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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 16 novembre 1994

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

DES ORDINATEURS POUR LES ÉCOLES

LOUIS RIEL

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 7847

L'ÉQUIPE DE SKI DE L'ÉCOLE NORTH COLLEGIATE DE BARRIE

    M. Harper (Simcoe-Centre) 7847

LOUIS RIEL

LE PROJET DE PARTENARIAT POUR L'EXCELLENCE

LES OBLIGATIONS DU DÉFICIT

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

    M. Breitkreuz (Yellowhead) 7848

MICHEL BELLEMARE

LA CULTURE CANADIENNE

L'ÉQUIPE DE FOOTBALL LES RAMS DE REGINA

LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER DU CANADA DE 1995

LE FINANCEMENT DE L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

LE DROIT DE LA MER

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

    M. Lavigne (Verdun-Saint-Paul) 7850

LE FINANCEMENT DE L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

QUESTIONS ORALES

LE FINANCEMENT DE L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7850
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7851
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7851
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7851
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7852

LA COMMISSION DE L'IMMIGRATION ET DU STATUT DE RÉFUGIÉ

LE FINANCEMENT DE L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

    M. Gauthier (Roberval) 7853
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7853
    M. Gauthier (Roberval) 7853
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7853
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7853
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7854

LE COLLÈGE MILITAIRE ROYAL DE SAINT-JEAN

LA DÉFENSE NATIONALE

    M. Harper (Calgary-Ouest) 7855
    M. Harper (Calgary-Ouest) 7855

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

    Mme Gagnon (Québec) 7855
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7855
    Mme Gagnon (Québec) 7856
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7856

LE FINANCEMENT DE L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7856

LES CLINIQUES PRIVÉES

LES PÊCHES

    M. Bernier (Gaspé) 7857

M. ALAN EAGLESON

INGLIS LIMITÉE

L'IMMIGRATION

LES DÉPENSES DU GOUVERNEMENT

LA CHINE

    Mme Stewart (Northumberland) 7859

RECOURS AU RÈGLEMENT

L'EXAMEN DE LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE DU CANADA

    M. Gauthier (Roberval) 7859
    M. Gauthier (Ottawa-Vanier) 7860

AFFAIRES COURANTES

DÉCRETS DE NOMINATION

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LA QUARANTIÈME CONFÉRENCE PARLEMENTAIRE DU COMMONWEALTH

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

JUSTICE ET AFFAIRES JURIDIQUES

LOI ANNULANT LA DÉCLARATION DE CULPABILITÉ DE LOUIS DAVID RIEL

    Projet de loi C-288. Adoption des motions portant présentation et première lecture 7863
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 7863

PÉTITIONS

L'ÉTHANOL

L'AVORTEMENT

LES DROITS DE LA PERSONNE

L'EUTHANASIE

L'AVORTEMENT

LA JUSTICE

LE SUICIDE ASSISTÉ

LE CRTC

L'AVORTEMENT

QUESTIONS AU FEUILLETON

DEMANDES DE DOCUMENTS

LE DÉCÈS DE L'HONORABLE EUGÈNE MARQUIS

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

    Projet de loi C-53. Reprise de l'étude de la motion portant deuxième lecture 7865M. Peter Adams (Peterborough) 7865
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 7867
    Mme Gagnon (Québec) 7868
    M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead) 7874

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LA LOI SUR LA CITOYENNETÉ

    Projet de loi C-249. Motion de deuxième lecture 7881

MOTION D'AJOURNEMENT

LES ANCIENS COMBATTANTS

ANNEXE


7847


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mercredi 16 novembre 1994


La séance est ouverte à 14 heures.

_______________

Prière

_______________

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

DES ORDINATEURS POUR LES ÉCOLES

M. Guy H. Arseneault (Restigouche-Chaleur, Lib.): Monsieur le Président, les écoliers de ma circonscription de Restigouche-Chaleur bénéficient d'un partenariat unique entre le gouvernement et trois multinationales nord-américaines de services informatiques.

Dans le cadre d'un programme organisé par Industrie Canada, le gouvernement distribue des centaines d'ordinateurs usagés à des écoles partout au Canada.

[Français]

Ma circonscription de Restigouche-Chaleur a déjà reçu 20 nouveaux ordinateurs. Voilà le recyclage des années 1990. De plus, les grandes compagnies d'informatique permettent le transfert des anciens programmes d'ordinateur pour bénéficier aux étudiants et étudiantes. Voilà la compréhension des années 1990.

[Traduction]

Ce partenariat entre les secteurs privé et public avantage les écoliers du Nouveau-Brunswick et aide à promouvoir la culture et l'innovation en matière d'apprentissage. Je félicite tous ceux qui participent à ce programme.

* * *

[Français]

LOUIS RIEL

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, il y a 109 ans aujourd'hui, Louis David Riel, le héros métis, était pendu, suscitant émoi et indignation au sein de la population francophone. Cinquante mille personnes se rassemblaient au Champ-de-Mars, à Montréal, pour entendre le célèbre cri d'Honoré Mercier: «Riel, notre frère, est mort.»

Le premier ministre du temps, John A. Macdonald, avait bien pris soin de ne pas faire juger Riel dans sa province natale, là même où il avait mené sa lutte pour le respect des droits fondamentaux des métis du Canada.

Pour réparer cette injustice de l'histoire, le Bloc québécois dépose aujourd'hui un projet de loi exigeant l'annulation du verdict de culpabilité rendu à l'endroit de Louis Riel.

Louis Riel a été pendu parce qu'il était métis, parce qu'il était francophone, parce qu'il était porté à la défense de sa nation. Sa mort par pendaison est un des événements les plus sombres de notre histoire. Refuser de le regarder, c'est refuser de comprendre le présent, c'est refuser de se donner un avenir.

* * *

[Traduction]

L'ÉQUIPE DE SKI DE L'ÉCOLE NORTH COLLEGIATE DE BARRIE

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, j'interviens à la Chambre aujourd'hui pour féliciter les élèves-athlètes de l'école North Collegiate de Barrie.

L'équipe junior masculine de cet établissement a reçu le prestigieux honneur de représenter le Canada aux compétitions de ski nordique de la Fédération internationale du sport scolaire. En février, les membres de l'équipe iront en Italie se mesurer à d'autres élèves-athlètes de partout dans le monde.

Il est encourageant de voir ces jeunes consacrer leur énergie et leurs efforts à des activités sportives. Ils sont une source de fierté pour leurs parents, leurs compagnons, leurs enseignants et la collectivité tout entière.

Il est important de reconnaître que la vaste majorité des jeunes ont du coeur, qu'ils tiennent à participer et qu'ils veulent devenir des Canadiens engagés.

Pour le voyage, l'équipe s'efforce de recueillir 15 000 $ auprès de sources privées et j'encourage ces efforts.

Pour l'honneur qu'ils ont mérité, je félicite les membres de l'équipe: Clayton Parent, Joe Tuck, Matt Goodman, Doug Smith, Chris Hogan et Jason Van Noortwyk, ainsi que leurs entraîneuses Ann Scully et Cathy Cudmore. Je leur souhaite la meilleure des chances en Italie.

* * *

LOUIS RIEL

M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface, Lib.): Monsieur le Président, de nombreux Manitobains et Canadiens ont une pensée pour Louis Riel aujourd'hui.


7848

Ce matin, dans ma circonscription, la Manitoba Metis Federation a tenu une cérémonie marquant le 109e anniversaire de la mort de Louis Riel, souligné la Semaine des Métis et proclamé le 16 novembre comme étant la journée de Louis Riel.

[Français]

Le 10 mars 1992, en réponse à une pétition du gouvernement, j'ai applaudi le geste du gouvernement de reconnaître Louis Riel comme le fondateur du Manitoba et sa contribution au Canada. Ce même jour, j'ai demandé qu'on fasse un pas de plus et qu'on le reconnaisse comme un des Pères de la Confédération. Je tiens toujours cette position.

* * *

[Traduction]

LE PROJET DE PARTENARIAT POUR L'EXCELLENCE

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais signaler à la Chambre l'esprit de collaboration qui existe entre les sociétés et les écoles secondaires de Scarborough.

(1405)

Récemment, la société pharmaceutique Novapharm, établie à Scarborough, a annoncé qu'elle créait, de concert avec l'école secondaire supérieure Sir John A. Macdonald, un projet de partenariat pour l'excellence. Ce programme vise à promouvoir l'étude des sciences au niveau secondaire.

La société parrainera des événements à caractère scientifique, comme les olympiades des sciences, et invitera les élèves à découvrir le milieu des grandes entreprises. Les élèves pourront acquérir une expérience pratique du travail.

L'école aura l'occasion d'entreprendre de nouvelles initiatives intéressantes et excitantes. En unissant leurs efforts, la société Novapharm et l'école Macdonald seront en mesure d'offrir le meilleur programme d'éducation qui soit.

J'applaudis à ce programme et je tiens à féliciter M. Leslie Dan, de Novapharm, et M. Glen Tarver, directeur de l'école secondaire supérieure Macdonald, pour leur initiative.

* * *

LES OBLIGATIONS DU DÉFICIT

Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à profiter de l'occasion qui m'est offerte ici pour présenter une proposition visant à aider le ministre des Finances à combattre le déficit. Cette idée a surgi au cours d'une assemblée publique tenue au Centre communautaire des aînés Green Briar, à Alliston.

Les électeurs qui assistaient à cette assemblée ont proposé qu'on émette des obligations du déficit pour permettre au gouvernement de racheter notre dette à l'étranger. Ces obligations fonctionneraient sur le même principe que les obligations de guerre émises au cours de la Seconde Guerre mondiale.

Ces citoyens âgés se sont dits inquiets de l'ampleur du déficit et des répercussions qu'il aura sur les générations futures. Ils ont aussi exprimé le désir d'aider le gouvernement à réduire le déficit.

J'exhorte le ministre des Finances à envisager sérieusement de donner suite à cette proposition constructive pour contenir le déficit.

* * *

[Français]

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, une étude commandée par le Conseil de la santé et du bien-être du Québec nous rappelle que les quatre dernières années ont été particulièrement éprouvantes pour les Canadiens sur le plan économique. La récession a affecté tous les Canadiens, mais a été particulièrement pénible pour les plus démunis qui ont été incapables de réintégrer le marché du travail.

Parlant de la réforme des programmes sociaux, et tout en insistant sur les rigueurs budgétaires des gouvernements, l'économiste Pierre Fortin résume ainsi la situation, et je cite : «Il ne faut pas tout saccager en raison d'une conjoncture économique temporairement affaissée. Notre crainte c'est qu'on détruise un système que nos parents et grands-parents ont mis 40 ans à construire.»

Il ne faut pas démolir notre système de sécurité sociale à la première difficulté venue. Dans une telle conjoncture, le rôle du gouvernement doit être de supporter les plus démunis, pas de les écraser.

* * *

[Traduction]

LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Monsieur le Président, je viens de terminer une série d'assemblées publiques dans ma circonscription sur la situation désespérée des programmes sociaux au Canada.

Mes électeurs ont été consternés d'apprendre que, dans 15 ans à peine, les filets de sécurité sociale plus les intérêts risquent de représenter 100 p. 100 des dépenses fédérales. Mais ce qui les a le plus contrariés, c'est qu'ils se font arnaquer plus qu'ils ne le croyaient par le gouvernement fédéral.

Ils croyaient contribuer au Régime de pensions du Canada en prévision de leur retraite. Mais, à cause de la mauvaise gestion du gouvernement, la caisse du RPC est à court de centaines de milliards de dollars, ce qui signifie que leurs cotisations ne sont rien d'autre que des charges sociales.

Mes électeurs veulent savoir pourquoi le ministre du Développement des ressources humaines ne s'est pas penché sur le problème du RPC dans son document de travail. Ils se demandent pourquoi le ministre ne fait rien pour mettre fin à cet État providence criblé de dettes.


7849

[Français]

MICHEL BELLEMARE

M. Eugène Bellemare (Carleton-Gloucester, Lib.): Monsieur le Président, vous allez sûrement comprendre ma fierté et ma grande joie d'annoncer à cette Chambre que mon fils Michel, jeune avocat de 27 ans, a été élu au Conseil municipal d'Ottawa-Carleton lundi dernier.

La Municipalité régionale d'Ottawa-Carleton qui compte trois quarts de million d'habitants englobe 11 municipalités locales, dont Gloucester où Michel a été élu. Je me joins à sa femme Nathalie ainsi qu'à toute la famille et son équipe pour célébrer cette belle victoire.

* * *

[Traduction]

LA CULTURE CANADIENNE

M. Pat O'Brien (London-Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, notre culture est notre identité. Elle nous donne un sentiment de fierté et nous permet de nous définir en tant que Canadiens et de définir notre place au sein de la communauté internationale. Nos arts, nos sports, nos langues, nos parcs naturels, nos lieux historiques et notre patrimoine multiculturel sont tous des éléments qui contribuent à la diversité de la culture canadienne.

Avec la mondialisation des échanges commerciaux et l'évolution rapide de la technologie de l'information, la culture canadienne deviendra un des moteurs de notre économie. Des organismes comme la SRC, le Conseil des arts du Canada, la Bibliothèque nationale, nos musées et nos archives aident à préserver la culture d'une population relativement peu nombreuse répartie sur un vaste territoire.

Compte tenu de la concurrence croissante venant de nos voisins américains, il est plus important que jamais que notre gouvernement assure un contenu canadien suffisant dans les émissions de radio et de télévision et dans les livres. Nous devons continuer d'élaborer des politiques qui rendent notre culture unique accessible à tous les Canadiens.

* * *

(1410)

L'ÉQUIPE DE FOOTBALL LES RAMS DE REGINA

M. Bernie Collins (Souris-Moose Mountain, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'annoncer cette nouvelle à la Chambre des communes.

Les Rams, l'équipe de la ligue mineure de football de Regina, ont remporté pour la douzième fois le Canada Bowl, qui se tenait à Montréal samedi dernier. Ils ont arraché le championnat grâce à une victoire de 52 à 6. C'est la deuxième année de suite que les Rams remportent cette compétition. Ils avaient gagné leur premier titre national en 1966.

Il convient de féliciter tout particulièrement l'entraîneur Frank McCrystal. Il a été avec l'équipe à neuf des championnats qu'elle a remportés-quatre fois comme entraîneur principal, deux fois comme entraîneur adjoint et trois fois comme joueur.

Cette équipe de jeunes Canadiens énergiques, qui travaille dur toute l'année, a accompli un exploit remarquable. Leurs partisans, en Saskatchewan, sont très fiers d'eux. Je félicite les Rams et je leur souhaite une excellente saison l'an prochain.

* * *

[Français]

LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, dans son rapport majoritaire déposé hier sur l'examen de la politique étrangère du Canada, la majorité libérale fait preuve d'une méfiance incompréhensible à l'égard des États-Unis, pourtant notre principal partenaire commercial. Au lieu de prendre acte de la continentalisation de notre économie, la majorité libérale cultive une attitude maladive envers les États-Unis.

Le rapport est très éloquent à ce sujet. Lorsqu'on y traite des relations commerciales du Canada avec la région de l'Asie-Pacifique, on parle de défis, alors qu'avec les États-Unis, on parle plutôt de problèmes. Toute une différence de langage, symbolique d'ailleurs du blocage psychologique des libéraux vis-à-vis nos voisins du Sud. Le problème existentiel du Canada, déchiré par une double identité, ne se règle pas par ce refus obstiné de la réalité américaine. Manifestement, les libéraux ne sont pas arrivés à s'arracher du cercle vicieux où s'étourdit, depuis des décennies, l'establishment canadien.

* * *

[Traduction]

LES JEUX D'HIVER DU CANADA DE 1995

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui un jour important dans la région de Peace River, en Alberta. Dans 95 jours, en effet, à compter du 19 février 1995, se tiendront les Jeux d'hiver du Canada à Grande Prairie.

De concert avec les habitants de Grande Prairie, je voudrais profiter de l'occasion pour inviter tout le monde, de tous les coins du pays, à assister aux Jeux d'hiver de 1995. Je voudrais également féliciter tous les bénévoles qui travaillent d'arrache-pied et avec dévouement à l'organisation de cette célébration nationale du sport amateur.

La ville de Grande Prairie est prête à recevoir les meilleurs Jeux d'hiver du Canada qu'on ait jamais vus et est impatiente d'accueillir tous les Canadiens du 19 février au 4 mars 1995.

* * *

LE FINANCEMENT DE L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

M. Jag Bhaduria (Markham-Whitchurch-Stouffville, Lib. ind.): Monsieur le Président, la réduction du déficit demeure l'un des objectifs les plus importants du gouvernement, mais il

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est impérieux que cela ne se fasse pas au détriment de l'éducation des jeunes Canadiens. La manifestation que les étudiants tiennent aujourd'hui sur la colline du Parlement le souligne bien.

Plus de 900 000 étudiants à plein temps de niveau postsecondaire pourraient être touchés directement par la proposition du gouvernement de réduire les paiements de transfert versés aux provinces au titre de l'enseignement postsecondaire. Il faut maintenir le niveau actuel de financement aux fins de l'enseignement postsecondaire afin de doter les jeunes Canadiens d'une formation scolaire et technique qui les prépare à entrer dans le XXIe siècle.

Comme le dit le livre rouge, le gouvernement a intérêt à s'assurer que les jeunes seront le mieux scolarisés possible, ce qui leur permettra ensuite de mener une vie utile et indépendante. Il faut mettre ce noble principe en application.

* * *

LE DROIT DE LA MER

M. Derek Wells (South Shore, Lib.): Monsieur le Président, il y a douze ans, les Nations Unies ont adopté le Traité sur le droit de la mer. Aujourd'hui, ce traité entre en vigueur.

Ce traité, qui est l'aboutissement de dix ans de négociations, accorde au Canada des droits souverains sur la prospection et l'exploitation des ressources naturelles sur une superficie d'environ 1 500 000 kilomètres carrés sur le plateau continental de l'Arctique, du Pacifique et de l'Atlantique. Il reconnaît également la compétence du Canada à l'égard des ressources biologiques dans une zone de 200 milles.

Même si ce traité est maintenant en vigueur et même si un grand nombre de ses dispositions sont devenues pratique normale dans bien des pays et acceptées comme droit international coutumier, plus de 70 pays, dont le Canada, ne l'ont pas encore ratifié.

Depuis un an, le Canada a pris des mesures qui outrepassent ce traité afin de protéger les stocks de poisson. Le temps est peut-être venu de songer à donner l'exemple en ratifiant ce traité et en en préconisant une ratification généralisée.

* * *

[Français]

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

M. Raymond Lavigne (Verdun-Saint-Paul, Lib.): Monsieur le Président, six semaines se sont écoulées depuis la publication du Livre vert sur la réforme sociale. Les Canadiens et Canadiennes sont pleinement engagés dans le débat.

(1415)

Le ministère du Développement des ressources humaines a reçu 12 000 appels de demandes de renseignements. Cent quatorze mille copies du Livre vert, dont 33 000 copies françaises, ont été distribuées ainsi que 210 000 copies du résumé. Déjà, 190 députés ont tenu des consultations publiques dans leur comté et 80 organisations nationales ont comparu devant le comité parlementaire, depuis la fin octobre.

Les Canadiens savent qu'il faut faire des changements. Ils veulent participer et ils veulent débattre des idées. Le gouvernement est prêt à écouter tous les Canadiens et les Canadiennes.

* * *

[Traduction]

LE FINANCEMENT DE L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, l'examen des programmes sociaux entrepris par les libéraux fédéraux nous donne toutes les raisons de croire que le financement consenti aux universités et aux collèges canadiens sera réduit et que le coût des études postsecondaires augmentera.

Selon le premier ministre de la Saskatchewan, Roy Romanow, le gouvernement fédéral considère la dette comme préjudiciable pour le gouvernement, mais comme acceptable pour les étudiants.

Hier, mon collègue, le député de Winnipeg Transcona, nous a rappelé que, à titre de Canadiens, nous nous attendons à ce que les jeunes de notre pays remboursent une dette nationale dont ils ne sont pas responsables et que nous semblons les encourager à s'endetter par la même occasion.

Si l'éducation, les connaissances et les compétences sont les assises indispensables d'une saine économie, le gouvernement doit trouver des façons d'accroître l'accès aux établissements qui permettent de s'instruire et d'acquérir des connaissances et des compétences.

_____________________________________________


7850

QUESTIONS ORALES

[Français]

LE FINANCEMENT DE L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, on assiste aujourd'hui à une importante manifestation d'étudiants, inquiets à juste titre de l'impact de la réforme des programmes sociaux sur le financement de l'enseignement postsecondaire. En coupant les transferts qu'il verse aux provinces, le gouvernement fédéral provoquera une hausse substantielle des frais de scolarité et restreindra sérieusement l'accès aux études universitaires.

Ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines. Compte tenu du bien-fondé des préoccupations étudiantes et de l'ampleur des critiques soulevées par sa réforme, le ministre s'engage-t-il aujourd'hui à reconsidérer l'intention de son gouvernement, quant au financement de l'enseignement postsecondaire?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, comme le député le sait, nous avons proposé diverses options dans le livre vert. L'une d'elles est de maintenir le statu quo, de


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ne rien changer à la formule mise en place par le gouvernement dont a fait partie le député et qui prévoyait une diminution de 250 millions de dollars des paiements de transfert au Québec seulement. Le député faisait partie de ce gouvernement-là. Je sais que le député s'y connaît bien dans ce domaine, mais c'est là une des options.

L'autre option que nous avons présentée consiste à trouver une formule permettant d'ajouter un supplément de 10 milliards de dollars au financement des études supérieures, un supplément qui servirait à financer les laboratoires et les bibliothèques ainsi qu'à accroître l'accès.

[Français]

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, voici un gouvernement qui se propose de couper définitivement les transferts aux provinces, dans le domaine de l'éducation postsecondaire, et qui pense pouvoir trouver refuge derrière un gouvernement que j'ai eu la fierté de quitter.

Est-ce que le ministre réalise, est-ce que le gouvernement réalise, est-ce que le parti ministériel réalise qu'en coupant les contributions fédérales aux provinces, la réforme des programmes sociaux va alourdir l'endettement des étudiants et transférer sur leur dos une partie du problème de la dette fédérale?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, le chef de l'opposition avait tellement de fierté qu'il n'a pas osé ouvrir la bouche ni quitter le gouvernement conservateur au moment où ce dernier a réduit d'un quart de milliard de dollars les paiements de transfert aux provinces. C'est ça la fierté du député. Pourquoi n'a-t-il rien dit à ce moment-là alors qu'il est si ferme maintenant?

Je voudrais faire ressortir un point fondamental. Rien dans notre proposition ne dit que nous allons réduire les paiements de transfert aux provinces. Celles-ci reçoivent maintenant plus de 6 milliards de dollars en paiements de transfert. Dans dix ans, elles recevront encore 6 milliards de dollars en paiements de transfert. Toutes ces affirmations au sujet d'une diminution de 2,6 milliards de dollars sont pure invention.

(1420)

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition BQ): Monsieur le Président, j'avais tellement de raisons de quitter ce gouvernement-là que je n'ai pu les énumérer toutes au moment de mon départ.

Comment le ministre peut-il prétendre que l'acquisition de connaissances soit l'objectif premier de son gouvernement de même que la principale méthode pour stimuler le développement économique quand on sait que sa réforme même va bloquer l'accès à l'université à des milliers de Canadiens et de Québécois?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, c'est la première fois que je suis d'accord avec le député quand il dit qu'il avait tellement de raisons de quitter le gouvernement précédent. La seule question que je me pose, c'est pourquoi il a attendu si longtemps.

Je viens de dire, dans ma réponse à la question précédente, que nous avons clairement déclaré que nous allons maintenir la formule actuelle de paiements de transfert.

Ce que nous voulons faire, et c'est pour cette raison que nous soumettons une proposition à un débat sérieux, c'est trouver une formule qui nous permettrait d'ajouter un supplément de 10 milliards de dollars sur les dix prochaines années, un supplément qui servirait à élargir l'accès pour les étudiants qui ne peuvent à l'heure actuelle faire des études supérieures.

Il y a actuellement un quart de million de travailleurs canadiens qui veulent retourner au collège et à l'université. Nous devons trouver un moyen pour les aider à le faire. Nous devons trouver un moyen pour accroître le nombre de places et améliorer les installations et les services.

C'est pour cette raison que nous devons trouver plus d'argent, et nous voulons le faire au moyen d'une répartition équitable entre les gouvernements, le secteur privé et les étudiants.

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse également au ministre du Développement des ressources humaines.

Le ministre persiste à nier l'impact négatif de sa réforme sur l'endettement des étudiants canadiens ainsi que sur l'accessibilité à l'éducation postsecondaire. En coupant les paiements de transfert aux provinces en matière d'éducation postsecondaire, sa réforme aura pour effet, au minimum, de doubler les frais de scolarité dès la première année selon l'Association des universités et collèges du Canada.

Comment le ministre peut-il continuer de prétendre qu'en provoquant, par sa réforme, une hausse sans précédent de frais de scolarité, que cela n'aura pas pour effet de réduire l'accessibilité à l'éducation postsecondaire?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai jamais eu pareilles prétentions. Ce que j'ai dit, c'est qu'avec le régime actuel, les frais de scolarité augmentent de 10 p. 100 par année.

Je tiens à souligner, surtout au député du Bloc Québécois, que cette décision n'est pas la nôtre, mais celle des gouvernements provinciaux. Ce sont eux, et non le gouvernement fédéral, qui prennent des décisions concernant l'enseignement. C'est cependant le gouvernement fédéral qui transfère les fonds. Malheureusement, une grande partie des fonds que nous transférons ne parviennent jamais aux universités.

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Monsieur le Président, le ministre dit qu'il n'a jamais vu cela, pourtant il l'a écrit dans son Livre vert.

Comment le ministre peut-il demeurer aussi insensible à l'actuel problème de l'endettement des étudiants, alors qu'en plus de faire doubler les frais de scolarité, sa réforme contribuera


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à augmenter cet endettement à un tel point que plusieurs n'oseront plus accéder aux études postsupérieures par peur d'accumuler une dette personnelle incontrôlable?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, le député soutient que nous sommes insensibles aux préoccupations des étudiants.

Je lui rappelle que, cette année seulement, nous avons affecté plus de 700 millions de dollars à la stratégie d'emploi des étudiants pour que des milliers et des milliers d'entre eux puissent acquérir de l'expérience en milieu de travail. Nous signons des ententes avec des entreprises du secteur privé pour qu'elles fassent de nouveaux investissements dans nos collèges et nos universités. Nous avons accru de 20 p. 100 les fonds destinés aux programmes d'emplois d'été pour les étudiants. Nous avons mis sur pied un Service jeunesse qui offrira des emplois aux étudiants du niveau postsecondaire.

Nous avons considérablement amélioré le programme actuel de prêts aux étudiants en doublant le montant maximal des prêts. Aujourd'hui même, j'ai annoncé une série de modifications à ce programme qui feront que les étudiants pourront accéder à ces fonds à de bien meilleures conditions.

(1425)

Nous écoutons les étudiants, nous réagissons à leurs préoccupations et nous voulons engager un débat et un dialogue avec eux. Nous ne les encourageons pas, comme le député l'a fait, à recourir aux barricades et aux protestations quand nous avons plutôt besoin d'un débat sérieux sur une question qui nous préoccupe tous.

* * *

LA COMMISSION DE L'IMMIGRATION ET DU STATUT DE RÉFUGIÉ

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, hier, le ministre de l'Immigration parlait en termes ronflants de la qualité des récentes nominations à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

Cependant, on note qu'il y a parmi ces gens des avocats aux honoraires très élevés de l'industrie de l'immigration, c'est-à-dire des gens qui ont intérêt à ce qu'il y ait beaucoup d'immigrants et de réfugiés et à ce que la procédure administrative soit complexe. Si l'on ajoute à cela le fait que tout le système des nominations est basé sur le principe des faveurs aux amis, on voit que le problème des risques de conflits d'intérêts reste entier.

Y a-t-il des lignes directrices pour protéger la commission de l'immigration des risques associés au fait que certains de ses membres pourraient être en conflit d'intérêts?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, non seulement il y a des lignes directrices en ce qui concerne les membres de la commission, mais il y a aussi la Loi sur l'immigration. D'ailleurs, la présidente de la commission m'a recommandé certaines mesures sur lesquelles je prendrai une décision cette semaine.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'entendre que la commission a des lignes directrices.

Je voudrais aller un peu plus loin. Nous ne craignons pas seulement les conflits d'intérêts, nous craignons aussi le trafic d'influence et nous nous demandons si les lignes directrices couvrent cela.

J'ai ici une note de service de 1992 préparée pour M. Schelew et d'autres membres de la Refugee Lawyers' Association, par Greg James, dans laquelle on donne, pour chaque membre de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, le pourcentage d'acceptation de demandes de statut de réfugié. C'est le type de renseignement dont on a besoin pour tout trafic d'influence, et M. James et M. Schelew sont maintenant tous deux membres de la commission.

Y a-t-il des lignes directrices pour protéger la commission de tout trafic d'influence de la part de gens que l'on pourrait appeler des «initiés» du secteur de l'immigration?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Le trafic d'influence est prévu par le Code criminel du Canada et si vous avez des renseignements précis, vous devriez les soumettre aux autorités compétentes.

Le Président: Chers collègues, je vous rappelle que vous devez vous adresser à la présidence.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le ministre aime s'appuyer sur des faits. Voici donc quelques faits et une question.

Premier fait: le ministre a nommé un immigrant illégal à la CISR. Deuxième fait: la GRC mène une enquête sur le trafic d'influence dans le monde de l'immigration. Troisième fait: la CISR est maintenant divisée en deux factions opposant, d'un coté, les membres nommés par favoritisme par les conservateurs et, de l'autre, ceux qui l'ont été, également par favoritisme, mais par les libéraux.

Le ministre va-t-il concéder que le désordre le plus total règne au sein de la CISR et ordonner que cet organisme fasse l'objet d'une enquête judiciaire?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, ce ne sont pas des faits. Vous vous appuyez sur des rumeurs et des insinuations.

