devant les tribunaux.

    Enfin, en ce qui concerne les questions fondées sur la race, la promotion sociale est permise en vertu de la Constitution. Le député demande l'égalité. Il y a inégalité au Canada et les Canadiens sont divisés en deux groupes. Dans un groupe, la pauvreté est plus répandue, le taux de mortalité à la naissance est plus élevé, les décrochages sont plus nombreux et l'abus de drogues est plus élevé. Ce genre d'accord vise précisément à apporter des changements pour que l'égalité règne au Canada.

+-

    M. Ted White: Monsieur le Président, le ministre a aisément mis de côté les préoccupations relatives à l'examen de la réglementation en disant «nous y réfléchirons et peut-être pourrons-nous l'incorporer un jour».

    Il a ensuite mis de côté les préoccupations relatives à l'inadmissibilité à la candidature au conseil en nous parlant d'un tout autre accord. En quoi cela était-il utile au débat?

    Il parle ensuite de contestation judiciaire en cas de manque de bonne volonté et soudainement quelqu'un est lésé. Mais ces choses ne peuvent être contestées devant les tribunaux sans entraîner d'énormes dépenses. Ce que mon collègue de Delta—South Richmond est en train de contester en cour relativement aux droits de pêche des autochtones a demandé 8, 9 ou 10 ans et un demi-million de dollars. Le citoyen moyen ne peut livrer ce genre de bataille. C'est tout à fait impossible.

    Le ministre n'a pas réellement répondu sur ces points. C'est dommage qu'il ne reste plus de temps.


+-DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Article 31 du Règlement]

*   *   *

[Traduction]

+-Les oiseaux migrateurs

+-

    L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, on célèbre aujourd'hui le Jour de la Terre, et à cette occasion, mon allocution portera sur les oiseaux migrateurs.

    En février 2002, le Sierra Legal Defence Fund, au nom de huit groupes environnementaux, affirmait que le gouvernement du Canada n'appliquait pas la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs et qu'il avait ainsi permis la destruction de quelque 45 000 oiseaux migrateurs et de leurs nids en 2001 seulement.

    Au mois de mars dernier, la Commission nord-américaine de coopération environnementale de l'ALENA, située à Montréal, a ordonné la tenue d'une enquête complète sur la plainte portant sur la destruction des nids causée par les activités de coupe à blanc.

    Compte tenu du fait que 21 espèces sont déjà désignées menacées dans la forêt boréale de l'Ontario, j'exhorte le ministre de l'Environnement à veiller à ce que le Service canadien de la faune applique la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs.

*   *   *

+-Le projet de loi C-250

+-

    M. Leon Benoit (Lakeland, PCC): Monsieur le Président, le projet de loi C-250 est actuellement à l'étude au Sénat. Cette mesure législative suscite de sérieuses préoccupations en matière de liberté d'expression et de religion. C'est pourquoi mes collègues et moi avons voté contre à chaque fois que nous en avons eu l'occasion. C'est également pour cette raison que je continue à déployer énormément d'efforts pour empêcher que cette mesure ne soit adoptée au Sénat.

    Il ne fait aucun doute que nous rejetons entièrement toute manifestation haineuse contre un groupe, quel qu'il soit. Toutefois, en vertu du projet de loi C-250, les organisations religieuses et leurs dirigeants pourraient commettre une infraction simplement en discutant de questions essentielles de leur confession, au sein de leurs congrégations respectives. Les enseignants dans les écoles confessionnelles pourraient également être censurés.

    En fait, le projet de loi C-250 n'assure pas la protection des opinions et des discours de laïcs des secteurs professionnel, éducatif et universitaire. Je me suis engagé à protéger la liberté d'expression et la liberté de religion, même si ce n'est pas le cas des libéraux, et je me suis également engagé à représenter mes électeurs à l'égard de questions qu'ils estiment importantes.

*   *   *

  +-(1400)  

+-L'industrie des assurances

+-

    M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, nous pouvons maintenant ajouter les églises, les cadets de la marine et les parcs à ferrailles à la liste grandissante des organisations qui éprouvent des difficultés d'un genre ou d'un autre dans le secteur de l'assurance. La question des assurances est devenue un sérieux problème pour l'Église anglicane. Quant aux cadets de la marine, ils risquent de perdre leurs navires à cause du coût des assurances. Pour ce qui est des parcs à ferraille, ils pourraient être incapables de s'acquitter de leur appréciable fonction de recyclage.

    Le secteur de l'assurance automobile retient souvent l'attention, mais les problèmes liés à cette industrie ne s'arrêtent pas là. Dans toutes les provinces et tous les territoires, les Canadiens éprouvent des difficultés de toutes sortes quant à la disponibilité et à la pertinence des garanties et aux choix des formules d'assurance. Les courtiers en immeubles, les propriétaires de petites et de grandes entreprises, les exploitants d'autobus scolaires, les commissions scolaires, les agriculteurs, les exploitants de stades, les propriétaires de maisons et bien d'autres Canadiens figurent sur la même liste que l'Église anglicane et les automobilistes.

    Cela fait maintenant un an que je demande la tenue d'une enquête nationale. Le secteur de l'assurance relève en grande partie de la compétence des provinces, mais lorsqu'un problème sévit manifestement au niveau national, seul le gouvernement fédéral peut le traiter rapidement et efficacement.

    J'exhorte le gouvernement à mettre en oeuvre, sans plus tarder, une enquête nationale équitable et ouverte dans le secteur de l'assurance. Une telle initiative ne pourrait qu'être bénéfique pour l'industrie et pour les Canadiens.

*   *   *

[Français]

+-Haïti

+-

    M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec un immense plaisir que je veux rendre hommage aujourd'hui à tous nos militaires canadiens en mission à l'extérieur du pays, plus particulièrement ceux présentement en Haïti.

    Je reviens d'une mission de l'Organisation internationale de la Francophonie dans ce pays, et j'ai pu y constater le travail quotidien de toute l'équipe et surtout l'effet plus que bénéfique de leur présence. Dans les rues de Port-au-Prince, l'activité économique est de retour. On y voit des écoliers qui reviennent de l'école, et ce, parce que les forces multinationales de l'Opération Halo ont apporté la sécurité si nécessaire pour relancer le pays.

    Je profite de cette tribune pour remercier de façon toute spéciale le lieutenant-colonel J. P. Davis, commandant de l'Opération Halo. J'adresse également mes remerciements au capitaine Brian J. Wright, officier d'État du commandant, au major Brian Hervé, commandant de l'Élément de soutien national et au capitaine Antoine Tardif de J5 Opérations d'information, tous de la Force opérationnelle en Haïti, de leur patience et leur coopération.

*   *   *

[Traduction]

+-La sclérose en plaques

+-

    M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, la fin de semaine dernière, beaucoup de personnes de la circonscription de Cambridge, que je représente, ont participé à la marche annuelle contre la sclérose en plaques afin de trouver un remède.

    La sclérose en plaques est l'affection neurologique la plus fréquente parmi les jeunes adultes canadiens. Les chercheurs ne connaissent toujours pas la cause de cette maladie.

    Au Canada, le coût annuel de la sclérose en plaques s'élève à 1 milliard de dollars. L'année dernière, la Société canadienne de la sclérose en plaques a amassé près de 19 millions de dollars. Cet argent sert à financer une grande variété de services de soutien pour aider les personnes atteintes à gérer et à supporter la maladie et à trouver de meilleurs traitements et un remède plus rapidement.

    Les campagnes de la division de Cambridge ont été incroyablement fructueuses ces dernières années, et la marche de la fin de semaine ne fait pas exception. Je félicite tous les bénévoles, tous les participants et tous ceux qui appuient cette cause. La marche a connu un vif succès malgré la pluie.

*   *   *

+-L'industrie minière

+-

    M. Andy Burton (Skeena, PCC): Monsieur le Président, j'ai assisté la semaine dernière à la conférence sur l'industrie minière dans le Nord, à Smithers, en Colombie-Britannique. L'intérêt de l'industrie minière pour le nord-ouest y était mis en vedette.

    Cette année, les dépenses consacrées à l'exploration minière en Colombie-Britannique devraient dépasser 100 millions de dollars, soit quatre fois le montant de 22 millions de dollars qui lui était consacré il y a quelques années. De nouvelles mines devraient être ouvertes dans le nord-ouest, notamment la mine de cuivre de Red Chris, la mine de cuivre et d'or de Galore Creek, la mine de houille anthraciteuse de Klappan, la mine de cuivre et d'or de Kemess-Nord et la mine Tulsequah Chief. Parmi les mines en exploitation, mentionnons la fabuleuse mine d'or et d'argent d'Eskay Creek, les mines de cuivre d'Huckleberry et de Kemess et la mine de molybdène d'Endako. Toutes ces mines se situent dans le nord-ouest.

    Toutes ces possibilités soulèvent mon enthousiasme, et j'encourage les deux paliers de gouvernement à réduire les tracasseries administratives dans ce domaine. Je crois que nous devons encourager la mise en valeur de nos ressources minières afin de créer de nouveaux emplois et de nouvelles possibilités pour les Canadiens.

    Les projets qui créent des richesses permettent de financer les services essentiels comme les soins de santé et l'éducation. L'industrie minière de la Colombie-Britannique a joué et continue de jouer un rôle important dans notre économie.

*   *   *

[Français]

+-L'environnement

+-

    M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ): Monsieur le Président, le Jour de la Terre a été célébré pour la première fois en 1970 et, aujourd'hui, 184 pays participent à cette journée consacrée à l'environnement. Le Québec n'est pas en reste.

    Ce matin, dans ma circonscription de Rosemont—Petite-Patrie, j'ai participé à une activité où plus de 1 000 écolières et écoliers de niveau primaire ont marché dans les rues afin de manifester leur désir de respecter la Terre.

    Le respect de la Terre se manifeste de plusieurs façons, entre autres celle de limiter les gaz à effet de serre. Au Canada, il faut se rappeler qu'en raison d'une politique canadienne laxiste, les gaz à effet de serre ont augmenté de 20 p. 100 entre 1990 et 2000, et ce, en excluant le Québec. Toutefois, au cours de la même période, les efforts du Québec lui ont permis de limiter ses hausses d'émissions à 4,4 p. 100.

    Le plan fédéral sur les changements climatiques propose des investissements visant à financer la réduction des gaz à effet de serre en utilisant une approche sectorielle. Je tiens à rappeler que le Bloc québécois, lui, a toujours privilégié un modèle territorial pour la mise en oeuvre des objectifs de Kyoto.

*   *   *

  +-(1405)  

+-RAI International

+-

    Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais réaffirmer mon appui aux Canadiens d'origine italienne qui demandent l'accès au réseau italien de télévision numérique, soit la RAI International, déjà diffusé dans 238 pays.

    En septembre 2003, j'ai écrit une lettre au CRTC à ce sujet. Depuis, le député de Saint-Léonard—Saint-Michel, moi-même et plusieurs de nos collègues libéraux nous sommes adressés à cette Chambre pour affirmer notre appui à la demande formulée auprès du CRTC par la RAI International. Nos efforts sont pleinement justifiés et je souhaite pour les Canadiens d'origine italienne de partout au Canada que le CRTC réponde positivement à leur demande et à la demande de RAI International, laquelle est appuyée par le dépôt d'une pétition de plus de 106 000 signatures et de plus de 330 lettres.

*   *   *

[Traduction]

+-Le dalaï-lama

+-

    M. Rob Anders (Calgary-Ouest, PCC): Monsieur le Président, en toute humilité, j'ai l'honneur de souhaiter la bienvenue à Ottawa à Sa Sainteté le quatorzième dalaï-lama.

    Le dalaï-lama est un lauréat du prix Nobel de la paix et un défenseur inlassable de la liberté et de la dignité humaine. Il mène sa lutte pacifique contre l'occupation du Tibet depuis des dizaines d'années, en dépit de tout. De son exil, Sa Sainteté a réussi à guider son peuple dans le domaine de l'éducation et de conservation de l'ancienne et unique culture tibétaine.

    J'espèce que tous les Canadiens comprendront l'esprit pacifique de sa visite et que celle-ci attirera l'attention sur la situation des droits de la personne au Tibet.

    Le Canada a une occasion historique de contribuer à amorcer des pourparlers entre les représentants du dalaï-lama et la Chine pour négocier une solution pacifique au Tibet. Cent soixante-deux parlementaires ont demandé au premier ministre de servir d'intermédiaire impartial. Il est temps que le premier ministre assume son rôle de leadership moral et qu'il fasse ce qui est juste.

*   *   *

+-Transparency International

+-

    M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais présenter à la Chambre les faits suivants qui ont été relevés par Transparency International, qui a démontré que le Canada est l'un des pays les moins corrompus au monde. Je veux ainsi répondre aux constantes allégations de corruption soulevées chaque jour par l'opposition, qui sont totalement inacceptables.

    L'«Index des perceptions de la corruption» de Transparency International illustre les niveaux de corruption dans le secteur public et chez les politiciens, selon la perception des gens d'affaire et des universitaires et l'analyse des risques.

    Nous notons que la corruption ne prospère pas que dans les pays pauvres. Il est inquiétant de voir que le niveau de corruption est également très élevé dans certains pays européens tels que la Grèce et l'Italie, ainsi que dans des pays riches en pétrole comme le Nigéria, l'Angola, l'Azerbaïdjan, la Libye et le Venezuela.

    Transparency International a classé 133 pays en 2003. Le Canada s'est mérité la onzième place, ce qui indique un niveau très faible de perception de la corruption. Il est intéressant de noter que le Royaume-Uni et les États-Unis ont été classés aux treizième et au dix-neuvième rangs, respectivement.

    Il est temps que l'alliance conservatrice présente des faits et qu'elle arrête de jouer avec les mots.

*   *   *

+-Le Jour de la terre

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Monsieur le Président, en ce Jour de la Terre, nous reconnaissons l'importance de l'environnement pour tous ceux qui partagent cette planète. Ce qui a commencé comme une petite célébration de militants de la base il y a quelque 34 ans est devenu un événement célébré dans plus de 100 pays par des centaines de millions de personnes.

    Le Canada a célébré le Jour de la Terre pour la première fois en 1990. Depuis lors, largement grâce aux efforts et au leadership d'un certain nombre d'organismes et de militants environnementaux ainsi que d'organisations syndicales, comme le Congrès du travail du Canada, d'importants progrès ont été réalisés sur le plan de l'environnement. Malheureusement, il reste beaucoup de travail à faire, et le gouvernement pourrait tirer une foule d'enseignements de ces efforts.

    Enfin, à l'occasion du Jour de la Terre, j'invite tous les députés à songer à l'importance des pas, petits et grands, que nous pouvons tous faire pour nous assurer un avenir durable.

*   *   *

[Français]

+-Le dalaï-lama

+-

    Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, récipiendaire du Prix Nobel de la paix, chef spirituel respecté et figure emblématique du mouvement pacifiste, nous accueillons aujourd'hui au Parlement Sa Sainteté le dalaï-lama. C'est avec fierté et une joie immense que le Bloc québécois lui souhaite la bienvenue.

    Chef du gouvernement en exil du Tibet, ce territoire qui a été envahi et annexé par la République populaire de Chine en 1950, le dalaï-lama cherche à en arriver à une solution négociée avec Pékin. Or, ce n'est pas chose facile, puisque les autorités chinoises se sont livrées, depuis l'invasion du Tibet, à une répression musclée de même qu'à une politique active de colonisation ou de sinisation du territoire.

    Malgré cela, le dalaï-lama constitue pour son peuple ainsi que pour des milliers de personnes à travers le monde l'incarnation même du Bouddha.

    Mes collègues du Bloc québécois se joignent à moi pour le saluer et pour le remercier de ses sourires, de cet espoir et de cette sérénité qu'il distille abondamment sur son passage partout où il se rend. Nos pensées l'accompagnent dans sa quête d'autonomie pour son peuple et pour son pays.

*   *   *

  +-(1410)  

[Traduction]

+-Le syndrome de fatigue chronique

+-

    M. Rodger Cuzner (Bras d'Or—Cape Breton, Lib.): Monsieur le Président, le syndrome de fatigue chronique est un trouble débilitant et complexe qui se caractérise par une profonde fatigue que le repos ne chasse pas et qu'une activité physique ou mentale risque d'aggraver.

    Les personnes qui souffrent du SFC sont tellement fatiguées qu'elles n'ont pas assez d'énergie pour rester debout plus que quelques heures par jour. En plus de la fatigue, elles présentent divers symptômes non spécifiques, comme la faiblesse, les douleurs musculaires, les troubles de la mémoire, la difficulté de se concentrer et l'insomnie. Dans certains cas, le SFC peut durer des années.

    La cause du SFC n'a pas été déterminée et il n'existe aucun test particulier pour le diagnostiquer ni aucun remède conçu spécialement pour le traiter. À la longue, il peut endommager le cerveau, le système immunitaire et les muscles des personnes qui en sont atteintes.

    Les Canadiens qui souffrent du SFC sentent souvent qu'on ne s'occupe pas d'eux puisqu'il n'y a pas de traitement ni de remède pour leur condition. J'estime qu'une plus grande sensibilisation à cette maladie débilitante nous permettra, un jour, de trouver un traitement efficace afin que ceux qui en souffrent puissent jouir d'une vie normale et active.

*   *   *

+-Le Jour de la terre

+-

    M. Bob Mills (Red Deer, PCC): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole, aujourd'hui, en ce Jour de la Terre.

    J'en profiterai pour souligner les idées mises de l'avant par le Parti conservateur à l'égard d'un environnement plus propre et plus sain. Elles contrastent avec la politique du gouvernement libéral, dont l'unique initiative récente à la Chambre vise à consacrer à un projet domiciliaire une partie d'un parc national considéré comme un joyau.

    Notre politique se fonde principalement sur notre conviction que le développement scientifique, l'innovation technologique et la croissance économique sont essentiels à un environnement plus propre, plus sain et plus sûr.

    Une politique environnementale doit être pratique. Elle doit faire l'arbitrage entre des intérêts sociaux qui s'opposent. Elle doit condenser, harmoniser et rationaliser les lois et les compétences qui se recoupent. Elle doit reconnaître que les gouvernements provinciaux et territoriaux ont un rôle à jouer dans une politique environnementale fédérale.

    Les Canadiens ont droit à un air, des terres et de l'eau plus propres. Ils méritent un gouvernement conservateur qui contribuera à les leur procurer.

*   *   *

+-Le Jour de la terre

+-

    M. Raymond Simard (Saint-Boniface, Lib.): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui le Jour de la Terre, où, comme Canadiens, nous devrions réfléchir à notre capacité d'être les gardiens des ressources naturelles vitales de la planète. J'attire votre attention plus particulièrement sur l'une de ces ressource, l'eau.

    Comme les députés le savent, l'eau est essentielle à la vie et à la santé des humains et des écosystèmes. Le Canada possède 7 p. 100 de la réserve renouvelable mondiale d'eau douce. Cela nous confère la possibilité et la responsabilité d'en être des gardiens prudents. Cette responsabilité s'étend au-delà de nos frontières. À l'échelle mondiale, plus d'un milliard de personnes n'ont pas accès à de l'eau potable salubre et plus de deux milliards de personnes ne vivent pas dans des conditions sanitaires satisfaisantes. Le Canada respecte son engagement d'oeuvrer avec ses partenaires étrangers à réduire de moitié ces chiffres d'ici 2015.

    Au plan national, le gouvernement fait preuve de leadership en participant à une gamme d'initiatives visant à améliorer la qualité de l'eau au profit des Canadiens et de l'environnement naturel. Le gouvernement fédéral continuera à travailler étroitement avec ses partenaires provinciaux et territoriaux pour assurer aux Canadiens de l'eau propre, potable et salubre.

*   *   *

+-Le gouvernement du Canada

+-

    M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, PCC): Monsieur le Président, un électeur m'a demandé récemment pourquoi je passais autant de temps à critiquer les libéraux et à parler de leurs nombreux scandales. La réponse est qu'on aurait pu faire beaucoup avec les fonds gaspillés.

    Les 2 milliards de dollars gaspillés dans le programme d'enregistrement des armes à feu auraient pu contribuer grandement à atténuer le problème des longues listes d'attente dans les hôpitaux.

    Le milliard de dollars dépensé en pure perte par DRHC aurait pu contribuer à fournir aux gens qui sont atteints d'arthrite, de la maladie de Parkinson, de la leucémie et d'une foule d'autres maladies les traitements dont ils ont besoin.

    Les 250 millions de dollars du scandale des commandites auraient pu contribuer grandement à la concrétisation de l'engagement assorti à l'accord sur la santé de fournir une couverture universelle pour les médicaments indispensables, mais onéreux.

    Les scandales libéraux vont au-delà du gaspillage de fonds publics. Ils sont des occasions perdues d'aider les gens démunis à obtenir l'aide dont ils ont vraiment besoin. On ne saurait négliger ces scandales. Chaque dollar gaspillé donne aux Canadiens une raison de plus de laisser tomber le Parti libéral et de voter pour un meilleur gouvernement dirigé par le nouveau Parti conservateur.

*   *   *

+-Les sans-abri

+-

    L'hon. Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, au Canada, la population des sans-abri a plusieurs visages; elle compte des femmes et des hommes seuls, des jeunes et des familles avec enfants. La recherche indique que nombre de femmes sans-abri ont fui un conjoint violent.

    Le gouvernement a pris plusieurs initiatives afin d'aider ces femmes et toute la population des sans-abri. En 1999, il a lancé l'Initiative nationale pour les sans-abri dans le but d'aider les collectivités à atténuer l'itinérance et à réduire le nombre des sans-abri.

    Deux projets implantés à London, en Ontario, illustrent les besoins des gens et la contribution que nous apportons. Nous finançons l'Atlohsa Native Family Healing Services, qui offrent un refuge de transition de six lits aux femmes autochtones et un refuge d'urgence de cinq lits aux autochtones. Nous finançons aussi des activités de missions visant à fournir des services accrus, notamment des lits supplémentaires et du linge de maison.

    Plus de 790 organismes aux quatre coins du Canada ont obtenu ou obtiennent des fonds pour des projets visant à améliorer et à créer de nouveaux services de soutien pour les sans-abri. Le gouvernement est fier de son rôle de partenaire dans la lutte contre l'itinérance.


+-QUESTIONS ORALES

[Questions orales]

*   *   *

  +-(1415)  

[Traduction]

+-Les affaires étrangères

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC): Monsieur le Président, aujourd'hui, j'ai eu l'honneur, avec d'autres chefs de parti de l'opposition, de rencontrer Sa Sainteté le dalaï-lama. Nous avons discuté de divers sujets, non seulement de questions spirituelles, mais aussi de préoccupations touchant la situation politique et les droits de la personne au Tibet et en Chine. Le premier ministre a plutôt choisi de rencontrer le dalaï-lama en présence d'autres leaders religieux et d'avoir seulement des discussions limitées avec lui.

    Pourquoi le premier ministre a-t-il laissé la Chine lui dicter les paramètres de ses propres conversations avec le dalaï-lama?

+-

    Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, en tant que premier ministre du Canada, c'est moi qui déciderai qui je rencontrerai et qui je ne rencontrerai pas. C'est également moi qui déciderai où je rencontrerai les personnes que je veux rencontrer et quels sujets je veux aborder avec elles.

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC): Monsieur le Président, on pourrait supposer que ces décisions seraient prises au nom des Canadiens, qui veulent que diverses questions soient abordées avec le dalaï-lama.

    On peut voir une tendance ici: David Herle de la firme Earsncliffe fait des annonces au sujet de notre relation avec les États-Unis; Jean Lapierre décide quelle devrait être notre relation avec le Québec; et maintenant la Chine nous dicte les paramètres de notre relation et de nos entretiens avec le Tibet.

    Le premier ministre est-il capable de prendre lui-même ces décisions sans un groupe de consultation?

+-

    Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je me contenterai de signaler que je serai le premier premier ministre du Canada à rencontrer le dalaï-lama. Je demanderais au député, qui est membre du Parti conservateur, quel conseil il a donné aux anciens premiers ministres conservateurs, M. Clark et M. Mulroney? Leur a-t-il suggéré de rencontrer le dalaï-lama? S'il l'a fait, ils ne l'ont pas écouté.

*   *   *

+-Le programme de commandites

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC): Monsieur le Président, je suis heureux de savoir qu'aujourd'hui je suis un progressiste conservateur. Apparemment, hier, j'étais un allianciste. Ça ne cesse de changer.

    Parlant de confusion, nous apprenons aujourd'hui que Jean Lapierre, le chef du bloc libéral, pense qu'il est temps que la GRC porte des accusations dans l'affaire des commandites et que cela améliorerait réellement les chances du premier ministre d'être réélu au Québec.

    Le premier ministre convient-il qu'il serait plus que légèrement suspect que la GRC se plie maintenant aux exigences de M. Lapierre?

+-

    Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai sans doute confondu le parti auquel appartient le chef de l'opposition et celui auquel il a appartenu. Il a certes appartenu à plusieurs partis au cours de sa carrière politique, mais il y a une chose qui est vraie. Il n'a jamais été un conservateur progressiste.

+-

    M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC): Au contraire, monsieur le Président, je pense que mon nouveau chef est très progressiste, et très honnête, j'ajouterais.

    Jean Lapierre, non élu mais choisi personnellement par le premier ministre pour être son lieutenant au Québec, parle de déficit démocratique. Dans une récente interview, M. Lapierre a abordé tous les sujets, de la date des élections à la combine des contrats de publicité en passant par les accusations que devrait porter la GRC. En tenant ce genre de propos, il politise et compromet l'enquête de la GRC qui est en cours.

    Vu à quel point il est proche du premier ministre, ce dernier approuve-t-il ces propos?

+-

    L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, le député sait mieux que quiconque ici que, dans notre pays, les enquêtes policières ont lieu indépendamment de l'opinion de qui que ce soit, y compris M. Lapierre.

+-

    M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC): Exactement, monsieur le Président, je saisis la gravité de l'affaire. Les déclarations de ce genre de la part d'un personnage clé qui semble être le principal porte-parole du premier ministre au Québec au sujet d'une enquête policière en cours sont totalement inacceptables. Elles nous rappellent la bonne vieille approche du Parti libéral, les machinations et les manipulations dont nous avons été témoins pendant le Shawinigate, le sommet de l'APEC, l'affaire de l'Airbus et maintenant la combine des contrats de publicité. C'est là une preuve de plus qu'il n'y a pas l'ombre d'une différence entre le premier ministre et son prédécesseur.

    Le premier ministre a choisi lui-même certains candidats. Il est peut-être temps qu'il se débarrasse de l'un d'entre eux. Le fera-t-il?

  +-(1420)  

+-

    L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit, et comme le député le sait pertinemment, dans notre pays, les enquêtes policières ont lieu indépendamment des opinions personnelles de quiconque.

    Je tiens également à rassurer tout le monde à la Chambre: toute décision d'intenter des poursuites relativement à ces affaires seront prises par le procureur général du Québec.

*   *   *

[Français]

+-La fiscalité

+-

    M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, hier, j'ai demandé au premier ministre d'exiger de CSL International, une filiale de son entreprise familiale, le remboursement de 100 millions de dollars qu'elle a soustrait illégalement au fisc québécois et canadien. Alors que le Bloc québécois déplore le comportement condamnable de la filiale, le ministre des Finances nous parle de la maison mère.

    Est-ce que le premier ministre, qui lui connaît bien son empire familial, va avoir la décence de reconnaître qu'à La Barbade, la filiale CSL International n'est qu'une façade, que tout est décidé à Montréal et qu'en conséquence 100 millions de dollars en impôt n'ont pas été payés, et ce, en violation de la Loi sur l'impôt?

[Traduction]

+-

    L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, le chef du Bloc interprète mal les faits. La mesure en cause, le projet de loi C-28, qui est à l'origine de sa demande, n'a aucun lien avec la CSL.

[Français]

+-

    M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, volontairement, le ministre des Finances confond filiale et maison mère. De plus, il souffre d'amnésie. Hier, il a faussement prétendu qu'en matière de paradis fiscaux, tous les projets de loi présentés en cette Chambre par l'actuel premier ministre avaient pour but d'abolir les échappatoires.

    Je demande donc au premier ministre lui-même, qui en 1998 a parrainé le projet de loi C-28, de nous dire à quoi a servi ce projet de loi, sinon à faire en sorte que CSL International—je répète qu'il s'agit bien de CSL International, qui n'est qu'une façade, et non de CSL—soit d'office considérée comme une entreprise active pour éviter de payer de l'impôt?

[Traduction]

+-

    L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, un haut fonctionnaire du ministère des Finances a expliqué la situation avec moult détails devant le comité permanent de la Chambre. Le Bloc a posé des questions semblables il y a quelques mois.

    Le fait est que le projet de loi C-28, la mesure dont il s'agit, concerne les sociétés étrangères et n'a rien à voir la CSL.

[Français]

+-

    M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre soutient qu'il se retirait du Cabinet chaque fois que des décisions concernant le transport maritime étaient abordées.

    Si tel est le cas, comment le premier ministre peut-il expliquer que lors du dépôt du projet de loi C-28—une loi qui vise entre autres les entreprises de transport maritime—, c'est lui-même qui l'a parrainé en cette Chambre?

[Traduction]

+-

    L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je le répète, le projet de loi en cause ne traite d'aucune question qui puisse mettre le ministre des Finances en conflit avec ses responsabilités.

[Français]

+-

    M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Monsieur le Président, on vient encore d'avoir un exemple qu'à chaque fois qu'il est coincé, le premier ministre refuse de parler.

    Reconnaîtra-t-il que lorsqu'il est question de consentir des avantages à une de ses compagnies, il n'hésite pas à intervenir directement et même à faire des lois rétroactives pour ses fins personnelles?

[Traduction]

+-

    L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, la question est absolument insensée. Les allégations n'ont absolument aucun fondement et ne renferment pas la moindre parcelle de vérité.

    Le député tente de faire des liens entre des sociétés qui sont complètement différentes et une loi qui n'a absolument rien à voir avec la CSL. Cela a été décrit en détail par des experts du ministère des Finances devant le Comité des transports.

*   *   *

+-Les droits de la personne

+-

    L'hon. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au très honorable premier ministre qui, j'en suis très heureux, rencontrera le dalaï-lama.

