Passer au contenu
Début du contenu

HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 015 
l
1re SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 1er juin 2020

[Enregistrement électronique]

  (1405)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Bienvenue à la réunion numéro 15 du Comité permanent des ressources humaines, du développement social et de la condition des personnes handicapées.
    Conformément aux ordres de renvoi du 11 avril 2020 et du 26 mai 2020, le Comité poursuit son étude de la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19. Conformément à la motion adoptée par la Chambre le 26 mai 2020, le Comité peut continuer à se réunir virtuellement jusqu’au lundi 21 septembre 2020 pour étudier des questions concernant la COVID-19 et d’autres questions.
    On a maintenant éliminé certaines limites jusque-là imposées aux réunions virtuelles. Comme je viens de le mentionner, le Comité peut maintenant étudier d’autres questions et, en plus d’entendre des témoignages, il peut aussi examiner des motions, comme il le fait normalement. Comme stipulé dans le dernier ordre de renvoi de la Chambre, toutes les motions feront l’objet d’un vote par appel nominal.
     La réunion d’aujourd’hui se tient par vidéoconférence, et les travaux seront diffusés sur le site Web de la Chambre des communes. Le site Web montrera toujours la personne qui parle plutôt que le Comité en entier.
    Je vous prie d’attendre que je vous donne la parole en vous nommant avant de commencer à parler. Lorsque vous êtes prêt à parler, prière d’activer votre micro en cliquant sur l’icône appropriée.
    Avant de commencer, et je m’adresse surtout aux témoins qui souhaitent prononcer leurs remarques dans les deux langues officielles, assurez-vous que la chaîne dans la langue que vous avez choisie est allumée lorsque vous parlez. Si vous passez d’une langue à l’autre, prière d’aussi changer de chaîne pour faciliter le travail des interprètes.
    Je tiens à remercier les témoins qui se sont joints à nous aujourd’hui. Nous accueillons, du Congrès du travail du Canada, Hassan Yussuff, président, et Emily Norgang, économiste, Politiques sociales et économiques. De la Christian Labour Association of Canada, nous recevons Wayne Prins, directeur général.
    Monsieur Yussuff, vous avez 10 minutes pour prononcer vos remarques liminaires. Nous vous écoutons.
    Monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité, bonjour. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de me présenter devant vous aujourd'hui. C'est un plaisir de me joindre à vous, même si c'est à distance.
    Le Congrès du travail du Canada est la plus grande organisation syndicale centrale du pays. Il regroupe plus de 50 syndicats nationaux et internationaux au Canada, ainsi que 12 fédérations provinciales et territoriales du travail et 100 conseils du travail dans tout le pays. Le Congrès du travail du Canada s’exprime sur des questions d’importance nationale pour trois millions d'hommes et de femmes syndiqués. Il défend également les intérêts de tous les travailleurs au pays.
    Les membres du Comité ont reçu une copie du mémoire du Congrès du travail du Canada sur les priorités en matière de travail pour la reprise économique.
    La pandémie de coronavirus et l’arrêt des activités économiques ont été dévastateurs pour des millions de travailleurs. Comme vous le savez, les travailleurs à faible revenu, en particulier les femmes et les travailleurs vulnérables, ont perdu un nombre disproportionné d’emplois et de revenus pendant la crise.
    Je vais parler de certains domaines prioritaires pour le Congrès et les syndicats du Canada.
    En ce qui concerne les prestations d’assurance-emploi, je tiens tout d’abord à féliciter le gouvernement et les fonctionnaires pour avoir rapidement conçu et mis en œuvre la Prestation canadienne d’urgence. Le programme d’assurance-emploi n’était pas outillé pour faire face à l’extraordinaire montée en flèche des demandes de prestations de chômage. Il était nécessaire de mettre en place une simple prestation de chômage qui permette un traitement automatisé des demandes. La Prestation canadienne d’urgence a généralement bien fonctionné, mais les syndicats et les employeurs ont demandé au gouvernement fédéral d’autoriser le versement de prestations supplémentaires de chômage en plus de la Prestation canadienne d’urgence.
    Les syndicats et les employeurs ont négocié des plans de prestations supplémentaires de chômage en prévision de licenciements. Nous demandons donc au gouvernement fédéral de prolonger la Prestation canadienne d’urgence au-delà de 16 semaines. De nombreux travailleurs à faible revenu, à temps partiel et occasionnels, ainsi que des travailleurs indépendants qui touchent des prestations d’urgence ne sont pas admissibles à l’assurance-emploi aux termes des règles existantes. Parallèlement, les prestations régulières de maladie de l’assurance-emploi devraient être simplifiées et rationalisées afin que le traitement des demandes puisse être entièrement automatisé. Le seuil d’admissibilité devrait donc être abaissé et un taux de remplacement plus élevé devrait être instauré.
    En ce qui concerne les soins de longue durée, les rapports des Forces armées canadiennes sur les centres de soins de longue durée en Ontario et au Québec montrent ce que les syndicats disent depuis des années: de nombreux centres de soins de longue durée sont en crise. Les pertes de vies inutiles et le traitement honteux des résidents de nombreux centres de soins de longue durée sont inacceptables.
    Ce sont les années de compressions budgétaires provinciales, l’augmentation de la propriété privée à but lucratif des centres de soins de longue durée et la pénurie de personnel de santé attribuable aux bas salaires, au peu d’avantages sociaux, à la charge de travail excessive, aux conditions de travail dangereuses et au manque d’heures à temps plein qui sont à l’origine de cette situation. Bien entendu, les provinces et territoires sont responsables de la prestation des services de soins de santé. Cependant, le Canada a désespérément besoin de normes nationales élevées et uniformes en matière de soins de longue durée.
    Le Congrès demande instamment au gouvernement fédéral de collaborer avec les provinces et les territoires à retirer les entreprises privées à but lucratif du secteur des soins de longue durée. Les soins de longue durée doivent être pleinement intégrés dans le secteur public et réglementé par la Loi canadienne sur la santé. Les résidents doivent se voir garantir des soins de qualité, avec un personnel adéquat et des protections convenables en matière de santé et de sécurité. De même, le travail essentiel effectué par le personnel des soins de longue durée doit être dûment valorisé. Si nous voulons résoudre les problèmes de personnel et les lacunes concernant les soins en établissement, les travailleurs ont besoin de hausses permanentes des salaires et des avantages sociaux, et de meilleures conditions de travail.
    Je félicite encore une fois le gouvernement fédéral d’avoir affecté jusqu’à 3 milliards de dollars pour aider les provinces et les territoires à augmenter les salaires des travailleurs essentiels à faible revenu. Ces augmentations de salaire doivent devenir permanentes et, à mon avis, elles devraient également s’appliquer aux travailleurs migrants à faible revenu qui assurent la sécurité de l’approvisionnement alimentaire du Canada.
    Les systèmes de transport en commun du Canada sont également en crise. Des réseaux de transport en commun efficaces, accessibles et fiables sont essentiels à la reprise économique des travailleurs. Toutefois, la baisse de 90 % du nombre d’usagers dans certaines villes s’est traduite par une baisse spectaculaire des recettes découlant des tarifs et des milliards de dollars de pertes de revenus. Alors que les administrations de transports en commun réduisent leurs services, des milliers de travailleurs ont été licenciés, et on s’attend à ce que des milliers d’autres le soient.
    Les employés des transports en commun qui sont toujours en poste sont confrontés à de graves risques pour leur santé. La plupart des véhicules de transport en commun et des installations de maintenance n’ont pas été correctement modernisés, et de nombreux travailleurs ne disposent pas de suffisamment d’équipements de protection individuelle.

  (1410)  

    À notre avis, le gouvernement fédéral devrait collaborer avec les gouvernements provinciaux et territoriaux pour élaborer un programme fédéral d’aide aux réseaux de transport en commun et aux réseaux d’autobus interurbains, et prévoir des dépenses en capital consacrées à la modernisation des véhicules de transport en commun et à l’achat d’équipement de protection individuelle pour les travailleurs de ce secteur.
    Il est essentiel de veiller à la santé et à la sécurité au travail en prévision du retour au travail. Il est essentiel que les travailleurs bénéficient de congés de maladie payés pour lutter contre la COVID-19. Je tiens à féliciter, bien sûr, le gouvernement, et le NPD en particulier, d’avoir mis ce point à l’ordre du jour.
    Il est important que les employeurs consultent les travailleurs, leurs syndicats ainsi que les représentants de la santé et de la sécurité concernant la manière de s’assurer que les plans de sécurité et les contrôles relatifs à la COVID-19 fonctionnent. Les travailleurs doivent participer par l’intermédiaire de leurs comités de santé et de sécurité au travail à l’évaluation des risques professionnels liés à la COVID-19 et à l’élaboration d’une réponse. C’est un élément important des bonnes pratiques en matière de santé et de sécurité qui doit être pris en compte dans la planification de la sécurité liée à la COVID-19 au travail. Nous devons également élargir le soutien aux travailleurs confrontés à des problèmes de santé mentale découlant de risques pour la santé, de la perte d’êtres chers, de l’isolement, du stress financier, de la dépression et de l’anxiété.
    En ce qui concerne l’assurance-médicaments, avant la pandémie, environ 10 % des Canadiens, soit 3,7 millions de personnes, ne pouvaient pas se payer les médicaments dont ils avaient besoin. Aujourd’hui, un nombre croissant de Canadiens n’ont pas les moyens d’acheter leurs médicaments, et des millions de travailleurs ont perdu leur emploi et ne bénéficient plus d’une assurance-médicaments au travail. Pendant la pandémie, les personnes âgées à revenu fixe ont du mal à payer leurs médicaments, car elles ne peuvent obtenir des renouvellements que sur une base mensuelle au lieu de tous les trois mois, comme c'était le cas avant la pandémie.
    Nous demandons donc au gouvernement d’accélérer la mise en place d’un régime public universel d’assurance-médicaments, comme le souligne le rapport Hoskins. En collaboration avec les provinces, le gouvernement devrait bien sûr prendre des mesures pour que tout le monde au Canada ait immédiatement accès à une liste de médicaments essentiels, ce qui couvrirait environ la moitié de toutes les ordonnances. Cette mesure est conforme aux recommandations du rapport Hoskins, mais elle devancerait les délais proposés.
    En ce qui concerne la sécurité des pensions et des retraites, les licenciements et la perte de revenus auront une incidence durable sur la sécurité de la retraite de nombreux travailleurs canadiens. En mars, le gouvernement a réduit le montant minimum qui doit être retiré des fonds enregistrés de revenu de retraite pour 2020. En mai, le gouvernement a également annoncé une aide financière pour les personnes âgées admissibles à la Sécurité de la vieillesse et au Supplément de revenu garanti. Le gouvernement a également suspendu le financement de l’insolvabilité pour les régimes de retraite sous réglementation fédérale. Nous accueillons favorablement ces mesures.
    Le Congrès exhorte également le gouvernement à travailler avec ses homologues provinciaux en vue de modifier le Régime de pensions du Canada. Cette modification sera également nécessaire pour protéger les prestations de retraite du régime des cotisants dont les revenus ont été affectés par la crise économique et le chômage. À notre avis, cela devrait prendre la forme d’une modification des dispositions d’exclusion et d’attribution de gains du régime, qui protègent partiellement le droit aux prestations de retraite des cotisants pendant une période de gains faibles ou nuls.
    À défaut de pareilles mesures extraordinaires, les prestations de retraite du Régime de pensions du Canada de centaines de milliers de Canadiens seront réduites de façon permanente, ce qui pourrait entraîner des pertes à vie de plusieurs milliers de dollars pour les particuliers. De plus, si les faillites commencent à augmenter, nous aimerions bien sûr que le gouvernement fédéral protège les pensions en prenant en charge l’administration des régimes de retraite qui ont échoué.
    Enfin, en ce qui concerne l’économie verte, la transition équitable et les investissements dans les infrastructures, nous estimons que la crise offre une occasion unique de relancer la croissance économique et de créer des milliers de bons emplois pour les femmes et les hommes en investissant dans les infrastructures sociales telles que les garderies, les écoles, les bibliothèques et les hôpitaux, ainsi que dans les infrastructures vertes et les projets connexes, tels que les énergies renouvelables, la rénovation des maisons et des bâtiments, et les transports en commun.
    Les gouvernements peuvent, en outre, s’assurer que les projets profitent aux communautés locales, aux femmes, aux peuples autochtones et aux groupes marginalisés en rendant obligatoire la conclusion d’ententes sur les retombées communautaires des projets d’infrastructure financés par le gouvernement fédéral. Ces investissements nous aideraient non seulement à atteindre nos objectifs climatiques, mais aussi à créer des milliers d’emplois décents dans tout le pays.
    Pour contribuer à ce processus, le gouvernement devrait faire participer pleinement les syndicats et les travailleurs au comité consultatif économique du gouvernement qui prodigue des conseils sur la planification de la relance.
    Membres du Comité, voilà qui conclut mes remarques liminaires. Je vous remercie de votre attention. Je répondrai à toutes vos questions.

  (1415)  

    Merci beaucoup, monsieur Yussuff.
    Nous entendrons maintenant Wayne Prins, directeur général de la Christian Labour Association of Canada. Vous avez 10 minutes, monsieur Prins.
    Bonne journée à tous. J’apprécie vraiment l’occasion qui m’est donnée de vous rencontrer aujourd’hui.
     La Christian Labour Association of Canada, ou CLAC, est un syndicat national fondé sur la conviction que les personnes, les entreprises et les collectivités de travail s’épanouissent lorsque les lieux de travail sont fondés sur la coopération et le respect mutuel. Nous croyons que la coopération et le partenariat entre les syndicats et les employeurs créent des collectivités de travail plus positives et de meilleurs résultats pour tous.
    La CLAC a été créée en 1952 et est aujourd’hui l’un des plus grands syndicats indépendants multisectoriels au Canada, avec plus de 60 000 membres travaillant dans un large éventail de secteurs et d’industries, notamment la construction, les soins de santé, la vente au détail, le transport, la fabrication, la transformation des aliments et autres. Au niveau international, la CLAC est un membre affilié de l’Organisation mondiale des travailleurs, dont je suis actuellement le président. L’Organisation mondiale des travailleurs représente collectivement 1,5 million de travailleurs dans une grande partie du monde.
    Nous restons indépendants des organismes syndicaux traditionnels au Canada, tels que le Congrès du travail du Canada, dont vous avez déjà entendu le témoignage. Nous avons beaucoup de respect pour les syndicats traditionnels et, dans de nombreux cas, nous en sommes venus à travailler en collaboration avec leurs membres affiliés à des initiatives sur le terrain. Le fait que nous ne soyons pas membres des syndicats traditionnels témoigne principalement d’une perspective différente concernant la nature et le rôle d’un syndicat en milieu de travail, ainsi que le choix des travailleurs et la responsabilité du syndicat. Toutefois, à de nombreux égards, le travail quotidien de nos syndicats est similaire, et nous sommes certainement confrontés aux mêmes défis dans le contexte actuel.
    Je tiens à féliciter tous les partis de s’être réunis et d’avoir favorisé une réponse rapide et efficace à la crise liée à la COVID-19. Les principaux programmes sont la Prestation canadienne d’urgence et la subvention salariale d’urgence. La Prestation canadienne d’urgence a été extraordinairement efficace pour aider des millions de Canadiens à traverser le pire de cette crise, et la subvention salariale d’urgence, particulièrement importante parce qu’il s’agit d’une subvention de 75 %, a littéralement sauvé des milliers d’entreprises canadiennes et permis à des millions de Canadiens de conserver un emploi rémunéré. Bien que ces programmes aient besoin de quelques ajustements à l’avenir, ils resteront d’une importance capitale pendant les mois à venir, en soutenant les travailleurs et les employeurs dans la reconstruction de l’économie.
    Je veux parler d’une crise nationale qui, au milieu de cette crise de la COVID-19, a pris une place centrale dans la conscience canadienne.
    La CLAC représente près de 10 000 membres qui travaillent en première ligne dans le domaine des soins de santé et des soins de longue durée en Ontario, en Alberta et en Colombie-Britannique. Le Grace Manor of Holland Christian Homes, qui était l’un des foyers mentionnés dans les médias nationaux la semaine dernière, est représenté par la CLAC. Ces travailleurs s’occupent des personnes âgées de notre pays avec un dévouement et un engagement extraordinaires. Si vous avez passé du temps avec eux, vous savez à quel point ils aiment les résidents et travaillent désespérément pour s’occuper d’eux de manière à les mettre à l’aise et à préserver leur dignité.
    Ils travaillent dans un environnement extrêmement difficile et pour de l’argent qui n’est souvent pas suffisant pour assurer leur subsistance. Les travailleurs utilisent chaque minute de leurs heures de travail pour prodiguer des soins pratiques aux résidents, mais le système les noie dans une paperasse et des documents inutiles, ce qui leur fait perdre du temps. Les attentes et la charge des soins ne cessent d’augmenter, mais le taux de financement n’a cessé de diminuer. En conséquence, les conditions de travail sont si difficiles qu’il est très difficile de trouver du personnel qualifié. Les pénuries de travailleurs sont fréquentes et l’épuisement professionnel des soignants est à la hausse.
    Tout cela trahit une effroyable indifférence en tant que société à l’égard des soins apportés à nos personnes âgées. Ce secteur a été négligé par les gouvernements de tout le pays pendant des décennies. En fait, la CLAC, avec d’autres, tire la sonnette d’alarme sur cette question depuis plus de 30 ans. Je comprends que ce secteur relève principalement de la compétence provinciale, mais nous comprenons maintenant qu’il s’agit d’une crise nationale. Il est moralement impératif que tous les intervenants se réunissent et trouvent des solutions à la crise dès maintenant. Le gouvernement fédéral peut jouer un rôle utile à cet égard, en commençant par établir une norme nationale de soins pour nos personnes âgées. Pour ce faire, il pourrait mener une étude orchestrée à l’échelle nationale sur les meilleures pratiques qui ont donné des résultats supérieurs.
    Avec tout ce qui a été dit récemment, je veux saisir cette occasion pour rendre hommage au service des travailleurs de ce secteur. Nous ne sommes pas mécontents que l’armée ait publié son rapport sur les foyers en Ontario. En fait, ce rapport pourrait finalement être le catalyseur d’un changement significatif. Cependant, pour nous, il est profondément affligeant de voir les travailleurs de première ligne dans le secteur des soins de longue durée porter le poids de l’indignation publique alors qu’en fait, la culpabilité est ailleurs. Les travailleurs restent les héros de cette situation, et c’est à nous autres, à commencer par nos dirigeants politiques, qu’il incombe de régler le problème.

  (1420)  

    Enfin, je veux parler de l'industrie de la construction et du travail dans le domaine des métiers spécialisés. La CLAC représente plus de 40 000 travailleurs spécialisés œuvrant dans le domaine de la construction et des métiers spécialisés. Elle représente notamment environ la moitié de la main-d'œuvre du secteur de la construction et de l'entretien contractuel dans l'industrie des sables bitumineux de l'Alberta, et approximativement la moitié des travailleurs construisant le mégaprojet d'énergie propre entrepris dans le Nord de la Colombie-Britannique appelé « Barrage du Site C ». Nous exécuterons une part appréciable du projet de LNG Canada à Kitimat, et quand le projet d'expansion du pipeline de Trans Mountain battra son plein plus tard cette année, plus de 60 % de la main-d'œuvre sera membre de la CLAC.
    Nous sommes très fiers de construire une bonne partie des infrastructures du secteur des ressources naturelles, des projets qui, au final, stimuleront l'économie canadienne en entier.
    Au cours de la crise, les activités du secteur de la construction ont constitué une bouée de sauvetage économique pour de nombreux Canadiens. Alors que la majorité de l'économie était à l'arrêt, les gouvernements des diverses provinces du pays ont déclaré que les travaux de construction étaient en bonne partie essentiels, confirmant ainsi le concept que nous, dans l'industrie, appelons la parité d'estime, principe selon lequel l'éducation dans les métiers spécialisés est aussi noble que toute autre forme d'éducation et les métiers spécialisés sont aussi importants que les autres emplois au pays.
    Il importe de comprendre qu'au Canada, les travailleurs de la construction sont répartis en trois principaux groupes: les syndicats de la construction traditionnels, la CLAC et d'autres syndicats, et les non-syndiqués ou les ateliers syndicaux ouverts. Chacun de ces groupes occupe une part substantielle du marché au Canada et, tout comme les Canadiens sont bien servis par la concurrence entre les partis politiques, nous sommes bien servis par la concurrence entre les acteurs du secteur de la construction.
    Si je dis tout cela, c'est parce qu'il existe un lien important avec ce qui s'en vient dans le cadre de la relance économique qui suivra la COVID-19. Comme nous l'avons vu ce matin à peine lors de l'annonce du premier ministre au sujet des municipalités, les investissements dans les infrastructures publiques joueront un rôle clé en stimulant l'activité et la croissance économique.
    Le gouvernement fédéral à lui seul dépensera des milliards de dollars dans le cadre de projets de construction, et il en ira de même de ses homologues provinciaux et des administrations municipales. Dans bien des cas, particulièrement dans celui des grands projets, les fonds viendront de plusieurs ordres de gouvernements. Dans tous les cas, il incombe aux gouvernements de veiller à ce que les fonds soient dépensés efficacement et de manière à ce qu'ils apportent des retombées optimales aux communautés où ils sont dépensés. De cette idée sont nées les ententes de retombées locales, un outil contractuel utilisé pour assurer la concrétisation des retombées.
    Bien entendu, la CLAC avalise le recours à ces ententes quand elles sont utilisées adéquatement. J'entends par là qu'il faut préciser les retombées locales escomptées, puis établir les conditions et affecter les ressources nécessaires pour obtenir ces retombées sans pour autant perdre les bénéfices d'une concurrence juste et ouverte pour le travail entre les acteurs de l'industrie de la construction.
    Parfois, les ententes de retombées locales sont utilisées pour limiter l'accès au travail à un seul groupe de travailleurs. Par exemple, le gouvernement de la Colombie-Britannique a conclu une telle entente avec les syndicats des métiers de la construction de la province. Ainsi, pour les projets désignés payés par tous les citoyens de la Colombie-Britannique, seuls les membres de ces syndicats sont autorisés à réaliser les travaux. La Ville de Toronto a fait de même avec les métiers de la construction de l'Ontario.
    Les données donnent à penser que lorsque les ententes de retombées locales sont utilisées à des fins restrictives, le coût des projets publics augmente de 20 à 25 %. Imaginez une augmentation de 20 à 25 % des milliards de dollars qui seront dépensés dans les infrastructures au pays dans la prochaine décennie. Il s'agit d'un point d'une importance capitale. Le lancement de concours équitables et ouverts pour les infrastructures publiques, que ce soit ou non sous les auspices d'une entente de retombées locales, constitue la meilleure approche, et l'approche que le gouvernement fédéral devrait exiger pour chaque dollar dépensé dans les infrastructures publiques au nom des Canadiens.
    C'est sur ces propos que je terminerai mon exposé. Je répondrai avec plaisir aux questions du Comité.
    Je vous remercie.

  (1425)  

    Je vous remercie beaucoup, monsieur Prins.
    Nous procéderons maintenant aux tours de questions, en commençant par M. Vis, qui dispose de six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président. Je partagerai mon temps aujourd'hui avec Mme Jansen.
    Monsieur Prins, je voudrais que le Comité sache que ma mère a été déléguée syndicale, à faible salaire, pour la Bethesda Christian Association pendant probablement 20 ans. Je vous remercie de témoigner aujourd'hui.
    Comme bien d'autres Canadiens, je m'inquiète beaucoup à propos de ce que j'entends au sujet des installations de soins de longue durée, particulièrement en Ontario et au Québec. Pensez-vous que les centres de soins privés sans but lucratif soient confrontés aux mêmes problèmes de financement que les centres à but lucratif?
     Oui. De façon générale, les problèmes de financement sont omniprésents. Il existe certainement diverses nuances, et si on examine l'ensemble de l'industrie, on constate qu'elle comprend un large éventail d'installations sans et avec but lucratif. Je n'ai rien vu qui dénote une corrélation directe entre les résultats et le genre de résidence. Les problèmes, particulièrement le genre de situations problématiques dont on a davantage entendu parler dernièrement, sont plus attribuables à un manque de financement généralisé, résultant d'une négligence générale ou du simple fait que le financement nécessaire n'a pas été fourni aux résidences pour qu'elles puissent respecter les normes applicables.
    Je vous remercie. C'est un témoignage très important pour notre comité.
    Pourriez-vous traiter brièvement de la situation pénible que vivent les employés d'hôtel actuellement? Je sais qu'en Colombie-Britannique, de nombreux employés d'hôtel reçoivent la subvention salariale, mais quand les activités internationales se raréfieront au centre de conférences de Vancouver à l'automne, qu'adviendra-t-il d'eux?
    « Situation pénible » est le mot juste. Les travailleurs de toutes les régions du pays vivront une sorte de retour à la normale à divers degrés, mais ceux du secteur de l'hébergement, particulièrement ceux oeuvrant dans l'hôtellerie, devront composer avec de faibles niveaux d'activité pendant de nombreux mois. Il faudra soumettre à des examens prolongés les programmes d'aide du gouvernement, notamment celui de la subvention salariale, mais aussi les autres formes d'aide pour que ces gens puissent payer leurs factures. Dans bien des cas, ils ne retourneront tout simplement pas travailler avant longtemps.
    Quand on pense à nos propres activités, les miennes et celles de tous ceux qui se trouvent dans la médiane aujourd'hui, et au nombre de jours que nous ne passons pas dans les hôtels alors que nous y serions normalement, on observe une corrélation directe entre nos activités et l'activité qui suscite du travail dans ce secteur. Certains d'entre nous pourraient commencer à travailler quelques heures dans les hôtels au cours des deux prochains mois, mais il est plus que probable que nous ne retrouverons pas un taux d'activité normal avant de nombreux mois. Les travailleurs auront besoin d'aide pour tous les mois où le retour au travail est retardé.
    D'accord.
    Pourrais-je obtenir une très brève réponse? Pour en revenir aux installations de soins de longue durée au Québec et en Ontario, et au manque de financement que vous et d'autres témoins avez déploré, se peut-il que ces installations ne fassent actuellement pas l'objet d'une surveillance suffisante de la part du gouvernement provincial?

  (1430)  

    Il est difficile de dire que la surveillance est insuffisante. Il y a eu un relâchement au chapitre de l'application de la loi.
    Les gens se demandent comment les choses ont pu en arriver là. Il y a des problèmes sur les plans de la réglementation et de la supervision, mais la plupart des problèmes que nous observons dans l'expérience que vivent les résidants sont simplement le résultat d'un manque de financement, un financement qui permettrait aux employés de disposer du temps et des ressources nécessaires pour prodiguer des soins aux résidents comme ils le devraient et comme ils le voudraient.
    Je vous remercie.
    Je céderai maintenant le reste de mon temps à Mme Jansen.
    Monsieur Prins, je pense que la proposition de M. Yussuff, laquelle consiste à tout rendre public, est une simplification exagérée des difficultés que rencontrent les installations de soins de longue durée. Je sais que dans ma région se trouve une installation de soins de longue durée qui fonctionne comme un navire de croisière. C'est formidable. Les responsables ont dû refuser de laisser entrer des travailleurs de la santé de leur propre région sanitaire parce qu'ils ne disposaient que de deux paires de gants et de deux masques pour la semaine.
    La réponse de la ministre Tassi [Difficultés techniques] si c'était acceptable. Considérez-vous que ce soit acceptable?
    Pardonnez-moi, pourriez-vous préciser votre pensée?
    Les employés n'ont pas assez d'équipement de protection individuelle, mais sont pourtant envoyés dans les centres de soins.
    Non, ce n'est absolument pas acceptable. De tous les problèmes que nous rencontrons, celui de l'équipement de protection individuelle est d'une importance cruciale. On ne peut qu'imaginer la détresse de ces employés quand ils travaillent en première ligne, en contact direct avec la contagion, alors qu'il n'y a pas suffisamment d'équipement de protection individuelle. C'est inimaginable.
    Considéreriez-vous qu'il soit exagérément simple de proposer de tout rendre public en affirmant que cela résoudrait le problème?
    Il ne semble pas que la situation soit attribuable à un seul problème.
    Répondez brièvement, je vous prie, monsieur Prins.
    C'est une simplification exagérée, bien entendu. De nombreuses installations non publiques accomplissent un travail exceptionnel. Si on songe à la manière dont ces résidences sont structurées, un bon nombre d'entre elles sont associées à un mouvement culturel ou confessionnel. Quand on pense à l'endroit où nous voulons finir nos jours, c'est...
    Le secteur est bien servi grâce à un éventail d'options; le problème se situe ailleurs.
    Je vous remercie, monsieur Prins.
    Je vous remercie, madame Jansen.
    Nous accorderons maintenant la parole à M. Turnbull pour six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
     Je remercie nos deux témoins de comparaître aujourd'hui. Je vous exprime toute ma gratitude et vous remercie de votre leadership.
    Monsieur Yussuff, je commencerai par vous. J'ai quelques questions à vous poser, après quoi nous verrons si nous pouvons interroger M. Prins également.
    Monsieur Yussuff, je tiens à vous remercier de votre leadership, mais je veux aussi faire référence à un document très important que le Congrès du travail du Canada a présenté vers le 13 mai, dans lequel il fait état de la vision syndicale de la relance économique.
    Je pense que ce document indique qu'il faut appliquer une approche tenant compte des genres et de la race dans le cadre de la relance économique, précisant que les démarches doivent s'appuyer sur un processus de relance inclusif et un engagement réel à réduire les inégalités au Canada alors qu'on rouvre les commerces et qu'on remettra finalement l'économie sur les rails de manière responsable et exhaustive.
    Pourriez-vous traiter de ces priorités? J'aimerais particulièrement savoir si vous pensez que les ententes de retombées locales s'inscrivent dans le cadre de la relance économique, mais j'écouterais aussi volontiers toute observation à portée générale que vous pourriez formuler sur la manière dont nous pouvons corriger ou réduire davantage les inégalités.
    Je vous remercie beaucoup de cette question.
    Selon les données que nous avons vues sur les projets et les investissements publics, nous sommes d'avis que les ententes de retombées locales constituent indubitablement un moteur formidable pour lutter contre les inégalités au chapitre des revenus, mais également pour tenir compte de la diversité de ceux et celles qui n'ont peut-être pas l'occasion de travailler dans le secteur.
    Il ne s'agit pas que des travailleurs ou des femmes qui pourraient obtenir un stage, mais aussi des petites entreprises qui tentent de tirer parti d'une occasion d'avoir accès au domaine alors que ces projets sont en cours.
    Bien entendu, la réalité, c'est que les retombées locales sont un moteur formidable lorsque vient le temps de lutter contre les inégalités, car elles permettent à de nombreux travailleurs qui n'en auraient peut-être pas l'occasion — notamment les jeunes, les femmes et les Autochtones — de s'inscrire à un programme de stage et, selon la durée des projets, et de non seulement commencer, mais aussi de terminer un tel programme dans le cadre du processus d'investissement.
    Je pense que c'est crucial. Il s'agit d'investissements du gouvernement et, dans une grande mesure, nous avons constaté, grâce aux données que nous avons pu examiner, que les travailleurs des communautés concernées peuvent tirer de grands avantages des retombées locales des projets. En outre, dans les endroits où sont investis les fonds — et donc l'argent des contribuables —, nous avons vu émerger de nouvelles possibilités pour les gens qui, très souvent, n'avaient pas de telles occasions avant. Il faut absolument conserver un moyen d'évaluer l'incidence bénéfique substantielle du projet sur l'ensemble de la communauté, mais aussi de déterminer qui en a profité dans la communauté.
    Les travailleurs racialisés, les Autochtones et les femmes sont une des cibles à qui l'aide devrait être offerte. Il importe que l'employeur et les gestionnaires de projet expliquent comment la communauté a progressé en faisant participer les groupes sectoriels qui n'avaient peut-être pas eu auparavant l'occasion de le faire.

  (1435)  

    Je vous remercie de ces explications.
    C'est formidable, et j'appuie sans réserve les ententes de retombées locales.
     Le rapport auquel j'ai fait référence, qui s'intitule Vision syndicale de la relance économique, souligne également l'importance des services de garde à l'enfance et va jusqu'à recommander la création d'un secrétariat des services de garde à l’enfance.
    Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet pour nous aider à comprendre pourquoi, selon vous, les organisations syndicales que vous représentez veulent l'instauration de services de garde à l'enfance à grande échelle et bien financés? Pourquoi cela est-il si important pour la relance économique du Canada?
    J'ai commencé en indiquant que certains groupes ont, bien entendu, été touchés de manière disproportionnée par la pandémie de la COVID-19 jusqu'à présent. Nous savons avec certitude que c'est sur les épaules des femmes que repose principalement la responsabilité de l'éducation des enfants. Les travailleuses mises à pied pendant toute cette période sont, bien entendu, confrontées à cette réalité.
    Nous considérons que pour réellement relancer l'économie, les services de garde à l'enfance constitueront un élément essentiel à la relance. Nous devons veiller à ce que les parents puissent confier leurs enfants à des services de garde compétents quand ils retourneront travailler, à défaut de quoi, ils ne pourront pas reprendre le travail. En ce moment même, les femmes constituent plus de la moitié de la main-d'oeuvre; par ailleurs, les familles en général dépendent des services de garde à l'enfance pour que tout le monde puisse aller travailler. En l'absence de services de garde adéquats lors de la relance de l'économie, je pense que nous assisterons à un réengagement disproportionné de ceux qui ne se rendront pas là.
    Nous sommes d'avis que le secteur de la garde à l'enfance joue un rôle essentiel. De plus, le réseau de garderies du Québec nous a montré que le système se paie de lui-même au fil du temps grâce à cet investissement. Nous devons collaborer avec les gouvernements provinciaux et les administrations municipales pour nous assurer que lorsque l'économie redémarrera, les services de garde à l'enfance constituent un élément essentiel. Nous pensons que le milieu des affaires appuie cette idée.
     En fait, de concert avec Goldy Hyder et le Conseil canadien des affaires, nous avons corédigé un article qui sera publié cette semaine, dans lequel nous incitons le gouvernement fédéral à travailler avec les provinces et les territoires, mais aussi avec les administrations municipales, et à prendre des mesures pour que les services de garde à l'enfance constituent un élément essentiel de la relance de l'économie. Il est crucial qu'ils admettent la responsabilité disproportionnée que les femmes assument pendant la période de relance. Nous ne voulons pas alourdir leur fardeau en omettant d'offrir des services de garde à l'enfance et nous voulons veiller à ce qu'il y ait du financement et des ressources pour elles dans l'avenir.
    Je veux remercier le gouvernement pour tout ce qu'il accomplit. Nous continuerons d'exercer des pressions pour nous assurer que ces services soient offerts au cours de la relance.
    Je vous remercie, monsieur Yussuff et monsieur Turnbull.
    Monsieur Yussuff, nous allons maintenant accorder la parole à Mme Chabot, mais je ferais remarquer que les interprètes éprouvent quelques difficultés à vous entendre. Pourriez-vous tenir votre micro un peu plus près de vous? Cela facilitera l'interprétation.
    Merveilleux. Je vais essayer.

[Français]

    Madame Chabot, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur le président Yussuff, je vous remercie de votre témoignage. J'aurais mille questions à vous poser.
    D'entrée de jeu, je dois dire que je suis d'accord avec vous sur certains éléments. Par exemple, investir dans des services publics phares de qualité est nécessaire sur le plan de la relance économique. Cela fait partie de la solution. Nous avons la même opinion à cet égard, et c'est aussi souvent le cas en ce qui a trait à certaines luttes que nous devons mener.
    Ma question portera plus précisément sur les caisses de retraite. Je ne sais pas si vous avez le portrait global de la situation, mais ce qui se passe est assez inquiétant. Comme vous l'avez mentionné, la reprise économique ne se fait pas de manière égale partout. Certaines entreprises se mettent déjà à l'abri des créanciers et les faillites seront peut-être plus nombreuses qu'on ne le croyait.
    En ce qui concerne les caisses de retraite, en attendant que le gouvernement se décide à modifier la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies et la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, pensez-vous qu'il pourrait au moins faire quelque chose afin de protéger les travailleurs?

  (1440)  

[Traduction]

    Oui, bien sûr. Je vous remercie infiniment de cette question. C'est un aspect qui inquiète beaucoup les travailleurs, en particulier parce qu'en effet, certaines entreprises pourraient devenir insolvables pendant l'actuelle pandémie de COVID-19.
    Le ministre Morneau a apporté de grandes améliorations concernant les problèmes de solvabilité auxquels feront face nos régimes de retraite — en essayant d'obtenir la reconnaissance de cette réalité. Également, j'ai souligné aujourd'hui dans notre mémoire que certains régimes de retraite vont très vraisemblablement souffrir d'insolvabilité en cette période.
    À cet égard, ce que nous disons est possible. Le gouvernement fédéral pourrait trouver une façon de prendre le contrôle d'une caisse de retraite qui devient orpheline, en consultation avec les travailleurs et l'employeur, afin de décider de la façon de gérer cette caisse pendant la période d'insolvabilité de sorte que le régime puisse être ramené à la vie.
    Il y a bien sûr d'autres inquiétudes. Si une entreprise fait faillite, les actifs restants de cette entreprise ne vont pas en priorité aux travailleurs. Nous réclamons depuis longtemps que les travailleurs soient prioritaires et que les actifs faillis servent à financer leur caisse de retraite. Il s'agit de promesses faites par l'employeur. Ce sont des salaires qui ont été détournés. Surtout, les employeurs ne devraient pas être libérés de leurs responsabilités pendant la période de faillite.
    En même temps, nous croyons également qu'il est très important de faire comme l'Ontario. Ils ont un mécanisme de protection. Quand une entreprise fait faillite et que le régime de retraite est orphelin, le mécanisme de protection est là pour donner un degré de protection aux travailleurs. Récemment, c'est ce que nous avons vu avec les employés de Sears. L'entreprise a fait faillite. Les travailleurs de l'Ontario se sont mieux tirés d'affaire que les autres grâce au mécanisme de protection des régimes de retraite que le gouvernement Ontario avait mis en place.

[Français]

     Le mécanisme de protection des régimes de retraite en vigueur en Ontario est-il un programme en bonne et due forme ou relève-t-il d'une fiducie comme plusieurs syndicats et retraités ont, comme on le sait, tenté de faire établir et reconnaître? Le mécanisme ontarien est-il distinct de ce genre de fiducie ou non? Ce n'est pas clair.

[Traduction]

    Si votre régime de retraite est enregistré en Ontario, vous êtes automatiquement couvert par le mécanisme de protection. Vous devez payer une prime parce que votre régime de retraite est enregistré en Ontario. Si votre caisse de retraite devient insolvable et qu'elle n'est pas entièrement provisionnée, le mécanisme de protection est là pour atténuer — sans toutefois les éliminer entièrement— les difficultés auxquelles les travailleurs pourraient faire face concernant leur régime de retraite.
    C'est automatique pour tous régimes de retraite enregistrés en Ontario. Ils doivent être enregistrés même s'ils relèvent de régimes enregistrés ailleurs au pays, à l'échelle provinciale. C'est crucial pour les régimes qui sont enregistrés en Ontario. Ils doivent automatiquement être soumis au mécanisme de protection.

[Français]

    Je vous remercie.
    J'ai une autre question sur tout le domaine des soins de santé, puisqu'on parle beaucoup de ce qui s'est passé dans nos centres de soins de longue durée. Vous n'en avez pas parlé dans votre mémoire, mais il y a une question qui me fatigue.
    On sait que l'argent se trouve à Ottawa, qui le transfère aux provinces. Pourtant, tout ce qui concerne la santé, les services sociaux, les choix de société en matière de programmes, la rémunération des salariés et les normes d'éducation relève des compétences des provinces. Or, pour agir en santé, les provinces ont besoin que le Transfert canadien en matière de santé soit augmenté. Êtes-vous d'accord là-dessus et, si vous l'êtes, de quel ordre devrait être cette augmentation?

  (1445)  

[Traduction]

    Les paiements de transfert pour la santé sont un enjeu et une source de tensions entre les provinces et territoires et le gouvernement fédéral depuis longtemps.
    La réalité, d'après moi, c'est que les provinces ont aussi une part de responsabilité. Une grande partie du sous-financement est attribuable au fait que les provinces et territoires ont choisi de défavoriser les soins de longue durée et de ne pas les financer convenablement, dans une mesure qui aurait permis de prévenir certains décès et, surtout, de ne pas payer suffisamment les travailleuses de ce secteur.
    Je crois qu'il est essentiel de reconnaître que les provinces ont choisi — et je ne suis pas ici pour les excuser— de réduire les impôts et de réduire l'argent dont elles disposent pour financer ces services. Au bout du compte, ce que nous voyons maintenant correspond à ce que nous voyons depuis des décennies dans le mouvement syndical. La réalité est que le personnel est mal payé, que ces personnes doivent avoir trois ou quatre emplois pour arriver à joindre les deux bouts, et qu'elles travaillent dans les soins de longue durée. Un grand nombre d'entre elles n'ont que le salaire minimum.
    Si le gouvernement fédéral ne s'était pas engagé à prendre des mesures spéciales pour mieux payer ces travailleuses… Les gouvernements de la plupart des provinces disent qu'ils ne vont pas maintenir ce paiement spécial aux travailleuses, une fois qu'il aura pris fin, même si nous savons qu'elles sont gravement sous-représentées. Il ne fait aucun doute que le gouvernement fédéral peut augmenter les transferts en santé aux provinces, mais qu'est-ce qui nous garantit que les provinces vont consacrer cet argent aux soins de longue durée? Quel engagement avons-nous de la part des provinces qu'elles vont faire appliquer les règles permettant de garantir que les services aux aînés sont adéquats?
    Surtout, nous disons qu'éliminer la possibilité de faire des profits signifie que chaque dollar que vous donnez à une installation de soins de longue durée sera investi dans l'installation de soins de longue durée et ne sera pas simplement siphonné pour aboutir dans les poches des actionnaires. C'est ce que nous préconisons. Je crois que c'est le problème fondamental, sachant que la plupart des entrepreneurs qui exploitent des installations de soins de longue durée ne le font pas par simple bonté de cœur, mais bien parce qu'ils veulent faire de l'argent en offrant ce service.
    Nous croyons qu'exclure de notre système de santé la possibilité de répondre à un désir de réaliser des profits permettrait d'investir tout cet argent de manière à garantir un meilleur système pour les personnes qui reçoivent des soins, un salaire décent pour les travailleuses et un effectif suffisant pour que cela ne se reproduise pas.
    Merci, monsieur Yussuff.

[Français]

     Merci beaucoup, madame Chabot.
    En conclusion...
    Je suis désolé, mais vous avez déjà eu huit minutes. C'était une longue réponse.

[Traduction]

    Monsieur Duvall, bienvenue au Comité. Vous avez six minutes.
    Je sais gré à nos témoins d'être là aujourd'hui pour présenter leurs déclarations. C'est vraiment très utile.
    J'ai une question pour M. Yussuff.
    Vous avez mentionné les prestations supplémentaires de chômage. C'est un élément qui est négocié entre les employés et l'employeur, et dont le coût est en fait imputé au salaire horaire des employés. Les prestations commencent quand les gens sont mis à pied et qu'ils sont admissibles à l'assurance-emploi.
    Nous savons maintenant que de nombreuses personnes mises à pied avant le 14 mars sont admissibles à cela et bénéficient des prestations normales d'assurance-emploi. Cependant, les travailleurs qui sont venus ensuite, ceux qui ont été mis à pied après le 15 mars, doivent se prévaloir de la Prestation canadienne d'urgence, la PCU, qui leur donne un montant inférieur aux prestations d'assurance-emploi qu'ils auraient normalement, et ils ne sont pas admissibles maintenant à leurs prestations supplémentaires de chômage. Cela a vraiment créé une iniquité et causé des difficultés financières aux familles de travailleurs.
    Croyez-vous qu'il faut annuler la règle imposée par le gouvernement et permettre aux travailleurs de percevoir les prestations qu'ils ont négociées alors qu'ils bénéficient de la PCU?
    J'ai deux réponses à vous donner, et il se peut que je me corrige moi-même ou que quelqu'un d'autre me corrige à un moment donné.
    D'après ce que je comprends, le ministère a permis aux personnes qui bénéficient de la PCU de recevoir 1 000 $ de leur régime de prestations supplémentaires de chômage. C'est ce qu'ils ont permis aux personnes bénéficiant de la PCU de gagner.
    Selon ma compréhension des choses, au moins, pour que tout soit clair, les personnes qui obtiennent la subvention salariale peuvent profiter de leur régime de prestations supplémentaires de chômage, en plus de la subvention, pour que cela donne leur salaire complet comme prévu.
    Cela devrait être la norme, bien sûr. Le but de la PCU est de simplifier le processus et de verser rapidement les prestations. Les travailleurs ont le droit de gagner jusqu'à 1 000 $, selon les règles.
    Nous pressons le gouvernement de continuer d'apporter des améliorations de sorte que les travailleurs qui contribuent à leur régime de prestations supplémentaires de chômage y aient accès. Vous avez absolument raison: ce serait la norme s'ils recevaient des prestations d'assurance-emploi. Bien entendu, ils n'y ont pas entièrement droit s'ils obtiennent la PCU en ce moment.
    Tel que nous le comprenons, ils peuvent obtenir jusqu'à concurrence de 1 000 $, avec le ministère, et de la même manière, jusqu'à concurrence de la différence entre leur subvention salariale et leur plein salaire en application du régime de prestations supplémentaires de chômage.

  (1450)  

    Merci. Il semble y avoir des problèmes de communication. Certains des syndicats avec lesquels j'ai discuté du maximum de 1 000 $ se sont fait dire qu'ils ne peuvent pas recevoir leurs prestations supplémentaires de chômage jusqu'à concurrence de 1 000 $. Je vais en discuter avec la ministre. Je voulais avoir votre perspective à ce sujet.
    Monsieur Yussuff, vous avez soulevé un autre bon point concernant les faillites et la protection des travailleurs. En ce moment, de nombreux travailleurs, syndicats, entreprises et analystes à l'échelle du pays lancent un cri d'alarme concernant les risques de faillite à cause de la COVID-19. Notre gouvernement dit avoir apporté des changements à la loi il y a environ un an; cependant, si des entreprises font faillite, les employés peuvent perdre des milliers de dollars en indemnités de départ. Ils perdent leurs prestations de soins de santé et subissent une énorme réduction de leurs pensions. Cela peut se produire.
    Croyez-vous que les dispositions de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité protègent adéquatement les travailleurs, même avec les modifications annoncées récemment par le gouvernement?
    Non. Je crois que ce sont des changements évidemment positifs, qui étaient attendus depuis longtemps, mais en réalité, si une entreprise faisait faillite, avec les règles actuelles, les actifs restants de cette entreprise ne serviraient pas à couvrir le passif non provisionné du régime de retraite des travailleurs. C'est injuste.
    Les travailleurs ne sont pas des investisseurs. Nous allons travailler jour après jour. Nous nous engageons. Nous accomplissons notre travail en conséquence. Quand l'entreprise fait faillite, nous ne devrions pas être obligés d'assumer le risque simplement parce que les créanciers bénéficient d'une super priorité alors qu'on dit aux travailleurs d'attendre en ligne. Nous défendons cette cause depuis des décennies, et nous disons que la loi doit changer.
    Il s'agit bien sûr d'un aspect fondamental des réformes qui sont requises. Nous savons que certaines entreprises vont faire faillite pendant cette pandémie, et nous espérons que le régime de retraite sera mieux et qu'il sera solvable. À ce jour, d'après ce que nous voyons au sujet de la situation des régimes de retraite, c'est raisonnable, mais au bout du compte, si un régime de retraite était en difficulté avant la pandémie, la situation n'en serait que pire.
    Nous croyons que les travailleurs doivent avoir la priorité. Les dispositions législatives sur la faillite et l'insolvabilité de ce pays ne servent pas les travailleurs dans toute la mesure possible. Il faut des changements.
    Monsieur Yussuff, sachant que cela pourrait se produire, croyez-vous que le gouvernement devrait travailler à ces changements immédiatement afin de protéger les travailleurs?
    Absolument. Les travailleurs ne devraient pas être en panique parce que leur régime de pension pourrait être en difficulté, parce que leur entreprise pourrait être en plus grande difficulté encore, et parce qu'ils ne savent pas si, en fin de compte, ils seront toujours à l'emploi de cette entreprise. C'est beaucoup de stress. Comme vous le savez, quand vous passez votre vie à travailler, vous vous attendez à ne pas être obligé de vous inquiéter de savoir si vous aurez votre pension. Les travailleurs ne devraient pas être mis dans cette situation en ce moment.
    Merci, monsieur Yussuff.
    Merci, monsieur Duvall.
    C'est maintenant au tour de M. Albas, qui a cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à nos deux témoins d'être avec nous aujourd'hui.
    Monsieur Prins, je vais commencer par vous.
    À notre dernière réunion, nous avions des représentants des métiers de la construction. Ils ont parlé de diverses choses, y compris des ententes sur les retombées locales. Vous avez parlé de ma province, la Colombie-Britannique. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce qui a bien fonctionné dans ce cadre?
    Vous n'avez pas dit qu'il fallait rejeter cet outil, mais il était question des personnes qui pouvaient y participer et de la façon. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur l'expérience de la Colombie-Britannique et sur les effets que cela a eus?
    Nous disons que nous appuyons les ententes sur les retombées locales parce que, comme nous l'avons entendu précédemment, il y a beaucoup de retombées locales positives à tirer de la dépense de fonds publics. Nous trouvons qu'il s'agit d'une manipulation insensée du marché quand on utilise un outil contractuel comme l'entente sur les retombées locales pour faire entrave à la dynamique normale d'un marché concurrentiel en disant à ce marché: « Voici les retombées que nous souhaitons dans cette collectivité, et en tant que gouvernement, nous n'allons choisir que ce groupe pour les réaliser. »
    Il faut préserver les gains et les avantages qui viennent avec la dynamique de concurrence d'un marché, même si nous avons cerné les retombées que nous souhaitons dans la collectivité. C'est alors que vous utilisez l'entente sur les retombées locales, pour veiller à la réalisation des éléments de cette liste — peu importe ce que vous voulez sur la liste — à l'issue du projet.

  (1455)  

    Dans les ententes sur les retombées locales, s'il y a une disposition précisant que nous voulons un certain nombre d'apprentis, que nous souhaitons la participation des collectivités des Premières Nations, de groupes particulièrement marginalisés ou encore de personnes handicapées, vous seriez favorable à cela, du moment que l'entente sur les retombées locales prévoit que n'importe qui peut faire une soumission. Est-ce juste?
    Tout à fait.
    Vous êtes au courant, dans votre province, du remplacement du pont Pattullo. C'est un énorme projet d'infrastructure. Toutes les choses que vous avez mentionnées sont des objectifs de la collectivité, concernant ce projet, et c'est excellent. Personne ne dira que ce ne sont pas de bonnes choses à souhaiter. Le problème, c'est que tout cela a été intégré dans une entente exclusive et restrictive qui empêche de nombreux Britanno-Colombiens… En fait, la vaste majorité des travailleurs de la construction de la Colombie-Britannique qui ne font pas partie du Syndicat des métiers de la construction ne peuvent pas travailler à ce projet.
    Sur le plan des politiques publiques, l'énorme augmentation artificielle du coût de ces projets est tout aussi inquiétante, et tout ce que cela signifie…
    Je me soucie du contribuable, et vous avez souligné que le contribuable va payer davantage.
    Honnêtement, si les ententes sur les retombées communautaires ne permettent pas aux travailleurs non syndiqués ou aux syndicats comme le vôtre de participer, quel est l'effet sur vos membres? Est-ce qu'ils se retrouvent obligés d'aller travailler dans une autre province où il n'y a pas d'ententes sur les retombées locales, ou d'adhérer à des syndicats qui ont le monopole?
    Chaque travailleur doit faire ses propres choix. Certains vont adhérer au syndicat; d'autres vont chercher du travail ailleurs.
    Je devrais souligner que l'entente en Colombie-Britannique fait l'objet d'une poursuite en justice selon laquelle, entre autres, priver les travailleurs de la possibilité de choisir le syndicat qui va les représenter est une violation de la liberté d'association, un des piliers du droit du travail canadien. C'est en cour.
    Bien entendu, je me préoccupe des choix et des possibilités qui s'offrent à nos membres. Je me préoccupe également de ce que le contribuable n'en a pas pour son argent. Ce n'est pas que le montant dépensé va être supérieur dans l'ensemble; c'est simplement qu'il y aura nettement moins d'infrastructure. Les gouvernements vont quand même dépenser 10 milliards de dollars; l'infrastructure obtenue pour ce montant sera cependant nettement moindre.
    Oui. Je comprends.
    Les représentants des métiers de la construction ont aussi exprimé leur appui au développement du potentiel du Canada concernant les pipelines nécessaires à l'exportation de nos produits dans le monde. Quelle est l'opinion de votre syndicat à ce sujet?
    Bien sûr, nous souhaitons un virage vers une économie verte et appuyons toute mesure qui garantira un environnement plus durable pour nos vies. Cependant, l'économie du Canada est fondée sur les ressources. Il n'est pas judicieux de prétendre que c'est autre chose. Donc…
    Je vous remercie. Je suis désolé, mais mon temps est limité…
    Et vous l'avez entièrement utilisé.
    Merci, monsieur Albas. Merci, monsieur Prins.
    C'est maintenant au tour de M. Dong, qui a cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens d'abord à remercier les témoins de nous consacrer du temps malgré leur horaire chargé.
    J'ai écouté attentivement les exposés ainsi que les questions et réponses. C'est très utile.
    Monsieur Yussuff, j'ai entendu vos observations au sujet des différents programmes gouvernementaux mis en place pour faire face à la COVID-19, notamment la PCU, la subvention salariale et la prestation pour les étudiants. J'aimerais en savoir plus sur votre point de vue à propos de chacun.
    Premièrement, concernant la PCU, comment estimez-vous qu'elle a contribué à protéger les travailleurs et à assurer leur sécurité en cette période stressante?

  (1500)  

    Comme vous le savez, personne ici n'a choisi de fermer l'économie pour empêcher la propagation du virus. C'était la décision de notre gouvernement. Je pense que nous devions trouver un moyen de verser rapidement des prestations aux travailleurs. La création de la Prestation canadienne d'urgence, ou PCU, et du portail par les travailleurs de la fonction publique qui a permis de verser l'argent aussi rapidement a été une réussite colossale au pays. Nous exprimons toute notre gratitude à ces employés ainsi qu'au gouvernement pour la rapidité à laquelle le système a été mis sur pied.
     Le fait est que la PCU est une prestation unique. Il ne s'agit pas du montant que certains travailleurs recevraient s'ils pouvaient toucher des prestations d'assurance-emploi. La somme est parfois supérieure, et parfois inférieure, mais il n'en demeure pas moins qu'un juste équilibre est atteint. Je pense que les millions de travailleurs qui en bénéficient aujourd'hui sont très heureux que vous leur versiez une somme mensuelle sur laquelle ils peuvent compter pour répondre à leurs besoins.
    Alors que l'économie continue sa réouverture, nous allons devoir trouver un moyen de composer avec la prestation et avec les défis qui pourraient se présenter au bout du compte. Comme vous le savez, tous les travailleurs ne retourneront pas au travail à court terme, de sorte que la PCU a été fort utile. Je pense que tout le monde mérite des félicitations pour le travail accompli et le soutien apporté. Des ajustements ont également été apportés au programme pour permettre aux gens de travailler et pour aider ceux qui prennent le risque d'aller travailler afin de gagner un montant supérieur à la PCU. Je pense que c'est une bonne chose. Il se peut que nous devions encore apporter quelques changements à l'avenir.
    En ce qui concerne le programme de subvention salariale, la décision de bonifier le programme de façon à couvrir 75 % des salaires jusqu'à un seuil de quelque 800 $ par semaine a été judicieuse. Cette décision a permis de s'assurer que la plupart des employés puissent finalement maintenir un lien d'emploi avec leur lieu de travail et leur employeur plutôt que d'être mis à pied. Nous avons même vu un certain nombre d'entreprises revenir sur leur décision initiale de licencier leurs employés. Elles ont pu maintenir leurs travailleurs en poste. Le gouvernement a prolongé le programme de subvention salariale jusqu'à l'automne, et nous allons encourager les employeurs qui bénéficient actuellement du programme à garder les travailleurs à leur emploi, étant donné qu'il est préférable pour les employés de maintenir leur lien d'emploi et de savoir qu'ils ont toujours un travail. Ils n'ont pas été complètement remerciés, et ils pourraient retourner au travail.
    Pardonnez-moi de vous interrompre...
    Veuillez m'excuser un instant, monsieur Dong.
    Monsieur Yussuff, c'était beaucoup plus facile pour les interprètes lorsque vous teniez le micro près de vous.
    Je m'en excuse.
    Merci, monsieur le président. J'espère que ce temps ne sera pas retranché de mes cinq minutes.
    Au sujet de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail, nous avons entendu dire que certains de ces emplois pourraient ne pas revenir après la COVID. Êtes-vous de cet avis? Comment la Subvention salariale d'urgence du Canada, ou SSUC, pourra-t-elle aider dans cette situation? Elle pourrait être utile ou non. Par ailleurs, que faites-vous pour préparer vos membres à la possibilité qui nous préoccupe, à savoir que certains de ces emplois pourraient ne pas revenir?
    Il ne fait aucun doute que certains de ces emplois ne reviendront pas. Nul besoin de contester cela. Nous devons trouver une façon de continuer à soutenir les travailleurs pour qu'ils ne dépendent pas uniquement de l'aide sociale pour payer leurs factures ou leur loyer, ou pour répondre à tout autre besoin de leur famille. Nous devons trouver une solution à la hauteur, car ces gens n'auront pas d'autre travail à court terme. Nous allons devoir trouver un moyen de poursuivre le programme.
    Au fur et à mesure de la réouverture des entreprises, nous verrons rapidement combien de travailleurs retournent au travail. Nous sommes bel et bien conscients de la situation. Nous parlons par exemple du secteur de l'hébergement, dont il a été question plus tôt aujourd'hui. Il est peu probable qu'un nombre important de travailleurs retournent à leur travail dans un avenir rapproché, avant que les gens se sentent suffisamment en sécurité pour aller à l'hôtel ou prendre l'avion afin de voyager. Nous devons en tenir compte.
    Je pense que ces programmes devront demeurer en place pendant un certain temps, pour s'assurer que les travailleurs ont certains revenus et qu'ils puissent continuer à payer leurs factures.
    Merci, monsieur Dong.
    C'est tout?
    Je suis vraiment désolé, mais l'heure est écoulée.
    Messieurs Yussuff et Prins, je vous remercie infiniment d'avoir témoigné aujourd'hui avec patience et de nous avoir donné des réponses complètes. Nous vous en sommes très reconnaissants, et cela va nous aider dans notre travail.
    Nous allons suspendre la séance quelques minutes pendant que MM. Prins et Yussuff nous quittent, puis que nous accueillons le prochain groupe de témoins.

  (1505)  


  (1515)  

    Reprenons.
    Nous tenons à remercier les témoins d'être avec nous aujourd'hui et de faire preuve de patience pendant que nous ajustons la technologie.
    Nous accueillons maintenant Jerry Dias, président d'Unifor. Nous recevons également les représentants du Syndicat des Métallos: Ken Neumann, directeur national, et Dominic Lemieux, directeur du District 5.
    Monsieur Dias, veuillez procéder à votre déclaration d'ouverture. Vous avez 10 minutes, mais vous n'êtes pas obligé d'utiliser tout votre temps.
    Ce sera difficile.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, messieurs Neumann et Lemieux, bonjour.
    Je m'appelle Jerry Dias. Je suis le président national d'Unifor, le plus grand syndicat du secteur privé au Canada. Unifor représente 315 000 membres au pays qui travaillent dans presque tous les secteurs industriels, y compris la santé et les soins de longue durée, la vente au détail, le transport de voyageurs, la transformation des aliments, les services publics, la logistique et bien d'autres domaines qui sont en première ligne de la pandémie de la COVID-19.
    Je suis ravi de m'adresser à vous tous, même si nous devons le faire à distance. J'espère que vous avez tous pu demeurer en sécurité et en santé pendant cette période difficile. Au nom d'Unifor, je vous remercie sincèrement de m'avoir invité à vous donner notre avis sur la réponse du gouvernement fédéral à la pandémie de la COVID-19. J'espère que mes propos contribueront à faire avancer vos travaux.
     Nous sommes au cœur d'une crise sans précédent sur les plans de l'économie et de la santé publique, et qui a des répercussions dans le monde entier. Il y a eu 5,8 millions de cas confirmés de la COVID-19 dans le monde, et environ 360 000 décès, dont près de 7 000 ici au Canada. Avec 7 000 vies perdues au Canada et autant de familles en deuil, des pertes de cette ampleur dépassent tout simplement l'entendement.
    Unifor est fier d'être un syndicat canadien. Chaque parcelle de notre organisation est vouée à protéger le gagne-pain, l'emploi et la santé des travailleurs au Canada. Nous sommes d'avis que la crise a mis au jour un grand nombre de failles et de faiblesses sous-jacentes au sein des institutions canadiennes du marché du travail.
     Par exemple, dès le début de la crise, il est devenu clair comme de l'eau de roche que notre assurance-chômage n'allait pas suffire. Des décennies de compressions budgétaires et de modifications terribles apportées à la réglementation ont pratiquement garanti que ce programme vital n'était pas outillé pour composer avec une forte augmentation du chômage.
     D'une part, le système ne pouvait tout simplement pas traiter la vague de demandes d'indemnisation, puisque des millions de travailleurs ont été licenciés, mais, d'autre part, de nombreux travailleurs n'y étaient tout simplement pas admissibles. Quand tout va bien, moins de la moitié des chômeurs canadiens ont droit au régime d'assurance auquel ils cotisent tous — soit 42 % d'entre eux, pour être exact. Si vous pouvez le croire, les personnes à faible revenu, y compris celles qui ont un emploi précaire, bénéficient moins du programme que celles qui sont à l'aise financièrement.
    L'assurance-emploi est devenue un programme inutilement complexe qui punit les travailleurs au chômage, les prive de prestations, récupère leurs gains et ne remplace qu'un petit montant avec lequel ils doivent vivre. Lorsqu'une crise comme celle-ci nous frappe, les systèmes se bloquent. Heureusement, le gouvernement fédéral a rapidement compris qu'il devait changer son fusil d'épaule. Il a alors créé la Prestation canadienne d'urgence, ou PCU. Ce programme est plus simple à administrer et fournit un soutien du revenu à bien plus de travailleurs dans le besoin que ne l'aurait fait l'assurance-emploi. Pourtant, des lacunes persistent.
     Il y a quelques semaines, je me suis adressé au comité des finances de la Chambre des communes pour exprimer ma frustration du fait que des centaines de milliers de travailleurs se voient refuser des prestations supplémentaires de chômage dans le cadre de la PCU. Cet argent est mis de côté par des employeurs qui auraient normalement complété les prestations de chômage, qui ne peuvent toutefois pas être versées en vertu des règles actuelles de la PCU.
    Qualifier cette restriction d'absurde serait un euphémisme. Unifor a lancé une campagne nationale pour corriger la situation. J'encourage vivement votre comité à se joindre à nous pour demander au ministre Morneau et à la ministre Qualtrough de remédier à cette lacune de la PCU. C'est le défi le plus pressant.
    Le plus grand défi à relever consiste à créer une fois pour toutes un régime d'assurance-emploi plus inclusif, équitable et souple. Ce serait un volet du revenu minimum de base versé aux personnes dans le besoin. Au cours des prochains mois, notre régime d'assurance-emploi sera une fois de plus mis à l'épreuve. La PCU arrivera à échéance pour des millions de Canadiens, qui chercheront alors à réintégrer les rangs de l'assurance-emploi. Cependant, bon nombre d'entre eux n'y seront pas admissibles. Nous devons donc apporter immédiatement des changements au programme d'assurance-emploi pour éviter que les demandeurs de la PCU ne soient laissés pour compte. Si nous ne faisons rien, nous risquons de connaître une nouvelle vague de panique économique, car les gens ne pourront pas joindre les deux bouts et payer leurs factures. Ce n'est pas une situation avec laquelle l'économie peut composer pour l'instant, d'autant plus que les provinces intensifient leurs efforts de réouverture.
     La Subvention salariale d'urgence du Canada, ou SSUC, est un autre outil important visant à aider les travailleurs à réintégrer le marché du travail. Cependant, des rapports récents indiquent que seulement 10 % des 76 milliards de dollars mis de côté pour le programme ont été dépensés. Il est clair que les employeurs ont été réticents à demander le programme, ce que nous avons également constaté chez nos propres membres. Certains grands employeurs avec lesquels nous négocions ont hésité à demander la subvention salariale. Dans d'autres cas, le programme ne représente tout simplement pas un incitatif suffisant pour convaincre les employeurs d'en faire la demande.

  (1520)  

     Au moment où le programme était prêt à recevoir les demandes à la fin du mois d'avril, de nombreux employeurs avaient déjà licencié des centaines de milliers de travailleurs. Il était tout simplement trop tard. Aujourd'hui, les employeurs évaluent le coût de réintégrer les travailleurs au moyen de la subvention, et ils se demandent pourquoi ils devraient payer de leur poche les primes d'assurance-maladie, les cotisations au régime de retraite et les charges sociales pour des travailleurs qui restent en congé payé.
     Il y a également eu des problèmes d'admissibilité. Les employeurs du secteur public élargi, y compris nos membres des universités, des collèges et des sociétés de transport municipal, ne sont pas admissibles au programme même s'ils ont exprimé leur intérêt à y participer. Le ministère des Finances Canada a récemment lancé un appel de commentaires à l'égard du programme, et Unifor a demandé instamment au gouvernement de le remanier en élargissant son admissibilité et en couvrant les primes d'assurance-maladie des travailleurs et d'autres cotisations non imposables.
    Tout compte fait, nos politiques canadiennes de sécurité du revenu doivent être revues de fond en comble. Cela inclut évidemment l'assurance-emploi et la SSUC, mais notre vision de l'insécurité financière doit aller bien plus loin. La crise actuelle a mis en lumière le faible salaire et les conditions de travail de plus en plus précaires que de nombreux travailleurs ont dû supporter ces dernières décennies. Elle a également mis en évidence l'iniquité des salaires entre les hommes et les femmes dans le secteur des soins et des services, ainsi que la profonde sous-évaluation de ce travail.
    Unifor souhaite que la mise en œuvre d'une réforme profonde et durable des normes du travail se poursuive, notamment en haussant le salaire minimum fédéral à au moins 15 $ de l'heure, et en instaurant en permanence des congés de maladie payés. Les provinces doivent faire de même.
    Nous sommes également conscients que la sécurité du revenu a autant à voir avec l'emploi qu'avec d'autres facteurs du caractère abordable, comme le logement, le loyer, le transport en commun, la mobilité, l'assurance-médicaments et la garde d'enfants. Ces éléments sont aussi importants pour un plan de relance économique harmonieux aujourd'hui, que pour une vision d'un Canada amélioré et plus équitable demain. Le Canada ne doit pas manquer d'ambition. Le moment est venu de proposer nos meilleures idées, comme le régime universel d'assurance-médicaments, la prestation universelle pour la garde d'enfants et la semaine de quatre jours. Ce sont des idées comme celles-ci qui nous permettent de renverser la vapeur devant la précarité croissante du marché du travail. Ce sont des idées qu'Unifor va proposer plus en détail au cours des prochaines semaines, alors que nous dévoilerons un cadre global pour la reprise économique du Canada.
    S'il y a une chose que la pandémie nous a montrée, c'est que le manque d'investissements publics et la dépendance des marchés mondiaux pour les biens et les services essentiels ne peuvent que se retourner contre nous en temps de crise. Qu'il s'agisse d'équipements de protection individuelle, d'aliments ou de produits essentiels comme les véhicules sans émissions, nous devons rebâtir notre chaîne d'approvisionnement nationale de façon stratégique pour renforcer l'économie, protéger l'environnement et stabiliser les emplois. Pour y arriver, il faut un gouvernement plus actif, énergique et déterminé, un gouvernement qui travaille dans l'intérêt du public, qui est prêt à jouer un rôle actif dans l'économie, à se retrousser les manches et à tracer la voie pour générer de l'activité économique et de bons emplois. Le gouvernement ne doit pas se contenter de réduire les impôts, de signer des accords commerciaux médiocres et d'espérer ensuite que le secteur privé réponde à l'appel.
    Les travailleurs canadiens méritent mieux que cela. Profitons de cette crise pour changer notre vision du développement industriel de façon à placer les travailleurs canadiens au premier plan. Unifor est prêt à apporter son aide.
     Je vous remercie. J'attends vos questions avec impatience.

  (1525)  

    Merci beaucoup, monsieur Dias.
    Nous allons maintenant passer à l'exposé du Syndicat des Métallos.
    Monsieur Neumann, on me dit que votre qualité sonore n'est pas excellente. Commençons par vous. Si nous avons des problèmes d'interprétation, j'ai cru comprendre que M. Lemieux a une copie de vos remarques. Voyons comment les choses se passent. Il se peut que je doive vous interrompre si l'interprétation fait défaut.
    Vous avez la parole, monsieur Neumann.
    Bonjour à tous. Je m'appelle Ken Neumann, et je suis le directeur national des Métallos. Je suis accompagné de Dominic Lemieux, notre directeur pour le Québec. Nous allons prendre la parole cinq minutes chacun.
     Je tiens à remercier le Comité de m'avoir invité à m'adresser à vous aujourd'hui. Nous avons discuté avec le Comité des finances de la réponse du gouvernement à la pandémie de la COVID-19, et nous sommes heureux de livrer également un message à votre comité.
    Comme tant de Canadiens, nos membres sont profondément touchés par la situation actuelle. Les membres du Syndicat des Métallos travaillent dans tous les secteurs de l'économie. Ce sont des travailleurs de la santé de première ligne, des travailleurs industriels, forestiers et manufacturiers, des mineurs, des gardiens de sécurité et des travailleurs universitaires. Chacun de ces secteurs a été touché de différentes façons: certains ont été la cible de licenciements massifs, alors que d'autres de nos membres en première ligne font des pieds et des mains pour se procurer des équipements de protection individuelle, sans parler des horreurs que vivent nos membres qui travaillent dans les soins de longue durée.
     Les conditions dignes du moyen âge que subissent nos aînés ne datent pas d'hier. La COVID-19 n'a fait que mettre au jour ce qui se passe lorsque les soins de longue durée sont écartés de la stratégie de soins de santé universels au pays. Nous pensons que la situation doit changer et que le gouvernement fédéral doit prendre les choses en main en incluant les soins de longue durée à la Loi canadienne sur la santé.
    La semaine dernière, nos membres de la production sidérurgique de base se sont réunis sur Zoom pour parler de ce qui doit se passer pour assurer un avenir sûr à une industrie qui appartenait autrefois à des entreprises canadiennes, mais qui est maintenant entièrement détenue par des étrangers. Certaines de nos usines sidérurgiques ferment leurs portes ou presque pendant que des infrastructures comme des ponts sont construits...

  (1530)  

    Veuillez m'excuser, monsieur Neumann. Il semble que nous ne sommes pas en mesure de faire l'interprétation avec une telle qualité sonore. Est-il toujours possible de laisser M. Lemieux prononcer votre exposé?
     Bien sûr. M. Lemieux peut poursuivre sans problème.

[Français]

     Monsieur Lemieux, vous avez la parole.
    Je vais prendre le relais, mais sachez que les notes de M. Neumann sont en anglais et que ma langue maternelle est le français.
    Premièrement, j'aimerais vous remercier de recevoir le Syndicat des métallos au Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées.
    Aujourd'hui, j'aborderai deux situations particulières qui touchent nos membres. Plusieurs membres du Syndicat des métallos sont venus vous rencontrer au cours des deux dernières années, sur la Colline du Parlement, pour parler de la protection des régimes de retraite et des avantages sociaux en temps de faillite. En fait, nous avons rencontré plus de 225 députés et sénateurs sur la Colline du Parlement, à Ottawa, pour vous faire part de cette situation.
    Au cours des dernières années, nos retraités ont vécu littéralement des histoires d'horreur quand leur entreprise s'est placée sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies ou a fait faillite. On n'a qu'à penser à ce qui est arrivé à Aciers inoxydables Atlas, à Sorel-Tracy, il y a quelques années, ou encore à Sears Canada, à Mabe, à Montréal, à l'usine de Papiers White Birch de Québec et, plus récemment, à une compagnie sur la Côte-Nord...
    Excusez-moi, monsieur Lemieux.
    Pouvez-vous vérifier si vous êtes sur le canal français?
    Nous aurons une meilleure interprétation si vous êtes sur le canal français.
    Je suis sur le canal français. Je peux le fermer, ce serait peut-être plus facile.
    Non, veuillez rester sur le canal français, s'il vous plaît.

[Traduction]

    Madame la greffière, ai-je posé la mauvaise question?
    On me dit que le micro est peut-être du mauvais côté.

[Français]

    Monsieur Lemieux, votre microphone n'est peut-être pas sur le bon côté. On vous entendait bien plus tôt, mais on a beaucoup de difficulté à vous entendre maintenant.
    Je vais essayer un autre casque.
    M'entendez-vous mieux?
    Oui, on vous entend beaucoup mieux.
    Vous pouvez continuer, monsieur Lemieux.
     Récemment, sur la Côte-Nord du Québec, il y a eu la situation de Cliffs Resources, une compagnie qui a fait faillite puis qui a laissé plusieurs de nos retraités sans protection pour les médicaments, mais surtout avec une pension amputée. Je peux vous dire que, quand une personne retraitée voit la rente de son régime de pension amputée de plus 20 %, sa vie change beaucoup.
    Dans le budget fédéral de 2018, le gouvernement a déclaré: « Tous les Canadiens ont le droit d'arriver à leur retraite avec l'esprit tranquille et les entreprises doivent faire preuve de bonne foi envers leurs employés. » Je crois qu'on ne peut pas se fier seulement à la bonne foi des entreprises. Je pense qu'on devrait changer la Loi sur la faillite et l'insolvabilité. Je m'explique.
    C'est vrai maintenant plus que jamais, on sait qu'il y a des compagnies qui sont à risque financièrement en raison de la pandémie de la COVID-19. Il va y avoir des faillites. À cause du choc financier et de la sous-capitalisation de certains régimes de retraite, nous avons des craintes pour les rentes négociées au fil du temps pour les travailleuses et les travailleurs canadiens, mais surtout pour les retraités. Plus que jamais, cela fait ressortir la nécessité de réformer la Loi sur la faillite et l'insolvabilité pour protéger les pensions et les avantages sociaux des travailleuses et des travailleurs canadiens.
    Bien souvent, les intérêts des travailleurs et les retraités passent sous la table, après ceux des banques, des compagnies d'assurance, des municipalités, et même des commissions scolaires. Nous ne demandons pas à être les premiers sur la liste des créanciers en cas de faillite, nous ne voulons surtout pas nuire à la relance possible d'une entreprise qui viendrait se placer sous la protection de la loi, mais nous voulons quand même avoir la possibilité de passer avant les banques, avant les compagnies d'assurance, avant les municipalités et avant les commissions scolaires.
    Les vraies personnes, qui doivent se nourrir, payer leur loyer et se soigner, doivent passer avant les banques. Quand un retraité de 85 ans, par exemple, apprend que sa pension va être coupée de 20 ou 21 %, c'est très difficile à encaisser. Il serait beaucoup plus facile pour les grandes banques canadiennes, pour les compagnies d'assurance, pour les municipalités, et même pour les commissions scolaires de surmonter la situation avec une perte plutôt que de pénaliser les retraités.
    Lors de la dernière session du Parlement, le Syndicat des métallos a appuyé deux projets de loi d'initiative parlementaire et un projet de loi du Sénat qui allait dans ce sens. La Chambre a donc déjà eu la chance d'en débattre sans pouvoir voter sur ces projets de loi. Nous espérons que vous irez enfin de l'avant, vu la nécessité de réformer cette loi pour protéger les retraités canadiens.
    Le deuxième point dont j'aimerais vous entretenir plus particulièrement porte sur le tourisme, l'hôtellerie et la restauration. J'aimerais attirer votre attention sur le sort des travailleuses et des travailleurs de cette industrie.
    Au Québec, le Syndicat des métallos représente près 4 000 travailleurs du secteur de l'hôtellerie et de la restauration, et 90 % de ces travailleuses et de ces travailleurs ont perdu leur emploi. Pour le moment, la Prestation canadienne d'urgence a permis d'aider les travailleurs en situation d'urgence, mais vous savez que les experts prédisent que cela va prendre entre 18 et 24 mois avant la reprise de ce secteur d'activité. C'est un secteur qui vivait déjà de graves pénuries de main-d'œuvre. Il faut soutenir les travailleurs et les travailleuses de cette industrie pour qu'ils puissent s'appuyer sur une main-d'œuvre compétente lors de cette relance et en nombre suffisant lorsque viendra la reprise de ce secteur d'activité.
    C'est souvent pendant l'été qu'on accumule des heures pour avoir droit aux prestations de l'assurance-emploi et on reçoit ces prestations dans les périodes creuses. Or, cet été, il n'y aura pas de tourisme international au Canada. Il n'y aura pas de bateaux de croisière. Il n'y aura pas de mariages. Dans bien des cas, les travailleurs et les travailleuses ne pourront pas travailler assez d'heures pour pouvoir faire une nouvelle demande d'assurance-emploi. Cette année, ce sera une saison morte pour une grande majorité des travailleurs de l'hôtellerie et de la restauration.
    Qu'arrivera-t-il à la fin de la PCU? Il faut réfléchir maintenant à ce qu'il arrivera lorsque la PCU sera terminée. Je crois qu'il y a deux avenues: la prolongation de la PCU ou la modification de la période de référence pour avoir droit aux prestations de l'assurance-emploi.

  (1535)  

    Je sais que vous vous penchez actuellement sur le cas des travailleurs et des travailleuses du secteur des pêches. Nous croyons que les gens de l'hôtellerie et de la restauration devraient pouvoir bénéficier de ces mêmes protections. C'est important d'y penser. Qu'adviendra-t-il de l'industrie du tourisme et de la restauration sans ces travailleurs et ces travailleuses?
    Je suis convaincu que vous aurez à cœur le bien-être des travailleurs et des travailleuses dans vos réflexions sur cette sortie de crise.
    Merci.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer aux questions, à commencer par M. Waugh, qui a six minutes.
    Merci, monsieur le président...

[Français]

    Excusez-moi, monsieur le président. Je veux juste m'assurer que le temps qu'il nous reste sera réparti également entre les partis.

[Traduction]

    Je vais partager mon temps avec monsieur...
    Un instant, monsieur Waugh.

[Français]

    Madame Chabot, voulez-vous faire un rappel au Règlement?
    Je ne suis pas certaine qu'on puisse appeler cela ainsi, mais disons que oui.
    Je veux juste m'assurer, monsieur le président, que le temps qu'il nous reste pour poser des questions sera réparti équitablement entre nous quatre.
    Je vais essayer de vous donner chacun six minutes.

  (1540)  

[Traduction]

    Monsieur Waugh, allez-y, je vous prie. La parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Je partagerai mon temps avec mon collègue Steinley, de Regina—Lewvan.
    Je n'ai pas de questions pour MM. Neumann ou Lemieux.
     Monsieur Dias, pendant une quarantaine d'années, j'ai fait partie de votre syndicat. J'étais dans les télécommunications. En 2015, j'ai été élu au Parlement. Le comité de cinq personnes créé il y a environ un an et demi par le gouvernement pour distribuer 595 millions de dollars pour la remise à flot des médias commence à peine à se former. Son président a été nommé il y a un mois. Unifor y est-il représenté?
    Nous avons fait partie du comité originel qui a déterminé les critères. Nous y étions représentés par un journaliste qui avait passé la plus grande partie de sa carrière au Toronto Sun. Comme vous le savez très bien, le comité de réglementation avait des représentants d'Unifor ainsi que de tous les secteurs de l'industrie.
    Oui, je suis au courant.
    Comme Unifor représente tellement d'organes d'information de notre pays, il exercerait une grande influence sur l'affectation des 595 millions. Se trouvait-il, comme je le crois, en conflit d'intérêts?
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    D'accord. Quelqu'un invoque le Règlement. Un instant, monsieur Dias.
    Monsieur le président, je m'interroge sur l'intérêt de ces questions. En quoi cela concerne-t-il le sujet de nos discussions d'aujourd'hui et...
    Le rapport est immédiat.
    ... [Inaudible] de la COVID-19.
    Merci, madame Young, d'avoir invoqué le Règlement.
    Sans entendre le point de vue opposé, je penche pour lui. La composition d'un comité qui détermine l'affectation de fonds intéresse à un haut point notre étude.
    Poursuivez, monsieur Dias.
    J'accueille la question avec plaisir. Je suis habitué à répondre aux questions de personnes très peu informées, et, manifestement, c'est le cas, ici.
    Pas vraiment.
    Je vous demande pardon, mais vous m'interrompez. Je vous ai laissé parler.
    Essentiellement, vous savez que le comité originel avait pour mandat de créer une structure. Son rôle n'était pas de déterminer à qui iraient telles ou telles sommes, et je pense que vous le savez. Essentiellement, la question est: Unifor a-t-il un rôle dans le choix de ceux qui recevront de l'argent? La réponse est non.
    C'est tout ce que je voulais savoir.
    Quand je reçois des téléphones de tous les journaux du pays qui affirment qu'ils attendent encore une partie de leur argent, un an et demi plus tard, et qui continuent de licencier des employés et de demander aux syndiqués d'Unifor d'accepter des compressions de 5 à 15 % de leurs salaires, je me sens concerné. Vous devriez l'être. Le comité n'a même pas encore démarré.
    Oui.
    Tous les journaux canadiens ont comprimé leurs effectifs pendant qu'ils attendaient que ce comité devienne fonctionnel.
    Que faites-vous à ce sujet? Représentez-vous les journaux?
    J'en fais beaucoup plus que vous, depuis votre élection. La simple réalité est que votre parti, vos journaux...
    Vous parlez de moi.
    Je vous demande pardon...
    Vous savez, pendant 40 ans j'ai été membre de votre organisation.
    Pas en qualité de journaliste. Vous étiez membre, pendant tout ce temps, du Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier, le SCEP.
    J'ai également été membre d'Unifor à CTV.
    Bravo! Il y a combien de temps?
    Vérifiez. Vous avez mes 1 500 $...
    Écoutez, je suis habitué d'avoir affaire avec...
    J'invoque le Règlement...
    Je suis parti il y a quatre ans.
    Un instant, messieurs Dias et Waugh.
    Je ne peux entendre aucun d'entre eux. Pourraient-ils, s'il vous plaît, cesser cette discussion?
    Le président: D'accord, monsieur...
    A-t-il une question intelligente pour moi?
    Je me demande ce qu'Unifor fait pour ses employés.
    Nous faisons tout notre possible pour aiguillonner le gouvernement. Vous constaterez que je collabore très étroitement avec l'industrie dans la recherche d'une façon pour amener le gouvernement fédéral à imposer les bénéfices de Google et de Facebook, pour arrêter le carnage dans l'industrie.
    Je dois dire que vous, au moins, vous pouvez avoir cette discussion avec le gouvernement. Le gouvernement conservateur antérieur ne se souciait même pas de répondre au téléphone.
    Alors, mon ami, avez-vous une question intelligente à me poser?
    Oui.
    La semaine dernière, Postmedia a licencié 40 employés, décision prétextée, d'après le syndicat, par son refus d'accepter la baisse de salaire.

  (1545)  

    Vous verrez qu'une solution s'en vient. Les mises à pied annoncées à Toronto ont été annulées, et je m'attends que celles qui ont été annoncées dans l'Ouest le seront toutes aussi.
    Eh bien, c'est excellent!
    À propos, la plupart des licenciements étaient dans des journaux dont les employés ne sont pas syndiqués. Qu'avez-vous fait pour eux?
    Que faites-vous pour les petits...
    Qu'avez-vous fait pour eux?
    Je fais tout mon possible, à propos. Au moins, je me fais entendre.
    Nous discutons. Chaque semaine, je demande au ministre du Patrimoine canadien ce qu'il fait pour les petits journaux qui pourraient ne pas être même admissibles aux 595 millions de dollars prévus pour leur remise à flot.
    Je reçois aussi les appels dont j'ai parlé. Que feriez-vous...?
    À propos, on devrait les sauver. Ces 10 dernières années, 250 petits journaux ont déposé leur bilan, et je suis prêt à jurer que le gouvernement conservateur n'a presque rien fait.
    Vous avez raison. Les libéraux doivent verser rapidement l'argent aux journaux pour financer les journalistes. L'argent annoncé en 2019 n'a pas été versé ni celui de 2020...
    Oui, en un an et demi.
    En fin de compte, vous devriez parler à vos amis qui dirigent les journaux et découvrir ce qu'ils font.
    Monsieur le président, mon temps est écoulé.
    Le reste va au député de Regina—Lewvan.
    Monsieur Steinley, vous héritez d'une minute.
    Allez-y.
    Je tiens à questionner MM. Dias et Neumann.
    Bonjour, messieurs. Je représente une partie importante des travailleurs d'Evraz et des travailleurs de la raffinerie Co-op et de l'usine d'Evraz.
    Monsieur Neumann, j'ignore si votre micro fonctionnera assez bien pour que vous répondiez à ceci.
    Pendant la dernière campagne, vous avez participé à quelques émissions radiophoniques, dans l'Ouest, où vous avez parlé des nouvelles technologies vertes, pour les aciéristes d'Evraz, pour qu'ils obtiennent de nouveaux emplois et profitent d'options différentes dans l'usine. Pendant mes visites de porte en porte, des syndiqués m'ont sans cesse demandé de vous poser, aujourd'hui, la question suivante.
    Comment pouvez-vous dire que vous appuyez vos membres locaux quand vous avez appuyé des partis qui sont contre les pipelines, que pourtant, les aciéristes d'Evraz enorgueillissent à juste titre de produire? Je suis fier de les représenter et de les appuyer. J'espère que nous pourrons collaborer pour faire construire des pipelines au Canada, avec du bon acier canadien et pour conserver à ces hommes et à ces femmes les emplois auxquels ils aspirent maintenant et pour longtemps.
    Monsieur Neumann, il a employé toute la minute pour poser une question, mais vous pouvez y répondre.
    Très rapidement, s'il vous plaît.
    Tout d'abord, permettez-moi d'être franc. En fait, nous nous battons pour nos employés des aciéries de tout le pays, peu importe l'endroit. Nous sommes en première ligne pour faire supprimer les tarifs. Vous ne nous avez jamais entendus dire que nous étions contre les pipelines. Nous voulions leur construction et celle de nos ponts.
    En fait, nous voulons que l'acier canadien soit prévu dans les mesures d'approvisionnement et nous sommes ceux qui ont pris la défense des travailleurs, qu'ils soient d'Evraz ou de Tenaris, ou de toutes les autres aciéries du pays. Si on remonte à deux gouvernements antérieurs, comment expliquer la construction du pont de Montréal et de celui de Vancouver avec de l'acier chinois? Vous devriez vous focaliser sur cet aspect pour assurer la préservation des emplois. Nous continuerons de nous battre pour les pipelines.
    Absolument, monsieur Neumann. J'aurai besoin de votre aide pour cette bataille, s'il vous plaît.
    Merci à vous deux.
    Monsieur Long, vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Que nos témoins sachent que j'ai le privilège de les questionner de Saint John, au Nouveau-Brunswick, où le mouvement syndical est très vigoureux et dont l'activisme possède une longue histoire.
    Monsieur Dias, je tiens à vous remercier de votre présence pour nous faire connaître vos opinions, vos idées, vos compétences et, bien sûr, les questions et les soucis des 315 000 syndiqués d'Unifor au Canada. J'ai le privilège de travailler avec la direction d'Unifor comme Erin Howell Sharpe, Adam Costain, Trevor Young, Grant Charlton, Tamara Davidson-Kelly, Tammy Moore, Martin Melanson et Tom Clarkson.
    Je n'ai pas l'intention de critiquer ou d'attaquer méchamment les syndicats. J'ai des questions pour vous.
    Monsieur Dias, voici la première. Pendant votre comparution devant le comité des finances, le 21 mai, vous avez fait observer que les gouvernements des provinces de partout dans le pays ont fragilisé des réformes durement acquises de plusieurs lois sur le travail, ces dernières années, notamment le droit au congé payé de maladie. La semaine dernière, le premier ministre a annoncé que notre gouvernement fédéral collaborerait avec les provinces et les territoires pour assurer à tous les travailleurs canadiens l'accès à au moins 10 journées de congés payés de maladie au cours de l'année, s'ils devaient en avoir besoin.
    Comment voudriez-vous, vos membres et vous, voir les gouvernements s'entendre sur cette question?

  (1550)  

    Excellente question, parce que le gouvernement fédéral devra agir beaucoup comme un chef de file dans ce dossier, vu que très peu de gouvernements provinciaux le feront.
    Les 10 journées de congé payé de maladie sont d'une importance évidente, pendant la pandémie. Parmi les premières décisions des gouvernements récemment élus en Ontario et en Alberta, il y a eu celle de reculer sur la réforme du droit du travail. Ils ont bloqué le salaire minimum et annulé les congés payés de maladie.
    Maintenant, en pleine pandémie, qui écope? Les soignants et préposés des établissements de soins de longue durée et les salariés des épiceries qui, c'est vrai pour beaucoup d'entre eux, en ont besoin plus que jamais. Je suis heureux de constater que Jagmeet Singh a soulevé la question et que le NPD fédéral et les libéraux fédéraux ont adopté des résolutions à cet égard.
    Il faudra ce genre de collaboration, mais, comme je l'ai dit, l'initiative devra venir du gouvernement fédéral. Ça ne peut pas se limiter à la durée d'une pandémie. Ce devra être permanent. Ensuite, manifestement, il faudra en discuter avec divers gouvernements des provinces, compte tenu des conventions collectives, de l'opinion des syndiqués, du partage des compétences fédéro-provinciales. L'annonce arrive à point nommé et elle révèle un sens du leadership qui se manifeste à un moment où il est des plus nécessaires.
    Je ferai observer que, au Nouveau-Brunswick, l'appui du premier ministre Blaine Higgs à ces congés n'est pas acquis.
    Je vous remercie de vos réponses et je cède mon temps à ma collègue Young.
    J'en suis vraiment reconnaissante, monsieur Long.
    Je remercie tous les témoins d'être ici.
    Monsieur Dias, je suis de London. Comme vous le savez, le secteur manufacturier de cette ville a été durement frappé, au fil des années, mais le travail incroyable des fabricants canadiens, ces trois derniers mois, dans le rééquipement de l'industrie et son adaptation très rapide à la production d'équipement de protection individuelle a été tout à fait remarquable. Il montre l'excellent travail que nous pouvons accomplir ensemble en très peu de temps.
    Comment entrevoyez-vous l'utilisation à long terme du secteur manufacturier pour la fabrication d'équipement de protection individuelle? Est-ce l'avenir?
    Ce l'est absolument.
    D'abord, la pandémie nous a montré notre impréparation nationale à prendre soin de nous-mêmes, alors et maintenant. Nous avons délocalisé la production de tout notre équipement de protection individuelle. En fin de compte, nous étions réduits à nous disputer les ressources essentielles pour prendre soin de nous-mêmes.
    Je suis toujours fasciné d'entendre les arguments de ceux qui prétendent que le secteur manufacturier canadien est mort. Franchement, la signature de l'accord de libre-échange, il y a 25 ans, a fait perdre plus d'un demi-million d'emplois manufacturiers à l'Ontario. Ça me fascine d'entendre tout le monde parler d'économie des petits boulots, de transformation et d'abandon de la fabrication et que, pendant ce temps, qui a pris la relève pendant la pandémie? L'industrie alimentaire et celle des pièces automobiles. C'est, par exemple, Bombardier, à Thunder Bay, ou des distilleries, comme Hiram Walker. C'est le secteur manufacturier qui a pris la relève et qui s'est mis à la transformation pour répondre à certains de nos besoins essentiels.
    S'il faut nous donner une stratégie dès notre sortie de la pandémie, il est évident qu'il faudra relever l'emplacement des emplois et recenser les moyens permettant de stabiliser l'économie. Ça signifiera que le gouvernement devra se focaliser sur un secteur manufacturier fort. C'est la seule façon de maintenir l'emploi. C'est la seule, franchement, qui nous permette de stabiliser notre économie.
    Je tiens aussi à louer Unifor pour son programme féministe, mais, comme vous le savez, la pandémie s'est particulièrement acharnée contre les femmes.
    Plus que jamais.
    Quel rôle vous attribuez-vous ensuite?
    Unifor a plus de 350 responsables de dossiers pour les femmes en divers lieux de travail, partout dans le pays. Je siège au conseil d'administration de Halton Women's Place, qui possède des refuges pour les femmes et je sais que, aujourd'hui, ces établissements sont pleins à craquer. En fait, nous avons dû louer des chambres d'hôtel et divers services pour assurer la sécurité des femmes.
    Un examen réaliste de la pandémie révèle qu'elle a mis à vif certains des problèmes structurels du Canada, parce que les femmes, je dirais, en subissent les conséquences démesurées, qui touchent les personnes affectées et les fournisseuses de services essentiels. Ça révèle vraiment des déséquilibres structurels et les obstacles que doivent vaincre les femmes. Leur salaire continue de se situer à environ 72 % de celui des hommes.
    C'est peut-être le moment idéal pour songer à doter notre pays d'une stratégie de garderies, parce que, pour vraiment accéder à l'égalité, il faut supprimer les obstacles. Les hommes ont beau se prétendre progressistes, les femmes continuent de se charger des travaux ménagers touchant l'élevage des enfants.

  (1555)  

    Merci...
    Des garderies, ce serait donc un bon point de départ.
    Merci, monsieur Dias.
    Merci, madame Young.

[Français]

     Madame Chabot, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    J'aimerais d'abord saluer les grandes organisations syndicales comme Unifor, les métallos et le Congrès du travail du Canada, que nous avons rencontrées aujourd'hui. Je me permets de faire un commentaire: je pense que toute relance économique, tout plan d'action pour réaliser un projet de société, ne peut se faire sans les grands syndicats. Je les remercie de leur apport.
    Je n'ai pas trouvé très drôles les questions des conservateurs. J'espère que cela ne se reproduira plus. Mes questions, je pourrais toutes vous les poser.
    Aujourd'hui, au Comité spécial sur la pandémie de la COVID-19, j'ai demandé trois fois plutôt qu'une si la PCU allait être prolongée. Je trouve cela important. Ce ne sont pas toutes les entreprises qui vont redémarrer et ce ne sont pas tous les employés qui vont retrouver leur emploi. Certaines vont tarder à reprendre leurs activités.
    On a parlé des secteurs du tourisme, de l'hébergement et de l'hôtellerie. Si j'ai bien entendu, c'est aussi une question majeure pour vous, et c'est aussi très important de revoir de façon globale le régime d'assurance-emploi pour l'avenir.
    Quelqu'un veut-il me répondre?
    Dans un premier temps, je vais parler des secteurs de l'hôtellerie, de la restauration et du tourisme. Selon nous, c'est effectivement essentiel de protéger ces travailleurs et ces travailleuses. Souvent, ces travailleurs ne sont pas des travailleurs saisonniers, mais la période d'été représente une grande partie des heures qu'ils travaillent pour être admissibles à l'assurance-emploi. Nous savons tous que, cet été, l'industrie du tourisme sera moins occupée.
    Nous demandons donc au gouvernement qu'il prolonge la PCU ou qu'il utilise les heures travaillées l'année dernière pour déterminer l'admissibilité à l'assurance-emploi. Ce sont deux pistes de solutions que nous proposons pour ces travailleurs et ces travailleuses. Je répète que 90 % de ces gens ont subi une perte d'emploi directement liée à la pandémie.
    C'est tout à fait exact. C'est bien reçu.
    Comme vous le savez, notre parti a mis en avant la protection des caisses de retraite en cas de faillite au moyen de projets de loi d'initiative parlementaire. Vous avez fait des recommandations en ce sens lors des campagnes électorales, et en tout temps.
    À votre avis, quel effet aurait un changement de rang dans les créanciers des caisses de retraite sur la situation des retraités?
     Je vais vous donner un exemple bien concret. Disons qu'une entreprise fait faillite et qu'il y a un déficit de capitalisation du fonds de pension de l'ordre de 10 millions de dollars. Les banques seront payées avant les travailleurs et les travailleuses, tout comme les compagnies d'assurances, les municipalités et les commissions scolaires. S'il y a 500 personnes qui sont déjà à la retraite, cela veut dire qu'elles vont perdre jusqu'à 20 % de leur fonds de pension, ce qui représente beaucoup pour elles.
    Prenez l'exemple d'un travailleur de 88 ans qui reçoit une petite rente de 800 $ de son fonds de pension. Si l'entreprise fait faillite, ce retraité pourrait perdre 200 $ de ces 800 $ par mois. Pour lui, c'est une catastrophe. Il ne pourra pas récupérer ces sommes, contrairement aux banques. Il n'y a pas une banque canadienne, une compagnie canadienne d'assurances ou une municipalité qui risquerait de faire faillite parce qu'elle n'a pas pu aller chercher 10 millions de dollars manquants dans un fonds de pension.
    Prenons l'exemple de Mabe, une compagnie d'électroménagers de Montréal qui a fait faillite. Ses employés ont perdu une grande partie de leur pension. Ce n'est pas vrai que la Ville de Montréal aurait fait faillite si elle avait été payée après les retraités ou les commissions scolaires.
    Ce que nous demandons, c'est qu'on protège ces retraités, qui sont souvent parmi les plus démunis, surtout les plus âgés, qui n'ont pas la chance de se refaire et de retourner sur le marché du travail pour aller chercher un peu d'argent et arrondir leurs fins de mois. Pour nous, c'est primordial.
     Nous ne voulons pas nuire aux entreprises qui veulent se placer sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies. Au contraire, nous voulons participer à leur relance. Cependant, les banques engrangent des profits de 10 milliards de dollars par année. Il est insensé que les banques, les compagnies d'assurances, les municipalités et les commissions scolaires passent avant les retraités. Nous demandons que le rang des retraités parmi les créanciers soit relevé. Nous ne voulons pas qu'ils soient au premier rang, mais ils devraient devancer les banques et les grandes compagnies d'assurances.

  (1600)  

    Je vous remercie.
    Si je comprends bien, cela va certainement prendre des modifications législatives, comme nous le souhaitions. Toutefois, d'ici là, n'y aurait-il pas un entre-deux auquel on pourrait travailler, un pas qui pourrait être franchi afin de préserver les bas de laine?
    Dans d'autres provinces, il existe des fonds spéciaux, mais, au Québec, nous n'avons pas cela. Il y a une mesure qui pourrait servir l'ensemble des Canadiens et des Canadiennes, et ce serait de modifier la Loi sur la faillite et l'insolvabilité. Ce serait facile et rapide. C'est la seule façon de protéger à court terme les retraités touchés.
    En temps normal, on en vit, des faillites, mais en temps de crise, on va en vivre encore plus. Il est donc impératif de modifier la Loi sur la faillite et l'insolvabilité au Canada.
    Merci, madame Chabot et monsieur Lemieux.

[Traduction]

    Le dernier intervenant de la soirée est M. Duvall.
    Vous disposez de six minutes.
    Merci.
    Je tiens à remercier nos témoins. Il est sûr que je respecte et que j'apprécie tout leur travail pour les travailleurs canadiens et tout le soutien qu'ils leur donnent.
    Messieurs Dias et Neumann, vous avez tous les deux parlé, dans vos exposés, du montant des prestations supplémentaires de chômage. Je sais que c'est un avantage social négocié et qu'Unifor a mené une campagne vigoureuse, de même que les aciéristes, pour tenter de le faire corriger.
    On m'a dit, dans une séance antérieure, qu'on était admissible à cette prestation tout en l'étant à la prestation canadienne d'urgence, jusqu'à concurrence de 1 000 $. Le saviez-vous?
    Bien sûr, un supplément peut s'ajouter à la prestation canadienne d'urgence, jusqu'à concurrence de 1 000 $. Mais, dans leur dernière communication, celle du 8 mai, les auteurs ont été très précis: il ne pouvait pas y avoir de prestations supplémentaires de chômage, un point c'est tout.
     Voici le ridicule de cette décision. En général, les travailleurs se retrouvent prestataires de l'assurance-emploi au maximum de 573,00 $ par semaine. Dans l'industrie automobile, par exemple, certains reçoivent en sus un supplément de 400 $ à 600 $ par semaine. Pour l'ouvrier qualifié, avec un supplément mensuel de 2 400 $, 1 000 $ ne suffisent pas, s'il est admissible.
    Je n'arrive pas à comprendre pourquoi le gouvernement voudrait dissuader les entreprises de s'acquitter d'une obligation contractuelle. Par exemple, Ford, General Motors et Chrysler lui ont bien dit qu'ils ne comprenaient pas ses intentions, qu'ils voulaient payer et que c'était pour eux une obligation contractuelle. L'explication du gouvernement était que, en autorisant le versement de prestations supplémentaires de chômage en sus de la prestation canadienne d'urgence, il inciterait les entreprises à licencier des employés pour déplacer une partie des coûts vers ceux qui relevaient de l'État fédéral.
    Force est de constater que ce discours servi aux entreprises incite au licenciement, parce qu'il n'y a aucun coût, y compris le paiement de prestations supplémentaires de chômage.
    C'est une stratégie ridicule.
    Je suis d'accord.
    Monsieur Neumann, êtes-vous au courant des 1 000 $ de prestations supplémentaires de chômage qu'on nous dit autorisés à recevoir en même temps que la prestation canadienne d'urgence?
    Oui, il s'agissait d'une annonce récente.
    Je voudrais tout d'abord m'excuser du fait que mon micro ne permettait pas l'interprétation.
    Je vous ai transmis mon mémoire et mes observations. J'espère que vous avez pu les consulter.
    Nous ne sommes pas différents d'Unifor. Nous nous trouvons dans la même situation qu'eux.
    Nous procédons à une négociation collective, nous mettons de l'argent de côté, pour ce régime de prestations supplémentaires de chômage, PSC, qu'on nous a encouragés à négocier. L'argent est là, mis de côté collectivement. C'est un peu comme négocier des régimes de pension. C'est de l'argent qui fait partie du programme de financement et qui est mis de côté pour les travailleurs en cas de besoin.
    C'est aujourd'hui que nous en avons besoin, plus que jamais.
    Au début, le gouvernement donnait l’impression qu'il allait autoriser l'utilisation du régime de PSC, mais cela a manifestement dérapé. Je crois, tout comme vient de le dire M. Dias, que la somme de 1 000 $ ne permet pas de répondre à vos besoins quand vous avez un salaire plus élevé, quand vous avez un métier, comme dans l'industrie de l'acier ou d'autres secteurs. Nous sommes dans le même bateau.
    C'est ridicule. Le gouvernement peut et doit changer cela. Mille dollars, ce n'est pas suffisant.
    Le gouvernement s'était engagé au départ à utiliser le régime de PSC.
    Ce sont des fonds que toutes les parties concernées ont négociés de bonne foi afin d'aider les travailleurs en cas de besoin.

  (1605)  

    Je vous remercie de le dire.
    Monsieur Lemieux, vous avez fait référence à la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, et je sais que vous avez fait un excellent travail à cet égard.
    Je crois savoir que le gouvernement voit les changements qu'il y a apportés il y a un an et demi comme étant justifiés.
    Envisagez-vous une hausse des faillites à l'avenir? Les gens risquent de perdre non seulement leur pension, mais encore des milliers de dollars en indemnités de cessation d'emploi et de départ, ainsi que leur régime de soins de santé.
    Pensez-vous que le gouvernement devrait modifier la loi incessamment, afin de protéger les travailleurs? Est-ce essentiel?

[Français]

     Nous croyons effectivement qu'il y aura quand même des faillites causées par la pandémie.
    Il est quand même inconcevable qu'en 2020, au Canada, on fasse passer les intérêts des banques et des compagnies d'assurance avant ceux des retraités.
    On n'a qu'à regarder les déclarations de revenus que font nos retraités chaque année, comparativement aux énormes profits dévoilés tous les ans par les banques canadiennes.
    Je crois qu'il est temps qu'on fasse passer les gens de la population — des retraités, des hommes et des femmes qui ont tenu leur pays à bout de bras, qui ont travaillé de nombreuses années — avant les intérêts des banques canadiennes et des compagnies d'assurance. Il est primordial de changer cette loi au Canada, d'autant plus en ces temps de pandémie.

[Traduction]

    Encore une fois, je vous remercie.
    Nous n'avons plus beaucoup de temps, mais je tiens à remercier M. Dias, M. Neumann et M. Lemieux du travail accompli.
    Il va falloir aller au fond de cette histoire de paiements versés dans le cadre du régime de PSC. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement veut se priver de revenus imposables pour quelque chose qui ne lui coûte absolument rien.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Duvall.
    Je remercie également nos témoins. Merci de votre patience quant aux difficultés techniques.
    Mesdames et messieurs, si vous souhaitez ajouter quoi que ce soit à vos réponses, si vous avez eu l'impression de ne pas avoir eu assez de temps, vous pouvez toujours, si vous ne l'avez pas déjà fait, fournir davantage d'informations sous forme écrite. Nous les prendrons en compte, tout comme nous l'avons fait de vos témoignages réfléchis d'aujourd'hui.
    Merci...
    Monsieur le président, je voudrais invoquer le Règlement.
    Je vous en prie, monsieur Vis.
    Cela concerne surtout les membres du Comité. C'est regrettable, il y a beaucoup à discuter lors de ces réunions, et je crois qu'il nous a fallu près de 20 minutes pour en arriver au second tour de questions. Il s'agit là d'importantes organisations nationales qui méritent d'être entendues par ce comité. Que nous soyons d'accord avec elles ou non, toutes ont besoin d'être entendues.
    Je me demande quelles assurances vous pouvez nous donner à l'avenir, à nous les membres du Comité, que les problèmes techniques seront résolus. Si j'ai bien compris, d'autres comités parlementaires n'ont pas eu les difficultés techniques auxquelles nous avons dû faire face déjà à plusieurs reprises.
    Nous souhaitons tous effectuer notre travail de façon efficace, monsieur le président.
    Merci, monsieur Vis.
    Soyez assurés que nous faisons de notre mieux. En revanche, je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous, quand vous dites que ces difficultés ne touchent que notre comité. Nous nous en tirons mieux qu'au début, mais nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir.
    Encore, merci à tous.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU