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ETHI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 28 juin 2005




¿ 0900
V         Le président suppléant (M. David Tilson (Dufferin—Caledon, PCC))
V         L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD)
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         L'hon. Ed Broadbent
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         L'hon. Ed Broadbent
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         L'hon. Ed Broadbent

¿ 0905

¿ 0910
V         M. Paul Zed (Saint John, Lib.)
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         M. Paul Zed
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         L'hon. Ed Broadbent

¿ 0915
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         M. Tom Lukiwski (Regina—Lumsden—Lake Centre, PCC)

¿ 0920

¿ 0925

¿ 0930

¿ 0935
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         M. Tom Lukiwski

¿ 0940
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         M. Paul Zed

¿ 0945

¿ 0950
V         L'hon. Ed Broadbent
V         M. Paul Zed
V         L'hon. Ed Broadbent
V         M. Paul Zed
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         M. Paul Zed

¿ 0955
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ)

À 1000

À 1005
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         L'hon. Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.)

À 1010
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.)

À 1015

À 1020
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         M. Derek Lee
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         M. Derek Lee
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         M. Derek Lee

À 1025
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         L'hon. Ed Broadbent
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         L'hon. Ed Broadbent

À 1030
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         M. Russ Powers (Ancaster—Dundas—Flamborough—Westdale, Lib.)
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         M. Derek Lee
V         Le président suppléant (M. David Tilson)
V         M. Derek Lee
V         Le président suppléant (M. David Tilson)










CANADA

Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique


NUMÉRO 034 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 28 juin 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¿  +(0900)  

[Traduction]

+

    Le président suppléant (M. David Tilson (Dufferin—Caledon, PCC)): Bonjour, mesdames et messieurs. Je déclare la séance ouverte.

    Nous sommes au Comité permanent de l’accès à l’information, de la protection des renseignements personnels et de l’éthique. Notre ordre du jour est conforme à l’alinéa 108(3)h) du Règlement.

    Nous examinons une motion d’Ed Broadbent proposant que le Comité permanent de l’accès à l’information, de la protection des renseignements personnels et de l’éthique retire sa confiance au commissaire à l’éthique.

    Monsieur Broadbent, voulez-vous introduire votre motion?

+-

    L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD): Me demandez-vous de proposer la motion?

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Oui.

+-

    L'hon. Ed Broadbent: Voulez-vous que je le fasse à la fin ou au début de ma déclaration?

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Je vous demande de proposer la motion tout de suite. Vous pourrez alors prendre la parole.

+-

    L'hon. Ed Broadbent: Je propose: Que le Comité permanent de l’accès à l’information, de la protection des renseignements personnels et de l’éthique retire sa confiance au commissaire à l’éthique.

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Monsieur Broadbent, vous avez la parole.

+-

    L'hon. Ed Broadbent: Je vous remercie.

    Monsieur le président, le Bureau du commissaire à l’éthique est l’un des services les plus importants dans un système parlementaire. Contrairement à son prédécesseur, M. Shapiro relève non du gouvernement, mais du Parlement. Ayant été nommé après que son prédécesseur – en partie à cause de son mandat et en partie à cause de son rendement – eut perdu toute crédibilité, il était très important pour M. Shapiro de gagner la pleine confiance du public et du Parlement. À cette fin, il aurait dû faire preuve dans les 14 derniers mois d’un jugement sûr, transparent et équitable. Comme dans le cas de la justice, pour mériter la confiance du public, son travail devait témoigner en apparence et en réalité de la sûreté de son jugement.

    Je ne crois pas qu’il ait satisfait à ces normes avant de déposer son dernier rapport, Ni noir, ni blanc, ni que ce rapport ait contribué à réduire ces préoccupations. Bien au contraire.

    Comme je l’ai déjà dit devant le comité, mon jugement se fonde entièrement sur son rendement, et pas du tout sur sa personnalité ou ses motifs. Je crois que M. Shapiro, qui a eu auparavant une brillante carrière, est un homme honorable. Je propose donc une motion de défiance strictement basée sur ce qu’il a fait ou n’a pas fait.

    Je veux maintenant vous présenter, monsieur le président et membres du comité, une liste de ce qui constitue pour moi des promesses non tenues et de mauvaises décisions.

    1. M. Shapiro a promis de revoir et de mettre à jour, en priorité, une liste des domaines de décision dans lesquels le premier ministre doit se récuser au Cabinet. Il a fait cette promesse en août dernier. Nous attendons toujours des résultats.

    2. Lorsque l’ancienne ministre, l’honorable Judy Sgro, a fait l’objet d’accusations pour la première fois, au lieu de choisir parmi les nombreux cabinets d’avocats qui ne sont pas clairement liés à un parti politique, M. Shapiro a retenu les services de Borden Ladner Gervais, étude bien connue pour ses liens avec le parti libéral. Ce cabinet a trois avocats qui représentent les libéraux devant la commission Gomery. Il a fait don de 165 000 $ au parti libéral entre 2002 et 2003, a versé une contribution de 25 000 $ à la campagne au leadership du premier ministre et a récemment engagé un autre ancien ministre libéral. Depuis qu’il a retenu les services de ce cabinet, M. Shapiro, faisant preuve de sa franchise habituelle, a lui-même remis en cause le choix qu’il a fait dans cette affaire.

    3. À l’insu des députés, M. Shapiro a produit deux versions de la lettre du 11 mai à Judy Sgro. La seconde lettre, sensiblement différente de la première par suite du retrait de deux noms, a été utilisée par Mme Sgro pour soutenir qu’elle avait été complètement innocentée. En se fondant sur la même lettre, le premier ministre avait alors, à tort, abouti à la même conclusion.

    4. M. Shapiro a très mal géré l’enquête relative aux enregistrements Grewal-Murphy-Dosanjh en ce qui concerne M. Tim Murphy, chef de cabinet du premier ministre. M. Yvon Godin, whip du NPD, a adressé à M. Shapiro une série de lettres pour lui demander d’inclure M. Murphy dans son enquête. J’ai rendu publiques ces lettres la semaine dernière. Dans sa réponse du 2 juin 2005, M. Shapiro a soutenu qu’il n’était pas habilité à enquêter sur M. Murphy. Il n’a cité, à l’appui de sa thèse, que le paragraphe 72.08(1) de la Loi sur le Parlement du Canada, qui ne mentionne que les ministres, ministres d’État et secrétaires parlementaires. Toutefois, le Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d’intérêts et l’après-mandat s’applique bel et bien au personnel d’un cabinet ministériel, et c’est le commissaire à l’éthique lui-même qui est responsable de l’administration de ce code, y compris les violations commises par le personnel d’un cabinet ministériel. Je cite le paragraphe 5(1) du code concernant les fonctions du commissaire à l’éthique au terme de l’article 72.07 de la Loi sur le Parlement du Canada: Le commissaire à l’éthique «administre le Code et applique les mesures d’observation régissant les conflits d’intérêts qui sont énoncées dans la présente partie en ce qui a trait aux titulaires de charge publique».

    Monsieur le président, selon la définition du code et de la Loi sur le Parlement du Canada, les titulaires de charge publique comprennent le personnel d’un cabinet ministériel. Dans les deux documents, «titulaire de charge publique» désigne «quiconque, autre qu’un fonctionnaire, travaille pour le compte d’un ministre ou d’un ministre d’État». Cette définition figure à l’alinéa 72.6(b) de la Loi et au paragraphe 4(1) du code. En refusant, dans sa lettre du 2 juin, d’enquêter directement sur la conduite de M. Murphy, M. Shapiro a fait abstraction de sa responsabilité expresse d’administrer le code.

¿  +-(0905)  

    5. À la lumière du refus de M. Shapiro d’enquêter directement sur M. Murphy, M. Godin a demandé au commissaire à l’éthique, dans une lettre datée du 9 juin 2005, d’inclure dans son enquête le ministre dont relève M. Murphy, c’est-à-dire le premier ministre.

    Dans sa réponse du 16 juin à Yvon Godin, M. Shapiro a totalement fait abstraction de la demande expresse d’enquêter sur M. Martin qui, en tant que ministre, fait clairement partie des personnes sur lesquelles le commissaire à l’éthique peut enquêter. Toutefois, après avoir parlé d’autres questions dans sa lettre, M. Shapiro a dit qu’il ne croit pas «qu’il soit nécessaire d’élargir officiellement l’enquête que j’avais acceptée d’entreprendre pour m’assurer de tenir compte de tous ceux qui ont participé activement aux événements à l’étude». Je suppose qu’il faisait ainsi allusion au premier ministre.

    Dans une autre lettre adressée à Yvon Godin le 20 juin, M. Shapiro reconnaît d’une part que «le premier ministre est responsable en dernier ressort devant le Parlement pour les actions de M. Murphy» et, de l’autre, que M. Murphy a joué un «rôle central... dans cette affaire» – c’est-à-dire la conversation enregistrée –, de sorte qu’il a lui-même changé d’avis et a maintenant l’intention de l’inclure dans son enquête aussitôt qu’il sera en mesure de la commencer. Encore une fois, cependant, il affirme qu’il reste à voir si le premier ministre devrait être inclus dans cette enquête.

    Il s’agit là d’un manque sérieux de jugement de la part de M. Shapiro. Comme M. Murphy relève du premier ministre, tout le monde considère qu’il agit en son nom. Il est donc essentiel de déterminer, directement auprès de M. Martin lui-même, si M. Murphy agissait, oui ou non, en son nom. Si le premier ministre est exclu de l’enquête, il est tout à fait concevable que M. Murphy soutiendra simplement qu’il agissait sans l’autorisation de M. Martin, ce qui laverait le premier ministre de tout soupçon.

    De plus, je trouve troublant le fait que M. Shapiro reconnaisse, au troisième paragraphe de sa lettre du 20 juin à Yvon Godin, qu’il n’avait pas encore commencé son enquête sur les enregistrements Grewal-Dosanjh-Murphy.

    6. Le rapport de M. Shapiro, Ni noir, ni blanc, omet de répondre à la question centrale concernant la mesure dans laquelle Mme Sgro est responsable de manquements à l’éthique et la question de savoir si sa démission du Cabinet suffisait dans les circonstances.

    Dans son rapport, M. Shapiro note à plusieurs endroits que c’est le personnel de Mme Sgro qui l’a placée en situation de conflit d’intérêts. Il note en outre, au sujet de la délivrance de permis à des personnes associées à des volontaires de la campagne, que cette «pratique va nettement à l’encontre du principe 7 du Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d’intérêts et l’après-mandat». Il dit ensuite: «Si la responsabilité de cette situation de conflit d’intérêts semble devoir principalement être imputée au personnel de la ministre, surtout à M. Ihor Wons, et si la confiance de la ministre dans son personnel n’a pas toujours été accordée à bon escient, cela n’empêche pas qu’elle a, dans cette histoire, une grande part de responsabilité, puisque, après tout, les permis de séjour temporaire ont été accordés avec son autorisation directe.»

    Malgré les preuves, M. Shapiro refuse de tirer une conclusion appropriée au sujet de la responsabilité personnelle de la ministre: «Dans l’affaire qui nous occupe, il est clair que, de façon générale, la ministre Sgro a été placée» – vous noterez la formulation «a été placée» qui signifie qu’elle ne s’est pas placée elle-même – «en situation de conflit d’intérêts en ce qui a trait à la délivrance de permis de séjour temporaire pendant la dernière moitié de la campagne électorale fédérale, et plus particulièrement dans le cas de Mme Alina Balaican. Elle a déjà démissionné de son poste; je ne commenterai pas sa décision et je n’ai aucune autre recommandation à formuler.»

    Cela est inacceptable. La ministre a effectivement démissionné par suite des allégations relatives à M. Harjit Singh.

¿  +-(0910)  

    Dans son rapport, M. Shapiro trouve que la ministre n’a pas mal agi dans ce cas. Mais qu’en est-il des autres cas? Pourquoi des membres d’un niveau élevé de son personnel s’occupaient-ils de sa campagne tout en traitant des demandes de permis de séjour temporaire provenant de membres de la famille d’autres travailleurs de la campagne? Pourquoi Mme Sgro leur a-t-elle délibérément permis de continuer? Pourquoi autant de demandes de permis de séjour temporaire qui ont été approuvées dans le mois qui a précédé les élections de 2004 étaient-elles liées à des députés libéraux?

    Il est clairement nécessaire de porter un jugement...

+-

    M. Paul Zed (Saint John, Lib.): J’invoque le Règlement.

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Excusez-moi, monsieur Broadbent.

    M. Zed invoque le Règlement.

+-

    M. Paul Zed: Monsieur le président, arrêtez-moi si j’ai tort, mais j’ai écouté très attentivement mon honorable collègue. Je croyais que vous aviez décidé que nous ne devions pas discuter des rapports du commissaire à l’éthique.

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Non, monsieur Zed, si je me souviens bien, j’avais dit que si une enquête était en cours – Grewal, Dosanjh, peut-être Murphy –, il ne convenait pas de formuler des commentaires et de poser des questions au comité. Cependant, une fois que le commissaire à l’éthique a déposé son rapport, il n'y a plus d’ingérence dans le processus de rédaction du rapport et, en ce qui me concerne, rien ne s’oppose à ce que les membres du comité ou tout autre député formulent des commentaires sur ce rapport. Pour moi, M. Broadbent parle des rapports déjà déposés et non d’une enquête en cours. Si un membre du comité parlait d’une enquête en cours, je déclarerais que ses propos sont inadmissibles.

    Monsieur Broadbent, je vous prie de poursuivre.

+-

    L'hon. Ed Broadbent: Si vous le permettez, je vais reprendre ma dernière phrase.

    Je disais donc: Mais qu’en est-il des autres cas? Pourquoi des membres d’un niveau élevé de son personnel s’occupaient-ils de sa campagne tout en traitant des demandes de permis de séjour temporaire provenant de membres de la famille d’autres travailleurs de la campagne? Pourquoi Mme Sgro leur a-t-elle délibérément permis de continuer? Pourquoi autant de demandes de permis de séjour temporaire qui ont été approuvées dans le mois qui a précédé les élections de 2004 étaient-elles liées à des députés libéraux?

    Il est clairement nécessaire de porter un jugement sur la question de savoir si l’une quelconque des mesures prises dans le contexte de la délivrance des permis constitue un motif suffisant pour la démission de Mme Sgro ou si celle-ci devrait être innocentée et réintégrer le Cabinet. Cela est important aussi bien pour Mme Sgro que pour l’établissement d’un précédent concernant la responsabilité et l’éthique ministérielle. Sans un jugement clair de la part de M. Shapiro sur la gravité de ces infractions, la question revient carrément dans l’arène politique, ce qui nous ramène là où l’affaire en était avant l’intervention de M. Shapiro. Si une personne travaille pour la campagne de réélection de la ministre et présente en même temps une demande de permis de séjour temporaire, il y a une situation de conflit d’intérêt pour la ministre.

    M. Shapiro reconnaît, à la page 22, qu’elle était elle-même au courant de ce qui se passait. En réponse à la question de savoir si, à sa connaissance, un demandeur ou le parrain de demandeurs de permis de séjour temporaire avait travaillé pour sa campagne, elle a clairement dit, et je cite: «Je suppose que oui.» Il est clair que Mme Sgro a permis que cette pratique persiste. À mon avis, M. Shapiro aurait clairement dû conclure qu’elle s’était placée délibérément en situation de conflit d’intérêts et que ce n’étaient pas des membres de son personnel qui l’avaient fait. Il aurait dû conclure qu’elle s’était délibérément placée en situation de conflit d’intérêts et que cela est inacceptable. Pour cette seule raison, elle ne devrait pas faire partie du Cabinet. Au lieu d’en arriver à cette conclusion, M. Shapiro recourt à une phrase alambiquée contenant un double négatif pour parler de sa connaissance des faits. Il a dit, et je cite «sans dire qu’elle n’était pas au courant du tout...», ce qui signifie, comme Mme Sgro l’a elle-même déclaré, qu’elle savait ce qui se passait. Si c’est le cas, elle ne devrait pas avoir un poste au Cabinet.

    Pour les six raisons qui précèdent, monsieur le président, j’ai proposé ma motion.

¿  +-(0915)  

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Merci, monsieur Broadbent.

    Nous passons maintenant au débat.

    Monsieur Lukiwski.

+-

    M. Tom Lukiwski (Regina—Lumsden—Lake Centre, PCC): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Je voudrais dire d’entrée de jeu, comme je l’ai mentionné à la dernière réunion du comité, que c’est une discussion sérieuse. La motion elle-même exprime la non-confiance dans le commissaire à l’éthique, qui est un haut fonctionnaire du Parlement et l’une des personnes avec lesquelles le comité doit collaborer très étroitement. Chaque fois que nous avons une motion exprimant la non-confiance des membres du comité, elle devrait être prise au sérieux. De toute évidence, au nom du parti conservateur, je la prends très au sérieux.

    Si je m’en souviens bien, le comité a été unanime à sa dernière réunion: cette discussion devait se tenir non à huis clos, mais en public, pour que tous les Canadiens et tous les parlementaires puissent examiner les motifs et l’objet de la position de chaque parti sur cette grave affaire.

    Je tiens à dire tout de suite, encore une fois au nom du Parti conservateur du Canada, que nous n’attaquons pas M. Shapiro personnellement. Beaucoup des observations que j’ai à formuler sont de la même nature que celles de mon distingué collègue. Ce n’est pas une attaque personnelle contre M. Shapiro. Je crois personnellement que c’est un homme honorable et un érudit. Dans mon parti, nous pensons qu’il est intègre et qu’il a beaucoup de connaissances, mais, en toute franchise, nous pensons qu’il occupe peut-être des fonctions qui ne lui conviennent pas.

    Je suis d’accord avec M. Broadbent pour beaucoup des exemples qu’il a donnés au comité dans son exposé préliminaire. Cela représente également la position du parti conservateur. Tout cela, je crois, témoigne d’abord et avant tout d’un manque de jugement. J’ai toujours cru fermement que le jugement ne s’apprend pas. Malheureusement, quand on naît, on en a ou on n’en a pas.

    Il y a beaucoup de choses qu’on peut apprendre sur le tas. Dans un nouvel emploi, il faut un certain temps d’adaptation. Toutefois, l’un des éléments clés, le principal élément de ce poste, c’est que le titulaire doit avoir du jugement, doit être impartial et indépendant. La caractéristique essentielle, c’est le jugement. Et c’est sur ce plan que M. Shapiro n’a pas su se montrer à la hauteur de ce que tous les membres du comité attendent d’un commissaire à l’éthique.

    Je devrais peut-être commencer par dire qu’à mon avis, l’une des raisons pour lesquelles le poste de commissaire à l’éthique a été créé est d’affronter les critiques dont a fait l’objet le prédécesseur de M. Shapiro, qui portait alors le titre de conseiller en éthique.

    En parlant de jugement, je sais que M. Wilson a été vertement critiqué par beaucoup de députés de l’opposition et beaucoup de membres des médias pour ce que je considère comme un manque total de jugement dans les questions d’éthique concernant les parlementaires.

    Je me souviens en particulier qu’en 2001, il avait déclaré qu’Alfonso Gagliano n’était pas en situation de conflit d’intérêts alors que son ministère avait attribué des contrats à des agences de publicité qui avaient ensuite sous-traité du travail au fils de M. Gagliano. Je crois que c’est à cause de ce manque de jugement que M. Wilson a été tellement critiqué.

    Cela explique que tout le monde, au Parlement, attendait beaucoup du titulaire du nouveau poste de commissaire à l’éthique. Même s’il y a eu des désaccords au moment de la nomination de M. Shapiro, tous les députés s’attendaient à ce que le titulaire du poste serve bien les parlementaires et les Canadiens. Toutefois, le parti conservateur estime que la conduite de M. Shapiro dans les derniers mois témoigne du fait qu’il n’est pas la personne qui convient pour ce poste.

¿  +-(0920)  

    Encore une fois, je vais donner quelques exemples. Beaucoup sinon la totalité de ces exemples ont déjà été présentée par M. Broadbent. Je dis, une fois de plus, que ce sont des exemples du manque de jugement de M. Shapiro, qui expliquent notre manque de confiance en lui.

    À notre avis, le principal problème de M. Shapiro est son manque d’expérience et de formation spécifique. Encore une fois, je crois qu’il aurait fallu réfléchir davantage avant de le nommer dans ce poste. Ce n’est certainement pas la faute de M. Shapiro puisque ce sont d’autres qui l’ont nommé.

    Le poste nécessite plus qu’une personne bien intentionnée, plus qu’une personne ayant une certaine intégrité personnelle et peut-être de l’expérience dans le domaine des affaires et d’autres domaines professionnels. Quand on fait une nomination à ce niveau, quand on nomme un haut fonctionnaire du Parlement, il faut rechercher un ensemble de compétences qui soient compatibles avec le mandat. Dans ce cas, je ne crois pas que l’ensemble de compétences nécessaire pour l’emploi ait fait l’objet d’une réflexion suffisante. Il semble du moins apparent que M. Shapiro ne possède pas les compétences qu’il faut pour s’acquitter de ce travail.

    Il nous aurait peut-être fallu quelqu’un qui avait déjà travaillé comme conseiller provincial en éthique, peut-être un juge à la retraite, une personne ayant une connaissance intime de la fonction publique fédérale, ou encore un avocat qui aurait au moins eu le genre de compétences nécessaires pour s’acquitter de ces fonctions. Malheureusement, M. Shapiro ne semble pas avoir les compétences nécessaires. Je crois que cela l’a placé dans une position très malheureuse et très inconfortable, peut-être même un peu injuste pour lui.

    Cela étant dit, nous nous attendons à ce que le commissaire à l’éthique fasse preuve d’un certain niveau d’expertise et de compétence. Or je crains fort que, pour nous du moins, cette expertise et cette compétence ne manquent cruellement.

    Nous avons déjà discuté au comité de nos préoccupations concernant M. Shapiro et certaines des décisions qu’il a prises. Certaines des questions et des appréhensions que je vais mentionner ont déjà fait l’objet d’interventions directes auprès de M. Shapiro. Encore une fois, il n’y a rien de neuf dans mon témoignage et dans la position du parti conservateur à ce sujet.

    Je voudrais répéter, pour les fins du compte rendu, que l’une de nos préoccupations découle du fait que M. Shapiro a levé sans explication les restrictions relatives au lobbying dans le cas de deux anciens ministres. Mon distingué collègue avait interrogé M. Shapiro à ce sujet deux ou trois fois. Nous n’avons reçu absolument aucune explication rationnelle de ce qui a été fait. C’est une violation claire des règles concernant le lobbying.

    Il appartenait à M. Shapiro de prendre cette décision, mais il n’a pas été en mesure d’en expliquer les motifs au comité et n’a pas pu justifier cette contravention aux règles concernant le lobbying. Pourquoi a-t-il accepté des exceptions aux règles dans le cas de ces deux anciens ministres? C’est probablement un sérieux manque de jugement. Si je me laissais guider par un esprit partisan, je dirais que cette décision avait des motifs partisans. Aucun membre du comité n’a porté une telle accusation contre M. Shapiro, mais il est évident que cette décision semble être totalement contraire aux règles relatives aux lobbyistes.

    Comme M. Broadbent l’a mentionné, M. Shapiro a jusqu’ici omis de se prononcer sur les circonstances dans lesquelles le premier ministre devrait se récuser à cause de ses intérêts d’affaires. M. Shapiro nous avait donné l’assurance qu’il se prononcerait à ce sujet très rapidement, mais nous attendons depuis plusieurs mois. Jusqu’ici, rien ne semble indiquer que M. Shapiro a pris les choses en main ou a pris au sérieux la demande de notre comité. Le temps qui s’est écoulé nous indique au moins qu’il n’a peut-être pas consacré à la question les efforts qu’elle méritait.

¿  +-(0925)  

    Je crois en outre que M. Shapiro a fait preuve d’un manque flagrant de jugement, et peut-être bien d’un certain manque de compétence, dans le traitement de deux dossiers dont il s’est occupé depuis sa nomination comme commissaire à l’éthique. M. Broadbent a expliqué, très clairement, je crois, les problèmes qu’il a constatés et que le parti conservateur a constatés aussi dans sa décision relative à Mme Sgro. Je reviendrai à cette question dans quelques instants.

    Encore une fois, ce n’est pas seulement l’opinion de M. Broadbent et du Nouveau Parti démocratique, ce n’est pas seulement mon opinion et celle du parti conservateur. Le manque de jugement de M. Shapiro et son défaut de prendre une décision claire dans l’affaire Sgro ont été largement commentés et, très franchement, largement critiqués par les membres des médias, partout au Canada.

    Cela ne veut pas dire que le comité ou les parlementaires doivent tenir pour parole d’évangile tout ce que les membres des médias disent au sujet des compétences d’une personne. Je veux simplement dire que dans tout ce que j’ai lu au sujet du rapport final concernant l’affaire Sgro, dans tous les commentaires que j’ai entendus de la part de ceux qui ont pris le temps d’étudier soigneusement le rapport, il est évident que tout le monde est unanime: ce rapport témoigne d’un sérieux manque de jugement.

    Très franchement, dès le départ, moi-même et d’autres nous étions interrogés sur le titre du rapport: Ni noir, ni blanc. Nous nous attendions à une décision et à des conclusions définitives fondées sur l’enquête de M. Shapiro. Nous ne les avons pas trouvées. À mon avis, le titre Ni noir, ni blanc décrit parfaitement ce rapport éminemment ambigu.

    Je ne crois pas que les membres du comité devraient tolérer ce genre de rapport et d’enquête. À mon avis, nous devrions avoir des normes plus élevées en matière de rapports lorsque nous demandons à un haut fonctionnaire du Parlement de faire enquête, surtout dans une affaire aussi délicate qu’une enquête portant sur un ancien ministre. M. Shapiro a pourtant mis plus de sept mois pour terminer son enquête.

    Comme M. Broadbent l’a signalé, la façon dont M. Shapiro a mené son enquête est également contestable. La première préoccupation du parti conservateur à ce sujet – nous avons déjà interrogé M. Shapiro sur sa décision au comité – est que le commissaire à l’éthique a décidé de retenir les services de quatre cabinets d’avocats pour l’aider dans son enquête.

    Notre premier sujet de préoccupation, au comité, était que M. Shapiro disposait déjà d’une bonne assistance juridique, mais qu’il avait décidé de ne pas y recourir. En réponse aux questions des membres du comité, il a affirmé, pour justifier son recours à des services juridiques extérieurs, qu’il n’était pas au courant de l’existence des services juridiques internes.

    Je crois qu’il incombe à tout haut fonctionnaire du Parlement de s’informer de tous les services à sa disposition. Le fait qu’il puisse dire: «Eh bien, je ne savais pas vraiment que j’avais des services juridiques à ma disposition. J’aurais pu les utiliser et peut-être économiser le prix des conseillers juridiques extérieurs, mais je ne le savais pas» m’amène à lui demander: Pourquoi n’étiez-vous pas au courant? Pourquoi n’avez-vous pas cru nécessaire d’examiner les ressources dont vous pouviez disposer avant d’entreprendre cette enquête? À tout le moins, on pourrait se demander, je suppose, pourquoi il a recouru à des cabinets d’avocats quand il aurait pu engager un détective privé, probablement à beaucoup moins cher.

    Même si nous acceptons l’argument de M. Shapiro selon lequel il était nécessaire de faire appel à des services juridiques extérieurs, il est difficile d’accepter le manque de jugement dont il a fait preuve en engageant un cabinet d’avocats qui, comme l’a précisé M. Broadbent, était connu pour ses liens étroits avec les libéraux. Ce cabinet avait non seulement fait d’importants dons au Parti libéral du Canada et à la campagne de leadership de l’actuel premier ministre, mais avait aussi représenté l’ancien premier ministre Jean Chrétien devant la commission Gomery.

¿  +-(0930)  

    Si je m’en souviens bien, lorsque nous avons demandé à M. Shapiro, ici, au comité, sur quels critères il s’était fondé pour choisir ce cabinet d’avocats, il a déclaré qu’il était très difficile de trouver à Ottawa un cabinet qui n’ait pas de relations politiques. Même si cela peut être vrai, on peut également soutenir qu’il est possible de trouver des cabinets d’avocats qui n’ont pas des relations aussi étroites que le cabinet actuel ou le cabinet qu’il a fini par choisir. Pour moi, il est inconcevable qu’une personne ayant du jugement, qui est censée réfléchir sans esprit partisan, puisse choisir ce cabinet d’avocats et venir affirmer devant le comité qu’à son avis, il n’y avait pas de différence parce que tous les cabinets d’avocats ont des relations politiques. Il n’y a pas de doute que c’est là un manque évident de jugement. De toute évidence, le cabinet qu’il a choisi avait trop de liens avec le Parti libéral du Canada, trop de liens avec l’actuel premier ministre et trop de liens avec l’ancien premier ministre pour qu’il lui soit possible d’échapper aux critiques. M. Shapiro devait être critiqué, et l’a été, mais, encore une fois, cela témoigne de son manque de jugement manifeste.

    Nous pensons également, comme M. Broadbent l’a dit, que M. Shapiro a pour le moins fait preuve de manque de jugement quand, ayant écrit sa première lettre à Mme Sgro au sujet de ce qu’on a appelé «le scandale des effeuilleuses», il a permis à l'ancienne ministre d’examiner la lettre et de formuler des commentaires. M. Shapiro a dit qu’il a reçu des conseils juridiques et, après avoir écrit la lettre initiale, il a omis ou éliminé des points clés de la lettre. En particulier, il n’a pas mentionné le nom des principaux membres du personnel de Mme Sgro, qui avaient été très impliqués avec Mme Balaican, la jeune femme qui était au centre du scandale des effeuilleuses.

    Ainsi, M. Shapiro a cru bon de réécrire la lettre et de l’envoyer à Mme Sgro. Elle est finalement passée au domaine public, mais un point essentiel de la lettre qui impliquait l’un des principaux conseillers de Mme Sgro avait été éliminé. Nous avions beaucoup interrogé M. Shapiro au comité sur la question de savoir s’il comprenait les relations entre les principaux membres et les membres subalternes du personnel. Après quelques hésitations, il a dit qu’il comprenait la différence. À titre de parlementaires, nous connaissons tous les relations avec les principaux membres du personnel, particulièrement quand il s’agit d’une personne comme M. Wons, qui était l’un des plus proches confidents de Mme Sgro. M. Wons aurait donc parlé à Mme Sgro de tout ce qu’il faisait, de toute décision qu’il aurait prise. Pourtant, M. Shapiro a cru nécessaire de supprimer son nom dans la lettre qu’il a écrite à Mme Sgro sur cette affaire.

    Il n’y a pas de doute...

¿  +-(0935)  

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Puis-je vous interrompre un instant? C’est une affaire délicate. Je maintiens que le comité a toute latitude pour examiner le processus suivi par le commissaire pour parvenir aux différentes décisions qu’il a prises. Je ne tiens pas à dire s’il a pris une bonne ou une mauvaise décision quant aux témoins ou aux personnes qu’il a choisi d’inclure dans son enquête. C’est une zone grise, mais vous commencez à vous approcher de la zone dangereuse.

+-

    M. Tom Lukiwski: Merci, monsieur le président.

    Au sujet de cette zone grise dont vous parlez, je me suis peut-être trop approché de la limite, mais ce que j’essayais de dire, c’est que tout cela tient au degré de jugement manifesté par M. Shapiro. À mon avis, quiconque a une certaine perspicacité politique comprendrait que lorsqu’un conseiller principal prend des décisions, c’est comme si la ministre elle-même le faisait. Pourtant, M. Shapiro n’a pas fait la distinction ou n’a pas semblé comprendre cette distinction lorsqu’il a récrit la lettre. Cela témoigne, je crois, de son manque de jugement. C’est ce que j’essayais d’établir. Je passe maintenant à autre chose.

    J’ai également été déçu de constater que, lorsqu’il a parlé des permis de séjour temporaire dans son rapport final, il n’a pas semblé y trouver grand-chose à redire. Il ne paraissait pas comprendre la distinction à faire entre l’esprit partisan et la responsabilité ministérielle en matière de délivrance de permis de séjour temporaire. Encore une fois, c’est une affaire sérieuse. Des accusations ont été portées contre les services d’immigration. L’ancien et le nouveau ministres en ont parlé. Il semble que dans la seconde moitié de la campagne électorale, comme le montre le rapport concernant Mme Sgro, 74 des 76 permis délivrés sont allés à des amis des libéraux ou à des députés libéraux. Pourtant, le rapport reste vague à ce sujet. L’ambiguïté y était telle que ces points essentiels ont été estompés.

    Je dis «points essentiels» parce que nous parlons de questions d’éthique et du bien-fondé de la délivrance de permis de séjour temporaire. Je crois que la décision finale manquait de clarté et témoignait aussi d’un manque de jugement politique de la part de M. Shapiro.

    Enfin, monsieur le président, il y a les changements d’avis de M. Shapiro en ce qui concerne la question de savoir si Tim Murphy devait ou non être inclus dans l’enquête. Très franchement, je crois que cette affaire devrait être confiée à la GRC, car elle relève davantage de la justice pénale que d’un code d’éthique.

    Cela étant dit, M. Shapiro a été invité à parler de ce point, mais il a exprimé des opinions différentes à plusieurs reprises. Il a commencé par dire qu’il n’était pas habilité à faire enquête sur M. Murphy. Ensuite, face aux faits présentés dans les lettres de M. Godin et dans une autre lettre que lui a adressée John Reynolds, du Parti conservateur du Canada, il s’est rétracté ou presque. Il a changé d’avis, disant: Oui, vous avez raison, je peux enquêter sur M. Murphy, et je vais peut-être le faire. Ensuite, quand on lui a demandé s’il comptait ou non l’inclure dans l’enquête, il a encore une fois été très vague. À un moment donné, il a dit qu’il allait probablement le faire, mais qu’il ne pouvait pas déclarer d’une façon définitive s’il le ferait ou non. Dans les lettres qu’il a adressées à M. Godin et à M. Reynolds, il a indiqué qu’il allait probablement le faire, mais qu’il ne pouvait pas le garantir.

    Au sujet du premier ministre, il a dit: Eh bien, je vais peut-être enquêter sur le premier ministre. Ensuite il a dit: Eh bien, je ne vais probablement pas enquêter sur le premier ministre. Finalement, il a encore changé d’avis et a dit: Oui, je vais probablement enquêter sur le premier ministre.

Monsieur le président et membres du comité, rien que ces exemples suffiraient pour s’interroger sur la compétence de M. Shapiro. Pour le moins, nous ne pouvons pas faire autrement que contester sévèrement son jugement. Cela me ramène à mes premières observations: l’un des principaux critères que le comité et le Parlement doivent rechercher lors de la sélection du commissaire à l’éthique, c’est non seulement l’expérience et les compétences, mais aussi le jugement politique. Je répète que le jugement ne s’acquiert pas, à mon avis. C’est une chose que l’on a ou que l’on n’a pas.

¿  +-(0940)  

    Par conséquent, le Parti conservateur du Canada estime que M. Shapiro a manqué de jugement. Ce manque de jugement a obscurci ses décisions et a abouti, en fin de compte, à un rapport défectueux, que le comité ne devrait pas reconnaître parce qu’il n’est pas à la hauteur des normes que nous attendons. Par conséquent, monsieur le président, le Parti conservateur du Canada appuie la motion de M. Broadbent et déclare qu’il n’a pas confiance en M. Shapiro.

    Merci beaucoup.

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Merci, monsieur.

    À vous, monsieur Zed.

+-

    M. Paul Zed: Merci, monsieur le président et collègues.

    Ce que je vais dire ne surprendra évidemment personne au comité. J’ai attendu en retenant mon souffle aujourd’hui parce que je pensais que M. Broadbent aurait quelques crimes de guerre ou quelques graves allégations à révéler, à part ce qui a déjà paru dans les médias. Je m’attendais aussi à ce que M. Lukiwski nous fasse part de nouveaux faits saisissants, surtout que pour moi, tout ceci, c’était beaucoup de bruit pour rien. Je tiens à dire très clairement que je trouve aberrant que le comité envisage même, après si peu de temps, de retirer sa confiance au commissaire à l’éthique. De plus, je crois que cela fait du tort à tous les parlementaires, que cela porte préjudice à la crédibilité du système que nous, députés, avons mis en place.

    Conscient du fait que mon collègue, M. Broadbent, veut éviter de ternir le nom de M. Shapiro et concentrer ses propos sur le processus, je m’attendais, monsieur le président, à ce qu’il formule un certain nombre d’allégations établissant que M. Shapiro a mal agi d’une façon ou d’une autre. Si M. Shapiro a pris une décision que M. Broadbent ou M. Lukiwski n’aime pas, c’est différent. Je crois toutefois que nous avons la responsabilité du processus. Chacun se rend compte, je pense, que nous n’avons pas affaire à un conseiller en éthique ou à un vérificateur d’éthique. Il s’agit d’un commissaire à l’éthique, c’est-à-dire d’un haut fonctionnaire indépendant qui relève directement du Parlement. Ce n’est pas un poste politique.

    Par conséquent, quand j’ai entendu M. Lukiwski parler de jugement politique, j’ai tiqué un peu, pour être franc, parce qu’il faudrait justement éviter de politiser ces fonctions à des fins partisanes. Honnêtement, après avoir écouté soigneusement mes deux honorables collègues de l’opposition parler des deux affaires qui sont maintenant publiques, je constate qu’ils n’ont fait que passer en revue les détails de chaque cas en espérant, en fait, passer maintenant devant une cour d’appel. Je dois ajouter que je suis un peu troublé par ce que le président a dit. Je croyais qu’il avait déjà décidé que les décisions du commissaire à l’éthique constituaient des rapports présentés au Parlement.

    M. Epp se souviendra bien du fait que nous avons eu un conseiller en éthique et que nous avions beaucoup discuté de la question de savoir si ses décisions constituaient des rapports adressés au Parlement, pour qu’il nous soit possible de les examiner, de les évaluer ou de nous y attaquer. Très franchement, cette façon de procéder m’inquiète profondément parce que nous avons établi le bureau du commissaire à l’éthique et qu’à titre de députés, nous avons approuvé sa nomination. Quand j’entends mes honorables collègues parler de normes et de précédents, je me demande: quelles normes et quels précédents? Cela me fait souvent penser à l’expression: «Que celui qui est sans péché jette la première pierre.»

    Je ne sais pas ce qui constitue un conflit. Je ne sais pas ce qui constitue une norme ou un précédent que mes honorables collègues trouveraient acceptables. M. Lukiwski a parlé du titre Ni noir, ni blanc. En fait, c’est très gris. En réalité, nous, députés, avons produit cette loi et défini une norme pour M. Shapiro. Nous lui avons donné cette loi. Si elle occasionne des difficultés, peut-être faudrait-il la modifier. Nous devons aussi lui donner les moyens et les outils nécessaires pour faire son travail.

¿  +-(0945)  

    Comme beaucoup d’entre vous le savent, le domaine de l’éthique n’est pas nouveau. J’ai eu l’honneur de représenter l’Association du Barreau canadien devant la commission Holtmann en 1988 et de parler de normes éthiques, au moment où l’ancien gouvernement envisageait d’établir un système d’enregistrement des lobbyistes. M. Epp et moi avons été à l’origine de la décision de 1994 concernant le rétablissement de la confiance, la décision qui portait sur le processus. Nous avons parlé des normes susceptibles d’établir la confiance et des moyens d’assurer l’intégrité dans la loi. C’est une chose très difficile à faire.

    Comme Parlement, nous avons dépassé le stade du conseiller en éthique. Je crois que c’était tout à fait indiqué de le faire.

    L’une de mes préoccupations est que M. Broadbent, M. Lukiwski et peut-être d’autres sont en train de ranimer le feu du débat sur l’éthique, à un moment où nous avons un commissaire à l’éthique. La question qui se pose est la suivante. À quoi nous sert, monsieur le président, d’avoir un commissaire indépendant à l’éthique, qui est un haut fonctionnaire du Parlement, si nous voulons politiser sa charge? À quoi nous sert d’avoir un commissaire indépendant à l’éthique si nous essayons d’atteindre des objectifs politiques chaque fois qu’il prend une décision, pour la simple raison que nous n’aimons pas sa décision?

    Ces dernières semaines, je me souviens que Mme Sgro n’était pas très heureuse non plus du rapport du commissaire à l’éthique. On a dit beaucoup de choses du processus, du temps qu’il a fallu et de certains passages du rapport.

    Monsieur le président, ne perdons pas de vue qu’il s’agit du commissaire à l’éthique. Nous avons un processus. Comme députés, nous avons établi le processus que nous estimions nécessaire. Nous avons nommé un universitaire respecté, un ancien haut fonctionnaire pour remplir ces fonctions. Si, comme parlementaires, nous voulons qu’il fasse le travail que nous lui avons confié ou que nous avons confié à son bureau, qu’il assume la responsabilité de réglementer l’intégrité ou les normes éthiques, alors nous devons tout d’abord veiller à ce qu’il dispose des ressources financières nécessaires.

¿  +-(0950)  

    Le comité l’a déjà entendu à ce sujet, avant la parution des rapports. Il est inconcevable pour moi que nous envisagions de remplacer M. Shapiro comme commissaire simplement parce que nous ne sommes pas d’accord sur les conclusions de l’un de ses rapports.

    Honnêtement, c’est l’une des préoccupations que suscite pour moi la motion de mon collègue, M. Broadbent. Je m’attendais à des preuves flagrantes. Je m’attendais à...

+-

    L'hon. Ed Broadbent: Des attaques personnelles.

+-

    M. Paul Zed: Non, pas des attaques personnelles. Je m’attendais en fait à une décision politique fondée suggérant de modifier la façon dont les députés envisagent les fonctions du commissaire à l’éthique.

    Il me semble, monsieur le président, que nous pourrions tirer certains enseignements des deux premières décisions rendues par le commissaire. Mais je trouve un peu décourageant d’entendre mes honorables collègues ternir le nom du commissaire à l’éthique. Les ayant écoutés, je constate qu’ils avancent l’argument qu’à leur avis, les enquêtes ont été mal gérées. Je crois qu’ils ont droit à leur opinion. C’est exactement ce qu’ils ont dit. Mes deux collègues d’en face, monsieur le président, croient que les enquêtes ont été mal gérées.

    En fait, ils sont en train de refaire les procès en cause. Ils se sont constitués en cour d’appel. C’est la crainte que j’ai et la raison pour laquelle je ne suis pas en mesure d’appuyer la motion.

    M. Lukiwski, vous avez mentionné il y a quelques instants deux ministres dont les médias avaient parlé. Vous avez repris une rumeur que M. Benson a démentie. Je ne suis pas votre avocat, mais je vous conseillerais d’être très prudent si vous décidez de répéter ces allégations à l’extérieur de la Chambre des communes. J’ai entendu le registraire adjoint dire qu’il n’y a pas eu de décision. Pourtant, monsieur, vous avez répété ce qui a été dit comme s’il y avait eu une décision. Vous ne vous êtes d’ailleurs pas limité à répéter qu’une décision avait été prise, vous avez dit que cette décision avait exempté quelqu’un, alors qu’il n’y a pas eu de décision.

    Pour être franc, collègues, je trouve cela un peu décourageant. Je croyais que notre comité s’occupait du processus. C’est comme si l’on voulait, en frappant au hasard, salir la réputation d’un bureau à des fins partisanes...

+-

    L'hon. Ed Broadbent: Je n’ai fait...

+-

    M. Paul Zed: Monsieur Broadbent, permettez-moi de vous dire, avec tout le respect que je vous dois, que j’ai écouté vos propos et que j’essaie de les évaluer.

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): À l’ordre, s’il vous plaît. Nous avons un orateur. Écoutons-le.

+-

    M. Paul Zed: Monsieur le président, j’ai soigneusement écouté la liste en six points que M. Broadbent a présentée. J’ai attendu patiemment dans l’espoir de trouver un seul point pertinent. Il a parlé de domaines de décision. Je crois que le commissaire lui-même a dit qu’il y travaillait. Ce n’est peut-être pas assez rapide pour M. Broadbent, mais le commissaire y travaille.

    Je voudrais demander à mon collègue M. Lukiwski s’il dispose de renseignements sur le cabinet Borden Ladner Gervais et s’il connaît le montant des dons offerts aux candidats à la campagne au leadership du parti conservateur qui a récemment eu lieu. Connaît-t-il le montant des dons offerts par ce cabinet à des candidats conservateurs aux dernières élections générales? Très franchement, ayant été membre du Barreau du Nouveau-Brunswick, du Barreau canadien et du Barreau international, ayant eu l’occasion d’enseigner dans une faculté de droit et ayant été membre d’un très grand cabinet d’avocats, je peux vous dire qu’il y a des avocats affiliés à tous les partis politiques dans chacun des cabinets que j’ai connus. Il n’y a pas un cabinet d’avocats dans cette ville, dans ce pays ou en Amérique du Nord qui n’ait pas des membres représentant tous les partis politiques.

    Par conséquent, lorsque j’entends M. Broadbent soutenir que le commissaire a pris une décision lorsqu’il a choisi Borden Ladner Gervais, je trouve qu’il va un peu loin pour essayer de mettre en doute la crédibilité du commissaire.

    Vous avez parlé de deux versions d’une lettre. Eh bien, c’est un fait que Mme Sgro a été innocentée. Vous pouvez choisir d’aimer ou de ne pas aimer certaines parties du rapport. Mme Sgro elle-même n’a pas aimé certains passages. Il n’en reste pas moins que c’est le rapport du commissaire à l’éthique.

    Collègues, je crois que nous avons tous appris une leçon. Le bureau du commissaire a connu certaines difficultés de croissance. Je n’avais pas rencontré M. Shapiro avant de le voir au comité. Mais, collègues, vous avez vous-même approuvé la nomination de M. Shapiro. J’ai vérifié. Les députés du Nouveau Parti démocratique ont approuvé cette nomination, tout comme les députés du Bloc, les députés du parti conservateur et les députés du parti libéral.

    Ainsi, tous les députés ont décidé du processus, il y a un peu plus d’un an. Le commissaire a produit deux rapports. L’opposition, qui n’en a pas aimé certaines parties, veut tout à coup politiser le processus. Collègues, si c’est ce que vous voulez faire, trouvez-vous une autre cible, ne vous attaquez pas au bureau du commissaire à l’éthique. Vous ne devriez pas le faire. Cela nuira à l’établissement ou au rétablissement de la confiance dans les parlementaires. Cela n’a rien à voir avec le gouvernement et rien à voir avec l’opposition. Il s’agit de nous-mêmes et du Parlement. Je suis profondément inquiet du processus qui s’engage. Je crois qu’il est aberrant. Je l’ai déjà dit à de nombreuses occasions, et je continue à le dire aujourd’hui.

    Monsieur Lukiwski, vous avez parlé de normes. Vous avez dit que cela est inférieur à la norme. De quelle norme parlez-vous? Nous n’avons pas voulu de la norme de M. Wilson. M. Wilson n’était pas le commissaire à l’éthique, il n’était que conseiller en éthique.

    Je vais donc conclure en disant que j’ai le plus grand respect pour tous les parlementaires et leur point de vue. Mais, honnêtement, je suis profondément préoccupé par l’établissement de critères de rendement dans le cas de l’éthique. Comme Mitchell Sharp l’a dit une fois devant notre comité, de quelle façon peut-on inscrire l’intégrité dans la loi? C’est une chose très difficile. Nous sommes tous d’honorables députés. Je crains fort que nous ne soyons en train de refaire le procès de ces affaires. Nous sommes en train de refaire un procès sans qu’un procès ait jamais eu lieu.

¿  +-(0955)  

    Monsieur le président, je veux dire avec respect que nous devons être très prudents pour ne pas transformer ce processus parlementaire en une chambre étoilée ou en un tribunal de pacotille. Je crois très profondément au processus d’un commissaire à l’éthique. Si nous devons en faire plus pour améliorer la qualité de cette charge, donnons-lui les outils et les moyens nécessaires pour faire son travail. Si nous voulons définir des normes ou des critères concernant les délais, par exemple, je suis très ouvert à ce genre d’arguments. Mais n’essayons pas de refaire le procès des deux dernières affaires car, très franchement, je trouve cela aberrant.

    J’ai terminé, monsieur le président.

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Merci, monsieur Zed.

    Monsieur Laframboise.

[Français]

+-

    M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ): Merci, monsieur le président.

    Vous savez que nous prenons la parole aujourd'hui sur une motion très importante par laquelle on nous demande de blâmer un commissaire.

    Bien que je sois l'un de ceux qui se sont montrés très durs envers la façon d'opérer de M. Shapiro, il faut quand même reconnaître l'intelligence de ce dernier. On ne dirige pas les destinées de l'une des plus prestigieuses universités en Amérique du Nord, l'Université McGill, sans être intelligent. Je pense qu'on ne peut donc pas le blâmer de manquer de jugement et de compétence.

    M. Shapiro manquait et manque probablement encore d'expérience politique. Tous les commentaires que j'ai faits — vous m'avez rappelé à l'ordre, monsieur le président, lorsque j'ai mentionné qu'il avait peur d'avoir peur — étaient attribuables à son manque d'expérience politique. Il se sentait plus en sécurité en demandant des avis juridiques, et cela a retardé le processus. Cependant, quand vient le temps de juger son travail, il faut aussi tenir compte des outils dont il disposait.

    Si on remplaçait M. Shapiro aujourd'hui — outre le fait qu'on pourrait nommer un juge sans doute capable de vivre avec tous les scandales politiques —, son remplaçant disposerait-il de meilleurs outils que ceux dont M. Shapiro disposait? Les outils dont il disposait pour faire son travail étaient son organisation administrative et les lois qu'il est chargé de faire appliquer.

    En ce qui a trait à son organisation administrative, c'est le travail de notre comité de s'assurer que M. Shapiro nous dise comment fonctionne son bureau. Nous savions donc dès le départ qu'il ne disposait pas des enquêteurs nécessaires pour faire ce travail. Il nous l'avait dit, il fallait choisir et former des enquêteurs. Nous savions donc à l'avance qu'il devait choisir une étude d'avocats. Il a commis une erreur et il l'a avoué. Il a choisi une étude d'avocats qui était proche du Parti libéral pour mener l'enquête. Les collègues l'ont tout de suite mentionné. Par contre, on n'a jamais attaqué le rapport produit par cette étude d'avocats. Finalement, il a engagé une étude d'avocats proche des libéraux, mais le rapport qu'elle a produit semble complet. Ces gens ont fait une analyse et interrogé des témoins. Je pense que personne, y compris les collègues autour de la table, n'a mis en doute le rapport. Personne n'a dit qu'il n'avait pas été bien fait ou qu'il était carrément partisan. Un rapport a été produit par l'étude d'avocats à laquelle M. Shapiro a eu recours. Or, il nous a dit qu'il ne choisirait plus jamais une étude associée au Parti libéral. Il embauchera probablement des enquêteurs.

    Je reviens donc à ma première question: une autre personne à sa place aurait-elle fait mieux? Je ne le sais pas, c'est pour moi un point d'interrogation. Je ne peux pas dire carrément oui, parce que celui qui aurait été là aurait dû, en l'absence du personnel requis, choisir une étude d'avocats. Je suis d'accord avec certains collègues qu'il est assez difficile pour une fîrme d'avocats située dans cette région de faire des affaires sans avoir de liens avec le parti au pouvoir.

    Le deuxième point porte sur les outils dont il disposait. Dans le dossier de Mme Sgro, il ne faut jamais oublier qu'il y a eu deux demandes. D'abord, Mme Sgro a demandé un avis au commissaire le 15 novembre 2004. Par la suite, il y a eu une demande d'enquête de la part de la députée de Calgary—Nose Hill le 22 novembre et le 14 décembre. Il y avait quand même eu une première demande d'avis. Or, en vertu de la loi, le commissaire devait répondre à la ministre. Je pense qu'il y a eu une erreur, et M. Shapiro l'a avoué la dernière fois que nous lui avons parlé. Il avait une entente avec Mme Sgro à l'effet que son avis serait traité dans le rapport. Souvenez-vous qu'il est écrit dans le rapport que Mme Sgro a par la suite demandé un avis indépendant, comme le lui permettait la loi, et de ne pas inclure cet avis dans le rapport.

    Il y a donc eu un avis, et il est écrit dans la loi que lorsque le commissaire donne un avis à un ministre qui en a fait la demande, il appartient à ce dernier de décider de le rendre public. Le commissaire ne peut pas choisir de le rendre public. Il appartenait à la ministre de le rendre public; ce qu'elle a fait.

    Le commissaire nous a avoué que c'était peut-être une erreur, mais quels sont ses pouvoirs quand une demande d'une ministre arrive avant le dépôt, en vertu de la loi, d'une plainte formulée par une députée? Que fait le commissaire? Doit-il jumeler cette demande et l'avis dans un seul rapport qu'il rendra public, ou doit-il donner l'avis quand même? Il nous a dit qu'il n'agirait peut-être pas de cette façon la prochaine fois.

À  +-(1000)  

    Est-ce que la loi le lui permet? Si jamais il le faisait, la ministre en question ne demanderait-elle pas, elle aussi, des avis juridiques pour dire au commissaire qu'elle veut obtenir son avis avant qu'il ne présente son rapport? Donc, déjà là, il y a un vide juridique qui devra être éclairci un jour, et le commissaire nous a dit que si cela arrivait, il n'agirait peut-être pas de la même façon.

    Je reviens toujours à ma question de départ: si une autre personne avait été à sa place, aurait-elle agi différemment? Encore là, je n'en suis pas sûr à 100 p. 100, monsieur le président.

    J'aborde maintenant le dossier de Tim Murphy, qui est finalement le troisième grand point. Je comprends que M. Broadbent a plus d'expérience que moi, mais j'ai beau lire et relire le Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat ainsi que le Code régissant les conflits d'intérêts des députés, ces derniers ne visent que les intérêts personnels. Je regrette, mais si on veut viser les intérêts politiques, il va falloir changer cela, car tous les termes que l'on trouve dans ces codes: « intérêts personnels », « intérêts publics », « cadeaux », « marques d'hospitalité », « traitement de faveur », « position d'initié », « biens du gouvernement », visent nos biens. Ces deux codes obligent les ministres et les députés à déposer annuellement un rapport dans lequel ils doivent établir la liste de leurs biens et mentionner s'ils ont reçu des cadeaux, mais on ne parle pas de conflits d'intérêts politiques. Le seul endroit où on parle de conflits d'intérêts politiques, c'est dans la loi qui a donné au commissaire à l'éthique les pouvoirs qu'il détient. Or, cette loi est on ne peut plus claire:

72.08 (1) Tout parlementaire qui a des motifs raisonnables de croire qu'un ministre, ministre d'État ou secrétaire parlementaire n'a pas respecté les principes, règles et obligations que le premier ministre établit pour les titulaires de charge publique peut demander par écrit au commissaire d'étudier la question.

    Cela ne vise que les ministres, les ministres d'État et les secrétaires parlementaires; cela ne vise pas les fonctionnaires.

    M. Shapiro nous a clairement dit que quand il enquêterait sur le ministre de la Santé, M. Dosanjh, il se trouverait automatiquement à analyser le travail de Tim Murphy et celui du premier ministre, mais cela ne nous permet pas, en tant que députés, de déposer des plaintes contre le premier ministre ni contre les fonctionnaires.

    Est-ce qu'on doit changer la loi? Oui, je suis d'accord qu'on doit la changer. Cependant, le commissaire à l'éthique nous a dit qu'il ne se sentait pas capable de faire une enquête directement à la suite d'une plainte d'un député, parce qu'il sent que la loi ne lui confère pas la compétence d'agir ainsi. Dans ce cas, je pense qu'il s'agit d'une situation difficile. De plus, si on devait remplacer le commissaire demain, son remplaçant serait aux prises avec la même loi. Si on veut faire un véritable ménage dans tout cela, il faudra évidemment faire des modifications législatives.

    Quant au manque d'expérience politique du docteur Shapiro, je vous dirais que c'est une chose qui s'apprend et qu'il est assez intelligent pour évoluer. D'ailleurs, une de ses grandes erreurs a peut-être été d'avouer bien ouvertement et avec candeur qu'il avait fait des erreurs.

    Tout à l'heure, mon collègue conservateur disait qu'il n'avait pas analysé la situation et qu'il n'était pas allé chercher les avis juridiques des juristes de la Chambre, qu'il ne savait pas qu'il pouvait le faire. En effet, il est possible que personne ne lui ait dit qu'il pouvait le faire et que personne au gouvernement ne lui ait donné un breffage où on lui aurait dit de s'adresser aux juristes de la Chambre s'il voulait obtenir un avis juridique. Il est allé chercher des avis juridiques à l'extérieur.

    Je suis conscient que le docteur Shapiro est suffisant intelligent pour être capable de réagir différemment si une telle situation se présente à nouveau.

    Est-ce qu'il a commis des erreurs par manque d'expérience politique? Je crois que oui. Est-ce que cela justifie qu'on décide aujourd'hui de le blâmer, de le récuser, de le remplacer? Nous maintenons que tant que les lois ne seront pas changées, le docteur Shapiro a encore notre confiance. Évidemment, nous l'avons critiqué et nous espérons qu'il ne commettra plus jamais les erreurs qu'il a avoué avoir commises, mais nous avons confiance en son intelligence et nous voterons contre la motion de M. Broadbent.

À  +-(1005)  

[Traduction]

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Madame Jennings, puis monsieur Lee.

[Français]

+-

    L'hon. Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je ne crois pas que M. Broadbent a fourni des justifications pour appuyer sa motion. Je crois que M. Shapiro, le commissaire à l'éthique, est un homme intègre, un homme d'expérience. S'il y a des faiblesses dans le système, la responsabilité en incombe plutôt aux parlementaires et à la Chambre des communes. Je crois que tout ce que les membres de ce comité, y compris moi-même, ont dit en ce qui concerne le processus qui a été suivi pour faire enquête sur les deux plaintes portant sur la conduite de l'honorable Judy Sgro constitue plutôt des critiques positives.

    C'est une expérience qui nous a démontré que le cadre législatif n'est pas parfait, qu'il laisse à désirer et qu'on devrait se pencher là-dessus de nouveau, profiter de cette expérience et, après mûre réflexion, peut-être proposer des amendements à la loi.

    Je ne pourrai donc pas appuyer la motion de M. Broadbent. Je trouve d'ailleurs vraiment regrettable que M. Broadbent l'ait présentée.

À  +-(1010)  

[Traduction]

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Merci.

    Monsieur Lee.

+-

    M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Je vous remercie.

    Mes observations ne seront peut-être pas très brèves, mais je... Je tenais aussi à vous remercier, madame Jennings, pour votre intervention.

    Je suis un peu d’accord avec M. Laframboise dans cette affaire. Je regrette vraiment ce que nous sommes en train de faire. C’est tout à fait déplacé parce que le bureau du commissaire à l’éthique est très récent. Si mes collègues veulent bien y penser, ils se rendront compte qu’il nous a fallu 10 ans pour faire adopter une loi et établir ce bureau. Ayant travaillé toutes ces années, nous avons constaté l’existence de nombreux obstacles dans l’élaboration de la loi, sa portée et le mandat du commissaire.

    M. Lukiwski a parlé au nom du parti conservateur. Je suis très déçu que le parti conservateur ait adopté cette position, qui semble coïncider avec celle de M. Broadbent et du NPD.

    Nous avons travaillé tellement fort et pendant si longtemps pour perfectionner ce nouvel instrument. Nous l’avons finalement mis en place. Nous avons trouvé la personne qui convenait pour remplir le poste. Tous les partis représentés à la Chambre des communes ont approuvé le choix de cette personne. Personnellement, j’ai trouvé très satisfaisants les titres de compétence de M. Shapiro. Je me suis souvent demandé qui voudrait d’un tel poste, de toute façon. Quoi qu’il en soit, il a accepté de le prendre.

    Il venait tout juste d’être nommé quand il a été saisi des documents déposés par plus de 300 députés. C’était une opération énorme, du point de vue logistique et technique. En même temps, si j’ai bien compris, M. Shapiro a perdu sa femme. Puis une ou deux plaintes ont été présentées.

    Quand il s’est attaqué à tout cela, il a constaté que la loi comportait des failles et des zones grises. À cet égard, nous sommes les seuls à blâmer. Il a poursuivi son travail et, à mon avis, il s’en est assez bien acquitté. Bien sûr, nous n’en sommes pas tous parfaitement satisfaits. Mais, malgré les difficultés posées par la loi, il a fait son travail et a porté un jugement.

    Voilà maintenant que certains membres du comité veulent lui tirer une balle dans la tête parce qu’ils ne sont pas d’accord avec lui sur les résultats ou sur la façon dont il a procédé. Pourtant, le Parlement, la Chambre – pas notre comité, mais le Parlement lui-même – a confié à cet homme des pouvoirs et des responsabilités. Il a fait ce qu’il devait faire du mieux qu’il a pu dans les circonstances.

    Je crois qu’il est vraiment triste, quand la Chambre a retenu les services d’une personne et a approuvé sa nomination, que le comité se livre à cette activité qui est pour le moins partiellement partisane en disant: Nous n’avons pas aimé ce que vous avez fait et voulons donc vous jeter dehors. Il me semble que nous nous trompons de cible. Il est triste que le Parlement en soit arrivé là.

    Ce n’est pas seulement l’intention. Notre façon de procéder est également en cause. Bien sûr, nous devons pouvoir parler librement ici, présenter des motions et faire ce que nous devons faire. Toutefois, j’ai été vraiment frappé par la façon dont M. Lukiwski a énuméré une série de faits qui, je le sais, nous le savons tous, ne sont que du ouï-dire. Nous le savons parce que M. Shapiro lui-même et l’un de ses collaborateurs ont témoigné ici la semaine dernière et nous ont dit quels étaient les faits, qu’en réalité, aucune exemption n’a été accordée. Dans un cas, il ne s’agissait que d’une rumeur publiée par un journal. Pourtant, M. Lukiwski a présenté cela aujourd’hui comme s’il s’agissait de faits. Il s’en est servi comme base de la position de son parti, qui veut transmettre à la Chambre un rapport disant que nous n’avons plus confiance dans M. Shapiro. Comme avocat, je suis révolté par l’injustice du procédé.

À  +-(1015)  

    Si le comité trouvait à redire au processus suivi par M. Shapiro, nous aurions dû, pour le moins, lui faire part de nos doléances dans une lettre et l’inviter à venir nous en parler, au lieu de le faire venir pour répondre à quelques questions sur le processus suivi et de s’en prendre à lui quelques jours plus tard. Je crois que nous aurions beaucoup de chance si nous pouvions même temps trouver quelqu’un au Canada qui accepterait ce poste. J’espère bien que M. Shapiro dira tout simplement aux conservateurs et aux néo-démocrates de décamper. Après tout, il travaille pour la Chambre et non pour le Nouveau Parti démocratique ou le parti conservateur. J’espère qu’il restera jusqu’au terme de son mandat parce qu’il jugera qu’il fait du bon travail. Personnellement, je crois qu’il a fait du bon travail.

    Permettez-moi d’ajouter maintenant quelques autres observations. J’en ai assez d’entendre des députés parler de conflit d’intérêts en pensant tout comprendre alors qu’ils ne savent pas de quoi il s’agit. L’existence d’un conflit d’intérêts n’implique pas nécessairement qu’une faute a été commise, à moins qu’un député ou un titulaire de charge publique n’y ait trempé dans son propre intérêt. Nous nous retrouvons tous assez souvent dans des situations de conflit d’intérêts. Monsieur le président, je vais vous présenter un scénario.

    Nous avons tous été candidats aux élections générales. Supposons qu’une personne veuille se faire engager parmi les membres de notre personnel. Supposons que cette personne vienne travailler à titre bénévole pour notre campagne avec l’intention explicite de se faire engager. Il est très possible que je ne sois pas au courant. Si je suis déjà député, j’ai des collaborateurs autour de moi qui le savent et un comité organisateur qui le sait. De mon côté, je ne sais pas que cette personne cherche du travail. Toutefois, c’est bien l’intention de cette personne qui contribue à ma campagne. Objectivement, je suis en situation de conflit d’intérêts. À titre de député, je tire parti du travail et de la contribution de cette personne à ma campagne de réélection. Le fait que cette personne veuille obtenir un emploi à mon bureau crée un conflit.

    Voilà donc le scénario de base, un scénario qui n’implique aucune faute, mais qui crée une situation de conflit, surtout si je viens à l’apprendre. Dois-je dire à la personne en question qu’elle doit cesser de travailler pour ma campagne? Je ne le crois pas. Voilà le genre de situation dans laquelle Mme Sgro s’est retrouvée lorsqu’une personne cherchant à obtenir un avantage s’est portée volontaire pour participer à sa campagne. Elle ne le savait même pas. Ses collaborateurs étaient au courant, mais pas elle. Il y avait donc conflit, et le commissaire a présenté un rapport à ce sujet. Je n’irai pas plus loin.

    Je voudrais présenter une autre analogie. À la Chambre des communes, nous élisons un Président au scrutin secret. Nous demandons à notre Président d’éviter toute forme d’esprit partisan et nous avons accepté comme règle de ne pas formuler de commentaires au sujet des décisions qu’il rend. Nous ne le faisons pas et ne pouvons pas le faire. Il est contraire au Règlement de la Chambre de formuler des observations au sujet des décisions du Président.

    Dans le cas présent, nous avons engagé un commissaire à l’éthique. Nous lui avons demandé de prendre des décisions qui, à mon avis, sont à 100 p. 100 de caractère judiciaire. Techniquement, ce sont des décisions quasi judiciaires, c’est-à-dire à 99 p. 100 de caractère judiciaire. Nous lui avons demandé de se prononcer d’une façon non partisane. Je crois que la loi créant le bureau du commissaire ne nous permet pas de discuter des dossiers pendant que son enquête est en cours...

À  +-(1020)  

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): C’est le code d’éthique des députés qui mentionne cette question.

+-

    M. Derek Lee: Est-ce bien le cas, monsieur le président?

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Je voulais juste vous signaler qu’il s’agissait du code d’éthique des députés. Je suppose que c’est à cela que vous faisiez allusion, et je...

+-

    M. Derek Lee: Oui. Pouvez-vous lire la disposition en question, aux fins du compte rendu?

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Oui.

    J’ai essayé de me conformer à ce que je considère comme une décision très difficile à cet égard, qui traite du fond de l’affaire, par opposition à la façon de procéder. Cette disposition figure dans le Code régissant les conflits d’intérêts des députés:

Une fois qu’une demande d’enquête a été adressée au commissaire, les députés devraient respecter le processus établi par le présent code et permettre son déroulement sans formuler d’autres commentaires à ce sujet.

    Je ne sais pas si vos observations s’adressaient à moi, mais c’est la raison pour laquelle j’essaie de faire la distinction entre la façon de procéder et le fond de l’affaire.

+-

    M. Derek Lee: Merci, monsieur le président. Je ne faisais pas allusion à vos décisions à ce sujet. Je crois que vous vous en êtes fort bien tiré. Mais, pour reprendre les paroles de M. Shapiro, il n’y avait ni noir, ni blanc.

    Quoi qu’il en soit, il est bon de demander aux députés de ne pas formuler d’observations sur le travail du commissaire à l’éthique, sur les dossiers dont il s’occupe ou sur les personnes avec qui il doit prendre contact. En effet, nous ne devrions pas le faire. Nous devrions permettre au commissaire de faire son travail et de prendre ses décisions, sans essayer d’anticiper et sans nous ériger en cour d’appel, comme je l’ai dit la semaine dernière.

    À quoi nous sert d’avoir un commissaire à l’éthique si, une fois qu’il a produit son rapport, nous reprenons toute l’affaire au comité et, dans le cas présent, demandons son renvoi? C’est vraiment affreux.

    Vous savez, j’aimerais beaucoup pouvoir persuader M. Broadbent de retirer sa motion. C’est vraiment une triste affaire. M. Broadbent est en politique depuis très longtemps. Je sais qu’il a cette affaire très à coeur. Je ne considère pas son travail comme étant excessivement partisan, mais je ne comprends vraiment pas pourquoi nous sommes incapables, autour de cette table, de placer la situation en contexte et de comprendre que toute la Chambre a besoin de ce genre de protection et de ce genre de compréhension du travail du commissaire à l’éthique.

    Si nous devons confier ces questions difficiles à un commissaire à l’éthique, nous devons lui accorder suffisamment de latitude. En fin de compte, si nous n’aimons pas ses décisions ou sa façon de procéder, nous n’aurons qu’à ne pas renouveler son mandat. Nous rechercherons d’autres qualités la prochaine fois. Mais, pour l’amour du ciel, nous devons éviter de transformer ce comité en tribunal chaque fois que le commissaire à l’éthique prend une décision que l’un d’entre nous ou plusieurs d’entre nous n’aiment pas.

    Nous voilà aujourd’hui en train de parler de personnes – il s’agit de particuliers, de citoyens et non de députés, de ministres ou de titulaires de charge publique – qui n’ont rien fait de mal. C’est comme le volontaire hypothétique que j’ai mentionné tout à l’heure et qui participe à une campagne politique. Nous parlons de ces gens ici, ayant pris leur nom sur l’une des pages du rapport. Nous les dénigrons et les impliquons dans des combines politiques. Personnellement, je n’ai rien vu qui constitue une combine politique, mais il est clair que l’opposition n’est pas du même avis.

    Monsieur le président, il y a deux jours, j’ai entendu l’un des dirigeants du parti conservateur dire à l’extérieur de la Chambre que les libéraux sont prêts à conclure un marché avec n’importe quelle bande d’escrocs. Cela revenait à dire que tous les partis politiques représentés à la Chambre des communes ne comprennent que des escrocs à l’exception d’un seul parti. Il n’y aurait qu’un seul parti qui ne soit pas formé d’une bande d’escrocs. Ce serait bien entendu le parti conservateur. Eh bien, qu’en savons nous? Il y a de la vertu partout.

    Il est évident que je n'appuie pas la motion, mais je voudrais inviter mes collègues à examiner cette question générale plus tard. Nous n’aurons pas un processus qui marche en matière d’éthique. Nous ne trouverons même pas quelqu’un qui accepte d’occuper le poste, car personne ne pourra tolérer ce genre de traitement. Qui sait? Peut-être un citoyen ferait-il un procès pour essayer de se protéger contre ce qui se passe ici.

À  +-(1025)  

    Je sais que nous ne permettons pas aux tribunaux de se mêler de ce que nous faisons. Nous avons ici une liberté d’expression garantie par la Constitution. C’est la raison pour laquelle nous devons être vigilants lorsque nous utilisons cette liberté d’expression parce que les citoyens ne peuvent pas venir ici pour se protéger. Nous devons donc faire attention quand nous utilisons le nom de personnes mentionnées dans ces rapports.

    Certaines de ces personnes sont de simples témoins et aucune de celles qui ont été mentionnées n’a rien fait de mal, que ce soit contre les dix commandements, contre la charte, contre le Code criminel ou contre le code de conduite. Il s’agit de simples citoyens dont le nom est mêlé à ce que les partis d’opposition appellent un scénario malsain de conflit d’intérêts.

    Eh bien, nous devons apprendre à nous maîtriser. Je n’ai pas l’intention d’appuyer cette motion. J’espère que M. Broadbent voudra bien la retirer.

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Merci, monsieur Lee.

    Monsieur Broadbent.

+-

    L'hon. Ed Broadbent: Merci, monsieur le président.

    [Éditeur: Inaudible] ... Je n’ai pas l’intention de la retirer.

    J’aimerais tenir compte de ce que mes collègues libéraux, en particulier, ont dit. Je note qu’ils n’ont répondu à aucune des six questions de fond que j’ai soulevées. Je vais cependant reprendre leurs arguments, un à un.

    L’un de mes collègues a dit que nous avons un commissaire, et non un conseiller en éthique. Les faits ne le confirment pas: il joue les deux rôles. Je demande au député qui a soulevé ce point de se reporter aux articles 72.07 et 72.08 du mandat du commissaire, qui mettent en évidence son rôle de conseiller. Il remplit donc les deux fonctions.

    Au sujet de la question du conflit d’intérêts, l’un de mes collègues s’est interrogé sur ce que les personnes mentionnées avaient fait de mal. J’ai essayé de souligner qu’au moins à mon avis, M. Shapiro n’a pas clairement dit dans son rapport que Mme Sgro savait qu’elle était en situation de conflit d’intérêts.

    J’ai écouté avec intérêt lorsque M. Lee a donné son exemple de conflit d’intérêts. J’ai rarement entendu quelque chose d’aussi bizarre. La personne qui travaille pour vous n’était pas en situation de conflit d’intérêts. Non, je ne le pense pas. Mais voilà où se situait le conflit d’intérêts. Si vous êtes ministre, si vous signez, en connaissance de cause, des permis de séjour temporaire en faveur de membres de la famille d’un travailleur de votre campagne électorale, vous êtes en situation de conflit d’intérêts. Vous récompensez quelqu’un, directement ou indirectement, pour son travail en signant un tel permis. C’est un conflit d’intérêts. Il n’est vraiment pas difficile de s’en rendre compte.

    L’autre point... Vous avez parlé de tribunaux de pacotille, etc. Je crois que c’est ridicule. J’ai essayé d’éviter toute observation à caractère partisan dans ce que j’ai dit. Vous pouvez approuver ou désapprouver les jugements. Ce n’est pas basé, comme les deux députés libéraux l’ont dit, sur le fait que certains partis d’opposition s’opposent à une décision. Je suis bien d’accord avec vous qu’il serait parfaitement irresponsable, de la part de n’importe quel député, de demander le renvoi du commissaire simplement parce qu’il n’aime pas une décision. Ce serait parfaitement irresponsable. Nous avons cependant le droit de porter un jugement en nous basant sur un ensemble de faits. Comment pourrions-nous autrement présenter des recommandations à la Chambre des communes? Il doit rendre compte de son activité à notre comité.

    Voilà pourquoi – vous pouvez bien ne pas être d’accord – j’ai cité...

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Il ne fait pas partie du comité.

+-

    L'hon. Ed Broadbent: C’est votre opinion.

    Il a pris une série de mauvaises décisions. Nous avons la responsabilité d’en tenir compte pour porter un jugement sur son rendement. Je ne vois rien de mal à agir de la sorte. Je le répète, il ne s’agit pas d’une décision ou deux. C’est toute une série de mauvaises décisions qui m’ont amené à cette conclusion.

    Mon honorable collègue a également mentionné le choix d’un cabinet d’avocats. J’ai souvent dit que je ne suis pas avocat. J’ai beaucoup d’autres défauts, mais pas celui-ci. Étant avocat, il prétend qu’il est impossible de trouver un cabinet d’avocats impartial parce que chacun a des membres qui appuient différents partis. En réalité, ils n’ont pas tous des membres qui appuient tous les partis. Je sais que ce n’est pas le cas. Beaucoup de cabinets ont effectivement des représentants de tous les partis, mais certains ont des liens particulièrement étroits avec un seul parti. M. Shapiro lui-même a admis devant le comité qu’il avait probablement pris une mauvaise décision en choisissant ce cabinet. Il ne s’agit donc pas de partis d’opposition qui essaient de marquer des points parce qu’ils sont dans l’opposition. M. Shapiro lui-même l’a reconnu.

    Quant à la décision du Président, elle ne s’appliquait qu’à l’affaire Grewal et Dosanjh. Par la suite, dans d’autres décisions prises à la Chambre, le Président a permis que des questions soient posées au sujet de M. Murphy et du premier ministre. Il n’a pas interdit ces questions. La décision qu’il a rendue à la Chambre, je le répète, portait sur l’affaire Grewal et Dosanjh. Il n’y a donc pas de doute que nous pouvons parler d’autres personnes. J’ai moi-même limité mes commentaires à M. Martin et M. Murphy.

    Enfin, pour ce qui est de l’accusation selon laquelle nous essayons de politiser le processus et de le rendre partisan, je vais formuler une observation que vous jugerez probablement partisane, même si j’essaie habituellement de l’éviter à tout prix.

À  -(1030)  

    Il me semble que le parti libéral a une vertu très caractéristique, si je peux m’exprimer ainsi. Chaque fois que quelqu’un formule une critique, les libéraux disent qu’il fait preuve d’esprit partisan, qu’il fait feu de tout bois ou qu’il se livre à un procédé de chambre étoilée. Pourquoi ce langage péjoratif? Ne peut-on pas, dans le cadre d’un débat critique, formuler des arguments qui ont une valeur intrinsèque, sans être traité de tous les noms? Est-ce que toute critique est, par définition, partisane? Si c’est le cas, j’aimerais bien savoir lequel, parmi mes six points, avait un caractère partisan.

    Je vous remercie.

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Eh bien, j’ai une liste. D’abord, monsieur Powers.

+-

    M. Russ Powers (Ancaster—Dundas—Flamborough—Westdale, Lib.): Je voulais proposer de passer au vote.

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Comme il ne semble pas y avoir d’autres orateurs, monsieur Powers, nous pouvons passer au vote.

    (La motion est rejetée.)

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Maintenant, mesdames et messieurs, nous avons deux autres questions à l’ordre du jour. Avant d’avoir des ennuis, comme la semaine dernière, je vais demander si nous voulons discuter de ces questions en public ou à huis clos.

+-

    M. Derek Lee: Si nous devons parler de nos travaux futurs, nous le faisons ordinairement à huis clos.

+-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Je suis passé par là la semaine dernière, et j’ai été réprimandé. C’est ce que je pensais, mais je ne voulais pas me faire prendre en défaut encore une fois.

    Comme personne n’intervient, je suppose que nous allons poursuivre à huis clos.

+-

    M. Derek Lee: Je propose que la séance se poursuive à huis clos, comme d’habitude, pour discuter des travaux futurs.

-

    Le président suppléant (M. David Tilson): Nous allons suspendre les délibérations pendant une minute ou deux pour laisser à tous ceux qui ne sont pas membres du comité le temps de quitter la salle.

    Je vous remercie.

    [La séance se poursuit à huis clos.]