Passer au contenu
;

CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 104 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 24 avril 2018

[Énregistrement électronique]

(0850)

[Traduction]

    Je déclare la réunion ouverte.
    Nous avons quatre témoins par heure, ce qui sera serré, et on me dit qu'on avait prévu d'accorder sept minutes aux témoins. Ce sera extrêmement court.
    Nous accueillons Erika Shea, de New Dawn Enterprises, Pierre Fortin et Jacques Primeau, du Partenariat du Quartier des spectacles, Amy Terrill, de Music Canada, et Oliver Pauk et Michael Vickers, de Collectif Akin.
    Nous allons commencer par New Dawn Enterprises et Mme Shea.
    Merci de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui.
    New Dawn a été fondé en 1976. Grâce à son travail dans un certain nombre de secteurs, l'organisation vise à assurer le dynamisme et l'autonomie de la communauté d'Unama'ki, c'est-à-dire de l'Île du Cap-Breton.
    Le Centre des arts et de la culture du Cap-Breton, un centre culturel situé dans le secteur industriel du Cap-Breton, est toujours en devenir. Grâce au soutien de la province de la Nouvelle-Écosse et du gouvernement du Canada, New Dawn a commencé à rénover un couvent de 40 000 pieds carrés vieux de 130 ans en septembre 2017. Le centre, qui visera principalement à fournir un espace de travail abordable aux artistes, devrait ouvrir ses portes en mai 2019.
    Tandis que je réfléchissais à ce dont je voulais vous parler, aujourd'hui, j'ai choisi trois aspects de notre parcours au cours des cinq dernières années relativement au travail de Patrimoine canadien: premièrement, l'importance d'investir dans la création de carrefours culturels dans des collectivités non métropolitaines; deuxièmement, l'efficacité et le professionnalisme du personnel de Patrimoine canadien du point de vue d'une organisation sans but lucratif; et, troisièmement, comme plusieurs autres témoins l'ont souligné récemment, l'importance du financement opérationnel.
    L'expérience liée à notre travail pour donner vie au Centre des arts et de la culture du Cap-Breton est vraiment enracinée à l'endroit même où tout s'est passé, c'est-à-dire une collectivité du Canada atlantique qui lutte depuis maintenant 40 ans pour se réinventer après le rapide déclin de ses industries primaires, c'est-à-dire le charbon et l'acier. Ce contexte historique est important. Il continue d'influer sur la vie des résidents actuels du Cap-Breton, et ce contexte historique nous lie, plutôt que de nous en séparer, à beaucoup d'autres collectivités canadiennes.
    La création d'un important carrefour culturel, dans ce contexte, est transformationnel. C'est un projet qui ressort du lot, actuellement, à Sydney, et il continuera de se démarquer au cours des prochaines années, et ce, pour un certain nombre de raisons.
    Le Centre des arts et de la culture du Cap-Breton représente le plus important investissement dans le centre-ville de Sydney depuis huit ans. Il ouvrira ses portes dans une zone principalement caractérisée par des bâtiments vides, des panneaux « à vendre » et des infrastructures publiques qui se dégradent. Il donnera aux gens une raison de revenir dans notre centre-ville et offrira à celui-ci la masse critique de personnes nécessaires qui viendront faire du magasinage dans ses magasins et manger dans ses restaurants. Le Centre donne aussi, comme il le fait déjà, de l'espoir aux gens de la collectivité, une preuve tangible d'un tournant que bon nombre d'entre nous espérons.
    Pour donner vie au Centre des arts et de la culture dans un tel contexte, il a fallu le faire avec le soutien de deux ordres de gouvernement, plutôt que trois. En 2018-2019, notre municipalité réparera seulement une des 60 routes locales, et dépensera moins cette année comparativement à l'année dernière en ce qui a trait à l'éclairage des rues, aux loisirs, aux parcs, aux bâtiments et aux bibliothèques. En outre, la municipalité a dû refuser des demandes d'investissement de capitaux d'organisations communautaires d'une valeur de plus de 3 millions de dollars. C'est un euphémisme de dire que notre municipalité est pauvre.
    Vos investissements dans des collectivités non métropolitaines et des collectivités qui éprouvent des difficultés économiques sont transformationnelles.
    Je ferai remarquer que, pour faire ce genre d'investissements, il faudra constamment tenir compte des différences qui se manifesteront lorsque ces genres de carrefours culturels ouvrent leurs portes. Les organisations artistiques dans ces collectivités semblent peut-être différentes, elles ne sont peut-être pas aussi grandes, elles n'existent peut-être pas depuis aussi longtemps et elles ne comptent peut-être pas sur autant de ressources que les organisations dans les grandes villes. Je le dis en sachant que la lutte pour les ressources est le lot de tous les intervenants de ce secteur à l'échelle du pays.
    Les centres culturels eux-mêmes peuvent aussi avoir un aspect très différent dans ces collectivités. Ils doivent peut-être faire de la place pour des organisations artistiques bénévoles qui travaillent aux côtés d'organismes artistiques professionnels. Ils peuvent exiger des espaces polyvalents dans les collectivités où la masse critique d'utilisateurs du secteur artistique n'est peut-être pas encore suffisante pour utiliser tous les locaux. Ils devront probablement et peut-être presque toujours être en mesure de fournir des espaces abordables aux artistes tels que définis par rapport au marché local et aux niveaux de revenu des artistes en question. Les gouvernements locaux, malgré leur solide appui de principe, pourraient ne pas pouvoir fournir de ressources financières, quelles qu'elles soient. Ces gouvernements, comme c'est le cas du nôtre, ont peut-être du mal à s'acquitter ne serait-ce que de leurs obligations les plus élémentaires en matière d'infrastructure.
    Le Cap-Breton a une longue histoire d'excellence artistique, et beaucoup d'habitants de l'île sont déterminés à se réinventer par ces moyens.
    Mes deux prochains commentaires sur l'efficacité et le professionnalisme du personnel de Patrimoine canadien et l'importance du financement opérationnel seront brefs.
    En tant qu'organisme sans but lucratif, il a été incroyablement encourageant de travailler en collaboration avec un ministère professionnel, efficace et habilitant. C'est l'expérience que nous tirons de nos interactions avec le personnel de Patrimoine canadien. Depuis le début, nous avons l'impression qu'il croit — au-delà de la rhétorique — à l'importance des carrefours culturels. Les représentants du ministère sont demeurés concentrés sur l'objectif final et ont été des défenseurs flexibles, raisonnables et engagés tandis que nous surmontions les défis qu'on rencontre inévitablement dans un projet de cette envergure.
    Je terminerai en soulignant l'importance des fonds d'exploitation pour les carrefours culturels. Pour nous, l'objectif reste de créer des espaces abordables où les artistes peuvent venir travailler.
    Les coûts d'exploitation d'un centre qui fournit des locaux à prix abordables aux artistes ne sont pas moins élevés que les coûts d'exploitation d'un bâtiment fournissant des locaux à des entrepreneurs ou des avocats ou des responsables des services publics. Nous avons fait de notre mieux pour créer et peaufiner un plan opérationnel solide et durable pour notre centre, mais même le soutien régulier le plus modeste est utile et peut nous aider à atténuer la tension entre des pressions concurrentes dans un tel cas: le besoin de maintenir le coût des locaux le plus bas possible et le besoin de fournir un environnement chaud, sécuritaire et confortable dans lequel travailler.
    Merci.
(0855)
    À la demande du greffier, nous allons modifier l'ordre de comparution pour des raisons techniques. Nous allons passer au Collectif Akin et à Oliver Pauk et Michael Vickers.
    Bonjour à tous. Je m'appelle Michael Vickers et je suis accompagné d'Oliver Pauk.
    Merci beaucoup de nous avoir invités à prendre la parole aujourd'hui. En tant que codirecteurs de l'organisation artistique Akin, nous vous présenterons un bref historique et une brève explication de notre modèle, suivis d'une série de recommandations axées sur le soutien que rendraient possible des modifications stratégiques plutôt que des demandes de financement. Vous trouverez de plus amples renseignements dans notre mémoire, et nous aimerions vous rencontrer individuellement pour vous en dire plus sur nos idées.
    Le Collectif Akin a été fondé il y a 10 ans par un groupe d'amis artistes dans un modeste loft de 600 pieds carrés à Toronto. Toujours géré entièrement par des artistes, le Collectif Akin est maintenant le plus important fournisseur de studios abordables au Canada, fournissant près de 35 000 pieds carrés d'espace à plus de 300 créateurs de tous les types dans huit emplacements de la région de Toronto. L'organisation offre aussi pendant toute l'année environ 60 programmes gratuits ou peu coûteux dans trois catégories: des occasions de perfectionnement professionnel pour les artistes actifs, des ateliers et des programmes de création et des projets d'engagement communautaire auprès de groupes marginalisés.
    Nous avons doublé le nombre de locaux loués et de locataires au cours des 18 derniers mois en raison du besoin marqué pour des locaux abordables et des programmes de soutien, et nous faisons tout ça sans financement de fonctionnement. Nous assurons l'abordabilité des studios en négociant des ententes de location à court et moyen terme pour des propriétés en transition et en voie de réaménagement. Nous avons conclu des baux allant de 6 mois à 10 ans. Les propriétaires et les promoteurs nous louent leurs propriétés à des conditions favorables avant que le développement ne puisse commencer, ce qui permet au Collectif Akin de tirer une valeur sociale et économique de bâtiments qui, sinon, resteraient vacants. Dans beaucoup de cas, nos membres sont des nouveaux arrivants au Canada ainsi que de jeunes entreprises du domaine culturel.
    Nous misons sur deux réalités souvent négligées dans le domaine du développement immobilier au pays. Premièrement, il arrive un moment dans le cycle de vie de tous les bâtiments où le besoin de remise en état ou de réaménagement entraîne une chute des taux de location à des niveaux que les entreprises de création ou les entreprises sociales peuvent se permettre. Deuxièmement, la période entre la décision de réaménager ses locaux et le début des travaux de construction en tant que tels prend souvent de trois à cinq ans ou même plus. Le modèle du Collectif Akin est bénéfique non seulement pour les artistes, mais aussi pour les propriétaires immobiliers, les promoteurs, les quartiers et la prospérité et la qualité de vie à Toronto.
    En bref, nous avons une formule qui fonctionne, c'est-à-dire des biens immobiliers qu'on peut utiliser de façon provisoire à prix réduit, des rénovations pour les artistes, des possibilités de gestion, d'entretien, de programmes ainsi que des occasions professionnelles. Tout cela permet d'offrir des locaux à prix abordables à des articles et des membres de groupes vulnérables qui, sinon, n'ont nulle part où travailler en raison des prix trop élevés. En outre, on aide aussi à créer des collectivités habilitantes, créatrices, florissantes et intéressantes. Prenons l'exemple des studios d'Akin sur la rue King, dans un magnifique bâtiment patrimonial appartenant à Allied Properties REIT, l'un des plus grands propriétaires fonciers au pays. Ces locaux nous sont loués dans le dispendieux district du divertissement de Toronto à un prix bien inférieur au marché locatif afin qu'Akin puisse fournir des studios à plus de 100 artistes durant cette période intermédiaire avant le réaménagement du site.
    Je vais maintenant vous fournir un exemple différent. Nous n'occupons pas uniquement des bâtiments arrivés en fin de cycle de vie. Les tout derniers locaux du Collectif Akin occuperont la moitié du quatrième étage du Musée d'art contemporain de Toronto, créant ainsi des locaux abordables pour 25 artistes dans un quartier culturel important d'où, récemment, de nombreux artistes ont été chassés en raison de la hausse des loyers.
    De quelle façon des centres culturels et des organisations comme le Collectif Akin peuvent-ils être soutenus à l'échelon fédéral? En changeant les règles et en mettant l'accent sur les incitatifs à la location, en remettant en question les avantages fiscaux et en facilitant l'accès aux biens immobiliers publics inutilisés.
