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Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi , auquel nous travaillons depuis plusieurs mois, voire plusieurs années. Le gouvernement est conscient de l’importance croissante d’Internet, ce dont d'aucuns se réjouissent, bien entendu. Il y a toutefois un certain nombre d’enjeux auxquels d’autres gouvernements ailleurs dans le monde se sont déjà attaqués, et c’est pourquoi le gouvernement présente aujourd’hui le projet de loi C-10.
Plusieurs grandes multinationales jouent un rôle très important dans le secteur de la radiodiffusion. C’est un enjeu dont traite le projet de loi. J’ai écouté le discours que le ministre a prononcé au sujet de ce texte, et j’invite tous les députés à relire ce qu’il a dit, car c’était un discours qui contenait beaucoup de substance et aussi beaucoup de passion.
J’aimerais revenir sur les trois grands axes qu’il a présentés et parler de l’importance de la culture et des arts pour notre pays.
Premièrement, le ministre a parlé d’équité. Il a dit qu’il était nécessaire d’instaurer plus d’équité entre nos entreprises de radiodiffusion. Les entreprises canadiennes relèvent du CRTC. Elles sont assujetties à un certain nombre de règlements et, tout bien considéré, ceux-ci ont bien servi les intérêts des Canadiens au fil des ans.
Toutefois, nous avons aussi ce qu’on appelle, faute d’un meilleur terme, les géants étrangers du Web. Nous les connaissons pour la plupart, puisqu’il s’agit d’entreprises comme Google et Facebook. Ce serait une grave erreur de s’attendre à ce que des entreprises comme Google se conforment volontairement aux règlements du Canada.
Le projet de loi fait en sorte que le dispositif législatif s’appliquera non seulement aux entreprises canadiennes, mais aussi à tous les géants étrangers du Web. Cela contribuera assurément à mieux protéger les intérêts des Canadiens.
Parlons maintenant du contenu canadien et de ce que le projet de loi fait à ce sujet. D’après ce qu’ont laissé entendre le ministre et d’autres personnes, cette mesure permettra d’injecter des centaines de millions de dollars de plus dans la production de contenu canadien, ce qui sera d’un grand secours pour l’industrie.
Voilà le genre de choses que nous devons faire pour avoir un impact très positif sur un secteur qui est particulièrement important pour notre pays. Il s’agit, je le répète, d’une somme d’environ 1 milliard de dollars, c’est-à-dire de plusieurs centaines de millions de dollars. C’est donc extrêmement positif.
Quand les jeunes utilisent des plateformes comme Netflix, Amazon ou Spotify, ils ont parfois beaucoup de difficultés à trouver du contenu canadien. Le projet de loi fera en sorte qu'il leur sera plus facile d’en trouver. C’est une question très importante, et c’est ce qu’on appelle, dans le projet de loi, la découvrabilité des émissions canadiennes.
Je considère que le projet de loi est avantageux pour tout le monde. J’invite donc les conservateurs, les néo-démocrates et le Bloc québécois à l’appuyer.
À en juger par ce qu’il a dit, le est tout à fait ouvert à des suggestions ou à des amendements, et il invite les députés de l’opposition à lui faire part de leurs idées. Je les y encourage moi aussi. Qu’ils n’hésitent pas à le faire, même à l’étape de la seconde lecture. Ils peuvent soumettre leurs commentaires au bureau du ministre, même avant que le projet de loi ne soit envoyé en comité, car c’est ce que le ministre les a invités à faire. C’est très encourageant de voir que, dès le début de ses remarques, le ministre a lancé cette invitation à tous les députés, dans le but de s’assurer que ce projet de loi, qui est en quelque sorte historique puisqu’il concerne notre accès au Web, sert bien les intérêts des Canadiens. Cela dit, j’espère que le projet de loi sera bientôt envoyé en comité.
J’ai déjà eu l’occasion de souligner l’importance de la culture et du patrimoine. Hier, en posant une question, j’ai fait allusion à une organisation que j’ai déjà eu l’occasion de mentionner dans cette Chambre, car elle incarne un grand nombre de choses que nous pourrions faire pour aider l’industrie.
Nous sous-estimons souvent la contribution de la culture et des arts à l’économie de notre pays. Nous avons pourtant des émissions remarquables. Je donnerai l’exemple de Schitt's Creek, dont j’ai découvert l’existence il n’y a pas si longtemps. Je sais que cela étonne un certain nombre de députés. Lorsque cette série a reçu tous ces prix, j’ai commencé à m’y intéresser. Je reconnais que, de temps à autre, je me gave de films et de séries diffusés sur Netflix. Eh bien, j’ai trouvé le temps de regarder tous les épisodes en l’espace de trois semaines.
J’invite tous ceux qui ne l’ont pas encore vue et qui suivent nos débats sur le projet de loi à la regarder, car elle montre bien pourquoi il est impératif d’adopter un projet de loi comme celui-ci, qui répond aux besoins de l’industrie. Schitt's Creek illustre, avec des personnages issus de tous les milieux, un grand nombre des valeurs que partagent les Canadiens. C’est sans doute l’une des raisons pour lesquelles cette série a autant de popularité chez nous et à l’étranger.
Ce n’est pas la seule. Je pense aussi à Corner Gas, qui se passe en Saskatchewan, ce qui devrait plaire à bon nombre de mes collègues de l’Ouest, surtout ceux de la Saskatchewan. Je ne sais pas si j’ai regardé tous les épisodes, mais en tout cas, j’en ai vu pas mal.
C’est agréable d'entendre cette allusion à la merveilleuse province qu’est la Saskatchewan et à l’excellent travail qui y est accompli. Une autre émission dont j’ai eu l’occasion de regarder au moins quelques épisodes, c’est Kim's Convenience, une série qui se déroule à Toronto. Là encore, nous voyons différents types de réflexion. Au fil des ans, le Canada a été reconnu comme ayant des comédiens exceptionnels tout comme de nombreux acteurs et actrices de marque. L’un de mes préférés a toujours été Star Trek et le bon vieux capitaine Kirk. Il est né au Canada et je pense qu’il est peut-être originaire de la Saskatchewan. Je n’en suis pas tout à fait sûr.
Le fait est que nous avons tant d’acteurs et d’actrices et de personnes qui présentent un énorme potentiel, dont bon nombre restent encore à découvrir. Le projet de loi contribuerait grandement à appuyer ces nouvelles découvertes et à faire en sorte qu’une industrie si importante pour nous tous soit mieux servie.
Nous parlons des personnes sur lesquelles brillent les feux de la rampe parce que ce sont des acteurs ou des actrices, mais ce n’en est qu’un certain nombre. J’aime beaucoup voir arriver les nombreuses camionnettes et semi-remorques dans nos collectivités, car elles sont souvent là pour des productions cinématographiques. Je me souviens qu’au cours de l’été, je voulais louer une grande camionnette, ce que je n’ai pas pu faire. Lorsque j’ai demandé quand je pourrai en avoir une, l’agence m’a répondu que ce ne serait pas avant un certain temps parce qu’elles avaient toutes été louées par une production cinématographique. Pour moi, c’est un de ces avantages indirects qu’il est vraiment important de reconnaître.
Je suppose que si je parlais à des gens de toutes les régions de notre pays, je constaterais dans différentes régions que de multiples décors sont installés dans des bâtiments publics comme l’Assemblée législative du Manitoba, par exemple, ou dans nos rues et nos collectivités, et j’y verrais des équipes de production. Il y a là une grande spécialisation. Au fur et à mesure que l’industrie continue de se développer, ce degré de spécialisation augmentera, et quand cela arrivera, il augmentera non seulement les compétences de milliers de Canadiens, mais aussi le nombre d’emplois créés.
Lorsqu’un plateau de tournage est installé dans une collectivité, les personnes qui le font fonctionner perçoivent un salaire. Il s’agit le plus souvent d’employés locaux ou de personnes d’origine canadienne, fortes de compétences canadiennes, s’installant dans ces collectivités et recevant un salaire. Elles achètent également des déjeuners et des collations, occupent des hôtels pendant de courtes ou de longues périodes et contribuent à l’économie locale.
Bref, toute équipe de tournage qui arrive suscite de l’intérêt. Mon intérêt est fortement éveillé, par exemple, lorsque je vois une installation être utilisée pour une production cinématographique, puis je la vois ensuite dans le film. Chaque fois que Winnipeg est mentionné dans un film ou dans une émission de télévision, je me sens très fier. C’est le genre de choses qui démontre pourquoi il est si important que les députés de tous les partis reconnaissent la valeur réelle du projet de loi .
De prime abord, le projet de loi n’est pas difficile à comprendre. Son objectif est de s’assurer qu’avec un apport de plusieurs centaines de millions de dollars, on pourra produire davantage de contenu canadien, ce qui est une bonne chose. Il y est aussi question de la découvrabilité des émissions canadiennes, c’est-à-dire que les jeunes pourront plus facilement trouver du contenu canadien, ce qui est aussi une bonne chose. Enfin, le projet de loi va assujettir toutes les grandes plates-formes multinationales à la réglementation canadienne, pour qu’elles soient sur un pied d’égalité avec les entreprises canadiennes, ce qui est encore une fois une bonne chose.
Le CRTC a remarquablement réussi, au cours des années, à protéger les intérêts des Canadiens. S’il n’avait pas été là, et si le gouvernement n’avait pas été là pour encourager la création et la distribution de contenu canadien, je me demande vraiment dans quel état serait l’industrie. Ce projet de loi va permettre de poursuivre nos efforts dans ce sens.
Comme pour tout, le coronavirus a eu un impact sur l’industrie, à plusieurs niveaux. C’est la raison pour laquelle j’ai fait allusion hier, lorsque j’étais avec le ministre, à l’organisation Folklorama. Il y a beaucoup de talents qu’on retrouve dans des productions au Canada et à l’étranger et qui viennent d’autres organisations et festivals culturels de moindre envergure, même si je ne devrais pas employer ce terme.
Je parle souvent de Folklorama, parce que c’est une organisation de Winnipeg qui existe depuis plus de 50 ans. Elle fait appel à des milliers de bénévoles. Chaque été, pendant deux bonnes semaines, elle organise toutes sortes de spectacles et d’activités de promotion de notre patrimoine. Elle regroupe souvent plus de 50 pavillons participants. J’ai déjà vu des spectacles, dans un pavillon, qui sont ensuite devenus de vraies émissions de télévision ou qui ont servi de tremplin à un grand nombre d’artistes de Winnipeg. Pour le gouvernement, les retombées sont à la fois directes et indirectes.
Je suis heureux que le ait eu une rencontre virtuelle, tout comme le d'ailleurs, avec Folklorama et avec le Conseil des arts populaires, car nous nous inquiétions des effets de l’épidémie sur ces deux organisations. Ce sont des organisations que nous ne pouvons pas nous permettre de voir disparaître. Le ministre du Patrimoine et le premier ministre ont été réconfortés d’apprendre que, grâce au programme de subventions salariales, entre autres, ces organisations ont réussi à maintenir leurs activités malgré les nombreuses difficultés. J’en conclus donc que Folklorama va être encore là pendant 50 ans.
Notre industrie de la culture et du patrimoine a besoin d’organisations comme Folklorama, car c’est un véritable vivier d’acteurs, d’actrices et de producteurs. C’est la raison pour laquelle, quand on analyse le projet de loi , il faut prendre la mesure de son immense contribution à la société canadienne.
J'encourage tous les députés à suivre le conseil du . S'ils ont des idées ou des propositions d'amendement, ils devraient les présenter. Nous sommes ouverts aux suggestions pour avoir la meilleure loi possible.
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Monsieur le Président, j'ai le plaisir de m'exprimer aujourd'hui sur le projet de loi , dont nous discutons.
Ce projet de loi était très attendu par le secteur culturel canadien, les entreprises de communication et de radiodiffusion et les médias en général.
Cependant, on attendait un projet de loi qui soit à la hauteur des changements qui se sont produits dans le domaine des communications depuis que la Loi sur la radiodiffusion a été mise en œuvre, il y a de cela plusieurs décennies.
J'ai beaucoup de respect pour le , qui a fait cette semaine un vibrant plaidoyer en faveur du projet de loi . D'ailleurs, voici comment il commençait son discours:
De 2011 à 2019, le nombre de Canadiens abonnés à Netflix est passé d'un pour dix à presque six pour dix. Le nombre de Canadiens qui utilisent Spotify pour écouter de la musique en ligne est passé de 2 % en 2014 à presque 30 % en 2019. Nous nous félicitons de ces innovations qui apportent tant de richesse à nos vies et tant de contenu diversifié. Toutefois, le maintien du statu quo ne fera que nuire davantage à notre capacité de raconter nos propres histoires canadiennes.
Malheureusement, le ministre, qui a fait le saut avec le Parti libéral du Canada peu de temps avant l'élection générale de 2019, a rapidement pris les mauvais plis du et du gouvernement libéral.
Le projet de loi est un projet de loi d'intention et de paroles, mais il contient peu de mesures et surtout peu de réponses aux nombreuses questions que se posent avec justesse les consommateurs, les entreprises et les médias canadiens. Le monde des médias s'attendait à plus et le demandait.
Je vais raconter l'histoire de l'évolution des médias telle que je l'ai vécue moi-même au fil des ans. J'ai commencé ma carrière à la radio, en 1984, dans une toute petite station à Asbestos, qui s'appelle maintenant Val-des-Sources. La radio s'appelait CJAN. J'étais un employé surnuméraire et faisais de l'animation la fin de semaine. J'étais aussi animateur journaliste quand on en avait besoin.
À l'époque, la station ainsi que le journal local étaient les seules sources d'information entièrement locale de la MRC de l'Or-Blanc, comme on l'appelait jadis. Deux animateurs et un journaliste travaillaient à temps plein et il y avait un employé surnuméraire en plus de l'administration. Il y avait surtout beaucoup d'heures de production locale.
Ensuite, je me suis dirigé du côté de Thetford Mines, une plus grande ville, et j'ai travaillé dans une station de radio sur la bande AM. Certaines personnes qui ont été élues depuis la dernière élection ne savent probablement même pas ce qu'est la bande AM. La station CKLD comptait une trentaine d'employés travaillant de la production publicitaire au journalisme et à l'animation. La production était locale à 100 %.
Ces deux stations faisaient partie de ce qu'on appelait le Réseau des Appalaches, un regroupement indépendant qui couvrait l'Estrie, Chaudière-Appalaches et une partie des régions du Centre-du-Québec. À cette époque, j'écrivais mes nouvelles sur une machine à écrire avec du papier carbone pour avoir des copies des nouvelles afin d'être sûr de pouvoir les classer. C'est ainsi que cela se passait.
Le déploiement de la technologie s'est alors amorcé, et j'ai reçu une machine à écrire qui gardait miraculeusement en mémoire une ligne à la fois, ce qui faisait que je n'avais plus besoin de liquide correcteur pour corriger mes fautes.
Ensuite, il y a eu l'arrivée des radios de la bande FM, des ordinateurs et du téléphone cellulaire. Tout cela a bouleversé la réalité du domaine de la radiodiffusion. Quand je suis arrivé en 1985, nous étions entre 25 ou 30 employés à la station. Sept ans plus tard, j'ai dû quitter la station; nous n'étions plus que 4 animateurs-journalistes à temps plein alors qu'Internet n'existait toujours pas.
À ce moment-là, j'ai fait une pause des médias pendant quelques mois et je suis devenu rédacteur en chef du Courrier Frontenac de Thetford Mines. À cette époque, on publiait le Courrier Frontenac, le courrier du mercredi et un journal mensuel pour un autre secteur de la MRC et il y avait aussi un autre journal qui faisait des spécialités. On comptait sur une équipe de cinq journalistes et des collaborateurs. Bref, c'était une vraie belle entreprise de communication locale.
Pour remettre les choses en perspective, c'était à l'époque où l'on faisait développer les films de nos appareils photo, le montage se faisait presque entièrement à la main et il fallait nous-mêmes livrer les pages montées à l'imprimerie pour qu'elles soient imprimées et distribuées. Voilà comment cela se passait. Thetford Mines avait même un autre hebdomadaire concurrent.
À l'époque, nous étions assez de journalistes à Thetford Mines pour constituer une équipe de balle-molle. Nous nous nommions « Les Chevaliers du Crayon ». Dans notre milieu, il y avait assez de couverture locale et de journalistes pour que nous puissions avoir une équipe de balle-molle. C'est tout dire.
Quand je suis parti en 1998 pour faire de la politique, il ne restait plus qu'un seul hebdo et de moins et moins de journalistes. La concurrence était toujours forte, mais elle était encore locale. Depuis ce temps sont arrivés les babillards électroniques, où l'on se branchait pour avoir accès à du contenu gratuit par le biais de modems. Les téléphones cellulaires sont devenus de plus en plus portables, puis il y a eu Internet, les protocoles de compression de données, la haute vitesse, Yahoo, YouTube, Facebook et tous les réseaux sociaux.
Aujourd'hui, chez nous, à Thetford Mines, il y a encore une station de radio et un hebdomadaire. Le nombre de personnes qui y travaillent se compte sur les doigts de mes deux mains seulement, et je n'ai besoin que de deux doigts pour compter le nombre de journalistes à temps plein qu'il reste à Thetford Mines.
Hier, le hasard a bien fait les choses. Le Courrier Frontenac a publié un article, dans son édition hebdomadaire, sous la signature de Médias d'Info Canada. Je me permets d'en citer un extrait:
Depuis la création des premiers journaux au Canada, le journalisme de qualité a été soutenu et maintenu par les revenus publicitaires. Pourtant, pratiquement tous nos médias numériques sont aujourd'hui confrontés à une menace existentielle en raison des pratiques anticoncurrentielles des géants du Web que sont Facebook et Google. C'est certainement le cas du journal que vous lisez en ce moment. Ces deux géants mondiaux contrôlent 80 % de tous les revenus publicitaires.
Maintenant, parlons un peu des perspectives de la radio. En août dernier, l'Association canadienne des radiodiffuseurs, ou ARC, publiait les résultats d'une étude économique sur la crise de leur domaine et l'avenir de la radiodiffusion locale. Les chiffres qui y ont été publiés sont effrayants. Selon les prévisions indiquées dans le rapport, il est possible que 50 stations de radio ferment leurs portes d'ici les quatre à six prochains mois, que 150 stations de radio de plus en fassent autant dans les 18 prochains mois et qu'en plus, au moins 40 des 94 stations de télévision privées locales du Canada cesseront leurs opérations dans les 12 à 36 mois.
Ce sont des chiffres qui m'inquiètent. Lenore Gibson, présidente du comité-conseil exécutif de l'ARC, déclarait dans le communiqué de presse accompagnant la publication de ce rapport:
En l'absence de mesures immédiates, le Canada verra une vague de fermetures de services locaux de radio et de télévision au cours des trois prochaines années. Par conséquent, de nombreuses communautés seront privées d'une voix médiatique quotidienne à l'échelle locale et la diversité des choix et des sources de nouvelles sera réduite de beaucoup dans presque chaque communauté du pays.
Cela est inquiétant. Carmela Laurignano, vice-présidente et chef de groupe chez Radio Evanov Communications Group, déclarait, à juste titre: « Si nous laissons les nouvelles locales mourir, la vitalité de la société canadienne s'en trouvera gravement compromise. »
Revenons au projet de loi . Que fait-il pour aider les radios et les journaux de ma région et des autres régions du Québec? Il ne fait absolument rien. Pourtant, il s'agissait d'une occasion unique pour le de faire un geste concret pour aider la production locale. Quand je dis « locale », je veux vraiment dire « locale », c'est-à-dire 100 % francophone chez nous.
On comprendra que je m'attendais à ce que les changements à la Loi sur la radiodiffusion soient à la hauteur des changements vécus par le monde des médias au cours des dernières années. Je suis extrêmement déçu. Ce projet de loi n'assure pas que les géants du Web, comme Google et Facebook, doivent se plier aux mêmes règles de concurrence que les entreprises canadiennes.
Dans son rapport intitulé « Relever les défis fiscaux posés par l'économie numérique », l'Organisation de coopération et de développement économiques, dont le Canada est membre, a donné plusieurs recommandations sur la manière de recueillir des informations à l'ère du numérique et des compagnies sans adresse physique.
Les autres membres du G20 et de l'Union européenne, l'Australie — dont il est beaucoup question —, l'Afrique du Sud, le Japon et la Corée du Sud ont tous modernisé leurs lois pour s'adapter aux nouvelles réalités du commerce électronique, mais pas le Canada.
Ces dernières semaines et depuis 2015, on a souvent entendu dire que le Canada est le dernier pays du G7 et du G20. Il y a une exception, cependant: le gouvernement libéral a fait du Canada le premier pays du G7, du G20 et du monde à avoir approuvé un accord avec Netflix pour un investissement forfaitaire, mais sans aucune garantie du géant du Web sur, notamment, le contenu francophone.
On ne connaît pas les détails, mais une chose est sûre: Netflix, Disney, Apple, Amazon et Spotify ne sont pas taxés au Canada, ils ne cotisent pas au Fonds des médias du Canada et n'ont aucune obligation de diffuser du contenu canadien. Ce sont des compagnies qui génèrent des milliards de dollars et à qui on rend la tâche plus facile en les laissant jouer selon des conditions différentes de celles qu'on impose aux compagnies locales qui, elles, doivent payer taxes et impôts ici, au pays.
Le résultat de tout cela, c'est une compétition injuste et déloyale qui cause des pertes d'emplois importantes dans les industries culturelle et journalistique et qui dégrade la qualité de notre produit national. Le problème n'est pas un manque de créativité. Nous savons bien que nous en avons beaucoup. Cependant, pour créer, cela prend des ressources, et en n'ayant pas les ressources nécessaires, parce que les recettes fuient le pays, on perd des centaines de millions de dollars en revenus fiscaux qu'il aurait été possible d'utiliser pour améliorer la création canadienne et québécoise.
Quand nous avons entendu parler d'une réforme de la Loi sur la radiodiffusion, nous nous attendions tous à ce que la question de l'imposition soit soulevée. D'ailleurs, dans le rapport Yale, intitulé « L'avenir des communications au Canada: le temps d'agir », sur lequel se base le projet de loi , on en a fait une des recommandations primaires. Je le cite:
Par contre, la question de l'application des taxes de vente aux services Internet étrangers relève d'une logique différente. À l'instar des mesures prises par certaines provinces et par plusieurs autres pays, nous recommandons que les taxes de vente soient imposées de façon équitable aux entreprises étrangères qui fournissent des services de communication médiatique en ligne. Cela mettrait fin au désavantage concurrentiel que subissent les fournisseurs canadiens.
Soit qu'on taxe les entreprises, soit qu'on ne les taxe pas. Lors de la campagne à la direction du Parti conservateur, le député de et chef de l'opposition a proposé, à juste titre, d'éliminer la taxe sur les produits et services pour les abonnements aux plateformes numériques canadiennes, favorisant ainsi le contenu culturel en ligne diffusé par des entreprises culturelles canadiennes, comme Club illico et ICI Tou.tv. Cela contribuerait à créer des conditions plus équitables en présence de plateformes numériques étrangères telles que Netflix, Crave ou encore Disney+.
Historiquement, à chaque réforme considérable de la loi régissant la radiodiffusion, le texte définit clairement les nouvelles technologies et comment elles se comparent avec les joueurs conventionnels. En 1929, on parlait des ondes radio. En 1968, c'était le câble. En 1986, c'était le satellite et la télévision payante. Puis, il y a eu une révision en 1991. Presque 30 ans plus tard, il y a eu des avancées technologiques importantes comme on n'en avait jamais vu, et ce, dans une très courte une période temps. Or le gouvernement libéral nous présente un projet de loi qui n'explique pas comment les plateformes numériques et les joueurs conventionnels vont se concurrencer dans le même marché ni selon quelles conditions ils vont le faire.
De plus, les définitions sont vagues ou même manquantes. Que signifie « média social », dans la liste des exclusions sous la catégorie « exploitation d'une entreprise de radiodiffusion »? Le paragraphe 1(3) du projet de loi vise à ajouter le texte suivant après le paragraphe (2) de la Loi sur la radiodiffusion:
(2.1) Ne constitue pas l’exploitation d’une entreprise de radiodiffusion pour l’application de la présente loi le fait, pour l’utilisateur d’un service de média social, de téléverser des émissions en vue de leur transmission par Internet et de leur réception par d’autres utilisateurs, en autant que cet utilisateur ne soit pas le fournisseur du service, son affilié ou le mandataire de l’un deux.
Est-ce qu'on parle de Facebook? Est-ce qu'on parle de YouTube? Est-ce qu'on parle des chaînes payantes de YouTube, qui cumulent 2,5 milliards de vues?
Il y a un autre point qu'il faut absolument aborder, soit le fait que le projet de loi va donner un vaste pouvoir discrétionnaire au CRTC afin de définir ce qui est une entreprise en ligne et d'obliger de telles entreprises à effectuer des dépenses pour produire et diffuser du contenu canadien. D'autre part, l'obligation des entreprises de contribuer à hauteur de 5 % de leurs revenus bruts au Fonds des médias du Canada, qui subventionne des productions canadiennes, n'est pas explicitement mentionnée par le texte de loi, pas plus que le calcul utilisé pour estimer les 830 millions de dollars de cotisations dont parlait le ministre. C'est peut-être aussi 1 milliard de dollars, car le ministre donne parfois ce chiffre aussi.
Les contributions des diffuseurs au Fonds des médias du Canada totalisaient, pour 2019-2020, 193 millions de dollars. Le ministre dit que le projet de loi C-10 va faire augmenter cette somme à 1 milliard de dollars. J'aimerais bien connaître la règle de trois qu'il a utilisée pour arriver à cette estimation.
Le gouvernement a choisi, en fin de compte, de céder sa responsabilité au CRTC plutôt que se mouiller lui-même. D'abord, on connaît la position du CRTC relativement à cette question. Dans une entrevue au journal La Presse, en 2018, le président du CRTC, Ian Scott, expliquait qu'il n'y avait pas lieu d'imposer des conditions à Netflix ou aux autres diffuseurs concernant le contenu francophone. Je le cite:
Ça marche très bien parce que les objectifs de la Loi sur la radiodiffusion sont atteints: il y a une industrie en santé qui a du succès dans les deux langues officielles. Nous observons que le système n'est pas brisé, même s'il est sous une pression sévère.
C'est le président du CRTC qui a dit cela.
Deuxièmement, il y a les décisions concernant notamment l'ordonnance d'exemption relative aux médias numériques, qui est continuellement renouvelée. On sait que le CRTC va prendre au moins neuf mois pour se prononcer. Avec le projet de loi C-10, le gouvernement libéral instaure une vaste délégation de pouvoirs au CRTC, sans y inclure de balises claires en matière de pourcentage de contenu canadien, de frais de contribution et de dépenses, d'exigence de contenu francophone, etc.
D'ailleurs le projet de loi choisit même de limiter les pouvoirs de surveillance des comités parlementaires quant aux directives et règlements adoptés par le CRTC et à la capacité d'un diffuseur de faire appel d'une décision du CRTC.
Le message qu'envoie le gouvernement au CRTC, finalement, c'est qu'il faut lui faire confiance et qu'on verra plus tard. Il attendra donc plusieurs mois pour que le CRTC agisse, et le Parlement aura un droit de regard très limité.
Par ailleurs, tout le monde ne partage pas l'opinion jovialiste du ministre concernant les retombées du projet de loi C-10 pour la production canadienne. Voici ce qu'en pense Michael Geist, professeur de droit à l'Université d'Ottawa et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en droit d'Internet et du commerce électronique:
[Traduction]
À court terme, le projet de loi crée un climat de grande incertitude, ce qui pourrait faire en sorte qu'il y ait moins d'investissements dans la production cinématographique et télévisuelle canadienne et que les consommateurs aient moins de choix, car les nouvelles entreprises de diffusion en continu pourraient éviter le marché canadien jusqu'à ce qu'il y ait plus de clarté sur ce qu'il en coûte de faire des affaires. Les services de diffusion en continu sur Internet sont en voie de devenir hautement réglementés au Canada, et l'incertitude concernant les coûts aura certainement des conséquences. Le processus réglementaire prendra des années parce qu'il faut lancer un appel au public pour recueillir leurs commentaires, tenir une longue audience, obtenir une décision initiale, traiter les demandes de révision et de modification de la décision, procéder aux examens judiciaires et traiter les éventuels appels judiciaires. Si l'un des appels est retenu, le CRTC est tenu de réexaminer sa décision, et tout le processus doit recommencer.
[Français]
C'est quelqu'un qui étudie les lois et tout ce qui se passe dans le domaine du commerce et de la diffusion numériques qui nous fait cette déclaration. Je cite encore une fois le ministre du Patrimoine canadien:
Nous irons aussi un petit peu plus loin et nous donnerons au CTRC des instructions sur la manière d'utiliser ces nouveaux outils. Cela se fera une fois que le projet de loi aura reçu la sanction royale, étant donné que ce projet de loi apporte des modifications qui permettent l'application de cette directive stratégique essentielle.
Qu'est-ce que cela signifie, « une fois que le projet de loi aura reçu la sanction royale »? Quelles seront ces instructions? Pourquoi le ministre n'a-t-il pas mis en annexe du projet de loi ses instructions au CRTC? Qu'y a-t-il dans ces instructions que le ministre ne veut pas que les Canadiens voient? Les instructions en question seront-elles quelque chose qui équivaut à dire qu'on n'a pas fait le travail, qu'on a promis de faire quelque chose, mais qu'on ne sait pas comment s'y prendre, qu'on ne veut surtout pas passer pour les méchants qui vont brimer les réseaux sociaux et qu'on va donc donner au CRTC le sale boulot et la responsabilité de prendre toutes les décisions?
C'est cela, le problème, en ce qui concerne le projet de loi C-10 et les libéraux: tout est dans le paraître et non dans l'action.
En résumé, ce projet de loi est vague et ne tient pas compte d'aspects importants. Il ne garantit pas que les géants du Web comme Google et Facebook devront concurrencer les autres entreprises selon les mêmes règles que les entreprises canadiennes doivent suivre. Il n'explique pas comment les plateformes numériques et les joueurs conventionnels vont se faire concurrence selon les mêmes conditions. Il ne répond pas à l'enjeu du contenu exclusif partagé sur les plateformes numériques. Il ne précise pas les lignes directrices qui seront mises en place pour la production du contenu canadien et les contributions au Fonds des médias du Canada.
Nous allons proposer des amendements en comité. Il est temps de réformer la Loi sur la radiodiffusion. Celle-ci existe et elle a laissé mourir trop de radios locales partout au pays. Elle est en train de faire mourir les journaux et les médias, et elle ne fait rien contre la propagation des discours haineux.
Le ministre demande que tous collaborent à l'amélioration de son projet de loi. Nous allons collaborer, mais on doit convenir que la mouture actuelle est loin d'être acceptable. On va avoir besoin de contenu, de clarté et de précisions. La balle est dans le camp du ministre. Nous allons voir maintenant si le ministre est prêt à écouter les recommandations et les propositions des différents partis de l'opposition.
:
Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec la députée de .
[Français]
Monsieur le Président, c'est un honneur de prendre la parole aujourd'hui pour débattre du projet de loi et des mesures qu'il contient pour appuyer les créateurs francophones et le contenu de langue française.
Notre gouvernement est le premier depuis 1991 à moderniser la Loi sur la radiodiffusion en réaction aux changements technologiques. Je tiens à rappeler à la Chambre pourquoi cette mesure législative est si importante et cruciale pour nos artistes et créateurs.
La télévision et la radio nous accompagnent tout au long de notre vie. Je me souviens d'émissions comme Bobino et Bobinette ou Passe-partout et des films qui ont marqué notre histoire comme Le déclin de l'empire américain ou Crazy. Chacun de nous se remémore, souvent avec beaucoup d'émotion, les émissions qui ont marqué nos vies.
La télévision et la radio sont à la fois source de divertissement, de découverte, de culture et d'information. Elles nous touchent, nous inspirent, nous émerveillent et nous permettent de nous ouvrir sur le monde. La télévision et la radio contribuent à forger notre identité, notamment notre identité francophone. Elles contribuent aussi à ce que nous nous connaissions et nous comprenions les uns les autres dans toute notre diversité.
Historiquement, dans le cadre du système canadien de radiodiffusion, les services de radiodiffusion traditionnels comme la radio, la télévision et le câble étaient obligés de financer le contenu canadien qui comprend nos histoires et nos chansons. Par contre, les services de radiodiffusion en ligne comme Netflix, Crave, Spotify ou QUB musique ne sont pas soumis aux mêmes exigences réglementaires que les services traditionnels.
Cette situation a donné lieu à un déséquilibre réglementaire et met en péril l'avenir du financement du contenu de chez nous. Notre projet de loi vise à faire que les services de radiodiffusion tant traditionnels qu'en ligne contribuent au secteur créatif. Pour y arriver, nous devons modifier la définition de ce qui constitue une entreprise de radiodiffusion pour y inclure les entreprises en ligne, lesquelles n'existaient pas en 1991.
La modification de cette définition dans la Loi sur la radiodiffusion fera que les entreprises en ligne devront contribuer financièrement à la production culturelle canadienne et québécoise. Bien entendu, ces contributions devront profiter à un large éventail de créateurs et de consommateurs canadiens, ainsi qu'aux francophones de partout au pays.
Nous savons que les Franco-Canadiens et les Québécois aiment leurs productions télévisuelles et leurs artistes musicaux. Les émissions francophones dans le marché de langue française et les artistes musicaux francophones connaissent un grand succès et récoltent de bonnes cotes d'écoute.
Pour le Québec et toutes les communautés francophones en situation minoritaire, la télévision et la radio de langue française jouent un rôle essentiel en appuyant la francisation des enfants et en créant un sentiment d'appartenance chez des populations qui sont souvent isolées.
Si la télévision et la radio sont d'une grande importance pour forger notre identité, elles le sont d'autant plus pour ce qui est de l'identité francophone, qui est minoritaire en Amérique du Nord. L'arrivée des radiodiffuseurs en ligne est venue chambarder le secteur canadien de la radiodiffusion, et le marché de langue française n'a pas été épargné.
Les radiodiffuseurs en ligne soulèvent d'immenses défis en lien avec la disponibilité et la promotion du contenu de langue française, notamment le contenu produit par nos communautés francophones en situation minoritaire et le contenu produit au Québec.
Les statistiques révèlent que 47 % des francophones regardent un contenu majoritairement anglophone sur Netflix, contrairement à la télévision traditionnelle où les services en français captent 92 % de l'auditoire dans le marché francophone. Cela démontre que les francophones cherchent du contenu dans leur langue et dans leur voix.
Il faut aussi constater que la moyenne des budgets de production de films et de vidéos en anglais est à la hausse depuis quelques années, contrairement aux budgets moyens pour les productions en français qui ont diminué et pour lesquels le financement provenant d'investisseurs étrangers demeure peu élevé.
Pour ce qui est de la musique et des plateformes numériques, soulignons qu'il n'y avait en 2017 que six artistes canadiens francophones dans le palmarès des 1 000 artistes de la musique dont les diffusions en continu ont été les plus populaires au Canada. De toute évidence, on ne peut pas rester sans rien faire: il faut agir.
La création de contenu dans les deux langues officielles est un objectif culturel essentiel, et ce, quelles que soient les avancées technologiques ou autres dans le secteur de la radiodiffusion.
C'est pourquoi notre projet de loi donne au CRTC les outils dont il a besoin pour veiller à ce que le financement et la réglementation soutiennent le contenu canadien dans les deux langues officielles, mais surtout pour qu'il tienne compte des besoins particuliers des francophones. Il en va de la survie du contenu francophone et de la protection de notre souveraineté culturelle.
Le CRTC veille depuis longtemps à l'application d'un cadre réglementaire rigoureux à l'égard des services traditionnels pour soutenir et promouvoir le contenu de langue française. Grâce aux efforts du CRTC, depuis 10 ans, le volume de la production télévisuelle de langue française est stable et représente 25 % du volume total de la production télévisuelle canadienne. Les efforts du CRTC ont aussi servi à mettre en valeur la musique de langue française. À cet effet, les stations de radio de langue française doivent consacrer au moins 65 % de leur programmation hebdomadaire de musique populaire à la musique de langue française.
On peut s'attendre à ce que le CRTC mette en place un cadre réglementaire tout aussi rigoureux en ce qui concerne les radiodiffuseurs en ligne. Il veillera à ce que ceux-ci soutiennent de façon juste et équitable le contenu canadien dans les deux langues officielles et tiennent compte des besoins particuliers des créateurs francophones partout au pays, surtout au Québec.
Je me réjouis de constater qu'avec la modernisation de la Loi sur la radiodiffusion, le CRTC aura un cadre réglementaire pour les dépenses, afin qu'une partie des sommes et des revenus soit réinvestie dans les productions d'ici.
En somme, ce projet de loi reconnaît l'importance d'investir dans la création de contenu diversifié qui reflète tous les francophones et tous les Canadiens de partout au pays. Il témoigne de notre détermination à veiller à l'épanouissement de la création d'histoires et de chansons dans les deux langues officielles à l'ère numérique.
Nous nous sommes engagés à renforcer la Loi sur les langues officielles en tenant compte de la réalité particulière du français en Amérique du Nord. Je sais que ma collègue s'apprête incessamment à vous présenter cela. Notre projet de loi a pour but ultime de préserver un écosystème de radiodiffusion durable qui maintient un appui à l'égard des histoires et des chansons de chez nous. Ce cadre législatif et réglementaire offrira un appui sans équivoque aux radiodiffuseurs, aux producteurs et aux créateurs d'ici.
Depuis la création de la première commission royale sur la radiodiffusion en 1928, le gouvernement du Canada s'emploie sans cesse à élaborer des politiques qui sont adaptées à l'évolution de la technologie. Je suis fière que notre gouvernement s'inscrive dans cette lignée et fasse avancer la Loi sur la radiodiffusion face à cette nouvelle ère numérique. Je suis convaincue que tous les députés à la Chambre souhaitent préserver notre souveraineté culturelle et encourager le secteur essentiel de la culture.
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Monsieur le Président, c’est un immense privilège pour moi de prendre la parole à la Chambre aujourd’hui au nom des citoyens de Davenport pour appuyer le projet de loi , Loi modifiant la Loi sur la radiodiffusion et apportant des modifications connexes et corrélatives à d'autres lois. Je remercie le de son leadership et du travail qu’il a accompli relativement au projet de loi avec sa , son ministère et son équipe.
Comme je l’ai mentionné à plusieurs reprises à la Chambre, la circonscription de Davenport, dans l'Ouest de Toronto, compte plus d’artistes, de créateurs et de membres du secteur culturel que probablement la plupart des circonscriptions du pays. Il y a des producteurs de cinéma, des écrivains, des réalisateurs et des musiciens, et aussi des galeries d’art et des musées. Tout ce qui a une incidence sur les arts et la culture intéresse donc beaucoup ma circonscription.
Les secteurs canadiens de la radiodiffusion, du cinéma, de la télévision et des médias interactifs occupent aussi une place énorme dans l’économie canadienne. Ils rapportent environ 19,7 milliards de dollars au PIB du Canada et représentent près de 160 000 emplois. Beaucoup de gens ne le savent pas, mais les arts, la culture et le patrimoine contribuent à l’économie canadienne à hauteur de 47,8 milliards de dollars. Ce secteur emploie plus de 650 000 Canadiens dans le pays. Il s’agit d’un immense secteur qui est très important, d’où l’importance particulière de ce type de projet de loi.
Il y a quelques années que nous promettons de moderniser la Loi sur la radiodiffusion afin de rendre les règles du jeu équitables. Je suis donc heureuse que la Chambre soit maintenant saisie du projet de loi .
Nous mentionnions dans notre programme électoral de 2019 que nous voulions, au cours de la première année de notre mandat, présenter un projet de loi qui contiendrait les mesures appropriées pour que tous les fournisseurs de contenu, y compris les géants du Web, offrent plus de contenu canadien dans leur répertoire, contribuent à la création de contenu canadien dans les deux langues officielles, fassent la promotion de ce contenu et le rendent facilement accessible sur leurs plateformes.
Nous savons aussi qu’en janvier 2020, le Groupe d'examen du cadre législatif en matière de radiodiffusion et de télécommunication a remis son rapport intitulé « L’avenir des communications au Canada: le temps d’agir ». Ce rapport comprend plusieurs recommandations et propositions pour améliorer notre système de radiodiffusion ici, au Canada, qui sont reprises dans le projet de loi .
Que propose le projet de loi ?
Il propose tout d’abord de moderniser la Loi sur la radiodiffusion, dont la dernière mise à jour remonte à avant l’ère numérique. Je crois, comme ma collègue vient de le dire, que la dernière réforme majeure de la Loi sur la radiodiffusion date d’il y a presque 30 ans, de 1991.
Le Canada soutient depuis longtemps la création musicale, cinématographique, télévisuelle et numérique canadienne, ainsi que l’accès à ces œuvres, tout en facilitant l’accès des Canadiens au contenu étranger. Nous avons toujours eu ce que nous appelons un système de radiodiffusion fermé orienté sur la propriété et le contrôle canadiens des entreprises montrant un contenu canadien. Cependant, aujourd’hui, avec l’augmentation de la programmation consommée sur Internet, le cadre législatif et réglementaire de la radiodiffusion doit être modernisé. C’est la première chose que fait le projet de loi . Il précise que la diffusion en ligne est régie par la loi. Il est incroyable qu’il nous ait fallu tout ce temps pour arriver à cette mesure.
Comme nous le savons, les Canadiens ont de plus en plus accès à la musique et à la télévision par des services en ligne, comme Netflix, Spotify, Crave et CBC Gem. Nous savons que ces services de vidéo en ligne ont vu leurs revenus augmenter d’environ 90 % par an au cours des deux dernières années, alors que les radiodiffuseurs traditionnels voient le leur baisser de près de 2 % par an depuis cinq ans. Cette nouvelle domination du marché illustrée par Netflix, qui est aujourd’hui présent dans presque tous les foyers canadiens, y compris le mien, a généré plus de 1 milliard de dollars de revenus au Canada en 2019.
Nous savons également que les services de diffusion en ligne ne sont pas assujettis aux mêmes règles que les services de radiodiffusion traditionnels, comme la télévision par ondes hertziennes, le câble et la radio. Aux termes des lois canadiennes sur la radiodiffusion, les diffuseurs de contenu en ligne ne sont pas tenus de soutenir la musique et les histoires canadiennes et d’autres objectifs importants de la radiodiffusion. Quel est le résultat? Nous voyons les revenus des diffuseurs de contenu en ligne augmenter, mais ces derniers ne sont pas tenus de contribuer à la musique et aux histoires canadiennes. Parallèlement, les revenus des radiodiffuseurs traditionnels stagnent et baissent, ce qui signifie que nous avons une incidence générale négative sur le financement du contenu canadien et sur la promotion des créateurs canadiens. Le soutien au contenu canadien est donc menacé, et l'objectif du projet de loi est de régler cette question.
De plus, il remédie aussi au déséquilibre réglementaire qui désavantage les radiodiffuseurs canadiens traditionnels face à la concurrence des diffuseurs de contenu en ligne. Le projet de loi actualise la politique et la réglementation de la radiodiffusion afin de garantir un traitement juste et équitable des diffuseurs de contenu en ligne et des radiodiffuseurs traditionnels, de sorte qu'il n'y ait pas un ensemble de règles pour les radiodiffuseurs canadiens et un autre pour les diffuseurs étrangers.
Les modifications proposées par le projet de loi permettent au CRTC de mettre en œuvre un cadre de réglementation de la radiodiffusion modernisé qui garantisse que les entreprises de radiodiffusion traditionnelles et de diffusion en ligne contribuent de façon appropriée au système de radiodiffusion canadien.
Il convient de souligner que, même si nous savons qu’il s’agit une première étape importante, nous savons aussi que nous allons devoir entreprendre d’autres réformes pour moderniser de fond en comble le système de radiodiffusion et faire en sorte que le Canada continue de soutenir la création et la production de contenu audiovisuel à l’ère numérique.
Que fait encore le projet de loi ? Il met à jour la politique de réglementation de la radiodiffusion afin que le CRTC puisse faire entendre des voix créatrices plus diverses dans le secteur de la radiodiffusion, surtout en ce qui concerne les Autochtones, les communautés racialisées et les personnes handicapées.
Il s’agit d’une demande énorme de la part des artistes et des créateurs de Davenport, dont 40 % sont nés à l’étranger. Pour eux, il est vraiment important d’entendre les voix créatives de nos multiples origines ethnoculturelles, statuts socioéconomiques, capacités et handicaps, orientations sexuelles, identités et expressions de genre et âges. Il s’agit d’une demande énorme de la part de ma communauté, c’est pourquoi je tiens à les remercier de leurs revendications soutenues. Je suis ravie que le projet de loi le permette.
Le projet de loi modifierait aussi la loi pour mieux tenir compte des cultures et des langues autochtones. À mon avis, c’est extraordinairement important, car cela s’inscrit dans l’effort que nous continuons à déployer pour établir une nouvelle relation de nation à nation avec les peuples autochtones du Canada. Nos histoires nous permettent de mieux nous comprendre et d’apprendre à nous connaître les uns les autres.
Je suis également heureuse de dire qu’une Loi sur la radiodiffusion actualisée, qui traite les radiodiffuseurs en ligne et conventionnels sur un pied d’égalité, augmenterait le financement mis à la disposition des artistes et des créateurs canadiens. En réalité, on estime que ces modifications se traduiraient par une augmentation des contributions à la musique et aux histoires canadiennes pouvant atteindre 830 millions de dollars par an une fois que le nouveau système sera mis en place.
Nous nous devons de souligner que la façon dont les artistes et les créateurs gagnent un revenu a changé. Le monde qui est devenu de plus en plus numérique a exacerbé l’enjeu général lié à la façon dont les artistes canadiens gagnent un revenu. Il est vraiment important que nous modifiions la Loi sur la radiodiffusion afin de commencer à régler cette question.
Je tiens aussi à souligner que nous traversons actuellement une pandémie sans précédent et que le milieu des arts et de la culture est touché de manière disproportionnée. Ce type de disposition législative permettra d’apporter certains changements structurels et nous aidera à créer un secteur plus sain et économiquement viable pour l’avenir.
Je me dois de mentionner que le contenu généré par les utilisateurs n’est pas inclus dans le projet de loi , de sorte que les jeux vidéo et les médias d’information ne seraient pas touchés par les modifications que nous proposons. C’est important de le souligner.
Je sais que mon temps de parole touche à sa fin, alors je vais conclure en disant que je suis absolument ravie des efforts que le a déployés pour moderniser la Loi sur la radiodiffusion et uniformiser les règles du jeu afin que tous nos créateurs bénéficient d’un financement accru pour raconter des histoires canadiennes. Je suis très favorable à ce projet de loi. Il nous offre l’occasion d’avoir un secteur de la radiodiffusion plus inclusif pour tous les Canadiens, qui soient francophones, anglophones ou issus de communautés racialisées: des Canadiens de toutes les diversités et de tous les statuts.
Le projet de loi garantira que la situation et les aspirations de tous les Canadiens seront prises en compte dans la Loi sur la radiodiffusion. Il créera un système de radiodiffusion plus équitable, obligeant les radiodiffuseurs en ligne à verser leur juste part. Ces modifications moderniseront certainement la Loi sur la radiodiffusion pour l’ère numérique pour de nombreuses années à venir.
J’aimerais terminer en disant que je veux me faire l’écho des propos tenus hier par le , qui a exhorté tous mes collègues à appuyer ce projet de loi. Plus vite ce projet de loi sera adopté, plus vite nous pourrons mettre en place un système plus équitable.
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Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui pour traiter du projet de loi , déposé par le concernant la radiodiffusion.
Certes, une modernisation s'impose, car on dit que la Loi sur la radiodiffusion n'a pas été dépoussiérée et modernisée depuis plus de 28 ans. À l'époque, Internet n'existait pas. Les médias sociaux étaient inexistants. On ne parlait pas des géants du Web et on n'avait pas toujours nos applications et notre tablette avec nous. Le contexte a évidemment évolué. Si tous les députés de la Chambre s'entendent sur une chose, c'est qu'il est urgent d'agir. Il est important de mettre des mesures en place.
Le gouvernement nous avait promis cette modernisation de la Loi dès 2015. Les attentes étaient donc élevées. Il a procédé à des consultations exhaustives. Il a fait beaucoup de promesses. Il a eu un très bon scénario, selon lequel tout le monde devait payer et apporter sa contribution. Cela allait bien de ce côté. Cependant, on en est maintenant au troisième ministre en plus de cinq ans et un projet de loi a été déposé.
Tout à l'heure, j'ai entendu une députée de la région de Québec qui a utilisé une expression fromagère en disant du projet de loi qu'il faisait penser à un gruyère à cause de ses nombreux trous. On cherche le fromage, mais on ne voit que des trous. Cette métaphore tombe à pic, parce qu'on parle de fromage et que les libéraux accouchent d'une souris. C'est pourtant un sujet sérieux, parce qu'on traite d'une industrie extraordinaire. C'est l'un des facteurs de notre identité canadienne que sont la langue, la culture et le contenu canadien.
Malheureusement, le projet de loi fait très peu de choses. Essentiellement, il pellette des responsabilités dans la cour du CRTC pour, en fin de compte, passer à l'action. Il y a beaucoup de choses que ce projet de loi ne fait pas.
On nous dit que le projet de loi va apporter des modifications pour faire en sorte que la radiodiffusion en ligne tombe sous la portée de la Loi. Qu'est-ce que cela veut dire? Cela signifie que la loi du CRTC va donc s'appliquer aux diffuseurs en ligne. On le sait. Ma collègue libérale disait à quel point le CRTC pouvait parfois être un carcan assez lourd sur le plan administratif. Pour nos médias traditionnels canadiens, ce n'est pas évident.
Le ministre nous dit donc qu'il va pelleter cela dans la cour du CRTC et que, d'ici un an, comme un autre collègue l'a mentionné, on va appliquer des règles un peu plus strictes à la diffusion en ligne. Ce n'est pas pourtant ce que le rapport Yale avait demandé et c'est surtout beaucoup moins que ce que le milieu a demandé.
Les géants du Web, comme Google et Facebook, ne sont pas touchés par ce projet de loi, et pourtant, on sait à quel point ces entreprises viennent chercher des revenus importants dans notre société et concurrencent nos entreprises canadiennes.
Le projet de loi C-10 n'explique pas non plus comment les plateformes numériques et les acteurs conventionnels vont se faire concurrence dans les mêmes conditions. En quelque sorte, ce terrain de jeu n'est pas équitable pour tout le monde. On ne dit pas non plus comment va se partager le contenu exclusif sur les plateformes numériques. Évidemment, on ne précise pas les lignes directrices qui seront mises en place concernant la production de contenu canadien et la fameuse contribution au Fonds des médias. Certaines entreprises doivent donc apporter une contribution selon des paramètres établis. Finalement, on constate que les paramètres sont très flexibles. Il ne semble donc pas y avoir d'équité apparente dans le projet de loi.
On l'a vu cette semaine, il y a aussi tout ce qui touche la culture. On sait qu'il y a un pilier canadien formé des cultures de langue anglaise et de langue française et de la culture québécoise. Ce projet de loi semble faire abstraction de cette réalité, et comme le disaient mes collègues bloquistes, qu'en retire la culture québécoise? Ce n'est pas clair du tout.
En ce qui concerne le droit d'auteur, les artistes québécois se plaignent de voir leurs œuvres être diffusées sur des plateformes numériques sans juste contrepartie de leur investissement. Cependant, le projet de loi ne parle pas de cette question.
En fin de compte, le projet de loi vise essentiellement à ce que les radiodiffuseurs en ligne soient assujettis au CRTC. On pellette cela dans la cour du CRTC et on attend de voir ce que cela va donner.
Il est bien sûr très louable que le projet de loi parle de culture autochtone, de personnes handicapées et de la diversité du Canada. Cependant, il serait également important de parler de culture québécoise et canadienne-française et de tout ce qui touche la dualité linguistique et culturelle au pays.
Nous croyons que les conditions doivent être équitables et nous pensons que les politiques devraient tenir compte de l'évolution des marchés. Or, ce qui est proposé aujourd'hui ne fait que pelleter par en avant ce qui aurait dû être fait depuis bien longtemps. De plus, nous aurions aimé que le ministre trouve une façon de réinjecter des dizaines de millions de dollars, voire des centaines, dans notre système.
Pour les gens qui nous écoutent, l'article 19 de la Loi de l'impôt sur le revenu vise l'Agence du revenu Canada et permettrait la pleine déduction des dépenses publicitaires consacrées aux médias numériques étrangers. Cela signifie que le gouvernement canadien cherche à rétablir l'équilibre, mais il ne fait que contribuer à ce déséquilibre.
Depuis 1996, l'Agence n'a pas changé son interprétation de la Loi, qui est basée sur les champs de compétences antérieurs à cette date, pouvant remonter à aussi loin que 1935. Il y avait une petite échappatoire, car les ordinateurs n'existaient pas à cette époque. Les définitions de ce que sont un journal et la radiodiffusion ne reflètent pas ce qu'on appelle la neutralité technologique de la Loi sur la radiodiffusion modernisée en 1991, ni la révolution phénoménale survenue depuis 1996. C'était donc une petite échappatoire, mais qui est devenue un gouffre.
Cela fait que les entreprises étrangères comme Facebook et Google, qui représentent jusqu'à 80 % des revenus publicitaires canadiens en ligne, rivalisent avec nos annonceurs et avec les médias canadiens traditionnels de radiodiffusion et de presse écrite tout en bénéficiant d'un petit coup de pouce du gouvernement. Cette situation a été dénoncée: on ne peut pas encourager des entreprises étrangères à faire concurrence à nos entreprises canadiennes. Pourtant le gouvernement se fait complice de cela.
Mon collègue de disait que le problème du gouvernement, c'est qu'il cherche toujours à ajouter une petite pincée de sel par-ci par-là, mais ne cherche pas à régler les problèmes systémiques. Il faudrait que le gouvernement corrige cette lacune dans le système fiscal canadien. Cela mettrait les joueurs canadiens et les joueurs étrangers sur un pied d'égalité en rétablissant des conditions de marché qui cessent d'avantager les géants du Web.
Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications exhorte le gouvernement à examiner cette échappatoire à l'article 19 de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui contribue au déclin de l'industrie des médias. Le Comité souhaite aussi que le gouvernement voie comment il serait possible d'améliorer la situation de toutes les entreprises canadiennes. Le rapport du Comité a été déposé il y a un an et demi, mais il dort toujours sur les tablettes.
Ce message a été amplifié par des témoins qui représentent divers segments de l'industrie des médias au Canada et qui ont déclaré au Comité que l'élimination de la déduction fiscale pour les publicités diffusées sur les sites Internet étrangers pourrait donner à l'industrie nationale un coup de pouce bien nécessaire.
Par ailleurs, les AMIS de la radiodiffusion plaident eux aussi fortement pour l'élimination de cette déduction fiscale. Ils ont produit un document très étoffé sur la situation. Ils soutiennent que le gouvernement canadien percevrait plus d'impôts le cas échéant, car les entreprises ne cesseraient pas de faire de la publicité sur les supports étrangers, mais seraient incitées à choisir les médias canadiens. On n’encouragerait pas les entreprises à faire affaire avec des entreprises étrangères, mais on assurerait une neutralité qui leur permettrait de choisir.
Le Forum des politiques publiques est du même avis. Il affirme qu'une simple correction à cet article 19 pourrait générer des revenus de 300 à 400 millions de dollars par année dans l'industrie des médias.
On a vu le gouvernement arriver avec des diachylons, alors que des solutions existent déjà. Nul besoin de chercher, il s'agit simplement d'arrêter de subventionner les géants du Web.
Il est donc temps d'entreprendre un examen approfondi de l'article 19 de Loi de l'impôt sur le revenu, et c'est la responsabilité du ministre du Patrimoine, parce que cela touche le nerf de la guerre, c'est-à-dire l'argent que le secteur culturel, le secteur des médias, dans ce cas-là, et le secteur des médias écrits perdent aux dépens des géants du Web.
Des entreprises telles que Google et Facebook sont libres de faire des affaires dans un environnement propice à celles-ci comme le nôtre, mais il n'y a aucune contribution de leur part. Dans le projet de loi, cette iniquité entre les médias traditionnels et les géants du Web, qui ne sont pas touchés, je le répète, est flagrante. C'est une des lacunes de ce projet de loi.
Une autre lacune, c'est qu'on ne s'est pas attaqué à la question de la divulgation. On dit de faire des demandes au CRTC, mais on doit avoir une capacité de divulgation. Quels sont les revenus que touchent les géants du Web? Comment se répartissent leurs recettes et leurs dépenses? Ce sont des choses qu'on doit savoir afin de faire en sorte qu'ils soient traités comme les autres entreprises canadiennes. C'est une autre chose qu'on ne voit pas dans ce projet de loi.
En parlant des géants du Web, un journaliste a dit que ces derniers étaient morts de rire quand ils ont vu le projet de loi du ministre. Le gouvernement libéral a déposé un projet de loi des plus attendu, et ce, le jour des élections américaines. On conviendra que c'est un bon moment pour déposer un projet de loi si on veut qu'il passe inaperçu.
Pourquoi sont-ils morts de rire? C'est parce que ce projet de loi a des lacunes énormes, des trous béants. L'histoire qu'il conte est très bonne: on veut encadrer les géants du Web, qui vampirisent nos médias. Cependant, en réalité, on les laisse courir. C'est un problème, car je réitère qu'il n'y a aucune obligation pour les géants du Web comme Google ou Facebook de verser des redevances aux médias d'information pour le contenu médiatique qu'ils partagent.
Pourquoi allons-nous sur les médias sociaux? C'est justement pour avoir accès à de l'information, et cette information vient souvent de nos médias canadiens. Or, comme on la consomme sur Facebook, les médias canadiens sont bredouilles. Ils n'ont pas de revenus. Le projet de loi ne traite pas de cette question extrêmement importante pour nos médias, particulièrement dans un contexte de pandémie.
C'est la même chose en ce qui concerne la taxation des revenus publicitaires générés par ces plateformes au Canada. De plus, celles-ci ne perçoivent pas de taxes comme telles, alors que les entreprises canadiennes le font. Encore là, il y a une iniquité, et le projet de loi ne traite pas de cette question. Ce sont des milliards de dollars de revenus qui sont en jeu pour le gouvernement, mais c'est aussi une question d'équité pour les entreprises canadiennes.
Alors, je dirais finalement que le projet de loi rate la cible, malheureusement. Ce qui est le plus préoccupant, c'est qu'au moment où le gouvernement dépose son projet de loi, on apprend que Facebook essaie déjà d'engager des gens du CRTC responsables de rédiger la loi. C'est normal que les géants du Web s'intéressent à cela, puisque c'est entre 70 % et 80 % des revenus publicitaires au Canada qui viennent des plateformes médiatiques et numériques.
Comment se fait-il qu'on permette ce copinage entre le CRTC et Facebook, alors qu'on sait que le CRTC va être responsable de faire appliquer la loi? N'est-ce pas permettre au loup d'entrer dans la bergerie? C'est cela qui est préoccupant.
Cette situation est dénoncée notamment par les AMIS de la radiodiffusion. Ils nous rappellent, comme je le mentionnais, que la Loi sur la radiodiffusion a été modernisée en 1991, mais qu'il y a quand même une souplesse. Le projet de loi vise à inclure les médias numériques dans la Loi, mais le CRTC a déjà la capacité réglementaire de le faire. Il suffirait donc au ministre d'indiquer au CRTC d'appliquer les dispositions de la loi de 1991 plutôt que de s'engager dans un processus qui nous mènera un an plus tard.
On sait qu'après chaque mois et chaque semaine qui passent, ces géants du Web continuent d'engranger des profits, et pendant ce temps-là, nos médias canadiens sont dans une situation très délicate. Ce ne sont pas les conservateurs qui le disent, ce sont les AMIS de la radiodiffusion, qui disent que le projet de loi n'élimine pas l'ambiguïté quant aux diffuseurs numériques une fois pour toutes.
En fin de compte, le projet de loi ne clarifie pas cet enjeu important, qui crée deux poids, deux mesures. Comme je l'ai dit tout à l'heure, on établit une approche qui traite les choses à la pièce.
Ainsi, les nouveaux médias numériques vont bénéficier d'une approche flexible, mais les médias traditionnels, eux, auront droit au carcan réglementaire. À ce sujet, on ne cherche pas à rétablir un équilibre en réduisant le carcan réglementaire sur les médias traditionnels, on cherche plutôt à l'imposer aux nouveaux acteurs.
Il y a des éléments intéressants dans le rapport Yale. Un de ceux sur lesquels on s'entend, c'est lorsque le rapport dit qu'il y a urgence d'agir. Malheureusement, le gouvernement n'agit pas, il ne fait que pelleter les pouvoirs dans la cour du CRTC, un an plus tard, alors qu'il était vraisemblablement possible d'exercer ces pouvoirs de manière réglementaire.
En même temps, on dit qu'on doit ouvrir l'écosystème pour faire en sorte que les acteurs traditionnels puissent respirer et être en mesure de concurrencer les nouveaux. À ce sujet, on ne sent pas de volonté chez le ministre de créer cet espace d'oxygène pour nos entreprises canadiennes, qui sont soumises à un carcan qui les étouffe, alors qu'il n'y a aucune règle pour les nouveaux acteurs. On dit maintenant qu'on va commencer à essayer de leur imposer des choses. Cela dit, cela ne s'applique qu'aux diffuseurs numériques. Je rappelle que les géants du Web ne sont pas concernés. C'est une lacune importante de ce projet de loi.
Nos amis de Radio-Canada dénoncent le fait que le projet de loi reste vague quant au contenu canadien. Cela est pourtant fondamental. En effet, on voit les géants du Web investir dans la production de contenu canadien, mais on ne sait pas comment définir cela. Cela n'est pas clair du tout.
Le rapport Yale avait mentionné la révision du mandat de CBC/Radio-Canada. Or c'est une autre grande lacune du projet de loi. Le rapport avait fait des recommandations à cet égard, mais, encore là, on ne retrouve rien là-dessus.
Voilà donc ce qu'on a sur papier. C'est très mince.
Ce qui est encore plus troublant, compte tenu des derniers jours et des dernières semaines, c'est la volonté du ministre d'avoir un espace médiatique ouvert et de permettre aux médias, tant canadiens qu'étrangers, de diffuser de l'information librement.
Cela nous amène à une déclaration du ministre qui était en ondes, cette semaine, dans un studio de Radio-Canada. Il s'est exprimé sur la liberté d'expression, et nous avons trouvé sa déclaration un peu dérangeante et très surprenante. Il a dit que le droit de s'exprimer s'arrêtait là où la blessure de quelqu'un d'autre commençait.
Un commentateur, journaliste et intellectuel québécois a demandé si le ministre voulait faire en sorte que le mode de l'information soit sujet à la tyrannie des susceptibilités. Par exemple, si on n'aime pas qu'une personne tienne un propos sur une collectivité ou sur une religion, peut-on dire qu'il faut faire taire cette personne?
La liberté d'expression est pourtant un facteur fondamental dans notre démocratie, c'est ce qui fait qu'on peut s'exprimer. Comme le disait mon collègue de , la liberté d'expression n'est pas permise seulement quand on aime ce qu'on entend. Il y a parfois des choses qu'on n'aime pas entendre. C'est justement cela, la liberté d'expression, et elle est déjà encadrée par des lois. On n'a pas le droit de dire des propos haineux et d'inciter à la haine ou à la violence.
Si le ministre a un programme caché, ce serait bien de le savoir. Ce n'est pas la première fois qu'il fait une déclaration douteuse. On a vu, à un moment donné, qu'il voulait imposer des licences aux entreprises médiatiques qui diffusaient de l'information. Ce n'est donc pas clair.
En conclusion, il y a un enjeu important au Canada. On a vu, cette semaine, à quel point la situation du français était difficile à Montréal. C'est toute la culture qui est en jeu. La question qu'on se pose, c'est s'il y a vraiment une volonté de préserver l'écosystème culturel québécois et de le reconnaître. Ce serait bien de simplement le reconnaître, mais on ne le sent pas et on ne le voit pas dans le projet de loi.
Malheureusement, ce qu'on a vu cette semaine, c'est la présidente du Parti libéral dire que, vouloir protéger par mesure législative la racine de l'écosystème québécois, qui est sa langue était oppressif.
Y a-t-il une réserve, une timidité qui empêche le gouvernement de protéger le fondement de l'écosystème culturel québécois? Il y a un vide à ce sujet dans le projet de loi.
Cela a été souligné par d'autres collègues, notamment nos collègues du Bloc québécois...
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Madame la Présidente, je me ferai un plaisir de partager mon temps de parole avec la députée de .
J'ai dit une évidence à quelques reprises par le passé, que j'essaierai de bien faire comprendre aujourd'hui: une nation ne confie pas à une autre nation son âme, son identité, ses arts, sa culture, son histoire, sa danse, sa musique, son théâtre, son cinéma et, moins que tout, sa langue.
Nous découvrons d'ailleurs que les libéraux et le majordome du NPD vont voter contre le projet de loi du Bloc québécois sur la connaissance du français. Voilà la preuve qu'on ne confie pas sa langue à une autre nation. Ce n'est pas une posture, cela s'appuie sur quelque chose qui se mesure et se calcule dans le temps. Or, le projet de loi comporte deux exemples patents du danger de confier son âme, sa culture, sa langue et ses arts à une autre nation.
Je commencerai par la propriété étrangère. C'est tellement gros qu'on ne me fera pas croire que le gouvernement ne sait pas ce qu'il fait. S'il ne le sait pas, il ne devrait pas être là. À l'heure actuelle, il y a des règles qui établissent qu'une entreprise en radiodiffusion ou en télécommunication doit être contrôlée par des intérêts canadiens. Cela protège dans une certaine mesure les arts et les différentes formes d'expression — canadiennes, dans ce cas-ci — de l'hégémonie de la puissance qui domine la culture mondiale à l'heure actuelle. Il est insensé de renoncer à cette protection pour la remplacer par un chèque, comme si l'âme était à vendre au plus offrant —notre voisin immédiat, pour nous.
Cette notion voulant qu'on ne confie pas son âme, sa culture, ses arts, sa musique et son chant à une autre nation s'applique aussi au Canada. Margaret Atwood n'est pas Californienne et Robert J. Sawyer n'est pas Texan. Cette reddition, ce dépôt des armes face à la culture américaine sont extrêmement dangereux.
Je donne un exemple extrême: une multinationale américaine de la Toile assujettie à l'obligation d'investir 30 % dans la production au Canada peut confier à une entreprise qu'elle aura achetée au Canada le mandat de produire une télésérie en anglais seulement. Qu'y a-t-il pour nous dans cela? C'est un recul grave.
L'autre exemple est bien sûr le pourcentage de français. Dans les programmes antérieurs, en particulier ceux en musique que j'ai bien connus — j'ai même siégé au Conseil canadien de la musique, ce qui en amusera certains —, des règles établissaient un certain pourcentage de français. Souvent, dans la convention, il s'agissait de 40 % de français. Pourquoi? Parce que cela prend d'abord une base pour une masse critique qui permettra de professionnaliser les secteurs. C'était vrai dans le secteur de la musique pour Musicaction, FACTOR ou encore le Fonds RadioStar, parmi d'autres.
C'était avant qu'on ne révise formellement les règles comme on se propose maintenant de le faire. Aujourd'hui, il faut enchâsser cette exigence dans la loi. Il faut pérenniser cette assurance que la production en français a accès à des outils fondamentaux et à un minimum de ressources. C'est maintenant que cela doit devenir formel.
Ne nous racontons pas de mensonges avant de faire semblant de nous croire. Si cette obligation n'est pas incorporée dans la loi, le CRTC va comprendre que, tant pour la propriété canadienne que la préservation du pourcentage de contenu français, l'intention du législateur n'est pas de protéger, mais bien de ne pas protéger. En effet, il n'existe pas de position neutre, et la loi est censée révéler l'intention du législateur.
On nous a dit qu'on ne voulait pas fixer de pourcentage pour le français, de peur que le pourcentage minimum ne devienne un maximum. J'ai eu un moment d'angoisse. Je me suis dit que c'était vrai. Imaginons Netflix, Disney+, Spotify et le Canada se dire, un beau matin, qu'ils voudraient investir 45 % dans le français, mais qu'ils n'osent pas le faire parce que le minimum a été fixé à 35 %.. C'est comme si on ne comprenait pas le sens du mot « minimum ». Il y a des gens plus intelligents que ce qu'ils prétendent.
Cela n'a pas un effet neutre. L'appel de capital qui vient avec ces 30 %, qui s'ajoute à ce que les entreprises réussissent à faire présentement par une loi de cette nature et dans cet état, est canalisé vers la production en anglais. Nous voyons tous ces séries produites par Netflix pour Netflix, dont certaines sont enregistrées dans les langues nationales et ensuite traduites avec un sous-titrage anglais qui ne dit pas la même chose que les mots en anglais. En général on arrête après la moitié d'un épisode, car c'est totalement imbuvable. Les lèvres ne concordent pas avec les mots, qui ne concordent pas avec ce qui est écrit. C'est peut-être parce que je suis moyennement intelligent, mais je trouve cela moins agréable. D'autres décident de faire la série en anglais tout de suite. Ainsi, Netflix est content, on l'écoute à la maison et tout le monde est heureux.
Cela n'a pas un effet neutre. Nous prenons résolument fait et cause pour ces gens. Il y a des comédiennes, des comédiens, des chanteuses, des chanteurs, des auteurs, des interprètes de toute nature qui ont le désir, parce que telle est leur âme, de s'exprimer en français, de faire sortir ce qu'ils ont en dedans et qui a besoin de sortir, parce que c'est cela, être un artiste. Ils ont envie de le dire et de le faire en français. Certains font une petite incursion dans d'autres langues à l'occasion, mais leur âme est là et ils vont vouloir le faire.
Ce n'est pas que l'argent actuel ni l'argent frais qui sera canalisé. Il y a un appel de capital pour faire des affaires et envahir le monde. Les producteurs font des affaires. J'ai été producteur et je ne faisais pas de chansons. Je vendais le produit. Les producteurs veulent aller travailler là où il y a le plus grand marché en anglais, avec tout l'argent qui est dans ces multinationales d'Internet. Cela n'a pas d'effet neutre. Je dis aux artistes francophones qu'ils ne doivent pas se laisser avoir. Les ressources qui sont maintenant investies dans la production en français vont baisser. Ce ne sera pas pareil. Cela n'augmentera surtout pas. Cela va baisser, parce que l'appel de capital va aller vers l'anglais, sans aucune forme de protection.
Évidemment, on comprendra que, dans cette version-ci, le projet de loi ne représente pas un progrès. C'est potentiellement une nuisance. Alors que tout le monde décide de chanter la chanson d'amour au français avant que les gestes ne viennent contredire la chanson qui est fausse, il faut que quelqu'un se dresse pour dire que cela ne passera pas.
Si cela est corrigé et si on inclut la propriété canadienne et le pourcentage de français dans la Loi, la modeste expertise du Bloc québécois, qui a un peu touché à cela à l'occasion, sera mise à contribution.
Dans le cas contraire, j'informe la Chambre que le Bloc québécois prendra le temps qu'il faudra, mais qu'il ne renoncera jamais à son âme, qui est d'abord et avant tout, comme celle du Québec, française.
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Madame la Présidente, je remercie le chef du Bloc québécois, député de Beloeil—Chambly et ami.
Je suis un peu embêtée. Je suis un peu intimidée par l'éloquence de mon collègue. Ce n'est pas évident de prendre la parole à la suite de ce monument politique historique.
Je vais parler de mon expérience personnelle. La culture et les arts, c'est vaste. Cela comprend toutes formes d'exécutions et d'inspirations. On pourrait parler des peintres, des danseurs, du cinéma, des scénaristes, des auteurs, des autrices. Puisque je ne serai pas invitée à témoigner à l'un des comités parce je suis députée, je vais présenter à la Chambre mon expérience personnelle.
Dans la vie, je suis une artiste. Je suis aussi hôtelière, à l'hôtel de mes parents. Je suis née dedans, comme on dit. Toute jeune, mes influenceurs — c'est un terme populaire aujourd'hui — étaient les visiteurs qui s'amenaient au petit hôtel, chez nous, au bout de l'île et qui prenaient plaisir, dans l'intimité, à se rencontrer et se donnaient rendez-vous chez nous. Soixante ans plus tard, c'est encore comme cela. J'ai grandi dans cet univers, où échangeaient Michel Brault, Pierre Perreault ou ensuite arrivaient Gilles Pelletier, Françoise Graton, avec leur grand chien. Ces gens s'assoyaient au bord du foyer et parlaient avec mon père et ma mère. Comme j'étais enfant, j'ai été habitée très jeune par ces grands discours de grands personnages du Québec, qui ont marqué et inscrit la mémoire du Québec par l'entremise de leur d'art.
On connaît par ailleurs les films de Pierre Perreault, comme La Trilogie de l'Île-aux-Coudres et comme Pour la suite du monde, qui a reçu des mentions de toute la Francophonie. De là est née chez moi l'envie d'écrire des chansons. C'était ma forme d'art à moi. De ma mère, j'ai hérité une voix assez large et assez chaude et, de mon père, j'ai hérité les lettres. J'avais donc de l'aisance en français et en poésie.
À partir de ma participation au du Festival international de la chanson de Granby, un festival qui a mis au monde plusieurs artistes du Québec et où je me suis rendue en demi-finale, j'ai eu envie d'écrire mes chansons. Je m'étais inscrite comme interprète et, tout à coup, je voulais écrire mes chansons, mes messages. J'avais compris que je pouvais m'inscrire dans l'univers du Québec, m'afficher sur le tableau de ceux et celles qui auront arrêté le temps, l'espace d'une chanson, pour créer quelque chose qui n'existait pas.
Tout de suite, j'ai vu l'effet que cela donnait sur les gens: un effet de joie, de bienfaisance, ainsi qu'un effet de stimulation. Selon le discours qu'on tient quand on est créateur et qu'on jette sur des feuilles sur notre table de travail ce que l'on veut envoyer comme message, eh bien, on influence sa société, on influence les gens avec lesquels on travaille, avec lesquels on publie et avec lesquels on transige. Tout à coup, lorsqu'on entend sa chanson sur scène, quand son film est au cinéma ou quand sa toile est exposée dans une galerie, le message passe, les messages se livrent.
Or les messages que nous voulons livrer, nous voulons les livrer dans notre langue maternelle parce que c'est la langue qui nous a vus grandir, c'est la langue qui nous a socialisés, c'est la langue qui nous a appris à dire ce que nous voulions dire aux autres — ne serait-ce que cela —, pour partir ensuite avec notre baluchon, avec nos chansons et pour chanter. Même si je ne suis pas une artiste très connue, j'ai eu la chance d'aller en Suisse, en France, même aux États-Unis chanter dans ma langue à moi.
Malgré le fait qu'aux États-Unis les gens ne comprenaient pas toujours ce que je chantais, ils appréciaient l'énergie et la passion avec laquelle je livrais mon message. Des gens ont acheté mes disques, et certains m'ont dit qu'ils avaient acheté un dictionnaire pour comprendre le français et pour ensuite essayer de traduire mes textes. Ces personnes voyaient avec quelle passion je livrais mon message.
Cette passion, elle émerge dans sa langue maternelle, fondamentalement. C'est pour cela qu'aujourd'hui je veux parler du projet de loi en disant qu'il ne faut pas s'égarer quand on s'assoit pour légiférer. Il faut se concentrer sur la matière première.
En ce qui nous concerne, en ce moment, la matière première, c'est le contenu créé par les artistes, les artisans, les journalistes, les chanteurs, les écrivains, les producteurs de cinéma et bien d'autres.
Pour prendre des termes que je connais, puisque je suis insulaire, on a vu la grande marée du Web envahir notre milieu. C'est positif à certains égards; tout n'est pas noir ou blanc. Cependant, il est très important, lors des grandes marées, de se faire des remparts. Sinon, la marée envahit vite le terrain qu'on a mis des années à travailler et où on a planté de belles fleurs et toutes sortes d'affaires. Nous, à l'Isle-aux-Coudres, nous le savons. Nous le voyons souvent quand les grandes marées d'automne arrivent; elles ne demandent pas la permission d'entrer.
Alors, s'il n'y a pas de rempart pour canaliser les grandes marées du Web, nous allons perdre l'essence de ce que nous sommes, notre territoire culturel. C'est ce qui me préoccupe en ce qui concerne le projet de loi qui a été déposé par notre collègue d'en face le . J'ai l'impression qu'on s'éloigne de la matière première et qu'on dérive, pour prendre encore un terme maritime. On n'est pas attaché à l'essence même du sujet qu'on traite.
Ce que j'ai envie d'apporter à la Chambre, c'est cela: un attachement pour le sujet que l'on traite, c'est-à-dire le divertissement, la culture qui décrit fondamentalement ce que nous sommes, qui parle de nos danses, de nos histoires, de nos chansons, de nos rêves, de nos ambitions et de nos valeurs, et qui influence ce que nous serons demain. Pour cela, il faut alimenter les créateurs et leur trouver les moyens de rester des créateurs.
La situation était criante avant, mais depuis l'apparition de la COVID-19, elle est devenue alarmante. On voit maintenant plusieurs artistes de grande qualité prendre d'autres chemins. Ils investissent leur énergie ailleurs que dans ce qu'ils faisaient de mieux. En ce moment, c'est très dangereux de brusquer les choses et de mettre de côté l'essentiel à cause du caractère urgent de la situation.
J'invite mes collègues à réfléchir à cette question. S'il n'y a plus de créateurs de contenu, il ne reste plus rien de la culture. En ce moment, il est essentiel de protéger la langue française et la part du marché qui revient aux entreprises et aux producteurs de contenu culturels et de faire valoir à la Chambre l'importance de ne pas dériver. C'est ce que nous nous appliquerons à faire, au Bloc québécois. Nous sommes là pour cela.
Je rappelle à la Chambre également que l'Assemblée nationale du Québec a adopté unanimement une recommandation au gouvernement qui vise à ce qu'un pourcentage soit inscrit dans la loi, afin de protéger le caractère francophone de notre culture.
Je remercie tous mes collègues de m'avoir écoutée. J'espère que mon intervention aura ramené dans le bon canal les gens de la Chambre.
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Madame la Présidente, je suis heureux de pouvoir participer au débat sur le projet de loi , le projet de loi du gouvernement dont l’objet est de moderniser la Loi canadienne sur la radiodiffusion. Il soulève de nombreuses questions.
J’ai trouvé agréable d’écouter le débat et de voir la passion que des collègues de tous les partis, de part et d’autre de la Chambre, ont pour la culture canadienne et pour l’identité linguistique ou régionale dont ils se réclament et qui fait partie de la culture canadienne. Je vais commencer par citer les objectifs du projet de loi , puis je mettrai en relief les difficultés et les préoccupations qui en découlent selon nous, les députés conservateurs.
Comme je le disais, le projet de loi propose de moderniser la Loi canadienne sur la radiodiffusion, et les conservateurs sont assurément d'accord pour dire qu'il est temps de modifier cette loi, de la moderniser, de la mettre à jour. Cependant, nous sommes très inquiets de voir que les dispositions du projet de loi ne permettront pas d'atteindre les objectifs qui y sont énoncés. Cette inadéquation me saute constamment aux yeux.
Ce qui me m’interpelle particulièrement, lorsque le gouvernement et les députés ministériels parlent de leurs propositions, c’est leur façon d'insister fréquemment sur leurs objectifs plutôt que sur la substance des dispositions qu'ils veulent faire adopter. Les députés du parti au pouvoir sont régulièrement en train de parler de tel ou tel objectif, et nous qui formons l'opposition sommes obligés de leur rappeler que l'enfer est pavé de bonnes intentions. Ce n'est pas l'intention, mais bien le texte du projet de loi qui sera adopté, et si ce texte n'est pas à la hauteur des objectifs énoncés, il en résultera de gros problèmes pour ceux qui seront touchés par les mesures adoptées.
Pour entrer dans le vif du sujet, disons qu'en ce qui concerne la portée de la modernisation, le projet de loi confirme que la radiodiffusion dont il est question dans la loi englobe la diffusion audiovisuelle en ligne. Il comprend des dispositions visant à favoriser un contenu radiodiffusé plus diversifié au Canada, de manière à ce que ce contenu soit le reflet de la vie des Canadiens, notamment en ce qui a trait à l'égalité des sexes, à la communauté LGBTQ2+, aux communautés racialisées, aux personnes handicapées et aux peuples autochtones. C’est l’un des objectifs énoncés.
Le projet de loi vise à créer une approche de réglementation plus souple qui permettrait au CRTC d’établir des règles pour tous les services de radiodiffusion au Canada. J’en dirai davantage dans quelques minutes, mais nous devrions nous inquiéter lorsque nous voyons que le gouvernement parle d’une approche réglementaire plus souple tandis qu’il accorde des pouvoirs à un organisme externe.
Si des dispositions sont rédigées en des termes plus vagues, cela revient à dire implicitement que le CRTC aura plus de pouvoirs et que ces pouvoirs ne seront pas définis aussi clairement que les Canadiens le souhaiteraient. Nous devons tous être très attentifs à la formulation que le gouvernement utilise relativement à la souplesse réglementaire et nous efforcer de déchiffrer ce qu’elle signifie en réalité.
La Loi vise aussi à « moderniser les pouvoirs d'exécution du CRTC [et] mettre à jour les dispositions relatives à la surveillance et au partage d'informations afin de renforcer le rôle du CRTC en tant qu'organisme de réglementation moderne et indépendant ». Dans quel contexte cette Loi s’inscrit-elle et que pensons-nous de ces prétendus objectifs?
Nous devrions tous réfléchir en tant que députés à la définition que nous donnons à la radiodiffusion dans un monde d’évolution technologique. Dans un sens, comme député, je suis un radiodiffuseur. Bien que je ne pense pas que ce discours soit diffusé en continu sur ma page Facebook, même s’il nous arrive évidemment de le faire, il est probable que des extraits de ce que je dis finiront par être diffusés à mes quelques 30 000 abonnés sur Facebook et peut-être même sur Twitter et Instagram. Par conséquent, je suis un petit diffuseur. Beaucoup de gens produisent des balados ou ont des chaînes YouTube. Ils utilisent le pouvoir exceptionnel qui leur est offert par l’entremise des médias sociaux et d’autres canaux pour diffuser leurs opinions. C’est vraiment un pouvoir révolutionnaire mis à la portée des simples citoyens.
Dans le passé, lorsqu'il était question de réglementer la radiodiffusion, c’était parce que la largeur de bande était limitée en termes d’ondes pour la radio et la télévision. Il fallait prendre collectivement des décisions sur l'accès à cette bande passante. On avait l’espoir que certains contenus seraient diffusés de cette manière.
Cependant, nous vivons aujourd’hui dans un monde où la capacité de diffusion sur Internet est illimitée et où les gens peuvent accéder à divers types de contenus plus nombreux qu’ils le souhaitent. Ce monde de capacité de diffusion illimitée aplanit les obstacles à l’entrée pour devenir un diffuseur et une personne qui diffuse ses opinions à un public de plus en plus vaste. C’est le nouveau monde dans lequel nous vivons.
Dans bien des cas, une personne qui travaille de son sous-sol sur sa propre chaîne YouTube peut exprimer beaucoup plus de points de vue et avoir une voix plus importante que certains réseaux et canaux conventionnels. Alors, comment définir ce qui constitue un radiodiffuseur? Si une personne dirige une chaîne YouTube très populaire sur laquelle elle exprime ses propres opinions, allons-nous attendre d’elle, par l’entremise du CRTC, qu’elle offre une certaine proportion d’un certain type de contenu? Est-ce l’orientation que nous voulons prendre en modernisant cette loi?
Je pense que la plupart des députés admettraient qu’il ne serait pas particulièrement raisonnable d’agir ainsi et que l’idée de prescrire des paramètres en matière de radiodiffusion ne vise que les très grands producteurs et fournisseurs de contenu, mais c’est un terrain glissant. À mon avis, cela soulève des questions sur la réglementation des paramètres du contenu dans un monde où les obstacles à l’entrée sont très faibles. L'offre de bande passante pour la télévision ou la radio n'est plus limitée comme auparavant.
Sous l’étiquette de la modernisation, ce projet de loi fait entrer le monde numérique dans le cadre législatif en vigueur, mais je ne crois pas qu’il cherche suffisamment à savoir si les cadres actuels s’harmonisent ou non avec le type de monde dans lequel nous nous trouvons. Je serais préoccupé par la possibilité que des Canadiens qui ne dirigent pas des exploitations à gros budget, qui ne font que diffuser leurs opinions et produire différents types de contenus, soient assujettis à l’intervention du CRTC si le niveau d’attention du public devait dépasser un certain seuil.
Je tiens aussi à souligner un problème persistant à propos de la réglementation de la radiodiffusion, à savoir la demande du marché et la façon dont nous définissons le contenu canadien. Je constate et j’affirme qu’il existe en fait une forte demande du marché pour un contenu de plus en plus diversifié. Les gens avec qui je m’entretiens ont soif d'apprendre sur la culture et les collectivités autochtones. Je pense qu’il y a une demande réelle pour ce contenu, et c’est agréable à voir.
Je pense qu’il y a un intérêt grandissant au sein de la population de ma circonscription en Alberta pour l’apprentissage du français et la consommation de contenu en français. Cette demande du marché est vraiment nécessaire pour l’élargissement de la connaissance sur ces choses, car faute de demande du marché pour la production de ces émissions et de ces messages, les gens n’ont consommeront pas.
C’est une chose de dire que quelqu’un peut vouloir un contenu plus diversifié sur une grande plateforme vidéo en ligne. C’en est une autre de savoir si les gens consommeront ce contenu. Le fait que les gens soient avides de ce contenu constituerait probablement un incitatif à en augmenter la production. Comme parlementaires, je crois que nous voulons tous voir une diversité grandissante et que cela se reflète dans les médias.
Je pense aussi que nous devrions reconnaître qu’il existe une demande pour ce contenu et que la diversité augmente en partie. Cela continuera à se produire, naturellement, mais je pense que nous devons en être conscients et examiner la question. Il nous faudrait instaurer des politiques qui favorisent raisonnablement cette évolution, sans confier au CRTC des pouvoirs d'intervention excessifs.
Il s'agit de savoir ensuite comment nous définissons le contenu canadien, ou comment nous définissons le contenu en fonction de sa capacité à refléter les différentes communautés. La définition précise de ce qui constitue un contenu canadien faisait partie de mes sujets d’études à l’université. J’ai toujours trouvé un peu étrange que nous puissions avoir une histoire qui se déroule en Californie, et c’est ce que raconte le film, mais que nous ayons un acteur né au Canada qui joue un rôle de premier plan, ou un réalisateur canadien, ou encore que le film ait été tourné quelque part au Canada, même si l’histoire est censée se dérouler en Californie. Cependant, selon certaines définitions, ce film est défini comme du contenu canadien en raison des origines nationales de certaines personnes impliquées, même si l’histoire racontée ne concerne pas vraiment le Canada.
Lorsque nous parlons de contenu autochtone, je pense que le Comité devrait peut-être examiner la signification de certains enjeux. Par exemple, peut-on parler de contenu autochtone si un acteur autochtone joue un personnage qui ne l'est pas? Ou si une histoire censée se rapporter à la culture autochtone ne reflète pas vraiment cette dernière et que l'émission n’a pas été créée en consultation avec des collectivités autochtones?
Le défi tient au fait qu’à un niveau individuel, nous pourrions être en mesure d’examiner si une représentation donnée se qualifie ou non et en tirer nos propres conclusions. Lorsque nous disposons de définitions réglementaires de ces concepts, des problèmes importants peuvent se poser, par exemple sur la question de savoir si les règlements, dans leur application, réalisent vraiment leurs objectifs. Je pense que les députés doivent aussi y réfléchir à l'occasion de l'examen approfondi du projet de loi.
[Français]
Je trouve qu'il y a beaucoup de problèmes en ce qui concerne ce projet de loi vague, qui semble typique par rapport aux autres projets de loi des libéraux.
Ce projet de loi est vague relativement aux pouvoirs du CRTC. Tout d'abord, il ne garantit pas que les géants technologiques étrangers comme Google et Facebook suivent les mêmes règles que les entreprises technologiques canadiennes. Il y a des gens qui ont accusé ces géants étrangers de la technologie d'avoir utilisé les données personnelles des Canadiens de façon inappropriée et d'avoir censuré les opinions de certains Canadiens. Malheureusement, avec ce projet de loi, ces entreprises peuvent continuer à régner sans contrôle sur les Canadiens.
Je suis également préoccupé par le manque de directives précises concernant le contenu canadien et la répartition des fonds destinés aux médias canadiens. Nous savons que la langue française est menacée au Canada, comme l'ont souligné mes collègues ces derniers jours. Le Canada est un pays fièrement bilingue, et notre culture française, si présente au Québec, est la clé de l'avenir bilingue du Canada.
Les médias français au Canada sont riches de contenus culturels uniques. C'est pourquoi nous, les conservateurs, travaillerons à préserver et maintenir le financement de la programmation culturelle française une fois que nous serons élus.
Je suis fier de pouvoir m'exprimer en français aujourd'hui, bien que ce ne soit pas ma langue maternelle. De nombreuses personnes dans ma province, l'Alberta, inscrivent leurs enfants aux programmes d'immersion française parce qu'elles veulent que leurs enfants ressentent cette fierté de pouvoir s'exprimer dans nos deux langues officielles.
Le fait que ce projet de loi ne modernise pas le droit d'auteur me préoccupe également. À une époque où l'Internet domine nos vies, il est crucial que le contenu produit par les Canadiens soit protégé contre une utilisation déloyale comme le plagiat.
Les artistes canadiens travaillent fort pour produire des œuvres de qualité, et nous veillons à ce que leurs droits soient fortement protégés. Contrairement aux libéraux, nous, les conservateurs, croyons en une loi modernisée sur le droit d'auteur, en de nouvelles mesures pour préserver la langue française et en la protection des Canadiens contre les géants technologiques étrangers qui doivent assumer leurs responsabilités.
Une fois que notre chef sera élu premier ministre après la prochaine élection, notre gouvernement conservateur supprimerait la TPS sur les plateformes numériques canadiennes afin de soutenir et de promouvoir le contenu médiatique canadien qui met en valeur la beauté de la culture canadienne. Nous comprenons qu'une législation adéquate sur le CRTC est importante dans l'intérêt de notre nation et de son peuple, et nous aurions souhaité que les libéraux le comprennent aussi.
Le Parti conservateur est un parti national qui est là pour tous les Canadiens. Nous sommes le seul parti ayant des députés dans chaque région du pays. Nous sommes fiers d'avoir des députés albertains qui, comme moi, défendent la langue française et des députés québécois qui défendent les travailleurs du domaine pétrolier. Nous sommes le parti qui unit tous les Canadiens et respecte les caractéristiques particulières de chaque région.
La langue française n'est pas seulement importante au Québec. Il y a une forte communauté francophone dans ma circonscription en Alberta, et j'adore travailler avec cette communauté. Il y a des francophones, ainsi que des francophiles. Il y a des communautés francophones qui sont là depuis longtemps et il y a des communautés francophones pleines de nouveaux arrivants.
J'invite mes collègues francophones, surtout ceux du Bloc québécois, à venir en Alberta pour découvrir notre communauté francophone vibrante, ainsi qu'à visiter Fort McMurray.
[Traduction]
J'aimerais revenir sur quelques-uns des points que je viens de mentionner.
Je suis très fier d'être membre d'un parti, le Parti conservateur, qui prend ces questions au sérieux, qui les étudie avec attention, qui propose des amendements, qui n'hésite pas à faire ressortir les problèmes et qui s'intéresse autant à la lettre qu'à l'esprit des mesures législatives. Je suis fier d'être membre d'un parti qui croit sincèrement qu'il peut unir les Canadiens d'un océan à l'autre. Partout au pays, qu'ils soient francophones ou anglophones, les députés conservateurs sont conscients qu'il faut défendre le français et l'anglais dans toutes les régions du pays, et c'est ce qu'ils font. Le Parti conservateur est aussi celui qui défend le mieux l'emploi et l'économie, toutes régions confondues.
En terminant, je tiens à dire une chose: j'ai remarqué qu'il est question de la représentation des personnes handicapées dans le projet de loi. C'est très bien, mais je rappelle que la Colline du Parlement est prise d'assaut par les personnes handicapées et leurs représentants, qui n'en reviennent pas de voir à quel point le projet de loi est mal ficelé et exacerbe la discrimination dont les personnes handicapées sont victimes.
De très nombreux organismes de défense des personnes handicapées sont venus dénoncer ces problèmes au comité de la justice et réclamer des changements concrets. Tout ce que le gouvernement a trouvé de mieux à faire pour les personnes handicapées, c'est d'inclure une disposition dans la Loi sur la radiodiffusion précisant les attentes de l'État relativement à la représentation des personnes handicapées.
Je ne dis pas que c'est inutile, c'est juste que, si le gouvernement écoutait vraiment ce que les gens qui doivent surmonter des obstacles particuliers, dont les personnes handicapées, ont à dire, il ne se contenterait pas d'une simple ligne dans la Loi sur la radiodiffusion. Il donnerait suite aux demandes de ces gens et ferait le nécessaire pour que les personnes handicapées puissent vivre dans la dignité. Il ferait siens les amendements tout à fait raisonnables qui ont été proposés par les organismes de défense des personnes handicapées. Il organiserait des consultations dignes de ce nom au lieu de se fermer comme une huître.
J'attendrai la suite du débat avec impatience.
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Madame la Présidente, je vais partager mon temps avec le député de .
Je me réjouis d’avoir l’occasion de prendre la parole au sujet de ce projet de loi, car il nous permettrait vraiment de nous adapter à la réalité du XXIe siècle. Comme on l’a dit, nous avons modifié la Loi sur la radiodiffusion en 1991 et nous n’avons rien fait depuis. Je suis donc heureuse de pouvoir dire quelques mots au sujet de ce projet de loi qui modifie la Loi sur la radiodiffusion.
En 1991, nous n’étions pas encore à l’ère numérique. Depuis, il y a eu beaucoup de changements dans la façon dont les gens ont accès à l'information et à des divertissements. Aujourd’hui, ils utilisent des diffusions en continu sur leurs propres appareils, que ce soient des tablettes, des ordinateurs ou autres. Ce n’est donc plus comme avant, et c’est la raison pour laquelle nous avons besoin de nous adapter à l’air du temps et nous devons adopter cette mesure.
Parallèlement, nous entendons, depuis 1991, de comités du Sénat et de la Chambre des communes ainsi que de groupes indépendants, des médias et du secteur culturel qu'il serait important maintenant que nous prenions conscience que les règles qui sont appliquées aux entreprises canadiennes des médias et du divertissement ne sont pas appliquées aux géants américains et étrangers de l’Internet qui, pourtant, s’immiscent tous les jours dans nos foyers grâce à tous ces appareils et ne sont pas réglementés.
Nous savons que ces géants ne sont pas prêts à s’auto-réglementer. On leur a demandé de le faire, mais ils refusent. Par conséquent, il est temps que nous leur imposions des règlements, tout comme nous réglementons le contenu canadien, la radiodiffusion canadienne, les services de nouvelles canadiens, bref tout ce qui concerne les médias canadiens. On voit bien que les médias canadiens sont dans une position tout à fait désavantagée face aux médias étrangers qui ne sont pas réglementés. Nous ne prenons pas cette décision parce que nous sommes canadiens et que nous avons l’esprit de clocher. Ce n’est pas cela.
L’Union européenne a décidé de préserver un contenu culturel européen. L’Australie a décidé d’examiner la question du contenu culturel australien. Tout le monde s’inquiète face à la désinformation non réglementée qui est relayée par les géants étrangers du Web. Nos médias canadiens, eux, doivent faire preuve de prudence quant à la façon dont ils traitent et présentent les informations, car ils sont assujettis aux règlements du CRTC. En fait, je dirais que nous voulons uniformiser les règles du jeu.
C’est en 1997 que Sheila Copps a décidé de livrer un dernier combat en faveur du contenu canadien, car elle se rendait compte que les magazines qui nous arrivaient d’ailleurs nous donnaient des nouvelles des États-Unis et de partout ailleurs, sauf du Canada, ou très peu. Le journalisme est à la peine, aujourd’hui, parce que nous n’avons pas accès à suffisamment de nouvelles de journalistes canadiens, dont les emplois disparaissent rapidement. Par conséquent, les nouvelles que nous recevons proviennent de regroupeurs de nouvelles étrangers, comme Google et Facebook, qui, eux, vont s’approvisionner à n’importe quelle source, pas nécessairement une source qui réglemente la véracité de son contenu. Bref, ils vont chercher des nouvelles n’importe où, il les regroupent et les gens les lisent sans savoir si c’est de l’information authentique ou si c’est de la désinformation.
Parce qu’ils refusent de s’auto-réglementer, les géants de l’Internet ne suivent pas non plus les règles en matière de contenu haineux ou de contenu très dangereux et nuisible, alors que nos médias canadiens doivent observer scrupuleusement ces règles. Nous proposons donc d'assujettir tous les protagonistes aux mêmes règlements pour que tout le monde soit sur un pied d’égalité.
Je tiens à rappeler que, lorsque Sheila Copps parlait du contenu canadien dans les années 1990, elle réfléchissait aussi à la façon de protéger le secteur de la musique. Elle a été vivement critiquée pour cela, mais finalement, ce qu’elle a fait était exactement ce dont nous avions besoin. Comme les gens achetaient des bandes vierges pour télécharger de la musique sans avoir à payer quoi que ce soit, elle a imposé une surtaxe à l’achat des bandes vierges. Cet argent a été mis dans une caisse qui a permis de développer considérablement la musique canadienne, de sorte que celle-ci a commencé à rayonner partout dans le monde. Bon nombre de divas canadiennes se sont ainsi révélées. Voilà ce qui s’est passé.
Il est temps que nous défendions non seulement le contenu canadien, mais aussi la souveraineté culturelle canadienne.
Il faut aussi montrer que la culture canadienne est diversifiée, qu’elle s’appuie sur un bilinguisme officiel, sur l'apport des francophones à l’intérieur et à l’extérieur du Québec. Le gouvernement a dit clairement, dans le discours du Trône, qu’il allait protéger cela. Nous avons des cultures autochtones qui sont d’une grande richesse. Nous avons de nombreuses cultures ethniques et racialisées, ainsi que la communauté LGBTQ. Nous savons que, sur le plan géographique, le contenu culturel des provinces de l’Atlantique est très différent de celui de la Colombie-Britannique. Nous, Canadiens, devons apprendre à nous connaître. Nous devons comprendre, entendre et raconter les histoires de chacun.
Les créateurs canadiens me disent souvent qu’ils se font voler leurs histoires par d’autres personnes, qu’ils ne reçoivent rien pour leur propriété intellectuelle. Il faut qu’ils soient rémunérés pour leur propriété intellectuelle, il faut que les règles soient les mêmes pour tout le monde, et c’est exactement ce que prévoit ce projet de loi.
Ce n’est pas un projet de loi malveillant. Personne ne veut interdire à qui que ce soit d’écouter en continu ce qu’il a envie d’écouter. Nous disons simplement que le CRTC exige que les émissions de divertissement canadiennes doivent avoir un minimum de contenu canadien pouvant aller jusqu’à 45 %. Les producteurs doivent donc investir là-dedans. Or, nous n’imposons pas cette règle aux autres géants des médias, qui font beaucoup d’argent avec le contenu canadien, mais qui n’en remboursent pas une partie aux Canadiens pour refléter la diversité et le régionalisme canadiens. Ce n’est plus acceptable dans un contexte de mondialisation.
Javier Perez de Cuellar, de l’UNESCO, s’est prononcé là-dessus à la fin des années 1990. Il a dit que la mondialisation a un désavantage: le monde est maintenant voué à une sorte de culture amorphe, et nous sommes en train de perdre notre souveraineté, notre identité culturelle.
Les pays d’Europe ont déjà pris des mesures pour que cela ne se produise pas. Ils font quelque chose de comparable à ce que nous proposons. L’Australie en fait autant de son côté. Nous ne voulons pas que les médias canadiens soient soumis à certaines restrictions et à certains règlements, pendant que les multinationales médiatiques peuvent relayer sur Internet, sans aucun contrôle, de l’information, de la désinformation, des messages haineux et toutes sortes de choses inappropriées.
Le moment est bon. L’idée que nous pourrions obtenir de l’argent et qu’ils soient tenus, comme les médias canadiens, d’investir dans la création de contenu canadien est une chose dont nos créateurs ont besoin. Notre industrie de la musique en a besoin. Toute cette merveilleuse propriété intellectuelle en a besoin.
Personne n’a besoin de nous dire, en tant que Canadiens, quels grands conteurs nous sommes, quels grands auteurs nous avons, quels producteurs ou contenus fabuleux nous avons. Il nous suffit de regarder Schitt's Creek pour constater que l’émission est devenue une pièce majeure du récit canadien et de la comédie canadienne.
Nous devons protéger tout cela mais, plus que tout, nous devons uniformiser les règles du jeu. Il ne s’agit pas de demander au CRTC de se livrer à une infamie. Il s’agit simplement de lui demander d’imposer les mêmes exigences et règles aux géants internationaux des médias, qui n’ont pas à suivre ces règles, et d’uniformiser les règles du jeu pour les médias canadiens.
Ils seront également tenus de contribuer au contenu canadien, comme les médias canadiens doivent le faire. Nous disons aussi qu’ils doivent refléter la diversité de la culture canadienne, qui est très différente des autres cultures internationales. Ce n’est pas étrange, cela ne relève pas de Big Brother ou de quelque chose du genre. Nous essayons simplement d’uniformiser les règles du jeu. Nous essayons de donner un coup de main à notre contenu canadien et de nous assurer que nous racontons et entendons nos propres histoires. C’est important. La réglementation de l’information est très importante.
Nous prenons connaissance de tous les comités d’études, des comités du Sénat et de la Chambre des communes, le dernier étant le comité que j’ai présidé et qui a remis son rapport en 2017, qui soulignait que nous ne nous reconnaissons pas dans nos propres bulletins d’information, nos médias et notre industrie du divertissement. Nous n’entendons pas les voix autochtones ou régionales. Nous ne voyons pas les groupes ethniques, les groupes racialisés ou la communauté LGBTQ de notre pays raconter leurs histoires.
Nous sommes uniques en tant que nation. Nous sommes très différents et nous devons refléter cette différence. Peut-être que les gens qui consomment du contenu canadien en France, aux États-Unis ou ailleurs pourraient apprendre qui nous sommes comme Canadiens. Ils pourraient en fait être inspirés par certaines des choses que nous pouvons faire et dire…
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Madame la Présidente, le Canada ne s'est pas formé par accident. Il est le fruit de la volonté de créer, dans la partie supérieure du continent nord-américain, un espace distinct sur les plans politique, économique et culturel. Nous nous concentrons aujourd'hui sur l'espace culturel.
Le projet de loi vise à garantir la vitalité à long terme du contenu culturel canadien. À bien des égards, le Québec sert de modèle et d'inspiration à l'affirmation culturelle de l'ensemble du Canada. Son exemple prouve qu'il est possible de préserver et de renforcer sa propre présence culturelle malgré les pressions constantes, qu'il est possible de bâtir et de maintenir un univers culturel qui reflète, soutient et renforce notre identité collective, et qu'on a même le devoir de le faire pour soi-même et pour ses concitoyens.
[Français]
La culture est un réservoir d'idées, de valeurs, de symboles, de façons de faire et d'histoires individuelles tissées en histoires collectives. Ce réservoir, il faut sans cesse l'alimenter si on veut qu'il demeure plein et profond. Sinon, à la longue, il s'évapore ou se trouve à être alimenté d'autres sources dans lesquelles on ne voit plus notre reflet, ou bien dans lesquelles on ne voit que les grandes lignes d'une image délavée.
Le Québec a bien su alimenter son réservoir culturel, et le reste du Canada aussi, souvent inspiré par le Québec.
[Traduction]
Cette affirmation de la valeur de la culture en tant que prisme à travers lequel on voit le monde explique en partie, selon moi, l'attention et l'appui que l'on accorde enfin aux langues et aux cultures autochtones du Canada, y compris, soit dit en passant, au moyen des dispositions du projet de loi à l'étude aujourd'hui.
En tant que Canadiens, il est crucial que nous puissions nous reconnaître dans des livres, des pièces de théâtre, des émissions de télévision et des films, et de nous entendre dans la musique. Lorsque nous sommes reflétés dans ces médias, nous nous voyons en mouvement dans l'avenir, en train d'agir, d'accomplir des choses, de surmonter des situations difficiles et complexes. Nous constatons aussi notre potentiel. Qu'y a-t-il de plus revigorant et motivant que cela, individuellement et collectivement?
Depuis plus d'un siècle au Canada, nous démontrons que le déterminisme culturel n'existe pas. On ne peut pas présumer de la capacité d'une culture de survivre et de prospérer, même en présence de puissantes forces culturelles extérieures. La vigueur d'une culture, sa résilience, est fonction de la détermination et de la capacité des gens à élaborer des stratégies culturelles et à les adapter continuellement selon l'évolution du milieu.
[Français]
La survie et l'épanouissement de notre culture dépendent de nous, de notre volonté de créer continuellement son contenu et de se doter des moyens nécessaires pour faire rayonner ce contenu. Le tout passe par des prises de conscience et des réflexions qui suivent l'évolution parfois rapide des changements et des défis technologiques et économiques qui se pointent sans cesse à l'horizon.
[Traduction]
La création de CBC/Radio-Canada est le fruit d'une volonté politique. C'était une réponse collective délibérée au défi posé par un nouveau média, la radio. L'exigence relative au contenu canadien à la radio était aussi un geste politique qui a donné naissance à une industrie musicale nationale qui, 30 ans plus tard, a conquis les marchés mondiaux dans les genres country, jazz et rock.
Je n'ai pas assez de temps pour énumérer la liste des études, analyses et initiatives stratégiques entreprises au fil des décennies dans le but de renforcer la culture canadienne en dépit des défis technologiques et économiques, mais voici néanmoins quelques exemples.
En 1929, la Commission royale de la radiodiffusion, appelée Commission Aird, avait recommandé que le Canada établisse un seul système de radiodiffusion national appartenant à l'État. Peu de temps après, en 1932, la Loi canadienne de la radiodiffusion était adoptée.
En 1936, un comité parlementaire a réclamé la création d'une société comparable à la BBC. C'est ainsi que la Société CBC/Radio-Canada a été créée et, en 1937, elle a ouvert à Montréal une station de radio de langue française qui est devenue aujourd'hui un phare pour la culture francophone au Québec, pour les francophones hors Québec et, il faut le préciser, pour les francophiles de tout le pays, dont le nombre a augmenté à la suite de l'adoption de la Loi sur les langues officielles par le gouvernement de Pierre Trudeau.
[Français]
Lorsque je pense à notre infrastructure culturelle, indispensable au Canada, je pense entre autres à CBC/Radio-Canada. On ne peut sous-estimer l'importance névralgique de Radio-Canada en particulier. Cela me déçoit lorsque j'entends les conservateurs dire qu'ils veulent privatiser CBC/Radio-Canada. À bien des égards, la société d'État est la source qui alimente notre réservoir culturel francophone au pays.
Pour poursuivre, en 1949, on met sur pied la commission Massey, à qui on confie le mandat d'examiner la radiodiffusion et la télédiffusion au Canada. En 1958, la Loi sur la radiodiffusion est adoptée. En 1959, les quotas sur le contenu canadien à la télévision sont créés.
[Traduction]
En 1969, remarquant que la câblodistribution était devenue un élément majeur du système canadien de radiodiffusion, le CRTC a établi des règles concernant les services que les câblodistributeurs étaient tenus d'offrir. C'est ce qu'on appelle aujourd'hui l'obligation réglementaire de transmission.
En 1971, la réglementation sur le contenu canadien est entrée en vigueur au sujet de la musique diffusée par les stations de radio AM. Le CRTC a aussi permis la substitution simultanée, selon laquelle l’émission d’une station de télévision locale aurait priorité sur une station américaine diffusant la même émission. Cette décision avait pour but d'aider les stations locales à conserver leur auditoire local et les recettes publicitaires correspondant à cet auditoire.
En 1983, on a créé le fonds de développement de la production d’émissions en vue d’assurer la production d'émissions de télévision canadiennes de haute qualité dans les domaines sous-représentés des dramatiques, des variétés, des émissions pour enfants et des documentaires.
En 1984, on a formé le comité fédéral-provincial sur l'avenir de la télévision en langue française pour qu'il étudie les défis propres à ce médium.
En 1992, le CRTC a publié sa Politique sur la représentation non sexiste des personnes.
En 1996, la ministre du Patrimoine canadien, Sheila Copps, a annoncé la création du Fonds de télévision et de câblodistribution pour la production d’émissions canadiennes, qui combinait le Fonds de production des câblodistributeurs et le Fonds de télévision de Téléfilm.
En 2002, le Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes a publié un rapport intitulé « Notre souveraineté culturelle: Le deuxième siècle de la radiodiffusion canadienne. »
Plus tard, en 2018, le gouvernement libéral a mis sur pied un groupe d'examen composé de six membres et chargé d'examiner la Loi sur la radiodiffusion, la Loi sur les télécommunications et la Loi sur la radiocommunication. Le rapport Yale, intitulé « L'avenir des communications au Canada: le temps d'agir », est le point de départ du projet de loi que nous débattons aujourd'hui.
Il fut un temps, il n'y a pas si longtemps, où on pensait généralement qu'aucune intervention que ce soit n'était possible relativement à Internet et que toute résistance envers ce mastodonte qu'est le Web ne pouvait qu'être vaine et signe d'une grande naïveté. Compte tenu en partie de cette façon de voir les choses, en 1999, le CRTC a exempté les entreprises de retransmission par Internet de l'obligation de détenir une licence ou de se soumettre aux règlements pris en application de la Loi sur la radiodiffusion. Cette décision a été examinée et confirmée en 2009.
En 2001, on a voulu, avec le projet de loi , soumettre les entreprises de retransmission par Internet au régime de droits d'auteur du Canada. Le projet de loi a toutefois été modifié pour maintenir l'interdiction d'utilisation de contenu exclusif par les entreprises de retransmission.
Dans un certain sens, le projet de loi s'attaque à des questions qui restaient à régler. Le projet de loi va placer les services de diffusion en continu en ligne sous le régime de la Loi sur la radiodiffusion. Les plateformes Internet comme Crave, Netflix, Amazon Prime et Spotify vont devoir, comme les diffuseurs classiques, contribuer à la création d'une programmation canadienne en versant un pourcentage de leurs revenus bruts.
[Français]
Par ailleurs, le Conseil des ministres disposera du pouvoir d'ordonner au CRTC de s'assurer que les fonds nécessaires sont consacrés à la programmation de langue française. Dans le monde moderne des communications de masse, la courroie de transmission culturelle est hautement technologique, que l'on parle de la radio, de la télévision, du cinéma, de la musique enregistrée ou du contenu sur Internet. Ce projet de loi vise à renforcer notre infrastructure culturelle moderne. L'épanouissement d'une culture dépend à la base d'une volonté collective, mais elle dépend aussi des ressources, bref, de l'argent. Ce projet de loi vise à assurer que les ressources nécessaires sont mises à la disposition et au service de la survie et de l'épanouissement de notre belle et magnifique culture.
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Madame la Présidente, je suis heureuse de parler du projet de loi et je partagerai mon temps de parole avec le député de .
Le projet de loi vise à renforcer la viabilité du système canadien de radiodiffusion et à mettre les radiodiffuseurs canadiens et leurs concurrents en ligne sur un pied d'égalité. L'objectif du projet de loi est de garantir que les services de radiodiffusion en ligne qui exercent leurs activités au Canada contribuent à la création de contenu canadien et soutiennent les écosystèmes canadiens de création audio et audiovisuelle, tout comme les radiodiffuseurs et les télédiffuseurs canadiens qui possèdent une licence le font depuis des décennies.
Jusqu'à ce que les géants du Web arrivent, le système de radiodiffusion était géré par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, ou CRTC, comme secteur canadien réglementé. Pour exploiter un service de radiodiffusion sur le marché protégé du Canada, il fallait obtenir une licence du CRTC. Comme condition pour obtenir cette licence, les radiodiffuseurs devaient contribuer de façon générale au système de radiodiffusion. Ils devaient appuyer la création et la promotion d'histoires et de musique canadiennes. C'était en gros ce qui était convenu selon la réglementation canadienne.
Ce régime a bien fonctionné pendant des décennies, contribuant à la croissance et à la qualité de notre système de radiodiffusion. Au fil des ans, les Canadiens ont d'abord eu accès à deux ou trois chaînes de télévision — je me rappelle clairement le cadran de mon téléviseur qui servait à changer de chaîne —, alors qu'aujourd'hui, ils ont accès à des centaines de chaînes. En raison du contexte de la mondialisation, le CRTC a établi de nouvelles règles et de nouveaux règlements afin de permettre à certaines chaînes étrangères comme CNN de distribuer leur contenu par l'intermédiaire des systèmes de câbles et de satellites au Canada, tout en veillant à ce que les exploitants canadiens demeurent concurrentiels.
Même en pleine expansion, le régime fermé de licences de radiodiffusion a été maintenu. Ce régime a été grandement avantageux pour les stations de télévision et de radio ainsi que les câblodistributeurs et les distributeurs de services par satellite. Par ailleurs, il a procuré un soutien stable et durable aux créateurs de films et de vidéos et aux musiciens. Cependant, l'émergence des multinationales du Web a changé la donne. Le CRTC a rapidement décidé d'exempter ces services du régime de licences afin d'encourager le développement de technologies innovatrices et de nouveaux modèles opérationnels. Ainsi, les diffuseurs Web étrangers sont maintenant en mesure de vendre leurs services aux Canadiens sans respecter les obligations réglementaires auxquelles sont assujettis les diffuseurs traditionnels, y compris l'obligation de soutenir les créateurs canadiens.
Cependant, ces diffuseurs en ligne ne bénéficient plus d’un traitement de faveur. Les deux dernières années, les revenus des services vidéo en ligne ont augmenté de quelque 90 % chaque année, tandis que la situation des diffuseurs traditionnels canadiens s’est détériorée. Les cinq dernières années, ils ont accusé une baisse constante de leurs revenus de 1,8 % par an. Pour ne pas trop insister sur ce point, la loi actuelle a désavantagé nos propres entreprises canadiennes. Nous devons aider l'équipe locale. Depuis trop longtemps, nous aidons les équipes étrangères.
Les radiodiffuseurs canadiens traditionnels sont obligés de se mesurer à des plateformes en ligne soumises à des règles différentes. Il faut que cela change. Le projet de loi permettrait de rétablir l’équilibre concurrentiel. Il fournirait au CRTC les outils dont il a besoin pour établir un cadre réglementaire moderne pour la radiodiffusion, adapté à l’ère numérique, en ligne et à la demande dans laquelle nous vivons aujourd’hui.
Il est important de noter que ce nouveau régime réglementaire engloberait à la fois les radiodiffuseurs traditionnels et les services en ligne. Notre approche est équilibrée et prévoit des garde-fous solides. Nous nous trouverions à exclure de la réglementation les contenus produits par les utilisateurs, les actualités et les jeux vidéo.
En outre, bien que ces modifications s’appliqueraient aux diffuseurs en ligne, des obligations ne seraient imposées qu’à ceux qui ont un impact important pour le Canada. En pratique, cela signifie qu’il n’y aurait d’impact que sur les grands services de diffusion en continu. Le tout premier objectif de la politique de radiodiffusion figurant dans la Loi sur la radiodiffusion modifiée stipulerait que toutes les entreprises de radiodiffusion doivent appliquer la politique de radiodiffusion de manière à favoriser le Canada. On égaliserait ainsi les règles du jeu et rétablirait l’équité et la justice dans le système. Les services de radiodiffusion en ligne seraient tenus de soutenir la création et la promotion d’histoires et de musique canadiennes. Cela contribuerait à stabiliser le financement des créateurs canadiens de film, de vidéo et de musique et à établir un soutien durable pour une nouvelle génération d’artistes canadiens.
Les Canadiens ont bénéficié de la souplesse et du choix qu’offrent les plateformes en ligne. Les créateurs, les histoires et la musique canadiens ont connu un succès international et ont atteint de nouveaux publics grâce aux plateformes mondiales de diffusion en continu. Quand j’y pense, ce sont des gens comme Alessia Cara qui me viennent à l’esprit ou des émissions comme Anne avec un E, l’émission de télévision que beaucoup de gens ont aimée.
Je souligne toutefois que l’intention de ce projet de loi n’est pas de restreindre la capacité des Canadiens d’accéder aux services de radiodiffusion en ligne ou de soumettre les plateformes étrangères à des règles qui ne s’appliquent pas également aux radiodiffuseurs canadiens. L’intention n’est pas non plus d’imposer aux services canadiens de radiodiffusion en ligne des règles qui ne s’appliquent pas aux services étrangers.
Le CRTC, en tant que régulateur expert, devrait instituer un régime qui ne fait pas de discrimination et traite les services semblables de la même façon. Aucun radiodiffuseur en ligne, canadien ou étranger, n’aurait besoin d’une licence du CRTC. Le message est qu’ils sont les bienvenus et peuvent se joindre au jeu, mais qu’ils doivent respecter les mêmes règles que les autres joueurs sur le terrain.
Le a mentionné que le projet de loi dont nous sommes saisis n'est qu’une première étape dans une approche plus générale que le gouvernement compte mettre en œuvre pour adapter la radiodiffusion canadienne à l’environnement en ligne et à la demande. Il a précisé qu’il entend demander au CRTC d’agir rapidement pour s’assurer que les diffuseurs en ligne contribuent de manière appropriée au système de radiodiffusion canadien. Il demandera ainsi au CRTC de remédier aux incohérences entre les différents règlements. Les exigences réglementaires devraient être souples, mais prévisibles, et tenir compte de l’extraordinaire diversité des créateurs qu’offre le Canada, ainsi que des modèles de gestion et des technologies dans le système de radiodiffusion canadien aujourd’hui.
Nous devons rétablir une certaine équité dans le système de radiodiffusion. Beaucoup de choses ont changé depuis l’époque où, comme je le disais, nous captions six chaînes tout au plus au moyen d'un téléviseur équipé d'un bouton qu'il fallait tourner pour passer d'un poste à l'autre. Le projet de loi trace une voie à suivre pour arriver à un cadre de réglementation plus équitable qui permettra aux radiodiffuseurs traditionnels de se mesurer à la concurrence sur un pied d’égalité. Il contribuera directement à stabiliser et à maintenir le revenu des créateurs canadiens.
Le projet de loi met les diffuseurs en ligne sur un pied d’égalité avec les radiodiffuseurs canadiens traditionnels, et il nous appartient, en tant que députés, d’adopter le projet de loi rapidement afin de rétablir un équilibre concurrentiel dans le système de radiodiffusion et de donner aux radiodiffuseurs canadiens une chance réelle de se remettre en selle.
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Madame la présidente, je tiens tout d’abord à souligner que bien que la Chambre siège sur le territoire ancestral du peuple algonquin anishinabe, je me participe à la séance de la Chambre depuis mon bureau local de Milton, sur le territoire ancestral de nombreuses Premières Nations, notamment les Haudenosaunee, Hurons-Wendats, Anishinabek, Attawandaron et plus récemment, la Première Nation des Mississaugas de Credit.
Des changements considérables ont été apportés à la Loi sur la radiodiffusion en 1991 mais depuis, nous avons assisté à l’essor d’Internet et des services de radiodiffusion en ligne, qui ont complètement changé la façon dont les Canadiens écoutent de la musique et regardent la télévision. La Loi sur la radiodiffusion n’a pas suivi le rythme de ces changements et, par conséquent, les radiodiffuseurs en ligne n’ont pas été réglementés.
Le projet de loi moderniserait la Loi sur la radiodiffusion pour l’ère numérique. Cette mesure fournirait au CRTC les outils dont il a besoin pour réglementer les diffuseurs en ligne et veiller à ce qu’ils contribuent à la création d’histoires et de musique canadiennes, tout comme les diffuseurs conventionnels le font depuis des dizaines d’années. Ainsi, les producteurs, les réalisateurs, les scénaristes, les acteurs et les musiciens canadiens bénéficieront d’un financement accru pour créer du contenu audio et audiovisuel d’excellente qualité. Ils auront plus d’occasions de mettre leurs histoires et leur musique à la disposition des Canadiens. Cela signifierait un régime réglementaire plus équitable et souple dans lequel des services comparables seraient soumis à des exigences réglementaires similaires, peu importe qu’ils opèrent en ligne ou par voie hertzienne.
Notre approche comporte aussi des garde-fous solides, où nous soustrayons à toute réglementation les contenus générés par les utilisateurs, les contenus d’actualité et les jeux vidéo. De plus, bien que ces modifications s’appliquent aux diffuseurs en ligne, des obligations ne seraient imposées qu’à ceux qui ont une incidence importante au Canada. En pratique, cela signifie que cela ne toucherait que les noms connus des ménages.
[Français]
Cela signifie que la musique et les histoires canadiennes seront plus largement disponibles grâce à divers services de radiodiffusion. Cependant, la technologie n'est pas la seule chose qui a changé depuis 1991; la société canadienne a changé aussi.
[Traduction]
C’est pourquoi, aujourd’hui, je tiens à souligner les modifications importantes que le projet de loi apporterait sur la Loi sur la radiodiffusion afin de favoriser une plus grande diversité pour les femmes, les Autochtones, les communautés racialisées, les anglophones et les francophones, y compris les personnes qui appartiennent à des communautés de langue officielle en situation minoritaire, la communauté LGBTQ2S et les personnes handicapées.
Le projet de loi précise que nous devons encourager les personnes de tous ces groupes à s’exprimer et à partager leurs histoires et leur musique. Il précise aussi que ces voix et ces histoires sont importantes et font partie intégrante de la culture canadienne.
La radiodiffusion joue un rôle essentiel dans le partage des cultures, du vécu et des points de vue. C’est pourquoi il est si important que les créateurs des communautés les plus marginalisées participent au système de radiodiffusion.
[Français]
La radiodiffusion est un média essentiel pour partager nos expériences vécues les uns avec les autres. En présentant un contenu représentatif de différentes cultures, communautés et langues, elle peut contribuer à bâtir une société chaleureuse, empathique, compatissante et inclusive. La radiodiffusion peut nous aider à célébrer nos différences tout en renforçant les liens communs qui unissent notre société.
[Traduction]
Ces derniers temps, il est devenu très clair que cette participation est plus importante que jamais. Des événements récents ont mis en lumière les fractures et les inégalités qui existent encore dans notre pays.
La Commission de vérité et réconciliation et l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées ont mis en lumière la persistance des politiques coloniales, patriarcales et racistes à l’origine de générations de traumatismes, de marginalisation et de mauvais traitements envers les Autochtones. Le mouvement #Moiaussi nous a forcés à réexaminer comment nous soutenons les victimes d’abus et de harcèlement sexuels et il a souligné combien il est important que nous travaillions encore plus fort pour éliminer les éléments de notre culture qui perpétuent l’inégalité et l’iniquité entre les sexes.
Nous avons encore du travail à faire pour que toutes les identités et expressions de genre soient reconnues et respectées. Nous devons continuer à lutter pour l’égalité et l’acceptation de toutes les personnes bisexuelles, lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, queer, en questionnement, intersexuelles et asexuées. Le mouvement Black Lives Matter a attiré l’attention sur le racisme systémique qui engendre encore de la discrimination, de l’hostilité, l’oppression et la violence envers la communauté noire…