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OGGO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 15 février 2005




¹ 1535
V         Le président (M. Leon Benoit (Vegreville—Wainwright, PCC))
V         Dr Shiv Chopra (à titre personnel)
V         Le président
V         Dre Margaret Haydon (à titre personnel)
V         Le président
V         Dr Gérard Lambert (à titre personnel)
V         Le président
V         Dr Shiv Chopra

¹ 1540
V         Le président
V         Dr Shiv Chopra

¹ 1545
V         Le président
V         Dr Shiv Chopra
V         Le président
V         M. Joe Preston (Elgin—Middlesex—London, PCC)

¹ 1550
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Joe Preston
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Joe Preston
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Joe Preston
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Joe Preston
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Joe Preston
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Joe Preston
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Joe Preston

¹ 1555
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Joe Preston
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Joe Preston
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Joe Preston
V         Dr Shiv Chopra
V         Le président
V         M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ)

º 1600
V         Dr Shiv Chopra

º 1605
V         Le président
V         L'hon. Robert Thibault (Nova-Ouest, Lib.)
V         Dr Shiv Chopra

º 1610
V         L'hon. Robert Thibault
V         Le président
V         L'hon. Robert Thibault
V         Dr Shiv Chopra
V         L'hon. Robert Thibault
V         Le président
V         M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD)

º 1615
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Pat Martin
V         Dre Margaret Haydon
V         M. Pat Martin
V         Dre Margaret Haydon
V         M. Pat Martin
V         Dre Margaret Haydon
V         M. Pat Martin
V         Dr Gérard Lambert

º 1620
V         M. Pat Martin
V         Le président
V         M. Guy Lauzon (Stormont—Dundas—South Glengarry, PCC)
V         Dr Gérard Lambert
V         M. Guy Lauzon
V         Dre Margaret Haydon
V         M. Guy Lauzon
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Guy Lauzon
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Guy Lauzon
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Guy Lauzon
V         Dr Shiv Chopra

º 1625
V         M. Guy Lauzon
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Guy Lauzon
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Guy Lauzon
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Guy Lauzon
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Guy Lauzon
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Guy Lauzon
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Guy Lauzon
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Guy Lauzon
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Guy Lauzon
V         Dr Shiv Chopra
V         Le président
V         M. Francis Scarpaleggia (Lac-Saint-Louis, Lib.)

º 1630
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Francis Scarpaleggia
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Francis Scarpaleggia
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Francis Scarpaleggia
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Francis Scarpaleggia
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Francis Scarpaleggia
V         Dr Shiv Chopra
V         Le président
V         M. Ken Boshcoff (Thunder Bay—Rainy River, Lib.)
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Ken Boshcoff
V         Dr Shiv Chopra

º 1635
V         M. Ken Boshcoff
V         Dr Shiv Chopra
V         M. Ken Boshcoff
V         Dr Shiv Chopra
V         Le président
V         M. Pierre Poilievre (Nepean—Carleton, PCC)
V         Le président
V         Dr Shiv Chopra

º 1640
V         Dre Margaret Haydon
V         M. Pierre Poilievre
V         Dre Margaret Haydon
V         M. Pierre Poilievre
V         Le président
V         Dr Gérard Lambert
V         Le président
V         Dr Shiv Chopra
V         Le président
V         Le président
V         Mme Nkiru Agbakwa (analyste en politiques, African Canadian Legal Clinic)

º 1650

º 1655
V         Le président
V         M. Joe Preston
V         Mme Nkiru Agbakwa
V         M. Joe Preston
V         Mme Nkiru Agbakwa
V         M. Joe Preston
V         Mme Nkiru Agbakwa
V         M. Joe Preston
V         Mme Nkiru Agbakwa
V         M. Joe Preston
V         Mme Nkiru Agbakwa
V         M. Joe Preston
V         Mme Nkiru Agbakwa
V         M. Joe Preston
V         Mme Nkiru Agbakwa

» 1700
V         M. Joe Preston
V         Mme Nkiru Agbakwa
V         M. Joe Preston
V         Le président
V         Mme Louise Thibault (Rimouski-Neigette—Témiscouata—Les Basques, BQ)
V         Mme Nkiru Agbakwa
V         Mme Louise Thibault
V         Mme Nkiru Agbakwa

» 1705
V         Mme Louise Thibault
V         Mme Nkiru Agbakwa
V         Mme Louise Thibault
V         Mme Marie Chen (directrice par intérim des Services légaux, African Canadian Legal Clinic)
V         Le président
V         M. Marc Godbout (Ottawa—Orléans, Lib.)

» 1710
V         Mme Marie Chen
V         M. Marc Godbout
V         Mme Marie Chen
V         M. Marc Godbout

» 1715
V         Mme Nkiru Agbakwa
V         Mme Marie Chen
V         Le président
V         M. Pat Martin
V         Mme Nkiru Agbakwa
V         M. Pat Martin
V         Mme Nkiru Agbakwa
V         M. Pat Martin

» 1720
V         Le président
V         Mme Marie Chen
V         Le président
V         Mme Marie Chen
V         Le président










CANADA

Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires


NUMÉRO 020 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 15 février 2005

[Enregistrement électronique]

¹  +(1535)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Leon Benoit (Vegreville—Wainwright, PCC)): Bon après-midi à tous. Nous sommes réunis aujourd'hui conformément à l'ordre de renvoi du lundi 18 octobre 2004 portant sur le projet de loi C-11, Loi prévoyant un mécanisme de dénonciation des actes répréhensibles et de protection des dénonciateurs dans le secteur public.

    Un de nos témoins d'aujourd'hui est Shiv Chopra. Il est accompagné de deux autres personnes qui s'assiéront également à la table, je crois. M. Chopra pourra nous les présenter.

    Pendant qu'elles s'installent, je voudrais lire quelque chose au comité—une sorte de rappel, étant donné que M. Chopra a une cause devant les tribunaux. Il le comprend et va agir en conséquence, mais pour votre gouverne, je crois devoir vous lire quelques renseignements que m'a communiqués la greffière. Je vais le faire.

    Honorables membres, avant de reprendre nos audiences sur le projet de loi C-11, j'aimerais prendre un instant pour soulever la question de la convention sur les causes en instance judiciaire.

    Une « cause en instance » est une affaire qu'un juge ou un tribunal est en train d'examiner et l'ouvrage de Marleau et Montpetit explique qu'il s'agit d'une « restriction que la Chambre s'impose volontairement »—et par extension ses comités—« pour protéger un accusé, ou une autre partie à des poursuites en justice ou à une enquête judiciaire, de tout effet préjudiciable d'une discussion publique de la question ». De plus, comme le faisait observer le Président Fraser, cette convention sert à « maintenir la séparation et la bonne entente entre le législatif et le judiciaire ».

    Par conséquent, d'un côté elle protège l'intéressé et de l'autre elle maintient la séparation entre le Parlement et les tribunaux.

    J'ai pensé que je devais lire cette déclaration aux membres du comité afin que nous ayons l'avis de Marleau et Montpetit et de l'ancien Président Fraser sur la question et que vous puissiez agir en conséquence.

    Nous allons maintenant commencer notre discussion avec M. Chopra. Je voudrais vous remercier d'être venu aujourd'hui. Vous avez une brève déclaration à nous faire, après quoi nous vous poserons des questions. La parole est à vous.

    J'aimerais que vous nous présentiez les autres personnes et si elles souhaitent s'asseoir à vos côtés, je les invite à le faire.

+-

    Dr Shiv Chopra (à titre personnel): Merci, monsieur le président.

    Je voudrais inviter mes collègues, Margaret Haydon et Gérard Lambert.

+-

    Le président: Leurs noms se trouvent devant eux. Si vous désirez vous présenter très brièvement, allez-y.

+-

    Dre Margaret Haydon (à titre personnel): Je suis Margaret Haydon et je suis une collègue de M. Chopra impliquée dans la cause devant les tribunaux pour avoir fait une dénonciation.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Lambert.

[Français]

+-

    Dr Gérard Lambert (à titre personnel): Je m'appelle Gérard Lambert. Je suis un collègue du docteur Shiv Chopra et de Margaret Haydon. Nous avons été congédiés par Santé Canada, et notre cause doit être entendue à la Commission des relations de travail.

[Traduction]

+-

    Le président: Vous pouvez commencer votre déclaration d'ouverture, monsieur Chopra.

+-

    Dr Shiv Chopra: Merci, monsieur le président.

    Comme je vous l'ai écrit pour demander à comparaître devant le comité, je vous suis reconnaissant de m'avoir invité et d'avoir consenti à permettre à mes deux autres collègues de se joindre à moi. Nous formons tous les trois un tout, parce que nous avons été tous les trois congédiés pour avoir, croyons-nous, dénoncé certaines questions dans le cadre de nos emplois à Santé Canada. Nous avons été tous les trois en congé de maladie prolongé. Une quatrième personne, Cris Basudde, est partie en même temps que nous, mais malheureusement, avec tout ce qui est arrivé, il est décédé. Sa cause pour discrimination raciale est toujours devant le Tribunal des droits de la personne et, à ma connaissance, ce sera sans doute la première fois dans l'histoire du Canada qu'une cause de ce genre sera entendue à titre posthume.

    Pour en revenir à mon exposé, comme je l'ai déjà écrit, nous nous réjouissons qu'on reconnaisse la nécessité pour le Canada de se doter d'une loi sur la dénonciation afin de protéger l'intérêt public. C'est effectivement utile, mais nous savons…du moins je sais que j'ai fait tout le tour de la question de la dénonciation au cours des 15 dernières années. J'ai déjà fait tout ce qui est proposé dans la loi. J'ai franchi chaque étape du processus de dénonciation au cours des 15 dernières années en faisant des dénonciations à l'interne…jusqu'aux trois premiers ministres , trois premiers ministres avec qui j'ai eu un échange de correspondance. J'ai eu un échange de correspondance avec de nombreux ministres de la Santé, le président du Conseil du Trésor—plus qu'un—et le président de la Commission de la fonction publique. J'ai remué ciel et terre.

    Lorsque j'ai signalé que certaines choses n'allaient pas du tout au sein de la fonction publique, j'ai soulevé des questions qui portaient sur ce qui se passait dans le cadre de mon emploi et de celui de ma femme—qui travaillait également à Santé Canada—et qui mettaient en jeu la sécurité du public. Qu'il s'agisse d'implants mammaires, de médicaments comme le Vioxx, de certains vaccins, de la salubrité des aliments, de l'hormone de croissance bovine, de l'ESB, toutes ces questions étaient directement de notre ressort. Nous avons soulevé ces problèmes au cours de ces années, sur une très longue période, depuis 1987.

    Lorsque j'ai soulevé ces questions, cela s'est transformé en racisme. On m'a dit qu'en coulisses on disait que j'étais un étranger, un membre d'une minorité visible et que les minorités visibles ne connaissaient pas la façon de travailler nord-américaine. Elles ne savent pas comment négocier, elles ne savent pas comment communiquer avec les entreprises, les collègues et les supérieurs. Tout cela a entraîné une série de poursuites que j'ai intentées non seulement contre Santé Canada, mais également contre le Conseil du Trésor et la Commission de la fonction publique, une cause que j'ai d'ailleurs gagnée.

    Je n'ai jamais cru que le racisme régnait au Canada. Je vis au Canada depuis 45 ans. J'y ai fait mes études et je suis un citoyen honorable et honoré. J'ai reçu toutes sortes de récompenses. J'ai reçu la médaille de citoyenneté du gouverneur général et mon syndicat m'a décerné un prix à l'occasion du 50e anniversaire de la Déclaration des droits de l'homme. Mon syndicat, qui regroupe près de 50 000 membres, a publié des brochures à mon sujet.

