Passer au contenu
Début du contenu

HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 040 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 9 février 2017

[Enregistrement électronique]

  (0805)  

[Traduction]

    Bienvenue. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous allons poursuivre notre étude sur la réduction de la pauvreté. Pour la suite des choses, nous allons aborder la question du logement et des districts. Nous sommes très heureux d'être accueillis dans la formidable ville représentée par le député Wayne Long.
    Je suis très heureux de vous voir tous ici aujourd'hui. Je vous prie de nous excuser si nous somnolons. Nous sommes arrivés assez tard la nuit dernière et nous espérons pouvoir partir tout à l'heure. Si j'ai bien compris, nous attendons toute une tempête de neige.
    Nous allons commencer par les présentations. Vous êtes nombreux aujourd'hui, nous allons donc essayer de nous en tenir à sept minutes pour les commentaires si c'est possible.
    J'aimerais accueillir Randy Hatfield, directeur général, et Greg Bishop, directeur de projet, du Saint John Human Development Council, et Donna Gates, directrice générale, et Penni Eisenhauer, organisatrice communautaire, de Living SJ. Oh, excusez-moi. M. Bishop n'est pas là.
    Nous avons avec nous Shilo Boucher, présidente et chef de la direction du YMCA of Greater Saint John, allez YMCA! Je signale également la présence d'Erin Schryer, directrice générale de Littératie au primaire inc., à titre personnel. Enfin, nous comptons parmi nous Wendy MacDermott, directrice générale de Centraide Saint John, Kings et Charlotte.
    Bienvenue à tous.
    Nous allons commencer immédiatement avec vous, monsieur Hatfield. Les sept prochaines minutes sont à vous.
    Merci, monsieur le président. Avant de commencer, je tiens à souligner que nous nous trouvons sur le territoire traditionnel non cédé des Wolastoqiyik et des Micmacs du Nouveau-Brunswick.
    Je m'appelle Randy Hatfield. Je suis directeur général du Saint John Human Development Council, le conseil de planification sociale. Greg Bishop devait m'accompagner ce matin, mais il a un rendez-vous médical avec son épouse, puisqu'ils attendent leur troisième enfant d'un instant à l'autre. Dans la foulée des chiffres plutôt sombres qui nous ont été présentés hier au sujet de la population, nous approuvons pleinement le lieu qu'il a choisi pour ce matin.
    J'ai remis aux témoins un dossier de présentation PowerPoint que je ne présenterai pas, mais auquel je ferai allusion. J'aimerais m'attacher à la localité de Saint John et décrire cette collectivité dans laquelle nous travaillons à travers le prisme de la pauvreté.
    Pour commencer, nous devons nous demander: « Qu'est-ce que la pauvreté? » Au Nouveau-Brunswick, nous avons une réponse; nous avons une définition. Notre Loi sur l'inclusion économique et sociale, qui établit la Société de l'inclusion économique et sociale du Nouveau-Brunswick et qui supervise la stratégie provinciale de réduction de la pauvreté, définit la pauvreté comme suit: « La pauvreté fait référence à la situation dans laquelle se trouve une personne dépourvue des ressources, des moyens, des occasions et du pouvoir nécessaires pour acquérir et maintenir son autonomie économique ou pour s'intégrer à la société et en être un membre actif. »
    Eh bien, comment mesurer la pauvreté? Comment peut-on mesurer une situation? C'est un concept très éthéré. C'est une notion d'inclusion sociale qui comprend la participation et l'appartenance, mais lorsque nous parlons de pauvreté, nous sommes dans l'obligation d'utiliser une mesure de remplacement. Nous devons nous appuyer sur une mesure indirecte du revenu. Lorsque nous observons la pauvreté dans le contexte de Saint John, nous nous fions à ce qui s'appelle la « mesure de faible revenu ».
    Je sais que votre comité et le gouvernement se pencheront sur la façon de faire et sur la mesure qui sera choisie au moment de discuter et de mettre en oeuvre une stratégie de réduction de la pauvreté. Je recommanderais d'établir la mesure de faible revenu à la moitié du revenu médian, une mesure de l'Organisation de coopération et de développement économiques, ou OCDE, largement reconnue qui, selon moi, peut être suivie au fil du temps et nous donner de puissants outils longitudinaux pour observer l'évolution — ou l'absence d'évolution — à l'égard de la réduction de la pauvreté.
    À l'aide de la mesure de faible revenu et des données de déclarants de 2014, les données disponibles les plus récentes, nous avons observé que les taux de pauvreté monétaire de huit villes de la province variaient de 8,5 %, à Dieppe, à 24,5 %, à Campbellton, une ville au nord. De façon similaire, si on regarde les taux de pauvreté infantile, la ville de Dieppe affiche le taux le moins élevé, à 9,6 %, alors que Campbellton affiche le taux scandaleusement élevé de 35,1 %. La population de Campbellton est équivalente à 10 % de celle de Saint John, et où nous nous trouvons aujourd'hui, dans la ville, le taux de pauvreté infantile est de 31,5 %.
    Lorsqu'on tient compte de la pauvreté dans cette collectivité et dans cette province, nous devons également nous pencher sur le nombre de travailleurs pauvres. Statistique Canada définit les travailleurs pauvres, un groupe croissant au sein de la population, comme les gens âgés de 18 à 64 ans qui gagnent un revenu supérieur à 3 000 $ mais qui se trouvent tout de même au-dessus de la mesure de faible revenu. Saint John affiche le plus haut pourcentage de travailleurs pauvres de la province à 8,1 %.
    Comme pour toute analyse statistique, il faut subdiviser les choses. Vous devez aller en profondeur, ou le plus en profondeur possible, lorsque vient le temps d'analyser les statistiques relatives à la pauvreté. Si on examine la région métropolitaine de recensement ou la RMR, de Saint John, il est important d'établir une distinction entre la ville centrale de Saint John et les districts plus aisés en banlieue qui l'entourent. Le taux de pauvreté monétaire de la RMR est de 14,5 %, ce qui correspond au taux provincial. Toutefois, lorsqu'on regarde la ville centrale de Saint John, on remarque que le taux de pauvreté monétaire est de 19,7 % et que le taux de pauvreté infantile est de 31%. Les municipalités de banlieue qui entourent Saint John obtiennent de meilleurs résultats pour presque toutes les mesures du statut socioéconomique, qu'elles concernent le revenu, la propriété du logement, les niveaux d'instruction ou la composition de la famille. La RMR est divisée en deux mondes; celui de Saint John et celui des municipalités environnantes.
    Au Human Development Council, on nous encourage à approfondir nos analyses et à mieux comprendre la pauvreté. Nous étudions la ville de Saint John, puis nous subdivisons les régions et les chiffres, et nous sommes en mesure de constater que les quatre quartiers de notre système, même s'ils ont une population équivalente, affichent des taux étonnamment différents. Dans le quartier où nous nous trouvons aujourd'hui, soit le quartier 3, le taux de pauvreté infantile est de près de 48 %.
    Cinq districts prioritaires ont été définis dans la ville de Saint John. Trois des cinq districts se situent dans le quartier 3, et deux se trouve dans le quartier 2. Comme le montrent certaines mesures qui figurent dans le dossier de présentation, nous constatons une concentration alarmante de la pauvreté infantile dans nos districts et, dans le cas de Saint John, dans un secteur électoral.

  (0810)  

    Une autre caractéristique de la collectivité que vous visitez aujourd'hui est la présence de familles monoparentales. Il y en a beaucoup au sein de la population. Les familles monoparentales représentent une famille sur trois dans le quartier 3, une famille sur quatre dans la ville de Saint John, et une famille sur dix dans une ville en banlieue dans les environs de Saint John.
    Nous devons également tenir compte du degré de pauvreté. C'est une chose de dire qu'il existe une mesure de faible revenu. Si vous faites 2 ou 3 $ de plus ou de moins, est-ce que votre vie change sensiblement? Non. C'est le degré de pauvreté qui représente la différence entre le revenu obtenu au moyen d'un emploi et de diverses prestations et la mesure de faible revenu qui a été établie. Le degré de pauvreté ici requiert une immense augmentation du revenu si nous voulons placer les gens au-dessus de la mesure de faible revenu.
    À Saint John, nous subissons également les conséquences de l'inégalité des revenus et de la richesse, et nous voyons le fossé se creuser entre les riches et les pauvres. L'économiste principal du Centre canadien de politiques alternatives a fait observer qu'en 2014, parmi les 86 Canadiens les plus riches, la tranche de 80 % la plus riche compte pour à peine 0,002 % de la population, mais elle est si riche qu'elle pourrait acheter absolument tout ce que possède chaque personne au Nouveau-Brunswick. Elle pourrait acheter toutes les voitures, toutes les maisons, toutes les propriétés non bâties, toutes les actions, toutes les obligations, tous les fonds de pension, tous les REER, tous les bijoux, tous les meubles — absolument tout — et avoir encore des milliards à dépenser.
    Mais nous, qui sommes assis à la table, avons espoir. Nous voyons une possibilité et une fenêtre ouverte qui donnent à penser que les planètes s'alignent de telle sorte que nous pourrons avoir un effet positif sur la réduction de la pauvreté. J'aimerais remercier notre député local, M. Long, qui a pris une bonne partie de son temps et, pour ainsi dire, a fait de la réduction de la pauvreté son cheval de bataille politique, et je pense que tous ceux qui se trouvent ici présents sont d'accord.
    Nous sentons certainement l'élan ici dans la collectivité qui découle de certains de ses efforts. Il a parrainé la pétition électronique e-291, qu'a lancée le Saint John Human Development Council avec plaisir. Elle est certifiée par le greffier des pétitions et elle demande de choisir Saint John comme lieu de démonstration de la stratégie canadienne de réduction de la pauvreté.
    Ce matin, vous entendrez parler des programmes novateurs et des personnes déterminées qui présenteront des arguments convaincants en faveur d'investissements consacrés à des lieux de démonstration. Vous en apprendrez davantage au sujet de l'innovation, de l'impact collectif et de la collaboration communautaire, mais ce serait négligent de ma part de ne pas rappeler au Comité que nous avons besoin de solides programmes nationaux et d'un leadership fédéral. Je sais que la lettre de mandat adressée au ministre de la Famille et des Enfants traite d'une stratégie nationale de logement, ce qui est important.
    Vous entendrez également parler de l'importance des services éducatifs et de garde à l'enfance.
    Nous saluons le travail qui a été fait au cours des années en ce qui concerne les taux de pauvreté chez les aînés. Grâce à la Sécurité de la vieillesse comme mesure universelle, au Supplément de revenu garanti comme source de revenu fondée sur un examen du revenu et au Régime de pensions du Canada lié à l'emploi, nos aînés bénéficient d'une aide financière relativement bonne grâce à certains outils.
    Grâce aux prestations fiscales pour enfants, nous disposons d'une merveilleuse mesure qui remet plus d'argent aux Canadiens à faible revenu. Il s'agit non seulement d'une mesure de réduction de la pauvreté, mais également d'une mesure de prévention de la pauvreté, selon moi. Nous allons voir l'incidence des prestations fiscales pour enfants dans les années à venir. Je félicite le gouvernement de ses travaux à cet égard.
    Nous devons tout de même combler le fossé du côté des personnes handicapées, de ceux qui bénéficient de l'aide au revenu et des travailleurs pauvres. En plus de bonifier les prestations fiscales pour le revenu gagné, vous devez vous pencher sur le revenu de base, mais pas aux dépens des services de base. Le Nouveau-Brunswick n'a pas encore mis en oeuvre de régime de médicaments d'ordonnance abordable, par exemple. En 2012, plus de 70 000 familles n'étaient pas assurées. Nous souhaiterions que le Comité envisage la mise sur pied d'un régime national d'assurance-médicaments. Cela apporterait une infrastructure essentielle à la province.
    C'est ainsi que se concluent mes observations. Je suis certain que cela fait sept minutes.
    Encore une fois, bienvenue à Saint John. Nous vous souhaitons bonne chance dans le cadre de vos travaux sur cet important sujet.
    Merci beaucoup, monsieur.
    Nous allons maintenant entendre Donna Gates, directrice générale de Living SJ. Vous avez sept minutes.
    Bonjour, et encore une fois, merci d'être venus à Saint John.
    Je m'appelle Donna Gates et je suis la directrice générale de Living SJ. Je suis en compagnie de Penni Eisenhauer, notre organisatrice communautaire et une incroyable figure de proue dans le district.
    J'aimerais également souligner la présence de notre député, Wayne Long, et le remercier. Il s'est fait le champion de la lutte contre la pauvreté à Saint John, et nous lui en sommes très reconnaissants, comme l'a précisé Randy.
    Living SJ incarne la stratégie de réduction de la pauvreté de Saint John, et nous avons un seul objectif: mettre un terme à la pauvreté intergénérationnelle. Comme vous l'entendrez sans doute nombre de fois aujourd'hui, il est triste de constater à Saint John un problème encore plus complexe: la pauvreté intergénérationnelle.
    Qu'est-ce que Living SJ? Nous sommes un réseau et nous faisons partie de Vibrant Communities Canada. Notre mission est soutenue par 36 hauts dirigeants locaux, et j'aimerais souligner le fait que la présence de hauts décideurs à la table a été la clé de notre réussite. Parmi nos partenaires, mentionnons les trois ordres de gouvernement, des établissements postsecondaires, des districts à faible revenu, des entreprises et des organismes sans but lucratif. Cela a été tout un exploit d'amener les représentants d'un si grand nombre d'organisations, qui ne s'assoient habituellement pas à la même table, à s'entendre sur quatre domaines prioritaires. Nous avons simplement utilisé les principes de l'impact collectif pour établir les cibles suivantes.
    Tout d'abord, il y a l'éducation et la résorption de l'écart concernant les résultats scolaires, soit la réussite de chaque enfant, de l'éducation préscolaire à l'éducation postsecondaire. Cela suppose l'amélioration de la littératie et des résultats liés à l'achèvement des études secondaires.
    Du côté de la santé, il est question d'un modèle de soins fondé sur le district, au coeur duquel se trouvent les gens.
    En matière d'emploi, il s'agit d'établir un lien entre les résidants et les emplois au moyen de programmes d'éducation et de formation. The Learning Exchange, que vous verrez en action plus tard aujourd'hui, trace la voie à suivre pour passer de l'aide sociale à l'emploi. Votre repas est préparé par l'une de ses extraordinaires entreprises sociales. Il s'agit réellement d'une histoire de réussite ici à Saint John, et j'ai hâte que vous en appreniez davantage à ce sujet.
    La revitalisation des districts dans le but d'attirer des gens dont les revenus sont mixtes est notre quatrième cible. Penni vous en dira un peu plus à ce sujet, mais l'une des valeurs fondamentales caractéristiques qui se trouvent au coeur de nos activités est l'inclusion de personnes ayant vécu l'expérience. Notre groupe de travail sur le logement a déterminé que la réserve foncière était prioritaire. Jody Kliffer en parlera plus tard ce matin.
    Je veux vous dire que nous aidons actuellement nos collègues à Halifax qui travaillent à la préparation de leur processus d'impact collectif pour lutter contre la pauvreté. Nous échangeons et apprenons les uns des autres. Leur collectivité a pour mantra: « Rien nous concernant ne se fera sans nous. » Cela explique pourquoi les personnes ayant vécu l'expérience de la pauvreté siégeront toujours à notre table.
    Nous avons élaboré un programme commun, et il a fallu le modifier. Nous avons volontairement examiné ce qui devait être éliminé, à cette étape-ci, et ce qui devait être ajouté. Un système de mesure partagé est également au coeur de notre réussite. Nos partenaires mesurent leurs activités de la même façon. Par exemple, la régie de la santé a constaté que le coût lié à l'utilisation des services d'urgence par trois personnes sur une période de trois ans pour des raisons non urgentes était de 100 000 $; notre équipe s'est donc penchée sur la façon de rejoindre les gens où ils vivent, et un centre de bien-être a été établi dans l'un de nos cinq districts prioritaires.
    De quoi avons-nous besoin? Nous admettons que le gouvernement ne peut y arriver seul. Nous vous demandons de vous servir de Saint John comme d'un laboratoire. Nous voulons continuer d'apprendre et d'expérimenter afin de bien faire les choses. Cela suppose un financement pluriannuel viable et plus adaptable assorti d'une participation et d'une obligation redditionnelle communautaires. Laissons la collectivité prendre les décisions. C'est ce que nous faisons ici, et ça fonctionne.
    Merci d'être venus à Saint John.
    Je vais maintenant laisser la parole à Penni.

  (0815)  

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je vous souhaite à toutes et à tous la bienvenue à Saint John.

[Traduction]

    Nous n'aurons pas d'effet positif sur la pauvreté si les gens qui l'ont vécue ne sont pas inclus dans le processus et dans la prise de décisions à toutes les étapes et à tous les échelons. De notre point de vue, les privilèges, l'argent et le pouvoir créent de l'exclusion, et ce que nous voulons dire, en fait, c'est que nous ne pouvons apporter de changement et voir une différence si ceux qui ont vécu la pauvreté ne sont pas inclus dès le début. Si nous ne sommes pas à la table, nous ne pouvons pas aider.
    Ce que je sais en tant qu'organisatrice communautaire qui travaille dans l'un des districts prioritaires, c'est que lorsque les gens sont mobilisés, cela change leur vie. J'ai été témoin de changements dans les districts qui sont survenus parce que les gens peuvent voir ce qu'ils ont la possibilité de changer. Il s'agit là, selon moi, d'une participation réelle et gratifiante.
    Ce que nous avons appris des gens qui ont connu la pauvreté, c'est que notre système comporte deux obstacles.
    Le premier concerne la date à laquelle le crédit d'impôt pour enfants est déposé chaque mois. On recommande de changer la date pour le 15e jour du mois. Ce sont là les commentaires de ceux qui vivent cette situation.
    Le deuxième, pour ceux qui ont déjà des démêlés avec le système de justice pénale, est causé par les changements apportés par le gouvernement Harper qui ont eu des répercussions importantes pour ceux qui ont un casier judiciaire. Ces obstacles ont entre autres un impact sur l'accès à l'emploi et aux études postsecondaires et peuvent même vous empêcher de faire du bénévolat à l'école de votre enfant. On recommande de revenir au processus de pardon, que les libéraux ont appuyé avant le gouvernement Harper.
    Si vous voulez des résultats tangibles et des districts revitalisés, vous devez allouer des ressources financières aux travaux visant à réduire la pauvreté à Saint John. En investissant dans les districts, en mobilisant les gens de manière significative et en misant sur des projets, programmes, services et modèles de pratique exemplaire novateurs déjà en place à Saint John, nous pourrons, je crois, accroître notre capacité de mettre en oeuvre les mesures que nous savons efficaces, de mettre sur pied des projets pilotes, de mettre en valeur l'impact collectif, de mesurer les résultats et d'obtenir un rendement social de l'investissement. De plus, nous allons apprendre les uns des autres, qu'il s'agisse de réussites ou de la capacité de dire que nous devons apporter un changement, d'avoir un effet positif en définitive et d'améliorer la vie des gens dans l'espoir de mettre un terme à la pauvreté intergénérationnelle.
    C'est là toute l'importance de faire comparaître une personne comme moi, qui a vécu cette réalité, ici aujourd'hui.
    Je m'appelle Penni Eisenhauer. Merci de m'avoir écoutée.
    Merci.

  (0820)  

    Merci beaucoup, mesdames.
    Nous sommes ravis de vous compter parmi nous également, Penni.
    Nous allons maintenant entendre Shilo Boucher, présidente et chef de la direction du YMCA of Greater Saint John.
    Bienvenue.
    Au nom du YMCA of Greater Saint John, merci aux membres du Comité de me donner cette formidable occasion. Je vous souhaite la bienvenue à Saint John.
    Je travaille au YMCA depuis 10 ans maintenant et je suis présidente et chef de la direction depuis 2011. Avant cela, j'ai travaillé dans le monde des affaires, et je peux vous dire que cela m'a ouvert les yeux sur la grande pauvreté qui sévit ici dans notre ville. Fait plus important encore, je crois, je dois souligner le soutien indéfectible de notre collectivité et sa grande volonté d'améliorer la situation. C'est fondamental. Depuis plus de 10 ans, des groupes communautaires et des chefs d'entreprise travaillent à réduire la pauvreté.
    Au YMCA, nous soutenons 2 400 personnes par année à Saint John grâce à notre campagne de financement annuelle, YMCA Pour nos enfants, qui est axée sur l'obtention de ressources indispensables pour donner aux enfants la possibilité de vivre en meilleure santé et plus heureux aujourd'hui, et dans les années à venir. En fait, mon objectif aujourd'hui est d'attirer votre attention sur l'importance des services à la petite enfance afin de briser le cycle de la pauvreté intergénérationnelle.
    Comme l'a mentionné Randy, Saint John, au Nouveau-Brunswick, affiche le plus haut taux de pauvreté infantile au pays. Dans la partie sud, un centre de services à la petite enfance fondé sur des données probantes exerce déjà ses activités. Parmi les enfants qui le fréquentent, 90 % appartiennent à la deuxième ou troisième génération à vivre dans la pauvreté. De plus, le Nouveau-Brunswick a l'un des taux d'analphabétisation les plus élevés au pays.
    Pour s'attaquer à ces problèmes, le YMCA of Greater Saint John dirige actuellement un centre de services à la petite enfance, qui a été fondé en 2009 dans le cadre d'un projet pilote trisannuel. Notre modèle de centre de services de la petite enfance est différent des autres, puisqu'il n'offre pas seulement des services à la petite enfance, il soutient également la famille. Nous voyons déjà des répercussions positives au sein de notre collectivité.
    En adoptant des approches novatrices fondées sur les districts et centralisant les services destinés aux enfants et aux parents dans des carrefours communautaires, nous avons une incidence plus grande et à plus long terme qui brise le cycle de la pauvreté. Lorsque les services sont éparpillés dans de multiples emplacements et que les parents vivent des difficultés supplémentaires, comme l'analphabétisation ou un handicap, ou qu'ils n'ont pas de moyen de transport, il peut être difficile de se retrouver dans le système.
    Prenons l'histoire de Krystal. Elle est mère de trois enfants, dont un qui souffre d'autisme. Au début, Krystal a visité le centre de services à la petite enfance en raison de l'insistance de son travailleur social. Impressionnée par les membres du personnel, Krystal fréquente notre centre depuis ce jour. Selon elle, le principal avantage tient au fait qu'elle n'a plus à prendre une série d'autobus pour se rendre aux rendez-vous de son enfant. Elle a dit:
J'avais l'impression de toujours courir d'un endroit à l'autre. Bien souvent, j'annulais tout simplement le rendez-vous parce que j'étais trop fatiguée pour y aller. Maintenant, notre spécialiste en intervention précoce, notre orthophoniste, notre ergothérapeute, notre physiothérapeute et nos travailleurs sociaux viennent tous au centre pour nous rencontrer... Je ne manque plus mes rendez-vous.
    En plus, les enfants se portent à merveille.
    Notre modèle de services à la petite enfance est conçu pour aider les familles, comme celles de Krystal, de manière à réduire les obstacles auxquels font face les parents et à donner aux enfants le soutien dont ils ont besoin.
    Près de 90 % de nos enfants bénéficient d'un certain type d'aide financière octroyé au centre de services à la petite enfance, et plus de 50 % des enfants se situent en dessous des cibles liées au développement. Pour régler ce problème, nous assurons la prestation d'un programme gratuit de préparation à la maternelle à ceux qui n'utilisent pas les services accrédités. Nous offrons aussi des ateliers de nutrition adaptés aux enfants et aux parents, qui travaillent ensemble pour en apprendre plus au sujet des aliments sains. Nous offrons aussi de l'information aux parents lorsqu'ils ont besoin d'aide. Nous les mettons en liaison avec des organismes communautaires pour qu'ils aient accès à des banques alimentaires, à des cours de perfectionnement des capacités parentales et à des agents de traitement des cas. Nous pouvons même les aider à remplir des formulaires dans les cas où l'analphabétisme est un problème.
    Le Centre de services à la petite enfance de Saint John a obtenu de nombreux résultats positifs au cours de ses huit dernières années d'activité. Notre capacité s'est élargie; 7 000 familles nous visitent chaque année. Vingt organisations partenaires contribuent aux activités du centre. La cote de préparation adéquate à l'école est passée de 40 % à 80 %. Nous avons augmenté le nombre de programmes de préparation à la maternelle à deux autres endroits, et plus de programmes sont offerts. Nous avons amélioré l'offre de programmes selon les besoins de la collectivité et nous offrons maintenant 17 programmes différents.
    Nous avons atteint ces résultats en travaillant avec des ressources limitées. Pour répondre aux besoins de la collectivité, nous avons besoin de fonds supplémentaires. Actuellement, nos programmes sont en place grâce au soutien du gouvernement provincial et à la campagne YMCA Pour nos enfants. En ce moment, nous ne recevons aucun financement fédéral pour ce programme. En plus de diriger l'élaboration de politiques nationales, le gouvernement fédéral peut fournir un financement grandement nécessaire pour faire en sorte que plus de familles puissent accéder à ces programmes de réduction de la pauvreté.

  (0825)  

    Au cours des semaines à venir, nous soumettrons une proposition de financement fédéral aux fins d'un projet pilote intitulé « Learning Together », qui permettra de vérifier la faisabilité d'un modèle intégrant des services à la petite enfance, des cours de maternelle, l'offre d'un soutien familial et la prestation de services sociaux dans un centre communautaire en milieu scolaire. Nos objectifs sont notamment les suivants: améliorer la préparation à l'école des enfants, améliorer les compétences en lecture et accroître l'accès aux services à la petite enfance pour toutes les familles à faible revenu en offrant un financement complet à toutes les familles qui se trouvent en deçà de la mesure de faible revenu. Le projet s'appuiera sur les travaux du centre actuel en mettant en oeuvre un programme et un modèle de recherche et en créant deux nouveaux centres dans les districts prioritaires.
    Ma collègue, Mme Erin Schryer, parlera du volet de recherche qu'elle supervisera dans le cadre du projet Learning Together.
    Le rendement potentiel du capital investi pour ce programme est élevé. Selon l'économiste Robert Fairholm, les services à la petite enfance de qualité au Canada génèrent 2 $ pour chaque dollar investi, et les avantages sociaux à long terme excèdent les coûts de plus du double.
    De plus, une étude menée par Gina Browne de l'Université McMaster a montré que, parmi les familles monoparentales vivant de l'aide sociale qui avaient reçu des services complets, y compris des services à la petite enfance de qualité, 25 % ont pu cesser d'avoir recours à l'aide sociale, par rapport à 10 % des familles qui n'avaient pas eu accès à ces services. L'étude a montré que l'offre de services complets aux mères seules et à leurs enfants se rembourse en une année. Cela est attribuable à un recours diminué aux services de santé et aux services sociaux et a un plus haut taux de sortie du programme d'aide sociale.
    Il faut des approches communautaires innovatrices qui soutiennent les parents et les enfants pour s'attaquer à la pauvreté intergénérationnelle. Cela nécessitera un soutien du gouvernement fédéral. Des investissements publics dans des initiatives comme le projet Learning Together que nous avons proposé peuvent entraîner une transformation, favoriser l'économie, soutenir les familles et aider les enfants à commencer la vie du bon pied.
    Merci de nous avoir donné cette possibilité. Nous l'apprécions grandement. Nous sommes impatients de poursuivre cette collaboration avec les intervenants tout au long du processus d'élaboration et de mise en oeuvre de la stratégie de réduction de la pauvreté.
    Merci beaucoup.
    Manifestement, j'ai un faible pour le YMCA, puisque j'y ai travaillé durant plus de 10 ans. Je suis très heureux de vous voir ici aujourd'hui. Je sais à quel point le YMCA fait un travail fantastique à l'échelle du pays. Merci.
    Nous avons maintenant une idée de qui sera notre prochaine intervenante. Nous accueillons la directrice générale de Littératie au primaire inc., Erin Schryer.
    Merci, monsieur le président. Je suis heureuse d'être ici aujourd'hui et je vous souhaite à tous la bienvenue ici dans notre merveilleuse ville de Saint John, au Nouveau-Brunswick.
    J'ai obtenu en 2014 mon doctorat en éducation à l'Université du Nouveau-Brunswick, où je continue de participer à un programme actif de recherche à titre d'agrégée de recherche honoraire. Je suis également directrice générale de Littératie au primaire. Nous sommes une organisation provinciale sans but lucratif qui s'attache à promouvoir l'importance de la lecture précoce chez les enfants au Nouveau-Brunswick. Nous desservons actuellement plus de 200 écoles primaires anglophones et francophones à l'échelle du Nouveau-Brunswick et rejoignons plus de 1 200 élèves annuellement.
    Aujourd'hui, j'aimerais commencer en soulignant quatre principes clés que je conseille vivement au Comité de suivre pour élaborer cette importante stratégie.
    Premièrement, vous devez vous fonder sur des données probantes pour étayer vos travaux. Je dois dire que j'ai bien peur que l'expression « fondé sur des données probantes » soit devenue un peu à la mode et qu'elle ait perdu une partie de sa signification. J'incite tout le monde à se rappeler sa signification. Prenons l'alphabétisation comme exemple. Au gouvernement fédéral, les fonds affectés à l'alphabétisation l'étaient habituellement par l'entremise de programmes et d'organismes d'alphabétisation des adultes, même si je soutiens que les niveaux de financement n'ont jamais été aussi élevés qu'ils auraient dû l'être. Toutefois, les données de recherche montrent clairement que la meilleure façon de prévenir les difficultés en lecture est de résoudre les problèmes en bas âge, lorsque les enfants sont à l'école, comme ce que nous faisons à Littératie au primaire. Les approches préventives d'intervention précoce se sont avérées être le moyen le plus efficace d'accroître la littératie au sein d'une population. Les données probantes sont claires; pourtant, les politiques — ou peut-être la façon traditionnelle de faire — n'ont pas suivi.
    Deuxièmement, il faut expérimenter. Lorsque nous avons fondé Littératie au primaire en 2009, de nouvelles recherches aux échelons national et international montraient que des mentors bénévoles en lecture pouvaient soutenir de manière importante l'apprentissage de la lecture chez les enfants, mais nous devions, à partir de ces données, faire des essais ici au Nouveau-Brunswick, puisque chaque administration a ses propres caractéristiques.
    Le Nouveau-Brunswick est la seule province bilingue du Canada, et nous devions créer des programmes en français et en anglais. Environ la moitié de la population du Nouveau-Brunswick vit en milieu rural. Il y a aussi des régions où la pauvreté infantile est extrêmement concentrée, comme ici, à Saint John.
    Grâce aux expériences, des données probantes locales sont recueillies, des améliorations sont apportées, et le nécessaire est fait pour assurer un bon fonctionnement.
    Troisièmement, il faut tenir de choses sur lesquelles nous avons travaillé très fort ici à Saint John et dont Donna a parlé: la coordination et la mise à profit de l'infrastructure, des ressources et du savoir existants.
    Quatrièmement, il faut être innovateur. Nous devons nous servir des données probantes de manières innovatrices pour explorer des avenues; dans le présent cas, il s'agit de réduire la pauvreté. James Heckman, lauréat d'un prix Nobel et économiste, a conclu de façon générale et à maintes reprises que le développement de la petite enfance avait une forte incidence sur la situation sanitaire, économique et sociale des personnes et de la société en général. Il a montré encore et encore que l'investissement dans le développement de la petite enfance pouvait générer d'importants gains économiques, particulièrement chez les enfants démunis et les familles à faible revenu.
    Cela m'amène à parler du projet particulier que j'aimerais mettre en place ici à Saint John dans le cadre d'une stratégie nationale de réduction de la pauvreté. Learning Together est un prototype novateur et fondé sur des données probantes de prestation de services à la petite enfance. Learning Together vise à établir trois lieux de démonstration de services à la petite enfance dans trois régions prioritaires de Saint John qui affichent toutes une grande concentration de pauvreté infantile. Les trois centres travailleront ensemble en tant que volet pleinement intégré d'une stratégie unique englobant la création de programmes, la mise en oeuvre et la recherche. L'un de ces centres existe déjà, et je suis ravie de savoir que vous allez visiter le centre de services à la petite enfance de Saint John cet après-midi. Deux nouveaux centres ont également été proposés.
    On cherche à créer ces centres en réaction aux données probantes, qui montrent clairement que les enfants sont voués au succès ou à l'échec dès leur entrée à la maternelle. Cela est dû aux expériences qu'ils ont vécues durant leurs premières années, avant leur entrée à l'école. Les enfants qui vivent dans la pauvreté ont très peu de chances d'arriver à la maternelle en étant prêts à apprendre et à tirer profit du programme et de l'enseignement. De fait, le rapport de 2014 de l'Institut canadien d'information sur la santé a permis de conclure que même si 26 % des enfants canadiens présentaient des problèmes de développement ou avaient un profil à risque dès leur entrée à la maternelle, plus de 40 % des enfants vivant dans des quartiers défavorisés présentaient un risque à leur entrée à la maternelle, alors que c'était le cas de moins de 10 % des enfants issus de quartiers bien nantis.

  (0830)  

    Au Canada, le lien entre le revenu et la maturité scolaire est très fort, mais il n'est pas nécessaire que ce soit le cas. Des recherches sur l'apprentissage préscolaire ont montré que les enfants qui fréquentent des établissements d'enseignement préscolaire de qualité affichent des taux plus élevés de maturité scolaire et de réussite linguistique et littéraire une fois à l'école et, au bout du compte, des taux plus élevés de mobilité sociale, ce qui leur permet de briser le cycle de la pauvreté pour eux-mêmes et pour leur famille.
    Learning Together comblerait une lacune importante au chapitre des services offerts aux enfants et familles à faible revenu. Au Canada, la garde des enfants est encore traitée comme une marchandise sur le marché. Les parents paient très cher pour faire garder leurs enfants. Les familles vivant dans la pauvreté ne peuvent tout simplement pas se le permettre; ainsi, elles n'y ont souvent pas accès.
    Le programme de recherche que je gérerais si notre modèle était adopté est un volet important de Learning Together qui vise principalement à intégrer les recherches, les pratiques et les politiques relatives à l'apprentissage préscolaire pour améliorer les compétences et la maturité scolaire des enfants à faible revenu. Fait important: grâce à ce travail, nous allons aussi améliorer les connaissances et les compétences des éducateurs et des parents. Les parents sont les premiers enseignants de nos enfants et ceux qui les influencent le plus. Nous ne pouvons pas oublier cela.
    Je veux vous communiquer un dernier message: une crise d'opioïdes sévit au pays. Elle ravage des collectivités et des familles et tue des Canadiens. Le Dr Maté, un spécialiste des soins palliatifs à la retraite, a récemment rédigé pour CBC News une lettre d'opinion intitulée « Fixing fentanyl means treating trauma that creates addicts ». Dans son texte, il aborde l'influence de la petite enfance pour ce qui est de façonner le cerveau et souligne que l'adversité dans l'enfance est au cœur des structures émotionnelles et de la dynamique psychologique qui favorisent la dépendance. Il n'est pas exagéré d'affirmer que, grâce à la prévention, Learning Together a le potentiel d'empêcher l'apparition de futurs toxicomanes.
    Je vous remercie de m'accorder du temps et de tenir compte de ce travail. Pardonnez ma voix chevrotante. Merci.

  (0835)  

    Inutile de vous excuser. Je viens du milieu des organismes sans but lucratif. Je comprends parfaitement ce que vous voyez tous chaque jour. C'est un problème partout au pays. Vous avez soulevé un enjeu qui touche toutes nos collectivités. Nous ressentons tous la même chose.
    Maintenant, nous accueillons la directrice générale de Centraide Saint John, Kings et Charlotte, Wendy MacDermott.

[Français]

    Je vous remercie d'être venus à Saint John et je vous souhaite la bienvenue.

[Traduction]

    Je sers deux collectivités rurales ainsi que Saint John. Notre Centraide a subi un changement assez important au cours des quatre dernières années. Nous étions auparavant un bailleur de fonds habituel, essentiellement un organisme qui signe des chèques. C'était bon, et nous le faisions très bien, mais, lorsque nous avons regardé nos 60 ans d'histoire, nous avons vu que les conditions sociales ne s'étaient pas vraiment améliorées, malgré le fait que nous avions investi 50 millions de dollars sur cette période. Nous avons décidé que quelque chose devait vraiment changer et avons dit: « Commençons par nous-mêmes ».
    Nous avons décidé que nous allions plutôt être un catalyseur. Nous signons encore des chèques — ne vous inquiétez pas —, mais nous le faisons très différemment. Nous le faisons en étant animés d'un nouveau sens des responsabilités. Nous nous concentrons bien plus sur les résultats que sur les transactions, que sur le nombre d'enfants assis à un bureau. Nous nous intéressons bien plus au fait de savoir si ces enfants obtiennent un diplôme ou si une femme ne retourne pas vers une situation de violence pour le reste de la vie de ses enfants, plutôt que de savoir si nous lui avons simplement sauvé la vie un soir. C'est important, et nous ne pouvons pas perdre ces choses, mais nous allons continuer de tourner en rond si nous n'arrêtons pas d'investir de la même manière.
    Nous avons vu notre rôle changer, et nous croyons que le rôle de tous les bailleurs de fonds doit changer. Nous devons tirer profit les uns des autres. Nous devons créer de nouvelles attentes au sein de nos collectivités. Nous sommes motivés par le rendement, en tant qu'humains, en tant que systèmes et en tant qu'organisations, et, si nos attentes sont plus élevées à l'égard de nos organismes communautaires, ils vont faire ce que l'on attend d'eux. Ils auront un bon rendement. Nous avons vu cela se produire à maintes et maintes reprises. Si, en tant que bailleurs de fonds, nous stimulons la mesure des transactions, c'est ce qu'ils ont la capacité de faire, et c'est ce qu'ils vont faire parce que nous le leur avons demandé.
    En tant que bailleurs de fonds, nous devons créer une plus grande discipline et une responsabilité. Sans innovation et discipline de la part des bailleurs de fonds et des fournisseurs de services, les enfants continueront d'avoir faim, et ceux qui sont fragiles continueront de subir des humiliations. Nous devons envisager de briser le cycle. Nous devons cesser de stimuler des projets qui sont indépendants les uns des autres. Nous n'avons pas le luxe de pouvoir continuer de faire cavalier seul en tant que partenaires de financement. Nous devons être interdépendants, si nous voulons apporter ces changements importants. Nous devons harmoniser nos efforts et nos ressources. Nous pouvons tirer profit les uns des autres et miser sur notre argent. Nous pouvons tirer profit de notre expertise.
    Les gens qui comparaissent devant vous sont très ancrés dans leurs organisations respectives et dans les réalités que nous servons.
    Il y a des cycles profondément ancrés, plus particulièrement à Saint John, mais aussi dans de nombreuses autres collectivités de partout au pays. Nous pouvons apporter de gros changements si nous cessons de prendre des décisions de façon isolée les uns des autres et d'être préoccupés par notre propre territoire et notre propre mandat.
    En tant que bailleurs de fonds — et ce n'est pas populaire — nous perpétuons également le chevauchement des efforts. Lorsque notre gouvernement provincial, notre gouvernement fédéral et notre Centraide local prennent des décisions de façon isolée, et lorsque nous finançons diverses organisations afin qu'elles mènent des activités semblables et que personne ne demande à l'autre ce qu'il fait, nous encourageons cette folie. La collectivité ne peut réagir d'aucune autre façon que celle que nous exigeons d'elle.
    En outre, nous devons avoir le courage de dire « non » aux initiatives qui ne peuvent pas faire la preuve qu'elles fonctionnent. C'est afin que nous puissions dire « oui » aux choses qui fonctionnent. Vous avez entendu de multiples exemples de projets qui fonctionnent, mais qui sont grandement sous-financés parce que nous tentons de répartir nos ressources trop limitées. Nous pouvons avoir une incidence, mais pas de la façon dont nous procédions.
    Nous devons également libérer les ressources humaines des organisations locales. Elles courent après leur queue à tenter de répondre à nos exigences redditionnelles. Nous demandons tous des calendriers différents, des exercices différents et des modèles budgétaires différents. C'est de la folie. Elles consacrent une grande partie de leurs précieuses ressources à la comptabilité, à la mesure et aux rapports — souvent elles mesurent des choses qui n'ont pas vraiment d'importance — afin que nous restions satisfaits. Ce n'est pas bien.
    Nous pourrions facilement libérer jusqu'à 25 % de ces capacités. Pour ceux d'entre vous qui ont une certaine expérience en affaires, imaginez cela. Juste comme cela: 25 % de plus. Imaginez un monde où l'organisation d'Erin n'a à rédiger qu'un seul rapport par année, qui est envoyé à tous les bailleurs de fonds. Ces choses dépendent entièrement de notre volonté.

  (0840)  

    Randy et Donna ont tous deux parlé de ce qui fait de Saint John un endroit unique. Nous avons une pauvreté générationnelle profonde, nous avons des familles monoparentales et nous avons une histoire de collaboration exceptionnelle. Il y a certainement des mesures fédérales qui peuvent contribuer grandement à la redistribution de la richesse, mais, dans une collectivité qui a créé une sous-culture de pauvreté, il faut bien plus que de l'argent pour régler des générations d'absence de participation à la population active, de problèmes de santé mentale non traités et, honnêtement, de désespoir. Ces problèmes ne peuvent être réglés qu'à l'échelon local.
    Notre collectivité s'auto-organise depuis plus de 15 ans afin de s'attaquer à ce problème complexe. Ce dont nous avons besoin de la part du gouvernement fédéral, c'est d'un partenaire souple et consentant. Nous savons que la normalisation et la systématisation des choses est la façon de faire de la grosse bureaucratie, mais nous avons désespérément besoin d'innover. Nous devons expérimenter, tout comme l'a affirmé Erin.
    Nous sommes la meilleure partie en ville — au pays — en ce qui a trait à l'innovation et à l'expérimentation. Nous sommes déterminés à briser le cycle de la pauvreté. Nous voulons passer du statut de ville du Canada ayant le taux de pauvreté le plus élevé à celui de ville qui a trouvé comment corriger la situation. C'est quelque chose dont on peut être fier. C'est une histoire à raconter à nos enfants.
    Nous allons le faire en mesurant si nos initiatives fonctionnent et en orientant nos fonds vers ce qui fonctionne, vers l'innovation et la prise de risques fructueux, équilibrés par l'apport des pratiques exemplaires d'ailleurs. Encore une fois, nous avons besoin du gouvernement fédéral en tant que partenaire de notre stratégie locale. Comme cela a été mentionné, le député Long et les membres de son personnel participent activement au travail de notre collectivité, mais il y a des limites à ce qu'un seul député peut faire.
    Désolée, Wayne.
    Nous ne cadrons bien avec aucun ministère provincial ou fédéral. Des problèmes surviennent ici, à Saint John, et, honnêtement, notre échec ou notre réussite sera déterminé ici, à Saint John. En tant que collectivité, nous faisons preuve du courage nécessaire pour prendre des décisions difficiles et parfois peu populaires afin d'obtenir de grands résultats.
    Le fait d'avoir une stratégie en place a donné à mon organisation le soutien dont elle avait besoin, en tant que bailleur de fonds local, pour dire « non » afin de pouvoir dire « oui ». Nous devons créer un fonds d'innovation local qui soit flexible et doté d'un bassin de ressources, afin que celles du gouvernement fédéral, du gouvernement provincial, de la collectivité et du milieu des affaires puissent être déployées de manières stratégiques et assumer une responsabilité importante. Encore une fois, nous pouvons faire ces choses.
    Nous savons que les systèmes d'envergure ont de la difficulté à innover. Nous savons que les gouvernements ne peuvent pas risquer l'échec public. Un fonds local est un moyen indépendant de contribuer à l'innovation locale sans assumer le risque d'échec. En tant que collectivité, nous sommes disposés à assumer le risque, l'impact collectif. Ce serait l'idéal pour les idées qui ne correspondent à aucun ministère, à aucune administration ou à aucun mandat, alors nous vous invitons à devenir nos partenaires de façons nouvelles et folles.
    Je vais vous laisser sur une dernière réflexion. Les représentants de Living SJ vous ont invités à vous rendre en Australie afin de discuter avec les Australiens de la façon d'initier les entreprises à la philanthropie. Comme cela arrive souvent, la conversation tournait autour de l'argent: comment pouvons-nous amener ces sociétés à donner de l'argent à la collectivité? Bien sûr, c'est important, et ce travail comporte une fonction de signature de chèques qui est très importante, mais le milieu des affaires peut apporter beaucoup plus au travail que nous faisons: la discipline commerciale, l'esprit d'entrepreneuriat, l'encouragement de la mesure et l'accent sur le rendement. Ce sont des choses qui nous stimulent au sein de la collectivité.
    Encore une fois, je vous invite à envisager un rôle plus vaste pour le milieu des affaires par la mobilisation et la participation. Le programme Cause pour la cause de Bell est une merveilleuse illustration d'une entreprise qui va plus loin que la simple signature du chèque en suscitant une conversation, ce qu'aucun d'entre nous ne peut faire à l'échelon local.
    Merci.
    Je vous remercie d'être venus.

