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ETHI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique


NUMÉRO 029 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 12 avril 2021

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Traduction]

    Le Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique tient aujourd'hui sa 29e séance.
    J'aimerais rappeler aux membres du Comité et du public que la séance est télévisée et sera diffusée sur le site Web de la Chambre des communes.
    Conformément à la motion adoptée par le Comité le vendredi 11 décembre 2020, le Comité poursuit son étude sur la protection de la vie privée et de la réputation sur les plateformes telle Pornhub.
    Nous accueillons aujourd'hui le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, l'honorable Bill Blair; le ministre de la Justice, l'honorable David Lametti; et la commissaire de la GRC, Brenda Lucki. Comme nous commençons un peu en retard aujourd'hui, je vais demander aux ministres de présenter les collaborateurs qui les accompagnent.
    Avant de commencer, j'aimerais avoir l'attention des membres du Comité un instant. Lors de notre dernière rencontre, nous avons eu une discussion et il y avait de plus en plus consensus pour convoquer le légiste. Nous avons donc réservé la troisième heure de notre séance aujourd'hui pour entendre son témoignage et obtenir de l'information qui pourrait nous être utile au moment de prendre des décisions sur les questions dont nous discutions lors de la dernière séance. Le légiste est prêt à répondre à nos questions à 13 heures aujourd'hui. Je voulais simplement en informer les membres. Nous enchaînerons avec son témoignage après les deux premières heures de notre séance.
    Messieurs les ministres, nous allons maintenant entendre vos déclarations liminaires.
    Je crois que c'est le ministre Blair qui commence.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président, et je salue tous les membres du Comité.
    J'aimerais commencer par remercier chacun de vous de m'avoir invité à venir vous rencontrer aujourd'hui dans le cadre de cette étude très importante et très à propos sur une question d'une très grande importance.
    Comme tout le monde le sait, l'agression et l'exploitation sexuelles d'un enfant — de tout enfant —, peu importe le contexte, la plateforme et l'endroit, sont intolérables et inacceptables. Il s'agit du crime le plus abominable qui soit et il mérite d'être condamné vigoureusement par la société et de donner lieu à une intervention ferme de notre part.
    L'enregistrement d'une agression sexuelle d'un enfant peut avoir d'importantes répercussions à vie sur les victimes et les survivants de ce crime. Malheureusement, à mesure que certaines de ces victimes vieillissent, beaucoup se rendent compte que leurs images continuent à circuler sur Internet, et elles sont victimisées encore et encore à mesure que ce matériel est échangé.
    J’aimerais profiter de l'occasion pour souligner le courage et la résilience remarquables des survivants qui se sont manifestés et qui ont pris la parole. J'ai pu rencontrer [Difficultés techniques], et tout comme le Comité, je suis consterné par les rapports selon lesquels du matériel odieux de ce genre a été trouvé sur des plateformes. Il est inacceptable que les victimes aient eu de la difficulté à convaincre les entreprises de supprimer du contenu illégal.
    Leurs histoires et leurs expériences nous rappellent à tous le travail important que nous devons faire — et que nous faisons — pour protéger les enfants et les jeunes. Le gouvernement du Canada joue un rôle de premier plan dans les efforts de lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants en ligne et, monsieur le président, nous prenons des mesures pour accroître la sensibilisation et réduire la stigmatisation associée au signalement. C’est important parce que nous savons que le nombre de cas signalés n’est que la pointe de l’iceberg en ce qui concerne l’ampleur réelle de ce crime des plus odieux.
    Les entreprises Internet doivent également en faire plus pour protéger les enfants, et nous prenons des mesures pour les obliger à être responsables de leur rôle à cet égard. Nous prenons également des mesures pour poursuivre en justice un plus grand nombre d’auteurs de ce crime en soutenant les efforts déployés pour détecter les cas, enquêter et poursuivre les auteurs en justice. J’ai demandé à la commissaire de la GRC de continuer à travailler avec ses homologues provinciaux et territoriaux pour lutter contre ce crime et veiller à ce que des poursuites soient intentées lorsque les organismes d’application de la loi le jugent approprié à la lumière des preuves recueillies.
    La stratégie nationale du Canada concernant cet enjeu est dirigée par Sécurité publique Canada, qui travaille en partenariat avec la GRC, le ministère de la Justice et le Centre canadien de protection de l’enfance, ou CCPE. Nous appuyons cette stratégie nationale avec un financement annuel permanent de plus de 18 millions de dollars. Cela comprend le soutien à Cyberaide.ca, une ligne d’urgence nationale gérée par le CCPE. Cela comprend également un financement permanent de 5,8 millions de dollars, annoncé en 2018, pour accroître la capacité d’enquête du Centre national contre l’exploitation des enfants de la GRC.
    De plus, dans le budget de 2019, nous avons investi 22,2 millions de dollars sur trois ans en financement supplémentaire afin de mieux protéger les enfants contre ce crime horrible. De ce montant, 15 millions de dollars visent expressément à accroître la capacité des unités d’enquête sur l’exploitation d’enfants sur Internet au sein des forces policières municipales et provinciales partout au Canada. Ces unités spécialisées sont chargées d’enquêter sur les cas d’exploitation sexuelle d’enfants en ligne. Les investissements prévus dans le budget de 2019 contribuent également à sensibiliser davantage le public à ce crime, à réduire la stigmatisation associée à la signalisation et à collaborer avec l’industrie numérique afin de trouver de nouvelles façons de lutter contre l’exploitation sexuelle des enfants en ligne.
     En même temps, il est important d'être conscients des complexités et des défis liés aux sphères de compétence associés à ce crime qui traverse souvent les frontières. Les auteurs et les victimes peuvent être n’importe où dans le monde, et des images d’agression et d’exploitation sexuelles d’enfants peuvent être échangées sur des plateformes qui peuvent avoir leur siège social dans un pays, mais être légalement enregistrées dans un autre pays, et avoir des serveurs dans un troisième pays.
    Cela a une incidence sur le pouvoir des organismes canadiens d’application de la loi d’enquêter et sur l’application des lois canadiennes, mais je suis convaincu que les organismes d’application de la loi continuent de faire tout leur possible pour enquêter sur ces crimes horribles et poursuivre les responsables. Une coopération internationale est essentielle. Je peux vous assurer que la GRC et le ministère de la Justice collaborent étroitement avec nos partenaires internationaux sur les enquêtes et les poursuites.
     Nous travaillons également en étroite collaboration avec nos alliés et nos partenaires internationaux afin de trouver des solutions pour mieux protéger les enfants et les jeunes. L'année dernière, par exemple, le Canada et ses partenaires du Groupe des cinq ont lancé les « Principes volontaires pour contrer l’exploitation et l’abus sexuels des enfants en ligne ». Ces principes sont un guide pour l’industrie concernant la façon de lutter contre ce fléau sur leurs plateformes.
    Nous reconnaissons qu’il reste beaucoup de travail à faire. C’est pourquoi nous allons présenter un projet de loi pour créer un nouvel organisme de réglementation qui veillera à ce que les plateformes en ligne retirent le contenu préjudiciable, y compris les images d’exploitation sexuelle d’enfants et les images intimes qui sont échangées sans consentement. Sécurité publique Canada et d’autres ministères travaillent à l’élaboration de ce projet de loi avec Patrimoine canadien, qui dirige cet effort.
    Nous continuerons de faire tout notre possible pour protéger les enfants canadiens et aider les survivants canadiens de ce crime terrible. De plus, nous continuerons de travailler avec nos partenaires nationaux et internationaux pour enquêter sur les cas où il y a des preuves et poursuivre les auteurs en justice.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur le ministre.
    Nous passons maintenant au ministre David Lametti.

  (1110)  

[Français]

     Je vous remercie, monsieur le président.
    Je suis accompagné aujourd'hui du sous-ministre délégué du ministère de la Justice, M. François Daigle. Je vous remercie de m'avoir invité aujourd'hui.
    J'aimerais faire quelques remarques générales sur certaines questions soulevées lors de séances d'étude antérieures du Comité.
    J'aimerais souligner que le gouvernement est déterminé à assurer la sécurité de nos enfants, y compris en ligne, comme vient de le dire le ministre Blair. Les lois criminelles du Canada dans ce domaine sont parmi les plus exhaustives au monde.

[Traduction]

    Le Code criminel interdit à quiconque et sous quelque forme que ce soit de produire, de distribuer, de transmettre, de rendre accessible, de se procurer, de vendre, de faire la publicité, d'exporter et de posséder de la pornographie juvénile. Le Code criminel donne une définition large de la pornographie juvénile, soit tout matériel représentant l'exploitation sexuelle d'une personne âgée de moins de 18 ans.
    Le Code criminel interdit également le leurre — c'est-à-dire, le fait de communiquer avec une jeune personne, à l'aide d'un ordinateur, y compris par Internet, en vue de faciliter la perpétration à son égard d'une infraction sexuelle. Il interdit de s'entendre avec une autre personne ou de faire un arrangement avec elle pour perpétrer une infraction sexuelle contre un enfant, et il interdit de fournir du matériel sexuellement explicite à une jeune personne dans le but de faciliter la perpétration d'une infraction sexuelle à son égard.
    Le Code criminel interdit en outre le voyeurisme et la distribution sans consentement d'images intimes, des sujets particulièrement liés au monde virtuel et à la discussion d'aujourd'hui.
    Les infractions d'application générale peuvent également s'appliquer à un comportement criminel qui se produit sur Internet ou qui est facilité par l'utilisation d'Internet. À titre d'exemple, les infractions liées au harcèlement criminel et à la traite des personnes peuvent s'appliquer, selon les faits en cause.
    Les tribunaux sont également autorisés à ordonner le retrait de matériel sur l'exploitation sexuelle d'un enfant et autre contenu de nature criminelle, comme les images intimes, le matériel voyeuriste ou la propagande haineuse, lorsqu'il est rendu accessible à la population à partir d'un serveur qui se trouve au Canada.

[Français]

    En plus du Code criminel, en tant que ministre de la Justice, je suis responsable de la Loi concernant la déclaration obligatoire de la pornographie juvénile sur Internet par les personnes qui fournissent des services Internet. Cette loi n'a pas de titre abrégé, mais les praticiens du droit l'appellent la loi sur la déclaration obligatoire.

[Traduction]

En anglais, on l'appelle la mandatory reporting act, ou MRA.

[Français]

    En vertu de la loi sur la déclaration obligatoire, les fournisseurs de services Internet au Canada ont deux principales obligations. La première est de communiquer avec le Centre canadien de protection de l'enfance lorsqu'ils reçoivent des plaintes de pornographie juvénile de la part de leurs abonnés. Ce centre est l'organisme non gouvernemental qui exploite Cyberaide.ca, la ligne nationale de signalement des cas d'exploitation sexuelle d'enfants sur Internet.
    La deuxième obligation d'un fournisseur de services Internet est d'aviser la police de la province ou du territoire lorsqu'il a des motifs raisonnables de croire que ses services Internet ont été utilisés pour la perpétration d'une infraction relative à la pornographie juvénile.

[Traduction]

    Même si les lois du Canada sont détaillées, je crois comprendre qu'on s'inquiète de la façon dont elles sont interprétées et appliquées, en particulier dans la foulée des reportages troublants des médias concernant MindGeek et son site Pornhub.
    En tant que ministre de la Justice, il ne serait pas opportun pour moi de commenter des enquêtes ou des poursuites potentielles ou en cours. J'ajouterais par ailleurs que la responsabilité de l'administration de la justice pénale, notamment les enquêtes et les poursuites liées à de tels crimes, y compris les infractions liées à l'exploitation sexuelle, relève en grande partie de mes homologues et collègues provinciaux.
    Toutefois, comme le premier ministre l'a mentionné pendant la période des questions le 3 février:
... la lutte contre le contenu illégal en ligne est une chose que nous prenons avec beaucoup, beaucoup de sérieux. Qu'il s'agisse de discours haineux, de terrorisme, de l'exploitation des enfants ou de tout autre acte illégal...
    En fait, le gouvernement prend ces mesures tellement au sérieux que le premier ministre a confié le mandat à quatre ministres de se pencher sur différents aspects des préjudices en ligne. Le ministre Blair et moi sommes deux de ces ministres. Comme il l'a mentionné, le ministre du Patrimoine canadien est l'un de ceux qui dirigent [Difficultés techniques] également.
    Internet a procuré de nombreux avantages au Canada et au reste de la planète, mais il a également offert aux criminels un outil pour élargir leurs activités — et donc, accroître le nombre de leurs victimes — et qui rend les enquêtes plus complexes. Un des facteurs qui les rend plus complexes est le fait que les réseaux et les services de télécommunications transcendent les frontières entre les pays, alors que les pouvoirs d'application de la loi des autorités policières, comme la GRC, se limitent généralement au territoire national.

  (1115)  

     De plus, en vertu du droit international, les ordonnances des tribunaux ne sont exécutoires en général que sur le territoire national. À quelques exceptions près, elles nécessitent le consentement de l'autre pays où l'on souhaite les faire appliquer.

[Français]

     Le Canada n'est évidemment pas le seul pays à faire face à ces défis. C'est ce pour quoi nous continuons à travailler en collaboration avec nos partenaires internationaux en vue de faciliter la coopération internationale dans le cadre des enquêtes et des poursuites relatives à ces crimes, notamment pour le renforcement de la coopération bilatérale et la négociation de nouveaux traités internationaux d'entraide juridique en matière criminelle, afin d'aborder ces questions.
    Bien que les traités d'entraide juridique constituent une méthode universellement acceptée pour demander et obtenir une assistance internationale en matière criminelle, même dans des situations d'urgence, ils n'ont pas été conçus pour l'ère d'Internet, où les éléments de preuve numériques constituent une composante courante de la plupart des enquêtes criminelles et où la rapidité est essentielle à la collecte de ces éléments de preuve en raison de leur volatilité.
    Le Canada travaille activement avec ses partenaires internationaux afin de résoudre ces questions. Par exemple, nous participons actuellement à la négociation d'un deuxième protocole additionnel à la Convention sur la cybercriminalité du Conseil de l'Europe en vue d'accroître la coopération internationale en matière d'accès transfrontalier aux données.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Je vous remercie, monsieur le ministre.
    Madame la commissaire, je ne sais pas si vous avez une déclaration liminaire. En avez-vous une que vous aimeriez nous présenter? Je vous remercie beaucoup d'être avec nous...
    J'invoque le Règlement.
    Sans vouloir offenser la commissaire, comme elle reste pour la deuxième heure et que nos deux ministres vont quitter, mettant ainsi fin à notre possibilité de leur poser des questions, j'aimerais mieux leur poser des questions et demander à la commissaire de nous présenter sa déclaration pendant la deuxième heure, à moins que les ministres veuillent bien rester.
    Je vous remercie, monsieur Angus. Elle m'a informé par un signe de tête qu'elle n'a pas de déclaration liminaire, alors nous allons passer aux questions des membres.
    Je vous remercie, chers collègues.
    Madame Stubbs, vous êtes la première.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie les ministres d'être avec nous.
    Ministre Blair, 70 députés de tous les partis vous ont écrit au sujet des cas d'exploitation d'enfants, du matériel d'agressions sexuelles d'enfants, des cas de traite de personnes et de viol sur les sites de MindGeek. Au début novembre et encore en décembre, vous nous avez donné l'assurance que nous disposions d'un cadre solide concernant les interdictions dans le Code criminel, que le ministre Lametti vient de nous décrire en détail.
    [Difficultés techniques] décembre, et vous y avez en quelque sorte fait allusion. Vous avez dit avoir communiqué avec la GRC pour lui offrir du soutien après ces révélations abominables au sujet de MindGeek, de Pornhub et d'autres sites. Pouvez-vous nous dire exactement et précisément de quel soutien il s'agissait?
    Je vous remercie beaucoup de la question, madame Stubbs.
    Oui, j'ai eu des discussions en effet avec la GRC pour savoir ce dont elle avait besoin pour bien répondre aux préoccupations soulevées par nos collègues au sujet de l'exploitation des enfants et de la traite des personnes. Les fonds supplémentaires que nous avons demandés dans le Budget supplémentaire des dépenses (C) et dans le Budget principal des dépenses pour la GRC, et qui ont fait l'objet d'un vote dernièrement, sont un résultat direct de ces discussions afin de répondre à ces préoccupations.
    La GRC et les services de police compétents se partagent la responsabilité des enquêtes à cet égard. Nous leur avons demandé ce dont ils avaient besoin pour le faire. Nous avons également mis du financement à la disposition [Difficultés techniques] des services de police pour qu'ils mettent sur pied leur propre unité de lutte contre l'exploitation des enfants. J'ai eu des discussions, en effet, avec la commissaire pour savoir ce dont la GRC avait besoin pour répondre adéquatement à ces préoccupations. Nous avons inclus le financement requis à cette fin dans le Budget principal des dépenses et le Budget supplémentaire des dépenses que nous avons présentés.
    Je ne vais pas vous demander des détails, bien entendu, puisque vous ne pouvez pas nous en parler, et je comprends cela. Pouvez-vous nous dire simplement si vous avez confirmé que des enquêtes sont en cours?
    Je vous remercie beaucoup de la question, madame Stubbs. Vous avez mentionné à juste titre que le ministre de la Sécurité publique ne peut pas mener d'enquête de quelque nature que ce soit. On peut m'informer de certains aspects d'une enquête, mais il revient à la GRC uniquement de révéler...
    Très bien, y en a-t-il une en cours? Pour que les Canadiens soient au courant, avez-vous confirmé qu'une enquête était en cours?
    Je peux vous dire que c'est la responsabilité de la GRC...
    Très bien.

