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La séance est ouverte. Bienvenue à cette 149
e réunion du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique. Conformément au paragraphe 81(4) du Règlement, nous étudions le Budget principal des dépenses 2019-2020, crédit 1 sous la rubrique Bureau du commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique, crédit 1 sous la rubrique Bureau du conseiller sénatorial en éthique, crédit 1 sous la rubrique Commissariat au lobbying, et crédits 1, 5, 10 et 15 sous la rubrique Commissariats à l'information et à la protection de la vie privée du Canada, renvoyés au Comité le jeudi 11 avril 2019.
Nous accueillons aujourd'hui des représentantes du Commissariat à l'information du Canada: Mme Caroline Maynard, commissaire à l'information du Canada, Mme France Labine, sous-commissaire, Service corporatif, planification stratégique et services de transformation, et Mme Layla Michaud, sous-commissaire, Enquêtes et gouvernance.
Nous allons commencer par vous, madame la commissaire. Vous disposez de 10 minutes.
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Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité. Je suis bien heureuse d'être encore ici avec vous aujourd'hui.
Comme vous l'avez dit, monsieur le président, je suis accompagnée de Mme France Labine et de Mme Layla Michaud.
[Traduction]
J'ai maintenant 15 mois d'expérience en tant que commissaire à l'information, et à ce stade-ci de mon mandat, je vois des signes de progrès très positifs, mais aussi des défis à l'horizon.
Je suis très reconnaissante du financement temporaire de 3 millions de dollars annoncé pour le Commissariat dans le budget de 2019, que j'avais demandé pour poursuivre ma stratégie de réduction de l'inventaire de plaintes. Je consacrerai cet argent à l'embauche d'enquêteurs, comme je l'ai fait avec les 2,9 millions de dollars de financement temporaire reçus dans le budget de l'an dernier.
[Français]
Il s'agit de la quatrième année de suite que mon commissariat demande et reçoit des fonds temporaires. Permettez-moi de souligner que ces demandes de financement temporaire étaient des mesures provisoires, en attendant une solution permanente. Un meilleur financement est essentiel pour permettre au Commissariat de remplir pleinement et efficacement son mandat.
Mon équipe optimise chaque dollar que le Commissariat reçoit. Nous révisons et améliorons les processus d'enquête. Nous tirons parti de la technologie pour innover et pour accélérer les tâches et les processus. Nous collaborons autant que possible avec les institutions et les demandeurs dans le but de conclure nos enquêtes rapidement et efficacement.
[Traduction]
Nos résultats sont éloquents. Le nombre, la qualité et la rapidité des enquêtes se sont améliorés considérablement. Mon équipe a fermé plus de 2 600 dossiers de plaintes en 2018-2019. C'est 76 % de plus que l'année précédente et un record dans l'histoire de l'organisation. Les deux tiers de ces enquêtes ont permis aux demandeurs de recevoir davantage d'information ou une réponse plus rapide de l'institution.
Bien que nous ayons connu la meilleure année de notre histoire, je vois des difficultés à l'horizon. J'ai commencé la première année de mon mandat avec un inventaire d'environ 3 500 dossiers, et j'ai reçu plus de 2 500 nouvelles plaintes en 2018-2019. Ce nombre presque record de nouveaux dossiers signifie que, malgré l'excellent rendement de mon équipe, j'ai à peine pu entamer mon inventaire. À ce rythme, il nous faudra des dizaines d'années pour éliminer l'arriéré.
Autrement dit, les ressources de 11,5 millions de dollars qui me sont allouées dans le Budget principal des dépenses et mes 93 équivalents temps plein approuvés sont utilisés au maximum en raison d'une charge de travail énorme, qui a augmenté de 25 % en six ans. Sans financement supplémentaire, je pourrais me retrouver avec environ 8 500 plaintes, vieilles et nouvelles, cette année.
[Français]
De plus, les amendements proposés au projet de loi qui sont présentement à l'étude au Parlement auront des répercussions considérables sur les activités et les finances de mon commissariat.
Lorsque le projet de loi a été déposé, le président du Conseil du Trésor de l'époque a déclaré que le gouvernement augmenterait les ressources du Commissariat à l'information de 5,1 millions de dollars au cours des cinq prochaines années et de 1,7 million de dollars sur une base continue.
[Traduction]
Le financement supplémentaire de 1,7 million de dollars sera bien sûr le bienvenu si le projet de loi est adopté, mais il pourrait ne pas suffire à mon commissariat pour répondre aux exigences du projet de loi dans sa forme actuelle.
À long terme, fonctionner avec du financement temporaire d'une année à l'autre n'est pas efficace ni viable. C'est ma plus grande préoccupation. Cela ne me permet pas de planifier à moyen et à long terme. Les fonds insuffisants signifient que je ne peux pas poursuivre sur ma lancée pour ce qui est de conclure les enquêtes et d'assurer le respect du droit à l'information des Canadiens.
Je peux vous assurer que je vais continuer d'optimiser les ressources dont je dispose actuellement. Je vais également faire tout ce que je peux pour réaliser des gains d'efficience dans le fonctionnement du commissariat. Mais, franchement, il y a une limite à ce que nous pouvons accomplir en révisant et en simplifiant les processus. C'est pour cette raison que l'une de mes priorités cette année est d'obtenir des ressources permanentes qui tiennent compte de tout le travail que mon commissariat devra accomplir en vertu de la loi.
[Français]
Avec plus de ressources permanentes, je pourrais élargir mon équipe d'enquêteurs afin de pouvoir non seulement conclure davantage de dossiers d'enquête chaque année, mais également traiter plus rapidement les nouvelles plaintes.
Une augmentation du financement permanent serait également nécessaire pour me permettre de mettre en œuvre les modifications proposées à la Loi et faciliter une transition efficace.
Voilà les résultats que j'aimerais obtenir pour les Canadiens et les Canadiennes.
Merci de m'avoir donné l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui.
Je suis prête à répondre à vos questions.
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Le formulaire de plainte en ligne a été lancé en décembre 2018. Les gens s'en servent. C'est un bon outil et 85 % des plaintes sont maintenant présentées par voie électronique, ce qui nous aide grandement à faire notre travail. Un des problèmes est que le système est « Protégé A ». Les demandeurs ne peuvent donc pas télécharger des documents avec des renseignements personnels, qui sont « Protégé B ». Nous cherchons à améliorer le système pour ne pas avoir à attendre l'arrivée par la poste des documents qui accompagnent le formulaire de plainte parce que l'attente de ces renseignements qui nous sont envoyés par la poste ou par courriel protégé nous fait perdre le gain de temps réalisé.
Nous travaillons sur le système. Nous avons aussi pris des mesures pour l'améliorer. Je crois que c'est pour cela que nous avons été aussi efficaces cette année en réglant 2 600 cas. Nous avons réduit la taille de nos équipes. Nous avons demandé l'avis de conseillers juridiques dès le départ. Nous collaborons avec les institutions. Quand je dis cela, les gens sourcillent parce que je fais enquête sur elles, mais nous rencontrons les sous-ministres et les sous-ministres adjoints et la direction de chaque institution pour leur montrer ce qu'ils protègent. Il est plutôt impressionnant de voir la réaction des institutions lorsqu'elles sont averties de ce qu'elles tentent de protéger ou de ce qui a été caviardé.
Parfois, je vois que la communication entre les représentants du bureau de l'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels, ceux du bureau de première responsabilité et les dirigeants varie. Nous avons une collaboration fantastique avec la haute direction ainsi qu'avec les employés du bureau. Parfois, ce sont les cadres intermédiaires qui craignent de laisser sortir de l'information. Nous les encourageons à communiquer entre eux et demandons à leur dirigeant d'expliquer en détail comment ils perçoivent l'accès à l'information, l'ouverture et la transparence au sein de leur institution.
Nous avons fait de grands pas en procédant ainsi, en rencontrant personnellement ces institutions et parfois même les comités de direction. Je me suis présenté à de nombreux comités, et cela donne des résultats.
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Oui. Le nombre de plaintes a augmenté, mais, en fait, ce n'est pas depuis que nous avons le formulaire en ligne. Le nombre de plaintes a augmenté depuis que les gens demandent beaucoup plus d'information.
Le nombre de plaintes en ce qui concerne les institutions a augmenté de 225 % en six ans. Nous avons maintenant 100 000 demandes d'accès à l'information au sein du gouvernement. Je reçois 2 500 plaintes par année. Vous pouvez voir approximativement quels sont les pourcentages.
Les Canadiens comprennent et connaissent mieux leur droit d'accès à l'information. Ils sont curieux. Il risque d'y avoir aussi plus de divulgation proactive. Souvent, les gens ne s'arrêtent pas là, ils veulent connaître les documents qui sous-tendent la divulgation. Alors, c'est sûr que, plus il y aura de demandes, plus il y aura de plaintes.
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Ce n'est pas applicable.
Selon moi, le plus gros problème présentement, en ce qui concerne le gouvernement, c'est la gestion de l'information. Nous sommes à l'ère numérique et les gens au gouvernement ou dans les institutions prennent des décisions par l'entremise de courriels. Il y a plusieurs échanges de courriels. C'est ce qui cause les plus grands temps de traitement.
Il peut y avoir une demande d'information au sujet d'une décision qui a été prise. Or, parmi les 500 courriels qui ont été remis, peut-être trois seulement sont pertinents, parce que la personne qui écrit les courriels ne fait pas le tri de façon adéquate ou n'a pas une bonne gestion de l'information.
Nous nous retrouvons ainsi avec des dossiers numériques immenses contenant des courriels qui ne répondent pas vraiment aux demandes des plaignants.
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C'est la responsabilité de chacun, et la loi ne nous permet pas d'effacer l'information d'entreprise. Le problème actuel est que personne ne fait ce tri ou ce ménage dans l'information.
On ne devrait pas prendre de décisions par l'entremise de courriels, non plus. On devrait vraiment prendre des décisions à l'aide de documents, comme on le fait dans le cas de dépenses financières, où il y a une vraie prise de décision comportant des signatures et des autorités qui effectuent une vérification. Ce genre d'information est facile à obtenir.
Cependant, quand on parle de politiques et de directives à l'interne, ou bien de grandes discussions au sein d'une institution, on se rend compte qu'il y a beaucoup de choses qui ne devraient pas être là.
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Merci, monsieur le président.
Vous avez parlé de 100 000 demandes d'accès à l'information. Chaque année, 2 500 plaintes se retrouvent sur votre bureau. C'est donc dire que 2,5 % des gens sont insatisfaits de la réponse qu'ils ont reçue, quelle qu'en soit la raison, que ce soit le temps de traitement ou autre chose. Cela démontre à quel point, lorsque vous entreprenez une enquête à la suite d'une plainte, cela prend beaucoup de temps.
Les gens qui vous envoient ces plaintes sont-ils conscients des coûts engendrés par une seule plainte? Ils s'imaginent peut-être que les coûts sont de 150 $ ou 200 $, mais, en réalité, ils se situent peut-être entre 4 000 $ et 5 000 $, voire entre 6 000 $ et 7 000 $, dépendamment de la plainte. Les gens ne mettent pas nécessairement de l'argent dans la cagnotte. C'est un service gratuit.
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La majorité des gens avec lesquels nous traitons sont satisfaits des services du bureau.
Bien entendu, les temps de traitement ne plaisent jamais à personne. Cependant, comme vous le dites, le bureau est là pour s'assurer du respect de l'accès à l'information et de la Loi. Souvent, nous sommes capables de régler la plainte simplement en expliquant aux gens ce qui est devant nous. Nous voyons les dossiers d'accès à l'information. Quand la plainte arrive chez nous, nous faisons la demande du dossier, et nous ne faisons aucune rédaction dans les documents. Nous pouvons donc voir exactement ce qui a été retiré et ce qui a été divulgué à la personne. Souvent, les gens constatent alors que l'exemption a été appliquée comme il faut, ou encore ils se rendent compte que c'est une opinion juridique, et ils sont satisfaits. En fait, les gens veulent obtenir l'opinion d'une personne qui n'est pas au sein de l'institution concernée. Ils ont confiance dans le fait que nos enquêteurs vont leur dire ce qui se passe. Nous sommes capables de régler énormément de dossiers de cette façon.
Par contre, il y aura toujours des gens qui seront moins satisfaits parce qu'ils en voudront plus. Ils pensent que tout devrait leur être donné, mais, malheureusement pour certains et heureusement pour d'autres, je dois respecter la Loi. Présentement, la Loi nous dicte des exemptions et des exclusions, et c'est mon mandat de m'assurer que cela est appliqué correctement.
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C'est un peu ce que nous avons mis en place. Présentement, nous avons une équipe de triage qui nous permet de voir tout de suite, lorsque les demandes arrivent, si nous sommes capables de les régler.
Je vous dirais que c'est beaucoup plus facile de régler un cas quand l'analyste de l'institution concernée vient tout juste de finaliser le dossier et que le plaignant sait exactement ce qu'il veut. Par contre, lorsque nous appelons une personne au sujet d'un dossier qui est entre nos mains depuis cinq ans, parfois ce n'est plus pertinent. Parfois, l'analyste de l'institution qui a traité la demande n'est plus là. C'est de l'information qui date et qui n'est probablement plus pertinente.
Nous essayons donc de régler les demandes le plus rapidement possible quand nous les recevons. Bien entendu, dans le cas de certaines plaintes, nous savons dès leur réception qu'elles nécessiteront une enquête officielle beaucoup plus détaillée.
Nous faisons donc un tri. Nous procédons ainsi depuis seulement six mois environ.
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Cela nuirait à la crédibilité de mon bureau, mais aussi à celle du gouvernement.
L'accès à l'information est devenu un droit quasi constitutionnel, parce qu'on veut que les Canadiens aient accès à de l'information afin qu'ils puissent remettre en cause certaines décisions institutionnelles et, ultimement, faire confiance au gouvernement lorsqu'il prend des décisions qui les touchent.
Plus les gens attendent, moins nous serons capables de répondre à leurs plaintes. Je ne peux pas dire immédiatement aux plaignants si l'institution a appliqué correctement les dispositions de la Loi et s'est acquittée de ses obligations ou si, au contraire, nous croyons qu'ils ont droit à plus d'information. D'ici à ce que leur plainte soit traitée, l'information a perdu de sa pertinence. Les gens ont besoin de l'information au moment où ils la demandent. Plus ils attendent, plus cela nuit à la crédibilité du gouvernement et plus cela mine la confiance que les gens lui portent.
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Cela ne relève pas de mon mandat. C'est le gouvernement qui devrait entreprendre ce projet. Cependant, je vous dirais qu'il y a certainement des besoins à ce chapitre. Plusieurs coordonnateurs institutionnels ont mené une étude en collaboration avec le Conseil du Trésor. Ils ont envisagé la professionnalisation des analystes en accès à l'information et la création d'une agence. Je ne sais pas où en est ce projet, qui devra certainement bénéficier d'un financement.
Cette agence offrirait de la formation et créerait un bassin de gens pouvant aller travailler dans les différents ministères. L'idée serait que les ministères puissent se partager ces gens. Quand il y a eu l'accident ferroviaire, Transports Canada a reçu un gros volume de demandes d'accès à l'information, mais il n'avait pas la capacité de répondre à toutes ces demandes. C'est dans des cas de ce genre que des analystes pourraient être envoyés dans différentes institutions.
Le but ultime serait d'avoir une agence centrale pour aider toutes les institutions à traiter les demandes d'accès à l'information. Cette agence pourrait former et engager des gens. Je pourrais apporter ma contribution, bien entendu, en donnant des lignes directrices et en expliquant nos processus, afin que tout le monde soit sur la même longueur d'onde.
J'aimerais poursuivre avec les questions soulevées par M. Baylis.
Ma première question toutefois, est la suivante. Il y a des organisations récidivistes, année après année, n'est-ce pas? Je siège depuis longtemps à ce comité, et c'est toujours la GRC, l'Agence du revenu du Canada et l'Agence des services frontaliers du Canada. Soit qu'elles n'ont pas les fonds, soit qu'elles décident de ne pas affecter les fonds parce qu'elles ont d'autres priorités. Selon moi, si l'accès à l'information est un droit quasi constitutionnel et que les retardataires sont toujours les mêmes d'une année à l'autre, le problème n'est pas le manque de fonds, mais un problème organisationnel au sein de leur structure.
De quels outils disposez-vous pour les obliger à se conformer?
L'une des choses que nous essayons de faire, c'est d'effectuer plus souvent des enquêtes et vérifications systémiques lorsqu'on sait qu'il y a un problème, soit au niveau des ressources ou de la formation, et de formuler des recommandations en vue de régler le problème. J'essaye de prendre plus souvent l'initiative à cet égard, et j'en ai l'autorité.
L'autre chose dont il faut se souvenir, c'est que les gens ne se plaignent pas nécessairement des organismes eux-mêmes; ils ne se plaignent pas vraiment d'irrégularités dans leur travail ou dans l'application de la loi. J'espère améliorer la façon dont ces éléments d'information sont véhiculés dans nos rapports au cours des prochaines années. Certains demandeurs s'attendent à plus d'information et vont se plaindre quelles que soient les mesures prises par l'institution. Il arrive ainsi que des institutions qui font de l'excellent travail reçoivent un nombre plus élevé de plaintes; dans de tels cas, nous en arrivons souvent à la conclusion que les plaintes sont sans fondement.
Je ne pense pas que le Commissariat communique très efficacement ce genre d'information dans ses rapports annuels et spéciaux; c'est quelque chose que nous cherchons à améliorer. Il faudrait vraiment se pencher de plus près sur la question pour mieux cerner les problèmes et les causes des retards et déterminer si les exemptions et exclusions sont appliquées correctement.
Il y a également le fait que le Conseil du Trésor produit seulement des données sur les échéanciers; sans information sur l'ampleur de la demande ou le nombre de pages, il est difficile de bien cerner l'ensemble de la question. Ce qu'on remarque ces derniers temps, c'est que certaines institutions qui respectent bien les échéances font l'objet d'un grand nombre de plaintes en matière d'exclusions et d'exemptions. Autrement dit, on répond rapidement à la demande, mais presqu'aucune information n'est disponible. Sur papier, tout a l'air d'aller puisqu'elles répondent rapidement aux demandes, mais ça ne signifie par pour autant qu'elles s'acquittent bien de leurs obligations.
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Parfois, quand nous présentons une demande à un ministère, on nous répond que cela représente des milliers de pages et on nous suggère de mieux cerner et préciser la demande. Dans de tels cas, nous décidons parfois de demander de l'information couvrant une période de deux semaines plutôt que de deux ou trois ans.
Personnellement, je trouve cela raisonnable. Les ministères ont des moyens limités; l'important, c'est qu'ils soient de bonne foi.
Ce qui m'inquiète davantage, c'est quand Facebook décide simplement de ne pas tenir compte d'une demande d'un organisme de réglementation, comme il l'a fait récemment.
J'ai eu affaire avec le ministère de la Justice pendant six ans; par l'entremise du Commissariat, je cherchais à obtenir de l'information sur les décisions politiques ayant motivé la décision de prendre en cible les survivants du pensionnat St. Anne, et après maints atermoiements et menaces de poursuites, on a enfin reçu 3 000 pages de courriels caviardés. Ma conclusion, c'est que le ministère de la Justice ne pense pas avoir à se conformer aux demandes d'information.
Avez-vous les moyens de contraindre le ministère à obtempérer? J'oserais espérer que, dans une affaire aussi scandaleuse, au moins un courriel sur 3 000 pages ne fasse pas l'objet du secret professionnel.
C'est ce qu'on prétend également dans l'affaire SNC-Lavalin. C'est toujours la même chose chaque fois qu'il y a scandale. Ils invoquent le secret professionnel pour justifier leur décision de tout cacher.
Dans de telles circonstances, comment peut-on obliger le ministère de la Justice à obtempérer et lui rappeler qu'il a également une obligation à l'égard des droits quasi-constitutionnels des citoyens?
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Vous avez raison dans la mesure où, à l'heure actuelle, la loi m'habilite simplement à formuler des recommandations à l'intention des ministères en cas de divergence d'opinion, mais j'hésite à intenter des poursuites lorsqu'on accepte mes recommandations.
En vertu de la nouvelle loi, j'aurai le pouvoir d'émettre des ordonnances. Ainsi, les institutions qui ne respectent pas une ordonnance seraient poursuivies. Je pense que ce sera un pouvoir très utile dont nous nous prévaudrons certainement.
Il y a aussi le fait, comme je l'ai dit plus tôt, qu'il est très difficile d'émettre des recommandations tous les jours ou toutes les semaines sans pouvoir y donner suite, et aussi sans pouvoir en parler. Le résultat, c'est que les gens ne savent pas ce qui nous occupe jusqu'à la publication d'un rapport annuel ou spécial.
Aux termes du nouveau projet de loi , je serai en mesure de publier ce genre de décisions, ce qui déplaira sûrement à certaines institutions. C'est un autre pouvoir que nous pourrons utiliser et qui nous sera utile. L'espoir, c'est qu'à mesure que nous publions plus d'information, que les Canadiens prennent conscience de leurs droits et que les institutions finissent par comprendre ce qu'on cherche, les taux de participation et de conformité augmenteront.