    Nous avons trois suggestions auxquelles nous vous prions de réfléchir sérieusement.
    Premièrement, les « baux temporaires ». Au Royaume-Uni, une initiative gouvernementale concernant les baux temporaires est réalisée depuis 2009. Il s'agit de baux dans des espaces commerciaux non utilisés qui sont offerts au prix coûtant à des organismes sans but lucratif en échange d'importants allégements d'impôt foncier ou d'autres considérations visant les propriétaires. Au Royaume-Uni, habituellement, les organisations sans but lucratif qui utilisent ces locaux ne paient pas de loyer du tout et sont simplement responsables de payer les coûts des services publics et les coûts d'amélioration locative des lieux. On crée ainsi plus d'espace pour les artistes, les créateurs et les entrepreneurs tout en récompensant les promoteurs, les propriétaires de bâtiments et les agents immobiliers, puisque leurs bâtiments sont ainsi utilisés et dynamisés. Les deux côtés en sortent gagnants et sont encouragés à participer.
    Deuxièmement, nous aimerions aborder la création récente d'une sous-catégorie d'impôts fonciers liés au partage créatif de locaux appliquée à l'échelle de l'Ontario. Nous reconnaissons qu'il s'agit là d'un pas dans la bonne direction, mais moins de 20 bâtiments de Toronto seront admissibles à l'allégement fiscal de 50 % pour les propriétaires fonciers, et cet allégement n'est pas transféré aux créateurs en tant que tels et n'est pas directement bénéfique pour eux. Parmi les obstacles supplémentaires, mentionnons des exigences comme le besoin d'offrir au minimum 10 000 pieds carrés d'espace ou d'avoir une liste de plus de 40 locataires en plus d'un loyer en dessous du prix courant qui n'est pas défini. Pourrait-on créer une nouvelle sous-catégorie fiscale à l'échelon fédéral, une sous-catégorie qui associerait le financement et l'aide financière non seulement aux propriétaires de bâtiments et aux locateurs, mais aussi aux locataires, comme c'est le cas au Royaume-Uni?
    Troisièmement, nous aimerions que le gouvernement permette des processus plus efficaces quant à l'utilisation des propriétés vacantes appartenant à l'État au moyen d'une politique sur les loyers inférieurs au prix courant. Les règles actuelles à Toronto font en sorte qu'il est plus difficile que jamais pour les organisations sans but lucratif d'avoir accès à ces locaux, et un voile de mystère entoure les locaux qui sont bel et bien disponibles. Comme beaucoup d'autres, en tant qu'organisation sans but lucratif affiliée à des organisations à but lucratif, nous sommes automatiquement exclus. Et même avant cela, il était quasiment impossible pour les petites organisations sans but lucratif d'être considérées comme d'éventuelles locataires de propriétés appartenant à la ville.
    Par exemple, il y a un immeuble en copropriété situé au 61, rue Heitzman, à Toronto, qui a créé un espace locatif administré par la ville dans le cadre d'une entente conclue au titre de l'article 37 exigeant que l'espace en question soit utilisé au profit de la collectivité. Ce qui s'est plutôt passé, c'est qu'un espace en devanture a été créé et n'a pas été utilisé pendant cinq ans. En outre, le Collectif Akin a ensuite été jugé inadmissible par le service juridique de la ville, et le site a continué d'être vacant pendant encore deux ans, sans jamais être utilisé. Les nouveaux règlements fédéraux créés pourraient exiger une affectation plus concrète et plus utile de fonds et des locaux à des artistes ou des groupes communautaires dans le cadre des projets d'aménagement. Les employés de la ville pourraient s'efforcer de faciliter la communication et l'utilisation réussie de ces types de locaux afin de ne pas gaspiller les possibilités qu'ils offrent.
    Enfin, il y a un manque de politiques culturelles qui appuient ces initiatives, et il faut plus de rassemblements visant à communiquer les renseignements à ce sujet. Le gouvernement devrait aider à réunir les organisations dans ce domaine et à faciliter la mise en commun des connaissances et l'édification d'une communauté aux échelons local, provincial et national.
    Nous demandons une révision de la loi actuelle pour permettre au Collectif Akin non seulement de s'épanouir dans le domaine artistique, mais aussi d'aider un plus large éventail de particuliers et de groupes tout en protégeant, en soutenant et en favorisant les carrefours et les districts culturels à l'échelle du Canada.
    Merci beaucoup de nous avoir donné l'occasion d'être ici aujourd'hui.
(0900)
    Nous allons maintenant passer à Amy Terrill, de Music Canada. Je soupçonne qu'elle reviendra nous voir lorsque nous procéderons à notre examen du régime des droits d'auteur.
    Je l'espère, si l'occasion se présente.
    Bonjour. Merci de m'avoir donné l'occasion de vous adresser la parole aujourd'hui. J'en profite pour vous féliciter de votre étude, qui fait actuellement l'objet d'un débat actif partout au pays.
    Je m'intéresse à cette question en raison du travail sur les « villes musicales » que nous avons commencé à Music Canada, en 2011. Nous entendons par ville musicale une « municipalité de toute taille possédant une économie musicale dynamique dont le soutien et la promotion répondent à une volonté consciente ». Depuis 2014, je dirige une étude que nous menons dans plus de 30 villes du monde entier. En outre, je suis devenue l'une des principales expertes mondiales en la matière. J'ai prodigué des conseils à des villes sur tous les continents et j'ai pris la parole pendant d'innombrables événements. Je suis membre active de comités de développement des villes musicales de Toronto et Vancouver.
    Music Canada a publié une feuille de route sur le développement d'une ville musicale en 2015. Depuis, environ une dizaine de villes ou de régions l'ont adoptée et ont aussi misé sur d'autres travaux indépendants pour commencer à adopter des stratégies musicales, y compris, tout récemment, Ottawa, qui a publié sa stratégie il y a deux semaines.
    L'un des aspects les plus importants d'une ville musicale, c'est la disponibilité des espaces et des locaux, pour les répétitions, pour l'enregistrement, pour les spectacles et pour l'éducation. C'est donc sans doute la question qui revient le plus souvent dans les collectivités canadiennes.
    Les préoccupations les plus courantes soulevées dans le cadre des enquêtes publiques et des groupes de discussion sur la musique comptent notamment les suivantes: premièrement, le manque de locaux de répétition abordables, le manque d'espaces de vie et de travail et, en fait, le manque de logements en général; deuxièmement, les pressions exercées sur les petites scènes musicales populaires ainsi que des pressions liées à l'abordabilité en plus des pressions découlant de l'usage mixte des salles, les fermetures des salles créant des écarts dans ce que nous appelons l'« échelle de la taille des salles », ce qui est nécessaire si l'on veut permettre adéquatement à de nouveaux artistes de faire leur place; troisièmement, les lourdeurs administratives dont on parle souvent, quatrièmement, le besoin d'engagement accru du public; et, cinquièmement, le besoin de miser sur plus d'occasions de collaboration et le besoin de créer des liens avec d'autres artistes, dans le domaine musical et à l'échelle des secteurs culturels.
    Les centres créatifs dans les quartiers culturels peuvent, à leur manière, répondre à ces besoins cernés par la collectivité et, ainsi, permettre d'atteindre des objectifs plus vastes dans les domaines des politiques, de l'économie et de la culture. Dans le cadre de notre enquête sur les villes musicales, nous avons cerné trois types de centres créatifs.
    Il y a des carrefours qui sont centrés sur les artistes et qui offrent des installations d'enregistrement, des espaces de répétition et de spectacles, des ateliers, un accès des services professionnels comme ceux d'avocats et de comptables, par exemple, des carrefours qui sont des incubateurs musicaux, comme on peut en voir dans d'autres industries, et qui fournissent des possibilités de partage de bureaux, des événements de réseautage, des possibilités de création d'entreprises, du soutien et de la formation ou une combinaison des deux. Il existe des exemples dans les deux cas. Les quartiers culturels, par ailleurs, accordent entre autres aux municipalités la marge de manoeuvre nécessaire pour concevoir des règles et des règlements qui peuvent être utilisés pour favoriser les activités créatrices et les organisations dans une zone géographique donnée.
    Au bout du compte, l'un et l'autre de ces outils servent à créer des espaces et des locaux à vocation culturelle. Pendant que vous vous penchez sur ces sujets et que vous essayez de déterminer de quelle façon le gouvernement pourrait le mieux soutenir ces initiatives, je vous demande de prendre en considération les deux choses qui suivent.
    Premièrement, les espaces musicaux prennent parfois des formes inattendues. Une grande partie d'entre eux n'ont pas été construits à des fins musicales précises d'entrée de jeu. La moitié du parc est probablement composée de lieux à usages multiples, d'espaces transformés ou de locaux inutilisés: des bars, des restaurants, des cafés, des bibliothèques, des surfaces de vente, des microbrasseries et des propriétés industrielles transformées, pour n'en nommer que quelques-uns. Une récente étude sur l'incidence économique réalisée dans la province de la Colombie-Britannique sera bientôt publiée, et on a déterminé que, en effet, la moitié des locaux à vocation musicale de la province n'étaient pas, à l'origine, considérés comme des salles de concert. Dans les grandes villes et les petits villages, des lieux de création et de prestation musicale surgissent dans des contextes uniques. Dans un même ordre d'idées, les centres créatifs ne répondent pas à une définition stricte, et je vous encourage à vous faire une idée inclusive de ce qui peut être considéré comme un centre créatif.
     Deuxièmement, ce réseau d'espaces culturels se compose d'un mélange d'entités à but lucratif et à but non lucratif, et les deux sont essentiels pour la subsistance de notre secteur culturel. Les mêmes artistes — je parle ici précisément des artistes du domaine musical — qui se produisent dans des espaces sans but lucratif se produisent aussi dans des espaces à but lucratif. Cela ne fait aucune différence pour eux.
    En outre, nos quartiers culturels sont eux aussi composés d'un tel mélange. Les entités commerciales — par exemple les salles de spectacle et les studios de musique — sont d'importantes locataires dans les quartiers culturels et elles sont aux prises avec les mêmes défis que leurs homologues du domaine sans but lucratif, mais elles ne sont habituellement pas admissibles aux programmes de financement fédéraux. Le financement fédéral pour les organisations sans but lucratif — je veux que ce soit bien clair — est vraiment important, et je ne dis pas ici qu'il faut le détourner d'aucune façon.
(0905)
    Permettez-moi de vous donner un exemple. Le quartier de la rue Queen Ouest, à Toronto, a été mentionné dans le témoignage du ministère. L'un des exploitants les plus emblématiques et les plus anciens de la rue Queen Ouest, la légendaire Horseshoe Tavern, ne peut continuer d'exister aujourd'hui que grâce à la générosité des propriétaires de l'immeuble. Si ces derniers décidaient de demander un loyer correspondant à la valeur marchande, la Horseshoe Tavern ne pourrait pas garder pignon sur rue à cet endroit.
    D'autres administrations ont reconnu les contributions importantes du secteur commercial, dont les acteurs font aussi face à des pressions d'abordabilité et à des demandes grandissantes du voisinage, par exemple, pour réduire le bruit, et des prêts ou des subventions ont par conséquent été mis à la disposition de ces scènes afin que celles-ci puissent mettre à niveau leurs installations ou acquérir de l'équipement spécialisé. C'est une chose à laquelle on pourrait réfléchir au moment de concevoir un programme de financement amélioré.
    Je vous félicite de votre étude. Je tiens aussi à féliciter toutes les personnes qui comparaissent à mes côtés. J'apprends beaucoup de choses ce matin. Merci. Je serai heureuse de vous en dire plus durant la période de questions.
    Merci beaucoup, madame Terrill.

[Français]

    Nous passons maintenant à MM. Pierre Fortin et Jacques Primeau, du Partenariat du Quartier des spectacles.
    Bonjour. Je suis Jacques Primeau, président du conseil d'administration du Partenariat du Quartier des spectacles. Je suis accompagné de M. Pierre Fortin, qui est le directeur général de cet organisme.
    Nous vous remercions d'avoir reçu le mémoire que nous avons déposé et de nous permettre de vous exposer quelques pistes de réflexion.
    Le Quartier des spectacles de Montréal est désormais devenu un pôle culturel de classe mondiale. Il est né d'une volonté vieille d'une vingtaine d'années de concevoir une trame urbaine de nouvelle génération capable de soutenir une variété d'événements culturels et citoyens. Il a été bâti grâce à l'action concertée des acteurs culturels actifs dans le centre-ville et grâce au soutien de la Ville de Montréal et à celui des gouvernements du Canada et du Québec. Plus de 200 millions de dollars ont été investis dans les places publiques, par exemple.
    Le nombre de billets vendus dans le Quartier des spectacles représente le quart de tous les billets de spectacle vendus au Québec. C'est plus de 1,5 million de billets de spectacle vendus, et ce, dans l'un des lieux de diffusion les plus concentrés en Amérique du Nord. Dans ce quartier, sept places publiques foisonnent de festivals en été. On n'a qu'à penser au Festival international de Jazz de Montréal, mais il y a également une quarantaine d'autres festivals qui se déroulent dans ces places publiques, qui restent animées tout au long de l'année.
    Le Partenariat est responsable de favoriser un équilibre dynamique entre les habitants, les commerçants, la communauté des affaires et les acteurs culturels, qui profitent tous de l'importante fréquentation générée par ce carrefour culturel. Le défi consiste à maintenir la qualité de vie des habitants malgré l'effervescence.
    Les investissements publics dans le Quartier des spectacles ont également attiré des projets immobiliers privés. Au cours des 10 dernières années, ces projets ont généré des retombées économiques immobilières de plus de 2,2 milliards de dollars.
    Ce développement a créé une pression importante sur les valeurs foncières et sur les coûts associés à l'établissement des ménages et des organisations culturelles dans le secteur. À terme, si rien n'est fait, le Quartier des spectacles pourrait devenir un emplacement inabordable pour plusieurs de ses créateurs et de ses lieux de diffusion les plus dynamiques.
    L'achalandage supplémentaire généré dans le centre-ville par le carrefour culturel du Quartier des spectacles profite à l'ensemble des acteurs économiques de la métropole, ce qui soulève régulièrement des questions sur le partage équitable des charges et des bénéfices.
(0910)
    D'autres défis s'ajoutent à ceux-ci, comme celui de la production culturelle francophone, une question qui touche particulièrement Montréal.
    Depuis 10 ans, nous voyons l'émergence de pôles culturels à la périphérie de Montréal. Plusieurs activités de production et de diffusion ont quitté le centre-ville pour se déplacer vers la banlieue et ces nouveaux pôles. Ce déplacement risque d'effriter la production francophone, car ces pôles en périphérie n'ont pas une masse critique assez importante et ne bénéficient pas d'une synergie suffisante pour soutenir le genre de productions et l'ampleur des activités que rend possible l'emplacement central du Quartier des spectacles.
    C'est en 2013 qu'a été créé le Global Cultural Districts Network, un regroupement de quartiers culturels de grandes villes du monde, dont le Partenariat est un membre de la première heure. Le GCDN parraine la recherche sur des sujets comme l'aménagement et l'animation des espaces publics ou les modèles de gouvernance des quartiers culturels. Il permet aussi d'animer un réseau international d'échange d'oeuvres d'art public entre quartiers, ce qui a permis à l'oeuvre Impulsion, normalement située dans le Quartier des spectacles, de voyager dans une dizaine de villes partout dans le monde depuis 2016.
    Il serait intéressant que les pôles culturels canadiens puissent se réunir en un réseau comme le GCDN. Le gouvernement du Canada pourrait jouer un rôle de catalyseur en soutenant activement la création et le fonctionnement d'un tel réseau.
    Le dynamisme d'un pôle culturel ne profite pas seulement à la ville où il se déploie. L'exemple de Montréal est intéressant à cet égard: la métropole bénéficie de l'apport des talents et de l'expertise des régions, tout en servant de vitrine et de tremplin à la créativité et aux innovations de ces mêmes régions.
    L'expérience acquise au cours des dernières années permet de mieux cerner les multiples contributions de la culture à la vitalité des villes et à leur rayonnement international. Le principal défi est double: permettre à la ville d'agir comme incubateur et lieu d'expression de toutes les formes de culture, tout en optimisant la très importante contribution que la culture apporte à la ville et au rayonnement du Canada.
    Voilà pourquoi le Partenariat accueille très favorablement l'initiative de votre comité et espère y apporter une contribution positive. Nous avons formulé huit recommandations dans notre mémoire, que je vous invite à consulter. Nous les reprenons sommairement ici.
    Tout d'abord, il s'agit de reconnaître l'importance des pôles et des quartiers culturels, et de se doter de politiques publiques et de mécanismes de soutien financier ou fiscal.
(0915)
    En deuxième lieu, nous recommandons de mettre en place un processus pour améliorer les connaissances et programmer de la recherche sur les pôles et les quartiers culturels.
    Nous recommandons ensuite d'élaborer et mettre en place un programme visant à favoriser le maintien des créateurs, des artistes et des lieux de diffusion dans les quartiers et les pôles culturels.
    En outre, nous recommandons de prévoir des mesures particulières qui favorisent le logement abordable dans les pôles et les quartiers culturels.
    En cinquième lieu, nous recommandons d'appuyer activement la création d'un réseau canadien de pôles et de quartiers culturels, et de soutenir les échanges d'oeuvres et d'expertise ainsi que les innovations.
    Ensuite, nous recommandons d'élaborer et mettre en place un programme visant à accroître le rayonnement international des pôles et des quartiers culturels des villes canadiennes.
    Notre septième recommandation est d'instaurer des mesures financières et fiscales de soutien aux innovations en matière d'animation et d'aménagement culturels urbains.
    Notre huitième et dernière recommandation est de prendre connaissance des analyses réalisées par le Partenariat sur la gestion et la mutualisation des risques associés au financement des salles et des producteurs.
    Merci beaucoup de votre présentation.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer aux séries de questions qui, vous le verrez, sont aussi extrêmement brèves. Chacune durera sept minutes, et il y aura quatre tours, durant lesquels nous passerons d'un parti à l'autre.
    Les sept premières minutes reviennent aux libéraux. Nous allons commencer par M. Hogg.
    Un certain nombre d'entre vous avez parlé d'entreprises et d'organisations sans but lucratif, et aussi de façons dont le gouvernement peut vous aider, que ce soit par des réductions de taxes ou en fournissant d'autres types d'allégements. Y a-t-il des références entre les organisations sans but lucratif et les entreprises...? Y a-t-il d'autres modèles dans le monde dont nous pourrions tirer des leçons et qui permettraient de dissiper certaines de ces préoccupations?
    Ce à quoi je pense, c'est l'Angleterre, où il y a des sociétés d'intérêt communautaires et des modèles différents qui réunissent les modèles sans but lucratif et les modèles entrepreneuriaux. De tels modèles ont-ils été examinés? Avez-vous des conseils à nous prodiguer sur la façon dont tout cela pourrait nous aider et pourrait soutenir les programmes de vos projets ainsi que les carrefours culturels?
    Je n'ai pas d'exemple précis, mais pour ce qui est des structures qui pourraient être intéressantes, il pourrait valoir la peine d'examiner de plus près les coopératives. C'est quelque chose que nous avons commencé à faire de notre côté très récemment.
    Nous constatons, dans le domaine de la musique que, en raison des pressions exercées sur les salles locales, en particulier, c'est quelque chose qui est devenu un sujet de grande préoccupation un peu partout dans le monde. C'est principalement en raison de la croissance du secteur résidentiel dans les centres-ville, ce qui exerce une pression sur les salles de spectacles musicaux, en particulier.
    Nous commençons à voir certains programmes, à Sydney, en Australie, par exemple, et à Austin, au Texas. Ce sont des programmes dans le cadre desquels des fonds publics ont été débloqués pour permettre la prise de saines mesures d'atténuation, et plus particulièrement afin qu'il y ait moins de plaintes. Il y a une composante de services publics dans tout ça, aussi, mais l'objectif est aussi d'assurer la durabilité de ces salles afin qu'elles ne ferment pas leurs portes. C'est quelque chose que nous avons constaté, dans le cas tant des subventions que des prêts sans intérêt.

[Français]

     Le Partenariat du Quartier des spectacles est un organisme sans but lucratif. Par contre, son conseil d'administration est composé de représentants d'institutions, mais également de propriétaires de salles et de festivals, qui sont le plus souvent des entreprises à but lucratif.
    Il existe différents modèles de partenariat à peu près partout sur la planète. L'étude du Global Cultural Districts Network sur la gouvernance des pôles culturels dans le monde nous renseigne beaucoup à ce sujet. Je vous invite à en prendre connaissance. C'est joint à notre dossier.

[Traduction]

    Nous avons récemment mis sur pied des sociétés d'intérêt communautaire en Nouvelle-Écosse afin qu'une entité puisse se constituer en personne morale de la sorte. Selon moi, il restera à voir de quelle façon les gouvernements provinciaux et les administrations municipales interpréteront cette structure et la mesure dans laquelle ils feront preuve de souplesse et d'innovation au moment d'offrir différentes concessions fiscales et, habituellement, de permettre à ces nouvelles entités d'avoir accès aux fonds des programmes de financement habituellement destinés au milieu sans but lucratif.
    À quoi vous attendez-vous lorsque vous réfléchissez à tout ça et de la façon dont vous comprenez la loi en Nouvelle-Écosse, qui est relativement nouvelle? Y a-t-il eu beaucoup d'expériences à ce sujet? Voyez-vous là des occasions ou des possibilités à cet égard?
    J'ai l'impression que, à l'échelon provincial, il y a beaucoup d'intérêt et d'optimisme quant à la possibilité de réunir la capacité de générer un profit et le mandat d'avoir une incidence sociale et communautaire positive.
    Du point de vue de la municipalité régionale de Cap-Breton, où nous travaillons, je vous dirais que les conversations au sujet des types de concessions fiscales dont pourrait bénéficier une entité à but lucratif ou sans but lucratif sont extrêmement limitées en raison de la situation économique de la collectivité. Assurément, je ne crois pas que la MRCB changera beaucoup la donne en ce qui a trait au soutien offert aux carrefours culturels ou à la création de quartiers culturels.
(0920)
    Pensez-vous que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer dans ce cadre?
    En ce qui concerne les sociétés d'intérêt communautaire? Rien ne me vient à l'esprit.
    Merci.
    On a parlé, ici, des carrefours et/ou des quartiers. Y a-t-il une différence majeure entre un « centre » et un « quartier »? Y a-t-il une différence tangible ou s'agit-il simplement de deux mots pour refléter le même type d'entité?
    Selon moi, il y a une distinction. Un carrefour culturel a tendance à mettre l'accent sur plusieurs locataires, et ce n'est pas quelque chose qui est confiné entre quatre murs. Il peut s'agir de plusieurs bâtiments, mais les carrefours ont tendance à relever d'une seule structure de gouvernance. En outre, des programmes seraient offerts au sein de ce carrefour. Pour ce qui est d'un quartier culturel, c'est plus une zone géographique qui réunit donc plusieurs entités et organisations, à but lucratif et sans but lucratif, mais qui se trouvent toutes à l'intérieur d'un même quartier.
    Dans le domaine de la musique, bien sûr, nous composons avec beaucoup de règlements municipaux. Il y a, par exemple, les règlements administratifs sur le bruit et ainsi de suite. En outre, une municipalité peut prendre des règlements ou des règlements administratifs précis visant un quartier précis afin d'encourager plus d'utilisations de nature culturelle. Voilà, selon moi, la distinction entre les deux.

[Français]

    Il y a une distinction qu'on peut faire également. Un quartier culturel n'est pas nécessairement un quartier de création. On peut avoir un quartier de diffusion, mais un pôle culturel implique de la création ou une espèce de milieu vivant où il y a de l'entraide et de l'interaction entre les créateurs et les créatrices. Pour arriver à créer un pôle culturel, il faut se maintenir dans cette direction, c'est-à-dire se soucier de rassembler des créateurs et des créatrices dans un quartier comme le nôtre.
    Le Quartier des spectacles a l'avantage d'être les deux à la fois. C'est un quartier où il y a 30 salles de spectacle offrant au total 30 000 sièges ainsi que des places publiques pouvant accueillir des centaines de milliers de personnes, mais il y a aussi des lieux de création, des petits lieux de répétition, qu'il s'agisse de musique ou de n'importe quelle autre forme artistique.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer à la prochaine série et aux conservateurs.
    Monsieur Shields, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président. Je suis très reconnaissant aux témoins de l'expertise dont ils nous font part aujourd'hui.
    Il y a une question sur laquelle j'aimerais revenir, et c'est la question des municipalités et des changements fiscaux ou des taxes... Je ne suis pas sûr de bien comprendre, mais si quelqu'un obtient un allégement ou un avantage fiscal au niveau municipal, cela signifie que les contribuables fonciers devront ramasser la facture. C'est de ça que vous parlez? Ou est-ce que vous prévoyez qu'il sera possible d'égaliser les choses d'une autre façon? Si vous voulez dire que les municipalités doivent accorder à un secteur un allégement fiscal, quelqu'un devra ramasser la facture, et c'est habituellement les contribuables fonciers.
    Je vais commencer par vous, monsieur Pauk, parce que je crois que vous avez dit quelque chose à ce sujet. Voyons si nous pouvons préciser tout ça.
    J'ai parlé de la création de la sous-catégorie fiscale du partage des locaux à des fins créatives à l'échelon provincial. Je ne sais pas si elle est entrée en vigueur complètement en Ontario, mais elle l'a été à Toronto. Les responsables ont prévu son entrée en vigueur le 1er janvier.
    Dans cet exemple, les propriétaires d'immeubles qui proposent des bâtiments qui respectent les critères — et il y a une longue liste de critères — reçoivent un rabais de 50 % sur leur facture d'impôts fonciers. Comme je l'ai mentionné, une des choses que nous avons remarquées, c'est qu'il y a très peu de propriétaires dont les sites respectent tous les critères. Je crois que, au bout du compte, il y en avait entre 12 et 15.
    Je suppose que l'argent vient des contribuables, dans la mesure où on renonce à des recettes.
(0925)
    Exactement. Il n'y a qu'un seul contribuable.
    C'est exact.
    L'argent vient d'une seule poche.
    Oui.
    Cela peut poser problème, dans la mesure où, si on cherche un avantage pour un certain groupe, il y a toujours quelqu'un d'autre qui paye, puisque l'argent vient toujours du même contribuable.
    C'est logique. Nous ne faisons que souligner certains des problèmes que nous constatons relativement à ce qui a déjà été fait.
    Oui.
    De plus, comme vous y avez fait allusion, il y a déjà eu certaines réactions négatives de la part d'autres secteurs. Par exemple, ceux qui travaillent dans le domaine de l'aide sociale ont soulevé la situation et ont dit: « Eh bien, comment pouvez-vous accorder cet allégement fiscal foncier aux artistes et aux créateurs, et ne pas nous faire bénéficier de la même chose vu l'important travail que nous faisons aussi? » J'en suis tout à fait conscient.
    À tout le moins, cette sous-catégorie d'imposition à Toronto est un pas dans la bonne direction, comme nous l'avons souligné, mais elle a assurément ses lacunes. Le principal point que nous voulions souligner, c'est que ce ne sont pas les producteurs créatifs eux-mêmes qui en bénéficient, ce qui est problématique.
    Ça, je l'ai compris. Merci.
    Je passe à Music Canada, vous avez tout un bagage de connaissances dans ce dossier.
    En ce qui concerne les catégories d'imposition? Oui, au sein du Toronto Music Industry Advisory Council, nous étions aussi préoccupés par les répercussions que nous avons observées, particulièrement en ce qui concerne l'immeuble à Toronto, qui a soulevé des préoccupations; je parle ici du 401 Richmond, où l'évaluation foncière municipale ne cesse d'augmenter. Je crois que c'est un défi dans des villes comme Toronto, où il y a réellement un « problème immobilier », c'est ainsi que nous décrivons les choses. C'est le coût croissant de l'immobilier. C'est l'utilisation la plus élevée qui est évaluée; c'est d'ailleurs la raison pour laquelle on voit autant de projets immobiliers de condos et ainsi de suite qui commencent à l'emporter sur tellement d'autres utilisations. On ne parle pas seulement des utilisations à des fins créatives. On parle aussi des petites entreprises. C'est difficile de rétablir ces choses par la suite.
    Je crois qu'il y a eu certaines suggestions en ce qui concerne l'article 37 — c'est quelque chose dont on a parlé tantôt — et il a été question d'élargir le recours à l'article 37 afin que certains de ces investissements puissent être réinvestis pour créer des espaces créatifs. Ce sont des choses qu'on entend parmi les promoteurs. Il y a des conversations très intéressantes qui ont cours un peu partout dans le monde, particulièrement en ce qui concerne les villes musicales et le développement des collectivités. Les intervenants commencent à se réunir afin d'essayer de commencer une conversation pour souligner l'importance des activités créatrices et le besoin de faire de la place en plus d'assurer le développement. Elle est peut-être là, notre solution.
    Merci.
    Il vous reste deux minutes.
    Monsieur Fortin.

