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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 10 février 2003




· 1340
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.))
V         Mme Claudette Legault (directrice générale, Metropolitan Immigrant Settlement Association)

· 1345

· 1350

· 1355

¸ 1400
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mme Claudette Legault

¸ 1405
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mme Claudette Legault
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mme Claudette Legault
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         R. P. Gus Pendleton (directeur de mission, Brunswick Street United Church)

¸ 1410
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         M. Paul O'Hara (conseiller, North End Community Health Centre)

¸ 1415

¸ 1420

¸ 1425
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne)

¸ 1430
V         Mme Claudette Legault
V         Mme Diane Ablonczy
V         Mme Claudette Legault
V         Mme Diane Ablonczy
V         Mme Claudette Legault
V         Mme Diane Ablonczy
V         Mme Claudette Legault

¸ 1435
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mme Diane Ablonczy
V         R. P. Gus Pendleton
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         M. Paul O'Hara
V         Mme Diane Ablonczy
V         Mme Claudette Legault
V         Mme Diane Ablonczy

¸ 1440
V         M. Paul O'Hara
V         Mme Diane Ablonczy
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.)

¸ 1445
V         Mme Claudette Legault
V         M. Yvon Charbonneau
V         Mme Claudette Legault
V         M. Yvon Charbonneau
V         Mme Claudette Legault
V         Mme Mira Musanovic (intervenante en services d'approche et en intervention d'urgence, Metropolitan Immigrant Settlement Association)

¸ 1450
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mr. Yvon Charbonneau
V         Mme Claudette Legault
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         R. P. Gus Pendleton

¸ 1455
V         Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ)

¹ 1500
V         Mme Claudette Legault
V         Mme Madeleine Dalphond-Guiral
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         R. P. Gus Pendleton

¹ 1505
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD)

¹ 1510
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mme Anna Gregus (gestionnaire, Service d'établissement, Metropolitan Immigrant Settlement Association)
V         Mme Wendy Lill
V         Mme Mira Musanovic
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mme Diane Ablonczy

¹ 1515
V         Mme Anna Gregus
V         Mme Diane Ablonczy
V         Mme Anna Gregus
V         Mme Claudette Legault
V         Mme Diane Ablonczy
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mme Diane Ablonczy
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mme Mira Musanovic
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mme Sylvia Parris (présidente, Multicultural Association of Nova Scotia)
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mme Sylvia Parris
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mme Sylvia Parris

º 1605

º 1610
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mme Diane Ablonczy

º 1615
V         Mme Sylvia Parris
V         Mme Diane Ablonczy
V         Mme Sylvia Parris

º 1620
V         Mme Diane Ablonczy
V         Mme Sylvia Parris
V         Mme Diane Ablonczy
V         Mme Sylvia Paris

º 1625
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         M. Yvon Charbonneau
V         Mme Sylvia Parris
V         M. Yvon Charbonneau
V         Mme Sylvia Parris

º 1630
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mme Madeleine Dalphond-Guiral
V         Mme Sylvia Parris
V         Mme Madeleine Dalphond-Guiral
V         Mme Sylvia Parris

º 1635
V         Mme Madeleine Dalphond-Guiral
V         Mme Sylvia Parris
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)
V         Mme Wendy Lill

º 1640
V         Mme Sylvia Parris

º 1645
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)

º 1650
V         Mme Sylvia Parris
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)

º 1655
V         Mme Sylvia Parris
V         Le vice-président (M. Jerry Pickard)










CANADA

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


NUMÉRO 020 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 10 février 2003

[Enregistrement électronique]

·  +(1340)  

[Traduction]

+

    Le vice-président (M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.)): D'abord, un gros merci à tous de vous être déplacés pour nous faire part de vos réflexions et de vos préoccupations à l'égard du projet de loi que nous examinons aujourd'hui.

    Nous étudions le paragraphe 108(2) du Règlement. Le comité entreprend une étude des programmes d'établissement et d'intégration du Canada ainsi que de la carte d'identité nationale.

    Je crois savoir, messieurs dames, que vous souhaitez discuter de vos préoccupations et aborder des enjeux concernant les programmes d'établissement et d'intégration; nous sommes donc contents que vous soyez là.

    Je vais demander à chacun des témoins de faire une brève description de ses préoccupations, après quoi nous passerons à la période des questions et nous tenterons d'examiner un peu plus en détail les enjeux grâce aux questions de nos collègues.

    Je vais aller dans l'ordre suivant: Mme Claudette Legault, M. Pendleton et M. O'Hara, si vous permettez.

    Madame Legault.

+-

    Mme Claudette Legault (directrice générale, Metropolitan Immigrant Settlement Association): Merci.

    Je suis Claudette Legault, directrice générale de MISA, la Metropolitan Immigrant Settlement Association.

    Je vous remercie aussi d'être ici, de même que les membres du comité. Je sais que les deux vice-présidents du comité sont là, c'est donc un privilège. Il est rare que des organismes d'établissement, des organismes sans but lucratif, aient l'occasion de discuter avec les comités parlementaires. Je sais que faire déplacer le comité comporte certaines difficultés, mais je pense que cela est très utile et nous sommes très honorés d'être ici. J'espère que nos commentaires viendront à la fois étayer et renforcer ce que vous avez entendu de témoins du centre et d'autres régions du Canada. J'espère également que nous pourrons vous faire part d'un point de vue que vous n'avez peut-être pas encore entendu, notre province n'étant pas principalement une destination recherchée par les immigrants.

    Nous avons aussi certains commentaires à faire sur les enjeux politiques en général, ainsi que sur le travail quotidien des agents d'établissement qui appliquent le programme sur le terrain.

    J'ai demandé à deux autres membres de la MISA de se joindre à moi, même si c'est moi qui ferai l'exposé. D'abord, Mme Anna Gregus, directrice de l'unité d'établissement, c'est-à-dire l'unité de la MISA qui offre l'essentiel des services d'établissement et d'orientation, de même que tous les services aux réfugiés pris en charge par le gouvernement. De même, Mme Mira Musanovic est agente d'établissement. Comme nous parlons des services d'établissement, je me suis dit qu'elle devait être là. Elle est également temporairement en congé de son poste d'agente de crise, c'est donc pourquoi elle peut certainement nous dire ce qui se produit lorsque l'établissement n'est pas aussi harmonieux que prévu.

    Ces deux personnes pourront nous relater les récits humains et les anecdotes au sujet de ce que nous voyons, et nous faire part de leurs témoignages personnels également. J'encourage donc les membres après mon exposé à leur poser des questions pour qu'elles puissent nous faire part de leurs opinions.

    La MISA est une organisation communautaire. Essentiellement, notre travail consiste à accueillir les immigrants en Nouvelle-Écosse. Nous offrons une gamme complète de services à toutes les catégories d'immigrants. Nous recevons du financement de quatre principaux programmes de Citoyenneté et Immigration Canada, à savoir le CLIC (Cours de langue pour les immigrants au Canada), le PEAI (Programme d'établissement et d'adaptation des immigrants), le Programme d'accueil et le PAR (Programme d'aide au réétablissement) pour les réfugiés pris en charge par le gouvernement).

    Comme nous en avons la chance aujourd'hui, nous pourrions vous parler de bien des choses, mais nous allons tenter de circonscrire nos commentaires au modèle de répartition de l'établissement. Je sais que vous en avez entendu parler beaucoup, mais peut-être vous manque-t-il le point de vue des petites provinces. Bien sûr, nous pourrions parler du financement, de l'intégration, mais nous aimerions nous concentrer sur la participation au marché du travail. Quelqu'un en a parlé ce matin dans son exposé au sujet du programme des candidats d'une province.

    Enfin, dernier élément mais non le moindre, la question la plus préoccupante, le Programme d'aide au réétablissement, le soutien pour les réfugiés.

    En ce qui a trait au modèle de répartition de l'établissement, pour ceux d'entre nous qui le connaissons, c'est un modèle qui permet la répartition des fonds d'établissement dans tout le pays en fonction, de façon générale, des divers facteurs sur lesquels il y a consensus, notamment les tendances en immigration en regard de la population générale, etc. Le modèle actuel fait l'objet d'une révision. Nous en sommes tous très conscients. Là encore, je vais utiliser des chiffres pour mon exposé qui faisaient partie de la présentation que Rosaline Frith nous a faite le printemps dernier sur les modèles de répartition, les crédits, et l'immigration dans son ensemble. À l'époque, on nous avait dit, et nous le savions, que même si l'immigration a augmenté, les fonds consacrés à l'établissement n'ont en réalité pas augmenté au cours de cette période.

    Tout le monde sait que la plupart des immigrants qui viennent au Canada se retrouvent à Toronto, et que les autres se destinent, dans une large mesure, vers d'autres grandes villes comme Montréal et Vancouver. Donc, en un sens, il est logique que ces provinces qui accueillent plus d'immigrants exigent un pourcentage plus élevé des fonds attribués selon le modèle de répartition. Même si cela est logique, j'estime que l'inverse ne l'est pas, à savoir que ceux qui accueillent moins d'immigrants devraient recevoir moins d'argent.

    Dans une certaine mesure, il y a du vrai au-delà de cette affirmation, mais à un moment donné, si on continue de réduire les fonds, on va réduire la capacité de la province et des organismes d'établissement de répondre aux besoins des immigrants, de les attirer, de les aider à s'établir et à s'intégrer. Donc, il nous faut une masse critique au-delà de ce seuil et en deçà, une masse critique, sinon il devient impossible pour nous d'essayer de renverser cette tendance.

·  +-(1345)  

    Le modèle tient compte d'un minimum de services d'établissement qui sont requis. En Nouvelle-Écosse, je dirais... M. Charbonneau a demandé ce matin comment nous avions pu réduire nos fonds de 50 p. 100 en si peu de temps, et je me ferai un plaisir de vous donner mon opinion après la période des questions.

    Depuis trois ans, le secteur de l'établissement a subi une compression de 10 p. 100 de ses crédits, et 10 p. 100 cette année. En discutant avec mes collègues de CIC—et nous avons de très bonnes relations professionnelles—nous ne nous souvenions plus si c'était depuis trois ou quatre ans, l'année prochaine étant donc la cinquième ou la quatrième. C'est le genre de réalité avec laquelle nous devons vivre. À un moment donné, cela veut dire qu'on a suffisamment d'argent pour la moitié d'une personne, ou les trois quarts d'une personne, ou une personne à temps plein mais mal payée.

    Si on compare les services d'établissement dans tout le pays, on voit que les immigrants qui viennent en Nouvelle-Écosse n'ont aucune garantie qu'ils vont obtenir des services aussi bons que dans d'autres provinces.

    L'autre chose que le modèle de répartition ne prend pas en compte, je pense, ce sont les services additionnels offerts par certaines provinces, par d'autres ministères fédéraux dans d'autres provinces de même que par les administrations municipales. Et on ne tient pas compte, je pense, du fait que dans ces villes et provinces où il y a déjà une bonne communauté d'immigrants, la collectivité en retour offre des services de soutien et d'orientation grâce aux organismes religieux et aux communautés ethniques qui existent en son sein.

    Dans une province comme la Nouvelle-Écosse, où nous n'avons pas cette masse critique, la responsabilité d'offrir certains de ces services incombe alors aux organismes d'établissement.

    Donc, je pense que la formule de financement—et je sais que vous serez amenés et que vous avez été amenés à décider de quoi aura l'air cette formule finale—devrait prendre en compte non seulement les chiffres totaux, mais d'autres facteurs que je viens de mentionner. Je pense que cela est particulièrement important compte tenu de l'engagement du ministre Coderre—engagement que nous accueillons favorablement—de trouver des moyens d'encourager les immigrants à venir dans des provinces qui, traditionnellement, ne sont pas des destinations choisies par ces derniers.

    Vous avez entendu ce matin des choses qui font croire que la Nouvelle-Écosse n'est pas tellement désireuse d'aller chercher des immigrants. Je pense que les choses sont sur le point de changer, mais je crois que le secteur de l'établissement devra s'impliquer beaucoup, et être capable d'offrir des services d'établissement sera une des composantes clés de ces efforts.

    Si notre province est désireuse de travailler avec le ministre à ce sujet, j'espère que l'on n'envisagera pas simplement d'établir le modèle de répartition selon des chiffres sur trois ans. J'aimerais vous faire part d'un argument à cet effet.

    Les besoins spéciaux en matière d'établissement dans des régions où cela est peut-être plus difficile, ont déjà été reconnus. Notamment dans l'Accord Canada-Québec signé en 1991. Je sais que certaines provinces sont peut-être opposées au fait que le Québec obtienne un ratio plus important des crédits d'établissement en fonction du nombre total d'immigrants qui se dirigent dans cette province, mais je suis d'accord. On a ainsi reconnu que l'établissement d'immigrants dans une culture francophone en Amérique du Nord comporte des défis particuliers et peut nécessiter du soutien additionnel et je suis d'accord pour dire que cette même approche «de l'équité» devrait être envisagée pour les provinces maritimes.

    Un dernier point concernant l'attribution des fonds: la valeur ajoutée. Le budget approximatif des services d'établissement en Ontario s'élevait à plus de 110 millions de dollars, sans compter tout le financement offert en Ontario dans le cadre du budget provincial. Je vais vous donner un exemple. Cela concerne les crédits que nous avons tous reconnus, à l'échelle nationale, comme étant importants et je sais que d'autres personnes au comité vont aborder la question.

    L'Ontario reçoit 110 millions de dollars. De cette somme, 15,5 millions sont engagés sur trois ans, ils ont été annoncés dans le budget de l'Ontario de 2001, pour les programmes de transition afin d'aider les travailleurs formés à l'étranger à se trouver un emploi. C'est beaucoup d'argent qui va à l'Ontario. Oui, l'Ontario reçoit beaucoup d'immigrants et de réfugiés, mais il y a une collectivité—une masse critique—qui peut aussi apporter son aide.

·  +-(1350)  

    Par contre, en Nouvelle-Écosse, en 2004-2005, si on s'en tient au modèle de répartition actuel, nous allons obtenir 1,9 million de dollars au total, par rapport aux 3,2 millions que nous avons reçus en 1999-2000. Donc, je pense qu'ajouter un autre million par-ci, un autre million par-là aux sommes accordées à l'Ontario n'aura probablement pas un impact aussi important que comprimer 200 000 $ du budget de la Nouvelle-Écosse, mesure qui aurait un impact plus grand que l'avantage que l'on en retirerait. Mon rêve, bien sûr, est que si vous deviez nous donner ce million de dollars—je fais juste lancer des chiffres comme cela, je ne m'attends pas à ce que cela se réalise—cela aiderait la Nouvelle-Écosse à être plus attirante pour les immigrants.

    Trois recommandations rapides. Le modèle de répartition des crédits d'établissement devrait prendre en compte d'autres facteurs. Le modèle futur devrait tenir compte des provinces qui cherchent à travailler avec le ministre pour attirer plus d'immigrants chez elles, les provinces qui historiquement n'ont jamais accueilli beaucoup d'immigrants. Et je vous demande d'examiner cette réduction de 10 p. 100 du budget de la région de l'Atlantique, compte tenu de certains des facteurs que j'ai mentionnés.

    En ce qui concerne le financement, je ne vais pas trop entrer dans les détails. Je vous ai remis un tableau à l'endos de mon document qui a été tiré d'un ouvrage écrit par Peter Li du Centre d'excellence des Prairies. C'est seulement une note que j'ai prise lorsque j'ai consulté les documents de base que vous avez présentés. On y explique combien coûte l'établissement.

    Le débat autour de l'immigration tourne toujours autour des questions suivantes: «Qu'est-ce qu'on en retire et combien cela coûte-t-il?» Le coût total de ces programmes est souvent décrit de façon erronée et mal compris dans les médias, notamment, qui ne sont pas nécessairement d'accord pour que beaucoup d'argent soit consacré aux initiatives d'établissement et par conséquent, ceux qui dépensent le plus ne sont peut-être pas plus les bienvenus que les immigrants.

    Donc, quand vous allez utiliser ce tableau, je vous demande de tenir compte non seulement du coût total des services d'établissement, mais du fait que le processus d'immigration génère aussi des recettes. De fait, dans le tableau, on dit que durant les quatre années écoulées entre 1997-1998 et 2000-2001, les recettes effectives générées par le recouvrement des coûts de l'immigration, le droit de citoyenneté, etc., sont plus élevées que les coûts.

    Or, je sais que certaines des recettes générées visent à compenser les coûts effectifs de ce processus, mais il faut nous assurer d'en tenir compte également, car je crois que cela place toute la question des coûts dans un contexte différent. C'est vrai qu'en 2001, le gouvernement fédéral a tiré près de 1 million de dollars en intérêts des divers prêts pour les voyages et l'immigration. Le gouvernement n'est pas perdant.

    En ce qui concerne les questions d'immigration, j'aimerais vous parler de la participation au marché du travail. Je sais que le comité a entendu divers témoins sur cette question. L'établissement est un processus qui se fait sur un continuum, et on a besoin de différents types de soutien en cours de route. Comme Citoyenneté et Immigration Canada le dit, l'objectif est de permettre aux immigrants de devenir «le plus rapidement possible des membres autonomes et à part entière de la société canadienne».

    Nombre de recherches et notre propre expérience indiquent que l'intégration se fait. Un accès opportun au marché du travail et la stabilité des revenus sont probablement deux des facteurs les plus importants qui facilitent l'intégration. Tous ceux ici qui ont déjà été au chômage et qui se souviennent comment ils se sentaient avant d'avoir un emploi stable reconnaissent à quel point il est important d'avoir un emploi pour apprendre à connaître sa collectivité, se faire des amis, se sentir valorisés, etc. Donc, plus vite les immigrants trouveront un emploi, plus vite ils deviendront des membres à part entière de l'économie, réduisant ainsi leur dépendance—à tout le moins celle que l'on perçoit—à l'égard du système. Malheureusement, dans le mandat actuel du financement du PEAI de CIC, les clubs de recherche d'emploi sont le seul service connexe qui soit offert.

    À notre association, nous pouvons compter sur le soutien de CIC. Le Ministère a fait preuve d'une certaine souplesse pour comprendre les défis que doit relever la Nouvelle-Écosse et nous offrons certains programmes restreints connexes à l'emploi, mais ce n'est pas l'objectif principal de l'établissement. À mon avis, les programmes de participation au marché du travail devraient être inclus comme service essentiel d'établissement financé.

·  +-(1355)  

    Je pense que c'est ce qui est emballant à ce sujet. Nous le répétons depuis un certain temps, mais l'an dernier, on a reconnu cela à l'échelle nationale plus que jamais auparavant, certainement avec la stratégie d'innovation. Cette stratégie est très positive et permet de repérer un certain nombre d'enjeux reliés à la participation au marché du travail des immigrants; nous avons également des chiffres du recensement sur les pénuries de compétences. Donc, beaucoup d'éléments militent en faveur de cela.

    Si le gouvernement fédéral souhaite maximiser l'efficacité des services d'établissement actuellement financés par le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, en un sens, la responsabilité de ces services d'établissement doit déborder celle du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Et j'aimerais ici vous parler du mandat spécifique de DRHC.

    Je ne sais pas quel est le surplus de la caisse d'assurance-emploi actuellement, mais pendant qu'il y a surplus, il y a pénurie de programmes d'emploi pour les immigrants, en grande partie parce qu'ils ne sont pas admissibles à l'assurance-emploi. Dans certaines provinces où les gouvernements ont conclu un accord avec DRHC, je crois que l'on dispose d'une certaine souplesse pour offrir des services d'emploi même si ce n'est pas au niveau que la plupart des agences d'immigrants estiment approprié pour être capable d'intégrer les immigrants.

    En toute équité pour les fonctionnaires de DRHC, nous savons très bien à quel point ils ont travaillé fort pour rétablir leur responsabilisation, compte tenu de ce qui s'est produit il y a quelques années. Je pense que lorsque les fonctionnaires qui veulent respecter le mandat de DRHC disent non aux programmes de participation au marché du travail des immigrants, ce n'est pas parce qu'ils ne le veulent pas, c'est parce qu'ils respectent le mandat qui leur a été confié. Tant qu'il n'y aura pas de directive nationale disant que DRHC peut maintenant financer des programmes d'immigrants, les fonctionnaires dans les régions vont respecter les règles établies.

    Donc, je recommanderais que les critères de DRHC soient élargis pour inclure les immigrants, qu'une partie importante du surplus de l'assurance-emploi, s'il en est, soit affectée aux services d'établissement et d'emploi pour les immigrants et que la stratégie d'innovation qui, je pense, a été favorablement accueillie à l'échelle nationale, soit accélérée et que des fonds y soient consacrés pour mettre en oeuvre certains des programmes. Voilà pour la vue d'ensemble.

    J'aimerais maintenant me concentrer sur les préoccupations courantes qui ont émergé et qui semblent certainement plus critiques récemment en ce qui a trait au Programme d'aide au réétablissement, le PAR. C'est le programme qui offre un soutien aux réfugiés pris en charge par le gouvernement.

    D'abord, nous félicitons le gouvernement et nous réjouissons que la nouvelle LIPR ne restreigne plus l'admission des réfugiés pris en charge par le gouvernement en fonction de critères de sélectivité. Nous sommes tout à fait d'accord pour dire que le programme des réfugiés repose sur des motifs humanitaires et que la LIPR a assoupli certaines des conditions en vertu desquelles nous acceptons maintenant les réfugiés.

    Essentiellement, ce qui nous préoccupe, c'est que même s'il s'agit d'une nouvelle orientation et que le profil de certains réfugiés pris en charge par le gouvernement que nous recevons actuellement est en train de changer, les politiques sous-jacentes, en réalité, n'ont pas changé. Elles font en sorte que les réfugiés pris en charge par le gouvernement, qui sont déjà très vulnérables, n'arrivent pratiquement jamais à s'établir et à s'intégrer au cours de la première année.

    Essentiellement, il s'agit d'une population déjà vulnérable et on essaie de faire en sorte qu'ils s'établissent au niveau du seuil de pauvreté.

    Par exemple, une famille était censée arriver avant Noël, mais le père est mort. La mère et le fils sont arrivés jeudi du Soudan.

    En tant que mère célibataire, cette femme recevra au total cette année 12 539 $, et cela inclut 563 $ pour le logement—loyer, chauffage, électricité, eau et téléphone. Son allocation de base pour l'alimentation, notamment, pour elle et son fils est de 327 $. Elle aura un laissez-passer d'autobus de 57 $ par mois. Deux fois par année, elle recevra une somme de 500 $ pour les vêtements, pour un total annuel de 1 000 $, et on lui remettra une somme de départ unique de 175 $.

¸  +-(1400)  

    Le seuil de pauvreté en Nouvelle-Écosse pour une mère célibataire est de 20 209 $, ce qui veut dire qu'une mère célibataire réfugiée avec un enfant reçoit un revenu du gouvernement du Canada dans le cadre du PAE qui équivaut à 62 p. 100 du seuil de pauvreté.

    En outre, la personne doit acheter tous ses articles de maison pour commencer sa nouvelle vie au Canada avec une allocation unique de 1 500 $ qui n'a pas augmenté depuis 1992, ou même peut-être avant. Avec cet argent, elle va devoir acheter tous ses meubles, la vaisselle, les casseroles, la literie, les couvertures, etc. Ensuite, six semaines après s'être installée dans son nouvel appartement, on va lui demander de commencer à rembourser son prêt pour le voyage, ses droits d'établissement, etc. à un taux minimum de 150 $ par mois. Et il y a d'autres exemples.

    Bien sûr, lorsque les réfugiés arrivent, ils sont heureux d'être ici, ils sont reconnaissants, et ils ont certainement bien l'intention de travailler, de s'établir et d'offrir une vie meilleure à leurs enfants. Mais comme l'a dit un des travailleurs, les réfugiés ne savent pas ce que ça représente «625 $ par mois», ça pourrait être 6 000 $. La première semaine, ils ne savent pas ce qu'ils peuvent acheter avec cette somme. Lorsqu'ils demandent s'ils peuvent vivre avec cela, le membre du personnel répond toujours ceci: «Oui, mais ça va être difficile». Et je pense que cette réponse en dit bien plus long qu'on ne le pense.

    Je ne pense pas qu'aucun des réfugiés et certainement pas les Canadiens s'attendent à ce que nous réétablissions les réfugiés en leur offrant beaucoup d'argent, mais je ne pense pas que le Canadien moyen comprenne à quel niveau nous établissons les réfugiés pris en charge par le gouvernement, c'est-à-dire en deçà du seuil de pauvreté. Nous n'offrons pas suffisamment de soutien à l'établissement, et on critique lorsque les gens sont incapables de s'intégrer. Et pourtant, nous faisons pratiquement en sorte qu'il soit impossible pour eux d'y parvenir.

    Le PAE a d'autres limites qui sont plus importantes parce que là encore, le profil des réfugiés a changé. Il y a plus de réfugiés ayant des besoins spéciaux, plus de familles monoparentales et de grandes familles, moins de réfugiés qui viennent d'Europe et plus d'Afrique et d'Asie. Ils viennent de plus loin, si bien qu'ils ont plus de dettes. Moins de ces gens-là vont parler l'une ou l'autre des langues officielles, moins auront de compétences transférables.

    Ce qui veut dire qu'ils ont besoin de soutien au départ, à tout le moins pour un petit bout de temps, même si je ne crois pas que cela se reflète nécessairement dans les fonds attribués. Par exemple, prenez le budget d'interprétation et de traduction. Même si le budget n'est pas énorme, le programme accorde 13 heures de ces services par personne, et deux heures de plus pour une famille ayant des besoins spéciaux. Je pense que lorsqu'on reçoit des réfugiés qui sont plus difficiles à établir, cette limite fait qu'il est très difficile d'offrir des services directement ou de passer un marché avec d'autres fournisseurs de services dans la province pour nous aider à offrir ces services.

    Dans le cadre du PAE, les réfugiés pris en charge par le gouvernement profitent du Programme fédéral de santé intérimaire. Je ne sais pas si vous avez entendu d'autres témoignages à ce sujet. Selon ses propres lignes directrices, le Programme n'est pas conçu pour remplacer les régimes de soins de santé provinciaux et n'accorde pas la même garantie qu'aux résidents permanents. Je sais que certains diront qu'au Canada, nous avons créé un système de santé à deux paliers. Dans ce cas, il y a un troisième palier, et ce sont les soins de santé auxquels ont droit les réfugiés pris en charge par le gouvernement lorsqu'ils arrivent ici. Essentiellement, le Programme n'accorde pas un accès adéquat aux soins de santé, aux médicaments ou aux soins dentaires. De fait, en Nouvelle-Écosse, le régime d'assurance-médicaments et le régime de soins dentaires pour ces réfugiés ne prévoient même pas le niveau minimum de services accordés aux prestataires de l'aide sociale.

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Je sais que beaucoup de renseignements que vous nous donnez sont importants, mais votre présentation a déjà duré 25 minutes. Puis-je me permettre de vous demander de résumer le reste de sorte que les autres témoins puissent fournir eux aussi de l'information et que nous passions ensuite aux questions.

+-

    Mme Claudette Legault: Je m'excuse auprès de mes collègues.

    Je vous ai présenté mes recommandations en ce qui concerne le Programme fédéral de santé intérimaire. Je crois qu'il est difficile pour les travailleurs d'aider les réfugiés à accéder aux soins de santé quand beaucoup de fournisseurs de soins de santé n'adhèrent pas à ce programme et n'offrent donc pas les services. Donc, je vous demande votre soutien à cet égard.

    En ce qui concerne les communications, le numéro 1-800 et le télécentre pour obtenir de l'information sur la citoyenneté et l'immigration sont un défi, plus particulièrement pour les réfugiés pris en charge par le gouvernement. Cela est devenu plus difficile récemment, et je demande que des efforts spéciaux soient consentis par le gouvernement pour répondre aux demandes de renseignements des réfugiés pris en charge par lui, parce que c'est quelque chose que nous ne sommes pas capables de faire.

    Je m'excuse, j'ai dépassé mon temps.

¸  +-(1405)  

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Vos renseignements sont très intéressants. Je constate qu'il vous en reste encore beaucoup à donner. Je pense que pour être équitable pour les trois autres témoins, il serait important de donner la chance à tout le monde de faire son exposé.

    J'apprécie beaucoup votre exposé.

+-

    Mme Claudette Legault: J'espère que durant la période de questions, nous pourrons aborder certaines des autres questions.

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Très certainement.

+-

    Mme Claudette Legault: Merci de m'avoir écoutée.

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci beaucoup.

    Le révérend Pendleton.

+-

    R. P. Gus Pendleton (directeur de mission, Brunswick Street United Church): Je m'appelle Gus Pendleton. Je suis ministre de l'Église unie de la rue Brunswick, que l'on appelle la Brunswick Street United Church and Mission.

    Nous n'obtenons pas de subventions du gouvernement pour notre travail que je vais vous décrire de cette façon: essentiellement, nous nous occupons des revendicateurs du statut de réfugié et tôt le matin, dès 6 heures, 6 h 30, nous leur préparons le petit déjeuner que nous offrons aussi à des sans-abri. À Halifax, les revendicateurs du statut de réfugié sont amenés immédiatement dans un refuge, qu'ils arrivent par bateau, par avion ou autrement, et revendiquent le statut de réfugié ici.

    Nous travaillons non seulement avec des réfugiés, mais avec des personnes sans abri, des gens très pauvres et qui ont des besoins divers. Je vois un peu notre travail comme le décrit la chanson de Malvina Reynolds God Bless the Grass, dans laquelle elle dit que l'on essaie de recouvrir l'herbe de ciment, mais que l'herbe repousse constamment, vous comprenez. Les gens dont nous nous occupons sont des personnes fortes qui ont des besoins très particuliers.

    Les réfugiés qui arrivent chez nous n'ont même pas certaines des ressources dont vous venez tout juste d'entendre parler.

    Ma femme vous prie de l'excuser. Elle est handicapée. Elle a eu une crise aujourd'hui et ne peut être avec nous. Je ne suis pas le travailleur social de l'Église, comme vous pouvez le constater d'après mon col. C'est elle qui fait la grande partie du travail direct et elle voulait que je vous fasse part de deux grandes préoccupations.

    Premièrement, la plupart des gens que nous rencontrons sont des médecins, des ingénieurs, des personnes ayant fait des études avancées ou possédant des compétences techniques perfectionnées. Le processus d'intégration, s'ils débarquent d'un conteneur, d'un navire ou d'un avion, est très difficile.

    D'abord, ils touchent l'aide sociale. C'est un processus qui fait peur à ces gens qui ont ce genre d'études, ce genre de compétences. Ils passent leurs premières journées avec des gens de la collectivité et avec lesquels, bien honnêtement, vous ne voudriez pas que jouent vos enfants. Ces gens-là sont entourés de drogues et d'alcool partout autour d'eux. Ils voient des gens qui quêtent pour obtenir de l'argent.

    Je n'ai pas de problèmes avec ces choses-là. Je dis simplement que c'est un monde différent.

    Les réfugiés peuvent aussi avoir des problèmes de langue. Certains viennent dans une église chrétienne pour y prendre leur petit déjeuner, et ils ne sont pas certains de ce que cela veut dire parce qu'ils sont musulmans. Ils sont totalement les bienvenus. Nous nous assurons de ne pas leur donner de porc pour le petit déjeuner, c'est tout.

    La réalité est que c'est un monde différent, un monde très différent pour les gens qui ont ce genre de compétences dont j'ai parlé. Donc l'une des préoccupations est la suivante: comment nous assurer que l'on intègre bien les gens? Parce que ce sont des gens qui aident le Canada à s'aider. Voilà pour la première préoccupation.

    Deuxièmement, cela concerne quelque chose que nous voyons également. Cela touche certaines de ces personnes et certaines désespérément—c'est-à-dire les divers types de problèmes de santé mentale. Quand on voit des médecins, des ingénieurs et d'autres personnes qui réalisent qu'ils ne peuvent subvenir à leurs besoins sauf s'ils s'adressent à une banque alimentaire, il arrive souvent qu'ils soient déprimés. Littéralement parlant, certains ne savent même pas quoi faire. Ils sont en dépression situationnelle et dans certaines cultures, on ne parle pas beaucoup de ce genre de choses.

    Il y a un petit groupe de personnes qui arrivent comme revendicateurs du statut de réfugié et qui, en réalité, ne peuvent même pas fonctionner dans les limites du processus lui-même.

    Nous nous sommes occupés d'un assez étroitement. Sa demande de statut de réfugié a été refusée. Il ne pouvait pas l'obtenir mais en réalité, il n'aurait jamais dû se retrouver dans le système. C'est un jeune homme qui vient d'Afrique. Il a de graves problèmes de santé mentale qui ne sont pas facilement reconnus par nos modèles de santé mentale. Honnêtement, c'est très difficile pour les gens de la classe moyenne du Canada d'obtenir de bons services de santé mentale, mais c'est pratiquement impossible pour des gens d'autres cultures.

¸  +-(1410)  

    Au fait, l'une des grandes ressources que nous pouvons véritablement leur offrir, j'ai son représentant juste à mes côtés, c'est la North End Clinic où on a un psychiatre qui est très sensible aux enjeux culturels.

    Ces problèmes sont très difficiles. Ce dont je vous parle, c'est des écueils, des gens qui ne sont pas couverts par le système, des petites gens, et je pense qu'à l'instar de ceux qui sortent de la maladie au Canada, ces gens-là sont aussi importants.

    La réalité est que certains d'entre eux ont été torturés dans leur enfance. Honnêtement, on voit de plus en plus de gens de moins de 20 ans, parfois moins de 18 ans. Bien sûr, ils mentent quand ils arrivent ici parce qu'ils ne veulent pas être perçus comme des mineurs.

    Ce sont là des problèmes très graves. Parfois, on est témoin des cicatrices physiques, entre autres. On veut simplement continuer de montrer à ces personnes un visage humain et raconter notre histoire à qui voudra l'entendre parce que cela fait grandement partie du problème.

    Merci.

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci beaucoup.

    Monsieur O'Hara.

+-

    M. Paul O'Hara (conseiller, North End Community Health Centre): Merci, je m'appelle Paul O'Hara, et je travaille au North End Community Health Centre, un centre de santé communautaire dans un quartier central de Halifax. Nous sommes probablement le seul service de ce genre en Nouvelle-Écosse—et qui est financé ainsi: il y a d'autres centres de santé, mais qui sont beaucoup plus petits. Nous répondons aux besoins d'une communauté à faible revenu et avec un pourcentage élevé de logements publics. Nombre des services offerts à la Brunswick Street United Church et à d'autres organismes qui s'occupent des sans-abri se trouvent dans notre collectivité.

    En préparant mon exposé d'aujourd'hui, je me suis entretenu avec plusieurs autres fournisseurs de soins de santé à notre centre pour vraiment comprendre ce que les gens perçoivent comme des enjeux pour les immigrants qui utilisent nos services de soins de santé primaire et de santé mentale dans notre centre de santé. J'ai parlé avec des médecins et des infirmières, une diététicienne, un interprète dans le domaine de la santé et je vais vous parler un peu d'une partie du travail que je fais dans la collectivité en tant que travailleur social.

    Vous comprenez tous sans doute qu'on a besoin d'une éducation constante en matière de diversité et de diversité culturelle spécifique à la santé, et que nous n'avons pas les fonds nécessaires pour offrir ce genre de programmes d'information dans notre collectivité.

    Je le répète, nous avons un urgent besoin d'interprètes dans le domaine de la santé. Dans les services de soins de santé primaire, si vous n'avez pas d'interprète, c'est très difficile.

    L'importance du racisme, de la pauvreté et de la différence des classes est véritablement pertinente dans la prestation des soins de santé, tout comme la relation entre les fournisseurs de soins de santé et les divers services d'information offerts aux diverses cultures spécifiques. Les organismes communautaires qui travaillent avec ces diverses cultures ne font pas vraiment un bon travail à cet égard.

    Il nous faut des programmes d'éducation continus bien adaptés aux fournisseurs de soins de santé pour les former, de même que pour être mieux engagés auprès des gens de communautés ethniques différentes afin d'établir de bonnes relations avec eux. Notre diététicienne a dit qu'elle avait, grâce à sa formation, pu établir certains liens avec les diverses cultures, mais qu'il n'y avait pas de relation réelle avec une organisation comme MISA, par exemple. Si nous avions les fonds—s'il y avait une personne, quelqu'un à la MISA qui était directement relié aux universités—nous pourrions faire beaucoup plus en ce qui a trait à l'éducation sur la santé, surtout lorsqu'on traite de choses comme la malnutrition et les piètres conditions d'hygiène, le genre de problèmes avec lesquels les gens qui arrivent d'un pays déchiré par la guerre s'amènent au Canada.

    Si nous voulons nous occuper de leurs problèmes d'un point de vue nutritionnel, il nous faut vraiment savoir ce que l'on fait. De même, les règles et les normes culturelles au sujet de la nourriture—les habitudes d'achat des aliments, le stockage de la nourriture, la croyance aux soins nutritionnels—tout cela a des répercussions sur notre façon d'assurer les soins de santé. Même des choses simples comme le fait que notre publicité est parfois très trompeuse—par exemple, quand on associe un produit à une valeur nutritive—voilà un élément que l'on ne peut passer sous silence dans la façon de faire du travail d'information.

    L'un des médecins au centre de santé a abordé la question des diagnostics, et a dit comment parfois ces diagnostics étaient compromis à cause de cultures particulières et de gens qui ne sont pas capables de donner de l'information qui est nécessaire. L'exemple, les maladies transmises sexuellement. Lorsqu'un immigrant qui possède peu l'anglais ou le français est incapable de faire passer son message par des types d'expressions subtiles associées à sa culture, on n'a même pas la possibilité de faire le bon diagnostic.

    Les rencontres entre le fournisseur de soins de santé et l'immigrant sont plus longues. Notre système conventionnel de soins de santé ne permet pas une telle chose. Quand on comprend les croyances et les précautions des immigrants au sujet des maladies, on ne peut pas miner leurs croyances culturelles, leurs pratiques en matière de santé, leurs recours qu'ils ont à la maison. Si on veut que les gens suivent le traitement, il faut être véritablement conscient de ces choses. Les croyances et les pratiques guidées par la religion sont toutes très pertinentes.

    Là encore, les immigrants comptent souvent sur des amis pour interpréter pour eux lorsqu'ils n'ont pas accès à un interprète dans le domaine de la santé, ce qui nécessite beaucoup de temps. Donc, lorsqu'un ami fait de l'interprétation, il ne le fait pas de façon professionnelle. Le diagnostic n'est peut-être pas rendu exactement et les problèmes concernant les soins de santé réels sont masqués. Il y a des problèmes de confidentialité qui sont compromis lorsque l'on utilise un ami pour faire de l'interprétation. Donc, un interprète en soins de santé est essentiel pour donner une prestation conséquente en la matière.

¸  +-(1415)  

    En outre, quand les gens vivent dans la pauvreté, l'accès aux médicaments est une question qui nous préoccupe beaucoup, à la clinique. Il s'agit de choses simples comme l'éducation à la santé en climat froid, la susceptibilité aux maladies et la façon de se garder en bonne santé, surtout pour les gens d'Asie et d'Afrique. Il y a trop de visites chez le médecin pour de simples rhumes, trop de visites en clinique externe et à l'urgence parce que les gens ne savent vraiment pas ce qui se passe.

    Donc, on ne peut pas présumer que les nouveaux venus connaissent nos systèmes de santé publics et qu'ils sont à l'aise dans ces systèmes. Il y a un grand besoin de services psychiatriques et de services de santé mentale connexes, surtout pour les gens qui ont vécu dans des camps de réfugiés ailleurs et qui viennent de pays où il y a des problèmes graves.

    Alors, si les gens veulent avoir accès rapidement aux programmes de santé mentale et aux autres services sociaux, nous devons vraiment savoir ce qui se passe et ce qu'il faut faire. Les symptômes psychosomatiques des réfugiés doivent être traités au niveau des services de santé primaires, et si nous ne sommes pas en mesure de le faire, nous n'offrons pas un service satisfaisant.

    Je ne sais pas si la MISA a des renseignements précis sur la question, mais nous avons tendance à croire qu'il y a beaucoup de réfugiés et de nouveaux venus qui vivent des suicides, des homicides et d'autres fins tragiques directement à cause de l'incapacité de notre système de soins de santé à aborder ces problèmes.

    La violence familiale est un autre exemple. Nous n'avons vraiment pas les programmes de dépistage nécessaires pour nous occuper des cas de violence conjugale propres à certaines cultures et pour tenir compte de la diversité culturelle.

    Les gens ont tellement peur d'être rejetés par leur propre communauté qu'ils refusent de s'attaquer à ces problèmes familiaux ou autres. Ils ne font pas appel aux foyers de transition ou aux centres d'accueil pour femmes battues. C'est parfois pour des raisons très simples, par exemple parce qu'ils ne savent pas ce qu'on va leur donner à manger. Ou parce qu'ils ont peur de la discrimination raciale. Elle existe. Elle n'a pas disparu. Nous savons tous ce qui se passe, et les gens ont peur; c'est pourquoi ils ne font pas appel à ces programmes. Nous devons donc être conscients de la situation et nous montrer plus accueillants envers les autres cultures, et envers leurs valeurs et leurs coutumes particulières. C'est ce qu'il faut encourager. Il faut faire des efforts pour rejoindre les gens.

    Nous avons entendu parler brièvement du régime d'aide sociale, et Claudette en a parlé. Gus et moi, nous nous sommes dit: «Ce serait merveilleux si nos clients avaient accès à certaines de ces choses-là.»

    Alors, qu'est-ce qu'il advient des nouveaux venus, et en particulier des réfugiés? Je travaille surtout avec des célibataires. Une fois qu'ils passent du statut de réfugiés au statut d'immigrants ayant reçu le droit d'établissement, ils n'ont plus accès à tous ces programmes. Ils tombent alors dans le système général d'aide sociale s'ils ne sont pas en mesure d'être indépendants.

    Nous traitons très mal les célibataires en Nouvelle-Écosse, et partout ailleurs au pays, j'imagine. Nous avons tendance à dire aux célibataires adultes, en particulier: «Prenez-vous en charge. Organisez-vous avec un ami. Trouvez-vous un logement.» Nous ne tenons vraiment pas compte de la réalité.

    L'allocation de logement fixée par l'aide sociale est un bon exemple. Une fois qu'une personne passe du statut de réfugié au statut de personne seule en mesure de travailler, dans le système d'aide sociale, le montant qu'on lui accorde pour se loger passe de 535 $ par mois—ce qui n'est déjà pas suffisant—à 235 $ par mois.

    J'ai eu à m'occuper d'un homme d'Europe de l'Est. Il parlait très peu anglais. Il avait été réfugié. Il souffrait du syndrome de stress post-traumatique. Il était considéré comme un célibataire apte au travail, et son propriétaire était en train de mettre ses affaires dans l'escalier. «Si vous ne pouvez pas payer le loyer, allez-vous-en. Je connais d'autres personnes qui peuvent payer.» Cet homme ne savait pas où aller ni quoi faire.

    Il y avait une étudiante en service social qui travaillait avec lui et qui était reliée à la MISA; c'était intéressant. Cette jeune femme m'a dit: «Paul, j'ai regardé les journaux. C'est ce que nous faisons tous les jours depuis trois jours. Il est impossible de trouver un logement pour 235 $ par mois. Absolument impossible.» Et je lui ai répondu: «Évidemment. Pas besoin d'être un génie pour le savoir.»

¸  +-(1420)  

    Cette personne, jeune et un peu naïve, pensait que le système répondrait de façon responsable à une personne dans le besoin. Désolé, mais cela ne fonctionne pas de cette façon. Une personne plus expérimentée, comme moi, a une approche différente. Je m'occupe de ce genre de cas depuis plus de 20 ans.

    Il y a un médecin qui est venu me dire: «Paul, j'ai des patients qui me prennent tout mon temps et j'ai autre chose à faire. Qu'est-ce que je vais faire de cet homme? Il va se retrouver à la rue et il a toutes sortes de problèmes.» En gros, je lui ai conseillé de donner à son patient une note indiquant brièvement quels étaient ses problèmes liés au syndrome de stress post-traumatique et ses autres difficultés d'employabilité, et cela a aidé cet homme à obtenir une hausse de ses prestations d'aide sociale.

    Maintenant, si vous prenez les gens comme moi... Il y a très peu de gens qui sont capables de discuter de ce genre de choses avec les nouveaux venus et les réfugiés parce que les ressources ne sont pas accessibles. Les gens se retrouvent souvent en crise. Ils perdent leur logement. Cet homme aurait très bien pu se retrouver à l'hôpital, pour un problème de santé mentale, et cela aurait coûté nettement plus cher au système que si l'aide sociale avait payé son loyer.

    Je voudrais ajouter une dernière chose. Je m'occupe de l'Initiative de partenariats en action communautaire, une initiative soutenue par le fédéral pour lutter contre l'itinérance. C'est la ministre du Travail, Claudette Bradshaw, qui est responsable de l'administration de ce programme par l'intermédiaire de DRHC.

    Il y a un article dans le Homeless Herald—il y a le Halifax Herald, mais nous appelons ceci le Homeless Herald—et à l'intérieur, à la première page, il y a un article sur les néo-Canadiens itinérants. En fait, c'est un étudiant en service social qui l'a écrit.

    Encore une fois, cette initiative, dans le cadre du programme IPAC, reconnaît la nécessité de fournir des logements sociaux pour les nouveaux venus célibataires. La MISA, grâce à tous ses liens avec des bénévoles, a lancé une initiative qui consistera à acheter un immeuble où pourront loger des gens se trouvant dans des situations de ce genre et qui sera géré par des bénévoles. Encore là, c'est une merveilleuse initiative et nous sommes heureux que le gouvernement fédéral fournisse une aide de ce genre dans le cadre du programme IPAC.

    Mais ce qu'il faudrait vraiment, à notre avis, c'est une stratégie nationale sur l'habitation pour faire reconnaître les questions de ce genre, parmi une foule d'autres. Nous avons un urgent besoin de logements sociaux pour toutes sortes de personnes différentes. Si nous voulons vivre dans une communauté saine et respectueuse de tous ses citoyens, nous devons reconnaître qu'il y a des gens qui n'auront pas un revenu suffisant et qui ne pourront pas payer les prix courants pour se loger dans les centres urbains.

    Quand on voit quelle est la croissance à Halifax, c'est vraiment renversant. Nous sommes en pleine croissance. La ville est très prospère. La Chambre de commerce le reconnaît et en est très satisfaite. Nous avons maintenant Houston, Alberta et toutes sortes d'autres entreprises à Halifax qui n'étaient pas ici il y a quelques années. Il y a des condos qui se construisent, et des immeubles résidentiels de prestige. Donc, la ville est très prospère, mais il y a des gens qui ont vraiment de gros problèmes au bas de l'échelle.

    Enfin, merci de votre attention.

¸  +-(1425)  

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci beaucoup, monsieur O'Hara.

    Je tiens à remercier nos trois témoins. Vous nous avez fourni une information très importante.

    Je vais maintenant laisser la parole à Diane, qui pourra peut-être vous poser d'autres questions ou s'attarder à certains points plus en détail.

+-

    Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

    Je remercie les témoins de leurs présentations. J'aimerais faire quelques commentaires pour essayer de vous aider. Je ne le fais pas normalement, mais je tiens à ce que vous sachiez que, contrairement à ce que bien des gens pensent parfois, notre parti est tout à fait prêt à soutenir l'immigration et à aider les immigrants à réussir. Il est aussi tout à fait favorable au maintien de notre tradition humanitaire en ce qui concerne l'accueil des réfugiés.

    Je trouve nécessaire de le dire parce que je sais, puisque je suis députée depuis neuf ans, que ce n'est pas toujours ainsi que notre parti est perçu. Je tiens à ce que vous sachiez que nous essayons tous, au comité, d'aborder ces questions sans aucun esprit partisan et que nous sommes très ouverts et très intéressés à ce que vous dites.

    Je voulais également vous dire que j'ai rédigé ce que notre parti appelle un «énoncé de position» sur les questions touchant l'établissement des immigrants. J'ai soumis ce document à l'approbation du groupe parlementaire, et il fera ressortir un certain nombre de questions que vous avez évoquées aujourd'hui. Donc, l'information que vous nous avez transmise est très utile pour moi.

    On m'a posé par exemple une question qui intéressera sûrement beaucoup Claudette. On m'a demandé : «Est-ce que nous avons des ressources suffisantes pour financer les programmes d'établissement que vous, Diane—c'est moi—, proposez à notre groupe parlementaire d'appuyer?» Je leur ai dit que oui, parce que nous percevons des frais de dossier et des taxes d'établissement expressément pour fournir ces services. Pourtant, très souvent, les services ne sont pas là pour les immigrants et, même pour ceux dont la culture est assez proche de la nôtre, il y a toujours des difficultés d'établissement. Comme beaucoup d'entre vous l'ont souligné, quand ce sont des gens dont la culture est très différente de la nôtre, les besoins sont encore plus grands.

    Claudette, je vais distribuer à mes collègues les chiffres que vous nous avez fournis, à la page 5 de votre document. Ce genre d'information est très utile. Comme je ne m'occupe pas de ce dossier depuis très longtemps, je n'avais pas ces chiffres-là. Vous m'avez rendu un grand service et cela m'aidera beaucoup à parler à mes propres collègues de ces questions. Je sais que tous les membres du comité sont du même avis.

    Passons maintenant aux questions que vous avez soulevées. Il y en a tellement! J'espère que nous pourrons tout couvrir, mais je vais au moins commencer par quelques-unes.

    J'aimerais avoir vos commentaires sur les compressions dans les services d'établissement. Je sais, pour avoir parlé de cette question dans diverses provinces, que les fournisseurs de services sont continuellement frustrés de ne jamais pouvoir faire de projets fermes à long terme, soit parce qu'ils n'ont qu'une allocation fondée sur l'activité de l'année passée, soit parce qu'ils ont une foule de paperasses à remplir pour obtenir leur prochaine allocation, ce qui est vraiment frustrant.

    C'est un peu comme à l'époque où le nombre de médecins a été réduit au Canada parce qu'ils étaient considérés comme un poids pour le système de santé, parce qu'ils fournissaient les services qu'ils facturaient; comme ils coûtaient de l'argent, on avait décidé d'en réduire le nombre. Puis, quand nous avons constaté que nous n'avions pas assez de médecins—et la Nouvelle-Écosse en souffre beaucoup—, nous avons ouvert plus de postes dans nos universités. Mais combien faut-il de temps pour former un médecin? De dix à quatorze ans? Il y a donc toujours du rattrapage à faire.

    Ce que je voudrais savoir, c'est quel serait le délai nécessaire à votre avis pour pouvoir répondre adéquatement et offrir les services qu'exigerait une évolution de la situation, si les chiffres augmentaient ou que les problèmes changeaient. Autrement dit, à quel point ce processus d'allocations annuelles vous permet-il sérieusement de planifier à moyen et à long termes de manière à être prêts à répondre aux changements nécessaires dans la prestation de vos services?

¸  +-(1430)  

+-

    Mme Claudette Legault: C'est une question difficile.

    J'ai déjà dit que la Vérificatrice générale, dans son dernier rapport, je pense, avait recommandé que des accords de contribution échelonnés sur quelques années soient signés avec les organisations offrant des services d'établissement. C'est un effort pour faire avancer les choses, et je pense que cela aiderait à régler le problème.

    Pour ce qui est de signer un accord, nous avons signé celui de cette année avant la fin de l'année. L'an dernier, nous avions des gens qui essayaient, en juin, d'offrir des programmes qui, théoriquement, avaient pris fin le 31 mars. Je sais qu'à l'ACDI, il y a une programmation pluriannuelle, mais il y a quand même des limites à la croissance.

+-

    Mme Diane Ablonczy: À quoi pensez-vous? Trois ans? Cinq ans?

+-

    Mme Claudette Legault: Trois ans, je pense, même si cela pourrait être porté à cinq ans dans certains cas. Les organisations comme la MISA et bon nombre des organisations qui offrent des services d'établissement sont là depuis 1980, alors je pense qu'elles ont un bon dossier même si elles n'ont pas de financement de base. Je pense en tout cas que n'importe quoi de plus long qu'un an...

    Il faudra une certaine souplesse, mais je pense qu'en ayant une idée générale de ce qui s'en vient, nous serions mieux en mesure de conserver les compétences de notre personnel actuel, et aussi de mettre en oeuvre des programmes dont on ne voit pas toujours les avantages immédiatement.

+-

    Mme Diane Ablonczy: Oui, je m'en rends bien compte.

+-

    Mme Claudette Legault: Donc, il est certain qu'un arrangement de trois ans serait très positif, si nous savions que les choses allaient bouger.

+-

    Mme Diane Ablonczy: J'ai été surprise de constater—je ne sais pas si d'autres membres du comité l'ont été aussi—que le mandat actuel des services d'établissement ne prévoit pas vraiment de fonds réservés pour veiller à ce que les gens se joignent à la population active, ce qui est certainement une des premières choses à faire, comme vous l'avez souligné à juste titre. En effet, comment les gens peuvent-ils s'établir dans un nouveau pays s'ils n'ont pas de revenu? Je serais certainement prête à appuyer cela sans réserve.

    J'aimerais savoir quelle serait la chose la plus urgente, ou les deux ou trois choses les plus urgentes que votre organisation et les autres entreprendraient si vous aviez de l'argent, s'il y avait du financement pour aider les nouveaux venus à s'établir sur le marché du travail.

