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CC2 Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité législatif chargé du projet de loi C-2


NUMÉRO 013 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 30 mai 2006

[Enregistrement électronique]

  (0825)  

[Traduction]

    Bonjour à tous. Je déclare la séance ouverte.
    C'est la treizième séance du comité législatif chargé du projet de loi C-2, Loi prévoyant des règles sur les conflits d'intérêts et des restrictions en matière de financement électoral, ainsi que des mesures en matière de transparence administrative, de supervision et de responsabilisation, qui nous a été renvoyé conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 27 avril 2006.
    Nous accueillons aujourd'hui M. Henry McCandless, responsable général du Citizens' Circle for Accountability.
    Bonjour, monsieur McCandless. Vous avez quelques minutes pour faire vos remarques liminaires, après quoi les membres du comité auront certainement des questions à vous poser. Merci d'être venu.
    Ce matin, je souhaite simplement vous parler du concept et de la logique de la reddition de comptes et de la façon dont celle-ci peut permettre une société plus équitable et renforcer la confiance des citoyens dans les autorités. Sans cette confiance, la société ne peut fonctionner correctement.
    Mon objectif est d'essayer de vous montrer ce que vous pouvez faire pour éviter les torts et les injustices, comme lors de l'épisode du sang contaminé des années 80 ou des échecs du contrôle de gestion à DRHC au sujet des commandites. Les vérifications et les commissions d'enquête arrivent après coup, quand c'est déjà trop tard.
    Cela fait 15 ans que j'étudie avec passion la reddition de comptes publique. En 2002, j'ai écrit ce livre sur la question. J'ai été directeur principal au Bureau du vérificateur général pendant 18 ans. Je détiens un MBA en comportement organisationnel, discipline qui porte sur les liens de cause à effet dans les processus de gestion. Au Bureau du vérificateur général, j'étais agent de liaison parlementaire entre le vérificateur et le Comité des comptes publics, et je connais donc assez bien les rôles et responsabilités de chacun.
    Parlons à présent de la reddition de comptes publique. Pourquoi est-ce un impératif dans notre société? Imaginons un instant que nous ne connaissions pas la différence entre le comportement, la responsabilité et la reddition de comptes. Une simple séquence logique pourra nous aider. Si un gouvernement exécutif a l'intention de faire quelque chose qui pourrait toucher la population de façon significative, en toute justice, il doit lui révéler ce qu'il a l'intention de faire et pourquoi il veut le faire. Cela s'appelle rendre des comptes au public. Les initiatives politiques du gouvernement sont un exemple de cette reddition de comptes.
    Ensuite, le gouvernement exécutif doit expliquer publiquement quelles sont ses normes de rendement, afin de préciser ses objectifs. On peut penser par exemple aux délais d'attente dans les urgences.
    Ensuite, nous voulons savoir si le gouvernement estime avoir atteint les normes de rendement convenues et nous voulons connaître les résultats de ses initiatives et savoir comment il a appliqué les leçons qu'il a tirées. Cela joue sur la confiance dans la compétence du gouvernement.
    Ensuite, nous appliquons le principe de précaution: nous demandons une vérification afin de déterminer si ce que le gouvernement dévoile est complet et juste. Ces exercices comptables et ces vérifications nous permettent de déterminer notre degré de confiance dans le gouvernement, parce que nous connaissons mieux ce qu'il entend faire, pourquoi il entend le faire et ce qu'il fait en réalité. Les députés peuvent ensuite mieux contrôler ce qui se passe et leur rôle, qui consiste à demander des comptes au gouvernement, est plus visible pour les citoyens.
    Reddition de comptes ne veut pas dire responsabilité, l'obligation d'agir, ni comportement, qui est l'acte posé. Au milieu des années 70, un comité a été créé à la demande du vérificateur général du Canada et a défini la reddition de comptes comme l'obligation de faire rapport sur les responsabilités.
    La reddition de comptes publique n'a rien de nouveau. Elle est un pilier du monde des affaires depuis des siècles. Les comptes publics du Canada sont un produit gouvernemental des rapports financiers. La raison pour laquelle vous n'êtes pas encore plongés dans la reddition de comptes publique, c'est que les autorités n'aiment pas rendre des comptes à moins d'y être obligées, comme les entreprises, et vous n'avez donc pas de base à partir de laquelle travailler. Les gouvernements exécutifs ont jusque-là évité que les normes de reddition de comptes soient fixées par voie législative. Jusque-là, elles ne l'ont pas été.
    D'abord, il nous faut une définition utile et exhaustive de la reddition de comptes et je vous propose la suivante: la reddition de comptes publique est l'obligation des autorités d'expliquer publiquement, totalement et équitablement, avant et après les faits, comment elles s'acquittent des responsabilités qui ont une grande incidence sur le public. Si vous avez l'impression que cette définition est un peu indigeste, ne vous inquiétez pas. Je l'écris simplement pour qu'elle soit irréfutable et inattaquable par les critiques, des universitaires pour la plupart.
    Ensuite, il faut se demander quels sont les avantages de la reddition de comptes publique. D'abord, les députés et les citoyens obtiennent l'information dont ils ont besoin, qu'ils n'auraient pas reçue autrement. En effet, les demandes d'accès à l'information ne sont pas un substitut de la reddition de comptes et n'étaient pas censées l'être.
    Ce qui est encore plus important, c'est que l'obligation de rendre des comptes publiquement, tant qu'elle est contrôlée à des fins d'équité et d'exhaustivité, exerce une influence sur les fonctionnaires qui est dans l'intérêt du public.
    L'exigence de rendre des comptes est inattaquable car elle est non partisane. Il ne s'agit pas de dire à quiconque comment il doit faire son travail; c'est simplement une demande d'explication. On ne demande pas plus d'information que ce dont ont besoin les fonctionnaires pour faire leur travail; lorsqu'ils savent quelque chose, ils peuvent en faire rapport.
    Ma dernière observation porte sur la façon d'imposer la reddition de comptes par voie législative. Lorsque quelque chose nous tient vraiment à coeur, nous légiférons, mais un projet de loi intitulé « imputabilité » qui ne porte pas sur l'imputabilité fait en sorte que les gens continuent de confondre comportement responsable et reddition de comptes. Cela veut dire que l'on ne rendra pas compte publiquement, de façon exhaustive et équitable, des responsabilités des autorités.

  (0830)  

    En outre, ajouter de plus en plus de surveillance, de vérification et de contrôle plutôt que des obligations de rendre des comptes découragera les personnes compétentes d'entrer à la fonction publique, alors qu'elles seraient prêtes à rendre compte de leur rendement de façon volontaire si elles savaient que cette information serait utilisée de façon équitable et adéquate.
    Votre comité pourrait recommander une chose qui n'entraînerait pas un accroissement des responsabilités à tous les niveaux dans le projet de loi C-2. En ce qui concerne la protection des dénonciateurs, qui occupe 32 pages du projet de loi, vous pourriez recommander une brève disposition selon laquelle les ministres et les sous-ministres feraient rapport une fois par an à la Chambre des communes de leurs propres normes de rendement en matière de protection, ce qui permettrait de savoir si cette protection est réellement efficace.
    Pouvez-vous conclure rapidement, monsieur McCandless?
    Oui.
    Vous pourriez également recommander qu'un comité de la Chambre soit créé afin d'examiner les principes et les normes de la reddition de comptes gouvernementale, et on pourrait appeler cette initiative la loi sur la reddition de comptes publique du gouvernement du Canada. Elle couvrirait les responsabilités au sein du gouvernement exécutif et entre le gouvernement et la Chambre.
    C'est la fin de mes observations. J'ai remis à la greffière une copie de mon livre et des articles parus dans la Revue parlementaire canadienne. Je suis désolé si ces articles ne sont pas en français, mais on m'a appelé jeudi midi à Victoria pour venir témoigner et je n'ai pas pu faire traduire quoi que ce soit, surtout à Victoria. J'imagine que la greffière s'en chargera. Cependant, les articles proviennent du numéro d'août 2004 de la Revue parlementaire canadienne, qui est bilingue.
    Je vous remercie de votre temps.
    Vous les déposez au comité, monsieur McCandless?
    Oui. Je les ai remis à Wayne.
    Merci beaucoup.
    Nous accueillons à présent Duff Conacher, président de la Coalition d'éthique du Gouvernement et de la Coalition de l'argent et de la politique fédérale canadienne. Bonjour, monsieur Conacher.
    Merci d'être venu. Vous avez quelques minutes pour nous présenter vos remarques liminaires, après quoi les membres du comité vous poseront des questions.
     Merci de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui sur ce très important projet de loi, le projet de loi C-2, qui est vraiment à l'avant-garde et touche de nombreux domaines de la reddition de comptes gouvernementale qui ont été négligés pendant plus de 130 ans, soit depuis la Confédération.
    Comme je l'ai dit, je suis président de deux coalitions, la Coalition d'éthique du Gouvernement, qui représente un peu plus de 30 groupes, et la Coalition de l'argent et de la politique fédérale canadienne, qui représente 50 groupes -- ces deux organismes représentant des groupes de partout au pays. La proposition de Démocratie en surveillance aujourd'hui est également fondée en partie sur le programme d'un groupe de dix membres qui s'appelle Open Government Canada, coalition qui a élaboré un énoncé de principe sur la réforme de l'accès à l'information il y a maintenant cinq ans. Les détails au sujet de ces groupes figurent sur le site Web de Démocratie en surveillance. Au total, ces groupes représentent plus de 3,5 millions de Canadiens.
    Toutes les plates-formes des coalitions s'appuient sur l'expérience historique qui prouve que pour obliger les gens qui travaillent dans des organismes importants et puissants, comme les institutions gouvernementales, à suivre les règles, celles-ci ne doivent comporter aucune échappatoire; en outre, les institutions doivent fonctionner de manière aussi transparente que possible; comme l'a dit M. McCandless, il doit y avoir des normes pour les buts et objectifs qui soient mesurables, pour pouvoir évaluer le rendement; les organismes d'exécution doivent être entièrement indépendants, bien dotés en ressources et posséder tous les pouvoirs voulus, y compris celui de pénaliser sévèrement ceux qui ne respectent pas les règles, et ils doivent procéder à des inspections régulièrement et en faire rapport publiquement, bien entendu; enfin, les dénonciateurs doivent être protégés efficacement.
    Nous ne disons pas que tous les fonctionnaires fédéraux essaient d'enfreindre les règles; cependant, comme l'histoire nous l'a montré, il y aura toujours des gens qui essaieront de le faire. Alors, comme le dit l'adage, il faut des inspections, non de bonnes intentions. Évidemment, il faut un système d'application qui comprenne tous les éléments clés que j'ai mentionnés. C'est triste à dire, mais malheureusement, c'est vrai.
    En étudiant le projet de loi C-2 et en gardant à l'esprit ces éléments nécessaires à son application efficace, les coalitions de Démocratie en surveillance ont examiné ces systèmes depuis les dix dernières années et nous avons trouvé dans le C-2 de nombreuses échappatoires dans 15 domaines clés.
    Vous devriez avoir reçu la liste de ces 15 éléments sur les échappatoires et les lacunes du projet de loi, mais si ce n'est pas le cas, vous devriez la recevoir sous peu, ainsi qu'un document très détaillé de 17 pages sur les 140 amendements que nous proposons afin de résoudre ces problèmes.
    Comme le dit le rapport, si ces lacunes ne sont pas corrigées, Démocratie en surveillance estime que les personnes qui enfreindront les règles en matière d'honnêteté, d'éthique, d'ouverture, d'embauche, de nominations et de prévention du gaspillage continueront à le faire en toute impunité.
    Si l'on n'apporte pas au projet de loi C-2, la Loi fédérale sur l'imputabilité, les changements dont j'ai parlé -- et c'est la première des 15 questions préoccupantes -- le fait de mentir au public demeurera légal. La LFI supprimera la seule règle éthique qui exige des ministres, de leur personnel et des hauts fonctionnaires qu'ils agissent avec honnêteté; ce serait un recul énorme.
    En outre, les ministres, leur personnel et les hauts fonctionnaires seront autorisés, en vertu des règles éthiques défectueuses, à prendre part à des processus d'élaboration de politiques qui servent leurs propres intérêts financiers et ils pourront se servir de la propriété gouvernementale à leurs propres fins. En effet, la règle sur la propriété gouvernementale sera également éliminée des règles sur l'éthique.
    Troisièmement, le lobbying secret et non conforme à l'éthique demeurera légal, et de nombreux employés de ministres pourront devenir lobbyistes trop rapidement après la cessation de leurs fonctions.

  (0835)  

    Quatrièmement, la nouvelle interdiction proposée concernant les dons secrets aux politiques ne sera pas appliquée efficacement. Cela, parce que le Canada ne se conforme pas à une entente internationale qu'il a pourtant signée et qui vise à combattre le terrorisme et le blanchiment d'argent.
    Cinquièmement, le grand public ne sera pas autorisé à présenter des plaintes concernant le comportement des politiques, alors que ceux-ci sont évidemment employés du peuple et que, comme un certain nombre d'autres choses que j'ai mentionnées, cela avait été promis par les conservateurs.
    Au total, dans ce projet de loi, il y a 21 promesses rompues par rapport au programme électoral des conservateurs, ce qui montre bien pourquoi il est nécessaire d'avoir une loi efficace et un système permettant de s'assurer que la classe politique agit avec honnêteté.
    Si l'on reprend la liste des domaines où il restera des problèmes très importants, des lacunes, des échappatoires, on se doit de constater que le premier ministre et son conseil des ministres pourront toujours nommer des fidèles et amis du parti à plus de 2 000 postes clés de l'application de la loi sans aucun examen réel ni processus d'approbation parlementaire efficace.
    Septièmement, les institutions gouvernementales seront autorisées à conserver des renseignements secrets, renseignements dont le grand public devrait pouvoir être saisi, du fait des lacunes qui seront laissées dans la Loi sur l'accès à l'information et dans le système de conformité.
    Des fonds secrets comme celui des escroqueries publicitaires ne sont pas réellement interdits parce que la proposition de la commission Gomery dans ce domaine n'a pas été reprise dans le projet de loi si bien que les politiques et les fonctionnaires ne seront pas tenus de fournir des reçus détaillés. Bien que les dépenses soient maintenant divulguées, les détails de celles-ci ne le sont pas et, de ce fait, il reste très difficile de s'assurer que ces dépenses sont justifiées.
    L'élément clé que Démocratie en surveillance préconise depuis longtemps est essentiel à toute reddition de comptes et correspond à ce dont parlait M. McCandless. Les institutions du gouvernement fédéral ne seront toujours pas tenues de présenter leurs projets de plans d'action et leurs décisions ni de consulter les Canadiens de façon réelle avant de prendre des décisions importantes ou d'entreprendre une action majeure. C'est un changement essentiel qu'il faudrait apporter si l'on veut améliorer la responsabilité. En Suède, il y a un système par lequel le gouvernement consulte régulièrement et efficacement la population.

  (0840)  

    Pourriez-vous conclure rapidement, monsieur Conacher?
    Oui, certainement. Merci beaucoup.
    Les citoyens devront toujours surmonter d'énormes obstacles lorsqu'ils voudront se constituer en groupes de surveillance avec les ressources nécessaires pour se montrer à la hauteur des ressources des lobbyistes du secteur privé. Démocratie en surveillance et ses coalitions proposent un système très simple qui marche bien aux États-Unis et qui permet d'aider les citoyens à se regrouper.
    Malheureusement, des décisions secrètes resteront possibles si le projet de loi C-2 n'est pas renforcé. Les décisions secrètes du commissaire à l'éthique concernant le premier ministre et d'autres hauts fonctionnaires resteront possibles et même le commissaire a fait remarquer que son mandat actuel lui pose un problème très sérieux.
    D'autre part, l'identité des politiques, du personnel politique, des personnes nommées par le Conseil des ministres et des fonctionnaires qui sont coupables de malversation sera souvent tenue secrète.
    Le commissaire à l'information et les autres organes de surveillance ne jouiront pas de l'indépendance voulue ni des pouvoirs essentiels pour s'assurer que les règlements sont bien suivis.
    Autre élément essentiel d'un système de conformité, des peines réelles. Les peines resteront trop minimes pour des activités contraires à l'éthique, secrètes et coûteuses. Par exemple, une infraction au code d'éthique du Conseil des ministres entraînera une amende maximum de 500 $, ce qui est ridicule.
    Enfin, les dénonciateurs qui ne sont pas fonctionnaires ne seront pas réellement protégés contre des représailles et aucun dénonciateur ne recevra une indemnisation suffisante pour chercher un autre emploi, même si ce processus de dénonciation les laisse totalement isolé du reste de leurs collègues.
    J'espère que le comité profitera de cette occasion historique pour prendre le temps de travailler à fond ce projet de loi et d'envisager sérieusement des amendements, quitte à poursuivre son étude pendant l'automne. Il n'y a pas d'urgence. Il est important de faire les choses correctement. C'est une occasion unique de combler certaines lacunes énormes dans le système de responsabilisation du gouvernement.
    J'engage le comité à examiner sérieusement les 140 amendements que Démocratie en surveillance lui propose aujourd'hui.
    Merci beaucoup. Je suis prêt à répondre à vos questions.
    Oui, merci, monsieur Conacher, d'être venu comparaître au nom de Démocratie en surveillance. J'ai oublié de le mentionner au début, et vous m'en excuserez.
    Merci à vous également, monsieur McCandless, d'être venu.
    Monsieur Conacher, nous aimerions savoir si vous êtes parent avec les Conacher qui jouaient au hockey.
    Oui. Mon grand-père, mon oncle, mon grand-oncle, ça dépend lequel.
    Formidable! Alors bienvenue au comité.
    M. Tonks a des questions.
    Eh bien, je ne sais pas patiner comme dans cette famille.
    Bienvenue, monsieur Conacher et monsieur McCandless. Vous avez fait valoir tous les deux qu'il faut protéger les dénonciateurs.
    Vous avez parlé d'une culture de la responsabilité. Vous vous êtes également attardés, du moins me semble-t-il, sur le fait que cette culture de la responsabilité doit être ancrée de deux façons, l'une en vertu de la loi où le sous-ministre se trouve à être l'agent responsable des finances, et vous faites un pas de plus pour vous assurer que cette responsabilité est complète en obligeant cet agent à assumer ce que vous appelez la responsabilité de rendre compte des dénonciations qu'il reçoit pour toute malversation financière ou autre dont il est saisi dans le cadre de ses responsabilités.
    Pourriez-vous nous donner plus de détails à ce sujet, parce que vous allez plus loin et vous dites que cet agent doit rendre des comptes aux législateurs par l'entremise d'un comité spécial. Vous savez que notre comité s'interroge sur la manière d'accroître les pouvoirs de surveillance des comités, ou d'une partie quelconque de la structure parlementaire, et sur la manière dont on peut assurer la reddition de comptes par des rapports qui sont adressés directement aux législateurs.
    Auriez-vous l'obligeance de nous en parler un peu plus?

  (0845)  

    Il y a tout un débat sur la question de savoir dans quelle mesure les sous-ministres relèvent directement des comités parlementaires. Les universitaires — ou du moins quelques-uns — disent que les sous-ministres ne doivent rendre des comptes aux législateurs que pour les responsabilités qui leur sont imposées en vertu de la loi ou d'une autorité quelconque.
    Je m'interroge sur ce qui a échappé à l'attention du commissaire Gomery et sur ce que les universitaires ne comprennent pas: soit cette notion de contrôle de gestion, ce par quoi on désigne simplement ces choses qui doivent être faites et ces choses qui doivent être évitées.
     Je crois pour ma part que le ministre est ultimement responsable de la qualité des contrôles de gestion. Collectivement, les ministres nomment les sous-ministres. Je sais que c'est le premier ministre qui les nomme, mais il n'en reste pas moins que le ministre a la responsabilité de nommer des sous-ministres qui savent en quoi consistent les contrôles de gestion et qui mettent en place les contrôles pour s'assurer que ce qui doit être fait sera fait et qu'on évitera ce qui ne doit pas être fait.
    Je propose quelque chose qui est probablement nouveau, à savoir que les sous-ministres aussi bien que les ministres disent à la Chambre quelles pratiques ils ont mis en place pour protéger les dénonciateurs et qu'ils lui disent si à leur avis ces pratiques atteignent leur but. Je suis d'avis que sans cette reddition de comptes publique, on n'obtiendra pas cette influence autorégulatrice qui pèsera sur leur conduite.
    À mon avis — et je l'ai écrit dans plusieurs textes — si les ministres et les sous-ministres ne rendent pas compte directement des activités relatives aux dénonciations, oubliez la protection des dénonciateurs; il n'y en aura tout simplement pas.
    Merci, monsieur McCandless.
    Je crois qu'en vertu du projet de loi, les hauts responsables auront l'obligation de faire rapport régulièrement au commissaire à l'intégrité du secteur public sur le fonctionnement de leurs systèmes de protection des dénonciateurs. Ce n'est pas comme se présenter devant un comité, mais bien sûr, un comité peut toujours interroger le fonctionnaire qu'il a convoqué pour l'interroger sur son mandat.
    Merci.
    Monsieur Owen.
    Messieurs, merci d'être là.
    Monsieur McCandless, si je vous ai bien compris, et je sais que vous avez votre façon à vous de dire les choses, ce qu'il faut, c'est simplement une bonne gestion du secteur public, où l'on s'attendra normalement à ce que le haut responsable verra à ce qu'il y ait un bon cadre en place pour que les dénonciateurs puissent signaler les erreurs apparentes, pour que le public ait accès aux informations du ministère, et pour que les citoyens qui sont desservis par le ministère soient traités équitablement. Ce n'est que ça en fait, cet agent de la responsabilité publique: un mélange d'ombudsman interne, de commissaire à la protection de la vie privée et de commissaire à la protection des dénonciateurs.
    Même si nous pouvons remédier aux symptômes d'une piètre gestion interne en ajoutant toujours plus d'agents indépendants du Parlement, ce qui me préoccupe, c'est qu'avec la croissance de ce groupe, nous risquons de créer un univers parallèle entre le législatif et l'exécutif où les agents ne seront pas vraiment comptables devant le Parlement et certainement pas devant l'électorat. Si nous permettons la prolifération de ces agents, c'est presque comme si nous retirions aux hauts fonctionnaires la responsabilité de voir à ces choses à l'interne. S'il nous faut créer ces fonctions, leurs titulaires auraient pour rôle de corriger les choses à long terme, de telle sorte que la reddition de comptes au sein des ministères, telle que vous la décrivez, fasse naturellement partie de la gestion, et ce ne serait que dans les cas exceptionnel que l'on ferait appel à ces agents indépendants.
    Il me semble que c'est de cette façon que l'administration publique peut croître sainement. Nous savons qu'on va commettre des erreurs et qu'il nous faudra peut-être procéder à des examens indépendants ou prendre des mesures, mais cela ne sera justifié que si le rôle de ces agents vise à améliorer la reddition de comptes à long terme. J'aimerais savoir si vous avez un commentaire à faire à ce sujet.

  (0850)  

    Eh bien, vous leur avez laissé une trentaine de secondes, monsieur Owen.
    Je maintiens que si vous devez rendre des comptes au public, à savoir que vous devez déclarer publiquement ce que vous comptez faire et pourquoi et comment vous faites ces choses et tout cela, alors le fait d'avoir à rendre des comptes publiquement et que ces comptes peuvent être vérifiés par quelqu'un qui s'assurera qu'ils sont exacts et complets est une motivation suffisante pour faire votre devoir. Je suis d'accord avec le fait d'avoir tous ces inspecteurs généraux intermédiaires, peu importe comment on les appelle.
    Vous n'avez probablement pas songé au fait que, depuis 1978, le vérificateur général du Canada fait le travail du gouvernement au niveau de la reddition de comptes. En 1978, lorsqu'on a voté la Loi sur le vérificateur général et qu'on a confié à celui-ci le mandat d'optimiser l'emploi des ressources, le Conseil du Trésor n'a pas modifié en même temps la Loi sur la gestion des finances publiques de manière à obliger les administrateurs généraux et les fonctionnaires eux-mêmes à rendre compte de leurs propres actions. On a refilé tout cela au vérificateur général. Mais vous ne devez pas refiler cette responsabilité au vérificateur général; vous n'êtes pas ici pour ça. Le vérificateur général est là pour s'assurer que les comptes de la direction sont exacts et complets. La vérificatrice générale a assumé la reddition des comptes, mais elle reste à l'écart.
    Allez-y, très rapidement, monsieur Conacher.
    Je serais d'accord avec vos réserves relativement aux mécanismes de surveillance indépendants si le législateur avait mieux su exiger des comptes des gens. Je prends l'exemple du respect de l'éthique. Les premiers ministres n'ont pas exigé de comptes de leurs ministres au niveau de l'éthique. George Radwanski n'a rendu aucun compte au législateur, en dépit de ce qu'il a fait et en dépit du fait qu'il fait face aujourd'hui à des accusations au criminel.
    Donc les parlementaires ne font pas leur travail -- excusez-moi de le dire -- depuis 139 ans. Nous avons besoin de vérificateurs indépendants qui ont tous les pouvoirs pour agir et qui, on l'espère, auront le courage voulu pour faire le travail, courage que nous n'avons toujours pas, chose certaine, dans le domaine de l'éthique.
    Merci, monsieur.
    Monsieur Sauvageau, allez-y, s'il vous plaît.

[Français]

    Bonjour et bienvenue, messieurs.
    Ma première question s'adresse à M. Conacher. Dans votre Rapport concernant les 140 points faibles de la Loi fédérale sur l'imputabilité, vous parlez de 21 promesses rompues par les conservateurs. Je ne vous demanderai pas de les énumérer, car cela prendrait mes huit minutes au complet. Par contre, j'aimerais que vous précisiez les deux ou trois principaux engagements qui n'ont pas été tenus et que vous nous fassiez parvenir la liste des 21 promesses non tenues.
    Il y a peut-être en effet 140 amendements proposés dans votre document; je ne les ai pas comptés. Y figurent-ils tous? Voulez-vous nous en faire parvenir d'autres?
    Enfin, l'élément déclencheur du projet de loi C-2 est le scandale des commandites. Si ce projet de loi était appliqué demain matin, êtes-vous convaincu que ce genre de scandale n'aurait plus lieu?
    Je vous remercie et vous prie d'excuser la qualité de mon français. J'ai beaucoup de pratique à faire à cet égard. Compte tenu des détails que je dois vous fournir, je vais répondre en anglais.

[Traduction]

    Tout d'abord, ce que vous avez reçu, ce sont seulement les deux premières parties de notre mémoire. C'est simplement parce que le préavis que nous avons reçu était très court. Ce n'est que vendredi dernier que j'ai adressé le mémoire au complet au comité, donc on traduira les 140 amendements qui suivent les sections que vous avez, où sont résumés les aspects qui comportent encore à notre avis des lacunes béantes.
    Pour ce qui est des promesses rompues, il est difficile de choisir parmi elles, mais je crois que le plus indigne, c'est cette tentative visant à supprimer les cinq règles qui régissent en ce moment le Cabinet, le personnel ministériel et le code des hauts fonctionnaires, dont cette règle qui oblige les gens à agir honnêtement, et le fait qu'on interdise au public de porter plainte auprès du commissaire à l'éthique à propos de ses propres employés — en fait, on fortifie cette interdiction. Il n'existe pas en ce moment d'interdiction légale, et on a inscrit dans ce projet de loi une interdiction légale. Je trouve cela parfaitement indigne.
    Les conservateurs n'ont pas non plus tenu cette promesse qu'ils avaient faite, et qui consistait à permettre au public de porter plainte, et pas seulement aux politiciens. Cela ne figure pas dans le projet de loi. Certains pensent que oui, mais le fait est qu'un citoyen devra désormais adresser sa plainte à un politicien, et le politicien devra alors prouver que la plainte est valide, d'une manière ou d'une autre — j'ignore comment on va arriver à faire cela sans pouvoir d'enquête — avant de pouvoir s'adresser au commissaire à l'éthique. C'est parfaitement indigne.
    Mais les autres aspects, soit le lobbyisme secret, les dons secrets, les décisions secrètes des responsables de l'éthique — tout ce secret — et le fait que les conservateurs n'ont pas tenu leur promesse qui consistait à inclure de nombreux changements importants dans le système d'accès à l'information... tout cela est absent. En conséquence, Démocratie en surveillance est d'avis que les gens qui ne sont pas honnêtes, qui manquent à l'éthique, qui se rendent coupables de gaspillage, qui manquent de transparence et qui enfreignent les règles relatives à l'embauche et aux nominations, ne se feront pas prendre, ils ne seront pas reconnus coupables et ils ne seront pas pénalisés.
    Donc un autre scandale des commandites demeure tout à fait possible.

  (0855)  

    Monsieur McCandless, la question était adressée à M. Conacher, mais avez-vous un commentaire à faire?
    Là-dessus, pas particulièrement, non. Je ne me suis pas penché sur les règles de conduite.
    Bien.
    Monsieur Sauvageau.

[Français]

    Monsieur Conacher, il est question que les citoyens et citoyennes puissent faire parvenir leurs plaintes directement au commissaire à l'intégrité, comme c'est le cas au Commissariat aux langues officielles. Pour notre part — et je crois qu'il en va de même pour les libéraux —, nous voulons éliminer la barrière qui empêcherait les citoyens de procéder de cette façon.
    Courons-nous le risque de voir un groupe de pression en particulier bloquer le processus en déposant 58 000 plaintes afin de prouver que le loi est inefficace, comme ce fut le cas dans le cadre du Registre canadien des armes à feu? Ces gens avaient décidé de remplir des formulaires n'importe comment, ce qui a démontré l'inefficacité de la loi, mais d'une façon quelque peu discutable.
    Est-ce que le fait de permettre aux citoyens de déposer leurs plaintes directement auprès du commissaire pourrait permettre à un groupe de faire la peau à un parti politique? Un tel groupe pourrait-il, en vertu de cet amendement, saisir l'occasion qui lui est offerte et poser ce genre de geste?

[Traduction]

    Je crois que vous avez là une sauvegarde qui n'existe pas dans le registre des armes à feu, donc votre analogie ne tient pas tout à fait la route. Et c'est que pour toute plainte que vous allez faire à propos d'une violation des règles d'éthique, si elle est fausse, elle sera considérée comme diffamatoire, et vous vous exposez à des poursuites judiciaires.
    Je n'ai aucune objection à ce que l'on inscrive une interdiction permettant au commissaire de rejeter les plaintes qu'il considère futiles ou vexatoires. Il y aura une période de transition où il y aura vraisemblablement un arriéré, comme c'est le cas avec toute nouvelle loi.

[Français]

    Me permettez-vous de vous interrompre? Je comprends cette partie de l'affaire. Cependant, je me demande ce que le groupe de pression jugerait futile ou vexatoire. Est-ce que ce groupe de pression ne pourrait pas justement démontrer l'inefficacité du rôle du commissaire en déposant mille et une plaintes? Celles-ci seraient jugées futiles ou vexatoires, mais le groupe les considérerait prioritaires. Par conséquent, le commissaire à l'intégrité ne pourrait pas effectuer son travail convenablement, du fait qu'il croulerait sous un amas de plaintes, aussi futiles et vexatoires soient-elles.

[Traduction]

    Les scénarios du pire sont toujours possibles, et je crois que vous imaginez ici un scénario du pire qui est très improbable. Depuis 20 ans, rien n'interdit le dépôt de plaintes relatives à l'éthique, soit depuis que le code du Cabinet est entré en vigueur et depuis les deux années ou presque depuis que le code des députés est entré en vigueur. Au cours des 12 dernières années, il n'y a eu qu'une douzaine de plaintes, donc je n'entrevois pas de danger, particulièrement si l'on se rend coupable de diffamation en faisant une fausse plainte.
    Merci, monsieur Conacher.
    Monsieur Martin.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos deux témoins d'être ici.
    Monsieur McCandless, j'ai lu avec intérêt votre article qui est paru dans l'édition du 22 mai du Hill Times. C'est un texte très riche. Je constate que vos observations aujourd'hui rejoignent ce texte aussi, mais nous nous en sommes déjà inspirés.
    Monsieur Conacher, je trouve que votre mémoire est comme toujours très utile, complet et réfléchi. Nous croyons comme vous que nous tenons là une occasion historique. Vous avez consacré presque toute votre vie à ces enjeux, et c'est peut-être la première occasion réaliste que nous avons de voir une partie, sinon la totalité, de ces choses réalisée.
    Je partage cet avis, et je trouve quelque peu rassurant qu'une bonne part de la LFI — même si elle est incomplète, peut-être, à votre avis — se lise comme la dernière plate-forme électorale du NPD fédéral, presque chapitre par chapitre. Nous en sommes donc très heureux. Cela étant dit, je constate que bon nombre de vos observations sont valides, et je peux vous assurer que nous nous employons en ce moment à rédiger des amendements qui nous permettront d'apaiser bon nombre de vos préoccupations, dans la mesure où cela est humainement possible. Je ne crois pas que nous pourrons vous satisfaire sur tous les points.
    Dans votre allocution liminaire, vous avez dit que l'une des choses qui vous inquiétaient le plus, c'était le fait qu'on ne trouvait pas dans la loi l'obligation d'agir avec honnêteté. Je vous demanderais seulement de réfléchir au fait — si vous êtes d'accord avec moi — que l'absence d'obligation d'agir avec honnêteté ne donne à personne le droit d'agir malhonnêtement. Il existe d'autres mesures et lois qui interdisent sûrement aux dirigeants politiques ou à leur personnel d'agir d'une manière qui serait manifestement illégale à plusieurs égards.
    Est-ce que le fait de mentionner dans le préambule du projet de loi C-2 l'obligation d'agir dans le respect des normes d'éthique et d'honnêteté les plus élevées apaiserait vos préoccupations?

  (0900)  

    Pas du tout, parce qu'un préambule n'est pas exécutoire. Je ne vois pas...
    Comment rendre exécutoire une obligation d'agir honnêtement dans la loi?
    C'est exécutoire de la même façon que les entreprises sont tenues de dire la vérité dans leur publicité. Si ce n'est pas le cas, six personnes — elles ne sont pas obligées de passer par un politicien — peuvent adresser directement une plainte au Bureau de la concurrence. Le Bureau de la concurrence est alors tenu de faire enquête et de rendre une décision. Sears Canada a été reconnu coupable de fausse publicité grâce justement à ce moyen il y a un an de cela.
    Les entreprises sont également tenues d'être honnêtes envers leurs actionnaires. Elles doivent produire des rapports exacts. Si ce n'est pas le cas, les actionnaires peuvent intenter des poursuites, tout comme les commissions des valeurs mobilières, qui sont des organismes indépendants chargés de faire respecter cette loi. Les chefs d'entreprise ne peuvent pas mentir aux consommateurs ou à leurs actionnaires, donc les dirigeants politiques, les fonctionnaires, ne devraient pas être autorisés à mentir au public. Contrairement à vous, je ne vois rien ici qui interdit d'être malhonnête.
    Si vous parlez de l'abus de confiance qu'on trouve dans le Code criminel, combien de fois avez-vous vu cette disposition être invoquée? C'est une procédure civile qu'il nous faut. Celle-ci existe déjà dans le code d'éthique, et rien ne motive sa suppression. Je pense qu'on la supprime parce que David Emerson a été accusé de ne pas avoir agi avec honnêteté. Donc, le gouvernement a compris que c'était un instrument puissant et qu'il valait mieux s'en débarrasser.
    Eh bien, je crois que ce sont là des observations valables.
    Je répète qu'il ne s'agit pas de légiférer en matière de moralité. Légiférer en matière de moralité signifie que même si vous votez des lois, les gens ne se conduiront pas nécessairement de façon morale. Certains vont enfreindre les lois. C'est ce qu'on veut dire quand on dit qu'on ne peut pas légiférer en matière de moralité. Mais cela ne veut pas dire que les lois n'existent pas; ces lois existent. Les chefs d'entreprise n'ont pas le droit de mentir, et les politiciens ainsi que les fonctionnaires ne devraient pas avoir le droit de mentir non plus.
    C'est essentiel. Et c'est la question relative à la reddition de comptes gouvernementale qui compte le plus pour les Canadiens, comme le démontrent tous les sondages depuis 10 ans, entre autres tous les sondages qui ont été réalisés lors des dernières élections. Voilà pourquoi je suis tellement choqué de voir que ce gouvernement cherche à supprimer cette règle, alors que c'est la question qui préoccupe le plus les Canadiens, comme l'ont démontré tous les sondages lors de la dernière campagne électorale.
    Monsieur McCandless, je ne veux pas vous oublier. Voulez--vous intervenir?
    Oui. Je viens de me rendre compte que le projet de loi C-2 serait très différent si on y ajoutait la définition du mensonge qu'a donnée l'universitaire américaine Sissela Bok, qui a publié en 1978 un livre intitulé Lying, à l'époque où l'administration américaine mentait au peuple à propos du Vietnam. Sa définition du mensonge est assez rigoureuse: c'est « tout message public qui tend intentionnellement à tromper ».
    Maintenant, rappelez-vous l'entrevue qu'a donnée Erik Neilsen à Peter Gzowski il y a quelques années de cela, où Neilsen a déclaré qu'on mentait énormément dans le milieu politique — en fait, il a été beaucoup plus cru que je ne l'ai été. Mais si c'était le critère qu'on employait pour ce qu'on appelle le mensonge, nous tiendrions là en effet une arme très puissante.
    Rien ne me permet d'espérer que le projet de loi C-2 va inclure cette définition, mais vous pourriez peut-être songer à une définition, à un critère qui définit le mensonge et ce qui n'est pas un mensonge. C'est une chose à laquelle le comité pourrait réfléchir pour voir s'il peut inclure quelque chose de ce genre.

  (0905)  

    Il vous reste moins d'une minute, monsieur Martin.
    Je pense que c'est une idée très intéressante. En fait, je l'ai notée. Vous savez, monsieur Conacher, je crois qu'on a bien compris votre observation.
    Je préfère croire que l'obligation d'être honnête est en quelque sorte implicite dans tout ce que nous faisons. Vous dites que personne n'est obligée de dire la vérité, et qu'il n'y a qu'une seule manière de le savoir, j'imagine. Aux élections, si l'on vous surprend à mentir, vous ne serez pas élu. Mais c'est un outil plutôt brutal pour qui veut valoriser l'éthique.
    Nous pensons que la meilleure chose à faire ici, avec la LFI, c'est d'améliorer la Loi sur l'accès à l'information, de telle manière que si l'on ne peut pas ériger en loi certaines pratiques éthiques, par une meilleure surveillance, et de meilleures observations de ce qui se passe, on renforce l'éthique en mettant les pratiques en lumière.
    Seriez-vous d'accord pour dire que l'amendement le plus important que l'on pourrait proposer consisterait à élargir...
    Je vais vous arrêter tout de suite. Nous avons un petit problème, monsieur Martin. Les 40 minutes sont écoulées. Nous n'avons pas encore entendu les conservateurs. Votre temps de parole est écoulé. Évidemment, si l'on veut continuer, il faut le consentement unanime du comité, et cela écourtera la présence du prochain groupe.
    Quelqu'un a-t-il une idée brillante?
    Une voix: [Note de la rédaction: Inaudible]
    Le président: Les conservateurs ont...
    Monsieur Martin, je dois vous couper la parole, désolé. Vous avez plus que dépassé votre temps de parole.
    Monsieur Lukiwski.
    Je remercie mes collègues de nous avoir accordé leur consentement unanime, et je vous remercie tous les deux d'être ici aujourd'hui.
    Monsieur Conacher, il est évident que vous avez fait des allégations très sérieuses à propos de la Loi fédérale sur l'imputabilité proposée. Dans votre communiqué de la semaine dernière, vous avez affirmé que le premier ministre, le président du Conseil du Trésor et les porte-parole du premier ministre étaient malhonnêtes, et vous avez affirmé que certaines promesses n'avaient pas été tenues.
    Vous avez réitéré ces affirmations aujourd'hui, et j'en conteste la véracité. J'avance que... vous avez employé le terme « indigne ». Eh bien, très franchement, sauf tout le respect que je vous dois, monsieur, je trouve pour ma part indigne que vous ayez dit ces choses à propos de cette loi.
    Je veux revenir à quelques accusations que vous avez faites aujourd'hui. Il est évident que je n'ai pas beaucoup de temps, je ne pourrai donc pas m'attarder sur chacune, mais je tiens à relever à certaines choses.
    La première accusation que vous avez portée, c'est que nous n'avons pas tenu la promesse que nous avions faite d'ériger en loi le Code régissant les conflits d'intérêts. Je vais vous demander, monsieur, si vous avez devant vous un exemplaire du projet de loi.
    Non, je n'en ai pas.
    C'est bien dommage. Si vous en aviez eu un, monsieur, je vous aurais demandé de nous lire l'article 2 du projet de loi qui se trouve en caractères gras à la page 1. Je vois qu'on vient de vous remettre le projet de loi. Pourriez-vous me lire cet article, monsieur?
    C'est l'article 2, à la page 1, en caractères gras.
    On lit : « Est édictée la Loi sur les conflits d'intérêts, dont le texte suit ».
    Merci. « Est édictée la Loi sur les conflits d'intérêts, dont le texte suit ». Je vous signale, monsieur, que les 50 premières pages de ce projet de loi sont consacrées à la consécration du code. Comment pouvez-vous donc prétendre qu'il s'agit d'une promesse rompue?
    Car, le 11 avril, le jour du dépôt de la Loi fédérale sur l'imputabilité, les documents d'information publiés par les conservateurs indiquaient que toutes les mesures du Code régissant les conflits d'intérêts et l'après-mandat s'appliquant à la fonction publique faisaient partie de la nouvelle loi. Cependant, cinq dispositions du code actuel ne se trouvent pas dans le projet de loi, notamment, les règles exigeant que les titulaires de charge publique agissent avec honnêteté et selon les règles de l'éthique, la règle exigeant qu'ils évitent des conflits d'intérêts, potentiels et apparents, la règle interdisant qu'ils se servent de la propriété gouvernementale à leurs propres fins, et la règle interdisant qu'ils prennent part à des processus décisionnels qui servent leurs propres intérêts financiers. Il ne s'agit pas, donc, du code actuel. Comme nous l'avons expliqué dans notre communiqué de presse de la semaine dernière, lorsqu'on supprime cinq dispositions du code actuel, on ne peut pas prétendre que la nouvelle loi consacrera toutes les dispositions du code actuel.