[Français]

     Un modèle est présentement à l'étude à Montréal, dans le Quartier des spectacles, où les valeurs foncières augmentent très rapidement. Ce modèle vise à accorder des avantages à un constructeur, par exemple l'autorisation de réaliser un projet de construction en surhauteur, à condition que celui-ci mette à la disposition d'artistes et de créateurs les étages moins nobles de l'édifice à construire. Ce modèle est à l'étude présentement à Montréal, mais il n'a pas encore fait ses preuves.

[Traduction]

    Il nous reste une minute et 20 secondes, madame Shea.
    Eh bien, je crois que, si une municipalité décide qu'elle veut fournir des privilèges fiscaux à un carrefour culturel ou un quartier culturel, c'est un outil auquel elle a accès pour concrétiser sa vision d'une économie créative plus solide et de plus grande envergure. Les privilèges fiscaux sont un outil permettant de donner corps à une vision qu'a une municipalité relativement à l'économie créative et ses répercussions financières positives et à long terme sur la collectivité.
    Pour ce qui est de notre expérience, nous avons acheté notre propriété en 2012 et nous l'avons occupée immédiatement. Nous avons payé des taxes municipales de 27 000 $ selon l'évaluation de l'édifice. Après la construction, l'évaluation de l'édifice signifiera que nous devrons payer 650 000 $ par année en taxes municipales, mais comme nous occupons l'immeuble à la même densité depuis cinq ans, nous ne consommons pas plus de services municipaux et pas plus d'eau, et nous ne demandons pas à la municipalité de déneiger plus de rues. Cette augmentation de l'évaluation fondée sur les fonds que nous avons investis est un peu arbitraire.
(0930)

[Français]

    Nous passons maintenant à M. Nantel, du NPD.
    Monsieur Nantel, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je pense que vous avez constaté à quel point le sujet est large. C'est un peu pour cela que le gouvernement nous a demandé de défricher le terrain, en vue de préciser la manière dont devrait être investi ce montant de 300 millions de dollars annoncé dans la politique culturelle l'automne dernier.
    Je remercie tous les témoins de leurs présentations ce matin. Elles sont toutes très différentes, mais très complémentaires.
    Nous tenons pour acquis que Music Canada représente les musiciens au Canada. Disons que nous formulons cette hypothèse. Il y a donc des artistes qui voudraient une place dans une communauté comme celle que Mme Shea cherche à développer par l'entremise de New Dawn Enterprises. En effet, je vois cela un peu comme une communauté. Je pense que cette entreprise pourrait présenter des arguments au même titre qu'une ville ou une région de la Nouvelle-Écosse. Elle ferait affaire potentiellement avec les gens d'Akin Collective pour monter un genre de groupe de ressources techniques, comme dans le secteur du logement social. Comment pourrions-nous bâtir cela pour faire une place aux musiciens canadiens?
    Ultimement, le temps passe, et on se retrouve avec un quartier comme celui qu'il y avait autrefois dans ce qui est devenu le Quartier des spectacles. Avant que cela s'appelle le Quartier des spectacles, il y avait l'édifice Wilder et l'édifice au-dessus, en face de la rue Sainte-Catherine, en face de MusiquePlus. Le carrefour culturel était là et il s'est professionnalisé. Comme nous avons pu le constater par les présentations de l'équipe du Quartier des spectacles, il y a eu un énorme succès et une professionnalisation. On a installé un espace créatif, un lieu où tout le monde peut s'exercer à jouer d'un instrument. Nous nous souviendrons tous des grandes années du Spectrum ou de l'apparition de la Société des arts technologiques, soit la SAT. Quand la dame de la SAT est venue nous rencontrer, elle nous a dit que la SAT s'était installée dans une ancienne banque en face du Spectrum. Aujourd'hui, la présentation du Quartier des spectacles est un peu comme l'aboutissement d'un pôle culturel, et il devient un district culturel. Je m'efforce de faire cette synthèse, parce que c'est notre travail de défricher un peu les enjeux.
    Ce qui m'intéresse ici, ce sont un peu les deux extrêmes de l'équation. M. Primeau ou M. Fortin — je ne sais plus lequel des deux — a dit aujourd'hui qu'il fallait s'assurer d'avoir encore des lieux abordables où l'on puisse s'adonner à différentes disciplines artistiques. C'est un gros enjeu. Pourtant, si un jour vous avez l'occasion d'aller à Montréal et de vous rendre aux Jardins Gamelin, vous constaterez comme moi qu'il y a une dimension de carrefour culturel beaucoup plus que de district culturel. On voit vraiment l'émergence de toutes sortes de talents, et le lieu s'y prête fort bien. Il y a aussi un énorme potentiel à l'édifice La Patrie, qui est près des Foufounes Électriques. C'est un immeuble magnifique dont simplement le nom évoque tout l'héritage culturel du Québec.
    Messieurs du Partenariat du Quartier des spectacles, vous avez évoqué dans vos recommandations qu'il fallait adopter des mesures pour soutenir les carrefours culturels. Vous avez aussi parlé de la mutualisation des risques. J'aimerais que vous m'expliquiez un peu ce à quoi vous faites allusion.
    Grosso modo, c'est une démarche qui a été entreprise il y a environ trois ans. Quand nous parlons de collaboration des organismes à but lucratif et sans but lucratif, c'est un beau cas. Nous avons pris l'ensemble des salles du Quartier des spectacles et nous avons réussi à recueillir des données sur le fonctionnement de chacune d'elles. Au fil du temps, nous avons réussi à créer une mutuelle des données, grâce à une intervention privée de l'entreprise Aimia, qui fait de la philanthropie des données. On nous a prêté une centaine de spécialistes pour traiter le comportement des spectateurs dans le Quartier des spectacles, c'est-à-dire pour savoir à quelle heure, où et quand ils achètent leurs billets, s'il s'agit d'hommes ou de femmes, s'ils habitent en banlieue ou près de Montréal. Grâce à ces informations, nous savons beaucoup plus où nous nous en allons. Chacune des salles n'aurait jamais eu, à elle seule, les moyens d'obtenir ces données.
    Cela nous a donné une deuxième idée, soit la mutualisation des risques. En fait, c'est dans le but d'augmenter la qualité et l'ampleur des spectacles dans le Quartier des spectacles. Toutes les salles ramasseront un certain montant d'argent de différentes façons et le mettront dans une caisse commune, si je peux résumer ainsi. Cet argent servira, que ce soit sous forme de prêts sans intérêts ou de subventions, à augmenter les budgets de production de ces compagnies. Le risque sera donc assumé par l'ensemble de la collectivité, ce qui permettra à chacune des salles de présenter des spectacles à plus grand déploiement, d'avoir recours à plus de comédiens, plus de musiciens et plus d'éclairage, bref, d'offrir de meilleurs spectacles.
(0935)
    Ma prochaine question s'adresse à vous cinq. Quels sont les pièges à éviter? S'il y avait une chose que le gouvernement fédéral pouvait faire pour qu'il y ait un foisonnement de pôles culturels, quelle serait-elle? À l'inverse, quelle serait la chose à ne pas faire? Par exemple, c'est évident qu'il ne faut pas uniformiser le processus à la grandeur du pays et bâtir de bien beaux immeubles en forme de feuille d'érable. On veut des approches qui soient davantage à la mesure des communautés.
    Madame Terrill, devrait-on parler d'égalité des chances entre les hommes et les femmes dans les offres de lieux d'exercice des arts? Quels critères le gouvernement fédéral devrait-il établir pour qu'on ait un genre d'étiquette « pôle culturel »?

[Traduction]

    Dans environ une minute, s'il vous plaît.
    Je ne m'attendais pas à ce qu'il y ait un lien entre l'égalité des sexes et les centres culturels, mais c'est une question qui revêt une grande importance pour les communautés culturelles actuellement. Je crois savoir que vous étudiez vous aussi cette question, qui est très importante.
    Selon moi, nous devons tous remettre en question le statu quo. Nous pouvons prendre des mesures de façon individuelle et, plus généralement, en tant qu'organisation ou au sein de notre secteur. Qu'il soit question de carrefours culturels, d'associations culturelles ou de l'industrie de façon générale, il faut faire de l'inclusion et de la diversité un enjeu d'importance cruciale.

[Français]

    Merci.
    Merci, monsieur Nantel.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer à M. Breton.

[Français]

    Vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à chacun des témoins d'être parmi nous aujourd'hui. Leur grande expertise nous aide dans notre étude.
    Je vous signale, monsieur le président, que je vais partager mon temps de parole avec Mme Dzerowicz. Un des organismes ici présents se trouve dans sa circonscription et je comprends très bien qu'elle veuille échanger avec ses représentants.
    Pour ma part, je veux vous entendre parler principalement des répercussions sur le plan touristique. Je m'adresse davantage à MM. Primeau et Fortin.
    Je viens d'une circonscription rurale, dans la grande région de Granby. Je me fais un devoir chaque année de me rendre dans le Quartier des spectacles ou dans un des centres culturels pour assister à un événement. C'est un succès extraordinaire que vous vivez encore.
    Tout à l'heure, vous avez dit que la construction du Quartier des spectacles et l'effervescence que cela avait créée avaient eu des répercussions de l'ordre de 2,2 milliards de dollars sur le secteur immobilier. Avez-vous fait des études sur les retombées financières de tous les spectacles et du quartier lui-même? C'est extrêmement important.
    Pour ma part, je vois le Quartier des spectacles comme un modèle. Chez nous, on dit souvent qu'un dollar investi en culture en rapporte six. Je ne sais pas si vous avez fait cette évaluation de votre côté. Est-ce davantage, est-ce moins? Parlez-moi des retombées de ce quartier sur le plan touristique.
    Nous avons fait plusieurs études sur les retombées économiques. Effectivement, cela se mesure très facilement. Par exemple, quelqu'un qui vient assister à un spectacle dans le Quartier des spectacles dépense, en moyenne, entre 50 $ et 60 $ ailleurs, que ce soit au bar ou au restaurant. La culture ou la proposition culturelle attire donc des gens au centre-ville.
    Combien y a-t-il de nouveaux restaurants, déjà?
(0940)
    Il y en a une cinquantaine.
    Ces restaurants ont ouvert dans la dernière année et aucun n'a fermé.
    On crée une expérience culturelle intense dans un centre-ville et les gens viennent pour l'expérience. Avant, les gens stationnaient leur voiture, entraient voir le spectacle, puis repartaient. Maintenant, il y a une proposition dans l'espace public, de sorte que les gens restent pour prendre un verre, par exemple. Tout cela génère évidemment des retombées économiques.
    Il se crée aussi une économie de la nuit, comme celle qui est vécue à Berlin et à Paris. En raison des lois antitabac, les gens sortent plus souvent des édifices, et ils parlent plus fort à la fin de la soirée qu'au début. Notre travail est de gérer l'équilibre entre ces fonctions et de faire en sorte que cela reste un endroit où toutes les fonctions d'un centre-ville peuvent se déployer.
    Les gouvernements, à l'initiative de la Ville de Montréal, ont contribué à un investissement de 200 millions de dollars dans les places publiques. C'était un investissement risqué. Nous avions promis aux gouvernements que l’augmentation de l’activité générerait des revenus supplémentaires, entre autres au moyen de la TPS, qui permettraient de les rembourser en 15 ans; cela s'est fait en 7 ans. C'est donc dire que cet investissement a été rentable pour la Ville, pour le gouvernement du Québec et pour le gouvernement du Canada, et cela se poursuit.
    Cependant, il y a parfois des effet pervers. Par exemple, le fait qu'il y ait 50 restaurants et qu'il soit maintenant très facile d'aller se restaurer à l'extérieur du site des festivals fait diminuer les revenus autonomes des festivals. Auparavant, les festivals vendaient de la nourriture et des boissons. Maintenant, ils ont maintenant plus de spectateurs, mais moins de revenus autonomes.
    C'est d'ailleurs la question qui me préoccupe le plus pour les prochaines années. Très souvent, on se préoccupe du contenant et de toutes les retombées économiques, on s'en réjouit, mais le fait est qu'il reste moins d'argent pour la scène, les artistes et les créateurs. Même si les événements prennent de l'ampleur, le gouvernement fédéral pourrait porter attention à cette situation et se préoccuper davantage de l'argent destiné à la création et aux artistes.
    Soit dit en passant, il y a chez vous un bel événement. Le Festival international de la chanson de Granby est tout de même un événement d'envergure.
    Merci beaucoup.
    Je vais laisser Mme Dzerowicz prendre le relais.

[Traduction]

    Il me reste combien de temps, monsieur le président?
    Le vice-président (L'hon. Peter Van Loan): Vous avez environ deux minutes.
    Mme Julie Dzerowicz: Parfait.
    Merci à vous tous de nous avoir présenté d'excellents exposés. J'ai vraiment appris beaucoup de choses aujourd'hui.
    Je suis très fière que le Collectif Akin ait pignon sur rue dans ma circonscription et de bénéficier de tout le travail qu'il fait là-bas. Merci de votre exposé.
    Lorsque j'étais à l'Université McGill, c'était mon rôle de faire venir des groupes de musique, alors je suis une fervente partisane des prestations de musique en direct et j'aimerais vraiment que des endroits comme Hugh's Room et le Horseshoe continuent d'exister et de s'épanouir. Ces endroits sont vraiment le coeur et l'âme de l'industrie de la musique de concert à Toronto et dans la RGT.
    J'ai une question pour le Collectif Akin. Pouvez-vous nous en dire un peu plus au sujet de votre dernière recommandation, le fait de réunir des organisations, ou les trois ordres de gouvernement, pour cerner les pratiques exemplaires? Pouvez-vous nous en parler pendant une minute? Je poserai ensuite une question à Amy.
    Par exemple, à beaucoup plus petite échelle, à Toronto, il y a une organisation appelée « Toronto Studio Commons ». Essentiellement, c'est une façon pour des organisations dans notre secteur d'activités de fournir un espace de studio ou un espace d'art visuel pour de la production ou une exposition d'oeuvres. C'est une façon pour nous de rester en contact, de partager des connaissances et de s'aider les uns les autres si un membre a des préoccupations sur un sujet quelconque dans le domaine. Nous nous rencontrons tous les deux ou trois mois pour parler d'un sujet différent.
    Je croyais que votre recommandation, c'était de réunir tous les ordres de gouvernement, ou des représentants de tous les ordres de gouvernement, pour qu'ils se concertent et qu'ils fassent quelque chose.
    Notre recommandation visait à favoriser les relations entre les organisations qui seront dans ce secteur d'activité grâce à des carrefours culturels. Par exemple, nous rencontrons aujourd'hui des gens très compétents, mais s'il n'y a rien pour vraiment favoriser une relation, ou si personne ne prend l'initiative d'aller rendre visite aux autres ou de leur téléphoner ou je ne sais quoi d'autre, on passe à côté d'une occasion de rester en contact et de partager des connaissances et, en fait, de profiter des expériences passées les uns des autres. L'objectif, c'est de se réunir en groupe, que ce soit par voie numérique ou directement, mais de permettre aux gens d'interagir les uns avec les autres.
(0945)
    Je tiens à remercier tous les témoins ce matin.
    Nous allons suspendre la séance quelques instants afin de nous préparer pour le prochain groupe.
    Encore une fois, merci d'avoir été là.

(0950)
    Nous reprenons nos travaux.
    Le groupe est encore une fois composé de quatre témoins.
    Nous avons ici, en studio, comme certains pourraient le dire, Jacquie Thomas et Michael Spence du Théâtre Gargantua. Nous accueillons aussi Sarah Douglas-Murray, du Creative City Network of Canada. Par vidéoconférence, de Vancouver, nous accueillons Judith Marcuse, de l'International Centre of Art for Social Change. Pour terminer, et c'est une première dans le cadre des travaux du Comité si je ne m'abuse, nous accueillons, par téléconférence, Marianne Garrah, du Jasper Community Habitat for the Arts.
    Nous allons commencer par le Théâtre Gargantua: Mme Thomas et M. Spence.
    Je crois que vous savez tous que vous avez sept minutes pour présenter vos exposés.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de vous parler aujourd'hui des carrefours culturels au Canada.
    J'ai lancé une petite entreprise il y a 25 ans. C'est avec beaucoup de culot que je l'ai appelée le Théâtre Gargantua. Nous n'avions peut-être rien de gargantuesque, sauf notre vision. Nous avons eu de la difficulté à payer nos factures de téléphone, mais nous avons fait de l'art qui s'est fait remarquer: des prestations très physiques, des acteurs suspendus dans les airs, de la musique de concert et des mises en scène qui ont transporté nos auditoires et remporté des prix. Il est maintenant clair pour nous que le succès était essentiel à la survie à long terme de notre entreprise.
    Il y a un facteur clé de cette réussite précoce qu'on ne saurait surestimer: nous avions des locaux. La congrégation favorable aux arts d'une église du centre-ville de Toronto, l'église St. Stephen's-in-the-Fields, nous a permis de mettre au point notre processus de création et de présenter notre travail dans son magnifique espace. Avec des plafonds voûtés de 40 pieds, des planchers surélevés en bois et des poutres exposées sur lesquelles nous pouvions nous balancer, c'était l'endroit idéal pour une jeune entreprise avec de grandes idées pour prospérer.
    Au fil de notre croissance et de notre maturation artistique, nos besoins techniques ont dépassé les capacités de la petite église. Notre première oeuvre était entièrement illuminée par des bougies, mais nous intégrons maintenant des médias plus modernes dans nos oeuvres, et nous utilisons de multiples projecteurs, des lumières mobiles et des décors à grande échelle. Notre vision est plus gargantuesque que jamais.
    Il n'y a vraiment qu'une chose qui nous retient. Il n'y a tout simplement pas assez de place pour tout ce que nous voulons faire. Trouver des locaux appropriés et abordables est un défi pour les artistes de partout au pays et, après 25 ans, je peux vous parler avec une certaine expertise des défis auxquels nous sommes confrontés à Toronto. Alors que, à l'époque, des compagnies théâtrales pouvaient créer des lieux de prestation dans des entrepôts abandonnés, les incroyables défis liés au marché immobilier ont quasiment éliminé toutes ces possibilités dans nos centres urbains. Les pressions immobilières à Toronto sont bien documentées, et il faut trouver une solution à cette perte d'espaces culturels. Nous avons besoin de locaux spéciaux, abordables et appropriés pour la création et la présentation des arts de la scène en cette période de crise.
    Gargantua, de pair avec ses partenaires, le Théâtre français de Toronto et l'Obsidian Theatre Company — respectivement le plus important théâtre de langue française de l'Ontario et la plus importante compagnie théâtrale noire du Canada — lance un projet ambitieux visant à créer un nouveau centre culturel à Toronto. Nous sommes trois entreprises primées qui offrent des prestations diversifiées à des auditoires multigénérationnels dans les deux langues officielles, et nous sommes déterminés à répondre au besoin crucial de locaux, les nôtres et ceux des autres artistes dans la collectivité.
    Notre carrefour permettra d'accueillir des auditoires combinés de près de 20 000 personnes chaque année, y compris 6 500 enfants d'âge scolaire. Nos programmes sont ouverts au grand public et sont offerts de 9 heures à 23 heures la plupart des jours. Je parle ici entre autres d'ateliers, de matinées pour les étudiants, de matinées les fins de semaine, de camps de jour durant l'été et de camps d'écriture de fin de semaine pour les adolescents, et tout ça, en plus de nos prestations régulières en soirée.
    Guidée par nos valeurs communes d'accessibilité, d'abordabilité, de souplesse et d'inclusion, notre vision inclut un carrefour créatif qui abrite deux espaces de spectacle souples équipés pour soutenir l'innovation artistique et technique, et deux salles de répétition en plus d'autres espaces de rassemblement publics. Il s'agira d'un complexe spécialisé sur une rue principale accessible à tous par le métro.
    Ce sera un endroit où nous soutiendrons une innovation artistique et culturelle diversifiée. Il s'agira d'un carrefour communautaire actif où il se passe toujours quelque chose et où on est toujours en train de créer, d'enseigner ou de présenter. Ce sera un endroit pour se réunir et raconter des histoires, une pratique à la base de toutes les manifestations culturelles.
(0955)
    La culture n'arrive pas par accident. C'est toujours le résultat d'un effort. C'est le résultat des efforts des gens pour vivre, des défis auxquels nous sommes confrontés, des stratégies uniques que nous élaborons pour les surmonter, des façons dont nous célébrons notre réussite, et des façons dont toutes ces choses sont ensuite transformées en histoires. En tant qu'artistes, nous estimons avoir la responsabilité et le privilège de participer à cette transformation.
    Les carrefours culturels sont l'endroit où nous nous réunissons pour entendre et raconter des histoires. Ce sont des endroits locaux, vivants, et ils sont mus par des conversations authentiques. Un carrefour bien conçu sera à la fois invitant et vital: un endroit qui mettra l'accent sur la collectivité qui l'abrite et qui redonne de l'énergie à cette même collectivité. Il fournira un espace où les voix locales pourront se faire entendre en plus de favoriser des occasions de travailler en collaboration avec d'autres collectivités, à l'échelle nationale et à l'échelle internationale.
    En tant que travailleurs culturels, nous sommes témoins de l'impact profond de ces espaces. Nous savons que les carrefours peuvent être des moteurs culturels qui stimulent le développement économique. Nous savons aussi que le gouvernement fédéral peut jouer un rôle important dans leur réussite. Voici nos recommandations sur la façon dont vous pouvez aider. Certaines des recommandations reprennent des choses dont nos collègues, ici, ont déjà parlé précédemment.
    La première chose dont nous voulons vous parler, c'est le fait de faciliter les relations. Aidez-nous à créer des partenariats afin que la participation fédérale, provinciale et municipale puisse fournir une base solide pour tirer parti des intervenants des entreprises, du secteur privé et même de l'étranger.
    Ensuite, faites en sorte que la philanthropie soit attrayante. Le fait d'encourager la philanthropie ne se limite pas à donner des incitatifs fiscaux. Il s'agit de la promouvoir activement en tant que façon d'être nationale.
    Il y a ensuite la question des terres publiques. Il faut créer des politiques en vertu desquelles les terres publiques ne peuvent être aliénées sans qu'on évalue dans un premier temps si elles sont appropriées pour accueillir des carrefours culturels, et, dans l'affirmative, sans les offrir à cette fin.
    Pour terminer, je veux parler du financement des coûts d'exploitation. Actuellement, les carrefours culturels n'ont nulle part où se tourner pour couvrir les coûts d'exploitation permanents. Cette lacune importante du système a fait en sorte que les carrefours culturels, une fois construits, doivent livrer concurrence à leurs propres programmes culturels pour obtenir des fonds du Conseil des arts du Canada. Il doit y avoir du financement offert par l'intermédiaire du ministère du Patrimoine canadien pour des activités peu séduisantes comme la gestion des locaux des carrefours, parce qu'il s'agit de dépenses auxquelles les commanditaires et les donateurs ne tiennent pas vraiment à contribuer.
    Nous vous remercions beaucoup de l'occasion de prendre la parole devant le Comité aujourd'hui.
(1000)
    Nous allons maintenant passer, par vidéoconférence, à Mme Marcuse du International Centre of Art for Social Change.

[Français]

    Je suis désolée, mais comme je parle français seulement une fois par année, je vais m'exprimer en anglais.

[Traduction]

    Je suis ravie de vous faire part de mes points de vue et de mes idées sur la façon dont nous pouvons intégrer les arts et la culture dans la société canadienne et de faire le lien avec la création artistique et les carrefours, ou centres culturels.
    Je suis moi-même artiste et je me suis surtout fait connaître comme productrice et chorégraphe. Je mène actuellement une étude nationale sur les arts comme véhicule de changement social. Cette étude réalisée sur six ans bénéficie d'un budget de 3 millions de dollars et met à profit le travail de six universités et 45 universitaires, artistes et organisations communautaires. C'est la première étude du genre au Canada. Dans le cadre de cette étude, qui prendra fin en décembre, nous avons déjà publié plus de 100 résultats, dont des renseignements sur les incidences de nos travaux sur les personnes, les collectivités et les changements au sein des systèmes.
    Je travaille partout dans le monde et je pars pour l'Afrique du Sud dans quelques jours, et je sais par expérience que le Canada est considéré comme un chef de file dans le domaine des arts pour le changement social.
    Mais qu'est-ce que j'entends par les arts pour le changement social? Nous définissons ce terme comme suit: « la création artistique collective faite par des groupes de personnes sur des questions qui les touchent et facilitée par un ou des artistes spécialistes ».
    Ce travail met en scène toutes les disciplines artistiques, les arts du spectacle, les arts visuels, la littérature, les arts numériques et les arts urbains, très souvent en partenariat avec des organisations locales qui font la promotion du changement: des organisations communautaires qui oeuvrent dans un large éventail de secteurs diversifiés non liés aux arts, comme la santé, la justice, l'établissement des immigrants, le développement économique, le dialogue interculturel et intergénérationnel, le travail de réconciliation et de résolution de conflits avec les jeunes et les aînés, la planification stratégique en entreprise et la création de politiques publiques.
     Mais ce terme renvoie d'abord et avant tout à la création artistique. Les arts pour le changement social sont une forme d'art assortie d'objectifs, d'une pédagogie, de méthodes et de bourses propres. Il s'agit d'une forme de démocratie culturelle. Ce type d'art concerne la voix de la population et l'imagination dont elle fait preuve pour comprendre et régler des problèmes souvent complexes.
    Plus de 400 organisations travaillent actuellement dans ce secteur, qui existe depuis plus de 50 ans au pays et qui connaît une croissance exponentielle. Les organisations, les artistes et les acteurs du changement de tous les secteurs constatent l'incidence profonde qu'entraîne ce travail. Il met à profit l'hémisphère droit de notre cerveau. L'innovation créative est au coeur de ces formes de dialogue fondées sur les arts et des mesures pour le changement positif qui en résultent.
     Alors, comment ce secteur est-il lié aux arts et aux carrefours culturels communautaires? Je vous en parlerai très rapidement, mais, avant, je veux vous proposer une image. C'est une image de l'écologie des arts au Canada.
    Tout en haut, il y a les arts de haut niveau, comme les musées, les galeries d'art, les troupes de ballet et les compagnies d'opéra. On y voit aussi des artistes d'avant-garde. Tout au bas, il y a notre petite-fille qui chante dans son bain au sujet de son chien. Entre les deux, il y a les arts communautaires: les cours de poterie, les ateliers de peinture du dimanche et plein d'autres types d'activités artistiques de nature communautaire. Ce que j'aime faire, c'est de présenter tous ces éléments comme un cercle où chaque élément du cercle est lié à tous les autres. Si nous voulons créer une société plus saine, plus novatrice et imaginative, plus créative, plus unie et plus engagée, nous devons faire preuve d'inclusion lorsque nous pensons aux politiques qui enrichissent notre expérience des arts. Ce n'est pas seulement une question de consommer les arts: il s'agit de faire de l'art avec les autres sur ce qui est important pour eux et de faire entendre les voix diversifiées qui existent au sein de notre pays.
    Vous allez bientôt recevoir un rapport stratégique, qui est la culmination de tous nos travaux au cours des cinq dernières années.
     Il y a des recommandations stratégiques précises à l'intention du ministère du Patrimoine canadien et du Conseil des arts du Canada. Après des décennies d'inclusion, le Conseil a éliminé les arts communautaires en tant que champ de pratique distinct. Ce dernier brille essentiellement par son absence sur le site Web du Conseil. L'absence d'artistes pour le changement expérimentés dans les jurys et de critères d'évaluation en la matière pose également problème. Malgré les efforts qu'il déploie depuis deux ans, le groupe de travail national n'a pas réussi à établir un dialogue productif sur ces questions.
(1005)
    La deuxième série de recommandations que vous recevrez bientôt dans les deux langues officielles consiste en des appels à l'action dans tous les ministères fédéraux, en partie d'après les réunions que nous avons tenues avec quelque 34 représentants fédéraux à Ottawa dans la dernière année. Nos recherches révèlent que le gouvernement fédéral accuse beaucoup de retard par rapport aux municipalités, aux provinces et aux fondations dans la reconnaissance et le soutien de ce secteur artistique, en n'apportant une contribution que d'environ 8 % du total. Nous passons inaperçus à Ottawa! En fait, bien d'autres gouvernements ont augmenté leur soutien au secteur, car ils voient les incidences profondes, durables et positives qui en découlent. La communauté de l'innovation sociale et de l'entreprise sociale est la dernière en date à intégrer ces pratiques artistiques dans son propre travail.
    Vu toutes ces réalités, je vous propose des approches positives possibles liées aux centres et carrefours artistiques et culturels, peu importe ce dont il sera question au bout du compte. J'appuie fermement les points de vue de la Coalition canadienne des arts et de la Fondation McConnell, qui représentent bien les orientations réalistes et positives que pourraient adopter les prochains centres et carrefours. Je propose que Patrimoine canadien exige que les activités d'arts pour le changement social fondées sur la collectivité soient intégrées dans les politiques, les activités de planification et les programmes des nouveaux centres. On pourrait même utiliser un dialogue axé sur les arts pour élaborer les politiques liées à ces nouveaux carrefours de briques et de mortier ou encore ces carrefours virtuels.
    À la lumière de mon expérience, j'ai constaté que la majorité des activités artistiques et culturelles au pays se tiennent actuellement à l'extérieur des centres d'arts. Souvent, les centres sont trop dispendieux pour les petites et moyennes organisations. Plus particulièrement, les arts communautaires ont tendance à être isolés du courant principal et sont constamment à la recherche d'endroits où accomplir leur travail dans la collectivité.
    Merci. Votre temps est écoulé. Nous aurons peut-être l'occasion d'entendre un peu plus longuement ce que vous avez à dire durant la période de questions et de réponses.
    Nous allons maintenant passer à Mme Sarah Douglas-Murray du Réseau des villes créatives du Canada.
    Merci de me donner l'occasion de parler des carrefours et des quartiers culturels du Canada.
    Je comparais aujourd'hui en tant que vice-présidente du Réseau des villes créatives du Canada, de l'organisation nationale sans but lucratif qui facilite la collaboration, le partage des connaissances, la recherche et le perfectionnement professionnel dans le secteur culturel à l'échelon local grâce à l'élaboration de politiques culturelles, d'activités de planification et de la pratique professionnelle. Nos membres proviennent principalement de 178 municipalités et administrations régionales dont la taille varie de 3 000 habitants à 2,8 millions d'habitants et représentent plus de 16 millions de Canadiens.
    La vision du réseau, c'est que la culture est un pilier essentiel de la durabilité, qu'elle facilite des changements positifs grâce à la créativité et l'innovation et qu'elle crée des collectivités saines, dynamiques et engagées à l'échelle du Canada. Grâce à son travail, le Réseau aide à renforcer la capacité des professionnels locaux de la planification culturelle et, par extension, des administrations locales afin que tous soient en mesure de favoriser et de soutenir le développement culturel dans leurs collectivités. Ce faisant, notre organisation vise à améliorer le climat opérationnel et les conditions des artistes, des arts, du patrimoine et des organisations culturelles en plus de favoriser la qualité de vie dans les collectivités de toutes tailles.
    Lorsque nous avons été invités à comparaître, ici, aujourd'hui, nous avons communiqué avec nos membres pour leur demander de définir ce en quoi consistent les carrefours et les quartiers culturels et de préciser ce dont ils bénéficient actuellement ou ce sur quoi ils travaillent afin d'en doter leurs collectivités. Nous avons appris que de tels endroits existent ou sont en cours d'élaboration dans bon nombre de nos collectivités membres, et, même si nos membres nous ont fait part de leur soutien à l'égard des carrefours et des quartiers culturels et des avantages qu'ils présentent, il nous est également apparu que chaque collectivité membre était unique et que les types, la portée, l'ampleur et la définition des biens dans chaque collectivité étaient extrêmement variés.
    Comme nos collectivités sont uniques et variées, nous devons faire preuve de créativité et d'innovation lorsque nous élaborons des programmes et au moment de déterminer de quelle façon soutenir le développement du secteur et des collectivités individuelles à l'échelle du pays. Il est aussi important d'assurer la souplesse de l'approche utilisée quant à la façon dont nous définissons et soutenons ces mêmes carrefours culturels.
    Même si la définition de chaque collectivité varie, les carrefours culturels ont tendance à être des endroits ou des bâtiments précis où plusieurs organisations offrant des services créatifs ou culturels ou plusieurs disciplines créatives et culturelles se réunissent au même endroit pour offrir des programmes, des services et des occasions. On a décrit les quartiers culturels comme une série de biens culturels situés très près les uns des autres, créant ainsi un lieu géographique. Lorsqu'ils parlaient des quartiers culturels, nos membres ont souligné que les endroits entre les espaces culturels sont aussi importants lorsqu'on définit les quartiers.
    Il convient de souligner que les carrefours et les quartiers culturels sont présents dans nos collectivités de façon naturelle et intentionnelle. Ils sont créés intentionnellement en tant qu'outil de développement communautaire, comme la revitalisation des centres-ville, la promotion du tourisme et l'amélioration de l'engagement à l'égard du bien-être communautaire.
    Lorsqu'on regarde les similitudes entre les carrefours et les quartiers, on constate qu'ils offrent tous les deux beaucoup d'installations et d'activités qui attirent les gens. Ces endroits permettent la pollinisation croisée des idées, des secteurs et des projets. Ce sont des endroits dynamiques, souples, accueillants et accessibles qui servent une communauté diversifiée d'artistes, d'artistes de spectacle, d'entrepreneurs créatifs et de membres du public.
    Nous avons aussi demandé à nos membres de nous dire quel rôle le gouvernement pouvait jouer pour aider les carrefours et les quartiers. Nous avons entendu dire que les municipalités jouent déjà un rôle capital et de plus en plus important pour faciliter, réaliser et garantir des activités culturelles au niveau local. Elles soutiennent déjà des carrefours culturels de plus d'une façon y compris l'inclusion dans les documents officiels de planification, la création et l'amélioration d'infrastructures et de lieux publics, le financement et l'octroi de financement — tant aux carrefours existants qu'aux organisations sans but lucratif — et des modifications du zonage, des règlements administratifs, l'octroi de licences et de permis, tout ce dont il a déjà été question plus tôt aujourd'hui.
    Nos membres sont convaincus que la culture est le quatrième pilier de la durabilité, et beaucoup de municipalités ont tenu d'importantes consultations communautaires pour élaborer des politiques et des plans culturels. Dans bien des cas, les documents de planification culturelle mentionnaient l'élaboration de quartiers ou de carrefours dans les collectivités.
    Souvent, le défi permanent, c'est le financement lié à l'élaboration, à l'exploitation et aux programmes. À cet égard, il faut améliorer la coordination entre les ordres de gouvernement. Nous sommes très heureux d'entendre la déclaration faite au Comité par la directrice générale de la Direction générale de la politique des arts selon laquelle il est important pour le ministère du Patrimoine canadien d'avoir l'occasion de créer des partenariats avec les municipalités et les provinces et que les intervenants tentent de déterminer de quelle façon le ministère peut soutenir ces centres.
    Nous sommes tout à fait d'accord pour dire que les municipalités, les provinces et le ministère devraient travailler en collaboration pour élaborer des accords de financement et des cadres pour assurer le développement et le renouvellement des infrastructures culturelles. C'est une recommandation qu'a aussi formulée la Coalition canadienne des arts dans sa déclaration devant le Comité lorsqu'elle a demandé qu'on exige que les accords bilatéraux futurs conclus avec les provinces exigent la prise en considération générale des projets culturels. Les représentants de la Coalition ont souligné avec justesse que, à l'échelon provincial, il y a une pénurie marquée de programmes similaires au Fonds du Canada pour les espaces culturels et que les organisations et les municipalités se retrouvent souvent dans des situations difficiles où elles doivent exercer des pressions sur les gouvernements provinciaux pour obtenir des fonds de contrepartie discrétionnaires.
(1010)
    Nos membres nous ont aussi dit qu'il fallait du financement pour appuyer les opérations, les programmes et les activités en cours dans les carrefours et les quartiers. Comme on l'a mentionné tantôt, ils sont de par leur nature très diversifiés et, souvent, ils ne cadrent pas parfaitement avec les volets de financement existants, qui sont axés sur une seule discipline, comme les arts de la scène ou les arts visuels, ou sur des résultats très précis souvent cernés au moyen de programmes de développement économique.
    Les industries créatives et culturelles ont un impact positif sur nos collectivités. Ils nourrissent l'âme de notre pays. Nous encourageons l'adoption de la culture comme quatrième pilier de la durabilité.
    En conclusion, je tiens à vous remercier de m'avoir donné l'occasion de prendre la parole aujourd'hui et j'encourage toute collaboration future avec le Réseau des villes créatives et nos membres dans le cadre de l'élaboration de vos programmes.
    Nous allons maintenant faire quelque chose que le Comité n'a encore jamais fait, soit d'avoir une téléconférence avec un témoin, Marianne Garrah du Jasper Community Habitat for the Arts. Marianne se joint à nous par téléphone, et on me dit qu'il y a peut-être d'autres personnes.
    Vous pourriez peut-être les présenter elles aussi, madame Garrah. Vous avez sept minutes.
    Merci d'avoir communiqué avec nous.
    Je m'appelle Marianne Garrah. Je vais céder la parole à David Baker, qui vous parlera au nom de Habitat for the Arts.
(1015)
    Bonjour. Merci de l'invitation de m'adresser à vous aujourd'hui.
    Je vais vous parler brièvement de notre petit centre des arts, ici, à Jasper, Habitat for the Arts. Il a été conçu pour offrir une occasion unique et significative de créer des programmes de partenariat dans le domaine des arts. Ces programmes vont des studios pour des artistes de la collectivité ou des artistes en visite à des salles de classe et des programmes parascolaires, ce à quoi s'ajoutent des programmes d'éducation postsecondaire accrédités. C'est aussi un petit lieu de présentation de performance musicale, et théâtrale et de films. C'est là que se trouve l'exposition itinérante de l'Alberta Foundation for the Arts. Il s'agit d'un centre de bénévoles et d'un centre d'information sur les événements culturels dans la collectivité, un guide complet, et c'est aussi un centre de ressources pour les arts et les artistes.
    L'objectif consiste à créer un endroit où les artistes et les organisations culturelles peuvent échanger les uns avec les autres, sensibiliser le public et interagir avec les membres de la collectivité. Le but, c'est de créer un endroit dont peuvent profiter tous les groupes démographiques, que ce soit pour présenter quelque chose ou pour interagir avec tout ce que Jasper a à offrir sur le plan culturel.
    Je vais vous fournir un bref historique. En 2010, nous avons ouvert Habitat 1.0. Nous occupions un tribunal provincial vacant et nous avons atteint la viabilité financière à environ 18 mois, ce qui signifie que nous pouvions payer nos factures et qu'il restait un peu d'argent. Nous sommes une organisation sans but lucratif ou, comme j'aime le dire, une organisation qui a une vocation. Nous avons attiré l'attention de l'administration municipale, ici, à Jasper.
    Les responsables de la ville nous ont invités en 2012 à nous joindre à des architectes pour concevoir un espace dédié aux arts. En 2016, la ville a ouvert une nouvelle installation, et nous offrons des programmes depuis. Nous sommes un centre d'activités efficace pour notre région, et nous sommes au centre d'un réseau pour toutes les disciplines et tout ce qui concerne les arts et la culture.
    Grâce à notre présence, ici, nous avons insufflé un vent de renouveau dans le milieu théâtral. Nous avons un club de théâtre, ici.
    Nous avons créé des installations de poterie au centre et nous possédons un four pour faire cuire la poterie. Des cours sont donnés par des potiers professionnels. Ces activités suscitent un très grand intérêt.
    Du côté de la musique, nous organisons régulièrement des événements. Des artistes connus passent par ici et donnent des spectacles. Les spectateurs sont nombreux.
    Nous avons aussi gagné la confiance de l'administration municipale pour lancer un projet visant à favoriser la présence d'amuseurs de rue dans Jasper. C'est un projet que nous avons commencé grâce à la Rozsa Foundation et ses activités de gestion artistique, ici, dans la province. Nous avons aussi créé le premier festival du film de Jasper, et le centre des arts compte sur un nouveau laboratoire médiatique et un studio d'enregistrement sonore et musical.
    Nous avons le plein appui de notre conseil municipal dans la mesure où nous avons créé des événements comme le défi de la poésie des maires. Si vous vous souvenez bien, le maire de Calgary, Naheed Nenshi, est le premier à l'avoir fait. Notre maire a repris le témoin et, en fait, c'est lui-même un poète.
    Nous tenons des événements annuels que la collectivité attend avec impatience, comme Bowls with Soul, un événement dans le cadre duquel un potier local fabrique et vend des bols. Les restaurants locaux créent des partenariats avec nous afin de fournir la soupe qu'on met ensuite dans ces bols. Il y a des artistes qui divertissent les gens pendant qu'ils mangent.
    Nous faisons partie de la Journée du cinéma canadien et nous aménageons plusieurs sites dans notre ville. Mentionnons aussi Raven About the Arts, un événement de remise de prix par le maire pour célébrer les arts locaux. Nous participons également à la Fête de la culture, l'événement national lié à cette célébration. Nous y participons depuis environ 10 ans.
    Jasper est sur la scène internationale. Nous sommes connus partout dans le monde en raison de nos montagnes, de nos orignaux et de notre sirop d'érable, mais nous ne nous limitons pas à ça. Nous avons créé des partenariats et avons tenté de faire connaître notre centre des arts dans les endroits où on discute de telles choses et dans l'esprit des gens qui sont là. Nous participons aux conférences sur les villes créatives et avons créé des réseaux là-bas. Nous avons aussi de solides liens avec le Banff Centre, notre voisin au Sud.
    La technologie, la tolérance et le talent, ce sont des éléments de la philosophie créative. Nous avons toujours eu une philosophie qui mise sur les gens, un lieu et un processus. Cela signifie qu'on offre aux gens un endroit bien équipé afin qu'ils puissent participer à un processus produisant des résultats significatifs, tant d'un point de vue social que du résultat en tant que tel. Le résultat du processus est vraiment secondaire par rapport aux liens sociaux qui sont tissés. C'est ce que nous appelons l'« inclusion proactive ».
    Nous sommes maintenant situés dans un parc national, en Alberta, et dans la municipalité de Jasper. C'est une ville qui a 18 ans, ce qui est un peu unique. J'ai déménagé ici en 2001. C'est l'année où Jasper est devenu une ville. Les deux événements ne sont pas liés. Cependant, nous avons depuis créé quelque chose qui n'avait jamais existé ici, avant, un centre des arts. Nous avons travaillé en collaboration avec les services d'approche communautaire et les services communautaires pour les familles, ici, à Jasper, pour offrir des activités au personnel, aux résidents et aux visiteurs.
(1020)
    C'est pertinent, parce que Jasper compte une population de 5 000 habitants toute l'année, mais il peut y en avoir jusqu'à 30 000 certaines journées durant l'été et, maintenant, durant l'hiver, en raison du ski, et on parle d'environ 2,35 millions de visiteurs chaque année dans le parc national de Jasper. Nous agissons à l'échelon local, et nous tissons des liens à l'échelle internationale. Des gens de partout dans le monde viennent à Jasper.
    Notre population de passage fait en sorte que les choses peuvent être un peu difficiles, mais je mets au défi quiconque de participer à une production théâtrale et de ne pas repartir après cette production, fort de nouveaux liens et, possiblement, avec la famille étendue la plus bizarre à n'avoir jamais existé.
    Nous parlons ici d'enjeux socioéconomiques. Nous croyons que les arts sont un choix de carrière viable auquel les gens peuvent consacrer leur énergie. Nous croyons que c'est un ajout important à ce que Jasper offre à nos visiteurs. C'est aussi un endroit où on peut grandir. Nous nous considérons comme un carrefour culturel, parce que nous existons simplement pour unifier ce qui est déjà là et élargir les possibilités de ce que nous pouvons faire. Nous avons certains défis, ici, en ce qui a trait au soutien lié à l'administration du centre et relativement au complexe de l'édifice.
    Nous voulons aussi vous parler d'une citation d'un ami du centre. Tommy Banks, Dieu ait son âme, a dit une fois durant une entrevue qu'on peut obtenir un prêt pour un terrain rempli de tuyaux, en Alberta, mais on ne peut pas obtenir un prêt pour produire une pièce de théâtre, et nous sommes partis de là...
    Je suis désolé, mais je vais devoir vous interrompre. Vous avez dépassé de loin les sept minutes. Nous allons maintenant passer aux séries de questions de sept minutes. Quelqu'un pourra peut-être vous poser une question sur Tommy Banks et les tuyaux.
    Merci beaucoup.
    Nous allons commencer par Mme Dzerowicz, des libéraux. Vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins de leur exposé aujourd'hui. C'était excellent.
    Je remercie les représentants du Jasper Community Habitat for the Arts, au téléphone, de leur patience et vous aussi, madame Marcuse, de vous joindre à nous par vidéoconférence.
    Ma première question est destinée au Théâtre Gargantua. Un certain nombre de personnes ont recommandé des incitatifs fiscaux pour rendre plus attrayant l'investissement dans les carrefours culturels. Habituellement, lorsqu'il y a des investissements dans le milieu des arts, cela réunit habituellement à la fois le secteur privé et le gouvernement ainsi que le public, d'une façon ou d'une autre.
    Je crois que c'est vous, monsieur Spence, qui l'avez mentionné. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ces idées précises à l'échelon fédéral et préciser ce que nous pouvons faire relativement à ces incitatifs fiscaux?
    L'un ou l'autre d'entre vous peut répondre.
    Je vais laisser Jacquie répondre.
    Je crois que, ce dont Michael parlait au sujet de... Vous savez, assurément, du point de vue des dons, l'une des meilleures façons de réunir des fonds, c'est d'accorder des incitatifs fiscaux aux personnes qui appuient les organismes sans but lucratif, ce qui, je crois, est déjà prévu dans le code fiscal. Le code pourrait être rédigé pour parler précisément des actifs culturels. Il pourrait y avoir une façon, dans le code fiscal, de soutenir un peu mieux ces carrefours culturels qui sont proposés et ceux qui existent déjà, de façon à ce que, lorsque quelqu'un va de l'avant et soutient de nouveaux centres créatifs, il puisse profiter des économies d'impôts réalisées grâce à ses dons.
    Vous avez mentionné être en train de créer un carrefour réunissant trois groupes clés: la Obsidian Theatre Company, le Théâtre français de Toronto et le Théâtre Gargantua. Quels sont les principaux défis auxquels vous êtes confrontés dans le cadre de la création du carrefour actuellement?
    Le principal défi, actuellement, c'est de trouver un local, parce que c'est extrêmement dispendieux. Il faut aussi trouver un espace qui est situé à un endroit accessible en transport en commun. Nous sommes déterminés à y arriver. Nous sommes déterminés à trouver un local qui est soit sur la ligne de métro, soit très accessible, pas seulement un bien pour la collectivité et pas seulement un carrefour pour les gens situés tout près. Nous voulons un endroit qui peut aussi être un atout pour d'autres artistes de la collectivité, qui peuvent venir au carrefour pour exercer leur art et pour d'autres spectateurs de partout dans la ville qui peuvent venir pratiquer leur art et voir les spectacles offerts.
    En raison des énormes difficultés et des grands défis à Toronto en raison des prix de l'immobilier, beaucoup de propriétés ne nous sont pas accessibles. Nous tentons actuellement de trouver un local dans un nouveau bâtiment construit dans un but précis. Il y a assez de locaux qui ne sont pas nécessairement équipés ou adaptés pour les arts et le théâtre, en particulier. Ce dont nous avons vraiment besoin, c'est un bâtiment construit à une fin précise qui peut accueillir une diversité de pratiques contemporaines. Nous sommes tous des troupes contemporaines.
(1025)
    Voilà qui m'amène sans doute à ma prochaine question, tout simplement parce qu'un certain nombre de personnes nous dit à quel point c'est dispendieux, particulièrement dans les centres urbains. Cependant, lorsqu'on regarde la situation à Paris ou à Sydney, en Australie, ou même à New York, les loyers dans tous ces endroits sont très élevés, mais ces villes réussissent tout de même à trouver des locaux pour leurs artistes. Je ne sais pas s'il y a des leçons à tirer de ce que font certaines des autres grandes villes du monde.
    De plus, on nous a recommandé d'utiliser plus efficacement les locaux du gouvernement fédéral. Je pourrais peut-être vous demander de nous en dire un peu plus et de nous formuler une recommandation un peu plus précise, après quoi quiconque veut intervenir sera libre de le faire. C'est une question sur laquelle j'aimerais me concentrer un peu afin de mieux savoir ce qu'on peut faire à cet égard à l'échelon fédéral. Si vous pouvez vous inspirer d'un exemple international ou de ce que quelqu'un d'autre fait ailleurs et qui est jugé très efficace, ce serait bien.
    Pourquoi pas commencer par vous, madame Thomas, puis nous passerons à Mme Marcuse, par vidéoconférence.
    Je peux vous donner un exemple, celui de Sydney, en Australie, et d'une troupe qui a pignon sur rue là-bas, « Legs On The Wall ». Cette troupe présente une oeuvre très précise: des chorégraphies sur les côtés des bâtiments, et elle a donc des besoins très précis. Initialement, on lui a offert un vieux hangar de parachutistes pour présenter ses chorégraphies. Plus tard, elle s'est vue offrir une installation à vocation spéciale, le Red Box, qui est adaptée à son style de théâtre. Voilà un exemple d'une troupe artistique qui a eu beaucoup de succès et qui est soutenue par son gouvernement afin de pouvoir créer une oeuvre précise, qui est maintenant de renommée internationale.
    Merci.
    Madame Marcuse, avez-vous quelque chose à ajouter à ce sujet?
    Oui, j'ai deux exemples à vous fournir. Il y a premièrement Melbourne, où des allées et d'autres zones du centre-ville sont réservées aux arts visuels. Cette initiative a vraiment vivifié cette partie de la ville de façon inestimable. C'est très beau. Ces zones sont intégrées avec les magasins et les restaurants. Le deuxième exemple, c'est à Quito, où une organisation de cirque social s'est vu offrir un hangar par le gouvernement fédéral. Les responsables ont modifié l'endroit, et c'est devenu un important centre pour la pratique du cirque social dans cette ville.
    J'aimerais ajouter qu'il faut vraiment penser aux centres ruraux, qui ont des besoins particuliers. Je suis sûre que vous avez beaucoup entendu parler de cette diversité, du fossé très profond actuellement entre les régions rurales et les zones urbaines.
    Merci.
    Il vous reste 10 secondes.
    Merci à tous.
    Nous allons maintenant passer aux conservateurs et à M. Eglinski pour sept minutes.
    Merci, monsieur le vice-président.
    Je tiens à remercier tous les témoins, ce matin, et je tiens à remercier tout spécialement Mme Marcuse, qui participe par vidéoconférence.
    Bien sûr, je tiens à remercier deux de mes électeurs, Marianne et David, qui comparaissent grâce à un nouveau système qui n'avait jamais été utilisé auparavant. Je vais commencer par vous. Je vais vous laisser terminer ce que vous aviez à dire sur Tommy Banks, mais j'aimerais ensuite que vous formuliez des commentaires sur le fait que vous utilisez un ancien bâtiment gouvernemental; si je ne m'abuse, c'est là que se situe votre installation à Jasper. C'est un local très bien situé, et les gens qui visitent la collectivité peuvent facilement s'y rendre à pied de la plupart des hôtels et motels du coin.
    J'aimerais que vous nous en disiez plus sur les difficultés que vous éprouvez à essayer de servir votre collectivité et la communauté internationale de visiteurs grâce à des occasions de financement très limitées. Je me demande si vous pourriez nous expliquer de quelle façon, selon vous, le gouvernement peut aider — que ce soit l'administration municipale ou les gouvernements provinciaux et fédéral —, de quelle façon on peut aider les petites organisations communautaires comme la vôtre, qui sont une plaque tournante pour les arts et ainsi de suite. Allez-y, s'il vous plaît.
(1030)
    Merci. Je suis heureux de vous entendre à nouveau. Je me souviens de la fois où nous avons parlé. C'est le même jour que nous avons parlé à Tommy Banks.
    Tommy Banks était un bon ami à nous. À nos débuts, il nous a dit que, en Alberta, on peut obtenir un prêt de la banque pour n'importe quoi si c'est un champ plein de tuyaux, mais qu'il est difficile d'obtenir du financement pour une pièce de théâtre. Les responsables de la banque riraient de nous en nous pointant la sortie.
    Nous avons lancé ce projet dans un palais de justice provincial vacant. C'était un appel à l'improviste à la province, et la personne qui a répondu partait en vacances ou à la retraite, je ne sais trop, mais il a dit oui, et nous sommes déménagés dans ce local. Nous étions financièrement viables en 18 mois. C'est un endroit situé directement au centre-ville — si jamais vous venez à Jasper, je vous invite tous à venir nous voir —, et les gens peuvent avoir accès au centre. Après 18 mois, nous avions fait nos preuves sur le plan financier, ce qui a attiré l'attention de l'administration municipale.
    Jasper était sur le point de rénover notre bibliothèque municipale, alors les représentants nous ont invités à nous joindre aux architectes pour aider à concevoir et construire le premier centre construit à une fin précise et dédié aux arts et à la culture. Nous nous sommes assis avec ces personnes. Il y a eu des retards de construction. Nous avons un peu perdu notre erre d'allée pendant les quatre ans d'attente avant l'ouverture du centre. Nous avons aussi perdu environ 20 000 $, parce que nous allions être un site vedette des Alberta Culture Days. Une fois le centre ouvert, ces intervenants devaient venir pour braquer les projecteurs sur nous.
    Nous avons depuis ouvert le centre. En outre, nous avons la chance d'avoir un espace vert tout juste devant le centre. Il y a là environ 2 000 pieds carrés d'espace. Nous sommes encore accessibles. Il reste possible pour les gens de venir dans nos locaux, et nous sommes plus ou moins dans le centre-ville. Les défis auxquels nous sommes confrontés sont, premièrement, le fait que cela n'avait jamais été fait, et, deuxièmement, les loyers exorbitants à Jasper, une ville qui existe seulement depuis 18 ans. Cela signifie que nous sommes extrêmement redevables à la municipalité d'avoir rendu tout ça possible.
    Quant aux choses que le gouvernement pourrait faire pour nous aider, à Lethbridge, il y a un centre des arts, Casa, et les coûts d'exploitation et le loyer sont payés par le ministère de la Culture. Dans notre cas, à Jasper, ce serait bien que certains coûts soient couverts, et ce serait bien aussi qu'il soit possible pour nous de payer les coûts administratifs. Je parle du complexe d'édifice. Les bâtiments ont été construits, puis personne ne veut payer pour le nettoyage ou l'exploitation. Si une aide devait nous être fournie, ce serait pour les coûts quotidiens d'exploitation du centre, et, peut-être, aussi, un salaire vital pour l'exploitation, les programmes, la tenue des événements et la planification du calendrier, et aussi tout simplement pour qu'on puisse garder les portes ouvertes. C'est notre principal défi financier. Nous avons cru suffisamment à tout ça pour faire des sacrifices afin d'y arriver, mais les mesures que j'ai mentionnées seraient la meilleure façon de nous enlever un peu de poids sur les épaules.
    Est-ce que j'ai un peu répondu à votre question?
    Oui, merci.
    Je veux maintenant passer à un autre groupe. Je m'adresse au Théâtre Gargantua.
    Nous avons accueilli des personnes venant de grandes collectivités, comme la RGT et Montréal, où il y a tout un réseau de groupes, d'installations artistiques et de centres culturels. De quelle façon croyez-vous qu'on compose avec la concurrence là-bas? Tout le monde essaie d'obtenir sa part de la collectivité. Y a-t-il un assez bon réseau où les gens se réunissent pour travailler ensemble? Ou y a-t-il beaucoup de particuliers qui essaient d'accaparer la plus grande part du gâteau possible?
(1035)
    Non. Je dirais que notre milieu, et, assurément, la communauté théâtrale, misent beaucoup sur la collaboration. Il y a beaucoup d'organisations différentes, la TAPA, la Toronto Alliance for the Performing Arts, étant la principale, à Toronto. Nous établissons des stratégies sur la façon de nous aider les uns les autres, de rendre notre collectivité plus forte et de trouver des façons d'accroître nos auditoires et d'assurer une certaine pollinisation croisée des spectateurs. Actuellement, il y a beaucoup plus de collaboration et de recoupements entre les disciplines, et il y a de plus en plus de performances contemporaines. Les compagnies de danse deviennent de plus en plus théâtrales, et les troupes de théâtre deviennent un peu plus physiques dans le cadre de leurs oeuvres.
    Je dirais que, dans les grands centres, nous comptons assurément sur la population permettant de soutenir nos organisations des arts de la scène. Je crois que, parmi les membres de la TAPA, il y a 154 troupes de théâtre professionnel à Toronto. C'est parfois un défi, surtout pour les petites troupes qui doivent trouver des locaux sur une rue périphérique tout simplement parce qu'elles ne peuvent pas se payer de l'espace dans un théâtre régulier. C'est parfois difficile d'attirer des spectateurs là-bas. Une des façons dont on pourrait améliorer la situation, ce serait grâce à un genre de campagne de promotion.
    Mon temps est écoulé.
    Merci beaucoup. Oui, votre temps est écoulé.