¹  +-(1540)  

    J'ai reçu un prix pour services rendus au public qui m'a été décerné par le Conseil des Canadiens, le Sierra Club, la Coalition canadienne de la santé et le Syndicat national des cultivateurs. Ce prix m'a été remis par le plus grand dénonciateur sur terre, M. Ralph Nader. J'en ai ici des photos.

+-

    Le président: Monsieur Chopra, si vous pouviez parler du projet de loi, nous l'apprécierions. Merci.

+-

    Dr Shiv Chopra: Toutes mes excuses, monsieur, mais je voulais mentionner que je ne suis pas un dénonciateur ordinaire. Je l'ai fait à de nombreuses reprises et je n'ai pas renoncé. Pendant toutes ces années, j'ai été victime de représailles et j'ai finalement été congédié il y a huit mois, avec mes deux collègues. Nous avons tous été congédiés pour insubordination. La cause n'a pas encore été entendue. Depuis huit mois, nous sommes tous les trois sans aucun revenu.

    Nous avons voulu protéger la sécurité du public et cette fois, c'était particulièrement au sujet de la maladie de la vache folle. En 1997, nous avions prédit que cela pourrait arriver au Canada et nous avons écrit une lettre ouverte au premier ministre Jean Chrétien. Nous l'avions prédit, et quand c'est arrivé nous avons écrit à notre sous-ministre adjoint, Diane Gorman. Elle n'en a pas tenu compte. Quelques jours plus tard, nous avons écrit à la ministre de la Santé, Anne McLellan pour lui dire : maintenant que c'est arrivé, voici comment l'arrêter. C'est une maladie créée par l'homme et nous pouvons l'arrêter tout de suite. Non, au lieu de nous écouter, on nous a suspendus de nos fonctions pour avoir fait peur au public et on nous a finalement congédiés. Voilà donc le contexte que je voulais présenter au comité.

    Pour en venir au projet de loi comme tel, nous l'avons lu. Nous n'aurions pas été protégés. En fait, Margaret Haydon et moi-même sommes allés devant la Cour fédérale qui, s'appuyant sur l'arrêt Fraser, nous a donné gain de cause et a dit que nous avions fait ce que nous devions faire. J'ai ensuite intenté une deuxième poursuite quand j'ai été suspendu pendant cinq jours sans salaire pour avoir critiqué Santé Canada et cette fois pour une question de racisme. J'ai également gagné cette cause.

    Depuis, j'ai fait l'objet de constantes représailles. Je suis âgé de 70 ans. Je compte 35 années de service. J'ai reçu toutes sortes de récompenses et finalement, quand j'ai été congédié, j'ai reçu de Jean Chrétien une récompense pour 25 années de service. Voici une autre récompense du premier ministre Paul Martin qui m'a donné une montre en or accompagnée d'un mot disant que j'avais bien servi le pays et qui émane du sous-ministre qui m'a congédié.

    Nous n'avions rien dit du congédiement dans les médias et le premier ministre a déclaré qu'il l'acceptait et l'affaire est maintenant devant les tribunaux. Comment le premier ministre, ce premier ministre a-t-il pu…

¹  +-(1545)  

+-

    Le président: Monsieur Chopra, si vous le permettez, je vous demande de vous en tenir au projet de loi. Vous avez parlé de représailles, par exemple. Si vous reliez cela au projet de loi en disant ce qu'il devrait contenir pour empêcher les représailles, le comité vous écoutera. Autrement, nous passerons directement aux questions, monsieur Chopra.

+-

    Dr Shiv Chopra: Monsieur, je pense que les représailles font partie intégrante… C'est une habitude. C'est la façon dont cela s'est passé et se passe encore maintenant. Voilà pourquoi j'insiste là-dessus, pour que le comité sache comment les représailles s'exercent. Ce projet de loi ne protège donc pas contre les représailles.

    Si le dénonciateur dit que les pressions viennent du Conseil privé lui-même pour qu'on accepte des médicaments d'une innocuité douteuse et si personne ne veut l'écouter, personne n'est prêt à l'entendre, ni le premier ministre, ni le ministre ou qui que ce soit d'autre, ni même M. Keyserlingk… Nous lui avons également adressé notre plainte. Cette cause se trouve devant la Cour fédérale.

    Je ne vois donc pas comment ce projet de loi empêcherait les représailles s'il est placé sous l'autorité de la Commission de la fonction publique. Si je mentionne la Commission de la fonction publique, c'est parce que je me suis adressé à elle à de nombreuses reprises. Nous l'avons fait souvent et nous la traînons devant les tribunaux. Comment la Commission de la fonction publique ou le bureau de M. Keyserlingk, le Bureau de l'intégrité de la fonction publique, pourrait-il protéger les dénonciateurs? Je ne vois pas ce qu'il pourrait protéger à moins que cette question ne relève directement d'une organisation privée qui ferait rapport au Parlement.

    Je vais donc m'arrêter là, monsieur, afin de répondre à vos questions.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Nous allons commencer notre premier tour de questions avec M. Preston.

+-

    M. Joe Preston (Elgin—Middlesex—London, PCC): Monsieur Chopra, merci d'être venu ici aujourd'hui et de nous avoir raconté votre histoire.

    Il semble presque incroyable qu'une personne possédant vos titres de compétence et autant d'années d'ancienneté à Santé Canada puisse être congédiée sans préavis pour insubordination simplement parce qu'elle a fait les mises en garde qu'elle est censée faire. Votre travail à Santé Canada consistait à vérifier l'innocuité de nos produits alimentaires et de nos médicaments. Quand vous l'avez fait, on vous a traité comme si vous étiez coupable d'insubordination.

    En ce qui concerne le projet de loi C-11, vous avez déjà déclaré qu'il ne vous aurait pas protégé. Vous avez déjà dit qu'en dénonçant ces actes au Commissaire de la fonction publique, comme le prévoit ce projet de loi, vous n'auriez pas été protégé. Qu'est-ce qui vous aurait protégé?

¹  +-(1550)  

+-

    Dr Shiv Chopra: Un projet de loi doit présenter deux aspects. Premièrement, il doit être obligatoire de dénoncer des actes répréhensibles qui se rapportent à votre travail, tout comme un citoyen qui assiste à un acte criminel sur la route ou dans son quartier a l'obligation d'en avertir les autorités. Sinon, il peut être poursuivi pour n'avoir rien dit ou pour avoir protégé le coupable. C'est un principe de la common law et du Code criminel. Nos emplois nous confèrent une obligation supplémentaire; si quelque chose se passe dans le cadre de notre emploi, il faut que ce soit une obligation.

    En fait, la Cour suprême s'est déjà prononcée à ce sujet dans l'affaire Neil Fraser. À partir de cette observation, Margaret Haydon et moi-même avons porté la cause devant la Cour fédérale qui a réaffirmé cette décision. Par conséquent, cela devrait être une obligation.

    Pour ce qui est de la deuxième partie de votre question, pour encourager les gens à dénoncer ou signaler les actes répréhensibles, il faut leur accorder une protection explicite. Nous avons témoigné tous les trois devant un comité parlementaire au sujet de l'hormone de croissance bovine recombinante et le Sénat avait reçu des garanties par écrit du ministre de la Santé, Allan Rock et du sous-ministre, David Dodge. Le Sénat du Canada avait obtenu des garanties par écrit, mais j'ai quand même été suspendu de mes fonctions.

+-

    M. Joe Preston: Un ministre vous avait garanti par écrit que vous seriez protégé si vous témoigniez, mais après votre témoignage, vous avez quand même été suspendu de vos fonctions.

+-

    Dr Shiv Chopra: Oui.

    Comme vous pouvez le voir, ces garanties avaient été données par le chef politique, le ministre Allan Rock, de même que le sous-ministre, qui est le chef de la bureaucratie de mon ministère, et c'était des personnalités éminentes.

+-

    M. Joe Preston: De toute évidence, leurs garanties ne valaient pas le papier sur lequel elles étaient écrites.

    Le comité a entendu le témoignage d'autres dénonciateurs et je vais vous poser les mêmes questions que celles que nous leur avons posées.

    Faudrait-il que les dénonciateurs puissent s'adresser à un ministère indépendant qui ferait directement rapport au Parlement pour que ce projet de loi soit efficace?

+-

    Dr Shiv Chopra: Personnellement, je ne vois pas d'objection à ce que les gens passent par la voie hiérarchique étant donné que c'est précisément ce que j'ai fait. Et je pense que c'est juste.

+-

    M. Joe Preston: Mais monsieur, sans vouloir vous contredire, je ne crois pas que cela ait donné de bons résultats dans votre cas.

+-

    Dr Shiv Chopra: Si la protection voulue est accordée, il n'y a pas d'inconvénient à suivre la voie hiérarchique.

+-

    M. Joe Preston: S'il y a un mécanisme de protection.

+-

    Dr Shiv Chopra: Oui, s'il y a un mécanisme de protection et il faudrait préciser exactement quelle sera cette protection.

    N'enlevez pas le dénonciateur de son poste, comme cela a été dit au cours de vos dernières audiences. Mme Marleau avait demandé si on devait l'enlever de son poste. Ce ne serait pas une bonne chose. Il serait terrible d'enlever cette personne de son poste.

    Votre rôle ou celui de la personne qui examinera la question, sera de recevoir la plainte, d'enquêter, d'approfondir les choses et de prendre des mesures contre l'auteur des actes répréhensibles.

    Si la dénonciation n'est pas justifiée, il faut certainement prendre des mesures contre son auteur, mais si des fautes ont été commises contre une personne ou un groupe de personnes, il faut prendre des mesures contre elles.

+-

    M. Joe Preston: Il faut prendre des mesures contre la personne qui se livre à des représailles. C'est ce que vous dites?

+-

    Dr Shiv Chopra: Oui, absolument.

+-

    M. Joe Preston: Par conséquent, si nous incluons dans le projet de loi C-11 un mécanisme qui permettrait de le faire, cela le rendrait efficace selon vous?

+-

    Dr Shiv Chopra: Oui, je pense qu'il faut dire aux gens explicitement et non pas implicitement qu'ils bénéficieront d'une protection. J'ai constaté que la protection était implicite. Voilà pourquoi j'ai persisté et j'ai voulu mettre le système à l'épreuve. Mais la protection implicite existe déjà. Je dis qu'il faut qu'elle soit explicite.

+-

    M. Joe Preston: Bien entendu, elle devrait également être implicite. Nous devrions pouvoir nous attendre à ce que nos employeurs nous traitent équitablement. Votre exemple nous montre que ce n'est peut-être pas toujours le cas, comme nous l'avons également constaté pour d'autres dénonciateurs. Vous dites toutefois que ce doit être explicite, que si le projet de loi précise quelles seront les sanctions en cas de représailles, si des mesures de représailles sont prises, ce mécanisme se déclenchera et pourra même aller jusqu'au congédiement dans un cas comme le vôtre.

¹  +-(1555)  

+-

    Dr Shiv Chopra: Oui, monsieur.

+-

    M. Joe Preston: Très bien.

    Le comité a parlé de la possibilité de protéger le dénonciateur en l'enlevant de son poste. Vous dites que ce n'est pas nécessairement la meilleure solution. Dans un petit bureau, cela peut être la seule façon de protéger l'employé contre des représailles, car nous avons entendu dire que les représailles n'étaient pas toujours aussi évidentes qu'elles l'ont été dans votre cas. On pourrait simplement vous empêcher de participer au prochain atelier, d'obtenir votre prochaine promotion, de vous amuser au parti de Noël ou que sais-je encore. Les représailles peuvent revêtir de nombreuses formes. Dans un petit bureau, peut-être pas à Ottawa, mais à l'extérieur, il n'est peut-être pas possible de vous maintenir à votre poste.

+-

    Dr Shiv Chopra: Je suis peut-être plus coriace que la plupart des gens. Je ne pense pas que ces petites choses soient bien graves.

    Quand l'intérêt public est en jeu, c'est une chose que je peux supporter. Pendant 15 ans, je ne suis jamais allé déjeuner avec qui que ce soit. Je suis resté travailler à mon bureau. Mon travail a été irréprochable.

+-

    M. Joe Preston: Mais à mes yeux, monsieur, ce sont des représailles. Si vous êtes un homme fort, tant mieux pour vous. Je vous félicite pour votre courage, mais pour moi ce sont des représailles. Nous voudrions produire un projet de loi qui protégera également les gens contre ce genre de représailles.

    J'ai déjà mentionné la Commission de la fonction publique, mais je ne suis pas certain d'avoir obtenu de vous une réponse définitive quant à l'idée d'avoir un bureau indépendant relevant du Parlement auquel les dénonciateurs pourraient s'adresser. Vous avez dit que vous seriez prêt à suivre la voie hiérarchique, mais certains dénonciateurs auraient peur de confronter leur supérieur si ce dernier était l'auteur d'un acte répréhensible.

+-

    Dr Shiv Chopra: Je dis que si un acte répréhensible est commis au travail, vous n'irez pas porter une enveloppe brune à un journaliste ou aux médias. Vous aurez l'obligation de le signaler à votre supérieur immédiat. S'il y a un changement…

+-

    M. Joe Preston: Mais si cela ne change pas? S'il n'y a pas de changement?

+-

    Dr Shiv Chopra: Il faut que ça change. Personnellement, je crois que cela devrait se passer ainsi. Vous devriez faire une dénonciation. Tous les autres témoins ont fait exactement la même chose—ils se sont adressés à leur supérieur hiérarchique. Mais il faut les protéger contre les agissements des personnes qui reçoivent leur plainte, mais qui font le contraire. Voilà ce qu'il faut protéger.

+-

    Le président: Merci, monsieur Preston.

    M. Sauvageau, pour sept minutes, suivi de M. Thibault.

[Français]

+-

    M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Messieurs, madame, bienvenue.

    Nous ne pouvons que souligner le courage et la détermination dont vous avez fait preuve. Je tiens à répéter ce que mon ami du Parti conservateur a dit, à savoir que, dans le cadre de notre étude du projet de loi C-11, nous apprécions beaucoup les commentaires que vous avez faits aujourd'hui, ainsi que ceux que nous ont faits quatre autres personnes qui, comme vous, ont été victimes de représailles après avoir dénoncé des actes répréhensibles. Concrètement, cela peut contribuer à améliorer le projet de loi et à le rendre plus acceptable pour les fonctionnaires.

    J'apprécie aussi que vous nous disiez qu'un agent de la Chambre totalement indépendant, comme la vérificatrice générale ou la commissaire aux langues officielles, devrait analyser les plaintes.

    J'apprécie aussi que vous nous disiez que le rapport doit être déposé à la Chambre des communes par un agent vraiment indépendant.

    Vous avez aussi répondu à certaines questions concernant le fait que ce soit la Commission de la fonction publique qui gère cela. En nous faisant part de votre expérience personnelle, vous avez démontré que ce ne serait peut-être pas une bonne chose. Vous avez aussi répondu à une question sur l'obligation de dénoncer les actes répréhensibles, ce qui nous éclaire beaucoup sur la version finale du projet de loi.

    En ce qui a trait aux gens qui exercent des fonctions assez spécialisés, comme vous le faites, vous dites que dans la loi, on devrait avoir une protection seulement lorsqu'on dénonce et qu'il ne devrait pas y avoir de transferts horizontaux, surtout dans le cas d'un médecin spécialiste de la qualité de l'alimentation. Je me demande comment on pourrait vous déplacer horizontalement dans la fonction publique, ce qui n'est pas évident.

    Comment peut-on assurer votre protection si vous restez en place? Je pense entre autres au scandale des commandites. Les gens ne pouvaient pas aller voir leur patron, parce que ce dernier était lui-même impliqué, de même que son patron à lui. Donc, comment peut-on assurer votre sécurité si vous restez en place?

    Deuxièmement, comment peut-on déplacer une personne qui exerce des fonctions aussi spécialisées que les vôtres?

    Troisièmement, est-ce qu'on devrait, dans certains cas, mettre la personne en congé sans solde tant et aussi longtemps que le problème n'est pas résolu?

    J'avais une autre question, mais elle vient de m'échapper. Je vais donc vous laisser répondre à ces questions en attendant que l'autre me revienne.

º  +-(1600)  

[Traduction]

+-

    Dr Shiv Chopra: Merci. Permettez-moi de répondre en ce qui concerne la vérificatrice générale ou la personne qui devrait être chargée de gérer ce projet de loi.

    Étant donné que ce projet de loi s'inscrit dans le cadre de la Loi sur la gestion des finances publiques et que tout acte répréhensible, que ce soit contre la sécurité du public ou autre chose, est toujours relié à l'argent… Si nous remontons au roi Charles I, aux débuts de la démocratie, c'est en soutirant de l'argent au Parlement que le roi a déclenché une guerre civile et que tout a commencé. Pour ce qui est de notre propre Parlement, c'est la Loi sur la gestion des finances publiques qui est la loi pertinente.

    L'administration de la Loi sur la gestion des finances publiques est placée sous la responsabilité de la vérificatrice générale. Par conséquent, bien que ce soit avec la recommandation du premier ministre, la vérificatrice générale fait rapport au Parlement. Je crois que c'est l'institution compétente, ou il faudrait au moins que ce soit un organisme qui en relève ou qui y est associé. Mais ce bureau devrait avoir la même responsabilité d'enquêter lorsqu'une dénonciation lui est renvoyée. Il doit ensuite faire ce que le projet de loi lui demande de faire en utilisant les pouvoirs qui lui sont conférés et présenter son rapport au Parlement. Telle est la procédure en place.

    Vous avez mentionné les langues officielles. C'est à peu près la même chose. Je ne sais pas si ce commissaire a une autorité quelconque sur les ministères—il fait seulement rapport au Parlement—mais nous suggérons que cette agence ait également le pouvoir de prendre des mesures contre un ministère ou de faire des recommandations contre un ministère et les personnes qui ont commis des actes répréhensibles. Voilà le genre de choses qu'il faudrait prévoir pour assurer une protection.

    Dans d'autres pays comme l'Australie, on ne parle pas de dénonciation, mais d'une « loi sur la corruption ». Par « corruption », on n'entend pas nécessairement les pots-de-vin et ce genre de choses, mais plutôt la corruption des lois adoptées par le Parlement dans l'intérêt public parce qu'il y a eu un gaspillage d'argent, directement ou indirectement.

    L'Australie a donc choisi cette voie. Peu importe le nom que nous voudrons lui donner dans notre pays, le résultat est le même, à savoir qu'il faut qu'un organisme indépendant enquête et prenne des mesures s'il est autorisé à le faire, et qu'il fasse ensuite rapport au Parlement.

    Votre deuxième question portait sur le risque de se faire mettre de côté. J'ai été mis de côté toute ma vie jusqu'à ce que je proteste, sans que je puisse faire quoi que ce soit. Parfois, votre patron peut savoir d'où cela vient, à cause de la façon dont vous soulevez des questions au travail, etc. … On ne vous aime pas ou on n'aime pas la façon dont vous soulevez ces questions. Et vous ne pouvez rien faire. Personnellement, je n'avais aucun moyen de prouver que c'était pour cette raison qu'on avait pris ces mesures contre moi. Il est impossible de le prouver. Vous ne pouvez pas prouver que c'est du racisme sans avoir de preuve directe et il est donc inutile d'essayer.

    Mais quand vous faites une dénonciation et que cela déclenche des réactions, c'est à ce moment-là que vous avez besoin d'une protection. Il faut relier les deux. Par exemple, dans ma situation, si on me congédie, si je me plains d'avoir été congédié suite à ma dénonciation et si on répond que c'était pour une autre raison, il faudrait alors que nous soyons au moins suspendus sans solde plutôt que congédiés, et c'est ce qui aurait dû être fait pour nous tous.

    Nous sommes maintenant obligés de vendre nos maisons et nous nous retrouvons sans aucun revenu. C'est la situation dans laquelle je suis. La cause n'a toujours pas été entendue depuis huit mois et je ne sais pas combien d'années cela pourrait prendre. Je suis âgé de 70 ans. Certaines personnes espèrent que je vais mourir, mais je prie pour que ce ne soit pas le cas. En attendant, il faut que je vive.

º  +-(1605)  

    Voilà donc le genre de protection qu'il faut inclure dans le projet de loi, parce qu'il faut que quelqu'un, un organisme soit chargé d'intervenir.

    Dans notre cas, le sénateur Spivak a demandé par écrit au ministre de la Santé d'intervenir. Il n'est pas intervenu. Il a écrit au premier ministre et le premier ministre lui a répondu qu'il acceptait la décision prise.

    Je pense que c'est une mauvaise chose. C'est à ce niveau-là qu'il faut renforcer le projet de loi.

+-

    Le président: Désolé, monsieur Sauvageau, votre temps est écoulé.

    C'est maintenant au tour de M. Thibault, du Parti libéral, pour sept minutes, et ce sera ensuite à M. Martin, du NPD.

+-

    L'hon. Robert Thibault (Nova-Ouest, Lib.): Merci, monsieur le président, et je tiens à vous remercier tous les trois d'être venus.

    Je ne veux pas critiquer, blâmer ou dire que vous avez eu raison ou tort. Je voudrais laisser tout cela de côté et profiter de votre expérience de la fonction publique pour voir comment nous pouvons nous charger de ce travail comme il faut.

    Premièrement, je dois vous dire que je vous souhaite une longue vie et une bonne santé.

    Surtout dans les emplois comme les vôtres, il y a des risques. Vous êtes en possession de renseignements très importants. Vous avez des opinions très critiques—je ne veux pas dire par là que vous critiquez tout le monde, mais des opinions quant aux risques qu'un produit présente pour la santé. Vos opinions peuvent varier, mais elles peuvent parfois susciter des craintes et de l'anxiété chez les gens. Il faut donc qu'il y ait un système vous permettant d'avoir des discussions entre chercheurs quant à la voie à suivre et de formuler des recommandations qui deviendront la position du ministère ou qui influenceront cette position.

    J'essaie de faire une distinction—et c'est suite à ce qu'a dit M. Chopra—entre les dénonciations et les dissensions. Si des actes illégaux sont commis dans un ministère, on parle alors de « corruption ». Il y a de la corruption au sein du ministère et vous le signalez. À mes yeux, c'est une dénonciation. S'il y a du racisme et que vous le dénoncez, il s'agit certainement d'une dénonciation.

    Si vous avez une opinion, une opinion scientifique qui diffère de celle que le ministère a adoptée après avoir fait faire un examen par les pairs, organisé un processus de discussion, si deux personnes ne sont pas d'accord… Deux chercheurs examineront les mêmes renseignements sans être nécessairement d'accord sur les mesures à prendre. Personnellement, je ne considère pas qu'il s'agisse d'une dénonciation. Je considère qu'il s'agit d'une dissension et que cela peut présenter un risque. Si vous avancez votre opinion divergente en la présentant comme l'opinion d'un chercheur du ministère qui ne partage pas l'avis de ses collègues, cela peut susciter des craintes injustifiées au sein de la population.

    Partagez-vous cette opinion? Pensez-vous qu'il y a là un risque et comment faites-vous la distinction entre une dénonciation et un désaccord ou une dissension d'ordre professionnel?

+-

    Dr Shiv Chopra: Je voudrais dissiper cette confusion, car c'est une chose qu'on dit souvent dans notre profession ou dans les autres professions où l'on est chargé d'appliquer une loi.

