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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent des finances


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 27 octobre 2005




¿ 0935
V         Le président (M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.))
V         Mme Sharon Chisholm (directrice générale, Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine)
V         M. Mark Holland (Ajax—Pickering, Lib.)
V         Le président
V         Mme Sharon Chisholm

¿ 0940
V         Le président
V         Mme Debbie Griffith (présidente, Rassemblement canadien pour l'alphabétisation)
V         Mme Carey Rigby-Wilcox (porte-parole, Learner Advisory Network, Rassemblement canadien pour l'alphabétisation)

¿ 0945
V         Mme Debbie Griffith

¿ 0950
V         Le président
V         M. John Murphy (président, Conseil national du bien-être social)

¿ 0955

À 1000
V         Le président
V         Mme Anuradha Bose (directrice exécutive, Organisation nationale des femmes immigrantes et des femmes appartenant à une minorité visible au Canada)
V         L'hon. Maria Minna (Beaches—East York, Lib.)
V         Le président
V         L'hon. Maria Minna
V         Mme Anuradha Bose

À 1005

À 1010
V         Le président
V         Mme Anuradha Bose
V         Le président
V         M. John Baldwin (directeur, Études et analyses micro-économiques, Statistique Canada)

À 1015
V         Le président
V         M. John Baldwin

À 1020
V         Le président
V         M. John Baldwin
V         Le président
V         Debbie Zimmerman (directrice générale, Conseil canadien de l'horticulture, Grape Growers of Ontario)

À 1025

À 1030
V         Le président
V         Debbie Zimmerman
V         Le président
V         M. Norman Beal (président, Conseil d'administration, Wine Council of Ontario, Canadian Vintners Association)

À 1035
V         Le président
V         Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Nord, NPD)

À 1040
V         Mme Sharon Chisholm
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         Mme Debbie Griffith
V         Le président
V         Mme Anuradha Bose
V         Le président
V         M. Charlie Penson (Peace River, PCC)

À 1045
V         M. Norman Beal
V         M. Charlie Penson
V         M. Norman Beal
V         M. Charlie Penson
V         M. Norman Beal
V         M. Charlie Penson
V         M. Norman Beal
V         M. Charlie Penson
V         M. Norman Beal
V         M. Charlie Penson
V         M. Norman Beal
V         M. Charlie Penson
V         M. John Baldwin

À 1050
V         M. Charlie Penson
V         M. John Baldwin
V         Le président
V         M. Robert Bouchard (Chicoutimi—Le Fjord, BQ)
V         Mme Sharon Chisholm

À 1055
V         M. Robert Bouchard
V         Mme Debbie Griffith
V         Le président
V         M. Mark Holland
V         Le président
V         M. Mark Holland
V         Mme Debbie Griffith
V         M. Mark Holland

Á 1100
V         Mme Sharon Chisholm
V         M. Mark Holland
V         Le président
V         Mme Françoise Boivin (Gatineau, Lib.)

Á 1105
V         Mme Anuradha Bose
V         Mme Françoise Boivin
V         Le président
V         L'hon. Maria Minna

Á 1110
V         Mme Anuradha Bose
V         L'hon. Maria Minna
V         Mme Anuradha Bose
V         L'hon. Maria Minna
V         Le président
V         M. John Baldwin
V         Le président
V         M. John Baldwin
V         Le président
V         M. John Murphy
V         Le président
V         M. John Murphy
V         Le président
V         M. John Murphy
V         Le président










CANADA

Comité permanent des finances


NUMÉRO 120 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 27 octobre 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¿  +(0935)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.)): Bonjour. Commençons sans plus tarder, car nous avons de nombreux témoins, et nos membres vont vouloir poser des questions. Voici comment nous allons procéder.

[Français]

conformément à l'article 83.1 du Règlement, afin de poursuivre les consultations prébudgétaires de 2005.

[Traduction]

    Les témoins ont sept ou huit minutes chacun pour présenter leurs remarques préliminaires ou des déclarations au sujet de leurs mémoires, puis les membres vont poser des questions.

    J'ai ici la liste des groupes, et nous allons les entendre dans l'ordre. Nous commençons par Mme Sharon Chisholm, de l'Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine.

+-

    Mme Sharon Chisholm (directrice générale, Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine): Bonjour, je suis Sharon Chisholm, directrice générale de l'Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine.

    Aujourd'hui, les quartiers et les collectivités du Canada sont en crise. On constate de plus en plus de pauvreté, de désespoir et de violence dans certaines collectivités, une densité excessive dans d'autres, une érosion des programmes destinés aux nouveaux arrivants qui rend inaccessible l'information sur les ressources, par exemple la façon de trouver un emploi.

    Le prix élevé des logements et l'effritement des soutiens communautaires viennent aggraver la situation et auront une incidence considérable sur la productivité. Voilà le thème de mes commentaires d'aujourd'hui.

+-

    M. Mark Holland (Ajax—Pickering, Lib.): Monsieur le président, j'invoque le Règlement.

    Vous me pardonnerez d'interrompre le témoin, mais il y a une motion devant le comité depuis quelque temps déjà, et je croyais que nous allions régler la question ce matin. Où en sommes-nous? Quand allons-nous examiner cette motion?

+-

    Le président: Cela ne figure pas au feuilleton, et nous n'allons pas en discuter.

    Je suis désolé, madame Chisholm.

+-

    Mme Sharon Chisholm: L'ACHRU a consulté les Canadiens et elle a pris contact avec un large éventail de secteurs liés au logement. Nous avons travaillé entre autre avec Campagne 2000, avec Green Communities Canada, avec la Fédération de l'habitation coopérative du Canada et avec les Églises Unie et anglicane.

    Notre travail a établi un lien indiscutable entre le logement abordable et l'état de santé, et même entre le logement et la réduction des soins de santé.

    Le lien entre le logement abordable et le rendement des enfants à l'école a été démontré. Le fait d'avoir un logement sûr signifie que l'on peut s'intégrer dans un quartier, se faire du capital social, trouver et conserver un emploi. Le fait de vivre dans des logements convenables et abordables permet aux enfants d'échapper à la pauvreté, ce qui leur donne un meilleur départ dans la vie et accroît leurs chances de contribuer utilement à la société.

    Ces dernières années, le gouvernement fédéral a pris certains engagements financiers à l'appui du logement abordable et social. Nos membres éprouvent une immense gratitude pour l'adoption de ces mesures et pour la reconnaissance implicite de l'importance du logement pour le bien-être des collectivités et des citoyens.

    Toutefois, nous déplorons encore que la construction et l'acquisition de nouveaux logements progressent si lentement. En 2001, un financement de un milliard de dollars a été annoncé à Québec, et un montant supplémentaire de 1,6 million de dollars a ensuite été annoncé à l'issue des négociations sur le projet de loi C-48, en juin dernier.

    Pourtant, depuis 2001, on n'a consacré que un demi-milliard de dollars, à peu près, à la création de logements destinés aux Canadiens à faible revenu. Nous ignorons toujours comment les fonds inscrits dans le projet de loi C-48 seront dépensés, même si nous avons très peu de temps pour les dépenser.

    Pourquoi ne pouvons-nous pas mener à bien ces initiatives? De nombreuses familles et de nombreuses collectivités attendent. Il est évident qu'il nous faut apprendre à travailler de concert, au sein des gouvernements et entre gouvernements. Les collectivités veulent participer en tant que partenaires, et nous croyons que les groupes communautaires sont les mieux en mesure de créer des logements d'une façon qui non seulement assure des abris mais aussi garantit de meilleurs résultats de santé, de meilleurs résultats pour les enfants, une plus grande inclusion dans les quartiers et une employabilité accrue, pour ne nommer que quelques-uns des avantages escomptés.

    L'ACHRU recommande donc au gouvernement fédéral de financer la production ou l'acquisition de 25 000 unités de logement abordables et permanents qui s'intégreront bien aux collectivités et renforceront les quartiers et les collectivités pour accroître la productivité. Cela s'est fait par le passé, avec succès, et nous croyons qu'il faut reprendre ce concept.

    Par ailleurs, nous recommandons aux gouvernements fédéral, provinciaux, territoriaux et municipaux de définir leurs objectifs en matière de logement abordable, de fixer des résultats mesurables et d'instaurer un mécanisme d'exécution permanent et prévisible. Il reste encore beaucoup à faire pour en arriver là.

    Nous croyons aussi qu'il faut déterminer des moyens pour reconstituer dans les collectivités la capacité nécessaire pour atteindre ces objectifs. Une telle capacité au niveau communautaire garantira que les initiatives en matière de logement sont exécutées de façon économique, produisent des retombées dans tout le pays et renforcent les collectivités.

    Nous prévoyons que la pauvreté due aux coûts de l'énergie sera criante cet hiver. Nous sommes très heureux des mesures annoncées pour permettre aux familles de rénover leurs logements et d'en améliorer l'efficacité énergétique. Mais selon nous, les coûts de l'énergie vont demeurer élevés, et les familles et les particuliers continueront d'en souffrir. Nous préconisons donc l'implantation d'un programme de vérification de l'efficacité énergétique et d'un programme d'éducation, pour aider les Canadiens à réduire leur consommation d'énergie. Nous pourrons ainsi non seulement diminuer les coûts et allouer une plus grande part du revenu à d'autres besoins essentiels, mais en outre réduire les émissions de gaz à effet de serre. Nous pensons que certains progrès ont été réalisés à cet égard, mais ne négligeons rien et prenons des mesures en matière d'éducation et de vérification.

    Nous proposons d'envisager l'adoption des indicateurs de succès suivants comme résultats mesurables d'un programme de logement convenable, pour que dans des années — dans dix ans, après avoir investi les sommes prodigieuses dont nous parlons aujourd'hui et qui, nous l'espérons, seront confirmées —, nous pourrons constater que des logements de meilleure qualité ont effectivement été construits pour les familles et les particuliers; que les enfants s'en tirent mieux qu'en l'absence de cette initiative; que l'investissement dans le logement s'est traduit directement par une réduction des émissions de gaz à effet de serre; que l'employabilité s'est améliorée dans les collectivités où l'on a réinvesti; que les nouveaux arrivants s'intègrent mieux dans notre pays et ont de meilleures chances de se prévaloir des avantages offerts; et que des programmes de logement ont été mis sur pied pour les Autochtones, des programmes conçus par des Autochtones — « par et pour les Autochtones », monsieur le président, c'est ce que nous souhaitons ici —; et que l'inclusion sociale a progressé dans les collectivités où l'on a réinvesti, afin que les habitants puissent participer à la vie communautaire.

¿  +-(0940)  

    Merci beaucoup de nous avoir écoutés. Nous serons heureux de participer à la discussion.

+-

    Le président: Merci, madame Chisholm.

    Avant de passer au témoin suivant, je signale aux membres que je sais qu'une motion a été déposée, mais je ne vais pas la présenter parce que le comité directeur a décidé que nous n'allions examiner aucune motion.

    J'ai pris connaissance de la motion. Elle n'a rien d'urgent. Nous allons l'examiner en temps et lieu. Si les membres du comité veulent agir autrement, ils le peuvent. Nous procédons ici à des consultations prébudgétaires et, par respect pour nos témoins, nous allons poursuivre ce processus de consultations prébudgétaires. Ce que vous faites après la séance, ce sont vos affaires. D'accord?

    Accueillons maintenant Mme Griffith, du Rassemblement canadien pour l'alphabétisation.

+-

    Mme Debbie Griffith (présidente, Rassemblement canadien pour l'alphabétisation): Bonjour. Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, recherchistes, je vous remercie de nous donner l'occasion de discuter avec vous aujourd'hui de l'alphabétisation et de ses conséquences sur le progrès et la productivité au Canada. Notre comparution est particulièrement opportune aujourd'hui, car c'est la Journée de l'alphabétisation sur la Colline.

    Je suis ici à titre de directrice administrative du Saskatchewan Literacy Network et de présidente du Rassemblement canadien pour l'alphabétisation, notre coalition nationale. Le RCA représente les groupes d'alphabétisation provinciaux et territoriaux qui, eux-mêmes, représentent des milliers d'intervenants dans le domaine de la littératie au Canada.

    Mon amie Carey Rigby-Wilcox est également venue de la Saskatchewan. Elle est porte-parole des apprenants du RCA, et elle va vous raconter son histoire.

+-

    Mme Carey Rigby-Wilcox (porte-parole, Learner Advisory Network, Rassemblement canadien pour l'alphabétisation): Bonjour. C'est un honneur pour moi d'être ici aujourd'hui.

    Pendant des années, j'ai gardé un secret. J'ai gardé un secret parce que j'avais honte. Je pensais que j'étais la seule personne illettrée au monde. J'ai essayé de garder ce secret pendant des années. Déjà au primaire, je me cachais derrière mes camarades ou j'allais aux toilettes pour éviter de participer aux activités.

    Un jour, nous devions jouer à la bibliothécaire et lire pour la classe. Je me souviens d'avoir pris un livre qu'une bibliothécaire nous avait lu; je l'avais appris par coeur. J'ai pris ce livre et je l'ai lu à la classe, en tournant les pages et en faisant comme si je lisais les mots, mais je ne lisais rien. Lorsque j'ai eu fini, je me suis dit que je m'en étais bien tirée et que personne n'avait deviné mon secret, mais un de mes camarades s'est exclamé « Ce n'est pas ainsi que l'histoire finit! » L'enseignante a dit: « Ça va comme ça, ne t'en fais pas », et elle m'a souri — je n'ai plus jamais eu à lire devant la classe.

    Après cet incident, ma mère m'a envoyée suivre des cours privés après l'école. Le professeur m'a dit que si je me faisais refaire le nez j'arriverais à lire. Dieu merci, ma mère n'a pas suivi son conseil.

    Puis j'ai fréquenté une autre clinique, où on a dit à ma mère que j'avais une déficience mentale et que je ne pourrais jamais fonctionner dans la société. On avait établi ça au moyen de simples tests avec des blocs et des taches.

    Tout a changé lorsque je suis devenue enceinte, à 18 ans. Quelqu'un m'a donné des livres pour enfants. Je tournais les pages et je me suis rendu compte que je ne pouvais même pas lire les mots dans un livre pour enfants. Alors j'ai décidé de demander de l'aide. Je ne voulais pas que mon fils ait honte de sa mère, je ne voulais pas qu'il éprouve les mêmes difficultés que moi. Je suis allée à READ Saskatoon, et j'ai trouvé un bénévole avec qui j'ai travaillé. Aujourd'hui, je me sens libre, parce que je peux lire.

    J'ai quatre enfants, je suis propriétaire d'une entreprise et j'essaie maintenant de parler au nom des apprenants, simplement pour montrer qu'il n'y a rien à craindre, qu'il n'y a rien à cacher, qu'il y a d'autres gens comme vous. Et puis, je veux aussi informer les adultes qui ne se rendent pas compte que certaines personnes ont des difficultés d'apprentissage.

    Je déteste raconter mon histoire, mais je le fais parce que je crois que cela peut aider.

    Je vais maintenant laisser Debbie continuer.

¿  +-(0945)  

+-

    Mme Debbie Griffith: Merci, Carey.

    L'histoire de Carey est une source d'inspiration parce que Carey a eu le courage de demander de l'aide et parce que, heureusement, la collectivité possédait les ressources nécessaires pour fournir cette aide. Des millions de Canadiens n'ont pas les compétences nécessaires pour prospérer et s'adapter à la société et à notre économie de l'information, toujours en évolution. Nous savons qu'ils sont des millions, parce que ce sont les dernières statistiques que Statistique Canada a publiées cette année sur l'alphabétisation au pays.

    La nouvelle étude montre que neuf millions de Canadiens adultes ont beaucoup de difficulté à lire. Un rapport national plus détaillé doit paraître le mois prochain. Les statistiques y seront ventilées par région et, par la suite, par circonscription.

    Ces millions de Canadiens se heurtent à des obstacles de taille: pour trouver et garder un emploi convenable; pour aider leurs enfants à bien démarrer à l'école; pour déchiffrer l'information sur la santé; pour faire leur devoir de citoyens; pour s'adapter à un milieu de travail en constante évolution, faire preuve d'innovation, contribuer à l'économie.

    Cet immense gaspillage de talent coûte cher à la société et à l'économie. Si nous voulons renforcer l'économie et stimuler l'innovation, nous devons exploiter le dynamisme et le talent de tous nos citoyens, y compris des millions que les problèmes liés à l'analphabétisme tiennent en marge de l'économie.

    Il ne faut pas déserpérer. Si le comité cherche à améliorer la productivité, l'alphabétisation est la clé du succès. Un rapport publié ce mois-ci par l'Institut C.D. Howe montre qu'une hausse de un pour cent de l'alphabétisation pourrait relever de 2,5 p. 100 la productivité et entraîner une augmentation permanente de 1,5 p. 100 du PIB, ce qui représente 13 milliards de dollars de plus par année.

    Les auteurs de ce rapport précisent que l'amélioration du niveau d'alphabétisation chez les personnes qui ont le plus de difficulté à lire est plus important pour la croissance économique que la production de diplômés plus compétents. Et tout en relevant la productivité de la nation, vous améliorerez aussi la vie de millions de Canadiens. Les personnes qui ont de la difficulté à lire sont plus touchées par le chômage et occupent plus souvent des emplois mal rémunérés et précaires. Aux plus bas niveaux de l'alphabétisation, une personne sur quatre est en chômage. Aujourd'hui plus que jamais, il faut savoir lire non seulement les mots mais aussi le monde. La capacité de lecture est essentielle pour déchiffrer le monde contemporain.

    Ce n'est que récemment que le gouvernement fédéral a commencé à manifester le leadership qui nous paraît nécessaire pour relever les défis de l'alphabétisation. Le soutien à l'alphabétisation est très inégal au pays. La plupart des organismes d'alphabétisation manquent de ressources et sont débordés de travail, ils sont peu en mesure de planifier à long terme. Seul un très petit pourcentage de Canadiens qui pourraient profiter de services d'alphabétisation sont effectivement aidés.

    Mais il y a d'autres bonnes nouvelles. Dans le dernier budget fédéral, le gouvernement s'est engagé à agir sur le front de l'alphabétisation. La ministre d'État Claudette Bradshaw a donc collaboré avec nos organisations et avec les fonctionnaires fédéraux pour dresser un plan. Pour alimenter ce processus, les milieux de l'alphabétisation ont été priés d'élaborer leur propre plan d'action sur dix ans. Le sommaire de ce plan se trouve dans les trousses de la Journée de l'alphabétisation que je vous ai distribuées.

    Notre principale recommandation porte sur l'appui d'une stratégie d'alphabétisation pancanadienne. Nous demandons un investissement de cinq milliards de dollars en dix ans, pour accroître sensiblement les compétences de lecture d'au moins un million de Canadiens. Cet engagement se compare aux investissements consentis dans d'autres pays où l'on comproend que l'alphabétisation des citoyens est essentielle à leur survie économique.

    En mon nom et au nom de Carey, je vous remercie.

¿  +-(0950)  

+-

    Le président: Merci, madame Griffith.

    Accueillons maintenant M. Murphy, du Conseil national du bien-être social.

+-

    M. John Murphy (président, Conseil national du bien-être social): Bonjour, mesdames et messieurs. Je m'appelle John Murphy, je viens de Canning, en Nouvelle-Écosse, et je suis président du Conseil national du bien-être social.

    Comme nombre d'entre vous le savent, le Conseil est un organisme indépendant qui a pour mandat de conseiller le ministre fédéral du Développement social dans les dossiers intéressant les Canadiens à faible revenu et ceux qui vivent dans la pauvreté.

    Je vous remercie de nous donner la possibilité aujourd'hui de traiter du thème de la prospérité et de la productivité et d'exposer les priorités budgétaires du Conseil.

    Le Conseil national du bien-être social attend avec impatience le jour où tous les citoyens du Canada pourront s'épanouir pleinement et participer à l'économie du XXIe siècle.

    Nous partageons la vision qui a été si bien exprimée dans le discours du Trône de 2004, et je cite :

Nous voulons un Canada avec des assises sociales solides, où les gens sont traités avec respect, où ils sont épaulés au besoin, où personne n'est laissé pour compte.

    Cette vision contraste nettement avec la réalité, car le Canada tolère encore une importante pauvreté. En 2003, le pays comptait 4 917 000 personnes pauvres, dont 1 200 000 enfants. Il est tout simplement inacceptable qu'un pays aussi riche que le Canada abandonne à eux-mêmes un si grand nombre de ses citoyens.

    La plupart des gens se demandent pourquoi la pauvreté persiste d'année en année. L'explication est simple, la grande richesse du pays est très mal répartie.

    Environ 4,9 millions de Canadiens ont des revenus qu'il faut bien qualifier de revenus de misère alors qu'une part relativement faible de la population jouit de près de la moitié de tout le revenu personnel au pays.

    Les inégalités sociales sont de plus en plus marquées au Canada, et selon nous s'il y a des baisses d'impôt dans le budget fédéral de 2006 elles devront cibler les citoyens à faible revenu.

    À en juger par les statistiques du revenu entre 1980 et 2001, le marché ne réussit pas à assurer des revenus aux pauvres mais il est très efficace lorsqu'il s'agit d'en assurer aux riches. Au Canada, un grand nombre de pauvres travaillent à temps plein et n'arrivent pas pour autant à joindre les deux bouts. Dans un rapport du Conseil intitulé Un revenu pour vivre?, nous avons montré que les Canadiens qui travaillent à temps plein pendant toute une année au salaire minimum se retrouvent bien en dessous du seuil de la pauvreté.

    Il faut majorer le salaire minimum au Canada. Le gouvernement fédéral doit donner l'exemple aux provinces et aux territoires en augmentant le salaire minimum des travailleurs dont les employeurs sont assujettis à la loi fédérale.

    Nous avons réalisé une vaste étude sur les systèmes d'aide sociale, les revenus du bien-être social et la réforme du bien-être social. À notre avis, la politique canadienne en la matière laisse sérieusement à désirer et est un véritable fiasco. La « main secourable » ne donne rien, et ceux qui doivent vivre de l'aide sociale sont abandonnés à leur sort. En 2004, 1,7 million d'enfants, de femmes et d'hommes vivaient de l'aide sociale au Canada, notre programme de revenu de dernier recours.

    Les revenus de l'aide sociale au pays sont à des niveaux qui ne permettent tout simplement pas aux bénéficiaires de combler leurs besoins les plus élémentaires. Le revenu de l'aide sociale varie selon le lieu où vous vivez au Canada et selon votre type de famille.

    Je vais vous donner quelques exemples de l'insuffisance de ces revenus. Ce sont les statistiques de 2004. Au Manitoba, une personne handicapée recevait 8 576 $ par année de l'aide sociale. Un chef de famille monoparentale avec un enfant vivant à Toronto, en Ontario, touchait 14 251 $, alors que le seuil de la pauvreté était d'environ 25 000 $.

    Il est clair que les taux de l'aide sociale ne tiennent pas compte du véritable coût de la vie. Ils sont fixés de façon arbitraire par les gouvernements provinciaux et territoriaux. Cela doit changer. L'aide sociale doit être calculée en fonction du coût d'un panier à provisions et du coût des services, et les taux doivent être indexés annuellement pour suivre l'inflation.

    Le gouvernement fédéral assume une part du coût de l'aide sociale dans le cadre du Transfert canadien en matière de programmes sociaux. Les réductions draconniennes effectuées par le gouvernement fédéral il y a dix ans ont entraîné une baisse cruelle et persistante des revenus de l'aide sociale.

¿  +-(0955)  

    Le Conseil national du bien-être social recommande au gouvernement fédéral de majorer les transferts et de négocier des normes minimales avec les provinces et les territoires.

    Finalement, le suppément de la Prestation nationale pour enfants, qui réussit à réduire la pauvreté dans les familles ayant un revenu de travail ne profite pas à toutes les familles vivant de l'aide sociale au Canada, car certaines provinces et certains territoires récupèrent ce supplément auprès des familles bénéficiaires de l'aide sociale, les plus pauvres.

    En 2004, la Prestation nationale pour enfants a été récupérée auprès de 255 300 familles monoparentales ou biparentales vivant de l'aide sociale. En tout, 300 000 enfants ont été privés de cette allocation. C'est un énorme recul dans la lutte contre la pauvreté des enfants. Le gouvernement doit mettre fin à ces retenues.

    Ce ne sont là que quelques-unes des raisons pour lesquelles nous avons besoin d'un nouveau contrat entre les gouvernements, pour rétablir le système national de sécurité du revenu pour nos citoyens les plus vulnérables. L'engagement de ce gouvernement envers les soins et l'éducation de la petite enfance soulagera la pauvreté de nombreuses familles en leur permettant de s'intégrer à la population active. Le Conseil recommande une augmentation des allocations pour accélérer le progrès dans chacun de ces secteurs.

    Le Conseil souhaite une action concertée pour lutter contre la pauvreté dans notre pays. Certains progrès ont été réalisés, mais les efforts ne sont pas proportionnels à l'ampleur du problème. Le Conseil est encouragé, toutefois, par deux progrès récents. Premièrement, en mai 2005, le ministre du Développement social, Ken Dryden, a déclaré qu'il voulait :

[...] susciter une discussion avec les gouvernements, les collectivités, les entreprises, le secteur bénévole et le grand public au sujet de la pauvreté, de la meilleure façon de la comprendre et de l'évaluer, des priorités que nous devrions établir et des objectifs que nous devrions fixer.

    Deuxièmement, le Comité permanent des ressources humaines entreprend un examen du Transfert canadien en matière de programmes sociaux. Nous nous en réjouissons et nous espérons que les Canadiens à faible revenu seront invités à y participer.

    Ces récentes annonces indiquent une certaine volonté politique de lutter contre la pauvreté.

    Dans sa réponse au discours du Trône de 2004, le très honorable Paul Martin affirmait:

[...] nous devons renforcer nos fondations sociales, nous devons bâtir une économie du XXIe siècle; et nous devons nous assurer que le rôle du Canada dans le monde en soit un d'influence et de fierté.

    Mesdames et messieurs, pour que le rôle du Canada en soit un d'influence et de fierté, nous devons aider 4,9 millions de Canadiens à sortir de la pauvreté et à s'engager sur la voie de la prospérité.

    Permettez-moi de vous résumer nos recommandations budgétaires.

    Premièrement, il faut que les baisses d'impôt visent les citoyens à faible revenu. Il faut aussi augmenter le salaire minimum fixé par la loi fédérale; accroître le financement de l'aide sociale et des services sociaux en relevant le budget du Transfert canadien pour les programmes sociaux; par souci de transparence et de responsabilisation, établir des transferts distincts pour l'aide sociale et les services sociaux; négocier des normes minimales pour les taux de l'aide sociale, d'après le coût réel d'un panier à provisions; mettre un terme à la récupération du supplément de la Prestation nationale pour enfants par les provinces et les territoires; finalement, mesdames et messieurs, accroître le financement pour le logement et la garde d'enfants.

    Je vous remercie de votre attention. Je suis à votre disposition pour répondre à vos questions. Merci, monsieur le président.

À  +-(1000)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Murphy.

    Accueillons maintenant Mme Bose, de l'Organisation nationale des femmes immigrantes et des femmes appartenant à une minorité visible au Canada.

[Français]

+-

    Mme Anuradha Bose (directrice exécutive, Organisation nationale des femmes immigrantes et des femmes appartenant à une minorité visible au Canada): Je m'appelle Anuradha Bose.

[Traduction]

    Je suis la directrice exécutive de l'Organisation nationale des femmes immigrantes et des femmes appartenant à une minorité visible au Canada, une organisation que l'honorable Maria Minna connaît bien, je crois.

+-

    L'hon. Maria Minna (Beaches—East York, Lib.): Permettez-moi, monsieur le président, de le confirmer. Je suis une des cofondatrices de cette organisation.

+-

    Le président: Félicitations!

+-

    L'hon. Maria Minna: Je suis très heureuse d'accueillir madame Bose ici aujourd'hui.

+-

    Mme Anuradha Bose: Nous tenons de nos membres le mandat d'exprimer les préoccupations des femmes immigrantes et de leurs familles. Je remercie le président et le greffier du comité, qui nous ont permis de comparaître aujourd'hui.

    Le Canada fait aujourd'hui l'envie de la plupart des pays de l'OCDE. L'économie affiche une excellente tenue depuis plusieurs années, et entre 1998 et 2002 le PIB a augmenté en moyenne de quatre pour cent, après indexation. Hélas, le Canada demeure une des économies du monde où les salaires sont relativement bas. Ce rendement contraste nettement avec celui de la Finlande et s'apparente plutôt à celui du Royaume.-Uni.

    Parmi les Canadiens qui travaillent à temps plein, un sur six est mal rémunéré — c'est-à-dire qu'il touche moins de 10 $ de l'heure. Deux millions de Canadiens sont laissés pour compte. Ce sont ceux que Saunders qualifie de travailleurs vulnérables, ceux qui ont de la difficulté à trouver un emploi bien rémunéré et des conditions de travail qui respectent les normes de la société.

    Le sexe et la race sont des facteurs importants lorsqu'on parle de travail mal rémunéré. Plus du quart des nouveaux immigrants sont mal payés, contre le sixième des personnes nées au Canada. Aujourd'hui, les membres des minorités visibles, et en particulier les hommes de race noire, sont les plus vulnérables de tous les immigrants.

    Près d'un tiers des immigrants membres de minorités visibles occupent des emplois mal rémunérés, contre moins d'un cinquième des minorités non visibles. Ces immigrants gagnent à peine leur vie dans des emplois précaires dans les grandes villes du pays. Leurs qualifications et leur expérience de travail ne sont pas non reconnues et elles sont sous-évaluées.

    Les nouveaux arrivants soufrrent aussi de la souplesse du marché du travail ou des emplois atypiques. Même le gouvernement fédéral a constaté une forte hausse de l'emploi atypique — de 12,4 p. 100 en 1981 à 19 p. 100 en 1997, sans parler de l'impartition ou du personnel d'agence.

    Les Canadiens s'attendent à ce que le marché du travail offre des salaires suffisants à tous les travailleurs, mais ce n'est pas le cas en réalité. Aujourd'hui, l'unité familiale peut se maintenir au-dessus du seuil de la pauvreté seulement si deux personnes occupent des emplois stables, ce qui est très rare dans le secteur mal rémunéré. L'unité familiale est donc victime d'une instabilité croissante qui, en retour, entraîne des coûts sociaux élevés.

    La preuve empirique dans la communauté des immigrants montre que les familles immigrantes connaissent un stress élevé et que ce sont les femmes et les enfants qui en souffrent le plus. L'éclatement des familles est maintenant beaucoup plus fréquent dans notre communauté.

    Il y a aussi un lien entre l'insuffisance du revenu et la mauvaise santé. Dans le cas des enfants, cela influe sur le rendement scolaire. Notre organisation est d'accord avec l'honorable David Blunkett, secrétaire d'État britannique au Travail et aux Pensions, qui affirmait que le travail constitue le meilleur moyen de se libérer de l'aide sociale.

    Nous recommandons au gouvernement du Canada de relever progressivement le salaire minimum fixé par la loi fédérale, sur une période de deux ans, pour le porter à 10 $ de l'heure et ainsi donner l'exemple aux provinces. Nous recommandons aussi au ministère des Finances d'envisager immédiatement la création d'un crédit d'impôt au revenu gagné, sur le modèle d'une mesure en vigueur aux États-Unis, ou d'un crédit d'impôt pour les familles dont les parents travaillent, comme cela se fait au Royaume-Uni, afin de stimuler l'emploi et de réduire la pauvreté chez les petits salariés.

    Comme nombre de nos collègues, nous demandons au gouvernement du Canada, dans le cadre des ententes de perception des impôts, d'encourager fermement les provinces à ne pas récupérer la Prestation nationale pour enfants accordée aux familles pauvres qui vivent de l'aide sociale. Nous recommandons que le gouvernement du Canada augmente progressivement la prestation sur une période de trois ans pour la porter à 4 900 $.

    L'assurance-emploi est une mesure de soutien social réservée aux périodes de chômage involontaires et de recherche d'emploi. Notre organisation croit que la structure actuelle de l'AE ne permet pas aux nouveaux immigrants de toucher des prestations. Cela crée de graves difficultés aux familles de nouveaux immigrants dans les grandes villes comme Toronto, Montréal et Vancouver. Pour être admissibles à la prestation, les nouveaux immigrants doivent avoir travaillé 910 heures pendant l'année, ce qui est équivalent à un emploi à plein temps pendant six mois.

    Une étude du CTC révèle que 28 p. 100 des hommes immigrants qui ont été en chômage pendant au moins deux semaines ont touché des prestations d'AE en 2000, contre 32 p. 100 des hommes non immigrants.

À  +-(1005)  

Chez les femmes, la situation est catastrophique. Seulement 19 p. 100 des femmes immigrantes ont touché des prestations d'AE en 2000, contre 30 p. 100 des femmes non immigrantes. Il est probable que les femmes immigrantes n'étaient pas admissibles en raison de la nature du travail qu'elles accomplissent et, surtout, parce que toutes les femmes assument des responsabilités liées aux soins des enfants, ce qui les éloigne du marché du travail pendant de longues périodes. Notre organisation recommande au gouvernement du Canada de réformer la Loi sur l'assurance-emploi en fonction des réalités d'un marché du travail souple et de fixer à 360 heures pour tous les travailleurs le minimum donnant droit aux prestations de l'assurance-emploi.

    Vous savez très bien qu'il y a un écart important entre les revenus des nouveaux immigrants au Canada et ceux des autres Canadiens. On en donne généralement pour raison le racisme. Chaque vague d'immigration s'est heurtée au racisme; cela a toujours fait partie de l'histoire du Canada. Pourtant, l'immigration est le fondement sur lequel le Canada a été construit. Environ 15 p. 100 de la population du Canada est née ailleurs. Les derniers arrivés sont en moyenne beaucoup plus qualifiés que les Canadiens nés ici. Vous savez aussi que les capacités intellectuelles sont largement sous-exploitées, faute d'une reconnaissance des diplômes obtenus dans les pays d'origine ou dans des pays tiers. La période de rattrapage pour les nouveaux arrivants ne cesse de s'allonger, malgré leurs qualifications supérieures. Dans les milieux d'immigrants, on dit à la blague que si vous avez besoin d'un médecin, vous devez appeler le service de taxi local.

    Notre organisation recommande au premier ministre du Canada de créer au BCP un service doté des ressources suffisantes et assujetti à un calendrier pour accélérer la reconnaissance des diplômes, comme cela s'est fait à l'Unité de l'inclusion au 10 Downing Street. Au XXIe siècle, le Canada doit mieux comprendre sa population immigrante. À notre avis, le gouvernement du Canada ne devrait pas traiter ses minorités visibles comme un groupe homogène dans les stratégies d'équité en emploi. Il devrait plutôt commander des études indépendantes pour mieux comprendre l'incidence de l'appartenance à une minorité visible, de l'immigration et du sexe sur la réussite en emploi.

    Les budgets n'ont pas le même effet pour les hommes et pour les femmes. Toutes les décisions de dépense du gouvernement se répercutent différemment sur les hommes et sur les femmes, puisque la position économique et sociale est fonction du sexe. Notre organisme croit qu'il faut encourager le changement culturel au ministère des Finances. Le budget fédéral insiste sur la croissance économique mais fait peu de cas de l'équité ou de l'égalité. Il semble y avoir peu de liens entre la politique sociale et la politique macroéconomique. Notre organisation recommande au ministre des Finances d'analyser l'incidence de toutes les mesures fiscales selon le sexe, afin de préserver l'équité entre les sexes, en particulier pour la répartition des avantages d'anciennes baisses d'impôt et des baisses d'impôt à venir.

    Le thème de vos audiences prébudgétaires est l'amélioration de la croissance de la productivité au Canada, mais notre organisation hésite à accepter une définition de productivité exprimée uniquement en termes de croissance du PIB.

À  +-(1010)  

+-

    Le président: Madame Bose, excusez-moi, pourriez-vous vous hâter un peu s'il vous plaît.

+-

    Mme Anuradha Bose: Nous avons une dernière recommandation à faire. Le comité pourrait envisager de demander au ministère des Finances d'imiter le royaume du Bhoutan, le seul pays au monde où l'on mesure le bien-être en fonction du bonheur national brut et non pas du produit national brut.

    Merci.

+-

    Le président: Nous allons maintenant entendre M. Baldwin de Statistique Canada.

+-

    M. John Baldwin (directeur, Études et analyses micro-économiques, Statistique Canada): Je suis directeur du groupe de l'analyse microéconomique. Notre tâche consiste essentiellement à produire les statistiques sur la productivité. On m'a demandé aujourd'hui d'expliquer brièvement la nature de notre processus de mesure et certaines de nos statistiques sur la performance de l'économie dans ce domaine.

    Statistique Canada mesure la croissance et la productivité au fil du temps, non pas comme le Bhoutan mais en se fondant sur le produit national brut, sur l'augmentation du produit national brut relativement à la hausse du facteur travail et des autres intrants que nous injectons dans le système. Les statistiques sur la productivité reflètent l'efficacité avec laquelle l'économie canadienne a transformé ces intrants en extrants. Les fluctuations de la productivité révèlent si nous avons réussi à améliorer notre capacité de produire des extrants grâce à l'augmentation des intrants.

    La croissance de la productivité reflète donc l'augmentation de notre efficience; elle découle de l'amélioration des connaissances et des techniques de production. Elle est également liée à l'agrandissement des usines, aux économies d'échelle, à une main-d'oeuvre plus qualifiée ou à l'introduction de produits de meilleure qualité. Nombre des changements font suite à des changements de la structure de la gestion ou de l'organisation de la production dans les usines et les ateliers.

    En raison de la taille de l'économie, il est très complexe d'en mesurer la productivité. Nous utilisons le cadre des comptes nationaux pour estimer la production et nous y intégrons des mesures du travail, du capital et des matières consommées.

    Deux ou trois mesures peuvent être utilisées, mais certaines sont plus populaires que les autres. Les mesures de la productivité les plus couramment utilisées dans les discussions sur la performance de l'économie sont les mesures de productivité partielles, en particulier la productivité du travail, l'augmentation du produit national brut relativement au nombre d'heures travaillées. Mais de nombreux analystes se servent aussi d'autres mesures partielles de la productivité, dont la production par unité de capital, par unité d'énergie ou par unité de matière utilisée dans le processus.

    Les économistes ont longtemps soutenu que ces mesures partielles de la productivité étaient inadéquates parce qu'elles ne donnaient pas une vue d'ensemble de l'efficacité avec laquelle l'économie transformait en extrants toutes les ressources utilisées dans le processus de production; ils souhaitaient disposer de mesures un peu plus générales. Ces mesures sont appelées mesures de la productivité multifactorielle. Elles reflètent effectivement la quantité d'extrants produite relativement à l'ensemble des facteurs injectés dans le système.

    Les mesures de la productivité peuvent être considérées comme le reflet d'une tendance ou un taux de croissance — nous pouvons nous demander si notre production s'améliore, compte tenu de ce que nous investissons dans le processus — ou nous pouvons nous comparer à d'autres pays en nous demandant quel est notre niveau de productivité relativement à celui des États-Unis, par exemple. Statistique Canada préfère généralement la première méthode, surtout parce que les comparaisons entre pays sont plus difficiles.

    Depuis vingt ans, toutefois, la communauté internationale s'intéresse de très près à la normalisation de la mesure de la productivité dans chaque pays, car les décideurs de nombreux pays, de pays occidentaux, considèrent qu'il est de plus en plus important de comprendre les différences de productivité entre les pays. Il y a quelque temps, Statistique Canada a commencé à chercher des moyens de comparer non seulement la croissance de la productivité au Canada et dans d'autres pays mais aussi les niveaux, relativement aux États-Unis par exemple.

    J'ai apporté un ensemble de diapositives qui illustrent le rapport entre les mesures de la productivité que nous effectuons et certaines mesures standard de la croissance du PIB. Si vous voulez bien vous y reporter, je vais les expliquer très rapidement. Je crois qu'elles vous ont été distribuées.

À  +-(1015)  

+-

    Le président: Oui.

+-

    M. John Baldwin: Prenons la diapo 2. On y voit la tendance des taux de croissance du PIB réel sur une longue période, de 1961 à 2004, en comparaison de la croissance des heures travaillées, la mesure élémentaire utilisée dans les statistiques sur la productivité, et de la croissance de la productivité du travail. Vous voyez que, pour l'ensemble de la période, entre 1961 et 2004, le PIB a augmenté de quatre pour cent par année, la productivité du travail, de deux pour cent, et le nombre d'heures travaillées, d'environ deux pour cent également. En fait, si la croissance de la productivité avait été nulle au cours de la période, le PIB réel ne serait que la moitié de ce qu'il est.

    Vous constatez aussi que, de décennie en décennie, le PIB réel et la productivité du travail évoluent pratiquement en tandem. Lorsque la croissance de la productivité du travail est excellente, notre PIB fait également très bonne figure. Il y a donc un lien très étroit entre la tenue de notre économie en général et la production de biens et de services, ces biens et services qui nous sont offerts aux fins de consommation ou d'investissement, pour renouveler notre stock de capital, trouver de nouvelles ressources, appuyer nos hôpitaux, etc.,

    Passons maintenant à la diapo 3. Nous y avons réparti le taux de croissance du PIB par habitant en ses deux éléments. Le PIB par habitant équivaut au PIB par heure travaillée multiplié par les heures travaillées par la population, le nombre d'heures travaillées par personne, en moyenne, dans l'économie. Vous pouvez calculer dans quelle mesure le PIB par habitant a augmenté pour chacune de ces sources. Vous le voyez là aussi sur le long terme, de 1961 à 2004, et pour chaque décennie. En noir, on a la proportion de la croissance du PIB par habitant due à des hausses de la productivité du travail — et c'est considérable.

    Pour quelle autre raison est-ce que les analystes veulent suivre la production en termes d'estimation de la productivité? C'est parce que le taux de croissance des salaires réels dans l'économie suit de très près le taux de croissance de la productivité du travail. Dans la diapo 4, nous présentons les augmentations de la rémunération horaire réelle, une donnée tirée des comptes nationaux, en fonction des taux de croissance de la productivité du travail. Ici aussi, pour chaque décennie, la croissance de la rémunération horaire réelle est à peu près équivalente à la croissance de la productivité du travail. Cela confirme l'intérêt d'améliorer la productivité.

    Pour chacun de ces graphiques, j'ai mentionné l'importance de la productivité du travail et le fait qu'elle reflète ces grands ensembles qui intéressent diverses personnes, mais les analystes se demandent aussi ce qui détermine la productivité du travail. Pour ce faire, ils ventilent généralement les déterminants de la productivité du travail en trois catégories. Il y a évidemment un très grand nombre de catégories, mais nous avons simplifié les choses dans le graphique 5 et nous avons ventilé les sources de la croissance de la productivité du travail — encore une fois sur le long terme — découlant essentiellement de l'augmentation des compétences de la main-d'oeuvre; de l'augmentation de l'intensité du capital, lorsqu'il y a plus de machines et d'équipement, plus de bâtiments, plus d'infrastructures de production pour chaque heure de travail dans l'économie; et de ce que nous appelons la productivité multifactorielle, la croissance, le résiduel, le changement technologique.

    Vous constatez qu'à long terme, ce changement technologique a contribué de façon variable à la croissance totale de la productivité du travail. Signalons qu'à l'époque heureuse des années 60 et 70, lorsque la croissance de la productivité du travail était extrêmement forte, nous avions un très fort taux de changement technologique, et ce changement a un peu ralenti récemment.

    Vous voyez donc pourquoi les analystes utilisent les données sur la productivité pour comprendre la macroéconomie à partir des données standard des comptes nationaux. Dans les diapos 6 et 7, j'ai comparé le Canada et les États-Unis au moyen des agrégats utilisés pour calculer la productivité du travail. La diapo 6 compare le rendement du Canada à celui des États-Unis en termes de tendance de la croissance du PIB réel et des heures travaillées dans nos deux pays, à long terme. Je le répète, je ne m'intéresse pas au court terme; je me base sur le long terme pour déterminer la présence d'éventuels problèmes structuraux.

    Vous constatez qu'à long terme, depuis les années 60, le Canada s'en tire relativement bien du côté du PIB. Il dépasse largement les États-Unis pour le nombre d'heures travaillées. Nous avons un marché du travail beaucoup plus dynamique.

À  +-(1020)  

    Vous remarquerez toutefois, également à la page 6, dans le graphique de gauche, que l'économie du Canada est beaucoup plus volatile. Pendant les périodes de récession, les fluctuations sont beaucoup plus marquées ici.

    La diapositive 7 compare les taux de croissance de la productivité du travail au Canada et aux États-Unis, à long terme, toutes les données étant indexées à 1961. Vous voyez qu'essentiellement, il n'y a pas de différence entre nos deux économies. Nous avions un meilleur rendement vers le milieu de la période, mais les États-Unis nous ont rattrapés et maintenant ils nous dépassent un peu.

    La dernière diapositive compare notre rendement à celui des États-Unis pour ce qui est du niveau. La ligne verte sur ce graphique montre que la productivité du travail au Canada, comparée à celle des États-Unis, est relativement stable depuis vingt ans.

    Notre rendement est plutôt faible en termes de PIB par habitant, parce que notre marché du travail a longtemps été beaucoup moins dynamique, compte tenu de notre population. C'est essentiellement parce que le nombre d'emplois offerts à l'ensemble de la population a diminué, contrairement à ce qui s'est passé aux États-Unis.

    Et c'est sur cette note que je termine mon exposé.

+-

    Le président: Merci, monsieur Baldwin.

+-

    M. John Baldwin: Si vous avez des questions au sujet de ces diapositives, j'y répondrai avec plaisir.

+-

    Le président: C'était un peu technique, mais vous avez aussi intéressé certains des autres groupes, et je crois que vous avez fait un très bon travail.

    Nous passons immédiatement au groupe suivant, le Grape Growers of Ontario, dont la porte-parole est Mme Zimmerman.

+-

    Debbie Zimmerman (directrice générale, Conseil canadien de l'horticulture, Grape Growers of Ontario): Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité. Je suis heureuse de pouvoir témoigner devant vous ce matin à titre de représentante du Conseil canadien de l'horticulture et de PDG de Grape Growers of Ontario.

    Les arbres et la vigne constituent aujourd'hui l'un des plus importants segments de l'agriculture canadienne. Ils représentaient plus de 300 millions de dollars de valeur à la ferme en 2004. Dans la seule province de l'Ontario, cela correspond à une valeur économique de un milliard de dollars. Le mémoire que je dépose aujourd'hui décrit une stratégie de compétitivité nationale destinée à accroître de 50 p. 100 la valeur à la ferme pour nos producteurs d'ici 15 ans. Les augmentations de la valeur à la ferme peuvent découler d'une hausse de la valeur par unité et d'une augmentation du volume par unité pour une même superficie. La compétition internationale et la nécessité de capturer une plus grande part de la croissance du marché national n'ont jamais posé de tels défis aux producteurs du Canada.

    Les économistes mesurent souvent la compétitivité en termes de maintien de la part du marché. Les producteurs canadiens de raisin et d'arbres fruitiers ont dû peu à peu céder de leur part du marché alors qu'en fait, les secteurs des produits frais et des produits transformés ne cessaient de croître. En termes simples, la compétitivité de nos producteurs s'érode. Pourtant, les Canadiens consomment de plus en plus de fruits, ils écoutent les conseils qu'on leur donne et ils mangent plus de fruits pour être en meilleure santé. En fait, de plus en plus d'études cliniques prouvent la valeur des éléments phytochimiques et des nutrients du raisin et des fruits. Les importations de pommes chinoises augmentent toutefois rapidement et envahissent nos marchés traditionnels. L'État de Washington a inondé nos marchés de ses produits a prix modique. Notre industrie de la vigne et du vin doit livrer concurrence aux vins importés de pays comme l'Australie, la Nouvelle-Zélande, l'Afrique du Sud et le Chili.

    Devant les défis que présente la croissance, nous avons décidé de combiner nos forces pour créer une approche unifiée, un partenariat de notre industrie, un peu comme ce que M. Beal va vous dire au sujet de l'industrie du vin.

    Nous représentons toutes les provinces où l'on cultive les arbres fruitiers et la vigne : l'Ontario, le Québec, la Colombie-Britannique, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard. Ensemble, nous voulons croître, et notre proposition vise la création d'un programme de renouveau de l'infrastructure privée-publique qui nous permettra de parvenir à nos fins. Le but du programme est simple : renouveler 25 p. 100 des vergers et des vignes au cours des sept prochaines années. La superficie cultivée n'augmentera pas, mais l'infrastructure des vergers et des vignes sera renouvelée pour accroître la productivité et les recettes. Le coût moyen du renouvellement d'une vigne ou d'un verger est d'environ 12 000 $ par acre. Au pays, la Colombie-Britannique a déjà collaboré pendant 15 ans à un programme de replantation et la Nouvelle-Écosse, pendant cinq ans. Nous demandons un engagement similaire des quatre autres provinces.

    Aujourd'hui, toutefois, nous demandons au gouvernement fédéral de prendre l'initiative et d'engager au total 100 millions de dollars d'investissement fédéral dans ce programme, auquel nos producteurs et nos gouvernements provinciaux contribueront aussi à parts égales, pour les sept prochaines années. Autrement dit, un tiers du fédéral, un tiers des provinces et un tiers des producteurs. Cette proposition garantit la neutralité commerciale grâce à une approche proactive ainsi qu'à l'uniformité de l'engagement et de la contribution de tous les secteurs. Cet investissement de 100 millions de dollars sur sept ans correspond à 4 000 $ par acre, la différence devant venir des producteurs et des divers gouvernements provinciaux. Comme le temps nous est compté, je vous renvoie, pour les détails de ce programme, au document que nous avons distribué. Vous trouverez aussi plus de détail dans notre mémoire.

    Monsieur le président, pour réussir en agriculture aujourd'hui, il est essentiel de disposer d'investissements gouvernementaux. Nos producteurs veulent s'allier à vous pour réussir. Je m'explique.

    L'Ontario, par exemple, a connu l'une des pires récoltes de raisin de son histoire. Les dommages hivernaux ont ramené une récolte de raisin normale de 50 000 tonnes à moins de 10 000 tonnes.

À  +-(1025)  

Nous savons qu'il nous faut des variétés plus robustes pour faire face aux rigueurs de notre climat. Nous savons que nos vignes sont de calibre mondial. Comme M. Beal vous le dira, nos vignobles représentent 1,2 milliard de dollars de ventes de vin au détail dans notre pays. Le renouvellement de nos vignes est également un facteur de succès indispensable pour les producteurs vinicoles. On vous dira ce matin que la réduction de la taxe d'accise fédérale stimulera le marché canadien du vin. Nous appuyons cette initiative des producteurs vinicoles, car toute croissance du secteur des vins au Canada entraînera une croissance de nos vignobles.

    Le besoin en Ontario est pressant. Vu les conditions climatiques actuelles, la nécessité d'un renouvellement est indéniable. Plutôt que de demander une subvention pour la perte de raisin et la perte de récoltes, nous vous demandons un investissement de contrepartie à l'investissement des producteurs et à l'investissement des gouvernements provinciaux. C'est une solution canadienne originale, qui répond aux besoins des producteurs canadiens de façon financièrement responsable.

    Nous savons que la replantation est une mesure efficace — demandez-le à la Colombie-Britannique ou à la Nouvelle-Écosse. Leurs programmes ont eu des résultats remarquables. Les producteurs sont disposés à partager les risques pour stimuler l'innovation dans les vignobles et les vergers. Contrairement aux autres cultures, il faut trois ou quatre ans avant que les arbres fruitiers et la vigne produisent bien, et plus de huit ans pour atteindre un niveau de production rentable. Nombre de producteurs de jus de raisin en Ontario ont vu disparaître tous leurs débouchés. Ce programme leur permettra de renouveler les anciens vignobles de Concord et de se lancer sur des marchés comme celui du vin de glace, un des produits de prestige du Canada. Les producteurs sont disposés à investir des sommes importantes pour renouveler leurs vignobles et leurs vergers. Un leadership national s'impose pour assurer des critères communs et un accès équitable pour toutes les régions du pays.

    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, nous avons besoin du soutien du gouvernement fédéral, nous avons besoin du leadership fédéral pour concrétiser notre vision. En tant que producteurs de raisin et d'arbres fruitiers, nous sommes disposés à partager le coût de cette vision. Nous savons que le Canada peut faire concurrence au reste du monde pour ce qui est de la qualité et des coûts — posez la question à M. Beal, il vous dira que son vin peut concurrencer celui de tous les autres pays producteurs de vin au monde. Nous pouvons assurer la traçabilité de l'arbre ou de la vigne jusqu'à la table ainsi que la salubrité des aliments, comme l'exigent les Canadiens aujourd'hui. Nous allons fidéliser les consommateurs de produits canadiens. Nous savons que notre industrie est un secteur de croissance et nous voulons réduire nos besoins en matière de programmes de protection du revenu.

    Je vous remercie de bien vouloir examiner cette proposition et je répondrai avec plaisir à vos questions à la fin de la séance.

À  +-(1030)  

+-

    Le président: Merci.

    J'ai une petite question, madame Zimmerman. Est-ce que ces fonds viendraient d'Agriculture Canada ou d'Industrie Canada? Comment envisagez-vous ce financement?

+-

    Debbie Zimmerman: Ils viendraient d'Agriculture Canada, par l'entremise du ministre des Finances.

+-

    Le président: Merci.

    Écoutons maintenant M. Beal, de la Canadian Vintners Association.

+-

    M. Norman Beal (président, Conseil d'administration, Wine Council of Ontario, Canadian Vintners Association): Merci, monsieur le président. Merci, mesdames et messieurs les membres du comité. Je suis Norman Beal, je préside le Wine Council of Ontario et je suis aussi membre du conseil de la Canadian Vintners Association, notre organe national. Je possède en outre une petite entreprise vinicole à Beamsville, en Ontario, dans la péninsule du Niagara.

    Nous avons peu de temps. Je serai donc bref et j'irai droit au but. Notre proposition concerne un allégement de la taxe d'accise pour une industrie composée en grande partie de petites et moyennes entreprises. Nous voulons en outre établir pour nos membres des règles du jeu équitables sur le marché très compétitif du vin à l'étranger, en particulier face à l'industrie en pleine expansion juste au sud de la frontière.

    N'oublions pas que nos membres sont des agriculteurs, des producteurs de vin et des exploitants d'attractions touristiques qui apportent une contribution non négligeable à l'économie du Canada. C'est une combinaison qui nous distingue des autres producteurs de boisson alcoolisée, et c'est une combinaison qui nécessite une exemption de l'actuelle taxe d'accise.

    Nous contribuons à l'économie de diverses façons. Vous le verrez dans notre mémoire, notre industrie vend plus de 100 millions de litres de vin entièrement canadien et de vin de coupage, une valeur de 1,2 milliard de dollars au détail. Nous générons plus de 600 millions de dollars de recettes pour les provinces et au-delà de 120 millions de dollars pour le gouvernement du Canada. Nous accueillons plus d'un million de visiteurs par année, une activité qui produit des revenus d'environ 400 millions de dollars. Comme le montrait une étude récente, l'activité économique globale attribuable à la vente de vin entièrement canadien au Canada s'élève à 450 millions de dollars, soit environ 4,25 $ par litre, contre environ 56 ¢ par litre de vin importé. En termes simples, nous contribuons de façon significative à l'économie canadienne et nous sommes des piliers des économies locales.

    Nous vous demandons de recommander au ministre des Finances d'inclure dans le prochain budget la proposition suivante : 1) une exemption de la taxe d'accise sur les ventes de vin entièrement canadien, jusqu'à concurrence de 500 000- litres par établissement vinicole; 2) l'introduction d'une taxe d'accise progressive sur la production vinicole au-delà de 500 000 et jusqu'à 900 000 litres; 3) un plafond du taux de la taxe d'accise fixé à 51,2 ¢ par litre.

    Cette proposition est identique à l'allégement de la taxe d'accise consenti par les États-Unis à leurs petits et moyens producteurs. La seule différence, c'est que le plafond de la taxe d'accise est fixé à seulement 28 ¢ là-bas. Pour ce qui est des comparaisons internationales, je pense que vous savez — mais permettez-moi de vous le rappeler — que de nombreux autres pays producteurs de vin reconnaissent l'importance économique de l'industrie vinicole et offrent un soutien direct à ce secteur. La plupart des régions vinicoles n'imposent pas de taxe d'accise. Celles qui le font ont prévu des rabais et des encouragements qui font plus que compenser le prélèvement de la taxe d'accise.

    Notre préoccupation principale à l'heure actuelle est la menace de plus en plus sérieuse de nos voisins du Sud. Un régime fiscal favorable a permis l'établissement d'entreprises vinicoles dans les 50 États des États-Unis, y compris l'Utah et l'Alaska. Dans le seul État de New York, il y a environ 200 entreprises vinicoles, et leur nombre augmente sans cesse.

    Prenons par exemple la région juste au sud de la péninsule du Niagara, où le climat est très semblable au nôtre. À l'heure actuelle, la sénatrice Hillary Rodham Clinton en fait énergiquement la promotion. Elle la présente comme la nouvelle vallée de la Napa, la Napa du Nord. Si je déménageais mon entreprise de 23 kilomètres vers l'est, de l'autre côté de la frontière, et si je produisais environ 50 000 caisses de vin, j'économiserais à peu près un demi-million de dollars en taxe d'accise. C'est l'avantage concurrentiel dont jouissent mes collègues américains.

    Il y a deux ans, il n'y avait pas d'entreprise vinicole dans cette région; aujourd'hui, on en compte six, et je vous garantis que dans une dizaine d'années il y en aura 50. Pire encore, les établissements vinicoles de la région de New York ont établi leur propre route du vin, inspirée de la nôtre, et ils en font la promotion comme destination touristique en s'appuyant sur les résultats du travail acharné et de la crédibilité de nos membres. Le régime fiscal américain favorable, le coût inférieur des terres et le projet de loi sur les passeports — que vous connaissez bien, j'en suis certain — se combinent pour faire planer une menace très sérieuse sur les revenus du tourisme dans les régions vinicoles du Canada.

    J'aimerais terminer en parlant des effets de la réduction de la taxe d'accise. La réduction de la taxe d'accise permettra de réinvestir dans les vignobles, les caves et les installations d'hébergement, pour en améliorer la qualité. Nous favoriserons ainsi la rentabilité, et nos entreprises seront plus compétitives. Elles créeront des emplois et des possibilités de perfectionnement. Elles instaureront des règles du jeu équitables pour les producteurs de vin canadiens, face à la compétition étrangère.

À  +-(1035)  

    Comme la plupart de nos membres sont de petites et moyennes entreprises, la majorité ne paiera plus de taxe d'accise, ce qui réduira le fardeau de réglementation et d'administration que nous devons tous supporter.

    Bref, monsieur le président, nos membres ne demandent, je le répète, ni protection ni subside. Le coût estimatif de notre proposition est relativement modeste: entre cinq et sept millions de dollars. Toutefois, ce modeste investissement que représente la réduction de la taxe d'accise permettra d'investir plus et de réinvestir dans les exploitations vinicoles pour accroître la qualité et la compétitivité. Ce sont les petits et moyens producteurs qui cultivent leur terre, produisent du vin avec leurs raisins et offrent une destination aux touristes de tous les coins du monde qui bénéficieront des avantages de cette proposition. Cela signifie, monsieur le président, que l'économie canadienne en bénéficiera aussi.

    Merci beaucoup. Je répondrai à vos questions avec plaisir.

+-

    Le président: Merci, monsieur Beal.

    Je rappelle aux témoins que les membres ont chacun cinq minutes. Cela comprend les questions et les réponses, alors je vous demande de répondre avec concision.

    Madame Wasylycia-Leis.

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Nord, NPD): Merci, monsieur le président, de me permettre de commencer aujourd'hui.

    Je remercie aussi tous nos témoins.

    J'aurais de nombreuses questions à poser, mais comme j'ai à peine cinq minutes je me contenterai d'en poser trois. La première s'adresse à Sharon Chisholm, elle porte sur la crise du logement. Selon moi, du moins ce que j'en sais puisque je vis dans un vieux quartier dans une région septentrionale, le logement est sans doute le principal souci des Canadiens et la cause première qui les empêche de jouir de la prospérité économique au même titre que tant d'autres Canadiens.

    À ce sujet, j'aimerais parler du projet de loi C-48, le projet de budget défini après le dépôt de la proposition du NPD. C'est un accord qui prévoit un financement de 1,6 milliard de dollars pour le logement abordable, sans que les provinces soient tenues de verser des fonds de contrepartie, et cela comprend des logements pour les Canadiens autochtones. C'est le libellé précis de l'entente.

    Je m'inquiète de constater que vous n'en avez pas entendu parler, car les projets devaient commencer immédiatement. Les fonds peuvent être versés assez rapidement; il n'est pas nécessaire d'attendre la fin de l'exercice. Est-ce que vous avez l'impression que le gouvernement en place est prêt à distribuer l'argent rapidement, en consultation avec les groupes communautaires plutôt que d'agir par l'entremise des provinces? Nous craignons qu'il n'ait l'intention d'économiser cet argent en vue d'une campagne électorale qui pourrait commencer à tout moment. Nous craignons que ce financement soit utilisé comme un pion sur l'échiquier politique plutôt que pour financer un programme concret. C'est ma première question.

    Debbie, au sujet de la littératie, nous avons reçu de la correspondance de Literacy Partners of Manitoba, qui s'inquiète d'une fusion éventuelle du Secrétariat national à l'alphabétisation avec d'autres programmes de RHDCC. Selon vous, est-ce que cela pourrait vraiment se faire et dites-moi ce que vous pensez de cette proposition.

    Finalement, je m'adresse à Anuradha Bose. Vous êtes le premier témoin à nous parler d'immigration depuis le début des audiences prébudgétaires, du moins à ma connaissance. Je pense qu'il nous faut établir avec précision ce que le gouvernement doit faire pour mettre de l'ordre au ministère de l'Immigration et rattraper les retards accumulés, dont les femmes immigrantes et membres des minorités visibles sont les principales victimes.

À  +-(1040)  

+-

    Mme Sharon Chisholm: Merci de cette question.

    Le fait que le financement du logement prévu dans le projet de loi C-48 n'ait encore donné lieu à aucune annonce nous inquiète énormément. Nous le savons, et tout le monde ici le sait, nous avons deux ans pour toucher cet argent et l'utiliser dans les collectivités.

    Pour ce faire, il nous faut développer la capacité des collectivités, donner aux collectivités la possibilité de trouver des terrains, de les acheter, de faire les préparatifs nécessaires en termes de projets architecturaux et de demandes des permis d'aménagement, pour passer à l'action.

    Rien n'a encore été annoncé au sujet de la façon dont notre capacité communautaire peut être développée. Nous avons perdu cette capacité en 1993, lorsque tous les programmes ont été annulés. Nous devons la restaurer. Nous attendons toujours de savoir comment les collectivités peuvent participer à la distribution des fonds prévus dans le projet de loi C-48.

    D'après la rumeur, il pourrait y avoir des annonces au sujet de projets d'application rapide, mais nous ignorons comment les collectivités pourront y participer. À qui doivent s'adresser les collectivités qui ont des projets prêts à démarrer, qui ont des capitaux à injecter, qui ont parfois des terrains et d'autres types de contribution à offrir? Les collectivités, nous le savons tous, sont les mieux en mesure de concrétiser les avantages de ces projets en matière de santé, d'établissement des enfants dans la vie, et de stabilité du logement, pour permettre aux familles de vivre, de prospérer et de contribuer à l'économie.

    Nous voulons que les fonds soient bien dépensés, qu'ils produisent les meilleurs résultats possibles. Nous voulons un investissement optimal, et nous croyons — et je pense que nous pouvons le démontrer — que le meilleur moyen d'y parvenir c'est de faire participer les collectivités. À l'heure actuelle, les collectivités n'ont reçu aucun message direct sur la façon dont elles peuvent se prévaloir de ce financement.

    Ces dernières années, nous nous sommes efforcés de trouver de l'argent. Nous avons trouvé un milliard de dollars en 2001 — seulement la moitié, à peu près, a été dépensée jusqu'à maintenant, et l'argent vient goutte à goutte —, puis nous avons obtenu 1,6 milliard de dollars de plus, et nos membres se réjouissent et disent que nous avons vraiment réussi. Mais je me demande maintenant s'il suffit d'obtenir des promesses, parce qu'il n'y a rien au niveau du gouvernement, par de discussions intergouvernementales, pour passer à l'action. C'est un réel problème. Nous devons faire débloquer ces fonds et les utiliser.

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci.

    Debbie, qu'avez-vous à nous dire?

+-

    Mme Debbie Griffith: Merci de votre question.

    Nous partageons les préoccupations de Literacy Partners of Manitoba au sujet de la fusion proposée. Vous le savez sans doute, le Secrétariat national à l'alphabétisation est l'agence fédérale compétente et il a assuré un extraordinaire leadership en matière d'alphabétisation au pays. Nous appuyons fermement non seulement le maintien du Secrétariat mais en outre l'élargissement de son mandat.

    Nous croyons que le Secrétariat est le mieux en mesure d'assurer un leadership pour définir l'orientation, la vision et les politiques nécessaires afin d'implanter une stratégie d'alphabétisation pancanadienne. Je crois que l'un des rôles principaux du Secrétariat, par le passé, et c'est un rôle essentiel au succès, a été de former des partenariats extraordinaires avec les provinces et les territoires en matière d'alphabétisation. Il a aussi pu créer des partenariats avec d'autres secteurs, à divers niveaux de gouvernement — santé, justice — et avec divers autres organismes. Nous voulons donc que son orientation demeure intacte et soit renforcée.

    Merci.

+-

    Le président: Merci.

    Madame Bose, rapidement s'il vous plaît.

+-

    Mme Anuradha Bose: Premièrement, vous parlez de retards. Ce problème semble insoluble. Nous aimerions que le ministère soit mieux doté en personnel. Le gouvernement doit modifier une partie de la LIPR, car on nous a promis de créer un processus d'appel des décision prises par la Commission du statut de réfugié.

    En outre, il faut régler la question de l'établissement. La division des compétences propre au fédéralisme canadien ne permet pas de régler rapidement le dossier de la reconnaissance des diplômes décernés par les pays d'origine ou des pays tiers.

    Je pense qu'il faut une volonté politique. Je réclame à nouveau la création d'un service doté de ressources suffisantes et assujetti à un calendrier, au sein du BCP, pour accélérer la reconnaissance des diplômes, sur le modèle de l'unité de l'inclusion au 10 Downing Street.

    Merci.

+-

    Le président: Merci, madame Wasylycia-Leis.

    M. Penson puis M. Bouchard vont poser leurs questions. Les Libéraux auront ensuite la parole.

+-

    M. Charlie Penson (Peace River, PCC): Merci, monsieur le président.

    Je souhaite la bienvenue à nos témoins. Nous allons bientôt conclure nos audiences prébudgétaires. Nous avons encore une semaine d'audience, mais nous avons déjà entendu des points de vue semblables aux vôtres — exprimés par de nombreux Canadiens.

    Comme Mme Wasylycia-Leis, j'ai peu de temps. Malheureusement, nous n'avons pas beaucoup de temps pour explorer ces questions. Je vais donc m'adresser seulement à deux personnes ce matin.

    Monsieur Beal, je constate dans votre exposé que le total visé par l'exemption de la taxe d'accise que vous demandez est passé de 400 000 à 500 000 litres. Est-ce exact?

À  +-(1045)  

+-

    M. Norman Beal: Je crois que l'exposé initial parlait de 500 000 litres.

    Nous essayons de suivre ce qui se fait actuellement aux États-Unis. Là-bas, chaque établissement vinicole est pleinement exempté de la taxe d'accise jusqu'à concurrence de 500 000 litres.

+-

    M. Charlie Penson: Monsieur Beal, vous le savez certainement, notre comité a étudié la question. Nous avons publié l'an dernier un rapport dans le quel nous avons recommandé d'exempter de la taxe 400 000 litres et de réintroduire progressivement cette taxe par la suite.

+-

    M. Norman Beal: C'est vrai.

+-

    M. Charlie Penson: Par introduction progressive, vous voulez dire — à partir de 500 000 litres et jusqu'à 900 000 litres — comme le recommandait notre comité?

+-

    M. Norman Beal: Oui, c'est cela.

+-

    M. Charlie Penson: Alors sauf pour les quantités, 400 000 ou 500 000 litres, notre recommandation est similaire à votre proposition?

+-

    M. Norman Beal: C'est exact, elle est identique.

+-

    M. Charlie Penson: Si nous devions la réitérer cette fois-ci suite à nos audiences, et si cela donnait effectivement des résultats, est-ce que cela constituerait un progrès.

+-

    M. Norman Beal: Oui, ce serait très positif.

+-

    M. Charlie Penson: Eh bien, nous avons étudié la question à fond et nous avons fait cette recommandation, même s'il s'agissait de 400 000 plutôt que de 500 000 litres, mais les problèmes demeurent les mêmes, si je comprends bien — vous êtes talonnés par la compétition.

+-

    M. Norman Beal: Tout à fait, en particulier celle des États-Unis.

+-

    M. Charlie Penson: Merci beaucoup. J'espère que nous pourrons renouveler cet engagement et que nous allons obtenir du ministre des Finances qu'il prenne des mesures.

    Je m'adresse maintenant à M. Baldwin. Monsieur Baldwin, vous êtes déjà venu ici et vous avez discuté avec nous. Je vous remercie du travail que vous faites à Statistique Canada, ces calculs dans le dossier de la productivité.

    Malheureusement, je crois que les Canadiens ont de la difficulté à saisir en quoi la productivité les touche au quotidien. Je sais qu'elle reflète le niveau de vie, en un certain sens. Vous avez dit que le PIB augmentait en fonction du nombre d'heures travaillées; c'est l'une des mesures.

    Prenons votre graphique numéro 2. La croissance du PIB reflète la croissance de la productivité. Si nous enlevons la première section — je sais que c'est la moyenne de 1961 à 2004, mais la productivité a décliné constamment de 1961 à 1973. Et le gouverneur de la Banque du Canada a déclaré que la productivité n'avait pas augmenté en 2003, la croissance a été nulle en 2004, et nous sommes à 0,07 p. 100 cette année, en 2005. Cela devrait inquiéter bien des gens. Est-ce que cette situation confirme votre interprétation des chiffres?

+-

    M. John Baldwin: Ce sont là deux questions. Premièrement, est-ce qu'il y a vraiment eu une diminution constante de la croissance de la productivité après 1960? Le graphique montre clairement que tel était bien le cas. Une tendance à la baisse s'est effectivement manifestée dans toute l'Amérique du Nord et cela a inquiété les économistes pendant des années. Ils n'ont jamais vraiment réussi à expliquer les causes de ce déclin subit. Pour l'instant, je pense que l'on se contente peut-être de dire qu'il s'agissait d'une période inhabituelle de l'après-guerre.

    La deuxième question se rapporte à la situation depuis 2000. Dans ces graphiques, j'ai utilisé de longues décennies, sauf après 2000. C'est surtout parce que quand mes graphiques s'arrêtent à 2000, tout le monde dit que j'ai oublié les quatre dernières années, alors que nous éprouvons certaines difficultés. En fait, c'est le cas. Nous traînons un peu de la patte depuis quatre ans.

    Je mets en garde ceux qui utilisent les données, ou du moins je leur dis que les données sur la productivité fluctuent au cours du cycle. Ce n'est qu'à la fin d'un cycle économique complet que l'on a vraiment une bonne idée de ce qu'était la tendance à long terme. Nous pouvons prendre diverses périodes au cours des 20 dernières années, en particulier les périodes de faible croissance ou de récession ou de déviations, et nous constaterons que les choses n'allaient pas très bien, en particulier en comparaison des États-Unis. Au début des années 1990, les choses n'allaient pas très bien, au début des années 1980, les choses n'allaient pas très bien, mais à la fin de la décennie, nous nous étions repris et il y avait peu de différences entre les deux économies.

    Alors oui — les choses ne vont pas trop bien depuis quatre ans, et les choses vont particulièrement mal si nous nous comparons aux États-Unis, mais il est difficile pour l'instant de déterminer s'il s'agit d'une tendance à long terme ou d'une partie du cycle normal. D'autres facteurs sont intervenus au cours de ces années.

À  +-(1050)  

+-

    M. Charlie Penson: Je vois dans votre présentation que vous parlez beaucoup du capital, de son lien avec l'investissement dans la productivité — l'investissement dans l'équipement — et la façon dont cela se traduit par l'innovation nécessaire dans les nouvelles technologies. Sur le graphique de la page 5, 2000-2004, il est un peu étonnant de constater qu'il y a si peu d'intensité du capital. On pourrait croire que comme le dollar canadien était relativement solide ces derniers temps les entreprises en auraient profité pour investir dans la machinerie et l'équipement. Pouvez-vous nous expliquer cela?

+-

    M. John Baldwin: Tout ce que je peux faire, c'est de constater qu'au cours des quatre dernières années, le rapport capital-travail a effectivement diminué parce que le taux d'investissement a été relativement faible. En passant, il était aussi relativement faible au début des années 1990; il s'est redressé avant la fin de la décennie.

    À Statistique Canada, nous avons effectué certains travaux pour voir si le profil d'investissement était similaire à cette étape du cycle économique au début des années 1990. Et en effet, ce profil est à peu près identique.

    Nous n'avons vraiment pas eu beaucoup de succès au début de la nouvelle décennie. Nous n'avons pas eu non plus beaucoup de succès au début de la dernière décennie, mais nous avons commencé à investir des sommes énormes vers la fin du cycle économique, et nous étions en assez bonne posture à la fin de la décennie.

    Maintenant, nous entrons dans le royaume de la prévision, et je ne me mêle pas de cela.

+-

    Le président: Merci, monsieur Penson.

    Monsieur Bouchard.

[Français]

+-

    M. Robert Bouchard (Chicoutimi—Le Fjord, BQ): Merci, monsieur le président. Je remercie également chacune et chacun d'entre vous pour vos excellentes présentations. Je ne pourrai pas vous poser à tous et à toutes des questions, mais j'en ai ciblé quelques-unes.

    Ma première question s'adresse aux représentantes de l'Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine.

    Vous avez dit que l'on devrait bâtir 25 000 logements par année. Vous avez aussi dit que les Canadiens devraient avoir de meilleurs logements et qu'ils devraient être plus accessibles, mais vous n'avez pas parlé de l'état de la situation à la SCHL et de ses surplus. Elle a un surplus de 4 milliards de dollars.

    Êtes-vous favorables à ce que l'on puisse utiliser une partie de ces surplus pour mettre en oeuvre immédiatement un programme de construction de logements?

[Traduction]

+-

    Mme Sharon Chisholm: Merci de la question.

    Oui, il y a à la SCHL deux types d'excédents que j'aime distinguer. L'un est le surplus attribuable à la vente d'assurance-hypothèque et de garanties de titres hypothécaires. Cela produit un excédent chaque année.

    L'autre, que j'appelle l'héritage, c'est l'argent économisé à mesure que nous remboursons les hypothèques des 600 000 unités de logement social construites par l'entremise de la SCHL depuis les années 60.

    L'ACHRU vise vraiment cet héritage. Elle veut s'assurer qu'il sera conservé pour le logement social et abordable — pour que les 600 000 unités que nous avons construites restent en bon état, qu'elles continuent d'être offertes aux familles dans le besoin, qu'elles soient bien entretenues et que nous puissions augmenter le stock. Si le budget actuel est maintenu, nous finirons par éprouver des difficultés.

    Votre question porte toutefois plutôt sur la première source de l'excédent, c'est-à-dire les surplus réalisés lorsque les Canadiens achètent des garanties de titre hypothécaire et de l'assurance-hypothèque. Je crois que cela est très important. Cet argent devrait être redistribué aux Canadiens qui sont mal servis par l'actuelle politique du logement.

    Comme vous le savez, la Société canadienne d'hypothèques et de logement a pu créer un excellent environnement pour la plupart des Canadiens en matière de logement. Quelque 80 p. 100 des Canadiens ont accès à des logements convenables, mais 20 p. 100 sont laissés pour compte et n'ont même pas accès au type de subventions et d'aide que reçoivent les autres Canadiens en vertu de divers programmes.

    Nous croyons, comme votre parti l'a indiqué, que ces fonds devraient être utilisés au bénéfice des ménages canadiens qui n'en profitent pas à l'heure actuelle. Je vous remercie de le mentionner.

À  +-(1055)  

[Français]

+-

    M. Robert Bouchard: Merci beaucoup.

    Ma deuxième question s'adresse aux représentantes du Rassemblement canadien pour l'alphabétisation. Madame Rigby-Wilcox, je vous remercie et vous félicite de votre témoignage. Il a été vraiment touchant.

    J'ai noté un chiffre important. Vous dites que 9 millions de Canadiens ont des problèmes d'alphabétisation. C'est beaucoup. Je suis d'accord avec vous: le fait que tant de Canadiens ne savent pas lire constitue un énorme gaspillage pour l'économie du Canada. Vous demandez une somme de 5 milliards de dollars pour une période de 10 ans afin d'alphabétiser un million de Canadiens et de Québécois.

    Puisque l'alphabétisation est du domaine de l'apprentissage, qu'apprentissage veuille dire éducation et que l'éducation est une des responsabilités des provinces, êtes-vous ouverte, et même favorable, à ce que ces programmes relèvent des provinces et que le fédéral transfère des sommes d'argent aux provinces pour qu'elles prennent en charge cette grande responsabilité?

[Traduction]

+-

    Mme Debbie Griffith: Merci de cette question.

    Nous croyons que le gouvernement fédéral est un intervenant essentiel pour relever les défis que présente l'alphabétisation des neuf millions de Canadiens dont nous avons parlé. Nous croyons que, ces dernières années, le gouvernement s'est engagé à corriger la situation, et nous attendons de lui qu'il assure un leadership.

    Nous espérons que le gouvernement fédéral pourra collaborer avec les provinces et les territoires pour mettre au point des ententes entre gouvernements, pour mettre en place les fonds nécessaires aux programmes.

[Français]

+-

    Le président: Merci, monsieur Bouchard.

[Traduction]

    Je vais demander aux témoins de rester encore cinq minutes à peu près, si cela leur convient, parce que nous allons prolonger un peu notre séance. Nous allons donner dix minutes aux trois libéraux.

    M. Holland, Mme Boivin et Mme Minna.

+-

    M. Mark Holland: Alors nous avons cinq minutes pour nous trois?

+-

    Le président: Non, dix minutes.

+-

    M. Mark Holland: Merci, monsieur le président.

    Je remercie tous ceux qui sont venus aujourd'hui. Nous vous sommes reconnaissants de vos exposés.

    Je vais commencer par le Rassemblement canadien pour l'alphabétisation. Je conviens que l'alphabétisation est une priorité nationale, et je félicite moi aussi Mme Rigby-Wilcox d'être venue nous faire part de son expérience. J'ai une expérience similaire.

    J'ai souffert de dyslexie. On m'a dit en quatrième année que je ne réussirais pas à terminer mes études secondaires, même de façon très marginale. Mais ma mère était tenace, et grâce à des livres et à des cours spéciaux j'ai pu surmonter mon handicap. Je crois donc qu'il nous faut reconnaître l'importance des difficultés d'apprentissage et leur effet sur d'autres problèmes, sur l'aide sociale, etc.

    Je m'intéresse évidemment à ce que vous pensez de la stratégie d'alphabétisation pancanadienne en cours d'élaboration. Lorsque vous demandez au gouvernement fédéral d'allouer cinq milliards de dollars à ce programme sur dix ans, qu'est-ce que vous envisagez exactement et comment pensez-vous que les fonds devraient être utilisés au cours de ces dix années?

+-

    Mme Debbie Griffith: Je vous renvoie à l'information fournie dans notre trousse pour la Journée de l'alphabétisation. Nous y exposons un sommaire du plan sur dix ans proposé par le Rassemblement canadien pour l'alphabétisation, en partenariat avec d'autres organisations nationales de littératie et avec les organisations d'alphabétisation provinciales et territoriales.

    J'aimerais aussi mentionner que nous travaillons avec la ministre Bradshaw. Il existe un comité consultatif ministériel où toutes les régions du pays sont représentées, et c'est par l'entremise de ce groupe que la proposition sera examinée et précisée.

+-

    M. Mark Holland: Je regarderai tout cela avec attention.

    Je sais que j'ai très peu de temps, je vais donc poser deux autres questions. L'une s'adresse à l'Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine, et elle porte sur vos propos concernant l'inclusion sociale. Je crois que c'est extrêmement important pour l'avenir.

    Je pense que nous avons tiré les leçons de nos erreurs passées quant à la façon dont nous concevons le logement social isolément du reste des collectivités. Vous n'en avez pas parlé, mais je crois qu'il est important de mentionner les unités secondaires ainsi que la façon dont les collectivités grandissent. J'ignore si vous avez aussi participé, au niveau de la planification, aux décisions d'aménagement des collectivités, dès le départ. Quand vous ajoutez des lotissements, il faut évidemment y incorporer dès le départ le logement social. Il existe aussi un autre problème. Dans ma propre circonscription, par exemple, nous avons des milliers d'unités illégales. C'est le seul type de logement abordable dont disposent les citoyens à l'heure actuelle.

Á  +-(1100)  

+-

    Mme Sharon Chisholm: Merci de poser cette question. Vous avez parfaitement raison. Dans mon travail de bénévole, je préside le Comité consultatif de la santé et des services sociaux de la ville d'Ottawa. Dans le cadre du processus de rezonage, compte tenu du peu de terrains disponibles, nous avons proposé que dans chaque nouveau lotissement 25 p. 100 de la capacité de logement soient réservés au logement abordable, afin que tous puissent profiter de la mise en valeur des terres. Cela a été adopté non pas comme exigence, mais comme cible, et nous croyons que la province de l'Ontario devrait appuyer ceux qui, au Conseil, aimeraient en faire une exigence, parce que la loi actuelle ne le permet pas vraiment.

    Ce que vous dites est très important. Nous ne construisons pas seulement des abris lorsque nous bâtissons des logements. Nous aménageons des lieux. Nous créons des quartiers et des collectivités sûrs, où les habitants peuvent participer à la vie communautaire. Nous savons qu'ils vont y vivre pendant un certain temps. Même s'ils ne peuvent acheter leur logement, ils savent que c'est là qu'ils vont élever leur famille, qu'ils vont participer à la vie communautaire, et cela donne à tous ces enfants les avantages auxquels vous faisiez allusion. Je crois que c'est extrêmement important.

    Aujourd'hui, alors que nous sommes en train de conclure un certain nombre d'ententes sur les infrastructures avec les municipalités et que nous commençons à définir les principes et les exigences, je pense que nous devrions songer à exiger des villes qu'elles se dotent de plans officiels intégrant ce type de philosophie; que lorsqu'elles planifient de nouvelles collectivités, elles intègrent les ménages à faible revenu dans ces collectivités. Cela pourrait constituer une condition pour l'obtention de fonds d'infrastructure dans les collectivités? Pourquoi pas?

    Il y a beaucoup à gagner à confier aux divers ordres de gouvernement les tâches que chacun assume le mieux. En l'occurrence, ce sont les municipalités qui déterminent vraiment comment le travail se fait. Maintenant que vous collaborez avec les municipalités, vous pouvez veiller à ce que le travail se fasse à partir de la base.

+-

    M. Mark Holland: Merci.

    Je sais que mes collègues ont divers points à soulever. Je vais donc formuler très rapidement ma dernière question, puis je laisserai la parole à Mme Boivin.

    Le Conseil national du bien-être social n'a pas mentionné la Prestation fiscale pour enfants. Ce programme a eu beaucoup de succès et il pourrait croître et avoir une incidence sur les problèmes que vous avez mentionnés, tout comme le supplément de revenu garanti l'a fait. Dans vos réponses, ou peut-être par la suite, j'aimerais que vous parliez aussi de ces deux programmes.

    Je m'en tiens à cela, et j'espère que vous serez en mesure de répondre à ma question.

+-

    Le président: Merci, monsieur Holland.

    Madame Boivin, vous avez cinq minutes, puis Mme Minna aura cinq minutes.

+-

    Mme Françoise Boivin (Gatineau, Lib.): Vous êtes trop aimable, monsieur le président.

    Merci, Mark, je vous en sais gré.

[Français]

    Je vais essayer de prendre un peu moins de temps, de façon à permettre à ma collègue de s'exprimer. On sait qu'on doit entendre d'autres personnes après vous. Je résumerais la séance de ce matin par ces mots: « inclusion sociale égale productivité ».

    Je ne veux pas que nos amis Mme Zimmerman et M. Beal se sentent mis à l'écart, mais je pense que les dossiers traités par les autres intervenants, ainsi que leurs interventions, ont été extrêmement importants. En effet, je pense que le Canada ne sera jamais aussi productif qu'il pourrait l'être tant qu'on ne s'assurera pas d'une équité entre tous les groupes d'individus. Pour cette raison, je vous félicite du travail que vous accomplissez.

    Je veux simplement faire certaines remarques relativement à certaines affirmations, à certaines idées fausses. À titre de présidente du caucus féminin du Parti libéral, je peux vous dire que les dossiers que vous traitez nous préoccupent, qu'il s'agisse d'alphabétisation, de logement social, de pauvreté chez les femmes et chez les enfants, d'immigration ou de l'intégration de nos immigrants.

    Monsieur Murphy, vous avez lu, avec raison, le passage du discours du Trône où on disait qu'on voulait un Canada aux assises sociales solides, où les gens sont traités avec respect, sont épaulés au besoin, et où personne n'est laissé pour compte. Il y a encore trop de laissés pour compte au Canada, et nous en sommes conscients.

    Par contre, on est en politique. On reçoit surtout des pots et rarement des fleurs. Par conséquent, je suis contente que vous ayez souligné le travail extraordinaire de ma collègue Claudette Bradshaw en matière d'alphabétisation. Je suis contente que vous souligniez les statistiques. Elles demeurent extrêmement alarmantes, mais j'ai confiance. Quand on parle à Claudette, ne serait-ce que 30 secondes, elle trouve toujours le moyen de nous rassurer. Elle est tellement enthousiaste face à ce dossier. Je veux transmettre un message d'espoir aux Canadiens et aux Canadiennes qui nous écoutent. On utilise souvent l'expression « aux Canadiens et aux Québécois », mais quand je dis « aux Canadiens », j'inclus les Québécois. J'ai espoir, mais il ne faut jamais arrêter, il y a encore beaucoup trop d'analphabètes. Les statistiques sont alarmantes à ce sujet, mais je félicite Claudette pour son travail dans ce domaine.

    Madame Chisholm, en ce qui a trait au logement social, on a procédé à quelques annonces dans mon comté. Je sens qu'il se passe des choses en matière de logement social et de logement abordable. Je pense à un autre collègue enthousiaste et je pense qu'il faut reconnaître cela. Il s'agit du ministre Fontana qui boit, vit et respire le logement social.

[Traduction]

    Je crois que nous faisons beaucoup, peut-être pas suffisamment pour que chacun au Canada ait un bon toit au-dessus de la tête, mais c'est ce que nous visons.

[Français]

    Il est important de souligner que le ministre Fontana a annoncé publiquement le renouvellement du programme IPAC, sans période de bris, parce que c'est extrêmement important. De concert avec vos groupes, on travaille d'arrache-pied pour que cela se fasse. Je pense que le ministre des Finances est ouvert à ce propos et je suis convaincue qu'on entendra des recommandations assez sérieuses à ce sujet.

    Monsieur Murphy, vous avez parlé, au nom du Conseil national du bien-être social, de l'importance des services de garde et d'éducation de la petite enfance.

    À titre de Québécoise et de députée du Québec, je suis très fière de dire que le Québec signera le premier une entente avec le gouvernement fédéral, malgré le fait qu'on entend souvent dire, partout au Canada, que ça va très mal entre le Québec et le fédéral. À mon avis, justice a été rendue puisque le Québec est à l'avant-garde en matière de services de garde et d'éducation de la petite enfance. Ce sont aussi de bonnes nouvelles.

    Dans mon bureau, on m'appelle parfois Pollyana, parce que je suis une personne extrêmement optimiste. Si on ne l'était pas, je vous assure qu'on abandonnerait la politique demain matin. Voir que des dossiers aboutissent à un moment donné fait du bien. Je dis donc bravo! Par contre, il reste du chemin à faire et nous en sommes conscients.

    C'était l'essentiel du message que je voulais vous transmettre.

    S'il me reste 30 secondes, j'aimerais vous poser une question qui a trait à l'immigration.

[Traduction]

    En bref, madame Bose…

Á  +-(1105)  

[Français]

+-

    Mme Anuradha Bose: Vous pouvez parler en français.

+-

    Mme Françoise Boivin: En ce qui a trait à l'immigration, on parle beaucoup de problèmes d'intégration. Je considère que le Canada est une terre d'accueil, mais il y a toujours d'énormes problèmes sur le plan de l'intégration. Selon vous, quel dossier devrait être réglé en priorité? Que faudrait-il faire dans l'immédiat? Il faut effectuer un virage à 180 degrés pour que nos immigrants se sentent Canadiens dès demain matin.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, madame Boivin. Maintenant nous sommes vraiment en retard.

[Français]

    J'avais précisé que l'on ne disposait que de cinq minutes pour les questions et les réponses.

    Madame Minna, c'est à vous.

[Traduction]

+-

    L'hon. Maria Minna: Merci, monsieur le président. Je serai brève, pour que nos vis-à-vis puissent répondre.

    Au sujet de l'alphabétisation, je collabore avec Claudette à titre de député dans ce programme. C'est excellent; elle veut faire participer la collectivité. Essentiellement, vous allez déterminer ce qui sera fait. Je suis très optimiste à ce sujet, et je suis heureuse d'apprendre que c'est… Nous allons rester en contact.

    Pour ce qui est du salaire minimum fixé par la loi fédérale, je suis d'accord. Je suis très fière de voir que la Prestation fiscale pour enfant donne des résultats. Je suis heureuse de dire que j'ai été l'une des marraines de ce programme. Il y avait aussi plusieurs parrains. Nous étions huit, de fait, et nous nous sommes battus pendant toute une année pour ce programme, pour le mettre sur pied, et nous sommes fiers de voir qu'il donne de bons résultats. Nous voulons maintenant porter la prestation à 4 900 $, je suis d'accord avec vous. La retenue doit disparaître, c'est indéniable. L'autre combat portait sur la garde d'enfants, et là encore j'aimerais qu'on accorde des augmentations, parce que nous devons maintenant pousser plus loin. Nous avons jeté les bases; maintenant il faut construire.

    Je crois que personne ne peut s'opposer à cela, je vais donc m'intéresser de plus près à la question des immigrantes, parce que nous n'en avons pas vraiment parlé ici. Je veux dire notamment qu'on perçoit trop souvent les problèmes des immigrants comme des problèmes d'immigration — les files d'attente, la façon dont nous amenons les gens ici, les problèmes — mais ce n'est pas la principale question.

    Madame Bose est avec nous aujourd'hui. J'ai été l'une des cofondatrices de son organisation, parce qu'à l'époque les femmes immigrantes membres des minorités étaient exclues. Pouvez-vous imaginer que la politique du gouvernement du Canada écartait les femmes de la formation en anglais langue seconde, parce qu'on ne s'attendait pas à ce qu'elles s'intègrent à la population active? Vers le milieu des années 80, j'ai participé à une contestation en vertu de la Charte devant la Cour suprême du Canada, avec la FAEJ. Cela ne date donc pas d'hier, et les bases de cette organisation remontent, je crois, à 1986 ou 1987. Je sais que c'était au milieu des années 80, parce que j'y étais.

    Je connais la réponse à ma question, mais je veux vous l'entendre dire. Expliquez-moi très rapidement l'initiative britannique, l'initiative de Downing Street, et son fonctionnement. Oui, il faut procéder à une analyse générale. Je propose — et dites-moi simplement si c'est une bonne idée ou pas — que dès son arrivée, tout nouvel immigrant soit inscrit à des cours d'ALS; que l'on reconnaisse immédiatement ses diplômes ou qu'on décide des études complémentaires qu'il doit suivre, le cas échéant; qu'on décide si cet immigrant a droit à des fonds et à une aide; puis qu'on l'aide jusqu'à ce qu'il trouve un emploi, car il y a encore des obstacles à l'emploi.

    Ce type d'intervention dynamique, proactive, c'est ce dont nous avons vraiment besoin. Qu'en pensez-vous?

Á  -(1110)  

+-

    Mme Anuradha Bose: Premièrement, les organismes d'établissement doivent être mieux financés, et leur personnel doit être mieux formé.

    L'initiative de Downing Street, je vous en enverrai la description par courriel, parce que c'est plutôt long.

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    L'hon. Maria Minna: D'accord.

+-

    Mme Anuradha Bose: Selon moi, le gouvernement du Canada pourrait créer un processus a priori pour que les personnes qui ont l'intention d'immigrer puissent faire évaluer leurs diplômes avant leur arrivée. Je sais que certaines professions le font, mais cela pourrait être généralisé. En outre, il doit y avoir un certain lien entre les réalités du marché du travail et les personnes que nous accueillons. À l'heure actuelle, nous avons un important contingent de cireurs de chaussures et de laveurs de vaisselle. Cela n'entre jamais dans l'équation de la productivité, c'est un gaspillage de talent, comme Jeffrey Reitz l'a indiqué.

+-

    L'hon. Maria Minna: Je suis tout à fait d'accord. Chaque fois que j'entends parler de l'exode des cerveaux, je pense aussi au gaspillage des cerveaux. Nous avons fait des pressions à ce sujet en 1981 et en 1983 — je le sais, j'y ai participé avec vous et d'autres — alors je crois qu'il est temps de régler cela.

    Merci.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Baldwin, je veux vous poser une brève question au sujet du graphique de la page 4, la productivité et les heures réelles. Je pense que les barres sont beaucoup plus rapprochées pour la décennie de 1961 à 1973. Elles semblent s'écarter en 2000 et en 2003. N'avez-vous pas dit qu'il n'y avait pas beaucoup de différence? Pourtant j'en vois une considérable. Pouvez-vous expliquer cet écart?

+-

    M. John Baldwin: Nous l'ignorons. L'écart s'est creusé depuis 2000. C'est peut-être en partie un phénomène cyclique semblable à celui dont j'ai parlé précédemment, dans ma réponse à M. Penson. Nous constatons que ces liens s'établissent sur le long terme, et qu'ils dévient sur le court terme.

+-

    Le président: Est-ce que ce pourrait être entre autres parce que l'on utilise aujourd'hui moins de machinerie qu'entre 1961 et 1973?

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    M. John Baldwin: Non, je ne le crois pas.

+-

    Le président: D'accord.

    Monsieur Murphy.

+-

    M. John Murphy: Monsieur le président, certains membre ont posé des questions au sujet de la Prestation fiscale pour enfants. J'ai indiqué qu'elle était bénéfique pour les petits salariés mais pas pour les personnes vivant d'aide sociale, et qu'il fallait éliminer sa récupération par les provinces. Je crois que les choses s'annoncent bien. Il y a toute la question du Québec, pour la garde et l'éducation de la petite enfance, c'est un bon modèle pour le reste du pays. Je crois que nous progressons.

    J'entends certains échos positifs au gouvernement au sujet de ce que Tony Martin propose, de ce que le premier ministre envisage, de ce que Ken Dryden examine. Mais personne n'a parlé de ceux qui vivent de l'aide sociale — 1 700 000 personnes vivent avec des revenus de misère, de misère absolue, à 60 p. 100 sous le seuil de la pauvreté. Si le gouvernement veut traiter équitablement tous les Canadiens, il doit régler ce problème particulier, et je pense que nous devons y veiller.

+-

    Le président: Le temps file, je crois que je vais vous répondre. Le fait est que cette question nous semble être du ressort des provinces, et nous avons suffisamment de dossiers où les provinces nous demandent de ne pas intervenir. J'imagine que c'est la raison pour laquelle la question n'a pas été soulevée. Elle est mentionnée dans votre mémoire, et nous en traiterons sans doute lors de nos délibérations, au moment de rédiger notre rapport.

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    M. John Murphy: J'espère que vous le ferez — lorsque vous parlerez de l'impôt au Canada.

+-

    Le président: Le Transfert canadien a été mentionné par un bon nombre de groupes, en particulier les étudiants.

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    M. John Murphy: Oui.

-

    Le président: Je remercie nos témoins. Merci d'avoir pris la peine de venir aujourd'hui.

    La discussion est plus difficile à suivre lorsque nous accueillons un grand nombre de groupes représentant des domaines et des secteurs d'intérêt aussi variés, mais notre mandat, et ce sera notre défi, consiste à essayer de refléter tout cela dans notre rapport.

    La séance est levée.