[Français]

    Nous passons maintenant à M. Nantel, du NPD.
    Monsieur Nantel, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Je vais parler dans ma langue.

[Français]

    Monsieur Spence et madame Thomas, je vous remercie de la présentation que vous avez livrée.
    Je remercie également les gens de l'organisme Jasper Community Habitat for the Arts.

[Traduction]

    Madame Douglas-Murray, puis-je souligner qu'il y a un parallèle entre Les Arts et la ville, à Québec, et votre organisation? Les projets comme le Jasper Community Habitat for the Arts et The Guild, à Charlottetown, sont-ils des exemples de ce que vous tentez vous aussi de faire?
    Oui. La majeure partie de nos membres sont des municipalités et des organisations régionales, mais nous acceptons aussi des...
    Organisations culturelles?
    ... des organisations et des groupes culturels.
    Nous tenons chaque année un sommet qui a lieu d'une province à l'autre. Nous constatons que, lorsque nous sommes dans une région locale, les organisations sans but lucratif de l'endroit participent beaucoup plus. Assurément, nous savons — c'est ce que nos municipalités membres nous ont dit — que les municipalités elles-mêmes sont en très étroite communication avec toutes les organisations culturelles sans but lucratif dans leur collectivité. La majorité offre un processus d'octroi de subventions culturelles. Elles sont nombreuses à exploiter des carrefours ou des quartiers ou à fournir des locaux à de telles organisations. Presque toutes nos municipalités membres ont réalisé d'importants processus de planification culturelle, ce qui leur a permis de cerner, de pair avec les membres de leur collectivité, la nature des besoins et l'orientation précise de la collectivité.
    Merci beaucoup de votre réponse très précise.
    Ce qui semble évident, à la lumière du témoignage des témoins que nous avons eu l'occasion de rencontrer, c'est que les gens du milieu culturel veulent avoir accès à de meilleurs publics; ils veulent un moyen de communiquer avec la clientèle. Nous voulons créer ces communautés, mais ce dont on entend parler, comme principe, mais peut-être pas de façon aussi précise et concrète, c'est l'impact social sur la clientèle, sur les citoyens.
    C'est la raison pour laquelle je veux vous parler, madame Marcuse. Aimeriez-vous prodiguer des conseils dans le cadre des projets d'art culturel pour que l'impact social soit toujours au rendez-vous et cerné précisément?
    De ce point de vue, dans cette optique, je crois qu'il y a vraiment place à la consultation. Par exemple, je recommanderais la tenue de consultations communautaires dans le cadre du processus de planification de ces centres culturels, parce que, très souvent, ils sont magnifiquement conçus, mais ils ne sont pas utilisés par l'ensemble de la collectivité, particulièrement ceux qui sont nouveaux dans la collectivité, les nouveaux immigrants, les jeunes et les aînés.
    J'ai l'impression qu'il y a des possibilités de rassemblement que peut saisir Patrimoine canadien, et pas seulement auprès des habitants locaux, mais aussi en regardant les recherches, qui prouvent vraiment les répercussions diverses des arts sociaux et la façon de mieux intégrer tout ça dans un carrefour, qui est habituellement composé de gens qui consomment des oeuvres ou d'autres qui en réalisent en vue de les vendre.
    Je souscris vraiment moi aussi à l'idée que vient d'exprimer Sarah Douglas-Murray au Comité — et d'autres l'ont fait aussi —, soit qu'il va y avoir une importante consultation, malgré toutes les vicissitudes que cela entraîne, avec la ville, la province et aussi avec les fondations privées, qui participent de plus en plus dans le milieu des arts à vocation sociale. Les universités aussi font beaucoup de travail d'extension, non seulement dans le cadre de leurs activités artistiques, mais en faisant un lien entre les arts et la santé, la réconciliation et l'établissement des nouveaux Canadiens et le travail auprès des aînés isolés et des jeunes dans la rue.
    Il faut élargir tout le domaine du travail artistique afin qu'on puisse bénéficier de tout ce que le domaine a à offrir et qu'on assure l'intégration des citoyens dans le processus artistique, pas seulement la consommation des arts.
(1040)
    Dans les notes que vous nous avez envoyées, vous avez mentionné Wapikoni mobile et la Cité des arts, les arts de la rue ou le cirque de rue. S'il vous plaît, dites-nous-en plus sur ces exemples. Je crois que, même si vous n'avez pas nécessairement participé dans ces cas-là, vous avez estimé qu'il s'agit de très bons exemples de l'impact de l'art sur les gens, sur les gens qui s'adonnent à l'art, ce qui est la différence, ici.
    Absolument. Oui, c'est exact, monsieur Nantel.
    Comme je l'ai dit, nous avons fait six ans de recherche sur l'impact de ces formes de création artistique et l'incidence sur les gens. Il y a, par exemple, un organisme appelé Cirque Hors Piste, à Montréal, un programme qui travaille auprès des jeunes de la rue. Ce que nous constatons dans le cadre de nos recherches, c'est qu'un très grand pourcentage d'entre eux nous disent par la suite être retournés aux études ou avoir acquis des compétences liées à l'emploi ou tout simplement pour bénéficier d'une meilleure inclusion sociale et accéder à une situation de mieux-être ou y retourner.
    Il y a par exemple un groupe de patientes atteintes du cancer du sein, à l'hôpital, en Ontario, qui ne sont pas heureuses en raison de leur traitement, qui créent une pièce avec un dramaturge d'art pour le changement social. Elles l'ont présenté à tout l'hôpital, et cela a fait en sorte que la politique a été améliorée.
    Pensez-vous qu'il serait approprié d'assurer l'intervention et le soutien d'autres ministères?
    Absolument. Dans le cadre de toutes mes conversations, à Ottawa, au cours de la dernière année, j'entends toujours parler d'« intégration latérale ». Je ne saurais trop insister sur l'importance d'établir des liens entre les cloisons.
    Si nous voulons nous attaquer aux problèmes vraiment complexes dans notre pays, nous devons vraiment réunir les artistes, les professionnels de la santé et les gens qui font du travail interculturel pour forger un consensus sur la meilleure façon d'utiliser les arts pour faire du Canada un endroit plus sain, plus intégré et plus créatif. Très souvent, les politiques produites ne reflètent qu'un point de vue précis. Si nous tenons ces conversations multidisciplinaires et intersectorielles, nous serons beaucoup plus à même d'obtenir des ressources durables et aussi, tout simplement, d'inclure plus de gens qui racontent leurs propres histoires et, ainsi, entraînent la création de politiques et l'adoption d'approches permettant des changements positifs.
    J'espère que je suis compréhensible.
    Absolument. Je suis sûr que les ministres de la Santé constateraient de très bonnes répercussions sur la santé de ses patientes atteintes du cancer grâce aux arts. Ai-je raison d'avancer une telle chose?
    Absolument.
    Merci beaucoup, monsieur Nantel.
    Merci à tous les témoins. Même si M. Hébert était le prochain à passer, nous n'avons malheureusement plus de temps. Nous devons clore la séance.
    La séance est levée à la suite de l'adoption de la motion présentée par M. Shields. Merci.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU