:
Madame la Présidente, enfin, nous arrivons à parler du projet de loi . Le Bloc québécois est en faveur du principe du projet de loi S‑5 en ce qui a trait au renforcement — j'insiste sur le mot — de la protection de l'environnement pour un Canada en santé. La Loi canadienne sur la protection de l'environnement, ou LCPE, n'a pas fait l'objet de révision depuis 1999. Je porte donc la voix de multiples organisations, de milliers de personnes qui demandent depuis des années que le gouvernement fédéral s'acquitte avec diligence de ce travail. Plusieurs personnes sont même venues à mon bureau de circonscription m'en parler. C'est un travail important, certes, mais tout autant titanesque si on ambitionne de le faire correctement et dans sa globalité, dans un horizon de temps qui soit quand même raisonnable.
Le 9 février, les sénateurs reçoivent le projet de loi et, le 22 juin, terminent leur étude. Ce processus aura produit des amendements, cela va de soi. Il aura aussi engendré des critiques sur le caractère expéditif du travail attendu de la part des membres du Sénat, particulièrement parce que c'est complexe juridiquement et qu'il y a des aspects techniques importants au cœur de cette mesure législative. Toucher à une partie de la Loi peut parfois avoir des répercussions sur les autres articles de celle-ci; j'y reviendrai tantôt.
D'ailleurs, un de ces amendements porte sur les substances nouvelles, plus précisément sur les organismes vivants. Hier matin, j'ai questionné la représentante d'Environnement et Changement climatique Canada à ce sujet lors du breffage du projet de loi . Elle m'a répondu que c'est à la suite des amendements du Sénat qu'une consultation a été planifiée. Or, ce n'est que jeudi dernier que la nécessaire consultation publique a été annoncée aux parties intéressées et au public. Pourquoi le gouvernement a-t-il attendu jusqu'à la mi-octobre pour faire cette consultation alors que, depuis le 22 juin, il avait déjà le champ libre pour faire tout cela? Les résultats de la consultation, c'est une grande pertinence pour notre travail en comité.
J'aimerais souligner maintenant que réviser, moderniser et renforcer la LCPE n’est pas suffisant. En fait, il faut s'assurer que le projet de loi devant nous est le premier de plusieurs autres qui suivront afin de s'assurer que tous les aspects de cette loi seront complètement revus et ajustés à la lumière des connaissances scientifiques, des moyens technologiques d'évaluation et de surveillance que nous avons maintenant à notre disposition. Ces futurs projets de loi, complémentaires à celui qui est devant nous, devront être planifiés et déposés dans les meilleurs délais. J'espère qu'on n'aura pas à attendre encore 20 ans.
Les problèmes de pollution de l'air et de pollution par contaminants rejetés dans l'environnement, qui affectent la santé des femmes, des enfants et des personnes vulnérables, documentation scientifique à l'appui, ainsi que les organismes génétiquement modifiés doivent impérativement faire l'objet d'une attention particulière. Cette seule révision ne suffira pas.
Toutefois, il y a une bonne nouvelle dont on peut se réjouir: le , de même que le et le député de ont tenu des propos allant dans le même sens. Je pense qu'il reste suffisamment de temps dans cette législature pour voir la suite.
Je ne suis pas issue du monde médical, mais au risque de me répéter — je suis sûre que mes collègues vont me pardonner —, chaque fois que j'ai l'occasion d'intervenir à la Chambre ou même d'intervenir auprès des citoyens de ma circonscription, je mets toujours ensemble l'environnement et la santé. C’est interrelié. J'ai été l'oreille attentive d'organisations de protection de l'environnement telles que Nature Canada, Vigilance OGM, Action cancer du sein du Québec et l'Association québécoise des médecins pour l'environnement.
En mars dernier, 54 organisations et plus de 200 femmes mobilisées par ces questions ont signé une lettre envoyée aux membres du conseil d'administration qui étudiait le projet de loi S‑5, aux membres du Comité permanent de l'environnement et du développement durable, au et même au . Cette lettre de 13 pages signale la kyrielle de problèmes de santé liés à des substances chimiques et recommande quelques modifications qui seraient requises pour redresser les lacunes.
Prenons un exemple. Combien de consommateurs savent que le Canada a un système de réglementation chimique fondé officiellement sur la déclaration postcommercialisation? Il s'agit d'une déclaration du fabricant qui survient après que le processus de commercialisation est terminé. On l'utilise avant même que les effets soient évalués.
En 2022, la littérature scientifique et médicale a amplement fait la démonstration des risques associés à l'exposition accumulée aux PFAS et au BPA qu'on retrouve partout et quotidiennement, entre autres dans les emballages. Ce sont des perturbateurs endocriniens reconnus.
Voici une liste des problèmes de santé: la modification de l'action de l'œstrogène; les cancers du sein; la baisse de la concentration et de la qualité des spermatozoïdes; l'obésité; le diabète de type 2. Comme si ce n'était pas assez pas assez, je pourrais rajouter les dysfonctionnements hormonaux et les effets immunologiques comme la diminution de la réponse vaccinale. Je suis certaine que cela nous dit quelque chose. Je pourrais aussi parler des troubles de la reproduction, y compris la baisse de la fertilité.
Je ne les nomme pas tous, car cela me prendrait trop de temps. Quand les données fournies par Environnement et Changement climatique Canada en 2018 démontrent que moins de 2 % de la communauté industrielle sous réglementation a été inspecté en 2017-2018, il y a de quoi être préoccupé. Cela signifie que les activités d'application de la loi ont diminué. En 2015-2016, le ministère de l'Environnement a indiqué que 43 entreprises avaient fait l'objet d'enquêtes pour des violations à la loi canadienne. En 2018-2019, c'était 12 entreprises. La pandémie de la COVID‑19 n'avait même pas encore débuté.
Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il est regrettable qu'on ait attendu plus de 20 ans pour revoir cette importante loi. Cela dit, allons vers l'avenir. Modernisons cette loi en fonction du XXIe siècle avec robustesse et mettons-là à l'abri des lobbys et des intérêts commerciaux. Les industriels sont souvent prompts à mettre leurs droits en concurrence avec ceux qui permettent une meilleure application de la loi et une surveillance accrue, avec le droit du public d'être informé et d'être à l'abri de substances dommageables à la santé.
Regardons plus particulièrement le projet de loi . Le gouvernement a fait grand bruit de l'amendement sur le droit à un environnement sain. Nous ne sommes pas dupes, et les citoyens ne devraient pas l'être non plus, devant la prétention du gouvernement libéral selon laquelle nous avons un vrai droit à un environnement sain. Ce n'est pas le cas, de l'aveu même des hauts fonctionnaires qui ont présenté le projet de loi S‑5 aux parlementaires lors de son dépôt.
La transparence a ses mérites, alors je vais dire sans détour et sans mauvaise foi que les articles relatifs au doit à un environnement sain ainsi qu'aux populations vulnérables se trouvent dans le préambule de lu projet de loi. Cela signifie que leur champ d'application est celui de la loi et qu'ils n'ont aucun effet sur les autres lois du Canada. Qu'est-ce que cela veut dire?
Ma collègue de , que je salue, en a touché un mot avant que nous retournions dans nos circonscriptions. Cela veut dire que, même si la protection de ce droit est ajoutée à la mission du gouvernement, cela ne crée pas un véritable droit fondamental de vivre dans un environnement sain.
J'aimerais citer mon collègue de . Dans son discours du 7 octobre, il dit qu'« on prévoit que [l]e cadre ouvrira la voie à une mise en œuvre progressive du droit à un environnement sain […] et qu'il évoluera avec le temps, selon les opinions des Canadiens et l'expérience acquise par le gouvernement. »
Je pense que ce serait bon de clarifier ce qu'on entend exactement quand on parle d'un droit dans un préambule qui va être progressif. Qu'est-ce que cela veut dire, exactement? J'espère que cela ne veut pas dire qu'on va consacrer encore 20 ans à l'apprentissage.
Les droits fondamentaux sont des droits accordés à chaque individu et assurés dans un État de droit et dans une démocratie. Les droits fondamentaux sont constitués des droits de l'homme, des citoyens et des libertés publiques. Le droit à un environnement sain, qui peut avoir toutes sortes de déclinaisons sémantiques, ne date pas d'hier.
Cela a été inauguré en Suisse en 1971. La Suède a inscrit ce droit à sa constitution en 1974. La primauté de ce droit ne s'est pas essoufflée avec le temps. Au fil des décennies, les États y ont fait beaucoup de place quelque part dans leurs politiques ou leur législation. On ne peut certainement pas dire que le Canada est un leader sur ce plan.
S'il fut un temps où la question occupait une place moins importante dans le programme politique des gouvernements, nos problèmes en matière d'environnement et de santé auraient sûrement fait bouger les choses. Or, un fait demeure: lorsqu'un droit s'insère dans le corpus constitutionnel d'un État de droit, ce droit prend une forme fondamentale. Selon l'ONU, 153 États ont légalement reconnu dans leur constitution un tel droit. Avant qu'on ne manifeste de l'incrédulité, je veux préciser que la structure législative des États concernés et leur choix de terminologie et de mise en œuvre sont, bien sûr, variables.
Les quelques pays où l'on n’a relevé aucune influence de la Constitution sur les lois environnementales sont ceux qui ont ajouté ce droit plus récemment, comme le Kenya, en 2010, la République dominicaine, en 2010, la Jamaïque, en 2012, Fiji, en 2013 ou encore des pays où sévissent des guerres civiles ou d'autres types de crises sociales, économiques et politiques. On pensera à la République démocratique du Congo. C'est en Afrique que l'on retrouve le plus grand nombre de pays où les textes constitutionnels ne semblent avoir aucune incidence sur les lois environnementales.
Quelques semaines avant la COP26, l'an dernier, l'ONU a adopté une résolution faisant du droit à un environnement sain un droit de l'homme. Son haut‑commissariat aux droits de l'homme a désormais un rapporteur spécial qui se consacre à cette question, parce que la dégradation de l'environnement et les changements climatiques sont reconnus comme des crises interconnectées en matière de droits de l'homme. Jouir d'un environnement sûr, propre, sain et durable sont les thèmes préconisés.
Au même moment ou presque, l'État de New York a modifié sa constitution pour y inclure le droit de chacun à bénéficier d'un air et d'une eau propres et d'un environnement sain. Comme pour les six États américains qui l'ont précédé dans cette démarche, cela a été une lutte ardue. Des détracteurs de ce progrès juridique, social et environnemental tiennent des propos que nous entendrons ici, à la Chambre: c'est trop flou; c'est imprécis; n'importe qui peut aller devant la justice; il faut protéger l'activité commerciale et les renseignements commerciaux confidentiels. Nous entendrons de tels propos. Il y a également eu, bien sûr, l'allusion du député de quant aux litiges potentiels qu'une loi révisée susciterait.
Je veux rappeler que l'OCDE confirme que l'inscription de dispositions environnementales dans les constitutions européennes a mené à une révision en profondeur et une évolution du progressif marqué des politiques environnementales, et a facilité la mise en œuvre de processus d'inspection, de surveillance et d'application.
Il faut parfois faire un petit retour dans le passé. Cela nous permet de mieux réfléchir sur ce qui se passe actuellement. J'ai donc voulu voir comment cette question était étudiée dans le contexte canadien, dans le contexte fédératif qui ne manque pas de révéler ses limites.
Plusieurs universitaires ont focalisé leurs travaux sur la question au fil du temps. Certains estiment qu'il conviendrait d'inclure un mécanisme de ce genre dans la législation canadienne de protection de l'environnement. C'est l'Association du Barreau canadien qui, en 1990, faisait cette recommandation dans un ouvrage intitulé Le développement durable au Canada: les avenues d’une réforme du droit. Plus précisément, elle a recommandé au gouvernement fédéral de chercher, dans le cadre d'une stratégie à long terme, à inscrire dans sa Constitution le droit à un environnement sain et d'adopter, en attendant des mesures provisoires, au moins une loi reconnaissant ce droit. Nous sommes loin de cela aujourd'hui.
L'Association recommandait que soient adoptées des dispositions détaillées sur la participation du public, de même que des dispositions visant à faciliter l'accès des citoyens aux tribunaux civils et criminels, à supprimer les limites imposées par la common law sur la qualité pour agir dans les cas de nuisances, à élargir l'accès des particuliers et des groupes environnementaux, et à multiplier les redressements possibles en cas de dommages environnementaux.
C'était il y a plus de 30 ans. Je remercie d'ailleurs le service de la Bibliothèque du Parlement qui, à la même époque, avait jugé bon et opportun de faire un rapport de recherche à ce sujet. J'invite mes collègues à en prendre connaissance. Comme quoi les gouvernements successifs ont eu amplement de temps pour bien faire. On me permettra donc d'être déçue de la timide mention du droit à un environnement sain dans un préambule.
Nous ne sommes pas tombés dans le panneau. Je pense que personne n'y est tombé.
Comme on le sait, chaque ordre de gouvernement peut adopter des lois pour protéger l'environnement dans la mesure où ces lois se rattachent à un domaine de compétence constitutionnelle de la Constitution de 1867, une compétence concurrente. En 2006, le Québec a modifié le chapitre IV de la Charte des droits et libertés de la personne. Il dit: « Toute personne a droit, dans la mesure et suivant les normes prévues par la loi, de vivre dans un environnement sain et respectueux de la biodiversité. » Contrairement à la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, la Charte québécoise a, dans un contexte politique québécois, une portée quasi constitutionnelle. Nous le voyons: le Québec n'a pas besoin du concours du Canada pour promouvoir et protéger les droits fondamentaux des Québécoises et des Québécois.
Je sais bien que le gouvernement fédéral n'a pas développé l'humilité requise pour reconnaître le mérite politique qui est relié à ce qui précède, ou celui requis pour s'inspirer des politiques publiques progressistes qui ont cours un peu partout dans le monde, et ce, même s'il se qualifie souvent de leader sur à peu près tout et rien en ce qui touche l'environnement. Pourquoi ne pas avoir l'ambition de donner un sens et une portée sérieuse à cette disposition qu'il entend placer dans le préambule?
Depuis 2006, la modification du chapitre IV de la Charte québécoise consacre non seulement un droit fondamental individuel, mais place aussi à l'avant un principe normatif à partir duquel les tribunaux peuvent donner une dimension environnementale à d'autres droits fondamentaux consacrés dans la Charte, y compris les droits à la vie, à la sécurité, à la liberté de la personne, à la vie privée, à la propriété et à l'égalité. Nous en sommes rendus là, à tout le moins au Québec.
Ce qu'il y a devant nous, avec tous les tambours et trompettes et la bannière du droit à un environnement sain, ce n'est même pas le plancher. Le strict minimum serait de le mettre dans le corpus de la Loi.
Comme je l'ai précisé plus tôt, l'ajout de ce droit n'est pas dans la Loi et dans son préambule. Il n'a donc aucune incidence sur les autres lois de compétence fédérale, sans parler du fait que son cadre de mise en œuvre reste fort incertain quant à la rigueur et à l'étendue de son application, eu égard aux articles de la LCPE.
Si le gouvernement était sérieux pour ce qui est de créer un nouveau droit, s'il était vraiment un partenaire aux côtés des États de droits et des démocraties progressistes, s'il prenait la voie de la transparence, s'il avait confiance en l'application de sa loi et s'il était un peu courageux politiquement, il proposerait une ronde de négociations pour vraiment l'inscrire dans la Charte canadienne des droits et libertés. Autrement, cette disposition maintenue en préambule ne changera rien.
Le 13 avril 2022, les partenaires de tous les partis politiques représentés à l'Assemblée nationale du Québec ont adopté une motion affirmant la primauté de la compétence du Québec en matière d'environnement. Unanimement, les élus du Québec s'opposent à toute intervention du gouvernement fédéral en matière d'environnement sur son territoire, le territoire québécois. Le Bloc québécois fait sienne cette position.
Le Bloc québécois souhaite collaborer avec tous les partenaires afin que la Loi abrogée reflète le mieux possible les recommandations des groupes de protection de la santé, de protection de l'environnement, de même que l'industrie et les parties prenantes de différents secteurs industriels sans toutefois perdre de vue le rôle fondamental de cette loi et les priorités suivantes: améliorer la transparence sur l'étiquetage obligatoire; améliorer l'application de la réglementation et assurer des exigences plus strictes en matière d'évaluation de produits pour les importateurs; s'attaquer aux expositions disproportionnées et aux impacts des produits chimiques toxiques sur la santé précisant les effets sur les communautés vulnérables; améliorer la collecte de données de biosurveillance afin de mieux comprendre et traiter les expositions subies par ces communautaires; établir des délais clairs pour l'évaluation des substances et mettre en œuvre des mesures pour traiter les substances jugées toxiques. Ces éléments méritent d'être studieusement analysés par le Comité permanent de l'Environnement et du Développement durable de la Chambre des communes. Je souhaiterais vraiment faire une étude réellement collaborative, une étude où on va prioriser la participation des experts, de ceux qui connaissent cela et non pas un défilé de différents lobbys.
Enfin, comme le dit l'adage « tout travail qui mérite d'être fait mérite d'être bien fait », il serait malheureux, voire irresponsable, de procéder de façon rapide. Cela compromettrait la qualité et la profondeur du travail à entreprendre. Faisons-le sérieusement, mais ne perdons pas notre temps inutilement. Je vais voir à ce qu'il n'y ait pas d'articles ou de dispositions qui puissent être considérés comme des intrusions dans les champs de compétence du Québec et des provinces. Je vais travailler dans la collégialité pour assurer que la Loi révisée sera réellement renforcée et qu'elle permettra au gouvernement fédéral de progresser en matière de protection de l'environnement et de la santé tout en assurant, sans compromis, le respect de la souveraineté environnementale du Québec.
:
Madame la Présidente, cette loi porte principalement sur la protection de l’environnement et de la santé humaine contre les toxines, et sur le maintien de la qualité de l’air et de l’eau. Cependant, tous s’entendent pour dire qu’il est temps que la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, la LCPE, soit considérablement améliorée. D’un côté, la majorité des gens croient qu’il est impossible de la mettre en application dans sa forme actuelle, car il existe de multiples obstacles à son application et les recours ne peuvent pas être utilisés.
La situation a grandement évolué en 23 ans. De nouveaux produits chimiques ont été inventés. Ils peuvent avoir des répercussions sur notre santé. Le public est de plus en plus préoccupé par la santé de notre environnement, ainsi que ses répercussions sur notre santé et celle des populations animales et végétales avec lesquelles nous partageons la planète et desquelles nous dépendons pour notre bien-être. Selon un sondage réalisé en 2017, neuf Canadiens sur dix étaient préoccupés par l’exposition à des toxines se trouvant dans les produits de consommation, 96 % convenaient que les étiquettes devraient divulguer la présence de telles toxines dans les produits de consommation, et 92 % étaient d’accord avec le fait que le Canada devrait reconnaître le droit de vivre dans un environnement sain.
Je souhaite aujourd’hui mettre l’accent sur ce dernier point, c’est-à-dire le droit de vivre dans un environnement sain. On compte 159 pays partout dans le monde qui ont des obligations juridiques quand vient le temps de protéger le droit à un environnement sain comme un droit de la personne. Cependant, le Canada ne dispose pas de telles obligations juridiques. Il existe des chartes des droits environnementaux en Ontario, au Québec, au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut. Cependant, il n’existe pas de loi fédérale qui reconnaît, de manière explicite, le droit de vivre dans un environnement sain au Canada.
Les efforts internationaux déployés pour reconnaître ce droit remontent à la Déclaration de Stockholm de 1972, qui reconnaît le droit à « un environnement dont la qualité lui permettra de vivre dans la dignité et le bien-être ». Cinquante ans plus tard, l’été dernier, le 28 juillet, l’Assemblée générale de l’ONU a adopté une résolution à l’unanimité qui reconnaissait le droit à un environnement sain partout dans le monde. Comme le Canada a voté pour cette résolution, se joignant au reste du monde, et comme 92 % des Canadiens sont d’accord avec eux, il est vraiment temps que nous disposions d’une loi fédérale qui reconnaît ce droit. Je suis heureux de dire que le projet de loi offre un pas dans cette direction.
Le préambule de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement comportera désormais l'énoncé suivant: « [Attendu que le gouvernement du Canada] reconnaît que tout particulier au Canada a droit à un environnement sain, comme le prévoit la présente loi ». Ce n'est pas un mauvais énoncé, mais une telle modification législative comporte des limites. D'abord, comme l'a mentionné la députée de , l'énoncé se trouve dans le préambule de la Loi, où il n'a pas vraiment de poids juridique. En outre, le droit est clairement lié aux dispositions de la loi. Autrement dit, il n'est protégé concrètement qu'en ce qui a trait au contrôle des toxines, à la qualité de l'air et à la qualité de l'eau.
La nouvelle loi prévoirait également que le droit à un environnement sain serait protégé « sous réserve des limites raisonnables », que ces limites seraient précisées dans le cadre de mise en œuvre et qu'elles découleraient de « la considération des facteurs pertinents, notamment sociaux, sanitaires, scientifiques et économiques ». Il est donc important de voir comment on fera respecter ce droit, et il semble que les mécanismes permettant d'y arriver seront précisés, eux aussi, dans le cadre de mise en œuvre du projet de loi.
Bien que le projet de loi semble être un pas en avant dans la reconnaissance du droit de vivre dans un environnement sain, l'absence de mesures facilitant l'application de la loi est préoccupant. En fait, le comité sénatorial chargé d'étudier le projet de loi a déclaré ceci:
Le comité souhaite exprimer sa préoccupation quant au fait que le droit à un environnement sain ne peut être protégé que s’il est véritablement applicable. Ce caractère exécutoire serait obtenu en éliminant les obstacles qui existent au pouvoir de recours actuel prévu à l’article 22 de la LCPE, intitulé « Mesures de protection de l’environnement ». On craint que l’article 22 de la LCPE ne contienne trop d’obstacles procéduraux et d’exigences techniques à respecter pour être d’une utilité pratique. Comme le projet de loi S‑5 ne propose pas l’élimination ou la réévaluation de ces obstacles, le comité craint que le droit à un environnement sain reste inapplicable.
Lors des discussions que j’ai eues avec des avocats en droit de l’environnement émérites au sujet du projet de loi , j’ai été mis au courant d’autres préoccupations, à savoir que le cadre de mise en œuvre prévu dans ce projet de loi ferait en sorte que le gouvernement devrait choisir entre les droits publics et les recours nécessaires lorsque ces droits ne sont pas respectés.
Tout d’abord, je suggère de renforcer le projet de loi en accordant aux résidants du Canada davantage de pouvoirs pour veiller à ce que leur droit de vivre dans un environnement sain soit respecté. Il s’agit d’une des initiatives prévues dans mon projet de loi émanant d’un député, le projet de loi .
Le projet de loi s’intitule Charte canadienne des droits environnementaux, et il fera l’objet de débats plus tard au cours de la présente session. J’aimerais consacrer un peu de temps à ses dispositions, car cette charte suggère de nombreuses façons potentielles d'améliorer le projet de loi , comme il se doit. Je souhaite souligner que le projet de loi a été rédigé par mon ancienne collègue, Linda Duncan, une brillante avocate en droit de l’environnement qui a été députée d’Edmonton Strathcona pendant de nombreuses années. Elle a présenté ce même projet de loi à quatre reprises pendant sa carrière de députée. Le projet n’a jamais été rejeté lors d’un vote. Cependant, malheureusement, il est toujours mort au Feuilleton.
Comme je l’ai mentionné plus tôt, parmi les limites du droit à un environnement sain que propose le projet de loi , il y a le fait qu’il est restreint aux dispositions de la LCPE. Il ne porte pas sur les protections environnementales décrites dans le reste de la législation environnementale fédérale, comme la Loi sur les pêches, la Loi sur les espèces en péril, la Loi sur l’évaluation d’impact, la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs et autres. Le projet de loi offrirait une couverture générale à toutes les lois fédérales qui ne relèvent pas de la LCPE. La LCPE a été exclue du projet de loi pour, semble-t-il, éviter tout conflit entre les lois.
En plus de cette couverture élargie, le projet de loi offrirait des protections plus rigoureuses du droit à un environnement sain. Plus précisément, il accorderait aux résidants du Canada le droit, par exemple, d’accéder à des renseignements sur les préoccupations environnementales, de participer à des audiences, d’avoir accès aux tribunaux pour veiller au respect des droits environnementaux, et de demander un examen des lois. En outre, il protégerait les lanceurs d’alerte.
Pour conclure, je réitère que je soutiendrai le projet de loi lors de sa seconde lecture. Cependant, j’espère que le gouvernement étudiera attentivement mon projet de loi, afin de constater dans quelle mesure celui-ci peut aider aux efforts d'amélioration du projet de loi S‑5 lors des amendements en comité. J’espère également que, si le gouvernement souhaite vraiment accorder le droit de vivre dans un environnement sain à tous les Canadiens, il appuiera mon projet de loi, la Charte canadienne des droits environnementaux, afin d’accorder et de renforcer ce droit dans la législation fédérale.