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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 015 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 28 février 2008

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Français]

    Bonjour et bienvenue, chers collègues.

[Traduction]

    Cette séance du 28 février 2008 est la 15e du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. Il s'agit d'une séance d'information sur la crise du Soudan et l'investissement.
    La première heure sera consacrée à l'audition de représentants du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Ce sont Ken Sunquist, sous-ministre adjoint, Opérations mondiales et délégué commercial en chef, Scott Proudfoot, directeur du Groupe de travail sur le Soudan, Donica Pottie, directrice des Politiques de la sécurité humaine, et David Angell, directeur général, Direction générale de l'Afrique. Nous accueillons aussi Louise Clément, directrice générale par intérim, Direction de l'Afrique Australe et de l'Est, de l'ACDI.
    Bienvenue à tous.
    Durant la deuxième heure, nous entendrons d'autres témoins, toujours sur la situation au Soudan.
    Je rappelle aux membres du comité que nous avons l'intention d'avoir à la fin de la réunion une très courte discussion pour ratifier et adopter le rapport du comité directeur, ou en tout cas pour le déposer officiellement devant le comité.
    M. Sunquist va faire une déclaration liminaire, après quoi nous passerons aux questions.
    Vous avez la parole, monsieur Sunquist.

[Français]

    Merci. C'est vraiment un plaisir pour mes collègues et moi-même d'être parmi vous aujourd'hui.

[Traduction]

    Je crois que la réunion d'aujourd'hui est un bon présage, monsieur le président. Je suis accompagné de plusieurs de mes collègues — ils sont plus nombreux que d'habitude — parce que nous ne savions pas quels seraient les domaines intéressant les députés. Plusieurs groupes du Ministère qui sont donc représentés aujourd'hui, s'occupant respectivement de la responsabilité sociale des entreprises, de la sécurité humaine et du Groupe de travail du Soudan. Nous avons aussi une collègue de l'ACDI si vous voulez parler de l'aide et du développement. J'espère que nous serons ainsi en mesure de répondre à toutes vos questions.
    Nous avons pris note de l'intérêt du comité à l'égard des entreprises canadiennes au Soudan. Comme le gouvernement du Canada n'est actuellement pas favorable à l'investissement au Soudan ni aux relations commerciales avec le Soudan, très peu d'entreprises y sont présentes. De ce fait, l'information disponible sur les activités — potentielles, actuelles ou futures — des entreprises canadiennes est relativement limitée.
    Il en va de même des questions relatives à la responsabilité sociale des entreprises présentes au Soudan. Toutefois, le comité souhaitera peut-être obtenir des précisions sur la stratégie d'ensemble et la position du gouvernement du Canada à ce sujet et j'en parlerai plus en détail un peu plus tard.
    La situation humanitaire et le respect des droits de la personne au Soudan préoccupent vivement le gouvernement du Canada. Nous avons d'ailleurs exprimé à maintes reprises l'inquiétude profonde que suscitent chez nous les atteintes constantes aux droits de la personne commises par toutes les parties au conflit, notamment la violence faite aux femmes et aux enfants, y compris de nature sexuelle.
    Le Canada joue un rôle central dans les efforts de la communauté internationale pour trouver des solutions pouvant mener à une paix durable dans tout le Soudan. À cette fin, nous avons consacré depuis 2004 plus de 441 millions de dollars à des initiatives de diplomatie, de maintien de la paix, d'aide humanitaire, de reconstruction et de remise en état. Le Canada appuie les efforts de maintien de la paix au Darfour. Nous sommes l'un des premiers donateurs de la Mission de l'Union africaine au Soudan qui a contribué à atténuer la violence des attaques contre les civils et à instaurer un environnement plus sûr pour permettre aux agences humanitaires de faire leur travail.
    Le Canada continue d'offrir son appui pendant la période de transition de la mission de l'Union africaine à la mission de l'ONU. Nous continuerons d'exhorter toutes les parties au conflit du Darfour à faciliter le déploiement de cette mission hybride et à coopérer pleinement à sa mise en oeuvre. Les représentants du gouvernement canadien font systématiquement connaître leurs préoccupations sur la situation qui règne au Soudan, par les voies bilatérales et multilatérales. Nous participons également aux efforts internationaux destinés à appuyer le processus politique au Darfour et nous continuerons d'appeler toutes les parties au conflit du Darfour à participer à la relance des pourparlers de paix.
    L'accès restreint des organismes humanitaires à la région reste une vive préoccupation et le Canada continue de prôner un accès sûr et sans entrave pour leur permettre de fournir leur aide sans avoir à craindre la violence, l'intimidation ou le harcèlement. Le Canada appelle régulièrement les parties au conflit du Darfour à protéger les populations civiles et à cesser les attaques et les actes de violence contre ces populations et contre les travailleurs humanitaires.
    Par le truchement de diverses résolutions, le Conseil de sécurité de l'ONU a imposé un embargo à la vente d'armes au Soudan, sous réserve de certaines exceptions reliées à l'aide humanitaire et au maintien de la paix, et il a décrété un gel des avoirs et une interdiction de voyager à l'égard de quatre ressortissants soudanais. Le Canada a mis en oeuvre ces sanctions au moyen de règlements adoptés au titre de la Loi sur les Nations unies. Nous sommes également prêts à mettre en oeuvre toute autre décision du Conseil de sécurité de l'ONU concernant le conflit au Soudan.
    Sur le plan commercial, il importe de souligner que, depuis 1992, le Canada refuse de procurer l'appui de ses programmes d"expansion du commerce international aux entreprises canadiennes voulant faire des affaires ou investir au Soudan. En 2007, le commerce du Canada avec le Soudan s'est limité à des importations d'une valeur de 65 millions de dollars, dont 99 p. 100 étaient des importations d'or, et à des exportations de 210 millions de dollars, dont 82 p. 100 étaient des céréales, notamment du blé et des denrées alimentaires.

  (1540)  

    En outre, le 5 février 2008, le gouvernement du Canada a appuyé la motion M-410 qui, si elle est adoptée, obligera le gouvernement et les sociétés d'État à se départir de leurs avoirs dans les entreprises faisant des affaires au Soudan, ainsi que dans tous les fonds et instruments financiers investis ou opérant dans ce pays, toujours sous réserve de certaines exceptions humanitaires. Cette motion doit faire l'objet d'un débat dans les prochaines semaines et, si elle est mise en oeuvre, des pressions additionnelles, notamment d'ordre économique, seront exercées sur le gouvernement du Soudan pour qu'il respecte les normes de conduite internationales.
    Toutefois, considérant le niveau de la présence commerciale canadienne au Soudan, l'incidence globale d'une telle mesure unilatérale de désinvestissement sur les économies canadienne et soudanaise risque d'être minime. À notre connaissance, et selon les bases de données disponibles, peu d'entreprises mènent des activités commerciales au Soudan. Parmi elles, mentionnons La Mancha, filiale montréalaise d'une société minière française qui y exploite une mine d'or, et Skylink qui fournit des aéronefs pour appuyer la participation du Canada au maintien de la paix au Darfour.
    Il convient de souligner également qu'une centaine de véhicules blindés de transport de troupes — le chiffre exact est 108, je crois — du ministère de la Défense nationale sont actuellement déployés au Soudan dans le cadre de la mission de l'ONU. L'entretien de ces véhicules est assuré par une société canadienne qui a passé un contrat avec le MDN. Donc, si vous constatez une hausse des statistiques commerciales, elle s'explique par des choses telles que la fourniture d'hélicoptères, l'entretien des véhicules blindés, etc.
    Il est crucial de bien cerner la présence canadienne au Soudan et c'est pourquoi le ministère continue de vérifier si d'autres firmes canadiennes y sont actives. Cela exigera du temps et des ressources mais sachez bien que c'est un dossier qui reste actif pour nous.
    En ce qui concerne la responsabilité sociale des entreprises au Soudan, nous encourageons toutes les entreprises canadiennes à adopter volontairement les pratiques exemplaires et les normes internationales en la matière.
    Pour ce qui est de la stratégie d'ensemble du Canada en matière de RSE, autant chez nous qu'à l'étranger, le gouvernement et les entreprises continuent de jouer un rôle de premier plan dans la promotion de pratiques exemplaires à l'échelle internationale. La responsabilité sociale des entreprises désigne la manière dont celles-ci intègrent les préoccupations sociales, économiques et environnementales à leurs activités commerciales. La RSE contribue à des résultats durables et à la création de richesses pour les entreprises et les parties prenantes, et il est crucial d'aider les entreprises à gérer leurs risques à l'étranger, aussi bien sur les plans environnemental et financier que sur celui des droits humains. Le gouvernement du Canada encourage toutes les entreprises canadiennes à respecter volontairement les normes et principes internationaux — il s'attend à ce qu'elles les respectent — et à refléter nos valeurs et nos engagements internationaux. Les initiatives volontaires sont un moyen souple, rapide et moins coûteux que la réglementation pour atteindre les objectifs de nos politiques publiques. Les sociétés canadiennes sont également encouragées à oeuvrer de manière transparente, en consultant les collectivités locales.
    En février 2007, le Canada a annoncé son appui à l'initiative relative à la transparence des industries extractives (ITIE), qui vise à améliorer la gouvernance dans les pays riches en ressources naturelles au moyen de la vérification et de la publication complète des paiements effectués par les sociétés pétrolières et minières aux gouvernements, ainsi que des recettes gouvernementales. Il s'agit là d'un pas important vers une transparence accrue, qui permet aux gouvernements concernés de rendre compte des paiements qu'ils reçoivent des sociétés minières.
    De plus, Exportation et développement Canada a annoncé en octobre 2007 son adhésion aux Principes de l'Équateur, un énoncé international des critères employés par le secteur financier pour évaluer et gérer le risque social et environnemental dans le cadre du financement de projets. Si je ne me trompe, c'est le premier établissement de financement des exportations au monde à avoir signé ce texte.
    Le Canada et le MAECI prônent également la RSE par le truchement du point de contact national, organisme chargé de promouvoir les lignes directrices de l'OCDE pour les entreprises multinationales et dont le but est de faciliter un dialogue positif et constructif entre les multinationales et les parties touchées par leurs activités.
    Le ministère participe également à diverses initiatives de sensibilisation et continue à tenir des séances de formation et d'information sur la RSE pour ses fonctionnaires, ici et à l'étranger, de façon à rehausser son aptitude à mieux conseiller les entreprises et à engager les gouvernements étrangers dans les questions de RSE.
    Permettez-moi de mentionner en passant que tous nos chefs de mission et délégués commerciaux en chef reçoivent maintenant une formation sur la RSE avant d'aller prendre leurs fonctions à l'étranger.
    En conclusion, le gouvernement du Canada reste profondément préoccupé par la situation des droits humains au Soudan. Pour ce qui est de l'activité commerciale, nous ne prévoyons pas d'augmentation notable des investissements dans ce pays. Au demeurant, si la motion M-410 est adoptée, elle constituera un autre facteur de dissuasion du commerce et de l'investissement au Soudan.

  (1545)  

    Finalement, nous nous attendons à ce que les sociétés canadiennes actives au Soudan — ou dans n'importe quel autre pays, d'ailleurs — respectent les normes de conduite les plus élevées du point de vue de la responsabilité sociale des entreprises.
    Je vous remercie de votre attention, monsieur le président. Nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions.
    Merci.
     Merci, monsieur Sunquist.
    Nous passons au premier tour de questions. Je vous rappelle que nous avons des représentants du ministère les Affaires étrangères et de l'ACDI et que c'est peut-être le bon moment de féliciter M. Obhrai qui vient de se voir confier la nouvelle fonction de secrétaire parlementaire de l'ACDI, en plus de ses responsabilités pour les Affaires étrangères.
    Nous entamons le premier tour.
    M. Martin, s'il vous plaît.
    J'aimerais, en notre nom à tous, féliciter M. Obhrai d'avoir obtenu cette nouvelle responsabilité. Je suis sûr qu'il sera aussi efficace à ce sujet qu'il l'a été pour les Affaires étrangères. Félicitations.
    Je remercie tous les témoins de leur présence. Nous sommes tous d'accord ici, je crois, sur la nécessité d'adopter une démarche s'appliquant à l'ensemble du pays pour faire face aux complexités du Soudan. Quand je suis allé à Khartoum, il y a quelques années, j'ai rencontré des représentants du régime. Très franchement, j'ai pensé que ce régime génocidaire le plus vieux au monde était composé d'un groupe de menteurs pathologiques.
    À l'heure actuelle, je crains que l'APG du Sud-Soudan soit sur le point de s'effondrer, ce qui marquerait à l'évidence la relance d'une campagne extraordinaire de violence semblable à celle que la région subissait encore il n'y a pas très longtemps.
    J'ai trois questions à vous poser.
    Quand il est venu témoigner devant le comité, M. Edwards, le sous-ministre, nous a tous beaucoup surpris, voire choqués, en disant qu'il n'y aurait aucune ressource du tout pour la MINUAD. Si tel est le cas, j'aimerais savoir pourquoi. Si ce n'est pas le cas, peut-être pourriez-vous nous dire quelles ressources précises seront consacrées à l'obtention des équipements dont a besoin la MINUAD : hélicoptères, véhicules de transport au sol et avions.
    Ma deuxième question vise à déterminer la liste des ressources que l'ACDI fournit au sud pour appuyer l'APG et répondre aux besoins humanitaires de la région. Si vous n'avez pas la réponse sous la main, ce qui serait parfaitement compréhensible, pourriez-vous l'envoyer plus tard au comité? J'ai l'impression que cet aspect a été relativement négligé et qu'il est peut-être très difficile, notamment si l'on tient compte de l'insécurité régnant au Kenya, d'acheminer des ressources sur place.
    Finalement, j'aimerais savoir si des efforts ont été déployés pour convaincre les membres de GNPOC, la Greater Nile Petroleum Operating Company, de se désinvestir et de chercher des ressources pétrolières ailleurs, comme en Angola ou au Nigéria, pour répondre à ses besoins et réussir à couper ses liens avec le Soudan.
    Merci.
    Merci, monsieur Martin.
    Je vais demander à David Angell, DG pour l'Afrique, de répondre à la première partie de votre question concernant les ressources de la MINUAD, puis à Louise Clément, de l'ACDI, de vous donner des précisions sur l'aide consentie au sud.
    La différence fondamentale entre l'AMIS et la MINUAD est que la première est une opération de soutien de la paix de l'Union africaine alors que la deuxième est une opération des Nations Unies combinée à une opération de paix de l'UA.
    Ce que ça veut dire, sur le plan financier, c'est que, pour l'AMIS, l'opération de l'Union africaine, le financement est volontaire, les pays étant invités à contribuer, et le Canada est l'un des principaux pays à l'avoir fait. En ce qui concerne l'opération de soutien de la paix de l'ONU, elle est financée essentiellement au moyen de contributions établies pour chaque pays. À titre de membres des Nations Unies, nous payons automatiquement une taxe à ce sujet, si vous voulez, correspondant à environ 3 p. 100 du coût.
    Ce que disait M. Edwards, je crois, c'était que le Canada a fait une contribution exceptionnelle à l'AMIS. Si je ne me trompe, nous avons fourni 286 millions de dollars depuis 2004, ce qui représente la quatrième contribution en importance mais, avec la transition à la MINUAD, le financement se fera au moyen des contributions établies par l'ONU. De ce fait, aucune contribution exceptionnelle ne devrait être demandée puisqu'il y aura une formule de financement automatique.
    Je crois que le Canada a fourni 48 millions de dollars pour la transition de l'AMIS à la MINUAD et que nous sommes en pourparlers avec les Nations Unies au sujet d'autres domaines dans lesquels nous pourrions apporter une contribution supplémentaire.
    Merci, monsieur.

  (1550)  

    Monsieur Sunquist ou madame Clément, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Je demande à Louise de répondre au sujet de l'aide.
    Bien que je ne sois pas en mesure de vous donner aujourd'hui la liste complète des initiatives, je peux vous donner un aperçu du programme de l'ACDI au Soudan.
    Nous avons un programme qui est essentiellement axé sur l'ensemble du Soudan. Il comporte deux éléments prioritaires, le premier étant l'aide humanitaire — surtout destinée aux Darfour —, et le deuxième, le rétablissement rapide de la région, ce qui est étroitement relié à la mise en oeuvre de l'Accord de paix global. L'objectif de cet élément est de faciliter le retour des réfugiés dans leurs foyers, d'appuyer le déminage des diverses régions du Soudan et, bien sûr, d'améliorer la gouvernance et la capacité du gouvernement local à dispenser des services aux populations.
    Nous vous enverrons la liste complète des initiatives concernant le sud.
    Merci.
    Il vous reste une minute.
    Monsieur Angell, j'ai reçu des informations de responsables de la MINUAD. Ils nous implorent de leur donner certaines ressources précises. Pas des soldats, ils en ont 26 000, mais plutôt du matériel pour les appuyer. Quelle que soit notre contribution par le truchement de l'ONU, elle ne nous empêche pas de faire preuve de leadership en fournissant certaines pièces d'équipement qui permettront aux troupes d'être déployées. Avons-nous l'intention de le faire? Avons-nous dit non? Où en est-on à ce sujet?
    Le Canada continuera de mettre à la disposition de la MINUAD la centaine de véhicules blindés de transport de troupes qu'il avait mis à la disposition de l'AMIS. Nous aurons toujours jusqu'à 50 membres des Forces canadiennes qui seront disponibles à la fois pour la MINUAD et pour l'opération de soutien de la paix au Sud-Soudan.
    Le Canada a fourni un certain nombre d'hélicoptères à l'AMIS. Les Nations Unies nous ont dit officiellement qu'ils ne sont plus nécessaires mais nous les gardons en disponibilité pendant la transition de l'AMIS à la MINUAD. Nous poursuivrons nos discussions avec les Nations Unies au sujet des besoins futurs.
    Merci beaucoup, monsieur Angell.
    Avant de passer au tour suivant, je voudrais mentionner la présence dans le public de son excellence le Dr. Faiza Hassan Taha, ambassadrice de la République du Soudan au Canada, et de M. Adil Bannaga, vice-ambassadeur.
    Soyez les bienvenus.
    Madame Barbot, vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, mesdames et messieurs. Je vous remercie d'être présents aujourd'hui.
    En ce qui concerne le désinvestissement au Soudan, qui est le sujet du jour, vous disiez, monsieur Sunquist, qu'il n'y avait en fait pas beaucoup d'entreprises canadiennes dans ce pays. La question semble donc se poser un peu différemment. Cependant, je comprends que tous les efforts du Canada vont dans le sens de la paix. Il y a un désir de changer la situation au Soudan. La question du désinvestissement étranger est tout de même très présente.
    De telles mesures peuvent-elles réellement toucher le gouvernement, étant donné que ces gens font affaire à des banques qui ne sont pas de notre monde? Il s'agit surtout de banques islamiques du golfe. Des mesures de désinvestissement peuvent-elles favoriser un peu la situation ou accélérer le processus de paix?
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Je pense qu'il faut tenir compte du contexte, c'est-à-dire de l'ampleur de la présence économique canadienne dans le pays, qui est minime. Nous ne faisons aucune promotion des échanges économiques depuis 1992. Donc, si des entreprises ont pris contact avec nous, au ministère ou dans nos missions, notre position a été de leur parler de leur responsabilité sociale et de leur rôle dans une situation de guerre. Ce genre de discussion a d'office un effet dissuasif et contribue au désinvestissement, comme le montre le fait que peu d'entreprises sont allées plus loin. Certaines l'ont fait, toutefois. J'ai mentionné que 82 p. 100 de nos exportations concernent des produits alimentaires, ce qui, tout le monde en conviendra, est probablement positif pour la population, de manière générale.
    Pour ce qui est des importations, l'entreprise qui produit la majeure partie de l'or a en fait été rayée des listes de désinvestissement des ONG des États-Unis parce qu'elle constitue — comment pourrais-je dire? — un modèle de développement durable et de présence positive dans la collectivité. Je vous communique là le jugement des ONG. Il s'agit d'une entreprise qui a employé plus de 500 personnes dans des emplois durables et qui ne fait pas partie des actions guerrières. Elle a construit des églises, des écoles, des mosquées, des hôpitaux. Elle se comporte très bien du point de vue de la responsabilité sociale des entreprises, au sens habituel, et elle fait même plus. Je précise qu'il ne s'agit pas d'une entreprise possédant le contrôle total de toute l'activité.
    Cela dit, votre question est difficile car elle touche au coeur même du problème. Comment pouvons-nous nous désinvestir quand nous sommes à peine présents sur place, et comment pouvons-nous faire passer le message qu'il s'agit d'une activité que le gouvernement du Canada et les Canadiens n'apprécient pas, pour faire comprendre que nous n'appuyons pas ce qui se passe dans cette région?
    Vous avez parfaitement raison de dire qu'il faut continuellement parler aux entreprises. Vous avez vu des exemples de grandes sociétés qui étaient sur place dans le passé. Nous les avons conseillées. Nous leur avons parlé. Elles ont participé aux discussions et la plupart se sont retirées.

  (1555)  

[Français]

    Même si le Canada n'a pas beaucoup d'industries au Soudan, il a quand même une voix à l'échelle internationale. Il a une idée de ce qu'est l'investissement et le désinvestissement et peut, de cette façon, influencer le débat. En se fondant sur ce que disait M. Sachs, on voit bien que les causes profondes ne sont pas vraiment d'ordre commercial, mais qu'il s'agit en fait de pauvreté, de misère, etc.
    Quelle influence le Canada exerce-t-il en vue de vraiment régler les problèmes là où ils se posent à la base?

[Traduction]

    Tout d'abord, chaque fois que nous le pouvons,si cela concorde avec la position que vous avez exprimée, oui, nous sommes là. Je crois l'avoir dit dans ma déclaration liminaire en affirmant que le Canada est tout à fait prêt à participer pour faire exactement ça dans différentes tribunes ou organisations.

[Français]

    Avez-vous des résultats à nous présenter à cet égard?

[Traduction]

    David, voulez-vous répondre?

[Français]

    Monsieur le président, j'aimerais ajouter ce qui suit à la réponse de mon collègue.
    Sur le plan non commercial, le Canada joue un rôle important dans le cadre du processus diplomatique international relatif au Soudan. En ce qui concerne le processus de paix, par exemple, le Canada était parmi les bailleurs de fonds les plus importants. J'ai moi-même participé pendant deux ans aux négociations à Abuja. Le Canada avait un diplomate sur le terrain pendant l'ouverture de la relance des négociations à Sirt, soit en octobre, novembre et décembre de l'année dernière. Le groupe de contact est le comité principal international des pays engagés envers le Soudan, et le Canada en est membre. Que ce soit à l'égard du Darfour ou dans une perspective Nord-Sud, le Canada y joue un rôle très important. Dans le cadre du processus international relié à la situation au Soudan, nous sommes donc présents et très actifs.

  (1600)  

[Traduction]

    Nous passons maintenant du côté gouvernemental. Je donne la parole à M. Goldring puis à M. Lebel.
     Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de votre présence, mesdames et messieurs.
    Ma question portera aussi sur le désinvestissement. Si le Canada y participe, et comme sa contribution globale est relativement minime ou ne peut avoir qu'une incidence réduite parce que nous faisons peu d'affaires dans la région, j'aimerais savoir quels autres pays sont des acteurs importants localement. Pouvez-vous les nommer? Lesquels appliquent cette politique de désinvestissement? Lesquels devraient l'appliquer mais ne le font pas? Je parle des pays qui devraient contribuer à la recherche de solutions mais ne le font tout simplement pas.
    Allez-y, monsieur Sunquist.
     C'est une question intéressante. En ce qui concerne qui devrait appliquer cette politique, je vous dirais que la plupart devraient le faire, mais c'est une autre question.
    Une recherche rapide dans nos bases de données nous a montré que la présence du Canada est minuscule. Nous avons cherché quels autres pays ont une présence relativement importante et ils ne sont pas nombreux.
    Si vous prenez le secteur du pétrole et du gaz naturel — je ne parle pas de sociétés individuelles parce qu'il y en a parfois plusieurs pour le même pays — vous trouvez des pays comme la Chine, la Malaisie, l'Inde, les États-Unis, l'Allemagne, les Pays-Bas, la France et l'Italie. Comme vous le savez, nous nous sommes retirés de ce secteur. Dans le secteur de l'énergie, la Suisse, la Chine, la France et l'Inde sont tous présentes. Dans celui des télécommunications, il y a les Émirats arabes unis, le Liban, le Koweït, l'Allemagne et la France.
    Je crois que cela répond précisément à votre question, madame Barbot. Beaucoup de pays sont très actifs au Soudan. Ce n'est pas le cas du Canada qui a décidé en 1992 de ne plus y être aussi actif.
    Je ne sais pas si ce sont les informations que vous vouliez mais il y a divers pays et entreprises qui sont actifs au Soudan.
    Quand on dit que les États-Unis ont adopté la législation sur l'investissement, ils ne l'ont pas nécessairement mise en oeuvre. S'il est vrai que le Parlement européen a adopté le même type de législation, il est évident que certains pays de l'Union européenne ne participent pas encore.
    Mon autre question est fondée sur un souci de prudence. Je vois que le Canada exporte des produits alimentaires, et je suppose que c'est essentiel, même si cela peut représenter un investissement au Soudan de la part de certaines entreprises. Y a-t-il certain types d'investissements que nous devrions essayer de séparer des investissements non essentiels, des investissements dont nous avons peut-être besoin et qui ne tombent pas dans le cadre de ce que nous essayons d'accomplir par un processus de désinvestissement?
    Si vous le permettez, monsieur le président, je demanderai à mes collègues de compléter ma réponse.
    À mon avis, l'objectif général est de ne pas pénaliser la population du Soudan, ce qui répond à votre question sur les produits alimentaires et ce type d'activité.
    Il ne faut pas généraliser. Par exemple, si l'on parle des sociétés d'État, vous devez savoir que les hélicoptères actuellement utilisés là-bas sont financés par le truchement de la Corporation commerciale canadienne. Il se trouve que je fais partie du conseil d'administration de cette société mais c'est comme cela que nous utilisons les sociétés d'État. Si l'on généralise trop, sans comprendre les répercussions que cela peut avoir... Dans le cas des hélicoptères, il est clair que nous en avons besoin là-bas pour faire ce que nous voulons faire.
    Je pense que vous soulevez les problèmes qui se posent quand on ne fait pas partie d'une action multilatérale de type ONU et qu'on veut agir unilatéralement. Je vous ai donné la liste des pays qui sont actifs. Nos valeurs, notre éthique nous disent une chose mais il est clair qu'il y a encore beaucoup de gens qui sont actifs sur place. Cela ne veut pas dire que nous devrions pas être là-bas; ça veut seulement dire que d'autres le feront et c'est pourquoi nous devons être présents dans différentes tribunes pour exprimer nos valeurs.
    Je sais que cela ne répond pas totalement à votre question. Je sais qu'il y a des questions de communications et que ce n'est pas nécessairement seulement un effort humanitaire. Si vous avez une radio... Dans l'un de mes postes précédents, j'étais en Yougoslavie; permettre à la télévision d'arriver en Albanie pour la première fois, ou en Corée du Nord quand j'étais en poste dans ce pays, a eu un effet spectaculaire sur les populations de ces pays. Si l'on dit qu'on ne peut pas avoir certaines communications, la conséquence non souhaitée est que les gens ne verront jamais qu'ils pourraient avoir une vie meilleure et que les choses pourraient se passer autrement.

  (1605)  

    Est-il possible de voir la chose sous cet angle, en essayant de séparer certaines des entreprises ou secteurs qui sont souhaitables mais qui tomberaient encore techniquement dans le cadre d'une initiative de désinvestissement — ce qui ne serait pas souhaitable parce que cela aurait alors un effet néfaste — des autres secteurs dont on veut effectivement sortir parce que c'est un encouragement et que cela fournit des fonds ou un encouragement au conflit local? Vous serait-il possible de signaler au comité quels autres pays ont participé aux différentes factions et s'ils tiennent compte de ce type d'équilibre dans leurs efforts de désinvestissement ou s'ils s'en moquent complètement?
    Merci.
    Avec votre permission, monsieur le président, nous vous enverrons une réponse par écrit car cette question exige un peu d'analyse. Je viens juste de parler à M. Proudfoot du Groupe de travail sur le Soudan. Je pense que vous devriez avoir une réponse plus complète que celle que nous pourrions vous donner maintenant.
    Nous allons examiner le cas des autres pays qui appliquent la politique de désinvestissement afin de voir comment ils différencient les choses. J'ai mentionné l'exemple américain. La Mancha a été retirée de la liste des États-Unis parce qu'elle fait du bon travail là-bas. Je ne sais pas comment on peut mesurer ces choses. Vous pourriez prendre une position différente mais c'était là une décision des ONG américaines.
    En ce qui concerne les produits alimentaires et certains aspects des communications, nous vous enverrons une réponse le plus rapidement possible.
    Merci, monsieur Sunquist.
     M. Lebel aura la parole au tour suivant.
    M. Dewar.
     Merci, monsieur le président.
    Je suis très heureux que nous ayons la possibilité de creuser un peu ce domaine. Nous allons entendre d'autres témoins qui nous apporteront d'autres précisions et je suis sûr qu'ils les partageront.
    Je remercie nos témoins d'aujourd'hui.
    L'une des questions auxquelles nous nous sommes intéressés... L'un des outils dont dispose le gouvernement est la LMES, comme vous le savez. Puisque vous avez été en poste dans l'ex-Yougoslavie, vous en connaissez les détails. Je suppose que l'un des outils qu'on pourrait utiliser dans le cas présent — et je conviens qu'il n'y a pas beaucoup d'investissements canadiens là-bas, comme vous l'avez dit — pourrait être la LMES.
    L'une de mes préoccupations — et je parlerai à nouveau de la Birmanie, mais pas aujourd'hui — est de savoir comment la LMES est mise en oeuvre car c'est une politique relativement récente puisqu'elle remonte à 1992. Ce qu'il nous faut aujourd'hui, c'est comprendre la portée des investissements. Je n'attends pas ça aujourd'hui mais vous pourriez peut-être remettre au comité une liste exacte des sociétés canadiennes qui investissent là-bas, en indiquant l'ampleur de leur présence.
    J'aimerais aussi avoir des informations sur l'investissement indirect car l'une des préoccupations que j'avais au sujet de la Birmanie — nous en avons discuté au sein de ce comité — était que la lentille par laquelle nous examinions la situation était celle des investissements futurs. À mon avis — et c'est juste une opinion —, nous aurions dû nous pencher sur les investissements qui existaient déjà en Birmanie. Si nous décidons d'utiliser ceci pour donner des indications au gouvernement, comme outil de sa politique, nous pourrions faire la même chose, c'est-à-dire ne pas examiner seulement qui investit directement au Soudan mais examiner aussi les investissements indirects, de façon à pouvoir toucher tous les dollars qui pourraient être investis, juste à titre d'information.
    L'autre chose que je veux mentionner, pour savoir si vous avez une expérience en la matière ou une connaissance de la situation, est que certaines personnes avec qui je discutais aujourd'hui m'ont dit que, même s'il n'y a pas beaucoup d'investissements canadiens actuellement au Soudan, pour les raisons déjà mentionnées — il y a beaucoup d'investissements de sociétés chinoises et indiennes —, le pétrole du Canada suscite beaucoup de convoitise. La proposition était d'appliquer des interdictions contractuelles et d'employer la RSE, la responsabilité sociale des entreprises, avec ces entreprises — par exemple, les sociétés chinoises qui convoitent nos sables bitumineux — en disant, avant que vous ne puissiez investir dans les sables bitumineux, examinons... Je sais que notre gouvernement s'intéresse à cela. Il a annoncé qu'il allait parler d'une lentille sur l'investissement étranger parce qu'il est très préoccupé par la sécurité nationale, notamment concernant l'investissement dans les sables bitumineux, et que nous pouvons employer la même méthode et utiliser cela comme outil.
    Je vais terminer sur ceci. Si l'investissement au Soudan et au Darfour me préoccupe, c'est à cause des conséquences sur la population. Des gens sont chassés de leurs propriétés, sans être indemnisés. Les sociétés pétrolières et les gens qui investissent là-bas — et ce sont des rapports que j'ai lus et entendus — utilisent parfois les lieux où des forages sont effectués pour mener des activités militaires, et il y a un double usage en ce qui concerne l'équipement.
    J'aimerais poser une question à notre gouvernement, je suppose. Serait-il possible d'imposer des conditions contractuelles à l'investissement dans nos champs pétroliers dans la mesure où on se penche sur l'investissement canadien et l'investissement indirect au Soudan?

  (1610)  

     M. Sunquist.
    M. Dewar pose une question à laquelle il est difficile de répondre en quelques mots, monsieur le président, mais je vais la scinder en deux parties.
    La première concerne la LMES et je crois que la plupart d'entre vous en avez été saisis dans le contexte de la Birmanie. Nous l'avons aussi utilisée au Bélarus ainsi que dans d'autres pays dans le passé
    En fait, la préférence... Je ne suis pas sûr de pouvoir parler de préférence juridique mais, généralement, c'est censé se faire de concert avec d'autres dans le cadre d'un regroupement multilatéral, onusien ou autre. Pour la Birmanie, c'était l'une des premières fois où nous avons agi sans cette... couverture, si je peux employer ce mot. Disons que nous l'avons fait différemment.
    La manière dont on peut invoquer la LMES dépend donc, je suppose, de la manière dont le gouvernement veut l'utiliser. La préférence a toujours été de le faire de concert avec d'autres car, sinon, ça devient un outil sans crocs si les autres peuvent la contourner autrement, comme disait Mme Barbot dans sa question. Nous préférons donc invoquer la LMES de concert avec d'autres de façon à pouvoir...
    Votre deuxième question est plus intrigante, dans un certain sens. Je ne pense pas qu'on l'ait déjà envisagée. L'investissement au Canada a toujours été envisagé dans le contexte d'entreprises oeuvrant au Canada en respectant les valeurs canadiennes, les intérêts canadiens, et en étant de bons citoyens corporatifs. Je ne pense pas qu'on ait jamais fixé de limite rigoureuse en fonction de ce que l'entreprise fait aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Chine ou au Japon. Je suppose qu'on pourrait se fonder sur sa réputation. C'est simplement une chose qui n'a jamais été utilisée comme politique publique.
    Si vous me le permettez, monsieur le président, la question de fond est que la richesse pétrolière du Soudan a le potentiel d'être un déterminant crucial, si vous voulez, pour la paix et le développement équitable, simplement parce que nous savons que les pétrodollars qui sont générés au Soudan ne vont pas exactement — cela dit malgré tout le respect dû à nos invités — assurer la paix et la stabilité dans ce pays.
    Je placerais l'impératif moral au premier plan en disant que, si nous savons que des sociétés pétrolières chinoises, par exemple, investissent là-bas et que leurs meilleures pratiques ne sont pas conformes à notre notion de RSE et qu'elles viennent investir ici, en faisant des profits similaires, c'est une question légitime à poser. Je sais que notre gouvernement se penche sur cette politique sous l'angle d'un examen attentif de qui investit, que ce soit dans le pétrole ou ailleurs. Voilà pourquoi j'en parle aujourd'hui, parce que nous avons des exemples de certains développements positifs au Soudan par le truchement de la Chine grâce à des pressions qui ont été exercées et d'un engagement constructif. Et je ne suis pas isolationniste en disant cela. Je pense qu'il doit y avoir un engagement mais il nous faut avoir les outils à notre disposition.
    Je crois pouvoir conclure que ce que vous me dites, c'est que la LMES est plus définie par le Cabinet que par vous mais, s'il y a d'autres outils, nous devrions certainement les examiner.
    J'en reste là.

  (1615)  

    Ça tombe bien parce que votre temps de parole est écoulé.
    Nous passons à M. Lebel.

[Français]

    Je vais poursuivre un peu dans le même sens que M. Dewar.
    M. Sunquist nous a dit plus tôt quelque chose d'intéressant. À l'occasion, des organismes nous disent que les entreprises canadiennes faisant des affaires dans d'autres pays ne respectent pas toujours le développement social de ces pays. Vous nous avez dit plus tôt que les entreprises canadiennes, lorsqu'elles allaient au Soudan, recevaient une formation en responsabilité sociale.
    Comment le gouvernement s'assure-t-il que les entreprises canadiennes faisant des affaires au Soudan ou dans d'autres pays respectent bien le développement social de ces pays?

[Traduction]

    Merci, monsieur Lebel.
    Monsieur Sunquist.
    Merci.
    Il s'agit au fond d'une question de conformité volontaire mais je crois pouvoir dire aussi que les entreprises canadiennes, quand elles opèrent n'importe où dans le monde, exportent les valeurs canadiennes et les systèmes canadiens. Le nombre d'entreprises canadiennes qui sont à n'importe quel moment impliquées dans ces questions est très faible.
    L'une des choses les plus intéressantes, dont nous n'avons pas parlé dans notre déclaration, est que, si vous prenez le cas de Talisman au Soudan il y a une décennie, je suis prêt à parier que Talisman est probablement aujourd'hui un chef de file au Canada en matière de RSE, et ce n'est pas à cause du Soudan. Cela dit dans le contexte de votre commentaire sur certaines pressions et certaines différences.
    Les entreprises au Canada... Nous essayons en fait de promouvoir les bonnes valeurs de RSE comme spécialité canadienne. C'est comme ça que nous voulons être perçus dans le monde. Nous voulons qu'on sache que, si l'on traite avec une société canadienne, il n'y aura pas de corruption. D'ailleurs, cela les aide à trouver des marchés car les agents gouvernementaux peuvent avoir l'assurance qu'ils ne seront pas mis sur la sellette en public pour ce genre de choses puisqu'ils savent que les sociétés canadiennes ne mangent pas de ce pain-là.
    Quand nous constatons qu'une société canadienne s'engage dans une voie qui nous met mal à l'aise, nos chefs de mission, nos ambassadeurs, nos hauts-commissaires ou nos délégués commerciaux n'hésitent pas à lui parler fréquemment des règlements du gouvernement d'accueil. Comme les règlements du gouvernement d'accueil sont parfois moins exigeants et plus souples que les règlements canadiens, nous disons aux entreprises canadiennes qu'elles doivent être liées par les deux. Elles ne doivent pas choisir les règlements les plus laxistes mais au contraire les plus exigeants.
    C'est une constante... J'ai parlé de Talisman mais j'aurais pu parler aussi de La Mancha et je n'ai pas répondu à la dernière remarque de M. Martin concernant GNPOC. Nous avons rencontré toutes les entreprises qui ont eu quoi que ce soit à voir, dans le passé ou récemment, avec le Soudan pour leur parler de leurs actions et de ce qu'elles font. Nous portons ces choses-là à leur attention quotidiennement, avec quelqu'un qui parle à quelqu'un.
    J'apprécie la teneur de votre remarque, dans le sens où ce n'est pas une approche réglementaire mais une approche exigeant qu'elles se perçoivent elles-mêmes comme Canadiennes attachées à nos valeurs.
    L'autre chose concerne les règlements de l'OCDE. Nous avons ici un point de contact national qui écoute les ONG et parle aux ONG et aux entreprises. Nous avons donc un mécanisme formel, nous avons des mécanismes informels, nous avons les choses du type Affaires étrangères... Nous pensons avancer dans la bonne voie et avoir le droit...
    Je dois dire aussi que les normes volontaires — nous utilisons les normes internationales volontaires de l'ONU, de la Banque mondiale — ne sont pas des choses qu'un quidam a concoctées un soir de nuit sans lune dans son sous-sol. Ce sont des normes valides pour les industries d'extraction — pour la corruption, etc.. Et vous constaterez que beaucoup de sociétés canadiennes sont aujourd'hui des chefs de file mondiaux. Elles publient des règlements de conformité; elles publient des rapports annuels séparés.
    Je suis pas sûr de pouvoir répondre à cela mieux qu'en disant que c'est là où nous en sommes.
    Je prendrai juste une seconde pour dire que l'autre chose que nous devons prendre en compte dans les contrats est de savoir s'il y a des obligations quelconques en vertu des négociations de l'OMC ou du GATT, et je ne le sais pas. C'est pourquoi je ne peux pas en parler.
    Veuillez m'excuser, je ne voulais pas mordre sur votre temps.

  (1620)  

    Merci, monsieur Sunquist.
     Nous passons maintenant à M. Patry puis à M. Wilfert.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur Sunquist.
     J'ai deux brèves questions à poser. Il semble qu'au Darfour, on ne puisse entrevoir la fin du conflit, même à moyen terme. On ne sait pas quand cela va se terminer. De plus, venant du Darfour, il y a eu une certaine déstabilisation chez son voisin, le Tchad. Le but très probable de cette déstabilisation était de ne pas permettre à la mission des Nations Unies d'augmenter le nombre d'hommes dont elle a besoin au Soudan comme tel. Même avec un embargo au Soudan, celui-ci peut se procurer des armes comme il le souhaite dans le monde, surtout par l'entremise de la Russie et de la Chine. Ma question est très simple. La solution ne passerait-elle pas par les Nations Unies, afin qu'une fois pour toutes, le Conseil de sécurité mette vraiment ses culottes, surtout avec la participation de la Chine?
    Deuxièmement, vous avez beaucoup parlé de la responsabilité des compagnies. Lorsque je présidais ce comité, il y a déjà deux ans, on a fait une étude sur la responsabilité sociale des entreprises et on a émis un rapport. À la suite de cela, les compagnies comme telles, soit les industries administratives, comme vous l'avez mentionné, ont émis certaines directives en février. Elles appuient cela. Par la suite, EDC a appuyé ces principes pour l'Équateur, et en mars, les tables rondes formées par le gouvernement fédéral ont émis un rapport. On attend depuis le mois de mars. Onze mois plus tard, on attend toujours la réponse du gouvernement.
    N'est-il pas temps que le gouvernement nous donne une réponse pour qu'on ait, non pas des voeux pieux, mais une politique du gouvernement à cet effet?

[Traduction]

     Merci, monsieur Patry.
    Aviez-vous une question, monsieur Wilfert? Sinon, nous allons les laisser répondre à toute la série.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis heureux de noter la présence de l'ambassadeur du Soudan, que j'ai rencontré, ainsi que du président du Comité des affaires étrangères du Soudan, que j'ai rencontré à plusieurs reprises. Je pense qu'il est certainement très important de dialoguer, même si on n'est pas toujours du même avis.
    Monsieur Sunquist, je voudrais savoir deux choses au sujet de la résolution 769 sur la MINUAD : premièrement, elle exige la coopération soudanaise pour être vraiment efficace; deuxièmement, c'est financier pour les hélicoptères à ailes fixes, etc. Je crois comprendre que le gouvernement canadien n'a donné aucune contribution financière. Pourquoi? Si nous croyons au devoir de protection, dont nous sommes l'auteur et que nous avons signé, pourquoi ne l'avons-nous pas fait?
    Merci.
    Je réponds à la première partie de votre question, sur le Conseil de sécurité de l'ONU. J'ai dit dans ma déclaration liminaire que la position du gouvernement est claire : nous suivons et apprécions les discussions du Conseil de sécurité de l'ONU, le débat et les décisions à ce sujet.
    La deuxième question porte sur les tables rondes concernant les industries d'extraction et leurs recommandations — 27 en tout — dont certaines ont déjà été mises en oeuvre mais qui seront toutes traitées dans la réponse qui sera déposée devant la Chambre.
     Après les élections.
    Je ne ferai aucune remarque à ce sujet mais je demande à mon collègue de répondre à M. Wilfert.
     Allez-y, monsieur Angell.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
     Selon notre analyse, les Nations Unies et le Conseil de sécurité jouent un rôle très important. Bien qu'ils n'aient pas connu un succès total jusqu'à présent, leurs efforts sont très importants.
    Par exemple, les membres du comité ont parlé de l'importance de créer des outils. On a vu les Nations Unies et le Conseil et de sécurité créer de nouveaux outils qu'on n'a jamais vus ici pour répondre à la situation au Darfour, comme la force de maintien de la paix et la force hybride. En effet, on n'a jamais vu une telle coopération entre les Nations Unies et l'Union africaine.
    On assiste à la même coopération dans certains processus de paix. M. Roed-Larsen représente le secrétaire général des Nations Unies et travaille étroitement avec M. Salim Ahmed Salim, qui représente le président de la Commission de l'Union africaine. Tous les deux collaborent étroitement pour travailler avec le mouvement afin d'établir des circonstances qui relanceraient les négociations. Le Conseil de sécurité a mis en place des mesures — en anglais on dit targetted sanctions — par rapport au financement des armements et à la capacité de voyager de quelques individus.
    De plus, les autres fonctionnaires des Nations Unies, Sir John Holmes, M. Guéhenno, du côté du maintien de la paix, de même que le secrétaire général lui-même demeurent très impliqués dans la situation. Bien sûr, des membres du Conseil de sécurité, y compris les membres permanents comme la France, le Royaume-Uni et la Chine, jouent des rôles très importants pour le Soudan dans un contexte national.

  (1625)  

[Traduction]

    En ce qui concerne les contributions financières pour le matériel aérien, monsieur le président, le gouvernement canadien a apporté une contribution exceptionnelle pendant la phase de l'AMIS mais, avec la création de la MINUAD, la responsabilité de la fourniture de ce matériel a maintenant été assumée par les Nations Unies sur la base des contributions établies. Les Nations Unies nous ont donc dit officiellement que la contribution que nous faisions n'est plus nécessaire.
    Il y a un appui canadien pour le transport de certains des soldats africains de maintien de la paix, par exemple. Il y a un soutien qui continue avec nos hélicoptères — ce soutien n'a pas encore été retiré — mais, à mesure que la MINUAD se déploie, cette responsabilité sera transférée. Les Nations Unies nous ont dit officiellement que les hélicoptères ne seront plus nécessaires.
    En ce qui concerne le devoir de protection, notre premier ministre a affirmé dans une déclaration officielle que le D2P s'applique effectivement au Soudan. Ce qu'on demande dans ce cas, c'est le déploiement efficace d'une opération de soutien de la paix, et c'est pourquoi nous avons attaché tellement d'importance à la mise en oeuvre de la MINUAD, et est pourquoi nous avons fait une contribution aussi exceptionnelle pour essayer d'assurer le succès de la force de l'UA, autrefois l'AMIS.
    Merci, monsieur Angell.
     M. Obhrai.
     Merci, monsieur le président.
    À l'intention de mes collègues d'en face, je précise que, si vous voulez savoir ce que fait le gouvernement, vous n'avez qu'à me le demander et je vous le dirai.
    M. Bernard Patry : Prenez-en bonne note.
    M. Deepak Obhrai : À mon ami néo-démocrate qui semble connaître mieux que moi la politique du gouvernement puisqu'il ne cesse de la citer, je souhaite poser une question concernant la remarque qu'il a faite à l'égard des entreprises qui investissent au Canada et qui, selon lui, devraient rendre compte de leurs activités à l'étranger. Permettez-moi de vous dire, sans l'ombre d'un doute, que ça ne sera jamais envisagé par le gouvernement actuel ou par le comité de l'investissement. Ce n'est pas faisable, ce n'est pas réaliste. Plus important encore, évidemment, c'est l'antienne dont le NPD ne cesse de nous rebattre les oreilles parce qu'il sait qu'il ne formera jamais le gouvernement.
    Le meilleur exemple — et le NPD pourrait en tirer la leçon — est TeleSpan, une société canadienne qui avait fait l'objet de fortes pressions au Canada pour qu'elle agisse de manière responsable, ce qu'elle a fait. Voilà le genre de pressions qu'ils veulent exercer. Selon le NPD, il faudrait obtenir que les pays où se trouvent les entreprises exercent des pressions sur celles-ci pour qu'elles agissent de manière responsable, mais essayer de faire gober ça aux Canadiens... Ce genre de choses, ça ne pourrait marcher que dans une dictature NPD.
    Je tiens à le dire très clairement de façon à ce qu'on comprenne bien où nous allons. D'accord? Merci.
    C'est clair comme de l'eau de boudin.
    Monsieur Obhrai, il vous reste un peu de temps mais j'aimerais poser une question.
    Vous avez parlé du retrait de Talisman du Soudan. Nous savons que PetroChina est ensuite arrivée dans le pays. Comme l'a dit M. Obhrai, beaucoup de gens au Canada ne demandaient pas seulement à Talisman de faire preuve de responsabilité sociale mais aussi de quitter complètement le pays, ce qui est arrivé.
    Quelle a été la conséquence, sur le plan des droits humains au Soudan, du départ de Talisman et de l'arrivée de la Chine?
    Je suis pas sûr que l'un d'entre nous veuille vous répondre.
    Permettez-moi peut-être de faire une remarque personnelle. Je pense que Talisman est un excellent exemple, autant pour le Canada que pour le reste du monde. Elle a peut-être tiré les bonnes leçons de ces difficultés. Comme l'a dit le secrétaire parlementaire, je pense que c'est aujourd'hui un chef de file mondial. Comme plusieurs autres sociétés pétrolières, telle Nexen, Talisman a déployé beaucoup d'efforts pour former un groupe d'entreprises au Canada, en travaillant avec Transparency International, désirant s'attaquer sérieusement à ce genre de problématique, ce qui est excellent.
    Si vous me demandez de vous dire honnêtement si le départ de Talisman du Soudan y a amélioré la situation, je vous dirai que c'est probablement le contraire. Talisman était sur le point de faire beaucoup de changements. Les aurait-elle réellement faits si elle était restée? Je ne le sais pas. Il y a dans la salle d'autres personnes qui pourraient mieux le dire que moi.
    En tout cas, c'était une entreprise que nous connaissions et à qui nous pouvions parler. Plusieurs d'entre vous avez dit qu'il faut être engagé localement. Y a-t-il le même niveau d'engagement aujourd'hui qu'il y a 10 ans, du point de vue de la promotion de...? Je ne sais pas. D'autres pourront vous dire si les écoles et les hôpitaux fonctionnent toujours. Il y avait une action humanitaire à l'époque.
    Disons que je ne sais pas.

  (1630)  

    Puis-je poser une autre question en prenant sur votre temps de parole?
    Avant que les sociétés canadiennes, notamment pétrolières, aillent dans certains de ces pays, avez-vous dit, le ministère des Affaires étrangères, l'ACDI ou quelqu'un d'autre — je suppose que c'est le ministère — leur parle très franchement de leur responsabilité sociale. Vous leur montrez probablement les différentes manières d'être de meilleurs citoyens corporatifs dans ces pays.
    Est-il possible d'évaluer le Canada en comparaison? Quel est le pays modèle, à votre avis? La Norvège? Le Canada? Les États-Unis? Quel pays se comporte de manière exemplaire du point de vue de la responsabilité sociale des entreprises?
    Je ne suis pas objectif mais je peux vous dire que le Canada est le meilleur. C'est en partie parce que, comme l'ont dit d'anciens présidents du comité, le Canada a adopté la notion de RSE beaucoup plus tôt que d'autres pays. Nous nous y sommes intéressés de manière explicite, du point de vue de la corruption, de l'environnement et d'autres choses. En outre, on a fait pression sur nous. Le Canada est le chef de file mondial des industries d'extraction — de l'industrie minière.
    C'est à la bourse de Toronto et à la bourse de Vancouver que le monde vient chercher des capitaux. De ce fait, nous avons l'obligation de rencontrer ces entreprises et de leur parler, ce qui nous permet de parler de RSE dès le départ.
    Nos délégués commerciaux en poste à l'étranger — et vous savez bien ce qui se passe, que ce soit aux Philippines, en Amérique centrale ou ailleurs — rencontrent continuellement les représentants des petites sociétés minières aussi bien que des très grandes. De manière générale, les grandes sociétés appliquent les principes de RSE sans aucun problème. Ça ne vaut pas la peine pour elle de ne pas le faire. Certaines des petites, qui ont tendance à entrer et sortir rapidement d'un pays, peuvent avoir un point de vue différent et nous devons travailler avec elles. Il y va de l'image du Canada, de la réputation du Canada et, en dernière analyse, du succès même de l'entreprise. Si elle fait du bon travail, ces pays l'inviteront à revenir et d'autres essaieront aussi de l'attirer.
    Merci beaucoup, monsieur Sunquist.
    Je tiens à remercier ce groupe de témoins. Nous avons beaucoup apprécié vos témoignages.
    Nous allons suspendre la séance pendant deux minutes pour permettre au groupe de témoins suivant de se préparer.

    


    

  (1635)  

    Bon après-midi.
    Pendant la deuxième heure, nous entendrons David Tennant, directeur général du Groupe d'aide économique du Canada pour le Sud-Soudan, Daniel Millenson, directeur national du Sudan Divestment Task Force, du Sudan Divestment Movement, et Ira Golsdstein, coordonnateur national du désinvestissement, de STAND Canada. Bienvenue à tous.
    Si vous étiez présents pendant l'heure précédente, vous avez vu comment ça marche. Nous vous écouterons avec beaucoup d'attention.
    Je précise que nous aurons besoin de cinq minutes environ à la fin de la réunion pour traiter du rapport du comité directeur, que nous voulons ratifier. Il y aura aussi des votes à la Chambre des communes. Ce sera une cloche d'une demi-heure. Nous espérons partir d'ici vers 17 heures 25.
    Nous sommes très intéressés par ce que vous avez à nous dire et je vous remercie à nouveau d'être venus.
    Vous avez la parole, monsieur Tennant.

  (1640)  

    Je dois préciser d'abord que je ne fais pas partie du groupe canadien du désinvestissement. Mon organisation s'appelle Groupe d'aide économique du Canada pour le Soudan du Sud.
    Je tiens à remercier les membres du comité de leur invitation. J'espère que mes remarques vous seront utiles.
    J'ai fait mon premier voyage au Sud-Soudan en janvier 2005. Un accord de paix venait juste d'être signé entre le Nord et le Sud pour mettre fin à 25 années d'une guerre civile qui a coûté la vie à des millions de personnes et en a déplacé des millions d'autres. Depuis 2005, je suis allé 10 à 12 fois au Sud-Soudan. Je viens en fait d'en revenir, en janvier, et j'y retourne en mars.
    Notre organisation, AECSS, Aide économique du Canada pour le Sud-Soudan, s'occupe avant tout d'aide humanitaire par le truchement du développement économique. Notre philosophie est simple : si quelqu'un a faim, ne lui donnez pas un poisson, apprenez-lui à pêcher.
    Ma déclaration comprend trois parties : ce que nous avons fait, ce que nous faisons maintenant et ce que nous allons faire.
    Lors de mon premier voyage au Sud-Soudan, nous avons acheté des véhicules et des téléphones satellitaires et nous avons commencé à acheter un produit dont je n'avais jamais entendu parler avant, la gomme arabique. C'est un produit de l'acacia qui est indigène au Sud-Soudan. C'est une ressource extraordinaire pour la région. La gomme arabique est utilisée dans le monde entier dans une foule de produits et d'industries, et c'est l'un des ingrédients principaux du Coca-Cola.
    Après avoir fait face à tous les défis logistiques imaginables, nous avons effectué au printemps 2006 la première exportation jamais faite de gomme arabique du Sud-Soudan — pas par le truchement de Port-Soudan, ce qui aurait été beaucoup plus facile, mais en passant par l'Ouganda puis le Kenya et le port de Mombasa. Après cela, nous avons décortiqué l'opération sous tous ses angles pour cerner les points forts et les points faibles du plan d'affaires. Nous avons conclu qu'il nous fallait forger une alliance stratégique avec l'un des grands importateurs mondiaux de gomme arabique si nous voulions que l'industrie se développe.
    En 2006, j'ai été nommé conseiller spécial en commerce international du ministère du Commerce et des Approvisionnements du gouvernement du Sud-Soudan. AECSS a alors décidé d'introduire l'agriculture mécanisée dans la région de la baie de Bahr al Ghazal. L'agriculture dans cette région, comme dans la majeure partie du Sud-Soudan, étant manuelle, avec des rendements très faibles.
    Le paradoxe du Sud-Soudan est que beaucoup de gens y sont affamés alors qu'il y a des centaines de milles carrés de terres arables. Avec la bonne application, et en ayant recours au savoir-faire agricole canadien, nous pensons que ces terres pourraient nourrir la population.
    En avril dernier, nous avons tenu notre dîner inaugural de collecte de fonds auquel le ministre des Affaires étrangères, Peter MacKay, a assisté comme conférencier d'honneur. Nous avons pu recueillir suffisamment de fonds pour acheter des motoculteurs, sur les conseils de spécialistes canadiens de l'agriculture. Nous avons aussi dressé un plan d'activité et un modèle qui permettront au programme de s'autofinancer.
    En ce qui concerne la gomme, nous avons forgé une alliance stratégique avec la société américaine qui est le plus gros importateur de gomme arabique en Amérique du Nord et le deuxième au monde. Ce contact nous a permis de négocier la vente d'environ 1000 tonnes de gomme arabique de la région du Haut Nil du Sud-Soudan. Nous procédons également aux dernières étapes de la diligence nécessaire pour réaliser un projet commun à Bahr al Ghazal avec la société américaine.
    Tous les profits de la vente de gomme et de l'exploitation agricole seront évidemment renvoyés dans la communauté à des fins humanitaires.
    En décembre 2007, le gouvernement du Sud-Soudan a accordé à AECSS 1 000 acres dans la région de Juba de l'État de Central Equatoria. Notre objectif est d'y aménager une ferme-école pour former des Soudanais du Sud aux méthodes de culture modernes, ce qui contribuera à nourrir la population du Sud-Soudan. Ce projet permettra d'ouvrir la région de Juba qui comporte 20 000 acres de terres fertiles. Comme elle est adjacente au Nil, nous aurons l'avantage d'un approvisionnement en eau constant.
    AECSS fera venir des experts. Pour vous donner une idée, nous avons recruté depuis décembre M. Jack Wilkinson, un Canadien président de la Fédération internationale des producteurs agricoles — une organisation mondiale — qui a accepté d'être notre conseiller. Nous avons constitué une équipe de projets comprenant des agriculteurs actifs, des spécialistes de l'agro-industrie et des leaders du monde des affaires. La clé du projet est le plan d'activité qui sera dressé dans le but d'établir une exploitation agricole autofinancée, de façon à produire des recettes plutôt qu'à dépendre de dons.
    Pour ce qui est de nos projets d'avenir, AECSS continuera de chercher des possibilités d'activités autofinancées. Ces activités créeront des emplois, ce qui produira de la richesse et aidera à instaurer une économie exploitée et contrôlée par les Soudanais du Sud. En mettant l'accent sur la formation et l'aide financière au Sud-Soudan, nous évitons ce que j'appelle la « colonisation économique ».
    Conformément à mon mandat de conseiller, j'encourage les entreprises canadiennes à penser au Sud-Soudan comme lieu d'investissement où ils pourront non seulement atteindre leurs objectifs en matière de profits mais aussi contribuer à la formation professionnelle, à l'éducation et au développement des capacités de la région.

  (1645)  

    En décembre, le président du Sud-Soudan nous a demandé de remettre une lettre au premier ministre Harper pour remercier le Canada de son appui. Le président Salva Kiir Mayardit souhaite faire une visite au Canada et aimerait que des ministres canadiens viennent visiter son pays. Nous sommes tout à fait prêts à contribuer à l'organisation de cette visite si cela peut être utile.
    Mes nombreux séjours au Sud-Soudan ont engendré chez moi un vif attachement pour la population locale. C'est une population qui est capable de survivre, qui n'a pas d'équivalent au monde et qui possède un optimisme dépassant toute compréhension. C'est aussi une population qui n'a aucun désir de vengeance mais qui cherche simplement des possibilités de progrès.
    Le Canada, pays généreux dont la population partage les préoccupations humanitaires, devrait s'efforcer de l'aider. Il y a au Soudan des projets et situations innombrables ayant besoin de l'aide internationale. Le Canada devrait être fier de ce qu'il a déjà fait et continuera de faire.
    Je crois cependant qu'il faut être prudent dans le choix des projets auxquels nous participons. Comme vous le savez, le Canada a engagé plus de 440 millions de dollars au Sud-Soudan, dont 285 pour faciliter le règlement de la crise du Darfour, ce qui n'est pas négligeable. La politique canadienne consistant à agir par le truchement d'ONG et du Fonds fiduciaire mutidonateurs est la bonne et doit être maintenue.
    J'aimerais maintenant formuler trois recommandations.
    Tout d'abord, tous les projets présentés par l'ACDI ou par d'autres organismes du gouvernement canadien devraient être accompagnés d'un plan d'activité détaillé. Les ONG et autres organisations devraient être tenues de démontrer leur expertise, notamment pour les projets exigeant du personnel qualifié et pas seulement des gens bardés de bonnes intentions.
    Je crois que les Canadiens, loin de désinvestir, devraient plutôt voir le Sud-Soudan comme une région d'affaires. Il ne fait aucun doute que les entrepreneurs canadiens peuvent survivre et prospérer dans ce pays tout en contribuant au développement des capacités, au développement économique et à l'emploi.
    Finalement, nous devrions créer un registre central de toutes les ONG et entreprises oeuvrant au Sud-Soudan, afin d'assurer une meilleure liaison entre les différents organismes.
    En conclusion, monsieur le président, je vous remercie de nous avoir donné la parole et je profite de cette occasion pour remercier les membres du Groupe de travail sur le Soudan qui ont été pour nous une source d'information extraordinaire et qui ont toujours été à notre disposition. J'aimerais également remercier l'ACDI et CIDA Inc. pour l'information qu'ils nous ont donnée et leur offre d'être une ressource.
    J'espère que mes remarques et recommandations vous seront utiles. AECSS ira de l'avant avec le projet de Juba et nous recueillerons des fonds dans les secteurs privé et institutionnel. Nous pensons que cela est bon pour le Sud-Soudan autant que pour le Canada.
    Le Sud-Soudan a survécu à la guerre et c'est à nous maintenant de faire le nécessaire pour qu'il gagne la paix et atteigne son potentiel.
    Je répondrai avec plaisir à vos questions. Merci.
    Merci, monsieur Tennant.
     Nous passons maintenant à M. Millenson.
    Je représente le Groupe de travail sur le désinvestissement au Soudan, qui est un projet du Genocide Intervention Network. Nous sommes une ONG basée à Washington et nous avons aussi des bureaux à Londres.
    Notre organisation se concentre essentiellement sur un modèle de désinvestissements ciblés qu'elle a mis au point dans le but d'améliorer la situation au Soudan en exerçant des pressions économiques ciblées sur les acteurs corporatifs se comportant le plus mal, notamment dans les secteurs du pétrole, de l'extraction minière, de l'énergie et de l'équipement militaire.
    Avant de commencer, j'aimerais donner suite au témoignage précédent en disant que nous encourageons l'investissement au Sud-Soudan, au Soudan oriental, au Darfour et dans les autres régions marginalisées du pays.
    Ceci est un modèle de désinvestissement qui a été adopté par 22 États américains. Le gouvernement des États-Unis a récemment adopté une législation sur le désinvestissement dont nous sommes les auteurs, et divers fonds de pension internationaux, dont un des Pays-Bas, ont commencé à se pencher sur le problème et à désinvestir. C'est un modèle de désinvestissement qui encourage l'investissement dans les régions marginalisées en se concentrant exclusivement sur les secteurs qui profitent effectivement au régime.
    Nous parlons ici d'un régime exceptionnellement vulnérable aux pressions économiques. Sa dette étrangère est supérieure à son produit intérieur brut, et sa dépendance extrême à l'égard du pétrole — 90 p. 100 de ses recettes d'exportation en proviennent — explique pourquoi il consacre près de 70 p. 100 de ses recettes pétrolières à ses dépenses militaires.
    Cela dit, le Soudan ne possède pas le savoir-faire technique nécessaire pour exploiter ses propres ressources pétrolières. Il est donc tributaire d'un ensemble de sociétés pétrolières étrangères — dont la majorité sont des sociétés d'État de Chine, de Malaisie et d'Inde — pour assurer la production, ce que lui donne les profits nécessaires pour poursuivre sa guerre.
    L'investissement responsable n'est pas un oxymore au Soudan. Comme on l'a dit lors de la session précédente, la société La Mancha Resources, de Montréal, est la plus grande société minière au Soudan. Elle exploite surtout une mine d'or au Soudan oriental. Après avoir été sur la liste des principaux fautifs pendant plusieurs mois, elle est devenue réceptive au principe d'engagement et a décidé de prendre diverses mesures. Voilà le type d'entreprise dont nous souhaitons la présence au Soudan.
    Le Soudan est le quatrième fournisseur de pétrole à la Chine — et la Chine est loin de partir du pays. C'est la même chose pour l'Inde et la Malaisie, mais il y a moyen pour les entreprises d'exercer leur influence et leur pouvoir économique pour aider à mettre fin aux atrocités. La Mancha en est un excellent exemple.
    Cette société a renoncé publiquement à faire de nouveaux investissements dans le pays — elle avait prévu d'investir des millions de dollars dans l'expansion de sa mine, ce qui aurait donné beaucoup de nouvelles recettes au gouvernement soudanais — tant qu'une force de maintien de la paix conforme à la résolution 1769, la MINUAD, ne serait pas totalement déployée sans entraves. Elle s'est également engagée à financer des efforts humanitaires au Darfour en plus de ce qu'elle fait déjà au Soudan oriental, même si le Darfour se trouve de l'autre côté de la région où elle est présente. Elle a aussi rencontré le ministre de l'Énergie et des Mines de l'époque, M. Ahmed Al-Jaz, pour discuter de la situation et exhorter une nouvelle fois le gouvernement du Soudan à accorder à la MINUAD l'accès à la région.
    Voilà précisément le genre de choses que nous souhaitons voir au Soudan. Hélas, les sociétés étrangères, surtout asiatiques, font tout le contraire.
    J'attire en particulier votre attention sur la China National Petroleum Corporation qui exploite six des sept blocs pétroliers actifs au Soudan et a également investi dans quelques autres qui en sont actuellement à l'étape de la prospection. EElle facilite les transferts d'armes au régime soudanais et autorise l'utilisation de ses installations par le gouvernement pour le lancement d'attaques contre les civils. Elle assure également l'avitaillement des appareils militaires.
    L'armée de l'air du Soudan est essentiellement équipée par les Chinois et les Russes. L'Iran fournit également des petites armes au gouvernement. En fait, le gouvernement canadien, qui finance en partie une ONG appelée Small Arms Survey, a fait un excellent travail pour documenter ces activités, tout comme l'avait fait la commission Harkfer en 2000 em faisant enquête sur le cas de Talisman.

  (1650)  

    Quelqu'un a posé tout à l'heure une question au sujet de la Greater Nile Petroleum Operating Company. CNPC est la société d'exploitation de ce consortium et de la plupart des autres grands consortiums actuellement présents au Soudan. En tout, plus de 15 000 personnes ont été déplacées à cause des forages de CNPC au Soudan. Toutefois, le gouvernement peut agir pour remédier à cette situation. Il y a plusieurs choses que le Canada peut faire.
    Premièrement, il peut se joindre au mouvement de désinvestissement ciblé déjà bien en cours aux États-Unis. Beaucoup de fonds de pension publics du Canada ont peut-être des investissements dans ces sociétés étrangères, ce qui leur donne le pouvoir, comme actionnaires, d'agir pour changer leur comportement. Si elles ne changent pas, ils peuvent en retirer leurs investissements et frapper ainsi le cours de leurs actions.
    Deuxièmement, comme on l'a dit en réponse à une question de M. Dewar, CNPC détient actuellement 11 blocs d'exploitation des sables bitumineux de l'Alberta. Aucun n'est encore exploité mais la société a dit souhaiter en acquérir plusieurs autres. ONGC, la société pétrolière de l'Inde, qui est la principale société pétrolière indienne active au Soudan, souhaite aussi exploiter les sables bitumineux de l'Alberta.
    La veille du Jour de l'an, le président Bush des États-Unis a signé le Sudan Accountability and Divestment Act interdisant l'octroi de contrats aux sociétés jugées les plus fautives, c'est-à-dire répondant aux critères de présence néfaste au Soudan et refusant d'apporter des correctifs à leurs activités.
    Peut-être plus que n'importe quel autre pays occidental, le Canada, grâce aux contrats des sables bitumineux de l'Alberta, bénéficie d'un pouvoir de pression exceptionnel et particulièrement important pour amener CNPC à mettre fin aux déplacements de populations, aux transferts d'armes ainsi qu'à l'avitaillement des appareils militaires et, surtout, pour inciter le gouvernement à mettre fin à ces atrocités.
    Bien souvent, les sociétés d'État suivent les instructions de leur gouvernement. Dans le cas du Soudan, CNPC est en fait à certains égards le bras de politique étrangère de la Chine. Celle-ci protège le Soudan à l'ONU et donne des armes au Soudan à cause de CNPC, et pratiquement pour aucune autre raison.
    J'exhorte notre gouvernement à user de son pouvoir de levier unique pour forcer CNPC, ONGC ainsi que toute autre société d'État ou privée agissant de manière problématique au Soudan et faisant des affaires au Canada à respecter les droits humains dans les autres pays où elle est présente.
    Je vous remercie à nouveau de m'avoir donné la parole et je répondrai avec plaisir à vos questions.

  (1655)  

    Merci, monsieur Millenson.
     M. Goldstein.
     Monsieur le président, membres du comité, merci de m'avoir invité à m'adresser à votre comité.
    Je collabore étroitement depuis deux ans à une cause commune avec des étudiants et des citoyens du Canada : mobiliser une masse critique d'étudiants, de citoyens et de décideurs canadiens pour mettre fin à la crise du Darfour et répondre aux menaces futures de génocide.
    L'ordre de renvoi de votre comité est une étape importante en vue d'une action gouvernementale plus efficace sur la crise du Soudan. À titre de coordonnateur national du désinvestissement pour STAND Canada, je supervise des campagnes populaires aux paliers local, provincial et fédéral. Le but de ces campagnes est de faire enquête sur les investissements publics et privés et sur les entreprises oeuvrant au Soudan afin d'inciter les actionnaires à agir, et de trouver des méthodes de pression sur le gouvernement du Soudan pour qu'il mette fin aux souffrances au Darfour.
    Beaucoup d'entre vous avez reçu des lettres, des appels téléphoniques et des courriels de vos électeurs sur ces questions parce que la crise du Darfour les préoccupe, tout comme le rôle du Canada pour mettre fin aux souffrances dans cette région et pour promouvoir un règlement politique durable de la crise. Cette affaire est exceptionnelle sur le plan international du point de vue de la transgression brutale des droits humains. Les Canadiens en sont conscients et veulent que leur gouvernement participe activement à la lutte pour mettre fin aux assassinats de masse et aux déplacements de populations du Darfour.
    Jusqu'à présent, les efforts internationaux déployés pour obtenir ce règlement ont échoué. Je sais que l'audience d'aujourd'hui donnera à votre comité des idées concrètes qu'il pourra recommander au gouvernement pour la résolution de cette crise.
    Mon but aujourd'hui est de vous communiquer le message de mon organisation et de ses membres. Students Taking Action Now: Darfur est une organisation vraiment nationale ayant plus de 70 filiales dans des écoles secondaires et des universités de tout le pays. Ces filiales sont des membres dynamiques des collectivités où elles sont présentes, et notre organisation collabore étroitement avec les citoyens, les décideurs et les autorités locales, provinciales et fédérales. Elle regroupe des milliers d'étudiants jeunes et enthousiastes agissant pour une cause commune en envoyant des milliers de lettres et en faisant des milliers d'appels téléphoniques aux députés pour leur communiquer un seul message.
    Ce message est clair et simple : les Canadiens sont préoccupés par le Darfour; les Canadiens veulent que leur gouvernement soit un chef de file dans la résolution de ce conflit; les Canadiens veulent s'assurer que leurs investissements n'aggravent pas une situation déjà catastrophique au Soudan.
    Cela dit, comment atteindre ces objectifs ambitieux? Des investisseurs, des administrateurs d'université et des gestionnaires de fonds de placement sont tous passés à l'action. Ainsi, la British Columbia Investment Management Corporation a demandé aux entreprises dont elle possède des actions qui sont actives au Soudan de faire le point sur leurs activités dans ce pays et de mettre en oeuvre des politiques de responsabilité sociale dans les régions de crise où elles sont présentes. Ce succès est à porter au crédit des militants étudiants et communautaires de la Colombie-Britannique.
    L'université Queen's a pris des mesures concrètes pour réglementer son portefeuille d'investissements en mars 2007. Faisant oeuvre de précurseur en matière d'investissement éthique, elle s'est départie de ses placements dans certaines sociétés ayant des liens étroits avec le gouvernement du Soudan. Les étudiants de l'université, dont je fais partie, souhaitaient la pleine transparence des investissements en question et ils ont demandé aux administrateurs de l'université de passer à l'action. D'ailleurs, des étudiants formulent la même exigence partout au pays : à l'université d'Ottawa, à l'université Western Ontario de London, à l'université Laval de Québec, à l'université Memorial de la côte est, à l'université de la Colombie-Britannique et dans bien d'autres encore.
    Finalement, les investisseurs privés de tout le pays, allant aussi bien d'enseignants du primaire à des producteurs de films ou d'émissions télévisés, des musiciens indépendants, des gestionnaires de fonds et des gens d'affaires, nous consultent quotidiennement pour obtenir plus d'informations sur leurs investissements personnels dans les entreprises agissant au Soudan, afin de savoir si celles-ci avivent le conflit du Darfour. Des membres d'organisations de la société civile facilitent ce processus militant. Le gouvernement canadien devrait établir un cadre juridique pour réglementer les placements des fonds publics dans les entreprises aggravant les infractions brutales aux droits humains.
    Les recherches se poursuivent mais les faits sont clairs. Certaines entreprises présentes au Soudan aggravent une crise humanitaire déjà profonde. Les Canadiens doivent faire preuve de leadership à ce sujet. Ils souhaitent un processus formel approuvé par le gouvernement, qui leur permettra de prendre ces décisions d'investissement difficiles. Cela débouchera sur une action générale des actionnaires, une participation des entreprises contribuant de manière responsable à l'économie du Soudan et le désinvestissement des entreprises qui entretiennent la crise.
    Les investisseurs canadiens sont dans une position unique à cause de l'expérience de Talisman au Soudan. À titre de coordonnateur de la campagne de désinvestissement au Soudan, j'ai récemment discuté longuement avec le cadre supérieur de cette entreprise responsable de son plan de responsabilité sociale. Avant l'expérience de Talisman au Soudan, ce poste n'existait pas dans l'entreprise et celle-ci ne s'occupait pas du tout de responsabilité sociale. Mon interlocuteur m'a dit que j'aurais bien du mal à trouver un poste similaire au conseil d'administration des entreprises chinoises ou indiennes présentes au Soudan, ce dont je ne doute pas.

  (1700)  

    L'expérience de Talisman montre que la responsabilité sociale des entreprises ne sera jamais une responsabilité pour celles-ci tant qu'elle ne sera pas exigée par leurs actionnaires ou imposée par le gouvernement. Dans le cas des sociétés privées, il n'y a pas d'actionnaires publics pour défendre cette cause, le seul objectif des entreprises étant le profit.
     Les investisseurs canadiens font leur travail et l'heure est maintenant venue pour le gouvernement de faire le sien. Il devrait imposer aux entreprises des normes de RSE ainsi que les obliger à produire des rapports conformément au rapport final de la Table ronde nationale sur les RSE dont on a parlé tout à l'heure. Près d'un an après le dépôt de ce rapport, le gouvernement n'a pas encore produit de réponse.
    Assurer le respect de normes fondamentales en matière de droits humains commence chez soi. De nombreuses entreprises oeuvrant au Soudan dans le cadre de relations étroites avec ce gouvernement oeuvrent aussi au Canada. Le gouvernement canadien détient donc le pouvoir particulier d'utiliser ses relations pour faire pression auprès du gouvernement soudanais — ce qui a toujours été difficile dans le passé.
    Les activités de ces entreprises au Canada devraient être tributaires de leurs activités au Soudan. Si une entreprise contribue à l'action violente des forces militaires soudanaises, comme ne cessent de l'indiquer les agences d'information rapportant de nouvelles hostilités au Darfour qui causent des centaines de morts et provoquent le déplacement de milliers de personnes, ses contrats avec le gouvernement fédéral ou provincial devraient être examinés. Le gouvernement canadien devrait exiger que ses activités au Canada soient reliées à une politique de gouvernance et à une mise en oeuvre historique des principes de la responsabilité sociale.
    En conclusion, permettez-moi de réitérer mes principales recommandations. Vérifier les investissements publics et examiner les investissements des entreprises présentes au Soudan. Des milliers de Canadiens attendent que le gouvernement fasse une déclaration publique sur ces questions.
    Mettre en oeuvre le cadre canadien de responsabilité sociale des entreprises pour en assurer le respect au Canada et à l'étranger, et appliquer les principes de ce cadre aux contrats que passe le gouvernement du Canada avec des entreprises étrangères qui oeuvrent aussi au Soudan.
    Je vous remercie de votre attention et je répondrai avec plaisir à vos questions.
    Je remercie nos trois témoins de leur contribution.
    On vient de me donner une information un peu différente de celle que j'ai communiquée au début. La cloche va commencer à sonner à 17 h 15 et seulement pendant 15 minutes, pas une demi-heure.
    Si nous voulons siéger plus longtemps, nous devrons avoir le consentement unanime du comité. Si tout le monde est d'accord, nous pourrons prendre cinq minutes de plus. Cela vous convient-il?
    Très bien, c'est accepté.
    Nous entamons donc immédiatement le premier tour.
    M. Martin.
    Merci à tous d'être ici.
    Monsieur Tennant, je partage votre opinion. Un voyage en avion au-dessus du Nil Blanc m'a permis de constater les possibilités économiques exceptionnelles qui existent pour la population du Soudan. Je partage votre opinion sur les Dinka et les Nuer qui sont des populations extraordinairement résistantes. Quand j'étais là-bas, je me disais qu'ils seraient parfaitement capables de s'en sortir s'il n'y avait pas ce conflit.
    Nous savons tous que le conflit est l'ennemi du développement économique et je crains très sérieusement que l'APG ne s'effondre avant ou après le référendum. Pouvez-vous nous dire, d'après votre expérience, ce qui serait nécessaire pour assurer le renforcement de l'APG et éviter son effondrement, et quel rôle le Canada pourrait jouer à cet égard?
    J'ai demandé tout à l'heure aux témoins précédents s'il n'y aurait pas moyen — et je ne sais pas si vous avez un avis sur la question — pour le Canada de faire preuve de leadership à l'égard des Chinois et des membres de GNPOC pour les amener à remplacer leurs ressources pétrolières du Soudan par celles d'un autre pays, comme le Nigéria ou l'Angola. Qu'en pensez-vous?

  (1705)  

    Merci, monsieur Martin.
    Comme vous le savez, l'APG a rencontré certaines difficultés cet hiver mais elles semblent s'être atténuées. Tous les gens à qui je parle, aussi bien de groupes communautaires au Soudan que du gouvernement du Sud-Soudan, me communiquent toujours deux messages similaires.
    Tout d'abord, la population du Sud-Soudan ne voulait pas la reprise de la guerre et elle souhaite que l'accord global réussisse. Le problème, selon leurs déclarations, est que le gouvernement du Nord ne respecte pas toutes les modalités de l'Accord de paix global — ce qui a aussi un effet au Darfour, je pense. La population du Darfour se demande pourquoi elle devrait passer un accord similaire à celui qui a été négocié au Sud puisque l'accord global du Sud n'est pas respecté.
    À mon avis, les chances de succès de l'accord global sont de 50 p. 100. Il n'y aura évidemment pas d'élections en 2008 parce que le Nord n'a pas fourni l'argent nécessaire au recensement. Y en aura-t-il en 2009? Je n'en sais rien mais il y aura le grand vote de 2011.
    En ce qui concerne les champs pétroliers, j'ai entendu ce qui s'est dit lors de la session précédente au sujet de Talisman. Je ne m'intéresse aucunement à Talisman. Je suis peut-être un homme d'affaires mais je ne m'intéresse pas à Talisman.
    Permettez-moi cependant de dire ceci. Je crois qu'il faut être très prudent. Nous avons remplacé Talisman par un conglomérat qui se moque effrontément de l'environnement et des droits humains et auprès duquel nous n'avons aucun pouvoir de persuasion. Pourrions-nous obtenir ce pouvoir? Je pense que vous, les députés, êtes les mieux placés pour répondre à cette question. Il y a au Sud-Soudan des gens qui viennent me voir pour me dire que les entreprises bloquent les rivières et construisent des barrages. À mon avis, leur objectif est de pomper le plus de pétrole possible avant 2011.
    J'espère que cela répond à votre question.
    Je peux peut-être répondre brièvement au sujet du consortium pétrolier.
    Talisman a été obligée de vendre sa participation à la société indienne ONGC qui est l'une des entreprises souhaitant prendre pied en Alberta. Les gens ont raison, c'est une société beaucoup moins responsable que Talisman et, si l'on veut être franc, son arrivée a probablement empiré la situation.
    On ne peut pas trouver beaucoup moins responsable que le trio CNPC, ONGC et Petronas, la société d'État malaisienne. Aucune ne partira du Soudan. Le Soudan est le quatrième fournisseur de pétrole de la Chine. La croissance économique en Chine est tellement forte que CNPC accélère le plus possible ses opérations en Angola. Elle cherche également d'autres sources de pétrole, notamment en Birmanie et dans d'autres pays où il y a violation des droits humains.
    La question est que beaucoup de ces entreprises ont des actionnaires occidentaux, notamment de grandes institutions canadiennes, parce que leurs actions sont cotées sur les bourses des États-Unis, du Canada et de Hong Kong où les investisseurs occidentaux peuvent les acquérir. En outre, on estime que les réserves des 11 blocs que détient CNPC en Alberta s'élèvent à environ 2,4 milliards de barils, ce qui est l'équivalent de ses réserves actuellement connues au Soudan. La société n'a pas les moyens de partir du Canada. Nous disposons donc d'un levier considérable pour la forcer à changer de comportement, à agir pour le bien des populations et à mettre fin à ses abus.
    Merci.
    C'est maintenant au tour de Mme Barbot.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je suis un peu gênée d'entendre parler du Soudan dans le contexte de compagnies d'huiles et de richesses, alors que les raisons qui devraient nous porter à parler du Soudan sont la détresse des gens, la guerre, le fait que des gens vivent dans les camps depuis plusieurs années et le fait qu'on ne voit pas la fin de cette chose. Personnellement, je trouve cela un peu odieux.
    En fait, on parle de la richesse des pays du Nord et de la puissance des pays qui exploitent les ressources naturelles, mais on n'entend pratiquement pas parler des gens du pays. C'est comme s'ils n'existaient pas. Je trouve cela absolument intolérable parce qu'au fond, la question des richesses qu'accumulent les autres pays ne m'intéresse absolument pas, ne serait-ce que parce que cette richesse se trouve dans les pays d'Afrique dont on exploite les ressources en laissant les gens dans des situations absolument épouvantables. Je vous entends parler, vous et les fonctionnaires qui étaient là avant, et c'est comme si le Darfour n'était pas au Soudan. Parler des compagnies qui existent au Soudan sans parler du Darfour, c'est incompréhensible, pour moi. Évidemment, je n'y suis pas allée et je ne sais pas comment on vit sur le terrain, mais je sais que des gens vivent, font des enfants et meurent dans les camps, et qu'on ne s'en occupe pas. C'est un crime. C'est un crime contre l'humanité et c'est inacceptable.
    Je vais essayer de me calmer et de revenir au sujet du jour.
     Monsieur Goldstein, vous faites partie du groupe STAND Canada et vous préconisez un embargo. Or, tous les experts concernés nous disent que les embargos font plus de tort que de bien aux gens. On voit qu'il y a peu de compagnies canadiennes au Soudan. Alors pourquoi mettre un embargo? Est-ce pour pouvoir se dire qu'on fait quelque chose en mobilisant les étudiants canadiens, américains et européens? Pensez-vous vraiment que la situation se réglera le jour où les rares compagnies canadiennes qui sont au Soudan se retireront?

  (1710)  

    Merci, madame Barbot.
    Monsieur Goldstein.

[Traduction]

    Permettez-moi d'abord de préciser que nous ne préconisons pas un embargo ou un boycott quelconque. Nous sommes des partenaires du Groupe de travail sur le désinvestissement au Soudan et nous appuyons pleinement la méthode du désinvestissement ciblé.
    Ce que j'ai dit, c'est qu'il conviendrait de vérifier les fonds deplacement publics pour voir s'ils possèdent des actions dans les sociétés ciblées pour le désinvestissement, et non pas dans n'importe quelle société présente au Soudan. Mon argument est strictement que les sociétés qui figurent sur la liste des plus fautives sont ciblées pour une raison précise. La même chose vaut pour les contrats gouvernementaux dont j'ai dit qu'il faudrait les examiner. Seules les sociétés qui n'apportent aucun bien mesurable à la population du Soudan et qui ne font en fait qu'empirer la situation devraient être ciblées. Les autres, comme je l'ai dit, devraient être encouragées à investir là-bas.
    Monsieur Tennant, très rapidement.
    Je crois que c'est fort bien de voir le Sud-Soudan ou le Soudan à 30 000 pieds de hauteur mais, quand on est au sol, que peut-on dire à la personne qui vous demande : « Comment puis-je assurer quelque chose de mieux à ma famille? Comment puis-je lui donner une vie meilleure que celle que j'ai eue? »
    La meilleure manière, c'est de créer des emplois. Les sociétés qui sont prêtes à prendre le risque d'aller au Soudan en ayant une attitude positive à cet égard devraient être matériellement encouragées à le faire et elles y seront bien accueillies. On parle du pétrole parce que c'est ce qui est à la mode en ce moment. Le Canada possède cependant aussi un savoir-faire exceptionnel en agriculture. Le Sud-Soudan devait être le panier à pain de l'Afrique. Les possibilités qui s'offrent aux agriculteurs canadiens au Sud-Soudan — et cela répond directement à votre question, madame — sont suffisantes pour nourrir la population locale, ce qui atténuerait d'autant les pressions exercées par les entreprises qui vont au Soudan à des fins immorales.
    Merci, monsieur Tennant.
    Nous passons très rapidement du côté gouvernemental. Si ça marche, nous pourrons peut-être même donner la parole à M. Dewar.
    Allez-y, monsieur Khan.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Tennant, je suis ravi de vous voir ici. J'ai eu précisément cette conversation avec le ministre du gouvernement précédent. Pourquoi ne pourrions-nous pas investir selon des critères commerciaux? Comme vous le dites, les projets et les détails du plan d'affaires, ainsi que l'expertise prouvée... Votre société a démontré qu'on peut exporter de la gomme arabique et c'est une expérience extraordinaire. En plus, cela permet aux gens de devenir indépendants, au lieu de désinvestir.
    Voici ma question. Le désinvestissement réduirait-il leur capacité? L'Iran, la Corée du Nord, l'Irak et d'autres pays ont survécu aux sanctions, sans parler de désinvestissement.
    Je pense que mes jeunes collègues ont d'excellentes idées. J'aime beaucoup leurs idéaux et leurs opinions mais nous avons peut-être surestimé notre aptitude à exercer une influence sur certains des autres pays. La Chine ou l'Inde ne vont pas partir, je suis totalement d'accord avec vous. Que souhaite une famille, avant tout? Du pain sur la table, des vêtements, l'accès à un médecin si les enfants sont malades, et l'accès à l'école pour ses enfants. D'après moi, cela ne résultera pas du désinvestissement mais, bien au contraire, de l'investissement et de l'accroissement des capacités de ces populations.
    J'aimerais connaître votre réaction là-dessus, sur l'investissement et le désinvestissement.

  (1715)  

    De manière très générale, monsieur Khan, je conviens avec vous que le désinvestissement n'est pas la bonne politique. Je crois qu'il faut faire attention et encourager les entreprises qui ont un comportement éthique. Vous avez absolument raison de dire que les gens du Sud-Soudan ne sont pas foncièrement différents des gens du Canada. Et le Canada a cette possibilité. Le Canada possède cette expertise.
    Si j'avais encore l'âge des jeunes hommes à ma droite et à ma gauche... J'ai l'impression d'être le vieil homme de la mer, ici. Pour un homme d'affaires, un entrepreneur, le Sud-Soudan est comme un tas de sable pour un enfant. Les possibilités d'affaires y sont énormes, et je parle d'affaires légitimes, non seulement pour gagner de l'argent mais aussi pour développer les capacités locales. Ce qui me rend le plus heureux au Soudan, c'est quand quelqu'un vient me dire : « David, nous te remercions beaucoup de l'aide que tu nous a donnée mais nous n'en avons plus besoin parce que nous avons appris à faire les choses nous-mêmes ». Cela nous écarte de la colonisation économique. Or, le Sud-Soudan s'oriente actuellement vers la colonisation économique.
    Une autre brève question.
    Certes, nous souhaitons la responsabilité sociale et toutes ces autres choses merveilleuses mais quelles seraient les conséquences sur l'emploi si nous devions continuer à désavantager certaines des entreprises qui oeuvrent là-bas et si nous faisions pression sur elles pour qu'elles partent? Vous ne pourrez pas exercer de pressions sur la Chine ou sur l'Inde. Ce sont de trop gros pays pour ça. Elles ne vont pas quitter le Soudan. Soyons donc réalistes et pragmatiques : au lieu d'un mouvement de protestation, essayons d'agir de manière réaliste.
    J'aimerais connaître votre avis sur les possibilités d'emploi du fait du désinvestissement, ou la réduction des possibilités.
    Comme beaucoup de pays africains, le Sud-Soudan n'a pas de filet de sécurité sociale. Si vous perdez votre emploi, même si c'est à cause du désinvestissement dans une mauvaise entreprise, vous avez des problèmes.
    Je conviens toutefois que nous devrions parler aux gens — et je reprends l'exemple de Talisman puisqu'on l'a déjà employé aujourd'hui — et parler à Talisman pour voir si elle ne devrait pas plutôt retourner au Sud-Soudan. Je ne suis pas sûr que ses actionnaires ou son conseil d'administration s'en réjouiraient mais nous devrions encourager les sociétés canadiennes responsables à investir au Sud-Soudan.
    J'aimerais ajouter une brève remarque, monsieur le président. Vous regardez votre montre et je sais que nous n'avons pas beaucoup de temps.
    Le Canada n'a de pouvoir que si nous investissons. En Afghanistan, nous sommes à la table. Quand on désinvestit et qu'on se retire, on peut bien exercer des pressions, on n'a plus d'influence. On ne peut rien changer.
    Merci.
    Merci, monsieur Khan.
    Il faut faire attention parce que le désinvestissement, c'est demander aux entreprises sans responsabilité sociale de partir, pas à celles qui font preuve de leadership dans ce domaine. Je ne pense pas que quiconque ait dit que tout le monde devrait partir de ces zones de conflit, mais seulement les entreprises qui...
    Je donne la parole à M. Dewar car je veux qu'il ait...
     Je suis heureux de cette précision car M. Khan...
     Autre chose, monsieur Dewar. Nous n'aurons pas le temps de discuter des travaux du comité aujourd'hui. Le comité directeur ratifiera mardi. On me dit que cela nous donnera quand même assez de temps.
    Le chronomètre n'a pas encore démarré, monsieur Dewar.
     Je voudrais préciser deux choses à l'intention de mon ami d'en face, monsieur le président.
    Personne ne parle d'annuler tous les investissements. Je suppose que M. Khan apprécierait de ne pas avoir à s'occuper des investissements qui ne sont pas utiles et qui causent en fait du tort aux populations. Pourtant, nous savons que certains investissements que nous avons, que vous avez, que je paye par le truchement du RPC, sont investis en Birmanie dans certaines entreprises très douteuses.
    Je veux aussi ajouter que je pourrais casser la croûte avec lui et avec plusieurs de mes amis du Soudan qui habitent actuellement chez ma mère et qui étaient des enfants-soldats. Ils vous raconteront des choses qui vous convaincront que nous devons agir pour changer la situation. C'est ça l'engagement. J'espère que nous en aurons l'occasion.
    L'une des choses que j'ai mentionnées à mes amis d'en face est celle-ci : « Le gouvernement Harper a récemment annoncé qu'il déposera un projet de loi autorisant le blocage d'investissements étrangers qui vont à l'encontre des intérêts de sécurité nationale du Canada ». C'est une citation du 22 janvier. Je la rappelle à mon ami M. Obhrai dans le contexte des politiques possibles. Je voulais simplement dire que nous avons la possibilité d'aller au-delà du critère de sécurité nationale et tenir compte aussi des droits humains.
    Je voudrais demander à M. Millenson et à quiconque peut avoir des informations à ce sujet quelles sont les pratiques de certaines de ces entreprises pétrolières en matière de main-d'oeuvre. Qui occupe réellement les emplois sur le terrain?

  (1720)  

    Monsieur le président, nous parlons généralement d'industries à utilisation intensive de capital et qui n'emploient donc pas beaucoup de main-d'oeuvre. Le modèle du désinvestissement ciblé exclut explicitement des choses comme l'agriculture, qui emploie 85 p. 100 de la population. En fait, la main-d'oeuvre des sociétés chinoises, indiennes et malaisiennes est pour plus des deux tiers une main-d'oeuvre étrangère.
    J'ajoute finalement que les pressions exercées sur ces entreprises produisent des résultats. Neuf grandes sociétés ont déjà changé leurs activités problématiques ou sont parties. Le gouvernement chinois a pris des mesures en exerçant des pressions sur le gouvernement soudanais pour qu'il accepte la résolution 1769 et autorise le déploiement de la MINUAD dans le pays. Certes, la résolution n'a pas encore été mise en oeuvre mais il s'agit là d'un changement de taille par rapport à la position habituelle de la Chine qui est de se laver les mains de ces questions et de ne jamais parler de violation des droits humains dans les autres pays.
    Merci, monsieur Millenson.
     M. Goldstein.
    Je veux juste réitérer que les mesures qui ont été prises par la Chine peuvent dans l'ensemble être attribuées à des pressions économiques semblables à celles dont nous venons de parler, je crois. La Chine ne se comporte normalement pas comme ça et elle vient de changer d'attitude à cause des pressions dont nous avons parlé aujourd'hui.
    Monsieur Tennant, voulez-vous...
    Une très brève remarque, monsieur le président.
    Je crois que la meilleure manière d'encourager les sociétés canadiennes ou autres consisterait à leur faire dresser un plan indiquant les bienfaits qu'elles veulent apporter à la population du Sud-Soudan ou du Soudan, par exemple sur le plan de la formation professionnelle.
    Les Chinois ne sont pas seulement présents dans le pétrole, ils investissent aussi au Sud-Soudan et la majeure partie de leurs employés vient de Chine. Le travail manuel est exécuté par des Soudanais, des Ougandais ou des Kenyans, mais les patrons sont des Chinois et toute l'expertise technique vient de Chine.
    Il faut que cela change. Ce que je voudrais, c'est que le gouvernement, s'il peut exercer des pressions, dise aux entreprises qu'elles seront obligées, lorsqu'elles seront implantées dans ce pays, de mettre sur pied un programme de formation permettant aux Soudanais d'assumer plus tard la responsabilité des opérations, voire de leur faire concurrence.
    C'est comme ça que nous avons bâti l'économie canadienne.
    Monsieur le président, je peux peut-être demander à notre invité de nous donner quelques exemples en préparant une synthèse de ce qu'il vient de nous expliquer sur la manière dont le désinvestissement et les pressions économiques exercées sur le gouvernement soudanais par le truchement de la Chine, et les pressions exercées sur la Chine, constituaient selon lui une variable positive du point de vue d'amener la Chine à la table. Beaucoup d'entre nous qui suivons ce dossier avons pris note de certains changements positifs qui s'expliquent peut-être par le fait que la Chine aurait exercé des pressions sur le gouvernement soudanais. Comme nous allons revenir sur cette question, il serait très utile que vous puissiez fournir cela au comité.
    Merci beaucoup de votre témoignage d'aujourd'hui.
    Merci, monsieur Dewar.
    Je vous remercie à nouveau tous les trois d'avoir témoigné devant le comité.
    Si vous avez eu l'impression que nous avons précipité un peu les choses pendant cette dernière heure, je vous présente mes excuses au nom du comité. Voyez-vous, quand la cloche sonne et qu'il faut aller voter, nous avons tendance à vouloir aller le faire, surtout lorsque le gouvernement est minoritaire. Merci donc de votre comparution.
    La séance est levée.