    Dans notre cas, il s'agit de la Loi sur les aliments et drogues. Dans d'autres circonstances, cela pourrait être la sécurité minière ou encore la sécurité aérienne. Dans tous les cas, il s'agit de lois du Parlement. En ce qui nous concerne, la Loi sur les aliments et drogues est rattachée au Code criminel. Notre rôle n'est pas de donner des opinions, de simples opinions, parce que nous ne sommes pas des chercheurs de laboratoire. Nous ne faisons pas de tests. Nous recevons les données de recherche des compagnies. La loi exige qu'elles soumettent leurs données au ministre de la Santé. La loi dit en une simple phrase qu'elles doivent fournir des données satisfaisantes au ministre de la Santé pour pouvoir vendre tel ou tel produit au Canada. Ce n'est pas plus compliqué.

    La présentation de médicament est envoyée au ministère et elle arrive sur nos bureaux. Nous examinons les données. En fait, nous sommes des vérificateurs scientifiques. Nous ne sommes pas des chercheurs en ce sens que nous ne testons rien. Quand nous recevons ces données, nous les vérifions. Ou bien nous disons qu'à notre avis le nécessaire a été fait et nous recommandons qu'on émette un avis de conformité ou bien nous disons que le travail a été insuffisant et qu'il faut le compléter.

    On a exercé des pressions sur nous en disant que si les États-Unis ou un autre pays avait adopté un produit, nous n'avions pas besoin de réexaminer les données au Canada. Nous ne sommes pas d'accord. En effet, si la compagnie ne nous fournit pas les données qu'exige la loi, en vertu du Code criminel, et si nous acceptons le produit sous prétexte que les États-Unis l'ont accepté, notre signature signifie que nous avons reçu les données et les avons jugées satisfaisantes au nom du ministre. Si ensuite un problème surgit comme pour le Vioxx ou l'ESB et que des gens meurent, j'aurais apposé ma signature. J'irais en prison parce que j'aurais été complice en apposant ma signature, parce que mon patron ou quelqu'un d'autre m'aura demandé de signer. Voilà la différence. Par conséquent, la loi ne nous laisse aucune latitude dans ce type de fonction.

    Quand vous remplissez certaines fonctions, si vous donnez seulement une opinion au sujet d'une méthode ou des conséquences, il peut y avoir des dissensions. Il faudrait alors qu'il y ait une discussion. Même dans notre situation, quand il y a des divergences d'opinions, il faudrait que le ministère réunisse d'autres chercheurs pour tenir un débat scientifique. Il ne faut pas dire aux gens qu'ils ne peuvent pas en parler à l'extérieur ou à l'intérieur ou n'importe où…

º  +-(1610)  

+-

    L'hon. Robert Thibault: Docteur Chopra…

    Me reste-t-il une minute?

+-

    Le président: Oui, il vous reste une minute et demie.

+-

    L'hon. Robert Thibault: Docteur Chopra, n'était-ce pas le cas lorsque vous avez exprimé une opinion au sujet du vaccin contre l'anthrax? Ce n'était pas nécessairement une évaluation, mais vous avez exprimé une opinion en disant que le gouvernement du Canada avait tort de vouloir stocker ce vaccin. Par la suite, nous avons vu qu'il y avait là un énorme risque pour la santé et que c'était la bonne chose à faire, du moins c'est ce qu'on croyait. N'était-ce pas l'expression d'une opinion plutôt que l'analyse des données dont vous avez parlé?

+-

    Dr Shiv Chopra: Permettez-moi de faire tout de suite une mise au point, car c'est une question personnelle.

    En fait, ce n'est pas vrai. J'ai parlé…et il a été clairement précisé dans les médias et dans les tribunaux que je ne parlais pas en tant que représentant de Santé Canada. Je me suis bien assuré que le journaliste voulait mon opinion personnelle, en tant que citoyen. J'ai dit que je parlais en tant que citoyen, car j'ai demandé aux médias de s'adresser au ministère. Je leur ai demandé de s'adresser au laboratoire spécial de Winnipeg, par exemple.

    Je suis microbiologiste. Je suis vétérinaire. Je connais les antécédents de cette maladie. L'anthrax ne posait pas de risque et n'en pose toujours pas. L'anthrax ne peut pas poser de risque, si bien que le stockage d'antibiotiques, surtout comme le Ciproflox, n'était pas, selon moi, la bonne chose à faire. C'était un gaspillage d'argent. C'était dangereux pour ma propre famille; par conséquent, j'ai exprimé cette opinion pour ma propre sécurité.

+-

    L'hon. Robert Thibault: Ce n'était pas en tant qu'expert scientifique, mais que citoyen…

+-

    Le président: Monsieur Thibault, je regrette, mais votre temps est écoulé.

    M. Martin du Nouveau parti démocratique, suivi de M. Lauzon.

+-

    M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Merci, monsieur le président.

    Merci, monsieur Chopra, madame Haydon et M. Lambert de vous être joints à nous aujourd'hui. Je crois avoir exprimé clairement mon opinion au sujet de vous trois. Je vous considère comme des héros à bien des égards et comme des champions de cette cause du point de vue des droits des employés. Vous êtes sans doute les personnes qui illustrent le mieux la nécessité et l'utilité d'une législation adéquate pour vraiment protéger les dénonciateurs.

    Cela dit, je voudrais vous demander—et cela s'adresse à vous trois—de parler un peu plus de votre expérience personnelle de certaines formes plus subtiles de représailles, certaines choses intangibles que peut avoir à subir un dénonciateur et pour lesquelles il peut être difficile de prévoir une disposition pour protéger les employés. Je crois qu'il serait utile, pour que nous trouvions le bon libellé, de savoir quelles sont les représailles plus subtiles dont vous avez fait l'objet en plus des sanctions disciplinaires.

º  +-(1615)  

+-

    Dr Shiv Chopra: La forme de représailles la plus subtile exercée contre moi c'est le montant d'argent énorme que l'on continue à dépenser pour prouver que mes accusations de racisme étaient injustifiées alors que le contraire a été démontré à de nombreuses reprises devant les tribunaux. Selon mes estimations, le Conseil du Trésor et le ministère de la Justice ont dépensé près de 10 millions de dollars pour se battre contre moi sur la question du racisme.

    Quant aux autres formes plus subtiles, le Dr Haydon vous confirmera que, comme j'étais son superviseur, si elle recevait une présentation de médicament et qu'une compagnie m'appelait pour me demander de ne pas lui confier le dossier parce qu'elle était trop tatillonne, je lui répondais que c'était son travail et qu'elle faisait exactement ce qu'elle était censée faire en tant que vérificatrice.

    La même chose est arrivée au Dr Lambert. Il a fait valoir, avec mon appui et celui de ses collègues, qu'un médicament ne devrait pas être approuvé. Il aurait fallu que nous tenions une réunion pour discuter de la question. Au lieu de nous laisser tenir une réunion, le directeur général l'a convoqué, l'a rétrogradé et a adressé une lettre de réprimande à Cris Basudde, maintenant décédé.

    Voilà des formes de représailles subtiles qui ne sont pas si subtiles. Je voudrais que mes collègues confirment ce que je viens de dire.

+-

    M. Pat Martin: Oui, ou nous donner d'autres exemples auxquels vous pouvez penser et qui vous rendaient la vie difficile et constituaient une forme de représailles.

+-

    Dre Margaret Haydon: À titre d'exemple, comme notre cause n'a pas encore été entendue par les tribunaux, je n'entrerai pas trop dans les détails, mais l'année dernière, nous avons été isolés tous les quatre dans des ailes séparées, dans des tours séparées, à des étages différents. Généralement, nous ne recevions pas les communications qui circulaient dans le bureau, telles que les articles scientifiques.

+-

    M. Pat Martin: Vous avez donc eu le sentiment d'être isolés et ostracisés, même dans votre milieu de travail.

+-

    Dre Margaret Haydon: Oui, et bien entendu nous avons perdu M. Basudde…

    Excusez-moi.

+-

    M. Pat Martin: Je comprends combien c'est difficile.

    Je soulève la question parce qu'en tant qu'ancien représentant syndical, je sais qu'il y a des représailles subtiles, qui font très mal et qu'il est plus difficile de mettre en lumière et d'inclure dans la loi pour les empêcher.

+-

    Dre Margaret Haydon: Je dirais en son nom qu'il a fait l'objet d'autres mesures punitives de la part de la haute hiérarchie de Santé Canada. Cela venait de plus haut que les premières réprimandes qui lui avaient été adressées. C'est monté jusqu'au sommet de la hiérarchie, si bien qu'il ne pouvait plus y faire face.

+-

    M. Pat Martin: Je comprends.

    Monsieur Lambert.

+-

    Dr Gérard Lambert: Je suis allé au Bureau de l'intégrité de la fonction publique lorsque nous avons dénoncé, tous les quatre, des actes répréhensibles à ce bureau. Dans son rapport final, le Bureau a mentionné que des représailles avaient été prises contre moi parce que j'avais signalé un problème à la Direction des médicaments. J'étais chef par intérim et on m'a enlevé de ce poste.

    Dans le premier rapport que le Bureau de l'intégrité de la fonction publique a adressé au Parlement, un cas de représailles était mentionné. C'était le mien. Cette cause n'est toujours pas réglée. Des lettres ont été envoyées au ministère pour résoudre cette affaire.

    J'ai reçu une offre de règlement, mais si je l'accepte, Santé Canada dit qu'il y aura… Santé Canada ne reconnaît pas que j'ai fait l'objet de représailles. Pour cette raison, si j'accepte son offre, cela revient à reconnaître qu'il n'y a pas eu de représailles. Je ne peux pas l'accepter.

    Cette offre m'a été faite après mon congédiement.

º  +-(1620)  

+-

    M. Pat Martin: Je vois.

+-

    Le président: Merci, monsieur Martin. Votre temps est écoulé.

    C'est au tour de M. Lauzon, suivi de M. Scarpaleggia.

[Français]

+-

    M. Guy Lauzon (Stormont—Dundas—South Glengarry, PCC): Merci, monsieur le président.

    Docteur Lambert, combien d'années de service avez-vous au sein du gouvernement du Canada?

+-

    Dr Gérard Lambert: J'ai travaillé 31 ans à Santé Canada.

[Traduction]

+-

    M. Guy Lauzon: Docteur Haydon, puis-je vous demander combien d'années de service vous comptez?

+-

    Dre Margaret Haydon: Oui, c'est environ 22 ans qui ont été précédés d'environ 10 années d'exercice privé.

+-

    M. Guy Lauzon: Et vous docteur Chopra?

+-

    Dr Shiv Chopra: Trente-cinq ans.

+-

    M. Guy Lauzon: Et votre collègue qui est décédé…? J'ai oublié son nom.

+-

    Dr Shiv Chopra: C'est Cris Basudde. Il était âgé de 56 ans. Il comptait 12 années de service. Au bout de 12 années de service, le ministère a eu l'effronterie d'écrire à son université, à Londres, pour vérifier s'il avait obtenu un Ph.D. sur le bon sujet ou s'il avait même obtenu un Ph.D.

+-

    M. Guy Lauzon: Je ne suis pas très fort en math, mais j'ai l'impression qu'à vous quatre vous comptez près de 100 années de service à la fonction publique du Canada. Aucun de vous ne travaille pour le moment au gouvernement du Canada. Avez-vous tous été congédiés?

+-

    Dr Shiv Chopra: Nous avons tous été congédiés le même jour, à 15 minutes d'intervalle. Nous étions tous en congé de maladie prolongé ce jour-là.

+-

    M. Guy Lauzon: Très bien.

    Maintenant, docteur Chopra, vos dénonciations vous ont valu de parcourir un chemin long et difficile. Nous sommes au courant.

    En 1998, vous avez été réprimandé et suspendu de vos fonctions—corrigez-moi si je me trompe—après vous être plaint publiquement de ne pas pouvoir obtenir des données scientifiques sur l'innocuité de l'hormone de croissance bovine. En fait, c'est vous qui avez eu raison et vos efforts se sont traduits par une enquête sénatoriale et l'interdiction de cette hormone de croissance dans le boeuf et le lait canadiens.

    Je crois que vous avez également protesté contre la décision de Santé Canada de ne pas vous donner d'avancement à cause de vos antécédents culturels et vous nous en avez parlé. Encore une fois, vous avez obtenu gain de cause.

    D'après mes renseignements, en 2003, vous avez exprimé des inquiétudes au sujet des mesures prises au Canada pour la prévention de l'ESB, que vous jugiez inadéquates. Les événements vous ont encore donné raison.

    Mais en 2004, vous avez été congédié.

    L'ESB a maintenant détruit le gagne-pain de nombreux Canadiens; elle a eu des effets dévastateurs sur tout le pays, sur l'industrie agricole et a coûté des milliards et des milliards de dollars… Si on vous avait écouté, si on vous avait laissé parler ou si vos renseignements avaient été jugés crédibles, pensez-vous que nous aurions actuellement cette crise de l'ESB?

+-

    Dr Shiv Chopra: Merci, monsieur Lauzon.

    C'est un sujet sur lequel j'aurais souhaité que quelqu'un nous écoute. Le problème aurait entièrement disparu. C'est précisément ce que nous avons écrit—si nous faisons ce que l'Europe a fait, car nous n'inventons rien, cette maladie disparaîtra instantanément. C'est une maladie créée par l'homme. À partir du moment où on décide qu'aucun animal… C'est ce que nous avons recommandé—qu'aucun animal ne serve à nourrir un autre animal. À partir du moment où nous le ferons, cinq ou six ans plus tard, ce qui correspond à la période d'incubation, il n'y aura plus d'ESB. Nous n'aurons plus à supplier les États-Unis de nous ouvrir leurs frontières. Les frontières du monde entier se seraient ouvertes au boeuf canadien et nos enfants et petits-enfants ne seraient plus en danger. Le boeuf qui sert à nourrir notre population est le pire. Notre boeuf le meilleur, le plus sûr, est celui que nous exportons.

º  +-(1625)  

+-

    M. Guy Lauzon: Suggérez-vous, docteur Chopra, que nous arrêtions immédiatement de nourrir les animaux avec d'autres animaux?

+-

    Dr Shiv Chopra: Absolument.

+-

    M. Guy Lauzon: Merci.

    Vous avez été congédié il y a huit mois, et vous êtes toujours en train d'en appeler de ce renvoi. J'espère pour vous que vous verrez la lumière au bout du tunnel, mais votre appel a déjà pris beaucoup trop de temps.

    Le projet de loi C-11 ne crée pas de nouvelles procédures pour dénoncer les représailles. Pensez-vous qu'un système efficace de dénonciation des actes répréhensibles devrait inclure un nouveau processus pour permettre aux dénonciateurs de se plaindre des représailles exercées contre eux?

+-

    Dr Shiv Chopra: Oui.

+-

    M. Guy Lauzon: Que se serait-il passé si, dans le cadre de votre travail, de vos recherches, vous aviez découvert un problème et si vous ne l'aviez pas signalé? Quelle aurait été la réaction de votre superviseur ou de votre gestionnaire? Comment auraient-ils réagi?

+-

    Dr Shiv Chopra: Vous voulez dire si je ne découvre pas…

+-

    M. Guy Lauzon: Si vous découvrez quelque chose, mais si vous ne…

+-

    Dr Shiv Chopra: Si je ne le signalais pas.

+-

    M. Guy Lauzon: Vous étiez donc coincé entre l'arbre et l'écorce.

+-

    Dr Shiv Chopra: Absolument.

+-

    M. Guy Lauzon: Votre optimisme ou votre foi dans l'humanité a quelque chose de très étonnant, car vous avez dit que le ministre, M. Rock, vous avait écrit une lettre vous garantissant une protection lorsque vous avez comparu devant le Sénat.

+-

    Dr Shiv Chopra: Oui.

+-

    M. Guy Lauzon: Et que cette lettre n'avait aucune crédibilité.

+-

    Dr Shiv Chopra: En fait, quand le comité sénatorial nous a invités pour la première fois, mes collègues et moi-même, nous avons refusé d'y aller parce que nous avions reçu la consigne de garder le silence. Un nouveau directeur m'avait demandé de modifier mon rapport. Quand j'ai refusé, j'ai dit que je ne pouvais pas comparaître devant le comité sénatorial; j'avais donc besoin d'une protection. C'est la raison pour laquelle on nous a accordé cette protection. Nous l'avons obtenue, mais quelques mois plus tard, j'ai été suspendu de mes fonctions.

+-

    M. Guy Lauzon: Cette protection a été accordée sur l'ordre du ministre.

+-

    Dr Shiv Chopra: Sur l'ordre du ministre.

+-

    M. Guy Lauzon: Et cela vous a été donné par écrit?

+-

    Dr Shiv Chopra: Par écrit et par le sous-ministre. En fait, j'ai soulevé la question avec le Sénat par la suite. Le Sénat a adopté à l'unanimité une motion pour étudier si le ministère s'était rendu coupable d'outrage au Parlement. Il y a un rapport d'enquête. Les sénateurs ont dit qu'ils voulaient une preuve directe. Ils nous ont demandé si quelqu'un nous avait dit : « Je vais prendre des mesures de représailles parce que vous avez fait telle ou telle chose ». J'ai répondu que personne ne vous prévenait à l'avance de ce genre de chose. Les sénateurs ont alors dit qu'ils ne pouvaient pas le prouver, mais que ce qui se passait à Santé Canada était déplorable. Cela figure dans le rapport du comité sénatorial. Nous avons d'ailleurs de nouveau écrit au Comité sénatorial du Règlement.

    Que peut-on dire d'autre? Que peut-on faire d'autre? Il est plus facile de chevaucher un tigre que d'en descendre.

+-

    Le président: Merci, monsieur Lauzon.

    C'est maintenant au tour des Libéraux, d'abord à M. Scarpaleggia et, si vous n'utilisez pas tout votre temps, M. Boshcoff.

+-

    M. Francis Scarpaleggia (Lac-Saint-Louis, Lib.): Oui, merci, monsieur le président. Je voudrais partager mon temps avec mon collègue, M. Boshcoff.

    Merci beaucoup à vous tous d'être venus ici aujourd'hui. Ce sont des témoignages très intéressants pour les membres du comité.

    Je voudrais éclaircir une chose, monsieur Chopra, à propos d'une observation que M. Sauvageau a faite, pour être sûr de bien comprendre. Verriez-vous des objections à ce que la Commission de la fonction publique soit l'organisme auquel seraient rapportés les actes fautifs, si elle faisait directement rapport au Parlement et si des changements étaient apportés pour mettre en place les pare-feux requis au sein de la Commission de la fonction publique? Ou êtes-vous totalement contre cette idée, comme beaucoup de gens?

º  +-(1630)  

+-

    Dr Shiv Chopra: Monsieur, je ne vois pas quel genre de pare-feux vous pourriez installer. Il y a toutes sortes de pare-feux au sein de la Commission de la fonction publique. Elle est divisée en secteurs différents qui font des choses différentes. Nous avons écrit à de nombreuses reprises à la Commission de la fonction publique pour lui demander d'enquêter sur ces questions, mais elle nous a opposé un refus. Elle a donc eu ces pouvoirs et fait des nominations. Elle a été impliquée indirectement et elle a été elle-même accusée de racisme.

+-

    M. Francis Scarpaleggia: Je ne parle pas de racisme. Je veux seulement savoir si, en ce qui concerne la dénonciation des actes répréhensibles, elle a ce mandat? Je ne pense pas qu'elle ait déjà eu pour mandat d'enquêter sur les dénonciations.

+-

    Dr Shiv Chopra: Non, elle n'avait pas ce mandat, mais comme c'est l'agence centrale chargée d'administrer les nominations et de veiller sur le comportement des fonctionnaires, nous avons fait de nombreux rapports à la Commission de la fonction publique et nous l'avons traînée devant la Cour fédérale.

+-

    M. Francis Scarpaleggia: Vous n'avez donc aucune confiance dans cette institution, alors…

+-

    Dr Shiv Chopra: Je ne parle pas seulement de la Commission de la fonction publique. Toute institution qui fait rapport au Conseil privé et qui…

+-

    M. Francis Scarpaleggia: Disons qu'elle fasse directement rapport au Parlement.

+-

    Dr Shiv Chopra: Si elle fait directement rapport au Parlement, peu importe de qui il s'agit. Le nom de l'institution n'importe plus.

+-

    M. Francis Scarpaleggia: Très bien, je comprends.

    Vous n'avez pas parlé en détail des causes que vous avez gagnées, mais vous avez dit qu'il y en avait eu toute une série. Pourriez-vous nous en citer quelques-unes?

+-

    Dr Shiv Chopra: Je crois qu'un témoin a comparu ici, la semaine dernière, M. Selwyn Pieters. Il a fait un meilleur travail que moi dans une page Web à mon sujet dans laquelle il a énuméré toutes les causes que j'ai gagnées et que j'ai portées devant les tribunaux. C'est un avocat. Il a suivi toute cette affaire. Je pourrais vous fournir ces renseignements plus tard.

+-

    M. Francis Scarpaleggia: Nous pouvons aller visiter cette page Web. Si c'est sous votre nom, nous ferons simplement une recherche.

+-

    Dr Shiv Chopra: Si vous faites une recherche, cherchez Chopra sur Google et vous trouverez un millier de textes écrits par d'autres gens.

+-

    Le président: Monsieur Boschcoff.

+-

    M. Ken Boshcoff (Thunder Bay—Rainy River, Lib.): La plupart des Canadiens ont l'impression que les fonctionnaires ne peuvent pas être congédiés et que les congédiements sont très rares au sein de notre gouvernement. Il faut donc que le gouvernement ait une bonne raison pour agir. Êtes-vous au courant de la fréquence des congédiements? En avez-vous entendu parler au cours de votre carrière?

+-

    Dr Shiv Chopra: Oui, j'en ai entendu parler. Le cas le plus célèbre est celui de Neil Fraser, qui a été congédié. Ce monsieur avait qualifié le premier ministre d'Hitler et il n'a pas été rétabli dans ses fonctions. Mais cette affaire est allée jusqu'à la Cour suprême qui a fait observer que M. Fraser avait eu tort de faire ce qu'il avait fait. Il peut toutefois y avoir des situations où un fonctionnaire est obligé de dénoncer des actes fautifs et la Cour a donné des exemples tels que l'intérêt public ainsi que la santé et la sécurité du public. C'est un premier exemple.

    Le deuxième cas fait suite au premier et j'ai été absous par la Cour fédérale et la Commission des relations de travail dans la fonction publique. Il y a eu de nombreux autres cas, mais il n'est pas très fréquent que des gens soient mis à la porte. Vous avez entendu M. Reid. Vous avez entendu M. McAdams. Ils ont été congédiés de la même façon, de même que Mme Gualtieri. Il y a un certain nombre de gens dans cette situation. Si des gens sont congédiés pour d'autres raisons, nous ne sommes pas au courant.

+-

    M. Ken Boshcoff: Le Tribunal canadien des droits de la personne a demandé à Santé Canada de prendre une série de mesures correctives. Le ministère avait 25 choses à faire. J'en parle parce que vous avez parlé de racisme systémique. Santé Canada s'est conformé à toutes ces exigences et les a même surpassées. Par conséquent, ce qui nous inquiète, c'est que vous dites que le racisme est toujours présent.

+-

    Dr Shiv Chopra: Ce n'est pas exact. Vous avez entendu dire que le ministère s'était conformé aux exigences.