  (0910)  

    Au contraire, monsieur; le projet de loi édicte le code, c'est pour cela qu'il y consacre 50 pages.
    Vous prétendez, peut-être, qu'il faudrait faire davantage, que nous avons apporté des modifications. C'est un argument qui peut se concevoir, mais on ne peut pas affirmer de façon péremptoire que nous n'avons pas tenu notre promesse en ne consacrant pas le code sur les conflits d'intérêts dans cette loi. C'est inexact, mais on n'est pas d'accord, et tant pis.
    Passons maintenant à autre chose. Vous dites que le gouvernement a rompu sa promesse d'éliminer les échappatoires permettant aux ministres de voter sur des questions liées à leurs propres intérêts commerciaux.
    Je vous demanderais de me lire le paragraphe 6(2), qui se trouve à la page 6.
    Le texte se lit comme suit:
(2) Il est interdit à tout ministre, ministre d’État ou secrétaire parlementaire de participer, en tant que membre du Sénat ou de la Chambre des communes, à un débat ou à un vote sur une question à l’égard de laquelle il pourrait se trouver dans une situation de conflit d’intérêts.
    Comment pouvez-vous, donc, prétendre qu'il s'agit d'une promesse rompue?
    Car, encore une fois, comme on l'a expliqué dans notre communiqué de presse la semaine dernière, la définition d'intérêt personnel utilisée dans la loi exclut à peu près 95 p. 100 des activités des ministres. Il est donc difficile pour un ministre de se trouver dans une situation de conflit d'intérêts dans l'exécution de ses fonctions. Il s'agit d'une exemption qui a été ajoutée par M. Paul Martin lorsqu'il était premier ministre. Elle permet au ministre des Finances d'avoir un million de dollars d'actions dans une banque tout en ayant le pouvoir de modifier la Loi sur les banques, car l'intérêt personnel ne vise pas l'intérêt dans une décision ou une affaire de portée générale. La Loi sur les banques est une question de portée générale, tout comme la plupart des questions qui relèvent des ministres. Je crois que les promesses électorales visaient exactement ce genre de situation, et je suis bien placé pour le savoir puisqu'on m'a consulté lors de l'élaboration de la promesse.
    C'est inexact, monsieur, la loi précise que nous ne pouvons pas être propriétaires.
    Vous pourriez avoir des placements dans un fonds fiduciaire sans droit de regard tout en sachant que vous êtes toujours propriétaire.
    C'est absolument faux, monsieur.
    Monsieur, je m'indigne de plus en plus car vos affirmations sont fausses dans bon nombre de cas. Si vous lisez attentivement la loi, comme nous l'avons fait, vous verrez que vos affirmations ne sont pas du tout fondées.
    Monsieur Poilievre, vous pourriez peut-être ajouter quelque chose.
    À titre d'exemple, les titulaires de charge publique doivent se dessaisir de tous leurs intérêts d'ici la semaine prochaine, le 3 juin. L'exemple que vous avez cité, à savoir posséder des actions bancaires et ensuite voter sur les dispositions de la Loi sur les banques, ne pourrait pas se produire, parce que nous n'avons pas le droit de posséder d'actions bancaires; il faut tout vendre.
    Ou les placer dans une fiducie sans droit de regard.
    Dont nous ignorerions complètement le contenu, puisqu'il s'agit d'une fiducie sans droit de regard.
    Oui.
    Donc, vous vous trompez.
    Non, selon les règles, on peut posséder des intérêts, car les règles prévoient une définition des intérêts privés.
    Vous ne sauriez pas que vous possédez ces titres, donc vous ne pourriez pas voter en fonction de vos intérêts privés si vous ne les connaissiez pas?
    Tout d'abord, lorsque vous êtes ministre, il y a une période de six mois pendant laquelle vous connaissez vos avoirs, pendant laquelle vous devez vous en dessaisir ou les placer dans une fiducie sans droit de regard. Démocratie en surveillance propose d'écourter cette période. Deuxièmement, lorsque vous placez ces avoirs dans une fiducie sans droit de regard, vous continuez de le savoir. Troisièmement, la définition des intérêts privés permet à un ministre de voter en fonction de ses intérêts financiers, du moment que l'objet du vote relève d'une application générale.
    Vous avez tort.
    Je suis désolé, on peut continuer à en débattre, mais nous sommes déjà 10 minutes en retard.
    Monsieur McCandless et monsieur Conacher, je vous remercie d'être venus et de nous avoir fait part de vos observations.
    Je vous remercie. Nous allons prendre une petite pause avant d'entendre notre prochain témoin.

  (0915)  


  (0920)  

    J'aimerais reprendre les travaux.
    Ce matin, nos prochains témoins sont des représentants du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada. Nous accueillons Mme Jennifer Stoddart, qui est commissaire à la protection de la vie privée, ainsi que Mme Patricia Kosseim, avocate générale. Bonjour, mesdames.
    Madame Stoddart, puisque vous avez déjà comparu devant de nombreux comités, vous savez que nous allons commencer par votre déclaration liminaire, suivie par les questions posées par les membres du comité.
    Merci d'être des nôtres.
    Je vous remercie de votre invitation. Je serai très brève dans mes commentaires, ensuite je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

[Français]

    D'entrée de jeu, j'aimerais dire que je suis satisfaite de l'orientation qu'a prise le gouvernement en mettant en avant le projet de loi C-2. Depuis ma nomination, je dirige le commissariat de façon à en accroître, en esprit et en intention, la transparence et l'imputabilité à l'égard des Canadiennes et des Canadiens. J'ai dû mener une dure et longue bataille pour rétablir le moral de l'équipe, mettre en place des pratiques organisationnelles appropriées et regagner la confiance du public à l'endroit du commissariat. J'appuie donc pleinement les efforts déployés par le gouvernement afin de mettre en place les mécanismes qui nous permettront d'éviter que des situations déplorables ne se reproduisent.
    Grâce au projet de loi C-2, de premières modifications importantes seront apportées à la Loi sur l'accès à l'information et à la Loi sur la protection des renseignements personnels. Cependant, je crois qu'il reste encore beaucoup de travail à accomplir. Pour ce qui est d'atteindre l'objectif de transparence et d'imputabilité du gouvernement, la Loi sur la protection des renseignements personnels est un facteur tout aussi important que la Loi sur l'accès à l'information.

[Traduction]

    Je vais insister quelque peu sur la nécessité d'une réforme de la Loi sur la protection des renseignements personnels, qui pose une question d'imputabilité et de transparence.
    Comme l'a décidé récemment la Cour suprême du Canada, la Loi sur l'accès à l'information et la Loi sur la protection des renseignements personnels doivent être interprétées conjointement comme un — et je cite — « code homogène ». Lorsque le Parlement a adopté ces lois complémentaires il y a 25 ans, il entendait clairement rehausser le niveau d'imputabilité gouvernementale, et ce, de deux façons; d'une part en veillant à ce que l'accès à des renseignements détenus par le gouvernement soit reconnu comme un droit individuel et, d'autre part, en renforçant le droit des personnes à savoir quels sont les renseignements personnels que le gouvernement détient à leur sujet et à quelles fins ce dernier s'en sert.
    La protection de la vie privée ne devrait pas être perçue comme le synonyme de « secret » ni l'antonyme « d'accès ». L'ouverture, l'imputabilité ainsi que l'accès aux renseignements personnels constituent en fait trois des principes fondamentaux, aujourd'hui reconnus à l'échelle internationale, qui sous-tendent tout régime moderne de protection des données. À la demande de l'ancien Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique, le Commissariat a rédigé un document de discussion sur la réforme de la Loi sur la protection des renseignements personnels, que nous allons déposer la semaine prochaine auprès du comité.
    J'aimerais maintenant parler de certaines dispositions du projet de loi C-2 liées à la Loi sur la protection des renseignements personnels. Mes commentaires vont porter sur les points suivants.
    J'aimerais parler tout d'abord de la portée de l'application élargie. Je crois, tout comme le commissaire à l'information John Reid, que nous pourrions nous appuyer sur une approche davantage fondée sur des principes afin que toutes les institutions gouvernementales assument la responsabilité de la gestion des renseignements qu'elles détiennent. Le projet de loi C-2 est une première étape louable en ce sens. En augmentant la portée de la Loi sur la protection des renseignements personnels pour y inclure davantage d'entités, le projet de loi C-2 constitue certainement une amélioration par rapport au statu quo.
    Je suis néanmoins préoccupée par la proposition visant à supprimer certaines sociétés d'État commerciales de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques (LPRPDÉ) qui touche le secteur privé, et de les inclure plutôt dans la Loi sur la protection des renseignements personnels. J'invite les députés à se reporter aux articles 188 et 190 du projet de loi. Je fais notamment référence à la Société Radio-Canada et à Énergie atomique du Canada Limitée, qui sont toutes deux des mandataires de Sa Majesté visées par la LPRPDÉ par suite d'un décret, ainsi qu'à VIA Rail, qui constitue une entreprise fédérale également régie par la LPRPDÉ. La triste réalité, c'est que les renseignements personnels sont beaucoup mieux protégés dans le secteur privé sous réglementation fédérale que dans le secteur public fédéral. En fait, si les règles sont changées pour les sociétés d'État commerciales mentionnées précédemment, le niveau de protection des renseignements personnels qu'elles sont tenues d'assurer en vertu de la LPRPDÉ sera diminué par rapport à celui demandé à leurs concurrents du secteur privé qui sont tous, à l'heure actuelle, traités sur un pied d'égalité.
    Le projet de loi C-2 prévoit une exemption, relativement à l'accès de renseignements personnels, qui vise les renseignements établis ou obtenus par le Commissariat dans le cadre d'une enquête. Cette disposition comporte une notion parallèle au contenu d'un nouvel article de la Loi sur l'accès à l'information et j'appuie ces deux nouvelles exemptions pour la tenue des enquêtes sur la protection de la vie privée réalisées par le Commissariat. Je crois que ces nouvelles exemptions, dans la mesure où elles s'appliquent à la tenue d'enquêtes sur la protection de la vie privée, sont importantes car elles permettraient de « fermer la porte arrière », c'est-à-dire d'empêcher une personne à qui un organisme gouvernemental a refusé l'accès à certains renseignements de déposer une plainte auprès du Commissariat afin d'obtenir indirectement l'accès à ces mêmes renseignements. Si les plaignants pouvaient procéder ainsi, ils contourneraient l'ensemble du processus délibératif prévu dans la loi.
    En outre, cette exemption est pleinement conforme à la disposition de confidentialité prévue dans la Loi sur la protection des renseignements personnels qui vise à protéger la formule de l'ombudsman et sa mission consistant à résoudre les conflits de façon officieuse. L'obligation de confidentialité est essentielle aux fonctions de l'ombudsman et encourage les parties à s'engager pleinement dans un processus de conciliation qui fonctionne de façon optimale lorsque les parties réussissent à établir un climat de confiance mutuelle.

  (0925)  

[Français]

    Pour terminer, j'ajouterai que les plaintes relatives à la protection de la vie privée sont déposées lorsqu'une personne croit que son droit à la vie privée a été bafoué. Cela ne ferait qu'ajouter l'insulte à l'injure si le commissariat rendait publiques des enquêtes réalisées pour vérifier les allégations des plaignants, car ceux-ci pourraient y voir une nouvelle atteinte à leur vie privée.
    Nous appuyons aussi les exemptions proposées à la Loi sur la protection des renseignements personnels qui visent à protéger les dénonciateurs en vertu du projet de loi C-11. Le commissariat s'est dit en faveur de la protection de l'identité des dénonciateurs lors de sa comparution sur le projet de loi C-11.
    La divulgation d'actes répréhensibles est un signal d'alarme quant à la possibilité qu'il y ait eu perpétration d'actes répréhensibles au sein d'un organisme gouvernemental. Les enquêtes réalisées dans ce type d'affaires ne portent généralement pas sur l'identité de la personne qui dénonce, mais bien sur la véracité des faits allégués. Il importe de ne pas confondre l'évaluation de la crédibilité des témoins inhérente à toute enquête, y compris les enquêtes sur des actes répréhensibles allégués, et la décision du législateur de protéger l'identité d'une personne dans cette situation particulière. Même lorsqu'il peut être utile, dans le cadre d'une enquête, de connaître l'identité du dénonciateur, le projet de loi C-11, tel que modifié par le projet de loi C-2, établit expressément que les règles de justice naturelle et d'équité des procédures continuent de s'appliquer à l'administrateur général, au commissaire à l'intégrité et aux tribunaux.
    Selon moi, il s'agit d'une façon d'arriver à un bon équilibre entre le traitement équitable du présumé responsable d'un acte répréhensible et la protection du dénonciateur.

[Traduction]

    J'aimerais parler brièvement du processus de nomination et de révocation des hauts fonctionnaires du Parlement. J'appuie les modifications au processus de nomination et de révocation du commissaire à la protection de la vie privée, conformément à l'article 53 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, qui assure toute l'indépendance nécessaire à un haut fonctionnaire du Parlement. Tout comme ma collègue la vérificatrice générale, je ne suis pas en faveur de la communication publique du décompte définitif des votes qui peut influer de façon négative sur la confiance des parlementaires à l'égard du haut fonctionnaire qu'ils auront choisi.

[Français]

    Finalement, je vais vous suggérer un ajout. Il y a une omission importante dans le projet de loi C-2, c'est-à-dire l'absence d'un mécanisme d'enquête en cas de plainte relative à la protection de la vie privée ou à l'accès déposée contre le commissaire à l'information ou le commissaire à la protection de la vie privée. Et j'ose espérer que les dispositions faisant en sorte que les lois s'appliquent aux deux commissaires n'entreront en vigueur que lorsqu'un processus d'enquête approprié sera en place pour faire face à l'émergence possible de ces situations.

[Traduction]

    En conclusion, j'espère vous avoir donné une idée précise de ma vision sur les nouvelles dispositions du projet de loi C-2 ainsi que de l'importance de réformer la Loi sur la protection des renseignements personnels, une réforme indispensable, pour les mêmes raisons, à l'imputabilité gouvernementale.
    Je serai heureuse de répondre à vos questions.
    Voilà un exposé très complet.
    Les membres du comité ont quelques questions à poser.
    Monsieur Owen.
    Merci, madame Stoddart, de vous être jointe à nous et d'avoir rétabli en si peu de temps l'intégrité du Bureau du commissaire à la protection de la vie privée.
    J'aimerais commencer par une question générale concernant le poste que vous occupez, et j'aimerais avoir votre avis sur votre rôle à l'égard de l'exécutif et du Parlement, puisque vous prolongez en quelque sorte l'action des députés en les aidant à forcer l'exécutif à rendre des comptes.
    À partir de là, il me semble que vous devriez pouvoir identifier progressivement les types de plaintes ou de problèmes pour lesquels vous pouvez préconiser des modifications dans la gestion de l'administration publique. Les préoccupations, les problèmes et les erreurs ne disparaîtront jamais entièrement, mais progressivement, ils devraient être remplacés par les meilleures pratiques de gestion, que votre service doit observer au même titre que tous les bureaux indépendants.
    Est-ce bien ce que vous avez observé dans l'histoire du Commissariat à la protection de la vie privée et dans vos propres relations avec l'exécutif au cours des deux dernières années? Est-ce qu'avec les changements que vous préconisez, nous allons parvenir à une amélioration des pratiques de gestion débouchant sur une plus grande responsabilité? Pensez-vous au contraire que votre commissariat soit simplement là pour traiter un volume constant de plaintes auxquelles aucun véritable correctif ne sera apporté?

  (0930)  

    Si je comprends bien la question, monsieur le député, vous abordez deux sujets: un sur la gestion et l'imputabilité — des questions administratives — l'autre sur l'application de la loi et les modifications qu'il faut y apporter.
    D'après mon expérience au Commissariat à la protection de la vie privée, je dirais que ce fut pour moi une chance et une malchance d'entrer à un moment critique dans ces fonctions en assumant le rôle historique de haut fonctionnaire du Parlement.
    J'aimerais insister sur le fait qu'il existe entre le Parlement et ses hauts fonctionnaires des relations réciproques; l'importance que le Parlement leur accorde et l'intérêt qu'il porte à leurs actions peuvent varier considérablement, comme il l'a fait depuis mon entrée en fonctions.
    J'ai la chance d'être commissaire à la protection de la vie privée à une époque où, pour différentes raisons, que ce soit l'importance croissante de la question de la protection de la vie privée ou les événements malheureux de 2003, auxquels le Parlement a participé directement, l'évolution de mon service est suivie de beaucoup plus près par le Parlement. Comme nous avons une relation synergique, cela me donne beaucoup plus de crédibilité lorsque je parle de la réforme de la Loi sur la protection des renseignements personnels car sinon, le Parlement n'entreprendrait pas à l'automne prochain la révision quinquennale de la loi.
    Je suis d'accord avec vous. Merci.
    Monsieur Murphy.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je tiens à vous remercier, madame la commissaire. Je vous suis très reconnaissant pour votre témoignage, et la situation me semble très claire lorsque vous parlez, à la page 5, de la SRC, d'Énergie atomique du Canada et de Via Rail.
    Ce que nous entendons à la Chambre des communes, c'est que dans l'autre partie de ce projet de loi omnibus -- en particulier dans les dispositions sur l'accès, on a prévu des mesures pour protéger la SRC et les sources. Mais ce qui est clair ici, c'est qu'en soustrayant la SRC en particulier à l'application de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, on se trouve à diminuer leur niveau de protection des renseignements personnels par rapport à celui exigé dans le secteur privé réglementé par le gouvernement fédéral.
    J'aimerais donc savoir comment on en est arrivé là, mis à part le fait qu'on a peut-être procédé à la hâte sans tenir de consultations. Vous a-t-on consulté pour soustraire à l'application de la loi ces trois sociétés d'État, indépendantes, qui doivent après tout faire concurrence à d'autres entreprises comme le réseau CTV, les systèmes ferroviaires dans l'Ouest et l'énergie atomique... Je suppose qu'elles exercent une concurrence à l'échelle mondiale.
    Vous a-t-on consulté et a-t-on eu suffisamment de temps pour prévoir certains mécanismes de protection?
    Non, malheureusement nous n'avons pas été consultés avant le dépôt la loi. Je crois que si nous avions été consultés, nous aurions signalé que ces trois entités sont déjà visées par la LPRPDE; qu'il existe une norme de protection des données plus moderne et plus élevée qui semble bien fonctionner. La LPRPDE prévoit une exemption en ce qui concerne les renseignements personnels recueillis à des fins journalistiques ou artistiques, donc les sources journalistes ne sont pas visées.
    Nous ignorons s'il s'agit d'une omission ou... Cela semble probablement être une omission. On ne peut pas imaginer que le gouvernement veuille délibérément abaisser la norme de protection des renseignements personnels, que ce soit pour les employés et pour le public, pour les consommateurs et pour les citoyens qui font affaire avec ces organisations.

  (0935)  

    Très bien.
    Monsieur Sauvageau.

[Français]

    Bonjour et merci, madame Stoddart et madame Kosseim.
    Ma première question fait référence à la page 5 de la version française de votre présentation. La dernière phrase du premier paragraphe se lit ainsi:
En fait, si les règles sont changées pour les sociétés d'État commerciales mentionnées précédemment, le niveau de protection des renseignements personnels qu'elles sont tenues d'assurer en vertu de la LPRPDÉ sera diminué par rapport à celui demandé à leurs concurrents du secteur privé qui sont tous, à l'heure actuelle, traités sur un pied d'égalité.
    Des représentants d'Exportation et Développement Canada nous ont dit que lorsqu'un organisme fait affaire avec des clients du secteur privé et que ses concurrents sont du secteur privé, le fait d'ouvrir la porte en vertu de la Loi sur l'accès à l'information pourrait constituer une concurrence déloyale, une épine dans le pied pour cet organisme.
    Est-ce bien le sens de cette phrase?
    Je crois que les enjeux, monsieur le député, ne sont pas tout à fait les mêmes que ceux de la Loi sur l'accès à l'information. À long terme, le Parlement devrait penser à amender ces deux lois en s'appuyant sur les principes plutôt que sur le fait de désigner certaines entreprises ou non, étant donné le mélange secteur public/secteur privé qu'on retrouve dans plusieurs organismes fédéraux.
    La LPRPDE assure un niveau assez élevé de protection des renseignements personnels. Cette loi contient des exigences en matière d'organisation, de transparence, d'imputabilité et de mesures de redressement, mais rien de tel n'est inclus dans l'actuelle Loi sur la protection des renseignements personnels. On imposerait à ces trois sociétés d'État un fardeau moins lourd que celui de leurs concurrents ou collègues du secteur privé régis par la même loi.
    À la fin de la page 7 et à la page 8, il est question du vote secret au Parlement. Quelles sont vos plaintes ou vos récriminations concernant le processus actuel du vote secret? Il s'agit de changer complètement une tradition du système parlementaire, parce que dans le système parlementaire britannique, seul le président est élu par vote secret des députés. À ma connaissance, ce n'est pas le cas pour les agents indépendants comme la vérificatrice générale, la commissaire aux langues officielles, etc. Quel est le problème relatif au processus actuel, selon vous?
    Honnêtement, je ne vois pas de problème relativement la situation actuelle. Je suis passée par là. Je ne suis pas experte en procédure parlementaire. Le commissaire intérimaire, M. Robert Marleau, a fait des commentaires à ce sujet, et je respecte son opinion. Il a dit qu'il était préférable que le vote secret soit régi par les règles de procédure de la Chambre plutôt que par un projet de loi.

  (0940)  

    Si on faisait le changement.
    Oui. Actuellement, les personnes nommées à ce poste sont élues par consensus, ou à peu près. Si on opte pour un vote secret, on peut supposer que chacun votera à sa guise, ce qui pourrait donner lieu à des situations où les deux tiers seraient en faveur et l'autre tiers contre ou à une élection par 10 voix de majorité, etc. Si vous allez dans cette direction, j'abonde dans le sens de la vérificatrice générale pour dire que le vote devrait alors être secret. Pour ma part, je ne demande pas qu'on change le processus actuel.
    Merci, monsieur le président.
    Vous seriez favorable au statu quo, mais si le comité proposait un changement, vous voudriez que le vote soit secret. Votre premier choix reste toutefois le statu quo, n'est-ce pas?
    Oui.
    Merci, je n'ai pas d'autres questions. Je ne sais pas si Mme Lavallée voudrait en poser.
    Vous avez demandé si le gouvernement voulait que les renseignements personnels soient moins bien protégés par le projet de loi C-2. Vous avez mentionné également que le niveau de protection actuel était assez élevé et que le projet de loi a pour effet de diminuer ce niveau.
    Pensez-vous vraiment que les renseignements personnels seront moins bien protégés avec ce projet de loi?
    Oui, en ce qui concerne ces sociétés d'État. C'est plus qu'une pensée, madame la députée.
    Pour les trois sociétés d'État que vous avez nommées?
    C'est un fait juridique incontesté. La Loi sur la protection des renseignements personnels ne comporte pas tous les aspects que comporte la LPRPDE, qui est une loi plus récente de presque 25 ans et qui s'applique au secteur privé.
    Actuellement, ces sociétés d'État sont incluses dans la LPRPDE. Cela veut dire que si les gens ont un problème relativement à la protection de leurs renseignements personnels, ils peuvent non seulement déposer une plainte auprès de nous, mais demander qu'on apporte des corrections. Et nous pouvons leur en suggérer également. Si les corrections ne sont pas apportées, ils peuvent se présenter devant la Cour fédérale en vue d'obtenir un dédommagement.
    À la demande du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique, je déposerai la semaine prochaine un document de discussion sur la réforme de la Loi sur la protection des renseignements personnels. En vertu de la loi actuelle, vous pouvez demander uniquement l'accès à votre dossier. Vous pouvez demander qu'on y apporte des corrections, mais si ces corrections ne sont pas faites, le processus s'arrête là. Ni le citoyen, ni moi, ni la commissaire ne pouvons aller devant la Cour fédérale pour vous, et encore moins obtenir un dédommagement. Cela a été confirmé récemment par la Cour fédérale. Qui plus est, la loi actuelle qui régit le secteur public fédéral ne contient pas de code de conduite applicable aux renseignements personnels, lequel est assez élaboré dans la loi qui régit le secteur privé.

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Monsieur Martin.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je tiens à vous remercier de vos observations, madame Stoddart. En vous écoutant, je me suis rappelé que ce sont les incidents qui se sont produits dans votre bureau qui ont en fait été à l'origine d'une bonne partie des mesures proposées aujourd'hui dans le projet de loi C-2. Je me rappelle, bien entendu, que l'enquête menée par le comité des opérations gouvernementales à propos du Bureau du commissaire à la protection de la vie privée a plus ou moins amené un grand nombre d'entre nous à nous rendre compte tout d'abord qu'il fallait assurer une meilleure protection aux dénonciateurs parce que nous nous rappelons la scène où ces dénonciateurs honnêtes et bien intentionnés se sentaient tellement mal protégés qu'ils ont estimé nécessaire d'être accompagnés de leurs avocats pour faire leurs exposés devant un comité permanent de la Chambre des communes. C'est surtout cela qui nous a amenés à nous rendre compte que le régime de protection des dénonciateurs laisse grandement à désirer. Donc je tiens à vous remercier pour les observations que vous avez faites à ce sujet aujourd'hui.
    Au début de votre exposé, vous avez fait valoir que la protection de la vie privée n'est pas synonyme de secret, ce qui est un très bon argument à faire valoir, à mon avis. Mais parallèlement, lorsque la vérificatrice générale a comparu devant notre comité, elle a indiqué dans son témoignage que chaque fois que l'on améliore l'accès à l'information, cela a pour résultat de réduire la quantité de documents. Autrement dit, cela constitue un problème à ses yeux car elle constate qu'il y a moins à vérifier lorsqu'il y a des demandes d'accès à l'information en cours.
    Prévoyez-vous des problèmes équivalents dans le cas des plaintes concernant la protection des renseignements personnels si nous élargissons de façon importante la portée des dispositions sur l'accès à l'information que renferme le projet de loi C-2?
    Non, je ne crois pas que cela ait la même incidence sur les renseignements personnels. Je crois qu'il y a une quantité minimale de renseignements personnels qui doit être détenue de même qu'une quantité minimale de renseignements qui sont toujours produits parce qu'ils concernent des particuliers. Donc nous ne constatons pas le phénomène dont le commissaire Reid a certainement parlé assez longuement. Ce n'est pas un phénomène que nous avons constaté.
    En fait, je dirais que c'est le contraire, mais peut-être pour d'autres raisons, à cause de la possibilité d'établir un lien avec des particuliers. Le rôle du gouvernement consiste en majeure partie à gouverner des citoyens. Une bonne partie du travail du secteur privé concerne également la gestion du marché et des relations avec les consommateurs. Donc je crois qu'il y a une augmentation de la quantité de renseignements personnels qui sont détenus. Cependant, nous n'avons pas fait d'étude sur cette question. Il s'agit d'une opinion personnelle.

  (0945)  

    Donc, vous ne considérez pas que le droit de savoir de la population et le droit de chacun à la protection de la vie privée constituent des intérêts opposés.
    Oui, comme vous le signalez, il y aura toujours des intérêts opposés, et cette question continue d'ailleurs d'être débattue entre autres devant les tribunaux. La Cour suprême du Canada vient de rendre une décision importante à ce sujet le mois dernier. Mais cela fait partie de la tension inhérente et saine qui existe dans toute démocratie.
    C'est un excellent argument.
    Nous considérons que nos gouvernements doivent être ouverts et transparents, mais pas ouverts et transparents à propos de ce qui se trouve dans mon dossier ou dans le vôtre, mais ouverts et transparents à propos de documents qui renferment des faits, peut-être des opinions, des énoncés de politique et ainsi de suite concernant la gouvernance du pays.
    Inversement, nous devrions être les seuls à avoir accès aux renseignements personnels que nous donnons, et je dirais que nous devrions persévérer en ce sens et que c'est la raison pour laquelle je plaide en faveur de la réforme de la Loi sur la protection des renseignements personnels la semaine prochaine. Nous devrions également connaître les liens et l'utilisation qui est faite de nos renseignements personnels. Cela n'est pas très clair dans le cadre du régime actuel.
    Mais nous devons accepter ces deux principes. Je crois que tous les citoyens les considèrent nécessaires et nous devrons prendre les mesures qui s'imposent.
    Jusqu'à ce que vous comparaissiez devant nous aujourd'hui, je crois que le comité avait probablement mis l'accent sur l'aspect relatif à l'accès à l'information. Il convient tout à fait que vous représentiez le droit à la protection des renseignements personnels.
    En ce qui concerne les changements apportés aux dispositions sur la protection des dénonciateurs, vous indiquez que vous n'avez pas d'objection aux conséquences que le projet de loi C-2 aurait sur le projet de loi C-11. Mais d'après votre propre expérience, je suppose qu'au bout du compte il est très difficile de garantir l'anonymat du dénonciateur. Je crois que vous y avez fait allusion. Si cela devient partie intégrante de l'enquête, vous avez parlé de justice naturelle ou du maintien de la justice naturelle. Pouvez-vous expliquer ce que vous entendez par cela?
    Je vais trouver le passage:
    Même lorsqu'il peut être utile, dans le cadre d'une enquête, de connaître l'identité du dénonciateur, le projet de loi C-11, tel que modifié par le projet de loi C-2, établit expressément que les règles de justice naturelle et d'équité des procédures continuent de s'appliquer...
    Que voulez-vous dire par justice naturelle et équité des procédures?
    Dans ce contexte, la justice naturelle et l'équité des procédures signifient habituellement le droit des deux parties à être entendues, avant qu'une décision soit prise qui les toucherait toutes les deux, et le droit de connaître l'ensemble des faits pris en compte dans le cadre du processus afin qu'on ne soit pas pénalisé par un processus arbitraire dont une partie serait secrète.
    Le droit de connaître votre accusateur n'est-il pas un élément de la justice naturelle?
    Je n'aime pas beaucoup l'expression « le droit de connaître son accusateur » dans le contexte du droit administratif. Elle télescope différentes idées, comme des principes de droit pénal, et les transfère dans le monde plus sensible et plus nuancé du processus administratif. Je n'utilise pas cette expression.
    Selon moi, ce que vous et moi recherchons dans le projet de loi C-11, lorsque j'ai déjà témoigné pour la première fois à ce sujet, c'est la façon de créer un endroit sûr, comme dans l'exemple du Commissariat à la protection de la vie privée en 2003, où les gens peuvent venir dire qu'il y a quelque chose qui ne va pas, sans en être intimidés le lendemain par la personne qu'ils soupçonnent d'un acte répréhensible. Je ne vois pas en quoi cela est contraire à la justice naturelle. Je pense qu'il faut et le temps et l'endroit pour faire cela. Vous pouvez parler et recevoir une certaine protection pendant que l'enquête suit son cours.
    J'ai dit dans mon exposé que la personne qui mène l'enquête a d'autres outils à sa disposition, et n'a pas besoin de rendre publiques les enquêtes, contrairement à ce qui se passe en audiences publiques, qui est notre règle lorsqu'on parle de procédures au criminel, tout particulièrement en ce qui concerne la crédibilité des témoins. Cette personne examine tous les faits, etc. Ces mesures de protection sont intégrées.
    Si je fais référence à la justice naturelle, c'est pour dire qu'il y a généralement une deuxième, une troisième ou une étape ultérieure après cela. Si vous dépassez le stade de la communication initiale des faits, déclenchée par le processus de dénonciation, et que vous en arrivez à devoir prendre des mesures disciplinaires ou correctives, voire porter des accusations au criminel, là, oui, vous avez le droit de tout connaître de l'affaire.

  (0950)  

    Merci.
    Monsieur Petit.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Madame Stoddart, ma question est double. Vous faites partie du Commissariat à la protection de la vie privée et vous disposez de tout un ensemble de règles pour protéger la vie privée. Et Dieu sait que c'est difficile aujourd'hui!
    Cependant, quelque chose m'intrigue. Le commissaire à l'information a un métier complètement à l'inverse du vôtre, c'est-à-dire qu'il veut beaucoup d'information. Vous, vous êtes comme le chien de garde.
    Croyez-vous que le projet de loi C-2 permettrait de transférer les renseignements que vous obtenez lors d'une enquête, par exemple relativement à la protection d'individus, au commissaire à l'information? Si je veux obtenir des renseignements, je dois passer par le commissaire à l'information. Supposons que vous bloquiez ma requête, à bon droit ou à mauvais droit, je n'ai pas à m'expliquer à cet égard. Seriez-vous prête à transférer des renseignements au commissaire à l'information, ou allez-vous systématiquement bloquer le transfert de renseignements? Est-ce que le projet de loi C-2 règle ce problème?
    Je ne crois pas que l'on transfère actuellement des renseignements personnels au commissaire à l'information. C'est pour cette raison que l'on fait une suggestion relativement à l'exemption.
    Je vais demander à l'avocate générale de vous en parler plus en détail.
    La commissaire à la protection de la vie privée entre en jeu lorsqu'il s'agit de renseignements personnels, notamment des renseignements personnels concernant des tiers ou recueillis dans le cadre d'une enquête de la commissaire à la protection à la vie privée portant sur des renseignements plus vastes. Dans les deux cas, il y a des dispositions, dans le projet de loi C-2 et dans la loi actuelle, qui permettent de protéger ces renseignements afin qu'ils ne soient pas divulgués.
    En vertu du projet de loi C-2, les renseignements colligés dans le cadre d'une enquête seraient exemptés, ce que la commissaire appuie totalement.
    En ce qui concerne les renseignements personnels relatifs aux tiers, il est déjà prévu que ces renseignements sont protégés. Il y a des mécanismes qui protègent justement ces renseignements avant leur divulgation.
    Donc, le projet de loi C-2 n'augmenterait pas nécessairement cette tension.
    D'accord.
    J'ai une autre question pour Mme Stoddart ou Me Kosseim. Dans le projet de loi C-2 de la session en cours et dans le projet de loi C-11 de la session précédente, que vous avez examinés, on utilise le terme « dénonciateur ». Naturellement, tout le monde porte son attention sur ce mot. Toutefois, il y a une autre notion, que nous avons connue dans le cadre de la Commission Gomery, celle de « délateur ». Voyez-vous la différence entre les deux termes?
    Un dénonciateur est quelqu'un qui n'a pas participé à la commission du crime, alors que le délateur est un individu dans le système qui, pour avoir des droits particuliers... Par exemple, M. Guité, qui était à l'intérieur du système, pouvait, pour que la pénalité contre lui soit moindre, vendre ses amis en dévoilant tout ce qu'ils ont fait.
    Est-ce que le projet de loi C-2 offre cette possibilité?
    J'ai de la difficulté à répondre à cette question, monsieur le député. Je n'ai pas réfléchi à la différence entre ces deux termes, mais je ne vois pas, dans l'utilisation de ces deux termes, de conséquences sur la protection des renseignements personnels.
    Merci.

[Traduction]

    Merci.
    C'est tout le temps que nous pouvions vous accorder aujourd'hui.
    Je vous remercie beaucoup, madame Kosseim et madame la commissaire Stoddart, d'être venues.
    Nous interrompons nos travaux quelques minutes.

  (0954)  


  (1000)  

    Nous reprenons nos travaux.
    Nous accueillons trois groupes ce matin. Mme Deborah Bourque, présidente nationale du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes.
    Bonjour, madame Bourque.
    Nous avons également M. Toby Sanger, économiste, et Mme Corina Crawley, tous deux du Syndicat canadien de la fonction publique.
    Bonjour.
    Nous avons également M. Pierre Patry et M. Éric Lévesque, de la Confédération des syndicats nationaux.
    Bonjour.
    Vous pouvez commencer par de brefs exposés, après quoi les membres du comité vous poseront des questions.
    Merci.
    Au nom des 54 000 membres du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, je tiens à vous remercier de nous donner l'occasion de présenter notre point de vue devant votre comité sur le projet de loi C-2.
    Étant donné les limites de temps, mon exposé sera une version abrégée du document écrit qui vous a été distribué et, en fait, je vais commencer à la page 2 du texte anglais, soit la page 3 du texte français.
    Tout d'abord, nous sommes très heureux que la Société canadienne des postes soit dorénavant assujettie à la Loi sur l'accès à l'information, ce que nous demandons depuis des années. Cependant, nous éprouvons de sérieuses réserves quant à l'amendement 149 apportée à la partie 3, qui ajoute des exemptions et des exceptions à l'application de la Loi sur l'accès à l'information à la Société canadienne des postes. Nous pensons que les exceptions proposées sont trop étendues. Aux exemptions liées aux intérêts économiques normaux comme les secrets industriels ou les renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques, le gouvernement en a ajouté une concernant les renseignements qui sont traités de façon constante comme étant de nature confidentielle. Cette exemption pourrait couvrir de nombreux renseignements dont disposent les sociétés d'États comme la Société canadienne des postes. Cette dernière n'a jamais été tenue d'assurer l'accès du public à l'information dont elle dispose. Il serait donc très facile pour elle de déclarer que de nombreux renseignements ont été traités de façon constante comme étant de nature confidentielle.
    Laissez-moi illustrer d'un exemple les renseignements essentiels que la Société canadienne des postes traite comme étant de nature confidentielle. La Société effectue actuellement un examen de son réseau national. Or, la toute première étape de cet examen a consisté à annoncer la fermeture d'un établissement de traitement du courrier à Québec. La Société canadienne des postes a également fermé environ 50 bureaux de poste ruraux depuis 2001, en dépit d'un moratoire sur la fermeture de bureaux de poste en milieu rural et dans les petites villes. La Société canadienne des postes est une société publique, et la population a le droit de savoir ce qu'elle prépare, en particulier lorsque des questions fondamentales comme l'intégrité du réseau postal public sont en cause. Malheureusement elle a refusé jusqu'à maintenant de divulguer son plan d'ensemble pour le réseau.
    Si elle inclut les renseignements qui sont traités de façon constante comme étant de nature confidentielle, il nous sera difficile d'obtenir ce type de renseignements, même si la Société canadienne des postes est assujettie à la Loi sur l'accès à l'information.
    Nous souhaitons également exprimer nos préoccupations à propos des exceptions touchant les nouvelles exemptions. Nous ne comprenons pas pourquoi nous avons besoin d'une exemption pour une partie d'un document qui porte sur l'administration générale, ou d'une exemption spéciale pour une partie d'un document qui porte sur une activité de la Société canadienne des postes entièrement financée sur des crédits votés par le Parlement. On dirait que tout, sauf des parties de ces deux types de documents... et vous savez, franchement, ils sont affichés sur le site Web de la Société canadienne des postes, et les renseignements se rapportant aux activités entièrement financées par le gouvernement se limitent aux envois postaux du gouvernement et aux publications à l'intention des aveugles. Pour nous, cela veut dire que tout serait considéré comme des renseignements traités de façon constante comme étant de nature confidentielle.
    Nous souhaitons que le comité modifie le projet de loi C-2 pour qu'il y soit énoncé clairement que la Société canadienne des postes doit fournir tous les renseignements, sauf ceux qui font l'objet d'exemptions très précises.
    J'aimerais indiquer que chaque fois que nous demandons que la Société canadienne des postes soit assujettie aux règles d'accès à l'information, nous avons toujours prévu une exemption pour les renseignements commerciaux. Bien que nous reconnaissions que la transparence doit être améliorée à la Société canadienne des postes, nous croyons aussi qu'il faut protéger les services postaux publics de demandes illégitimes des concurrents, par exemple en ce qui concerne l'intention de la Société canadienne des postes de faire concurrence aux services de messagerie. Ces entreprises veulent acquérir une plus large part du marché de Poste Canada, sans assumer les obligations de cette dernière en matière de service universel.
    Le syndicat recommande donc une formulation, qui se trouve dans l'exposé écrit que nous avons distribué, qui clarifie le fait que le responsable de la Société canadienne des postes doit fournir tous les renseignements, sauf les secrets industriels ou des renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques. Nous suggérons également que les termes « secrets industriels, renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques » soient définis de la façon la moins restrictive possible et que ces renseignements soient assujettis à un examen indépendant de la part du commissaire à l'information.
    Nous avons d'autres préoccupations, tout particulièrement ce qui touche à l'impartition de l'approvisionnement, et nous espérons avoir la possibilité d'en parler au cours de la période de questions. Merci beaucoup.

  (1005)  

    Je vous remercie, madame Bourque.
    Mme Crawley puis M. Sanger, très brièvement.
    Au nom du Syndicat canadien de la fonction publique, je voudrais remercier le comité de cette occasion qui nous est donnée de vous faire part de nos points de vue et de vous recommander des amendements au projet de loi C-2, Loi fédérale sur l'imputabilité.

[Français]

    Le SCFP est le plus grand syndicat au Canada. Il compte plus de 540 000 membres, dont la plupart des travailleurs et des travailleuses des secteurs municipaux, de la santé, de l'éducation et des services sociaux du pays. Notre objectif est de maintenir et de renforcer le secteur public, non seulement pour le bénéfice de nos membres, mais aussi pour fortifier nos communautés. Notre intérêt aujourd'hui est d'assurer que le projet de loi C-2 améliorera dans les faits l'imputabilité au gouvernement, en particulier dans le cadre des contrats liés à l'achat de biens et services et avec des sociétés privées en général.

[Traduction]

    S'agissant de la sous-traitance et des partenariats public-privé ou en P3, l'imputabilité revêt une importance capitale.
    Le scandale des commandites est un exemple parmi d'autres qui illustre cela. En effet, on n'a qu'à penser au scandale de 160 millions de dollars qui a éclaboussé le ministère de la Défense nationale, à celui de la voie rapide reliant l'Aéroport de Richmond et Vancouver, également connu sous le nom de Canada Line, ou encore à celui du pont de la Confédération de Île-du-Prince-Édouard. Autant d'exemples qui baignent dans la controverse.
    La privatisation des routes, des hôpitaux, des écoles et des prisons au Royaume-Uni s'est traduite par une mauvaise gestion des deniers publics et une perte de contrôle public.
    Les changements proposés dans le projet de loi C-2 visent à scruter à la loupe le secteur public, ce qui est souhaitable, dans bien des cas, mais dispensent le secteur privé et l'utilisation des deniers publics de cet examen.

[Français]

    Je vais donner la parole à mon collègue, qui vous expliquera nos amendements et nos préoccupations particulières.

[Traduction]

    À notre avis, l'un des éléments clefs de la Loi fédérale sur l'imputabilité devrait être d'accroître la transparence et la divulgation de l'information sur les contrats du gouvernement avec des tiers. C'est exactement ce genre de lacune qui a donné lieu au scandale des commandites: un parti politique a détourné des fonds publics, canalisés dans des contrats privés, souvent avec des mandataires du gouvernement, à des fins partisanes. Les comptes publics, les budgets, les prévisions budgétaires, les rapports ministériels et le vérificateur général, de même que les propositions faites dans la Loi fédérale sur l'imputabilité, fournissent une comptabilité et des détails importants sur la façon dont les fonds sont dépensés au sein du gouvernement. Les citoyens méritent aussi de savoir comment les compagnies privées dépensent leurs fonds.
    Au lieu de proposer des améliorations à l'imputabilité en renforçant considérablement la transparence, la Loi fédérale sur l'imputabilité a adopté une approche du genre « papa a raison », en accroissant les pouvoirs des organismes de surveillance et leur nombre. Or, ces propositions n'empêcheraient pas nécessairement les abus et les scandales, notamment en ce qui a trait aux marchés publics conclus avec des sociétés privées.
    La Loi fédérale sur l'imputabilité proposée contient des échappatoires majeures qui permettent d'exclure les contrats liés aux biens et services de la portée des examens du vérificateur général, d'interdire aux citoyens, individuellement, de déposer des plaintes auprès du vérificateurs de l'approvisionnement proposé, de ne pas enchâsser dans la loi la pratique actuelle de divulgation proactive et de ne pas tenir compte des recommandations du commissaire à l'information sur la divulgation de détails concernant des contrats avec des tiers, ni même des principes établis par les tribunaux concernant ces renseignements.
    Nous avons préparé et distribué quatre ensembles de changements. Ceux-ci sont simples et très directs, mais ils contribueront considérablement à accroître l'imputabilité en ce qui a trait aux dépenses publiques. Ce ne sont certainement pas les seuls changements à apporter. En effet, nous appuyons les propositions faites par le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes. Par ailleurs, vous avez entendu nombre d'autres propositions.
    Je pourrai entrer dans les détails plus tard, si vous le souhaitez. Je vous ai distribué ces changements.

  (1010)  

    Merci.
    Monsieur Lévesque ou monsieur Patry, soyez très bref s'il vous plaît.

[Français]

    D'abord, je voudrais vous remercier de nous permettre de vous présenter nos mémoires sur le projet de loi C-2. La CSN représente 300 000 travailleuses et travailleurs dans tous les secteurs d'activité. Bien que largement concentrée au Québec, la CSN est également présente ailleurs au Canada, notamment dans les secteurs des télécommunications, du transport routier ainsi que chez les agentes et agents correctionnels des pénitenciers fédéraux.
    Nous louons l'initiative du gouvernement actuel de présenter un projet de loi et un Plan d'action pour l'imputabilité fédérale. Globalement, nous sommes d'accord sur les grandes lignes de ce projet de loi. Toutefois, nous considérons que c'est volumineux, complexe, et nous voulons nous assurer qu'il y ait une véritable consultation et une étude rigoureuse, car son adoption ne doit pas se faire dans la précipitation.
    Compte tenu du peu de temps qui nous a été alloué et de la complexité du dossier, nous allons, dans notre présentation, nous concentrer sur quelques questions.
    D'abord, en ce qui concerne le financement des partis politiques, on se réjouit que le gouvernement ait inclus dans son Plan d'action pour l'imputabilité fédérale des mesures qui s'inspirent du modèle québécois, depuis les années 1970, sur le financement des partis politiques, ce qui contribue effectivement à améliorer le processus démocratique lors d'élections.
    L'interdiction des dons corporatifs contribuera à démocratiser davantage le financement des partis politiques, alors que les dispositions qui concernent l'interdiction de verser des dons secrets aux candidats politiques contribuera aussi à assainir les pratiques électorales.
    En ce qui concerne la transparence de la budgétisation, on est aussi d'accord sur l'approche proposée. On l'a d'ailleurs nous-mêmes recommandée lors de consultations prébudgétaires. Toutefois, on se questionne sur le moyen utilisé. On se demande s'il ne serait pas préférable de créer un groupe de travail indépendant plutôt que d'avoir un directeur parlementaire du budget. On se pose aussi des questions sur son pouvoir en matière d'accès à l'information. Pourquoi ce poste relève-t-il de la Bibliothèque du Parlement plutôt que d'être rattaché au Comité permanent des finances, par exemple? On se questionne aussi sur les ressources additionnelles qui seront dévolues au directeur parlementaire du budget.
    En ce qui concerne la protection offerte aux divulgateurs, on se réjouit du fait qu'une protection soit accordée aux employés qui voudront dénoncer un certain nombre de situations répréhensibles. Par contre, on s'oppose au 1 000 $ offert à titre de récompense aux personnes qui se prévaudrait des dispositions de la nouvelle loi. On craint que cela entraîne une culture de la délation. On est d'accord pour assurer une protection aux individus, mais on ne croit pas qu'il faille instaurer une culture de la délation en offrant un montant d'argent à cet égard.
    En ce qui a trait à la Loi sur l'accès à l'information, nous ne sommes pas d'accord pour en repousser à nouveau la réforme. D'ailleurs, il y avait eu unanimité à cet égard au sein du Comité permanent de l'accès à l'information en novembre dernier, si je ne fais pas erreur. Nous croyons donc que le gouvernement devrait aller de l'avant le plus rapidement possible sur cette question.
    Nous tenons à souligner que nous sommes d'accord sur l'ajout de sociétés d'État qui seront couvertes par la Loi sur l'accès à l'information. Par contre, les nouvelles exceptions nous inquiètent, sauf l'exclusion particulière qui touche la Société Radio-Canada et qui concerne le travail journalistique. Cela nous semble pleinement justifié pour assurer la protection des sources.
    En terminant, je mentionnerai deux volets. D'abord, en ce qui concerne les pouvoirs de la vérificatrice générale, on se réjouit de ce qui se trouve à l'intérieur du projet de loi.
    En ce a trait au commissaire à l'éthique, notre principal questionnement vient du fait que les citoyennes et les citoyens ne pourront pas s'adresser directement à lui, mais devront passer par un député. On aurait préféré que les citoyennes et les citoyens puissent également porter plainte auprès du commissaire à l'éthique, lequel jugerait de la validité de ces plaintes.
    Merci.

  (1015)  

[Traduction]

    Vous vous en êtes tous très bien tirés dans les limites de temps imparties. Merci beaucoup.
    Monsieur Owen.
    Merci.
    Peut-être vais-je poser ma première question à Mme Crawley, après quoi je partagerai mon temps de parole avec mes collègues, et ma question concerne l'élargissement des pouvoirs d'examen du vérificateur général en ce qui a trait aux contrats.
    Vous avez évoqué un certain nombre d'exemples de contrats de type P3.  
    Lors de sa comparution devant nous, la vérificatrice générale s'est dite très préoccupée par l'élargissement de son rôle, même dans les limites proposées par le projet de loi...par manque de ressources, mais également en raison de la complexité de son rôle, elle s'est dite favorable à peut-être à un modèle plus simple qui lui permettrait de faire des vérifications ponctuelles ou encore en suivant le cours normal des choses, c'est-à-dire en effectuant des vérifications professionnelles.
    Bien entendu, il y a un aspect où une intervention directe de la vérificatrice générale pourrait s'avérer très utile, au-delà de la simple vérification, et c'est le suivi de l'argent, ou comme on dit l'optimisation des deniers publics. Est-ce que c'est ce à quoi vous pensez en parlant d'élargissement des partenariats privé-public?
    Tout d'abord, je commencerai en vous disant que je pense qu'il se peut que nous n'appuyions pas l'élargissement du rôle de la vérificatrice générale aux organismes qui bénéficient de petites sommes au titre du financement fédéral, et je crois que c'est le principal changement auquel vous faites allusion.
    Je ne suis pas étonnée d'entendre qu'elle a émis des réserves à ce sujet, c'est-à-dire en ce qui a trait à sa charge de travail. Il est peut-être plus important que la vérificatrice générale ait accès aux états financiers et aux documents, ainsi qu'aux contrats, une fois ceux-ci signés, conclus entre l'État fédéral et des sociétés privées — plutôt que les ONG et les organismes sans but lucratif qui reçoivent un million de dollars sur cinq ans ou des sommes de ce genre.
    Mais vous parlez de projets publics d'envergure...
    Monsieur Patry, avez-vous une observation à faire?
    Je veux donner à tout le monde une chance égale de participer. Madame Bourque, avez-vous des observations à faire?
    Mme Deborah Bourque: Non.
    Le président: Merci.
    Monsieur Owen, allez-y.
    Est-ce qu'il me reste encore du temps?
    Oui, allez-y.
    Madame Jennings.

[Français]

    Merci. Je dispose de combien de temps, monsieur le président?

[Traduction]

    Vous avez environ sept minutes. Non, sept minutes, ce n'est pas juste. Je vous accorderai le temps approprié.

[Français]

    Il existe peut-être un conflit d'intérêts entre le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes et moi-même, puisque j'ai déjà été membre de ce syndicat et que j'ai agi comme déléguée syndicale. J'ai donc un penchant très favorable pour le syndicat.
    Malheureusement, je n'ai reçu votre mémoire qu'en anglais et j'aimerais en citer des passages. Pouvez-vous m'expliquer davantage la raison pour laquelle vous voulez que le paragraphe 18.1(2) proposé soit éliminé complètement?

[Traduction]

    Je pense le comprendre, mais je veux simplement m'en assurer. Vous demandez que ce soit complètement éliminé et que le paragraphe 18.1(1) soit modifiée pour qu'on élimine la partie où il est dit les renseignements « qui sont traités par elle de façon constante comme étant de nature confidentielle ».
    Si j'ai bien compris, cela s'appliquerait à Postes Canada qui offre certains de ces services ordinaires en sous-traitance, et vous craignez que Postes Canada soit ainsi traité différemment de ses concurrents du secteur de la livraison des colis, etc.
    Je m'explique. Tout d'abord, nous n'avons jamais dit que Postes Canada devrait être obligée de divulguer des renseignements qui saperaient notre service postal public. Comme chacun le sait, certains concurrents multinationaux du secteur de la livraison de courrier s'adonnent à des pratiques extrêmement agressives et prédatrices. Nous pensons que Postes Canada devrait être protégée contre la divulgation de renseignements commerciaux de nature délicate.
    Dans nos commentaires au sujet du paragraphe 18.1(2), nous disons simplement que les renseignements se rapportant à « l'administration » sont généralement déjà accessibles, puisqu'on peut les trouver dans les rapports annuels.
    En ce qui concerne l'alinéa 18.1(2)b), lequel porte sur les activités qui sont entièrement financées sur des crédits votés par le Parlement, il ne s'agit en fait que de deux choses: les envois du gouvernement qui sont gratuits et la documentation pour les aveugles.
    Nous pensons qu'une meilleure façon d'aborder les points soulevés dans le paragraphe 18.1 c'est de rédiger de nouveau le paragraphe 18.1(1) afin de dire tout simplement que tous les renseignements exigés en vertu de la loi doivent être divulgués. Nous avons éliminé la mention des renseignements « qui sont traités par elle de façon constante comme étant de nature confidentielle », car Postes Canada n'a jusqu'ici pas été obligée de divulguer des renseignements, et pourrait donc prétendre que tous les renseignements la concernant tombent sous le coup de cette exemption.

  (1020)  

    Merci.
    Madame Lavallée.

[Français]

    Bonjour. Merci d'être parmi nous. Il me fait particulièrement plaisir de vous recevoir à titre de porte-parole du Bloc québécois en matière de travail.
    J'ai d'ailleurs rencontré Mme Carbonneau de la CSN vendredi dernier concernant le projet de loi anti-briseurs de grève. En outre, j'aurai l'occasion de rencontrer prochainement des représentants de l'Alliance de la fonction publique et de la Société des postes à ce sujet.
    Je ne me rappelle pas lequel d'entre vous a exprimé des réticences concernant la vitesse à laquelle travaillait notre comité. Vous souhaitez que nous prenions le temps qu'il faut pour faire un bon travail. Or, nous sommes vraiment bousculés. Je vois que trois représentants syndicaux importants sont ici et que seules quelques minutes séparent leurs présentations respectives. Les gens viennent ici et s'excusent du fait qu'ils n'ont pas eu le temps de se préparer adéquatement. Je ne crois pas que ce soit possible. Nous siégerons sans doute pendant 45 heures au cours des 2 prochaines semaines. Je ne suis pas sûre que la qualité du travail sera au rendez-vous.
    Cela étant dit, j'ai l'impression — et je ne sais pas si c'est votre cas également — que l'actuel gouvernement conservateur tente de nous faire adopter le projet de loi C-2 davantage pour des raisons de perception. Dans son communiqué de presse, il parle d'ailleurs de  restaurer la confiance des Canadiens envers le gouvernement. On n'a pas le temps de faire une analyse vraiment adéquate. Il faut non seulement se pencher sur la perception et la confiance des Canadiens, mais aussi établir un système qui fasse en sorte d'éviter un autre scandale des commandites.
    M. Sanger nous a dit que selon lui, le projet de loi C-2 n'éviterait pas d'autres scandales et abus de pouvoir. Il nous a fait part de son opinion, mais il voudra peut-être la commenter davantage. Je voudrais demander à chacun d'entre vous, considérant ce que vous avez analysé et lu sur le projet de loi, si nous retrouverons à votre avis dans le projet de loi C-2 des éléments nous permettant d'éviter un nouveau scandale des commandites. Il faut se rappeler que ce scandale a été l'élément déclencheur du projet de loi.
    C'est nous qui avons exprimé des réserves concernant la rapidité avec laquelle le projet de loi était étudié. Nous craignions que le projet de loi ne soit adopté de façon précipitée. Nous déplorons d'autant plus cette situation que dans l'ensemble, le fait de se doter d'une loi sur l'imputabilité au niveau fédéral pourrait en effet éviter que d'autres scandales des commandites ne se produisent. Ça ne les empêcherait pas tous, mais on pourrait ainsi en réduire la probabilité, ce qui serait sans contredit judicieux.
    Par ailleurs, on aborde dans ce projet de loi des questions éminemment complexes. On parle de financement des partis politiques; on revoit le rôle du commissaire à l'éthique et on traite de l'accès à l'information, de la passation des marchés, dont je n'ai pas parlé plus tôt, ainsi que de la protection des divulgateurs. Bref, il s'agit de sujets qui en soi méritent tous une analyse assez exhaustive. Il faut être certain d'adopter les bonnes dispositions, de façon à éviter de nouveaux scandales des commandites. Cependant, le but premier est d'améliorer le régime démocratique dans lequel nous vivons. C'est là une préoccupation importante de la CSN.
    Pour ces motifs, nous déplorons que les choses se fassent dans la précipitation. Nous considérons important qu'un tel projet de loi soit adopté, mais nous croyons que ce dernier mérite une étude beaucoup plus approfondie. Nous souscrivons au projet de loi dans ses grandes lignes, même si nous avons exprimé certaines réticences ou posé certaines questions, notamment au sujet de la transparence du processus de budgétisation.
    Nous aurions souhaité pouvoir débattre de chacune de ces questions et effectuer nos propres études, de façon à donner aujourd'hui à ce comité un meilleur aperçu de notre position. Nous avons reçu l'invitation mardi dernier. En une semaine, nous avons fait les analyses que nous étions en mesure de faire, mais il reste que chacun de ces sujets mérite une étude beaucoup plus approfondie. On parle ici de donner à notre société de bons outils lui permettant d'accéder à plus de transparente et de démocratie.

  (1025)  

[Traduction]

    Avez-vous quelque chose à dire, monsieur Sanger?
    C'est vrai que le projet de loi comporte de nombreux éléments positifs. Il est clair qu'en l'espace de trois minutes, nous n'avons pas le temps d'en discuter. Ce que nous voulions faire ressortir, c'est que vous pourrez colmater des brèches majeures simplement en apportant quelques amendements.
    Je pense que bien d'autres gens ont des amendements à proposer. Peut-être ne pourrez-vous pas tout résoudre avec un seul projet de loi, mais je pense néanmoins que vous pouvez colmater de nombreuses brèches majeures.
    Madame Lavallée, vous avez deux minutes.

[Français]

    Madame Bourque, voulez-vous vous prononcer à ce sujet? Est-ce que cela réglera le problème du scandale des commandites? Est-ce que cela évitera qu'un tel scandale se reproduise?

[Traduction]

    Je ne suis pas certaine que cette loi aurait pu empêcher le scandale des commandites.
    Le problème tient au fait que, l'un après l'autre, les gouvernements fédéraux ont intégré au secteur public des valeurs appartenant au secteur privé, des choses comme les commandites d'entreprises, les comptes de dépenses fastueux et autres émoluments exorbitants pour les PDG. À notre avis, c'est là essentiellement l'un des problèmes associés à ce qui tourne autour du scandale des commandites, à tout le moins en ce qui concerne Postes Canada.
    Mais je fais assurément écho à ce que disait mon confrère du fait qu'il fallait consacrer plus temps et d'attention à cette loi assurément fort copieuse. Il faut absolument et impérativement, pour assurer la bonne démocratisation de nos institutions publiques, que les lois de ce genre soient conformes aux besoins du citoyen.
    Monsieur Martin.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie tout d'abord les témoins d'être venus et de nous avoir fourni toutes ces recommandations précieuses.
    Il y a, nous pouvons vous le garantir, des choses très précises qu'à mon avis nous allons faire et tenter de concrétiser en apportant des amendements au projet de loi.
     Comme le temps presse, je voudrais aborder une chose en particulier auprès de Mme Bourque en sa qualité de représentante du STTP.
    Lorsque Mme Moya Greene a comparu devant nous, elle a défendu avec véhémence l'exclusion que prévoit le projet de loi C-2. Alors que même le projet C-2 envisage de subordonner Postes Canada à la Loi sur l'accès à l'information en ajoutant cette société à l'annexe 2, ce même projet de loi, dès maintenant, fait volte face en prévoyant toute une série d'exclusions automatiques et permanentes dans le cas de tout ce qui risque d'avoir une durée de vie critique. Au moment de sa comparution, je lui ai fait valoir que ce qu'elle voudrait, c'est un secret encore plus rigoureux que celui qui a cours au ministère des Finances, une institution dont les rouages internes peuvent exercer une influence considérable sur toute l'économie nationale.
    D'où vient ce raisonnement, qu'est-ce qui fait que Postes Canada tient tellement à ce droit au secret hors du commun?
    Je n'ai pas la prétention de lire dans les pensées des cadres de Postes Canada, mais à mon avis, le problème tient au fait que ces mêmes cadres estiment que la mission commerciale de Postes Canada est beaucoup plus importante que la politique publique que cette société est chargée d'exécuter. Si la haute direction de Postes Canada comprenait qu'effectivement, il s'agit d'une société d'État à vocation commerciale, mais que cette société est également au service du bien public et qu'elle doit souvent agir dans l'intérêt public plutôt que chercher à maximiser ses bénéfices...
    Je pense que c'est là une partie du problème. Postes Canada se considère comme une entreprise commerciale plus que comme une institution d'intérêt public.
    C'est on ne peut plus clair.
    Ma deuxième question s'adressera par contre à tous les témoins.
    Dans la première partie de votre mémoire, que vous n'avez pas eu la possibilité d'aborder, vous parlez de sous-traitance, etc. Une étude réalisée en 2003 vous a révélé que, sur un total de 599 dossiers d'acquisition et de sous-traitance, 355 étaient contraires à la politique interne, et vous nous dites aussi qu'il vous est impossible, tout comme à la population d'ailleurs, de savoir si les choses ont changé. Cela donne un peu l'impression que si, idéologiquement parlant, la tendance était à la sous-traitance à tout prix, le vieil adage néo-conservateur qui veut que tout ce qui est public soit mauvais et que tout ce qui est privé soit bon, est la seule justification.
    Je voudrais donc demander à tous les représentants du secteur public qui sont ici de me dire ce qu'ils en pensent. Comment pourrions-nous resserrer le projet de loi C-2 afin d'obliger au minimum les dirigeants de présenter, lorsqu'ils songent à recourir à la sous-traitance, une quelconque analyse des coûts et des avantages qui pourrait être rendue publique si l'intention est effectivement de recourir à la sous-traitance ou à un quelconque partenariat public-privé.

  (1030)  

    Je ne veux pas mobiliser tout votre temps parce que je pourrais m'étendre davantage sur la question, mais je me contenterais simplement de vous dire en deux mots qu'à notre avis, rien n'a été fait depuis les recommandations de l'audit effectué par Deloitte.
    J'ai écrit à Gordon Feeney, le président du conseil d'administration de Postes Canada, pour lui demander ce qui avait été fait afin de faire en sorte que les règles soient bien respectées. Il m'a répondu que ce qui avait été fait dans ce sens le satisfaisait pleinement, ce qui ne me réconforte guère parce que j'ignore ce qui a été fait.
    Nous pensons donc que c'est là un problème sérieux. L'idéologie n'a pas changé depuis. Nous constatons qu'on met encore et toujours beaucoup l'accent sur la sous-traitance. À notre avis, les évaluations dont nous vous avons parlé dans notre exposé pourraient faire beaucoup pour nous donner la garantie que les problèmes ainsi relevés n'existent plus.
    Je vous remercie.
    Le SCFP parle également de cela dans son mémoire. Pourriez-vous, madame, nous en dire un peu plus long sur les mesures qu'on pourrait envisager pour que la société ait au moins l'obligation de procéder à une analyse coûts-avantages avant de faire ce genre de chose? Vous avez dit une chose, et vous pourriez peut-être commencer par là, et c'est qu'en réalité, la responsabilisation et la transparence souffrent lorsque les deniers publics sont dépensés par des intérêts privés, et que nous n'avons pas vraiment le moyen de contrôler comment ces deniers publics sont utilisés, n'est-ce pas?
    Dans l'ensemble, oui, je suis d'accord. Je pense que nos recommandations représentent une façon très simple d'intégrer les contrats avec des firmes privées aux attributions du vérificateur général. Cela, c'est une chose. Je dirais simplement que, j'en conviens, il y a vraiment une tendance — qui ne se limite pas à Postes Canada, loin de là, puisqu'elle touche les institutions du secteur public, les sociétés d'État, etc. — dans le sens de la privatisation. Ce texte de loi en est une manifestation, avec les nouveaux pouvoirs du vérificateur général, les changements à la loi en matière de divulgation publique, et le vérificateur de l'approvisionnement qui sont tous opposés à la voie du secteur public parce que cela alourdit la bureaucratie et rend plus onéreux l'examen des institutions du secteur public et des organismes sans but lucratif, alors que d'un autre côté, il y a cette absence très claire de quelque disposition que ce soit concernant les contrats passés avec le secteur privé, des contrats que le gouvernement privilégie de plus en plus pour l'acquisition de services mais également de bâtiments.
    Puis-je faire un commentaire à ce sujet?
    À mon avis, la première chose à faire consisterait à améliorer la transparence et la divulgation. Ce serait pour moi une excellente idée d'imposer une sorte de processus d'évaluation qui permettrait de déterminer si les propositions de contrat avec le secteur privé n'auraient pas plutôt intérêt, par souci d'efficacité, à rester à l'interne, parce que manifestement ce serait meilleur. Mais à mon avis, la première chose à faire est de travailler la transparence et la divulgation.
    Ce qui m'inquiète avec ce projet de loi, c'est qu'il est beaucoup trop axé sur les dépenses publiques et pas beaucoup sur les contrats avec le secteur privé et l'acquisition de biens et de services auprès du secteur privé, ce qui va placer littéralement sous le microscope toutes les ONG et d'ailleurs aussi tous les autres organismes publics, avec pour résultat un préjugé défavorable pervers à l'endroit de toute dépense publique dans ce domaine étant donné que nous n'aurons aucun moyen de passer à la loupe les dépenses effectuées dans le secteur privé.
    Monsieur Patry, très rapidement s'il vous plaît.

[Français]

    Nous avons aussi un parti pris pour le secteur public lorsqu'il s'agit de l'intérêt commun. C'est pour cela que nous nous sommes réjouis du fait que, du point de vue de ce qui est prévu dans les modifications de la Loi sur l'accès à l'information, cela couvre des sociétés d'État qui n'étaient pas couvertes antérieurement, puisqu'il s'agit de sociétés qui dépensent des deniers publics. Il ne s'agit pas tant de mesurer la rentabilité de ces organisations, mais puisqu'il est question de deniers publics, il y a une obligation de rendre des comptes.
    Par ailleurs, des cas d'exception ont été prévus, et cela restreint la Loi sur l'accès à l'information.
    Pour nous, il est clair qu'il doit y avoir la plus grande transparence possible, de façon à ce que la population sache ce qu'il advient des impôts et des taxes qu'elle paie au gouvernement fédéral.

