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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 140 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 30 janvier 2019

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    Bienvenue, chers témoins. Nous sommes désolés d'être en retard de quelques minutes pour débuter la réunion. Nous essayons encore de nous y retrouver dans nos nouveaux locaux dans l'édifice de l'Ouest ou, plus important encore, de savoir comment sortir de l'édifice de l'Ouest pour nous rendre à nos réunions. Merci de votre patience.
    Nous poursuivons l'étude sur le leadership international. Elle s'inscrit dans le cadre pancanadien sur les changements climatiques. Aujourd'hui, nous allons poursuivre nos travaux et étudier la tarification de la pollution ou, comme certains l'appellent parfois, la taxe sur le carbone.
    Conformément à notre procédure habituelle, nous accorderons 10 minutes à chaque organisme pour faire une déclaration liminaire. Une minute avant la fin du temps imparti, je brandirai le carton jaune, ce qui vous signalera qu'il ne vous reste qu'une minute, puis je brandirai le carton rouge lorsque votre temps de parole sera écoulé. Vous n'êtes pas obligés d'arrêter de parler en plein milieu d'une phrase, mais vous devrez conclure vos remarques. Après avoir entendu les déclarations liminaires de tous les témoins, nous allons passer à la période de questions où les membres et les témoins échangeront. Chaque membre disposera de six minutes. Il appartient aux membres de gérer leur temps de parole, mais je vais les avertir une minute avant la fin, principalement pour leur laisser savoir combien de temps il leur reste. Celui ou celle qui a la parole lorsque le temps est écoulé devra conclure ses remarques, puis nous passerons à la prochaine série de questions.
    J'aimerais vous souhaiter à nouveau la bienvenue à la table, monsieur Sopuck. Cela fait un certain temps qu'on ne vous avait pas vu ici.
    Je suis heureux d'être ici.
    Vous jouez un rôle très important à notre comité depuis un certain temps, alors nous sommes ravis de vous revoir.
    Vous êtes beaucoup trop gentil.
    Sur ce, nous pourrions peut-être entendre tout de suite la déclaration de l'Association canadienne des carburants.
    Monsieur Boag, si vous êtes prêts, la parole est à vous pour 10 minutes.
    Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs. Merci beaucoup de nous avoir invités à comparaître devant votre comité aujourd'hui.
    Je m'appelle Peter Boag et je suis le président de l'Association canadienne des carburants. Je suis accompagné de Carol Montreuil, vice-président de notre division de l'Est du Canada et dirigeant des politiques dans le dossier de la tarification du carbone.
    L'Association canadienne des carburants représente l'industrie qui produit, distribue et met en marché des produits pétroliers au Canada — près de 95 % des carburants de transport qui permettent le déplacement des biens et des personnes.
    Nos membres produisent également de l'asphalte, du mazout domestique et des charges d'alimentation pour les installations de production. Nous sommes fortement intégrés au secteur de la pétrochimie. Bref, nos produits appuient tous les secteurs de notre économie, et nos membres sont une composante importante de l'infrastructure énergétique essentielle du Canada.
    Bien que l'offre de carburants soit en évolution, des prévisions indépendantes, dont celles de notre propre Office national de l'énergie, montrent que la demande de nos produits demeurera relativement constante jusqu'en 2040.
    Vous nous avez demandé notre point de vue sur la tarification du carbone. Nous sommes heureux de vous en faire part aujourd'hui — à la fois d'un point de vue général et, plus précisément, en ce qui concerne la proposition fédérale actuelle de tarification du carbone.
    Nous appuyons les politiques climatiques qui respectent les six principes de conception suivants: un, la clarté et la prévisibilité; deux, la transparence; trois, des objectifs exigeants, mais réalisables; quatre, l'équité, c'est-à-dire qu'on n'impose à aucun territoire, secteur ou entité un fardeau disproportionné; cinq, des résultats rentables appuyés par des preuves solides; six, l'équilibre des bilans économique et environnemental.
    Dans cette optique, nous présentons les points de vue suivants sur la norme de rendement fondée sur les extrants proposée dans le cadre du programme fédéral de fixation du prix du carbone. Elle obligera les installations industrielles, à quelques exceptions près, à réduire leurs émissions à 80 % de la moyenne du secteur actuel ou à payer une taxe sur les émissions de carbone au-dessus de ce seuil, et ce, dès janvier prochain. Autrement dit, il s'agit d'une norme de réduction des émissions de 20 % comparativement à la moyenne du secteur actuel.
    Commençons par le principe des objectifs exigeants, mais réalisables. Pour le secteur canadien, la cible de 80 % correspond à un bilan en matière d'émissions que même les meilleures raffineries du monde auraient de la difficulté à atteindre. Le premier graphique dans le document que vous avez illustre le rendement en matière d'émissions des 16 raffineries du Canada.
    Les raffineries ayant le meilleur rendement en matière d'émissions de GES, celles dont l'intensité des émissions est la plus faible, se trouvent du côté gauche de la courbe verte. Le point vert représente la moyenne du secteur du raffinage. La ligne rouge au bas est le seuil de 80 % fixé par la proposition fédérale.
    Le graphique nous montre très simplement que le seuil de 80 % n'a pas été atteint et est probablement inatteignable, du moins pas dans un avenir prévisible, même par les raffineries canadiennes les plus performantes. La situation serait la même pour plus de 90 % des 200 raffineries situées dans les pays de l'OCDE.
    Cela ne laisse aux six raffineries canadiennes qui sont actuellement visées par le filet de sécurité fédéral d'autre option que de payer la note. Elles n'ont vraiment pas d'occasions de réduire suffisamment leurs émissions pour atteindre ce niveau de rendement. Paradoxalement, l'établissement d'objectifs irréalisables détourne les investissements pour améliorer les processus et la technologie qui permettraient de réduire les émissions.
    Cela nous amène à notre principe suivant, l'équité. Le graphique suivant, à la page 4, compare les coûts de conformité jusqu'en 2022 pour une raffinerie de taille moyenne exploitée dans une province ou un territoire bénéficiant d'un filet de sécurité à ceux d'autres provinces ou territoires qui ont leurs propres programmes de tarification du carbone, tels que le Québec, l'UE et la Californie, ou qui n'ont aucun programme du tout, soit pratiquement tous les autres territoires des États-Unis.
    Le coût cumulatif d'une raffinerie moyenne dans les pays bénéficiant d'un filet de sécurité, comme on peut le voir sur le graphique, s'élève à près de 100 millions de dollars, soit plus de trois fois le coût du carbone dans les pays concurrents. Pour les raffineurs exerçant leurs activités au Nouveau-Brunswick et en Ontario, les coûts du carbone sont quatre fois plus élevés que ceux des raffineurs du Québec qui fonctionnent dans le cadre du régime de plafonnement et d'échange du Québec.

  (1540)  

    Cet ensemble de mesures disparates et inéquitables est encore plus grave en raison du fait que les raffineurs de ces instances, à l'exception de la Californie, se font tous concurrence dans le même marché, le bassin Est ou bassin de l'Atlantique.
    L'impact de ces mesures interventionnistes soulève d'importantes inquiétudes relativement à notre principe final: la nécessité d'un équilibre des bilans économique et environnemental. Le risque est qu'en imposant des coûts inéquitables du carbone aux raffineries canadiennes, elles ne seront plus compétitives et seront vulnérables à la fermeture. Sur ce point, une étude réalisée en 2017 par Baker and O'Brien a révélé que jusqu'à sept raffineries canadiennes sont menacées de fermeture, les coûts disparates du carbone étant un facteur important.
    C'est un cas classique de ce que nous appelons — et je suis certain que vous êtes au courant — une fuite du carbone. Le coût du carbone dans un territoire provoque l'échec d'entreprises à forte intensité énergétique et exposées à la concurrence, comme les raffineries, face à leurs compétiteurs d'autres territoires où le coût du carbone est soit inexistant, soit inférieur à celui du territoire où elles se trouvent. La fermeture de raffineries canadiennes érodera les avantages économiques directs de notre secteur du raffinage pour le Canada et déplacera simplement les émissions vers une autre instance. Ce sont des situations qui surviennent encore, seulement ailleurs.
    Cela nous rendra plus dépendants des importations de carburant et risque de compromettre la sécurité de notre approvisionnement en carburant.
    La réduction de l'activité économique et le simple fait de transférer les émissions vers un autre territoire n'ont clairement pas comme résultat un bilan économique et environnemental équilibré.
    En conclusion, nous ne sommes pas opposés à la tarification du carbone en tant que politique de réduction des émissions de GES. Nous appuyons tout mécanisme de tarification du carbone bien conçu qui intègre nos six principes. Sur une note positive, la tarification du carbone assure la transparence, et les économistes sont unanimes pour dire que des mécanismes de tarification du carbone bien conçus favorisent les occasions de réduction des émissions les plus rentables. Toutefois, les politiques sur le carbone efficaces, la tarification ou autre doivent respecter d'autres principes.
    Du point de vue des principes d'objectifs réalisables, d'équité et de bilans économique et environnemental équilibrés, la proposition de filet fédéral sur la tarification du carbone dans sa forme actuelle ne passe pas le test.
    Monsieur le président, je mets fin ici à mon exposé liminaire. Merci de votre attention. Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.

  (1545)  

    Excellent. Merci.
    Nous allons maintenant entendre Joanna Kyriazis, de Clean Energy Canada.
    Vous avez 10 minutes.
    Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité.
    Je suis Joanna Kyriazis, conseillère de direction principale à Clean Energy Canada, un groupe de réflexion sur le climat et l'énergie propre à l'Université Simon Fraser. Je travaille ici à Ottawa.
    J'aimerais, durant le temps que je vais passer au Comité aujourd'hui, couvrir quatre points: les coûts de l'inaction à l'égard des changements climatiques, la tarification du carbone comme outil clé, la possibilité offerte par l'énergie propre et la raison pour laquelle le Canada a besoin d'un plan.
    Nous passons beaucoup de temps à parler des coûts éventuels de la tarification du carbone et de la lutte contre les changements climatiques. Cependant, qu'en est-il du coût des atermoiements ou de l'inaction? C'est le sujet que j'aimerais aborder en premier aujourd'hui.
    Les changements climatiques coûtent déjà une fortune aux Canadiens. L'année dernière a été une année record pour les dommages causés par les conditions météorologiques extrêmes, avec 1,9 milliard de dollars en pertes assurées.
    En juillet, une vague de chaleur intense s'est abattue sur le centre du Canada, ce qui a causé 93 décès au Québec. Les aînés et les gens qui n'ont pas accès à l'air climatisé étaient les plus vulnérables. Les tempêtes estivales qui ont touché les Prairies ont entraîné des dommages de 240 millions de dollars. En août, de fortes pluies se sont déversées sur le centre-ville de Toronto dans une tempête si intense que l'on voit ce phénomène une fois par siècle. La Gare Union, une station de transport en commun, a été inondée, et les tours de bureaux sur la rue Bay ont été privées d'électricité. La tempête a coûté plus de 80 millions de dollars. Au cours du même mois, des incendies de forêt ont ravagé l'Ouest canadien, et la Colombie-Britannique a dû déclarer l'état d'urgence à l'échelle provinciale pour une deuxième année consécutive. Des dizaines de milliers de personnes ont été évacuées de leur domicile.
    Bien entendu, chacun de ces phénomènes a des répercussions sur d'autres secteurs de l'économie, que ce soit des effets néfastes sur l'industrie du tourisme, une perturbation des centres financiers ou une augmentation des coûts liés aux soins de santé en raison de visites plus fréquentes dans les hôpitaux pour des cas d'inhalation de fumée.
    Les propriétaires de maison sont aussi touchés. Le coût moyen pour réparer un sous-sol inondé, pour ceux qui ont la malchance de se retrouver dans cette situation, s'élève à 43 000 $, et c'est sans compter les jours de travail manqués et les répercussions psychologiques à long terme que ces phénomènes peuvent causer.
    La société financière Intact, l'une des plus importantes compagnies d'assurance de biens, aurait augmenté les cotisations de 15 à 20 % à la suite de la hausse des coûts associée aux dommages dus aux intempéries. Le Bureau d'assurance du Canada estime que jusqu'à 10 % des propriétés canadiennes sont à haut risque de ne plus être assurables dans un avenir proche.
    Ce ne sont pas des coûts que nous risquons d'engager dans le futur. Ce ne sont pas des chiffres débités par des modèles. C'est le prix que nous payons déjà, et nous nous attendons à ce que la fréquence de ces phénomènes augmentera en raison des changements climatiques. C'est le prix de l'inaction, et il est élevé.
    Par chance, nous avons des solutions pour protéger les Canadiens et réduire les coûts pour notre économie. L'une de ces solutions est la tarification du carbone. C'est mon deuxième argument.
    Comme ce comité en a beaucoup entendu parler, la tarification du carbone fonctionne. Les économistes conviennent généralement que la tarification du carbone est la façon la plus efficace de réduire la pollution causée par les émissions de carbone. Il y a maintenant 46 compétences nationales et 24 compétences infranationales qui ont un système de tarification du carbone ou qui en auront un sous peu.
    La tarification du carbone a un bilan éprouvé à l'échelle nationale et internationale. Nous n'avons qu'à regarder la Colombie-Britannique pour avoir la preuve qu'une taxe sur le carbone fonctionne. De plus, la tarification du carbone réduit les émissions tout en favorisant une forte croissance économique. Les quatre provinces qui avaient des systèmes de tarification du carbone en place l'an dernier étaient la Colombie-Britannique, l'Alberta, l'Ontario et le Québec. Elles ont contribué à augmenter le PIB du Canada en 2017.

  (1550)  

    La tarification du carbone favorise également la croissance dans les secteurs des technologies et des énergies propres. Un signal du marché est envoyé directement et a une incidence directe en récompensant ceux qui font le choix de réduire la pollution par le carbone. De plus, les entreprises et les consommateurs ont la flexibilité de décider comment ils veulent réduire leurs émissions. Ils peuvent soit payer le prix du carbone, soit investir dans des solutions propres: thermopompes, stockage d'énergie, gaz naturel renouvelable ou efficacité énergétique. En encourageant ces solutions, le Canada contribue à la croissance de son industrie des énergies propres, dont le marché mondial est maintenant évalué à plus de 5,8 billions de dollars, et ce chiffre continue d'augmenter. C'est plus que le PIB du Japon, qui est la troisième puissance économique mondiale.
    Voilà qui m'amène à mon troisième point. L'économie propre est une occasion en or pour le Canada, et les entreprises canadiennes se distinguent déjà en étant des chefs de file dans le secteur des énergies propres. La liste Global Cleantech 100 a été rendue publique cette semaine. C'est une liste des entreprises d'énergies propres les plus prometteuses dans le monde. Et devinez quoi? Douze entreprises qui figurent sur la liste sont canadiennes.
    Voici deux exemples où le Canada pourra profiter de la transition vers l'énergie propre. Le premier est Corvus Energy. Corvus est une entreprise canadienne qui fabrique des batteries pour les traversiers électriques. Lorsque la Norvège a lancé un appel pour qu'il y ait davantage de traversiers écoénergétiques, l'entreprise Corvus a été retenue pour approvisionner en batteries et en stations de charge le premier traversier électrique dans le monde. Les opérateurs de traversiers en Norvège ont signalé une réduction d'émissions remarquable de 95 %, et les coûts de fonctionnement ont également diminué de 80 %. Corvus continue de prospérer et fournit maintenant des batteries pour des traversiers hybrides et entièrement électriques dans le monde entier.
    Le secteur minier du Canada est un autre exemple. Le Canada compte 14 des 19 métaux et minéraux nécessaires pour les panneaux solaires. Nous avons également des gisements importants d'argent, de nickel, de cuivre et de lithium utilisés pour les éoliennes et les batteries. Le Canada peut se targuer d'avoir des sociétés minières parmi les plus importantes au monde, notamment Barrick Gold et Teck Resources. Pour des sociétés comme celles-là, la croissance des technologies d'énergie propre représente des occasions importantes. La tarification du carbone et d'autres politiques climatiques peuvent contribuer à accélérer cette transition et veiller à ce que les entreprises canadiennes aient une longueur d'avance alors que le monde s'engage dans cette voie.
    Le dernier point que je veux faire valoir au Comité est que l'immobilisme n'est pas une option. Chaque année, le Forum économique mondial publie son Rapport sur les risques mondiaux dans lequel il classe les principaux risques dans le monde pour ce qui est de la probabilité et des répercussions. Le rapport de cette année, qui vient d'être rendu public, a révélé que l'inertie face aux changements climatiques et les conditions météorologiques extrêmes sont les risques les plus menaçants dans le monde cette année, et non pas la cybersécurité, le terrorisme ou l'instabilité politique.
    Ma question est donc la suivante: qu'attendons-nous? Il faut agir maintenant. Les solutions existent. Il serait dommage d'écarter l'outil le plus efficace pour régler ce problème.
    Merci de l'invitation à comparaître aujourd'hui. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Votre exposé était excellent. Merci de vos remarques.
    Nous allons maintenant entendre le Conseil national des lignes aériennes du Canada. Nous avons parmi nous Massimo Bergamini et Geoffrey Tauvette.
    Messieurs, vous avez 10 minutes.
    Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité.

[Français]

     Je m'appelle Massimo Bergamini et je suis le président-directeur général du Conseil national des lignes aériennes du Canada. Je suis accompagné de M. Geoffrey Tauvette, qui est directeur, Carburant et environnement, pour la compagnie WestJet, en plus d'être le coprésident du comité sur l'environnement de notre association.
    Le Conseil national des lignes aériennes du Canada a été créé en 2008 et représente toujours les quatre principales lignes aériennes du Canada, soit Air Canada, Air Transat, WestJet et Jazz Aviation.

[Traduction]

    Aujourd'hui, au Canada, l'aviation commerciale est devenue la seule façon pratique pour des millions de personnes de voyager pour retrouver leur famille, travailler, accéder à des nécessités essentielles ou simplement explorer notre vaste pays.

  (1555)  

     L'ère de l'élite du jet-set est révolue depuis longtemps. L'examen de la Loi sur les transports au Canada de 2016, aussi connu sous le nom de rapport Emerson, a souligné ce fait dans son chapitre détaillé sur l'aviation.
    Le rapport Emerson a également reconnu que la hausse des frais et des droits risquait de miner la compétitivité de notre industrie, en particulier face aux transporteurs américains qui mènent des activités dans les marchés contigus.
    Deux ans plus tard, non seulement il n'y a pas eu de progrès pour baisser les coûts imposés par le gouvernement, mais un certain nombre de récentes initiatives fédérales feront augmenter le coût des vols intérieurs et pousseront davantage de Canadiens à acheter leurs billets auprès des transporteurs américains.
    Voilà qui nous amène à la question dont nous sommes saisis aujourd'hui. Comment pouvons-nous faire en sorte que le rôle fondamental joué par le transport aérien commercial dans la vie des Canadiens soit en adéquation avec l'impératif mondial de réduire les émissions de carbone?
    Ce débat a été présenté par certains comme une sorte de choix qui n'en est pas vraiment un entre deux propositions apparemment vertueuses, mais contradictoires: mettre un prix sur la pollution ou empêcher l'instauration d'une taxe sur le carbone néfaste pour l'emploi. Nous rejetons cette interprétation.
    Le Conseil national des lignes aériennes du Canada appuie sans réserve la tarification du carbone — ou, comme certains préfèrent l'appeler, la tarification de la pollution —, y compris celle des émissions de carbone attribuables à l'aviation commerciale.
     Nos membres donnent l'exemple quant à la réduction des émissions de carbone, et ce, depuis des années. Non seulement c'est une pratique durable, mais c'est aussi une façon pour nous de restreindre nos coûts à l'avenir.
    Nous persistons à croire que les mécanismes axés sur le marché devraient être au coeur de toute stratégie de réduction des émissions de carbone et qu'une taxe sur le carbone est tout simplement la mauvaise politique à adopter pour le domaine de l'aviation, et ce, pour plusieurs raisons que Massimo vous expliquera tout à l'heure.
    Une politique axée sur le marché devrait stimuler l'innovation, éclairer les choix des consommateurs et réduire les émissions. La taxe sur le carbone que le gouvernement fédéral propose d'imposer aux émissions du secteur de l'aviation rendra les déplacements aériens plus coûteux pour les Canadiens et ne fera rien pour nous aider à réduire les émissions. Voyons pourquoi il en est ainsi.
    Le carburant représente généralement le coût variable le plus important pour les compagnies aériennes, soit souvent jusqu'à 30 % de leurs coûts d'exploitation. Je dis cela en toute connaissance de cause, car je suis chargé de l'achat du carburant pour notre compagnie. La volatilité des prix du carburant et les problèmes d'approvisionnement auxquels nous faisons face sont énormes, surtout au Canada où nous devons importer environ 40 % de notre carburant. Notre industrie est également aux prises avec certains des coûts les plus élevés imposés par le gouvernement à l'échelle internationale. La réduction de la consommation de carburant est devenue une question de survie.
    Entre 2008 et 2016, le secteur canadien de l'aviation a amélioré son efficacité énergétique de plus de 16 %. À vrai dire, cette amélioration est attribuable, en grande partie, aux investissements dans la nouvelle flotte d'avions que nous avons mise en service. À elles seules, les quatre compagnies aériennes membres du Conseil national des lignes aériennes du Canada — à savoir Air Canada, WestJet, Air Transat et Jazz — auront consacré 35 milliards de dollars à la modernisation de leur flotte entre 2012 et 2027.
    Un investissement massif a été effectué par le secteur de l'aviation, y compris les aéroports et les services de contrôle de la circulation aérienne, pour faire en sorte que nous consommions moins de carburant, notamment au moyen de technologies à bord des avions, par l'entremise de procédures de navigation, NAV Canada ayant l'un des meilleurs systèmes au monde, et grâce à la construction, par les administrations aéroportuaires, de nouvelles infrastructures qui sont certifiées LEED et éconergétiques. Ces améliorations sont mesurées et surveillées dans le cadre des rapports que nous produisons en collaboration avec Transports Canada depuis 2005. En fait, nous travaillons de plein gré avec le ministère pour réduire nos émissions et en faire rapport chaque année.
    Nous sommes un secteur d'envergure mondiale. Malheureusement, notre technologie a atteint sa pleine maturité. Par exemple, les derniers appareils que nous avons mis en service — soit le 737 MAX de Boeing et les 787 — consomment respectivement 15 et 20 % moins de carburant que les anciens modèles que nous avons remplacés, et il s'agit là du nec plus ultra. Cela signifie qu'une taxe sur le carbone ne nous incitera tout simplement pas à obtenir d'autres économies de carburant et ne fera rien de plus pour nous aider à réduire nos émissions.
    Nous avons dit à maintes reprises que la taxe sur le carbone, à titre de mesure axée sur le marché, ne convient pas à l'aviation commerciale en général et qu'elle est particulièrement mal adaptée au contexte canadien. Nous estimons qu'elle aurait pour conséquence d'exacerber les fuites de capitaux et d'émissions, de freiner la croissance dans l'économie du tourisme et, selon le plan de déploiement prévu actuellement, de créer d'importantes distorsions dans le marché.
    C'est pourquoi nous exhortons le gouvernement à adopter un système de compensation des émissions de carbone pour les vols intérieurs, système qui serait en harmonie avec le modèle international.
    Pour nous, il ne s'agit pas de considérations théoriques. Permettez-moi d'illustrer mon propos en vous donnant un exemple tiré d'une étude que nous avons rendue publique plus tôt aujourd'hui et qui présente de façon détaillée le coût d'une taxe sur le carbone liée au transport aérien pour les familles canadiennes, en plus de préciser certaines de ses répercussions sur l'économie canadienne.
    Tout d'abord, si une taxe sur le carbone devait s'appliquer au transport aérien, voici quelles en seraient les conséquences pour une famille de quatre personnes vivant à Ottawa et prenant l'avion pour aller visiter les grands-parents en Colombie-Britannique: le coût d'un vol sans escale d'Ottawa à Vancouver augmenterait de 150 $ en 2022, d'environ 300 $ d'ici 2026 et de près de 400 $ d'ici 2030. Supposons maintenant que cette famille ne soit pas en mesure de trouver un vol sans escale et qu'elle doive prendre un vol de correspondance à l'aéroport Pearson de Toronto; la taxe fédérale sur le carbone viendrait alors ajouter 200 $ au coût du vol en 2020, 350 $ en 2026 et près de 500 $ d'ici 2030.
    Pour situer les choses dans leur contexte, aux termes du régime fédéral, cette même famille ontarienne aurait droit à un remboursement de taxe de 718 $ en 2022, ce qui signifie que 28 % de l'allocation annuelle de la taxe sur le carbone de la famille servirait à compenser le coût d'un vol pour aller visiter les grands-parents en Colombie-Britannique.
    Notre étude révèle que, d'ici 2030, une taxe nationale sur le carbone ajouterait plus de 800 millions de dollars au coût du transport aérien au Canada. Il est facile d'entrevoir les effets préjudiciables pour le secteur du tourisme qui, selon une récente étude menée par Destination Canada, éprouve déjà des difficultés en raison du coût élevé du transport aérien.
    Nous voulons proposer une solution de rechange pour atteindre les objectifs en matière de croissance propre dans le domaine du transport aérien.
    Premièrement, il s'agit de reconnaître l'effet cumulatif de la panoplie de taxes et de frais, pour reprendre l'expression du ministre des Transports, M. Garneau, sur notre industrie et notre économie, ainsi que sur les familles et les collectivités canadiennes. De notre point de vue, une taxe reste une taxe. C'est un instrument économique, un outil qui doit être utilisé de manière judicieuse et efficace. L'ajout du mot « carbone » au mot « taxe » ne transforme pas le tout en quelque chose de différent ou de foncièrement bon.
    Un plan de tarification du carbone pour le secteur canadien de l'aviation doit être pragmatique et tenir compte des circonstances économiques qui lui sont propres et du rôle qu'il joue au Canada aujourd'hui, ainsi que du rôle qu'il y jouera à l'avenir.
    Deuxièmement, la politique nationale doit être en adéquation avec le consensus international sur la tarification du carbone, conformément à l'entente de 2016 sur le régime de compensation et de réduction du carbone pour l'aviation internationale, ou CORSIA.
    Enfin, il s'agit de reconnaître le potentiel novateur du biocarburéacteur disponible sur le marché pour ce qui est de contribuer à la décarbonisation du transport aérien. Si nous tenons à accomplir une véritable percée, en raison de la maturité de notre secteur, il faudra miser sur les carburants de remplacement à faible teneur en carbone qui sont offerts sur le marché.
    Malheureusement, la commercialisation du biocarburéacteur a progressé à un rythme qui ne correspond pas à son incidence possible sur l'empreinte carbone de notre secteur. Sachant que la demande de voyages aériens devrait doubler au cours des 20 prochaines années, et compte tenu de la nécessité impérieuse de réduire les émissions de carbone dans tous les secteurs à l'échelle planétaire, la réduction de l'empreinte carbone mondiale de notre industrie exigera un approvisionnement de biocarburéacteur viable sur le plan commercial. Pourtant, l'approche actuelle adoptée par le gouvernement semble viser davantage à obtenir des résultats sur papier plutôt qu'à relever les défis et à saisir les occasions qu'une mentalité axée sur les avantages du biocarburéacteur pourrait créer pour le Canada.
    Le Canada bénéficierait d'un avantage naturel important s'il jouait un rôle de chef de file dans le développement de biocarburants et de biocarburéacteur. Notre pays possède des matières premières durables, des technologies de production disponibles sur le marché et une industrie du transport aérien résolue et engagée. Hélas, l'élément qui semble faire défaut en ce moment, c'est la volonté politique.
    Pour certains, le filet de sécurité pour la taxe sur le carbone entrera en vigueur le 1er avril. En ce qui a trait au secteur du transport aérien, il est encore temps pour le Canada de choisir une meilleure façon de procéder. Il est encore temps d'opter pour une solution de rechange qui fixe le prix de la pollution, qui réduit véritablement les émissions de carbone, qui encourage la commercialisation de carburants à faible teneur en carbone et qui y parvient sans rendre le transport aérien inaccessible pour beaucoup de Canadiens.
    Je vous remercie.

  (1600)  

    Vous avez terminé juste à temps. Merci.
    Enfin, nous allons entendre M. Todd Myers, du Washington Policy Center.
     Bonjour et merci, monsieur le président.
    Je m'appelle Todd Myers, et je suis directeur de l'environnement au Washington Policy Center. Au cours des deux dernières décennies, j'ai travaillé dans le domaine de la politique environnementale au département des Ressources naturelles de l'État de Washington, où nous nous occupions de dossiers forestiers, et, par la suite, j'ai occupé la fonction d'analyste en énergie et environnement au Washington Policy Center.
    Le bilan enregistré par l'État de Washington au cours de la dernière décennie peut s'avérer instructif en ce qui concerne les dimensions politiques et économiques de la politique sur le carbone.
    Il est clair que les niveaux accrus de CO2 retiennent la chaleur dans l'atmosphère et, avec le temps, font augmenter les températures, même s'il existe un débat entourant l'ampleur des répercussions. Le défi pour les décideurs est de déterminer comment élaborer des politiques climatiques efficaces lorsqu'il existe une incertitude scientifique quant aux risques politiques et économiques de ces directives. J'ai siégé des deux côtés — à titre d'analyste et de fonctionnaire — pour essayer d'examiner ces politiques.
    Une mauvaise orientation peut susciter des réactions politiques négatives. Des politiques malavisées font gaspiller de l'argent en mettant l'accent sur des efforts qui sont inefficaces, ce qui nous fait perdre du temps et des occasions de lutter contre les changements climatiques.
    La politique climatique de l'État de Washington a fait face à toutes ces difficultés. Les législateurs et les électeurs ont rejeté à maintes reprises des propositions de taxe sur le carbone, même si les sondages montrent que les gens appuient la réduction des émissions de CO2.
    En 2016, les électeurs de l'État de Washington ont rejeté un projet de taxe sur le carbone sans incidence sur les recettes, à savoir l'initiative 732, qui aurait fixé le prix du CO2 à 25 $US la tonne métrique, tout en réduisant les taxes de vente et l'impôt des sociétés. La proposition a été rejetée par une grande majorité de l'électorat, soit 59 % des voix contre 41 %.
    L'année dernière, les électeurs ont rejeté l'initiative 1631, qui proposait une taxe sur le carbone de 15 $ la tonne métrique, et ce montant aurait augmenté chaque année. Les recettes auraient servi à appuyer une vaste gamme d'efforts destinés à réduire les émissions de CO2 et à financer des mesures de justice sociale. Malgré l'appui de notre gouverneur, ce projet n'a pas abouti, lui non plus, ayant été rejeté par 57 % des voix contre 43 %.
    Les législateurs à Washington ont été, eux aussi, réticents à adopter des taxes sur le carbone pour des raisons évidentes. Aucune politique de taxe sur le carbone n'a reçu de vote à l'assemblée législative de l'État de Washington au cours des huit dernières années, même si les démocrates avaient la majorité à la Chambre législative de l'État ou à la Chambre des représentants et au Sénat pendant toute cette période.
    D'après les données de sondage et les discussions avec les gens dans tout l'État de Washington, plusieurs raisons expliquent pourquoi les électeurs ont rejeté les taxes, même dans un État aussi conscient de l'environnement et aussi riche que Washington.
    Tout d'abord, il est prouvé que la « loi d'airain » de M. Roger Pielke Jr. s'applique aux changements climatiques. Les gens sont disposés à payer un certain prix pour l'environnement, mais il y a des limites. Durant la campagne pour la taxe sur le carbone de l'année dernière, nous avons créé une simple calculatrice en ligne qui permettait aux gens d'évaluer les coûts de la taxe pour la première année.
    Un des appels que j'ai reçus illustre bien les résultats des sondages effectués après la mise en échec de l'initiative. L'homme à l'autre bout du fil m'a demandé si j'avais créé la calculatrice et il voulait que je l'aide à l'utiliser. Lorsqu'il s'est rendu compte du coût, il a dit: « Ça alors, j'allais voter pour cette taxe. » Il était disposé à payer un montant, mais cela avait ses limites.
    C'est d'ailleurs ce qui ressort d'un récent sondage effectué par l'Energy Policy Institute de l'Université de Chicago. La recherche menée l'année dernière auprès de 1 202 Américains a révélé que bien des gens étaient disposés à payer 1 $ de plus par mois pour leur facture d'électricité afin de lutter contre les changements climatiques, mais dans le cas d'une hausse de 10 $ par mois, le taux d'appui est passé de 57 % à 18 %.
    Par ailleurs, les électeurs ne font pas confiance au gouvernement quand vient le temps de faire des dépenses judicieuses et ils craignent que les promesses ne soient pas tenues. J'étais généralement en faveur de la taxe sur le carbone sans incidence sur les recettes dans l'État de Washington et j'ai voté pour cette mesure, mais dans le cadre de mes entretiens, lorsque je signalais à d'autres personnes que bon nombre des ménages verraient leur fardeau fiscal diminuer grâce à l'initiative, la plupart des gens me répondaient simplement qu'ils ne croyaient pas que l'engagement serait respecté. Ils craignaient que d'autres taxes s'ajoutent par la suite et que tout le monde se retrouve, au bout du compte, avec un fardeau fiscal plus élevé.
    Même les bonnes politiques peuvent être sapées par la crainte que les gens se retrouvent, tout compte fait, avec une politique à laquelle ils s'opposent. Après deux décennies dans le domaine de la politique environnementale, je dois dire que je comprends cette préoccupation.
    Enfin, comme on l'a expliqué, ce n'est pas tout le monde qui peut s'adapter aux prix du carbone. Cela se manifeste de deux façons.
    Premièrement, comme on l'a mentionné, il y a les fuites. Je n'en parlerai pas davantage, mais je me contenterai de dire que nous observons ce phénomène aux États-Unis dans le cadre de l'initiative régionale de réduction des émissions de gaz à effet de serre, qui est dotée d'un système de plafonnement et d'échange; en effet, même si le nombre d'emplois dans le secteur manufacturier aux États-Unis a augmenté ces dernières années, ce n'est pas le cas dans le nord-est du pays, où le système de plafonnement et d'échange est en vigueur. Essentiellement, la fabrication est confiée à des entreprises à l'étranger, puis les produits finis sont importés au pays.
    Deuxièmement, cela s'applique aussi aux familles pour qui les solutions de rechange sont coûteuses ou inaccessibles. Lorsqu'on n'entrevoit aucune possibilité d'éviter les taxes, la tarification du carbone ne signifie pas que l'on protège l'environnement. Elle signifie tout simplement qu'il y aura plus de taxes.
    Ces difficultés, parmi tant d'autres, s'additionnent pour donner lieu à un refus systématique des taxes sur le carbone dans l'État de Washington, et c'est ce qui pourrait expliquer, en partie, la situation qui s'est produite l'année dernière en Ontario.
    Les décideurs doivent également surmonter la difficulté de créer des politiques qui soient viables sur le plan économique et efficaces sur le plan environnemental.
    Un des défis que pose la taxe sur le carbone, c'est celui de déterminer comment fixer le bon prix. Bill Nordhaus, un professeur de Yale qui a remporté le prix Nobel de 2018 pour son travail sur la modélisation climatique, a exposé les coûts et les avantages des différents objectifs de température. Il a conclu que l'objectif optimal est une augmentation d'environ 3,5°C d'ici 2100. D'après ses constatations, si on vise une cible de 2° d'ici 2100, comme le prévoit l'Accord de Paris sur le climat, les coûts l'emporteraient sur les avantages selon un rapport de 4:1.

  (1605)  

    Soyons clairs, M. Nordhaus croit, tout comme moi d'ailleurs, que nous devons réduire nos émissions de CO2. Cependant, son modèle nous rappelle deux choses importantes.
    Premièrement, nous devons faire attention de ne pas causer plus de tort que de bien. Les pays signataires de l'Accord de Paris sur le climat doivent déjà composer avec des coûts élevés pour atteindre des objectifs stricts, mais n'arrivent pas à cibler des réductions de CO2 précises qui soient conformes à leurs engagements en vertu de cet accord.
    Deuxièmement, pour nous assurer que nos actions climatiques ne nous coûtent pas plus cher qu'elles ne nous procurent d'avantages, la politique doit miser sur les améliorations technologiques susceptibles de nous aider à réduire nos émissions à moindre coût. Les ratios coûts-avantages calculés par M. Nordhaus peuvent être améliorés grâce à la technologie, pour accroître notre efficacité énergétique, réduire nos émissions de carbone et atteindre nos autres objectifs en matière de température à coût raisonnable.
    Comme vous l'avez entendu dans les témoignages de lundi dernier, les approches réglementaires cachent les coûts de la réduction des émissions de CO2, ce qui fait augmenter le risque de coûts excessifs. Le manque de transparence est tel, aussi, qu'il est difficile pour les particuliers de réagir adéquatement pour éviter les coûts associés à une réduction des émissions. Compte tenu de toutes les difficultés politiques et économiques associées aux taxes sur le carbone, les avancées technologiques demeurent la meilleure option pour réduire les émissions de CO2 de manière durable et efficace.
    La plupart des politiques climatiques font avant tout augmenter les prix pour dissuader les émetteurs d'émettre du CO2. On peut pourtant atteindre le même résultat en augmentant l'élasticité de la demande aux prix actuels de l'énergie. Les technologies personnelles faisant diminuer les coûts des transactions associées à l'information augmentent le pouvoir de chacun de réagir adéquatement aux signaux de prix sans qu'on augmente pour autant les taxes sur le carbone. Plutôt que de réfléchir exclusivement à l'ampleur de la taxe sur le carbone nécessaire pour susciter un changement de comportement, nous devrions réfléchir davantage à la façon d'aider tout un chacun à changer plus facilement ses comportements. Comme des témoins le soulignaient lundi, les deux tiers des émissions canadiennes viennent de petits émetteurs. Il est donc essentiel d'abaisser les coûts encourus par les particuliers pour réduire leurs émissions si l'on veut assurer le succès de la stratégie de réduction des émissions de CO2.
    Ces changements technologiques ne sont pas assujettis aux fluctuations politiques. Les gens n'abandonneront pas des technologies leur permettant d'économiser, peu importe le gouvernement au pouvoir. Il y en a plusieurs exemples.
    Il y a une application de cartographie conçue à Vancouver, Cowlines, qui présente aux utilisateurs trois options pour atteindre leur destination: la voie la plus rapide, le moyen de transport le moins cher (l'auto, le transport en commun ou le covoiturage) et le moyen le plus écologique. Beaucoup d'utilisateurs choisiront le plus écologique, et les économies s'élèvent en moyenne à un kilogramme de CO2 par déplacement.
    Il y a aussi les thermostats intelligents de l'entreprise torontoise ecobee et de Nest, en Californie, qui utilisent des données et l'intelligence artificielle pour aider les propriétaires à réduire leurs coûts énergétiques tout en maintenant un bon niveau de confort. Nest est interconnecté avec certains services publics, aux États-Unis, et offre ce qu'on appelle des « récompenses à l'heure de pointe ». Il s'agit d'un système volontaire afin de réduire la température dans les maisons aux heures où la demande en électricité est la plus forte et qui offre des rabais mensuels.
    Je ne les mentionne pas pour endosser ces produits, mais ce sont des exemples tangibles de technologies qui permettent de réduire les émissions de CO2 aux prix actuels. On voit rapidement apparaître de nouveaux outils du genre pour les citoyens, mais les politiques à cet égard n'en sont encore qu'au stade embryonnaire. Le iPhone n'existe que depuis une dizaine d'années, mais a déjà profondément changé notre société et notre style de vie. Devant ces changements rapides, il est difficile de bien cerner nos options stratégiques, mais il y en a trois en particulier qu'il conviendrait d'étudier.
    La première serait d'aplanir les obstacles réglementaires qui réduisent la valeur de la technologie de l'information. Les tarifs d'électricité sont souvent conçus pour protéger les consommateurs, mais on présume qu'ils n'ont pas accès à l'information sur les prix en temps réel et qu'ils ne peuvent donc pas y réagir. Or, les choses sont en train de changer. Nous devrions nous inspirer de l'exemple de Nest et permettre aux consommateurs d'utiliser les signaux de prix pour conserver l'énergie et économiser de l'argent.
    Deuxièmement, les données des administrations fédérales, provinciales et locales doivent être transparentes et accessibles, sans compromettre la confidentialité. Toute la force de Cowlines vient de la compilation de dizaines et de dizaines d'ensembles de données séparées, qui sont présentées aux utilisateurs dans un format compréhensible.
    Troisièmement, il y a des défis particuliers, et le gouvernement peut décerner des prix pour les solutions technologiques. L'an dernier, j'ai fait office de mentor à l'occasion du Fishackathon organisé par l'entreprise torontoise HackerNest et financé par le gouvernement du Canada. Les équipes s'y faisaient concurrence pour concevoir des solutions pour téléphone intelligent aux problèmes des pêches. Les prix offerts n'étaient pas énormes, mais la créativité des participants y était vraiment remarquable.
    Ce ne sont là que quelques pistes pour favoriser la mise au point de technologies susceptibles de faire baisser les coûts de la réduction du carbone. Les outils destinés à aider les gens à réduire leur consommation d'énergie sont moins assujettis aux volte-face politiques et contribuent davantage à défendre les intérêts des citoyens qu'à leur nuire. Ils permettent de tirer avantage des nouvelles possibilités qui se présentent chaque jour.

  (1610)  

    Le grand inventeur Buckminster Fuller a dit, un moment donné: « On ne change jamais les choses en combattant la réalité. Pour changer quelque chose, il faut construire un nouveau modèle qui rendra l'ancien obsolète. » C'est l'occasion que nous devons saisir.
    Je vous remercie tous de ces déclarations. Nous avons là beaucoup de matière à réflexion.
    Sur ce, nous passerons directement à la première série de questions.
    M. Peschisolido ouvrira le bal.
    Monsieur le président, je vous remercie.
    Merci infiniment de vos déclarations et de vos mots pleins de sagesse.
    Je m'adresserai d'abord à Peter. Vous avez parlé d'appui à un mécanisme pour réduire les émissions de carbone. Il y a six principes, mais vous ne croyez pas que la structure existante puisse fonctionner. Y a-t-il des plans qui sembleraient prometteurs, selon vous, pour réduire les émissions de carbone tout en préservant l'efficacité économique de votre secteur?

  (1615)  

    Concernant notre engagement avec Environnement et Changement climatique Canada, c'est surtout le caractère réaliste ou non de la cible et la rigueur des réductions imposées à notre secteur qui nous préoccupaient. Nous adhérons au principe d'une cible ambitieuse mais réaliste, qui serait difficile à atteindre pour l'industrie, mais qui permettrait d'atténuer beaucoup les iniquités qui caractérisent la mosaïque actuelle. Nous espérions pour cela une cible de 90 % de la moyenne du secteur. Nous avons fourni des analyses économiques détaillées pour étayer cette position.
    Vous vous souvenez peut-être que quand la politique a été annoncée, elle proposait d'imposer une obligation générale de 70 % des objectifs par secteur. C'est la proposition qui a été faite après les analyses des phases un et deux du gouvernement. Le seuil a ensuite été abaissé à 80 % pour tous, puis à 90 % pour certains secteurs particulièrement énergivores et exposés aux forces du marché. Nous croyions vraiment avoir présenté des arguments très convaincants pour expliquer les défis auxquels notre secteur est confronté et pourquoi il serait plus approprié de fixer un objectif de 90 %. Ce n'est pas ce qui a été décidé. Selon nous, c'est vraiment un objectif ambitieux, mais réaliste, qui permet d'accroître l'équité. Il règle également beaucoup de problèmes de déséquilibre entre le rendement environnemental et économique, d'une part, et le risque de fuite de carbone, d'autre part, qui existe dans le régime actuel.
    J'ai une autre question à vous poser.
    Tom a mentionné deux facteurs, celui du prix approprié, soit du niveau de prix, et celui du changement technologique. Y a-t-il des changements technologiques que les raffineries actuelles pourraient adopter pour accroître leur rendement économique et mieux atteindre leurs objectifs?
    Je dois d'abord vous dire que les dirigeants et exploitants de raffineries ne sont pas restés assis à ne rien faire ces dernières années et qu'ils se sont plutôt affairés à améliorer continuellement leurs activités à plus forte intensité énergétique. Il s'agit fondamentalement d'un domaine à forte intensité énergétique, et s'il y a des émissions liées aux procédés eux-mêmes, la plus grande partie des émissions dans ce secteur découle de la combustion elle-même. Il y a beaucoup d'activités parallèles menées au moment des changements et de l'entretien. Nous saisissons toutes les occasions de réduire notre intensité énergétique, soit les coûts et les émissions.
    Le bilan du secteur pour les 10 à 20 dernières années est assez positif. Nous avons réussi à réduire notre intensité énergétique, à accroître notre efficacité et à réduire nos coûts et nos émissions. Cependant, nous nous heurtons à des limites physiques.
    Nous avons cueilli les fruits mûrs. Il reste des possibilités à exploiter. Toutes les raffineries ne s'équivalent pas. Certaines s'en tirent mieux que d'autres, mais cela témoigne de... Certaines existent depuis plus longtemps que d'autres. Leurs configurations diffèrent. Elles ont été construites pour répondre aux besoins de divers marchés et produire des produits différents, donc il est très difficile de traiter toutes les raffineries de la même façon.
    C'est le défi sur le plan de la faisabilité. Il n'y a pratiquement aucune raffinerie dans le monde qui réussit à atteindre la cible actuelle. En date du 1er janvier de cette année, c'est l'objectif établi pour les raffineries canadiennes et c'est le prix qu'elles doivent payer. Le défi vient du fait que la technologie, quand elle existe, coûte tellement cher que la solution est souvent de payer. Cela ne permet pas vraiment de réduire les émissions.
    Je vous remercie, Peter.
    Joanna, vous avez mentionné que l'imposition d'un tarif sur le carbone ou la pollution fonctionne. Vous avez parlé de développement d'autres activités économiques et notamment, d'une entreprise du nom de Corvus. Pouvez-vous nous en parler un peu plus? Y a-t-il d'autres formes d'activités économiques analogues à celles de Corvus qui émergent au Canada?
    Oui, absolument. La tarification du carbone stimule l'innovation et contribue à aider notre secteur de la technologie propre. Je peux vous en donner un autre exemple de l'Ontario. En 2017, il y avait 5 000 entreprises dans le secteur de l'énergie propre, en Ontario; elles employaient 130 000 personnes et généraient environ 20 milliards de revenus chaque année. Ces entreprises bénéficiaient du système de plafonnement et d'échange, de même que des signaux de prix qu'il envoyait et du recyclage de certains revenus pour réduire encore davantage les réductions, des technologies émergentes et de tout le reste.
    La tarification du carbone et les politiques complémentaires sont importantes pour appuyer ces secteurs. Bien souvent, il y a des problèmes de fuite similaires dans les entreprises de technologies propres fondées au Canada, qu'on parle d'ecobee en Ontario, d'une société canadienne productrice d'énergie solaire dont le siège social est situé à Guelph ou encore de Corvus Energy. Beaucoup de ces entreprises finissent par déménager une grande partie de leurs activités et de leurs emplois ailleurs, dans des marchés où elles peuvent trouver plus d'acheteurs. Il y a des facteurs économiques et d'emploi à prendre en considération.

  (1620)  

    Je vous remercie, Joanna.
    Merci.
    Passons maintenant à M. Sopuck pour six minutes.
    Merci.
    Monsieur Boag, vous n'aurez pas à vous soucier de construire de nouvelles raffineries une fois le projet de loi C-69 adopté, vous pouvez tout de suite rayer cela de la stratégie d'affaires de votre entreprise.
    Je me hérisse quand j'entends qualifier le CO2 de polluant. Nous sommes en train d'en expirer en ce moment même. C'est la première molécule dans l'équation photosynthétique, et j'estime vraiment malhonnête de la qualifier de polluante. Le terme « technologie propre » sous-entend que le Canada a une économie de technologie sale, ce qui est absolument faux, selon moi. J'ai les chiffres sous les yeux: les émissions d'anhydride sulfureux ont diminué de 50 % depuis 15 ans, et les rejets de plomb, de cadmium et de mercure, de 80 %. Pour ce qui est de la qualité de l'air au Canada, en concentration de particules, toutes nos grandes villes dépassent de loin les normes de l'Organisation mondiale de la Santé. Les émissions de dioxyde d'azote sont restées stables, et ce n'est qu'un exemple. Pour avoir moi-même travaillé dans le secteur du papier et celui du pétrole et du gaz, sur les questions environnementales, je trouve assez insultant pour l'industrie qu'on laisse entendre que nos entreprises sont sales, parce que c'est faux.
    Madame Kyriazis, le Canada produit 1,6 % des émissions mondiales, n'est-ce pas? Très bien.
    Vous avez mentionné un certain nombre de choses qui se passent au Canada en ce moment et auxquelles nous devons nous attaquer. Vous parlez d'inondations, de sécheresse, de feux de forêt et de chaleur extrême. Je dois vous dire d'entrée de jeu que je me suis moi-même lancé en agriculture en 1979 et que par conséquent, j'observe depuis longtemps la situation météorologique dans les Prairies canadiennes. Les années 1980 ont été extrêmement sèches; les années 1990 ont été très humides et pendant les années 2000, il y a eu alternance des années humides et des années sèches, donc ne venez pas dire à un agriculteur des Prairies... Je ne veux pas être désobligeant, mais ceux d'entre nous qui vivent dans cet environnement connaissent très bien les perturbations météorologiques.
    Vous avez fait un lien entre la tarification du carbone et l'amélioration de ces effets. En quoi la tarification du carbone au Canada améliorera-t-elle ce que vous qualifiez de menace pour le Canada? Vous avez parlé de feux de forêt, de vagues de chaleur, etc. En quoi la tarification du carbone au Canada — et seulement au Canada — nous permettra-t-elle de régler ces problèmes?
    Les régimes de tarification du carbone ont fait leurs preuves pour réduire les émissions. Toute réduction des émissions ou toute tonne d'émissions en moins a un impact tangible, pour éviter tant les effets climatiques que les répercussions sur la santé attribuables à la pollution atmosphérique. Le plus récent rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, le rapport 1.5, nous montre tout ce qu'une augmentation moyenne de la température de 0,5°C peut causer.
    Excusez-moi, mais je n'ai pas beaucoup de temps. Je comprends ce que vous dites, mais je vous demande une réponse fondée sur la physique et la chimie atmosphérique.
    J'aimerais connaître les interactions moléculaires qui résulteront d'une taxe sur le carbone au Canada — et au Canada seulement, j'ajouterais — alors que le CO2 est présent partout dans le monde. Quelles sont les interactions physiques et chimiques dans l'atmosphère canadienne qu'une taxe sur le carbone suscitera pour régler les problèmes que vous soulevez?
    Si nous réduisons la concentration de dioxyde de carbone dans l'air, nous atténuerons le réchauffement et réduirons les écarts climatiques attribuables au changement climatique.

  (1625)  

    Vous ne répondez pas à ma question.
    J'ai autrefois été directeur environnemental dans une usine de papier. Nous avions de très mauvais effluents. Le règlement de 1989 sur les pâtes et papiers nous a obligés à construire une usine de traitement des eaux usées. Nous y avons consacré 25 millions de dollars. Nous avons ainsi réussi à décontaminer des effluents toxiques. Je vous demande une réponse très précise, fondée sur des données scientifiques, compte tenu du fait que les émissions du Canada représentent 1,6 % des émissions mondiales. Je veux savoir si nos réductions auront un quelconque effet sur les problèmes environnementaux comme les incendies, les inondations et la chaleur, que vous avez décrits. Je veux une réponse technique et non un renvoi à un quelconque programme de l'ONU.
    C'est le problème. Le problème, c'est qu'on demande aux Canadiens de dépenser cet argent, mais qu'obtiennent-ils en retour sur le plan environnemental? Je veux une réponse scientifique, s'il vous plaît.
    Je suis avocate de formation, mais je vous cite les experts scientifiques.
    Vous faites pourtant des affirmations. Vous devez pouvoir les appuyer.
    Je cite les experts scientifiques qui...
    Votre profession n'a aucune importance pour moi. Vous avez fait une affirmation. Appuyez-la.
    Monsieur Sopuck, vous avez posé une question. Je pense que nous devons écouter le témoin. Il n'est que justice de lui laisser la chance de vous répondre.
    Très bien.
    Pour vous fournir la meilleure réponse scientifique que je peux, je vous citerai les voix scientifiques qui font autorité sur le changement climatique et les causes du réchauffement mondial, soit les concentrations accrues de CO2 attribuables à l'humain et les concentrations d'autres gaz à effet de serre dans l'atmosphère. En nous attaquant à ces problèmes, nous contribuerons à réduire les effets climatiques que connaît le Canada.
    Oui, mais vous évitez ma question. Je vous demande si la réduction de nos émissions, au Canada seulement, nous permettra d'atténuer les effets dont vous parlez, soit les feux et les inondations.
    Toute réduction d'une tonne de CO2 fera une différence. Si nous voulons savoir si le bilan d'émissions global du Canada dans un contexte mondial compte, il faut mentionner que nous sommes le plus grand émetteur par habitant des pays du G20. Nous sommes l'une des 10 plus grandes économies au monde. La meilleure chose que nous puissions faire, si nous voulons convaincre les autres pays de mettre la main à la pâte, c'est de concevoir et de mettre en oeuvre un régime de tarification du carbone qui fera école dans le monde et qui produira les technologies propres dont nous avons besoin non seulement pour réduire nos propres émissions et stimuler la croissance de notre économie, mais aussi pour exporter nos technologies ailleurs et aider les autres pays du monde à atteindre eux aussi leurs objectifs de réduction des émissions.
    C'est très bien. Merci.

[Français]

     J'aimerais faire un rappel au Règlement, monsieur le président.
    Tout à l'heure, pendant le témoignage...

[Traduction]

    Je m'excuse, nous n'avons plus de temps, Joël. À moins que vous ne souhaitiez invoquer le Règlement, nous allons continuer...
    Non, c'est très important. Je souhaite faire un rappel au Règlement.
    D'accord.

[Français]

    Monsieur le président, tout à l'heure, j'ai vu le reflet d'un flash. Je veux m'assurer que personne dans cette salle ne prend de photos. Était-ce un effet miroir ou est-ce quelqu'un dans l'assistance, derrière les témoins, qui a pris une photo? Je veux simplement que vous vous assuriez qu'aucune photo n'est prise, s'il vous plaît.

[Traduction]

    Oui, je rappelle à tous les membres du public que pendant la séance, il n'est pas permis de prendre des photos. J'aurais dû le mentionner au départ. À la fin, une fois la séance levée, si quelqu'un souhaite prendre une photo, ce sera l'occasion de le faire. Nous nous arrêterons à... Nous verrons comment nous pouvons vous accommoder.
    Merci, monsieur Godin.
    Passons maintenant à M. Stetski.
    Merci d'être des nôtres aujourd'hui.
    Monsieur Myers, vous avez indiqué dans votre déclaration que les coûts excèdent les avantages. Je vis dans la circonscription de Kootenay—Columbia au sud-est de la Colombie-Britannique. Au cours des deux derniers étés, nous avons perdu de vue à compter de la fin juillet ou de la première semaine d'août les magnifiques montagnes Rocheuses, de même que les chaînes Purcell et Selkirk. Lorsque vous affirmez que les coûts dépassent les avantages, est-ce que vous prenez en compte les coûts des changements climatiques pour l'environnement, la santé et l'économie, les répercussions sur le tourisme et tous ces arbres que nous perdons et qui ne peuvent plus se rendre jusque dans nos scieries? Si vous considérez tous ces éléments, pouvez-vous encore légitimement soutenir que les coûts excèdent les avantages?
    C'est une excellente question.
    J'ai travaillé au ministère des Ressources naturelles de l'État de Washington où nous nous occupions des questions de foresterie. Je comprends très bien le problème dont vous parlez, car nous avons eu droit également dans l'État de Washington à une partie de cette fumée au cours des deux derniers étés.
    La modélisation dont je parlais a été faite par William Nordhaus. Il traite des coûts et des avantages pour l'économie. Toutes les fois que l'on procède à une modélisation portant sur une période de 100 ans, il faut évidemment prévoir certaines variations. Il ne prétend pas que les coûts sont nuls; il indique clairement que des mesures doivent être prises pour s'attaquer à ces mêmes problèmes que vous soulevez et aux répercussions qui s'ensuivent. Je ne veux laisser entendre, d'aucune manière, qu'il n'y a pas lieu d'agir, car les exemples que vous donnez sont tout à fait fondés.
    Il s'agit de déterminer à quel endroit il faut tracer la ligne. Jusqu'à quel point doit-on intervenir? À combien s'élèvent les coûts? En procédant à sa modélisation, avec les marges d'erreur nécessaires, M. Nordhaus a déterminé que si l'on s'efforce d'atteindre la cible de 2 % visée avec l'Accord de Paris sur le climat, les coûts pour l'économie vont excéder les avantages.
    Mon expérience de la foresterie me permet d'ajouter que les changements climatiques ne sont pas les seuls responsables, comme vous le savez sans doute, de la détérioration des forêts. Il serait sans doute préférable que l'on s'emploie à mieux gérer la santé de nos forêts, plutôt qu'à miser uniquement sur la réduction des émissions de gaz carbonique. Les problèmes ne viennent pas tous des changements climatiques. Il est bien évident que les étés plus chauds augmentent les risques de feux de forêt comme nous avons pu tous les deux le constater, mais ce n'est pas la seule approche à notre disposition.

  (1630)  

    Je serais aussi curieux de savoir comment la question a été posée aux citoyens. Si vous leur demandez: « Voulez-vous payer davantage de taxes? », ils vont toujours vous répondre par la négative. Tout dépend donc de la manière dont vous présentez la chose et les bienfaits pouvant découler de la tarification.
    J'aimerais bien savoir comment la question a été posée, car il peut paraître un peu simpliste de demander aux gens s'ils veulent payer plus ou non.
    En fait, les gens ne répondent pas toujours par la négative. Comme je l'indiquais, un sondage mené dans l'État de Washington et dans l'ensemble des États-Unis a révélé que les citoyens sont disposés à faire leur part financièrement pour réduire les émissions de Co2. Il s'agit de déterminer combien ils sont prêts à payer.
    Nous avons mis de l'avant deux initiatives pouvant produire selon moi de bons résultats. Il y a d'abord une taxe sur le carbone sans incidence sur les revenus dont les majorations sont compensées largement par des réductions des taxes de vente, la principale source de recettes fiscales pour l'État de Washington. Cette proposition a tout de même été rejetée car, comme je l'indiquais, les gens craignent de futures augmentations de ces taxes. Même suivant une formule où les coûts sont nuls au départ, chacun garde cette préoccupation à l'esprit.
    Je ne suis pas en train de dire que la tarification du carbone ne sert à rien. Je me demande simplement, et c'est ce qui me frustre un peu, de quelle manière on doit s'y prendre dans un tel contexte. C'est la raison pour laquelle je propose le recours à des solutions technologiques accroissant l'élasticité de la demande de façon à réduire les répercussions sur les gens en leur donnant l'occasion d'économiser l'énergie, d'épargner et de réduire leurs émissions de carbone sans qu'il y ait tarification à proprement parler. C'est l'approche que je préconise.
    Je vais maintenant m'adresser aux représentants du Conseil national des lignes aériennes.
    Presque tous les groupes qui ont témoigné devant nous au cours des derniers mois nous ont indiqué que leur industrie pouvait en faire davantage. Je suis donc plutôt déçu, car je crois vous avoir entendu dire que vous êtes rendus au maximum, qu'il vous est impossible d'en faire plus. Est-ce vraiment le point de vue du secteur des lignes aériennes?
    Les données relatives aux réductions des émissions et à notre consommation de carburant, un élément fondamental pour notre secteur, révèlent que nos investissements à ce chapitre produisent de moins en moins de résultats. La grande place qu'occupe le carburant parmi les coûts variables de nos activités nous distingue des autres secteurs. Notre survie dépend de notre capacité à réduire notre consommation de carburant, surtout dans une conjoncture publique aussi peu propice que celle que nous connaissons au Canada.
    Je vais demander à mon collègue de vous parler de l'ampleur des mesures prises par les compagnies aériennes du Canada pour réduire leur consommation de carburant et gérer jusqu'au dernier litre celui qui est utilisé pour chaque vol. C'est la réalité avec laquelle nous devons composer. Si l'on ajoute un coût à la marge...
    J'ai également entendu de nombreux témoins nous indiquer que la tarification de la pollution encourage l'innovation et incite les entreprises à mieux faire. Ne croyez-vous pas que c'est le cas également pour l'industrie du transport aérien?
    Nous devons d'ores et déjà composer avec la tarification du carbone. Celle-ci représente 30 % de nos frais d'exploitation. C'est notre réalité actuelle. Nous disons simplement... Il n'y a pas que cette tarification. Nous devons aussi gérer les coûts découlant de la nouvelle réglementation sur les droits des passagers. Différents autres éléments, comme la taxe provinciale sur le carburant d'aviation et les changements au financement de l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien, influent sur notre rentabilité et notre capacité concurrentielle. Nous devons chercher à réaliser toutes les économies possibles.
    Le coût variable le plus important pour nous est celui du carburant, et c'est la toute première priorité pour des gens comme Geoff. C'est ce qui fait que notre situation est tout à fait unique.
    Nous ne voulons pas de passe-droit...

  (1635)  

    Merci. Peut-être aurons-nous l'occasion d'y revenir tout à l'heure.
    Nous passons maintenant à Mme Dzerowicz et M. Fisher qui vont partager le temps à leur disposition.
    À vous la parole.
    Avons-nous six minutes?
    Oui.
    Un grand merci pour vos exposés très intéressants.
    Je veux poursuivre un peu dans le sens des questions de M. Stetski. Il y a beaucoup de choses qui se disent devant notre comité, et nous souhaitons en vérifier quelques-unes.
    Ma première question s'adresse à vous, monsieur Boag.
    Plusieurs nous ont indiqué que la tarification du carbone n'est pas le seul moyen à notre disposition pour réduire nos émissions. Dans le contexte de notre plan pancanadien, différentes initiatives devraient nous aider à atteindre nos cibles découlant de l'accord de Paris.
    On nous a également beaucoup répété qu'il fallait agir rapidement. C'est assez conforme à ce que nous disait Mme Kyriazis. Nous devons faire vite et prendre des mesures sans tarder.
    Je comprends qu'il peut être très difficile pour votre industrie d'atteindre l'objectif de 80 % fixé par la loi fédérale. Je présume que tous les pays disposant de ressources à raffiner sont confrontés à des difficultés semblables.
    Ces coûts ne vont pas diminuer avec le temps. En considérant que les changements climatiques risquent fort de s'accélérer, pourquoi ne voudrions-nous pas nous attaquer au problème sans attendre en consentant les investissements nécessaires pour rectifier le tir?
    Je dois préciser d'entrée de jeu que certaines raffineries dont nous devons soutenir la concurrence sur différents marchés ne se voient pas imposer une tarification du carbone par leur gouvernement — et c'est le cas notamment aux États-Unis. Les raffineries canadiennes, tributaires du commerce, sont ainsi fortement défavorisées du point de vue concurrentiel par ces coûts additionnels qu'elles doivent assumer en vertu du régime de tarification du carbone. Il ne leur est pas possible de faire payer ces frais à leurs clients, comme elles le feraient pour n'importe quel autre coût. Les raffineries concurrentes qui n'ont pas de tels coûts à absorber peuvent offrir des prix moins élevés.
    En cherchant à aller trop loin trop rapidement, nous allons simplement sonner le glas de l'industrie du raffinage au Canada. Ainsi, les mêmes émissions seront produites ailleurs dans le monde et nous allons nous retrouver tout au bout d'une longue chaîne d'approvisionnement. Nous serons par le fait même obligés d'importer notre carburant, ce qui pourrait mettre en péril la sécurité de notre approvisionnement.
    M. Fisher pourrait sans doute vous en parler d'expérience. Une raffinerie non concurrentielle de sa circonscription a dû fermer ses portes, si bien que sa province de la Nouvelle-Écosse a vécu certains problèmes d'approvisionnement au cours des dernières années.
    J'ai cru comprendre que des mesures législatives semblables allaient être adoptées dans la plus grande partie des États-Unis. On nous a parlé d'une loi fondée sur un système de prélèvements et dividendes. Bien que cela ne soit pas encore le cas, on s'attend à ce que la plupart des États adoptent des mesures en ce sens. Partout dans le monde, on semble comprendre que les changements climatiques sont une réalité et que nous devons tous agir très rapidement.
    Comme j'en suis à trois minutes, je vais passer le relais à M. Fisher.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, Julie, de me laisser une partie de votre temps.
    Je remercie aussi nos témoins de leur présence aujourd'hui. C'est un sujet fascinant.
    Comme j'ai très peu de temps à ma disposition, je vais m'adresser seulement à Joanna. J'espère que vous n'avez pas d'objection à ce que je vous appelle Joanna. Je vous ai vu sourciller chaque fois que quelqu'un prononce votre nom de famille.
    Oui, j'en suis désolée.
    Vous avez parlé du coût de l'inaction. En raison de ce coût et peut-être de l'excellente opportunité qui s'offre à nous, notamment dans le contexte des plans gouvernementaux, nous observons une forte croissance du recours à l'énergie verte et aux technologies propres dans le Canada atlantique.
    Vous avez parlé de votre liste de 100 entreprises. Si vous aviez eu plus de temps, vous auriez sans doute mentionné CarbonCure, une société de Dartmouth—Cole Harbour qui accomplit des choses formidables via la séquestration des gaz à effet de serre durant la production du béton. C'est le genre d'innovation que nous pouvons observer dans notre circonscription.
    Dans le peu de temps à notre disposition, j'aimerais que vous puissiez nous expliquer un peu mieux les liens entre la tarification de la pollution et l'innovation que l'on doit stimuler. Je voudrais savoir également dans quelle mesure vous estimez que l'innovation découle de cette excellente occasion d'aller de l'avant. Est-ce que cette innovation vient surtout de la volonté d'améliorer nos comportements ou émane-t-elle plutôt de la quête de profits additionnels? Bien évidemment, il n'y a rien de mal à vouloir réaliser des profits.
    Les choix du secteur privé sont souvent motivés par les possibilités de bénéfices. Les signaux de prix ont par ailleurs un effet déterminant sur les comportements des consommateurs. En écoutant certains autres témoins, je me dis que nous pourrions peut-être inciter les consommateurs à modifier leurs comportements en les sensibilisant davantage quant aux options les plus écologiques qui s'offrent à eux. Malheureusement, cela ne sera pas aussi efficace qu'un signal de prix pour influer sur les comportements.
    Il faut aussi déterminer dans quelle mesure la tarification du carbone peut stimuler l'innovation. Une telle tarification envoie un message clair sur le marché en rendant plus dispendieux les matériaux et les activités à l'origine de plus fortes émissions. Il en ressort que les particuliers et les entreprises se mettent à la recherche d'options à plus faible empreinte carbone, qu'il s'agisse de technologies ou de matériaux. La demande pour ces nouvelles solutions technologiques et matérielles augmente alors en conséquence. Il s'ensuit que le marché réagit en voulant profiter de ces nouveaux débouchés. C'est exactement ce que fait CarbonCure en utilisant le gaz carbonique pour produire davantage de béton, ce qui réduit l'empreinte écologique des projets de construction.
    Les thermostats intelligents de l'entreprise ecobee sont un autre exemple. Au gré de l'accroissement de la demande sur le marché et de l'introduction de nouvelles technologies capables de soutenir la concurrence, la gamme des options disponibles va s'étendre davantage. Ces options vont en outre devenir plus accessibles et moins coûteuses.

  (1640)  

    Monsieur Godin.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de se prêter à l'exercice.
    Je crois que nous avons un objectif, mais qu'il faut être réaliste. Il y a un changement du côté du réchauffement climatique, et c'est mondial. Ce n'est pas la responsabilité du Canada. Naturellement, la Terre se réchauffe. Il peut y avoir une accélération due à l'industrialisation, mais nous sommes tous d'accord pour dire que nous devons agir en prenant des mesures pour protéger notre environnement. Nous nous entendons là-dessus.
    Madame Kyriazis, vous avez affirmé lors de votre présentation que la taxe sur le carbone fonctionnait bien. C'est le cas en Colombie-Britannique, où il y a des résultats. Vous avez aussi parlé d'urgence.
    Sur le site de l'Office national de l'énergie, je vois que depuis 2008, les émissions de gaz à effet de serre ne sont pas à la baisse. Comment pouvez-vous affirmer que la taxe sur le carbone est la solution clé pour atteindre notre objectif commun, qui consiste précisément à réduire les émissions de gaz à effet de serre?

[Traduction]

    Si l'on prend l'exemple de la Colombie-Britannique, la tarification du carbone est en place depuis 2007. Une étude menée en 2015 démontre que les émissions ont été réduites dans une proportion pouvant aller de 5 % à 15 %. Il est vrai que ces émissions ont augmenté au cours des dernières années. C'est toutefois le fait de la forte croissance économique et démographique qu'a connue cette province pendant cette période. Quoi qu'il en soit, tout indique qu'une tarification du carbone contribue considérablement à faire en sorte que les émissions soient inférieures à ce qu'elles auraient été autrement.

[Français]

     Vous me dites que la taxe sur le carbone est la solution pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. La raison que vous me donnez pour expliquer l'augmentation des émissions en Colombie-Britannique est qu'il y a eu de la prospérité économique. Les deux sont directement reliés. Alors, doit-on arrêter le développement économique? Doit-on simplement réduire les émissions de gaz à effet de serre et ainsi diminuer la qualité de vie des Canadiens et des Canadiennes? Est-ce cela qui arrivera?
    La taxe sur le carbone est le moyen que le gouvernement en place a trouvé pour réduire les émissions, mais je ne suis pas certain que c'est la meilleure solution. Le Canada a une réalité particulière du fait qu'il est le deuxième plus grand pays au monde. Cette réalité a-t-elle été prise en compte dans l'application d'une taxe sur le carbone? Dans les pays européens de plus grande densité de population que le Canada, l'effet est différent. Comment pouvez-vous me convaincre que la taxe sur le carbone est la mesure qui permet de réduire rapidement les émissions?
     Vous avez mentionné plus tôt qu'il faut agir dès maintenant. Or la taxe sur le carbone que le gouvernement propose n'aura aucun effet immédiat. Ce sera 20 $, 30 $, 40 $, 50 $. Selon les spécialistes, si on veut un résultat rapide, il faudrait monter cela à 300 $. Mesure-t-on aussi l'impact de cette taxe sur le quotidien des gens?
    Quelqu'un a mentionné tantôt que les deux tiers des émissions de gaz à effet de serre sont attribuables aux citoyens. On court après sa queue, on n'a pas de résultats immédiats. Vous avez insisté sur l'urgence d'agir. Plusieurs personnes du domaine de l'environnement me disent qu'il faut calmer la situation, parce qu'être alarmiste ne sert pas l'environnement. Oui, il faut agir, mais il faut prendre le temps de trouver les bonnes solutions.
    Vous ne m'avez pas convaincu des bienfaits d'une taxe sur le carbone. Voulez-vous ajouter autre chose là-dessus?

  (1645)  

[Traduction]

    Précisons d'abord que les données en provenance non seulement de la Colombie-Britannique, mais aussi d'autres régions du monde — le Royaume-Uni, la Californie, le Québec — indiquent que la tarification du carbone produit de bons résultats en permettant de réduire les émissions tout en appuyant une croissance économique forte. Il n'est donc pas nécessaire de sacrifier croissance économique et qualité de vie.
    Quant aux impacts possibles d'une tarification du carbone sur les comportements individuels, je reviens à l'exemple de la Colombie-Britannique. Une étude a révélé que la tarification du carbone dans cette province a fait diminuer la consommation résidentielle de gaz naturel dans une proportion de 7 % à 10 %. La consommation d'essence a aussi baissé. La demande d'essence par habitant aurait été de 7 % à 17 % supérieure sans la tarification. Celle-ci a aussi fait augmenter le recours à des solutions offrant une plus grande efficacité énergétique. Il y a donc effectivement eu des changements dans les comportements, et ce, sans que l'on ait à sacrifier la qualité de vie ou la croissance économique.

[Français]

    Excusez-moi, je vous arrête ici parce que le temps file, malheureusement.
    Vous avez dit aussi qu'il faut envoyer un signal clair aux entreprises et aux citoyens. Ne pensez-vous pas que des subventions, des campagnes de sensibilisation, de l'innovation et de la réglementation permettraient d'obtenir des résultats plus rapidement?

[Traduction]

    La tarification du carbone n'est pas la seule solution, mais les économistes ne cessent de nous répéter que c'est celle qui permet de réduire les émissions au coût le plus bas possible pour notre économie.
    Monsieur Amos.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous nos témoins. Votre participation est très appréciée.
    Ma première question s'adresse à M. Boag de l'Association canadienne des carburants.
    Il ressort de votre exposé que votre association est d'avis qu'il y a certains coûts associés à un régime de tarification fondé sur le rendement. Est-ce bien le cas?
    Oui.
    Peut-on dire qu'il y aura des coûts supplémentaires et probablement une forme quelconque d'évolution des comportements au sein de l'industrie du raffinage?
    Nous craignons que le niveau actuellement retenu pour répondre aux attentes n'ait que très peu d'effet sur l'évolution des comportements. Étant donné que l'écart à combler pour bon nombre de raffineries canadiennes sera tout simplement trop important, elles n'auront d'autre choix que de se conformer en payant la taxe applicable au titre de leurs émissions excédentaires.
    Je comprends
    Le seuil établi aura pour effet de restreindre considérablement les possibilités d'investir pour modifier les comportements ou acquérir de nouvelles technologies permettant de réduire les émissions. Le paiement de la taxe sur le carbone deviendra la seule option pour ces entreprises.
    Je comprends ce que vous essayez de nous dire. Je crois toutefois qu'il faut faire attention aux termes que nous utilisons. Comme il ne s'agit pas d'une approche réglementaire, je ne pense pas que l'on puisse parler d'une obligation de se conformer. Ils seraient certes au-delà...
    C'est pourtant bel et bien une obligation. C'est en fin de compte un règlement pris en application de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, laquelle fait intervenir les sanctions prévues au Code criminel. Il faut vraiment se conformer à cette réglementation, sans quoi il y a risque d'incarcération.
    C'est une norme de rendement. Je pense qu'il y a une distinction à faire entre une norme de rendement et une obligation de se conformer.
    C'est une exigence.
    Si je soulève la question, c'est que l'on entend depuis plusieurs mois déjà des commentaires en provenance de députés de l'opposition qui soutiennent que ce régime de tarification fondé sur le rendement est en quelque sorte un gigantesque passe-droit accordé aux gros émetteurs. D'après ce que vous nous indiquez, je crois comprendre que ce n'est pas du tout le cas. Il n'y a aucun cadeau pour ces entreprises. Elles doivent plutôt assumer des coûts bien concrets.

  (1650)  

    En fait, nous sommes favorables au concept d'un régime de tarification fondé sur le rendement. Un tel régime établissant un seuil à atteindre par tout le monde, plutôt qu'une quantité que tout le monde doit viser, représente à nos yeux une solution tout à fait appropriée du point de vue stratégique. La situation devient problématique compte tenu du seuil effectivement fixé et de la mesure dans laquelle il est bel et bien atteignable, car les objectifs stratégiques ainsi visés peuvent avoir des effets négatifs.
    Merci. Je comprends votre point de vue.
    Madame Kyriazis, merci pour votre exposé. Pouvez-vous nous indiquer quelle est la position de Clean Energy Canada quant à la proposition de l'Association canadienne des carburants qui préconise que le seuil ou la norme à atteindre pour la tarification fondée sur le rendement passe de 80 % à 90 %, ce qui aurait pour effet de réduire la proportion de diminution à partir de laquelle la tarification s'appliquerait?
    Clean Energy Canada n'a pas pris position sur la question de savoir à quel seuil une industrie donnée devrait être assujettie dans le cadre d'un système de tarification fondée sur le rendement. Nous croyons qu'un tel système représente un bon instrument de politique pour aider à régler les problèmes de compétitivité et à offrir une protection contre les fuites de carbone lorsque ces dernières représentent un risque.
    Merci.
    J'aimerais revenir à M. Boag.
    D'après ce que je comprends, au départ, le gouvernement fédéral était d'avis qu'il fallait établir une norme de rendement de 70 %. Votre organisme a exercé des pressions en vue d'obtenir un pourcentage plus élevé.
    En fait, j'aimerais apporter quelques éclaircissements. Je crois que le gouvernement est parvenu, en menant sa propre analyse, à la conclusion qu'une norme de 80 % représentait un seuil plus approprié. Ensuite, le gouvernement nous a demandé... ou nous a donné à nous, et à toutes les industries, l'occasion de présenter des analyses supplémentaires liées à nos propres secteurs sur la pertinence du nouveau seuil de 80 %.
    D'après ce que je comprends, on a mené des consultations. Des avis ont été donnés. Des preuves ont été présentées.
    Oui.
    Quelles preuves avez-vous présentées? Si vous les avez, pourriez-vous fournir au Comité les preuves empiriques avec lesquelles l'ACC justifie une norme de 90 % ?
    Je n'ai pas ces données en main. J'aimerais donner la parole à M. Montreuil, qui fait partie de notre personnel et qui a dirigé cette initiative. Il s'agit d'un document volumineux duquel nous avons extrait ces deux graphiques.
    Le graphique que vous voyez à la page 4, en ce qui a trait à la comparaison des coûts entre le filet de sécurité actuel... Vous aimez parler de 80 %; je parle de moins 20 %. Vous aimez parler de 90 %; je parle de moins 10 %. Le coût entraîné par ce filet de sécurité, comparativement à d'autres pays, en particulier les États-Unis, où le coût est nul, est l'enjeu principal. Cette réduction...
    Monsieur Montreuil, je ne veux pas vous interrompre, mais je souhaite simplement vous demander si vous pouvez envoyer ces preuves empiriques au Comité. Merci.
    Absolument.
    J'aimerais poser une dernière question à M. Myers.
    Monsieur Myers, jusqu'à récemment, je ne connaissais pas le Washington Policy Center. J'aimerais me faire une meilleure idée de votre situation. J'aimerais que vous me répondiez par oui ou par non.
    D'après ce que je comprends, le WPC obtient une partie de son financement de la Fondation Charles Koch.
    C'est inexact.
    Je vous remercie de ces éclaircissements.
    Nous entendrons maintenant M. Fast.
    Merci beaucoup.
    J'ai écouté les exposés très attentivement et j'aimerais d'abord aborder la question de la Colombie-Britannique.
    Joanna, vous venez de la Colombie-Britannique, n'est-ce pas?
    Mme Joanna Kyriazis: [Inaudible]
    L'hon. Ed Fast: Vous ne venez pas de cette province.
    D'accord, mais je viens de cette province. J'ai fait l'expérience de la taxe sur le carbone de la Colombie-Britannique et, comme vous le savez, on avait promis que cette taxe n'aurait pas d'incidence sur les revenus et qu'elle servirait à réduire les émissions de gaz à effet de serre. J'aimerais vous lire une citation qui date de moins d'un an. Elle vient du Sierra Club:
« Les données les plus récentes sur les émissions de la Colombie-Britannique représentent des années d'incapacité à réduire ces émissions de plus d'un montant symbolique »... « Dix ans après que le gouvernement précédent a inscrit dans la loi l'objectif de réduction des émissions de 33 % ... nous sommes essentiellement au même point où nous avions commencé. »
Les émissions de la Colombie-Britannique sont maintenant 10 % plus élevées qu'en 1990, contrairement à l'Union européenne, qui a réduit ses émissions de 23 % pendant la même période.
    L'extrait se poursuit en indiquant que la taxe sur le carbone n'a pas atteint son objectif. Je suis sûr que le Sierra Club aurait souhaité obtenir une taxe sur le carbone encore plus élevée, mais comme vous le savez, le gouvernement de Gordon Campbell avait promis que la taxe n'aurait aucune incidence sur les revenus — il en avait fait le serment. Un nouveau gouvernement est arrivé et a fait ce que craignaient les contribuables — ou les électeurs de l'État de Washington —, c'est-à-dire qu'il a modifié cette taxe. Elle n'était plus neutre sur le plan des revenus, car le NPD avait éliminé cet aspect de la taxe. Et les émissions continuent d'augmenter.
    Vous laissez entendre que les émissions continuent d'augmenter à cause de l'activité économique. C'est peut-être le cas, mais seriez-vous d'accord avec moi pour dire que les objectifs en matière d'émissions établis dans l'Accord de Paris, que le Canada a signé, sont des objectifs absolus qui ne sont pas assujettis aux rajustements liés à l'activité économique?

  (1655)  

    Oui, les objectifs de l'Accord de Paris sont des objectifs absolus et ils visent à réduire nos émissions absolues. La tarification du carbone est une solution efficace. Ce n'est pas la seule solution dont nous avons besoin, et il s'ensuit qu'un ensemble de politiques similaire à celui adopté par le gouvernement fédéral dans le cadre pancanadien et d'autres politiques sont nécessaires pour atteindre notre objectif lié au climat tel qu'établi dans l'Accord de Paris.
    Je vous remercie de préciser qu'un ensemble de politiques est nécessaire. Je suis tout à fait d'accord avec vous.
    Notre problème avec le gouvernement actuel, c'est qu'il a dit qu'il fallait absolument adopter la politique de la tarification du carbone, que toutes les autres politiques étaient optionnelles et que chaque province pouvait élaborer ses propres politiques, tant et aussi longtemps qu'elles imposaient une taxe sur le carbone.
    Lorsque j'examine l'expérience de la Colombie-Britannique, je constate que c'est le contraire de ce que vous avez suggéré et que cela correspond aux craintes de M. Myers, c'est-à-dire qu'on impose une taxe et que les contribuables craignent que cette taxe soit de plus en plus élevée et, évidemment, que les règles changent et que cette taxe ne soit plus neutre sur le plan des revenus.
    J'aimerais maintenant poser une question à M. Bergamini et à M. Tauvette.
    Vous avez laissé entendre que des améliorations avaient été apportées au parc de véhicules pour réduire la consommation de carburant et que vous obtenez maintenant des rendements décroissants. Qu'est-ce qui a motivé ces améliorations? Était-ce une taxe sur le carbone ou était-ce autre chose?
    C'est simplement une question de survie.
    Une question de survie.
    Je veux dire que c'est...
    Vous n'aviez pas besoin d'une taxe sur le carbone pour vous inciter à faire cela.
    Non.
    D'accord.
    Je crois que je vous ai entendu mentionner deux solutions et l'une d'entre elles était le modèle de compensation du carbone. Veuillez me décrire ce modèle.
    Cela ressemblerait à... En fait, nous avons proposé que notre industrie soit autorisée à adhérer au modèle fondé sur le rendement qui a été offert aux émetteurs stationnaires ou à un autre modèle qui nous permettrait de fonctionner de façon à respecter le modèle international et qui nous permettrait de réaliser de réelles réductions de carbone par l'entremise de compensations.
    Nous voulons faire notre part. Nous croyons que la tarification du carbone est essentielle aujourd'hui pour des raisons liées à la société et à la bonne conscience sociale. Nous sommes prêts à faire ce qu'il faut, mais nous ne sommes pas prêts à nous laisser entraîner dans un processus qui nuira à notre industrie et à notre compétitivité, et qui mènera à...
    Je comprends.
    Pourriez-vous fournir à notre comité une sorte d'ébauche — vous n'avez pas à le faire maintenant —...
    Oui.
    ... pour ajouter à votre comparution d'aujourd'hui, afin de nous donner une idée de ces compensations, du moins celles qui pourraient fonctionner dans votre industrie? Il ne s'agit pas seulement de votre industrie. Nous avons également entendu les représentants de l'industrie du raffinage. Nous savons que l'industrie du ciment est profondément engagée dans ce dossier. Ces industries ont reçu un traitement un peu différent de celui que vous avez reçu.
    Quatre-vingt-quinze pour cent.
    D'autres industries tentent de trouver des façons de s'attaquer à leurs émissions tout en évitant d'adopter un modèle de tarification du carbone qui nuit à leur compétitivité.
    Voici ma dernière question. Vous avez aussi mentionné un avenir axé sur des carburants à faible teneur en carbone dont la mise au point exigera des percées technologiques. Pourriez-vous nous en dire plus?

  (1700)  

    Nous avons besoin d'un carburant qui est plus efficace, et il doit donc ressembler au carburéacteur, mais nous ciblons manifestement un carburant à faible teneur en carbone. C'est une grosse partie du travail après nos compensations. Nous avons besoin de biocarburéacteur pour nous aider à réduire nos émissions. Cela coûte trois fois plus cher, et nous avons donc besoin d'aide pour mettre au point la technologie nécessaire et nous avons besoin des politiques appropriées.
    Merci.
    Monsieur Bossio.
    Nous avons une excellente discussion avec nos témoins. Je vous remercie d'être ici aujourd'hui et d'offrir votre expertise dans le cadre de cette discussion.
    J'aimerais d'abord revenir sur les commentaires que M. Fast vient de formuler sur la Colombie-Britannique.
    Vous êtes au courant de l'expérience de l'Australie liée à l'établissement d'un prix sur la pollution et à la tarification du carbone. En effet, l'Australie a établi un prix de 23 $ sur la pollution en 2012-2013, de 24,15 $ en 2013-2014, et a ensuite éliminé ce prix en 2014.
    J'ai un graphique à vous montrer. Je ne sais pas si tout le monde peut le voir. Vous pouvez voir cette barre, ici. Elle indique le moment où le prix de la pollution a été mis en oeuvre. Vous pouvez observer l'effet que même un prix relativement peu élevé sur la pollution sur une courte période de temps a eu sur les réductions des émissions en Australie. Ensuite, après l'élimination de ce prix, les émissions cessent de suivre la trajectoire qu'elles suivaient avant l'établissement du prix, car elles la dépassent.
    J'aimerais donc souligner cela et demander l'aide de Mme Kyriazis.
    Est-ce un indicateur clair et précis de ce que vous disiez plus tôt sur l'efficacité de la mesure consistant à établir un prix sur la pollution? C'est un excellent exemple de ce qui peut se produire lorsqu'on établit un tel prix et des énormes changements que peut entraîner l'élimination de ce prix.
    Je connais ce graphique et il est très efficace.
    Pour revenir à l'exemple de la Colombie-Britannique, le prix du carbone était gelé de 2012 à 2016. Cela a également eu un effet sur l'augmentation des émissions.
    Un prix du carbone bien établi qui augmente de façon prévisible au fil du temps sera l'instrument le plus efficace pour réduire les émissions, ainsi que l'existence de la certitude en matière de politiques et de prix que cherchent à obtenir les entreprises et les consommateurs.
    À titre de suivi, nous avons tenté de prendre des mesures réglementaires. Nous avons aussi tenté de mettre en oeuvre des mesures volontaires. Nous avons essayé le protocole de Kyoto. Nous parlons de cet enjeu depuis maintenant une génération. Aucune de ces mesures n'a fonctionné et pourtant, nous démontrons très clairement que cela fonctionne, mais que ce n'est pas suffisant.
    Convenez-vous que l'approche équilibrée que nous avons adoptée et qui consiste à établir un prix et à offrir un remboursement, ainsi qu'à investir dans les transports en commun, dans l'innovation et dans l'accroissement de la productivité de nos entreprises et de notre société en général, en plus de la prise de règlements et de mesures pour contrôler les émissions, est une approche qui offre un éventail d'options? Nous prenons plus de 15 mesures différentes pour lutter contre le changement climatique. C'est l'approche équilibrée qu'il faut prendre; c'est donc une évolution vers l'atteinte de nos objectifs, et non une révolution.
    Oui, la tarification du carbone est un élément essentiel d'un ensemble de politiques, comme je l'ai dit, mais le gouvernement fédéral se penche également sur d'autres politiques, notamment la norme en matière de carburant propre — une mesure très importante —, les règlements sur le méthane, l'élimination progressive du charbon, ainsi que des investissements importants dans l'infrastructure des céréales, le transport et les technologies propres... Il est important de s'attaquer à ce problème sous différents angles.
    De plus, vous dites que l'établissement d'un prix sur la pollution peut favoriser l'innovation.
    Une innovation très intéressante a été réalisée en Colombie-Britannique par une entreprise appelée Carbon Engineering. Cette entreprise prend du carbone dans l'atmosphère pour créer un carburant qui peut être utilisé dans n'importe quel véhicule, y compris les avions. Il s'agit donc d'un carburant à émissions de carbone nulles. Dans le cadre des innovations réalisées dans le secteur aérien, ne serait-il pas logique d'utiliser, encore une fois, du combustible neutre en carbone?

  (1705)  

    La tarification du carbone et la norme sur les carburants propres sont deux pas dans la bonne direction lorsqu'il s'agit d'encourager la mise en oeuvre de solutions de rechange comme les carburants à faibles émissions de carbone et les biocarburants. D'après ce que j'entends des témoins qui comparaissent aujourd'hui, il leur faut plus de solutions, plus de technologies et plus d'appui pour les aider à atteindre leurs objectifs en matière de réduction d'émissions, et ces politiques sont donc en quelque sorte...
    Je suis désolé de vous interrompre, mais au bout du compte, pour revenir sur l'affirmation de M. Sopuck selon laquelle le CO2 n'est pas un polluant, saviez-vous que le gouvernement précédent a décrété, dans le cadre de la LCPE 2012, que le CO2 est un polluant? Je crois que si vous posiez la question à la plupart des scientifiques dans le monde, ils seraient d'accord avec cette affirmation.
    Oui, je savais et je suis d'accord.
    Merci beaucoup.
    À M. Stetski, maintenant, pour trois minutes.
    Merci.
    Moi aussi, je vis en Colombie-Britannique. Depuis que je suis député, je suis fasciné par la facilité avec laquelle on fait dire n'importe quoi aux chiffres. Beaucoup de témoins, des économistes et des scientifiques, nous ont parlé de la réussite de la tarification du carbone dans la province. Je suis convaincu que le Sierra Club aurait voulu préconiser une majoration du carbone plutôt que le contraire.
    J'ai une petite question pour vous tous, si vous permettez, dans le peu de temps qui m'est imparti. En faisant abstraction de tout ce dont nous venons de discuter, croyez-vous que la tarification de la pollution diminue la présence de gaz à effet de serre?
    En commençant ici et en poursuivant jusqu'au bout de la rangée.
    Oui. La tarification entraîne une baisse de la quantité. On peut alors se demander si l'effet est durable. L'Australie offre un excellent exemple de réduction après une majoration du prix. Qu'arrive-t-il ensuite? Si le prix revient à ce qu'il était avant, le résultat n'est pas durable. Il faut un incitatif durable, et une tarification judicieuse contribue à cette durabilité. D'après moi, le plus durable est de trouver des moyens de rechange qui n'exigent pas une forte augmentation du prix.
    Monsieur Boag.
    Je pense qu'une tarification du carbone bien conçue offre une solution stratégique répondant à un certain nombre de principes qui, d'après nous, devraient être intégrés dans la politique. Chose sûre, elle procure une certaine transparence. La tarification qui annonce l'évolution du tarif au fil du temps fournit de la transparence et de la prévisibilité. Du point de vue économique, elle favorise les occasions de réduire les coûts au minimum.
    Je pense que c'est une question de rythme, une question à la fois d'amplitude et de vitesse; c'est là qu'apparaissent les divergences.
    Je suis d'accord. La tarification du carbone permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre selon un bon rapport coût-efficacité, par effet dissuasif sur les activités qui en émettent le plus et incitatif sur l'innovation et la mise au point de technologies nouvelles qui nous aideront à réduire encore plus nos émissions.
    Oui, nous appuyons la tarification du carbone. C'est obligatoirement la bonne stratégie.
    L'exemple australien est édifiant, parce que le modèle australien n'a pas diminué les émissions du secteur australien de l'aviation. C'est également vrai dans l'Union européenne, où on applique un système compensatoire. Nos transporteurs, en agissant de leur plein gré, ont davantage réduit les émissions que leurs homologues européens.
    Je suis désolé de vous interrompre. Voyez l'heure. Il est 17 h 10 et nous avons besoin de 10 minutes de huis clos à la fin de la séance, mais nous avons le temps pour une dernière salve de questions à trois minutes par intervenant. Je vous remercie d'avance pour vos réponses concises.
    Joe, trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je ne parviens pas à me rappeler si c'était Massimo ou Geoff, mais l'une des idées que vous avez soulevées et dont nous n'avons pas discuté est celle de la compensation carbone dans votre industrie. Pouvez-vous en dire un peu plus?
    Notre programme international de compensation et de réduction du carbone pour l'aviation internationale (CORSIA) permet aux lignes aériennes d'acheter des crédits de compensation pour les aider à réaliser leur croissance carboneutre. Ces compensations et ces définitions seront définies par l'OACI d'ici la fin de l'année. Nous les connaîtrons dans les prochains mois.

  (1710)  

    Peut-être pouvons-nous laisser la fin à Wayne ou à Mike.
    Vous avez parlé des exemples offerts par l'État de Washington, où deux référendums ont eu lieu et ont échoué. Quelles sont les similitudes et les différences entre ces deux modèles et ce que propose le gouvernement du Canada?
    La similitude réside dans l'initiative 72, qui était sans incidence sur les revenus. Votre effort pour le filet de sécurité fédéral vise cette neutralité des incidences sur les revenus des contribuables.
    Encore une fois, l'échec du Washington trouve deux ou trois explications: d'abord, personne ne croyait en un accord durable; ensuite, paradoxalement, les défenseurs de l'environnement s'y opposaient, parce qu'ils voulaient une augmentation des revenus.
    Voilà les principaux motifs de préoccupation, qui, d'après nous, ressemblent à ceux de votre projet.
    Très rapidement, et dans la même ligne de pensée, n'a-t-on pas offert une sorte de remboursement?
    Non. Pas dans le premier cas; on a offert une réduction de la taxe de vente, qui est notre principale taxe.
    D'accord. C'est bon.
    Je tiens à souligner aussi que j'ai appris que les incendies dans la région de Fort McMurray avaient causé des pertes équivalentes à 7 millions d'heures de travail dans le secteur des ressources en Alberta, qui a, de ce fait, essuyé une réduction de 40 % de ses revenus. Les exportations ont diminué de 1,2 % tandis que les importations ont augmenté de 13 %.
    Seriez-vous d'accord pour dire que nous constatons les répercussions du changement climatique directement dans ce secteur, qui, en soi, sont peut-être nuisibles pour lui?
    Je ne peux pas faire de commentaires directs sur ce segment de l'industrie — ce n'est pas le mien — mais il est sûr que la météo est un facteur. Quant à attribuer un événement météorologique isolé au changement climatique, c'est une autre histoire.
    Je pense que vous conviendrez que le nombre de ces manifestations centennales augmente. Ma propre circonscription a subi des crues record en 2014, une sécheresse record en 2016, puis, de nouveau, des crues record en 2017. En 2018, des tornades ont frappé Ottawa, et nous avons connu, deux années de suite, les pires saisons d'incendies de forêts de toute l'histoire du Canada en Colombie-Britannique. Je pense qu'il est assez évident que ces manifestations centennales continuent de survenir tous les ans.
    Votre temps est écoulé.
    Monsieur Fast, prenez trois minutes.
    D'accord, ce sera vite fait.
    Joanna, M. Sopuck m'a demandé de vous poser cette question.
    Vous avez fait remarquer qu'il existait des réponses à ses questions très précises. Pourriez-vous communiquer à notre comité les faits que vous avez cités?
    Joanna, je vous cite. Vous dites préférer une tarification du carbone qui augmente de façon prévisible au fil du temps.
    D'après vous, où s'arrêtera cette tarification? En Colombie-Britannique, le tarif s'élève à 35 $ la tonne. Le tarif fédéral commence à 20 $ et s'élèvera à 50 $. Vous voulez qu'il augmente. À quel moment estimez-vous que le tarif sera efficace pour modifier les comportements au point de produire les résultats espérés?
    Même un petit montant influera sur les comportements.
    Sa valeur finale dépend entièrement de nos objectifs et des autres politiques que nous mettons en vigueur. Je ne peux donc pas...
    Ces objectifs sont assez clairs. Ils sont exposés dans le texte de l'Accord de Paris, et chacune des provinces les a fixés. Vous les connaissez. Quelle valeur du tarif du carbone permettra de les atteindre?
    Je les connais; mais je n'ai pas modélisé la comparaison en tenant compte en même temps de toutes les politiques pour déterminer le tarif à fixer ni à quel moment il doit l'être. Voilà pourquoi...
    Vous voulez que le tarif continue d'augmenter...
    ... pour atteindre nos objectifs.
    D'accord.
    Ma dernière question, Massimo, revient à la notion de carburant à faible intensité de carbone dont vous avez parlé. Vous avez déploré le manque de volonté politique d'atteindre cet objectif. Pouvez-vous dire comment cette absence de volonté s'est manifestée et comment nous pouvons y remédier?
    Il se fait beaucoup de travail aux ministères de Ressources naturelles Canada et d'Environnement et Changement climatique Canada, auquel participe Transports Canada. On a le sentiment de délais très serrés à respecter dans l'élaboration de normes.
    Encourager la commercialisation de biocarburéacteur est complexe... une tâche difficile. Actuellement, des fonctionnaires essaient d'imposer des normes de performance à notre secteur, qui sont complètement déconnectées de la réalité du marché et qui ne tiennent aucunement compte des répercussions sur les coûts. Ce n'est pas la manière, pas le moyen d'exercer l'influence que le Canada possède dans ce domaine, pas la façon d'aider notre industrie à atteindre et même à dépasser ses objectifs de réduction des émissions carbonées.

  (1715)  

    Merci.
    Votre temps est écoulé.
    Wayne, vous disposez de trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs de l'Association canadienne des carburants...
    ... quelles améliorations votre association peut-elle réaliser pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre? Si vous voulez englober l'éthanol, qui a fait l'objet de témoignages antérieurs, faites-le. Quelles améliorations pouvez-vous faire pour réduire les émissions de gaz à effet de serre?
    Il est sûr que, dans le contexte de la norme sur les carburants propres, notamment en ce qui concerne notre travail avec Environnement et Changement climatique Canada et la détermination des voies à suivre pour assurer la conformité, que les réductions continues de la consommation d'énergie et l'amélioration constante de l'efficacité énergétique des raffineries permettront finalement de réduire l'intensité carbonique des carburants que nous produisons. La conjonction de certaines occasions pointues et du système de tarification fondée sur les extrants y contribuera encore mieux. Il est sûr que les mélanges de biocarburants, de bioconstituants, que ce soit du diesel renouvelable ou de l'éthanol, offrent d'autres possibilités en matière de conformité, mais ils entraînent des coûts.
    Les mécanismes de réglementation comme les normes sur les carburants propres ou sur les carburants renouvelables ont l'inconvénient d'une opacité particulière pour les coûts. La relation avec le prix tarifé du carbone et le prix du litre de carburant n'est pas évidente.
    D'après de nombreuses études réalisées au Canada par des groupes indépendants de réflexion, ces dernières années, le prix de la tonne de mélange de carburants renouvelables par tonne évitée d'émissions est très élevé, dans les centaines de dollars, ce qui n'est pas clair pour le citoyen lambda et, par conséquent, ne vient pas l'aider à prendre des décisions.
    C'est certainement une voie pour atteindre la conformité. Nous y sommes déjà engagés. Le taux d'éthanol dans les mélanges au Canada est, peut-être en moyenne, supérieur à 7 %, grâce à diverses mesures de rafistolage axées sur les carburants renouvelables, mais le coût par tonne de gaz à effet de serre non émise est élevé.
    Merci.
    Simplement par curiosité, est-ce que l'éthanol a un rôle dans le carburéacteur de l'avenir?
    Un procédé permet de le convertir en carburéacteur. C'est donc une possibilité.
    Ce n'est pas encore à portée de main?
    Ç'a été approuvé dans le cadre de notre norme internationale ou par l'office des normes. Des technologies viennent tout juste de faire leur apparition pour permettre aussi d'emprunter cette voie.
    Merci.
    Je meurs d'envie de demander...
    En 20 secondes.
    Peut-être après. Mes électeurs voudraient savoir comment il se fait que tous les postes d'essence de Cranbrook affichent le même prix en même temps, qui fluctue en même temps, mais nous pourrons en discuter plus tard.
    C'est ce qu'on appelle un marché concurrentiel.
    Avant de conclure, je tiens à remercier tous les témoins. Je pense que nous avons eu une bonne discussion.
    Nous suspendrons les travaux quelques minutes. Veuillez quitter les lieux, sauf les membres du Comité et le personnel. Nous disposons de 10 minutes pour les questions dont nous devons discuter à huis clos.
    Sur ce, je suspends les travaux. Merci d'avoir été ici.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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