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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 071 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 25 avril 2013

[Enregistrement électronique]

  (1200)  

[Traduction]

    La réunion va commencer. J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins d'aujourd'hui: Andrew Beynon, Jo-Ann Greene et Karl Jacques.
    Je vous remercie de revenir devant notre comité pour répondre à nos questions.
    Nous allons passer immédiatement aux questions, en commençant par Mme Truppe, qui dispose de sept minutes.
    Il y a eu beaucoup de consultations au sujet du projet de loi S-2. Pouvez-vous confirmer, pour le compte rendu, le nombre de rencontres que vous avez eues avec les Premières Nations à ce sujet, et nous citer quelques-uns des endroits où ces rencontres se sont déroulées?
    Madame la présidente, je vais essayer de répondre à la question, mais j'invite mes collègues à intervenir si je me trompe ou s'ils jugent bon d'ajouter une précision.
    Merci.
    Si on remonte au tout début, c'est en 2000 qu'on a commencé à faire des études et à organiser des groupes de discussion et d'information sur la question des biens immobiliers matrimoniaux situés dans les réserves. Les premières séances de planification du processus de consultation ont eu lieu avec l'Association des femmes autochtones du Canada et l'Assemblée des Premières Nations.
    Ensuite, le processus de consultation nationale a vraiment commencé en 2006 et s'est traduit par la tenue de 103 réunions dans 76 endroits au Canada. Bon nombre de ces réunions se sont déroulées au niveau régional, dans des villes comme Fredericton, Québec et Thunder Bay — et ailleurs en Ontario. Ce sont là simplement quelques exemples de villes où il y a eu des réunions.
    Pour leur participation au processus de consultation, l'Assemblée des Premières Nations et l'Association des femmes autochtones du Canada ont reçu chacune 2,7 millions de dollars. Au total, le processus a coûté 8 millions de dollars, dont le ministère des Affaires autochtones a assumé plus de 2,8 millions.
    Vous voulez dire qu'il a payé 2,8 millions de dollars sur le total de 8 millions de dollars?
    Oui, madame la présidente, sur le total de 8 millions de dollars.
    Excusez-moi, êtes-vous en train de vérifier quelque chose ou avez-vous terminé votre réponse?
    Je vais vous donner un peu plus d'informations, si vous le voulez bien. Le processus de consultation comportait quatre phases: la planification, la consultation nationale, la recherche ou l'établissement d'un consensus, et une entente sur un projet de loi.
    Pouvez-vous expliquer en quoi a consisté la recherche d'un consensus?
    La recherche d'un consensus, qui a été facilitée par la représentante ministérielle, portait sur le contenu d'un futur projet de loi. Pendant ces réunions sur le contenu d'un futur projet de loi, les parties avaient toute latitude pour faire des recommandations sur le sujet.
    Par exemple, les représentants de l'Association des femmes autochtones du Canada et de l'Assemblée des Premières Nations ont proposé, entre autres, de restructurer le projet de loi de façon à insister davantage sur le foyer familial et à créer de nouveaux concepts et de nouvelles définitions, en plus de « biens immobiliers ». Ils pensaient que c'était important.
    Certains ont également proposé de changer le titre. Aujourd'hui, on l'appelle la Loi sur les foyers familiaux situés dans les réserves et les droits ou intérêts matrimoniaux, mais au départ, elle devait s'appeler « la loi sur les biens immobiliers ou mobiliers matrimoniaux ». Ils estimaient que ce titre risquait de poser des problèmes, vu les différents régimes de propriété dans les réserves, et ils ont donc proposé le titre qui a finalement été retenu.
    S'agissant de la définition de « foyer familial », ils tenaient beaucoup à une clause « Il est entendu que », qu'on retrouve à l'article 5 du projet de loi et qui dit expressément que le titre de propriété des terres de réserve ne modifie pas leur statut.

  (1205)  

    Parfait. Merci. Dans quelle mesure les provinces et les territoires ont-ils participé à l'élaboration de ce projet de loi?
    Les provinces ont participé au processus de consultation. Elles ont eu des réunions séparées, où elles ont pu faire des commentaires. Elles ont également participé à des appels conférences, où elles pouvaient fournir les informations nécessaires...
    Toutes les provinces?
    Oui, toutes les provinces ont participé.
    Combien de soumissions avez-vous demandées et combien en avez-vous reçu?
    Nous n'avons pas vraiment demandé des soumissions écrites. Cela dit, les trois parties, l'APN, le ministère des Affaires autochtones et l'Association des femmes autochtones du Canada, avaient une ligne 1-800 pendant la période de consultation. Nous avions également une adresse courriel et une adresse postale où les soumissions pouvaient être envoyées, si les gens le voulaient. De cette façon, n'importe qui au Canada pouvait faire parvenir ses commentaires à l'une des trois parties.
    S'agissant du centre d'excellence, comment va-t-il pouvoir aider les Premières Nations à élaborer leurs propres lois en matière de droits et biens matrimoniaux situés dans les réserves?
    On prévoit —, car il faut attendre l'approbation des financements nécessaires — que le centre d'excellence aidera les Premières Nations en leur fournissant des informations, des outils et des conseils sur la meilleure façon de procéder pour élaborer des lois sur les biens immobiliers matrimoniaux. De plus, il aidera celles qui choisissent de ne pas élaborer leurs propres lois à bien comprendre les dispositions du projet de loi S-2.
    On prévoit que le centre d'excellence sera hébergé par une organisation existante, de façon indépendante du gouvernement et des Premières Nations qu'il aura pour vocation de servir.
    De façon indépendante du gouvernement et des Premières Nations.
    Oui.
    Mon temps est écoulé? Très bien.
    Je vais donner la parole à Niki.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais savoir tout d'abord combien il y a eu de consultations au sujet du projet de loi S-2. Je ne parle pas des projets de loi antérieurs, mais uniquement du projet de loi S-2 qui a été déposé le 1er décembre 2011.
    Madame la présidente, nous avons eu, depuis la présentation du projet de loi en 2008, de nombreuses discussions avec des organisations, des groupes et des représentants des Premières Nations. Des témoins ont aussi comparu devant le Comité sénatorial permanent des droits de la personne.
    J'aimerais plutôt savoir quelles consultations publiques ont eu lieu, celles dont vous avez parlé, depuis le 1er décembre 2011, pendant cette législature; c'est ça qui nous intéresse. Je vous remercie d'avance de faire parvenir ces informations à notre comité, elles nous seront très utiles.
    J'aimerais revenir sur les discussions de nos dernières réunions. Je constate que la représentante ministérielle dit dans son rapport:
On a dit souvent que le délai était trop court, et qu'il ne permettait pas d'examiner et de bien comprendre les complexités de la question. Certains participants estimaient que le Ministère aurait dû communiquer directement avec les membres des collectivités et que l'information aurait dû être offerte plus rapidement à quiconque le souhaitait et non pas être publiée seulement dans Internet.
    J'aimerais faire ici une pause. Je représente 33 Premières Nations du Manitoba — dont 18 qui sont isolées et qui n'ont généralement pas accès à Internet, et encore moins aux autres services auxquels nous sommes habitués dans les centres urbains. Cela pose de sérieux problèmes. Donc, le fait que ce soit noté dans le rapport est une bonne indication de ce que beaucoup de gens ont ressenti à propos de toute cette consultation.
    S'agissant des recommandations de la représentante ministérielle, on nous a parlé de 30 recommandations, mais qu'en est-il des trois autres qui n'ont pas été retenues?

  (1210)  

    Si vous me le permettez, madame la présidente, je vais donner quelques éléments de réponse pendant que ma collègue cherche l'information. Au sujet des endroits où se sont déroulées ces consultations, puisque c'est ce que la députée veut savoir, nous proposons de faire parvenir à votre comité une liste de toutes les réunions de consultation qui ont eu lieu avant la rédaction du projet de loi S-2 et après.
    Je vous en remercie, avec les dates, s'il vous plaît, avant et après... le projet de loi S-2 est différent du projet de loi S-4, vous comprenez ce que je veux dire?
    Tout à fait.
    Nous aimerions donc avoir ces informations, mais je me demande... Les trois recommandations qui n'ont pas été retenues étaient pourtant cruciales. Si vous ne pouvez pas me répondre, je vais passer à autre chose.
    Pour répondre à votre question, je dirai que 33 ont fait l'objet de mesures législatives... parmi les recommandations non retenues dans le projet de loi, il y a le titre du projet de loi, dont j'ai parlé tout à l'heure. Le titre que nous avons aujourd'hui a été proposé par l'APN... L'autre recommandation concernait la compétence inhérente... et elle n'a pas été retenue, car il existe déjà des dispositions sur la négociation d'une entente d'autonomie gouvernementale, et...
    Excusez-moi.
    Avec votre permission, madame la présidente, je dirai que l'autre recommandation concernait l'inclusion d'une disposition sur le réexamen du projet de loi après un certain temps.
    Et la recommandation sur les mesures non législatives? Des dépenses ont été engagées, par les bandes, par les services juridiques, et le projet de loi ne traite pas... Il existe une quarantaine de foyers d'accueil pour les femmes dans les réserves de tout le pays, pour environ 600 Premières Nations, ce qui est tout à fait inadéquat. Or, le projet de loi n'aborde pas du tout la question.
    Cela nous préoccupe beaucoup, comme d'ailleurs un certain nombre de Premières Nations et de groupes concernés, car le projet de loi S-2 ne prévoit absolument rien pour mettre un terme à la violence contre les femmes, sans parler de toutes les autres questions qu'il n'aborde pas et des investissements que le gouvernement fédéral refuse de faire. Pourquoi les mesures non législatives, qui sont pourtant cruciales, sont-elles complètement absentes?
    Permettez-moi de vous dire, pour commencer, qu'en ce qui concerne le centre d'excellence dont il a été question tout à l'heure, il restera à décider, une fois que le projet de loi aura été adopté par le Parlement et à condition qu'il le soit, comment ce centre sera mis sur pied et avec quel financement précis.
    Je suis en mesure de vous dire que, dans les propositions que nous avons faites à des institutions ou organisations autochtones pour les inviter à héberger le centre d'excellence si le projet de loi est adopté, nous indiquons, et ce sont des documents publics, un financement pouvant aller jusqu'à environ 4,8 millions de dollars sur cinq ans. Bien sûr, c'est à condition que le projet de loi soit adopté et que ce montant soit approuvé par le Conseil du Trésor, mais ça vous donne une idée du niveau de financement.
    Je voudrais également porter à votre attention le fait qu'on envisage d'allouer des crédits à la GRC et au ministère de la Sécurité publique pour faciliter la mise en oeuvre de la loi et la coordination avec les provinces.
    Je comprends ce que dit la députée au sujet des nombreux enjeux de toutes sortes, qu'il s'agisse de logement, de foyers pour les femmes, d'écoles... Ces enjeux sont nombreux. Je n'ai parlé que de certains des investissements qui seront faits pour la mise en oeuvre de la loi. Pour les autres enjeux, je pense que votre comité peut les examiner et faire des recommandations. Mais pour ce qui est du projet de loi S-2, nous avons décidé de ne pas inclure des dispositions relatives à la mise en oeuvre, comme le financement des foyers pour les femmes.
    Madame la présidente, quel est le temps qui m'est imparti?
    Votre temps est écoulé.
    Je vais donner la parole à Mme Young.
    Je vous remercie de comparaître aujourd'hui. Je vais vous poser une série de questions très précises, car je trouve qu'il nous manque des données fondamentales sur cette question pourtant cruciale. J'aimerais donc avoir ces réponses... et je suppose que vous déciderez entre vous qui est le mieux en mesure de me répondre. Après quoi, je poserai des questions de nature plus générale.
    Premièrement, nous savons qu'il existe environ 600 Premières Nations. Combien d'entre elles ont déjà adopté une loi sur les droits immobiliers matrimoniaux? Et parmi celles qui en ont adopté une, combien l'ont fait dans le cadre de la Loi sur la gestion des terres des premières nations et combien dans le cadre d'une entente d'autonomie gouvernementale?

  (1215)  

    Nous vous ferons parvenir ces chiffres précis, mais je vais déjà vous en donner une idée.
    Les Premières Nations qui ont signé une entente d'autonomie gouvernementale sont habilitées à administrer la question des biens immobiliers matrimoniaux. Elles ne sont pas assujetties à ce projet de loi. Quant à la Loi sur la gestion des terres des premières nations, elle autorise les Premières Nations à adopter leurs propres lois sur les biens immobiliers matrimoniaux.
    Le régime de gestion des terres des Premières Nations est en train de prendre de l'expansion, car de plus en plus de Premières Nations manifestent le désir d'y adhérer. Si je me souviens bien, les chiffres les plus récents indiquent que 22 Premières Nations ont adopté des lois sur les biens immobiliers dans le cadre de la LGTPN. Je sais personnellement que d'autres Premières Nations de la LGTPN travaillent activement à l'élaboration de leurs propres lois dans ce domaine.
    Autrement dit, ces lois existent, elles existent dans 22 Premières Nations. Donc, en fait, nous essayons d'entraîner les autres... ou de faire en sorte que les femmes et les enfants exposés à la violence puissent vivre dans des conditions dignes du XXIe siècle. C'est bien ça?
    Oui. Il est vrai que des Premières Nations, parmi celles qui ont adhéré à la IGTPN, ont déjà adopté des lois sur les biens immobiliers matrimoniaux. Le centre d'excellence tiendra certainement compte des règles fédérales provisoires et des lois existantes sur les biens immobiliers matrimoniaux, y compris celles qui ont été adoptées par des Premières Nations de la IGTPN.
    Nous avons beaucoup parlé hier de la violence à laquelle sont exposés les femmes et les enfants à la maison, et des raisons pour lesquelles les dispositions du projet de loi S-2 sur les ordonnances de protection d'urgence sont si importantes, mais personne ne nous a donné de chiffres concrets sur l'ampleur du problème de la violence.
    Le ministre a mentionné le chiffre de 19 p. 100, ce qui est trois fois supérieur à celui des collectivités autres que les Premières Nations. C'est vraiment énorme — trois fois plus de violence contre les femmes et les enfants.
    Nous savons, bien sûr, que les ordonnances de protection d'urgence sauvent des vies. Mais avons-nous une idée du nombre de décès causés par cette violence, et du nombre de vies qu'on sauvera par l'adoption du projet de loi S-2?
    Permettez-moi de vous faire un bref historique de la situation.
    Des études ont été faites à ce sujet. Je n'ai pas de chiffres précis, mais nous pouvons vous faire parvenir le résumé d'un rapport décrivant certaines situations dans lesquelles des ordonnances de protection d'urgence auraient permis d'aider des femmes, voire des hommes, dont la vie était en danger ou qui étaient victimes de violence conjugale, et auraient peut-être permis de désamorcer la crise.
    Ces ordonnances prévoient notamment une période pouvant aller jusqu'à 90 jours, applicable sans délai, pendant laquelle le demandeur se voit octroyer le droit exclusif d'occuper le logement familial. Pendant une réunion avec des gestionnaires de foyers de Premières Nations, en Alberta, une des participantes, particulièrement enthousiaste, a demandé si cette période pouvait être prolongée. Elle a expliqué que, dans sa communauté, ils avaient une approche holistique et qu'ils essayaient de favoriser le rapprochement du conjoint violent et des autres membres de la famille. Et que, parfois, cela prenait plus de 90 jours, et que c'est pour cela qu'elle demandait si c'était possible d'obtenir une prolongation.
    Oui, c'est prévu également. L'amendement présenté au Sénat dispose que la prolongation de l'ordonnance, ou sa modification, est à la discrétion du juge. Initialement, le projet de loi prévoyait qu'une telle prolongation serait de 90 jours supplémentaires, pour un total de 180 jours, mais, maintenant, le juge a toute latitude pour déterminer la durée de la prolongation.
    Cela répond... dans cette communauté, s'ils font des démarches dans ce sens, ils peuvent obtenir une prolongation au-delà de ça.
    Outre l'aspect sécurité dont vous venez de parler — et je vous en remercie infiniment —, j'aimerais dire que, lorsque j'étais membre du conseil d'administration du YWCA de Vancouver, nous avons construit des foyers d'accueil pour les femmes qui avaient besoin d'être protégées.
    Vous avez parlé d'études et de travaux de recherche, et nous avons entendu un témoignage sur les femmes qui veulent rester dans leur maison. Est-il préférable que les femmes et les enfants restent chez eux plutôt que d'être envoyés dans un foyer? Est-ce une meilleure solution, à votre avis?

  (1220)  

    En tant que membre des Premières Nations, je pense qu'il est important que les femmes et les enfants qui ont leur réseau de soutien dans la communauté puissent rester dans cette communauté et conserver leurs liens avec leur culture.
    Une étude réalisée il y a déjà quelques années montre qu'il serait souhaitable que les lois provinciales et territoriales sur la famille contiennent toutes des dispositions sur les ordonnances de protection d'urgence, car ce sont des outils efficaces pour désamorcer des situations familiales violentes, dans certains cas, et aussi pour éviter les poursuites pénales, si ces ordonnances sont prises à temps.
    Étant donné... Excusez-moi, soyez bref, s'il vous plaît.
    Je serai bref. Je pense que ce qui doit intéresser le comité, comme vous l'avez dit tout à l'heure, c'est de combler la lacune qui existe actuellement dans la loi. S'il est adopté, ce projet de loi n'obligera pas les femmes et les enfants à rester dans le foyer familial dans la réserve, il leur offrira tout simplement le choix. Certains préféreront aller dans un foyer d'accueil, à Vancouver ou ailleurs, mais actuellement, le problème vient du fait qu'ils n'ont pas ce choix, et les tribunaux ne peuvent pas leur permettre de rester dans la réserve.
    Et pourtant, toutes les autres femmes ont cette option.
    Ailleurs, les femmes ont d'autres options.
    Exactement.
    Votre temps est écoulé.
    Je vais donner la parole à Mme Bennett.
    Comme vous le savez, les communautés des Premières Nations ont encore des objections très sérieuses à ce projet de loi, des objections qui illustrent souvent ce que dit Wendy Grant-John dans son rapport, à savoir: « La viabilité et l'efficacité du cadre législatif, quel qu'il soit, dépendront aussi de la disponibilité des ressources financières nécessaires à la mise en oeuvre de mesures non législatives... ».
    Le ministère a-t-il préparé un plan d'action indiquant quand et comment ces ressources seront mises à disposition, ainsi que leur niveau?
    Le plan de mise en oeuvre prévoit plusieurs étapes, bien sûr, car, étant donné les changements apportés au projet de loi S-2 avant sa présentation et l'ajout d'une période de transition de 12 mois, les règles fédérales provisoires n'entreront en vigueur qu'un an après que la première partie du projet de loi, c'est-à-dire le mécanisme d'élaboration des lois des Premières Nations, sera entrée en vigueur par décret en conseil.
    Au départ, le plan de mise en oeuvre comprend trois parties. Premièrement, une campagne de sensibilisation. Deuxièmement, la création et l'exploitation d'un centre d'excellence sur une période de cinq ans, comme on l'a dit tout à l'heure. Et troisièmement, la formation de ceux qui seront chargés de l'exécution et de l'administration de la loi, y compris la formation qui sera dispensée par la GRC et le ministère de la Sécurité publique aux juges de la Cour supérieure. C'est en effet à cette instance que les règles fédérales provisoires seront traitées puisqu'elles concernent également les lois sur le divorce.
    Nous envisageons d'établir des règlements pour faciliter les procédures judiciaires relatives aux ordonnances de protection d'urgence. Nous avons déjà eu des réunions à ce sujet avec les territoires et les provinces. Nous en aurons une autre pour la rédaction de ces règlements, lesquels doivent être en place, bien sûr, pour la date à laquelle la seconde partie du projet de loi entrera en vigueur, la partie qui contient les règles fédérales provisoires.
    D'ici là, le centre d'excellence devrait fonctionner et être en mesure d'aider les Premières Nations au moment où cette partie du projet de loi entrera en vigueur par décret en conseil. Il devrait aussi être en mesure de fournir des conseils et du soutien...
    Quel est le budget prévu? La campagne de sensibilisation a-t-elle déjà commencé? Et la formation? Quel budget a-t-on prévu? Vous n'avez pas vraiment besoin d'attendre l'adoption du projet de loi pour commencer votre programme de sensibilisation ou de formation.

  (1225)  

    Nous sommes toujours à la disposition de ceux qui ont besoin d'informations et de conseils. Nous continuons...
    Je parle d'une stratégie concrète; quelles ressources financières seront mises à disposition pour ces deux programmes, quand et comment, et quel sera le budget du centre d'excellence? Ce n'est pas prévu dans le budget de cette année, c'est sûr.
    Nous devons respecter les décisions du Parlement. Notre ministère a pris des mesures pour divulguer le maximum d'informations au sujet du projet de loi. Si...
    Non, je parle des programmes de sensibilisation et de formation. Vous n'avez pas besoin d'une loi pour ça. Des femmes continuent d'être violentées et tuées par leur conjoint. Il n'y a pas de place au foyer d'accueil. Tout le monde dit que ce projet de loi va régler le problème...
    Je crois que la réponse...
    ... à lui tout seul.
    ... nous devons respecter les décisions du Parlement et ne pas précipiter la mise en oeuvre du projet de loi. Ce que vous dites est juste...
    Non, nous parlons des autres mesures non législatives qui sont celles qui suscitent le plus d'opposition au projet de loi. Les gens veulent que ça se fasse sans tarder.
    Je comprends, et je vous dirai que nous travaillons sur un plan de mise en oeuvre. Nous avons annoncé publiquement quel était le niveau de financement proposé pour le centre d'excellence.
    Pourriez-vous déposer ce plan de mise en oeuvre ainsi que le budget que vous proposez?
    Oui, je pense que c'est possible. Encore une fois, il faudra attendre l'approbation du Conseil du Trésor. Permettez-moi d'ajouter, toutefois, que Wendy Grant-John a fait des remarques très judicieuses sur l'importance de la mise en oeuvre de la loi, et pas seulement ses dispositions, et je respecte cela.
    Mais elle a aussi parlé d'un « rôle minimal pour la loi fédérale » — je dis bien, un rôle minimal — et d'une « opposition presque universelle à l'introduction de lois provinciales (en les intégrant dans une loi fédérale) », sur cette question-là. Elle a même parlé d'une « très nette préférence pour la reconnaissance de la compétence des Premières Nations comme moyen de combler la lacune juridique ».
    Ce qui nous inquiète, c'est que le Centre national pour la gouvernance des Premières Nations a vu son budget disparaître complètement, et que les Premières Nations n'ont pas les ressources pour combler cette lacune législative.
    S'agissant du pouvoir conféré aux Premières Nations d'adopter des lois, je voudrais simplement souligner aux membres du comité qu'on a essayé ici de trouver un juste milieu. Ce n'est pas tout à fait ce que Wendy Grant-John a recommandé, mais on prévoit ici un mécanisme qui permettra aux Premières Nations de remplacer complètement les règles fédérales provisoires, sans pour autant leur imposer ce qu'elles doivent mettre dans leurs lois sur les biens immobiliers matrimoniaux.
    C'est aux membres du comité de décider si c'est un bon compromis entre une intervention du gouvernement fédéral pour combler une lacune législative, d'une part, et le fait de respecter le droit des Premières Nations d'adopter leurs propres lois sur des bases différentes, et je pense que c'est fidèle à ce que recommandait Wendy Grant-John. Je répète, pour que ce soit clair, que Wendy Grant-John a raison en ce qui concerne la mise en oeuvre. Si ce projet de loi est adopté, il faudra, pour qu'il soit efficace, faire très attention au niveau de financement que nous lui allouerons. Pour l'instant, la seule information qui soit du domaine public, c'est le budget proposé de 4,8 millions de dollars pour le centre d'excellence.
    L'APN a dit que la période de transition devrait être d'au moins trois ans, c'est bien ça? Je suppose qu'il va falloir demander aux députés de la majorité s'ils sont prêts à l'envisager.
    Permettez-moi d'ajouter que d'autres parties ont demandé la même chose. Pour l'instant, la période de transition est fixée à 12 mois, compte tenu du fait que certaines Premières Nations sont prêtes à adopter leurs propres lois sur les biens immobiliers matrimoniaux et à ne pas être assujetties du tout aux règles fédérales provisoires. Bien sûr, les Premières Nations pourront adopter leurs propres lois à ce sujet quand elles le veulent à partir de l'entrée en vigueur du projet de loi, et pas seulement pendant les 12 premiers mois.
    Madame Crockatt, vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie de comparaître devant notre comité et de nous donner des réponses très franches. Nous commençons à bien saisir tout ce qui sous-tend le projet de loi, et je vous en remercie.
    J'apprends que le centre d'excellence a un budget prévu de près de 5 millions de dollars sur cinq ans, ce qui n'est pas rien, et qu'il sera indépendant du gouvernement. Donc, celui-ci n'exercera aucun contrôle direct, et ce sera une bonne occasion d'échanger des outils d'informations et des pratiques exemplaires sans que le gouvernement impose quoi que ce soit. C'est bien ça?

  (1230)  

    Oui, et j'ajouterai que l'objectif est de trouver une organisation autochtone déjà établie qui pourra faciliter le démarrage du centre. On a prévu une période de transition de un an, et le centre d'excellence aura donc le temps de se préparer, mais comme je viens de le dire, il ne partira pas de zéro avec une organisation qui n'a pas l'habitude d'offrir des services, d'utiliser le web, de fournir des informations. Au contraire, nous essayons de faire fond sur l'expertise et l'expérience d'une institution déjà établie.
    On a beaucoup parlé des consultations, mais j'aimerais quand même revenir un peu là-dessus, car il est important de bien comprendre tout ce qu'on a fait sur ce plan-là. Nous avons donc, si j'ai bien compris, dépensé 8 millions de dollars pour organiser des réunions dans 103 collectivités, et l'AFAC a été consultée.
    Nous avons parlé de Wendy Grant-John. Si j'ai bien compris, elle a produit un rapport assorti de 33 recommandations. Combien ont été acceptées?
    En tout, il y en avait plutôt 64, dont 33 concernaient précisément des dispositions législatives ou le contenu du projet de loi. Sur ces 33, 30 ont été retenues. Par exemple, on prend en compte les intérêts de l'enfant, y compris dans le préambule. Et le tribunal prend aussi en compte toute une série de critères en ce qui concerne les ordonnances de protection d'urgence et l'occupation exclusive du foyer familial par le conjoint qui demande l'ordonnance. Il faut donc prendre en compte les intérêts des enfants pour leur permettre, comme on le disait tout à l'heure, de conserver leurs liens avec la communauté. On reconnaît donc, entre autres, la nécessité de prendre en compte les intérêts des enfants.
    Vous avez bien dit que 30 recommandations sur 33 avaient été acceptées?
    Oui, et les trois autres, on l'a dit tout à l'heure, ont fait l'objet d'autres mesures.
    Ah oui?
    Oui.
    Très bien.
    Pouvez-vous nous expliquer comment, concrètement, ces ordonnances de protection d'urgence seront exécutées? Est-ce que ce sera une procédure simple ou compliquée? Dans quelle mesure ces ordonnances vont-elles changer la vie des femmes qui habitent dans les réserves et qui sont victimes de violence conjugale?
    Je vais commencer, madame la présidente.
    Ce que je trouve important, au niveau personnel, c'est que le projet de loi prévoit qu'un agent de police et une autre personne — il sera indiqué dans les règlements que ça peut être une autre personne — puissent présenter la demande au nom du conjoint demandeur. Si cette personne ne peut pas le faire, une autre peut le faire à sa place.
    Par exemple, il y avait dans ma communauté une jeune femme qu'on a empêchée de voir sa mère, et deux semaines plus tard, celle-ci a été battue à mort par son conjoint. Si les ordonnances de protection d'urgence avaient existé —, car la jeune femme était probablement inquiète —, elle aurait pu en demander une au nom de sa mère. Le juge désigné aurait pu l'autoriser à le faire, à expulser le conjoint et à éviter ainsi cette tragédie.
    Dans ce cas-là, je pense que c'est l'une des façons, avec les autres procédures... À l'heure actuelle, la plupart des provinces — la Colombie-Britannique vient d'adopter une nouvelle loi sur la famille en mars dernier, qui prévoit des ordonnances de protection d'urgence...
    Ça aurait sans doute sauvé cette femme.
    Oui, ça aurait pu.
    Merci de nous avoir dit tout cela.
    J'aimerais ajouter à cela que, dans la plupart des provinces, les tribunaux, la police et les autres services concernés ont déjà l'habitude des ordonnances de protection d'urgence. Comme ça le dit bien, ce sont des ordonnances qui sont prises dans l'urgence, donc il faut procéder rapidement. Le projet de loi confère aux juges le même pouvoir, mais il l'étend aux situations d'urgence dans les réserves. Les autorités provinciales, la police, les tribunaux savent déjà comment les utiliser.
    La GRC et le ministère de la Sécurité publique recevront les budgets nécessaires pour dispenser la formation adéquate, afin d'assurer la bonne application de cette loi fédérale.
    Il vous reste 10 secondes.
    Avant, les femmes ne pouvaient pas demander une ordonnance de protection d'urgence, alors que leur arrivait-il, à elles et à leurs enfants? Pouvez-vous nous le dire en quelques mots?
    La plupart du temps, elles étaient obligées de quitter la communauté, avec leurs enfants, et de s'installer en ville, ce qui les obligeait à renoncer à leur réseau de soutiens et à leur maison.
    Elles devaient donc faire leurs valises, en pleine nuit, et quitter la maison au plus vite?
    Bien souvent, oui. Une femme nous a dit...

  (1235)  

    Je vais donner la parole à Mme Crowder, qui sera suivie de Mme Day.
    Je vais partager mon temps, madame la présidente, alors je vous demande de me faire signe quand deux minutes et demie seront écoulées. Puisque je n'ai que deux minutes et demie, je vais poser toutes mes questions et vous demander des réponses par écrit.
    Monsieur Jacques, j'ai demandé l'autre jour si on avait fait, pour ce projet de loi, une analyse en vertu de l'article 35, et vous avez répondu que l'information à ce sujet avait été communiquée au Cabinet et était confidentielle. Pourriez-vous me dire, en termes généraux, quels facteurs vous examinez pour faire une analyse en vertu de l'article 35? J'aimerais avoir cette réponse par écrit, si possible.
    Madame Greene, vous avez dit que des consultations avaient eu lieu avec chaque province, mais avec chaque territoire aussi, je suppose? Quoique, il n'y a peut-être pas de réserves dans les territoires.
    Si, mais seulement dans les Territoires du Nord-Ouest.
    D'accord, les Territoires du Nord-Ouest. Donc, des consultations ont eu lieu avec chaque province et avec chaque territoire où se trouvent des réserves. Pourriez-vous nous faire savoir, par écrit, quelles préoccupations ils ont exprimées et comment le projet de loi y répond précisément? J'aimerais aussi que vous indiquiez s'il y a eu des discussions sur les codes fonciers très complexes qui existent dans les réserves. Le problème s'est posé pour des testaments et des successions, vous êtes sans doute au courant.
    Ma troisième question concerne les coûts de mise en oeuvre qui reviendront éventuellement aux Premières Nations et aux provinces, car les provinces vont devoir payer quelque chose.
    S'il me reste du temps, j'ai une quatrième question à laquelle j'aimerais bien que vous me répondiez oralement. On n'arrête pas de dire que le projet de loi traite de la violence dont sont victimes les femmes et les enfants autochtones. En fait, le texte n'en fait mention que huit fois, et je vous épargnerai la lecture des huit articles. Je suis sûre que vous les connaissez. J'aimerais cependant que vous me disiez par quelles mesures précises, autres que celle qui est prévue dans le projet de loi au sujet des ordonnances de protection d'urgence, vous comptez lutter contre la violence contre les femmes et les enfants autochtones?
    Si vous voulez commencer par celle-ci, comment, selon vous, exécutera-t-on les ordonnances de protection d'urgence dans les réserves des régions rurales et éloignées, qui manquent déjà de policiers?
    Vous avez à peu près 15 secondes. Sinon, vous pouvez nous faire parvenir la réponse par écrit.
    Je voudrais simplement dire que, selon les règlements, les femmes pourront en faire la demande par télécopieur, par courriel et par téléphone, et elles pourront recevoir une réponse par les mêmes moyens. Les ordonnances pourront aussi être octroyées selon les mêmes méthodes.
    Madame Day.

[Français]

    Je remercie nos témoins d'être revenus de nouveau parmi nous.
    L'association Femmes Autochtones du Québec a émis hier un communiqué de presse dans lequel elle réitérait son opposition au projet de loi S-2, Loi sur les foyers familiaux situés dans les réserves et les droits ou intérêts matrimoniaux.
    D'ailleurs, la présidente a déclaré que le projet de loi ne serait pas conforme aux normes établies par le Code civil du Québec concernant le partage des biens matrimoniaux en cas de séparation ou de décès. Or, étant donné que 40 % de leurs couples vivent en union libre, cela touche 40 % des femmes.
    Ma question s'adresse à M. Jacques, du ministère de la Justice.
    Votre ministère a-t-il fait une analyse sur les différences qu'il va y avoir quant à l'application des dispositions du projet de loi S-2 au Québec, sachant que la province n'est pas assujettie au même système juridique?
    Le ministère a-t-il effectué des études d'impact sur l'application du projet de loi S-2, en fonction du Code civil du Québec, pour y détecter de possibles contradictions ou un flou juridique?
    Je vous remercie de la question.
    Je veux revenir rapidement sur ce que l'honorable membre du comité a dit précédemment. Il était clair, dans l'une des recommandations de la représentante ministérielle, que l'incorporation des lois provinciales par renvoi était exclue. Dans ces conditions, il est certain qu'en développant un système applicable à tout le monde, des différences vont se créer d'une province à l'autre. Il y a des différences avec la province de Québec, comme il y en a avec l'Ontario ou les autres provinces. Toutes les provinces n'ont pas un régime similaire et l'adoption d'un nouveau régime va évidemment créer des distinctions.
    N'y a-t-il pas ici un vide juridique?
    Il est important de mentionner que les lois provinciales continuent de s'appliquer pour ce qui est du partage des biens personnels, de la garde des enfants et du soutien alimentaire. La seule différence entre les deux régimes est le partage du foyer familial et la valeur qui est attribuable. C'est la seule chose qui sera distincte d'un régime à l'autre.

  (1240)  

[Traduction]

    Madame James.
    Merci, madame la présidente.
    Je souhaite la bienvenue à nos trois témoins d'aujourd'hui.
    Une de mes collègues a demandé combien de Premières Nations avaient déjà adopté des lois sur les biens immobiliers matrimoniaux. Vous avez dit que c'était — un instant, je l'ai noté — 22, et que c'était dans le cadre de la Loi sur la gestion des terres des premières nations, mais je n'ai pas bien compris si on avait déjà des résultats de l'application de ces lois. Je veux parler des 22 Premières Nations qui ont adopté leurs propres lois sur les biens immobiliers matrimoniaux dans le cadre de la LGTPN.
    Je voudrais savoir si vous avez des statistiques, des commentaires positifs, enfin tout ce qui tendrait à démontrer combien ce projet de loi est important.
    Merci.
    Nous n'avons pas de statistiques.
    La Loi sur la gestion des terres des premières nations n'oblige pas les Premières Nations à envoyer au ministre une copie de leurs lois sur les biens immobiliers matrimoniaux. Mais le Centre de ressources pour la gestion des terres des Premières Nations nous a assurés que, de façon générale, les lois sur les biens immobiliers matrimoniaux fonctionnent bien dans les communautés, parce qu'elles sont conçues par et pour les communautés.
    D'après ce qu'on m'a dit, il n'y a pas eu beaucoup d'appels interjetés, peut-être un de temps à autre. Je suis désolée, je n'ai pas de statistiques, et je ne sais même pas s'il y en a. Mais d'après ce qu'on m'a dit, ça marche bien.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais vous poser une question. Je sais qu'on en a parlé à la Chambre ou ailleurs, avec des amis ou en famille.
    Est-il possible, avec ce projet de loi, que des non-membres puissent obtenir et se faire transférer des biens de façon définitive? J'aimerais avoir une réponse précise. Je pense bien connaître la réponse, mais j'ai entendu certaines choses qui signifieraient que, par exemple, quelqu'un comme moi pourrait se retrouver propriétaire de biens immobiliers. Est-ce vrai?
    Non, il n'y a aucun transfert possible si la personne est un non-membre.
    Mais si la personne qui n'est pas membre a besoin d'une ordonnance de protection d'urgence, a-t-elle le droit de rester dans la maison avec ses enfants? Si oui, pendant combien de temps?
    Si elle obtient une ordonnance de protection d'urgence, celle-ci sera valable pendant la période qui aura été fixée par le juge. La personne peut également demander l'occupation exclusive du foyer familial s'il y a rupture du mariage. À ce moment-là, ce serait parce que la relation est terminée, et la personne pourrait demander de rester dans la maison, avec ses enfants, pendant une période déterminée par le juge ou selon les circonstances. La loi précise les circonstances que le juge peut prendre en compte pour fixer la durée de l'ordonnance et pour octroyer le droit d'occupation exclusive.
    Un amendement apporté par le Sénat prévoit en fait de prendre en compte la relation de la personne avec la communauté. Autrement dit, si c'est un parfait étranger, le juge en tiendra compte pour déterminer la période pendant laquelle il peut rester dans la maison.
    Mais en aucune façon quelqu'un comme moi pourrait obtenir le transfert de biens à son nom et détenir le seul titre...
    Non, la loi dispose qu'un tel transfert n'est possible qu'entre membres.
    Merci. Je voulais simplement avoir cette précision.
    Je sais que certains reprochent à ce projet de loi de ne pas tenir compte de la culture et des traditions des Premières Nations. Que répondez-vous à ces gens-là?
    Je pense que c'est une question délicate, car l'objectif est de trouver un juste équilibre entre les intérêts de la collectivité et les droits fondamentaux des habitants de la réserve. Nous avons fait bien attention, conformément à la recommandation de la représentante ministérielle, de maintenir ce juste équilibre dans le projet de loi. C'est le cas de la période de 90 jours pour les ordonnances de protection d'urgence. Si quelqu'un demande la révocation ou la prolongation d'une ordonnance, la communauté des Premières Nations et le conseil de bande peuvent invoquer leur culture et leurs traditions et faire des démarches en conséquence. Bref, ils peuvent être entendus et leurs arguments peuvent être pris en compte.

  (1245)  

    Merci. Votre temps est écoulé.
    Madame Ashton.
    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais revenir sur le sujet qu'a abordé ma collègue, Mme Crowder. Je suppose que vous voyez ça sous l'angle du projet de loi, mais soyons honnêtes. Le ministre nous répète inlassablement que le texte va mettre fin à la violence que subissent les femmes autochtones, etc. Mais quand il s'agit de lancer une enquête nationale, d'investir dans des foyers d'accueil, d'investir dans des logements — comme on l'a fait remarquer — on ne voit rien venir.
    S'agissant des ordonnances de protection d'urgence, c'est sûr que ça va être utile et que c'est très important. Mais je vais vous donner l'exemple d'une communauté que je représente, la Première Nation Garden Hill. C'est une communauté isolée sur la rive est du lac Manitoba, qui compte environ 2 500 habitants. Le poste de la GRC se trouve sur une île, à l'écart de la communauté. Pendant les semaines où la glace est en train de prendre ou est en train de fondre, la GRC ne peut pas s'y rendre facilement. En fait, la seule façon est d'y aller par hélicoptère.
    Cette bande est actuellement gérée par un tiers, lequel a réduit le budget des agents de bandes, si bien que ce progamme est en suspens — autrement dit, les gens ne sont pas rémunérés. Par conséquent, il n'y a pas de services de police dans la communauté. En ce moment, c'est la fonte des glaces, et la GRC ne peut pas y accéder facilement.
    Alors à quoi sert d'avoir une ordonnance de protection s'il n'y a plus d'argent pour la police, s'il n'y a pas de foyer d'accueil, parce qu'il n'y en a pas, s'il n'y a pas de maison de transition, parce qu'il n'y en pas, s'il faut payer 500 $ pour aller à Winnipeg, parce que c'est l'endroit le plus proche où il y a un foyer d'accueil? Ces lacunes ne sont pas seulement des lacunes. On parle de personnes qui sont en danger et qu'on ne peut pas aider simplement à cause de problèmes d'accès.
    Il y a les discours théoriques et il y a les discours pratiques. Je peux vous dire que, sur le plan pratique, une ordonnance de protection d'urgence ne veut rien dire s'il n'y a personne pour l'exécuter et pour surveiller la situation, et, bien sûr, s'il n'y a pas les services de soutien aux victimes lorsqu'un acte criminel a été commis.
    J'aimerais bien savoir ce que vous avez à répondre. Malheureusement, nous ne pouvons pas poser la question aux politiques, mais j'aimerais bien savoir ce que vous en pensez.
    Allez-y.
    Je sais que certains programmes aident à faire face à ces situations. Comme vous l'avez dit, un budget est prévu pour les ordonnances de protection d'urgence, et il y a le programme de prévention de la violence familiale. Il y a aussi une initiative qui permet d'aider les couples qui divorcent, et un autre programme qui permet d'intervenir dans ce genre de situations, dans le Nord.
    Soyons précis. Quels sont les chiffres? Dans la circonscription de Churchill, il y a 22 communautés isolées, dont 18 sont des Premières Nations. C'est dans le nord du Manitoba.
    On nous rebat les oreilles avec le centre d'excellence. Je ne pense pas qu'il sera à Garden Hill. Alors de quels chiffres parlons-nous? Il existe 663 Premières Nations. La plupart sont isolées, éloignées. Avez-vous une ventilation de ces chiffres? Quel pourcentage de cette somme sera alloué aux Premières Nations éloignées?
    Vous soulevez beaucoup de questions au sujet du financement du logement et des services de police, des foyers pour les femmes, etc. Je propose de faire parvenir à votre comité des informations sur les niveaux de financement de ces différents programmes.
    Parfait, j'aimerais bien avoir ces renseignements, mais je veux aussi m'assurer que, lorsqu'on dit que les ordonnances de protection d'urgence vont permettre de sauver des vies, les gens savent quel genre de vie ont les habitants de ces communautés. Je sais en tout cas que s'il n'y a personne pour la faire respecter, le morceau de papier sur lequel est écrite l'ordonnance ne vous permettra certainement pas de sauver des vies.

  (1250)  

    Madame Ambler, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente
    Je maintiens qu'un morceau de papier, c'est mieux que rien, parce qu'avec ça, on peut au moins commencer à faire quelque chose.
    S'agissant de l'exécution des ordonnances de protection d'urgence, je me demande si le centre d'excellence aura un rôle à jouer à cet égard, surtout pour les communautés éloignées. Est-ce qu'on va prévoir quelque chose pour les communautés comme celle dont a parlé Mme Ashton, qui sont très éloignées, qui sont gérées par un tiers, ou qui auront des difficultés à les faire respecter? Est-ce que c'est le centre d'excellence qui va les aider ou une autre direction du ministère?
    Je dois dire que l'objectif est d'installer le centre d'excellence dans une institution autochtone existante, qui a l'expérience des communautés plus urbaines, des communautés plus prospères et aussi des communautés plus éloignées et en proie à plus de difficultés. Ils savent par expérience quel type de loi sur les biens immobiliers matrimoniaux convient le mieux à une communauté éloignée, et quelles dispositions il faut y inclure. Oui, le centre d'excellence devrait être en mesure d'offrir ce service, par exemple de donner des conseils sur la façon de faire respecter une ordonnance de protection d'urgence lorsqu'il n'y a pas de détachement de la GRC sur place.
    J'aimerais revenir sur la coordination qui est prévue, dans notre plan de mise en oeuvre, avec la GRC et le ministère de la Sécurité publique, pour que la loi ne soit pas qu'un bout de papier, mais qu'elle soit vraiment appliquée comme il se doit.
    Je ne conteste pas ce qu'a dit la députée. Certaines communautés très éloignées ont du mal à faire régner l'ordre, pas seulement sur les questions de biens immobiliers matrimoniaux.
    Bien sûr. Vous êtes donc en train de me dire que le centre d'excellence, en l'occurrence, va s'adapter aux besoins des communautés qui s'adressent à lui. Il ne va pas leur dire que le projet de loi S-2 doit être appliqué de telle façon, avoir tel libellé et prévoir telles conditions. C'est bien ça?
    Le centre sera indépendant. Je respecte ces institutions. Je les connais, et je sais qu'elles savent très bien s'adapter aux circonstances très différentes des Premières Nations du Canada. Elles n'appliquent certainement pas la même solution à tout le monde. Et ce n'est pas ce qui est prévu dans ce projet de loi. Dans la LGTPN, ce n'est pas la même solution pour tout le monde. Selon leur emplacement, les Premières Nations de la LGTPN ont des lois différentes pour les biens immobiliers matrimoniaux.
    Je suis très contente de le savoir.
    Que pouvez-vous me dire au sujet du processus de ratification prévu dans le projet de loi? Je crois que ça a suscité certaines inquiétudes.
    Je vais répondre à la question, madame la présidente.
    Mon collègue l'a déjà dit, mais je tiens à le répéter. Le projet de loi vise à combler une lacune qui concerne la protection des droits des femmes, des enfants et des familles qui habitent dans les réserves. Il ne s'applique qu'aux Premières Nations qui ont une communauté dans une réserve, et c'est une première solution à certains des problèmes qui se posent.
    Le projet de loi ne les règle pas tous. Il a un objectif précis. Pendant les consultations, des femmes nous ont dit qu'elles voulaient participer à l'élaboration des lois de la communauté et mieux les connaître. Donc ça fait partie... c'était prévu dès le départ, mais ça a été changé et le projet de loi S-2 fixe un taux de participation plus bas...
    Les seuils...
    Oui, avant il fallait la double majorité. On nous a dit que c'était...
    Difficile à obtenir...
    ... dur à obtenir et que les Premières Nations ne pensaient pas pouvoir atteindre ce seuil. Donc, aujourd'hui, le taux de participation n'est que de 25 p. 100 des électeurs admissibles, qui sont âgés de plus de 18 ans et qui sont membres de la communauté, qu'ils habitent ou non dans la réserve. C'est ce qu'ils ont demandé parce qu'ils voulaient être sûrs que les membres de la communauté aient leur mot à dire dans l'élaboration des lois sur les biens immobiliers matrimoniaux.
    Il y a eu beaucoup de malentendus dans le passé, avec le processus de vérification qui a été supprimé. Il ne devait servir qu'à vérifier le processus, pas la loi à proprement parler. Je tiens à répéter que le ministère ou le ministre n'a pas son mot à dire eu égard à la révision, au désaveu ou à l'annulation d'une loi des Premières Nations. C'est quelque chose qui les concerne uniquement, elles et le gouvernement.

  (1255)  

    Madame Bateman.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci à vous tous de revenir nous voir. J'avais pourtant lu tous les documents, mais je me rends compte que je comprends beaucoup mieux la question maintenant.
    J'aimerais revenir sur une chose, et, si nous en avons le temps, parler des quatre phases de votre approche, qui me plaît beaucoup.
    Mais j'aimerais auparavant revenir sur le centre d'excellence, car d'après ce que j'ai compris, ça va être un outil auquel pourront avoir accès toutes les communautés des Premières Nations qui veulent faire ce qu'ont fait les 22 dont on a parlé, c'est bien ça?
    Oui, c'est exact.
    Il y a plusieurs choses à dire. D'abord, c'est vrai que les Premières Nations pourront s'adresser au centre pour avoir des conseils sur la façon d'élaborer des lois sur les biens immobiliers matrimoniaux, et aussi sur les règles fédérales provisoires. Autrement dit, si les Premières Nations préfèrent ne pas adopter leurs propres lois, quel est le dipositif par défaut que le projet de loi prévoit?
    Cela aidera les gouvernements des Premières Nations à faire un choix entre les deux — qu'est-ce que nous aimons et qu'est-ce que nous n'aimons pas dans chaque option? Autrement dit, si nous choisissons d'adopter nos propres lois, quelles dispositions aimerions-nous garder, lesquelles aimerions-nous adapter aux besoins de nos communautés?
    Je suis sûr que le centre d'excellence, en tant qu'institution autochtone, prendra modèle sur le Centre de ressources pour la gestion des terres des Premières nations, lequel aide les Premières Nations qui ont adhéré à la LGTPN à élaborer leurs propres lois, pas seulement celles qui concernent les biens immobiliers matrimoniaux. Ces lois appartiennent au domaine public. On peut les consulter. De cette façon, les Premières Nations, que ce soit par l'entremise du centre d'excellence ou directement, peuvent se renseigner sur les lois qui existent déjà.
    Je voudrais simplement ajouter, pour terminer, qu'il y a six mois, nous en étions à 20 lois sur les biens immobiliers matrimoniaux adoptées dans le cadre de la LGTPN; aujourd'hui, nous en sommes à 22. Le régime de la LGTPN est donc en expansion, et je sais que beaucoup d'autres Premières Nations travaillent actuellement à l'élaboration de leurs propres lois en la matière.
    Par conséquent, si le projet de loi est adopté, on verra combien d'autres Premières Nations, à partir des 22, vont adhérer au régime, mais je ne serais pas étonné qu'on atteigne le chiffre de 35 ou de 60 d'ici quelque temps. À ce moment-là, le centre d'excellence et les Premières Nations intéressées seront en mesure de faire des comparaisons entre toutes ces lois.
    Allez-y.
    Madame la présidente, il faut bien comprendre que les Premières Nations qui choisissent d'adhérer à la LGTPN ne sont alors plus assujetties à la Loi sur les Indiens et aux 34 dispositions relatives à la gestion des terres qui y figurent.
    Avec le projet de loi S-2, elles n'ont pas à choisir entre l'un ou l'autre. Elles peuvent élaborer leurs propres lois sur les biens immobiliers matrimoniaux, et le projet de loi continue d'exister séparément. Elles peuvent même, si elles le souhaitent, demander aux tribunaux d'appliquer leurs lois. Elles peuvent leur donner la forme qu'elles veulent. C'est à elles de décider. La seule condition, c'est que ces lois, comme toutes les lois canadiennes, doivent être conformes à la Charte canadienne des droits et libertés et, le cas échéant, à la Loi canadienne sur les droits de la personne.
    Il faut bien comprendre qu'il y a une énorme différence avec le régime de la LGTPN — mais l'objectif reste de combler les lacunes actuelles. C'est la même chose pour les Premières Nations qui décident de signer des ententes d'autonomie gouvernementale, car il leur appartient alors de prendre des mesures sur les biens immobiliers matrimoniaux.

  (1300)  

    Merci de nous avoir expliqué cette distinction, je l'ignorais. Je vous en remercie infiniment.
    Puisqu'il reste un peu de temps, voulez-vous nous parler de cette femme pour qui ce projet de loi aurait été très bénéfique s'il avait été en vigueur? Vous alliez commencer à en parler, en réponse à une de mes collègues, mais vous avez été interrompue. Madame Greene, je vous offre le reste de mon temps pour terminer votre récit; j'aimerais beaucoup vous entendre.
    La femme de ma communauté...?
    Je ne me souviens plus très bien... ça concernait les ordonnances de protection d'urgence?
    Oui.
    Le projet de loi prévoit que, si la personne violentée ne peut pas faire une demande elle-même, quelqu'un d'autre peut la faire à sa place, sous réserve de l'approbation du tribunal. Dans ce cas-là, la fille de cette femme se doutait que quelque chose n'allait pas lorsqu'on l'a empêchée de voir sa mère. À ce moment-là, si le projet de loi avait été en vigueur, elle aurait pu demander l'autorisation de remplir une demande d'ordonnance de protection d'urgence, ce qui aurait peut-être permis de désamorcer la crise.
    Je suis désolée, mais votre temps est écoulé. Merci.
    Je tiens à vous remercier d'être revenus devant notre comité, et de nous avoir prodigué des conseils et des explications que nous avons beaucoup appréciés.
    La séance est levée.
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