Le Président: Je prie le ministre d'adresser sa réponse à la présidence.

M. Marchi: Monsieur le Président, si le député détient la moindre information indiquant qu'un membre de la CISR se livre au trafic d'influence, il se doit de la transmettre aux autorités compétentes en la matière, aux termes du Code criminel.

Deuxièmement, en ce qui concerne les allégations portant sur la conduite d'une personne, le processus suit son cours. La présidence m'a fait son rapport. On a demandé à la personne en question de s'expliquer, ce qu'elle a fait.

Comme le veut la procédure, nous examinons ces deux documents, et une décision sera prise cette semaine. Ça, ce sont les


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faits. Ils sont connus. J'ai bien peur d'avoir à décevoir le député, mais nous ne nous appuyons pas sur des rumeurs, des calomnies ou autres attaques gratuites.

* * *

[Français]

LE FINANCEMENT DE L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le ministre du Développement des ressources humaines persiste à banaliser l'impact négatif de son projet de réforme sur tous les étudiants du Canada.

D'une part, il coupe les transferts aux provinces pour l'enseignement supérieur et, d'autre part, il propose comme solution d'accroître les possibilités d'endettement pour les étudiants canadiens.

Est-ce que le ministre réalise que ce qu'il offre aux étudiants canadiens par son projet de réforme, c'est de sortir de l'université avec une dette moyenne de 50 000 $, et pendant dix ans, des termes de 600 $ par mois pour rembourser la dette qu'il leur aura fait doubler?

(1430)

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, le député m'a accusé de vouloir banaliser toute la question. Je prétends, pour répondre à ce qu'il dit, qu'il s'est lui-même rendu coupable de désinformation grave à l'égard de la réalité, et ce, plus d'une fois. J'ajouterais que toute sa question repose sur une prémisse totalement fausse.

Tout d'abord, nous ne sabrons pas les paiements de transfert aux provinces. Nous les maintenons à leur niveau de 1993-1994, ce qui représente un montant d'environ 6,1 milliards de dollars. Cet engagement est respecté. Il n'y a pas de réduction. Étant un des grands défenseurs des droits provinciaux à la Chambre, le député devrait savoir que le transfert se fait de plus en plus par le truchement des recettes fiscales versées aux provinces afin que celles-ci puissent prendre des décisions concernant les frais de scolarité. Ce sont elles qui décident des augmentations. Ce sont elles qui déterminent les programmes d'études. Ce sont elles qui décident ce que font les universités.

Il me semble que si le député a des critiques à formuler contre ce qui se passe dans les universités, il devrait se tourner du côté de ses collègues provinciaux et leur demander pourquoi ils n'affectent pas réellement à l'enseigment supérieur les crédits fédéraux qui représentent la moitié du financement total des universités.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le ministre sait très bien que les recteurs d'universités au Canada et les responsable de collèges d'enseignement supérieur prévoient doubler les frais de scolarité à très court terme à cause de la réforme du ministre. Et cela, il ne peut le nier!

Jamais dans le passé un gouvernement n'aura frappé les étudiants plus durement que le gouvernement libéral. Il est encore temps pour le gouvernement de rebrousser chemin.

Pourquoi le ministre ne s'engage-t-il pas devant les milliers d'étudiants qui sont devant le Parlement à retirer son projet qui condamne les étudiants à la pauvreté?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, dès le commencement, le député et ses collègues ont décidé de tout rejeter en bloc, d'adopter une attitude négative à l'égard de toute réforme. Ce que nous offrons aujourd'hui aux étudiants, je l'ai dit à leurs dirigeants à une réunion ce matin, je l'ai dit aux dirigeants du milieu étudiant lorsque je les ai rencontrés aux quatre coins du pays, et cela se résume à peu près à ceci: «Examinons ensemble le problème. Améliorons la situation. Examinons les faits. Penchons-nous sur les véritables enjeux.»

[Français]

Voyons ce que nous pouvons faire, en travaillant ensemble à l'amélioration du système d'études supérieures.

[Traduction]

Le fait est que tout le monde, à l'exception du député du Bloc québécois, sait que des changements et des réformes s'imposent au Canada.

Plus nous invitons nos étudiants, nos professeurs et nos administrateurs à participer à ce débat, plus la réforme a des chances de réussir, ce qui va à l'encontre de la position du député.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, le mois dernier, ici même dans cette enceinte, le ministre du Développement des ressources humaines a déclaré qu'il était en faveur d'un système plus vaste de subventions directes aux étudiants, en remplacement des transferts fédéraux aux provinces pour l'enseignement postsecondaire.

Le gouvernement va-t-il adopter une autre proposition réformiste, c'est-à-dire un système de bons d'études supérieures qui retirerait certains pouvoirs aux bureaucrates pour les conférer aux étudiants?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, la députée est membre du Comité permanent du développement des ressources humaines. Ce comité tient actuellement des audiences dans tout le pays et reçoit tout un éventail de propositions.

S'il y en a une que la députée souhaite soumettre au nom de son parti, je serais certes prêt à l'examiner dans le cadre du rapport de ce comité. Voilà pourquoi nous avons prévu un processus parlementaire démocratique et transparent. Nous voulions obtenir toutes les bonnes idées, même des mauvaises.


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Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, le Parti réformiste prône un système de bons d'études supérieures pour que l'argent versé sous forme de transferts fédéraux au titre de l'enseignement postsecondaire soit remis carrément aux personnes directement intéressées, c'est-à-dire les étudiants. De cette façon, les établissements d'enseignement répondraient davantage aux besoins des étudiants.

(1435)

Le gouvernement va-t-il envisager de donner aux Canadiens les choix qu'un tel système de bons offrirait?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, comme la députée le sait pertinemment, lorsque nous avons modifié le programme de prêts aux étudiants, au printemps dernier, nous avons ajouté aux prêts aux étudiants une série de subventions donnant aux femmes la possibilité de poursuivre des études supérieures, nous avons prévu un programme de remise de dette dans certains cas et nous avons fait en sorte que les étudiants ayant un revenu insuffisant puissent recevoir de l'aide.

Je tiens à répéter que les propositions du livre vert ne constituent pas la politique du gouvernement. Nous croyons qu'il pourrait y avoir une combinaison de prêts et de subventions qui constituerait un système de bons pour les étudiants, un système qui leur donnerait la possibilité d'adapter leurs demandes de financement à leurs besoins financiers en évitant les complications et l'examen des moyens financiers qui vont maintenant de pair avec l'octroi des prêts aux étudiants. Ainsi, il pourrait être beaucoup plus facile d'obtenir des fonds non seulement pour les étudiants qui suivent actuellement des cours, mais également pour les nombreux Canadiens qui sont sur le marché du travail et veulent reprendre leurs études.

Si cela vient compléter en quelque sorte ce que le Parti réformiste propose, nous serions certes heureux d'examiner la question. Cependant, j'invite la députée à soumettre ses idées au comité pour qu'il les mentionne dans son rapport, car notre gouvernement va prendre ce rapport très au sérieux.

* * *

[Français]

LE COLLÈGE MILITAIRE ROYAL DE SAINT-JEAN

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, hier, le ministre des Affaires intergouvernementales a malheureusement fermé la porte à la proposition constructive du maire de Saint-Jean.

Bien plus qu'un simple moratoire, le maire propose une transition permettant au Collège de Saint-Jean de se transformer graduellement en institution civile. Sa proposition a l'avantage d'atténuer l'impact négatif d'une fermeture brutale des activités de formation militaire du collège, tel qu'envisagé par le gouvernement fédéral.

Comment le ministre peut-il refuser de faire preuve d'ouverture d'esprit et de souplesse à l'endroit de la proposition du maire de Saint-Jean qui permet de rencontrer les objectifs de toutes les parties, tout en assurant une transition graduelle?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique, Lib.): Monsieur le Président, la proposition du maire de Saint-Jean contient certaines clauses très utiles, que j'ai vues il y a quelques heures, et auxquelles je vais sûrement réfléchir.

Mais il est faux de dire que la proposition satisfait aux conditions qui étaient posées par le gouvernement du Québec et par le gouvernement canadien. Au point de vue financier en particulier, la proposition du maire de Saint-Jean signifierait que le gouvernement fédéral devrait débourser un montant additionnel d'environ 23 millions de dollars pour trois ans, de façon à obéir au moratoire. Mais nous avons actuellement un compromis qui a été fait entre le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral, un compromis qui assure la survie du Collège de Saint-Jean, un compromis qui continue une présence militaire au Collège de Saint-Jean, un compromis qui permet le passage du Collège militaire à une université civile mixte au cours des prochaines années.

Par conséquent, le compromis que nous avons, qui est une entente signée entre le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral, réussit beaucoup plus à remplir les conditions qui étaient posées et par le gouvernement du Québec et par le gouvernement fédéral. Ceux qui désirent. . .

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je cède maintenant la parole au député de Charlesbourg.

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de voir que le ministre des Affaires intergouvernementales réfléchit à la proposition. Cela veut dire qu'il y aura certainement une évolution.

Comme deuxième question, je voudrais demander au ministre comment peut-il très souvent se réfugier, ainsi que le ministre de la Défense, derrière une économie de 23 millions de dollars en fermant le Collège militaire de Saint-Jean, alors que tous savent très bien que les économies réelles ne seront que de 10 millions de dollars uniquement dans quelques années, à cause de la baisse de la clientèle d'élèves-officiers?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique, Lib.): Monsieur le Président, il ne faut tout de même pas charrier! Ça fait des mois qu'on sait que des épargnes très considérables viendront de la fermeture du Collège de Saint-Jean, car il n'y a plus de besoin d'élèves-officiers en aussi grand nombre qu'il y avait auparavant, parce que la dimension de l'armée diminue.

Nous avons actuellement une entente qui permet de maintenir le Collège de Saint-Jean avec une population et militaire et civile. Nous en sommes venus à un compromis et une entente a


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été signée par le gouvernement du Québec qui permet de réaliser les objectifs des deux parties. Ceux qui veulent briser l'entente, ce sont eux qui sont responsables de la fermeture du collège.

* * *

(1440)

[Traduction]

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale.

Les dossiers d'enquête de la police militaire, dans l'affaire du meurtre de Shidane Arone, révèlent que l'ordre d'agression contre les prisonniers somaliens est venu d'officiers supérieurs. Le major Barry Armstrong, médecin-chef de l'unité en cause, a déclaré que, le 18 avril 1993, un ordre général a été donné à Belet Huen et qu'on lui a ordonné de détruire certaines preuves, dont toutes les photos de patients somaliens. Le major Armstrong dit que certaines photographies ont toutefois été conservées.

Ces événements se sont produits il y a un an et demi. Le ministre reconnaît-il que, puisqu'on allègue encore qu'il y a eu camouflage au plus haut niveau, ces allégations et les preuves devraient faire l'objet d'une enquête publique?

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais rappeler au député et à tous les autres députés de la Chambre que le gouvernement précédent avait déjà ordonné une enquête dans ce dossier. Toutefois, elle a été interrompue lorsque certaines personnes ont été mises en accusation.

L'affaire est pendante devant la cour martiale. Une cause devrait d'ailleurs être entendue en janvier ou février, je crois. J'ai déjà déclaré publiquement que l'enquête se poursuivrait, dès que les procédures judiciaires seraient terminées. Le mandat de l'enquête aura une portée assez grande pour que toutes les questions soulevées par les députés de l'opposition reçoivent une réponse. La personne en cause était effectivement un officier militaire.

Quant aux événements entourant la situation en Somalie, comme je l'ai dit, ils sont devant les instances judiciaires pour le moment. J'ai déjà déclaré à la Chambre qu'il serait inopportun pour moi de faire des commentaires à ce sujet.

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, j'aurais une question complémentaire.

Selon une autre allégation, le 4 mars 1993, le major Armstrong aurait fait l'autopsie de M. Ahmed Affrah Aresh, un autre civil somalien non armé qui a été tué d'une balle dans le dos, comme s'il s'agissait d'une exécution. Des accusations n'ont jamais été portées, et on me dit qu'aucune enquête n'est menée sur la question.

Le ministre convient-il qu'il faudrait enquêter sur cette affaire et qu'il faudrait enquêter également sur le processus que suit la justice militaire dans ce cas? Seul un caporal croupit en prison, soit l'homme qui a fourni les preuves initiales qui justifiaient la tenue d'une enquête.

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je tiens tout d'abord à préciser que la Cour suprême du Canada a jugé le système de justice militaire conforme à la Constitution.

Pour ce qui est des allégations publiées ce matin, la police a ouvert deux enquêtes. Si l'homme en question possède des preuves qu'il a le devoir de communiquer, en tant que membre des forces armées, il devrait mettre ces preuves à la disposition des autorités policières responsables de l'enquête.

* * *

[Français]

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines. Voulant se donner des airs de Robin des bois, le ministre du Développement des ressources humaines prétend, par sa réforme, s'attaquer aux riches chômeurs pour donner davantage aux pauvres en proposant de priver les ménages gagnant plus de 60 000 $ du droit aux prestations d'assurance-chômage tout en exigeant qu'ils continuent de payer des cotisations.

Le ministre reconnaît-il que son projet de réforme de l'assurance-chômage obligera 2,6 millions de ménages gagnant plus de 60 000 $ à payer des cotisations d'assurance-chômage sans avoir droit aux prestations?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je rappelle encore une fois à la députée que le livre vert n'est justement qu'un ensemble de propositions. Il ne contient ni programme, ni politique et constitue simplement un document de travail devant susciter un important dialogue entre Canadiens.

Je ferais remarquer à la députée que lorsqu'elle parle de la nécessité d'aider les chômeurs chroniques, c'est justement ce à quoi tend le livre vert. Il vise à trouver des moyens d'obtenir les ressources nécessaires pour venir en aide à ceux qui sont au chômage depuis longtemps, et notamment leur permettre d'accéder à de bons programmes d'alphabétisation, à du recyclage, à des programmes d'aide au travail indépendant. Cet exercice permettra d'élaborer des moyens de permettre à ces chômeurs de se trouver un nouvel emploi, et de faire du filet de sécurité un tremplin. Il permettra de donner beaucoup plus de possibilités et d'espoir aux sans-emploi.

C'est ce à quoi tend le livre vert et je crois que la députée devrait y souscrire.


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(1445)

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Je désire poser une question complémentaire. Le ministre réalise-t-il qu'en faisant du revenu familial une condition d'accès à l'assurance-chômage, les premières victimes de sa réforme seront les femmes, en les ramenant à une dépendance financière inacceptable envers leur conjoint?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je crois que la députée devrait examiner de plus près le document technique qui a été présenté car elle y trouvera les explications voulues.

Le document indique que selon la proposition visant à créer un système à deux paliers, 70 p. 100 des prestataires d'assurance-chômage ne seraient visés d'aucune façon et que ceux qui reçoivent des prestations de base seraient essentiellement assujettis à la même formule. Seules les personnes qui touchent des prestations d'assurance-chômage chaque année seraient visées.

La différence est importante. En fait, 40 p. 100 des prestataires de l'assurance-chômage avaient et continuent d'avoir fréquemment recours à l'assurance-chômage, de sorte que le programme n'est plus une forme d'assurance, mais un programme de protection du revenu. Les prestations répondent peut-être à un besoin authentique, mais elles ne correspondent plus au principe fondamental de l'assurance. L'assurance-chômage est devenue un programme de protection du revenu et, comme la députée le sait sans doute, chaque programme de ce genre comporte des critères qui font en sorte que les bien nantis, ceux qui ont beaucoup d'argent, ne puissent pas avoir indûment recours au système.

Voilà tout simplement la proposition que nous soumettons à l'opinion des Canadiens et j'aimerais savoir ce qu'en pense la députée.

* * *

[Français]

LE FINANCEMENT DE L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

M. Martin Cauchon (Outremont, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre responsable du Développement des ressources humaines. Toutes sortes d'informations erronées circulent au sujet de la réforme des programmes sociaux, donc du Livre vert, qui soit dit en passant, est un document de discussion. Il y a des gens qui disent que le gouvernement fédéral veut couper jusqu'à 2,3 milliards de dollars de contribution à l'enseignement postsecondaire. Il y a même des gens qui disent que le gouvernement fédéral a des visées centralisatrices au niveau des programmes de prêts aux étudiants.

Est-ce que le ministre responsable du Développement des ressources humaines peut rétablir les faits sur ces questions?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'Économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, il est certainement vrai que de fausses rumeurs circulent, particulièrement dans les publications par les députés de l'autre côté de la Chambre, sur les changements que nous allons apporter au système d'éducation postsecondaire.

Premièrement, on ne veut pas couper l'aide fédérale, on veut l'investir. Comme je l'ai dit plus tôt, si on continue avec le statu quo, il y aura 61 milliards de dollars dépensés pour l'éducation. Mais, si on adopte les propositions fédérales, la combinaison de transferts de points d'impôts et des prêts produira 70 milliards de dollars pour cette période, une augmentation de 10 milliards de dollars pour les fonds d'éducation au Canada.

* * *

[Traduction]

LES CLINIQUES PRIVÉES

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, la ministre de la Santé a invité les cliniques privées de l'Alberta à une bataille rangée. Le ministre albertain de la Santé m'a autorisé à réfuter ces allégations. Quand la ministre propose-t-elle que ce débat ait lieu?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, il s'agit d'une question très sérieuse. Contrairement à ce que le Parti réformiste veut nous faire croire, il n'y a pas de solution miracle.

Je me suis penchée ces derniers mois sur certains problèmes graves et sur les moyens de veiller à ce que les Canadiens aient accès au type de soins dont ils ont besoin au moment opportun, à ce que nous ne créions pas un système qui avantage les riches et les nantis au détriment des malades et du Canadien moyen.

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, je propose que nous en discutions dès aujourd'hui, dans le couloir. Pas le temps? Alors, nous pourrions le faire dans le cadre de l'émission «Newsworld». Pas prêts? Pourquoi pas, dans ce cas, dans le bureau de la ministre, avec tous ses fonctionnaires. . .

Des voix: Oh, oh!

(1450)

Le Président: Heureusement que nous avons déposé nos armes à la porte aujourd'hui. Si le député de Macleod veut bien poser sa question.

M. Hill (Macleod): Elle est simple. La ministre de la Santé a-t-elle peur de discuter avec moi de la question des cliniques privées?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, voici un an que je parle de questions de santé à la Chambre. Je n'ai pas peur d'en discuter avec qui que ce soit dans ce pays.

Je sais exactement où veulent en venir les députés réformistes. Ce n'est ni la politique de ce gouvernement, ni la mienne.


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[Français]

LES PÊCHES

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, lors de la Conférence fédérale-provinciale des ministres des Pêches, tenue à Victoria le 1er novembre dernier, le gouvernement du Québec a formellement réclamé la responsabilité de l'administration des pêches. Rappelons qu'en 1983, le gouvernement libéral avait décidé de façon unilatérale de centraliser la gestion des pêches à Ottawa.

Le ministre des Pêches peut-il nous indiquer s'il entend procéder au réaménagement des responsabilités administratives dans le domaine des pêches au Canada, et dans l'affirmative, entend-il le faire dans le sens des revendications du Québec?

[Traduction]

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. En fait, depuis quelques semaines ou même quelques mois, plusieurs gouvernements du Canada se sont dits désireux d'assumer une plus grande responsabilité dans la gestion des pêches, afin d'assurer la survie des stocks de poisson.

Le gouvernement du Québec est l'un de ceux qui ont exprimé cet intérêt, ayant clairement exposé sa position à une réunion des ministres, tenue à Victoria, il y a quelques semaines. Le gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador a aussi exprimé son intérêt à l'égard de la gestion des pêches en proposant ce qu'il a appelé un modèle de gestion conjointe. Le gouvernement de Colombie-Britannique a exprimé le souhait que des commissions de délivrance de permis et d'attribution de quotas de pêche soient établies dans cette province.

Il est bon de constater le bon vouloir du nouveau gouvernement du Québec. Là-dessus je le félicite sincèrement, comme j'ai déjà félicité le ministre, qui est d'accord avec ses homologues sur la nécessité de se doter de structures efficaces au pays, compte tenu des compressions budgétaires, de trouver des moyens d'éviter les recoupements et les doubles emplois et d'adopter de meilleures politiques de gestion des pêches, le tout grâce à un effort concerté des dix provinces et du gouvernement national.

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, je croyais que ma question était claire, mais je ne suis pas sûr d'avoir reçu une réponse claire.

La question est la suivante: Le ministre entend-il faire un réaménagement de l'administration de la gestion des pêches au Canada? Il y a eu des fuites dans le Globe and Mail il y a trois semaines. On y faisait état qu'il devait y avoir des coupures. Le Québec arrive avec une proposition.

Est-ce que le ministre entend faire des réaménagements dans la gestion des pêches, et dans l'affirmative, seront-elles dans le cadre des revendications du Québec?

[Traduction]

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, en collaborant avec mon collègue et les autres députés intéressés par la question des pêches, ainsi qu'avec toutes les provinces, j'ai certainement l'intention de m'attaquer directement à une réorganisation de ce secteur. Le but ultime de l'entreprise est de préserver la ressource et de veiller au respect des normes. Pour ce faire, il faut aspirer à un plus grand partage des rôles et des responsabilités avec les provinces, y compris la province de Québec. Je suis très ouvert à cet égard, et disposé à étudier la question.

Le député me demande si la proposition de l'une ou l'autre des provinces sera acceptée intégralement, sans modification et sans discussion. Ce ne serait pas conforme à l'esprit du fédéralisme d'agir ainsi. Le fédéralisme est basé sur le respect mutuel, le partage des intérêts, le dialogue et la discussion.

J'ai hâte de poursuivre les dialogues et les discussions fructueuses avec toutes les provinces, y compris le Québec.

* * *

M. ALAN EAGLESON

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, en mars dernier, la Chambre a appris que la GRC enquêtait sur les activités de Hockey Canada et sur M. Alan Eagleson.

Depuis, un grand jury américain a porté 34 chefs d'accusation et le Barreau du Haut-Canada, 41 plaintes contre M. Eagleson.

La GRC n'a même pas encore communiqué avec la principale source de renseignements pour le FBI et le Barreau du Haut-Canada, M. Russ Conway, de Lawrence, au Massachusetts.

(1455)

Ma question s'adresse au solliciteur général. Comment se fait-il que la GRC n'a même pas interrogé M. Conway et pourquoi n'enquête-t-elle pas d'une façon énergique et déterminée?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le solliciteur général ne fait habituellement aucun commentaire sur des enquêtes en cours. Cependant, je peux confirmer que l'enquête se poursuit. J'ai la certitude qu'elle sera menée avec le professionnalisme qui caractérise la GRC.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le solliciteur général actuel et ceux qui l'ont précédé ont fourni la même réponse chaque fois que cette question a été posée à la Chambre depuis 1992.

D'aucuns craignent que, dès que les autorités américaines demanderont l'extradition de M. Eagleson, la GRC s'y opposera en accusant ce dernier d'une peccadille.


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Lorsque les autorités américaines demanderont l'extradition de M. Eagleson aux États-Unis pour y être traduit en justice, le ministre laissera-t-il la procédure d'extradition avoir préséance sur des accusations que la GRC pourrait porter après la demande d'extradition?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le député fait valoir un argument intéressant, soit que les autorités américaines n'ont pas encore demandé l'extradition de M. Eagleson. Si une telle demande est faite, c'est le ministre de la Justice qui devra s'en occuper, et non le solliciteur général.

* * *

INGLIS LIMITÉE

M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

Hier, un représentant de la société Inglis Limitée m'a informé que la société mère, la Whirlpool Corporation, fermera l'usine située dans Cambridge, la circonscription que je représente.

Comme les gens de ma circonscription ont reçu de bonnes et de mauvaises nouvelles au cours de la dernière semaine, le ministre a-t-il des conseils à donner aux travailleurs d'Inglis qui vont perdre leur emploi ainsi qu'aux habitants de Cambridge?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, il est effectivement regrettable que la société Inglis ait décidé de fermer son usine de Cambridge, en Ontario. Cela entraînera des pertes d'emplois. Cette fermeture s'inscrit dans la restructuration des activités de la société qui veut concentrer sa production à son usine principale.

La bonne nouvelle nous est parvenue il y a environ une semaine lorsque la société Toyota a annoncé qu'elle investira 600 millions de dollars dans l'agrandissement de son usine de Cambridge, en Ontario, créant ainsi 1 200 emplois à long terme.

Cette annonce prouve non seulement qu'une des plus grandes sociétés du monde a pleine confiance dans la compétitivité du Canada, mais aussi que les travailleurs canadiens de l'automobile peuvent être productifs et compétitifs et sont capables de fabriquer d'aussi bonnes voitures que n'importe qui.

* * *

[Français]

L'IMMIGRATION

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration.

À la suite des pressions de l'opposition officielle, l'examen des nominations des commissaires à la CISR a démontré que le ministre a reproduit le même système de patronage que le gouvernement précédent. Ce qui a changé, c'est que maintenant, les conflits ouverts entre les différentes factions minent davantage la crédibilité de la commission.

Suite à la démission du directeur exécutif et à la suspension indéfinie du vice-président de la Commission, qu'attend le ministre pour procéder à un véritable ménage au sein de la Commission?

[Traduction]

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, il ne serait pas juste de croire que parce que la nomination d'une personne est remise en doute cette semaine, cela doit rejaillir sur les 211 membres de la CISR.

Il faut reconnaître plutôt qu'il s'agit là d'une importante institution fédérale et chercher à l'améliorer par des réformes et des modifications au lieu de profiter de cette situation pour la démolir.

Il ne serait pas juste de se contenter de dire que le processus de nomination est en place depuis des années.

(1500)

Toutes les nominations ont été publiées dans la Gazette du Canada et ont été évaluées selon les mêmes critères par la CISR. Il faut continuer à apporter des améliorations. Nous en avons proposé au groupe chargé de l'examen des organismes et des programmes. Si le député a d'autres recommandations à faire, nous serons on ne peut plus heureux de les entendre.

* * *

LES DÉPENSES DU GOUVERNEMENT

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de l'Industrie saura que le Bureau de la politique de concurrence du gouvernement a terminé son enquête sur la façon dont le ministère de la Défense nationale adjuge les contrats de déménagement de son personnel. Il a maintenant demandé à ce ministère d'ouvrir le processus d'appel d'offres aux entreprises autres que les quatre grands transporteurs routiers.

Le ministre publiera-t-il un résumé du rapport afin que les entreprises qui voudront soumissionner pour des déménagements à l'avenir soient au courant des nouvelles règles?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, comme le député l'a signalé, le directeur des enquêtes et recherches en vertu de la Loi sur la concurrence a fait des recommandations au comité interministériel responsable des déménagements gouvernementaux. Il a également ajouté que, selon lui, ces recommandations peuvent être rendues publiques.

* * *

LA CHINE

M. Svend J. Robinson (Burnaby-Kingsway, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la secrétaire d'État chargée de l'Amérique latine et de l'Afrique.


7859

La semaine dernière, le premier ministre a annoncé en Chine qu'il appuyait le projet de barrage des Trois-Gorges et la vente de réacteurs Candu à la Chine. Étant donné que la secrétaire parlementaire elle-même et d'autres libéraux ont exprimé une vive opposition à la participation du Canada au projet des Trois-Gorges, qui a été décrit comme une catastrophe économique, sociale et environnementale, et étant donné que la Chine poursuit ses essais nucléaires et continue de se débarrasser de ses déchets en les envoyant au Tibet, comment la secrétaire parlementaire peut-elle justifier que l'on trahisse ainsi des promesses faites par le gouvernement libéral au sujet des Trois-Gorges et de la vente de réacteurs Candu?

L'hon. Christine Stewart (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique), Lib.): Monsieur le Président, notre premier ministre est allé en Chine et il a parlé du projet hydro-électrique des Trois-Gorges avec le président de ce pays. La Chine a décidé de construire le barrage des Trois-Gorges en dépit de notre position sur les questions d'environnement et de droits de la personne. Ces questions continueront de nous préoccuper, en Chine et partout où nous sommes présents.

Cependant, le gouvernement de la Chine demande la collaboration du Canada et nous espérons qu'en la faisant profiter de nos compétences en gestion et de notre expertise technique, nous aurons une influence sur les effets négatifs possibles du projet.

Cependant, il importe de reconnaître que le fleuve Yang Tsé Kiang représente une ressource très importante pour la Chine et qu'il est à la fois porteur de menaces et de possibilités. Ce fleuve a causé des milliers de décès, mais il possède un immense potentiel hydro-électrique et peut aussi être une grande voie navigable jusqu'aux villes de l'intérieur du pays, ce qui est important.

* * *

[Français]

RECOURS AU RÈGLEMENT

L'EXAMEN DE LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE DU CANADA

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, ce recours au Règlement fait suite au dépôt à la Chambre, hier, de deux documents déposés par un des coprésidents, le député d'Ottawa-Vanier, du Comité mixte spécial chargé de l'examen de la politique étrangère.

Le premier document contient le rapport du comité et est signé par les deux coprésidents; le second comprend les opinions dissidentes et les annexes au rapport. L'inclusion des opinions dissidentes dans un document distinct du rapport, signé par les coprésidents du comité, est à notre avis contraire aux règles parlementaires qui régissent le comité et cette Chambre, et cela pour plusieurs raisons.

Nous tenons d'abord à souligner que l'article 108.(1)a) du Règlement de la Chambre autorise les comités à faire rapport sur les questions qui leur sont déférées. Ce même article autorise les comités, et je le cite à la page 63 du Règlement:

. . .à joindre en appendice à leurs rapports, à la suite de la signature de leur président, un bref énoncé des opinions ou recommandations dissidentes ou complémentaires présentées, le cas échéant, par certains de leurs membres.
Cette décision de joindre en annexe un tel énoncé doit faire l'objet d'une motion adoptée par le comité. Tel qu'il appert des procès-verbaux du comité reproduits dans le second document déposé hier, une telle motion a été adoptée à la séance du soir du 2 novembre 1994.

