Passer au contenu
Début du contenu

FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain







CANADA

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 032 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 27 mai 2008

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    Bonjour, chers collègues. Je vous souhaite la bienvenue. Nous en sommes à la 32e séance du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international, tenue le mardi 27 mai 2008. Nous poursuivons aujourd'hui notre étude du rapport provisoire de notre sous-comité sur le dialogue bilatéral Canada-Chine sur les droits de la personne.
    Nous sommes très heureux d'avoir avec nous, aujourd'hui, des invités. Au cours de la première heure, nous entendrons M. Gregory Chin, professeur à l'Université York, de même que M. Pitman Potter, professeur de droit, directeur des Chinese Legal Studies et directeur de l'Institute of Asian Research à l'Université de la Colombie-Britannique.
    Bienvenue à cette téléconférence. J'espère que vous pouvez m'entendre.
    Très bien.
    À titre individuel, M. Jeremy Paltiel, professeur à l'Université Carleton, nous livrera également son témoignage.
    Nous souhaitons la bienvenue à tous nos invités. Il serait peut-être de mise que nous commencions par notre ami en Colombie-Britannique, via le système de vidéoconférence.
    Monsieur Potter, c'est à vous, s'il vous plaît.
    Généralement, selon la procédure suivie ici, vous avez à peu près 10 minutes pour présenter vos premières observations, puis nous passerons à une série de questions.
    Monsieur Potter.
     Merci beaucoup, monsieur le président. C'est à la fois un honneur et un plaisir pour moi d'être ici.
    Je n'ai pas préparé de mémoire mais j'ai bel et bien quelques points de discussion, et j'ai apporté des copies qui pourront vous être remises un peu plus tard. Je croyais qu'il y aurait quelqu'un ici pour les ramasser — mais quoi qu'il en soit, permettez-moi simplement d'amorcer la discussion avec quelques remarques.
    Les droits de la personne représentent, bien sûr, une dimension importante des relations entre le Canada et la Chine. Je crois également qu'il est très important que ce comité entende le plus large éventail possible de spécialistes afin d'être en mesure de prendre des décisions éclairées sur cette question primordiale.
    J'ai l'intention de vous présenter un bref exposé, en me limitant à la période de 10 minutes dont vous avez parlé, après quoi je pourrai répondre à vos questions.
    D'abord, il faut reconnaître que la situation des droits de la personne en Chine est quelque peu problématique. Le département d'État américain a qualifié la situation de piètre, et on trouve de nombreux exemples pour en témoigner, dont vous avez d'ailleurs probablement déjà entendu parler: emprisonnement de dissidents, répression religieuse au Tibet, dans le Xinjiang et ailleurs en Chine, répression ethnique au Tibet, dans le Xinjiang, en Mongolie intérieure et dans d'autres régions, contrôle des médias nationaux et étrangers, mesures sévères à l'endroit des avocats, qu'il s'agisse des soi-disant défenseurs des droits ou des défenseurs des manifestants tibétains.
    La plupart de ces abus sont justifiés en vertu des lois en Chine. Cependant, ces lois sont conçues pour appuyer le pouvoir autoritaire plutôt que la règle de droit ou la primauté du droit, au sens où nous l'entendons au Canada. Donc, la situation pose problème, quoiqu'on constate certains progrès: ratification par la Chine du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels; signature par la Chine du Pacte international relatif aux droits civils et politiques; entente très récente visant à reprendre les discussions avec les États-Unis en ce qui concerne les droits de la personne; et de façon plus générale, effort en vue de légitimer, pour ainsi dire, l'administration gouvernementale, notamment à la faveur d'un règlement sur l'accès à l'information gouvernementale qui doit entrer en vigueur cette année, d'une plus grande confiance dans le concept de droit public, et d'un rôle accru pour les avocats et les spécialistes du droit.
    Dans un sens, bien que regrettable, l'intensification de la répression à l'endroit des avocats, dont faisait état récemment l'organisme Human Rights Watch, témoigne tout de même d'un changement dans la situation qui prévaut en matière de capacité institutionnelle, changement qui n'aurait tout simplement pas été possible il y a dix ans. Que les avocats aient un statut tel qu'ils font l'objet de mesures plus rigoureuses est en soi un signe de progrès. Cela signifie que des changements dans la structure des lois et dans le respect des droits de la personne sont possibles en raison du rôle accru que jouent les spécialistes du domaine juridique, une classe moyenne en émergence, ainsi que de nouveaux groupes au sein de la société chinoise qui sont désireux d'améliorer leur niveau de vie et de faire respecter davantage leurs droits individuels.
    Il me semble y avoir un paradoxe dans l'attitude de la Chine en matière de respect des droits de la personne. On voit des exemples de situations problématiques, et elles sont nombreuses, mais on constate également des progrès, et la question consiste à faire la part des choses dans tout cela. J'ai l'impression que cela dépend des normes et des valeurs sur lesquelles reposent le système juridique en Chine, ses politiques en matière de droits de la personne, de même que les institutions et les structures qui en font partie.
    Dans les travaux que j'ai publiés, dont je vous ai remis une liste — et je serais heureux de vous fournir une copie des articles si vous le désirez — je parle de ces deux visions en termes d'adaptation sélective, en ce qui a trait à la question des normes et des valeurs, et de capacité institutionnelle, en ce qui concerne les institutions et les structures.
    Il est important, je crois, de reconnaître que les normes et les valeurs sur lesquelles sont fondés les décisions prises par le gouvernement chinois ainsi que le fonctionnement du système juridique sont tout à fait différentes de celles qui sont implicites dans la terminologie utilisée par les juristes et les politiciens. Si on parle du « judiciaire », d'un « gouvernement ouvert » ou de la « primauté du droit » ici, au Canada, ces expressions revêtent une signification très différente en Chine. De même, les institutions agissent de façon très différente de ce à quoi on pourrait s'attendre, en raison d'une combinaison de contraintes sur le plan des ressources, de mandats politiques, et ainsi de suite.
    Il importe donc de comprendre les différences qui existent sur le plan des normes et des structures institutionnelles quand vient le temps de formuler nos attentes à l'égard de la performance du système des droits de la personne et du système juridique, et encore une fois, je serai heureux de vous faire parvenir des copies de mes articles sur la question.
    Le défi consiste à déterminer comment encourager l'adoption d'un comportement de plus en plus favorable au respect des droits de la personne, et comment décourager les abus dans ce domaine. À mon sens, il y a trois principaux facteurs qui entrent en ligne de compte, et que j'appellerai le dialogue, l'attitude et la légitimité. Chacun d'entre eux témoignent d'une compréhension des facteurs normatifs et institutionnels dont j'ai fait mention.
    À mon avis, le dialogue avec la Chine est essentiel.
    Si l'on compare les changements survenus au cours des 30 dernières années en ce qui concerne les questions liées aux droits de la personne en Chine et, disons, en Birmanie, on constate que la Chine, en dépit de tous ses problèmes, présente tout de même un dossier nettement plus encourageant, dans ce domaine, que celui de la Birmanie.
    La raison première se trouve dans le degré d'ouverture et de dialogue avec l'Ouest, et notamment le Canada, à la faveur de discussions bilatérales, de programmes de recherche conjoints, d'échanges dans le domaine de l'éducation, de relations commerciales et de liens avec des ONG. Ce sont là des éléments essentiels à de saines relations entre le Canada et la Chine. Ils contribuent à modifier les positions dogmatiques, ainsi que les valeurs, et permettent d'acquérir une capacité institutionnelle. Le dialogue est donc primordial.
    Mais l'attitude dans le dialogue est également très importante. À mon avis, il importe de reconnaître — et on a pu le constater encore le mois dernier — que le régime en place et bon nombre de Chinois eux-mêmes sont extrêmement sensibles à la critique provenant de l'extérieur du pays. La domination exercée par les pays occidentaux sur la Chine dans l'histoire récente — je ne pense pas seulement à la période impériale du XIXe siècle et du début du XXe, mais à une période encore plus récente — est très présente dans les esprits et touche une corde très sensible.
    Les désaccords avec les États-Unis sur les droits relatifs à la propriété intellectuelle, les questions touchant les relations avec Taïwan, les critiques relatives au non-respect des droits de la personne, les questions liées au Tibet et ainsi de suite ont ravivé la flamme du nationalisme. Ce mouvement est très puissant en Chine, et facile à déclencher. Il est évidemment encouragé par le gouvernement, bien que celui-ci reconnaisse qu'il s'agit d'une arme à deux tranchants — et ce n'est pas surprenant quand on pense que le Parti communiste chinois lui-même est issu du mouvement du 4 mai 1919, soit un mouvement nationaliste.
    Le nationalisme est donc une composante essentielle de la susceptibilité à la fois du gouvernement et des citoyens en Chine. Aussi, le fait d'adopter une attitude autoritaire en matière de respect des droits de la personne n'est pas productif. Justifié ou pas, ce n'est pas productif.
    Le dialogue, y compris la critique, doit être adapté au contexte des priorités stratégiques de la Chine, par exemple le développement et la stabilité. Le dialogue sur les droits de la personne doit prendre en compte la complexité des conditions qui règnent en Chine: la situation démographique, les problèmes de pauvreté chroniques, les défis à relever en matière de développement.
    Certes, le contexte et ces conditions servent parfois d'excuses à la répression sur le plan politique, mais bon nombre de ces conditions correspondent à la réalité. Le fait de reconnaître le contexte et les conditions qui règnent en Chine, tout en ne permettant pas que cela serve d'excuse à la répression, repose sur une compréhension des cadres normatif et institutionnel dont j'ai parlé précédemment.
    Outre le dialogue comme tel et l'attitude adoptée à cet égard, la légitimité compte pour un facteur important dans les relations Canada-Chine. La légitimité est une source de motivation déterminante. La capacité dont jouit le Canada de conférer la légitimité au régime chinois est peut-être l'atout le plus important dont il dispose dans la gestion de ses relations avec la Chine.
    En dépit de notre longue histoire de coopération et d'amitié avec la Chine, le Canada n'occupe tout simplement pas une place très importante dans la conscience des dirigeants et du peuple chinois, comme symbole de puissance et source d'influence. Mais nous sommes un interlocuteur important en ce qui concerne la légitimité, et nous devons faire preuve de prudence avant de conférer une telle légitimité à ce pays.
    Cet aspect pourrait s'avérer très utile pour préciser les conditions et l'attitude à adopter dans le dialogue. Par exemple, les conséquences du dialogue qui sont acceptables pour le Canada peuvent et doivent être rendues publiques, mais nous devrions éviter de nous engager dans un dialogue et dans des discussions pures et simples, car cela contribue souvent à conférer la légitimité sans rien exiger en retour. L'attention apportée à la légitimité en tant que facteur de motivation peut déboucher sur un dialogue constructif et normatif, de même que sur l'acquisition d'une capacité institutionnelle.
    En résumé, le Canada devrait continuer de reconnaître l'importance de la question des droits de la personne en Chine. La feuille de route du gouvernement chinois en cette matière est plus ou moins concluante, et peut paraître décourageante à l'heure actuelle, mais la question consiste à se demander ce que l'on doit faire. À mon avis, la meilleure réponse que l'on puisse donner en ce qui concerne l'établissement de saines relations entre le Canada et la Chine réside dans le dialogue ininterrompu, la prise en compte du contexte et des conditions qui règnent localement, et la conscience du pouvoir que nous donne la capacité de conférer la légitimité pour ajuster le tir de sorte que le dialogue engagé corresponde aux intérêts du Canada dans ses relations avec la Chine.
    Merci beaucoup.

  (1540)  

    Merci beaucoup, monsieur Potter.
    Je donne maintenant la parole à M. Chin. S'il vous plaît.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de formuler quelques brèves remarques aujourd'hui.
    Je suis professeur adjoint au Département de science politique de l'Université York. J'enseigne la politique et l'économie de la Chine et je fais des recherches sur le sujet depuis le début des années 1990, comme étudiant au départ, et maintenant comme professeur. L'une de mes spécialités est le changement politique en Chine et le rôle de la Chine dans le système international.
    Pour résumer mon cheminement, je précise qu'avant de me joindre à l'Université York en 2006, j'étais diplomate pour l'ambassade du Canada à Beijing, où j'étais chargé de gérer l'aide extérieure destinée à la Chine et à la Corée du Nord. De 2000 à 2003, j'ai travaillé pour la section de la Chine et de l'Asie du Nord-Est de l'ACDI et pour la section de la Chine et de la Mongolie du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international du Canada. J'ai été chercheur invité à l'Université de Pékin en 1997 et 1998. Je suis un Canadien d'origine chinoise. Mon grand-père a immigré au Canada en 1904. Je parle le mandarin et le cantonais. J'ai vécu cinq ans en Chine au cours de la dernière décennie.
    J'aimerais profiter du court laps de temps dont je dispose pour aborder deux questions liées au dialogue sur les droits de la personne entre le Canada et la Chine: en premier lieu, la volonté grandissante de Beijing d'accepter, de confirmer et d'appliquer les normes en matière de droits de la personne; et en second lieu, les conditions dans lesquelles il est le plus probable que Beijing accepte de se conformer aux normes internationales sur les droits de la personne.
    Premièrement, dans quelle mesure la Chine est-elle disposée à accepter, à confirmer et à appliquer les normes en matière de droits de la personne? Je crois qu'on peut dire que la position de la Chine sur la question des droits de la personne a évolué considérablement au cours des 30 dernières années. Elle en est venue à accepter le principe de base qu'il existe des droits universels de la personne, se détachant ainsi de la période maoïste, où elle soutenait que les notions occidentales des droits de la personne incarnaient un esprit capitaliste et bourgeois qui ne s'appliquait ni à elle ni aux autres États socialistes. La Chine a commencé à se faire à l'idée que la définition universelle des droits de la personne comprend des droits civils et politiques de même que des droits économiques et sociaux. Cependant, elle n'a pas encore ratifié la convention internationale sur les droits civils et politiques.
    Malgré l'acceptation graduelle et croissante de Beijing à l'égard du concept des droits universels de la personne, un écart important demeure entre sa position et celle du Canada. La Chine persiste à croire que les droits de la personne ne sont pas absolus, que leur promotion doit être dosée, selon Beijing, en tenant compte d'autres facteurs, notamment de la transition de la Chine vers le développement économique et la stabilité politique.
    Elle affirme que les droits civils et politiques ne peuvent être mis en application que de façon progressive, à un niveau plus élevé de développement économique et social, par un respect généralisé de la primauté du droit et dans un contexte politique plus stable.
    Il est également possible que la Chine tente de mettre au point un nouveau modèle de politique et de gouvernance qu'elle qualifiera de « démocratique » et qui pourrait comporter des éléments pluralistes, mais qui ne permettra pas de contestation multipartite ni d'élections populaires directes pour les plus hautes fonctions du pays, ce que le Canada considère comme des composantes intrinsèques de la démocratie.
    À mon avis, le comité devrait aussi s'intéresser à l'ambivalence de Beijing dans la réaction internationale au non-respect des normes sur les droits de la personne dans d'autres pays. Plus récemment, la Chine s'est toutefois montrée de plus en plus disposée à soumettre des cas de violation des droits de la personne aux pressions internationales et elle a graduellement changé sa position au sujet de la Corée du Nord, du Darfour et du Myanmar.
    Néanmoins, la Chine considère toujours les sanctions économiques et les interventions humanitaires visant à assurer la sécurité comme une violation inacceptable de la souveraineté du pays en question, sauf dans le cas de très graves conflits internes ou dans les situations où des réactions en chaîne menacent la stabilité internationale. Le professeur Allen Carlson de l'Université Cornell, aux États-Unis, a cependant montré que la Chine a changé lentement sa position sur l'intervention internationale au cours des 15 dernières années. Il semble donc y avoir un mouvement possible aussi de ce côté.
    Deuxièmement, à quel moment la Chine semblera-t-elle le plus apte à se conformer aux normes internationales en matière de droits de la personne? Il semble plus probable que la Chine adhère aux normes internationales:
    1. Lorsque Beijing réalisera que les normes en question sont réellement universelles et lorsque ces normes recevront l'appui des gouvernements de la vaste majorité des pays développés et des pays en voie de développement. Cela explique pourquoi la Chine est de plus en plus disposée à accepter certains des droits civils et politiques internationaux, par exemple les droits de l'enfant et le droit à l'égalité entre les sexes.