+-

    Mme Claudette Legault: Il faudrait que notre responsable de l'emploi soit ici. Je pense que c'est en partie le travail que nous faisons déjà, même si, encore une fois, nous sommes constamment à la recherche de fonds; nous en trouvons un peu ici et là.

    Je pense que ce sont exactement les éléments qui ont été mentionnés dans la stratégie d'innovation, et certaines choses que nous faisons déjà. Il y a certainement la question de la reconnaissance des titres de compétences, qui est très importante; il faut que nous permettions aux gens de venir ici, et il y en a qui ont des titres de compétences. On dit qu'il y a une pénurie de main-d'oeuvre en Nouvelle-Écosse, mais nous avons eu l'an dernier à la MISA 22 professionnels de la santé qui cherchaient du travail.

    C'est à la page 7, je pense, qu'on peut lire:

élaborer une approche intégrée pour l'évaluation et la reconnaissance des titres de compétences étrangers; fournir un meilleur soutien à l'intégration au marché du travail par des mesures comme l'aide à l'acquisition d'une expérience au Canada grâce à des stages et internats.

    Cela veut dire qu'il faut placer les gens dans des emplois où ils acquièrent de l'expérience au Canada, avec un employeur.

    D'après notre expérience, ces programmes ont été parmi les plus utiles pour ouvrir une porte et pour permettre à des gens d'entrer par cette porte, ne serait-ce que pour acquérir de l'expérience au Canada en sachant que, peut-être, ils pourront s'améliorer un peu et avoir des références de quelqu'un qu'ils pourront appeler au Canada. Et, inévitablement, il y en a beaucoup qui finissent par être embauchés ou qui reçoivent un appel de l'employeur quand il y a un emploi qui s'ouvre dans le secteur. Je pense que l'important, c'est de mettre le pied dans la porte, ce qui permet d'être ensuite orienté vers le travail disponible au Canada.

¸  +-(1435)  

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): C'est très intéressant.

    Est-ce que Gus et Paul pourraient répondre aussi à cette question?

+-

    Mme Diane Ablonczy: Oui, ce serait bien.

+-

    R. P. Gus Pendleton: Très simplement, c'est exactement ce qu'il faut à mon avis; il faut faciliter les choses, s'assurer qu'il y a des stages, et pas seulement pour les médecins. Il y a manifestement eu certains progrès du côté des professionnels de la santé. Mais quand on voit un ingénieur qui met les articles dans des sacs, au supermarché, quand on voit des gens qui ont d'autres types de compétences et qui sont vraiment... Certains d'entre eux travaillent très fort, parfois à trois ou quatre emplois une fois qu'ils ont reçu le droit d'établissement. Mais ce n'est pas une façon particulièrement efficiente de concevoir notre société. Il y a des gens de talent qui ont des compétences dont nous avons besoin, mais qui ne peuvent pas acquérir de l'expérience au Canada, et pas seulement parmi les médecins.

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Paul.

+-

    M. Paul O'Hara: Je suis d'accord. Nous avons reçu récemment un médecin chinois. Nous avons maintenant un système électronique, que nous sommes en train d'intégrer à nos mécanismes de soins de santé grâce à une subvention du gouvernement fédéral. Et ce médecin transférait l'information de nos dossiers à ce système électronique, alors que nous manquons de médecins dans nos établissements de santé.

+-

    Mme Diane Ablonczy: Ce qui me frappe, c'est que cela doit être particulièrement traumatisant pour les réfugiés parce que, quand on ajoute le manque d'assistance à l'établissement sur le marché du travail à un niveau raisonnable—parce qu'il est certain que nous ne voulons pas perdre de capital humain, de potentiel humain—au faible niveau d'aide financière, il est étonnant que les gens soient capables de supporter ce genre de fardeau.

    Je dois dire que je trouve cela étonnant en tant que Canadienne. Je ne m'occupe pas de ce dossier depuis très longtemps, mais je ne savais pas que le niveau d'appui aux demandeurs du statut de réfugiés était aussi déplorable. Pourtant, notre pays se vante de sa compassion et de ses traditions humanitaires, et du fait qu'il tire des gens de situations désespérées et qu'il leur donne un nouveau départ au Canada. Mais je pense que, dans l'esprit de n'importe quel Canadien raisonnable, cela peut difficilement être considéré comme un parrainage suffisant.

    Si vous ou moi parrainions quelqu'un, nous en ferions beaucoup plus que ce qui semble se faire, d'après ce que Claudette et les autres témoins nous ont dit. Amener quelqu'un dans notre pays et l'abandonner ensuite à son sort, cela n'est pas ce que j'appellerais un programme très compatissant d'accueil aux réfugiés. Donc, l'information que vous nous avons fournie est très utile pour moi.

    J'aimerais que nous nous penchions sur votre recommandation—et les autres peuvent faire leurs commentaires aussi—selon laquelle les demandeurs du statut de réfugiés devraient non seulement bénéficier d'un soutien essentiel, mais également être autorisés à avoir un revenu, du moins au départ, sans que cela soit déduit du soutien qu'ils reçoivent.

    Y a-t-il des études, des projets pilotes ou d'autres expériences dont vous pourriez nous parler et dans lesquels cette approche a été particulièrement utile et positive pour garantir la réussite des gens plus tard?

+-

    Mme Claudette Legault: Non, je ne connais pas de programmes de ce genre. Je pense qu'il y a eu un changement dans le cadre du nouveau PAR. Comme je ne m'occupais pas d'établissement, je n'étais pas au courant à ce moment-là; il semble toutefois que les gens pouvaient gagner davantage sous le régime de l'ancien programme, mais que ce n'est pas encouragé dans le nouveau programme.

    Mais j'ai bien peur de ne pas en savoir plus.

+-

    Mme Diane Ablonczy: Je pense qu'il y a eu un projet pilote de ce genre en Europe. Il me semble l'avoir étudié quand je me suis intéressée au dossier de DRHC. Je pourrais essayer de retrouver l'information. Le comité trouvera peut-être cela utile parce que c'était une approche intéressante, à mon avis.

    Dans un endroit comme Halifax, est-ce qu'il y a assez de services d'interprétation disponibles pour répondre aux besoins d'un groupe de personnes très diversifié? Bien sûr, il y a beaucoup de langues différentes, alors je suis curieuse de savoir comment cela serait possible. Auriez-vous des interprète en disponibilité pour tous les groupes linguistiques auxquels vous pourriez avoir affaire, ou que suggérez-vous à cet égard?

¸  +-(1440)  

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    M. Paul O'Hara: Je n'ai pas d'information précise à ce sujet-là. Nous avons un interprète vietnamien sur place parce qu'il y a une importante communauté vietnamienne. Nous comptons un peu sur les liens établis par la MISA. Bien souvent, ce sont tout simplement des amis qui viennent aider, ce qui fait que nous n'avons pas de services d'interprétation satisfaisants.

    Et, comme notre établissement est un centre de santé communautaire et que nous avons une optique un peu différente de celle des cabinets de médecins ordinaires, nous savons comment trouver l'information et, grâce à des subventions et à d'autres moyens, nous publions une foule de brochures et de documents d'information utile pour les gens. Mais ce n'est certainement pas suffisant. C'est évident.

    Nous recevons des gens d'Asie, d'Afrique, d'Europe de l'Est, d'Amérique du Sud, des Antilles. Il y a une multitude de cultures à Halifax, et nous n'avons vraiment pas de moyen rapide et pratique pour offrir le service.

+-

    Mme Diane Ablonczy: J'aurais encore bien des choses à vous demander, mais je devrais peut-être passer le flambeau à d'autres. S'il reste du temps, j'aimerais avoir un autre tour.

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci, Diane.

    Yvon.

[Français]

+-

    M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Monsieur le président, j'ai quelques commentaires d'ordre général à faire et des questions à poser à Mme Legault.

    Vous avez souligné une chose qui ne semble pas toujours logique, mais qui s'avère bien sensée lorsque nous regardons le fond des choses. C'est à la page 2 de votre mémoire. Vous dites que les montants d'argent alloués aux diverses provinces ne devraient pas être proportionnels au nombre d'immigrants accueillis, parce qu'il faut toujours prévoir une infrastructure minimale; ainsi, même s'il n'y a pas beaucoup d'immigrants, certains coûts de base doivent être assumés. Ce phénomène se vérifie au Québec, où les régions situées à l'extérieur de Montréal sont clairement sous-financées. Par contre, on dit que nous devrions attirer les immigrants vers les régions extérieures aux grands centres. La même chose s'applique ici. C'est un point sur lequel nous allons devoir revenir.

    Vous précisez aussi que la contribution des immigrants à l'économie est substantielle; les services devraient par conséquent être meilleurs. Vous dites même que les sommes d'argent qu'ils génèrent sont supérieures au coût des services.

    Enfin, vous abordez une réalité bien palpable que nous devons aborder, comme députés, dans nos comtés: l'obtention d'un emploi--qui est la priorité la plus importante--et le démarrage d'une entreprise. À la page 6 de votre mémoire, vous revenez sur ce sujet:

[Traduction]

«Le fait de trouver du travail ou de lancer une entreprise aide les nouveaux venus à créer un nouveau soutien social...»

[Français]

    Quand on a un emploi, déjà beaucoup de choses vont mieux:

[Traduction]

«Plus tôt les nouveaux venus travaillent, plus tôt ils contribuent à la société...»

[Français]

    Parfois cependant, des semaines et même des mois se passent avant qu'ils obtiennent un emploi. Et pendant ce temps, un individu, un couple ou une famille fait face au stress. Les différentes présentations ne font pas souvent état de cette réalité. On a parlé des problèmes de santé physique et mentale chez certains individus. Or, les couples et les familles vivent des problèmes qui leur sont particuliers.

    Par exemple, si à l'intérieur d'un couple, un des deux partenaires a plus de formation que l'autre, et que, de ce fait, un des deux a des chances d'obtenir un emploi, alors que l'autre n'en a pas, certains problèmes se posent. On parle ici de relations entre des hommes et des femmes, immigrants et réfugiés qui, dans certains cas, viennent de pays où on ne retrouve pas les mêmes règles qu'ici en matière d'égalité homme-femme.

    Ensuite, il y a la famille. Quand les enfants vont à l'école, ils sont exposés à toutes sortes de réalités propres à la culture de leur pays d'accueil. Quand ils reviennent à la maison et que les parents prennent connaissance de ces réalités, ils en sont parfois scandalisés. À cet égard--que ce soit auprès du personnel scolaire ou auprès des mères qui, plus souvent qu'autrement, sont les premières à hériter de ce type de problèmes--, des services de soutien seraient nécessaires. En outre, les mères et les pères voient leurs enfants se mettre à demander toutes sortes de choses, parce qu'ils ont été exposés à la «liberté» de notre culture. Or, celle-ci ne correspond pas toujours à leurs valeurs. Je ne porte pas de jugements à ce sujet; leurs valeurs sont parfois très bonnes.

    J'aimerais savoir si vous avez quelques commentaires à exprimer et je voudrais vous donner l'occasion d'expliquer pourquoi, en trois ans, le nombre d'immigrants est passé de 3 200 à 1 600 en Nouvelle-Écosse. Vous sembliez dire plus tôt que vous aviez une explication à ce sujet.

¸  +-(1445)  

+-

    Mme Claudette Legault: Vous avez soulevé plusieurs points, donc je ne sais pas par où je devrais commencer. J'ai même oublié le premier commentaire, c'était au sujet du minimum de...

+-

    M. Yvon Charbonneau: J'ai souligné des éléments de votre présentation qui m'avaient impressionné et que je pense que nous devrions reprendre. Ce n'est pas la peine nécessairement de commenter, puisque ce sont vos propres propos que j'ai voulu mettre en relief.

+-

    Mme Claudette Legault: D'accord.

+-

    M. Yvon Charbonneau: Mais j'insisterais surtout sur la dernière partie, l'impact sur le couple, l'impact sur la famille et l'explication de la chute dramatique du nombre d'immigrants en Nouvelle-Écosse en trois ans.

+-

    Mme Claudette Legault: D'accord. C'est vrai que la dynamique de la famille est vraiment compliquée et si vous êtes ici jeudi soir, monsieur, je peux vous inviter à un atelier pour les parents qui ont des problèmes reliés à des adolescents. C'était un besoin identifié par les immigrants, qui m'ont demandé d'organiser une rencontre. L'année dernière, on a fait une rencontre avec seulement les parents et ensuite avec seulement les adolescents. À la fin, on a fait une rencontre avec les deux ensemble pour avoir une meilleure communication. On a donc identifié des besoins. On essaie, avec les programmes d'orientation, de parler un peu des dynamiques de la famille, de comment elles changent et de toute la pression que ça met sur la famille. Parfois, tous ces changements peuvent aboutir à une situation de violence familiale. Alors dans ce cas, on essaie de faire des programmes de prévention.

    Je ne sais pas si je peux demander à Mira ou à Anna de parler un peu de ce qu'elles voient dans les familles, de comment on essaie d'aider, et aussi des autres besoins qu'il y a. Il y a d'autres groupes et organisations en Nouvelle-Écosse, à Halifax, avec le North End Community Clinic, SOS. Plusieurs groupes acceptent de donner des cours aux parents, mais là encore, on a besoin de traducteurs et de gens pour nous aider, il faut encore que des traductions soient faites afin de faciliter les choses.

[Traduction]

+-

    Mme Mira Musanovic (intervenante en services d'approche et en intervention d'urgence, Metropolitan Immigrant Settlement Association): Plutôt que de répondre à votre question, je vais vous donner l'exemple d'une famille de six personnes. Ces gens sont venus de l'ex-Yougoslavie il y a un an et cinq mois. Ils ont été inscrits au PAR, le Programme d'aide au réétablissement, pendant un an. Et maintenant, ils reçoivent de l'aide sociale.

    La famille compte quatre très jeunes enfants. La mère est gravement malade et a des problèmes médicaux très sérieux. La mère et le père travaillaient dans leur pays d'origine. Mais, maintenant, ils sont tous les deux prestataires de l'aide sociale.

    Le père enseignait la sociologie à l'école secondaire. Je ne sais pas exactement ce que la mère faisait. À l'heure actuelle, le père est le seul qui se cherche un emploi, parce que la mère doit s'occuper de ses problèmes de santé tout en s'occupant de ses enfants. Et, même si elle cherche du travail, elle devra ensuite trouver ensuite trouver une garderie. Cela coûte très cher d'avoir quatre enfants en garderie pendant que les deux parents travaillent.

    Je voulais simplement vous donner un exemple de ce que vivent certaines familles et vous dire que ce n'est pas une question de mois avant que ces gens-là trouvent du travail; cela peut parfois prendre un an ou même quelques années. Et je suis certaine que le père finira pour se trouver un emploi mal payé.

    Dans son ancien pays, il a été professeur de sociologie pendant une dizaine d'années. Il a une expérience considérable. Je l'imagine facilement parce que j'ai une expérience similaire. Pouvez-vous imaginer vous retrouver dans un emploi de préposé au nettoyage, mal rémunéré, quand vous avez les capacités nécessaires pour être enseignant?

    Ils ne connaissent pas la langue. Ils n'ont pas assez de soutien pour l'apprendre et pour trouver des emplois convenables.

    C'est extrêmement difficile pour toute la famille quand il faut se contenter d'emplois mal payés après avoir joui d'un certain statut dans son pays d'origine. Maintenant, ils doivent trouver du travail, n'importe quel travail.

    À Halifax, il est parfois difficile d'obtenir même un emploi comme préposé au nettoyage. Pour ce professeur—il se donne le titre de professeur, comme il l'aurait dans son pays d'origine—, ce sera très difficile de trouver un emploi mal payé de préposé au nettoyage. Il sera jugé trop qualifié.

    Voilà certaines des choses que doivent vivre ces familles.

¸  +-(1450)  

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): D'accord, Madeleine...

+-

    Mr. Yvon Charbonneau: Monsieur le président, si vous me le permettez, j'aimerais demander une réponse à ma dernière question.

    Mme Legault nous a offert une explication au sujet de la diminution considérable du nombre d'immigrants, qui est passé de 3 200 à 1 600 entre 1996 et 1999. Elle a laissé entendre qu'elle avait peut-être une explication.

+-

    Mme Claudette Legault: Eh bien, ici en Nouvelle-Écosse, nous nous posons tous la question. Pour ce qui est de l'augmentation momentanée de l'immigration en Nouvelle-Écosse, elle s'est produite en bonne partie à la suite de la guerre du Golfe, quand un certain nombre d'immigrants du Moyen-Orient sont arrivés; il y avait parmi eux beaucoup de gens d'affaires et d'entrepreneurs. Je pense que si vous regardez la proportion que représente cette catégorie parmi les immigrants arrivés pendant cette période, elle est très élevée en Nouvelle-Écosse, par habitant, comparativement au reste du pays.

    Alors, pour on ne sait trop quelle raison, peut-être à cause de certaines difficultés inhérentes à l'adaptation, au lancement d'une entreprise, et ainsi de suite, ces gens-là sont allés voir ailleurs, comme le font bien des gens de Nouvelle-Écosse, là où les perspectives étaient plus intéressantes. En outre, on peut lire dans le journal, dans un article publié la semaine dernière, que 230 000 immigrants ont dit non à la Nouvelle-Écosse; c'est donc parce qu'ils ont dit oui à un autre endroit.

    Quelqu'un a mentionné ce matin que nous n'avons pas fait du très bon travail pour promouvoir la Nouvelle-Écosse comme province idéale. Plutôt que de regarder les gens qui sont partis, nous devrions plutôt nous intéresser à ceux qui sont restés et nous demander pourquoi. Ceux qui sont restés l'ont fait pour les mêmes raisons que nous, parce que nous avons un emploi, un moyen de subvenir aux besoins de nos familles. Certains des atouts que les gens de la Nouvelle-Écosse trouvent attrayants, par exemple les petites communautés sûres, les valeurs familiales traditionnelles, les bonnes universités et les possibilités d'éducation pour les enfants, attirent aussi les immigrants.

    Je pense que c'est une voie que nous pourrions explorer pour essayer de faire augmenter les chiffres. La Nouvelle-Écosse, et les Maritimes en général, sont toujours bien cotées dans le palmarès des universités canadiennes dressé par Maclean's, mais nous ne faisons pas la promotion de cet aspect-là. Pourtant, les possibilités d'éducation pour les enfants représentent un atout majeur; c'est très important pour les nouveaux venus.

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Gus, avez-vous quelque chose à ajouter?

+-

    R. P. Gus Pendleton: En fait, j'aimerais répéter que nous travaillons surtout avec des gens seuls, des hommes et des femmes célibataires, et presque exclusivement au niveau d'entrée; ce sont des gens qui sortent des refuges et qui viennent nous voir, ou qui viennent prendre le petit déjeuner avec nous. Nous voyons donc beaucoup de gens qui quittent la province, puisqu'ils ont la liberté de le faire.

    D'un autre côté, je suis très heureux que certains de mes amis personnels, par exemple, des gens qui sont venus ici et qui ont énormément à offrir au Canada... Après le 11 septembre, j'ai des amis arabes qui sont partis, mais la plupart d'entre eux sont maintenant de retour. Ils ont trouvé Toronto très intimidante. Ils ont reçu des menaces. Il s'est produit des incidents très malheureux ici, mais ils ont trouvé Toronto beaucoup moins accueillante.

    Donc, je pense que les gens qui sont restés l'ont fait pour ces raisons-là. C'est exactement cela. C'est une population plus fluide, parce qu'ils arrivent ici, par opposition aux réfugiés parrainés qui peuvent choisir dans quelle province ils vont aller. Ce sont des gens qui arrivent ici par hasard, parce que c'est ici que leur navire a accosté et qu'ils ont appelé les services d'immigration. Je pense que cela nous permet de comprendre un peu mieux ce qui se passe.

    Certaines des personnes qui manifestent ce qui nous semble, au niveau d'entrée, de graves problèmes potentiels de santé mentale s'en vont. Ils veulent des endroits plus gros, plus modernes, où la vie est plus sophistiquée et plus rapide, et ils aboutissent à Montréal ou à Toronto. Dans la communauté des réfugiés, j'entends parfois parler de certaines personnes, et il me semble que les gens qui sont susceptibles d'avoir des problèmes vont en avoir n'importe où, qu'ils soient à Toronto, à Montréal ou à Halifax.

    Mais j'ai vraiment l'impression qu'il y a des gens qui choisissent de partir d'ici parce qu'ils veulent retrouver leur communauté ethnique ailleurs et qu'ils sont convaincus ce qu'est là qu'ils doivent aller, ou encore parce qu'ils ne tiennent pas vraiment au mode de vie d'ici et qu'il n'y a pas beaucoup d'emplois dans la région. L'emploi devient un problème majeur dans ces circonstances.

    Merci.

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Madeleine.

¸  +-(1455)  

[Français]

+-

    Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Merci, monsieur le président.

    J'ai écouté attentivement vos trois présentations et je me suis demandé, étant donné que nous sommes maintenant à environ une semaine du dépôt du budget, si vous êtes optimistes ou inquiets. J'entends dire, par exemple, que malgré la croissance du nombre d'immigrants, aucune augmentation de budget n'est prévue pour l'établissement de cette population. Cela m'inquiète, d'autant plus qu'on dispose de surplus assez importants. C'est donc un choix de société qu'il faudrait faire.

    Dans votre mémoire, madame Legault, vous parlez de Développement des ressources humaines Canada. Bien sûr, on peut choisir d'affecter les surplus au remboursement de la dette. On s'enrichit tous quand on rembourse nos dettes, sauf que je vois là un problème moral.

    Le Canada veut accueillir de plus en plus d'immigrants, et la situation des réfugiés ne va pas aller en se simplifiant au cours des prochaines années. Ces personnes sont des êtres humains; de plus, ils vont contribuer à l'avancement de la société dans laquelle on vit. On a le devoir moral de leur offrir des services de base.

    D'après ce que j'ai compris, votre travail consiste à dispenser des services absolument essentiels comme trouver de la nourriture et un toit ou permettre l'accès à l'éducation et aux services de santé. C'est ce que j'ai entendu.

    Or, je me demande ce qu'on peut faire pour que notre ministre des Finances soit sensible à cette situation. Pour ma part, je suis au comité depuis 2000. Je commence donc ma troisième année, et je peux vous dire que peu d'argent est consacré à cette cause.

    On a mis en vigueur une nouvelle loi et on est allé voir un peu ce qui se passait dans le monde. Or, on constate qu'avec le personnel en place, il n'est même pas possible de traiter les dossiers dans des délais acceptables. Il semble que d'un côté, des décisions soient prises mais que d'un autre côté, on n'ait pas l'argent nécessaire pour que ces décisions se concrétisent de façon rationnelle.

    Je ne sais pas si vous avez fait des représentations auprès du ministre des Finances. Des consultations pré-budgétaires ont lieu. J'imagine qu'on est venu à Halifax. Est-ce que vous avez eu l'occasion de faire part de vos attentes et, le cas échéant, lesquelles?

¹  +-(1500)  

+-

    Mme Claudette Legault: On n'a jamais fait de représentations à cet effet à ce comité. C'est la première fois.

+-

    Mme Madeleine Dalphond-Guiral: C'est triste à dire mais l'argent, c'est le nerf de la guerre. Justement, par les temps qui courent, on semble plus disposés à consacrer de l'argent à la guerre, mais on doit quand même se définir en tant que société et choisir les valeurs qu'on veut défendre.

    Disons que votre voix devrait au moins être entendue quand il y a des auditions de témoins. Citoyenneté et Immigration vous concerne directement, c'est sûr, mais il est très clair que le ministère des Finances a beaucoup d'influence; il régit à peu près tout. À mon avis, personne autour de la table ne dira le contraire.

    Je peux vous dire que nous sommes très sensibles à ce que vous dites. Pour notre part, nous réclamons de l'argent, généralement sans succès, mais nous en réclamons néanmoins.

    Il est très clair que si en plus, nous avions l'appui d'organisations respectées et bien structurées, cela pourrait faire changer un peu les choses .

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci, madame.

    Allez-y, Gus.

+-

    R. P. Gus Pendleton: J'en déduis que vous en faites une question morale. C'est exactement cela. Je ne suis pas un bureaucrate, ni un politicien. Vous savez ce que je fais. C'est visible sur ma manche et à mon col.

    J'étais en vacances. Quand je suis rentré, j'ai eu un appel de Jeremy et j'étais très heureux de l'invitation. Merci.

    Mais pendant notre absence, nous étions aux États-Unis. J'ai entendu le discours de George Bush sur l'état de l'Union. Il a dit une chose très intéressante au sujet de l'argent qu'il allait consacrer à la lutte contre le sida en Afrique. Il a dit que cela faisait partie du «programme conservateur compatissant» proposé dans le discours sur l'état de l'Union de l'année dernière et de l'année précédente, mais que cela n'avait jamais été inscrit dans le budget.

    Donc, il arrive que nous prenions des engagements, mais que ces engagements ne se traduisent pas en dollars.

    Le problème, c'est que l'Église vit au-dessus de ses moyens. Nous avons des problèmes financiers. Je comprends que le gouvernement connaît lui aussi des difficultés, mais il vit avec un surplus, et pas nous. La réalité, c'est que nous vivons ces problèmes dans nos familles, dans nos églises, dans nos institutions communautaires, dans nos conseils scolaires et dans nos gouvernements, et que nous prenons des décisions qui coûtent de l'argent. Alors, quand un gouvernement recule par rapport à ce qu'il dit vouloir faire, et qu'il se contente de ce qu'il est prêt à payer, il y a une sorte de séparation.

    Cette séparation, il me semble, est surtout une séparation psychologique en parallèle direct avec un autre genre de séparation qui est en fait la plus importante. C'est le fait qu'il s'agit d'une question morale. Il s'agit d'enfants à qui on a appris à devenir des soldats, d'enfants qui ont fui une famille dont la maison a été incendiée. Et il s'agit de médecins, de chauffeurs de taxi, d'ingénieurs et de secrétaires, de gens qui ont dû se sauver pour rester en vie. Et le Canada, surtout dans le sillage du 11 septembre, est devenu simplement moins accueillant.

    N'oubliez pas que je travaille presque uniquement avec les gens qui viennent nous voir, et non avec ceux qui vivent dans les camps de réfugiés. La vérité, c'est qu'ils ont peur. Ils ont l'impression qu'on leur donne constamment des réponses évasives et que le Canada n'est pas prêt à les considérer comme des individus uniques, marqués à mort, avec certaines compétences et certaines capacités, mais aussi toutes sortes de craintes. Et il faudra que le gouvernement accorde l'argent nécessaire aux programmes pour que nous puissions former un tout. Et je pense que c'est vraiment une question morale.

    Donc, je vous remercie beaucoup d'avoir soulevé la question de cette façon.

¹  +-(1505)  

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Wendy.

+-

    Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Merci beaucoup.

    J'aimerais poursuivre dans la même veine. Madeleine Dalphond-Guiral et moi sommes toutes les deux membres du sous-comité des personnes handicapées, à Ottawa, et nous faisons beaucoup de bruit depuis un an au sujet du crédit d'impôt pour personnes handicapées parce qu'en réalité, le gouvernement fédéral a très bien réussi à cibler les personnes handicapées et à leur rendre la vie beaucoup plus difficile. Nous avons réussi à obtenir une décision morale à la Chambre des communes : nous avons obtenu, par décision unanime de tous les députés de la Chambre, que le ministère des Finances adoucisse ou du moins atténue certaines des modifications apportées au sujet du crédit d'impôt pour personnes handicapées.

    Si je mentionne cela, c'est parce que nous nous occupons ici d'une autre population extrêmement vulnérable. Ce sont des gens qui arrivent... Claudette, c'est comme votre histoire sur cette Somalienne qui est arrivée ici avec son enfant après la mort de son mari et qui a dû vivre son deuil tout en commençant une nouvelle vie sous le seuil de la pauvreté dans un pays où elle ne comprend rien. C'est absolument incroyable.

    Je pense qu'il n'y a personne, autour de la table, qui avait vraiment envisagé ces chiffres comme vous nous les avez présentés et qui comprenait ce que cela signifie d'arriver ici comme réfugié parrainé et de bénéficier pendant un an du prétendu soutien du gouvernement; personne ne savait vraiment ce que cela représentait. Comme vous le savez, nous avons des surplus au gouvernement, dans le programme d'assurance-emploi, d'énormes surplus accumulés grâce aux gens qui ont cotisé au régime.

    En outre, comme vous l'avez souligné très clairement, nous avons de l'argent—plus d'un million de dollars en intérêts—qui provient des prêts de voyage des gens qui arrivent au pays. Donc, nous faisons de l'argent sur le dos des immigrants et nous les laissons ensuite couler à pic, et vivre dans une pauvreté et une misère inconcevables.

    J'aimerais suggérer que notre comité présente une recommandation très ferme au ministre des Finances. Je voudrais recommander—je peux le faire en tant que néo-démocrate; je peux essayer de faire des pressions sur les membres du comité pour que nous fassions cette recommandation—que les programmes d'établissement soient mieux financés, que les sommes prévues pour offrir une assistance de base soient augmentées de manière à ce que les gens puissent vivre dans une certaine stabilité et payer pour leur logement à un niveau compatible avec ce qui est disponible dans leur communauté, que ce soit à Halifax ou à Vancouver.

    Je suis également très préoccupée par la situation des personnes handicapées. Vous avez mentionné les gens qui arrivent ici avec leur famille et qui ont des besoins particuliers. Je voudrais que quelqu'un se penche sur ces besoins particuliers. Combien voyez-vous de gens, adultes et enfants, qui ont des besoins particuliers—de familles qui ont du mal à répondre à leurs besoins essentiels en matière de santé et qui ont des besoins particuliers, par exemple des invalidités mentales ou physiques—et à quels genres de difficultés doivent-ils faire face? Pouvez-vous répondre?

    Encore une fois, je vous remercie beaucoup de votre présentation; c'était très fort. Il est absolument essentiel que le comité entende ce que vous dites, que cela figure au compte rendu et que ce soit porté à l'attention du gouvernement.

    Merci.

¹  +-(1510)  

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci, Wendy.

    Anna.

+-

    Mme Anna Gregus (gestionnaire, Service d'établissement, Metropolitan Immigrant Settlement Association): Puis-je répondre très brièvement à votre commentaire sur les besoins particuliers?

    Nous avons des gens qui arrivent avec des invalidités physiques parce qu'ils ont été blessés par des mines terrestres. Nous en avons aussi qui ont des problèmes de santé mentale parce qu'ils souffrent du syndrome de stress post-traumatique.

    Je dois ajouter que nous accueillons également un certain nombre de parents seuls qui ont laissé leur conjoint derrière eux. Ce sont des cas très difficiles parce qu'ils n'ont qu'un délai d'un an pour faire venir les membres de leur famille, mais ces gens-là arrivent avec de jeunes enfants dont ils doivent s'occuper. Ils doivent surmonter les barrières linguistiques, les difficultés financières et, en même temps, ils essaient de communiquer avec les services d'immigration, qui élèvent essentiellement un mur de briques devant eux. Donc, les seuls moyens de communication dont ils disposent, ce sont les boîtes vocales et les numéros 1-800.

    Je voulais vous dire deux mots là-dessus. Les gens ont énormément de mal à avoir accès à l'information que le ministère de l'Immigration est le seul à pouvoir leur fournir. C'est extrêmement frustrant et difficile pour eux.

    Donc, en plus de la question des finances, j'apprécierais vraiment que vous mentionniez quelque part dans votre rapport que les canaux de communication entre les clients, les réfugiés, les parrains des réfugiés et les parrains pour le gouvernement canadien devraient être ouverts.

+-

    Mme Wendy Lill: Au sujet de ce délai d'un an, pendant lequel le gouvernement soutient les gens dans une certaine mesure, est-ce que cela pose un problème? Est-ce que vous aimeriez que ce délai soit prolongé? Voudriez-vous que le gouvernement demeure responsable un peu plus longtemps?

    Il y a aussi la question de la taxe d'entrée. Elle est encore appliquée. Est-ce qu'elle serait appliquée par exemple à la Somalienne dont nous avons parlé tout à l'heure? Est-ce qu'elle devrait vraiment payer cette somme dans quelques mois? Est-ce qu'elle devrait se mettre à rembourser ces 950 $, ou quoi que ce soit d'autre?

+-

    Mme Mira Musanovic: Les réfugiés qui sont parrainés par le gouvernement sont exemptés de la taxe d'entrée depuis 2002, je crois. Mais ils doivent quand même rembourser leur prêt de transport.

    Dans le cas de cette femme, par exemple, le voyage depuis le Kenya lui a probablement coûté au moins 2 000 $. Je ne suis pas sûre qu'il faille y ajouter le transport de son fils. Donc, cela pourrait probablement faire 3 000 $ ou 4 000 $ simplement pour le transport et les frais médicaux à l'étranger.

    Au sujet du délai d'un an, je pense que ce n'est pas uniquement une question de temps. Cette période n'est pas nécessairement trop courte. Je travaille depuis quelque temps avec beaucoup de gens qui sont venus au Canada. Dans les bureaux des visas, à l'étranger, on leur dit: «Rendez-vous au Canada, et le ministère de l'Immigration va vous aider à faire venir votre famille. Vous serez tous réunis d'ici deux ou trois ans.» C'est une histoire que j'entends tous les jours au travail. Eh bien, ce n'est pas vrai. Il arrive que ces gens-là ne reçoivent aucune information à l'étranger au sujet de ce que signifie vraiment le délai d'un an. Ils ne disent même pas toujours à l'agent des visas qu'ils ont un mari ou une femme, ou même quelques enfants qui restent au pays.

    Je ne sais pas si c'est le ministère de l'Immigration qui leur donne ce conseil-là—j'espère que non—, mais il y a des gens de leur communauté qui leur conseillent de ne même pas mentionner qu'ils sont mariés parce que c'est beaucoup plus facile d'entrer au Canada en disant qu'ils sont célibataires et de faire venir leur famille ensuite, une fois rendus au Canada. Donc, ils n'ont plus la possibilité de faire venir leur mari, leur femme ou leurs enfants dans un délai d'un an parce que, pour bénéficier de ce délai, ils doivent informer les agents des visas à l'étranger, avant d'arriver au Canada, de l'existence de ces membres de leur famille.

    En outre, c'est limité aux conjoints, aux conjoints de fait et aux enfants. Les notions de conjoint et de conjoint de fait ne veulent d'ailleurs pas toujours dire la même chose que dans les cultures occidentales. Beaucoup de ces clients sont mariés, d'après certaines de leurs traditions, mais ils ne peuvent pas le prouver. Ils doivent parfois se prêter à des entrevues extrêmement difficiles et à révéler des détails intimes de leur vie pour essayer de prouver aux agents d'immigration qu'ils sont véritablement mariés.

    C'est donc un des principaux problèmes auxquels je dois faire face actuellement. Ces gens-là n'ont aucune information et ils ratent cette chance.

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Diane.

+-

    Mme Diane Ablonczy: Je trouve moi aussi déplorable que le Ministère soit aussi inaccessible. Nous, les députés, nous savons à quel point il est amusant d'essayer d'obtenir un passeport pour un de nos électeurs. Il y a un numéro 1-800, mais quand vous appelez là, vous vous faites dire de laisser votre nom et votre numéro de téléphone et qu'on va vous rappeler, sauf qu'on ne vous rappelle pas. Parfois, comme vous le dites, la situation est désespérée, et il n'y a personne à la maison. Donc, c'est vraiment un problème.

    Mais je voulais poursuivre la discussion—j'espère que personne ne l'a fait pendant mon absence—, monsieur le président, sur les services d'établissement pour les enfants.

    Cette situation a été portée à notre attention quand les conseils scolaires de la région de Vancouver ont écrit une lettre conjointe pour dire qu'ils accueillaient dans le système beaucoup d'enfants qui avaient non seulement besoin d'instruction—ce qui est le cas de tous les enfants—, mais aussi de formation en anglais, langue seconde. Et, surtout, il y a énormément de problèmes de socialisation. Les auteurs de la lettre soulignaient que certains de ces enfants, à cause des différences culturelles, ont énormément de mal à socialiser avec les autres enfants. Mais, en plus, comme Gus l'a fait remarquer, certains d'entre eux souffrent du syndrome de stress post-traumatique et ont besoin d'une intervention personnelle soutenue, sous forme de counselling ou autrement.

    Mais les conseils scolaires reçoivent de l'argent pour enseigner, et c'est tout. Ils n'ont pas les ressources nécessaires, ou alors ils n'ont pas d'argent pour obtenir les ressources qui leur permettraient d'offrir ces autres services. La province les avertit de ne pas se tourner vers elle. Et le gouvernement fédéral aussi. Tout le monde s'en lave les mains.

    Je suppose que vous avez constaté vous aussi ce genre de difficultés chez les enfants, pas seulement à l'école, mais dans un contexte social plus vaste. Je pense que ce serait utile pour le comité si vous pouviez nous dire expressément s'il faudrait d'après vous envisager des services supplémentaires, ou spéciaux, pour ces enfants qui viennent d'arriver au Canada.

¹  +-(1515)  

+-

    Mme Anna Gregus: Je pense — et pas seulement à ce sujet-là — qu'il y a beaucoup de choses qui se disent à différents niveaux; par exemple, les gouvernements fédéral et provinciaux discutent entre eux, tout le monde parle aux fournisseurs de services — parce que nous fournissons certains services, en tant qu'organisme d'aide à l'établissement des enfants. Je sais que les conseils scolaires financent eux aussi certains services pour aider les enfants. Ils ont des travailleurs sociaux dans les écoles. Mais, pour une raison que j'ignore, nous ne savons pas qui fait quoi, et nous devrions peut-être avoir une occasion de nous asseoir ensemble, de comparer nos renseignements et de partager nos ressources. Il ne suffit pas de demander plus d'argent; il faut aussi utiliser plus efficacement l'argent que nous recevons déjà.

    Donc, il y a certainement un besoin de services spéciaux pour les enfants, mais cela ne veut pas nécessairement dire qu'il faut plus d'argent de ce côté-là. Nous devrions peut-être examiner tout simplement ce qui existe déjà et voir comment nous pourrions nous en servir.

+-

    Mme Diane Ablonczy: Une meilleure coordination.

+-

    Mme Anna Gregus : Exactement.

+-

    Mme Claudette Legault: Il y aura demain une présentation ici à Halifax, au Newcomers' Centre du YMCA, qui a fait de l'excellent travail dans les écoles dans le cadre des programmes de soutien scolaires, et je pense qu'on va y soulever cette question d'un soutien dirigé expressément vers ce groupe cible.

+-

    Mme Diane Ablonczy: Parfait, nous allons surveiller cela.

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci beaucoup.

    Mesdames et messieurs, je...

+-

    Mme Diane Ablonczy: Excusez-moi, monsieur le président, je pense que le témoin a encore un commentaire à faire.

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Allez-y, Mira.

+-

    Mme Mira Musanovic: Mon commentaire porte plutôt sur la nécessité de mieux former les fournisseurs de soins de santé, et en particulier les médecins de famille, qui sont les premiers à rencontrer ces familles, Ils devraient peut-être recevoir une formation spécifique sur le stress post-traumatique, sur la façon de le reconnaître et sur certaines des difficultés que vivent les réfugiés dans les camps de réfugiés, parce que ce sont eux qui rencontrent nos clients en premier. Ils voient souvent les enfants et leurs parents. Donc, si leur évaluation n'est pas bien faite, ces gens-là échappent probablement à notre attention et ne reçoivent pas les soins dont ils ont besoin.

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci beaucoup, Mira.

    Je pense que vous avez tous—y compris Paul, qui a dû partir tôt—démontré très clairement la nécessité d'accroître le financement et d'examiner l'opportunité d'en faire davantage dans le domaine des services de réétablissement; cela ne fait aucun doute. Nous pouvons aussi examiner les autres facteurs sociaux qui entrent dans ces catégories.

    Plus je vieillis, plus je me dis que nous vivons dans un monde moins parfait que nous le voudrions. Il se passe bien des choses dont on pourrait dire qu'elles «échappent à notre attention»; appelez-cela comme vous voudrez.

    Une des difficultés que je rencontre comme élu depuis un bon bout de temps—30 ans!—, au niveau tant municipal que fédéral, c'est que les besoins sont de plus en plus grands et qu'il y a de plus en plus de demandes de financement accru, alors que la société en général ne veut pas que nous augmentions les fonds alloués à ce genre de choses. Quand on regarde la santé et les problèmes dans ce domaine-là, quand on regarde l'immigration et les problèmes qui s'y rattachent, ou encore les exigences relatives à la sécurité de notre pays et les difficultés que cela engendre, on se rend compte que nous sommes constamment soumis à des pressions pour répondre à toutes sortes de besoins, et il est bien possible que nous n'ayons pas les moyens de le faire.

    J'aimerais bien pouvoir vous dire que nous pouvons fournir cet argent. Je suis un ancien enseignant et j'ai passé une bonne partie de mes 25 années d'enseignement à m'occuper de programmes spéciaux. Je comprends donc ce que vous demandez, et je comprends qu'il faut essayer d'établir de meilleurs rapports sociaux entre nos enfants et les néo-Canadiens, et aider ces derniers à se faire un chemin dans notre pays. C'est très important. Nous ne répondons pas aux besoins de tout le monde aussi bien que nous le devrions. En même temps, les audiences et les présentations comme celles d'aujourd'hui nous ouvrent des portes qui nous permettent de voir plus loin, dans l'espoir que nous pourrons relever certains de ces défis d'une manière ou d'une autre.

    Je vous remercie beaucoup d'avoir soulevé toutes ces questions. Je suis d'avis que les gens du gouvernement, même s'ils ne paraissent peut-être pas toujours aussi réceptifs que nous le voudrions, ont des ressources limitées pour y répondre. Même si nous avons des surplus, il ne faut pas oublier non plus que nous avons une dette de plusieurs milliards de dollars. Il est essentiel d'établir un équilibre, de fixer des priorités—et tout le reste—pour répondre à ces questions.

    Plus vous faites entendre votre point de vue avec force—comme vous l'avez fait aujourd'hui—, plus nous pourrons espérer régler au moins certains des problèmes. Je trouve déplorable que, comme vous l'avez dit, Claudette, il y ait un niveau de pauvreté de 60 p. 100 parmi les familles qui arrivent. Comment peuvent-elles survivre? Gus, quand vous dites que vous aimeriez bien avoir autant de soutien, vous faites manifestement un travail extraordinaire sur le terrain.

    Il est possible que nous n'ayons pas les ressources nécessaires; nous devrions les avoir dans un monde idéal. Je ne sais pas trop comment nous allons y arriver, mais il y a beaucoup de membres du comité qui vont essayer de trouver des ressources et de rendre cet exercice aussi juste que possible. C'est vraiment un des buts que nous visons, et c'est la raison pour laquelle nous sommes ici pour vous écouter.

    J'imagine que notre prochain témoin n'a pas pu venir, ou alors qu'elle ne sera pas ici avant 16 heures. Nous avons donc 35 minutes devant nous. Si vous voulez continuer à discuter à bâtons rompus avec les membres du comité, vous êtes les bienvenus.

    Chers collègues, je vais suspendre les travaux du comité jusqu'à 16 heures.

    Merci beaucoup.

¹  +-(1523)  


º  +-(1601)  

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Sylvia, comment allez-vous aujourd'hui?

+-

    Mme Sylvia Parris (présidente, Multicultural Association of Nova Scotia): Je vais bien, merci.

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci beaucoup d'être venue. Je pense que tous les membres du comité attendent votre présentation avec impatience. Nous sommes très heureux que vous ayez pu venir nous aider à mieux comprendre vos problèmes et vos difficultés. Nous sommes tout à fait conscients du fait que vous n'avez vraiment pas beaucoup de temps et nous vous sommes reconnaissants d'être venue nous expliquer la situation que vous vivez ici à Halifax.

    Je vais donc vous demander de limiter si possible votre présentation à une dizaine de minutes, après quoi chacun de mes collègues pourra vous poser ses questions.

    Vous avez la parole.

+-

    Mme Sylvia Parris: Merci beaucoup.

    J'ai préparé un mémoire écrit, et nous avons essayé d'en résumer les points les plus importants dans le bref exposé que je vais vous présenter. J'espère que cela pourra servir de point de départ pour vos questions.

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Vous préférerez peut-être ne pas nous lire votre mémoire écrit. Si vous nous en exposez les principaux points, nous pourrons ensuite approfondir le sujet en vous posant des questions sur les éléments les plus importants.

+-

    Mme Sylvia Parris: Je vais essayer. Je devrais peut-être saisir l'occasion de reconnaître le trac que je ressens. Je ne voudrais vraiment rien oublier, alors j'essaierai de trouver un compromis et de lire aussi rapidement que possible.

    En tant que Néo-Écossaise d'origine africaine, dont le grand-père est arrivé ici à la fin des années 1800 et dont le père est membre du 2e Bataillon de construction, un bataillon composé de noirs, je viens ici avec un héritage familial qui a ses racines en Nouvelle-Écosse. Même si la venue de ma famille ici était due à l'immigration forcée, c'étaient, de fait, des immigrants.

    Je suis heureuse de représenter ici la Multicultural Association of Nova Scotia, ou MANS. La MANS est une organisation provinciale reconnue comme un chef de file du multiculturalisme dans la province. Elle s'intéresse à l'élaboration des politiques, à la défense des droits et à l'éducation. Elle cherche à influencer et à susciter l'élaboration de toute loi pertinente pour qu'elle reflète le multiculturalisme. Nous fonctionnons avec un soutien administratif limité et l'énergie de notre conseil d'administration.

    La MANS fera un bref commentaire au sujet du projet de loi C-18, la Loi concernant la citoyenneté canadienne, et des commentaires plus détaillés sur l'établissement et l'intégration.

    Je tiens à féliciter le gouvernement de tenir ces consultations, et je voudrais vous sensibiliser à la nécessité, pour le gouvernement, de prendre vraiment conscience des obstacles auxquels se butent les organisations sans but lucratif qui voudraient y apporter leur contribution.

    L'initiative des organismes bénévoles vise à exprimer leur reconnaissance de la valeur de l'apport des bénévoles et des soutiens requis pour faire de cet apport une réalité. L'entente conclue entre le secteur bénévole et le gouvernement du Canada stipule que:

Le gouvernement du Canada doit rendre compte de ses actes à tous les Canadiens et est tenu de cerner les sujets de préoccupation nationale et de mobiliser les ressources pour y répondre, d'élaborer des politiques et de prendre des décisions dans l'intérêt de tous les Canadiens.

    Le secteur bénévole est appelé à:

être le véhicule d'expression des opinions et points de vue de tous les éléments du secteur bénévole afin qu'il soit représenté auprès du gouvernement du Canada et entendu par lui, de s'assurer la participation du secteur dans toute sa profondeur et sa diversité.

    Des facteurs comme le manque de ressources pour effectuer des recherches approfondies, les échéanciers serrés et l'accès limité à l'information influencent la qualité et l'utilité de la participation. Cependant, je suis heureuse que la MANS ait pu se mobiliser et vous apporter des éléments de réflexion.

    La MANS est bien placée pour faire des commentaires sur les questions touchant les immigrants, puisqu'elle sert de «lien» entre les immigrants nouvellement arrivés et ceux qui sont ici depuis plusieurs générations. La singularité des communautés générationnelles et ethniques et leurs similarités formeront la toile de fond du contexte de ces discussions.

    Si nous parlons d'abord du projet de loi C-18, un président de la Chambre des communes a déclaré que «la citoyenneté multiculturelle du Canada, notre héritage multiculturel, est unique et devenue une caractéristique de notre pays aux yeux du monde». En fait, j'ai participé dernièrement à une conférence internationale tenue à Edmonton, où le Canada a été désigné comme un modèle mondial de la réalité d'un État multiculturel.

    Le projet de loi semble avoir tendance à catégoriser qui est digne de rester Canadien. Dans la même mesure où l'immigrant canadien—c'est-à-dire tout le monde, à l'exception des Autochtones, et je parle de ceux qui sont ici depuis des générations—est Canadien quoi qu'il fasse, ceux qui deviennent canadiens devraient pouvoir être sûrs de le rester. Une personne accusée de l'un des délits dont fait état le projet de loi devrait être traitée de la même manière que nous traitons les «Canadiens» d'avant le projet de loi C-18.

    Les articles 16 et 17, qui traitent de révocation de la citoyenneté, devraient être réexaminés et prévoir l'exigence du respect des règles juridiques et de forme en matière de preuves. De même, l'inaccessibilité des processus d'appel devrait être repensée. Bien qu'il faille réagir fermement à la fausse représentation, des pratiques doivent être en place pour faciliter l'obtention des documents requis. De même, des mécanismes doivent être prévus pour faire ressortir des choix en matière de cueillette des données et de l'information.

    Il sera intéressant de clairement articuler les «valeurs» auxquelles il est fait allusion à l'article 28 et de trouver des moyens de mesurer et de pondérer ces valeurs. Il est certain qu'il faudrait que les commissaires à la citoyenneté puissent le faire.

º  +-(1605)  

    La nouvelle approche en matière d'exigences de résidence est plus souple et la MANS peut l'appuyer.

    Au sujet de l'établissement et de l'intégration, l'immigration a toujours été une caractéristique distinctive du Canada, qui rassemble des familles qui ont été séparées, offre une havre de sûreté aux réfugiés et attire les travailleurs spécialisés. Le Canada doit reconnaître de façon très concrète les besoins liés à l'orientation et à l'intégration des immigrants de manière holistique. À ce propos, j'insiste sur la famille. Nous ne devons pas oublier que les familles sont composées d'adultes et d'enfants qui ont tous besoin d'appui et de services qui contribueront à leur intégration au Canada.

    Tandis que nous nous préparions en vue de cette présentation, nous avons constaté combien il existe peu d'informations sur la manière dont les jeunes immigrants récents d'âge scolaire se débrouillaient dans leur école publique et sur le genre de programmes et de mesures de soutien qui leur étaient offerts. Donc, il serait bon d'avoir des opportunités pour réaliser ce genre de recherches. Quoi qu'il en soit, les commentaires reçus de nombreux membres de la collectivité multiculturelle indiquent que tout ne va pas au mieux en matière de programmes et de mesures de soutien conçus pour répondre aux besoins des jeunes immigrants. Une analyse des obstacles doit être entreprise pour évaluer les répercussions des politiques et des critères d'affectation des fonds pour l'intégration.

    Pour bon nombre des gens qui viennent s'installer au Canada, la vie est une lutte constante parsemée d'obstacles liés à la langue, à l'accès à l'emploi, à l'orientation culturelle, à la reconnaissance des compétences, au racisme et à la discrimination, à la réunification des familles, au statut d'immigrant et à la création de réseaux de soutien. Ce commentaire a été fait dans le cadre d'une conférence nationale sur l'établissement tenue en 2001. Cette recherche fait ressortir le besoin de mesures proactives et d'élargir la prestation des programmes et d'accroître leur accessibilité.

    Actuellement, dans le cadre de la lettre d'entente entre la Nouvelle-Écosse et le Canada, l'occasion s'offre de collaborer à la prestation de programmes et de services de soutien. Pour que les immigrants et leurs familles puissent vraiment s'établir et s'intégrer, ils faut qu'elles aient réellement accès aux services d'aide à l'apprentissage d'une langue seconde et à des mesures d'appui communautaire culturel, et il faut des mécanisme de lutte contre la discrimination systémique et flagrante et un financement adéquat de la prestation et de la mise en oeuvre des services.

    Les recherches confirment que les programmes offrant des cours d'anglais langue seconde sont un moyen efficace d'intégrer les nouveaux venus dans la société canadienne. Ceci, encore une fois, vient d'une recherche effectuée sur la jeunesse immigrante en 2000.

    La MANS est souvent appelée à fournir les coordonnées de personnes-ressources et des renseignements spécifiques sur les groupes ethnoculturels. Elle a trouvé des moyens créatifs de répondre aux besoins d'éducation pour lutter contre la discrimination et le racisme. Bien entendu, qui dit intégration dit sentiment de sûreté, de sécurité et de respect. Les programmes d'établissement et d'intégration doivent reconnaître cette réalité et fournir les ressources appropriées.

    Les jeunes sont souvent désignés comme une population à risque. Les jeunes immigrants sont doublement à risque. Il est ressorti des entrevues de Park avec des jeunes que selon eux, il faudrait des programmes dans les écoles. Park fait remarquer que «les participants trouvaient que les efforts pour promouvoir la tolérance et la compréhension devraient être axés sur les écoles et cibler tant les professeurs que les élèves».

    Plus de la moitié des enfants et des jeunes adultes récemment immigrés sont incapables de parler l'une ou l'autre des langues officielles du Canada. L'auteur de cette étude ajoute que les jeunes de moins de 15 ans étaient les moins susceptibles de connaître l'une ou l'autre des langues officielles. Ils convenaient que les cours de langue seconde les aidaient à apprendre la langue et à s'intégrer plus rapidement dans la société en général.

    Il nous faut des immigrants qui ont une profession qui contribueront à la croissance future de l'économie, particulièrement en région rurale, en Nouvelle-Écosse. Ce commentaire vient du ministre du Développement économique et du Tourisme, ici, en Nouvelle-Écosse, l'honorable Cecil Clarke. Si nous voulons attirer et garder ces personnes, nous devons offrir des services de qualité comme l'aide à l'apprentissage de la langue seconde pour leurs enfants et des programmes qui les incitent à pleinement s'intégrer dans la collectivité.

    Le Canada comprend que l'immigration ait un rôle à jouer dans le règlement de la pénurie de travailleurs spécialisés. Le gouvernement est déterminé à faciliter la venue au Canada de travailleurs étrangers hautement spécialisés avec leurs conjoints et conjointes. Ceci ne va pas sans l'engagement de fournir des services à tous ceux qui ont été invités.

    Selon une recherche effectuée à la suite de la campagne «Le Canada : un pays pour nous tous», les Canadiens trouvaient que le gouvernement devrait parler haut contre le racisme et promouvoir la diversité. Il est certain que cela susciterait un sentiment d'être compris et d'être bienvenus dans nos communautés multiculturelles.

º  +-(1610)  

    La Nouvelle-Écosse a de nombreuses qualités uniques à offrir aux immigrants. Pourtant, sa capacité de les accueillir et de les garder est limitée par les ressources, les institutions et les structures en place pour répondre à leurs besoins. Les gouvernements fédéral et provincial doivent travailler ensemble pour créer et maintenir les mesures de soutien nécessaires qui sont recensées. L'intégration devient une réalité lorsque la communauté géographique d'accueil et les nouveaux arrivants s'adaptent de manière à tous deux croître et évoluer.

    Je vous remercie.

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci beaucoup, Sylvia. Nous apprécions votre présentation.

    Diane, êtes-vous prête?

+-

    Mme Diane Ablonczy: Oui, merci, monsieur le président, et merci, Sylvia, d'être venue nous présenter cette information.

    Vous avez mis le doigt sur deux ou trois de mes thèmes préférés, alors j'en suis déjà ravie, particulièrement en ce qui concerne l'article 21, qui traite du refus d'une demande de citoyenneté pour grave mépris à l'égard des principes et des valeurs sur lesquelles se fondent une société libre et démocratique.

    Je partage vos préoccupations à l'égard du fait que ces valeurs ne sont pas définies et qu'aucun processus n'est prévu pour les définir. Je pense que la préoccupation que vous avez soulevée est vraiment pertinente, particulièrement pour les milliers de néo-canadiens qui demandent chaque année la citoyenneté—non pas les nouveaux Canadiens, mais les nouveaux venus au Canada. Il doit être difficile pour eux de cerner quelles valeurs ils sont censés adopter pour s'assurer d'être admissibles à la citoyenneté. Bien que les représentants officiels aient dit, eh bien, ce n'est qu'un mépris grave pour ces valeurs qui pourrait entraîner le rejet d'une demande de citoyenneté, cela soulève toujours la question de savoir quelles seraient ces valeurs. Je pense qu'il est important que le comité réfléchisse à l'angoisse que ce genre de dispositions peut générer.

    J'aimerais beaucoup que vous parliez du besoin de programmes et de mesures de soutien conçus pour répondre aux besoins des jeunes immigrants. Nous avons parlé plus tôt du fait que les jeunes immigrants ont de la difficulté, non seulement avec la langue, mais à s'intégrer socialement, à savoir comment se faire accepter au sein de leur nouvelle culture. Je parlais à l'un des autres témoins sur les terribles effets, sur les jeunes, du sentiment de ne pas être acceptés et de certaines stratégies qu'ils peuvent adopter pour se faire remarquer ou accepter, notamment en se joignant à des bandes et d'autres choses difficiles du genre.

    Je me demande si vous pourriez parler un peu plus longuement de cela. Quels programmes et mesures de soutien aimeriez-vous qu'il y ait—dans un monde idéal, avec des tonnes d'argent—pour les jeunes immigrants?

º  +-(1615)  

+-

    Mme Sylvia Parris: Je pense qu'il est très important de ne pas négliger l'aspect de la langue. Bien entendu, il y a la question du territoire de compétence, à ce que nous comprenons, de déterminer qui doit s'occuper de l'éducation. Mais je pense que c'est très important. Si on n'a pas la possibilité d'acquérir une bonne maîtrise de la langue, alors, on a des problèmes.

    L'autre chose qu'envisage l'Association multiculturelle, c'est de s'adresser directement aux jeunes et de parler avec eux de ce dont ils ont besoin et où cela devrait se faire. Je pense que les programmes devraient être conçus en fonction de ce que les jeunes nous disent ce qui se passe dans le système. Par exemple, nous envisageons une table ronde pour examiner la question du racisme dans les écoles et ses répercussions, parce que souvent, particulièrement si on fait partie d'une minorité visible et qu'on est nouvellement arrivé dans la province, on est une cible plus visible, susceptible d'être prise à partie et traitée de façon non appropriée.

    Le dialogue que nous avons eu partout, avec les collectivités, visait les moyens de régler ce dilemne. Si nous voulons instituer des programmes axés sur les jeunes de la catégorie immigrante, la réponse que nous avons c'est, d'accord, cette éducation relève de la compétence provinciale, alors nous ne pouvons rien y faire. Si nous allons à la province lui poser la question, nous nous faisons dire que l'immigration est un dossier fédéral, donc qu'elle n'a rien à y voir. Je pense qu'il nous fait vraiment encourager les gouvernements à avoir ce dialogue. Nous pouvons demander à des groupes de cerner leurs besoins, mais comment pouvons-nous établir un partenariat avec eux, avec des groupes sans but lucratif ou autres, quand on dirait presque que c'est une «patate chaude» que se renvoient constamment les administrations de l'une à l'autre quand nous essayons d'en parler.

    Donc, nous avons ce groupe de gens, les jeunes, qui occupent de genre d'espace dont personne ne semble vouloir se déclarer propriétaire parce qu'il traverse divers domaines de compétence—l'un l'éducation et l'autre l'immigration. Je pense que, pour régler le problème, il nous faut pouvoir nous asseoir ensemble—et je sais que nous avons un comité provincial-fédéral, alors le mécanisme il existe déjà—et, en convenant que notre but est de régler les problèmes que vivent les jeunes, nous demande comment y arriver, plutôt que d'en rejeter la responsabilité sur quelqu'un d'autre.

+-

    Mme Diane Ablonczy: Ce n'est pas grand chose, mais à la page 3, vous avez parlé des articles 16 et 17. Il est entendu que la révocation de la citoyenneté est quelque chose de très sérieux, et vous avez mentionné certaines des mesures de sécurité ou des freins et contrepoids que vous aimeriez voir intégrés à tout le processus menant à la révocation. Je suis particulièrement intéressée par votre suggestion selon laquelle il faut des alternatives à la collecte des données et de l'information. Je me demande si vous pouvez expliquer ce que vous avez à l'esprit.

+-

    Mme Sylvia Parris: Il arrive souvent maintenant, lorsqu'on regarde ce genre de chose, que nous ayons une façon bien établie de recueillir l'information. On demande à une personne si elle a ceci, ceci et cela, même si nous reconnaissons la difficulté, par exemple, à cause d'une situation politique, de recueillir cette information. Je pense que si nous le reconnaissons, en tant qu'institution, nous devrions pouvoir suggérer des moyens créatifs et différents d'obtenir cette information lorsque nous comprenons, d'après les recherches effectuées, que ces renseignements seront difficiles à obtenir. Plutôt que de dire qu'il nous faut le certificat de naissance, ou quoi que ce soit d'autre, n'y aurait-il pas d'autres moyens que nous pourrions envisager pour obtenir la preuve que nous donnera le certificat de naissance, sans nécessairement en être le document?

    Je ne suis pas sûre que cet exemple vous suffise, mais c'est ce que je voulais dire en parlant de moyens différents de recueillir l'information.

º  +-(1620)  

+-

    Mme Diane Ablonczy: C'est plein de bon sens. C'est un peu comme de l'aide à obtenir les documents appropriés, mais aussi une certaine flexibilité dans la norme approuvée et la preuve qui étayerait une affirmation particulière.

+-

    Mme Sylvia Parris: Oui, parce que si la question est «Qu'est-ce que je veux savoir avec ce document?» plutôt que «Je veux ce document», il pourrait y avoir d'autres solutions.

+-

    Mme Diane Ablonczy: Nous avons entendu d'autres témoins, à ce sujet, mais j'aimerais connaître votre avis, Sylvia. Vous dites qu'il faut que les que les nouveaux venus s'intègrent et deviennent des membres pleinement fonctionnels de la société aussi rapidement que possible. D'après vous, quels sont les plus grands obstacles à cela?

+-

    Mme Sylvia Paris: Je pense que vous ne serez pas étonnée de m'entendre dire encore une fois que c'est la langue, et je ne parle pas que de la langue de base, sociale, de survie. C'est un facteur. Mais il y a aussi une espèce de facteur philosophique. L'une des choses dont nous avons parlé, dans nos débats, c'est de la manière de démontrer réellement que nous sommes ce que nous disons être. Nous disons être une société multiculturelle, que nous aurons une journée multiculturelle canadienne, ou quelque chose du genre. Nous le disons avec beaucoup d'orgueil, mais comment pouvons-nous l'illustrer quand, chaque fois qu'il arrive quelque chose qui semble aller à l'encontre de cette norme préconçue que nous avons, nous abordons la situation comme étant autre, différente?

    S'il nous tient réellement à coeur d'être une société multiculturelle et diversifiée, alors, chaque politique et tout ce que nous faisons doit l'illustrer. Il faut qu'il y soit évident qu'on a pensé à l'adaptabilité, dans le sens large du terme. Alors, pour ce qui est de la manière dont nous agissons, quoi que nous fassions, le défi qui se pose aux administrations fédérales et provinciales, c'est que toutes les politiques qui guident nos actes, toutes nos procédures, doivent réellement illustrer que nous sommes un pays où règne la diversité culturelle.

    C'est un peu le tableau d'ensemble. Nous ne doutons pas qu'il faille des ressources en place pour appuyer les gens qui ont une culture différente ou des défis linguistiques à relever. Nous disons que cela fait partie d'un pays qui se veut multiculturel. Alors il faut un genre d'assise philosophique à ce que nous faisons, et alors, les politiques et notre mode de gestion des politiques suivent, parce que notre orientation est définie. Il ne s'agit pas d'ajouter ou de décider comment composer avec l'autre.

    Le cadre que nous créons change. Ce n'est pas demain que ça arrivera, mais c'est une orientation que nous devons prendre. Cela influencera la manière dont nous planifions les choses et attribuons les ressources aux politiques et programmes que nous créons.

    L'autre chose revient à ce problème de territoire de compétence dont j'entends souvent parler. Je pense que c'est une conversation qui est profondément gravée dans mon esprit. Il nous faut songer à la collaboration d'une manière qui réponde aux enjeux cernés, plutôt que d'aller aussi loin que nous pensons le pouvoir selon notre domaine de compétence. On revient encore à la modification du cadre dans lequel on voit les choses et on les règle.

    Lorsque nous faisons face à la discrimination systémique ou à n'importe quel problème systémique, c'est toujours un défi, pour nous, d'examiner la situation et de voir l'incidence qu'elle a sur les collectivités, aux plans de la culture, du sexe, ou de toute autre chose. Il nous faut toujours y songer lorsque nous rédigeons et planifions. Ainsi, nous ne serions pas ici à parler de ce qu'il nous faut injecter comme fonds, ou ajouter, pour régler la problématique; nous cernerions cette problématique qu'il faut régler à la base avec les politiques que nous créons, quelles qu'elles soient.

º  +-(1625)  

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci.

    Yvon.

+-

    M. Yvon Charbonneau: À la page 4 de vos observations, vous avez dit, au deuxième paragraphe :

... nous avons constaté combien il existe peu d'informations sur la manière dont les jeunes immigrants récents d'âge scolaire se débrouillaient dans leur école publique et sur le genre de programmes et de mesures de soutien qui leur étaient offerts.

    Quels rapports ou mécanismes avez-vous établis avec les commissions scolaires et les écoles en général, ou les associations d'enseignant en ce qui concerne ces réalités relatives à une meilleure intégration des nouveaux venus, des nouveaux immigrants?

+-

    Mme Sylvia Parris: Pour nous, en tant qu'organisation sans but lucratif, dans la manière dont nous sommes structurés, nous sommes composés de groupes ethno-culturels. Nous pouvons obtenir une participation au niveau organisationnel. Lorsqu'une commission scolaire nous fait part, en tant qu'organisation, de certaines préoccupations, nous essayons d'obtenir des subventions pour réaliser certaines initiatives.

    Par exemple, l'Association multiculturelle dirige une initiative appelée Youth Against Racism, la jeunesse contre le racisme. Il s'agit d'une préoccupation qu'ont exprimé nos membres dont les enfants, qui fréquentent les écoles, vivaient des problèmes de discrimination et de racisme. Ceci nous a informés. Comme je l'ai dit plus tôt, nous allons tenir une table ronde au sujet du racisme dans les écoles et faire une analyse du programme. Cela fait deux ou trois ans qu'il est en oeuvre. Est-ce qu'il a le moindre effet?

    Je suis sûre que vous l'avez entendu dire par d'autres groupes, les organismes sans but lucratif trouvent des moyens créatifs de s'adapter pour pouvoir recenser les besoins d'après qui fait partie de notre organisme et avec qui nous avons des rapports dans la collectivité. Nous n'avons pas vraiment de moyens, à part en faisant des commentaires, d'influencer ce qui se passe au niveau provincial en fait d'éducation.

    Comme je l'ai dit, lorsque cela fait un bout de temps qu'on est en consultation, ou quoi que ce soit, qu'on discute du sujet, ce que nous avons vécu, en essayant de répondre aux commentaires voulant que... c'est un problème de territoire de compétence. Je pense que ce comité a la possibilité de prendre ce genre d'observations et de voir s'il est pertinent de demander la tenue de discussions planifiées entre les gouvernements fédéral et provinciaux au sujet des nombreux besoins des immigrants d'âge scolaire.

+-

    M. Yvon Charbonneau: N'avez-vous aucun moyen de communiquer avec les associations d'enseignant et les commissions scolaires, à l'échelle locale?

+-

    Mme Sylvia Parris: Oui. Nous entretenons des relations directes avec les commissions solaires, et avec certains membres du personnel du ministère de l'Éducation. Nous avons des rapports avec des directeurs d'école. Ce sont toutes des ressources que nous utilisons. Si c'est une population qui nous importe et que nous courtisons pour l'inciter à venir dans notre pays, alors nous devrions nous efforcer de répondre à ses besoins autrement qu'en essayant de trouver des moyens stratégiques de passer les portes mais en intégrant ces moyens à nos politiques et à notre mandat, de manière à bien mettre en valeur notre engagement.

    Oui, nous pouvons, si on veut, prendre des mesures douces, un peu en passant par la porte de côté. Je pense qu'il y a des organisations, dans cette province, qui font cela très bien.

    Moi, je dis qu'il pourrait être pertinent de passer à un niveau supérieur des politiques, qui illustrerait réellement l'engagement du gouvernement en matière d'immigration. Ce serait pour reconnaître qu'un adulte immigrant, qui vient ici sous une catégorie, quelle qu'elle soit, a une famille et peut avoir des enfants. Si ces enfants ont besoin d'aide, alors n'y a-t-il pas de responsabilité sous-jacente, connexe, que nous devrions assumer aussi?

º  +-(1630)  

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Madeleine.

[Français]

+-

    Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Merci, monsieur le président. Bonjour Sylvia.

    Vous faites mention dans votre rapport, particulièrement au sujet du projet de loi C-18, du fait qu'il n'y a pas plusieurs catégories de citoyens. Le comité a eu l'occasion d'entendre un certain nombre de témoins, et un bon nombre d'entre eux étaient particulièrement inquiets face aux mesures inscrites sur tout ce qui touche la révocation de la citoyenneté, particulièrement sur ce qui touche la révocation de citoyenneté en relation avec la sécurité de l'État. Il me semble que le Canada, qui est un État de droit, ouvre la porte, dans ce projet de loi-là, à mettre de côté les procédures d'appel. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce que c'est cette partie-là du projet de loi qui vous inquiète particulièrement, ou y voyez-vous autre chose que ça?

[Traduction]

+-

    Mme Sylvia Parris: Nous parlons encore de ce que nous avons vu comme étant la nécessité de maintenir les mêmes normes. Il s'agit de quelqu'un qui est devenu Canadien. Il a passé tout le processus. Alors, pour l'instant, c'est un Canadien, et un Canadien est un Canadien.

    Alors, en ce qui concerne la réaction à quelqu'un qui est Canadien depuis plusieurs générations, ce que nous suggérons, il me semble, c'est que la même chose, alors, s'applique à quelqu'un qui est devenu Canadien récemment. Alors, qu'on essaie de dire que nous devons utiliser notre système de tribunaux, notre système judiciaire, comme on le ferait pour cet autre Canadien est vraiment l'aspect dont nous aimerions essayer de parler, parce qu'en ce qui concerne des gens qui sont sur le point d'obtenir la citoyenneté, il me semble qu'il existe d'autres mécanismes de freins et contrepoids pour composer avec une personne qui a des problèmes juridiques, qui commet des infractions, ou quoi que ce soit d'autre.

    Ce sur quoi nous voulons mettre l'accent, c'est qu'une fois qu'on est Canadien... cela neutralise l'interprétation voulant que nous avons des classes, ou des catégories de Canadiens plutôt que d'être Canadien à part entière une fois ce privilège acquis.

[Français]

+-

    Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Comment réagissez-vous au fait que, pour certaines personnes à l'endroit desquelles on demanderait la révocation de la citoyenneté, des preuves puissent être acceptées qui sont des preuves illégales quand il s'agit de la justice ordinaire et courante dans ces pays-là. Dans la loi, à un moment donné, c'est en quelque sorte précisé qu'on peut même accepter des preuves qui ne sont pas vraiment des preuves reconnues.

    Est-ce que cela vous inquiète au niveau, notamment, des droits de la personne?

[Traduction]

+-

    Mme Sylvia Parris: Vous dites que nous accepterions comme preuve quelque chose que nous ne pourrions pas vérifier, n'est-ce pas? Si j'avais dit cela, oui, ce serait un sujet de préoccupation.

    Je suppose qu'en examinant le dossier, on pourrait espérer que notre système judiciaire et notre système de tribunaux auraient un mécanisme pour ce genre de chose et pour pouvoir être sûrs des faits, qui pourrait être utilisé de façon légitime. Quelle que soit la preuve qu'ils décident d'accepter, celle-ci devrait passer par un certain processus. La question qui se pose serait peut-être que, si on ne pense pas pouvoir faire un bon travail de côté-là, au plan juridique, alors, on doit se demander comment notre système judiciaire fonctionne, et ce n'est pas vraiment quelque chose que peut régler une disposition de ce projet de loi.

º  +-(1635)  

[Français]

+-

    Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Merci.

    En ce qui concerne tous les jeunes issus de communautés visibles, est-ce que, depuis le 11 septembre, vous avez le sentiment que c'est plus difficile pour eux de s'intégrer à la communauté, notamment ici, à Halifax, ou si ça n'a rien changé?

[Traduction]

+-

    Mme Sylvia Parris: Il est certain qu'il y a eu des incidents et que le contexte a changé, dans la manière dont les gens sont traités dans la communauté en général, et certainement les jeunes, en tant qu'élément particulier de la population, non pas tant dans le sens d'un processus de politique et de structure mais plutôt dans ce qui leur arrive dans des zones publiques, par exemple, en région métropolitaine, ici, dans les couloirs des écoles. Les établissements étaient conscients qu'il pouvait y avoir des retombées, des contrecoups, et je pense qu'ils ont essayé d'y être sensibles. En ce qui concerne notre organisation, nous avons été appelés à faire les présentations, à animer et à coanimer des activités, à fournir de l'information sur les communautés culturelles.

    C'est donc qu'il était reconnu que la tragédie pouvait avoir des répercussions, et je pense que les gens essaient d'y être vraiment sensibles. Mais en ce qui concerne spécifiquement votre question, oui, il y a eu un contrecoup.

    Savez-vous ce qui nous a amenés à nous interroger, nous aussi, quant à l'efficacité de nos démarches? Je pense que cela tourne autour de la nécessité de faire en sorte que tout soit mieux enchâssé et aille au-delà de ce que peut faire un groupe sans but lucratif pour régler la question. Nous avons fait des choses. Nous avons distribué des documents de la Multicultural Association of Nova Scotia. Nous animons un festival fantastique en juin—du 20 au 22 juin, si vous êtes à Halifax à ce moment-là—au bord de l'eau. Donc, nous faisons vraiment des choses intéressantes, mais lorsque cette tragédie est survenue, il semble que les gens sont presque retournés à comportement par défaut, et ils ont commencé à dire des choses et à faire des choses qui auraient été impensables la semaine précédente seulement.

    Alors, nous nous demandons, aussi, jusqu'où nous allons, si nous parvenons réellement à influencer les perceptions des gens, à vraiment modifier les croyances qui soutiennent la discrimination et le racisme?

    Je pense que c'était vraiment important pour nous. Bien sûr, en tant qu'organisation, on est limités dans ce qu'on peut faire, mais je pense que c'est l'une de ces choses qui nous amène à nous demander si nous devrions agir autrement pour avoir une influence vraiment durable en matière de changement, plutôt que quelque chose qui n'est seulement que superficiel. Lorsqu'on subit des pressions, on cherche une zone de confort. Nous avons vu des gens acculés à une zone qui n'était pas très confortable. Je pense que c'est cette affaire de réaction.

    Alors, on est amenés à se demander si nous pouvons trouver quels autres moyens—l'expression «pratiques exemplaires» est bien jolie et populaire—nous devrions commencer à envisager, des moyens qui ont réellement un effet aussi durable, même dans les situations les plus tendues, que quand tout va sur des roulettes?

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Madame Lill.

+-

    Mme Wendy Lill: Merci.

    Merci d'être venue ici, Sylvia.

    J'assiste au festival multiculturel depuis de nombreuses années. C'est un merveilleux festival où on peut voir la culture, la musique et l'artisanat de tous les groupes culturels, les groupes d'immigrants de notre communauté qui sont rassemblés. Ils communiquent ensemble, et c'est un merveilleux événement, très heureux.

    Alors juxtaposons ceci à l'observation que vous avez faite, la citation de la Conférence nationale sur l'établissement:

Pour bon nombre des gens qui viennent s'installer au Canada, la vie est une lutte constante parsemée d'obstacles liés à la langue, à l'accès à l'emploi, à l'orientation culturelle, à la reconnaissance des compétences, au racisme et à la discrimination, à la réunification des familles, au statut d'immigrant...

Nous avons entendu cela ce matin, et nous l'avons entendu à maintes reprises, dans la description de l'expérience de gens venus au pays.

    Je pense que vous avez démontré que le multiculturalisme doit être l'assise philosophique d'un pays. Cette assise a été ébranlée. Elle a été ébranlée par les événements du 11 septembre, et il y a eu une hausse—je le constate à mon bureau, et je pense que tout le monde, ici, l'a constaté—de la haine fondée sur la race et la religion, dans notre pays. Alors nous devons continuer d'y travailler, c'est certain. C'est tout simplement ainsi.

    La question qui se pose, c'est : Y a-t-il des mesures spécifiques que, selon vous, le gouvernement fédéral peut prendre immédiatement pour vraiment s'attaquer à ces flambées et les étouffer? Que pouvons-nous recommander à CIC, et que pouvons-nous proposer nous-mêmes, en tant que nation, comme moyen d'atténuer les craintes et décourager divers types de comportements négatifs et destructeurs liés à la présence multiculturelle?

º  +-(1640)  

+-

    Mme Sylvia Parris: Vous me donnez là une nouvelle occasion de dire combien je pense que la langue est importante, parce que nous l'entendons tellement dire ici. Il serait vraiment important de trouver des moyens d'appuyer l'apprentissage de la langue seconde chez les jeunes.

    Pour vraiment chercher ce qui pourra changer la situation réellement en profondeur, il faudrait probablement qu'on ne fasse pas que réagir à ce qui se passe, mais qu'on essaye de créer des programmes de façon proactive. Dans les collectivités ethnoculturelles, ici, les gens parlent du fait d'être Canadiens ou néo-Écossais et ils disent que c'est vraiment significatif et réel.

    Lorsqu'on pose cette question et qu'on en parle, on obtient des réponses différentes selon les générations. La réponse de la grand-mère est différente de celle de la petite-fille—et ce n'est pas toujours une réponse stéréotypée. Les jeunes sont plus susceptibles de vouloir parler du fait qu'ils sont Canadiens ou Néo-Écossais. Alors, on commence à demander ce que cela signifie.

    Nous avons entendu certains jeunes, à qui nous avons parlé, dire que cela ne signifie n'est pas tant et que, réellement... Lorsque je l'ai entendu dire la première fois, j'ai pensé, oh, c'est fantastique, c'est excitant. Mais, pour eux, c'est plus une affaire de survie, de devoir de dire qu'ils sont Canadiens ou Néo-Écossais, sans même savoir exactement ce que cela peut signifier, mais pour aller, en quelque sorte, au-delà... La manière dont nous agissons, nos politiques, et la manière dont nous affichons nos valeurs ne correspondent pas à ce que nous disons être. Alors, nous pouvons bien dire que nous sommes un pays multiculturel, mais nous devons faire ces choses-là d'une certaine façon.

    Maintenant, nous reconnaissons tous, et j'ai essayé de le dire à la fin de mon intervention, qu'il faut nous mêler et évoluer de façon à véritablement être une communauté qui ouvre les bras à ceux qui veulent s'y intégrer et s'y adapter, et que les nouveaux venus peuvent s'adapter à cette communauté. C'est pourquoi, le fait de s'intéresser très spécifiquement aux institutions, à la façon dont elles pratiquent...

    Nous avons maintenant un processus, je crois qu'on peut le dire sans se tromper, qui fait que nous faisons une analyse fondée sur le sexe dans tout ce que nous faisons au gouvernement fédéral. Nous faisons une espèce d'analyse multiculturelle dans tout ce que nous faisons, et elle touche tous les Canadiens. Alors nous pouvons élargir notre point de mire, nous arranger pour faire une analyse générale qui touche cet aspect; trouver le moyen d'être attentifs à l'apprentissage de la langue. Si nous devons encore travailler en partenariat avec les organismes bénévoles et les organisations sans but lucratif, alors, il nous faut avoir des structures pour simplifier les choses autant que possible, en matière de demande de certains services. Je pense qu'il nous faut, en tant que gouvernement, songer à certaines des questions auxquelles nous voulons des réponses et transmettre ces questions aux groupes pour qu'ils puissent aller dans les collectivités, les poser et en obtenir des réponses.

    Si nous voulons vraiment savoir qu'est-ce qu'il faut faire pour que les gens se sentent vraiment intégrés et qu'ils en ressentent de l'assurance, que leur singularité est à la fois appréciée et respectée et qu'ils comprennent la valeur du Canada et ce qu'elles signifient, alors, il nous faut aller dans ces collectivités et poser des questions directes. Donc, en tant que gouvernement, soit que nous y allions directement nous-mêmes, frapper de porte en porte et poser ces questions, ou nous chargeons des organisations qui, selon nous, peuvent bien s'acquitter de cette tâche et qu'elles le fassent—avec notre appui. Ensuite, nous pourrons nous fonder sur ces réponses pour changer les politiques.

    Je disais souvent, quand j'allais travailler dans diverses organisations, pas dans un sens de... Ma mère m'a appris à être fière de moi et à avoir juste ce qu'il faut de modestie, du moins je l'espère. Mais lorsqu'on va quelque part, il devrait y avoir une certaine reconnaissance qu'on est passé par là; on devrait laisser une espèce de marque. Alors, si nous voulons vraiment changer les choses, nous devrions constater un changement. Nous ne devrions pas chercher à le faire en essayant de trouver un moyen de faire rentrer des piquets ronds dans des trous carrés.

º  +-(1645)  

    Donc, si nous parlons de changement, nous devons être prêts à vraiment y réfléchir et à prendre tout ce qui va avec. Si nous le faisons, alors, nous voulons le faire en étant bien informés. Nous devons dialoguer avec la population, parler de ses besoins et établir une structure pour que les gens aient le sentiment que ce qu'ils disent peut avoir une incidence et, au bout du compte, incorporer le tout dans la nouvelle orientation des politiques.

    Donc, pour résumer encore, je pense que c'est vraiment affaire de langue et de nous mettre à la tache. Il faut créer des structures qui intègrent l'expression de la diversité multiculturelle et tout son éventail—non seulement les minorités visibles, mais la diversité ethnique que nous avons ici. Trouvons le moyen de tout envelopper et de concevoir une structure, ou quoi que ce soit, qui démontre tout ce que nous faisons en matière de politiques et fait dire oh, ce doit être un lieu multiculturel.

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci, Wendy.

    Il y a toujours une multitude de difficultés qui surviennent lorsqu'on essaie de composer avec les enjeux qui deviennent une menace pour les gens. Très franchement, parfois, il y a erreur d'orientation—c'est ainsi que je l'appellerais—dans beaucoup de situations. Je sais que s'il survient une récession ou que si la situation économique devient très difficile, il y aura beaucoup de gens pour se manifester et dire qu'on n'a pas besoin d'immigrants au pays. Ils ne feront que prendre nos emplois. L'orientation erronée est notre problème à tous, et je pense que les événements du 11 septembre nous ont fait faire une erreur d'orientation en matière de sécurité, et il est arrivé qu'on fasse l'erreur de pointer un doigt accusateur sur les réfugiés et les immigrants. Rien que cela, en soi, a suscité beaucoup de préoccupations pour beaucoup de monde, au Canada.

    Tout ceci étant dit, votre présentation a été très claire. Il n'existe pas de méthode parfaitement logique pour prendre des décisions relativement à certains des enjeux qui concernent les immigrants et les réfugiés au Canada. Je pense que vous l'avez démontré très clairement. Le racisme, dans une certaine mesure, existe encore, ainsi que d'autres problèmes auxquels vous êtes confrontés en première ligne quotidiennement. Ce comité vous félicite pour le travail que vous faites.

    Il y a de nos bureaucrates qui ont examiné certaines problématiques—je parle ici de ce que vous dites à la page 3, et j'aimerais bien qu'il existe une réponse facile à cela. Certains Canadiens auraient un statut différent d'autres, et c'est le commentaire—qui reste un citoyen canadien et qui ne le peut pas? Peut-être puis-je essayer de donner un exemple. Il se peut que ce soit contraire à ce que pensent mes collègues.

    Si quelqu'un devient médecin au Canada et n'a pas suivi les étapes normales, s'il a recouru à d'autres moyens pour devenir docteur—il a triché aux examens, ou quelque chose du genre—une fois que c'est su, pensez-vous que son permis de pratique devrait lui être retiré ou peut-il le conserver? On peut le lui retirer en passant par un processus très coûteux devant les tribunaux. Je pense que nos bureaucrates y songeraient en termes de ressources qu'ils ne voudraient pas sacrifier. Que ce soit ou non le meilleur moyen de régler la question, à mon avis, cette situation soulève la question quant à certaines choses qui pourraient être perçues comme justes ou injustes.

    Je suppose que c'est le même genre de situation que lorsque quelqu'un reçoit la citoyenneté canadienne par de faux moyens, en mentant sur son passé, etc. Si c'était une violation réelle de ce qu'ils considèrent comme des principes démocratiques, certains de nos représentants officiels laissent entendre qu'après un certain temps, si c'est découvert, il n'y aurait aucun moyen de rectifier la situation autrement que par un procès qui coûterait des millions, et selon eux, ce n'est pas la bonne solution. Je ne pense pas que cela touche bien des gens. D'après ce qu'ont dit les représentants officiels, très peu de gens pourraient être touchés. Mais c'est véritablement un point d'achoppement pour bien du monde au comité.

    Certains s'opposeraient fermement à cette mesure et d'autres l'appuieraient. Cela devient un problème. Je me demande, dans ce genre de situation, si quelqu'un qui a reçu la citoyenneté par de faux moyens et que le seul moyen de la lui retirer est un procès très coûteux, si vous voudriez vraiment voir sacrifier les ressources réservées aux programmes de soutien et autres pour de tels procès? Ou est-ce que vous pensez que nous court-circuitons trop le système en étant plus sévères dans ce cas particulier?

    Je pense que c'est le noeud de la question. C'est l'argent, de toute évidence, et la meilleure utilisation possible des ressources. Certains prétendraient que ce n'est pas le cas, mais bien d'autres soutiennent. Je pense que c'est ce qu'a soutenu le ministère.

    Je me demandais ce que vous en pensez.

º  +-(1650)  

+-

    Mme Sylvia Parris: Il est certain que si vous me demandez de dire si je préfère que l'argent soit consacré à un procès ou à des programmes et services, il me faudrait dire, d'après les six pages de commentaires que j'ai ici, les programmes et services.

    Mais j'aimerais que nous y réfléchissions un peu. Si nous revenions un peu sur nos pas et pour voir s'il y a quelque chose que nous avons manqué, dans le cours du processus, qui puisse mieux nous donner l'assurance que nous avons bien fait notre travail de préparation de cette personne à recevoir le privilège d'être Canadien, si nous pensons avoir bien fait notre travail sur ce plan et si nous pensons n'avoir que très peu de cas qui pourraient poser un problème, alors nous pouvons facilement intervertir les choses et interpréter cela comme l'obligation de passer par le tribunal parce que nous sommes confiants d'avoir fait un bon travail, à priori. Je peux voir pourquoi certaines personnes voudraient le contredire, mais je pencherais en faveur de l'argument disant regardons vraiment ce que nous avons fait, en matière de processus menant à la citoyenneté, voyons si nous avons vraiment fait un bon travail de côté-là, et si nous avons fait tout ce qu'il fallait, autant que possible, alors, nous pouvons avoir cette assurance—être si sûrs, en fait, que nous pouvons interpréter le processus comme disant que si quelque chose va de travers, il faudra passer par le tribunal, parce que nous sommes si convaincus d'avoir bien agi auparavant.

+-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Oui. Je suis sûr que nous avons un excellent système, parce qu'il n'est agit pas question de beaucoup de cas. C'est un nombre minimal, mais étant donné les coûts qui sont devenus si exorbitants dans la société logistique que nous avons aujourd'hui, souvent, rien ne se passe à cause du manque de ressources. C' est une partie du problème.

    Le bien et le mal doivent être déterminés par tous ceux qui participent à la situation. Il faut trouver un équilibre et nous cherchons la meilleure solution qui soit. Je voulais seulement connaître votre avis là-dessus.

    Merci beaucoup. J'apprécie beaucoup l'information que vous avez présentée. Tout le monde, aujourd'hui, a très bien défendu la nécessité de mieux financer l'établissement, d'aider les immigrants à avoir plus de débouchés ici, au Canada, et certainement de veiller à ce que nous répondions à leurs besoins mieux que nous le faisons maintenant. Je ne pense pas que quiconque, ici, soit persuadé que nous répondons à ces besoins aussi bien que nous le devrions. Un débat se poursuit sur plusieurs de nos enjeux et il est évident qu'il y a des limites à ce que nous pouvons faire.

    Et ce processus nous est très utile. Lorsque nous accueillons des gens comme vous et nous écoutons vos témoignages, cela nous aide à mieux comprendre l'incidence des décisions que nous prenons sur la vie de centaine de personnes. Nous apprécions votre venue ici et que vous nous aidiez en ce sens.

    Alors, merci beaucoup, Sylvia. Nous tiendrons dûment compte de vos observations lorsque le comité discutera de son rapport final.

º  -(1655)  

+-

    Mme Sylvia Parris: Merci beaucoup d'avoir bien voulu m'entendre.

-

    Le vice-président (M. Jerry Pickard): Tout va bien pour tout le monde?

    Nous allons probablement lever la séance. J'ai appris tout à l'heure, avant que commence la séance de l'après-midi, que bien que nous ne sachions pas tous les prévisions météorologiques, il semble que Terre-Neuve attende une nouvelle tempête de neige. Cela pourrait changer nos projets de voyage pour demain. Nous n'en savons encore rien. Nous devrons suivre la situation de près. Il se peut que les audiences doivent être reportées, ou peut-être devrons-nous rester une nuit de plus, ou quelque chose du genre. Notre personnel veille à ce que tout aille aussi bien que possible.

    La séance est levée.