    Au cours de cette rencontre, il serait bien que le dalaï-lama rappelle au premier ministre à quel point il est difficile de séparer le spirituel de la politique. Bien des aspects de la vie politique devraient se fonder sur une dimension spirituelle de la vie.

    Le premier ministre ne croit-il pas qu'il est difficile de séparer le spirituel de la politique? Ne pense-t-il pas que la question des droits de la personne comporte une dimension spirituelle? Dans l'affirmative, abordera-t-il cela avec le dalaï-lama?

  +-(1425)  

+-

    Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les observations que le chef intérimaire du NPD a faites en guise de préambule sont tout à fait pertinentes.

    Je crois sincèrement que la question des droits de la personne, comme bien d'autres questions, est d'ordre spirituel. Je n'hésiterais certainement pas à aborder la question des droits de la personne n'importe où, n'importe quand, avec n'importe qui.

+-

    L'hon. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Dans ce cas-là, monsieur le Président, le premier ministre peut-il nous dire s'il a l'intention de discuter avec le dalaï-lama des mesures à prendre pour inciter la Chine à améliorer son bilan en matière de droits de la personne, à manifester plus de respect envers le Tibet, à négocier l'autonomie des régions à l'intérieur du territoire chinois, et d'aborder toutes les autres questions qu'a soulevées le dalaï-lama?

    Qu'y aurait-il d'inconvenant ou de déplacé, sur le plan spirituel, à discuter de telles choses?

[Français]

+-

    Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je peux assurer le chef intérimaire du NPD que j'ai l'intention d'aborder toute une série de questions d'ordre spirituel. D'ailleurs, c'est le dalaï-lama lui-même qui s'est déclaré moine. Ce sont des sujets dont il veut discuter.

    Cela étant dit, absolument, la question des droits humains doit être abordée lorsqu'on rencontre n'importe quel chef international, particulièrement quelqu'un de l'envergure du dalaï-lama.

*   *   *

[Traduction]

+-Le programme de commandites

+-

    M. Vic Toews (Provencher, PCC): Monsieur le Président, le lieutenant québécois que le premier ministre a lui-même choisi essaie d'inciter la GRC à porter des accusations au pénal dans le scandale des commandites. En gardant le silence, le premier ministre permet à son acolyte de s'ingérer dans une enquête criminelle de la GRC.

    Le premier ministre a nommé M. Lapierre. Va-t-il le tenir responsable de ce comportement répréhensible, ou est-ce le comportement qu'il attend de ses amis?

+-

    L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit, les opinions personnelles de M. Lapierre ou de quiconque n'ont absolument aucune influence sur les enquêtes policières.

    Ces opinions ne peuvent aucunement influer sur la décision d'intenter ou non des poursuites dans une affaire quelconque. Cette décision sera prise par le procureur général du Québec.

+-

    M. Vic Toews (Provencher, PCC): Monsieur le Président, le premier ministre a reproché au Comité des comptes publics de faire enquête sur le détournement de fonds publics vers des maisons de publicité proches des libéraux.

    Voici maintenant que son lieutenant québécois, celui qu'il a lui-même nommé, incite la GRC à porter des accusations au pénal afin d'atténuer les pressions politiques pour les libéraux au Québec.

    Pourquoi le premier ministre s'intéresse-t-il plus à s'ingérer dans l'enquête sur le scandale qu'à faire toute la lumière sur ce gâchis?

+-

    L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, le député sait fort bien que personne ne peut bousculer la GRC. Les enquêtes policières suivront leur cours selon les procédures normales, et aucune opinion, pas plus celle de M. Lapierre, n'y changera quoi que ce soit.

    Toutefois, je crois que c'est un député de l'opposition officielle, le député de St. Albert, sauf erreur, qui a proposé, lorsqu'on l'a interrogé, que quelqu'un soit mis en prison. Je vous laisse y réfléchir, monsieur le Président.

    Des voix: Oh, oh!

+-

    Le Président: À l'ordre, à l'ordre. Je suis certain qu'il y a plusieurs propositions, mais nous ne sommes pas obligés de les prendre en considération maintenant. Le député d'Okanagan—Coquihalla va poser une question.

*   *   *

+-Les marchés publics

+-

    M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC): Monsieur le Président, depuis 1993, la firme Earnscliffe Strategy Group a reçu quelque 6 millions de dollars du gouvernement libéral et 2 millions de dollars lorsque le premier ministre était ministre des Finances.

    Depuis, David Herle est monté en grade et il a géré la campagne du premier ministre dans le cadre de la course à la direction du Parti libéral. Il est maintenant coprésident de la campagne électorale libérale. Il a été nommé sondeur en chef. M. Herle annonce maintenant officiellement les politiques à la place du premier ministre.

    Je veux savoir, et les Canadiens veulent savoir, qui dirige le gouvernement? Est-ce David Herle, à partir du Cabinet du premier ministre, ou est-ce le premier ministre, à partir du bureau de la firme Earnscliffe? Lequel des deux est-ce?

  +-(1430)  

+-

    Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je ne sais pas à quelles annonces le député fait allusion.

    M. Herle est un membre très actif du Parti libéral. C'est évident. Il est un analyste politique compétent.

    Je ne sais pas à quelles grandes annonces le député fait allusion.

*   *   *

+-Les affaires étrangères

+-

    M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC): Monsieur le Président, je peux aider le premier ministre.

    Le 11 avril, à la télévision nationale, M. Herle a fait une importante annonce en matière de politique étrangère, soulignant que le gouvernement avait l'intention d'ouvrir un nouveau secrétariat à Washington. Cinq jours plus tard, le premier ministre a tenté de se reprendre en annonçant en grande pompe, au cours d'un discours prononcé à Toronto, que ce projet serait réalisé.

    La question me semble pertinente. Qui dirige réellement le gouvernement? Est-ce M. Herle qui dirige à partir du bureau du premier ministre, ou est-ce le premier ministre qui dirige à partir des bureaux d'Earnscliffe, et dans le premier cas, quand pouvons-nous nous attendre à une nouvelle annonce de la part de M. Herle?

+-

    Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, parlons un peu de la qualité des recherches effectuées par nos vis-à-vis alliancistes-conservateurs. L'idée de la création de ce secrétariat a été lancée par le caucus libéral il y a environ un an.

    J'en ai ensuite parlé pendant la course à la direction, puis l'idée a été reprise dans le discours du Trône. C'est une question qui a été largement débattue.

    Je comprends que le député n'était peut-être pas au courant des suggestions avancées par le caucus libéral. Je comprends également qu'il n'a probablement pas entendu tous les discours que j'ai prononcés pendant la course à la direction du parti, mais je sais qu'il était ici au moment de la lecture du discours du Trône. Je l'ai vu. Il a sûrement dû écouter quelque chose.

*   *   *

[Français]

+-Le peuple arménien

+-

    Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, la Chambre des communes a adopté hier la motion M-380 qui reconnaît le génocide arménien de 1915 comme un crime contre l'humanité. Or, malgré un vote clair, le ministre des Affaires étrangères s'est empressé de déclarer que la position du gouvernement resterait inchangée.

    Le premier ministre peut-il nous dire s'il est d'accord avec le ministre?

+-

    L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, nous avons énormément de respect pour les motions et les déclarations de cette Chambre. Nous les traitons très sérieusement.

    Toutefois, évidemment, la politique étrangère du Canada doit rester dans le domaine du gouvernement, et on a clairement dit que nos relations avec la Turquie, une alliée de l'OTAN, restent les mêmes qu'avant.

+-

    Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, comment le premier ministre, qui prétend vouloir mettre fin au déficit démocratique, peut-il faire une telle affirmation quand il dit ne pas être tenu de respecter ce que la Chambre a voté majoritairement?

    En d'autres mots, par la voix de son ministre, est-ce que le premier ministre nous dit: «Parlez, parlez tant que vous voudrez, nous ferons ce que nous voudrons»?

+-

    L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Non, pas du tout, monsieur le Président. Chacun agit dans son propre domaine. C'est vrai.

    Nous avons la responsabilité de la politique étrangère du Canada. Nous prenons cette responsabilité en fonction de toutes nos responsabilités vis-à-vis des alliés, et nous continuerons d'exercer cette responsabilité sérieusement, mais toujours en respectant la volonté, les voeux et les opinions des députés en cette Chambre.

*   *   *

+-Le bois d'oeuvre

+-

    M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, le 13 avril dernier, des groupes représentant l'industrie du bois d'oeuvre, dont le Conseil de l'industrie forestière du Québec, ont écrit au ministre du Commerce international pour lui faire part de leurs inquiétudes face au projet d'entente que Washington a présenté.

    Le ministre, qui envisage de répondre à l'offre des Américains avant la fin du mois, peut-il nous confirmer que jamais il n'acceptera une entente à rabais pour acheter la paix avec l'administration Bush sur le dos de l'industrie forestière?

+-

    L'hon. Jim Peterson (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, c'est vrai que nous avons eu beaucoup de discussions avec les provinces, l'industrie, les ouvriers et les producteurs dans le secteur du bois d'oeuvre. Nous allons continuer à poursuivre notre projet en deux volets, c'est-à-dire que nous allons continuer les négociations et nous allons poursuivre nos litiges. Notre but est d'obtenir le libre-échange pour le bois d'oeuvre.

  +-(1435)  

+-

    M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, le ministre nous confirme qu'on a toutes les raison d'être inquiets. La dernière fois que le gouvernement a voulu répondre à un projet américain d'entente sur le bois d'oeuvre, il a fallu que l'industrie se mobilise pour l'empêcher de s'effondrer.

    Le ministre peut-il nous donner l'assurance qu'il ne profitera pas de la campagne électorale pour négocier une entente en catimini sur le dos des travailleurs et de l'industrie du bois d'oeuvre?

+-

    L'hon. Jim Peterson (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je dois vous dire que ce projet est de la plus grande importance pour moi. Cela occupe toutes mes journées, et je vais continuer à travailler pour les Canadiens dans ce dossier.

*   *   *

[Traduction]

+-Les marchés publics

+-

    M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PCC): Monsieur le Président, pour justifier l'attribution de contrats sans appel d'offres à ses amis, le premier ministre invoquait toujours un besoin pressant ou une échéance à respecter.

    Pourquoi était-il si pressé de passer avec Earnscliffe un contrat de 160 000 $ pour la fourniture de conseils stratégiques en matière de communications? Est-ce en raison des élections prochaines et, dans l'affirmative, pourquoi se sert-il des deniers publics pour financer sa propagande politique?

+-

    L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.): Monsieur le Président, Santé Canada a recours à de nombreux fournisseurs de services de communications stratégiques au moyen de contrats d'offres à commandes qui sont passés par Travaux publics et Services gouvernementaux Canada.

    Ce ministère respecte les lignes directrices pertinentes du Conseil du Trésor. Le processus est absolument transparent et ni moi-même, en tant que ministre, ni le personnel de mon cabinet ne sommes intervenus dans l'attribution de ces contrats.

+-

    M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PCC): Monsieur le Président, rappelez-vous cette vieille chanson intitulée You Gotta Have Timing, qui porte sur le choix du bon moment. Ils savent y faire en la matière.

    Des voix: Encore.

+-

    Le Président: On ne chante pas pendant la période des questions.

    Le député de St. John's-Ouest va poser une question et nous voulons l'entendre.

+-

    M. Loyola Hearn: Monsieur le Président, ils n'aiment pas la musique.

    En vertu d'une offre à commandes en date du 29 mars 2004, Earnscliffe sera à la disposition de Santé Canada pour lui fournir des conseils et proposer des stratégies au sujet de certains dossiers politiques parmi les plus délicats.

    Pourquoi le premier ministre a-t-il recours à la sous-traitance pour un travail que le personnel du ministère est payé pour faire?

+-

    L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.): Monsieur le Président, il est tout à fait normal que Santé Canada cherche à obtenir les meilleurs conseils au Canada. C'est d'ailleurs pour ça que nous organisons des ateliers un peu partout au pays. Nous devons parfois avoir recours au secteur privé pour organiser certains de ces ateliers et obtenir les meilleurs conseils possible en communications stratégiques.

    Earnscliffe est l'une des quatre entreprises dont les services ont été retenus en vertu d'une offre à commandes. La décision n'a été prise ni par le ministre ni par son cabinet. L'opposition le sait pertinemment. Le processus est transparent et nous respectons les règles.

+-

    M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, PCC): Monsieur le Président, le premier ministre est très fier de ses rapports avec la maison de lobbyistes Earnscliffe, d'Ottawa. Elle l'a fait premier ministre et il la récompense avec des contrats financés par les contribuables.

    On vient de donner 160 000 $ à Earnscliffe pour qu'elle conseille le ministère de la Santé sur la réforme des soins de santé. Toutefois, Earnscliffe a également obtenu un contrat pour traiter avec des sociétés privées faisant la promotion de la privatisation des soins de santé.

    Pourquoi le premier ministre pense-t-il que l'adjudication de contrats à ses amis chez Earnscliffe favorisera l'intérêt public, alors qu'ils agissent manifestement contre le bien public?

+-

    L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.): Monsieur le Président, nous obtenons les meilleurs conseils en communications stratégiques qui soient. Cela s'est fait au moyen d'une offre à commandes, organisée par Travaux publics de manière très transparente.

    Je sais qu'Earnscliffe a structuré sa façon de travailler, en plaçant une muraille de Chine entre ses opérations. Cela a été examiné par le conseiller en éthique. Elle respecte ce que la Cour suprême du Canada a indiqué dans son rapport annuel de 1988-1999, à savoir qu'Earnscliffe respecte absolument ces lignes directrices. Donc, le conseiller en éthique considère qu'elle peut faire les deux, conseiller en matière de communications stratégiques et mener ses autres activités...

  +-(1440)  

+-

    Le Président: Le député d'Edmonton—Strathcona a la parole.

+-

    M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, PCC): Monsieur le Président, voici quelques faits à propos du premier ministre et d'Earnscliffe.

    Dans les années 1990, il a truqué la procédure de passation de marchés du ministère des Finances pour favoriser Earnscliffe. Lorsqu'il a été congédié de...

    Des voix: Oh, oh.

+-

    Le Président: Le député ne veut pas donner à penser ici qu'il se fait des truquages. En anglais, on emploie ce mot dans le cas des voiliers. Il doit s'en tenir aux faits. S'il veut donner une liste en guise de préambule, il a intérêt à s'assurer qu'elle est en règle, car je ne laisserai pas passer ce type de langage.

+-

    M. Rahim Jaffer: Monsieur le Président, il a arrangé certaines procédures de passation de marchés pour Earnscliffe. Lorsqu'il a été congédié du Cabinet, son successeur au poste de ministre des Finances a annulé tous ces contrats avec Earnscliffe.

    Earnscliffe a commencé à travailler sérieusement pour sa campagne à la direction et, lorsqu'il est devenu premier ministre, les robinets ont commencé à se rouvrir pour Earnscliffe.

    Combien d'argent a coulé du cabinet du premier ministre vers Earnscliffe depuis qu'il a pris les commandes?

+-

    L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, pour ce qui est du préambule de monsieur, il persiste à fausser les faits.

    L'arrangement contractuel avec Earnscliffe était antérieur à l'élection du gouvernement en 1993. Il y a eu deux prorogations de courte durée de ce contrat pendant que le ministère des Travaux publics préparait un nouveau processus concurrentiel. Lorsque ce processus a enfin été mis en place vers la fin de 1994, le contrat a à nouveau fait l'objet d'un d'appel intégral à la concurrence et, dans ce cadre concurrentiel, Earnscliffe a remporté le marché.

*   *   *

+-L'industrie de l'éthanol

+-

    Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le Président, hier, à la société Iogen, ici, à Ottawa, le premier ministre a assisté au départ du premier camion-citerne rempli d'éthanol dérivé de la cellulose et prêt à mettre sur le marché.

    Comme le gouvernement a investi 21 millions de dollars pour amener cette technologie à ce stade-ci, est-il maintenant disposé à se conformer au discours du Trône et au budget et à contribuer à l'expansion commerciale et au développement de l'éthanol dérivé de la cellulose?

+-

    L'hon. R. John Efford (ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement du Canada soutient depuis longtemps des technologies environnementales novatrices, comme du combustible propre.

    Dans un premier temps, en février, le gouvernement a consacré 78 millions de dollars à sept nouvelles usines de production d'éthanol dans le pays, et d'autres seront aménagées sous peu.

    En outre, le gouvernement du Canada a réaffirmé son appui de longue date aux technologies environnementales en annonçant dans le budget de 2004 l'affectation de fonds supplémentaires de 1 milliard de dollars dans ce secteur. L'éthanol de la société Shell Oil a été désigné comme secteur d'investissement pour ce nouveau programme.

*   *   *

+-La santé

+-

    Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, le premier ministre et les libéraux disent que ce sont les conservateurs qui veulent un système de santé privé, à but lucratif. En réalité, le premier ministre prépare la voie à des services de santé privés, à but lucratif. À preuve, les lobbyistes de la firme Earnscliffe sont proches du premier ministre et les libéraux ont retenu les services de cette firme pour qu'elle conseille Santé Canada.

    Le premier ministre peut-il prouver qu'il se distingue des conservateurs et dire à tous les Canadiens que son gouvernement n'autorisera pas la prestation de services de santé privés, à but lucratif, au Canada?

+-

    L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.): Monsieur le Président, comme la question va dans tous les sens, je profiterai de l'occasion pour bien confirmer à la Chambre la ferme intention du gouvernement de collaborer très étroitement avec les provinces. Le premier ministre s'est engagé à rencontrer ses homologues l'été prochain, à la suite du bon travail que nous accomplirons, au cours des prochaines semaines et des prochains mois, avec les ministres de la Santé.

    Nous voulons garantir les cinq principes énoncés dans la Loi canadienne sur la santé. Nous voulons collaborer avec les provinces pour élaborer un plan à long terme et pour assurer la pérennité de notre système de santé.

*   *   *

[Français]

+-L'assurance-emploi

+-

    M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, le ministre des Ressources humaines a récemment laissé entendre en cette Chambre que les travailleurs saisonniers de la circonscription de Beauséjour—Petitcodiac ne seront pas pénalisés financièrement pour avoir emmagasiné des heures pour leurs prestations d'assurance-emploi. Son ministère m'a assuré que le même traitement serait offert aux gens de la circonscription de Acadie—Bathurst, mais il a renversé sa décision et leur demande maintenant de payer.

    Le ministre des Ressources humaines s'engage-t-il, oui ou non, à traiter les travailleurs saisonniers aux prises avec ce problème de la même façon partout, et pas seulement de favoriser ceux des comtés libéraux?

+-

    L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.): Monsieur le Président, on retrouve la problématique des travailleurs saisonniers partout au pays. Mon ministère et moi, personnellement, la traitons tous deux de la même façon. Nous traitons le problème et nous essayons d'engager toutes les ressources du ministère à trouver des solutions pour tous les individus, peu importe où ils travaillent.

*   *   *

  +-(1445)  

[Traduction]

+-Le programme de commandites

+-

    Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC): Monsieur le Président, les Canadiens veulent des réponses claires afin de savoir qui est responsable du fait que des millions de dollars ont été dépensés en commandites d'une manière qui, aux dires de la vérificatrice générale, violait toutes les règles en place.

    Aujourd'hui, un bureaucrate de niveau intermédiaire, Chuck Guité, a dit que les libéraux lui avaient donné carte blanche pour accorder des contrats valant des millions de dollars. Essaie-t-on de faire croire aux Canadiens qu'un seul bureaucrate a été autorisé à dépenser tout cet argent sans avoir reçu de directives ou fait l'objet de contrôles de la part du pouvoir politique?

+-

    L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, comme la députée le sait, le Comité des comptes publics est en train d'entendre toute une série de témoins relativement à cet important dossier. Je suis convaincu que tous ici, y compris la députée, voudront prendre connaissance du rapport du comité sur le témoignage de M. Guité, ainsi que sur les autres témoignages concernant ce qui a pu se produire, et à quel moment, au cours des dernières années.

+-

    Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC): Monsieur le Président, je rappelle au gouvernement libéral que la vérificatrice générale a découvert des excès tellement graves dans les dépenses liées au programme de commandites que cette situation a donné lieu à l'ouverture d'une enquête parlementaire, d'une enquête judiciaire et de nombreuses enquêtes criminelles.

    Le gouvernement demande aux Canadiens de croire que tous ces abus sont l'oeuvre d'un seul bureaucrate qui semble se prendre pour un autre. Si les libéraux sont restés passifs pendant que tout cela se produisait, pourquoi les Canadiens voudraient-ils les voir diriger le pays?

+-

    L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, je suis certain que la députée est au courant du témoignage entendu ce matin. Je suis sûr qu'elle et ses collègues du Comité des comptes publics porteront une grande attention à cette version des faits, qu'ils vont la comparer aux autres versions et qu'ils vont présenter leurs conclusions et leurs constatations dans un rapport à la Chambre qu'on les invite à déposer le plus rapidement possible.

+-

    M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, PCC): Monsieur le Président, ce qui est ressorti clairement du témoignage de ce matin, c'est que le fonds secret des libéraux pour l'unité canadienne a planté le décor du scandale des commandites.

    À titre de ministre des Finances et de vice-président du Conseil du Trésor, le premier ministre était parfaitement au courant de l'existence de cette poule aux oeufs d'or que constituait le fonds pour l'unité nationale, il l'a financé et il a donc sa part de responsabilité dans le scandale des commandites.

    Pourquoi les Canadiens devraient-ils faire confiance au premier ministre et croire qu'il va faire la lumière sur le gâchis des commandites alors qu'il était le membre le plus influent du Cabinet de M. Chrétien?

+-

    Le Président: Le président du Conseil du Trésor a la parole.

    Des voix: Oh, oh!

    Le Président: Tout le monde sait que le président du Conseil du Trésor est un ministre très populaire, mais il nous faut pouvoir entendre sa réponse et si tout le monde chahute et l'applaudit, cela nous est impossible. Le président du Conseil du Trésor a la parole.

+-

    L'hon. Reg Alcock (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, le député a demandé pourquoi les Canadiens devraient faire confiance au premier ministre en l'occurrence. Tout simplement parce qu'il a mis en place le processus le plus ouvert et le plus transparent qui puisse exister. Tous les jours, des faits sont divulgués. Comme je l'ai toujours dit, le premier ministre n'a pas peur de la vérité.

+-

    M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, PCC): Monsieur le Président, c'est une réponse difficile à avaler de la part de l'homme de 13 millions de dollars responsable de la disparition de 83 millions de dollars tout simplement volatilisés.

    Nous avons découvert aujourd'hui que trois anciens ministres libéraux des Travaux publics avaient une conception particulière de la vérité puisqu'ils ont prétendu ne pas avoir été en rapport avec Chuck Guité.

    Étant donné qu'il ressort clairement du témoignage d'aujourd'hui que le programme des commandites a été conçu par et pour le Parti libéral et que les hautes instances politiques donnaient leurs directives à ce sujet, pourquoi les Canadiens devraient-ils faire confiance au gouvernement et croire qu'il va remédier au gâchis qu'il a créé?

+-

    L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, je ne sais pas trop de quel témoignage le député parle. D'après le compte rendu que j'ai eu du témoignage de M. Guité aujourd'hui, ce dernier a dit exactement le contraire; il a dit que les décisions qu'il a prises à l'égard des firmes de publicité ne lui étaient pas dictées par les instances politiques.

*   *   *

[Français]

+-Les travailleurs âgés

+-

    Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Neigette-et-la Mitis, BQ): Monsieur le Président, suite à une conférence de presse tenue hier par les syndiqués de la Whirpool et le Bloc québécois, le personnel du ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences a rencontré les travailleurs qui proposent une solution inédite et originale pour aider les travailleurs âgés entre 55 et 65 ans qui vont bientôt perdre leur emploi.

    Le ministre peut-il nous dire s'il entend répondre favorablement aux propositions des travailleurs de la Whirpool qui sont venus hier à Ottawa pour dénoncer son incurie?

  +-(1450)  

+-

    L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.): Monsieur le Président, la seule dénonciation que l'on doit faire, c'est l'incurie de la vérité. La députée d'en face, évidemment, ne l'a jamais connue.

    Le groupe de travail avec lequel les personnes ont eu une rencontre va déposer son rapport. Quand je recevrai le rapport, je prendrai une décision.

+-

    Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Neigette-et-la Mitis, BQ): Monsieur le Président, le député libéral de Montmagny-L'Islet est en possession du projet des travailleurs de la Whirpool depuis l'automne dernier et n'a rien fait. Suite aux pressions du Bloc québécois, le personnel du ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences a finalement rencontré les travailleurs hier.

    Le ministre entend-il enfin donner son accord pour un financement du projet par le gouvernement fédéral avant la fermeture de l'usine prévue pour le 14 mai prochain?

+-

    L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à souligner que la députée est consciente du fait que mon ministère et le gouvernement du Canada sont toujours là, prêts à aider des travailleurs qui se trouvent dans une situation évidemment malheureuse.

    On essaye de mettre en place les programmes nécessaires pour résoudre les problèmes et les interruptions de revenus temporaires, je l'espère, de tous les chômeurs.

*   *   *

[Traduction]

+-Le Parti libéral du Canada

+-

    M. Ken Epp (Elk Island, PCC): Monsieur le Président, le premier ministre tourne la démocratie en dérision. Il n'y a rien de démocratique dans le fait de nommer des candidats dans les circonscriptions sans permettre aux gens de choisir.

    Dans Edmonton-Est, un libéral favori est sur le point d'être nommé par acclamation sans que les autres aient le droit de se présenter. Dans Burnaby--Douglas, le candidat libéral préféré reçoit tous les appuis alors que les Canadiens d'origine chinoise ont droit au crochet.

    Comment le premier ministre explique-t-il ces gestes à la lumière de son discours du Trône...

+-

    Le Président: Le député d'Elk Island sait sûrement que les questions posées durant la période des questions doivent porter sur les responsabilités du gouvernement. Je n'ai pas à lui rappeler que la nomination des candidats d'un parti est une chose qui concerne le parti. Espérons que sa question complémentaire portera sur un point qui se rapporte vraiment aux responsabilités du gouvernement à la Chambre.

+-

    M. Ken Epp (Elk Island, PCC): Monsieur le Président, il est dit clairement dans le discours du Trône que le gouvernement va s'attaquer au déficit démocratique. Je crois qu'on y parle de renouvellement démocratique. Si la démocratie n'inclut pas le choix des candidats, alors je ne sais pas ce qu'est la démocratie. Comment le premier ministre peut-il expliquer cela?

+-

    Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, regardez dans l'ensemble tous les candidats libéraux au pays. Ils ont obtenu leur investiture à la suite de luttes ouvertes et nous sommes très fiers de la grande diversité de la population canadienne qu'ils représentent.

    Si l'on veut parler de la nécessité de combler le déficit démocratique, on pourrait certainement appeler Ezra Levant. Je suis convaincu qu'il serait prêt à nous donner certains conseils. On pourrait peut-être appeler aussi Grant Devine. Il aimerait sans doute nous donner des conseils. Et que dire de ce parangon de la démocratie allianciste, Jim Hart?

*   *   *

+-Le développement des ressources humaines

+-

    Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): Monsieur le Président, comme vous le savez, les étudiants de tout le pays sont en plein dans leurs examens ou vont bientôt finir leur année scolaire et nous savons tous qu'ils vont alors chercher un emploi pour l'été. Je sais que le ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences a annoncé le début de Placement carrière-été...

    Des voix: Oh, oh!

+-

    Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. La députée de Whitby--Ajax a la parole et nous voulons entendre sa question. Si tout le monde continue de parler à la Chambre au lieu de le faire dans les antichambres, il est impossible d'entendre et la députée de Whitby--Ajax a le droit de se faire entendre.

  +-(1455)  

+-

    Mme Judi Longfield: Monsieur le Président, comme je disais, le ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences a annoncé le lancement du Programme placement carrière-été il y a quelques mois et le délai réservé aux employeurs pour y adhérer est maintenant expiré.

    Le ministre pourrait-il préciser à la Chambre combien d'étudiants devraient profiter de ce très important programme d'emplois d'été?

+-

    L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de le faire, car tous les ans, comme la députée le sait, le programme Placement carrière-été obtient beaucoup de succès. Il aide même les gens dans les circonscriptions bloquistes, car ils ne peuvent s'en sortir seuls.

    Cependant, tous les étés, le gouvernement du Canada débloque quelque 90 millions de dollars pour aider 50 000 étudiants qui fréquentent des écoles secondaires ou poursuivent des études postsecondaires et qui cherchent un emploi les préparant à une carrière.

    Je suis très heureux de dire que ce n'est qu'un élément de la Stratégie emploi jeunesse qui, chaque année, permet l'embauche d'environ un million de jeunes hommes et femmes dans tout le pays, ce dont nous sommes très fiers.

*   *   *

+-Les affaires étrangères

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC): Monsieur le Président, plus tôt au cours de la période des questions, le député d'Okanagan—Coquihalla a interrogé le premier ministre au sujet de l'annonce de la société Earnscliffe selon laquelle un nouveau secrétariat du gouvernement du Canada serait créé à Washington. Le premier ministre a répondu que le député devrait être au courant puisqu'il en a été question dans le discours du Trône. Vous devriez dire au premier ministre que ce projet ne figure pas dans le discours du Trône.

    Le premier ministre a-t-il eu le temps de consulter la société Earnscliffe et admettra-t-il que cette annonce ne figurait pas dans le discours du Trône?

+-

    Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le discours du Trône traite abondamment de nos relations avec les États-Unis. On y souligne notamment la nécessité d'établir des relations plus élaborées.

    Au cours du débat que nous avons eu ici à la Chambre au sujet du discours du Trône, cette question a été abondamment discutée, avant et après la présentation du discours. Elle a également fait l'objet de discussions à l'extérieur de la Chambre. Si je me rappelle bien, il y a environ une semaine, j'ai prononcé un autre important discours où j'ai réitéré cette annonce.

    Le problème peut fort bien venir du fait que cette initiative n'a pas été annoncée une seule fois, mais bien de nombreuses fois. J'espère, grand Dieu, que le député a enfin compris.

