La Chambre reprend l'étude, interrompue le 13 décembre, de la motion portant que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
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Madame la Présidente, bien que ce ne soit pas ma première intervention au cours de la présente législature, il s'agit de mon premier discours officiel. J'aimerais donc prendre un instant pour adresser quelques remerciements. Représenter les gens de St. Catharines en cet endroit est le plus grand honneur qui m'ait été donné dans ma vie. Je tiens à remercier les électeurs, tous ceux qui m'appuient ainsi que tous ceux qui ont contribué à la campagne.
Nous savons tous que derrière chaque nom qui figure sur les bulletins de vote se cachent des dizaines de personnes qui travaillent dans l'ombre. Malgré nos différences d'opinions, je sais que chacun de nous se présente ici pour travailler dur dans l'intérêt des citoyens de sa circonscription. C'est d'ailleurs ce que je promets de faire pour les gens de St. Catharines.
Les personnes que j'aimerais remercier sont trop nombreuses pour les nommer toutes, mais je tiens à remercier tout spécialement les membres de mon équipe, Sam, Sara, Zack, Romy et Cass, qui m'ont appuyé dans les coulisses. Ils forment une équipe incroyable. Les gens de St. Catharines et moi sommes très chanceux de pouvoir compter sur eux. Je m'en voudrais de ne pas mentionner Alice, une bénévole extraordinaire qui a contribué à ma campagne et grâce à qui nous sommes parvenus jusqu'ici. Je la remercie énormément.
J'ai pu écouter hier une partie des débats à la Chambre. Les échanges m'ont fait penser à une soirée à laquelle j'ai assisté il y a 10 ou 15 ans. Un organisme de santé mentale pour les enfants de notre région y remettait son tout premier prix Hope Award à un membre de la collectivité pour son travail exceptionnel dans le domaine de la santé mentale et de la toxicomanie. Je pense que la lauréate de cette année-là était la Dre Robin Williams, une pédiatre de longue date. Elle était ma pédiatre lorsque j'étais enfant. Elle est ensuite devenue médecin-hygiéniste; elle défend avec passion la cause de la santé mentale, en particulier chez les enfants.
À l'époque, la Chambre des communes débattait de modifications importantes au Code criminel. L'approche voulant qu'on enferme les délinquants et qu'on jette la clé de la cellule s'était malheureusement frayé un chemin, et la Dre Williams s'en inquiétait. Je me rappelle qu'elle est montée sur la scène, a accepté son prix, puis a tourné son regard vers le député conservateur de l'époque. Elle lui a dit: « Je vous supplie de me donner une fraction de ce que vous avez l'intention de dépenser pour bâtir des prisons, et je vous promets de faire baisser le taux de criminalité. Enfermer les délinquants et jeter la clé de la cellule ne fonctionne pas. »
Le député que la Dre Williams a ainsi imploré a plus tard siégé à un comité. Dans l'une des premières études que le comité de la justice a faites après les élections de 2015, nous discutions de la surreprésentation des Autochtones dans les prisons fédérales. Je crois que plus de 20 % des détenus sont des Autochtones, alors qu'ils ne représentent que 5 % ou moins de la population canadienne. J'ai exprimé des préoccupations. Ce même député, lorsqu'il a eu l'occasion de poser des questions à un témoin, a dit que le système fonctionnait: le fait que des gens soient emprisonnés signifiait que le système fonctionnait. Ce n'était pas le cas.
Nous menons la guerre contre la drogue depuis bien longtemps — pratiquement depuis que je suis au monde —, mais nos efforts se sont soldés par un échec. Je crois qu'il n'y a pas un seul député à la Chambre qui peut affirmer que cette aventure a été une réussite en matière de politique publique auprès de n'importe quel ordre de gouvernement, dans n'importe quel pays. Cela m'encourage un peu lorsque je vois enfin des députés conservateurs parler de la crise des opioïdes et d'une ligne de prévention du suicide, dotée d'un numéro à trois chiffres que les gens peuvent appeler, mais il n'y a aucun lien. C'est une excellente initiative, et j'espère vraiment qu'elle sera mise en œuvre sous peu, mais il n'y a aucun lien avec les grands sujets de préoccupation. Il n'y a aucun lien avec le racisme systémique, qui est une réalité. Il n'y a aucun lien avec notre système de justice pénale, où sont surreprésentées les personnes souffrant de problèmes de santé mentale et de troubles concomitants, c'est‑à‑dire de toxicomanie accompagnée de troubles mentaux.
Les députés du Parti conservateur réclament plus de peines minimales obligatoires et soutiennent que ce sont des outils de gouvernance efficaces. Prenons le cas des États‑Unis, qui constituent un véritable laboratoire pour les peines minimales obligatoires. Le Canada a imposé de telles peines, et cela n'a pas fonctionné. Examinons la situation aux États‑Unis, et les députés peuvent choisir n'importe quel État. Cela n'a pas fonctionné. Si les peines minimales obligatoires avaient réellement un effet dissuasif majeur, les États‑Unis seraient le pays le plus sûr du monde. Je crois que personne ici n’est prêt à affirmer cela en ce qui concerne les infractions liées à la drogue ou commises avec une arme à feu. C'est révélateur.
Même des politiciens américains de droite expriment enfin leur insatisfaction. Ce dossier accapare un pourcentage considérable du budget de leur État, et le budget du système carcéral fédéral est en train d'exploser, sans toutefois produire de résultats sur le plan de la sécurité publique. Il faut donc se poser des questions: pourquoi cela ne fonctionne‑t‑il pas, et que se passe‑t‑il? Aux États‑Unis, les juges n'ont souvent aucun pouvoir discrétionnaire, mais je sais qu'au Canada, nous avons un grand respect pour notre magistrature.
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Madame la Présidente, je suis ravi de prendre la parole au sujet du projet de loi , Loi modifiant le Code criminel et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Le projet de loi prévoit des modifications à la détermination des peines ainsi que d'autres modifications qui accorderaient une plus grande marge de manœuvre au système de justice pénale et favoriseraient des sanctions appropriées et proportionnelles aux crimes. Ainsi, les changements proposés permettraient de réduire la surreprésentation des Autochtones, des Canadiens noirs et d'autres personnes marginalisées dans le système de justice pénale, notamment en abrogeant certaines lois sur la détermination de la peine qui, comme il a été démontré, touchent ces groupes de manière disproportionnée.
Je félicite le gouvernement de prendre les devants sur d'importants dossiers comme celui-ci. Des événements survenus récemment nous rappellent que le racisme et la discrimination systémiques sont de véritables problèmes dans le système de justice pénale et que les conséquences de l'inaction sont graves. Nous savons que de nombreux facteurs systémiques contribuent à l'ampleur du problème. Pour éliminer ces facteurs, tous les responsables au sein du système de justice pénale et d'autres structures sociales connexes doivent absolument prendre des mesures délibérées et soutenues. Or, les lois pénales existantes et les règles qu'elles imposent ont d'importantes conséquences sur ce que les intervenants du système de justice pénale peuvent et ne peuvent pas faire. Ces lois ont une incidence sur toutes les personnes qui interagissent avec le système de justice pénale, qu'il s'agisse des accusés, des délinquants, des témoins ou des victimes.
Les réformes apportées par les conservateurs en matière de détermination de la peine ont accru le recours aux peines minimales obligatoires d'emprisonnement et ont restreint davantage la possibilité d'imposer des ordonnances de sursis. Ces changements ont limité la capacité des juges d'imposer des peines correspondant à la gravité des crimes commis. Par surcroît, ils empêchent les juges de vraiment tenir compte des antécédents ou des facteurs systémiques qui ont une incidence sur les Autochtones, les Canadiens noirs et les personnes marginalisées. Or, ces facteurs contribuent aux démêlés de ces populations avec le système de justice pénale.
On ne s'étonnera donc pas de la hausse considérable, au cours des deux dernières décennies, du taux d'incarcération des membres de ces communautés. Par exemple, en 1999, les Autochtones représentaient environ 2 % de la population adulte canadienne, mais environ 17 % des personnes admises dans les établissements correctionnels provinciaux, territoriaux et fédéraux pour y purger une peine. En 2020, les Autochtones adultes représentaient 5 % de la population adulte canadienne mais 30 % des détenus sous responsabilité fédérale. Quant aux femmes autochtones, elles représentaient 42 % de la population carcérale féminine dans des établissements fédéraux.
Dans le même ordre d'idées, en 2018, les Noirs représentaient 7,2 % de la population carcérale fédérale, mais seulement 3 % de la population canadienne. On sait que les Noirs sont également plus susceptibles que les autres Canadiens d'être incarcérés dans un pénitencier fédéral en raison d'une infraction passible d'une peine minimale obligatoire. Service correctionnel Canada a recueilli des données de 2007 à 2017 qui révèlent que 39 % des Noirs et 20 % des Autochtones incarcérés dans un établissement fédéral pendant cette période avaient été accusés d'infractions passibles d'une peine minimale obligatoire. Voilà pourquoi on prévoit que l'abrogation de ces peines minimales obligatoires devrait réduire le taux global d'incarcération des Autochtones et des Noirs.
Les réformes proposées dans le projet de loi se fondent sur de vastes consultations auprès de nombreux intervenants du système de justice et d'autres partenaires à l'échelle du Canada, notamment les procureurs de la Couronne, les avocats de la défense, les communautés autochtones et leurs dirigeants, les universitaires, les défenseurs des droits des victimes, les tenants de la justice réparatrice, les représentants des systèmes de soutien communautaire de première ligne et les représentants des secteurs de la santé, y compris la santé mentale, du logement et d'autres programmes de soutien social.
Le projet de loi donne également suite aux appels à la réforme de diverses commissions d'enquête, notamment la Commission de vérité et réconciliation, l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées et la Commission sur le racisme systémique dans le système de justice pénale en Ontario.
Les parlementaires ont également souligné les effets néfastes des peines minimales obligatoires. Par exemple, dans son rapport provisoire d'août 2016 intitulé « Justice différée, justice refusée », le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles signalait que les peines minimales obligatoires ont eu une incidence négative sur les Autochtones et sur les membres de groupes marginalisés, dont ceux qui avaient des problèmes de santé mentale. De même, dans sa déclaration de juin 2020, le Caucus des parlementaires noirs a demandé la révision et l'abrogation des peines minimales obligatoires ainsi que la suppression des restrictions limitant l'utilisation des ordonnances de sursis.
Le thème commun à tous ces appels à la réforme est la reconnaissance du fait que l'utilisation courante et aveugle des peines minimales obligatoires et les restrictions actuelles du Code criminel quant à l'utilisation des ordonnances de sursis ont eu de nombreux effets négatifs, et que ces effets ont été ressentis de façon démesurée par les peuples autochtones, les Noirs et les membres de groupes marginalisés.
Les peines minimales obligatoires ont également rendu notre système de justice pénale moins efficace et moins efficient. Je crois que ce projet de loi contribuera à rétablir la confiance du public dans le système de justice pénale en accordant le pouvoir discrétionnaire dont ont besoin les juges qui sont chargés de déterminer les peines et qui sont au fait de tous les tenants et aboutissants d'une affaire. Les dispositions proposées leur permettront d'imposer des peines qui répondent aux circonstances particulières d'une infraction et de son auteur.
Le projet de loi atteindra cet objectif important en abrogeant 20 peines minimales obligatoires, y compris celles pour toutes les infractions liées aux drogues et pour certaines, mais pas toutes, infractions liées aux armes à feu. Le projet de loi lèvera également bon nombre des restrictions concernant le recours aux ordonnances de sursis dans les cas où les délinquants ne présentent pas de risque pour la sécurité publique, ce qui permettra à ces derniers de purger leur peine dans la collectivité sous réserve de conditions strictes — comme la détention à domicile ou le couvre-feu — tout en étant en mesure d'avoir un emploi, de suivre des cours et de jouir d'un soutien familial et communautaire, y compris en matière de santé.
La plupart des Canadiens conviendront que les ordonnances de sursis sont un outil de détermination de la peine approprié et qu'elles devraient être mises à la disposition des juges dans les cas qui s'y prêtent. Je m'attends à ce qu'elles soient utilisées dans les cas moins graves, et je suis convaincu que les juges seront en mesure d'évaluer quand il sera approprié de les utiliser.
Enfin, ce projet de loi exigerait que la police et les procureurs envisagent des solutions de rechange aux accusations au criminel pour la simple possession de drogues, comme l'émission d'un avertissement ou l'aiguillage vers des programmes de traitement de la toxicomanie. Ces mesures sont conformes à l'approche du gouvernement visant à traiter la toxicomanie et l'épidémie d'opioïdes au Canada comme un problème de santé plutôt que comme un problème de justice pénale.
J'aimerais conclure en soulignant que je suis conscient que le projet de loi a déjà reçu un large soutien de la part des collectivités et des responsables du système judiciaire au Canada. Certaines personnes sont allées jusqu'à dire qu'il s'agissait de l'un des projets de réforme du droit pénal les plus progressistes présentés depuis de nombreuses années. Comme de nombreuses autres personnes, je crois que ce projet de loi est un pas dans la bonne direction et j'exhorte le Parlement à appuyer son adoption rapide. J'ai hâte d'entendre le point de vue des autres députés.
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Madame la Présidente, aujourd'hui, je ne suis pas vraiment heureux de me lever à la Chambre pour parler du projet de loi
Tout d'abord, il faut rappeler que ce projet de loi est une copie conforme du projet de loi , qui avait été présenté et débattu lors de la dernière législature. Étant donné qu'il y a eu une élection, par contre, on recommence. À tout réfléchir, je ne suis pas malheureux d'être obligé de recommencer parce que, si le projet de loi C‑22 avait été adopté dans son entièreté il y a quelques mois, les peines minimales obligatoires imposées pour plusieurs infractions importantes auraient été réduites. Au moins, on est en mesure aujourd'hui de changer les choses.
Les principales raisons qui m'ont motivé pour devenir député conservateur sont l'ordre public, la défense nationale, la sécurité publique et la bonne gestion économique. C'est plus particulièrement l'approche des conservateurs en matière d'ordre public qui m'a poussé à devenir député conservateur. J'ai été élu pour la première fois en 2015, mais, malheureusement pour ma formation politique, ce sont les libéraux qui ont gagné à ce moment-là et qui gouvernent depuis.
Depuis 2015, nous constatons des changements drastiques et dramatiques dans la façon dont on aborde les questions de sécurité publique, en particulier la protection des victimes, tout en accordant plus de droits aux criminels. C'est très préoccupant.
À ce sujet, j'adresse mes reproches personnels aux libéraux, oui, mais aussi aux néo-démocrates, qui appuient de façon systématique l'approche des libéraux, malheureusement. C'est souvent le cas du Bloc québécois, également. En tant que Québécois, j'ai d'ailleurs souvent du mal à comprendre comment mes collègues du Bloc peuvent adopter une approche très à gauche sur ces sujets, mais cela relève d'un autre débat. En ce qui me concerne, le projet de loi C‑5 offre une approche totalement idéologique et, surtout, incompréhensible.
En effet, voici des exemples de crimes pour lesquels le projet de loi C‑5 diminuera les peines minimales: vol avec arme à feu; extorsion avec arme à feu; trafic d'armes; importation ou exportation d'une arme prohibée; décharge intentionnelle d'une arme à feu; utilisation d'une arme à feu dans la perpétration d'une infraction; possession d'une arme à feu prohibée; possession d'une arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte avec des munitions; possession d'une arme obtenue par perpétration d'une infraction; possession d'une arme en vue d'en faire le trafic; et décharge d'une arme à feu.
Si les Canadiens et les Québécois écoutaient attentivement cette énumération des différents crimes impliquant des armes à feu, la majorité des citoyens diraient que cela n'a pas de bon sens et qu'il n'est pas possible de réduire les peines applicables à de telles infractions. Si les personnes savaient clairement ce qui est débattu aujourd'hui, si on sondait leur opinion, la grande majorité dirait que cela n'a pas de bon sens et qu'il n'y a aucune raison de réduire les peines de criminels commettant de telles infractions. C'est ce que M. et Mme Tout-le-Monde répondraient dans la rue.
Chaque député a bien évidemment le devoir de représenter ses concitoyens, en moyenne 100 000 personnes environ. Les libéraux vont dire que c'est ce que les gens veulent et le NPD va les appuyer. Malheureusement, du côté conservateur, nous sommes en minorité. Cependant, je peux garantir que si on posait la question aux Canadiens, la majorité, c'est-à-dire plus de 50 %, dirait certainement qu'elle est contre de telles mesures.
Il faut aussi rappeler le changement d'attitude des libéraux. En effet, les infractions que je viens de nommer ont été inscrites au Code criminel en 1976 par le gouvernement libéral de l'époque, dirigé par le premier ministre Pierre Elliott Trudeau, père de l'actuel . À l'époque, les notions de gauche ou de droite face au crime étaient très différentes et nous convenons qu'il s'agissait de mesures importantes qui faisaient l'affaire.
Aujourd'hui, plus de 40 ans plus tard, nous essayons de comprendre pourquoi le fils de Pierre Elliott Trudeau possède à ce sujet une optique totalement différente et amène son gouvernement dans une direction dangereuse pour la sécurité publique.
Par ailleurs, dans le projet de loi C‑5, il y a les armes à feu d'un côté, et la drogue de l'autre. Entendons-nous bien: on parle ici de peines pour les trafiquants et non les toxicomanes et les consommateurs de drogue. Il ne s'agit pas du tout de gestion des gens qui consomment de la drogue pour différentes raisons, avec les risques que cela comporte. Il s'agit vraiment des trafiquants, ceux qui vendent, produisent et trafiquent des drogues comme l'héroïne, la cocaïne, le fentanyl et la méthamphétamine en cristaux, ou crystal meth.
À ce sujet, j'aimerais lire un extrait de ce que mon collègue de a dit hier à la Chambre. Je trouve cela intéressant lorsqu'on parle du fentanyl. Il a dit ceci:
Le Canada est présentement aux prises avec une crise des opioïdes. Chaque jour, environ 20 Canadiens perdent la vie à cause d'une surdose d'opioïdes. Ce chiffre a augmenté de 88 % depuis le début de la pandémie. Il y a maintenant 7 000 Canadiens par an qui meurent de cette façon. La solution du gouvernement libéral consiste à supprimer les peines obligatoires pour ceux‑là mêmes qui répandent ce poison dans nos rues, mettent des vies en danger et tuent 20 Canadiens par jour.
C'est cela, l'enjeu principal. C'est cette approche idéologique et philosophique concernant les criminels.
Comme mon collègue de St. Albert—Edmonton l'a mentionné brillamment dans son discours hier, comment les Canadiens peuvent‑ils s'imaginer que l'on cesse d'imposer des peines sévères aux trafiquants de drogue, des gens qui font mourir 20 Canadiens par jour à cause du fentanyl? Comment peut‑on comprendre cela dans une logique de base? Personnellement, cela ne rentre pas dans ma tête ni dans celle de la plupart de mes collègues.
J'aimerais que mes collègues des autres partis, comme le Bloc québécois, et certains libéraux disent que les conservateurs ont raison et que le gouvernement va trop loin avec le projet de loi C‑5.
On ne traite pas le problème de la bonne façon. Comme je le disais, cela n'a rien à voir avec les toxicomanes. En parlant des gens qui consomment pour différentes raisons, plus tôt, une collègue du Bloc québécois disait qu'il fallait plutôt voir le problème en amont. Si on regarde les choses en amont, pour aider les gens qui consomment, il faut s'attaquer aux trafiquants qui apportent la drogue dans les rues et qui font en sorte qu'il y a 20 Canadiens par jour qui en meurent.
Le pire, c'est qu'on dirait que le regarde cela et trouve que c'est correct. On sent qu'il n'y a pas de compréhension et que le gouvernement n'est pas capable de cerner la bonne approche. Si c'était basé sur des faits ou sur une façon de voir les choses qui suscite l'adhésion, cela irait; mais, non, c'est amené comme si c'était une idéologie parfaite. Pour nous, ce n'est pas acceptable.
Rappelons que le projet de loi C‑5 prévoit de diminuer les peines minimales pour des crimes qui mettent en cause l'usage d'une arme à feu. Il me semble qu'on parle depuis plusieurs semaines des armes à feu à Montréal et du trafic d'armes qui transite par les États‑Unis. Des gens font venir des armes d'un peu partout et les vendent sur le marché noir. Des jeunes de 14, 15 ou 16 ans se servent de ces armes dans les rues de Montréal. Le même problème existe à Toronto depuis plusieurs années. Le Québec est maintenant touché alors que le problème est de plus en plus présent à Montréal.
Tandis que les policiers, les juges et le système de justice tentent de trouver une façon de contrôler ce problème, ici, à Ottawa, nous débattons un projet de loi qui dit que, finalement, les trafiquants d'armes n'ont pas de raison de s'inquiéter et que, s'ils sont arrêtés, ils n'auront pas de peine et que cela va bien aller, que s'ils vendent des armes, ce n'est pas grave, que s'ils en achètent et s'en servent, il n'y a pas d'inquiétude à avoir. Le projet de loi C‑5 envoie le message que les trafiquants ne doivent pas s'inquiéter, qu'ils peuvent faire ce qu'ils veulent, qu'ils auront juste une petite tape sur les mains et que cela ne sera pas si grave que cela.
C'est la même chose pour ce qui est de la drogue. Normalement, dans une société de droit où la loi et l'ordre sont importants, quelqu'un qui songe à vendre de la drogue devrait se dire que, s'il se fait attraper, il va se retrouver enfermé pendant un bon moment et qu'il devrait peut‑être y repenser.
Or, l'approche du gouvernement consiste à dire qu'il ne faut pas s'inquiéter, qu'on peut vendre de la drogue aux jeunes et que ce n'est pas grave si 20 personnes meurent par jour. Selon moi, c'est en dehors de toute logique.
Dans le projet de loi, on parle aussi des ordonnances de sursis et des détentions à domicile. C'est comme si on voulait vider complètement les prisons en envoyant les détenus purger leur peine à la maison.
Une longue liste des crimes pour lesquels les peines seraient diminuées a été établie. Il s'agit, par exemple, du harcèlement criminel, des agressions sexuelles, de l'enlèvement d'une personne de moins de 14 ans, de la traite des personnes, d'un vol de véhicule à moteur, d'une introduction par infraction; ce n'est pas rien. Au lieu d'emprisonner ces criminels, on leur dirait de rester à la maison et de se faire des toasts. Ainsi, une personne ayant commis une agression sexuelle pourrait avoir une peine à domicile dans le quartier proche de la victime. C'est tout à fait ridicule.
J'aimerais revenir sur la question des armes à feu. Le mois dernier, les médias nous ont informés que l'équipe intégrée de la GRC chargée de l’intégrité des frontières à Cornwall a ouvert une enquête sur la contrebande d'armes à feu après qu'un bateau eut traversé le fleuve Saint-Laurent pour amarrer près de Cornwall en Ontario. Les criminels ont déchargé du bateau trois gros sacs pour les mettre dans un véhicule et sont ensuite partis. La GRC a fait un contrôle routier et a réussi à les arrêter. Un grand nombre d'armes à feu ont été saisies: des armes à feu prohibées et à autorisation restreinte, ainsi que des chargeurs à grande capacité. Inti Falero-Delgado, un homme de 25 ans originaire de Laval, au Québec, et Vladimir Souffrant, un Montréalais de 49 ans ont été placés en état d'arrestation.
Dans cette situation de trafic et d'importation d'armes, ces deux individus ne recevraient pas de peines minimales conformément au projet de loi . Pour eux, il y aurait peu de danger d'aller en prison; ils encourraient plutôt une peine avec sursis ou, au pire, la possibilité de purger leur peine à la maison. Cela se passe ainsi dans la vraie vie, parce que, dans la vraie vie, le criminel se demande toujours quelles seront les conséquences de son crime.
Les criminels sont au fait des peines que l'on diminue tout le temps. C'est la raison pour laquelle il y a eu une augmentation de 20 % des crimes violents au Canada depuis le changement de gouvernement en 2015. Les criminels qui ont le goût de commettre un crime ou de vivre de la criminalité profitent des mesures que propose le gouvernement. Les grands criminels vont influencer les plus jeunes en leur disant de ne pas s'inquiéter, car le gouvernement du s'est organisé pour que leur situation ne soit pas si pire.
L'autre point que j'aimerais soulever porte sur la notion du racisme systémique qu'on prétend combattre dans le cadre de ce projet de loi. Cela n'a rien à voir de dire que cela a un impact sur les communautés noires et autochtones ou d'autres groupes racisés. Ces groupes peuvent effectivement être surreprésentés en pourcentage dans les prisons, mais la notion de crime ne doit pas être reliée aux races, car cela ne change rien. Peu importe la couleur des personnes, que ce soit des Blancs, des Noirs ou des Autochtones, un crime, c'est un crime. À partir du moment où un crime a été commis avec une arme, la notion de race ne devrait pas intervenir là-dedans. On jette de la poudre aux yeux si l'on prétend que ce projet de loi va combattre le racisme systémique; c'est un faux débat, il n'y a pas de lien.
Il faut voir ailleurs lorsqu'on parle d'incarcération et de surreprésentation. Ce n'est pas en diminuant les peines qu'on va régler ce problème; au contraire, cela va donner plus de latitude à n'importe quel groupe de commettre des crimes puisqu'ils seront moins stressés par la peur d'être incarcérés.
J'ai un exemple très concret à ce sujet. Il y a trois ou quatre ans, le projet de loi avait été présenté pour le contrôle des armes à feu. Je siégeais à l'époque au Comité permanent de la sécurité publique et nationale et c'est moi qui avais demandé aux représentants des groupes autochtones de venir témoigner pour ce projet de loi. Rappelons-nous que c'est le projet de loi C‑71 qui a fait que les propriétaires d'armes doivent maintenant demander un numéro à Ottawa pour vendre une arme ou la transférer à quelqu'un d'autre.
C'est une notion de sécurité publique qui est discutable, mais qui est là et c'est correct. J'ai demandé aux Autochtones de venir nous dire ce qu'ils en pensent. Ils ont répondu clairement que cela ne les concernait pas. La représentante autochtone de la Saskatchewan a répondu clairement qu'il n'était pas question qu'un père qui veut transmettre son arme à son fils selon la tradition aille demander un numéro d'autorisation à Ottawa. Il ne le fera pas.
Ma première réaction a été: qu'on soit Autochtone, Blanc ou Noir, quand on a deux mains et qu'on a une arme à feu dans les mains, il s'agit de sécurité publique. Pour moi, la notion de race n'a rien à voir quand on parle de sécurité publique. Il reste qu'aujourd'hui, à moins d'avis contraire, le projet de loi ne s'applique pas aux Autochtones. J'avais posé la question à l'ancien ministre de la Sécurité publique, mais il n'avait pas su quoi me répondre.
Il s'agit de notions avec lesquelles on veut jouer afin de passer un message d'ouverture dans les médias. Cependant, quand je parle de sécurité publique, j'aime avoir des faits: quiconque a deux mains peut prendre une arme et tirer, la race n'a pas d'importance. Ces notions sont très délicates et je déteste quand les libéraux s'en servent pour essayer de marquer des points politiques et se présenter comme les meilleurs et les plus ouverts sur la planète. Dans les faits, pourtant, ce n'est pas ainsi que cela fonctionne.
Je termine en disant que le projet de loi est un mauvais projet de loi parce qu'il jette de la poudre aux yeux en faisant croire aux Canadiens qu'il va régler le racisme systémique. Or, tout ce qu'il ferait serait d'aider les criminels à être encore plus criminels, sans aider d'aucune façon les citoyens canadiens.
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Madame la Présidente, j’ai l’intention de partager mon temps avec le député de .
[Français]
Je remercie la présidence de m'avoir accordé du temps pour parler du projet de loi .
Les Canadiens veulent un système de justice pénale qui contribue à leur sécurité et réagit rapidement et efficacement face à la criminalité. Ils s'attendent à ce que le système de justice pénale produise des résultats équitables pour tous.
[Traduction]
Malheureusement, nous savons que ce n’est pas le cas pour tous les Canadiens, et ce, pour toutes sortes de raisons, notamment la façon dont les lois pénales sont formulées et appliquées.
Je suis très fière de faire partie d’un gouvernement qui a le courage de reconnaître que notre système de justice pénale et nos lois ne génèrent pas toujours les meilleures solutions pour chaque citoyen, et de prendre les mesures qui s’imposent. De cette façon, nous donnons aux tribunaux et aux décideurs du système la souplesse dont ils ont besoin pour prendre de meilleures décisions pour chacun.
Le projet de loi propose des réformes nécessaires dans trois domaines. Premièrement, il donne aux tribunaux un plus grand pouvoir discrétionnaire pour imposer des peines appropriées en supprimant les peines d’emprisonnement minimales obligatoires pour certaines infractions au Code criminel et pour toutes les infractions à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Deuxièmement, il donne à ces mêmes tribunaux un plus grand pouvoir discrétionnaire pour imposer des peines appropriées en supprimant les restrictions inutiles qui s’appliquent aux peines avec sursis. Troisièmement, il oblige les policiers et les procureurs à envisager des mesures de déjudiciarisation pour la possession simple de drogue, et l’inscription du contrevenant dans un programme de soins.
Dans le cas de la possession simple de drogue, les approches habituelles du système de justice pénale ne fonctionnent pas. Cette nouvelle approche donnera de meilleurs résultats pour les contrevenants et pour la société en général.
Le projet de loi part du principe que les responsables de l’administration de notre système de justice pénale doivent avoir le pouvoir discrétionnaire nécessaire pour lutter contre la criminalité. C’est tout à fait logique puisque c'est le bon exercice de ce pouvoir discrétionnaire qui permet au système de justice pénale de parvenir à des décisions appropriées.
[Français]
La Cour suprême du Canada a souligné à plusieurs reprises que l'exercice adéquat du pouvoir discrétionnaire est nécessaire au bon fonctionnement de notre système de justice pénale. Je suis tout à fait d'accord.
Le projet de loi abrogerait toutes les peines minimales obligatoires de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances relatives à six infractions, ainsi que les peines minimales obligatoires liées à 14 infractions du Code criminel. Ce faisant, le projet de loi redonnerait un pouvoir discrétionnaire aux tribunaux chargés de la détermination de la peine.
Certains diront que cela signifie que les peines pour ces infractions seront désormais plus courtes et que, en abrogeant ces règles rigides de détermination de la peine, nous signalons que ces infractions ne sont pas graves.
[Traduction]
J’estime que les juges imposent des peines en fonction des faits qui leur sont présentés. Une peine appropriée, c’est une peine qui est appropriée dans toutes les circonstances. Si la décision d’un juge est inappropriée, le système d’appel permet de la corriger.
Je suis convaincue que les tribunaux continueront d’examiner ces infractions avec tout le sérieux voulu. Le fait de supprimer les peines minimales obligatoires pour certaines infractions touchant aux armes à feu ne signifie pas que ces infractions sont mineures ou que les tribunaux ne reconnaissent pas leur gravité. Au contraire, les tribunaux de partout au Canada ne cessent d’affirmer que les crimes liés aux armes à feu sont particulièrement graves et qu’ils devraient être traités comme tels. Ils ne cesseront pas de l’affirmer à cause de ce projet de loi: les délinquants qui méritent d’aller en prison continueront d’aller en prison.
Ce qui va changer, par contre, c’est qu’il y aura moins de contestations au titre de la Charte, que les poursuites seront plus rapides et que les peines seront mieux adaptées à la situation de chaque contrevenant. Lorsque les tribunaux auront affaire à des Autochtones, à des Noirs et à des membres de communautés marginalisées, ils pourront tenir compte de la situation du contrevenant avant de déterminer sa peine. J’invite tous les députés à appuyer ces changements.
Dans sa plateforme électorale, le gouvernement s’est engagé à continuer de lutter contre la violence fondée sur le sexe ainsi qu’à combattre la contrebande d’armes à feu avec des mesures qu’il a déjà présentées, comme la vérification des antécédents afin d’empêcher ceux qui ont déjà violenté leur conjointe ou leur partenaire d’obtenir un permis d’arme à feu; la mise en œuvre de lois permettant de retirer les armes à feu des mains de certaines personnes susceptibles d’être des menaces pour elles-mêmes ou pour autrui, notamment pour leur conjointe ou leur partenaire; l’augmentation des peines d’emprisonnement maximales de 10 à 14 ans pour le trafic et la contrebande d’armes à feu; et le renforcement des capacités de la GRC et de l’Agence des services frontaliers du Canada pour lutter contre l’importation illégale d’armes à feu.
Le projet de loi propose également de rétablir le pouvoir discrétionnaire des tribunaux en matière de détermination de la peine en modifiant le régime des ordonnances de sursis. Ces ordonnances ont été créées en 1996 pour offrir aux tribunaux une façon novatrice de condamner les délinquants en leur permettant de purger leur peine au sein de la communauté, dans des conditions à la fois très strictes et susceptibles de favoriser la réadaptation. On s’était rendu compte que l’emprisonnement dans des pénitenciers n’était pas toujours nécessaire, que les Autochtones étaient envoyés en prison plus souvent que les autres, et que cela devait changer.
Le système d’ordonnance de sursis a toujours empêché le recours à ce type d’ordonnance pour les infractions assujetties à une peine minimale obligatoire. Les tribunaux ont toujours eu l’obligation de s’assurer que le fait de purger une peine au sein de la communauté ne posait aucun risque pour la sécurité publique, et la peine devait être inférieure à deux ans d’emprisonnement. Mais avec le temps, les restrictions qui ont été imposées à cet outil en ont diminué l’efficacité et l’ont rendu inutilisable dans des cas de plus en plus nombreux. En supprimant cet outil précieux contre le recours trop fréquent à l’incarcération, on a diminué la discrétion dont disposaient les tribunaux.
Avec les changements proposés dans le projet de loi , le gouvernement corrige la trajectoire amorcée par le gouvernement conservateur précédent, qui consistait à limiter le recours aux ordonnances de sursis, afin que les tribunaux soient mieux en mesure de prendre une décision en fonction des faits qui leur sont présentés. Ces ordonnances de sursis continueront de s’appliquer uniquement lorsque la sécurité publique n’est pas mise en danger. Ce sont là des changements positifs, fondés sur des données probantes, qui amélioreront considérablement la façon dont la justice pénale est administrée.
[Français]
Enfin, j’aimerais aborder brièvement les changements visant la possession simple de drogue.
La crise des opioïdes, qui touche plusieurs communautés du Canada, a braqué les projecteurs sur les méfaits de la toxicomanie. Elle a forcé les collectivités à trouver des solutions novatrices, mais elle a aussi contribué à démontrer qu’une réponse à la toxicomanie par des mesures sanitaires et sociales est beaucoup plus efficace que d’autres moyens, notamment les mesures de justice pénale qui stigmatisent des personnes et créent des obstacles à leur réadaptation.
[Traduction]
Le gouvernement reconnaît depuis longtemps qu’il est nécessaire de renforcer les couplages entre le système judiciaire et les autres systèmes sociaux, comme les soins de santé. C’est exactement ce que le projet de loi propose de faire. Il encourage les policiers et les procureurs, lorsque approprié, à ne pas procéder à des inculpations et à des poursuites en cas de possession simple de drogue et à plutôt envisager d’orienter les délinquants vers d’autres systèmes qui conviennent mieux et qui seront mieux en mesure de s’attaquer aux causes profondes qui ont amené le délinquant, au départ, à avoir affaire avec le système de justice.
Réfléchissons quelques minutes. Au lieu de procéder à des inculpations et à des poursuites, qui peuvent se traduire par une perte d’un emploi, une séparation de la famille et de la communauté et un risque accru de récidive, le système va offrir les aides nécessaires et permettre au délinquant de continuer de travailler et de rester dans sa communauté. Voilà un système intelligent, qui a fait ses preuves, et j’appuie vivement tous ces changements.
[Français]
Les réformes contenues dans le projet de loi sont attendues depuis longtemps et ont été largement appuyées. Je sais que plusieurs personnes auraient préféré que le projet de loi aille plus loin, mais je sais aussi que le a déclaré que ce n’est qu’une étape importante dans un effort plus large pour rendre notre système de justice pénale plus équitable pour tous. Il est essentiel que nous franchissions cette étape maintenant.
Je demande à tous les députés d’appuyer cette importante mesure législative.
:
Madame la Présidente, c’est un réel privilège de me lever aujourd'hui à la Chambre et de discuter du projet de loi . Ce projet de loi propose des mesures législatives qui élimineraient certaines peines minimales obligatoires et donneraient aux procureurs le pouvoir discrétionnaire de traiter la simple possession de drogues comme une question de santé plutôt qu’une question criminelle.
Je veux commencer par souligner ce que je crois être l’aspect le plus fondamental de ce projet de loi qui permet l’indépendance du pouvoir judiciaire dans la détermination de la peine.
Avant de siéger à la Chambre et d’avoir le privilège de servir les électeurs de Kings—Hants, j'étais avocat. Je peux donc dire avec assurance que les circonstances de chaque cas sont généralement différentes. Pour ces raisons, lorsque nous examinons la détermination de la peine, le fait de ne pas permettre aux juges d’utiliser leur pouvoir discrétionnaire me pose problème.
[Traduction]
J’ai eu le privilège d’écouter le débat sur le même projet de loi, au sujet de l’indépendance judiciaire et du pouvoir discrétionnaire des juges, quand la Chambre en avait été saisie au cours de la 43e législature. J’aimerais faire un lien avec ce que j’estime être en général un principe conservateur, à savoir que nous permettons aux décideurs locaux d’utiliser leur pouvoir discrétionnaire lorsque c’est possible. Il s’agit de décentraliser les décisions vers les administrations locales, les gouvernements provinciaux, lorsque c’est possible et nécessaire. Mes amis du Bloc québécois sont sûrement en mesure d’apprécier cette façon de faire, sous l’angle de la dévolution des pouvoirs.
Je vois aussi cela dans le projet de loi. Nous siégeons ici à titre de parlementaires. J’ai entendu le et d’autres députés exposer des circonstances et des causes dont on pourrait s’inspirer pour parler de l’incidence que ce projet de loi pourrait avoir sur la détermination de la peine et les résultats judiciaires. En réalité, personne à la Chambre ne connaît les circonstances particulières d’une cause qui se produira dans trois ou quatre ans. En fin de compte, nous voulons permettre à nos juges, à notre magistrature, de prendre ces décisions et de soupeser les facteurs atténuants et aggravants. Comme je l’ai déjà mentionné, lorsque j’étais avocat, les circonstances variaient toujours d’une affaire à l’autre. Ce projet de loi donne essentiellement à notre magistrature le pouvoir discrétionnaire de prendre ces décisions.
Le député de St. Catharines et a dit plus tôt aujourd’hui que la Cour suprême du Canada avait jugé que les peines minimales obligatoires étaient inconstitutionnelles dans certains cas. La Chambre doit en débattre, mais on sait que ces peines ne permettent pas de réduire la criminalité. J’ai entendu des collègues à la Chambre discuter de la façon dont nous nous attaquons au crime et dont nous pouvons contester certains de ces points. Je suis d’accord pour dire qu’il faut travailler en dehors de ce projet de loi. Le projet de loi à l’étude n’est pas une solution miracle à ce problème, mais il permettrait d’accorder ce pouvoir discrétionnaire aux juges et de réduire les problèmes systémiques auxquels font face les Autochtones et les Canadiens noirs.
[Français]
J’ai mentionné à plusieurs reprises à la Chambre que j’ai le privilège de représenter les trois nations autochtones de Kings—Hants: les Sipekne'katik, les Glooscap, et la nation de la vallée d’Annapolis.
En discutant avec les leaders de ces communautés, j’ai entendu à quel point le système de justice pénale peut être structuré d’une manière qui crée des inégalités, et comment les délinquants primaires peuvent devenir des criminels à vie en passant des années en prison pour simple possession de drogues au lieu de bénéficier de services de réhabilitation ou du soutien nécessaire pour s'en sortir.
[Traduction]
Au lieu d’essayer de réadapter les gens et de tenir compte de certaines circonstances, nous les mettons en prison pour une période minimale, même si les circonstances ne le justifient pas. C’est la réalité.
Une voix: Oh, oh!
M. Kody Blois: Les députés d’en face peuvent exprimer leur point de vue. Je serai heureux de répondre à leurs questions lorsque j’aurai terminé, mais il me reste des choses à dire.
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Madame la Présidente, je serai très heureux de répondre aux questions lorsque j’aurai terminé.
Les statistiques ont été confirmées. Encore une fois, je crois fondamentalement que c’est une question d’indépendance judiciaire et de pouvoir discrétionnaire. Les faits sont très clairs. Cinq pour cent des adultes au Canada sont autochtones. Ils forment 30 % de notre population carcérale dans le cas des hommes, et 42 % dans le cas des femmes; 7,2 % de notre population carcérale est noire, mais les Noirs ne représentent que 3 % de la population du pays. Ce projet de loi est très important pour les collectivités autochtones et les résidants noirs de Kings—Hants.
Ce que j’ai entendu au cours du débat, et c’est peut-être ce que certains députés d’en face auraient voulu dire, c’est qu’« un crime est un crime ». J’entends cela. Un crime est proportionnel. Peu importe les antécédents d’une personne. Au bout du compte, nous devons tenir compte des circonstances qui sous-tendent le comportement. Je reconnais que le crime grave entraîne, comme il se doit, une peine lourde. Mais en même temps, en imposant des peines minimales obligatoires et en retirant le pouvoir discrétionnaire des principes de common law en matière de détermination de la peine, nous ne laissons aux juges aucun pouvoir discrétionnaire d’examiner le meilleur scénario. Il en va de même pour les poursuivants, qui doivent pouvoir tenir compte des circonstances et formuler des recommandations pour assurer la sécurité des collectivités.
Encore une fois, je suis d’accord pour dire que cette mesure ne réglerait pas à elle seule tout le problème. Il faut mettre l’accent sur l’investissement dans les systèmes de soutiens sociaux, dans le logement et dans les loisirs. Tout cela est important pour réduire la criminalité, au sens large, dans les collectivités de tout le pays. C’est important pour créer des défis pour les personnes pour qui il y aurait peut-être de meilleurs programmes et de meilleurs soutiens que le simple fait d’imposer une peine minimale obligatoire.
Je tiens également à mentionner qu’il faut encourager la déjudiciarisation pour la possession simple de drogue. Je sais que nous avons un défi à relever au Canada. Il serait naïf de ma part de dire à la Chambre que les drogues ne sont pas un problème dans Kings—Hants. Elles sont certainement un problème. La crise des opioïdes est souvent mentionnée à la Chambre, surtout par nos collègues de la Colombie-Britannique. Il n’est que raisonnable, dans l’optique du bien commun, d’élargir le pouvoir discrétionnaire de la police pour traiter ces cas comme un problème de santé plutôt que de criminalité, et de veiller à mettre en place ces mesures de soutien.
Je sais que les députés néo-démocrates souhaiteraient que nous allions plus loin. Dans certaines circonstances, le et le travaillent de concert pour donner plus de pouvoirs aux municipalités. Je n’ai pas l’article sous les yeux en ce moment, mais je sais que le gouvernement se penchera sur ces questions dans les prochains jours.
Je ne sais pas combien de temps il me reste, deux ou trois minutes peut-être, mais voici ce que je propose en guise de conclusion.
Je pense que tous les députés de la Chambre conviennent qu’un crime ou une activité criminelle grave doit être puni par une peine sévère et que nous ne devons avoir aucune clémence à cet égard. Nous constatons toutefois que les peines minimales obligatoires prévues ont été, dans certains cas, jugées inconstitutionnelles par la Cour suprême du Canada. Nous savons qu’elles ont des répercussions négatives sur les minorités visibles du pays. Elles empêchent les juges d’exercer leur pouvoir discrétionnaire et d’examiner les circonstances d’une affaire afin de rendre la meilleure décision possible. En fait, de nombreux députés ont dit que les peines minimales obligatoires restreignent en quelque sorte le rôle des tribunaux dans le prononcé des peines et les empêchent d’examiner les circonstances, de tenir compte des circonstances aggravantes et, le cas échéant, d’imposer une peine plus sévère. Les tribunaux se contentent parfois d’imposer la peine minimale, ce qui est également vraiment problématique.
Nous devons faire avancer les choses. Je vais certes appuyer ce projet de loi. Il est raisonnable. Je répondrai maintenant aux questions des députés d’en face.
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Madame la Présidente, c’est un privilège pour moi de prendre la parole à la Chambre au sujet d’un projet de loi qui, en plus d’être attendu depuis longtemps et d’être important pour de nombreux Canadiens, porte sur une question très réelle et profondément importante qui touche toutes les collectivités de notre pays.
Le projet de loi traite de la question des peines minimales obligatoires et de l’initiative du gouvernement de supprimer les peines minimales obligatoires pour un certain nombre de peines prescrites. Il supprimerait les peines minimales obligatoires pour toutes les infractions liées à la drogue en vertu du Code criminel, puis d’autres en ce qui concerne les dispositions relatives au tabac et aux armes à feu.
J’étais à la Chambre lorsque de nombreuses peines minimales obligatoires ont été introduites dans le Code criminel par le précédent gouvernement conservateur de Harper, et notre parti s’est opposé à cette approche à l’époque et nous nous y opposons maintenant. Nous le faisons pour un certain nombre de raisons. Les néo-démocrates s’opposent depuis longtemps à l’imposition de peines minimales obligatoires dans notre Code criminel, sauf pour les crimes les plus graves. Voici quelques-unes des raisons de cette position.
Tout d’abord, il s’agit d’un outil très rudimentaire. Il enlève au juge le pouvoir discrétionnaire d'adapter la peine en fonction des particularités de chaque cas. Il se trouve que je suis avocat de formation et que j’ai passé 16 ans à plaider des causes dans le domaine du travail. Je dirais à la Chambre que chaque affaire qui est présentée devant un juge est unique. Elle concerne des personnes uniques, comporte des circonstances uniques, et se déroule dans un contexte et des conditions tout à fait particulières. L’essence de la justice est d’élaborer une résolution qui convient aux circonstances particulières qui sont présentées à un tribunal.
Les politiciens ne devraient pas condamner des gens depuis cette chambre. Dans notre système de gouvernement, il y a une séparation des pouvoirs: le pouvoir judiciaire est séparé du pouvoir législatif, qui est séparé du pouvoir exécutif, qui est séparé des forces policières. Ce sont des éléments fondamentaux et très importants de notre démocratie moderne.
Je me méfie toujours lorsque des politiciens de la Chambre tentent d’entrer dans les tribunaux du pays pour dire aux juges ce qu’ils doivent faire dans une situation particulière. Les peines minimales obligatoires sont spécialement inappropriées parce qu’elles ont pour but de dire aux juges quelle peine prononcer contre une personne, sans tenir compte de la personne en question ni des circonstances de l’affaire.
Deuxièmement, les peines minimales obligatoires sont régulièrement jugées inconstitutionnelles dans notre pays. Je pense que nous pouvons affirmer sans risque que, dans la plupart des cas, les peines minimales obligatoires ne sont pas conformes à la Constitution ni à la Charte des droits et libertés.
Troisièmement, il est maintenant évident que les peines minimales obligatoires sont un facteur majeur qui contribue directement à la surreprésentation des Canadiens les plus marginalisés, notamment les Autochtones, les personnes racialisées et les pauvres, au sein de la population carcérale.
À titre d’exemple, les Autochtones représentent environ 4,9 % de la population du pays, mais si l’on jette un coup d’œil dans les prisons, on constate que 30 % des détenus sont autochtones. En ce qui concerne les femmes autochtones, il est encore plus choquant de constater que 42 % des femmes incarcérées sont autochtones. L’un des principaux facteurs contribuant à cette situation est le recours aux peines minimales obligatoires.
Enfin, les peines minimales obligatoires ne fonctionnent pas. Les États‑Unis sont le meilleur exemple que je peux donner. Dans le monde entier, c'est aux États‑Unis qu'est emprisonné le pourcentage le plus élevé de la population, mais cela n’a en rien réduit le taux de criminalité ou le taux d’infractions avec violence. S’il était vrai que le recours aux peines minimales obligatoires réduisait la criminalité, il y aurait des preuves empiriques de cela chez notre voisin du Sud, mais il a été prouvé que c’est tout le contraire.
En fait, le Texas, qui est l'un des endroits dans le monde qui répriment le plus sévèrement la criminalité, a déclaré publiquement que les peines minimales obligatoires ne marchent pas. Elles ont eu pour seul résultat que le Texas a mis derrière les barreaux un pourcentage incroyablement élevé de sa population sans faire baisser pour autant la criminalité.
Par conséquent, je suis favorable à cette mesure et j’appuie le projet de loi. Les peines discrétionnaires et la déjudiciarisation sont nettement préférables à des peines minimales obligatoires qui enferment plus de Canadiens, plus longtemps, sans aucun effet positif.
Cependant, ne nous leurrons pas, le projet de loi ne réglera en rien le problème fondamental de notre politique antidrogue. Autrement dit, il ne traite pas la toxicomanie comme un problème de santé, mais comme une affaire de criminalité. C’est justement là que réside le problème de notre politique antidrogue. La toxicomanie est un problème de santé, pas une affaire de criminalité. Il ne s’agit pas de turpitude ou de question de moralité, mais purement et simplement d’un problème de santé. La toxicomanie est une maladie biopsychosociale complexe. Elle résulte d’un comportement compulsif d’origine traumatique. Le trouble lié à la consommation de substances est répertorié dans le « DSM-5 », le manuel de diagnostic qu’utilisent nos professionnels de la santé.
C’est un de ces sujets où je dirai que la population en général est très en avance sur les politiciens de notre pays et, si je puis me permettre, sur de nombreux politiciens à la Chambre. La raison en est que pas une famille, pas une, n’est épargnée par le trouble lié à la consommation de substances. Tout le monde a une mère ou un père, une sœur ou un frère, un oncle ou une tante, un cousin ou une cousine, un grand-parent, sans parler de soi-même, qui connaît ou a connu un problème de consommation de substances, qu’il s’agisse d’alcoolisme ou de toxicomanie. Ces familles savent quelque chose qu’il est important de reconnaître à la Chambre: ces personnes qui souffrent ne sont pas des criminels, mais des malades, des patients, des personnes aux prises avec une maladie.
Le Dr Gabor Maté, qui est, selon moi, une autorité mondiale en la matière, un grand Canadien, estime que les traumatismes sont la cause fondamentale de la toxicomanie. Il a déclaré, après avoir soigné des gens dans le quartier Downtown Eastside de Vancouver pendant de nombreuses années, qu’il n’a jamais soigné personne qui n’ait pas vécu de traumatismes importants dans l’enfance.
Donc, quel est l’effet sur ces personnes qu’on criminalise? Les sanctions pénales sont une façon pour la société d’imposer à des citoyens un traumatisme maximal. Ils sont appréhendés par la police. Ils vivent le traumatisme d’une arrestation. Ils connaissent le contexte très sérieux et intimidant d’un tribunal. Ils sont jugés. Ils vont en prison. Ce système est conçu pour imposer les pressions les plus fortes que la société puisse imposer. Autrement dit, ce que nous faisons quand nous criminalisons la politique antidrogue, c’est traumatiser de nouveau des personnes dont le principal problème est qu’elles souffrent de traumatismes. C’est totalement paradoxal. En fait, c’est cruel et ça ne marche pas.
Si criminaliser la consommation de drogues marchait, nous l’aurions éliminée depuis des années. Nous avons dépensé des milliards de dollars, incarcéré des millions de personnes dans le monde, nui à des dizaines de millions de personnes, tout cela sans résultat. Aujourd’hui, le Canada établit, année après année, des records de décès par surdose d’opioïdes. Chaque année depuis que le gouvernement a été élu en 2015, le taux de mortalité a augmenté. Entre 2016 et 2020, plus de 17 000 Canadiens sont morts. En Colombie-Britannique, on compte 6,5 décès par jour.
Pour conclure, je dirai que les préjugés, la honte et le châtiment sont les principaux problèmes émotionnels des personnes atteintes d’un trouble lié à la consommation de substances et que criminaliser leur comportement accentue la honte et les préjugés. Nous n’avons pas besoin de nous débarrasser des peines minimales obligatoires. En fait, il faut décriminaliser la consommation de drogues, instaurer un approvisionnement sûr, réglementé, avec un minimum de restrictions, et mettre l’accent sur la prévention par la sensibilisation et un traitement sur demande par l'intermédiaire du système de santé public. Nous améliorerons ainsi la politique sur les drogues et la consommation diminuera dans le pays.
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Madame la Présidente, je veux commencer par remercier les électeurs d’Ottawa-Sud. Il s’agit de mon septième mandat consécutif. C’est un honneur et un privilège de représenter cette magnifique circonscription qui brille par sa diversité, où les habitants parlent plus de 82 langues et viennent de plus de 160 pays. J’aime appeler ma circonscription les « Nations unies d’Ottawa-Sud ».
On a déjà consacré beaucoup de temps à la description des objectifs du projet de loi , des réformes proposées et des retombées attendues. J’appuie ces changements, et je crois qu’ils apporteront une contribution positive importante à notre système de justice pénale. Ils contribueront également aux efforts visant à remédier aux effets indéniables et disproportionnés que les lois pénales actuelles ont sur certaines communautés au Canada.
Nous savons que, au Canada et dans d’autres pays, certaines communautés ont davantage de démêlés que d’autres avec le système de justice pénale. Au Canada, l'incarcération disproportionnée des Autochtones et des Canadiens noirs est bien documentée. Les raisons de cette situation sont systémiques, et elles incluent nos lois sur la détermination de la peine. Il est clair pour moi que la question de l'incarcération disproportionnée doit être réglée par une révision des lois actuelles sur la détermination de la peine. C’est exactement ce que le projet de loi propose de faire.
Le Canada n’est pas le seul pays à reconnaître que l’usage accru et sans discernement des peines minimales obligatoires, ou PMO, s’est révélé une approche coûteuse et inefficace de réduction de la criminalité. En effet, de nombreux pays renoncent à cette approche en matière de justice pénale. Bien que les peines minimales obligatoires puissent être une expression vigoureuse de la politique gouvernementale dans le domaine du droit pénal, nous savons qu’elles n’ont aucun effet dissuasif et peuvent avoir des répercussions injustes et inéquitables. La Cour suprême du Canada a été très claire sur ces questions.
Les politiques de justice pénale ne sont pas élaborées en vase clos. Les politiques fondées sur des données probantes s’appuient sur des recherches pertinentes, y compris des études comparatives effectuées dans d’autres pays. En examinant le succès ou l’échec d’une politique, on peut élaborer des réformes qui s’appuient sur des mesures que l'on sait efficaces et corriger ce qui ne fonctionne pas.
Par exemple, si les États‑Unis, tant au niveau fédéral qu’au niveau des États, ont toujours fait grand usage des PMO, de nombreux États se sont orientés vers la réduction ou l’élimination pure et simple des peines obligatoires au cours des 10 dernières années et ils ont particulièrement mis l’accent sur celles qui concernent des infractions sans violence et liées à la drogue. Ces tendances révèlent un changement motivé, entre autres, par la nécessité de s’attaquer aux niveaux élevés d’incarcération et aux coûts sociaux et fiscaux correspondants. On pourrait parler à un législateur californien de ce qu'il en a coûté à l’État de la Californie au cours des dernières décennies.
C’est ce que font des gouvernements de toutes les allégeances politiques aux États‑Unis, et j’encourage tous les partis de la Chambre à reconnaître les véritables effets des PMO et à travailler à l’amélioration de notre système de justice pénale. Aux États‑Unis, certains ont appelé cela le mouvement « smart on crime », autrement dit la lutte intelligente contre la criminalité. Il s’agit d’une approche qui reconnaît la nécessité de s’attaquer aux niveaux élevés d’incarcération des jeunes Noirs et Hispano-Américains, qui subissent des effets négatifs disproportionnés en raison du recours à des lois contenant des peines minimales obligatoires aux États‑Unis, en particulier, comme je l’ai déjà souligné, pour des infractions sans violence liées à la drogue.
Certains ont également fait remarquer que les peines minimales obligatoires encouragent en fait les cycles de la criminalité et de la violence en exposant des délinquants non violents, qui pourraient autrement être des membres productifs de la société, au système carcéral qui encourage la récidive.
Récemment, le président des États‑Unis a indiqué son intention d’abroger les PMO au niveau fédéral, qui relève de sa compétence, et il a incité les États à abroger également leurs peines minimales obligatoires. D’autres pays ont procédé à des changements semblables. Par exemple, en 2014, la France a abrogé certaines PMO, citant principalement des données selon lesquelles le taux de nouvelles condamnations avait plus que doublé entre 2001 et 2011, passant de 4,9 à 12,1 %.
Lorsque l’on examine les tendances dans des pays aux vues similaires, on peut constater un changement de politique clair visant à limiter le recours aux peines minimales obligatoires aux cas les plus graves et à rétablir le pouvoir discrétionnaire des juges lors de la détermination de la peine. Bien que les comparaisons internationales ne puissent pas être la seule perspective à envisager pour élaborer la politique de détermination de la peine au Canada, particulièrement en raison de nos traditions culturelles uniques et de notre diversité, ces comparaisons servent de toile de fond utile pour évaluer la pertinence de nos propres lois en la matière.
À l’heure actuelle, le Code criminel et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances prévoient des peines minimales obligatoires pour 73 infractions, y compris les infractions liées aux armes à feu, les infractions sexuelles, la conduite avec facultés affaiblies, l’enlèvement, la traite des personnes, les infractions liées au commerce du sexe, le meurtre, la haute trahison et les infractions liées aux drogues, comme le trafic, l’importation et l’exportation, et la production de certaines drogues comme la cocaïne et l’héroïne.
Au cours des 15 dernières années, 30 infractions ont été modifiées, presque toutes par l'ancien gouvernement Harper, afin d’augmenter les PMO existantes ou d’en imposer de nouvelles.
J’étais à la Chambre lorsque ces amendements ont été proposés par le gouvernement précédent, lorsqu’ils ont été présentés, et j’ai eu l’occasion d’en débattre à l’époque. Je m’y suis opposé alors, et je m’y oppose encore aujourd’hui. J’ai été particulièrement frappé à l’époque par les preuves qui ont été présentées à la Chambre, produites par la Division de la politique en matière de droit pénal du ministère de la Justice, dont le directeur se trouvait à être un ancien député progressiste-conservateur. Les éléments de preuve produits et présentés par le ministère de la Justice indiquaient que les modifications proposées par le gouvernement d'alors ne donneraient pas les résultats escomptés. Il avait été averti et prévenu, non seulement par les membres de l’opposition de l’époque, mais aussi par un membre du groupe de réflexion du ministère de la Justice.
Le projet de loi renverse cette tendance et, ce faisant, vise à rendre le système de justice pénale plus juste et plus équitable pour tous. Il abrogerait les peines minimales obligatoires pour 20 infractions, y compris celles applicables à toutes les infractions liées aux drogues, ainsi que pour certaines infractions liées aux armes à feu. Il ne s’agit pas d’un signal du Parlement selon lequel les infractions liées aux drogues et aux armes à feu ne sont pas graves et ne méritent pas des peines exemplaires dans les cas appropriés.
Les infractions liées aux armes à feu et aux drogues peuvent être très graves, et je suis persuadé que nos tribunaux sauront imposer les peines appropriées. Le projet de loi , comme je l’ai dit, n’abrogerait pas toutes les peines minimales obligatoires du Code criminel. Ce projet de loi ne propose pas de modifier les peines pour les infractions sexuelles contre des enfants et d’autres crimes sexuels, et la peine obligatoire d’emprisonnement à vie pour meurtre ne serait pas modifiée.
Certains diront que le gouvernement aurait dû supprimer toutes les peines minimales obligatoires. D’autres critiqueront les décisions du gouvernement de réformer les peines minimales obligatoires visées par ce projet de loi. Ce projet de loi est un pas en avant important et équilibré, et je sais que le est toujours prêt à envisager d’apporter d'autres changements à l’avenir.
Malgré les divergences d’opinions quant au rôle des peines minimales obligatoires dans nos lois sur la détermination de la peine, je ne voudrais pas que ces points de vue nous détournent de notre travail, qui consiste à examiner les changements importants apportés par le projet de loi . Nous avons devant nous un bon projet de loi qui a été accueilli favorablement par un large éventail d’intervenants. Il apporterait des changements d’une importance capitale, non seulement dans le domaine des peines minimales obligatoires, mais aussi en ce qui concerne les condamnations avec sursis et la façon dont le système de justice pénale traite la simple possession de drogue.
Je voterai pour ces changements parce que je suis convaincu qu’ils rendront notre système de justice pénale plus équitable et meilleur. Je recommande vivement à tous les députés de tous les partis d'appuyer l’adoption rapide du projet de loi .
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Madame la Présidente, je ne suis pas assis à ma place habituelle, car l’article 17 du Règlement ne s’applique pas. La motion n
o 1 a fait en sorte de le permettre, j’en profite donc.
C’est la première fois que je prends la parole à la Chambre pour une assez longue intervention, même si je me suis déjà exprimé plusieurs fois dans les affaires courantes, notamment, mais je tiens à remercier mes concitoyens, les habitants de Calgary Shepard, de m’avoir fait l’honneur de m’élire pour un troisième mandat à la Chambre des communes. Je suis encore impressionné par cet endroit. C’est la cathédrale de notre démocratie, comme le disait un de mes mentors qui avait été député.
J’ai écouté les interventions de différents députés des deux côtés. Parfois, ils décrivent le contenu du projet de loi et d’autres fois, ils parlent de ses aspirations. Il me semble que les députés ministériels exagèrent un peu avec les aspirations du projet de loi, de même qu’avec les espoirs et les rêves que le gouvernement a mis dans ces mots et dans cette mesure législative.
Le Parti conservateur est souvent appelé le parti de l'ordre public. Nous avons la réputation d’être sévères avec les criminels et de ne pas voir les deux côtés, c’est-à-dire celui du délinquant et celui de la ou des victimes. Ce que j’ai souvent vu chez des députés ministériels, c’est qu’ils se concentrent uniquement sur le délinquant ou l’accusé. Les dispositions du projet de loi ne s’appliquent qu’aux délinquants une fois qu’ils sont arrivés à l’étape de la procédure judiciaire où ils sont reconnus coupables d’un crime et où une peine doit être prononcée. Où est-il question des victimes? Voilà ce qui est absent du texte. C’est ce que diraient bon nombre de mes concitoyens, dont certains ont été victimes d’actes criminels. J'en connais quelques-uns. En fait, des membres de la famille de députés de notre caucus ont été victimes d’actes criminels.
J’ajouterai que, si les députés regardent mes votes antérieurs — et j'en suis à ma troisième législature —, ils verront que je fais partie des députés qui n’ont pas voté en faveur du projet de loi d’initiative parlementaire sur les peines de prison à vie purgées en entier. Le député de s’est lui aussi prononcé contre ce projet de loi. En revanche, j’ai appuyé le projet de loi de Larry Bagnell, que je peux nommer, puisqu’il n’est plus député. C’était un excellent président du comité de la procédure et il a dû y supporter mes 13 heures de manœuvres dilatoires. Je promets de ne pas en faire autant ici.
M. Kevin Lamoureux: Plus jamais, n’est-ce pas?
M. Tom Kmiec: Plus jamais? Il ne faut jamais dire jamais, de ce côté-ci comme de l'autre.
Madame la Présidente, je parlais du projet de loi , que M. Bagnell a présenté à la Chambre. Nous avons eu un vote à l'étape de la deuxième lecture sur son projet de loi d’initiative parlementaire. Quinze conservateurs ont voté en sa faveur. J’étais du nombre parce que je pensais qu’une ordonnance d’évaluation pour les personnes atteintes du syndrome d'alcoolisme fœtal devrait leur permettre d’avoir un traitement spécial devant les tribunaux et que les juges devraient avoir pour instruction d’en tenir compte à la détermination de la peine. Il s’agissait d’une évaluation dans ce cas que je trouvais tout à fait raisonnable.
Si nous regardons comment j’ai voté sur d’autres projets de loi, les députés verront que je suis disposé à examiner les textes proposés et à les juger sur le bien-fondé de leur contenu, pas sur les aspirations qui les sous-tendent. Les juges ne tiennent pas compte des espoirs que nous exprimons à la Chambre pour décrire les projets de loi.
J’ai entendu des députés dire que le projet de loi aidera les Canadiens noirs ou autochtones à être traités comme ils le méritent dans le système judiciaire afin de ne pas se voir infliger des peines trop sévères, mais les mots « race », « racisme » et « racisme systémique » ne figurent pas dans le projet de loi. Un autre député a déclaré que le projet de loi aidera à faire en sorte que les minorités ne soient pas jugées trop sévèrement, mais je ne vois pas ces mots. Les libéraux auraient pu proposer une ordonnance d’évaluation et une obligation pour les juges d’en tenir compte.
À ce propos, les députés libéraux ont demandé plusieurs fois si nous faisons confiance aux juges. Bien sûr que nous leur faisons confiance. Le gouvernement nomme les magistrats pour qu’ils rendent des décisions au nom des Canadiens. Ils doivent prendre en compte les deux parties, c’est-à-dire le délinquant et la victime, et décider de l’issue qui serait équitable et juste pour la société, en incluant une possibilité de réadaptation et une sanction adaptée au crime, afin que les victimes aient également le sentiment que justice a été rendue dans leur cas.
Les libéraux parlent de pouvoir judiciaire discrétionnaire. Que pensent-ils du pouvoir discrétionnaire du ou de celui des provinces? Je me demande comment Jody Wilson-Raybould se sent maintenant en pensant au pouvoir discrétionnaire des juges. Le gouvernement actuel, ici en face, a été impliqué dans une procédure criminelle pour avoir favorisé une partie, alors que pense-t-il de l’idée de permettre aux procureurs généraux d’utiliser leur pouvoir discrétionnaire pour rétablir la justice?
Les députés du gouvernement sont bien hypocrites lorsqu’ils parlent du pouvoir discrétionnaire des juges et de leur capacité de déterminer la peine qui convient. Nous ne parlons pas des procureurs généraux qui donnent des directives à leurs procureurs. Dans notre caucus, nous avons plusieurs procureurs qui ont examiné cela et qui ont utilisé ces articles du Code criminel pour déterminer les peines à imposer.
Bon nombre de nos observations reprennent probablement certains points de l’excellente allocution de notre collègue de sur les mérites de ce projet de loi. Cependant, je trouve incroyable qu'on élimine les peines minimales obligatoires dans les cas de production et de fabrication de drogues énumérées à l’annexe I, surtout de drogues dures comme la cocaïne, l’héroïne, le fentanyl et la méthamphétamine en cristaux.
J’habite dans un quartier de banlieue entièrement composé de maisons unifamiliales, et la plupart d’entre elles se trouvent près d’un hôpital. Il y a à peine quelques années, on a découvert un laboratoire de fentanyl dans mon quartier, dans l’une des maisons situées tout près de Deerfoot Trail. Je crois qu’on y a trouvé deux ou trois millions de comprimés avec des presses à comprimés. C’est très courant à Calgary. Ces laboratoires clandestins se cachent dans des quartiers résidentiels. Ces six dernières années, on a commis deux meurtres dans notre quartier de banlieue si tranquille. Si je me souviens bien, l’un d’entre eux était lié au commerce de la drogue. Je le répète, cela se produit dans toutes les collectivités du Canada. En entendant les nombres quotidiens de décès dus à la consommation d’opioïdes, je suis absolument convaincu que nous faisons face à une crise.
Toutefois, je le répète, le libellé de ce projet de loi ne correspond pas à son contenu. J’y vois une sorte d’assouplissement des peines minimales à imposer aux personnes qui commettent des crimes comme un vol qualifié ou un enlèvement avec une arme à feu. Ce sont des crimes que la plupart de mes concitoyens jugent absolument inacceptables.
Avant qu’on ne m’accuse de ne pas me soucier de ceux qui se retrouvent dans le système carcéral, je vous dirai que dans ma circonscription, nous avons l’hôtel Ogden, un monument historique construit il y a près d’un siècle. Le train du CP passe juste à côté. C’était l’un des premiers hôtels de Calgary. Le pasteur Delaney y dirige la Victory Foundation pour l’église. Cette fondation aide les hommes sortant de prison à se remettre sur pied, à trouver un emploi, à suivre de la formation et à recevoir de l’éducation.
J’y ai pris un café avec d’anciens détenus qui s’efforçaient de reprendre leur vie en main. J’ai chez moi un tableau splendide peint par un homme qui était sans abri et qui s’est retrouvé dans le système carcéral. Il a été condamné, mais selon moi, il est l’un des plus grands artistes de Calgary. Il a peint un wapiti qui se fait attaquer par un couguar. La Victory Foundation l’aidait. J’ai rencontré ces hommes et j’ai discuté avec eux pour mieux comprendre ce qu’ils vivent. Bon nombre d’entre eux affirment qu’ils ont fait du mal à quelqu’un et qu’ils doivent réparer leur méfait.
Examinons cependant les deux facettes de ce débat. Où est la voix des victimes qui veulent un système judiciaire équitable? Si l'on souhaite donner un pouvoir discrétionnaire aux juges, on doit aussi permettre aux procureurs généraux de donner la directive aux procureurs d'engager des poursuites. Nous avons aussi fixé les limites à l’intérieur desquelles les juges doivent rendre leurs décisions, en indiquant le minimum, le maximum et ce qui est raisonnable entre les deux.
Un collègue de notre côté de la Chambre a souligné que les Canadiens s’attendent à ce qu’un crime commis dans l’Est du Canada, par exemple sur la rive sud de Montréal, dans la magnifique région de Brossard, dans le secteur B où j’ai vécu une partie de ma vie, soit traité de la même façon que s’il avait été commis au centre-ville de Calgary. Ce même crime serait examiné de la même façon par les juges, qui détermineraient une peine semblable. Nous affirmons que chaque cas est différent et qu’il comporte des circonstances particulières, mais c’est ce qu’on nous demande de faire ici. Je ne suis pas avocat de profession, alors je ne suis pas encombré par une formation juridique et je peux simplement présenter mon interprétation profane de ce à quoi devrait ressembler le système judiciaire. Je considère cela comme un avantage, mais peut-être que certains avocats ne voient pas les choses de la même façon.
Avant que j’oublie, je voudrais citer un proverbe yiddish à mes collègues: « Quand on balaie la maison, on trouve tout ». J'ai parcouru le projet de loi et j’ai mentionné les aspects fondamentaux du système judiciaire. Or, dans ce projet de loi, j'ai cherché les termes mentionnés par nos collègues, qui espèrent que les délinquants ne seront plus jugés uniquement en fonction de caractéristiques immuables comme la race, mais seulement en fonction des circonstances uniques de chacun. Je suis d’accord, mais ce n'est pas dans ce projet de loi. Il n’y a pas d’ordonnance d’évaluation. Le gouvernement aurait pu s’inspirer d’une idée de notre ancien collègue Larry Bagnell et l’appliquer à ce qui lui tient vraiment à cœur.
Je ne vois pas comment je pourrais appuyer ce projet de loi. Il est identique au projet de loi de la dernière législature, et les députés ministériels savaient que nous n’appuierions pas ce genre de mesure législative. Ils avaient une occasion de régler le problème, mais ils ont choisi de ne pas le faire. Entre le dépôt du projet de loi et la rentrée parlementaire, ils ont raté l’occasion de trouver un consensus à la Chambre en déposant un projet de loi qui aiderait les Canadiens et les victimes de crimes graves.
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Madame la Présidente, j'ai le plaisir de prendre la parole au sujet du projet de loi .
[Traduction]
Le projet de loi propose d’importantes réformes pour réduire la surreprésentation dans les prisons des Autochtones, des Canadiens noirs et des membres des communautés marginalisées.
Je vais consacrer mon temps de parole principalement aux ordonnances de sursis. J’aimerais vous faire part aujourd’hui de mon expérience comme ministre de la Sécurité communautaire et des Services correctionnels et procureur général de l’Ontario. Comme nous le savons tous, l’administration de la justice relève des provinces. Dans mes observations, je vais vous faire part de certaines frustrations que j'ai ressenties, lorsque j’étais au gouvernement provincial, en raison de certains des changements qui ont été apportés sous le gouvernement Harper et auxquels le projet de loi vise à remédier.
Comme nous le savons tous, un système de justice pénale juste et efficace est essentiel pour que les Canadiens se sentent en sécurité dans leur collectivité, qu’ils aient confiance en leur système de justice et qu’ils aient l’assurance que les délinquants sont tenus responsables de leurs actes d’une manière équitable et transparente qui favorise la sécurité publique au Canada. Malheureusement, beaucoup trop de gens sont victimes de discrimination et de racisme systémique à toutes les étapes de notre système de justice pénale. Ce problème a été exacerbé par les politiques de répression de la criminalité, y compris le recours aveugle et généralisé aux peines d’emprisonnement minimales obligatoires et l’ajout de restrictions à la possibilité de recourir à des ordonnances de sursis. Ces restrictions visaient à assurer la sécurité des Canadiens, pour ainsi dire, mais elles ont raté la cible parce que les peines avec sursis ne sont jamais autorisées dans les cas où la sécurité du public est menacée.
Ces restrictions ont empêché les juges d’imposer des peines non privatives de liberté à purger dans la collectivité, même dans les cas où ces peines auraient été indiquées. Cette approche universelle de la détermination des peines ne tient pas compte du fait que les infractions peuvent être commises dans un large éventail de circonstances, avec des degrés de gravité variables. La faute de quelqu’un qui vole pour nourrir sa famille est moins grave que celle de quelqu’un qui vole des biens pour les vendre sur le marché noir. Dans les mesures législatives sur la détermination des peines, les peines universelles ont trop souvent comme point de référence le second exemple, ce qui crée des problèmes dans notre système de justice. Les peines minimales obligatoires vont également à l’encontre du principe fondamental de la détermination des peines, à savoir que les peines doivent être adaptées aux circonstances particulières de l’infraction et au degré de responsabilité du délinquant devant le tribunal.
Le projet de loi constitue un important pas en avant pour offrir des solutions de rechange à l’incarcération, lorsque c'est indiqué, y compris pour les Autochtones et les Canadiens noirs. L’un des éléments importants des réformes proposées consiste en une série de modifications du régime d’ordonnances de sursis qui permettraient de réaliser l’objectif initial de ce régime, à savoir s’attaquer au recours excessif à l’incarcération pour les crimes moins graves.
Pour mieux expliquer l’importance des modifications du projet de loi dans ce domaine, permettez-moi de parler un instant de leur objectif législatif initial. Les ordonnances de sursis ont été promulguées en 1996, et je crois me souvenir qu’Allan Rock était ministre de la Justice à l’époque. Elles ont été adoptées dans le cadre d’une série complète de réformes qui tenaient compte de la nécessité de s’attaquer au taux d’incarcération élevé au Canada, particulièrement en ce qui concerne les Autochtones.
Une ordonnance de sursis permet à un délinquant qui ne représente pas une menace pour la sécurité publique de purger une peine d’emprisonnement de moins de deux ans dans la collectivité, dans des conditions strictes, y compris l'assignation à résidence et l'imposition d'un couvre-feu. La loi régissant les ordonnances de sursis donne aux juges la capacité d’imposer un large éventail de conditions qui concilient le souci de sécurité publique et d’autres objectifs importants, y compris la réadaptation. Par exemple, un juge peut exiger qu’un délinquant suive un programme de traitement approuvé, ce qui peut permettre de s’attaquer aux causes sous-jacentes ayant mené à la perpétration de l’infraction au départ. Cela me semble tout à fait logique. En ma qualité de ministre de la Sécurité communautaire et des Services correctionnels et procureur général de l’Ontario, j’ai étudié cette question, car si un détenu ou un délinquant est condamné à deux ans moins un jour, il se retrouve dans une prison provinciale.
Dans mes fonctions antérieures, j’ai visité suffisamment de prisons en Ontario pour savoir qu’elles ne sont pas les meilleurs endroits où se trouver. Pour une personne aux prises avec un problème de toxicomanie ou de santé mentale, la prison n’est pas un endroit où elle pourra obtenir les bons soins, par rapport à la collectivité. Les données probantes montrent que le fait de permettre aux délinquants qui ne posent pas de risque pour la sécurité publique de purger leur peine dans la collectivité dans des conditions strictes, tout en maintenant l’accès à des systèmes de soutien liés à l’emploi et à la santé, est beaucoup plus efficace que les peines sévères comme l’incarcération pour réduire la criminalité en aval.
En fait, les données recueillies après l’adoption initiale des ordonnances de sursis appuient cette conclusion. Au cours des premières années de la mise en œuvre des ordonnances de sursis, les taux de récidive ont été réduits et le taux d’incarcération a diminué de 13 %. Les modifications au Code criminel adoptées par les gouvernements conservateurs en 2007, dans le cadre de l’ancien projet de loi , et en 2012, de l’ancien projet de loi , ont depuis restreint sensiblement le recours aux ordonnances de sursis. On ne peut plus y avoir recours pour toutes les infractions faisant l’objet d’une poursuite par voie de mise en accusation et pour lesquelles la peine maximale d’emprisonnement est de 14 ans ou à perpétuité, ainsi que les infractions passibles d’un emprisonnement maximal de 10 ans si elles ont causé des lésions corporelles ou ont mis en cause la drogue ou l’usage d’une arme. Les réformes ont également introduit une liste d’infractions inadmissibles au régime des ordonnances de sursis, y compris pour les crimes non violents contre les biens.
En raison de ces restrictions, le recours aux ordonnances de sursis a été sensiblement réduit. Les données de Statistique Canada montrent que le nombre d’ordonnances de sursis a diminué, passant de 11 545 en 2004 à 7 022 en 2018. Des études ont également démontré que ces restrictions ont eu des répercussions négatives disproportionnées sur les Autochtones. Elles ont également entraîné une augmentation du nombre de contestations fondées sur la Charte et de demandes de réforme.
Le projet de loi ramènerait le régime des ordonnances de sursis au modèle qui existait avant les modifications de 2007, tout en veillant à ce qu'on ne puisse recourir aux ordonnances de sursis dans le cas des infractions suivantes: encouragement au génocide, torture et tentative de meurtre, ni dans le cas d'infractions de terrorisme et d’organisation criminelle qui sont poursuivies par voie de mise en accusation et pour lesquelles la peine d’emprisonnement maximale est de 10 ans ou plus. On ne pourrait pas non plus recourir aux ordonnances de sursis dans le cas d'une infraction assortie d’une peine minimale obligatoire. Les ordonnances de sursis deviendraient donc applicables à toutes les autres infractions pour lesquelles le juge qui prononce la peine détermine qu’une peine d’emprisonnement de moins de deux ans est appropriée, à condition que le tribunal soit également convaincu que l’imposition d’une ordonnance de sursis ne mette pas en danger la sécurité publique et soit conforme à l’objectif et aux principes fondamentaux de la détermination de la peine.
Cette approche permettrait aux juges chargés de la détermination de la peine d’envisager toutes les sanctions possibles autres que l’emprisonnement pour l'ensemble des délinquants, conformément au principe de modération de la détermination de la peine, qui exige que les tribunaux prennent en compte toutes les sanctions autres que l’emprisonnement qui sont raisonnables dans les circonstances, en accordant une attention particulière aux antécédents des délinquants autochtones. Ces modifications établissent un juste équilibre entre la garantie de solutions de rechange à l’incarcération, le cas échéant, et la reconnaissance de l’importance de la sécurité publique dans le cas d'infractions graves.
Cette loi est une étape clé dans les efforts continus du gouvernement pour transformer le système de justice pénale. J’applaudis le gouvernement d'avoir proposé des réformes qui aligneraient les ordonnances de sursis avec l’intention initiale du Parlement, une approche qui, selon les données, contribuerait directement à réduire la surreprésentation des Autochtones, des Canadiens de race noire et des membres des communautés marginalisées dans le système de justice pénale, et offrirait davantage de possibilités de réadaptation et de meilleure réintégration lorsque ce serait possible.
Voilà le genre de mesures que nous demandions au gouvernement fédéral de prendre, lorsque j’étais procureur général de l’Ontario. Je suis ravi de voir que cela se fait dans le cadre du projet de loi . Je suis également ravi de pouvoir parler, dans mon nouveau rôle de député, de ce projet de loi et de l’appuyer. J’invite les autres députés à voter pour cette mesure.
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Madame la Présidente, c’est la première fois que je peux participer à un débat à la Chambre des communes au cours de la 44
e législature et j’aimerais commencer par remercier quelques personnes.
Tout au long de ma carrière, j’ai été fonctionnaire et c’est un honneur pour moi de servir une fois de plus les bonnes gens de Kootenay-Columbia. Les 20 derniers mois ont été difficiles. Nombreux sont ceux qui ont répondu à l’appel pour venir en aide à leurs concitoyens, et ils l’ont fait discrètement et sans que ce soit reconnu. Aujourd’hui, je veux rendre hommage à l’un de ces groupes. Je tiens à exprimer ma sincère gratitude aux employés de la circonscription et du personnel de la Colline qui ont travaillé sans relâche dans des circonstances difficiles pour soutenir diligemment chaque député et les électeurs que nous servons.
Il n’y a pas de parcours jusqu'à l'élection à la Chambre, qui ne comporte pas un énorme soutien de la famille. Aujourd’hui, j’aimerais prendre un instant pour remercier mon épouse, Heather, pour son engagement envers notre famille et la démocratie, et pour son appui indéfectible du travail que je fais ici pour les habitants de Kootenay-Columbia et, en fait, tous les Canadiens. La poursuite du bien commun s’accompagne toujours de sacrifices. Je suis si fier d’être le bénéficiaire de son amour et de son soutien.
Aujourd’hui, nous allons parler des peines minimales obligatoires dans le cadre de la discussion sur le projet de loi . J’aimerais commencer par remettre les pendules à l’heure. Les collègues d’en face ont encore une fois pris une loi sérieuse et l’utilisent comme un outil de division politique. Ils ont créé une belle histoire pour eux-mêmes, laissant entendre qu’ils travaillent dur pour défaire les peines minimales obligatoires des conservateurs, alors qu’en fait, la majorité des peines minimales obligatoires que le projet de loi C-5 vise à éliminer s’appliquent à des infractions liées aux armes à feu qui ont été adoptées par les gouvernements libéraux précédents.
Pour ceux qui écoutent à la maison, le projet de loi , présenté par le gouvernement, prévoit l’élimination des peines minimales obligatoires pour les criminels qui commettent des infractions avec une arme à feu, y compris, mais sans s’y limiter, l’utilisation d’une arme à feu lors de la perpétration de l’infraction, le trafic d’armes et le vol qualifié commis avec une arme à feu. Le gouvernement préfère renvoyer chez eux les criminels qui commettent de telles infractions.
Le projet de loi me touche de près, tant sur le plan personnel que, bien sûr, sur le plan professionnel, car j’ai servi sur les lignes de front de la guerre contre la drogue et j’ai eu affaire à des délinquants violents tout au long de ma carrière. Ce que je sais être la vérité absolue, c’est qu’il est difficile de trouver des solutions à de gros problèmes comme ceux que nous abordons aujourd’hui sans entendre les victimes. J’ai côtoyé des parents qui ont perdu un enfant à cause d’une surdose et j’ai effectué des enquêtes qui ont mené à l'arrestation des criminels les plus violents. J’ai une expérience directe de ces questions et je vois un écart clair et grandissant entre ce que prévoit ce projet de loi et les objectifs que nous devons atteindre pour apporter des changements.
Bien que nous venions à la Chambre avec des points de vue différents, je crois que tous les députés ont le désir de faire ce qu'il y a de mieux pour les Canadiens. Je veux être clair avec mes collègues d’en face. S’ils veulent du changement, ce n'est pas ce projet de loi qui leur en donnera. En fait, d’après mon expérience, le projet de loi nous éloignera encore plus de notre objectif commun de créer des collectivités plus sûres.
Les Canadiens doivent connaître la position des conservateurs et je veux être très clair à ce sujet. Les prédateurs violents condamnés, ceux qui s’attaquent à l’innocence de nos filles et de nos fils, méritent d’être en prison et non dans le confort de leur propre maison. Pourtant, le gouvernement semble politiquement déterminé, au détriment de la sécurité des collectivités, à envoyer ces criminels en vacances dans leur cour arrière.
Par le biais du projet de loi , le gouvernement cherche également à éliminer six peines minimales obligatoires de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances qui visent les trafiquants de drogue. Il s’agit du trafic ou de la possession en vue du trafic; de l’importation, de l’exportation ou de la possession en vue de l’exportation; et de la production d’héroïne, de cocaïne, de fentanyl et de méthamphétamine en cristaux. Les messages du gouvernement lui-même laissent croire aux Canadiens qu’il ne fait qu’aider ceux qui luttent contre la toxicomanie. Le ministre omet de souligner que les peines minimales obligatoires qui sont éliminées ciblent les criminels qui s’en prennent aux toxicomanes. Il y a beaucoup trop de Canadiens qui luttent contre la dépendance. Au lieu d’être axé sur l’élimination et la réduction des conséquences pour les criminels, le projet de loi devrait plutôt offrir l’aide dont ont si désespérément besoin ceux qui souffrent de dépendance.
Mes collègues conservateurs et moi-même sommes convaincus que les personnes aux prises avec une dépendance doivent être la priorité et recevoir l’aide nécessaire. Nous faisons face à une épidémie d’opioïdes dans tout le pays et la situation est encore plus grave en Colombie‑Britannique. Beaucoup trop de parents et de proches reçoivent l’appel téléphonique redouté, où ils doivent faire face à la réalité brutale que leur enfant a subi une surdose.
J’aimerais prendre un moment pour aborder la question de la consommation de drogues et du rétablissement. Le chemin de la guérison, dont j’ai l’expérience professionnelle et personnelle, est très difficile et constitue un engagement à long terme. Une prévention du crime efficace commence par nos jeunes et doit se poursuivre tout au long de leur vie. Les programmes d’éducation peuvent être efficaces s’ils sont offerts au bon moment. Cependant, en ce qui concerne la dépendance aux opioïdes, par exemple, les efforts et le succès prennent des années. Nous savons que le système actuel n’est pas efficace et qu’il faut le changer, mais nous avons besoin d’une approche qui soit une solution positive pour la réadaptation, une approche conçue pour aider ceux qui sont dépendants, au lieu d’aider ceux qui profitent de la dépendance.
Compte tenu du déclin de la santé mentale et de son lien avec la question dont nous parlons aujourd’hui, j’aimerais profiter de l’occasion pour me joindre à mes collègues et demander au gouvernement de s’engager à fixer une date pour la mise en œuvre du financement de la ligne d’assistance nationale à trois chiffres, adoptée à l’unanimité au cours de la 43e législature. Le gouvernement doit aux Canadiens d’activer cette ligne et de créer une mesure législative judicieuse qui servira réellement à rendre nos collectivités sûres. Nous avons demandé hier une date pour l’activation du 988, mais nous n'avons pas eu de réponse.
Contrairement à ce que prétend le , le projet de loi qui nous intéresse ne vise pas à réduire les peines minimales obligatoires pour la possession simple, car ces peines minimales n’existent pas. Le projet de loi ne ferait donc rien à ce sujet. Il éliminerait plutôt les peines d’emprisonnement obligatoires pour les trafiquants de drogue qui commettent des actes de violence. Il permettrait à des criminels qui ont commis des actes violents de purger leur peine en détention à domicile plutôt qu’en prison, ce qui mettrait nos collectivités en danger. J’aimerais vraiment savoir qui le gouvernement a consulté. A-t-il parlé aux victimes?
Le crime organisé et les gangs s’en prennent à nos jeunes. La fillette de 12 ans d’un de mes amis a été abordée dans la cour d’une école primaire par le membre d’un gang qui l’a amenée à consommer de la méthamphétamine en cristaux. À l’âge de 13 ans, la jeune fille avait volé la plupart des objets de valeur de sa famille pour financer sa dépendance. La bande criminelle organisée l’a forcée à se prostituer. Envisager de réduire les peines minimales pour les membres de ces gangs n’est pas une solution.
Le affirme que le projet de loi a pour objectif de s’attaquer à la surreprésentation des Autochtones et des Canadiens noirs dans nos prisons. Selon un article publié récemment dans The Globe and Mail, le projet de loi n’atteindrait pas cet objectif. L’article indique que pour un projet de loi qui porte soi-disant sur la justice raciale, toutes les dispositions qu'il contient sont entièrement neutres sur le plan racial. Depuis près d’un an, le gouvernement affirme que les peines minimales obligatoires choisies touchent de manière disproportionnée les Noirs et les Autochtones, mais il n’a fourni aucune preuve permettant de penser qu’elles permettront de remédier véritablement à cette surreprésentation.
Le projet de loi maintient les peines minimales obligatoires les plus sévères, ainsi que leurs effets brutaux sur les femmes autochtones, en particulier. Selon le document intitulé Aperçu statistique: Le système correctionnel et la mise en liberté sous condition publié en 2019 par le de l’époque, près de la moitié des femmes condamnées à des peines obligatoires d’emprisonnement à vie sont autochtones et la plupart ont agi dans un contexte de légitime défense après avoir subi de mauvais traitements et des traumatismes pendant toute leur vie. Il est clair que ces femmes sont des victimes et ne représentent pas un grand risque pour la sécurité publique au Canada, et pourtant le projet de loi C‑5 continuerait à leur imposer les peines les plus sévères au pays. Tous les Canadiens méritent un système de justice pénale plus équitable et plus juste. Nanaimo, en Colombie‑Britannique, a un programme de justice réparatrice très efficace. C’est sur ce point que nous devons nous concentrer dorénavant.
Nous sommes en droit de nous demander qui le gouvernement a consulté au sujet de cette mesure législative et si ces voix sont représentées dans la forme actuelle du projet de loi. Je m’interroge également sur sa compréhension de l’application de la loi, car le projet de loi ajoute à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances un ensemble de principes que les agents de la paix et les procureurs devraient utiliser pour déterminer s’ils doivent porter des accusations de possession. Le savait sûrement que les policiers disposent déjà de la souplesse nécessaire à cet égard.
Les conservateurs sont très préoccupés par la proposition du gouvernement de permettre aux criminels de purger leur peine en détention à domicile plutôt qu’en prison pour un certain nombre d’infractions, notamment les agressions sexuelles, la traite des personnes et les enlèvements. Ce projet de loi mettrait en danger les collectivités et les victimes.
En conclusion, je demande à tous les députés de la Chambre de réfléchir au résultat concret qu’ils obtiendront en choisissant de faciliter la vie des délinquants violents et des trafiquants de drogue. Il semble évident que nous devrions plutôt tenir ces criminels responsables de leurs actes et nous concentrer sur la création d’une mesure législative constructive qui aiderait les victimes et les personnes souffrant de dépendance afin de rendre nos collectivités plus sûres.
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Madame la Présidente, comme c’est la première fois que je prends la parole pour prononcer un discours de cette longueur, je voudrais prendre un moment pour remercier les gens. Tout d’abord, je remercie les résidants de Kitchener-Centre de m’avoir fait confiance pour les représenter à la Chambre, ainsi que les centaines de personnes qui se sont jointes à nous pour frapper aux portes et faire des appels téléphoniques. En particulier, il y avait un noyau solide: Jackie, Devon, Ros, Joanna, Janet, Zoe, Scott, Wayne, Noah, Greg, Brenden et Jenna. Je tiens également à remercier tout particulièrement Mats pour tout le travail accompli au cours des trois dernières années, et bien sûr Asha, qui a géré les deux campagnes. Je ne serais pas là sans eux.
Je remercie enfin ma mère, mon père, mes frères Brad et Rob, et ma sœur Emily. Ils m'ont accompagné à chaque étape du processus, y compris en frappant aux portes et en faisant des appels, ce qui m’a permis d’avoir le privilège de parler dans des moments comme celui-ci, dans cette enceinte, des priorités de notre communauté.
Cela m’amène au projet de loi . J’aimerais commencer par ce que j’aime bien dans ce projet de loi, à savoir l’objectif déclaré de s’attaquer au racisme systémique dans le système de justice pénale du Canada. En ciblant les peines minimales obligatoires, je reconnais que le gouvernement cherche à remédier au fait qu’en 2020, bien qu’ils représentaient 5 % de la population adulte canadienne, les adultes autochtones représentaient 30 % des détenus dans les établissements fédéraux; que la proportion de délinquants autochtones admis pour une infraction passible d’une peine minimale obligatoire a presque doublé entre 2007-2008 et 2016-2017, passant de 14 à 26 %; et, enfin, qu’en 2018-2019, les détenus noirs représentaient 7 % des délinquants sous responsabilité fédérale, mais seulement 3 % de la population canadienne.
Je reconnais l’intention du gouvernement de s’attaquer à ces injustices en supprimant les peines minimales obligatoires visées par ce projet de loi. Cela dit, nous devons être honnêtes avec nous‑mêmes. Les peines minimales obligatoires ne dissuadent pas le crime, et toutes les peines minimales obligatoires contribuent au racisme systémique. Cependant, le projet de loi , dans sa forme actuelle, vise moins d’une peine minimale obligatoire sur cinq dans son intégralité, c’est-à-dire seulement 13 sur 73, moins du tiers en tout ou en partie, ou 20 sur 73, et seulement 10 des 28 que les tribunaux ont déjà jugées inconstitutionnelles.
De cette façon, il semble raisonnable d’évaluer ce projet de loi comme une demi-mesure. Je suis ici depuis un peu plus de trois semaines seulement et j’entends souvent le mot « réconciliation ». À ce sujet, j’aimerais lire l’appel à l’action no 32 de la Commission de vérité et réconciliation, qui déclare ce qui suit:
Nous demandons au gouvernement fédéral de modifier le Code criminel afin de permettre aux juges de première instance, avec motifs à l’appui, de déroger à l’imposition des peines minimales obligatoires de même qu’aux restrictions concernant le recours aux peines d’emprisonnement avec sursis.
Je souligne, en particulier pour les députés dans cette enceinte qui disent appuyer chacun des appels à l'action, y compris, je présume, l'appel à l'action no 32, que cela ne veut pas dire une peine sur cinq.
J'aimerais aussi lire l'appel à la justice no 5.14 de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, qui prévoit ce qui suit:
Nous demandons à tous les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux d’évaluer de manière approfondie les répercussions des peines minimales obligatoires en ce qui concerne les peines prononcées et l’incarcération excessive des femmes, des filles et des personnes autochtones 2SLGBTQQIA et de prendre les mesures qui s’imposent pour remédier à leur incarcération excessive.
J'ai écouté les propos des députés qui s'inquiètent de la criminalité, dont ceux du dernier intervenant dans cette enceinte. Soyons clairs: éliminer les peines minimales obligatoires veut dire faire confiance, comme il se doit, à la magistrature.
Même sans peines minimales obligatoires, les juges chargés de la détermination de la peine auront encore l'obligation d'imposer une peine proportionnelle au degré de responsabilité du contrevenant et de la gravité de l'infraction, en considérant toutes les circonstances aggravantes ou atténuantes. Il s'agit notamment du risque pour la sécurité publique. Il s'agit aussi de la personne même et de toutes les circonstances pertinentes de l'affaire devant eux, y compris le fait de reconnaître et de réparer les torts causés par le colonialisme et le racisme systémique dans la vie des peuples autochtones, des Canadiens noirs et des groupes racialisés.
Enfin, je dirais que ce projet de loi passe à côté d’une belle occasion, en ce sens que, même après l’abolition des peines minimales obligatoires, des gens de tout le pays se retrouveraient encore en prison pour possession simple de drogues illicites et continueraient de mourir à cause de leur dépendance aux drogues et d’un approvisionnement dangereux. Nous continuerions d’appliquer le concept dépassé de la consommation de drogues, qui date des années 1980, plutôt que de suivre les conseils très clairs des experts de la santé publique, y compris de l’Association canadienne des chefs de police, que nous avons devant nous. Ces conseils sont de décriminaliser les drogues illicites, d’offrir un approvisionnement sécuritaire réglementé, et de traiter le problème comme la crise de santé mentale et de toxicomanie qu’il est.
Jusqu’ici cette année, dans ma seule collectivité, un approvisionnement en drogues empoisonnées a coûté la vie à 120 personnes. Depuis janvier 2016, à l’échelle du pays, nous avons eu plus de 25 000 décès évitables. C’est pourquoi j’appuie les demandes faites par d’autres députés, qui encouragent le ministre à renvoyer ce projet de loi au comité avant la deuxième lecture pour que sa portée puisse être étendue à la décriminalisation.
Je terminerai en soumettant deux considérations au gouvernement. La première est de songer à accroître le nombre de peines minimales obligatoires à abroger afin de donner suite à l’intention déclarée du gouvernement de s’attaquer au racisme systémique. La deuxième est de songer à offrir des preuves claires que le fait d'abroger la faible fraction des peines minimales obligatoires figurant dans le projet de loi réduirait effectivement la surreprésentation des Noirs et des Autochtones dans nos prisons fédérales.
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Madame la Présidente, c’est vraiment un plaisir pour moi de parler de ce projet de loi aujourd’hui. Il est désolant de voir l’approche laxiste du gouvernement à l’égard de la criminalité déjà se manifester dès la première occasion.
Le projet de loi est malheureusement l’exemple parfait de cette approche. Il ne ferait rien pour rendre les collectivités du pays plus sûres pour les Canadiens. Au contraire, il réduirait les peines des trafiquants de drogue et des auteurs de crimes violents commis au moyen d’armes à feu et ne tiendrait pas ceux-ci responsables de leurs actions. Ce projet de loi ferait en sorte que les individus qui ont causé des torts à nos collectivités purgeraient leur peine au sein des collectivités, aux côtés des victimes, plutôt qu’en prison comme ils le devraient.
Le projet de loi éliminerait un grand nombre de peines minimales obligatoires pour certains des crimes les plus graves, comme commettre un vol qualifié avec une arme à feu, se livrer au trafic d’armes, décharger délibérément une arme à feu et commettre une extorsion avec une arme à feu. Ce ne sont là que quelques-uns des crimes pour lesquels il n’y aurait plus de peines minimales obligatoires. Il ne fait aucun doute que ce projet de loi, s’il est adopté, n’accroîtra aucunement la sécurité des collectivités canadiennes.
Les crimes visés par ce projet de loi sont des infractions incroyablement graves. Les Canadiens seraient alarmés d’apprendre que les peines d’emprisonnement minimales obligatoires pour la possession d’une arme à feu non autorisée, la possession d’une arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte, la possession d’une arme obtenue lors de la perpétration d’une infraction et la possession d’armes en vue d’en faire le trafic se verraient toutes réduites par ce projet de loi.
Le gouvernement doit penser que les Canadiens manquent de bon sens s’il pense leur faire croire que ce projet de loi mettra fin aux crimes commis avec des armes à feu en réduisant les peines d’emprisonnement minimales obligatoires pour les criminels. Les libéraux affirment que ce projet de loi aide les personnes aux prises avec une dépendance à trouver le traitement dont elles ont si désespérément besoin. Les Canadiens qui luttent contre la toxicomanie devraient pouvoir avoir accès à des traitements. Mais au lieu de cela, ce projet de loi éliminerait les peines d’emprisonnement obligatoires pour les criminels qui font le trafic et importent ou exportent les substances mortelles inscrites à l’annexe 1 ou 2.
Soyons clairs: les libéraux proposent de laisser les trafiquants et les fabricants de drogues s’en tirer à bon compte, tout en prétendant que cela aidera les personnes qui souffrent de toxicomanie. La pandémie nous a montré à quel point la crise des opioïdes est grave dans certaines régions du pays. C’est maintenant que nous devrions sévir contre ceux qui empoisonnent nos collectivités. La solution des libéraux consiste cependant à supprimer les peines d’emprisonnement obligatoires pour ceux qui alimentent cette crise.
Nous avons entendu un représentant du gouvernement déclarer que le projet de loi permettrait de se débarrasser des peines minimales mises en place par les méchants conservateurs. Bon nombre de ces lois ont été mises en place au milieu des années 1990, lorsque Pierre Elliott Trudeau était premier ministre, par le gouvernement libéral de l’époque. Il est un peu exagéré de voir les libéraux blâmer les conservateurs pour les lois d’un gouvernement libéral précédent.
Les libéraux essaient de convaincre les Canadiens qu’ils aident les toxicomanes et les collectivités, mais en réalité, ils cherchent à réduire les peines et à dégager de leur responsabilité ceux qui fabriquent des drogues et qui en font le trafic, alimentant ainsi la criminalité, la toxicomanie et les taux de décès au milieu d’une crise qui fait rage dans toutes les collectivités du pays. Au lieu de punir les gangs, ils tentent de sévir contre les propriétaires d’armes à feu qui respectent la loi.
Nous avons un système très rigoureux en place au Canada pour les propriétaires d’armes à feu respectueux des lois. Les propriétaires d’armes à feu, les chasseurs et les tireurs sportifs s’entendent tous pour dire que nous avons besoin d’un système solide. On vérifie leurs antécédents. Ces vérifications se sont avérées très efficaces. Nous ne comprenons donc pas comment ce projet de loi s’attaquerait aux infractions commises avec une arme à feu en éliminant les peines minimales obligatoires pour les gangs et les criminels qui ne respectent pas ce système déjà très robuste.
Il n’est pas surprenant qu’au cours de la dernière législature, le gouvernement ait fait voter ses députés contre un projet de loi d’initiative parlementaire conservateur qui aurait renforcé les sanctions imposées à ceux qui font le trafic d’armes. Le gouvernement propose maintenant d’affaiblir les peines. L’écart devient de plus en plus évident.
J’ai vu les répercussions de ces infractions dans ma propre collectivité, Oxford. Les Canadiens s’inquiètent beaucoup de l’augmentation du nombre de crimes violents et liés à la drogue dans leurs collectivités. Il est extrêmement inquiétant de voir le gouvernement adopter une attitude de laxisme à l’égard de la criminalité et non une position qui défend les victimes et leurs collectivités.
Dans mes fonctions de chef de police de ma collectivité, j’ai été témoin de la lutte continuelle que les agents mènent pour assurer la sécurité de nos collectivités. Au lieu de donner plus de ressources aux agents, le gouvernement libéral réduit la protection des victimes en fixant des peines moins sévères pour les criminels. Car il s’agit de criminels. Ce sont des gens qui ont été condamnés par les tribunaux, qui ont été reconnus coupables de crimes comme le vol qualifié avec une arme à feu, le trafic d’armes à feu et la production de substances inscrites aux annexes 1 et 2, comme l’héroïne, la cocaïne et le fentanyl. Mais le gouvernement veut libérer ces gens-là plus tôt.
De plus, le gouvernement veut accroître le recours aux ordonnances de sursis. Les enlèvements, les agressions sexuelles, la traite des personnes et l’enlèvement d’un mineur sont des crimes que le gouvernement aimerait faire purger à domicile dans les collectivités où ces crimes ont été commis.
Le gouvernement ne cesse de répéter qu’il veut aider les toxicomanes. Nous savons que le système de justice et la police de notre pays ont déjà la capacité d’utiliser leur pouvoir discrétionnaire pour s’occuper des délinquants qui sont aux prises avec une dépendance et qui sont condamnés pour simple possession. Il est temps que le gouvernement accroisse sérieusement le soutien offert aux personnes aux prises avec des problèmes de toxicomanie et de santé mentale.
Les Canadiens nous ont élus pour que nous agissions. Qu’en est-il du numéro à trois chiffres pour la ligne d’aide au suicide qui a été adopté à la Chambre afin de créer un service national de prévention du suicide? Ce serait un exemple d’action concrète. Il est malheureux que le gouvernement traîne les pieds dans ce dossier simplement, semble-t-il, parce que cette initiative lui vient d’un de mes collègues conservateurs.
Le a dit que l’une des raisons qui l’ont incité à déclencher une élection de 600 millions de dollars en pleine pandémie était le manque de coopération des partis de l’opposition à la Chambre. Que dire de la coopération de son gouvernement? Il a fallu attendre deux bons mois au premier ministre, après ce qu’il a qualifié d’élection la plus importante de l’histoire canadienne, pour convoquer la Chambre. Maintenant que nous sommes là, le gouvernement saisit l’une des premières occasions pour déposer un projet de loi sérieusement inquiétant pour les Canadiens. Les trafiquants et les fabricants de drogues et d’armes à feu doivent être en prison, et non au sein de nos collectivités.
Pour emprunter une expression aux amateurs de pêche sportive, ce projet de loi est à remettre à l’eau. Il ne fait rien pour aider nos collectivités.
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Madame la Présidente, c'est avec grand plaisir que je me lève à la Chambre pour parler du projet de loi .
Le projet de loi a été proposé lors de la législature précédente. Il est très important non seulement pour les Canadiens, mais aussi pour les Canadiens de race noire et les Autochtones. De plus, il est important pour la sécurité des Canadiens en général. Si je dis cela, c'est parce que le projet de loi C‑5 tente de régler deux fléaux qui existent dans notre système.
La première raison, c'est l'importance d'abolir les peines minimales obligatoires dans le système pénitencier. La deuxième raison réside dans le fait d'ajouter ou de laisser beaucoup plus de flexibilité, une plus grande marge de manœuvre, ce qui était désiré avec les ordonnances de sursis.
J'espère donc que tous les députés vont non seulement appuyer le projet de loi, mais aussi y ajouter des mesures qui respectent l'esprit du projet de loi, en plus de nous donner la chance d'aller encore plus loin. À mon avis, c'est extrêmement important que mes collègues appuient le projet de loi.
Pour commencer, je vais maintenant parler des peines minimales obligatoires.
Cela n'a pas de bon sens de continuer à incarcérer des gens et à éliminer la flexibilité dont tous les juges et tribunaux ont besoin.
Les juges ont la responsabilité de juger une situation et d'augmenter la sécurité des Canadiens. De plus, ils proposent une peine qui reflète la sévérité du crime commis.
Quand la flexibilité est supprimée et que les parlementaires décident de fixer une durée arbitraire, cela n'a pas de bon sens. Non seulement cela ne permet pas d'augmenter la sécurité des Canadiens, mais cela punit des gens, dans plusieurs cas, parce qu'ils auront reçu la mauvaise peine.
Les députés de la Chambre des communes ont deux avantages remarquables. Le premier, c'est que nous avons le droit de visiter n'importe quelle unité des Forces armées canadiennes; le deuxième est que nous avons le droit de visiter des prisons ou des pénitenciers.
En 2015, après mon élection, j'ai utilisé un de ces avantages. Je ne dirai pas que j'ai eu grand plaisir à le faire, mais je peux dire que cela a complètement changé ma façon de voir le système pénitencier du Canada. J'ai eu la chance de visiter des établissements dans lesquels les personnes incarcérées purgeaient une peine maximale, minimale ou moyenne.
C'était remarquable, et cela m'a vraiment ouvert les yeux. J'ai vu les conditions dans lesquelles les personnes vivaient. Je dois dire, en toute sincérité, que je ne pense pas que cela peut mener à la réhabilitation des personnes incarcérées. J'en suis vite venu à la conclusion que l'on devrait laisser les prisons aux personnes qui posent vraiment un danger pour les Canadiens.
Des personnes peuvent avoir des problèmes de santé mentale ou de toxicomanie dus à plusieurs raisons comme le fait de ne pas avoir pu garder un emploi ou celui d’avoir appris la loi du plus fort dans les rues des villes canadiennes. Ces gens n’ont pas besoin d’être incarcérés, ils ont besoin d’accéder à d'autres options comme le traitement de leur dépendance. Ce sont des gens qui n’ont peut-être jamais eu de sentiment d’appartenance.
En tant que père de trois enfants et grand-père de deux petits-enfants, je peux dire que ce sentiment de sécurité et d’appartenance est tellement nécessaire pour les jeunes. Certains n’ont pas la chance de trouver cela dans leur famille. Ils le trouvent dans un gang, par manque d’autre option.
J'estime qu'il est de notre devoir en tant que parlementaires de trouver des moyens et de financer ces moyens pour nous assurer que ces gens-là vont avoir d’autres options, avant qu’on ne les mette en prison. Comme je l’ai déjà mentionné, les prisons sont les pires institutions dans lesquelles on puisse mettre quelqu’un en espérant qu’il y deviendra un citoyen modèle. Ce n’est pas ainsi que cela fonctionne. J’invite mes collègues à visiter une prison durant leur carrière politique. Ils devraient voir de leurs propres yeux comme cela fonctionne.
J’entends plusieurs personnes dire qu'en raison de la montée fulgurante de l’utilisation des armes de poing à Montréal, ma ville natale, ainsi que dans d’autres villes canadiennes, le moment n'est pas propice pour présenter un tel projet de loi. Elles disent qu’elles ne veulent pas adoucir les peines qui sont en place, que ce n’est pas le bon moment. Je dois toutefois poser la question: quand est-ce que ce sera le bon moment pour le faire?
Examinons la situation de façon logique. Dans le contexte actuel, avec l’existence de ces peines minimales, on voit une augmentation de l’utilisation des armes de poing. Rien n’a changé. Depuis une génération, on renforce et on durcit les peines, mais le résultat est la montée fulgurante de l’utilisation des armes de poing. Essayons donc quelque chose de différent. On ne peut pas toujours continuer à répéter la même réponse et s'attendre à un résultat différent. Cela n’a pas de bon sens.
Je pense qu’il faut se mettre à chercher un nouveau modèle, une nouvelle façon de répondre à la situation existante. Il faut avoir confiance que les juges exerceront leur jugement. Il faut injecter de l’argent pour offrir à ces jeunes d'autres options que les gangs de rue. Le projet de loi est un pas dans la bonne direction.
J’espère que nous aurons l’audace de faire des choses différemment pour offrir une réponse permettant enfin d'assurer la sécurité des Canadiens.
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Madame la Présidente, je suis heureux d'avoir la chance de participer au débat d'aujourd'hui sur le projet de loi , une mesure législative très imparfaite et même dangereuse. Mes commentaires et mon opinion à ce sujet ont été façonnés par près de 30 ans d'expérience à titre d'avocat. J'ai notamment été procureur de la Couronne pour la province de l'Ontario pendant les 18 dernières années.
Il y a une semaine, les députés ont rendu hommage, d'un commun accord, aux victimes du massacre de Montréal, pendant lequel 14 femmes ont été tuées, et 10 femmes et 4 hommes ont été blessés. L'anniversaire de cet événement donnait à la Chambre, surtout au et au gouvernement libéral, l'occasion de prendre fermement position contre tous les types de violence commise avec des armes à feu et de signaler très clairement aux Canadiens qu'ils agiraient immédiatement pour mettre un frein à la hausse constante de ces comportements criminels. Je trouve particulièrement troublant que le ait présenté le projet de loi moins de 24 heures après cette commémoration, un geste insensible dont le moment a été mal choisi par le gouvernement.
Pendant la dernière campagne, le a promis de promouvoir la paix, l'ordre et le bon gouvernement. Il a déclaré que le Canada avait besoin d'un dirigeant qui ne courberait pas l'échine devant la montée de l'extrémisme et qui agirait pour mettre un terme à la violence commise avec des armes à feu dans nos communautés. Le projet de loi fait exactement le contraire de ce qui a été promis. Il montre aux Canadiens, une fois de plus, que le gouvernement aime se donner des apparences de vertu.
Le projet de loi est identique au projet de loi présenté à la législature précédente et qui n'avait jamais franchi l'étape de la deuxième lecture avant le déclenchement inutile des dernières élections fédérales. Ce projet de loi prévoit l'élimination des peines minimales obligatoires pour 14 des 67 infractions au Code, soit 13 infractions liées à des armes à feu et une liée au tabac. Malgré ce que le et les libéraux nous ont dit cette dernière semaine, ce projet de loi dangereux ne vise pas des crimes moins graves liés aux armes à feu.
À titre d'exemple, j'aimerais lire l'article 244(1) du Code:
Commet une infraction quiconque, dans l’intention de blesser, mutiler ou défigurer une personne, de mettre sa vie en danger ou d’empêcher son arrestation ou sa détention, décharge une arme à feu contre qui que ce soit.
J'aimerais bien qu'un député m'explique en quoi il s'agit là d'une infraction moins grave liée aux armes à feu.
Le projet de loi éliminerait aussi les six peines minimales obligatoires pour les infractions prévues à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Il s'agit d'infractions très graves, notamment trafic, importation et exportation ainsi que production de substances contrôlées. J'invite les députés à y réfléchir un instant. Le gouvernement libéral, qui est laxiste en matière de criminalité et motivé par une idéologie, croit que ceux qui font le trafic de fentanyl — la drogue de rue la plus mortelle qui existe, qui est vendue à des millions de toxicomanes, qui est la cause de la crise des opioïdes et qui entraîne quotidiennement des surdoses et des morts — et qui en produisent ne devraient pas s'attendre à se voir imposer une peine minimale d'emprisonnement. C'est carrément honteux et dangereux.
En tant que nouveau député et amateur de politique à Ottawa, j'ai entendu à maintes reprises le et le gouvernement soulever l'argument fallacieux selon lequel le premier ministre Harper est à blâmer pour tout ce qui ne va pas au Canada. Il est peut-être temps que le gouvernement fasse un peu d'autoréflexion.
Contrairement aux réponses toutes faites du , qui dit que le gouvernement fait table rase des politiques délétères des conservateurs en matière de justice pénale, il n'en demeure pas moins que celui-ci garde intactes les 53 autres peines minimales obligatoires dans le Code et qu'il conserve la plupart de celles qui ont été présentées par le Parti conservateur. Il faut rappeler au ministre de la Justice que ce sont les anciens premiers ministres Pierre Elliott Trudeau et Jean Chrétien qui ont présenté, en 1977 et en 1995 respectivement, plusieurs peines minimales obligatoires pour des infractions liées aux armes à feu.
Ces peines font partie du système de justice pénale depuis le début des années 1890. Au cours de décennies qui ont suivi, les législateurs ont compté sur les peines obligatoires pour atténuer les incohérences dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire des juges. L'un des éléments clés du système gouvernemental tient au fait que le Parlement examine continuellement toutes les lois et qu'il adopte de nouvelles lois pour faire en sorte que ses lois, y compris les lois sur la détermination des peines, répondent aux exigences de la justice. Celles-ci indiquent très clairement qu'il y a une hausse considérable de la violence liée aux armes à feu au pays.
Les conservateurs sont d'avis que les crimes violents graves commis avec une arme à feu méritent une peine d'emprisonnement obligatoire. Si les députés ministériels ne veulent pas nous croire sur parole, peut-être voudront-ils réfléchir aux propos d'éloquents juristes au sujet de la violence commise au moyen d'une arme à feu dans nos collectivités.
La possession et l’utilisation d’armes à feu ne sont pas des erreurs de jugement passagères. La lourde réglementation qui régit les armes à feu et les munitions signifie que ceux qui en possèdent ont déployé certains efforts pour se les procurer. Personne ne tombe par hasard sur une arme de poing illégale. Il faut suivre tout un parcours pour trouver un trafiquant et ensuite pour cacher ce type d’arme afin d’échapper à la justice. C’est un processus mûrement réfléchi. Les armes à feu chargées, en particulier dans des lieux publics, ajoutent un élément de risque accru.
Voici une citation du juge D. E. Harris:
Une personne munie d’une arme à feu se sent toute-puissante, investie du droit de vie ou de mort sur autrui. En somme, il lui suffit de viser quelqu’un et d’appuyer légèrement sur la gâchette pour ôter la vie [...] La dérisoire facilité de tuer avec une arme à feu [...] représente un danger imminent pour nous tous.
Il ajoute: « Ce pouvoir si immense et si peu fondé sur la raison, nous devons le combattre de toutes nos forces ».
Voici maintenant un extrait des paroles glaçantes prononcées par la juge Molloy dans sa décision concernant l’affaire Ferrigon:
Une personne qui charge une arme à feu et qui la porte, en la dissimulant, dans un lieu public est par définition une personne dangereuse. Les armes à feu servent à tirer sur des gens. Une personne qui porte une arme à feu chargée dans un lieu public montre qu'elle est disposée à tirer sur un autre être humain. Autrement, l’arme ne serait pas chargée. Cette personne est donc dangereuse. Elle est dangereuse pour les gens qu’elle fréquente, pour la police et les autres représentants des forces de l’ordre, pour les membres de sa collectivité et pour les passants innocents, notamment les enfants, qui pourraient être tués ou mutilés par des balles perdues.
D'après Sécurité publique Canada, les crimes violents commis avec des armes à feu mettent de plus en plus en péril la sécurité de nos communautés. La violence armée est à la hausse: les crimes violents commis avec des armes à feu ont augmenté de 81 % depuis 2009, une arme à feu joue un rôle dans un homicide sur trois au Canada, et 47 % des Canadiens sont d'avis que la violence armée constitue une menace dans leur communauté. Les gens et les communautés de partout au pays subissent les effets de la violence armée. Elle se fait sentir dans l'ensemble des territoires et des provinces du pays, dans les zones urbaines et rurales et les banlieues, dans tous les groupes d'âge et toutes les strates socioéconomiques et, enfin, parmi les personnes qui possèdent une arme et celles qui n'en ont pas.
Le temps est venu de renforcer les lois canadiennes en matière d'armes à feu et de mettre l'accent sur la dénonciation et les mesures de dissuasion. Ce n'est pas le moment de présenter un projet de loi indulgent envers les criminels, qui met les communautés et les victimes en danger.
Les peines minimales obligatoires sont un outil important qui, loin de nuire au processus, permet au contraire d'établir des peines plus justes. Les peines minimales obligatoires n'enlèvent pas au juge la capacité d'envisager une peine proportionnelle: elles déterminent plutôt une fourchette de peines stable pour une infraction donnée, ce qui permet aux citoyens de comprendre à l'avance la gravité des conséquences liées à cette infraction.
Le a fait valoir que le projet de loi n'a pas été conçu pour les criminels endurcis, mais pour les délinquants à faible risque et ceux qui commettent une première infraction. Voici ce qu'il a dit le 8 décembre:
Pensez à vos propres enfants. Peut-être qu'ils ont eu des ennuis à un moment donné avec la loi. Je parie que vous voudriez leur donner le bénéfice du doute ou une seconde chance s'ils se trompent. Eh bien, c'est beaucoup plus difficile de leur accorder une seconde chance dans l'état actuel des choses.
Ce message du est vraiment troublant. Je ne pourrais penser à un meilleur exemple pour illustrer une personne qui refuse de se rendre à l'évidence. Il est question ici de délinquants dangereux et violents, et non pas de jeunes espiègles et malavisés qui enfreignent la loi pour la première fois.
Le gouvernement libéral prétend que le projet de loi vise à combattre le racisme dans le système de justice pénale du Canada. Comme l'a mentionné le ministre de la Justice de l'Alberta, Kaycee Madu:
Le nouveau projet de loi sur la justice du gouvernement fédéral [...] comprend des mesures raisonnables, j'en conviens, mais je suis profondément troublé par la décision de vider de leur substance les dispositions sévères relatives à la détermination de la peine pour les crimes commis avec une arme à feu [...] L'élimination de peines sévères et obligatoires pour ces crimes porte atteinte aux minorités mêmes qui sont si souvent victimes de violence armée éhontée. Je trouve aussi que le gouvernement fédéral fait preuve de mauvaise foi en utilisant un enjeu réel comme le racisme systémique pour faire avancer ses projets de loi conciliants envers les criminels.
En tant qu'ancien procureur de la Couronne, je suis tout à fait conscient du fait qu'il y a un taux disproportionné d'Autochtones et de Canadiens noirs dans les prisons, et je l'accepte sans réserve. En tant que parlementaires, nous avons les outils nécessaires pour mettre en place des mesures afin de lutter contre ce problème. De plus, des principes sont déjà établis pour que les juristes doivent obligatoirement tenir compte des antécédents des délinquants autochtones.
Par ailleurs, l'année dernière, le gouvernement libéral s'est engagé à verser 6,6 millions de dollars pour déterminer les peines de manière plus éclairée, en se fondant sur la compréhension de l'adversité et des inégalités systémiques affrontées par les Canadiens de race noire et les membres d'autres groupes racialisés.
En outre, le Parlement peut instaurer une soupape de sécurité, qui prendrait la forme d'une exemption constitutionnelle permettant au tribunal d'écarter la peine minimale obligatoire dans les cas exceptionnels où elle constituerait une peine cruelle et inusitée.
Ce projet de loi imparfait et dangereux modifierait aussi sensiblement le régime de peines avec sursis en permettant l'imposition de peines avec sursis pour les agressions sexuelles, le harcèlement criminel, l'enlèvement, la traite des personnes, l'incendie criminel et le rapt.
Je trouve particulièrement paradoxal qu'hier, le a soutenu que ce projet de loi réduirait considérablement le nombre de contestations fondées sur la Charte et accélérerait le règlement des affaires criminelles. Or, il a omis de dire que les modifications au régime de peines avec sursis augmenteraient énormément le nombre de litiges, car les modifications proposées ne sont pas valables en droit.
Pour pouvoir imposer une peine avec sursis, un juge doit être convaincu que permettre au délinquant de purger sa peine à la maison ne mettrait pas en danger la sécurité de la population. Or, les délinquants reconnus coupables d'agression sexuelle, de harcèlement criminel et d'enlèvement sont bel et bien dangereux.
De surcroît, l'article 752 définit les infractions que je viens de mentionner comme des « sévices graves à la personne », et les cours d'appel provinciales ont toujours refusé d'accorder des peines avec sursis pour de tels crimes.
Assurer la sécurité des Canadiens est la principale priorité du gouvernement fédéral. Le gouvernement libéral a négligé ses responsabilités. Nous devons rejeter ce projet de loi idéologique et clément envers les délinquants.