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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de l'industrie, des ressources naturelles, des sciences et de la technologie


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 22 septembre 2005




¼ 1810
V         Le président (M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin—Kapuskasing, Lib.))
V         M. David Rolfe (président, Keystone Agriculture Producers, Fédération canadienne de l'agriculture)

¼ 1815
V         Le président
V         M. Garth Whyte (premier vice-président, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante)

¼ 1820
V         Le président
V         M. Graham Cooper (premier vice-président, Alliance canadienne du camionnage)

¼ 1825
V         Le président
V         M. J. Mackay (président et chef de la direction, Association du transport aérien du Canada)

¼ 1830
V         Le président
V         Mme Isabelle Durand (directrice adjointe par intérim, Option consommateurs)
V         Le président
V         Mme Isabelle Durand

¼ 1835
V         Le président
V         M. Stephen Hazell (directeur national de la conservation, Club Sierra du Canada)

¼ 1840
V         Le président
V         M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, PCC)

¼ 1845
V         M. J. Mackay
V         M. John Duncan
V         M. David Rolfe

¼ 1850
V         Le président
V         M. Paul Crête (Montmagny—L'Islet—Kamouraska—Rivière-du-Loup, BQ)
V         M. Graham Cooper

¼ 1855
V         Le président
V         M. Garth Whyte
V         Le président
V         M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.)
V         M. Graham Cooper

½ 1900
V         M. David Rolfe
V         Le président
V         M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD)
V         M. J. Mackay

½ 1905
V         Le président
V         M. Stephen Hazell
V         Le président
V         M. Garth Whyte
V         Le président
V         M. Garth Whyte
V         Le président
V         M. Werner Schmidt (Kelowna—Lake Country, PCC)

½ 1910
V         Le président
V         Me Jacques St-Amant (analyste-conseil, Option consommateurs)
V         Le président
V         M. J. Mackay
V         Le président
V         M. Garth Whyte
V         Le président
V         M. Marc Boulianne (Mégantic—L'Érable, BQ)

½ 1915
V         Mme Isabelle Durand
V         M. Marc Boulianne
V         M. David Rolfe

½ 1920
V         Le président
V         L'hon. Dan McTeague (Pickering—Scarborough-Est, Lib.)
V         M. J. Mackay
V         M. Garth Whyte
V         Le président
V         M. David Rolfe
V         Le président
V         L'hon. Dan McTeague

½ 1925
V         M. Garth Whyte
V         L'hon. Dan McTeague
V         M. Garth Whyte
V         L'hon. Dan McTeague
V         M. Garth Whyte
V         L'hon. Dan McTeague
V         M. Garth Whyte
V         L'hon. Dan McTeague
V         M. Garth Whyte
V         Le président
V         M. Bradley Trost (Saskatoon—Humboldt, PCC)
V         Le président
V         M. Bradley Trost
V         Le président
V         M. David Rolfe

½ 1930
V         Le président
V         M. Graham Cooper
V         Le président
V         M. J. Mackay
V         Le président
V         M. Garth Whyte
V         Le président
V         L'hon. Jerry Pickard (Chatham-Kent—Essex, Lib.)

½ 1935
V         Le président
V         L'hon. Jerry Pickard
V         Le président
V         M. Graham Cooper

½ 1940
V         L'hon. Jerry Pickard
V         Le président
V         M. J. Mackay
V         Le président
V         Le président
V         M. Bruce Cran (président, Association des consommateurs du Canada)
V         M. Mel Fruitman (vice-président , Association des consommateurs du Canada)

½ 1955

¾ 2000
V         Le président
V         M. John Williamson (directeur fédéral, Fédération des contribuables canadiens)
V         Le président
V         M. Frédéric Quintal (porte-parole, L'essence à juste prix)

¾ 2005
V         Le président
V         M. Kory Teneycke (directeur exécutif, Association canadienne des carburants renouvelables)

¾ 2010

¾ 2015
V         Le président
V         M. Jeff Passmore (vice-président exécutif, Corporation Iogen)
V         Le président
V         M. Claude Girard (porte-parole, Coalition pour la défense des consommateurs de carburant du Saguenay-Lac-St-Jean)

¾ 2020

¾ 2025
V         Le président
V         M. John Duncan

¾ 2030
V         Le président
V         M. Kory Teneycke
V         Le président
V         M. Jeff Passmore
V         Le président
V         M. John Duncan
V         Le président
V         M. Paul Crête
V         M. Frédéric Quintal

¾ 2035
V         M. Paul Crête
V         M. Frédéric Quintal
V         M. Paul Crête
V         M. John Williamson
V         Le président
V         L'hon. Dan McTeague

¾ 2040
V         M. John Williamson
V         L'hon. Dan McTeague
V         M. John Williamson
V         L'hon. Dan McTeague
V         M. John Williamson
V         L'hon. Dan McTeague
V         Le président
V         M. John Williamson
V         L'hon. Dan McTeague
V         Le président
V         M. John Williamson
V         L'hon. Dan McTeague
V         M. John Williamson
V         L'hon. Dan McTeague
V         Le président
V         M. Brian Masse

¾ 2045
V         M. Frédéric Quintal
V         M. Brian Masse
V         M. Frédéric Quintal
V         Le président
V         M. Brian Masse
V         M. Kory Teneycke

¾ 2050
V         Le président
V         M. Jeff Passmore
V         Le président
V         M. Michael Chong (Wellington—Halton Hills, PCC)

¾ 2055
V         Le président
V         M. Bruce Cran
V         Le président
V         M. John Williamson
V         Le président
V         M. Marc Boulianne
V         M. Claude Girard

¿ 2100
V         M. Marc Boulianne
V         M. Claude Girard
V         M. Marc Boulianne
V         M. Claude Girard
V         Le président
V         M. Andy Savoy
V         M. John Williamson
V         M. Andy Savoy

¿ 2105
V         M. John Williamson
V         M. Andy Savoy
V         M. John Williamson
V         M. Andy Savoy
V         M. John Williamson
V         M. Andy Savoy
V         M. John Williamson
V         M. Andy Savoy
V         M. John Williamson
V         M. Andy Savoy
V         M. John Williamson
V         M. Andy Savoy
V         M. John Williamson
V         M. Andy Savoy
V         M. John Williamson
V         M. Andy Savoy

¿ 2110
V         M. Kory Teneycke
V         Le président
V         M. Werner Schmidt
V         M. Jeff Passmore
V         M. Werner Schmidt
V         M. Jeff Passmore
V         M. Werner Schmidt
V         M. Kory Teneycke
V         M. Werner Schmidt
V         M. Kory Teneycke
V         M. Werner Schmidt
V         M. Jeff Passmore
V         M. Werner Schmidt
V         M. Jeff Passmore
V         M. Kory Teneycke

¿ 2115
V         M. Werner Schmidt
V         M. Kory Teneycke
V         M. Werner Schmidt
V         M. Kory Teneycke
V         M. Werner Schmidt
V         Le président
V         M. Kory Teneycke
V         Le président
V         M. Kory Teneycke
V         Le président
V         L'hon. Jerry Pickard

¿ 2120
V         M. Kory Teneycke
V         M. Jeff Passmore
V         L'hon. Jerry Pickard
V         Le président
V         M. John Williamson
V         Le président
V         M. John Williamson
V         Le président

¿ 2125
V         M. Bradley Trost
V         M. Jeff Passmore
V         M. Bradley Trost
V         M. Jeff Passmore
V         Le président
V         M. Werner Schmidt
V         Le président










CANADA

Comité permanent de l'industrie, des ressources naturelles, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 050 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 22 septembre 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¼  +(1810)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin—Kapuskasing, Lib.)): Nous sommes le 22 septembre 2005. Je déclare ouverte cette séance de soirée du Comité permanent de l’industrie, des ressources naturelles, des sciences et de la technologie.

    Nous sommes très reconnaissants du fait qu’un certain nombre d’organismes ont envoyé des délégués à nos séances d’aujourd’hui, qui sont consacrées aux récentes hausses – inhabituelles, je crois – des prix de détail de l’essence, aux difficultés prévues cet hiver en ce qui concerne les combustibles nécessaires au chauffage et aux effets sur les prix du carburant du récent ouragan Katrina et peut-être, dans les deux prochains jours, de l’ouragan Rita qui s’approche des côtes du Texas. Il est triste de constater que tant de personnes sont en difficulté à cause de ces terribles ouragans, mais cela constitue pour nous une importante occasion d’examiner et de mieux comprendre ce qui s’est passé. Voilà pourquoi vous avez été invités ici.

    Je tiens à remercier notre greffière ainsi que le greffier qui l’a aidée, Pierre Rodrigue, de même que Dan et tous les membres du personnel, pour leur contribution à l’organisation, à si bref délai, de la séance d’aujourd’hui. Je veux également remercier tous mes collègues qui ont fait preuve d’une grande coopération. Nous devons réaliser notre étude dans des délais très serrés. Je vous suis donc reconnaissant d’être venus pour passer environ une heure et demie avec nous.

    Pour ce qui est du programme de la séance, je dois vous demander de limiter votre exposé à un maximum de cinq minutes pour qu’il nous reste suffisamment de temps pour vous poser des questions. Si vous n’avez pas le temps de présenter certains éléments, parce que je vous aurais interrompus, vous pouvez être sûrs que vous aurez la possibilité d’en parler au cours de la période des questions et réponses. Je vais m’arrêter là pour que nous puissions nous mettre au travail tout de suite.

    Vous ayant tous remerciés, je vais maintenant demander à David Rolfe, président de la Fédération canadienne de l’agriculture, de prendre la parole. Encore une fois, nous vous serions reconnaissants de vous limiter à un maximum de cinq minutes.

+-

    M. David Rolfe (président, Keystone Agriculture Producers, Fédération canadienne de l'agriculture): Je vous remercie. C’est vraiment un plaisir pour moi d’être ici ce soir pour présenter un exposé au comité. Je voudrais cependant faire une mise au point. Je ne suis pas président de la Fédération canadienne de l’agriculture. Je ne fais que présenter cet exposé au nom du président de la Fédération.

    Les incidences de la hausse du prix du carburant sont certainement graves dans le secteur agricole. Nous en sommes actuellement au stade de la récolte. Il est malheureux que la hausse des prix survienne au moment même où notre consommation de carburant est à son maximum. Les moissonneuses-batteuses et tout le matériel de récolte sont en marche. C’est donc un très mauvais moment.

    Je voudrais nous présenter quelques statistiques sur la consommation de carburant du secteur agricole. Les dernières données dont nous disposons remontent à 2003. En 2003, la consommation de carburant diesel dans l’agriculture s’est élevée à 2,25 milliards de litres et la consommation d’essence, à 1,52 milliard de litres. Comme vous pouvez le constater, la montée des prix aura des effets très sérieux dans notre secteur.

    Nous avons également à vous présenter quelques autres chiffres tirés des données du recensement de Statistique Canada sur le secteur agricole. Pour notre industrie, l’augmentation des coûts de carburant sera de 757 millions de dollars. En examinant le nombre d’exploitations agricoles au Canada et le revenu par famille agricole, on constate qu’en 2003-2005, le revenu par exploitation sera de 3 734 $. Ce chiffre est vraiment très petit parce que nous vivons une période de baisse généralisée du prix des denrées et de hausse constante du prix des intrants. Les conséquences pour les exploitations agricoles seront donc importantes.

    Je vous disais donc que le revenu par famille agricole s’élève à 3 734 $. Or l’augmentation des coûts de carburant atteindra 3 369 $, engloutissant donc la plus grande partie du revenu agricole et laissant les producteurs pratiquement sans revenu, ce qui est vraiment déplorable.

    Mais l’augmentation du prix du carburant, que ce soit le diesel ou l’essence, n’est que l’un des aspects du problème que connaît l’agriculture. Nous avons des coûts directs de carburant et des questions de consommation, mais il y a d’autres aspects à considérer. Nous assistons en même temps à une hausse des prix du gaz naturel et du propane. Avec l’hiver qui vient, nous devons également tenir compte des coûts assez importants de chauffage pour le bétail, l’horticulture et l’entreposage des légumes. Ce sera un problème difficile à affronter dans un secteur dont les marges bénéficiaires sont déjà très serrées.

    Nous devons également considérer d’autres questions. Tout ce qui est livré à une exploitation agricole, de même que tout ce qu’elle expédie implique des frais de transport, des frais de camionnage qui s’accompagneront de suppléments pour le carburant. Dans l’Ouest, la plus grande partie des céréales est transportée par chemin de fer, ce qui impliquera également des suppléments.

    Il est très difficile pour notre secteur de faire assumer ces coûts en aval. La plupart des autres industries peuvent imposer des suppléments d’une forme ou d’une autre. Les secteurs du transport aérien et du transport maritime ainsi que les producteurs de biens de consommation peuvent généralement facturer des suppléments pour le carburant. À cet égard, l’agriculture est défavorisée: il lui serait, par exemple, très difficile d’imposer un supplément pour le carburant sur chaque boisseau de grain, chaque porc et chaque bœuf vendu. Nous sommes donc dans une situation difficile.

    Nous nous attendons par ailleurs à d’autres augmentations des prix du carburant et des coûts des intrants pour cet automne et le printemps 2006. La production des engrais, notamment de l’ammoniac anhydre et de l’urée, nécessite d’énormes quantités de gaz naturel. Cela nous causera des difficultés extrêmes sur le plan des prix et des intrants lorsqu’il faudra faire les semailles en 2006. Les prix ont grimpé en flèche pour atteindre des niveaux presque sans précédent. Compte tenu de la situation déjà précaire de l’agriculture et du fait qu’il nous est malheureusement impossible de transmettre les augmentations de coûts en aval, notre secteur connaîtra des difficultés extrêmes pendant l’hiver et au printemps 2006.

    Ce n’est donc pas seulement le carburant que nous consommons directement. Il faut aussi tenir compte des coûts que d’autres industries transmettront à l’agriculture primaire. Nous connaîtrons donc de très sérieuses difficultés à l’avenir.

¼  +-(1815)  

+-

    Le président: Merci beaucoup. Je vous suis reconnaissant d’avoir respecté la limite de temps.

    J’ai omis de mentionner ce que vous savez probablement déjà: notre séance est télévisée à l’échelle nationale sur la chaîne des affaires publiques CPAC. Vous avez donc la possibilité de faire état de vos préoccupations non seulement devant nous, mais aussi devant vos propres groupes et devant le grand public.

    Nous passons maintenant à M. Garth Whyte, de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante.

+-

    M. Garth Whyte (premier vice-président, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante): Merci, monsieur le président. Je voudrais aussi remercier le comité, la greffière et le personnel pour leur aide. Nous avons eu une semaine pour nous préparer, ce qui nous a permis de produire une bonne trousse de documentation à votre intention. J’espère que vous avez le document devant vous parce que je vais m’y reporter.

    Nous ne sommes pas des experts en prix des carburants, mais nous connaissons bien les problèmes de la petite entreprise. Nous représentons des camionneurs qui voient fondre leurs bénéfices. Nous représentons des fabricants qui voient monter leurs frais d’expédition. Nous représentons des hôteliers qui s’inquiètent de voir diminuer le nombre de leurs clients. Nous avons parmi nos membres des agriculteurs qui, comme David vient de vous le dire, utilisent du carburant pour faire leur récolte et l’expédier vers les marchés. Nous représentons des détaillants. Comme vous le savez, notre Fédération compte 105 000 propriétaires d’entreprises dont beaucoup s’inquiètent de la situation aussi bien de leur entreprise que de leurs employés. Voici ce qu’ils nous disent... J’ai ici des graphiques que je voudrais rapidement passer en revue.

    La première de ces trois pages montre essentiellement l’importance des PME pour l’économie canadienne: elles représentent 45 p. 100 du PIB et 60 p. 100 du nombre total d’emplois. La deuxième page est celle de notre baromètre des affaires. Malheureusement, nous ne disposerons pas des derniers chiffres avant la semaine prochaine, mais il s’agit d’un indicateur extraordinaire de ce qui se passe dans l’économie. Nous attendons avec impatience les projets d’embauche, mais ce graphique montre que l’optimisme avait déjà commencé à baisser avant la montée du prix du carburant.

    Je voudrais attirer votre attention sur la figure 3, qui présente les réponses à la question suivante: Compte tenu de vos attentes et de votre rendement des 12 derniers mois, quels sont les aspects qui se sont détériorés? Notre enquête date du mois de juin, avant la crise, avant l’ouragan Katrina. Vous remarquerez que 78 p. 100 des répondants ont jugé que le prix de l’énergie constituait le plus important facteur influant sur leur entreprise. Et cela se passait avant que nous ayons besoin de ce comité.

    Le graphique suivant montre que beaucoup de nos propriétaires d’entreprise s’attendent à majorer leurs prix de moins de 2 p. 100. Seuls 31 p. 100 des répondants ont dit qu’ils comptaient augmenter leurs prix de plus de 2 p. 100. Cela signifie qu’ils ne peuvent pas transmettre à leurs clients une grande partie de la hausse de leurs coûts.

    Passons maintenant à la question des taxes sur le carburant. Je suis à la page 6. Nous avons posé une question et avons reçu 10 000 réponses jusqu’au 2 septembre 2005. La question était la suivante: Devrait-on réduire les taxes perçues sur le carburant pour endiguer la hausse des prix de l'énergie? 74 p. 100 des répondants ont dit oui et 21 p. 100 ont dit non, 5 p. 100 étant indécis. Le graphique suivant, à la page 7, montre les résultats par province. Il est intéressant de noter que l’Alberta a l’un des chiffres les plus élevés, 80 p. 100 des répondants ayant répondu oui, par rapport à 70 p. 100 en Ontario. Vous pouvez voir les chiffres des autres provinces.

    Le graphique suivant présente des données que le comité trouvera intéressantes, je l’espère. Nous avons demandé: Quelles incidences les prix des carburants actuels ont-ils sur la rentabilité quotidienne de votre entreprise? Nous avons posé cette question pour le comité. Nous avons reçu 1 800 réponses: 83 p. 100 ont dit que leur entreprise était moins rentable et près d’un répondant sur cinq (19 p. 100) a dit que son entreprise perd de l’argent.

    Par conséquent – et cela ne surprendra pas certains des autres témoins –, quels sont les secteurs les plus touchés? Sur le graphique, le bleu représente les entreprises qui perdent de l’argent. Dans le secteur des transports, 32 p. 100 ont dit qu’ils perdaient actuellement de l’argent. Pourtant, cela était antérieur aux pointes dont nous parlons aujourd’hui. Dans le secteur primaire, l’agriculture, l’hébergement et la vente au détail, un répondant sur quatre a dit qu’il perdait de l’argent et ce, au moment où l’essence ne coûtait qu’environ 1 $ le litre.

    Nous avons ensuite demandé: À terme, comment vos activités commerciales peuvent-elles se poursuivre si les prix des carburants restent aux niveaux actuels? Les niveaux actuels, à ce moment-là, n’étaient pas à 1,05 $ ou 1,20 $, ils n’étaient pas au niveau signalé à Stoney Creek qui, d’après un journaliste, atteignait 1,99 $. Ils étaient plutôt aux alentours de 1 $. En réponse à cette question, 45 p. 100 des répondants ont dit qu’ils pouvaient affronter ces niveaux en procédant à des ajustements mineurs, 52 p. 100 ont dit avoir besoin d’ajustements majeurs et, parmi ces 52 p. 100, 9 p. 100 croyaient que leur entreprise risquait de ne pas survivre si les prix se maintenaient aux niveaux actuels. Comme l’a dit David, 24 p. 100 des répondants du secteur de l’agriculture estimaient que leur entreprise pourrait ne pas survivre. C’était également le cas d’un répondant sur cinq dans le secteur des transports et de 17 p. 100 des répondants du secteur primaire. Vous pouvez voir le reste de la liste.

¼  +-(1820)  

    La question suivante, à la page 12, était: Le gouvernement fédéral doit-il mettre en œuvre un nouveau plan pluriannuel de réduction des impôts? C’est notre première recommandation. La hausse des prix du carburant a créé beaucoup d’incertitude. Or 77 p. 100 des 15 000 propriétaires d’entreprises qui ont répondu étaient d’accord que l’une des stratégies que vous devriez envisager consiste à établir un plan quinquennal de réduction des impôts et taxes sur le carburant ainsi que sur le revenu des particuliers et des sociétés, afin de faire baisser les coûts d’une façon générale.

    Parmi nos autres recommandations, nous proposons essentiellement de réduire d’une manière globale la taxe sur les carburants. Nous nous demandons pourquoi les taxes provinciale et fédérale devraient se situer entre 40 et 50 p. 100 du prix, alors qu’elles ne s’élèvent qu’à environ 20 p. 100 aux États-Unis. Nous croyons que vous devriez éliminer la taxe d’accise de 1,5c. le litre destinée à réduire le déficit puisque nous n’en avons pas eu depuis plusieurs années. Nous croyons que vous devriez éliminer la taxe sur la taxe. Pourquoi imposer une taxe fédérale d’accise à laquelle s’ajoute une taxe de vente provinciale puis la TPS? Nous convenons avec le comité que le Bureau de la concurrence devrait surveiller étroitement les développements dans l’industrie pour découvrir tout indice de fixation concertée des prix et d’exploitation des consommateurs. Nous croyons qu’il faudrait conférer plus de pouvoirs au Bureau de la concurrence pour lui permettre de mieux surveiller l’industrie. Nous ne voulons rien imposer à un secteur quelconque, mais il est parfois nécessaire de mettre un frein à la concurrence déloyale. Il faut donc que les pouvoirs publics suivent la situation pour déterminer ce qui se passe.

    Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Vous avez tous fait un travail considérable en très peu de temps pour nous aider. Nous vous en sommes très reconnaissants.

    C’est maintenant au tour de M. Graham Cooper, de l’Alliance canadienne du camionnage.

+-

    M. Graham Cooper (premier vice-président, Alliance canadienne du camionnage): Merci, monsieur le président. J’espère pouvoir vous donner un bref aperçu de notre industrie et de la façon dont la hausse actuelle des prix nous touche. Je n’essaierai pas de vous inonder de chiffres. Je vais juste vous présenter un instantané de la situation.

    D’une façon générale, le coût du carburant diesel se classe deuxième parmi l’ensemble des éléments de la structure de coûts de l’industrie du camionnage. Les chiffres varient avec le type d’entreprise, mais, d’une façon générale, le carburant est, après les frais de main-d’oeuvre, l’élément le plus important de la structure de coûts. Pour les transporteurs à charge complète, le carburant représente 20 à 30 p. 100 des coûts.

    Vous voudrez bien m’excuser d’employer des expressions que vous ne connaissez peut-être pas, mais, pour les transporteurs de détail, c’est-à-dire ceux qui exploitent un réseau de terminaux et transportent un certain nombre de petites charges, la part du carburant dans les coûts est un peu moins élevée parce qu’ils ont d’autres coûts importants, comme l’exploitation du réseau de terminaux.

    Il y a environ 600 000 camions lourds au Canada, dont 280 000 sont des véhicules de route, c’est-à-dire des véhicules lourds de la classe 8 qui font du transport interurbain, interprovincial et international.

    Le Canada compte quelque 10 000 transporteurs routiers, le nombre exact dépendant de la façon de compter. Ce n’est jamais une science exacte, mais les chiffres sont de cet ordre de grandeur. Ces transporteurs s’occupent d’environ 90 p. 100 des biens de consommation expédiés à l’échelle nationale et, comme vous le savez, j’en suis sûr, ils s’occupent aussi de plus de deux tiers des biens échangés entre le Canada et les États-Unis.

    En ce qui concerne particulièrement le prix du carburant, lorsque la première – je devrais peut-être dire la dernière – des séries de hausses des prix a commencé en 2001, la plupart des transporteurs routiers avaient des contrats avec leurs clients et leurs expéditeurs qui ne tenaient pas compte des fluctuations du prix du carburant ou ne permettaient pas d’y réagir assez rapidement. Depuis, la majorité des transporteurs routiers canadiens – et, bien sûr, américains et européens – ont mis en place un système de suppléments pour le carburant. Ce système permet de suivre le prix du carburant, de l’exprimer en fonction d’un prix de base établi en 2001 ou 2002 et de rajuster le taux de transport en conséquence.

    Pour vous donner un exemple des effets de ce système, je dirais que le supplément pour carburant d’une entreprise de transport intérieur à charge complète – qui livre d’ordinaire à un seul endroit des chargements complets provenant d’un seul client – représente actuellement environ 25 p. 100 du taux de transport.

    Permettez-moi de vous donner un exemple de ce que cela signifie en pratique. Les chiffres varient bien sûr avec le produit transporté, la distance et d’autres facteurs. J’ai donc choisi l’exemple hypothétique d’un chargement d’appareils électroménagers.

    Dans le cas où des appareils électroménagers – réfrigérateurs, sécheuses ou autres – sont expédiés du sud de l’Ontario vers la région montréalaise, le transport du chargement, qui compte ordinairement une cinquantaine d’appareils, coûtera au total entre 800 $ et 1 000 $, avant le supplément pour carburant.

    Disons que le prix est de 900 $. Un supplément de 25 p. 100 s’élèverait donc à 225 $, c’est-à-dire 4,50 $ par appareil. Ce n’est là que l’élément de carburant de cet appareil qui est probablement livré à un grossiste.

    Je dois ajouter qu’aucune partie de ce supplément ne s’ajoute au bénéfice du transporteur. Garth a parlé tout à l’heure de marges bénéficiaires très serrées. Dans l’industrie du camionnage, les marges sont infimes depuis des années et le seront probablement toujours, du moins dans l’avenir prévisible, à cause de la concurrence et d’autres facteurs. Dans certains cas, le supplément imposé par les transporteurs à leurs clients n’est même pas suffisant pour couvrir les hausses successives du prix du carburant, notamment en période de fortes fluctuations, comme à l’heure actuelle. Il est évident que les suppléments assurent aux transporteurs une certaine protection, mais celle-ci est loin d’être parfaite. Bien sûr, les fortes fluctuations aggravent la situation. Il peut bien arriver, par exemple, qu’un supplément soit fixé le mardi et que le transporteur commence à perdre de l’argent dès le jeudi suivant.

¼  +-(1825)  

    Je vais m’arrêter là, monsieur le président. Je serais heureux de répondre à vos questions plus tard.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Je sais que dans ma propre circonscription du nord de l’Ontario, il y a beaucoup d’exploitants de grumiers qui commencent à avoir des difficultés, comme tous vos membres. Merci encore.

    Nous passons maintenant à M. Clifford Mackay, de l’Association du transport aérien du Canada.

+-

    M. J. Mackay (président et chef de la direction, Association du transport aérien du Canada): Merci, monsieur le président.

    L’ATAC représente l’aviation commerciale dans le pays. Elle compte quelque 300 membres, comprenant tant des transporteurs aussi importants et connus que WestJet et Air Canada que de petites écoles locales de pilotage.

    Je voudrais concentrer mes observations d’aujourd’hui sur trois points. Je vais d’abord vous donner un peu de contexte quant aux incidences de la situation sur notre secteur et nos clients. Je parlerai ensuite du rôle du gouvernement, puis je vous présenterai quelques recommandations.

    Je commence donc par le contexte. Comme dans le cas des camionneurs, le carburant occupe la deuxième place parmi les coûts les plus importants de notre industrie, après les coûts de main-d’oeuvre. Dans les deux dernières années, par exemple, le prix du carburant est passé pour nous d’environ 29 à 38 $ US le baril. Bien sûr, nous en sommes aujourd’hui à bien plus de 50 $ US le baril. D’après des estimations mondiales récentes, si les prix moyens du carburant se situent cette année à environ 57 $ US le baril, le coût mondial du carburant s’élèverait à 100 milliards de dollars, soit le double de ce qu’il était il y a 12 mois. Il en est de même au Canada parce que nous sommes soumis aux mêmes pressions que partout ailleurs dans le monde.

    Qu’essayons-nous de faire pour affronter cette situation? Les grandes sociétés, comme Air Canada et WestJet, ont à deux reprises ajouté des suppléments à leurs prix ces derniers mois. Toutefois, comme dans le cas des camionneurs, je dois dire que ces suppléments ne permettent absolument pas de recouvrer les hausses de coûts. Les grandes sociétés procèdent également à des opérations de couverture et recourent à différentes autres stratégies pour maximiser leur rendement par tous les moyens possibles. Malgré cela, les hausses ont commencé à réduire très sensiblement la rentabilité.

    Chez Air Canada, chaque hausse de 1 $ du prix du pétrole réduit les bénéfices de 28 millions de dollars. Air Transat a récemment annoncé que ses profits baisseraient sensiblement à cause du coût du carburant. Cette semaine, Clive Beddoe a dit que même s’il s’attendait à ce que WestJet réalise des bénéfices, ce trimestre a été plutôt difficile pour la société. Aux États-Unis, deux autres grands transporteurs ont entamé des procédures de faillite la semaine dernière, essentiellement à cause de la hausse du prix du carburant.

    L’industrie a donc des problèmes très sérieux.

    Je dois également parler des petits transporteurs. Ils ont encore moins de marge de manoeuvre parce que leurs bénéfices sont encore plus petits que ceux des grands transporteurs. Ils ne peuvent pas procéder à des opérations de couverture parce qu’ils manquent de capacités financières. Ils n’ont pas la flexibilité opérationnelle nécessaire pour essayer différentes stratégies. Ils encaissent donc tous les coups. Vous avez entendu parler plus tôt des difficultés de la petite entreprise. Elles sont les mêmes dans notre secteur.

    Le prix du brut n’est pas pour nous le seul facteur de coût. Je dois dire au comité qu’à part tout ce que nous avons à subir, le gouvernement fédéral et les provinces imposent des taxes spéciales sur le carburant d’aviation. Au niveau fédéral, les fournisseurs de services aériens doivent acquitter une taxe supplémentaire de 4c. le litre sur le carburant d’aviation. Au niveau provincial, il y a également une taxe supplémentaire allant de 1c. à 5c. le litre, selon l’endroit. Pour vous donner une idée de l’importance de cette taxe, je dirai que, depuis 1999, le gouvernement fédéral a perçu plus de 300 millions de dollars en taxes sur le carburant. D’après nos estimations – je dis bien que ce ne sont que des estimations –, nous aurons à verser bien plus de 100 millions de dollars à cet égard.

    De notre point de vue, il est insensé que le gouvernement fédéral réalise ainsi de tels gains en profitant de la catastrophe qui s’abat sur nous. C’est d’autant plus irritant quand on se rend compte que Michael Wilson avait introduit cette taxe sur le carburant pour combattre le déficit. Auparavant, le secteur de l’aviation n’avait pas à payer de taxes sur le carburant.

    Que conviendrait-il donc de faire? Nous croyons que le gouvernement du Canada devrait concentrer ses efforts sur son objectif déclaré d’amélioration de la compétitivité et d’augmentation du rendement économique au Canada. Toutefois, pour le faire, il doit renoncer à son objectif à court terme de maximisation des recettes fiscales et adopter une politique plus susceptible de favoriser la croissance, l’efficacité et l’innovation.

    Dans le secteur de l’aviation, je dois vous dire que des coûts additionnels de 100 millions de dollars représentent un énorme fardeau. Ils entraînent une augmentation du coût des vols, réduisent notre marge de manoeuvre et, d’une façon générale, imposent encore plus de contraintes dans une situation déjà précaire. La vraie question, pour nous, est de savoir si les gouvernements sont disposés à réduire ces taxes sur le carburant.

    Le printemps dernier, le Comité permanent des transports avait déjà expressément recommandé un moratoire et une élimination progressive des taxes sur le carburant ainsi que d’autres mesures destinées à augmenter la compétitivité et l’efficacité de l’industrie. Jusqu’ici, le gouvernement semble vouloir continuer à percevoir le plein montant de ces taxes, ce qui, à notre avis, est préjudiciable aux voyageurs et aux expéditeurs canadiens qui comptent sur une industrie saine et efficace non seulement pour eux-mêmes, mais aussi pour leurs clients au Canada et dans le monde.

¼  +-(1830)  

    Nous voudrions également suggérer respectueusement que le gouvernement pourrait songer à reconnaître qu’il ne convient pas de taxer les intrants nécessaires à l’exploitation d’une entreprise. La plupart des économistes vous diront la même chose. S’il faut imposer des taxes, elles devraient s’appliquer aux extrants, aux bénéfices et aux salaires. Cette façon de procéder rapprocherait les intérêts de l’industrie et du gouvernement.

    Dans l’approche actuelle, le gouvernement est gagnant tandis que l’industrie et les voyageurs canadiens sont perdants. Une telle situation est simplement intenable à long terme. Elle est de plus contraire aux objectifs déclarés de compétitivité et d’innovation du gouvernement.

    Merci beaucoup, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci à vous, monsieur Mackay.

[Français]

    Madame Isabelle Durand, de l'association Option consommateurs, a maintenant la parole.

+-

    Mme Isabelle Durand (directrice adjointe par intérim, Option consommateurs): Merci.

+-

    Le président: Vous pouvez vous exprimer en français ou en anglais.

+-

    Mme Isabelle Durand: Je parlerai en français.

    Les consommateurs canadiens sont inquiets de la montée des prix de l'essence et du mazout. Ils soupçonnent l'industrie de pratiques abusives. Ils se sentent impuissants et ils attendent beaucoup des pouvoirs publics. Nous remercions, par conséquent, le Comité permanent de l'industrie d'avoir bien voulu nous accueillir ce soir.

    Comme vous le savez, Option consommateurs est une association de consommateurs dont le siège social est à Montréal, mais qui s'intéresse depuis longtemps à des dossiers d'envergure nationale, notamment à la question de l'énergie, à l'égard de laquelle nous intervenons à divers titres depuis plus de 10 ans.

    Les gouvernements, donc, et notamment celui du Canada, peuvent agir. Il faut d'abord une analyse rigoureuse de la situation, puis le génie d'agencer des politiques à long terme et des mesures de soutien à court terme. C'est ce que nous expliquerons dans les quelques minutes qui viennent. Vous trouverez nos 15 recommandations en annexe du texte de mon allocution.

    Le coût moyen de production d'un baril de pétrole dans le monde est de 7 $. Le prix du brut fixé sur les marchés internationaux en est complètement dissocié et il est, au moins pour la moitié, le résultat d'opérations purement spéculatives.

    Au Canada, le raffinage et la distribution constituent des marchés de plus en plus concentrés, ce qui ouvre la porte à des pratiques oligopolistiques légales, mais inefficientes. Même certaines conventions comptables contribuent possiblement à la hausse incessante du prix du litre d'essence. D'autre part, le marché de l'est du Canada est tributaire des importations de pétrole en provenance d'Europe et d'Afrique du Nord.

    Le Canada est le septième plus important consommateur de pétrole au monde, et ce, malgré sa faible population. Pour le consommateur qui utilise une automobile et qui se chauffe au mazout, la hausse actuelle des prix des produits pétroliers peut aisément se traduire par une augmentation de son budget d'environ 100 $ par mois. Les adaptations qui seront nécessaires ne peuvent cependant résulter que de choix individuels. Les consommateurs sont captifs de structures socio-économiques, comme l'étalement urbain, qui entraîne des comportements énergivores.

    Il faut agir à deux niveaux: la consommation d'énergie et le fonctionnement des marchés. Il faut combiner des politiques structurelles et des actions immédiates.

    Le Canada doit réviser et renforcer ses politiques en matière d'économie d'énergie et de migration vers les énergies renouvelables. Il peut notamment intervenir par un soutien financier, les activités de recherche et la révision des normes de construction. Le transport en commun doit bénéficier d'un soutien plus considérable. Entre autres, on pourrait accorder un crédit d'impôt aux usagers réguliers du transport en commun. Le transport ferroviaire devrait aussi être encouragé. On devrait également rehausser les normes de consommation de carburant des véhicules automobiles et soutenir, par des mesures fiscales, l'achat de véhicules peu énergivores.

    Dans l'immédiat, il faut mettre en place une allocation de chauffage mensuelle au bénéfice des ménages à faible revenu qui ont recours au mazout. Un tel programme est nécessaire. Il peut être efficace et bien ciblé.

    Le gouvernement devrait aussi envisager de réduire sensiblement son soutien fiscal à l'industrie pétrolière canadienne et se servir plutôt de ses outils fiscaux pour rééquilibrer l'actuel transfert de richesses des consommateurs vers cette industrie. Des mesures particulières et temporaires pour aider les entreprises inévitablement énergivores et les consommateurs résidant dans les régions périphériques devraient être adoptées rapidement.

    Dans son état actuel, la Loi sur la concurrence ne permet pas de détecter ou de réprimer des pratiques oligopolistiques qui visent non pas à réduire la concurrence, mais à profiter du faible degré de concurrence pour fixer des prix abusifs. Le Parlement devrait rapidement corriger ces lacunes en s'inspirant des mesures existant déjà ailleurs.

    Pour contribuer à juguler les opérations spéculatives sur le pétrole, le Canada devrait, d'autre part, soutenir les efforts visant la mise en place d'une taxe internationale sur de telles opérations, inviter les organismes de réglementation des États-Unis et du Royaume-Uni à renforcer l'encadrement de ces opérations et surimposer les entreprises canadiennes qui s'y adonnent. Il faut agir maintenant pour rassurer la population et éviter de sérieux déséquilibres économiques. Nos gouvernements en ont les moyens.

    Nous vous remercions de votre attention. C'est avec plaisir que nous répondrons aux questions.

¼  +-(1835)  

[Traduction]

+-

    Le président: Merci beaucoup, cela fait exactement cinq minutes.

    Stephen Hazell, du Club Sierra du Canada.

+-

    M. Stephen Hazell (directeur national de la conservation, Club Sierra du Canada): Merci, monsieur le président.

    En 2003, la revue The Economist a annoncé la fin de l’ère du pétrole. L’année suivante, le National Geographic annonçait la fin de l’ère du pétrole bon marché.

    La réalité, c’est que l’ère du pétrole bon marché est révolue. Oui, Katrina et Rita entraîneront des hausses brutales des prix qui provoqueront, à leur tour, beaucoup de difficultés. Je crois cependant qu’il faut affronter la réalité: les prix du pétrole et du gaz naturel continueront à monter.

    Comment puis-je dire cela? Les économistes discutent pour déterminer si 2006 marquera un sommet dans la production mondiale de pétrole. Certains économistes croient que ce sommet ne sera atteint que dans 10 ou 20 ans, mais il est indiscutable que, depuis 25 ans, nous produisons et consommons plus de pétrole que nous n’en découvrons. Nous ne trouvons pas suffisamment de nouveaux gisements pour remplacer ce que nous consommons. De plus, le coût de la prospection augmente très sensiblement tandis que la taille des bassins diminue.

    Le Club Sierra croit que nous devons considérablement réduire notre dépendance des combustibles fossiles dans un proche avenir. Une hausse du prix du pétrole fait partie de la solution. Pourquoi devons-nous dépendre moins des combustibles fossiles? C’est parce qu’il y a de plus en plus de preuves irréfutables du fait que notre climat change d’une façon très sensible. Les glaces de l’Arctique ont rétréci de 10 p. 100. La taille des glaciers alpins de l’Ouest du Canada a beaucoup diminué, réduisant l’alimentation d’été de l’Athabasca, de la rivière de la Paix et de la rivière Saskatchewan. Nous connaissons des hivers plus doux et des étés plus chauds. Nous avons donc un problème mondial sérieux.

    On peut discuter de la question de savoir dans quelle mesure les ouragans Katrina et Rita sont liés au changement climatique. D’après le Globe and Mail, il n’existe aucun lien. Il est vrai qu’on ne peut pas déterminer qu’un ouragan donné est directement attribuable au changement climatique, mais il y a des indices selon lesquels l’intensité et la durée des ouragans en dépendent dans une certaine mesure. Il y a des preuves scientifiques de cette affirmation.

    Parlons maintenant de l’industrie du pétrole et du gaz, qui reçoit actuellement des subventions fédérales d’environ 1,4 milliard de dollars par an. J’ai ici une étude du Pembina Institute, que je peux mettre à votre disposition si vous êtes intéressés. En même temps, l’industrie du pétrole et du gaz réalise des bénéfices extraordinaires. Shell et Imperial Oil ont cette année des bénéfices de plus de 500 millions de dollars. Petro-Canada en a 350 millions. L’année dernière, Imperial Oil a fait près de 2 milliards de bénéfices. Voilà donc au où va l’argent. Ce n’est pas le gouvernement fédéral qui l’empoche, c’est plutôt l’industrie du pétrole et du gaz.

    Nous croyons que la réduction des taxes sur le carburant ne réglera pas vraiment le problème. Avec 10c. le litre et 7 p. 100 de TPS sur l’essence, nous ne voyons vraiment pas comment une réduction peut faire baisser suffisamment le prix du carburant pour que cela fasse une différence réelle.

    Notre proposition, qu’appuient d’autres membres de la Coalition du budget vert et que nous ferons circuler dans les prochaines semaines dans le cadre des consultations sur le budget fédéral, est la suivante. Nous reconnaissons qu’il est nécessaire de remédier à certains des difficultés dont mes collègues viennent de parler, par exemple le prix élevé du mazout de chauffage pour les aînés et les personnes ayant des revenus fixes. Nous proposons de réduire certaines de ces énormes subventions que le gouvernement fédéral verse à l’industrie du pétrole et du gaz et d’affecter les fonds ainsi récupérés à un programme beaucoup plus rigoureux et généreux de subventions destiné à augmenter les rendements énergétiques partout dans l’économie canadienne. Cela comprendrait les petites entreprises et les exploitations agricoles. Utilisez une partie des subventions à l’industrie du pétrole et du gaz pour réduire les coûts énergétiques des Canadiens. À notre avis, c’est l’approche qu’il faut adopter.

    Il est intéressant de constater qu’au cours de la dernière année, tant le National Geographic que l’Economist sont revenus sur ces thèmes. Le message de l’Economist au début de cette année portait le titre suivant: «Pétrole: Comment éviter la prochaine crise». Je crois que nous sommes actuellement en plein dedans. De son côté, le National Geographic a publié un article intitulé: «Après le pétrole: Vers un meilleur avenir».

¼  +-(1840)  

    Voilà l’avenir. L’avenir, ce n’est pas le pétrole, ce n’est pas la réduction des taxes sur le carburant. L’avenir, ce sont les énergies renouvelables et le rendement énergétique. Comment rendre notre économie plus efficace? Il est évident que nous devons le faire, mais nous n’y arriverons pas en réduisant les taxes sur le carburant.

    Merci beaucoup, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci, monsieur Hazell.

    Vous avez tous bien coopéré avec nous. Nous vous en sommes reconnaissants.

    Collègues, nous allons maintenant passer aux questions. Nous aurons successivement John Duncan, puis Paul, Andy Savoy et Brian. Nous chercherons à éviter le partage du temps de parole parce que nous voulons essayer de nous limiter à cinq minutes si possible. Ainsi, je pourrais donner la parole à chacun à chaque tour de table.

    John, je vous prie de commencer.

+-

    M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, PCC): Je crois que nous avons beaucoup de chance parce que nous avons pu nous faire une idée globale de la situation en écoutant un ensemble d’exposés complémentaires. Cela nous est d’une grande aide.

    L’énoncé qui m’a le plus impressionné venait de Clifford Mackay, qui a parlé de taxer les extrants plutôt que les intrants.

    Une voix: Bonne idée.

    M. John Duncan: Nous avons entendu des représentants des secteurs des ressources, des transports et de la fabrication. Chacun de ces secteurs connaît de grandes difficultés, comme l’indiquent les chiffres de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante. Les entreprises peuvent affronter des hausses prévisibles et des prix plus élevés, mais elles ne peuvent pas faire face à des pointes de ce genre. Je suis sûr que cela s’applique aussi à l’Alliance canadienne du camionnage. Toute l’économie en souffre. De plus, il y a le déséquilibre du marché nord-américain: 85 p. 100 de notre commerce se fait avec les États-Unis dont les régimes de taxation du carburant sont considérablement inférieurs aux nôtres.

    Je voudrais aller plus loin à cet égard. Le problème commence à être vraiment critique. Je sais que dans le domaine du transport aérien, Clive Beddoe, de WestJet, aurait dit qu’à l’heure actuelle, le marché est tellement sensible que la compagnie peut perdre un passager pour une différence de 5 $ sur le prix d’un billet d’avion. Il serait donc imprudent de la part du gouvernement de ne pas réagir dans l’immédiat en faisant la seule chose qu’il puisse faire pour affronter ces changements extraordinaires des prix, c’est-à-dire en réduisant les taxes.

    Êtes-vous du même avis?

¼  +-(1845)  

+-

    M. J. Mackay: Pour vous donner une idée de la situation, je vous dirais que notre industrie a changé d’une façon radicale dans les 10 dernières années. Aujourd’hui, c’est le prix qui compte le plus sur le marché. Il n’y a pas de doute là-dessus. Vous avez dû le constater vous-même au niveau personnel. Les gens tiennent maintenant compte du prix du transport aérien. Ils changeront de compagnie pour une différence de 15 $ ou de 20 $, ou même de 5 $ ou 6 $ dans le cas des vols sur courte distance. Par conséquent, il est faux de croire que de petites différences n’auront pas d’effets. Elles ont en fait des effets importants. Nous le constatons tout le temps. Lorsque le gouvernement a imposé le droit pour la sécurité du transport aérien, le marché Edmonton-Calgary s’est effondré du jour au lendemain, les gens ayant renoncé à prendre l’avion et prenant plutôt leur voiture. Voilà à quel point les effets sont importants. Par conséquent, 100 millions de dollars de taxes sur le carburant peuvent faire une grande différence pour nous. Une réduction de son montant nous aiderait beaucoup à gérer ce problème très difficile.

    Permettez-moi d’ajouter une autre observation. Vous n’avez absolument rien à faire pour inciter les membres de l’ATAC à réduire leur consommation de carburant. Croyez-moi, nous faisons des choses incroyables pour réaliser des économies sur ce plan. N’importe quel pilote vous dira qu’on lui a appris, dès son entrée dans notre industrie, que réduire la consommation de carburant est absolument critique. La seule chose qui soit plus importante, dans la plupart des cas, c’est la sécurité. Vous n’avez donc pas besoin de nous inciter à économiser le carburant en augmentant les taxes.

+-

    M. John Duncan: Juste. Et votre industrie n’est pas la seule dans cette situation. Par exemple, dix membres de mon caucus se sont rendus à Prince George cette semaine et y ont visité une usine de pâte à papier qui s’était complètement débranchée du réseau électrique pour produire elle-même la vapeur et l’électricité dont elle a besoin.

    J’aimerais maintenant demander au représentant du secteur agricole ce que cela représente pour lui. En ce moment, il doit y avoir des récoltes qu’il n’est pas rentable de faire. Est-ce exact? Les choses sont-elles déjà allées aussi loin?

+-

    M. David Rolfe: Votre hypothèse est tout à fait exacte. Beaucoup de récoltes seront vendues à un prix inférieur au coût de production. Le carburant n’est que l’un des coûts de l’agriculture. Nous n’avons pas le choix. Nous devons faire la récolte et préparer les semailles de l’année prochaine. Il n’y a aucun moyen d’éviter les coûts de carburant associés à cette opération.

    Les producteurs se trouvent dans une situation très particulière. Ils n’ont pas la possibilité de se rattraper en ajoutant des suppléments au prix de leurs produits. Ils sont constamment à la merci du marché.

¼  +-(1850)  

+-

    Le président: Merci beaucoup. Nous respectons parfaitement les temps de parole.

    Si nous continuons à le faire, tout le monde pourra participer.

    Paul, vous avez cinq minutes.

[Français]

+-

    M. Paul Crête (Montmagny—L'Islet—Kamouraska—Rivière-du-Loup, BQ): Merci, monsieur le président.

    Hier, un porte-parole du premier ministre a dit qu'il écouterait les recommandations du comité et qu'il les analyserait. J'espère qu'il pourra prendre une demi-heure au cours des prochains jours pour écouter votre témoignage. Il y effectivement un message à l'effet que notre économie est présentement prise en otage par un secteur économique. Cela ne se fait pas volontairement, mais il y a des conséquences quotidiennes dans les domaines de l'agriculture, du transport, des forêts, dans les régions et pour les consommateurs.

    Le Bloc québécois a proposé des mesures dans le cadre d'un plan complet, incluant des mesures qui concernent l'environnement. Donc, je veux vous féliciter à ce sujet.

    Je veux dire à M. Hazell que nous voulons évidemment payer le prix réel pour l'énergie. En fait, il ne s'agit pas de ne pas payer le prix, incluant les coûts environnementaux. Cependant, il faut s'assurer qu'on paie au bon endroit. Lorsqu'on nous facture une partie du montant pour des profits de raffinage qui n'ont pas de bon sens et qu'on les donne à la compagnie, on n'aide pas la société, surtout s'il n'y a pas de moyens pour ramener cet argent dans la société par une taxe ou autrement.

    Donc, j'aimerais savoir ce que vous jugez pertinent. Il y a des recommandations que nous n'avions pas dans notre plan, et nous allons les étudier très sérieusement parce qu'elles sont importantes.

    Croyez-vous qu'il s'agit simplement d'une phase attribuable à l'ouragan Katrina ou bien, comme le disait M. Cooper, je crois, croyez-vous que la flambée des prix de l'essence a commencé en 2001, qu'il ne s'agit pas d'un phénomène temporaire et que nous avons un choix de société à faire pour les prochaines années?

    Dans le secteur de l'agriculture au Canada, on a estimé le coût à environ 250 millions de dollars. On souhaitait donc que les agriculteurs puissent remettre la main là-dessus, puisque l'effet négatif est que ce coût additionnel vient s'ajouter aux autres coûts. Or, l'endettement agricole est déjà très élevé, particulièrement au Québec.

    Alors, pouvez-vous me dire si vous considérez que l'on fait face à une crise temporaire ou est-ce que la situation demande un plan d'action complet de la part du gouvernement?

[Traduction]

+-

    M. Graham Cooper: Je pourrais peut-être commencer.

    À la question de savoir s’il s’agit d’un problème temporaire ou d’une question structurelle à long terme, j’ai dit au début de mon exposé – du moins, je l’espère – que ce n’était que la série la plus récente de hausses des prix. Nous pourrions bien sûr remonter aux années 1970 et à la crise de l’OPEP.

    Je ne suis pas un économiste du pétrole et je ne prétends pas être un expert dans ce domaine, mais, en ce qui concerne les prix du carburant, nous savons qu’il y a des fluctuations. Nous sommes ici aujourd’hui parce que ces prix ont monté beaucoup plus qu’ils n’ont baissé.

    Face aux problèmes structurels que nous devons affronter, il est vrai que les taxes ne régleront pas toutes les difficultés, mais Cliff Mackay a présenté quelques excellents arguments. Beaucoup de secteurs, y compris le nôtre, de même que de nombreuses industries de services, sont taxés sur les intrants plutôt que sur les extrants. C’est certainement le cas pour le carburant.

    L’une des choses que nous devons considérer en examinant le régime de taxation pour chercher des rajustements ou des moyens de compenser les hausses des prix, c’est que dans notre secteur en particulier – je ne voudrais pas donner trop de détails parce que je sais que le temps de parole est limité – et surtout au niveau provincial, la plus grande part des taxes sur le carburant est affectée à l’infrastructure routière. Nous savons à quel point cette infrastructure est importante. Ce n’est cependant pas le cas au niveau fédéral. Les recettes fédérales provenant de la taxe d’accise sur les carburants est d’environ 4 ou 4,5 milliards de dollars par an, dont 9 ou 10 p. 100 seulement sont réinvestis dans l’infrastructure routière.

    De notre point de vue, il n’y a pas de formule magique en ce qui concerne le prix du carburant, mais nous devons évidemment chercher des solutions innovatrices.

¼  +-(1855)  

+-

    Le président: À vous, monsieur Whyte.

+-

    M. Garth Whyte: Merci, monsieur le président.

    Nous avons témoigné devant votre comité et devant le comité des finances après le 11 septembre 2001. Nous avons présenté à votre comité des exposés sur le SRAS, l’ESB, le bois d’œuvre résineux et les inondations. Il y a eu des crises et, oui, il y en a également eu avec le gouvernement minoritaire. Nous avons connu des flambées de prix dans le domaine de l’assurance et c’est maintenant au tour du carburant. Oui, les prix du carburant montent en flèche.

    Le défi, pour chaque député, est le suivant: quel rôle peut-il jouer pour donner un certain degré de certitude à une personne qui veut lancer une entreprise ou étendre ses affaires? En ce moment précis, je crois que cette personne ferait mieux d’attendre parce qu’elle ne sait pas quel niveau atteindront les prix du carburant. Que pouvez-vous donc faire?

    D’abord, comme nous l’avons dit, vous pouvez examiner les recettes fédérales tirées de la taxe sur le carburant dans le secteur de l’aviation ou celui du camionnage. Ensuite, vous pourriez appuyer l’idée d’un plan quinquennal de réduction des impôts. Nous avons un plan décennal de dépenses. Si nous avions aussi un plan fiscal quinquennal, les gens sauraient avec certitude que l’impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés baissera, que la taxe sur le carburant baissera, ce qui réduirait le degré d’incertitude causé par ces flambées des prix et ces crises.

    Je vous annonce déjà que vous allez recevoir des télécopies de chacun de nos membres parce qu’on nous a dit que certains députés croient que les taxes n’ont pas vraiment d’importance. Ces députés peuvent aller consulter notre site Web et examiner notre plan quinquennal de réduction des impôts. Ils peuvent songer à une stratégie pouvant donner un peu de certitude au milieu de toute cette incertitude.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Nous respectons encore notre horaire.

    Andy, vous avez les cinq minutes suivantes.

+-

    M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Je voudrais remercier les témoins d’être venus à si bref délai.

    Je vis dans la vallée de la rivière Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick. Ma circonscription va de Fredericton à Grand-Sault. Nous avons une très importante industrie de camionnage, comprenant Day & Ross et plusieurs autres grandes sociétés de transport routier. Dans ce secteur – et je m’adresse ici à M. Cooper –, il semble y avoir deux ou trois scénarios, si j’ai bien compris.

    Dans un cas, il existe une certaine protection. Un certain nombre des grandes sociétés de camionnage, surtout parmi celles qui s’occupent de transport à longue distance, semblent s’être protégées en percevant d’assez importants suppléments pour carburant. Le président a mentionné le secteur forestier. Il y a quelques semaines, il y a eu des protestations parce que les camionneurs du secteur primaire, qui travaillent en forêt et transportent les grumes, n'ont pas de protection contre les hausses de prix, qui se répercutent donc lourdement sur leur bilan. En fait, un camionneur m’a dit qu’il avait transporté trois chargements de grumes à destination du Maine, aux États-Unis, et qu’il avait perdu 1,50 $ par chargement, avant les frais généraux.

    Il y a des sociétés qui exploitent 10 ou 20 camions. Elles sont petites, mais occupent une place essentielle dans l’économie. Est-il exact de dire qu’elles sont protégées dans une certaine mesure? Je sais que d’autres sociétés qui font affaire avec les grandes scieries sont protégées grâce à des suppléments. Certains exploitants ont dit que 40 à 60 p. 100 des hausses sont couvertes, mais qu’ils doivent absorber le reste.

    Je voudrais donc savoir dans quelle mesure l’industrie est protégée. Si les petits exploitants n’ont aucune protection, pensez-vous que nous pouvons faire quelque chose pour eux?

+-

    M. Graham Cooper: Permettez-moi de vous donner quelques précisions. Quand vous parlez de protection et de couverture, je crois que vous pensez surtout aux suppléments pour carburant plutôt qu’aux instruments financiers dérivés et à d’autres opérations boursières complexes. En fait, quelques transporteurs – ils sont très rares – se livrent à de telles opérations. Comme vous le savez, j’en suis sûr, elles comportent d’importants risques et nécessitent des connaissances et des capacités financières assez spécialisées.

    Par ailleurs, si vous parlez des sociétés de camionnage qui ont des programmes de suppléments par rapport à celles qui n’en ont pas, je tiens à vous dire qu’il n’a pas été facile d’établir ces programmes en 2001 et 2002. Les clients des sociétés ne se sont empressés de dire: «Nous savons que vous avez de grandes difficultés, et nous allons donc vous offrir un supplément.» Il a fallu négocier durement. Comme vous le savez, nous avons une concurrence féroce dans notre secteur. Certaines sociétés, aussi bien au Nouveau-Brunswick que dans d’autres régions du pays, étaient disposées à accepter un supplément moindre ou pas de supplément du tout. De plus, il y a des expéditeurs – certains d’entre eux assez grands – dont les décisions se fondent strictement sur les prix.

    D’une façon générale, la majorité des expéditeurs, y compris, je l’espère, l’industrie des pâtes et papiers du Nouveau-Brunswick, se rendent compte de ce qui arrive au prix du carburant. Ils reconnaissent que les suppléments pour carburant se généralisent un peu partout dans le pays, mais ne croyez pas qu’ils sont prêts à les offrir de leur propre initiative. Je ne prétends pas que le groupe du Nouveau-Brunswick n’a pas essayé. Je ne connais pas très bien toutes les techniques auxquelles nous avons eu recours, mais il est certain que nous avons assisté au Nouveau-Brunswick à un retrait des services. Il y a des conflits entre les petites entreprises de camionnage et leurs clients.

    Je crois donc qu’il faut régler le problème à ce niveau. Il est évident que les protestations dont nous avons été témoins, comme le blocage des autoroutes et d’autres mesures de ce genre, n’aideront personne à long terme. Je ne sais pas ce qu’il adviendra plus tard au Nouveau-Brunswick. Nous voyons la même chose dans d’autres régions du pays. D’après notre expérience, une fois que les arguments sont présentés d’une manière convaincante, une fois que la société de transport s’adresse à un client raisonnable pour lui expliquer qu'à défaut de suppléments, elle pourrait faire faillite dès la semaine suivante, on peut espérer que le client se montrera compréhensif.

    D’autres organisations, comme les associations locales de camionnage, par exemple l’Association du camionnage des provinces de l’Atlantique, possèdent énormément de renseignements sur ces questions. Bien sûr, l’une des grandes difficultés, surtout dans le cas des petits transporteurs, qui forment la majorité de nos membres, c’est qu’il leur est assez difficile de se tenir au courant des derniers développements économiques. Ils savent tout simplement que leurs difficultés sont graves.

½  +-(1900)  

+-

    M. David Rolfe: Beaucoup de petits transporteurs doivent accepter le prix qu’on leur offre parce qu'ils ne peuvent pas fixer eux-mêmes leur prix. En fait, la crise au Nouveau-Brunswick nous a incités à faire notre enquête parce que les camionneurs bloquaient la frontière. Une protestation a été organisée à l’improviste, ce qui montre que ces gens connaissaient de sérieuses difficultés. Si les gens à qui vous donnez des services ont eux aussi des difficultés, il devient très difficile d’imposer des suppléments. Notre enquête nous révèle qu’il est très difficile pour toutes les parties d’assumer les coûts additionnels. Les gens se sentent assaillis de tous les côtés.

+-

    Le président: Merci, Andy. Merci, monsieur Whyte.

    À vous, Brian.

+-

    M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Merci, monsieur le président.

    De bons arguments ont été présentés au sujet de l’exploitation forestière et du camionnage. Il s’agit de questions critiques. J’ai ici des pétitions signées par des centaines de camionneurs qui croient qu’ils vont faire faillite à moins de secours immédiats. De telles faillites auraient d’importantes répercussions sur d’autres entreprises.

    Je voudrais commencer par ceci. J’ai remarqué ces derniers temps qu’en dépit de tous les problèmes que connaissent différents secteurs, l’industrie du pétrole et du gaz réalise constamment des bénéfices record. Le total atteint 51,9 milliards de dollars. D’après Statistique Canada, 75 p. 100 de l’augmentation des bénéfices du premier trimestre est attribuable à la flambée des prix du pétrole.

    Nous avons ici une industrie qui profite de la situation pour faire d’énormes bénéfices. J’aimerais savoir ce que nos témoins en pensent. À quel moment peut-on dire que c’est assez? Jusqu’à quel point une industrie peut-elle prospérer?

    Ensuite, nous avons parlé de rendements énergétiques et de protection de l’environnement. Je crois que c’est un domaine important auquel nous n’avons pas touché. J’aimerais que M. Hazell nous parle du biodiesel et d’autres carburants de remplacement que nous pourrions adopter tout de suite pour réduire la pollution. Je crois que cela est extrêmement important.

    Tout d’abord, à quel moment peut-on dire que c’est assez? Quand est-il temps d’intervenir? Ou devrions-nous nous en abstenir? Devrions-nous laisser l’industrie augmenter indéfiniment ses profits? Vous demandez des réductions d’impôt, mais, en réalité, nous ne pourrons peut-être pas... Je veux avoir votre avis: Y a-t-il un moment où nous devons rechercher l’équité?

+-

    M. J. Mackay: Je vais être très franc: nous y sommes déjà. Mon collègue de l’Association du transport aérien international a dit en public, il y a quelques semaines, que l’industrie pétrolière a encore une fois enlevé toute perspective de rentabilité et de rendement sur l’investissement à notre industrie, dans le monde entier, pour l’avenir prévisible.

    Nous n’avons pas de contrôle sur les prix. Nous ne pouvons rien y faire. La seule option qui nous reste consiste à garer nos avions et à déclarer faillite. Ce serait catastrophique pour l’économie aussi bien mondiale que nationale.

    Par conséquent, notre industrie en est déjà là. Nous aimerions qu’on trouve un moyen de réduire quelque peu les fluctuations du marché. Je ne parle pas du tout de réglementation des prix, mais les flambées que nous avons connues échappent tout simplement à toute tentative de gestion.

½  +-(1905)  

+-

    Le président: Y a-t-il quelqu’un d’autre qui souhaite intervenir?

+-

    M. Stephen Hazell: Je voudrais signaler rapidement deux points. D’abord – je me répète en partie ici –, l’industrie du pétrole et du gaz reçoit des subventions extraordinaires du gouvernement fédéral. D’après les estimations du Pembina Institute, ces subventions s’élèvent à 1,4 milliard de dollars par an. Ce sont des subventions que l’industrie des énergies de remplacement ne reçoit pas, que l’industrie du biodiesel ne reçoit pas. L’industrie pétrolière reçoit ces subventions parce qu’elle comprend de grandes sociétés qui exercent de très fortes pressions.

    Je ne propose pas du tout de mettre la main sur ces bénéfices, mais nous devrions réduire ces folles subventions.

    Quant à la question de savoir comment aller de l’avant, je dirais que le dernier budget fédéral comprenait d’importantes mesures à cet égard. Toutefois, nous ne faisons que commencer à affronter sérieusement certains de ces défis. Le biodiesel fait partie de la solution, de même que d’autres énergies de remplacement, comme le vent, le soleil et l’hydrogène. L’amélioration du rendement énergétique constitue probablement le meilleur moyen d’avancer. Dans l’ensemble, les Canadiens gaspillent beaucoup les combustibles fossiles et l’énergie. Nous sommes loin de faire autant d’économies d’énergie que d’autres régions du monde, comme l’Europe.

+-

    Le président: Monsieur Whyte, je voudrais vous demander si votre plan de réduction des impôts porte aussi sur les sociétés pétrolières.

+-

    M. Garth Whyte: Oui. Je ne voudrais pas faire un inconvénient d’un avantage. Il n’y a rien de mal à réaliser des bénéfices. Il faudrait simplement que nous ayons plus de concurrence.

    Nous aimerions que rien n’arrive au secteur du pétrole et du gaz, nous ne voulons pas de réglementation... Il est hors de question de revenir à l’époque du Programme énergétique national. Nous ne voulons même pas y penser. En même temps, nous devons pour le moins surveiller ce qui se passe. Le Bureau de la concurrence ou un autre organisme devrait suivre la situation et déterminer les motifs de ces pointes. Pourquoi l’essence était-elle à 1,99 $ à Stoney Creek hier, alors qu’elle était à 1,05 $ ailleurs? J’aimerais connaître la réponse à cette question.

+-

    Le président: Parlez-vous de concurrence au niveau du gros?

+-

    M. Garth Whyte: Oui, au niveau du gros.

+-

    Le président: Très bien. Merci beaucoup.

    Je crois que tout va bien et que nous respectons l’horaire. Merci beaucoup, Brian. À ce train, tout le monde pourra participer.

    Werner, puis Marc et Dan.

+-

    M. Werner Schmidt (Kelowna—Lake Country, PCC): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Je vous remercie. Je crois que nous avons eu aujourd’hui des exposés qui comptent parmi les plus concis, les plus convaincants et les mieux pensés de cette session. Chacun de vous mérite d’être félicité pour cette seule raison.

    Je voudrais par ailleurs signaler que nous donnons l’impression de nous intéresser essentiellement aux hydrocarbures, comme si c’était la seule source d’énergie. Je sais que, pour le moment, nous devons surtout compter sur cette source. C’est certainement vrai.

    Mon autre question... J’ai trouvé cela impressionnant. Mon collègue John l’a déjà mentionné. Il est possible de trouver des sources d’énergie de remplacement et de récompenser ce genre d’initiative. Certaines de nos sociétés pétrolières commencent en fait à s’intéresser à ces autres sources. TransAlta Utilities, par exemple, s’intéresse à l’énergie éolienne ainsi qu’au gaz, etc.

    Vous avez dit, monsieur Hazell, que l’ère du pétrole bon marché est révolue. Je dirais plutôt que l’ère de l’énergie bon marché est révolue. Il n’y a plus d’énergie bon marché. Je crois que nous devons nous en rendre compte. De plus, aucune source particulière d’énergie ne suffira pour résoudre nos problèmes. Tandis que la demande d’énergie augmente, nous allons constater que l’approvisionnement en énergie provenant d’une source donnée va devenir de moins en moins suffisant, qu’il s’agisse d’hydrocarbures, d’énergie éolienne, nucléaire ou autre. Nous ne le savons pas. Nous avons besoin de réunir les renseignements.

    La question est donc la suivante... Je sais que la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante a dit très clairement que nous avons besoin d’un plan quinquennal de réduction des impôts. Je me demande s’il n'est pas possible d’étendre cela à un plan quinquennal ou décennal destiné à développer un cadre énergétique national nous permettant de reconnaître non seulement le rôle des hydrocarbures et de leur prix, mais aussi celui des autres sources d’énergie. À mon avis, nous ne devrions pas nous limiter à un secteur particulier. Autrement, nous serons encore là dans cinq ans à nous demander ce qui nous arrive. Les entreprises auront fait faillite, notre pays sera confronté à une inflation extrême et nous connaîtrons un grand ralentissement économique, comme nous n’en avons pas eu depuis longtemps.

    Je suis vraiment inquiet. Ma question est donc la suivante: que devrait comprendre ce cadre énergétique national pour vous aider et aider le gouvernement à développer les sources d’énergie susceptibles de nous assurer des niveaux de prix supportables et prévisibles?

½  +-(1910)  

+-

    Le président: Très bien, Werner. Nous commencerons par Jacques St-Amant.

+-

    Me Jacques St-Amant (analyste-conseil, Option consommateurs): Nous avons développé une grave dépendance par rapport aux hydrocarbures, une dépendance qui nous coûtera cher à court terme. Je crois que nous devons affronter d’urgence la situation.

    Nous sommes bien sûr d’accord avec vous qu’il est nécessaire d’avoir une vision plus globale de la situation. Voilà pourquoi nous préconisons de travailler sur les rendements énergétiques en général et d’investir dans les énergies renouvelables. À long terme, beaucoup des sources d’énergie renouvelable seront probablement moins coûteuses ou, au moins, plus contrôlables que les hydrocarbures.

    Par ailleurs, l’industrie des hydrocarbures est un secteur hautement concentré et notre Loi sur la concurrence ne nous donne pas suffisamment de moyens pour contrôler ce qui s’y passe.

    Quoi qu’il en soit, nous sommes certainement d’accord avec vous qu’il est nécessaire d’avoir une vision globale de la politique énergétique nationale, mais, à court terme, nous avons aussi besoin d’aider les industries dont les représentants témoignent devant le comité, de même que les consommateurs et les personnes à faible revenu, qui sont particulièrement touchées.

+-

    Le président: Merci, Jacques.

    À vous, monsieur Mackay.

+-

    M. J. Mackay: Je voudrais aborder très brièvement deux points. Je n’essaierai sûrement pas de brosser un tableau d’ensemble. Je veux seulement formuler deux observations. D’abord, permettez-moi de vous donner quelques exemples du travail de technologie et d’innovation dans notre industrie. Nous n’avons pas beaucoup de choix pour ce qui est de la propulsion des avions. Nous travaillons à long terme, et il faut une vingtaine d’années pour passer à un système de propulsion différent. Il reste cependant beaucoup à faire au sol: équipements de soutien au sol, gestion des aéroports, systèmes de contrôle de la circulation aérienne. Il y a encore beaucoup à faire pour améliorer les rendements dans une certaine mesure grâce à de nouvelles technologies. Nous pouvons donc réaliser certains gains, même dans le contexte de la technologie existante.

    Ma seconde observation est que le plus important, pour nous, c’est d’en arriver à un niveau raisonnable de certitude au sujet de nos coûts énergétiques. Ce sont les pointes qui sont très difficiles à absorber. Je sais qu’il n'y a pas de formule magique, mais je voulais vous faire part de cette préoccupation.

+-

    Le président: Monsieur Whyte, il vous reste quelques secondes.

+-

    M. Garth Whyte: Quelques secondes pour parler de ce sujet? D’accord.

    Je crois que l’Ontario souhaite avoir un plan énergétique. Comme vous le savez, nous avons eu des baisses de tension et des pannes de secteur et que pour élaborer et mettre en œuvre un nouveau plan, dans le domaine nucléaire ou hydroélectrique, nous pouvons avoir besoin d’une dizaine d’années. Il est donc nécessaire de commencer tout de suite et de faire fond sur ce que nous avons. Nous ne voulons pas du tout écarter ce qui existe. Nous devons le renforcer et rassembler les différents groupes. On a l’impression que le secteur éolien déteste le secteur du nucléaire. On peut aujourd’hui exploiter le charbon d’une façon très propre, mais il est hors de question de parler du charbon. Nous avons besoin d’un certain degré de certitude, aussi bien du côté des consommateurs que de celui des entreprises. En même temps, nous devons préserver notre compétitivité à l’échelle internationale.

    Il y a donc des choses à faire. Je conviens que c’est un débat différent. Bien sûr, il n’en est pas de même dans les industries du camionnage et du transport aérien, qui peuvent difficilement recourir à des camions électriques.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Je vous remercie aussi, Werner.

    À vous, Marc.

[Français]

+-

    M. Marc Boulianne (Mégantic—L'Érable, BQ): Je vous remercie, monsieur le président. J'aurais deux questions à poser. Ma première question concerne l'Association des consommateurs du Canada.

    Vous avez parlé d'un programme d'aide pour le chauffage. On est d'accord pour dire que c'est bon en principe, en autant que cela soit très bien appliqué. Dans le passé, il y avait un programme de cette nature, mais il y a eu certains problèmes, dont un peu de gaspillage.

    Pouvez-vous nous rassurer à cet effet, madame Durand?

½  +-(1915)  

+-

    Mme Isabelle Durand: Nous représentons Option consommateurs, et non l'Association canadienne des consommateurs, qui comparaîtra plus tard.

    Concernant le programme qui a déjà existé dans le passé, des sommes avaient été remises aux gens qui recevaient le crédit d'impôt pour la TPS.

    Dans notre mémoire, nous donnions l'exemple d'une allocation qui serait davantage basée sur les programmes d'allocation pour le logement au Québec. On fournirait principalement et de façon régulière une allocation mensuelle aux gens à faible revenu. Cela pourrait prendre la forme d'un formulaire que les gens auraient à remplir, mais il faut que cela se fasse rapidement. On ne peut pas attendre un crédit d'impôt qui viendrait un peu plus tard, parce que les gens devront assumer cette somme tout de suite.

    Nous avons calculé que pour une personne qui chauffera au mazout cet hiver, la facture pourrait passer facilement de 124 $ par mois à 182 $ par mois, ce qui fait 60 $ de plus par mois. Si on parle d'un consommateur qui utilise en plus son automobile, la facture peut aller jusqu'à 100 $ de plus par mois. Il s'agit de le faire de façon plus ciblée, c'est-à-dire à l'intention des consommateurs qui en ont réellement besoin tout de suite, cet hiver.

+-

    M. Marc Boulianne: J'aimerais poser une question à M. Rolfe concernant l'agriculture. Vous nous avez donné une bonne description. Très souvent, lorsque nous parlons de la crise de l'énergie, il est question de camionnage, de métallurgie et des industries en général, mais nous avons souvent tendance à ignorer le secteur agricole.

    Pourtant, cette année, seulement pour ce qui est des exploitations agricoles au Québec, près de 250 000 d'entre elles dépenseront plus de 250 millions de dollars en frais supplémentaires. C'est la même chose dans ma région. Les producteurs de sirop d'érable auront certainement des problèmes. C'est vital et l'économie des régions s'en ressent, ainsi que les entreprises et les PME.

    Ne croyez-vous pas que dans ce dossier, c'est un secteur qui est négligé? Ne trouvez-vous pas que l'on est absent? Quelles mesures d'urgence et à long terme le gouvernement pourrait-il adopter pour assurer un soutien au secteur agricole? Nous avons fait des propositions, comme par exemple de donner des compensations et fournir des mesures fiscales. J'aimerais vous entendre à ce sujet.

[Traduction]

+-

    M. David Rolfe: Je n’ai pas saisi toute la question, mais il est certain que l’agriculture est un peu négligée dans tout ce débat. Nous devons utiliser de l’énergie, sans avoir la possibilité de transmettre nos coûts en aval. Nous n’avons pas le choix. Vous devez utiliser de l’énergie si vous avez du bétail, si vous avez des légumes en entreposage. La plus grande partie de cette énergie vient d’hydrocarbures.

    À la question de savoir de quelle façon ces effets peuvent être atténués, je dirais que l’agriculture n’est pas en mesure de réduire sa consommation de carburant. La réduction des taxes pourrait sûrement aider, mais elle ne réglerait pas le problème. Ce serait certainement utile, mais il y a beaucoup d’autres coûts que d’autres industries nous transmettent: par exemple, le transport routier, le transport ferroviaire, la fabrication des engrais, tous nos autres intrants dont le prix augmente à cause de la hausse du prix du carburant.

    Ce n’est donc pas intrinsèquement un problème de carburant. Ce n’est pas un problème étroitement défini, comme c’est le cas dans d’autres secteurs où le carburant constitue un important élément des coûts. Nous devons aussi affronter tous les autres coûts additionnels que les autres nous imposent, mais que nous ne pouvons jamais récupérer de nos clients.

    Le secteur de l’agriculture a donc besoin d’une aide supplémentaire. Quant à déterminer quelle forme elle pourrait prendre, je dois dire que le filet de sécurité actuel, c’est-à-dire le Programme canadien de stabilisation du revenu agricole et l’assurance-récolte, ne répond tout simplement pas aux besoins. Ces programmes ne suffisent pas compte tenu des besoins actuels. Il nous faut des mesures supplémentaires pour aider l’agriculture à surmonter cette crise dans l’immédiat. Nous pouvons envisager d’utiliser d’autres sources d’énergie, mais cela ne peut se faire qu’à long terme.

½  +-(1920)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Rolfe.

    Merci, Marc.

    À vous, Dan.

+-

    L'hon. Dan McTeague (Pickering—Scarborough-Est, Lib.): Je vous remercie d’être venus. Je dois dire que l’information que vous avez présentée était, dans l’ensemble, extrêmement concise et utile. Je ne crois pas qu’il y ait une seule personne ici que je n’aie pas essayé d’aider au fil des ans grâce aux travaux du comité ou aux changements apportés à la Loi sur la concurrence.

    Monsieur Mackay, nous n’avons peut-être jamais eu l’occasion de collaborer, mais M. Beddoe et M. Ken Rowe pourraient sûrement vous parler de ce que nous avons fait pour modifier la Loi sur la concurrence. Les amendes de 15 millions de dollars pour la fixation de prix abusifs — qui, d’après la commissaire, constituent les seules mesures positives prises à cet égard — ont été très avantageuses pour votre industrie. J’ai donc travaillé avec beaucoup d’entre vous et obtenu votre appui à différents degrés.

    Monsieur Hazell, je ne voudrais pas que vous pensiez que je vous ai oublié. Il y a trois semaines, j’ai proposé à notre caucus d’utiliser des fonds fédéraux pour offrir des subventions égales à celles des gouvernements provinciaux de l’Ontario et de la Colombie-Britannique pour ce qui est des voitures hybrides, parce que je viens de l’industrie, ayant déjà travaillé pour Toyota dans le domaine des relations publiques.

    Ma question s’adresse à vous tous. Je comprends l’importance que vous attachez tous, à différents degrés, à la question des taxes.

    Monsieur Rolfe, dans votre industrie, il n’y a pas de TPS. Vous ne payez aucune taxe fédérale sur le carburant teinté.

    Monsieur Cooper, vous devez payer une taxe fédérale d’accise de 4 ¢, ainsi que la TPS de 7 p. 100 que vous pouvez évidemment récupérer. Je sais que cela est très onéreux pour beaucoup d’entre vous.

    En ce moment précis, les États-Unis sont privés de 23 p. 100 de leur capacité de raffinage. Cela s’est produit il y a une vingtaine de minutes. Treize raffineries sont fermées. Au Canada, nous avons un approvisionnement abondant aussi bien en brut qu’en produits raffinés. La pénurie est temporaire.

    Je voudrais demander à chacun d’entre vous de me dire très brièvement pourquoi vous consacrez tant de temps à la question des taxes, qui n’a rien ou presque rien à voir avec la hausse du prix de l’essence. C’est une question très simple, mais il semble que chaque fois qu’il y a un problème, certains disent: «C’est la Loi sur la concurrence», tandis que d’autres — peut-être à différents degrés, parmi vous — pensent que c’est lié aux taxes.

    Pouvez-vous m’expliquer de quelle façon cela vous touche, surtout en ce moment de crise?

+-

    M. J. Mackay: Je vais essayer de répondre très brièvement.

    La crise ne fait qu’aggraver la situation. Le problème fondamental de ces taxes, c’est qu’elles s’appliquent à nos intrants plutôt qu’à nos extrants. C’est une mauvaise décision économique. En procédant ainsi, vous nuisez à notre productivité alors que nous essayons par tous les moyens de l’augmenter.

+-

    M. Garth Whyte: J’ai également évoqué la question de la concurrence. M. McTeague était peut-être au téléphone quand je l’ai fait, mais j’ai préconisé plus de concurrence et j’ai parlé des raisons pour lesquelles nous parlons des taxes sur le carburant. C’est parce qu’elles s’appliquent sur nos dépenses plutôt que sur nos revenus. De plus, nous ne pouvons pas récupérer la taxe d’accise, dont les recettes, pour le gouvernement, ont augmenté avec la crise. Voilà donc trois bonnes raisons que nous avons d’évoquer ces taxes. Oui, la concurrence et la surveillance de la situation sont très importantes, comme je l’ai dit et répété aujourd’hui. Tout le monde utilise du carburant. C’est le problème, un problème qui se répercute partout dans le secteur agricole.

    Les exploitants de serres doivent les chauffer pour pouvoir récolter leurs produits, qu’ils doivent ensuite expédier vers les marchés. La taxe sur le carburant intervient partout. Voilà le problème.

    Je suis allé au-delà de ce point, et vous le savez. J’ai dit qu’il fallait envisager un plan quinquennal de réduction des impôts. Considérez ce que cela a permis de réaliser après le 11 septembre 2001, songez à la certitude que cela a entraîné et au fait que notre économie a surclassé celle des États-Unis pour cette raison. Vous n’avez même pas évoqué cela. C’est ce qui manque dans le plan d’ensemble.

+-

    Le président: Merci, monsieur Whyte.

    Monsieur Rolfe.

+-

    M. David Rolfe: Je voudrais faire une mise au point. Nous payons la taxe fédérale d’accise sur le carburant teinté. C’est la taxe provinciale que nous ne payons pas.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Dan, il vous reste en fait une minute.

+-

    L'hon. Dan McTeague: Excellent. Je ne contesterai pas la question de la taxe d’accise sur le carburant teinté. J’avais toujours pensé que ce carburant en était exempté.

    Je voudrais revenir à M. Whyte pour un instant, parce que je sais qu’il a beaucoup travaillé sur la question de la concurrence dans le passé.

[Français]

    J'aimerais simplement dire à Mme Durand et à M. St-Amant que nous avons tenu les mêmes propos en l'an 2000. C'est d'ailleurs pour cela que nous avons obtenu une réduction pour les gens dans le besoin. Bien sûr, il y avait des inquiétudes. Cependant, cette réduction a contribué à redresser la situation des gens démunis.

[Traduction]

    Monsieur Whyte, je voudrais signaler un certain nombre de choses. Si vous vous inquiétez de l’augmentation de la TPS, est-ce parce que les entreprises ne peuvent pas la récupérer?

½  +-(1925)  

+-

    M. Garth Whyte: Parlez-vous de la TPS?

+-

    L'hon. Dan McTeague: Oui.

+-

    M. Garth Whyte: Non, les entreprises peuvent récupérer la TPS. Elles peuvent certainement le faire.

+-

    L'hon. Dan McTeague: Vous inquiétez-vous donc de la taxe d’accise?

+-

    M. Garth Whyte: Oui, et je vous ai présenté...

+-

    L'hon. Dan McTeague: Je comprends.

+-

    M. Garth Whyte: Nous parlons de cette taxe parce qu’un propriétaire d’entreprise agroalimentaire sur quatre croit qu’il pourrait faire faillite.

+-

    L'hon. Dan McTeague: Non, monsieur Whyte. Cela n’a rien à voir avec la crise actuelle. Dites-moi de quelle façon la taxe contribue aux difficultés de ces gens.

    S’il est possible de récupérer la TPS, les taxes restent donc fixes, que ce soit en Ontario ou ailleurs, à 14,7 ¢ du côté provincial et à 10 ¢ du côté fédéral. De quelle façon, au niveau marginal, cela change-t-il la situation par rapport à ce qu’elle était l’année dernière quand l’essence était à 79 ¢ le litre?

+-

    M. Garth Whyte: Tout d’abord, nous n’avons aucun contrôle sur les prix mondiaux. Nous aimerions bien intervenir à ce niveau, mais c’est impossible. Nous devons donc nous limiter à ce qui est à notre portée.

    Beaucoup de solutions sont possibles à cet égard. Si les parts provinciale et fédérale s’élèvent à 40 ou 50 p. 100 du prix du carburant, il est envisageable de réduire ce pourcentage. La TPS s’ajoute à la taxe d’accise et, comme vous le savez, la taxe d’accise s’ajoute à la taxe de vente provinciale.

    Il faudrait que j’examine cela de plus près. Comme je l’ai dit au début de mon exposé, nous ne sommes pas des experts en carburant.

    Le problème est peut-être plus aigu dans le Canada atlantique où la taxe harmonisée de 15 p. 100 s’ajoute à tout cela. Il y aurait là quelque chose à faire.

    Je ne connais pas beaucoup de travailleurs autonomes qui réclament la TPS s’appliquant à la taxe sur le carburant. C’est très onéreux. C’est une chose à laquelle nous devrions penser.

+-

    Le président: Merci, monsieur Whyte.

    Brad, puis Jerry.

+-

    M. Bradley Trost (Saskatoon—Humboldt, PCC): Je m’excuse, monsieur le président, je discutais de quelque chose avec mon collègue.

+-

    Le président: Allez-y, si vous voulez.

+-

    M. Bradley Trost: Non, ça va. Je voudrais simplement formuler quelques observations générales, puis vous laisser y répondre.

    Dans l’ensemble, les présentations étaient assez bien faites. En fait, ce n’est pas dans l’ensemble. Elles étaient toutes bien faites, mais je voudrais les regrouper d’une certaine façon parce que quelques questions semblent revenir dans beaucoup des exposés, même si ce n’est pas toujours de la même manière. J’ai bien aimé les exposés de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante, de l’association des consommateurs et du Club Sierra.

    La plupart des exposés parlaient d’un changement macro-économique global destiné à remédier à la situation économique générale du groupe en cause. Vous n’avez pas vraiment demandé des choses très précises, même si vous avez donné quelques exemples concrets. C’est l’une des observations que je voulais formuler. N’importe lequel d’entre vous peut y répondre, une fois que j’aurai terminé, pour me dire s’il est exact que vous avez généralement besoin d’aide à cause de la situation économique, même si celle-ci est directement attribuable à la hausse des prix du carburant.

    Ma seconde observation est que certaines industries ont beaucoup plus de mal que d’autres à faire des substitutions et à affronter la situation. C’est la raison pour laquelle certains d’entre vous sont ici. Il est curieux de constater que le public ne comprend pas toujours cela.

    Chez moi, dans la circonscription de Pallister, un candidat néo-démocrate affirmait que les agriculteurs devraient utiliser des machines plus petites, des moissonneuses-batteuses d’une plus petite taille, etc., afin de réduire la consommation de carburant. Ils pourraient avoir à repasser cinq fois dans un champ, mais le véhicule étant plus petit, ils pourraient économiser sur le carburant. Je ne sais pas si c’est la politique officielle du parti, mais la proposition est intéressante. Peut-être quelqu’un voudra-t-il faire des commentaires à ce sujet.

    Encore une fois, vous voudrez peut-être répondre à mon observation concernant la situation générale. Ensuite, la Fédération canadienne de l’agriculture pourrait nous donner une idée de ce qu’on pourrait faire concrètement.

    En ce qui concerne les camionneurs et le transport aérien, quelles mesures précises pourraient aider rapidement votre industrie à surmonter la flambée des prix à court terme? Ensuite, s’il y a quelqu’un qui veut présenter des commentaires sur la question de la situation économique générale, cela nous serait très utile.

+-

    Le président: Merci, Brad. Nous verrons ce qu’il sera possible de faire dans les prochaines minutes.

    À vous, monsieur Rolfe.

+-

    M. David Rolfe: L’idée que le secteur agricole pourrait gagner en efficacité en recourant à des équipements plus petits est erronée. L’agriculture est l’un des secteurs les plus efficaces que nous ayons, tout simplement parce qu’il est obligé d’économiser au maximum pour affronter la baisse du prix de ses produits au cours des dernières années. Je crois donc que l’idée est erronée.

    Dans le passé, l’agriculture a reçu des paiements spéciaux. Ce printemps encore, le gouvernement, reconnaissant les circonstances très difficiles de notre secteur, lui a attribué un milliard de dollars. Nous attendons encore le deuxième versement de ce paiement. Nous avons reçu le premier au printemps.

    J’espère que le gouvernement reconnaîtra les circonstances extrêmement difficiles que connaît actuellement le secteur agricole, compte tenu des prix actuels du carburant et de l’improbabilité, dans un proche avenir, d’une baisse de ces prix, de même que des prix du gaz naturel, du propane et d’autres formes d’énergie dont nous avons absolument besoin dans notre industrie. J’espère qu’on voudra bien tenir compte de cette situation.

    J’espère qu’on reconnaîtra que nous constituons une industrie primaire dont personne ne peut se passer au Canada. Je ne voudrais certainement pas voir les producteurs de l’agriculture primaire, les exploitations agricoles familiales du Canada faire faillite à cause des prix de l’énergie et de la crise actuelle.

½  +-(1930)  

+-

    Le président: Monsieur Cooper.

+-

    M. Graham Cooper: Merci, monsieur le président.

    Je voudrais répondre à votre question concernant ce qu’il est possible de faire rapidement. J’aborderai très brièvement la question des taxes.

    M. Whyte et d’autres ont mentionné la taxe d’accise fédérale. J’ai dit dans mon exposé que les recettes de cette taxe ne sont réinvesties que dans une faible mesure dans l’infrastructure routière. Je parle de la taxe de 4 ¢ le litre sur le carburant diesel et de 10 ¢ le litre sur l’essence. Il faudrait peut-être faire quelque chose à ce sujet.

    Je crois que M. McTeague a raison, dans la mesure où nous avons peut-être eu un ouragan qui constitue un prétexte parfait. Nous en avons eu deux en succession, qui ont réduit la production non seulement du brut, mais aussi des produits raffinés. Je ne sais pas si nous avons déjà eu des problèmes aussi sérieux dans le passé récent.

    Quant à ce qu’il est possible de faire rapidement, je trouve plutôt amusants les comptes rendus des journaux sur les plaintes des gens qui font le plein. Les journalistes vont dans une station-service et demandent aux gens ce qu’ils pensent du prix de l’essence. Il est évident que les gens n’aiment pas que le prix atteigne 1,20 $ quand il était à 80 ¢ la semaine précédente. Ensuite, ces gens vont sur l’autoroute et conduisent à 140 kilomètres à l’heure.

    Dans notre industrie, par exemple, où la consommation de carburant est extrêmement élevée, nous savons que si les transporteurs examinent de près leurs coûts et imposent à leurs chauffeurs une vitesse maximum de 90 kilomètres à l’heure sur les routes à quatre voies ou sur n’importe quelle autre route, les répercussions sur leurs bénéfices seront vraiment très importantes. On le voit en Europe, où la limite de vitesse sur les autoroutes est de 130 kilomètres à l’heure pour les voitures, mais seulement de 90 pour les véhicules commerciaux lourds. D’après ce que j’ai pu voir quand j’étais là, cette limite est scrupuleusement respectée.

    J’ai une dernière observation. Nous avons besoin de compromis. Dans notre industrie, du point de vue environnemental, nous avons le mandat de réduire les émissions cancérigènes résultant de niveaux élevés de soufre et de matières en suspension. Les nouveaux moteurs qu'on vient d’introduire consomment cependant plus de carburant. Ainsi, nous essayons d’un côté d’avoir des moteurs plus propres, mais, de l’autre, ces moteurs ont un rendement moindre.

+-

    Le président: À vous, monsieur Mackay, très brièvement.

+-

    M. J. Mackay: En un mot, nous avons besoin d’une aide immédiate: un moratoire sur la taxe d’accise imposée sur le carburant d’aviation, ainsi qu’un programme très rigoureux de surveillance pour s’assurer que les avantages profitent aux fournisseurs de services et aux clients.

+-

    Le président: Merci. C’était concis et au point.

    Monsieur Whyte.

+-

    M. Garth Whyte: Nous avons été invités à venir ici. Nous avons eu une semaine pour nous préparer. Nous vous avons présenté d’excellentes statistiques, de même que cinq recommandations. Nous en parlions déjà il y a un an. Vous devez cesser de vous livrer à des manoeuvres politiques et vous entendre pour agir parce que nous avons là des gens qui disent qu’ils sont au bord de la faillite.

    Je ne suis pas venu ici pour être mis sur la sellette. Nous essayons de vous proposer des solutions. Alors, écoutez-nous attentivement et efforcez-vous de faire quelque chose. Essayer de monter un groupe contre un autre ou un parti contre un autre ne nous mènera nulle part. Les Canadiens veulent que vous vous mettiez au travail, comme gouvernement minoritaire. Vous devez songer aussi bien au court terme qu’au long terme.

+-

    Le président: Jerry, c’est à vous.

+-

    L'hon. Jerry Pickard (Chatham-Kent—Essex, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Je comprends certainement les sentiments de chacun des représentants de l’industrie qui est venu témoigner. Il n’y a pas de doute que le prix du carburant constitue un énorme problème pour tous les secteurs, non seulement le vôtre, mais partout dans le pays.

    J’ai devant moi un graphique qui montre le prix du brut entre janvier 1999 et mai de cette année. Comme vous pouvez le voir, l’augmentation est exponentielle. On n’en voit pas la fin. Les flambées ont été plus intenses ces derniers temps, mais la ligne monte très régulièrement. Si je devais parier, je dirais que les hausses continueront. Bien sûr, j’aurais bien voulu que ce ne soit pas le cas.

    D’après ce que les témoins nous ont dit aujourd’hui, le Canada n’est pas le seul à faire face à cette montée vertigineuse des prix de l’énergie. Nous faisons partie du marché nord-américain, où les prix sont les moins élevés. De toute évidence, l’Asie, l’Europe et les autres régions doivent faire face à des prix très supérieurs. En fait, les taxes en Europe sont de 1,30 $ et non de 16 ¢.

    Je voudrais revenir aux taxes fédérales. Nous avons une taxe d’accise de 4 ¢ sur le carburant diesel et de 10 ¢ sur l’essence. Nous avons aussi la TPS.

    Permettez-moi de mettre cela en perspective dans le cas de l’industrie du camionnage. Je cherche des solutions. Je ne veux pas du tout mettre n’importe qui sur la sellette. Il faut cependant se rendre compte que le prix du baril de pétrole a augmenté de 57 $. On nous a dit aujourd’hui que chaque dollar se traduit par une augmentation d’un cent au niveau du détail. Cela revient à dire que le prix de l’essence a monté de 57 ¢ pendant cette période.

    Si je poursuis le raisonnement en pensant à l’industrie du camionnage et au carburant diesel...

½  +-(1935)  

+-

    Le président: Voulez-vous en venir à votre question, Jerry?

+-

    L'hon. Jerry Pickard: La taxe est de 4 ¢ sur le carburant diesel. Comme la TPS est récupérée, le gain net du côté fédéral... La taxe fédérale est de 4 ¢. Nous nous sommes engagés à en verser la moitié pour financer l’infrastructure municipale, y compris les ponts et les routes sur lesquels les camions doivent rouler. Nous nous sommes engagés à financer toutes sortes d’infrastructures pour permettre aux entreprises de fonctionner. Si nous devions retirer cette part de la taxe aux municipalités, les impôts municipaux vont inévitablement monter. En effet, les municipalités ont besoin de ressources pour financer leur infrastructure. Par conséquent, à moins de revenir sur notre engagement envers les municipalités, le maximum que le gouvernement fédéral puisse faire serait de réduire la taxe sur le carburant diesel de 2 ¢. Par conséquent, le gain possible est de 2 ¢, puisque vous récupérez la TPS.

    Quel serait l’effet d’une telle réduction par rapport aux énormes hausses qui se sont produites? Je crois que nous devrions analyser la situation de la taxe d’accise et ce qui arrive à la TPS.

    Nous avons, d’un côté, des hausses énormes et, de l’autre, un tout petit montant de taxe. Ce n’est pas 40 p. 100, mesdames et messieurs. C’est en fait beaucoup moins du côté fédéral. Si nous analysons vraiment la situation, en tenant compte du fait que la TPS est récupérée, cela nous laisse 10 ¢ dont la moitié est promise aux municipalités. Par conséquent, si nous renonçons à la totalité de nos recettes, l’essence coûterait 5 ¢ de moins.

+-

    Le président: Des réactions aux propos de M. Pickard?

    Monsieur Cooper. Ce sera ensuite M. Mackay

+-

    M. Graham Cooper: Monsieur Pickard, je voudrais bien avoir plus de détails sur votre façon d'arriver à 50 p. 100.

    À propos de mes chiffres de tout à l'heure, le gouvernement fédéral retire au total environ 4,5 milliards de dollars par année de sa taxe d'accise. De ce montant, environ 0,5 milliard provient du carburant diesel. La dernière fois que j'ai consultéLes transports au Canada 2004, c'est-à-dire cette semaine, j'ai constaté que le montant injecté par le gouvernement fédéral dans l'infrastructure routière était de 354 millions de dollars, si ma mémoire est fidèle. Voilà le genre d'écart qui nous préoccupe.

    Je ne veux pas résumer tout ce débat à une question de taxes, car il est évident qu'il y a de plus gros enjeux, mais, si nous cherchons les moyens d'aider le secteur des transports, nous savons, d'après les études réalisées au fil des ans, que, si nous réinjectons plus d'argent dans l'infrastructure, cela se traduit par une plus grande efficacité dans la consommation de carburant.

½  +-(1940)  

+-

    L'hon. Jerry Pickard: L'engagement pris envers les municipalités concernait l'infrastructure, la réinjection du produit de la taxe dans l'infrastructure. Dans ma municipalité, on fera beaucoup de travaux sur les ponts.

+-

    Le président: Merci, Jerry.

    Ce sera M. Mackay, puis nous en resterons là.

+-

    M. J. Mackay: Très brièvement, si vous ajoutez les trois taxes spéciales que mon secteur doit acquitter, soit la taxe sur le carburant, le loyer des aéroports et la taxe de sécurité — personne d'autre n'a à les payer —, vous vous retrouvez avec des charges de plus de 500 millions de dollars par année. Le gouvernement fédéral ne contribue aucunement au soutien de notre infrastructure. Nos clients et nous devons tout payer. Il s'agit de 500 millions de dollars qui sortent du système, du point de vue de la productivité, de l'investissement, etc. Voilà notre problème. Et la taxe sur les carburants fait partie du problème.

+-

    Le président: Chers collègues, merci beaucoup. Nous avons fait du bon travail.

    Michael, je vais vous donner la parole au prochain tour. Tout le monde a pu intervenir cette fois-ci. Michael, vous pourrez le faire au prochain tour. Nous allons essayer de procéder de la même manière avec le prochain groupe qui attend en coulisse.

    Je vous remercie tous d'avoir sacrifié un temps précieux que vous auriez pu consacrer à vos familles et à vos autres engagements pour comparaître aujourd'hui. Vos sages paroles ont été bien entendues. Je félicite mes collègues de leurs questions.

    Nous allons suspendre la séance pendant environ cinq minutes. Nous serons de retour dans cinq ou dix minutes.

    J'invite le prochain groupe de témoins à prendre place pendant ces quelques minutes.

    La séance est suspendue pour cinq ou dix minutes.

½  +-(1940)  


½  +-(1950)  

+-

    Le président: Bonsoir à tous.

    C'est un plaisir d'ouvrir cette deuxième partie de la séance du soir, en ce 22 septembre. Il s'agit ici du Comité permanent de l'industrie, des ressources naturelles, des sciences et de la technologie.

    Nous accueillons avec plaisir un excellent groupe de témoins représentant l'Association des consommateurs du Canada, la Fédération des contribuables canadiens, L'essence à juste prix, l'Association canadienne des carburants renouvelables, la Corporation Iogen, la Coalition pour la défense des consommateurs de carburant du Saguenay—Lac-St-Jean. Les représentants du Congrès du travail du Canada, qui ne peuvent être parmi nous, nous prient de les excuser.

    Nous allons suivre l'ordre de la liste, qui a été dressée selon l'ordre d'arrivée, ainsi que le greffier a structuré ces séances.

    Chers collègues, je tiens encore, comme la dernière fois, à donner à tous l'occasion d'intervenir, chacun ayant cinq minutes pour poser ses questions, mais nous allons d'abord inviter nos témoins à faire leurs interventions, qui se limiteront à cinq minutes, je l'espère, pour que tous aient le temps de poser leurs questions.

    Sans plus tarder, je dois vous dire que nous vous sommes reconnaissants d'être venus ce soir, loin de vos familles, pour nous éclairer, ainsi que tous les Canadiens. Les délibérations sont transmises sur CPAC — vous êtes donc avertis — pour que nous puissions tous mieux comprendre ce qui est arrivé récemment aux prix de l'essence. J'espère que de tout ceci ressortiront quelques bonnes réponses.

    Là-dessus, nous invitons le président de l'Association des consommateurs du Canada, Bruce Cran, à prendre la parole le premier.

+-

    M. Bruce Cran (président, Association des consommateurs du Canada): Merci.

    Je m'appelle Bruce Cran, et je suis président de l'Association des consommateurs du Canada. Notre organisation est un groupe de bénévoles qui, depuis une soixantaine d'années, s'occupent des questions de consommation, les prix de l'essence étant l'une d'elles.

    Je cède la parole à mon vice-président, Mel Fruitman, qui présentera notre exposé.

+-

    M. Mel Fruitman (vice-président , Association des consommateurs du Canada): Merci, Bruce.

    Nous comparaissons évidemment à titre de représentants des consommateurs. Nous sommes des profanes, en ce qui concerne les complexités de l'établissement des prix de l'essence et tout le système, mais ce qui se passe autour de nous nous inspire des réflexions et des propositions visant à améliorer la situation des consommateurs. Nous avouons que la réduction de certaines taxes fédérales sur l'essence n'aurait pas un effet énorme sur les prix au détail, mais nous estimons qu'un important principe qui se rapporte à l'intégrité du gouvernement en matière de taxes est ici en jeu.

    D'abord, nous croyons que la taxe de 1,5¢ imposée il y a un certain nombre d'année expressément pour faciliter la réduction du déficit doit disparaître, maintenant que l'objectif a été atteint. Il est inadmissible que le gouvernement continue de la percevoir.

    Deuxièmement, le gouvernement ne devrait pas continuer à escroquer les contribuables en augmentant le prélèvement de TPS avec les prix. Les consommateurs n'obtiennent aucun remboursement de TPS. Il est inacceptable que l'État profite de gains imprévus de la sorte. C'est d'autant plus irritant que le parti au pouvoir a fait campagne il y a quelques années en promettant d'abolir la TPS s'il était élu. Il exploite maintenant les contribuables et les consommateurs canadiens et adopte un comportement dénué de tout principe. La TPS sur l'essence doit être remplacée par une taxe au litre qui serait fixe et indépendante des fluctuations du marché.

    Troisièmement, nous estimons que le ministre des Finances a tenu des propos qui manquent de franchise, disant que, même si le gouvernement réduisait les taxes, les consommateurs n'en profiteraient pas, car les pétrolières absorberaient la différence. C'est comme si les pillards des zones ravagées par des catastrophes comme la Nouvelle-Orléans disaient que, s'ils n'avaient pas volé, d'autres l'auraient fait à leur place.

    Voilà qui suffit pour le gouvernement. Voyons maintenant l'industrie.

    Au fil des ans, il y a eu bien des enquêtes. Le Bureau de la concurrence a achevé la dernière il y a environ six mois. Il dit dans certains passages du résumé de son rapport interne qu'il y a eu des augmentations de prix en mai 2004 parce que les marges bénéficiaires des raffineurs ont augmenté aux États-Unis et que, compte tenu de la demande de l'époque, les raffineries tournaient presque à plein régime. Il signale aussi des chocs mineurs, notamment des hausses non prévues de la demande, qui ont pour conséquence une insuffisance temporaire de l'offre, ce qui pousse les prix à la hausse. Il ajoute par contre qu'il y avait des fournisseurs étrangers capables de combler l'écart pourvu qu'ils soient prévenus à temps qu'on aurait besoin de leurs produits.

    En parcourant la documentation, nous avons aussi remarqué qu'on parle souvent des « prix du disponible » et des « prix du brut », ce qui sème pour nous une certaine confusion au sujet des causes sous-jacentes. J'y reviendrai dans un moment.

    Bien sûr, des accusations de collusion ont été portées contre les membres de l'industrie. Le Bureau de la concurrence les étudie. Nous ne croyons pas que les sociétés aient besoin d'agir de concert, puisqu'elles suivent toutes la même partition. Elles ont toutes la même mentalité, pensent et agissent de la même façon et savent ce que les autres s'apprêtent à faire.

    Si nous considérions ce qui se passe sur le marché... Dans l'optique du marché, disons en simplifiant que nous avons observé une grande utilisation de formules mathématiques complexes, des analyses numériques et de régression, et la question est toujours abordée du côté de l'offre. Supposons que nous considérions très simplement ce qui se passe sur le marché. Cela se résume alors à un jeu de chiffres; voilà tout. L'essence est au fond un produit non différencié. Les automobilistes ne peuvent la mettre en réserve en prévision des hausses futures. Normalement, ils ne gardent pas leurs réservoirs pleins d'essence. À l'occasion, il font l'appoint, mais ils achètent l'essence lorsqu'ils en ont besoin.

    Nous avons aussi beaucoup entendu parler au fil des ans de la hausse des prix pendant les week-ends d'été, lorsque les villégiateurs se rendent à leur chalet. Nous croyons que l'industrie se comporte ainsi simplement parce qu'elle a le loisir de le faire : elle pourra toujours vendre son produit. Personne ne va s'abstenir d'aller passer le week-end au chalet parce qu'il répugne à payer le litre d'essence 10¢ de plus. Chaque fois qu'un négociant relève les prix, les concurrents en profitent en égalant ses prix au lieu de les diminuer.

    Voici un simple exemple mathématique pour montrer comment cela fonctionne ou pourrait fonctionner. Prenons par exemple un chiffre d'un million de litres par jour. Ce ne sont pas des chiffres exacts.

½  +-(1955)  

Si l'entreprise réalise des profits de 15¢ le litre, cela donne 150 000 $ par jour. Ces 15¢ correspondent aux chiffres que nous avons vus. Si elle majore son prix de 15¢, ce qui donne un revenu net de 150 000 $ par jour, et si, comme concurrent je ne veux augmenter mon prix que de 5¢ pour lui enlever une partie de son marché, il me faudra vendre 750 000 litres de plus pour obtenir les mêmes recettes. Mais si, à court terme, je ne peux atteindre que 250 000 litres, je ne gagne que 50 000 $ au lieu de 150 000 $. Dans ce cas, je n'ai aucune raison de maintenir un prix plus faible. Je vais me rallier au prix le plus élevé plutôt qu'au plus bas. C'est le contraire de ce que la concurrence devrait être.

    Nous avons des recommandations à formuler, mais je pourrai peut-être y revenir à l'occasion des questions.

¾  +-(2000)  

+-

    Le président: Pendant les questions et réponses, vous pourrez faire d'autres observations, bien sûr. Je vous remercie.

    Nous allons passer à M. Williamson, de la Fédération des contribuables canadiens.

+-

    M. John Williamson (directeur fédéral, Fédération des contribuables canadiens): Je remercie les membres du Comité de permettre à la Fédération des contribuables canadiens de faire entendre son point de vue dans les délibérations sur la hausse des prix de l'essence et les lourdes taxes que les automobilistes paient lorsqu'ils font le plein.

    Comme mon temps est limité, j'en arrive tout de suite au fait. À qui les Canadiens doivent-ils reprocher les prix élevés de l'essence? Au gouvernement.

    En moyenne, les taxes représentent le tiers du prix. Le taux réel des taxes sur l'essence est donc de 50 p. 100. Il y a trois ordres de gouvernement, mais un seul contribuable pour tous, en fin de compte. Selon les provinces, les taxes sur l'essence représentent entre 27 et 38 p. 100 du prix à la pompe. Les différences de taxes expliquent en grande partie la variation des prix au Canada. La moyenne des prix se situe maintenant à plus d'un dollar le litre. Là-dessus les taxes représentent environ 33¢. Les budgets des familles en souffrent.

    Au cours de l'exercice 2004-2005, le gouvernement fédéral a perçu 4,5 milliards de dollars en taxes fédérales sur l'essence et le diesel, soit 18 p. 100 de plus qu'il y a dix ans. Une explication réside dans l'augmentation constante du taux des taxes. Le prélèvement fédéral sur l'essence a augmenté de 567 p. 100 entre 1985 et 1995, passant de 1,5¢ à 10¢ le litre.

    Nombre de ces hausses de taxe ont été présentées aux Canadiens comme un moyen de réduire le déficit fédéral. En 1995, lorsque la taxe d'Ottawa sur l'essence a bondi de 8,5¢ à 10¢ le litre, Paul Martin, alors ministre des Finances a parlé d'une mesure visant à éliminer le déficit. Ce déficit est disparu en 1997-1998, mais la taxe subsiste, et le gouvernement fédéral continue d'exploiter le contribuable à la pompe, même s'il engrange depuis bien des années des excédents qui se chiffrent par milliards.

    Un autre facteur qui gonfle les recettes fédérales provenant des taxes sur l'essence est la TPS de 7 p. 100 et la TVH perçue au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve-et-Labrador. La TPS et la TVH s'appliquent au plein prix, taxes sur l'essence comprises. Cette taxe sur les taxes ajoute en moyenne 1,5¢ aux prix de l'essence. Dans les provinces qui ont la TVH, les 15 p. 100 ajoutent 3,8¢ au prix du litre, ce qui est renversant.

    Avec la hausse des prix à la pompe, vous le savez tous, le produit de la TPS augmente. Entre 1996-1997 et 2004-2005, le produit de la TPS provenant de la vente d'essence est passé de 900 millions de dollars à 1,2 milliard, soit une augmentation de 31 p. 100.

    Le prix du brut est élevé. Il est temps que le gouvernement fédéral donne une chance aux automobilistes et cesse de les exploiter. Il peut le faire au moyen de trois mesures faciles. D'abord, Ottawa devrait éliminer la TPS et la TVH perçues sur les taxes. Cela fera baisser le prix en moyenne de 1,5¢ le litre. Il faut ensuite éliminer la taxe imposée pour résorber le déficit. Ce sera une économie de 1,5¢ le litre pour les automobilistes. Enfin, il faut réduire le prélèvement fédéral de 2¢, ce qui portera les économies à 5¢ le litre.

    Il y a une semaine, la Pologne a été le premier pays d'Europe à réduire sa taxe sur l'essence à cause du prix élevé du pétrole. D'après l'Associated Press, et non notre Fédération, cette décision a déjà fait baisser les prix dans les stations d'essence.

    Les Canadiens mécontents des prix de l'essence continueront de blâmer Ottawa, car seuls les législateurs fédéraux peuvent offrir un soulagement immédiat en abaissant les taxes sur les carburants. Les Canadiens ne peuvent contrôler les cours mondiaux du pétrole, mais ils peuvent faire beaucoup pour faire baisser les taxes sur l'essence. Une réduction de 5¢ le litre rendra 2 milliards de dollars aux automobilistes. Même en accordant cette modeste réduction, le gouvernement fédéral percevra toujours des milliards en taxes sur les carburants pour assurer le transfert vers les municipalités. Les contribuables réclament des taxes moins élevées sur les carburants. Ils ne veulent plus entendre les politiques avancer des prétextes pour expliquer qu'on ne puisse réduire ces taxes.

    Merci de votre temps.

+-

    Le président: Merci de votre grande concision, monsieur Williamson. Je vous en suis reconnaissant.

    Nous accueillons maintenant Frédéric Quintal, représentant de L'essence à juste prix.

[Français]

+-

    M. Frédéric Quintal (porte-parole, L'essence à juste prix): Monsieur le président, membres de l'assemblée, madame la greffière, je vous remercie beaucoup.

    Je vais d'abord me présenter rapidement. Le 6 octobre prochain, cela fera cinq ans que je suis observateur de l'industrie et de l'actualité pétrolière. J'ai trouvé que la meilleure façon de le souligner était d'écrire un livre sur le sujet. Si vous êtes intéressés à en avoir un exemplaire, laissez-moi votre adresse de courriel. Ce livre résume les cinq dernières années de tout ce dont il a été question aujourd'hui: le Bureau de la concurrence, la réglementation sur le soufre, la réduction fiscale de 2003, l'étude du Conference Board du Canada ainsi que certaines précisions sur ce que peut faire MJ Ervin.

    Je vais brosser un portrait de la situation, ce qui nous permettra de voir à quel point la situation en est une de crise. Ce qui sert de référence au litre d'essence canadien, c'est le gallon d'essence à la bourse NYMEX. Le 1er janvier 2005, il valait 1,08 $. Ce prix était un record en février 2003 et pourtant, le 1er janvier 2005, c'était le plus bas prix de l'année. Le 30 août 2005, il a atteint 2,54 $. En huit mois, il y a connu une hausse 135 p. 100. Je parle ici de l'essence ordinaire, avant les taxes. Je crois qu'il est temps d'agir.

    Quelles en sont les causes? L'industrie se targue d'avoir passé le test d'une vingtaine d'études et d'enquêtes. Ne cherchons pas de collusion, nous n'en trouverons pas de preuve. Toute la journée, nous avons entendu ici des suggestions de solutions qui sont l'équivalent d'une gorgée de sirop NyQuil pour tous ceux qui subissent les conséquences de ces fluctuations exagérées. Je vous propose, messieurs les parlementaires, de nous attaquer à la cause. D'où vient cette absence de concurrence au raffinage?

    En juin 1985, une première compagnie, Esso, a annoncé publiquement qu'elle rendrait accessible dans le journal spécialisé Oil Buyers Guide le prix de ses produits raffinés, sans escompte. Tout le monde était au courant. Le lendemain, Texaco Canada a félicité Esso de cette initiative, et Shell et Ultramar ont suivi peu après. Je n'invente rien. Cela a été dénoncé dans le rapport de M. Michael O'Farrell. Il a dénoncé clairement le fait que cela mettait fin à la concurrence dans le raffinage. On en vit aujourd'hui toutes les conséquences.

    Le résultat, 20 ans plus tard, est la frénésie boursière. Voici quelques exemples de frénésie boursière: en juillet 2004, la rumeur d'arrêt de production de la pétrolière UKOS a circulé, et le prix du baril de pétrole a grimpé de 4 $; le 6 juillet 2005, les spécialistes en météorologie ont annoncé que trois jours plus tard, la tempête tropicale Dennis atteindrait le golfe du Mexique. Dennis n'a jamais atteint le golfe du Mexique, mais le prix du baril de pétrole a grimpé de 4 $; dans deux jours, Rita atteindra le Texas, et lundi, lorsque le rapport des météorologistes a annoncé qu'elle toucherait le golfe du Mexique, il y a eu une frénésie boursière de 25 ¢ qui s'est estompée le lendemain.

    Le 1er juin 1985, le nouveau système d'Esso a commencé. Par contre, Esso ne l'a pas annoncé le 1er juin 1985, mais le 21 juin. Pourquoi? Peut-être parce qu'on voulait que cela passe inaperçu. D'ailleurs, qu'y avait-il à Montréal le 21 juin 1985? La démission du premier ministre René Lévesque. L'annonce d'Esso était placée discrètement dans le fond des sections d'économie de tous les journaux. Cette hypothèse est intéressante. Pourquoi la même nouvelle n'est-elle sortie que le 2 juillet 1985 à Toronto? Pourquoi n'est-elle pas sortie la même journée? Qu'y avait-il à Toronto le 2 juillet 1985? L'actualité était ailleurs. C'était la première journée du gouvernement minoritaire de David Peterson en coalition avec le NPD. Était-ce un hasard ou était-ce intentionnel que cette nouvelle passe inaperçue en juin 1985? Comme je le dis toujours, si vous voulez qu'il y ait le moins de monde possible à vos noces, faites-les un mercredi matin, et non un samedi après-midi.

    Voilà mon point de vue. La problème est là: il n'y a plus de concurrence dans le raffinage. La principale recommandation que je vous fais, à vous parlementaires, est la suivante: réglementez le raffinage ou, dans un an, vous serez peut-être responsables de la prochaine récession économique au Canada. Vous avez le choix, vous êtes nos parlementaires. Vous avez le pouvoir. Ou vous n'êtes pas capables de faire face à 150 producteurs pétroliers, ou vous vous prenez en main, vous vous retroussez les manches et vous nous montrez que vous représentez 30 millions de Canadiens.

    Merci.

¾  +-(2005)  

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Quintal.

    Nous écouterons maintenant Kory Teneycke, de l'Association canadienne des carburants renouvelables.

+-

    M. Kory Teneycke (directeur exécutif, Association canadienne des carburants renouvelables): Merci de nous avoir invités aujourd'hui. Nous croyons qu'une grande part de la solution au problème du prix de l'essence dépend de vous. Il existe un carburant renouvelable, l'éthanol, fabriqué à partir de produits cultivés chez nous comme le maïs, le blé et même la paille.

    Le mélange d'éthanol et d'essence peut s'utiliser dans toutes les voitures et être facilement intégré à l'infrastructure existante. S'il est utilisé en quantité suffisamment importante, ce mélange a la possibilité de diversifier notre approvisionnement national en carburants et d'améliorer notre capacité de raffinage. II élargirait notre approvisionnement en essence et aiderait à atténuer les effets de la flambée des prix.

    L'éthanol peut permettre d'atteindre ces objectifs, mais il faudra que les parlementaires fassent preuve de leadership. Vous devrez encourager le changement dans tout le Canada.

    Bien que plusieurs témoins entendus aujourd'hui aient prétendu qu'il existe une intense concurrence dans l'industrie pétrolière, il y a pratiquement un monopole sur la matière première utilisée pour fabriquer le carburant, le pétrole brut. Comme vous le savez, le brut est une ressource non renouvelable. Vous l'extrayez, vous le consommez et il n'y a plus rien.

    Bien qu'il n'y ait pas de pénurie imminente de pétrole, les réserves se trouvent à des endroits de plus en plus éloignés et de plus en plus dangereux, ce qui ne fait qu'augmenter le coût du brut. Les prix sont encore plus élevés en raison d'une demande accrue, dans le monde entier, en particulier sur des marchés à croissance rapide comme la Chine et l'Inde. En conséquence, les prix du brut ne peuvent descendre en bas d'un nouveau plancher. On peut spéculer sur ce montant minimum, mais il va sans dire que les jours où le baril coûtait 18 $ sont bel et bien révolus.

    Par contre, l'éthanol provient de produits agricoles renouvelables, pas du pétrole brut. Ainsi, il ajoute un élément de concurrence sur le marché des carburants au niveau le plus élémentaire. Par le passé, des critiques soutenaient qu'il coûtait plus cher de produire de l'éthanol que de fabriquer des carburants à partir du pétrole. C'était vrai quand le baril coûtait 18 $, mais ça ne l'est plus aujourd'hui. À 41 $ le baril, le coût moyen de production d'un baril d'éthanol est égal au coût moyen de production d'un baril d'essence.

    Au coût moyen de 54 $ le baril de pétrole brut en 2005, l'éthanol est beaucoup moins cher à produire que le brut. Alors que les coûts de production du pétrole augmentaient, ceux de la production d'éthanol ont diminué légèrement.

    Contrairement au brut, les coûts de production d'éthanol dépendent des prix des produits agricoles et du gaz naturel, ce qui les rend beaucoup plus stables que le marché mondial du pétrole. Ainsi, le potentiel de l'éthanol comme source de carburant viable est bien réel. Cela est faisable sur les plans économique et technique. Si le Canada adoptait une stratégie nationale sur les carburants prévoyant une utilisation accrue d'éthanol, nous pourrions mettre un terme au monopole du brut.

    Un autre facteur majeur contribuant à l'augmentation du prix des carburant est la baisse de La capacité de raffinage. Notre capacité de raffinage du brut pour produire de l'essence a baissé de 18 p. 100 depuis 1980. Au lieu d'exploiter nos raffineries à 86 p. 100 comme nous le faisions il y a 25 ans, nous les exploitons à 97 p. 100. Ce problème ne se limite pas au Canada. Les États-Unis sont aux prises avec le même. Ces 20 dernières années, leur capacité de raffinage a baissé de 9 p. 100, alors que la demande intérieure a augmenté de 20 p. 100.

    La capacité diminuant, la marge bénéficiaire prélevée par les raffineurs ne cesse d'augmenter. La marge moyenne a doublé au cours des dix dernières années, passant à plus de 10¢ le litre. Alors que notre capacité d'accroître l'offre d'essence diminue, le bénéfice des raffineurs augmente. De plus, la disparition de la marge de manoeuvre dans notre capacité de raffinage aggrave notre vulnérabilité aux hausses de prix dues aux perturbations dans les raffineries.

    Comme l'ont montré les ouragans Katrina et Rita, même une perturbation qui se produit à des milliers de kilomètres peut entraîner une hausse brusque de 20¢ le litre chez nous. Où est la stratégie visant à augmenter la capacité de raffinage? Quelles sociétés pétrolières en Amérique du Nord construisent de nouvelles raffineries?

    Aux États-Unis, aucune nouvelle raffinerie n'est en construction, les dispositions visant à encourager la construction de raffineries ayant été rayées du projet de loi sur l'énergie. La situation n'est pas plus enviable de ce côté-ci de la frontière. Non seulement le Canada ne construit pas de nouvelles raffineries, mais celle d'Oakville a fermé ses portes l'an dernier.

    L'éthanol peut aider à remédier à cette pénurie en augmentant la capacité de raffinage et en livrant une concurrence fort nécessaire aux raffineurs de brut. On ajoute de l'éthanol à l'essence après son raffinage. L'ajout de 10 p. 100 d'éthanol accroît d'autant la capacité de raffinage.

¾  +-(2010)  

    L' augmentation de l'offre de pétrole raffiné sur le marché a un effet positif sur les prix, qu'il s'agisse d'éthanol ou d'essence. Si l'industrie pétrolière ne ferme pas d'autres raffineries, l'augmentation de la production d'éthanol assurera une plus grande élasticité sur le marché des carburants, car la pression qui s'exerce sur les raffineries existantes s'allégera.

    Bien des représentants de l'industrie pétrolière ont signalé que les obstacles environnementaux à la construction de nouvelles raffineries sont considérables. Nous connaissons tous la réaction « pas dans ma cour ». Les obstacles ne sont pas aussi considérables lorsqu'il s'agit de raffiner de l'éthanol, car on utilise un processus biologique de fermentation, pas un processus chimique.

    Si le Canada ajoutait 10 p. 100 d'éthanol à toute l'essence au Canada, la nouvelle demande provoquerait la construction de toute une nouvelle série d'usines de production d'éthanol. Elles seraient l'équivalent d'une raffinerie de produits pétroliers capable de traiter 200 000 barils par jour.

    Si l'éthanol a la capacité de mettre un terme au monopole du brut au Canada et d'améliorer notre capacité de raffinage, pourquoi n'a-t-on rien fait? Ce n'est pas dans l'intérêt financier de l'industrie pétrolière, qui ne veut pas mettre de l'eau dans son vin.

    Un certain nombre de provinces ont pris des mesures pour accroître l'utilisation de carburants renouvelables, et le gouvernement fédéral en a fait autant par son Programme d'expansion du marché de l'éthanol. Ce que nous demandons aujourd'hui pour aider à atténuer le problème, c'est l'imposition d'une norme de 10 p. 100 de carburant renouvelable exigeant que, d'ici 2010, l'essence contienne 10 p. 100 d'éthanol. Cela diversifierait notre approvisionnement en énergie, ajouterait à notre capacité de raffinage et aiderait à contrôler les prix.

    Merci pour votre temps. J'espère que vous allez appuyer cette évolution sur le marché des carburants au Canada.

¾  +-(2015)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Teneycke.

    Voici maintenant Jeff Passmore, de la Corporation Iogen.

+-

    M. Jeff Passmore (vice-président exécutif, Corporation Iogen): Merci à vous, monsieur le président, et aux membres du Comité de nous avoir permis de comparaître.

    La Corporation Iogen s'occupe également de la production d'éthanol, mais à la différence des producteurs classiques, je précise pour que ce soit bien clair que nous utilisons les résidus agricoles, la partie de la plante qui ne sert pas à l'alimentation : paille, trognons de maïs, tiges, feuilles.

    Le Canada consomme environ 40 milliards de litres d'essence par année. On vous l'a certainement dit au cours de la journée. Il faudrait donc 4 milliards de litres d'éthanol pour assurer une teneur de 10 p. 100 en éthanol. Si nous utilisions ce type d'essence dans toutes nos voitures, il faudrait une production de 4 milliards de litres. Comme Kory vient de le dire, aucune raffinerie de pétrole n'a été construite en Amérique du Nord depuis les années 1970, et la capacité de raffinage est limitée. Il n'y a aucun projet de construction de raffinerie de pétrole.

    Iogen et même ceux qui produisent l'éthanol à partir de grains proposent de construire des raffineries appelées bioraffineries. Que les choses soient claires. Nous proposons de construire ce genre d'installation. Nous sommes les seuls à parler de construire des raffineries et d'accroître la capacité. Si c'est une innovation dans le discours aux yeux de tous, très bien, mais nous sommes ici pour parler de construire des bioraffineries.

    Les bioraffineries vont accroître l'offre de carburant, améliorer la sécurité énergétique, maintenir les prix à un niveau inférieur à ce qu'ils seraient autrement, ouvrir de nouveaux débouchés à l'agriculture et réduire les émissions de gaz à effet de serre. Pour ce qui est des nouveaux débouchés pour l'agriculture, Iogen envisage de construire ses usines dans les Prairies : Manitoba, Saskatchewan et Alberta. Et vous savez quoi? C'est un choix dénué de tout sectarisme. Il n'y a pas tellement de députés libéraux dans ces trois provinces. C'est là que nous entendons implanter nos usines.

    Tout le Canada profiterait des avantages dont je parle : débouchés pour l'agriculture, réduction des émissions de GES, sécurité énergétique, modération des prix, hausse de l'offre de carburants. Tout le Canada devrait en profiter, mais en profitera-t-il?

    Iogen travaille actuellement avec le gouvernement du Canada sur des mesures incitatives comparables à celles proposées dans le U.S. Energy Policy Act de 2005. On reproche aux Américains de ne pas avoir signé le Protocole de Kyoto, mais il faut savoir qu'ils ont dans cette loi que le président a signée en août une initiative très dynamique de production d'éthanol à partir de la cellulose. Il y a des garanties de prêt. Des subventions d'immobilisation. Des encouragements à la recherche et au développement. Selon nous, il faut bâtir ces raffineries au Canada et, je le répète, nous avons avec le gouvernement du Canada des entretiens sur des mesures comparables à ces encouragements.

    Je ne crois pas que vous ayez tous mon exposé sous les yeux, mais voici une carte qui indique où vous souhaiterions bâtir nos installations. Il pourrait y en avoir au moins cinq dans les Prairies.

    Pour écarter tout doute au sujet des voitures qui peuvent utiliser une essence contenant 10 p. 100 d'éthanol, la norme que Kory a réclamée, je précise qu'elles peuvent toutes l'utiliser. Pas une seule voiture sur la route aujourd'hui est incapable de consommer ce type d'essence.

    Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci, monsieur Passmore.

    Monsieur Girard, de la Coalition pour la défense des consommateurs de carburant du Saguenay—Lac-St-Jean.

[Français]

+-

    M. Claude Girard (porte-parole, Coalition pour la défense des consommateurs de carburant du Saguenay-Lac-St-Jean): Bonsoir et merci aux membres du comité d'avoir permis à la coalition de se faire entendre ici ce soir. Nous comptons sur le gros bon sens de nos représentants politiques. Je n'ai pas l'intention de vous inonder de chiffres, de tableaux ou de quoi que ce soit. Je crois que les personnes ici présentes sont toutes de bonne foi. Les gens tentent de formuler des solutions. C'est peut-être davantage le point de vue des consommateurs, des gens de la rue, que j'aimerais faire entendre ici ce soir.

    La Coalition pour la défense des consommateurs de carburant du Saguenay—Lac-St-Jean existe depuis plus de cinq ans. Elle regroupe aujourd'hui près d'une vingtaine d'organismes représentant près de 100 000 personnes. Au cours des dernières semaines, les augmentations marquées du prix des carburants ont « donné beaucoup de gaz » à la coalition. La mission première de la coalition était d'informer, mais les de la coalition membres ont élargi cette dernière en y ajoutant les objectifs suivants: sensibiliser et regrouper.

    D'ici quelques semaines, la coalition pourrait atteindre un nombre impressionnant d'adhésions, compte tenu des contacts qui se font en ce moment. La coalition a présenté deux mémoires, dont un devant ce comité en 2003, plus précisément le 12 mai. L'une des recommandations de ce mémoire était la mise en vigueur d'un système d'établissement des coûts d'exploitation des pétrolières, de façon à fixer des prix justes et équitables pour les consommateurs. Également, la coalition demandait d'instaurer une législation empêchant quiconque de s'entendre sur les prix et l'obligation d'expliquer, preuves à l'appui, tout mouvement à la hausse du prix à la pompe de même que tout refus de baisser les prix malgré une chute des prix d'approvisionnement. En clair, la coalition demandait et demande toujours l'institution d'un organisme de contrôle des prix des carburants au Canada.

    La coalition n'a rien contre le fait que toute entreprise doive assurer sa survie et son développement en faisant des profits. Cependant, il apparaît évident que les pétrolières se sont érigées en système et qu'il y a un vice dans le marché des produits pétroliers au Canada. D'ailleurs, on peut appliquer cela à l'ensemble de la planète. Aucun principe, valeur ou système ne doit tolérer le genre de situation absurde que font vivre présentement aux Canadiens les compagnies pétrolières. Le Canada, qui est un exportateur de pétrole, ne devrait dépendre d'aucun approvisionnement extérieur. Par le passé, on pouvait invoquer toutes sortes de raisons pour expliquer les hausses de prix des carburants. Aujourd'hui, la population est de plus en plus et de mieux en mieux informée, et maintenant, ça ne passe plus.

    Je dis et je répète, attention! Les consommateurs que je représente ici en ont assez. Le laisser-aller du gouvernement canadien doit cesser immédiatement. Il est dangereux de persister dans cette voie. Des gestes malheureux pourraient être posés, et la situation pourrait dégénérer. Prenez simplement l'exemple les plus démunis qui seront incapables d'assumer les hausses du prix du mazout pour se chauffer l'hiver prochain. Attention! des familles vont littéralement mettre le feu et périr en se chauffant avec des combustibles de rechange ou en utilisant des organisations de fortune. Nous avons connu cela au Québec lors de la grande tempête de verglas.

    Par ailleurs, j'entends déjà les représentants gouvernementaux annoncer des mesures pour aider les plus démunis, précisément. Cependant, où vont-ils prendre l'argent? Je vous donne la réponse en prime : ils vont le prendre dans les poches des contribuables. Je dis encore, attention! L'argent, ce n'est pas dans les poches des contribuables, mais dans les coffres des pétrolières qu'il se trouve, et c'est là que le gouvernement doit le prendre pour le restituer au peuple.

    Il faut prendre en considération les flambées successives et irrationnelles des prix des carburants et l'impact majeur subi à tous les niveaux de notre économie. La population se questionne sérieusement sur les profits excessifs des pétrolières, et ici, je vous assure que ce n'est plus une perception. L'étude des états financiers des pétrolières nous a prouvé au cours des dernières années que ces compagnies avaient enregistré des profits six, sept, voire huit fois plus élevés que la moyenne de l'industrie canadienne. Ça c'est du business!

    Considérant que le gouvernement fédéral possède les pouvoirs nécessaires et l'appareil législatif permettant de mettre un terme à l'abus des pétrolières; considérant, et ce pour mettre un terme à l'argument classique relatif à l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, qu'il n'y a dans l'ALENA aucun passage où on autorise les compagnies pétrolières à abuser des consommateurs canadiens; considérant l'urgence et l'importance de régulariser cette situation, la Coalition pour la défense des consommateurs de carburant demande au gouvernement du Canada d'instaurer sur- le-champ un organisme de contrôle des prix des carburants au Canada. On ne demande pas de contrôler l'énergie ni d'envahir le champ de compétence des provinces, mais celui des compagnies pétrolières. Assez, c'est assez.

¾  +-(2020)  

    La population canadienne, l'économie canadienne et l'industrie en général ont besoin d'un soutien du gouvernement canadien. Nous demandons en plus la préparation d'un plan établissant des mesures transitoires, de façon à passer de la situation actuelle à une situation dans laquelle les automobilistes circuleraient dans des voitures hybrides ou bénéficieraient de solutions de rechange moins polluantes et plus économiques.

    Cette planification pourrait permettre aux consommateurs de traverser cette problématique environnementale qu'engendrent les carburants fossiles et permettre à toute la population de croire en un avenir meilleur. Il ne s'agit pas d'un avenir seulement mondialisé, « chinoisé » ou « wal-martisé ». Je crois bien me faire comprendre.

    En tant que société, nous ne pouvons plus tolérer de voir des bandits nous piller allègrement, de voir des gens déjà beaucoup trop riches s'enrichir encore plus sur notre dos et détruire les fondements de notre économie et notre façon de vivre.

    Merci.

¾  +-(2025)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Girard.

[Traduction]

+-

    Très bien. Nous allons passer aux questions. Si nous nous en tenons tous à cinq minutes, tous pourront intervenir cette fois-ci encore.

    Nous allons suivre à peu près le même ordre, en commençant par John Duncan.

+-

    M. John Duncan: Merci beaucoup, monsieur le président.

    Merci à tous les témoins de leurs exposés.

    Je suis désolé, mais je dois revenir brièvement en arrière, car M. Pickard a dit que les municipalités recevaient 5¢ le litre. Je vais de nouveau faire une mise au point.

    À écouter M. Pickard, on croirait qu'une réduction de la taxe d'accise sur l'essence priverait les municipalités d'une partie de leur argent. En fait, le lien entre la taxe fédérale sur l'essence et les transferts aux municipalités est une question politique et non juridique. Aucune loi ne lie expressément les deux. Une hausse ou une baisse du produit de la taxe d'accise n'aurait aucune conséquence légale pour le montant du transfert, car ce montant dépend d'une décision politique. Le gouvernement a promis d'augmenter le transfert jusqu'à l'équivalent de 5¢ le litre, mais il faudra cinq ans pour atteindre ce niveau.

    La mise en oeuvre graduelle prévoit 600 millions de dollars à chacune des deux prochaines années. C'est l'équivalent de 1,5¢ le libre. En 2007-2008, ce sera 2¢ le litre, soit 800 millions de dollars, et enfin 2,5¢ le litre en 2008-2009. Nous n'atteindrons donc les 5¢ le litre qu'en 2009-2010. Autrement dit, cette année et l'année prochaine, le gouvernement ne versera aux provinces que 1¢ sur les 7¢ qu'il perçoit en taxe d'accise sur l'essence, mais il ne cédera rien du produit de la TPS sur l'essence.

    Cette précision s'impose parce qu'on essaie de nous berner en nous disant que ces transferts sont menacés.

    Je veux revenir aussi sur le fait que les représentants du Congrès du travail du Canada n'ont pu venir ce soir et exprimer ma déception, car je sais que bien des travailleurs dans le secteur des ressources et d'autres travailleurs aussi, par exemple dans les secteurs des transports et de la fabrication, sont touchés par le régime actuel de prix. Il y a dans ma circonscription des travailleurs forestiers qui sont certainement inactifs maintenant à cause des prix du carburant. On m'a fait part de ce point de vue, et je sais que c'est probablement de cela que le CTC aurait parlé ce soir. Le niveau des taxes le préoccupe.

    John Williamson a parlé de la récente... Est-ce aux Pays-Bas qu'on a réduit...? En Pologne, merci. On nous a présenté ici une série de graphiques de sources diverses qui montrent que dans les provinces où les taxes sont les plus basses, les prix sont plus bas également. Nous avons vu des comparaisons entre le Canada et les États-Unis, et c'est un fait que des taxes plus faibles donnent des prix également plus bas. C'est une confirmation de plus. De ce côté-là, on a aussi essayé de nous berner. Mais c'est essentiellement ce que nous constatons, pour peu qu'on ouvre les yeux, d'après les faits que nous observons d'aujourd'hui. Merci de cette confirmation.

    Kory Teneycke et Jeff Passmore ont ajouté un élément aux discussions d'aujourd'hui. Chaque fois qu'on essaie de circonscrire l'objet du débat, c'est-à-dire le coût des carburants et du mazout... L'énergie est un secteur compliqué et complexe de l'économie, et nous constatons, si nous élargissons un peu les perspectives, qu'il y a des choses nouvelles en préparation.

    Nous avons beaucoup parlé aujourd'hui des raffineries et de la capacité de raffinage. Serait-il juste de dire que vous avez tous les deux confirmé que l'investisseur n'a aucune raison de consacrer son argent à la construction de raffineries classiques alors que toutes sortes d'autres possibilités se profilent très nettement à l'horizon.

¾  +-(2030)  

+-

    Le président: Merci, John.

    Nous allons essayer d'obtenir les réponses très rapidement. Vous voulez tenter votre chance, monsieur Teneycke?

+-

    M. Kory Teneycke: À propos du raffinage, il semble que, au moins au cours des dix dernières années, l'industrie pétrolière n'a pas réagi très bien aux signaux donnés sur le marché par ceux qui augmentaient les marges bénéficiaires des raffineries. Normalement, lorsque les prix d'un produit ou d'un service donné augmentent, le marché réagit en augmentant l'offre. Dans le cas du raffinage, les marges ont augmenté alors que la capacité s'est contractée. Le marché donne le signal qu'il faut augmenter la capacité, et c'est le contraire qui se produit.

    Comme cela arrive souvent sur le marché, quelqu'un qui vient de l'extérieur du secteur classique arrive avec une idée ou un produit de remplacement qui remplit la même fonction, propose un prix plus bas. C'est ainsi que nous sommes prêts à construire des raffineries. Nous voulons le faire. Je vous dirais que nous sommes aujourd'hui les seuls qui aient un plan dynamique de construction de raffineries, mais il s'agira de raffiner autre chose que du brut. C'est tant mieux, si on considère les tendances dans les prix du brut.

+-

    Le président: Il y a peut-être assez de temps pour une autre intervention, monsieur Passmore.

+-

    M. Jeff Passmore: Monsieur Duncan, je dirais seulement que, dans le cas de la production d'éthanol à partir de la cellulose, le problème ne consiste pas à réunir les capitaux propres, mais à trouver des capitaux à emprunter, car nous proposons une technologie nouvelle. Nous n'avons encore rien construit. Le problème, c'est celui des emprunts pour toute technologie nouvelle. Les prêteurs n'accordent pas d'argent pour les technologies nouvelles à moins qu'elles ne soient garanties par une solide cote de crédit. Ils refusent ces risques. C'est le problème que nous avons sur les bras, et nous avons en ce moment des entretiens à ce sujet.

+-

    Le président: Merci.

+-

    M. John Duncan: Une précision. Ma question n'a pas été bien comprise. Je demandais pourquoi on investirait dans une capacité de raffinage classique alors qu'il peut y avoir des technologies plus intéressantes ou différentes que nous allons pouvoir...

+-

    Le président: C'était une bonne question, et la précision s'imposait. Merci.

    Paul.

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Merci, monsieur le président.

    Je voudrais dire à M. Quintal que son livre Qui fait le plein? porte un sous-titre qui lui va bien, en l'occurrence La croisade d'un consommateur pour démystifier le prix de l'essence. Je pense qu'il résume bien le propos.

    D'après ce que j'ai pu constater, vous êtes impatient de voir des résultats concrets, et je vous comprends. Il y a quand même des signes encourageants, entre autres la décision de convoquer les cinq ministres responsables prise par le comité cet après-midi. Je crois que c'est un geste dans le bon sens.

    Cela étant dit, vous avez entièrement raison pour ce qui est de la hausse soudaine du prix et de la situation que nous vivons présentement. Vous suggérez que l'on réglemente le raffinage. J'aimerais que vous nous donniez plus de détails sur les solutions que vous avez envisagées à cet égard.

+-

    M. Frédéric Quintal: J'aime souvent citer en exemple le rapport O'Farrell de décembre 1985. Selon ce dernier, il y a élimination de la concurrence à l'étape du raffinage. Avant juin 1985, il était impossible pour un raffineur, en se basant sur le Oil Buyer's Guide, de connaître le prix de son compétiteur. Il y avait une compétition à ce niveau. Aujourd'hui, le Oil Buyer's Guide paraît quotidiennement. Par exemple, à Ottawa, Esso a exactement le prix de Olco, Petro-Canada et Shell. Le prix d'Esso est celui de ses compétiteurs. Ce n'est même pas le fait des raffineries canadiennes, mais celui d'une agence américaine. Celle-ci indique à chaque jour, à chacune de ses rampes de chargement, quel sera le prix. Ce dernier est basé sur le Nymex. Je ne connais pas d'autre secteur industriel...

    Il existe une autre ambiguïté dans l'industrie pétrolière: tout le monde pense encore que si le prix du pétrole monte, le prix de l'essence monte aussi. Il y a une éducation à faire, et pour cette raison, j'ai écrit ce livre. Le prix de la matière première monte, mais tous les produits sortant de la raffinerie sont inscrits à la bourse. Il m'a fallu deux ans pour le comprendre, et je l'explique aujourd'hui. Tout le monde paie une orange le même prix, mais cela ne s'applique pas aux transformateurs tels que Tropicana, Minute Maid, Oasis et Old South. Le jus transformé n'est pas inscrit à la bourse. Cela s'est fait dans le cas de l'industrie pétrolière, et nous en vivons pleinement les conséquences. On peut voir que l'actuelle frénésie boursière est vraiment exagérée.

    J'observe l'industrie depuis cinq ans. Au cours de cette période, le Nymex n'a jamais fluctué de plus de 10 ¢ en une journée. Or, subitement, le lundi 29 août 2005, il a enregistré une fluctuation, sur le Nymex, de 21 ¢ le gallon en deux heures. Mardi le 30 août, la fluctuation était de 41 ¢. Pour ce qui est du prix de l'essence au détail, il a fallu 39 mois pour passer le cap des 80 ¢ dans la région de Montréal; 14 mois pour passer le cap des 90 ¢; six semaines pour passer de 1 $ à 1,10 $; 16 jours pour passer de 1,10 $ à 1,30 $, et deux jours pour en arriver, le 2 septembre, à passer de 1,30 $ à 1,47 $. C'est ce qu'on appelle une spirale ou frénésie boursière. Plus ça va, plus ça s'intensifie. Je pense qu'il y a maintenant des exagérations, des excès.

    J'aime répéter une citation de feu Pierre Elliott Trudeau :

    Il faut un État suffisament fort pour faire contrepoids à la recherche du profit et pour assurer que la richesse [...] soit équitablement distribuée [...] entre les parties constituantes de l'économie, c'est-à-dire entre producteurs et consommateurs.

    Messieurs les parlementaires, nous en sommes rendus à ce point. C'est à vous de jouer.

¾  +-(2035)  

+-

    M. Paul Crête: Il est dit dans votre exposé, monsieur Quintal, que l'avenir ne sera pas rose si l'on ne bouge pas. Qu'entendiez-vous par là? Supposons, par exemple, qu'à la suite des audiences, rien ne change en termes de fonctionnement, de façon de faire et de mesures du gouvernement. À quelle réalité pourra-t-on s'attendre pour les prochains mois et les prochaines années?

+-

    M. Frédéric Quintal: L'année 2006 sera tout simplement une récession. En tant que parlementaires, vous et vos collègues des divers partis choisirez ce que vous voudrez léguer à la population canadienne, une fois retirés de la vie politique: prendre cette industrie un peu plus en main et la réglementer pour défendre les intérêts de la population ou être les initiateurs, les politiciens qui auront été au pouvoir au moment de cette grande récession, qui va commencer en 2006. Lorsque je parle de récession, c'est très sérieux. Les gens qui nous ont précédés nous en ont fait la démonstration. On a pu constater à quel point ils subissent les contre-coups de cette situation. Il faut vraiment réagir. C'est sérieux.

+-

    M. Paul Crête: S'il me reste du temps, j'aimerais poser une question à M. Williamson.

    Vous nous avez beaucoup parlé de la question des taxes. D'après ce que je comprends, ce n'est pas l'augmentation des taxes qui a provoqué la hausse du prix de l'essence au cours de la dernière année. Je suis le premier à ne pas aimer payer des taxes. Personne n'aime cela, et je le comprends. Toutefois, compte tenu des problèmes actuels, on doit se demander si ce n'est pas plutôt tout le reste du système qui produit des augmentations et des fluctuations très importantes à court terme.

    Est-ce que ce ne sont pas deux problèmes qui doivent être considérés en parallèle?

+-

    M. John Williamson: Je vais répondre en anglais, simplement parce que c'est plus facile pour moi.

[Traduction]

    Il y a un certain nombre de questions sur la table, mais il me semble hypocrite que les politiques s'en prennent toujours à l'industrie. À la Fédération des contribuables, nous nous intéressons à la fiscalité et aux dépenses. Nous allons laisser aux grandes pétrolières le soin d'expliquer comment elles établissent leurs prix.

    Il y a eu sur la question des audiences à Washington, et il y en a à Ottawa. Mais il me semble qu'il est hypocrite de la part des politiques de pointer l'industrie du doigt alors que le gouvernement exploite lui aussi les consommateurs à la pompe à essence.

    Merci.

+-

    Le président: Merci, Paul.

    Nous allons donner la parole à Dan, à Brian, puis à Werner.

    Dan, à vous.

[Français]

+-

    L'hon. Dan McTeague: J'aimerais remercier M. Crête pour ce qu'on appelle en anglais un segue.

[Traduction]

    M. Williamson, je suis l'un de ces hommes politiques. En 1998, j'ai pris le temps de rédiger un rapport qui portait sur tous les aspects de l'établissement des prix dans l'industrie. Nous avons découvert une ou deux choses. Il y a eu évidemment la question de la TPS et des autres taxes et, bien entendu ce 1,5¢ le litre dont vous avez parlé.

    Nous avons fait notre travail dans la plus grande transparence, au vu de tous. Nous l'avons fait de façon à voir quelles étaient les composantes du coût. Nous avons aussi formulé des recommandations dont votre organisation a pris connaissance. Votre prédécesseur, M. Robinson, en témoignera.

    Lorsqu'il s'agit de discuter de taxes, croyez-moi, monsieur Williamson, il ne manque pas de gens de ce côté-ci qui ont étudié la question et la comprennent implicitement. Il y a aussi Bernard Lord, qui a siégé au Comité spécial sur les prix de l'essence du Nouveau-Brunswick et qui, comme conservateur, n'ira jamais recommander de laisser tomber les taxes sur l'essence. Il sait quels ont été leur effet sur les résultats des entreprises et sur les consommateurs de sa province.

    J'ai une question à vous poser. Vous soutenez ici, je crois vous l'avoir entendu dire à l'instant, mais corrigez-moi si je fais erreur, que vous essayez de tenir compte de tous les aspects de l'industrie et plus particulièrement de la fiscalité. Même si le Canada est probablement l'un des pays qui a les taxes les plus faibles au monde, les États-Unis mis à part, et même si, à cause de cela, les Canadiens paient leur essence plus cher que les Américains — une essence souvent d'origine canadienne —, pourriez-vous me dire si votre organisation a songé à se demander, ne fût-ce que superficiellement, si la taxation du produit par les provinces n'est pas aussi une question à considérer?

    Je ne sais pas, mais j'examinerais par exemple les redevances provinciales de l'Alberta. Je trouve que votre organisation est notoirement silencieuse à ce sujet. Et pourtant, ces redevances contribuent au prix de l'essence.

    Par conséquent, monsieur Williamson, peut-être pourriez-vous expliquer au Comité jusqu'où vous êtes prêt à aller pour réduire les ponctions gouvernementales sur ce produit pour aider les consommateurs. Plus important encore, pourriez-vous commenter la structure de cette industrie, car là aussi, vous restez muet sur cette question, alors que tant d'autres semblent en arriver à cette conclusion?

¾  +-(2040)  

+-

    M. John Williamson: Bien sûr. J'ai un ou deux points à faire valoir. Bernard Lord refuse de réduire les taxes. Dalton McGuinty a publiquement demandé à Ottawa de les réduire. C'est peut-être une position soutenue par les deux partis, mais cela demeure une position légitime de demander une diminution des taxes.

    On prétend que le Canada est le pays qui, après les États-Unis, a les taxes les plus faibles au monde, mais c'est faux. De toute façon, la question relève du Comité des finances et non de celui-ci.

    Quant aux revenus fiscaux des provinces, il est vrai que, bien des fois, les impôts provinciaux sont plus élevés que ceux d'Ottawa, notamment au Québec. Ce que nous voulons faire comprendre, et c'est l'autre moitié de la campagne que nous avons menée au fil des ans, c'est que le grand problème d'Ottawa, c'est qu'il taxe les automobilistes mais n'utilise pas cet argent. La plupart des provinces utilisent le produit de la taxe sur l'essence pour leur réseau routier. Ottawa ne le fait pas. La pire province est l'Ontario, elle ne réinvestit dans son réseau routier que la moitié du produit de sa taxe sur l'essence.

    Depuis 2000, nous demandons à Ottawa de réinvestir la moitié du produit de cette taxe dans les réseaux routiers et les ponts. Dans ce cas, je crois que vous êtes très conséquents. Les provinces utilisent le produit de la taxe pour entretenir les routes. Ottawa ne le fait pas. C'est pourquoi nous nous en prenons au gouvernement fédéral.

    De plus, le gouvernement fédéral a eu et a toujours d'énormes excédents. Cela rend notre argumentation d'autant plus convaincante.

+-

    L'hon. Dan McTeague: Monsieur Williamson, allez-vous répondre à ma question? Avez-vous demandé au gouvernement de l'Alberta de réduire ses redevances, qui représentent environ 10¢ le litre?

    Soit dit en passant, mes renseignements me viennent de la division pétrolière de Ressources naturelles Canada, si vous voulez en discuter avec ces gens-là.

+-

    M. John Williamson: Bien sûr, nous...

+-

    L'hon. Dan McTeague: Et je le comprends, mais auriez-vous l'obligeance de répondre à ma question? Êtes-vous intervenus auprès des gouvernements provinciaux au sujet de leurs redevances? Il s'agit là d'une taxe importante qui est englobée dans le prix et que tous les consommateurs doivent payer.

+-

    M. John Williamson: Si vous ne l'avez pas fait, monsieur, allez-vous le faire?

+-

    L'hon. Dan McTeague: Nous devons revoir la question. Encore une fois, ce n'est pas...

+-

    Le président: Vous vous attaquez à un gouvernement, mais pas à l'autre.

+-

    M. John Williamson: La situation fiscale en Alberta est loin d'avoir été facile pour le gouvernement Klein.

+-

    L'hon. Dan McTeague: Je pourrais peut-être faire avancer la discussion.

    Monsieur Williamson, je me préoccupais aussi des Albertains, mais non pas au sujet des redevances. Lorsque le prix de l'essence avec ou sans taxe dans une bonne partie du Canada où les taxes étaient plus élevés, était plus faible en Ontario, il était beaucoup plus élevé en Alberta. Vous voudrez peut-être en parler avec les consommateurs. M. Fruitman a peut-être aussi une opinion à exprimer à ce sujet. À cause de la structure de l'industrie, il y a souvent des prix de gros.

    Je comprends que vous vous préoccupiez de la TPS, mais je me soucie également des 40¢ le litre qui sont ajoutées au prix. Si vous vous préoccupez de 1¢, vous devriez aussi vous poser des questions sur les 40¢ qui sont ajoutées en marge bénéficiaire pour la vente de gros.

+-

    Le président: Nous allons laisser M. Williamson répondre, car son temps de parole est presque terminé.

    Allez-y, monsieur Williamson.

+-

    M. John Williamson: Bien sûr, il y a des taxes élevées, mais lorsqu'on a un taux de taxe de 50 p. 100, une réduction de 5¢ le litre, ce n'est pas beaucoup demander. Si je demandais plus, vous pourriez écarter ma demande. Je crois que nous sommes très raisonnables. Je ne vois pas très bien comment un député ministériel peut justifier l'imposition d'une taxe sur la taxe, le maintien d'une taxe d'élimination du déficit huit ans après sa disparition et le maintien de taxes élevées alors qu'on n'en dépense pas le produit dans l'intérêt des automobilistes.

+-

    L'hon. Dan McTeague: Si vous savez quelque chose sur les taxes, monsieur Williamson, c'est grâce à ce que j'ai écrit en 1998 comme député libéral.

+-

    M. John Williamson: Alors pourquoi n'y faites-vous pas quelque chose au lieu de vous contenter d'en parler?

+-

    L'hon. Dan McTeague: Nous avons agi, monsieur Williamson. C'est ainsi que nous avons injecté de l'argent dans le réseau routier et l'infrastructure.

+-

    Le président: Merci, Dan.

    Merci, monsieur Williamson.

    Ce sera dans l'ordre Brian, Michael et Marc.

+-

    M. Brian Masse: Merci, monsieur le Président.

    J'ai une question à poser à M. Quintal.

    J'ai remarqué vos propos au sujet des spéculateurs qui contribueraient à faire augmenter les coûts et profiteraient de la situation. Nous n'en avons pas beaucoup parlé. Le ministère des Finances a signalé que les spéculateurs tiraient profit de ce qui se passe dans le monde.

    Je voudrais connaître votre opinion sur un point. Le gouvernement a réduit l'impôt des sociétés, qui était de 28 p. 100 et devrait baisser à 21 p. 100. Il est maintenant de 25 p. 100, après une réduction de trois points. Pourtant, les bénéfices atteignent un niveau record, tout comme les prix, et les consommateurs ne retirent aucun avantage. Il est très difficile aux Canadiens d'accepter de perdre les impôts de cette industrie, qui engrange des bénéfices records, tandis que les consommateurs paient le prix fort à la pompe.

    Pourquoi la réduction des impôts n'entraîne-t-elle pas une baisse des prix?

¾  +-(2045)  

[Français]

+-

    M. Frédéric Quintal: Quelle est la question, précisément? Je n'en ai pas saisi le sens.

[Traduction]

+-

    M. Brian Masse: Plus précisément, la spéculation qui a cours sur le marché en ce moment a occasionné une grande perte de bénéfices. Le ministère des Finances a mis le doigt sur ce problème. L'industrie pétrolière et gazière a droit depuis quelques années à une réduction de l'impôt des grandes sociétés, une réduction de 3 p. 100. Cela n'a pas provoqué une baisse des prix, malgré des bénéfices records. Qu'est-ce qui cloche dans le système pour que les consommateurs n'en profitent pas, au bout du compte?

    Cela vous aide-t-il?

[Français]

+-

    M. Frédéric Quintal: Il s'agit de la Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (ressources naturelles) d'octobre 2003. L'un des trois arguments principaux présentés pour faire adopter cette réduction fiscale était, si je me rappelle bien, d'améliorer la qualité de vie des Canadiens. J'avais demandé au Comité des finances ce qu'était la qualité de vie des Canadiens alors que tous les jours, depuis deux ou trois ans, le budget pour l'essence, le gaz naturel et l'huile à chauffage fluctuait de 25 à 50 p. 100.

    Le second argument était de favoriser des investissements. Au départ, en 2003, Petro-Canada nous annonçait qu'il n'investirait pas dans sa raffinerie d'Oakville et qu'il allait la fermer. D'ailleurs, dans mon livre, je fais la démonstration comptable que le fait de fermer Oakville coûtait plus cher que de faire la conversion. En novembre 2003, dans un chapitre exclusif endossé par la Caisse de dépôt et placement du Québec, j'avais suggéré à Petro-Canada d'acheter la raffinerie d'Oakville, d'y d'investir et de croire que cela pouvait fonctionner. Petro-Canada a refusé. Je voulais faire épargner 200 millions de dollars aux actionnaires, mais cette information ne leur a jamais été transmise.

    Le troisième argument était d'avoir un taux d'imposition des sociétés comparable à celui de pays comme l'Islande, le Danemark, les Pays-Bas et la Suisse. À quoi cela sert-il de compétitionner le taux d'imposition des sociétés de ces pays? Shell ne construira jamais d'usine de traitement des sables bitumineux en Suisse, puisqu'on n'y trouve pas de sables bitumineux. À mon avis, cette réduction fiscale était farfelue.

    À la suite d'un calcul que j'ai fait pour l'année 2004, étant donné que ce que M. Trudeau avait instauré en 1974 touchait les ressources naturelles qui sont de compétence provinciale, la seule façon d'obtenir des revenus fédéraux était d'empêcher que les redevances provinciales soient déductibles, ce qui a été rétabli en 2003. Les redevances pétrolières en Alberta, en 2003, ont été de 4,25 milliards de dollars.

    Le plan actuel sur la réduction fiscale a causé une perte de 276 millions de dollars pour le gouvernement fédéral en 2004. Je souhaite d'ailleurs que soit étudié par la vérificatrice générale le document d'information sur la réduction fiscale pour l'année 2004 où il est question d'un montant de 60 millions de dollars seulement pour les redevances provinciales de l'Alberta. Je ne parle ni de la Nouvelle-Écosse, ni de Terre-Neuve ni de la réduction d'impôt. Mais il s'agit de 276 millions de dollars, alors que le document parle de 60 millions de dollars.

    En octobre 2003, j'estimais qu'en 2007, cela coûterait 3 milliards de dollars par année, et malheureusement, ces 3 milliards de dollars sont plus probables que les 100 millions de dollars mentionnés dans le document. Cette réduction fiscale ne représente que l'accroissement des profits des compagnies pétrolières.

    Ce qui est décevant, c'est qu'en 2004 deux pétrolières, Shell et Petro-Canada je crois, ont eu six fois les bénéfices nets de l'année 1999. Avaient-elles vraiment besoin d'une réduction fiscale alors que les consommateurs l'auraient pleinement appréciée?

[Traduction]

+-

    Le président: Merci.

    Avez-vous terminé, Brian, ou avez-vous une autre courte question?

+-

    M. Brian Masse: J'ai une courte question à poser à nos apôtres de l'éthanol.

    Outre l'engagement d'ajouter 10 p. 100 d'éthanol à l'essence — c'est presque un engagement politique, jusqu'à un certain point —, que faut-il d'autre pour réaliser la percée qui vous semble nécessaire?

+-

    M. Kory Teneycke: Nous souhaitons deux choses, en termes généraux. Et Jeff a fait allusion à des éléments particuliers pour assurer le développement et la commercialisation de nouvelles technologies comme celle de la cellulose.

    Il y a d'abord l'accès au marché. Dans le monde entier, l'industrie pétrolière a fait la preuve qu'elle n'était pas disposée à ajouter à ses produits des carburants renouvelables, même s'ils sont beaucoup moins coûteux que l'essence. Par conséquent, des pays des quatre coins du monde — George Bush et les États-Unis, tout récemment — ont exigé qu'on ajoute ces produits à l'essence. Premier point.

    Je suis sûr que John Williamson et d'autres seront d'accord sur le deuxième. Il faut avoir pour l'investissement un climat qui se compare à celui d'autres pays. Il faut tenir compte de tous les facteurs macroéconomiques comme le coût de la main-d'oeuvre, celui du capital et les taux d'impôt, mais il faut songer également à des mesures incitatives destinées directement à une industrie donnée.

    Au Canada, nous avons toujours moins bien appuyé le secteur des énergies renouvelables que le secteur pétrolier. Il y a là un déséquilibre. Nous avons moins bien épaulé ce secteur que ne l'ont fait des pays voisins comme les États-Unis.

    C'est différent des sables bitumineux. Peu importe la qualité des conditions du point de vue de l'impôt et de l'investissement au Rhode Island, l'activité ne se déplace pas vers cet État, mais on peut facilement bâtir une usine d'éthanol dans tout État desservi par une ligne de chemin de fer. La concurrence est donc beaucoup plus vive.

    Jeff.

¾  +-(2050)  

+-

    Le président: Très rapidement, monsieur Passmore.

+-

    M. Jeff Passmore: Oui, Brian.

    Qui aurait jamais pu imaginer que je me retrouve devant un comité de la Chambre des communes du Canada en train de dire que tout ce que je réclame, c'est que nous fassions aussi bien que George Bush et le Congrès républicain. Ils ont exigé une production d'éthanol de 28 milliards de litres d'ici 2012. D'ici 2013, un milliard de litres d'éthanol devra provenir de la cellulose. Pour chaque gallon d'éthanol de cellulose qu'un raffineur mélange avec son essence, il obtiendra un crédit comme s'il y avait ajouté deux gallons et demi de carburant renouvelable. L'éthanol de cellulose est donc privilégié à raison de 2,5 contre 1 par rapport à l'éthanol classique. Et les Américains vont assurer la construction d'une industrie de l'éthanol de cellulose en offrant des garanties de prêt pour couvrir la dette sur la nouvelle technologie.

+-

    Le président: Merci, monsieur Passmore.

    Merci, Brian.

    Ce sera Michael, Marc et Andy.

+-

    M. Michael Chong (Wellington—Halton Hills, PCC): Merci, monsieur le président.

    Je vous félicite, messieurs Passmore et Teneycke, d'avoir soulevé la question de l'éthanol et de la capacité de raffinage. Vous avez ainsi ajouté une dimension nouvelle au débat.

    Monsieur le président, c'est là une question que nous pourrions étudier plus à fond une autre fois. Aujourd'hui, je vais m'attarder à la question plus immédiate et pressante des prix à la pompe et des mesures que le gouvernement devrait prendre à ce propos. Je m'adresserai donc aux autres témoins.

    Il ne fait pas de doute que la raison sous-jacente qui explique les prix élevés des carburants est le fait que le baril de pétrole coûte 70 $. Cela dit, le gouvernement doit ou peut jouer un rôle, car les taxes représentent entre 30 et 40 p. 100 des prix de détail. Nous ne pouvons contrôler le prix du pétrole, mais les gouvernements peuvent faire quelque chose pour réduire les prix de détail.

    Au moment où nos séances s'achèvent, comme je l'ai dit hier, monsieur le président, je crains que ces délibérations n'aient été une perte de temps totale à moins que le gouvernement n'allège le fardeau de plus en plus lourd de la hausse des prix du carburant. Il peut le faire dès aujourd'hui, s'il le veut, ou encore demain, au lieu d'embrouiller la question et de dresser des écrans de fumée.

    Il y a ici un vrai problème : ces prix représentent une menace grave de déclin pour le centre de l'activité industrielle et manufacturière en Ontario. Nous sommes doublement frappés par la hausse du dollar et celle des prix du carburant, ce qui a des conséquences concrètes pour l'emploi et les Ontariens qui travaillent dans le secteur manufacturier. Ces emplois sont menacés à cause de l'inaction du gouvernement.

    Au lieu d'avoir au Comité un débat de fond sur la question, l'allégement des taxes que nous pourrions offrir et la façon de s'y prendre, nous parlons de comportement anticoncurrentiel. Aucun fait ne corrobore cette thèse. Les députés ministériels prétendent que le financement des infrastructures municipales est menacé si nous réduisons les taxes. Et nous parlons même de nationaliser de nouveau l'industrie, une idée politique vouée à l'échec dès le départ. Tout cela, au lieu de tenir un vrai débat de fond sur l'impact et la façon de réduire les prix des carburants.

    Voici la question que j'ai à poser aux témoins, et surtout à la Fédération des contribuables canadiens et à l'Association des consommateurs du Canada. Pourriez-vous dire au Comité, dans l'espoir de convaincre certains députés ministériels, quelles ont été les conséquences de la hausse des prix des carburants sur vos membres et sur les groupes que vous consultez?

¾  +-(2055)  

+-

    Le président: Merci, Michael.

    Pour répondre à votre question, ce seront M. Fruitman ou M. Cran et M. Williamson qui prendront la parole.

    D'accord, monsieur Cran.

+-

    M. Bruce Cran: Merci.

    On nous appelle tous les jours pour nous raconter toutes sortes de choses. Des gens qui visitent notre site Web nous disent que ce qui leur coûtait 30 $ représente maintenant une dépense de près de 60 $. Nous savons que l'industrie des transports est durement frappée. Nous avons une grève ou un arrêt de travail dans les ports à Vancouver, ce qui aura un effet sur tous les produits de consommation. Les effets sur les consommateurs sont très graves. Ils se retrouvent avec moins d'argent et doivent réduire leurs trajets en voiture, par exemple.

    J'habite en Colombie-Britannique. La voiture y est essentielle. Ce n'est pas un privilège, mais une nécessité, car nous n'avons pas un très bon système de transport en commun. Tous ces gens-là seront touchés.

    Oui, les effets se répercutent dans toute notre économie, et pas un consommateurs n'y échappe.

+-

    Le président: Monsieur Williamson.

+-

    M. John Williamson: Je serai très bref.

    Selon un sondage dont les résultats ont été publiés cette semaine, trois Canadiens sur quatre estiment que leur situation financière va se ressentir de ces prix élevés de l'essence. Ces 20 dernières années, d'après Statistique Canada, la consommation d'essence au Canada a augmenté d'environ 1 p. 100 ou juste un peu plus. Je ne vais pas mettre la théorie à l'essai avec 1,50 $ le litre. Il y aurait peut-être une certaine contraction de la demande, mais les gens vont utiliser l'essence qu'il faut pour aller au travail, aller chercher les enfants et parcourir le Canada, que ce soit pour affaire ou pour des raisons personnelles.

    En fin de compte, parce que l'essence coûte plus cher, il y a moins d'argent dans les familles pour faire des petites dépenses supplémentaires en fin de mois, par exemple une soirée au théâtre, un film, un dîner au restaurant avec les enfants. C'est ce que nous observons. On ne circule pas beaucoup moins, mais le budget des familles se ressent de cette hausse. Les taxes sont élevées. Le prix des produits est à la hausse. Dans bien des régions du Canada, notamment en Ontario, l'électricité coûte plus cher. La hausse des prix de l'essence est donc une chose que les gens peuvent difficilement absorber, d'autant plus qu'Ottawa engrange des excédents considérables.

+-

    Le président: Merci, monsieur Williamson, et merci à vous, Michael.

    Marc, je vous en prie. Ce sera ensuite Andy.

[Français]

+-

    M. Marc Boulianne: Je vous remercie, monsieur le président.

    Je voudrais m'adresser à monsieur Girard, de la Coalition pour la défense des consommateurs de carburant du Saguenay—Lac-St-Jean. Je voudrais d'abord faire un commentaire et ensuite poser quelques questions. Je veux vous féliciter d'avoir accepté de faire le travail que vous faites, car au fond, il s'agit de défendre les intérêts des consommateurs d'une région très précise. Ce modèle pourrait aussi s'appliquer à la région de Chaudières—Appalaches. Actuellement, le prix du pétrole est dévastateur pour nos régions, que ce soit au niveau de l'agriculture ou du camionnage, comme nous l'avons mentionné tout à l'heure.

    On se rend compte également que les consommateurs n'ont pas beaucoup d'alliés. Pendant la journée, aujourd'hui, nous n'avions pas que des alliés. Toutefois, je crois que les témoins que nous avons entendus depuis 18 heures sont des alliés des consommateurs. On a entendu les grandes compagnies pétrolières. Même le Bureau de la concurrence a fait une distinction entre les prix excessifs et les prix illégaux. Dans au moins six cas, il a fait une étude et cela n'a donné aucun résultat. C'est la même chose pour le ministère des Finances, qui est un peu indifférent à cela.

    Cet été j'ai eu l'occasion de faire une entrevue — M. Quintal, d'ailleurs, participait à cette émission — au cours de laquelle on avait demandé au ministre Lapierre d'intervenir. Il avait alors répondu qu'il ne pouvait pas le faire, que ce problème se posait à l'échelon mondial, que c'était la faute de ce qui se passait en Irak et qu'il ne donnerait pas des coupons d'essence aux individus. Ce sont les circonstances dans lesquelles vous travaillez. Je tiens à vous féliciter.

    J'aimerais maintenant vous poser une question. Vous parlez d'un organisme de contrôle des prix, dont vous réclamez la création depuis un certain temps. Vous avez sûrement obtenu des réponses à votre demande. On vous a parlé d'obstacles. Où ce dossier en est-il actuellement?

+-

    M. Claude Girard: Nous n'avons jamais reçu de réponse. Votre comité a recommandé, en 2003, à la suite du mémoire que nous avions déposé, d'instituer un organisme pancanadien de surveillance des prix qui aurait déterminé certaines choses. Ce serait un pas dans la bonne direction. Ce que nous disons n'est pas compliqué. J'ai été directeur d'une association de camionneurs, j'ai négocié avec le gouvernement, je pourrais vous en parler très longtemps. Nous essayons d'attirer l'attention sur ce que cela représente pour le consommateur, le vrai monde. Aujourd'hui, tout le monde se sent floué. Cela ne peut plus continuer. Tout le monde sait — je jouis de l'immunité parlementaire, je peux donc le dire — que les compagnies nous volent. Les profits de ces compagnies sont insensés. J'ai étudié personnellement les états financiers des compagnies pétrolières, je suis un spécialiste dans ce domaine. C'est aberrant.

    Pour les dix dernières années, on parle d'une amélioration du flux de trésorerie de 60 milliards de dollars. C'est complètement fou. On ne voit une telle chose dans aucune autre industrie au Canada. Ce marché est vicié, quelque chose n'est pas normal. Tout le monde le sait, mais on dirait qu'on joue à l'autruche et qu'on ne veut pas faire les vraies choses.

    Un contrôle des prix de l'énergie, cela existe, on n'a qu'à penser à ce qui se passe au Québec : Hydro-Québec est obligée de justifier l'augmentation de ses tarifs. Certaines personnes vont probablement me répondre que, dans le cas présent, un facteur à l'échelle mondiale influence le prix du brut et que l'on doit réagir rapidement. Ce n'est pas vrai. Le Canada produit plus de pétrole qu'il n'en consomme. Aujourd'hui, en Arabie Saoudite, le prix du litre est de 20 ¢, au Venezuela je crois qu'il s'agit de 26 ¢. Comment se fait-il que le Canada ait instauré un système qui fait en sorte que nous nous sommes peinturés dans un coin? Pourquoi ne sommes-nous pas capables de profiter de cet avantage concurrentiel important que nous avons face aux pays compétiteurs? Je n'arrive pas à comprendre cela.

    Selon nous, il faut absolument instituer un organisme de contrôle qui va arrêter cette hémorragie. Nous l'avons dit précédemment, nous n'avons pas d'objection à ce que les compagnies pétrolières fassent de l'argent. Nous n'avons rien contre cela, mais présentement, elles en font trop. Cela n'a plus de sens.

¿  +-(2100)  

+-

    M. Marc Boulianne: Vous avez également parlé d'une situation inquiétante. Vous avez même employé les mots « situation dangereuse et explosive ». J'aimerais que vous nous en disiez davantage sur ce sujet.

+-

    M. Claude Girard: En effet, et je peux même dire que très bientôt notre coalition va représenter plus d'un million de personnes. Je parle pour tout le Québec. La semaine prochaine, il y aura une réunion où les grands leaders seront présents. Il n'est plus question seulement de la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean. Il s'agit vraiment du niveau provincial.

    En fait, les gens m'interpellent. On dit, peut-être à la blague, que la question du mazout n'est pas grave, car on va se faire du feu, on va s'organiser avec du bois, on va aller bûcher du bois et on va faire du feu. Cela a l'air bien drôle, mais cela pourrait être dramatique dans des installations de fortune, comme je le disais tout à l'heure. En fait, cela pourrait être majeur. Tout à l'heure, monsieur parlait de ceci et de cela, de cinéma. Je m'excuse, mais ce n'est pas du cinéma. Moi, j'ai cinq enfants.

+-

    M. Marc Boulianne: Qu'attendez-vous du comité?

+-

    M. Claude Girard: J'aimerais que le comité aille jusqu'à demander au gouvernement de statuer sur ce sujet, en d'autres mots, qu'il recommande d'instaurer un organisme de contrôle. Cette mesure ne serait pas nécessairement permanente, ce pourrait être un plan transitoire, pour le moment, afin de stopper cette hémorragie et permettre aux consommateurs et à notre économie de survivre et de passer au travers...

    Nous n'avons rien contre cela. Nous savons qu'il y a une problématique à ce niveau et qu'il faut changer. Qu'on organise un plan transitoire afin que nous puissions passer du point A au point B.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, Marc.

    Ce sera maintenant Andy, puis Werner et Jerry.

+-

    M. Andy Savoy: Merci beaucoup, monsieur le président. Merci à tous les témoins de leur présence.

    Je voudrais d'abord une précision, monsieur Williamson. Dans votre exposé du début vous avez blâmé le gouvernement à cause des prix de l'essence. Je ne comprends pas, après avoir vu ce qui s'est passé ces deux dernières semaines où nous avons essayé de comprendre le problème. Je comprends que vous vous préoccupiez des taxes, mais c'est aller un peu loin de prétendre que le gouvernement est responsable de ces prix élevés. Est-ce bien ce que vous vouliez dire? Vouliez-vous dire plutôt que vous êtes mécontents du niveau des taxes?

+-

    M. John Williamson: Je reproche au gouvernement le niveau élevé des taxes...

+-

    M. Andy Savoy: Mais non les prix élevés de l'essence?

¿  +-(2105)  

+-

    M. John Williamson: Lorsque les taxes représentent la moitié du prix d'un produit, elles ont pour conséquence que les prix sont élevés.

+-

    M. Andy Savoy: Non, pas les taxes. Je connais les chiffres, mais vous ne pouvez pas reprocher les prix élevés au gouvernement. Je pense que c'est un énoncé juste.

+-

    M. John Williamson: On le peut certainement, en partie. En grande partie.

+-

    M. Andy Savoy: Merci.

+-

    M. John Williamson: Aux États-Unis, les prix sont inférieurs de 20¢ le litre, après conversion. La différence, ce sont toutes les taxes que nous avons chez nous.

+-

    M. Andy Savoy: Très bien. Vous laissez entendre que les prix actuels sont la faute du gouvernement. Ce n'est pas vrai. La cause, ce sont les conditions du marketing, l'offre et la demande. M. Chong y a fait allusion et nous avons étudié toute cette question. Nous connaissons la situation. Oui, je conviens avec vous que vous vous préoccupez des taxes, mais ne venez pas dire que le gouvernement est responsable de la hausse des prix, de cette flambée soudaine. Simple mise au point.

    Deuxièmement, pour ce qui est de réduire les taxes, je comprends où vous voulez en venir. M. Chong a raison de dire qu'il faut avoir un débat de fond sur les effets d'une réduction des taxes. Avez-vous fait des recherches sur les pays où on a réduit les taxes ou sur les régions du Canada qui ont envisagé de le faire et ont réexaminé cette proposition?

+-

    M. John Williamson: Vous parlez de l'essence ou de la situation plus générale?

+-

    M. Andy Savoy: De l'essence.

+-

    M. John Williamson: Dans tout le pays, les provinces ou les villes qui ont des taxes plus faibles, les prix sont plus bas, en moyenne. Là où les taxes sont élevées, à Montréal et à Vancouver, par exemple, c'est là que les prix sont les plus élevés au Canada. C'est un fait. Quand on constate ce qui se passe, quand on voit la différence entre le Canada et les États-Unis, on s'en rend compte aussi.

    S'il n'y avait aucune corrélation, alors, comme le ministre des Finances l'a dit, l'essence se vendrait partout au même prix, mais ce n'est pas le cas. Il y a beaucoup de prix différents, et c'est en grande partie à cause des taxes.

+-

    M. Andy Savoy: Bien des pouvoirs publics ont examiné la question, et certains ont effectivement réduit les taxes, et je me demande si vous êtes au courant. Ils ont réduit les taxes. Au Nouveau-Brunswick, par exemple, au début des années 1990. Êtes-vous au courant?

+-

    M. John Williamson: Je le suis.

+-

    M. Andy Savoy: Savez-vous ce qu'il est advenu des quatre composantes du prix de l'essence, soit le prix du brut, la marge bénéficiaire de la raffinerie, celle de la commercialisation et les taxes? Les taxes ont été réduites de 3,5¢, ce qui aurait dû se répercuter sur le prix final, puisque aucun des trois autres facteurs n'a changé. On a dit qu'ils n'avaient pas changé. Il est certain que le prix du brut n'a pas changé. La marge bénéficiaire de la commercialisation n'a pas changé, mais la baisse s'est volatilisée. Ces 2,5¢ ou 3¢ ont été absorbés quelque part, et les prix de détail n'ont pas bougé.

    Ce que je me demande, dans ce débat sur la question, c'est comment on peut garantir... puisque les choses se sont ainsi passées au Nouveau-Brunswick? Je l'ai déjà dit, et je ne veux pas me répéter, mais Stockwell Day, lorsqu'il était trésorier de l'Alberta, a posé ces questions : « Si nous envisageons de baisser la taxe sur l'essence, qu'est-ce qui garantit que les détaillants vont baisser leur prix? Vont-ils combler l'écart? » Et il a ajouté : « Nous allons étudier la question. Nous étudions la possibilité de réduire les taxes sur les carburants. Laissez-nous un peu de temps. Si nous le faisons, nous tenons à le faire correctement. » Finalement, en 1999, il ne l'a pas fait. Il les a maintenues au même niveau, à 9¢.

    Certains ont étudié la question, ont réduit les taxes, mais cela ne s'est pas beaucoup fait sentir sur les prix de détail. D'autres, comme l'Alberta, ont étudié la question et ont décidé que ce n'était pas une bonne idée, que ce n'était pas une utilisation judicieuse de l'argent du contribuable. Voilà ce qui m'inquiète. Je ne dis pas que votre point de vue ne se défend pas. Je demande quel pourcentage de la baisse se répercutera pour sûr à la pompe. C'est ce qui me préoccupe. Une partie? La totalité. L'exemple du Nouveau-Brunswick va dans un sens. D'autres ont étudié la question et ont eu des doutes. Voilà ce qui me dérange.

    Je crois que c'est là une question de fond, monsieur Chong. Quel pourcentage de la baisse se répercutera sur le prix de détail? Je tenais à faire ressortir ce point.

    Convenez-vous que c'est une préoccupation valable, monsieur Williamson, compte tenu de ce qui est arrivé par le passé?

+-

    M. John Williamson: C'est une préoccupation valable, mais, encore une fois, les faits montrent que la baisse des taxes, au moins en Pologne, a été répercutée. Et c'est pourquoi il y a des endroits, aux États-Unis, où les législateurs envisagent une baisse provisoire des taxes. Mais je ne me souviens pas que le Parlement du Canada ait demandé des garanties semblables aux employeurs, lorsque les impôts sur le revenu des particuliers ont été réduits, entre 2000 et 2004, pour s'assurer que les baisses seraient répercutées.

    Les gens pensent que les taxes sur l'essence sont trop élevées, et l'industrie vous implore aujourd'hui et dit qu'elle répercutera la baisse. Je ne vois pas quoi d'autre vous pouvez... L'industrie est d'accord. Il me semble que, avec tous les pouvoirs du gouvernement du Canada, si vous ne pouvez pas surveiller l'industrie et exercer des représailles au besoin, vous n'utilisez pas tout votre pouvoir d'intimidation. Encore une fois, je considère les endroits où les taxes sont élevées et ceux où elles sont faibles. Ce sont des faits.

+-

    M. Andy Savoy: Diriez-vous que, d'après l'expérience passée, on peut s'inquiéter et se demander dans quelle mesure la baisse sera répercutée? J'ai terminé mes questions. Voilà ce qui m'inquiète.

+-

    M. John Williamson: Je suppose que la tendance est là, mais, à un moment donné, il faut agir.

+-

    M. Andy Savoy: Pour passer aux carburants renouvelables, vous avez dit que les raffineurs envisageaient de se lancer dans les carburants renouvelables, et plus spécialement l'éthanol. Entrevoyez-vous un problème à l'avenir? Qu'adviendrait-il de la concurrence si une société intégrée raffinait du brut, produisait de l'éthanol et avait un réseau de distribution? Y voyez-vous un problème? La question a été abordée dans les discussions, mais j'ai des inquiétudes à ce sujet.

¿  +-(2110)  

+-

    M. Kory Teneycke: Ce n'est pas pour demain, étant donné que l'industrie pétrolière répugne à se lancer dans le secteur de l'éthanol. Au Canada, des pétrolières sont en train de construire des usines d'éthanol, une à Lloydminster et l'autre à Sarnia. En Amérique du Nord, ce sont les deux seules installations en construction, que je sache, qui appartiennent à des pétrolières.

    Même s'il y avait intégration verticale, l'éthanol serait toujours avantageux parce qu'il coûte moins cher à produire que ne coûte le raffinage de l'essence à partir du brut, puisque le brut n'entre pas dans sa production. En ce sens, l'éthanol serait toujours avantageux, même s'il y a intégration verticale et même si cela diminue la concurrence.

+-

    Le président: Bonne question, Andy. Merci.

    Werner, Jerry et Brad. Nous sommes dans la dernière ligne droite.

+-

    M. Werner Schmidt: Merci beaucoup, monsieur le président.

    Je remercie les témoins de leurs exposés de ce soir.

    Il se fait un peu tard, et je voudrais m'en tenir uniquement aux énergies de remplacement et à la production d'éthanol.

    Je poserai tout d'abord une question technique à Jeff. L'initiative Bush dont vous avez parlé, est-elle contenue dans le projet de loi américain sur l'énergie, ou s'agit-il d'une étude?

+-

    M. Jeff Passmore: Non, il s'agit de l'Energy Policy Act de 2005, que le Congrès a adopté en juillet et que Bush a signé le 8 août.

+-

    M. Werner Schmidt: Avez-vous de la documentation sur cette loi?

+-

    M. Jeff Passmore: Bien sûr.

+-

    M. Werner Schmidt: Je crois qu'il serait utile au Comité d'obtenir cette documentation.

    Deuxièmement, c'est Kory, je crois qui a dit : « Nous voulons construire des raffineries. » Pourquoi ne le faites-vous pas?

+-

    M. Kory Teneycke: Pourquoi nous le faisons pas? Nous le faisons. Actuellement, la capacité de production d'éthanol au Canada est d'environ 230 millions de litres par année. On prévoit que, d'ici 2007-2008, elle se situera à 1,4 milliard de litres. C'est déjà une énorme expansion de notre industrie. Cela tient à divers facteurs. Le premier, ce sont les exigences en matière d'utilisation d'éthanol que des provinces ont adoptées, dont la Saskatchewan, le Manitoba et, plus récemment, l'Ontario, ainsi que le programme fédéral d'expansion de l'utilisation d'éthanol. Cela a aidé à combler l'écart entre le soutien accordé à notre industrie et celui qu'on donne aux États-Unis. Nous sommes donc en train de construire des usines, mais nous pourrions faire bien plus. Nous pourrions bâtir beaucoup plus d'usines au Canada. Nous sommes loin derrière bien d'autres pays, pour ce qui est de la taille relative de notre industrie, et ces autres pays renforcent encore leur capacité. Les États-Unis le font, tout comme le Brésil, la Chine, l'Inde, l'Amérique centrale et l'Europe. Les progrès y sont plus rapides qu'au Canada. Nous construisons des usines, mais nous pourrions en construire plus.

+-

    M. Werner Schmidt: Quel effet la construction d'un certain nombre d'usines d'éthanol aurait-elle sur la capacité globale de raffinage au Canada?

+-

    M. Kory Teneycke: Si nous imposions comme norme une teneur de 10 p. 100 de carburant renouvelable, ce qui veut dire que ce carburant pourrait être utilisé dans toutes les voitures actuellement, ce serait comme bâtir une importante raffinerie d'une capacité de 200 000 barils par jour. Personne d'autre n'a un projet semblable, l'équivalent d'une grande raffinerie. L'impact serait appréciable, d'autant plus que bien des gens parlent aujourd'hui de l'intégration poussée de notre marché à celui des États-Unis. Si on considère ce que l'expansion de l'industrie des carburants renouvelables aux États-Unis va ajouter à la capacité de raffinage, on peut dire que l'éthanol va jouer un très grand rôle dans l'accroissement de cette capacité des deux côtés de la frontière.

+-

    M. Werner Schmidt: Si je pose la question, c'est que je pense que...

+-

    M. Jeff Passmore: Si je peux me permettre, c'est comme trouver 10 p. 100 de carburant de plus. Au fond, on se retrouve du jour au lendemain avec 4 milliards de litres de carburant sur le marché qu'on n'avait pas jusque-là. Intuitivement, on peut dire que, si on ajoute 4 milliards de litres sur le marché des carburants utilisés dans le transport, on allège les pressions à la hausse qui agissent sur les prix.

+-

    M. Werner Schmidt: À supposer que les raffineries en place conservent la même capacité qu'aujourd'hui. Ce que vous dites repose sur cette hypothèse.

+-

    M. Jeff Passmore: C'est exact.

+-

    M. Kory Teneycke: C'est une partie de l'hypothèse. L'autre facteur qui jouerait, pour atténuer la pression sur les prix, c'est que le prix du brut reste à son niveau actuel. Si nous voulons que nos coûts de production restent inférieurs à ceux de l'essence, le prix du brut ne doit pas être inférieur à 40 $ le baril, de sorte que...

¿  +-(2115)  

+-

    M. Werner Schmidt: Oui, je comprends.

    Voici mon autre question. On semble laisser entendre, du moins, que l'élasticité des prix a diminué parce que le taux d'utilisation de la capacité des raffineries est passé de 85 à 97 p. 100. Quelle est l'importance de l'écart entre ces deux pourcentages? Dans quelle mesure fait-il diminuer l'élasticité?

+-

    M. Kory Teneycke: Je ne suis probablement pas le mieux placé pour donner une réponse détaillée à cette question. Je ne suis pas sûr de ce que serait l'écart de prix —  il y a une différence d'environ 10 p. 100 dans le taux d'utilisation de la capacité de raffinage — et je ne peux pas dire quel serait le nombre de raffineries, mais si une raffinerie cesse de produire alors que le taux d'utilisation de la capacité est de 97 p. 100, il y aurait un très gros problème. S'il y avait une marge de manoeuvre de 10 p. 100 de plus, le problème serait bien moindre. C'est ce que nous voyons en ce moment, avec les ouragans Katrina et Rita.

+-

    M. Werner Schmidt: J'ai dit qu'on semblait laisser entendre que le fait de passer d'un taux d'utilisation de 85 à 97 p. 100 avait en quelque sorte créé une marge bénéficiaire des raffineries. Elles auraient commencé à réaliser des bénéfices à 97 p. 100, mais cela semble laisser entendre qu'elles n'en avaient pas en produisant à 85 p. 100. Est-ce exact?

+-

    M. Kory Teneycke: Je crois qu'elles font des bénéfices lorsqu'elles tournent à 85 p. 100. Je n'ai pas les chiffres sous les yeux, en ce qui concerne la marge bénéficiaire des raffineries dans les années 1980, mais ce qui nous inquiète, c'est que, comme le marché dit que la marge des raffineries augmente, la réaction sur le marché devrait être un accroissement de la capacité. C'est le contraire qui s'est produit. Elle s'est contractée. Il se passe quelque chose sur le marché pour qu'il ne réagisse pas, et c'est pourquoi, je crois, bien des gens ont parlé de la concurrence.

+-

    M. Werner Schmidt: Je ne voulais pas vous mettre sur la sellette, mais dire l'enthousiasme que m'inspire ce genre d'entreprise. Je vous demande donc, ainsi qu'aux autres témoins, ce que le gouvernement peut faire pour faciliter le genre d'initiative dont vous parlez, pour l'encourager et proposer des mesures incitatives.

    John avait un certain nombre de choses à dire là-dessus, mais à quoi ressemblerait un cadre national de l'énergie qui vous permettrait à vous et à d'autres d'examiner ces énergies de remplacement et leur association aux hydrocarbures classiques?

+-

    Le président: C'était une question fort longue suivie d'une longue réponse. Vous avez déjà dépassé votre temps de parole de six minutes.

+-

    M. Kory Teneycke: Nous pouvons donner une réponse très brève, si vous le souhaitez.

+-

    Le président: D'accord, puisque vous le proposez, mais si d'autres ont des observations à faire, nous les invitons à les adresser au Comité par courrier électronique.

    Pouvez-vous répondre très rapidement, Kory?

+-

    M. Kory Teneycke: Une norme sur les carburants renouvelables exigeant une teneur de 10 p. 100 en éthanol est l'approche que les États-Unis, l'Union européenne, le Brésil, l'Inde, la Chine et la Japon, par exemple, ont tous retenue. C'est la première étape. Ce genre de mesure pourrait se prendre dès demain, et elle serait utile.

+-

    Le président: Bien. Si d'autres ont des idées, c'est avec plaisir que nous les recevrons.

    Jerry, à vous.

+-

    L'hon. Jerry Pickard: Merci, monsieur le président.

    Il y aurait un point à faire valoir à la défense de l'industrie pétrolière. En général, au Canada, nous avons veillé de près à la qualité du pétrole produit et raffiné chez nous. Bien des modifications ont été apportées aux règlements pour améliorer la qualité du produit, réduire les émissions et assainir l'environnement. Ces mesures ont contribué à faire augmenter les coûts et elles ont eu des répercussions sur l'industrie, jusqu'à un certain point. Nous devons tous en être conscients. J'ignore si on en a parlé aujourd'hui.

    Pour en revenir à la question d'Iogen, qui me semble cruciale, et à celle des carburants renouvelables, c'est une bonne idée d'imposer des normes, mais cela ne va pas résoudre le problème. Je ne crois pas qu'il y ait personne ici présent qui souhaite voir le Brésil faire entrer du pétrole chez nous si les provinces l'ordonnent, parce qu'il y a là-bas des problèmes écologiques et toutes sortes de préoccupations environnementales dont nous ne voulons pas parler.

    Selon moi, l'adoption des carburants renouvelables dépend de deux facteurs cruciaux. Il faut imposer une norme, avec des délais raisonnables, et il faut que la capacité de production existe au Canada.

    Vous avez dit très clairement, Kory, que le brut devait coûter environ 40 $ pour que le coût de production de l'éthanol soit inférieur à celui de l'essence. En ce moment, la baril coûte environ 67 $. Cet écart vous permet-il de trouver assez de capitaux pour construire les usines d'éthanol dont nous aurons besoin à l'avenir? La deuxième partie de ma question est la suivante : combien de temps faut-il pour implanter une ou plusieurs usines et produire l'éthanol dont on aura besoin?

¿  +-(2120)  

+-

    M. Kory Teneycke: Je suis d'accord sur le préambule de la question. Je suis tout à fait d'accord pour dire qu'il faudra imposer une norme. Quant à l'écart entre nos coûts de production et le prix de vente du pétrole, les producteurs d'éthanol ne mettent pas la main sur tout cet argent, cette différence entre le prix de production de l'éthanol et le prix de l'essence.

    Dans l'industrie de l'éthanol, la concurrence est acharnée, et vous constaterez que les usines de production se construiront, c'est certain. Les prix du carburant qui ont cours aujourd'hui vont stimuler la construction des usines pour alimenter le marché. Elles se construiront là où l'investissement donnera le meilleur rendement. En ce moment, les conditions sont plus propices dans d'autres pays pour la construction de ces usines qu'elles ne le sont au Canada. On doit donc se demander pourquoi le Canada a une politique qui favorise les technologies classiques plutôt que celles des énergies renouvelables.

    Jeff, voudriez-vous donner d'autres précisions?

+-

    M. Jeff Passmore: Pour ce qui est des délais, Jerry, c'est au printemps 2007 que nous voulons entreprendre la construction de la première grande usine au monde de production d'éthanol de cellulose. Elle sera financée par du capital-actions et des emprunts. Le capital-actions vient du secteur privé. Les emprunts viendront aussi du secteur privé s'ils sont garantis par une solide cote de crédit.

    C'est la question à l'étude : le partage du risque de commercialisation des nouvelles technologies avec le gouvernement.

+-

    L'hon. Jerry Pickard: Monsieur Williamson, un petit moment... Je rejette une réflexion que vous avez faite à la légère, je l'espère, et sans trop de sérieux. Vous avez dit que les politiques étaient hypocrites en matière de fiscalité. Pourtant, j'ai entendu M. McTeague insister auprès de vous pour que vous vous engagiez à examiner les redevances de l'Alberta, qui représentent autant que le total des taxes fédérales — c'est le même montant — et vous avez laissé entendre que vous n'aviez pas encore étudié la question. Vous avez dit que nous le ferions. Il me semble que vous êtes très sélectif. Le public doit se demander ce qu'il y a d'hypocrite chez les témoins qui comparaissent.

    Je crois qu'il faut s'abstenir de lancer des injures aux gens pour ce qu'ils font. Je ne suis pas d'accord. J'aurais cru que les représentants d'une organisation comme la Fédération des contribuables, ce que vous êtes, considéreraient tous les aspects des taxes avant de comparaître, au lieu de venir ici nous lancer des injures et se contenter de parler d'un seul type de taxe. C'est inacceptable.

+-

    Le président: Merci, Jerry.

    Je donne le dernier mot à M. Williamson, puis nous passerons à autre chose.

+-

    M. John Williamson: Je dois admettre que j'ai été pris de court par les propos de M. McTeague. Il ne m'arrive pas souvent qu'un député libéral intervienne pour réclamer ce qui serait en fait une réduction de l'impôt des sociétés.

    En Alberta, nous avons surtout cherché à réduire l'impôt sur le revenu des particuliers. Nous fonctionnons comme une fédération. Je suis chargé de la politique fiscale fédérale. Les redevances sont une question entièrement différente. Si j'avais su qu'elle serait abordée ce soir, je me serais renseigné. Mais je le répète, selon moi, ce n'est pas une question sur laquelle les députés ici présents peuvent agir, du point de vue des taxes fédérales et des redevances provinciales. Ce sont deux questions entièrement distinctes.

    Je suis désolé de ne pas être prêt à répondre à cette question ce soir, mais je maintiens qu'il y a quelque chose d'hypocrite chez des politiques qui vilipendent les grandes pétrolières alors qu'ils ont le pouvoir d'apporter des changements dès maintenant.

+-

    Le président: Patience, Jerry.

    Je vais vous laisser terminer votre phrase, monsieur Williamson. Nous passerons ensuite à Brad.

+-

    M. John Williamson: En fait, j'ai terminé. Encore une fois, je m'intéresse à ce que le gouvernement fédéral peut faire et je ne pointe pas un doigt accusateur sur qui que ce soit d'autre.

+-

    Le président: Merci, monsieur Williamson.

    Il se fait tard et nous nous débrouillons toujours assez bien, au bout de cette longue journée.

    Les derniers mots vous reviennent, Brad, et nous vous demandons d'être aussi concis que par le passé, et même plus.

¿  -(2125)  

+-

    M. Bradley Trost: Monsieur le président, je me posais des questions à propos de cette concision, car je peux parfois faire de l'obstruction systématique.

    Ce soir, je suis vidé. Je n'ai pas vraiment d'autres questions précises à poser, mais je tiens à remercier tout le monde y compris ceux qui ont témoigné plus tôt et suivent les délibérations à la télévision. Merci. Pour certains d'entre nous, la journée a été longue, plus longue qu'une journée normale de comité.

    Je tiens à dire que j'ai discuté avec d'autres témoins de ce que nous pouvons faire ou pas au Canada. Le prix du carburant est en gros fixé au niveau national. Avec un autre témoin, nous avons résumé : nous pouvons agir sur les taxes et la réglementation pour infléchir les prix au Canada, mais c'est à peu près tout.

    Je souhaite vivement que l'éthanol et les autres nouveaux carburants s'avèrent une solution économique et féconde. En fin de compte, je vous conseille de ne pas toujours compter sur les subventions de l'État. Lorsqu'elles viennent, elles ne sont pas nécessairement ce que vous souhaitez. Je viens du gouvernement et je suis là pour prêter main-forte, mais c'est parfois assez dangereux.

    Une toute petite question. Je remarque que la troisième de vos usines est en Saskatchewan. Où au juste? Saskatoon—Humbolt. Est-ce à Kinistino, à Tisdale, à St. Brieux? Où sera-t-elle bâtie?

+-

    M. Jeff Passmore: Il faudrait demander à Brian Fitzpatrick où se situe l'un des principaux sites envisagés.

+-

    M. Bradley Trost: D'accord. Ce n'est pas dans la bonne circonscription.

+-

    M. Jeff Passmore: Je sais, mais il y en aura peut-être une plus près de Tisdale.

+-

    Le président: Là-dessus, nous allons mettre un terme à cette excellente séance. Je comprends qu'il y a de toutes parts des convictions très arrêtées, et je crois que chacun, quel que soit son point de vue, a l'intérêt du public à coeur.

    Je remercie nos témoins de ce soir de leur participation. Ils ont dû, pour comparaître, quitter leur famille et leurs autres activités. Merci aux députés et à leurs collaborateurs pour leurs questions excellentes tout au long de la journée. Qu'on soit dirigeant d'ONG ou qu'on préside une association, chacun représente une certaine clientèle. Nous représentons nos électeurs. Ils nous font part de leurs opinions, qu'ils soient des personnes vulnérables, des pauvres, des personnes à revenu fixe, des propriétaires de petite entreprise, des camionneurs, etc. Nous sommes tous ici pour trouver des solutions, mais vous nous avez beaucoup aidés en nous faisant connaître votre point de vue.

    Là-dessus, nous allons ajourner la séance.

+-

    M. Werner Schmidt: Avant l'ajournement... Vous avez remercié tout le monde, mais personne ne vous a remercié. Vous avez fait un excellent travail.

-

    Le président: J'étais entouré d'une bonne équipe.

    Merci beaucoup, et bonne nuit.

    Soit dit en passant, merci également à la CPAC.