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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 062 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 12 mai 2015

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Mesdames et messieurs, bonjour. Il est 15 h 30 et nous allons débuter notre réunion.
    Cet après-midi, nous entendrons deux groupes de témoins. Le premier se compose de trois témoins. Nous entendrons sans tarder notre premier invité, M. Anthony Phillips, qui se joint à nous par vidéoconférence.
    Vous avez la parole, monsieur.
    Je tiens à remercier le comité de m'avoir invité à prendre la parole sur la question de la santé mentale et à vous expliquer comment le gouvernement du Canada appuie la recherche sur les besoins des personnes aux prises avec la maladie mentale et le mésusage de substances.
    Comme vous le savez, les Instituts de recherche en santé du Canada, ou IRSC, sont l'organisme du gouvernement du Canada chargé de financer la recherche en santé répondant à des critères d'excellence dans les universités, les hôpitaux et les centres de recherche partout au Canada.
    Pour réaliser leur mandat, les IRSC soutiennent la recherche selon une structure interdisciplinaire unique constituée de 13 instituts virtuels. La mission de l'Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies, dont je suis actuellement le directeur scientifique, est de favoriser l'excellence dans l'innovation et une recherche responsable sur le plan de l'éthique pour améliorer nos connaissances du fonctionnement et des troubles du cerveau et de l'esprit, de la moelle épinière, des systèmes sensoriels et moteurs, de même que sur la santé mentale, les maladies mentales et toutes les formes de dépendance.
    Entre 2006-2007 et 2013-2014, les IRSC ont investi plus de 475 millions de dollars dans la recherche en santé mentale et les troubles de comportement connexes. Cela inclut des investissements dans un certain nombre de grandes initiatives qui visent à répondre aux besoins de populations fortement sujettes à ces troubles. Un bon exemple est la principale initiative des IRSC, la Stratégie de recherche axée sur le patient du Canada, ou SRPC. Cette initiative a pour objectif central de favoriser la prestation de soins de santé fondés sur des données probantes en intégrant des approches diagnostiques et thérapeutiques novatrices au lieu d'intervention et, il va sans dire, de générer de nouvelles connaissances permettant d'améliorer la santé des Canadiens.
    Dans le cadre de la SRAP, les IRSC travaillent avec des partenaires pour établir des réseaux de recherche qui produisent les données scientifiques et les innovations dont nous avons besoin pour améliorer la santé des patients et les systèmes de soins de santé. Le premier réseau de la SRAP soutenu par les IRSC oeuvre dans le domaine de la santé mentale des adolescents. Ce réseau vise à améliorer les soins offerts aux jeunes Canadiens aux prises avec une maladie mentale en transformant les découvertes prometteuses issues de la recherche en pratiques et en politiques. Il représente un investissement de 25 millions de dollars sur cinq ans, réparti à parts égales entre les IRSC et la Fondation Graham Boeckh de Montréal.
    Les IRSC travaillent aussi avec des partenaires pour améliorer les activités de prévention du suicide dans les communautés autochtones. En mars dernier, par exemple, en partenariat avec le gouvernement du Nunavut, le Conseil circumpolaire inuit et d'autres partenaires fédéraux et internationaux, les IRSC ont organisé, sous les auspices du Conseil de l'Arctique, un symposium circumpolaire sur le bien-être mental axé sur la prévention du suicide. Cette rencontre a mis en présence des chercheurs, des membres des communautés, des praticiens, des responsables des politiques et des jeunes de toutes les régions de l'Arctique dans le but de déterminer et de mettre en commun les pratiques exemplaires pouvant servir à promouvoir le bien-être mental et à prévenir le suicide.
    En juin 2012, les IRSC ont également lancé l'initiative phare Voies de l'équité en santé pour les Autochtones, qui vise à soutenir l'élaboration, la mise en oeuvre et l'application à grande échelle d'interventions et de programmes axés sur l'amélioration de la santé et du bien-être des Autochtones dans quatre domaines clés, dont la prévention du suicide.

  (1535)  

     À titre d'exemple, nous signalons l'étude de la docteure Susan Chatwood, de l'Institut de recherche en santé circumpolaire à Yellowknife, qui porte sur les programmes de santé mentale existants dans l'Arctique et vise à déterminer ce que différentes régions peuvent apprendre les unes des autres pour trouver une solution à ce problème extrêmement grave.
     Les IRSC appuient également un certain nombre d'initiatives visant à remédier au problème du mésusage de substances. Par exemple, le 1er mai 2015, j'ai eu le plaisir d'annoncer, avec la ministre de la Santé, la création de l'Initiative canadienne sur l'abus de substances. Il s'agira d'un réseau de recherche national destiné à améliorer la santé des Canadiens qui ont des problèmes de dépendance.
    Cette initiative, qui représente un investissement fédéral de 7,2 millions de dollars sur cinq ans, est unique en ce sens qu'elle a pour objet le transfert et l'adoption de nouvelles approches fondées sur des données probantes pour réduire les risques du mésusage de substances pour la santé, notamment la dépendance, la surdose et le décès. Les chercheurs financés grâce à cette initiative travailleront aussi étroitement avec les prestataires de services et les représentants des personnes qui ont un problème de mésusage de substances afin qu'elles puissent être en meilleure santé.
    En conclusion, monsieur le président, je voudrais vous assurer que les IRSC sont déterminés à continuer de travailler avec des partenaires publics et privés pour appuyer la recherche dans ces importants domaines et assurer l'application des résultats de la recherche en vue d'améliorer les services et les traitements destinés aux personnes atteintes de troubles mentaux.
     Encore une fois, je vous félicite, vous et vos collègues, d'avoir entrepris cette étude et je tiens à vous remercier de m'avoir fourni l'occasion de vous entretenir de cet important sujet. Il va sans dire que je serai ravi de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup.
    Je vous remercie.
    Nous avons deux autres invités à entendre avant de passer aux questions. Si vous pouvez demeurer connecté jusqu'à 16 h 30, ce serait excellent.
    La parole est maintenant à Sony Perron.
    C'est à vous, monsieur.
    Je vous remercie, monsieur le président, de me fournir l'occasion de vous donner un aperçu des programmes et services financés par Santé Canada dans le domaine de la santé mentale et du bien-être des Premières Nations et des Inuits.

[Français]

     Santé Canada reconnaît que la prise de mesures à l'égard des problèmes de santé mentale et de toxicomanie est une priorité de santé importante pour les Premières Nations et les Inuits. Par conséquent, le ministère consacre cette année plus de 300 millions de dollars à une gamme de programmes et de services touchant le mieux-être mental.
     Ces programmes comprennent la promotion de la santé mentale, la prévention de la toxicomanie et du suicide, d'autres services d'intervention dans les situations de crise, des services de traitements et de suivis ainsi que des services de soutien destinés aux anciens élèves des pensionnats indiens admissibles et leurs familles.
    Santé Canada travaille avec ses partenaires afin que les mesures prises pour appuyer les individus, les familles et les communautés relativement aux soins de santé mentale soient coordonnées et incluent le soutien familial, l'emploi, la formation, l'éducation et les services sociaux.
    À la lumière des pratiques exemplaires, nous savons que le soutien offert aux personnes, aux familles et aux communautés doit être sécuritaire sur le plan culturel et axé sur les communautés. Nous ne pouvons trouver des solutions viables que si nous collaborons avec nos partenaires, y compris avec les organisations des Premières Nations et des Inuits, et — ce qui est le plus important — avec les communautés elles-mêmes.

[Traduction]

    Les recherches sur la promotion de la santé mentale et la prévention du suicide mettent en lumière la nécessité d'interventions globales, à plusieurs volets, qui s'inscrivent dans un continuum de mieux-être. Les interventions qui englobent les niveaux individuel, familial, communautaire et fédéral, provincial et territorial se sont révélées particulièrement efficaces.
    Nous avons travaillé avec l'Assemblée des Premières Nations et des chefs de file du domaine de la santé mentale afin de mettre au point le Cadre du continuum du mieux-être mental des Premières Nations. Les communautés ont été invitées à prendre part à cette démarche et à présenter leurs idées.
    Ces discussions ont fait ressortir l'importance fondamentale de la culture. Les autres éléments considérés comme indispensables pour aller de l'avant incluaient l'innovation communautaire, les partenariats intergouvernementaux, la collaboration et la coordination entre les différents secteurs ainsi que les liens entre les programmes et les services.
    Le cadre a été ratifié par l'Assemblée générale des chefs de l'Assemblée des Premières Nations qui l'a publié en janvier 2015. Nous travaillons maintenant avec l'Inuit Tapiriit Kanatami en vue d'élaborer un cadre du continuum du mieux-être mental pour les lnuits.
    Santé Canada participe comme partenaire à la mise en oeuvre du Cadre du continuum du mieux-être mental des Premières Nations, lequel préconise des modèles intégrés de prestation des services mettant en valeur les forces des communautés et le savoir autochtone.
    Nous chercherons dorénavant à renforcer les programmes fédéraux de mieux-être mental avec nos partenaires, par exemple en favorisant l'intégration entre les programmes fédéraux, provinciaux et territoriaux, et en offrant les programmes de façon moins cloisonnée, plus coordonnée et plus efficace, afin de répondre aux besoins particuliers des communautés.

  (1540)  

[Français]

     Nous soutenons également des équipes de mieux-être mental qui offrent des traitements spécialisés à un groupe de communautés des Premières Nations aux prises avec des problèmes de santé mentale. Les équipes ont pour objectif d'accroître l'accès à un éventail de services de mieux-être mental incluant la sensibilisation, l'évaluation, le traitement, le counseling, la gestion de cas, l'aiguillage et les soins de suivi.
    Par l'entremise de la Stratégie nationale de prévention du suicide chez les jeunes Autochtones, nous appuyons le dépistage de la dépression en milieu scolaire, l'éducation et la formation des intervenants de première ligne en vue de réduire la stigmatisation et d'améliorer la sensibilisation des communautés, de la formation sur l'aiguillage et l'intervention, des services d'intervention en situation de crise, le suivi et le soutien des jeunes à risque, ainsi que des activités culturelles et traditionnelles qui renforcent les facteurs de protection et qui réduisent les facteurs de risque.
    Depuis 2008, nous avons soutenu une gamme de services destinés aux anciens élèves des pensionnats indiens et à leurs familles, afin qu'ils puissent aborder de façon sécuritaire les problèmes liés au mieux-être et à la santé affective qui découlent de la divulgation des abus subis durant leur enfance. Par exemple, en 2013-2014 seulement, Santé Canada a soutenu la prestation d'environ 630 000 services de soutien émotionnel et culturel à d'anciens élèves et à leurs familles, ainsi que 47 000 consultations auprès de professionnels de la santé mentale.

[Traduction]

    Le 20 février 2015, la ministre Ambrose a annoncé un investissement visant à prévenir, dépister et contrer la violence familiale et la violence faite aux enfants. Les sommes investies par Santé Canada faciliteront l'accès des membres des Premières Nations victimes de violence à des services de counselling en santé mentale qui sont en contact avec des refuges. Cet argent permettra également d'améliorer les services offerts aux membres des Premières Nations et aux lnuits victimes de violence de manière à ce qu'ils soient mieux coordonnés et adaptés à la culture et qu'ils tiennent davantage compte des traumatismes subis.
    Je vous remercie de votre attention. Je serai heureux de répondre à vos questions tout à l'heure.
    Je vous remercie beaucoup.
    Nous entendrons maintenant Kimberly Elmslie, de l'Agence de la santé publique du Canada. Vous avez la parole.

[Français]

     Je vous remercie de me donner l'occasion de souligner le travail qu'effectue l'Agence de la santé publique du Canada afin d'améliorer le bien-être mental des Canadiens. Nous collaborons étroitement avec nos partenaires afin de contribuer à la mise en oeuvre de la stratégie en matière de santé mentale pour le Canada.

