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PROC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre


NUMÉRO 072 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 11 mai 2023

[Enregistrement électronique]

  (1005)  

[Traduction]

     Bonjour et bienvenue à la 72e réunion du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Le Comité se réunit aujourd'hui pour poursuivre son étude.
     Je vois, monsieur Cooper, que vous avez levé la main.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
     J'aimerais présenter une motion concernant l'ordre de renvoi de la Chambre faisant suite à la question de privilège concernant la campagne d'intimidation orchestrée par un agent du consulat de Pékin à Toronto contre le député de Wellington-Halton Hills, Michael Chong.
     La motion sera distribuée. Je vais maintenant lire la motion pour le compte rendu:
Que, relativement à son ordre de renvoi du mercredi 10 mai 2023 concernant la campagne d'intimidation orchestrée par Wei Zhao contre le député de Wellington-Halton Hills et d'autres députés, le Comité
(a) utilise, aux fins de la présente étude, les éléments de preuve reçus dans le cadre de son étude sur l'ingérence électorale étrangère, sans limiter les témoins qui peuvent être appelés à comparaître;
(b) utilise, aux fins de la présente étude, les témoignages reçus par le Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique dans le cadre de son étude sur l'ingérence étrangère, sans limiter le nombre de témoins qui peuvent être appelés à comparaître;
(c) invite chacun des témoins suivants à se présenter seul:
(i) l'honorable Michael Chong, pour une durée d'une heure,
(ii) Eric Janse, greffier intérimaire de la Chambre des communes, pour une durée d'une heure,
(iii) l'honorable Mélanie Joly, ministre des Affaires étrangères, pour une durée d'une heure,
(iv) l'honorable Marco Mendicino, ministre de la Sécurité publique, pour une durée d'une heure,
(v) l'honorable Bill Blair, président du Conseil privé du Roi pour le Canada et ministre de la Protection civile, pour une durée d'une heure,
(vi) Jody Thomas, conseillère à la sécurité nationale et au renseignement auprès du premier ministre, pour une durée de deux heures,
(vii) David Vigneault, directeur du Service canadien du renseignement de sécurité, pour une durée de deux heures,
(viii) David Morrison, vice-ministre des Affaires étrangères et ancien conseiller par intérim du premier ministre en matière de sécurité nationale et de renseignement, pour une durée de deux heures,
(ix) Mike MacDonald, ancien conseiller par intérim du premier ministre en matière de sécurité nationale et de renseignement, pour une durée d'une heure,
(x) Vincent Rigby, ancien conseiller en matière de sécurité nationale et de renseignement auprès du premier ministre, pour une durée d'une heure,
(xi) Michael Duheme, commissaire de la Gendarmerie royale du Canada, pour une durée d'une heure, et
(xii) Cong Peiwu, ambassadeur de la République populaire de Chine au Canada, pour une durée de deux heures;
(d) ordonne aux parties de fournir leurs listes préliminaires d'autres témoins au greffier du Comité dans un délai d'une semaine;
(e) ordonne la production,
(i) dans un délai d'une semaine, du rapport du SCRS de juillet 2021 intitulé « People's Republic of China Foreign Interference in Canada: A Critical National Security Threat », ainsi que tous les documents concernant la transmission au Cabinet du premier ministre, au Bureau du Conseil privé, au ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement et au ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile, la distribution au sein de ces organismes, l'analyse et le traitement de ce rapport, et
(ii) dans un délai de trois semaines, tous les autres mémorandums, notes d'information, courriers électroniques, comptes rendus de conversations et tous les autres documents pertinents, y compris les projets, qui sont en la possession d'un ministère ou d'un organisme gouvernemental, y compris le groupe de travail sur les menaces pour les élections en matière de sécurité et de renseignement, le groupe du protocole sur les incidents électoraux critiques, tout cabinet ministériel et le cabinet du premier ministre, et qui contiennent des informations sur la planification ou les efforts déployés par des gouvernements étrangers ou d'autres acteurs d'États étrangers, ou en leur nom, pour intimider un membre de la Chambre des communes, à condition
(iii) que ces documents soient déposés sans être expurgés au bureau du légiste et conseiller parlementaire, dans les deux langues officielles,
(iv) qu'une copie des documents soit également déposée au Bureau du légiste et conseiller parlementaire, dans les deux langues officielles, avec toute proposition de caviardage d'informations qui, de l'avis du gouvernement, risqueraient vraisemblablement de compromettre l'identité d'employés ou de sources ou les méthodes de collecte de renseignements d'organismes de renseignement canadiens ou alliés,
(v) que le Bureau du légiste et conseiller parlementaire doit rapidement faire savoir au Comité s'il est convaincu que les documents ont été produits conformément à l'ordre donné et, dans la négative, le Président doit être chargé de présenter immédiatement, au nom du Comité, un rapport à la Chambre décrivant les faits matériels de la situation,
(vi) le Bureau du légiste et conseiller parlementaire évalue les expurgations proposées par le gouvernement, conformément au sous-paragraphe (iv), afin de déterminer si le Bureau convient que les expurgations proposées sont conformes aux critères énoncés au sous-paragraphe (iv) et
(A) s'il est d'accord, il fournit les documents, tels qu'ils ont été expurgés par le gouvernement conformément au sous-paragraphe (iv), au greffier du Comité, ou
(B) s'il n'est pas d'accord avec tout ou partie des expurgations proposées, il fournit au greffier du Comité une copie des documents expurgés de la manière que le Bureau juge conforme aux critères énoncés au paragraphe (iv), ainsi qu'un rapport indiquant le nombre, l'étendue et la nature des expurgations proposées par le gouvernement qui ont fait l'objet d'un désaccord, et
(vii) le greffier du Comité fait distribuer aux membres du Comité les documents fournis par le Bureau du légiste et conseiller parlementaire conformément au sous-paragraphe (vi) et les fait publier sur le site Web du Comité dès leur réception; et
(f) met à disposition les éléments de preuve reçus dans le cadre de cette étude pour son étude sur l'ingérence électorale étrangère.
     Madame la présidente, cette motion découle d'une question de privilège sur un sujet on ne peut plus grave. Il y a deux ans, un diplomate accrédité du consulat de Pékin à Toronto a organisé l'intimidation d'un député fédéral en menaçant de sanctionner et de punir sa famille à Hong Kong parce que ce député avait présenté une motion visant à dénoncer le régime de Pékin pour avoir perpétré un génocide contre les musulmans ouïghours.
     Cela constitue une attaque contre cette assemblée et contre chacun des députés. C'est une attaque contre notre démocratie. C'est une tentative d'empêcher un député de cette chambre de faire son travail et de défendre les intérêts de ses électeurs et des Canadiens, ce que chaque député ici devrait pouvoir faire sans interférence.
     Le SCRS a établi que cet agent de Pékin, ce diplomate de Pékin, avait participé à l'orchestration de cette campagne d'intimidation il y a deux ans. Cela a été révélé et documenté dans un mémo. Pourtant, pendant deux ans, le député de Wellington-Halton Hills, M. Chong, a été tenu dans l'ignorance. Le premier ministre, chose incroyable, prétend qu'il l'a appris pour la première fois dans le Globe and Mail et non pas il y a deux ans, alors que la conseillère à la sécurité nationale du premier ministre, Jody Thomas, a dit à M. Chong que le mémo avait été distribué aux ministères concernés ainsi qu'à la conseillère à la sécurité nationale au Bureau du Conseil privé.
     Deux scénarios sont possibles, dont aucun n'est favorable au premier ministre. Le premier scénario est que le premier ministre ne dit pas la vérité, qu'il a été informé et qu'il a tenu le député de Wellington-Halton Hills dans l'ignorance. Il a étouffé l'affaire et fermé les yeux sur le fait qu'un diplomate de Pékin intimidait un député et menaçait la sécurité de sa famille. L'autre scénario est que le premier ministre est incompétent et a mis en place une structure dans laquelle il a été tenu dans l'ignorance et n'a pas été mis au courant de ce qui, comme je l'ai dit au début, est une affaire on ne peut plus sérieuse: un diplomate de Pékin essayant d'intimider un député dans l'exercice de ses fonctions en menaçant sa famille.
     Dans un cas comme dans l'autre, il est clair que le premier ministre est tout simplement inapte à exercer ses fonctions lorsqu'il s'agit de protéger l'intérêt national du Canada et la sécurité des Canadiens. C'est une preuve supplémentaire que ce premier ministre ne prend pas au sérieux l'ingérence de Pékin.

  (1010)  

    Je dois dire qu'il est très décevant que, face à l'inaction du premier ministre, à son incompétence, à sa négligence et, sans doute, à la possibilité qu'il mente ou qu'il ne soit pas franc — je retire mensonge — ou qu'il ne dise pas toute la vérité, le premier ministre se lance dans une campagne pour tenter d'attaquer et de salir le caractère du député de Wellington-Halton Hills en répandant des renseignements erronés selon lesquels le député avait été informé il y a deux ans, alors qu'il n'en est rien. Il a également chargé deux députés, dont le député de Kingston et les Îles, de répandre ces renseignements erronés à la Chambre. On ne peut tomber plus bas.
    J'invoque le Règlement.
    Sur ce point, madame la présidente, j'ai fait une déclaration, que j'ai précisée par la suite, et je me suis excusé de la manière dont elle a été reçue. Cependant, je suis curieux de savoir pourquoi nous devons faire cette étude si M. Cooper est déjà parvenu à toutes ces conclusions.
    Je crois que nous allons retourner... Je sais que M. Cooper est en train de conclure.
     Je regarde la Chambre, même quand je n'y suis pas, et je sais que vous avez précisé ce point à plusieurs reprises, mais la répétition fonctionne dans cette enceinte.
     Allez‑y, monsieur Cooper.
    Merci, madame la présidente.
     En fin de compte, nous devons mettre au grand jour ce qui s'est passé, savoir qui a reçu ce mémo, comment il a été transmis, quand il a été distribué et à qui, et c'est ce que prévoit cette motion.
     Il ne s'agit pas seulement de convoquer des témoins; il s'agit de produire des preuves. Il ne s'agit pas seulement de documents, mais de suivre la chronologie ainsi que la manière exacte dont ce mémo a été distribué afin de savoir exactement qui était au courant et quand.
     J'espère que, dans l'esprit du vote unanime sur la question de privilège, cette motion sera également adoptée à l'unanimité.
     Je vous remercie, madame la présidente.

  (1015)  

    Merci, monsieur Cooper.
     Allez‑y, monsieur Green.
    Merci beaucoup.
     Tout d'abord, c'est un plaisir d'être ici avec vous tous aujourd'hui. Il s'agit en quelque sorte de la suite de certains de nos travaux au comité de l'éthique.
     Ceux d'entre vous qui ont eu le privilège de travailler avec nous savent que les néo-démocrates approuvent généralement la production de documents importants. Vous savez également qu'à l'unanimité, nous avons convenu qu'il s'agissait d'une question sérieuse. Nous avons des experts en la matière qui vont nous parler aujourd'hui.
     Je dirais que nous sommes d'accord sur le principe de la production de documents. Nous pensons qu'il faut mettre en place un système permettant à une tierce partie d'évaluer ce qui relève ou non de la confidentialité du Cabinet et de la sécurité nationale, et d'évaluer toutes les autres choses que nous entendons généralement en comité et qui nous empêchent d'avoir accès aux renseignements.
     Cela dit, je dirais que nous appuyons cette idée, mais nous encourageons vivement les députés autour de la table à nous permettre de revenir au sujet qui nous occupe aujourd'hui, à savoir les dépositions des témoins clés pour le reste de la réunion.
     Je vous remercie de votre attention.
    Merci.
     Allez‑y, monsieur Turnbull.
    Merci, madame la présidente.
     Je vous remercie tous de vos observations. Il est évident que nous prenons tous cette question très au sérieux. Une question de privilège est quelque chose qui nous préoccupe tous en tant que députés. Et dans le cas présent en particulier, je crois qu'il nous faut aller au fond des choses.
     J'aurais aimé voir la motion un peu plus tôt afin de pouvoir y réfléchir, car elle ferait probablement l'objet d'un large consensus sur la majeure partie de son contenu. J'ai cru comprendre, d'après une conversation antérieure, que nous avions jusqu'à mardi pour décider si nous allions entendre d'autres témoins. Cette motion énumère des témoins précis choisis par les conservateurs, et je pense bien que notre équipe aimerait avoir un peu de temps pour réfléchir aux témoins que nous aimerions ajouter à la liste. Je crois que tous les partis devraient avoir la possibilité d'y réfléchir.
     Je voudrais également souligner que nous devons entendre aujourd'hui trois groupes de témoins. Je crois que le témoignage de ces personnes a déjà été reporté et je ne voudrais pas leur manquer de respect. Il est important, à mon avis, que nous poursuivions les travaux du comité prévus pour la journée.
    À ce comité, nous avons travaillé la plupart du temps en toute bonne foi et nous sommes parvenus à des accords sur... On pourrait même dire que nous avons convenu d'étudier l'ingérence étrangère avant que certaines de ces allégations ne commencent à circuler dans les médias; nous avons donc toujours manifesté un intérêt pour ce sujet. N'oubliez pas que les témoins qui sont ici aujourd'hui parlent de l'ingérence étrangère dans les élections et qu'ils ont des choses importantes à apporter.
    C'est une question importante. Nous sommes prêts à collaborer. Tel est mon sentiment général, mais nous avons besoin d'un peu de temps pour examiner la motion. Je pense que si nous prenons ce temps, nous trouverons une solution, comme nous l'avons toujours fait dans le passé.
     Sur ce, je propose que le débat soit maintenant ajourné.
    Cette motion ne pouvant faire l'objet d'un débat, nous allons la mettre aux voix.
     (La motion est adoptée 7 voix contre 4.)
     La présidente: Je vous remercie.
     Je tiens simplement à préciser — et je vais continuer à essayer de respecter le temps imparti — que je connais certains des paramètres.
    M. Chong serait naturellement le premier à comparaître, et nous tenterons de le faire venir avant la semaine de relâche. Ensuite, nous déterminerons au fur et à mesure l'ordre de comparution des autres témoins.
     Après la semaine de relâche, nous nous pencherons sérieusement sur la question de privilège, comme les députés en ont exprimé le souhait. Il reste que c'est le mardi qu'il faut faire parvenir le nom des témoins à la greffière. Si un avis n'a pas encore été envoyé, il le sera sous peu.
     Sur ce, le comité se réunit aujourd'hui pour poursuivre son étude sur l'ingérence électorale étrangère.
     Nous accueillons aujourd'hui Mark Bourrie, avocat, Michel Juneau-Katsuya, ancien chef de l'unité Asie-Pacifique du Service canadien du renseignement de sécurité, et Peter German, avocat, du Vancouver Anti-Corruption Institute.
     Vous disposerez chacun d'un maximum de quatre minutes pour une déclaration liminaire, après quoi nous passerons aux questions des membres du comité.

  (1020)  

[Français]

     Monsieur Bourrie, vous avez la parole. Vous pouvez vous exprimer dans la langue officielle de votre choix.

[Traduction]

    Je ferai mes remarques en anglais. Je les ai remises aux traducteurs et je les ai envoyées à la greffière.
     Je commencerai par dire que mes remarques vous seront probablement beaucoup plus utiles si vous avez une copie de l'article du Ottawa Magazine que j'ai envoyé à la greffière plus tôt cette semaine. L'histoire y est vraiment complète. Quatre minutes ne peuvent certainement pas lui rendre justice.
    Le temps presse; j'aimerais donc vous remercier de m'avoir invité.
     Comme vous pouvez le voir dans le courriel de 2012 que j'ai remis à la greffière, j'espérais avoir cette occasion il y a quelque temps déjà. Je pense que mon expérience au sein de l'agence de presse Xinhua pourrait fournir au Comité des renseignements et un contexte utiles dans son examen de la tentative de la Chine d'étendre son influence au système politique du Canada.
     Je suis avocat depuis cinq ans, mais j'ai commencé à fournir des écrits à des journaux à la fin des années 1970. J'étais assez jeune. J'ai contribué à plusieurs quotidiens lorsque j'étais étudiant. J'ai passé 13 ans en tant que pigiste dans la région de la baie Georgienne, en Ontario, pour le Globe and Mail et le Toronto Star.
     Je suis arrivé à Ottawa en 1994 et j'ai rejoint la tribune de la presse en tant que pigiste. Entre 1994 et 2007, j'ai écrit pour le Toronto Star, le National Post, l'Ottawa Citizen, le Hill Times, le Law Times, le Canadian Lawyer et un grand nombre d'autres publications énumérées dans mon CV. En 2004, j'ai commencé à travailler à mon doctorat, qui portait sur le système de censure de la presse pendant la Seconde Guerre mondiale, et en 2007, j'ai accepté un poste d'enseignant de durée limitée à l'Université Concordia, à Montréal. En 2009, j'ai terminé mon doctorat, mon contrat d'enseignement était terminé et je suis revenu dans la tribune de la presse.
     La majeure partie du travail que je faisais à la pige avait été répartie entre mes collègues, ou les publications avaient réduit leurs achats, de sorte qu'un certain ajustement s'imposait. Parallèlement, il se passait des choses intéressantes dans les médias. Des expériences comme BuzzFeed, VICE, Canadaland, iPolitics, Blacklock's Reporter et d'autres médias non traditionnels tentaient de prendre la place de médias moribonds. En dehors de la scène médiatique, il semblait y avoir un véritable dégel dans les relations sino-occidentales.
     Voici quelques éléments de contexte à retenir lorsque vous écouterez ce que je vais vous dire.
     En 2009, Hu Jintao était encore président et dirigeant de la Chine, et son mandat était encore limité dans le temps. La Chine sortait tout juste de Jeux olympiques d'été couronnés de succès. Les relations entre la Chine et Taïwan semblaient s'améliorer. Le Canada avait envoyé des missions commerciales en Chine pendant des années, et tous les gouvernements récents essayaient de conclure un accord. Le gouvernement Harper y est parvenu en 2014.
     En 2009, des représentants de l'agence de presse chinoise Xinhua m'ont demandé d'écrire quelques articles en tant que pigiste. J'avais des inquiétudes et j'ai essayé d'obtenir des conseils du SCRS. Mes collègues et les membres de la Colline en général se méfiaient beaucoup des activités de Xinhua au Canada, et j'ai demandé conseil au SCRS, qui ne m'a jamais répondu. La plupart de mes interactions avec Xinhua sont documentées dans l'article du Ottawa Magazine que j'ai envoyé à la greffière du Comité et dans les courriels que je vous ai également transmis.
    Xinhua essayait d'accomplir deux choses qui semblaient s'exclure mutuellement, mais qui, en fait, ne s'excluaient pas. Elle voulait gagner de l'argent et se développer pour devenir une agence de presse alimentant en contenu des organismes d'information crédibles dans le monde entier. Elle a conclu des accords avec de grands médias comme l'Associated Press et avec des médias chinois au Canada et dans d'autres pays. Elle voulait également donner de la crédibilité aux institutions chinoises et au régime.
     Xinhua était apolitique. Je n'ai vu aucune tentative de promouvoir les intérêts d'un parti politique canadien plutôt qu'un autre, mais mon expérience est limitée. Xinhua ne voulait pas offenser les acteurs politiques ici, et les articles de l'époque sont, je crois, toujours en ligne. Xinhua a couvert des événements sociaux somptueux à l'ambassade de Chine, qui ont attiré des députés et des sénateurs libéraux et conservateurs. Elle a refusé de publier toute critique à l'égard du gouvernement conservateur.
     Cependant, il s'est avéré que le chef du bureau de Xinhua recueillait des renseignements pour la Chine et il m'a demandé d'espionner pour lui. Il voulait des renseignements sur la rencontre privée entre le premier ministre Harper et le dalaï-lama en avril 2012, alors j'ai démissionné et je lui ai dit pourquoi.

  (1025)  

    Monsieur Bourrie, nous voulons savoir pourquoi, mais je dois passer à la personne suivante. J'espère qu'il reste du temps pour les questions et les observations. Nous ferons également circuler votre déclaration liminaire.
    Je suis d'accord pour qu'on lui accorde 30 secondes, s'il y a consentement unanime.
    Cela vous convient-il?
     Des députés: D'accord.
     Le président: Nous accorderons alors cinq minutes à chacune des déclarations liminaires. Cela signifie que notre temps sera limité.
     Allez‑y, monsieur Bourrie.
    Je parlerai comme un commissaire-priseur.
     Des voix: Oh, oh!
    Dites-nous pourquoi, mais pas trop vite pour les interprètes, s'il vous plaît.
     La parole est à vous.
    Je vais aller droit au but. Les courriels se trouvent dans les documents que j'ai envoyés, mes courriels avec Xinhua.
     Le chef du bureau de Xinhua voulait que je me renseigne auprès de mes contacts pour savoir ce qui s'était passé lorsque le premier ministre Harper a rencontré le dalaï-lama. Il voulait que je dépose à Ottawa des documents sur le dalaï-lama qui ne seraient manifestement pas utilisés à des fins journalistiques, et je l’ai essentiellement envoyé paître. C'est la version simplifiée.
    C'est excellent.
     Je peux confirmer que...
    Je les ai dénoncés.
    Vous les avez dénoncés. Je vous remercie.
     Je répétais ce qu'il a dit, pour le compte rendu.
     Les documents qui ont été communiqués sont en cours de traduction. Tant qu'ils ne seront pas dans les deux langues officielles, ils ne seront pas distribués, mais ils sont en route, pour que tout le monde le sache.
     Sur ce, monsieur Juneau-Katsuya, vous avez la parole.

[Français]

     Pour être le plus concis possible, j'ai supprimé quelques paragraphes de la présentation que j'ai donnée au service d'interprétation. Alors, j'espère que ce dernier pourra me suivre.
    Madame la présidente, membres du Comité, je vous remercie de m'offrir l'occasion de vous faire part de mes réflexions et de mes analyses basées sur 30 ans de travail, de recherches, d'enquêtes et d’analyses sur les activités des services de renseignement chinois au Canada. Ce travail, je l'ai effectué comme agent du contre-espionnage, conseiller en matière de sécurité pour le secteur privé et chercheur universitaire.
    D'entrée de jeu, je peux vous confirmer que le Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS, connaît le problème de l'ingérence chinoise dans les élections canadiennes depuis le milieu des années 1990. À cette époque, mon unité avait produit le rapport Sidewinder en collaboration avec la GRC. Pour la première fois, nous avions appris dans les archives d'Élections Canada que l'ambassade de Chine avait donné de l'argent en 1995 aux caisses électorales du Parti libéral du Canada et du Parti conservateur du Canada. Les services chinois étaient alors maladroits. Trente ans plus tard, ils ont bonifié leurs techniques et leurs opérations, et ce, avec beaucoup d'aplomb et de témérité.

[Traduction]

     Le problème, cependant, ne vient pas seulement des opérateurs chinois. Il est également causé par nos propres candidats, nos élus et notre personnel politique, qui sont naïfs ou calculent intentionnellement pour gagner du pouvoir avec l'aide du gouvernement chinois. Si les services de renseignement chinois sont si doués, c'est parce qu'ils connaissent le système électoral et les faiblesses de l'être humain, et que leur travail est un jeu de longue haleine.
     Aujourd'hui, je veux être très clair. Nous pouvons prouver que tous les gouvernements fédéraux, de M. Mulroney à M. Trudeau, ont été compromis par des agents de la Chine communiste. Tous les gouvernements ont été renseignés à un moment ou à un autre. Chaque gouvernement a choisi d'ignorer les avertissements du SCRS par négligence, par intérêt personnel ou par partisanerie. Tous les gouvernements ont été infiltrés par des agents d'influence agissant pour le compte du gouvernement chinois, et nous savions qui ils étaient. Chaque gouvernement a pris des décisions concernant la Chine qui sont discutables et ne peuvent s'expliquer que par une ingérence exercée de l'intérieur ou motivée par l'intérêt personnel.
     Non seulement les gouvernements en place ont été compromis, mais tous les partis politiques fédéraux l'ont été à un moment ou à un autre. L'inaction du gouvernement fédéral — de tous les gouvernements fédéraux — a conduit à des attaques contre de nombreux gouvernements municipaux et provinciaux. En fin de compte, tous les gouvernements ont fait partie du problème, et non de la solution, et il ne faut pas oublier que la Chine n'est pas la seule à pratiquer l'ingérence.
     Compte tenu de ces faits, je voudrais proposer respectueusement quelques mesures à prendre.
     Premièrement, établir un processus obligatoire pour tous les futurs élus, le personnel politique et les bénévoles, dans lequel ils prêtent serment et signent une déclaration indiquant qu'ils ne sont pas sous l'influence ou qu'ils n'agissent pas pour le compte d'un gouvernement ou d'une entité étrangère. Ce document ferait état explicitement des procédures pénales en cas de tromperie intentionnelle.
     Deuxièmement, supprimer la possibilité pour des étrangers de voter pour la sélection des candidats et des personnes nommées. C'est un non-sens évident.
     Troisièmement, donner un briefing de sécurité explicite et clair à tous les députés nouvellement élus et leur demander de prouver par leur signature qu'ils ont assisté à ce briefing et qu'ils l'ont compris, en les avertissant à nouveau des répercussions en cas de tromperie. La prévention est notre meilleure défense.
     Quatrièmement, interdire à tous les ministres et hauts fonctionnaires sortants de travailler ou de participer à toute activité ou tout emploi lié à leurs fonctions antérieures pendant une période de trois à cinq ans, tant pour les entités étrangères que nationales.

  (1030)  

[Français]

     Cinquièmement, je propose que le Canada se dote d'une loi pénale sur l'ingérence étrangère, définissant les activités considérées comme illicites et les peines pouvant être encourues.
    Sixièmement, je recommande la création d'un bureau indépendant, distinct du SCRS et de la GRC, qui se rapportera directement à la Chambre des communes, et dont le directeur ou la directrice sera nommé par cette dernière. La proposition de créer un poste de coordonnateur national sous la tutelle du ministre est un non-sens.
    Septièmement, ce bureau doit avoir des pouvoirs encadrés par une loi lui donnant le droit, à titre d'agent de la paix, d'enquêter, de perquisitionner, de procéder à des arrestations et d'entamer des poursuites pénales sans avoir à en demander la permission à qui que ce soit.
    Huitièmement, je propose la création d'un mécanisme de transparence contrôlée, afin de dévoiler les cas d'ingérence détectés, ayant fait l'objet d'une enquête et confirmés. Comme je l'ai mentionné, l'éducation et la sensibilisation sont nos meilleures défenses.

[Traduction]

    Neuf...

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Il me reste trois lignes.

[Français]

    Je sais, mais cela fait déjà 5 minutes et 11 secondes. J'ai donné quatre minutes à M. Bourrie et il a pris quatre minutes et demie.
    Je vais vous laisser terminer.

[Traduction]

    Enfin, réduire le nombre de diplomates chinois au Canada. On estime que 70 % du personnel actuel exerce des fonctions illégales de renseignement au Canada.
     N'oubliez pas que chaque semaine qui passe affaiblit la confiance du public canadien en notre système et la capacité ou la détermination de notre gouvernement à faire quelque chose. En fin de compte, nos alliés perdent confiance en nous et nourrissent des doutes à notre égard. Ne sous-estimez pas ce problème.
    Je vous remercie de ce temps supplémentaire.
    Merci beaucoup.
     Allez‑y, monsieur German.

[Français]

[Traduction]

    Bonjour, mesdames et messieurs les membres du Comité. Je vous remercie de votre invitation.
     En guise de brève introduction, je dirai que l'Institut de lutte contre la corruption de Vancouver a été créé en 2021. Il fait partie intégrante de l'International Centre for Criminal Law Reform de l'Université de la Colombie-Britannique. Nous sommes une organisation à but non lucratif et nous réalisons des projets à l'échelle internationale. Nous faisons de la recherche et de la rédaction, et nous organisons des conférences et des ateliers.
     Sur le plan personnel, je suis un ancien sous-commissaire de la GRC et du Service correctionnel du Canada. J'ai également rédigé deux rapports pour le procureur général de la Colombie-Britannique, aujourd'hui premier ministre, intitulés Dirty Money et Dirty Money—Part 2.
     Mon intention, dans les prochaines minutes, est de parler des résultats, ce qui fait très bien suite, en fait, aux propos de mon ami, M. Juneau-Katsuya.
     Inévitablement, ce comité recommandera des changements législatifs qui pourraient inclure la création d'un registre ou d'une agence pour traiter des questions qui vous réunissent. D'après notre expérience internationale, de nombreux pays, peut-être même la plupart, ont mis en place des lois pour traiter toutes les formes de criminalité. Ils se conforment ainsi aux normes internationales. Malheureusement, peu nombreux sont les pays qui appliquent les lois régissant les questions essentielles comme la corruption et le blanchiment d'argent.
     Le blanchiment d'argent est l'arrière-plan du crime organisé transnational et va de pair avec lui. L'argent joue également un rôle important dans l'ingérence électorale. Combien, d'où et pourquoi sont des questions cruciales.
     Pratiquement tous les pays disposent de lois contre le blanchiment d'argent, mais peu d'entre eux les appliquent activement. Au Canada, notre performance est mitigée, même si le budget de 2023 et les initiatives prises en Colombie-Britannique sont porteurs d'espoir, tout comme la confiscation de biens civils dans les provinces. Autrement dit, il y a un monde entre la parole et l'acte. Le Canada doit agir. Nous respectons la primauté du droit et devons projeter dans le monde le fait que nous croyons à l'intégrité et à la bonne gouvernance.
     Qu'en est‑il alors? Lors de la création d'une loi, d'un registre ou d'une agence, quelques points sont d'une importance vitale.
     La première est la vérification. Les renseignements ne sont que du bruit s'ils ne sont pas vérifiés. L'expression « à données inexactes, résultats erronés » résume bien cet aspect.
     Deuxièmement, l'accès du public. La transparence est essentielle. Grâce à elle, les médias et les parties intéressées peuvent exercer une forme de contrôle essentielle dans une démocratie.
     Troisièmement, l'indépendance. Les personnes mandatées pour traiter ces questions doivent savoir qu'elles sont protégées contre toute attaque, rétrogradation, censure ou remise en cause de leur carrière.
     La quatrième question est celle des conséquences. Il doit y avoir des conséquences si des personnes ou des entités ne respectent pas les règles.
     La cinquième question est celle de l'application. Il est essentiel de désigner et de financer des entités expressément chargées de l'application de la loi. La GRC à l'échelle fédérale et l'unité d'enquête et d'exécution d'Élections Canada sont déjà en place, mais elles ont besoin d'une loi forte, d'un financement sûr et d'un accès rapide aux services de poursuite. Par exemple, bien qu'elle enquête sur des activités criminelles, l'unité d'enquête d'Élections Canada n'a pas accès à la précieuse mine de renseignements qu'héberge le CANAFE.
     Enfin, en ce qui concerne l'argent, les fonds utilisés pour influencer le système politique entrent généralement dans l'arène politique par l'intermédiaire de mandataires nationaux ou étrangers. Nous parlons de trois étapes dans le cycle du blanchiment d'argent: le placement, la superposition et l'intégration. L'objectif est de brouiller les pistes. Il n'est pas surprenant que l'argent fourni par des influenceurs étrangers s'apparente davantage au financement du terrorisme, car il est utilisé pour commettre un crime et n'est pas le produit de la criminalité, comme c'est le cas pour le blanchiment d'argent traditionnel. Encore une fois, les organismes chargés de l'application de la loi ont besoin des outils législatifs, de financement et de ressources spécialisées pour suivre la piste de l'argent.
     Mesdames et messieurs, votre rôle en tant que membres du Comité est particulièrement important à un moment crucial de l'existence de notre pays. Je vous remercie de votre travail et je me tiens à votre disposition pour répondre à vos questions.
    Je vous remercie, madame la présidente.

  (1035)  

    Merci, monsieur German. Merci beaucoup.
     Nous avons maintenant des tours de six minutes. Les questions doivent être posées par l'intermédiaire de la présidence, à moins que nous ne fassions une pause entre les deux à des fins d'interprétation. Éloignons-nous du style personnel.
     Nous commençons par M. Nater.
    Monsieur Nater, vous avez la parole.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Monsieur Juneau‑Katsuya, après avoir appris qu'une source du Service canadien du renseignement de sécurité, ou SCRS, avait rendu publiques les informations précisées sur l'ingérence étrangère dans les élections de 2019 et de 2021, vous avez mentionné qu'elle méritait une médaille. En tant qu'ancien agent du SCRS, croyez-vous que les informations révélées dans les médias sont crédibles?
    Je vous remercie de cette question.
    Nous ne sommes pas certains si la source provient du SCRS ou d'une autre organisation de la grande famille des services de sécurité et du renseignement du Canada.
    Cela dit, la personne qui a été le déclencheur de toute cette information a créé un événement historique. Nous ne nous parlerions pas aujourd'hui si ce n'était de ce geste et de ce dont j'ai été témoin au cours des 30 dernières années. Malheureusement, puisque j'étais tenu au secret, je n'ai pas pu en parler avant.
     Les Chinois ont gagné énormément de terrain. Toutefois, comme je le disais, il n'y a pas que les Chinois. Cependant, les Chinois ont été très agressifs, ils ont été très téméraires, et ils ont réussi à gagner énormément de terrain.
    Alors oui, je crois qu'il y a une différence entre la responsabilité éthique et la responsabilité morale. Je suis d'avis que le lanceur d'alerte a agi de façon morale, ce qui, à mon sens, prime sur les considérations éthiques et les responsabilités contractuelles.

[Traduction]

    Merci beaucoup. Je passe maintenant à l'anglais.
    Ce fut un plaisir.
    Je voudrais poursuivre avec vous. Vous venez de parler des actions très agressives de la République populaire de Chine et vous avez dit dans votre déclaration liminaire que jusqu'à 70 % des agents diplomatiques...
    C'est un chiffre prudent.
     Je suis désolé. Pouvez-vous le répéter?
    C'est un chiffre prudent, 70 %.
    C'est donc peut-être même plus. Je crois, d'après une réponse au Feuilleton que notre parti a reçue, qu'il y a 178 diplomates de la RPC accrédités au Canada. Il se peut qu'il y en ait 177 maintenant, après les événements de ces derniers jours.
     Compte tenu de ce nombre élevé et, franchement, du grand nombre de personnes agissant illégalement, que pensez-vous du fait qu'il ait fallu deux ans pour expulser un seul diplomate, sans parler de l'éventualité de 70 % de tous les diplomates?

  (1040)  

     La comparaison est vraiment importante. L'Amérique est notre plus grand partenaire économique, et ils ont environ 80 diplomates ici, au Canada, donc il y a deux fois plus de Chinois et nous avons un déficit commercial avec la Chine.
     D'où vient l'erreur? Mon hypothèse en tant qu'enquêteur est que malheureusement, aux Affaires étrangères — ou aux Affaires mondiales aujourd'hui — certaines personnes travaillent naïvement et non intentionnellement — ou peut-être intentionnellement — pour le compte de la Chine. Une certaine forme de remaniement doit se produire de ce côté‑là également.
    Regardez le temps qu'il a fallu pour prendre une décision sur l'expulsion d'une personne qui était si évidente. Je vais répéter ce que j'ai dit dans mon exposé: nous le savons depuis 30 ans. Nous avons averti les premiers ministres et les cabinets de toutes ces choses, et les gens, par intérêt personnel, par esprit partisan ou par négligence, ont négligé de prendre des mesures.
     Je peux comprendre les ramifications politiques, économiques et autres qui existent, mais en même temps, parce que nous avons agi si faiblement, cette ingérence étrangère a eu lieu et se trouve bien enracinée dans notre système en ce moment.
    Nous avons maintenant expulsé un diplomate. Croyez-vous que cela aura un effet d'intimidation? Vous parlez d'actions faibles dans le passé. L'effet est‑il suffisamment fort avec un seul diplomate, ou croyez-vous qu'il doive être plus fort?
    C'est un pas dans la bonne direction. Mais ce n'est pas suffisant, et c'est pourquoi je recommande que nous réduisions le nombre de diplomates en place ici au Canada. Il n'y a aucune raison d'avoir autant de diplomates d'un pays qui ne veut pas faire affaire avec nous. Nous avons un déficit commercial. Nous avons vendu une entreprise, Nexen, en Alberta, pour 15 milliards de dollars. Nous ne sommes même pas capables d'acheter un magasin de quartier en Chine.
     Cet écart dans les relations ne justifie pas la présence d'un si grand nombre de diplomates, si ce n'est que certaines personnes favorisent la Chine pour de mauvaises raisons.
    Vous avez mentionné dans votre exposé une série de points sur la manière de renforcer notre cadre juridique. Le premier point dont vous avez parlé est un processus obligatoire pour les candidats et le personnel, avec une déclaration signée et la menace de poursuites pénales. Quelles sanctions proposeriez-vous en ce qui concerne les poursuites pénales? Quelle est la force d'une...?
     Je dirais une peine de prison. Cela frôle la trahison, littéralement, alors je dis: prison. Maintenant, la durée d'emprisonnement serait dictée par la jurisprudence et par notre système, mais il s'agit bien d'une peine d'emprisonnement — pas d'amende ni de peine avec sursis ou quoi que ce soit de ce genre.
    Dans les quelques secondes qui me restent, je noterai que dans une interview accordée à la CBC en février dernier, vous réagissiez aux articles parus à l'époque dans le Globe and Mail. Vous avez parlé un peu du cas de Kenny Chiu et du fait que la collectivité chinoise de sa circonscription était manipulée par le Parti communiste chinois. J'ai terminé, mais pourriez-vous à un moment donné développer ces remarques?
    Merci, madame la présidente.
    Vous ne demandez pas cela maintenant, n'est‑ce pas?
    Je n'ai plus de temps, madame la présidente. Je respecte...
    Je vous remercie, monsieur Nater.
     Allez‑y, monsieur Fergus.

[Français]

     Je remercie les témoins de leur présence et de leurs témoignages.
    Monsieur Juneau‑Katsuya, dans votre allocution d'ouverture, vous avez mentionné être au courant depuis 30 ans de la négligence du gouvernement, peu importe le parti au pouvoir. Vous avez déterminé que des personnes déloyales — c'est le moins qu'on puisse dire — travaillaient au sein d'Affaires mondiales Canada.
    De plus, M. Bourrie a parlé d'un ancien secrétaire parlementaire visé par le gouvernement chinois par l'entremise d'une journaliste d'une agence de presse. Selon vous, s'agissait-il d'une brèche sérieuse? Le gouvernement de l'époque a-t-il pris le temps de résoudre ce problème?

  (1045)  

    C'était une brèche très sérieuse. Malheureusement, la réponse de M. Harper, à l'époque, a été qu'il s'agissait d'une histoire personnelle et qu'on n'avait pas à s'en mêler. Il a laissé la personne en poste.
    Aucun diplomate n'a été...
    La journaliste est repartie en raison d'une chicane personnelle. Je rappelle que c'est son mari qui avait découvert la relation qui existait entre elle et le secrétaire parlementaire, et c'est lui qui en avait informé un journal de Toronto et lui avait transmis les échanges de courriels entre son épouse et le secrétaire parlementaire.
    Le secrétaire parlementaire a-t-il été démis de ses fonctions?
    Non, il est resté en poste.
    A-t-il accédé à un autre poste?
    Je crois que oui.
    L'exemple que vous avez donné n'en est qu'un parmi des dizaines d'autres. Ce type de négligence a eu lieu sous tous les gouvernements, peu importe le parti au pouvoir.
    Le Canada perd énormément de crédibilité auprès de ses alliés internationaux. Comme le disait M. German, il y a tout un monde entre les paroles et l'action et c'est là où le Canada perd de la crédibilité. Aujourd'hui, nous avons une occasion historique de rectifier les choses, indépendamment de ce qui a été fait dans le passé. On ne peut pas corriger le passé, mais on peut veiller à ce que cela ne se reproduise pas dans le futur.
    Merci beaucoup.
    Madame la présidente, j'ai oublié de démarrer mon chronomètre. Combien de temps de parole me reste-t-il?
    Il vous reste trois minutes, monsieur Fergus.
    C'est parfait.

[Traduction]

    Monsieur Bourrie, merci beaucoup de votre témoignage.
     Lorsque vous avez signalé certains problèmes, vous avez fait des pieds et des mains pour présenter la situation aux autorités.
    Franchement, cela m'a coûté très cher sur le plan personnel.
     J'ai envoyé un courriel. Malheureusement, vous n'avez pas les documents ici, et cela me brise le coeur, franchement.
    Soit dit en passant, vous pouvez soumettre les documents par la suite.
    Oh, je l'ai déjà soumis.
    D'accord. C'est très bien.
    J'ai dit au représentant de Xinhua: « Écoutez, ce n'est pas ce que font les journalistes canadiens. » J'ai envoyé cela à la tribune de la presse. C'était en avril 2012. Ils n'ont rien fait. Il s'agissait du personnel et des journalistes qui faisaient partie du comité directeur de la tribune de la presse.
     J'ai fait le tour et j'ai essayé d'obtenir une certaine couverture médiatique. J'ai écrit un article qui a été publié en août 2012 dans l' Ottawa Magazine, et les gens ont enfin pris conscience de ce qui se passait.
     Personne au gouvernement ne m'a contacté. Personne au SCRS ne m'a contacté. C'est le premier agent du SCRS que je vois de ma vie — à ma connaissance.
     Des voix: Oh, oh!
     M. Mark Bourrie: La tribune a essayé de faire croire qu'il s'agissait d'un différend entre Xinhua et moi. J'ai dit: « Non, c'est un problème chez vous et dans votre gouvernance. » Lorsque Xinhua a dit qu'elle allait me poursuivre en justice, j'ai dit que c'était très bien; ce n'est pas mon différend, ce n'est pas mon problème, et j'en suis resté là.
     Xinhua vous a demandé d'espionner le premier ministre. Ils vous ont demandé d'espionner le dalaï-lama. Vous l'avez rapporté. Qu'a fait l'ancien premier ministre Harper à ce sujet?
    Rien.
    Il n'y a même pas eu de suivi ou d'accusé de réception?
    Rien. J'étais complètement et totalement livré à moi-même, comptant essentiellement sur la force de ma femme pour m'en sortir, ainsi que sur quelques personnes de la tribune de la presse.
     Pour ce qui est de la Chambre, du gouvernement et des médias, j'étais seul. Ils voulaient vivre dans un monde de rêve, et je ne faisais pas partie de ce rêve.
     Je précise pour le compte rendu que nous entendrons un autre témoin, la cheffe de cabinet du premier ministre. Quelle question poseriez-vous ou souhaiteriez-vous que l'on pose?
    J'aimerais savoir pourquoi — et cela fait écho à mon nouvel ami — ils ont été si naïfs. Je sais, comme je l'ai dit en toile de fond, que c'était l'époque de Hu Jintao et que les choses ont changé avec le nouveau régime pour ce qui est de la laideur et du masque mis là‑dessus, mais quand même, où était tout le monde à ce sujet à l'époque?
    Merci beaucoup, monsieur Bourrie.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.

[Traduction]

    Je vous remercie.

[Français]

    Madame Normandin, la parole est à vous.
    Je remercie l'ensemble des témoins pour leurs remarques liminaires. C'est très éclairant.
    Monsieur Juneau‑Katsuya, j'aimerais commencer par vous et revenir sur des choses que vous avez mentionnées. Dans le rapport Sidewinder, que votre organisme a rédigé, il est dit que la Chine était assez peu subtile dans ses façons d'intervenir à l'époque, mais que, malgré cela, les gouvernements n'en avaient pas fait état. Vous avez parlé de décisions discutables des différents gouvernements successifs. J'aimerais que vous nous en donniez quelques exemples. J'aimerais également savoir si le fait d'avoir tabletté, sinon même carrément détruit le rapport Sidewinder fait partie de ces décisions discutables.

  (1050)  

     Merci beaucoup.
    En fait, le rapport n'a pas été tabletté. On nous a ordonné de le déchiqueter, ainsi que toutes les notes de travail que nous avions accumulées. À ma connaissance, il n'existe qu'un seul exemplaire aujourd'hui, et c'est celui qui est en possession de la GRC.
    Des exemples de décisions discutables prises au fil du temps, il y en a plusieurs. L'une d'elles a été mentionnée par M. Fergus: on connaît maintenant ouvertement l'existence d'une relation inappropriée entre une journaliste, reconnue par tous les services de renseignement comme étant une espionne, et un secrétaire d'État. Or, la réaction du gouvernement a été de dire qu'il s'agissait d'une histoire personnelle et qu'on ne devait pas s'en occuper. De plus, l'homme en question est demeuré en poste.
    Tout à l'heure, j'ai mentionné une autre décision: on a vendu une entreprise du domaine de l'énergie en Alberta pour 15 milliards de dollars, mais nous ne sommes pas capables d'acheter quoi que ce soit. Lorsqu'on fait l'acquisition d'une compagnie pour 15 milliards de dollars, on se retrouve avec une importante puissance d'influence. En tant que simples citoyens canadiens, si nous voulions parler à la première ministre de l'Alberta aujourd'hui, nous serions probablement mis en attente et nous attendrions longtemps. Par contre, une compagnie qui a 15 milliards de dollars d'investis, et peut-être quelques milliers d'employés, va probablement se voir accorder une audience dans la semaine qui suit. C'est le genre de situation que nous avons pu observer.
     Nous avons aussi observé des cas d'individus qui, de toute évidence, rencontraient régulièrement des agents du Département du travail sur le front uni, la principale agence chinoise s'occupant des activités d'ingérence étrangère dans le monde. Des gens les rencontraient dans la communauté et en Chine, et certains se sont fait payer des voyages en Chine. Ces gens faisaient partie des cercles rapprochés du pouvoir et du système décisionnel.
    Des maires, dont ceux de Vancouver et d'Ottawa, étaient opposés à certaines activités chinoises, mais se sont fait payer un voyage en Chine par le gouvernement chinois. En revenant, ils ont notamment adopté des règlements municipaux pour contrecarrer les manifestations qui se tenaient régulièrement en face des ambassades.
     Ce ne sont là que certains exemples. À l'heure actuelle, il y a énormément d'ingérence étrangère au niveau provincial, et les provinces sont totalement dans le noir. Rien n'est fait, aucune sensibilisation n'est faite.
    Lorsque le Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS, a tenté de sensibiliser les industries à la question du vol de propriété intellectuelle, le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité a réprimandé le SCRS en lui disant que ce n'était pas sa responsabilité et qu'il ne devait donner l'information qu'au gouvernement, c'est-à-dire au premier ministre. On en voit le résultat aujourd'hui: les premiers ministres sont restés les bras croisés et n'ont rien fait.
    Mon temps de parole est limité, mais je voudrais continuer sur cette lancée.
    Vous avez mentionné que les façons de procéder de la Chine étaient assez grossières et vous nous en avez donné des exemples. Un autre témoin, M. Morris Rosenberg, nous a dit qu'il était naïf à l'époque. Devrait-on croire à cette naïveté? Si quelqu'un fermait les yeux ou prenait des décisions discutables, était-ce par intérêt personnel?
    Je ne peux pas parler au nom de M. Rosenberg. Par contre, ce que j'ai observé, c'est que dans la plupart des cas impliquant n'importe quel parti politique, même s'il n'était pas au pouvoir officiellement, ce sont toujours des intérêts personnels ou partisans qui ont motivé les gens.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais poser une question en lien avec la crédibilité du Canada à l'échelle internationale, notamment auprès du Groupe des cinq, dont vous avez fait mention.
    On a entendu à plusieurs reprises que c'est la faute du SCRS, que c'est lui qui aurait dû transmettre l'information. Quel message envoie-t-on au Groupe des cinq en faisant porter le chapeau au SCRS? En décrédibilisant ses propres services de renseignement, quel message le Canada envoie-t-il au Groupe des cinq?
    Il envoie un très mauvais message.
    À l'heure actuelle, le Groupe des cinq se pose de sérieuses questions, après une litanie de mauvaises décisions ou de décisions qui n'ont pas été prises assez rapidement, et ce, même si les preuves étaient flagrantes: la décision concernant Huawei, la décision d'expulser un diplomate, la décision de s'attaquer à la question de l'ingérence étrangère. Il a malheureusement fallu attendre la manoeuvre d'un lanceur d'alerte pour que le Canada se mette en mode action. Pour les États‑Unis et le Groupe des cinq, c'est très préoccupant.
     Par l'intermédiaire de l'opération Dragonlord, les États‑Unis ont cherché à surveiller le gouvernement canadien et à établir sa relation avec la Chine. Depuis les années 1990, nos alliés ont des doutes sur la volonté du Canada d'agir et de protéger les secrets qu'on lui transmet.

  (1055)  

     Merci à vous.
    Monsieur Green, vous avez la parole.

[Traduction]

    Je vous remercie. Bonjour à tous.
     Je vais vous poser une série de questions en rafale. Comme je ne dispose que de six minutes, au cas où je devrais intervenir et reprendre la parole, je vous demande de ne pas vous en formaliser. Ce n'est certainement pas personnel.
     J'aimerais commencer par vous, monsieur Juneau-Katsuya. J'ai eu le privilège de siéger à un comité en votre compagnie. Vous y aviez présenté un témoignage convaincant tout à fait en ligne avec vos propos d'aujourd'hui.
    En particulier, vous avez mentionné que tous les premiers ministres depuis Mulroney ont été avertis de l'ingérence étrangère et qu'aucun d'entre eux n'a fait quoi que ce soit à ce sujet. Je pense que nous convenons tous que l'ingérence étrangère est un enjeu non partisan.
     Pour que les choses soient claires, la loi exige que le SCRS ne signale les cas d'ingérence étrangère qu'au gouvernement. Est‑ce exact?
    À l'heure actuelle, oui.
    Croyez-vous que le SCRS devrait être tenu d'informer la cible de ladite ingérence étrangère, ou est‑il tenu de le faire?
     Selon la situation opérationnelle, il peut arriver que nous décidions de ne pas informer tout de suite la cible ou la personne visée afin de comprendre un peu mieux le réseau et ce qui est en jeu. En définitive, il nous incombe de protéger les citoyens canadiens, car au bout du compte, notre patron n'est pas le gouvernement, mais bien le peuple canadien.
    On peut dire qu'il existe différents types d'ingérence étrangère. Dans un cas, l'ingérence pourrait être en faveur d'un certain candidat et lui donner un coup de pouce. Vous avez évoqué les processus d'investiture.
    J'espère vivement que tous nos comités permanents formuleront des recommandations sur cet enjeu afin de nous protéger lors des prochaines élections.
     Selon vous, dans le continuum de l'ingérence et de l'influence, le processus d'investiture est‑il probablement l'un des points d'intervention les plus vulnérables dont un gouvernement peut se mêler?
    Tout à fait. C'est l'un des processus les moins réglementés dans une certaine mesure. Il revient à chaque parti politique de décider qui aura le droit de voter et de se porter volontaire ou de travailler comme personnel politique. Il y a donc là un bassin d'ingérence possible.
    Dans votre travail, avez-vous déjà eu vent d'allégations, d'information ou de renseignements, vérifiés ou non, selon lesquels des acteurs étrangers, étatiques ou non étatiques, auraient utilisé les processus d'investiture pour trouver des candidats préférés et peut-être influencer les membres d'une collectivité, d'un groupe ethnique ou d'une nationalité pour qu'ils participent en masse et appuient un candidat plutôt qu'un autre?
    Pire que cela, j'ai vu des candidats aller au consulat et demander son aide.
    Ils allaient au consulat — ils s'adressaient aux acteurs étatiques.
    Ils s'adressaient aux acteurs étatiques et leur demandaient de les aider à se faire élire, et ils ont été élus.
    Devant le comité de l'éthique dont je fais partie, vous avez déclaré que le SCRS, la GRC et d'autres organismes gouvernementaux utilisent essentiellement des logiciels espions pour surveiller des citoyens canadiens susceptibles de se livrer à ce genre d'activités à l'échelle nationale. Si j'ai bien compris, il faudrait une procédure à cette fin. Il y a une procédure pour laquelle ils obtiendraient une approbation ministérielle, peut-être du ministre de la Sécurité publique.
    Par ailleurs, des députés sont parfois la cible de cette surveillance. Est‑ce exact?
    Oui, mais pour être clair, nous ne ciblons généralement pas les Canadiens. S'ils sont en rapport avec des Canadiens, alors les Canadiens peuvent en venir à être ciblés.
    Étant donné la nature des téléphones intelligents, il s'agit d'une capture complète, de sorte que ce logiciel capturerait tout ce qui entre.
     Cela dit, est‑ce que vous venez nous dire que des renseignements recueillis révèlent que des candidats ont cherché à obtenir la faveur de consulats de pays étrangers pour se tailler une place dans les processus de nomination au Canada?
    C'est exact.
    Des lois sont en vigueur à cet égard. Vous avez parlé de trahison. Je pense qu'une partie de la difficulté que nous avons à trouver la jurisprudence tient au fait qu'il s'agit d'un sujet dont nous avons probablement tous entendu parler, mais que nous ne comprenons peut-être pas parfaitement.
     Pourriez-vous nous faire part de vos réflexions sur l'importance d'avoir des dispositions législatives claires, assorties de conséquences claires, qui établissent le seuil pour éviter que ce genre de situation ne se reproduise dans les processus futurs?

  (1100)  

    Dans notre jargon, nous les appelons « agents d'influence ». Staline les appelait les idiots utiles.
    Oui.
    Ces personnes utiles offrent parfois, intentionnellement ou par inadvertance, leurs services simplement parce qu'elles sont séduites par une culture, un pays ou l'intérêt national. Elles croient bien faire, mais malheureusement, elles ne comprennent pas que des professionnels du renseignement sont capables de les manipuler et d'en venir à obtenir ce qu'ils veulent.
    Dans ce cas, cependant, pour les besoins de notre étude, vous nous dites que pour saisir ces processus, il faudrait des dispositions législatives claires pour qu'au cas où le SCRS dispose d'information ou de renseignements vérifiés, comme M. German l'a dit, selon lesquels un candidat cherche à obtenir une aide étrangère dans le cadre d'une investiture ou d'une élection nationale, cela déclenche automatiquement une enquête criminelle qui établira une responsabilité pénale, que vous avez décrite comme étant une peine d'emprisonnement.
    Oui, mais le problème que nous éprouvons actuellement avec le SCRS et la GRC, c'est que leur chaîne de commandement et leurs rapports vont directement au premier ministre, et c'est là que le bât blesse.
    Vous déclarez que nous devrions avoir un organisme gouvernemental non partisan, indépendant du Parlement et habilité par lui, qui serait responsable de la sauvegarde complète de notre démocratie pour garantir que ces types d'interactions sont entièrement vérifiés, enquêtés et, à terme, poursuivis?
    Tout à fait.
    Je vous remercie.
    Il s'agit de l'OSSNR.
    Il nous livre la marchandise?
    Sommes-nous sérieux? Tout allait si bien. Évitons simplement de dévier de cette excellente voie.
    Je vous remercie pour cette série de questions. Je l'apprécie.
     Nous amorçons un deuxième tour de table rapide. Nous donnerons trois minutes à M. Cooper, puis trois minutes à M. Turnbull, une minute à Mme Normandin et une minute à M. Green.
     Allez‑y, monsieur Cooper.
    Merci infiniment, madame la présidente.
     Je remercie les témoins.
     Je souligne que l'agence de presse Xinhua et le People's Daily ont été interdits d'accès lors de la tournée du premier ministre Harper dans l'Arctique en 2013 et que, dans un article de la CBC du 22 août 2014, le porte-parole du premier ministre Harper a déclaré que Xinhua et le People's Daily n'étaient pas les bienvenus.
     Je vais poser quelques questions à M. Juneau-Katsuya.
     Tout d'abord, vous avez accordé une entrevue à la CBC dans laquelle vous avez fait des commentaires sur Kenny Chiu. Vous avez laissé entendre que la communauté chinoise de sa circonscription avait été manipulée par le PCC. Pouvez-vous nous en dire plus?
    L'une des stratégies d'ingérence étrangère de la Chine consiste à infiltrer une communauté et à l'influencer, voire à l'intimider, pour qu'elle agisse ou travaille dans une certaine perspective. Grâce aux médias sociaux, une grande exploitation a été amorcée simplement en vue de lancer des campagnes négatives contre certaines personnes, ce qui en viendra à influencer la communauté.
    La communauté chinoise du Canada est bien informée depuis des dizaines d'années de l'influence que le gouvernement chinois exerce sur elle. Elle sait qu'elle est observée. Ses membres n'ont pas été en mesure de le signaler aux autorités, et lorsqu'ils l'ont fait, les autorités n'ont pas été en mesure d'enquêter convenablement, de sorte qu'ils se sont sentis totalement laissés pour compte.
     Ils se sont adaptés à la situation et, malheureusement, nous avons une communauté dont les membres lisent très souvent des journaux chinois, lesquels sont influencés ou manipulés par l'État et qui livrent leur propre message. En fin de compte, ils savent qu'au sein de la communauté, des agents d'influence, c'est‑à‑dire des Canadiens agissant au nom du gouvernement chinois, dénoncent des individus. Comme si cela ne suffisait pas, nous avons récemment découvert l'existence de postes de police chinois secrets dans la communauté.
     Cette forme de surveillance, et d'intimidation a fondamentalement contrôlé de nombreux membres de la communauté chinoise qui, en grand nombre, ont de la famille dans leur pays d'origine.

  (1105)  

    Dans la circonscription de Steveston—Richmond Est, et dans d'autres circonscriptions du Lower Mainland et de la région du Grand Toronto comptant une importante population de Canadiens d'origine chinoise, on a constaté une baisse considérable de la participation aux élections de 2021. Pensez-vous qu'il s'agit d'une coïncidence ?
    Pas du tout. Cela fait aussi partie de la manipulation.
    Par exemple, nous avons vu des étudiants étrangers chinois à qui le consulat a dit et donné la consigne, après leur avoir remis un document avec des photos de candidats, de faire du porte‑à‑porte et de dire en chinois aux électeurs: « Vous votez pour telle personne; vous ne votez pas pour telle autre. » Ils prétendent ensuite qu'ils sont capables de savoir pour qui ils votent.
    Je vous remercie.
    Monsieur Turnbull, vous disposez du même temps.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins pour leur témoignage.
    Monsieur Juneau-Katsuya, je vais commencer par vous.
     Vous avez explicitement affirmé que nous pouvons prouver que tous les gouvernements ont été compromis, de Mulroney à Trudeau, ce qui n'est pas peu dire. Si je ne me trompe pas, vous avez déjà dit la même chose au comité de l'éthique.
     M. Bourrie nous a dit aussi qu'on lui avait demandé d'espionner le dalaï-lama et le premier ministre Harper à l'époque, qu'il avait tiré la sonnette d'alarme et que M. Harper n'avait rien fait. Je fais le lien avec ce que nous avons vu quelques années plus tard, car je crois que c'était en 2012, si je ne me trompe pas. En 2014, le premier ministre Harper a conclu un accord commercial de 30 ans avec la Chine. À l'époque, de nombreux experts ont exprimé de sérieuses inquiétudes à propos des répercussions de cet accord sur notre sécurité nationale.
    Monsieur Juneau-Katsuya, diriez-vous que le premier ministre Harper était mou envers la Chine?
    Il l'est devenu. Au début, après sa première élection, il avait le couteau entre les dents, me citant même à l'occasion à la Chambre des communes, mais avec le temps, des agents d'influence ont pu avoir accès à lui et ont changé le cours de son processus décisionnel.
    Je vous remercie.
    L'accord commercial de 30 ans que le gouvernement Harper a conclu a‑t‑il compromis la sécurité nationale, selon vous?
    Les intérêts nationaux à tout le moins, assurément.
    D'accord.
    Vous avez parlé d'un déséquilibre commercial dans votre déclaration précédente. Découle‑t‑il d'un...? Est‑ce une retombée ou une conséquence...?
    Ce déséquilibre existe depuis des dizaines d'années. Il a toujours été présent. Nous avons toujours eu un déficit commercial avec la Chine, donc cela n'a rien changé. Cela n'a rien amélioré non plus.
    Avez-vous déposé les suggestions que vous avez formulées dans votre déclaration liminaire, ou pouvez-vous le faire? Je pense que nous devrions les avoir, mais j'aimerais les voir par écrit si possible. Je les ai trouvées très judicieuses.
    J'ai remis mon document à la greffière.
    Merveilleux.
    Monsieur German, je sais que vous avez beaucoup parlé de blanchiment d'argent. J'aimerais connaître toute autre réflexion que vous pourriez avoir sur ce que nous devons faire concrètement pour bloquer le flux d'argent susceptible de faciliter l'ingérence étrangère.
    L'argent est toujours présent dans ces discussions. Comme j'ai essayé de le souligner, je pense que nous avons besoin des dispositions législatives solides auxquelles M. Juneau-Katsuya a fait allusion, et elles doivent être applicables. Cela signifie non seulement que nous avons besoin d'outils et de processus d'enquête, mais d'organismes d'exécution de la loi dotés de pouvoirs suffisants. Cela comprend le bureau d'Élections Canada. Il dispose d'une bonne unité d'enquête, mais il lui faut les ressources, l'accès et tous les éléments nécessaires pour agir.
     L'argent est essentiel dans tout cela, et nous disposons des renseignements nécessaires. Il s'agit de les exploiter et de les utiliser.
    Merci infiniment.
    Merci beaucoup.
    Allez‑y, madame Normandin.

[Français]

     Merci beaucoup.
    Monsieur Juneau‑Katsuya, vous avez déjà mentionné qu'il y avait des circonscriptions types où il y aurait davantage de risques d'ingérence. J'aimerais entendre votre point de vue à ce sujet, ainsi que celui de M. German. Est-ce que c'est factuel? Le cas échéant, devrions-nous d'abord concentrer nos efforts sur ce genre de circonscriptions?

[Traduction]

    Je pense qu'il est juste de dire que dans les circonscriptions où l'on trouve beaucoup de personnes d'origine chinoise, il y aura plus d'interventions et plus de sujets de préoccupation. Un autre député a mentionné Steveston. J'ai vécu à Steveston pendant de nombreuses années. Il est certain que le Lower Mainland est une communauté riche en raison des différents groupes ethniques présents dans la grande région de Vancouver, mais il y a toujours un revers à la médaille. L'influence des citoyens canadiens nés à l'étranger ou qui ont de la famille à l'étranger est une question à laquelle nous devons être attentifs. Mes amis en ont parlé plus en détail que je ne peux le faire.

  (1110)  

[Français]

    Je suis tout à fait d'accord qu'il faut commencer par là, car c'est le point faible de notre système. L'ingérence étrangère n'est pas seulement de nature politique; elle se manifeste aussi sous la forme d'influence et d'intimidation. Tous les gouvernements autoritaires qui la pratiquent vont travailler à partir des communautés, que ce soit pour y implanter des agents ou simplement pour les intimider. Il ne fait donc aucun doute qu'une attention particulière doit y être accordée par les autorités.
    Toutefois, le problème auquel on est confronté aujourd'hui, c'est que le système législatif ne donne pas aux policiers les outils auxquels M. German faisait allusion.
    Merci.
    Monsieur Green, vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur German, vous avez mentionné les différents niveaux de blanchiment d'argent. Je pense qu'il y a eu des commentaires sur le rôle d'idiot utile du Canada et sur les gens qui sont des idiots utiles dans certains cas. Au comité de l'éthique, nous étudions la fondation Trudeau. Cette allégation y a fait l'objet de pressions. M. Zhang Bin, multimilliardaire en Chine et personne très influente, a fait un don à la fondation Trudeau.
     À votre avis, ce type d'intervention est-elle assimilée à l'exercice d'une influence ou pourrait-elle franchir le seuil de l'ingérence?
    Eh bien, en ce qui concerne l'influence et l'ingérence, je ne suis pas vraiment sûr que la distinction soit si nette. Je pense qu'elle tient probablement au fait de savoir si cela devient criminel à un moment donné.
    Je n'ai pas la réponse ni les faits dans l'affaire en question. Cependant, ce que j'ai dit dans ma déclaration liminaire, et je pense que c'est digne d'intérêt, c'est que lorsque nous parlons de blanchiment d'argent, nous parlons de produits de la criminalité. Lorsque nous parlons d'influence électorale et de financement de la lutte contre le terrorisme, nous parlons d'argent utilisé dans un but précis. Il s'agit d'un début et non d'une fin.
    Merci beaucoup.
    C'est l'un de ces groupes pour lesquels nous aimerions avoir beaucoup plus de temps et c'est pourquoi je dirai aux témoins, tout d'abord, au nom des membres du comité de la procédure, merci beaucoup pour le temps que vous nous avez accordé. Je vous remercie de votre patience au début de la réunion. Si vous aimeriez nous faire parvenir d'autres renseignements dont nous devrions prendre connaissance, veuillez les soumettre à la greffière. Nous les ferons traduire dans les deux langues officielles et nous les distribuerons.
    Nous vous remercions beaucoup de nous avoir fait part de vos réflexions et nous vous souhaitons une bonne fin de journée. Merci pour votre travail. Nous espérons rester en contact avec vous. Portez-vous bien et soyez prudents.
    La séance est suspendue jusqu'à l'arrivée du prochain groupe. Merci beaucoup.

  (1110)  


  (1115)  

    Nous reprenons nos travaux.
    Nous accueillons maintenant Nancy Bangsboll, chercheuse indépendante, par vidéoconférence; Thomas Juneau, professeur agrégé à l'École supérieure d'affaires publiques et internationales de l'Université d'Ottawa; et enfin, Christian Leuprecht, professeur au Collège militaire royal du Canada, par vidéoconférence.
     Vous disposerez chacun d'au plus quatre minutes pour une déclaration liminaire, après quoi nous passerons aux questions des membres du Comité.
     Madame Bangsboll, la parole est à vous. Bienvenue au comité de la procédure.

  (1120)  

     Bonjour à tous. Je m'appelle Nancy Bangsboll, et je suis chercheuse indépendante dans le Sud-Ouest de l'Ontario.
    Des recherches ont prouvé que la Tides Foundation U.S. a fourni une quantité substantielle de fonds étrangers à des organisations au Canada, y compris Dogwood, Leadnow, le Conseil des Canadiens et bien d'autres. Ces organisations se sont inscrites en tant que tiers et ont ensuite travaillé ensemble pour infléchir les résultats de l'élection de 2015.
     Mes recherches se sont concentrées sur les circonscriptions, sur les influenceurs actifs dans des villes et sur la façon dont ces organisations et campagnes financées par des fonds étrangers ont influé non seulement sur les résultats de nos élections, mais plus important encore, sur les politiques gouvernementales depuis 2015.
     Les bénéficiaires de ces fonds étrangers au Canada comprenaient des organisations qui ont ouvertement déclaré leur engagement à défaire des candidats conservateurs, et leur engagement à travailler ensemble et à voter ensemble afin de réaliser leurs différents objectifs. Ils l'ont fait à plusieurs reprises dans des documents imprimés, des vidéos et des appels téléphoniques avant et pendant les élections de 2015. D'importantes preuves de l'avantage conféré aux candidats ont été décrites en détail dans le rapport Defeating Harper de Leadnow et dans les notes des réunions de synthèse de Leadnow.
     Au cours de l'été 2016, j'ai déposé une plainte volumineuse auprès d'Élections Canada, en demandant au commissaire de mener une enquête approfondie et d'engager des poursuites pour les violations de la Loi électorale du Canada et pour toute autre infraction que son enquête révélerait. Au cours de l'hiver 2016, deux enquêteurs d'Élections Canada sont venus chez moi et ont passé deux heures et demie à examiner les preuves fournies dans la plainte. L'enquêteur Tim Charbonneau et moi avons continué à correspondre par courriel et par téléphone jusqu'en octobre 2017, date à laquelle j'ai reçu le dernier courriel de sa part. Il m'a informé qu'il poursuivait son enquête et qu'il avait fait des progrès considérables. Il m'a rappelé que dans toute affaire comportant des allégations de collusion, il est très important de parler à toutes les parties concernées et que, compte tenu de l'ampleur de cette enquête, lui et ses collègues devaient parler à beaucoup de gens. Il m'a remercié pour ma patience.
     En mai 2018, je l'ai contacté à nouveau pour lui fournir plus d'information, mais il n'a pas répondu. Des semaines plus tard, j'ai lu une déclaration de Marc Chénier, l'avocat du directeur général des élections qui témoignait le 6 juin devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. J'ai été stupéfaite de l'entendre dire que l'enquête sur l'ingérence électorale était close. Voici comment elle s'est terminée, selon M. Chénier:
Nous avons dû interrompre certaines enquêtes menées par le commissaire parce qu'il était impossible d'obtenir la preuve que nous voulions. Dans le monde politique, il y a souvent des allégeances. Les gens se soutiennent mutuellement, et c'est normal.
    Apparemment, toutes les preuves fournies n'avaient absolument aucune importance si les auteurs des infractions ne passaient pas aux aveux.
    Je me suis concentrée sur Tides, mais beaucoup d'autres groupes d'influence font la même chose. Le nombre de ces organisations et militants abondamment financés qui interviennent dans nos élections et dans l'élaboration de la politique gouvernementale est si élevé qu'il est impossible de les dénombrer. Malheureusement, le Canadien moyen ne sait même pas qu'ils existent.
     Je vous remercie. J'ai écourté ma déclaration en essayant de ne pas dépasser les quatre minutes.
    C'est excellent. J'attends avec impatience les questions et les commentaires des membres.
     Sur ce, nous passons à M. Juneau.
     La parole est à vous.
     Mes remarques porteront essentiellement sur la réponse à la question de savoir ce que le Canada peut faire pour mieux contrer l'ingérence étrangère, en mettant l'accent sur la transparence. Ce n'est pas le seul élément de notre réponse que nous pouvons améliorer, mais c'est un élément central que nous sous-exploitons. Pour l'essentiel, j'expliquerai sur une base pragmatique, ou instrumentale, pourquoi le manque de transparence a été contre-productif.
     Le point de départ de toute discussion sur l'ingérence étrangère doit être la réalité que les cibles sont souvent des communautés de la diaspora. Au sein de ces communautés, la méfiance envers le gouvernement et les agences de sécurité nationale est souvent élevée. Cela peut aussi être vrai pour l'ensemble des Canadiens.
     C'est souvent l'un des principaux obstacles à une lutte plus efficace contre l'ingérence étrangère. Elle rend la coopération et la communication de l'information plus difficiles. L'incompréhension de cet élément et le défaut de s'en occuper limitent l'efficacité de nos efforts. La résilience collective doit être l'une de nos premières lignes de défense contre l'ingérence étrangère et les autres menaces qui pèsent sur nous aujourd'hui, comme l'espionnage économique, la désinformation et autres. Cependant, lorsqu'elle est aggravée par le manque de transparence, la méfiance abaisse inutilement le plafond des réponses fructueuses.
    Deuxièmement, la communauté de la sécurité nationale se fait beaucoup d'idées fausses sur la transparence. Trop souvent, la transparence est considérée comme une proposition du type « tout ou rien »: c'est la transparence ou la sécurité nationale. La transparence alourdit la tâche. Elle est coûteuse. C'est une case bureaucratique irritante à cocher. Ce sont là toutes des idées fausses.
     La transparence permet d'améliorer la sécurité nationale, ou du moins elle devrait le faire. Moins de transparence revient à combattre l'ingérence étrangère et d'autres menaces avec une main attachée derrière le dos. En fait, la transparence devrait être l'une de nos principales forces ou l'un de nos principaux atouts dans la lutte contre les non-démocraties. Trop souvent, c'est mal compris et c'est une occasion ratée.
     Très rapidement, et nous pourrons approfondir la question, que pouvons-nous faire? Nous avons besoin de séances d'information plus nombreuses et de meilleure qualité pour les parlementaires et les partis politiques ainsi que d'une formation sur la manière dont les destinataires de ces séances peuvent utiliser l'information, car elle est souvent mal comprise. Nous pouvons échanger davantage avec les communautés minoritaires, notamment en formant des unités de mobilisation spécialisées; mieux échanger avec les médias, ce que la communauté du renseignement ne fait pas assez bien, y compris avec les médias locaux et ethniques; et améliorer la liaison avec les universités et le secteur privé. La communication est bien meilleure qu'il y a quelques années, mais il y a toujours beaucoup d'obstacles à une coopération efficace. Il faudrait que la communauté du renseignement comprenne mieux les intérêts des parties prenantes, leur culture, leurs besoins et la manière dont elles pourraient utiliser ces renseignements, et qu'elle communique mieux avec le public en général, par des discours, la vulgarisation, les médias sociaux, les témoignages parlementaires, les rapports publics et annuels, avec un contenu concret plutôt que du jargon.
    En passant, l'un des principaux obstacles à toutes ces mesures est l'épidémie de surclassification au sein de la communauté du renseignement. La transparence, telle que je la conçois ici, comme un échange durable, est également liée à cet enjeu. Cela nécessite une meilleure communication de l'information et une meilleure coordination entre la communauté du renseignement et les services de sécurité non nationaux à Ottawa ainsi qu'avec les gouvernements provinciaux et municipaux, qui ont un rôle clé à jouer. Nous le constatons aujourd'hui dans le contexte de l'ingérence étrangère. Nous avons relevé des faiblesses à ce niveau dans le contexte du convoi de l'an dernier. Il y a eu beaucoup d'améliorations, mais il reste encore beaucoup à faire.
    Pour conclure, plus de transparence et plus d'échanges, c'est beaucoup de travail pour une communauté du renseignement déjà surchargée. Cela nécessite des compétences particulières qui ne sont pas suffisamment favorisées au sein de la communauté du renseignement. Il faut plus de personnel, tout simplement. Cela signifie qu'il faut définir les paramètres du mandat des unités de mobilisation concernant ce qu'elles peuvent dire ou ne pas dire, à qui et dans quel contexte elles peuvent le dire. Cela signifie que vous avez besoin d'une couverture politique, parce que le dialogue, en particulier dans des contextes avec des communautés minoritaires, peut être délicat.
     Je conclurai sur ce point. Il s'agit d'un investissement nécessaire si nous voulons être sérieux dans la lutte contre l'ingérence étrangère et les autres menaces qui pèsent sur nous. Je vous remercie de votre attention.

  (1125)  

    Merci.
    Allez‑y, monsieur Leuprecht.

[Français]

     Madame la présidente, je vous remercie de l'invitation d'aujourd'hui.

[Traduction]

     L'objectif ultime du Parti communiste chinois est de limiter la capacité du Canada à prendre des décisions souveraines. L'ingérence étrangère est fondamentalement une question de souveraineté canadienne. Trop de Canadiens et de députés tiennent la démocratie pour acquise. Un gouvernement qui prétend mener une politique étrangère fondée sur des valeurs devrait au contraire défendre et protéger la démocratie et les libertés canadiennes ainsi que notre mode de vie.
     Les menées subversives de Pékin sont la plus grande menace qui pèse aujourd'hui sur la souveraineté et le mode de vie démocratique du Canada. Le Canada a besoin d'une stratégie de dissuasion cohérente qui impose des coûts cumulatifs aux acteurs étatiques hostiles.
     Premièrement, abaisser le seuil des enquêtes en suivant l'exemple de nos alliés et en établissant, dans la loi, des seuils clairs pour l'ingérence étrangère ainsi que des conséquences punitives.
     Deuxièmement, définir l'ingérence étrangère, la subversion et le subterfuge. Lorsqu'un acteur hostile étranger viole intentionnellement, délibérément et à répétition le droit canadien et a recours à des comportements à première vue illégaux et criminels, il s'agit de subversion et de subterfuge.
     Troisièmement, l'ingérence étrangère au Canada semble se concentrer dans les grandes régions métropolitaines. Il convient donc de charger les équipes intégrées de la sécurité nationale, qui ont déjà fait la preuve de leur efficacité contre le terrorisme, d'enquêter sur l'ingérence étrangère et de les doter des ressources nécessaires. Au minimum, les activités dirigées contre le député Chong, sa famille et, apparemment, d'autres députés relèvent du complot et du harcèlement, des infractions au Code criminel qui atteignent donc facilement le seuil exceptionnellement élevé d'expulsion de diplomates fixé par le premier ministre.
     Quatrièmement, le Département du travail du Front uni du PCC se comporte en fait comme un syndicat du crime organisé transnational parrainé par l'État, alors traitons‑le comme tel et mettons fin aux activités de ces voyous et de leur club composé de postes de police secrets.
     Cinquièmement, le Département du travail du Front uni est rendu possible par le fait que la Chine possède le deuxième service diplomatique étranger en importance au Canada. Pourquoi le Canada accrédite‑t‑il tellement plus de diplomates chinois que le nombre de diplomates canadiens accrédités en Chine?
     Sixièmement, rétablir explicitement le mandat du SCRS, en matière de subversion, qui a été abandonné après la Guerre froide.
     Septièmement, alors qu'il vient de confier au Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, le CPSNR, une nouvelle étude, le premier ministre pourrait choisir de le transformer, pour les besoins de cette seule étude, d'un comité de parlementaires en une commission parlementaire tout en donnant aux Canadiens l'assurance publique qu'il n'y aura pas d'ingérence de l'exécutif dans l'étude. Cela donnerait au CPSNR, plutôt qu'à l'exécutif politique du moment, la latitude de décider du contenu et de l'échéancier des questions dont il estime qu'il est dans l'intérêt national de rendre compte au Parlement.
     Huitièmement, conclure un accord multipartite sur une stratégie de sécurité nationale intégrée, comme le font depuis longtemps certains des principaux alliés du Canada.
     Neuvièmement, maintenant qu'il semble que le premier ministre ait pu induire le Parlement en erreur, ce qui est très grave dans une démocratie constitutionnelle de Westminster, il y a une raison de plus pour qu'une enquête publique indépendante soit menée.
     Le Canada doit tracer des lignes rouges et s'opposer aux mauvais acteurs en envoyant un message cordial, mais clair: enfreindre la loi canadienne pour limiter la prise de décision souveraine du Canada est inacceptable et aura des conséquences réelles.

  (1130)  

[Français]

     Je vous remercie.
    Merci à vous.

[Traduction]

    Nous amorçons les tours de table de six minutes, en commençant par M. Cooper.
    Allez‑y, monsieur Cooper.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
     Je vais adresser d'abord mes questions à Mme Bangsboll.
     Dans son rapport intitulé « Defeating Harper », Leadnow s'attribue le mérite de la défaite de 24 candidats conservateurs aux élections de 2015.
     Pouvez-vous résumer comment, lors de cette élection, Leadnow a utilisé les fonds et le soutien non financier de la Tides Foundation, basée aux États-Unis, et d'autres acteurs et organismes étrangers?
    Oui.
     La première chose qu'il faut reconnaître, c'est que l'argent qui arrive par l'entremise de Tides U.S. ou de toute autre fondation étrangère est remis à Tides Canada ou à de nombreuses autres fondations ici qui financent l'action militante, de sorte qu'il n'est pas toujours possible, en définitive, de savoir qui soutient qui ou quel groupe de militants reçoit de l'argent et d'où cet argent provient.
     Je peux vous dire que dans l'étude d'une circonscription, lorsque nous avons examiné les coûts qui procuraient un avantage à certains candidats, nous avons pris en compte les voyages en avion parce que nous savions que dans certains cas, des gens venaient en avion pour faire partie d'une équipe. Nous avons pris en compte les déplacements, que ce soit en voiture ou autrement, de Toronto à London. Nous avons aussi pris en compte les affiches, les bannières, les dépliants, le matériel publicitaire, le temps de diffusion radiophonique qu'ils n'ont pas eu à payer, la nourriture, les T‑shirts, les locaux loués et les banques téléphoniques.
     Le bureau de Leadnow était situé dans les locaux du Centre for Social Innovation de Toronto. Je ne sais pas comment ils ont payé pour cela, mais c'est là que se trouvait leur bureau principal. Les sondages coûtent cher. Tout candidat doit payer pour toutes ces choses, mais dans ce cas‑là, c'était gratuit. Il y a eu des publicités sur Facebook et en ligne. David Suzuki a participé à plusieurs de ces campagnes et a voyagé avec l'équipe dans de nombreux endroits différents. On parle de locations de chambres d'hôtel et ainsi de suite.

  (1135)  

    Merci, madame Bangsboll.
     Pensez-vous que des candidats ont reçu ce type de soutien lors des élections de 2015 et ne l'ont pas signalé à Élections Canada? Avez-vous des preuves de cela?
    Nous n'avons pu trouver aucune preuve que quelqu'un a déclaré des contributions en nature d'organisations militantes, alors qu'au moins 11 d'entre elles ont été ciblées avec un personnel complet. Comprenez-moi bien: nous avons ici sept membres du personnel. Ils sont tous rémunérés. Ce ne sont pas des bénévoles, mais on les présente comme tels. Ils ont tous dû venir ici et ils travaillent avec M. Suzuki et un membre du personnel de M. Suzuki, alors dans une telle situation...
    Madame Bangsboll, 11 candidats ont reçu un soutien non financier avec un personnel complet et ne l'ont pas déclaré.
    Selon le rapport « Defeating Harper », 11 villes ou campagnes ont été ciblées avec du personnel. Beaucoup d'autres villes n'avaient pas de personnel. Il s'agissait de villes où l'on avait tout intérêt à battre le candidat conservateur et où l'on pensait avoir les meilleures chances.
    Vous avez fait une dénonciation à Élections Canada. Est‑ce exact?
    Oui.
    Élections Canada n'a rien pu faire à ce sujet.
     Allez-vous vous engager à nous fournir les documents justificatifs dont vous disposez?
    Tout à fait.
    Je vous en remercie beaucoup.
     Je vais maintenant poser une question à M. Leuprecht.
     Vous avez parlé du Département du travail du Front uni. Au comité de l'éthique, à propos d'un soi-disant don de 140 000 $ à la fondation Trudeau, le frère du premier ministre a déclaré qu'il n'y avait aucune possibilité d'ingérence étrangère et que le don provenait d'une société canadienne, une société-écran basée à Montréal à partir d'une résidence, contrôlée par une société appelée China Cultural Industry Association qui fait partie du Département du travail du Front uni.
     Convenez-vous que dans ce contexte, il n'y a pas de possibilité d'ingérence étrangère, ou diriez-vous qu'il y en a eu?
    Monsieur Cooper, la documentation de source ouverte soulevant des préoccupations au sujet de ce don remonte à 2016, nous avons donc eu amplement le temps d'avoir une discussion franche, ce que je pense que les gens ne sont pas prêts à avoir. C'est aussi la raison pour laquelle les gens s'opposent à un registre des agents étrangers, en raison du nombre d'élites canadiennes qui seraient piégées dans un tel registre.
     Combien de temps me reste‑t‑il?
    Il vous reste 24 secondes.
    Monsieur Leuprecht, je vous permets d'utiliser le reste de mon temps de parole pour ajouter ce que vous voulez.
    Ce sont des questions très sérieuses dans une démocratie parlementaire. De nombreuses options s'offrent au gouvernement aujourd'hui s'il veut montrer qu'il est sérieux dans sa volonté de défendre la démocratie canadienne. Nous devons prendre une décision: sommes-nous du côté des tyrans ou défendons-nous la démocratie canadienne?
    Je vous remercie.
     Madame Romanado, vous disposez de six minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
     J'aimerais remercier les témoins d'être venus nous voir.
     Ma première question s'adresse à M. Leuprecht.
     Les témoins du groupe précédents ont présenté des témoignages très convaincants sur l'ingérence étrangère et sur le fait qu'elle dure depuis des dizaines d'années. Je ne sais pas si vous étiez à l'écoute, mais l'un de ces témoins nous a exposé le cas d'un organisme dirigé par l'État chinois, Xinhua, qui a demandé à un journaliste d'espionner l'ancien premier ministre. Un journaliste de cette même agence de presse a été impliqué dans un scandale avec Bob Dechert, le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères John Baird, dans une apparente opération-piège de nature sexuelle.
     Est‑il inquiétant que tout cela se soit passé si près d'un ministère si important que celui des Affaires étrangères?
    D'autres preuves provenant de sources ouvertes sont problématiques par rapport à John Baird en ce qui concerne des questions financières et Jean Charest, ce qui a été documenté, ainsi que l'ancien ambassadeur et ministre du Cabinet, M. McCallum.
     Les preuves que vous avez fournies nous montrent que, si nous les triangulons, il y a de nombreuses tentatives de cibler les mêmes personnes de différentes manières. Cela correspond effectivement aux types d'opérations qui ont été documentées contre des parlementaires en exercice.

  (1140)  

    Monsieur Leuprecht, je veux revenir sur ce que vous venez de dire à propos de questions financières. Pourriez-vous confirmer que M. Baird est allé travailler pour un milliardaire chinois après avoir démissionné de son poste aux Affaires étrangères? Pensez-vous que ce sujet devrait être abordé dans nos recommandations législatives?
    L'affaire est de notoriété publique. Elle montre que le cadre canadien n'est pas suffisamment solide pour établir des règles claires sur ce qui est acceptable ou non, à la fois pendant le mandat et par la suite.
     Plutôt que de regarder en arrière, le Comité peut faire œuvre utile en s'assurant que nous établissons des règles beaucoup plus claires et des sanctions claires pour la violation de ces règles, que ce soit par des Canadiens, des étrangers ou des diplomates accrédités au Canada.
    Dans cette veine, un témoin précédent, M. Juneau‑Katsuya, a déclaré que le premier ministre Stephen Harper était devenu « mou » envers la Chine à la fin de son mandat, parce que des agents d'influence l'avaient approché. Que pensez-vous de cette évaluation?
    Comme je l'ai déclaré devant le Comité sur les relations sino-canadiennes, je pense que l'accaparement des ressources par des élites est un défi important. Dans le cas présent, il s'agit d'accaparement des élites par la Chine — à la fois par des intérêts pécuniaires et par des entreprises et des cabinets d'avocats qui sont liés à l'accaparement des ressources par les élites. Comme je viens de le dire, je pense que c'est la principale raison de la résistance considérable et du lobbying actif contre le registre des agents étrangers qui a été proposé.
    Merci beaucoup.
     Ma prochaine question s'adresse à M. Juneau. En toute transparence, je souligne que nous avons tous les deux la même alma mater, soit l'Université McGill.
     Monsieur Juneau, vous avez évoqué la surclassification des renseignements classifiés. Pouvez-vous nous en dire plus? Par ailleurs, pouvez-vous me donner votre avis sur les mêmes questions que j'ai posées au témoin précédent?
    En ce qui concerne la surclassification, je l'ai mentionnée très brièvement en passant, simplement parce que, dans le cadre des efforts plus larges déployés par la communauté du renseignement et de la sécurité nationale pour être plus transparente sur la question de l'ingérence étrangère et lorsqu'elle traite d'autres menaces, qu'il s'agisse d'espionnage économique, de désinformation et d'autres activités, la surclassification est un obstacle à la mise en commun de l'information.
     J'estime et je pense que c'est un point de vue partagé par un nombre assez grand d'observateurs, y compris d'anciens observateurs, que de nombreux renseignements au sein du gouvernement et de la communauté du renseignement sont classifiés alors qu'ils pourraient facilement ne pas l'être, ou qu'ils devraient l'être, mais qu'ils le sont à un niveau trop élevé. Cela complique énormément les efforts de communication d'information aux Canadiens en général, aux parlementaires dans de nombreux cas, y compris comme nous l'avons vu dans l'actualité de ces derniers jours, et à la société civile.
     Dans le cadre de ce que j'essayais de suggérer, soit de consentir un effort plus large et beaucoup plus important pour être plus transparents afin de nous aider à mieux contrer l'ingérence étrangère, cela va constituer un obstacle majeur. C'est le résultat d'une culture au sein de la communauté de la sécurité nationale qui reste très insulaire, très protectrice, où la structure d'incitation favorise grandement la surclassification. Vous pouvez être pénalisé pour ne pas avoir classifié des renseignements, mais vous ne pouvez pas être pénalisé pour les avoir surclassifiés. Il est très facile pour moi de venir vous dire que c'est un problème. Dans la pratique, je reconnais parfaitement que les solutions ne sont pas faciles, mais elles sont essentielles.
    Je vous remercie.
    J'ai une dernière question pour le professeur Leuprecht. Pensez-vous que le ministre Baird ait pris, en son temps, des décisions aux Affaires étrangères qui vous amènent à penser qu'il y a une emprise sur les élites?
    J'ai bien peur qu'il n'y ait pas suffisamment d'information dans le domaine public pour être en mesure de tirer des conclusions, mais les préoccupations au sujet de la relation et des conséquences de l'extradition d'une personne, par exemple, ne sont un secret pour personne.

  (1145)  

    Je vous remercie.

[Français]

     Madame Normandin, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie l'ensemble des témoins.
    Professeur Leuprecht, je commencerai par vous, mais j'invite M. Juneau à intervenir s'il le souhaite.
    Vous avez parlé du rôle du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement. J'aimerais revenir un peu là-dessus, parce que ce comité nous a beaucoup été présenté comme une panacée qui pourrait remplacer la tenue d'une enquête publique indépendante. Vous avez également rappelé que ce comité ne se rapporte pas au Parlement et qu'il a d'autres problèmes. Il lui est notamment particulièrement difficile d'obtenir de l'information du Bureau du Conseil privé, ce qui met des bâtons dans les roues à ses enquêtes.
    J'aimerais savoir ce que vous pensez de la transmission d'informations à ce comité de parlementaires pour qu'il puisse bien travailler.
    Madame Normandin, c'est une question très importante que vous venez de poser.
    J'ai rédigé tout un livre là-dessus, qui s'intitule Intelligence as Democratic Statecraft. Il comprend un chapitre sur la façon exacte dont fonctionne le Canada et sur les atouts et les points négatifs du système en place.
    Au Canada, le partage de l'information est certainement un problème. Comme je le fais remarquer dans mon livre, je crois qu'il faut faire plus confiance aux parlementaires. Ces derniers savent très bien comment utiliser les renseignements et l'information à leur disposition. Ils sont très bien placés collectivement pour décider de ce qui doit être fait avec l'information et sur la manière de communiquer leurs conclusions au grand public.
    Je comprends les réticences face, d'une part, à la structure de ce comité et, d'autre part, au partage de renseignements. Toutefois, les preuves obtenues d'autres partenaires parlementaires, comme le Royaume‑Uni et l'Australie, n'arrivent pas à la conclusion que tire le gouvernement actuel, à savoir qu'on ne peut effectivement pas faire confiance aux parlementaires. C'est tout le contraire.
    Merci beaucoup, professeur Leuprecht.
    Professeur Juneau, j'aimerais pousser plus loin la question de la déclassification de l'information et du rôle des médias. Une des choses qu'on nous a mentionnées, c'est que les médias étaient déjà au courant par le passé de la question de l'ingérence étrangère, mais que cela ne les avait pas intéressés.
    Avec plus d'informations et une plus grande déclassification et transmission de données, les médias pourraient-ils, d'une part, davantage s'intéresser à ce qui se passe et, d'autre part, mieux communiquer cette information à la population pour que cette dernière comprenne aussi? A-t-on mal jaugé le rôle des médias dans la transmission de l'information?
     Je vous remercie.
    Je vais revenir sur votre question précédente à propos du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, le CPSNR. Je suis complètement d'accord avec la suggestion de mon collègue, le professeur Leuprecht, de le transformer en comité parlementaire au lieu d'un comité de parlementaires.
    Cela étant dit, il est important de préciser que, selon l'information découlant de mes recherches pour certains projets, il n'existe aucune preuve d'ingérence inappropriée du politique dans le caviardage des rapports classifiés du CPSNR avant de les rendre publics. Je pense qu'il faut le dire. Ce caviardage s'est fait au niveau bureaucratique de la haute gestion. Selon l'information qu'on a — j'ai fait quelques recherches pour certains projets —, il n'y a pas de preuve d'ingérence inappropriée.
    Les rapports du CPSNR sont très bons jusqu'à maintenant. Je les ai tous lus et il s'y trouve de la très bonne substance. Le problème n'est pas le comité lui-même, mais le fait que plusieurs de ses rapports ont été ignorés ou négligés par le gouvernement. Une solution partielle serait une procédure obligeant le gouvernement à répondre aux rapports du comité, ce qui n'est pas le cas maintenant. Cette obligation permettrait d'attirer l'attention sur les rapports et de mettre un peu de pression sur la société civile, les partis d'opposition et les médias pour en parler davantage.
    En ce qui concerne les médias, je pense que vous avez raison de souligner la question. Comme je l'ai dit dans ma présentation tantôt, la communauté de la sécurité nationale ne fait pas montre d'assez de transparence avec les médias, que ce soit dans les breffages techniques fournis qui, très souvent, en disent assez peu, ou dans les réponses aux médias. Quand des journalistes contactent quelqu'un d'un bureau de ministre ou de la fonction publique, le temps de réponse est beaucoup trop long et la qualité des réponses est beaucoup trop limitée; on donne de la langue de bois, mais assez peu d'information.
    Or, les médias jouent un rôle absolument essentiel en transmettant aux Canadiens de l'information, que ce soit en matière de sécurité nationale ou dans d'autres domaines. On n'en fait vraiment pas assez à ce sujet. Si on veut être plus transparent pour mieux informer, par exemple, les communautés de la diaspora sino-canadienne, irano-canadienne ou indo-canadienne d'une menace et sur ce qui peut être fait pour la contrer, il faut donner beaucoup plus d'informations aux médias, et on ne le fait vraiment pas assez à ce stade-ci.

  (1150)  

    Merci. Il me reste assez peu de temps, mais je tente ma chance.
    Une proposition nous a été faite de mettre sur pied un bureau d'enquête indépendant sur l'ingérence étrangère, qui ne relèverait pas du ministre de la Sécurité publique et serait distinct du Service canadien du renseignement de sécurité et de la Gendarmerie royale du Canada. En quelques secondes, pensez-vous que ce serait une idée à creuser?
    Je n'en suis pas convaincu, mais je pourrais l'être. Il faudrait voir les détails de la proposition pour avoir une idée plus claire. Je pense que la création d'une nouvelle agence, en plus de toutes celles qu'on a, n'est pas nécessairement la solution. J'aurais tendance à dire que la solution passe davantage par de meilleurs outils et plus de ressources, ainsi qu'un meilleur mandat législatif pour les organisations en place.
    Qu'en pensez-vous, professeur Leuprecht?
    Comme je l'ai mentionné dans mon témoignage, je vous rappelle qu'il existe déjà des équipes intégrées de la sécurité nationale dans toutes les grandes villes an Canada. Elles se sont bien occupées du contre-terrorisme et elles mènent bien leurs enquêtes. On pourrait leur donner les ressources et le mandat pour mener enquête sur l'ingérence étrangère. Le problème est que, puisque nous n'avons pas encore clairement défini ce que constitue de l'ingérence étrangère, il leur serait actuellement difficile, peu importe l'agence en question, de mener ce genre d'enquête.
    Merci.
    Monsieur Green, vous avez la parole.

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Je vais poursuivre sur le même sujet parce que je pense qu'il est de la responsabilité du Comité de formuler des recommandations en matière de bonne gouvernance et de proposer des changements législatifs fondés sur vos témoignages d'experts en la matière.
     Monsieur Juneau, vous êtes l'auteur d'un livre intitulé Intelligence Analysis and Policy Making: The Canadian Experience. Vous y recommandez quelques mesures pour soutenir notre appareil de sécurité.
    J'ai coprésidé le comité d'examen parlementaire créé conformément à la Loi sur les mesures d'urgence. Dans ce processus, nous avons vu pendant l'occupation insurrectionniste d'Ottawa des dizaines de millions de dollars atterrir dans les mains de personnes qui entendaient perturber notre démocratie. Il semblait évident que notre appareil de sécurité et nos forces de l'ordre de première ligne étaient débordés. La Commission Rouleau a permis une analyse très approfondie non seulement du recours à la Loi sur les mesures d'urgence, mais aussi des conditions préalables et des échecs.
     Êtes-vous d'avis que, pour cette allégation particulière d'ingérence étrangère chinoise, une commission d'enquête publique indépendante serait le meilleur cadre non partisan pour établir des faits qui pourraient se révéler utiles pour déterminer l'ampleur et la portée du problème? Pour l'instant, nous n'avons entendu parler que de M. Chong, mais je crois comprendre que 10 autres députés pourraient être concernés. Seriez-vous favorable à une commission d'enquête publique indépendante?
    Je vous remercie. Je préciserai seulement que je suis le coauteur du livre que vous mentionniez avec une collègue, Stephanie Carvin, de l'Université Carleton.
    Sur la question de la commission d'enquête publique, je ne suis franchement pas convaincu que ce soit la meilleure solution. À l'heure actuelle, nous avons le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, ou CPSNR, l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement, ou OSSNR, votre comité et Élections Canada. Nous avons une variété. D'autres — la GRC et le SCRS — ont leurs propres façons de traiter une partie de problème. Le rapporteur spécial indépendant présentera ses propres recommandations. Je ne suis pas convaincu que la valeur ajoutée, en sus de tout cela, par une commission d'enquête publique indépendante — qui prendrait beaucoup de temps, coûterait de l'argent et exigerait beaucoup de ressources — ajoute plus qu'une valeur marginale à tout ce que nous avons déjà.
    Ce que vous dites ici, aujourd'hui, c'est que l'OSSNR et le CPSNR seraient capables de faire comme il convient la lumière sur les allégations formulées et pourraient fournir des cadres législatifs adéquats en situation de gouvernement minoritaire, avec un risque d'élections dans l'année à venir. À propos d'échéances, pensez-vous que ce soit suffisant?
    L'OSSNR, le CPSNR et les autres... Encore une fois, si vous examinez le bilan de l'OSSNR et du CPSNR et lisez les rapports, ils sont très bons. Ils sont indépendants. Ils sont essentiels...
    Ils n'obligent à rien.
    En effet. C'est un problème. J'en conviens.
    Juste pour le redire et le verser au compte rendu aujourd'hui, est‑ce que vous recommanderiez que le Comité, dans cette étude, propose de donner un caractère contraignant aux avis de ces organismes afin d'obliger le gouvernement à légiférer? Un témoin précédent nous a dit que le SCRS doit seulement informer le gouvernement. Des experts en la matière nous ont également dit que tous les premiers ministres, au cours des 30 dernières années, ont été informés de ce problème, mais qu'aucun n'a rien fait.
    Comment faire pour adopter face à ce problème une approche indépendante, non partisane et fondée sur les droits qui ne mette pas en balance les intérêts économiques du commerce extérieur et la démocratie intérieure?

  (1155)  

    Je voudrais préciser que je ne suis pas d'accord avec ce qui a été dit plus tôt et ailleurs, à savoir que les gouvernements n'ont rien fait pour contrer l'ingérence étrangère. Je suis certainement d'accord, et je l'ai écrit, qu'ils n'en font et qu'ils n'en ont pas fait assez, qu'il s'agisse du gouvernement actuel ou de ses prédécesseurs. Franchement, dire qu'ils n'ont rien fait, c'est exagéré.
    À propos de donner un caractère contraignant, je serais d'accord de modifier, par exemple, le mandat du CPSNR pour en faire un comité parlementaire. Par ailleurs, en réponse à une question précédente, j'ai mentionné que le gouvernement doit répondre à ces rapports. Pour ce qui est de rendre les recommandations contraignantes, je ne vois pas bien, à vrai dire, comment cela fonctionnerait d'un point de vue technique. J'hésite donc à me prononcer de façon définitive sur le sujet.
    Je vous dirai, très franchement, que ma crainte dans cette période hyperpartisane est que, souvent, les résultats sont perdus. Ce qui est présent dans ces débats partisans — et dans les propos de témoins parfois —, c'est l'exploitation de la crise du moment, sans qu'on propose de changements législatifs clairs et réfléchis. Il semble parfois qu'il n'y ait pas nécessairement, entre le gouvernement et l'opposition, de volonté d'améliorer et de renforcer les lois.
    Vous avez parlé de plus grande transparence. Nous avons un gouvernement qui utilise le secret professionnel, le secret du Cabinet et des mesures décrétées en secret, ainsi que l'obstruction dans la production de documents à toutes les étapes parlementaires. Or, je crois que nous pouvons tous convenir que la démocratie est fragile dans le monde. Nous traversons une crise en ce moment, étant donné la teneur des allégations, le cynisme croissant et la désaffection électorale.
    Sans vouloir trop vous demander, auriez-vous trois recommandations importantes qui, selon vous, aideraient dans un premier temps à combattre le cynisme qui ressort de cette étude particulière et à apporter un remède législatif?
    Certainement. Je pense en avoir mentionné beaucoup dans mon exposé: plus de transparence, un meilleur dialogue avec les parlementaires, avec la société et, notamment en ce qui concerne l'ingérence étrangère, avec les communautés diasporiques. Il faut pour cela créer des unités de dialogue. Il en existe déjà au Centre de la sécurité des télécommunications et au SCRS en particulier. Elles font un assez bon travail, mais je crois qu'elles sont trop petites. Il faudrait donc les étoffer, en augmenter la portée et les doter de plus de ressources. En ce qui concerne le CPSNR, faites réagir le gouvernement et transformez le CPSNR en comité parlementaire. Je pourrais continuer.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie. Pour boucler l'heure, je demanderai aux conservateurs de poser une question, puis aux libéraux de faire de même.
    Monsieur Calkins, vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Comme je ne peux poser qu'une question...
    Monsieur Leuprecht, dans vos observations préliminaires, vous avez laissé entendre que le premier ministre a peut-être induit le Parlement en erreur. Pouvez-vous nous dire dans quel contexte il nous aurait induits en erreur?
    Les déclarations de ces derniers jours et l'évolution de la communication en ce qui concerne M. Chong me paraissent très problématiques et c'est ce qui fait comprendre, à mon sens, que, comme je l'ai souligné, le cadre législatif en place pour notre sécurité nationale n'est pas assez rigoureux.
    Bon nombre de ces problèmes pourraient être réglés en adoptant l'approche australienne qui prévoit un examen quinquennal automatique. Notre dernier examen systématique du cadre de sécurité nationale du Canada, si vous voulez, remonte à 1981 et à la Commission McDonald. De toute évidence, nous avons besoin d'une approche plus systématique.
    Je ne sais trop si les déclarations du premier ministre étaient intentionnelles ou si elles étaient fonction de la meilleure information alors disponible, mais elles montrent clairement qu'en ce qui concerne la responsabilité interministérielle, la coordination entre le premier ministre et son propre service est difficile et les déclarations qu'il a faites ensuite posent des problèmes.
    Je vous remercie.
    Madame Sahota, vous avez une question.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Madame Nancy Bangsboll, vous avez mentionné au début de votre témoignage que vous faites de la recherche. Je n'ai pas réussi à trouver d'articles... Ce n'est pas la peine que ce soient des livres, par exemple, mais je n'ai pas réussi à trouver où atterrissent vos recherches et où elles sont publiées. Pouvez-vous expliquer où finissent vos recherches?
    Ma deuxième question est, êtes-vous membre du Parti conservateur et faites-vous des dons à ce parti?

  (1200)  

    Si vous ne voyez rien de publié, c'est parce que je ne publie pas. Je fais part de mes recherches à des personnes qui publient. Je le fais délibérément depuis de nombreuses années. Je n'aime pas l'attention négative de personnes et d'organisations qui ne veulent pas être exposées. Je ne vois aucun intérêt à m'exposer à ce genre de traitement, mais mes recherches sont utilisées par d'autres.
    Quelle était votre deuxième...? Oui, je suis membre du Parti conservateur.
    Je vous remercie de votre réponse et de votre témoignage.
    La présidente: Je vous remercie, madame Sahota. C'était votre question.
    Mme Ruby Sahota: Je vous remercie d'au moins l'avoir dit publiquement devant le Comité. J'aimerais beaucoup en savoir plus sur vos recherches.
    C'est parfait. Il ne nous reste qu'une minute et 28 secondes.
    Cela dit, au nom des membres du comité PROC, je vous remercie tous de votre présence aujourd'hui. Merci du travail que vous faites.
    S'il y a autre chose que vous souhaitez porter à l'attention des membres du Comité, envoyez‑le à la greffière. Nous le ferons traduire dans les deux langues officielles avant de le communiquer aux membres du Comité.
    Je terminerai en vous souhaitant une bonne fin de journée.
    La séance est suspendue jusqu'à ce que nous passions au troisième groupe.

  (1200)  


  (1205)  

    Bonjour. La séance reprend.
    Dans le groupe suivant, nous avons Mme Jenni Byrne.
    Madame Byrne, vous disposerez de 10 minutes pour vos observations préliminaires.
    Soyez la bienvenue au comité PROC.
    C'est parfait. Je vous remercie.
    Je vous remercie de m'avoir invitée aujourd'hui. Le Comité et le travail que vous faites sont essentiels pour protéger la démocratie canadienne, et nous n'avons pas le choix. Les faits qui ont été révélés sont très inquiétants. C'est la plus élémentaire des responsabilités du gouvernement que de protéger les Canadiens et notre démocratie de l'ingérence étrangère, et il est de plus en plus manifeste que le gouvernement a totalement manqué à cette responsabilité, laissant le pays à la merci d'acteurs étrangers hostiles. Nous savons maintenant, grâce à des Canadiens patriotiques prêts à sonner l'alarme en public, que le gouvernement a systématiquement fermé les yeux sur l'ingérence étrangère illégale à laquelle se livre Pékin.
    Chaque semaine, sinon chaque jour, semble apporter son lot de nouvelles preuves de la désinvolture et de l'aveuglement délibéré du Canada face à l'ingérence de Pékin dans le système électoral canadien. Le gouvernement sait depuis au moins deux ans qu'un diplomate de la République populaire de Chine s'en prend à la famille du député conservateur Michael Chong à Hong Kong pour essayer de le réduire au silence.
    C'est une révélation vraiment choquante et qui amène à très sérieusement s'interroger sur le gouvernement. Toute intimidation de Canadiens par un gouvernement étranger, que ce soit directement ou en s'en prenant à des membres de leur famille, est anormale et, dans ce cas, Pékin visait spécialement un député en raison de la position courageuse fondée sur des principes qu'il a adoptée en condamnant les violations des droits de la personne commises par Pékin.
    Ce genre d'ingérence directe dans notre système électoral ne saurait être toléré, mais que fait le gouvernement pour protéger les Canadiens ou M. Chong? Rien. Il a fallu les questions incessantes du Parti conservateur pour qu'il finisse par expulser le diplomate ou protester auprès du gouvernement chinois. Il n'a même pas dit à M. Chong tout ce qu'il savait qui arrivait à sa famille jusqu'à ce qu'on en parle dans les médias.
    Malheureusement, face à ce très grave problème, le gouvernement a choisi de fermer les yeux. À cause de son silence, les Canadiens et les membres de leur famille à l'étranger sont plus exposés que jamais aux activités d'ingérence étrangère, et son indifférence nuit à notre démocratie.
    Au lieu de faire leur travail et de protéger les Canadiens, notamment les membres de la communauté chinoise du Canada qui sont les principales victimes et les principales cibles des manœuvres d'ingérence de Pékin, les libéraux ont consacré un temps et des efforts considérables à essayer d'empêcher totalement une enquête indépendante sur l'ingérence étrangère. Ils n'ont fini par céder et autoriser ces audiences que lorsque le NPD, leur partenaire de coalition, les y a enfin contraints. Depuis, nous avons entendu des allégations inquiétantes au sujet de la fondation Trudeau.
    Mme Pascale Fournier, l'ancienne présidente et cheffe de la direction de la fondation Trudeau, a sonné l'alarme au sujet d'un don que la fondation Trudeau a reçu de Pékin à peu près au moment où Justin Trudeau est devenu premier ministre, avant que Xi Jinping devienne président. Étonnamment, Trudeau a même désigné le président et chef de la direction de la fondation Trudeau au moment de ce don pour qu'il produise un rapport sur l'ingérence étrangère dans les dernières élections. Il est évident que ce don d'un milliardaire lié à Pékin visait à essayer d'influence le premier ministre.
    Mme Fournier a déclaré qu'il y avait des preuves que des membres du conseil d'administration de la Fondation ont collaboré avec le donateur pour cacher la véritable source des fonds. Elle a également déclaré avoir pensé qu'une enquête indépendante était nécessaire, mais que les membres du conseil qui avaient des liens étroits avec la famille Trudeau ont refusé. Elle a démissionné, mais certains de ces membres du conseil sont toujours là. Il a depuis été rapporté que les dons étrangers à la fondation Trudeau se sont multipliés par 10 à peu près au moment où Justin Trudeau est devenu premier ministre, et cela tandis que son frère était un membre actif de la fondation Trudeau.
    Toutes ces tentatives d'ingérence étrangères sont préoccupantes.
     Ce qui est plus préoccupant encore, c'est la volonté évidente du gouvernement de la dissimuler. Le premier ministre n'a même pas pu se résoudre à demander une enquête indépendante. Au lieu de cela, il a demandé à un vieil ami de la famille, qui se trouve aussi être membre de la fondation Trudeau, d'étudier l'idée pour lui. Il est devenu évident que le gouvernement ne prend pas au sérieux la menace d'ingérence étrangère dans notre système politique. S'il la prenait au sérieux, il ferait quelque chose. Il essaierait de faire toute la lumière sur ces allégations.
    Au lieu de cela, il fait tout son possible pour arrêter les audiences et retarder les enquêtes. On dirait souvent que ce gouvernement et ses amis en veulent plus aux lanceurs d'alerte et aux journalistes qui dénoncent l'ingérence étrangère qu'ils ne sont en colère à cause de la menace sérieuse que cette ingérence fait peser sur notre démocratie.
    Voilà plus de 20 ans que je participe à la vie politique canadienne et je crois fermement qu'il faut protéger nos droits et libertés démocratiques. Je suis donc heureuse que les libéraux soient enfin obligés d'examiner sérieusement la situation, même s'il a fallu leur forcer la main.
    Je répondrai volontiers à vos questions.

  (1210)  

    Je vous remercie de vos observations.
    Nous allons entamer la série de questions de six minutes, en commençant par M. Cooper.

[Français]

    Monsieur Cooper, vous avez la parole.

[Traduction]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je vous remercie, madame Byrne, de votre présence aujourd'hui.
    Je pense que les Canadiens sont stupéfaits de l'ampleur de l'ingérence chinoise que l'on découvre, ingérence qui se concrétise par des attaques et de l'intimidation contre un député et peut-être d'autres députés encore, l'ouverture de postes de police illégaux et des attaques contre notre démocratie au cours, non pas d'une, mais de deux élections fédérales. Il est maintenant bien établi, d'après les reportages du Globe and Mail et de Global News, qui reposent sur leur examen de documents du SCRS, que Pékin a mené une vaste campagne d'ingérence dans la campagne électorale de 2019, notamment en finançant clandestinement et en soutenant au moins 11 candidats. Nous savons que Pékin s'est ingéré dans les élections de 2021 afin que le Parti libéral soit réélu. Le premier ministre a eu droit à plusieurs séances d'information, dès février 2021, sur l'ingérence de Pékin dans les élections de 2019, c'est‑à‑dire bien avant les élections de 2021 dans lesquelles Pékin s'est de nouveau ingéré.
    Malgré ces séances d'information, le premier ministre n'a rien fait, n'a pris aucune véritable mesure et a laissé les Canadiens dans l'ignorance, alors que le SCRS l'a informé que la meilleure façon de lutter contre l'ingérence étrangère, c'est d'en parler au grand jour et de se montrer transparent.
    D'après tout ce que nous avons vu ces derniers mois — qui est vraiment sidérant —, que pensez-vous, en tant qu'ancienne cheffe de cabinet adjointe du premier ministre Harper, de la façon dont le gouvernement gère cette affaire et, pour avoir travaillé avec lui, comment pensez-vous que le premier ministre Harper aurait géré ce type d'ingérence?
    Je crois que, si ces allégations avaient été rapportées au premier ministre Harper, il les aurait rendues publiques et il aurait pris des mesures. Si vous avez vu comment le premier ministre Harper gérait les choses, par exemple, lorsqu'il a renvoyé la délégation iranienne en Iran et fermé l'ambassade en 2012, c'est ainsi que le premier ministre Harper gérait les choses lorsque le SCRS le tenait informé.
    En tant qu'ancienne cheffe de cabinet adjointe et directrice de campagne nationale en 2011 et en 2015, je n'ai jamais été informée d'une ingérence étrangère à la veille de ces deux élections.

  (1215)  

    Je pense que vous avez souligné un point important au sujet de l'Iran parce qu'il y a 10 ans, le régime iranien s'en prenait à des Canadiens d'origine iranienne et s'ingérait dans nos affaires intérieures. Il utilisait des diplomates accrédités pour orchestrer cette ingérence et le premier ministre a fermé toute l'ambassade. Il les a tous renvoyés à Téhéran.
    En revanche, nous avons un gouvernement libéral qui ferme les yeux sur l'ingérence iranienne, en dépit du fait que le Corps des Gardiens de la révolution islamique, le CGRI, a abattu le vol PS752. Les libéraux n'ont pas jugé bon de classer le CGRI parmi les entités terroristes, malgré un vote de la Chambre des communes dans ce sens en 2018. Résultat, le CGRI peut recruter, recueillir des fonds et intimider des Canadiens d'origine iranienne.
    Voulez-vous ajouter quelque chose à ce sujet?
     Vous avez entièrement raison, et je suis tout à fait au courant du travail que caucus conservateur a fait, sous la direction de Melissa Lantsman, pour sensibiliser et inciter le gouvernement libéral à inscrire le CGRI sur la liste des entités terroristes, ce qui aurait été la bonne chose à faire. Franchement, depuis trois ou quatre mois que le gouvernement se fait prier pour demander une enquête sur la Chine, le fait qu'il ne procède pas à cette inscription me rend aussi très perplexe. Il est très simple d'inscrire le CGRI sur la liste des organisations terroristes et il est choquant que ce ne soit pas encore fait.
    À votre avis, pourquoi n'est‑ce pas encore fait?
    Je ne sais pas. Je suppose que vous devriez le demander au gouvernement.
    Très bien.
    Quel conseil auriez-vous donné au premier ministre si le SCRS vous avait avertie qu'un candidat se présentant pour le Parti conservateur faisait partie d'un réseau d'ingérence étrangère?
    Si j'en avais été informée, je lui aurais recommandé de rayer ce candidat des listes du Parti conservateur.
    En revanche, vous savez que le premier ministre a été informé qu'un candidat faisait partie d'un réseau d'ingérence étrangère. Il n'en a pas tenu compte et a laissé le candidat se présenter. Le candidat a ensuite été élu député.
    Qu'en pensez-vous?
    Je pense que c'est irresponsable pour ce qui est de protéger l'intégrité électorale des élections de ne pas avoir pris de mesures après avoir été informé de quelque chose.
    Madame la présidente, je pense que cela montre encore plus que le premier ministre ne prend pas l'ingérence étrangère au sérieux, qu'elle soit le fait de Pékin, de Téhéran ou d'autres États étrangers hostiles.
    Tout à fait.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je vous remercie.
    Madame Romanado, vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Par votre intermédiaire, je remercie le témoin d'être des nôtres aujourd'hui.
    Madame Byrne, aujourd'hui, dans un groupe de témoins précédent, un ancien agent du renseignement nous a expliqué qu'il existe des preuves de tentatives d'ingérence étrangère sur plusieurs décennies. Du premier ministre Mulroney à l'actuel premier ministre, il y a eu des tentatives d'ingérence étrangère. Vous venez de mentionner que vous n'avez jamais été informée de tentatives d'ingérence étrangère lorsque vous étiez cheffe de cabinet adjointe.
    Ai‑je bien compris?
    Vous avez bien compris.
    Comment se fait‑il que l'ancienne cheffe de cabinet adjointe n'ait jamais été informée par le SCRS de tentatives d'ingérence étrangère, alors que des agents du renseignement du SCRS ont déclaré qu'il y avait eu des tentatives?
    Je ne sais pas.
    Je peux vous dire avec certitude que je n'ai jamais été informée d'une ingérence étrangère. Je sais que M. Morrison, qui est un des anciens conseillers à la sécurité, a déclaré que l'ingérence étrangère a considérablement augmenté au cours des dernières années, mais je pense qu'il est encore plus important qu'il y ait une commission d'enquête publique qui peut remonter...
    Je vais vous interrompre, car j'ai très peu de temps et je souhaite le partager avec d'autres collègues.
    En qualité de cheffe de cabinet adjointe, vous aviez connaissance des lettres de mandat des ministres. Pouvez-vous confirmer s'il était fait référence dans les lettres de mandat de secrétaires parlementaires de ministres de l'ingérence étrangère et de la lutte à mener contre cette ingérence?

  (1220)  

    Les dernières lettres de mandat remontaient à... Un remaniement de Cabinet. C'était en 2011. Je ne travaillais pas au Cabinet du premier ministre, mais je ne me rappelle pas s'il était question ou pas d'ingérence étrangère.
    D'accord. Je vous remercie.
    Je cède mon temps de parole à M. Turnbull, qui a aussi quelques questions.
    Je vous remercie.
    Merci, madame Byrne.
    Étant donné votre lien avec l'actuel chef du Parti conservateur, pouvez-vous nous dire pourquoi M. Poilievre a choisi de ne rien faire du tout pour renforcer nos institutions démocratiques et les protéger contre cette menace lorsqu'il était ministre de la Réforme démocratique?
    Comme je l'ai dit, il n'y avait aucun... Nous n'avons été tenus informés d'aucune menace, mais je pense que c'est...
     Vous dites qu'il n'y avait aucune menace quand Pierre Poilievre était...
    Comme je l'ai dit, non pas que j'en ai été informée...
    De nombreux experts du renseignement et de la sécurité nationale nous ont expliqué que cela dure depuis plus de 30 ans.
    Lancez une commission d'enquête nationale et faites en sorte que son mandat porte sur plus que les huit dernières années.
    Je comprends, mais ne pensez-vous pas que c'est un peu fort de votre part d'avancer tout un tas d'allégations et d'affirmations devant le Comité au sujet de l'actuel premier ministre, alors que le chef de l'opposition aujourd'hui n'a rien fait quand il était ministre de la Réforme démocratique?
    Je pense que c'est complètement...
    Passons à autre chose. Quand M. Poilievre était ministre de la Réforme démocratique, Élections Canada a demandé à être habilité à enquêter sur des infractions à la loi, mais à la place, M. Poilievre a proposé de retirer des pouvoirs à l'organisme.
    Je peux imaginer pourquoi M. Poilievre voudrait retirer des pouvoirs d'enquête, étant donné qu'il faisait alors l'objet d'une enquête de l'organisme pour des infractions électorales.
    Savez-vous pourquoi M. Poilievre a essayé de réduire le pouvoir d'action et l'efficacité de nos organismes électoraux?
    Eh bien, Élections Canada peut tout à fait enquêter à présent sur les activités d'ingérence étrangère.
    Pensez-vous que donner moins d'outils à Élections Canada améliore notre réponse face à l'ingérence étrangère?
    Élections Canada peut enquêter à présent. Élections Canada peut enquêter maintenant, monsieur, tout comme une commission d'enquête publique.
    Il me semble qu'en lui donnant plus d'outils, pas moins, il serait plus en mesure de contrer l'ingérence étrangère.
    Mais il peut en fait...
    Vous avez dit que le gouvernement ne fait rien pour contrer l'ingérence étrangère.
    Vous n'avez rien fait.
    C'est ce que vous affirmez, mais nous voyons les choses autrement...
    Pourquoi ne faisons-nous pas une pause? Je vais arrêter le chronomètre...
    Pourquoi ne me dites-vous pas, monsieur, dans votre préambule, ce que vous avez fait en réalité?
    Pourquoi ne faisons-nous pas une pause...
    Nous avons fait pas mal de choses, en fait. J'ai une liste de cinq pages, mais je ne vais pas...
    Monsieur Turnbull, j'ai la parole et nous allons faire une pause.
    Je pense que le mieux est de s'adresser à la présidence, de donner au témoin le temps de répondre et de donner du temps pour la question. Adressez-vous à la présidence. Cela donnerait aussi du temps aux interprètes.
    Est‑ce que cela vous convient?
    Par votre intermédiaire, madame la présidente, je pose ces questions parce qu'il y a un autre fait, qui est que les modifications apportées à la Loi électorale du Canada par le gouvernement précédent... Le ministre de la Réforme démocratique à l'époque, qui est l'actuel chef du Parti conservateur a présenté un projet de loi pour qu'il soit plus difficile aux Premières Nations, aux jeunes et aux personnes vulnérables de voter.
    Reconnaissez-vous à présent, madame Byrne, qu'il s'agissait d'une politique à courte vue?
    Il me semble que j'ai été invitée à venir témoigner au sujet de l'ingérence étrangère.
    Madame la présidente, je pense que vous voudrez probablement que les questions demeurent pertinentes, étant donné que je suis ici pour une heure. On n'a pas à discuter de la loi électorale à ce comité. Cela pourrait se faire un autre jour. Nous sommes là pour parler de l'ingérence étrangère.
    J'invoque le Règlement.
    Je sais que je suis invité à ce comité, mais les députés ont quelque latitude pour ce qui est des questions qu'ils souhaitent poser. Je n'ai jamais siégé à un comité où un témoin dicte aux députés quelles questions ils peuvent poser.
    Je vous demande, en tant que présidente, d'autoriser le député à continuer d'user de son privilège parlementaire pour poser ses questions afin que je puisse arriver aux miennes.
    Je suis certaine que beaucoup de personnes regardent le témoignage des invités qui nous ont rejoints. Je les remercie vivement de leur temps. Il y a une certaine latitude, donc je pense que nous l'accorderons aujourd'hui.
    Je demanderai, cependant, que vous continuiez de vous adresser à la présidence pendant la petite minute qui vous reste.
    Allez-y, monsieur Turnbull.
    Madame Byrne, pensez-vous que faire en sorte qu'il soit plus difficile pour les citoyens canadiens de voter est un moyen de lutter contre l'ingérence étrangère?
    Non. Je pense que pour lutter contre l'ingérence étrangère, il faut que le gouvernement prenne le sujet au sérieux.
    Je vous remercie.
    J'ai lu des articles qui laissaient entendre que le Parti conservateur a envoyé des collaborateurs aux États-Unis étudier le fonctionnement de la machine électorale du Parti républicain. C'est une machine qui comprend de dangereux stratagèmes visant à empêcher les électeurs de voter.
    Vous est-il arrivé de participer à un atelier ou à des séances de formation avec des républicains américains?

  (1225)  

    Non.
    Je vous remercie.
    Pensez-vous que la ligne de dénonciation proposée par le Parti conservateur pendant la campagne de 2015, qui permettait aux gens de dénoncer leurs voisins, a aidé en quoi que ce soit à lutter contre l'ingérence étrangère?
    À ma connaissance, la campagne électorale de 2015 n'a été visée par aucune forme d'ingérence étrangère.
    Je vous remercie.
    Madame Normandin, vous avez la parole.

[Français]

     Madame Byrne, merci beaucoup de votre présence au Comité.
    J'aimerais revenir au moment où vous étiez directrice de campagne, en 2015. À votre connaissance, quelles étaient à cette époque les principales menaces à la sécurité nationale qui pesaient sur le scrutin?

[Traduction]

    Les principales menaces en ce qui concerne l'ingérence étrangère...?

[Français]

    Non. Quelles étaient les menaces de façon générale?

[Traduction]

    Je suis désolée. Pouvez-vous répéter?
    Nous allons nous arrêter quelques instants.
    Je veux m'assurer, au sujet de l'interprétation, madame Byrne, que vous savez que le temps qu'il vous faut pour entendre la traduction de la question sera rendu à la députée. Parfait.
    Nous ferons une pause entretemps. Je relance le chronomètre.

[Français]

    Vous avez six minutes.
    Merci beaucoup.
    En 2015, vous étiez directrice de campagne. On se souvient que, à l'époque, il y avait eu des attaques terroristes. Selon vous, quelles étaient les différentes menaces qui, de façon générale, pesaient sur le scrutin?

[Traduction]

    Je pense qu'il y avait beaucoup de problèmes importants pendant la campagne électorale de 2015. Je dirai — et je sais que votre collègue néo-démocrate va poser des questions — que la seule forme d'ingérence étrangère dont j'étais au courant à l'approche de la campagne de 2015 était le financement de Leadnow par la Fondation Tides, Leadnow qui avait une organisation appelée VoteNow qui se concentrait sur 29 circonscriptions électorales, soit 16 circonscriptions libérales et 13 circonscriptions néo-démocrates.
    Ces fonds... Il est vrai que Leadnow a déclaré que 17 % de son financement venait de donateurs étrangers. Nous savons qu'en 2015, Leadnow a reçu 1,5 million de dollars venant d'organisations américaines — de la Fondation Tides. Avec Leadnow, par exemple, j'attirerai l'attention sur deux circonscriptions qui étaient ciblées. Il s'agissait de celle d'Elmwood-Transcona, que le député conservateur a perdu par 61 voix. Du personnel rémunéré et 130 bénévoles ont été envoyés dans cette circonscription que nous avons perdue par 61 voix.
    Kootenay, en Colombie-Britannique, est...

[Français]

     Si je peux me permettre de vous interrompre, je ne vous demande pas de détails sur qui a perdu son élection et par combien de votes. J'aimerais par contre savoir de quelle façon vous avez appris qu'il y avait ce genre d'ingérence dans les élections. Quelle a été la source de cette information?

[Traduction]

    Je tiens l'information d'articles de presse.

[Français]

    J'aimerais vous entendre parler d'une déclaration faite par un témoin précédent, selon lequel tous les gouvernements des trente dernières années, de Mulroney à Trudeau, ont été compromis par la Chine, que tous les gouvernements en ont été informés à un moment ou à un autre, et que tous les gouvernements ont choisi d'ignorer les avertissements du Service canadien du renseignement de sécurité. Est-ce que vous êtes d'accord avec cette affirmation faite plus tôt devant le Comité?

[Traduction]

    Ce que je peux dire, c'est que je sais que je n'ai jamais été informée d'aucune forme d'ingérence électorale de la part de Beijing dans les deux campagnes nationales que j'ai dirigées.
    La différence avec ce que nous voyons avec l'actuel gouvernement est qu'il est évident qu'il a été informé plusieurs fois et qu'il a choisi de l'ignorer. Ce n'est pas mon opinion. C'est un fait incontesté. Nous le savons en raison d'articles de presse.

[Français]

    Certaines informations devaient tout de même avoir été portées à votre connaissance parce qu'elles étaient publiques. Même si vous n'avez pas pris part à cette décision, j'aimerais entendre votre avis. Il est connu, par exemple, que le premier ministre Harper avait défendu son député Bob Dechert, après avoir appris, de façon publique, que ce dernier avait entretenu une relation avec une journaliste d'une des agences de presse chinoises. Aujourd'hui, est-ce que vous considérez que c'était une bonne décision de le maintenir en poste?

[Traduction]

    Je ne comprends pas ce que vous... En fait, je ne sais pas de quoi vous parlez.

  (1230)  

[Français]

    Au risque de me répéter, j'ose espérer que ce n'est pas une question d'interprétation. En 2011, Stephen Harper a défendu le député Bob Dechert après qu'il a publiquement été admis qu'il avait entretenu une relation avec une journaliste d'une agence de presse chinoise. Au jour d'aujourd'hui, avec un certain recul, considérez-vous que de le maintenir en poste était une bonne décision?

[Traduction]

    Je n'étais pas au cabinet du premier ministre quand l'incident s'est produit. J'étais directrice des opérations politiques.
    Je peux dire qu'à l'approche de la campagne de 2015, le SCRS ne m'a informée d'aucune...

[Français]

    Je vous demande votre opinion. Aujourd'hui, est-ce que vous soutiendriez une telle décision?

[Traduction]

    Ce que je dis, c'est que, si l'ancien premier ministre Harper avait été informé qu'il y avait une ingérence étrangère avec quelqu'un qui allait se présenter, il aurait réglé...

[Français]

    Madame Byrne, en tout respect, je veux dire quelque chose.
    Je vous interromps un instant, mesdames Normandin et Byrne. Je demande encore une fois que tous les commentaires soient adressés à la présidence parce que je constate qu'on ne respecte pas l'ordre de parole. Merci.
    Alors, madame la présidente, par votre intermédiaire, je demande à la témoin son opinion personnelle, pas si elle était au courant. Je lui demande son opinion, aujourd'hui, avec les informations que nous avons.
    Est-ce qu'il s'agissait selon elle d'une bonne décision du premier ministre Harper de maintenir son député en poste? Je le demande parce qu'il y a des situations similaires actuellement qui ont été fortement dénoncées, notamment par les conservateurs. J'aimerais donc savoir si, comme on dit en bon québécois, ce qui est bon pour pitou est bon pour minou.

[Traduction]

    Je ne peux pas avoir d'opinion sur quelque chose que je ne sais pas.
    À ma connaissance, il n'y a eu aucune séance d'information concernant M. Dechert au sujet de ce qui est arrivé en 2011.
    Comme je le disais, tout ce que je peux dire, c'est que le SCRS ne m'a jamais informée, en tant que directrice de campagne en 2015, d'inquiétudes suscitées par un candidat qui se présentait pour le Parti conservateur du Canada pendant la campagne électorale de 2015.

[Français]

    Au risque de me répéter, il n'y a pas besoin d'avoir eu un breffage. C'était dans les médias. L'information est maintenant connue depuis plus de 12 ans. Je répète ma question. Selon l'opinion de la témoin, est-ce que, aujourd'hui, elle juge que c'était la décision à prendre que de maintenir le député en poste?

[Traduction]

    Je ne pense pas qu'il y a assez d'information.
    Je vous dis qu'il n'y a pas eu de séance d'information et qu'aucune preuve n'a été fournie. Il y a eu des articles de presse. Le SCRS n'a pas déclaré avoir informé le premier ministre qui a ensuite ignoré cette information, contrairement au parti dans ce cas‑ci.

[Français]

    Alors, à cet effet, jusqu'à quel point la témoin croit-elle les informations qui sont présentées dans les médias?

[Traduction]

    Je crois que cela a été rapporté dans la presse au sujet de l'ingérence étrangère pendant les campagnes de 2019 et 2021 parce que le gouvernement libéral a reconnu que c'est vrai. L'information vient de responsables du SCRS qui sont manifestement tellement préoccupés de voir qu'il est fait si peu de cas des séances d'information sur l'ingérence étrangère qu'ils estiment, de toute évidence, que la seule solution qu'ils aient maintenant est d'être des lanceurs d'alerte dans la presse.

[Français]

     Je vous remercie.

[Traduction]

    Allez-y, monsieur Green.
    Je vous remercie.
    Bienvenue au Comité, madame Byrne. Je sais que vous savez comment fonctionne ce genre d'endroit. Je vais donc vous poser une série de questions en cascade. Je respecterai la présidence, mais je pense pouvoir les poser d'une manière respectueuse qui ne nécessite pas d'intervention.
    Juste pour confirmer, étiez-vous la directrice de campagne pour la chefferie de M. Poilievre?
    J'étais conseillère principale.
    Serez-vous la directrice de la campagne nationale? Est‑ce que cela a été annoncé?
    Est‑ce que nous aurons bientôt des élections?
    Probablement.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Matthew Green: Vous avez mentionné des acteurs non étatiques, ce qui est, à mon sens, un point important. Le point qui n'a pas été soulevé, évidemment, c'est celui des dizaines de millions de dollars qui ont afflué dans le pays pendant le convoi.
     Nous savons que vous étiez conseillère principale de M. Poilievre pendant cette période, et nous constatons la relation de M. Poilievre avec le convoi. Vous avez mentionné Mme Lantsman. Nous savons que Mme Lantsman a été la première députée à lancer une pétition demandant la fin de l'obligation vaccinale dans la période précédant les élections.
    Avez-vous conseillé à M. Poilievre de veiller à séparer nettement les actions insurrectionnelles du convoi et la campagne à la chefferie à ce moment‑là?

  (1235)  

    Pour ce qui est du convoi, il me semble que le juge Rouleau, qui est un juge libéral, a déclaré qu'il n'y avait aucune preuve que des fonds étrangers ou une ingérence étrangère aient fait partie de... qu'il n'avait trouvé aucune preuve que cela faisait partie de ce qui s'est passé par rapport au Convoi de la liberté.
    Vous siégiez au comité. Vous avez donc probablement...
    GiveSendGo et GoSendMe ont mis environ un million de dollars venant des États-Unis...
    Je suis désolée. Pouvons-nous arrêter le chronomètre un instant?
    Monsieur Fergus, vous avez la parole.
    Je prie mon collègue de m'excuser. J'invoque le Règlement.
    Le témoin a dit quelque chose au sujet du juge Rouleau. Je pense que le témoin a ajouté un adjectif. J'essaie de comprendre. Est‑ce qu'il s'agit d'un titre? Parce qu'à ma connaissance, il est manifeste qu'aucun membre de la magistrature n'est nommé en fonction... ou d'appartenance à des partis politiques.
    Monsieur Green, je vous redonne la parole.
    Merci.
    Si nous voulons avancer, ce serait de nous limiter à des recours pertinents au Règlement.
    Ma question portait sur le fait que les conseils… Quand 10 millions de dollars ont été versés à Tamara Lich, du Maverick Party… Il y a des liens étroits entre des députés de premier plan du Parti conservateur et le mouvement, et vous étiez à ce moment une conseillère principale de M. Poilievre, qui briguait la tête du parti.
    Nous savons que 1 million de dollars a été versé. Quel type de conseil avez-vous donné à M. Poilievre, considérant le lien étroit entre le Parti conservateur et le convoi, pour éviter toute ingérence étrangère?
    Si vous parlez des dons, je rappelle que 62 000 personnes ont donné 9,7 millions de dollars durant la direction…
    Je vais être plus précis. Qu'avez-vous conseillé au candidat en avance dans la course à la direction à ce moment pour éviter…
    Avez-vous pris des précautions? C'est une autre façon de poser la question… Si c'est non, dites‑le et nous allons pouvoir passer à autre chose.
    Des précautions… Je pense que vous faites référence à la campagne de financement, et c'est à cela que j'essaie de répondre.
    Il peut aussi s'agir de cartes de membres. Si je me fie aux chiffres qui ont été publiés, je pense qu'il y a eu beaucoup d'allégations au cours de la dernière course à la direction concernant les chiffres gonflés ou faux. Des témoins experts nous ont confirmé que les courses à l'investiture sont des cibles de choix pour l'ingérence étrangère.
    C'est peut-être le cas pour d'autres partis. Je sais que l'adhésion au Parti libéral du Canada est gratuite. Je ne suis pas certaine des règles de votre parti à ce sujet. Dans le nôtre, l'adhésion coûte 15 $ par année, et ceux qui font une demande doivent payer avec leur propre carte de crédit ou un chèque personnel.
    À titre de membre de la haute direction du parti, vous n'avez pas donné de conseil à M. Poilievre relativement au lien entre…
    Les règles d'Élections Canada sont très claires concernant la direction, et les règles du parti sont aussi très claires à ce sujet.
    Pour ce qui concerne les dons, comme je l'ai dit, plus de 62 000 personnes ont donné près de 9,7 millions de dollars…
    Je pense que vous conviendrez que l'ingérence étrangère ne se limite pas aux périodes électorales. Pouvons-nous nous entendre là‑dessus?
    Nous avons vu, d'après les informations qui ont circulé, que c'est assez généralisé pour ce qui est des processus d'investiture au Parti libéral.
    Je crois que certaines allégations visaient aussi le Parti conservateur, y compris à l'échelon provincial. M. Brown, M. Ford, M. Charest… Cela semble assez courant durant les courses à la direction.
    Vous avez déclaré que quand vous étiez conseillère principale au sein du gouvernement Harper, vous n'avez jamais reçu d'information du SCRS sur ces questions, mais est‑ce que c'est quelque chose que vous avez envisagé? Même si vous ne receviez pas d'information à ce sujet, vous est‑il arrivé de vous dire qu'il serait peut-être nécessaire d'en parler, que ce soit en lien avec une fonction partisane comme celle de la direction de la campagne nationale ou à titre de membre du personnel du Cabinet du premier ministre?
    Non. Je n'ai jamais dit que je n'ai jamais reçu d'information du SCRS. J'ai dit que je n'ai jamais reçu d'information du SCRS concernant l'ingérence étrangère ou un autre sujet relié.
    C'est ce que je vous ai demandé.
    Non, cela ne m'est jamais venu à l'esprit parce que je n'ai jamais soupçonné l'implication d'acteurs étrangers dans le processus électoral, sauf quand des médias ont rapporté qu'avant les élections de 2015…
    Je suis un nouveau venu sur la Colline parlementaire. Je suis ici depuis moins longtemps que vous, mais cela me semble étrange. Je trouve hautement suspect que quelqu'un qui a une cote de sécurité aussi élevée ne s'inquiète jamais du risque d'ingérence étrangère. Le fait est que vous receviez des notes d'information, que deux comités avaient un mandat lié à ces questions et vous aviez ce qui peut être considéré comme une cote de sécurité de haut niveau.
    Le sujet n'a jamais été soulevé devant vous, malgré votre rôle dans ces gouvernements. Ai‑je bien compris?
    Cela nous ramène à la première fois où j'ai réalisé que l'ingérence étrangère pourrait être un problème. Comme je l'ai expliqué, le financement versé à Leadnow par la fondation Tides, qui était…

  (1240)  

    Compte tenu de vos longues années en poste, je dois avouer que je trouve… Ne l'entendez pas comme une attaque personnelle. En fait, je m'adresse à la présidence pour dire que je trouve cela très suspect. Pour reprendre la formulation de mon ami M. Cooper, soit vous saviez et vous n'avez rien fait, soit vous ne saviez pas parce que vous étiez incompétente. Loin de moi l'idée de vous accuser d'incompétence parce que je vous considère comme une personne très intelligente. Je cite M. Cooper, qui apparemment a appliqué cette formule à beaucoup de mes collègues libéraux. Laquelle de ces propositions s'applique à vous?
    Monsieur Green, avant que la fondation Tides finance des campagnes qui vous ont aidés, vous et vos partenaires de la coalition, durant les élections de 2015, aviez-vous entendu parler d'ingérence étrangère dans une élection canadienne?
    Vous semblez ignorer complètement les témoignages…
    Monsieur Green, je vous prie…
    … que nous avons reçus avant le vôtre. Ce niveau d'arrogance est normalement réservé aux libéraux, mais si vous y tenez…
    Madame Byrne, que savez que les députés posent des questions et font des observations. Vous avez accepté de comparaître devant le Comité, et je sais que vous aviez accepté de nous consacrer du temps la semaine dernière et que vous êtes de nouveau avec nous, et je vous en remercie.
    Nous passons au second tour, avec M. Nater et Mme Sahota ensuite.
    Monsieur Nater, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, madame la présidente. Merci à notre témoin.
    Je vais partager mon temps de parole avec M. Steinley.
    Dans votre déclaration liminaire, madame Byrne, vous avez déclaré qu'apparemment, ce n'est pas ce qui s'est passé qui met les libéraux en colère, mais plutôt les lanceurs d'alerte et les médias. Pourquoi selon vous?
     Je ne sais pas pourquoi. C'est évident qu'ils ne veulent pas en parler. Ce n'est pas pour rien s'ils n'ont pas déclenché une enquête publique, alors que ç'aurait été très facile. Ce n'est pas pour rien s'ils se traînent les pieds et font de l'obstruction durant cette étude, ce qui a empêché Katie Telford, la cheffe de cabinet du premier ministre, de témoigner devant le Comité. Ils s'en prennent aux journalistes qui leur posent des questions, ils soutiennent que le SCRS se trompe, puis ils se rétractent, bien entendu.
    Quand il a été question de la note d'information selon laquelle la famille de M. Chong avait été prise pour cible à Hong Kong, le premier ministre a tout d'abord répondu, sur un ton très hostile, que le SCRS n'avait jamais transmis cette information. Nous avons appris depuis que le SCRS avait communiqué l'information et qu'un des conseillers à la sécurité nationale avait reçu le rapport, mais qu'il ne l'avait pas lu.
    Je ne sais pas pourquoi. J'imagine qu'ils sont hostiles parce qu'ils cachent quelque chose.
     Dans la foulée des allégations concernant les menaces contre M. Chong et sa famille, nous avons appris que plusieurs députés seraient dans la même situation. Étant donné que c'était en lien avec une motion liée aux Ouïghours — je souligne que les membres du Cabinet libéral se sont abstenus de voter sur cette motion —, dans quelle mesure doit-on s'inquiéter? Vous avez travaillé pendant 20 ans au sein de l'appareil politique. Dans quelle mesure faut-il s'inquiéter que des députés soient la cible de menaces de la part d'agents étrangers en raison de leurs positions sur des questions aussi fondamentales que les droits de la personne dans le monde?
     Je pense que c'est extrêmement inquiétant. M. Chong milite depuis longtemps pour le respect des droits de la personne dans le monde. La motion qu'il a présentée sur le sort que l'administration de Pékin fait subir aux OuÏghours en Chine qui est à l'origine des menaces contre sa famille à Hong Kong.
    Comme vous l'avez souligné, monsieur Nater, les membres du Cabinet libéral se sont abstenus de voter sur cette motion, de même que quelques députés d'arrière-ban, y compris certains néo-démocrates. À mon avis, c'est extrêmement inquiétant. C'est quelque chose qui donne froid dans le dos, et qui devrait donner froid dans le dos à tous les députés, sans égard à leur allégeance politique. En restant les bras croisés, le gouvernement fait de vous tous des cibles potentielles de l'ingérence étrangère dans la manière dont vous votez, justement parce que vous avez un droit de vote et que vous pouvez vous exprimer à la Chambre des communes et présenter des motions.
    J'ai une dernière question avant de céder la parole à M. Steinley.
    La fin de semaine dernière, une politicienne américaine défaite faisait partie des conférenciers d'honneur au Congrès libéral. Un ancien chef libéral a fait une blague au sujet de l'ingérence étrangère dans les élections.
    Pensez-vous qu'il est de bon goût de faire des blagues au sujet d'un enjeu aussi grave que l'ingérence étrangère dans les élections, de banaliser cet enjeu?
    Non, je crois que c'est vraiment de mauvais goût, et je crois que c'est tout à fait révélateur de la véritable posture du Parti libéral à ce sujet. Les libéraux ne prennent pas le problème au sérieux. Ils n'aiment pas que l'opposition et les médias refusent de lâcher le morceau tant qu'ils n'auront pas des réponses.
    Merci d'être ici, madame Byrne.
    J'ai une question pour vous. L'ingérence de Leadnow dans la campagne de 2015 me met vraiment en colère parce que nous avons perdu la circonscription de Regina—Lewvan par 132 votes. Les libéraux étaient au courant de cette ingérence. C'est 1 million de dollars qui ont été injectés dans la campagne de 2015. À votre avis, pourquoi n'ont-ils pas fait une enquête sur cette ingérence étrangère dans les élections?

  (1245)  

    Peut-être parce qu'ils en ont bénéficié. C'est à eux que vous devriez poser la question.
    Pour donner suite à cela, comme ils n'ont pas mené d'enquête, pensez-vous… Je crois que la réponse est oui puisque vous l'avez mentionné tout à l'heure, mais pensez-vous qu'il devrait y avoir une enquête publique et qu'elle devrait remonter plus loin que la campagne de 2019? Pensez-vous que les libéraux accepteraient qu'il y ait une enquête publique qui remonte à 2015?
    Je crois que s'il y a une enquête publique et que les responsables estiment qu'il y a eu de l'ingérence étrangère, ce dont je n'ai aucune idée pour ce qui est de la période antérieure à la campagne de 2015 à la lumière de ce qui a été rapporté dans les médias… Je crois qu'ils auraient déjà dû déclencher cette enquête.
    Ce sera ma dernière question. S'il n'y a pas d'enquête publique, pourra-t-on accuser les libéraux de ne pas prendre le problème au sérieux?
    C'est impensable pour moi qu'il n'y ait pas d'enquête publique. Étant donné ce que nous avons appris au sujet des secrets, de la désinformation et des menaces contre M. Chong, c'est absolument impensable pour moi que David Johnston ne déclenche pas d'enquête publique. Du point de vue de la gestion de crise… C'est exactement pour cela que le gouvernement continue de s'empêtrer dans ses protestations. Cela en dit long sur la manière dont il aborde ce problème.
    Merci.
    Madame Sahota, allez‑y.
    Merci, madame la présidente.
    Ma première question portera sur les déclarations de la témoin dans un balado intitulé Curse of Politics.
    Durant une discussion sur les élections de 2021, vous avez fait remarquer qu'on peut être d'accord avec la stratégie, mais qu'on ne peut pas prétendre qu'elle a fonctionné. La stratégie du Parti conservateur n'a pas fonctionné. C'est ce que vous avez laissé entendre.
    En Colombie-Britannique, nous avons perdu quatre sièges dans le Lower Mainland. Nous avons perdu des appuis dans quatre des cinq circonscriptions de Surrey. Vous ne pouvez pas me dire que notre stratégie a fonctionné dans le Lower Mainland. Elle n'a pas fonctionné.
    Beaucoup d'enjeux préoccupaient les électeurs de cette région durant la campagne. Je suis certaine que vous avez fait une analyse postérieure des raisons.
    J'ai discuté avec plusieurs candidats et des députés élus dans la région, et la légalisation des armes d'assaut faisait partie des principaux enjeux soulevés durant le porte-à-porte. Des Sino-Canadiens pointaient la légalisation des armes d'assaut comme d'un enjeu important des élections.
    Bien entendu, il n'y a jamais un seul enjeu dans une campagne électorale. Je crois que vous l'avez également mentionné durant ce balado. Parfois, le résultat dépend d'une accumulation des enjeux. Est‑ce que vous maintenez ce que vous avez dit concernant l'échec de la stratégie électorale du Parti conservateur dans ces circonscriptions?
    Oui. Je crois que c'est évident. Comme je l'ai dit, je ne suis pas du tout intervenue dans la campagne de 2021. J'ai dit très clairement que je n'étais pas d'accord avant certaines orientations prises durant la campagne, principalement concernant l'appui à la taxe sur le carbone. C'est un aspect très important.
    Je ne crois pas que les facteurs étaient mutuellement exclusifs. Plusieurs facteurs expliquent pourquoi, au cours des dernières élections, les résultats mitigés des conservateurs, notamment dans les circonscriptions urbaines et suburbaines du district régional du Grand Vancouver et la région du Grant Toronto. Cela ne signifie pas pour autant qu'il n'y a pas eu d'ingérence étrangère.
    Je ne crois pas que le résultat des élections aurait été différent, vraiment pas, mais cela n'enlève rien au fait que l'ingérence étrangère dans nos élections est très préoccupante.
     Tout à fait, et je conviens même avec vous que l'ingérence étrangère n'a sans doute pas eu de véritable effet sur les résultats dans ces circonscriptions. Cela dit, il faut quand même agir, et c'est pourquoi nous sommes ici aujourd'hui. C'est pourquoi nous examinons, même s'il y a consentement unanime, la motion de privilège concernant M. Chong. C'est pourquoi un registre des agents étrangers sera instauré au cours des prochains mois. Des consultations ont eu lieu. C'est pourquoi nous avons constitué le CPSNR et mis en place différentes procédures.
    Je crois que nous sommes tous d'accord, et que beaucoup de témoins sont d'accord, sur le fait que le gouvernement a pris des mesures et qu'il faut continuer de renforcer notre démocratie pour faire échec à l'ingérence étrangère.
    Ce que je trouve étrange, c'est que parmi les experts que nous avons entendus, ceux qui ont occupé des fonctions de conseil auprès de nos agences partenaires comme le SCRS s'entendent pour la plupart sur le fait que l'ingérence étrangère a pris une ampleur inquiétante depuis un moment déjà. Le problème continue de s'aggraver, comme vous l'avez dit, et c'est pourquoi nous prenons ces mesures. Toutefois, quand je vous entends affirmer que personne n'était au courant, sauf pour ce qui concerne les interventions de Leadnow et d'autres durant les dernières élections, je dois avouer que cela me semble, comme M. Cooper l'a dit, plutôt suspect. La seule explication serait que quand vous étiez conseillère de M. Harper, vous avez mis en place une de structure qui vous permettait de fermer les yeux sur ce qui se passait.
    Est‑ce que vous avez déjà conseillé à l'ancien ministre de la Réforme démocratique et actuel chef de l'opposition officielle, M. Poilievre, de mettre en place des politiques pour nous protéger? Vous avez parlé de l'Iran dans votre témoignage, pas seulement la Chine. Vous pouvez aussi nous parler d'autres pays si vous le jugez nécessaire.

  (1250)  

    Comme je l'ai dit, je n'ai jamais reçu d'information concernant des activités potentielles d'ingérence étrangère dans les périodes précédant les élections. Je n'ai jamais eu un accès privilégié à ce genre de rapport ou reçu de rapport à cet effet. Je n'ai jamais reçu d'information du SCRS comme quoi des candidats pouvaient être en cause. Je n'ai jamais eu entre les mains de rapport comme celui concernant la période précédant les élections de 2019. Il est passé du CPSNR au Cabinet du premier ministre, et le premier ministre l'a eu entre les mains. Le rapport exposait les craintes de responsables du SCRS concernant des activités d'ingérence étrangère dans la campagne de 2019. Je n'ai jamais eu ce genre de rapport.
    C'est aussi improbable que…
    Votre temps est écoulé.
    D'accord. Merci.
    Merci à vous.
    Madame Normandin, c'est à vous.

[Français]

     Merci beaucoup.
    J'aimerais revenir à la question de l'ingérence locale. Vous en avez parlé plus tôt lorsqu'il a été question de la fondation Tides. Au moment où vous étiez directrice de campagne, vous avez cherché à obtenir de l'aide pour contrer cette ingérence dans le cadre de l'élection.

[Traduction]

    Comme je l'ai dit, en tant que directrice de campagne, je n'ai jamais reçu d'information concernant l'ingérence étrangère. Je n'ai jamais été informée, durant les périodes où j'ai été directrice de la campagne nationale ou cheffe de cabinet adjointe, que le SCRS avait des craintes relativement à des activités d'ingérence étrangère avant une campagne électorale.

[Français]

    On ne vous a donné de breffage ni sur l'ingérence étrangère ni sur l'ingérence intérieure?

[Traduction]

    Non, jamais.

[Français]

    J'aimerais aborder l'ingérence d'autres pays, juste pour être certaine. Vous n'avez jamais eu d'information sur de l'ingérence de la part de la Russie ou des États‑Unis? La possibilité qu'il y en ait n'a même jamais été discutée, d'un point de vue stratégique?

[Traduction]

    Je n'ai jamais reçu d'information concernant des activités d'ingérence étrangère avant l'une ou l'autre des campagnes électorales nationales dont j'ai été responsable.

[Français]

    J'aimerais que vous nous disiez, sans parler des breffages et en vous fondant sur votre connaissance personnelle, si vous avez même pensé à la possibilité qu'il y ait de l'ingérence de la part de la Russie, des États‑Unis, de l'Iran ou de quelque pays que ce soit, dans votre gestion de la campagne. Sans même qu'il soit question de breffages, j'aimerais savoir si vous avez considéré cette possibilité en tant que directrice de campagne nationale.

[Traduction]

    Non. L'ingérence n'était pas un sujet de préoccupation. La seule discussion que nous avons eue… Nous savons qu'avant la campagne électorale de 2015, le Parti libéral du Canada a collaboré très étroitement avec le Parti démocrate des États-Unis pour mettre au point sa base de données et ses techniques de campagne, mais c'est la seule discussion que nous avons eue. Je crois qu'il serait juste de dire, et j'en conviendrais, que ce n'était pas de l'ingérence. Le Parti libéral a de son propre chef décidé d'aller aux États-Unis pour s'approprier les techniques de campagne des Américains.

[Français]

     Jamais, à aucun moment, la question de l'ingérence étrangère n'a fait partie d'une discussion sur la gestion de la campagne?

[Traduction]

    Non, il n'y a jamais eu de discussion à ce sujet, sauf avant la campagne de 2015, quand il a été question dans les médias du fait que la fondation Tides a versé au moins 1,5 million de dollars à Leadnow pour mener une campagne de soutien à 29 candidats libéraux et néo-démocrates dans 29 circonscriptions électorales.

  (1255)  

    Merci.
    Monsieur Green, vous avez la parole.
    Merci.
    Afin d'amener le débat sur un terrain non partisan, je vais essayer de trouver des points communs sur lesquels, je crois, nous pouvons nous entendre.
    Vous conviendrez sans doute qu'une enquête publique complète et indépendante constituerait, ou constitue le meilleur moyen de remonter aussi loin que nous le voulons pour rassurer les Canadiens du fait qu'une enquête et un examen approfondi sont réalisés et que des recommandations seront présentées à la Chambre des communes.
    J'en conviens.
    Vous seriez d'accord pour que l'enquête remonte aussi loin que nécessaire pour nous assurer que le témoignage que nous avons entendu vaut, dans un esprit non partisan, pour les deux partis qui ont occupé le pouvoir et qui ont formé le gouvernement depuis 20 ans.
    Oui.
    Seriez-vous d'accord pour dire que l'accès rapide, ouvert et complet aux documents, ainsi que la transparence à cet égard, en matière bien entendu de sécurité nationale aideraient la commission à se doter d'un cadre optimal pour étudier les questions soulevées?
    Oui, je crois.
    Vous avez parlé de votre travail qui s'étale sur des dizaines d'années, et vous avez fait référence à votre parti, mais à d'autres également. Seriez-vous d'accord également pour qu'il y ait une réforme, ou que d'autres processus soient proposés pour ce qui concerne l'investiture afin de nous prémunir contre l'ingérence étrangère dans les activités de mobilisation de membres et de candidats?
    Comme je l'ai dit, je crois que les partis gèrent les processus d'investiture de manière différente. Je ne connais pas les règles du NPD, mais je sais que l'adhésion au Parti libéral est gratuite.
    Êtes-vous d'accord avec ces règles?
    Chaque parti a ses propres…
    Ce n'est pas ce que je vous ai demandé. Ce que je veux…
    Je crois qu'Élections Canada a déjà un processus auquel les partis doivent se conformer. Si les partis politiques craignent l'ingérence étrangère dans leurs processus d'investiture, comme c'est arrivé au Parti libéral, alors je crois qu'ils doivent prendre des mesures…
    À votre avis, le CPSNR et l'OSSNR sont-ils les organismes appropriés pour ce genre de choses? Je vous le demande parce qu'ils existaient quand c'est arrivé, mais nous sommes encore ici à en discuter.
     En fait, le CPSNR a présenté un rapport au premier ministre avant la campagne de 2019, mais il a été ignoré. Je vais m'abstenir de commenter…
    D'accord, mais pensez-vous qu'il devrait y avoir un mécanisme qui exigerait que ces rapports soient également présentés à la Chambre?
    Oui, je crois que je serais favorable à cette idée.
    À votre avis, des processus législatifs devraient-ils exiger que les députés ciblés soient informés rapidement de toute activité concrète d'ingérence étrangère?
    Oui.
    Merci.
    Merci.
    Madame Byrne, l'heure prévue est écoulée, mais nous accorderiez-vous 10 minutes supplémentaires de votre temps?
    D'accord.
    Merci. M. Cooper pourra avoir son temps de parole de cinq minutes pour compléter ce tour, M. Gerretsen suivra, et nous allons pouvoir vous libérer.
    Monsieur Cooper, allez‑y.
    Merci, madame la présidente.
    En juillet 2021, le SCRS faisait état dans un rapport de la manière dont une diplomate du consulat de Toronto, Zhao Wei, avait orchestré une campagne d'intimidation contre un député en exercice, Michael Chong. Nous savons que ce rapport a été remis au conseiller à la sécurité nationale au Bureau du Conseil privé et aux ministères concernés. Nous avons aussi appris de la part de la cheffe de cabinet du premier ministre et de sa conseillère à la sécurité nationale qu'il est systématiquement informé de toutes les questions touchant la sécurité nationale. D'après sa cheffe de cabinet, Mme Telford, il lit tout et rien n'est ignoré. Or, en l'occurrence, le premier ministre essaie de faire croire aux Canadiens qu'il a pris connaissance de cette campagne dans le Globe and Mail, alors que c'est extrêmement grave. On parle quand même d'un État étranger hostile et d'une diplomate accréditée qui ciblent un député en exercice en vue de compromettre sa capacité de s'acquitter de son travail de représentant de ses électeurs et de l'ensemble des Canadiens.
    Considérant cela, c'est très difficile de croire ce que le premier ministre prétend, et même de croire qu'il dit la vérité. J'ai de sérieux doutes à ce sujet. Cela en dit long sur le peu de sérieux qu'il accorde à la question de l'ingérence étrangère. Il se trahit lui-même. Il faut aller au fond des choses, et je présente une motion au Comité en ce sens.
    Selon ce que j'en comprends, un système rigoureux de suivi des documents de nature délicate est en place au Cabinet du premier ministre. Comme vous y avez vous-même occupé des postes de direction, pouvez-vous nous expliquer comment se fait le suivi des documents au sein du Cabinet du premier ministre?

  (1300)  

    Pour ce qui concerne le Cabinet du premier ministre, le BCP est l'agent de la circulation, si vous me permettez l'expression. C'est lui qui décide quels documents se rendent jusqu'au premier ministre. Les fiches de suivi sont très détaillées, si je me souviens bien. Il n'y est pas indiqué seulement si un document doit être soumis au premier ministre, mais aussi quel fonctionnaire doit le recevoir au sein de l'appareil, dépendant du ministère. Bien entendu, il y a aussi un suivi des organismes et des membres du personnel politique à qui un document est destiné.
    Il existe une fiche de suivi et il devrait être assez simple pour le premier ministre de donner l'instruction au BCP de la rendre publique. Nous saurions par où la mystérieuse note d'information est passée et qui l'a reçue. Les notes de suivi, selon ce que j'en comprends et pour autant que je m'en souvienne, ne sont pas des documents très secrets ou classifiés.
    Si le premier ministre et le gouvernement tenaient vraiment à savoir où la note de suivi s'est perdue en chemin, ce serait très facile pour eux de trouver exactement quels fonctionnaires, quels organismes de sécurité et quels membres du personnel politique l'ont reçue.
    Merci de cette réponse.
    Madame Byrne, l'alinéa e) de la motion que j'ai présentée porte sur la production au Comité, dans un délai d'une semaine, du rapport et des documents concernant sa transmission au Cabinet du premier ministre, au BCP, au ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement et au ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile.
    S'agit‑il d'une demande raisonnable à votre avis? Est‑ce que c'est facile d'y donner suite?
    Oui, je crois que ce serait facile de donner suite à cette demande.
    Merci.
    Je change un peu de sujet. Pour que ce soit bien clair, vous n'avez jamais été en contact avec le Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignements visant les élections, ou Groupe de travail MSRE, à titre de porte-parole du Parti conservateur lors des élections de 2021. Est‑ce exact?
    C'est exact.
    Vous n'avez pas non plus été en contact avec le groupe de travail en 2019. Est‑ce exact?
    C'est exact. Je n'avais pas un rôle central.
    J'ai fait du porte‑à‑porte pour des candidats de la région durant les campagnes de 2019 et de 2021, mais je n'avais pas de responsabilité dans la campagne centrale.
    Vous n'aviez pas de rôle officiel dans les campagnes de 2019 et de 2021.
    Non.
    Pourquoi pensez-vous avoir été convoquée ici aujourd'hui?
    J'ai réfléchi à cette question. Je sais qu'a priori, c'est à cause de la campagne de 2015, et je pense qu'il y a un peu de partisanerie en jeu si on considère qu'une des demandes… Je sais qu'une contre-motion a été présentée pour convoquer mon amie Anne McGrath devant un comité. Elle a été la directrice nationale du NPD au cours des deux dernières élections. Je crois qu'il y a un peu de partisanerie derrière le fait que j'ai été convoquée et pas les membres de l'autre parti.
    Merci.
    Le dernier intervenant sera M. Gerretsen.
    Merci, madame Byrne, d'être ici aujourd'hui.
    Vous avez affirmé plus tôt que vous n'avez jamais reçu d'information ou lu de rapport au sujet de l'ingérence étrangère, mais…
    Je n'ai jamais reçu de rapport.
    D'accord.
    En 2013, dans un rapport public, le SCRS parle de l'ingérence étrangère comme d'une menace réelle et du fait qu'elle prendrait de l'ampleur dans les années suivantes. Avez-vous lu ce rapport?
    Je ne m'en souviens pas.
    Avez-vous reçu ce rapport?
    Je ne me…
    Vous étiez la cheffe de cabinet adjointe à ce moment.
    Effectivement, j'étais la cheffe de cabinet adjointe.
    Et vous ne vous en souvenez pas.
    Non, je ne m'en souviens pas.
     Ce que vous nous dites au sujet de Stephen Harper est très différent de ce que nous avons entendu de la part d'autres témoins aujourd'hui.
    Selon un ancien agent du renseignement, Stephen Harper aurait été plutôt mou à l'égard de la Chine, et des agents d'influence ayant réussi à l'approcher l'auraient amené à revoir certaines décisions.
    Un ancien correspondant parlementaire a affirmé que Stephen Harper l'aurait mis sur la touche quand il a obtenu des renseignements de première main au sujet de l'ingérence étrangère. Il nous a demandé de vous poser une question, et je vais vous la poser. Il aimerait savoir pourquoi vous et le gouvernement Harper avez fait preuve d'autant de naïveté à l'égard de la Chine.

  (1305)  

    Je ne peux pas répondre à la place de l'ancien premier ministre. Comme je l'ai déjà dit, je ne sais pas du tout à quoi le témoin…
    Je vous répète ce qu'il a dit. Il croit que Stephen Harper a fait preuve de naïveté à l'égard de la Chine. L'agent du renseignement qui a témoigné avant lui a dit que Stephen Harper avait été mou à l'égard de la Chine.
    Pourquoi ces menaces n'ont-elles pas été prises au sérieux par le Cabinet du premier ministre, dont vous faisiez partie?
    Je n'ai aucune preuve qui permettrait d'établir que c'était le cas. Comme je l'ai dit, je n'ai jamais reçu d'information à ce sujet, et je ne me souviens pas du rapport public du SCRS.
    Très franchement, vous n'aviez pas à en être informée puisque c'était un document public du SCRS.
    J'ai quelques questions à vous poser. Si je puis me permettre, je vous demanderais de répondre par oui ou non.
    Avez-vous reçu de l'information sur l'ingérence étrangère après qu'une agence de presse contrôlée par l'État chinois a demandé à un journaliste d'espionner l'ancien premier ministre?
    Non.
    Avez-vous reçu de l'information sur l'ingérence étrangère après que la même agence de presse a été impliquée dans une opération qui visait à piéger un secrétaire parlementaire conservateur?
    Non.
    Avez-vous reçu de l'information sur l'ingérence étrangère quand, une année auparavant, Richard Fadden, le directeur du SCRS, a fait une mise en garde publique selon laquelle des politiciens étaient susceptibles de tomber sous l'influence de gouvernements étrangers en raison de certaines relations personnelles?
    Non. Je ne travaillais pas au Cabinet du premier ministre à cette époque.
    D'accord.
    Avez-vous reçu de l'information sur l'ingérence étrangère après que John Baird a accepté un poste auprès d'un milliardaire chinois?
    Non. En 2015, j'étais la directrice de la campagne nationale.
    Avez-vous reçu de l'information sur l'ingérence étrangère après que ledit milliardaire chinois a fait un don de 1 million de dollars dans le cadre du gala du Centre national des Arts, où il était assis à côté de Laureen Harper, la présidente honoraire?
    Non.
    Madame la présidente, je cède le temps qu'il me reste à M. Turnbull.
    Madame Byrne, le CPSNR, le Protocole public en cas d'incident électoral majeur, le Groupe de travail MSRE, le Mécanisme de réponse rapide, le Centre canadien pour la cybersécurité, le plan pour protéger la démocratie canadienne, le projet de loi C‑59 et le projet de loi C‑76 représentent huit mesures que notre gouvernement a prises depuis 2015. Pouvez-vous nommer huit mesures prises sous le règne de Stephen Harper?
    Ce que je peux dire, c'est que peu importe…
    J'aimerais que vous répondiez par oui ou par non.
    Pouvez-vous me donner le temps de répondre?
    Oui, si vous répondez à la question. C'est oui ou c'est non?
    Je vais répondre à la question, mais…
    Pouvez-vous nous nommer huit mesures?
    Excusez-moi, mais je vais arrêter le chronomètre. Nous nous en sortons très bien jusqu'ici.
    Comme nous l'avons souvent répété, des questions sont posées et des réponses sont données. J'ai déjà été dans ce fauteuil, et je me suis fait dire par le président d'un comité que nous savons que ce temps appartient aux députés. Je crois qu'il faut aussi donner du temps aux témoins.
    Je suis consciente qu'il est généralement admis ici, si vous avez fréquenté ces couloirs, que c'est un endroit où le temps appartient aux députés, mais, monsieur Turnbull, je vous saurais gré de laisser notre témoin donner sa réponse.
    Peu importe les huit mesures que vous avez énumérées, nous sommes encore ici à discuter du fait qu'au cours des deux dernières élections, votre gouvernement a délibérément ignoré les conseils des fonctionnaires relativement à l'ingérence étrangère.
    Pouvez-vous nous nommer quatre mesures?
    Comme je l'ai dit, nous sommes encore ici alors que votre gouvernement se traîne les pieds après avoir ignoré systématiquement…
    Que diriez-vous d'en nommer seulement deux? Je suis désolé de vous interrompre, madame Byrne, mais notre temps est limité. Pouvez-vous nommer deux mesures?
    Je comprends que vous essayez de détourner l'attention, mais cela n'a rien à voir…
    Je n'essaie pas de détourner quoi que ce soit. Je vous pose seulement…
    C'est exactement ce que vous faites.
    … une question très simple pour savoir si, sous le règne de Stephen Harper… Plusieurs témoins nous ont affirmé que le gouvernement Harper n'a rien fait. Vous dites que notre gouvernement n'a rien fait, et vous m'avez posé une question, ce qui va à l'encontre de la procédure habituelle.
    Je vous ai donné huit exemples concrets et vous n'êtes pas en mesure de m'en donner un seul. C'est assez révélateur.
    Eh bien…
    D'accord. Je vais poursuivre.
    Madame la présidente, combien de temps me reste‑t‑il?
    Il vous reste 10 secondes.
    D'accord. Je vais donc remercier notre témoin de sa présence parmi nous aujourd'hui.
    Sur ce, nous avons…
     Madame la présidente, j'invoque le Règlement. J'aimerais présenter une motion afin de demander au Comité de prévoir suffisamment de temps durant la réunion de mardi pour examiner la motion que j'ai soumise concernant M. Chong.
    Je viens d'avoir la confirmation que nous n'avons plus de services. Nous n'avons plus de ressources. Nous pouvons examiner la motion que vous voulez présenter à la prochaine réunion. Ce n'est pas possible aujourd'hui.
    Madame Byrne, je vous remercie de nous avoir accordé du temps. Si vous souhaitez ajouter autre chose, vous pourrez transmettre un document écrit à la greffière. Il sera traduit dans les deux langues officielles et distribué aux membres du Comité.
    C'est ce qui met fin à notre réunion.
    Portez-vous bien et soyez prudents. La séance est levée.
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