  (0845)  

    Merci, madame MacDermott.
    Comme je fais ce travail depuis maintenant environ un an et demi, je comprends pleinement vos préoccupations concernant le fossé entre les bailleurs de fonds — ou le gouvernement — et les organisations sur le terrain en ce qui concerne la compréhension de la logistique et des réalités liées à votre budget ou à votre calendrier. J'ai été dans cette position pendant longtemps. Nous nous bousculions pour présenter ces demandes et nous réjouissions lorsque nous obtenions le financement, sans jamais nous plaindre par crainte de ne plus en obtenir.
    Nous devons nous assurer que ces idées sont transmises aux décideurs afin que nous puissions être sur la même longueur d'onde relativement à beaucoup de ces éléments. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant commencer la série de questions.
    Pour six minutes, madame la députée Vecchio, vous êtes la première à avoir la parole.
    Je vous suis vraiment reconnaissante à tous de vous être présentés ce matin et de discuter de ces stratégies avec nous.
    Une chose que j'ai entendue de la part de tous les témoins du groupe, c'est l'appel à l'établissement d'un système d'éducation de la petite enfance. Il y a seulement deux ou trois facteurs que je veux aborder avec vous. Je fais partie des critiques pour le ministère de la Famille, des Enfants et du Développement social. Les gens étudient une stratégie nationale, mais je pense que, souvent, la stratégie en question est tirée d'une collectivité qui est très différente d'une autre.
    Erin, vous avez parlé de pauvreté. Devrions-nous créer un programme national qui est offert à tout le monde, ou bien devrions-nous le cibler? Devrions-nous nous assurer que nos familles à faible revenu disposent de services de garde d'enfants et d'éducation de la petite enfance accessibles et qu'elles touchent cette indemnité différentielle? Certaines provinces sont déjà dotées d'un tel programme. Devrions-nous étudier une stratégie nationale de gratuité pour tous — un peu comme au Québec, où on exige des frais minimes —, ou bien devrions-nous étudier quelque chose de bien plus ciblé?
    Je m'étais un peu préparée à cette question, car, honnêtement, je me bats avec cette notion dans ma propre tête. Comme je l'ai écrit sur Twitter l'autre soir, je dépense plus de 10 000 $ par année pour un enfant. Une partie de la raison pour laquelle nous avons attendu très longtemps — pas très longtemps, mais assez longtemps — pour avoir un autre enfant, c'est que je n'avais pas les moyens de payer pour deux enfants en garderie.
    Je pense que l'établissement d'une stratégie nationale pour la garde d'enfants éliminerait de nombreux obstacles à l'accès. Ma crainte par rapport à une telle stratégie... ou l'élément que je voudrais y ajouter, c'est exactement ce que vous dites. Nos expériences permettent de répondre à des besoins uniques. Les gens qui vivent dans la pauvreté ont des besoins différents de ceux d'autres populations en matière de garde d'enfants. Nous allons devoir répondre à leurs besoins de façon responsable.
    Je tiens de nombreuses conversations avec des familles qui, bien franchement, me demandent — et j'y ai réfléchi relativement au projet que je propose — pourquoi elles devraient envoyer leur enfant aux services de garde. Elles affirment qu'un de leurs membres est à la maison et qu'il s'occupe de leur enfant. Il s'agit en partie de communiquer l'importance non seulement de la garde des enfants — et nous pouvons même penser à cela dans le titre « programme national de garderies » —, mais de l'apprentissage préscolaire. C'est une question de développement familial, avant et après la naissance de l'enfant.
    Quels sont précisément les âges que vous ciblez? Je suis mère de cinq enfants. Ils se portent tous très bien. Ils ont tous eu une expérience différente en garderie, et je défends beaucoup l'idée selon laquelle, si je peux me le payer, je vais me le payer. J'ai regardé la situation du Québec, où il y a une liste d'attente de deux ans et où la qualité est très douteuse; pourtant, le programme est présenté partout au pays comme ce qui a été inventé de mieux depuis le fil à couper le beurre.
    J'examine ces éléments et je me dis que je veux voir cela pour les enfants qui ont besoin d'un coup de main, car je crois en cette approche. Je me demande seulement comment nous pouvons faire cela aussi bien et quel groupe d'âge vous allez commencer à faire entrer en ligne de compte. Certaines personnes sont préoccupées par la possibilité que le programme commence à six mois. D'autres voudraient qu'il commence à trois ans. Quelles sont vos réflexions?

  (0850)  

    Les recherches sont très claires. Plus les enfants passent de temps dans des installations d'apprentissage préscolaire en garderie, plus cela influe sur leur développement. Je sais qu'en Ontario, on offre la prématernelle à quatre ans. Plus particulièrement, dans le cas des enfants qui vivent dans la pauvreté, ce n'est pas une période suffisante pour eux, en raison de tous les désavantages qu'ils pourraient avoir connus durant la petite enfance. Comme je l'ai mentionné, lorsque les enfants arrivent à la maternelle, ils sont déjà orientés vers la réussite ou l'échec en raison de ce qui est arrivé durant leur petite enfance, alors, plus les enfants peuvent rester longtemps en garderie...
    Je milite en faveur d'un service offert de zéro à cinq ans. Compte tenu des politiques du Canada, beaucoup d'entre nous n'ont pas à commencer avant que l'enfant ait environ neuf mois ou un an, mais c'est vraiment toute la gamme. Il ne s'agit pas de commencer à trois ou à quatre ans.
    Je vais passer à Randy.
    Je viens d'une petite collectivité de 300 personnes située dans le sud-ouest de l'Ontario. Bien souvent, quand nous parlons des effets de la pauvreté, nous nous concentrons en réalité sur les centres urbains. La pauvreté dans les régions urbaines est très différente de celle des régions rurales. Quels sont certains des éléments que nous, en tant que comité national, devrions étudier précisément afin de nous assurer qu'au moment de nous pencher sur ces stratégies, nous englobons les régions rurales et urbaines? Quelles sont certaines des distinctions dont nous devrions être conscients?
    De combien de temps disposons-nous?
    Des voix: Oh, oh!
    M. Randy Hatfield: C'est une excellente question, puisque le Nouveau-Brunswick serait considéré comme une province dont la moitié de la population est rurale.
    Une tension s'exerce entre les programmes de soutien nationaux solides et la marge de manœuvre qu'on pourrait utiliser et dont on pourrait profiter si on ciblait les ressources. Comme vous venez d'une petite collectivité, vous pouvez peut-être reconnaître que c'est une question d'échelle, ce qui est souvent très difficile. Saint John compte maintenant 68 000 habitants, et nous connaissons tous les maux sociaux de toute grande région métropolitaine. La question est de savoir comment nous pouvons créer et renforcer les capacités nécessaires pour y faire face. Nous avons un comptoir d'échange de seringues, un refuge pour hommes et un refuge pour femmes. Ce sont tous des éléments fragiles d'une infrastructure que nous tentons de maintenir.
    Il me semble que le transport est un obstacle principal lorsqu'il est question des populations rurales. Je sais que de nombreuses personnes dans ce groupe ont tenté de surmonter cette difficulté et de s'en occuper. Il s'agit d'un obstacle énorme et d'une entrave à la participation, à l'appartenance et à l'obtention de l'accès aux services.
    Les affectations de financement par habitant ne nous servent souvent pas bien. Selon les données du recensement d'hier, le Nouveau-Brunswick compte pour 2,1 % de la population nationale et 10 circonscriptions fédérales. C'est une question de pertinence, d'accès, de pouvoir politique et de ce que peuvent faire les affectations de fonds par habitant. Nous avons besoin d'une certaine marge de manœuvre à l'échelon local. Je pense que les formules de financement différentiel sont quelque chose dont la collectivité a fait la promotion au fil des ans, et, selon moi, il est justifié de le faire. Une école primaire située au centre d'une ville, qui tente de recueillir des fonds et d'offrir la gamme de services auxquels on s'attendrait dans une école publique est très différente au centre-ville de Saint John de ce qu'elle serait si elle se trouvait dans l'une des municipalités de la banlieue, voire même des régions rurales qui l'entourent.
    Il s'agit d'une excellente question. Je n'ai pas de réponse facile. Je pense qu'il y a une combinaison d'un programme national solide... J'ai parlé de l'assurance-médicaments, et je pense qu'au Nouveau-Brunswick, 70 000 familles ne sont pas assurées. Selon moi, il va falloir que ce soit l'une de ces combinaisons.
    Merci beaucoup.
    Monsieur le député Long, vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins d'aujourd'hui.
    Il fait bon d'être chez soi. J'adore voir la passion et la conviction de vos exposés. C'est merveilleux.
    Donc, le chèque est dans la boîte aux lettres...
    Ce n'est pas encore l'année des élections, n'est-ce pas?
    Des voix: Oh, oh!
    M. Wayne Long: J'ai beaucoup de questions à poser, et je m'excuse de ne pas pouvoir m'adresser à tout le monde.
    Madame Eisenhauer, j'ai trouvé que votre discours et votre exposé étaient très bien faits. Je vous en félicite.
    Penni, je vous connais, et je sais certainement que vous travaillez beaucoup à Saint John. Vous avez parlé de gens qui ont du vécu. Parfois, du point de vue du gouvernement, nous avons tendance à nous réunir en comités et à tenir nos séances, et nous faisons des choses en vase clos. Nous ne voulons pas faire cela. Selon moi, dans le cadre de l'élaboration d'une stratégie nationale de réduction de la pauvreté — ce que notre gouvernement est chargé de faire —, il est primordial de faire participer des gens ayant connu la pauvreté. Pourriez-vous nous dire à quel point vous estimez qu'il importe que l'on inclue dans notre stratégie des gens qui en ont fait l'expérience?
    Eh bien, si vous voulez obtenir les réponses, c'est à ces gens qu'il faut parler. Ils sont ceux qui l'ont vécue.
    J'ai connu la pauvreté. J'ai grandi dans une maison de la classe moyenne, mais j'ai été atteinte de maladie mentale et de dépendance. Je suis titulaire de deux diplômes; toutefois, j'ai connu divers styles de vie, qui m'ont amenée vers des poches de pauvreté pendant certaines périodes. Je sais ce que c'est de vivre dans un logement insalubre. Je sais ce que c'est de ne pas avoir assez d'argent pour acheter la nourriture dont on a besoin. Je sais ce que c'est que d'essayer de s'y retrouver dans un système qui veut vraiment tenir les gens dans la pauvreté.
    Je comprends le fait que les gens ne sont pas à l'aise lorsque diverses personnes parlent de ce qu'elles ont vécu. Cela rend les gens mal à l'aise. Par exemple, je peux me présenter ici ce matin. Toutefois, peut-être, que pour une mère ou une personne qui doit amener ses enfants à l'école... 8 heures du matin n'est pas le bon moment pour elle. Je pense que vous devez envisager la mobilisation de façon significative.
    Je travaille pour un collectif, un groupe de chefs de district. Nous nous appelons le « Neighbourhood Action Group » — le groupe d'action de district. Nous avons établi une façon significative de mobiliser les gens relativement aux honoraires. On devrait accorder de la valeur au temps des gens, et j'estime qu'ils sont plus susceptibles de participer s'ils ont accès à des services de garde d'enfants, à un moyen de transport et à de la nourriture et si leur temps a de la valeur.
    Ma recommandation, c'est que nous devons étudier les groupes qui requièrent une expérience vécue de la pauvreté, et nous devons nous pencher sur la façon de mobiliser les gens de façon significative. Pour certaines personnes, c'est très intimidant, alors il pourrait falloir se rendre à des endroits où des gens se regroupent déjà naturellement et tenir une conversation naturelle au lieu de toujours les amener à la table en tant que telle.

  (0855)  

    Merci. C'est excellent. Je souscris de tout cœur à votre opinion.
    Concernant les commentaires de Wendy et de Randy sur l'harmonisation des trois ordres de gouvernement, d'un point de vue fédéral, j'estime fortement — et je pense que c'est aussi votre cas — que beaucoup de changements transformationnels découleront d'initiatives fédérales. Parfois, on peut voir que le gouvernement fédéral veut faire une chose à l'échelle du pays, puis l'argent est transféré aux provinces — que ce soit pour l'éducation, le logement ou quoi que ce soit — et, même si je ne dirais pas que nous en perdrons le contrôle, il pourrait être affecté à des domaines différents qui ne sont peut-être pas une priorité fédérale.
    Randy, dans quelle mesure estimez-vous que l'harmonisation entre les trois ordres de gouvernement est importante? Quels défis et possibilités voyez-vous là?
    Je pense que le principal défi serait d'ordre constitutionnel, c'est-à-dire que le gouvernement fédéral a une capacité budgétaire, et les gouvernements provinciaux, des compétences, et les municipalités vivent avec les conséquences. Il est vraiment difficile d'obtenir l'harmonisation des trois.
    Au Nouveau-Brunswick, la gouvernance municipale est différente de celle des municipalités de votre province. C'est toute une évolution pour ces municipalités que d'intervenir et d'accepter une certaine responsabilité à l'égard des dossiers sociaux et des conditions sociales dans leur collectivité, mais nous commençons à observer ce phénomène, plus particulièrement en ce qui a trait au dossier de l'immigration, maintenant, et les gens considèrent cela comme une réponse à certains de nos défis démographiques.
    Je pense que c'est là la différence, monsieur Long. Quand on a la capacité budgétaire, la compétence et l'expérience de la pauvreté et les conséquences à l'échelon local, il est essentiel qu'elles soient harmonisées et que les parties travaillent ensemble, mais c'est difficile à faire.
    Wendy, avez-vous des commentaires à formuler?
    J'ajouterais — comme je l'ai dit plus tôt — que, selon moi, la possibilité, c'est de créer des bassins de ressources qui réagissent à un plan local.
    Je pense que l'un des problèmes que nous avons en tant que collectivité locale au moment de réagir, même aux intimidantes demandes de propositions du gouvernement fédéral, c'est qu'elles figurent dans le calendrier du gouvernement fédéral lorsque quelque chose est une priorité particulière. Selon moi, les meilleures idées arrivent lorsqu'elles sont lancées à l'échelon local et qu'elles ont été bien réfléchies. Ensuite, une fois qu'elles sont prêtes pour la mise en œuvre dans la collectivité locale, comment pouvons-nous mobiliser le gouvernement fédéral? Les choses se passent vraiment dans le sens contraire. Je vais utiliser une petite illustration.
    En novembre 2016, il y a eu un appel de propositions concernant une étude sur l'itinérance. La violence familiale faisait partie des domaines. Heureusement, en tant que collectivité, nous avions travaillé auprès de quatre organisations afin de créer un nouveau modèle au sujet des façons dont nous allions lutter contre la violence familiale au lieu de compter presque uniquement sur un système d'urgence. Comme nous étions prêts, nous avons pu respecter le délai d'exécution de six semaines afin de mettre au point cette proposition. Si la collectivité n'avait pas déjà été en train de travailler là-dessus... Les collectivités voient les possibilités que présente une grosse pile d'argent fédéral et entendent de petits anges chanter, mais on n'a pas la capacité réaliste d'optimiser cet argent à l'échelon local si on n'est pas en mesure de miser sur quelque chose qu'on tente déjà d'obtenir.
    Il s'agit de changer l'orientation. Voici la stratégie locale, voici ce sur quoi nous travaillons, et voici les priorités, alors comment les gouvernements fédéral et provincial peuvent-ils participer à ce projet et l'appuyer? C'est vraiment dans l'autre direction, que ça se passe à partir du moment où le gouvernement est prêt à libérer de l'argent, puis nous nous bousculons pour tenter de l'obtenir. Encore une fois, les bailleurs de fonds locaux font partie de ce problème, eux aussi.

  (0900)  

    Merci.
    Merci beaucoup.
    Madame la députée Sweet, vous disposez de six minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Bonjour à toutes et à tous.
    Comme je vais poser mes questions en français, vous pouvez mettre l'oreillette pour entendre l'interprétation simultanée.
    Je suis la porte-parole du NPD en matière de logement. Je vais donc me concentrer sur la question du logement puisqu'on n'en a pas beaucoup parlé aujourd'hui. Le logement est vraiment une partie importante du casse-tête et on doit en tenir compte, si l'on veut combattre la pauvreté.
    Y en a-t-il parmi vous qui savent quelle est la longueur de la liste d'attente pour avoir un logement social à Saint John? Avez-vous des chiffres à nous donner à cet égard, que ce soit le nombre d'années ou de personnes?

[Traduction]

    Actuellement, plus d'un millier de noms figurent sur la liste d'attente à l'échelon régional. Il s'agit habituellement d'une demande annuelle qu'il faut présenter afin que votre nom reste sur la liste. C'est très difficile, puisque, à l'intérieur de cette cohorte de gens qui ont des besoins en matière de logement, un certain tri est effectué, certainement dans le cas des personnes qui fuient la violence familiale et de celles qui ont de jeunes enfants. Nous avons un réel problème dans la collectivité en ce qui a trait aux personnes seules non âgées, cette population qui ne correspond à aucun des domaines prioritaires. Il n'est pas rare qu'elles soient inscrites sur une liste d'attente pour une période si longue qu'elles finissent par décrocher ou ne plus vraiment s'attendre à obtenir un logement abordable.
    Le logement abordable est un dossier très difficile. Je sais que M. Dickinson fera partie du prochain groupe de témoins et qu'il formulera des commentaires sur certains des enjeux liés au logement, mais, encore une fois, c'est une question d'échelle.
    Au Human Development Council, nous sommes l'entité communautaire qui œuvre au titre de la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance pour Moncton, Fredericton et Saint John, les trois principaux centres urbains de la province. Il s'agit d'un modèle qui, selon moi, fonctionne très bien. Il englobe la collectivité. Il exige l'intégration d'un plan communautaire relatif aux enjeux de la collectivité dans une demande de propositions. Un comité communautaire détermine l'affectation des fonds, mais, à Saint John, par exemple, moins de un quart de million de dollars par année — environ 220 000 $ par année — sont accessibles pour lutter contre l'itinérance. Même si c'est beaucoup d'argent, ce n'est pas vraiment le cas, et ça complique vraiment les choses, pour les raisons d'échelle que j'ai évoquées plus tôt.
    La liste d'attente pour les logements sociaux et pour les logements abordables est longue dans la région.

[Français]

    Concernant la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance, le Québec préconise une approche consistant à parler aux gens qui connaissent les problèmes et les solutions. Plusieurs personnes en ont d'ailleurs parlé. Il ne faut pas se concentrer sur une approche en particulier. L'approche « Logement d'abord » fonctionne bien, mais il y a plusieurs autres initiatives de prévention. Malheureusement, on a diminué le financement de telles initiatives.
    Est-ce la même chose ici? Aimeriez-vous qu'on adopte une approche plus généraliste par rapport au financement des initiatives de prévention de l'itinérance?

[Traduction]

    Je ne suis pas certain que l'adoption d'une autre approche soit requise, contrairement à l'obtention d'un plus grand nombre de ressources. Je sais que c'est une expression qu'on utilise souvent et que tout le monde aurait besoin de plus d'argent, mais le dossier du logement fait partie des dossiers maudits qui touchent une foule d'organismes gouvernementaux et de ministères. Il est donc très difficile d'aller en profondeur.
    Il est intéressant de regarder les trois principales villes du Nouveau-Brunswick, par exemple, où chaque collectivité utilise sa modeste allocation de manières différentes. Ainsi, à Moncton, il s'agit habituellement de projets d'immobilisations. À Saint John, on souhaite habituellement maintenir les activités d'un certain nombre d'organismes communautaires fragiles. Je suis un adepte convaincu du modèle de la SPLI consistant à englober les collectivités et à leur permettre d'établir leurs priorités, de lancer des appels de propositions et de financer des propositions en fonction de ces priorités communautaires.
    Il serait bien, par exemple, que notre gouvernement provincial puisse verser des sommes équivalant aux allocations fédérales, mais c'est peu probable. Cela n'arrivera pas.

  (0905)  

[Français]

     Monsieur Hatfield, vous êtes le seul parmi les témoins à avoir mentionné que nous sommes en territoire des Micmacs.
    Du côté des populations autochtones, y a-t-il des problèmes particuliers? Devrait-on réfléchir à des solutions différentes pour les populations autochtones de la province et de la ville?

[Traduction]

    Je crois que la province compte 13 nations autochtones. Elles sont réparties de façon inégale dans l'ensemble de la province. Il n'y a aucune réserve, par exemple, près de Saint John, et aucun centre d'amitié dans la ville. C'est très éparpillé.
    Les besoins de la collectivité autochtone sont bien connus et documentés. Des investissements sérieux doivent être faits par tous les ordres de gouvernement pour la population de nos Premières Nations. Je pense que cela ne fait aucun doute. Ce n'est pas ouvert à une discussion ni à un débat. M. Long a parlé de l'harmonisation. Dans ce domaine particulier, il doit y avoir une harmonisation sérieuse des programmes provinciaux et fédéraux.
    Encore une fois, notre système fédéral est imparfait. Nous devons trouver des façons dont les capacités financières du gouvernement fédéral peuvent être harmonisées avec la compétence qui existe dans la province. Nous devons observer au Nouveau-Brunswick l'émergence de municipalités et d'administrations locales qui sont prêtes à intervenir dans les domaines sociaux.

