propose que le projet de loi , soit lu pour la troisième fois et adopté.
— Monsieur le Président, je suis très heureux d'amorcer le débat sur le projet de loi portant sur la dissimulation d’identité.
J'ai présenté ce projet de loi pour la première fois il y a un peu plus d'un an, le 3 octobre 2011. J'avais alors demandé aux députés de ce Parlement de défendre les propriétaires et exploitants d'entreprise, les travailleurs des services d'urgence, les villes et les citoyens de notre nation rendus vulnérables par les failles dans nos lois actuelles.
Je remercie chaudement tous les députés qui m'ont appuyé et qui ont permis à ce projet de loi d'arriver à cette étape cruciale. Aujourd'hui, je demande à nouveau le soutien de cette Chambre.
[Traduction]
Avant d'aborder les détails techniques de mon projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi , je demande aux députés de se reporter à l'été 2010. Une bonne semaine avant le sommet du G20, des activités de protestation pacifiques et légales ont débuté à Toronto. Les manifestations se sont déroulées dans le calme la plupart du temps jusqu'à ce qu'un groupe de vandales violents apparaisse. Le 26 juin, le premier jour du sommet, à peu près 10 000 personnes se sont réunies au centre-ville pour manifester. Il s'est détaché du groupe un noyau d'environ 200 membres du black bloc dirigés par des criminels endurcis vêtus de noir et le visage couvert. Pourquoi ces gens se sont-ils couvert le visage?
Le pays allait malheureusement se heurter à une nouvelle forme de criminalité insidieuse. Dans le dessein de nuire, ces voyous se sont mis à saccager des véhicules et des immeubles avec des armes qu'ils avaient cachées jusque-là. Des marteaux, des mâts porte-drapeau, des boîtes aux lettres et même des fragments du béton des rues ont été utilisés pour causer le plus de dommages possible. Le but n'était pas simplement de terroriser les commerçants et les résidants des rues Yonge, Queen Ouest et College. Les casseurs avaient aussi une intention cachée. Ils voulaient détourner l'attention de la police du groupe principal afin de permettre à leurs complices d'enflammer les manifestants pacifiques pour qu'ils prennent d'assaut le centre des congrès. Heureusement, les policiers, extrêmement bien formés, ne se sont pas laissé prendre et les membres du black bloc se sont changés et mêlés à la foule.
Au cours de la fin de semaine, et ce, en dépit des milliers de policiers déployés sur les lieux, ces émeutiers masqués ont réussi à rallier à leur émeute violente de nombreux citoyens habituellement pacifiques. Pour la première fois dans l'histoire de la ville de Toronto, les policiers ont été obligés d'utiliser des gaz lacrymogènes. Ils ont aussi dû utiliser des balles en caoutchouc et du gaz poivré. Au bout du compte, ces criminels ont causé des dégâts de l'ordre de 2,5 millions de dollars. Près de 100 policiers et 40 simples citoyens ont été blessés.
Les émeutiers masqués ont également marqué des points sur un autre front. Ils ont ravi l'attention des médias aux citoyens bien intentionnés qui exerçaient leurs droits de s'exprimer librement et de se réunir. À la suite de ce spectacle déplorable orchestré par de tels voyous, le maire de Toronto de l'époque, David Miller, a dit qu'il était injuste envers ceux qui étaient venus manifester de qualifier ces gens de manifestants. Ils étaient d'une tout autre étoffe.
Dans la foulée des manifestations entourant la réunion du G20, il est devenu évident que les policiers avaient besoin d'un nouvel outil pour appréhender ces commandos urbains masqués avant que d'innocents manifestants ne soient poussés à commettre des actes de destruction aussi aveugles. Cependant, un an plus tard, cet outil n'avait pas été mis à la disposition des policiers lorsque l'émeute de la Coupe Stanley a fait rage au coeur de Vancouver. Nous nous souvenons tous des images du 15 juin 2011, mais, pour saisir pleinement le désespoir lié à cet événement, je pense que nous devons reprendre les mots de Brian Hutchinson, Vancouvérois et éditorialiste, qui était sur les lieux. Je cite:
J'ai vu du sang dans nos rues; des gens par terre qui saignaient. Partout, des éclats de verre jonchaient le sol. On a mis le feu à des voitures de police. Les principaux ponts sont maintenant fermés pour empêcher l'accès au centre-ville. Le transport en commun est immobilisé. Il n'y a pas d'issue. D'autres policiers et d'autres pompiers arrivent des banlieues, mais trop tard, semble-t-il.
Au moment où j'écris ces lignes, le soleil vient de se coucher. Quelle honte, Vancouver.
Les dommages causés par les émeutiers à la ville et à environ 90 commerces se sont élevés à au moins 3 millions de dollars. De nombreux véhicules, y compris des voitures de police, ont été incendiés. Près de 150 personnes ont été blessées, dont neuf agents de police. On sent encore la peur et les torts causés à la réputation et à l'économie de Vancouver.
M. Tony Hunt, directeur général de la prévention des sinistres du magasin London Drugs qui a été pillé par plus de 300 criminels pendant l'émeute, a comparu plus tôt cette année devant le Comité de la justice et a décrit la scène de façon évocatrice. Je cite:
Trente employés ont assisté à la scène, horrifiés alors que les voyous, à force de donner des coups sur la vitre anti-effraction et le portail de sécurité en acier, se sont introduits dans le magasin. Les employés ont donc fui pour trouver refuge et se barricader dans notre pièce, au sous-sol, pendant que les voleurs ont volé l'équivalent de 450 000 $ de marchandises coûteuses et ont causé des dégâts physiques d'une valeur de 224 000 $.
Les biens matériels peuvent être remplacés, mais le traumatisme psychologique vécu par nos employés est tout à fait inacceptable [...]
L'inspecteur Steve Rai, de la police de Vancouver, a rapporté des faits semblables. Il a dit ceci devant le Comité de la justice:
Certains employés ont dû s'enfermer dans des arrière-salles ou des salles de sécurité, et certains d'entre eux sont toujours traumatisés. Il y a un commerce célèbre qui prépare des mélanges de café et qui était situé près du centre de l'émeute, et une pauvre victime a dû s'enfermer alors qu'elle entendait un groupe d'émeutiers à l'extérieur qui attaquait et détruisait son magasin. Ce type de situation s'est produit dans tout le centre-ville pendant l'émeute et a eu des répercussions sur la vie des gens.
Il s'agit d'un autre exemple où des criminels entraînent des citoyens ordinaires dans une opération de destruction.
Comme l'a dit aux journalistes le chef de police Jim Chu:
Ces personnes sont arrivées masquées et équipées de lunettes de protection et d'essence, et même d'extincteurs qui leur ont servi d'armes [...]
En dépit de l'excellent travail du service de police de Vancouver, qui a recensé 15 000 actes criminels distincts, très peu de personnes ont été mises en accusation. Malgré une présence médiatique importante, l'accès à des caméras de télévision en circuit fermé et la prolifération d'appareils mobiles, qui ont tous fourni d'innombrables images des méfaits, de nombreux criminels ont pu échapper à la justice.
Je ne saurais trop insister sur ce point: les criminels qui sont à l'origine des pires actes de violence ne sont pas des manifestants. Les mots me manquent pour qualifier les tactiques employées pour transformer un groupe de citoyens ordinaires en foule déchaînée. C'est insidieux. Dans le contexte déjà tendu d'une émeute, les instigateurs ont mis le feu aux poudres, enflammant la foule et provoquant une explosion de violence.
Les policiers nous ont affirmé que pour maintenir l'ordre public et assurer la protection des gens dans des situations aussi explosives, ils doivent avoir la possibilité d'écarter les criminels dès le début.
[Français]
Malheureusement pour les citoyens et les commerçants de Montréal, les policiers n'ont pas été autorisés à le faire avant les actes de vandalisme et de violence qui se sont produits cette année lors des manifestations étudiantes. Là encore, des criminels masqués se sont infiltrés dans la foule et ont incité les gens à la destruction en faisant du saccage dans les rues, en fracassant des fenêtres et en s'en prenant aux policiers.
Nous savons qu'il faut agir. On nous a dit ce que nous devions faire. C'est la raison pour laquelle j'ai présenté ce projet de loi et qu'il a reçu un aussi vaste appui tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de cette Chambre.
[Traduction]
Le projet de loi , loi sur la dissimulation de l'identité, créera deux nouvelles infractions au Code criminel. La première est un acte criminel, dont se rendraient coupables les personnes qui participent à une émeute en portant un masque ou un déguisement dans le but de dissimuler leur identité sans excuse légitime. Cette infraction serait assortie d'une peine maximale de 10 ans.
La deuxième infraction serait mixte. S'en rendrait coupable quiconque participe à un attroupement illégal en portant un masque ou un déguisement dans le but de dissimuler son identité sans excuse légitime. La peine maximale serait de cinq ans ou, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, l'auteur d'une telle infraction serait passible d'un maximum de six mois d'emprisonnement ou d'une amende pouvant atteindre 5 000 $.
Le projet de loi protégerait la population, la police et les manifestants légitimes. En outre, il protégerait la liberté de réunion et la liberté d'expression, justement parce qu'il ne s'appliquerait qu'aux casseurs qui enfreignent déjà la loi.
Je crois que les Canadiens font la nuance entre des manifestants honnêtes et des casseurs qui, cachés derrière leur masque, cherchent à mettre le feu aux poudres. Voilà pourquoi j'ai reçu un aussi grand soutien de la part des chefs et des services de police, des associations de quartier, des groupes de gens d'affaires et de particuliers. Les chefs de police de Calgary, Toronto, Vancouver et Victoria appuient tous les objectifs de cette mesure législative.
Le chef de police Chu a avalisé le projet de loi en déclarant ce qui suit:
Le service de police de Vancouver est heureux d'appuyer le projet de loi. Lorsque nous voyons des manifestants dans une foule qui mettent des masques et des cagoules, nous savons qu'il y a de fortes chances que la violence éclate sous peu.
Les services de police de Victoria souhaitent aussi que l'on s'attaque à ce problème. Dans une résolution rédigée cette année à l'intention de l'Association canadienne des chefs de police, le chef de police Jamie Graham exhorte le gouvernement à prendre des mesures à cet égard. Selon sa résolution, le fait d'être masqué permet à un délinquant de se fondre dans un groupe de gens pacifiques sans être identifié. Le délinquant peut alors commettre des actes illégaux en étant masqué puis enlever son masque ou son déguisement, et se perdre parmi les manifestants pacifiques. Le chef Graham a examiné le projet de loi que nous étudions aujourd'hui et il a affirmé:
En bref, cette mesure législative est une façon responsable et équilibrée de donner aux corps policiers les moyens de faire respecter la loi et d'assurer la sécurité du public.
Les membres de la Downtown Vancouver Business Improvement Association, qui représente les entreprises qui ont été les plus durement touchées par l'émeute dans cette ville, appuient unanimement mon projet de loi. Je cite l'association:
Le 15 juin 2011 est une journée sombre dans l'histoire de notre ville qui a traumatisé des milliers d'habitants, d'employés et d'entrepreneurs qui travaillent fort. Les dommages matériels subis ce soir-là et le pillage qui s'est produit ont entraîné des millions de dollars de pertes. L'image parfaite de Vancouver a été ternie par les actes de personnes dangereuses et irresponsables qui n'ont aucun respect pour les lois du pays.
Au nom de ce groupe, Charles Gauthier nous demande d'appuyer le projet de loi. Voici ce qu'il a dit:
Comme législateurs, vous devez appuyer le projet de loi d'initiative parlementaire C-309 pour faire renaître la confiance du public dans nos lois. Vous indiquerez ainsi aux pilleurs, émeutiers et autres criminels qui portent un masque ou un déguisement pour dissimuler leur identité qu'ils seront punis avec toute la rigueur de la loi.
[Français]
Tous ces groupes s'aperçoivent que, depuis des années, des criminels perfectionnent leurs tactiques du black-bloc dans des villes du monde entier. Ils savent aussi que d'autres pays se sont attaqués à des problèmes identiques à celui que la Chambre tente d'enrayer aujourd'hui.
[Traduction]
Les États-Unis, le Royaume-Uni et la France ont rédigé et approuvé des lois pour s'attaquer à des problèmes semblables. Ce sont des nations démocratiques comme le Canada qui appliquent et défendent avec vigueur le droit à la libre expression et à la liberté de réunion. Les tribunaux de ces pays ont confirmé la constitutionnalité de ces lois, avec raison, reconnaissant la différence entre une manifestation légale et une émeute illégale.
Les criminels masqués responsables des émeutes sont bien préparés lorsqu'ils arrivent sur les lieux d'une manifestation. Ils sont armés et motivés. Nous offrons à nos policiers l'équipement et la formation dont ils ont besoin pour faire respecter nos lois afin que nos rues demeurent sécuritaires. Nous savons cependant qu'il leur manque un outil qui les aiderait à prévenir les émeutes, à réduire leur intensité et à les maîtriser. Il leur manque un outil pour empêcher qu'une manifestation légale qui se déroule sans heurt ne dégénère au point de causer la destruction de tout un quartier. Il leur manque un outil qui protégerait les citoyens, les travailleurs des services d'urgence, les entreprises privées et les biens publics. Il leur manque un outil qui protégerait le droit des manifestants respectueux des lois de faire valoir leurs convictions. Il leur manque un outil qui préviendrait la violence dans les rues du pays. Donnons cet outil à nos policiers. Faisons-le maintenant. Faisons-le dès aujourd'hui.
:
Monsieur le Président, aucun projet de loi outre celui-ci, soit le projet de loi , n'a démontré avec autant d'évidence quel est le programme conservateur en matière de droit criminel, c'est-à-dire
a front page and then a bill. C'est aussi simple que cela.
Mon collègue a très bien expliqué la base, démontrant ainsi pourquoi les conservateurs se sont embarqués dans le projet de loi . Des émeutes ont eu lieu après un événement sportif, soit la victoire de la Coupe Stanley. Cet événement aurait dû être extrêmement heureux, et ce, même si l'équipe à domicile venait de perdre. Malheureusement, cela a dégénéré en émeute, et à cause de cette émeute, on a présenté ce projet de loi. Il faut savoir que c'est un projet de loi d'initiative parlementaire, car le gouvernement n'a pas osé le faire directement; il l'a donc fait faire indirectement.
Un problème survient actuellement et nous l'avons déjà soulevé à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi, c'est-à-dire qu'il faut avoir un Code criminel qui se tient solidement. C'est notre inquiétude à nous. Il n'est pas question d'empêcher que des émeutes se produisent ni de se ranger du côté des émeutiers ou des gens qui veulent faire de la casse. Le principal problème constaté, c'est que l'article 351 du Code criminel prévoit déjà la solution à ce problème. En effet, cet outil est déjà dans le coffre à outils des policiers. Ces derniers peuvent aller voir un procureur de la Couronne et faire déposer des accusations criminelles envers quelqu'un qui a commis un acte criminel en portant un masque.
Le paragraphe 351(2) se lit comme suit:
Déguisement dans un dessein criminel:
Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans quiconque, dans l’intention de commettre un acte criminel, a la figure couverte d’un masque ou enduite de couleur ou est autrement déguisé.
C'est assez large et cela couvre pas mal tous les cas mentionnés, entre autres, à l'article 65 du Code criminel, soit l'article visé par le projet de loi , concernant la participation à une émeute. Nous allons revenir directement à cet article. On voit clairement ce que mon collègue tente de faire: dire que, si une personne dissimule son identité et qu'elle participe à un attroupement illégal ou à une émeute, ce qui fait référence aux articles 63 et 64 du Code criminel, cette personne est coupable d'un acte criminel dans un cas et d'un acte punissable par déclaration sommaire dans l'autre.
C'est vrai que le paragraphe 351(2) ne couvre pas le deuxième style de cas couvert par le projet de loi de mon collègue. Or ce qui est aussi vrai, et cela a été nié par le gouvernement tout au long du processus en comité, c'est que l'article 351 du Code criminel ne s'applique pas. On l'a d'ailleurs encore entendu lors de réponses à des questions posées ici, en cette Chambre: il s'appliquerait plutôt dans des cas de vols à main armée ou des cas reliés à du vol. On n'y voit donc pas d'utilité dans les cas d'émeutes ou d'attroupements illégaux, alors qu'il a été prouvé en comité que ce paragraphe a tout à fait la latitude voulue pour couvrir ce genre de situations. C'est tellement vrai que le gouvernement, par la voix des députés conservateurs au Comité permanent de la justice et des droits de la personne, a présenté lui-même un amendement au projet de loi pour y coller la peine prévue au paragraphe 351(2).
Ceux qui étaient à la Chambre et qui ont participé au débat se rappelleront que le projet de loi initial du député de prévoyait une incarcération maximale de cinq ans. J'ai posé des questions en comité qui démontraient que le paragraphe 351(2) prévoit justement une sanction maximale de 10 ans à l'infraction de commettre un acte criminel en étant masqué ou déguisé. En effet, j'ai posé les questions suivantes: n'y a-t-il pas des risques que les tribunaux soient un peu mélangés? On sait à quel point les conservateurs n'aiment pas toujours les jugements des tribunaux. Une fois devant la cour, comment cela sera-t-il analysé? En vertu de quelles accusations la personne sera-t-elle accusée? Est-ce en vertu du paragraphe 351(2) ou plutôt en vertu du paragraphe 65(2)?
Ce n'est pas toujours évident. Justement, c'est pour cette raison que notre commentaire principal demeure toujours le même en ce qui concerne les projets de loi à saveur criminelle du gouvernement, c'est-à-dire qu'il faut faire attention et qu'il faut y aller, comme les anglophones le disent, en utilisant la piecemeal approach.
Cela consiste à prendre des petites dispositions ici et là et à les changer, parce qu'en voyant la une d'un journal, on s'est senti investi d'une mission et obligé de changer quelque chose. Or les outils sont parfois là, mais ils ne sont simplement pas utilisés. C'est la toute première chose à considérer. C'est vrai que cela ne couvre pas les actes punissables par déclarations sommaires, mais est-ce dans cette direction qu'on veut se diriger? Selon le libellé de ce projet de loi, j'en doute.
La façon dont le député a rédigé son projet de loi pose effectivement problème. Comme celui-ci couvre des infractions similaires à celles que l'on retrouve aux paragraphes 65(1) et 351(2) du Code criminel, ce qui est problématique, c'est qu'on n'ait pas du tout utilisé les mêmes mots. À cet égard, on a proposé un amendement pour au moins tenter d'établir une logique dans le Code criminel, mais le gouvernement en place a absolument refusé toute espèce d'amendement qui aurait pu se tenir debout.
Par contre, en changeant la sentence maximale à l'image du paragraphe 351(2), les conservateurs ont admis que ce qu'on disait en comité ne devait pas être si imbécile que cela. On disait effectivement qu'il y avait une corrélation à faire entre le paragraphe 351(2) et ce que le député tentait de démontrer au moyen de son projet de loi, particulièrement pour les cas d'émeute. Par amendement, on y retrouve maintenant exactement la même sentence.
Cela étant dit, selon le projet de loi devant nous:
Quiconque commet l’infraction prévue au paragraphe (1) en portant un masque ou autre déguisement dans le but de dissimuler son identité sans excuse légitime est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans.
Il s'agit là de l'autre problème que je veux aborder. Les policiers ont dit au comité qu'ils ont effectivement besoin d'outils. Je veux bien les croire. On est tous témoins de la situation, lorsqu'on voit des émeutes à la télévision, qu'elles se passent à Montréal, à Toronto ou à Vancouver. Ces événements sont absolument disgracieux. Personne n'est favorable à ce genre d'événements. Personne ne pense que la liberté d'expression signifie qu'on est libre de casser des vitrines, de frapper sur des gens ou de faire quoi que ce soit du genre. La liberté d'expression, qui est protégée dans la Charte canadienne des droits et libertés, ne couvre pas ce type d'événements. Par contre, notre Charte dit clairement qu'on a une liberté d'expression.
Si ma collègue veut faire partie d'une manifestation et que ce qu'elle veut porter lui couvre le visage, peu importe ce que c'est, il ne s'agit pas en soi d'une infraction car c'est l'expression d'une opinion. C'est une façon de s'exprimer. Il est là le danger.
Plusieurs témoins nous ont carrément dit que de telles mesures décourageraient certainement beaucoup de gens d'exprimer leur opinion. Certains de mes collègues pourront approfondir encore plus ce sujet.
Quand on fait partie d'une manifestation légale et paisible, qu'on porte un déguisement comme un masque à l'effigie d'un premier ministre parce qu'on est en train d'exprimer son opinion dans le cadre de la manifestation, et que la police déclare tout à coup que cette manifestation est devenue une émeute ou un attroupement illégal, il n'est pas facile, pour les gens qui défilent à la fin de la manifestation de savoir que l'émeute a été déclarée « attroupement illégal » et qu'ils se sont désormais en contravention du Code criminel et passibles de poursuites.
Or il y a là un renversement du fardeau de la preuve extrêmement dangereux. La différence majeure entre le paragraphe 351(2) et les dispositions proposées par le député dans son projet de loi, c'est qu'il y a un renversement du fardeau de la preuve et qu'il appartiendra à la personne accusée de démontrer qu'elle avait une excuse légitime.
Les conservateurs ont même refusé les amendements visant à définir les excuses légitimes, comme une burqa ou quelque chose à connotation religieuse, par exemple. On ne sait pas ce que veut dire « excuses légitimes » au sens du projet de loi , tel qu'il est présenté.
Les lacunes majeures de ce projet de loi créent des inquiétudes profondes. L'étude en comité n'a absolument pas calmé ces inquiétudes. Tout ce à quoi elle a servi, c'est à faire admettre de façon indirecte au gouvernement que l'article existait effectivement déjà, pour y coller une sentence équivalente.
:
Monsieur le Président, je suis content de participer au débat sur le projet de loi , qui apporterait des modifications au Code criminel en ce qui concerne les émeutes et les attroupements illégaux auxquels se livrent certains individus qui masquent leur visage pour éviter qu'on les reconnaisse et que des accusations soient portées contre eux.
Comme tous les députés, les images des émeutes de Vancouver et le mépris des lois qui en ressort m'ont troublé et attristé. Je peux comprendre que le parrain du projet de loi veuille présenter une mesure législative qui permettrait de réagir aux incidents de ce genre. Malheureusement, comme le comité s'en est rapidement rendu compte, la mesure législative dont nous sommes saisis ne résoudra pas le problème, et ce, pour les raisons suivantes. Rien ne laisse croire que les émeutes de Vancouver ne se seraient pas produites, que les policiers auraient pu agir différemment et que les individus impliqués auraient été condamnés à des peines plus sévères si cette mesure législative avait été adoptée l'an dernier.
Les policiers ont dit au comité que les émeutiers qui dissimulent leur visage sont un problème non seulement parce qu'ils font souvent partie des participants les plus violents, mais aussi parce qu'ils sont difficiles à identifier et, par conséquent, qu'on peut moins facilement les traduire en justice. Les services de police du Canada forment donc davantage les unités chargées de la sécurité publique et leur allouent plus de ressources. Ils élaborent de nouvelles façons de réagir aux foules incontrôlées et mettent en commun leurs pratiques exemplaires. Je félicite les services d'urgence du Canada des mesures qu'ils prennent, car ils font ce qu'il faut pour lutter efficacement contre les émeutes.
Les modifications qui seraient apportées au Code criminel ne sont pas nécessaires parce qu'il existe déjà des dispositions juridiques contre les émeutes et les soulèvements. Comparons le projet de loi dont nous sommes saisis avec les dispositions actuellement en vigueur. D'après l'article 64 du Code criminel, une émeute est « un attroupement illégal qui a commencé à troubler la paix tumultueusement ». On peut donc lire à l'article 65 que « [q]uiconque prend part à une émeute est coupable d’un acte criminel [...] ».
La notion d'acte criminel est capitale. Le paragraphe 351(2) du Code criminel se lit comme suit: « Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans quiconque, dans l’intention de commettre un acte criminel, a la figure couverte d’un masque ou enduite de couleur ou est autrement déguisé. » Le Code criminel fournit donc déjà aux forces de l'ordre les outils législatifs nécessaires pour composer avec les émeutiers qui se cachent le visage. Le projet de loi n'apporte rien de plus.
Le parrain de la mesure, le député de , a déjà déclaré à la Chambre qu'elle diffère de la loi actuelle en ce qu'elle permet aux forces policières d'agir de façon préventive contre les gens qui, au cours d'une émeute, dissimulent leur identité. Le projet de loi vise, selon les propres mots du député, les « fauteurs de troubles déguisés qui persistent à flâner ».
Une analyse approfondie révèle que le projet de loi ajouterait un paragraphe à l'article 65 du Code criminel et que, par conséquent, il ne pourrait viser que les auteurs d'une infraction au titre de la version actuelle de l'article 65. Autrement dit, il faut déjà participer à une émeute, ce qui constitue une infraction en vertu du Code criminel, pour que le nouveau paragraphe s'applique. Le membre cherche à intégrer au Code criminel une disposition passe-partout pour prévenir les émeutes masquées, mais ce n'est pas ce que propose le projet de loi C-309, et même si c'était le cas, ce dernier laisserait fort à désirer. En effet, tout projet de loi qui autoriserait que des personnes soient mises en détention et encourent un maximum de 10 années d'emprisonnement simplement pour s'être masqué le visage en public serait en porte-à-faux complet avec la Charte et les libertés civiles.
Si les forces de l'ordre devaient l'interpréter de cette façon, comme le désire apparemment le député de , le projet de loi serait vraisemblablement l'objet de contestations judiciaires au motif que son application contreviendrait à l'article 2 de la Charte des droits et libertés, qui porte sur la liberté d'expression, ou encore à l'article 7, qui concerne la protection de « la vie [...] la liberté et [...] la sécurité de [l]a personne ».
Modifier la loi pour permettre les arrestations préventives des personnes qui portent un masque, ce que semblait vouloir le député, d'après ce qu'il a lui-même laissé entendre, est suspect sur le plan constitutionnel. Modifier la loi sans permettre de telles arrestations, comme le fait le projet de loi , est inutile. Soyons clairs, le Code criminel interdit de participer à une émeute le visage couvert. Ceux qui le font sont poursuivis par les procureurs et déclarés coupables par les juges. Rien ne permet de croire que l'ajout des dispositions du projet de loi au Code criminel changerait les choses ou aurait changé le cours des émeutes survenues à Vancouver.
Je comprends que les députés et les auditeurs puissent se demander pourquoi, si j'affirme que le projet de loi est inutile et n'apporte rien, je tiens quand même à exprimer mon opposition. C'est que, dans sa formulation même, le projet de loi pose problème sur le plan de la Charte. Il est indiqué que la mesure s'applique à ceux qui dissimulent leur identité « sans excuse légitime », mais la loi ne définit pas cette expression. Les députés conviennent tous, j'en suis certain, que ce projet de loi n'est pas censé viser les personnes qui se couvrent le visage pour des motifs religieux ou les amateurs de sport qui se peignent le visage aux couleurs de leur équipe. Si l'on n'apporte pas davantage de précisions, cependant, je crains qu'on risque, sans le vouloir, d'exposer ces personnes à des poursuites en vertu du projet de loi.
Manifestement, si une personne qui porte en toute bonne foi un voile qui lui couvre le visage et que cette personne participe à un rassemblement qui tourne à l'émeute, elle devrait être accusée d'avoir participé à une émeute. Il s'agirait là d'une conséquence imprévue. Elle ne devrait pas être l'objet de poursuites en vertu d'une loi qui vise des provocateurs masqués. C'est pourquoi il serait préférable d'ajouter une disposition afin de clarifier l'exemption pour « excuse légitime » de façon à inclure les objets qui couvrent le visage qui font partie des pratiques traditionnelles d'une culture ou d'un groupe religieux, comme cela a déjà été proposé par le membre libéral du comité. Une telle définition démontrerait clairement que le Canada tient à protéger la liberté de religion tant ici qu'à l'étranger.
Des collègues ont également soulevé certaines préoccupations au sujet de la liberté d'expression qui vont au-delà des questions religieuses. Par exemple, ceux qui se rassemblent pour protester contre un leader politique et qui portent un masque à l'effigie de ce leader ne posent pas nécessairement ce geste pour cacher leur identité, même si tel est le résultat. Au bout du compte, même si le projet de loi ne s'attarde pas à ces scénarios, il n'en demeure pas moins qu'il criminalise un geste qui l'était déjà.
Il ne fait aucun doute que les émeutes constituent un phénomène très troublant et que le Canada doit s'y attaquer avec sérieux et efficacité. Pour les parlementaires, cela signifie que nous devons appuyer les efforts des services de police visant à élaborer des méthodes de formation plus efficaces et de meilleures techniques de contrôle des foules, ce qui suppose l'accroissement et le renforcement des ressources. Ainsi, les services de police seraient en mesure d'améliorer la communication avec les fêtards et les manifestants, de partager les meilleures pratiques et d'augmenter le nombre de policiers qualifiés disponibles face à de grands rassemblements publics. Nous devons faire en sorte que ceux qui enfreignent la loi en incitant à l'émeute tout en dissimulant leur identité en subissent les conséquences.
Ce n'est toutefois pas en adoptant une loi redondante que nous contribuerons à régler le problème. On risque de créer un nouveau problème en rédigeant le projet de loi de telle façon qu'il pourrait enfreindre involontairement la Charte canadienne des droits.
C'est pourquoi nous hésitons à appuyer ce projet de loi. Nous invitons tous les députés à reconnaître que le Code criminel vise déjà ceux qui portent un masque pour participer à une émeute. Il est de notre devoir, en tant que parlementaires, de corriger les lacunes qui se trouvent dans la loi, mais nous devons également être conscients que la loi fait ce qu'elle est censée faire et que la question relève d'un tout autre débat.
En conclusion, même si, comme nos collègues, nous espérons ne pas avoir à déplorer des émeutes et des attroupements illégaux causant des dommages matériels, des blessures ou même pire, nous estimons que cette mesure législative n'atteint pas l'objectif visé, et ne nous permet même pas de nous en rapprocher.
:
Monsieur le Président, c'est toujours un plaisir de prendre la parole à la Chambre, surtout un lundi matin, avec un collègue qui, comme moi, représente une magnifique circonscription. La sienne est dominée par les Rocheuses et dans la mienne se trouve Nose Hill Park. Toutefois, ce n'est malheureusement pas le sujet du débat d'aujourd'hui.
Je suis ici pour donner mon appui au projet de loi , présenté plus tôt cette année. Représentant une circonscription au coeur de l'un des plus grands centres urbains du pays, je sympathise avec les résidants et les propriétaires d'entreprise qui ont été touchés par les actes de destruction récents perpétrés lors des émeutes survenues dans les régions de Toronto, Vancouver et Montréal.
Une des grandes priorités du gouvernement est de préserver la sécurité des citoyens. Dans ces trois villes, les agents publics qui prennent de risques pour protéger les passants innocents, les habitations et les biens des propriétaires d'entreprise se sont conduits de manière exemplaire.
Comme l'ont mentionné le député de et le lors de débats précédents à la Chambre, le projet de loi doterait la police d'un outil efficace pour mieux défendre les citoyens contre les participants à une émeute qui choisissent d'employer la violence tout en veillant à ce que les Canadiens qui choisissent de s'exprimer pacifiquement soient mieux protégés par la loi.
Toutefois, certains à la Chambre ne pensent pas que la police devrait disposer de cet outil pour protéger la population. Par exemple, le 7 mai dernier, la députée de a déclaré sur Twitter: « Le ministre de la Justice annonce qu'il appuiera un projet de loi d'initiative parlementaire visant à ériger en infraction le fait de porter un masque lors d'une manifestation. Finis les ours polaires lors des marches de sensibilisation aux changements climatiques. »
Même s'il y aurait tellement à redire sur cette déclaration, à commencer, bien franchement, par le ton, je vais d'abord préciser que la députée en question semble avoir de la difficulté à faire la distinction entre les émeutes, qui sont illégales et sur lesquelles porte le projet de loi, et les manifestations pacifiques, qui sont légales. Je vais expliquer la différence entre les deux pour qu'elle puisse comprendre.
Comme nous avons pu le voir récemment à Toronto, à Montréal et à Vancouver, ceux qui mettent le feu à des objets, les lancent à des policiers et détruisent délibérément des biens publics et privés posent des gestes propres aux émeutes ou aux attroupements illégaux. Un attroupement de personnes qui choisissent de manifester paisiblement, en respectant la loi, pour appuyer une cause en particulier, par exemple les changements climatiques, ne serait pas considéré comme une émeute ou un attroupement illégal. Étant donné que j'aime discuter avec la députée dans cette enceinte et dans d'autres tribunes, et puisque je la connais bien, j'ai du mal à croire qu'elle ne comprend pas cette distinction et qu'elle décide d'adopter une attitude désinvolte à l'égard du véritable objectif de cette mesure législative. En fait, si on lit le projet de loi, on constate bel et bien qu'il ne ciblerait pas les personnes qui portent un masque ou un déguisement dissimulant leur identité alors qu'ils participent à des manifestations légales, à des marches, à des rassemblements ou à d'autres activités communément associées à l'exercice de la liberté de parole et d'expression dans le cadre d'un rassemblement légal.
Pour que les choses soient tout à fait claires, je vais répéter que les dispositions de ce projet de loi ne viseraient pas les personnes qui manifestent pacifiquement ou participent à une activité respectueuse de la loi. Les dispositions de la mesure législative viseraient les personnes qui portent un masque pour dissimuler leur identité lorsque la loi contre les émeutes a été invoquée ou lorsqu'un attroupement est jugé illégal, conformément au Code criminel du Canada.
Je vais maintenant fournir des éclaircissements sur d'autres idées fausses véhiculées par ma collègue de au sujet du projet de loi.
Le 19 septembre, la députée est retournée sur Twitter et a écrit ceci: « Si une activité pacifique devient incontrôlable et que vous portez un foulard parce que c'est l'hiver, allez-vous faire 20 ans de prison? » Cet énoncé est faux, tout à fait trompeur et exagéré. Cependant, il s'agit d'un exemple parfait d'argument fallacieux utilisé pour critiquer le projet de loi. Je vais passer en revue la logique douteuse de cet énoncé ainsi que de certaines autres déclarations similaires faites à la Chambre aujourd'hui.
Comme je l'ai déjà mentionné, pour que le projet de loi puisse s'appliquer, l'accusé doit porter un masque ou un déguisement dans le but précis de dissimuler son identité dans le cadre d'une émeute ou d'un attroupement illégal.
Cela dit, qu'en est-il d'un rassemblement qui se transforme en émeute? À cela, je répondrai que la meilleure façon d'éviter de participer à une émeute, c'est encore de ne pas y participer. Je ne dis pas cela en plaisantant ou de manière désinvolte, car j'ose espérer que la majorité de nos électeurs sont en mesure de faire la distinction entre la participation à une manifestation légale et pacifique et la participation à une émeute, comme je l'ai souligné dans mon intervention, surtout que depuis longtemps, dans notre pays, les citoyens sont fiers de manifester pacifiquement pour réclamer des changements.
Il semble que je doive aussi aborder la préoccupation de la députée à l'endroit des foulards. Ce projet de loi concerne précisément les accusés qui portent un déguisement sans excuse légitime. C'est ce qui est au coeur de certains arguments qui ont été avancés ce matin à la Chambre. Le fait de se protéger des éléments durant un attroupement légal constitue une excuse légitime pour porter un foulard. D'un autre côté, le fait de dissimuler son identité pour se prêter à des actes violents, comme endommager des biens ou attaquer des policiers, que ce soit durant une émeute ou un attroupement illégal tel que défini par le Code criminel canadien, ne constituerait pas une excuse légitime pour porter un foulard.
La journée où elle a émis son commentaire sur Twitter, la députée a tenté de vider le projet de loi de sa substance, en proposant toute une série d'amendements, non pas pour proposer des idées qui amélioreraient le projet de loi ou susciteraient le débat, mais pour remplacer les articles par des pages blanches. Ce faisant, la députée démontre qu'elle n'a pas compris que le projet de loi comblerait une lacune dans la loi actuelle.
Je le répète, à l'heure actuelle, une personne qui porte un masque ou un déguisement avec l'intention de commettre un acte criminel, y compris prendre part à une émeute, pourrait être arrêtée aux termes du paragraphe 351(2) du Code criminel et être passible d'une peine d'emprisonnement de 10 ans. Toutefois, le paragraphe 351(2) ne s'applique pas aux infractions punissables par voie de déclaration sommaire de culpabilité. Ainsi, le Code criminel ne fait pas expressément référence au cas des personnes qui participent à un attroupement illégal tout en portant un masque ou un déguisement dans le but de dissimuler leur identité sans excuse légitime.
Certains députés ont tenté de faire valoir, aujourd'hui, que la loi actuelle couvrait déjà ces infractions. Mais comme je viens de l'indiquer, les témoignages des responsables de l'application de la loi nous confirment que ce n'est pas le cas. D'après eux, il est difficile d'appliquer ce paragraphe parce qu'il a pas été conçu pour les situations de ce genre. À l'origine, il visait plutôt à couvrir des cas comme les vols à main armée. Pour illustrer ce fait, j'aimerais signaler des données tout à fait essentielles: 15 000 actes criminels distincts ont été recensés pendant l'émeute de Vancouver et dans plusieurs cas, des preuves sur vidéo montraient qui était l'auteur du crime. Mais seules quelques accusations, un nombre infime, ont été portées en vertu de cet article, parce qu'il couvre seulement les infractions punissables par mise en accusation. Voilà pourquoi ce projet de loi est un outil très important pour les responsables de l'application de la loi.
C'est donc dire que, quand un émeutier sait que son visage sera capté par un enregistrement vidéo ou un téléphone cellulaire et qu'il se masque pendant une émeute, nous disposerons maintenant d'un nouveau moyen de le tenir responsable de ses actes, un moyen plus clair que les dispositions actuelles de la loi.
Heureusement, plusieurs députés ont reconnu que ce projet de loi important méritait qu'on tienne un débat au lieu de le démolir. Et cet appui ne vient pas que des conservateurs. À titre d'exemple, la dernière députée à représenter la circonscription de Victoria a voté en faveur du projet de loi à l'étape de la deuxième lecture, tout comme 189 autres députés. Ils reconnaissent tous qu'il faut s'attaquer à ce problème et débattre du projet de loi, au lieu d'envoyer des messages désinvoltes sur Twitter et de tenter de le démolir.
L'approbation du projet de loi à l'étape de la deuxième lecture a permis au Comité de la justice de la Chambre d'examiner plus en détail la question et de prendre connaissance des commentaires de l'un des électeurs de l'ancienne députée de Victoria, le chef de police Jamie Graham. Il a déclaré que cette mesure législative était une façon progressiste, responsable et équilibrée de donner aux corps policiers les outils législatifs dont ils ont besoin pour faire respecter la loi et pour assurer la sécurité du public. C'est ainsi que s'est exprimé un de nos responsables chevronnés qui compte plus de 43 années d'expérience dans le domaine de l'application de la loi.
Lors de son témoignage, le chef de police Graham a déclaré que, récemment, le tribunal avait confirmé la validité d'une loi semblable adoptée par l'État de New York et que le Royaume-Uni et la France avaient adopté des lois analogues, en 2001 et en 2009 respectivement, pour répondre à des inquiétudes du même genre.
Il s'agit d'un outil fondamental que, selon le chef de police Graham, nous devons accorder aux responsables de l'application de la loi pour les raisons que j'ai énumérées plus tôt. Voici ce qu'il a déclaré devant le comité:
Nous utilisons des tactiques particulières pour exercer un effet dissuasif. Nous faisons ce que le gouvernement ou l'administration nous demande de faire. Je fournis la formation et le matériel aux agents de la paix, et le gouvernement fournit les outils législatifs. Tout ce que je dis, c'est que ce projet de loi serait un outil supplémentaire extrêmement utile [...]
Nous avons vu à la télévision ce qui s'est passé lors des émeutes survenues à Toronto, à Vancouver et à Montréal. Nous avons vu des gens commettre délibérément des actes de violence et infliger des blessures physiques à des agents de maintien de l'ordre. Nous avons également pu voir les dommages que ces actes avaient causés aux entreprises.
J'ose croire qu'après avoir été témoin de toutes ces choses, aucun député ne votera de manière à empêcher la police de disposer de cet outil qui l'aidera à protéger la population, les forces de l'ordre et les manifestants légitimes, c'est-à-dire les personnes qui défendent la valeur canadienne que constitue le fait de manifester pacifiquement.
Comme je l'ai déjà affirmé à la Chambre, en qualifiant ce comportement d'antithèse des libertés d'expression et de réunion pacifique, le projet de loi fait ressortir les valeurs canadiennes que sont la liberté, la tolérance, le respect et la primauté du droit. Il fournit également un soutien supplémentaire aux gens qui travaillent en première ligne afin de défendre ces valeurs. C'est pourquoi je demande à tous les députés d'appuyer l'adoption de ce projet de loi.
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Monsieur le Président, je vous remercie de la précision que vous avez apportée. Je vais profiter pleinement de mes six minutes.
Je suis vraiment estomaqué par le discours de la secrétaire parlementaire. Elle a fait complètement l'impasse sur un problème très important, soit l'inversion du fardeau de la preuve, qui est une conséquence du projet de loi du député de . Je ne présumerai pas de ce que les tribunaux en feront, mais cette inversion risque d'entraîner plusieurs problèmes et d'invalider, en tout ou en partie, les articles, les modifications que le député de aura faites.
Je ne reviendrai pas sur cet aspect, mais je vais simplement signaler, comme ma collègue de l'a fait, que le projet de loi actuel est malheureusement redondant et largement perfectible. Quelqu'un peut se retrouver involontairement dans un attroupement illégal ou dans une émeute, tels que définis aux articles 63 à 66. Il peut être victime des événements et appréhendé. C'est arrivé à de nombreuses personnes, à d'honnêtes citoyens qui voulaient simplement exprimer leur opinion sur la place publique et s'offrir la possibilité de participer à notre société, à l'exercice démocratique, ce qui est fondamental et important.
Je vais donner un exemple très célèbre dans le contexte québécois. Un professeur de philosophie s'était déguisé en panda géant, l'Anarchopanda. Il va sans doute continuer à le faire s'il y a d'autres événements. Le but principal de ce professeur de philosophie était de désamorcer des situations problématiques et potentiellement violentes en donnant des câlins à la ronde, autant à des manifestants qu'à des policiers. Plusieurs policiers, d'ailleurs, ont accepté d'être câlinés afin de désamorcer les crises potentielles.
En inversant le fardeau de la preuve, on exigerait de l'Anarchopanda, comme de n'importe quel manifestant légitime masqué, de fournir une excuse légitime. L'Anarchopanda, qui était malheureusement présent à un événement qui a dégénéré en émeute, pourrait, à la limite, être condamné à une peine allant jusqu'à 10 ans de prison. Il est absolument incroyable que le simple fait de porter ce déguisement dans un but avoué d'aider à la poursuite d'une manifestation tout à fait légitime, qui est un droit fondamental dans notre société, puisse mener à une condamnation pouvant aller jusqu'à 10 ans de prison. C'est la peine imposée pour des activités criminelles comme le financement du terrorisme, le trafic d'armes, l'exploitation sexuelle ou l'agression sexuelle.
Jusqu'où irons-nous? Ce sont des exemples que je cite très rapidement pour démontrer l'absurdité du projet de loi tel qu'il est et qui n'a pas pu être amendé. On a présenté un amendement constructif afin que le port d'un masque soit criminalisé de manière cohérente avec ce qui est prévu à l'article 351 du Code criminel.
Les partis de l'opposition et certains groupes ne sont pas les seuls à s'opposer à ça, et avec raison. L'Association du Barreau canadien a clairement dit qu'on peut dissimuler son identité pour diverses raisons légitimes, notamment pour protéger des membres de sa famille ou des amis dans un autre pays ou pour d'autres motifs innocents, y compris des motifs médicaux et religieux. Le Barreau du Québec a été dans le même sens en disant que les personnes pouvaient avoir une très bonne raison de dissimuler leur identité ou de porter un masque pour exprimer quelque chose.
Advenant le cas où le projet de loi serait adopté, quels problèmes entraînerait-il quant au droit fondamental d'expression? Il risque d'être invalidé. La modification supplémentaire apportée au Code criminel risque d'être invalidée par les tribunaux, parce qu'elle touche à nos libertés fondamentales et rate son objectif initial de contrer les actes criminels lors d'attroupements illégaux.
Je demande à l'ensemble des députés de la Chambre de voter contre ce projet de loi, et ce, afin d'éviter un dérapage. Malheureusement, ce serait une conséquence inacceptable pour des milliers d'innocents de notre société.
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Monsieur le Président, une fois de plus, je félicite tous les députés pour cet échange d'idées vigoureux concernant ce projet de loi.
Je sais que la vaste majorité des projets de loi d'initiative parlementaire qui sont présentés à la Chambre ne se rendent jamais jusqu'à cette étape, mais ils sont quand même dans l'intérêt du public, puisqu'ils font progresser les débats nationaux sur diverses questions. C'est déjà en soi un résultat valable.
Cependant, sur cette question, il ne suffit pas de faire avancer le débat. Les auteurs des délits que le projet de loi vise à criminaliser ne participent pas à des manifestations en toute légalité. Il n'est pas question de pandas géants ou de Frosty le bonhomme de neige, comme certains députés l'ont laissé entendre. Il n'est pas question non plus du phoque de l'association PETA pour le traitement humain des animaux. Je ne cherche pas à criminaliser les pandas, les bonshommes de neige ou les phoques.
Aujourd'hui, je veux que nous nous occupions du vandalisme et de la violence perpétrés par pure provocation. Le projet de loi concerne la destruction de propriétés publiques et privées ainsi que les agressions par des personnes armées. En plus d'être coupables de ces crimes, ces individus jettent le discrédit sur les citoyens honnêtes et bien intentionnés qui veulent se prévaloir de leur liberté d'expression et de réunion.
Malheureusement, nous sommes aux prises avec un danger réel et croissant. Les membres du black bloc incitent des manifestants à prendre part à des émeutes partout au Canada et dans des grandes villes d'autres pays. Leur tactique s'est raffinée et a été enseignée à de nouvelles générations de criminels radicaux. Ils savent repérer et exploiter les échappatoires dans nos lois qui leur permettent d'échapper à la justice. Il y a, je le répète, des échappatoires dans nos lois.
Ils sont capables de tirer parti efficacement de cette situation, et ils continueront à enseigner ces tactiques à de nouvelles recrues. Ils continueront de provoquer des émeutes, de s'en prendre aux propriétaires d'entreprise, d'attaquer des travailleurs des services d'urgence et de détruire des propriétés publiques tant et aussi longtemps qu'ils penseront avoir de bonnes chances de s'en tirer sans conséquence.
Pendant ce temps, nous continuons d'envoyer notre police et nos intervenants d'urgence dans ces situations instables. Si nous conservons les échappatoires telles quelles dans nos lois, nous demandons à ces intervenants d'attendre que les émeutiers soient déchaînés avant d'agir. Et pourtant, nous leur demandons aussi de s'arranger pour qu'il n'y ait aucun dommage aux propriétés et pour que personne ne soit blessé, ni parmi les intervenants, ni parmi les personnes armées qui les attaquent. C'est une tâche impossible. Aussi bien leur demander d'empêcher la marée de monter.
Ces intervenants ne sont pas que des secouristes en uniforme. Ce sont des mères et des pères. Il s'agit de citoyens modèles qui risquent leur vie pour protéger celle des autres. Et ils sont là parce qu'il faut quelqu'un pour faire leur travail. Bien honnêtement, ils sont l'élite de notre société, et je leur lève mon chapeau.
Mais ce n'est pas assez. Nous ne pouvons pas nous contenter de rester assis ici, des mois plus tard, à des centaines de kilomètres des scènes de capharnaüm ou de désordre que certaines brutes armées ou membres du crime organisé ont causées, à ne rien faire d'autre que hausser les épaules. Nous ne pouvons pas nous contenter de commander un rapport sur la question. Nous ne pouvons pas nous contenter, émeute après émeute, de blâmer un petit groupe de casseurs pour détourner aussitôt notre attention du problème.
J'en ai assez, les députés en ont assez, les secouristes en ont assez et les Canadiens en ont très certainement assez. Le projet de loi que je propose aujourd'hui aux députés fournirait aux policiers un outil crucial pour qu'ils puissent faire leur travail, protéger le public et rentrer à la maison sains et saufs.
L'outil en question ne restreint d'aucune façon le droit qu'ont les citoyens de s'exprimer ou de se réunir pacifiquement. Il vise au contraire à renforcer ces droits, car il fera en sorte que ceux qui participent à un rassemblement dans le but de semer le désordre soient traînés devant les tribunaux et perdent l'envie d'agir comme ils le font. Les gens qui participeront — dans un but pacifique — à un rassemblement, à une manifestation ou à une autre activité du genre pourront dès lors le faire librement et sans craindre pour leur sécurité.
Mon projet de loi permettra simplement au gouvernement de s'acquitter de son obligation première, à savoir protéger les citoyens canadiens. Or, c'est le sens même de la justice de ces derniers qui est froissé quand ils voient que les criminels radicaux qui sont derrière de tels actes de violence gratuite s'en tirent parce qu'ils sont masqués.
Les Canadiens réclament une solution à long terme, et c'est exactement ce que leur propose le projet de loi , qui aidera les policiers à mieux protéger le public. Je sollicite donc l'appui de tous les députés.