*   *   *

+-Les marchés publics

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC): Monsieur le Président, franchement, le premier ministre aurait dû simplement admettre qu'il avait fait erreur au lieu de chercher encore une fois à cacher la vérité. De toute évidence, il refuse de le faire.

    Je voudrais toutefois poser une autre question au sujet de la société Earnscliffe. Le premier ministre a été prié de révéler la valeur totale des marchés que le gouvernement a refilés à la société Earnscliffe. Acceptera-t-il de le faire?

+-

    Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, ces renseignements sont du domaine public et je suis sûr qu'ils seront rendus publics. Il y a une procédure à suivre, et ce sera fait.

*   *   *

[Français]

+-La fonction publique

+-

    Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, contrairement à ce que disait la ministre du Patrimoine hier...

    Des voix: Oh, oh!

+-

    Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. L'honorable députée de Québec a la parole maintenant et il faut entendre sa question. Il y a trop de bruit aujourd'hui.

+-

    Mme Christiane Gagnon: Monsieur le Président, contrairement à ce que disait la ministre du Patrimoine canadien hier, la lettre qu'a reçue Mme Gendron était signée par un fonctionnaire de Patrimoine Canada. Donc, la ministre responsable est bel et bien la ministre du Patrimoine canadien, et c'est à elle d'agir.

    Si la ministre refuse d'agir, devrons-nous comprendre qu'elle privilégie la décision de ses fonctionnaires avant la protection des droits et libertés de Mme Gendron, qui exerce pourtant une activité politique légitime?

+-

    L'hon. Hélène Scherrer (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, ce que j'ai dit hier et que je répète aujourd'hui, c'est qu'il s'agissait d'un dossier relevant des ressources humaines du ministère, et que cette employée traitait avec le service des ressources humaines du ministère.

    Des voix: Oh, oh!

    Mme Suzanne Tremblay: Ça n'a pas de bon sens!

*   *   *

+-La santé

+-

    M. Eugène Bellemare (Ottawa—Orléans, Lib.): Monsieur le Président, il est clair que l'enjeu de l'avenir de notre système de santé...

+-

    Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. L'honorable députée de Québec a posé sa question et a obtenu une réponse. C'est la fin de cette question pour aujourd'hui. Nous ne pouvons pas continuer avec tout ce bruit.

    Si les honorables députés veulent continuer la discussion, et je mentionne en particulier l'honorable députée de Rimouski--Neigette-et-la Mitis, ils peuvent le faire dans l'antichambre.

+-

    M. Eugène Bellemare: Monsieur le Président, il est clair que l'enjeu de l'avenir de notre système de santé, ce système qui est un symbole de notre identité canadienne, est la première priorité des Canadiens.

    Ma question s'adresse au ministre de la Santé. Le ministre a donné plus de détails sur le plan de partenariat avec les provinces, sur le renouvellement du système de santé au Canada. Étant donné les accords de 2000 et de 2003, peut-il nous expliquer comment et pourquoi il croit qu'on peut en arriver à une entente durable cet été?

  +-(1500)  

+-

    L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de cette question. Nous devons saisir cette chance historique de travailler étroitement avec les provinces et d'établir un plan de réforme durable.

    Dans la foulée des accords de 2000 et de 2003 sur la santé, nous sommes déterminés à nous asseoir avec les provinces afin d'assurer un plan dans lequel notre gouvernement s'est dit prêt à injecter des fonds additionnels aux 36,8 milliards de dollars supplémentaires déjà prévus dans ces accords.

    Au chapitre de l'imputabilité, il faut dépasser cette étape d'une imputabilité d'un palier de gouvernement à un autre. Ce que nous souhaitons, c'est l'imputabilité des deux ordres de gouvernement à leurs citoyens.

*   *   *

[Traduction]

+-Présence à la tribune

+-

    Le Président: Je voudrais signaler aux députés la présence à notre tribune de la très honorable Patricia Hewitt, secrétaire d'État au Commerce et à l'Industrie du Royaume-Uni.

    Des voix: Bravo!

*   *   *

+-Les travaux de la Chambre

[Les travaux de la Chambre]
+-

    M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, PCC): Monsieur le Président, je demanderais au leader du gouvernement à la Chambre d'informer la Chambre des travaux qu'il prévoit pour le reste de la journée et aussi pour la semaine prochaine, au cas où le premier ministre persisterait encore ce week-end à retarder le déclenchement des élections.

[Français]

+-

    L'hon. Jacques Saada (leader du gouvernement à la Chambre des communes et ministre responsable de la réforme démocratique, Lib.): Monsieur le Président, cet après-midi, demain et lundi, nous continuerons l'étude à l'étape de la troisième lecture des projets de loi C-11, Loi portant mise en vigueur de l'Accord d'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank, C-12, Loi modifiant le Code criminel (protection des enfants et d'autres personnes vulnérables) et la Loi sur la preuve au Canada, C-15, Loi de mise en oeuvre des traités ou des ententes administratives sur le transfèrement international des personnes reconnues coupables d'infractions criminelles, C-10, Loi modifiant la Loi sur les contraventions et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances.

    De plus, nous continuerons l'étude à l'étape du rapport du projet de loi C-23, Loi prévoyant les pouvoirs en matière d'imposition foncière des premières nations, constituant la Commission de la fiscalité des premières nations, le Conseil de gestion financière des premières nations, l'Administration financière des premières nations ainsi que l'Institut de la statistique des premières nations et apportant des modifications corrélatives à certaines lois, ainsi que le débat sur la motion portant renvoi au comité avant la deuxième lecture du projet de loi C-29, Loi modifiant le Code criminel (troubles mentaux) et modifiant d'autres lois en conséquence.

    Mardi sera un jour désigné.

    Mercredi, nous espérons être en mesure d'entamer l'étude des dernières étapes du projet de loi C-9, Loi modifiant la Loi sur les brevets et la Loi sur les aliments et drogues. Des discussions ont lieu pour expédier l'étude de ce projet de loi. Le gouvernement serait d'ailleurs prêt à accepter toute demande allant en ce sens.

    Je souhaite que mon collègue d'en face et tout le reste de ses collègues soient en excellente forme, parce qu'il y a beaucoup de pain sur la planche.

*   *   *

+-Recours au Règlement

+-L'honorable député de New Westminster—Coquitlam—Burnaby

[Recours au Règlement]
+-

    L'hon. Mauril Bélanger (leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, il a été porté à mon attention que le député de New Westminster—Coquitlam—Burnaby aurait été à la Chambre avant la période des questions et qu'il y aurait pris des photos, ce qui va à l'encontre du Règlement.

    J'aimerais que la présidence vérifie si c'est effectivement le cas, et, si tel est le cas, qu'elle s'assure que cela ne se reproduise plus.

[Traduction]

+-

    Le vice-président: Le député visé par le rappel au Règlement que fait le leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes vient de quitter la Chambre. Je prendrai la question en délibéré et ferai rapport de mes conclusions à la Chambre.


+-INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Initiatives ministérielles]

*   *   *

  +-(1505)  

[Traduction]

+-Loi sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank

    La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-11, Loi portant mise en vigueur de l'Accord d'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank, soit lu pour la troisième fois et adopté.

+-

    M. Lawrence O'Brien (Labrador, Lib.): Monsieur le Président, c'est la deuxième fois en deux jours que j'ai l'occasion d'intervenir sur un accord des premières nations. Hier, nous avons voté, et aujourd'hui, j'interviens au sujet de l'Accord d'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank, le projet de loi C-11, qui est une loi habilitante.

    Le projet de loi comporte deux principaux éléments: il donne force de loi à l'accord d'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank, et il permet d'apporter des modifications accessoires et des dispositions de coordination à d'autres lois fédérales.

    D'entrée de jeu, je désire souligner que cet accord n'est pas un traité. En d'autres mots, c'est le genre d'entente avec laquelle je suis habitué de travailler, au Labrador. Il y a l'accord avec les Inuits du Labrador, qui devrait être ratifié ce printemps et qui, je l'espère, deviendra une loi au cours des 12 mois qui suivront. Nous avons élaboré le cadre d'un autre accord avec l'Association des Inuits du Labrador , et la ratification de cet accord suivra. De plus, la nation des Métis du Labrador a présenté une revendication. Je connais donc bien le domaine des accords avec les premières nations.

    Cet accord est le premier accord autonome d'autonomie gouvernementale, négocié en vertu de la politique du droit inhérent du gouvernement fédéral, à être présenté au Parlement. Cette politique reconnaît le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale comme un droit autochtone existant au titre de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. La politique et l'accord basé sur la politique ne définissent cependant pas le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, du fait que seuls les tribunaux peuvent déterminer sa nature, sa portée et son contenu.

    À cet égard, l'Accord sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank met de côté le débat sur le titulaire potentiel d'un tel droit, et sur la portée et le contenu d'un tel droit, et s'attache plutôt à énoncer des arrangements pratiques pour un certain nombre de champs de compétence où la première nation de Westbank pourrait exercer son autorité législative.

    L'accord établit clairement que les parties ne considèrent pas que l'accord reflète des avis juridiques définitifs en ce qui concerne les modalités selon lesquelles le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale doit être défini aux termes de la loi. De plus, pour plus d'assurance, l'article 8 de l'accord stipule «qu’aucune disposition du présent Accord ne saurait être interprétée commeune disposition reconnaissant ou niant des droits ancestraux qui sont reconnus etconfirmés à l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.»

    Cet accord a pour but de changer les relations existant entre le Canada et la première nation de Westbank. C'est une rupture avec le régime existant de la Loi sur les indiens, qui a créé une relation de dépendance avec les premières nations et qui a sapé la relation entre les dirigeants des premières nations et les membres des bandes. Je pense que c'est un point très important parce que, selon moi, la Loi sur les Indiens est en grande partie dépassée. Le fait d'inclure dans l'accord des clauses différentes de celles de la Loi sur les Indiens démontre que nous sommes en voie de modernisation.

    Selon les dispositions de l'Accord sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank, celle-ci agirait à titre de gouvernement devant rendre compte en premier lieu à ses membres. Le gouvernement fédéral se retirerait des opérations courantes de la première nation de Westbank et du territoire de sa réserve.

    L'accord exige que la première nation de Westbank élabore une constitution qui définirait un gouvernement et des institutions démocratiques et légitimes qui seraient entièrement responsables envers les membres de la première nation de Westbank. La constitution de la première nation de Westbank doit prévoir, entre autres, des élections démocratiques des membres du conseil, des règlements contre les conflits d'intérêts et des mécanismes d'appel.

  +-(1510)  

    La première nation de Westbank a conçu et ratifié sa constitution en mai 2003. Au moment de sa mise en oeuvre, la constitution deviendra une loi de la première nation de Westbank et, comme toute autre loi de Westbank, elle ne sera pas approuvée par le Canada.

    L'accord énonce les règles applicables au gouvernement de la première nation de Westbank, à sa constitution et à l'exercice du pouvoir d'édicter des lois dans un certain nombre de domaines convenus, notamment : l'agriculture; la culture et la langue; l'éducation; l'environnement; les services de santé; les terres et la gestion des terres; l'octroi de licences et de permis d'affaires et la réglementation et le fonctionnement d'entreprises; l'appartenance; l'interdiction visant les substances intoxicantes; l'ordre, la paix et la sécurité publics; les travaux publics; la gestion des ressources; le trafic et le transport; et les testaments et biens.

    Sauf pour ce qui est de l'appartenance à la première nation de Westbank, le pouvoir d'édicter des lois ne vaudra que pour les questions propres à la réserve et exclura ce qui n'est pas mentionné expressément dans l'accord, comme les services sociaux, les services à l’enfance et à la famille, le maintien de l'ordre et la création d'un tribunal. De plus, l'accord prévoit expressément que la première nation de Westbank n'exerce pas de compétence dans les domaines suivants: droit pénal, protection de la santé de tous les Canadiens, propriété intellectuelle liée à tous les domaines de compétence fédérale, radiodiffusion et télécommunications.

    L'accord est une entente bilatérale conclue entre le Canada et la première nation de Westbank et remplace la plupart des dispositions de la Loi sur les Indiens. À mesure que la première nation de Westbank exercera son pouvoir d'édicter des lois dans un domaine prévu à l'accord, la disposition équivalente de la Loi sur les Indiens deviendra caduque. Toutefois, certains éléments de cette loi, notamment en ce qui concerne le statut d'Indien, l'imposition et certains pouvoirs réglementaires du gouverneur en conseil, ne faisaient pas partie des négociations et sont donc conservés. Ainsi, l'accord ne donne aucun pouvoir d'imposition à la première nation de Westbank et, par conséquent, les règlements actuels sur l'impôt foncier demeureront en vigueur conformément à l'article 83 de la Loi sur les Indiens.

    Dès la mise en oeuvre de l'accord, la relation fiduciaire sera maintenue, mais au fur et à mesure que la première nation de Westbank exercera ses compétences, le Canada s'attend à ce que ses obligations fiduciaires diminuent.

    Tout le cadre juridique du Canada transparaît dans tout au long de l'accord, qui se fonde sur l'application simultanée des lois fédérales et des lois de la première nation adoptées conformément aux paramètres prévus dans l'accord. Les lois provinciales d'application générale continueront d'être traitées de la même manière qu'elles le sont en vertu de la Loi sur les Indiens. Le gouvernement de la première nation de Westbank sera tenu de respecter la Charte des droits et libertés et la Loi canadienne sur les droits de la personne.

    La première nation de Westbank a un profil particulier puisque, en plus des 386 membres vivant dans la réserve, elle compte environ 8 000 résidants non membres vivant sur ses terres. Les non-membres continuent a être protégés par la charte et par la Loi canadienne sur les droits de la personne. L'accord précise que les baux des non-membres établis, acquis ou émis en vertu de la Loi sur les Indiens seront maintenus en vigueur conformément aux modalités dont ils sont assortis.

    L'accord prescrit également que, après la date d'entrée en vigueur, la première loi de la première nation de Westbank doit établir un mécanisme qui offre aux résidants non membres un droit de parole officiel prévu par la loi sur les questions qui les touchent directement et de façon significative. Avec cette obligation à venir en tête, la première nation de Westbank a consulté les non-membres afin de mettre sur pied en 1999 un conseil consultatif provisoire.

  +-(1515)  

    De plus, l'accord prescrit que la constitution de la première nation de Westbank doit établir un mécanisme d'appel et il prévoit aussi que la première nation devra créer des entités administratives pour régler les litiges d'ordre administratif en vertu de la loi de la première nation de Westbank, y compris les questions concernant les propriétaires et locataires.

    En conclusion, la Loi sur les Indiens en vigueur tend à saper les relations entre le chef de la première nation de Westbank et les membres du conseil et de la bande. L'application de l'accord modifiera les relations entre le Canada et la première nation de Westbank de telle façon que la première nation de Westbank se verra accorder plus de responsabilités. Elle développera également des formes de gouvernance soustraites à l'application de la Loi sur les Indiens afin de répondre aux aspirations et aux besoins individuels de la première nation de Westbank.

+-

    M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.): Madame la Présidente, je viens d'examiner la proposition concernant l'autonomie gouvernementale qui a été ratifiée par les premières nations elles-mêmes après des discussions approfondies avec leurs membres et avec la localité environnante de Kelowna.

    J'ai une question à poser au député concernant les relations avec la collectivité environnante. La situation unique de la première nation de Westbank, c'est que ses terres sont situées à l'intérieur des limites de la ville de Kelowna. Toutefois, il y a des dispositions dans le projet de loi qui portent sur les relations avec la municipalité et avec les autres collectivités entourant d'autres premières nations dans la région de Westbank, le long de l'Okanagan. Je crois qu'il y a aussi un comté ou une municipalité rurale au-delà des limites de Kelowna. Le député pourrait peut-être parler de ce qui est prévu dans le projet de loi.

+-

    M. Lawrence O'Brien: Madame la Présidente, si je comprends bien, le Canada a fait très attention, dans la négociation de cette entente avec une première nation, de ne pas empiéter sur aucun des droits prévus dans la Constitution canadienne, dans la Loi canadienne sur les droits de la personne ou dans les divers règlements en vigueur à Kelowna et dans les environs. Il est fait mention de façon précise des 8 000 non-membres qui vivent dans la réserve de Westbank. Le gouvernement a fait un effort particulier pour voir à ce que les droits des non-membres ne soient pas compromis.

    Je connais assez bien ce concept parce que nous sommes en plein forum de ratification au Labrador relativement à l'entente avec la Labrador Inuit Association. Dans ce dossier, les négociateurs ont pris bien soin de voir à ce que les non-membres soient protégés et gardent les mêmes droits que les Canadiens comme nous.

+-

    L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Madame la Présidente, le député a beaucoup d'expérience dans ce domaine. J'aimerais qu'il nous en dise plus long sur les progrès que réaliseront les premières nations du point de vue de l'économie, de la gouvernance, de la santé et des programmes sociaux une fois qu'ils seront plus en mesure de prendre en main leur propre destinée.

+-

    M. Lawrence O'Brien: Madame la Présidente, je suis très à l'aise avec cette question. En huit ans au Parlement, j'ai été témoin, lors des différents accords dont nous avons traités, des préoccupations des organisations autochtones de ma propre circonscription, les Inuits du Labrador, la nation innue, l'Association des Inuit du Labrador et la première nation de Westbank. La principale préoccupation est de leur donner une stabilité et une croissance économiques et une compréhension de l'économie.

    Selon ce que je crois et ce que j'en sais, plus les premières nations connaissent une croissance économique, plus leurs valeurs sociales sont stables. Elle enrichit leurs valeurs culturelles. Elle leur accorde un droit intrinsèque et une liberté pour aller de l'avant. Je dois dire que, personnellement, je n'ai entendu parler que d'expériences positives. Je n'ai aucun doute que, du point de vue de la première nation de Westbank, il en sera de même.

  +-(1520)  

+-

    L'hon. Larry Bagnell: Madame la Présidente, avant l'entrée en vigueur de cet accord, ce gouvernement autochtone compte 25 p. 100 des Canadiens non autochtones vivant dans des réserves. C'est énorme. Je pense que l'on en compte 7 500, et il y a quelques centaines de personnes dans la réserve. Il existe un conseil consultatif à l'heure actuelle offrant à ces personnes une certaine tribune, mais cet accord établira des mécanismes de protection de leurs intérêts, officialisant le conseil, de sorte que les non-autochtones auront leur mot à dire à l'égard des lois et de l'administration gouvernementale. En fait, une fois qu'une loi entrera en vigueur, elle ne pourra pas être changée sans l'accord des non-autochtones.

    Le député considère-t-il qu'il s'agit d'un bon modèle? En réalité, on donne aux non-autochtones une place dans la réserve avec laquelle ils se sentent à l'aise, et on leur donne leur mot à dire.

+-

    M. Lawrence O'Brien: Absolument, madame la Présidente. Dans le cas des non-membres qui habitent dans des réserves ou dans n'importe quel secteur visé par les revendications territoriales des différents peuples--par exemple, les Inuits, les premières nations comme la première nation de Westbank ou les Métis--, ou par toute autre revendication présentée au Canada, le modèle permet d'abord et avant tout de veiller à ce que des mécanismes soient en place pour protéger les droits des non-membres habitant dans une réserve. Dans le cas présent, le ministère et le gouvernement du Canada ont pris les mesures qui s'imposent pour veiller à ce que les mécanismes soient consignés et officialisés. Ainsi, en cas de différend entre membres et non-membres, des mécanismes existent pour régler ces différends. Je crois que c'est la bonne façon de procéder.

+-

    L'hon. Roger Gallaway (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais moi aussi parler en faveur du projet de loi C-11. D'entrée de jeu, ayant passé une bonne partie de la journée à la Chambre et entendu un grand nombre de discours, je dirai qu'il faut prendre garde de considérer cette mesure comme autre chose qu'un projet pilote. Il faut éviter de sombrer dans l'hyperbole et de dire que c'est la panacée parce que c'est un domaine très complexe et que la situation d'une foule de premières nations du pays est radicalement différente de celle de la première nation de Westbank.

    Cela étant dit, je dirai que le projet de loi C-11 donnerait effet à l'accord d'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank. Cet accord constitue le premier accord d'autonomie gouvernementale à voir le jour dans le cadre de la politique canadienne du droit à l'autonomie gouvernementale, et c'est un processus qui est devenu réalité à la Chambre après 14 ans de discussions sur le terrain.

    C'est une politique qui s'intéresse aux décisions locales puisque ce sont les décisions prises à ce niveau qui reflètent le mieux ce que veulent les gens et ce dont ils ont besoin. Ainsi, cet accord apporterait des améliorations dans bien des secteurs pour la première nation de Westbank, y compris le logement et l'emploi.

    Nombre de députés connaissent l'histoire du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. D'un point de vue historique, nous savons qu'il y avait des agents des Indiens chargés de superviser les bandes, voire d'imposer le point de vue du ministère aux premières nations. Cet accord met fin à cela. En fait, cet accord constitue un virage à 180 degrés dans l'autre direction.

    La ratification de l'accord par les membres de la première nation de Westbank a été réalisée au terme d'un processus de négociation global, qui s'est traduit par le présent accord, lequel, selon nombre de députés qui ont pris la parole aujourd'hui, jouit d'un vrai soutien. Il importe de souligner qu'il y a eu des négociations. En fait, au début de celles-ci, dans certains quartiers, on me dit que bien des gens étaient plutôt hostiles à l'accord et que certains d'entre eux ont fini par y adhérer. Comme c'est le cas pour tout autre accord, il y a toujours des gens qui s'opposeront à l'accord, mais il reste qu'il y a eu de vraies négociations.

    Il y a un mot que nous entendons beaucoup ici et que j'essaie d'éviter, et c'est le mot consultation. J'essaie de l'éviter, parce que je dois dire que j'en suis arrivé à un point où je ne sais plus ce qu'il veut dire. En fait, je crois qu'il ne veut rien dire du tout. Il y a un grand nombre de consultants qui gravitent autour de nous et qui consultent beaucoup, mais je ne sais pas réellement ce que cela veut dire. Tout cela a trait à des négociations. Des personnes se réunissent et s'entendent sur un cadre de négociation et après un certain temps, ils en arrivent à une entente.

    Le processus de négociation s'est terminé sur une note positive. Il a permis de clarifier les relations entre le gouvernement provincial, le gouvernement fédéral et les premières nations au niveau législatif et d'établir des dispositions prévoyant la consultation publique et la reddition de comptes.

    Comme je l'ai dit plus tôt, les négociations entre les gens de Westbank et le gouvernement du Canada ont commencé en 1990 et elles se sont poursuivies au cours du mandat de deux conseils de bande et, comme nous le dirions ici, du mandat de deux gouvernements.

    L'Accord de Westbank a permis de réunir des gens de collectivités différentes, de styles de vie différents et d'occupations différentes qui ont tenté de comprendre où ils s'en allaient.

    Il est intéressant de noter qu'un conseil consultatif a été créé pour représenter 7 500 ou 8 000 personnes qui vivent dans une réserve sans être autochtones. En collaboration avec ce conseil, la bande de Westbank travaille à la préparation d'une loi qui fera de ce conseil consultatif une institution permanente sous l'égide du régime juridique de Westbank.

  +-(1525)  

    Cette première nation a travaillé dur pour arriver à établir des partenariats forts avec les collectivités voisines. Des protocoles d'entente ont été signés avec le District régional d'Okanagan et la ville de Kelowna. Les responsables de Westbank ont également rencontré l'Union des municipalités de la Colombie-Britannique, un comité consultatif en matière de négociation de traité, des groupes de travailleurs organisés et des associations de propriétaires. Il est clair qu'on a beaucoup discuté du fait que cela n'avait rien à voir avec l'imposition d'une «entente» sur des terres intéressantes. Les dirigeants de Westbank ont rencontré les gens des secteurs avoisinants, des collectivités voisines et des terres voisines et ils se sont entretenus avec ces gens avec lesquels ils ont établi un lien.

    Cela ne veut pas dire que tous sont d'accord. Cela ne veut pas dire non plus que tout le monde est heureux, mais on s'entend clairement sur ce qui ne fonctionne pas. En fait, on m'a dit que plus de 400 sessions d'information et de discussions avaient porté sur les détails de l'entente et sur ce que cela signifierait, non seulement pour ce peuple autochtone, la première nation de Westbank, mais également pour les 7 500 ou 8 000 non-autochtones vivant sur les terres de Westbank et pour les collectivités avoisinantes, les collectivités voisines.

    L'information a été diffusée de bien des façons, par les médias, par la radio locale et dans des séances de discussion et des réunions que tiennent des groupes comme les chambres de commerce. Tout cela a permis aux gens de poser des questions, d'obtenir des réponses et de proposer des idées.

    Je le répète, cela ne veut pas dire que la démarche qui a mené à la signature de cet accord le 3 octobre dernier a été facile. Ce genre de chose ne va jamais de soi. Les discussions ont parfois été vives. Il y a eu parfois des divergences de vues, car il est bien évident que tous n'étaient pas en faveur de l'accord. Chose certaine, dans les assemblées publiques, tous ont pu prendre la parole et se faire entendre. Ceux qui voulaient comparaître et intervenir pouvaient le faire, qu'il s'agisse de membres de la bande ou de collectivités avoisinantes.

    Ce qui est clair, c'est qu'il s'agit d'un processus ouvert et donc démocratique. Ainsi, il a été plus facile à un grand nombre de ceux qui ont voté contre l'accord ou qui appartenaient à une collectivité voisine et s'opposaient à l'accord, d'accepter librement le résultat.

    Selon moi, cela s'explique par l'esprit de coopération qui règne à Westbank. Chacun peut s'y exprimer. Il peut y avoir des divergences de vues, mais les gens comprennent qu'on peut tout de même parvenir à un consensus ou à un accord. Je précise pour les députés de l'autre camp que la première nation de Westbank a été décrite comme l'une des plus progressistes du Canada.

    En suivant cette démarche, la première nation de Westbank nous a montré qu'il y avait de nombreuses formes de démocratie, que ce processus pouvait être démocratique en permettant une participation large et ouverte. Tous ceux qui veulent le faire peuvent s'exprimer, se faire entendre et peut-être même influencer l'issue du débat. Je suis convaincu qu'une démarche de cette nature ne peut qu'être bonne pour la structure de gestion des affaires publiques, car je crois que les structures de gouvernement des premières nations, comme on les appelle souvent au Canada, ont derrière elle une histoire qui a fréquemment été qualifiée de tortueuse.

  +-(1530)  

    L'accord d'autonomie gouvernementale prévoit également une constitution pour la première nation de Westbank, qui a été ratifiée par les membres de celle-ci en même temps que l'accord. Une constitution est la pierre angulaire d'un régime de droit. Dans ce cas, elle va déterminer les divers aspects de la gouvernance de la communauté, à commencer par l'élection de ses représentants, les budgets et la façon de légiférer, et énoncer les principes de base, dans ce cas-ci, ceux de la communauté.

    À mes yeux, la constitution élaborée pour la première nation de Westbank est déterminante, puisqu'elle a été rédigée par celle-ci et aura une application locale. Comme il se doit, cette constitution reflète les souhaits de la population au lieu d'avoir été imposée par une batterie de consultants, d'avocats ou, pire encore, une délégation du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.

    Cette constitution découle de la démarche adoptée par la première nation de Westbank. Un groupe de membres de cette communauté a consacré presque une décennie à en rédiger les lois fondamentales. La communauté s'est réunie à de nombreuses reprises pour débattre des diverses questions. Elle a formulé des réponses aux problèmes et a mis de l'avant des idées. Cette constitution n'est pas complète pour autant.

    Si je comprends bien, la question de la propriété matrimoniale n'a pas encore été réglée, mais le fait est que la nation a mis un mécanisme en place dans ce but. Celle-ci fait preuve de suffisamment de bonne volonté pour parvenir à un point où cette question sera réglée.

    Il importe également de comprendre que ceux qui vivent dans la réserve sans être autochtones font aussi valoir leurs vues. On les a amenés à participer. Lorsqu'un accord a été conclu et qu'un projet de constitution a été rédigé, il a été distribué et, là encore, chacun a pu dire son mot, se faire entendre et influencer le résultat.

    Cette façon de parvenir à un accord ou à une entente a donné plus de poids à la constitution formulée et, en bout de ligne, améliorera le mode de gouvernance de cette nation, car il va de soi que les gens sont plus enclins à respecter et à observer des lois et à participer à des organismes qu'ils connaissent parfaitement, ayant assisté ou pris part à l'établissement de ces lois ou de ces institutions. Dans un tel cas, les gens ont nettement le sentiment de se les approprier.

    À mon sens, une constitution ainsi élaborée sur place ne peut se traduire que par une amélioration de la gouvernance de cette première nation et, par suite, à une amélioration de la structure municipale. Si elle est un succès, elle a d'importantes répercussions sur d'autres premières nations.

    Par leur constitution, les habitants de la première nation de Westbank ont montré que des obstacles qui semblaient impossibles ou, pourrais-je dire, difficiles à surmonter, pouvaient être levés. Nous avons là un exemple d'une collectivité qui a montré qu'un accord peut et devrait être adapté aux conditions locales, que des accords de portée nationale imposés à des localités échouent fréquemment ou, pourrait-on dire, habituellement, car ils ne sont pas adaptés aux conditions locales. En dernière analyse, les droits et, ce qui est encore plus important, les intérêts de tous les membres de la localité peuvent être respectés parce qu'ils ont participé au processus.

    Les négociateurs du gouvernement fédéral ont reconnu le potentiel de l'approche de la première nation de Westbank et, à mon avis, la valeur de ce projet pilote. Ils ont également reconnu que l'accord auquel ils sont parvenus était équitable et recueillait un large appui de la population de cette région.

  +-(1535)  

    En guise de conclusion, je voudrais dire qu'il recueille un large appui des localités. Encore aujourd'hui, des gens de la région s'y opposent, mais il est évident que même les députés qui représentent une circonscription contiguë ou une circonscription dans laquelle se trouve cette réserve appuient l'accord.

    L'accord est le fruit d'une discussion et d'un consensus au niveau local, et non au niveau du gouvernement fédéral. On nous dit qu'il répond aux besoins des habitants de la première nation de Westbank, mais, ce qui est tout aussi important, il répond aux besoins des 7 500 ou 8 000 non-autochtones qui habitent dans la réserve de cette première nation. Il répond également aux besoins des membres des localités contiguës.

    Comme je l'ai dit au début, je le considère comme un projet pilote. C'est le premier accord à voir le jour aux termes du cadre d'orientation qui a été élaboré il y a plus de 14 ans. Un accord de cette nature, préparé au niveau local, recueillera l'appui de toute la collectivité, mènera à une bonne gouvernance, à la prospérité des localités et, bien sûr, à ce que désirent tous les Canadiens, peu importe où ils habitent, soit une saine économie locale, des perspectives économiques, des emplois, et l'harmonie entre toutes les collectivités.

+-

    M. Ted White (North Vancouver, PCC): Monsieur le Président, depuis une quarantaine de minutes, nous avons l'impression que le gouvernement est en train de faire de l'obstruction à l'endroit de son propre projet de loi.

    J'aimerais demander au député qui vient de s'exprimer s'il a rédigé lui-même son discours et, si ce n'est pas le cas, de nous dire qui l'a rédigé. Sommes-nous en présence d'une manoeuvre d'obstruction pour retarder l'adoption du projet de loi, parce qu'aucun autre parti ne prend la parole, sauf les libéraux qui vont jusqu'à se poser des questions entre eux? Le député pourrait peut-être répondre à ces questions.

  +-(1540)  

+-

    L'hon. Roger Gallaway: Monsieur le Président, premièrement les journaux ont souvent fait mention du fait que je n'ai jamais prononcé de discours préparés à l'avance.

    Une voix: Jusqu'à aujourd'hui.

    L'hon. Roger Gallaway: Ils peuvent chahuter tant qu'ils veulent, je prononce pas de discours préparés à l'avance et celui-ci n'en était pas un.

    Par ailleurs, le député m'a posé une question qui intéresse le gouvernement. Je ne parle pas au nom du gouvernement. Le député peut poser sa question demain, au cours de la période des questions orales, parce que je ne m'exprime pas au nom du gouvernement.

+-

    M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au député. Je pense qu'il pourrait nous parler de son expérience particulière dans sa circonscription. La Loi sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank prévoit la possibilité d'ajouts aux réserves et la possibilité que les premières nations de Westbank définissent leur propriété en vertu de la définition de «terres indiennes» dans la Loi sur les Indiens.

    Il existe un cas concernant les Chippewas de Sarnia où une terre réservée à cette bande a été visée par la Loi des mesures d'urgence, plutôt que par la Loi sur les Indiens, avec le résultat que la bande a perdu la terre en question.

    Je pense qu'il existe une grande hésitation et une grande incertitude au sein de la première nation de Westbank et d'autres nations au Canada. Suite à cette expérience, les premières nations veulent préserver une grande partie des terres en vertu de la définition d'une réserve. Le député pourrait peut-être nous relater l'épisode vécu par les Chippewas de Sarnia relativement à leurs transactions foncières.

+-

    L'hon. Roger Gallaway: Monsieur le Président, une partie de la prémisse de la question est inexacte, parce qu'on n'a jamais pris de terres de réserve aux Chippewas de Sarnia en vertu de la Loi sur les mesures de guerre.

    En fait, on a pris des propriétés sur la réserve de Stony Point, qui se trouve à quelque 50 milles au nord de la ville de Sarnia au bord du lac Huron. Les gens de la réserve de Stony Point ont été déplacés aux termes de certaines dispositions qui remontent maintenant à 64 ans et on les a installés dans une autre réserve à proximité, si je peux m'exprimer ainsi, et je n'ai pas l'intention d'avoir un ton désinvolte à ce propos. On les a déplacés vers une autre réserve qui était également située au bord du lac Huron. Cela a été un point chaud dans cette communauté parce que cela a été imposé à un moment de l'histoire sous prétexte des exigences de la Deuxième Guerre mondiale.

    Encore aujourd'hui, des problèmes se posent en raison des subtilités des questions touchant les réserves. En fait, étant donné que les propriétés étaient détenues en vertu de la Loi sur les mesures de guerre par, je crois, le ministère de la Défense nationale, le résultat final est qu'il n'a pas encore été établi que ce sont les terres d'une bande, ou des terres autochtones, malgré le fait qu'on a convenu, il y a environ neuf ans, que ce devrait être le cas.

    Ces questions sont très complexes. Voilà pourquoi je pense que, dans un cas comme celui-là, lorsqu'il existe une autonomie locale par rapport au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, cela ne veut pas dire que c'est parfait et cela ne veut pas dire que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes mais, au moins, la prise des décisions se fait à l'échelle locale.

    La réserve de Sarnia, qui a été arpentée en 1818, a des antécédents, au fil des ans, de vente de terres, à l'occasion, aux entreprises pétrochimiques contiguës, lesquelles, pour une large part, sont venues s'installer à Sarnia pendant la Deuxième Guerre mondiale. Je sais qu'on a regretté d'avoir vendu ces terres. Je sais que les Chippewas, ou les Aamjiwnaang, de Sarnia tentent de reprendre possession de terres excédentaires vendues à des entreprises comme Imperial Oil il y a quelques années et de les rendre au contrôle de la bande.

    Le grand atout de la réserve de Sarnia est qu'elle possède un parc industriel qui a obtenu de très bons résultats, car il est géré par la bande locale. Le résultat final est qu'il y a beaucoup d'emplois créés dans la réserve, à la fois pour les premières nations et pour des gens vivant hors de la réserve.

  +-(1545)  

+-

    M. John Cummins (Delta—South Richmond, PCC): Monsieur le Président, le gouvernement veut prolonger le débat. J'aimerais poser une vraie question. Comme je sais qu'en dehors de ses fonctions de parlementaire le député d'en face est avocat, je pense que cette question va particulièrement l'intéresser.

    L'accord prévoit que la première nation de Westbank a un droit ancestral inhérent à l'autonomie gouvernementale aux termes de l'article 35 de la Constitution. Si le gouvernement de la première nation de Westbank agit en s'appuyant sur un droit ancestral, je pense que l'article 25 le protégera contre toute contestation aux termes de la charte. Qu'en pense le député?

+-

    L'hon. Roger Gallaway: Monsieur le Président, je remercie mon collègue qui me pose une très bonne question. Beaucoup de députés, des deux côtés de la Chambre, ont parlé de la façon dont la charte des droits et la Constitution s'appliqueront sur ce territoire.

    J'ai entendu le député d'Okanagan citer l'article 52 de la Loi constitutionnelle de 1982, qui qualifie la Constitution de loi suprême du Canada si je ne m'abuse, car je n'ai pas le texte de la loi devant moi.

    La question qui m'est posée a trait à l'article 35 et au fait que cette disposition prévoit peut-être une exemption. Il m'est difficile de me prononcer sur des articles précis de loi quand je ne les ai pas devant moi. Cependant, c'est ce que j'appellerais la clause des premières nations figurant dans la Constitution. Cette question soulèvera un grand débat car nombreux sont ceux qui croient que la Charte des droits est, en fait, la Constitution. Voilà une affirmation bien ridicule que font pourtant bien des députés à la Chambre.

    M. John Cummins: J'ai posé une question, veuillez y répondre.

    L'hon. Roger Gallaway: J'y arrive. La question, si je ne m'abuse, était de savoir si la Constitution s'appliquera ou si l'article 35, qui est la disposition que mentionnait le député, en exempte les autochtones de Westbank. Voilà le genre de questions qu'adorent les avocats et qui créent une industrie. J'ajouterai ceci. À ma connaissance, la question que soulève le député n'a encore jamais été soumise aux tribunaux, et je ne dis pas que c'est correct.

    Je soutiens que toutes les dispositions de la Constitution s'appliquent à cette région, et si le député croit qu'une disposition particulière d'un document constitutionnel, c'est-à-dire qu'un article d'une loi constitutionnelle, pourrait prévaloir sur tout le reste, j'ai bien peur qu'il ait tort.

+-

    M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.): Monsieur le Président, c'est pour moi un véritable honneur de prendre la parole pour appuyer le projet de loi C-11. Les députés de l'opposition ne sont pas beaucoup intervenus dans le débat. Le projet de loi vaut pourtant la peine qu'on en discute. La situation de Westbank doit faire l'objet d'un dialogue, non seulement à la Chambre des communes, mais aussi ans l'ensemble du Canada.

    Cette région du pays, comme je l'ai mentionné lors des débats précédents, est constituée de territoires quasiment inhabités. Il s'agit de terres cédées en vertu d'un traité négocié par le pays tout entier pour que le territoire devienne un pays et relève de la Couronne canadienne. C'est ce qu'on appelle des terres de la Couronne. Toutefois, dans cette région, le processus de négociation du traité n'a pas encore abouti. Seul un partenariat entre la province, le gouvernement fédéral et les premières nation permettra qu'il conduise à un traité. Nous espérons qu'il sera mené à bonne fin dans un avenir très proche.

    Mon collègue qui a parlé avant moi a dit que cet accord d'autonomie gouvernemental était nécessaire pour que la communauté détienne le pouvoir de légiférer en matière d'éducation et de culture, de finances, d'utilisation des terres, de location des terres et d'exploitation des ressources sur ses terres.

    Cet accord d'autonomie gouvernementale est pour le Canada l'occasion d'étudier d'autres possibilités. Il existe de nombreux autres arrangements possibles, comme nous l'avons vu hier avec le projet de loi C-31 et le traité no 11 avec le peuple tlicho. Il s'agit d'un accord d'autonomie gouvernementale inscrit dans les limites d'un traité existant. En l'occurrence, il s'agit d'un accord d'autonomie gouvernementale sans traité. C'est un tournant historique pour notre pays qui tend la main aux premières nations qui veulent se doter d'une meilleure structure administrative et d'une meilleure structure décisionnelle, en dehors de la Loi sur les Indiens.

    J'invite l'opposition à présenter ses arguments contre cette mesure. C'est maintenant et ici qu'il faut en débattre. Le moment n'est pas encore venu de clore le débat. Voyons ce qu'elle a à dire, voyons à quoi elle s'oppose.

    C'est également l'occasion de passer en revue les déclarations faites par certaines personnes qui s'opposent au projet de loi. Elles parlent des droits des contribuables et de représentation. Dans notre pays les citoyens devraient avoir des droits, bien sûr.

    Beaucoup de jeunes au Canada ne sont pas considérés comme des contribuables ou n'ont pas ce statut. Quelles sont leurs droits? Est-ce le niveau d'impôts payés qui devrait définir l'influence des gens? Cette définition de la démocratie, j'ose le dire, est totalement fautive et ne correspond pas du tout à celle que l'on devrait rechercher dans le monde. La démocratie devrait être fondée sur les droits des citoyens. Nous sommes tous Canadiens, et tous les Canadiens devraient avoir une voix à la Chambre des communes, pas seulement les contribuables. C'est ce qui nous permet de tenir un tel débat à la Chambre.

    Je crois que c'est également ce qui donne une chance aux jeunes qui ne sont pas des contribuables parce qu'ils n'ont pas de travail. Ou aux gens qui connaissent des difficultés. Ou aux gens qui ne paient pas d'impôts parce qu'ils n'ont pas été en mesure de devenir propriétaires et d'avoir ainsi à payer d'impôt foncier.

    Il y a toutes sortes de sphères de réalité au Canada, dont il faut tenir compte concrètement.

    Si le débat se transforme en un dialogue, en une mantra ou en un lobby sur une fédération de contribuables, nous faisons fausse route en matière de démocratie. La démocratie devrait être fondée sur l'égalité des citoyens, indépendamment de leur domicile. Les premières nations régnaient sur ce territoire bien avant qu'aucun pays européen ait découvert ce nouveau continent que l'on appelle l'Amérique du Nord, ou l'île de la tortue selon la version des livres d'histoire.

    Toute l'histoire de l'accord sur l'autonomie gouvernementale au sein de la première nation Westbank a une valeur historique et nous donne l'occasion de réfléchir sur l'histoire et l'avenir du Canada. On considère que deux nations fondatrices, la France et l'Angleterre, se sont entendues pour fonder ce pays. Moi je dis que ce sont les traités qui ont permis de fonder ce pays.

    Il y a eu des traités originaux avec la France. Il y a eu des traités originaux avec l'Angleterre. Mais ces pays européens savaient que, pour s'assurer ce territoire, ils devaient passer des accords, des accords sacrés avec les premières nations. C'étaient elles qui avaient la responsabilité du territoire et qui en étaient les véritables propriétaires.

  +-(1550)  

    J'ose dire la définition de la notion de propriété parce que, dans une large mesure, nous estimons que ces terres étaient notre responsabilité, non notre droit. Or, pour exercer cette responsabilité, voici un modèle de gouvernement autonome où les citoyens éliront leurs dirigeants. Il y aura également entre 7 000 et 8 000 citoyens de la première nation de Westbank qui seront des non-membres et qui partageront les terres avec eux. 

    Des lois et des dispositions les guideront dans la prise de décisions pour l'avenir. La Chambre devrait prévoir des dispositions pour que les premières nations ou les nations autochtones participent au processus décisionnel du Parlement. Voilà pourquoi je parle d'une troisième Chambre du Parlement où siégeraient les représentants des véritables premières nations, en l'occurrence les peuples autochtones de ce pays, non les conseils de bande établis en vertu de la Loi sur les Indiens. Je songe notamment aux nations okanagan, cri, mohawk, wyandot et haïda. Aujourd'hui, en 2004, ces nations sont absentes. Elles ne sont ni respectées, ni reconnues comme il se doit.

    Je crois que la Décennie internationale des populations autochtones tire à sa fin. Le Canada a l'occasion de rendre hommage aux autochtones, comme l'a fait ma région en concluant les traités nos 6 et 10. Chaque année, les autochtones célèbrent les traités qu'ils ont conclus lorsqu'on a désigné un jour anniversaire du traité. Les Canadiens devraient célébrer la conclusion du traité dans notre pays, comme ils célèbrent la fête du Canada. Le Canada a vu le jour suite à la conclusion d'un traité de paix et d'amitié.

    Aujourd'hui, la Chambre reçoit un visiteur de marque en la personne du dalaï-lama qui prêche la paix et l'amitié à l'échelle de la planète. J'estime qu'il reconnaît que le Canada a été fondé sur la paix et l'amitié et qu'il s'en réjouit. Je crois qu'il se sent chez lui au Canada, notamment à cause des initiatives de paix et d'amitié qui unissent nos nations. Celles-ci veulent cohabiter sur le territoire. Il ne sert à rien de lutter et de faire de l'opposition. Il faut plutôt en arriver à un consensus et trouver le moyen de vivre les uns avec les autres.

    Je parle toujours d'un fleuve de nations. Nous venons de tous les coins du monde et nous sommes venus grossir les rangs des nations qui existaient à l'origine. Nous devons trouver des façons de vivre ensemble en tant qu'une seule nation, un seul pays. C'est là une occasion où les membres de la première nation de Westbank peuvent obtenir les outils d'autonomie gouvernementale et les moyens nécessaires pour prendre leurs propres décisions sur des questions comme les finances, la culture, l'éducation, le bien-être collectif et l'avenir de leurs enfants et pour trouver une place au sein de la collectivité de Kelowna, au sein de la Colombie-Britannique et de notre pays, le Canada.

    Laissons-les parler pour eux-mêmes. Laissons-les exprimer leur vision du monde, avec les dons qu'ils ont en tant que nation okanagan. Laissons-les s'exprimer dans leur langue, de la façon dont ils ont appris. Il y a de dures réalités à l'intérieur de cette région semi-désertique au sol desséché. Cependant, il y a également la beauté des vergers, le fleuve, et la responsabilité sacrée à l'égard de la vie qui seront toujours là à l'avenir. Tout cela entre en jeu.

    Le moment est venu pour le Canada de discuter de cela, de partager cette vision du monde de notre pays. Je suis heureux d'avoir l'occasion de parler de cela. Je félicite les dirigeants de la première nation de Westbank auxquels on doit ce document. Je suis heureux qu'ils aient choisi ce processus démocratique. Il n'est pas parfait. Il n'y a pas de démocratie parfaite que nous pouvons donner en exemple dans le monde à l'heure actuelle. Nous essayons d'instaurer la démocratie dans d'autres régions du monde, dans les pays déchirés par la guerre. Il se peut que dans le cadre des pratiques d'autonomie gouvernementale des premières nations du pays, les intéressés commencent à mettre en vigueur les modèles originaux de gouvernance.

    Nous vivons à Ottawa et on retrouve au sud de la ville la nation algonquine dont notre Président vient. Les six nations originales de la Confédération iroquoise vivent dans la région des Grands Lacs. Nous devrions laisser les intéressés utiliser les structures originales de gouvernance. Qu'on les célèbre. Laissons ces gens faire leurs erreurs. S'ils en commettent, ils les corrigeront. Cependant, ces modèles de gouvernance pourraient un jour transformer la Chambre en un nouveau modèle de gouvernance.

    Il se peut qu'un jour, l'expérience à Westbank amène l'assemblée législative de la Colombie-Britannique à modifier sa structure de gouvernance à l'intérieur de la province. Il se peut que la structure de gouvernance des intéressés ou leur modèle de gouvernance puisse remplacer le mode d'administration que le maire de Kelowna et son conseil municipal utilisent à l'heure actuelle.

  +-(1555)  

    Ces pouvoirs publics tiennent peut-être l'occasion idéale d'observer un mode de gouvernement local démocratique. Kelowna adoptera peut-être ces modèles de gestion des affaires publiques. Le modèle de gestion du district régional du centre de l'Okanagan est peut-être imparfait. La première nation de Westbank appliquera peut-être un modèle qui se traduira par des améliorations dans nos vies à tous.

    Nous devons tous avoir confiance et croire que ces gens prendront leurs décisions correctement dans l'intérêt de leur peuple, et que ceux qui habitent avec eux auront part aux décisions. Cet accord d'autonomie gouvernementale est certainement un moyen qu'ils souhaitaient, et ils ont travaillé fort pour l'obtenir. Il faut le leur accorder.

    Notre pays est démocratique. Les membres de cette collectivité se sont exprimés démocratiquement. Selon moi, ce qui fait la véritable originalité de notre pays, c'est le partage et les enseignements de la ceinture wampum à deux bandes réunies entre elles, l'une illustrant le navire des premiers peuples, l'autre celui des nouveaux arrivants.

    Ce modèle d'autonomie gouvernementale est leur navire. Nous devons les laisser voguer sur la rivière de la vie, les navires avançant à l'unisson avec les administrations municipales, provinciales et fédérale. Nous finirons peut-être par avoir trois ordres de gouvernement qui correspondront à ce que nous appelons maintenant les trois ordres de gouvernement: fédéral, provincial et municipal. Peut-être y aura-t-il un ordre national, tribal ou un gouvernement local de première nation, un gouvernement au niveau des bandes.

    C'est une occasion pour eux de mettre des choses en pratique, de nous montrer leur façon de faire. Sans exemple, comment juger? Qu'ils nous donnent leur exemple.

    J'invite les députés qui ne seraient pas d'accord ou qui ont des objections contre l'accord d'autonomie gouvernementale à le dire à la Chambre et à laisser les autres Canadiens assimiler un point de vue différent.

    Nous avons ici l'occasion de laisser à une première nation qui a négocié comme il convenait, en suivant les démarches voulues aux termes de la politique officielle d'autonomie gouvernementale, aux termes de l'article 35 de la Constitution qui porte sur le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, la possibilité de se gouverner comme elle le souhaite dans un contexte moderne.

    Pourtant, il ne faut pas juger ces modes de gouvernement comme inférieurs ou supérieurs, mais la mise en commun de ces modèles pourrait transformer notre pays, l'améliorer. Le reste du monde, voyant l'abondance de nos richesses, de nos ressources et de nos eaux, découvrira peut-être un Canada qui a aussi des trésors de savoir et constatera que ce savoir a été porté par les premières nations.

    Ces premières nations ont une grande responsabilité et croient intimement qu'elles peuvent mettre en oeuvre et cultiver ce projet, s'abstenir de le confier à d'autres, et qu'elles peuvent trouver leur voie sous la gouverne d'un agent indien, hors de l'emprise de la Loi sur les Indiens. Elles sont convaincues de pouvoir s'acquitter de cette responsabilité.

    C'est l'essence même de la première nation de Westbank.C'est l'exercice de son droit à l'autonomie gouvernementale. C'est une première nation en quête de respect international à l'intérieur des limites d'un pays dans lequel il peut mettre en oeuvre, dans sa langue et selon sa vision du monde, un système de gouvernance qui pourrait bien un jour influer sur notre façon de gouverner aussi imparfaite soit-elle tant dans cette enceinte que dans les assemblées législatives provinciales.

    Le fait de permettre à ces premières nations de se gouverner elles-mêmes en vertu de ces structures et de ces lois constitue peut-être un moyen pour le Canada de devenir le pays magnifique qu'avaient imaginé les premiers fondateurs, la Couronne et la nation française qui s'y est établie. Le Canada est une rivière de nations et une nation de rivières.

    Nous devons permettre qu'ils puissent saisir l'occasion qui leur est donnée. J'exhorte tous mes collègues à appuyer le projet de loi et à offrir à ces gens une place d'honneur dans ce coin du pays, dans une magnifique région de la Colombie-Britannique. Permettez-leur d'exercer le droit de se gouverner qu'ils ont négocié. Permettez-leur d'apporter les changements qu'ils feront dans l'avenir, permettez-leur de demander des assurances et de la certitude dans l'élaboration des traités pour lesquels ils continuent de se battre et de faire en sorte que ce processus ait bientôt préséance. J'espère qu'il deviendra officiel dans l'ensemble de la Colombie-Britannique.

  +-(1600)  

    Le pays doit garder l'assurance que nous pouvons vivre en harmonie les uns avec les autres et que la bataille entre eux et nous est terminée. Unissons-nous pour former une seule nation.

    Je conclurai en disant que cette fois j'exhorte tous les députés à appuyer le projet de loi. Permettez à la première nation de Westbank de faire ses premiers pas dans la voie de l'autonomie gouvernementale en adoptant ce projet de loi.

+-

    L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je profite de l'occasion pour féliciter les députés autochtones de notre caucus. C'est formidable d'avoir ici trois députés autochtones aux antécédent différents pour apporter un éclairage personnel concernant des aspects auxquels, sans leur présence, nul autre d'entre nous n'aurait pensé, et pour peut-être nous ouvrir les yeux sur certains de ces nouveaux concepts.

    Je voudrais féliciter particulièrement le dernier député ayant pris la parole. Je sais que son séjour à la Chambre tire à sa fin. Il a été un merveilleux atout pour notre parti à l'occasion de bon nombre de rencontres à huis clos que j'ai eues. Il a défendu les initiatives autochtones et s'est battu férocement derrière les portes closes pour faire avancer certaines idées remarquables et créatives.

    J'aimerais avoir son point de vue sur trois sujets de préoccupation qui ont été soulevé ce matin. Étant donné que le compte rendu de nos délibérations est conservé pour la postérité, je suis certain que tout le monde veut s'assurer qu'il est fidèle à la fois par rapport aux préoccupations exprimées, qui étaient justifiées, et aux réponses apportées à ces préoccupations. Je me demande si le député pourrait élaborer sur le concept de troisième ordre de gouvernement.

    Quelqu'un a dit ce matin que cette mesure créerait un troisième ordre de gouvernement, ce qui n'est pas le cas ni techniquement, ni constitutionnellement. Dans la pratique, elle permettra à ces personnes de gérer elles-mêmes le déneigement, la culture, les terres, les services d’eau et d’égouts et autres choses du même genre. J'aimerais qu'il nous dise ce qu'il pense du commentaire ayant été fait plus tôt, avec lequel je ne suis pas d'accord, selon lequel nous ne devions pas créer un troisième ordre de gouvernement.

  +-(1605)  

+-

    M. Rick Laliberte: Monsieur le Président, à ce que je sache, il y a trois ordres de gouvernement au Canada: le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial et les municipalités. Lorsque le processus d'établissement des traités a eu lieu et que la Couronne britannique a négocié ces traités, après avoir déterminé son droit de négocier des traités à la lumière des traités déjà conclus avec la France, ces différends ont été réglés. Cependant, je crois que la Couronne britannique a manqué à son devoir parce qu'elle na pas respecté les nations, les tribus et les communautés, les bandes.

    Mettons les choses en perspective. Les nations autochtones avaient leurs propres ordres de gouvernement, leurs propres confédérations entre les nations. Elles avaient établi des accords sur l'utilisation des terres ainsi que des accords de transport dans les réseaux hydrographiques entre les différentes régions du pays. Ces nations jouaient un rôle actif dans leurs activités et elles avaient des accords. Elles avaient des ceintures wampum. L'histoire orale, une longue histoire, permet de documenter ces faits.

    En ce qui concerne le troisième ordre de gouvernement, qui est au coeur du débat, nous avons déjà un troisième ordre de gouvernement, et ce sont les municipalités. Le gouvernement fédéral transfert des pouvoirs aux provinces qui, à leur tour, en transfèrent d'autres aux municipalités. Quant aux conseils de bande, en vertu de la Loi sur les Indiens, des pouvoirs leur ont été transférés directement par le gouvernement fédéral.

    Il y a 630 bandes indiennes au Canada. Qu'en est-il de leurs tribus et de leurs nations? Voilà la question que je soumets à la Chambre. Qu'en est-il des tribus et des nations comme organes de gouvernement? Pourquoi ne sont-elles pas reconnues dans le Canada d'aujourd'hui?

    La nation okanagane est une nation à part entière. La première nation de Westbank fait partie de la nation okanagane, mais le Canada ne reconnaît pas cette dernière. Ces nations ont leurs propres pratiques. Si chaque nation est libre d'agir selon ses pratiques, il s'opérera une plus grande magie dans notre pays. Il y aura plus de responsabilité parce que les nations elle-mêmes--et non celles qu'on appelle premières nations--puiseront dans leur sagesse, leurs coutumes ancestrales pour gouverner.

    Les Okanagans ont leur propre langue, leurs propres droits et biens inhérents. Ils ont leurs propres remèdes, leur propre connaissance de la terre et des animaux de leur région. Il y a une connaissance ancestrale qui est propre à chaque nation et qui s'exprime par sa langue.

    Les Dénés ne peuvent pas mettre en pratique les connaissances des Okanagans. Les Okanagans ne peuvent mettre en pratique les connaissances des Mohawks. Les Mohawks ne peuvent mettre en pratique les connaissances des Cris. Nous devrions permettre à toutes ces nations de venir célébrer leurs connaissances. Nous devrions leur permettre de s'exprimer comme elles le veulent. Le Canada serait un meilleur pays s'il faisait preuve de plus d'ouverture, de générosité, s'il partageait ces valeurs et ces principes canadiens. Pourquoi ne partageons-nous pas cette ouverture? Pourquoi sommes-nous si timides? Pourquoi avons-nous peur d'ouvrir nos bras et de nous unir pour former une seule nation?

    C'est pourquoi je vois notre pays comme une rivière de nations. Où que nous vivions, nous devrions être fiers de nos ancêtres. La force de nos ancêtres rendra notre pays fort. Nous devons être une nation. Nous devons couler comme une seule rivière.

  +-(1610)  

+-

    L'hon. Ethel Blondin-Andrew (ministre d'État (Enfance et Jeunesse), Lib.): Monsieur le Président, j'ai le grand honneur aujourd'hui d'avoir l'occasion de parler du projet de loi C-11, Loi sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank.

    D'abord, j'offre mes félicitations aux gens de la première nation de Westbank qui ont travaillé pendant de nombreuses années pour parvenir à cet accord pratique et efficace.

    De façon générale et comme on l'énonce sincèrement dans le discours du Trône, l'objectif du gouvernement vise à combler l'écart socio-économique qui existe entre les peuples autochtones et les autres Canadiens.

    Cette semaine a été exceptionnelle pour les peuples autochtones. D'abord, tous les dirigeants ou des représentants des peuples autochtones se sont réunis autour d'une table ronde pour traiter des questions d'éducation, de santé, de développement social et de direction politique et pour faire avancer le programme des questions autochtones en général. Des femmes ont participé également à cette rencontre, ainsi que des représentants de tous les groupes, comme je l'ai mentionné.

    Nous avons aussi présenté le projet de loi C-31, soit l'accord des Tlichos, qui est un accord pour les 3 000 Dogribs des Territoires du Nord-Ouest qui obtiennent ainsi satisfaction à leur revendication. Cet accord intègre l'autonomie gouvernementale à la question de la revendication. Il s'agit là d'une première, sans compter ses nombreuses autres caractéristiques. Nous avions présenté auparavant la Loi sur l'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank, qui est, je crois, très exhaustive et complète très bien nos objectifs de travail avec les peuples autochtones.

    C'est la direction que nous voulons prendre. Nous ne nous inspirons pas des mots d'autres personnes, qui ont leurs propres opinions académiques et leurs propres préjugés. C'est une politique gouvernementale que nous examinons actuellement. Ceci est délibéré et intentionnel. C'est quelque chose que nous voulons faire et que nous avons, avec la population autochtone, l'intention de mettre en oeuvre.

    En tant que pays, nous voyons trop souvent ce que le discours du Trône appelait les conditions «honteuses» que doivent supporter un trop grand nombre d'autochtones de ce pays. Il ne s'agit pas d'une situation lointaine ou étrangère à notre expérience de Canadiens. Il s'agit de l'essence même de la famille du Canada. Lorsque je dis que la situation à laquelle fait face la population autochtone n'est pas lointaine ou étrangère, je veux dire que c'est une situation qui nous touche tous, autant que nous sommes. C'est une réalité partagée.

    Nous réagirons en changeant les perceptions et les méthodes d'approche.

    Ce sera bientôt ma 17e année en tant que député et j'ai toujours fait partie d'un comité, au Cabinet ou comme simple député, sur la Constitution ou sur tous les fronts où il était possible de faire avancer le dossier autochtone. J'en suis très fier. C'est ce que j'avais l'intention de faire et je l'ai fait avec beaucoup de mes collègues de tous les côtés de la Chambre au cours des années.

    Je sais que nous devons collaborer avec les premières nations et les Inuits et oeuvrer ensemble, en partenariat, à la réalisation d'objectifs communs. Nous devons aussi cesser de penser que les solutions aux problèmes se trouvent uniquement à Ottawa ou dans les capitales provinciales ou territoriales. Ce n'est pas le cas. Nous devons travailler ensemble. Les gouvernements, les parlementaires, les autochtones et les autres doivent faire front commun et chercher ensemble des moyens de remédier à des conditions que nous reconnaissons être inacceptables. Ce débat sur le projet de loi nous permet d'échanger à la Chambre nos points de vue respectifs sur la question. Nous ne sommes pas nécessairement tous du même avis quant à la politique à suivre, mais nous avons tous une opinion à cet égard.

    Je suis convaincue que l'adoption de l'accord sur l'autonomie gouvernementale sera bénéfique non seulement pour les premières nations mais pour l'ensemble de la population canadienne. Des premières nations fortes et autonomes ont beaucoup à apporter au Canada, notamment par leur contribution économique, sociale et culturelle.

    Lorsqu'une collectivité conclut un accord d'autonomie gouvernementale ou règle une revendication, de nombreuses personnes en bénéficient. Beaucoup, parmi elles, ne sont pas membres de ces groupes ou de ces nations, mais le règlement de revendications et les accords conclus par les peuples autochtones engendrent une prospérité partagée.

  +-(1615)  

    Cet accord donne aux dirigeants de Westbank les outils dont ils ont besoin pour développer leur communauté. Il permettra à la première nation de Westbank de créer des structures gouvernementales à la fois efficaces et représentatives.

    Cet accord stimulera la croissance économique en aidant les entrepreneurs locaux à continuer d'attirer des investisseurs et de s'associer à des entreprises.

    Un examen attentif de l'accord d'autonomie gouvernementale révèle à quel point il favorisera la responsabilité et l'autonomie de la première nation de Westbank. Selon les termes de cet accord, des décisions capitales seront prises par ceux-là mêmes qui connaissent le mieux les questions d'intérêt local et que ces questions touchent de plus près. Je suis convaincue qu'il en résultera d'autres améliorations au chapitre du logement. Il y a un grave manque de logements, comme l'ont successivement souligné les dirigeants autochtones, lundi. C'est un problème majeur.

    Quelle est la meilleure solution? C'est, de toute évidence, le partenariat et la collaboration. La participation des autochtones à la conception et à la mise en oeuvre de toute politique ou de tout projet important est la seule façon de résoudre ce problème. Je suis convaincue que cela contribuera à améliorer la situation de l'emploi et la qualité de vie en général des autochtones.

    La première nation de Westbank croit qu'elle sera mieux en mesure de réaliser ces améliorations si elle est dirigée par un gouvernement représentatif et efficace, capable de légiférer et d'exercer de nouvelles responsabilités.

    Il y a ceux qui s'inquiètent de la façon dont la Première nation de Westbank sera représentée. Prenons la partie qui traite des questions liées au genre dans l'accord d'autonomie gouvernementale. L'équipe de négociation de l'accord d'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank a reçu des directives d'un comité composé de membres et d'aînés, entre autres, de la première nation de Westbank, des femmes dans une proportion de 70 p. 100. Le comité, autonome par rapport au chef et au conseil, a aussi participé directement à l'élaboration de la constitution de la première nation de Westbank.

    La première nation de Westbank est au fait des questions liées au genre et à l'importance d'aborder ces questions au cours du processus de négociation. La première nation de Westbank a suscité la représentation des femmes aux étapes cruciales du processus de prise de décision. La contribution des femmes tant dans le cadre des négociations que dans celui de l'élaboration de la constitution de la première nation de Westbank a été suffisante pour assurer que les questions liées au genre ont été considérées.

    L'ensemble des membres de la première nation de Westbank, y compris les membres hors réserve, ont aussi eu l'occasion de soulever des questions liées au genre tout au long du processus de négociation. Cela s'explique peut-être en partie par l'expérience qu'ils ont pu vivre dans le passé.

    Les séances d'information publiques, les assemblées publiques locales et les envois postaux aux foyers et aux entreprises ont été les éléments d'une vaste campagne d'information. Je crois que cela est très important. Dans le passé, la première nation de Westbank a été un point de mire pour des questions liées au genre. En 1986, la Cour suprême a rendu une décision dans une affaire liée au genre. Je crois que la direction a privilégié la vision des gens et qu'elle s'est montrée visionnaire en acceptant et en élaborant un processus prenant ces questions en compte. Plus que tout, je suis convaincue que cet accord d'autonomie gouvernementale servira de modèle pour des questions délicates comme celle-là.

    La première nation de Westbank espère qu'elle sera mieux en mesure de réaliser ces améliorations si elle est dirigée par un gouvernement représentatif et efficace, capable de légiférer et d'exercer de nouvelles responsabilités.

    Des dispositions à l'égard des municipalités ont été prises, un peu comme celles que nous avons prises ici, mais d'aucuns diront que la première nation de Westbank obtient un traitement préférentiel. Ce n'est pas le cas. Il ne faut pas confondre le traitement identique et l'égalité. Le traitement identique n'est pas l'égalité. Il y a lieu parfois de prendre des mesures supplémentaires pour assurer l'égalité car les gens ne sont pas tous au même niveau.

    Le projet de loi dont nous sommes saisis contribuerait précisément à établir ce type de gouvernement par la mise en vigueur de l’accord. La première nation de Westbank deviendrait autonome; elle exercerait ses compétences et ses responsabilités.

    Nos politiques nous sont propres; elles sont conçues pour donner le pouvoir au peuple, et non pour le leur enlever. Elles visent à leur donner les pouvoirs nécessaires pour assurer leur indépendance économique, sociale, culturelle et politique. C'est ce que vise chaque communauté du Canada.

  +-(1620)  

    Prenons l'association des municipalités. L'objectif des municipalités est d'obtenir des pouvoirs accrus, de les appliquer localement et de les adapter à leurs besoins. Pourquoi la situation serait-elle différente pour la première nation de Westbank? Celle-ci devrait avoir les mêmes possibilités de devenir autonome, d'être financièrement indépendante et d'assumer ses responsabilités politiques.

    En résumé, Westbank établira et administrera son propre gouvernement démocratique à l'intérieur du cadre constitutionnel du Canada. Tous les Canadiens devraient entendre ces mots: «à l'intérieur du cadre constitutionnel du Canada». Le gouvernement respectera les lois canadiennes et reconnaîtra que tous les membres de cette première nation, comme l'ensemble de la population, sont assujettis au Code criminel et à la Charte canadienne des droits et libertés.

    Pour favoriser la création de liens plus étroits avec les non-membres qui habitent sur les terres de Westbank, la première nation de Westbank établira un mécanisme permettant de veiller à ce que les résidants non membres aient leur mot à dire dans les lois qui les touchent directement. Il s'agit là d'une importante amélioration par rapport à la Loi sur les Indiens. La situation n'est pas différente par rapport à la façon dont les autochtones ont toujours accueilli les étrangers sur leurs terres, par exemple quand ils ont invité les premiers Européens à se joindre à eux. C'est exactement pareil. Cela s'inscrit dans la même tradition.

    En vertu de cet accord sur l'autonomie gouvernementale, la première nation détiendra un éventail de pouvoirs. Le jour viendra où elle adoptera des lois dans des domaines comme la gestion des terres et des ressources ou la langue et la culture autochtones. C'est tellement important: nous sommes notre culture et nous sommes notre langue. Je parle ma propre langue. Je ne suis pas de Westbank, mais j'admire ces gens. En fait, j'ai failli avoir un accident mortel en me rendant ici. J'étais dans mon bureau et le temps était presque écoulé et je me suis dit que je ne perdrais pas une autre occasion de prendre la parole au sujet d'un projet de loi qui touche les populations autochtones. Cela montre vraiment que je ferais pratiquement n'importe quoi pour les gens de Westbank. Je me suis rendue ici, mais je suis un peu essoufflée.

    Je veux que les gens soient au courant de ces priorités. Avoir compétence sur des terres et des ressources, et avoir la responsabilité de les gérer, c'est énorme. C'est habilitant et c'est ainsi que cela doit être. Si nous ne privons pas les gens de leur langue et de leur culture, mais, au contraire, bonifions et préservons cette langue et cette culture, c'est encore mieux. C'est particulièrement bon pour les enfants, pour les aînés et, bien sûr, pour tout le monde aussi, mais je vois les choses ainsi parce que j'étais enseignante dans une vie antérieure.

    C'est dans ces domaines que se trouve une des caractéristiques clés de l'accord. Avec ces nouveaux pouvoirs, Westbank prend le contrôle de ses ressources. Les pouvoirs accordés à la première nation en vertu de l'accord comprennent le droit d'accorder des intérêts et des permis sur ses terres. C'est bien. Mes grands-parents et moi, nous vivions sur une parcelle de terre qui est devenue Norman Wells. Imperial Oil y a eu des ressources pendant plus de 75 ans. Ma famille n'en a jamais bénéficié. Ma famille a perdu sa propriété aux mains de ces entreprises. Nous habitons toujours à proximité, mais nos familles ont été déplacées. On ne nous a jamais indemnisés, et ça va, mais il ne devrait pas en être ainsi. Cela ne se passe pas comme cela dans le cas des agriculteurs et si ça arrive, cela ne devrait pas arriver. Cela ne devrait arriver à personne.

    En vertu de l'accord, la communauté obtient la liberté de former des partenariats et de mener ses affaires en fonction de ses propres besoins, tout en respectant les intérêts qui existent déjà. La première nation de Westbank a déjà démontré qu'elle sait comment gérer ses affaires de manière responsable et rentable. Après tout, elle est une des communautés autochtones les plus prospères et les plus fructueuses du Canada et une des plus magnifiques, je dois dire.

    Les terres de Westbank sont situées dans un cadre d'une beauté naturelle magnifique sur les rives du lac Okanagan, tout près de la ville de Kelowna. L'emplacement est idéal pour profiter de la prospérité économique de la région, des avantages dont la première nation de Westbank a su tirer pleinement profit. Les industries du tourisme et de l'écotourisme devraient prendre de l'expansion dans cet endroit de rêve.

    La première nation et ses membres ont ouvert des terres pour le développement, et la première nation assume maintenant des fonctions de gestionnaire foncier. On trouve aujourd'hui dans la zone commerciale de Westbank des centres commerciaux qui génèrent des revenus de location considérables et créent des emplois pour les membres de la bande.

  +-(1625)  

    La première nation de Westbank s'est taillé une réputation de gestionnaire foncier équitable, de partenaire digne de confiance et de voisin fiable. Les gens n'ont rien à craindre en ce qui concerne cet accord. Nous ne devrions pas être alarmistes. Nous ne devrions pas semer la panique, quand il n'y en a pas. Lorsqu'il y a une volonté d'accepter l'autre, il y a une volonté de créer de bons liens et de bons partenariats. Les gens ne devraient pas s'employer à rendre la situation négative et craindre cet accord.

    Ce qui est le plus frappant peut-être dans la réussite de la première nation de Westbank, c'est que la majeure partie de ce qu'elle a accompli a été réalisé dans les limites de la Loi sur les Indiens. La première nation souhaite maintenant établir de nouvelles relations avec la population canadienne, des relations plus équitables qui lui permettront de s'épanouir pleinement.

    Il est clair que les membres de la première nation de Westbank sont prêts à s'acquitter de leurs obligations. Ils travaillent à l'élaboration de cet accord depuis plus de dix ans. Ils ont tenu plus de 400 séances d'information et de consultation. Ils ont obtenu le soutien des administrations municipales et régionales, de la Chambre de commerce, des syndicats et d'une vaste gamme de groupes d'intérêts dont les préoccupations et les objectifs sont étroitement liés à ceux de la première nation.

    Westbank a également rédigé et approuvé une constitution qui établit une structure de gouvernement, assigne des fonctions et précise l'appartenance à la bande. Je suis convaincue que le processus de consultation de la communauté qui a mené à la constitution de Westbank conduira à une autonomie gouvernementale plus forte et efficace. Après tout, les dirigeants communautaires ont participé à chaque étape de l'élaboration de la constitution, et ils contribueront au développement de ses institutions.

    La constitution et l'accord d'autonomie gouvernementale établiront également un point de référence de valeur pour les négociations de traités entre les gouvernements de Westbank, du Canada et de la Colombie-Britannique. Bien sûr, nous savons tous que la Colombie-Britannique a un des ensembles de dispositions, ou parfois une absence de dispositions, les plus complexes, ce qui aggrave la situation.

    L'adoption de l'accord d'autonomie gouvernementale de Westbank aura certainement un effet positif à l'extérieur de la province. Bien qu'il s'agisse du troisième accord d'autonomie gouvernementale en Colombie-Britannique, et du 17e au Canada, il s'agit du premier accord ne concernant que l'autonomie gouvernementale conformément à la politique canadienne sur le droit inhérent. C'est une étape importante. L'accord démontre que le gouvernement du Canada peut collaborer avec les premières nations pour conclure des ententes adaptées aux besoins spécifiques d'une communauté.

    Je voudrais dire que je ferai tout en mon pouvoir pour m'assurer que le travail ardu de toute une décennie ne soit pas vain, car nous sommes investis des aspirations de ce peuple. Nous sommes investis de leurs objectifs et de leurs rêves. Il ne veulent oeuvrer contre le Canada, ils veulent en faire partie et collaborer avec lui.

    Aujourd'hui, je demande l'appui des députés pour que nous offrions à la première nation de Westbank les moyens lui permettant de bâtir la collectivité qu'elle envisage. De toute évidence, les progrès qu'elle a déjà accomplis au chapitre de la gouvernance conduisent la collectivité sur la voie de l'autonomie et de la prospérité.

    Je dois me reporter aux documents. Cet accord renferme des articles sur presque tous les sujets. Un article traite de la protection d'autres autochtones et non-autochtones d'Okanagan. C'est un document très conciliant. Il parle du gouvernement de Westbank, de l'application des lois, de l'agriculture, de l'accord d'autonomie gouvernementale dans le contexte juridique canadien, de l'égalité des sexes. Il parle également des relations entre gouvernements. Il parle de culture et de langue, de l'éducation, de l'environnement, des services de santé, des terres et de la gestion des terres, de l'octroi de licences et de permis et de la réglementation d'entreprises commerciales. Il parle de la composition des membres de la première nation de Westbank. Il parle d'ordre, de paix et de sécurité publics, d'interdiction visant les substances intoxicantes, de travaux publics, d'infrastructure communautaire et de gestion des ressources locales, du trafic et du transport, des testaments et des biens, de l'application de la loi de la première nation de Westbank, des mesures financières, de la gestion financière et de la mise en oeuvre de l'accord d'autonomie gouvernementale de la première nation de Westbank.

    Ce processus n'aura pas lieu de façon ponctuelle. Il est systématique, planifié, délibéré. Ce document est remarquable. Ces autochtones visent à faire valoir leurs droits: être égaux aux autres Canadiens et pouvoir accéder à l'autonomie et à la prospérité. Nous devrions tous appuyer ce document.

  +-(1630)  

[Français]

+-

    Le vice-président: Conformément à l'article 38 du Règlement, il est de mon devoir de faire connaître à la Chambre la question qu'elle abordera au moment de l'ajournement ce soir, à savoir: l'honorable député de Sherbrooke, L'environnement.

[Traduction]

    

+-

    M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, PCC): Monsieur le Président, j'ai remarqué avec quelque intérêt que la députée demandait l'appui de la Chambre. Je pense qu'elle doit savoir que le vote d'hier soir indique l'existence d'un appui généralisé pour le projet de loi.

    Par conséquent, pourrait-elle m'aider à comprendre quel genre de stratégie son gouvernement poursuit actuellement en ce qui concerne ce débat? Je ne sais pas si j'ai raison ou non, mais je devrais mentionner que je crois qu'il y a même ici des gens qui nous regardent et qui aimeraient bien que le projet de loi aille de l'avant.

    Ce qui me laisse perplexe est que, en dépit de l'appui généralisé de la Chambre pour ce projet de loi, et du fait qu'il ne rencontre qu'une opposition très limitée et que toutes ces questions ont été débattues en long et en large, le gouvernement continue à faire échec à son propre projet de loi. Cela nous laisse perplexes. Pour ma part, je suis de l'avis de la députée, à savoir que vous devrions poursuivre les travaux de la Chambre.

    Cela aurait-il quelque chose à voir avec le fait que le premier ministre et son gouvernement ne sont pas prêts à gouverner pour le moment? Par exemple, voyons les autres projets de loi qui suivraient immédiatement celui-ci si le débat devait s'arrêter faute de combattants. Le projet de loi C-10, sur la marijuana, en est à l'étape de la troisième lecture, ce qui veut dire que l'on en débattrait encore une fois et qu'on l'adopterait. Le projet de loi C-11, sur la première nation de Westbank, pourrait être adopté immédiatement. Le projet de loi C-12, sur la protection des enfants, en est lui aussi à l'étape de la troisième lecture et pourrait également être expédié assez rapidement. Le projet de loi C-15 concerne le transfèrement des contrevenants.

    La Chambre essaie de faire avancer ces projets de loi. Dans des conditions normales, l'opposition essaierait de ralentir les choses, ou de présenter un point de vue particulier, ce qui est tout à fait normal et conforme au processus parlementaire.

    Est-ce parce qu'il n'y a rien d'inscrit au programme législatif des libéraux du fait que le premier ministre n'a aucune idée de la direction dans laquelle il veut emmener le Canada que la députée, chose étonnante, fait de l'obstruction systématique contre ce projet de loi très important dont les habitants de Westbank veulent l'adoption?

+-

    L'hon. Ethel Blondin-Andrew: Monsieur le Président, je ressens encore la morsure des propos que j'ai entendus ici l'autre jour de la part desdits députés, dont certains sont absents. J'ai écouté chaque mot de leur diatribe contre l'intention générale du projet de loi. Un député, qui s'est levé à la Chambre, a aussi pris la parole au sujet de ce projet de loi.

    En tant que membre d'une première nation, j'ai écouté leurs foutaises sur ce document bien intentionné. Ils ont invoqué la charte contre les autochtones. Ils ont voulu utiliser la charte. Il est évident que la plupart d'entre eux n'ont pas lu le document. Je l'ai lu. Je l'ai étudié. S'ils en avaient fait autant, ils n'auraient pas tenu ces commentaires l'autre jour. Leurs propos étaient une insulte à tous les députés.

    M. Myron Thompson: Pourquoi en retarde-t-on l'adoption? Allons de l'avant.

    L'hon. Ethel Blondin-Andrew: Le député du NPD et moi-même avons tous deux parlé de représentation.

    Le gouvernement ne manque pas de travail. Nous sommes également saisis du projet de loi C-31, qui concerne l'accord sur l'autonomie gouvernementale des Tlichos. J'ai rencontré les députés d'en face il y a déjà plusieurs semaines pour obtenir leur consentement unanime à l'adoption de ce projet de loi. Ils me l'ont refusé.

    Je ne veux pas entendre de tels propos de la part de ces députés. Ils sont fallacieux. Ils sont faux. Ces députés jouent à des petits jeux, et ils le savent bien. J'ai parlé à une députée, et elle m'a dit qu'ils n'accorderaient pas leur appui. Elle m'a répondu: «C'est la politique.» Ce sont ses propres mots.

    Je les ai suppliés, et les représentants du peuple tlicho, présents à la tribune, m'ont regardée négocier avec ces députés. Ils ont refusé, ils ont refusé de donner leur accord. Qu'ils ne viennent pas me parler d'obstruction systématique, car je sais de quoi il s'agit. J'ai agi avec sérieux. Je ne le dirais pas si je n'avais pas essayé.

    Pour ce qui est du travail accompli par le premier ministre, il a réussi à éliminer le déficit. Nous avons aussi réduit la dette. Nous avons également mis en oeuvre beaucoup plus de projets de loi que ce qui a été fait dans le passé.

    Après avoir écouté tous les discours livrés ici l'autre jour sur l'accord de Westbank, je ne puis croire que les députés de l'opposition tiennent un pareil langage.

    Le chef Robert Louie, présent à la tribune, a entendu leurs foutaises. Heureusement, la vision qui anime ces dirigeants les aide à supporter ce genre de chose. Ce n'est pas...

  +-(1635)  

+-

    M. Charlie Penson: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il me semble que nos débats doivent conserver une certaine civilité et que ce n'est pas le cas quand on qualifie d'inepties ce que disent des députés. Cela contrevient au Règlement. La députée devrait, à mon avis, s'abstenir de faire ce genre de commentaires.

+-

    Le vice-président: Avec tout mon respect, il s'agit plutôt d'une question de débat. C'est, bien sûr, toujours apprécié par la Chambre que des députés veuillent rappeler à des collègues d'observer une certaine étiquette parlementaire. Si la ministre d'État n'a pas terminé, je lui donne la parole.

+-

    L'hon. Ethel Blondin-Andrew: Monsieur le Président, je me sens un peu émue, mais j'éprouve un grand enthousiame pour mon peuple. Je crois qu'il a un rôle à jouer au Canada que le député ne reconnaît pas. Il ne reconnaît pas non plus que ces gens devraient jouir de l'autonomie gouvernementale.

    Une voix: Moi, oui.

    L'hon. Ethel Blondin-Andrew: Alors, levez-vous et dites-le. Le député devrait se lever et déclarer qu'il croit dans ce que le peuple de Westbank a mis de l'avant au lieu de prendre ombrage des moindres détails tatillons comme il l'a fait l'autre jour.

    J'étais ici et j'ai écouté son discours l'autre jour. Monsieur le Président, je m'excuse, ce n'était pas des inepties, mais plutôt des ordures politiques.

+-

    L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, non seulement ils ont été tatillons l'autre jour, et j'ai été gentil avec eux, jusqu'à ce moment. J'ai été aimable avec eux. Je les ai félicités pour le bon geste d'hier soir posé par la plupart des membres de leur parti. Les députés présents aujourd'hui ont soumis leurs idées de façon respectueuse et voilà qu'arrive ce moment.

    Comme vient de le dire la députée, avant Pâques, les députés se sont succédé sans aborder ces points. Ils ne faisaient que retarder le projet de loi. Nous aurions dû l'adopter avant Pâques. Le Sénat pourrait l'étudier à l'heure actuelle.

    Nous ne voulons pas entendre d'excuses de la sorte, que nous retardons le projet de loi. Deux autochtones viennent de prendre la parole. Ces députés insinuent que les députés autochtones ne devraient pas intervenir sur un projet de loi qui les concerne et je trouve cela terrible.

    La députée a exprimé des inquiétudes. Comme je l'ai dit plus tôt, voilà la situation du projet de loi. Je veux que ce soit précisé avant de poser ma question à la députée, de sorte que le compte rendu indique que toutes les inquiétudes au sujet du projet de loi ont été dissipées.

    À propos de l'argument selon lequel l'article 25 donnerait un droit inamovible, la position du gouvernement, encore une fois, consiste à dire que cette mesure législative ne confère aucun droit particulier aux autochtones. L'argument n'est donc pas valable. D'ailleurs, même s'il vaut pour ce projet de loi--ce point est un peu ésotérique--il faudrait qu'il satisfasse à un critère technique très précis devant les tribunaux et il ne réussirait pas. Ce n'est donc pas un sujet d'inquiétude.

    La seule autre inquiétude qui reste est la suivante: pourquoi nous ne voulons pas de la Loi sur les textes réglementaires et de ce type de protection. Cette loi exige que le sous-ministre de la justice et le président du Conseil privé examinent de nouveau le projet de loi. C'est exactement l'équivalent du ministre des Affaires indiennes. L'attitude adoptée est encore une fois paternaliste. En procédant ainsi, on n'accorde pas la pleine autonomie gouvernementale. Pour faire contrepoids à cette autonomie, le projet de loi prévoit un registre public qui jouera le même rôle.

    Comme les députés le savent, j'ai été personnellement très déçu hier soir qu'un parti ait voté contre un projet de loi similaire, le projet de loi concernant le peuple tlicho. Je ne nommerai pas ce parti, parce que nous devons être constructifs ici. Mais le projet de loi Tlicho a reçu un vote négatif.

    La députée fait beaucoup pour les droits des autochtones. J'aimerais qu'elle explique les avantages de l'autonomie gouvernementale sous les régimes Westbank et Tlicho, et ce que cette autonomie apportera.

    Lorsque nous aurons reçu les réponses voulues à ces inquiétudes et que nous connaîtrons le point de vue des premières nations, nous adopterons le projet de loi.

  +-(1640)  

+-

    L'hon. Ethel Blondin-Andrew: Monsieur le Président, je souligne combien le projet de loi répond aux voeux exprimés par les intéressés et ceux-ci ont affirmé qu'ils sont en accord avec ses objectifs. Si tel est le cas, j'estime que les régimes d'autonomie gouvernementale prônés par le projet de loi sur le peuple tlicho et le présent projet de loi sont le fait de visionnaires. Ils sont futuristes et sont très en avance.

    Le projet de loi répond aux souhaits constamment exprimés par les députés. Ceux-ci veulent que les peuples autochtones rendent des comptes, soient responsables, prennent leur vie en main au points de vue économique, social et politique. Ils demandent pourquoi les autochtones ne se comportent pas ainsi. Ce projet de loi le leur permettra. Ce document les amènera à se prendre en mains. C'est un instrument qui mènera à ce résultat. Le projet de loi C-31 sur le peuple tlicho permettra également d'atteindre cet objectif. Il leur donnera l'occasion de montrer aux députés et au reste du monde qu'ils peuvent se gouverner eux-mêmes.

+-

    Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

    Des voix: Le vote!

    Le vice-président: Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

    Des voix: D'accord.

    Des voix: Non.

    Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur du sous-amendement veuillent bien dire oui.

    Des voix: Oui.

    Le vice-président: Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

    Des voix: Non.

    Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent.

    Et plus de cinq députés s'étant levés:

    Le vice-président: Convoquez les députés.

*   *   *

    Après l'appel du timbre:

+-

    Le vice-président: En conséquence, le vote sur le projet de loi C-11 est reporté après l'étude des initiatives ministérielles, lundi prochain.

[Français]

+-

    L'hon. Mauril Bélanger: Monsieur le Président, si vous le demandiez, vous trouveriez qu'il y a consentement pour que le vote que l'on vient de différer à la fin des ordres émanant du gouvernement lundi soit différé après la période des questions orales mardi prochain.

[Traduction]

+-

    Le vice-président: D'accord?

    Des voix: D'accord.

*   *   *

+-Le Code criminel

    La Chambre reprend l'étude, interrompue le 21 avril, de la motion: Que le projet de loi C-12, Loi modifiant le Code criminel (protection des enfants et d'autres personnes vulnérables) et la Loi sur la preuve au Canada, soit lu pour la troisième fois et adopté, ainsi que de l'amendement et du sous-amendement.

+-

    L'hon. Gar Knutson (ministre d'État (Marchés nouveaux et émergeants), Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer aujourd'hui au débat sur le projet de loi C-12, Loi modifiant le Code criminel (protection des enfants et d'autres personnes vulnérables) et la Loi sur la preuve au Canada.

    Comme les députés le savent, le projet de loi C-12 propose un certain nombre de modifications au droit pénal afin de mieux protéger les enfants contre l'exploitation sexuelle, les mauvais traitements et la négligence, de faciliter le témoignage des victimes, qu'il s'agisse d'enfants ou d'autres personnes vulnérables, et des autres témoins lors de procédures criminelles, et de créer une nouvelle infraction de voyeurisme.

    Je crois que tout le projet de loi C-12 est important et je l'appuie intégralement, mais je limiterai mes observations aux préoccupations exprimées relativement à l'âge du consentement à des activités sexuelles.

    L'objectif du projet de loi C-12 à cet égard est clairement énoncé dans le premier paragraphe du préambule, qui est ainsi libellé:

    Attendu que la vulnérabilité des enfants à toute forme d'exploitation--notamment la pornographie juvénile, l'exploitation sexuelle, la négligence et l'abus--préoccupe le Parlement du Canada au plus haut point;...

    La réponse du projet de loi C-12 aux préoccupations relatives à l'âge requis pour consentir à des activités sexuelles est axée sur la question de savoir si le fautif a agi de manière à exploiter le jeune et non si ce dernier, la victime, a consenti. À mon avis, c'est une bonne réponse qui met l'accent là où il le faut.

    En particulier, le projet de loi C-12 propose de créer une nouvelle catégorie d'exploitation sexuelle interdite concernant les jeunes qui ont l'âge du consentement, c'est-à-dire entre 14 et 18 ans.

    Aux termes de la réforme proposée, les tribunaux seraient obligés de déterminer si la relation en question était une forme d'exploitation, en étudiant la nature et les circonstances de cette dernière, notamment l'âge de la jeune personne visée, la différence d'âge et le degré de contrôle ou d'influence exercé sur cette jeune personne.

    Je sais que l'on continue de réclamer que l'âge requis pour consentir à des activités sexuelles soit haussé. Pourquoi? Si je comprends bien, cela serait motivé par un certain nombre de raisons. Ainsi, si l'on veut hausser l'âge du consentement de 16 à 18 ans c'est pour empêcher certains individus d'obliger des jeunes à se prostituer.

    Je signale à cet égard que, conformément au Code criminel, quiconque oblige une personne de moins de 18 ans à se prostituer commet déjà un délit punissable d'une peine minimale obligatoire de cinq ans d'emprisonnement. Je crois également que le Code criminel prévoit qu'il est interdit de forcer qui que ce soit à se prostituer.

    Une autre raison semble être liée à ce qu'on entend par activité sexuelle. Les interdictions canadiennes contre les activités sexuelles ne font pas la différence entre un baiser et des rapports sexuels.

    Je ne crois pas que les Canadiens trouvent qu'une fille de 14 ou 15 ans n'est pas suffisamment mûre pour prendre librement la décision d'embrasser ou non son copain de 17 ans. Je ne pense pas non plus que les Canadiens veulent faire un criminel d'un jeune de 17 ans qui embrasse sa copine de 14 ans. Que ça nous plaise ou non à nous les adultes, la réalité est que les adolescents se livrent à des activités sexuelles et que la loi pénale ne devrait pas servir à régir ce genre d'activités.

    L'une des raisons qui est souvent citée est que les jeunes de 14 ou 15 ans sont trop jeunes et trop immatures pour comprendre pleinement les conséquences de leur décision de se livrer à des activités sexuelles. Bien qu'il soit vrai que, à 14 ou 15 ans, on ne possède généralement pas la maturité d'une personne de 18 ans, en tant que société, nous trouvons que ces jeunes sont suffisamment mûrs pour être traités comme des adultes aux termes de la Loi sur la justice pénale pour les jeunes en ce qui concerne les infractions violentes graves.

    Quelle que soit la raison qui nous pousse à préconiser que l'on hausse l'âge du consentement, l'idée générale semble être d'empêcher l'exploitation sexuelle des jeunes, ce qui est fort louable. À cet égard, je crois que c'est exactement ce que fait le projet de loi C-12.

    Contrairement aux propositions visant à hausser l'âge du consentement à 16 ans, le projet de loi C-12 étendra la protection non seulement aux jeunes de 14 et de 15 ans, mais aussi à ceux de 16 et de 17 ans. Il protégerait les jeunes contre l'exploitation en général.

  +-(1645)  

    Le projet de loi C-12 apporterait de nombreuses modifications fort attendues au Code criminel afin de protéger les membres les plus vulnérables de notre société. J'espère que tous les députés appuieront le projet de loi C-12 visant à mieux protéger les enfants du Canada contre toute forme d'exploitation.

+-

    M. Myron Thompson (Wild Rose, PCC): Monsieur le Président, j'ai écouté le député énumérer les raisons pour lesquelles les gens pensent que l'âge du consentement devrait passer de 14 à 16 ans.

    Toutefois, le député n'a pas signalé que toute l'information que nous avons recueillie au cours des dernières années montre de toute évidence qu'une vaste majorité de Canadiens réclame qu'il en soit ainsi. Que je sache, nous sommes les serviteurs de la population dans cet endroit.

    En tant que serviteurs de la population, pourquoi ne réalisons-nous pas le désir de la vaste majorité et ne relevons-nous pas l'âge du consentement?

+-

    L'hon. Gar Knutson: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. Je crois que des gens raisonnables peuvent avoir divers points de vue à ce sujet. Nous abordons la question de l'âge de consentement selon des perspectives philosophiques, religieuses et culturelles différentes. Il n'est que raisonnable de s'attendre à ce que les gens aient divers points de vue.

    Ils peuvent également avoir des avis partagés sur l'opportunité d'utiliser le droit criminel pour obliger les gens à adopter un certain comportement. Ce moyen devrait être notre dernier recours pour influer sur le comportement de nos concitoyens. Je suis père de trois enfants âgés de 14, 12 et 8 ans et je m'inquiète de l'âge auquel ils commenceront à avoir des relations sexuelles. Je ne compte toutefois pas sur le droit criminel pour régir leurs activités sexuelles.

    J'essaie plutôt de leur offrir un bon foyer, régi par certaines normes, de prendre de sages décisions et de leur faire comprendre que les actes ne sont jamais sans conséquences. À un certain âge, les enfants ne sont pas encore assez vieux pour comprendre les conséquences de leurs actes, donc ils ont intérêt à éviter de s'adonner à des activités, notamment les activités sexuelles, qui pourraient avoir de très graves conséquences.

    Pour revenir au point que mentionnait le député, nous ne pensons pas que la vaste majorité des Canadiens veulent que l'âge de consentement soit haussé. À mon bureau de circonscription, je n'ai pas constaté une forte demande à ce sujet. Je n'ai pas reçu non plus tellement d'appels à ce propos. Certes, il y a des gens qui voudraient que l'âge de consentement soit porté à 16 ans et je respecte leur opinion.

    Pour les raisons que j'ai mentionnées, je ne crois pas que nous voulons criminaliser les relations sexuelles lorsque les partenaires ont atteint un certain âge. Ce n'est pas une proposition que nous devrions rejeter du revers de la main. Elle ne correspond toutefois pas à l'opinion de la vaste majorité des Canadiens, contrairement à ce que prétend le député.

  +-(1650)  

+-

    M. Ken Epp (Elk Island, PCC): Monsieur le Président, j'aimerais demander au député s'il pense que c'est correct qu'une personne de 25 ans ait des relations sexuelles avec une personne de 14 ans et, s'il n'est pas de cet avis, pourquoi il ne fait rien à ce sujet.

+-

    L'hon. Gar Knutson: Monsieur le Président, je viens de parler de cela en réponse à la question précédente. Il va sans dire que je ne pense pas qu'il soit convenable qu'une personne de 25 ans...

    Des voix: Oh, oh!

    L'hon. Gar Knutson: Monsieur le Président, j'aimerais demander au député si, compte tenu de l'importance de cette question, nous pourrions en discuter sans nous interrompre l'un l'autre, car c'est effectivement une question très importante.

    Cette question touche directement les croyances fondamentales de la majorité des Canadiens. Je demanderais au député de ne pas me chahuter pendant que j'essaie de donner ma réponse. Je comprends que ce n'est pas la façon habituelle de faire les choses à la Chambre, mais je pense que, lorsqu'il est question de l'exploitation des enfants, nous pourrions laisser de côté nos pratiques habituelles et avoir un débat calme et respectueux en tenant compte du fait que les gens ne partagent pas nécessairement tous la même opinion.

    Le point que j'essayais de faire ressortir concerne les limites du droit pénal, et il faut se demander s'il convient d'utiliser le droit pénal comme une massue pour atteindre ce que je considère comme un objectif social valable.

    Je suis d'accord avec le député pour dire que, de façon générale, ce n'est pas correct pour une personne de 25 ans d'avoir des relations sexuelles avec une personne de 14 ans et que, dans certaines circonstances, le droit pénal doit intervenir. C'est dans le projet de loi, et je crois donc que le député devrait appuyer cette mesure.

+-

    M. Myron Thompson (Wild Rose, PCC): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir parler de ce sujet encore une fois.

    Je souscris à une bonne partie de la philosophie sous-jacente au projet de loi. Je ne veux pas lancer un débat d'ordre philosophique sur la nécessité d'édicter une loi pour indiquer qu'il ne convient pas qu'une personne de 40 ans, par exemple, incite une jeune personne de 14 ans à pratiquer des activités sexuelles. Il devrait exister une loi sévère pour prévenir une telle chose, mais ce n'est pas ce qui m'inquiète le plus par rapport à ce projet de loi.

    Bien des gens ici savent ce qui me préoccupe avant tout et c'est de protéger les enfants en éliminant et en interdisant absolument toute forme de pornographie juvénile. Nous avons récemment voté à l'égard d'une motion que j'avais présentée à la Chambre des communes. Elle demandait l'adoption d'une loi interdisant toute défense pour ceux qui utilisent la pornographie juvénile dans le but d'exploiter des enfants. Cette motion a été adoptée à l'unanimité.

    Le problème que me pose le projet de loi C-12, c'est qu'il n'interdit pas cette défense, et voilà l'objet du débat. Bien des libéraux disent qu'on a supprimé les mots «valeur artistique» dans le projet de loi, mais on les a remplacés par l'expression «bien public». Voilà ce qui explique mon intervention sur la pornographie juvénile.

    Je tiens à préciser quelque chose pour tous les députés et la population canadienne en général. En ma qualité de député et porte-parole de l'opposition, je m'intéresse activement au dossier de la pornographie juvénile. Il ne s'agit pas d'incidents sporadiques ou d'activités qui se produisent à l'occasion ou rarement.

    Avant de venir à la Chambre aujourd'hui, j'ai fait quelques recherches. J'ai ici des exemples montrant qu'il ne s'agit pas du tout d'incidents occasionnels. Des cas d'exploitation des enfants par le truchement de la pornographie juvénile surviennent quotidiennement au Canada. Ils ne sont pas signalés, imprimés en grands titres dans les journaux ou commentés à la télévision. Cette activité se déroule à grande échelle, et nous refusons de le reconnaître.

    J'ai ici un article publié il y a quelques jours dans le Calgary Sun. Cet article est intitulé «Pas de peine d'emprisonnement dans un cas de pornographie juvénile». Il s'agit d'un petit article, et non d'une grosse manchette en première page. Un type a été trouvé coupable de pornographie juvénile, mais on ne lui a pas imposé de peine d'emprisonnement. On a jugé qu'il pouvait être traité afin de mettre un terme à cette activité répréhensible. Cet individu ne s'est vu imposer aucune peine autre que la détention à domicile. Tout récemment, un ancien agent de la GRC en Saskatchewan a été trouvé coupable d'infractions sexuelles à l'endroit d'enfants et lui aussi s'est vu imposer une peine de détention à domicile.

    Ces cas montrent aux Canadiens, et en particulier aux députés de la Chambre, que les individus qui sont arrêtés et accusés, ou qui font l'objet d'enquêtes parce qu'ils ont commis des infractions liées à la pornographie juvénile, proviennent de toutes les couches de la société. Les gens pensent parfois qu'il n'y a que les voyous ou les gens de cet acabit qui commettent ce genre d'infractions, mais ce n'est pas le cas. Des banquiers, des enseignants, des prêcheurs, des policiers et d'autres sont accusés d'avoir commis de telles infractions. La pornographie juvénile est très répandue; c'est une vaste industrie.

  +-(1655)  

    Il y a aussi le cas d'un Albertain qui dirigeait un réseau de pornographie juvénile, un groupe international de distribution de pornographie juvénile sur Internet. Ces gens-là faisaient des profits énormes. Il y beaucoup d'hommes adultes qui font de l'argent avec des photos abjectes qui sont diffusées sur Internet. Ces individus exploitent nos jeunes partout au pays. L'homme en question avait plus de 1 000 photos et 250 vidéoclips dans ses ordinateurs. C'est incroyable. Ces vidéos montraient les choses les plus ignobles que l'on puisse imaginer, comme par exemple des enfants d'à peine deux ans qui étaient utilisés pour commettre des actes sexuels avec des adultes. Il n'y a rien de plus ignoble, à mon avis.

    Un homme de 78 ans de la région de Waterloo doit répondre à des accusations de pornographie juvénile. Imaginez, un vieillard de 78 ans. Il y a aussi le cas d'un individu de London, et cela se passait cette semaine, qui s'en est tiré avec une peine de détention à domicile après avoir été trouvé coupable de pornographie juvénile. On a trouvé dans son ordinateur une très grande quantité de matériel et de photos pornographiques qu'il avait rapportés d'une autre région du globe lors d'un voyage d'affaires. C'est incroyable. Cet individu est un homme d'affaires prospère, qui fait beaucoup d'argent avec la pornographie juvénile impliquant de très jeunes enfants.

    Un autre grand titre signale qu'un ancien employé de la Société d'aide à l'enfance a été de nouveau arrêté. Cette histoire se passe à Windsor. L'homme de 27 ans est de nouveau en détention. Il a été arrêté une première fois parce qu'il possédait toutes ces saletés de pornographie juvénile. Un autre titre fait état d'accusations de pornographie portées contre un résidant de Niagara Falls. Celui-ci doit comparaître en justice la semaine prochaine à St. Catherines.

    Je pourrais continuer longtemps ainsi. J'en ai toute une pile. Je pourrais donner exemple après exemple. Les corps policiers, ou quiconque oeuvre à résoudre ce grave problème, pourront nous dire qu'il s'agit là d'une réalité quotidienne et omniprésente. Nous n'entendons parler que des cas spectaculaires. Je ne sais pas s'il est juste de les qualifier ainsi. Nous n'entendons pas parler de tous les cas, car ils sont devenus des histoires banales, je crois, pour les médias, qui n'en parlent presque pas.

    Les autorités gouvernementales ne réagissent pas très bien face à la situation. Je pense au service de police de Toronto. Celui-ci n'a que quelques policiers pour étudier les millions d'éléments qu'ils ont confisqués à des personnes faisant présentement l'objet d'une enquête après avoir enfreint les lois relativement à l'utilisation de pornographie juvénile. Je sais que certains députés ont vu une partie du matériel que la police de Toronto a confisqué. Ils essaient de nous faire comprendre la gravité de la situation. Les photos vont de bébés en couche aux jeunes adolescents qui subissent des abus à n'en plus finir. C'est incroyable que cela puisse se produire.

  +-(1700)  

    Nous savons également que, grâce aux efforts énergiques et dévoués de cinq ou six policiers de la région de Toronto, une fillette de six ans de la Caroline du Nord a été secourue. Ils ont été en mesure de déterminer l'identité de l'enfant à partir des photos, de la localiser et de la tirer de cette situation. Pour moi, ces policiers torontois sont des héros nationaux.

    Cependant, lire leurs rapports m'attriste. Ce n'est qu'un chiffre approximatif, mais il me disent qu'il pourrait y avoir jusqu'à 100 000 enfants qui sont utilisés pour la production de la pornographie juvénile qui est distribuée et utilisée dans le monde entier. De ce nombre, quelques-uns, un grand nombre ou plusieurs centaines pourraient être ici, au Canada. Ils pourraient se trouver dans la maison voisine, mais nous ne savons pas qui ils sont. Cependant, à la suite de leurs efforts acharnés, de nombreuses heures de recherche dans les documents et de l'utilisation qu'il en ont faite, ces gens ont réussi à retrouver cette enfant.

    Je pense vraiment que nous devrions écouter les services de police lorsqu'il demandent au gouvernement de leur fournir l'argent qui les aiderait à mettre au point une stratégie nationale et à collaborer avec les agences internationales. Ils seraient alors en mesure de s'attaquer énergiquement à cet ennemi diabolique qu'est la pornographie juvénile, et de vaincre cet ennemi de nos enfants. Dieu sait combien il est difficile de trouver le financement nécessaire lorsque nous constatons où va une partie de notre argent.

    Il est évident que tous les députés de la Chambre conviennent que cela doit être fait. Ils ont manifesté leur accord lors du vote dont j'ai parlé plus tôt. Ils ont dit qu'il voulaient se débarrasser de la pornographie juvénile. La seule façon de le faire consiste d'abord à adopter une loi qui enlève à quiconque la possibilité dans ce pays de posséder, distribuer ou s'enrichir de la pornographie juvénile en exploitant les enfants.

    Un petit problème est survenu récemment. Un certain M. Sharpe s'est retrouvé devant les tribunaux, et un juge a décrété qu'une partie du matériel qu'il avait en sa possession avait une certaine valeur artistique. À cause de cette décision, la valeur artistique a été inscrite dans la loi comme élément de défense. Les Canadiens ont vivement dénoncé la situation, et j'ai été heureux de joindre ma voix à la leur, réclamant l'élimination de l'élément de mérite artistique. Il ne devrait y avoir aucun moyen de défense pour les gens qui exploitent les enfants par la pornographie juvénile. Tout le monde est d'accord là-dessus. Mais voici que le gouvernement propose le projet de loi C-12, et nous avons un autre problème. On a remplacé le terme «valeur artistique» par «bien public».

    Combien de temps s'écoulera-t-il avant qu'un producteur de pornographie juvénile, inculpé et poursuivi devant les tribunaux, plaide non coupable en vertu des dispositions du projet de loi C-12, en invoquant le bien public? Nous ne savons même pas quelle sera la définition de «bien public». Une personne pourra-t-elle prétendre que du matériel quelconque a une valeur artistique ou autre et se battre pour avoir le droit de produire le matériel en question ou de l'utiliser comme bon lui semble, peu importe ce que contient ce matériel? Nous ne savons pas encore comment sera interprétée cette notion de «bien public», mais nous le saurons un jour. Un juge, quelque part, définira le terme parce que ce projet néglige de le faire.

    Je demande à tous les députés de la Chambre de faire en sorte que nous puissions respecter le vote tenu récemment en faveur de l'élimination de tous les moyens de défense, tout en protégeant les personnes qui pourraient avoir de bonnes raisons pour avoir en leur possession des articles de pornographie juvénile.

  +-(1705)  

    J'ai essayé, sans succès, de convaincre un certain nombre de membres du parti ministériel, les libéraux, qu'il suffirait d'inclure dans la loi toutes les possibilités auxquelles on puisse penser et qui ne s'y trouvent pas. Ils ne l'ont pas fait. L'expression «bien public» est toujours dans le projet de loi.

    J'ai donc une suggestion à faire pour ce projet de loi et cet article en particulier. J'ai conçu et présenté un projet de loi d'initiative parlementaire. L'article de ce projet de loi dira que, lorsqu'un délinquant est accusé d'une infraction de nature pédopornographique, et je ne lirai pas tout, «le tribunal est tenu de déclarer cette personne non coupable si la représentation ou l’écrit qui constituerait de la pornographie juvénile a un but éducatif, scientifique ou médical». Je voudrais ajouter à cela: «ou si les actes reprochés ont été accomplis aux fins de l'application de la loi».

    Cette disposition protège les vrais médecins, psychiatres et scientifiques qui pourraient utiliser le matériel en cause à des fins scientifiques, médicales ou éducatives. En outre, elle protège la police qui met la main sur ce matériel dans le cadre de son enquête. Nous devons protéger ces personnes de bonne foi qui travaillent fort pour éradiquer la pornographie juvénile. Nous pouvons le faire en les incluant dans cette disposition.

    Nous pourrions donc éliminer la notion de «bien public». Le terme non défini de «bien public» pourrait disparaître. Puis, nous pourrions alors faire parvenir un message aux tribunaux, leur soulignant qu'ils doivent protéger les médecins, les scientifiques, les psychologues, les enquêteurs, les services de police et tout autre service de bonne foi, dans la mesure où ils utilisent ce matériel à des fins médicales, scientifiques, éducatives ou d'application de la loi. Nous ne voudrions pas que quiconque a une raison légitime de posséder un tel matériel puisse être arrêté et accusé.

    Toutefois, je ne voudrais surtout pas condamner un autre policier de ce pays--et je suis persuadé que tous les députés seront d'accord avec moi à ce sujet--à devoir passer des jours entiers à revoir tout le matériel dégoûtant qu'il a saisi pour tenter de déterminer s'il pourrait répondre aux critères du bien public ou du mérite artistique. Nous ne devons pas faire cela.

    Nous devons cesser d'exposer les responsables de l'application de la loi à de telles mesures parce que cela les rend fous. Je crois que cela nous rendrait fou nous aussi si nous n'avions rien d'autre à faire que de revoir ces millions de documents qui ont été saisis par le service de police de Toronto à lui seul. Cela pourrait rendre n'importe qui cinglé. Je sais que certains députés comprennent ce que je veux dire parce qu'il ont vu des exemples du genre de matériel qui est confisqué.

    Mettons un terme à tout cela et transmettons un message clair à ceux qui voudraient s'attaquer à nos enfants. Nous ne retiendrons pas l'idée que le droit à la liberté d'expression d'une personne qui décide d'exploiter nos enfants en les soumettant à la pornographie juvénile primera sur les droits des enfants de ce pays d'être à l'abri de ce genre d'ennemi.

  +-(1710)  

    Nous pouvons le faire. Ce gouvernement peut le faire. Le projet de loi C-12 ne permet pas de le faire à cause de ces deux petits mots, «bien public», qui s'y trouvent toujours. Faisons-les disparaître. Protégeons tous ces gens qui ne font que leur travail. Faisons ce qu'il se doit. Faisons tous ce que nous avons décidé de faire lorsque nous nous sommes engagés à titre de députés à éliminer toutes les défenses justifiant la pornographie juvénile. Faisons-le dès maintenant.

+-

    L'hon. Sue Barnes (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais revenir sur la motion dont le député a parlé mais qu'il a malheureusement omis de citer. La motion était ainsi libellée:

...protéger nos enfants d'une plus grande exploitation sexuelle en supprimant immédiatement des lois sur la pornographie juvénile toute disposition portant sur les moyens de défense relatifs à la possession de pornographie juvénile qui ouvre la porte à l'exploitation des enfants.

    La partie importante, en l'occurrence, c'est «qui ouvre la porte à l'exploitation des enfants».

    Nous avons autorisé le moyen de défense fondé sur le bien public. Pourquoi? Parce que les policiers ont besoin de ce moyen de défense. Nous ne voulons pas porter d'accusations contre des policiers qui sont en contact avec ce genre de matériel. Le moyen de défense fondé sur le bien public est important parce que les gens qui doivent intenter des poursuites, ceux qui doivent produire ce matériel devant un tribunal et obtenir des condamnations lorsque c'est justifié doivent pouvoir s'appuyer sur ce moyen de défense. Cela fait partie de leur travail. Ce moyen de défense existe déjà.

    Je signale que nous sommes rendus au débat en troisième lecture et qu'à cette étape, nous devons nous prononcer sur le renvoi de ce projet de loi au Sénat. Mais devinez ce qui se passe. Je suis en train de répondre au discours du député qui ne portait pas vraiment sur la troisième lecture, mais bien sur une motion de renvoi visant à nous empêcher de renvoyer le projet de loi au Sénat. Pourquoi? Parce que les députés ont voulu recourir à la procédure pour retarder l'étude de cette mesure à la Chambre. Cette motion vise à renvoyer le projet de loi au comité.

    Or, le comité a déjà adopté le projet de loi. Ce dernier a déjà franchi à la Chambre l'étape de la deuxième lecture et celle du rapport. Ce projet de loi est nécessaire, et pas dans six mois. Nos tribunaux en avaient besoin hier. Il est nécessaire parce qu'il prévoit des protections pour les enfants qui doivent aller témoigner devant un tribunal, des protections pour les aider à témoigner. Il est nécessaire parce que les juges ont besoin de ces nouvelles dispositions législatives pour les aider, compte tenu des décisions rendues par la cour.

    Permettez-moi de dire aux députés que nous élaborons des moyens de défense fondés, par exemple, sur le «bien public» en réponse à des décisions comme celle qui a été rendue dans l'affaire Sharpe, pour faire en sorte que la preuve que nous présentons soit inattaquable. Ce n'est pas une lubie. Il est très facile de lire la litanie des crimes dans un journal, mais nous savons que ce qui importe, c'est que nous adoptions des lois qui sont utiles. Voilà ce que les députés auraient pu faire au lieu de retarder l'adoption de ce projet de loi.

    J'ai assisté à titre de secrétaire parlementaire à des débats sur des motions de renvoi et ce n'est pas du joli. Nous aurions pu faire adopter ce projet de loi si nous avions pu compter sur la collaboration de l'autre côté.

    J'aimerais vous entretenir brièvement de ce que bien public veut dire au juste. Comme moyen de défense, cela veut dire que tout matériel ou acte en question doit servir le bien public sans aller au-delà. Cela signifie, contrairement aux moyens de défense fondés sur le mérite artistique qui sont prévus au paragraphe du code, que les moyens de défense fondés sur le bien public demanderaient une analyse en deux étapes. Le matériel ou l'acte sert-il le bien public dans un domaine reconnu? Si oui, va-t-il au-delà de ce qui sert le bien public? Aucun moyen de défense n'est possible lorsqu'il ne sert pas le bien public, ou représente un risque ou une atteinte qui dépasse ce qui sert le bien public.

    Nous devons agir de façon responsable. C'est difficile d'élaborer quelque chose qui est inattaquable devant les tribunaux tout en pouvant répondre à nos besoins. Nous avons élaboré un projet de loi. Nous n'essayons pas de le reporter. Nous n'essayons pas de retarder la protection. Ce projet de loi est très, très important. À mon avis, ce que nous devrions faire maintenant...

  +-(1715)  

+-

    M. Ken Epp: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je me demandais si la députée croyait qu'elle faisait un discours ou si elle posait une question à mon collègue. Je pense qu'elle vient tout juste de répondre, alors laissons-la poursuivre.

+-

    La présidente suppléante (Mme Hinton): La députée a le droit de faire des commentaires ou de poser des questions. Je lui demanderais de limiter son temps à environ la moitié du temps réservé aux questions et de poursuivre, si elle veut bien.

+-

    L'hon. Sue Barnes: Voici la question que j'adresse au député, madame la Présidente. Pourquoi a-t-il contribué à retarder l'adoption du projet de loi à la Chambre? Cette mesure législative est nécessaire.

+-

    M. Myron Thompson: Madame la Présidente, au cas où la députée se serait absentée, je dois lui dire que j'ai été ici la majeure partie de la journée à observer le gouvernement libéral faire de l'obstruction systématique au projet de loi C-11, au sujet duquel nous nous sommes déjà déclarés favorables pour qu'il reçoive un traitement accéléré et soit adopté. Elle ose maintenant me reprocher de soudainement prendre la parole à son sujet, alors que je ne l'ai pas encore fait depuis sa présentation.

    Je vais profiter de l'occasion pour en parler parce que c'est ma première occasion de le faire, et je veux faire connaître mes observations. Il y a une chose que je tiens à dire à la députée, qui doit être avocate, puisque seule une avocate se lèverait de son siège pour approuver constamment que nous ayons besoin d'un article sur le «bien public», vu que je peux garantir que cet article amènerait une suite interminable de causes devant les tribunaux. Ce serait le paradis pour les avocats. Bon sang qu'ils vont avoir du travail rien qu'à tenter d'établir en quoi la pornographie infantile sert le bien public!

    J'aimerais bien qu'un avocat quelconque, de n'importe où au pays, me dise qu'il vaut la peine de passer des heures et des heures et des tonnes d'argent à déterminer si une ordure comme celle que l'on nous a présentée, et comme en voit la police, contribue de quelque manière au bien public.

    Tout ce que je demande, et tout ce que nous avons demandé depuis le début, c'est une mesure législative qui empêcherait ceux qui exploitent des enfants d'invoquer des moyens de défense.

    J'ai peut-être omis ce passage, mais la députée sait fort bien qu'il figurait dans la motion: supprimer «toute disposition portant sur les moyens de défense». Si elle écoutait, elle constaterait que j'ai également proposé que nous protégions nos représentants de la loi, nos médecins, les gens de la profession médicale et les enseignants.

    Quelles sont les priorités de la députée? Il semble que ses priorités soient de tout rédiger dans les termes juridiques appropriés, que la plupart des Canadiens ne pourront même pas comprendre, de sorte que les tribunaux seront remplis de gens qui invoqueront des dispositions concernant le bien public qui les protégeront pendant qu'ils exploitent nos enfants. Les policiers devront continuer de passer des heures à parcourir tous ces documents pour savoir s'il est possible que le bien public a été servi, comme ils ont dû le faire pour les oeuvres censées avoir une valeur artistique. Il n'est pas étonnant que des gens comme John Sharpe, et d'autres pédophiles dans tout le pays, ont pavoisé lorsque cette mesure législative a été adoptée.

    L'ennui, c'est que la députée, et bien d'autres députés, vivent en dehors de la réalité, contrairement aux Canadiens ordinaires, car environ 90 p. 100 des Canadiens ordinaires diraient: «Pour l'amour du ciel, débarrassons-nous de ces ordures et faisons-le avec le plus de fermeté possible.»

    J'admets que ma proposition irait peut-être même à l'encontre de la charte des droits, car elle enlèverait à quelque idiot le droit d'utiliser du matériel pornographique à des fins personnelles ou autres.

    Je dis à cette députée, à la Chambre et aux Canadiens qu'il est temps aujourd'hui d'affirmer que ces pédophiles ne pourront pas invoquer la charte pour exploiter nos enfants ou pour se protéger et que nous allons adopter des mesures législatives qui protégeront les enfants. Cela est plus important que de protéger les droits de ces idiots qui produisent, distribuent et utilisent ce matériel pour détruire des enfants.

    Le gouvernement doit agir avec plus de fermeté et ne pas m'abreuver de jargon juridique au sujet de ce qui peut se produire. Je sais ce qui se produira. Le gouvernement se retrouvera constamment devant les tribunaux parce qu'il n'aura pas eu le courage d'adopter le projet de loi et de l'appliquer dans toute sa rigueur.

  +-(1720)  

+-

    M. Ken Epp (Elk Island, PCC): Madame la Présidente, je félicite mon collègue pour sa compassion et sa passion dans ce dossier.

    Comme nous avons très peu de temps, la question que j'aimerais lui poser se résume à ceci. Durant son discours il a proposé qu'au lieu d'avoir les moyens de défense fondés sur la valeur artistique ou le bien public, on dresse simplement la liste des personnes qui seraient autorisés à posséder ce matériel pour des raisons juridiques valables, qu'il s'agisse de procureurs ou d'autres personnes.

    Je me demande s'il craint qu'en qu'en dressant une liste précise, une personne puisse être condamnée parce qu'on a omis par inadvertance d'inscrire son nom sur la liste. Autrement dit qui devrait être sur la liste et qui ne devrait pas l'être?

+-

    M. Myron Thompson: Madame la Présidente, comme il a été indiqué plus tôt, on fait déjà mention des fins éducatives, scientifiques et médicales, mais j'ajouterais également la mention «aux fins d'application de la loi». À partir des descriptions des fins auxquelles cela peut servir, il faut seulement que les personnes puissent être reconnues comme des médecins, des psychiatres, des procureurs ou d'autres personnes de bonne foi.

    Il n'est pas nécessaire de dresser une liste. Il faut toutefois s'assurer que ces quatre raisons sont protégées lorsqu'on a établi sans l'ombre d'un doute les fins pour lequel le matériel est utilisé. Il faut mettre un terme à l'exploitation des jeunes en s'assurant d'envisager tous les cas qui pourraient survenir. Cette question revêt beaucoup d'importance à mes yeux, et j'espère qu'il en est de même pour vous.

+-

    M. Paul Harold Macklin (Northumberland, Lib.): Madame la Présidente, c'est un plaisir de participer au débat, même si je constate que nous aurons peu de temps ce soir.

    J'ai au moins trouvé réconfortant d'entendre le député qui m'a précédé faire valoir qu'il avait maintenant une série d'exemples où le bien public serait servi par le projet de loi C-12. On perçoit un certain progrès. Nous commençons à prendre conscience que nous ne saurions proposer un projet de loi qui ne laisse aucun moyen de défense et l'expression «bien public» est une excellente façon d'offrir ce moyen. Le député a fait un grand pas vers l'acceptation de ce principe.

    Aujourd'hui, j'estime que nous avons une occasion particulière de discuter plus à fond de questions fort importantes, comme tout le monde l'a souligné aujourd'hui. La discussion, bien qu'elle ait déjà été longue, devrait se poursuivre, car il faut chercher de vrais moyens de protéger nos enfants tout en préservant tous les droits garantis par la charte. Si je dis cela, c'est bien sûr parce que le projet de loi C-12 propose non seulement des réformes du droit pénal relatives à la pornographie juvénile, mais aussi d'autres réformes afin de mieux protéger ceux qui nous sont chers entre tous, nos enfants, ainsi que les personnes handicapées.

    Le projet de loi C-12 est nécessaire et il est le bienvenu. J'ai hâte de voir s'appliquer les réformes qu'il propose. Chacun de nous veut s'assurer que le droit pénal répond aux besoins et aux préoccupations des Canadiens, surtout des plus vulnérables, c'est-à-dire les personnes handicapées et les enfants.

    Même si l'intervenant précédent s'est concentré sur une partie particulière du projet de loi, nous devons comprendre et apprécier le fait qu'il porte sur divers domaines. Premièrement, le projet de loi aborde de deux façons le concept de renforcement de nos dispositions actuelles relatives à la pornographie juvénile. L'une d'elles consiste à élargir la définition de la pornographie juvénile écrite de manière à intégrer les documents qui sont créés dans un but sexuel et, pour leur plus grande partie, décrivent des activités sexuelles avec des enfants qui sont prohibées, et l'autre vise à rétrécir les défenses actuelles de la pornographie juvénile, de manière à ce ce qu'il n'y ait qu'une défense fondée sur le bien public.

    Dans l'acception du bien public, le commentaire de l'intervenant précédent mentionne les chercheurs, les enseignants, les policiers, les autorités chargés de l'administration de la justice, les médecins, etc., qui doivent s'en servir pour le bien public. Je suis très heureux de constater un certain progrès chez mon ami qui a pris la parole au sujet de ce concept, car jusqu'à maintenant, cette formation politique se contentait de dire tout simplement qu'il ne devrait y avoir absolument aucun moyen de défense.

    Je crois que ces députés commencent à comprendre. Ils commencent à élaborer le concept selon lequel il y a des utilisations légitimes qui doivent être autorisées. Il faut des possibilités d'éduquer les gens à composer avec les réalités médicales et à traiter avec l'administration de la justice.

  +-(1725)  

    Je crois que le fait que nous progressons dans ce domaine est très important. Le fait de ramener les moyens de défense à un seul fondé sur le bien public servira mieux l'intérêt public, mais je crois qu'il y a une limite à cela.

    Tout comme on peut plaider en faveur du concept de bien public, il faut aussi le limiter parce que nous ne pouvons laisser ce moyen de défense aller au-delà d'un certain point. L'élément qui a été déterminé est qu'il faut soupeser tout le bien public au regard du risque du mal que cela provoquerait. Donc, si le mal l'emporte sur les avantages pour la société, je parle du moyen de la défense fondé sur le bien public, alors, en fait, il faut le limiter.

    Deuxièmement, le projet de loi propose aussi la création d'une nouvelle catégorie d'actes interdits, celle de l'exploitation sexuelle des jeunes. Je crois que les exemples donnés par l'intervenant précédent portent sur ces éléments. Ce qui nous préoccupe, c'est l'exploitation des enfants.

  +-(1730)  

+-

    La présidente suppléante (Mme Hinton): Comme il est 17 h 30, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.


+-Initiatives parlementaires

[Initiatives parlementaires]

*   *   *

[Français]

-La Loi sur les langues officielles

+-

    L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.) propose: Que le projet de loi S-4, Loi modifiant la Loi sur les langues officielles (promotion du français et de l'anglais) soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

    --Madame la Présidente, c'est un honneur pour moi aujourd'hui de vous entretenir à propos du projet de loi S-4, Loi modifiant la Loi sur les langues officielles (promotion du français et de l'anglais).

    Avant d'aller plus loin, je pense qu'il serait important pour moi de dire aujourd'hui que j'ai informé le Comité permanent des langues officielles, auquel j'ai demandé que le projet de loi soit référé, et mes collègues que, advenant que le projet de loi soit étudié par ce comité dans un avenir quelconque, je n'avais pas l'intention de présider ledit comité pendant les séances sur le projet de loi S-4. Par souci de transparence, j'ai demandé à ce que le vice-président ou l'un des vices-présidents du comité préside à ma place, pendant que je prendrai place ailleurs dans la salle, pour ne pas, en quelque sorte, présider le tribunal qui jugera du bien-fondé du projet de loi que je parraine.

    J'aimerais aussi féliciter le sénateur Jean-Robert Gauthier qui a fait de cette cause son cheval de bataille pendant plusieurs années. D'ailleurs, ce projet de loi qui vise à donner plus de mordant, si je peux le qualifier ainsi, à la Loi sur les langues officielles est tellement important aux yeux de l'honorable sénateur, qu'il est revenu trois fois à la charge sur ce projet de loi depuis 2001.

    J'en profiterai également pour souligner que le sénateur Jean-Robert Gauthier représente fidèlement les Canadiens et les Canadiennes au Parlement et au Sénat depuis 1972, si je ne m'abuse, soit depuis 32 ans. Dans quelques mois, le sénateur Gauthier nous quittera par force de l'âge—75 ans—, aussi injuste que cela puisse être, surtout pour ceux et celles qui travaillent aussi fort dans des initiatives comme la protection des minorités. Je sais que le sénateur écoute sans doute ce débat et que les membres de son cabinet—en l'occurrence son adjoint, M. Sébastien Goyer—écoutent attentivement eux aussi, et le voient d'ailleurs.

    Si le projet de loi est important pour le sénateur Gauthier et moi-même, c'est que nous nous souvenons très bien de l'époque où il était difficile d'obtenir des services en français et en anglais du gouvernement du Canada. Le sénateur Gauthier est devenu l'emblème des luttes pour l'obtention et le respect des droits des francophones, mais aussi des minorités partout.

    On le connaît bien, nous, francophones, comme défenseur de ce dossier, mais il a été longtemps et est toujours le défenseur de plusieurs autres causes relatives à ceux et celles vivant en milieu minoritaire. Bien sûr, on pourra parler des droits des fonctionnaires ou de plusieurs autres dossiers semblables qui ont été et qui sont toujours des dossiers importants pour le sénateur Jean-Robert Gauthier.

    Par conséquent, lorsque la politique des langues officielles a été instituée, il y a environ 30 ans, le sénateur en était à ses tout débuts comme député. Je suis convaincu que lorsqu'il est arrivé à la Chambre des communes, bien que le français et l'anglais aient eu alors le même statut ici, à la Chambre, qu'aujourd'hui—avec les cabines d'interprétation simultanée et tout ce qu'on connaît depuis la période de M. Diefenbaker—plusieurs choses étaient différentes dans d'autres services à Ottawa.

    Toutefois, malgré tous nos efforts, à tous et à toutes, il y a quand même une situation qui perdure, et on doit admettre que les droits ne sont pas toujours reconnus comme ils devraient l'être. Qui plus est, il y a même une certaine section de la Loi sur les langues officielles qui, aux yeux de certains—et je dis bien aux yeux de certains, parce qu'un sénateur ne partage pas cette opinion—, établit que l'article 41 et d'autres sont déclaratoires seulement et non exécutoires.

  +-(1735)  

    Le 29 mars dernier, la commissaire aux langues officielles, Mme Dyane Adam, publiait son rapport intitulé: «De la parole aux gestes: La langue de travail au sein de la fonction publique fédérale». Les données de ce rapport font suite à la compilation de questionnaires qu'elle avait envoyés à 2 000 fonctionnaires travaillant ici même dans la région de la capitale nationale. On parle donc de cette région-ci. Les résultats prouvent sans aucun doute que nous avons besoin de rendre exécutoires, si cela n'est pas clair aux yeux de certains, ces parties de la Loi sur les langues officielles.

    Je reviens au rapport de la commissaire aux langues officielles. Elle nous disait:

    Les anglophones et les francophones sont tous deux en faveur d'un usage accru du français au travail.

    Cependant, même si les deux sont en faveur, ce n'est pas toujours ce qui se passe. On sait d'ailleurs que ce n'est pas le cas.

    Aujourd'hui, il est temps d'aller plus loin. Il est temps de donner des outils au gouvernement du Canada pour favoriser l'épanouissement des minorités francophones et anglophones. Il est temps également de veiller à ce que soient prises les mesures nécessaires pour la mise en oeuvre de notre engagement. Quand je dis notre engagement, je veux dire l'engagement de la Chambre puisque, après tout, c'est le Parlement qui a adopté la Loi sur les langues officielles. L'article 41 est déjà dans la loi, bien sûr. Il s'agit maintenant d'affirmer le caractère exécutoire dont certains prétendent qu'il n'est pas déjà dans la Loi sur les langues officielles.

    L'article 41 de la Loi sur les langues officielles se lit comme suit:

    Le gouvernement fédéral s'engage à favoriser l'épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada et à appuyer leur développement, ainsi qu'à promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne.

    Cependant, on nous dit que ce paragraphe est seulement déclaratoire, comme je l'ai dit tantôt. Certains le prétendent en tout cas.

[Traduction]

    Le projet de loi S-4 va plus loin. Il ajoute deux paragraphes à l'article 41. Le paragraphe 41(2) proposé se lirait de la manière suivante. Je lis le projet de loi du sénateur, que je parraine à la Chambre. Je suppose que je pourrais l'appeler notre projet de loi, mais cela serait injuste parce que le sénateur a fait beaucoup plus que je ne pourrai jamais faire. Néanmoins, le paragraphe 41(2) se lit ainsi:

    Il incombe aux institutions fédérales de veiller à ce que soient prises les mesures positives nécessaires pour assurer la mise en oeuvre de cet engagement.

    Le paragraphe 41(3) proposé se lit ainsi:

    Le gouverneur en conseil peut, par règlement visant les institutions fédérales autres que le Sénat, la Chambre des communes et la bibliothèque du Parlement, fixer les modalités d'exécution des obligations que la présente partie leur impose.

    Je comprends que certains voudraient modifier une partie de cet énoncé lorsque le projet de loi sera renvoyé à un comité, à tout le moins une partie de ce qui vient. Le paragraphe 43(1) du projet de loi dit ceci:

    Le ministre du Patrimoine canadien prend les mesures nécessaires pour assurer la progression vers l'égalité de statut et d'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne...

[Français]

    Finalement, le projet de loi confère plus de pouvoir au commissaire aux langues officielles qui en ferait désormais plus qu'une conscience active des droits des francophones et des anglophones vivant en situation minoritaire. Le paragraphe 77(1) ferait donc en sorte que, et je cite:

    Quiconque a saisi le commissaire d'une plainte visant une obligation ou un droit prévus [...] peut former un recours devant le tribunal sous le régime de la présente partie.

  +-(1740)  

[Traduction]

    J'invite les députés à adopter ce projet de loi aujourd'hui et à le renvoyer à un comité. J'espère que lorsqu'on mettra fin au débat un peu plus tard aujourd'hui, ce sera pour de bon. Je demande aussi de ne pas demander le report du vote.

    La raison pour laquelle je demande ces deux choses est évidente. La législature tire peut-être à sa fin, si j'ose dire, mais qui sait, et si tel est le cas, nous pourrions renvoyer le projet de loi à un comité. Si des députés veulent proposer des amendements au projet de loi, ils pourraient le faire.

[Français]

    Bien sûr, après l'étude en comité parlementaire, le projet de loi revient en Chambre, évidemment, pour que nous tous puissions nous prononcer par un vote par appel nominal sur la forme finale du projet de loi.

    C'est pourquoi je pense qu'il serait important de permettre au projet de loi d'être envoyé dès aujourd'hui en comité parlementaire, afin qu'on puisse en faire l'étude dès la semaine prochaine.

    C'est ce que je demande à mes collègues aujourd'hui. Je leur demande premièrement d'appuyer le projet de loi et deuxièmement d'accorder ce privilège de cesser le débat aujourd'hui et, en ne demandant pas de vote par appel uninominal, de permettre au projet de loi d'être référé immédiatement au Comité permanent des langues officielles. Je souhaite que cette décision soit prise plus tard aujourd'hui.

    Adopter ce projet de loi en deuxième lecture voudrait dire, pour les 975 000 francophones en situation minoritaire et les 585 000 anglophones vivant aussi en situation minoritaire au Québec, que leurs droits sont importants et qu'ils le seront encore plus à l'avenir. Si c'est vrai, bien sûr, que certaines minorités sont bien traitées, la portée du projet de loi est moindre, mais elle est proportionnellement encore plus importante pour la minorité qui reçoit moins bien ces services. Je reprends ce qu'a dit un collègue d'en face.

    Toujours est-il que je remercie déjà les députés pour le travail effectué. Je félicite à nouveau le sénateur qui nous a proposé ce projet de loi. Je félicite le Sénat en entier, parce qu'il l'a adopté à l'unanimité, dois-je l'ajouter à ce moment-ci.

    Bien sûr, je remercie d'avance les députés membres du Comité permanent des langues officielles, que je préside, mais que je ne présiderai pas pendant ces audiences, comme je l'ai déjà dit. Je sais qu'ils font un travail très ardu en ce qui a trait aux langues officielles. Ils étudieront à fond ce projet de loi et ils présenteront des amendements s'il y a lieu.

    Quoi qu'il en soit, lorsqu'il terminera son cheminement devant le Comité permanent des langues officielles, soit dans son état actuel ou modifié, le projet de loi sera en quelque sorte béni par ce comité. Par la suite, bien sûr, du moins à mon avis, la Chambre voudra sans doute l'adopter à l'unanimité, après avoir reçu les commentaires du Comité permanent des langues officielles.

    Encore une fois, je remercie mes collègues. Je félicite le sénateur et son personnel, ainsi que tous ceux et celles qui ont oeuvré à la préparation du projet de loi à plusieurs reprises et qui nous ont offert le projet de loi qui est devant nous aujourd'hui.

[Traduction]

+-

    M. Scott Reid (Lanark—Carleton, PCC): Madame la Présidente, ce projet de loi est quelque peu inhabituel en ce sens qu'il nous vient du Sénat. Cela ne se produit pas souvent, mais ce n'est quand même pas un précédent. C'est aussi un projet de loi d'initiative parlementaire, ce qui signifie qu'il est parrainé par un député plutôt que par un membre du Cabinet.

    C'est ma seule chance de demander au député quelles sont ses intentions au sujet du projet de loi. Je suis sensible aux préoccupations du député. Effectivement, il se fait peut-être tard pour le gouvernement, mais cela reste à voir. Nous ne le savons tout simplement pas. À cet égard, la décision sera prise par le premier ministre. Si l'on me demande mon avis, je pense que les élections devraient avoir lieu à l'automne plutôt qu'au printemps, parce qu'il n'est pas urgent de tenir des élections, mais c'est une opinion personnelle.

    Quoi qu'il en soit, même si je pense qu'un grand nombre de députés seront d'accord pour dire que, dans l'ensemble, le projet de loi est raisonnable et méritoire, celui-ci comporte peut-être des lacunes. À mon avis, ce n'est pas nécessairement une bonne idée d'accepter, non pas vraiment de renvoyer cette mesure au comité, mais en fait d'accepter qu'elle aille au comité et qu'elle revienne à la Chambre sans aucune modification. Les contraintes de temps sont telles qu'il ne serait pas possible de modifier le projet de loi, de l'améliorer et, peut-être, de lui permettre d'atteindre plus efficacement les objectifs visés. À cette fin, il faudrait que le projet de loi soit renvoyé au comité, que celui-ci entende des témoins, qu'il examine tout problème qui peut exister dans le projet de loi tel qu'il est présentement rédigé, que celui-ci revienne à la Chambre, qu'il soit peut-être modifié et qu'il retourne au Sénat, si nécessaire. C'est tout simplement de cette manière que les choses fonctionnent, étant donné la façon dont le projet de loi nous est parvenu. S'il nous avait été présenté d'une façon différente, cette démarche ne serait pas nécessaire.

    Je m'inquiète vraiment. Nous pourrions nous trouver dans une situation où il nous faudrait choisir entre le projet de loi, en supposant qu'il aille de l'avant sous sa forme actuelle sans aucun amendement, et voter contre lui. À mon avis, il faut faire preuve d'un peu de bonne volonté pour examiner des amendements, surtout des amendements favorables permettant d'atteindre les objectifs d'une façon meilleure, peut-être, que celle du libellé initial.

    Je demande au député si le parrain du projet de loi au Sénat et lui-même sont prêts à envisager la possibilité d'examiner très attentivement les amendements visant à améliorer le projet de loi. Pendant mes observations, je ferai référence à l'un de ces amendements possibles, mais on pourrait en formuler d'autres.

  +-(1745)  

[Français]

+-

    L'hon. Don Boudria: Madame la Présidente, dans un premier temps, bien sûr, je suis prêt à entendre des témoins au comité. Je ne présiderai pas les travaux. Je serai un membre parmi d'autres, ajoutant mon point de vue à cet égard. Si on me demande aujourd'hui si je voudrais entendre des témoins, je dirais bien sûr. J'aimerais par exemple entendre la commissaire aux langues officielles qui pourrait venir nous en parler et peut-être la présidente de la Commission de la fonction publique. Il y en a sans doute d'autres. Il y a peut-être d'éminents juristes que des députés voudront entendre, et j'en passe.

    Nous sommes prêts à entendre ces témoins. À la lumière du témoignage de ces experts, si les gens nous parlent d'améliorer le projet de loi, nous devrions être prêts à entendre aussi leurs conseils, cela va de soi. Si on veut entendre une critique, c'est dans un but ultime d'améliorer le projet de loi, si une amélioration doit avoir lieu. Je ne peux pas prétendre parler pour le sénateur. Là n'est pas mon rôle aujourd'hui.

    De toute façon, lorsque le projet de loi est devant la Chambre, c'est à la Chambre de décider, et non à celui qui a parrainé le projet de loi dans la Chambre et qui a eu le pouvoir décisionnel la première fois. Quoiqu'il en soit, je sais que le sénateur est lui-même une personne très éclairée. Si quelqu'un lui présente aussi des modifications de nature à améliorer son projet de loi, je le connais fort bien et je sais que s'il croit sincèrement que son projet de loi sera meilleur après une amélioration, il n'a pas la vanité ou d'autre défaut semblable pour prétendre que ce qu'il a fait dans le passé ne peut pas être amélioré. Je le connais assez bien pour savoir que ce n'est pas sa nature.

    Ce que nous voulons, c'est un projet de loi qui est bon, non seulement pour qu'on puisse en être fiers au niveau personnel, mais que ce soit une bonne législation pour les Canadiens et Canadiennes. C'est pour cela que nous sommes tous ici, à la Chambre des communes et au Parlement en général.

    Donc oui, écoutons les témoins et, en troisième lecture, nous nous prononcerons pour ou contre le produit final. Il est bien possible que le produit final soit identique à celui que nous avons aujourd'hui. Nous verrons. Le temps nous le dira. Je rejoins le point de vue du député d'en face. Comme lui, je ne voudrais pas, dans une sorte de hâte de passer à la troisième lecture, adopter un projet de loi que nous ne voulons pas.

[Traduction]

+-

    M. Scott Reid (Lanark—Carleton, PCC): Madame la Présidente, l'objet du projet de loi S-4 est de rendre exécutoire la partie VII de la Loi sur les langues officielles.

    Les passages les plus importants de cette partie sont les articles 41 et 43. Le projet de loi modifie le libellé de ces articles par un ajout de nature interprétative à l'article 41, et un ajout de nature discrétionnaire à l'article 43. Comme je l'ai mentionné dans ma question adressée au député d'en face, je crois que le projet de loi n'est pas aussi efficace qu'il le devrait dans l'atteinte de ces objectifs.

    Pendant le temps qui m'est alloué, j'aimerais souligner certains points qui me préoccupent. Je commencerais par l'article 43, avant de passer à l'article 41. L'article 43 de la Loi sur les langues officielles se lit actuellement ainsi:

    Le ministre du Patrimoine canadien prend les mesures qu'il estime indiquées pour favoriser la progression vers l'égalité de statut et d'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne et, notamment, toute mesure:

a) de nature à favoriser l'épanouissement des minorités francophones et anglophones...

b) pour encourager et appuyer l'apprentissage du français et de l'anglais;

c) pour encourager le public à mieux accepter et apprécier le français et l'anglais:

d) pour encourager et aider les gouvernements provinciaux à favoriser le développement des minorités francophones et anglophones...

    La loi dit: Le ministre du Patrimoine canadien prend les mesures qu’il estime indiquées.» Cela veut dire que l'on laisse entièrement la chose à la discrétion du ministre. Il n'existe pas d'obligation réelle. De même, l'article poursuit, sans la restriction qui précède, en disant ceci: «prend les mesures qu'il estime indiquées» pour faire toutes les choses que je viens d'énumérer. Cet article est donc purement discrétionnaire. Je pense pourtant que, d'une manière générale, on doit éviter le recours si généralisé au mode discrétionnaire dans une mesure législative.

    L'article 43 serait modifié comme suit par le projet de loi S-4:

    Le ministre du Patrimoine canadien prend les mesures nécessaires pour favoriser la progression vers l’égalité de statut et d’usage du français et de l’anglais dans la société canadienne et, notamment, toute mesure [visant à faire les choses que j'ai décrites--favoriser l’épanouissement du français et de l’anglais, encourager et aider les gouvernements provinciaux, etc.]

    L'expression «qu'il estime» a été supprimée. La conséquence de cela, c'est que le ministre possède toujours un pouvoir discrétionnaire complet dans la mesure où il lui revient de répondre à toutes les obligations particulières décrites dans les alinéas a) à h) de la loi, mais qu'il est tenu de respecter la loi de manière non discrétionnaire et de façon justiciable. On pourra ainsi déposer une plainte si l'on n'est pas satisfait de la partie plus générale des dispositions.

    Je tiens à dire aux députés que c'est exactement l'inverse de ce qui s'impose. Ce qu'il faudrait faire--ce qui serait le plus susceptible de produire de bonnes politiques, de bons règlements et de bonnes actions de la part du ministre, ainsi qu'une certaine cohérence dans les interventions judiciaires si elles étaient nécessaires--ce serait de faire le contraire: laisser la première partie de l'article 43 discrétionnaire et rendre les dispositions particulières obligatoires. J'ai proposé cela au Comité mixte permanent des langues officielles, le 12 mars 2002.

    À l'occasion de cette réunion du comité, nous discutions de l'article 7. À l'époque, le sénateur Gauthier faisait partie du comité. Il a fait observer qu'il était possible de considérer que la dernière partie de l'article 43 avait le sens suivant: «et, sans restreindre la généralité de ce qui suit, le ministre doit prendre des mesures pour encourager et aider les gouvernements provinciaux à favoriser l'épanouissement du français et de l'anglais dans les minorités linguistiques», tout en laissant la première partie, la partie générale, sous une forme discrétionnaire.

    C'est sous cette forme que l'on rédige habituellement une loi. On obtiendrait une mise en oeuvre bien plus cohérente et logique de la loi, et un arbitrage sous le régime de la loi, si l'on cherchait à utiliser les recours qu'apportent les autres modifications que le sénateur Gauthier propose à cette loi.

  +-(1750)  

    Je passe à l'article 41, qui se lit actuellement comme suit:

    Le gouvernement fédéral s'engage à

favoriser l'épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada et à appuyer leur développement...

    Il s'agit uniquement d'une déclaration qui reprend presque mot pour mot le libellé du préambule de la loi. Personnellement, j'estime que c'est une sorte de préambule interne.

    Si je ne m'abuse, avec les modifications proposées dans le projet de loi S-4, nous avons maintenant ajouté ce qui suit:

    Il incombe aux institutions fédérales de veiller à ce que soient prises les mesures positives nécessaires pour assurer la mise en oeuvre de cet engagement.

    Cela serait tout aussi simple. Il serait possible de faire appel aux tribunaux si on estimait que le gouvernement ne s'acquitte pas comme il se doit de ses obligations, d'ailleurs vraiment assez vagues, en vertu de l'article 41. Il me semble qu'il faudrait essayer de prévoir, dans les lois, des obligations très précises, énoncées clairement, et peut-être faire des ajouts. Il serait alors possible de se pencher sur la loi au lieu de faire des propositions vagues et de s'attendre à ce que les directives vagues données au gouvernement soient justiciables.

    En fait, il est même possible que cela aille à l'encontre de la Constitution. Pour expliquer comment cela pourrait être le cas, je me réfère à un témoignage.

  +-(1755)  

[Français]

    J'aimerais citer un témoignage qui a été fait par l'honorable député de Outremont alors qu'il était ministre de la Justice sous le gouvernement Chrétien, des années passées. Lorsqu'il a comparu devant le Comité mixte permanent des langues officielles, le 30 avril 2002, l'ancien ministre libéral de la Justice a dit, et je cite:

[...] lorsque nous avons entamé la mise en oeuvre intégrale de l'article 41, il y a quelques années, les gouvernements provinciaux ont manifesté une certaine inquiétude parce qu'ils estimaient à l'époque que l'application d'un tel article empiéterait sur leurs compétences. Nous avons répliqué que c'est l'engagement du gouvernement. Le gouvernement a un rôle à jouer dans l'application de la Partie VII et, plus précisément, de l'article 41. Pour cette raison, nous avons été en mesure de procéder à la mise en oeuvre intégrale de cet instrument, un outil extraordinaire. À mon avis, l'adoption du projet de loi S-32 mettrait en péril cet outil fantastique, car certaines personnes ne se contenteraient pas de soulever des inquiétudes: elles saisiraient les tribunaux pour déclarer invalides l'article 41 et la Partie VII.

[Traduction]

    Il est possible, et c'était l'avis du ministre libéral de la Justice il y a deux ans, que ce projet de loi, identique à sa version antérieure sous un autre numéro, invalide les obligations du gouvernement aux termes de la partie VII de la loi. Il s'agit d'un problème assez grave qui empêche peut-être le projet de loi d'atteindre ses objectifs comme il le devrait.

    Voilà le genre de chose dont on devrait discuter au comité. Voilà le genre de chose qui signifie que nous devrions être très prudents, que nous devrions apporter des amendements au projet de loi au besoin et même, s'il y a lieu, le renvoyer au Sénat sous une forme modifiée.

    Il nous appartient de veiller à ce que les lois soient adéquates, de voir à ce que tous les projets de loi quittant cette enceinte permettent d'atteindre les objectifs énoncés. Une fois modifié, ce projet de loi pourrait sans doute y parvenir. S'il n'est pas modifié et s'il ne règle pas certains problèmes dont j'ai fait état aujourd'hui, et il y en aura d'autres, il me semble que nous irons dans une direction diamétralement opposée à ce que nous voulions initialement. À titre de législateurs, nous sommes tenus d'agir prudemment et de chercher à rédiger le meilleur projet de loi possible sur ce sujet, comme sur tous les autres sujets dont nous sommes saisis d'ailleurs.

[Français]

+-

    M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Madame la Présidente, avant de parler plus précisément du projet de loi S-4, je tiens d'abord à rappeler que je siège au Comité permanent des langues officielles depuis plusieurs années et que j'ai entendu beaucoup témoignages sur la pertinence de rendre exécutoire la partie VII de la Loi sur les langues officielles.

    J'ai même travaillé, à un certain moment, avec différents experts, juristes et constitutionnalistes sur la possibilité de la modifier moi-même et de déposer un projet de loi pour rendre exécutoire cette partie VII de la Loi sur les langues officielles. Par conséquent, le Bloc québécois n'a pas une position campée sur le fait qu'on ne veuille absolument pas rendre exécutoire ladite partie.

    Cela étant dit, j'ai le plaisir d'intervenir sur le projet de loi S-4, qui modifie la partie VII de la Loi sur les langues officielles. La modification du projet de loi S-4 vise plus particulièrement les articles 41, 42 et 43. Le projet de loi du sénateur Gauthier vise donc à rendre exécutoire la partie VII qui est interprétée jusqu'à aujourd'hui comme étant une déclaration d'intention politique par le gouvernement.

    Faisons un petit historique du projet de loi S-4. Il s'agit du troisième projet de loi présenté au Sénat par le sénateur Jean-Robert Gauthier au cours de la présente législature. Il avait d'abord proposé le projet de loi S-32 à la première session, puis le projet de loi S-11 au cours de la seconde session. Ce sont les deux projets de loi qui ont précédé le projet de loi S-4 qu'on étudie aujourd'hui, qui est rendu aussi loin, les deux précédents étant morts au Feuilleton lorsque la Chambre a été prorogée.

    Comme le député de Glengarry—Prescott—Russell l'a souligné, je me dois à mon tour de reconnaître le travail acharné du sénateur Gauthier pour promouvoir le droit des minorités francophones à l'extérieur du Québec. Le sénateur Gauthier est un ardent défenseur des francophones hors Québec, et c'est tout à son honneur.

    Cependant, après avoir regardé et étudié rigoureusement le projet de loi devant nous, force nous est de constater que nous ne pouvons l'accepter, à moins qu'il ne soit modifié pour répondre aux impératifs constitutionnels auxquels doit répondre toute loi. Je m'explique.

    À l'article 41 de la Loi sur les langues officielles, et je cite:

    Le gouvernement fédéral s'engage à favoriser l'épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada et à appuyer leur développement, ainsi qu'à promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français et de l'anglais [...]

    Cette dernière partie de l'article 41 est importante:

[...] dans la société canadienne.

    Il me semble que la portée de l'article 41 est trop vaste et surtout trop vague. On devrait éliminer la référence à la société canadienne et préciser «dans le respect des compétences des provinces», car nous voulons que le gouvernement respecte et applique la loi au sein de ses juridictions propres. À mon avis, tel est l'esprit de la loi. C'est ce qui est sous-entendu dans la loi, mais ce n'est malheureusement pas ce qui est écrit.

    Nous voulons donc que le gouvernement fédéral respecte et applique la Loi sur les langues officielles au sein de ses juridictions propres et non dans l'ensemble de la société canadienne, faisant fi de ses obligations constitutionnelles. Je suis convaincu que le sénateur Gauthier a comme intention ce que je viens de dire, c'est-à-dire que le gouvernement fédéral intervienne au sein de ses propres champs de juridiction.

    Je suis convaincu que le parrain du projet de loi, le député de Glengarry—Prescott—Russell, a aussi cette intention, mais ce n'est pas clair. C'est ce qui pose problème, et je le démontrerai un peu plus tard.

    Dans l'article 43, nous retrouvons encore une fois une référence à la société canadienne dans son ensemble, et je cite:

    Le ministre du Patrimoine canadien prend les mesures qu'il estime indiquées pour favoriser la progression vers l'égalité de statut et d'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne [...]

    Plus préoccupants sont les alinéas d) et f) du paragraphe 43(1).

    Je cite l'alinéa 43(1)d):

pour encourager et aider les gouvernements provinciaux [...]

  +-(1800)  

    Le paragraphe 43(1) f) est plus préoccupant encore. On y lit:

[...] pour encourager les entreprises, les organisations patronales et syndicales, les organismes bénévoles et autres à fournir leurs services en français et en anglais [...]

    Voici entre autres les principales raisons qui nous permettent de conclure que, tel que présenté aujourd'hui, le projet de loi S-4 ne rencontre pas les objectifs louables qu'il s'était fixé au départ, c'est-à-dire encourager l'épanouissement des minorités francophones et protéger leurs droits.

    Plus préoccupant encore est le questionnement sur sa constitutionnalité, tel qu'il est écrit aujourd'hui. Le ministre de la Justice de l'époque, le député d'Outremont, nous faisait part de ce questionnement. Je vais le citer, lorsqu'il a comparu devant le comité le 30 avril 2002. Je pense que c'est important, pour amender et modifier le projet de loi, qu'on entende bien les avertissements qui nous ont été servis.

    Cela dit, comme ministre de la Justice, je dois mettre un bémol sur l'outil utilisé et la méthode utilisée. Pourquoi? La disposition de l'article 41 existe depuis quelque 15 ans au moment où on se parle. L'article 41, somme toute, est une déclaration politique qui a énormément de portée et qui lie le gouvernement, mais au moment où on l'a adoptée, elle préoccupait énormément l'ensemble des provinces et territoires, l'ensemble de nos partenaires canadiens. Pourquoi? Parce que cette déclaration permettait au gouvernement canadien d'intervenir dans des champs qui ne relevaient pas de sa compétence, disait-on, tellement l'emprise de l'article 41 semblait grande.

    C'est le ministre de la Justice de l'époque qui disait cela. Il continuait en disant ceci:

    À mon point de vue, si on ajoutait à l'article 41 des éléments qui rendraient exécutoire cette partie, on risquerait de mettre en péril l'outil important qu'est cet article. Je soumets très humblement qu'il s'ensuivrait des contestations judiciaires qui mettraient en péril l'article 41. Je pense que cet élément démontre à lui seul l'importance d'aborder l'article 41 dans son sens même, qui est celui d'une déclaration politique.

    Plus loin, il disait:

    À mon avis, l'adoption du projet de loi S-32 [...]

    Il s'agit du projet de loi S-4 devant nous aujourd'hui.

[...] mettrait en péril cet outil [...] car certaines personnes ne se contenteraient pas de soulever des inquiétudes: elles saisiraient les tribunaux pour déclarer invalides l'article 41 et la Partie VII.

    Un avocat général, Warren J. Newman, de la Section du droit administratif du ministère de la Justice, disait ceci au Comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles, le 6 mars 2002:

    Au moment de la présentation de la Loi sur les langues officielles en 1988, certaines provinces se sont interrogées sur la validité constitutionnelle de la Partie VII, parce que les objectifs dépassent largement les champs de compétence législative fédérale. Ces provinces ont été rassurées par le fait que cette partie de la loi est fondée sur le pouvoir fédéral de dépenser, et parce que la Partie VII n'est pas de nature réglementaire mais plutôt de nature «programmatoire».

    Je souligne tout simplement que, de l'avis de plusieurs juristes, cet engagement n'est probablement pas justiciable. D'ailleurs, l'honorable sénateur Beaudoin, dans son excellent ouvrage sur le fédéralisme au Canada, a mentionné que la cour pourrait dire que le fédéral doit s'engager, mais elle ne peut se prononcer sur les sommes dépensées. Ce serait intervenir dans la sphère parlementaire et ce, par rapport à l'engagement constitutionnalisé.

    Ce que le ministre de la Justice de l'époque est venu nous dire, c'est que si le projet de loi S-4 était adopté tel que libellé en ce moment, il y aurait plusieurs levées de bouclier de la part des provinces. Il y aurait probablement un recours devant la Cour suprême pour contester la constitutionnalité de la Loi sur les langues officielles telle que modifiée, et que fort probablement ces provinces obtiendraient gain de cause. La Loi s'en trouverait ainsi affaiblie et les droits des minorités francophones aussi, par la même occasion.

    Je sais que les francophones vivant en situation minoritaire en ont assez des débats et des tergiversations, mais il ne faut pas leur nuire davantage en voulant les aider de bonne foi.

    Un aspect que l'on oublie souvent de rappeler dans un débat comme celui-ci est le fait que les deux communautés minoritaires du Québec et du Canada ne sont pas sur un pied d'égalité. Certaines communautés francophones du Canada demeurent très fragiles. En effet, le taux d'assimilation des francophones continue d'augmenter.

    Une lacune majeure de la Loi sur les langues officielles repose sur le fait qu'elle ne reconnaît pas l'asymétrie qui existe présentement au Canada au niveau des minorités linguistiques. En effet, la situation des francophones hors Québec est beaucoup plus préoccupante et précaire que celle des Anglo-Québécois et la loi doit le reconnaître.

    Pour ce qui est de l'article 41, éliminons la référence à «la société canadienne» et remplaçons la par «dans le respect des compétences des provinces». Nous devons préciser la portée de l'article 41. C'est très important dans la loi.

  +-(1805)  

    Je suis convaincu qu'autant le sénateur Gauthier que le parrain du projet de loi, le député de Glengarry—Prescott—Russell, étaient—et sont toujours—de bonne foi lorsqu'ils ont déposé ce projet de loi, et je leur assure mon entière collaboration

  +-(1810)  

    Toutefois, le Bloc québécois ne peut appuyer un projet de loi qui est, selon toute vraisemblance, une ingérence dans les champs de compétence provinciale, qu'il serait immédiatement contesté devant les tribunaux et n'aiderait d'aucune façon le respect des droits des minorités linguistiques.

    Les droits des francophones du Canada sont bafoués depuis si longtemps que c'est une solution sans équivoque que nous devons trouver pour résoudre cette situation, et non pas une loi qui entraînera encore une fois contestation judiciaire par-dessus contestation judiciaire. Les francophones ont assez attendu. Ils veulent une vraie protection de leurs droits.

    Cela dit, le Bloc québécois serait favorable à des modifications qui permettraient de renforcer l'application de la loi et la présence du français dans les institutions fédérales, en autant que celles-ci ne viennent pas affaiblir le statut du français au Québec.

+-

    M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Madame la Présidente, j'aimerais tout d'abord remercier le député de Glengarry—Prescott—Russell de parrainer ce projet de loi du sénateur Jean-Robert Gauthier, un homme qui désire beaucoup faire reconnaître et respecter les droits linguistiques, spécialement ceux des minorités au pays.

    Il me fait plaisir de débattre le projet de loi S-4 sur les langues officielles qui fait la promotion du français et de l'anglais. Tout d'abord, j'aimerais féliciter les membres du Comité sénatorial des langues officielles ainsi que les membres de l'autre Chambre d'avoir adopté à l'unanimité et sans amendement le projet de loi S-4. J'aimerais également féliciter le sénateur Gauthier pour son dévouement et son acharnement dans l'avancement de la dualité linguistique au pays.

    Le projet de loi débattu aujourd'hui est sans aucun doute un pas dans la bonne direction, dans l'avancement des langues officielles au Canada. Depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur les langues officielles, en 1988, le gouvernement a toujours fait part de ses bonnes intentions pour les langues officielles, mais il n'a jamais voulu aller plus loin et reconnaître le caractère exécutoire de l'article 41 de la partie VII de la Loi sur les langues officielles.

    Plus tôt, le parrain du projet de loi disait que cela datait peut-être même d'avant 1988. Il existe encore un argument à savoir si cet article est exécutoire ou non exécutoire. Après 15 ans, on se pose encore la même question. Il est temps de clarifier cette loi.

    Ne pas reconnaître le caractère exécutoire de l'article 41 signifie que le gouvernement n'a jamais voulu se mettre dans l'obligation, face à la loi, d'assurer la progression vers l'égalité de statut et d'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne.

    Qu'est-ce que cela veut dire pour les langues officielles de notre pays? Cela veut dire que le présent gouvernement manque de sérieux et qu'il est contre-productif dans son engagement d'assurer la dualité linguistique au Canada.

    Citons pour exemple le plan d'action Dion sur les langues officielles. Ce plan très ambitieux engage le gouvernement fédéral à investir 751 millions de dollars sur cinq ans pour améliorer le statut des deux langues officielles et protéger les minorités linguistiques.

    En passant, je suis obligé de dire aussi que parfois, je pense qu'on utilise ces 751 millions de dollars pour aller en cour d'appel et faire renverser la décision chaque fois que les francophones ou les anglophones—la plupart du temps, ce sont les francophones—gagnent une cause en cour. C'est là que je dis qu'il y a un manque de sérieux.

    Je ne remets pas en question le plan d'action sur les langues officielles, qui déborde de bonnes intentions, mais il n'existe aucun mécanisme pour l'épauler, dans le développement des communautés de langues officielles, sur le plan législatif.

    C'est un manque de sérieux et c'est contre-productif lorsque le gouvernement s'engage à favoriser l'épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada en investissant plus de 750 millions de dollars, mais que les minorités linguistiques ne peuvent même pas aller devant les tribunaux pour faire respecter leurs droits linguistiques. Si nous ne pouvons pas nous présenter devant les tribunaux pour faire valoir nos droits linguistiques, nous nous trouvons dans une position de recul dans bien des régions du pays.

    Depuis son entrée en vigueur, l'article 41 de la partie VII de la Loi sur les langues officielles est demeuré un tigre de papier, faible et sans défense contre le pouvoir de la majorité sur les minorités francophones et anglophones du pays.

    Le projet de loi S-4 est bien accueilli par le NPD, car il vise à renforcer et à donner des dents à une loi qui n'a présentement aucune force d'exécution. Le taux d'assimilation est en hausse et constitue un problème sérieux et même critique partout au pays. Il est donc obligatoire que le gouvernement donne aux minorités linguistiques tous les outils nécessaires à leur épanouissement et à leur survie.

    Je trouve très malheureux que le projet de loi S-4 soit le troisième projet de loi à être présenté au gouvernement, après le projet de loi S-32 en 2001 et le projet de loi S-11 en 2003, visant à donner des dents à la Loi sur les langues officielles.

  +-(1815)  

    Face à ces projets de loi, le gouvernement libéral a toujours soutenu que reconnaître le caractère exécutoire de la Loi sur les langues officielles amenait trop de cas de minorités linguistiques devant les tribunaux.

    Cet argument est facile et très contestable. Je ne crois pas que les minorités abuseraient de leurs droits d'avoir recours aux tribunaux mais, si c'est le cas, ce serait un signe important des lacunes du gouvernement en matière de protection des minorités linguistiques et du recul de nos communautés de langues officielles en milieu minoritaire.

    Nous avons besoin d'une loi forte pour protéger les minorités linguistiques et faire reculer l'assimilation au pays. Le gouvernement fédéral doit prendre ses responsabilités et renforcer son engagement à l'endroit des minorités linguistiques.

    Les investissements du gouvernement pour appuyer les minorités linguistiques doivent être accompagnés par un droit de recours devant les tribunaux en vertu de l'article 41 de la partie VII de la Loi sur les langues officielles pour leur donner du poids et une plus grande signification.

    Un droit qui ne peut pas être défendu n'est pas un droit, mais une simple affirmation de bonne volonté qui demeure vulnérable et sujet à être piétiné. Je ne mets pas en doute la bonne foi de la majorité, mais les chiffres démontrent que les droits des minorités francophone et anglophone du pays sont de plus en plus bafoués.

    Le NPD favorise la diversité linguistique et culturelle comme une valeur capitale de notre pays. Il accueille donc favorablement le projet de loi S-4 comme une façon de protéger et d'assurer la vitalité des minorités linguistiques. J'espère avoir la chance d'étudier ce projet de loi profondément en comité.

    La seule manière pour le comité d'étudier ce projet de loi, c'est si le Parlement vote en sa faveur; ainsi, il sera envoyé au comité. Là, je rejoins mon collègue du Bloc québécois qui disait tout à l'heure qu'avec des amendements, on pourrait peut-être avoir un meilleur projet de loi. Avec des amendements, il y a peut-être des choses qu'on pourrait changer et qui respecteraient les compétences provinciales. Or, le seul endroit où cela peut se faire, c'est au comité. Si on réussit donc à envoyer le projet de loi au comité, on proposera des amendements.

    C'est pour cela que je demande à mes collègues d'appuyer ce projet de loi pour qu'on puisse l'envoyer au comité et faire en sorte qu'il revienne au Parlement. Nous aurions ainsi la chance de voter deux fois sur ce projet de loi. Donnons-nous la chance de pouvoir l'étudier en comité, d'y apporter les amendements qui doivent être faits, mais n'allons pas à rebours en disant: non.

    Je trouve que c'est important. On pourrait faire venir des personnes compétentes au comité, et elles pourraient nous aider. Je suggère cet exemple: le professeur Michel Doucet de l'Université de Moncton. C'est une personne très qualifiée sur les plans constitutionnel et linguistique. On pourrait inviter des personnes de son calibre, et je suis certain que mes collègues de la Chambre connaissent d'autres personnes qualifiées qui seraient capables de nous éclairer.

    Pour ces raisons, il ne faut surtout pas dire non à ce projet de loi en cet instant, parce que c'est si important. C'est comme de dire à des personnes: «On aimerait que vous ne contreveniez pas à la loi quant à la vitesse sur la route», alors qu'en fait, il n'y aurait pas de loi pour arrêter ces personnes qui conduisent trop vite. Je trouve que cela, c'est la même chose.

    Je veux féliciter le gouvernement qui, en 1988, a établi une loi sur les langues officielles. Toutefois avoir une loi qui n'a pas de mordant, c'est comme ne pas avoir de loi du tout.

    Rappelons-nous un exemple dont j'ai déjà parlé ici, à la Chambre des communes. Il s'agit de l'histoire des inspecteurs des aliments. Une cause a été gagnée devant les tribunaux au Nouveau-Brunswick, et le même gouvernement libéral en appelle de cette décision.

    La question est à savoir si loi a des dents. On va le savoir. Cependant, avec un projet de loi comme celui-ci, on pourrait le dire. C'est pour cela que je demande à mes collègues de la Chambre de vraiment appuyer les minorités dans notre pays et ainsi de donner une loi pour nous aider à nous assurer que les minorités seront protégées.

  +-(1820)  

+-

    M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir aujourd'hui de prendre la parole à la Chambre sur un sujet aussi important que celui sur la Loi sur les langues officielles. Cela fait déjà un certain temps que des discussions se tiennent entre parlementaires sur la pertinence ou non de revoir la Partie VII de cette loi, promulguée en 1969 et révisée en 1988.

    Présenté au Sénat par le sénateur Jean-Robert Gauthier et parrainé à la Chambre des communes par le député de Glengarry—Prescott—Russell, le projet de loi S-4 propose, grosso modo, de rendre exécutoire la Partie VII de la Loi sur les langues officielles. Cette partie concerne l'engagement du gouvernement fédéral à favoriser l'épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada, à appuyer leur développement et à promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne. C'est le fameux article 41, qui est celui que l'on propose de modifier. On ajouterait deux paragraphes à l'engagement, et je cite:

    (2) Il incombe aux institutions fédérales de veiller à ce que soient prises les mesures positives nécessaires pour assurer la mise en oeuvre de cet engagement.

    De plus:

    (3) Le gouverneur en conseil peut, par règlement visant les institutions fédérales autres que le Sénat, la Chambre des communes et la Bibliothèque du Parlement, fixer les modalités d'exécution des obligations que la présente partie leur impose.

    Puis il y a l'article 43 qui serait aussi modifié par le projet de loi S-4 et qui indiquerait que:

    Le ministre du Patrimoine canadien prend les mesures nécessaires pour assurer la progression vers l'égalité de statut et d'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne [...]

    C'est ce qu'on propose plutôt que «les mesures qu'il estime indiquées pour favoriser la progression vers l'égalité de statut et d'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne».

    Finalement, le paragraphe 77(1) se lirait comme suit:

    Quiconque a saisi le commissaire d'une plainte visant une obligation ou un droit prévu aux articles 4 à 7 et 10 à 13 ou aux parties IV, V, ou VII, ou fondée sur l'article 91, peut former un recours devant le tribunal sous le régime de la présente partie.

    Le problème que tente de solutionner le projet de loi concerne l'inefficacité actuelle de la mise en oeuvre de cette loi. On sait tous très bien que les institutions fédérales, entre autres, ne respectent pas, depuis 1969 et dans une large mesure, la Loi sur les langues officielles. En effet, l'attitude de certains ministères et institutions fédérales est parfois devenue, avec le temps, carrément arrogante. Cela est rendu à un point tel que de nombreux ministères et organismes présentent, années après années, des rapports annuels systématiquement en contravention avec la Loi sur les langues officielles. Pire encore, ils déposent des plans d'action qui annoncent impunément à l'avance qu'ils ne respecteront pas la loi dans les années à venir.

    Que fait le gouvernement pour respecter la Loi sur les langues officielles? Assurément, il fait trop peu. En effet, cette loi est constamment bafouée par de nombreux ministères et institutions fédérales. Cela encourage évidemment ceux-ci à persévérer dans leur attitude de «je m'en foutisme» en matière de respect de la Loi sur les langues officielles.

    Si le gouvernement ne fait rien c'est, dit-on, parce que la loi n'aurait pas assez de mordant. N'étant qu'une déclaration de bonne intention, la Partie VII de la loi ne permettrait pas, dans sa forme actuelle, de contraindre les institutions délinquantes à se conformer à la loi, puisqu'elle n'est pas exécutoire.

    Voilà la principale raison qui nous amène aujourd'hui à débattre de la modification proposée à cette partie de la Loi sur les langues officielles: pour que celle-ci ait plus de dents, en somme, pour qu'elle ait une portée exécutoire plutôt qu'une portée simplement déclaratoire. L'intention est, à n'en pas douter, louable.

  +-(1825)  

    Par contre, je me questionne sur certains points. D'abord, l'objectif du projet de loi S-4 est de rendre exécutoire la partie VII de la Loi sur les langues officielles. Le problème, c'est que la partie VII vise à étendre la portée de la loi à l'ensemble de la société canadienne, et c'est précisément la raison pour laquelle cette partie n'était pas exécutoire dès sa promulgation en 1988. C'est précisément pour cela que cette partie avait reçu un traitement particulier lors de sa rédaction. En effet, il y avait eu une importante levée de boucliers de la part de les provinces qui ne pouvaient accepter une telle ingérence dans leurs champs de compétences.

    Ce refus historique est aujourd'hui encore le nôtre.

    De plus, n'est-il pas trop tôt pour présenter ce projet de loi? Je sais que le Comité permanent des langues officielles prévoit travailler sur la partie VII de la loi au cours des prochaines semaines. D'ailleurs, le ministre de la Justice sera le témoin de la réunion du comité de mardi prochain. Le dernier rapport du comité sur ce sujet, un rapport intérimaire de surcroît, remonte je crois à la 35e législature.

    Il y a longtemps que l'on discute de la partie VII de la Loi sur les langues officielles à la Chambre des communes, sans pour autant en être arrivé à des conclusions satisfaisantes. Je ne crois pas que toutes les questions ont trouvé des réponses satisfaisantes, d'un côté ou de l'autre du Parlement.

    Je me demande donc pourquoi on accélère ainsi le processus législatif de ce projet de loi, alors qu'il y a encore tant de questions.

    Voici ces questions. Quelle est la portée effective de cette modification législative proposée? Pourquoi, selon le sénateur Gauthier lui-même, tous les ministres de la Justice sans exception ont-il tenu à interpréter la partie VII comme étant déclaratoire? Pourquoi le précédent ministre de la Justice refusait-il de la rendre exécutoire? Une province pourrait-elle saisir les tribunaux sur la constitutionnalité de la partie VII de la loi? Cette possibilité est-elle fondée? Est-elle légitime? Les opinions divergent à cet égard. N'existe-t-il pas déjà une panoplie de recours possibles pour favoriser l'épanouissement des minorités linguistiques? Est-ce que le gouvernement les applique? Les utilise-t-il? Fonctionnent-ils?

    Je crois que le véritable problème est plutôt dû au fait qu'il n'y a pas de volonté réelle de la part du gouvernement fédéral, et ce, depuis les premiers balbutiements de la Loi sur les langues officielles. Cela avait fait dire à la commissaire aux langues officielles qu'il y avait un important problème de leadership au gouvernement en matière de langues officielles.

    J'ai envie de vous dire que telle est l'évidence. Lorsque le gouvernement ne parvient pas à faire respecter une loi en vigueur depuis 35 ans, une loi qu'il dit être au coeur même de l'identité du pays...

  +-(1830)  

[Traduction]

+-

    Le président suppléant (Mme Hinton): À l'ordre, s'il vous plaît. L'heure réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée, et l'article retombe au bas de la liste de priorité du Feuilleton.

-Motion d'ajournement

[L'ajournement]

*   *   *

    L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

*   *   *

[Français]

-L'environnement

+-

    M. Serge Cardin (Sherbrooke, BQ): Madame la Présidente, l'agrandissement du site d'enfouissement de Coventry, au Vermont, qui menace bien sûr l'eau potable du lac Memphrémagog, est un dossier mettant en scène deux pays. Donc, la population est à même de s'attendre à recevoir le soutien du ministre des Affaires étrangères.

    Lundi dernier, le ministre me disait que les autorités du Vermont nous ont assurés que les observations du Québec seront traitées au même titre que celles provenant du Vermont. Ce n'est pas nécessairement rassurant, puisque d'un côté, au Vermont, avec l'agrandissement du site d'enfouissement, les gens auront des revenus supplémentaires substantiels dans l'opération de ce site, pendant que de l'autre côté de la frontière, de ce côté-ci, au Québec, il y a des risques importants pour la pollution de la nappe phréatique, ce qui met en danger l'eau potable.

    Le ministre nous disait aussi que la MRC de Memphrémagog et la Ville de Sherbrooke participent au processus et songent à demander des droits de participation en tant que parties, et qu'elles auraient tous les privilèges, incluant la possibilité d'interjeter appel une fois la décision rendue.

    Le ministre nous disait aussi que nous aurons la chance de faire valoir notre position devant les instances américaines appropriées. Si cela n'était pas suffisant ou si nous n'avions pas la chance de nous faire entendre correctement, évidemment, il nous resterait la Commission mixte internationale, mais c'est toujours en dernier ressort.

    Pendant ce temps, les fonctionnaires du ministre se contentent de prendre de l'information, agissent comme des observateurs et laissent les gens du milieu se débrouiller tout seuls. Ils disent aussi qu'ils interviendront si cela ne fonctionne pas et qu'ils seraient prêts, à ce moment-là, à intervenir auprès de la Commission mixte internationale.

    Ce n'est pas ce que les gens attendent. Toutes les interventions effectuées par les gens du milieu et par les intervenants de la MRC de Memphrémagog et la Ville de Sherbrooke coûtent très cher. Ces derniers s'attendent à ce que le ministre fasse peut-être sa part, compte tenu de l'aspect étranger de la situation.

    Voici ma première question. Le ministre apportera-t-il une aide financière pour toutes ces démarches entre les deux pays, pour aider aussi le milieu, la Ville de Sherbrooke et la MRC de Memphrémagog? Également, toutes les interventions de ces gens exigent beaucoup d'expertises. Le ministre leur apportera-t-il un soutien technique?

    Le cas de Sherbrooke et de la MRC de Memphrémagog implique beaucoup d'actions. C'est une situation que je pourrais qualifier de cas type. Le ministre est-il au courant de toutes les situations semblables qui existent le long de la frontière canadienne et québécoise? Le cas échéant, fera-t-il en sorte de prévenir afin que cela ne se reproduise pas?

    Par l'intervention de la Commission mixte internationale, il pourrait établir, dans le cadre de la Loi sur les eaux limitrophes, une politique claire et précise dans les cas de sites d'enfouissement près des eaux et des rivières qui servent à l'alimentation humaine.

    J'aimerais obtenir des réponses de la part du ministre des Affaires étrangères.

+-

    L'hon. Dan McTeague (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Madame la Présidente, nous avons bien écouté l'intervention du député. C'est la deuxième fois qu'il pose une question à ce sujet et je sais qu'une inquiétude existe. Selon le député il existe un problème; nous le connaissons car il a été soulevé par des députés libéraux, soit le député de Compton—Stanstead et celui de Brome—Missisquoi, à plusieurs reprises.

    Le gouvernement s'intéresse beaucoup au dossier. Il faut bien comprendre que nous sommes en train de suivre les différentes étapes de cette situation; nous devons suivre le processus requis.

    Évidemment il y a deux choses. La situation du site d'enfouissement de Coventry demeure une décision du Vermont, et le député comprend très bien cela. En effet ses collègues de Compton—Stanstead et de Brome—Missisquoi se sont déjà rendus au Vermont, avec des personnes de la région, pour rencontrer les autorités concernées de l'État du Vermont et les représentants des associations responsables du processus, comme le Vermont Solid Waste Management Program. Le processus de l'État du Vermont est connu comme étant l'Act 250 Process.

    Je veux signaler au député que si vraiment il est question d'aide—il parle d'aide financière—, premièrement, il faut souligner que les personnes qui ont de l'expérience en environnement, les experts qui ont des choses à dire sur la situation de l'eau potable peuvent facilement venir au secours des agences. Actuellement, des personnes nous apportent leurs connaissances. Nous savons aussi la position prise par le gouvernement du Québec.

    Cependant il faut vraiment savoir—et le député le sait très bien—que le fait d'aller devant la Commission mixte internationale est un recours de dernière instance. Il faut commencer par le début du processus et non par la fin. On comprend très bien ce qui arrive et ce qu'en pensent les représentants du Vermont, c'est-à-dire d'avoir un agrandissement du site d'enfouissement. Cependant, il faut prendre en considération qu'il y a des étapes que nous devons suivre.

  +-(1835)  

[Traduction]

    Il devrait être évident pour quiconque ici présent que ce que le député demande ce n'est pas seulement d'aller devant la commission mixte internationale qui, comme nous l'avons dit au député à maintes reprises, achève maintenant son travail, mais bien de l'argent. Que demandera-t-il ensuite?

    En réalité, nous appuyons carrément les électeurs qui se préoccupent à juste titre de l'eau potable, de l'eau qui n'est d'aucune façon compromise par la proposition faite au Vermont.

[Français]

    Ce n'est pas la première fois, et ce ne sera pas la dernière comme l'a bien dit le député. Le ministre a indiqué, le 19 avril, que:

    Les autorités du Vermont nous ont assurés que les observations du Québec seront traitées au même titre que celles provenant du Vermont.

    C'est vrai. Mais le ministre a aussi dit que, et je cite:

[...] la municipalité régionale de comté [...] participe au processus et songe demander des «droits de participation en tant que partie».

    Il a continué en disant qu'il y avait d'autres étapes. Il y a l'Environmental Protection Agency, il y a aussi des fonctionnaires du gouvernement du Vermont.

    Nous avons des choses à faire. C'est une question qui ne sera pas résolue aujourd'hui et aucune décision n'a été prise. Bien que je comprenne l'inquiétude du député, nous en sommes toujours au constat du problème soulevé par les députés de Compton—Stanstead et de Brome—Missisquoi.

+-

    M. Serge Cardin: Madame la Présidente, mon collègue fait référence souvent aux députés de Compton—Stanstead et de Brome—Missisquoi et je comprends sa préoccupation à les faire réélire dans la région. Cependant ce n'est pas cela l'important; l'important, c'est la population.

    Le cas type que nous vivons dans la région de Magog et de Sherbrooke met en scène deux pays. Il est faux de dire que la Commission mixte internationale n'agit qu'en fin de processus. Dans le cadre du Traité des eaux limitrophes, on peut participer, entreprendre des actions quand il y a de réelles préoccupations dans le domaine de l'environnement mettant en scène, bien sûr, les eaux limitrophes.

    À ce moment-là, je crois que ce devrait être la volonté du gouvernement d'intervenir. En effet, dans les domaines environnementaux, on ne peut se satisfaire que de la bonne foi des parties, surtout des parties étrangères au dossier. Donc, le ministre des Affaires étrangères doit s'impliquer rapidement et poser des gestes concrets.

  -(1840)  

+-

    L'hon. Dan McTeague: Madame la Présidente, j'ai fait allusion au député de Compton—Stanstead simplement parce que ce député travaille avec d'autres personnes. Bien entendu, le député le sait, nous parlons du sort et de l'intérêt de tout le monde, non seulement celui des gens de la région, mais aussi celui du gouvernement fédéral.

    Le gouvernement du Canada et Environnement Canada ont obtenu des documents techniques et sont en train de procéder à l'analyse de l'information qu'ils contiennent. Nous avons aussi des informations que nous devons concilier dans ce dossier. On nous a aussi fournis des informations concernant le processus d'octrois. Cela permettrait aussi à notre ministère et à d'autres ministères de faire front commun non seulement pour les citoyens qui demeurent là, mais aussi pour le gouvernement qui aurait le pouvoir de vérifier les dossiers pour s'assurer que les propos sont fondés sur quelque chose au sujet duquel les deux pays peuvent en fin de compte fonctionner.

[Traduction]

    Il nous faut une politique de l'eau sur laquelle les deux parties peuvent s'entendre et où chaque partie comprendrait les obligations de l'autre.

-

    La présidente suppléante (Mme Hinton): La motion d'ajournement étant réputée adoptée, la Chambre s'ajourne jusqu'à 10 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

    (La séance est levée à 18 h 41.)