[Français]

    Dans une stratégie antipauvreté, vous voyez également l'inclusion d'une stratégie en matière de logement. Comment verriez-vous la possibilité de travailler sur ces deux éléments ensemble?
    Plusieurs personnes ont dit que tous les niveaux de gouvernement doivent travailler ensemble. On parle d'une stratégie pancanadienne. Toutefois, on sait que les conditions de vie sont très différentes d'un bout à l'autre du pays. J'imagine que la flexibilité et le partenariat entre les différents paliers gouvernementaux, les groupes communautaires et les groupes comme le vôtre seraient quelque chose d'important de même que le financement qui est attribué.
    Aimeriez-vous voir autre chose dans une stratégie en matière de logement?

[Traduction]

    L'une des choses qu'il vaut la peine de prendre en considération, c'est la diversité en ce qui a trait à la propriété et à la location, etc. L'un des aspects de Saint John qui est un peu unique, c'est que près de la moitié de nos logements sont locatifs. Ce sont des logements en très mauvais état qui sont destinés à des personnes à faible revenu, et nous allons en entendre un peu plus parler, encore une fois, au sein du deuxième groupe de témoins, mais il s'agit également un peu d'une norme, à Saint John —, même dans le cas des propriétés qui ne sont pas destinées à des personnes à faible revenu — que la location prévaut. C'est devenu un problème dans la collectivité parce que, selon la norme, si vous en avez la capacité, vous possédez une maison, mais ce n'est pas nécessairement la norme là-bas. Il s'agit d'une petite illustration de la mesure dans laquelle nous avons besoin d'une stratégie nuancée qui ne devient pas une stratégie universelle.
    Le parc de logements de Saint John est ancien, alors cette situation s'assortit de nombreux problèmes. L'autre jour, je discutais avec le maire Darling, et il a mentionné même l'infrastructure physique. On venait tout juste de déterrer un tuyau qui datait à peu près d'avant la Guerre civile. Voilà notre réalité. Elle témoigne des difficultés que Randy a mentionnées en ce qui concerne l'alignement des priorités et des compétences municipales, fédérales et provinciales.
    Merci beaucoup.
    Très rapidement, monsieur Hatfield, vous avez mentionné un millier de noms sur la liste d'attente. Combien de temps faut-il en moyenne pour être retiré de cette liste?
    Je pense qu'après un an on peut revoir leur inscription. Les gens devraient présenter une demande et recommencer. Je pense que de nombreuses personnes ont tout simplement abandonné la liste — honnêtement —, sauf si elles font partie des populations extrêmes ou retenues au triage. Le système est très imparfait.
    Nous observons le même phénomène à Cambridge: 3 000 personnes sont inscrites sur la liste d'attente pour des périodes de cinq à six ans.
    Nous allons passer très rapidement à M. Robillard, pour six minutes.
    Je vais poursuivre cette discussion dans ma langue maternelle, alors gardez vos écouteurs.

[Français]

     Madame Schryer, en tant qu'ancien enseignant, votre organisme m'intéresse beaucoup.
    Votre organisme compte deux programmes, soit Elementary Literacy Friends et Communauté-Littératie-Enfants francophones.
    Selon vous, en quoi ces initiatives contribuent-elles à réduire la pauvreté? Comment pouvons-nous envisager d'incorporer les exemples de vos efforts au sein d'une stratégie pancanadienne de réduction de la pauvreté?

  (0910)  

    Je vous remercie de votre question.

[Traduction]

    Nous nous occupons de deux choses à Littératie au primaire.
    Il y a le dossier de l'alphabétisation. Nous savons que les personnes peu alphabétisées sont plus susceptibles d'être sans emploi, d'avoir recours aux services sociaux et d'avoir des démêlés avec le système de justice pénale. Il y a de nombreuses répercussions qui sont coûteuses pour le gouvernement ainsi que pour la personne elle-même, sur le plan des pertes liées au coût de renonciation. Même de façon générale, il s'agit là d'une facette du problème d'alphabétisation. Au Nouveau-Brunswick, plus de 50 % des adultes anglophones sont peu alphabétisés. Plus de 60 % de notre population francophone sont peu alphabétisés.
    Les faibles niveaux d'alphabétisation empêchent notre province de progresser. Le sujet a fait l'objet de nombreuses discussions récemment. Nous examinons souvent l'alphabétisation et l'économie, et la façon dont l'économie est limitée au Nouveau-Brunswick en raison de nos faibles taux d'alphabétisation.
    Comme je l'ai déjà mentionné, à Littératie au primaire, nous avons examiné des données probantes pour trouver comment aider. À l'époque, en 2009, il existait un mouvement au sein du secteur privé pour faire valoir que nous devions vraiment nous attaquer au problème. Les acteurs du secteur privé affirmaient que la situation touchait leurs profits. Ils n'arrivaient pas à trouver des travailleurs et déploraient l'absence de l'innovation et de l'entrepreneuriat qu'ils souhaitaient voir dans la province. Nombre de leurs plaintes étaient liées à nos faibles taux d'alphabétisation.
    Nous avons examiné les données probantes. Elles montraient que les problèmes en lecture surviennent tôt chez les enfants. C'est vraiment à ce moment qu'il faut s'attaquer au problème. À Littératie au primaire, nous affirmons que si nous réussissons à atteindre nos enfants, et si nous pouvons en atteindre d'autres, nous nous assurerons qu'ils ne quittent pas l'école avant de maîtriser la lecture et, ensuite, nous pourrons faire progresser le taux d'alphabétisation chez les adultes de cette manière en créant un effet domino sur l'économie.

[Français]

    Avez-vous recours à l'alphabétisation sous forme numérique avec les jeunes auxquels vous venez en aide? Votre organisme a-t-il un volet axé sur les nouvelles technologies, afin d'éviter un retard en cette matière chez ces mêmes jeunes?

[Traduction]

    Je crois que je vous ai compris. Votre question concerne la numératie chez les enfants. Est-ce exact? Ce l'est?
    Actuellement, la littératie à laquelle nous travaillons avec les enfants est très ciblée sur la lecture. Nous nous penchons sur la compréhension de textes par les enfants. Il existe des études — et nous les examinons — portant sur la numératie, la culture scientifique et les liens entre les capacités fondamentales en lecture chez les enfants et ces concepts. Les études n'ont pas encore clairement établi ces liens, mais ils existent assurément... J'ai rencontré de nombreuses fois des responsables de différents organismes soutenant les connaissances financières dans la province et des enseignants en mathématiques afin de discuter des façons dont nous pouvons soutenir leurs efforts au moyen de nos activités dans la collectivité.

[Français]

    La coordination des efforts à Saint John par l'entremise de Living SJ a entraîné l'établissement de priorités communes avec les bailleurs de fonds privés et publics.
    Comment êtes-vous parvenus à établir des priorités communes avec ces bailleurs de fonds? Plus important encore, quel impact cela a-t-il pu avoir sur l'atteinte des objectifs fixés par Living SJ?
     Je vous remercie de votre question.

[Traduction]

    Une des choses qui nous ont été extrêmement utiles est le fait que bon nombre des bailleurs de fonds nous ont appuyés dès le début. Nombre d'entre nous — les responsables de la fondation communautaire, de Centraide, du gouvernement provincial, de l'administration municipale — étaient ceux qui affirmaient: « Il faut agir, et c'est à nous de prendre les choses en main. » Nous n'avons pas eu à nous battre pour convaincre les bailleurs de fonds d'adopter une approche différente. Nous tentions de voir par nous-mêmes la façon de nous coordonner. Pour ce qui est des changements, les responsables de Living SJ ont fourni à ceux de Centraide un modèle détaillant les investissements que nous devrions faire et la façon de les faire.
    Nous avons une équipe de vérificateurs qui examine les demandes de subventions. Ils les examinent selon les critères de Living SJ. Nous cherchons à savoir si l'investissement de notre part participera à l'atteinte de l'objectif, qui est l'alphabétisation avant la fin de la deuxième année du primaire. Nous nous penchons sur les objectifs que nous cherchons à réaliser comme collectivité et sur les façons d'y arriver à l'aide de nos moyens financiers.
    Par ailleurs, au lieu de seulement nous pencher sur les sommes que nous octroyons, qui sont importantes dans notre collectivité — nous donnons environ un million de dollars par année —, nous examinons aussi les façons d'obtenir un effet de levier. Nous avons été en mesure d'avancer les premiers 10 000 ou 20 000 $ afin d'assumer une partie du risque initial, puisque, comme bailleur de fonds du secteur communautaire, nous sommes en mesure de le faire pour obtenir du financement du gouvernement provincial afin de mettre à l'épreuve une nouvelle idée ou pour attirer une firme de consultants pour bien analyser notre travail. Nous avons réussi à mettre en oeuvre ces changements grâce à notre approche collective.
    Quand les bailleurs de fonds ne participent pas aux discussions et que vous devez les convaincre par la suite, c'est beaucoup plus difficile. Pour les membres de notre conseil d'administration, Living SJ fait partie de l'ADN maintenant. Il fait partie intégrante de notre programme. Nous en discutons. Cela est aussi important pour préserver ce rôle à l'avenir.

  (0915)  

    Merci beaucoup.
    Monsieur Long, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie à nouveau les témoins de leurs excellents exposés et de leurs réponses.
    Shilo et Erin, je vous ai écoutées avec grand intérêt parler des projets concernant l'apprentissage chez les jeunes enfants et des initiatives qui seront probablement mises en oeuvre dans les trois districts prioritaires de Saint John. En particulier, les programmes parallèles dont vous avez parlé ont soulevé mon intérêt. D'un côté, vous visez l'apprentissage en bas âge, mais de l'autre, des programmes seront offerts aux parents en parallèle.
    Shilo, peut-être pourriez-vous nous parler de ces programmes.
    Merci de votre question, monsieur Long.
    Même si les soins aux enfants et les services de garde autorisés sont très importants pour les familles qui vivent en situation de pauvreté, nous croyons fermement qu'il faut offrir davantage de soutien aux parents. Le projet pilote proposé et celui actuellement en oeuvre dans le district Sud, visent non seulement les enfants, mais aussi les parents, parce que les parents sont les personnes auprès desquelles les enfants retournent chaque jour. Nous essayons de leur permettre d'acquérir des compétences, qu'il s'agisse de compétences améliorant l'employabilité ou de compétences parentales de base, afin de les aider à prendre soin de leurs enfants quand ils reviennent de l'école.
    Voilà ce que nous proposons au moyen de ce modèle: continuer à mobiliser les parents. Je crois que c'est aussi un problème dans ces arrondissements scolaires, étant donné que les enfants fréquentent l'école. Si les parents n'ont pas à rendre des comptes et ne sont pas sensibilisés, ce sont les enfants qui sont perdants au bout du compte, ce qui a aussi des incidences sur leurs apprentissages. Ce modèle vise à mobiliser à la fois les enfants et les parents de différentes façons, individuellement ou ensemble.
    M. Long: Erin.
    Je vais seulement ajouter, pour poursuivre sur l'aspect de tirer avantage des ressources et de l'infrastructure au moyen de programmes parallèles, que nous pouvons offrir un programme dans le district Sud, puis l'offrir dans le district Nord et Ouest, mais d'une façon adaptée à ces districts. L'analyse pourrait révéler des besoins différents d'un district à l'autre, ou les besoins pourraient être les mêmes. Parfois, dans le cadre de nos programmes, un programme à l'intention des parents pourrait être le même dans les trois centres, ou il pourrait varier quelque peu, selon les besoins que nous constatons dans la collectivité.
    En mettant en place trois centres, je crois qu'il est possible de mettre à profit les infrastructures et les ressources existantes et l'apprentissage offert dans les centres. Cela fait vraiment partie des répercussions de la coordination globale. Encore une fois, comme nous l'avons mentionné abondamment aujourd'hui, il faut aussi s'adapter; ce ne sera peut-être donc pas le même programme, en raison de la situation qui prévaut dans chaque district.
    Merci beaucoup.
    Donna, Living Saint John est une organisation impressionnante. De toute évidence, vous avez mis en place vos quatre piliers, si je puis dire. Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, j'aimerais entendre quelques commentaires de votre part concernant la façon dont vous mesurez les résultats. Manifestement, le programme est fantastique, mais je suis aussi un homme d'affaires, et il faut obtenir des résultats et mesurer et surveiller. Pouvez-vous nous expliquer comment vous avez établi les paramètres et les mesures appropriés?
    Je vais revenir aux principes de l'« impact collectif ». J'aurais pu en parler de façon très détaillée, mais ce n'est peut-être pas le bon moment ni l'endroit. Je vous incite à taper « impact collectif » dans Google et à en apprendre un peu plus sur le sujet, parce qu'il s'agit de principes pouvant s'appliquer à bon nombre des problèmes auxquels nous sommes confrontés, non seulement comme ville, mais aussi comme province et pays.
    Je vais mettre en lumière deux aspects.
    D'une part, il s'agit d'établir des objectifs communs. Comme je l'ai mentionné précédemment, ce n'est pas facile d'amener toutes ces personnes passionnées — je devrais aussi souligner que toutes ces personnes sont des partenaires au sein de notre réseau Living SJ — à s'entendre sur des objectifs communs. Nous avons été en mesure de concentrer nos efforts sur quatre piliers qui sont essentiels pour réussir à changer les choses.
    Les mesures de rendement en sont un autre aspect. Nous commençons par nous demander si nous évaluons ce que nous faisons. Wendy a parlé de cet aspect aussi en ce qui concerne la façon dont Centraide, un de nos partenaires, a réussi à modifier son approche et même ses modèles de financement en demandant aux bénéficiaires du financement de rendre compte des résultats obtenus. Le processus par lequel nous réfléchissons attentivement à la façon dont nous allons mesurer et évaluer le rendement dans les faits est très important.
    Nous menons aussi un projet avec Shilo, du YMCA, dont nous mesurons aussi les résultats. Quand nous réunissons nos équipes d'impact collectif, qui ensemble relèvent de la stratégie fondée sur les quatre piliers, la mesure du rendement est toujours un sujet de discussion. Nous essayons aussi d'appliquer des méthodes semblables. Par ailleurs, j'ai la chance d'avoir un membre d'équipe qui a une formation en mesure, en évaluation et en statistique. Parfois, nous menons des sondages, mais nous mesurons les résultats de différentes façons. Nous ne pouvons pas gérer et modifier ce que nous ne pouvons pas mesurer, donc il s'agit d'un de nos principes fondamentaux.

  (0920)  

    Très rapidement, Randy, chaque fois que vous parlez, vous m'épatez par vos connaissances et votre passion. Manifestement, nous sommes ici en tant que comité en vue d'aider le ministre à établir une stratégie de réduction de la pauvreté. J'aimerais apprendre de vous. Que feriez-vous en premier si vous étiez à notre place?
    Vous blaguez.
    Vous avez 20 secondes.
    Vingt secondes?
    Nous mobiliserions la collectivité en fonction des expériences vécues. Je crois que Living SJ est un bon porte-parole pour la collectivité de Saint John au moment de présenter les priorités qu'elle a établies. Je crois que nous devons être plus confiants. Nous devons appliquer une approche semblable à celle utilisée dans le cadre de la SPLI aux mécanismes de financement. Je suis en faveur d'offrir du financement à l'échelle locale aux responsables d'une collectivité qui ont établi leurs priorités et qui sont prêts à prendre des décisions difficiles concernant le financement et à en assumer les conséquences.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    La parole est au député Zimmer pendant six minutes.
    Merci de témoigner devant le Comité aujourd'hui. Nous sommes enfin arrivés hier soir vers 1 h 30, mais nous voilà.
    J'aimerais souligner que l'étude porte sur les « stratégies de réduction de la pauvreté ». Elle ne porte pas sur une stratégie d'atténuation de la pauvreté. Elle ne porte pas sur une stratégie de continuation de la pauvreté. Elle porte sur une stratégie de réduction.
    Wendy, je crois que vous tenez quelque chose, parce que vous avez mentionné que d'importantes sommes ont été distribuées, mais que, en dépit de cela, nous voici réunis. Je crois qu'Erin a aussi mentionné quelque chose à ce sujet, soit que nous faisons encore du surplace en ce qui concerne la pauvreté, si c'est le terme que vous souhaitez employer. Je crois que cela ne reflète pas l'importance que le sujet mérite, mais bon.
    Ce qui me préoccupe, c'est la façon de la réduire. Réduire la pauvreté veut dire examiner de nombreux facteurs. Pour ma part, il s'agit d'examiner la structure familiale et d'établir si un membre de la famille a un gagne-pain. Dans les faits, comment réduire la pauvreté et comment changer les choses?
    Wendy, ma question s'adressera à vous, parce que vous avez relevé cette situation. Je crois que vous avez dit que vous avez émis des chèques et que vous ne souhaitez pas que les choses continuent de la même façon. Vous voulez voir des changements. Quelles sont les trois choses que vous feriez, si vous le pouviez, pour réduire la pauvreté?
    Pour ma part, il s'agit vraiment de briser les cycles. Nous connaissons les cycles. Il s'agit de tenir compte des données probantes montrant ce qui fonctionne vraiment. Encore une fois, ce sujet n'est pas populaire et ne s'adresse pas aux coeurs sensibles. Nous avons encaissé des coups importants au cours des quelques dernières années à la suite de la mise en oeuvre de ces changements importants.
    Je vais donner un exemple. Plus tôt, j'ai mentionné la violence familiale. Le modèle des refuges d'urgence a été créé dans les années 1970 comme mesure provisoire. C'est très bien pour offrir un endroit sécuritaire aux femmes pendant 30 jours. Au cours des quelques dernières années, nous avons commencé à effectuer un suivi sur le nombre de femmes dans les refuges qui avaient déjà séjourné dans un tel endroit auparavant. Nous pouvons mesurer le cycle, et il s'agit de 50 % des femmes. Cinquante pour cent des femmes qui ont séjourné dans un refuge l'année dernière avaient déjà séjourné dans un refuge auparavant. Ce nombre ne tient pas compte des séjours répétés.
    Si nous cherchons à briser le cycle... Nous savons aussi que les données probantes montrent que si vous avez grandi dans un milieu violent, vous êtes cinq fois plus susceptibles d'être une victime ou un agresseur. Voilà le cycle. Nous devons intervenir différemment. D'un autre côté, nous avions un organisme de charité, extrêmement sous-financé, géré par une seule personne, qui accompagnait des femmes pendant 18 mois dans une résidence. Cet organisme a relevé que 95 % des femmes avaient quitté leur conjoint violent pendant 12 mois consécutifs. Il y a des seuils. Selon des travaux de recherche, si vous partez pendant une période assez longue, la probabilité que vous retourniez commence à diminuer.
    Il existe différents types d'interventions, mais nous avons créé des modèles complets fondés sur un système en cas d'urgence. Je ne dis pas que nous ne devrions pas financer des refuges ni que les situations d'urgence ne sont pas véritablement urgentes. Elles le sont. Toutefois, tant que nous continuons à adopter la même approche qui est celle la plus coûteuse et la moins efficace... c'est ce que nous faisons dans le système de justice pénale et dans les urgences. Chacune des interventions les plus coûteuses peut être prévenue pour un grand nombre de personnes, et nous pouvons éviter les coûts financiers et sociaux, simplement en veillant à ce que les enfants ne grandissent pas dans ces terribles situations.

  (0925)  

    L'autre analogie que j'avais écrite est que nous continuons à tenter d'éteindre l'incendie au lieu de le prévenir. Ma question porte sur la structure. Vous me semblez être une personne qui planifie ce qu'elle doit faire. Si vous pouviez élaborer une stratégie de réduction de la pauvreté au Canada, à quoi ressemblerait-elle? Six minutes ne seront assurément pas suffisantes pour répondre à cette question... En quoi consisterait cette stratégie? Avez-vous établi un plan qui fonctionnerait partout au pays? Vous avez parlé de différentes choses.
    Je vais m'expliquer un peu. Je suis un ancien enseignant et je faisais partie d'un excellent arrondissement scolaire qui sortait vraiment des sentiers battus. La chose qui me frustre — et Erin l'a mentionnée —, c'est que nous continuons à faire les choses de la même façon que nous les avons toujours faites. Que nous ayons un problème d'alphabétisation et que nous ayons des enfants qui fréquentent l'école pendant 12 ans me semble bizarre parce qu'ils passent tout ce temps à l'école... J'ai appris à lire à l'école, alors pourquoi y a-t-il des enfants qui n'y arrivent pas? Je vois certaines des choses que mes enfants rapportent à la maison. Ils racontent de merveilleuses histoires en revenant de l'école, mais ils ne peuvent pas accomplir les choses simples de la vie. Une partie de ce problème est l'adaptation. C'est ce que j'essaie de dire. Vous devez être flexible pour faire des choses qui sont efficaces.
    Je vous demanderais de vraiment envisager d'établir un plan et de le présenter au Comité parce que vous avez déjà commencé. Je vous mets au défi de nous donner l'ensemble de votre plan. Si vous pouviez le faire, que feriez-vous?
    Erin, je veux revenir à vous concernant l'alphabétisation et ce que je disais à ce sujet. Encore une fois, cela m'a toujours frappé. Pourquoi l'alphabétisation pose-t-elle problème maintenant? Nos enfants passent beaucoup de temps à l'école. Quelle est votre réponse?
    Malheureusement, dans le système d'éducation et chez les chercheurs en éducation, il y a un grand fossé entre la recherche en éducation et la pratique, ce qui se passe dans les écoles. Il est regrettable que, dans les écoles, cela ait contribué à ce que beaucoup de choses ne fonctionnent pas nécessairement — je crois que nous poursuivons sur le même thème ici —, mais c'est ce que nous savons et ce que nous faisons, alors la pratique demeure inchangée. Il existe des exemples de cette réalité partout, comme en ce qui concerne l'alphabétisation. Je l'ai vu dans le cadre de ma propre recherche. La pratique et ce que nous constatons dans la littérature de recherche ne concordent pas.
    Je déteste simplifier les choses, mais c'est un secteur important, et c'est quelque chose sur quoi mon organisation travaille avec le gouvernement provincial afin qu'on en parle. Comment pouvons-nous fusionner ce qui se passe? Nous avons effectivement plusieurs facultés d'éducation. Nous avons plusieurs personnes qui examinent précisément le domaine de l'alphabétisation et l'apprentissage précoce de la lecture.
    Comment pouvons-nous fusionner ces deux domaines dans le but d'effectuer une recherche sur ce qui est efficace dans une salle de classe et d'envisager de faire certaines démonstrations, comme ce que nous proposons ici avec Apprendre ensemble? Cela signifie retourner dans les écoles et examiner le préscolaire. Quelles sont les activités que nos éducateurs préscolaires pourraient faire avec les enfants afin de les préparer à l'école? Le genre de choses que les enfants doivent savoir et ce que les professeurs peuvent faire sont très bien établis dans la littérature de recherche. Comment pouvons-nous rapprocher ces deux aspects?
    C'est fantastique. Merci beaucoup.
    Il ne nous reste que très peu de temps, mais je veux laisser le mot de la fin au député Sweet pour quelques minutes. Allez-y.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    On a parlé de la capacité fiscale du gouvernement fédéral de financer des projets. Madame Gates, vous avez parlé de financement pluriannuel.
    Des gens de la FCM ont dit que les projets devraient être financés à long terme, mais ils parlaient de huit ans. Croyez-vous que ce nombre d'années est pertinent? C'est ma première question, et elle s'adresse à Mme Gates.
    Ma deuxième question s'adresse à tous ceux qui veulent y répondre. Si vous aviez une priorité ou une urgence à faire part au gouvernement fédéral, quelle serait-elle?

  (0930)  

[Traduction]

    Merci.
    Vous vous demandiez si je croyais que huit ans suffisaient concernant le financement pluriannuel. J'aimerais voir 10 ans. Je le crois. Je pense que, sur 10 ans, nous pourrions en réalité voir une différence. Ce serait ma recommandation.
    Une chose est certaine, je crois que ce que nous démontrons ici, c'est que nous savons tous non seulement comment travailler ensemble, mais comment tirer parti du financement. Si nous pouvions utiliser Saint John, comme je l'ai mentionné, comme laboratoire, pour être en mesure d'avoir des petits groupes de personnes concentrées sur les quatre piliers clés et les étudier, nous pourrions envisager d'élargir l'étude pas juste au sein de notre province. Comme Randy l'a mentionné, le Nouveau-Brunswick pourrait être lui-même un laboratoire fantastique vu sa structure rurale et urbaine. J'aimerais que cela se produise. Ce serait mon souhait.

[Français]

    Y a-t-il quelqu'un d'autre qui veut énoncer une priorité? Je m'adresse à tous les témoins.

[Traduction]

    Je n'en ai pas un, j'en ai deux — les deux que j'ai mentionnés —, et ils sont simples.
    Le premier, changer le crédit d'impôt pour enfants. Le déplacer du 20e jour du mois au 15e jour du mois. C'est simple.
    L'autre est le casier judiciaire. Il faut retourner à sa version antérieure, soit le système de pardon. Le gouvernement Harper a vraiment rendu un mauvais service aux gens. La suspension de casier judiciaire coûte très cher, et celle-ci vous tient en otage parce qu'elle renferme votre nom. Si vous récidivez, elle revient vous hanter. Les gens ne peuvent pas chercher un emploi, aller à l'école ou même faire du bénévolat avec un casier judiciaire. J'ai entendu dire qu'il s'agit simplement d'une modification informatique.
    Merci.
    Je crois que nous devons porter attention au groupe intermédiaire de personnes dont j'ai parlé. Les personnes âgées semblent avoir une sécurité du revenu adéquate. Les enfants sont maintenant couverts. Compte tenu de la nature changeante du travail, de l'intelligence artificielle, de l'utilisation de robots et de l'économie mondialisée, nous allons avoir un certain nombre de personnes pauvres qui travaillent. C'est donc ce segment intermédiaire de personnes, les personnes de 18 à 64 ans, qui ont besoin d'un niveau adéquat de revenu parce que la pauvreté est une mesure du revenu.
    Nous avons parlé de l'éradication, de la réduction ou de la prévention de la pauvreté. Nous utilisons une mesure du revenu. Vous devez donner de l'argent directement aux personnes si vous voulez baisser le taux de pauvreté. Je penserais que c'est la cohorte intermédiaire actuelle qui doit être examinée attentivement, car l'économie change très rapidement.
    Merci beaucoup.
    Malheureusement, je dois nous garder sur la bonne voie. C'est en quelque sorte mon seul travail ici — ou en réalité, c'est son travail à elle — de m'assurer que nous respectons l'horaire imparti.
    Je veux effectivement vous remercier tous sincèrement d'être venus tôt ce matin et d'avoir répondu à nos questions... très bien, d'ailleurs.
    Vous avez remarqué que je n'ai pas dit une seule fois « St. John's ».
    Des voix: Bravo!
    Le président: On m'a dit qu'on me le ferait payer cher si je le faisais.
    Je crois que Saint John est entre bonnes mains avec des personnes comme vous sur le terrain. Il nous revient de nous assurer que vous avez les ressources pour faire le travail que vous faites, et je vous en remercie sincèrement.
    Nous allons interrompre brièvement la séance. Si vous voulez bien me le permettre — nous n'avons pas la chance de voyager très souvent —, j'aimerais prendre une photographie avec tout le monde. Ne quittez pas la salle, mais je devrai suspendre les travaux afin d'être en mesure de prendre une photographie.
    Nous allons interrompre la séance pendant environ 15 minutes et nous reviendrons avec notre prochain groupe de témoins.
    Merci beaucoup.

  (0930)  


  (0950)  

    Bienvenue à tous.
    C'est un très grand plaisir d'être ici. C'est notre deuxième groupe de témoins aujourd'hui. Pour les personnes qui n'étaient pas ici au tout début, je vous dirais seulement que nous sommes arrivés cette nuit vers 1 h 30 et que nous étions debout tôt ce matin. Si nous commençons à nous endormir, veuillez nous pardonner, mais vous aurez toute notre attention au cours de la prochaine heure et demie.
    Je suis très heureux d'accueillir Kit Hickey, directrice exécutive, de Housing Alternatives Inc. Nous recevons aussi Jody Kliffer, à titre personnel, Anthony Dickinson, président, de l'organisation The ONE Change Inc., Althea Arsenault, de la Société d'inclusion économique et sociale qui remplace Stéphane Leclair, gestionnaire, développement des ressources, et Daniel Shoag — le nouveau meilleur ami de Karen —, professeur adjoint, de la Harvard Kennedy School.
    Bienvenue à tous. C'est un plaisir d'être ici. Nous allons de l'avant avec notre étude sur les stratégies de réduction de la pauvreté. Nous nous concentrons, dans le cadre de notre voyage pancanadien, sur les volets du logement et des districts. Je suis très heureux de vous voir tous ici.
    Nous allons commencer. Chaque témoin aura environ sept minutes. Lorsqu'on s'approchera de la septième minute, je vais lever la main. Je ne vous dis pas d'arrêter; seulement, commencez à conclure votre témoignage.
    Nous allons commencer par Kit Hickey, de Housing Alternatives Inc., s'il vous plaît.
    Vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup de m'offrir la possibilité d'être ici ce matin.
    J'aimerais — parce que j'ai effectivement reçu mon chèque — remercier spécialement le député Long de tout le travail que son personnel et lui-même font ici à Saint John. Nous l'apprécierons vraiment.
    Je m'appelle Kit Hickey et je suis directrice exécutive de Housing Alternatives. Notre organisme est un groupe accrédité de ressources sans but lucratif qui fournit, à l'échelle nationale, des services de développement et de gestion à des projets de logement coopératif sans but lucratif ici à Saint John et dans la région environnante. En outre, nous offrons aussi des logements et d'autres services connexes à notre population d'itinérants au moyen d'un projet de départ organisé financé par le gouvernement provincial, et nous exécuterons le projet Logement d'abord financé par le gouvernement fédéral.
    Nous sommes de plus en plus inquiets de la viabilité à long terme du secteur du logement coopératif de Saint John. Une préoccupation importante tient à l'expiration des accords d'exploitation et à la façon dont nous pouvons assurer l'abordabilité à long terme des logements pour les familles à revenu faible ou modeste et les adultes célibataires.
    En octobre 2012, la Fédération de l'habitation coopérative du Canada et Housing Alternatives ont organisé une réunion et invité des membres des neuf coopératives de logement de Saint John. Les membres ont constaté que chaque coopérative faisait face à des problèmes similaires, comme des difficultés financières, un manque de fonds réservés aux réparations majeures, le fait d'assurer le maintien dans les lieux de membres à revenu faible ou modeste et la faible participation des membres.
    Il a été décidé qu'il serait essentiel de travailler ensemble afin que nos coopératives demeurent fortes et saines. Notre groupe a adopté le principe coopératif international de « collaboration entre coopératives » et a commencé son cheminement. On a formé un comité directeur composé de représentants de chacune des neuf coopératives de logement. On a demandé à chaque membre du comité directeur d'obtenir de sa propre coopérative la permission de faire partie du comité, et tous les membres ont convenu de rendre des comptes régulièrement à leur coopérative.
    En avril 2014, au cours d'une réunion visant à établir des objectifs, le groupe a décidé que l'objectif du comité serait d'explorer des possibilités concernant les coopératives de Saint John afin que les coopératives travaillent ensemble en examinant l'impact de la consolidation. Les objectifs du comité comprenaient une analyse financière de toutes les coopératives participantes, l'élaboration et le maintien d'un plan de communication, des discussions sur les avantages et les inconvénients d'une fusion possible, l'examen d'autres pratiques exemplaires et fusions réussies et des discussions à ce sujet et des réunions avec des intervenants pour élaborer un processus de fusion.
    Une fois l'analyse terminée, il est devenu clair qu'en fusionnant, les coopératives constateraient les avantages suivants. Il y aurait d'abord des épargnes financières, y compris une diminution des frais de vérification; une réduction des primes d'assurance; des options d'achats en masse; des appels d'offres de groupes pour l'enlèvement de la neige et l'entretien du gazon; et une réduction des risques liés aux coûts concernant les postes vacants et les arriérés. Il y aurait aussi un intérêt accru pour des rôles de leadership; une prévention de l'épuisement professionnel de membres du conseil; une participation accrue; plus de temps et/ou de financement consacré à l'éducation; et une augmentation des nouvelles idées et directives en ce qui concerne la coopérative. Parmi les autres avantages, mentionnons une voix collective plus forte pour se faire entendre du gouvernement, une capacité de refinancer les réparations des biens d'équipement, un plus grand bassin de logements et la capacité d'explorer de nouvelles possibilités.
    Les échecs des coopératives sont plus susceptibles de se produire lorsque la taille d'une coopérative menace sa capacité d'avoir une bonne gouvernance et gestion. Après avoir fusionné plusieurs coopératives et créé une coopérative forte et viable, l'Unified Saint John Housing Co-operative réduit la menace de perte de logements qui pèse sur le secteur coopératif de logement canadien. Nous protégeons aussi le logement abordable à Saint John et offrons un modèle positif destiné aux autres coopératives partout au pays afin de nous assurer d'éviter la perte de logements abordables.
    Le 1er janvier 2016, huit de nos coopératives ont fusionné pour former une seule nouvelle coopérative de 252 logements qu'on appelle maintenant l'Unified Saint John Housing Co-operative Ltd. Chacun des districts des coopératives de logement précédentes est représenté au conseil d'administration. En mai 2016, la coopérative de logement a reçu le Prix de l'excellence coopérative de la Fédération de l'habitation coopérative du Canada à la réunion annuelle tenue à Hamilton, en Ontario.

  (0955)  

    En terminant, les membres de la nouvelle coopérative de logement se sont déclarés très satisfaits. Nous sommes convaincus que, au moyen de cette mesure préventive prise par le secteur, la viabilité et la durabilité à long terme de ces logements abordables sont assurées. Nous sommes fiers de voir qu'il s'agit d'un exemple de la façon dont notre collectivité assure un rôle de leadership en réglant des problèmes de manière novatrice.
    Merci beaucoup.

  (1000)  

    Merci.
    Nous allons maintenant passer à Jody Kliffer.
    Vous avez sept minutes, monsieur.
    Merci au Comité de m'offrir la possibilité de vous parler aujourd'hui de la réserve foncière.
    À titre d'information, il s'agit d'une recherche que j'ai effectuée à l'école des études supérieures, à l'Université de la Colombie-Britannique, en 2007. C'est pourquoi je suis ici aujourd'hui à titre personnel. C'est quelque chose qui vient de mon passé et m'a suivi sans cesse pendant sept ans. Je suis donc ici pour vous parler de certains des points saillants de la réserve financière comme outil utilisé partout en Amérique du Nord.
    Essentiellement, lorsque vous pensez à la propriété, elle tend à se manifester de différentes façons. Lorsque nous pensons à des solutions à la pauvreté, nous devons adopter une approche holistique qui fait appel aux composantes de la santé, et de l'éducation et de l'emploi, mais aussi à l'environnement bâti et à la façon dont la pauvreté a frappé nombre de nos collectivités et districts.
    La pauvreté à Saint John, comme dans de nombreuses collectivités, est concentrée dans des zones, ce dont vous avez probablement entendu beaucoup parler aujourd'hui. Particulièrement dans l'est du Canada, ces districts comportent un parc immobilier vieillissant. La SCHL nous dit que tout ce qui a été construit avant 1930, soit essentiellement tous les immeubles du coeur urbain de Saint John, a très souvent besoin de réparations. Ce ne sont pas tous les immeubles qui doivent être réparés, mais ils font partie de la catégorie des immeubles construits avant 1930.
    Comme certaines de ces collectivités ont vécu un déclin au cours des 50 dernières années, pour différentes raisons, ce qui tend à diminuer, c'est la fierté communautaire, les recettes fiscales des villes et des provinces, la sécurité de ces collectivités et le réinvestissement dans les propriétés adjacentes latérales ou les propriétés dans une zone similaire parce que le secteur privé n'a aucune confiance dans ces propriétés. Ce qui augmente en même temps, c'est le coût des ressources de la ville pour envoyer des véhicules d'intervention d'urgence afin de maintenir l'ordre dans ces districts... des camions d'incendie, des ambulances, etc. Le délabrement des immeubles s'accentue aussi dans ces collectivités, comme les taux de criminalité. Le cycle de déclin entre dans une phase très marquée, et il est difficile de l'endiguer sans mener une réflexion stratégique.
    Comment le déclin survient-il habituellement? Comme nous le savons, un propriétaire d'un immeuble peut ne pas être en mesure de payer son hypothèque pour différentes raisons, qu'il s'agisse d'un propriétaire foncier absent qui ne voit plus la valeur du rendement du capital investi de sa propriété ou d'un propriétaire foncier qui, peu importe ses raisons personnelles, est incapable d'effectuer ses versements hypothécaires. Les taxes s'accumulent sur cette propriété. Elle finit par être abandonnée, et le cycle de détérioration commence si la propriété n'a pas déjà commencé à se détériorer et si elle est saisie. Elle est ensuite mise en vente pour défaut de paiement des taxes foncières. Ce processus dure environ sept ans ou est parfois plus long, et, pendant ce temps, on n'a pas réinvesti dans la propriété. Au fil du temps, le rendement du capital investi de ces propriétés devient encore plus médiocre.
    Alors, qu'est-ce qu'une réserve foncière et comment permet-elle de régler ces problèmes? La mission d'une réserve foncière est de restaurer l'intégrité et la fierté communautaire de ces districts et de stabiliser le processus de déclin. Dans un moment, nous allons parler de la façon dont elle y parvient. Il s'agit d'une stratégie qui porte sur la pauvreté de nos environnements bâtis qui créent les conditions physiques de la pauvreté qui nous entoure. On a commencé à utiliser la réserve foncière au Michigan en 2001, je crois, dans une ville appelée Flint, mais Détroit l'a plus tard adoptée, et maintenant on l'utilise partout en Amérique, de San Francisco, à St. Louis en passant par Cincinnati et presque tous les centres urbains importants qui doivent composer avec une forme d'abandon des immeubles. Elle a été une méthode stratégique très utile pour trouver une nouvelle utilisation des propriétés et des immeubles dans les collectivités et stabiliser le processus de déclin. Bien qu'on ne l'utilise pas encore au Canada, je crois qu'elle pourrait être une nouvelle stratégie potentielle que nous pourrions examiner.
    La structure de la réserve foncière est habituellement celle d'une organisation quasi gouvernementale composée d'environ neuf membres; deux ou trois membres sont habituellement des politiciens afin de favoriser la transparence de la réserve foncière. C'est un organisme sans but lucratif. Elle examine des propriétés immobilières de la ville où on l'utilise et essaie d'attribuer une valeur à ces propriétés auxquelles le marché immobilier traditionnel ne s'intéresse plus. Essentiellement, elle examine les propriétés délaissées par tous.
    Comment fonctionne-t-elle? Elle comporte trois volets. Elle acquiert des terrains parfois dans le cadre d'un achat ou d'un legs. Souvent, il s'agira d'une personne qui ne veut pas en réalité posséder une propriété parce qu'elle vient d'en hériter ou que la propriété n'a aucune valeur à ses yeux. La réserve foncière a l'unique capacité d'exproprier des terrains si la situation le permet; aux États-Unis, ce pouvoir lui est conféré par l'État.
    Le deuxième volet porte sur l'entretien du terrain. La réserve financière crée des espaces verts. Si l'immeuble est irréparable, on le démolit et on crée un espace vert qui remplace un immeuble délabré. On peut y aménager un potager communautaire qui produira de la nourriture pour la collectivité et restaurer les immeubles qui sont en assez bon état.

  (1005)  

    Le troisième volet d'une réserve foncière consiste à se départir de terrains. Elle ne les acquiert pas pour les conserver à jamais; elle sert plutôt à revaloriser le terrain et à le repositionner sur le marché. Une réserve foncière pourrait s'adresser à des organismes de logements abordables et leur offrir des terrains contigus à celui de voisins, une fois que le bâtiment a été détruit et que le terrain est devenu un espace vert. Par ailleurs, le terrain pourrait devenir un nouveau lotissement si la réserve foncière a été en mesure d'acheter plusieurs terrains adjacents. La réserve foncière peut repositionner sur le marché la propriété à des fins de vente.
    Habituellement, un des pouvoirs requis d'une réserve foncière aux États-Unis est le pouvoir de radier l'impôt foncier. Souvent, un obstacle au réinvestissement dans la propriété est l'accumulation de taxes depuis de nombreuses années. Une réserve foncière a le pouvoir d'éliminer ces taxes. Un autre pouvoir requis est celui d'éliminer le titre d'un bien-fonds. La plupart du temps, particulièrement dans les vieilles villes où il y a eu des successions et des terrains transmis par héritage, le titre peut être la source d'une grande confusion au fil du temps, et c'est un obstacle au réinvestissement. Une réserve foncière a le pouvoir, comme je l'ai mentionné, d'exproprier le terrain, pouvoir qui lui est accordé par l'État. Les décisions sont prises par le comité lorsqu'il est approprié d'exercer ce pouvoir. Une réserve foncière peut accélérer le processus de forclusion, alors au lieu de prendre sept ou huit ans, le processus dure environ deux ans. L'immeuble en question n'atteint pas un état critique de déclin. Une réserve foncière peut aussi faire en sorte qu'on peut prendre des décisions rapidement. Elle n'a pas à faire approuver ses décisions par un organisme gouvernemental, comme un conseil municipal. Elle est habilitée à prendre ses décisions seule au moyen de sa propre structure de gouvernance.
    Les avantages qui découlent d'une réserve foncière ont été importants dans de nombreuses collectivités qui l'utilisent aux États-Unis. Il y a d'abord l'embellissement de districts en tant que tel. La réserve foncière a stabilisé le déclin des collectivités dans lesquelles on l'utilise. Dans de nombreux cas, on engrange de nouvelles recettes fiscales relativement aux immeubles reconvertis. Cela fait en sorte que les rues sont plus sécuritaires. Il y a plus de logements abordables qui sont remis à des organismes actifs dans ce portefeuille. On a conservé nombre d'immeubles du parc immobilier vieillissant parce qu'au lieu de les laisser à l'abandon, la réserve foncière peut stabiliser ce processus plus rapidement et retourner les biens à la collectivité. Dans certains cas, elle améliore l'approvisionnement alimentaire de la collectivité, car on tend à y aménager davantage de potagers communautaires.
    Le financement d'une réserve foncière est obtenu au moyen de financement de démarrage qui vient du gouvernement ou d'organismes sans but lucratif. Elle peut exercer ses activités parce qu'elle ne paie pas de taxes sur les propriétés qu'elle possède. Une source de revenus bénéfique à la réserve foncière est l'augmentation de taxes applicables à des propriétés reconverties à des fins d'utilisation dans le secteur privé. Pendant cinq ans après la reconversion d'une propriété, la réserve foncière conserve les taxes accrues qui sont perçues. Ces sommes vont donc à la réserve foncière pendant cinq ans jusqu'à ce que la propriété retrouve un statut ordinaire. La réserve foncière peut aussi générer des revenus provenant de ventes de propriétés.
    Pourquoi Saint John? C'est évident. Je crois que nous avons beaucoup de propriétés dans un secteur pauvre, particulièrement dans certains districts où le groupe de Kit et d'autres groupes communautaires travaillent, dans la partie nord. Le marché immobilier n'a pas réussi à attribuer une valeur à un lot de propriétés et d'immeubles. Si nous ne faisons pas quelque chose bientôt, et que le statu quo demeure notre stratégie, alors il est certain que nous assisterons à la démolition et au déclin de ces propriétés et immeubles.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur.
    Nous accueillons maintenant Anthony Dickinson, président de l'organisation The ONE Change Inc.
    Bienvenue. Vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs, de l'invitation de vous parler aujourd'hui et merci aux autres témoins de ce matin.
    Je veux concentrer mes remarques sur le besoin de logements sécuritaires et abordables, particulièrement sur la façon dont ils sont liés à la réduction de la pauvreté axée sur le district, laquelle, selon moi, est un élément essentiel de toute stratégie de réduction de la pauvreté. Je vais vous parler de mon point de vue en tant que président du conseil de l'organisation The ONE Change Inc., laquelle est une organisation de développement communautaire populaire. Toutefois, mes remarques seront certainement influencées par mon travail en tant que directeur de refuge pour itinérants Outflow Ministry, défenseur de toujours de la communauté d'itinérants de Saint John et également par le temps où j'ai vécu dans la vieille partie Nord, qui est un des districts prioritaires de Saint John.
    Je n'ai pas beaucoup de temps, alors je vais limiter mes remarques à deux aspects clés. Premièrement, je vais parler du type de logement dont on a besoin à mon avis; et deuxièmement, je vais parler de l'importance de la collectivité, de son aménagement physique et de ses résidents. Je vais conclure mes observations en suggérant une façon de cristalliser notre pensée.
    Quel type de logement est nécessaire? Les cadres de référence qui nous ont été donnés afin que nous puissions nous préparer à la séance de ce matin font partie de ma réponse. Un des principaux aspects soulevés dans le cadre de l'étude est le logement abordable. Puis-je soutenir, avec tout le respect qui vous est dû, que ce cadre de référence est incomplet? Saint John a besoin de logements qui sont non pas seulement abordables, mais sécuritaires. Aujourd'hui, Saint John a des logements qui sont abordables. Nous avons aussi des logements qui sont sécuritaires. L'astuce, selon moi, est d'avoir des logements qui sont abordables et sécuritaires à la fois.
    Laissez-moi vous donner deux exemples. ONE Change gère le centre communautaire Nick Nicolle. Nous avons récemment commandé une étude sur l'utilisation éventuelle de ce centre, l'utilisation d'un immeuble adjacent qui a été abandonné lorsque l'école du district a fermé et la façon dont nous pourrions utiliser cet immeuble à l'avantage de la collectivité. Un membre de la collectivité a dit qu'il utilise notre centre communautaire comme un endroit où se réchauffer pendant l'hiver parce que son appartement est trop froid. Cet appartement est clairement abordable, mais il n'est pas sécuritaire.
    Le deuxième exemple vient d'un homme qui a utilisé le refuge pour hommes Outflow Ministry. Un jour, il a quitté le refuge, tout heureux d'emménager dans son propre appartement. C'était un moment de poignées de mains et de célébrations pour tous. Il est revenu au refuge deux jours plus tard; il était couvert de piqûres de punaises et avait besoin d'un lit pour la nuit. L'immeuble dans lequel il avait emménagé était infesté. Encore une fois, l'appartement était clairement abordable, mais il n'était pas sécuritaire.
    L'aménagement des districts est aussi important lorsqu'on prend en considération le logement sécuritaire et abordable. On ne détermine pas que le logement est sécuritaire et abordable seulement en se fondant sur le logement ou l'immeuble lui-même; il faut aussi tenir compte de l'endroit physique où il se trouve. ONE Change est fier de faire partie de ce que nous appelons le corridor de services, corridor qui comprend le NEW-C ou le centre de bien-être North End, la mission RiverCross, l'église St. Luke, l'église Harbour, la banque alimentaire North End et notre centre communautaire Nick Nicolle, qui se trouvent tous dans le même district.
    Chacun de ces services contribue à un logement sécuritaire et abordable en fournissant aux résidents certains services et repas et une partie de l'esprit communautaire dont ils ont besoin pour vivre une vie enrichissante en toute dignité. De tels éléments d'une collectivité sont cruciaux. À ONE Change, nous sommes fiers d'offrir gratuitement tous nos programmes. On ne se demande pas si la personne a le droit ou non de bénéficier des programmes ou si son revenu de ménage est assez faible pour justifier une subvention du programme. Nous traitons plutôt tout le monde sur un pied d'égalité.
    Une famille qui vit dans la pauvreté depuis trois générations recevra le même niveau de service lorsqu'elle arrive au centre communautaire Nick Nicolle qu'un député. Selon moi, il est essentiel de fournir un service digne à nos résidents parce que cela signifie que tout le monde qui vient au centre est traité de façon égale. L'entretien d'un logement sécuritaire et abordable avec un revenu limité est difficile. Des dépenses sont inévitables. Le fait d'accéder à des programmes, qu'ils soient éducatifs, récréatifs ou sportifs, qui aident les gens à briser le cycle de la pauvreté ne devrait pas augmenter ces dépenses.
    Je veux mentionner une autre chose concernant ONE Change. J'ai dit plus tôt que nous sommes une organisation populaire, et je dis cela très sincèrement. La participation des résidents est la bienvenue et est encouragée dans tout ce que fait ONE Change.