  (1545)  

    2. Lorsque la Chine considérera que le fait de respecter les droits de la personne est compatible avec ses propres intérêts, et que tout comportement allant à l'encontre de ces normes risquerait de compromettre l'atteinte de ses objectifs. Je parle ici de risques de premier ordre menaçant la survie de la nation. C'est sans doute essentiellement pour cette raison que la Chine s'est prononcée en faveur de la non-prolifération des armes nucléaires.
    3. Lorsque la Chine percevra que l'organisation internationale qui assure l'application de ces normes est largement reconnue comme étant légitime et efficace. C'est ce qui transparaît dans la volonté de la Chine de soumettre des questions de sécurité au Conseil de sécurité des Nations Unies et dans sa réaction plus prudente à l'égard des progrès du G-8. Elle a aussi tendance à réagir fortement à la défense proactive et provocatrice des droits sur le plan bilatéral.
    4. Lorsque Beijing comprendra que la Chine s'isolera du reste du monde par sa position si elle fait obstacle à l'application des normes internationales en matière de droits de la personne. On peut arriver à cette conclusion quand on pense à la situation embarrassante où la Chine s'est retrouvée en tentant de transporter des armes classiques au Zimbabwe.
    5. Lorsque la Chine verra que d'autres grandes puissances, les États-Unis en particulier, respectent les normes internationales en matière de droits de la personne que ces pays voudraient que la Chine applique.
    Pour généraliser, on peut dire que la Chine accepte de plus en plus de normes internationales par rapport à la période maoïste, mais sa définition de certaines de ces normes diffère encore de celle du Canada, notamment en ce qui concerne les droits de la personne. La Chine soutient toujours que l'application des normes doit être contrainte par un engagement à l'égard du principe de la souveraineté nationale. Et il semble plus probable que la Chine se conformera aux normes internationales en matière de droits de la personne lorsqu'elle constatera que ces normes, ou l'organisation qui les met en application, sont généralement reconnues comme étant légitimes.
    J'estime que le Canada peut le mieux promouvoir les valeurs nationales et internationales liées aux droits de la personne en Chine quand il fait la promotion des normes internationales sur les plans multilatéral et bilatéral grâce à une stratégie de participation constructive qui met l'accent sur l'établissement d'un dialogue politique soutenu et approfondi avec la Chine, et grâce à des programmes systématiques et durables de socialisation constructive au niveau bilatéral. Cela équivaudrait, dans une certaine mesure, à poursuivre des programmes axés davantage sur la défense des droits, sur le plan multilatéral et collectif.
    Merci.

  (1550)  

    Merci beaucoup, monsieur Chin.
    Je cède maintenant la parole à M. Paltiel.
    C'est un grand privilège d'être appelé à témoigner, devant ce comité de la Chambre des communes, sur la nécessité d'un dialogue avec la Chine sur les droits de la personne. Je poursuis des travaux qui concernent la Chine depuis l'époque de mon baccalauréat et je travaille depuis une vingtaine d'années sur la question des droits de la personne en Chine.
    D'abord, il faut reconnaître que les droits de la personne en République populaire de Chine ont fait d'immenses progrès depuis la première fois que je me suis rendu dans ce pays, en octobre 1974. Ensuite, il est absolument irréfutable qu'il reste beaucoup à faire à ce chapitre. Enfin, les Canadiens s'entendent tous à dire que notre politique étrangère doit être alignée sur les valeurs canadiennes. Il ne fait aucun doute que notre politique envers la Chine doit tenir compte de la question des droits de la personne. Les questions que nous devons nous poser sont les suivantes: Quels sont nos objectifs en matière de droits de la personne dans le cadre de nos relations avec la Chine? Comment devrions-nous manifester nos préoccupations relatives à cette question? Et quels sont les meilleurs moyens dont nous disposons pour atteindre nos objectifs en la matière?
    J'ai lu le rapport de M. Charles Burton concernant le dialogue sur les droits de la personne qui s'est poursuivi jusqu'à maintenant, et je me rallie à l'essentiel de ses conclusions et de ses préoccupations. La principale conclusion qui me semble ressortir de ce rapport est que nous devrons procéder à une nouvelle évaluation pour déterminer si l'approche adoptée représente la meilleure façon de faire connaître à la Chine nos préoccupations relatives aux droits de la personne, et si le dialogue est le meilleur moyen d'établir des relations avec les membres de la société chinoise qui travaillent à l'amélioration du respect des droits de la personne en Chine. Je vais traiter de ces questions plus tard dans mon exposé.
    Je crois que nous devons être prudents et éviter deux extrêmes. Le premier serait de ramener toute notre relation avec la Chine à une expression de notre désaccord avec les pratiques du gouvernement chinois en matière de droits de la personne. Cela n'améliorerait en rien la situation des droits de la personne en Chine et, de surcroît, cela irait à l'encontre de nos propres intérêts vitaux. L'autre extrême serait de simplement dissoudre nos préoccupations en matière de droits de la personne dans notre relation commerciale. Cela trahirait les espoirs de millions de Chinois ainsi que ceux des Canadiens qui s'intéressent à la question et qui souhaitent que le Canada défende les valeurs que symbolisent les Nations Unies et la Déclaration universelle des droits de l'homme, déclaration à laquelle le Canadien John Humphrey a apporté une contribution capitale il y a 60 ans, et dont nous célébrerons l'anniversaire le 13 décembre prochain. Cela irait en outre à l'encontre de nos intérêts, qui sont de voir la Chine devenir un État de droit qui se conforme systématiquement à un ordre international fondé sur des règles — un ordre en lequel les Canadiens croient fermement et dont dépend la prospérité de notre économie ouverte.
    Le mois dernier, je suis revenu d'un voyage en Chine au cours duquel j'ai participé à un forum hautement médiatisé sur les droits de la personne, forum auquel ont également assisté les ministres du conseil d'État chinois, un vice-président du Comité central du Parti communiste chinois ainsi que des hauts représentants de l'ONU et des responsables des commissions des droits de la personne de différents pays. J'étais le seul Canadien invité.
    Cette conférence s'est tenue dans l'ombre des émeutes de Lhasa, des importantes manifestations qui se sont déroulées en mars dans les régions de Chine peuplées de Tibétains, et de la controverse qui a entouré le relais du flambeau olympique peu de temps après. J'ai eu l'occasion de dire sans ambages qu'à mon avis, la communauté internationale devrait examiner les méthodes employées par le gouvernement chinois pour faire face aux mouvements de protestation au Tibet, que les attaques contre l'intégrité du Dalaï Lama avaient terni l'image de la Chine sur la scène internationale et porté atteinte aux sentiments de la population tibétaine, et qu'un dialogue sincère avec le Dalaï Lama était la meilleure et peut-être même la seule façon de redorer le blason de la Chine avant les Jeux olympiques de Beijing.
    Malgré le fait que les organisateurs chinois ont déployé tous les efforts possibles pour faire valoir la perspective de leur gouvernement auprès des participants, et que les représentants des médias officiels chinois ont fait pression sur moi pour que je joigne ma voix à la condamnation officielle de la politisation du relais du flambeau olympique, j'ai continué de défendre le droit à la liberté d'expression politique, exercé de façon pacifique. Dès mon retour au Canada, j'ai envoyé aux organisateurs du forum une évaluation en chinois sur la stratégie adoptée par les médias nationaux relativement aux droits de la personne, et j'ai reçu une réponse courtoise qui m'indiquait qu'on avait pris connaissance de mes préoccupations. Donc, d'après mon expérience, il est possible d'entretenir un dialogue sur les droits de la personne avec la Chine.
    En outre, tous ceux qui ont suivi de près les efforts saisissants déployés par tous les paliers du gouvernement chinois pour venir en aide aux victimes de l'effroyable tragédie du 12 mai 2008 — c'est-à-dire l'important tremblement de terre qui a frappé Wenchuan, dans le Sichuan — ne peuvent entretenir le moindre doute quant au dévouement profond et à l'engagement concret des autorités chinoises envers leur peuple. C'est là un point de convergence important.
    La récente controverse qui a entouré le relais du flambeau olympique nous a également permis de comprendre clairement une chose en ce qui concerne les réactions de la Chine face à la critique. Une condamnation publique de la Chine, en particulier si elle est liée à un événement de prime importance pour la fierté nationale chinoise — comme le sont les Olympiques de Beijing — ne fera rien d'autre que susciter une réaction de nationalisme chez les Chinois, et cela sera plus préjudiciable aux efforts nationaux pour l'amélioration des droits de la personne que toute intervention mal ciblée visant à faire progresser les droits de la personne en Chine.

  (1555)  

    Pendant la conférence, le seul média qui s'est véritablement intéressé à mes idées sur un sujet lié aux droits de la personne a été le Southern Metropolitan Daily. La question que l'on m'a posée était de savoir si les condamnés à mort devaient avoir droit à des visites conjugales, mais je ne m'attarderai pas là-dessus.
    Peu après mon départ de Chine, ce journal a publié un reportage concernant un trafic de main-d'œuvre enfantine qui reliait la province du Sichuan, à l'ouest, à la ville industrielle de Dongguan, sur le delta de la rivière des Perles, au sud. L'histoire a par la suite été reprise par des correspondants étrangers et diffusée autour du monde, mais à l'origine, il s'agissait purement et simplement d'un travail de journalisme d'enquête fait par des Chinois sur la question des droits de la personne.
    Malheureusement, le rédacteur en chef délégué de ce journal a par la suite été démis de ses fonctions, après qu'il eut publié un article sur l'autocensure dans les reportages concernant le Tibet. Cela illustre mieux que mes propres opinions le lien étroit qui unit les sensibilités nationalistes et le progrès des droits de la personne en Chine. Les propos moralisateurs que l'Occident tient à la Chine ont tendance à freiner le progrès des droits de la personne dans ce pays. Nous devons éviter de lancer des accusations publiques envers la Chine avec une attitude empreinte de supériorité.
    Cela signifie-t-il que nous devons éviter de faire des déclarations controversées, notamment en ce qui concerne la question du Tibet? Pas du tout. Quelque temps avant mon arrivée en Chine, le nouveau premier ministre d'Australie, Kevin Rudd, a prononcé un discours en chinois à mon alma mater, l'Université de Pékin. Dans ce discours, il a vanté cette tradition chinoise qu'est la sincérité entre amis, et il a aussi fait une déclaration au sujet du Tibet.
    Je crois que nous pouvons discuter avec la Chine de nos points de vue sur les répercussions de l'expansion économique et sur les tensions ethniques. Peut-être devrions-nous également leur parler de nos expériences et de nos difficultés relatives à la participation de groupes des premières nations à des projets d'expansion économique.
    Dans le passé, les efforts que nous avons faits en ce sens n'ont guère porté fruit parce que les représentants chinois avec qui nous avons discuté de la question des droits de la personne ne sont pas des gens qui travaillent sur le terrain et qui font face aux problèmes concrets. Ce sont plutôt des bureaucrates des droits de la personne, qui ont été désignés pour traiter avec les étrangers. Nous devons insister pour entreprendre un dialogue sur les droits de la personne qui serait réellement axé sur nos préoccupations mutuelles. Il vaut mieux discuter en privé des préoccupations consulaires particulières. Ces questions devraient être soulevées dans le cadre des échanges diplomatiques habituels avec nos homologues chinois.
    Nous devons signifier clairement que les préoccupations consulaires particulières sont loin d'être la seule raison pour laquelle nous souhaitons établir des relations amicales avec la Chine, mais nous devons tout à la fois insister sur le fait que la manière dont les dirigeants chinois règlent les questions qui intéressent le Canada doit être considérablement améliorée, de manière à créer une atmosphère de confiance mutuelle dans laquelle des relations amicales pourront se développer.
    Nous devons faire savoir très clairement aux Canadiens que l'établissement de relations amicales avec la Chine est un enjeu très important pour notre pays. La Chine n'est pas seulement l'économie la plus dynamique du monde, dont l'importance double tous les cinq ou sept ans; elle est maintenant notre deuxième partenaire commercial, et elle a pris notre place au premier rang des partenaires commerciaux du pays qui représente notre plus important marché: les États-Unis. La Chine est également le plus important partenaire commercial du Japon ainsi que celui de la Corée du Sud et de tous les pays d'Extrême-Orient.
    Mais nos intérêts envers la Chine dépassent largement les intérêts commerciaux. La Chine se classe maintenant première pour ce qui est de l'aide apportée à l'Afrique, et c'est elle qui fait les investissements les plus importants en Amérique latine. C'est elle qui apporte la plus importante contribution aux forces de maintien de la paix de l'ONU parmi les cinq membres permanents du Conseil de sécurité. C'est également le pays qui détient les plus importantes réserves en devises, soit plus de 1,7 billion de dollars américains.
    Ce n'est pas le Canada qui a besoin de la Chine, c'est le monde entier. Mais la Chine a également besoin du reste du monde. Si nous établissons avec elle un dialogue nuancé et bien circonscrit, et si nous sommes persévérants, cela aidera à réduire les écarts qui nous séparent et profitera à nos relations.
    Nous devons établir un dialogue sur les droits de la personne qui clarifie les différentes approches des autorités officielles en la matière, mais qui éveille par ailleurs l'intérêt des personnes et des organisations qui, de l'intérieur du pays, travaillent activement à la promotion des droits de la personne; un dialogue qui vise à dégager et à faire connaître des pratiques exemplaires plutôt que des principes trop abstraits; un dialogue qui soit mené dans une optique d'exploration commune, dans un domaine où aucun pays n'atteint les idéaux qu'il poursuit.

