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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 043 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 1er mars 2007

[Enregistrement électronique]

  (0905)  

[Traduction]

    Bonjour mes collègues. Bienvenue à la 43e séance du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. Nous sommes le jeudi 1er mars.
    Nous allons recevoir aujourd'hui un certain nombre de témoignages. Des témoins vont comparaître pour nous parler des bombes à dispersion. Comme nous avons adopté une motion à ce sujet — à l'unanimité, je crois, il y plusieurs semaines, nous leur sommes très reconnaissants de leur présence ici aujourd'hui.
    Au cours de la première heure, nous entendrons Steve Goose, directeur général, Division des armes, Alerte aux droits de la personne; Paul Hannon, directeur exécutif de Action Mines Canada; Simon Conway, directeur de Landmine Action, au Royaume-Uni et Isabelle Daoust, conseillère en droit international humanitaire à la Croix-Rouge canadienne.
    Nous avons hâte d'entendre vos témoignages. Nous vous invitons à faire une déclaration préliminaire; essayez de vous limiter à une dizaine de minutes. Ensuite, nous passerons aux questions.
    Nous allons commencer par M. Hannon.
    Merci, monsieur le président, et je remercie les membres du comité de nous avoir invités. C'est à la fois un plaisir et un privilège pour nous de prendre la parole devant vous.
    Je représente Action Mines Canada, un regroupement de 40 ONG canadiennes qui travaillent sur le dossier des armes activées par les victimes. Les mieux connues d'entre elles sont sans doute les mines terrestres. Nous avons beaucoup collaboré avec les parlementaires et notre gouvernement à la mise en oeuvre du Traité d'Ottawa, mais nous nous intéressons aussi aux autres armes qui causent des problèmes aux populations civiles. Les bombes à sous-munitions en font partie.
    Cette semaine est la huitième Semaine canadienne de sensibilisation aux mines, dans l'ensemble du pays. Des événements commémorent et reconnaissent le succès du Traité d'Ottawa, mais engagent aussi les Canadiens à terminer le travail commencé sur le dossier des mines terrestres.
    Aujourd'hui, le 1er mars, a été déclaré, dans le cadre de cette semaine, Journée d'action contre les bombes à sous-munitions, ici à Ottawa et dans les autres villes de tout le Canada. Avec mes collègues, Simon Conway et Steve Goose, nous revenons tout juste d'Oslo où 46 pays, y compris le nôtre, ont signé une déclaration dans laquelle ils ont convenu de conclure un nouveau traité, d'ici deux ans, pour interdire les bombes à sous-munitions qui causent des torts inacceptables aux populations civiles.
    Nous avons le plaisir de vous faire un rapport à ce sujet et de répondre aux questions que vous voudrez poser, surtout parce que vous avez adopté une motion très importante, ce que nous apprécions beaucoup. Cela a beaucoup facilité nos efforts et est très utile pour le Canada. Je remarque que le Canada s'est déjà engagé à deux des cinq éléments de cette motion.
    Bien entendu, nous sommes ici pour voir si nous pouvons aller plus loin et obtenir que ces cinq éléments soient mises en oeuvre, mais nous nous ferons un grand plaisir de répondre à vos questions, après nos déclarations préliminaires, soit pour vous fournir les renseignements dont vous pouvez avoir besoin, soit pour vous faire part de notre point de vue au sujet de la voie à suivre et des mesures à prendre en ce qui concerne l'élaboration du traité et les activités du Canada.
    Vous avez déjà présenté nos collègues. Je vous présenterai chacun d'entre eux un peu plus en détail lorsque nous commencerons et je les laisserai vous parler quelques minutes.
    Il y a d'abord Simon Conway. Il fait partie de Landmine Action, un organisme britannique qui fait de la recherche et de la promotion pour le déminage. C'est sans doute la principale organisation du pays. Simon est lui-même un ancien soldat britannique et ancien démineur et c'est donc un problème qu'il connaît bien. Il a été dans la plupart des pays touchés par ces bombes, en dernier lieu au Liban, et cette semaine, son organisation a publié une étude très importante sur le Kosovo.
    Je vais céder la parole à Simon pour qu'il vous dise quelques mots.
    Je voudrais commencer par citer les paroles qui ont été prononcées en janvier, en Afghanistan, par un porte-parole de l'OTAN, un officier britannique, le Brigadier Richard Nugee qui a déclaré: « Je crois que notre seule erreur majeure, qui s’est montrée très difficile à corriger [en 2007], a été les pertes en vies humaines de civils innocents  ».
    Je dirais que cela souligne un des écueils de la guerre moderne et aussi le fait que la guerre moderne a changé. La responsabilité de protéger les civils se heurte au besoin d'atteindre un objectif militaire et nous devons donc examiner si nos systèmes d'armes sont les bons pour atteindre notre objectif.
    Je voudrais vous expliquer très brièvement ce qu'est une sous-munition. Une sous-munition comprend deux parties. Vous avez le conteneur et les sous-munitions à l'intérieur qui ressemblent aux pois à l'intérieur d'une cosse. Le conteneur peut être une bombe larguée à partir d'un avion, une roquette ou une bombe d'artillerie. Vous pouvez avoir un très grand nombre, parfois des centaines de sous-munitions explosives à l'intérieur de chaque conteneur.
    Les sous-munitions proprement dites contiennent généralement une petite quantité d'explosifs. La plupart d'entre elles ont environ la taille d'un poing ou d'une pile D. Elles contiennent des explosifs. Elles sont généralement enrobées d'une enveloppe à fragmentation qui se transforme en shrapnel. Il y a toujours un cône de cuivre qui s'inverse lors de la détonation créant une balle de métal en fusion qui est censée percer le blindage. Son but est donc de transpercer un char et d'exploser à l'intérieur.
    Souvent, surtout lorsqu'elles sont larguées à partir d'un avion, ces bombes contiennent une matière incendiaire, généralement du zirconium. Cette matière s'enflamme. Par conséquent, lorsqu'une bombe à sous-munitions explose, cela cause généralement une explosion, une fragmentation, un shrapnel, du métal fondu et un incendie. Comme je l'ai dit, il peut y avoir des centaines de sous-munitions à l'intérieur d'une seule fusée.
    Permettez-moi de vous donner un exemple. Le lance-roquettes multiples est un système sur chassis chenille qui lance des roquettes. Il peut en lancer 12 qui contiennent chacune 644 petites sous-munitions. Il suffit donc de pousser sur un bouton pour déployer 7 728 sous-munitions sur une zone d'une superficie d'un kilomètre carré.
    Lorsque j'étais dans l'armée et que je suivais mon entraînement juste avant la guerre du Golfe, nous disions que ces machines servaient au quadrillage de nettoyage. Cela me remplissait d'une certaine euphorie en tant que soldat à l'entraînement. Je me demande maintenant s'il est vraiment acceptable d'utiliser, pour le combat, un système d'arme qui bombarde en tapis ou sature un secteur d'un kilomètre carré.
    Pour la plupart de ces armes, lorsque les conteneurs individuels s'ouvrent et se dispersent, leur contenu se répand sur l'équivalent de deux à quatre terrains de soccer. C'est peut-être acceptable dans une zone découverte, mais dans une zone urbaine ou une région peuplée, cela répand des sous-munitions non explosées sur une vaste superficie. Voilà donc ce dont il s'agit.
    À quoi ces armes étaient-elles destinées?
    Les munitions à dispersion ont été conçues pour être utilisées contre des grandes formations d'infanterie blindées, surtout pour empêcher le Pacte de Varsovie de traverser les plaines d'Europe centrale. C'était notre ultime recours pour défendre la démocratie. Voilà à quoi devait servir ce que je retrouve dans le sol des plaines allemandes. Nous étions prêts à nous servir de n'importe quoi contre nos ennemis pour ralentir leur progression.
    Dans ces circonstances, vous conviendrez sans doute que nous ne pouvions pas nous offrir le luxe d'examiner si ces armes étaient très précises ou si elles fonctionnaient comme prévu. Cette guerre, qu'on a qualifiée de guerre industrielle — et je me reporte au récent ouvrage du Gén Rupert Smith intitulé The Utility of Force  — n'a pas eu lieu et nous ne menons pas ce genre de guerre dans le contexte actuel. Les guerres que nous menons sont ce que le Gén Rupert Smith appelle des guerres contre la population. Nous combattons dans des régions peuplées, dans des régions urbaines. Nous ne menons pas une guerre défensive contre de longues colonnes de blindés qui se dirigent vers nous. Nous intervenons dans d'autres pays. Nous intervenons pour des raisons humanitaires. Nous intervenons pour prévenir des menaces imminentes contre nous. Dans ces circonstances, nous nous battons pour défendre la volonté des peuples. Nous essayons de gagner leur coeur et leur esprit.

  (0910)  

    Si nous tuons un grand nombre de civils à cause des armes que nous choisissons, ce qui a pour effet de dresser la population locale contre nous et de susciter une vive réaction de la part du public aux niveaux national et international… L'exemple classique est ce qui s'est passé récemment au Liban. Quel objectif a-t-on atteint en procédant à des bombardements massifs, en larguant environ 4 millions de sous-munitions sur une région très peuplée du Sud-Liban, ce qui a suscité de vives protestations de la part du public et de la communauté internationale?
    Le Liban n'est pas le seul exemple de ce genre. Si vous regardez en arrière, des munitions à dispersion ont été utilisées en Iraq en 2003 lors de l'attaque contre al-Hilla, qui a été documentée par Human Rights Watch et où des centaines de civils ont été blessés lorsque les forces américaines ont utilisé ces munitions dans une région peuplée. En mars 2003, le Royaume-Uni a largué 98 000 sous-munitions sur Basra et la région, tuant les gens dans leurs maisons, tuant des enfants chez eux. Quel objectif militaire peut-on espérer atteindre en faisant ce genre de choses?
    En effet, si vous le faites, si vous causez un grand nombre de victimes civiles, si vous suscitez cette réaction de la part du public, vous n'atteindrez probablement pas vos objectifs politiques.
    Enfin, pour ce qui est de l'utilité militaire de ces armes — et notre rapport sur le Kosovo vient de sortir — ces armes n'ont jamais vraiment fonctionné comme prévu. Nous avons largué environ 235 000 sous-munitions — c'est pour les États-Unis, le Royaume-Uni et les Pays-Bas — au Kosovo en mai et juin 1999. Selon les données de l'OTAN que nous avons analysées portant sur les frappes contre des objectifs mobiles — c'est-à-dire d'importants groupes de chars — sur 269 frappes représentant le déploiement de dizaines de milliers de sous-munitions, moins de 75, c'est-à-dire moins de 30 p. 100 ont réussi à endommager les cibles.
    J'étais au Kosovo en juin 1999 et nous n'y avons vu aucun char. Je sais qu'ils avaient eu quelques jours pour les faire disparaître, mais ils n'avaient pas vraiment eu le temps de déplacer d'énormes colonnes de véhicules endommagés. Les dommages n'étaient pas importants. J'ai entendu le Gén Sir Hugh Beech, de l'Institute of Strategic Studies, un autre officier britannique, dire que nous avions peut-être détruit tout au plus une trentaine d'équipements militaires avec les 78 000 sous-munitions larguées par le Royaume-Uni. Sur le total de 234 000 sous-munitions, le Royaume-Uni en a largué environ 78 000 et nous avons peut-être détruit tout au plus 30 pièces d'équipement militaire.
    Je ne vois pas très bien comment ces armes ont pu avoir un effet décisif… et il faudrait que les ministères de la Défense se justifient.
    En fin de compte, ces armes ne sont pas fiables. Elles sont déployées massivement. Je l'ai constaté pour la première fois au Kosovo, en juin 1999, lorsque nous avons trouvé un grand nombre de bombes à dispersion non explosées. Je l'ai vu en Asie du Sud-Est. Je l'ai vu à des endroits comme l'Érythrée…

  (0915)  

    Je vais vous interrompre un instant pour savoir où nous en sommes du point de vue temps.
    Monsieur Goose, vous avez un exposé à faire, ainsi que madame Daoust?
    Je vais conclure.
    Mon principal argument est que la nature de la guerre a changé et nous ne menons plus les mêmes combats. Nous menons des guerres contre les populations et les systèmes d'armement que nous utilisons devraient en tenir compte. Il faut qu'ils soient plus discriminatoires. Il faut qu'ils soient plus intelligents. Si nous utilisons des armes qui tuent un grand nombre de civils au moment de l'attaque et pendant les années qui suivent, nous n'atteindrons pas nos objectifs politiques.
    Merci.
    Merci, monsieur Conway.
    Madame Daoust.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président. Je vais m'exprimer en français, si vous le permettez.
     Évidemment, tout comme mes collègues ici présents, la Croix-Rouge dans son ensemble est vivement préoccupée par les problèmes juridiques et par les conséquences humanitaires liées aux armes à dispersion. J'aimerais aujourd'hui me faire porteuse d'un message auprès des parlementaires et du gouvernement. Il s'agit du message de la Croix-Rouge, qui a lancé, l'année dernière, un appel à tous les gouvernements concernant les trois points suivants.
     Le premier point est de mettre fin à l'emploi des munitions à dispersion, qui sont non précises et non fiables. Le deuxième point est d'interdire l'usage de ces armes contre des objectifs militaires si les objectifs militaires sont situés dans des zones habitées. Le troisième point de l'appel de la Croix-Rouge est l'élimination des stocks de ces armes qui sont non précises et non fiables et, en attendant la destruction des stocks, d'en interdire le transfert.
    J'aimerais, monsieur le président, vous expliquer comment nous en sommes venus à ces conclusions. Premièrement, nous nous sommes basés sur des fondements juridiques, et deuxièmement, sur les conséquences humanitaires que nous observons sur le terrain.
    Notre analyse est basée sur le droit international humanitaire. Quand je parle de droit international humanitaire, je me réfère principalement aux quatre conventions de Genève et aux deux protocoles additionnels, qui contiennent toutes les règles qui sont applicables en temps de conflit armé et qui contiennent précisément des règles relatives à la conduite des hostilités. Donc, nous parlons d'armes qui sont déjà régies par le droit, par des règles spécifiques et générales. J'aimerais vous citer quelques-unes de ces règles.
    Premièrement, il y a la règle de la distinction, qui exige que les combattants sur le terrain fassent une distinction entre les civils et les militaires. Deuxièmement, il y a la règle de l'interdiction des attaques sans discrimination. La troisième règle est celle de la juste proportion, c'est-à-dire qu'il faut que les attaques dont on peut s'attendre à ce qu'elles causent des pertes de vies humaines dans la population civile ne soient pas excessives par rapport à l'avantage militaire concret que l'on cherche à atteindre. Une autre règle importante est la règle des précautions que les combattants doivent prendre avant de lancer des attaques. Il y a aussi une règle qui concerne la protection de l'environnement, c'est-à-dire qu'il est interdit d'utiliser des armes qui pourront causer des dommages étendus durables et graves à l'environnement, et qui sont conçues à cet effet. Finalement, il y a une règle relative aux maux superflus, c'est-à-dire qu'il est interdit d'utiliser des armes qui sont susceptibles causer des maux superflus auprès des civils ou des combattants.
    J'apporte une précision. Quand le droit international humanitaire a été négocié, après la Deuxième Guerre mondiale, il est évident que tous les impératifs militaires ont été pris en considération en même temps que les exigences humanitaires. C'est un droit qui cherche donc à créer un équilibre entre ces deux tensions. Chacune des règles qui ont été élaborées cherche à trouver un équilibre entre les impératifs militaires et les exigences humanitaires.
    Nos préoccupations sont que ces armes ne respectent pas les règles que je viens de citer, tant dans leur emploi que dans les caractéristiques spécifiques qui y sont liées.
    Mon deuxième point porte évidemment sur les conséquences humanitaires. La Croix-Rouge est présente dans plus de 80 pays du monde, dans des conflits différents. Il est clair que depuis la fin des années 1990, nos délégués sur le terrain sont en mesure de documenter l'impact humanitaire très grave de ces armes dans des contextes comme ceux du Laos, de l'Afghanistan, de l'Irak, du Liban Sud, du Kosovo, et je pourrais en nommer bien d'autres encore.
    Ce qui est très choquant pour nous, c'est que les civils souffrent déjà suffisamment pendant les conflits. Avec ce genre d'armes, on voit encore, 10, 20 ou 30 ans après le conflit, des pertes humaines, des blessures, des morts, particulièrement chez les enfants. Nous avons donc des préoccupations juridiques de respect du droit, mais surtout des préoccupations humanitaires liées aux conséquences de l'utilisation de ces armes.
    Je pense que je vais m'arrêter là-dessus, monsieur le président. Merci beaucoup.

  (0920)  

[Traduction]

    Merci, madame Daoust.
    Monsieur Goose.
    Je préfère généralement les discours improvisés, mais j'ai cru comprendre que, pour faciliter la traduction, vous aimez recevoir un mémoire écrit. J'en ai donc préparé un et je vais simplement en lire une partie si nous n'avons pas beaucoup de temps.
    Nous sommes heureux de voir que le comité reconnaît l'importance des bombes à sous-munitions. En fait, nous nous trouvons à un moment charnière ou les gouvernements et la société civile unissent de nouveau leurs efforts, en réponse à un impératif humanitaire, pour créer un traité qui sauvera un nombre incalculable de vies.
    La même initiative a été couronnée de succès pour les mines antipersonnel il y a 10 ans. Nous pouvons en faire autant pour les terribles bombes à sous-munitions, si nous en avons la volonté politique, si les gouvernements peuvent de nouveau faire preuve de courage et de compassion et si l'on ne laisse pas des intérêts militaires douteux l'emporter sur des préoccupations humanitaires bien documentées.
    Le Canada est peut-être, de tous les pays, celui qui devrait être le fer de lance de cette initiative pour éliminer les bombes à sous-munitions qui sont des armes imprécises et peu fiables. La vision, la détermination et la compassion du Canada sont largement à l'origine du Traité d'interdiction des mines, de 1997. La détermination du Canada et les efforts qu'il a déployés au cours de la dernière décennie ont largement contribué au succès de ce traité.
    Il est de nouveau nécessaire que le Canada joue le rôle de file, mais jusqu'à présent, il a tardé et a même hésité à répondre à cet appel. Nous nous réjouissons que le Canada ait participé à la conférence qui vient de prendre fin, à Oslo, sur les bombes à sous-munitions et qu'il ait appuyé, avec 45 autres pays, une déclaration l'engageant à conclure un nouveau traité en 2008 — ce qui est une échéance très rapide — qui interdira ce type de munitions qui causent des torts inacceptables aux civils.
    Le Canada ne s'était pas joint à une déclaration similaire, bien que plus faible, en novembre dernier, de la Convention sur les armes classiques. Étant donné cette abstention, sa participation à Oslo marquait un progrès important.
    Nous nous réjouissons aussi que le Canada ait annoncé qu'il détruirait le reste de son arsenal de bombes à sous-munitions, ses projectiles d'artillerie de 155 mm à sous-munitions.
    Néanmoins, le Canada peut faire beaucoup plus. Il faudrait commencer, comme le comité l'a déjà démontré, par annoncer l'entrée en vigueur immédiate d'un moratoire sur l'utilisation, la production, l'importation ou l'exportation de bombes à sous-munitions en attendant la conclusion d'un nouveau traité.
    L'Autriche a fait cette annonce à Oslo, la semaine dernière. Apparemment, les Forces canadiennes n'ont jamais utilisé de bombes à sous-munitions, mais je dois mentionner qu'une entreprise canadienne, Bristol Aerospace Limited, a en catalogue une roquette air-sol non guidée à sous-munitions, la CRV7, qui est une roquette de 70 mm contenant des sous-munitions M73.
    Il est important, au niveau international, que le Canada ne se contente pas d'adhérer tardivement et en se faisant prier au nouveau processus lancé à Oslo. Le Canada devrait jouer un rôle de chef de file, d'une part parce que c'est la bonne chose à faire au niveau national et, d'autre part, parce que cela correspond à la position énergique qu'il a adopté dans le domaine humanitaire et à ses efforts pour améliorer la sécurité humaine. C'est aussi en raison des effets que le leadership du Canada aura sur la scène internationale. Grâce au processus d'Ottawa concernant les mines terrestres et le rôle de chef de file que le Canada a joué dans ce dossier, le Canada possède beaucoup de connaissances et d'expérience pertinentes pour promouvoir l'initiative concernant les bombes à sous-munitions en dehors de la Convention sur certaines armes classiques.
    Le Canada jouit d'une réputation et d'un respect qui peuvent inciter de nombreux autres pays à participer à un nouveau processus. Nous craignons beaucoup que si le Canada n'appuie pas entièrement cet effort visant à combattre les dangereuses bombes à sous-munitions, de nombreux autres pays hésiteront à le faire, estimant que si ce n'est pas important pour le Canada, le gardien du Traité sur les mines terrestres, ce n'est pas important pour eux non plus.
    Nous nous inquiétons de certaines déclarations qui laissent entendre que le gouvernement n'est pas pressé d'agir et considère la Convention sur certaines armes classiques comme la meilleure tribune pour résoudre le problème des bombes à sous-munitions, en partie parce que certains des principaux utilisateurs et détenteurs de ces armes, comme les États-Unis, la Russie et la Chine font partie de la Convention, mais pas encore de ce processus extérieur.
    Cette attitude est pour le moins ironique étant donné que le processus d'Ottawa sur les mines terrestres a vu le jour parce que la CCAC n'avait pas réussi à résoudre adéquatement le problème des mines antipersonnel, tout comme ce nouveau processus est né de son incapacité à s'attaquer au problème des bombes à sous-munitions.
    On ne peut pas prétendre que la CCAC peut résoudre immédiatement ou efficacement le problème des bombes à sous-munitions.
    Lorsque nous en serons aux questions, je me ferai un plaisir d'expliquer les nombreuses raisons pour lesquelles la CCAC ne donnera pas de résultats qu'un processus extérieur permettra d'obtenir.

  (0925)  

    Le Canada a également mentionné la possibilité d'une solution technique au problème des bombes à sous-munitions et il a été question de l'acquisition future de bombes à sous-munitions ayant un faible taux de défaillance. Cela ne marchera pas. Simon a déjà souligné à quel point les fabricants qui prétendent avoir un faible taux de défaillance sont loin de compte. Le Liban a démontré très clairement que les sous-munitions ayant un faible taux de défaillance dans des conditions de test idéales sont loin de donner les mêmes résultats lorsqu'elles sont utilisées dans des conditions de combat. L'amélioration du taux de défaillance ne règle pas non plus l'autre moitié du problème, à savoir que les bombes à sous-munitions touchent un vaste secteur sans discrimination. L'amélioration du taux de défaillance n'y changera rien.
    Lorsqu'on utilise les bombes à sous-munitions, c'est de façon irresponsable. C'était le cas au Liban en 2006, en Iraq en 2003, en Afghanistan en 2001 et 2002, au Kosovo en 1999, ou même si l'on remonte à leur utilisation en Asie du Sud-Est dans les années 60 et 70. Elles sont utilisées de façon irresponsable, même par certains des pays qui professent adhérer scrupuleusement aux règles du droit humanitaire international. Elles sont déployées en énormes quantités et dans des régions peuplées. On utilise de vieux modèles périmés même lorsque que nouveaux modèles existent. Malgré toutes les bonnes intentions, le recours aux bombes à sous-munitions dans les combats est irresponsable étant donné les caractéristiques dangereuses inhérentes de ces armes.
    J'ai entendu dire qu'on s'inquiétait des répercussions d'une interdiction des bombes à sous-munitions sur les soldats canadiens qui servent en Afghanistan. Nous en avons parlé hier soir. Nous voyons mal pourquoi nous aurions besoin de bombes à sous-munitions en Afghanistan pour le moment. Mais surtout, nous savons ce qui s'est passé lorsque les États-Unis en ont déployé là-bas en 2001 et 2002. Human Rights Watch est allée enquêter sur le terrain pendant un peu plus d'une semaine et a identifié plus de 100 civils qui avaient été tués par des bombes à sous-munitions. Bien entendu, le nombre de blessés était beaucoup plus important et il y a certainement eu beaucoup d'autres victimes que nous n'avons pas pu localiser.
    Les bombes à sous-munitions ont causé davantage de victimes civiles en Iraq en 2003 et au Kosovo, en 1999, que toute autre arme. Il est clair qu'elles représentent un risque inacceptable pour les civils.
    Simon a indiqué à quel point on a exagéré l'utilité militaire de ces armes. Les bombes à sous-munitions posent également un problème pour nos soldats. Il ne fait aucun doute qu'elles limitent la mobilité de nos propres forces armées et mettent nos troupes en danger. Nous avons un rapport d'action de la 3e division d'infanterie américaine faisant suite à son combat en Iraq en 2003 qui qualifie les bombes à sous-munitions d'inutiles en disant que c'est une relique de la guerre froide. Plus de 80 soldats américains ont été tués par des sous-munitions américaines pendant la guerre du Golfe de 1991. Des sous-munitions américaines ont tué des soldats américains.
    Dans la bonne vingtaine où elles ont été utilisées, les bombes à sous-munitions ont eu des effets horribles. En réalité, c'est une catastrophe humanitaire à laquelle il faut s'attendre. Il y a environ 75 pays qui stockent cette arme et 34 qui la produisent. Il y a déjà un arsenal de millions et de millions de bombes à sous-munitions qui contiennent des milliards de sous-munitions. Si ces milliards de sous-munitions sont envoyées dans des nouveaux pays, y compris peut-être vers des acteurs non étatiques — nous avons récemment documenté l'utilisation de bombes à sous-munitions par le Hezbollah — et si elles sont utilisées, ne serait-ce que dans une faible proportion, le problème des mines terrestres ne sera pas grand-chose en comparaison.
    Néanmoins, si nous agissons immédiatement, nous pouvons éviter cette nouvelle crise. Un traité interdisant les bombes à sous-munitions qui causent des torts inacceptables serait une des principales mesures que les gouvernements pourraient prendre pour protéger les civils contre les effets des conflits armés et le contrecoup des conflits armés. La révolte du public à l'égard de ces armes est déjà forte et augmente de jour en jour. Il est temps que le Canada devienne le chef de file des pays déterminés à mettre un terme aux souffrances causées par les bombes à sous-munitions.
    Merci.

  (0930)  

    Merci.
    Avant de passer au premier tour de questions, je voudrais demander rapidement une explication. Même si j'ai écouté attentivement, je n'ai pas vraiment entendu de définition claire de la grosseur d'une bombe… Je connais la différence entre une bombe et une grenade. Je ne sais pas si vous avez essayé de le définir. Quelle grosseur l'engin doit-il avoir pour être appelé une bombe à sous-munitions? Si cela vient d'un lance-grenades, ce n'est pas une bombe, n'est-ce pas?
    Les bombes à sous-munitions les plus petites que nous trouvons sont des bombes d'artillerie qui peuvent contenir, en moyenne, entre 40 et 60 sous-munitions explosives.
    Voulez-vous dire qu'à l'intérieur de cette roquette ou de cette bombe il y a un mécanisme explosif et pas seulement du shrapnel qui est projeté à l'extérieur?
    Vous pouvez comparer cela avec des pois dans leur cosse, la cosse étant le conteneur. Il peut s'agir d'une bombe d'artillerie, d'une roquette ou d'une bombe larguée à partir d'un avion. La cosse s'ouvre et laisse tomber les pois. Chacun de ces pois est une sous-munitions, un engin explosif ayant sa propre coque qui contient des explosifs et une mèche.
    Bien. Je crois utile d'obtenir cette précision… Je sais que Mme Daoust a parlé de la définition d'une bombe à sous-munitions en droit humanitaire, mais je voulais que cela figure au compte rendu.
    Vous avez dit que 75 pays ont probablement ces armes et que 34 les produisent. C'est bien cela? Y a-t-il une liste?
    Tout ce que j'ai entendu dire, je l'avoue, c'est que les États-Unis, le Canada et la Grande-Bretagne en ont. Mais vous dites qu'il s'agit de 75 pays et ils sont énumérés ici sur cette liste?
    Une voix: Oui.
    Le président: Très bien, merci.
    Nous allons passer à M. Eyking.
    Merci, monsieur le président.
    La présence de ce groupe ici, ce matin, est une excellente chose. Je crois que le Canada a été un chef de file sur la question des mines terrestres et du déminage.
    Je viens du Cap-Breton où nous avons également un groupe que vous connaissez probablement, Paul. Il s'agit du Canadian International Demining Corps, qui est une ONG. Ce groupe me rappelle ce qu'il fait et ce qu'il veut. Il fait un excellent travail avec l'aide de chiens. Et vous connaissez sans doute Irving Schwartz.
    Je suppose que c'est la raison pour laquelle vous comparaissez devant notre comité, car nous espérons que le Canada peut également jouer un rôle de chef de file pour les bombes à sous-munitions.
    J'ai trois questions. Vous avez déjà fait allusion à la première, mais l'Armée canadienne utilise-t-elle ces bombes? Et si nous cessions de les utiliser, cela aurait-il d'importantes répercussions sur nos exercices militaires? Cela nous désavantagerait-il sur ce plan? Également, dans votre déclaration préliminaire, vous avez mentionné qu'il y avait cinq recommandations. Vous avez dit, je crois, que nous en suivons trois, mais pas les deux autres ou que nous en suivons deux ou trois. Pourriez-vous nous en parler un peu?
    Je crois pouvoir répondre à toutes ces questions.
    Le Canada n'a jamais utilisé de bombes à sous-munitions. À notre connaissance, nous ne les avons jamais testées. Si nous imposons un moratoire et si nous concluons un traité qui protégera les civils contre ces armes, cela ne limitera absolument pas notre capacité militaire. Nous n'avons pas encore utilisé ces armes et nous avons une force militaire très compétente. Cela ne devrait absolument pas la limiter, tant pour les opérations de maintien de la paix que pour le combat.
    Pour ce qui est des recommandations que le comité a adoptées dans sa motion, il y en avait cinq. La première était que le Canada se joigne aux 26 pays qui déploient des efforts. Depuis Oslo, ils sont maintenant au nombre de 46 et le Canada en fait partie. C'est une chose que nous apprécions. Bien entendu, nous voudrions que le Canada soit à l'avant-garde et devienne un chef de file de ce mouvement. Comme l'a dit Steve, le dossier des mines terrestres nous a permis d'acquérir beaucoup d'expérience et de connaissances. Nous avons extrêmement bien exploité nos ressources pour créer des alliances et des coalitions internationales et pour faire avancer les choses.
    La deuxième recommandation de votre motion que suit le Canada est la destruction complète de notre arsenal de bombes à sous-munitions. À Oslo, les représentants du Canada ont clairement déclaré que nous étions en train de détruire le reste de notre arsenal. Le ministre de la Défense nationale a écrit à l'un des membres de notre groupe pour dire qu'il n'avait aucune intention d'acquérir de nouvelles bombes à sous-munitions.
    Par conséquent, nous pensons que le deuxième élément de votre motion, soit le moratoire, est la prochaine étape logique. Nous avons accepté de négocier un traité d'ici deux ans. Nous détruisons notre stock de bombes à sous-munitions et nous n'avons pas l'intention d'en acheter d'autres. Il nous semble donc entièrement logique d'appuyer un moratoire et de le mettre en oeuvre pendant que l'on négocie un traité. Il serait à la fois illogique et irresponsable de faire l'acquisition de bombes à sous-munitions pendant que ces négociations se poursuivent. Nous pourrions acheter du matériel qui risque de devenir illégal à l'issue des négociations. Cela nous placerait inutilement dans une situation délicate. Il est donc parfaitement logique que le Canada participe à un moratoire. Cela contribuerait vraiment à faire avancer les choses.
    Un des autres éléments de votre motion qu'il est très important, selon nous, que le Canada examine est la nécessité d'une cohérence politique. L'organisation que vous mentionnez, le Canadian International Demining Corps, travaille actuellement au Liban avec de l'argent canadien pour informer les populations civiles des risques dans les secteurs où elles ne devraient pas aller parce qu'ils sont contaminés par des sous-munitions. Un grand nombre de ces zones ont déjà été débarrassées des mines terrestres. La communauté internationale doit maintenant y retourner pour déminer une région où il y a déjà eu des opérations de déminage. Nous dépensons de l'argent pour le déminage ou pour protéger les civils et les avertir du danger alors que nous n'avons aucune politique interdisant l'utilisation des armes qui causent ce problème.
    Si nous n'avons pas de politique telle qu'un traité international et une législation nationale énergique, nous allons vers le désastre dont Steve Goose a parlé, car il y a des milliards de ces sous-munitions dans les arsenaux de la planète. Elles ne sont même pas utiles pour la guerre moderne.

  (0935)  

    Il vous reste une minute, monsieur Eyking.
    Très bien.
    La plupart des pays ou États que vous avez énumérés ici sont membres de l'OTAN ou cherchent à en devenir membres. Qu'en pense-t-on à Bruxelles? Qu'en pense l'OTAN? A-t-elle une politique à cet égard?
    Autrement dit, quelles sont les rumeurs émanant de l'OTAN et de Bruxelles au sujet des bombes à sous-munitions et quelles sont les intentions?
    Une réponse très rapide.
    L'OTAN n'a pas pris collectivement position au sujet des bombes à sous-munitions. Néanmoins, la majorité des membres de l'OTAN font partie de ce groupe de 46 pays qui se sont engagés à conclure un nouveau traité d'ici deux ans. Ils vont devoir trouver un moyen de continuer à opérer, comme ils l'ont fait avec les mines antipersonnel. À l'heure actuelle, un seul pays membre de l'OTAN n'est pas signataire du Traité d'interdiction des mines.
    Monsieur Patry, très rapidement.

[Français]

    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Monsieur Hannon, vous n'avez pas répondu à la deuxième question de mon collègue, M. Eyking, qui concernait la motion. Vous avez dit, ou c'était peut-être M. Goose, que le Canada n'est prêt à suivre pour le moment que deux ou trois des cinq recommandations. Quelles sont ces deux ou trois recommandations?
    Toutes mes excuses. Les deux recommandations que suit le Canada sont celles qui proposaient de se joindre aux 26 pays, qui sont maintenant 46, et de compléter la destruction des stocks de bombes à munitions. Le processus est en cours dans ces deux cas. Pour ce qui est des trois autres, il s'agit du moratoire, de la cohérence politique au sujet du déminage et de l'utilisation des bombes et la ratification du protocole V.

  (0940)  

    Merci.
    Madame Lalonde.

[Français]

    Bonjour. Merci beaucoup pour le travail que vous faites. C'est un travail aussi admirable que nécessaire, parce qu'on constate non seulement que les guerres sont affreuses, mais que les après-guerres deviennent, pour les civils, de vrais cauchemars. On en a plusieurs exemples depuis longtemps et, plus récemment, en Afghanistan. Un reportage à Radio-Canada rapportait que dans ce pays, des populations civiles et des soldats étaient aux prises avec des champs minés par les Russes en 1980, qui sont encore aujourd'hui dangereux.
    Premièrement, une convention obligerait-elle les pays qui ont déjà utilisé des bombes à fragmentation à fournir les plans de leurs bombardements? D'après ce que je comprends, l'élimination de ces bombes sur le terrain est différente lorsqu'on a un plan.
    Deuxièmement, quel est le processus prévu? Nous allons exercer des pressions pour que le Canada en fasse partie. Pouvez-vous nous donner les étapes qui mènent à la signature d'une convention?

[Traduction]

    Pour répondre à votre première question, il est peut-être un peu tôt pour prédire exactement la teneur du traité, mais il a été beaucoup question, à Oslo, de la nécessité d'en faire un traité détaillé et complet qui, comme le Traité d'interdiction des mines, portera sur le déminage, la responsabilité à cet égard, la transparence et l'aide aux victimes. Je suis donc certain que le problème dont vous parlez sera abordé d'une façon ou d'une autre dans un nouveau traité.
    Ce que la conférence d'Oslo a également d'encourageant, en plus du fait que les pays ont été si nombreux à y participer et à s'engager à conclure un nouveau traité, c'est qu'on s'est également mis d'accord sur un processus pour les sessions de négociation qui conduiront au traité. La première aura lieu à Lima, au Pérou, en mai. Il y aura ensuite des sessions de suivi en Autriche, probablement en Nouvelle-Zélande, ainsi qu'en Irlande.
    Le Canada doit jouer le rôle de chef de file dès le début et il faut donc que la politique canadienne progresse et même fasse un grand bond en avant d'ici la réunion de Lima, au Pérou. Il y a donc une échéance à respecter.

[Français]

    Quelle est la date?

[Traduction]

    C'est du 23 au 25 mai prochains. Nous agissons très rapidement, car les impératifs humanitaires l'exigent.

[Français]

    Au Kosovo, il y a eu beaucoup de bombes à fragmentation et de mines antipersonnel. On a investi beaucoup pour nettoyer le pays. Est-ce que ces bombes posent encore un problème? Pouvez-vous également nous nommer les pays qui se battent pour déminer des territoires qui, autrement, pourraient être cultivés ou habités?

[Traduction]

    Voulez-vous répondre à cette question?
    Le Kosovo est sans doute le pays où il y a eu l'intervention humanitaire la plus importante au lendemain du conflit. On a consacré environ 30 millions de dollars US au déminage, surtout pour les munitions à dispersion. Ces opérations de déminage se poursuivent actuellement au Kosovo. On retrouve des munitions à dispersion enterrées dans le sol. Elles sont mises au jour par les cultivateurs lorsqu'ils labourent. On en trouve suspendues dans les arbres des forêts où les gens vont cueillir des champignons, ramasser du bois ou pique-niquer.
    Le nombre de victimes a diminué, mais on a dépensé des sommes d'argent énormes et ce n'est qu'une petite région. C'est très problématique. Nulle part ailleurs autant d'argent n'a été dépensé pour le déminage, bien qu'on y a consacré aussi beaucoup d'argent dans des pays comme l'Afghanistan et le Cambodge.
    En tant qu'ancien démineur, je voudrais également souligner que, depuis que j'ai commencé à exercer ce métier, nous n'avons jamais fait la distinction entre les mines et autre matériel de guerre non explosé et les bombes à sous-munitions. Nous procédions au déminage partout où ce matériel représentait une menace pour la population locale. Nous avons fait des opérations de déminage au Kosovo, au Sri Lanka, de même qu'en Érythrée et nous avons du enlever des sous-munitions. La nature de notre travail dépendait de ce que nous trouvions. Cela portait le nom d'opération de déminage, mais nous trouvions différents types d'explosifs.
    Les sous-munitions posent des problèmes pour le déminage. Elles sont souvent dotées de systèmes de détonation très sensibles. Vous ne pouvez pas les bouger. On les trouve dans des endroits inattendus. Elles sont en très grand nombre. Ces facteurs posent un problème particulier pour les opérations de déminage.
    J'étais là, en juin 1999, au Kosovo, lorsque deux officiers britannique sont morts en déplaçant des bombes à sous-munitions qui avaient été trouvées près d'une école, dans une ville appelée Glogovac. Nous avions passé la matinée à essayer de les convaincre de ne pas y toucher, mais ils n'ont pas tenu compte de notre avertissement, comme c'est souvent le cas, et ils sont morts.
    Comme l'a dit Steve, 80 soldats américains ont été tués par des bombes à sous-munitions au lendemain de la première du Golfe. Ces tombes ont tué davantage de soldats américains que ne l'ont fait les Iraquiens.

  (0945)  

    Pourrais-je ajouter un petit mot, monsieur le président?
    Oui, très petit.
    Il est peu probable qu'un nouveau traité sur les munitions à dispersion obligera à faire de nouvelles dépenses pour le déminage, même s'il comportera sans doute une disposition prévoyant une assistance pour le déminage. C'est parce que le Canada participe déjà à ce genre d'activité.
    On ne fait pas la distinction entre les munitions. Vous n'allez pas sur le terrain pour le débarrasser uniquement des mines antipersonnel à cause d'un traité sur les mines antipersonnel. Vous procédez à un déminage complet. Le Canada n'aurait qu'à poursuivre les activités de déminage auxquelles il participe déjà.
    Merci beaucoup, monsieur Goose.
    Nous allons passer à M. Goldring et M. Storseth qui vont se partager leur temps.
    Merci beaucoup.
    Les munitions non explosées ont certainement posé des problèmes. Nous savons que ce sont des moutons qui tondent la pelouse à Vimy Ridge à cause du danger que représentent les munitions non explosées de la Première Guerre mondiale.
    Vous avez dit que le Canada ne les avait jamais utilisées, mais nous pouvons voir que les choses ont changé et que nos forces militaires interviennent maintenant de plus en plus. Nous avons des chars dans des théâtres de guerre. Par conséquent, lorsqu'on dit que le Canada ne les utilisera jamais, je pense que c'est à l'armée de décider s'il y a lieu d'utiliser des munitions pour sauver la vie de ses soldats. Je suppose que c'est toujours l'argument invoqué.
    Pour ce qui est de vos propos concernant les munitions à dispersion et le danger qu'elles représentent, vous avez dit qu'elles posaient surtout un risque pour les civils à la suite du bombardement. Vous avez mentionné le taux de défaillance de ces munitions. Est-ce que ce taux comprend non seulement les munitions défaillantes qui sont toujours sur le terrain, mais également les munitions à action différée?
    Une dernière observation avant que vous ne répondiez et que je cède la parole à mon collègue. Ces munitions ont certainement bien d'autres utilisations que le bombardement des zones civiles. Je crois qu'elles servent au bombardement en tapis des aéroports avant une intervention et dans de nombreux autres scénarios. Les nouveaux modèles de bombes à dispersion des États-Unis sont de plus en plus intelligents. Ces bombes ciblent des endroits multiples en même temps. Leur conception a donc évolué.
    Mais je voudrais savoir quelle est la fiabilité du pourcentage de bombes qui n'explosent pas et quelle proportion d'entre elles peuvent exploser à retardement.
    Merci, monsieur Goldring.
    Nous allons peut-être entendre la question de M. Storseth, après quoi vous pourrez répondre aux deux en même temps, si vous gardez en mémoire la question de M. Goldring.
    Monsieur Storseth, très rapidement.
    Merci, monsieur le président. Je vais essayer d'être bref.
    Comme l'a dit M. Conway, je crois que le principal argument est que ces munitions ne se contentent pas nécessairement de cibler les combattants militaires. Elles ciblent les civils pendant des semaines, des mois et même des années plus tard, si j'ai bien compris.
    Dans votre excellent rapport, j'ai vu qu'il était question de Nabatiya. Une des bombes non explosées qui se trouvaient là portait une estampille datant de 1974. Est-ce typique de ce que nous trouvons dans les théâtres de guerre, surtout au Liban?
    Il y a une autre question à laquelle je crois vraiment nécessaire de répondre. D'après votre expérience, monsieur Conway, de quel genre d'équipement parlons-nous? De quoi avons-nous besoin pour résoudre le problème du matériel militaire non explosé étant donné que, de toute évidence, le déminage pose un peu plus de difficultés? Cela soulève des problèmes différents, d'après ce que nous avons vu dans le cas des mines terrestres au Liban. Avez-vous une idée du nombre de morts que ces mines ont causées depuis, dans la population civile du Liban?

  (0950)  

    Depuis la fin de…?
    Depuis la fin du conflit.
    Très bien, commençons par la question de M. Goldring, et celui d'entre vous qui le désire peut y répondre.
    Monsieur Conway.
    Pour parler très rapidement de ce qui se passe au Royaume-Uni, nous sommes en train de renoncer à l'utilisation des munitions à dispersion. Le largage de bombes à sous-munitions qui dispersent 147 d'entre elles sur une superficie couvrant deux à quatre terrains de football est remplacé par le Brimstone, un cône de charge unitaire ciblé. En effet, s'il y a des chars ou un groupe de véhicules, il est préférable, et plus économique à long terme, d'utiliser une arme qui coûte peut-être plus cher à l'unité, mais qui va éliminer ce char au lieu de disperser un tas de munitions non guidées qui vont saturer le secteur.
    Un mouvement a été amorcé — et c'est ce qui ressort d'un grand nombre de documents du ministère de la Défense que nous avons obtenus en invoquant la Loi sur l'accès à l'information — pour laisser de côté ce type d'armes à dispersion au profit d'armes ciblées individuellement qui sont beaucoup plus précises. Je crois donc que ces armes vont être mises hors service. Je crois que nous avons atteint le sommet de la vague.
    Ces armes sont-elles toujours à dispersion?
    Ce sont des bombes individuelles ciblées et elles ne sont donc pas à dispersion.
    Il va falloir trouver une définition au cours du processus. Si vous voulez vous diriger dans cette voie, il est possible d'exclure certains types de munitions intelligentes de la définition.
    Et vous seriez pour?
    Je ne suis pas pour l'achat de nouveaux systèmes d'armes. Je ne suis pas venu ici pour cela. Néanmoins, je pense que les systèmes d'armes devraient être intelligents et discriminatoires et donc guidés. S'il existe une arme qui peut identifier un véhicule militaire grâce à un genre d'algorithme, sa chaleur ou d'autres critères et le cibler, si cela ne cause pas de torts inacceptables sur le plan humanitaire — et la principale question est de savoir si cela cause ou non des torts inacceptables sur le plan humanitaire et si vous pouvez ou non l'utiliser de façon à protéger les civils — je n'y vois pas d'objection. Je ne peux pas toutefois parler au nom de toutes les autres ONG.
    Merci.
    Et la réponse à la question de M. Storseth…?
    Nous avons entendu des arguments selon lesquels si vous utilisez des munitions à dispersion qui s'autodétruisent, cela ne posera plus de problème de déminage par la suite. Dans le Sud-Liban, nous avons trouvé un nombre considérable de bombes à sous-munitions de ce type dont le mécanisme d'autodestruction n'a pas fonctionné.
    Les moyens techniques que vous pouvez prendre pour essayer d'améliorer ces munitions sont très problématiques. Souvent, ces armes sont testées dans des circonstances telles qu'elles fonctionnent toujours dans des zones de test idéales. Après le combat, nous constatons sur le terrain que le taux de défaillance est énorme. Les Nations Unies parlent d'un taux de défaillance d'environ 40 p. 100. Je trouve cela difficile à croire, mais cela peut signifier qu'environ un million de sous-munitions non explosées jonchent le Sud-Liban. Une importante proportion de ces munitions sont dotées de mécanismes d'autodestruction qui n'ont pas fonctionné.
    Que demandez-vous ou de quoi avez-vous besoin pour résoudre ce problème? Ces munitions sont déjà là. Je veux parler des montants d'argent et du genre d'équipement que vous souhaitez pour…
    Merci, monsieur Storseth.
    Allez-y.
    La réponse est que c'est une question de financement. J'avoue que nous avons ce qu'il faut sur le plan de la formation. Nous savons comment procéder au déminage pour les munitions à dispersion. C'est problématique et dangereux, mais avec un financement suffisant… Un certain nombre de pays y consacrent beaucoup d'argent et je pense donc qu'on peut se débarrasser de ces munitions.
    Merci, monsieur Conway.
    Madame McDonough.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie tous pour votre présence ici aujourd'hui et pour le rôle très important que chacune de vos organisations a joué pour rendre le Canada et les Canadiens fiers du Traité sur les mines terrestres, il y a 10 ans. Et même s'il y a beaucoup de gens qui se demandent ce qu'il est advenu de la politique étrangère indépendante du Canada, je vous remercie de démontrer que nous pouvons travailler sans sectarisme, comme nous l'avons fait au sein de ce comité, et avec les ONG, dans le cadre d'un partenariat solide, pour relever un défi aussi monumental que l'interdiction des munitions à dispersion dans le monde.
    Je ne peux pas m'empêcher de penser qu'il y a un an environ, nous nous sommes penchés sur la question, à l'occasion d'un petit déjeuner réunissant tous les partis sur la Colline parlementaire. L'ambassadeur d'Afghanistan était venu prendre la parole pour soutenir la campagne que vous aviez lancée pour l'interdiction des munitions à dispersion. Il y a donc eu un certain progrès.
    Je voudrais poser quelques questions dont vous connaissez peut-être — mais peut-être pas — la réponse et si vous n'avez pas le temps d'y répondre en détail, j'espère que vous accepterez de fournir ces renseignements au comité.
    La première porte sur la situation actuelle en Afghanistan. Je sais que d'après vos recherches, de 2001 à 2002, le décès d'une centaine de civils a été directement attribuable aux munitions à dispersion. Pensez-vous que ces munitions sont toujours utilisées en Afghanistan? Dans l'affirmative, par quels pays et dans quelles régions de l'Afghanistan?
    Deuxièmement, certains députés, mais heureusement personne présent aujourd'hui au tour de cette table, ont fait valoir qu'il faudrait entendre le point de vue de ceux qui, au Canada, préconisent de poursuivre l'utilisation des bombes à dispersion. Je me demande si vous pourriez nous aider à identifier ces personnes, car nous devrions sans doute savoir qui elles sont et les entendre pour savoir ce qu'elles ont à dire.
    Troisièmement, vous avez mentionné que la majorité des pays européens figuraient parmi les 46 signataires, à Oslo, la semaine dernière. Pourriez-vous nous dire quels sont les pays membres de l'OTAN qui n'étaient pas parmi les signataires?
    Enfin, ma question porte sur l'étape suivante que vous préconisez, qui semble très raisonnable, à savoir que nous devrions accorder le financement voulu, joindre le geste à la parole. Pourriez-vous nous dire combien il coûterait au Canada de passer à l'étape suivante en déclarant un moratoire? Cela aurait-il des inconvénients ou est-ce logiquement la prochaine étape à franchir pour jouer le rôle de chef de file et contribuer à atteindre l'objectif visé en travaillant ensemble?

  (0955)  

    Oui, j'essayerai de vous fournir des réponses plus précises. Je ne pense pas que nous ayons le temps d'entrer dans les détails au sujet de l'Afghanistan.
    Pour ce qui est des personnes qui préconisent ce genre de choses, ce n'est sans doute pas à moi de vous dire qui elles sont, mais nous avons certainement entendu les discours d'un grand nombre d'experts militaires au cours des six dernières années. Aucun d'entre eux n'a vraiment présenté des arguments particulièrement convaincants en faveur de l'utilisation de ces armes; ils ont simplement essayé de nous empêcher de faire valoir qu'elles posaient un problème humanitaire. Les fonctionnaires des Affaires étrangères et de la Défense nationale pourraient certainement vous donner des noms.
    Si ces personnes comparaissent devant vous, vous devriez leur demander quelles preuves elles ont de l'efficacité de ces armes, quelles preuves elles ont qu'atteignent leur objectif et comment elles les utiliseront pour la guerre moderne. Je pense que cela répondra à certaines de vos questions, car nous n'avons vu aucune preuve. Il y a des affirmations en ce sens, généralement de la part des fabricants, mais nous n'avons vu aucune preuve que ces armes atteignent les objectifs militaires qu'elles sont censées atteindre et qu'elles font ce qu'elles sont censées faire. Par contre, nous avons largement la preuve qu'elles ne font pas ce qu'elles sont censées faire et qu'elles causent des torts à un très grand nombre, à des dizaines de milliers de civils et à de nombreuses communautés dans le monde.
    Nous allons vous donner la liste des pays de l'OTAN qui n'étaient pas là ou qui n'ont pas signé.
    Oui, je crois que, logiquement, la prochaine étape à suivre pour le Canada est de déclarer un moratoire. Je ne pense pas qu'il y aura un prix à payer. Comme Steve l'a laissé entendre, les coûts immédiats pour le Canada se résument à quelques voyages et aux ressources que les Affaires étrangères déploieront pour participer à des conférences et à des échanges bilatéraux, pour poursuivre le travail diplomatique qu'elles ont accompli, avec intelligence et créativité, pour le Traité sur les mines terrestres. Les gens du ministère savent comment le faire.
    Ce sera peut-être une économie à long terme, car si nous n'agissons pas maintenant, nous risquons de voir ces armes proliférer encore davantage. J'ai vu le Hezbollah se servir de munitions à dispersion dans le Sud-Liban, pas plus tard que l'année dernière. Les Chinois avaient vendu ces munitions à l'Iran qui les a fournies au Hezbollah. Nous voyons maintenant des acteurs non étatiques qui se servent des munitions à dispersion. Il se pourrait qu'elles soient vendues à d'autres pays.
    Nous pourrions avoir un énorme problème qui nous coûtera énormément d'argent à régler. Les pays comme le Canada seront inévitablement ceux qui paieront pour les résoudre, étant donné qu'ils ont déjà déboursé tellement d'argent pour l'élimination des mines terrestres. Voulez-vous avoir à payer ce coût? Il vaut peut-être mieux agir maintenant. Cela vous permettra d'économiser de l'argent à long terme.

  (1000)  

    J'ai quelques renseignements pertinents concernant l'Afghanistan. Ces dernières années, nous avons invoqué la Loi sur l'accès à l'information pour obtenir des renseignements sur l'utilisation que les États-Unis ont faite des bombes à sous-munitions et nous avons appris qu'ils y ont eu recours, à plusieurs reprises, en Iraq, après 2003. Ils s'en sont beaucoup servis en 2003 lors des principaux combats. Ils les ont utilisées une ou deux fois depuis, mais on nous a dit qu'ils ne les avaient pas déployées en Afghanistan depuis 2002.
    Nous savons qu'il y a eu des rumeurs selon lesquelles les Pays-Bas les auraient utilisées. Les autorités néerlandaises nous ont affirmé que non.
    Merci beaucoup pour ces renseignements et merci d'être venus ici. Tout cela a certainement été très instructif et fait suite à la motion que nous avons adoptée.
    Nous allons suspendre la séance quelques instants pour vous permettre de quitter la table et laisser les témoins suivants s'installer.

    


    

  (1005)  

    Nous reprenons la séance.
    Notre étude du développement démocratique arrive à son terme. Il nous reste très peu de témoins à entendre.
    Nous avons le grand plaisir aujourd'hui de recevoir le président de l'Agence canadienne de développement international, Robert Greenhill. Vous êtes le bienvenu. Il est agréable de vous revoir. Nous recevons également Adair Heucan, directrice générale par intérim du Bureau de la gouvernance démocratique. Nous nous réjouissons de votre présence parmi nous. Vous nous avez remis un bref document sur l'ACDI et le Bureau de la gouvernance démocratique.
    Vous êtes souvent venus devant le comité et vous savez comment nous fonctionnons. Vous pouvez faire une déclaration préliminaire. Nous aimerions qu'il nous reste du temps pour les questions.
    Bienvenue. Nous avons hâte d'entendre ce que vous avez à nous dire.

[Français]

     Merci de me donner l'occasion de discuter de cette importante question qu'est celle de la gouvernance démocratique et du rôle que nous pouvons jouer pour aider le gouvernement à cet égard.

[Traduction]

    Je voudrais aussi commencer par remercier les membres du comité d'avoir pris la peine d'assister à la réunion organisée par le Conseil démocratique. C'était une excellente journée et, par votre présence, vous avez souligné l'importance que le comité accorde, collectivement, à cette question. Les personnes présentes l'ont reconnu et apprécié.
    Ainsi que l'a précisé la ministre de l'ACDI, l'honorable Josée Verner, lorsqu'elle a comparu devant votre comité en octobre dernier, le développement démocratique est un secteur d'activité prioritaire de notre Agence. Pour nous, le développement démocratique signifie la gouvernance démocratique. Cela comprend la liberté et la démocratie, la primauté du droit, les droits universels de la personne et des institutions publiques responsables.
    Par liberté et démocratie, nous entendons une démocratie fondée sur de solides institutions électorales et législatives, et sur les partis politiques qui prennent racine dans une riche culture démocratique, qui comprend une société civile active et des médias libres et dynamiques. Par primauté du droit, nous entendons des lois équitables et efficaces, de même que des institutions juridiques accessibles et propices et une magistrature impartiale. Les droits universels de la personne doivent être encadrés par des institutions solides et des mécanismes de défense des droits de la personne qui appuient la société civile, la promotion des droits de la personne et la responsabilisation. Les institutions publiques responsables sont essentielles pour gérer l'économie et les fonds publics et pour offrir les services sociaux cruciaux avec efficacité et sans corruption, notamment dans le domaine de la santé et de l'éducation.
    Notre engagement envers la gouvernance démocratique n'a cessé de s'affirmer depuis la chute du mur de Berlin. À l'heure actuelle, de tous les organismes canadiens, l'ACDI est celui qui consent les plus importants investissements dans le domaine de la gouvernance démocratique dans les pays en développement, en travaillant en collaboration étroite avec de nombreux autres organismes et ministères canadiens. Cela, parce que nous savons qu'à long terme, le développement économique et social et la réduction de la pauvreté passent forcément par des systèmes de gouvernance ouverts, démocratiques et responsables, qui privilégient les droits de la personne et la primauté du droit.
    Lors de l'entrée au pouvoir du gouvernement du Canada il y a un an, l'accent a été mis sur la gouvernance démocratique. Depuis, cet aspect fait partie intégrante du travail de l'ACDI. Dans tous ses programmes géographiques en cours, l'Agence axe de plus en plus ses activités sur la promotion de la liberté et de la démocratie, de la primauté du droit, des droits de la personne et de la responsabilisation des institutions publiques. Divers programmes géographiques peuvent mettre l'accès sur d'autres problèmes, qu'il s'agisse de la santé, de l'éducation ou du développement du secteur privé, etc., mais chacun de nos programmes géographiques doit obligatoirement inclure une intervention sur le plan de la gouvernance démocratique.
    Le document qui vous a été remis fait état d'une liste de projets que l'ACDI a entrepris dans le domaine de la coopération avec d'autres partenaires canadiens et internationaux.
    En créant le Bureau de la gouvernance démocratique, l'année dernière, l'ACDI réaffirmait sa détermination à déployer davantage d'efforts pour promouvoir la gouvernance démocratique dans le monde entier.
    On m'a demandé de vous parler un peu aujourd'hui des origines, de la nature et du rôle du Bureau de la gouvernance démocratique.
    Le Bureau tirera pleinement parti de la capacité de l'ACDI à mettre en application des pratiques efficaces et servira de centre de ralliement permettant à l'Agence d'inciter activement la participation de la communauté des spécialistes canadiens et étrangers, des institutions et d'autres ministères dont le travail est axé sur la gouvernance démocratique. Il est important de souligner que nous avons pour rôle de faciliter, de coordonner et d'accélérer, mais certainement pas de monopoliser l'aide canadienne à la gouvernance démocratique. De nombreux autres ministères et autres institutions canadiennes clés, y compris les ONG, y participent activement, en collaboration avec les partenaires locaux dans les pays en développement.
    Pourquoi ce bureau a-t-il été créé? Depuis des années, un grand nombre de Canadiens sont actifs dans le domaine de la gouvernance démocratique. Leur contribution est d'une grande importance historique. Le Canada a par exemple joué un rôle de premier plan dans la fin de l'apartheid en Afrique du Sud. Jusqu'à tout récemment, il n'existait aucun centre susceptible d'assurer la coordination et de faire la synthèse du rôle du Canada en faveur de l'avancement de la gouvernance démocratique. Il nous manquait une solide base de connaissances. Par conséquent, même si la liste de projets était impressionnante, il n'était pas certain qu'ils contribuaient toujours à renforcer la compréhension institutionnelle. Il nous manquait aussi un organisme central chargé de renforcer la capacité canadienne à l'intérieur et à l'extérieur du gouvernement et susceptible de donner rapidement accès au meilleur savoir-faire possible.
    Le Corps canadien, lancé en 2004, a représenté la première tentative pour combler ce vide. Mais cet organisme était doté d'un vaste mandat qui ne se résumait pas seulement à la bonne gouvernance. Il avait aussi pour mission de mobiliser les jeunes et de susciter l'engagement du public. Le Corps canadien a remporté certains succès dans ses efforts en vue de mobiliser des bénévoles et les jeunes. Cependant, avec le temps, il est devenu évident que, pour promouvoir la gouvernance démocratique et tirer pleinement parti de la valeur ajoutée canadienne, il était nécessaire de concentrer davantage nos efforts.

  (1010)  

    La mobilisation des jeunes et des bénévoles était déjà bien établie au sein de la Direction générale du partenariat canadien qui envoie chaque année littéralement des milliers de Canadiens à l'étranger pour participer à des programmes de bénévolat. Pour ce qui est de l'engagement du public, la Direction générale des communications de l'Agence était mieux placée pour s'en occuper. À partir de ces constats, il nous est apparu clairement que c'était bien le secteur de la gouvernance démocratique qui avait le plus besoin d'être renforcé.
    C'est pourquoi le 30 octobre 2006, la ministre Verner a créé le Bureau de la gouvernance démocratique. Ce nouvel organisme favorisera une réflexion novatrice sur la gouvernance démocratique. Il contribuera activement aux échanges sur les pratiques exemplaires et les leçons tirées au Canada et sur la scène internationale. Il orchestrera des programmes novateurs, en complément des activités actuelles réalisées par d'autres directions générales de l'ACDI et d'autres organisations du gouvernement et de l'extérieur. Nous souhaitons que ce bureau permette d'accroître la capacité de l'ACDI et du gouvernement du Canada de réaliser des programmes de gouvernance démocratique qui soient efficaces, opportuns et équitables de façon à promouvoir une plus grande harmonisation et une meilleure coordination entre les principaux intervenants canadiens.
    Pour résumer ce qui s'est passé depuis sa création, il y a moins d'un an, le Bureau a fait la promotion de la liberté et de la démocratie en appuyant des processus électoraux dans des contextes particulièrement difficiles. Au cours de la dernière année, le Bureau a envoyé 290 observateurs canadiens surveiller 10 élections dans différentes régions du monde, y compris en Haïti, en Cisjordanie, à Gaza, et récemment, en République démocratique du Congo. Pour ce faire, le Bureau a étroitement collaboré avec d'autres directions générales de l'ACDI, mais aussi avec d'autres ministères fédéraux, notamment Élections Canada, Affaires étrangères et Commerce international Canada et la Défense nationale.
    Le Bureau a mis en place une nouvelle façon de rassembler des équipes en vue de répondre aux demandes de soutien à l'observation d'élections.Il fournit aussi une nouvelle formation en matière de sécurité aux observateurs électoraux. En outre, le Bureau a également favorisé l'amélioration des relations entre des organisations régionales comme l'Organisation des États américains et l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe. En ce qui concerne le soutien du processus électoral, nous avons non seulement largement augmenté l'engagement du Canada sur le plan quantitatif au cours de l'année dernière, en collaboration avec Élections Canada et d'autres institutions, mais nous avons également considérablement amélioré la qualité de notre engagement.
    En partenariat avec d'autres organisations canadiennes et internationales, le Bureau a facilité la participation du Canada au développement de systèmes politiques plus ouverts, transparents et responsables. Comme vous l'avez constaté, à titre de coprésident du Conseil de la démocratie, le Bureau a collaboré avec le MAECI, le CRDI et d'autres organismes canadiens non liés au gouvernement pour mener des discussions visant à stimuler l'engagement de la communauté de praticiens envers la promotion de la démocratie.
    D'autre part, en collaboration avec le reste de l'ACDI, le Bureau de la gouvernance démocratique cherche à donner à la société civile du Sud une place et un rôle dans le développement du discours démocratique. La ministre, Mme Verner, a récemment fait part de notre intention de travailler avec nos partenaires internationaux à la reconnaissance explicite du rôle que peut jouer la société civile des pays du Sud pour harmoniser les efforts des donateurs. En reconnaissant explicitement et en soutenant ce rôle, nous assurerons une meilleure coordination de nos initiatives avec celles des autres donateurs et des gouvernements des pays en développement.

  (1015)  

[Français]

    La promotion de la primauté du droit dans les pays en développement est aussi un des secteurs où le Canada peut apporter une aide marquante. Le Canada peut être fier de ses experts en droit civil et en droit commun. Pour optimiser la contribution du Canada, le Bureau de la gouvernance démocratique a récemment complété une étude qui dresse le portrait des institutions canadiennes travaillant dans le domaine de la primauté du droit. Cette étude, qui est menée en étroite collaboration avec les programmes géographiques de l'ACDI et avec les institutions du secteur canadien de la justice, servira de base à une approche inclusive de la programmation en matière de primauté du droit. Cette démarche permettra de faire progresser les objectifs de politique étrangère du Canada, d'améliorer l'harmonisation avec les autres donateurs et de répondre aux besoins des pays partenaires.
    À titre d'exemple, le Bureau de la gouvernance démocratique permet de faire avancer les choses au Ghana, où nous travaillons en étroite collaboration avec les intervenants locaux pour améliorer les compétences et les connaissances du personnel des services judiciaires. Toujours au Ghana, le bureau travaille avec plus de 200 journalistes, rédacteurs en chef et d'autres représentants du monde des médias pour perfectionner leur habileté à parler d'enjeux propres aux droits de la personne.
    Nous travaillons également explicitement sur la question des droits humains, et surtout sur la façon de mesurer leurs progrès et leur impact. Grâce à l'aide fournie par le Bureau de la gouvernance démocratique à Metagora, un projet-pilote de l'OCDE qui vise à créer un système qui servira à mesurer l'état de la démocratie, des droits de la personne et de la gouvernance, le bureau contribue également à établir des indicateurs précis, pertinents et efficaces pour l'élaboration d'une programmation fondée sur des preuves dans le secteur des droits de la personne.
    Nous travaillons en étroite collaboration avec Equitas et les universités de Montréal et de McGill. Le bureau travaille également à accroître la capacité du ministère de la Justice et des droits de la personne d'Indonésie à protéger les droits de la personne dans les régions touchées par le tsunami.
    En ce qui a trait à la responsabilité des institutions publiques, le bureau a déjà collaboré à améliorer la cohérence et la coordination de ces dernières. Il a établi des accords-cadres avec deux entités canadiennes de renommée mondiale expertes dans la gouvernance, c'est-à-dire Statistique Canada et le Bureau du vérificateur général du Canada. Ces accords-cadres aident à rallier l'expertise canadienne en matière de gestion statistique et de vérification, ce qui favorise une approche globale et une vision plus ambitieuse de la contribution du Canada en faveur de la responsabilité de rendre des comptes dans les pays en développement.
    Un des rôles du bureau est de travailler avec les directions générales des programmes de l'ACDI pour promouvoir la gouvernance démocratique de façon cohérente. Le bureau a contribué à l'élaboration de cadres de programmation de pays tels que la Tanzanie, le Honduras, la Bolivie et l'Ukraine. Il a également collaboré avec les programmes géographiques d'Haïti, du Nicaragua, du Honduras et du Pakistan pour mettre à l'essai un projet d'indicateurs de gouvernance. Ces derniers fournissent des données précises et opportunes sur lesquelles on peut s'appuyer pour élaborer une programmation efficace.
    Dans une optique d'apprentissage collaborative, le bureau a uni ses forces et celles du Centre pour l'innovation dans la gouvernance internationale, ou CIGI, à Waterloo, pour créer un portail d'échange des connaissances à l'intention de tous les intervenants engagés dans la gouvernance démocratique. Ce village de la gouvernance virtuelle attirera l'attention de la communauté internationale sur le bassin de connaissances, d'expertise et de leadership du Canada en matière de promotion de la gouvernance démocratique. Il améliorera la capacité des décideurs et des praticiens à créer dans les pays en développement des politiques et des programmes fondés sur les preuves, et facilitera l'intégration de ces connaissances et des pratiques innovatrices et efficaces.

[Traduction]

    Pour ce qui est des projets futurs, au cours de l'année à venir, le Bureau travaillera fort pour améliorer la capacité de l'ACDI et de ses partenaires, et ce, grâce à des initiatives novatrices de financement et de développement des capacités. Par exemple, le mécanisme de déploiement du développement démocratique, une initiative de plusieurs millions de dollars, permettra à l'ACDI de recruter et de déployer des spécialistes de la gouvernance démocratique parmi les meilleurs, et de répondre ainsi rapidement à d'urgents besoins sur le terrain.
    Pour le moment, si l'ACDI ou un autre ministère constate qu'un pays a besoin de certains experts… si un pays vient nous demander de l'aide pour réformer son bureau du vérificateur général, par exemple, ou pour apporter une amélioration dans tel ou tel domaine, il peut être long et compliqué de recruter et de déployer les experts canadiens requis. Grâce au mécanisme de déploiement du développement démocratique, nous travaillerons en collaboration avec un partenaire canadien — et nous avons déjà fait un appel de propositions à cet effet — pour pouvoir recruter rapidement et fournir les meilleurs experts canadiens dans les différents domaines de la gouvernance démocratique.
    Dans ses efforts en vue de promouvoir la liberté et la démocratie, le Bureau appuiera de façon proactive les gouvernements engagés envers la démocratie. À cet effet, on mettra moins l'accent sur le jour même des élections que sur le cycle électoral plus large, ce qui touchera des aspects comme la période de transition du pouvoir, la transparence des médias et le renforcement des commissions électorales.
    L'une des initiatives clés du Bureau sera de coordonner la mise en oeuvre d'une stratégie améliorée de lutte contre la corruption pour l'Agence. L'appui à la responsabilisation, à la transparence et à l'équité sont des principes au coeur de l'approche du nouveau gouvernement du Canada et des principes essentiels à l'efficacité de l'aide de l'ACDI. Un aspect de cette stratégie de mise en oeuvre du Bureau de la gouvernance démocratique sera d'offrir une formation générale sur la lutte contre la corruption .
    Pour être clair, depuis des années, nous luttons très énergiquement et très efficacement contre la corruption dans le cadre des projets ou programmes auxquels l'ACDI participe. Nous voulons aller encore plus loin en aidant les gouvernements à adopter des programmes pangouvernementaux plus vastes pour lutter contre la corruption et améliorer la responsabilisation et la transparence de façon beaucoup plus systématique.
    Enfin, en ce qui a trait à la primauté du droit, le Bureau donnera suite aux recommandations tirées de son examen des institutions canadiennes en développant un cadre stratégique pour la programmation liée à la primauté du droit, en collaboration avec les institutions canadiennes spécialisées dans ce domaine. Nous avons également l'intention de mettre en oeuvre un accord-cadre avec le ministère de la Justice. Cela favorisera la création d'une communauté de praticiens dans le domaine de la primauté du droit, et ce, grâce à une coordination et une collaboration accrues entre les différents acteurs.
    Pour conclure, nous prévoyons et espérons que le Bureau de la gouvernance démocratique jouera un rôle clé dans la livraison d'une programmation efficace, novatrice, cohérente et axée sur les résultats en matière de gouvernance démocratique et ce, pour le bénéfice de l'ACDI, du gouvernement du Canada et de la communauté de praticiens dans son ensemble.
    Le Bureau de la gouvernance démocratique sera à l'avant-plan de nos efforts de lutte contre la corruption. Il élaborera des mécanismes qui permettront au gouvernement du Canada d'avoir accès rapidement aux meilleurs spécialistes canadiens et de les déployer de manière efficace. Il servira également de plaque tournante pour l'appui donné aux spécialistes canadiens et étrangers.
    Je vous remercie infiniment de m'avoir permis de souligner les contributions que l'ACDI, par le truchement du Bureau de la gouvernance démocratique, effectue en faveur de cet enjeu mondial. Le fait que vous avez entrepris cette étude est encourageant, et je suis intéressé de prendre connaissance des réflexions et de la perspective nouvelle que votre étude apportera à notre travail.
    Je souhaite que votre travail soit fructueux et j'ai bien hâte d'entendre vos recommandations.
    Merci beaucoup.

  (1020)  

    Merci, monsieur Greenhill.
    Juste avant de passer aux questions, j'ai ici un document qui ne semble pas être disponible sur votre site Web. Il s'intitule « Canada's Aid Program, January 29, 2007 ». Le comité pourrait-il en obtenir un exemplaire dans les deux langues officielles?
    Certainement.
    Très bien.
    Pourriez-vous simplement me dire très rapidement combien l'ACDI dépense en tout pour la gouvernance démocratique? Nous savons tous que l'ACDI fait un excellent travail, mais je trouve très frustrant de ne pas pouvoir chiffrer les dépenses. Pourriez-vous m'en donner une idée pour l'exercice 2006-2007 en cours?
    Pour 2005-2006, les dépenses se chiffrent à 375 millions de dollars.
    Pour 2006-2007, ce sera plus important. Pour ce qui est du chiffre précis…

[Français]

    Pour 2007-2008.
    On n'a pas encore ces statistiques parce que cela dépendra de la décision de la ministre, mais on peut dire clairement que c'est en augmentation constante. Ce sera donc plus que les 375 millions de dollars que j'ai mentionnés pour 2005-2006.

[Traduction]

    Très bien.
    Passons à M. Patry, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup. Je vais partager mon temps avec mon collègue Borys.

  (1025)  

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur Greenhill et madame Heuchan.
    En janvier dernier, le comité a reçu de l'ACDI une note documentaire sur le Bureau de la gouvernance démocratique. Dans les notes documentaires de l'ACDI, on précise que ce nouveau bureau aura le mandat spécial d'améliorer l'efficacité de l'aide.
    Le 4 décembre dernier, Mme Diane Éthier de l'Université de Montréal a comparu devant ce comité et a affirmé que l'ACDI ne faisait pas vraiment d'évaluation de l'efficacité.
    Ma première question est très simple. La responsabilité de l'évaluation de l'efficacité des programmes de gouvernance démocratique de l'ACDI sera-t-elle confiée au Bureau de la gouvernance démocratique?
    Pour ce qui est de ma deuxième question, je note ce matin, dans les documents qui nous sont fournis, la liste très impressionnante de vos partenaires en matière de gouvernance démocratique.
    Où en est le processus d'attribution de contrats pour le mécanisme du Déploiement pour le développement démocratique?

[Traduction]

    Je vais demander à mon collègue de poser sa question. Ainsi nous aurons toutes les réponses d'un seul coup. Il va poser sa question en premier.
    Oui, il va poser une deuxième question, après quoi vous pourrez répondre.
    Je voudrais soulever la question de la réorganisation. Il semble qu'il y ait eu une réorganisation des programmes existants. Avez-vous l'intention de participer directement, plutôt qu'indirectement par l'entremise d'agences de l'extérieur, à ce genre de travail? À quel pourcentage des projets réalisés l'année dernière, par exemple, avez-vous participé directement?
    Vous avez aussi parlé du Corps canadien et de la mobilisation des jeunes et des bénévoles. Il y a eu un excellent projet, le projet inaugural qui était la mission d'observation des élections en Ukraine avec la participation des communautés de la diaspora. Malgré toutes les réserves et toutes les inquiétudes du ministère, cela a été un grand succès, précisément grâce à ce facteur.
    Nulle part dans les documents il n'est fait mention de la participation directe de cet énorme réservoir de connaissances que nous possédons au Canada. Cela nous avantage énormément par rapport aux autres pays pour promouvoir la gouvernance démocratique à l'étranger.

[Français]

    Merci de vos questions. Il y en a plusieurs; je vais essayer de répondre à toutes.
    On s'assure de l'efficacité de l'aide à deux ou trois niveaux. Premièrement, l'équipe assure un suivi étroit de chacun de nos projets. Deuxièmement, dans le cadre du programme, on fait des évaluations, souvent au niveau du pays, et celles-ci sont publiques. Troisièmement, l'agence a des critères. Il y a, par exemple, le pourcentage de l'aide accordée et le pourcentage de nos projets qui ont réussi. Cela nous donne une mesure de l'efficacité de l'aide dans le cadre de ces projets spécifiques.
    Si on considère l'efficacité de l'aide pour le développement démocratique, on peut voir aussi des choses bien concrètes sur le terrain. Par exemple, en Haïti, des actions ont bien réussi. Pour la première fois en 200 ans, les Haïtiens ont eu des élections aux niveaux municipal, législatif et présidentiel qui ont bien réussi. On a aussi donné à 3 millions d'Haïtiens des cartes d'identité leur donnant un certain accès aux services pour la première fois de leur vie.
    En Afghanistan, où le Canada a dépensé 30 millions de dollars pour appuyer les élections de 2005, on a pu voir que ces élections avaient bel et bien eu lieu. Si je me souviens bien, 63 p. 100 de la population a voté, dont un nombre de femmes jamais égalé auparavant lors d'une élection en Afghanistan.
    Les évaluations futures des projets spécifiques sont la responsabilité des départements qui les font. De plus, nous avons un département responsable de l'évaluation et de l'audit. Nous aurons aussi, après avoir mis un nouvel accent sur la comptabilité, un chief audit executive qui fera des audits pour moi sur des programmes spécifiques, afin de nous assurer que l'argent est bien dépensé et donne des résultats. Comme je l'ai dit, dans le cas des élections surtout, on peut voir les résultats directement.
    En ce qui concerne les processus, ceux-ci varient. On travaille parfois avec des organisations multilatérales, par exemple l'Organisation des États américains, ou l'OEA, pour quelques projets. Pour d'autres projets, nous avons recours à des appels d'offres concurrentiels, par exemple pour le mécanisme du Déploiement pour le développement démocratique. Cela consiste en une offre concurrentielle auprès de plusieurs personnes qui ont démontré de l'intérêt.

  (1030)  

[Traduction]

    En ce qui concerne le rôle du Bureau de la gouvernance démocratique, le Bureau a bien l'intention non pas de redistribuer les fonds, mais d'ajouter des fonds supplémentaires aux grosses sommes d'argent que nous investissons déjà dans l'ACDI et dans l'ensemble du gouvernement pour la gouvernance démocratique.
    En plus des fonds supplémentaires, nous voulons améliorer la qualité de ce que nous faisons et cela de deux façons. C'est d'une part en soutenant des programmes novateurs comme certains des programmes électoraux qui sont réalisés ainsi que le mécanisme de déploiement démocratique. La deuxième façon dont nous pouvons améliorer les choses c'est en centralisant tous les efforts. Il est trop souvent arrivé par le passé que nos projets soient dispersés dans différents programmes géographiques et ministères sans être coordonnés. Le Bureau sera un centre de réflexion et de coordination.
    Par conséquent, en plus du financement supplémentaire, la qualité et la coordination de notre engagement dans la gouvernance démocratique vont nettement augmenter.
    Pourriez-vous nous dire à combien cela se chiffre exactement?
    Le montant prévu au budget pour cette année est de 40 millions de dollars, en plus de ce que nous faisons par l'entremise…
    Comme nous manquons de temps, vous pourriez peut-être répondre par écrit à certaines des autres questions qu'il a posées.
    Madame Lalonde.

[Français]

    Je vais partager mon temps avec M. Carrier.
    D'abord, pourriez-vous nous donner, monsieur Greenhill, le texte que vous nous avez lu? Ce serait utile. Étant donné qu'il est déjà dans les deux langues, cela ne posera aucun problème.
    Dans le budget des dépenses rendu public le 27 janvier, j'ai cherché en vain les mots « développement démocratique ». On fait allusion plusieurs fois au développement, mais jamais au développement démocratique. Que signifie l'ajout des mots « développement démocratique » et comment pourrons-nous nous y référer?
    Ensuite, je voudrais poser une des questions qu'on nous a préparées. Si les allocations sectorielles sont les mêmes que dans le document du 29 janvier sur le Programme d'aide du Canada, 21 p. 100 des dépenses actuelles consacrées à l'aide continueront de cibler la gouvernance démocratique, ce qui signifie que l'ACDI dépenserait 640 millions de dollars pour la gouvernance démocratique au cours du prochain exercice.
    Pourriez-vous nous confirmer ce chiffre de 640 millions de dollars?

[Traduction]

    Merci, madame Lalonde.
    Monsieur Greenhill.

[Français]

    Il nous fera plaisir de vous fournir une copie du texte.
    Comme nous fonctionnons par institution et par lieu géographique, vous ne verrez pas les mots « développement démocratique », mais vous trouverez la cible pour la gouvernance démocratique. Comme celle-ci se trouve déjà dans la structure traditionnelle de l'ACDI, elle englobe aussi les mesures qu'on doit prendre pour aider à la résolution de conflits et des choses de ce genre. Ces fonds sont donc alloués à la gouvernance d'un des secteurs de l'ACDI. Il n'en va pas de même avec la gouvernance démocratique.
    Nous allons fournir au comité une analyse démontrant les sommes qui seront allouées à la gouvernance démocratique de ces secteurs.

  (1035)  

    Merci, monsieur Greenhill.
    Monsieur Carrier, vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    C'est la première fois que je siège au Comité des affaires étrangères et des affaires internationales, et je trouve cela bien intéressant, d'autant plus que je fais partie de l'Association parlementaire Canada-Afrique. Donc, il y a un certain lien.
    Votre dépliant fait état de vos différentes composantes d'intervention. Je trouve que c'est un mandat très vaste et très beau, sauf que vous ne pouvez sûrement pas intervenir dans tous les pays en même temps et de la même façon. Comment définissez-vous vos cibles d'intervention? Sont-elles définies en partie par le ministre des Affaires étrangères, ou si vous avez l'entière liberté de les définir et que vous les soumettez ensuite au ministre? Faites-vous part au ministre responsable des résultats de vos efforts concernant les différentes cibles d'intervention définies, de sorte que des actions puissent être prises par la suite sur le plan démocratique?
    Merci. Il s'agissait de questions essentielles, surtout en ce qui concerne la gouvernance démocratique.
     À l'ACDI, nous concentrons davantage nos ressources sur certains pays. Pour décider où et comment nous allons agir en matière de gouvernance démocratique, nous tenons compte de deux facteurs. Nous devons d'abord préciser quelle est la volonté du Canada de s'impliquer, qu'il s'agisse des élections en Ukraine, en Afghanistan ou en Haïti. Il s'agit de développement mais aussi d'un engagement positif du Canada.
    D'autre part, nous discutons avec les pays partenaires, soit avec leur gouvernement, soit avec des membres de la société civile. En effet, nous essayons de plus en plus de prendre des initiatives qui correspondent aux besoins exprimés par ces pays en voie de développement. Par exemple, nous travaillons actuellement avec des gens du Mali pour mettre sur pied le premier bureau du vérificateur général en Afrique francophone. Il s'agit d'une demande spécifique du gouvernement du Mali, qui voit là une façon d'augmenter sa transparence et son combat contre la corruption.
    La décision de s'impliquer en Haïti au cours des dernières années émanait clairement du gouvernement du Canada. Pour ce qui était de savoir où et comment nous allions travailler, ce fut discuté avec les autorités haïtiennes. On a donné de l'appui relativement à la commission électorale. Le Centre parlementaire contribue maintenant à la formation des parlementaires. Nous avons aussi formé des médias et des groupes de droits de la personne à la suite de discussions avec des membres de la société civile.
    Nous assurons la rétroaction à l'égard de projets spécifiques de façon à déterminer ce qui a fonctionné et ce qui n'a pas fonctionné. Nous pensons aussi être en mesure de faire la synthèse, dans le cadre de discussions, des leçons apprises avec ce Bureau de la gouvernance démocratique. L'objectif est de s'assurer de toujours avoir recours aux meilleurs programmes dans le cadre de ces démarches.
    Il est clair que la gouvernance démocratique est plus complexe, plus ardue et plus délicate dans le domaine de l'éducation et d'autres secteurs difficiles que dans d'autres secteurs. C'est pourquoi nous avons pensé établir un bureau consacré à ces questions. C'est essentiel pour que nous devenions plus forts dans ces domaines.

[Traduction]

    Merci, monsieur Greenhill.
    Nous passons du côté ministériel.
    En ce qui concerne le financement, la Partie II du Budget principal des dépenses a été déposée hier. Elle indique que le budget de l'ACDI pour 2007-2008 sera de 3 049 000 000 $. Vous avez dit que le financement du développement démocratique se chiffre à environ 375 millions de dollars, mais dans ce document, la gouvernance démocratique représente 21 p. 100 de votre budget, soit 650 millions de dollars. C'est une forte augmentation. Ce montant vous semble-t-il normal?
    Les sommes que l'ACDI consacre à la gouvernance démocratique représentent quel pourcentage de l'ensemble des dépenses du gouvernement canadien…? Y a-t-il quelqu'un qui réunit les montants des dépenses consacrées au développement démocratique et qui dit quelle est la part de l'ACDI, celle des Affaires étrangères et celles des autres ministères?

  (1040)  

    Le montant de 375 millions de dollars est pour 2005-2006, alors si vous le comparez avec le montant pour 2007-2008…
    Il y a donc une augmentation de 61 p. 100?
    La ventilation par secteur comprend des dépenses pour la résolution des conflits, etc., qui n'entrent pas dans le domaine de la gouvernance démocratique, mais qui entrent généralement dans la rubrique de la gouvernance au sens large.
    Selon ce document, la gouvernance démocratique absorbe 21 p. 100 de votre budget.
    Je vais veiller à obtenir des chiffres précis et vous fournir une analyse de certaines des activités des autres ministères qui entrent dans cette rubrique.
    Si vous prenez le Fonds pour la paix et la sécurité dans le monde, qui joue un rôle de plus en plus important dans la réforme du secteur de la sécurité, la justice et la primauté du droit dans certains États fragiles, il a également une contribution importante à faire. Voilà pourquoi le Conseil démocratique est coprésidé par les Affaires étrangères et l'ACDI.
    Si vous voulez savoir exactement à combien se chiffre l'engagement du gouvernement canadien à cet égard, nous allons préparer rapidement ces renseignements pour le comité, en collaboration avec les Affaires étrangères.
    Nous l'apprécierions, surtout si vous pouvez le faire rapidement. Vous êtes probablement nos derniers témoins sur ce dossier et certains de ces renseignements nous seront très utiles pour notre rapport.
    Monsieur Goldring, s'il vous plaît.
    Monsieur Greenhill, l'examen de vos documents m'amène à vous poser des questions dans la même veine. Vous avez certainement bien décrit la structure de base de cette gouvernance démocratique, mais on semble se demander quel est le montant exact qui est affecté à cette fonction et à cette organisation. Serait-il possible — car cela nous serait utile — d'obtenir un diagramme des divisions que comporte cette organisation ou qu'elle va comporter? Autrement dit, est-ce qu'elle est déjà structurée?
    Vous avez mentionné tout à l'heure que vous aviez déjà procédé à des appels d'offres pour certaines fonctions. Si vous l'avez fait, vous avez certainement déjà dû mettre en place une structure plus détaillée. Si vous lancez des appels d'offres, y précisez-vous ce que vous désirez ou attendez-vous de recevoir des propositions?
    Je pose la question parce que le comité a consacré énormément de temps à ce rapport et je me demande comment ce rapport et les recommandations qui devraient l'accompagner s'intégreront dans votre stratégie et votre planification globale et s'il aura un effet qui pourra varier à l'avenir. Il nous serait utile d'avoir une certaine idée de ce que vous envisagez pour la gouvernance démocratique, ainsi qu'une estimation de ce que cela coûtera.
    Merci, monsieur Goldring.
    Monsieur Greenhill.
    Nous allons vous préciser comment cette organisation est structurée et quelles sont nos idées. Le Bureau de la gouvernance démocratique se compose d'environ 30 à 40 personnes qui ont pour rôle d'aider à coordonner, au sein de l'ACDI, un grand nombre des activités qui ont lieu au sein des différentes directions géographiques et autres organes du gouvernement. Nous pouvons vous en donner une description précise.
    En ce qui concerne l'appel de propositions, c'est pour ce qu'on appelle un mécanisme de déploiement. Un partenaire canadien sera choisi par voie de soumission pour coordonner les services d'experts des différentes régions du Canada. Ensuite, si on a besoin d'une personne compétente pour réformer le Bureau du vérificateur général ou pour procéder à une réforme de l'appareil judiciaire ou résoudre d'autres problèmes, nous aurons un mécanisme en place pour trouver cette personne et l'envoyer sur le terrain très rapidement. Voilà comment fonctionnera ce mécanisme de déploiement.
    Dans votre documentation, vous avez déjà indiqué qu'ils sont vos partenaires et ils sont tous déjà désignés. Avez-vous lancé une recherche, un processus de recrutement pour trouver les partenaires que vous avez désignés ici?

  (1045)  

    Oui. C'est s'est fondé sur l'expérience des cinq dernières années ou à peu près avec les partenaires internationaux canadiens qui avaient travaillé avec l'ACDI dans ce domaine. Nous avons lancé un appel d'offres public et les intéressés ont été invités à soumissionner. Bien entendu, un des critères était l'expertise et les connaissances dans le domaine.
    Dans ce cas, je me pose des questions au sujet de ce que mon collègue a dit à propos de la diaspora. En ce qui concerne l'Ukraine et l'Europe de l'Est, nous avons certainement une grande expertise, ici au Canada, que nous pourrions utiliser, de même que la diaspora des Caraïbes. Je ne vois pourtant pas ces communautés dans votre liste, pas plus que les autres diasporas d'autres régions du monde ne sont jugées suffisamment importantes pour figurer ici.
    En fait, les diasporas jouent un rôle important. C'était notamment le cas pour les élections en Ukraine. Pour ce qui est de Haïti et du gouvernement intérimaire, nous avons eu quelques réunions avec la diaspora. Pour l'Afghanistan, la diaspora joue un rôle important, mais souvent, au sein de ces organismes… Un Canadien d'origine afghane a joué un rôle crucial au sein de CARE Canada. Droits et démocratie a fait participer des membres de la diaspora à ses programmes pour les droits humains et les diasporas y jouent donc un rôle.
    Cette liste reflète simplement nos activités passées. Je ne serais pas du tout étonné… si nous publions cette liste dans un an ou deux, que vous y trouviez des organisations de la diaspora qui participent activement à ces programmes. Mais soyez certain que les diasporas jouent déjà un rôle très actif tant collectivement qu'individuellement.
    Peut-être pourriez-vous nous indiquer, dans votre diagramme, quels sont les points d'accès pour les membres de la diaspora afin que nous puissions diriger plus facilement les différentes communautés qui désirent apporter leur aide.
    Me reste-t-il un peu de temps?
    Oui, il vous en reste.
    Dans votre rapport, vous indiquez les nombreux pays dans lesquels vous travaillez, mais Haïti figure seulement sous le titre « Liberté et démocratie ». Étant donné la situation de Haïti, avez-vous également d'autres programmes pour ce pays? Je suppose qu'il y a certainement des problèmes sur le plan de la responsabilisation des institutions publiques, de la primauté du droit et des droits de la personne. Cela entrerait dans cette nouvelle catégorie, n'est-ce pas?
    Oui, vous avez parfaitement raison, car cette liste n'est fournie qu'à titre d'exemple. Elle n'est pas complète. En fait, pour ce qui est des programmes dans lesquels nous avons joué un rôle, nous avons participé très activement aux programmes touchant les élections et la liberté.
    Nous nous sommes beaucoup occupés des droits de la personne, et particulièrement de protéger les droits des Haïtiens à la frontière avec la République dominicaine où nous avons des programmes spéciaux. Nous avons été très actifs sur le plan de la primauté du droit, de la réforme de la police nationale haïtienne et de la réforme de l'appareil judiciaire. Vous avez donc parfaitement raison, nous pouvons vous citer des exemples de programmes de ce genre que nous menons actuellement en Haïti.
    Comme je l'ai mentionné, ce n'est là qu'un échantillon. Ce n'est pas la liste complète de nos projets.
    Nous apportons une aide importante dans ces domaines.
    En effet, et c'est un excellent exemple de pays où la gouvernance démocratique occupe une place fondamentale dans nos programmes.
    Il vous reste une minute de plus, mais je vais la prendre. Merci, monsieur Goldring.
    Si nous consacrons environ 600 millions de dollars au développement démocratique, quelle partie de cette somme est incluse dans l'aide publique au développement? Quel pourcentage de ce montant énorme entre dans cette catégorie? La totalité?
    La quasi-totalité. En fait, je crois que jusqu'ici c'était 100 p. 100. Je ne vois pas de raison pour que cela change.
    Merci. C'est exactement ce que je voulais entendre.
    Madame McDonough.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie pour votre présence ici aujourd'hui.
    Vous nous avez fourni des renseignements utiles et cela fait beaucoup à absorber, mais je voudrais explorer un peu avec vous le rapport que vous voyez entre ce que vous avez appelé les initiatives de gouvernance démocratique de l'ACDI, d'une part, et la réduction de la pauvreté et le développement durable,d'autre part.
    Vous ne pouvez pas visiter des pays comme l'Afghanistan, Haïti et le Kenya, comme j'ai eu le privilège de le faire, l'année dernière, sans comprendre pourquoi la gouvernance démocratique est extrêmement importante. Mais vous ne pouvez pas non plus visiter ces pays sans être frappé par leur pauvreté dégradante et dévastatrice et les conséquences des changements climatiques.
    J'ai donc deux brèves questions à poser, après quoi ne voudrais vous donner l'occasion de fournir des explications supplémentaires. Juste avant d'assumer la présidence de l'ACDI, vous avez fait valoir à notre comité, de façon très éloquente, persuasive et passionnée, pourquoi le Canada devrait atteindre le plus rapidement possible l'objectif de 0,7 p. 100, qui est la norme minimum internationale pour l'aide publique au développement. Je me demande comment vous envisagez cela aujourd'hui dans le contexte des initiatives de développement démocratique.
    Deuxièmement, je me demande si vous pourriez clarifier quelque chose. Le Fonds canadien de développement pour les changements climatiques, qui vise à s'attaquer à la fois aux causes et aux conséquences des changements climatiques, représente maintenant une priorité dans l'esprit des Canadiens. Ce programme est-il poursuivi? On a laissé entendre qu'il expirerait en 2005. Ce programme est-il poursuivi sous sa forme initiale ou a-t-il été modifié?
    Pourriez-vous nous parler un peu de l'interaction entre les trois éléments que vous avez énoncés ici? On s'inquiète de la diminution de l'importance accordée à la réduction de la pauvreté et du rôle que l'APD joue à cet égard et l'ignorance dans laquelle le public se trouve de ce qu'il est advenu de l'engagement de l'ACDI envers les initiatives de développement durable, surtout dans le contexte des engagements de Kyoto, etc.

  (1050)  

    Merci, madame McDonough.
    Monsieur Greenhill.
    Certainement.
    Il y a tout d'abord une interconnexion entre le développement de la gouvernance démocratique et l'environnement. Il est évident que tout est relié. Selon le pays, il peut être davantage souhaitable de mettre l'accent sur l'un plutôt que sur l'autre. S'il s'agit d'un État qui fonctionne relativement bien, il sera possible de consacrer énormément d'efforts au programme de réduction de la pauvreté. Dans d'autres cas, on peut se rendre compte qu'il faudra s'attaquer à la pauvreté par l'entremise des ONG plutôt que du gouvernement pendant que l'on essaie de bâtir des institutions démocratiques, et que la viabilité de la réduction de la pauvreté sera limitée par l'état dans lequel se trouvent les institutions démocratiques. C'est certainement ce qui s'est passé en Haïti. Ces deux facteurs ont d'énormes répercussions sur l'environnement, car lorsque les gens vivent dans la misère, lorsque les titres de propriété ne sont pas clairs… Quand il y a beaucoup de pauvreté, une mauvaise gouvernance, une mauvaise supervision, l'environnement en souffre énormément, car cela entraîne une dégradation massive. Haïti en est un excellent exemple.
    Il est impossible de résoudre la crise environnementale en Haïti et la désertification résultant de l'abattage des arbres sans travailler sur le plan de la gouvernance démocratique et de la réduction de la pauvreté. Par conséquent, nous ne réussirons pas en Haïti tant qu'il n'y aura pas de stabilité dans ces trois domaines. Le développement démocratique est la condition sine qua non, une nécessité absolue pour assurer la viabilité des projets de développement et des projets environnementaux en Haïti.
    Pour ce qui est de l'objectif de 0,7 p. 100, j'estime que les décisions à cet égard incombent aux gouvernements et aux ministres et non pas aux sous-ministres. J'ai pour rôle de veiller à ce que l'aide accordée soit utilisée le plus efficacement possible, dans le cadre de la politique gouvernementale. Je dois mentionner que le nouveau gouvernement s'est engagé à une croissance de 8 p. 100 jusqu'en 2010 et qu'il a également annoncé, cette semaine, un financement supplémentaire de 200 millions de dollars pour l'Afghanistan.
    En ce qui concerne le Fonds canadien de développement pour les changements climatiques, il a été lancé en 2000, pour une période de cinq ans. En 2006, il a été prolongé d'un an. Nous sommes en train de réexaminer ce programme et plusieurs autres pour nous assurer que nous pouvons soutenir efficacement la protection de l'environnement. Il est certain que l'environnement est un de nos secteurs prioritaires. Nous allons évaluer ce fonds et les autres solutions afin de pouvoir faire plus sur le plan de l'environnement.
    J'ai deux brèves questions. À quel niveau d'aide publique au développement cette augmentation de 8 p. 100 d'ici 2010 va-t-elle nous conduire? Deuxièmement, dites-vous que le Fonds a expiré, mais qu'il y a d'autres programmes de l'ACDI qui sont maintenus sur le plan des changements climatiques…?
    Il y a à l'ACDI un certain nombre de programmes, pas seulement pour les changements climatiques, mais pour l'environnement en général. Nous procédons actuellement à une évaluation et à un examen du Fonds dans ce contexte.
    Mais le Fonds a-t-il été maintenu jusqu'ici?
    Il a été prolongé jusqu'en 2006. La décision de le prolonger de nouveau…

  (1055)  

    Il a donc expiré? Depuis quand?
    Il a expiré à la fin de 2006-2007.
    Merci, madame McDonough.
    Très rapidement, avant d'en arriver au deuxième tour, M. Khan voudrait poser une question et je ne sais pas si quelqu'un d'autre le désire aussi. M. Goldring, peut-être.
    Je vais poser une question, monsieur, et vous laisser répondre.
    Je m'intéresse à l'Afghanistan. Énormément de travail y a été consacré. Lorsque vous dites que la gouvernance démocratique est essentielle pour réduire la pauvreté, j'aimerais que nous parlions du taux de succès ou d'échec. Compte tenu des 30 millions de dollars et du restant de l'aide apportée à l'Afghanistan, le rôle de l'ACDI a-t-il été utile? Et quel sera l'impact de l'augmentation de 200 millions de dollars?
    Merci beaucoup.
    L'Afghanistan est un excellent exemple de pays dans lequel la démocratie et le développement vont de pair. Nous avons contribué à la liberté et à la démocratie grâce aux 30 millions de dollars destinés à soutenir les élections et au travail que nous accomplissons pour améliorer l'appareil judiciaire, grâce au Fonds pour la paix et la sécurité mondiales.
    Néanmoins, un des meilleurs exemples qui montrent que les deux ne vont pas l'un sans l'autre, en Afghanistan, ce sont les conseils de développement communautaire. Dans le cadre du programme de solidarité nationale, le gouvernement canadien et le gouvernement afghan, ainsi que d'autres donateurs, ont contribué à la réinstallation d'un système de gouvernements locaux. Au moyen d'un vote à bulletins secrets, les citoyens élisent des représentants aux conseils communautaires qui ont accès à des fonds, selon un processus transparent, pour l'aménagement de l'infrastructure qu'ils jugent importante, que ce soit des puits, des systèmes d'irrigation, des écoles, des génératrices ou encore des ateliers de couture municipaux. Ce faisant, la collectivité doit, par l'entremise de ses représentants élus, non seulement désigner les projets à financer, mais également fournir au moins 10 p. 100 de la valeur de ces projets. Souvent, il s'agit de 30 p. 100 ou plus. Elle en est donc propriétaire.
    Ces projets se sont révélés extrêmement efficaces pour favoriser le développement au niveau rural. Il y a 16 000 villages qui ont des conseils de développement communautaire. Par conséquent, plus de la moitié de la population rurale de l'Afghanistan est maintenant touchée. Environ 21 000 projets ont été entrepris et 9 000 sont achevés. Il y en a plus de 400, rien que dans la province de Kandahar.
    Ces projets comptent parmi les moyens les plus efficaces de placer la responsabilité du développement entre les mains de la population locale. C'est également l'un des moyens les plus puissants de promouvoir la démocratie.
    En fait, monsieur le président, un des problèmes que nous avons lorsque nous présentons ces chiffres est que, pour le développement dans le cadre du programme de solidarité nationale ou pour la démocratie — en fait, pour les deux, cela entre probablement dans la rubrique du développement rural. En réalité, c'est un moyen très puissant de concrétiser la gouvernance démocratique jusqu'au niveau local.
    Merci, monsieur Greenhill.
    Je vais accorder un peu moins d'une minute à M. Goldring. Alors parlez rapidement.
    Je vais parler rapidement.
    Je vais commencer par M. Greenhill. Le développement démocratique se répercute également sur la réduction de la pauvreté et l'environnement ainsi que la primauté du droit. Il doit donc être difficile de séparer ces dossiers lorsque vous présentez vos prévisions budgétaires en fin d'année étant donné que tout cela commence par le développement démocratique.
    J'ai juste une brève question concernant quelque chose que je ne vois pas ici. J'aimerais savoir ce que vous pensez de l'éducation publique, car c'est certainement un aspect important en Haïti comme dans bien d'autres pays. À votre avis, à quel point l'éducation publique est-elle importante pour le développement démocratique?
    Parlez-vous de l'éducation publique sur les questions de démocratie ou en général?
    Je parle de la sensibilisation à la démocratie dans les écoles publiques.
    Il est extrêmement important que cela figure dans le programme scolaire et les cours d'instruction civique donnés à l'école, mais également dans les médias, et surtout la radio, pour aider à faire comprendre à la population, qui dans bien des cas n'a encore jamais voté, en quoi consistent des élections. Il est également important d'éduquer les médias quant au rôle que des médias conscients de leurs responsabilités doivent jouer dans le processus électoral. En Afghanistan comme en Haïti, une partie de nos programmes visaient à informer le public des processus démocratiques par l'entremise des médias.
    Merci beaucoup, monsieur Greenhill. Merci d'être venus.
    Voilà qui termine notre séance d'aujourd'hui.
    La séance est levée.