(1505)

Le texte de la motion se lit comme suit, à la page 107 du second document déposé: «Sur motion de Bill Graham, il est convenu: Que le comité permette aux députés du Bloc québécois, du Parti réformiste ou autre, membres du comité, de joindre en annexe au rapport un énoncé de leurs opinions ou de leurs recommandations dissidentes ou complémentaires, pertinentes et proportionnelles à la longueur du rapport, la proportionnalité et la pertinence étant laissées à la discrétion des députés dissidents.»

Nous vous soumettons respectueusement, monsieur le Président, que les documents déposés hier ne respectent pas les prescriptions de l'article 108(1)a) du Règlement, puisque l'énoncé des opinions dissidentes n'est pas présenté à la suite de la signature des coprésidents que l'on retrouve à la fin du rapport dans le premier document. Au contraire, cet énoncé apparaît dans un second document, distinct du premier qui, lui, contient le rapport du comité signé par les coprésidents.

Les opinions dissidentes ne sont en aucun cas jointes au rapport comme l'exigent l'article 108(1)a) du Règlement et la motion adoptée par le comité le 2 novembre 1994. Certains pourraient être tentés d'alléguer que l'énoncé des opinions dissidentes se retrouve à la suite de la signature des coprésidents au sein du deuxième document qui fait partie du rapport du comité.

Nous ne pouvons pas, monsieur le Président, souscrire à de telles prétentions, car une telle façon de faire contrevient, à notre avis, à l'esprit, sinon à la lettre de l'article 108(1)a). En effet, quel est l'intérêt de joindre au rapport du comité les opinions dissidentes de certains membres, si ce n'est de permettre aux lecteurs du rapport de juger du bien-fondé des opinions et recommandations qu'il contient en les comparant avec celles des membres dissidents.

La logique la plus élémentaire veut que ces textes se suivent au sein du même document. En aucun temps, il ne doit être possible à quiconque de consulter ce rapport, sans avoir immédiatement accès, dans le rapport, aux recommandations du rapport minoritaire. C'est d'ailleurs pour cette raison que l'article 108(1)a) prévoit de façon impérative que l'énoncé des opinions dissidentes doit être joint au rapport, à la suite de la signature des coprésidents, sinon un tel énoncé devient tout à fait inutile.

On ne peut invoquer des raisons économiques ou pratiques pour justifier le dépôt en Chambre de deux documents distincts, puisque ce dépôt ne se fonde sur aucune décision du comité. En effet, le comité doit adopter une motion en conformité avec les


7860

règles parlementaires pour que le rapport du comité et l'énoncé des opinions dissidentes puissent être scindés en deux documents.

Selon le paragraphe 552 de Beauchesne, il est de droit parlementaire strict que la Chambre décide de toute question par la mise aux voix d'une motion d'un député. Or, comme l'article 116 du Règlement prévoit qu'un comité doit observer les règles de procédure de la Chambre, le comité devait, de façon impérative, adopter, en conformité avec les règles parlementaires, une motion visant à scinder en deux documents le rapport des opinions dissidentes, s'il considérait opportun, pour des raisons économiques ou pratiques, de le faire.

Or, la motion adoptée par le comité du 2 novembre 1994 qui autorise les députés du Bloc québécois, membres du comité, à joindre au rapport leurs opinions dissidentes ne prévoit pas en aucune façon une telle scission en deux documents. En fait, les procès-verbaux du comité reproduits dans le second document ne font aucunement état d'une telle décision.

En conséquence, on ne peut donc objecter que le comité avait complète discrétion pour inclure les opinions dissidentes dans un second document. Encore une fois, une telle décision aurait dû faire l'objet d'une motion dûment adoptée par le comité et les procès-verbaux ne font pas état d'une telle motion.

En conclusion, monsieur le Président, pour ces motifs, nous vous soumettons respectueusement que le dépôt hier du rapport et des opinions dissidentes en deux documents distincts est contraire aux règles de procédure parlementaire régissant la Chambre des communes et le comité.

La jurisprudence parlementaire établit clairement qu'il est loisible à la Présidence de juger de la recevabilité d'un rapport à tout moment après son dépôt. À cet égard, je désire citer le paragraphe 893 de Beauchesne, à la page 253: «Même s'il a été communiqué à la Chambre, le rapport d'un comité peut être jugé irrecevable.»

(1510)

Le 28 janvier 1991, à la page 2824 des Débats, la Présidence a déjà déclaré une partie de rapport déjà déposé en Chambre irrecevable, voire nulle et sans conséquence. Par conséquent, nous vous enjoignons, monsieur le Président, d'exercer les pouvoir dont vous êtes investis et de déclarer irrecevable le dépôt effectué hier, en Chambre, par l'un des coprésidents du comité; d'ordonner la réimpression du rapport du comité mixte spécial chargé de faire l'examen de la politique étrangère du Canada, afin que les opinions dissidentes apparaissent à la suite de la signature des coprésidents au sein d'un seul document, conformément aux règles parlementaires qui régissent la Chambre et le comité; et enfin, d'ordonner le dépôt de la version réimprimée du rapport, dans les plus brefs délais.

M. Jean-Robert Gauthier (Ottawa-Vanier, Lib.): Monsieur le Président, étant le coprésident de ce comité qui n'existe plus, mais tout de même, j'en prends la responsabilité, je voudrais expliquer à la Chambre les raisons pour lesquelles le coprésident du Sénat et moi-même avons décidé de produire le rapport en volumes séparés, mais c'est un rapport, un simple rapport, qui a été déposé uniquement en cette Chambre et au Sénat, et ce ne sont pas deux rapports.

Le rapport du comité, les opinions dissidentes, les annexes, les essais, les documents, les synthèses, totalisent 1 126 pages. C'est un volume assez important et qui demandait, évidemment, une certaine considération. Nous avons consulté, nous avons réfléchi, nous avons décidé de faire le rapport en deux volumes, deux volumes qui ont été insérés dans une chemise blanche qui indiquait: Rapport du comité et qui a été déposé dans cette Chambre sous cette forme-ci et distribué aux médias sous cette forme.

Nous aurions voulu que l'imprimeur mette un ruban comme celui-ci pour que ça soit plus facile, mais le temps ne le permettait pas et le coût était trop dispendieux. C'est une question, mais il n'est pas tout à fait acceptable de dire que ce sont deux rapports, car il n'y a qu'un rapport. Nous avons donc décidé de faire le rapport en deux volumes. Le premier, qui contient 181 pages, contient le rapport majoritaire; le deuxième, qui contient 202 pages, rapporte les opinions dissidentes du Bloc et du Parti réformiste, ainsi que les annexes.

Nous avons regroupé en un autre volume les 250 pages d'essais préparés par les experts reconnus par le comité, c'est juste, et de plus, un document de synthèse, au nombre de 483 pages, a été rendu disponible, imprimé en feuilles mobiles, afin de limiter les coûts, et ceux qui le veulent peuvent l'obtenir. Les délais d'impression ne permettant pas de relier les volumes par une bande plastique ou de papier, le rapport, qui comprend deux volumes, a été distribué hier dans une pochette, comme je l'expliquais, spécialement conçue et ayant pour titre: Rapport du Comité mixte spécial chargé de l'examen de la politique étrangère du Canada.

Les essais et les documents de synthèse sont donc, quant à eux, distribués sur demande. Dans l'index du volume I, il est très bien indiqué que le rapport comporte deux volumes et décrit le contenu du volume II. Cela prouve bien que l'opinion dissidente fait partie intégrante du rapport du comité. Le Bloc ne devrait voir dans cette présentation que le souci des coprésidents de présenter un format pratique et facile à manier par les lecteurs.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, il est évident qu'aucun parti ici n'a tenté de faire quoi que ce soit pour offusquer des députés de cette Chambre qui se sentent, semble-t-il aujourd'hui, lésés. Tel n'était pas le cas, telle n'était pas l'intention et tel n'est pas le résultat non plus.

Dans un deuxième temps, sans engager un débat avec les députés d'en face, il est évident que les deux volumes sont deux volumes d'un seul rapport.

(1515)

La preuve en est, monsieur le Président, et vous connaissez fort bien les règles de la Chambre, s'il n'y a eu qu'un dépôt, bien sûr, il n'y a eu qu'un rapport.


7861

[Traduction]

Voici en effet ce qu'on peut lire à la page 2, du volume 1: «Le volume 2 renferme les opinions dissidentes, les annexes et les procès-verbaux des délibérations.» Autrement dit, monsieur le Président, le volume 1 renvoie au volume 2, et les deux volumes font partie d'un même rapport, comme l'a expliqué le député d'Ottawa-Vanier.

J'ai fait une proposition au nom de mes collègues, et je tiens à vous en faire part, monsieur le Président. Dans l'éventualité d'une réimpression ou de l'impression d'exemplaires additionnels, si des députés en avaient besoin pour la Chambre ou pour le comité ou même pour qui que ce soit aux fins de diffusion, je ne m'opposerais pas à faire procéder à cette nouvelle impression en englobant les deux documents en un seul volume si cela était possible pour les services d'impression.

Je ne préconise évidemment pas qu'on détruise les exemplaires imprimés jusqu'ici. Tout d'abord, je le répète, cela a été fait sans mauvaise intention, et on n'a rien fait de mal. Il n'y a donc aucune raison de reprendre les exemplaires déjà imprimés. Si cela pouvait cependant faire plaisir à nos vis-à-vis, et s'il était nécessaire d'imprimer d'autres exemplaires du rapport, je ne m'opposerais certainement pas à ce que les deux documents soient réunis en un seul volume.

[Français]

Certains disent qu'il est peut-être trop tard. Non, il n'est pas trop tard; il n'y a rien de mal avec les rapports qui sont là. Tout ce que j'indique aux députés d'en face, c'est que si cela peut leur faire plaisir, si cela peut les satisfaire, on est prêts à collaborer dans l'éventualité où il faudrait des copies supplémentaires. Il n'y a pas lieu de dire qu'il est trop tard. Au contraire, il n'y a eu aucune malice, aucune mauvaise intention, et bien sûr, aucun résultat qui soit mal.

D'ailleurs, si j'ai bien compris les discussions informelles d'hier, deux des trois partis en Chambre étaient d'accord pour garder le rapport tel quel.

[Traduction]

Enfin, au cas bien improbable où quelqu'un croirait encore par erreur que ces deux volumes constituent deux rapports, le président du comité a pris la peine de faire imprimer au cours de la fin de semaine une couverture spéciale pouvant contenir les deux volumes de sorte que plus personne ne puisse considérer, même par inadvertance, ces deux volumes comme deux rapports distincts.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, à propos du même rappel au Règlement, je suis d'accord avec mon collègue du Bloc québécois pour dire que les dispositions prises pour la publication et la diffusion de ce rapport laissent à désirer.

En effet, il compte deux volumes, mais aucune indication sur la page couverture ne précise lequel est le premier ou le deuxième. Il faut parcourir la table des matières pour constater qu'il y a effectivement un deuxième volume, et même alors, il est difficile de savoir lequel est le premier volume et lequel est le deuxième.

Comme une réimpression complète coûterait cher, je propose qu'on ajoute sur les exemplaires non encore distribués une indication claire, au moyen d'un timbre ou d'un autocollant, disant que tel volume est le premier, et que le deuxième contient les rapports minoritaires.

Il est essentiel de signaler clairement aux lecteurs du rapport qui reçoivent le premier volume qu'il y a aussi deux rapports minoritaires, celui du Bloc québécois et celui du Parti réformiste. Si les dispositions voulues ne sont pas prises, le grand public et les lecteurs ne sauront jamais que d'autres propositions ont été avancées.

[Français]

M. Gauthier (Roberval): Sur le même recours au Règlement, monsieur le Président, vous me permettrez peut-être d'ajouter quelques précisions supplémentaires qui sont de l'ordre suivant. On reconnaît qu'il y a eu une façon de procéder inadéquate. Le comité aurait pu, étant donné l'ampleur du rapport, regrouper le tout dans un document de quelque 400 pages, ce qui se voit régulièrement, ou publier un rapport complet en français et sa traduction complète en anglais. Cela aurait rendu justice à tout le monde.

Il m'apparaît que non seulement les raisons invoquées par le parti ministériel sont absolument inacceptables, mais qu'en plus, on n'a démontré d'aucune façon que le Règlement avait été respecté dans ce cas.

(1520)

Or, je vous ai démontré avec force les arguments que le Règlement avait été bafoué, non respecté, que le rapport ne répondait pas aux impératifs exigés par le Règlement et que le président du comité, s'il avait voulu faire preuve de bonne foi, aurait pu réunir son comité et adopter les résolutions nécessaires pour procéder comme il l'a fait.

En conséquence, je vous demande de rendre une décision dans le sens de ce qu'on vous a demandé antérieurement.

[Traduction]

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je crois que les observations faites par le whip en chef du gouvernement et par le député d'Ottawa-Vanier suffisent amplement à régler cette question.

Elles montrent très clairement que, même si une plainte a été formulée, un rappel au Règlement ou une question de privilège ne sont pas justifiés à la suite de la publication d'un rapport en deux volumes. À mon avis, il arrive fréquemment que des rapports soient publiés en plusieurs volumes. Nous avons ici un rapport qui, avec les appendices, représente cinq volumes. C'est ce que l'on distribue aux députés qui en font la demande.

Il y a un autre aspect technique que j'inviterais la présidence à considérer lorsqu'elle étudiera cette question. Le paragraphe 108(1) du Règlement, qui autorise la présentation d'opinions dissidentes et qui a été modifié durant la dernière législature, en grande partie à l'instigation des députés de son parti, ne vise que les comités permanents.

7862

Il est en l'occurrence question du rapport d'un comité mixte spécial. Si une opinion dissidente a pu être énoncée, c'est parce que le député d'Ottawa-Vanier et les membres du comité ont bien voulu appliquer cette disposition à un comité mixte spécial, sinon elle ne se serait pas appliquée.

Cette disposition du Règlement n'a été modifiée qu'à l'égard des comités permanents. Elle ne s'est jamais appliquée à autre chose. C'est en fait un privilège spécial que le député d'Ottawa-Vanier et coprésident de ce comité mixte spécial a eu la magnanimité d'accorder.

Je m'étonne que des plaintes soient formulées aujourd'hui, alors que les opinions ou les rapports dissidents sont très longs. À mon avis, les opinions dissidentes sont presque aussi longues que le rapport. Le deuxième volume est plus épais que le rapport lui-même.

Je ne suis pas surpris que le rapport ait été divisé en deux volumes et je crois que le whip en chef du gouvernement et le député d'Ottawa-Vanier ont expliqué d'une manière satisfaisante pourquoi on avait procédé ainsi.

[Français]

Le Président: J'aimerais remercier l'honorable député de Roberval d'avoir soulevé cette question.

[Traduction]

Je remercie également le député d'Ottawa-Vanier, le whip du gouvernement et, bien sûr, le secrétaire parlementaire, de même que le leader parlementaire du Parti réformiste. Vous consentirez tous, j'en suis sûr, à accorder à votre Président un peu de temps pour examiner tout ce qu'il a en main. Si je le juge nécessaire, je ferai rapport de ma décision à la Chambre.

J'examinerai tous les renseignements qui m'ont été remis et je m'informerai également du Règlement. Avec votre autorisation, je ferai rapport à la Chambre dès que possible, si cela se révèle nécessaire.

_____________________________________________


7862

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

DÉCRETS DE NOMINATION

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, quelques décrets annonçant les nominations faites par le gouvernement.

Conformément au paragraphe 110(1) du Règlement, ces décrets sont renvoyés d'office aux comités permanents compétents énumérés dans la liste jointe.

[Français]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, les réponses du gouvernement à cinq pétitions.

* * *

[Traduction]

LA QUARANTIÈME CONFÉRENCE PARLEMENTAIRE DU COMMONWEALTH

M. Bob Speller (Haldimand-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre, dans les deux langues officielles, un rapport concernant la 40e Conférence parlementaire du Commonwealth qui a eu lieu à Banff, en Alberta, du 4 au 18 octobre 1994.

* * *

(1525)

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

JUSTICE ET AFFAIRES JURIDIQUES

Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les langues officielles, le quatrième rapport du Comité permanent de la justice et des affaires juridiques.

Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, votre comité a étudié les documents regroupés sous le titre «Avant-projet de modification du Code criminel et du Tarif des douanes concernant les cartes et les jeux de société concernant des crimes» et a convenu d'en faire rapport avec trois recommandations.

Cette étude a été faite à la suite des préoccupations exprimées à l'égard de la glorification des tueurs en série par le truchement d'un jeu de société et de cartes illustrant leurs méfaits. La Chambre a reçu de nombreuses pétitions à ce sujet.

Le comité a étudié l'avant-projet de loi. Il recommande maintenant d'aborder de façon plus générale la glorification de ces tueurs et l'exploitation des actes d'horreur, de cruauté et de violence et d'étendre la portée des dispositions du Code criminel concernant l'obscénité dans un effort législatif plus concerté. Il propose également un préambule, ainsi que des dispositifs de protection et autres moyens particuliers de défense.

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, dans son opinion dissidente au rapport du Comité de la justice et des questions juridiques, le Bloc québécois souligne


7863

que l'exploitation de la violence ne peut laisser personne indifférent. Sans l'ombre d'un doute, les cartes et jeux de société (série noire) nient nos valeurs fondamentales et violent de façon honteuse la mémoire des victimes brutalisées et tuées.

Les témoins nous ont indiqué qu'ils n'avaient pu prendre connaissance de ces cartes et jeux de société de tueurs en série avant que le comité leur en fournisse des spécimens. Il en était de même pour la plupart des députés fédéraux qui s'opposaient à l'importation et à la fabrication de ces cartes de tueurs en série. Ils admettaient ne les avoir jamais vues.

On se demande alors comment un phénomène aussi marginal que les cartes et jeux de société (série noire) puisse occuper les membres du comité pendant des mois. De toute évidence, cette façon de procéder manque de sérieux.

Nous croyons donc fermement que ce comité devrait s'occuper davantage des questions liées à la violence réelle plutôt qu'à la violence hypothétique d'éditeurs crapuleux.

* * *

LOI ANNULANT LA DÉCLARATION DE CULPABILITÉ DE LOUIS DAVID RIEL

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ) demande à présenter le projet de loi C-288, intitulé: Loi annulant la déclaration de culpabilité de Louis David Riel.

-Monsieur le Président, il y a 109 ans aujourd'hui, Louis David Riel était pendu. Le 22 novembre 1885, réagissant à cette pendaison, environ 50 000 personnes se rassemblèrent aux Champ-de-Mars, à Montréal, et entendirent le célèbre cri d'Honoré Mercier: «Riel, notre frère, est mort.»

Aujourd'hui, je dépose un projet de loi intitulé «Loi annulant la déclaration de culpabilité de Louis David Riel». Rappelons quelques faits. Afin de s'assurer d'un verdict unanime, le premier ministre Macdonald fit juger Riel à Regina plutôt qu'à Winnipeg. Le jury était composé exclusivement d'anglophones protestants. Pour se justifier, le Cabinet, dans un rapport à la Chambre, alla même jusqu'à falsifier le rapport du Dr Valade qui stipulait que Riel n'était pas responsable, pour cause de folie.

En fait, le procès a été entaché d'irrégularités et Riel a été sacrifié par Macdonald au puissant lobby ontarien. Riel a été pendu parce qu'il était Métis, parce qu'il était francophone, parce qu'il s'était porté à la défense d'une société distincte.

Il est important de se rappeler. . .

Le vice-président: J'espère que la députée et tous les députés voudront respecter le Règlement qui stipule qu'on doit faire un sommaire très bref, sinon nous allons y passer tout l'après-midi. Alors, une phrase de plus.

Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Refuser de regarder, c'est refuser de comprendre le présent, c'est refuser de se donner un avenir.

(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

(1530)

[Traduction]

PÉTITIONS

L'ÉTHANOL

M. Rex Crawford (Kent, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais aujourd'hui présenter trois pétitions. La première, que je présente conformément à l'article 36 du Règlement, est signée par des habitants de ma circonscription qui demandent au gouvernement de faire, maintenant qu'il est au pouvoir, ce qu'il préconisait du temps où il faisait partie de l'opposition, c'est-à-dire appuyer la création, au Canada, d'une industrie de l'éthanol de classe internationale, étant donné que l'éthanol est une ressource renouvelable, durable et respectueuse de l'environnement, que cela crée des emplois et aide nos régions rurales.

Il y a, à Chatham, une usine de production d'éthanol de 200 millions de dollars qui attend l'aide du gouvernement. Cette usine pourrait être vingt fois plus importante que toute autre usine qui existe actuellement au Canada.

L'AVORTEMENT

M. Rex Crawford (Kent, Lib.): Monsieur le Président, dans la deuxième pétition, mes électeurs soulignent que la société canadienne n'accorde aucune protection à l'enfant à naître. Ils demandent au Parlement de modifier immédiatement le Code criminel afin d'étendre à l'enfant à naître la protection dont bénéficient tous les êtres humains.

La dernière pétition que je présente aujourd'hui vient d'électeurs de Kent qui affirment que la société canadienne ne protège pas la vie humaine avant la naissance. Les pétitionnaires prient le Parlement d'agir immédiatement et de modifier le Code criminel pour assurer à l'enfant à naître la même protection que celle dont jouissent les êtres humains vivants.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Joe McGuire (Egmont, Lib.): Monsieur le Président, j'ai trois pétitions à présenter, en vertu de l'article 36 du Règlement, au nom de mes électeurs d'Egmont.

La première concerne l'orientation sexuelle. Les pétitionnaires prient le Parlement de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne de quelque façon que ce soit qui pourrait témoigner d'une certaine approbation sociale des relations entre personnes de même sexe, ou de l'homosexualité, et notamment de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne en ajoutant aux motifs illicites de discrimination l'expression non définie d'«orientation sexuelle».

L'EUTHANASIE

M. Joe McGuire (Egmont, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième pétition porte sur l'euthanasie. Les pétitionnaires demandent au Parlement de veiller à ce que les dispositions actuelles du Code criminel du Canada interdisant le suicide assisté soient vigoureusement appliquées et de ne pas apporter de modifications à la loi qui auraient pour effet de sanctionner ou de permettre l'aide au suicide ou l'euthanasie passive ou active.

L'AVORTEMENT

M. Joe McGuire (Egmont, Lib.): Monsieur le Président, la dernière pétition demande au Parlement de prendre immédiatement des mesures pour modifier le Code criminel et assurer aux enfants à naître la même protection que celle dont jouissent les autres être humains.


7864

LA JUSTICE

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je suis heureux de déposer la pétition suivante, signée par 2 340 Canadiens de toutes les régions. Le document est passablement volumineux.

Les signataires demandent que la pétition soit portée à l'attention du Parlement en mémoire de Dawn Shaw, une fillette de six ans qui a été assassinée dans ma circonscription, Comox-Alberni.

Les pétitionnaires demandent que le Parlement adopte une loi modifiant le système judiciaire, qui aurait pour effet de mieux protéger les enfants contre les agressions sexuelles et d'assurer la condamnation des coupables.

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter une pétition au nom de 51 Albertains, dont beaucoup sont de ma circonscription.

Les pétitionnaires demandent que le Parlement veille à ce que les dispositions actuelles du Code criminel du Canada interdisant l'aide au suicide soient appliquées rigoureusement et qu'il n'apporte à la loi aucune modification qui ait pour effet d'approuver l'aide ou l'encouragement au suicide ou l'euthanasie passive ou active.

Je suis heureux non seulement de présenter la pétition, mais aussi d'y souscrire.

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, j'ai trois pétitions à présenter aujourd'hui. La première est signée par 61 habitants de la ville de Frankfurt, en Ontario.

(1535)

Les pétitionnaires prient le Parlement de s'assurer que les dispositions actuelles du Code criminel du Canada interdisant le suicide assisté soient rigoureusement appliquées, et de n'apporter à la loi aucune modification qui sanctionnerait ou permettrait l'aide ou l'encouragement au suicide, ou encore l'euthanasie active ou passive.

LE CRTC

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, ma deuxième pétition me vient de la même localité et porte sur le contenu de la programmation télévisée.

Les signataires demandent qu'il plaise au Parlement de veiller à ce que le CRTC reconnaisse qu'il n'est pas nécessaire que les divertissements présentés aux Canadiens soient choquants. Le langage ordurier, la violence excessive et les scènes d'activité sexuelle explicites n'apportent rien de plus à une programmation de qualité.

L'AVORTEMENT

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, la troisième pétition m'a été envoyée par des habitants de Lanark et de Perth, en Ontario. Les pétitionnaires prient le Parlement de modifier immédiatement le Code criminel pour étendre l'application des dispositions assurant la protection des êtres humains aux êtres humains qui ne sont pas encore nés.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le vice-président: Toutes les questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

* * *

DEMANDES DE DOCUMENTS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que l'avis de motion portant production de documents soit reporté.

Le vice-président: L'avis de motion portant production de documents est-il reporté?

Des voix: D'accord.

* * *

[Français]

LE DÉCÈS DE L'HONORABLE EUGÈNE MARQUIS

M. François Langlois (Bellechasse, BQ): Monsieur le Président, c'est avec regret mais sérénité que nous avons appris hier le décès de l'honorable Eugène Marquis qui a représenté la circonscription de Kamouraska en cette Chambre.

M. Marquis est né à Saint-Alexandre de Kamouraska en 1901. Il était le fils de Joseph Marquis et d'Eveline Michaud. Après avoir complété ses études classiques, Eugène Marquis a reçu sa licence en droit de l'Université Laval. Après avoir été admis au Barreau du Québec, il a été substitut du procureur général de la province de Québec.

En 1931, Eugène Marquis a épousé, à Sainte-Claire de Dorchester, Véronique Chabot qui est également ma tante, étant la soeur de ma mère. Étant appelé vers la politique, il s'est présenté à l'élection générale de 1945 sous la bannière du Parti libéral du Canada, alors que le très honorable William Lyon Mackenzie

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King était premier ministre de ce pays, et les électeurs et électrices de Kamouraska lui ont accordé leur confiance. Cette confiance a été renouvelée à l'élection suivante, à celle de 1949, alors que le très honorable Louis Saint-Laurent était premier ministre du Canada.

Le 24 août 1949, sur la recommandation du premier ministre du Canada, l'honorable Eugène Marquis était nommé membre de la Cour supérieure du Québec et il devait terminer sa carrière à la Cour supérieure du Québec comme juge en chef associé de cette cour.

Me Marquis a eu une carrière, tant comme avocat civiliste que criminaliste, et tous et toutes ont pu reconnaître chez lui, lorsqu'il était membre de la magistrature ou en pratique privée, comme représentant de l'État ou comme substitut du procureur général, ses grandes qualités humaines.

J'ai l'honneur de partager avec M. Marquis quatre paroisses qui, lorsqu'il était député, faisaient partie de sa circonscription et qui sont maintenant de la circonscription de Bellechasse. Il s'agit de Saint-Damase-des-Aulnaies, de Tourville, de Sainte-Perpétue et de Saint-Omer. Eugène Marquis s'est également impliqué au niveau des Chevaliers de Colomb où il a apporté une collaboration précieuse pour l'avancement de la mission sociale de cet organisme.

À ses enfants, Monique, Louise, Yves, Michel et Jean, j'offre mes plus sincères condoléances, de même qu'à ses collègues du Barreau du Québec et ses confrères et consoeurs de la magistrature québécoise et canadienne.

(1540)

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais moi aussi exprimer le regret des députés de notre parti pour le décès de M. Marquis. Je sais bien que l'honorable député de Bellechasse est le neveu de ce gentilhomme. Je regrette pour lui, pour sa famille et pour la famille du défunt que cet événement se soit produit aujourd'hui. Je transmets à l'honorable député tout le respect que les députés de cette Chambre portent aux anciens députés et cela s'applique certainement à ce député de Kamouraska qui a bien servi son pays il y a longtemps. J'exprime, au nom de tous les députés de ce côté de la Chambre, nos plus sincères condoléances, ainsi qu'à sa famille.

[Traduction]

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, au nom de tous les députés réformistes, je voudrais offrir mes condoléances à la famille d'un ancien député de la Chambre des communes, M. Eugène Marquis.

Même si aucun député de notre parti ne l'a connu personnellement, je sais que M. Marquis était agriculteur et ceux d'entre nous qui sont agriculteurs se sentent près de lui. Notre parti offre toutes ses condoléances aux membres de sa famille. Nous savons qu'il était très attaché au Canada et qu'il était en faveur d'un Canada uni et fort avant que des préoccupations ne surgissent à ce sujet, plus récemment. Nous le remercions donc de cet attachement et de tout ce qu'il a pu faire pour notre pays.

[Français]

Le vice-président: J'aimerais aussi transmettre mes plus sincères condoléances à la famille d'un de nos anciens collègues.

_____________________________________________


7865

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

La Loi sur le ministère du Patrimoine canadien

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 15 novembre, de la motion: Que le projet de loi C-53, Loi constituant le ministère du Patrimoine canadien et modifiant ou abrogeant certaines lois, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de reprendre le débat sur le projet de loi C-53, loi constituant le ministère du Patrimoine canadien.

La mesure législative proposée constituera officiellement en droit ce nouveau ministère. En fait, il y a plus d'un an que ce ministère a été formé à partir d'éléments de cinq ministères fédéraux distincts-pas moins, ceci dans le cadre des efforts du gouvernement en vue de rationaliser la structure du système fédéral.

La période qui s'est écoulée entre la constitution de ce ministère dans la pratique et sa constitution en droit a, c'est le moins qu'on puisse dire, été très intéressante et stimulante non seulement pour le nouveau ministère, mais aussi pour le gouvernement et, bien sûr, pour le pays tout entier.

Les différents secteurs du ministère du Patrimoine canadien ont dû se faire à la nouvelle organisation. Dans bien des cas, il a fallu briser les liens établis avec l'ancienne organisation et en créer de nouveaux avec les diverses entités fusionnées pour créer le nouveau ministère du Patrimoine canadien.

Prenons Parcs Canada, un exemple qui m'intéresse. Parcs Canada, qui faisait auparavant partie du ministère de l'Environnement, relève maintenant du nouveau ministère dont il représente un secteur actif et vital. C'est le gardien de nos parcs et de nos sites historiques nationaux, qui ensemble constituent certains des éléments les plus précieux de notre patrimoine naturel et culturel.

Certains ont remis en question le bien-fondé du transfert de Parcs Canada au ministère du Patrimoine canadien. À mon avis, il est logique que ce programme relève d'un ministère qui se consacre à la protection de notre patrimoine.

(1545)

Les lieux historiques et les parcs nationaux sont des expressions tangibles de notre culture et des réalités géographiques qui aident à donner aux Canadiens une perspective unique sur leur environnement naturel.


7866

Il me semble qu'il y a une relation spéciale entre les Canadiens, les autochtones, les immigrants et l'environnement. Elle se dégage du Service canadien des parcs et fait donc partie de notre patrimoine.

En écoutant les divers députés qui sont intervenus au sujet de ce projet de loi, tant du côté ministériel que du côté de l'opposition, ce qui m'a frappé, c'est la nature fondamentale des sentiments exprimés. En fait, ce nouveau ministère, le ministère du Patrimoine canadien, est responsable de domaines qui touchent une corde très sensible chez tous les Canadiens.

Le ministère du Patrimoine canadien-un nouveau ministère dont j'aime beaucoup le nom-s'occupe de toutes les choses qui nous définissent et nous distinguent des autres pays du monde. Tous ceux qui prennent le temps d'examiner la question ne peuvent être qu'impressionnés par l'éventail et la diversité des domaines dont le nouveau ministère est responsable.

Je n'entends pas les énumérer tous, mais je voudrais mentionner certains des principaux secteurs pour la gouverne de ceux qui suivent notre débat. J'ai déjà parlé du Service canadien des parcs. Ce nouveau ministère est également responsable des arts, de la radiodiffusion, de la conservation du patrimoine, des industries culturelles, y compris le film, la vidéo, l'enregistrement sonore et l'édition.

Il s'occupe, en outre, des programmes fédéraux destinés à faire la promotion des langues officielles, de la poursuite de l'excellence dans le sport amateur, chose qui, monsieur le Président, nous intéresse tous deux beaucoup, de la promotion de notre diversité culturelle et de l'encouragement de la pleine participation de tous les Canadiens à l'essor de notre société.

En bref, le ministère du Patrimoine canadien est actif dans les domaines qui ont pour objectif commun la promotion de l'identité canadienne. Je pense que tous ceux qui nous écoutent doivent se sentir touchés par l'un ou l'autre de ces domaines d'intérêt qu'on confie à ce nouveau ministère et que je viens de mentionner. Je sais que, pour ma part, dans ma circonscription, Peterborough, même si je ne suis député que depuis peu, j'ai déjà eu des entretiens personnels avec des électeurs au sujet de presque tous les domaines de notre patrimoine que j'ai mentionnés.

Comme on peut le constater, la mesure législative dont nous discutons créera officiellement un ministère fédéral dont les programmes touchent tous les Canadiens. Ce ministère est un amalgame très riche de divers secteurs. En fait, je crois que le ministre du Patrimoine canadien a le privilège de diriger l'un des nouveaux portefeuilles les plus emballants et les plus stimulants.

Le sens du mot «patrimoine» varie selon les gens. Toutefois, une chose est très claire pour tous les députés à la Chambre, surtout cette année et par les temps qui courent: notre patrimoine est important et le ministère qui en est responsable est nécessairement important pour le pays, aujourd'hui et toujours. Je n'ai aucun doute que le nouveau ministère du Patrimoine canadien jouera un rôle utile et vital dans l'arène fédérale en réalisant le mandat que lui a confié le Parlement.

Même si le projet de loi dont nous sommes saisis n'est qu'une formalité destinée à confirmer légalement la création du ministère, à mon avis, il reflète l'esprit visionnaire et éclairé du gouvernement. C'est une mesure qui rendra service à nos enfants et ils nous en seront reconnaissants. Selon moi, ce ministère fera en sorte que le Canada demeurera un pays exemplaire pour tous les autres, une nation érigée sur ses fondations autochtones et qui a suffisamment confiance en sa propre identité pour accueillir tous les peuples de la terre, non seulement en acceptant leurs différences culturelles, mais aussi en reconnaissant leur valeur à titre d'exemples vivants de l'expression humaine qui nous lie au passé et aux autres nations de la planète et qui nous procure l'assise et la certitude dont nous avons besoin pour envisager l'avenir avec confiance.

(1550)

J'ai noté que certains députés s'interrogeaient sur la logique de la répartition des responsabilités, c'est-à-dire la radiodiffusion au ministère du Patrimoine canadien et la politique sur les télécommunications au nouveau ministère de l'Industrie. Ces députés prétendent s'inquiéter parce que cette structure pourrait limiter l'action du gouvernement dans ces deux secteurs vitaux. Je peux seulement répondre que la vérité est tout autre.

Les Canadiens peuvent avoir l'assurance que les deux ministères collaborent et unissent leurs efforts pour trouver des façons innovatrices et efficaces de réaliser chacun leur mandat.

Il suffit, pour s'en rendre compte, de s'arrêter à la dernière annonce de mes deux collègues, le ministre du Patrimoine canadien et le ministre de l'Industrie, concernant la demande que le gouvernement a faite à la Commission de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes pour solliciter des avis sur de nombreuses questions de réglementation et de politiques touchant la mise en oeuvre de l'autoroute de l'information et en faire rapport.

Les deux ministres estiment que les intérêts de toutes les parties, c'est-à-dire les consommateurs, les entrepreneurs, les créateurs, bref, à peu près tout le monde, seront défendus au mieux dans le cadre d'un processus de collecte d'informations ouvert et transparent.

Le gouvernement a donc demandé au CRTC de se pencher sur certains dossiers, comme la réglementation et les nouveaux services, les démarches dans le sens de la réalisation des objectifs de la Loi sur la radiodiffusion, le rôle de ces nouveaux services et le passage à un environnement de saine concurrence entre les divers partenaires de l'autoroute de l'information, notamment les compagnies de télédistribution et de téléphone.

Il est trop facile de se tordre les mains et de s'arracher les cheveux en clamant que les deux ministères ne seront pas en mesure de remplir chacun leur mandat. Les gens qui se conduisent ainsi ont des oeillères et refusent de voir ce qu'on peut accomplir avec de la volonté et des efforts.


7867

Nous avons entendu plusieurs députés, qui se sont prononcés sur ce projet de loi, parler de l'aube de ce qu'il est convenu d'appeler l'âge de l'information, de ce que cela signifie pour nous, aujourd'hui, et pour nos enfants demain. Certes, nous ignorons ce que l'avenir nous réserve, mais, chose sûre, ces adaptations sont des gages de réussite.

En ce qui concerne la viabilité de notre secteur culturel, le gouvernement s'engage à ce que les services à contenu canadien soient fortement présents sur l'autoroute de l'information, aussi bien sur le plan visuel que sur le plan sonore.

À mon avis, le débat à l'étape de la deuxième lecture s'est révélé à la fois intéressant et révélateur, intéressant en raison de l'étendue et de la portée des questions débattues, et révélateur puisqu'il a mis en évidence les différences fondamentales qui existent entre le point de vue du gouvernement et celui des députés des partis d'opposition.

Le négativisme qu'ont exprimé les opposants à ce projet de loi contraste de façon marquée avec l'assurance dont a fait preuve le gouvernement en déposant cette mesure législative et les diverses autres mesures qui institueront les autres grands ministères.

La manifestation de notre patrimoine national n'a jamais été aussi importante qu'à l'heure actuelle. Les mesures que le gouvernement a prises à cet égard reposent sur un sentiment d'optimisme face à l'avenir, je dis bien d'optimisme face à l'ingéniosité, à la compétence et à l'énergie constantes de nos compatriotes canadiens, pour que nous puissions assurer un avenir florissant et prospère à notre pays.

Je tiens à assurer à tous les Canadiens que leur gouvernement est déterminé à les servir avec toute l'efficacité et toute la compétence possibles.

Monsieur le Président, je vous remercie de m'avoir accordé la parole, et j'espère que ce projet de loi sera adopté rapidement.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, je parlerai aujourd'hui du projet de loi C-53, qui constitue le ministère du Patrimoine canadien. Dans mon premier discours à la Chambre au sujet du projet de loi, j'avais parlé du multiculturalisme et du droit d'auteur. Je traiterai aujourd'hui du système des parcs nationaux. Quoique fondamentalement différents, ces secteurs relèvent tous de la responsabilité et de la compétence de Patrimoine Canada.

(1555)

Je continue de me demander pourquoi Parcs Canada relève maintenant du ministère du Patrimoine canadien. Il est vrai que les parcs nationaux constituent une source d'information pour tous les Canadiens au sujet de l'histoire et de la culture canadiennes; mais les 35 parcs et réserves nationaux me semblent avoir une plus grande importance sur le plan environnemental. Avant le dépôt de ce projet de loi par le gouvernement précédent, Parcs Canada relevait du ministère de l'Environnement.

Dans ses «Principes directeurs et politiques de gestion», Parcs Canada indique qu'il contribue à «façonner le sens collectif de l'identité et de la fierté nationales au Canada. Nous célébrons ce précieux patrimoine par les lieux historiques nationaux, les réserves et les parcs nationaux, les gares ferroviaires patrimoniales, les canaux historiques, les aires marines nationales, les rivières du patrimoine canadien, les édifices fédéraux à valeur patrimoniale et les plaques historiques».

Parcs Canada a redéfini le but qu'il poursuit de la façon suivante: «Assumer les responsabilités nationales et internationales en matière de reconnaissance et de conservation du patrimoine dans les aires assignées, et commémorer, protéger et mettre en valeur, directement et indirectement, des aspects représentatifs du patrimoine culturel et naturel du Canada afin d'en favoriser la compréhension, l'appréciation et la jouissance par le public, de manière à en assurer à long terme l'intégrité commémorative et écologique».

La loi de 1930 sur les parcs nationaux stipulait que: «Les parcs sont créés à l'intention du peuple canadien pour que celui-ci puisse les utiliser pour son plaisir et l'enrichissement de ses connaissances; ils doivent être entretenus et utilisés de façon à rester intacts pour les générations futures.»

Au fil des ans, le mandat et le but de Parcs Canada ont mis davantage l'accent sur la question plus générale de la protection de l'environnement, accordant moins d'importance à l'utilisation des parcs par le public. L'assujettissement des parcs à l'autorité du ministère du Patrimoine canadien m'amène à poser la question suivante: Les préoccupations environnementales de Parcs Canada risquent-elles de se perdre au milieu des questions patrimoniales?

Tout au long de son histoire, Parcs Canada a dû relever les mêmes défis, soit assurer l'équilibre entre le développement, la protection et la préservation de l'écosystème, et le financement, l'administration et la responsabilité financière du système de parcs.

Je voudrais en savoir plus au sujet des préoccupations des gens qui vivent près des parcs et y trouvent leur gagne-pain. Nos parcs des Rocheuses sont célèbres dans le monde entier et les gens viennent de partout pour les voir. Le tourisme a des retombées économiques qui se chiffrent dans les centaines de millions de dollars et il crée des centaines d'emplois directs.

Cet été j'ai rencontré des gens des parcs nationaux de Banff, Jasper et Waterton. Le plus grand défi pour les parcs de nos jours est de trouver un juste équilibre entre le développement et la protection des écosystèmes. Il n'y a pas de doute que Parcs Canada contribue à la culture et au patrimoine canadiens. Le développement des ressources des parcs permet de donner aux visiteurs des renseignements qui les aident à comprendre et à apprécier notre patrimoine naturel et culturel. Ce développement nourrit aussi ceux qui vivent et travaillent dans ces endroits.


7868

Étant donné que l'activité commerciale est fonction de l'attrait des beautés naturelles de nos parcs, la protection des écosystèmes fragiles est aussi importante pour ceux qui vivent du tourisme que pour les écologistes.

Le gouvernement continue à ne rien faire en prétendant qu'il consulte le public sur de nombreuses questions. Il en va de même pour les parcs. Actuellement, rien que pour les parcs des Rocheuses de l'Alberta et de la Colombie-Britannique, il y a de nombreux examens, notamment celui des quatre parcs nationaux, et des mises à jour des plans quinquennaux, associées à des études distinctes, pour les parcs de Banff, Jasper, Yoho et Kootenay. Il y a aussi l'étude de la vallée de la Bow dans le parc de Banff, le développement dans cette vallée étant interrompu pour deux ans. On procède à un examen opérationnel pour les villes de Waterton, Jasper, Wasagaming, Waskesiu, Field et Lake Louise; à une étude sur la fermeture des pistes aériennes de Jasper et de Banff; à la mise à jour du plan d'action concernant Lake Louise et à une étude sur le dédoublement de la transcanadienne dans sa traversée des parcs. C'est symptomatique d'un gouvernement perdu dans l'examen, la discussion et l'étude. Mais, est-ce un gouvernement qui écoute? Je n'arrête pas de poser la question. Toutes ces études portent essentiellement sur des aspects environnementaux, pas sur les avantages culturels de nos parcs nationaux.

Je voudrais maintenant parler d'un autre défi auquel doit faire face Parcs Canada, celui du financement, de l'administration et de la responsabilité financière. Selon des chiffres obtenus du ministre du Patrimoine canadien, le budget 1993-1994 de Parcs Canada montre des dépenses de 170,2 millions et des recettes de 32,5 millions. Selon les mathématiques que j'ai apprises à l'école, cela laisse un manque à gagner de 137,7 millions de dollars. Je trouve incompréhensible que, en ces temps économiquement difficiles, Parcs Canada puisse continuer à administrer et à fonctionner, pour ne pas dire à préserver nos parcs pour les générations à venir, sans avoir de plan stratégique à long terme. Pour un gouvernement à court d'argent, il devient de moins en moins faisable de conserver les parcs comme on le fait aujourd'hui.

(1600)

Comme il a été démontré à maintes reprises, l'accès à l'information laisse à désirer au sujet des dépenses précises suscitées par les parcs. Par exemple, les habitants du parc national Waterton ont été invités à participer à un examen opérationnel fondé sur trois principes. Premièrement, ceux qui bénéficient de services gouvernementaux devraient en payer le juste prix. Deuxièmement, les Canadiens devraient obtenir une juste valeur marchande pour l'utilisation de leurs terres et de leurs biens. Troisièmement, les subventions devraient être éliminées. Ce postulat est bien dans l'esprit des discours creux du gouvernement libéral.

Au cours d'une assemblée publique tenue à Waterton, les habitants ont appris que le budget annuel de leur collectivité se chiffrait à 750 000 $, mais que seulement 75 000 $ de recettes étaient produites. C'est ahurissant. Cette localité est disposée à payer sa juste part. En fait, les habitants sont heureux d'avoir plus de poids dans la prise de décisions et l'administration de leur collectivité, mais on ne leur permet ni d'examiner les dépenses, ni de vérifier où va cet argent et où il pourrait être économisé. Les 85 personnes qui habitent cette localité à l'année doivent combler un manque à gagner de près de 700 000 $ sans avoir accès à une information complète et détaillée. N'est-ce pas ridicule d'attendre une telle chose de ces gens?

Ces résidents s'interrogent notamment sur la nécessité d'avoir l'équivalent de 59 employés à l'année dans leur petit parc de 505 kilomètres carrés qui ne reçoit que 330 000 visiteurs par an. Pour l'instant, l'école publique est fermée. J'ai pu le constater. Un service d'autobus mène les enfants à l'école à l'extérieur du parc. La piscine est fermée et l'herbe pousse dans les crevasses. Manifestement, la collectivité n'a pas eu son mot à dire.

Pourtant, selon le document de perspective de Parcs Canada, il est clair que l'administration des lieux historiques est une responsabilité partagée. Les Canadiens doivent mieux connaître le processus décisionnel et y participer, et ils doivent collaborer à la réalisation des programmes du patrimoine.

Le 3 août 1994, le ministre du Patrimoine canadien a annoncé qu'il examinait la question des frais d'utilisation des installations de Parcs Canada. Les documents que j'ai consultés ne précisent pas ce que le ministre entend faire à ce sujet. Parc Canada dépense déjà plus de 170 millions de dollars par an seulement pour les parcs nationaux, à l'exclusion des autres lieux historiques.

La hausse de frais pour les visiteurs devrait être envisagée uniquement lorsque le gouvernement est disposé à ouvrir ses livres pour montrer aux Canadiens comment il dépense leur argent. Autrement, il s'agit d'un gaspillage de fonds publics et les poches des contribuables sont déjà vides.

Dans tous mes discours à la Chambre, que ce soit sur la Société Radio-Canada, le multiculturalisme ou diverses questions concernant le patrimoine, j'ai rappelé qu'il fallait respecter la responsabilité financière et les pratiques d'une saine gestion. En terminant, je voudrais poser quelques questions, par exemple: Sommes-nous prêts à payer davantage pour entretenir nos parcs ou notre gouvernement doit-il continuer à financer le réseau des parcs aveuglément et sans rendre des comptes? Quelles autres dépenses les contribuables peuvent-ils encore se permettre?

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, j'interviens à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-53 pour continuer à m'objecter à son adoption.

Lors de ma première intervention, j'avais rappelé à cette Chambre certains éléments importants. J'avais d'abord rappelé que c'est dans la nature même du système fédéral qu'originent les problèmes du Québec puisque l'application qu'on fait au Canada du système fédéral évacue complètement la réalité du Québec. On s'est graduellement écarté de l'orientation première pour en arriver à un gouvernement central fort où une des nations fondatrices n'a plus maintenant qu'un statut très minoritaire.


7869

J'avais également rappelé à cette Chambre que les questions existentielles du Canada anglais ne concernent nullement les Québécois et nuisent même à son évolution. D'ailleurs, nous ne pouvons que souhaiter que le Canada anglais puisse régler ses problèmes existentiels pour le bien-être de nos nations. C'est ainsi qu'on a décidé de façon fort unilatérale de dépenser des sommes énormes à la quête de cette élusive identité canadienne, identité qu'on présuppose suprême à la bien vivante identité québécoise.

(1605)

Dans le même ordre d'idées, j'avais soulevé la question des conséquences négatives de l'immense pouvoir de dépenser du fédéral. À titre d'exemple, on peut déjà constater, dans le débat référendaire qui s'amorce à peine, l'impact concret de ce pouvoir de dépenser sur la forme et l'orientation que prendra le débat. Au nom de l'identité canadienne et de sa promotion, prévues aux articles 4 et 5 du projet de loi, l'administration fédérale subventionnera différents groupes et organismes pour défendre l'option du «non» et ce, en contravention directe avec l'esprit de la loi québécoise qui régit les consultations populaires.

Les journaux nous rapportaient encore hier que le Conseil pour l'unité canadienne en était à la mise sur pied de trois organismes, en vue du référendum québécois. Une des voies d'accès empruntées est le Centre Terry-Fox, qui est financé, vous l'aurez deviné, avec les fonds fédéraux. Ce n'est que le début d'un gaspillage du fédéral dans les juridictions provinciales.

L'expérience québécoise nous enseigne que ces généreux mouvements bien financés s'amplifieront rapidement dans les semaines qui viennent. Bien que je l'aie déjà mentionné, tout ceci est contraire à l'esprit de la loi québécoise. Voilà l'étendue de la considération du système fédéral pour la spécificité québécoise. Lors de mon premier discours, j'avais soulevé l'importance, pour l'essor de la culture québécoise, du contrôle de tout ce secteur par le gouvernement québécois.

S'en soucie-t-on, au niveau de l'administration fédérale? Pas le moindrement. On s'apprête, avec le projet de loi actuel, à envahir systématiquement tous les domaines de la culture, que ce soit les arts, le statut de l'artiste, les industries et le patrimoine culturels, la conservation, l'exportation et l'importation des biens culturels.

Je rappelle que le gouvernement fédéral investira, en matière de culture, près d'un milliard de dollars par année au Québec. Voilà ce dont je parle quand je dis que le pouvoir de dépenser du fédéral nuit au Québec. J'ai présenté ces arguments il y a à peine deux semaines. Depuis, de nouveaux éléments sont venus confirmer l'importance de rejeter le projet de loi du ministre du Patrimoine canadien.

Tout d'abord, nous avons pu constater que le ministre du Patrimoine canadien n'envisage aucune limite à son pouvoir d'intervention. Ceci est très inquiétant en soi. Il y a lieu de se demander jusqu'où le gouvernement serait prêt à aller s'il croyait l'identité canadienne menacée. Serait-il tenté de concentrer les fonds du ministère du Patrimoine canadien et ceux des programmes d'autres ministères à des fins de promotion, tout en ne s'inquiétant nullement de la légitimité de l'investissement?

D'ailleurs, le ministre des Affaires internationales s'apprête à vouloir faire la promotion de la culture canadienne via ses ambassades à l'étranger et de son centre culturel à Paris, un centre, d'ailleurs, que les conservateurs voulaient fermer. Par ailleurs, le contenu des témoignages présentés dans le cadre des audiences du Comité permanent du patrimoine canadien soulève d'ailleurs des questions similaires. L'étude du mandat de la Société Radio-Canada semble déjà ouvrir toute grande la porte à une promotion extensive de l'identité canadienne. Curieusement, sauf une ou deux exceptions notoires, on n'a pas encore, après deux mois de séance, parlé de la culture québécoise.

Est-il nécessaire de spécifier que c'est au Québec que l'on retrouve la vaste majorité des auditeurs et auditrices de la société d'État? Quelle culture autre que la culture québécoise peut-on bien vouloir y refléter? Un autre élément qui mérite considération est l'attitude du gouvernement central face aux demandes des pratiques légitimes du nouveau gouvernement québécois. Poursuivant une tradition établie de longue date, le gouvernement Parizeau travaille à revitaliser les liens avec la France et à y faire la promotion des produits québécois.

On sait que le Québec considère depuis longtemps qu'il détient des pouvoirs exclusifs au niveau des relations internationales, portant sur l'éducation et la culture. Or, les produits culturels constituent un volet important de ces échanges internationaux. Comment le Québec peut-il, dans le contexte d'une loi comme celle qui est débattue aujourd'hui, protéger et promouvoir sa culture, alors que le gouvernement central légifère pour en prendre le contrôle, ce qui est inacceptable?

(1610)

Encore une fois, on nie la spécificité et l'autonomie québécoises. Le contrôle sur la culture québécoise revient de droit au gouvernement québécois, et non à un gouvernement dirigé majoritairement par des représentants du Canada anglais. Il ne s'agit pas d'un caprice, mais d'une nécessité. C'est d'ailleurs ce que le Bloc québécois réaffirmait dans son rapport sur la politique étrangère déposé hier, et je cite:

Les gouvernements successifs du Québec ont toujours réfuté cette thèse de l'indivisibilité et se sont dotés de politiques et de relations internationales distinctes qui avaient également pour ambition de servir les intérêts nationaux du Québec et de favoriser le rayonnement du Québec et de son développement, notamment sur les plans commercial, culturel, économique, politique et social.
La nouvelle ministre québécoise de la Culture et des Communications réclame effectivement, depuis son assermentation, le rapatriement du contrôle québécois sur l'autoroute de l'électronique et les télécommunications, essentiel au développement de la culture québécoise. De ce fait, elle reflète la volonté collective des Québécois et Québécoises.

Il est impératif que le gouvernement central se retire du domaine de la culture québécoise et qu'il compense équitablement le gouvernement du Québec. Pour tous ces motifs, nous nous opposons à l'adoption du projet de loi C-53.


7870

[Traduction]

M. Bernie Collins (Souris-Moose Mountain, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de participer au débat sur le projet de loi constituant le ministère du Patrimoine canadien.

Avant tout, je voudrais dire que je suis abasourdi par les tentatives résolues de ceux qui veulent nous faire croire que cette mesure législative transitoire est un projet de loi complexe. Le projet de loi dont nous sommes saisis vise simplement à constituer un ministère qui existe déjà depuis plus d'un an.

Le ministère du Patrimoine canadien s'occupe des divers éléments qui nous définissent en tant que nation diversifiée et vibrante, possédant un riche patrimoine culturel et naturel. Il touche à divers domaines allant du développement culturel aux arts, à la radiodiffusion, aux parcs nationaux, aux lieux historiques, au sport amateur et au multiculturalisme. Il s'occupe aussi de la promotion des langues, du cérémonial d'État et des programmes à l'intention des autochtones, toutes des activités qui contribuent grandement à rendre le Canada unique.

Le ministère du Patrimoine canadien s'est donné comme mission de bâtir notre avenir ensemble et de renforcer le sentiment d'identité que partagent les Canadiens et qui respecte la diversité de notre pays et de ses habitants. Sa mission englobe donc toute la gamme des activités qui définissent la société canadienne et qui vont de la promotion du sport à nos industries culturelles, à la protection et à la préservation des parcs nationaux et des lieux historiques, à la promotion de l'excellence dans les sports et à la culture, pour n'en nommer que quelques-unes.

Tous les secteurs du ministère sont reliés d'une façon ou d'une autre à ce qu'on pourrait appeler l'esprit et l'âme du Canada. Ensemble, ces services offrent un tableau saisissant de nos réalisations, de notre situation actuelle et de nos aspirations.

En tant que principal gardien de notre patrimoine naturel et physique, Parcs Canada commémore, préserve et présente directement et indirectement des lieux culturels et patrimoniaux importants afin que les Canadiens les comprennent, les apprécient et les goûtent davantage. Le tourisme découlant des activités du ministère influe considérablement sur la croissance économique de bien des régions. En outre, dans l'exécution des responsabilités prévues par son mandat, le Service des parcs établit de nouvelles tendances dans sa façon de créer des partenariats innovateurs avec des entreprises privées et sans but lucratif.

Le ministère du Patrimoine canadien joue aussi un rôle clé dans la mise en valeur et le développement des minorités linguistiques anglaises et françaises. Le respect des deux langues officielles, des traditions et contributions des peuples autochtones, de notre diversité culturelle et des droits fondamentaux de la personne fait du Canada l'un des seuls pays à vraiment apprécier et célébrer la diversité de sa population.

Le multiculturalisme est essentiel à la société canadienne. Partout dans le monde, des pays cherchent la formule qui leur permettra de créer une véritable identité nationale à partir de groupes d'origines ethnique, culturelle, linguistique et raciale différentes. Beaucoup de ces pays s'intéressent maintenant sérieusement à notre modèle 100 p. 100 canadien.

(1615)

Les députés remarqueront que, dans la Loi constituant le ministère du Patrimoine canadien, le gouvernement s'engage à promouvoir l'égalité de tous les Canadiens dans la vie sociale, économique et culturelle de leur pays. Il reconnaît qu'il faut supprimer les barrières qui divisent les Canadiens et créer des liens fondés sur la confiance et le respect. Après tout, le multiculturalisme a pour but de créer une cohésion sociale et de renforcer l'identité nationale.

Le ministère du Patrimoine canadien fait aussi porter ses efforts sur la mise en valeur du développement culturel au Canada et sur les moyens de communication. Cela est capital pour l'avenir de notre pays, non seulement parce que nous pourrons maintenir le caractère unique du Canada, mais aussi parce que nous disposerons d'un puissant outil de développement économique.

Personne ne doute que nous entrons dans une ère remplie de défis. À ce moment-ci de notre histoire, certaines forces sont malheureusement à l'oeuvre pour démanteler l'entité qu'est le Canada. Dans un tel contexte, il est impérieux que le gouvernement instaure un climat propice à l'épanouissement du riche héritage culturel du Canada et donne à tous les Canadiens l'accès à leurs propres produits.

En outre, les progrès implacables de la technologie déplacent et, dans bien des cas, éliminent les frontières traditionnelles. Nous assistons à des changements radicaux qui touchent les économies de nos principaux partenaires commerciaux partout dans le monde.

La création d'un ministère comme le ministère du Patrimoine canadien survient dans un tel contexte et, aujourd'hui plus que jamais, les Canadiens en retireront des avantages. Je crois que le ministre responsable du ministère a le privilège de se retrouver à la tête d'un des portefeuilles les plus intéressants et les plus riches en défis de tout le gouvernement.

Le projet de loi visant l'établissement de ce ministère témoigne de la vision et du degré de conscience du gouvernement. Grâce à ce ministère, le Canada demeurera un pays que les autres prennent pour modèle. Notre nation a suffisamment confiance en son identité pour embrasser les peuples de la terre non seulement en acceptant leurs différences culturelles, mais en reconnaissant qu'elles sont des exemples vivants de l'expression de groupes d'humains qui nous relient au passé et nous donnent des assises solides et des certitudes nécessaires pour affronter l'avenir.

Je crois que, en tant que nation, nous avons besoin d'un ministère du Patrimoine canadien et j'espère que le projet de loi sera adopté rapidement.


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M. Hugh Hanrahan (Edmonton-Strathcona, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole aujourd'hui pour participer au débat de deuxième lecture sur le projet de loi C-53, Loi constituant le ministère du Patrimoine canadien, qui devrait plutôt porter le nom de ministère du gaspillage et des dédoublements gouvernementaux. Les députés d'en face disent que ce projet de loi n'est rien de plus qu'une formalité. Pour nous, au Parti réformiste, c'est beaucoup plus que cela.

Les Canadiens veulent des changements. Les libéraux commencent enfin à comprendre cela et je les en félicite.

Le Parti réformiste préconise une baisse des niveaux d'immigration depuis le début des années 90, et les libéraux ont maintenant adopté cette idée. Le Parti réformiste a dénoncé énergiquement les failles dans notre système de justice pénale, et les libéraux ont maintenant entrepris un examen du système de justice pénale. Le Parti réformiste a réclamé d'importantes modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants, et les libéraux sont également en train d'examiner cette question.