  (1600)  

     Je recommande avec insistance la reprise d'un dialogue sur les droits de la personne, qui serait axé sur deux pôles. Le premier serait une consultation annuelle sur les sujets qui préoccupent les deux pays, et le second, une recherche pluriannuelle en concertation sur les sujets de préoccupation communs. Des organisations officielles et des ONG des deux pays participeraient à ce processus et les sujets seraient examinés par des groupes de travail spécialisés. Les sujets pourraient être proposés par les parties au dialogue des ministères des deux pays, mais les discussions devraient être menées par des organisations qui ont la capacité et le désir d'intervenir sur le terrain. Nous devons consacrer à ce dialogue les ressources linguistiques et logistiques sans lesquelles il sera impossible.
    Ensuite, il va sans dire que notre gouvernement et notre société civile doivent, sans équivoque possible, pouvoir faire connaître aux autorités chinoises leurs préoccupations particulières. Nous pouvons nous fier à la société civile pour obtenir de l'information sur ces sujets préoccupants. Les sujets en question devraient être abordés par des dirigeants des plus hauts échelons — ce qui signifie que des réunions devront être tenues dans les plus hautes sphères —, mais on obtiendra de meilleurs résultats si l'on traite ces questions en évitant d'embarrasser publiquement le gouvernement chinois. Lorsque l'on aura fait part de ces préoccupations au gouvernement chinois, on devra assurer un suivi en empruntant les voies diplomatiques habituelles. Les questions de principe peuvent être abordées dans le cadre d'un dialogue public. Cependant, il vaut mieux traiter les préoccupations particulières discrètement, mais avec ténacité et détermination. L'humiliation publique est une option de dernier recours.
    Les images émouvantes qui se succèdent sur nos écrans de télévision depuis le tremblement de terre du 12 mai ont clairement révélé les progrès accomplis par la Chine au chapitre des droits de la personne. Les Chinois n'ont pas seulement demandé de l'aide; ils ont exigé qu'on leur permette de contribuer aux secours et qu'on leur fournisse de l'information par considération pour leurs inquiétudes quant au sort de leurs concitoyens.
    Les hauts dirigeants chinois ont par ailleurs démontré qu'ils s'engageaient personnellement à répondre aux besoins de la population. Les scènes dans lesquelles on a vu le premier ministre chinois, Wen Jiabao, travailler jour et nuit sur la ligne de front pour apporter des secours aux sinistrés ont changé à jamais la manière dont les Chinois perçoivent le rôle et la personnalité de leurs dirigeants. Cela découle en partie de la sensibilisation à l'aide aux sinistrés par d'autres pays. Le temps est manifestement propice à l'établissement de relations, et il n'est plus de mise que les pays se fassent la morale les uns aux autres.
    Je vous remercie beaucoup.
     Merci, monsieur Paltiel.
    Et merci à nos deux autres invités pour leur témoignage exhaustif et très approfondi.
    Nous allons passer à notre première série de questions. J'invite M. Chan à questionner nos invités.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, messieurs, de vous être joints à nous. Monsieur Potter, nous sommes heureux de vous revoir.
    Dans une certaine mesure, vous avez tous trois dit que la situation des droits de la personne en Chine s'est améliorée. Jeremy, vous avez parlé d'immenses progrès. Pouvez-vous nous donner plus de précisions sur le type d'amélioration qu'on a pu observer, tant sur le plan des libertés individuelles que sur celui de la liberté de religion?
    Votre question s'adresse-t-elle spécifiquement à moi?
    Non. J'aimerais que vous y répondiez tous les trois.
    Je vais commencer par la fin, c'est-à-dire par la question de la liberté de religion. Il y a des problèmes à ce chapitre. Les immenses progrès dont j'ai parlé font référence au milieu des années 1970, époque à laquelle j'étais en Chine et où tous les lieux de culte étaient fermés. De nos jours, les Chinois pratiquent ouvertement les deux religions officielles de leur pays, ainsi que certaines religions non officielles. Les problèmes les plus importants se rapportent aux religions non officielles.
    Il y a des temples ouverts, et les gens y font leurs dévotions ouvertement. J'ai pu observer cela au cours de mon dernier séjour. Mais le contrôle et la supervision par l'État continuent de poser problème. La différence, c'est qu'il existe maintenant des lieux dédiés à l'activité religieuse en Chine, ce qui n'était pas le cas auparavant.
    L'ouverture des médias que j'ai pu constater est un autre exemple. Je ne veux pas seulement parler de cette histoire de main-d'œuvre enfantine qui a fait l'objet d'un reportage dans un journal national, mais également des reportages provenant de la zone touchée par le séisme, de l'utilisation d'Internet et de blogues, des gens qui parlent de problèmes liés à... de leurs réelles préoccupations concernant des problèmes qui auraient pu être associés à de la corruption dans le passé, et de leurs préoccupations actuelles au sujet de malversations possibles dans l'apport des secours. Toutes ces choses sont relativement nouvelles.
    Bien que des problèmes persistent — comme je l'ai mentionné, les rédacteurs en chef se font congédier —, ce que l'on observe aujourd'hui en Chine, c'est que la population exprime de telles préoccupations, et qu'il est possible de faire passer des messages de cette façon. Dans les faits, il peut arriver qu'une personne soit blâmée, à titre d'instigatrice, par exemple, mais par la suite, les normes évoluent encore et la population s'attend à un engagement plus marqué.
    Il va de soi que M. Potter est mieux qualifié que moi pour parler des changements qui touchent les normes juridiques, mais le rôle des avocats s'est considérablement modifié. Récemment, les avocats qui défendaient des manifestants du Tibet étaient menacés de sanctions, mais il n'en reste pas moins que des avocats ont offert de défendre ces personnes bénévolement. Ce sont là d'autres changements.
    Je vais m'interrompre pour ne pas accaparer tout le temps disponible. Je cède la parole aux autres témoins.

  (1605)  

    Passons maintenant à M. Potter, puis ce sera au tour de M. Chin, s'il désire répondre.
    J'ai seulement quelques commentaires à faire sur la question.
    Tout d'abord, en ce qui a trait à la conception, je crois sincèrement, sauf le respect que je dois à toutes les personnes visées, qu'il ne sert pas à grand-chose de comparer la situation d'aujourd'hui à celle de l'époque de Mao. La vie d'aujourd'hui en Chine est à ce point différente de celle que l'on connaissait sous le régime maoïste que la comparaison ne donne tout simplement rien.
    Il serait plus efficace de faire une comparaison en examinant les différentes étapes des trois dernières décennies. Si l'on se penche sur la question des droits de la personne, même au milieu et à la fin des années 1980, avant la crise de Tiananmen, puis que l'on examine la question dans le contexte du milieu des années 1990, par exemple, après la visite de Deng Xiaoping dans le sud, et enfin la question dans le contexte d'aujourd'hui, il est juste de dire que, sur de nombreux points, la situation relative aux droits de la personne s'est bel et bien détériorée. Je crois que c'est entre autres le cas sur le plan de la religion.
    Il est vrai que beaucoup ont des convictions religieuses en Chine, mais les politiques chinoises, prévues notamment dans la constitution et dans les règlements nationaux sur le contrôle de la religion, établissent très clairement que, même si les gens ont droit à la liberté de religion, ils n'ont aucun droit quant à la pratique libre de celle-ci.
    Une question très importante se pose, à savoir si la situation respecte les normes internationales. Cependant, ça signifie également que le gouvernement accorde beaucoup d'attention aux comportements liés à la pratique religieuse. Je ne parle pas seulement de l'interdiction des prétendues sectes comme le Falun Gong. Je parle en fait des églises chrétiennes clandestines. Je parle de l'Islam et de la domination de l'enseignement islamique au Xinjiang ainsi que du contrôle exercé sur le bouddhisme tibétain, pas seulement au Tibet, mais également en Mongolie intérieure.
    Il est important d'admettre que, sur ce plan, on se heurte à des obstacles. Il faut reconnaître que le gouvernement appréhende énormément les organisations concurrentes et qu'il y est hostile, qu'elles soient religieuses, économiques ou civiles. Je crois donc qu'il faut examiner la question de la religion dans un contexte plus large.
    Pour ce qui est des médias, je crois qu'il est absolument vrai qu'il y a actuellement une plus grande liberté journalistique en Chine que par le passé. C'est en grande partie attribuable au travail des représentants des médias qui cherchent à repousser les limites, si l'on veut.
    Il y a aussi un plus grand pluralisme politique. Prenons les débats qui se déroulent au Congrès national du peuple, même les débats dans le régime du parti. Le pluralisme est de plus en plus présent et de plus en plus toléré. Les efforts déployés à l'intérieur du parti pour instaurer des institutions démocratiques pluralistes et pour adopter des lois et des règlements qui régissent les droits des membres du parti à la liberté dans les débats entre partis constituent une autre étape très importante dans l'avancement des droits de la personne.
    Enfin, je dirais qu'il y a également la croissance des institutions juridiques. J'aimerais souligner le commentaire que j'ai fait au sujet du récent rapport du Human Rights Watch sur la répression des avocats en Chine, soit le fait que les avocats jouent aujourd'hui un rôle de plus en plus important. On vient d'adopter en Chine une nouvelle loi sur les avocats qui vise à augmenter le contrôle de l'État sur ceux-ci. Cette initiative nous porte à croire que les avocats en Chine tentent dans une très grande mesure d'affirmer davantage les droits, la primauté du droit, et ainsi de suite et que c'est permis de le faire.
    La dernière chose que j'aimerais dire, c'est qu'il y a des sujets sur lesquels le débat n'est pas vraiment permis. Taïwan, le Tibet et Tiananmen en sont trois auxquels on peut penser. Cependant, la liberté de débat, de discussion et d'expression en Chine sur d'autres sujets est de plus en plus grande. Je crois donc qu'il y a bel et bien eu d'importantes améliorations au cours des trois dernières décennies, mais qu'il y a également des situations préoccupantes et qu'il y en aura encore dans un proche avenir. Reste à savoir comment obtenir le juste équilibre entre les deux.

  (1610)  

    Merci, monsieur Potter.
    Malheureusement, nous n'avons plus de temps, monsieur Chin. Nous vous permettrons de répondre en premier à la prochaine question.
    Je m'excuse Greg.
    Madame Barbot.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Potter, vous disiez que le Canada ne pesait pas lourd dans la balance de la Chine, mais qu'il servait à établir la crédibilité de celle-ci sur le plan international. J'aimerais que vous développiez davantage cette idée pour nous faire voir jusqu'à quel point on peut utiliser ce besoin de crédibilité de la Chine pour la défense des droits humains. Selon ce que vous avez dit tous les trois, je comprends qu'il y a eu des changements bénéfiques en Chine, mais j'aimerais savoir plus spécifiquement ce qui a été fait en termes de gouvernance et de responsabilité. Peut-on voir des signes tangibles dans la population? Par exemple, le Canada pourrait-il aujourd'hui travailler à la promotion des droits de la personne avec des groupes de droits humains, des organisations de la société civile chinoise? Est-ce possible dans le contexte actuel?

[Traduction]

    Merci, madame Barbot.
    Je vais céder d'abord la parole à M. Chin, puis vous aurez tous l'occasion de répondre. Nous disposons de sept minutes pour les questions et réponses; nous devons donc être assez concis.
    Monsieur Chin.
    Je m'excuse auprès de Mme Barbot. Je n'avais pas mis mon écouteur et je n'ai donc pas entendu vos questions. Je vais laisser M. Potter et M. Paltiel y répondre.
    Je vais seulement essayer de répondre à la première.
    Votre question était très concrète — des exemples précis de libertés individuelles et religieuses. Mes collègues ont déjà parlé des contraintes.
    En ce qui a trait aux temps libres, je crois qu'on peut dire que le parti de l'État s'en retire de plus en plus. On parle donc de temps libre personnel.
    Il y a également le droit, par exemple, de choisir son emploi et l'endroit où l'on veut travailler. Il est donc question de société de marché et de droits liés à la consommation et à l'économie. Je crois que c'est à cet égard que nous observons une augmentation des droits et libertés individuels en Chine.
    De plus, en matière de religion, il y a manifestement de grandes contraintes en Chine. Je crois toutefois que les plus importantes sont celles qui visent l'interdiction du prosélytisme et la volonté de l'État de faire en sorte que les organisations religieuses obtiennent son approbation et sa permission. Autrement, on constate effectivement une augmentation de l'activité religieuse en Chine.
    Je m'arrête ici.
    Merci.
    Monsieur Paltiel.
    En fait, je vais demander à Greg Chin de répondre, parce qu'il connaît bien le sujet.
    C'est vrai, il existe de nombreuses ONG spécialisées dans les droits de la personne en Chine, des organisations actives qui sont légalement autorisées à fonctionner et qui réussissent à agir. Il y a toutes sortes de problèmes liés aux ONG en Chine, en partie parce que le gouvernement a une façon étrange de...
    De plus, j'aimerais mettre en lumière le commentaire de M. Potter selon lequel les organisations concurrentes constituent la principale préoccupation du Parti communiste chinois. Pour régler le problème lié aux ONG, le Parti a adopté un règlement qui autorise uniquement les activités d'organismes de base populaire locaux qui n'ont ni réseau national ni siège social national ou celles de groupes de coordination nationaux qui ne dirigent aucun organisme de base populaire local.
    Certaines organisations réussissent à contourner ce règlement en s'enregistrant comme entreprises; c'est une zone grise. Mais Greg en sait vraiment plus à ce sujet, parce qu'il a travaillé avec des représentants d'ONG en Chine. Il existe toutefois beaucoup d'ONG chinoises qui s'occupent d'aspects particuliers des droits de la personne et avec lesquels notre gouvernement collabore. Il a collaboré avec elles par le passé, et nous aimerions en faire plus à cet égard, parce que ces groupes de base populaire font un travail concret. Ils améliorent la vie des femmes, des prisonniers et des travailleurs migrants. Voilà des aspects qui nous préoccupent particulièrement.
    Peut-être que Greg peut donner plus d'explications à ce sujet.

  (1615)  

    Nous nous ferons un plaisir d'entendre ce qu'il a à dire, mais juste après M. Potter, s'il vous plaît.
    Merci.
    Pour répondre à la question de Mme Barbot relativement au poids du Canada, je crois qu'en réalité, la Chine occupe une place importante dans notre conception du monde et de l'Asie. Cependant, lorsqu'on va en Chine, le Canada, compte tenu de la taille de son économie et de sa population, n'a pas autant d'importance. Je crois que c'est la simple réalité. Bien entendu, lorsque nous nous rendons en Chine, les gens sont très gentils avec nous. Nous avons une amitié de longue date avec la Chine et nous collaborons avec elle depuis longtemps. Chaque fois que nous montons dans un taxi et que nous disons que nous sommes Canadiens, les Chinois nous parlent de Bai Qiu-en et de Norman Bethune et tout le reste. Il y a donc toute cette bonne volonté. Mais dans l'ensemble, je ne crois pas que nous ayons autant d'importance à leurs yeux qu'ils en ont pour nous.
    Selon moi, la question de la légitimité est cruciale parce que toute la dimension de « l'essor de la Chine » dépend de l'importance accordée au fait que la Chine reprenne la place de premier plan qu'elle mérite dans le monde ainsi qu'à la légitimité de cette place et, par conséquent, à celle de son gouvernement sur la scène nationale. Une grande partie de ce que nous avons vu relativement à l'aide aux victimes du séisme visait à établir la légitimité au pays. C'est un aspect sur lequel le Canada peut avoir une certaine influence. En effet, lorsque nous participons à une discussion sur les droits de la personne avec la Chine, qu'il s'agisse d'une discussion multilatérale ou bilatérale, le gouvernement chinois peut affirmer que les Canadiens appuient ce qu'il fait, ce qui lui permet d'acquérir une légitimité auprès du reste du monde et de sa population.
    Je crois donc que notre capacité à établir la légitimité du gouvernement chinois est un atout très important pour le Canada parce que, aux yeux du reste du monde, nous avons la réputation d'être avant tout une source de bons offices et tout le reste. Je crois que c'est un élément que nous devrions explorer davantage.
    J'appuie très fortement le commentaire émis sur la collaboration avec les ONG. C'est un élément crucial dans la nouvelle société civile en Chine. Nous pourrions débattre à l'infini sur la question de savoir s'il existe ou non une société civile en Chine, mais il ne fait aucun doute qu'une telle société y est en émergence. Par ailleurs, ces ONG, qui sont encore quelque peu dominées par le parti et les éléments du gouvernement — mais qui font néanmoins preuve d'une indépendance, d'une efficacité et d'une assurance croissantes — sont un élément essentiel dans lequel devrait s'engager le Canada.
    Pour ce qui est des réalisations spécifiques en matière de responsabilité du gouvernement — pour répondre à une autre partie de votre question, madame — j'aimerais souligner deux processus du point de vue législatif. Le premier est le processus d'audiences législatives. Si l'on se penche sur la réglementation et les lois adoptées au cours des trois ou quatre dernières années — et la loi sur la propriété adoptée l'an dernier en est un excellent exemple —, le recours accru à des audiences législatives de plus en plus ouvertes au public afin d'obtenir les commentaires de groupes d'élites silencieux, mais néanmoins très variés, montre encore une fois que le gouvernement s'efforce d'établir la légitimité d'un processus législatif par la participation.
    La réglementation relative à un gouvernement transparent constitue un autre exemple. La nouvelle réglementation sur le processus décisionnel d'un gouvernement transparent qui entre en vigueur cette année constitue un pas très important vers la responsabilisation du gouvernement. Toutefois, il est également très important de comprendre que l'adoption de cette réglementation n'a pas été motivée par les notions de responsabilisation gouvernementale que nous connaissons ici au Canada. Elle vise plutôt à contrôler la corruption à l'échelle locale. Quoi qu'il en soit, le gouvernement a fait d'importants progrès pour ce qui est d'assurer un certain niveau de responsabilisation dans le processus décisionnel gouvernemental.
    J'espère que ça répond à vos questions.
    Merci, monsieur Potter.
    Nous allons passer à M. Goldring. Il posera une question, et nous commencerons tout de suite par M. Chin.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Potter, vous avez dit que la majorité des cas d'abus pouvaient être justifiés par les autorités chinoises. Dans l'un de vos commentaires, vous avez affirmé que le fait que les avocats soient assez importants pour que le gouvernement sévisse contre eux constitue une amélioration, que c'est un progrès. Selon moi, c'est plutôt le contraire. Si la situation va en ce sens, elle met plutôt en lumière l'insuffisance perpétuelle de la discussion bilatérale sur les droits de la personne engagée entre la Chine et le Canada.
    Par ailleurs, M. Chin a également émis un commentaire selon lequel la Chine était plus en mesure d'aborder la discussion à ce sujet, je suppose, du point de vue des ententes internationales en matière de droits de la personne. Cependant, dans votre commentaire, vous précisiez qu'il en était ainsi lorsque les ententes étaient exécutoires, légitimes et efficaces. Peut-être pourriez-vous développer davantage, parce qu'il est certain que, dans ce contexte, ce que je comprends, c'est qu'il y a beaucoup de clauses conditionnelles et de lois sur les droits de la personne qui sont comprises partout dans le monde par la plupart des grandes collectivités.
    Quel est le problème ici, particulièrement en ce qui a trait aux préoccupations de la Chine relativement à la nature exécutrice, légitime et efficace? Que peut-on faire pour changer la discussion à ce sujet, pour peut-être remonter à la source du problème, soit le renforcement de la légitimité de certains règlements internationaux?

  (1620)  

    Merci, monsieur Goldring.
    Bien que votre question s'adressait à M. Potter, je vais demander à M. Chin de répondre. Je pense que vous aurez tous l'occasion de parler.
    Monsieur Chin, vos commentaires.
    Lorsqu'il est question des conventions des Nations Unies sur les droits politiques et les droits de la personne, je pense que vous êtes en mesure de voir en quoi la Chine n'a pas pleinement ratifié les conditions. Si on pense par exemple au recours à la peine de mort et à d'autres pratiques du genre, on peut voir que la Chine entreprend graduellement de limiter sa forte propension à recourir à la peine de mort.
    À ce propos, nous avons pu, par l'entremise d'engagements constructifs comme par exemple les programmes de l'ACDI en Chine, envoyer là-bas des spécialistes canadiens du domaine juridique, des gens qui pratiquent le droit, qui ont eu l'occasion de travailler avec leurs homologues chinois afin de les encourager à limiter le recours à la peine de mort, mais également de les aider à élaborer d'autres réformes pouvant être apportées au système judiciaire chinois. Vous avez là selon moi un type de collaboration bilatérale. À l'échelle internationale, c'est du côté des Nations Unies qu'il faut dégager des consensus et s'entendre sur les conventions à proprement parler. C'est là où je vois l'importance de la diplomatie, à ces deux niveaux: bilatéral, par l'entremise des programmes d'aide étrangère, et multilatéral, par l'entremise d'efforts diplomatiques.
    Merci, monsieur Chin.
    Monsieur Potter.
    Merci.
    Lorsque j'ai dit qu'on justifiait souvent les abus en invoquant le système judiciaire chinois, c'est vrai. Pour justifier par exemple l'emprisonnement de personnes comme Hu Jia, on invoquera les lois chinoises. Cela devrait nous inciter à la réflexion, si nous présumons que les textes de lois chinois, qu'ils portent sur les modalités applicables à la gouvernance transparente ou aux droits de la personne... La protection des droits de la personne a été prévue dans la constitution chinoise, mais on la qualifie en renvoyant au socialisme, qui sous-tend ensuite le pouvoir des partis et ainsi de suite. Le système judiciaire là-bas fonctionne différemment de ce à quoi nous pourrions nous attendre d'un système fondé sur la primauté du droit; on invoque souvent les lois pour justifier les abus. Toutefois, il s'agit là d'un changement important si on examine comment les choses se passaient il y a 20 ou 30 ans.
    J'aimerais revenir sur la question du rôle des avocats, que vous avez également soulevée. Il est moins facile de contrôler les avocats. Ils s'affirment davantage. Si on compare la situation à ce qui existait il y a dix ans, le gouvernement tient moins leur soutien pour acquis.
    Je ne vous ai pas parlé de mes antécédents au début de mon allocution, mais vous avez une copie de mon CV. Je ne m'éterniserai pas sur le sujet, mais j'étudie depuis très longtemps la question des tribunaux et des avocats chinois. Je peux vous assurer qu'il y a dix ans, les avocats chinois ne faisaient pas réellement partie de l'équation des droits de la personne en Chine, tandis qu'on les retrouve aujourd'hui au premier plan. Voilà pourquoi le régime a estimé qu'il était nécessaire de faire pression sur eux afin qu'ils restreignent leurs actions.
    D'un côté, il est regrettable que le régime réagisse ainsi — et c'est bien sûr ce que je pense — mais en même temps, on constate que la Chine accorde de plus en plus d'importance au droit, aux institutions juridiques et aux avocats. Cela témoigne d'une évolution systémique plus large, qui est issue des besoins internes de la Chine et des pressions politiques, économiques et sociales internes.
    Ce qui m'amène au dernier point. Je dirais que presque tous les changements progressifs que nous avons pu observer en ce qui a trait aux droits de la personne en Chine ont vu le jour en Chine tout en bénéficiant d'un appui discret à l'étranger. Lorsqu'une pression publique se fait sentir de l'étranger, autant le gouvernement que de nombreuses personnes en Chine réagissent en fermant la porte aux discussions et en disant: « Ne nous faites pas la morale. ». Mais lorsque les besoins se font sentir de l'intérieur, et lorsque la Chine reçoit un appui discret du Canada et d'autres pays, on voit naître le changement; c'est ainsi qu'ont vu le jour presque tous les changements positifs qui ont eu lieu au regard des droits de la personne. Alors j'estime que des discussions en fonction du contexte demeurent plus efficaces que la critique publique.

  (1625)  

    Merci, monsieur Potter.
    Monsieur Paltiel, vous avez au plus 30 secondes.
    Il y a deux choses.
    La première, c'est que l'infrastructure des droits de la personne en Chine découle de la condamnation initiale de ce pays par la sous-commission des droits de la personne des Nations Unies en 1989. Mais une fois que l'infrastructure a été établie —, elle a été établie par l'État pour défendre la Chine contre les contestations — elle s'est transformée en un conduit pour les normes et les pratiques associées aux droits de la personne, ce qui a permis d'intégrer les documents sur les droits de la personne aux usages chinois.
    Le fait que les audiences sur les projets de loi, les audiences publiques, fassent partie des pratiques chinoises depuis que la Chine a joint les rangs de l'OMC constitue un autre exemple du genre. La Chine s'est engagée auprès de l'OMC à tenir des audiences publiques sur les questions liées au commerce, mais cette pratique s'étend dans l'arène législative. Cela vous démontre comment les pratiques internationales influencent réellement la Chine.
    Merci, monsieur Paltiel.
    Pour terminer, nous souhaitons la bienvenue à M. Marston, qui siège au sous-comité des droits de la personne du présent comité permanent. C'est d'ailleurs en raison du rapport que le sous-comité a présenté que nous sommes réunis ici aujourd'hui.
    Monsieur Marston, bienvenue.
    Je ne m'attribuerai pas tout le mérite de ce rapport, monsieur le président, mais votre accueil est apprécié. Merci.
    J'étais à Pékin il y a environ un an et, pendant mon séjour, j'ai eu l'occasion de rencontrer un groupe de travailleurs qui renseignait des travailleurs agricoles sur leurs droits. J'ai été étonné; je ne m'attendais pas à être témoin d'une telle situation. On m'a alors dit que la disparition du « bol de riz de fer » créait une situation de pression, plus particulièrement dans le centre de la Chine.
    Je crois qu'il est nécessaire que les Canadiens comprennent le message qui nous est transmis aujourd'hui, à savoir que nous n'avons qu'une influence limitée dans ce contexte. J'ai entendu une proposition selon laquelle des investissements massifs aux fins du perfectionnement des compétences linguistiques au MAECI et à l'ACDI nous permettraient d'obtenir l'attention voulue et de transmettre les messages avec la subtilité dont vous parlez.
    D'autre part, pourquoi ne pas inclure le Berne Group et quelques ONG dans ce dialogue, soit dans le cadre des discussions elles-mêmes ou en parallèle à celles-ci?
    Souhaitez-vous adresser cette question à une personne en particulier?
    M. Chin parlait du Canada et des normes internationales, et je m'adressais à lui en quelque sorte.
    Monsieur Chin.
    Au départ, en vue de créer la plus grande marge de manoeuvre possible pour permettre aux ONG canadiennes d'agir en Chine, il importe d'établir des moyens qui permettraient à ces ONG d'établir avec leurs homologues chinois des rapports fondés sur la confiance — il faut leur faire de la place si on veut qu'elles soient en mesure d'agir. Il faudrait réfléchir longuement afin de déterminer qui seraient les partenaires du côté chinois.
    De son côté, pour l'accueil, le gouvernement chinois aura probablement recours à certaines organisations, comme celle qu'il appelle CANGO, l'association chinoise des ONG. Il s'agit d'organismes-cadres qui n'ont jusqu'ici jamais été pris au sérieux, mais ils ont subi des transformations intéressantes au cours des 15 dernières années. Ils ont assumé de nouveaux rôles au fur et à mesure qu'ils ont été appelés à concurrencer des ONG plus autonomes, pour ainsi dire. Il s'agit de l'entité-cadre approuvée par les Chinois.
    Donc, à l'étape initiale, il nous faudrait réfléchir à la façon d'établir des partenariats adéquats qui permettraient aux ONG canadiennes d'agir tout en bénéficiant de la confiance de leurs homologues chinois. Après, il faudrait appliquer une stratégie progressive en vue de laisser plus de place à la promotion indépendante ou autonome des droits.
    Merci, monsieur Chin.
    Monsieur Potter.
    Je vous remercie.
    La question de M. Marston m'amène à dire quelque chose que je crois que nous pouvons tous comprendre, et qu'il peut valoir la peine de répéter. Le gouvernement de la Chine n'est pas une organisation monolithique où les normes et les priorités sont toutes les mêmes. Le Parti Communiste de Chine étant l'unique parti, le gouvernement se trouve à regrouper des positions très diversifiées. Les objectifs sont très variés, et beaucoup d'éléments au sein du gouvernement chinois appuient l'intensification des efforts déployés pour favoriser ce que nous appelons les droits de la personne et une saine gestion. Pour concrétiser leur appui, ils utilisent différents mécanismes, entre autres dans le milieu des ONG et dans la société civile.
    Nous devons les encourager dans cette voie autant que nous le pouvons, tout en évitant que les personnes qui se trouvent dans le système se fassent critiquer parce qu'on croirait qu'elles sont trop assujetties à l'influence et au pouvoir des états étrangers. Ce n'est pas facile d'atteindre le juste équilibre, et c'est pourquoi je pense qu'il pourrait être très utile de cultiver davantage les liens entre les ONG canadiennes et chinoises.
    Il faudrait que ce soit bien géré et structuré, car nous ne voulons pas que ce soit perçu par la Chine comme une situation semblable à la Révolution orange, ce qui poserait vraiment problème pour le gouvernement. Toutefois, il serait utile que les organisations de la société civile aient une plus grande marge de manoeuvre grâce à des liens avec des organisations semblables au Canada. De tels liens pourraient réellement aider les personnes qui, en Chine, cherchent à faire valoir les principes et les pratiques que nous appuyons tous en matière de gestion et de droits de la personne.

  (1630)  

    Je vous remercie, monsieur Potter.
    Monsieur Paltiel.
    J'aimerais souligner la principale raison pour laquelle le gouvernement chinois tolère ou même encourage les activités des ONG. C'est que les emplois de fonctionnaire, ou « bol de riz en fer », comme on dit, sont moins courants qu'avant et qu'il n'y a pas de filet de sécurité sociale solide dans la conjoncture actuelle. On a fait appel aux ONG pour combler les lacunes qui existent dans une société de marché, et les ONG sont encouragées à faire le travail que le gouvernement ne peut pas faire lui-même.
    Ici, vous parlez même du filet de sécurité sociale? On demande aux ONG d'offrir un genre de système de secours?
    Oui.
    C'est intéressant.
    Je remercie nos invités. Malheureusement, l'heure prévue est terminée. Dans l'heure qui suit, nous entendrons le témoignage de deux autres personnes: M. Préfontaine et M. Frolic.
    Merci de nous avoir présenté votre point de vue. Cette information est pour nous d'une grande utilité. Que vous soyez en Colombie-Britannique ou avec nous ici à Ottawa grâce à la technologie, nous tenons à vous remercier. Vos témoignages nous ont réellement éclairés.
    Nous allons suspendre la séance pour quelques minutes pour que nos invités puissent quitter la salle et que les témoins suivants puissent s'installer.

    


    

    Mesdames et messieurs, nous allons reprendre la séance. Dans cette deuxième heure, nous allons accueillir M. Daniel Préfontaine, président du Centre international pour la réforme du droit criminel et la politique en matière de justice pénale à l'Université de la Colombie-Britannique. Nous avons aussi le plaisir d'accueillir M. Bernie Michael Frolic, professeur émérite à l'Université York.
    Il faut se garder un peu de temps pour les travaux du comité. Le comité de direction s'est réuni, et le compte rendu de la réunion devrait avoir été diffusé. Ce serait bien de pouvoir adopter ce rapport.
    Bienvenue à nos deux invités. Comme vous étiez ici pendant la première heure, vous savez comment nous fonctionnons. Nous allons commencer par M. Préfontaine.

  (1635)  

[Français]

    Bonjour, chers membres du comité.
    À titre de président du Centre international pour la réforme du droit criminel, j'ai le plaisir de vous remercier aujourd'hui d'avoir invité le centre international à partager avec vous son expérience en Chine et à vous faire part de ses commentaires sur les droits de la personne et l'évolution de la Chine au cours du XXe siècle.
    Je ferai ma présentation en anglais. Je serai à votre disposition afin de répondre à vos questions à la fin de ma présentation.

[Traduction]

    Monsieur le président, le Centre international a préparé un mémoire à l'intention du Comité. Ce document résume nos activités en Chine au cours des 13 dernières années, plus particulièrement en ce qui a trait aux droits de la personne, à la primauté du droit et à la justice pénale.
    Durant cette période, j'ai personnellement participé aux activités du Centre, et je peux vous dire que j'ai vécu une expérience extrêmement enrichissante même si la courbe d'apprentissage était parfois difficile.
    Comme beaucoup de Canadiens, je me demandais, lorsque je me suis rendu en Chine pour la première fois en 1985, comment il était possible de promouvoir nos valeurs dans un tel environnement. Je dois cependant vous avouer que, même si l'expérience a été fructueuse et intense, il a été difficile et parfois frustrant de mobiliser nos interlocuteurs chinois en raison de la langue. Nous ne parlions pas mandarin, et ils ne parlaient pas français ni anglais. Au fil du temps, nous avons pu atténuer certaines de ces difficultés. Le dialogue n'est possible que si une communication est établie, que ce soit grâce à de bons interprètes ou à une connaissance de la langue, surtout lorsque l'on veut aborder la question des droits de la personne.
    Nous sommes tous conscients, et il en est de même des homologues chinois que nous avons rencontrés, qu'il y a encore des violations très réelles des droits de la personne en Chine, malgré tous les progrès mentionnés jusqu'à maintenant. Cependant, comme l'ont dit certains avant moi, nous avons constaté que les Chinois avec lesquels nous travaillons sont motivés et souhaitent vraiment travailler dans ce domaine afin de faire changer les choses pour que personne n'ait à revivre ce que leurs parents ou grands-parents ont subi. Ils veulent que des efforts soient déployés pour faire respecter davantage la primauté du droit et les droits de la personne.
    Certes, le sens de ces termes ne fait pas l'unanimité, et parfois même dans notre pays. Cela est encore plus vrai en Chine, comme l'a mentionné M. Potter. Se fondant sur notre expérience, nous estimons que notre engagement auprès de nos homologues chinois donne de bons résultats, mais il faut poursuivre nos efforts et améliorer notre façon de faire.
    Puisque nous utilisons ce terme, il faut noter que le sens d'engagement varie selon les gens. S'engager est préférable à ne rien faire, à réprimer; il s'agit d'une forme d'accommodement. L'engagement, illustré par exemple par les projets de réforme du droit auxquels nous travaillons, doit être considéré comme un élément important de notre politique étrangère en général et de la coopération en matière d'aide au développement.
    À mon avis, nos objectifs en tant qu'organisme canadien en Chine sont d'appuyer la réforme des systèmes juridiques et judiciaires dans le but d'améliorer les droits de la personne. Il est préférable d'être sur place et de fournir un appui, que de se tenir à l'écart et d'opposer des objections, bien qu'il soit aussi important de formuler des critiques légitimes.
    J'aimerais maintenant vous parler brièvement du Centre afin de vous donner un peu de contexte. Le Centre a été créé en 1991 à Vancouver à titre d'organisme indépendant sans but lucratif. Il est officiellement associé aux Nations Unies conformément à une entente convenue entre le gouvernement du Canada et cette organisation. Notre mandat est assez vaste. Nous cherchons notamment à promouvoir les droits de la personne, la primauté du droit, la démocratie et la bonne gouvernance. Nous nous efforçons aussi dans la mesure du possible d'aider ceux et celles qui souhaitent appliquer des normes internationales, et non pas seulement les normes relatives aux droits de la personne.
    Nous possédons 17 ans d'expérience dans le domaine de la réforme des systèmes de justice pénale. Nous avons travaillé dans nombre de pays. Toutefois, selon moi, sans doute parce que j'y suis étroitement associé, le programme d'engagement et de soutien à l'appui de la réforme du système judiciaire et juridique en Chine représente notre plus grande contribution.

  (1640)  

    Nous avons franchi de nouvelles frontières en 1995 avec le lancement du projet de coopération sur la justice pénale entre la Chine et le Canada. Comme d'autres, nous avons d'abord travaillé auprès des établissements d'enseignement supérieur, mais nous avons été des pionniers dans le secteur de la justice pénale.
    Nous avons reçu des fonds de la Fondation Ford, lesquels provenaient en partie de l'Agence canadienne de développement international, afin d'aider, grâce aux conseils de spécialistes, les Chinois à étudier et à comprendre ce que suppose l'application dans leur pays des normes en matière de droits de la personne, plus particulièrement en ce qui concerne les modifications à apporter à la procédure pénale et au droit pénal, et à déterminer la mesure dans laquelle ils appliquent et souhaitent appliquer les normes découlant des conventions internationales.
    Notre programme a été renouvelé en 1997 pour une période additionnelle de trois ans. En plus de travailler avec deux établissements d'enseignement supérieur, nous avons établi un nouveau partenariat qui mettait à contribution entre autres la Société chinoise des prisons. Nos partenaires devaient examiner les violations des droits de la personne en prison, notamment trouver des façon de réduire les taux d'incarcération en étudiant les services correctionnels communautaires utilisés au Canada, si je peux m'exprimer ainsi.
    En 2000, nous sommes passés à autre chose, soit la ratification et la mise en oeuvre des conventions relatives aux droits de la personne. Enfin, de 2003 à l'été dernier, nous avons mené un programme d'une durée de quatre ans visant à mettre en application les normes internationales en matière de justice pénale.
    Par ailleurs, nous nous efforçons d'améliorer l'aide juridique. Les Chinois nous ont demandé de les aider à étudier les systèmes d'aide juridique des autres pays et à établir un programme national d'aide juridique, ce que nous avons fait. Grâce à nos efforts, l'Association du Barreau canadien et IBM Canada, sous la direction de l'ACDI, sont en train de mettre en place un système d'aide juridique en Chine, reliant un grand nombre de cliniques partout dans le pays. Des centaines de milliers de dossiers sont traités. Par rapport au Canada, la situation en Chine fait en sorte que les chiffres sont énormes.
    Nous avons lancé et poursuivons encore aujourd'hui un vaste programme auprès des procureurs chinois. Nous sommes un organisme clé en Chine, et à ce titre nous contribuons à la professionnalisation et au renforcement du Parquet populaire suprême de Chine et nous l'aidons à trouver de nouvelles façons de respecter les conventions internationales et de lutter contre le crime.
    Comme l'ont mentionné d'autres avant moi, nous connaissons l'évolution des systèmes juridique et judiciaire en Chine. Nous avons été témoins des changements effectués par le gouvernement depuis le milieu des années 1990 et des modifications apportées en mars 2004 à la constitution afin d'« inscrire » le principe des droits de la personne. Il faut faire attention, car la reconnaissance de ces droits dans la constitution chinoise n'a pas la même valeur que dans le cas de la Charte canadienne des droits et libertés ou de notre Constitution. Cependant, l'inclusion de ce principe est un pas important en vue de reconnaître que les droits de la personne doivent être respectés.
     En fait, nous constatons, par l'intermédiaire des personnes avec lesquelles nous travaillons, que le gouvernement chinois accorde une grande importance aux normes internationales relatives aux droits de la personne, car il s'agit d'un moyen d'aider la Chine à prendre sa place au XXIe siècle au sein de la communauté internationale. La Chine doit toutefois faire face à de nombreux problèmes. En raison de l'économie de marché libre, la corruption, le crime économique, le cybercrime et le trafic de drogues ont pris beaucoup d'ampleur comparativement à il y a 20 ou 30 ans, ou même dix ans. La situation nuit beaucoup à la mise en oeuvre des récentes réformes juridiques et judiciaires auxquelles la Chine travaille.
    Le Parquet populaire suprême de Chine s'est donné pour priorité de lutter contre la corruption. Dans le cadre de notre projet visant à appuyer leurs efforts, nous procédons à toutes sortes d'échanges d'information et à des voyages d'études. Nous leur présentons différentes approches pour combattre la corruption, que soit par la prévention ou par l'application de la loi. Or, il reste beaucoup à faire sur le plan de la prévention.

  (1645)  

    Je crois qu'il serait important que je présente quelques-unes des réformes substantielles qui ont été instaurées et sur lesquelles nous avons l'impression d'avoir eu une certaine influence. Les améliorations au régime d'examen de la peine de mort, qui ont entraîné une baisse considérable du nombre de condamnations à cette peine, sont plutôt remarquables. D'un point de vue statistique, le calcul peut se faire à la façon d'Amnistie Internationale ou à notre façon. La peine de mort existe toujours, mais on y a recours moins souvent et dans moins de cas.
    La protection accrue des droits de l'accusé au stade de l'enquête précédant l'instruction, qui découle des nouveaux pouvoirs de supervision que les procureurs exercent sur la police, est très importante. L'instauration de règles contre la torture et de règles d'exclusion de la preuve ainsi que l'enregistrement sur bandes vidéo des interrogatoires — j'en ai moi-même été témoin — sont des réformes très impressionnantes. Certains services de police d'ici pourraient peut-être en faire autant. On ne peut pas tout faire, mais on peut du moins en faire une bonne partie.
    Monsieur Préfontaine, puis-je vous interrompre un instant? Nous avons dépassé de deux minutes la période de dix minutes. Si vous pouviez résumer et conclure votre intervention pour que nous puissions passer au prochain...
     Bien sûr. Je me doutais bien que cela se produirait, car il y a tant à dire. C'est pourquoi je vous ai remis l'exposé.
    C'est un exposé très dense que nous ne manquerons pas de laisser à tous les membres pour qu'ils puissent eux aussi le parcourir. Mais pourriez-vous résumer et conclure votre intervention, s'il vous plaît?
    Laissez-moi donc terminer par la question de l'engagement. À la lumière des années d'exécution de programmes en Chine, nous voyons cinq raisons de croire que la collaboration avec ce pays dans le domaine des droits de la personne fonctionne et devrait se poursuivre. Premièrement, la Chine est déterminée à transformer son système judiciaire dans ses efforts pour se joindre à la communauté internationale. Elle est motivée. Deuxièmement, le changement en Chine est caractérisé par un équilibre entre les expériences endogènes (ce que les Chinois apprennent d'eux-mêmes chez eux) et les leçons tirées de l'expérience des autres, ce qui multiplie les possibilités d'engagement. Troisièmement, bien que les garanties juridiques et les droits de la personne soient marqués par des traditions différentes en Chine et au Canada, il existe suffisamment de domaines d'intérêt communs pour établir un dialogue fructueux sur les droits qui repose sur l'intérêt mutuel et l'apprentissage. Quatrièmement, les deux pays sont en mesure de concevoir, de gérer et d'entretenir une relation de coopération fondée sur le respect mutuel. Cinquièmement, la coopération entre les deux pays s'impose toujours plus à mesure que la mondialisation s'accélère.
    Enfin, nous poursuivons un objectif commun. Maintenant que le Canada a passé 25 ans à travailler et à intervenir là-bas, il perdrait plutôt un gros investissement s'il abandonnait ou ignorait cet objectif. Comme la répression est impossible, nous devrions opter pour l'engagement.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Préfontaine.
    Je passe la parole à notre prochain invité, monsieur Frolic.
    Je remercie le comité de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui. Je suis le dernier du long défilé de témoins que vous avez entendus aujourd'hui, et le tour de la question a déjà probablement été fait. J'espère toutefois que mes observations permettront de soulever quelques points nouveaux.
    Mes observations sont fondées sur mes échanges avec la Chine pendant plus de 40 ans. Beaucoup disent de moi, à tort ou à raison, que je suis le principal chroniqueur des relations bilatérales sino-canadiennes. Je me suis rendu en Chine pour la première fois en 1965, et j'ai travaillé pour l'ambassade du Canada à Beijing dans les années 1970. Depuis, je n'ai pas cessé de m'y rendre régulièrement pour la visiter ou pour y travailler.
    D'après mon expérience, le contraste entre la Chine actuelle et la Chine d'autrefois est vraiment remarquable. Je ne suis pas certain de pouvoir dire à quel point. Le développement économique est spectaculaire, les changements sociaux sont profonds et même les changements politiques sont notables. Il faut toutefois bien comprendre que la Chine d'aujourd'hui est caractérisée par une société et un système politique autoritaires, et que mes chances, peut-être même aussi les vôtres, d'y voir apparaître une démocratie à l'occidentale sont minces. Dans mes observations, je veux donc aborder plusieurs questions touchant le changement en Chine et notre politique à l'égard de ce pays. Enfin, je formulerai quelques recommandations en matière de politiques qu'il faudra prendre pour ce qu'elles sont.
    D'abord, nos relations bilatérales nous ont bien servis, mais il faudra les transformer sans tarder dans plusieurs domaines autres que la promotion des droits de la personne et de la démocratie. Mis à part la démocratie et les droits de la personne, nous devons revoir notre stratégie de commerce et d'investissement à long terme, car elle pose problème. Nous devons aussi prendre des décisions difficiles concernant la poursuite de notre aide au développement, sur sa forme et sa provenance, résoudre les désaccords fondamentaux en matière consulaire — l'affaire Celil — et resserrer nos formalités d'immigration.
    Deuxièmement, le système politique chinois se transforme tout au moins progressivement sinon radicalement. Le parti est plus transparent et ses membres plus instruits; il est plus professionnel, plus à l'écoute du monde extérieur et plus démocratique à l'interne. Ce sont les conclusions que je tire après avoir formé 2 500 membres du parti en gestion occidentale et dans d'autres domaines pendant les huit dernières années à Toronto. Nous avons aussi assisté au renforcement des institutions de l'État et du droit. Par exemple, le Congrès national du peuple, autrefois un corps législatif moribond, tient maintenant des audiences publiques sur les projets de loi. Son rôle dans le système politique est en expansion et son travail devient plus transparent.
    Il y a une dizaine d'années, j'ai écrit que la société civile était émergente en Chine, mais qu'elle était « dirigée par l'État ». Aujourd'hui, nous voyons naître des organisations populaires de la société civile dans les quartiers des grandes villes, où les propriétaires s'unissent pour lutter contre les promoteurs, les organismes de gestion des ensembles immobiliers et les autorités locales corrompues à l'aide des nouvelles lois.
    Un nouveau phénomène intéressant s'observe à Shanghai — la promenade à pied. Récemment, des milliers d'habitants sont descendus dans la rue et ont marché en silence pendant des heures en signe de protestation contre les politiques du gouvernement. Il existe 75 millions de blogues aujourd'hui en Chine, et il est impossible de les éliminer continuellement. La Chine compte aussi 100 millions de croyants, ce qui constitue une révolution religieuse importante malgré les limites qui lui sont imposées.
     Le verre est-il à moitié vide ou à moitié plein? Les témoins du despotisme bien enraciné, des violations des droits de la personne — notamment chez les Tibétains et les Ouïgours —, le voient à moitié vide. Ceux qui reconnaissent qu'il nous a fallu des centaines d'années pour mettre en place la démocratie sont un peu plus optimistes. À mon avis, le verre est à moitié plein.
    Troisièmement, c'est le parti qui contrôle, et son autorité est acceptée par la majorité des Chinois. Il ne faut pas s'attendre à une chute du Parti communiste semblable à l'effondrement de l'Union soviétique. J'ai vécu en Union soviétique dans les années 1980, au moment de la chute du Parti communiste, ce qui me permet de percevoir les différences. Le parti d'aujourd'hui, qui compte 73 millions de membres, est plus fort que jamais. Sa légitimité est assurée par un grand compromis qu'il a fait avec la population. Tant qu'il fournira les biens économiques, la population laissera la gouvernance entre ses mains. Les sondages d'opinion publique en Chine confirment cet appui. Cela convient à la nouvelle classe moyenne, qui représente 200 millions d'habitants. Le maître mot est « stabilité », car tous se rappellent ce qui s'est produit en Union soviétique dans les années 1990. Le parti a bien sûr ses faiblesses, surtout sur le plan local, dans les régions rurales où la corruption des autorités est répandue.
    Quatrièmement, la diplomatie dure — couplage, sanctions, blocus, politique du haut-parleur — n'a pas réussi à transformer l'attitude de la Chine en matière de droits de la personne.

  (1650)  

    En 1989, la Chine a fait la sourde oreille après que nous avons exprimé notre désapprobation et demandé des excuses à Beijing. Elle n'a pas réagi davantage vis-à-vis des autres pays qui l'ont sanctionnée. Les États-Unis, plus insistants que le Canada sur les droits de la personne, condamnent fortement et régulièrement les actions de la Chine dans ce domaine depuis des années. Toutefois, on n'a observé aucun changement concret ou durable découlant de la politique américaine. La confrontation n'a pas eu de résultats positifs visibles. À mon avis, le dialogue est la meilleure voie à suivre. Cette voie a toujours été plus efficace que l'isolement et la confrontation.
    Cinquièmement, en raison de la forte population, de la longue histoire et de la culture d'autoritarisme politique de la Chine, il est peu probable que ses valeurs, ses institutions et ses pratiques politiques changent rapidement. Pour nous, la démocratie et les droits de la personne sont des valeurs universelles. Nos valeurs axées sur l'individu, fondement de notre démocratie, et sur ses droits, notamment en ce qui a trait à la propriété privée, à la protection par la primauté du droit, à la représentativité des institutions et à la responsabilisation des dirigeants, sont les conséquences logiques de notre histoire. Ce sont des valeurs dont nous sommes fiers. La Chine a beaucoup de chemin à parcourir avant d'être en mesure de prôner les valeurs occidentales et de mettre en place des institutions qui les appuient. À court terme, il nous faudra peut-être composer avec une puissance économique mondiale autoritaire qui se dirige timidement vers le pluralisme politique, sinon vers la démocratie.
    Je ferai maintenant quelques recommandations en matière de politiques.
    Tout d'abord, il faudrait relancer les pourparlers bilatéraux en matière de droits de la personne, mais de façon différente, en ouvrant le processus afin de permettre une plus large participation des intervenants canadiens. Le processus a jusqu'ici été restreint à quelques bureaucrates et à quelques organisations des hautes sphères gouvernementales. Pour ce faire, il faudra trouver des interlocuteurs chinois qui ont un intérêt plus direct dans la démocratisation. Il faut s'inspirer des Américains, qui s'apprêtent à reprendre le dialogue sur les droits de la personne avec Beijing; je crois d'ailleurs que c'est chose faite depuis hier. Il faut que nous sachions comment ils s'y prennent, pourquoi ils ont repris le dialogue et ce qu'ils font exactement.
    Deuxièmement, il faut appuyer l'établissement d'une base pour la démocratie — c'est ce qui est ressorti des travaux de notre comité ou sous-comité l'an dernier —, mais avec plusieurs mises en garde. Je reconnais qu'une telle entreprise est coûteuse, qu'il serait dangereux de la centraliser et de la bureaucratiser, qu'il faudra beaucoup de temps avant que la base soit fonctionnelle, qu'il s'agit d'une entreprise très ambitieuse qui exige beaucoup de fonds publics. Ce sont là de sérieuses préoccupations. Quel rôle important pourrait jouer un intervenant tardif comme le Canada? N'est-ce pas un peu présomptueux de notre part? Le National Endowment for Democraty, fondation américaine axée sur la démocratie, a été créé il y a 25 ans. Soyons réalistes : que pourrions-nous faire que tant d'autres n'ont pas fait pendant 20 ans ou plus, malgré des budgets qui se chiffrent aujourd'hui en milliards de dollars?
    Troisièmement, il faut organiser, regrouper et élargir nos projets dans les domaines des droits de la personne, de la primauté du droit et de la gouvernance, projets actuellement en cours en Chine, sous l'égide, entre autres, de l'ACDI, du CRDI et du MAECI. Ce sont des programmes peu coûteux, centrés sur la formation des ressources humaines et le développement institutionnel. En voici quelques exemples : collaboration avec la Central Party School pour l'amélioration de la gestion de l'environnement; mise en oeuvre du programme quinquennal visant à renforcer la capacité législative de la Chine à l'échelle nationale et à l'échelle provinciale; formation juridique offerte aux juges; organisation de séances pratiques d'aide juridique — nous en avons entendu parler — et projets visant à faire vivre, à de hauts fonctionnaires chinois, l'expérience de la gestion canadienne.
    Quatrièmement, il faut élargir la participation de la société civile canadienne et favoriser l'ouverture. C'était l'une des principales recommandations du rapport de juillet 2007 à ce comité. Quelques suggestions en ce sens : organiser chaque année une série de séminaires de leadership de deux ou trois semaines partout au Canada avec de jeunes leaders chinois et leurs homologues canadiens, afin de faire connaître aux chinois les valeurs et le mode de vie canadiens. C'est ce que fait le programme Draeger-Stiftung en Europe de l'Est depuis 20 ans.
    Maintenant que la pratique religieuse est mieux acceptée en Chine, nous devrions promouvoir des échanges plus actifs entre les Chinois et leurs homologues canadiens. Les activités caritatives sont un domaine prometteur. Des organisations religieuses taïwanaises ont établi une bonne collaboration dans ce domaine.
    Il faut renforcer la coopération entre médias chinois et canadiens. Dans nos programmes, à l'Université York, nous avons collaboré avec CCTV, Beijing TV, des télévisions et des journaux de Chongqing et les médias de Chengdu. Ces médias ont, par la suite, tissé des liens avec des médias canadiens.
    La participation de groupes militants violemment opposés au gouvernement chinois est un sujet délicat. Le défi consistera à trouver le moyen d'inscrire leurs activités dans un contexte axé sur l'engagement positif plutôt que sur la confrontation.
    Cinquièmement, il faut établir des liens sur le plan ethnique et multiculturel. Compte tenu de l'expérience du Canada avec ses propres minorités ethniques et de nos politiques multiculturelles de longue date, pourquoi ne pas encourager l'échange de points de vue canadiens et chinois sur l'autonomie culturelle? Un programme de ce type existe entre nos Premières nations et des peuples autochtones taïwanais depuis plusieurs années. J'ai lancé cette idée aujourd'hui —juste avant de venir ici — à l'ambassade de Chine. J'ai mentionné le Tibet et ils n'ont pas vraiment adhéré à l'idée, mais au moins, ils m'ont écouté.

  (1655)  

    Sixièmement, il faut avant tout mettre l'accent sur le renforcement de la démocratie. La démocratie d'abord, puis les droits de la personne. La démocratie pose le contexte — primauté du droit, renforcement des institutions et bonnes pratiques de gouvernance — qui favorisera par la suite le respect des droits de la personne. Le respect des droits de la personne passe par un système fonctionnel de primauté du droit.
    Le renforcement de la démocratie et des droits de la personne est une entreprise holistique. L'établissement des bases de la démocratie doit être le premier objectif. Les droits de la personne suivront. Il faut surtout garder à l'esprit qu'on ne doit pas s'attendre à des miracles.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Frolic et monsieur Préfontaine. Merci sincèrement pour votre témoignage, et particulièrement pour la clarté de vos recommandations. Votre intervention était plus qu'un simple témoignage; vous avez tenu des propos convaincants.
     Merci également, monsieur Préfontaine, pour votre récapitulation.
    Nous allons donner la parole à M. Patry et à M. Chan. Ou peut-être pouvons-nous poser les deux questions avant d'entendre nos invités.

  (1700)  

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup, messieurs.

[Traduction]

    Monsieur Frolic et monsieur Préfontaine, j'ai lu vos exposés respectifs et je dois dire qu'ils sont très intéressants. J'irai droit au but.
    Votre exposé, monsieur Frolic, comporte six recommandations. La quatrième porte sur l'élargissement de la participation de la société civile canadienne. Dans le premier paragraphe, vous écrivez que le manque de transparence constaté par le passé est considéré comme un point faible. J'aimerais que vous développiez ce point de vue.
    Voici ma deuxième question. Nous savons qu'un changement politique important s'opère en Chine — il n'y a aucun doute à ce sujet. Même le témoin qu'on vient d'entendre dit qu'il n'y aura pas d'élections au plus haut niveau avant longtemps. Le capitalisme est toutefois présent et on observe une amorce de démocratisation, si on peut dire, dans certains domaines.
    Qu'en est-il des droits de la personne? J'aimerais que vous développiez un peu la question des droits de la personne avant de terminer. Qu'est-ce qui, selon vous, prime : les droits de la personne ou la démocratie?
    Monsieur Chan.
    Merci.
    Je suis heureux de vous voir encore une fois, tous les deux, intervenir dans ce domaine.
    Quand vous répondrez à la question de mon collègue, monsieur Préfontaine, peut-être pourriez-vous apporter davantage de précisions, en indiquant comment la réforme du système judiciaire a influencé la vie des citoyens ordinaires en Chine. Comment le Chinois moyen a-t-il bénéficié de la réforme judiciaire que nous avons aidé à mettre en place?
    Par ailleurs, monsieur Frolic, vous parlez de la réforme démocratique, du changement qui se produit en Chine. Pourriez-vous apporter des précisions sur les types de changement qui se sont produits et nous dire comment vous pensez que la situation va évoluer à court ou à moyen terme, si ces changements se poursuivent?
    Merci, messieurs Chan et Patry.
    M. Frolic a maintenant la parole.
    Merci beaucoup, monsieur Patry.
    J'ai dit que le manque de transparence dans le passé était une faiblesse. Je parlais du rapport, qui, en quelque sorte, portait sur un large éventail de sujets. Je crois qu'il faut ici ouvrir davantage le système. Je ne sais toutefois pas trop de quel rapport il s'agit, mais je dirais le rapport Burton.
    J'ai senti dans ce rapport, que je n'ai pu lire que tout récemment puisqu'il n'était pas facilement accessible, que les gens comme moi ne connaissaient rien de ces dialogues sur les droits de la personne — et cela ne fait que 40 ans que je travaille dans ce domaine. Je n'avais pas nécessairement quelque chose de si profond à dire, mais je sentais du moins que le groupe d'intervenants était un peu trop restreint et que nous devions en élargir l'étendue.
    Il y a toujours un risque. Je sais pourquoi ils ont agi de la sorte. Ils craignaient d'attirer des groupes de revendication susceptibles de perturber le processus. Mais je pense qu'il s'agit d'un véritable défi. Comment inclure certains groupes et décider qui exclure? Nous avons été exclus, je pense. Je ne veux pas dire que je devrais être inclus, mais il serait bon d'élargir la base de participation.
    Pour ce qui est censé être la priorité, je crois avoir été assez clair à ce sujet. Je ne pense pas qu'il soit possible d'instaurer des droits de la personne sans avoir de régime politique efficace en place, un régime dont la culture politique est déjà changeante — ce qui n'est pas le cas de la Chine, puisqu'il s'agit toujours d'une culture politique autoritaire —, où les gens commencent à respecter les droits de la personne, ce qui ne s'est pas produit en Chine.
    La politique et la loi mettent principalement l'accent sur le droit qu'a la personne d'accéder à la propriété et de défendre ce droit — de se défendre elle-même et sa propriété en général — et d'être protégée par la loi. Il faut une infrastructure pour garantir ce droit avant d'envisager de donner plus de droits politiques individuels. Il n'est pas possible de faire respecter ces droits sans ce type de valeurs et d'institutions. Voilà ce que je voulais dire.
    Merci, monsieur Frolic.
    Monsieur Préfontaine.
    Puisque cela touche chaque citoyen, il faut étudier la façon dont les différents organes de la justice, comme on les appelle en Chine, ont changé la façon dont ils font leur travail ainsi que le type de professionnalisation qui a lieu à la Cour suprême populaire de Chine. Il y a 20 ans, 10 ans, très peu de gens avaient une formation juridique; maintenant, presque tous ont une formation... pas tous, en raison du maintien des droits acquis pour ce qui de la qualité des juges et des procureurs. On voit l'évolution de la professionnalisation lorsque l'on remarque qu'il y a 120 000 juges qui sont à deux doigts de terminer une formation juridique, ou qui en recevront une dans les cinq prochaines années, qu'il y a environ 140 000 procureurs qui auront eux aussi une formation juridique et des diplômes en droit, en d'autres mots, et lorsque l'on remarque qu'il y a 160 000 avocats — peu importe les commentaires au sujet des avocats — qui assurent le respect et l'exécution des lois qui sont créées. Cela entraîne une réaction des institutions.
    Donc, nous avons tenté de leur indiquer, pour le compte du Canada, ce que les autres pays font et les éléments fondamentaux dont il faut tenir compte, de les renseigner et de leur montrer notre façon de faire, la nature de notre système de valeurs et nos codes d'éthique. Cela comprend le travail du Barreau canadien avec la profession juridique et le travail du National Institute of Justice avec les juges, notre travail auprès des procureurs et le travail des parlementaires, tel que mentionné, avec le comité des questions de droit et de justice de la Chine sur la façon de légiférer et de rédiger des lois pour qu'elles puissent être interprétées correctement.
    Prenons par exemple l'histoire que j'ai mentionnée dans le mémoire, qui compare la situation de 1999 à celle d'aujourd'hui. En 1999, il y avait 600 centres d'aide juridique en Chine, qui traitaient environ 60 000 cas par année et conseillaient approximativement 800 000 personnes sur le droit des procédures criminelles et le droit applicable aux avocats. Les données les plus récentes, obtenues en 2006, montrent qu'ils ont traité 318 514 cas et conseillé 3 193 801 personnes. Ce sont les statistiques de la Chine.
    L'aide juridique, en soi, avec l'aide du Canada — puisque nous avons été les premiers là-bas à instaurer un système national d'aide juridique — touche les citoyens, les groupes vulnérables et les femmes victimes de violence. De nombreux efforts sont déployés contre la violence faite aux femmes, pour la protection des enfants, etc.

  (1705)  

    Merci, monsieur Préfontaine.
    Nous allons maintenant donner la parole à Mme Barbot.

[Français]

    Vous disposez de sept minutes.
    Merci.
    Professeur Frolic, vous avez parlé du dialogue et avez cité le rapport Burton. De façon plus spécifique, vous demandez un processus transparent et, en même temps, vous dites que le gouvernement canadien ne fait pas preuve de transparence. Vous avez bien expliqué que certains groupes auraient dû être impliqués mais ne l'ont pas été.
    J'aimerais savoir ce qui se passe du côté chinois. Comment le travail de dialogue qui s'est fait a-t-il été reçu, et quelle influence le Canada a-t-il vraiment afin de changer les choses? J'ai posé cette question aux autres invités avant vous. Je comprends qu'on le fait dans la partie légale, mais une fois que les lois sont faites et que les gens sont formés, il faut encore faire un pas pour s'assurer que les gens qui vont en justice ont un traitement conforme, ou plus ou moins conforme, à ce que nous appelons la démocratie. Je comprends les contraintes de la Chine, mais j'aimerais connaître les résultats concrets et savoir comment les Chinois, le vrai monde, répondent à cela. J'aimerais aussi savoir de façon précise comment le Canada pourrait changer sa façon de faire, s'il y a lieu qu'il la change.

[Traduction]

    Merci, madame Barbot.
    Monsieur Préfontaine, nous avons sept minutes pour la question et la réponse.
    Je pensais qu'elle vous était adressée.
     Bien, peu importe la personne. Je crois qu'elle veut les deux.
     Désolé, je m'excuse.
    Je pense que c'est une démocratie et que l'aspect juridique l'emporte donc.
    Je tiens d'abord à parler un peu du rapport Burton. Je l'ai finalement lu, après ne pas l'avoir vu pendant longtemps et avoir entendu toutes sortes de commentaires à son sujet, et après en fait avoir lu la transcription des audiences du présent comité sur la question. Il est intéressant de noter que le rapport Burton adresse des critiques beaucoup moins dures que les commentaires présentés par Burton dans les audiences.
    Lorsqu'on lit le rapport, on s'aperçoit qu'il est très logique. D'excellentes mesures ont été prises, mais il y a certains problèmes que nous devons régler. Par exemple, nous souhaitons élargir la base de participation des deux côtés, cibler davantage notre discussion, aborder des sujets plus clairs qui nous permettent de dialoguer véritablement, peut-être déterminer s'il faut qu'un autre organisme fournisse des services complémentaires au MAECI, et des deux côtés retirer les ministères des affaires étrangères du dossier et ainsi de suite.
    Comme je l'ai dit, j'ai participé à une réunion de quelques heures avec le chargé d'affaires de l'ambassade de la Chine et je lui ai parlé du dialogue sur les droits de la personne. J'ai dit: « Je vais bientôt présenter un témoignage à ce sujet. Que pensez-vous de ce dialogue? Est-il inutile? Souhaitez-vous le poursuivre? » Il a été très ouvert et a déclaré: « Nous pensons qu'il s'agit d'un processus positif. Nous avons appris beaucoup du Canada. » Voilà leur point de vue.
    Ça vaut ce que ça vaut. Il s'agit d'une discussion officielle, bien entendu, que les autres représentants peuvent entendre. Mais, essentiellement, ils ont beaucoup appris du Canada. Ils ont bénéficié de l'expérience du Canada à certains égards. Ils pensent, si cette expérience va se poursuivre, qu'il faut une préparation adéquate pour mieux définir les sujets. Cela a été utile pour la Chine et elle a tenu ce type de dialogues avec d'autres pays; ils ne leur sont pas inutiles. Ils ont changé les choses. C'est leur point de vue. Ils ne m'ont pas trop donné de détails.
    Il m'est difficile de parler des résultats tangibles du dialogue en Chine puisque je n'y ai pas participé, mais je peux m'exprimer à propos de ce qu'a dit plus tôt Raymond Chan, c'est-à-dire qu'il y a des changements énormes dans certains domaines, peu importe qu'il s'agisse d'accroître la capacité du parlement de la Chine ou de sensibiliser le parti à une transparence accrue. Nous pouvons leur parler, nous pouvons en fait parler assez régulièrement aux hauts dirigeants de la Chine, ce qui était impossible auparavant.
    Il reste à savoir si nous pouvons les influencer afin qu'ils agissent d'une façon qui nous convient. Comme les gens à l'ambassade l'ont dit aujourd'hui: « Ne nous dites pas ce que vous voulez. Nous ne voulons pas que vous nous disiez quoi faire dans notre pays — nous allons faire nos propres choix —, mais nous sommes prêts à vous écouter. Et si vous pouvez nous aider à nous améliorer dans certains domaines, tant mieux. »
    La société civile m'étonne toujours et elle s'est ouverte énormément en Chine dans différents domaines. Le tremblement de terre survenu récemment est un bon exemple. Des personnes partent de Shanghai, parcourent 2 000 kilomètres en voiture et utilisent ensuite ce précieux véhicule, dans lequel elles ne laissent personne monter parce qu'il est flambant neuf, pour transporter des gens entre les sites touchés par le tremblement de terre. Certaines personnes font don de montants énormes à cette cause. Il y a tant de gens qui y vont. Il y a les carnets Web, les courriels, etc. Je reçois tant de choses de mes étudiants chinois et d'autres personnes à ce sujet. C'est une expérience extraordinaire.
    Les médias sont plus ouverts, mais il va y avoir de nouveau un recul. Le régime ne va pas permettre aux médias d'être si ouverts pendant très longtemps. L'ouverture des médias est toutefois, comme on l'a mentionné plus tôt, un grand changement en Chine. Le pays est plus ouvert. Mais cela ne ressemble certainement pas à nos médias, bien qu'ils causent parfois eux aussi des problèmes. On déforme tout le temps mes propos dans The Globe and Mail, mais c'est une toute autre histoire.

  (1710)  

    Merci.
    Monsieur Préfontaine.
    À partir d'une réflexion politique sur ce qu'est un État et sur son type de cadre constitutionnel ou de système judiciaire, vous pouvez alors commencer à comprendre la manière dont c'est utilisé. Lorsqu'il est utilisé, les principes démocratiques seront peut-être pris en compte et peut-être ne le seront-ils pas, parce que le système judiciaire, la règle de droit, peut être aussi accablant que réfléchi et clément. Je veux dire dans la mesure où vous prêtez attention à ce que la loi dit, où vous vous conformez à ses dispositions et où vous vous inspirez de la manière dont les tribunaux l'interprètent. Dans ce sens, qu'est-ce qui vient en premier, une forme de gouvernement démocratique ou un système de droit qui mène à des formes de gouvernement plus démocratiques? Nous disposons d'un ensemble de normes internationales et c'est le chemin que nous semblons tous emprunter. Même au Canada, nous avons parfois des problèmes avec certaines normes internationales. De quelle manière les appliquons-nous au jour le jour?
    Je proposerais que nous collaborions de plus en plus avec les intervenants. Les intervenants sont comme nous; ce sont des personnes qui ne souhaitent pas toutes écraser les autres. Je crois que, si vous amenez les gens à voir ce qui est bien, en ce qui concerne leur situation, vous obtiendrez certains résultats comme ce que nous voyons actuellement, selon moi, en Chine, et plus de respect pour la personne accusée lorsqu'elle est arrêtée, moins d'oppression de la part de la police. Mais vous verrez également les exceptions habituelles. Vous verrez des mesures de répression, parce que nous en avons, et de toutes sortes. Je ne suis pas en train de dire que nous sommes comme la Chine pour ce qui est de la façon dont nous traitons les groupes religieux ou autres; ce n'est pas ce dont je parle. Je dis que, parfois, vos lois doivent aller beaucoup plus loin que ce que vous voudriez et au-delà de vos contraintes constitutionnelles. Mais les tribunaux vous imposent des limites et, à ce chapitre, les nôtres fonctionnent, je crois, probablement mieux pour nous que pour les autres.

  (1715)  

    Merci, monsieur Préfontaine.
    Nous accordons la parole à un député ministériel, M. Khan, puis à M. Goldring.
    Monsieur Khan.
    Merci, monsieur le président.
    Je poserai quelques questions très brèves et je vous laisserai le temps d'y répondre.
    Monsieur Préfontaine, au cours de vos années de travail en Chine, pouvez-vous nous dire quel est le plus grand progrès et le pire progrès que vous avez observés en matière de droits de la personne? Et avez-vous constaté un progrès émanant d'une initiative canadienne?
    Monsieur Frolic, puisque le Canada n'a pas beaucoup de poids en Chine, comme certains des témoins l'ont déclaré, d'après vous, quel est le moyen le plus efficace de sensibiliser la Chine à l'égard des droits de la personne, pour promouvoir le progrès? J'aimerais également, monsieur, obtenir vos commentaires sur la manière dont la croissance rapide de la classe moyenne en Chine, alors que celle-ci s'intègre à l'économie mondiale, influera sur les questions en matière de droits de la personne? Est-ce réaliste de penser qu'un simple pays puisse apporter un changement à ce sujet dans un pays aussi puissant que la Chine? N'importe lequel de vous deux peut répondre.
    Ces trois questions sont assez simples et concises; je ne pense pas qu'il faille beaucoup de temps pour y répondre.
    Nous commencerons par M. Préfontaine, rapidement.
    Eh bien, le Canada s'est rendu là-bas avec d'autres pays — les États-Unis, l'Australie, l'Allemagne et le Royaume Uni, pour n'en nommer que quelques-uns. Étrangement, nous avons joué un rôle très actif. Peut-être est-ce en raison du type de rapport que nous entretenons avec les Chinois depuis plus de 25 ans, et peut-être plus parce que nous avons été invités et que nous leur avons expliqué notre manière de mener des affaires et de faire les choses, et ils nous ont écouté. Vous ne vous rendez pas compte de cela immédiatement. Vous vous en rendez compte après deux ans ou plus tard.
    À titre d'exemple, nous avons réuni un groupe de procureurs principaux là-bas pour travailler auprès de leur groupe de lutte contre la corruption au sein du Parquet populaire suprême. Ils ont examiné notre modèle d'exécution intégré, la manière dont la GRC travaille avec les organismes frontaliers et divers ministères, etc. Je me suis aperçu, deux ans plus tard, au cours d'une conversation impromptue, qu'ils étaient allés de l'avant, qu'ils avaient fait des recommandations à ce sujet et qu'ils avaient adopté le modèle, mais l'avaient adapté à leurs besoins. Ce n'est pas si mal. Alors un petit pays comme...
    Au Canada, nous savons de quoi il en retourne. Nous avons été le premier organisme étranger — étranger pour eux — à travailler à une réforme de la justice, plus particulièrement en ce qui concerne la mise en œuvre de normes relatives aux droits de la personne. Nous avons publié des livres. En 1998, nous avons publié un recueil de normes en matière de droits de la personne. Nous avons produit des volumes qui sont diffusés maintenant. Le recueil a été distribué à environ 220 000 procureurs, juges et universitaires en Chine. Alors, nous avons une influence sur le cours des choses à ce sujet.
    De quelle manière pouvez-vous mesurer cette influence? C'est une question difficile. Dans notre monde de la gestion axée sur les résultats, ce n'est pas facile d'avoir des résultats prévisibles et de toujours avoir des indicateurs qui y correspondent dans ce contexte. Ce que vous pouvez constater, par contre, si vous voyagez et faites des séjours, c'est que certains changements se produisent. Vous voyez dans les journaux des choses que vous n'aviez jamais vues auparavant sur des procureurs et des juges qui se débarrassent de certaines affaires. On se préoccupe maintenant des personnes injustement déclarées coupables. Qui aurait pu croire, il y a cinq ans, que cela serait possible?
    Continuez, monsieur Frolic.

  (1720)  

    Voilà beaucoup de questions. Voyons voir si je peux répondre à certaines.
    Pour les progrès au chapitre des droits de la personne, je pense, d'une certaine manière, que c'est dans le domaine du droit que nous avons accompli le plus de choses: le droit, l'aide juridique, etc. C'est vraiment impressionnant, et nous avons travaillé là-dessus pendant 20 ans. Donc, il reste à établir dans quelle mesure vous pourriez évaluer les effets, mais d'après moi, ils sont importants.
    La société civile représente un autre secteur. Nous avions un petit programme administré par l'ACDI pendant près de 10 ans, subventionné par le Fonds canadien. Nous avons donné 25 000 $ ou 30 000 $ par année à des organisations chinoises de la société civile, qui interviennent dans divers domaines: la lutte contre le SIDA, l'environnement, la situation des femmes, le chômage et le vieillissement. Et ce même si le gouvernement chinois n'est pas vraiment d'accord. C'est possible, parce que nous fournissons cette aide directement aux organisations de la société civile, malgré le fait que notre gouvernement, celui du Canada, ne soit pas d'accord, parce que nous ne sommes pas sûrs de contrôler ce qui se passe exactement. En règle générale, vous pouvez constater que des progrès naissent de tout ce que nous faisons dans le domaine socioéconomique, qui fait partie des droits de la personne.
    En ce qui concerne les droits civils et politiques, cela reste beaucoup plus difficile.
    Pour ce qui est du peu de poids du Canada en Chine, je suis d'accord avec mon collègue. Nous avons déjà joué un rôle important en Chine. Nous avons été un aspirant, comme aurait dit Marlon Brando. Mais regardez où nous en sommes maintenant. Ce n'est pas en partie attribuable à une anomalie d'une politique gouvernementale. La Chine est tout simplement devenue très grande et très puissante, ce qui n'est pas notre cas. Très lentement, au cours des 20 dernières années, et ceci n'a rien à voir avec les droits de la personne, notre rôle dans le monde a changé. Nous ne sommes plus vraiment à la hauteur. Nous ne jouons plus dans la cour des grands, si je puis dire.
    Alors, pouvons-nous influer sur ce qui se passe en Chine? Eh bien, manifestement, dans les circonstances actuelles, nous ne pouvons rien faire. En ce moment, nous ne sommes pas un acteur important en Chine. Les échelons supérieurs au sein du gouvernement et les nôtres entretiennent un rapport difficile. Les choses changeront, espérons-le. Que nous le fassions aux échelons intermédiaires et inférieurs — pour reprendre les paroles de Pitman Potter qui disait précédemment qu'il y a de nombreuses Chines et qu'il n'y a pas seulement l'échelon officiel —, ça serait une possibilité. Quelles seraient les répercussions de notre travail avec nos homologues des échelons intermédiaires et inférieurs, nous le savons pas. Mais nous pouvons le faire.
    De quelle manière pouvons-nous nouer un dialogue sur les droits de la personne? Eh bien, je pense que nous devrions restaurer le dialogue à l'échelon supérieur. Je pense que nous devrions faire en sorte que nos ONG et nos groupes de la société civile participent davantage au processus avec leurs homologues. Ça ne sera pas facile. Je crois que nous devrions mettre sur pied des programmes à caractère social comme ceux que nous avons déjà et qui sont gérés par l'ACDI et le CRDI, etc. Ces programmes ont réellement des incidences. Certains d'entre eux ont financé notre centre.
    Voilà mes réponses à vos questions.
    Merci pour ces réponses.
    Je reviens à M. Marston, mais je rappelle au comité que nous avons un très bref point à l'ordre du jour, soit l'adoption du rapport du comité directeur, ce que nous cherchons à faire vers 17 h 30.
    Monsieur Marston.
    Merci, monsieur le président.
    Deux noms me viennent à l'esprit : le Dr Bethune et le Dr MacKay à Taiwan. Ces deux hommes ont eu beaucoup d'influence dans un — et certains ne seront pas d'accord ici — pays.
    Vous avez mentionné que l'ACDI finance certains organismes là-bas. L'un de ces organismes dont je parlais avec nos derniers témoins était un groupe qui offrait aux travailleurs agricoles des conseils concernant leurs droits. En arrivant sur les lieux, j'ai vu une affiche et je me suis dit que la personne ressemblait à mon ami... Je ne le nommerai pas, mais cela ressemblait à son genre de projet. Il était allé en Chine pour participer à ce programme de ses propres moyens.
    Il y a beaucoup de gens qui oeuvrent en Chine sans que nous le sachions.
    Le dialogue est un outil. Si l'on s'en tient à cela, selon moi, nous nous engageons dans un processus très long. Je crois que le Canada a un important rôle à jouer en raison du respect entre les deux pays. Il lui arrive parfois de rester invisible, mais il est toujours là. J'ai déjà parlé du fait que je croyais qu'il fallait investir dans l'ACDI et le MAECI et ajouter des compétences langagières.
    L'autre aspect qui me préoccupe est la mémoire institutionnelle à long terme. J'ai remarqué que nous avons la même couleur de cheveux vous et moi. Le Canada a beaucoup d'expertise en la matière et il compte beaucoup de gens qui ont investi beaucoup de temps là-bas. Ce qui m'inquiète, c'est la façon de recueillir et de retenir ces renseignements et de les utiliser dans nos organisations.
    Merci, monsieur Marston.
    Monsieur Frolic.
    Je suppose que c'est à moi de répondre d'abord, étant donné que j'ai une tête blanche.
    Tout d'abord, certains diront que les cheveux blancs ne marquent pas l'expertise, mais indiquent plutôt que l'on devrait être à la retraite et faire autre chose. Ils pourraient dire qu'ils tentent de mettre au point une nouvelle politique et qu'ils n'ont pas de temps pour les gens d'autrefois, ce qui pourrait avoir été le cas jusqu'à présent. C'est seulement mon propre point de vue.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Bernie Michael Frolic: Le Dr Bethune et le Dr MacKay et autres modèles de rôle sont importants. Lorsque je me rends quelque part en Chine, c'est peut-être pace que j'ai une barbe et qu'il avait une barbe et qu'il est chauve, on me dit que je ressemble à Norman Bethune. C'est un peu mon entrée en matière. Même si bien des Canadiens ne partagent pas sa pensée politique, en Chine, on le perçoit comme un éminent Canadien. À l'heure actuelle, Dashan, un autre Canadien qui a déjà étudié à l'Université de Toronto, est un comédien très connu à la télévision chinoise. Il est maintenant sur un pied d'égalité avec Bethune comme grands héros canadiens.
    Le problème, c'est qu'il n'y a pas beaucoup de héros canadiens actuellement en Chine, des héros dont les Chinois pourraient s'inspirer. Comme quelqu'un m'a dit aujourd'hui, même les chauffeurs de taxi à Pékin demandent: « Qu'est-il arrivé au Canada? Pourquoi n'êtes-vous plus des amis de la Chine? », et ce, malgré Bethune. C'est un problème.
    En ce qui concerne les droits des travailleurs, une nouvelle loi sur le travail vient d'être adoptée en Chine. Elle améliorera radicalement les droits des travailleurs, en plus de leur donner de meilleures conditions de travail et de meilleurs salaires. Les usines bas de gamme à faible coût d'exploitation du Sud de la Chine ferment donc boutique et déménagent au Centre de la Chine, où les salaires sont encore faibles, ou encore, elles s'implantent au Vietnam.
    En effet, certains changements se produisent sur le marché du travail à cause de cette nouvelle loi, à mesure que la Chine bonifie ses valeurs. C'est un changement très intéressant et on verra où cela va mener la Chine, si les usines de ce pays pourront continuer à fabriquer la chemise que je porte aujourd'hui pour la réunion dans les magasins, ou alors si ces chemises seront fabriquées au Bangladesh ou au Vietnam.

  (1725)  

    Monsieur Préfontaine.
    Très rapidement, la politique doit servir principalement à cibler, ou encore à examiner ce que vous êtes en train de faire en Chine. Si vous croyez que vous avez réussi dans une secteur ou l'autre, il nous faut continuer dans le même sens et même augmenter nos activités, s'ils sont d'accord. Nous avons observé que, dans bien des cas, ils sont d'accord dans bien des domaines, mais pas tous. Il faut donc cibler les interventions, rajuster le tir, pour que les deux parties puissent en profiter mutuellement.
    Il y a beaucoup de choses dont nous pouvons profiter et beaucoup de choses à apprendre, même à l'égard de notre système judiciaire, que nous tenons en si haute estime. Il y a des choses que l'on fait là-bas qui pourraient nous faire économiser beaucoup d'argent, beaucoup de temps. On pourrait faire en sorte que certains ne se retrouvent pas en prison, simplement grâce au travail communautaire. Ce n'est là qu'un exemple. Je ne dis pas que notre système ne fait pas de son mieux, mais il y a des choses que nous, Canadiens, pouvons apprendre. Ce n'est pas une voie à sens unique où ils sont les seuls à apprendre. Je dirais donc qu'il faut cibler la politique.
    Merci beaucoup à tous les deux. Nous vous sommes reconnaissants de vos remarques.
    Nous allons suspendre la séance une minute pour ensuite passer aux travaux du comité. À bien y penser, nous n'allons peut-être même pas suspendre la séance. Ce sera très court, si quelqu'un veut bien proposer l'adoption du rapport du comité directeur.
    M. Lebel le propose, appuyé par M. Patry.
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Merci. La séance est levée.