  (1035)  

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Poilievre.
    Oui, je suis d'accord avec vous, ce genre de loi nécessite un examen attentif et une étude approfondie, et c'est la raison pour laquelle cela fait deux ans que le scandale des commandites a été mis au grand jour et a plongé notre pays dans de grands débats destinés à découvrir comment rétablir la responsabilisation. Pendant ces deux années, une commission publique a étudié le dossier, elle a déposé un rapport, puis nous avons présenté ce projet de loi. D'ici la fin de la semaine, vous serez heureux de l'apprendre, nous aurons entendu, pendant 45 heures, plus de 70 témoins, et cela seulement jusqu'à la fin de cette semaine-ci. Je suis donc persuadé que vous vous féliciterez comme moi de cette étude minutieuse dont ce projet de loi a déjà fait l'objet.
    Nous avons consacré tellement de temps à ce projet de loi que d'ailleurs, à chaque fois qu'ils avaient l'occasion de prendre la parole à ce sujet, il y a des députés de l'opposition qui ont utilisé la moitié de leur temps de parole — ils ont tellement de temps qu'ils peuvent se le permettre — à se plaindre du fait qu'ils n'ont pas suffisamment de temps pour en parler. Je trouve donc étrangement contradictoire que d'une part ils ont tant de temps...
    Monsieur Poilievre...
    ... ils passent tout leur temps à parler du fait qu'ils n'ont pas le temps.
    Monsieur Poilievre, chacun cherche à provoquer l'autre, et je ne veux plus de cela... c'est assez.
    Voici la question qui m'intéresse. Vous parlez beaucoup des entrepreneurs privés. Aux États-Unis, la question des entrepreneurs privés inquiétait beaucoup de monde, et certains faisaient valoir que les entrepreneurs privés volaient le contribuable américain. Donc la gauche progressiste de ce pays, menée par un tas de syndicats et de militants, s'est unie et a obtenu que l'on rétablisse la loi sur les informateurs, qui permettait aux particuliers d'intenter des poursuites contre les entrepreneurs privés qui fraudaient le gouvernement. Dans de nombreux cas, le gouvernement n'avait pas la volonté politique voulue pour les poursuivre lui-même. Si le juge estimait qu'il y avait eu fraude, le juge pouvait autoriser des remboursements équivalents à trois fois ce que l'entrepreneur était censé avoir volé, ou avait vraiment volé, et le citoyen qui avait invoqué la loi avait droit à une commission de 30 p. 100 de ce qui avait été volé. Depuis lors, le Trésor américain a récupéré 10 milliards grâce aux poursuites de ces particuliers, et 80 p. 100 de cet argent provenait des entrepreneurs de la défense et des entreprises de services médicaux.
    Je me demande ce que vous pensez de l'idée d'importer ce principe au Canada, et nous aurions ainsi une loi sur les informateurs qui permettrait à des organisations comme la vôtre d'intenter des poursuites contre les entrepreneurs qui fraudent le gouvernement du Canada, ou la Société canadienne des postes, par exemple, pour s'assurer que l'argent soit récupéré, et ainsi votre organisation rentrerait dans ses frais, et peut-être davantage, grâce à un système de récompense. Cette idée présente-t-elle un intérêt pour vous?
    Je ne connais pas cette loi, je ne peux donc pas vraiment me prononcer là-dessus, mais je pense que les gens ne sont pas nécessairement motivés par l'appât d'une récompense financière mais plutôt par l'idée qu'ils sont au service du public, c'est ce qui doit motiver les gens en effet. La première chose à faire, c'est d'accroître la transparence et la divulgation dans l'appareil gouvernemental et ne pas s'en remettre nécessairement aux tribunaux pour faire cela.

[Français]

    Je l'ai dit au cours de ma présentation. Je ne connais pas non plus la loi à laquelle vous faites référence et qui est en vigueur aux États-Unis, qui ne sont pas toujours un modèle de développement de société. Ce n'est pas ce que nous voulons importer au Canada, surtout pas au Québec.
    Toutefois, je tiens à mentionner que nous voulons effectivement protéger les fonctionnaires qui seraient témoins d'actes répréhensibles, afin qu'ils puissent s'adresser à en endroit approprié. Cependant, nous ne voulons pas d'un système de récompense. C'est vrai pour nous, pour les fonctionnaires, peu importe. Nous ne voulons pas instaurer un système de délation et de judiciarisation à outrance ni des processus qui sont éminemment politiques. Je pense que ce qui existe à l'égard de la protection du divulgateur est bien. Cependant, nous ne sommes pas d'accord pour qu'il y ait un versement de 1 000 $. Cela risque d'instaurer une culture de la paranoïa à l'intérieur de nos organisation, et je crois que ce n'est pas un modèle que nous voulons importer au Canada.

  (1040)  

[Traduction]

    Pour ma part, je ne suis pas du genre à rejeter une idée à cause de sa provenance. Je juge chaque idée selon ses mérites. Peu importe la provenance de cette idée, si un gouvernement peut récupérer 10 milliards d'argent volé, je crois que c'est 10 milliards que l'on peut réinvestir dans des programmes auxquels votre syndicat est censé être attaché. Je crois donc que tout moyen qui permettrait de retrouver cet argent serait un bon moyen. Mais, au bout du compte, ce n'est qu'en s'adressant aux tribunaux qu'on peut récupérer de l'argent qui a été volé par suite d'une fraude. Il n'y a pas d'autre moyen. Il n'existe pas d'autre moyen légal pour ce faire.
    Vous pouvez donc parler de cet idéal que vous avez d'éviter à tout prix le système judiciaire, mais au bout du compte, vous ne pourrez rien faire si les entreprises comme les entreprises publicitaires libérales que nous poursuivons maintenant pour l'argent qu'elles ont volé... Elles ont été traduites devant les tribunaux, et vous devez...
    Monsieur Poilievre, s'il vous plaît.
    Je crains vivement, et ce que je dis s'applique à tout le monde, qu'on commence à se provoquer, et je ne veux pas de ça.
    Vous pouvez donc continuer. Une partie de votre temps est écoulée, il vous en reste encore un peu.
    Très bien. J'espère pouvoir finir une phrase, monsieur le président.
    Ma prochaine question est celle-ci, que pensez-vous des dispositions relatives à la protection des dénonciateurs qu'on retrouve dans le projet de loi?
    Je suis d'accord avec ce qu'ont dit mes collègues au sujet des limites de la Loi sur les dénonciateurs. Mon syndicat estime qu'il est important que les personnes qui révèlent des malversations ou dénoncent certaines choses ne fassent pas l'objet de représailles. Je pense que c'est un principe fondamental et nous l'appuyons.
    Nous avons aussi des inquiétudes concernant l'indemnisation financière ou l'incitation financière à dénoncer des collègues de travail ou des employeurs. Postes Canada a mis sur pied sa propre ligne d'appel ou son processus de dénonciation qui nous inquiète sérieusement car nous pensons que cela ouvre la porte à des abus et que ce n'est pas la bonne façon d'agir démocratiquement. Ce qui est important ici, c'est la volonté de transparence et la nécessité de protéger les personnes qui dénoncent des actes répréhensibles.
    Merci. Nous terminons cette partie de la réunion.
    Mesdames et messieurs, merci d'être venus nous rencontrer.
    Nous faisons une courte pause.

  (1042)  


  (1048)  

    Nous reprenons, mesdames et messieurs. Nous accueillons maintenant l'Association canadienne des agents financiers.
    Bonjour, messieurs.
    M. Milt Isaacs est le président et il est accompagné de Jonathan Hood, vice-président, ainsi que de Serge Buy, et quelqu'un va certainement me dire de qui il s'agit.
    Vous allez pouvoir le présenter.
    Monsieur Isaacs, vous-même ou un de vos collègues allez pouvoir faire quelques remarques initiales, après quoi les membres du comité vous poseront des questions.
    Merci encore une fois d'être venus.
    L'Association canadienne des agents financiers représente environ 3 000 agents financiers de la fonction publique, il s'agit du groupe FI. En tant que président de l'Association, je voudrais tout d'abord vous remercier de nous avoir invités aujourd'hui et saluer le travail que vous accomplissez.
    Nous assistons à une occasion historique pour le Canada. La Loi fédérale sur l'imputabilité pourra non seulement accroître la reddition de comptes au gouvernement fédéral mais aussi renforcer la confiance des Canadiens dans leur gouvernement et rendre leur fierté aux fonctionnaires.
    Nous allons concentrer nos remarques sur trois points principaux: l'importance de la consultation, les questions à long terme et les mesures de prévention par opposition aux mesures de réaction.
    Tout d'abord, je voudrais exprimer nos inquiétudes concernant le manque de consultations au niveau de la rédaction de ce projet de loi. Quand le comité des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires a examiné le projet de loi C-11, des représentants de tous les partis politiques ont dénoncé le manque de consultations auprès de la fonction publique. Cette lacune a été considérée comme l'une des principales faiblesses du projet de loi.
    Nous pensons qu'on aurait pu éviter une partie des débats de votre comité en consultant mieux les principaux intervenants tels que notre association. Nous savons bien qu'on a discuté au niveau politique de cette Loi fédérale sur l'imputabilité depuis le lancement des dernières élections. Toutefois, à l'époque, ce n'était pas une politique gouvernementale et le débat a donc été assez restreint; par conséquent, nous n'avons pas eu beaucoup d'occasions de faire connaître notre point de vue.
    Quand on parle d'imputabilité financière, je ne peux pas imaginer un groupe qui s'intéresse plus à cette question et s'en préoccupe plus que le groupe des agents financiers. Ce sont eux qui sont en première ligne dans le combat pour la reddition de comptes. Cela a donc été une erreur de ne pas tenir compte d'eux lors de la rédaction du projet de loi C-2. Il faudrait consulter ces agents financiers par le biais de notre association non seulement pour la rédaction du projet de loi mais aussi pour sa mise en application. Grâce à notre expérience et à nos qualifications professionnelles, nous ne pouvons qu'enrichir ce processus.
    Notre première recommandation est d'inclure les syndicats de la fonction publique au sein du comité des sous-ministres qui examinera les politiques actuelles de gestion financière du Conseil du Trésor. Ce comité s'inscrit dans le plan d'action qui accompagne le projet de loi. Les fonctionnaires de première ligne auront certainement une perspective différente de celle de la gestion à proposer — un point de vue objectif, bien informé et formulé par des personnes directement intéressées qui permet d'aborder de manière plus complète la question de la reddition de comptes.
    Il faut bien comprendre que ce projet de loi aura des répercussions à long terme sur la façon de faire au gouvernement fédéral. Le comité dont je viens de parler n'est qu'une des nombreuses initiatives visant à éliminer des règles et des règlements éventuellement paralysants. Nous sommes d'accord avec ces mesures importantes, mais nous pensons qu'il ne suffit pas de se concentrer uniquement sur les règles et règlements passés.
    Notre seconde recommandation, qui figure dans notre dernier rapport intitulé Freins et contrepoids III: À la recherche de l'équilibre, est qu'on impose un test analogue pour toutes les nouvelles règles et tous les nouveaux règlements de gestion financière à l'avenir. Ce test est essentiel pour nous permettre de trouver un équilibre entre imputabilité et efficacité.
    Par ailleurs, nous constatons qu'il est prévu de revoir ce projet de loi tous les cinq ans. Nous nous méfions d'un processus consistant à rectifier les erreurs au bout de cinq ans, en ouvrant la porte à une nouvelle réforme éventuelle de grande envergure. Il vaudrait mieux prendre maintenant tout le temps voulu pour élaborer un produit qui s'inscrira dans la durée.
    Il est important de prévoir une reddition de comptes, non seulement dans le contexte actuel à la suite de certains scandales, mais aussi pour l'avenir, lorsque la reddition de comptes ne fera plus la une des journaux. C'est à ce moment-là qu'il y aura le plus de risques.
    Comme le montrent nos deux premières recommandations, notre association estime qu'on a raté avec le projet de loi C-2 la possibilité d'aborder la question de l'imputabilité de manière proactive. Bien que ce projet de loi prévoie le renforcement du Bureau du vérificateur général, le recrutement d'un plus grand nombre de vérificateurs et d'autres mesures de réaction, nous estimons qu'il n'y a néanmoins pas assez de mesures préventives.

  (1050)  

    Les agents financiers jouent ce rôle préventif. Notre association estime que s'il y avait eu un agent financier au coeur du programme de commandites, ce scandale ne se serait probablement pas produit.
    La loi devrait prévoir le renforcement du rôle proactif des agents financiers au gouvernement du Canada. En vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques, ils ont des responsabilités professionnelles et juridiques. Ils sont aussi liés par un code de déontologie, et beaucoup de nos membres ont en outre des titres professionnels en matière de comptabilité.
    On a dit que si le scandale des commandites s'était produit, ce n'était pas parce qu'on manquait de règles, mais simplement parce qu'elles n'avaient pas été suivies. En fait, la vérificatrice générale a dit à votre propre comité qu'il faudrait peut-être en revenir au principe de la bonne gestion au lieu de créer encore plus de règles. Elle a en outre signalé que l'un des principaux problèmes était le fait qu'on comprenait mal les règles existantes. C'est quelque chose que nous avons aussi signalé nous-mêmes dans des rapports antérieurs. Grâce à leur formation et à leur expérience, les agents financiers peuvent contribuer à faire mieux comprendre les règlements. Par conséquent, notre troisième et dernière recommandation est qu'on veille à s'assurer de la présence d'agents financiers au sein des programmes susceptibles d'entraîner une reddition de comptes sur la gestion des fonds publics.
    Il serait difficile de trouver beaucoup de Canadiens qui s'opposent à la Loi fédérale sur l'imputabilité. C'est un projet de loi extrêmement important, et il est donc impératif de bien faire les choses. Les Canadiens préféreraient qu'on mette un peu plus de temps avant d'adopter ce projet de loi si ce retard signifie qu'on obtiendra ainsi des règles durables. Nous invitons donc les députés de tous les partis à y réfléchir très soigneusement lorsqu'ils prendront leurs décisions au cours des prochaines semaines.
    Les fonctionnaires que nous sommes s'inquiètent du nombre de nouvelles règles et de nouveaux règlements qu'on rédige, qu'on annonce et qu'on met en oeuvre à l'occasion à chaque fois qu'un nouveau scandale fait la une des journaux. N'oublions pas que quand le pendule politique repart dans l'autre sens et que le public s'intéresse à une autre question, ce sont les fonctionnaires qui se retrouvent obligés d'appliquer toutes ces règles et tous ces règlements. Le gouvernement et le Parlement peuvent modifier le système et élaborer un document qui va redéfinir notre gouvernement, assurer une meilleure reddition de comptes tout en faisant en sorte que le gouvernement exécute son programme de manière efficace et efficiente.
    De nombreux programmes sont en concurrence pour l'obtention de fonds, et les Canadiens tiennent à ce que leur argent soit correctement utilisé. En même temps, ils veulent avoir accès à des services gouvernementaux. Quand on met en place une loi axée sur la reddition de comptes, il faut bien s'assurer qu'elle ne risque pas de devenir un obstacle qui dissuade les Canadiens de faire appel aux services du gouvernement. Les agents financiers ont les compétences, l'expérience et les qualifications nécessaires pour apporter un plus à l'élaboration et à la mise en oeuvre de cette loi, et nous souhaitons donc vivement participer à ce processus.
    Merci.

  (1055)  

    Merci, monsieur Isaacs.
    Nous avons des questions à vous poser ainsi qu'à vos collègues.
    Monsieur Murphy.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Isaacs.
    Au risque de vous citer vos propres écrits, j'ai lu avec intérêt une partie de ce document, Freins et contrepoids III: À la recherche de l'équilibre, mais je voudrais revenir un peu en arrière pour vous expliquer les fondements de ma question. Vous dites qu'à l'époque du projet de loi C-11 — et je n'étais pas là, donc je ne le sais pas — votre groupe n'a pas vraiment été consulté. Lors de la Commission Gomery, il y a peut-être eu des consultations, mais quoi qu'il en soit on y trouve des conclusions qui recoupent tout à fait ce que vous écrivez à la page 54 — le renforcement des comités de la Chambre, l'examen permanent de la structure des crédits et une définition claire de la reddition de comptes administrative. C'est ce dernier point qui est essentiel. À la page 55 du volume 1, on dit que les sous-ministres doivent être désignés agents comptables de leur ministère. C'est un peu de cela que nous parlons, de ce basculement culturel que le projet de loi C-11 va provoquer.
    Ma principale question concerne l'échéancier, car je pense que tout le monde est assez d'accord sur les aspects d'ensemble de la question. Par contre, tout le monde n'est manifestement pas d'accord sur l'échéancier. On a dit qu'il fallait y consacrer deux ans de débats, une Commission royale ou une Commission d'enquête, 54 heures ou 35 heures — je ne me souviens pas bien, mais je crois que c'était 54. À la page 11 de 26 de votre document Freins et contrepoids, vous dites que le « débat général » qui vous semble indispensable « non seulement garantirait l'expression de leurs points de vue et préoccupations au sujet du caractère pratique des divers modèles de responsabilité administrative » mais donnerait aussi aux fonctionnaires un « sentiment d'appartenance » à tout modèle qui serait retenu, même malgré la crainte de se trouver désormais eux-mêmes sur la sellette. « Cela garantirait le ralliement sans réserve au nouveau modèle et en faciliterait le lancement et la mise en oeuvre ».
    Nous aimons bien le nouveau modèle. Nous constatons que vous avez le sentiment de ne pas avoir été consultés. Il s'agit ici de trouver des solutions, et je vous pose donc la question: ce « débat général » — pour vous citer — qu'est-ce que cela signifie? De combien de temps auriez-vous besoin pour avoir le sentiment qu'on vous a bien écoutés et que vous avez pu donner votre avis au nouveau sous-ministre sur les responsabilités de la fonction public?
    Nous avons reçu le projet de loi en avril. C'est un gros document. Actuellement, les responsables de l'association l'examinent pour voir quelles sont ses répercussions au quotidien sur nos membres.
    Il est difficile d'entrer dans les détails. En gros, pour notre association et ses membres, il s'agit d'avoir la possibilité de bien digérer ce projet de loi pour pouvoir ensuite présenter nos propres conclusions.

  (1100)  

    Mais pourriez-vous nous dire combien de temps il vous faudrait, ou comment vous voudriez procéder? Il est évident que six minutes lors d'une séance d'un comité du Parlement, c'est probablement un extrême... Est-ce qu'il nous faudrait l'été tout entier? Combien de temps faudrait-il?
    C'est une bonne question.
    Nous aurons cette loi pendant cinq ou dix ans. J'ignore combien de temps il nous faudrait. Disons qu'il nous faut deux mois. J'estime que c'est un investissement; vous investissez votre temps pour vous assurer de bien faire le travail. Il est plus facile de se doter d'un bon cadre dès le départ que de faire vite et de devoir tout détruire et recommencer à zéro. L'esprit du projet de loi, son objet et ses intentions sont bons. Mais il faut que les intervenants puissent apporter leur contribution et il nous faut un certain temps pour bien assimiler le contenu de ce projet de loi et déterminer son incidence sur le milieu de la gestion financière. Mais cela ne nous prendra pas des années.
    Pour résumer, J'ajouterai simplement que l'effet paralysant de ce projet de loi sur les élus et les hauts fonctionnaires d'Ottawa qui dénoncent des actes répréhensibles m'inquiète à titre de nouveau député. Je l'ai déjà souligné et j'en prendrai pour preuve votre déclaration selon laquelle les sous-ministres et hauts fonctionnaires doivent être consultés si on veut qu'ils adhérent à de nouvelles règles.
    Merci de votre témoignage.
    Merci.
    Je cède la parole à M. Tonks.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie M. Isaacs et ses collègues d'être venus.
     J'aimerais aborder le même sujet que mon collègue, M. Murphy, soit le rôle que joue l'agent des finances par l'entremise du sous-ministre. Vous avez dit que l'agent financier devrait être partie intégrante de l'élaboration et de l'évaluation des programmes — si je peux me permettre de paraphraser ainsi ce que vous avez dit. Récemment, on a ainsi commencé à parler de journalistes qui étaient intégrés aux opérations militaires pour bien comprendre ces opérations et présenter de meilleurs reportages. Il s'agit ici un peu de la même chose: l'objectif, c'est de bien comprendre le programme pour mieux l'évaluer.
    Or, je vois mal comment on peut intégrer les agents financiers à un système qui, aux termes de la loi, fait appel aux agents comptables par le biais, j'imagine, de la fonction de vérification interne assumée par un comité de vérification interne. Il me semble que l'agent financier doit faire partie du comité de vérification interne, mais ce comité relève du contrôleur général. L'évaluation, elle, semble prendre une autre orientation et s'inscrire dans le cadre d'une autre fonction.
    Pourriez-vous m'expliquer comment on pourrait mieux profiter des compétences des agents financiers dans l'évaluation des programmes et comment on pourrait mieux les intégrer à la structure de comité et à la structure de surveillance du Parlement?
    Je vous répondrai d'abord en tentant de vous expliquer ce que je veux dire quand je dis que les agents financiers doivent être intégrés au programme; peut-être répondrai-je ainsi à votre question.
    Vous avez fait mention du contrôleur général et de la vérification interne. La vérification interne est plutôt réactive. Elle permet de découvrir certaines choses après le fait. Nous, nous voulons des mesures préventives et cela qu'interviennent les agents financiers si on les met à contribution dès le départ.
    Par le biais de l'accès à l'information — le programme des commandites en est un exemple — on découvre certaines choses et, quand ces choses deviennent publiques, on se demande d'abord et avant tout ce qu'a fait l'agent financier. Dans le programme des commandites, aucun agent financier ne figurait à l'organigramme. Si le programme avait compté des agents financiers, puisqu'il s'agissait de dépenses de fonds publics, il y aurait eu des effets de commerce, des autorisations quelconques permettant ces dépenses. Cela aurait donné lieu à la piste de comptabilité. Je crois savoir qu'en l'absence d'une telle piste, on n'a pu déterminer qui avait autorisé quoi.
    Voilà pourquoi nous estimons que les agents financiers devraient participer à ces programmes afin de prodiguer des conseils et une orientation aux gestionnaires de programme, leur dire: « Voici l'autorisation qui vous a été accordée par le Parlement par le biais des crédits, et voici les règles qui régissent la façon dont cet argent peut être dépensé. Vous êtes autorisés à faire ceci mais non cela, et si vous voulez faire cela, vous devez obtenir l'autorisation du Parlement. »
    Voilà ce que fait un agent financier, et si quelqu'un avait joué ce rôle dans le programme des commandites, nous ne serions probablement pas ici aujourd'hui.

  (1105)  

    Merci, monsieur Isaacs.
    Madame Guay, vous avez la parole.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci de vous être déplacés rapidement malgré un avis de convocation aussi court. Vous nous avez quand même remis un document passablement intéressant. Vous n'êtes pas les seuls à parler de consultations plus longues. La majorité des témoins qui viennent ici, sinon tous, téléphonent à nos bureaux de comté pour nous dire qu'ils ont manqué de temps pour préparer un mémoire qui nous permettrait de présenter des amendements qui feraient en sorte que ce projet de loi fonctionnera bien. Or, on tente plutôt de faire adopter un projet de loi qui, à la fin ou dans dix ans, devra peut-être faire l'objet d'une révision. Ainsi, pendant dix ans, on aura administré un projet de loi qui ne fonctionnait pas, tout simplement.
    J'aimerais avoir votre avis sur ce qui suit. Nous avions proposé de promulguer le projet de loi C-11 de la législature précédente. Je sais que le projet de loi C-11 n'était pas un projet de loi parfait, mais il aurait pu former un filet de sécurité temporaire en attendant que l'étude du projet de loi C-2 soit complétée et que nous ayons vraiment eu le temps nécessaire pour avoir une loi bien travaillée, avec les amendements nécessaires que vous, les témoins, auriez pu nous suggérer dans le cadre d'une étude approfondie.
    J'aimerais vous entendre à cet égard.

[Traduction]

    Merci, madame.
    Il est évident que la dénonciation est un aspect important du travail des fonctionnaires. Vous décrivez le projet de loi C-11 comme une mesure temporaire qui nous aurait permis d'attendre l'adoption du projet de loi C-2. Toutefois, selon nous, le projet de loi C-11 n'avait pas assez de mordant et ne nous aurait pas donné ce qu'il nous fallait.
    Nous ne nous serions toutefois pas opposés à ce qu'il serve de mesure temporaire. Essentiellement, c'est tout ce que je puis dire sur cette mesure législative.
    En ce qui concerne les dispositions du projet de loi C-2 sur la dénonciation, c'est un autre élément que nous étudions encore. Nous tentons de déterminer les mérites de ces dispositions et leurs incidences sur nos membres.
    C'est un effort louable en plus de protéger les fonctionnaires qui dénoncent des actes répréhensibles, cela ne fait aucun doute, mais je crois que les membres de notre association dénonceraient ce genre de choses de toute façon, comme le veut leur code de déontologie. Cependant, il est vrai que dans la culture actuelle, certaines personnes pourraient hésiter, car les fonctionnaires ne se sentent pas protégés actuellement.
    Personnellement, et en toute franchise, je vois mal comment on peut créer ce genre de culture avec une loi. Vous pouvez prévoir toutes les mesures de protection que vous voulez dans les dispositions législatives, il n'en reste pas moins que dès que vous dénoncez un abus, vous êtes étiqueté comme dénonciateur. Ce qu'il faut, c'est un changement de culture considérable et pas seulement au sein de la fonction publique, mais dans le secteur privé aussi.
    C'est une question délicate et je ne suis pas certain que la solution réside dans une loi.

[Français]

    Vous avez dit tout à l'heure que vous étiez encore en consultation, en train d'étudier le projet de loi tel quel. Nous vous recevons aujourd'hui, vous nous faites quelques recommandations, mais si vous êtes encore en train d'étudier le projet de loi, cela veut dire que vous aurez probablement d'autres recommandations à nous faire une fois votre étude complétée.
    Je trouve donc qu'il est dommage que nous n'ayons pas déjà tous les résultats de votre étude. Vous pourriez toujours demander de revenir devant le comité pour au moins y déposer la version finale de vos propositions. Autrement, on ne fera pas un travail sérieux, un travail de fond. Or, pour nous, c'est extrêmement important lorsque nous faisons l'étude d'un projet de loi.
    Je me rappelle avoir participé à la révision de la Loi sur la protection de l'environnement. Nous avions mis deux ans pour la faire. Dans le cas présent, on essaie de faire adopter un projet de loi en l'espace de deux mois. Je ne critique pas, parce que je pense que tout le monde veut un projet de loi sur la responsabilité. Toutefois, il faut le faire de façon responsable. Or, il semble que vous n'ayez pas eu le temps de terminer l'étude du projet de loi.
    Je vous invite donc, lorsque vous aurez toutes vos recommandations, à faire une demande pour venir nous les présenter au comité.
    J'ai une dernière question pour vous, messieurs, si vous voulez y répondre. Que pensez-vous de la récompense de 1 000 $?

  (1110)  

[Traduction]

    D'abord, je tiens à dire que nous serions heureux de profiter de cette invitation. Je suis d'accord avec vous. Nous n'avons pas encore bien assimilé tout le contenu du projet de loi et nous accepterions certainement cette invitation.
    Par ailleurs, la récompense de 1 000 $ est, à notre sens, inutile. Nos membres sont régis par un code de déontologie. Je ne crois pas que cette somme inciterait qui que ce soit à dénoncer un acte répréhensible. Aucune récompense monétaire n'est nécessaire selon moi.

[Français]

    Cela me satisfait pleinement. Nous sommes aussi tout à fait en désaccord sur la récompense de 1 000 $. Nous pensons que c'est la responsabilité d'une personne de dénoncer un geste répréhensible dont elle est témoin, sans pour autant avoir besoin d'être rémunérée. Cela peut même créer une situation où des gens chercheront à dénoncer à peu près n'importe quoi pour toucher la récompense de 1 000 $. Nous sommes donc d'accord avec vous.
    J'espère que vous pourrez terminer l'étude de ce projet de loi et que vous demanderez de revenir nous voir. Il nous fera plaisir de vous accueillir.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Martin, avez-vous d'autres observations ou questions?
    Je le ferais si j'en avais le temps.
    Le président : Vous avez le temps, monsieur.
    M. Pat Martin : Je suis désolé si j'ai dû sortir de la salle pendant une partie de votre exposé, mais j'ai pris connaissance de votre mémoire, monsieur, et j'en apprécie à la fois le ton et la teneur. Je partage votre avis que vous auriez dû être consulté et avoir votre mot à dire pendant l'élaboration de ce processus.
    Je fais remarquer qu'il y a dans votre mémoire certains éléments qui, à mes yeux, devraient être considérés comme des améliorations continues et que nous ne devrions pas avoir à attendre d'être saisis d'un projet de loi pour nous livrer à cette amélioration continue de nos pratiques de gestion. Je pense que ce serait catastrophique pour la survie de ce projet de loi si nous en cessions l'étude pour entreprendre certaines recommandations que vous faites, par exemple de commander une étude empirique de tous les systèmes actuellement en vigueur pour faire rapport sur le rendement. C'est du travail nécessaire, mais je soutiens que cela devrait se faire de manière continue.
     En effet, nous étudions bon nombre de ces questions depuis 10 ans. Certains diraient que nous étudions cette question depuis 40 jours. En réalité, nous lui consacrons très généreusement de notre temps, mais l'étude est comprimée en quelques brèves semaines. Mais sur beaucoup de questions, nous savons ce qu'il faut faire. S'il fallait tout arrêter maintenant et même faire marche arrière pour donner suite à certaines de vos recommandations, par exemple engager les fonctionnaires dans un vaste débat sur la question de la responsabilité des ministres et des sous-ministres... Ce serait intéressant, mais ce serait un peu comme une discussion sur le sexe des anges, en comparaison des mesures concrètes et tangibles que nous essayons d'obtenir.
    Dans cette ouverture étroite dont nous disposons dans ce Parlement minoritaire, nous voulons obtenir des résultats concrets, parce qu'il y a des gens qui ne veulent pas que ce projet de loi aboutisse. Il y a des ennemis du projet de loi qui sont tapis dans l'ombre, pour ainsi dire, qui essaient de le saboter et d'en freiner l'avancement. L'une des manières les plus efficaces de le torpiller serait de s'engager dans une étude, de continuer à entendre des témoins jusqu'au printemps prochain, et ensuite, les élections seraient déclenchées... Croyez-moi, dans un gouvernement majoritaire, vous n'auriez pas l'occasion de prendre de telles mesures concrètes.
    N'êtes-vous pas d'accord pour dire qu'il serait important de mettre en place les trois piliers: la protection des dénonciateurs, la réforme de l'accès à l'information et un nettoyage des pratiques en matière de nominations politiques? Si nous obtenions ces trois choses-là durant le cours de ce Parlement minoritaire, n'aurions-nous pas raison de faire la fête?

  (1115)  

    Je ne suis pas sûr d'être en mesure de répondre à votre question, parce que vous l'avez posée dans un contexte politique. Je vous dirai que si le mécanisme permettant d'apporter des amendements au projet de loi existe, alors absolument, je ne peux faire autrement que d'être d'accord avec vos observations. C'est difficile d'être contre.
    Ce qui nous préoccupe, c'est qu'une fois que vous aurez adopté cette loi, nous aurons un cadre et les politiques devront être configurées en fonction de ce cadre. C'est ce que nous craignons: que faudrait-il faire à ce moment-là? Je comprends que lorsque vous... On va en faire l'étude après cinq ans, mais je pense que vous devrez probablement examiner l'affaire chaque année.
    Je ne voudrais pas qu'on se lance dans un processus bureaucratique pour apporter des ajustements au projet de loi et que l'on constate par la suite qu'il y a des lacunes et qu'il faut apporter des changements fondamentaux. Ce qui nous préoccupe, en fait, c'est qu'une fois que vous aurez adopté ce projet de loi, les paramètres auront été établis. Vous aurez jeté les bases et toute politique éventuelle devra cadrer avec ces paramètres.
    C'est pourquoi nous disons que vous devez faire venir les intervenants et leur donner le temps de bien assimiler tout cela. Cela ne prendrait pas des années.
    Eh bien, certains d'entre nous ont déjà consacré des années à ces questions. Le dossier a progressé au rythme des glaciations. J'ai vu les présidents du Conseil du Trésor se succéder et faire l'un après l'autre tout ce que vous recommandez que nous fassions encore une fois, c'est-à-dire d'entreprendre une étude approfondie du climat professionnel entourant les agents des finances. Alcock l'a fait. Il a ajouté bien d'autres choses encore. Nous avons suivi de près tout ce qui s'est fait dans ce dossier et il n'en est résulté aucun avantage appréciable pour qui que ce soit. On s'est contenté de faire des études qui n'étaient que de pures exercices intellectuels et qui ont été suivies de tables rondes chargées d'analyser l'étude qu'on venait de terminer. La plupart des Canadiens veulent des preuves concrètes d'un engagement en faveur de la transparence, de l'imputabilité et de la bonne gouvernance.
    Nous avons maintenant une ouverture et j'ai beau trouvé valables tous les points que vous avez soulevés, je persiste à croire que ce serait une erreur de retarder ce projet de loi pour prendre ces mesures qui devraient faire partie d'un cadre d'action continu et que nous devrions appuyer comme des éléments intrinsèques de notre travail. Nous devrions avoir une culture de l'amélioration continue — que les Japonais appellent kaizen — dans laquelle les agents des finances cherchent toujours des manières de mieux faire leur travail. Je m'inquiéterais si les ennemis de ce projet de loi utilisaient les arguments que vous avez présentés aujourd'hui pour justifier de torpiller ce projet de loi ou de le laisser mourir de mort lente avant les prochaines élections fédérales.
    Monsieur Moore.
    Merci et je remercie aussi les témoins.
    À titre de membre du comité, je peux dire que nous avons eu un calendrier assez lourdement chargé, nous avons eu de longues heures de réunion et nous avons entendu un vaste éventail de témoins. Vous avez évidemment été invités à titre de témoins pour nous faire profiter de vos compétences en la matière. Je trouve un peu inquiétant d'entendre les gens dire qu'ils ne sont pas consultés, alors même que leur témoignage fait partie de cette consultation. Nous avons l'avantage de pouvoir compter sur des années d'étude de ces dossiers. C'est un projet de loi bien réfléchi et nous y travaillons en entendant des témoins. Le comité travaille très dur pour intégrer l'apport des témoins.
    Avez-vous une recommandation générale et claire à l'intention du comité? J'ai remarqué, comme M. Martin l'a déjà dit, que les recommandations qui figurent dans votre résumé exigeraient énormément de temps. Je pense que les Canadiens nous disent que l'on n'atteindra jamais la perfection. Je le sais et je ne pense pas qu'aucun d'entre nous ait la moindre illusion à cet égard, mais nous voulons aboutir à un bon produit.
    J'ai trouvé intéressant de vous entendre dire que le projet de loi C-11 n'avait aucun mordant, et c'est une chose qu'on peut dire en faveur du projet de loi C-2: il a du mordant. Il donne aux fonctionnaires du Parlement les pouvoirs voulus pour mieux faire leur travail et il offre la protection voulue aux dénonciateurs contre toute représaille, et ce sont là certaines des mesures nécessaires que nous devons prendre à titre de députés responsables pour renforcer la reddition de comptes dans notre pays. Je préférerais aller de l'avant en adoptant quelque chose de positif. Les études de ce genre se poursuivent depuis des années et cela va continuer et nous pouvons en tirer profit.
    Je vais écouter vos commentaires là-dessus, mais je remarque par ailleurs que dans votre résumé, on trouve le passage suivant:
ç
Même si l'imputabilité est une valeur démocratique fondamentale, il ne s'ensuit pas nécessairement qu'il ne peut jamais trop y en avoir. Des exigences excessives et encombrantes en matière d'imputabilité peuvent détourner de la sensibilité, de l'innovation et de l'efficience.
    Je me demande si vous pouvez nous dire quelques mots à ce sujet également. Pouvez-vous nous en donner des exemples précis? Pourriez-vous jeter un peu de lumière sur ce que cela veut dire?

  (1120)  

    Malheureusement, je ne peux pas vous fournir de détails à ce sujet. Je n'ai pas d'exemple précis à vous fournir.
    J'ai été agent financier auprès du gouvernement fédéral pendant 25 ans. Je peux vous dire qu'il est difficile pour les gestionnaires de programme de remplir les obligations du programme lorsqu'il y a de nombreuses règles avec lesquelles il faut se conformer. Je comprends que ce projet de loi tente à résoudre certaines de ces questions — et je trouve que c'est quelque chose de positif. Ainsi, nous espérons que ce projet de loi ne va pas rajouter d'autres règles et règlements qui finiront par être contre-productifs.
    Au gouvernement, comme dans le monde des affaires, il faut parvenir à un équilibre. Il faut donc qu'il y ait un niveau raisonnable de risques qui soit imposé au processus, afin de ne pas nuire aux services qui sont fournis aux Canadiens. Certaines personnes trouvent que ce discours peut être étrange dans la bouche d'un agent financier. Il existe des perceptions selon lesquelles nous sommes des commis de caisse, et c'est complètement faux. Cette description est tout à fait périmée. Il faut comprendre qu'il s'agit de professionnels qualifiés, et qu'ils tentent de comprendre pourquoi ils existent. Les agents financiers sont là pour garantir la probité dans les dépenses des fonds, tout en garantissant la réalisation des programmes. Nous sommes préoccupés par le fait qu'il y a une tendance à tenter d'enlever le risque dans la loi, et je ne crois pas que ce sera possible. Je ne crois pas que vous allez y parvenir.
    Comme la vérificatrice générale l'a mentionné, il s'agit de cas isolés. À ma connaissance, il n'y a pas de scandale généralisé dans le gouvernement fédéral. Je crois qu'il y a une tendance à réagir trop promptement, et cela cause certains problèmes. Cette réaction excessive crée des obstacles et des échappatoires par lesquels les personnes doivent passer. Il s'agit de toute la bureaucratie dont nous avons parlé dans ce rapport, et que nous tentons d'éviter. Alors nous ne sommes pas en train de dire qu'il ne faille pas présenter de projets de loi — en effet on peut apprendre de ses erreurs — mais il faut comprendre que le gouvernement, dans un projet de loi, doit laisser cours à un risque raisonnable dans les processus quotidiens afin de favoriser l' efficacité. Ce type de législation anti-risques n'est pas nécessairement la solution aux problèmes.
    Merci, monsieur Isaacs. Votre temps est écoulé.
    Merci messieurs de votre présence. Merci de nous avoir parlé du projet de loi. Merci beaucoup.
    Nous allons prendre une courte pause avant de reprendre avec le dernier exposé.

  (1124)  


  (1132)  

    La séance est reprise. Nos derniers témoins ce matin proviennent de l'Association des comptables généraux accrédités du Canada. Nous allons entendre la vice-présidente des Affaires gouvernementales et réglementaires, Mme Carole Presseault, ainsi que M. Roch Lefebvre, le vice-président, Recherche et normalisation.
    Bonjour à vous deux. Si vous le voulez bien, vous pouvez maintenant procéder à vos remarques liminaires, puis les membres du comité vous poseront des questions. Merci d'être venus.

[Français]

[Traduction]

    Je comprends que la matinée a été longue, mais j'aimerais faire une remarque préliminaire.
    Au nom de CGA Canada et de nos 64 000 membres, j'aimerais vous dire que nous sommes ravis d'être ici pour parler avec vous de ce projet de loi fort important.
    Il y a environ 100 ans, 12 comptables qui travaillaient à Montréal se sont réunis dans une pièce et ont décidé de créer l'Association des comptables généraux accrédités, afin de promouvoir leur croissance professionnelle et de réunir les outils et les compétences nécessaires pour faire face à un milieu professionnel sans cesse changeant. Certains de nos membres travaillent au sein du gouvernement — environ 8 000 membres travaillent dans le gouvernement fédéral à l'heure actuelle — et ils sont aux prises avec certaines des mêmes difficultés auxquelles font face les gestionnaires du secteur public.
    Nous avons hâte d'entendre vos questions et de discuter de ce projet de loi essentiel. Avant, j'aimerais faire quelques observations rapides.

[Français]

    L'élaboration du projet de loi C-2 résulte d'une crise de confiance qui, comme vous le savez très bien, va au-delà du gouvernement, du Parlement et des frontières du Canada. Elle implique tous les secteurs, tant corporatifs que gouvernementaux. La crise de confiance actuelle découle en grande partie de la perception qu'a la population qu'il existe un manque d'éthique parmi les élites du milieu des affaires, de la politique et de la bureaucratie. Malheureusement, cette crise de confiance n'est que trop justifiée par les agissements d'une poignée d'escrocs.
    La question qu'il importe de se poser est: pourquoi? Comment en sommes-nous arrivés là? Quelque chose a-t-il changé? Quelles leçons pouvons-nous tirer de tout cela et quelles mesures pouvons-nous ou devez-vous prendre pour empêcher que cela se reproduise?

[Traduction]

    Bien que nous espérons tous que le projet de loi nous permettra d'éviter beaucoup d'erreurs du passé, il faut comprendre que les règles et les règlements ne remplacent pas le comportement éthique. La vérificatrice générale et d'autres témoins en ont parlé lors de leurs témoignages à ce comité, et à d'autres comités.
    Vous estimez peut -être qu'il est ironique que nous comparaissions aujourd'hui afin de défendre l'utilisation d'une approche prudente lors de la création de règles. Après tout, les comptables sont prédisposés à l'utilisation des règles et de la structure. Nous travaillons avec les chiffres, nous sommes des analystes financiers, des directeurs financiers, des vérificateurs et des leaders d'entreprise. En résumé, c'est vers nous que les gens se tournent lorsqu'ils ont besoin de conseils pour savoir comment suivre les règles gouvernant le capital, les biens, les profits et les pertes.
    Dans la même veine, la profession de comptable porte un énorme fardeau en ce qui concerne la confiance du public et la responsabilité. Nous sommes fiers de porter ce fardeau. C'est en effet notre gagne-pain. Mais il faut bien se rappeler que les règles en soi ne vont pas nécessairement donner les résultats auxquels nous aspirons tous. Le défi auquel fait face le Parlement et ce comité est de parvenir à un équilibre entre les règles, l'éthique et la bonne gouvernance.
    Dans le monde financier, l'imputabilité du rendement fiscal est plus directe aujourd'hui que jamais. Les règles introduites après le scandale Enron font en sorte que les PDG et les directeurs financiers sont imputables pour la certification de leurs états financiers d'entreprise. Les vérificateurs sont maintenant soumis à un contrôle indépendant. Personne ne réfute l'idée que les cadres supérieurs sont responsables de la véracité et de la fiabilité de l'information financière présentée aux actionnaires: cela ne fait qu'indiquer que le leadership et l'imputabilité viennent d'en haut.
    Il ne fait aucun doute que les commissaires à l'éthique et que les enquêteurs judiciaires ont un rôle à jouer, mais nos leaders politiques ont eux aussi un rôle à jouer. Le président américain Harry Truman s'est rendu célèbre pour avoir affiché dans son bureau cette phrase: « Le responsable, c'est moi. » Cela témoignait simplement de la puissance de la responsabilité personnelle, et le président était largement admiré pour ça. Les Canadiens ne sont pas différents des Américains à cet égard. Nous nous attendons à cela de nos leaders gouvernementaux.

  (1135)  

[Français]

    Le Canada veut se doter d'une loi sur la responsabilité fédérale qui soit efficace, une loi dont il a besoin, mais pas à n'importe quel prix. Lors de l'étude de ce projet de loi, vous avez comme défi de trouver un juste équilibre entre des intérêts concurrentiels afin de bien servir les Canadiens et les Canadiennes. Vous devez, pour atteindre cet équilibre délicat, tenir compte des intérêts d'une myriade de groupes, notamment l'organisme que nous représentons, tout en respectant leur droit de se faire entendre avec sérieux et parfois de manière strictement confidentielle. Cette considération contraste vivement avec le droit à l'information qu'a la population et dont sont garants le Commissaire à l'information du Canada, les médias et le Parlement lui-même.

[Traduction]

    À notre avis, le gouvernement a su régler plusieurs problèmes importants dans le projet de loi C-2. Nous sommes très heureux qu'on ait précisé les rôles des sous-ministres et des sous-ministres adjoints comme administrateurs des comptes. Nous appuyons sans réserve la mise sur pied des comités indépendants de vérification. Nous estimons également que la protection au chapitre de l'accès à l'information qui est assurée dans les documents de travail sur la vérification interne est appropriée et elle saura améliorer le processus de vérification interne des ministères et des organismes gouvernementaux. Nous avons constaté avec plaisir que des mesures de protection appropriées ont été prévues pour assurer la protection des ébauches de rapports de vérification et que des paramètres avaient été établis visant leur publication. Bref, ces mesures assureront l'intégrité et l'efficacité du processus de vérification.
    Nous félicitons le gouvernement d'avoir élargi les pouvoirs du vérificateur général lui permettant ainsi de suivre la trace de l'argent; nous approuvons l'inclusion d'un examen quinquennal de la pertinence et de l'efficacité des subventions et contributions — une recommandation que nous avions déjà formulée, entre autres.  Nous pensons également qu'à titre de parlementaires, vous apprécierez la création du nouveau poste de directeur parlementaire du budget. Nous appuyons les mesures d'appui et de protection destinées aux dénonciateurs mais comme d'autres témoins, nous sommes contre le fait d'offrir aux fonctionnaires une récompense pécuniaire. Ces initiatives sont semblables à celles qui ont été adoptées par le secteur des entreprises.
    Le projet de loi est une mesure législative ambitieuse qui cherche à renforcer la responsabilisation et à améliorer la gestion des ressources humaines et financières du gouvernement. Nous appuyons ces initiatives. On nous a demandé de participer aux efforts visant à renforcer la gestion financière et à améliorer la vérification interne au sein de la fonction publique fédérale. Nous sommes sur le point de lancer une série d'initiatives à cet égard.
    Puisque nous sommes des lobbyistes enregistrés, nous avons tort de ne pas faire de commentaires sur les modifications proposées à la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes. Toute bonne mesure législative et tout bon règlement sont fondés sur la clarté. Ainsi, nous jugeons que le gouvernement a un objectif fort louable lorsqu'il cherche à rendre les mesures législatives régissant les agissements des lobbyistes plus exécutoires. C'est pourquoi nous avons décidé d'appuyer l'Institut des relations gouvernementales du Canada qui recommande que l'on renforce les dispositions sur l'application de la loi et l'enquête. La grande majorité des lobbyistes respectent pleinement la loi, mais de meilleures dispositions sur l'application de la loi permettront de protéger la majorité contre l'impact des agissements de la minorité. Nous jugeons qu'il est dans l'intérêt de tous de renforcer ces dispositions.
    Nous voulons tout ce qu'il y a de mieux pour l'avenir du Canada, même si à l'occasion nous ne sommes pas du même avis quant aux méthodes employées pour y parvenir. Au cours de la dernière campagne électorale fédérale, CGA Canada a demandé à tous les partis politiques de s'engager à adopter plusieurs mesures visant à rétablir la confiance des Canadiens envers les leaders et les institutions du secteur public et du secteur privé. Nous sommes très heureux de constater que le gouvernement a donné suite à ce message et à d'autres recommandations.
    Nous sommes impatients d'aider votre comité dans ses travaux.

[Français]

    Nous vous remercions et il nous fera plaisir de répondre à vos questions.

  (1140)  

[Traduction]

    Je suis convaincu qu'il y aura des questions, madame Presseault. Merci beaucoup d'être venue nous rencontrer aujourd'hui. Votre exposé était absolument fascinant.
    M. Owen sera notre premier intervenant.
    Merci d'être venu nous rencontrer aujourd'hui pour nous éclairer dans nos délibérations.
    Ce projet de loi est volumineux et fort complexe et je dois dire que la façon très claire dont vous avez présenté les avantages du projet de loi est fort utile.
    Madame Presseault, pourriez-vous ou votre collègue nous en dire un peu plus long sur les changements qui devront se produire si ce projet de loi entre en vigueur? Il faudra passer d'un système où l'ancien gouvernement proposait de rétablir le rôle du contrôleur général qui avait été aboli au début des années 90 et passer à la création de postes d'agents financiers principaux dans tous les ministères.
    Enfin cette question donne suite aux commentaires que vous avez faits sur la gestion financière par rapport à la simple vérification, et cela revient au processus d'examen très prudent de l'atteinte des objectifs et l'utilisation des fonds affectés à des fins particulières plutôt que de se contenter d'attendre que l'on prépare des vérifications de suivi après la mise en oeuvre. Pouvez-vous nous dire comment ces activités se sont déroulées à ce jour et dans quelle mesure ces nouvelles mesures permettraient de contrer certains des problèmes que nous avons vécus comme ceux qui sont associés au programme des commandites?
    Merci, monsieur Owen, de cette question. C'est une question importante, car nous estimions que le rétablissement du rôle du contrôleur général était une très bonne décision, parce que tout compte fait, encore une fois, lorsque vous parlez de refléter les initiatives prises par le secteur des entreprises, l'exemple est donné par les dirigeants, et je crois qu'il s'agit là d'un sujet que nous voulions vous communiquer aujourd'hui.
    Le contrôleur général a des responsabilités très claires, pas simplement pour renforcer le processus de vérification interne mais également pour constituer une certaine capacité. Nous avons beaucoup parlé de vérification interne, et la vérificatrice générale et d'autres intervenants en ont également beaucoup parlé. Cependant, nous n'avons pas beaucoup parlé de renforcer la capacité financière dans le secteur public et à cet égard, lorsque je dis que nous allons lancer une série de programmes, nous espérons quand même qu'en renforçant le rôle d'agent financier principal, l'exemple sera donné.
    Le groupe qui nous a précédés est composé d'agents financiers. Nous nous sommes rencontrés la semaine dernière, et ce groupe est en train d'essayer de déterminer comment il peut participer à cette création de capacités. Un élément clé de cet effort consiste à mettre l'accent sur la professionnalisation de la fonction publique, c'est-à-dire l'obtention de titres professionnels comme le titre de CGE octroyé par l'Association des comptables généraux accrédités du Canada ou de tout autre titre comptable.
    Comme je l'ai déjà signalé, le rôle du Bureau du contrôleur général donne l'exemple à cet égard à l'ensemble de la fonction publique.
    Merci.
    Madame Lavallée.

[Français]

    Tout d'abord, nous voulons vous remercier d'être ici. C'est très gentil d'être venus nous présenter vos réflexions très intéressantes sur le projet de loi, sur la démarche elle-même et sur la crise de confiance des élites à travers le monde. J'ai trouvé cela très intéressant.
    Ici, au Canada, au gouvernement fédéral, le projet de loi C-2 a été élaboré essentiellement dans la foulée du scandale des commandites. Le gouvernement conservateur a essayé de trouver une façon d'éviter un prochain scandale des commandites. C'est écrit en toutes lettres dans tous les documents gouvernementaux. Pourtant, quelques témoins nous ont dit que le projet de loi n'empêcherait pas nécessairement un autre scandale comme celui des commandites.
    Le gouvernement veut également restaurer la confiance des Canadiens dans leurs dirigeants. Cependant, nous avons l'impression d'être dans une démarche de gestion de la perception de la population où le gouvernement veut faire adopter un projet de loi à toute vapeur, et il bouscule les témoins — nous nous en excusons — à cette fin.
    Selon vous, le projet de loi C-2 pourra-t-il empêcher un autre scandale des commandites?
    Au cours de la campagne électorale, vous dites avoir défini des éléments à ajouter pour assainir encore davantage, si la chose est possible, la gestion des finances publiques. Pouvez-vous nous décrire ces éléments?

  (1145)  

[Traduction]

    J'essaierai de répondre à la première partie de votre question. Enfin je crois que cela revient à votre première question.
    Nous avons jugé que ce projet de loi était fort intéressant, et pas simplement parce qu'il rétablissait le poste de contrôleur général; en effet, ce projet de loi propose la création d'un directeur parlementaire du budget, l'élargissement du pouvoir du vérificateur général et la création d'autres postes, comme le poste de dirigeant de la vérification et les postes d'agents comptables principaux. Il est clair que les responsables ont fait d'importants efforts quand ils ont pensé à toutes ces possibilités.
    Lorsque l'on étudie ces propositions du point de vue d'une personne qui n'est pas comptable — je voyais ça plutôt comme un enquêteur sur les fraudes ou quelque chose du genre — l'on constate que le système est en fait conçu pour être le plus solide possible. Je ne dis pas cela parce que je m'adresse à votre comité. Je reconnais plutôt qu'on a déployé beaucoup de temps et d'effort pour rédiger ce projet de loi et pour identifier les responsabilités et pouvoirs de tous les intervenants. Nous appuyons cela. Comme je l'ai dit, j'appuie ces mesures pas simplement à titre de comptable; du point de vue des systèmes, je crois qu'il s'agit d'une mesure législative très solide.
    Cette mesure législative permettra-t-elle d'éviter que d'autres scandales ne se produisent? Probablement pas. Je ne sais pas si c'est possible d'avoir un système à toute épreuve, mais je crois que cette mesure législative représente une amélioration remarquable. Je ne sais pas si les parlementaires et le gouvernement seront un jour certains à 100 p. 100 que... Je pense que cela serait un peu trop ambitieux. Cependant, à mon avis, vous avez ici un bon point de départ et avec un peu plus d'expérience, il sera possible de peaufiner la loi pour corriger les lacunes qui pourraient exister.
    Merci.

[Français]

    En ce qui concerne le deuxième élément de votre question, il me fera plaisir de vous remettre nos documents à ce sujet.
    D'accord. Pouvez-vous nous parler de deux ou trois principaux éléments?
    Nous avons fait une série de recommandations lors de la présentation de nos mémoires prébudgétaires que nous avons reprises lors de la campagne électorale. La thématique était la même, soit le retour à la responsabilité ministérielle et le rôle que pourraient jouer les contrôleurs ministériels et les comités de vérification indépendants. N'oublions pas non plus la normalisation. Nos recommandations portaient plus sur le secteur corporatif que sur le secteur public.
    Vous avez également déclaré que vous étiez contre la récompense donnée aux dénonciateurs, sans développer davantage. Pouvez-vous le faire maintenant?
    Oui, absolument. Nous sommes loin d'être des experts en matière de dénonciation et de délation. Plusieurs groupes ont comparu devant vous. Nos réflexions se situent vraiment au niveau du principe en vertu duquel la dénonciation et la délation sont des outils de dernière instance. Avant tout, il suffit d'avoir les bons systèmes en place et une culture organisationnelle qui favoriseraient les échanges nécessaires à l'interne pour éviter le recours à cet outil de dernière instance. Nous reconnaissons toutefois que c'est un mal nécessaire.
    Quant à la récompense, vous avez entendu les témoins précédents. Nous partageons leur opinion. Les membres de notre association travaillant au sein du secteur public sont des professionnels régis par un code de déontologie. Le montant de 1 000 $ ne veut absolument rien dire. Par souci de bien agir et en vertu de leur sens du professionnalisme, les gens vont poser les gestes nécessaires, peu importe la récompense.

[Traduction]

    Merci, madame Lavallée.
    Monsieur Martin.
    Merci.
    Je n'ai qu'une petite question à poser. Vous avez signalé que nombre de vos clients ou membres de votre association sont des lobbyistes. Est-ce que cela veut dire que votre association est en fait un lobbyiste inscrit? Est-ce que CGA est un lobbyiste?
    Dans le cadre de notre rôle au sein de CGA Canada, nous sommes des lobbyistes enregistrés. Entre 12 et 14 de nos employés sont touchés par la loi révisée par l'ancienne législature. Je suis désormais identifiée comme lobbyiste enregistrée et je m'enregistre.
    Ma prochaine question n'est peut-être pas aussi pertinente, mais je vais vous la poser quand même.
    Le NPD recommandera entre autres choses que les lobbyistes ne soient pas autorisés à vendre d'autres services aux organismes gouvernementaux auprès desquels ils font peut-être des activités de lobbying. En d'autres termes, cette proposition vise à empêcher de plus grosses entreprises qui ont peut-être plusieurs sous-compagnies à avoir des contrats avec le gouvernement et de faire du lobbying. Estimez-vous qu'il y a conflit dans ces circonstances et qu'une modification est appropriée?

  (1150)  

    Je n'étais pas consciente du problème. C'est intéressant; et je pense immédiatement à ce que ça pourrait représenter pour notre organisation.
    J'aimerais d'entrée de jeu vous rappeler que la législature précédente avait modifiée les dispositions de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes et modifiée la définition. Nous ne savons pas encore quel sera l'impact de cette modification. On a décidé de renforcer les mesures sur l'application de la loi et je crois que c'était une bonne idée, une chose qui s'imposait.
    Je crois qu'à l'occasion, le Parlement a tendance à placer beaucoup de choses sous l'égide de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes, des choses qui en fait ne relèvent pas du tout de cette loi. J'aimerais avoir un peu plus de temps pour penser à la modification que vous proposez. Si cette proposition était retenue, CGA Canada, qui offre des produits pédagogiques pour l'éducation permanente à divers clients indépendants, y compris peut-être le gouvernement du Canada, ne pourrait plus offrir ses services. Nous avons un produit. Nous avons des cours qui permettent de renforcer la gestion financière et la vérification interne. Nous ne pourrions plus participer à un processus d'appel d'offre ouvert et équitable parce que certains de nos employés, de par la nature de leurs activités, seraient des lobbyistes inscrits, puisqu'ils communiquent avec des responsables de la politique gouvernementale.
    C'est un commentaire intéressant. Je pense que cela démontre bien que les gens ne comprennent pas vraiment qui sont les lobbyistes. Nombre d'entre nous pensons plutôt aux grosses organisations comme Hill & Knowlton Canada, mais il y a également des lobbyistes à but non lucratif, des groupes comme le vôtre. Je crois que c'est une chose dont je devrai tenir compte dans les modifications que proposera mon parti.
    Je voudrais poser une autre question sur les lobbyistes. Que pensez-vous de la proposition visant à interdire les honoraires en fonction des résultats, ce qui a fait couler beaucoup d'encre dans l'affaire David Dingwall, par exemple? Pensez-vous qu'on devrait interdire ce genre d'honoraires?
    Certainement.
    Merci, monsieur Martin.
    Monsieur Lukiwski.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aussi à nos deux témoins de leur présence parmi nous.
    J'aimerais vous demander votre avis sur une question qui fait souvent surface au comité et qui a déjà été soulevée par d'autres témoins. Il s'agit de la vitesse à laquelle nous étudions ce projet de loi.
    Certains de mes collègues estiment que les conservateurs tentent d'expédier les choses, en dépit du fait que le projet de loi mérite une étude sérieuse. Comme l'a dit M. Lefebvre, nous devons nous donner la peine de rédiger un bon projet de loi. Cela peut toutefois se faire de bien des manières; nous pouvons en améliorer le texte au moyen d'amendements. Je suis tout à fait d'accord avec cela.
    J'aimerais souligner quelque chose puis vous demander votre avis, car j'estime que notre démarche est tout à fait la bonne. En règle générale, un comité parlementaire permanent se réunit à raison de quatre heures par semaine et le Parlement siège à peu près 28 semaines par année. Cela signifie que dans une année, les comités entendent quelques 112 heures de témoignages.
    À l'heure actuelle, nous siégeons pourtant à raison de 24 heures par semaine, et par conséquent, d'ici cinq semaines, nous aurons entendu davantage d'heures de témoignages qu'un comité en une année. Dans le cas où nous siégerions au-delà du 23 juin, date de l'ajournement de la session — ce qui se produira vraisemblablement — je prévois que nous passerons à 40 heures de séance par semaine. Je le répète, si mes calculs sont justes, en trois semaines, nous aurons entendu l'équivalent d'une année de témoignages.
    Si je vous demande votre avis, c'est que j'estime pour ma part que, grâce à nos longues heures de séance et aux nombreux témoins que nous aurons entendus en étudiant ce projet de loi article par article, le résultat sera avantageux pour tous. Nous aurons en effet travaillé avec la diligence voulue. Il est même probable que d'ici fin juillet, nous ayons entendu l'équivalent de deux ans de témoignages en temps normal, ce qui est plutôt impressionnant. Si un autre comité parlementaire examinait un sujet ou un projet de loi pendant la même période, il pourrait certainement affirmer avoir fait du travail sérieux, avoir fait preuve de diligence raisonnable. En l'occurrence, le résultat de tous nos efforts, ce serait que la loi entre en vigueur. Nous aurions alors fait notre travail. Nous pouvons adopter ce projet de loi, car n'oublions pas qu'un gouvernement minoritaire peut tomber à tout moment.
    J'aimerais donc que vous me disiez si d'après vous le projet de loi doit être adopté et s'il doit être traité avec l'attention soutenue qu'il nécessite, mais rapidement. On permettrait ainsi à l'objet de la loi, que vous semblez approuver, de se traduire de manière concrète. La loi serait effectivement en vigueur.

  (1155)  

    Il faut que je commence par une mise en garde, mais j'imagine que vous vous en attendiez, dans la mesure où il y a beaucoup d'aspects politiques et environnementaux à prendre en considération, et je ne me considère pas un expert en la matière. Mais je crois qu'il faut, comme l'a très bien souligné M. Martin, que le comité soit certain d'avoir bien étudié les sujets et la recherche. En réalité, il faut évaluer les choses comme le feraient probablement des comptables ou des vérificateurs et voir si oui ou non des audiences supplémentaires pourraient offrir de la valeur ajoutée.
    Encore une fois, il est difficile pour moi de parler au nom de tous les membres de notre association, mais je crois qu'en examinant ce dont nous sommes saisis et la qualité du travail, en tant qu'association nous pourrions dire que le comité dispose d'assez d'information en ce moment.
    Merci beaucoup. Je n'ai pas d'autres questions.
    Monsieur Petit.

[Français]

    Madame Presseault, j'aimerais vous poser une question.
    Vous avez mentionné qu'il y avait un gros scandale au sein de la compagnie Enron. Cependant, dans tous les grands scandales financiers, les comptables se sont toujours montrés complaisants envers celui qui commettait le crime. Ce fut le cas du cabinet d'expertise comptable Arthur Anderson qui exerçait ses activités aux États-Unis et au Canada.
    D'après les l'Association des comptables généraux accrédités du Canada, le projet de loi C-2 pourra-t-il remédier au problème des comptables trop complaisants qui risque de mener à des scandales?
    Nous pourrions refaire l'histoire d'Enron, mais je crois que ce n'est pas le but de votre question. Dans l'affaire Enron, il y a plusieurs complices. La semaine dernière, deux des dirigeants les plus importants de l'entreprise ont été reconnus coupables. L'exemple vient d'en haut.
    On peut trouver, dans la copie imprimée de mon texte, des citations de Warren Buffet qui indiquent que l'intégrité est vraiment ce qui importe le plus. D'autres associations, tout comme la nôtre, ont déclaré que seule l'histoire pourra déterminer ce que pourra régler le projet de loi C-2. Il suffit d'avoir à l'intérieur du système une bonne culture organisationnelle qui favorise les échanges et les bons freins et contrepoids, ce qui aide souvent la vérificatrice générale à établir si la faute est attribuable à la vérification interne. Ce processus était en place, mais il n'avait pas sa place, si je peux m'exprimer ainsi. La création de comités de vérification internes indépendants et autonomes de la direction d'un ministère ou d'une société de la Couronne va-t-elle réparer la faute? Dans le secteur corporatif, beaucoup de choses ont été dites sur les comités de vérification indépendants qui font leurs preuves. Nous avons hâte qu'ils soient établis. La politique n'entrera en vigueur qu'en 2007, mais on nous assure que plusieurs ministères sont déjà intéressés.
    Plusieurs de nos membres dans l'ensemble du Canada, des comptables généraux licenciés, ont une grande expertise et beaucoup d'expérience dans le milieu corporatif et autres. Ils souhaitent siéger à ces comités, qui ne seront pas seulement des comités de comptables. On ne peut dire que c'est la faute des comptables ou des vérificateurs, car ils font partie intégrante du système. Vous savez que les agents financiers sont sur la sellette. Ils sont sur la ligne de front de ce secteur. La présence d'agents financiers n'était pas évidente, dans le cadre de cette situation.
    Je suis certaine que je n'ai pas répondu à votre question, monsieur Petit, mais c'était mon exercice de patinage matinal.
    Vous patinez bien. Je vous remercie.

[Traduction]

    Voilà qui conclut la période de questions. Je tiens à vous remercier tous les deux de votre présence, c'est fort apprécié.
    Le président a quelques annonces à faire avant l'ajournement de cette séance, qui sera suivie d'une autre séance cet après-midi. Je ne serai pas disponible ce soir. M. Tonks va présider la séance; il est entendu qu'il n'y aura pas de vote, que tous les caucus sont d'accord.
    La séance de ce soir aura lieu à 18 heures dans la salle 237-C, de l'autre côté du couloir. Le sous-comité se réunira demain à 12 h 15 dans la salle 701 de l'édifice de la Promenade.
    Finalement, il y a deux avis de motions pendantes, l'une de M. Poilievre et l'autre de Mme Jennings. On en traitera demain soir à 20 heures, sauf imprévu.
    Y a-t-il un vote?

  (1200)  

    La motion de l'opposition fera l'objet d'un vote à 19 h 15 ce soir. Le timbre devrait sonner à 18 h 15 et le vote aura lieu à 18 h 30, ce qui perturbera la réunion du comité.
    Ce sera à M. Tonks de régler la question.
    Merci. La séance reprendra à 15 h 30 cet après-midi dans cette salle. La séance est levée.