  (1010)  

    Nos portes sont ouvertes à la collectivité, et nous sommes impatients de solliciter ses conseils. En ce qui concerne les idées mises de l'avant par le Comité, je vous en prie, veuillez vous assurer de parler aux citoyens qui seront touchés le plus directement par vos idées. Leur voix compte autant que la mienne, et vous avez autant l'obligation de les écouter que de m'écouter.
    J'aimerais terminer en suggérant un cadre de réflexion. De prime abord, vous pensez peut-être qu'il est un peu vague ou peut-être même ridicule, mais je vous prie de m'écouter. Ma suggestion pour vous est de voir grand chaque fois. La réduction de la pauvreté ne suffit pas. La réduction de la pauvreté réduit les statistiques, et les gens se sentent bien, mais des personnes sont laissées pour compte. Notre but devrait être l'éradication de la pauvreté. C'est un grand rêve.
    L'itinérance et le manque de logements sécuritaires et abordables sont un gros problème à Saint John, tout comme la pauvreté générationnelle. Au-delà de cela, la pauvreté en général est un gros problème à Saint John. Je suis encouragé par le désir de votre Comité d'essayer des solutions novatrices et de donner à Saint John une possibilité de mettre à l'essai ces nouvelles idées. Nous n'allons pas résoudre la pauvreté avec le statu quo. Nous avons essayé cela, et ça n'a pas fonctionné. Chaque fois que vous avez une idée, je vous prie de vous demander: « Suffit-elle à mettre fin à la pauvreté? » Si la réponse est non, oubliez cette idée et rêvez plus grand.
    C'était un privilège de vous présenter ce matin mon exposé et de partager le temps de parole avec mes collègues. J'apprécie le temps que vous m'avez donné.
    Merci.

  (1015)  

    Merci beaucoup, monsieur.
    Nous accueillons maintenant Mme Althea Arsenault, de la Société d'inclusion économique et sociale.
    Les sept prochaines minutes vous appartiennent.
    Merci de nous avoir invités; je vous transmets les excuses de Stéphane Leclair. Il devait assister à une autre réunion, ce matin.
    La Société d'inclusion économique et sociale est une société de la Couronne relevant du gouvernement provincial. Notre programme consiste à superviser la mise en oeuvre du plan « Ensemble pour vaincre la pauvreté: le plan d'inclusion économique et social du Nouveau-Brunswick ».
    Nous avons un rôle à jouer; nous n'allons pas beaucoup sur le terrain, mais il s'agit de partenariats, et notre rôle consiste à soutenir et favoriser les partenariats, à rassembler les partenaires de façon que les projets visant la réduction de la pauvreté puissent aller de l'avant. Vous pouvez presque dire que notre Société est la colonne vertébrale des efforts de réduction de la pauvreté dans la province du Nouveau-Brunswick.
    Nous sommes régis par une loi. Nous sommes mentionnés dans les lois. Nous ne sommes pas un secrétariat. Et s'il y a une chose que j'aimerais recommander à votre Comité, c'est que, si vous voulez déployer une stratégie de réduction de la pauvreté, vous devez l'inscrire dans une loi, de façon qu'elle ne puisse pas être modifiée.
    Notre mandat consiste à élaborer, coordonner et superviser la mise en oeuvre des initiatives et des plans stratégiques visant la réduction de la pauvreté et à aider des milliers de Néo-Brunswickois à devenir plus autonomes. Nous avons une vision. Nous avons également un but. C'est un objectif très ambitieux. Nous avons décidé que, d'ici 2015, nous allions réduire la pauvreté de 25 % et la pauvreté économique extrême, de 50 %. Est-ce que c'est réalisable? Probablement pas, pas tout de suite. Nous n'y sommes pas arrivés en cinq ans. Nous n'allons pas régler le problème en 5 ans, en 10 ans ou en 15 ans. Mais, en travaillant de concert, dans le cadre de partenariats, nous deviendrons plus forts, et nous pourrons abaisser ces chiffres. Fait plus important encore, nous allons avoir une incidence sur la vie des gens.
    La structure de notre conseil d'administration est unique. Je crois que nous sommes la seule structure du genre au Canada, en ce qui concerne les programmes provinciaux de réduction de la pauvreté. Nous avons défini quatre secteurs. Aucun secteur n'a plus d'importance ou de pouvoir que les autres. Nous représentons le gouvernement, les entreprises, le secteur sans but lucratif et les citoyens. À l'heure actuelle, 17 personnes siègent au conseil d'administration, entre autres trois ministres: les ministres du Développement social, de l'Éducation et du Service Nouveau-Brunswick. Nous avons également trois représentants des organismes sans but lucratif de la province et trois représentants du milieu des affaires. Mais il y a aussi, au sein de notre conseil d'administration, six membres qui sont des citoyens. Ce sont des citoyens qui vivent dans la pauvreté ou ont déjà vécu dans la pauvreté. Leur voix est la plus importante, et nous prouvons que nous le croyons sincèrement, puisque nous comptons six représentants des citoyens pauvres, mais seulement trois ministres, trois représentants des organismes sans but lucratif et trois représentants du gouvernement. Et c'est ça le plus important, pour nous. Ces gens-là n'hésiteront pas à nous le dire, si nous proposons un plan qui ne fonctionne tout simplement pas, parce qu'ils ont vécu dans la pauvreté et qu'ils nous diront pour quelles raisons ce que nous faisons constitue un obstacle ou pourquoi il y a des obstacles.
    La même structure est reprise par nos 12 réseaux d'inclusion communautaire et par leurs conseils d'administration également. Cette structure est également reprise par nos comités de travail ou nos comités consultatifs. Il y a toujours des représentants de ces quatre secteurs dans nos conseils d'administration et nos comités.
    Nous avons entamé ce que nous appelons le plan EVP2. C'est la deuxième phase du plan Ensemble pour vaincre la pauvreté. Nous avons terminé le plan EVP1, qui s'est déroulé de 2009 à 2014. Nous mettons maintenant en oeuvre le plan de 2014 à 2019. Dans notre second plan, nous avons défini quatre piliers: le renforcement des capacités des communautés, l'apprentissage, l'inclusion sociale et l'inclusion économique. La force de ce plan, c'est qu'il ne s'agit pas de notre plan, il ne s'agit pas d'un plan du gouvernement; c'est le plan des citoyens de la province du Nouveau-Brunswick. Nous avons mené des consultations, nous avons invité tout un chacun à y participer et nous nous sommes assurés que les citoyens avaient les moyens de s'y présenter et qu'ils avaient un moyen de transport pour s'y présenter et faire entendre leur voix. Ce sont leurs idées; c'est leur plan. Ce plan représente les principes directeurs sur lesquels nous nous fondons. Est-ce que nous agissons en prenant la direction des 28 mesures inscrites dans le plan EVP2? Non. Nous ne pouvons pas le faire. Et notre force réside dans le fait que nous nous mettons à la recherche de partenaires — des partenaires représentant d'autres ministères, le secteur sans but lucratif, le milieu des affaires — de façon que, ensemble, nous allons pouvoir changer les choses et faire avancer les mesures que nous avons définies pour réduire la pauvreté.
    Voici quelques-unes des choses que nous avons faites dans le cadre du plan Ensemble pour vaincre la pauvreté. Nous avons entre autres élaboré en partenariat avec tous les autres intervenants un régime médicaments du Nouveau-Brunswick, et ce régime est offert à tous ceux qui ne sont couverts par aucune assurance. Nous avons lancé le programme De beaux sourires et une bonne vision, un programme de soins dentaires et de la vue destinés aux enfants des familles à faible revenu. Nous avons créé un fonds d'investissement pour le développement économique communautaire des entreprises sociales.
    Un des projets que nous poursuivons, dans le plan EVP2, comme l'ont dit les témoins précédents, a trait au transport. Nous nous apprêtons à publier au printemps un rapport sur le transport en milieu urbain et rural; la raison en est que, si vous avez un emploi, mais que vous ne pouvez pas vous y rendre, vous n'avez pas d'emploi. Si vous n'avez pas de moyen de transport, vous ne pouvez pas vous rendre à vos rendez-vous médicaux. Vous ne pouvez pas suivre votre traitement de chimiothérapie si vous n'avez pas les moyens de posséder une automobile. C'est très important.
    Nous cherchons également à élaborer un guichet unique. Nos activités de communication nous ont permis de savoir que les gens à qui nous parlons ne connaissent pas nos programmes; ils disent savoir qu'il en existe, mais ils doivent nous demander comment les trouver.

  (1020)  

    De concert avec l'Human Development Council et le gouvernement du Nouveau-Brunswick, nous sommes en train de mener des recherches sur la possibilité d'adopter un système commun pour le gouvernement du Nouveau-Brunswick et le secteur sans but lucratif. Ce serait un numéro unique où l'on pourrait obtenir toute l'information. Je suis une employée du gouvernement, et j'ai moi-même de la difficulté à naviguer dans le système provincial ou le système fédéral. Nous allons également, au cours des prochains mois, mettre sur pied un comité consultatif sur l'équité salariale et le salaire minimum vital.
    Notre plus grande force réside dans nos réseaux d'inclusion communautaire. C'est nous qui les avons créés. Il y en a 12, dans la province du Nouveau-Brunswick, et ils sont fondés sur les collectivités et les besoins des collectivités. La province s'est dotée du plan Ensemble pour vaincre la pauvreté, mais, en même temps, chacun des réseaux d'inclusion communautaire a adopté son propre plan de réduction de la pauvreté, lequel reflète les besoins et les domaines d'intérêt particulier de ces collectivités.
    Depuis novembre 2011, nous avons financé plus 392 initiatives et nous avons collaboré avec plus de 45 000 personnes, celles qui ont profité concrètement de ces programmes. Mais le plus important, c'est que notre Société a fait des investissements de plus de 5 millions de dollars. La collectivité a investi plus de 16 millions de dollars, en espèces ou en nature, et la valeur totale du projet s'établit à 21 millions de dollars. Cela fait que notre rendement est le suivant: pour chaque dollar versé par notre Société, la collectivité verse 3,80 $.
    Est-ce que c'est ainsi depuis le début? Non. On nous considérait comme une banque, et tout le monde venait nous demander des subventions. Mais pour être forts, il faut que nos collectivités soient fortes et il faut que vos partenaires se tiennent à vos côtés. C'est une des forces qui ont permis aux réseaux d'inclusion communautaire de s'épanouir, au cours des cinq dernières années, dans toute la province du Nouveau-Brunswick.
    De fait, 80 % de notre financement retourne aux collectivités, et c'est ainsi que nous pouvons les soutenir. Tout le financement que nous consacrons aux projets est versé aux 12 réseaux d'inclusion communautaire.
    Nous réunissons comme tout le monde des statistiques — seuil de faible revenu, mesure de faible revenu, panier de consommation — sur les efforts que nous déployons pour réduire la pauvreté dans différents secteurs. Nous faisons face aux mêmes problèmes que tous les autres organismes sans but lucratif quand il est question des mesures. Nous faisons face aux mêmes problèmes que toutes les autres provinces quand il est question des organismes FPT et du Comité consultatif provincial. Les mesures sont faibles. Nous en avons déjà discuté, étant donné que la Société pour l'inclusion économique et sociale fait partie du Comité consultatif provincial. Je vous en prie, demandez à Statistique Canada d'élaborer une mesure de la réduction de la pauvreté qui puisse s'appliquer à l'échelle du pays.
    Le plus important, ce sont nos partenariats. Comme je l'ai déjà dit, nous travaillons de concert avec des groupes locaux, à l'échelle de la collectivité, mais nous avons également des partenariats à l'échelon fédéral. Vous avez devant vous deux petits dépliants qui exposent ce que nous faisons. Nous menons entre autres un projet de premier plan avec l'Agence du revenu du Canada, je parle du Programme communautaire des bénévoles en matière d'impôt, qui s'adresse aux personnes à faible revenu. Nous le réalisons de concert avec l'ARC, et cela fait six ans que ça dure.
    Quand nous avons commencé, environ 13 000 personnes s'étaient inscrites afin de pouvoir produire leur déclaration d'impôt avec l'aide du PCBMI. Aujourd'hui, grâce à notre travail à l'échelle de la province et du fait que nous en avons parlé dans les bibliothèques publiques, aux intervenants de Service Canada, aux Premières Nations, au ministère de la Santé et au ministère de l'Emploi et du Développement social, nous avons augmenté ce chiffre de plus de 7 000 personnes. Aujourd'hui, 22 000 personnes, dans la province, remplissent leur déclaration d'impôt avec l'aide du PCBMI. Nous nous occupons également du Bon d'études canadien, de concert avec EDSC, et nous en assurons aussi la promotion.
    La force de ce que nous faisons tient à nos partenariats.
    Merci.
    Vous êtes la bienvenue. Merci.
    Notre dernier témoin, aujourd'hui, comparaît à titre personnel. Nous accueillons Daniel Shoag, professeur adjoint à la Harvard Kennedy School.
    Bienvenue, monsieur.
    Je m'appelle Dan Shoag et je suis professeur de sciences économiques à Harvard, et je suis depuis peu un ami de Karen; j'enseigne l'économie urbaine et l'économétrie.
    C'est la première fois que je viens à Saint John. C'est un honneur pour moi d'être ici pour vous parler de mes recherches sur le marché du logement, la migration et les inégalités. Je vais vous présenter un exposé qui est beaucoup plus général que certains autres témoignages, et j'espère qu'il sera utile. Mes recherches portent sur les États-Unis, et c'est pourquoi je vais donc commencer par parler de l'expérience des Américains; cependant, je crois que le Canada pourra en tirer des leçons importantes. Je vais conclure en parlant de mon premier examen des données canadiennes dans ce domaine.
    Ce projet de recherche a en fait vu le jour en raison de l'échec d'un projet de devoir que je destinais à mes élèves. Il existe en économie urbaine une relation célèbre, appelée la « convergence des revenus », une belle expression utilisée pour dire que les milieux pauvres ont tendance à rattraper les milieux riches au chapitre du revenu par habitant, et ils y arrivent grâce à une augmentation plus rapide du revenu.
    Je sais qu'il est étrange, aujourd'hui, de penser que des milieux pauvres comme l'Alabama et le Mississippi affichaient la croissance du revenu la plus rapide, et pourtant, c'était vrai. En fait, c'était le cas pendant plus d'un siècle, à partir du moment où nous avons eu accès à des données, après la guerre de Sécession.
    J'allais donc demander à mes étudiants, comme devoir, de montrer ce rattrapage, montrer que les milieux pauvres rattrapent les milieux riches, en utilisant les données relatives aux 20 ou 30 années précédentes. Heureusement, j'ai voulu d'abord essayer de faire ce devoir, ce que je ne fais pas souvent. Il est heureux que je l'aie fait, en l'occurrence, étant donné que cette relation n'existe plus. Depuis les deux dernières décennies, les milieux pauvres n'arrivent plus à rattraper les milieux riches. Les disparités régionales, qui se sont effritées pendant plus d'un siècle, sont en fait restées inchangées au cours des deux dernières décennies.
    La deuxième question du devoir que je voulais donner à mes étudiants consistait à illustrer une autre de ces relations admises par tous, c'est-à-dire le fait, tout simplement, que les gens déménageraient pour occuper un emploi mieux rémunéré. Cela semble intuitif. Les gens devraient déménager lorsqu'ils peuvent obtenir un salaire plus élevé. Encore une fois, c'est ainsi que les choses se passent depuis que nous avons accès à des données. Toutefois, ici aussi, tout comme c'était le cas pour la convergence des revenus ou le rattrapage, la migration orientée vers des salaires plus élevés a pratiquement cessé au cours des deux dernières décennies. Plutôt que de s'installer dans des États plus riches, comme le Connecticut ou New York, les Américains s'installent plutôt dans des États où les salaires sont moyens, comme la Floride, le Texas ou l'Utah. C'est un changement important du phénomène migratoire des États-Unis.
    Ces deux relations admises d'emblée, qui avaient duré un siècle, le rattrapage du revenu dans les régions et le déplacement vers des milieux où les salaires sont plus élevés, se sont toutes les deux désintégrées au cours des 20 à 30 dernières années. Si cela se produit maintenant, ce n'est pas une coïncidence. La migration a une grande influence sur la croissance du revenu et sur les inégalités. Elle permet aux gens de se déplacer lorsqu'une occasion se présente, et les gens qui ne se voient pas offrir de belles possibilités dans leur région déménagent là où les emplois sont mieux rémunérés. La migration atténue le ralentissement du marché du travail dans les marchés où les emplois ne sont pas nombreux. Il est donc logique qu'un déclin au chapitre de la migration ait une incidence sur le rattrapage.
    Comme je n'ai pas pu présenter un devoir productif, il me fallait déterminer pourquoi les tendances en matière de migration ont changé à ce point. La réponse s'impose tout de suite à l'esprit, ce sont les données, et je crois que si je suis ici, c'est qu'il s'agit d'une question de logement. On observe depuis deux ou trois décennies une évolution spectaculaire du marché du logement dans les villes les plus riches des États-Unis, et ces changements se sont faits parallèlement au renversement des tendances.
    Les milieux riches ont toujours coûté plus cher que les milieux pauvres; ça n'a pas changé. Ce n'est pas surprenant. J'ai déjà accordé une entrevue désastreuse à un journaliste qui a résumé mon travail en disant: un professeur de Harvard constate que la vie coûte plus cher à New York qu'en Alabama.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Daniel Shoag: Ça m'a valu pas mal de quolibets.
    Laissons de côté les mauvaises entrevues; il est vrai que des endroits comme New York ont toujours coûté plus cher que des villes en Alabama. Rien n'est plus vrai. Toutefois, le coût de la vie y est beaucoup plus élevé qu'autrefois, par rapport aux milieux plus pauvres. On parlait autrefois de salaires de 1 % plus élevés et d'un prix du logement plus élevé de 1 %. L'écart a doublé au cours des dernières années.
    La conséquence de tout cela est très différente pour les travailleurs scolarisés qui gagnent un revenu élevé et les travailleurs peu scolarisés et à faible revenu. C'est parce que le logement compte pour une plus grande part du budget des travailleurs à faible revenu vivant en ville. Prenons deux occupations, disons concierge et avocat. Il y a 50 ans, la rémunération des concierges comme celle des avocats était plus élevée de 50 % à New York que dans des États plus au sud, et cela, même après rajustements en fonction du prix des logements. Aujourd'hui, les deux vont gagner 40 % de plus s'ils vivent à New York que s'ils vivent dans le Sud. Si vous laissez de côté le prix du logement, l'avocat gagnera 35 % de plus seulement à New York que dans le Sud. Mais pour les concierges, la tendance est inverse. Un concierge du Sud aura un revenu supérieur, si on supprime le coût du logement, qu'un concierge vivant à New York. C'est parce que le logement représente une part énorme du salaire des gens peu scolarisés habitant à New York.

  (1025)  

    Comme on pouvait s'y attendre, la hausse du prix des logements là où les salaires sont plus élevés a eu une réelle incidence sur les tendances en matière de migration. Les travailleurs qui ont fait des études collégiales continuent à aller s'installer à San Francisco et à New York, mais les travailleurs peu éduqués quittent ces villes. Ce n'est pas qu'ils ne voudraient pas un salaire plus élevé. C'est seulement que, si on exclut le coût du logement du salaire, ils ne pourraient pas y trouver un bon emploi. Cette catégorisation des compétences mène à la ségrégation. Elle fait en sorte que les travailleurs peu scolarisés n'ont pas un accès optimal aux meilleurs débouchés et aux endroits où ils trouveraient des emplois bien rémunérés. Elle accentue les inégalités de revenu et élimine le rattrapage des régions ou la convergence des revenus dont j'ai parlé au début.
    En résumé, je suis convaincu que le changement survenu dans le marché des logements des villes les plus riches des États-Unis a entraîné un changement des tendances au chapitre de la migration régionale et du rattrapage du revenu. Pourquoi les marchés du logement ont-ils changé? Je crois que la réponse est assez claire, ici aussi. Quand les prix montent et que la quantité n'évolue pas, ou qu'elle diminue, le problème tient à l'offre; si vous prenez connaissance des données, vous voyez assez clairement qu'il y a toutes sortes de restrictions. Ce ne sont pas les coûts de construction qui ont changé, en réalité. Les briques coûtent à peu près le même prix dans toutes les villes. Dans des villes comme Boston, où j'habite, la densité de la population n'est pas en fait beaucoup plus grande que dans des villes moins chères, comme Houston, si tant est qu'elle l'est. Donc, le problème n'est pas un manque de place. Les coupables, en réalité, ce sont les règlements et les restrictions qui nuisent au développement.
    Je suis personnellement touché. Jusqu'à il y a deux ans, mon épouse et moi-même vivions avec nos enfants dans un appartement de Brookline, un joli district de Boston. Vous connaissez peut-être un de ses célèbres habitants, Tom Brady, mais il ne vit pas dans un petit appartement comme le nôtre.

  (1030)  

    Qui?
    Des voix: Oh, oh!
    Cet édifice comptait cinq étages, et chacun des appartements aurait coûté plus de 500 000 $ — nous étions locataires — s'il avait été mis sur le marché, et, comme chaque étage comportait une douzaine d'appartements, un sixième étage aurait été très profitable. Mais il était impossible d'en construire un sixième en raison des restrictions municipales sur la hauteur. Puisqu'il était impossible d'ajouter des appartements, le prix des appartements a augmenté; au bout du compte, les travailleurs peu spécialisés comme moi ont été évincés et ont dû déménager.
    Pour ma recherche, j'ai créé une mesure des règlements et restrictions touchant l'occupation du territoire, au fil du temps et selon la région, et cette mesure permet de voir que ce n'est qu'au moment où les régions les plus riches commencent à imposer des restrictions importantes en matière de développement que les prix augmentent et que la migration cesse, puisque les gens peu scolarisés sont repoussés et que le rattrapage du revenu prend fin. Les endroits où ces restrictions ou règlements n'existent pas sont bien moins susceptibles de vivre le même problème.
    Je sais qu'il est étrange de penser que des politiques locales en matière de développement — ce qui peut être qualifié de très local aux États-Unis — et les restrictions sur l'occupation du territoire ont des conséquences à l'échelle de la nation ou encore de penser que ces politiques, adoptées à un échelon tout à fait local, ont une incidence sur le rattrapage du revenu à l'échelle nationale ou sur la convergence des revenus ou encore sur les tendances nationales en matière de migration; pourtant, c'est bien ce qui se dégage de la recherche. Lorsque le contexte juridique a changé, il y a 30 ans, et que ces politiques sont devenues beaucoup plus courantes, ces politiques locales sont devenues un enjeu national. Je crois que, dans les cercles politiques des États-Unis, on reconnaît ou on a reconnu davantage l'importance nationale de cet enjeu. Je sais que le conseil des conseillers économiques du président Obama avait, avant de quitter, rédigé un rapport portant spécifiquement sur ce sujet et sur la recherche dont je vous parle aujourd'hui.
    J'aimerais pour terminer parler de la façon dont les choses se présentent ici, au Canada. Je ne prétends pas être un expert des données concernant le Canada. C'est plus compliqué, la fluctuation du prix des ressources nationales joue beaucoup plus sur la dynamique des régions au Canada qu'aux États-Unis. Pourtant, si vous regardez ces données, vous pouvez voir que, même si on observe toujours une convergence des revenus, un rattrapage et une migration vers les milieux plus riches, on semble pourtant voir un certain ralentissement, ces dernières années. Les récentes tendances au chapitre du prix du logement, dans certaines villes où les salaires et la productivité sont particulièrement élevés soulèvent bel et bien des préoccupations quant au maintien de ces tendances. Un organisme qui s'intéresse sous un angle national à la pauvreté, aux débouchés et aux inégalités devrait, je crois, savoir que les politiques en matière de développement qui peuvent sembler n'avoir qu'une importance locale ont en fait une véritable importance par rapport à ces enjeux considérés à l'échelle macroscopique. La possibilité que les prix repoussent les gens et créent cette ségrégation fondée sur le niveau de scolarité ou le niveau de revenu est un enjeu dont vous devriez vous occuper.
    Merci, monsieur.
    Oui, je crois que tout le monde sait qui est Tom Brady. Si vous l'ignorez, ce n'est pas grave non plus.
    Nous commençons en donnant la parole à Bob Zimmer, pour six minutes, s'il vous plaît.
    Merci encore une fois de comparaître devant notre Comité.
    J'aimerais m'adresser en particulier à Anthony...
    Dit-on Anthony ou Tony? Que préférez-vous?
    Tony.
    D'accord. On vous avait demandé de donner votre nom complet, et c'est ce que vous avez fait.
    Tony, pour en revenir à mes précédentes questions sur la façon de tirer de tout cela une stratégie de réduction de la pauvreté, je viens de lire la notice biographique de votre organisation. On y dit que votre organisation croit qu'il serait possible de lutter contre la criminalité en s'attaquant aux problèmes sous-jacents touchant la pauvreté, la santé, l'emploi et l'éducation. Je crois que cela résume la pauvreté et ses causes. Encore une fois, il s'agit de ne pas laisser le feu prendre. On en revient à cela.
    Vous avez parlé de la question de la santé, vous avez parlé d'un logement sûr et abordable, mais je vois ici deux autres sections, l'emploi et l'éducation. Pourriez-vous expliquer par quels moyens nous pourrions réduire la pauvreté en apportant des changements au chapitre de l'emploi et de l'éducation?
    Je sais qu'il ne reste probablement plus maintenant que cinq minutes, mais faites de votre mieux.

  (1035)  

    Il s'est passé une chose récemment, je crois, dans le vieux quartier Nord, il y a environ deux ans: nous avons perdu notre école secondaire, en raison du programme de fermeture des écoles. Il n'y avait pas suffisamment d'élèves. Mais notre organisme a toujours fait valoir que, dans un district, il fallait une école. Nous cherchons des moyens de régler les problèmes relatifs à l'éducation et de combler les lacunes, mais nos programmes ne sont pas exclusivement orientés sur les jeunes. Nous avons aussi des programmes d'éducation pour les adultes, par exemple.
    Je ne me souviens plus si c'est une anecdote qui m'a été racontée ou une statistique que j'ai lue quelque part; je parlais avec quelqu'un qui a dit que les gens du district ignoraient pour la plupart que l'Université du Nouveau-Brunswick à Saint John était située à proximité, de l'autre côté de la colline. Je crois donc entre autres, qu'il faut que les gens sachent, ou qu'on leur apprenne, que l'éducation est précieuse, que les programmes soient offerts par le Collège communautaire du Nouveau-Brunswick, par l'Université du Nouveau-Brunswick à Saint John, ou un autre établissement.
    À mon avis, il est tout aussi important de chercher à savoir quelles sont les causes précises de la pauvreté. Est-ce le manque d'éducation qui fait que les gens sont incapables d'obtenir un emploi ou est-ce purement et simplement parce que les seuls emplois offerts sont des emplois de nuit et qu'il n'y a pas d'autobus, la nuit? Nous avons toujours toutes sortes d'idées sur les solutions qui donneront des résultats dans des années. Ce serait merveilleux si nous pouvions proposer des solutions aux gens qui, aujourd'hui même, vivent dans la pauvreté.
    J'ai déjà travaillé dans un centre d'appel, comme bien des gens de mon âge, et ce centre d'appel a fermé ses portes. Bon nombre de mes camarades ont trouvé un emploi dans un nouveau centre d'appel, qui venait d'ouvrir ses portes, mais un d'entre eux a accepté un emploi moins bien rémunéré, dans un autre centre d'appel, parce qu'il pouvait s'y rendre à pied. Il avait fait des calculs et, étant donné qu'il lui aurait fallu payer une course en taxi pour aller travailler et revenir chez lui, il aurait en fait perdu de l'argent. Son revenu net aurait peut-être été plus élevé, officiellement, mais ses frais de transport auraient empiré sa situation, étant donné qu'il n'y a tout simplement pas d'autobus.
    Quant à l'accès aux transports en commun, je crois que le financement du gouvernement fédéral était calculé par passager, ce qui aurait permis d'en avoir plus, mais cela ne règle rien au fait qu'il faut beaucoup de... Quand je vivais à Vancouver, je me déplaçais en transport en commun. Il ne m'est jamais venu à l'idée d'avoir une automobile, mais, dans mon secteur de travail, cela n'est pas possible, aujourd'hui.
    L'un des employés du refuge, qui travaillait sur les quarts de nuit, devait revenir chez lui à pied ou en taxi, vu que, le dimanche matin, il n'y avait pas d'autobus avant 10 heures. Des choses comme cela constituent des obstacles qui n'ont pas, je crois, de raison d'être.
    On ne s'en sort pas, je crois que vous avez mis le doigt dessus: ce sont de petits détails qui font que les grands projets ne peuvent pas voir le jour. Si vous aviez un plan structuré plus important, j'aimerais que vous le communiquiez au Comité, car votre témoignage ne se termine pas au moment où vous quittez le micro et que nous retournons chez nous. J'aimerais que vous communiquiez au Comité d'autres documents, si vous le pouvez, sur un plan plus général qui permettrait au Canada de vraiment réduire la pauvreté.
    À mon sens, il existe deux types de pauvreté. Habituellement, je demande aussi aux témoins de me donner leur définition de la pauvreté. Il y a la pauvreté intellectuelle et il y a la pauvreté des moyens de subsistance. Je crois que si nous pouvions régler le premier problème, la pauvreté intellectuelle — si nous arrivons à sortir de l'obscurité les gens pauvres sur le plan intellectuel —, nous pourrons nous attaquer beaucoup plus efficacement aux autres aspects du problème. Je crois que c'est à cela que vous vous attaquez.
    Est-ce qu'il me reste du temps, monsieur le président?

  (1040)  

    Veuillez être très bref.
    Je suis désolé, j'aimerais poser une question à Daniel avant de n'avoir plus de temps.
    Vous avez parlé de manière générale du logement, pendant votre exposé, mais j'aimerais savoir ce que vous pensez des coopératives d'habitation du Canada ou des logements abordables financés par le gouvernement. Nous avons subventionné des logements, dans certains cas. Si vous deviez élaborer un programme pour le Canada, de quelle façon se présenterait-il?
    Vous avez 30 secondes pour répondre. Si vous ne pouvez pas donner une réponse complète, vous pourrez nous la faire parvenir plus tard.
    C'est tout à fait clair, je vais faire parvenir des commentaires supplémentaires plus tard.
    Je crois qu'il faut que cela passe par la construction. Le tableau général que je vous ai brossé montrait que les forces du marché sont en jeu et qu'il y a beaucoup de possibilités sur le plan économique, et qu'en fait, ce sont les règlements et les restrictions qui dressent des obstacles; le problème ne tient pas au fait qu'il faut que le gouvernement construise des logements, pas à grande échelle, du moins. Je crois que, à l'échelle locale, ce que vous proposez au sujet des coopératives d'habitation pourrait se révéler très utile.
    Mais je ne suis pas certain de pouvoir répondre. J'ai besoin...
    C'est bon.
    Quant aux ratios d'occupation des nouveaux immeubles d'habitation, seriez-vous d'accord pour dire qu'il faudrait qu'un certain pourcentage soit offert à un prix abordable? Ce que j'aimerais connaître, ce sont les détails des nouvelles constructions. Mais nous n'avons plus de temps, vous pourriez peut-être faire parvenir votre réponse au Comité.
    Merci.
    Merci.
    Nous donnons maintenant la parole à M. Long.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins de ces magnifiques exposés.
    Le Comité se rend dans toutes les régions du pays pour trouver des solutions novatrices au problème de la pauvreté, et il a été formé dans le but de réduire la pauvreté.
    Monsieur Kliffer, j'ai à coup sûr été extrêmement intéressé par le concept de réserve foncière dont vous avez parlé. Je suis à Saint John, comme vous. Je vous ai déjà entendu parler de ce concept, mais, encore une fois, il est certain que notre Comité pourrait s'en servir, et souligner que c'est très innovateur.
    Vous avez expliqué les bons résultats obtenus grâce à la réserve foncière à Flint. Supposons qu'il nous serait possible de lancer un projet pilote de réserve foncière à Saint John, au Nouveau-Brunswick. À votre avis, quelles en seraient les premières étapes? Pourriez-vous nous expliquer, le plus brièvement possible, comment vous envisageriez ce projet, comment les différents ordres de gouvernement pourraient travailler ensemble à ce projet et quelles en seraient les échéances?
    La réserve foncière donne de bons résultats lorsqu'elle s'accompagne du soutien des différents ordres de gouvernement, en particulier un soutien pour la planification sur place. Ce genre d'initiatives exige un soutien au chapitre de la planification du territoire et de choses comme celles-là, et suppose également un financement de la municipalité, car elle ne peut pas être réalisée de façon isolée et donner des bons résultats. Elle doit être mise en oeuvre de concert avec d'autres stratégies qui en constituent le cadre.
    Il faudrait donc une collaboration totale entre les deux entités, en fait, la province et la ville. Est-ce que c'est bien ça?
    Je dirais en effet que ce serait le scénario idéal. Pour le moment, il y a un groupe qui cherche à réaliser un projet pilote, dans le Nord, et il cherche à réunir les responsables d'organismes communautaires sans but lucratif et des investisseurs du secteur privé, espérant faire germer l'idée.
    Je crois en fait, pour répondre à votre première question, qu'il faudrait créer un poste de chercheur, rémunération et financement inclus, pour examiner de quelle façon nous pourrions créer une réserve foncière, au Canada, en tenant compte des politiques et règlements de notre pays, étant donné que les choses ne se passent pas ici comme aux États-Unis. Il faudrait cerner et cartographier ces différences, voir comment cela pourrait se faire dans les différentes provinces, et il faudrait le faire en partenariat avec les différents ordres de gouvernement; je le répète, il sera important que les administrations municipales autant que le gouvernement fédéral donnent leur aval.
    En quelques mots, savez-vous pourquoi cela ne se fait pas encore au Canada? Il me semble que c'est un tellement beau concept. Il n'y a vraiment personne, au Canada, qui aurait voulu le mettre en oeuvre?

  (1045)  

    Personnellement, je crois que c'est parce que nous sommes un peuple plutôt réactionnaire; nous ne nous attaquons pas proactivement aux problèmes. Le Canada n'a pas connu le même niveau de problèmes, au chapitre de l'environnement bâti, que les États-Unis connaissent depuis la crise des saisies immobilières. Notre réglementation sur les banques est plus sévère. Nous n'avons pas non plus connu l'exode massif des centres urbains, que les États-Unis ont connu. Je suis d'avis que certaines collectivités canadiennes qui font face à cette sorte de déclin sont sur le point de se retrouver en quelque sorte dans une situation d'urgence, mais la crise ne s'est pas encore déclarée et, malheureusement, je ne crois pas que nous chercherons des solutions avant que la crise ne se déclare.
    Merci.
    Madame Arsenault, je sais que vous avez parlé de ces programmes. Ce sont de magnifiques programmes. En fait, j'en ai parlé sur ma page Facebook cette semaine. J'ai été ébahi par le nombre de personnes qui ne connaissaient pas ces programmes. C'est incroyable. Il y a aussi le programme d'épargne du Canada ou cet autre programme qui permet à une personne dont le revenu est inférieur à 45 000 $ de placer 2 000 $ dans un compte pour un de ses enfants.
    Je voulais dire que, à mon avis, le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial ont raté une chance de collaborer davantage. Vous avez parlé des plans Ensemble pour vaincre la pauvreté, du premier et du deuxième plan, et le gouvernement fédéral a lancé l'initiative Combattons ensemble la pauvreté, et tout le reste.
    De quelle façon pensez-vous que le gouvernement fédéral pourrait collaborer davantage avec la province et la Société d'inclusion économique et sociale afin de faire avancer davantage la stratégie de réduction de la pauvreté?
    Je crois qu'il existe toutes sortes d'excellentes occasions de collaborer davantage. Dans les deux projets que nous sommes en train de réaliser, nous faisons la promotion des projets fédéraux et nous leur versons un financement. Les partenariats existent déjà. Depuis cinq ou six ans, j'observe que les choses changent au chapitre de la collaboration entre les ministères du gouvernement du Nouveau-Brunswick, mais aussi la collaboration avec le gouvernement fédéral et que des liens s'établissent. Il est parfois difficile de s'y retrouver, de mettre la main sur la personne qui se trouve justement à être le champion d'un programme donné, la personne avec qui il est possible d'établir des liens et de mettre ce type de partenariats en place.
    Ainsi, par exemple, j'ai reçu hier un courriel de Service Canada; on m'invite à venir parler de ma Société, au nom du Nouveau-Brunswick, de ce que nous faisons et des possibilités de partenariat, de partage et de promotion mutuelle. Des occasions existent donc. Les gens en veulent. Parfois, c'est seulement une question de trouver la bonne personne, la bonne direction. Cela prend du temps, parfois, mais c'est possible, parce que les programmes sont parallèles. Si vous ne faites pas votre déclaration de revenus, vous n'aurez pas droit aux prestations. C'est aussi simple que cela, qu'il s'agisse du gouvernement fédéral ou du gouvernement provincial. Mais les occasions de partenariat existent, c'est certain.
    Soyez très bref, je vous prie.
    D'accord. Je poserai une question à Kit Hickey au prochain tour.
    Il y a un problème, de toute évidence, et les gens ne sont pas au courant. Je ne sais pas à qui la faute en revient, je ne sais pas si le marketing n'est pas fait de la bonne façon ou si la visibilité n'est pas suffisante. J'en ai parlé sur Facebook cette semaine. J'ai reçu des centaines et des centaines de commentaires de gens qui n'en savaient tout simplement rien. Quels véhicules utilisez-vous pour que le message se rende jusqu'aux gens?
    Nous avons un partenariat. Nous utilisons aujourd'hui Facebook, Twitter, des affiches, des publicités dans les autobus. Nous utilisons aussi nos 12 réseaux d'inclusion communautaire. Quand vous faites votre déclaration de revenus, on vous renseigne au sujet du Bon d'études canadien. Nous organisons aujourd'hui des super cliniques qui incluront les programmes de l'ARC, de Service Canada, de la Société d'inclusion économique et sociale et d'autres programmes des gouvernements fédéral et provinciaux.
    Les personnes à faible revenu sont nombreuses à refuser de croire que le gouvernement fédéral leur donnera de l'argent sans rien exiger en échange. Qu'il leur donnera une somme de 2 000 $. Elles ne le croient pas, alors elles ne s'en occupent pas. C'est une question de marketing et de communication, mais il faut que cela se fasse de façon concertée. La façon dont ce programme avait été conçu, au départ, explique aussi certains des obstacles. Les gens devaient aller à la banque, une démarche qui fait très peur aux personnes à faible revenu. Les gens devaient ensuite obtenir un numéro d'assurance sociale. Ils se demandaient pourquoi ils devaient obtenir un numéro d'assurance sociale pour un enfant de deux ans. Et ils ne croyaient toujours pas que le gouvernement fédéral allait leur donner 2 000 $ sans rien demander en échange. Certains de ces obstacles sont aujourd'hui disparus, entre autres parce que les gens peuvent maintenant s'inscrire en ligne au programme SmartSAVER.
    Il faut reconnaître que des obstacles se dressent et il faut essayer de les éliminer.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant le tour de Mme Sweet, pour six minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Il a été bien démontré par des études aux États-Unis et au Canada que, premièrement, l'écart entre les riches et les pauvres s'accroît et que, deuxièmement, il y a une crise du logement partout au pays.
    Si nous voulons combattre et vaincre la pauvreté, comme certains le disaient, cela passe par le logement social, coopératif et abordable. Tout à l'heure, on nous disait que la liste d'attente pour le logement régional à Saint John était d'environ 1 000 personnes.
    Combien de logements sociaux ou coopératifs devrions-nous construire pour que tout le monde ait un logement abordable, sécuritaire et adéquat?

  (1050)  

[Traduction]

    Même s'il y a environ 1 000 personnes sur la liste d'attente de la région, nous savons qu'il y a à l'échelle de la ville environ 2 000 unités de logement abordables, si l'on compte ensemble les logements des organismes publics, sans but lucratif et coopératif. Ajoutons à cela que les besoins ne sont pas comblés, nous le savons. Je n'ai pas les dernières statistiques locales sur le nombre de personnes qui ont besoin d'un logement abordable, mais, pour la province, on en compte plus de 30 000, et le besoin est aussi criant qu'il y a 15 ans, à tout le moins.
    Plus de 7 000 personnes touchent des prestations d'aide au revenu, et cela ne vise que le revenu; cela ne comprend pas les travailleurs pauvres ou les gens qui touchent des prestations d'assurance-emploi ni non plus les personnes âgées qui touchent la pension du RPC.
    Nous savons que le déficit est important. Je crois que cela nous donne une meilleure idée du nombre de logements abordables dont la ville a besoin de toute urgence.

[Français]

     Nous aurions donc besoin de 6 000 unités? Je ne suis pas certaine du nombre requis.

[Traduction]

    Nous en comptons 2 000, et il en faudrait environ 5 000.

[Français]

    D'accord.
    Vous avez parlé plus tôt du fait que la fin des ententes à long terme pose problème et que de plus en plus de subventions au logement ont disparu. Ces subventions sont importantes pour vaincre la pauvreté. Quelqu'un qui n'a pas à payer plus de 30 % de son revenu pour se loger peut acheter de la nourriture et peut-être également une bicyclette pour son enfant ou une sécheuse pour la maison.
    Qu'arrive-t-il aux gens qui sont en train de perdre leur subvention au logement? Que leur arrive-t-il lorsqu'ils perdent la subvention?

[Traduction]

    Le Nouveau-Brunswick s'efforce de faire en sorte que cela n'arrive pas, que le secteur ne perde pas ces logements abordables. Le regroupement des coopératives de logement, ici, à Saint John, arrivera certainement à protéger les locataires contre une hausse des prix, et les gens ne seront pas obligés de déménager d'un logement à prix abordable qu'ils occupent peut-être depuis de nombreuses années. Mais la vérité, c'est que si rien ne se passe, si aucun programme n'est mis en place, un programme de supplément au loyer, un programme de protection des prix abordables, les gens perdront un accès à des logements abordables.

[Français]

    Si je comprends bien, c'est le gouvernement provincial qui a repris le financement du logement social qui était autrefois accordé par le gouvernement fédéral. C'est ce qui se passe également dans d'autres provinces.
    Je crois que vous avez réussi à régler le cas ici, au Nouveau-Brunswick, en amalgamant les coopératives. Cependant, à certains endroits, il y a des fournisseurs de logements, des coopératives par exemple, qui préfèrent louer leurs logements abordables à quelqu'un qui n'a pas besoin d'une subvention étant donné que ces fournisseurs ne savent pas exactement ce qui va se produire deux ans plus tard. L'année dernière, le budget prévoyait 30 millions de dollars étalés sur deux ans. Comme les coopératives ne savent pas exactement ce qui va se produire deux ans plus tard, certaines décident de louer leurs logements à des gens qui n'ont pas besoin de subvention. Il y a donc des unités de logement abordable qui sont perdues. Est-ce que vous avez réglé ce problème en formant une coopérative de coopératives?

[Traduction]

    Nous estimons que nous avons grandement contribué à assurer la sécurité de l'occupation d'un certain pourcentage des logements des coopératives d'habitation. Les logements sont occupés par des familles de différents niveaux de revenu et par des personnes âgées seules. Nous tenons à préserver la santé de la collectivité en privilégiant la mixité des niveaux de revenu.
    Il y a une autre chose que nous voulons faire, dans le secteur sans but lucratif, pour les logements subventionnés à 100 %; nous voulons adopter ce modèle-là. C'est un modèle qui fonctionne extrêmement bien; cependant, si nous voulons qu'il réussisse, il nous faut ajouter d'autres unités de logement abordables.

  (1055)  

    Votre temps est écoulé. Vous vous êtes arrêtée pile.
    Nous donnons maintenant la parole à M. Robillard, pour six minutes.

[Français]

    Emploi et Développement social Canada finance le programme « Logement d'abord » , qui intègre les besoins en logement aux autres services de soutien et d'accompagnement offerts aux itinérants, notamment des services en santé mentale et du counseling en matière de toxicomanie.
    Selon vous, le programme « Logement d'abord » réussit-il à répondre aux besoins des itinérants qui souffrent de problèmes de santé mentale ou de toxicomanie? Si oui, qu'est-ce qui explique son succès?

[Traduction]

    Je crois que la réussite du programme s'explique par le fait que, fondamentalement, le logement est un de nos principaux besoins de base; le logement passe avant tout. Si nous pouvons trouver un logement sécuritaire et abordable, tout le reste se met en branle.
    Le programme Logement d'abord s'assure d'offrir d'abord un logement, après quoi il veille à ce que les personnes qui participent au programme aient accès aux services dont elles ont besoin pour conserver leur logement.

[Français]

     Avez-vous identifié des problèmes ou des lacunes dans la conception ou la prestation de ce programme? Avez-vous des recommandations à faire au Comité à cet égard?

[Traduction]

    Selon notre expérience, à Saint John, un certain accès au logement est possible. Notre gouvernement provincial a décidé d'agir et a pris des ententes de supplément au loyer pour 10 unités par année, pendant 2 ans. Il est certain que cela nous a énormément aidés.
    L'un de nos principaux défis, c'est de nous assurer que des services adéquats sont accessibles et peuvent répondre aux divers besoins des personnes. Nous n'avons pas un financement suffisant pour mettre sur pied, comme dans le modèle At Home/Chez Soi, une véritable Cadillac — je ne crois pas que quiconque puisse le nier —, le type d'équipe qui puisse fournir les services nécessaires. Ici, à Saint John, nous avons mis sur pied une équipe que l'on appelle l'équipe mobile spécialisée. Nous comptons sur les services offerts par différents organismes, des organismes du gouvernement ou des organismes du domaine de la santé mentale et de la toxicomanie, et nous cherchons à travailler comme une équipe au moment de fournir ces services. C'est l'un de nos principaux défis, l'accès aux services pour les personnes ayant des problèmes de santé mentale.
    Merci.
    Vouliez-vous partager votre temps avec M. Long?
    Oui.
    D'accord, monsieur Long.
    Merci, monsieur le président.
    Kit, nous allons encore parler un peu de logement. Premièrement, j'aimerais vous féliciter du travail que vous faites, avec Housing Alternatives et le programme Logement d'abord. Je crois que ce sont de magnifiques programmes.
    Notre Comité se réunit afin de recevoir des conseils et des suggestions de nos témoins quant à ce que nous pouvons faire, en tant que gouvernement fédéral, pour élaborer une meilleure stratégie de réduction de la pauvreté. Si vous étiez à notre place, au sein du gouvernement fédéral, que feriez-vous pour améliorer la situation du logement pour les gens de Saint John?
    Je crois que c'est clair, l'accès à un logement abordable et adéquat est absolument essentiel. Si nous voulons nous attaquer aux enjeux liés à la pauvreté, il est essentiel de nous attaquer au problème du logement. Le logement est fondamental. Nous avons d'abord et avant tout besoin de logements supplémentaires. Quand nous parlons de logements abordables, nous ne pensons pas nécessairement à des logements abordables pour des personnes à faible revenu; nous avons également besoin de logements abordables pour ceux que nous appelons les travailleurs pauvres.
    Je vais poursuivre sur le même sujet, si vous me le permettez. Avez-vous tout simplement besoin de plus d'argent? Avez-vous besoin d'argent ou aimeriez-vous que le gouvernement soit mieux aligné? Faudrait-il simplifier les services ou faudrait-il innover davantage? Est-ce que votre problème est uniquement de nature financière?

  (1100)  

    Je ne crois pas qu'il s'agisse d'un problème strictement financier. Puisque nous sommes un organisme sans but lucratif, il est certain que nous n'avons pas les ressources financières suffisantes pour offrir chaque année quelques unités de logement de plus. Je crois que cela tient à la volonté de tous les ordres de gouvernement, et le milieu des affaires comme le milieu des organismes sans but lucratif ont aussi la responsabilité de s'assurer que nous avons des logements en nombre suffisant.
    Si nous n'investissons pas de manière à avoir des logements adéquats et sûrs, nous allons tous en subir les répercussions. Les services de police et les services d'incendie recevront un plus grand nombre d'appels de service. Le système de santé devra répondre à un plus grand nombre de demandes. Le système d'éducation verra la demande augmenter.
    Non, il ne s'agit pas uniquement d'argent. Il faut aussi s'assurer que la municipalité est au courant du zonage inclusif, c'est-à-dire nous assurer que, quand de nouvelles unités de logement sont construites, une partie des logements seront abordables. Il est essentiel, aussi, de continuer à créer des collectivités à différents niveaux de revenu, qu'il ne s'agisse pas à 100 % de logements subventionnés.
    Merci.
    Il vous reste du temps.
    C'est parfait.
    Tony, merci du travail que vous faites auprès de ONE Change et d'Outflow. Je suis fier de pouvoir dire que le bureau de notre député collabore de très près avec Outflow. Nous y allons tous les samedis matin pour servir le déjeuner aux hommes qui fréquentent ce refuge. C'est certainement un privilège, pour nous, de pouvoir le faire.
    Pourriez-vous nous parler des défis auxquels fait face le refuge? Vous recevez du financement, et je ne vais pas donner de chiffres pour le moment, mais vous devez en fait mener des campagnes de financement et recueillir deux ou trois fois cette somme simplement pour boucler les fins de mois. Pourriez-vous nous expliquer à quels défis vous faites face, dans ce refuge, et nous dire comment un meilleur alignement des programmes de soutien fédéraux et provinciaux vous serait utile?
    Le principal problème, quand on parle des campagnes de financement, c'est le temps que cela exige. Je présente six demandes de subvention en janvier. Tout le temps que j'y consacre m'empêche de consacrer du temps aux hommes qui ont besoin d'aide pour surmonter un obstacle ou un autre. Ces hommes ont des besoins très diversifiés. Certains ont besoin de parler pendant cinq minutes, mais d'autres ont besoin d'un programme de défense de droits à long terme. Trouver un juste équilibre entre le travail qui me passionne véritablement et le fait de devoir trouver de l'argent est véritablement un combat.
    Quant au financement, tout le monde vous dira que, plus il y a de l'argent, mieux c'est. Il me semble que, pour le moment, nous avons trois fois plus de problèmes que de ressources pour régler ces problèmes.
    Faut-il mieux aligner les services? Par exemple, il ne fait aucun doute dans mon esprit que, quand nous nous rendons là, le samedi matin, il pourrait y avoir quelqu'un qui, par exemple, rédigerait une ordonnance ou quelqu'un qui pourrait prodiguer quelques conseils, des choses comme cela.
    Pensez-vous qu'il serait possible que les refuges offrent davantage de programmes de soutien complémentaires?
    Nous commençons à travailler en ce sens, mais je n'ai pas nécessairement de détails. J'ai rencontré des intervenants du milieu de la santé mentale en cherchant à trouver le moyen de faire en sorte que les clients du refuge qui ont besoin de soins de santé de ce type puissent accéder à ces services ou que les services viennent à eux. Nous ne sommes qu'à deux coins de rue d'un centre qui offre des soins en santé mentale, mais il peut se passer bien des choses entre deux coins de rue. Ce n'est pas aussi simple que ça en a l'air, de s'y rendre. Le Centre Mercantile offre beaucoup de soins en santé mentale, mais cet immeuble est très intimidant pour les visiteurs. C'est un bel immeuble, un immeuble magnifique, mais c'est tout. Il est certain que nous aimerions que les services soient fournis là, ou que les services soient plus facilement accessibles. Nous n'en sommes qu'aux premières étapes, et c'est pourquoi je ne peux pas vous dire exactement de quoi tout cela aura l'air au bout du compte.
    L'autre chose, c'est qu'il faut que nos clients aient accès à différents programmes de santé... En plus des problèmes de santé mentale, une partie de mes clients souffrent de problèmes de toxicomanie, et ils ont aussi des problèmes cognitifs. Il y a toutes sortes d'obstacles qui font que, pour eux, il est intimidant d'aller consulter un médecin, peu importe la raison. Je suis allé à un rendez-vous chez le médecin avec un de mes clients, et il leur était vraiment difficile de communiquer entre eux. J'y ai assisté en partie pour répondre au nom de mon client aux questions pour lesquelles il n'avait pas de réponse.
    Je crois qu'il serait très utile que des gens se consacrent à la défense des droits, dans ce contexte. C'est très facile pour vous et pour moi, la plupart de temps, de rencontrer un professionnel. Pour les gens qui ont été marginalisés toute leur vie, rencontrer un professionnel, c'est parfois une expérience horrible.

  (1105)  

    Merci.
    Me reste-t-il une petite seconde?
    Non, c'est terminé.
    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à Mme Vecchio.
    Merci beaucoup.
    Althea, j'aimerais m'adresser à vous, pour commencer. Vous avez parlé des mesures. Nous avons parlé de toutes sortes de choses, de la mesure du faible revenu à la mesure du panier de consommation. De quoi devrions-nous tenir compte, à votre avis, au moment de mesurer la pauvreté? À quelle sorte d'indicateurs devrions-nous recourir?
    Je n'ai pas beaucoup de temps, et j'aimerais que vous donniez une rapide réponse.
    Si vous cherchez des mesures, veillez à ce que les mesures s'appliquent non seulement au milieu urbain, mais aussi au milieu rural. Nous avons entendu dire, dans différents contextes, que des provinces ne pouvaient même pas utiliser les mesures existantes, parce qu'elles ne tiennent pas compte de la population autochtone. Vous voulez savoir quels paramètres il faut intégrer à la mesure du panier de consommation? La nourriture, le logement, le transport et l'absence de transport. Vous devez aussi en tenir compte, car une course en taxi ou un trajet en navette coûte davantage qu'un déplacement dans la collectivité. C'est un aspect très important, ça aussi.
    Je crois que ce serait là les trois principaux paramètres, la nourriture, le logement et le transport... On pourrait aussi ajouter l'éducation.
    Merci beaucoup. C'était impressionnant.
    Anthony, vous avez parlé de l'aspect générationnel de la pauvreté — nous en avons entendu parler —, et je constate que la situation se présente beaucoup, dans notre propre collectivité, qu'il n'y a pas de transition, que certaines familles restent pauvres pendant des générations.
    Je comprends que c'est un symptôme, mais que pourrions-nous faire pour nous rendre utiles, en tenant compte du fait qu'il s'agit de logements de transition, pas de logements permanents? Sur quoi devrions-nous nous concentrer, en tant que gouvernement?
    Vous parlez des logements de transition dans le contexte de la pauvreté intergénérationnelle?
    Ce que je constate, c'est que les gens sont censés rester dans ces logements pendant un, deux, ou trois ans. Cependant, dans ma propre collectivité, il y a des familles qui y restent pendant des décennies. Cela vaut aussi pour leurs parents et leurs grands-parents.
    Avez-vous des recommandations qui pourraient aider la transition de ces personnes d'un logement temporaire à un logement permanent?
    Je crois que la situation est différente selon la personne qui est devant vous. De façon générale, si obtenir un emploi est un but raisonnable pour la personne, on peut se demander ce qui l'empêche d'en trouver un. Est-ce que c'est une question de vérification du casier judiciaire? Ou peut-être qu'il n'y a pas de service d'autobus. Par exemple, s'il y a une offre d'emploi au coin de la rue, on peut demander à la personne pourquoi elle ne va pas trouver un emploi là-bas. Mais dans ce cas, qui va s'occuper des enfants à trois heures du matin pendant qu'elle travaille? C'est ce genre de chose de la vie réelle qu'il faut prendre en considération.
    Si le problème est que les gens se sont habitués à ce mode de vie ou quelque chose du genre... Le travail que nous faisons au centre communautaire vise toutes les tranches d'âge; ça aide les gens à voir les choses différemment. La chose la plus importante dans nos programmes, je le redis, est le fait que les gens viennent nous dire ce dont ils ont besoin. Ce n'est pas un comité qui leur dicte ce dont ils ont besoin.

  (1110)  

    D'accord.
    Daniel, vous nous avez parlé de la convergence du revenu régional. En anglais, on utilise aussi l'expression snob zoning, ou le zonage snob, c'est-à-dire que les gens veulent faire en sorte que leur collectivité ne change pas. Ils veulent faire partie d'une collectivité influente. C'est le genre de problèmes que l'on voit fréquemment.
    Nous savons qu'une résidence à Vancouver coûte en moyenne plus de un million de dollars. Dans la région du Grand Toronto, c'est 650 000 $, et au Nouveau-Brunswick, 126 000 $, d'après les dernières statistiques.
    Il y deux ou trois questions qui m'intéressent. La situation est ainsi: nous avons besoin de logements abordables, mais le contexte est différent d'un bout à l'autre du pays, et il y a un écart d'environ un million de dollars entre le coût des maisons sur la côte Ouest et la côte Est? Alors, que feriez-vous par rapport à cela?
    Sur quoi devons nous appuyer nos objectifs? Lorsqu'on construit des logements abordables dans certaines régions, devrait-on demander à ce qu'il y ait un pourcentage des habitations utilisé pour les logements abordables, et comment pouvons-nous contourner...? On discute beaucoup de ce genre de restrictions. Bob et moi-même avons participé à des tables rondes d'un bout à l'autre du Canada sur des questions de ce genre. Vous avez abordé le sujet des restrictions, et c'est ce dont les constructeurs d'habitations nous parlent le plus souvent: les restrictions et la bureaucratie. Pouvez-vous nous faire part de certaines de vos idées?
    Oui, je crois que vous avez raison; il n'y a aucune raison de... Construire une maison, ça ne coûte pas un million de dollars, n'est-ce pas? Il y a certaines restrictions en vigueur qui font que les prix demeurent élevés.
    Les efforts dont je parlais sont globaux, contrairement, je crois, à certains aspects plus directs... pour les gens qui ont des besoins urgents. Il y a des gens qui pourraient avoir des offres d'emploi dans ces marchés très coûteux, et ils ne peuvent pas venir à Toronto ou à Vancouver à cause des prix. C'est un objectif pour une autre échelle de pauvreté.
    Votre question à propos du pourcentage des habitations qui devraient être des logements abordables est, selon moi, intéressante, et je vais essayer d'y répondre concrètement. Cependant, je ne crois pas que le gros du problème est le fait que le marché ne fournit pas de logements abordables; cela n'arriverait pas naturellement. C'est plutôt qu'il y a des restrictions en place qui l'en empêchent.
    S'il y a un nombre limité d'unités d'habitation par ville, et que la demande est plus importante dans une ville donnée que le nombre total d'unités libres, alors les prix vont monter. Un objectif serait de faire en sorte que, pour un nombre donné, il y aura un certain pourcentage de logements abordables. Une autre solution serait de simplement augmenter le nombre d'habitations. S'il y a beaucoup de gens qui veulent vivre à un endroit, et s'il y a de nombreuses possibilités d'emploi, alors cela leur donne une option. Avec cette solution, on essaie d'accroître le nombre total de personnes.
    Merci.
    Il ne nous reste pas beaucoup de temps.
    Je veux dire quelque chose à propos d'un de vos commentaires, Daniel. Si vous faites d'autres recherches sur le Canada pour préparer un témoignage devant notre comité, vous devriez vous intéresser à Toronto. Cette ville a éliminé beaucoup de la bureaucratie dont vous avez parlé. Elle a déjà supprimé tout ce genre de frais, mais le prix des maisons continue de grimper. Je veux seulement vous encourager à étudier cela également.
    Je vais donner à Mme Sweet une dernière occasion de parler.
    Si vous avez d'autres questions, il vous reste environ deux minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais maintenant faire la distinction entre le logement social et le logement abordable.
    J'entendais quelqu'un dire tout à l'heure que 50 % de la population de la ville de Saint John loue un logement. Le marché locatif est donc important dans votre ville.
    Il y a des gestes que le gouvernement fédéral pourrait poser pour encourager la construction de logements à prix abordable, par exemple couper la TPS sur la construction de ce genre de logements. Avez-vous d'autres idées à formuler à ce sujet?
    Deuxièmement, qu'est-ce que nous pourrions faire pour maintenir le prix abordable de ces logements? Rien n'empêche un propriétaire d'augmenter les loyers après cinq ou dix ans. Quelles sont vos idées à ce sujet?

[Traduction]

    La situation à Saint John est unique, parce que nous avons un taux d'inoccupation très élevé. Ce taux d'inoccupation élevé fait en sorte que les promoteurs immobiliers ne voient aucun intérêt à venir y aménager de nouvelles unités d'habitation. Malheureusement, ce taux d'inoccupation comprend les parcs immobiliers plus anciens, qui sont maintenant inférieurs aux normes. En conséquence, nous devons composer avec le fait que les promoteurs immobiliers ne peuvent pas recevoir de financement à cause de l'état du marché. Malgré tout, le gouvernement provincial, par l'intermédiaire du Programme de logements locatifs abordables, un programme provincial de partage des frais associés au logement, a permis à des promoteurs privés d'obtenir du financement. Ils peuvent recevoir des subventions d'investissement pour les unités de logement abordable au prorata de 50 % du coût du projet d'aménagement. Ils ont également accès au Programme de suppléments de loyer.

  (1115)  

[Français]

    Je vais vous interrompre, parce que le temps qui m'est accordé est presque écoulé.
    Est-ce que certaines conditions ont été posées aux constructeurs ou aux promoteurs en vue de maintenir le prix abordable des logements pendant une longue période de temps?

[Traduction]

    Ces mesures incitatives comprennent-elles des clauses selon lesquelles le coût des logements doit demeurer peu élevé pendant une longue période?
    Répondez brièvement, je vous prie. Merci.
    Le programme de subventions d'investissement prévoit une période de gain de la remise obligatoire pour la subvention d'investissement, et, selon le montant d'argent, l'habitation pourrait demeurer abordable pour une période de 15 ans. En règle générale, les ententes pour les suppléments au loyer sont en place de 10 à 15 ans, ce qui protège effectivement l'abordabilité du logement pendant cette période.
    Merci beaucoup.
    Je tiens à vous remercier tous d'être venus ici aujourd'hui nous faire part de votre expérience et de vos opinions sur ces questions. Il s'agit d'un problème très grave. Le problème des logements abordables concerne tout le pays. À nouveau, je vous remercie beaucoup.
    Je souhaite remercier tous les membres du Comité ainsi que toutes les personnes qui ont rendu nos séances possibles. Je tiens également à remercier les personnes qui sont venues témoigner aujourd'hui. Nous avons vu beaucoup de personnes passer, et c'est réconfortant de savoir que nous tentons vraiment de régler un problème qui touche le coeur de la collectivité.
    Merci beaucoup.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU