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CC30 Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité législatif chargé du projet de loi C-30


NUMÉRO 014 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 22 février 2007

[Enregistrement électronique]

(0905)

[Français]

    Nous avons enfin le quorum.

[Traduction]

    Je remercie les témoins d'être venus aujourd'hui.
    Je demanderais aux membres du comité qui sont présents de demander à leurs collègues retardataires d'essayer d'être plus ponctuels à l'avenir, nous l'apprécierions grandement. Nous avons un ordre du jour bien rempli aujourd'hui.
    Nous en sommes à la 14eséance du comité législatif chargé du projet de loi C-30.
    Nous accueillons d'Alcan, M. Daniel Gagnier, vice-président principal, Affaires générales et externes, et M. Patrick Tobin, directeur, Relations gouvernementales et des affaires générales. De l'Association canadienne des producteurs d'acier, M. Ron Watkins, président; M. Denis Fraser, président et chef de la direction, Mittal Canada; et Jim Stirling, directeur général, Environnement et Énergie, Dofasco. De Interface Flooring Systems (Canada) Inc., M. Rahumathulla Marikkar.
    Nous attendons encore — mais nous allons commencer — M. Avram Lazar, président et directeur général de l'Association des produits forestiers du Canada, et M. Gordon Peeling, président et chef de la direction de l'Association minière du Canada.
    On vient de m'informer que M. Lazar ne viendra pas; il comparaîtra un autre jour. Cela nous donne 10 minutes de plus.
    En général, nous accordons aux témoins environ 10 minutes — ou moins, si possible — pour que vous nous parliez des aspects du projet de loi C-30 qui vous intéressent. Nous allons bien sûr apprendre quelque chose au sujet de votre industrie ou de votre entreprise, mais nous aimerions nous concentrer autant que possible sur le projet de loi C-30, la Loi canadienne sur la qualité de l'air, et sur ce que nous pouvons faire pour renforcer cette loi. Puis nous passerons aux questions.
    Nous allons commencer par les représentants de l'Alcan, M. Gagnier ou M. Tobin.
    Ce sera M. Gagnier, pour 10 minutes, s'il vous plaît.
    Je vais vous faire grâce de la publicité sur l'entreprise. Vous pourrez la lire dans notre exposé. J'aimerais tout d'abord vous parler des choses que nous faisons et de notre approche à l'égard de la qualité de l'air et des gaz à effet de serre.

[Français]

    Je vais commencer par parler d'Alcan et des émissions de gaz à effet de serre. Pour nous, les changements climatiques constituent à la fois un défi commercial et une occasion d'affaires. Notre réponse stratégique s'incarne dans une philosophie gagnante fondée sur des avantages environnementaux et économiques. Des mesures énergétiques adoptées par Alcan dès le début des années 1990 ont prouvé qu'il était possible d'obtenir des réductions importantes tout en maintenant la croissance économique. Notre expérience au Québec a démontré que les gouvernements et les secteurs industriels peuvent travailler de concert afin d'obtenir des réductions volontaires.

[Traduction]

    Au sujet des mesures précoces prises par Alcan, les faits sont révélateurs. Les émissions totales des usines d'électrolyse ont été réduites de 25 p. 100 entre 1990 et 2005; l'intensité des émissions de GES des usines d'électrolyse — nous mesurons les réductions absolues et d'intensité — a été réduite de 45 p. 100. Les émissions de PFC, qui contiennent une forte concentration de gaz à effet de serre, ont été réduites de 80 p. 100; et cela, en même temps que les productions augmentaient de 40 p. 100. Il s'agit de données mondiales.
    Au Canada, de 1990 à 2005, nous avons réduit de plus de 30 p. 100 les émissions totales de nos usines d'électrolyse et nous avons réduit l'intensité des émissions de GES de nos usines d'électrolyse de 50 p. 100. Pendant la même période, notre production a augmenté de 50 p. 100.
     Je pense donc que nous avons prouvé le bien-fondé de notre approche à l'égard de la qualité de l'air. Au début de la semaine, à Montréal, nous avons annoncé un nouvel objectif de réduction de 10 p. 100 d'ici 2010.
    Les prochaines diapositives montrent tout simplement les tendances des émissions de PFC, de réduction des émissions de polluants atmosphériques — notamment de fluorure —, d'hydrocarbures polyaromatiques, et de réduction totale des émissions par installation au fil des années.
(0910)

[Français]

    Parlons de ce que nous faisons aujourd'hui.
    L'amélioration des procédés des anciennes technologies se poursuit et Alcan modernise intensément ses actifs au Canada à l'aide de nouvelles technologies. Ces efforts ont eu des répercussions positives importantes en matière d'économie d'énergie et de réduction des émissions de gaz à effet de serre. La technologie d'électrolyse de la série AP35 d'Alcan est aujourd'hui la technologie offrant le meilleur rendement énergétique et dégageant le moins de gaz à effet de serre. Tout en continuant à améliorer cette plateforme technologique, nous investissons dans son avenir, c'est-à-dire dans la technologie AP50, en construisant une usine pilote de 550 millions de dollars américains à Jonquière, au Québec.
    Afin de vous donner une idée de la convergence possible de cette technologie avec d'autres, nous croyons que ses effets dans cinq ans seront une réduction des gaz à effet de serre et une amélioration de 20 p. 100 de l'efficacité énergétique.
    Nous recherchons activement des possibilités gagnantes au chapitre des applications en aval de nos produits qui possèdent des bénéfices inhérents sur le plan de l'énergie et de leur capacité de contribuer à des réductions de GES, cela grâce au développement, à la promotion et à la vente d'une gamme de produits de l'aluminium, notamment en insistant sur les avantages du recyclage des produits en fin de vie.
    Ces efforts et leurs résultats prouvent que des objectifs comme la croissance économique, la compétitivité et la réaction aux défis environnementaux peuvent se renforcer mutuellement.

[Traduction]

    À la diapositive 17, vous trouverez un tableau du coût de la réduction des émissions qui est très complexe, mais que je vais simplifier pour vous. Tout ce qui se trouve en dessous de la ligne représente ce que nous avons réalisé à ce jour, et tout ce qui se trouve au-dessus de la ligne — énergie nucléaire, énergie éolienne, reboisement, énergie solaire, passage du charbon au gaz et protection de la forêt — sont autant de technologies dans lesquelles nous pourrions investir et qui donneront des résultats.
    En ce qui concerne les politiques et la réglementation — à la diapositive 18 — pour tirer avantage des solutions actuelles, encourager le développement de nouvelles solutions et profiter de mesures antérieures, le Canada et des entreprises comme la mienne ont besoin d'un cadre de politique intelligent, d'une réglementation intelligente et d'une approche pragmatique dans le choix des outils que nous utiliserons.
    Une combinaison stratégique de politiques, de règlements, d'impôt et d'incitatifs afin d'encourager fortement les investissements dans les technologies et l'efficacité énergétique aidera les entreprises à tirer le maximum de leurs plans d'affaires et de leurs cycles d'investissement et contribuera, d'après nous, à créer des situations gagnant-gagnant.
    Nous avons besoin d'une série d'approches qui tiennent compte de ce que les entreprises ont déjà accompli. Ces approches doivent être souples, c'est-à-dire que tous les secteurs font face à des réalités différentes et s'il est vrai qu'il nous faut des incitatifs pour développer davantage la technologie, il y a beaucoup de choses que nous pouvons faire et beaucoup de choses que nous avons déjà faites. Les approches sectorielles au Canada peuvent s'appuyer sur ce qu'ont déjà fait certaines provinces, comme l'industrie de l'aluminium au Québec, y compris les mesures volontaires inclues dans la boîte à outils des organismes de réglementation.

[Français]

    Parlons de notre approche coordonnée.
    La coopération fédérale-provinciale, comme vous allez le voir à la diapositive 19, est essentielle afin d'assurer la bonne réglementation des émissions des gaz à effet de serre et des polluants atmosphériques. Il faut adopter les dispositions sur l'équivalence dans le projet de loi C-30 pour éviter les chevauchements et les conflits de réglementation. L'équivalence d'effet permettra d'obtenir les mêmes résultats que l'équivalence de réglementation en ce qui a trait à l'atteinte des objectifs politiques globaux.
    Nous soutenons le pouvoir du gouvernement fédéral de réglementer directement, lorsque cela est nécessaire. Nous conseillons d'user de prudence dans l'examen ou le réexamen des normes dans un secteur comme celui de l'aluminium et dans d'autres, car elles sont déjà bien établies à l'échelle provinciale, aussi bien pour les polluants atmosphériques que pour les gaz à effet de serre. Elles donnent déjà des résultats importants et des plans concrets pour l'avenir.

[Traduction]

    Au sujet des politiques et de la réglementation, à la diapositive 20, les objectifs obligatoires doivent constituer un élément important de la boîte à outils, car ils permettent d'établir des objectifs à long terme clairs, transparents et uniformes et ils représentent l'intention stratégique de la position que nous souhaitons atteindre. Des objectifs à long terme permettent de fixer des jalons intermédiaires clairs afin de libérer les forces concurrentielles du marché. Mais nous avons besoin d'objectifs à court et à moyen terme qui nous incitent à passer immédiatement à l'action. Certains d'entre nous ont déjà commencé à agir.
    Enfin, au sujet des instruments du marché, les gouvernements doivent établir les règles et la réglementation visant à assurer le bon fonctionnement du marché, y compris un système d'échange des droits d'émission et de compensation, pour ensuite se retirer afin de laisser les forces du marché agir efficacement.
    Pour ce qui est des objectifs de l'industrie de l'aluminium, pour certaines industries, comme celle de l'aluminium, il sera important de mesurer le niveau réel et l'intensité des émissions afin de savoir où nous en sommes — jusqu'à ce que les réductions issues des applications en aval soient elles aussi reconnues. Afin de situer les objectifs de réduction de l'intensité, il faut savoir qu'ils nous permettent simplement d'améliorer constamment notre efficience et de poser des repères. C'est pourquoi ils sont importants. Toutefois, la fixation d'objectifs de réduction absolue sans égard à la croissance de l'industrie, à la rotation des stocks de produits et aux possibilités de recyclage risque de nuire sérieusement à la capacité de tirer avantage des bénéfices énergétiques inhérents de n'importe quel matériau et de ses qualités de réduction des émissions de GES.
    En guise de conclusion, monsieur le président, depuis le début des années 90, Alcan prend très au sérieux le besoin d'agir en ce qui a trait à la réduction des GES et à sa performance environnementale et a adopté de nombreuses mesures fructueuses jusqu'à présent. Si nous voulons être concurrentiels — et c'est aussi une question de compétitivité —, nous devons tous passer aux actes et nous aurons besoin d'approches intelligentes et pragmatiques qui favoriseront l'amélioration des performances environnementales tout en rehaussant la compétitivité de l'économie canadienne.
    Notre message, c'est que nous y croyons depuis un certain temps déjà et qu'il est maintenant temps d'agir.
    Merci beaucoup.
(0915)
    Maintenant, qui fera l'exposé pour l'Association canadienne des producteurs d'acier?
    Monsieur Fraser, votre association dispose de 10 minutes.
    Bonjour, monsieur le président, messieurs les membres du comité et messieurs nos confrères qui participez à ces travaux.

[Français]

    Tout d'abord, je tiens à vous dire, au nom de l'Association des producteurs d'acier du Canada, que nous sommes ravis de la chance qui nous est offerte de comparaître devant vous pour vous faire part du point de vue du secteur canadien de l'acier.
     Nous savons qu'il faut agir de façon concertée pour protéger l'environnement et nous sommes convaincus qu'il est possible d'atteindre un bon rendement à la fois sur le plan environnemental et sur le plan économique, ce qui assurera une croissance soutenue ainsi que la prospérité de l'économie canadienne et de l'industrie. Nos entreprises ont fait la preuve de leur engagement solide à réaliser des gains environnementaux importants tout en maintenant cet équilibre économique dans le passé.
    Dans mes remarques préliminaires, je vais tout d'abord souligner la grande efficacité de notre industrie quand elle s'est attaquée aux questions d'air propre au cours des 15 dernières années et même au-delà, puisque nous avons dépassé les objectifs fixés par le Protocole de Kyoto pour les gaz à effet de serre et que nous avons obtenu des réductions importantes d'autres émissions.
    Ensuite, je tiens à défendre notre approche en matière de réussite durable qui tient compte à la fois du rendement environnemental et du rendement économique. J'insiste sur la nécessité de continuer à investir dans des technologies propres qui nous permettent de réaliser ces percées.
    Enfin, je dois souligner certains efforts entrepris par notre industrie pour contribuer à mettre en place un secteur durable de l'acier, ce qui sera avantageux pour le Canada.

[Traduction]

    Il est malheureux qu'un pourcentage trop élevé du grand public ait l'impression que le secteur de l'acier contribue de façon importante aux émissions de polluants atmosphériques et de gaz à effet de serre du Canada. En réalité, les publications d'Environnement Canada révèlent que nous ne produisons que 1,8 p.100 des émissions canadiennes de gaz à effet de serre et que 1 p. 100 des polluants atmosphériques.
    En termes relatifs, notre contribution à ces émissions est faible, mais nous avons fait de gros efforts pour obtenir des répercussions importantes en ce qui concerne notre empreinte écologique. Nous nous sommes attaqués très tôt à la réduction des émissions, puisque cela remonte à avant 1990. Et depuis 1990, soit une période pendant laquelle les expéditions d'acier canadien ont augmenté de 13 p. 100, notre industrie a réduit l'intensité de ses émissions de gaz à effet de serre de plus de 24 p. 100 et, en valeur absolue, nous avons réduit nos émissions de GES de près de 15 p. 100, et, en vérité, nous avons dépassé les objectifs fixés par le Protocole de Kyoto d'une réduction de 16 p. 100 très tôt, c'était en 1991.
    Nous avons également réduit sensiblement nos rejets de produits nocifs. C'est ainsi que, entre 1993 et 2003, nous avons réduit nos émissions de benzène de 75 p. 100. Notre objectif, énoncé dans les codes de pratique adoptés volontairement dans le cadre de la LCPE, est de 90 p. 100 d'ici 2015, et nous devrions l'atteindre en 2008, soit sept ans plus tôt que prévu.
    Ces statistiques montrent clairement que notre industrie a fait des efforts importants sur une période prolongée pour améliorer notre rendement environnemental. Nous continuerons à apporter des améliorations, mais nous pensons qu'il est important que tous les secteurs, et l'ensemble des Canadiens, travaillent tous ensemble à s'attaquer de façon équitable et durable à cette question.
    Le secteur canadien de l'acier est parvenu à obtenir des résultats très importants au cours des deux dernières décennies parce que ses membres se sont attaqués tôt à ces problèmes et ont fait preuve d'un engagement sans faille pour faire progresser de pair la durabilité environnementale et le rendement financier et les investissements. Nous sommes parvenus à réduire les émissions des polluants atmosphériques les plus dommageables. Tout, de notre adaptation permanente à des technologies environnementales efficaces à nos investissements dans le domaine de l'énergie pour améliorer son efficience, a fait que nous avons conservé notre rôle de leader dans ce domaine.
    Il est fort compréhensible que nous soyons très fiers de ces résultats. Nous espérons vivement que, en préparant un nouveau cadre réglementaire et de nouvelles cibles, le gouvernement tiendra pleinement compte de nos réalisations jusqu'à maintenant et de l'impossibilité, avec les technologies actuelles, d'améliorer encore sensiblement les résultats à court terme. Nous vous disons respectueusement que vous auriez tort d'ignorer les résultats que nous avons obtenus jusqu'à maintenant et d'imaginer que nous pourrons obtenir immédiatement ou à court terme d'autres gains importants.
    Nous sommes d'avis qu'il est essentiel que le projet de loi C-30 s'accompagne d'un cadre de politique qui fasse progresser les objectifs environnementaux du Canada à l'échelle de la planète en recourant à des politiques nationales visant à la fois la durabilité environnementale et la durabilité économique.
(0920)

[Français]

    Les deux sont liés inextricablement. Si, comme pays ou comme industrie, nous ne sommes pas économiquement viables, nous ne serons pas en mesure d'investir dans les technologies environnementales de pointe. Nous savons que les investissements, l'innovation et les améliorations environnementales vont de pair. Au cours des deux dernières décennies, les entreprises canadiennes du secteur de l'acier ont investi des milliards de dollars en équipement et en processus qui ont permis d'obtenir les progrès environnementaux dont je viens de vous entretenir. Si l'industrie de l'acier n'avait pas obtenu de bons rendements à la fois économiques et environnementaux, elle n'aurait pas pu investir et, en réalité, elle n'aurait pas fait ces investissements.
    Toutefois, quand nous nous tournons vers l'avenir, nous savons que le Canada et les autres pays devront réaliser des investissements majeurs et collaborer pour développer et mettre en oeuvre des technologies environnementales qui constitueront des percées, si nous voulons enregistrer des gains additionnels importants dans des secteurs comme le nôtre. J'insiste sur la notion des percées parce que les possibilités d'amélioration sont très limitées à petite échelle, étant donné que nous en avons déjà accompli plusieurs.
    C'est pourquoi la nouvelle législation et la réglementation qui l'accompagnera doivent tenir compte de plusieurs considérations.
    Il y a tout d'abord, comme je l'ai dit au début, des limites concrètes aux améliorations qu'il serait possible d'obtenir à court terme. Si des technologies qui conviennent et qui sont abordables n'existent pas, elles ne peuvent pas être mises en oeuvre. Ce n'est pas là seulement un point de vue canadien. Nos homologues de toute la planète oeuvrant dans le même secteur d'activité reconnaissent qu'il faudra faire un grand pas technologique en avant pour obtenir à l'avenir des réductions de gaz à effet de serre de la même ampleur que celles que nous avons obtenues au cours des 20 dernières années.
    Une seconde réalité à laquelle nous sommes confrontés est le coût et la complexité du roulement du stock de capital dans nos usines. Nos entreprises suivent des cycles d'investissements de 25 à 30 ans, avec de longues périodes de remboursement. Nos concurrents étrangers sont dans la même situation. Nous ne pouvons pas accélérer ce rythme, car nous verrions alors nos coûts de capital, déjà énormes, gonfler jusqu'à des niveaux non soutenables, auxquels nous ne serions plus concurrentiels. Nous verrions alors les investissements fuir le secteur canadien de l'acier vers d'autres cieux.

[Traduction]

    Si une norme impossible à atteindre en termes économique ou technologique nous est imposée, c'est sur le marché que nous en verrons les répercussions. Dans un tel cas, ce qui ne sera pas fabriqué au Canada pour notre marché sera tout simplement importé. Le marché canadien de l'acier est probablement le plus ouvert dans le monde, puisque plus de 50 p. 100 de notre acier est importé. Le fait de remplacer de l'acier canadien par des produits venant d'autres pays, ayant des normes environnementales moins rigoureuses, devrait donc nuire à nos objectifs économiques et environnementaux si cela devenait nécessaire. Cela aurait aussi pour effet d'accroître et non pas de réduire les émissions mondiales de GES. Dans ce contexte, nous n'aurions pas les capitaux nécessaires pour réinvestir en technologies productives pour l'avenir.
    Soyons clairs : nous ne cherchons pas de normes inférieures à celles de nos concurrents dans d'autres pays industrialisés. Ce que je dis est que les politiques canadiennes doivent tenir compte du fait que nous ne nous trouvons pas dans un vide environnemental ou économique. Notre cadre législatif et réglementaire doit permettre au secteur canadien de l'acier d'être concurrentiel et responsable en termes environnementaux, à la fois sur les marchés internationaux et sur les marchés intérieurs. Nous espérons vous voir adopter une approche législative et réglementaire qui tienne compte de la réalité de nos investissements en immobilisations, de notre rendement et de notre engagement jusqu'à maintenant, et de la nécessité de disposer à l'avenir de technologies permettant de réaliser des percées. Cela suppose de définir des objectifs réalistes à moyen et à long terme, et non pas des objectifs inatteignables à court terme.
    Le secteur canadien de l'acier veut faire partie de la solution, et travaille en partenariat avec les gouvernements et avec d'autres pour y parvenir. C'est pourquoi nous collaborons à de nombreux niveaux au sein de notre industrie à des questions essentielles comme l'efficience énergétique et la réduction accrue des émissions. En 2005, nous avons négocié un protocole d'entente avec Environnement Canada et avec son homologue ontarien pour collaborer tous ensemble à la recherche de moyens devant permettre de réduire à court et à plus long terme des émissions de gaz à effet de serre, sans nuire à la capacité concurrentielle du secteur canadien de l'acier. Ce protocole d'entente constitue un cadre précieux d'analyse et de collaboration permanente, que nous souhaitons poursuivre.
    De plus, nous avons consacré des efforts importants à l'efficience énergétique, qui améliore le rendement environnemental. Au pays, nous jouons un rôle actif dans le Programme d'économie d'énergie dans l'industrie canadienne de Ressources naturelles Canada. Nous joignons nos efforts à ceux du International Iron and Steel Institute (IISI) implanté à Bruxelles pour étalonner les pratiques exemplaires, en nous appuyant sur les principes des meilleures techniques existantes d'application rentable pour chacun des processus du secteur de l'acier. Ces principes joueront un rôle essentiel à court terme.
    À plus long terme, nous travaillons en partenariat avec le gouvernement du Canada à un programme de recherche s'appuyant sur les travaux de l'IISI pour mettre au point précisément les types de percées technologiques dans la fabrication de l'acier dont nous et les autres pays producteurs d'acier aurons besoin.
    Permettez-moi de conclure en insistant sur un certain nombre de préoccupations précises que nous avons.
    Avant tout, nous tenons à ce que vous réalisiez que le Canada a besoin d'une industrie de l'acier qui soit durable à la fois en termes environnementaux et économiques — d'une industrie qui continue à générer les capitaux nécessaires pour améliorer le rendement dans les deux domaines — tout simplement comme nous l'avons fait depuis plus de deux décennies.
    Nous demandons ensuite au gouvernement de tenir compte de la faiblesse des émissions de notre secteur en regard des émissions totales du Canada, et des améliorations très importantes que nous avons déjà obtenues.
    Nous demandons aussi de ne pas adopter de régime réglementaire qui se traduirait par un dédoublement des exigences ou par des exigences contradictoires pour l'industrie. La reconnaissance de la réglementation des gouvernements provinciaux, au moyen d'ententes sur les équivalences, réduirait au minimum le fardeau de la conformité à assumer par le gouvernement et par l'industrie.
    Notre quatrième souhait est que la réglementation en cours de rédaction reconnaisse les limites des sciences et de la technologie qu'il sera possible d'appliquer à court terme à nos processus. Ne pas le faire reviendrait à pénaliser notre secteur et pousser au déménagement de la production dans d'autres pays. Nous vous demandons également d'appuyer des mesures politiques et budgétaires stimulant les investissements en nouvelles technologies, en réalisant bien que les améliorations environnementales — tout comme les réductions de consommation d'énergie — sont le fruit d'investissements en nouveaux produits et en nouveaux processus.
    Mesdames et messieurs, je vous remercie encore de cette occasion de nous présenter devant vous ce matin.
(0925)
    Merci beaucoup, monsieur Fraser.
    C'est maintenant le tour de M. Marikkar, d'Interface Flooring Systems (Canada) Inc. Vous avez 10 minutes.
    La revendication d'une industrie durable s'est fait entendre parce que les émissions provenant des procédés industriels et manufacturiers empoisonnent l'air que nous respirons, perturbent les chaînes alimentaires, nuisent à la végétation et contaminent les sols. Les effluents industriels sont souvent rejetés directement dans les ruisseaux et les rivières. Des niveaux élevés de métaux et de matières en suspension posent des problèmes de qualité de l'eau et présentent des risques pour la santé publique. La température et le niveau du PH des effluents peuvent également avoir une incidence négative sur la demande biochimique d'oxygène des organismes vivants, ce qui a pour effet de dégrader l'écosystème mondial.
    Des lois sur la qualité de l'air et de l'eau ont été adoptées dans les années 70 pour forcer la réduction de polluants de l'air et de l'eau nuisibles. Par la suite, les mesures législatives ont mis l'accent sur le changement climatique mondial, surtout pour lutter contre les pluies acides. Interface vise à faire mieux que ce qu'on lui demande et d'éliminer tous ces rejets de substances toxiques dans l'atmosphère et l'eau de toutes nos installations dans le monde.
    Interface a été fondée sur des idées qui à l'époque étaient révolutionnaires et a adopté des technologies et des produits pratiquement inconnus sur les marchés nationaux et internationaux. Au fil des années, nous avons assuré la croissance de notre entreprise par des alliances stratégiques et l'acquisition de nombreuses sociétés. Interface a des installations manufacturières sur quatre continents et des bureaux de vente dans 110 pays.
    Notre objectif est d'être le chef de file d'une industrie écologique dans le monde. Cela suppose la création des technologies de l'avenir : des technologies plus douces, plus sensibles et responsables qui imitent les systèmes naturels. Nous sommes en train de refaire complètement notre image et de reformuler tout ce que nous faisons, y compris notre façon de définir notre entreprise. Nous sommes en train de créer une entreprise qui tient compte des besoins de la société et de l'environnement en mettant au point un système de production industriel qui réduira nos coûts et réduira de manière spectaculaire les fardeaux imposés aux organismes vivants.
    L'industrialisme s'est développé à une époque où l'humanité était moins nombreuse, moins matérialiste et où les ressources naturelles étaient abondantes. Le résultat est un système industriel très productif qui prend, transforme et rejette et qui est fondé sur l'hypothèse d'un approvisionnement indéfini de ressources et d'une quantité indéfinie de puits où enfouir nos déchets industriels.
    Même si la capacité de déplacer des montagnes de matières et le style de vie qui en découlait étaient considérés comme souhaitables, aujourd'hui c'est tout à fait le contraire qui est vrai : le taux d'utilisation des matières menace notre prospérité au lieu de la rehausser. À Interface, nous reconnaissons que nous faisons partie du problème. Afin de réduire la quantité de matières que nous prenons et de déchets que nous créons, nous devons d'abord analyser tous nos flux — tout ce qui entre et tout ce qui sort. Ce n'est qu'alors que nous pourrons commencer à nous attaquer à la tâche qui nous attend.
    Notre expérience du développement durable a montré que le remède au gaspillage de ressources est rentable, créateur et pratique. Elle permet également de libérer des ressources précieuses pour les rendre disponibles pour les milliards de personnes qui en ont davantage besoin. Pour nous, le développement durable c'est autre chose que les solutions faciles comme le recyclage ou le remplacement des ampoules, bien qu'il s'agisse là de mesures importantes; ce que nous appelons la prochaine révolution industrielle est une façon profondément différente de voir le monde, notre façon de fonctionner dans ce monde, les systèmes qui s'imposeront et ceux qui disparaîtront.
    Même s'il n'y a pas de solution unique à l'impact que nous avons actuellement sur la terre et ses écosystèmes, notre entreprise a une vision : montrer la voie de la prochaine révolution industrielle au XXIe siècle. Nous savons bien que c'est une tâche énorme, mais cela nous rend plus concurrentiels aujourd'hui et assure notre croissance future.
    Interface a montré la voie vers le développement durable en mettant en place sept fronts ambitieux.
    Le premier est l'élimination du gaspillage. Le premier pas vers le développement durable est une campagne visant à éliminer l'idée du gaspillage, et pas seulement de le réduire graduellement. Pour cela, nous écoutons les suggestions de nos employés et nous misons sur le travail d'équipe pour assurer la qualité de nos produits.
    Le deuxième front est l'élimination des émissions nocives. Nous accordons la priorité à l'élimination des émissions qui ont une incidence négative ou un effet toxique sur les systèmes naturels. Interface a recensé 192 cheminées comme étant des sources ponctuelles de pollution atmosphérique en Amérique du Nord, en Europe et en Asie. Bien que toutes les installations d'Interface respectent les règles environnementales en vigueur, notre objectif est d'aller encore plus loin et d'éliminer totalement nos émissions. Les produits Cool Carpet d'Interface sont certifiés climatiquement neutres par un tiers. Cela veut dire que les émissions de gaz à effet de serre produites pendant la totalité du cycle de vie du produit sont compensées.
(0930)
    Le troisième front est l'utilisation d'énergie renouvelable. Il s'agit de réduire la demande d'énergie des procédés d'Interface tout en remplaçant les sources d'énergie non renouvelable pour des sources d'énergie renouvelable durable.
    Le quatrième front est celui de la création d'un processus cyclique. Il s'agit de modifier nos procédés et nos produits pour obtenir des flux de matériaux cycliques.
    Le cinquième front est l'optimisation des transports. Nous explorons des méthodes permettant de réduire le transport des matériaux et des personnes.
    Le sixième front est celui de la sensibilisation des parties prenantes, ou la création d'une collectivité à l'intérieur et à l'extérieur d'Interface qui comprend le fonctionnement des systèmes naturels et notre incidence sur eux.
    Le septième front est la recherche de nouvelles façons de commercer. Nous voulons redéfinir le commerce pour mettre l'accent sur la prestation de services et de produits de grande valeur plutôt que sur le transport de matériaux, et d'encourager des organismes externes à créer des politiques et à mettre en place des mesures pour inciter les marchés à adopter des pratiques durables.
    Pour conquérir ces sept fronts, Interface a élaboré un modèle manufacturier holistique en 1994. Ce parcours de douze ans nous a amené un succès rassurant et une croissance de plus de 10 p. 100. Nos bénéfices ont augmenté, tout comme nos exportations, nos emplois, la qualité et le rendement de notre produit.
    Au cours des douze dernières années, notre installation au Canada a réussi, parmi d'autres exploits, à réaliser des économies totales de 13 millions de dollars U.S. grâce à ces pratiques durables et Interface a réalisé des économies de 299 millions de dollars à l'échelle mondiale.
    Nous avons éliminé neuf des onze polluants atmosphériques émis par notre installation de Belleville et nous avons révoqué le certificat émis par le ministre de l'Environnement.
    Nous avons réduit de 69 p. 100 notre consommation de combustible fossile, de 64 p. 100 nos émissions de gaz à effet de serre et de 92 p. 100 les polluants de l'air intérieur provenant de nos produits. L'Association pulmonaire de l'Ontario a reconnu nos efforts dans le cadre de son programme « Faire : mouvement d'action immédiate pour respirer de l'air pur », jusqu'à ce que le programme soit aboli il y a deux ans.
    Depuis 2006, nous n'utilisons que de l'électricité renouvelable que nous nous procurons en achetant des certificats verts.
    Notre installation ne produit aucun effluent depuis que nous avons éliminé toutes les conduites d'égouts liées à notre procédé. L'industrie de la moquette est reconnue pour la grande quantité d'effluents qu'elle produit, mais notre installation de Belleville ne produit aucun effluent. Nous n'avons aucune conduite d'effluent.
    Nous utilisons 93 p. 100 moins d'eau; nous envoyons 97 p. 100 moins de déchets dans les décharges et seulement l'an dernier, nous avons recyclé 800 000 livres de moquettes après consommation.
    Nous avons recours à la certification par une tierce partie, comme ÉcoLogo, PPE, climatiquement neutre, ISO 9001, ISO 14001, etc. Nous avons des programmes de sensibilisation et d'encouragement des employés qui récompensent leurs pratiques durables et des augmentations salariales supérieures à la moyenne.
    Essentiellement, un modèle d'entreprise durable veut dire gagner de l'argent en faisant quelque chose de bien. Nous vous encourageons à adopter des politiques et des règlements et à mettre en place des incitatifs qui permettront d'assainir l'air. Nous encourageons également tous les gouvernements à utiliser les leviers dont ils disposent, par exemple, un approvisionnement plus écologique.
    Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de comparaître.
(0935)
    Merci, monsieur Marikkar.
    Notre dernier témoin sera M. Gordon Peeling, de l'Association minière du Canada. Monsieur Peeling, vous avez dix minutes.
    L'Association minière du Canada est l'organisme national qui représente l'industrie minière canadienne. L'AMC réunit des sociétés engagées dans les domaines de l'exploration minérale, de l'extraction minière, de la fonte et de l'affinage des métaux, ainsi que de la fabrication de produits semi-finis. Nos sociétés membres génèrent une grande partie de la production canadienne de métaux communs et précieux, de diamants, de sables bitumineux et d'uranium.
    Le prix de rendement environnemental de la fondation GLOBE du Canada dans la catégorie des associations industrielles a été décerné à l'AMC en 2005.
    Le Canada est un des chefs de file de l'industrie minière mondiale : il compte parmi les plus grands des producteurs d'uranium, de nickel, de magnésium, de titane, d'aluminium et de zinc, notamment. Notre industrie fournit du travail à quelque 388 000 Canadiens et contribue au produit intérieur brut à hauteur de 10 milliards de dollars par l'extraction minière, et de 32 milliards de dollars supplémentaires par la fabrication de produits minéraux non métalliques.
    Cette année, l'industrie investit 1,4 milliard de dollars dans l'exploration au Canada. Notre industrie est aussi le principal employeur dans plus de 100 collectivités canadiennes; et de grandes villes canadiennes sont des leaders mondiaux, Toronto en financement minier et Vancouver en expertise en exploration.
    L'industrie minière canadienne joue également un rôle de premier plan sur la scène internationale. Par exemple, notre société minière inscrite à la bourse de Toronto a environ 4 000 projets miniers en marche dans des pays étrangers. Notre industrie a des investissements directs s'élevant à quelque 50 milliards de dollars à l'étranger.
    Je voudrais soulever trois questions. Premièrement, notre industrie réagit au changement. Parmi nos sociétés membres, trois groupes sectoriels — soit les fonderies, les usines de boulettes de minerai de fer et les exploitations de sables bitumineux — sont ciblés par l'avis d'intention d'élaborer et de mettre en oeuvre des règles et d'autres mesures pour réduire les émissions atmosphériques et seront touchés par les délibérations de votre comité.
    Je souligne qu'aux fins de l'avis d'intention, le gouvernement a inclus l'extraction des sables bitumineux dans le secteur pétrolier. J'ai regroupé mes observations au comité sous trois rubriques.
    D'abord, il importe de souligner que notre industrie reconnaît la nécessité de réduire son impact sur l'environnement. Au cours des 15 dernières années, les sociétés membres de l'AMC ont redoublé d'effort, investissant des milliards de dollars dans l'amélioration de leurs procédés et dans des mesures environnementales. L'initiative Vers le développement minier durable, à laquelle adhèrent toutes nos sociétés membres, comprend des mécanismes de mesure du rendement, établit des objectifs précis et comporte un système de vérification externe du rendement visant plusieurs secteurs de l'environnement, dont la consommation d'énergie et les émissions de gaz à effet de serre.
    En ce qui concerne les améliorations concrètes, les sociétés membres de l'AMC ont réduit de 91 p. 100 leurs émissions de mercure dans l'environnement au cours des 10 dernières années. Quant aux émissions de cadmium et de zinc, elles ont été réduites de 71 p. 100, et celles du plomb de 68 p. 100. Ces réductions ont été enregistrées dans tous les sous-secteurs de l'industrie.
    Et malgré une forte croissance, même le secteur des sables bitumineux a enregistré une diminution importante du total de ses émissions de substances telles que le mercure, le dioxyde de soufre, le plomb, l'arsenic et le cadmium. Le tableau 1 qui figure à la fin du présent document donne un complément d'informations sur les progrès réalisés depuis 10 ans par les sociétés membres de l'AMC au chapitre des émissions de dioxyde de soufre. Ces améliorations importantes témoignent de l'efficacité de l'investissement fait par les sociétés minières dans des procédés et des technologies plus propres, par des mesures volontaires proactives, et en réaction aux lois canadiennes.
    À ce titre, d'ailleurs, il convient de souligner l'exemple particulier d'Inco, à Sudbury. La société, qui porte maintenant le nom de CVRD Inco, a récemment mis en service une nouvelle installation qui lui permettra de réduire de 34 p. 100 les émissions de dioxyde de soufre provenant du complexe de Sudbury. Cette technologie d'assainissement du four à lit fluidisé est avant-gardiste et représente un investissement de 115 millions de dollars de la part de CVRD Inco.
    Outre ces réductions d'émissions de substances polluantes particulières, l'industrie a aussi amélioré ses pratiques de gestion de l'énergie et, par le fait même, son rendement relatif aux émissions de gaz à effet de serre. Par exemple, le secteur de la fonte et de l'affinage des métaux a réduit ses besoins énergétiques de 18 p. 100, les faisant passer de 50 térajoules par kilotonne produite en 1990, à 42 térajoules par kilotonne produite en 2004. Ces améliorations traduisent les investissements faits par l'industrie dans la gestion de l'énergie ainsi que dans les technologies de procédés efficaces.
    En termes d'émissions absolues, l'industrie minière, excluant les sables bitumineux, a surpassé l'engagement pris par le Canada aux termes du Protocole de Kyoto, qui visait une réduction de 6 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre. Le tableau 2, à la fin du document, offre plus de détails sur les progrès réalisés par l'industrie au chapitre des émissions de GES et de l'intensité de ces émissions.
    Le secteur des sables bitumineux investit également dans des procédés novateurs afin de réduire sa consommation d'énergie. Par exemple, entre 1990 et 2004, Syncrude a réduit de 14 p. 100 ses émissions de GES par baril produit — le fruit d'engagements financiers importants dans de nouvelles technologies et le renouvellement de l'équipement.
(0940)
    Ensuite j'aimerais parler de l'importance de ne pas perdre de vue les facteurs et les aspects cruciaux qui motivent l'investissement au Canada. Les objectifs doivent être réalisables, et un régime réglementaire et fiscal efficace peut faciliter l'atteinte d'objectifs plus rigoureux. Dans le contexte du marché mondial, les entreprises investissent dans les régions offrant des débouchés, où le gouvernement est doté d'un système réglementaire efficace, où le réseau de transport est moderne, et où des incitatifs fiscaux judicieux sont en place.
    En déterminant le type et la portée des exigences à imposer à l'industrie canadienne, les membres du comité devraient tenir compte de l'ensemble des critères qui influent sur les décisions des investisseurs mondiaux. Cette question est doublement importante lorsqu'on considère que les réductions considérables d'émissions sont généralement le fruit de changements technologiques fondamentaux : les investissements se font au cours de longues périodes pour soutenir le développement, le perfectionnement et la mise en oeuvre de nouvelles technologies.
    Les entreprises qui souhaitent investir doivent aussi pouvoir compter sur un régime d'investissement stable et transparent. Par exemple, en toute justice envers les sociétés minières qui ont pris volontairement des mesures décisives pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, nous sommes d'avis que la démarche du Canada devrait récompenser, et non pénaliser, ces maîtres d'oeuvre pour les investissements qu'ils ont engagés aux fins de l'amélioration. À cet égard, il conviendrait de reconnaître les améliorations réalisées au fil du temps depuis 1990, année de référence du Protocole de Kyoto. Par ailleurs, les objectifs futurs ne devraient pas être gonflés de façon arbitraire en présumant que les réalisations du passé, au chapitre de la réduction des émissions, pourront être répétées à l'avenir.
    Il importe aussi que le comité fonde son analyse environnementale sur une approche intégrée, tenant compte du cycle de vie complet des projets. On doit prêter une attention particulière à l'intégration des exigences en matière de réduction des émissions, notamment les émissions de dioxyde de soufre et de gaz à effet de serre puisque dans certains cas, un investissement visant à réduire les émissions de dioxyde de soufre peut nécessiter une hausse de la consommation d'énergie (et, par conséquent, donner lieu à une augmentation des émissions de gaz à effet de serre). Dans d'autres cas, les seules méthodes possibles pour réduire les émissions de dioxyde de soufre peuvent nécessiter l'utilisation de produits chimiques à base de carbonate, ce qui entraîne une augmentation des émissions de dioxyde de carbone. Les objectifs de réduction des émissions doivent refléter les risques relatifs de sorte que l'on cible les polluants qui présentent les risques les plus menaçants.
    Les objectifs de réduction des émissions doivent aussi tenir compte de l'impact des mesures sur la chaîne de valeur. Par exemple, dans le cas de notre secteur du minerai de fer, la production de boulettes fondantes à valeur ajoutée augmente les émissions relatives de gaz à effet de serre à l'étape du traitement du minerai de fer, mais réduit considérablement les émissions, en aval, à l'étape de la fonte de hauts fourneaux. On doit faire preuve de grande prudence en récompensant ou en pénalisant les producteurs de façon improvisée, sans tenir compte des intrants et des extrants du continuum complet de la production.
    Pour pousser un peu plus loin les dépenses sur la question du continuum et du cycle de vie des projets, il est également logique que le Canada établisse des objectifs qui prévoient des façons d'encourager, au pays, le recyclage des composantes électroniques et autres matières secondaires.
    Enfin, pour clore ce volet de mon exposé sur l'investissement, j'aimerais souligner que l'accélération de la déduction pour l'amortissement des investissements dans des technologies propres contribue à créer un environnement propice à l'investissement. Un certain nombre d'associations industrielles, y compris l'AMC, ont demandé au gouvernement d'envisager un amortissement sur deux ans pour l'investissement dans les procédés et technologies propres. Un tel traitement inciterait encore davantage nos entreprises à investir dans la modernisation de leurs fonderies et affineries. D'autres possibilités existent également dans les domaines de la recherche et du développement, où les partenariats industrie-gouvernement actuels sur des questions telles que le stockage du carbone permettraient d'élargir et d'accélérer le processus afin d'améliorer les dimensions économiques de la quête de nouvelles technologies.
    Enfin, toujours dans la perspective du changement climatique, j'aimerais vous rappeler que l'industrie minière est une industrie mondiale. De fait, au plan de la présence internationale, on peut difficilement trouver un secteur plus mondialisé que le secteur minier canadien. La plus grande partie de la production minière canadienne est vendue à l'étranger, et nos plus grandes sociétés investissent et mènent des projets d'exploration dans d'autres pays.
    L'industrie minière canadienne — qu'il s'agisse des métaux communs, du minerai de fer, des diamants, de l'uranium ou des sables bitumineux, doit affronter la concurrence internationale dans un marché où les prix sont fixés par une bourse mondiale — à Londres et ailleurs. Les sociétés doivent axer leur compétitivité sur la capacité d'explorer, d'accéder aux réserves minérales et de freiner leurs coûts. Bon nombre de nos concurrents internationaux sont établis dans des pays qui offrent d'importants avantages concurrentiels, dont les normes environnementales sont beaucoup moins rigoureuses et où on ne leur impose aucun objectif de réduction des émissions en vertu du Protocole de Kyoto. Dans le cas du secteur du minerai de fer, par exemple, ce sont ces concurrents au Brésil et en Australie, notamment, qui fixent les prix du marché mondial. L'établissement des prix échappe donc entièrement au contrôle des producteurs canadiens; qui plus est, ces derniers n'ont aucun moyen de récupérer leurs coûts additionnels auprès de leurs clients.
    Dans cette perspective, bien que nous appuyions les initiatives axées sur le changement climatique, nous demandons au comité et au gouvernement de tenir également compte du contexte mondial entourant chacun des secteurs industriels en établissant des objectifs précis. Il nous faut de toute instance trouver des solutions avantageuses pour tous, c'est-à-dire des solutions qui nous permettront d'améliorer notre rendement environnemental sans nuire à l'investissement et à la création d'emplois.
    Merci beaucoup de votre attention. Je vous suis reconnaissant de l'occasion que vous m'avez donnée de comparaître aujourd'hui.
(0945)
    Merci beaucoup, monsieur Peeling.
    Nous allons maintenant passer aux questions, et je rappelle à tout le monde que nous allons respecter scrupuleusement l'horaire prévu, puisque nous aurons quelques questions dont nous devrons aussi nous occuper à la fin de la séance.
    Monsieur McGuinty, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, messieurs, d'être venus nous rencontrer ce matin. Je veux revenir à une série de questions que j'ai déjà posées aux représentants de plusieurs secteurs industriels. Beaucoup d'entre vous en ont parlé dans leurs exposés, mais je veux simplement faire en sorte que votre point de vue sur trois éléments différents soit consigné au compte rendu.
    Je vous demanderais d'être aussi brefs que possible puisque nous ne disposons que de sept minutes. Pourriez-vous répondre aux trois questions suivantes.
    Question un : Dans quelle mesure chacun de vos secteurs industriels est-il déjà activement engagé dans tout le processus de Kyoto — c'est-à-dire à l'échelle nationale et à l'échelle internationale?
    Question deux : Le gouvernement a écarté la possibilité que l'industrie canadienne puisse participer aux marchés du carbone internationaux. C'est clair. Nous avons posé la question à quatre reprises et nous avons obtenu quatre réponses très claires. Nous ne participerons pas aux marchés du carbone internationaux. Le président de la Bourse de Toronto a indiqué que cela se traduirait par des coûts vraiment excessifs pour les entreprises canadiennes qui ne pourraient procéder à l'échange de crédits que sur le marché national. Pouvez-vous me dire à moi et aux Canadiens ce que cela signifiera en dollars pour vos entreprises que vous ne puissiez pas participer aux marchés du carbone internationaux?
    Question trois : Beaucoup d'entre vous ont parlé du fait que vous avez déjà atteint vos cibles de Kyoto. Vous les avez dépassées. Pouvez-vous nous aider à comprendre de quelle façon vous aimeriez que l'on reconnaisse les mesures précoces que vous avez prises, les mesures que vous avez prises depuis 1990? Je crois qu'il y a peut-être deux ou trois témoins qui ont clairement indiqué qu'ils avaient déjà atteint les cibles de Kyoto. Que souhaiteriez-vous comme traitement pour vos secteurs respectifs afin de tenir compte des mesures précoces que vous avez prises, et ce, en utilisant 1990 comme année de référence, plutôt que 2003, comme le propose le gouvernement?
    J'aimerais vous entendre sur ces trois aspects.
    Si cela fait 12 questions en tout, vous avez 25 secondes pour répondre à chacune.
    Monsieur Garnier.
    Permettez-moi de mettre une carte sur la table. Je suis président du conseil d'administration de l'Association internationale pour l'échange de droits d'émission. Je veux simplement indiquer clairement ma position avant de commencer.
    Le protocole de Kyoto est ni plus ni moins à l'origine de la décision d'Alcan d'accélérer ses efforts à ce chapitre. C'est ce qui a amené le conseil d'administration et le comité exécutif à décider en 1997 d'agir sans tarder : plus vite nous ferions nos classes, plus nous serions avancés et plus nous aurions un avantage concurrentiel. Ainsi, le Protocole de Kyoto a eu l'effet d'un catalyseur. C'est quelque chose que nous avons pris au sérieux et qui nous a incité à agir. S'agissant de l'avenir, je crois que, dans le cas de Kyoto, l'important est de savoir ce que nous ferons après 2012. Si nous n'avons pas un nouvel ensemble de cibles, peu importe que nous atteignions celles qui existent déjà, tout va s'effondrer, et il n'y aura aucune incitation pour les marchés du carbone à fixer le prix du carbone de façon appropriée.
    En ce qui concerne les marchés du carbone et les marchés internationaux, je ne veux pas donner l'impression de prêcher pour ma paroisse — je suis un bon Canadien et un bon Québécois —, mais cela importe peu; nous allons le faire de toute manière. Nous participons déjà au mécanisme d'échange européen et au mécanisme asiatique. Si le Canada a un marché national, nous allons y participer. J'estime toutefois que, dans l'optique de l'avantage concurrentiel, cela ne paraît guère sensé d'avoir simplement un marché du carbone national. Il faudra un marché nord-américain pour compenser l'effet de certains des autres blocs qui existent.
    Deuxièmement, les marchés du carbone doivent être considérés, un, comme le moyen le plus efficient d'avoir une idée du prix auquel devrait se transiger le carbone; et deux, comme une façon d'assurer une valeur ajoutée à la réduction des émissions des émissions de gaz à effet de serre. Les Européens sont toujours en train de roder leur mécanisme, et ils vont y apporter des rajustements. Le mécanisme va continuer d'exister. Le prix à terme pour le carbone en 2009 se situait à 13 euros ce matin. Il y a donc un mécanisme d'établissement des prix.
    Pour ce qui est d'avoir atteint ou dépasser les cibles de Kyoto, oui, nous l'avons fait. Mais pour ce qui est d'être compensé pour avoir pris rapidement des mesures, c'est là une chose à laquelle nous avons renoncé aux tables où nous siégeons depuis cinq ans, et nous avons dit sans ambages : laissez tomber. Il y a toutefois une façon pour le gouvernement, dans son rôle de réglementation où il fixera des cibles pour les divers secteurs, de tenir compte de ce que certaines entreprises ont déjà fait, et ce serait de ne pas revenir à 1990. Dans les secteurs qui ont été des chefs de file et qui ont dépassé leurs cibles, l'année de référence pourrait être différente. On pourrait dire : tel secteur a déjà atteint ses cibles alors son année de référence sera 2000 plutôt que 1990. Dans les secteurs qui n'ont pas atteint leurs cibles, l'année de référence pourrait être différente. Il existe divers moyens de tenir compte dans la réglementation de ce qu'on fait certains secteurs industriels et leur permettre de tirer un avantage du fait qu'ils ont agi rapidement. Il incombera aux responsables de la réglementation d'en décider.
(0950)
    Qui sera le suivant?
    Permettez-moi d'abonder dans le sens de ce que vient de dire Dan quant à la façon de compenser ceux qui auront pris rapidement des mesures. C'est là quelque chose que nous réclamons depuis le début, parce que notre secteur s'est engagé dans la voie de l'efficience énergétique dès les années 70 et que nous nous sommes fixés comme objectif à long terme d'améliorer de 1 p. 100 par an nos gains d'efficience énergétique. C'est ce qui nous a amenés en fait à commencer à mesurer les réductions de gaz à effet de serre qui découlaient de ces gains d'efficience et à passer ensuite à des cibles de réduction plus absolues. Alors, même si nous voulons que l'on reconnaisse ceux qui ont agi rapidement — et j'estime que la solution qui consisterait à prendre l'année de référence différente comme point de départ est très élégante —, nous sommes déçus que le gouvernement n'ait jamais semblé prêt à faire une distinction entre ceux qui avaient pris rapidement des mesures et ceux qui s'étaient traînés les pieds. Par conséquent, il a adopté un système qui s'appliquerait à tout le monde, et il se trouvait ainsi à pénaliser dans les faits ceux qui avaient agi rapidement et à récompenser ceux qui n'avaient rien fait.
    Cela dit, il y a différentes façons d'aborder la situation. Ce n'est pas que nous ne voulons pas de cibles. Nous avons toujours à coeur d'atteindre nos cibles. Nous continuerons à améliorer nos procédés, et nous voulons des cibles raisonnables. Les acteurs les plus importants devront changer en profondeur leur façon de faire les choses et il faudra pour cela des investissements à long terme, d'où l'intérêt considérable d'un fonds d'investissement.
    En ce qui concerne l'échange de crédits, permettez-moi de dire que ce ne serait que prudent de mettre au point un mécanisme d'échange, sinon on risque d'entraîner des distorsions sur le marché ou d'imposer des plafonds mal avisés à un certain secteur ou à certaines installations. Rien ne doit être laissé au hasard. Il faudrait un marché suffisamment vaste, un processus de mesures et de vérifications, une application uniforme et un fardeau administratif peu élevé. Dans la conception d'un mécanisme national pour l'échange d'émissions de gaz à effet de serre, il faut prévoir la possibilité que le mécanisme soit relié aux marchés internationaux. Il serait peut-être possible d'instaurer des marchés régionaux pour les polluants atmosphériques dans certaines régions. Qu'on pense au SO2, par exemple. Il ne faut pas s'arrêter aux seuls gaz à effet de serre quand on pense aux divers types de mécanismes qui pourraient être mis en place, mécanismes de plafond et d'échange de crédits, mécanismes d'échange de droits d'émission, etc.
    Nous considérons que, si le gouvernement optait dans un premier temps pour un mécanisme restreint, nous aurions des réserves quant aux liquidités du marché et à sa taille. Mais si c'est ce qu'on choisit comme point de départ, comme l'a indiqué Dan, et il faudrait prévoir la possibilité d'un lien avec les mécanismes d'échange internationaux afin d'avoir accès à un réseau d'échange assez vaste.
    Merci. Nous devons passer au suivant.

[Français]

    Monsieur Bigras, vous avez sept minutes, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    D'abord, je souhaite la bienvenue à nos témoins.

[Traduction]

    Je suis désolé, monsieur Marikkar, mais nous devons passer au suivant. Le temps de parole est écoulé. Nous aurons sans doute la possibilité de revenir à cette question.

[Français]

    Merci de votre présence au comité.
    Je suis plutôt surpris, monsieur Gagnier, de vous entendre suggérer ce matin qu'on laisse tomber les crédits pour action précoce. Cette semaine, on recevait des représentants d'Hydro-Québec au comité qui disaient qu'il fallait effectivement respecter le principe d'équité. Je pense que c'est fondamental de faire en sorte que des entreprises ayant réduit considérablement leurs émissions de gaz à effet de serre, non seulement sur le plan de l'intensité mais aussi sur le plan de la quantité absolue de réduction, puissent être récompensées.
    J'aimerais que vous m'expliquiez comment on pourrait intégrer ce principe d'équité dans une approche sectorielle, dans la mesure où nous laisserions tomber ces mesures hâtives qui sont souvent demandées par les secteurs industriels. On sait que, particulièrement au Québec, l'industrie de l'aluminium est grandement liée au secteur énergétique. Comment pouvez-vous concilier le fait qu'Hydro-Québec réclame des mesures hâtives, dans le système et dans l'approche, alors que votre secteur industriel, qui est grandement lié au secteur énergétique, ne le demande pas?
    En tant que propriétaires de nos propres centrales hydroélectriques, nous avons un avantage compétitif, en termes écoénergétiques, pour l'électrolyse de notre matériel. Il y a deux manières de calculer. On calcule l'indirect, c'est-à-dire les sources d'énergie pour les procédés industriels. Effectivement, quand vous parlez d'Hydro Québec, en particulier, ou de BC Hydro, il y a un avantage compétitif et géographique, à cause du bassin hydroélectrique. C'est normal. Alors, dans ces deux provinces, il y a un avantage. Il n'y a pas le même avantage en Alberta.
    Dans notre cas, les émissions sont directes dans la fabrication de l'aluminium, soit l'aluminium primaire ou secondaire. C'est là où nous disons qu'il n'y a pas un gouvernement en Europe, en Asie, en Australie ou n'importe où ailleurs qui nous a dit que nous étions tellement performants qu'il allait nous donner tous les crédits que l'on veut, rétroactivement à 1990. Ce sont les pays qui font partie du Protocole de Kyoto qui ont une marge, une enveloppe de crédits à allouer. Alors, si vous allouez tous les crédits à ceux qui ont réagi tôt et qui ont livré des marges importantes en termes de réduction d'émissions à effet de serre, vous allez en avoir moins pour encourager les autres.
    Alors, nous croyons qu'il faut plutôt se montrer plus pragmatique et plus réaliste et considérer les moyens à prendre. On pourrait dire, par exemple au secteur de l'acier, qui a investi des centaines de millions de dollars pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre, qu'on va établir des cibles par secteur, mais que son point de départ ne sera pas l'année 1990, mais plutôt l'année 1996 ou l'année 2000. Alors, cela lui donne une compensation pour ce qu'il a déjà fait, et vous mettez l'accent sur le futur, en lui demandant qu'il entend faire à l'avenir dans ce domaine.
(0955)
    Vous nous dites ce matin que vous pourriez toujours vous débrouiller avec une cible absolue, mais que l'option que vous défendez est plutôt celle de l'intensité.
    Cette semaine, les représentants de la Bourse de Toronto nous ont indiqué que cela pourrait créer certains problèmes. Même l'Institut Pembina nous a dit carrément que le système européen s'appuyait sur les valeurs absolues et que ce serait très difficile d'intégrer le marché canadien du carbone si nous options pour l'intensité.
     Comment pouvez-vous favoriser la promotion de l'intensité alors que, d'une part, certains secteurs disent que cela créerait des frais administratifs, des frais supplémentaires dans le cadre du marché et, d'autre part, que l'Europe dit que cela créerait un problème si le Canada adoptait l'intensité.
    J'aimerais vous entendre à cet égard.
    On fait les deux calculs. Il y a des normes, comme ISO 14064 à laquelle Alcan a travaillé, qui établit les normes et les standards pour faire vos vérifications de réduction de gaz à effet de serre. On fait deux calculs. D'abord, on fait le calcul d'intensité, qui est important parce que c'est de l'amélioration continue. Vous devenez le benchmark dans votre industrie.
    Par exemple, si on devient un benchmark à l'international, l'Institut international de l'aluminium a calculé que d'ici 2017, en utilisant la moyenne de la meilleure pratique de toutes les alumineries dans le monde, l'industrie de l'aluminium sera neutre en termes d'émissions de carbone. Alors, il s'agit d'élever tout le monde au même niveau d'excellence opérationnelle. On fait le calcul aussi sur la base actuelle, ce qui ne nous coûte pas plus cher puisque nous utilisons une formule. Alors, quand on sort nos chiffres, on sort les deux en même temps. Si vous avez un marché de carbone sur le mode cap and trade, ce n'est pas de l'intensité que vous vendrez, mais de l'actuel.
    Alcan est allé en Grande-Bretagne, en France et ailleurs pour vendre des crédits qui sont actuels, tandis qu'à l'intérieur, l'intensité nous permet de continuer à améliorer les émissions par livre, par kilo, par tonne d'aluminium que nous produisons dans notre système. Alors, il s'agit de faire les deux à la fois.
    Excellent.
    J'ai une dernière question. À la page 18 de votre mémoire, dans le dernier paragraphe, vous nous indiquez, et je vous cite: « Les approches sectorielles au Canada peuvent s'appuyer sur ce qu'on a déjà fait dans certaines provinces, comme l'industrie de l'aluminium au Québec [...] »
    On a toujours favorisé une approche territoriale dans la lutte contre les changements climatiques parce qu'on pense qu'elle est la plus efficace. Vous semblez nous dire que, d'un côté, vous favorisez l'approche sectorielle, mais que, d'un autre côté, vous souhaitez que la considération territoriale, c'est-à-dire les efforts qui ont été faits dans certaines provinces, soit incluse.
    Croyez-vous qu'il y ait un moyen — je ne veux pas donner l'exemple du modèle européen, bien sûr, qui met en place une approche critique, une approche sectorielle et territoriale — de concilier les deux approches pour intégrer plus d'équité dans le système?
(1000)
    En bref, oui. Au Québec, c'était un accord négocié avec le gouvernement, un accord exécutif vérifié par une tierce partie qui a établi une cible de réduction de 200 000 tonnes de CO2; on a livré plus de 600.
    L'approche que vous pouvez utiliser en Alberta sera donc tout à fait différente, parce que vous avez une autre spécificité industrielle, soit l'huile et le pétrole. Encore une fois, les cibles peuvent varier, mais à la base, il faut qu'il y ait des réductions des émissions de gaz à effet de serre.

[Traduction]

    Merci. Nous allons maintenant passer au suivant.
    Monsieur Cullen, vous avez sept minutes.
    Je voudrais simplement qu'on nous dise ce qui se passe au juste. Combien de temps —?
    Je crois que ce n'est que le début. Je ne pense pas qu'il se passe quelque chose. Nous allons vérifier.
    D'accord, merci.
    Merci, messieurs, d'être là ce matin.
    Parmi tous les témoins que nous avons entendus jusqu'à maintenant — je crois que nous en sommes à notre 13e ou 14e séance sur ce projet de loi et que nous étudions le sujet depuis deux ans et demi. On m'a remis hier un document dans lequel un député néo-démocrate soulevait la question du changement climatique à la Chambre des communes en 1983. Il y a donc assez longtemps que nous débattons de la question.
    Le débat qui jusqu'à maintenant portait sur le bien-fondé du respect du Protocole de Kyoto semble être plus axé dorénavant sur les moyens à prendre et la façon de procéder. La question des difficultés économiques qui découleraient du respect de nos obligations internationales semble aussi prendre une autre orientation. La plupart des témoins que nous avons entendus ce matin, comme l'a fait remarquer M. McGuinty, ont dit qu'ils avaient atteint ou dépassé leurs cibles de secteur tout en poursuivant leur rythme de croissance — le secteur de l'acier, l'Association minière et, plus particulièrement, Alcan.
    Commençons par M. Peeling. L'idée voulant que, pour atteindre des cibles absolues, pour respecter une norme internationale à laquelle notre pays a souscrit, il faudra faire des sacrifices économiques —, le choix est-il aussi simple que cela? Le pays qui se fixe une cible relative aux GES doit-il nécessairement subir des conséquences économiques afin de respecter cette cible?
    Tout dépend de la façon dont la cible est établie et des outils dont on dispose pour l'atteindre. Plus la cible est rigide, plus ce sera difficile pour l'industrie.
    C'est pour cette raison que j'ai insisté sur l'importance du stock de capital disponible à court terme, des paramètres du climat d'investissement, du coffre à outils et des mesures incitatives pour amener l'industrie à faire plus. Nous sommes dans un cycle de capital de 30 ans. Nos technologies sont là pour le long terme et pour que nous passions à de nouvelles technologies — et dans bien des cas ces technologies n'existent pas encore et nous investissons dans la recherche en ce sens —, il faudra certainement des mesures d'incitation.
    Nous avons besoin de ces choses-là, alors il n'est pas nécessaire que ce soit douloureux. Si nous avons les outils qu'il nous faut, il n'est pas nécessaire que ce soit douloureux.
    C'est ce que beaucoup d'entre nous croyaient et espéraient depuis déjà assez longtemps.
    Même si votre association minière a été assujettie aux conditions et aux cibles qui ont été fixées par le gouvernement, le gouvernement de l'époque n'a pas fait grand-chose pour ce qui est des nombreux — Il y a eu une foule de tables rondes et de discussions. Les consultations se sont poursuivies pendant des années, mais il n'y a pas eu beaucoup d'incitatifs économiques. Il n'y a pas eu beaucoup d'incitatifs fiscaux. Le secteur était, en quelque sorte, laissé à lui-même. Pourtant, les chiffres que vous nous avez présentés aujourd'hui montrent que vous avez réalisé des progrès importants dans la voie de l'efficience énergétique et de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Je ne peux que m'imaginer tous les gains supplémentaires que vous pourriez réaliser s'il y avait des politiques progressistes en place.
    Je voudrais aussi entendre M. Fraser sur cette question. Vous avez parlé de croissance. Le secteur a connu une croissance de 13 p. 100 tout en réduisant ses émissions de gaz à effet de serre de 15 p. 100.
    En effet, et ces gains ont pu être réalisés grâce à l'utilisation de meilleures technologies. Comme M. Gagnier l'a expliqué dans le cas du secteur de l'aluminium, la situation est à peu près la même pour la plupart d'entre nous qui participent à ce que nous appelons l'industrie lourde. Nous continuons à réaliser des progrès en utilisant les meilleures technologies disponibles.
    Si vous me permettez de renforcer ce que vous avez dit au sujet du secteur minier, tout dépend de la façon dont les cibles sont fixées. Si elles sont fixées en tenant compte des contraintes des technologies existantes et de ce qui est justifiable sur le plan économique, les conséquences seront d'autant moins douloureuses que le contexte économique sera plus favorable. Si toutefois les cibles supposent le recours à des technologies qui n'existent pas encore, elles ne seront autre chose qu'une taxe.
(1005)
    Entendu.
    S'agissant des outils disponibles, nous avons entendu clairement que l'échange de crédits à l'échelle internationale est un outil important. Nous vous avons également entendu nous présenter des chiffres qui montrent que vous avez réussi à effectuer une réduction absolue des gaz à effet de serre tout en faisant des gains économiques; c'est donc dire que cela pourrait aussi se faire à l'avenir. Il est important de le souligner à mon avis, car certains disent que l'industrie canadienne ne pourrait pas survivre à l'établissement de cibles absolues, à l'imposition d'une réduction absolue des gaz à effet de serre, car l'économie s'en trouverait suffoquée.
    Mais nous venons d'entendre ce matin des représentants des plus importants secteurs industriels nous dire qu'ils ont effectué des réductions absolues de leurs émissions de gaz à effet de serre tout en poursuivant leur croissance économique. C'est donc un mythe qu'il faut détruire.
    Je dois me tourner maintenant vers M. Gagnier. L'énergie qui est produite au Québec est presque exclusivement d'origine hydroélectrique. En quoi cela représente-t-il un avantage pour votre entreprise sur le plan des coûts énergétiques ainsi que sur le plan des émissions polluantes?
    S'agissant d'émissions, il y a un ordre hiérarchique qui va du nucléaire au pétrole lourd et au charbon. Dans chaque secteur, il y a des technologies qui peuvent contribuer à éliminer le carbone ou à le capter et à le stocker. Il faut donc prendre ce virage technologique. C'est pourquoi Alcan recommande que le gouvernement crée un contexte favorable aux investissements dans le captage et le stockage du carbone et dans la technologie du charbon épuré.
    Mais notre avantage n'est un avantage que si l'on tient compte du coût de toutes les ressources que nous utilisons. Pendant bien des années, Alcan ne s'inquiétait pas trop du coût de l'électricité qu'elle utilisait; elle disait: nous en avons en abondance, nous allons fabriquer de l'aluminium et, même si nous n'utilisons pas vraiment cette énergie de façon efficiente, nos opérations seront quand même rentables. Aujourd'hui, nous avons un système qui ne nous permet plus de faire cela. Nous ne pouvons plus le faire pour l'électricité ni pour l'eau. Alors, nous tenons compte de la totalité des coûts afin de nous assurer de pouvoir être, comme vous l'avez dit, beaucoup plus efficients dans notre utilisation des ressources.
    Ainsi, nous avons réduit notre consommation d'eau. Nous avons de l'eau en abondance au Canada. Nous avons réduit de plus de 90 p. 100 la quantité d'eau que nous utilisons pour nos procédés industriels. Mais nous l'avons fait parce que nous considérons l'eau comme un coût.
    Il y a quelque chose que je veux bien comprendre. Un des éléments clés de la création d'Alcan au Québec était la capacité de produire de l'énergie peu coûteuse et peu polluante. Cela s'est avéré un avantage. Nous ne le savions pas il y a 60 ou 70 ans, mais nous le savons maintenant. Mais l'eau appartient à qui?
    L'eau appartient à la population, à l'État. Les droits d'Alcan au Québec et en Colombie-Britannique sont essentiellement des accords qui confèrent à Alcan l'intendance économique et environnementale de ces bassins hydrauliques. Si nous ne nous en occupons pas mieux que quiconque, la population et l'État pourront à un moment donné nous en retirer l'intendance.
    Nous avons jusqu'à maintenant deux bassins hydrauliques, dont un qui est de la taille de la Suisse. Et nous assurons une bonne intendance économique et environnementale de ces ressources. C'est pourquoi les collectivités et les provinces appuient ce genre d'activité. Nous avons investi, uniquement depuis que je suis chez Alcan, plus de 150 millions de dollars dans l'entretien de ces systèmes.
    Alors, nous investissons, nous utilisons des capitaux privés pour entretenir les infrastructures. Je vous donne un exemple. Lorsqu'il y a eu les inondations du Saguenay au Québec, beaucoup de barrages se sont effondrés. Dieu merci, aucun des barrages d'Alcan n'a lâché, car cela aurait été désastreux. Le Lac-St-Jean est notre réservoir.
    Nous devons passer au suivant. Merci beaucoup.
    Monsieur Warawa, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être venus. Et merci aussi des documents remis et des excellents exposés
    Monsieur Gagnier, vous avez dit dans votre exposé que le Canada a besoin d'un cadre politique intelligent, d'une réglementation intelligente et de pragmatisme, d'un coffre à outils. Il faut savoir où on s'en va. Le gouvernement a travaillé fort sur le projet de loi C-30, et c'est de cela que nous discutons aujourd'hui. Je suis sûr que chacun de vous a étudié le projet de loi C-30 et l'avis d'intention. Je suis sûr que vous savez tous qu'il est prévu dans cet avis que des cibles seront fixées à court, moyen et long terme. Les cibles à court terme sont fondées sur l'intensité pour les émissions de gaz à effet de serre et elles seront annoncées sous peu. Il s'agit de plafonds fixes, à court terme, pour les niveaux de pollution.
    Vous avez également parlé de votre déception face au manque de leadership du précédent gouvernement; vous avez dit que vous aviez pris des mesures volontaires, alors que le projet de loi C-30 nous fait passer d'un régime volontaire à une réglementation obligatoire.
    Êtes-vous d'accord pour dire que nous devrions nous écarter des mesures volontaires? Il y a eu le protocole d'entente et chacun de vous a indiqué que vous faites déjà le travail de toute manière. Mais avez-vous l'impression que l'actuel gouvernement offre un leadership plus clair? Je ne veux pas engager la discussion sur le plan politique, mais avez-vous l'impression que la voie qu'a tracée le gouvernement pour réduire les émissions de gaz à effet de serre grâce au projet de loi C-30 est beaucoup plus claire? Êtes-vous satisfait de la structure de base qui y est prévue?
(1010)
    Je m'en tiendrai à des propos non partisans.
    Nous avons besoin de réglementation. C'est la première chose à faire. Alcan réclame un cadre réglementaire. Le cadre n'a pas besoin d'être des plus intrusifs, mais il doit tracer la voie pour en arriver au résultat escompté. Il nous a fallu 10 ans pour apprendre comment faire les choses, alors que cela vienne d'un gouvernement ici ou d'un gouvernement en Europe, nous apprenons tous. Ce que nous voulons essentiellement, c'est quelque chose qui assure une certaine cohérence. Nous devons investir plus de 10 milliards de dollars pour renouveler notre stock de capital. Nous devons construire une usine de 550 millions de dollars à Jonquière; nous avons entrepris de construire une usine de traitement de revêtement pour cuves usé au Québec, qui va coûter 150 millions de dollars; nous devons moderniser Kitimat. Cela monte à 2 milliards de dollars. Et je pourrais continuer ainsi longtemps. Nous n'allons pas faire ces investissements si notre gouvernement, si quelque gouvernement que ce soit, dit qu'il ne sait pas ce qu'il veut faire en fait de réglementation.
    Pour nous, la réglementation — et ce n'est peut-être pas là le genre de discours que vous entendez de la plupart des représentants du milieu des affaires — est absolument essentielle pour ce qui est de planifier nos décisions d'investissements. Plus vite nous aurons la réglementation, plus vite nous saurons ce que vous, les élus, allez faire pour créer un climat propice aux investissements et établir des cibles environnementales, plus vite nous pourrons agir.
    Monsieur Peeling, pourriez-vous nous parler de l'importance de la certitude du marché aux fins d'investissements?
    Oui, bien sûr. J'abonde pas mal dans le sens des propos de Dan. Il s'agit d'assurer la clarté du processus afin que les entreprises sachent quelles sont les conditions et les réalités qui constituent le cadre dans lequel elles doivent prendre leurs décisions quant aux investissements à faire et au renouvellement de leur capital social, quant aux investissements qu'elles doivent faire dans les nouveaux procédés et les nouvelles technologies et aussi dans les infrastructures nécessaires à leur mise en oeuvre.
    Il leur faut aussi investir dans la recherche pré-concurrence et dans la recherche financée par l'État. L'État doit être un partenaire, mais son rôle consiste à assurer des règles du jeu équitables. Nous avons pris l'initiative à ce chapitre car il est extrêmement important pour nous de gérer nos coûts énergétiques, qui sont considérables. C'est pourquoi nous avons investi beaucoup de temps et d'argent au fil des ans dans la gestion énergétique, et nous pensons pouvoir apporter encore des améliorations avec la technologie existante, mais il nous faut également le soutien et l'infrastructure qui vont en fait exiger de nouveaux procédés et de nouvelles technologies à l'avenir. La certitude joue certainement un rôle clé dans les décisions d'investissements.
    Nous avons entendu les témoins nous parler de manière générale de l'importance d'avoir un cadre bien défini, et c'est justement ce que prévoit le projet de loi C-30 à notre avis, mais notre gouvernement est prêt à écouter les propositions visant à renforcer et à améliorer le projet de loi.
    Nous avons également entendu certaines personnes nous dire que la solution serait de faire payer les entreprises. Ainsi, on nous a dit, je crois que c'était hier ou mardi, qu'il suffirait de faire payer un dollar de plus par baril de pétrole extrait des sables bitumineux pour nous aider à atteindre la cible de Kyoto. Or, depuis 10 ans, les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté de façon radicale au Canada, mais notre objectif serait de nous retrouver en bas ici. Y a-t-il une solution magique, ou avons-nous besoin d'un plan d'action bien défini qui nous amènera en bas ici — pas immédiatement, mais qui, en suivant une trajectoire bien précise, nous assurera l'inertie qui nous permettra d'atteindre cet objectif?
    Si vous le permettez, je ne crois pas aux solutions magiques ni même aux solutions uniques.
    Je crois au contraire que tout le monde devra payer le prix et faire sa part, en commençant par les consommateurs qui devront faire les choix qui s'imposent. Il faudra changer la façon de concevoir les produits et la façon de faire bien des choses. Je crois que c'est Gord Lambert qui a témoigné devant votre comité en disant qu'il pourrait être utile, que cela permettrait de résoudre leurs problèmes, d'ajouter 1 $ au coût du baril de pétrole. Mais je vous ferais remarquer que d'autres gouvernements ont modifié leur régime fiscal tout en respectant le principe de la neutralité fiscale : ils ont reconfiguré leur fiscalité afin de prévoir des incitatifs susceptibles de modifier les comportements. Ils appellent cela l'écologisation de la fiscalité. En Europe, par exemple, on a éliminé les taxes sur la main-d'oeuvre pour en faire porter le fardeau à d'autres secteurs, tout en maintenant la neutralité fiscale sur le plan des charges fiscales totales.
    Ma grande inquiétude — et je ne suis pas politique —, c'est qu'on ne pense qu'à alourdir le fardeau fiscal et qu'il viendra un moment où les gens en auront assez et qu'ils refuseront de changer leur comportement.
    Alors, je ne crois pas qu'il y ait de solutions magiques. Il faudra beaucoup de mesures différentes et beaucoup d'instruments pour amener les différents secteurs de même que les consommateurs à changer leurs comportements.
(1015)
    Merci beaucoup. Nous devons passer à quelqu'un d'autre.
    Je tiens simplement à signaler aux membres du comité que deux ou trois groupes de témoins se sentent peut-être un peu délaissés.
    Monsieur Godfrey, vous avez cinq minutes.
    Permettez-moi simplement de prendre comme point de départ l'avis d'intention pour réglementer la mise en oeuvre du projet de loi C-30. On peut y lire, sous objectifs en ce qui concerne les GES, « À court terme (2010-2015) », que les réductions seraient fonction de l'intensité des émissions et que ce n'est que pour la période de 2020 à 2025 que l'on passerait des objectifs fondés sur l'intensité à des objectifs de réduction absolus. Voilà ce vers quoi tendrait le projet de loi.
    Il me semble avoir entendu tous les témoins dire que vous y êtes déjà. Peut-être avons-nous simplement devant nous des témoins chanceux. En fait, si l'on devait vous demander d'accepter les objectifs de Kyoto pour ce qui est de la réduction absolue des émissions de 2008 à 2012, vous pourriez les respecter. Y a-t-il quelqu'un ici qui ne le pourrait pas?
    Vous y êtes tous déjà. Vous avez déjà franchi l'étape de la réduction de l'intensité. Vous êtes en mesure de respecter les objectifs de Kyoto. Ce qui ressort clairement, c'est que vous êtes déjà en avance sur ce qu'on attend de vous.
    Permettez-moi de vous poser la question suivante: est-il vrai que plus vite nous établirons un régime de réduction ferme pour tout le monde et un régime national d'échange qui sera intégré à d'autres régimes et qui vous permettra d'échanger vos réductions supplémentaires, plus ce serait à votre avantage sur le plan économique, car vous n'arrivez pas à vendre votre surplus à l'heure actuelle? Ai-je raison de dire cela?
    Oui, vous avez raison de dire cela, mais nous n'avons pas effectué ces réductions pour pouvoir les vendre. Si nous avions un mécanisme de plafonds et d'échange de crédits et que le marché national était fluide, nous pourrions essentiellement inciter nos gestionnaires d'usine, qui sont des gens pleins d'imagination, à chercher à réduire encore davantage les émissions de gaz à effet de serre pour pouvoir ensuite se servir de ces crédits. Tout dépendrait de la façon dont le mécanisme serait conçu, pour ce qui est tant de l'échange de crédits que de ce qui serait offert en contrepartie.
    Il en va de même pour le MDP. Si les Européens se servent du MDP et qu'ils peuvent ensuite réinjecter la totalité ou la moitié des crédits dans leur économie, ils vont s'assurer un avantage concurrentiel. S'agissant du MDP, je crois que ce serait une erreur que le gouvernement dise que les entreprises canadiennes ne peuvent pas y participer. C'est justement le mécanisme international à l'intérieur duquel nous pourrions réaliser des progrès.
    Je voudrais creuser ce sujet encore davantage.
    Quand certains font des généralisations et qualifient le mécanisme d'échange international comme étant un mécanisme permettant d'acheter de l'air chaud en Russie — et je ne nommerai personne —, vous répondriez à cela que le mécanisme de développement propre est quelque chose de légitime et de souhaitable pour les entreprises canadiennes.
    En effet, à moins que nous ne voulions permettre aux Européens de nous damer le pion.
    Monsieur Peeling.
    J'ai une petite observation à faire.
    Je tiens à ce qu'il n'y ait pas de méprise possible. S'agissant des sous-secteurs de l'industrie minière, il y a une de nos usines de boulettes de minerai de fer qui ne pourrait pas respecter la cible de Kyoto selon l'échéance prévue. Nous en avons une autre qui ne pourrait pas respecter sa cible à cause de la demande de boulettes à fondant acide puisque l'intensité des émissions de gaz à effet de serre y est plus grande. Ces usines de fabrication de boulettes sont les plus éconergétiques au monde, mais tout dépend de ce qu'exige le secteur de l'acier.
    C'est pour cette raison que j'ai expliqué que, si l'on fixe un objectif arbitraire et que l'on ne tient pas compte du fait que le minerai de fer et le secteur de l'acier font partie d'un même continuum, on oublie que la boulette à fondant acide représente un avantage énorme pour les aciéries qui peuvent ainsi réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, même si les émissions paraissent plus élevées dans le secteur du minerai de fer. C'est pourquoi le mécanisme qui sera adopté devra tenir compte de tout cela, car si l'on ne tient compte que d'une composante, on va pénaliser les usines qui sont déjà les plus efficientes au monde.
(1020)
    Alors, sur le plan technique, il faudrait tenir compte de l'ensemble du processus de fabrication.
    Oui.
    Il semble que tout le monde soit d'accord.
    Certaines entreprises, comme Pembina, ont laissé entendre que vous devriez être dissociés de la production d'électricité et du secteur pétrolier et gazier en amont parce que votre situation est différente. Cela vous paraît-il logique?
    Je ne comprends pas ce règlement, puisqu'il nous est impossible de refiler le coût ni de l'électricité ni du gaz ni du pétrole que nous utilisons. Nous n'avons aucune marge économique. Ce n'est pas nous qui fixons le prix de l'aluminium sur le marché, mais bien le LME.
    J'aimerais présenter un point de vue légèrement différent de celui que vous ont présenté mes collègues en ce qui concerne le mécanisme d'échange de crédits international.
    Je fais partie d'un important groupe international, Mittal. Nous exerçons notre activité dans 60 pays différents, si bien que nous voyons ce qui se passe des deux côtés. Il se produit beaucoup d'acier dans des pays qui ne sont pas signataires du Protocole de Kyoto et qui se sont montrés très peu intéressés ou pas du tout intéressés par les mesures comme celles auxquelles nous serons assujettis en vertu du projet de loi C-30. Nous craignons que si l'on opte simplement pour un mécanisme d'échange de crédits à l'échelle internationale qui permettrait d'acheter des crédits, certains secteurs en seront touchés de façon disproportionnée, le secteur de l'acier, par exemple, et qu'ils déplaceront tout simplement leurs installations de production ailleurs. Il est très facile de déplacer la production d'acier à l'étranger, et c'est là une source d'inquiétude importante pour notre industrie.
    Nous préférerions des politiques qui encouragent et qui favorisent le réinvestissement dans des technologies au Canada pour que nous puissions accroître encore davantage notre capacité d'atteindre des cibles de plus en plus exigeantes.
    Merci, monsieur Fraser.
    Nous passons maintenant à M. Jean pour cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président, et je remercie les témoins d'être venus nous rencontrer.
    J'aimerais vous lire une citation que j'ai reçue de la Bibliothèque du Parlement. La voici : « Le Canada ne pourra absolument pas respecter son objectif en matière de réduction des émissions par des mesures strictement nationales sans ni plus ni moins signer l'arrêt de mort de son économie industrielle. » L'économiste en chef des Manufacturiers et exportateurs canadiens et le président de l'Association canadienne des producteurs pétroliers sont d'accord. Y a-t-il quelqu'un ici qui ne l'est pas? Excellent.
    Je pense que tout le monde est d'accord pour dire que nous voulons améliorer la qualité de l'air au Canada et éliminer certains polluants. Bien entendu, le projet de loi C-30 ne se limite pas aux GES, qui sont l'unique préoccupation du Protocole de Kyoto. Le projet de loi traite de l'air intérieur, ce qui est vraiment étonnant. C'est là quelque chose d'extraordinaire de la part d'un gouvernement. Mais il faut trouver un juste équilibre entre l'économie et l'amélioration de la qualité de l'air.
    Je voudrais maintenant aborder très brièvement la question de ce qu'il en coûtera pour respecter les objectifs de Kyoto. J'ai fait des calculs. J'ai demandé à la Bibliothèque du Parlement de faire des recherches sur ce qu'il en coûterait pour respecter l'engagement de Kyoto — simplement pour acheter des crédits, sans apporter les changements nécessaires à l'échelle nationale, et on m'a fait savoir que, d'après le président du Greenhouse Emissions Management Consortium, le coût minimal se situerait entre 26 et 38 milliards de dollars. Il pourrait s'élever à 38 milliards de dollars sur la période de cinq ans prévue dans le Protocole de Kyoto. Cela représente 2 500 dollars par contribuable, ou environ 5 000 dollars par ménage.
    Nous avons entendu des témoins du Québec, qui avaient été proposés par le Bloc — il y a un monsieur en particulier qui a été très impressionnant — nous dire que les fonds investis dans l'infrastructure rapportent beaucoup d'avantages sur le plan des émissions de gaz à effet de serre et des émissions en général. Pour tout vous dire, avec 36 milliards de dollars, on pourrait payer beaucoup de travaux d'infrastructure au Canada, là où le besoin se fait sentir. On pourrait aussi payer pour mettre au point beaucoup de technologies qui pourraient être vendues dans d'autres pays qui pourraient ainsi réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.
    Messieurs, y a-t-il quelqu'un qui n'est pas d'accord avec cette façon de voir les choses?
    Je ne suis pas en désaccord. Cela vient simplement ajouter à ce que j'ai dit tout à l'heure, à savoir que c'est beaucoup d'argent qui mérite d'être réinvesti dans notre économie, à condition d'avoir un cadre approprié, pour que nous puissions réaliser les objectifs, mais par des moyens économiques. Je pense que vous avez entendu de la plupart des représentants ce matin que le secteur manufacturier s'est comporté de façon très responsable au cours des quinze ou vingt dernières années, et qu'il a réinvesti dans l'adoption de technologies toujours plus performantes et qu'il a obtenu des résultats considérables. Il a en fait atteint les objectifs du Protocole de Kyoto.
(1025)
    Je n'ai pas beaucoup de temps. Monsieur Gagnier, je vais simplement faire une dernière remarque.
    On pourrait changer les fenêtres de toutes les maisons au Canada, ou presque, et les rendre plus écoénergétiques pour 5 000 dollars chacune. Ce seraient des maisons intelligentes. Je pense à toutes les possibilités que nous avons d'utiliser au Canada l'argent de ces crédits — uniquement l'argent des crédits — pour nous aider ici dans notre pays.
    Je m'adresse à M. Gagnier.
    Je tiens à être très clair. Personne ici ne donne à entendre que le gouvernement devrait injecter des fonds dans le marché, mais les entreprises peuvent décider elles-mêmes des choix —
    Quel marché, monsieur?
    Je veux parler du marché du carbone, que ce soit un marché national ou nord-américain, peu importe. C'est là une question de compétitivité et de rentabilité économique pour les entreprises. Il est trop facile de dire que respecter les cibles de Kyoto nous coûterait 36 milliards de dollars si nous devions acheter des crédits sur le marché du carbone.
    Il est vrai que nos choix ne sont pas toujours heureux à Alcan, sur le plan des intentions — Mais nous ne sommes pas stupides. Nous n'irions pas acheter des crédits sur le marché du carbone à moins que nous n'y trouvions un avantage concurrentiel et que nous puissions ainsi obtenir un transfert de valeurs et une réduction des gaz à effet de serre dans nos installations. Voilà ce que nous recherchons.
    Personne ne dit que le gouvernement devrait investir. Je ne voudrais pas que le gouvernement du Canada achète des crédits en Russie. Je n'achèterais pas des crédits en Russie. S'agissant de marchés du carbone, tout ce que je peux vous dire en fait de recommandation, c'est qu'il faut mieux comprendre comment ce marché fonctionne, car si nous n'avons pas de marché du carbone, nous aurons une taxe sur le carbone.
    J'ai encore des questions à poser, et nous avons un président qui est très sévère.
    On nous a parlé du coût de la séquestration du carbone. D'après le Pembina Institute, il s'élèverait à environ un dollar le baril de pétrole, par exemple. J'ai fait quelques recherches là-dessus, et il y aurait 25 p. 100 uniquement pour le coût de transmission; le coût du captage et du stockage serait de 75 p. 100. Cela m'a surpris énormément. Mais j'ai entendu d'autres témoignages selon lesquels le montant pourrait être dix fois plus élevé, parce que la technologie n'existe pas encore.
    Est-il juste de dire que nous ne savons pas ce qu'il en est. Il existe des technologies — la Norvège en a, et d'autres pays aussi — , mais le fait est que personne n'a fait cela à une échelle massive. Dès qu'on accroît l'efficacité du captage — dès qu'on le fait passer de 50 p. 100 à 100 p. 100, par exemple — , cela fait augmenter considérablement le prix.
    Une réponse très courte, s'il vous plaît.
    La technologie n'a pas encore fait ses preuves. Il y a des projets pilotes. Je vous inviterais à voir ce qui se fait en Norvège. Les Norvégiens sont sans doute les plus avancés en la matière, et vous auriez ainsi une idée des paramètres.
    Je suis désolé, mais le temps de parole est écoulé. Je ne voudrais pas ternir ma réputation.

[Français]

    Monsieur Lussier, vous avez la parole pour cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs les panélistes, vous avez fait de très bons commentaires ce matin. Je commencerai par m'adresser à M. Fraser.
    Dans votre document, il est indiqué que 50 p. 100 de notre acier est importé et que les entreprises qui produisent cet acier n'ont pas à se plier à des mesures environnementales très rigoureuses.
     Quels sont les pays auxquels vous faites référence?
    Il y en a plusieurs. J'ai personnellement visité les installations dans certains de ces pays: le Brésil, le Kazakhstan et, peut-être le plus important — on devrait tous comprendre la signification de cela —, la Chine.
    La production en Chine représentera bientôt tout près du tiers de la production mondiale d'acier. La Chine est un formidable compétiteur, et ce, pour toutes sortes de raisons structurelles qui soutiennent l'économie. C'est un compétiteur auquel il est difficile de faire face, parce qu'on lutte contre l'État. Si en plus on crée un environnement économique qui ajoute une taxe supplémentaire ou entraîne un désavantage économique additionnel, de par les gestes qu'on devra poser face à l'environnement, il devient extrêmement difficile de pouvoir justifier les investissements supplémentaires qui nous permettraient d'atteindre les objectifs dont on discute ici ce matin.
    Merci.
    M. Marikkar, vous avez fourni des chiffres très impressionnants sur vos entreprises engagées dans la réduction des gaz à effet de serre, et ce, de différentes manières: diminution de l'énergie, diminution de la pollution, diminution des quantités d'eau utilisées et recyclage des fibres.
    Qu'attendez-vous du projet de loi C-30, en ce qui a trait aux mesures d'encouragement qui vous permettraient de continuer à améliorer vos performances?
(1030)

[Traduction]

    Ce que nous attendons du projet de loi C-30, c'est qu'il améliore la qualité de l'air en général, c'est qu'il prévoie des incitatifs et des mécanismes axés sur le marché. Je crois que M. Gagnier en a déjà parlé.
    Nous avons des politiques gouvernementales d'approvisionnement écologique, et il y a également un grand nombre d'entreprises privées qui sont à la recherche de produits écologiques. Nous avons le mécanisme ÉcoLogo qui permet de certifier les vingt produits les plus écologiques. Et si nous avions également un mécanisme axé sur le marché, nous n'aurions plus droit qu'à de beaux discours et nous verrions les entreprises s'engager d'elles-mêmes dans la bonne voie, et d'autres leur emboîteraient le pas. Sur le plan de la réglementation, nous encourageons les décideurs à réglementer les vingt produits les moins écologiques dans chaque secteur. Il faut une approche sectorielle, et cela nous permettrait ensuite de mieux orienter notre action.

[Français]

    Merci, monsieur.
    Monsieur Peeling, dans votre document, vous mentionnez les performances de vos entreprises. Toutefois, il y a un délinquant dans votre liste. En effet, vous dites souvent « excluant les sables bitumineux ». Vous dites que Syncrude a réduit de 14 p. 100 ses émissions par la mesure de l'intensité.
    Comment réagissent les entreprises de votre groupe lorsqu'elles constatent que leur performance en termes de réduction de gaz à effet de serre est un peu contraire aux tendances des entreprises exploitant les sables bitumineux? Y a-t-il un dialogue entre les deux ? Il faudrait aligner les cibles des unes sur celles des autres.

[Traduction]

    Il y a un dialogue considérable entre les secteurs concernés. D'ailleurs, bien souvent, quand nous cherchions à accroître l'efficience énergétique de nos procédés, nous mesurions nos activités à l'aune de ce que faisaient les entreprises qui exploitent les sables bitumineux, parce qu'elles étaient des chefs de file en matière d'efficience énergétique de leurs opérations. Oui, les chiffres sont en hausse dans leur cas à cause de la croissance absolue des investissements dans le secteur.
    Cela m'amène à une remarque que j'aurais voulu faire en réponse à une question précédente, en ce sens que, même si dans l'ensemble d'un secteur ou d'un sous-secteur, nous avons une longueur d'avance par rapport à nos cibles de Kyoto, il y a des domaines particuliers où nous avons des difficultés alors que, dans d'autres, nous sommes éconergétiques. Le fait est que le Canada ne peut pas atteindre les résultats escomptés sans l'engagement des consommateurs, de chacun de nous, dans les choix que nous faisons au jour le jour. Il faudra pas mal de temps pour sensibiliser les consommateurs aux choix individuels qu'ils font et pour les inciter à changer leur comportement en matière de transport en commun, de véhicules automobiles, de voitures de taille réduite, qui sont plus éconergétiques, de carburants de rechange, que sais-je encore? Cela fait tout simplement partie de la réalité avec laquelle nous devons composer.
    Nous avons de nos membres qui sont du secteur des sables bitumineux. Nous en avons aussi dans le secteur de la fabrication de boulettes de minerai de fer. Nous en avons dans le domaine de la fusion et du raffinage. Le Canada a toujours voulu, dans l'exploitation de ses ressources, aller aussi loin que possible sur la trajectoire de la valeur ajoutée de manière à créer des emplois et à se lancer dans la voie de la première transformation et de la fabrication afin de tirer le meilleur parti possible de notre capital ressource. Il faut comprendre que cette première transformation qui permet d'obtenir du métal, des boulettes ou de l'acier est la plus énergivore de toutes les étapes du processus, alors nous avons besoin d'énergie, comme l'a dit Dan. Pendant longtemps, nous avons tenu pour acquis que cette énergie était disponible et que tout le monde devait assumer les mêmes coûts, mais il nous faut être beaucoup plus efficients en matière de consommation d'énergie.
    Merci, monsieur Peeling.
    Nous allons donner la parole à M. Manning, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leurs exposés. Ils nous ont certainement donné de bons conseils.
    Quand on est en affaires, je suppose que la concurrence est toujours une préoccupation, de même que la compétitivité. Quelqu'un pourrait peut-être me dire quelle serait l'incidence sur les échanges et la compétitivité des industries canadiennes si le Canada instaurait des mesures pour respecter ses obligations en vertu du Protocole de Kyoto, alors que d'autres grandes économies et partenaires commerciaux, comme les États-Unis, qui est un de nos principaux partenaires commerciaux, n'en faisaient pas autant?
    Je me demande simplement ce qui se passerait du côté de la concurrence, Dan.
(1035)
    Un certain nombre d'entreprises américaines, dont GE, Alcoa et Duke Energy, se sont regroupées récemment sous la bannière USCAP, United States Climate Action Partnership. Ces entreprises réclament essentiellement un mécanisme de plafonds et d'échange de crédits, elles réclament un régime de réglementation. Je suis profondément convaincu que, étant donné l'interdépendance de nos deux économies, nous devons veiller à ne pas nous causer du tort à nous-mêmes et nous assurer essentiellement une certaine harmonisation entre nos deux économies.
    C'est pourquoi j'ai dit d'entrée de jeu que, quoi que nous fassions, nous devons nous assurer, à peu de choses près, d'avancer par étape, pour que nous puissions apprendre ce que c'est que d'avoir un marché national ou d'avoir des cibles sectorielles. En dernière analyse, nous allons devoir nous assurer que nous avons un bloc nord-américain compétitif au sein duquel nous pourrons agir.
    Monsieur Fraser, avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
    J'abonderais dans le même sens, à savoir qu'un alignement avec les États-Unis est extrêmement important. Comme je l'ai déjà indiqué, les échanges d'acier entre les deux pays sont considérables; dans tous les secteurs, l'activité industrielle est telle que le marché continental — les États-Unis et le Canada — forme une seule entité économique. Si nous devions nous écarter de façon considérable des politiques et de l'environnement économique qui ont cours aux États-Unis, cela pourrait avoir des conséquences très délétères pour l'industrie canadienne.
    Par contre, cela nous donne l'occasion d'élargir notre optique quant à la façon de nous attaquer aux problèmes environnementaux en agissant de concert avec ce qui se fait aux États-Unis.
    Le marché continental serait-il plus bénéfique que le marché international?
    Pour moi, un marché continental est beaucoup plus sensé. Nous connaissons le cadre de réglementation aux États-Unis; c'est une quantité connue. Je dirais qu'il y a beaucoup moins de possibilités de tromper le système ou de contourner les mesures. Sur la scène internationale, il est beaucoup plus difficile d'avoir confiance que le flux monétaire économique, avec les crédits de carbone, serait bien utilisé. Ce serait dommage pour nous d'acheter beaucoup de crédits de carbone dans le monde et qu'en fin de compte, le monde ne réduise pas ces émissions.
    Monsieur Peeling, aimeriez-vous dire quelque chose à ce sujet?
    Oui. Je serai très bref.
    Ce lien avec le marché américain est extrêmement important pour nous, mais à bien des égards, nous avons un point de vue légèrement différent. Bien que les États-Unis soient notre principal marché pour nos produits, nous faisons concurrence au reste du monde pour ce marché aux États-Unis. Cela pourrait devenir un fardeau important pour nous au Canada si nos principaux concurrents pour le marché américain sont la Chine ou d'autres pays qui n'ont pas le fardeau de Kyoto.
    Donc le message ici, à l'aube du prochain cycle de négociation au-delà de 2012, c'est que le gouvernement canadien, avec d'autres gouvernements, devrait s'assurer qu'il y a au moins un certain partage du fardeau entre les pays industrialisés et les pays en développement si le fardeau n'est pas partagé également. Il faut commencer à mettre tout le monde sur un pied d'égalité. À l'heure actuelle, les règles du jeu ne sont que partiellement équitables. C'est une chose.
    L'autre réalité, c'est qu'il y a un élément de l'industrie américaine avec lequel nous devons être en concurrence, absolument. Il est préférable d'avoir des règles du jeu équitables, alors c'est un point très important pour nous.
    Très bien. Nous aimerions maintenant passer au dernier tour de table. Nous serons donc assez stricts.
    Monsieur Holland, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins.
    Ma première question concerne les possibilités que cela représente. Je pense que nous parlons beaucoup des craintes et des problèmes que cela pourrait causer à l'industrie, mais il y a également des possibilités. Quelqu'un a mentionné que ce ne serait pas obligatoirement difficile si on avait les bons outils. L'une des choses dont nous parlons lorsqu'il est question d'un système d'échange et de plafonds, c'est la possibilité que les entreprises retirent un avantage économique lorsqu'elles s'engagent dans un type d'activités appropriées, et qu'elles encouragent en fait ce type d'activités et les rendent avantageuses sur le plan économique.
    Je me demande si vous voulez bien nous parler de certaines de ces possibilités. Il y a également des possibilités pour ce qui est de mettre au point des technologies qui non seulement réduisent les émissions mais aussi améliorent l'efficience et la productivité. Donc, certaines de ces choses peuvent en fait être des incitatifs, comme certains d'entre vous l'ont expliqué, je pense, pour trouver de nouvelles façons de faire les choses et devenir plus productifs, plus concurrentiels, et en tirer également des avantages sur le plan environnemental.
    Je ne sais pas si l'un d'entre vous veut parler spécifiquement de ces possibilités, alors que nous parlons de toutes les choses négatives à cet égard.
(1040)
    Je pense que l'industrie a fait preuve d'autodiscipline pour ce qui est de l'utilisation efficiente de l'énergie, de prendre des mesures sur le plan de l'investissement qui encouragent non seulement la réduction des émissions mais aussi l'amélioration de l'efficience, de la productivité et la réduction des intrants énergétiques.
    Si je peux revenir à la question des difficultés, les difficultés ne sont que relatives si l'on peut garantir que les règles seront les mêmes pour tous dans le monde, on ne peut pas parler de difficulté; il s'agit alors d'un défi. Dès que les règles ne sont pas les mêmes pour les concurrents importants sur la scène mondiale, alors cela devient un gros problème qui cause des difficultés. Nous devons donc nous rappeler que les difficultés ne sont définies que pour ce qui est de la concurrence relative entre les intervenants sur la scène mondiale.
    Nous investissons 300 millions de dollars par an dans la R-D. En convergeant un certain nombre de technologies et en investissant 550 millions de dollars de plus dans cette usine de taille commerciale au Québec dans la technologie AP50, nous prévoyons des gains d'efficience de 20 p. 100, l'élimination de HAP et des émissions de fluorure et une réduction du CO2.
    Or, nous voulons cela dans cinq ans. Si nous investissions moins, nous devrions sans doute attendre de 10 à 12 ans pour réaliser la même chose. Nous devons donc agir plus rapidement et nous avons besoin de cette certitude sur le plan de la réglementation pour pouvoir le faire. C'est là que l'on réalise des gains.
    Je dois continuer, car mon temps est limité.
    Manifestement, ce que notre comité tente de faire, c'est, plutôt que d'apporter tout simplement une série d'amendements mineurs au projet de loi C-30 , nous voulons faire en sorte que la LCPE vous donne vraiment toute une gamme de choix, que ce soit en ce qui concerne les échanges et les limites et peut-être toutes ces autres mesures qui font partie de cette boîte d'outils, pour utiliser votre expression.
    Vous avez mentionné que la nouvelle technologie est en réalité ce qui vous permet surtout de réduire les émissions et de faire des progrès importants pour ce qui est d'atteindre les objectifs en matière de réduction d'émissions. Pouvez-vous me dire quel rôle le gouvernement devrait jouer à cet égard? Nous avons les programmes de partenariat en matière de technologie — quelque chose comme une version verte de ce programme? Quel rôle à votre avis le gouvernement devrait-il jouer pour aider au processus de recherche et de développement, s'il doit jouer un rôle? Jusqu'à quel point est-ce important à votre avis?
    Je pense qu'il s'agit d'aider l'industrie à gérer les risques des technologies qui n'ont pas fait leur preuve. Je ne pense pas qu'il soit ici question nécessairement de cadeaux, mais plutôt de partenariats entre les secteurs public et privé. En d'autres termes, si la technologie du charbon épuré ou la technologie de captage et du stockage du carbone présentent des possibilités raisonnables, alors si nous pouvons avoir des partenariats pour aider à mettre au point cette technologie et partager le risque, nous pourrons faire des gains sur le plan économique, nous ferons des gains sur le plan technologique et sur le plan environnemental également.
    J'aimerais demander aux témoins jusqu'à quel point il est essentiel à votre avis d'agir rapidement à cet égard pour mettre en place des limites raisonnables?
    Le long terme est tout à fait essentiel, car au-delà de 2030, si nous n'avons pas de nouvelles technologies, alors nous aurons des problèmes.
    En plus de ce qui a été dit, on s'efforce considérablement à l'échelle internationale de trouver des moyens de production qui seront plus efficaces. L'IISI, notre association internationale, a un programme qui réunit les ressources à l'échelle mondiale pour faire progresser la technologie et déterminer quelles sont les meilleures pratiques. C'est là un domaine où nous ne nous faisons pas concurrence; nous collaborons pour le bien de l'environnement. Si nous voulons atteindre les objectifs à long terme, il est tout à fait essentiel que nous puissions appuyer directement et indirectement ces efforts, car la technologie et les gros investissements seront à la base de notre succès.
    Merci, monsieur.
    Nous passons à M. Watson, qui a cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à chacun d'entre vous d'être venus témoigner ici aujourd'hui.
    Kyoto a été adopté en 1997 et ce ne sera pas facile. Ce protocole a été l'élément catalyseur qui a fait en sorte que chacune de vos industries a pris des mesures précoces et uniformes et nous avons certainement beaucoup entendu parler de succès à cet égard.
    Naturellement, cela fait contraste avec le manque d'actions précoces de la part du gouvernement précédent pendant huit ans à partir de l'adoption du protocole de Kyoto, alors que pendant sept de ces huit années, il y avait un excédent budgétaire, de sorte que le gouvernement n'avait pas de problèmes de financement. Le gouvernement a été majoritaire pendant sept ans, ce qui est le meilleur climat pour imposer une volonté politique, si on a la volonté politique de le faire. Il y a eu six ans avec les outils actuels de la LCPE, et le gouvernement disait que cela suffisait pour réglementer le secteur. Il est clair que le gouvernement précédent ne devrait pas s'attribuer le mérite de mesures précoces. De façon générale, il a envoyé les mauvais messages à l'industrie.
    En ce qui concerne l'autre débat entourant les mesures précoces, vous avez dit précédemment que vous aviez essentiellement choisi le fruit qui pendait sur une branche plus basse pour améliorer votre secteur, de sorte que vous avez atteint vos premiers objectifs de réductions importantes d'émissions. J'aimerais que chacun d'entre vous me dise combien de temps il vous faudra dans chacun de vos secteurs pour mettre au point les nouvelles technologies qui vous permettront d'atteindre les prochains objectifs de réductions importantes.
    Pouvez-vous nous donner une idée de l'échéancier? Parlons-nous de cinq, dix, quinze ou vingt ans?
(1045)
    Au cours des cinq dernières années, les gains dont je vous ai parlé ont été réalisés au détriment de la technologie AP50 —
    Est-ce que cela concerne des réductions minimes ou considérables?
    On a assisté à des réductions considérables du rendement énergétique, c'est-à-dire 20 p. 100 dans une industrie qui s'en tenait à 1 p. 100 par année. Cela a vraiment été très considérable.
    À plus long terme, par exemple d'ici 2030, il faudra réaliser des percées technologiques, comme réussir à utiliser l'anode permanente ou autre chose, afin de modifier la façon dont se fabrique l'aluminium. Il faudra aussi que nous analysions le cycle de vie, cela afin de savoir comment on peut le mieux réduire les gaz à effet de serre en aval, au moyen des matériaux les plus adaptés, qu'ils s'agissent du plastique, de l'acier, de l'aluminium ou de matériaux composites.
    Est-ce que les représentants des autres secteurs pourraient intervenir ici s'il vous plaît?
    Il faut envisager un horizon de 10 à 15 ans, mais je ne voudrais pas vous donner l'impression qu'il n'y a pas moyen de faire quoi que ce soit à court terme. L'industrie de l'acier estime en effet que la cogénération sur un site intégré peut représenter une occasion non négligeable de faire des progrès.
    Toutefois, ainsi que l'a dit M. Gagnier, il est impératif que le régime de réglementation et les réalités économiques nous apportent davantage de certitude, afin que ces investissements soient fructueux, améliorent sensiblement la situation.
    Monsieur Peeling, monsieur Marikka, voulez-vous intervenir.
    Il ne fait aucun doute que nous pouvons continuer à modifier quelque peu les processus, et nous ferons mieux qu'à l'heure actuelle.
    À titre d'exemple de changement technologique d'envergure, à Terre-Neuve, on est en train de mettre en oeuvre un projet pilote de technologie hydrométallurgique de récupération du nickel, qui coûte 250 millions de dollars et entraînera des coûts de 1,1 milliard de dollars lorsqu'il s'appliquera intégralement. Une fois que l'installation aura été construite, il faudra attendre cinq ans pour en voir les résultats. Ensuite, il s'écoulera beaucoup de temps avant que la technologie ne soit appliquée ailleurs dans l'industrie.
    Cela ne concerne qu'une seule gamme de nos produits. Par conséquent, certaines de ces améliorations n'interviendront que bien au-delà de 2010 ou même 2015, et c'est là que nous avons besoin du soutien gouvernemental.
    En fait, je ne suis pas sûr que ce soit à ce moment-là que l'appui du gouvernement soit le plus important. Nous en avons besoin par rapport à nos activités préalables à celles qui sont proprement économiques, comme par rapport au stockage du carbone, dont la recherche ne peut être intégralement assumée par une seule entreprise, car elle ne serait pas en mesure d'en tirer des avantages. C'est alors qu'on a besoin de partenariats. Il s'agit de solutions à plus long terme mais porteuses de résultats transformateurs.
    Je vais intervenir ici car il me reste à peu près une minute seulement.
    Par rapport aux difficultés de démarrage, elles ne vous ont pas empêché d'agir tôt. Imaginez ce qui se passerait si vous ne l'aviez pas fait dès 1997 et si aujourd'hui, le comité vous annonçait qu'il faut respecter le calendrier de Kyoto.
    J'aimerais maintenant passer aux situations auxquelles les autres secteurs devront peut-être faire face. Étant donné ce par quoi vous êtes passé ces dernières années, quels choix s'offriraient à vous? Que pourriez-vous faire à court terme, si votre échéancier était bref? Quelles mesures pourriez-vous prendre?
    Il serait probablement extrêmement coûteux d'atteindre les mêmes résultats dans un échéancier très serré. Je le répète, il nous a fallu 10 ans pour montrer aux gens comment s'y prendre et comment y consacrer des ressources. Par conséquent, plus on commence tôt, plus on peut réaliser de choses.
    Nous serions toutefois en mesure d'offrir des solutions réalisables sur le plan économique et justifiables et génératrices de grands avantages, comme nous l'avons montré au cours des ans, ce qui est douteux pour le moment. La question est de savoir combien de temps il faut se donner, et si on va aller au-delà de la technologie ayant déjà fait ses preuves.
    Je vous remercie, messieurs.
    Monsieur Scarpaleggia, vous avez décidé de céder une partie de votre temps de parole à M. McGuinty.
    La parole est donc à M. McGuinty.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Fraser, si vous permettez, j'aimerais revenir à certaines de vos paroles puis interroger peut-être M. Gagnier?
    J'ai cru vous entendre dire indirectement que la participation à des marchés internationaux du carbone accélérerait la délocalisation de l'industrie de l'acier dans d'autres pays. Ainsi, par exemple, vous vous êtes interrogé sur la vérifiabilité et la fiabilité des mécanismes de développement propre. Or nous savons qu'il existe maintenant 500 projets internationaux qui obéissent aux mécanismes de développement propre, dont 12 ou 13 situés à l'extérieur du Canada. L'autre jour, TransAlta nous disait que son propre COF, les membres du conseil d'administration, actionnaires et investisseurs ne permettraient jamais qu'on lance des projets frauduleux ou au montage financier douteux.
    Permettez-moi donc de poser une question assez directe. Le Protocole de Kyoto compte 168 signataires et il y a quelque 184 pays dans le monde entier. Pouvez-vous me dire lesquels des pays auxquels vous pensiez n'ont pas adhéré au processus de Kyoto et seraient disposés à tricher, pour reprendre vos propres termes?
(1050)
    Il ne s'agit pas vraiment d'une perspective. De toute manière, je n'ai pas clairement exprimé ce que j'entendais par la situation.
    On ne peut étudier isolément le choix des cibles et le régime d'échange de droits d'émission. À mon avis, le système d'échange nous incite à penser qu'on peut fixer à peu près n'importe quelle cible par rapport à une industrie donnée, et donc il existe une solution facile. Je parlais de la complaisance qui entoure tout cela. En effet, une fois qu'on a fait le tour de ce qui est réalisable sur le plan technologique, cela devient une espèce de taxe pour l'industrie, et l'entreprise doit quand même concurrencer des pays comme la Chine, le Brésil et la Russie, qui n'ont pas fait preuve de la même discipline et, par conséquent, n'ont pas imposé des difficultés aussi grandes à leurs propres industries.
    N'oubliez pas que j'ai dit que les difficultés sont quelque chose de relatif. Si tout le monde obéit à la même règle, connaît les mêmes niveaux de difficulté et doit atteindre la même efficacité technologique, il n'y a pas vraiment de problème de concurrence. Toutefois, dès que des entités importantes du système mondial ne sont pas assujetties aux mêmes règles, le système d'échange devient — Il se transforme en risque beaucoup plus élevé pour nous, du fait que nous créons des conditions propices à une délocalisation progressive de nos capacités de production.
    Il n'en demeure pas moins que cela fait 40 ans que vous faites concurrence aux autres sur les marchés internationaux, en dépit du fait que vos concurrents doivent se conformer à des normes plus faibles par rapport à l'environnement, à la réglementation et aux relations de travail. Je dirais donc qu'au contraire, la norme canadienne a aiguillonné votre compétitivité à l'échelle internationale. Il n'y a rien de nouveau dans le fait que la Chine, l'Inde, le Brésil ou la Russie ont des normes environnementales peut-être moins strictes que les nôtres. Cela n'est rien non plus pour votre secteur industriel, ni d'ailleurs pour aucun autre secteur industriel canadien. En fait, l'Association minière du Canada, qui est à l'avant-garde du monde entier en ce moment, et l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques, elle aussi au premier échelon grâce à son programme de soins responsables, font oeuvre de pionniers et montrent à quel point le reste du monde doit se hausser pour atteindre les normes internationales.
    En conclusion, je précise qu'à mes yeux, le processus de Kyoto sert à mobiliser ces pays et à les amener à respecter des normes plus exigeantes sur le front de l'environnement, de la réglementation et d'autres encore afin que nous puissions tous renforcer les normes planétaires et concerter nos efforts par rapport à notre atmosphère.
    Je suis tout à fait d'accord avec votre position. Dans la mesure où les buts que nous nous fixons et les milieux dont nous nous entourons demeurent propices à l'investissement dans les nouvelles technologies, ils accroîtront notre productivité et nous permettront d'atteindre une plus grande efficacité énergétique. En même temps, ainsi que nous l'avons illustré au cours des 20 dernières années, nous réussirons aussi à réduire les émissions de manière considérable.
    Nous prenons donc tout à fait au sérieux vos arguments et y adhérons. La seule chose que nous préconisons toutefois, c'est de choisir les cibles avec prudence, car autrement, on risque de dépasser les capacités économiques de nos industries et nous priver d'un mécanisme économique grâce auquel nous pourrions nous défendre.
    Je comprends très bien.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Lauzon qui aura les cinq dernières minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Ça me fait plaisir d'être ici. Je suis en quelque sorte un invité, puisque je remplace un collègue, mais c'est une question que je trouve très intéressante et je souhaiterais presque être membre de votre comité.
    Je ne suis qu'un novice et les témoins représentent de toute évidence des entreprises bien gérées, tournées vers l'avenir et bien établies, et je vous félicite de l'efficacité avec laquelle vous avez atteint vos cibles. Mais je ne puis m'empêcher de penser aux entreprises qui ne sont pas dans votre position enviable.
    Dans un article paru récemment dans un journal, on cite le professeur Mark Jaccard, de l'Université Simon Fraser. Il estime qu'il faudrait détruire un tiers des immeubles et de l'équipement de votre économie au cours des quatre prochaines années afin d'atteindre la cible de Kyoto. Certains penseront peut-être qu'il est seul de cet avis. Mais plus loin, dans le même article, on cite Buzz Hargrove. Je pense qu'il n'est plus néo-démocrate, qu'il est un porte-parole libéral. Il disait que la cible de Kyoto aurait un effet dévastateur sur l'ensemble de la collectivité; que ce serait suicidaire sur le plan de notre économie qu'il faudrait fermer pratiquement toutes les grandes industries du pays, du pétrole et du gaz à l'industrie de l'automobile en passant par le transport aérien, et que ça n'a aucun sens.
    Monsieur Fraser, je comprends très bien votre point de vue, mais je ne comprends pas du tout pourquoi vous fixeriez des cibles aussi rigoureuses dès maintenant. Si vous ne réussissez pas à les atteindre, les personnes qui achètent votre produit devront chercher à s'approvisionner ailleurs, ils devront l'importer. Nous pourrions perdre des emplois. Lorsque j'ai lu la citation du professeur la première fois, j'ai pensé qu'il exagérait peut-être un peu. Mais Hargrove dit la même chose.
    Quel est votre avis? Pensez-vous que cela aurait un effet dévastateur?
(1055)
    Je vais vous citer un chiffre pour compléter ce que vous dites. Si l'industrie sidérurgique cessait toute activité, les émissions diminueraient de 1,8 p. 100.
    Si l'industrie de l'aluminium cessait toute activité, la réduction serait de 1 p. 100.
    Je comprends pourquoi vous souhaitez des cibles à long terme raisonnables et suffisamment de temps pour les atteindre. D'après ce que je comprends, vous nous dites que vous voulez des cibles raisonnables qui soient atteignables dans un délai donné, mais que pour atteindre ces cibles rigoureuses, il faudrait sacrifier le tiers de notre économie.
    En gros, il faut examiner le coût des émissions de carbone, et nos habitudes de consommation constituent un facteur important.
    Ce n'est pas la principale question, mais on ne peut pas établir des cibles qui font porter la totalité du fardeau à l'industrie qui a montré qu'elle en avait déjà fait beaucoup. Nous pouvons très facilement montrer que même en cessant toute activité, il serait impossible d'atteindre la cible qui a été fixée.
    C'est donc une question difficile mais devant laquelle nous ne baissons pas les bras. Nous ferons notre part, mais nous ne pouvons pas faire la part des autres.
    J'aimerais dire un mot au sujet de vos 2 600 employés. Vous avez 2 600 employés dans votre entreprise et un chiffre d'affaires de 1,5 milliard de dollars. Je pense que votre comité devrait en tenir compte de cela lorsque vous choisirez l'approche qu'il convient de prendre.
    L'industrie de la sidérurgie compte 35 000 employés et près de 15 milliards de dollars de chiffre d'affaires.
    Je pense que nous serions mieux de songer à ce que nous —
    Monsieur Peeling, vous voulez intervenir rapidement?
    Le secteur manufacturier au complet, ce qui nous inclut, est responsable d'environ 40 p. 100 des émissions canadiennes. Nous ne parlons jamais des consommateurs et des particuliers. Tant que nous n'inclurons pas les consommateurs, ce qui peut être la solution à long terme, nous n'aurons qu'une réponse partielle.
    Merci beaucoup.
    Je remercie tous les témoins d'être venus aujourd'hui. Nous avons entendu de très bons témoignages et de très bonnes questions. Nous l'apprécions tous.
    Avant de terminer, monsieur Cullen, vous aviez déposé un avis de motion. Souhaitez-vous que nous en discutions maintenant?
    Non, merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    Encore une fois, merci aux témoins et aux membres du comité.
    La séance est levée.