    Il y avait deux aspects. C'est moi qui ait porté cette cause devant le tribunal. Il y en avait deux. Pour ce qui est du racisme systémique, vous pourrez lire dans la décision que j'étais le principal plaignant dans cette cause, NCARR contre La Reine. J'étais le président de cette organisation. Cette cause ne portait pas sur l'équité en matière d'emploi. C'était sur le racisme. Le défendeur avait demandé à faire porter la cause sur l'équité en matière d'emploi. Le recours dont vous parlez portait à la fois sur l'équité en matière d'emploi et le racisme. J'ai une nouvelle cause, qui est toujours devant le tribunal et qui a été renvoyée à plusieurs reprises. Le ministère dit maintenant qu'elle devrait être rejetée parce que cela a pris trop de temps. Ce n'est pas de ma faute si les tribunaux ne s'en occupent pas comme il faut.

    Le racisme règne au ministère. Vous avez entendu le président du Conseil du Trésor reconnaître devant un autre comité que tous les groupes désignés, sauf les minorités visibles, avaient réalisé des progrès. De toute évidence, il y a du racisme pas seulement à Santé Canada, mais dans toute la fonction publique. Il y a de très sérieux problèmes.

º  +-(1635)  

+-

    M. Ken Boshcoff: Le fait que la proportion d'employés des minorités visibles soit passée de 2 p. 100 à 12 p. 100 à Santé Canada ne témoigne-t-il pas d'un certain progrès?

+-

    Dr Shiv Chopra: Il y a eu un certain progrès. C'est le même genre de progrès qu'il y en a eu… Il y a eu certains progrès, mais les chiffres et les proportions continuent d'augmenter. La population qui fait partie des minorités visibles a augmenté. Les objectifs du recensement de 1991 devaient être atteints en 2002. La population a augmenté bien au-delà de ce chiffre.

+-

    M. Ken Boshcoff: Mais vous dites qu'il y a du racisme alors que le nombre de personnes embauchées a augmenté énormément.

+-

    Dr Shiv Chopra: Vous parlez de l'équité en matière d'emploi alors que je parle du racisme. C'est comme pour Cris Basudde. Lorsque quelqu'un dit qu'on a trop la mentalité des minorités visibles, lorsqu'un directeur nouvellement nommé déclare : « Je vois qu'un grand nombre d'entre vous font partie des minorités visibles—j'aime les minorités visibles », les observations de ce genre constituent du racisme direct. Ces personnes sont récompensées. Elles continuent à toucher des salaires de EX-2, EX-3, EX-5 au ministère. Une instance a été chargée d'examiner ce cas qui a suscité de graves accusations au sein de la fonction publique. Il y a de sérieux problèmes.

+-

    Le président: Merci, monsieur Chopra.

    La parole est à M. Poilievre, pour les deux dernières minutes.

[Français]

+-

    M. Pierre Poilievre (Nepean—Carleton, PCC): Merci, monsieur le président.

    Deux des témoins sont mes commettants. C'est donc une question qui m'intéresse beaucoup.

    À titre de député, je dirais que ce cas serait beaucoup plus facile s'il y avait une loi qui protégeait les dénonciateurs. Il y aurait alors un agent du Parlement qui pourrait nous donner les renseignements et tenir une enquête. Maintenant, c'est plus difficile, parce que Santé Canada ne vas pas partager ses renseignements avec un député comme moi.

    Je reconnais que nous n'avons pas beaucoup de temps. Je vous pose donc ma question tout de suite. Si on adopte le projet de loi C-11, quel sera le changement le plus important pour protéger les gens qui se trouvent dans des circonstances difficiles dans la fonction publique?

[Traduction]

+-

    Le président: Pourrions-nous obtenir une brève réponse de chacun d'entre vous, s'il vous plaît?

+-

    Dr Shiv Chopra: Je recommanderais qu'il devienne obligatoire, pas nécessairement de dénoncer, mais de signaler les actes répréhensibles. En même temps, il faudrait que le projet de loi accorde une protection absolue. Il devrait définir exactement quelle sera cette protection afin que tout fonctionnaire qui est témoin d'un acte fautif, surtout dans le cadre des fonctions qu'il exerce, en fasse rapport. Il ne doit avoir aucune difficulté à rapporter les actes fautifs à ses supérieurs. C'est ce qui rendrait la loi efficace. D'autre part, l'agence doit être entièrement indépendante du pouvoir exécutif.

º  +-(1640)  

+-

    Dre Margaret Haydon: Je suis d'accord avec M. Chopra. J'ajouterais qu'à mon avis il faut faire quelque chose contre les auteurs des actes répréhensibles. C'est une question très importante.

+-

    M. Pierre Poilievre: Contre laquelle le projet de loi ne fait rien. Le projet de loi ne fait rien à cet égard.

+-

    Dre Margaret Haydon: C'est exact.

+-

    M. Pierre Poilievre: Merci.

+-

    Le président: Monsieur Lambert.

[Français]

+-

    Dr Gérard Lambert: Il serait important que la personne responsable de la mise en oeuvre de cette loi ait le pouvoir d'appliquer les remèdes nécessaires pour corriger la situation. Il ne faut pas que ce fardeau soit donné aux personnes accusées.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci beaucoup à vous tous.

    Monsieur Chopra, un dernier mot très bref.

+-

    Dr Shiv Chopra: Une des choses que je voudrais suggérer est que, lorsqu'un acte répréhensible est rapporté, la personne qui reçoit le rapport devrait enregistrer la plainte auprès de l'autorité qui sera chargée de s'en occuper.

+-

    Le président: Très bien.

    Merci beaucoup à tous les trois.

    Nous allons suspendre la séance pendant deux minutes en attendant que les prochains témoins s'installent à la table, après quoi nous reprendrons. Merci beaucoup.

º  +-(1641)  


º  +-(1645)  

+-

    Le président: Nous reprenons notre séance de cet après-midi. Au cours de notre deuxième heure, nos témoins seront Marie Chen, directrice intérimaire des services juridiques et Nkiru Agbakwa, analyste en politique, de l'African Canadian Legal Clinic. Et si j'ai estropié votre nom, veuillez me le dire.

    Faites-nous votre exposé, après quoi nous passerons aux questions.

+-

    Mme Nkiru Agbakwa (analyste en politiques, African Canadian Legal Clinic): Merci pour cette invitation.

    Au nom de la communauté qu'elle représente, l'African Canadian Legal Clinic, ACLC, tient à remercier le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires de l'avoir invitée à lui faire part de ses observations et de ses préoccupations au sujet du projet de loi C-11, la Loi sur la protection des fonctionnaires dénonciateurs d'actes répréhensibles. Je suis accompagnée ce soir de Mme Marie Chen, directrice intérimaire des services juridiques de l'ACLC.

    L'ACLC est un organisme sans but lucratif qui fait partie du système juridique de l'Ontario. L'ACLC défend des causes types et joue le rôle de clinique juridique communautaire spécialisée dans les questions de discrimination raciale systémique, de même que les politiques gouvernementales ou lois qui intéressent la communauté africano-canadienne.

    Pour commencer, je tiens à dire que l'ACLC applaudit les objectifs louables du projet de loi C-11. Néanmoins, même s'il s'agit d'une mesure positive, le projet de loi C-11 présente des faiblesses sur des points très importants, notamment en raison de la portée très étroite de l'article 8 qui énonce les actes répréhensibles auxquels la loi s'appliquera.

    L'ACLC considère que pour être vraiment efficace et améliorer l'imputabilité et la transparence, le projet de loi C-11 devrait inclure la discrimination et le harcèlement dans les actes répréhensibles définis à l'article 8, il devrait protéger les droits tant des dénonciateurs que des auteurs présumés des actes répréhensibles tels qu'ils sont reconnus par la Charte et enfin, il devrait protéger les dénonciateurs du secteur privé.

    Je commencerai par le fait que la violation des droits de la personne et la discrimination ne font pas partie des actes répréhensibles désignés à l'article 8. Je dois dire que malheureusement, le profilage racial et les autres formes de discrimination à l'endroit des Canadiens d'origine africaine et des autres minorités raciales demeurent très présents et profondément enracinés dans le tissu socio-économique de notre société.

    Chacun sait que, par rapport au groupe dominant de la population canadienne, les minorités raciales sont sous-employées, économiquement défavorisées et surreprésentées dans le système de justice pénale et cela de façon disproportionnée. Cette situation menace continuellement la santé, la vie ou la sécurité des personnes touchées de même que du public, par voie de conséquence. On peut en dire autant des politiques, des décisions, des actes ou des omissions qui provoquent ces situations.

    L'ACLC croit qu'en omettant d'inclure la discrimination dans les actes répréhensibles énumérés à l'article 8, le projet de loi C-11 prive ceux qui sont témoins ou victimes de discrimination au travail de la protection juridique dont ils ont besoin pour se faire entendre. L'ACLC croit qu'il ne devrait pas en être ainsi.

    L'inclusion de la discrimination dans les actes répréhensibles désignés à l'article 8 permettrait non seulement aux victimes, mais aux autres employés qui en sont témoins de dénoncer ces actes. Cela servirait l'intérêt public en empêchant qu'une discrimination répandue un peu partout dans notre société ne crée une classe inférieure de citoyens canadiens.

    Nous croyons que, sans cette protection, le racisme systémique ou les autres pratiques ou politiques discriminatoires ne seront pas révélées au grand jour. Voilà pourquoi l'ACLC s'inquiète énormément de voir que le projet de loi n'inclut pas expressément la discrimination dans les actes répréhensibles désignés à l'article 8.

    Également, l'ACLC s'inquiète de ce que le harcèlement, y compris le harcèlement racial, ne soit pas inclut dans les actes répréhensibles visés par le projet de loi C-11. Nous croyons que la liste ne devrait pas se limiter à des actes d'ordre financier, mais inclure les abus de pouvoir et surtout le harcèlement. Pour cette raison, l'ACLC demande instamment que le harcèlement soit inclus dans les actes répréhensibles mentionnés à l'article 8. Plus précisément, l'article 8 devrait être élargi pour inclure le harcèlement racial, sexuel et sous d'autres formes. Nous aurons ainsi l'assurance que les personnes qui dénoncent des actes aussi graves n'auront pas à choisir entre leur emploi et le silence.

    Par conséquent, nous formulons les recommandations ci-après.

º  +-(1650)  

    Premièrement, il faudrait modifier l'article 8 pour inclure dans les actes répréhensibles les violations des droits de la personne et la discrimination. Nous demandons également que l'article 8 soit modifié pour inclure le harcèlement dans les actes répréhensibles.

    Tel qu'il est actuellement libellé, le projet de loi C-11 vise les actes fautifs commis dans le secteur public, mais pas dans le secteur privé. L'ACLC croit que la protection des dénonciateurs ne devraient pas se limiter au gouvernement et à ses organismes, mais s'étendre également aux employés du secteur privé. Par exemple, la loi équivalente en vigueur au Royaume-Uni et en Afrique du Sud s'applique également aux deux secteurs. Tout semble indiquer que la protection des dénonciateurs du secteur privé n'a pas eu d'effets négatifs sur le secteur privé de ces pays ou n'a pas engendré une diminution des affaires. Cela a eu, au contraire, des effets très bénéfiques sur tous les segments de la société.

    Il y a de bonnes raisons de ne pas limiter au secteur public la législation fédérale qui protège les dénonciateurs. Tout d'abord, nous savons que la dichotomie entre le privé et le public est de plus en plus floue et disparaît progressivement. De nombreux services qui étaient rendus par l'État sont maintenant assuré par le secteur privé, mais nous savons qu'un changement au niveau du contrôle et de la propriété n'entraîne pas nécessairement un changement dans la nature des services ou des biens que ces institutions fournissent au public.

    Comme les événements mondiaux le révèlent clairement, la corruption, les fautes professionnelles, la discrimination et bien d'autres vices qui nuisent à l'intérêt public peuvent avoir lieu dans le secteur privé autant que dans le secteur public. Le projet de loi C-11 sous sa forme actuelle suppose—à tort selon nous—que les actes ou omissions qui menacent la santé, la vie ou la sécurité du public ou de l'environnement ne peuvent se produire que dans le secteur public. À notre avis, rien ne saurait être plus loin de la vérité. Par conséquent, nous recommandons que le projet de loi C-11 soit modifié pour étendre cette protection aux employés du secteur privé qui dénoncent des actes répréhensibles.

    Pour conclure, l'ACLC croit que si ses recommandations sont suivies, le projet de loi permettra aux employés de tirer le signal d'alarme en toute sécurité s'ils sont témoins d'agissements fautifs qui menacent la sécurité et la santé du public ou la gestion des fonds publics ou encore de violations des droits de la personne comme la discrimination raciale.

    À notre avis, si le projet de loi C-11 est modifié pour inclure la discrimination raciale dans les actes répréhensibles, non seulement les employés victimes de discrimination, mais les employés qui sont témoins de discrimination raciale ou d'autres formes de discrimination dans leur milieu de travail pourront les dénoncer et obtenir la protection juridique dont ils ont besoin pour le faire en toute sécurité.

    Nous demandons respectueusement au comité permanent de tenir compte des recommandations de l'ACLC et de modifier le projet de loi en conséquence.

    Merci.

º  +-(1655)  

+-

    Le président: Merci, madame Agbakwa.

    Nous allons passer directement aux questions.

    M. Preston, pour sept minutes, suivi de Mme Thibault.

+-

    M. Joe Preston: Merci beaucoup d'être venues témoigner aujourd'hui.

    Vous avez commencé par dire que le projet de loi était une mesure positive. Après avoir entendu de nombreux témoins, je commence à croire que ce n'est peut-être pas le cas.

    Vous avez dit que les catégories d'actes répréhensibles prévus ne couvraient pas le racisme, la discrimination et le harcèlement ainsi que les autres violations des droits de la personne. Sous quel libellé proposeriez-vous de l'inclure? Les dispositions du projet de loi font mention d'un code de conduite. Est-ce que cela en relèverait?

+-

    Mme Nkiru Agbakwa: Excusez-moi, mais je n'ai pas très entendu votre question.

+-

    M. Joe Preston: Vous voudriez que nous ajoutions la discrimination et le harcèlement aux actes répréhensibles désignés à l'article 8. La contravention d'un code de conduite est déjà prévue à l'article 8. Je n'ai pas lu ce code de conduite, mais je suppose qu'il comprend la discrimination et le harcèlement. Cet article ne couvre-t-il pas ce que vous demandez?

+-

    Mme Nkiru Agbakwa: Je pense qu'il faut l'inclure expressément. Ce n'est peut-être pas si clair pour la personne ordinaire qui est victime de discrimination raciale. Il faudrait inclure dans l'article 8 une disposition précise et clairement énoncée. Même si cela peut être couvert par le code, nous croyons important que cette disposition soit insérée expressément dans l'article 8.

+-

    M. Joe Preston: Par conséquent, même si c'est déjà couvert, les choses seraient beaucoup plus claires, selon vous, si c'était énoncé expressément.

+-

    Mme Nkiru Agbakwa: Oui.

+-

    M. Joe Preston: Vous avez également parlé d'étendre le projet de loi C-11 aux sociétés privées. Le comité a parlé d'inclure les sociétés qui font affaire avec le gouvernement du Canada ou qui sont ses sous-traitants afin qu'un employé qui dénoncerait des actes répréhensibles ayant des conséquences sur le Trésor public puisse être couvert. Voulez-vous dire que nous devrions aller encore plus loin?

+-

    Mme Nkiru Agbakwa: Oui, car c'est important. Par exemple, un comptable qui travaille dans une entreprise privée peut-être témoin d'actes répréhensibles, d'activités frauduleuses. Même s'il travaille pour une société privée, il devrait pouvoir dénoncer de tels actes sans avoir à craindre des représailles.

+-

    M. Joe Preston: Je reconnais qu'il devrait le faire, mais cela relève peut-être plus du Code criminel que d'une loi sur la protection des dénonciateurs, à moins qu'il ne s'agisse d'un sous-traitant du gouvernement du Canada et que ce soit relié au Trésor public, et donc au projet de loi C-11.

+-

    Mme Nkiru Agbakwa: Nous savons qu'il y a des sociétés du secteur privé dont les activités ont des répercussions importantes sur le public. Cette loi devrait s'étendre aux entreprises ou aux sociétés du secteur privé. Si elles se livrent à des activités qui ont d'importantes conséquences pour le public ou qui pourraient mettre en danger la santé ou la sécurité du public, ces activités devraient être incluses.

+-

    M. Joe Preston: Certainement, et je suis d'accord avec vous à ce sujet.

    J'ai une dernière question. Pour le moment, cette loi prévoit que les dénonciateurs doivent s'adresser au Commissaire de la fonction publique. Pensez-vous que c'est la bonne méthode?

+-

    Mme Nkiru Agbakwa: Pourriez-vous répéter cette question?

+-

    M. Joe Preston: Oui. Tel qu'il est libellé actuellement, le projet de loi prévoit que le dénonciateur doit s'adresser au Commissaire de la fonction publique pour dénoncer les actes répréhensibles. Des témoins nous ont dit s'ils pensaient que cette façon de procéder était bonne ou mauvaise. Quelle est votre opinion?

+-

    Mme Nkiru Agbakwa: Il faudrait prévoir plusieurs étapes. Il faudrait d'abord dénoncer les actes répréhensibles à l'interne avant de s'adresser à la Commission. S'il est possible de régler le problème à l'interne en s'adressant à un supérieur ou à un cadre, ce serait préférable. Si le problème ne peut pas être réglé ainsi, on pourra alors s'adresser à une instance supérieure.

»  +-(1700)  

+-

    M. Joe Preston: Oui, et ce serait l'idéal à moins que la plainte ne porte contre le supérieur ou le gestionnaire immédiat, qui pourrait faire quelques…

+-

    Mme Nkiru Agbakwa: Oui, si la plainte est portée contre le supérieur ou le gestionnaire, cela rend les choses un peu plus difficile. Vous ne pouvez pas être juge et partie. Quelqu'un d'autre pourra s'en occuper. Si un des gestionnaires de l'organisation n'est pas capable de régler la situation, la plainte ou la dénonciation pourrait être adressée à l'instance supérieure.

+-

    M. Joe Preston: Merci beaucoup.

    Je n'ai pas d'autres questions, monsieur le président.

+-

    Le président: Très bien.

    Mme Thibault, suivie de M. Godbout.

[Français]

+-

    Mme Louise Thibault (Rimouski-Neigette—Témiscouata—Les Basques, BQ): Vous proposez l'inclusion de toute la question du harcèlement à l'article 8. J'en conclus que c'est parce que votre organisme n'est pas satisfait des mesures qui existent actuellement à la fonction publique. Si vous dites qu'il faut vraiment que cela soit inclus, est-ce parce que vous n'avez pas confiance en ce qui existe actuellement? Est-ce que je vous mets des paroles dans la bouche?

[Traduction]

+-

    Mme Nkiru Agbakwa: Merci beaucoup pour cette question.

    Ce n'est pas parce que nous ne faisons pas confiance au système actuel, mais parce que dans ce système, c'est seulement la victime qui formule la plainte. Ce que nous demandons accorderait une meilleure protection en permettant non seulement à la victime, mais aux autres employés, aux autres gestionnaires de faire une dénonciation. Par exemple, il y a des décisions dont sont témoins non seulement les employés, mais également les gestionnaires, qui peuvent aussi voir qu'il s'agit de discrimination ou de politiques discriminatoires. Ils devraient pouvoir… Il faudrait que non seulement la victime, mais également les autres employés puissent dénoncer les actes répréhensibles.

    Dans le système actuel de protection des droits de la personne, la victime a l'entière responsabilité de dénoncer les actes répréhensibles. Nous demandons un élargissement afin que la victime ne soit pas seule à pouvoir le faire.

    Un principe fondamental de la société canadienne est que nous avons la responsabilité collective d'éliminer la discrimination raciale et le harcèlement.

[Français]

+-

    Mme Louise Thibault: J'apprécie beaucoup votre réponse. Elle était très claire.

    Pourriez-vous être plus précise? Je sais que mon collègue vous a posé une question, mais j'aimerais que vous preniez quelques minutes pour nous expliquer la façon dont cette loi devrait couvrir le secteur privé. Il y a un collègue qui n'est pas ici maintenant et qui a posé cette question. Il disait qu'il y avait, dans sa circonscription, beaucoup d'entreprises qui faisaient affaire avec le gouvernement et qu'il faudrait que ces personnes puissent, le cas échéant, dénoncer des pratiques douteuses, abusives, etc.

    De votre côté, parle-t-on de cela? Parle-t-on aussi d'autres choses, et quelles sont ces autres choses, s'il vous plaît?

[Traduction]

+-

    Mme Nkiru Agbakwa: Oui, merci beaucoup.

    Nous croyons que la loi devrait couvrir également d'autres secteurs. Cette protection devrait s'étendre au-delà de la fonction publique afin que les gens qui sont témoins d'actes répréhensibles sans être à l'emploi de la fonction publique puissent les dénoncer parce qu'ils bénéficieront de cette protection. L'exemple que je vous ai donné est celui d'un comptable qui constate des activités frauduleuses dans le cadre de son travail. Il devrait pouvoir les dénoncer même s'il n'est pas fonctionnaire.

»  +-(1705)  

[Français]

+-

    Mme Louise Thibault: Madame, parlez-vous d'un comptable ou d'un fiscaliste qui dénoncerait quelqu'un qui fait une déclaration d'impôt frauduleuse? Voulez-vous dire qu'il dénoncerait un contribuable qui est son client à l'Agence de revenu du Canada?

[Traduction]

+-

    Mme Nkiru Agbakwa: Oui, je crois que cette personne devrait pouvoir faire une dénonciation.

[Français]

+-

    Mme Louise Thibault: C'est le deuxième cas.

    Voici ma dernière question. Un témoin nous a dit aujourd'hui qu'il était très préoccupé, comme moi et peut-être certains de mes collègues du comité, par ce que j'appelais les mesures transitoires. Je me disais qu'il faudrait qu'il y ait des dispositions pour protéger les dénonciateurs ou les dénonciatrices là où il était possible que l'on connaisse leur identité. Quelqu'un nous a dit aujourd'hui de ne pas faire cela, de ne surtout pas enlever la personne de son poste. Cependant, pour cette personne, la dénonciation était une obligation. Donc elle voyait tout à fait différemment la protection de l'identité. Cependant, mon souci, en proposant l'inclusion de dispositions de cette nature, était de ne pas nuire à la personne et de la protéger contre les représailles.

    Croyez-vous qu'on bonifierait ce projet de loi en y incluant des mesures transitoires pour protéger un individu et son emploi? Croyez-vous qu'on devrait muter cette personne ou la mettre en congé pour qu'elle ne soit pas victime de représailles ou d'autres choses?

    Merci, madame.

[Traduction]

+-

    Mme Marie Chen (directrice par intérim des Services légaux, African Canadian Legal Clinic): Je vais répondre à cette question.

    Nous croyons qu'effectivement il devrait y avoir des dispositions transitoires. Le but de ce projet de loi devrait particulièrement insister sur la protection des dénonciateurs et les dispositions transitoires représentent un élément crucial de cette protection.

    D'autre part, je crois qu'il faudrait laisser au dénonciateur le choix… Je ne pense pas qu'il devrait être obligatoire de suivre un processus déterminé; le dénonciateur devrait pouvoir décider des mesures qu'il veut prendre et de la protection dont il veut bénéficier.

+-

    Le président: Très bien, merci madame Thibault.

    M. Godbout, suivi de M. Martin, pour sept minutes.

+-

    M. Marc Godbout (Ottawa—Orléans, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je voudrais d'abord remercier les témoins qui comparaissent devant le comité.

    Si je comprends bien, vous ne dites pas que le projet de loi ne vise pas la discrimination, mais que vous voulez que ce soit énoncé expressément dans la définition des actes répréhensibles à l'article 8. Ai-je bien compris votre position? Vous voulez que la discrimination soit mentionnée explicitement?

    Cela dit, je vais faire suite à certaines questions qui ont été posées. En ce qui concerne le reste du projet de loi, que pensez-vous du mécanisme ou du processus proposé pour la dénonciation comme telle? Pensez-vous que ces mécanismes soient suffisamment définis dans le projet de loi? Auriez-vous des recommandations à ce sujet?

    Mme Thibault vous a parlé des représailles. La loi protège-t-elle suffisamment les témoins? En fait, je vous demande quelles seraient vos recommandations en ce qui concerne le reste de la loi? Est-ce suffisamment clair ou auriez-vous des recommandations supplémentaires à nous faire?

»  +-(1710)  

+-

    Mme Marie Chen: Nous pouvons faire des observations générales quant aux dispositions actuelles de la loi. Il nous semble qu'une protection supplémentaire pourrait être accordée contre les représailles; à notre avis, même s'il y a un article au sujet des représailles, il est assez limité. Il pourrait certainement être amélioré et apporter une protection supplémentaire, mais nous préférons laisser les témoins qui ont fait directement l'expérience de la dénonciation vous dire ce qu'ils souhaiteraient.

    Nous sommes venues aborder la question sous l'angle de l'accès à la justice et pour demander que la discrimination soit incluse dans la loi.

    Voilà notre réponse à cette question.

+-

    M. Marc Godbout: Vous parlez de discrimination. Il y a d'autres mécanismes en place. Vous avez parlé du harcèlement, etc. Il y a d'autres mécanismes. Y a-t-il des leçons à tirer de l'application de ces autres mécanismes afin de ne pas répéter les mêmes erreurs dans cette nouvelle loi? De toute évidence, vous n'êtes pas satisfaites de la législation en place si vous voulez que celle-ci couvre la discrimination. Je voudrais savoir quels sont les aspects dont vous n'êtes pas satisfaites afin que, si nous sommes d'accord avec vous, nous puissions veiller à ce que ce projet de loi soit le meilleur qui soit.

+-

    Mme Marie Chen: Mme Agbakwa a déjà souligné une lacune évidente du système actuel de protection des droits de la personne qui est la distincte faite entre les victimes et les témoins. Dans le système actuel, ce sont les victimes qui portent plainte pour violation des droits de la personne. Mais le processus comporte également d'autres limitations, notamment le long délai qui s'écoule avant que les causes ne soient entendues. C'est une chose que cette loi devrait essayer d'éviter. Il faut prévoir un mécanisme pour que les dénonciations soient examinées le plus rapidement possible, car nous avons constaté qu'en ce qui concerne les droit de la personne, les désistements posaient un très sérieux problème. Les gens abandonnent leur cause parce qu'ils se fatiguent d'attendre. Comme rien ne se passe, ils finissent par renoncer. C'est un des écueils que cette loi devrait essayer d'éviter.

    Deuxièmement, tout organisme d'examen qui sera mis sur pied doit pouvoir comprendre la nature de ces dénonciations. Il faut qu'il puisse comprendre en quoi consiste le problème, car du côté des droits de la personne, nous avons constaté un manque de compréhension, surtout à l'égard de la discrimination raciale. Cela veut dire que les plaignants n'obtiennent pas les résultats qu'ils devraient obtenir parce que le problème n'a pas été suffisamment compris. Mais ce sont surtout les longs délais qui posent problème. Effectivement, aucun système n'est parfait, mais comme nous avons la possibilité d'améliorer la protection accordée aux dénonciateurs, je crois qu'il faudrait faire les choses comme il faut.

+-

    M. Marc Godbout: Je suis d'accord avec vous, si ce n'est que nous devrions peut-être améliorer les autres lois pour régler les problèmes dont vous parlez. J'ai également entendu certains de mes concitoyens dire la même chose que vous et je suis assez d'accord avec vous pour dire que les longs délais posent parfois de sérieux problèmes et qu'il faudrait y remédier.

    Pour ce qui est du secteur privé, ce projet de loi s'adresse à la fonction publique. Je vois mal comment il pourrait s'appliquer à tout le monde, car nous ne voulons pas réduire son efficacité. Cela m'inquiéterait. Nous avons parlé des contrats et c'est une chose qui pourrait être examinée. Néanmoins, il serait sans doute difficile d'étendre cette mesure à tout le monde. Je crois que ces questions devraient être abordées dans le cadre d'autres lois. Est-ce une priorité à vos yeux? En fait, c'est ce que je vous demande.

»  +-(1715)  

+-

    Mme Nkiru Agbakwa: Je pense que c'est important. Par exemple, au Royaume-Uni, la loi couvre le secteur privé et il ne semble pas que cela ait posé de problèmes. Au contraire, tous les segments de la société ont bénéficié de cette protection qui s'étend également au secteur privé.

+-

    Mme Marie Chen: Si vous le permettez, j'ajouterais très brièvement que vous avez raison. Si nous étendions la protection de cette loi au secteur privé, il faudrait entièrement remanier son libellé parce qu'il est très axé sur le secteur public. Mais je pense que le projet de loi peut quand même couvrir les situations dans lesquelles une entreprise privée fait d'importantes transactions avec le secteur public ou dépend des deniers publics pour ses activités. À mon avis, tel qu'il est, le projet de loi peut couvrir ce genre de situation. Nous sommes venues vous signaler que ce genre de situation ne se produisait pas uniquement dans le secteur public et qu'il était vraiment nécessaire de protéger les dénonciateurs dans le secteur privé. Il n'est peut-être pas possible de le faire dans le cadre de ce projet de loi, mais nous signalons la nécessité et l'importance de le faire.

+-

    Le président: Merci. La sonnerie de 15 minutes vient de commencer et il ne nous reste donc qu'une dizaine de minutes.

    Monsieur Martin.

+-

    M. Pat Martin: Merci, monsieur le président, et je remercie les témoins pour leur mémoire.

    Je ne pense pas que j'utiliserai tout mon temps, mais je vais parler, moi aussi, de votre recommandation d'étendre cette mesure au secteur privé. Vous soulevez là une question intéressante et je ne crois pas que les autres témoins aient fait cette recommandation au comité.

    Vous avez mentionné d'autres pays comme le Royaume-Uni et l'Afrique du Sud. Savez-vous si le modèle sud-africain englobe également le secteur privé?

+-

    Mme Nkiru Agbakwa: Le modèle sud-africain correspond dans une large mesure au modèle britannique. Ce dernier donne une définition assez large des travailleurs. L'expression « travailleurs » comprend toutes sortes de gens. Contrairement aux fonctionnaires qui sont seulement les employés de la fonction publique, ces travailleurs peuvent être des employés d'autres secteurs, des stagiaires qui sont témoins d'actes répréhensibles. Cela ne comprend pas les bénévoles, mais les stagiaires ou les comptables qui travaillent à l'extérieur de la fonction publique et qui ont connaissance d'actes répréhensibles bénéficient de la protection voulue pour pouvoir dénoncer ces actes.

+-

    M. Pat Martin: En gardant l'anonymat, je suppose et en étant entièrement protégés. L'anonymat est-il un aspect essentiel du modèle de dénonciation que vous recommanderiez si l'intéressé désire demeurer anonyme?

+-

    Mme Nkiru Agbakwa: Oui. Si l'intéressé le désire, il peut être souhaitable, au début, de ne pas divulguer son identité, mais en cours de route, il peut devenir trop difficile de ne pas divulguer la source d'information. À ce moment-là…

+-

    M. Pat Martin: C'est un véritable problème. Lorsque les preuves sont présentées, l'origine ou la source de l'information peut devenir évidente. C'est une raison de plus pour faire en sorte qu'il y ait une bonne protection pour le cas où l'identité du dénonciateur est révélée. Je suis d'accord avec vous.

    Il y a eu des projets de loi d'initiative parlementaire qui ont été présentés à la Chambre des communes et que nous estimons supérieurs à celui-ci—je dirais en toute modestie que le mien en fait partie. On pourrait au moins envisager de l'élargir. C'est une question qui relève de la Loi sur la gestion des finances publiques. Nous croyons que cette question pourrait s'inscrire dans le cadre de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique et le Code canadien du travail pour inclure au moins les entreprises du secteur privé qui relèvent du Code canadien du travail. Il s'agirait du secteur des transports, du secteur bancaire, du secteur des communications, etc. Ce serait une façon, si le comité en décide ainsi, d'étendre les principes de ce projet de loi au moins aux travailleurs visés par la législation fédérale du travail.

    Je n'ai pas d'autres questions. Je vous remercie pour votre excellent exposé et pour avoir soulevé deux questions que nous n'avions pas encore soulevées au comité, à savoir la discrimination raciale et l'élargissement de cette mesure au secteur privé.

»  -(1720)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Martin.

    J'aurais seulement une question concernant la Commission canadienne des droits de la personne. On en a déjà parlé. Cette commission a pour rôle de se pencher sur les problèmes de discrimination raciale et de harcèlement. J'ai l'impression que si ces questions sont incluses dans ce projet de loi, cela donnera lieu à un dédoublement des services et à une inclusion inutile.

    Je voudrais que vous vous exprimiez clairement à ce sujet. Vous en avez fait mention. Vous avez dit qu'à votre avis la Commission canadienne des droits de la personne n'était pas efficace, mais je crois que c'est une autre question.

+-

    Mme Marie Chen: Mme Agbakwa a énoncé notre position à ce sujet. Nous voyons cela non pas comme un dédoublement, mais comme une amélioration. Nous avons donné l'exemple des gens que la Loi sur la protection des droits de la personne ne couvre pas, à savoir les témoins et les gestionnaires qui ne sont pas victimes eux-mêmes, mais qui ont été témoins de politiques ou de pratiques discriminatoires.

    Deuxièmement, au lieu de se soucier des systèmes qui existent déjà—car le Code criminel contient des dispositions qui pourraient s'appliquer aux actes répréhensibles définis dans le projet de loi—il faut plutôt se dire que malgré l'existence de ces systèmes, il est nécessaire de protéger les dénonciateurs. Le fait que les actes répréhensibles qui figurent ici soient déjà couverts par le Code criminel, par exemple, n'élimine pas la nécessité de légiférer pour protéger les dénonciateurs.

    Je suis le même raisonnement à l'égard des violations des droits de la personne ou de la discrimination. Même s'il y a un système permettant de porter plainte pour ces raisons, cela ne veut pas dire que la protection qu'une loi accorde aux dénonciateurs ne devrait pas également s'appliquer. Il s'agit d'améliorer la protection accordée.

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    Le président: À propos de ce que vous venez de dire, le préambule du projet de loi C-11 mentionne que cette mesure est dans l'intérêt public au lieu de parler d'intérêt personnel. Avez-vous examiné cette clause du projet de loi? Qu'en pensez-vous?

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    Mme Marie Chen: Je dirais que l'élimination de la discrimination raciale est dans l'intérêt public. Ce projet de loi vise certains problèmes systémiques. Les petits problèmes personnels peuvent devenir des problèmes systémiques. C'est la même chose pour la discrimination raciale; vous pouvez avoir des problèmes systémiques. Il est dans l'intérêt public de s'attaquer à la discrimination raciale systémique. Cela ne se limite pas aux questions financières.

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    Le président: D'accord.

    Merci beaucoup. Merci à toutes les deux d'être venues.

    Nous devons aller voter. La séance est levée.