Le Parti réformiste a beaucoup parlé du problème critique que constituent nos déficits et notre dette, qui atteint maintenant 538 181 397 919 $. Comme par magie, les libéraux commencent à penser qu'il y a un problème dans ce domaine également.

Même si nous ne sommes pas au pouvoir, nous pouvons quand même être extrêmement efficaces et sommes fiers de savoir que le gouvernement commence à mettre nos idées en application. Je dois féliciter les ministériels pour leur perspicacité.

(1620)

J'ai cité ces quelques exemples où le gouvernement a écouté le Parti réformiste en espérant que cette tendance se maintiendra. J'espère que ce sera le cas pour le projet de loi C-53.

Comme je l'ai mentionné plus tôt, le projet de loi C-53 devrait être rejeté à la Chambre et renvoyé au Cabinet pour une refonte totale. Cette refonte devrait porter de façon précise sur la question des dédoublements. Il y a des dédoublements entre le ministère de l'Industrie et celui du Patrimoine canadien, il y a des dédoublements entre le ministère de l'Environnement et celui du Patrimoine canadien et il y a possibilité de dédoublements entre le ministère de la Justice et celui du Patrimoine canadien. Et la liste ne s'arrête pas là.

En tant que gouvernement, nous dépensons plus de 40 milliards de dollars par année, soit environ 110 millions de dollars par jour. Ce n'est pas un problème de recettes que nous avons au Canada, mais un problème de dépenses. Lorsque, de retour dans ma circonscription, Edmonton-Strathcona, j'ai tenu la semaine dernière des assemblées locales au sujet de la réforme sociale, nombreux ont été les participants qui ont déploré que le gouvernement continue de gaspiller beaucoup d'argent pour des programmes inutiles ou si peu prioritaires. Les principaux programmes qui étaient souvent mentionnés à cet égard étaient ceux des langues officielles et du multiculturalisme.

Je tiens tout d'abord à dire sans équivoque que nous ne sommes ni anti-francophones ni anti-Québécois au Parti réformiste. Nous estimons cependant qu'on gaspille énormément de ressources dans des régions où le nombre ne justifie pas des services dans les deux langues. Nous sommes cependant favorables à l'application d'une politique de bilinguisme territorial en vertu de laquelle on maintiendrait l'usage des langues officielles dans les institutions fédérales importantes comme le Parlement et la Cour suprême et dans d'autres services fédéraux là où la demande est suffisante pour justifier des services économiques dans la langue minoritaire.

Deuxièmement, il y a le multiculturalisme. C'est sur ce sujet que je concentrerai mon attention aujourd'hui. Il me paraît clair que quiconque critique le programme de multiculturalisme du Canada se fait immédiatement coller l'étiquette de raciste. Voilà une façon beaucoup trop facile d'éluder une question. Comment peut-on participer à un débat sur une question quand on cesse dès le début d'en discuter de façon rationnelle pour traiter l'adversaire de tous les noms? C'est pour cette raison que j'interviens à la Chambre pour inviter mes collègues députés à discuter de la question non sur le plan des émotions mais plutôt sur celui de la raison.

Les défenseurs du programme de multiculturalisme ont également commencé à considérer les critiques de bonne foi comme des attaques et ceux qui les expriment comme des ennemis. Le multiculturalisme est une vision qui procède des différences, de ce qui sépare, et qui ne tient aucun compte de ce qui unit.

Par ailleurs, lors d'un sondage effectué en 1991, on a demandé aux Canadiens s'ils approuveraient ou non que le gouvernement cesse de financer les projets en matière de multiculturalisme, ce qui forcerait les organismes multiculturels à les financer eux-mêmes. Plus des deux tiers ont répondu oui, et 45 p. 100 se sont dits fermement d'avis que le multiculturalisme devrait être financé par les organismes multiculturels eux-mêmes plutôt que par le gouvernement fédéral.

Comme mon temps de parole est limité, je me contenterai de signaler une des mesures contenues dans la loi, consistant à fournir un soutien aux personnes et aux groupes ou organismes afin de préserver, de mettre en valeur et de promouvoir le multiculturalisme au Canada. Il vaut la peine de lire un passage d'un livre publié récemment par Neil Bissoondath, qui a immigré de Trinidad au Canada. Ce livre s'intitule Selling Illusions. Comme M. Bissoondath le démontre très clairement, les objectifs de la Loi sur le multiculturalisme comportent notamment le problème suivant:

. . .ainsi en est-il des cultures ethniques que l'on nous présente aux kiosques de différents festivals; tous les représentants de groupes ethniques hauts en couleurs s'inclinent et sourient mécaniquement pour saluer tous les visiteurs. Ils semblent authentiques, mais ils laissent une impression d'artificiel. Ils n'ont pas de mordant. Ils sont en sécurité. C'est la culture à la Disney.
C'est peut-être encore plus inquiétant que les 30 millions de dollars que nous gaspillons actuellement pour le multiculturalisme. Les aspects de cette politique qui créent des divisions donnent l'impression que nous discutons de l'adoption de lois différentes pour les Canadiens, de lois fondées uniquement sur des


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considérations ethniques ou culturelles. C'est à cause de la lâcheté politique, de sottises bureaucratiques et de pressions ethniques que l'idée du multiculturalisme a complètement dénaturé la politique fédérale au point de la rendre méconnaissable.

(1625)

Ainsi, les libéraux examinent actuellement la question des motifs culturels que quelqu'un d'une certaine culture ou religion pourrait invoquer pour se défendre et qui lui permettraient ainsi d'échapper à des poursuites, alors que, pour la même infraction, un individu d'une autre culture ferait l'objet de poursuites. Une telle proposition culturelle nous amène, par exemple, à nous demander s'il faut tenir compte de la culture avant de condamner le fait de battre sa femme, de recourir à la violence pour discipliner ses enfants ou de pratiquer la polygamie. Cela soulève encore une fois la question suivante: Comment définir le contexte culturel? Faut-il appartenir à cette culture? Faut-il que ses deux parents appartiennent à cette culture?

Le programme ontarien qui permettrait aux jeunes Noirs de ne pas être traduits devant les tribunaux, mais d'être confiés aux services communautaires est un autre exemple. Fondamentalement, les jeunes Noirs seraient traités différemment des autres dans le cadre de ce programme, cela, même s'il n'y a pas de statistiques démontrant que les jeunes Noirs commettent plus de crimes. La raison pour laquelle il y a peu de données sur la criminalité des Noirs au Canada, c'est que les services de police ne tiennent généralement pas de données fondées sur la race. Pourquoi? Peut-être parce que le système de justice canadien est aveugle et qu'il devrait l'être à l'égard de facteurs comme la race ou le caractère ethnique.

Qu'est-il advenu du concept d'égalité devant la loi? Qu'est-il advenu du principe voulant que tous les Canadiens soient traités sur un pied d'égalité, quelles que soient leurs origines raciales ou ethniques? Ces deux exemples sont des manifestations classiques de l'échec du multiculturalisme.

Le Canada a besoin d'un gouvernement prêchant par l'exemple. Il est temps que le gouvernement se plie aux voeux de la population. Qu'il supprime, notamment, le financement du multiculturalisme. Qu'il renvoie le projet de loi C-53 et qu'il le remplace par un projet de loi qui mettra fin aux doubles emplois et aux chevauchements ainsi qu'au gaspillage des pouvoirs publics.

Le multiculturalisme va à l'encontre de l'unité. Il mine le tissu même de notre grand pays. Nous devrions mettre l'accent sur l'égalité plutôt que d'accorder un traitement spécial à des personnes et à des groupes en particulier. Le multiculturalisme n'est pas mauvais en soi, à condition d'être entièrement financé par les organismes multiculturels eux-mêmes. Cependant, ce n'est pas le cas au Canada. En fait, le multiculturalisme n'est rien de plus que l'exploitation de notre générosité.

M. Pat O'Brien (London-Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt l'intervention de mon collègue d'Edmonton-Strathcona. Je suppose que je devrais lui garantir, dès le départ, que ni mes collègues de ce côté-ci ni moi n'avons l'intention d'adopter les programmes des réformistes ou leurs manières.

Il est intéressant d'entendre le député parler de cette politique et dire qu'elle est d'inspiration réformiste, puis ajouter du même souffle qu'elle doit être rejetée. Je suis ici pour dire à mes collègues et à tous ceux des deux côtés de la Chambre qui sont prêts à m'écouter en toute objectivité pourquoi ce projet de loi doit être appuyé.

Permettez-moi de rassurer mon collègue en lui disant qu'il y a très peu de choses dans les orientations de son parti que nous souhaitons adopter. En fait, c'est pour cette raison que nous avons présenté des candidats dans toutes les régions du pays, dans toutes les provinces. Nous n'avons laissé de côté aucune province. Je pense que mes collègues d'en face ont compris leur erreur à cet égard et qu'ils essaient de la corriger, mais les Canadiens savent et comprennent qu'il n'y a qu'un seul parti vraiment national à la Chambre, comme le montre le fait qu'un seul parti a réussi à faire élire des députés dans toutes les provinces.

Je souhaiterais expliquer pourquoi il s'agit, selon moi, d'un projet de loi extrêmement important qui mérite l'appui des députés de tous les partis qui ont l'esprit ouvert.

Le projet de loi C-53 vise plusieurs objectifs. Il vise à créer légalement le ministère du Patrimoine canadien. Il établit les pouvoirs et fonctions du ministre du Patrimoine canadien. Il règle diverses questions administratives ayant trait à la création du ministère et il met en place la structure organisationnelle voulue pour concrétiser la réintégration des employés. Il va regrouper sous un même toit les communications, les industries culturelles, les langues officielles et patrimoniales, les parcs nationaux et les lieux historiques, le bénévolat, le multiculturalisme, le cérémonial d'État, ainsi que les sports amateurs.

(1630)

En d'autres termes, grâce à ce projet de loi, on parviendra à une bien meilleure coordination et à une intégration plus solide de plusieurs fonctions importantes. Il cherche à rationaliser ces fonctions et à faire en sorte qu'on puisse s'en acquitter de façon plus efficace et efficiente. À mon avis, les députés de tous les partis devraient appuyer cet objectif: assurer les services gouvernementaux avec plus d'efficacité et de compétence.

J'espérais que tous les députés de la Chambre partageraient cette philosophie. Or, à en juger par les commentaires des députés d'en face, ils semblent estimer qu'il ne vaut pas la peine d'appuyer ce projet de loi parce qu'on y traite de multiculturalisme. C'est regrettable et c'est tout simplement anticanadien.

Qu'est-ce que veut dire être Canadien? J'inviterais quelques-uns des députés du Parti réformiste, qui lancent des commentaires pendant que je prononce mon discours, à jeter un coup d'oeil sur les armoiries du Canada. L'idée voulant que le Canada se soit toujours composé d'une seule culture pure ou homogène est manifestement tout à fait ridicule. Les armoiries du Canada portent les symboles de quatre cultures. Notre pays a quatre cultures fondatrices.

Pour parler bien franchement, je pense que beaucoup de Canadiens ne le savent pas. Je dois dire avec regret que je soupçonne certains députés d'en face d'ignorer le fait que quatre cultures


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ont fondé notre pays et qu'elles sont fort bien représentées sur nos armoiries.

Depuis 1867, le Canada a toujours été multiculturel et s'est toujours composé de plus d'une culture. Ce projet de loi vise à continuer de reconnaître ce fait très important qui, de toute évidence, ne plaît pas à certains députés d'en face.

En bref, notre pays a représenté dès le début un nouveau nationalisme, un mélange de plusieurs cultures, quatre cultures fondatrices et deux langues dominantes. Et depuis 1867, notre pays est devenu encore plus multiculturel. Le multiculturalisme n'est pas récent. Ceux qui pensent cela devraient se renseigner un peu sur l'histoire du Canada.

Le multiculturalisme n'a rien de neuf. Il était présent au moment de la fondation de notre pays et il a été intégré à la Constitution en 1867. Comme je l'ai dit à maintes reprises, ceux qui veulent bien se donner la peine de regarder verront qu'il est représenté sur les armoiries du Canada. Nous sommes un pays multilingue, un pays qui bénéficie des forces de gens venus de tous les coins du monde.

Les députés à la Chambre parlent avec des accents de divers pays. Même si je ne souscris pas toujours à leur façon de voir les choses, je suis fier d'entendre leurs accents. De toute évidence, la présence de gens venus de différentes régions du monde constitue un atout pour notre pays. Aucun pays ne regroupe autant de cultures que le Canada. Nous devrions en être fiers. C'est ce qui fait que nous sommes uniques.

Le Canada est un pays qui, à l'origine, comportait quatre cultures et deux langues officielles, mais qui, depuis 1867, a toujours eu la générosité d'accueillir des gens du monde entier. Les immigrants affluent littéralement au Canada et c'est ce qui fait notre force.

C'est pourquoi mon collègue, le député d'Edmonton-Strathcona, ne craint pas que nous volions la politique du Parti réformiste. Malheureusement, ce parti ne semble pas considérer le multiculturalisme comme une force. Pourtant, c'est ce qui constitue la force même de notre pays. C'est peut-être notre plus grand atout, en tant que pays.

(1635)

Le fait qu'avec la mondialisation du commerce, la culture canadienne continuera à influencer encore plus notre économie devrait être évident pour tous ceux qui préfèrent s'en tenir à la réalité.

Au seuil du XXIe siècle, une activité économique qui domine partout dans le monde est le tourisme. En tant que Canadiens, je doute que nous le reconnaissions assez ou que nous misions assez là-dessus. Nous commençons à nous y intéresser et ce gouvernement compte même en faire une grande priorité.

Étant donné que, de partout dans le monde, des gens veulent venir au Canada visiter des amis et des parents qui y habitent, nous devrions être des leaders dans le secteur du tourisme et nous devrions considérer notre multiculturalisme comme une force et non comme une faiblesse, comme on le dit beaucoup trop souvent à la Chambre. Peu importe quels députés le disent, cela me désappointe toujours.

Bien sûr, toutes ces modifications doivent s'effectuer dans le respect de nos responsabilités financières. Les Canadiens savent que le gouvernement a des engagements financiers dans tous les secteurs d'activités. Ils peuvent avoir l'assurance que le projet de loi C-53 est conforme à cet objectif et, par conséquent, à l'examen exhaustif des programmes fédéraux qui est en cours.

Notre gouvernement est conscient des inquiétudes que soulève la décision de partager les responsabilités relatives à la radiodiffusion et aux télécommunications entre le Patrimoine canadien et Industrie Canada. Or, il y a de bonnes raisons pour cela. Confier les télécommunications au ministère de l'Industrie, c'est reconnaître le rôle croissant de l'économie.

Par ailleurs, la radiodiffusion a d'énormes répercussions sur un pays comme le Canada qui possède un vaste territoire, mais seulement un dixième de la population de son voisin américain. La radiodiffusion est essentielle au Canada. Nous devons être très prudents, car il faut veiller à ce que la radiodiffusion serve en tout temps à promouvoir la culture canadienne et qu'elle ne soit pas dominée par les réseaux américains. Il convient donc de confier la question de la radiodiffusion au ministère du Patrimoine canadien, comme le fait le projet de loi.

Le ministère s'emploie également à promouvoir l'identité canadienne en oeuvrant dans plusieurs grands domaines: la gestion du patrimoine naturel et matériel; la promotion des langues officielles, du sport amateur, de la participation et de l'appui communautaire; et la gestion du développement culturel et des moyens de communication.

Le Canada a 36 parcs nationaux. Un grand nombre de ces magnifiques parcs sont situés dans l'ouest du pays, mais il y en a dans chaque province. Il ne fait aucun doute que nous voulons en faire la promotion. Il y a également neuf canaux historiques et quatre zones de conservation marine au Canada. Trois océans baignent les rivages canadiens.

Nous célébrerons bientôt le soixante-quinzième anniversaire de Parcs Canada. Les parcs canadiens produisent des recettes annuelles de plus de un milliard de dollars et emploient environ 30 000 Canadiens.

Passons maintenant au domaine de la promotion des langues officielles, du sport amateur, de la participation et de l'appui communautaire, quelle expression! On peut facilement se rendre compte de toutes les activités extrêmement importantes que cela englobe. La grande diversité culturelle de notre nation, le multiculturalisme, est ce qui nous distingue. C'est notre force, une base solide sur laquelle nous pouvons bâtir.

Je veux vous parler du sport, le domaine que je connais le mieux. Nous envoyons des athlètes olympiques représenter le Canada et c'est ce qu'ils font. Ils n'insistent pas pour dire qu'ils représentent le Canada français, le Canada anglais, l'Alberta ou l'Ontario. Ils représentent le Canada et sont fiers de remporter des médailles en tant que Canadiens. Cette attitude est très


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visible en particulier dans le hockey, sport où nous excellons et où nous dominons.

Je me souviens du fameux but, sans doute le plus célèbre de toute l'histoire du hockey, que Paul Henderson a compté avec l'aide d'un Canadien français nommé Cournoyer et d'un Italo-Canadien du nom d'Esposito.

Ces trois Canadiens ont fièrement contribué à vaincre les Russes et à prouver l'excellence canadienne au hockey. C'est un travail d'équipe de ce genre dont nous avons besoin au Canada. Il faut que toutes les cultures travaillent en collaboration. Il faut voir le multiculturalisme comme un atout et non comme un handicap. Il y a des groupes qui craignent terriblement qu'on encourage les diverses cultures à s'accrocher à ce qui compte pour elles.

J'ai trois enfants et beaucoup de mes collègues sont aussi des parents. Laissez-moi vous dire que c'est possible pour moi d'être ce que je suis, soit un Canadien d'origine irlandaise. Je suis très fier de mes origines irlandaises. Mes parents m'ont appris à en être fier. Mais je suis aussi très fier d'être Canadien.

(1640)

On peut être également fier de deux choses à la fois. L'un n'empêche pas l'autre et je ne comprends pas l'étroitesse d'esprit dont font preuve les députés d'en face lorsqu'ils disent que cela n'est pas possible. C'est pitoyable.

[Français]

M. Maurice Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi C-53 qui a comme objectif de procéder à la création du ministère du Patrimoine canadien.

Je voudrais m'attarder pendant quelques minutes sur le mandat du futur ministère du Patrimoine puisque, à sa face même, il révèle des faits ou un état de fait qui questionne même l'avenir de ce pays qu'est le Canada. On dit: «. . .le mandat du ministère du Patrimoine. . .», et je me permets de lire intégralement cette citation dont la source origine d'un document du gouvernement libéral. On ne peut donc le mettre en doute d'aucune espèce de façon. Il y est écrit: «Le mandat du futur ministère est de susciter et stimuler chez les Canadiens un profond sentiment d'identité et d'appartenance fondé sur le bilinguisme et le multiculturalisme.» On dit également un peu plus loin dans le mandat «. . .que le ministère a pour but de développer et dispenser des programmes qui appuient un sentiment très net d'identité chez les Canadiens.»

Les deux premiers mots de ce mandat m'amènent à m'interroger sur le sens même ou la nécessité même de ce ministère puisque «susciter» signifie qu'il n'existe pas de sentiment d'identité, selon le texte même, ou de sentiment d'appartenance.

Avant mon intervention, je suis allé vérifier dans le dictionnaire Le Petit Robert, un document également très crédible, il me semble, et on dit dans la définition du verbe susciter, que cela veut dire «faire naître un sentiment ou une idée.» Cela réfère précisément au mandat qu'a le ministère du Patrimoine. Or, «faire naître» suppose qu'il n'existe pas.

C'est assez particulier, après 125 ans et plus d'histoire canadienne, que le gouvernement, en créant un ministère du Patrimoine, admet dans le mandat même de ce ministère, que le sentiment d'identité ou d'appartenance n'existe pas. Ils ont raison puisque ce qui existe au Canada, ce sont deux identités. Une que l'on retrouve de façon très particulière et de façon très évidente sur le territoire du Québec qui s'appelle l'identité francophone, qui est ouverte sur toutes les communautés, qui permet à tout individu qui le souhaite, qui le veut, de se développer, de vivre en harmonie avec toute personne qui demeure dans son rayonnement ou autour de lui.

Il y a également l'identité anglophone, que l'on retrouve de façon très majoritaire à l'extérieur du Québec et qui, également, permet d'accueillir des gens de toute nationalité, de les respecter dans leur identité culturelle propre, mais de leur permettre d'évoluer dans ce pays qui s'appelle le Canada.

Donc, on a raison de dire dans le mandat, et c'est un aveu, que la culture canadienne, comme telle s'entendant, une culture à laquelle adhérerait l'ensemble des Canadiens et Canadiennes, autant que les Québécois et Québécoises, c'est un aveu majeur, à mon sens, que de reconnaître que cette culture n'existe pas.

(1645)

Et j'aimerais, pendant ce débat, que le ministre du Patrimoine vienne nous expliquer quelles sont les valeurs qui sont partagées dans l'ensemble du Canada, autant au Québec qu'à l'extérieur du Québec. Voilà la première remarque que je voulais faire.

À sa face même, selon moi, je dis que le mandat du ministère du Patrimoine est en fait de faire la promotion des valeurs du gouvernement en place et non pas la promotion des valeurs des peuples canadien et québécois. C'est donc, selon ma définition, un ministère de la propagande. Et c'est reconnu depuis des décennies, cette façon qu'a le gouvernement fédéral de concevoir la culture à travers tout le Canada, particulièrement au Québec, en la fondant uniquement sur le bilinguisme et le multiculturalisme.

Des pays où les individus sont bilingues, il en existe des dizaines, à travers le monde, qui ont une identité propre. Les Français qui parlent plusieurs langues, qui peuvent parler l'anglais, l'espagnol, j'aimerais leur demander quelle est leur identité première. Ils vont répondre tout de suite, d'emblée, que c'est l'identité française. Qu'on aille aux États-Unis, je n'y ai jamais rencontré personne qui s'interrogeait sur son identité. C'est clair, c'est net, c'est précis, ça permet de respecter également les gens qui ne pensent pas comme nous et qui ne partagent pas les mêmes origines culturelles.

Je veux dire également que l'action du gouvernement fédéral, dans le passé, et d'autres institutions, je pense à la Cour suprême, a toujours eu comme effet d'amoindrir et d'anéantir les pouvoirs du gouvernement du Québec sur sa propre culture. Je donne simplement l'exemple du domaine des communications, qui est un domaine vital, quand on parle de culture. Trois décisions ont été prises dans le passé, au cours des années, par la Cour suprême, qui, tout le monde le sait, comme le disait l'ex-premier ministre du Québec, Maurice Duplessis, «penche toujours du même bord». Trois décisions ont été prises dans le passé: une sur


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la radiodiffusion et la télédiffusion, à la fin des années 1930, qui naturellement, a reconnu le pouvoir du gouvernement fédéral; une en 1974 sur la câblodistribution, et une plus récente, en 1994, sur la téléphonie, ce qui fait que le Québec est évacué du domaine des communications, un élément central, stratégique pour l'avenir du peuple québécois.

Je pense qu'il me reste encore une couple de minutes. Je voudrais également, pour terminer mon intervention, m'interroger sur les personnes qui assument le leadership de ces institutions, et je pense particulièrement au ministre du Patrimoine, le député de Laval-Est, qui, comme tout le monde le reconnaît, je pense, est un type très gentil, mais qui ne se gêne pas pour imposer ses vues aux organismes qui dépendent de lui. On n'a qu'à se rappeler, et c'est un passé tout à fait récent, qu'au cours des semaines qui viennent de passer, pendant en fait deux semaines, le Bloc québécois ainsi que le Parti réformiste ont demandé la démission du ministre du Patrimoine, parce qu'il est intervenu auprès du CRTC afin de favoriser les gens de son propre comté.

Pendant deux semaines, à chaque période des questions, le Bloc québécois et le Parti réformiste ont insisté auprès du premier ministre pour que le ministre du Patrimoine démissionne, en raison du fait qu'il est intervenu dans un organisme quasi judiciaire, en fait, l'équivalent d'un tribunal. On peut s'interroger sur ce que ce ministre pourra faire avec son ministère de la propagande, surtout au Québec, le jour où les Québécois et Québécoises seront appelés à se prononcer sur leur avenir.

(1650)

Ce ministre, et je termine là-dessus, trouvera des appuis de taille à l'intérieur même de son Cabinet. Je me permets d'en citer deux: le ministre des Affaires étrangères, député de Papineau-Saint-Michel, que tout le monde connaît, d'illustre renommée, particulièrement au Québec. En 1977, ce ministre déclarait, au sujet de la Société Radio-Canada, qui est, à mon sens, certes un des véhicules culturels des plus importants des Québécois et Québécoises, toujours dans l'expectative du référendum de 1980: «Je ne veux pas voir Radio-Canada prendre une position neutre pour présenter les deux côtés de la question. Les employés, au moment du référendum, doivent être sans équivoque du côté Pro-Canada.»

Dernièrement, le premier ministre lui-même disait: «Il y a une loi qui guide les opérations de Radio-Canada. Parmi les obligations de cette loi, il y a l'obligation de renseigner les gens sur les avantages que présente le Canada. C'est pourquoi la Société Radio-Canada a été établie.»

C'est un message clair et nous sommes tout à fait justifiés de nous interroger sur la création de ce ministère.

Le vice-président: Chers collègues, conformément à l'article 38, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera ce soir, à l'heure de l'ajournement: l'honorable députée de Saint John-Les anciens combattants.

Nous reprenons le débat avec l'honorable député de Victoria-Haliburton.

[Traduction]

M. John O'Reilly (Victoria-Haliburton, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir dans le débat et d'exprimer une fois de plus mon appui au projet de loi C-53, visant à constituer le ministère du Patrimoine canadien.

Le projet de loi C-53 s'inscrit dans le cadre d'une vaste réorganisation du gouvernement. Le nouveau ministère aura une efficience accrue, ce qui devrait susciter l'appui de tous les députés puisque, à long terme, ce sera bénéfique à tous les contribuables.

C'est le gouvernement précédent qui a jeté les bases du ministère en juin 1993, mais le gouvernement actuel, dont je fais partie, a beaucoup amélioré le projet initial. Je suis heureux de pouvoir dire que les améliorations se reflètent dans de nombreuses réalisations du nouveau ministère au cours de l'année écoulée, notamment dans les domaines de la conservation du patrimoine, des langues officielles, des parcs nationaux et du sport amateur.

Gardant cela à l'esprit, le gouvernement en est maintenant à l'étape qui consiste à confirmer la réorganisation du ministère du Patrimoine canadien, lequel peut déjà mieux servir l'ensemble des Canadiens. Je crois qu'il importe de se rappeler que le ministère sert de très nombreux Canadiens et pas uniquement certains groupes d'intérêts comme l'ont allégué quelques-uns de nos vis-à-vis. Le ministère s'occupe des parcs nationaux, du sport amateur, des lieux historiques et de nombreuses expositions culturelles dans tout le pays. Il s'agit véritablement d'un ministère national qui s'occupe des Canadiens des quatre coins du pays.

Dans ma circonscription, celle de Victoria-Haliburton, en Ontario, je pense à la voie navigable Trent-Severn qu'ont empruntée des millions de voyageurs au cours des 100 dernières années et qui permet aux utilisateurs de se rendre de Trenton à la baie Georgienne sur une voie navigable historique. Chaque été, grâce aux fonds versés par ce ministère au titre du patrimoine, on peut voir une boutique de forgeron le long du canal Rideau, qui va de Kingston à Ottawa et qui contient de nombreuses écluses historiques. Cela montre bien l'importance du patrimoine et de l'histoire au Canada. Grâce aux efforts déployés par le ministère, des trésors historiques comme la voie navigable Trent-Severn et le canal Rideau seront préservés pour les générations futures.

Sur le plan culturel, certains députés d'en face prétendent que, si le marché libre ne soutient pas certaines formes d'art, elles ne devraient pas être produites. On peut voir ici même, au Musée des beaux-arts du Canada, de nombreuses oeuvres expérimentales ou avant-gardistes. Encore une fois, certains députés d'en face ne voient pas l'utilité de ces oeuvres lorsque, en réalité, certaines d'entre elles ont pris beaucoup de valeur depuis qu'on en a fait l'acquisition. L'art ne peut pas être jugé rapidement ou à l'aveuglette.


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(1655)

Grâce au ministère, les industries culturelles canadiennes ont connu une croissance de 40 p. 100 entre 1988 et 1992, alors que les autres industries ont vu leurs ventes et leurs recettes diminuer. Cela est attribuable en grande partie à des programmes comme le programme d'aide à la distribution des publications et les programmes de soutien à la production d'enregistrements sonores, de films et de vidéos. De 1987 à 1992, l'Ontario à elle seule a affiché une hausse d'environ 70 p. 100 des exportations de livres d'auteurs canadiens salués unanimement par les critiques.

En outre, étant donné que les industries culturelles font tellement appel à l'innovation et à la technologie, les emplois qu'elles créent exigent de grandes compétences, ils sont durables et de haut niveau. Les livres et les films primés, les productions théâtrales à succès, les disques dont il se vend un million d'exemplaires et les installations de production qui attirent des cinéastes étrangers sont autant d'exemples de domaines où le Canada multiplie les succès. Tous ces succès, nous les devons à des industries culturelles créatives qui prennent de l'expansion chaque année. Cette expansion a multiplié les emplois et les occasions d'affaires pour les Canadiens.

La politique de multiculturalisme du Canada a le noble objectif d'assurer l'égalité des chances à tous les Canadiens pour qu'ils puissent participer à la vie sociale, culturelle, économique et politique de notre grand pays. J'exhorte aussi les députés d'en face à prendre conscience de la situation et à consulter les Canadiens qui sont reconnaissants au Canada de cette politique de multiculturalisme et de ses avantages.

Cette politique est un effort que fait un gouvernement responsable pour aider les citoyens à se comprendre les uns les autres et à devenir plus tolérants. Le diversité ne divise pas. Elle enrichit notre société. Il importe de se rappeler que, si le Canada veut rester concurrentiel dans un monde où les relations sont de plus en plus étroites, il doit compter sur les ressources de la diversité culturelle.

Je félicite les députés d'en face de leurs efforts persévérants pour trouver quelque chose qui cloche au ministère du Patrimoine canadien. Il semble que leurs efforts soient vains. Ils n'arrivent à dire du neuf de ce ministère que lorsqu'il le lisent dans les journaux. Ils devraient plutôt s'attarder aux beaux efforts que déploient le ministre et ses collaborateurs et aux politiques et programmes appliqués par le ministère. Si les députés d'en face accordaient un peu importance à cela et un peu moins à leur comédie, ils seraient d'accord avec moi lorsque je les exhorte à appuyer le projet de loi C-53.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, je remercie la Chambre de me donner l'occasion de participer au débat sur le projet de loi C-53, visant à réorganiser le ministère du Patrimoine canadien.

Je dois avouer que j'apprends des choses fascinantes quand je viens à la Chambre et que j'écoute certaines des interventions des députés d'en face. Il était heureux pour le député, et je dois faire attention à la façon dont je m'exprime, que deux de ses collègues soient venus lui apporter un certain soutien, car l'argumentation aurait été passablement faible.

J'ai appris qu'il y a eu quatre peuples fondateurs au Canada. Voilà qui est très intéressant. Je me demande s'ils ont tous mis le pied sur le sol canadien en même temps ou s'ils l'ont fait en quatre coins différents pour se rencontrer au milieu. Cela me paraît assez étrange. J'ai appris également que s'il n'y avait pas eu l'énorme ministère du Patrimoine canadien, nous n'aurions pas eu d'écluses historiques dans la circonscription du député. Voilà qui fut très instructif, je dois l'avouer.

Ce qu'il importe vraiment de faire, c'est de repenser la raison d'être même de ce ministère au lieu de parler de réorganisation du ministère et du Cabinet.

Mon collègue, le député d'Edmonton-Strathcona, a parlé plus tôt de Neil Bissoondath et a exposé brièvement la position de cet écrivain sur le multiculturalisme. Je ne me rappelle pas s'il a cité ou non des extraits de son ouvrage, mais j'ai trouvé un éditorial portant sur le dernier livre de M. Bissoondath.

L'éditorial a paru dans le Vancouver Sun du 14 novembre, et je tiens à le signaler à la Chambre. Que je sache, cet éditorial n'a pas été écrit par un membre du Parti réformiste, mais il épouse très fidèlement la position que notre parti a adoptée en matière de multiculturalisme. S'il me reste un peu de temps, je voudrais attirer l'attention de la Chambre sur certains autres points, mais voici ce qu'on peut lire dans cet éditorial du Vancouver Sun:

Le dernier ouvrage de Neil Bissoondath, un examen non romanesque de la politique fédérale de multiculturalisme, suscite un débat qui tombe à point sur les mérites et le coût de cette politique.
M. Bissoondath, Canadien originaire de Trinidad, dit que la politique ne favorise pas la compréhension et l'acceptation, mais qu'elle fait plutôt ressortir les différences et que, partant, elle divise les Canadiens. A-t-il raison? Le secteur du multiculturalisme du ministère du Patrimoine canadien fait-il plus de tort que de bien, et ne vaudrait-il pas mieux appliquer à la réduction du déficit les 26 millions de dollars dépensés annuellement en subventions?
(1700)

On pourrait penser que c'est un réformiste qui pose ces questions, mais c'est le Sun de Vancouver. Il serait ridicule d'abandonner le multiculturalisme parce que l'on croit, à tort, qu'il ne sert qu'à financer des festivals de danse folklorique. Certains fonds servent peut-être encore à cela, mais une bonne partie du financement aide considérablement les immigrants désireux de s'intégrer à la société canadienne.

Des fonds sont accordés pour aider des groupes ethniques aux prises avec des conflits entre générations, pour organiser des colloques sur la violence familiale et pour sensibiliser aux différences interculturelles des institutions comme les services de police.

De nombreux immigrants et autres Canadiens semblent voir d'un bon oeil ces aspects de la politique, mais certains d'entre eux s'inquiètent de ses mauvais côtés. Pour M. Bissoondath, l'un de ses aspects regrettables, c'est l'affaiblissement de l'identité canadienne, parce que les Canadiens d'origine étrangère finis-


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sent par n'être ni Canadiens, ni ce qu'ils étaient avant d'arriver ici.

Certains immigrants parlent de dignité volée pour décrire le mauvais côté de la politique. D'autres estiment que la politique favorise la ghettoïsation des nouveaux venus au lieu de les encourager à développer leur loyauté envers leur terre d'accueil. Compte tenu de ce que les immigrants eux-mêmes en disent, il semble clair que cette politique adoptée il y a maintenant plus de 20 ans doit faire l'objet d'une refonte. Ce n'est pas une réorganisation qui est nécessaire, mais bien une refonte.

Vu la situation financière critique dans laquelle nous nous trouvons, un examen du programme de multiculturalisme est justifié, au même titre qu'un examen du Conseil des arts du Canada avec un budget de 98 millions de dollars cette année, du Sport amateur avec un budget de 64 millions de dollars, de la Promotion des femmes avec un budget de 8 millions de dollars, etc.

Par habitant, les subventions au titre du multiculturalisme coûtent moins de un dollar par Canadien. Certains projets semblent valoir beaucoup plus que cela, et d'autres, beaucoup moins. Pourquoi dépense-t-on de l'argent pour des affiches et des macarons dénonçant le racisme et pour l'enseignement de l'arménien?

Si les Arméniens ou tout autre groupe ethnique veulent que nos enfants puissent parler leur langue, ils devraient eux-mêmes en financer l'enseignement. Le financement, par l'État, de ce genre de formation linguistique confirme l'argument de M. Bissoondath voulant que la politique du multiculturalisme ait pour effet de diviser les Canadiens en donnant aux groupes une conscience accrue de leur propre ethnicité.

Cela conforte également les Canadiens de souche dans leurs hésitations à considérer les immigrants comme des citoyens à part entière. Nous ne proposons pas que le Canada opte pour le melting-pot à l'américaine, mais il reste que notre bien-aimée mosaïque a du plomb dans l'aile. Il est temps de repenser le multiculturalisme, son objet, ses effets et les coûts qu'il entraîne.

Grâce à M. Bissoondath, dont les origines étrangères le rendent apte à débattre du multiculturalisme, cette question est maintenant à l'ordre du jour avec tout le reste. Je souscris à l'idée que ce ministère doit être repensé plutôt que réorganisé.

Quand j'ai pris la parole au sujet des amendements, j'ai parlé des nombreux organismes relevant du ministre du Patrimoine canadien. Ces organismes englobent la SRC, des musées et des programmes multiculturels. Je ne puis m'empêcher de me demander si nombre de ces institutions ne serviraient pas mieux les Canadiens si elles passaient au secteur privé, si elles étaient carrément supprimées ou si leur financement était réduit. Il serait peut-être préférable que leurs fonctions soient directement exercées par d'autres ministères.

Par exemple, j'estime que nous pourrions songer sérieusement à supprimer le financement d'institutions comme l'organisme qui s'occupe de la situation de la femme au Canada et, ainsi que je l'ai déjà dit, les subventions au multiculturalisme.

Un autre genre de dépenses fédérales non nécessaires concerne les langues officielles. Pourquoi avons-nous besoin d'un commissaire aux langues officielles? En confiant cette responsabilité aux provinces et aux organismes privés, on pourrait fournir relativement plus de services tout en faisant réaliser des économies considérables au gouvernement fédéral.

La Commission des champs de bataille nationaux est un autre organisme relevant du ministère du Patrimoine canadien. Je ne doute pas que nous ayons besoin de cette commission, mais je pense qu'elle pourrait peut-être relever du ministère de la Défense nationale, s'il n'y avait pas de ministère du Patrimoine canadien.

Il y a aussi la Fondation canadienne des relations raciales. Il semble qu'un tel organisme soit justifié. C'est difficile à dire, mais, s'il l'est, il devrait peut-être relever du ministère de la Justice. Chose certaine, je trouve bizarre que l'on veuille faire entrer les relations raciales dans notre patrimoine canadien. Cela a presque une connotation négative. Nous ne voulons pas que cela fasse partie de notre patrimoine mais s'il y a un problème, nous voulons le régler.

Il serait peut-être plus approprié de faire relever la Commission de la fonction publique du Conseil du Trésor.

(1705)

Il y a certaines choses que nous devrions faire, peut-être, en ce qui concerne la SRC. Je me demande souvent ce que les Canadiens nous répondraient si on leur demandait de nous dire ce qui, à leur avis, caractérise le mieux notre patrimoine. Je me demande s'ils nous parleraient des habitants de notre pays et de leurs qualités ou s'ils nous parleraient de notre environnement et du territoire magnifique qui est le nôtre. Je serais très surpris qu'ils mentionnent la SRC, surtout Téléfilm Canada et l'Office national du film, que l'on pourrait sûrement fusionner et privatiser, ce qui coûterait beaucoup moins cher aux contribuables canadiens.

Ensuite-je n'aime pas parler de cela, parce qu'on en a tellement parlé-il y a les musées qui sont financés par le ministère du Patrimoine canadien. Je me demande si l'on ne pourrait pas les privatiser, eux aussi. Ainsi, les gens qui aiment les musées voudront peut-être aller en visiter s'ils y découvrent des choses intéressantes, au lieu d'être perturbés par ce qu'ils ont vu dans certains d'entre eux. Cela permettrait sûrement de supprimer quelques projets farfelus, comme le musée qu'on construit actuellement dans la circonscription du premier ministre, je le répète, à grands frais pour les contribuables. De plus, une étude indique que ce musée est voué à l'échec.

Après avoir examiné attentivement et objectivement toutes les attributions actuelles des organismes du ministre du Patrimoine canadien, nous estimons que ce poste n'est peut-être vraiment pas nécessaire. Il est possible qu'une fois supprimées toutes les dépenses inutiles ou les dépenses pour des projets dépassés, il ne reste pas assez de responsabilités pour justifier l'existence de ce ministère. S'il restait des responsabilités justifiables, elles pourraient être assumées par d'autres ministères. À notre avis, les contribuables canadiens réaliseraient ainsi des économies.

En terminant, je prendrai seulement quelques instants pour mentionner ces économies éventuelles: une voiture et un chauffeur de moins assignés à un ministre, un vaste bureau de moins, en plus du personnel du ministre, une retraite de plusieurs millions de dollars de moins à payer encore avec l'argent des contri-


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buables, moins de risques que des lettres d'intervention soient adressées au CRTC si le poste de ministre du Patrimoine canadien était supprimé, moins de risques de conflits d'intérêts-plus le cabinet est restreint, moins les risques de conflits d'intérêts sont élevés-et, enfin, une grosse légume libérale de moins à surveiller.

Alors, je termine en répétant ceci: qu'on nous laisse nous demander si nous avons même besoin d'un ministère du Patrimoine canadien, et s'il ne serait pas préférable, pour notre pays et pour notre patrimoine, de supprimer le poste de ministre du Patrimoine canadien. Qu'on nous laisse repenser à toute cette idée au lieu de réorganiser ce ministère.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, la restructuration du ministère du Patrimoine canadien telle que proposée par le projet de loi C-53 pour en faire un véhicule de promotion de la culture canadienne from coast to coast se veut ni plus ni moins qu'une attaque en règle du gouvernement fédéral contre la spécificité du Québec, sa culture, sa langue et ses institutions culturelles.

À preuve, l'inclusion de la culture pancanadienne comme élément de la nouvelle politique étrangère du Canada qui démontre une fois de plus la volonté sans cesse croissante du fédéral de marginaliser la spécificité du Québec dans l'ensemble fourre-tout du multiculturalisme canadien. Cette volonté, le ministre du Patrimoine canadien l'énonce très clairement dans son discours sur le projet de loi C-53: «Nous souhaitons rallier les forces vives du multiculturalisme autour d'une identité culturelle spécifiquement canadienne.»

L'objectif est clair. Alors que, dans ce discours, les seules références à la culture d'expression francophone au Canada ont trait aux langues officielles et à TV5, comment ne pas lire en filigrane qu'il faut absolument réussir à ramener non seulement la culture québécoise, mais aussi la culture autochtone dans le bassin idéal et soi-disant sécuritaire du multiculturalisme dans un monde caractérisé par l'omniprésence et l'omnipuissance de la culture américaine.

Monsieur le Président, dans un tel contexte, vous n'aurez aucune difficulté à comprendre que pour l'opposition officielle, il serait suicidaire d'appuyer le projet de loi C-53.

Malgré les nobles déclarations d'intentions du ministre, homme de lettres, s'il en est, comment le Parlement canadien peut-il ne pas s'inquiéter de voir la culture d'aujourd'hui, nos auteurs et nos créateurs-ce que j'appellerai le patrimoine en devenir-être considérés comme une industrie au même titre que l'acier, les chaussures ou le poulet.

(1710)

À titre d'exemple, qui, en définitive, aura le dernier mot en ce qui a trait à la révision de la Loi sur les droits d'auteur? Le ministre de l'Industrie ou le ministre du Patrimoine canadien? Il y a fort à parier que le pouvoir qui est d'ores et déjà aux mains de l'Industrie y restera, puisque rien dans le projet de loi C-53 n'établit clairement le partage des responsabilités entre les deux ministères.

Voici un autre exemple qui devrait tirer la sonnette d'alarme dans cette Chambre. Grâce à l'autoroute de l'information, la communication s'apprête à franchir la vitesse de Mach 2. Est-il raisonnable de réduire tout cet enjeu à la seule commercialisation de la fibre optique?

C'est pourtant la conclusion à laquelle il faut bien en venir puisque c'est le ministre de l'Industrie qui en sera le maître d'oeuvre. C'est aussi refuser d'admettre que l'importante révolution technologique générée par l'arrivée de l'autoroute de l'information va, sans aucun doute, transformer rapidement et radicalement la culture mondiale.

On dit souvent que la guerre est trop sérieuse pour être laissée aux généraux. Se pourrait-il que la culture d'une société soit trop précieuse pour la laisser aux technocrates et aux businessmen?

Je crois que la culture québécoise est trop précieuse pour être confiée au bon vouloir du gouvernement fédéral. L'État du Québec doit être le seul responsable en matière de culture québécoise.

Les revendications historiques du Québec en matière culturelle ont toujours été axées sur la reconnaissance de la spécificité québécoise et sur la volonté de l'État du Québec d'être le seul maître d'oeuvre dans la promotion et la défense de la culture québécoise. Les exemples de sa volonté politique ne manquent pas. Dès 1966, le premier ministre Johnson déclarait, lors d'une réunion sur le régime fiscal canadien, que le Québec doit être maître de ses décisions en ce qui a trait à l'épanouissement culturel.

En 1969, c'est au tour du premier ministre Bertrand de déclarer que les affaires culturelles relèvent de la compétence du Québec. En 1973, sous Robert Bourassa, le Québec réclame le rapatriement de la politique culturelle dans sa totalité, y compris les budgets fédéraux consacrés à cette fin. En 1976, le Québec propose que chaque province puisse légiférer exclusivement dans le domaine des arts, des lettres et du patrimoine culturel.

Plus récemment, en 1991, la Commission Bélanger-Campeau évoque la nécessité d'attribuer de façon exclusive au Québec les compétences et les responsabilités dans le domaine du développement social, économique et culturel. La même année, le Rapport Arpin, commandé par le gouvernement québécois de l'époque constatait, et je cite: «L'on peut conclure qu'il existe, sur le plan des structures, des programmes, des clientèles et même des mesures législatives et fiscales, un chevauchement manifeste entre les interventions des deux ordres de gouvernement. L'harmonisation des interventions entre les deux paliers de gouvernement a toujours été difficile. Le gouvernement fédéral n'a jamais voulu reconnaître la prépondérance du Québec en matière culturelle.»

Depuis plus de trente ans, le gouvernement fédéral, par le puissant biais de son pouvoir de dépenser, s'est immiscé sans aucun scrupule dans le domaine de la culture. L'objectif de ces incursions était clairement de bémoliser la culture québécoise. Le résultat en est l'émergence de chevauchements et de dédou-


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blements sans parler de l'assujettissement larvé de nos créateurs à la manne fédérale.

L'offensive fédérale dans le domaine culturel, par l'introduction du projet de loi C-53, n'est que la pointe de l'iceberg. À preuve, le rapport du Comité mixte spécial chargé de l'examen de la politique étrangère du Canada qui vient consacrer la volonté d'Ottawa d'assujettir la culture québécoise à la norme fédérale.

Le rapport dissident déposé par l'opposition officielle dénonce cette tentative fédérale de diluer la spécificité québécoise en la remuant dans la sauce du bilinguisme et du multiculturalisme canadien. Il n'y a pas de doute, toute l'affaire est dans la sauce.

L'opposition officielle constate, et je cite: «L'orientation de la politique étrangère du Canada en matière culturelle, telle que prescrite dans le rapport majoritaire, se fonde sur le postulat d'une seule nation, d'une seule et même culture (une soi-disant culture canadienne), et que toutes les provinces doivent par conséquent jouir d'un statut égal.»

(1715)

Pour l'opposition officielle, il est clair que les principes du bilinguisme et du multiculturalisme, fondement politique de la définition d'une culture dite canadienne, ont pour conséquence de désavouer l'existence de la culture québécoise, originale et développée essentiellement à partir de ses origines françaises, avec les apports britanniques et autochtones et plus récemment, des diverses communautés d'immigrants.

Le Québec n'acceptera jamais de voir sa culture inféodée au gouvernement fédéral. L'opposition officielle dénonce avec vigueur cette tentative non voilée d'assujettir le Québec au dictat fédéral.

[Traduction]

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de me pencher une fois de plus sur le projet de loi C-53. C'est avec plaisir que je vais parler des divers aspects du ministère du Patrimoine canadien et dire que ce qu'il faut vraiment faire, lorsqu'il est question de ce ministère, ce n'est pas simplement le rationaliser de façon superficielle, mais bien procéder à une restructuration en profondeur d'un bon nombre des services qu'il regroupe, notamment le ministère du Multiculturalisme, le Conseil des Arts du Canada, l'Office national du film, Condition féminine Canada, la Société Radio-Canada et bien d'autres services.

Permettez-moi simplement de parler de certains de ces ministères et de préciser que, dans certains cas, nous pourrions complètement nous en passer.

Je voudrais tout d'abord m'arrêter sur le ministère du Multiculturalisme, un sujet dont de nombreux réformistes ont déjà parlé. Nos vis-à-vis ont laissé entendre que, sans un ministère du Multiculturalisme, il ne pourrait y avoir de diversité multiculturelle au Canada. C'est tout à fait stupide.

Je rappelle aux députés d'en face que ce sont des gens d'origines culturelles très diverses qui ont colonisé l'ouest du pays. Nous n'avions pas besoin alors d'un ministère du Multiculturalisme. Ces gens avaient leur culture qu'ils ont préservée avec leur propre argent, chose tout à fait nouvelle pour les libéraux. C'est encore ce qui se passe aujourd'hui. Les gens n'ont pas besoin du gouvernement pour leur dire qu'il leur faut préserver leur culture. Ils le feront s'ils le jugent bon et paieront eux-mêmes la note. C'est ce que la plupart des Canadiens trouvent sensé.

Or, pour une raison quelconque, le gouvernement a décidé que certaines cultures étaient plus méritantes que d'autres, qu'on devait établir une liste des priorités concernant les cultures, que certains groupes devraient recevoir de l'argent et d'autres non. Eh bien, je pense que cela ne peut que créer des dissensions.

Je tiens à signaler aux députés d'en face, qui affirment souvent que les réformistes n'offrent aucune solution pour sabrer les dépenses, qu'il s'agit là d'un domaine où il est possible d'épargner quelque 21 millions de dollars. Nous pourrions effectuer cette compression aujourd'hui et la plupart des Canadiens seraient tout à fait en faveur de cela, selon moi.

Je tiens à aborder certains des autres problèmes reliés au ministère du Multiculturalisme. Je le répète, j'ai parfois le sentiment que le ministère du Multiculturalisme crée des dissensions. À ce propos, j'ajouterais que tous les comportements ne se valent pas. Certaines cultures prônent des types de comportement que la plupart des Canadiens rejettent clairement. Ainsi, certaines cultures laissent entendre que les femmes sont des êtres inférieurs et devraient se contenter de jouer des rôles subalternes. Je ne suis absolument pas de cet avis.

Selon moi, quand on se met à financer les cultures et à donner de l'argent à des gens pour défendre les cultures, cela empêche ce qui est devenu une norme au Canada, une sorte de norme éthique ou morale, de se répandre dans les cultures où il peut arriver que l'on ne traite pas les gens avec tout le respect dû à leur sexe. Je m'oppose fortement à ce genre de situation et j'espère que les ministériels en font autant. Voilà pourquoi, selon moi, on peut prétendre que le ministère du Multiculturalisme a perdu sa raison d'être.

J'ajouterais que, lorsqu'on voit, par exemple, ce que le ministre de la Justice a proposé la fin de semaine dernière ou ce qui est sorti de son ministère concernant l'inscription dans la loi de motifs d'ordre culturel, on saisit, je pense, le danger que présente cette attitude qui consiste à accorder un statut spécial à certaines cultures, ce qui revient à ouvrir la boîte de Pandore.

(1720)

Heureusement pour les Canadiens que les réformistes se tenaient sur leurs gardes. Ils ont immédiatement pressé le ministre de questions et celui-ci a battu en retraite, comme il se devait.

Ce n'est pas que les lacunes lui sont apparues dès le départ. C'est seulement parce que les réformistes sont intervenus, ont soulevé la question et ont forcé le ministre à battre en retraite. J'espère que nous saurons toujours faire de même.


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Entre-temps, nous encourageons certes les ministériels à se pencher à nouveau sur le dossier du ministère du Multiculturalisme et à reconnaître que cette façon de gouverner peut être une source de discorde et introduire d'étranges idées dans notre système judiciaire.

S'il est un autre organisme relevant du ministère du Patrimoine canadien sur lequel il faut se pencher, c'est bien le Conseil des Arts du Canada. Le Conseil des arts du Canada subventionne des artistes canadiens de toutes sortes, alors que ceux qui devraient créer, et créeraient effectivement des oeuvres, le font de toute façon. Nous versons annuellement, par l'intermédiaire du Conseil des arts, des dizaines de millions de dollars à des gens qui produisent ce que le conseil appelle de l'art.

Avant l'existence du Conseil des arts, les gens produisaient des oeuvres artistiques et ils le font encore, malgré l'existence du conseil. Je sais qu'il y a dans ma circonscription de nombreux peintres et écrivains qui sont enchantés de simplement mettre leur talent à l'épreuve, non pas pour de l'argent, mais plutôt pour satisfaire la pulsion créatrice qui les anime. Ce faisant, ils produisent de véritables oeuvres d'art et toute la société s'en trouve enrichie.

Ce que j'aime dans leur façon de faire, c'est que le contribuable n'a pas à payer la facture. On ne lui demande ni de financer l'artiste, ni d'acheter l'oeuvre. Comparez cela au Conseil des arts du Canada qui donne des dizaines de millions de dollars aux éditeurs afin qu'ils publient, pour des écrivains eux aussi subventionnés, des livres qui vont dormir à tout jamais sur une tablette. Je suis justement en train de lire un essai financé par le Conseil des arts qui traite, croyez-le ou non, des abus du Conseil des arts. Quelle ironie! Il est presque impossible de rédiger une oeuvre au Canada sans que celle-ci ne soit financée par le Conseil des arts du Canada, puisque les fonds vont directement aux éditeurs canadiens. Voilà un des paradoxes de la situation.

L'auteur que je lis en ce moment parle justement d'un entrepôt où sont rangés tous ces volumes de la littérature canadienne que personne ne veut acheter. En fait, les maisons d'édition ne parviennent même pas à les donner.

Elles ont proposé certains produits de la littérature canadienne à des écoles et à des prisons, mais, même là, elles ont essuyé un refus. C'est à juste titre, je suppose, car en fin de compte c'est la personne elle-même qui juge de l'intérêt qu'une chose représente.

Je pense que c'est le meilleur argument pour ne pas avoir d'organisation comme le Conseil des arts du Canada, qui déforme complètement le marché et dévalue le produit, vu que de nombreux écrivains de qualité se trouvent associés à ceux qui ne valent pas grand-chose. Ceux qui cherchent à suivre la situation se font une fausse idée de la culture canadienne, car une bonne partie de la production n'est pas fameuse. C'est financé par le gouvernement et il vient un moment où les observateurs peuvent penser que la culture canadienne ne vole pas bien haut. C'est regrettable, parce qu'il se publie aussi beaucoup de choses excellentes. Cependant, à cause du Conseil des arts du Canada, les gens se font une fausse idée de ce que nous produisons et c'est regrettable.

Une autre institution qui amène les gens à s'interroger sur la façon dont le gouvernement dépense, c'est l'Office national du film. Mes collègues du Parti réformiste ont déjà soulevé la question d'une série de films vidéo financés par l'office portant sur l'amour entre lesbiennes. Il s'agissait de films à diffusion restreinte, certains comportant des scènes très explicites. Cela nous a amenés à nous demander si le gouvernement est vraiment sérieux lorsqu'il parle de réduire les dépenses.

L'Office national du film dépense des millions chaque année. Ne devrait-il pas y avoir des lignes directrices plus strictes en ce qui concerne les productions pornographiques ou adultes aux frais des contribuables, alors que la majorité d'entre eux s'opposeraient à de telles productions?

(1725)

Ce n'est pas ce que pensent les libéraux. Cela nous amène à une question plus générale, à savoir devrait-il seulement y avoir un Office national du film? Cet organisme semble n'avoir de comptes à rendre à personne.

À mon avis, de nombreux producteurs de film privés aimeraient produire des films pour les écoles, comme cela se fait aux États-Unis. Une dame de ma circonscription m'a dit: «Nous aimerions présenter les films de National Geographic à l'école.» Elle voulait savoir comment s'y prendre pour obtenir les droits. En fait, ces films sont offerts gratuitement aux écoles. La National Geographic Society est, bien sûr, une association financée par des particuliers, non par les contribuables. Pourquoi ne pourrait-il pas en être ainsi dans notre pays? J'affirme quant à moi que c'est tout à fait possible.

Voyons un peu maintenant Condition féminine Canada, qui relève également du ministère du Patrimoine canadien. L'une des fonctions de ce secteur semble être malheureusement de financer des intérêts privés, y compris le Comité canadien d'action sur le statut de la femme, un groupe fortement politisé, au centre d'intérêt très étroit, qui-quoi qu'il en dise-ne représente absolument pas les vues de toutes les Canadiennes. S'il est vraiment sûr de sa position, s'il pense vraiment qu'il représente les Canadiennes, qu'il se fasse directement financer par elles. Je les appuierais totalement.

À ce stade où le pays se trouve dans une situation financière aussi déplorable, j'encourage le gouvernement à examiner en détail le ministère du Patrimoine canadien pour voir si on a vraiment besoin de certaines de ses composantes, et à mettre de l'ordre dans ses finances.

[Français]

M. Michel Daviault (Ahuntsic, BQ): Monsieur le Président, je constate que j'ai à peine quelques minutes. Il me fait plaisir d'intervenir une deuxième fois sur le projet de loi C-53, Loi constituant le ministère du Patrimoine canadien.

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Lors de ma première intervention, j'ai pris soin de dénoter le caractère fourre-tout de ce qui constituait ce ministère. Notamment, j'avais mis en évidence le ramassis de programmes, la répartition des responsabilités, le regroupement de différents secteurs de ministères et de secrétariats d'État.

J'avais laissé entrevoir également le poids politique très relatif du ministre du Patrimoine par rapport au pouvoir réel du ministre de l'Industrie qui, lui, tiendrait véritablement les cordons de la bourse.

Je concluais en dénonçant le fait qu'on avait complètement occulté l'existence de la culture québécoise du fait qu'on n'y faisait nullement référence dans ce projet de loi. Je rappelais enfin l'iniquité du traitement dans l'administration du réseau français de la Société Radio-Canada, par rapport au réseau anglais, ainsi que les fermetures de nombreuses stations régionales.

À cet égard, Mme France Dauphin, de la Coalition pour la défense des services français de Radio-Canada, dans un mémoire déposé au Comité permanent du patrimoine canadien, soulevait plusieurs questions. Par exemple, l'investissement aux programmes par heure d'émission a augmenté de près de 7 000 $ au réseau anglais, alors qu'il a été minime au réseau français. Exactement en cinq ans, de 1987 à 1992, au réseau anglais, on est passé de 30 500 $ à 37 500 $. Au réseau français, on est passé de 17 500 $ à 18 300 $. Au réseau français, une augmentation de moins de 5 p. 100, au réseau anglais, une augmentation de plus de 20 p. 100.

Aujourd'hui, j'aimerais revenir sur un aspect important de ce projet de loi, celui sur le partage des responsabilités. Pour nous, dans ce projet de loi, on sent une volonté ferme de faire de ce ministère un outil de promotion, pour ne pas dire de propagande, de la «multiculture canadienne».

Quant à la gestion de ce nouveau ministère, je suis d'accord avec les propos de la députée de Calgary-Sud-Est, à l'effet qu'il n'y a pas de stratégie ou de dessein, ni de plan pour gérer ce nouveau ministère. Cependant, j'affirmerai plutôt que les libéraux donnent «en apparence» au ministre du Patrimoine des pouvoirs très larges et qu'en ce sens nous avons tout lieu de questionner l'aspect plutôt occulte du mandat de ce nouveau ministère.

Par exemple, pourquoi maintenir ce partage artificiel de la culture et des technologies de diffusion; dichotomie créée par les conservateurs vis-à-vis de la culture et de l'administration de l'industrie culturelle.

En fait, on ne laisse au ministre du Patrimoine que la responabilité des contenus de la culture, et au ministre de l'Industrie, la responsabilité commerciale des moyens de diffusion: les véritables cordons de la bourse.