  (1120)  

    ... de confirmer si oui ou non une enquête est en cours. Honnêtement, je craindrais beaucoup...
    Nous allons leur poser la question plus tard.
    Monsieur le ministre...
    ... de leur nuire en révélant des renseignements qu'il serait malvenu pour moi de révéler.
    Bien entendu, mais un oui ou un non ne compromettrait rien. Cela permettrait simplement de confirmer aux Canadiens que leurs élus et les forces de l'ordre ont pris des mesures pour contrer ce crime odieux, comme vous l'avez mentionné.
    Dans votre déclaration liminaire, vous avez parlé du financement annoncé dans les budgets de 2018 et de 2019, de même qu'un projet de loi visant à créer un nouvel organisme de réglementation. Je crois que ce que je... [Difficultés techniques], selon vos propres mots et ceux de divers experts... Par exemple, les Amis de la radiodiffusion nous ont dit avoir publié un rapport. Il s'agit d'une analyse juridique exhaustive qui montre que, en common law, régime en place depuis longtemps au Canada, ces plateformes sont déjà responsables du contenu produit par leurs utilisateurs et dont elles font la promotion et pour la diffusion illégale du contenu produit par leurs utilisateurs.
    De plus, comme un représentant du ministère de la Justice l'a mentionné: « La définition de la pornographie juvénile dans le Code criminel est parmi les plus larges au monde. Ce ne sont pas seulement les images que nous protégeons ou qui criminalisent la distribution, mais aussi la pornographie audio et deux formes de pornographie écrite ». Il poursuit en disant: « Le problème vient souvent de l'application de la loi et du processus lorsque les choses se mettent en branle. »
    Dans l'intérêt de tous les Canadiens, et surtout des victimes qui sont exploitées de façon odieuse et qui continuent d'être victimisées au Canada en ce moment même, et en guise d'appel à la justice, à la responsabilisation et à l'imposition de sanctions pour protéger tous ces Canadiens innocents, qu'allez-vous faire très exactement à titre de ministre responsable de la sécurité publique pour vous assurer que les lois canadiennes sont appliquées?
    C'est une question importante.
     Je conviens avec vous que le Canada dispose actuellement d'un cadre juridique solide pour lutter contre l'exploitation des enfants. Nous savons que la GRC et les services de police municipaux et provinciaux ont un travail très important — et parfois difficile — à faire pour recueillir les éléments de preuve dont ils ont besoin. C'est pourquoi nous nous sommes adressés à eux pour leur demander quelles étaient les ressources dont ils avaient besoin pour mener leurs enquêtes. Nous avons veillé — et par « nous », j'entends le gouvernement — à leur fournir ces ressources. Nous avons également demandé aux forces de l'ordre et à la GRC de nous dire de quoi elles avaient besoin comme outils et mesures de soutien supplémentaires. Nous avons toujours été très à l'écoute.
    Comme je l'ai mentionné, un certain nombre d'autres initiatives sont prévues, et je pense que le procureur général pourra peut-être nous fournir un peu plus de renseignements là-dessus. En ce qui concerne la communication obligatoire des préjudices en ligne et le retrait de ce genre de contenu, plusieurs initiatives importantes sont en cours.
    D'accord, mais voici ce qui préoccupe les Canadiens. S'il est vrai, comme vous l'avez dit et comme les experts l'ont dit, qu'il existe déjà un cadre juridique solide, en quoi le fait de rappeler les engagements budgétaires de 2018 et 2019 et de prévoir encore une autre loi vous aide-t-il à faire en sorte que justice soit rendue aux victimes, que ces crimes soient réprimés et que les auteurs soient tenus responsables?
    Il est vraiment important, dans le cadre de ces enquêtes, de veiller à ce que les forces de l'ordre disposent des outils et des ressources dont elles ont besoin pour faire leur travail, et c'est ce dont nous nous sommes assurés. En fait, nous avons notamment débloqué 15 millions de dollars à cet égard.
     Lorsque j'étais chef de police à Toronto, madame Stubbs, je dirigeais une unité de lutte contre l'exploitation des enfants. Nous y avons fait un travail extrêmement important en identifiant les auteurs et même en sauvant des enfants de ces situations horribles. Il était important que les forces de l'ordre disposent de ressources et de fonds suffisants, et c'est pourquoi le gouvernement a pris des mesures pour veiller à ce que les services de police municipaux et provinciaux et la GRC aient les ressources nécessaires pour effectuer leur travail.
    Quant au déroulement de leurs enquêtes, je vais leur laisser, comme il se doit, le soin d'en parler. En tout cas, le gouvernement reconnaît que nous avons la responsabilité de nous assurer non seulement que nous mettons des outils législatifs efficaces à la disposition des forces de l'ordre, mais aussi que ces dernières ont la capacité et les ressources nécessaires pour s'attaquer à ce crime des plus odieux.
    C'est aussi, comme je...
    Merci, monsieur le ministre.
    Merci.
     Je vais vous arrêter là. Je sais que le temps file.
    Nous allons maintenant passer à M. Sorbara pour la prochaine série de questions.
    Monsieur Sorbara, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour à tous, et bon lundi.
     Le comité d'éthique mène cette étude depuis plusieurs semaines, et nous avons entendu des témoignages assez choquants. Je peux dire bien franchement — et je crois parler pour la majorité d'entre nous — que c'était très bouleversant. Certains jours, je suis rentré chez moi en pensant aux témoignages que j'avais entendus sur l'exploitation des enfants, une situation qu'aucun enfant ne devrait subir, ni au Canada ni ailleurs dans le monde. Je remercie d'ailleurs tous mes collègues de leur travail dans ce dossier, et je tiens aussi à remercier les ministres de leur comparution.
    Je vais justement commencer par les ministres Blair et Lametti. J'aimerais entendre une réponse de votre part concernant letravail effectué par le ministre du Patrimoine canadien, M. Guilbeault, en vue de créer un nouvel organisme de réglementation pour lutter contre la haine en ligne, le partage d'images non consensuelles, la pornographie juvénile et l'incitation à la violence et au terrorisme.
    À l'heure actuelle, au sein de notre [Difficultés techniques] Centre national de lutte contre l'exploitation des enfants, qui s'occupe, en grande partie, de tous les signalements, entrants ou sortants, d'infractions relatives à l'exploitation sexuelle des enfants en ligne au Canada. Comment ce nouvel organisme de réglementation va-t-il collaborer avec l'actuel Centre national de coordination contre l'exploitation des enfants?
    Je vous saurais gré de répondre brièvement, car j'ai d'autres questions à vous poser.

  (1125)  

    Je serai heureux de commencer.
    Je vous remercie, monsieur Sorbara, de votre question. Je partage certainement tous les sentiments que vous avez exprimés au début, et je souscris assurément à ce que le ministre Blair a dit.
    Mon rôle dans cette affaire, à titre de ministre de la Justice, c'est de veiller à ce que le droit pénal et les autres lois du Canada couvrent des situations nationales en la matière et de travailler avec un certain nombre de ministres, de ministères et de partenaires internationaux pour faire en sorte que tout fonctionne bien, dans un esprit de coopération internationale, et pour veiller à ce qu'il n'y ait pas de lacunes législatives dans les mesures de protection offertes par le Code criminel, entre autres.
    Sans révéler la teneur d'un éventuel avant-projet de loi — et vous savez tous que je n'en ai pas le droit —, je dirai que les mesures qui ont été proposées visent à rendre les fournisseurs de services Internet plus responsables grâce à la déclaration obligatoire. Y a-t-il des moyens de renforcer la loi concernant la déclaration obligatoire? Y a-t-il des façons de protéger les renseignements de manière plus rigoureuse, par exemple, pour aider les organismes d'application de la loi et les procureurs à constituer et à conserver des dossiers probants?
    Voilà autant de mesures qui entreraient dans cette catégorie. Elles ont déjà été présentées dans le domaine public, mais je ne donnerai aucun détail sur ce que pourrait contenir un éventuel projet de loi.
    Monsieur Blair, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Merci beaucoup, monsieur Sorbara.
    Encore une fois, je me dois d'être quelque peu prudent au moment de parler de mesures législatives qui pourraient être présentées, mais du point de vue de la sécurité publique et d'après ce que les forces de l'ordre nous ont dit sans équivoque, il y a essentiellement trois principes. Ainsi, on prévoit une déclaration obligatoire des préjudices en ligne, ce qui pourrait englober l'exploitation sexuelle des enfants. Des mesures seraient prises pour préserver les éléments de preuve, qui seraient ensuite utilisés par les forces de l'ordre dans le cadre de leurs enquêtes et, au bout du compte, par les procureurs dans le cadre d'éventuelles poursuites pénales à la suite de ces préjudices en ligne et, enfin, [Difficultés techniques] pour mettre fin à la victimisation causée par leur présence en ligne.
    Bref, en ce qui a trait à l'application de la loi, les services de police de tout le pays nous ont dit très clairement ce qu'ils aimeraient voir dans la législation.
    Merci.
    Je tiens à vous remercier, messieurs les ministres, et je remercie aussi le Secrétariat du Conseil du Trésor sous la direction du ministre Duclos. Le Budget principal des dépenses de 2021 prévoit une augmentation considérable du financement: 6,3 millions de dollars pour la stratégie nationale de lutte contre la traite des personnes, 4,4 millions de dollars pour la stratégie nationale sur la cybersécurité et 4,2 millions de dollars pour la protection des enfants contre l'exploitation sexuelle en ligne. Dans le budget de 2019, je le rappelle, le gouvernement a annoncé un financement de 4,4 millions de dollars pour 2019-2020 et de 8,7 millions de dollars pour 2021. Voilà donc de quoi se réjouir.
    J'aimerais changer de cap un peu. Notre étude sur les plateformes a été riche en enseignements pour moi, et j'ai appris beaucoup de jargon juridique et de renseignements connexes. Je suis d'accord pour dire que nous disposons d'un système robuste. Je crois que c'est l'article 162, ou une disposition de cet ordre, qui porte sur l'exploitation des enfants, mais je voudrais attirer votre attention sur un point parce que j'estime que c'est important pour la discussion de ce matin.
     J'ai pu lire quelques documents, et sachez que nous en avons reçu beaucoup. Une foule de mémoires nous ont été envoyés, plus que pour presque toute autre étude dont j'ai connaissance. L'un d'entre eux provient du Centre for Gender and Sexual Health Equity et s'intitule « Impacts de la criminalisation et de la réglementation punitive du travail du sexe et de la pornographie en ligne: la nécessité de faire entendre la voix des travailleurs du sexe ». Il y a aussi un article paru dans le magazine Maclean's, sous la plume de Justin Ling, qui affirme que les gouvernements ont laissé tomber les travailleurs du sexe du Canada et que ces derniers sont à bout de patience.
    Tout cela remonte au projet de loi C-36, qui a été présenté par les conservateurs. Notre rôle, en tant que législateurs — et je me reporte aussi à l'arrêt Bedford — , c'est de protéger tous les Canadiens, de protéger les enfants contre l'exploitation et de permettre aux Canadiens de travailler en toute sécurité dans n'importe quel type d'environnement.
     J'ai examiné la situation dans d'autres pays — notamment en Nouvelle-Zélande et en Allemagne —, et il me semble que nous devons éviter de forcer les travailleurs du sexe à la clandestinité. Leurs voix doivent être entendues, et nous devons veiller à ne pas causer de tort aux Canadiens, mais plutôt à les aider.
    J'aimerais donc vous poser une question d'ordre général, monsieur Lametti: comment le travail du sexe est-il réglementé au Canada?

  (1130)  

    Je suis désolé, monsieur Sorbara, mais votre temps est écoulé.
    Nous allons maintenant passer à Mme Gaudreau.

[Français]

     Bonjour. Je vous remercie de votre présence et de vos réponses. C'est plutôt clair et encourageant.
    Je vais aborder la question sous un angle différent. Sachez qu'en tant que mère, j'éprouve de l'indignation, tout comme l'ensemble des gens de ma circonscription, face à ce que nous vivons. Nous sommes pris dans une conjoncture [difficultés techniques] pour modifier les lois ou nous assurer de bien les appliquer. Voici donc ma question.
    Compte tenu de toutes les lois dont nous disposons et de l'augmentation des sommes d'argent que nous investissons pour accompagner les victimes et éviter qu'elles soient doublement victimes, comment se fait-il que certaines provinces réussissent à agir encore plus rapidement que nous pour protéger les renseignements personnels? Je pense notamment à la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, à laquelle nous sommes toujours en train de réfléchir.
    La protection des renseignements personnels est une question très large, et cela inclut la dignité et les situations que nous vivons en ce moment. Il y a trois provinces, soit l'Alberta, la Colombie-Britannique et le Québec, qui ont offert de l'aide. Je sais que notre système législatif ne nous permet pas de modifier une loi d'un claquement de doigts, mais à l'ère numérique, comment se fait-il qu'on ne puisse pas adapter la Loi sur la radiodiffusion aux réalités d'aujourd'hui?
    Pourquoi ne travaillons-nous pas à la Loi sur la protection des renseignements personnels pour arriver à nos fins?
    Bien que toutes les démarches de coopération internationale semblent être en vigueur, j'aimerais entendre l'honorable ministre et ses collègues à ce sujet.
    Je vous remercie de votre question, madame Gaudreau.
    Évidemment, tout cela comporte beaucoup d'aspects, de lois, de ministres, de ministères et d'enjeux. Au fédéral, il y a deux lois sur la vie privée: la Loi sur la protection des renseignements personnels, qui touche les institutions fédérales et qui relève donc de ma responsabilité, et la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, qui relève du ministre de l'Innovation. Comme vous l'avez noté, la Chambre étudie actuellement un projet de loi visant à moderniser cette dernière.
    Pour ma part, je suis en train d'enquêter. On m'a demandé d'exprimer mon opinion et de faire des commentaires sur la Loi sur la protection des renseignements personnels. Fondamentalement, le défi tient au fait que la technologie évolue très vite, et ce, de façon internationale. Alors, nous travaillons avec les autres pays. Évidemment, les provinces ont aussi leur mot à dire, par l'entremise de leurs propres lois. Nous devons donc constamment moderniser la Loi, ce qui crée des défis quant à son application, comme vous venez de le voir dans le cadre de votre étude.

  (1135)  

    Je comprends que cela relève davantage du ministre de la Justice. Cela dit, comment se fait-il que, alors que nous sommes en mesure de faire les changements essentiels pour aider les victimes, cela n'arrive jamais?
    Quand je parle à ces gens, ils s'indignent. Ils disent qu'on change toujours de gouvernement, que les projets de loi finissent toujours par mourir au Feuilleton et que, finalement, ils sont oubliés. Il y a de l'aide, mais elle ne perdure pas, parce qu'une loi qui devrait déjà être en vigueur n'est pas appliquée. Celle-ci apporterait une aide supplémentaire aux victimes et les soulagerait de leur fardeau. Généralement, ce sont elles qui tiennent cela à bout de bras jusqu'à la fin, alors qu'elles sont déjà à bout de souffle.
     Il y a donc une grande lacune à laquelle nous devons réagir aussi rapidement que l'évolution du Web, n'est-ce pas?
     Oui, nous réagissons. Comme l'a souligné le ministre Blair, nous sommes en train d'investir dans ce domaine, d'améliorer l'application des lois et de travailler avec les forces policières à l'étranger. Nous avons donc agi. Je crois sincèrement qu'il n'y a pas un gouvernement dans l'histoire canadienne qui a agi aussi rapidement que nous.
    Cela prend du temps et des investissements, et nous continuons de moderniser la loi en tout temps. C'est donc un défi continuel, mais nous sommes à la hauteur et nous agissons.
    Pouvez-vous vous engager, pour le bien-être des victimes, à faire en sorte qu'elles connaissent non seulement les étapes à franchir, mais aussi les pas qui sont faits? Cela les rassurerait et leur montrerait non seulement qu'elles sont prises en considération, mais qu'on est en train de moderniser la loi afin qu'elle soit mieux appliquée.
     Chaque seconde, il y a une nouvelle victime, et elle a de la difficulté à croire qu'on est là pour elle.
    Êtes-vous capable de vous engager à améliorer la transparence et de divulguer les démarches qui sont entreprises au nom de ces victimes?
    C'est vrai que nous pourrions toujours communiquer plus clairement ce que nous sommes en train de faire, surtout pour les victimes, comme vous l'avez souligné. Vous avez raison.

[Traduction]

     Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Merci, madame Gaudreau.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Angus pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Blair, madame Lucki et monsieur Lametti, d'être des nôtres.
     Feras Antoon, le PDG de MindGeek, vit à Montréal. En fait, il y construit la maison de ses rêves — c'est apparemment un véritable manoir — dans un quartier appelé Mafiaville. Je suis souvent allé à Montréal, mais je ne sais pas où se trouve Mafiaville. Je le mentionne parce que M. Antoon vit à Montréal, tout comme son associé, David Tassillo. Ils ont un millier d'employés à Montréal, et leur bureau est situé au 7777, boulevard Décarie.
    Monsieur Lametti, à votre avis, cela qualifierait-il MindGeek d'entreprise canadienne assujettie aux lois canadiennes?
    Encore une fois, je ne vais pas entrer dans les détails. Il y a eu des opinions divergentes. Comme le ministre Blair et moi-même l'avons souligné, cela peut dépendre de l'endroit où se trouvent les serveurs et de l'emplacement...
    D'accord, je suis désolé, mais je vais vous interrompre. Je suis en train de lire la loi concernant la déclaration obligatoire, et on n'y mentionne pas le mot « serveurs ». On y parle plutôt de « service ».
    Permettez-moi de vous aider un peu. Si vous faites une recherche dans Wikipédia, monsieur Lametti, vous verrez, à la première ligne du texte anglais de Wikipédia, que MindGeek est une entreprise privée canadienne. Pourtant, vous ne savez pas s'il s'agit effectivement d'une entreprise privée canadienne. Vous n'en êtes pas certain.
    Monsieur Angus, je le répète, mon rôle dans ce dossier est de m'assurer que les mesures de protection prévues dans le Code criminel sont adéquates et qu'elles sont mises en place. Comme je l'ai souligné dans mes observations préliminaires, monsieur Angus, et je sais que vous m'avez écouté attentivement, il y a des subtilités dans le cas des entreprises qui exercent leurs activités sur Internet...

  (1140)  

    Je comprends cette idée. Ce à quoi je fais référence...
    ... et nous renvoyons tous ces... Des avis juridiques ont été donnés, mais c'est une question d'application de la loi...
    D'accord, je comprends. Il ne me reste que quelques minutes, monsieur Lametti.
    Je fais référence à la note d'information du 10 décembre 2020, adressée à la commissaire de la GRC en réponse à un article paru dans le New York Times. On y apprend qu'en 2018, la GRC a rencontré les représentants de MindGeek pour soulever la question de la loi concernant la déclaration obligatoire et que l'entreprise a par la suite indiqué que la loi ne s'appliquait pas, car elle n'est pas une entreprise canadienne.
    Lorsque vous allez parler à des entreprises qui, selon vous, ont peut-être enfreint la loi canadienne, mais qui relèvent d'autres champs de compétence et lorsqu'elles se contentent de vous dire qu'elles ne sont pas des entreprises canadiennes, est-ce que cela suffit?
    Écoutez, je n'aborderai pas les particularités de toute... L'enquête est en cours.
    Vous êtes au courant de la loi concernant la déclaration obligatoire, n'est-ce pas? Vous avez recommandé...
    Je suis parfaitement au courant de la loi concernant la déclaration obligatoire, et une entreprise pourrait également être tenue de signaler des cas dans un autre pays, comme aux États-Unis, ce qui obligerait ensuite les autorités étrangères à transmettre l'information aux forces de l'ordre canadiennes...
    C'est intéressant, parce que ce n'est pas ce que dit la loi concernant la déclaration obligatoire, monsieur Lametti. Aux termes de cette loi, si une allégation de pornographie juvénile est faite, le fournisseur de services doit mettre les renseignements à la disposition de l'organisme canadien compétent chargé de l'application de la loi. Or, vous dites que, selon l'interprétation qu'ils en font, les fournisseurs de services peuvent estimer que cette loi ne s'applique pas à eux; d'ailleurs, ils n'ont pas fait le moindre signalement jusqu'ici. Ils n'ont jamais signalé quoi que ce soit aux autorités canadiennes.
     Je le mentionne parce que Rose Kalemba...
    Je crois qu'en matière d'application, monsieur Angus...
    Je suis désolé. Je n'ai pas terminé ma question.
    Si vous me permettez de répondre à votre question, monsieur Angus...
    Je n'en étais qu'au début de ma question.
    J'aimerais répondre à cette question et réagir à cette observation.
    À l'ordre, mesdames et messieurs.
    Monsieur Angus, voulez-vous terminer votre question pour que le ministre ait l'occasion d'y répondre?
    Je venais de commencer ma question, monsieur Lametti. Je suis désolé de vous avoir interrompu. Je ne veux pas être impoli.
    Rose Kalemba nous a livré par écrit un témoignage horrible. Elle avait 14 ans lorsqu'elle a été kidnappée, torturée et violée, et de multiples vidéos de sa torture ont été mises en ligne sur Pornhub. Elle a supplié les employés de l'entreprise de les retirer. Ils n'ont pas voulu le faire avant que plus de deux millions de personnes aient vu ces images.
    Elle est citoyenne canadienne. Les mots-clés liés à ces vidéos ont été publiés par une entreprise dont le siège social se trouve à Montréal. Compte tenu de votre interprétation de la loi concernant la déclaration obligatoire, Rose Kalemba et les autres victimes à qui nous avons parlé auraient-elles pu être sauvées s'il y avait eu le moindre signalement par Pornhub ou MindGeek aux autorités canadiennes, comme l'exige la loi concernant la déclaration obligatoire, en vertu du droit canadien?
    Monsieur Angus, je répéterai que le Code criminel et la loi concernant la déclaration obligatoire visent, tous deux, des situations survenues au Canada. D'autres accords internationaux aident à la collecte de ces éléments de preuve.
     Je ne me prononcerai pas sur des cas d'enquête passés, présents ou futurs. Ce n'est pas de mon... Il m'est impossible de le faire sans risquer de compromettre d'éventuelles enquêtes.
    Je comprends tout à fait. C'est simplement que Mme Kalemba est canadienne, alors je me suis dit que vous pourriez nous éclairer là-dessus.
    En tout cas, je trouve cela intéressant parce que nous avons parlé de la loi concernant la déclaration obligatoire, et vous nous dites qu'un nouvel organisme de réglementation sera mis sur pied et que ce sera également obligatoire. Or, d'après cette note d'information, la GRC s'efforce de maintenir des partenariats avec des entreprises privées — Pornhub/MindGeek —, car il s'agit d'un moyen efficace de favoriser la conformité volontaire des entreprises et le respect de leurs propres conditions d'utilisation.
    J'ai lu les lois sur la pornographie juvénile et la loi concernant la déclaration obligatoire. Je suis vraiment surpris de voir que la GRC et vous-même semblez préférer une conformité volontaire à la loi, alors que nous n'avons pas eu un seul signalement de leur part. Comment cette conformité volontaire fonctionne-t-elle auprès de nos partenaires de MindGeek s'ils ne signalent jamais rien?
    Monsieur Angus, votre temps est écoulé, mais nous allons permettre au ministre de nous donner une réponse.
    Je vous remercie.
    Je pense que vous devriez peut-être poser cette question à la GRC. Pour que cela soit porté au compte rendu, sachez, monsieur Angus, que je n'ai exprimé aucune position à ce sujet, contrairement à ce que vous semblez affirmer.
    Vous n'avez pas de position sur le fait qu'ils doivent faire un rapport ou pas. En tant que procureur général, vous n'avez pas de position. D'accord. Merci.
    Ce n'est pas ce que j'ai dit, monsieur Angus.
    Je vous remercie, messieurs.
    Nous allons donner la parole à M. Viersen, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre Lametti, en novembre dernier, un certain nombre de parlementaires et moi-même vous avons écrit au sujet de cas documentés d'exploitation d'enfants, de trafic sexuel et de viols publiés sur les sites de MindGeek. Ces vidéos ont été exploitées à des fins commerciales et vues par des millions de personnes. Nous vous avons demandé si les lois actuelles étaient adéquates et s'il y avait des choses qui empêchaient leur application.
    Vous nous avez répondu: « Je vous assure que le Code criminel contient un cadre solide qui interdit une vaste gamme d'agissements comme ceux auxquels vous faites référence. »
    Nous voici six mois plus tard. De multiples victimes se sont manifestées. Nous avons des centaines, voire des milliers d'exemples de la sorte, mais aucune accusation n'a encore été portée. Avez-vous toujours confiance en ce « cadre solide » qui est le nôtre?

  (1145)  

    Merci de votre question, monsieur Viersen.
    J'ai très confiance en ce cadre solide. Nous avons une couverture nationale qui, je pense, est plus complète que celle de n'importe quel autre pays dans le monde. Il s'agit d'une situation internationale complexe, et ces questions relatives à l'application de la loi devraient être posées à la GRC, par exemple, en tant qu'organisme d'enquête.
    Le ministre Blair aurait peut-être quelque chose à ajouter, mais il ne fait aucun doute que la couverture normative des lois canadiennes n'a pas d'égale ailleurs dans le monde.
    Si je peux me permettre...
    Monsieur le ministre Lametti, aux termes de la Loi sur le directeur des poursuites pénales, le procureur général peut émettre des directives en matière de poursuites. Avez-vous émis de telles directives à cet égard?
    Monsieur Viersen, comme vous le savez, notre service des poursuites pénales agit de façon indépendante. Les moments où je peux intervenir sont encadrés par la loi, et ils sont très rares.
    Bien entendu, je travaille avec mes homologues, mais je peux vous assurer que, dans un premier temps, les forces de l'ordre mènent leurs enquêtes en toute indépendance. Ensuite, dans la mesure où les preuves recueillies sont suffisantes pour engager des poursuites, la décision de poursuivre se prendra de manière indépendante, et je suis convaincu que ces organismes font tous leur travail comme ils sont censés le faire.
    Monsieur Lametti, cela dure depuis des années. Il s'agit d'infractions flagrantes envers des femmes et des enfants — trafic sexuel, abus d'enfants, viols —, dont les représentations sont publiées en ligne depuis des années et des années, et pourtant nous ne voyons aucune accusation, aucune enquête. Ne pensez-vous pas que le moment est venu d'adopter une directive aux fins de poursuites pénales?
    Encore une fois, monsieur Viersen, comme vous le savez, mon rôle dans cette affaire est de veiller à ce que le Code criminel, la loi concernant la déclaration obligatoire et les autres lois fournissent une couverture adéquate...
    Vous n'avez aucune responsabilité dans tout cela?
    [Difficultés techniques] tout. Je suis convaincu que tous les aspects de l'application de la loi et des poursuites pénales au Canada sont pris en compte, et que le ministère de la Justice et le ministère de la Sécurité publique travaillent main dans la main pour s'assurer que tout se passe bien. Ce que je ne peux pas faire, en tant que représentant élu, c'est de commenter une enquête, et ce que je ne peux pas faire en tant que ministre de la Justice ou procureur général, c'est...
    Nous ne parlons pas d'une enquête particulière. Nous disons simplement: avez-vous une directive aux fins de poursuite?
    ... porte atteinte à l'indépendance du service des poursuites pénales [Difficultés techniques] important. Elle a été établie sous le précédent gouvernement conservateur, et je crois fermement que c'était une très bonne décision de la part des ministres de la Justice de l'époque.
    Il est intéressant de noter que MindGeek ou Pornhub ont plus de 1 000 employés au Canada. Ils opèrent ici, sans égard pour l'endroit où ils se trouvent. Pensez-vous qu'une entreprise doit obéir à la loi canadienne, quel que soit l'endroit où se trouve son siège social?
    Encore une fois, mon rôle dans cette affaire est de m'assurer que les lois sont adéquates. La question de savoir si les lois canadiennes sont respectées et si elles s'appliquent relèvera des fonctions d'enquête et de poursuite.
    Pendant plus de neuf ans, ces entreprises ne se sont pas conformées et elles n'ont pas rapporté la présence sur leur site Web de matériel d'exploitation sexuelle d'enfants, alors que nous avons des preuves évidentes à cet égard. Croyez-vous que c'est cela, respecter la loi?
    Écoutez, ce sont des crimes horribles. Nous le savons. Nous avons confiance en nos services de police. Comme je l'ai mentionné dans mes observations préliminaires, la plupart de ces crimes relèvent des gouvernements provinciaux. Or, lorsque la GRC est sollicitée, nous avons confiance en elle, confiance dans les systèmes que nous avons mis en place pour signaler ces crimes et confiance non seulement dans l'indépendance de la GRC en matière d'enquête, mais aussi dans l'indépendance du service des poursuites pénales, non seulement à l'échelon fédéral, mais aussi aux échelons provincial et territorial dans tout le Canada.
    Merci, monsieur Viersen.
    Nous allons maintenant passer à Mme Lattanzio.
    Madame Lattanzio, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous d'être là, ce matin, tant les ministres que Mme Lucki. Merci de participer et d'aider le Comité à mener à bien cette très importante étude.
    Ma première question s'adresse à M. Blair.
    Monsieur Blair, pas plus tard que le mois dernier, Sécurité publique Canada a lancé une campagne nationale de sensibilisation à l'intention des enfants, des parents et des fournisseurs de soins afin d'attirer leur attention sur l'exploitation et l'abus sexuels des enfants en ligne et, plus précisément, de les sensibiliser à ces crimes odieux, à la façon de signaler ces abus et à la façon de réduire les stigmates associés à ces signalements. Pourquoi les efforts de sensibilisation et les pratiques de réduction de la stigmatisation sont-ils si importants?

  (1150)  

    Merci beaucoup, madame Lattanzio.
    C'est une question très importante. Nous reconnaissons que l'éducation publique des enfants et de leurs parents ainsi que la sensibilisation à la question de l'exploitation sexuelle des enfants sur Internet sont absolument essentielles pour donner aux familles et aux jeunes les outils dont ils ont besoin. Nous travaillons également d'arrache-pied pour éliminer la stigmatisation, car nous savons que de nombreuses personnes ont été profondément traumatisées par ce crime des plus odieux et nous voulons donner aux gens les moyens de se manifester et de prendre des mesures pour se protéger.
     Nous reconnaissons aussi l'importance d'apporter un soutien robuste aux enquêtes criminelles. Je tiens à souligner que la GRC dirige le Centre national contre l'exploitation des enfants, mais que nous travaillons aussi en étroite collaboration avec le Centre canadien de protection de l'enfance, qui, en notre nom et avec notre financement, met en œuvre des stratégies d'identification des victimes et de soutien aux victimes afin d'aider les survivants, et offre des ressources adaptées aux victimes et à leurs familles.
     Nous savons que cette victimisation générée de la manière la plus terrible qui soit par cette exploitation sexuelle des enfants en ligne peut avoir des conséquences tenaces qui resteront pour la vie. Il est extrêmement important que nous sensibilisions le public à ce problème afin que... Nous savons que pendant la pandémie, beaucoup d'enfants passent beaucoup plus de temps en ligne, et nous voulons nous assurer qu'ils peuvent le faire en toute sécurité. Nous pouvons y parvenir en sensibilisant le public et en travaillant avec leurs familles. Parallèlement à cela, nous reconnaissons que les prédateurs existent et que nous devons nous assurer de disposer des outils et des ressources nécessaires pour enrayer ces pratiques, ainsi que pour appréhender et poursuivre ces personnes.
     Merci.
    Monsieur Lametti, j'aimerais vous donner l'occasion de dire plus précisément au Comité ce qu'est la loi concernant la déclaration obligatoire. Je sais que mon collègue vous a posé diverses questions à ce sujet, mais vous serait-il possible d'en brosser les grandes lignes et d'expliquer comment elle peut aider à combattre la pornographie juvénile au Canada.
    Merci beaucoup, madame Lattanzio, de me poser cette question fort à propos, surtout que la loi concernant la déclaration obligatoire joue un rôle important en la matière.
    La loi concernant la déclaration obligatoire est une loi pénale fédérale qui impose des obligations à ceux qui fournissent des services Internet au public, comme les fournisseurs d'accès, les fournisseurs de contenu et les hébergeurs. Cette loi oblige ces différents intervenants à se rapporter au Centre canadien de protection de l'enfance, qui gère la ligne d'information anonyme Cyberaide.ca, lorsqu'ils apprennent l'existence d'une adresse Internet où pourrait se trouver de la pornographie juvénile accessible au public, ou à avertir la police s'ils ont des motifs raisonnables de croire que tel ou tel service Internet est utilisé pour la perpétration de méfaits en matière de pornographie juvénile. C'est d'une importance capitale. La loi les oblige également à conserver les données temporaires pendant une période de 21 jours [Difficultés techniques] afin de permettre aux forces de l'ordre d'y accéder.
    Ce sont des mesures importantes pour tenter de combattre un phénomène qui se produit en ligne de façon fugace. Cette obligation de déclaration a pour but d'aider les autorités chargées de l'application de la loi à agir rapidement. C'est un élément essentiel de la structure pénale qui a été mise en place pour lutter contre ce type de crime, que nous considérons tous comme étant odieux et qui doit être éradiqué.
    Merci.
    Je vais revenir au ministre Blair.
    Monsieur le ministre, j'espère que vous pourrez parler un peu plus aujourd'hui de la traite des personnes. Je crois que la stratégie nationale de notre gouvernement met l'accent sur l'autonomisation en tant que pilier, et que vous avez en fait un comité consultatif et un conseiller en chef.
    Pouvez-vous nous expliquer aujourd'hui l'importance d'avoir un représentant qui travaille avec le gouvernement et concentre ses efforts à lutter contre ce fléau?
    Merci beaucoup...
    Monsieur le ministre, le temps de Mme Lattanzio est écoulé, mais nous allons vous donner l'occasion de répondre brièvement.
    Je ferai de mon mieux pour donner une réponse courte, monsieur le président.
    Un conseiller spécial pour lutter contre la traite des personnes a été nommé. Sa fonction est de fournir des conseils d'experts au gouvernement sur les efforts collectifs qui doivent être déployés pour lutter contre la traite des personnes et de sensibiliser le public à cette abomination. Cette démarche s'appuie sur des investissements antérieurs. Elle s'inscrit dans le cadre de la Stratégie nationale de lutte contre la traite des personnes que le gouvernement a lancée en 2019.

  (1155)  

    Je vous remercie.
    Nous allons passer à Mme Gaudreau pour deux minutes et demie.

[Français]

     Je vais revenir à ce que je disais tantôt. Au cours de la prochaine année, il y aura un changement. En fait, c'est imminent. Je disais que tous les projets de loi mouraient au Feuilleton. J'entends de la part de l'ensemble de mes collègues qu'il y a urgence d'agir. Le processus législatif étant ce qu'il est, malheureusement, force est de constater qu'on ne peut pas éradiquer à la vitesse grand V ce fléau qui fait de nouvelles victimes chaque jour et chaque seconde.
    Compte tenu de la fragilité des projets de loi, qui peuvent mettre des années à être adoptés, ne croyez-vous pas que, dans un contexte aussi virulent — c'est un mot qu'on peut utiliser par les temps qui courent —, il faudrait augmenter la responsabilité des personnes, des organismes et des commissaires qui ont davantage de pouvoir pour aider à contrer ce fléau?
     C'est beau, augmenter les investissements et développer des organismes, mais il existe déjà des ressources. En ce moment, on parle des victimes, et c'est loin de la partisanerie ou d'un projet de loi. En tant que législateurs, nous sommes pris dans ce rythme qui n'est pas assez rapide pour les victimes.
    J'aimerais vous entendre à cet égard.
     Je vous remercie de votre question, madame Gaudreau.
    En ce qui concerne les investissements, nous faisons ce que nous pouvons, parce que le gouvernement a le pouvoir de le faire.
    En ce qui a trait aux projets de loi, nous sommes toujours disposés à améliorer le cadre normatif actuel, que ce soit en matière de droit pénal ou dans d'autres domaines. En ce moment, je n'ai pas de projet de loi à proposer, puisque, comme je viens de le dire, le Code criminel et les autres lois sont robustes. Cela dit, nous sommes toujours ouverts aux suggestions d'amélioration.
    Je sais que des députés ont des projets de loi, mais cela prend la coopération des députés à la Chambre des communes. Je sais que votre chef a fait preuve d'une telle coopération dans le contexte du projet de loi sur l'aide médicale à mourir. Parfois, il faut coopérer, surtout quand il y a parfois des mesures dilatoires de la part d'autres partis.
    Nous sommes toujours prêts à coopérer.

[Traduction]

    Merci, monsieur le ministre.
    Nous allons maintenant passer à M. Angus, pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Lametti, d'être venu aujourd'hui.
    Je vais aller au-delà de nos tentatives d'obtenir des réponses sur les lois de déclaration obligatoire que nous avons en place.
    L'histoire de Serena Fleites a été révélée, et je pense qu'elle nous a tous choqués. Mme Fleites est une survivante de la pornographie juvénile qui est allée frapper à la porte du New York Times. Elle a supplié Pornhub/MindGeek de retirer ses vidéos, et elle a parlé des multiples mots-clés qui avaient été utilisés. Lorsque nous avons interrogé les représentants de Pornhub/MindGeek là-dessus, ils ont dit qu'ils n'avaient aucun dossier à son sujet. Un certain nombre d'autres enfants survivants se sont également manifestés.
    Il n'y a eu aucune enquête sur ces allégations portées contre MindGeek et n'y a eu aucune déclaration en ce sens non plus. Je sais que certains ont des doutes sur le fait que ce soit une entreprise canadienne, mais il reste qu'elle est basée à Montréal.
    Aux termes du paragraphe 163.1(3) du Code criminel, quiconque « transmet » ou « rend accessible » de la pornographie juvénile ou « en fait la publicité » est coupable d'un acte criminel passible d'un emprisonnement maximal de 14 ans.
    Je pense ici aux mots-clés, à la promotion et à la vente, bref, à tout ce qui se fait en ligne. N'avons-nous pas déjà des lois suffisantes au Canada? On dirait que nous n'avons tout simplement pas la volonté politique d'appliquer réellement la loi. Pourquoi aurions-nous besoin de changer quoi que ce soit alors que la loi est assez claire en ce qui concerne la transmission, la distribution et la promotion du viol d'enfants?

  (1200)  

    Monsieur Angus, permettez-moi de...
    Je suis désolé, mais j'ai posé la question à M. Lametti. Est-il toujours avec nous?
    D'accord.
    Je serai heureux de répondre à cela.
    Monsieur Angus, je suis ravi que vous ayez compris que le droit pénal canadien et la loi concernant la déclaration obligatoire constituent l'un des cadres les plus solides et les plus complets au monde pour ce genre de crimes odieux.
    Exactement, alors pourquoi n'y a-t-il jamais eu de déclaration au Canada? Si c'est si solide, monsieur Lametti, comment se fait-il...
    Comme je l'ai souligné...
    ... qu'il n'y a pas eu la moindre déclaration?
    Je sais que vous avez écouté très attentivement les observations liminaires et, comme je l'ai dit, le principe de territorialité nationale s'applique, c'est-à-dire que le Code criminel s'applique au Canada.
    Dans le contexte d'Internet, il y a une variété de normes différentes qui peuvent signifier qu'une entreprise opère en fait dans un autre pays. Nous travaillons avec d'autres pays pour échanger des renseignements.
    Sauf qu'il n'y a pas eu la moindre déclaration ou la moindre enquête, monsieur Lametti. Allez, tout de même...
    Encore une fois, je ne peux pas me prononcer au sujet des enquêtes. Cela ne fait pas partie de mon mandat...
    Étant donné l'article 163, ne diriez-vous pas que ce sont des cas fondés de prime abord? Vous avez bel et bien l'autorité nécessaire. Vous ne l'avez tout simplement pas utilisée.
    Je n'ai pas, comme je l'ai dit... Le Code criminel est plus qu'adéquat puisqu'il s'applique...
    C'est plus qu'adéquat?
    ... aux Canadiens. C'est en fait un très bon code criminel, et j'en suis très fier.
    Les enquêtes et les poursuites sont des fonctions indépendantes et leur application dans un contexte international n'est pas toujours aussi claire que vous le souhaiteriez, même si c'est ce que nous aimerions tous deux.
    Par conséquent, diriez-vous qu'il n'y a pas de problème à venir s'installer au Canada et à mener ses affaires sans avoir à s'inquiéter d'être contraint à faire quelque déclaration que ce soit, attendu qu'il n'y en a jamais eu?
    Ce n'est certainement pas le cas, monsieur Angus.
    Votre temps est écoulé, monsieur Angus.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre.
    Passons maintenant à M. Carrie, qui partagera son temps avec M. Gourde.
    Monsieur Carrie.
    Merci beaucoup, monsieur le président et messieurs les ministres.
    Tout au long de cette étude, nous avons parlé de la vie privée et de la réputation des personnes qui ont vu leurs photos sexuelles privées téléchargées sur des sites Web pour adultes sans leur consentement. Nous avons entendu nombre de ces victimes, dont beaucoup sont des enfants. Ils sont aussi victimes de violence sexuelle et de traite de personnes.
    Monsieur Blair, vous avez qualifié ces crimes d'actes haineux. Croyez-vous que les auteurs de traite de personnes méritent d'être punis avec toute la rigueur de la loi, oui ou non?
    Oui, monsieur.
    Merci.
    Monsieur Lametti, croyez-vous que les auteurs de traite de personnes méritent d'être punis avec toute la rigueur de la loi, oui ou non?
    Tout à fait.
    Merci.
    Monsieur Lametti, pourriez-vous s'il vous plaît confirmer aux Canadiens la peine maximale pour une personne reconnue coupable de l'acte criminel de la traite de personnes, ainsi que la peine d'emprisonnement maximale pour une personne reconnue coupable d'un délit mineur — seulement les chiffres, s'il vous plaît?
    Je suis désolé, mais je n'ai pas ces dispositions sous les yeux. Je vais vous revenir avec ces réponses.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Blair, votre collègue au sein du Cabinet, qui témoigne aujourd'hui avec vous, a parrainé le projet de loi C-75 en 2019, projet qui fait de la traite de personnes une infraction mixte, ce qui veut dire que les marchands d'esclaves des temps modernes peuvent être reconnus coupables et passer moins de 2 ans en prison ou simplement payer une amende d'au plus 5 000 $.
    M. Angus a précisé à quel point le système canadien est efficace. En réalité, le gouvernement a fait de ce crime une infraction mixte, au titre de laquelle quelqu'un peut s'en tirer avec la même peine que s'il avait essentiellement été arrêté pour avoir troublé la paix.
    Êtes-vous au courant de ces changements dans le projet de loi C-75?
    Merci, monsieur Carrie.
    Je suis au courant des changements, mais je suis également au courant du fait que nous n'avons pas réduit la peine maximale pour les pires criminels commettant les pires délits de traite de personnes.
    Les peines qui étaient préalablement applicables pour ces crimes extrêmement haineux permettaient aux tribunaux, d'après les preuves et la loi, d'établir la peine convenant dans les circonstances.
    Quand vous avez eu l'occasion de modifier la loi, plutôt que de lui donner plus de mordant et de la rendre plus fonctionnelle, comme le disait M. Angus, afin de pouvoir appliquer la loi dont nous disposions dans ce cadre rigoureux que vous déclarez avoir, vous avez fait de ce crime une infraction moins grave.
    Comment ces victimes peuvent-elles croire que le gouvernement s'occupe de la question et fait de son mieux pour les Canadiens quand vous affaiblissez la loi dès que vous en avez l'occasion au lieu de la renforcer?
    Comme la parole est maintenant à M. Gourde, je dois m'arrêter là, mais c'est très décevant, croyez-moi.
    Monsieur Gourde.

  (1205)  

[Français]

     Monsieur Gourde, vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Ma question s'adressera au ministre de la Justice.
    Nous sommes tous indignés par la situation entourant la pornographie juvénile. Je pense que certaines lois devraient être renforcées pour que les victimes soient protégées. J'ai une suggestion à faire au ministre. Si on avait l'intention d'adopter un projet de loi pour renforcer le cadre législatif, pourrait-on demander un avis juridique à la Cour suprême avant de le déposer?
    En effet, les entreprises dont nous parlons ont des ressources financières et juridiques inimaginables. Elles pourraient contester une telle loi. Déjà, le fait d'avoir un avis de la Cour suprême pourrait encadrer et limiter les recours possibles, ce qui nous permettrait peut-être de protéger les victimes beaucoup plus rapidement.
    Le ministre pourrait-il tenir compte de cette suggestion?
    Je vous remercie de votre question, monsieur Gourde.
    Comme je l'ai déjà expliqué à maintes reprises, les lois canadiennes sont assez exhaustives et assez claires. La difficulté provient du caractère international du problème. Il faut donc renforcer l'application de la loi et mener des enquêtes sur le plan international en travaillant avec d'autres pays et d'autres forces policières du monde. La loi existe donc déjà, et elle est assez claire.
    S'agit-il d'une entreprise canadienne ou non? C'est souvent une question plutôt difficile. On doit se baser sur les faits, et il n'est pas certain que l'opinion d'un tribunal canadien pourrait trancher la question. On a vu des cas impliquant des entreprises en ligne où la décision d'un tribunal canadien, voire de la Cour suprême du Canada n'avait pas été appliquée. Dans le cas d'Equustek Solutions inc., la décision de la Cour suprême n'a pas été appliquée aux États-Unis. Cela ne trancherait donc pas nécessairement la question.
    Est-ce qu'il faudra aller devant une cour internationale pour que...

[Traduction]

    Monsieur Gourde, votre temps est malheureusement écoulé.

[Français]

     Merci.

[Traduction]

    M. Fergus posera les dernières questions du deuxième tour.
    Monsieur Fergus, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Je remercie les témoins de leur présence.
    Comme vous l'avez sûrement constaté, c'est un dossier très épineux qui touche profondément tous les députés qui ont participé à ces séances. Avant de poser ma question aux deux ministres, j'aimerais soulever quelques points.
    Monsieur Lametti, vous avez indiqué que nous avions une loi très puissante, mais que quelques éléments avaient besoin d'être renforcés pour qu'elle tienne mieux compte du caractère international de la cybercriminalité, si je puis utiliser ce terme, puisque les actes de MindGeek et de Pornhub sont effectivement criminels. Le problème concerne l'emplacement de leurs serveurs informatiques.
    Je peux aussi noter qu'en dépit du fait qu'une volonté d'agir semble transcender la partisanerie, l'opposition officielle a voté contre l'augmentation des fonds alloués à la GRC pour combattre ce fléau qu'est la pornographie juvénile en ligne. Cela dit, je sais bien que les députés qui sont ici sont de bonne foi et qu'ils veulent agir de façon appropriée maintenant.
    Monsieur Lametti et monsieur Blair, de quoi avez-vous besoin, tant sur le plan des ressources que des améliorations à apporter au cadre législatif, pour sanctionner ces crimes en tenant compte de leur caractère international dû à la nature d'Internet?
     Quels sont les autres outils et les autres fonds dont on a besoin pour bien poursuivre ces gens et rendre justice aux victimes de ces crimes?

  (1210)  

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Fergus, pour cette question si importante.
    Comme vous l'avez déjà souligné, nous versons des fonds à la GRC pour l'exploitation du Centre national contre l'exploitation d'enfants, qui assume diverses responsabilités importantes, dont l'enquête sur ces prédateurs afin de recueillir les preuves nécessaires pour les poursuivre devant les tribunaux. Il vise également à cerner les victimes à l'échelle internationale et à les sauver.
    En raison de la nature des méfaits en ligne en général, et surtout en ce qui a trait à ce crime absolument horrible, le volet international est très important. C'est donc pour cette raison, à l'occasion des réunions ministérielles des cinq pays auxquelles j'ai assisté ces trois dernières années, que l'accent a chaque fois été mis sur [Difficultés techniques] sexuelle des enfants en ligne et la mise en œuvre de principes pour encadrer les efforts de l'industrie contre la cybercriminalité et l'exploitation sexuelle des enfants.
    De plus, nous faisons partie d'une initiative appelée l'Alliance mondiale WePROTECT, un mouvement qui a pour mission de mettre fin à l’exploitation sexuelle en ligne des enfants grâce à des actions nationales et internationales. Il comprend des États aux vues similaires, des ONG et des organisations de la société civile.
    Enfin, monsieur Fergus, j'aimerais souligner que la GRC préside actuellement le Virtual Global Taskforce, un groupe qui lutte contre l'exploitation des enfants. Cette alliance internationale des forces de l'ordre pratique l'échange de renseignements et de données, et traite de ces questions à l'échelle du globe. J'estime que cela témoigne à la fois de l'engagement du Canada et du leadership international de la GRC dans ce dossier d'une importance cruciale.

[Français]

    Monsieur Fergus, j'ajouterai seulement que nous travaillons avec d'autres pays sur des traités d'entraide juridique pour faciliter l'échange d'information entre nos forces policières, sur des conventions multilatérales sur la cybercriminalité, ainsi que sur des accords bilatéraux avec des pays comme les États-Unis, par exemple, pour faciliter l'échange d'information dans un contexte où on doit le faire rapidement.
     Monsieur Lametti, monsieur Blair, le Comité veut vraiment s'occuper de ce problème. Nous aimerions vous proposer des modifications qui pourraient faciliter votre travail et vous aider à poursuivre ces criminels.
    Qu'attendez-vous du Comité? Quel genre de recommandations pourraient renforcer vos capacités afin que vous ayez le cadre légal nécessaire?

[Traduction]

    Merci, monsieur Fergus. Votre temps est écoulé, mais nous allons permettre aux ministres de répondre à la question.
    Messieurs les ministres.

[Français]

    Comme je viens de l'expliquer, les lois nationales sont très fortes. Ce que nous voudrions, c'est plutôt une amélioration de la coopération à l'échelle internationale.

[Traduction]

    Monsieur Blair, aviez-vous une réponse à fournir vous aussi?
    Oui, monsieur le président.
    Permettez-moi de reconnaître le travail important effectué par ce comité. Nous avons hâte de connaître ses conclusions et ses recommandations. Je crois que nous avons tous un engagement commun, soit éliminer l'exploitation sexuelle des enfants en ligne. Nous avons hâte que les recommandations de ce comité viennent étayer et soutenir notre travail.
    Merci.
    Voilà qui conclut le deuxième tour de questions.
    Messieurs les ministres, vous avez précisé être disponibles seulement la première heure. Nous aimerions que vous restiez, si possible, mais nous comprenons que vous êtes aussi des personnes occupées. Si vous ne pouvez pas rester, nous souhaitons vous remercier de votre présence ce matin. Nous apprécions votre volonté d'être des nôtres.
    Chers collègues, poursuivons. Mme Stubbs entamera le troisième tour de questions.

  (1215)  

    Merci, monsieur le président.
    J'ai quelques questions pour vous, commissaire Lucki. J'ai consulté le site Web sur les diverses unités de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants de la GRC. J'aimerais également souligner le rapport récent du directeur de Cyberaide.ca, qui a déclaré que, en 2020, son [Difficultés techniques] ont monté en flèche en avril, mai et juin [Difficultés techniques] jeunes qui sont exploités sexuellement et le signalement de personnes qui tentent d'exploiter sexuellement des enfants.
    Je me demande si vous pouvez confirmer que les cas d'exploitation sexuelle d'enfants en ligne ont augmenté au cours de la dernière année. Dans ce contexte, pourriez-vous aussi nous fournir des éclaircissements sur le soutien et les ressources que le ministre de la Sécurité publique dit avoir fournis quand il a communiqué avec la GRC après la dénonciation de ce simulacre de justice par des députés et des victimes l'an dernier?
    Merci beaucoup pour cette question.
    La pandémie de COVID-19 a tout particulièrement accentué le risque que courent les enfants, puisque les contrevenants ont tiré profit du fait que les enfants passent beaucoup plus de temps en ligne et, souvent, sans supervision. Depuis le début de la pandémie, le Centre a constaté une hausse des activités en ligne liées à l'exploitation sexuelle d'enfants. De mars à mai 2020, le Centre a enregistré une hausse d'environ 36 % des signalements d'exploitation présumée d'enfants en ligne, ce qui est en partie attribué à l'augmentation de la viralité dans les médias et à une hausse tangible des cas d'auto-exploitation.
    Nous nous attendons également à ce que plus d'infractions liées à l'exploitation d'enfants, tant en ligne que hors ligne, soient signalées quand les restrictions associées à la pandémie seront graduellement levées et que les enfants auront de nouveau accès à des adultes de confiance, qu'il s'agisse d'un enseignant, d'une gardienne ou d'employés des services de soutien communautaire. Cet accès était très limité au début de la pandémie, ce qui a probablement empêché les enfants de signaler l'abus à des adultes de confiance à l'extérieur de leur domicile, ce qui est un aspect absolument crucial.
    Pour ce qui est de votre question sur les communications du ministre Blair avec la GRC, chaque fois qu'un énorme... Par exemple, quand quelque chose comme la hausse de l'exploitation d'enfants se produit, nous avons toujours une conversation sur ce que nous pouvons faire pour prévenir ce genre de situations. Évidemment, nous étudions la loi et la loi sur la déclaration obligatoire. Nous avons discuté des ressources. Nous avons abordé la question de la technologie. Nous avons parlé de certains éléments des lois et de la façon dont cela pourrait améliorer l'application de la loi, ainsi que de la façon dont nous pourrions mieux communiquer avec les forces de l'ordre.
    Merci, madame la commissaire.
    Je présume que vous avez suivi les travaux de ce comité et que vous êtes tout à fait au courant des cas évidents de centaines, pour ne pas dire de milliers, de victimes de matériel d'agression sexuelle d'enfants, de viol, de traite de personnes et de photos non consensuelles. Je suis persuadée que vous êtes aussi perturbée que chacun d'entre nous par le témoignage des victimes.
    En évitant d'entrer dans les détails, pouvez-vous confirmer s'il y a une enquête sur MindGeek et si des accusations ont été portées?
    Merci pour [Difficultés techniques] le Comité souhaite obtenir des éclaircissements sur l'état de l'enquête et, malheureusement, nous ne précisons habituellement pas si un incident fait ou non l'objet d'une enquête. Bien sûr, cela est principalement dû au fait que l'on ne souhaite pas compromettre le processus d'enquête ou des preuves essentielles, et les données sont simplement si... Tout va et vient si rapidement, et nous essayons vraiment de ne rien compromettre.
    Ce que je peux vous dire en ce qui a trait à Pornhub ou MindGeek, c'est que la demande d'une enquête criminelle est à l'étude, de même que toute autre mesure nécessaire. Nous collaborons avec le service de police responsable de ce dossier. Si nous disposons des renseignements nécessaires pour lancer une enquête, celle-ci sera lancée. C'est sans équivoque. Si cette enquête nous apporte les preuves nécessaires pour porter des accusations, ce sera fait. Je vous assure que personne n'est plus déterminé que ces représentants de l'ordre quand il est question d'enfants et d'exploitation sexuelle.

  (1220)  

    J'en déduis donc, d'après votre réponse, qu'aucune accusation n'a [Difficultés techniques], mais vous pouvez comprendre à quel point ce serait perturbant pour tous les Canadiens qui nous écoutent, compte tenu des années où ces enfants et ces femmes ont été victimisées encore et encore, contre leur gré.
    Alors dites-moi bien franchement: que diable se passe-t-il? Comment se fait-il que l'on envisage actuellement d'entamer une enquête et qu'aucune accusation n'ait été portée?
    Les enquêtes du genre sont très... Elles ne se produisent pas du jour au lendemain, et il y a toujours des renseignements manquants. Par exemple, quand nous recevons un signalement, nous devons nous assurer, surtout quand on parle d'exploitation d'enfants ou d'exploitation sexuelle, que ce dossier correspond à la fourchette d'âges applicable à un enfant, ce qui est une première difficulté. Souvent, nous obtenons divers signalements et, malheureusement, ils ne correspondent pas à cette catégorie, donc ils sont bien évidemment mis de côté. Il y a toute une science derrière cette analyse, et beaucoup de travail est investi strictement pour établir l'âge d'une personne en ligne. Ce n'est pas une science exacte. Elle repose sur la maturité et sur des experts qui ont reçu la formation nécessaire. Nous avons également...
    Pardonnez-moi, madame la commissaire. Je vais vous laisser terminer votre réponse, mais nous devrons ensuite passer à M. Dong. Veuillez m'excuser.
    Nous avons pris les signalements reçus de Pronhub/MindGeek et beaucoup correspondent à cette catégorie. Les autres sont soumis sur-le-champ au service de police responsable, qui veille ensuite à faire enquête. Dès que ces signalements répondent à ces exigences minimales, l'enquête est lancée. Bien sûr, il faut ensuite un certain temps pour étudier les preuves. Puis, une fois que nous détenons les preuves, des accusations sont portées. Donc, des accusations seront portées, et c'est là qu'elles seront rendues publiques.
    Merci, madame la commissaire.
    Monsieur Dong, la parole est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Lucki, merci beaucoup d'être venue devant le Comité pour répondre à nos questions.
    Tout d'abord, quand l'affaire a éclaté, la tension est montée de plusieurs crans au sein de la population. Les électeurs de Don Valley-Nord me posent beaucoup de questions, car ils veulent savoir quoi faire s'ils se trouvent dans une situation du genre ou s'ils voient la moindre preuve qu'un enfant est exploité. J'espère que vous allez très brièvement nous en dire un peu plus sur le Centre national contre l'exploitation d'enfants.
    Offre-t-il un service 24 heures sur 24? De quel type de service s'agit-il? Que peuvent faire les membres de la population s'ils ont l'impression qu'un crime est commis?
    Il va sans dire que, quand des personnes reçoivent ce type d'information, elles doivent avant tout communiquer avec leur service de police. Nous travaillons avec le Centre national contre l'exploitation d'enfants et avons essayé d'établir un lien entre ce centre et l'industrie parce qu'avoir [Difficultés techniques] augmente la sensibilisation au sein de l'industrie. Le Centre a le mandat de lutter contre l'exploitation sexuelle d'enfants en ligne et est accessible 24 heures sur 24, sept jours sur sept. Il incite l'industrie à se conformer volontairement aux exigences, mais il fournit aussi ce service.
    Dès que quelque chose attire son attention, le personnel soumet rapidement le tout aux forces de l'ordre, puis nous aidons les forces de l'ordre. Si cela ne relève pas de la GRC, nous veillons à ce que la question soit soumise au service de police responsable et lui apportons notre aide dans la mesure du possible.
    Vous avez dit que l'industrie doit volontairement signaler cela. Toutefois, comme vous l'avez constaté plus tôt, beaucoup se demandent si la loi va assez loin en imposant ces exigences à l'industrie et en établissant sa responsabilité en matière de protection des enfants. Je propose, alors que notre étude se termine, que vous nous soumettiez toutes les suggestions que vous pourriez avoir sur la façon de renforcer la loi à cet effet. Nous serions heureux de les connaître.
    Maintenant, il semble que, depuis le milieu de l'an dernier, la GRC reçoit des centaines de signalements liés à Pornhub par l'intermédiaire du National Center for Missing and Exploited Children. Bien entendu, je ne souhaite pas obtenir de précisions sur l'enquête, s'il y en a une, mais pourriez-vous me dire quel est le processus suivi par la GRC quand elle reçoit ces signalements?

  (1225)  

    Évidemment le [Difficultés techniques] travail par l'intermédiaire du Centre national contre l'exploitation d'enfants ou CNCEE de la GRC. Quand il reçoit ces signalements, comme c'est aussi le cas à l'international avec le National Crime Information Center des États-Unis, nous veillons à les transférer à un organisme canadien d'application de la loi. Souvent, si nous le pouvons, nous montons un dossier d'enquête et le remettons à nos organismes. Une fois le dossier en main, ils peuvent lancer une enquête.
    Nous avons entendu de nombreux députés s'exprimer à ce sujet. Il y a évidemment des questions relatives aux compétences des États. S'agit-il d'une entreprise canadienne soumise aux lois canadiennes?
    À votre avis, pouvons-nous faire quelque chose pour rendre les choses plus claires afin que ces enquêtes puissent avoir lieu? Évidemment, nous avons entendu dire qu'il existe de nombreux éléments de preuves, mais aucune enquête n'a été lancée.
    C'est une question très compliquée parce que, comme vous le savez, l'application des lois pénales nationales et des limites territoriales [Difficultés techniques] la question de la compétence pose un problème compte tenu du caractère mondial d'Internet, qui n'est pas limité par les frontières traditionnelles. Le droit des conflits internationaux est un domaine fort complexe. Il est très difficile pour la GRC de surveiller la situation et de vérifier la conformité à la Loi concernant la déclaration obligatoire, en particulier dans les cas où les entreprises ont une structure internationale complexe et où les données sont stockées dans plusieurs pays. Ces services passent par Internet et transcendent les frontières internationales.
    Cependant, dans ces cas, le fait d'avoir établi des partenariats solides à l'échelle internationale, notamment avec le Virtual Global Taskforce, nous permet d'échanger des renseignements et des données. Nous pouvons tirer le meilleur parti de ces relations et éliminer, pour ainsi dire, certaines de ces frontières, car nous devons nous assurer que ces activités sont conformes à notre protocole.
    Merci beaucoup.
    Je voulais vous laisser le temps d'obtenir une réponse à votre question.
    Merci.
    Merci, monsieur Dong.
    Nous allons maintenant passer à Mme Gaudreau qui aura la parole pendant les deux prochaines minutes et demie.

[Français]

     Bonjour, madame la commissaire.
    Il y a eu une augmentation des demandes d'aide. On parle d'environ 100 000 demandes. Malgré toutes les difficultés liées aux enquêtes, avons-nous accès à des statistiques?
     En 2019, combien d'enquêtes y a-t-il eu à la suite de demandes d'aide? Avez-vous un chiffre?

[Traduction]

    En 2019, 11 376 dossiers d'enquête ont été envoyés aux organismes d'application de la loi compétents au Canada et à l'étranger. De plus, environ 63 000 signalements ont été transmis surtout aux organismes d'application de la loi étrangers, à titre de pistes d'enquête. Les services de police compétents au Canada ou, en fait, les services d'application de la loi internationaux ne sont pas véritablement forcés de prévenir la GRC qu'ils ont ouvert ou non une enquête après avoir reçu les dossiers d'enquête que nous leur transmettons. Toutefois, grâce à nos partenariats avec le CNCEE, nous savons que de nombreux dossiers ont abouti à des résultats positifs.

  (1230)  

[Français]

     Merci beaucoup.
    Compte tenu de vos limites en ce qui concerne l'application de la loi et du contexte international, est-ce qu'on peut créer une structure, voire augmenter les pouvoirs, pour nous assurer de freiner ce fléau, qui évolue beaucoup plus vite que le système législatif dans lequel nous vivons?
    Il a été question d'augmenter le financement. Étant donné l'augmentation du nombre de signalements et d'enquêtes possibles, avez-vous d'autres besoins, par exemple en matière de ressources financières?
    De quoi avez-vous besoin? Nous voulons indiquer ces besoins dans le rapport, ne serait-ce que pour établir un modèle international pour aider au conflit lié à la protection des renseignements personnels.
    Je vous remercie de votre question.

[Traduction]

    Il s'agit là d'une excellente question. Évidemment, nous examinons plusieurs éléments. Tout d'abord, nous nous penchons sur les lois. Il y a la Loi concernant la déclaration obligatoire, dont le ministre Lametti a parlé. Nous devons étudier la conformité prévue par cette loi, et elle doit s'appliquer à tous les fournisseurs de services. Bien entendu, il serait très utile de disposer de renseignements de base sur les abonnés à cet égard, car cela nous permettrait de réagir de manière plus rapide et complète. Des ressources accrues ne peuvent jamais nuire. Je ne les refuserais donc jamais.
    Nous devons également tenir compte de la technologie. Par exemple, je crois que vous avez parlé plus tôt du projet Arachnid, lequel fait appel à la technologie. Elle s'applique aux enfants, mais nous devrions aussi utiliser une technologie semblable pour les adultes, un outil qui peut parcourir Internet et retirer plusieurs images. Même si nous identifions un fournisseur de services, comme Facebook, Twitter ou Pornhub, l'image est téléchargée sur d'autres plateformes. Elle est reproduite de façon exponentielle. La seule façon de se débarrasser de tout cela, c'est d'avoir une technologie qui parcoure et fouille Internet.
    De toute évidence, il faut que la déclaration des méfaits en ligne soit obligatoire. Nous avons besoin de mesures, comme celles dont le ministre a parlé, afin de préserver les preuves et de faire retirer le contenu rapidement, comme l'a dit le ministre. Toutes ces mesures sont très importantes.
    Nous devons toujours discuter avec nos partenaires internationaux. Il est intéressant que vous disiez cela, car lorsque je parle avec nos partenaires du Groupe des cinq, nous discutons évidemment de questions de sécurité nationale. Nous parlons donc de terrorisme, mais nous discutons aussi fréquemment de l'exploitation des enfants. C'est une industrie en pleine expansion. L'une des statistiques qui me choquent, c'est le fait qu'entre le début du Projet Arachnid, qui permet de parcourir la toile et de retirer des images, ou de demander que des images soient retirées, et le 1er avril de l'année en cours, plus de 6,9 millions de demandes de retrait ont été envoyées aux plateformes [Difficultés techniques]. Ce chiffre est incroyablement élevé.
    Merci, madame la commissaire.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Angus, afin qu'il pose la prochaine série de questions.
    Monsieur Angus, veuillez prendre la parole.
    Je vous remercie infiniment, madame Lucki, de vous être jointe à nous aujourd'hui. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    J'ai sous les yeux la note d'information qui vous a été remise le 10 décembre 2020. Elle porte sur l'article du New York Times intitulé « Les enfants de Pornhub ». La note est intéressante parce que vous avez parlé de partenariats solides, mais voilà le passage qui m'a vraiment frappé en lisant la note: « La GRC s'efforce de maintenir des partenariats avec des entreprises privées » — dans le cas présent, nous parlons de Pornhub et MindGeek — « dans la mesure où ceux-ci sont efficaces et soutiennent la conformité volontaire des entreprises à leurs propres conditions d'utilisation.
    Je me demande pourquoi, lorsqu'il est question de savoir si des actes criminels ont été commis ou non, la GRC cherche à appuyer la conformité volontaire et les conditions d'utilisation qui sont affichées par les entreprises sur leur site Web, plutôt qu'à faire observer les lois canadiennes.
    Il s'agit d'adopter une combinaison d'approches, car il y a l'aspect juridique et l'aspect réglementaire. Bien sûr, nous ne nous occupons pas de l'aspect réglementaire.
    Soyons réalistes. Si nous parvenons à convaincre les entreprises de se conformer volontairement à la réglementation, nous serons alors bien plus avancés. Je sais que nous travaillons avec les entreprises, notamment par l'intermédiaire du CNCEE. Nous mettons en commun des pratiques exemplaires avec d'autres entreprises qui font manifestement bien les choses ou qui prennent de meilleures mesures. Nous discutons des mécanismes de signalement. Nous assurons en premier lieu la sensibilisation à la Loi concernant la déclaration obligatoire, parce que bon nombre de ces entreprises ne sont pas au courant de l'existence de cette loi. Il s'agit d'une combinaison de...
     Merci.
    Je suppose que ce qui nous a choqués, nous les membres du Comité, c'est d'apprendre que les entreprises n'avaient en fait jamais respecté la Loi concernant la déclaration obligatoire ou présenté quoi que ce soit pour honorer leurs obligations en vertu de cette loi.
    Je soulève la question — et je sais que vous ne pouvez pas aborder des cas particuliers — parce que je veux parler d'une survivante qui a communiqué avec nous, une personne adulte qui a survécu à la violence non consensuelle, étant donné que nous discutons des enfants. Elle a eu de nombreuses conversations avec la GRC, et elle les a consignées. Lors d'un appel téléphonique avec la GRC qui a eu lieu le 6 avril, on lui a dit que Pornhub ne pouvait pas être accusé parce que l'entreprise bénéficiait d'une dérogation générale. La survivante a demandé à l'agent s'il faisait allusion aux conditions de service, et l'agent a répondu par l'affirmative, en indiquant que les conditions de service stipulent qu'ils n'assument pas de responsabilités et que ce sont les utilisateurs qui sont responsables du contenu. Il s'agit d'une personne qui a survécu à une agression sexuelle non consensuelle.
    Je sais que vous ne pouvez pas parler des détails, mais vos notes d'information indiquent que les conditions d'utilisation ont été distinguées comme un facteur, et c'est ce qu'un agent de police a dit à une survivante pour lui expliquer les raisons pour lesquelles elle ne peut pas signaler son cas. Pourquoi est-ce ainsi?

  (1235)  

    Je ne laisserais jamais entendre à un service de police qu'un survivant ne devrait pas signaler son cas. Il doit absolument s'adresser à la police dont il relève et signaler son cas afin qu'il soit examiné et fasse l'objet d'une enquête. C'est très important. Il est évident que le signalement est important pour les entreprises, mais il est également important que les survivants se manifestent afin que nous puissions suivre les pistes et nous assurer que l'enquête est bien menée.
    Le problème, c'est que la GRC...
    Merci, monsieur Angus. Votre temps de parole est malheureusement écoulé. Je voulais vous donner l'occasion d'obtenir une réponse. C'est la raison pour laquelle j'ai prolongé votre temps de parole.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Viersen, qui posera la prochaine série de questions.
    Monsieur Viersen, vous avez la parole pendant cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens aussi à remercier la commissaire de sa présence aujourd'hui.
    Je vais probablement m'en tenir à des questions dans la même veine que celles de M. Angus. MindGeek semble employer près de mille travailleurs au Canada. Si je suis témoin d'une exploitation sexuelle ici, au Canada, quelle qu'en soit l'origine, n'ai-je pas le devoir de la signaler?
    Oui, mais MindGeek... L'entreprise MindGeek en tant que telle n'est pas entièrement mêlée à... Pornhub n'est qu'une filiale, et MindGeek possède de nombreuses autres filiales. Je n'en suis pas certaine, mais il se peut qu'un grand nombre de ces employés ne soient même pas au courant de tout cela.
    D'accord. Toutefois, si vous travaillez dans un immeuble à bureaux au Canada et que vous tombez sur un cas d'exploitation sexuelle d'enfants, n'avez-vous pas le devoir de le signaler, quelle que soit son origine?
    Oui. Tout citoyen du Canada ou toute personne n'importe où devrait le signaler, pas seulement les employés. Vous avez absolument raison.
    Les documents de la GRC montrent qu'ils se sont rencontrés au moyen de MindGeek en 2018, et MindGeek a déclaré à ce moment-là qu'ils n'avaient pas besoin de signaler le cas aux forces de l'ordre canadiennes parce que l'entreprise n'était pas canadienne. Pouvez-vous confirmer cela?
    Oui. Lorsque nous avons eu cette discussion avec MindGeek en 2018, ils ont demandé un soutien relativement à un logiciel qui aide à détecter automatiquement des documents liés à l'exploitation sexuelle en ligne, et le CNCEE les a dirigés vers un tiers, afin qu'ils puissent avoir accès à ce type de logiciel.
    De plus, à l'époque, la question de la loi concernant la déclaration obligatoire a été soulevée, et ils ont dit qu'elle ne s'appliquait pas à eux parce que l'entreprise n'était pas canadienne, bien que cela ne veuille pas dire qu'ils ne signalaient pas les cas. En fait, ils les signalaient par l'intermédiaire des États-Unis. Ensuite, les États-Unis nous fournissaient ces informations, et nous leur avons demandé, par l'intermédiaire de MindGeek, de nous faire parvenir un rapport mensuel des cas que l'entreprise signale aux États-Unis.
    C'est une manière non traditionnelle de procéder, mais l'essentiel, c'est que nous recevions les signalements.
    D'accord, mais toute cette histoire de compétence me laisse toujours perplexe. Pourquoi ne signaleraient-ils pas les cas au Canada?
    Ils croient que leurs serveurs, ceux qui sont assujettis à la loi... Ils signalent les cas par l'intermédiaire du NCMEC qui exerce ses activités aux États-Unis. Je ne peux pas parler de cette législation particulière. Cependant, il y a les articles 2 et 3 de la loi concernant la déclaration obligatoire.
     Je dispose d'un expert en la matière, M. André Boileau, qui peut vous donner une réponse plus complète. Il est plus compétent que moi en ce qui concerne les articles qui s'appliquent.

  (1240)  

    Compte tenu de la structure de MindGeek, la question de savoir si l'entreprise est entièrement canadienne ou non n'est pas claire pour l'instant. Le CNCEE a communiqué à quelques reprises tant avec le NCMEC des États-Unis qu'avec l'entreprise. Pour éviter la duplication des signalements, nous avons été en mesure d'obtenir des sommaires mensuels. Ils nous aident à évaluer les signalements qui nous parviennent, afin que nous puissions les traiter très rapidement.
    Madame la commissaire, avez-vous lu la lettre que plus de 78 députés et sénateurs ont envoyée à la GRC?
    Oui, je l'ai lue, et nous avons une réponse à leur donner. Je m'excuse du retard à cet égard. Il ne s'agit pas de la réponse d'une page que vous recevez habituellement. Je pense qu'elle compte presque sept ou huit pages. Nous l'avions mise au point, et elle était prête à être envoyée la semaine dernière, jusqu'à ce que nous nous rendions compte qu'elle devait être traduite. Le Comité recevra une réponse à cette lettre aujourd'hui. Nous pourrions la retarder légèrement s'il y a d'autres questions en suspens à la suite de notre comparution devant le Comité. Nous ajouterons ces réponses au document.
    D'accord.
    Il vous reste environ 15 secondes.
    Je vais céder ce temps de parole. Merci.
    Merci.
    Pour la prochaine série de questions, nous allons donner la parole à Mme Shanahan.
    Vous avez la parole pendant cinq minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie la commissaire, Mme Lucki, d'être avec nous aujourd'hui.
    J'ai vraiment écouté avec intérêt tous les témoignages que nous avons eus aujourd'hui. Il est important de souligner encore une fois que cette étude a suscité beaucoup d'intérêt dans la population, ce qui nous a d'ailleurs beaucoup aidés à lutter contre l'exploitation juvénile sur Internet.
    J'aimerais remercier tous mes collègues qui sont présents aujourd'hui.
    Je remercie particulièrement MM. Dong et Erskine-Smith d'avoir présenté la motion en premier lieu au Comité.

[Traduction]

    Cela dit, nous devons joindre le geste à la parole. Voilà ce qui préoccupe tous mes collègues ici présents. J'ai entendu les ministres et la commissaire Lucki évoquer les défis de l'application de la loi et les ressources dont ils ont besoin. Nous pouvons comprendre que, compte tenu de l'évolution constante de la technologie, la difficulté de repérer la pornographie juvénile en ligne et d'enquêter sur elle est énorme.
    Le gouvernement a recommandé un financement de plus de 35 millions de dollars dans le Budget supplémentaire des dépenses et dans le Budget principal des dépenses, et l'opposition officielle a voté contre ce financement. Elle a voté contre ce soutien supplémentaire accordé aux services de police fédéraux. Ce qui me choque encore plus, c'est que lorsque d'autres affectations particulières ont été faites dans le Budget principal des dépenses de 2021, notamment 6,3 millions de dollars pour la Stratégie nationale de lutte contre la traite des personnes, 4,4 millions de dollars pour la stratégie nationale sur la cybersécurité et 4,2 millions de dollars pour la protection des enfants contre l'exploitation sexuelle en ligne — c'est-à-dire exactement ce dont nous parlons en ce moment —, les conservateurs, donc l'opposition officielle, ont voté contre.
    Soit dit en passant, puisque nous parlons de l'importance que la GRC et les services de police fédéraux revêtent dans ce domaine, au cours du congrès du NPD, qui s'est déroulé le week-end dernier, une motion visant à annuler complètement le financement de la GRC a été présentée.
    Je pense que mes collègues sont d'accord...
    J'invoque le Règlement. Nous parlons de viol d'enfant en ce moment. Si la députée veut faire valoir les actions exceptionnelles des libéraux, elle peut le faire ailleurs. Nous avons seulement quelques minutes pour obtenir des réponses concernant l'application des lois nationales. Si elle a des arguments ridicules à faire valoir, elle peut le faire ailleurs.
    Je ne crois pas qu'il s'agisse d'un rappel au Règlement, mais je pense que, dans un effort pour ramener les choses à l'ordre, Mme Shanahan va probablement prendre note de cette préoccupation.

  (1245)  

    Je vais récupérer mon temps, monsieur le président, parce que...
    Madame Shanahan, il vous reste environ deux minutes.
    Très bien, car j'ai effectivement des questions importantes à poser à la commissaire, étant donné que je suis frappée par les défis incroyables que nous devons relever pour repérer la pornographie juvénile et enquêter sur elle dans cet univers cybernétique incroyablement complexe, qui ressemble à bien des égards au Far West.
    Madame la commissaire, pouvez-vous nous parler du genre de travail que vous réalisez? Nous avons entendu dire plus tôt que la GRC préside le Virtual Global Taskforce. Pouvez-vous nous parler de ce travail et des initiatives qui sont entreprises en ce moment?
    Bien que les responsables de l'application de la loi doivent faire face à de nombreux défis dans leur lutte contre ce crime, nous avons réalisé d'importants progrès. En 2019, par exemple, 100 000 signalements ont été reçus et 362 victimes canadiennes ont été identifiées. Leur dossier a été versé dans la base de données de l'exploitation sexuelle d'enfants d'INTERPOL, ce qui représente une augmentation de 32 % par rapport à l'année précédente.
    Nous avons aussi élaboré et mis en œuvre un nouveau système de gestion des dossiers plus efficace, tout cela grâce au financement émanant du budget de 2018 et du budget de 2019-2020. Le système vise précisément les enquêtes sur l'exploitation sexuelle d'enfants en ligne, en vue d'accroître les capacités d'analyses, qui sont très importantes.
    Comme vous l'avez dit, nous avons réalisé une étude mondiale sur la santé et le bien-être dans le cadre d'un partenariat avec le Groupe de travail virtuel international. Je ne saurais top insister sur les effets négatifs associés au visionnement de ces images au quotidien pour ceux qui font ce genre de travail. L'étude était très importante.
    Il y a aussi une alliance policière internationale qui se consacre à la protection des enfants. C'est ce qui se passe avec la présidence du Groupe de travail virtuel international. L'échange de renseignements et de données est associé à la sensibilisation et à l'éducation.
    Nous travaillons aussi avec nos partenaires nationaux et internationaux pour veiller à ce que tous les citoyens soient informés le plus possible, parce qu'il n'est pas seulement question des victimes ou des survivants, mais aussi des signalements et de l'échange de renseignements. Il est également question des gens qui... [Difficultés techniques].
    Le Centre canadien de la protection de l'enfance, ou le CCPE, est le partenaire de notre stratégie nationale. Il a élaboré plusieurs ressources à l'intention des enfants, des parents, des policiers et des membres de la collectivité, pour les former.
    L'information, c'est le pouvoir. Je ne saurais trop insister là-dessus, parce qu'il faut que les gens qui sont témoins de certaines situations les dénoncent. C'est le meilleur moyen pour lutter contre ce fléau.
    Merci, madame la commissaire.
    La parole est maintenant à M. Carrie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame la commissaire, j'aimerais revenir sur un point qui a été soulevé par les ministres et par vous, sur le plan international.
    J'ai eu l'honneur de participer à une table ronde à Oshawa, et j'aimerais remercier l'unité policière de lutte contre la traite de personnes de Durham à cet égard. Nous avons entendu des représentants du FBI et du Texas. J'ai appris qu'aux États-Unis, ces infractions ou les infractions relatives à la traite de personne sont associées à une peine minimale obligatoire de 10 ans par victime.
    Lorsque les libéraux ont eu l'occasion de faire quelque chose, ils ont adopté le projet de loi C-75, qui faisait de la traite de personnes une infraction mixte entraînant une peine d'emprisonnement de moins de deux ans ou une amende de 5 000 $.
    Ma question est la suivante: à votre avis, quel serait le meilleur moyen pour dissuader les gens de pratiquer ce genre d'activités au Canada? Si je veux utiliser ces images d'exploitation sur Internet ou passer par Internet pour faire la traite de personne, quel serait le meilleur moyen de me dissuader de le faire au Canada par rapport aux États-Unis? La peine minimale obligatoire de 10 ans ou la possibilité de devoir payer une amende de 5 000 $? Je pose la question parce que mes sources me disent que les commerçants d'esclaves peuvent faire de 250 000 à 300 000 $ par victime. Où se trouve le meilleur endroit pour faire des affaires?

  (1250)  

    Monsieur Carrie, il est très difficile de répondre à cette question. Je demanderais à mes collègues du ministère de la Justice de le faire. Je crois que Robert Brookfield et Normand Wong participent aussi à la réunion. Ils seraient mieux placés que moi pour répondre à la question.
    Vous ne pouvez peut-être pas y répondre, mais je crois qu'il est évident, pour tous ceux qui nous regardent, que lorsque nous avons eu l'occasion de resserrer la vis aux auteurs de ces crimes, nous avons en fait rendu les peines moins sévères.
    Lorsque ma collègue du Bloc vous a demandé combien d'enquêtes vous aviez réalisées depuis 2019 — depuis le changement instauré par les libéraux —, vous avez évoqué certaines statistiques. Vous avez été très occupés, et je comprends les chiffres. Vous avez réalisé des milliers d'enquêtes, mais combien d'accusations avez-vous portées depuis 2019, depuis l'entrée en vigueur du projet de loi C-75?
    Je n'ai pas les chiffres précis depuis l'entrée en vigueur du projet de loi C-75. Il faudrait que j'obtienne... [Difficultés techniques]... les chiffres pour ce qui relève de la compétence de la GRC, et non de l'ensemble du Canada, ce qui ne vous rendrait pas service, parce que bon nombre des régions que nous couvrons sont éloignées des grands centres urbains, où ont principalement lieu ces activités.
    Tout à fait. Merci beaucoup, commissaire Lucki.
    Si l'on regarde la situation actuelle... Je viens d'Oshawa, une ville située dans le corridor de l'autoroute 401. Nous connaissons une augmentation de ce type d'activités, ce qui est troublant pour tous les intervenants qui participent à cette étude. Je me demandais si vous pouviez nous donner le nombre d'accusations qui ont été portées par la GRC, en premier lieu, mais aussi le nombre... [Difficultés techniques]... administration.
    Je sais que le gouvernement avait de la difficulté avec la nomination des juges aux tribunaux fédéraux pendant un certain temps. Lorsqu'on a fait de la traite des personnes une infraction mixte, il a été décevant de constater que ces infractions punissables par voie de mise en accusation, qui étaient à l'origine associées à des sanctions importantes pour les auteurs, étaient relayées aux cours provinciales.
    Pourriez-vous nous dire dans quelle mesure les tribunaux fédéraux sont occupés avec les poursuites associées à ces types de crimes? Y a-t-il une longue période d'attente entre le moment où sont portées les accusations et le moment où les victimes doivent témoigner en cour contre les auteurs de ces crimes et être à nouveau victimisées?
    Il vous reste environ 30 secondes, mais je vais laisser le temps à la commissaire de répondre à la question.
    J'aimerais pouvoir y répondre, mais la COVID a contribué aux retards dans les procédures judiciaires. Je ne peux vous donner de réponse précise. Il n'y a pas de distinction entre le provincial et le fédéral en ce qui a trait au dépôt d'accusations en vertu du Code criminel. L'affaire est entendue par un tribunal, tout simplement. Je n'ai évidemment pas ces chiffres précis à ce sujet ni au sujet des retards.
    Je vous remercie pour votre témoignage. J'aimerais que vous nous transmettiez certains de ces chiffres, si possible.
    Merci, monsieur Carrie.
    Nous allons... [Difficultés techniques].
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour à tous.
    Commissaire Lucki, je vous remercie pour votre témoignage et pour vos commentaires jusqu'à maintenant. J'ai eu la chance de grandir dans une petite ville de la Colombie-Britannique où se trouvait un détachement de la GRC, à Prince Rupert. Je me souviens avoir eu la visite d'agents de la GRC à mon école secondaire, pour les bonnes raisons, bien sûr: à des fins d'éducation, entre autres. Je tiens donc à remercier tous les agents de la GRC. Ici, en Ontario, nous ne voyons peut-être pas les agents de la GRC au quotidien, mais je les voyais lorsque j'étais enfant et je tiens à les remercier.
    En ce qui a trait à la réponse qui a été donnée, la lettre du 22 février 2021 se voulait une réponse à la question de mon collègue M. Dong au sujet de... [Difficultés techniques]... M. Stephen White, une lettre de trois pages que j'ai trouvée très utile, qui présentait un excellent résumé des responsabilités de la GRC dans le domaine de compétence visé par l'étude.
    Puisque le Comité devra rédiger un rapport et présenter des recommandations, j'aimerais attirer votre attention à la page 3, aux demandes et recommandations de la GRC en vue d'améliorer la loi... Je vais lire le passage. Au deuxième paragraphe de la page, on peut lire ceci:
Parmi les recommandations proposées par la GRC se trouve la modification du règlement de la loi concernant la déclaration obligatoire afin de faire du Centre national contre l'exploitation des enfants l'organisme désigné pour les notifications en vertu de l'article 3 (Avis obligatoire à un policier). Ce changement permettra une meilleure harmonisation des activités en matière de déclaration et rendra la normalisation possible. La GRC comprend que le changement demandé, parmi d'autres, fait maintenant l'objet d'un examen par le ministère de la Justice.
    Pouvez-vous nous expliquer comment ce changement renforcerait les capacités d'enquête et de poursuite de la GRC dans les cas d'exploitation d'enfants?

  (1255)  

    C'est une excellente question.
    Je demanderais à mon collègue, André Boileau, d'y répondre.
    Merci.
    Pour répondre à votre question, les capacités de la GRC seraient accrues, parce qu'à l'heure actuelle, l'article 3 de la loi concernant la déclaration obligatoire prévoit que les sociétés canadiennes fassent leurs déclarations aux divers organismes d'application de la loi du pays... les policiers. Il n'y a pas d'indication précise sur l'organisme avec lequel elles doivent communiquer, contrairement à l'article 2, qui désigne le Centre canadien de protection de l'enfance à titre d'entité à contacter.
    En nommant le Centre national contre l'exploitation des enfants à l'article 3, on pourrait veiller à ce que tous les renseignements passent par nous — toutes les déclarations — afin que nous puissions éliminer les chevauchements ou les conflits pour ensuite diffuser l'information très rapidement au service de police compétent.
    Merci, monsieur Boileau. Je vais certainement lire votre réponse dans les bleus pour m'assurer de bien la comprendre, puisque je ne suis pas avocat de formation, mais je vous remercie pour votre explication.
    Le Centre national contre l'exploitation des enfants assure actuellement la présidence du Groupe de travail virtuel international, au nom de la GRC. J'aimerais que vous me répondiez bien franchement: quelle est la place du Canada au sein du Groupe de travail virtuel international?
    C'est une autre très bonne question.
    Je ne saurais top insister sur l'importance du leadership de la GRC, de façon générale, à de nombreux égards. Nous sommes le ciment qui unit tous les services de police. Nous sommes le dépôt national des renseignements. Comme nous sommes responsables de ces renseignements et que nous les partageons, c'est signe que nos lois sont en avance sur celles des autres pays. C'est pourquoi il est important pour nous d'être au premier plan de ce groupe de travail mondial.
    Le groupe de travail est utile à de nombreux égards, pas seulement sur le plan national, et il nous permet d'échanger les meilleures pratiques et de connaître les mesures utilisées par les autres pays pour lutter contre ce crime. Il est aussi très utile de partager les renseignements et les données. Je suis très fière de voir que le Canada est un chef de file à cet égard.
    Merci.
    Monsieur le président, combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste environ 20 secondes.
    Sur ce, j'aimerais simplement remercier la commissaire et aussi M. Boileau. Je suis désolé, monsieur Boileau, mais je n'ai pas votre titre sous les yeux. Je vous remercie pour vos réponses. Je souhaite à tous un excellent travail.
    Je remercie également les membres du Centre national contre l'exploitation des enfants. Merci pour ce que vous faites.
    Je sais que nous n'avons abordé qu'une très petite partie de la question de l'exploitation des enfants. J'ai été bouleversé par ce que j'ai entendu et j'ai serré mes filles très fort dans mes bras lorsque je suis rentré à la maison.
    Je tiens à remercier les personnes qui font ce travail, pour leur professionnalisme et leur dévouement à leur service.
    Je vais leur transmettre vos commentaires. Merci.
    Merci.
    Merci, monsieur Sorbara.
    Nous allons entendre deux derniers intervenants.
    Madame Gaudreau, vous disposez de deux minutes et demie.

[Français]

     Bonjour, madame Lucki.
    J'aimerais avoir un peu plus d'information sur le Groupe des cinq. On a parlé du fait que le Canada est devenu un leader. J'ai une préoccupation: notre modèle législatif sert à pérenniser les structures. Pourtant, la nécessité de réagir évolue tellement rapidement. Je vous ai bien entendu tantôt quant à l'augmentation des besoins en ressources.
    Qui siège au Groupe des cinq? Quel est le rôle précis du groupe?
    Rassurez-moi et rassurez les victimes pour lesquelles nous sommes en train de réfléchir à l'adoption de lois internationales qui pourraient aider à enrayer le problème. Si vous nous dites que nous sommes un leader, j'aimerais vous entendre sur le sujet.

  (1300)  

[Traduction]

    Les pays qui forment le Groupe des cinq sont l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni, les États-Unis et nous. Il est important de travailler ensemble et surtout d'échanger les renseignements et les données, mais aussi d'investir dans les solutions technologiques et de les développer. Certains de ces pays travaillent au développement de telles solutions, que nous pourrons utiliser.
    Nous sommes aussi des chefs de file en ce qui a trait à la lutte contre l'exploitation des enfants et à... [Difficultés techniques], la technologie est la première en son genre, et ce qu'a fait le groupe des Phoenix, par exemple, est incroyable. Pour ce qui est des sociétés, nous aimons travailler avec les principes volontaires pour lutter contre l'exploitation sexuelle des enfants, qui ont été élaborés par les gouvernements du Groupe des cinq à la suite de consultations avec un large éventail d'intervenants, notamment un groupe de représentants de l'industrie. Ces principes visent à présenter un cadre uniforme de haut niveau permettant aux intervenants de l'industrie d'examiner les processus en matière de sécurité et de répondre aux risques que courent les utilisateurs. Les échanges sont très utiles et visent à mettre un terme à ces actes odieux.
    Merci, madame la commissaire. Nous avons un...

[Français]

     Cela perdure-t-il dans le temps, est-ce toujours le même groupe?

[Traduction]

    Merci, madame Gaudreau.
    Nous allons entendre M. Angus, qui sera notre dernier intervenant ce matin.
    Merci beaucoup.
    Madame Lucki, le rapport à la commissaire prévoit des recommandations, mais elles ne s'y trouvent pas. Je pensais qu'elles avaient été effacées, mais d'après le témoignage du ministre de la Justice et le vôtre, je crois comprendre qu'il n'y a peut-être pas de recommandations.
    Pourriez-vous nous fournir les recommandations qui étaient faites dans ce rapport?
    Je regarde le...
    Les recommandations ont été caviardées dans notre version. Si vous pouviez nous les transmettre, nous pourrions nous en servir aux fins de notre travail.
    Certaines de ces recommandations sont des renseignements confidentiels du Cabinet, en raison de la présentation d'un mémoire au Cabinet, mais nous discutons avec les représentants du ministère de la Justice de la loi concernant la déclaration obligatoire et des façons de la renforcer.
    Très bien, mais j'ai très peu de temps. Je vous demande simplement si vous pouvez nous les transmettre. Cela simplifierait les choses.
    Nous pouvons ajouter une petite section dans cette lettre.
    Je vous en remercie.
    Madame Lucki, les survivantes répètent sans cesse qu'on ne les croit pas. Je veux que cela figure au compte rendu, car comme vous l'avez indiqué, les représentants de Pornhub vous ont dit, dans vos discussions avec eux en 2018, qu'ils considéraient que les règles ne s'appliquaient pas, puis on a laissé Pornhub agir de manière détournée. Je ne vois dans le Code criminel aucune disposition autorisant les entreprises faisant l'objet d'une enquête à contourner les règles.
    Je m'occupe d'une survivante qui a appelé la GRC concernant une relation non consensuelle... une vidéo d'agression sexuelle. Ils lui ont demandé: « Comment est-ce que Pornhub peut savoir que c'était un acte illégal? » Voilà ce qu'on lui a dit le 6 avril. Le 23 mai, ils ont dit: « On trouve beaucoup de viols sur ce site et parfois, ce ne sont que des mises en scène. Donc, comment Pornhub est-elle censée savoir que cette survivante ne joue pas un rôle? Comment pourrait-elle prouver qu'elle n'était pas consentante? »
    La GRC lui a ensuite demandé comment elle pouvait prouver que Pornhub avait sciemment publié quelque chose d'illégal. Ils lui ont ensuite demandé comment elle savait que Pornhub savait ce qui était téléchargé. Comment pouvait-elle savoir que l'entreprise avait visionné la vidéo avant sa publication? La GRC a indiqué que c'était le cas, mais dans le reportage de W5, on apprend qu'il n'y avait pas assez de modérateurs pour faire le travail correctement, de sorte qu'ils ignoraient peut-être que ce n'était pas consensuel, parce qu'ils n'avaient pas assez d'effectifs pour surveiller le site.
    Voilà le genre de questions que l'on pose sans cesse à une survivante. Le 6 avril, la GRC lui a écrit pour l'informer que si elle veut porter plainte concernant les agissements de Pornhub, elle doit contacter la police de l'endroit où l'entreprise se trouve.
    La GRC est le corps policier de la province où habite cette femme. On lui dit que Pornhub n'est pas une entreprise canadienne. Pouvez-vous dire à cette survivante à qui elle doit s'adresser pour porter plainte contre Pornhub?

  (1305)  

    La revictimisation des survivantes est totalement inacceptable. C'est absolument inacceptable. Les victimes d'exploitation d'enfants en ligne devraient vraiment porter plainte auprès de leur organisme local d'application de la loi.
    Elle l'a fait.
    C'est malheureux. Je suis sans mots...
    Savez-vous où elle pourrait porter plainte? La GRC lui a dit qu'elle devait contacter la police de l'endroit où se trouve Pornhub.
    Je vois; ce n'est pas un...
    Dans les conditions de service de Pornhub, on mentionne Chypre. Ils sont basés à...
    Non, ce n'est pas une réponse acceptable. Nous devons nous améliorer.
    Nous avons aussi la ligne Cyberaide. Donc, nous devons nous améliorer pour que les survivantes ne soient pas revictimisées chaque fois qu'elles veulent porter plainte. Cela m'attriste d'entendre cela. Ce n'est tout simplement pas acceptable.
    Merci.
    Merci, monsieur Angus.
    Merci, madame la commissaire.
    Je remercie tous les fonctionnaires accompagnateurs qui ont aussi participé à la réunion cet après-midi. Je suis en Alberta, et je n'arrête pas de dire que [Difficultés techniques] c'est l'après-midi. Quoi qu'il en soit, je vous remercie de votre présence.
    Chers collègues, nous allons suspendre la séance brièvement afin de permettre aux témoins des deux premières heures de se déconnecter et au légiste et conseiller parlementaire de se connecter.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    J'aimerais avoir une précision, en fait. Je reçois beaucoup de courrier d'organismes de partout au pays qui craignent que nous [Difficultés techniques]. Lorsque j'ai proposé cette étude, je ne m'attendais pas à ce que nous recevions tant de renseignements et de témoignages. Je sais que mon collègue libéral a proposé d'entendre des travailleuses du sexe ou un groupe de défense des travailleuses du sexe, comme Stella, qui a exprimé le souhait de comparaître, une occasion qui leur a été refusée.
    Pouvez-vous nous dire combien de témoins il nous reste et pourquoi, exactement, nous nous opposons à ce que les gens de Stella viennent témoigner?
    Merci, monsieur Dong.
    Le Comité n'a pas encore choisi les futurs témoins. Nous examinerons certainement la question et nous déciderons à ce moment-là. Je demanderai aux membres du Comité de déterminer combien de temps encore nous pouvons consacrer aux témoins ou aux personnes qui pensent pouvoir contribuer à cette étude.
    Le Comité se doit de fournir des précisions aux gens qui suivent son étude. Je pense que nous examinerons la liste des témoins potentiels un moment donné, lorsque nous aurons l'occasion de traiter des travaux futurs.
    Je rappelle à toutes les personnes qui pensent pouvoir contribuer à ces délibérations que même si les membres du Comité ne sont pas tous nécessairement d'accord pour accueillir tous les témoins qui manifestent leur intérêt en ce sens, le Comité a décidé d'accepter toute correspondance de ceux qui ont quelque chose à apporter, et que ce sera inclus dans les témoignages. Les membres du Comité en ont décidé ainsi il y a quelque temps.
    Par conséquent, même si toutes les personnes qui pensent pouvoir contribuer n'auront pas l'occasion de comparaître dans un cadre comme celui de la réunion d'aujourd'hui, le Comité a décidé d'accepter tous les témoignages écrits, exactement comme s'ils avaient témoigné en personne, avec les mêmes dispositions relatives à la confidentialité, si demandé ou au privilège parlementaire. Ces choses seront incluses. C'est une décision qui a été prise par les membres du Comité il y a quelque temps.
    Je suis certain que nous aurons l'occasion d'entendre d'autres témoins. Je ne suis pas sûr que quelqu'un [Difficultés techniques] rejeté, monsieur Dong.
    Très bien.
    Toute décision du Comité à cet égard, le cas échéant, sera communiquée. Toutefois, à ma connaissance, aucun mémoire ou aucune demande n'a été rejeté jusqu'à maintenant.
    Merci beaucoup.
    Cela nous permettra d'avoir une étude exhaustive, ce qui est très important. Je pense qu'il sera utile, pour les membres du Comité, de les entendre.
    Merci.
    Nous en aurons l'occasion, j'en suis certain...
    Excusez-moi; j'invoque le Règlement.

  (1310)  

    J'invoque le Règlement.
    La parole est à M. Angus, suivi de Mme Shanahan.
    Allez-y, monsieur Angus.
    Merci.
    Pour ce qui est du fonctionnement, nous avons eu une réunion, et nous n'avons pas l'habitude de discuter des témoins en public, mais lors de la réunion de planification. Ensuite, nous les convoquons. C'est ainsi que nous avons procédé. En outre, il était entendu que tous les témoignages seraient pris en compte, même les témoignages écrits.
    Nous pourrions tenir une réunion de planification; je suis ouvert à l'idée. Je pense que c'est probablement une meilleure façon de procéder que le faire au moyen de rappels au Règlement qu'affectionne particulièrement M. Dong, semble-t-il.
    Merci, monsieur Angus. Je vous en suis reconnaissant. Je pense qu'il serait possible d'organiser une telle réunion vendredi.
    Allez-y, madame Shanahan.
    Monsieur le président, mon rappel au Règlement porte sur notre fonctionnement à partir de maintenant.
    Nous avons reçu la note d'information concernant la comparution du légiste juste avant cette réunion, et j'ai essayé de communiquer avec la greffière à ce sujet. Accueillerons-nous le légiste? Fonctionnera-t-on comme d'habitude pour les séries de questions? J'aimerais avoir des précisions là-dessus.
    Pour les séries de questions, nous reprendrons en haut de la liste. C'est un nouveau témoin. Selon moi, nous avons un nouveau témoin et un sujet différent. Nous commencerons donc les séries de questions du haut de la liste des intervenants. Le légiste et conseiller parlementaire a préparé une brève déclaration. Nous allons l'écouter, puis nous passerons aux questions.
    Chers collègues, si vous souhaitez toujours suspendre la séance pour quelques minutes, c'est possible. Au retour, nous entendrons le légiste et conseiller parlementaire.
    Nous allons suspendre la séance pour quatre minutes. La séance est suspendue.

  (1310)  


  (1315)  

    Je vois que la plupart des gens sont de retour. Donc, nous reprenons.
    Chers collègues, nous reprenons notre discussion sur les questions de conflits d'intérêts et de lobbying en relation avec les dépenses liées à la pandémie, mais plus particulièrement en ce qui concerne l'ordre de renvoi du 25 mars 2021 et la motion adoptée par la Chambre des communes. Des questions ont été soulevées quant à la façon de procéder. M. Fortin a présenté une motion. Les membres du Comité de tous les partis souhaitaient entendre le légiste afin d'obtenir des précisions supplémentaires et d'appuyer le Comité pour les décisions qu'il est prêt à prendre.
    Monsieur Dufresne, merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir accepté notre invitation à si court préavis. Merci beaucoup de nous faire profiter de vos conseils et de votre sagesse sur cette question.
    Je crois que vous avez une brève déclaration liminaire. Nous vous donnons la parole pour votre déclaration, puis nous passerons aux questions.

[Français]

    Membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant vous. En tant que légiste et conseiller parlementaire de la Chambre des communes, je suis heureux d'être ici aujourd'hui pour répondre à toutes les questions que le Comité pourrait vouloir poser.
    Mon bureau fournit une gamme complète de services juridiques et législatifs au Président, au Bureau de régie interne, à la Chambre et à ses comités, aux députés et à l'Administration de la Chambre. À titre de conseillers juridiques de la Chambre, de ses comités et de ses députés, nous connaissons les intérêts de l'organe législatif du gouvernement et offrons à la Chambre des services juridiques et législatifs qui sont pour ainsi dire semblables à ceux que le ministère de la Justice offre au gouvernement.
    Je suis accompagné de Michel Bédard, légiste adjoint et conseiller parlementaire, Affaires juridiques. J'espère que mes réponses seront utiles au Comité.

[Traduction]

    J'aimerais d'abord souligner brièvement les pouvoirs du Comité relatifs à la convocation de personnes.
    La Chambre détient certains pouvoirs essentiels à son travail qui font partie de ses privilèges collectifs. En tant que grand enquêteur de la nation, la Chambre a le droit de [Difficultés techniques]. Ce droit fait partie des privilèges, immunités et pouvoirs de la Chambre, qui sont définis dans le préambule et à l'article 18 de la Loi constitutionnelle de 1867, et à l'article 4 de la Loi sur le Parlement du Canada. Ces droits, dans ce rôle, ont été reconnus par les tribunaux et comprennent le pouvoir constitutionnel de convoquer des personnes et d’exiger la présentation de documents et de dossiers.

[Français]

    Si un témoin ne se conforme pas à une ordonnance émise par un comité ou par la Chambre et voulant qu'il se présente devant un comité pour y témoigner, le comité en question ne peut lui-même imposer des sanctions à l'endroit du témoin. Le comité peut accepter la situation et les motifs présentés, décider de ne rien faire ou faire rapport à la Chambre, qui, elle, détient le pouvoir de prendre les mesures appropriées.
    Sur ce, je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Je vous remercie.

  (1320)  

[Traduction]

    Merci, monsieur Dufresne. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir accepté d'être ici.
    Nous commençons la première série de questions avec M. Barrett.
    Monsieur Dufresne, merci de vous joindre à nous aujourd'hui.
    Quelles sont les obligations liées à un ordre de la Chambre?
    Les ordres de la Chambre [Difficultés techniques] pouvoirs, notamment le pouvoir de convoquer des personnes et d’exiger la présentation de documents. L'ordre est donné et doit être respecté.
    Quels sont les recours de la Chambre en cas de non-respect d'un ordre dûment émis par la Chambre?
    Un ordre de la Chambre fait partie des privilèges de la Chambre et relève de l'administration des questions de procédure de la Chambre. Dans le cas de préoccupations relatives au respect d'un ordre de la Chambre, il convient, s'il s'agit d'un ordre de la Chambre, d'en saisir la Chambre elle-même. S'il s'agit d'un ordre d'un comité, il faut d'abord en saisir le comité, mais toute préoccupation devrait ultimement être portée à l'attention de la Chambre si des mesures supplémentaires sont souhaitées.
    Monsieur Dufresne, dans ce cas précis, alors que la Chambre a ordonné la comparution de certaines personnes devant le Comité et la présentation ou la remise de documents au Comité, quelle est la marche à suivre? Le président du Comité doit-il d'abord en saisir la Chambre ou, étant donné qu'il s'agit d'un ordre de la Chambre, un député peut-il simplement soulever le problème directement auprès du Président de la Chambre des communes?
    Normalement, selon les décisions antérieures de Présidents de la Chambre, si une question concerne un comité et des renseignements devant lui être remis, il est généralement d'usage d'attendre que le comité ait d'abord examiné la question, ce qui lui donne l'occasion de déterminer s'il est satisfait.
    Souvent, lorsque les renseignements ne sont pas fournis, des motifs sont invoqués pour expliquer pourquoi les renseignements n'ont pas été fournis, notamment les questions de confidentialité. Donc, en général, le comité a d'abord l'occasion d'étudier la question et de déterminer s'il est satisfait ou non, s'il souhaite examiner d'autres approches ou s'il convient d'en saisir la Chambre.
    Y-a-t-il des précédents? A-t-on déjà ignoré un tel ordre de la Chambre ou refusé de s'y conformer?
    Il est arrivé qu'on ne respecte pas un ordre de la Chambre de produire des documents. Le gouvernement a invoqué le secret du Cabinet pour ne pas fournir des renseignements ou des documents, ou encore la sécurité nationale. En fin de compte, ces questions ont été renvoyées à la Chambre sous forme de question de privilège.
    Un des cas était l'affaire des détenus afghans. Dans sa décision sur une question de privilège, le Président a accordé un peu de temps aux partis pour trouver une solution et ainsi permettre au comité de faire son travail tout en respectant les impératifs de la sécurité nationale invoqués par le gouvernement.
    Dans un autre cas lié à des renseignements relatifs aux dépenses publiques, la question a été renvoyée au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre afin qu'il puisse l'examiner puis en faire rapport à la Chambre.
    Ces deux cas concernaient-ils des documents, ou l'un des deux concernait-il des personnes ayant reçu l'ordre de témoigner?
    Ces deux cas concernaient des documents.
    Y-a-t-il un précédent concernant une personne?
    Il y a des précédents pour ce qui est de la convocation de personnes, d'ordres de comités pour la comparution de témoins. Ces questions sont portées à l'attention de la Chambre.
    Est-il déjà arrivé qu'un ministre ordonne à des témoins de ne pas comparaître ou d'ignorer un ordre de la Chambre?
    Il y a eu un précédent en 2010, lorsque le gouvernement a ordonné au personnel politique de ne pas comparaître devant un comité. Je crois que c'était ce comité-ci. Le motif invoqué à l'époque était semblable à celui qu'on invoque aujourd'hui, à savoir la notion de gouvernement responsable selon laquelle les ministres sont les mieux placés pour comparaître à titre de témoins pour répondre aux questions du comité. Dans ce cas, en 2010, ce n'était pas un ordre de la Chambre. C'était un ordre du comité, mais les arguments avancés et les motifs invoqués étaient les mêmes.

  (1325)  

    Je vous remercie.
    Monsieur Dufresne, cet ordre de la Chambre comprenait-il une disposition sur la responsabilité ministérielle?
    Si je le lis correctement, cet ordre comprenait une disposition prévoyant que le premier ministre pourrait aussi comparaître et que s'il témoignait à la place des employés politiques nommés, ces derniers seraient libérés de leurs obligations.
    D'accord. Cela répondrait-il à l'argument sur la responsabilité ministérielle?
    C'est au Comité et, au bout du compte, à la Chambre d'en décider.
    Dans le cas de personnes assignées à comparaître, est-ce que quelqu'un peut les exempter légalement de témoigner devant un comité en application d'un ordre de la Chambre, comme — dans le cas présent — lorsque des ministres indiquent aux personnes légalement convoquées qu'elles ne devraient pas témoigner? Le gouvernement possède-t-il ce pouvoir?
    Selon moi, c'est la Chambre qui détient ce pouvoir. Cette dernière délivre l'ordre et c'est à elle qu'il revient de décider si elle considère qu'il a été respecté. Il en va de même pour les ordres de comité et le comité a l'occasion de se pencher sur la question. Il y a, ici encore, le précédent des détenus afghans, au sujet desquels le Président a clairement fait savoir que la Chambre a le pouvoir constitutionnel de demander l'information.
    Par ailleurs, la Chambre et les comités sont très fortement encouragés à tenir compte des impératifs de la politique publique lorsqu'ils exercent ces pouvoirs.
     Monsieur, votre temps est écoulé.
    Madame Lattanzio, nous vous accordons la parole pour six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie M. Dufresne et M. Bédard de témoigner aujourd'hui pour répondre à nos questions sur la responsabilité ministérielle.
    Les principes de responsabilité ministérielle guident les ministres et les fonctionnaires quand ils comparaissent devant des comités parlementaires, y compris lorsqu'ils témoignent à titre d'agents comptables. Je crois comprendre qu'il incombe aux ministres de répondre aux questions du Parlement au sujet des politiques, des programmes et des activités du gouvernement et de fournir autant d'informations que possible au sujet de l'exercice de leurs pouvoirs, y compris ceux qu'ils ont délégués à d'autres.
    Les ministres ont également pour responsabilité de déterminer quelles sont les questions auxquelles ils devraient répondre personnellement et quelles sont celles auxquelles des fonctionnaires parlant en leur nom pourraient répondre. Il s'agit d'une pratique de longue date de la Chambre.
    En dehors du fait que les comités possèdent un large pouvoir leur permettant d'ordonner à toute personne résidant au Canada de témoigner devant un comité, considérez-vous que le recours à ce pouvoir pour convoquer des employés qui n'ont, bien souvent, aucun pouvoir sur les décisions du gouvernement afin de les obliger à témoigner [Difficulté technique] jeu politique?
    Je ferais remarquer que La procédure et les usages de la Chambre des communes, qui traite du rôle des fonctionnaires et de leurs fonctions, précise que ne ce sont pas eux, mais le ministère et le ministre qui prennent les décisions politiques.
    Il s'y trouve un passage traitant des genres de questions et de sujets qui sont appropriés — ou non — pour les fonctionnaires et, de façon générale, les comités accepteront les raisons que leur fournissent les fonctionnaires si l'on aborde des domaines à propos desquels ils n'ont pas de pouvoir ou de connaissances. Voilà où vous avez vu ces genres de préoccupations quant aux sujets qui sont appropriés pour les fonctionnaires, compte tenu du rôle très différent qu'ils jouent au chapitre de la prise de décisions et de la responsabilité.
    Vous avez parlé plus tôt du précédent établi en 2010. Je crois comprendre que le ministre conservateur d'alors, Jay Hill, avait clairement indiqué que le personnel politique ne témoignerait pas devant des comités. Voici ce qu'il a indiqué:
Ces employés doivent rendre des comptes à leurs supérieurs et, en fin de compte, à leur ministre de l’exécution correcte et compétente de leurs fonctions.
    Il a ajouté ce qui suit:
Nous sommes donc très fondés à dire que ce sont les ministres qui devraient rendre compte des actions du personnel politique. Les ministres se sont présentés à des élections et ont accepté d'endosser la responsabilité que représente la fonction de ministre. Ce n'est pas le cas du personnel politique.
    Je sais qu'il vous sera peut-être difficile de répondre, mais jugez-vous qu'il soit un brin hypocrite de la part des conservateurs ou d'autres membres de faire maintenant valoir le contraire quand cela leur sied sur le plan politique?
    Pouvez-vous aussi nous dire ce qui s'est passé en 2010? Qui a fini par se présenter devant le Comité pour témoigner?

  (1330)  

    En ce qui concerne le précédent de 2010, c'est le ministre qui a comparu à la place du personnel politique. L'opposition et de nombreux membres du Comité se préoccupaient de la position alors adoptée. Ils ont débattu d'une motion afin d'en faire rapport à la Chambre. Le Comité l'ayant rejetée, la motion n'a pas été adoptée.
    Ce sont les genres de questions que nous voyons poindre. Un gouvernement adoptera une position, que les comités jaugeront afin de déterminer s'ils acceptent — ou non — les motifs que leur présente le gouvernement. Je suis d'avis qu'au bout du compte, c'est aux comités et à la Chambre qu'il revient de prendre la décision. Ils pourraient bien décider qu'il convient de convoquer des témoins différents à des fins différentes ou pour obtenir des renseignements différents. Ce sont des points que le Comité peut prendre en compte.
    Je veux poursuivre sur le sujet, car vous avez souligné qu'il pourrait y avoir diverses fins ou raisons. C'est essentiellement le cœur de la question: pour diverses raisons. S'il est vain de convoquer un témoin devant un comité et que la démarche est purement politique, n'en concluriez-vous pas qu'il est futile de procéder ainsi?
    Comme le livre l'indique à propos des pouvoirs des comités, la question consiste toujours à savoir si vous avez ce dont vous avez besoin pour accomplir votre mission fondamentale à titre de grand enquêteur de la nation, et ce, sans porter atteinte à d'autres intérêts publics, questions de politique publique ou personnes.
    Le Comité doit réellement procéder au cas par cas pour déterminer ce dont il a besoin pour accomplir son travail. De quelles informations avez-vous besoin pour pouvoir légiférer, délibérer et obliger le gouvernement à rendre des comptes?
     Je terminerai en citant de nouveau M. Hill, qui a déclaré ce qui suit:« La tyrannie de l'opposition majoritaire s'en prend maintenant aux hommes et aux femmes qui font partie de notre personnel politique. Lorsque ces personnes ont assumé leurs fonctions, elles ne s'attendaient pas à être jugées par un comité et à être humiliées et intimidées par des députés. »
    Monsieur Dufresne, pensez-vous que le fait de contraindre le personnel politique à témoigner devant un comité profitera vraisemblablement au Parlement et au gouvernement au pouvoir en général? C'est pour des questions qui ne sont pas pertinentes. C'est ce que je dirai en guise de préface.
    Au bout du compte, ce n'est pas à moi de déterminer ce qui relève ou non du mandat d'un comité. Je vous renverrai, une fois encore, au passage de La procédure et les usages de la Chambre des communes sur le rôle des fonctionnaires. Le personnel politique joue un rôle différent de celui des ministres.
    De façon générale, il est conseillé aux comités de demander les renseignements dont ils ont besoin, mais de traiter tous les témoins avec courtoisie et de veiller à ne causer aucun préjudice non nécessaire à qui que ce soit ou pour quelque considération politique que ce soit.
    Je vous remercie beaucoup.
    Nous accordons la parole à M. Fortin pour six minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Bonjour, monsieur Dufresne. Je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui. Vos éclaircissements nous sont précieux dans la situation actuelle. C'est souvent le cas.
    Selon ce que je comprends, l'autorité qui donne un ordre, en l'occurrence la Chambre des communes, est la seule à pouvoir démentir, retirer ou modifier cet ordre.
    Est-ce que je fais erreur?
    Vous avez raison, monsieur Fortin. S'il est question de modifier le libellé de cet ordre, c'est la Chambre qui peut le faire. L'ordre donne cependant au comité la possibilité de libérer les témoins en question. Le comité conserve une certaine discrétion.
    D'accord. Sinon, nous devons nous en tenir au libellé de l'ordre qui a été émis le 25 mars par la Chambre des communes.
    C'est la distinction qu'il faut faire. Si l'ordre venait du comité, celui-ci pourrait le modifier de sa propre initiative.
    Nous dites-vous qu'en 2010 le gouvernement a ordonné à quelqu'un de désobéir à un ordre de la Chambre? Est-ce bien ce que vous nous avez dit?

  (1335)  

    En 2010, il s'agissait d'un ordre émis par un comité.
    Si je comprends bien, cela ne s'est jamais produit pour un ordre de la Chambre.
    Est-ce le cas, à votre connaissance?
    On n'a pas vu de situation impliquant la comparution d'un témoin, à ma connaissance. On a vu des cas impliquant la divulgation d'information, par exemple lorsque de l'information ou des documents étaient demandés, mais que le gouvernement invoquait le secret du Cabinet ou la sécurité nationale.
    La distinction, ici, est que le gouvernement invoque comme motif la responsabilité ministérielle.
    J'aimerais justement que nous parlions de la responsabilité ministérielle. D'après ce que je comprends, ce principe implique que, face à la Chambre, et même à l'ensemble de la population, les ministres ont l'obligation de rendre des comptes sur la gestion de leur cabinet. Ils en sont responsables.
    Cela dit, dois-je comprendre qu'ils sont les seuls à avoir cette obligation? Autrement dit, la Chambre ne pourrait demander de comptes à personne d'autre qu'au ministre.
    J'en comprends également qu'un comité de la Chambre ne pourrait pas réviser, avec d'autres témoins ou au moyen d'autres documents, la position adoptée par le ministre.
    Est-ce bien le cas?
    Selon moi, les comités et la Chambre, ultimement, disposent de l'autorité nécessaire pour déterminer quel motif ils vont accepter. Il y a un grand encouragement à...
    Je m'excuse, monsieur Dufresne. Mon intention n'était pas de vous interrompre. Ce que nous faisons là est vraiment impoli, mais nous avons très peu de temps à notre disposition. Je pense m'être mal exprimé.
     Je voulais dire ce qui suit. Le ministre, en raison de son obligation de rendre des comptes, pourrait nous décrire en plusieurs points sa position, par exemple. Or, en raison du principe de la responsabilité ministérielle, le Comité serait-il dans l'impossibilité de vérifier les faits auprès d'autres témoins? Pourrions-nous, par exemple, assigner quelqu'un à comparaître pour qu'il confirme ce que le ministre a dit et nous dise s'il est d'accord sur ses propos?
    Avons-nous, oui ou non, le droit de faire cela?
    Selon la décision du Président Milliken dans l'affaire des détenus afghans, la Chambre est souveraine et peut décider d'accepter ou non le motif invoqué, y compris par le gouvernement. Dans le cas des détenus afghans, le gouvernement invoquait la sécurité nationale. Dans la situation actuelle, c'est la responsabilité ministérielle qui est invoquée. C'est un dialogue qui doit avoir lieu.
     D'accord.
    Nous voulons examiner certains éléments du dossier du mouvement UNIS. Nous voulons vérifier des faits et nous avons besoin d'entendre certains témoins, parce que d'autres témoins nous ont dit que M. Untel avait dit ceci ou qu'il avait fait cela. Nous voulons entendre ces témoins de faits, que nous n'accusons de rien. Ils ne sont pas ici pour être redevables de quoi que ce soit. Nous voulons toutefois entendre leur témoignage et leur version des faits.
     N'avons-nous pas le droit de vérifier ces faits auprès des individus en question, parce qu'ils sont des employés d'un ministre?
    À ma connaissance, il n'y a pas de reconnaissance d'une immunité indiquant qu'un employé ministériel n'est pas contraint de témoigner devant un comité. Selon moi, c'est plutôt un motif qui vous est donné, lorsqu'on vous présente ce principe important de responsabilité ministérielle faisant que les ministres sont redevables au Parlement. Puisque les employés rendent des comptes au ministre, ils mettent en avant cet argument.
     C'est au comité et à la Chambre ultimement, si la question lui est présentée, de déterminer la marche à suivre.
    Je comprends que nous avons le droit de poser des questions à des témoins, même si ce sont des employés d'un ministre.
    Vous avez le droit de leur demander de comparaître afin d'entendre ces informations. C'est au comité et, ultimement, à la Chambre de déterminer si ce droit de [difficultés techniques].
    C'est donc la Chambre qui en décide.
    Toutefois, dans un cas où le patron, en l'occurrence un ministre, ordonne à l'individu en question de désobéir à un ordre de la Chambre, quel est l'éventail des sanctions à la disposition de cette dernière?
    Lorsqu'une préoccupation est soulevée à la Chambre au sujet d'une violation de privilège liée au respect d'un ordre de produire un document ou, dans ce cas, de convoquer un témoin, la Chambre peut faire rapport à un comité, qui est généralement le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, pour qu'il se penche sur la question. La Chambre peut donner un ordre. Dans ce cas, elle l'a déjà fait, mais elle pourrait modifier cet ordre si elle était d'avis que c'était préoccupant.
     L'escalade des mesures peut inclure le fait de convoquer un individu à la barre de la Chambre, de déclarer que quelqu'un est en outrage au Parlement ou de retirer la confiance au gouvernement, comme cela a été fait en 2011.

  (1340)  

[Traduction]

     Je vous remercie, monsieur Fortin.

[Français]

    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Monsieur Fortin, votre temps est écoulé, mais nous espérons vous revenir.
    Monsieur Angus, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie.
    Je suis très honoré et enchanté que vous soyez avec nous aujourd'hui. Pour moi qui fais partie du Comité depuis bien des années, il est presque bizarre d'observer les libéraux adopter maintenant la position de Jay Hill. Je me souviens que mon bon ami Wayne Easter s'était offusqué que les conservateurs ne veuillent pas que le personnel politique témoigne devant notre comité. Si nous ne pouvions pas les faire venir, ce sera une menace fondamentale pour la démocratie.
    Je voudrais simplement mettre les choses dans le contexte de l'époque. Vous avez parlé des documents sur les détenus afghans. Le Canada était alors engagé dans une très vilaine guerre qui a donné lieu à des allégations de torture et qui avait des implications internationales. Ces documents étaient extrêmement explosifs. À l'époque, j'avais désapprouvé la manière dont les conservateurs géraient les documents sur les détenus afghans, mais nous comprenions qu'il s'agissait d'une affaire fort délicate qui pouvait avoir des ramifications considérables.
    Dans le cas présent, nous avons affaire aux frères qui dirigent l'Organisme UNIS, qui ont appelé le Bureau du premier ministre trois jours avant que le Cabinet se fasse dire que plus d'un demi-milliard de dollars serait accordé à l'Organisme UNIS. Nous ne sommes pas autorisés à parler à la personne clé qui, au Bureau du premier ministre, a donné le feu vert, car pour une raison quelconque, cela constitue une menace à la sécurité nationale. Je pense qu'il vaut la peine de mettre les choses en perspective.
    Je me souviens de la fois où l'opposition a assigné le personnel de Christian Paradis à comparaître. Les conservateurs n'en étaient pas très heureux. Est-ce qu'une règle parlementaire stipule que le personnel politique, les gens proches du premier ministre, ne peuvent pas témoigner devant un comité? S'agit-il d'une sorte de règle fondamentale de la démocratie?
    Comme je l'ai indiqué précédemment, le personnel politique ou les fonctionnaires ne bénéficient d'aucune immunité lorsqu'ils sont convoqués pour témoigner devant un comité parlementaire. De façon générale, on gère la situation en fonction des sujets et des genres de questions, le personnel politique et les fonctionnaires jouant un rôle très différent de celui des ministres.
    Ils jouent des rôles différents, mais ce sont aussi les personnes clés qui font avancer les dossiers, particulièrement — apparemment — dans des dossiers explosifs et délicats comme celui de la relation entre les frères Kielburger et le premier ministre et la somme d'un demi-milliard de dollars qu'ils allaient recevoir. Je mettrai cette affaire de côté un instant pour voir ce que notre comité doit faire.
    Mes collègues libéraux ont beaucoup parlé de la responsabilité ministérielle, mais les ministres qu'ils ont convoqués ne savaient rien à propos du dossier; nous avons donc pas mal perdu notre temps. Nous avons maintenant une motion pour faire rapport à la Chambre.
    Serait-il déplacé de la part du Comité d'indiquer à la Chambre que les témoins qu'elle a proposés n'ont pas témoigné? Cela menacerait-il la démocratie ou la capacité de survie du Parlement? Si nous l'informions que ces témoins n'ont pas comparu, cela pourrait-il entraîner le déclenchement d'élections?
    C'est une des solutions dont le Comité dispose s'il considère qu'un témoin qu'il souhaite entendre ne s'est pas présenté devant lui. En pareil cas, le Comité a des options. Il peut accepter la situation ou chercher d'autres moyens d'obtenir l'information. Cependant, s'il souhaite entendre ce témoin en particulier et puisqu'il ne possède pas le pouvoir de l'obliger à témoigner, il peut faire état de la situation à la Chambre.
    Le fait est qu'avec le scandale des frères Kielburger et d'UNIS, le dossier traîne depuis huit mois. Nous en arrivons à la fin de notre étude. Comme certaines questions demeurent sans réponse, nous avons demandé à ces employés de témoigner. Je pense que nous savons ce que nous devons savoir, mais il semblerait très étrange de ne pas indiquer dans notre rapport que les trois derniers témoins n'ont pas comparu.
    Pour moi, la question est simple. Le Comité était censé entendre ces témoins, à la demande du Parlement, qui a nommé ces personnes. Quand elles ont dû témoigner, elles ne se sont pas présentées. Nous devrions donc simplement informer la Chambre qu'elles n'ont pas comparu.
    Est-ce une démarche assez simple que le Comité a le pouvoir d'entreprendre?

  (1345)  

    Comme je l'ai indiqué, c'est quelque chose que le Comité peut faire. Il peut faire rapport de la situation à la Chambre, à qui il reviendra ensuite de voir comment elle entend y réagir.
    Serait-ce le Président qui déciderait? Si nous disions simplement à la Chambre que nous voulons qu'elle sache que, par suite du vote qu'elle a tenu, les témoins n'ont pas comparu, est-ce le Président qui déciderait de ce qu'il convient de faire?
    L'affaire peut alors être soulevée à titre de question de privilège. Si c'est le cas, alors le Président devrait prendre une décision à ce sujet.
    Il faudrait donc que quelqu'un soulève la question à la Chambre en indiquant que ses privilèges de député ont été bafoués. Le Président prendrait alors une décision. Peut-il la faire parvenir ensuite au Comité?
    Quand une question de privilège est soulevée, le Président déterminera si elle est valide, si elle a été soulevée à la première occasion et s'il y a atteinte, de prime abord, à un privilège. S'il juge que c'est le cas, alors une motion peut être proposée à la Chambre afin de suggérer un recours, que ce soit en renvoyant l'affaire au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, conformément à la procédure normale, ou en recourant à d'autres mécanismes.
    Dans l'affaire des détenus afghans, les partis ont été invités à trouver une solution. Dans d'autres cas, on a statué qu'il y avait outrage, alors que dans un autre, l'opposition [Difficulté technique] soulever des préoccupations à propos de la confiance.
    Je vous remercie beaucoup de ces précisions, qui m'aident à clarifier les choses.
    Je vous remercie.
    Monsieur Carrie, nous vous accordons maintenant la parole pour les prochaines questions.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président. Je tiens à remercier M. Dufresne de témoigner.
    Je veux revenir au précédent de 2010. Vous avez clairement indiqué que c'était différent, puisqu'il s'agissait alors d'un ordre de comité et non d'un ordre de la Chambre. J'étais toutefois ici à l'époque et, comme M. Angus l'a fait remarquer, la situation était très sérieuse. Quiconque a vu cette vidéo...
    Je voudrais en revenir aux propos de Mme Lattanzio. Quand ces témoins, ces employés, ont été convoqués devant le Comité, ils n'ont pas simplement dû témoigner pour une journée afin de fournir les renseignements que l'opposition n'avait pas. Ils se sont fait réprimander et presque démolir.
    Quand Mme Lattanzio parle de motifs politiques, monsieur le président, je dirais que les libéraux semblent avoir maintenant une norme différente que celle qu'ils appliquaient quand ils étaient dans l'opposition. Je voudrais citer M. Easter, qui était là à l'époque et qui a déclaré ce qui suit:
Si nous voulons inviter le ministre à témoigner devant le Comité, alors nous le ferons et nous nous attendrons à ce qu'il soit ici. Quand nous invitons d'autres personnes à témoigner devant le Comité, comme nous sommes en droit de le faire, nous nous attendons à ce qu'elles viennent et n'en soient pas empêchées par un décret émanant du bureau du premier ministre.
    Mme Lattanzio a indiqué que certaines questions ne sont pas pertinentes, ce dont je conviens d'ailleurs. Mais les questions que nous posons sont pertinentes et nous devons obtenir des réponses pour pouvoir terminer notre rapport.
    Monsieur Dufresne, pourriez-vous éclaircir les choses? Est-ce que je saisis bien vos explications en pensant que l'ordre que le Comité a pris en 2010 diffère d'un ordre pris par la Chambre cette année?
    Un ordre de comité diffère d'un ordre de la Chambre, en ceci que, comme je l'ai fait remarquer, un comité peut modifier son propre ordre, mais pas un ordre de la Chambre. Quand des préoccupations sont soulevées au sujet d'un ordre de comité et sont présentées à la Chambre, l'ordre devient parfois un ordre de la Chambre.
    Dans le cas présent, vous êtes [Difficulté technique] ordre de la Chambre, mais sachez qu'il existe des similitudes entre les arguments invoqués par le gouvernement dans cette affaire et aujourd'hui, et aussi entre certaines réactions du Comité, notamment lorsque mon prédécesseur a comparu devant lui pour traiter de questions semblables à celles dont nous parlons maintenant.
    Je vous remercie pour cette précision.
    Les médias m'ont interrogé au sujet du terme « outrage » et à propos du « comportement méprisant » du gouvernement. Dans cette motion, cela ne concerne pas uniquement notre comité, comme vous le savez. Il est question également de la défense nationale et des terribles allégations d'inconduite sexuelle dont le Cabinet du premier ministre semble avoir fait fi. Le ministre de la Défense nationale, comme par hasard juste avant le déclenchement d'élections, n'a pas voulu en parler.
    Pouvez-vous aider les membres du Comité à comprendre la définition, telle que vous la comprenez, des termes « outrage » et « outrage au Parlement »?

  (1350)  

    Habituellement, lorsqu'on soulève la notion d'outrage au Parlement, c'est lorsque des comités ou la Chambre découvrent que certaines actions ont empêché la Chambre de faire son travail, ont empêché les députés de faire leur travail et ont empêché la divulgation de renseignements. Il a été déterminé qu'il y a eu outrage, par exemple, dans le cas où quelqu'un a délibérément induit un comité en erreur. C'est le genre de choses que l'on qualifie d'outrage.
    Je présume que vous avez vu le témoignage du ministre Rodriguez devant notre comité. On lui a posé des questions très claires. J'ai trouvé qu'une des questions était, honnêtement, gênante pour lui. Lorsque M. Poilievre lui a demandé quelle était sa réponse, il a fourni une réponse, puis une autre réponse, pour finalement dire qu'il ne connaissait pas la réponse. De toute évidence, le gouvernement a fait comparaître d'autres personnes en remplacement des témoins qui auraient dû comparaître parce qu'il voulait — soyons très clairs — boucher les trous. Il a envoyé un ministre qui n'avait aucune idée de ce dont il parlait et qui a donné des réponses contradictoires à une question posée par un député.
    Lorsque quelqu'un donne une réponse qui est totalement opposée à ce qu'il a affirmé plus tôt, s'agit-il d'un outrage d'après votre compréhension de la définition de ce terme?
    Il appartient au Comité de décider s'il est satisfait de l'information qu'il a obtenue. Ce n'est pas à moi de le décider.
    Je vous remercie pour votre réponse.
    Monsieur Carrie, votre temps est écoulé.
    La parole est maintenant à M. Dong pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Premièrement, je tiens à remercier le légiste de comparaître devant le Comité pour répondre aux questions sur le sujet.
    Vous avez mentionné que l'ancien légiste, Rob Walsh, a témoigné en 2010 devant notre comité au sujet de questions similaires. Il a dit ceci: « ... il y aurait des restrictions en ce qui concerne les questions qui pourraient leur être posées. Certaines questions devraient être adressées au ministre et non au personnel politique. »
    Êtes-vous d'accord avec M. Walsh et pourriez-vous nous en dire un peu plus long sur les questions qui ne pourraient pas être posées au personnel politique?
    Le point qu'a fait valoir M. Walsh est similaire à celui qu'on fait valoir [Difficultés techniques] le rôle de la personne est pertinent ainsi que les pouvoirs qu'elle a ou qu'elle n'a pas. Généralement, on comprend, compte tenu du rôle que jouent les fonctionnaires, qu'on ne devrait pas leur demander d'assumer la responsabilité des décisions qui sont prises par le gouvernement ou le cabinet. Il n'est peut-être pas approprié de demander à un fonctionnaire de défendre ce genre de décisions. Un fonctionnaire devrait comparaître à d'autres fins.
    Il faut garder en tête le rôle et la fonction de la personne. Les responsabilités de la personne devraient guider le type de sujets soulevés.
    C'est donc dire que le personnel politique inclut les fonctionnaires.
    Les fonctionnaires ne font pas partie du personnel politique, car ils n'oeuvrent pas du tout dans la sphère politique. Le personnel politique est autorisé à avoir une allégeance politique, à la différence des fonctionnaires, qui sont tenus d'être neutres. Toutefois, il y a certes une différence entre le personnel politique et les ministres en ce qui a trait aux pouvoirs et aux responsabilités.
    Je suis heureux que nous en parlions. À mon avis, le personnel politique des ministres a la tâche de bien comprendre les diverses répercussions des différentes options présentées aux ministres, parmi lesquelles ils doivent choisir. Certains employés politiques jouent le rôle de conseillers chargés d'exposer les différentes conséquences des options qui s'offrent à un ministre. D'autres employés politiques sont responsables des communications. À ce titre, ils aident le ministre à communiquer efficacement les décisions qu'il a prises.
    Toutefois, au bout du compte, ces employés [Difficultés techniques] ne sont que des employés. Ils sont des conseillers et ils fournissent des conseils, mais ils ne prennent pas les décisions. C'est pourquoi les ministres sont ultimement responsables des décisions qu'ils prennent.
    Estimez-vous que ce modèle de responsabilité ministérielle est un bon modèle à suivre?

  (1355)  

    Je dirais que la responsabilité gouvernementale est fondée là-dessus. Ce sont les ministres et le gouvernement lui-même qui [Difficultés techniques] et au Parlement. De leur côté, les employés sont là pour servir et appuyer [Difficultés techniques] et le gouvernement. Je considère cela comme un principe très valable.
    D'un autre côté, la Chambre joue le rôle de grand enquêteur de la nation et elle dispose de pouvoirs constitutionnels qui lui permettent de déterminer les renseignements qu'elle a besoin d'obtenir.
    J'aimerais fournir un peu plus de contexte en ce qui concerne ce dont nous discutons.
    L'un des témoins que nous avons entendus s'appelle Ben Chin, et son seul lien avec l'étude qui est effectuée est une seule correspondance rédigée par un adjoint de Marc Kielburger. Elle se lit comme suit: « Bonjour Ben, je vous remercie de contribuer si gentiment à la conception de notre plus récent programme pour le gouvernement. Salutations chaleureuses, Craig. »
    Monsieur Chin a répondu ceci deux jours plus tard: « Je vous remercie pour votre message Craig. Permettons à nos jeunes de travailler! » On a dit que c'était la seule fois qu'il a communiqué avec l'organisme UNIS au sujet de ce dossier.
    À votre avis, est-ce que cette seule correspondance justifie qu'on invite cette personne à comparaître pour l'interroger pendant deux heures?
    Ce n'est pas mon opinion qui importe, mais celle du Comité [Difficultés techniques] au Comité de décider quel témoin il doit convoquer ou quelles questions il doit examiner en vertu de ses pouvoirs constitutionnels.
    J'ai une dernière très brève question à vous poser. Vous avez parlé de la question de privilège. Est-ce que le privilège peut faire l'objet d'une motion sujette à débat. Si le Comité estime qu'il y a eu, en effet, un abus du privilège, est-ce que cela pourrait faire l'objet d'une motion sujette à débat?
    En premier lieu, lorsqu'une question de privilège est soulevée, le Président de la Chambre doit déterminer si la question de privilège paraît fondée à première vue et si une motion peut ensuite être présentée.
    Je crois qu'il s'agit d'une motion sujette à débat, mais je poserais la question à des experts. Mes collègues du service de la procédure ont davantage de connaissances que moi sur cette question en particulier.
    Est-ce qu'il me reste du temps, monsieur le président?
    Non, votre temps est écoulé. La parole est maintenant à M. Fortin.
    Merci.
    Merci.
    Allez-y, monsieur Fortin.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Monsieur Dufresne, si j'ai bien compris votre témoignage, il faut quand même faire la différence entre une assignation à témoigner et une assignation à rendre des comptes. Le principe de la responsabilité ministérielle qu'invoquaient les deux ministres dans ce cas-ci s'appliquerait si nous demandions des comptes à quelqu'un, mais nous sommes en droit de demander à des individus de témoigner même s'ils font partie du personnel de ces ministres.
     Ai-je bien compris?
    Ce que je dis, c'est qu'il n'y a pas d'immunité pour des individus strictement en raison de leurs fonctions. Cela peut toucher la pertinence de ce qu'on leur demande par rapport à leur niveau de responsabilité ou à leur rôle et à l'information qu'ils détiennent.
    D'accord. Je vais vous poser une autre question, monsieur Dufresne.
    Évidemment, si la Chambre reproche à un individu de ne pas avoir témoigné, c'est une chose. L'individu n'a pas obéi à l'ordre et il y a des conséquences à cela. J'imagine qu'une telle situation a des précédents.
    Cependant, est-ce qu'il y a des précédents quant aux sanctions que la Chambre peut infliger à un ministre qui aurait donné l'ordre de ne pas obéir à un ordre de la Chambre?
    Nous avons discuté du précédent de 2010. Dans ce cas, ce n'était pas un ordre de la Chambre, c'était un ordre du Comité, mais une motion avait quand même été présentée pour faire rapport de la situation à la Chambre. Cette motion a été défaite, mais elle soulevait le même genre de préoccupation.

  (1400)  

    Je comprends donc qu'il n'y a pas de précédent quant aux sanctions imposées. Le Président de la Chambre pourrait-il dire au ministre qu'il a commis un outrage au Parlement et le démettre de ses fonctions ou considérer qu'il n'est plus un député, par exemple?
    Y a-t-il des conséquences de cette nature, ou cela est-il déjà arrivé?
    En ce qui concerne les sanctions quand une préoccupation est soulevée relativement à l'information fournie, la Chambre peut renvoyer l'affaire au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
     Dans le cas du précédent de 2011 que j'ai mentionné, le gouvernement n'avait pas produit l'information demandée et avait invoqué le secret du Cabinet. Finalement, il y a eu un ordre de la Chambre et une motion déclarant que le gouvernement avait perdu la confiance de la Chambre.
    D'accord. Je passe à une autre question, monsieur Dufresne.
    À ce stade-ci, on a établi que des gens ont désobéi à des ordres de la Chambre, et on va faire rapport de la situation à la Chambre.
     Doit-on proposer des sanctions ou des conséquences à cela, ou doit-on simplement rapporter la situation à la Chambre, qui décidera elle-même des conséquences dans le cadre d'une question de privilège?
    C'est au comité de décider ce qu'il veut inclure dans son rapport à la Chambre. À la page 154 de La procédure et les usages de la Chambre des communes, on parle de décrire la situation, de faire un sommaire des événements et des individus concernés et d'indiquer si on a une préoccupation concernant une atteinte au privilège ou un outrage. Si le comité veut suggérer une mesure quelconque à la Chambre, il peut le faire.
    Ultimement, c'est la Chambre qui devra trancher la question et déterminer si elle a assez d'information pour le faire.

[Traduction]

    Merci, monsieur Fortin.
    La parole est maintenant à M. Angus pour deux minutes et demie.

[Français]

    D'accord. Donc...

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Puisqu'il est 14 heures passées, je propose qu'on lève la séance.
    Il ne s'agit pas d'une motion sujette à débat.
    Nous allons procéder à un vote par appel nominal.
    (La motion est adoptée par 6 voix contre 4.)
    Je vous remercie, madame la greffière.
    Monsieur Dufresne, je vous remercie beaucoup pour votre présence cet après-midi. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir accepté de comparaître avec un court préavis.
    La séance est levée.
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