[Traduction]

    Un rôle important en matière de santé publique est la surveillance de la santé mentale et de la maladie mentale au sein de la population canadienne. Le système de surveillance de la maladie mentale de l'agence permet de suivre les tendances d'un certain nombre de maladies mentales, comme les troubles de l'humeur et les troubles anxieux. Ce système comprend des données complémentaires, notamment sur les blessures auto-infligées, par exemple, les comportements suicidaires, et la maltraitance des enfants.
    Comme vous le savez, ces données nous apprennent que la maladie mentale touche de nombreux Canadiens: au moins un sur trois aura un problème de santé mentale au cours de sa vie, et un sur sept utilise les services de santé pour un problème de santé mentale tous les ans. De plus, environ 4 000 Canadiens se suicident chaque année et le nombre de tentatives de suicide est encore beaucoup plus élevé.
    Pour éviter tout chevauchement et tirer profit du travail réalisé à la grandeur du pays, l'agence est membre du Groupe de collaboration en matière d'information sur la santé mentale et la toxicomanie avec nos collègues de la Commission de la santé mentale du Canada ainsi que d'autres partenaires nationaux recueillant des données sur la santé mentale.
    Le budget de 2013 prévoyait une réaffectation de 2 millions de dollars des fonds de l'agence sur une période de trois ans dans le but d'améliorer la collecte de données et la préparation de rapports sur la maladie mentale et la santé mentale. À cette fin, l'agence collabore avec la Commission de la santé mentale du Canada pour améliorer ses données sur la santé mentale positive et le bien-être.
    Nous disposons maintenant d'un ensemble d'indicateurs de santé mentale positive chez les Canadiens et ces indicateurs constituent le fondement de la surveillance permanente de la santé mentale et des facteurs qui influent sur ces changements aux niveaux individuel, familial, communautaire et sociétal. La capacité d'adaptation des personnes, les relations positives avec la famille et un milieu favorable sont quelques exemples de ces indicateurs. Nous savons que 65 % des Canadiens estiment que leur état de santé mentale est très bon ou excellent et que 82 % sont satisfaits de leur vie. Les Canadiens sont aussi bien ancrés dans leur collectivité: 87 % des adultes estiment que leur quartier est un lieu d'entraide. En collectant et en analysant ces données, nous serons capables de partager plus d'information sur les facteurs qui nous aident à préserver notre santé mentale et à prévenir la maladie mentale.
    Une autre grande priorité de l'Agence est la prévention du suicide. L'adoption de la Loi concernant l’établissement d’un cadre fédéral de prévention du suicide en décembre 2012 a donné de la visibilité à la question et souligné que le suicide était un problème de santé publique. Le cadre fédéral de prévention du suicide vise à améliorer l'information, la collaboration et les ressources pour les Canadiens, et à fournir aux personnes qui s'efforcent de prévenir le suicide l'information la plus récente sur les pratiques exemplaires.
    Nos échanges avec nos partenaires et les intervenants nous ont appris que la fragmentation de l'information était l'un des principaux obstacles auxquels ils sont confrontés dans leur travail. La prévention du suicide ne sera efficace que si tous les secteurs y participent, notamment le gouvernement, les organisations non gouvernementales, les collectivités, le milieu universitaire et le secteur public. Le cadre servira de point de départ pour l'établissement de partenariats sur des activités concrètes; il nous tarde de collaborer avec la Commission de la santé mentale du Canada afin de contribuer à la réalisation des objectifs du cadre.
    L'agence s'efforce également d'améliorer le bien-être mental des Canadiens avant même l'apparition de problèmes de santé mentale. Un autre rôle clé de l'agence consiste à piloter des activités nationales qui favorisent la santé mentale positive, comme les programmes de renforcement de la résilience des personnes et des collectivités. Nous investissons 112 millions de dollars par an dans des programmes communautaires destinés aux familles vivant dans des conditions à risque, comme la pauvreté, l'isolement social, l'abus d'alcool ou de drogues et la violence familiale.

  (1545)  

    Ces programmes tiennent compte des facteurs qui influent sur la santé mentale, notamment les compétences parentales, le développement des jeunes enfants, le bon déroulement des grossesses et les problèmes de santé mentale, comme la dépression post-partum. En créant des milieux favorables, nous avons un impact positif sur la santé mentale.
    Le soutien de l'innovation en matière de promotion de la santé mentale est une priorité pour nous. Des projets d'envergure sont en cours pour promouvoir la santé mentale chez les enfants, les jeunes et les familles à la grandeur du Canada. Ces projets ont déjà eu des effets positifs, notamment en ce qui concerne la résilience des enfants et des jeunes, leur estime de soi, l'image qu'ils ont d'eux-mêmes, leur capacité d'adaptation et leurs aptitudes sociales. Par exemple, certaines de nos interventions dans les écoles ont permis de réduire les comportements agressifs, la violence dans les relations et l'abus d'alcool, elles ont contribué à l'amélioration du milieu scolaire et elles ont été intégrées dans les programmes d'enseignement.
     Notre travail se fonde sur nos engagements internationaux, notamment sur le soutien du Canada à la résolution de l'Organisation mondiale de la Santé à l'appui d'un plan d'action global pour la santé mentale de 2013 à 2020. Une autre de nos priorités est de réduire les risques pour la santé mentale, notamment l'exposition à la violence familiale et à la violence envers les enfants. Comme l'a signalé mon collègue, la ministre Ambrose a récemment annoncé un investissement de 100 millions de dollars sur 10 ans pour répondre aux besoins en matière de santé des victimes de violence familiale. Cet investissement servira notamment à soutenir les projets communautaires visant à aider les victimes à se refaire une santé physique et mentale après un épisode de violence familiale.

  (1550)  

[Français]

     Notre travail de santé publique dans les domaines de la santé mentale et de la prévention du suicide repose sur un vaste éventail de partenaires qui pilotent des initiatives destinées à mieux répondre aux besoins des Canadiens en matière de santé mentale. Nous collaborons avec la Commission de la santé mentale du Canada et notre travail est harmonisé avec la Stratégie en matière de santé mentale pour le Canada.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Cela met fin aux présentations. Nous allons maintenant passer aux questions.
    Monsieur Rankin, vous êtes le premier. Allez-y.
    Je remercie tous les témoins, qu'ils soient à distance ou ici. Vos témoignages sont appréciés. Nous en sommes au premier jour de notre étude sur la santé mentale au Canada et je vous suis très reconnaissant de donner le coup d'envoi.
    Monsieur Phillips, à Vancouver, vous avez parlé de la SRPC, la Stratégie de recherche axée sur le patient du Canada. Vous avez également dit que le symposium circumpolaire avait abordé le problème du suicide chez les jeunes vivant dans le Nord et touché un mot sur l'initiative Voies pour les Autochtones. Vous avez notamment soulevé la question de la prévention du suicide. Vous nous avez appris que près de 4 000 suicides surviennent chaque année au Canada. Je suppose que les Autochtones y comptent pour beaucoup.
    Quelles pratiques exemplaires avez-vous réussi à cibler dans le cadre de l'une ou l'autre de ces initiatives pour nous aider à mieux comprendre le problème du suicide chez les jeunes autochtones?
    Merci pour votre question.
    La rencontre qui a eu lieu dans la région circumpolaire a fait ressortir, je pense, une vérité très importante, à savoir qu'il n'existe pas de solution universelle pour lutter contre ce fléau. Il est très important que les approches soient fondées sur les traditions de la société, c'est-à-dire des segments de la société aux prises avec le problème, et qu'elles y soient bien ancrées. Il est très important que les collectivités apprennent à reconnaître les problèmes existants ainsi que les facteurs susceptibles de prédisposer une personne à essayer de mettre fin à ses jours. Le principal message à retenir est que les déterminants sociaux et environnementaux à l'origine de ces troubles doivent faire l'objet d'une attention très soutenue.
    Par ailleurs, à l'autre extrémité du spectre, concernant les facteurs biologiques fondamentaux qui pourraient expliquer les tendances au suicide, des recherches très importantes sont menées à l'Université McGill par Gustavo Turecki et ses collègues. Leurs travaux démontrent clairement que l'adversité dans la petite enfance peut influer sur les facteurs épigénétiques. Je n'ai pas l'intention de faire un exposé sur l'épigénétique, mais ce qu'il importe de retenir ici, c'est que nous commençons à mieux comprendre comment l'environnement peut avoir une influence sur la lecture du code génétique. Cela ne change pas le code, mais plutôt la façon dont les données génétiques peuvent influer sur la structure du cerveau et, par conséquent, sur nos pensées et nos actions. Ces résultats sont vraiment très prometteurs, parce que l'épigénétique pourrait également permettre de découvrir des bioindicateurs d'une tendance à un comportement suicidaire et, à long terme, nous permettre d'intervenir.
    En terminant, je veux également signaler l'étroite relation existant entre la dépression et le suicide dans tous les segments de la société canadienne. La reconnaissance de la nécessité d'un traitement précoce et efficace des premiers signes de dépression sera, à mon avis, une autre étape importante.
    J'espère que cela répond, en partie, à votre question.
    Oui, votre réponse est très instructive.
    J'ai peu de temps à ma disposition, mais j'aimerais vous poser une question, monsieur Perron.
    Dans vos observations, vous avez dit que les séquelles laissées par les pensionnats indiens, à la surprise de personne, avaient largement contribué à ce problème de mal-être mental. Vous avez dit qu'en 2013-2014 seulement, Santé Canada a financé quelque 630 000 interventions de soutien affectif et culturel à d'anciens pensionnaires. Quelle est la nature de ce soutien exactement?

  (1555)  

    Dans le cadre du processus de règlement de la réclamation présentée par des pensionnaires indiens, le gouvernement fédéral s'est engagé à offrir un soutien affectif durant tout ce processus. Il y a diverses formes de soutien. Nous finançons des professionnels, notamment des travailleurs sociaux, des psychologues et des psychiatres qui offrent un soutien et des services de consultation personnalisés aux familles. Nous avons également financé des organisations locales et régionales pour leur permettre d'offrir un soutien adapté à la culture.
    Les travailleurs de la santé et les guérisseurs traditionnels locaux joueront également un rôle pour soutenir la communauté et aider les personnes à aller au bout de ce processus difficile.
    L'abus de substances est l'un des problèmes soulevés par M. Phillips. Je suis persuadé que vous conviendrez, de même que Mme Elmslie, que c'est également un facteur contributif, ou une cause et un effet, allez savoir lequel. Je suis certain qu'on pourrait en parler longtemps.
    J'habite à Victoria, en Colombie-Britannique. Pas très loin, à Vancouver, un programme de réduction des méfaits a été mis en oeuvre dans le quartier est du centre-ville, un programme d'échange de seringues qui a permis de sauver un grand nombre de vies. Il semble que nous soyons incapables d'avoir un programme semblable chez nous. J'aimerais savoir si M. Phillips et les IRSC ont étudié les bienfaits des programmes de réduction des méfaits, comme le centre Insite. Avez-vous étudié ce programme? L'Agence de la santé publique a-t-elle étudié l'impact de ces centres sur les graves problèmes de toxicomanie dans des villes comme la mienne?
    Je vais peut-être commencer en ajoutant deux choses. Premièrement, nous savons que nous faisons face à un problème à multiples facettes et complexe en ce qui concerne l'abus de substances. Il y a des années, à la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits, nous parlions d'alcoolisme et nos programmes étaient axés sur ce problème. Depuis 10 ans, nous avons réformé bon nombre de nos programmes pour adopter une approche multi-substance et multi-dépendance parce que la réalité a changé. Les gens sont souvent confrontés à des dépendances multiples.
    Avez-vous étudié la réalité des sites d'injection? C'est là la question.
    Non, nous ne l'avons pas fait. En réalité, nous travaillons au niveau de la réserve. Nous n'avons pas de programme dans les villes.
    L'Agence de santé publique s'est-elle penchée là-dessus? L'Agence de la santé publique a-t-elle fait une analyse coût-bénéfice, une étude des pratiques exemplaires ou une analyse de ces sites?
    Non, nous ne l'avons pas faite. C'est une question qui concerne la recherche et ce sont nos collègues chargés de la recherche qui s'en occuperaient.
    Docteur Phillips, vous habitez à Vancouver, je suppose. Pourriez-vous nous parler de votre recherche?
    Nous avons publié des documents, dont certains ont été financés par les IRSC, qui montrent que la réduction des surdoses a un effet bénéfique sur la santé. C'est une question différente de celle dont vous parlez, qui est la réduction des risques. Il existe des preuves et je pourrais vous envoyer les documents, si vous le souhaitez.
    Je l'apprécierais.
    Merci, monsieur le président. Mon temps est-il écoulé?
    Oui.
    Madame McLeod, pour cinq minutes.
    J'ai un certain nombre de questions pour tous les membres de notre panel. Merci, tout d'abord, de vos très bonnes présentations,
    Monsieur Perron, je vais commencer par vous.
    Dans les années 1980, j'étais une nouvelle infirmière diplômée et j'ai occupé un de mes premiers emplois dans une communauté éloignée des Premières Nations. La première semaine, je m'en souviens tellement bien, il y a eu trois suicides. C'était un de ces événements très rapprochés. C'était très difficile et très traumatisant pour la communauté.
    Avons-nous des statistiques? On nous parle de beaucoup de programmes et de beaucoup de tentatives pour améliorer la santé mentale et prévenir les suicides. Cela donne-t-il déjà des résultats?
    Je pense que oui en ce qui concerne la surveillance de ce problème spécifique du suicide. C'est un vrai problème et c'est un problème partout au Canada en général. C'est encore plus difficile chez les Premières Nations ou les communautés autochtones parce que les mécanismes pour rendre compte et assurer le suivi et savoir si le suicide a eu lieu dans une communauté des Premières Nations ou dans une communauté autochtone ou si la personne est inuit, sont insuffisants. Nous avons besoin d'investir et de faire mieux.
    Dans certaines régions, nous avons de meilleures données que dans d'autres pour suivre cette réalité. Nous pouvons mesurer le succès de certaines initiatives sur le terrain. Par exemple, nous avons des programmes de prévention du suicide chez les jeunes, ainsi que des initiatives dans différentes régions qui ont changé la dynamique dans quelques communautés et atténué certains problèmes. Vous parliez du nombre de suicides. C'est un phénomène que nous constatons. Il y a maintenant une plus grande résilience pour répondre à cette réalité. Nous avons des équipes d'intervention en cas de crise en santé mentale qui apportent un soutien.

  (1600)  

    Vous ne diriez pas que dans les années 1980, vous aviez un incident juste ici et qu'il est maintenant ici. Vous ne disposez pas de cette information.
    Malheureusement, les données ne sont pas suffisantes pour le dire.
    Cela m'amène à l'Agence de la santé publique du Canada.
    Vous avez parlé d'un travail important en matière de collecte de données. Il semble que nous allions dans la bonne direction. Quelles sont les difficultés qui entravent encore une bonne collecte des données?
    Comme pour la collecte de données nationales en général, la difficulté est de pouvoir identifier des données comparables dans tout le pays. C'est pourquoi nous travaillons avec nos collègues des provinces et des territoires à l'élaboration d'indicateurs spécifiques afin de pouvoir collecter toutes les données de la même façon et en rendre compte de la même façon.
    Nous avons depuis un certain temps de bonnes données sur les occurrences de maladies mentales spécifiques. Nous avons commencé à compléter ces données-là où nous le pouvons et Statistique Canada nous aide beaucoup, bien entendu, grâce à ses enquêtes nationales. C'est quand nous voulons en savoir plus sur les facteurs qui influent sur la résilience ou sur certaines mesures complexes d'une santé mentale positive que le travail que nous avons commencé à faire avec la Commission de la santé mentale du Canada et avec nos autres partenaires est vraiment important. En fin de compte, nos experts nous disent que la capacité des enfants, en grandissant à l'étape de la petite enfance, d'acquérir des capacités d'adaptation et la capacité des parents d'acquérir des compétences parentales sont les précurseurs de la résilience face aux adversités ultérieures et du développement d'une santé mentale positive.
    Voilà pourquoi nous nous concentrons maintenant sur le travail qui permettra d'établir les indicateurs que le Canada doit mesurer sur le long terme pour savoir si nous allons dans la bonne direction pour que notre population ait une bonne santé mentale.
    Quelque chose comme le taux de suicide... Ce n'est pas indiqué sur les certificats de décès, n'est-ce pas? Avons-nous une bonne idée du taux de suicide? Je pense que nous le devrions.
    Oui, nous en avons une bonne idée si le suicide est indiqué sur le certificat de décès. C'est ce qui nous intéresse quand nous étudions la qualité de nos données. Obtenons-nous une bonne information sur le suicide comme cause du décès? Cela n'est pas toujours le cas et ce n'est pas toujours cohérent.
    Nous nous préoccupons également de comprendre les tentatives de suicide et d'obtenir également de meilleures données sur ces variables.
    Comme vous pouvez l'imaginer, dans ce domaine de la santé mentale et de la compréhension de la santé mentale des Canadiens et des facteurs qui l'influencent, il existe de nombreux facteurs qui ont une incidence sur la complexité des données sur lesquelles nous travaillons actuellement. Je pense que nous allons voir beaucoup de progrès dans ce domaine dans l'année qui vient. La Commission de la santé mentale a déjà publié un ensemble d'indicateurs et nous préparons le nôtre dans une perspective de santé publique. Ces deux documents seront réunis. Notre objectif est de pouvoir très bientôt présenter une image globale de la santé mentale des Canadiens.
    Vous avez dit un sur trois. J'ai toujours entendu dire que c'était un sur cinq.
    Oui. Nos données les plus récentes indiquent un sur trois. Ces données proviennent de l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes de Statistique Canada. À mesure que cette information va entrer de plus en plus dans le domaine public et être renforcée, ce chiffre va passer de un sur cinq à un sur trois.
    Monsieur Phillips, la recherche axée sur le patient réalisée actuellement, ou SRAP, représente un grand changement. Avez-vous de nouveaux outils pour vraiment analyser cette question et faire avancer les choses? Est-ce juste?
    La SRAP, la Stratégie de recherche axée sur le patient, met l'accent sur la nécessité d'une recherche transnationale.
    Nous investissons environ un demi-milliard de dollars par an pour mieux comprendre tous les déterminants de la santé, mais il est évident que les gens veulent que ces connaissances, le cas échéant, aboutissent à un meilleur diagnostic et à un meilleur traitement. C'est l'objectif principal de la Stratégie. Nous travaillons en partenariat avec de nombreux groupes différents au Canada, en particulier avec les provinces, qui sont naturellement responsables d'offrir les services de soins de santé aux Canadiens.
    Nous venons de créer huit unités de soutien dans différentes régions du Canada qui établiront une infrastructure pour en arriver par exemple, à une meilleure structure d'essais cliniques ou une meilleure analyse de l'efficacité ou de l'inefficacité des interventions. La différence que vous recherchez peut-être ici est un engagement fort de la part des IRSC à l'égard de la recherche transnationale. C'est ce que représente la Stratégie.

  (1605)  

    Merci beaucoup.
    Madame Fry, allez-y.
    Je suis vraiment ravie de voir que les IRSC collaborent à la Stratégie. La recherche transnationale est quelque chose que le Canada peut faire très bien, surtout parce que nous disposons de toutes les données des banques de l'administration publique dans chaque province. Je pense que c'est vraiment important
    La Commission de la santé mentale du Canada est-elle l'un de vos partenaires?
    Désolé, est-ce que la question s'adresse à moi?
    Oui. La Commission de la santé mentale du Canada est-elle l'un de vos partenaires?
    La Commission de la santé mentale du Canada, bien entendu, ne fait pas de recherche, mais il est évident qu'elle fait un travail extrêmement important pour le Canada en élaborant une politique nationale sur les problèmes de santé mentale.
    Peu de temps après sa création, j'ai invité l'exécutif de la Commission de la santé mentale du Canada à venir à la réunion du conseil consultatif de notre institut, ce qui s'est révélé vraiment productif. À cette étape très précoce, il y a probablement environ cinq ans, j'ai proposé de choisir un domaine auquel nous pourrions collaborer et la Commission y a été favorable. Ce domaine a été la recherche sur le suicide.
    Nous avons ensuite invité l'Institut de la santé des femmes et des hommes à travailler avec nous, et une évaluation de l'ampleur du problème a été réalisée. Actuellement, l'Agence de la santé publique du Canada, la Commission de la santé mentale du Canada et nous-mêmes organisons dans un mois à Montréal ce qui, je pense, sera un atelier novateur grâce auquel nous allons essayer de sonder la collectivité. De très nombreux intervenants vont être réunis pour tenter d'élaborer une stratégie de recherche sur le suicide. C'est un partenariat avec la Commission de la santé mentale et avec l'ASPC.
    C'est très bien, car je pense que dans un pays aussi vaste que le nôtre, avec nos gouvernements provinciaux et les autres administrations, nous avons à la fois des lacunes et des chevauchements dans notre recherche. Je pense que la Commission de la santé mentale ne fait peut-être pas de la recherche « traditionnelle », mais bon nombre de ses programmes, comme At Home/Chez Soi, etc., peuvent nous dire quels sont les effets sur les communautés. Je suis ravie d'entendre que vous travaillez avec elle.
    Je veux poser une question à l'Agence de la santé publique du Canada. Ce n'est pas une question provocatrice. C'est simplement que vous avez recueilli toutes ces données. Vous et Santé Canada avez étudié beaucoup de choses.
    Dans le même temps, l'UNICEF vient d'afficher son rapport. Vous avez parlé de la capacité d'adaptation et vous avez parlé du fait que les jeunes ont tendance à être les plus heureux. En fait, ce n'est pas exact. Le rapport de l'UNICEF indique que le Canada se classe 24e sur les 29 pays les plus riches du monde s'agissant du bonheur de leurs enfants. Les enfants du Canada sont parmi les plus malheureux dans le monde et disent qu'ils ne peuvent pas parler à leurs parents. Cela les situe à la 25e place sur 28 dans le monde.
    Je pense que c'est un problème. On doit avoir certaines relations avec sa famille, comme vous l'avez dit. Or, nous avons perdu sept places concernant l'indice du bonheur chez les enfants et les relations des enfants avec leurs parents. Nous avons également 35 % des enfants du Canada, ce qui nous place au 21e rang sur 29 dans le monde, qui se plaignent d'être victimes d'intimidation non seulement à l'école, mais partout dans la société.
    Je sais que Rome n'a pas été bâtie en un jour, mais cette situation existe depuis un certain temps déjà. Selon vous, quels sont les obstacles qui empêchent votre travail, les données que vous recueillez et les groupes avec lesquels vous travaillez, d'aboutir à des résultats positifs pour les enfants canadiens? Vous avez dit que les données sont très difficiles à trouver, mais travaillez-vous réellement en étroite collaboration? Ceci est un domaine que les provinces, les écoles, etc., devraient commencer à étudier ensemble. Quelles sont les difficultés? Pourquoi perdons-nous des places en matière de bien-être des enfants et des relations des enfants et que devrait-on faire à ce sujet, selon vous?

  (1610)  

    C'est une très bonne question. Une des choses les plus importantes que notre travail de surveillance, les résultats de notre analyse que nous communiquons à ceux qui élaborent les programmes et qui changent les choses dans les collectivités nous apprennent, c'est qu'il faut une meilleure intégration. Nous devons associer notre travail de surveillance au travail des collectivités pour répondre à leurs propres besoins, car il n'existe pas de solution unique, comme vous le savez bien. C'est notre objectif actuellement.
    Je vous ai parlé de nos investissements dans l'innovation pour la promotion de la santé mentale. Nous avons décidé de mettre l'accent sur les interventions en milieu scolaire. Comme vous vous en doutez, il existe bien des domaines à étudier sur le plan de la santé mentale positive, mais nous avons décidé que nous allions consacrer nos fonds d'innovation au milieu scolaire. Pourquoi? Parce que c'est là que de nombreux facteurs sont intégrés. C'est là où les enfants sont victimes d'intimidation de la part de leurs camarades ou bien viennent de milieux familiaux peu propices à leur bien-être mental positif. C'est peut être le système scolaire qui sera l'environnement le plus favorable pour eux.
    Je pense que nous avons tourné une page dans notre façon de collaborer sur la santé mentale et la prévention de la maladie mentale. Nous avons tourné cette page car au Canada, nous avons la Commission de la santé mentale qui montre vraiment la voie en nous aidant à comprendre ce qui doit être intégré et pourquoi. Comme vous le savez, on peut utiliser les données de bien des façons. J'ai une formation d'épidémiologiste. Quand je regarde les comparaisons entre les pays, je me dis toujours que le contexte dans lequel ces données sont recueillies et la façon dont elles sont présentées sont essentielles pour que nous puissions en faire une interprétation précise. Alors que les signes sont positifs...
    Excusez-moi, je voulais simplement dire que je sais que l'épidémiologie est un domaine différent qui consiste à comparer, mais c'est ce que nous faisons. Nous faisons tout le temps des comparaisons au Canada. Nous disons: « Regardez, nous sommes numéro un dans le monde ». Ils utilisent maintenant la même chose qu'ils ne peuvent pas critiquer.
    Trois questions ont été posées subjectivement aux enfants eux-mêmes. On leur a demandé, « Êtes-vous heureux? » Et le Canada s'est classé 24 sur 29.
    Je suis ravie de vous entendre dire que vous vous concentrez sur l'intervention en milieu scolaire car je suis d'accord avec vous que c'est certainement l'endroit le plus important sur lequel mettre l'accent.
    Vous avez dit qu'il fallait une meilleure intégration. Je voudrais vraiment savoir quels sont les obstacles à cette intégration. Dans notre fédération, les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral devraient pouvoir travailler étroitement pour intégrer ce genre d'information et ne pas permettre qu'il y ait des lacunes, comme c'est traditionnellement le cas. Quel est le plus grand obstacle à cette intégration?
    Je pense souvent que l'obstacle c'est de ne pas avoir un programme clair sur la façon de procéder ensemble. Nous avons maintenant une stratégie de santé mentale pour le Canada et c'est une base très importante pour nous faire avancer ensemble dans la même direction.
    J'espère que la Commission de la santé mentale ne sera pas seulement renouvelée pour 10 ans; elle fait un excellent travail et j'espère qu'elle va obtenir une partie de l'argent qu'elle a demandé.
    Merci beaucoup. Il y avait une minute supplémentaire juste pour vous, madame Fry.
    Monsieur Lizon.
    Merci à tous les témoins de comparaître devant le comité et de nous communiquer de précieuses informations.
    Ma première question s'adresse à M. Phillips. Vous avez parlé à plusieurs reprises d'abus et de mésusage de substances. La recherche fait-elle des progrès pour que nous puissions traiter efficacement ce problème?
    Oui, je le pense, et cela prend différentes formes. Évidemment, les gens aimeraient voir une diminution de l'utilisation abusive de ces substances, mais cela ne se produit pas tout de suite. Ce que je peux dire avec certitude, c' est que nous comprenons beaucoup mieux comment l'expérimentation de la drogue peut se transformer en une dépendance et une habitude très grave. Nous connaissons maintenant la neurobiologie de ces processus, ce qui n'était pas le cas il y a 10 ans. Une fois que l'on connaît la base biologique sous-jacente d'une importante transition comme la naissance d'une habitude ou d'une dépendance à la drogue, on peut peut-être utiliser d'autres interventions pour dissocier ou modifier cette habitude. Ce domaine fait l'objet de nombreux travaux.
    Je vais juste rajouter que mes homologues des États-Unis ont l'Institut national sur l'abus des drogues dans le NIH et je travaille en étroite collaboration avec le directeur de cet institut
    J'ai parlé de quelque chose appelé l'ICRAS, l'Initiative canadienne de recherche sur l'abus de substances. Elle est conçue pour être un partenariat avec les Américains, de sorte que si nous faisons une découverte au Canada qui semble prometteuse pour le traitement de la dépendance ou si les Américains en font une, elle puisse être rapidement appliquée dans chaque pays. Je mets beaucoup d'espoir dans les partenariats, non seulement avec les chercheurs au Canada, mais également à l'échelle internationale, pour que nous puissions rapidement reconnaître les percées et agir efficacement pour les mettre en pratique.

  (1615)  

    Cela m'amène à ma deuxième question. Vous avez mentionné votre relation de collaboration et de partenariat avec les Américains. Y a-t-il d'autres chercheurs ailleurs au monde avec qui vous êtes associés pour échanger de l'information ou mener des projets conjoints?
    Oui. Nous avons bon nombre de très importants partenariats.
    Je suis responsable des partenariats entre les IRSC et l'organisme correspondant en Chine, qui s'appelle la Fondation nationale des sciences naturelles. Nous avons établi, au cours d'une période de 10 ans, un partenariat très efficace avec la Chine. J'ai été plus qu'étonné quand, à ma première rencontre avec le chef de cet organisme, j'ai demandé quels étaient en Chine les problèmes de santé les plus répandus. Je pensais au cancer ou à quelque autre maladie. Il m'a répondu qu'un de leurs plus graves problèmes était l'héroïnomanie, qu'il y avait en Chine plus d'un million d'héroïnomanes et que toute aide qu'on pouvait leur apporter dans ce domaine serait grandement appréciée.
    Nous travaillons en étroite collaboration avec l'Union européenne. En fait, nous sommes l'un des rares pays non européens, autres qu'Israël, je crois, à avoir conclu un partenariat de recherche officiel avec l'Union européenne.
    Dans un autre domaine de santé mentale, soit la démence, la perte de fonctions cognitives associées au vieillissement, qui constitue de toute évidence un problème de mauvaise santé mentale, nous sommes partenaires de la Commission européenne dans un programme conjoint portant sur la neurodégénérescence dans la démence et nous avons une collaboration de recherche très active.
    Le partenariat international est très important pour les IRSC et les Canadiens font face à de gros calibres.
    Pour terminer, j'ai un chiffre concernant les articles de recherche publiés au Canada. Plus de la moitié des articles que nous publions le sont en partenariat avec un chercheur à l'étranger.
    Merci beaucoup.
    Mon autre question porte sur les capacités d'adaptation des personnes que vous avez mentionnées. Ma question est peut-être très élémentaire. Pouvez-vous m'aider à comprendre comment vous aidez les jeunes à acquérir ces capacités? Qu'est-ce qui est important?
    Madame Fry a mentionné l'intimidation et les situations difficiles. Si je me reporte à mes jeunes années à l'école, je me souviens qu'il y avait de l'intimidation. Je pense, cependant, que l'évolution de la société a fait que les parents, moi-même y compris sans doute, sont aujourd'hui davantage protecteurs de leurs enfants.
    Mes parents n'étaient pas aussi protecteurs que je le suis. Enfants, nous étions plutôt indépendants et nous devions composer nous-mêmes avec la plupart des situations, parfois avec l'aide d'amis ou de frères ou sœurs. On ne s'attendait pas à ce que les autorités scolaires s'en mêlent sauf si la situation se dégradait à un tel point que leur intervention devenait nécessaire.
    Pourriez-vous développer cette problématique? Quels sont les enjeux? Comment pouvons-nous aller de l'avant et quelle est la meilleure solution?

  (1620)  

    Avec plaisir.
    Pour ce qui se passe dans les écoles aujourd'hui, nos partenaires qui œuvrent en milieu scolaire, enseignants et concepteurs de programmes d'études, nous disent que l'intimidation est un problème important qui influe sur la santé et le bien-être des écoliers. De fait, nous avons financé un organisme, appelé PreVAiL, qui fait des recherches visant à prévenir la violence et à préparer des programmes d'études pour que les enseignants puissent, dans le milieu scolaire, mieux aider les élèves à comprendre l'intimidation et à la prévenir et à composer avec l'intimidation.
    D'après ce que nous avons appris et d'après les résultats provenant d'enquêtes, comme l'Enquête sur les comportements liés à la santé des enfants d'âge scolaire, dirigée par l'Organisation mondiale de la Santé, la violence, l'intimidation et les menaces exercées contre les enfants sont un problème important dans nos écoles. C'est une situation que nous prenons très au sérieux à l'Agence de la santé publique, vu notre rôle qui est d'aider à doter les collectivités, et donc les écoles qui en sont une composante, des outils nécessaires pour comprendre ce problème et prendre des mesures pour le résoudre.
    Dans nos programmes, nous ciblons les enfants les plus vulnérables, ceux issus de familles monoparentales, ceux qui vivent peut-être dans des conditions qui ne sont pas propices à leur acquisition des capacités que les enfants de milieux plus favorisés acquièrent. Dans ces situations, nos programmes de financement apportent un soutien aux programmes communautaires de base destinés aux enfants et aux familles qui leur permettent de trouver un environnement sécuritaire, de parler des problèmes qui les touchent et d'obtenir l'aide et le soutien dont ils ont besoin pour acquérir les capacités de santé mentale qui leur serviront plus tard dans la vie.
    Nos évaluations de ces programmes font voir un effet très bénéfique sur ces enfants. Dans nos visites sur le terrain, en voyant l'environnement bienveillant et sécuritaire où sont accueillis des enfants du même âge, suivis par des conseillers, et où les parents apprennent à composer avec des situations difficiles, nous constatons l'utilité et la nécessité pour les communautés de promouvoir ces programmes établis à l'intention des enfants vulnérables.
    Nous nous attaquons au problème sur deux fronts.
    Merci.
    Madame Moore, c'est à vous.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
     Mes questions vont s'adresser à M. Perron et Mme Elmslie.
    Quels sont les outils d'évaluation de vos programmes? Comment faites-vous pour savoir s'ils sont efficaces et s'ils répondent aux besoins? Pouvez-vous nous fournir des évaluations qui ont été faites au sujet de différents programmes? Avez-vous des exemples de changements apportés à des programmes à la suite d'une évaluation qui a été faite?
    Vous pouvez répondre en premier, monsieur Perron.
    Merci. C'est une excellente question.
    Il y a le National Native Alcohol and Drug Abuse Program, le NNADAP en anglais. Je suis désolé de ne pas pouvoir vous donner tout de suite le nom en français.
    Dans le contexte de ce programme, nous utilisons certains indicateurs. À la fin d'un traitement, par exemple, on peut voir si une personne a laissé tomber un ou plusieurs éléments de sa dépendance à une substance.
     On réexamine le même résultat après six mois afin de voir où en est la personne relativement à sa dépendance. De tels indicateurs sont très communs dans les programmes de traitement. On ne s'éloigne pas de cela.
    Par contre, il est très difficile de suivre la clientèle à long terme. Il y a des limites à ce qu'on peut faire à cet égard. On suit ce genre d'indicateurs pour voir si les centres de traitement ou les programmes qu'on soutient ont un rendement aussi bon que ce qui existe pour la population en général et ce qui dessert une population non autochtone.
    On a aussi des programmes plutôt axés sur des activités, comme le programme de prévention du suicide, par exemple. Il s'agit souvent d'activités qui ont été développées dans chacune des régions du pays. On mène des campagnes spécifiques sur ces activités ou ces projets. On va développer des indicateurs de rendement pour savoir combien de personnes, combien de jeunes et combien de familles ont été touchés par ce programme. Quel type d'intervention y a-t-il eu? Souvent, il faut aussi recueillir le point de vue des participants pour savoir ce que cela leur a apporté. Cela renforce-t-il ou combat-il des problèmes qui sont présents dans leur milieu? Cela leur donne-t-il plus de chances de composer avec l'adversité qui peut être liée à des problèmes de santé mentale ou à des problèmes de dépendance? Il y a ce genre d'indicateurs.
    On a des évaluations, mais il est extrêmement difficile de savoir quel est l'effet à long terme de ces mesures. C'est la raison qui explique le travail qu'on a fait avec l'Assemblée des Premières Nations. Il s'agit de définir un cadre de mieux-être en santé mentale pour voir comment réorganiser les programmes.
    Au cours des 25 dernières années, Santé Canada a développé différents programmes par silos et à la pièce. On a aussi essayé, à l'époque, de faire des programmes qui seraient pareils partout au pays.
     En consultation et en partenariat avec plusieurs partenaires et spécialistes, on essaie d'utiliser les bonnes pratiques avec le cadre qu'on a développé avec l'Assemblée des Premières Nations. Nous voulons indiquer quel est le cadre d'ensemble et quels sont les éléments fondamentaux à ce sujet.
     Par exemple, la culture a été définie comme un élément fondamental afin de bâtir la résilience et de recréer la connexion avec le milieu, avec l'histoire et avec la famille pour redonner un sens ou donner un meilleur sens à la vie dans la communauté. Il s'agit de mettre la culture au centre de tout cela et d'inviter les communautés qui gèrent ces programmes à repositionner les programmes que nous finançons. Ces programmes ne sont pas définis. Ils peuvent être ajustés en fonction des besoins s'ils fonctionnent à l'intérieur de ce cadre et que l'ensemble des composantes est touché.
    Les évaluations nous ont fait découvrir une autre réalité. Bien que nous soyons convaincus qu'une intervention bien ancrée dans les communautés et avec un contrôle communautaire est extrêmement importante pour connaître du succès, il y a des types de services spécialisés qui ont besoin d'être offerts à une autre échelle. On a donc commencé à investir dans des équipes d'intervention en santé mentale qui fournissent des services plus spécialisés pouvant soutenir plusieurs communautés. On a aussi commencé à intervenir dans des situations de crise parce qu'on ne peut pas s'attendre à ce que la capacité des organisations à composer avec de grandes crises soit présente.
    Les évaluations nous ont aussi amenés à identifier des écarts dans ce qu'on finançait. Les programmes ont été modulés au fil des années pour créer ce nouveau type d'interventions. Les équipes d'intervention en santé mentale aident les communautés à compléter l'offre de services. Les évaluations nous amènent donc à ajuster l'offre. Je dirais que le cadre de santé mentale développé par les Premières Nations, avec l'appui de Santé Canada, est un guide pour le proche avenir. Il y a un enthousiasme dans tout le pays à l'endroit de ce guide afin de développer et de repositionner les programmes pour une intervention plus efficace à long terme. Je dirais donc que les évaluations sont utiles.
    Les résultats des apprentissages des 10, 15 et 20 dernières années qui nous indiquent où aller sont canalisés dans ce cadre. J'inviterais donc les membres du comité à jeter un coup d'oeil sur ces aspects. Nous sommes très fiers d'avoir fait cela avec l'Assemblée des Premières Nations.
     On travaille présentement à faire la même chose avec les Inuits. En effet, si on pense que la culture est fondamentale, il faut aussi respecter le fait que les Inuits ont une culture différente. Il faut donc établir un cadre qui va être basé sur leur réalité et sur leur culture. On va le faire.
    C'est un autre enseignement de l'intervention des 20 dernières années, à savoir que les programmes développés à Ottawa où on tente de faire la même chose un peu partout sont limités si on n'est pas en mesure de les adapter aux réalités des communautés, des milieux et des cultures avec lesquels on compose.

  (1625)  

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Wilks, la parole est à vous.
    Je veux d'abord remercier les témoins.
    Aucun d'entre vous, dans ses déclarations aujourd'hui, n'a utilisé le mot que j'espérais entendre, celui de « stigmate ». Étant moi-même en rétablissement de longue durée, j'aimerais entendre chacun de vous décrire ce que fait votre organisme pour éliminer le stigmate qui se rattache aux gens en rétablissement à la suite d'une période de toxicomanie ou de problèmes de santé mentale.
    Je m'adresse d'abord à vous, docteur Phillips.
    Les IRSC reconnaissent l'importance de contrer avec efficacité la stigmatisation et le rôle qu'elle joue, manifestement, comme obstacle à un bon accès aux services appropriés. Nous avons soutenu les travaux de recherche à l'Université Queen's avec Mme Elmslie, qui est une pionnière de grande réputation pour ses efforts visant à mieux faire comprendre la stigmatisation, à la désamorcer, puis à évaluer s'il y a eu ou non un changement d'attitude qui mène à un meilleur accès aux soins.
    Il s'agit d'un domaine de recherche actif. Il reste encore un long chemin à parcourir. Cependant, depuis cinq ans, et j'exprime ici une impression personnelle, je sens réellement que le stigmate longtemps associé tant aux problèmes de santé mentale qu'à la toxicomanie diminue peu à peu. Voilà un signe vraiment prometteur. Cependant, des recherches plus poussées sont réellement nécessaires. Je regrette de ne pas en avoir parlé comme d'une priorité dans ma déclaration préliminaire, mais je puis vous dire que, dans la pratique, tel est bien le cas. Je vous remercie donc de votre question.

  (1630)  

    Monsieur Perron.
    Voilà une excellente question. Je ne pense pas que nous ayons tenté, dans les programmes que nous offrons, de nier ce problème. Il s'agit en effet d'un problème, mais nous avions omis un élément qui figure désormais dans ce cadre, qui est d'aller de l'avant pour aider les gens à prendre une part active dans leur communauté et dans la vie économique.
    Le programme était lacunaire sur un point. Comme nous étions dans une situation de crise, aux prises avec le problème de toxicomanie, nous ne nous sommes pas tellement préoccupés de la suite, des services post-traitement et du soutien dans la communauté. C'est là un élément que nous ajoutons au programme, car pour venir à bout du seul phénomène de la stigmatisation, il faut aider les clients, ceux qui sont touchés par ces problèmes, à se reprendre en main et à prendre une part active à la vie économique en retournant aux études... les soutenir quand ils y sont.
    La connexion avec les autres genres de programmes des services provinciaux ou territoriaux est également très importante, car en adoptant une approche axée uniquement sur la santé, nous ne sortirons pas de la problématique de la santé. Mais si nous voulons vraiment amener les gens touchés par des problèmes de santé mentale et de toxicomanie à se reprendre en main, il doit y avoir une connexion avec ces autres programmes afin de les aider à progresser dans la vie après avoir surmonté une crise ou un problème de toxicomanie.
    Il se peut que cela ne soit pas une réponse directe à la stigmatisation, mais il faut dire que nous sommes tellement absorbés par nos efforts pour résoudre le problème que le facteur de la stigmatisation ne nous saute pas aux yeux. Je pense que la façon de composer avec la stigmatisation est d'inclure ces éléments dans notre intervention, dont le but est d'aider les gens à progresser dans la vie après leur traitement et à surmonter leur crise ou leur problème de toxicomanie.
    Avant d'entendre votre réponse, madame Elmslie, je voudrais faire une suggestion à l'intention de chacun d'entre vous, à savoir que, dans vos travaux de recherche, vous devriez commencer par obtenir la participation de gens qui sont en redressement parce que, je le dis en tout respect, nous pensons différemment. Lorsque vous parlez à quelqu'un qui est en situation de redressement, ou qui y est passé, vous ne pouvez pas faire de l'astuce. Voilà pour ma suggestion.
    Merci beaucoup.
    Je vous laisse la parole, madame Elmslie, pour parler de stigmatisation.
    L'une des leçons que j'ai tirée du symposium du Conseil de l'Arctique sur la prévention du suicide est que le regain d'espoir et le recul de la stigmatisation vont de pair. Les jeunes qui y ont participé m'en ont vraiment fait prendre conscience. Cela m'a fait une forte impression. J'y ai beaucoup pensé depuis, ainsi qu'à la nécessité de raccorder nos façons de penser pour diminuer la stigmatisation en donnant une meilleure information aux gens, en engageant le dialogue avec eux et en tablant sur l'importance de susciter de l'espoir à la suite d'une dépression et de créer une situation de vie qui permet de s'en sortir. Ce sont maintenant, dans l'optique de santé publique qui conditionne la conception de nos programmes de santé mentale, des éléments fondamentaux qui entrent dans notre façon de considérer la stigmatisation.
    Cela ne se fait pas en vase clos. Ça fait partie de tout un ensemble où convergent les questions de santé mentale, de maladie mentale, de redressement et de prévention du suicide. À notre sens, le dialogue fait partie de l'approche programmatique que nous appliquons à ces questions de manière à ne pas isoler ou marginaliser ici la discussion sur le suicide, la discussion sur la stigmatisation. Il entre en ligne de compte dans l'élaboration programmatique de notre travail en santé publique.
    Merci.
    Juste à temps, monsieur Wilks.
    Voilà qui termine la première moitié de notre séance d'aujourd'hui. Nous prendrons une pause de quelques minutes, après quoi la séance reprendra.

  (1630)  


  (1635)  

    La séance se poursuit.
    Au cours de la deuxième heure de notre séance de cet après-midi, nous accueillons Louise Bradley et Jennifer Vornbrock, représentant la Commission de la santé mentale du Canada, qui auront 10 minutes pour faire une déclaration, après quoi nous passerons à la période de questions.
    La parole est à vous.

[Français]

     Je vous remercie et vous souhaite un bon après-midi.

[Traduction]

    Monsieur le président et membres du comité, je tiens à vous dire combien je suis heureuse d'être ici aujourd'hui.
    Je m'appelle Louise Bradley et je suis présidente-directrice générale de la Commission de la santé mentale du Canada. Je tiens à signaler la présence à mes côtés de ma collègue Jennifer Vornbrock, vice-présidente de notre équipe Connaissances et innovation.
    Permettez-moi de commencer par un survol de la Commission et de son mandat. La Commission a été créée en 2007 dans le sillage des travaux du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie et de son étude intitulée « De l’ombre à la lumière », qui recommandait la mise sur pied d'une commission nationale de la santé mentale.
    La Commission a pour mandat d'améliorer le système de la santé mentale et de faire évoluer les attitudes et les comportements des Canadiens à l'égard de la maladie mentale. La Commission est un agent de coordination, qui harmonise et promeut les intérêts des gouvernements, des organismes, des particuliers atteints de maladie mentale et de leurs familles. Notre travail regroupe dirigeants et spécialistes en santé mentale et facilite l'application étendue d'idées, de politiques et de programmes.
    Je suis heureuse de pouvoir dire que, dans le budget fédéral de 2015, le gouvernement du Canada a fait connaître son intention de renouveler le mandat de la Commission pour 10 ans à partir de 2017. La Commission est enchantée d'avoir l'occasion de poursuivre son travail, sous la direction du nouveau président de son conseil d'administration, l'honorable Michael Wilson. M. Wilson a exercé ses talents et son influence, qui sont considérables, pour promouvoir la santé mentale à titre de simple citoyen. Conscients de ses réalisations jusqu'à ce jour, nous avons hâte de voir ce qu'il réussira à accomplir, fort du soutien de la Commission et de nos nombreux partenaires.
    La Stratégie en matière de santé mentale pour le Canada, qui a été rendue publique en 2012, continue d'orienter le travail de la Commission. Elle prévoit des mesures pour améliorer les soins en santé mentale et les systèmes qui y sont associés grâce à six orientations stratégiques. Depuis l'introduction de cette stratégie, la Commission a travaillé sans relâche pour faire en sorte qu'elle soit adoptée, partageant ses recommandations avec les parties concernées partout au pays et à l'étranger. J'ai entendu dire par des représentants de gouvernements provinciaux et territoriaux que la Stratégie est devenue un document de base qui sert à la formulation de leurs propres plans et priorités en santé mentale.
    La Stratégie a eu une influence extraordinaire, mais la Commission sait qu'il subsiste des obstacles à sa mise en oeuvre à l'échelle du Canada. Afin de faciliter le processus de mise en oeuvre, la Commission a lancé son propre examen de la stratégie. Après en avoir discuté avec les intervenants et les responsables gouvernementaux, la Commission a déterminé que les mesures suivantes seraient utiles à cette fin: la coordination des services et des ressources en santé mentale, y compris l'intégration des services de santé mentale, des soins primaires, des soutiens au logement et des services d'aide aux toxicomanes; la création d'un plan d'action basé sur les priorités partagées de la stratégie et indiquant les prochaines étapes à ceux qui cherchent à la mettre en oeuvre; l'amélioration des données relatives à la santé mentale par un suivi plus serré des tendances actuelles et par la détermination des lacunes d'information. La Commission envisage avec confiance sa collaboration future avec les parties concernées et les autorités gouvernementales en vue de mettre en oeuvre ces mesures au cours de la prochaine décennie.
    La Commission a saisi toutes les occasions pour utiliser la Stratégie comme guide de l'expansion de nos activités. La question de la prévention du suicide revêt une importance suprême et nous y travaillons depuis des années, notamment au moyen de notre initiative de lutte contre la stigmatisation, de nos programmes de santé mentale en milieu de travail et de l'échange de connaissances visant à fournir des outils et à promouvoir les pratiques exemplaires.
    Nous savons que cette question bénéficie d'un large soutien parmi les parlementaires, comme en fait foi l'adoption du projet de loi C-300, la Loi sur le cadre fédéral de prévention du suicide, qui a reçu l'aval de tous les partis. Beaucoup d'entre vous connaissent aussi la campagne #308conversations que la Commission a lancée l'an dernier et dont le député Harold Albrecht s'est fait le champion. La campagne consistait à demander aux 308 députés de la Chambre des communes de tenir une réunion portant sur la prévention du suicide dans leurs circonscriptions respectives. L'objectif de ces rencontres était d'inciter les gens à en parler et d'obtenir des renseignements sur les interventions offertes dans les communautés.
    Au cours de la seconde étape de ce projet, qui est un prolongement de son initiative de lutte contre la stigmatisation, la Commission élabore un modèle communautaire de prévention du suicide, qui vise à adapter et à appliquer au contexte canadien un programme existant et éprouvé de prévention du suicide. Ce modèle, mis au point par le Dr Ulrich Hegerl, est un programme communautaire multi-niveaux de prévention du suicide qui a fait ses preuves en réduisant les taux de suicide de 24 % au cours des deux années de mise à l'essai dans une collectivité. La Commission travaille actuellement avec différents intervenants pour déterminer la mise en oeuvre d'un modèle pancanadien.

  (1640)  

    Cette initiative prolongera un autre programme clé de la Commission, à savoir le programme Chez Soi/At Home, qui est un projet de recherche participative. Il a permis d'obtenir des résultats positifs et à faible coût dans le cadre de la démarche de lutte contre l'itinérance « Logement d'abord », qui offre aux sans-abri atteints d'un problème de santé mentale chronique un accès immédiat à des logements subventionnés. Ses participants étaient parmi les Canadiens les plus vulnérables, hautement stigmatisés, disant souffrir d'isolement et présentant un risque élevé de suicide. Chez Soi/At Home a montré que les personnes atteintes d'un problème de santé mentale chronique qui bénéficient d'un logement sans restrictions sont plus susceptibles de conserver ce logement et de voir leur qualité de vie s'améliorer. Le programme a aussi montré que chaque tranche de 10 $ investis dans les services « Logement d'abord » pour les participants ayant des besoins élevés a permis à la collectivité de réaliser une économie de coût de presque 22 $.
    Le succès de ce programme a incité le gouvernement fédéral à investir 600 millions de dollars dans la démarche axée sur le « Logement d'abord », par l'entremise de la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance. Grâce à ses recherches novatrices, la Commission a été en mesure de concevoir des approches concrètes et économiques pour améliorer la qualité de vie de Canadiens sans-abri et atteints d'une maladie mentale chronique.
    Exerçant son leadership pour ce qui est de la transformation des systèmes de services en santé mentale, la Commission accorde une plus grande importance à l'échange de connaissances et à la diffusion des pratiques exemplaires. Le Centre d'échange de connaissances, qui est au cœur du travail de la Commission, comprend de nombreux pôles de partage d'information, tant en ligne qu'au moyen de réunions. Le CEC diffuse de l'information sur les initiatives de la Commission et sur d'autres pratiques exemplaires, s'assurant ainsi que les bons renseignements vont aux bonnes personnes et que celles-ci sauront s'en servir.
    Le CEC est également voué à améliorer les données et les ressources en matière de santé mentale. Le mois prochain, il introduira un ensemble d'indicateurs nationaux de la santé mentale, qui permettra d'obtenir des données essentielles sur le taux d'automutilation, la prévalence de maladies mentales spécifiques, le taux de suicide et le taux d'accès aux services. Ces données comporteront indicateurs de la santé mentale pour certaines sous-populations, telles que les jeunes LGBTQ et les immigrants récents. Cette information permettra de déterminer les domaines dans lesquels on répond aux besoins des Canadiens et ceux où il y a place pour l'amélioration.
    Comme vous pouvez le constater, la Commission travaille fort, comme toujours, et elle est prête à amorcer la planification à long terme de la prochaine étape. À l'heure actuelle, la Commission cherche à se faire conseiller sur son nouveau mandat par le gouvernement fédéral, Santé Canada et d'autres partenaires clés. Elle consulte également différents responsables gouvernementaux et parties concernées partout au pays pour discuter de priorités communes.
    Ces discussions constitueront le fondement du plan d'action sur la santé mentale au Canada, qui fixera les buts et les priorités à l'appui de la mise en œuvre de la Stratégie. Tout comme la Stratégie a orienté le travail au cours de la dernière décennie, le plan d'action sur la santé mentale au Canada donnera le ton pour la prochaine. En menant à bien ce plan d'action, la Commission sera en mesure de régler des problèmes pressants, notamment en matière de prévention du suicide, d'accès et de services de soutien en santé mentale pour les premiers intervenants, les personnes âgées, les enfants et les jeunes ainsi que pour diverses autres populations.
    Pour terminer, je tiens à féliciter les membres du comité d'avoir défini les mesures futures à prendre au niveau fédéral. Il reste encore beaucoup à faire. Avec le renouvellement du mandat de la Commission, c'est le moment idéal pour redoubler d'efforts. Nous sommes à un moment charnière dans le domaine de la santé mentale au Canada et nous devons consacrer plus que jamais nos énergies à la transformation du système.
    J'ai hâte de travailler avec vous tous, de même qu'avec tous les Canadiens, à la poursuite de nos efforts pour atteindre le but que nous visons tous, qui est l'amélioration de la santé mentale des Canadiens.
    Merci beaucoup.

  (1645)  

    Merci beaucoup.
    Monsieur Rankin, vous avez sept minutes.
    Grand merci pour votre exposé.
    Vous avez mentionné au départ, madame Bradley, l'enjeu de la prévention du suicide et la réduction de 24 % du taux de suicide dans la communauté, si j'ai bien compris, où le nouveau modèle était mis à l'essai. Il s'agit d'un résultat vraiment extraordinaire. Pouvez-vous nous dire si cette communauté était composée de personnes autochtones et non autochtones? De quelle communauté s'agit-il?
    À vrai dire, le modèle a été mis à l'essai dans une communauté qui se trouve en Allemagne. L'essai a été repris dans 17 autres pays, mais pas ici au Canada.
    Y a-t-il eu un succès similaire au Canada que vous pourriez nous signaler?
    Eh bien! ce que nous proposons, c'est de faire l'essai de ce modèle au Canada en l'adaptant au contexte canadien. C'est ce projet que nous envisageons pour faire avancer le travail visant la prévention du suicide.
    Votre stratégie tient-elle compte, du moins en partie, des aspects culturels particuliers, dont il a été question précédemment, qui concernent les Premières Nations et les Inuits?
    Je pense que c'est absolument nécessaire.
    Nous connaissons certains des taux. Nous savons qu'environ 12 % des 4 000 personnes qui se suicident annuellement sont des enfants et des jeunes. Nous savons aussi que ce taux est beaucoup plus élevé dans le Nord du pays.
    Notre stratégie de recherche ciblerait certainement en partie les communautés autochtones du Nord.
    Je veux justement en parler. Quatre mille suicidés par année est un chiffre effarant, et vous dites que 12 % d'entre eux sont des enfants et des adolescents.
    J'ai deux questions. Premièrement, y a-t-il des statistiques sur les tentatives de suicide, qui je sais sont en nombre beaucoup plus élevé? Avez-vous ces chiffres? Deuxièmement, faites-vous une ventilation en fonction des Premières Nations et des Inuits?
    Permettez-moi d'apporter une correction. C'est 14 % des suicidés qui sont âgés entre 10 et 24 ans.
    Nous avons des chiffres sur les tentatives de suicide, ainsi que sur les suicides proprement dits. Je n'ai pas en mains les chiffres précis, mais je pourrai certainement vous les obtenir.
    Avez-vous une ventilation en fonction des Premières Nations et des Inuits?
    Nous avons une certaine ventilation géographique.
    Je pense que le point essentiel ici est de constater, avec 14 % des suicidés, soit 528 personnes, âgés de 10 à 24 ans, qu'il reste énormément de travail à faire. Dans le cadre de nos recherches, que nous nous pencherons certainement, je pense, sur ces chiffres et les préciserons.
    Il y a eu des questions sur la stigmatisation au cours de la séance précédente. Je ne sais pas si nous avons des chiffres précis sur les effets de la stigmatisation.

  (1650)  

    Avez-vous une ventilation statistique au sujet des premiers intervenants? Nous avons beaucoup entendu parler des pompiers, des policiers et des ambulanciers paramédicaux qui, semble-t-il, détiennent le record pour le nombre de suicides. C'est du moins ce que j'ai entendu dire par leurs représentants.
    Enregistrez-vous ces renseignements? Avez-vous des données sur les suicides et les tentatives de suicide parmi les premiers intervenants?
    Non. La Commission ne possède pas de telles données. Le projet sur les indicateurs dont je parlais plus tôt vise, tant bien que mal, à cerner les données qui existent au pays.
    Le point que vous soulevez au sujet des premiers intervenants est certainement pertinent. Nous ciblons ce groupe et faisons des interventions dans ce domaine, et je suis donc bien placée pour en parler.
    D'accord.
    Nous avons entendu ce matin le témoignage de représentants de l'Agence de la santé publique du Canada, qui nous ont dit que celle-ci investit 112 millions de dollars par année dans les programmes communautaires. Nous avons entendu Santé Canada faire état de certains de ses programmes, et puis il y a le ministère des Anciens Combattants qui se penche sur le syndrome de stress post-traumatique. Et maintenant, nous avons la Commission de la santé mentale du Canada qui cherche à mettre en place une stratégie nationale, si je vous ai bien compris.
    Dans quelle mesure votre travail supplantera-t-il celui qui se fait déjà par ces autres organismes? En d'autres termes, est-ce que vous considérez que votre travail consiste à exercer un rôle de coordination à l'intérieur de l'appareil gouvernemental canadien?
    À vrai dire, nous jouons déjà un rôle de coordination et la Stratégie est bien établie. Elle est reflétée dans les programmes d'environ neuf des treize provinces et territoires. Ce travail est donc bien amorcé.
    La Stratégie a été élaborée en consultation avec des milliers de personnes, y compris des représentants des principales parties concernées, telles que l'Agence de la santé publique, Santé Canada et d'autres.
    L'un des aspects essentiels de notre travail est que tout se fait en collaboration ou en partenariat avec d'autres. De fait, nous avons établi bien au-delà de 250 partenariats. Nos partenaires et les gouvernements provinciaux et territoriaux nous ont demandé de continuer d'exercer ce rôle.
    La Commission existe depuis seulement huit ans. Nous avons accompli beaucoup et nous sommes, je pense, sur la bonne voie
    En bref, la réponse est oui. La Commission exerce effectivement un rôle de coordination. C'est un rôle que nous jouons depuis le début, et nous espérons continuer de le jouer.
    Vous accomplissez de l'excellent travail, et je vous en félicite.
    Je voudrais, dans la minute qui me reste, vous demander de traiter un peu plus longuement de l'importante analyse que vous avez faite du programme Chez Soi/At Home et de l'initiative « Logement d'abord », qui revêtent une énorme importance dans la communauté que je représente. Pourriez-vous nous dire quelque chose des leçons que vous en avez tirées?
    Il s'agissait du plus grand projet de recherche de démonstration au monde le phénomène de l'itinérance et de la maladie mentale. Je pourrais prendre tout le reste de votre temps, et plus encore, pour en parler, mais l'un des éléments clés que nous avons retenu est l'idée du redressement. Mon collègue de Santé publique a discuté plus tôt de toute la question de la reprise en mains et de l'espoir, qui est néanmoins importante, surtout dans les collectivités du Nord.
    Nous avons certainement appris, pour avoir bien étudié la situation, qu'il s'agissait probablement des gens les plus atteints de maladies chroniques dans ce pays. Près de 2 000 personnes ont participé au programme, qui s'est soldé par un grand succès. Si nous avons pu montrer qu'il existe de l'espoir, du soutien et un changement dans la vie des gens qui font partie de cette population, c'est sûrement vrai pour le reste du pays.
    Je vous remercie de votre excellent travail.
    Merci.
    C'est maintenant au tour de M. Young.
    Allez-y, monsieur.
    Je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
    Vous savez, madame Bradley, quand on discute de santé mentale, on finit toujours par parler de suicide, mais aussi de toxicomanie, d'accoutumance et de l'abus de médicaments. Il y a tout un éventail de médicaments sur ordonnance dont on sait qu'ils causent le suicide. Le médicament contre l'acné, l'Accutane, en est un, mais la plupart d'entre eux sont des antidépresseurs, et toutes les grandes sociétés pharmaceutiques offrent au moins un ISRS et un IRSN.
    C'est un fait bien connu que les antidépresseurs causent le syndrome sérotoninergique, qui se caractérise par une agitation, un rythme cardiaque accéléré, des convulsions et qui peut éventuellement être mortel chez ceux qui en souffrent. Ils sont la cause de beaucoup d'abus d'alcool et de drogues, de suicides et d'actes de violence bizarres. Dans chacune des fusillades survenues dans des écoles sur lesquelles j'ai fait des recherches, le tireur prenait un antidépresseur ou était en sevrage. Ces choses-là ne sont pas, de façon générale, rapportées par les médias. D'ailleurs, le pilote allemand qui a tout récemment provoqué l'écrasement de son avion dans les Alpes prenait des antidépresseurs. Son geste était délibéré.
    En Afghanistan, les États-Unis ont perdu plus de soldats par suicide qu'au combat. Cela était également le cas des forces armées britanniques en 2012, ainsi que des forces de défense australiennes. À un certain moment, les anciens combattants américains de retour d'Iraq se suicidaient au rythme d'environ un à l'heure, plus précisément de 22 par jour. En Iraq, il y avait, apparemment, un soldat sur quatre qui prenait un antidépresseur en situation de combat ou à son retrait du champ de bataille.
    Au cours de cette période, soit de 2001 à 2009, la quantité d'antidépresseurs commandée aux sociétés pharmaceutiques par les forces militaires a augmenté de 76 %.
    Ces chiffres sont renversants, et il va sans dire qu'aucune autre guerre n'a été marquée d'une pareille incidence de suicides. Bien entendu, on n'avait pas d'antidépresseurs durant la guerre du Vietnam ou la Seconde Guerre mondiale. Cependant, la corrélation entre les antidépresseurs et le suicide est manifeste et, pourtant, personne n'en parle, personne ne fait quoi que ce soit.
    Nos autorités demeurent passives et se contentent de laisser faire. Nos médecins militaires distribuent à tout venant ces médicaments, puis regardent partir au combat des soldats regonflés à l'aide d'un médicament, dont l'étiquette elle-même porte la mise en garde qu'il peut rendre suicidaire ou violent, et qui causent des réactions psychotiques pouvant se traduire par des suicides et des meurtres, tout particulièrement après le rapatriement des soldats. La période la plus dangereuse survient lorsqu'on cesse de prendre l'antidépresseur ou qu'on en augmente la dose, chose qui peut parfois se produire, je suppose, quand les soldats rentrent au pays.
    De nos jours, les antidépresseurs sont prescrits très libéralement au Canada. Dans certains groupes d'âge, c'est un Canadien sur quatre qui prend un antidépresseur. Nous venons au troisième rang mondial pour l'administration d'antidépresseurs.
    Je vous demande s'il y a, à votre connaissance, quelqu'un qui a fait des recherches sur la corrélation entre l'administration ou la privation d'antidépresseurs et le suicide.

  (1655)  

    Je n'ai aucune autorité en la matière. Je suis infirmière spécialisée en santé mentale. Mais je peux vous donner mon opinion personnelle. Je ne suis pas surprise qu'on me dise que bien des gens qui se suicident prenaient des antidépresseurs puisqu'il y a un lien étroit entre la dépression et le suicide. Alors ce n'est pas...
    J'ai entendu cet argument bien des fois. C'est ce que les médecins répondent. Je parle d'un produit dont l'étiquette même indique... si c'était rédigé en langage simple, on y lirait: « il est possible que ce médicament vous incite à mettre fin à vos jours ». L'étiquette d'un de ces médicaments, et je crois que c'est l'Effexor, indique que ce médicament risque de donner des idées de meurtre.
    Les gens se suicident après avoir pris des médicaments dont l'étiquette porte un avertissement sur le suicide, et tout le monde dit « oh, c'est parce qu'ils étaient déprimés ». C'est totalement illogique, alors je voulais vous demander pourquoi on nie ces réalités?
    Je n'ai jamais entendu parler d'études de ce genre. Cela ne veut pas dire qu'il n'y en ait pas une en cours, mais cela ne fait pas partie du mandat précis de la commission. Mais si cela fait partie des causes du suicide au Canada et à l'étranger, vous avez raison, il faut étudier cela.
    Permettez-moi d'ajouter que les antidépresseurs ont sauvé la vie de plusieurs de mes proches et de mes patients.
    C'est le slogan des compagnies pharmaceutiques. C'est ce qu'elles disent toujours: elles sauvent des vies. Elles ne peuvent pas le prouver, mais elles le crient sur les toits, et j'entends cela extrêmement souvent.
    Je connaissais Sara Carlin, qui en 2007 a commencé à prendre du Paxil. Elle a fait une réaction et elle s'est mise à prendre de la drogue, ce qui fait partie des comportements anormaux qui figurent sur l'étiquette de ce médicament. Elle a quitté son équipe de hockey, elle a décroché de l'université et elle s'est mise à prendre de la cocaïne. Un jour, elle est rentrée chez elle à deux heures du matin après une nuit de beuverie et elle s'est pendue dans la maison de ses parents. Il n'y a aucun doute que le Paxil y était pour quelque chose. En fait, on lit en plein sur l'étiquette que le Paxil risque de causer des idées suicidaires.

  (1700)  

    J'en prends bonne note. Un élément de l'étude que nous recommandons de faire, ou du projet que nous envisageons de lancer a trait à toute la question de l'accès...
    De l'accès ou...
    De l'accès aux moyens de se suicider, alors ça va des ponts jusque...
    Bien sûr. Mais je parle de la façon dont les médecins donnent ce médicament aux gens en les assurant qu'il est sûr et efficace, puis ils se suicident.
    Je voudrais vous présenter une recommandation aujourd'hui: que vous enquêtiez sur tous les enjeux que vous abordez. Vous vous trouvez devant cette situation, alors examinez-la en profondeur en consultant des sources impartiales, et non des médecins qui travaillent pour des compagnies pharmaceutiques ou qui reçoivent des paiements discrets de compagnies pharmaceutiques, examinez les liens entre les médicaments et le suicide. Je suis convaincu qu'il y a un lien direct; j'étudie cette question depuis 14 ans. Je pense que ce lien est évident et que les gens qui prescrivent ces médicaments et les gens qui les vendent refusent de le reconnaître parce qu'ils retirent beaucoup d'argent de la vente de ces médicaments.
    Je suis d'accord, le problème du suicide est très complexe et très important, et nous allons certainement tenir compte de cela à l'avenir. Merci.
    Merci, vous terminez parfaitement à temps.
    Madame Fry.
    Avant de poser mes questions, je tiens à féliciter la Commission de la santé mentale du Canada pour le travail excellent qu'elle accomplit depuis huit ans. En huit ans, vous avez amélioré les résultats des patients de santé mentale plus que toute autre mesure prise au Canada ne l'a fait au cours de ces huit dernières années.
    Je voulais vous poser une question au sujet du renouvellement de 10 ans. Je voudrais vous demander si vous saviez quelles ressources on allait vous fournir et comment vous alliez pouvoir faire votre travail avec cela. Vous dites que vous êtes présentement en pourparlers avec le gouvernement alors je ne veux pas vous placer dans une situation difficile en vous posant une question comme celle-ci.
    Je le répète, le projet At Home/Chez Soi et tout le travail que vous avez accompli pour éliminer la stigmatisation ont permis de faire d'énormes progrès au cours de ces dernières années. Avez-vous des projets en cours sur le trouble bipolaire avec des groupes comme la Société canadienne de la schizophrénie et auprès de personnes atteintes d'une pathologie? Si tel est le cas, vous pourriez peut-être me dire ce qui, à votre avis, devrait être la prochaine étape à prendre pour éviter de simplement hospitaliser les gens qui ont des troubles pathologiques, mais pour les soutenir — nous savons que certaines provinces envisagent de le faire — au lieu de les enfermer à nouveau dans des établissements, car nous savons tous que ce n'est pas la bonne solution. Avez-vous mené des projets là-dessus? Selon vous, quelles seraient les bonnes recommandations à présenter au sujet de ces groupes-ci?
    La deuxième question que je voulais vous poser a trait à la politique extrêmement sévère sur le très petit nombre de personnes qui se trouvent en prison au Canada pour avoir commis un crime violent parce qu'elles souffrent d'une maladie mentale. Je voulais savoir ce que vous pensez de cette notion selon laquelle on devrait enfermer ces personnes et ne plus jamais les libérer. Avez-vous travaillé auprès de détenus atteints d'une maladie mentale?
    Pourriez-vous me dire ce que vous savez de ces deux domaines et ce que vous recommanderiez que nous fassions de ces personnes. Selon vous, quels sont les plus grands défis qui entravent ce programme?
    En ce qui concerne la Société canadienne de la schizophrénie et leurs différentes filiales provinciales, nous collaborons d'assez près avec la Société pour les troubles de l'humeur du Canada et avec, sauf erreur, les 17 membres de l'Alliance canadienne pour la maladie mentale et la santé mentale, l'ACMMSM, et je sais que vous la connaissez. Oui, nous collaborons de très près.
    Nous nous sommes en quelque sorte écartés des diagnostics précis. Mais il est reconnu que la schizophrénie et le trouble bipolaire sont les maladies les plus complexes et les plus difficiles à diagnostiquer. Tous ces troubles ont une chose en commun: la stigmatisation, et c'est pourquoi ils font partie intégrante de l'initiative intitulée Changer les mentalités que la commission mène depuis sa création. Nous poursuivons ce travail en nous concentrant sur les enfants et sur les adolescents, sur le milieu de travail, sur les professionnels de la santé et sur les médias. Il est clair que la façon dont les médias présentent les décès par suicide et autres touche ces organismes de très près. Nous ne nous penchons pas sur un diagnostic précis ou sur une catégorie diagnostique particulière, mais nous collaborons de très près avec tous ces organismes et nous les connaissons très, très bien.
    En ce qui concerne la santé mentale dans les établissements correctionnels, je crois que c'est ce que vous mentionnez dans votre question en parlant de troubles concomitants, nous savons qu'il se trouve un bien plus grand nombre de détenus atteints de maladies mentales et de troubles de toxicomanie dans les établissements provinciaux et fédéraux. J'espère que pendant la prochaine phase de la commission, nous pourrons examiner cela d'un peu plus près. Comme je l'ai dit, nous avons beaucoup de groupes d'intervenants. Nous avons fait plus de progrès avec certains d'entre eux qu'avec d'autres. Mais le nombre est très élevé si vous comptez les établissements provinciaux et fédéraux ainsi que les collectivités qu'ils touchent. Nous reconnaissons qu'il s'agit d'un domaine important. Nous n'avons pas vraiment fait beaucoup de progrès, mais nous avons concentré nos activités dans d'autres domaines. Dans le cadre du projet At Home/Chez Soi, nous avons observé l'évolution de cette population à travers le système juridique, y compris les services correctionnels, alors dans ce domaine particulier je vous dirai que nous avons fait des progrès, mais qu'il y a encore beaucoup à faire.

  (1705)  

    Qu'en est-il des défis auxquels font face de nombreuses personnes atteintes de psychoses qui sortent, disons, de l'hôpital et qui ont besoin de soutiens dans la collectivité? Quelle serait votre recommandation à ce sujet? On ne peut pas les enfermer dans des établissements.
    Je crois que j'ai nommé les trois domaines sur lesquels nous devrons nous concentrer. Le premier est l'intégration des services, et je crois que cela s'applique à toutes les personnes qui sortent d'un programme, surtout un programme mené en établissement. Il faut établir un processus de transition et une voie de passage claire vers les services communautaires. Vous remarquerez que la dernière partie de la stratégie porte sur l'accès. À mon avis, notre commission devra se pencher plus activement sur cet enjeu à l'avenir. Il est facile de dire qu'il faudrait aiguiller ces personnes vers un programme ou vers un service communautaire et que comme nous éliminons la stigmatisation, elles sont plus nombreuses à demander ces services. Mais si les services n'existent pas, ces gens ne pourront pas y accéder. Il s'agit d'une intégration extrêmement importante qui ne peut pas s'interrompre, pour que ces personnes continuent à recevoir leurs soins dans la collectivité, qu'il s'agisse de soins de santé primaires, de centres de soins collaboratifs, de centres de santé mentale, ou autres.
    Monsieur Albrecht, à vous la parole.
     Je remercie la commission du travail qu'elle accomplit et merci, madame, d'être venue aujourd'hui.
    Avant de poser mes questions, je voudrais soulever une erreur que j'ai remarquée. À la page 6 de votre déclaration préliminaire, je crois qu'il y a un mot qui ne devrait pas s'y trouver. Dans la phrase « en réduisant les taux de suicide de 24 % », l'anglais parle de réduire « la prévention du suicide de 24 % », et ce mot prevention s'insère mal dans cette phrase. On devrait lire « la réduction du suicide », et non la réduction de la prévention du suicide. Je soulève cela au cas où ce rapport allait rester dans les anales pour toujours.
    Mme Louise Bradley: Merci.
    M. Harold Albrecht: Mais je vous remercie encore pour votre travail.
    Nous avons entendu aujourd'hui deux mots qui à mon avis sont importants. Le premier est « stigmatisation », et l'autre est « espoir ». Je suis vraiment heureux qu'on ait déjà souligné cela.
    La campagne #308conversations a ouvert une excellente tribune pour notre personnel communautaire qui participe à des initiatives de prévention du suicide et de santé mentale et auprès de personnes qui ont fait face au suicide d'un membre de leur famille. Dans ma région, quatre députés se sont réunis pour diriger l'une de ces conversations. Nous avons attiré environ 100 participants à cet événement qui se déroulait sur toute une matinée. C'était un événement important. Les conversations en personne, les médias sociaux, les activités organisées dans le cadre de cet événement ainsi que la couverture des journaux et des radiodiffuseurs ont contribué à souligner, et ainsi à éliminer, une bonne partie des stigmates les plus évidents. Il y avait des travailleurs de première ligne, des bénévoles, des entraîneurs de hockey et de baseball, des membres du personnel des conseils scolaires et autres — tous ces participants étaient importants. L'après-midi s'est terminé en une séance sur le modèle safeTALK. Nous avons en fait reçu de la formation sur ce modèle.
    J'ai deux questions à vous poser sur la campagne #308conversations. D'abord, je crois qu'initialement vous espériez la lancer de mai à août 2014. Vous l'avez prolongée jusqu'à mai 2015. Savez-vous maintenant combien de députés ont réellement participé à cette initiative?

  (1710)  

    Avez-vous cette information, Jennifer?
    Merci d'avoir posé cette question. Je tiens à vous remercier et à reconnaître que vous êtes en tête de cette campagne.
    Nous avons près de 60 députés maintenant. Nous avons prolongé la campagne jusqu'à la fin de la session du printemps, et certains députés ont la forte intention de continuer pendant l'été. Nous avions essayé de lancer la campagne l'été dernier et nous avions organisé cet événement, mais je ne pense pas que nous ayons développé une aussi bonne lancée que celle dont nous bénéficions à l'heure actuelle.
    Vous avez vous-même participé à quelques courtes vidéos. Vous et des députés de tous les partis avez présenté les expériences que vous avez vécues. Nous espérons qu'en décrivant ces expériences personnelles, comme vous venez de le dire, vous encouragerez vos collègues qui ne se sentent peut-être pas à l'aise. Nous avons entendu toutes sortes d'expériences. Certains, comme vous, ont organisé de grands événements avec une centaine de députés. D'autres ont organisé des événements qui ressemblaient plus à des discussions autour d'une table de cuisine.
    Bien sûr. Tous ces événements sont absolument essentiels, selon moi. Si notre comité ici peut faire quelque chose, je vais encourager au moins notre groupe autour de la table d'en organiser un.
    S'il y a un moyen quelconque de travailler en partenariat avec vous pour faire augmenter ce nombre de 60 à 300 — et... bien au moins à 300...
    À 338.
    Des voix: Oh, oh!
    xxxOui, à 338 après l'élection, c'est exact.
    Cela est plus ou moins relié aux médias sociaux. Je sais que la Commission de la santé mentale du Canada a plus de 10 000 personnes qui la suivent sur Twitter. Malheureusement, @MHCC_308 n'en compte que 600 et quelques. Je me demande ce que nous pourrions faire pour accroître ce chiffre. Bien sûr, notre initiative est temporaire, mais ce serait fantastique si nous pouvions étendre l'initiative dans les médias sociaux.
    Je ne sais pas si vous auriez des idées qui nous aideraient à accroître ces chiffres et à nous faire connaître.
    Nous sommes sur le point de publier un rapport d'étape sur #308conversations. Nous diffusons aussi les courtes vidéos. Nous avons eu une autre occasion de présenter le rôle de direction qu'assume le Canada et nos députés dans ce domaine en signant très récemment une entente avec l'Organisation mondiale de la santé pour lancer la campagne #308conversations dans le monde entier. Nous avons aussi commencé à en discuter avec les É.-U. pour voir ce que les membres du Congrès américain pensent de cette idée. Je crois qu'ils l'appelleront les #435conversations avec les membres du Congrès.
    Une fois que nous bien lancé cette notion des #308conversations, je crois que nous aurons commencerons à lancer un phénomène, pour utiliser le langage des médias sociaux.
    Fantastique.
    Me reste-t-il encore un peu de temps?
    Il vous reste trois minutes.
    Trois minutes? C'est énorme.
    Mme Jennifer Vornbrock: Nous parlons très rapidement.
    M. Harold Albrecht: Dans le cas des médias et des outils Internet, quel soutien fournissons-nous à certains des outils Internet qui s'offrent aux initiatives de santé mentale et de prévention du suicide? J'en connais un qui s'intitule Your Life Counts, mais il y en a probablement des dizaines d'autres.
    Existe-t-il des initiatives coordonnées par la Commission de la santé mentale du Canada ou par l'ASPC ou par un autre groupe fédéral qui soutiendrait en quelque sorte ces outils Internet ou qui serait pour eux une source initiale de renseignements?
    Comme nous l'a dit Mme Bradley, la commission désire beaucoup mettre sur pied le modèle qu'utilisent 55 villes européennes. Ce modèle se compose de cinq volets. L'un de ses volets principaux repose sur cette notion de sensibilisation du public. Nous collaborons de très près avec l'Agence de la santé publique pour déterminer lesquels de ces nombreux outils Internet — la formation, les ateliers, l'éducation, la formation des contrôleurs et la sensibilisation du public — sont les meilleurs outils de marketing social et transmettent les meilleurs messages.
    Je pense que le plus grand avantage de mettre en oeuvre ce modèle et de collaborer de près avec l'ASPC ainsi qu'avec l'Association canadienne pour la prévention du suicide et avec d'autres organismes est l'occasion de vraiment déterminer où se trouvent les meilleures connaissances et d'en tirer profit. Nous devons ainsi veiller à concentrer nos activités sur l'échange de connaissances, sur leur application et sur le transfert du savoir. Tous ces éléments sont au coeur du mandat de la Commission de la santé mentale.

  (1715)  

    Je suis bien content d'entendre ça, parce qu'une chose me paraît évidente depuis que je suis entré dans ce domaine, un peu par hasard, c'est la meilleure coopération que l'on observe entre les différents groupes et organismes. Vous savez, trop souvent nous protégeons notre propre territoire et nous nous efforçons d'obtenir ce dont nous avons besoin, alors je suis très heureux de voir la Commission de la santé mentale du Canada, l'ASPC et d'autres organismes collaborer pour apporter un changement réel.
    Juste un petit commentaire au sujet de ce qu'on nous a dit à la séance précédente sur le bonheur et sur les compétences fondamentales de prévention. Je n'oublierai jamais ce qu'a dit le Dr David Goldbloom, votre ancien vice-président, si je ne m'abuse.
    Président.
    C'était tellement contraire à la logique et pourtant si simple, et je crois qu'il illustrait ainsi l'importance de retourner aux fondements de certaines de ces choses. Il soulignait qu'un des meilleurs facteurs de protection et de préparation à la bonne santé mentale est de prendre un bon repas en famille. Je me suis dit que ce n'était vraiment pas sorcier.
    Je me demande si vous pourriez nous dire ce que vous en pensez, ou si vous l'avez aussi entendu dire cela.
    Oui, je l'ai entendu dire cela, et je trouve qu'il a tout à fait raison. Nous envisageons souvent de prendre des moyens très complexes et nous pensons qu'il faut faire de très longues recherches avant de mettre une solution sur pied.
    Je crois que le modèle communautaire dont nous parlons illustre très bien cela, parce que nous sommes convaincus que nous trouverons les réponses dans les différentes collectivités. Les réponses ne seront pas les mêmes pour Iqaluit que pour Vancouver, mais les principes sont souvent les mêmes. Parfois il s'agit de solutions très simples, comme vous et vos collègues avez entendu dire dans vos #308conversations. Il y a bien des choses que nous pouvons faire pour transformer la situation. Je ne suis pas surprise d'apprendre que dans les villes où ils ont mis ce modèle à l'essai, les taux ont chuté. C'est pourquoi nous avons tant d'espoir que ce modèle réussira ici au Canada.
    Merci d'avoir prononcé à nouveau ce mot, « espoir ».
    Merci beaucoup, monsieur Albrecht.

[Français]

     Je cède maintenant la parole à Mme Moore, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Bradley, vous avez beaucoup parlé de stigmatisation et de problèmes d'intégration chez ces personnes, en particulier celles qui sont aux prises avec un problème de santé mentale plus profond. Je me demandais si vous aviez développé des outils à cet égard, notamment pour les employeurs, afin d'expliquer les besoins et les façons de travailler avec ces personnes ainsi que de les intégrer dans un milieu de vie.
    Avez-vous aussi développé des outils pour donner des explications aux jeunes et aux enfants en ce qui a trait à la santé mentale? Il peut en effet arriver qu'un membre de la famille ait un problème de santé mentale. Comment fait-on, dans ce cas, pour aborder cette question avec l'enfant ou l'adolescent?
    Quand j'étais adolescente, une étudiante de mon école souffrait de schizophrénie. Or on ne nous a rien expliqué à ce sujet. Nous avions simplement une camarade qui avait un ami imaginaire...

[Traduction]

    Excusez-moi, on n'entend pas l'interprétation.
    Avez-vous entendu cette conversation?
    Seulement les dernières phrases.
    D'accord.

[Français]

    Je me rappelle qu'au secondaire, il y avait parmi nous une personne schizophrène et qu'on ne nous avait donné aucune information sur son état. On tenait pour acquis que nous allions comprendre cette situation.
     Est-ce que des outils ont été développés à cet égard?

[Traduction]

    Merci d'avoir posé cette excellente question.
    Oui, nous avons accompli beaucoup de travail dans ce domaine. Je vais vous parler d'une initiative que nous avons lancée récemment spécialement pour les adolescents. Avec notre initiative de lutte contre la stigmatisation que nous appelons Changer les mentalités, nous menons une campagne intitulée La tête haute. Au printemps dernier, nous avons rassemblé 130 adolescents de toutes les provinces et de tous les territoires du pays. Après avoir mené des recherches, nous avions découvert que le moyen le plus efficace de réduire la stigmatisation et de modifier la façon de regarder les personnes atteintes de maladies mentales et, ce qui est plus important encore, d'éliminer la discrimination et les comportements qui en découlent, c'est la sensibilisation par la communication directe.
    Ces jeunes sont restés ensemble pendant toute une semaine. Ils étaient en contact avec des camarades atteints de maladies mentales. Nous avons écouté leurs expériences, puis nous leur avons donné de l'éducation et leur avons remis un ensemble d'outils en leur disant de retourner dans leurs écoles secondaires et d'organiser des sommets similaires à celui-ci. J'ai assisté à un de ces sommets il y a à peine une semaine, à St. John's où l'un des participants avait réuni 400 étudiants de toutes les écoles secondaires de la province de Terre-Neuve-et-Labrador. Il y en a aussi eu un en Colombie-Britannique qui a bien sûr réuni beaucoup plus de participants. D'autres sommets sont en train de s'organiser. Ça ressemble un peu à une toile d'araignée qui s'étend sur tout le pays.
    Nous participons à des initiatives comme le Jack Project et d'autres groupes.
    Nous ciblons particulièrement les jeunes. À propos, pour vous donner une idée de notre stratégie, si vous ne voulez pas lire toute la Stratégie du Canada en matière de santé mentale, si vous lisez la version rédigée pour les jeunes, elle a à peu près le tiers de la longueur, et son contenu est très simple et direct. Le Conseil des jeunes a réécrit la stratégie dans le langage des jeunes, si l'on peut dire. On trouve des caricatures d'un bout à l'autre du document, et Michael Wilson et moi n'étions pas très heureux de notre version pour adultes, et nos jeunes ont pris cette merveilleuse initiative afin de décrire l'impact qu'ils ont dans le milieu scolaire.
    Je pourrais vous parler aussi des lieux de travail. Mais je voudrais d'abord savoir si j'ai répondu à votre question ou si vous voudriez plus de détails.

  (1720)  

    Il vous reste 40 secondes, madame Moore.
    Vous pourriez peut-être nous parler du milieu de travail.
    Oui.
    Il y a environ un an et demi, la commission a élaboré une norme de sécurité psychologique pour le milieu de travail qui, je le répète, est une première mondiale et, pour autant que nous le sachions, la seule qui existe. Nous l'avons créée en partenariat avec des experts en la matière. Nous avons fait cela de concert avec l'Association canadienne de normalisation, avec le BNQ et avec plusieurs autres organismes. Elle porte sur toute la question de la santé mentale en milieu de travail.
    Il fut un temps — et c'est probablement encore le cas dans bien des endroits —, où la santé mentale était une chose dont on s'occupait hors du travail. C'était une chose séparée. Et pourtant l'endroit où nous passons le plus grand nombre de nos heures d'éveil est, si l'on peut dire, rempli de dangers pour la santé mentale; par conséquent, elle offre de nombreuses occasions de faire de la promotion et de la prévention en matière de santé mentale. Cette norme de sécurité psychologique pour le milieu de travail a été conçue comme toute autre norme de santé en milieu de travail. Par exemple, nous savons que quiconque entre dans un chantier de construction doit porter un casque. Cette norme de sécurité psychologique tient compte de ce qui se passe à l'intérieur du casque de chantier. Nous avons maintenant un guide qui montre aux entreprises, aux gouvernements et aux organismes de quelle façon appliquer cette norme. Ce sont des instructions complètes, faciles à lire et claires sur la façon de le faire. Nous sommes maintenant à mi-chemin d'une étude de trois ans sur 40 entreprises qui ont mis cette norme en vigueur et que nous suivons pour en étudier les coûts ainsi que les répercussions qu'elle a sur le moral des employés, sur les personnes handicapées, sur l'absentéisme et autres. D'autres pays l'ont aussi adoptée. Nous continuons à poursuivre cette initiative très prometteuse.
    Madame McLeod.
    Merci d'être venue aujourd'hui nous parler des prochaines étapes à entreprendre. Je voudrais regarder un peu vers l'arrière. Je tiens à vous féliciter pour cette norme pour le milieu de travail. Dans mon ancien rôle, j'ai assisté à des réunions des ministres fédéraux et provinciaux où tous les participants appuyaient et encourageaient la mise en vigueur de cette norme. Il est certain que cette initiative va se répandre, et je serais très intéressée de voir les résultats de l'étude que vous menez en suivant ces 40 organismes.
    J'ai organisé l'une des #308conversations. C'était intéressant, parce que nous en sommes sortis avec le sentiment qu'il fallait absolument agir. Évidemment, pour agir il faut que quelqu'un prenne le taureau par les cornes et lance une initiative. Peut-être que plus tard je pourrais vous décrire ce que notre groupe a l'intention de faire, parce que lorsqu'on lance une initiative, il est important de se fixer un objectif. Vous avez tenu quelques conversations assez puissantes, alors après cela, dans quelle direction votre communauté se dirige-t-elle? Il est certain que nous présenterons nos commentaires à la commission. Je crois que la lettre vient d'être approuvée. Mais dans quelle direction notre communauté se dirige-t-elle?
    Vous pourrez présenter quelques observations à ce sujet, mais en réalité je voudrais que vous nous parliez du Plan d'action sur la santé mentale du Canada et que vous disiez de quelle façon il abordera les problèmes qui se font jour dans le système de soins de santé, afin de vraiment établir une base. Pourriez-vous nous parler un peu de ces questions?

  (1725)  

    Bien sûr.
    Jennifer, voudriez-vous parler des #308?
    Je vous dirai très rapidement au sujet des #308 que les renseignements que nous a présentés chaque collectivité nous ont profondément émus. Nous avons reçu des lettres. Nous avons reçu des tonnes d'information.
    Comme Louise l'a dit dans sa déclaration préliminaire, et nous en avons parlé ici également, nous avons l'intention de mettre sur pied le modèle communautaire. Nous sommes témoin de la force et de la résilience extraordinaires qu'a déjà chacune de ces collectivités dans les travaux qu'elles accomplissent. Ce qu'il nous faut vraiment, comme vous l'avez dit, c'est qu'un organisme coordonne et dirige cela. Je pense, à titre de coprésidente de ce groupe national de prévention du suicide et en collaborant avec nos partenaires, que la commission devrait assumer maintenant ce rôle dans le cadre de son prochain mandat. Nous espérons pouvoir nous lancer dans cette prochaine étape.
    Merci beaucoup d'avoir organisé l'une des #308conversations. C'est très important de le faire.
    En ce qui concerne le plan d'action sur la santé mentale, nous avons tenu des discussions en table ronde dans tous les provinces et territoires, sauf deux ou trois. Nous avons l'intention d'en organiser dans toutes les provinces et dans tous les territoires.
    Les gens nous disent quelles prochaines étapes ils pensent que nous devrions entreprendre. Nous pensons le savoir, mais nous n'en sommes pas sûrs. Nous n'avons pas consulté les gens sur la stratégie depuis longtemps. Nous menons aussi un sondage en ligne. Nous avons également établi un mécanisme pour consulter l'ensemble des Canadiens le mois prochain. Nous obtiendrons ainsi l'opinion de gens qui ne se consacrent pas entièrement à ce sujet, et nous désirons les entendre.
    Nous ne voulons pas que la stratégie se perde sur les tablettes, même s'il s'agit d'un très joli document. Je pense que même si nous avons une avance de deux ans sur nos plans, il est vraiment important que nous examinions ce qu'elle signifie et ce qu'elle donnerait comme stratégie sur la santé mentale. Sur quelles priorités devrions-nous nous concentrer maintenant et à long terme pour que cette stratégie entre vraiment en oeuvre?
    Nous avons effectué un peu d'analyse environnementale dans les provinces et dans les territoires pour voir ce qui réussit et ce qui ne réussit pas. Évidemment, chacune des provinces l'applique différemment. Cela ne veut pas dire que certaines sont meilleures et que d'autres sont pires. Elles sont tout simplement différentes.
     Où concentrer nos efforts, maintenant? Je crois qu'il faut que nous établissions nos indicateurs de santé mentale. C'est la première fois qu'on établit des indicateurs au Canada. Nous serons alors prêts, à la prochaine réunion de notre conseil d'administration en juin, à présenter les résultats de toutes ces discussions, des sondages et de nos discussions en groupes avec les citoyens. Je pense que c'est vraiment la prochaine chose à faire lorsque nous entamerons la prochaine phase des travaux de la commission, de concert avec tous nos intervenants et partenaires.
    Madame Morin, c'est à vous.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être ici parmi nous aujourd'hui.
    J'ai demandé à mes trois collègues s'ils savaient ce qu'était le 308 meeting dont vous nous parliez plus tôt, mais aucun d'entre eux n'était au courant. Je ne sais pas où se situait le problème à cet égard, mais peut-être pourriez-vous me dire plus précisément ce que nous pourrions faire pour vous aider.

[Traduction]

    Quelle réunion? Excusez-moi.
    La 308.
    Oh, je comprends. D'accord.
    Oui. Nous sommes convaincus que nous trouverons les solutions dans les collectivités, alors au printemps dernier, nous avons écrit aux 308 parlementaires pour leur faire part de notre intention. Il n'est pas facile de présenter ce sujet, nous le reconnaissons. Nous avons donc fourni aux gens les outils nécessaires pour diriger une conversation. Il s'agissait de tous les renseignements sur l'endroit où organiser une réunion, de quelle façon la diriger, les questions à suggérer pour lancer la discussion ainsi qu'un mécanisme pour envoyer les commentaires à la commission pour que nous puissions en présenter les résultats à tous les députés parlementaires.

  (1730)  

[Français]

    D'accord, merci. Un de mes adjoints n'a probablement pas vu cela passer, mais je serais vraiment heureuse de me pencher sur cette question.
     Dans le document que vous nous avez fourni et qui porte sur la Stratégie en matière de santé mentale pour le Canada, vous parlez de six orientations stratégiques, soit la promotion de la santé mentale, la promotion du rétablissement, la défense des droits de la personne, l'accès à la bonne combinaison de services, les traitements, les formes de soutien, la réduction des inégalités et le travail auprès des Premières Nations, des Inuits et des Métis ainsi la mobilisation du leadership.
     Comment votre budget était-il réparti entre ces six orientations.

[Traduction]

    Madame Bradley, vous pouvez répondre brièvement.
    Je pense que notre plan d'action sur la santé mentale va nous aider à accomplir cela.
    À la commission, nous sommes très hésitants à présupposer des faits. Nous savons que nous ne sommes pas des experts qui ont réponse à tout. C'est difficile parce que les situations diffèrent dans les différentes régions du pays. Il est toujours possible de catégoriser, mais le Plan d'action sur la santé mentale du Canada a été conçu de manière a faire exactement ce que vous nous demandiez dans votre question, c'est-à-dire d'établir des priorités sur lesquelles nous concentrer avant tout, et de décider de l'aide que nous pourrons demander à nos intervenants et aux gouvernements de tout le pays pour accomplir cela.
    La stratégie sur la santé mentale présente de très nombreuses recommandations. Nous savions en les rédigeant qu'il n'existe pas de solution unique. Chaque province, chaque territoire, chaque ministère du gouvernement fédéral peuvent choisir les recommandations qui lui semblent les plus pertinentes pour établir son plan. Nous avons collaboré avec chaque province et chaque territoire pour les aider à fixer ces priorités.
    Excellent.
    La cloche sonne. Notre prochaine tâche est d'aller voter.
    Je remercie la Commission de la santé mentale du Canada d'être venue comparaître devant nous aujourd'hui.
    Je remercie les collaborateurs et tous nos députés d'avoir consacré de leur temps pour venir aujourd'hui. C'est merveilleux.
    Nous allons clore la séance, et nous nous revoyons jeudi.
    La séance est levée.
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