De plus, le ministre de l'Industrie a réussi à mettre sur pied un comité consultatif sur l'autoroute électronique. Voilà un autre exemple de chevauchements, de dédoublements et de manque de coordination à l'intérieur même du régime fédéral. Les industries de télécommunications et de câblodistribution convergent vers ce nouveau ministère de l'Industrie. Cette convergence n'est pas sans nous inquiéter, car elle met en cause le niveau de programmation canadienne, sur lequel le ministre du Patrimoine est appelé à statuer.

En réalité, force nous est de constater que les vrais pouvoirs sur la culture canadienne sont remis entre les mains du ministre de l'Industrie. De plus, en accordant au CRTC le pouvoir de définir seul les règles de fonctionnement des télécommunications au Canada, Ottawa banalise les intérêts du Québec et les place à égalité avec ceux de l'industrie et des groupes de consommateurs, ce qui est tout à fait contraire aux revendications traditionnelles du Québec.

Rappelons enfin que le Québec a été exclu de la juridiction de la radiodiffusion, de la télédiffusion et de la câblodistribution en 1974, puis de la téléphonie, le tout au profit du CRTC, qui obtenait, en juin 1993, un pouvoir de réglementation étendu, confirmant ainsi la main-mise d'Ottawa sur toute l'industrie des télécommunications.

Le vice-président: Comme il est 17 h 30, la Chambre abordera maintenant l'étude des affaires émanant des députés, selon l'ordre indiqué au Feuilleton d'aujourd'hui.

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INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LA LOI SUR LA CITOYENNETÉ

Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam, Réf.) propose: Que le projet de loi C-249, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté (droit à la citoyenneté), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Monsieur le Président, c'est pour moi un grand privilège que de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi d'initiative parlementaire que j'ai déposé, le projet de loi C-249, qui modifie la Loi sur la citoyenneté relativement au droit à la citoyenneté.

Le projet de loi modifie la Loi sur la citoyenneté de sorte qu'un enfant né au Canada après le 31 décembre 1994 n'aura pas la citoyenneté canadienne si, au moment de sa naissance, aucun de ses parents n'a qualité de citoyen canadien ou de résident permanent. Toutefois, cet enfant se verra attribuer la citoyenneté lorsque son père ou sa mère acquerra la qualité de citoyen ou de résident permanent et qu'une demande à cet effet sera faite par la personne autorisée à représenter l'enfant.

Le projet de loi rejoint des préoccupations exprimées dans ma propre circonscription, Port Moody-Coquitlam. La question avait d'ailleurs été soulevée au cours des discussions du Comité de la citoyenneté et de l'immigration lorsque j'y siégeais. La situation actuelle et les descriptions de la politique m'ont de plus en plus sensibilisée aux lacunes du système d'immigration canadien et à la nécessité d'y apporter des changements. Comme bien d'autres Canadiens, je ne puis plus me borner à accepter passivement les choix faits pour nous par des gouvernements dont les politiques d'immigration ne sont pas dictées par les réalités nationales mais trop souvent par les exigences de groupes politiques et de groupes d'intérêts spéciaux.


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Les politiques d'immigration et de citoyenneté du Canada doivent correspondre à l'intérêt national et à celui des nouveaux Canadiens et il est primordial de protéger l'un et l'autre. Des politiques qui nuisent au pays compromettent l'avenir de tous ses citoyens.

La politique du Parti réformiste est fondée sur cette conviction. Si nous voulons que le Canada serve bien les intérêts des nouveaux Canadiens et des Canadiens de souche, nous devons accorder la priorité aux besoins économiques du Canada lorsque nous définissons les objectifs et la politique d'immigration. Nous devons réprimer sévèrement les abus et considérer la sécurité de la société canadienne comme la chose la plus importante. Nous devons tenir compte du fait que le Canada a l'une des politiques d'immigration les moins restrictives du monde occidental, et même du monde entier, et que cette caractéristique est à l'origine de certains abus des plus condamnables.

Quel rapport y a-t-il entre le sujet du projet de loi que j'ai présenté et la situation dont je viens de parler? L'ouverture de notre politique d'immigration et les abus dont elle a fait l'objet, en particulier au chapitre des visas de visiteurs et des demandes de statut de réfugié, ont peut-être porté un coup à la fierté d'être citoyen canadien. Nous avons créé, pour ceux qui peuvent aisément contourner le système, une catégorie de citoyen par opportunisme.

Les visiteurs peuvent aisément profiter de la citoyenneté par opportunisme. Ils peuvent venir au Canada dans le seul but de faire en sorte que leurs enfants naissent ici et aient la citoyenneté canadienne. Sur l'actuelle demande de séjour à titre de visiteur, il n'y a aucune question sur l'état médical. Les visiteurs peuvent rester au Canada jusqu'à six mois et il suffit qu'ils nomment une personne qu'ils désirent visiter pour justifier leur séjour. Ils peuvent même dire qu'ils ont beaucoup voyagé sans avoir jamais eu la chance de visiter le Canada. Ils s'engagent à ne pas travailler et promettent de retourner dans leur pays natal ensuite.

(1735)

Le système repose sur la confiance et l'honnêteté, ce qui fait qu'on abuse de l'hospitalité du Canada. Il est évident que l'acquisition de la citoyenneté par la naissance est en train de devenir une véritable industrie dont les exploitants demandent de l'argent à leur clientèle pour arranger l'hébergement et l'accouchement au Canada.

En vertu de la législation actuelle, l'enfant né au Canada pendant un séjour de la mère à titre de visiteur devient d'office citoyen canadien. Prenons par exemple le phénomène des bébés-passeport, qui a fait l'objet d'un article dans le Vancouver Sun, en novembre 1993. Selon cet article, on avait dénombré annuellement dans la province entre 246 et 333 bébés nés de mères non résidentes au cours des trois années précédentes. Ces chiffres proviennent du bureau de la statistique de l'état civil de la Colombie-Britannique. En fait, ils pourraient être beaucoup plus élevés, car ils ne comptent pas les enfants de mères qui semblent être résidentes parce qu'elles ont donné à l'hôpital une adresse en Colombie-Britannique.

En janvier 1994, le Toronto Sun rapportait qu'il y a eu environ 400 naissances d'enfants de mères non résidentes, l'an dernier au Canada. Le journal précisait que les responsables de l'immigration s'inquiétaient de cette tendance et qu'ils réclamaient des modifications prévoyant que la nationalité ne serait reconnue que si le parent était citoyen canadien ou immigrant reçu. Les États-Unis et la Grande-Bretagne tentent de mettre un frein à cette pratique et ont raffermi leurs lois sur la citoyenneté. L'article en question citait un employé de l'immigration qui disait que cette pratique des mères qui viennent ici dans le seul but de donner naissance à leur enfant en sol canadien était une façon d'acheter la citoyenneté canadienne.

Les possibilités d'abus sont immenses, et cela concerne tous ceux qui sont fiers de posséder la citoyenneté canadienne, que nous chérissons tant. Il suffit d'avoir les moyens pour obtenir la citoyenneté par opportunisme. Les intéressés n'ont qu'à débourser personnellement les frais d'hospitalisation de 1 500 $ par jour et les frais de séjour au Canada pour environ un mois avant la naissance. Autrement dit, la citoyenneté canadienne est à vendre pour 30 000 $. Voilà un autre privilège des riches qui leur permet d'assurer l'avenir de leurs enfants. Je me permets d'ajouter que ce n'est peut-être pas une si grande coïncidence si le premier bébé né à Vancouver en 1994 était d'une mère n'ayant pas de statut de résidente permanente au Canada.

Dans ma circonscription de Port Moody-Coquitlam, j'ai effectué un sondage téléphonique au printemps dernier pour savoir s'il y avait lieu de présenter un projet de loi sur cette question. Selon plus des deux tiers des répondants, il faut modifier la loi pour mettre un terme à ces abus et cesser de dévaloriser la citoyenneté canadienne.

Pourquoi est-il si important de ne pas accorder librement la citoyenneté canadienne? Pourquoi ceux qui sont nés au Canada, peu importe le statut de leurs parents ou leur intention de rester au Canada, devraient-ils être considérés comme des Canadiens? Plus j'examinais cette question, plus j'en voyais clairement les conséquences très réelles quant aux droits et aux privilèges mêmes qui se rattachent à la citoyenneté et que nous apprécions tant.

La citoyenneté ne s'accompagne pas seulement d'une liste de droits, mais aussi de responsabilités qui nous aident à devenir de bons citoyens et à faire de notre pays le meilleur endroit pour vivre. Ce sentiment a été exprimé maintes et maintes fois au printemps dernier, lorsque Citoyenneté et Immigration a tenu des audiences sur d'éventuelles modifications à apporter à la loi. C'est à mon initiative que le comité s'est penché sur la question de la citoyenneté selon la naissance et le comité a unanimement adopté les propositions.

Les néo-Canadiens tiennent rarement pour acquise leur place au Canada. Les libertés dont nous bénéficions, de même que la richesse et la beauté du Canada devraient nous inspirer une fierté toute spéciale. Cette fierté suppose toutefois une participation et un partage des responsabilités à l'égard de l'avenir de nos familles et de nos collectivités.

Un autre témoin a déclaré qu'une nation se bâtit autour d'un partage des valeurs, d'une histoire, voire d'un engagement envers le pays. Le seul fait de se trouver au Canada entraîne donc


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une interaction et un engagement. Il doit y avoir une volonté de participer à la vie de la collectivité et de s'engager à apprendre ensemble ce qui fait la grandeur du Canada.

Les bébés-passeport ne sont pas engagés envers le pays et ils ne remplissent pas des responsabilités de citoyens. Ils n'ont pas grandi au Canada ou ne comprennent pas ce qu'il faut pour être un bon citoyen. Il n'y a aucun engagement envers le pays tant que l'enfant ne décide pas de rentrer au Canada, soit vers 18 ans. Est-ce que le principal motif du retour au Canada est de parrainer leurs parents? L'essence même de la valeur intrinsèque de la citoyenneté perd toute sa signification et, à long terme, la société ne se trouve ni renforcée ni améliorée par la contribution de ses membres.

(1740)

De plus, en tant que citoyen canadien, cet enfant, après une période minimale de résidence au Canada, a droit à tous les services médicaux, à tous les programmes d'éducation et à tous les autres programmes sociaux canadiens. Il peut même arriver, dans des cas exceptionnels, que cet enfant, après avoir vécu une vie de criminel à l'étranger, décide de revenir au Canada. Son statut de citoyen canadien de naissance le protégerait alors, car nous ne pourrions rien faire pour l'empêcher de revenir au pays, même s'il est évident qu'il ne partage pas les valeurs et les responsabilités que nous respectons.

Dans le cas de ceux dont les parents considèrent la citoyenneté que nous accordons si librement simplement comme une mesure de sécurité qui pourrait leur être utile un jour, nous n'avons aucun contrat ni aucune preuve qu'ils sont attachés à notre pays. La citoyenneté canadienne n'est qu'un instrument facile à obtenir et précieux, puisqu'il peut être utile ultérieurement. Il s'agit là d'une véritable exploitation du système généreux que nous maintenons pour les visiteurs.

La préservation de l'intégrité de la citoyenneté canadienne est liée à une autre considération dont il faut tenir compte lorsqu'on pense au système de reconnaissance du statut de réfugié. Comme notre système est fort complexe, nous observons beaucoup de fraudes de la part de gens qui revendiquent le statut de réfugié de manière à contourner le système d'immigration. Nous avons créé un système pour les réfugiés à l'intérieur du Canada, puisque le processus de reconnaissance du statut de réfugié est très long. Il faut parfois attendre jusqu'à trois ou quatre ans avant qu'une décision finale ne soit rendue. La vie continue pendant ce temps et des enfants naissent.

Comment peut-on ordonner à un étranger dont la demande du statut de réfugié a été rejetée de quitter le pays lorsqu'il est père d'un ou deux enfants qui sont nés ici, au Canada, et qui ont la citoyenneté canadienne? Ceux qui prennent la décision doivent tenir compte du fait que les enfants sont Canadiens et ont droit à tous les droits et privilèges conférés par la citoyenneté canadienne.

Examinons un instant le processus afin de comprendre la cause du retard qui est à la source du dilemme. Prenons d'abord le cas d'un faux réfugié qui n'a absolument pas droit au statut de réfugié, mais qui entend abuser du système. Il sera interrogé par un agent d'immigration supérieur qui tentera de déterminer si sa prétention est fondée. Il aura au moins un mois pour étayer sa demande et réclamera souvent plus de temps encore. Si, comme la plupart des individus de son espèce, il ne dispose pas des documents originaux, il les fabriquera.

Il a aussi droit à un avocat. On lui en fournira un sur demande. À cette étape, les demandeurs qui entrent dans des catégories prédéfinies subissent une audience sommaire. Tous les demandeurs sont informés de ce qu'ils doivent dire ou faire pour faire partie de ces catégories. Les demandeurs peuvent ensuite présenter leur demande en tenant compte des grandes lignes que le gouvernement leur a fournies.

Les autres sont soumis à un examen approfondi. Il se passe habituellement deux ou trois mois avant la tenue de l'audience. En général, le demandeur est alors au Canada depuis au moins six mois. L'audience a lieu devant deux commissaires et le statut de réfugié ne peut être refusé qu'avec l'accord des deux. Cela signifie qu'il n'y a qu'une personne à convaincre d'accorder le statut de réfugié.

Si la demande est rejetée, il faut en donner les motifs par écrit et ces motifs peuvent être contrôlés par la Cour d'appel fédérale. Si la cour maintient la décision, on peut encore faire réexaminer le cas par le ministère pour des considérations humanitaires. Tout le processus peut prendre deux, trois ou même quatre ans.

On sait que près de 80 p. 100 des revendicateurs du statut de réfugié finissent par demeurer au Canada, même si seulement 35 p. 100 de tous les revendicateurs correspondent à la définition que les Nations Unies donnent du terme réfugié. Il semble impossible de fournir des données sur le nombre des réfugiés qui seraient touchés par le nouveau critère relatif à la naissance d'enfants au Canada.

Il est malheureux qu'il y ait des gens qui abusent d'un système qui vise justement à les protéger. La grande majorité des visiteurs et des personnes qui demandent le statut de réfugié ne cherchent pas à exploiter le système. Le projet de loi reconnaît la nécessité d'adopter des dispositions relatives aux enfants nés des personnes qui utilisent correctement le système d'examen du statut de réfugié. Ces enfants deviendraient des citoyens canadiens à part entière tout simplement en présentant une demande après que leurs parents aient obtenu leur statut de résident permanent.

Il reste cependant un point à régler. Il faut prévoir une disposition législative-un simple amendement du projet de loi suffirait peut-être-pour éviter que des enfants nés au Canada soient apatrides. En conclusion, le système actuel qui accorde automatiquement la citoyenneté à toutes les personnes nées au Canada, peu importe le statut de résidence de leurs parents, invite à des abus délibérés dans un monde de plus en plus petit dont l'évolution reste imprévisible.

(1745)

L'immigration devrait être ouverte à ceux qui choisissent de venir renforcer la trame de leur nouveau pays. La valeur de la citoyenneté canadienne et celle de notre magnifique pays se calculeront par l'addition des valeurs et du sentiment d'appartenance des citoyens fiers et généreux qui l'habitent.


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La Chambre des communes doit se pencher sur le problème que représente le fait d'accorder d'office la citoyenneté canadienne à tout enfant né au Canada. En accroissant l'intégrité du processus on renforcerait la fierté et le sentiment d'appartenance de toutes les générations de Canadiens.

Le vice-président: La députée de Mission-Coquitlam a mentionné avant que le débat ne commence qu'elle voulait partager son temps de parole. Il lui reste environ sept minutes, mais je ne vois pas le député avec qui elle devait partager son temps de parole. Dois-je en conclure que la députée ne partagera pas son temps de parole?

Très bien, la députée de Mission-Coquitlam dispose encore de huit minutes à peu près.

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, je vous demanderais de m'aider un peu et de me laisser savoir quand mon temps de parole tirera à sa fin pour que je puisse au moins finir ma phrase.

Je prends la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi d'initiative parlementaire présenté par ma collègue. Cette mesure législative concerne le problème croissant des femmes qui arrivent au Canada juste à temps pour donner naissance à leur enfant qui, du coup, devient citoyen canadien.

Ce projet de loi vise à empêcher que l'enfant se voit attribuer la citoyenneté canadienne à moins qu'un de ses parents acquière la qualité de citoyen ou de résident permanent et présente une demande à cet effet au nom de l'enfant. L'enfant né au Canada ne deviendra plus automatiquement citoyen canadien.

Lorsque j'ai appris que des femmes venaient au Canada pour accoucher dans nos hôpitaux et retournaient ensuite dans leur pays, j'ai trouvé cette situation plutôt anormale. On pourrait penser que les Canadiens devraient être flattés que les gens d'ailleurs aient une si haute opinion du Canada et des avantages découlant de la citoyenneté canadienne qu'ils choisissent de venir au Canada pour donner naissance à leurs enfants.

Je crois comprendre aussi que, dans la majorité des cas, les gens qui font cela paient pour les soins médicaux qu'ils reçoivent. Par conséquent, qu'y a-t-il de mal à cela? Le système de soins de santé n'a rien à débourser. Nous devrions être flattés que des gens de partout dans le monde veuillent donner la citoyenneté canadienne à leurs enfants. Il est difficile de soutenir que c'est là une façon de s'arranger pour que, 18 ans plus tard, l'enfant qui est citoyen canadien parraine ses parents pour les faire venir au Canada comme immigrants.

Je suppose qu'il y a de bonnes chances que cela se produise, mais je ne crois pas que ce soit là la principale faille que présente la loi sous sa forme actuelle. Il faudrait modifier la Loi sur la citoyenneté de sorte que le Canada cesse d'être considéré comme un lieu de naissance commode. Cette pratique doit cesser, car si elle continue, ce sera un travestissement du système actuellement en place par lequel les gens acquièrent la citoyenneté canadienne.

Des gens viennent au Canada de partout dans le monde. Ils viennent ici pour de nombreuses raisons, mais pour la grande majorité, ils y viennent parce que le Canada est un pays d'avenir, un pays où règnent l'équité et l'égalité, un pays où tout le monde est traité sur un pied d'égalité.

Si cela est vrai, comme je le crois, comment concilier la procédure complexe à laquelle doivent se plier les immigrants et les réfugiés pour devenir des citoyens canadiens avec le fait qu'une femme peut venir ici quelques jours, donner naissance à un bébé qui se voit reconnaître automatiquement la citoyenneté canadienne, et puis partir? Ces deux procédures sont à mon avis irréconciliables, et la dernière doit être supprimée.

Ceux qui prennent consciemment la décision de venir au Canada et de demander la citoyenneté canadienne le font parce qu'ils ont certaines attentes à l'égard de la citoyenneté, ce qu'elle est, ce qu'elle signifie et ce qui en découle. Ces gens-là ont compris ce que cela veut dire qu'être citoyen canadien. Chacun d'entre eux doit prendre une part active à la construction de ce pays que nous partageons tous.

Le sentiment d'être Canadien peut être long à acquérir. Cela veut dire faire partie d'une grande famille et, à ce titre, assumer certains droits et certains devoirs qui sont fondés sur nos traditions et sur les valeurs que nous partageons.

La Charte des droits et libertés garantit certains droits que partagent tous les citoyens canadiens, dont celui de voter aux élections fédérales et provinciales et d'y briguer les suffrages; le droit d'entrer au Canada, d'y demeurer ou d'en sortir; le droit de travailler et de résider dans la province de son choix et le droit de recevoir l'enseignement dans la langue de la minorité.

Les Canadiens jouissent également d'autres droits en tant que citoyens. Ils peuvent avoir un passeport canadien. Leur candidature à certains postes peut recevoir la priorité. Ces droits s'accompagnent de devoirs pour renforcer nos communautés, participer à la vie politique, respecter les lois canadiennes, lutter contre la discrimination et l'injustice, respecter les droits d'autrui, respecter la propriété privée et publique, se soucier du patrimoine du Canada et cultiver les idéaux du Canada.

(1750)

La citoyenneté canadienne aujourd'hui, cela veut dire, me semble-t-il, que tous les citoyens peuvent participer pleinement et également à la vie nationale. Elle assure la promotion de nos symboles nationaux et de nos valeurs et l'édification d'un pays où nous pouvons tous nous sentir chez nous.

Je suis convaincue que ceux qui participent activement à la vie de la société comme citoyens renforcent notre démocratie, notre identité nationale et notre sentiment de responsabilité à l'égard du Canada, renforcent nos relations mutuelles, améliorent la qualité de nos institutions et nous aident à régler les problèmes de la société.

Chaque année, de nombreux nouveaux citoyens prêtent le serment de citoyenneté. Il s'agit d'une déclaration solennelle qui confère des responsabilités à celui qui la fait. Avant de pouvoir prêter serment, il faut satisfaire aux normes suivantes. Il faut être âgé d'au moins 18 ans, être entré légalement au Canada pour


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devenir résident permanent, avoir vécu au Canada pendant un total de trois ans sur la période de quatre ans précédant immédiatement la demande de citoyenneté, parler une des langues officielles du Canada, avoir des connaissances suffisantes sur le Canada, notamment sur les droits et les responsabilités du citoyen, ne pas être sous le coup d'une ordonnance d'expulsion ni emprisonné, ne pas avoir été reconnu coupable d'un acte criminel au cours des trois années précédentes et ne pas être considéré comme une menace à la sécurité du Canada.

Même lorsque ces normes sont respectées, il doit y avoir une entrevue avec un juge de la cour de la citoyenneté. J'exhorte donc tous les députés à appuyer le projet de loi pour régulariser l'application du droit à la citoyenneté au Canada.

À mon sens, la citoyenneté doit être un moyen de promouvoir une participation active essentielle dans les affaires publiques. En adoptant ce projet de loi, nous montrerons au monde tout le sérieux que nous accordons à la citoyenneté canadienne et à tous les avantages qui en découlent.

M. Pat O'Brien (London-Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de parler de ce projet de loi d'initiative parlementaire que je considère comme une mesure très grave.

J'ai pourtant l'impression d'avoir entendu des prophètes de malheurs qui voient des conspirations partout. On jurerait que notre pays est sur le point d'être envahi par des femmes enceintes qui vont débarquer chez nous afin de mettre leur enfant au monde en terre canadienne, de manière que ces nouveau-nés rusés puissent s'approprier la citoyenneté canadienne et, partant, menacer notre sécurité nationale.

Je m'étonne qu'un projet de loi d'initiative parlementaire d'une portée aussi grave soit traité à la légère et avec autant de désinvolture. Je suis surpris et vraiment déçu. J'espère simplement que cette invasion de femmes enceintes n'est pas imminente.

Durant la campagne électorale, notre parti a invité les Canadiens à examiner les orientations que nous proposions dans le livre rouge et ce que nous considérons comme les priorités et les engagements de notre parti. Les Canadiens de toutes les régions ont répondu en appuyant très clairement notre parti.

Les députés réformistes d'en face interrompent sans cesse et refusent d'entendre cela. C'est bien beau, mais les Canadiens souhaitent être témoins du nouveau décorum dont ils parlent tant. Il est intéressant de constater qu'ils ne respectent pas ce décorum quand ils entendent des idées auxquelles ils s'opposent.

Quoi qu'il en soit, nous reconnaissons l'importance d'édifier un pays où les citoyens ne se considèrent pas comme des individus isolés ou des groupes d'intérêts rivaux, mais plutôt comme des membres d'une collectivité qui s'entraident. La nécessité de bâtir un Canada où les mêmes obligations et privilèges sont conférés à tous ceux qui en font partie est un aspect fondamental d'une telle vision.

Il est difficile de promouvoir l'obtention de la citoyenneté canadienne sans communiquer les valeurs fondamentales qui sont inhérentes à cet engagement.

À l'heure actuelle, notre sécurité subit des changements fondamentaux et graves. Le Canada doit relever une variété de défis économiques, culturels et sociaux, et l'un d'eux n'est pas cette supposée invasion de femmes enceintes qui viennent accoucher chez nous.

Nous devons relever le défi de l'intégration d'une population plus diverse que jamais du point de vue culturel dans une société plus complexe que jamais.

Comme je l'ai dit plus tôt, le Canada est plus que jamais un pays polyglotte. Presque toutes les cultures du monde y sont représentées. Les députés siégeant de ce côté-ci de la Chambre et la majorité des Canadiens considèrent cela comme un de nos atouts fondamentaux, comme l'essence même de l'identité canadienne.

C'est une composante qui n'est pas à craindre, qui ne doit pas être édulcorée, qui ne doit pas être extirpée de l'identité canadienne.

(1755)

Nous devons énoncer clairement ce que nous attendons de nos nouveaux citoyens et ce que notre pays a à leur offrir. Pour ce faire, nous avons besoin d'une loi sur la citoyenneté. Nous sommes bien de cet avis. Nous avons besoin d'une nouvelle loi sur la citoyenneté qui sera le reflet de notre époque.

D'ici la fin de l'année, le gouvernement va présenter une nouvelle loi sur la citoyenneté. Il dressera le portrait de la société canadienne à l'aube du XXIe siècle.

Je suis d'accord avec la députée pour dire que la citoyenneté canadienne est précieuse, mais qu'il ne faut pas céder à la tentation xénophobe qui consiste à ne pas l'accorder à ces étrangers qui veulent venir s'établir au Canada.

Il ne faut pas la considérer comme allant de soi. La citoyenneté comporte des droits civils, des devoirs et des responsabilités. Autrement dit, il faut définir les principes inhérents à la citoyenneté et à la démocratie, dont l'égalité des chances, la participation éclairée, le respect de la primauté du droit, la non-violence et le respect mutuel.

Une question aussi essentielle ne doit pas être remaniée à la légère. Franchement, je crains que c'est ce que fait la députée de Port Moody-Coquitlam. La députée a dit qu'il ne fallait pas banaliser la citoyenneté canadienne. Puis je l'ai entendue, et je n'en croyais pas mes oreilles, prendre certaines latitudes dans ses observations et ses litanies au sujet des supposés problèmes des réfugiés. J'estime qu'il faut prendre bien garde de mettre dans le même sac tous ces problèmes réels ou imaginaires au sujet des refugiés, de la citoyenneté et de l'octroi de la citoyenneté à des nouveau-nés. J'ai été franchement surpris d'entendre pareilles observations.


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Il ne faut pas restreindre ainsi peu à peu et à la légère la définition de la citoyenneté. Elle est bien trop importante pour être modifiée de la sorte.

À mon avis, il serait, à ce stade-ci, prématuré, sinon irresponsable de la part de la Chambre, d'isoler le moindre élément du dossier de la citoyenneté. On dirait qu'il y a à la Chambre des députés-heureusement ce ne sont pas des nôtres-qui sont obsédés par certains problèmes et qui manifestent ce qui m'apparaît comme une peur, qui frise la xénophobie, des gens qui viennent d'ailleurs. Je suis étonné de constater ce phénomène.

Malgré les protestations des députés d'en face, j'affirmerai que je suis très étonné de voir cette initiative refaire surface encore et toujours. Notre gouvernement a engagé un processus d'examen qui nous aidera à élaborer une loi concernant la citoyenneté qui soit plus solide, plus pertinente et plus efficace.

Je reconnais que la députée de Port Moody-Coquitlam est probablement bien intentionnée, mais son initiative est inopportune et de portée trop restreinte. Il y aurait lieu d'envisager la question dans une optique plus générale.

Lorsque le moment sera venu, on abordera tout cela de façon, je dirais, plus globale, plus responsable.

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui dans le cadre du débat sur le projet de loi d'initiative parlementaire C-249, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté. La motion, déposée le 11 mai 1994 par la députée de Port-Moody-Coquitlam, fera en sorte qu'un enfant né au Canada après le 31 décembre 1994 n'aura pas la citoyenneté canadienne si, au moment de la naissance, aucun des parents n'était citoyen canadien ou résidant permanent.

Cette question a été débattue superficiellement lors du processus de consultations menées par le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration, en juin dernier. L'actuelle Loi sur la citoyenneté stipule que quiconque naît au Canada est un citoyen canadien, à l'exception des enfants de diplomates et du personnel diplomatique. La Loi sur la citoyenneté actuellement en vigueur est vieille de 20 ans. C'est seulement en novembre 1993 que le journal Vancouver Sun a signalé quelques chiffres d'enfants qui étaient nés de parents n'ayant pas la résidence permanente au Canada.

(1800)

Jusqu'à présent, il n'y a pas eu d'étude scientifique et sérieuse sur la question. L'article du journal est basé sur les informations données par des infirmières de l'hôpital Saint-Paul de Vancouver. Il ajoute que la majorité de ces enfants provenaient de parents de Hong Kong qui veulent devenir des citoyens canadiens. Cet article suscita la controverse au sein de la communauté chinoise de Vancouver. Les dirigeants de cette communauté ont affirmé qu'il s'agissait d'un problème mineur.

Un fonctionnaire du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration a vaguement mentionné qu'il y aurait eu en 1993 environ 400 bébés nés de mères étrangères au Canada et que ces naissances n'avaient pas toutes eu lieu pour garantir un passeport.

Le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration n'a pas de chiffres au sujet des enfants nés au Canada dont les parents ne sont pas des citoyens ou résidants. La raison est très simple: c'est de la responsabilité des provinces d'enregistrer les naissances. Le gouvernement fédéral n'a pas autorité en la matière.

Le Parti réformiste peut-il appuyer son projet de loi sur des chiffres précis qui démontrent un grand complot de l'étranger, d'un flot ininterrompu de personnes venant de l'étranger qui abusent sciemment le gouvernement canadien? Certains parents sont ici légalement, par exemple, des étudiants, des travailleurs temporaires ou des revendicateurs du statut de réfugié.

[Traduction]

Il est évident que cette situation n'est pas assez grave pour exiger des modifications radicales à la loi à ce stade-ci. La motion vise à établir une nouvelle catégorie de gens vivant au Canada. Les enfants nés après le 31 décembre 1994, dont les parents ne sont ni des citoyens canadiens ni des résidents permanents, ne pourraient obtenir d'office la citoyenneté canadienne.

[Français]

La Loi sur la citoyenneté s'appuie notamment sur le principe du jus soli ou droit de sol. C'est un principe fondamental suivi par la plupart des pays. Avec la motion de la députée de Port Moody-Coquitlam, le principe territorial est rejeté du revers de la main.

Ce projet de loi reflète, à mon sens, le sentiment et le préjugé que les immigrants abusent du système. Cependant, il faut souligner que les enfants nés au Canada vont grandir «canadien» et n'auront pas besoin de cours de langue ni d'autres services d'accueil signifiant des dépenses pour l'État. Ils s'intégreront plus facilement à la communauté québécoise ou canadienne.

Ce projet de loi, s'il était adopté tel quel, pourrait faire en sorte qu'un enfant né au Canada risquerait de devenir apatride. Or, l'article 3 de la Déclaration des droits de l'enfant, proclamée par l'Assemblée générale de l'ONU le 20 novembre 1959, établit que «l'enfant a droit, dès sa naissance, à un nom et à une nationalité.» Et je souligne le mot «nationalité».

Cette motion introduit un vide juridique pour ces enfants. Dans le cadre de l'Année internationale de la famille, c'est fort paradoxal.

Nous savons que les agents de visa ici et dans les différentes ambassades canadiennes sont très réticents à accorder des visas de touristes aux femmes enceintes. Il n'y a donc pas là non plus de chiffres pouvant autoriser une dénonciation d'abus.

L'orateur précédent a dit qu'il n'y a pas eu d'invasion de femmes enceintes au Canada, et je suis d'accord.


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(1805)

[Traduction]

La Déclaration des droits de l'enfant signée par le Canada précise que les enfants ont besoin d'une protection spéciale, surtout sur le plan juridique, avant et après leur naissance. Notre pays doit à nos enfants le mieux que nous puissions leur offrir.

[Français]

Les gouvernements sont tenus de reconnaître ces droits et d'en assurer le respect au moyen de mesures législatives adéquates. Ces droits doivent être reconnus à tous les enfants sans exception aucune et sans distinction ou discrimination fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, les opinions politiques ou autres, l'origine nationale ou sociale, la fortune, la naissance ou toute autre situation, que celle-ci s'applique à l'enfant lui-même ou à sa famille. L'enfant doit grandir dans une atmosphère d'affection et de sécurité morale et matérielle.

Les chiffres donnés jusqu'à présent d'enfants de non-résidents nés au Canada sont très vagues et n'occasionnent pas de difficultés majeures. S'il y a un abus, il est minimal.

Dans tous les cas, nous attendrons le texte du projet de loi modifiant l'actuelle Loi sur la citoyenneté que le ministre s'est engagé à déposer cet automne pour nous prononcer de façon définitive. Pour le moment, je suis contre le projet de loi C-249.

[Traduction]

Mme Beryl Gaffney (Nepean, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de parler de la motion C-249 présentée par ma collègue d'en face, la députée de Port Moody-Coquitlam.

En faisant des recherches, hier, pour me préparer à intervenir aujourd'hui, j'ai jugé, de prime abord, que cette motion était pertinente, mais, après avoir approfondi la question, j'ai découvert qu'elle était probablement prématurée, car elle ne représente qu'un tout petit aspect d'un débat beaucoup plus large au sujet des orientations que nous prendrons à l'avenir, au Canada, en ce qui concerne la citoyenneté.

Le projet de loi C-249 attire notre attention sur les questions importantes de citoyenneté qui se poseront durant les mois à venir, et je suis d'accord pour dire qu'il faut modifier la façon dont le Canada aborde ces questions.

Il est regrettable que le projet de loi C-249 représente une approche spéciale à cet égard. Lorsqu'il est question de choses aussi importantes que les modifications apportées à la Loi sur la citoyenneté, on ne devrait pas remanier la législation en présentant une petite mesure législative à la fois.

En avril, le gouvernement s'est engagé à rédiger une nouvelle Loi sur la citoyenneté. Nous avons reconnu qu'il était nécessaire de modifier la loi actuelle et de supprimer les anomalies en ce qui concerne l'accès à la citoyenneté, ainsi que de renforcer l'intégrité de la citoyenneté. Pour renforcer cette intégrité, il ne suffit pas simplement de présenter une petite mesure législative, mais bien d'élaborer une stratégie globale. Nous devons savoir au juste l'orientation que nous souhaitons prendre avant de nous engager dans un débat sur des questions de détail.

Il faut élaborer un plan qui reflète la volonté des gens. Il s'agit aussi d'encourager ceux qui cherchent à obtenir la citoyenneté canadienne à mieux connaître notre pays et à prendre davantage d'engagements à l'égard de ce dernier. Les nouveaux citoyens doivent participer activement à la vie communautaire. C'est là le fondement de l'approche gouvernementale. Il est vrai que ce sera là un processus complexe. Nous l'avons déjà enclenché et nous entendons bien le mener à terme.

On a formé, en avril, un comité permanent pour examiner les idées qui amélioreront la visibilité et la valeur de notre citoyenneté. Ce groupe a déposé ses conclusions en juin, et je pourrais ajouter que la députée de Port Moody-Coquitlam faisait partie du comité permanent qui a présenté ce rapport sur la citoyenneté canadienne et le sentiment d'appartenance.

Le rapport précise, à la page 17, que certaines femmes semblent effectivement venir en visite au Canada seulement pour donner naissance à leurs enfants. Toutefois, le comité a reconnu qu'il s'agissait là d'un problème extrêmement minime et que les enfants nés au Canada ne devraient pas devenir des résidents permanents. En parvenant à cette conclusion, le comité a tenu compte des témoignages de ceux qui appuyaient cette notion.

(1810)

Dans le même rapport, on trouve 28 recommandations de modification de la Loi sur la citoyenneté. De ces 28 recommandations, celle que la députée de Port Moody-Coquitlam mentionne est la douzième. Elle fait partie des 28 recommandations. Sauf erreur, le ministre déposera la nouvelle Loi sur la citoyenneté au cours de la nouvelle année. Je pense qu'on pourra alors examiner ces 28 recommandations. Le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration en sera certainement saisi à ce moment-là. C'est probablement la raison pour laquelle j'ai changé d'idée, en ce sens que, à mon avis, il est un peu limitatif de traiter uniquement de cet aspect particulier du rapport.

Ces recommandations ne doivent pas être envisagées isolément. Il y a dix mois, le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration a lancé un processus de consultation des Canadiens. Entre février et septembre, lors de réunions publiques et dans des groupes d'étude, des milliers de Canadiens ont donné leurs opinions au gouvernement. Plus de 10 000 Canadiens d'un peu partout et de tous les secteurs de l'économie et de la société ont exprimé leurs points de vue sur les liens importants qui existent entre la citoyenneté et l'immigration et sur la façon dont ces valeurs ont façonné leur conception du Canada au cours du siècle prochain.

Les Canadiens ont fait connaître leur point de vue et nous avons déjà agi. Ces consultations ont une valeur inestimable pour plusieurs raisons. Premièrement, elles nous donnent l'occasion de prendre le pouls des Canadiens. Deuxièmement, elles incitent les Canadiens à réfléchir à leurs espoirs, à leurs rêves et à ce que cela signifie vraiment pour eux de faire partie de cette merveilleuse nation.


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La nouvelle loi sur la citoyenneté que proposera le gouvernement visera toute une gamme d'objectifs. Elle encouragera tous les Canadiens à exercer leurs droits civils en favorisant la citoyenneté, l'éducation et le respect des droits. Nous devons tenir compte des obligations et privilèges mutuels inhérents aux relations entre les citoyens canadiens et la société.

En outre, une nouvelle loi sur la citoyenneté modernisera les mécanismes administratifs actuellement en usage. De trop nombreuses personnes, qui ont droit à la citoyenneté canadienne et qui désirent désespérément l'obtenir, attendent encore à cause d'un système administratif trop lourd et incohérent. Ce système comporte trop d'obstacles. Il doit exister une meilleure façon de procéder.

Nous la trouverons grâce aux consultations et à des interventions réfléchies. Le ministre a déjà décidé que, en vertu du nouveau système, il n'y aurait plus de juges au Bureau de la citoyenneté. Leur fonction sera confiée à des Canadiens éminents, choisis parmi les titulaires de l'Ordre du Canada.

Les éléments du projet de loi C-249 sont importants, bien trop, à vrai dire, pour qu'on les traite ainsi un à un. Le comité permanent en a parlé aujourd'hui. Certaines recommandations ont été formulées. Par contre, il serait prématuré d'isoler une question du reste du travail effectué, avant même qu'on ne l'ait située dans le contexte d'un plan global sur la citoyenneté. Ce plan est en cours d'élaboration. Ayons la sagesse de l'attendre.

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, en tant porte-parole du Parti réformiste pour les questions de citoyenneté et d'immigration, je suis très heureux d'appuyer la députée de Port Moody-Coquitlam et les modifications qu'elle propose d'apporter à la Loi sur la citoyenneté dans le projet de loi C-249.

Tout d'abord, je voudrais dire que ce projet de loi a été déposé le 4 mai dernier, presque deux mois avant que le comité ne présente son rapport. Quand le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration a été formé, on lui a fixé cinq grands objectifs, dont celui de trouver des moyens de valoriser la citoyenneté canadienne.

Au cours des délibérations du comité, on a dit maintes fois aux députés que l'on avait banalisé la valeur de la citoyenneté canadienne. Comme un témoin l'a fait remarquer, pour être citoyen de ce merveilleux pays qui est le nôtre, il suffit de réussir le test, de payer des impôts, et le tour est joué. D'autres personnes se sont dites préoccupées de voir que la citoyenneté canadienne n'est aujourd'hui guère plus qu'une chose pratique pour les étrangers, une sorte de police d'assurance que l'on peut encaisser quand les temps sont durs.

Certains témoins ont dit au comité que des femmes venaient au Canada uniquement pour y accoucher. En vertu des lois canadiennes actuelles, tout enfant né au Canada reçoit automatiquement la citoyenneté canadienne, sans que l'on ne pose de questions. On dirait que le monde entier s'est donné le mot au sujet de la générosité du Canada.

(1815)

Selon des rapports publiés récemment dans le Vancouver Sun, ces trois dernières années, au moins 300 bébés de non-résidents sont nés en Colombie-Britannique chaque année. Cela fait plus de 900 enfants tout juste en Colombie-Britannique. Dans certains cas, cependant, il s'agissait d'un concours de circonstances.

Le personnel des hôpitaux estime cependant que la grande majorité des bébés sont nés de résidents de Hong Kong qui espèrent ainsi entrer plus rapidement au Canada ou, à tout le moins, offrir à leur enfant ou s'offrir à eux-mêmes une police d'assurance, si jamais le retour de Hong Kong à la Chine ne se passait pas aussi bien que prévu.

Va arriver un temps où ces «bébés-passeport» vont avoir droit à tous les avantages qu'offre la société canadienne: études collégiales et universitaires subventionnées, études universitaires, accès aux programmes sociaux, programmes de formation professionnelle, sécurité de la vieillesse, etc., alors qu'ils n'ont aucun rapport avec ce pays si ce n'est un morceau de papier disant qu'ils sont nés au Canada.

À l'âge de 19 ans, ces enfants pourront parrainer leurs propres parents afin de les faire venir au Canada, même si eux-mêmes n'ont guère, voire jamais résidé dans ce pays. À mon avis, ce n'est guère qu'une police d'assurance pour les parents en question et c'est se moquer de la citoyenneté canadienne.

J'admets que la question des «bébés-passeport» est un problème mineur, surtout si on la compare aux autres questions qu'englobe le portefeuille de la Citoyenneté et de l'Immigration. C'est cependant une lacune manifeste dont il est fait abus et qui doit donc être comblée.

Je pense que la position de la députée de Port-Moody-Coquitlam, qui se dresse fermement contre ceux qui abusent du système et fait preuve de compassion à l'égard des nouveau-nés, est extrêmement équilibrée. La députée préconise qu'un enfant né au Canada ne se voie accorder la citoyenneté canadienne que si au moins un parent ou bien est résident permanent dans notre pays ou bien a la citoyenneté canadienne.

Les parents qui sont devenus résidents ou citoyens ont clairement montré un engagement à l'égard du Canada et devraient donc, à titre de récompense, pouvoir accorder à leurs enfants tous les droits et privilèges qui vont avec la citoyenneté.

Les enfants nés au Canada de demandeurs du statut de réfugié auront automatiquement droit à la citoyenneté canadienne dès qu'au moins un des parents sera devenu un résident permanent ou un citoyen. Quant aux «bébés-passeport», ils devront prendre la citoyenneté de leurs parents.

S'il est adopté par le Parlement, ce projet de loi aura à mon avis deux effets. Premièrement, ce sera un message qui voudra clairement dire au reste du monde que le Canada attache une grande importance à sa citoyenneté. Pour qu'un nouveau-né devienne citoyen, les parents doivent prouver leur engagement à l'égard du Canada en devenant résidents ou citoyens. Un tel engagement sera trop dur à prendre pour certains et ceci mettra donc fin au flux de «bébés-passeport» et à l'utilisation de la


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citoyenneté canadienne comme une police d'assurance personnelle pour l'enfant ou ses parents.

Deuxièmement, ce sera un message qui voudra dire aux Canadiens que le gouvernement fédéral attache une grande importance à la citoyenneté et que sa position quant à qui peut l'acquérir est très ferme. J'ai l'impression que de moins en moins de Canadiens considèrent leur citoyenneté comme un bien précieux.

L'expression «citoyen canadien» a perdu de leur valeur à la suite d'histoires comme les «bébés-passeport» et l'abus flagrant des exigences en matière de citoyenneté. Cette modification serait une première étape dans l'entreprise de restaurer la valeur de la citoyenneté pour ceux qui la chérissent le plus, c'est-à-dire les Canadiens.

En terminant, je veux signaler à la députée que je trouve le projet de loi C-249 pertinent dans le cadre des débats à la Chambre. Le comité permanent avait fait les mêmes recommandations dans son rapport sur la citoyenneté canadienne et le sens de l'appartenance, publié il y a quatre mois. Ce rapport d'un comité réunissant tous les partis présentait, à l'unanimité, les recommandations suivantes:

«Les enfants nés au Canada ne devraient avoir la citoyenneté canadienne que si l'un de leurs parents, ou les deux, ont le statut de résident permanent ou la citoyenneté canadienne. Les enfants nés d'un parent reconnu comme un réfugié au sens de la convention ou qui revendique le statut de réfugié et qui est par la suite reconnu comme tel par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié devraient automatiquement obtenir la citoyenneté canadienne.»

J'insiste sur le fait que ces deux recommandations avaient l'approbation de tous les membres du comité, libéraux, réformistes et membres du Bloc québécois, et que ce sont ces mêmes recommandations qu'on retrouve noir sur blanc dans le projet de loi C-249.

(1820)

De toute évidence, la députée de Port Moody-Coquitlam a répondu aux préoccupations des Canadiens et respecté l'esprit et la lettre du rapport du comité permanent, en rédigeant ce projet de loi. Je demande à mes collègues de la Chambre d'être à l'écoute des Canadiens, d'oublier leurs différences partisanes et d'appuyer le projet de loi C-249 en tant que mesure apportant des modifications très importantes à la Loi sur la citoyenneté.

M. Stan Dromisky (Thunder Bay-Atikokan, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi C-249, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté, présenté par la députée de Port Moody-Coquitlam.

L'occasion nous est donnée d'examiner le processus d'acquisition de la citoyenneté canadienne. Avant de parler des détails du projet de loi, j'aimerais traiter de l'importance du processus d'acquisition de la citoyenneté. Nous devons protéger l'intégrité de ce processus car, comme le savent tous les députés, la possession de la citoyenneté canadienne est considérée comme un grand honneur. La citoyenneté canadienne est réputée et respectée partout dans le monde et les Canadiens sont admirés pour leur tolérance et leur équité.

Nous reconnaissons néanmoins que la Loi sur la citoyenneté doit être modifiée. Le 14 avril, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration déclarait à la Chambre que le moment était venu d'apporter des modifications à la loi qui remonte à 20 ans. Le ministre a déclaré, comme en fait foi le hansard:

Nous avons besoin d'une Loi sur la citoyenneté qui assure l'équité et l'intégrité-une loi qui supprime certains aspects discriminatoires de notre législation actuelle, élimine les incohérences observées dans l'octroi de la citoyenneté canadienne et améliore le processus d'acquisition de la citoyenneté.
Des mesures importantes ont été prises pour atteindre cet objectif, notamment l'élimination du rôle de juge de la citoyenneté et l'adoption de modifications administratives et réglementaires importantes qui visent à accélérer le processus, notamment par l'accroissement du nombre d'auditions quotidiennes, la création d'auditions collectives, la prolongation des heures de bureau, etc. Le fait qu'on ait mis fin aux nominations partisanes à la magistrature a été particulièrement bien accueilli par de nombreux Canadiens.

En outre, le ministre a demandé au comité permanent d'étudier la Loi sur la citoyenneté et de recommander des améliorations. Peu après, en juin, le comité a publié son rapport sur la citoyenneté canadienne et le sentiment d'appartenance, qui contenait un ensemble de recommandations.

Le projet de loi déposé par la députée porte sur trois de ces recommandations, dont il a déjà été fait mention, et que je me permets de paraphraser: les enfants nés au Canada n'ont la citoyenneté canadienne que si un des parents ou les deux ont qualité de résidents permanents ou de citoyens canadiens; deuxièmement, des dispositions devraient être prises pour que cette règle ne puisse s'appliquer si son application fait en sorte qu'une personne née au Canada est apatride; troisièmement, par exception à la première règle, les enfants nés de parents ayant obtenu le statut de réfugié devraient automatiquement obtenir la citoyenneté canadienne.

Compte tenu de ces recommandations, je me sens obligé de dire que le projet de loi C-249 d'initiative parlementaire dont nous sommes saisis aujourd'hui comporte de sérieuses lacunes. Bien que le comité en ait approuvé la substance, le projet de loi demeure très incomplet dans la mesure où il ne tient pas compte des deux dernières recommandations dont je viens de parler. En outre, ce projet de loi risque d'être utilisé pour susciter des craintes injustifiées chez les Canadiens en exagérant des abus du système d'octroi de la citoyenneté canadienne qui, du point de vue statistique, sont négligeables.

Un exemple typique de ce genre de choses est le cas des mères étrangères qui viennent, soit avec un visa de visiteur, soit comme revendicatrices du statut de réfugié, donner naissance à leur enfant sur le sol canadien expressément pour qu'il ait la citoyenneté canadienne. J'aimerais faire remarquer que le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration m'a informé que, contraire-

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ment à ce que prétend le Parti réformiste, rien ne prouve que ce soit un problème important.

Dans son rapport, le comité a d'ailleurs conclu à cet égard que les bébés-passeport-comme on les a gentiment baptisés-ne semblent pas constituer un problème d'envergure. Il n'en demeure pas moins que le comité a formulé des recommandations pour prévenir la possibilité d'abus.

(1825)

J'aimerais que cela soit parfaitement clair pour tout le monde. Lorsque le comité a avancé des suggestions sur la façon d'éviter les abus, ce n'était pas pour régler un problème existant. Je préviens donc les députés d'en face qu'il est totalement irresponsable de susciter des craintes injustifiées en s'inspirant de rumeurs sans fondement.

Certains députés de cette Chambre semblent être enclins à se saisir d'événements occasionnels et statistiquement insignifiants et à leur donner une importance disproportionnée dans le seul but de se faire du capital politique. Ce n'est que trop courant.

Comme je le mentionnais plus tôt, ce projet de loi d'initiative parlementaire est suspect parce qu'incomplet. Il semble apporter une solution pleine de bon sens à un problème simple. Malheureusement, nous vivons dans un monde complexe où les situations sont le résultat non pas d'un seul facteur, mais généralement d'une myriade de variables qui ne sont pas évidentes de prime abord. La plupart des problèmes ne peuvent être résolus qu'après une analyse soigneuse et approfondie et demandent parfois des solutions complexes afin de produire des résultats optimums et équitables.

Ce projet de loi n'est ni équitable ni complet car il n'envisage pas tous les scénarios possibles. Bien qu'il soit fidèle à l'essence de la première recommandation du comité, qui se trouve à la page 17 du rapport de ce dernier, ce projet de loi ne tient pas compte des deux recommandations qui l'accompagnent et qui énoncent des exceptions importantes à la première règle.

Permettez-moi de vous donner un exemple. Ce serait manquer de compassion et faire preuve de cruauté que de ne pas accorder la citoyenneté canadienne à un enfant à qui aucun autre pays n'accorderait de citoyenneté. On ne pourrait laisser un enfant dans la situation intenable qu'est celle d'un apatride. Je suis renversé que la députée n'ait pas jugé bon de prévoir cette exception raisonnable.

En outre, je ferai remarquer que, peu importe les intentions déclarées de la députée, son projet de loi dit clairement et sans équivoque que les enfants de mères étrangères ne peuvent devenir citoyens que lorsqu'un des deux parents devient résident permanent ou citoyen.

Cela pose un problème grave, car il n'est pas tenu compte du cas de revendicateurs du statut de réfugié dont la demande est acceptée et qui ne décident pas de demander à devenir résidents permanents ou citoyens. Comme ces personnes ne sont pas obligées de devenir résidents permanents ou citoyens, il est possible que leurs enfants ne puissent, dans les faits, obtenir la citoyenneté.

J'ai été très déçu de constater que le projet de loi restait muet sur ces deux exceptions. Je suis convaincu que le projet de loi, s'il avait été précédé d'une analyse sérieuse et poussée, aurait été plus complet.

Puisqu'il n'est pas tenu compte de ces exceptions signalées au comité, le projet de loi devient injuste et notre processus relatif à la citoyenneté s'en trouve tronqué. Ce n'est pas une façon de faire acceptable au Canada.

Je conclus en disant que le projet de loi C-249, bien qu'il corresponde à la teneur générale de la première recommandation figurant à la page 17 du rapport du comité permanent, demeure incomplet au point de rendre le processus injuste et limitatif. Pour ces raisons, il importe de dénoncer cette modification et de la présenter sous son vrai jour: une manipulation sectaire de l'opinion.

Fait plus rassurant, la Chambre peut s'attendre dans un proche avenir à une réforme complète et juste de la Loi sur la citoyenneté. Je suis convaincu que la loi révisée saura faire la part des choses et tenir compte sérieusement des recommandations que le comité a formulées dans son rapport de juin.

Pour l'instant, le Parti réformiste servirait mieux les intérêts des Canadiens participant au processus de réforme de la citoyenneté au lieu de parler de. . .

[Français]

Le vice-président: À l'ordre! La période prévue pour l'étude des initiatives parlementaires est maintenant expirée.

[Traduction]

Conformément au paragraphe 96(1) du Règlement, l'article est rayé du Feuilleton.

_____________________________________________


7890

MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LES ANCIENS COMBATTANTS

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, le 10 juillet, j'ai demandé au ministre de la Défense nationale et des Anciens combattants s'il reconnaissait que d'autres modifications devaient être apportées au projet de loi C-84 et, le cas échéant, s'il avait l'intention d'inscrire ces modifications au menu législatif très bientôt, vu l'âge avancé de nos anciens combattants de la marine marchande. Il a répondu que le ministère des Anciens combattants procédait à des réformes visant à accélérer le traitement des réclamations des anciens combat-

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tants. Je suis d'accord avec cette démarche. Or, ce n'est pas la seule chose dont ont besoin les anciens combattants.

(1830)

Le projet de loi C-84 est une mesure complexe qui modifie diverses lois sur les pensions de guerre. En refusant d'appliquer le principe d'égalité aux anciens combattants, le ministère s'est trouvé à assujettir les anciens combattants de la marine marchande à une loi applicable aux civils, plutôt que de les inclure dans la nouvelle Loi sur les allocations aux anciens combattants.

Une solution aux injustices que comporte le projet de loi C-84 consisterait en une simple proposition de modification qui aurait pour effet d'étendre la Loi sur les allocations aux anciens combattants.

Aux yeux du gouvernement, le projet de loi C-84 est une bonne mesure législative. Je dirais que c'est un point de départ. Certains marins marchands et leurs familles reçoivent des prestations, ce qui représente certes un pas dans la bonne direction, mais, malheureusement, l'admissibilité est trop restreinte.

Le projet de loi C-84 n'est pas satisfaisant puisqu'il n'accorde pas aux anciens combattants de la marine marchande le véritable statut d'anciens combattants et qu'il ne leur assure pas l'accès à toute la gamme des prestations d'assurance-maladie, d'invalidité et de soutien du revenu qu'offre le ministère.

En mars dernier, le sous-ministre des Anciens combattants, qui a participé à l'élaboration du projet de loi de 1992, a admis, lors d'une audience du comité de la Chambre des communes, que ce projet de loi n'était pas parfait. Puis, il s'est contredit lui-même en affirmant qu'il n'était pas nécessaire de le modifier substantiellement. De même, vendredi dernier, le secrétaire d'État pour les Anciens combattants a déclaré à Radio-Canada que tous les anciens combattants de la marine marchande avaient droit à toutes les prestations des anciens combattants, alors que ce n'est pas le cas.

Après 50 ans d'attente, le gouvernement travailliste actuellement au pouvoir en Australie a finalement accordé aux marins marchands la gamme complète des prestations versées en vertu de la loi de ce pays sur les droits des anciens combattants. En leur accordant tous les avantages et la pleine égalité, le gouvernement a pleinement reconnu la contribution que les marins marchands ont apportée à la défense de leur pays.

Au cours de la guerre, des navires marchands canadiens transportaient du matériel indispensable pour le succès de l'effort de guerre. La marine marchande était constamment la cible d'attaques des chars et des sous-marins allemands. Il n'est pas surprenant, donc, qu'elle ait connu le plus haut taux de pertes de tous les services; un marin sur dix a été tué.

La semaine dernière, la vice-première ministre a déclaré que, grâce à la marine marchande du Canada, le calme était revenu et les portes de la liberté avaient pu rester ouvertes.

Après la guerre, les anciens combattants de la marine marchande sont devenus officiellement des civils. Ils n'étaient pas admissibles aux avantages accordés aux anciens combattants. En tant que pays, nous avons reconnu les injustices faites aux hommes et aux femmes qui ont servi dans la marine marchande. Pourquoi ne les avons-nous pas indemnisés en conséquence?

La semaine dernière, le gouvernement a fait un pas de plus vers la reconnaissance de la contribution de la marine marchande à l'effort de guerre. Il y a d'abord eu la dédicace du Livre du Souvenir pour les morts de la marine marchande. Ce livre est un symbole. Il montre que l'on se souvient des 2 200 marins civils morts au cours des deux guerres mondiales. Il y a eu ensuite la participation des anciens de la marine marchande, acceptée par la légion, à la cérémonie de dépôt d'une gerbe par le vice-roi.

Il y a environ 3 200 anciens marins survivants dont l'âge moyen est de 74 ans. Tout ce qu'ils demandent, c'est le même traitement et le même accès aux prestations.

Je demande au secrétaire d'État aux Anciens combattants d'apporter les changements à la loi dès maintenant, pour qu'ils puissent être soumis au Parlement avant qu'il ne soit trop tard. Le temps presse pour les anciens de la marine marchande. Reconnaissons-les, une fois pour toutes, comme la quatrième arme du service armé.

J'espère que le secrétaire parlementaire ne se contentera pas de traiter de la réforme des pensions, comme l'a fait le ministre de la Défense nationale dans sa réponse. Je lui demande s'il reconnaît que des changements au projet de loi C-84 sont nécessaires, et s'il ne le reconnaît pas, pourquoi? Par ailleurs, s'il est d'accord, quand lancera-t-on les réformes?

M. Fred Mifflin (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale et des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je remercie la députée d'avoir fait un survol des soi-disant lacunes de la loi du gouvernement précédent, et je me permets d'ajouter à l'ironie de la situation en disant que le gouvernement envisagera certainement de corriger les erreurs de nature juridique ou technique contenues dans cette mesure législative.

Je connais personnellement la question car j'ai fait partie du comité qui a défendu et obtenu l'octroi de ces avantages pour les anciens combattants de la marine marchande. L'important est que la loi fait ce qu'elle devait faire au départ. Les anciens combattants de la marine marchande ont le même accès aux avantages destinés aux anciens combattants que leurs homologues militaires. Ils ont donc droit à la pension d'invalidité, à l'allocation aux anciens combattants, aux avantages du Programme pour l'autonomie des anciens combattants, aux soins de longue durée et aux subventions concernant les obsèques.

Les anciens combattants de la marine marchande peuvent bénéficier de tous les programmes auxquels les anciens combattants militaires ont actuellement accès.

À entendre la députée de Saint John, on se demande si les anciens combattants de la marine marchande reçoivent quelque chose. Ils reçoivent certainement tous les mêmes avantages. En fait, un groupe de quelque 2 000 anciens combattants de la marine marchande et leurs personnes à charge reçoivent des prestations d'anciens combattants. C'est certainement bien loin de ce que la députée voudrait laisser entendre.

Cela dit, les représentants de ces anciens combattants ont cerné plusieurs éléments de la loi qui mériteraient selon eux d'être améliorés. Le secrétaire d'État aux Anciens combattants a rencontré les groupes intéressés, dont les propositions sont maintenant à l'étude.

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De cette étude découleront des modifications concernant les avantages offerts aux anciens combattants de la marine marchande, modifications qui pourraient éventuellement être inscrites dans un projet de loi général d'ordre administratif-ce genre de projet de loi que l'on présente de temps en temps pour moderniser le langage utilisé dans la loi et régler des questions administratives.

Lors de cette réunion, on a aussi demandé aux représentants de la marine marchande de porter à l'attention du secrétaire toute situation où quelqu'un semble ne pas avoir droit à ces avantages à cause de lacunes de la loi. Je conclus en invitant la députée à faire de même. Je la remercie de sa question.

Le vice-président: Aux termes du paragraphe 38(5) du Règlement, la motion d'ajournement de la Chambre est adoptée d'office. La Chambre s'ajourne donc à 10 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 36.)