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TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 23 février 1994

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LE MOIS DE L'HISTOIRE DES NOIRS

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER

LA COUPE DU MONDE DE BIATHLON

    M. Breitkreuz (Yellowhead) 1717

LE PROGRAMMES CANADIEN DES PRÊTS AUX ÉTUDIANTS

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER

LA BANQUE D'ALIMENTATION DAILY BREAD DU GRAND TORONTO

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER

M. MAX MCLEAN

L'ÉCOLE NORMALE DE LA NOUVELLE-ÉCOSSE

LA CHAMBRE DE COMMERCE MARITIME

LES FORÊTS

LE COLLÈGE MILITAIRE DE SAINT-JEAN

LES AFFAIRES INDIENNES

LE BUDGET

    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 1720

LA PETITE ENTREPRISE

LA LUTTE AU CRIME ORGANISÉ

QUESTIONS ORALES

LE BUDGET

    M. Martin (LaSalle-Émard) 1721
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1721
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1721
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1721
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1722
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1722
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1722
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1722
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1723
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1723
    M. Harper (Calgary-Ouest) 1723
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1723
    M. Harper (Calgary-Ouest) 1723
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1723
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1724
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1724
    M. Speaker (Lethbridge) 1724
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1724
    M. Speaker (Lethbridge) 1724
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1724
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1725
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1725

LA LOI SUR LE PAIEMENT ANTICIPÉ DES RÉCOLTES

LE BUDGET DES DÉPENSES

    M. Martin (LaSalle-Émard) 1726
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1726
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1726
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1726

LES AFFAIRES INDIENNES

LA DÉFENSE NATIONALE

LE COLLÈGE MILITAIRE ROYAL DE SAINT-JEAN

RECOURS AU RÈGLEMENT

RETRAIT DE LA DEMANDE DE DÉLAI

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA POLITIQUE DE DÉFENSE

    Reprise de l'étude de la motion de M. Collenette 1728
    Adoption de la motion par 202 voix contre 49 1729

AFFAIRES COURANTES

LOI SUR LE POUVOIR D'EMPRUNT POUR 1994-1995

    Projet de loi C-14. Adoption d'office des motions portant présentation et première lecture 1729

LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

    Projet de loi C-15. Adoption d'office des motions portant présentation et première lecture 1729

PÉTITIONS

L'IMMIGRATION

LE LOGEMENT SOCIAL

    Mme Gagnon (Québec) 1729

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

    M. Chrétien (Frontenac) 1730

LE CODE CRIMINEL

    M. Hill (Prince George-Peace River) 1730

QUESTIONS AU FEUILLETON

DEMANDES DE DOCUMENTS

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

    Reprise de l'étude de la motion sur le Budget 1730
    Amendement de M. Loubier 1739
    M. Speaker (Lethbridge) 1739
    M. Hill (Prince George-Peace River) 1747

ANNEXE


1717


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mercredi 23 février 1994


La séance est ouverte à 14 heures.

_______________

Prière

_______________

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LE MOIS DE L'HISTOIRE DES NOIRS

Mme Mary Clancy (Halifax): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour souligner que février est le Mois de l'histoire des Noirs.

La célébration du Mois de l'histoire des Noirs permet aux Canadiens de race noire de manifester leur fierté et de rappeler que leur présence au Canada remonte au moins à 1605, lorsque, à titre d'interprète, Mattieu Da Costa a accompagné Samuel de Champlain en Nouvelle-Écosse.

Depuis, il y a eu des politiciens, des écrivains, des artistes, des éducateurs, des historiens et bien d'autres qui ont aidé à fabriquer le tissu social, culturel et économique de la vie canadienne.

C'est indiscutablement le cas en Nouvelle-Écosse, qui compte de nombreuses personnalités canadiennes d'origine africaine dont les travaux sont importants pour leurs concitoyens de la province et de tout le Canada. Wayne Adams, premier député africain-canadien à l'Assemblée législative et membre du Cabinet; Maxine Tynes, poète et écrivain renommée; Joan Jones, récente récipiendaire de la médaille Pearson; le Dr Carey Best ainsi que Sylvia et Marie Hamilton ne sont que quelques-uns des habitants de la Nouvelle-Écosse d'origine africaine dont la contribution a été reconnue par leurs concitoyens.

Le Mois de l'histoire des Noirs permet de rendre hommage à l'apport essentiel de la collectivité de race noire et de son histoire à la vie canadienne. Reconnaissons cette partie importante du patrimoine canadien, non seulement en février, mais toute l'année durant.

* * *

[Français]

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg): Monsieur le Président, la Québécoise Myriam Bédard nous a encore fait l'honneur de s'illustrer aujourd'hui à Lillehammer. Elle a en effet remporté une deuxième médaille d'or en biathlon et, de ce fait, devient la seule athlète québécoise et canadienne à accomplir un tel exploit. Le Bloc québécois espère que cette deuxième victoire éclatante de Mme Bédard saura convaincre tout le monde, sans exception, de son immense talent.

Je dois malheureusement dénoncer ceux qui, comme le mentionnait le journaliste J.V. Dufresne, et je cite: «Suintent le mépris et la jalousie à l'égard du Québec.» Mme Bédard a déjà eu le mérite de surmonter toutes les difficultés que lui a causées Biathlon Canada. Le courage et la détermination de cette jeune femme lui a permis de se rendre au bout de ses rêves et d'atteindre les plus hauts sommets. Elle est sans nul doute un exemple à suivre pour tous les Québécois.

Au nom des citoyens de la circonscription de Charlesbourg, de tous les Québécois, nous t'offrons, chère Myriam, notre admiration et nos félicitations.

* * *

[Traduction]

LA COUPE DU MONDE DE BIATHLON

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead): Monsieur le Président, immédiatement après les Jeux olympiques d'hiver, une compétition sportive de calibre international se déroulera dans la circonscription que je représente, soit Yellowhead, en Alberta.

En effet, du 10 au 13 mars, la ville de Hinton tiendra des épreuves de la Coupe du monde de biathlon, au Athabaska Nordic Centre. Le biathlon, ce sport qui associe le ski de fond et le tir à la carabine, rapportera environ 2 millions de dollars à notre pays.

En tout, 238 entraîneurs et athlètes, de 21 pays se rendront à Hinton pour participer aux épreuves de la Coupe du monde. Beaucoup de ces entraîneurs et athlètes participent actuellement aux Jeux olympiques d'hiver. Les habitants de Hinton seront sûrement fiers d'encourager deux athlètes locaux, soit Kevin Quintilio et Nicole Bressard, deux biathlètes de niveau international et membres du club de ski nordique de Hinton, qui feront la fierté non seulement des gens de Hinton, mais de tous les Canadiens.

Je remercie tous les pays participants qui nous ont envoyé des drapeaux. J'aimerais que tous les députés se joignent à moi pour encourager l'équipe nationale du Canada.

* * *

(1405)

LE PROGRAMME CANADIEN DES PRÊTSAUX ÉTUDIANTS

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux): Monsieur le Président, à l'instar de beaucoup de mes collègues, j'ai reçu des messages pour la Saint-Valentin. Un message en particulier m'a beaucoup intéressé, car on nous y demandait à


1718

tous de retirer le projet de loi pernicieux qui empêche les étudiants de profiter d'une période de grâce de six mois à la fin de leurs études pour trouver un emploi.

Ce projet de loi prive les étudiants de 35 millions de dollars.

[Français]

Je demande, monsieur le Président, qu'ensemble, nous essayions d'améliorer l'accès à l'éducation postsecondaire pour tous les Canadiens et d'améliorer le Programme canadien de prêts aux étudiants. Démontrons que l'éducation nous tient à coeur.

* * *

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER

M. Guy H. Arseneault (Restigouche-Chaleur): Monsieur le Président, les Jeux olympiques demeurent, malgré les temps difficiles que nous vivons, le symbole d'un grand rassemblement entre nations sous un même drapeau, celui de la fraternité et de la paix universelles.

[Traduction]

Je suis fier qu'un Canadien de Restigouche-Chaleur, Alain Roy, représente non seulement le Canada, mais le nord du Nouveau-Brunswick, aux XVIIes Jeux olympiques d'hiver.

Alain est à Lillehammer avec l'équipe canadienne de hockey.

[Français]

Je souhaite bonne chance à Alain et à ses coéquipiers. Je sais qu'ils représenteront honorablement le Canada, non seulement sur la glace, mais aussi en vivant et en adoptant l'esprit même des ces jeux.

[Traduction]

Au nom de tous les gens de Restigouche-Chaleur et de tous les députés fédéraux, je tiens à féliciter Alain et tous les athlètes olympiques du Canada.

* * *

LA BANQUE D'ALIMENTATION DAILY BREAD DU GRAND TORONTO

M. Sarkis Assadourian (Don Valley-Nord): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour lancer un appel urgent au nom de la banque d'alimentation Daily Bread du Grand Toronto.

J'ai appris que cette banque d'alimentation traverse une période difficile cet hiver. Actuellement, elle a des stocks pour trois semaines seulement, et il faudrait qu'elle en ait au moins pour sept semaines de plus afin de pouvoir continuer à fonctionner d'ici la campagne de collecte d'aliments de Pâques.

Les banques d'alimentation servent environ 160 000 enfants et adultes par mois. Comme les dons sont à la baisse, il devient de plus en plus difficile pour elles de répondre à une demande aussi forte.

Les Canadiens ont toujours compris l'importance des groupes et des organismes qui aident les personnes défavorisées.

Je prie donc instamment mes collègues du Grand Toronto de voir à ce que leur banque d'alimentation ne soit pas oubliée et d'encourager tous les habitants de leurs circonscriptions à faire des dons pour assurer la survie d'un organisme qui fait un travail aussi louable.

* * *

[Français]

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies): Monsieur le Président, au nom de tous les Québécois et Québécoises, nous tenons à féliciter très chaleureusement les quatre Québécoises qui ont remporté hier, à Lillehammer, la médaille d'argent au relais féminin de patinage de vitesse.

L'équipe, formée de Christine Boudrias, Isabelle Charest et Nathalie Lambert, toutes trois de Montréal-Nathalie Lambert est de mon propre comté, alors que Sylvie Daigle est de Sherbrooke-nous a éblouis par sa cohésion et sa solidarité. La performance, le courage et la persévérance de ces quatre athlètes furent remarquables.

Le Québec fut d'autant plus à l'honneur hier, qu'un autre Québécois a remporté une médaille, de bronze cette fois, chez les hommes en patinage de vitesse. Il s'agit du champion du monde sur 1 000 mètres, Marc Gagnon, de Chicoutimi, qui a mérité cette médaille en donnant son maximum. Nous sommes fiers de lui, ainsi que de tous les Québécois qui ont participé à cette course.

Le Bloc québécois tient à féliciter tous nos athlètes à Lillehammer pour l'honneur qu'ils nous font à tous.

* * *

[Traduction]

M. MAX MCLEAN

M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, je veux aujourd'hui rendre hommage à M. Max McLean, de Camrose, en Alberta. M. McLean a récemment été nommé le «citoyen Moose de l'année» par la chambre de commerce locale.

Cette distinction est présentée chaque année à une personne qui a apporté une contribution exceptionnelle à la collectivité. Bénévole à plein temps, Max a mis son énergie et son enthousiasme au service de la Société canadienne du cancer et de l'Association canadienne du diabète, dont il vend le journal. Il a aussi aidé à la campagne de collecte de fonds pour le manoir Ronald McDonald.

Max se dévoue pour le bien de sa collectivité depuis près de 50 ans. Que Max McLean, qui croit que les bénévoles contribuent dans une large part à rendre la vie plus agréable à Camrose, serve de modèle à tous les Canadiens.


1719

L'ÉCOLE NORMALE DE LA NOUVELLE-ÉCOSSE

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester): Monsieur le Président, la Nouvelle-Écosse ne peut pas se permettre de perdre un seul autre de ses centres d'excellence.

Dans ma ville, Truro, nous risquons de voir fermer l'École normale de la Nouvelle-Écosse parce que nous formons plus d'enseignants que nous n'avons d'emplois pour eux.

(1410)

Des directeurs d'école de partout au Canada ont reconnu l'excellente qualité de la formation que reçoivent ces enseignants. L'ACDI et l'Association des collèges communautaires du Canada achètent des places pour la formation d'enseignants du tiers monde.

Nous reconnaissons que nous ne pouvons pas nous permettre de dédoublement des établissements d'enseignement, mais je recommanderais qu'on leur donne de l'expansion plutôt que de les fermer. Nous pourrions attirer les meilleurs professionnels de l'enseignement à Truro et y former des enseignants pour le marché mondial selon le principe de recouvrement des frais.

Des représentants de maisons d'enseignement des États-Unis viennent au moins une fois par année en Nouvelle-Écosse pour y recruter divers diplômés en enseignement. Je recommande qu'on tire profit de notre longue tradition de compétence en enseignement en commercialisant cette excellente ressource.

* * *

LA CHAMBRE DE COMMERCE MARITIME

M. Stan Dromisky (Thunder Bay-Atikokan): Monsieur le Président, j'ai l'honneur d'annoncer aujourd'hui la restructuration récente de la Chambre de commerce maritime. Établi en 1959, cet organisme réunit tous ceux qui dépendent d'une industrie du transport maritime viable au Canada.

Cette restructuration a notamment permis la création d'un conseil des gouverneurs qui sera en rapport avec tous les niveaux de gouvernement. La Chambre représente divers groupes, dont des producteurs de grain de l'ouest du Canada, des intérêts ontariens dans les secteurs de l'acier, du charbon, des agrégats, du sel et du ciment, des exploitants de minerais québécois, des affréteurs du Canada atlantique et des ports qui facilitent le transport des marchandises visées.

Parce qu'elle représente diverses industries très importantes pour l'économie canadienne, la Chambre sera évidemment un ardent promoteur de l'essor industriel de notre pays.

Je profite donc de l'occasion pour souhaiter à la Chambre de commerce maritime la meilleure des chances dans la poursuite de cet objectif commun.

* * *

LES FORÊTS

M. Joe Fontana (London-Est): Monsieur le Président, à titre de président de l'Association parlementaire Canada-Europe, je suis heureux d'entendre mon collègue de Kootenay-Est souligner le succès de la 21e réunion interparlementaire annuelle Canada-Europe, qui s'est tenue à Vancouver.

Outre que nous avons discuté d'une foule de questions importantes pour les relations entre le Canada et l'Europe, notre plus grand succès a été de montrer aux délégués européens que le Canada est à l'avant-garde des pratiques sylvicoles progressistes.

Je voudrais remercier tous les délégués canadiens comme européens de leur apport sincère et constructif. À la fin des délibérations, j'estime que nous avons trouvé un terrain d'entente et réglé un problème éventuellement dangereux.

Les nouvelles d'ailleurs ont confirmé le succès de la réunion. J'espère que cet organisme pourra aider les parlementaires européens à mieux comprendre les positions et les politiques canadiennes, même celles qui présentent des points de vue opposés.

Selon des reportages parus dans La Presse, le remplacement de la ville de Québec par Vancouver comme lieu de la réunion s'explique par la répugnance de l'association à parler des questions politiques du Québec. Rien n'est plus éloigné de la vérité. La dirigeants des deux groupes ont accepté le changement en question.

Qu'il suffise que je rappelle aux députés les graves répercussions économiques qu'une interdiction de l'exportation des produits forestiers aurait sur les localités d'un bout à l'autre du Canada.

* * *

[Français]

LE COLLÈGE MILITAIRE DE SAINT-JEAN

M. Claude Bachand (Saint-Jean): Monsieur le Président, comme tout le monde le sait, le Québec est traditionnellement désavantagé dans la répartition des dépenses du ministère de la Défense puisqu'il n'en reçoit que 15,8 p. 100. Avec son Budget d'hier, le gouvernement fédéral trouve probablement que cette iniquité doit perdurer et même s'accentuer.

Collège militaire à statut universitaire, bastion d'une expertise francophone reconnue en études stratégiques, en sciences spatiales et en sciences informatiques, seule porte d'entrée des francophones qui désirent faire une carrière d'officier, seul collège militaire francophone au pays, Saint-Jean va disparaître. Déraciné de son milieu, l'enseignement militaire en français ne sera plus que l'ombre de lui-même et sera noyé dans le grand tout unificateur du très unilingue Collège militaire de Kingston.

En mettant la hache dans cette véritable institution du Canada français que constitue le Collège militaire de Saint-Jean, le gouvernement fédéral montre clairement le peu de cas qu'il fait des francophones du Québec et du Canada.

1720

[Traduction]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. John Duncan (North Island-Powell River): Monsieur le Président, ma déclaration concerne des questions soulevées à la Chambre hier.

Je suis le porte-parole de mon parti pour les affaires autochtones et je suis profondément offensé par les observations que des députés ont faites, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de la Chambre, sur l'attitude de mes collègues au sujet de nos frères et soeurs autochtones.

Il y a des divergences d'ordre idéologique entre les partis présents à la Chambre, mais ne nous calomnions pas les uns les autres. Espérons plutôt que la lumière se fasse et que nous puissions arriver à une conclusion raisonnable et acceptable.

Je n'aurai pas de repos et je ne serai pas satisfait tant qu'un des députés d'en face n'aura pas présenté d'excuses pour les propos qu'il a tenus sur mes collègues et moi.

* * *

(1415)

[Français]

LE BUDGET

M. Patrick Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine): Monsieur le Président, les gens de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, comme tous les Canadiens, applaudissent le Budget déposé hier, notamment pour la suppression des failles dans la législation fiscale, dont les déductions de restauration et de représentation qui passent de 80 à 50 p. 100.

J'ai de bonnes leçons pour vous. Le gouvernement met ainsi fin à certaines déductions accordées aux entreprises dont le capital est supérieur à 15 millions de dollars. Le Budget efface aussi l'exonération de 100 000 $ sur les gains en capital qui ne privilégie que les mieux nantis, comme ceux de l'opposition.

Notre gouvernement empêchera les firmes implantées au Canada d'échapper à l'impôt par le truchement de filiales à l'étranger. Également, le Comité des finances de la Chambre des communes réexaminera de nouveau, à la demande de l'opposition, la fiscalité des fiducies familiales. Il est bon de voir ce gouvernement qui est l'écoute de la population et respecte ses engagements électoraux, soit la justice sociale et la dignité humaine au Canada.

* * *

[Traduction]

LA PETITE ENTREPRISE

M. Harbance Singh Dhaliwal (Vancouver-Sud): Monsieur le Président, hier, le ministre des Finances a annoncé que le budget répondrait aux besoins des petites entreprises du Canada. Venant moi-même de ce secteur, je ne pouvais que me réjouir de cette déclaration.

Les impôts sur la masse salariale constituent depuis longtemps un fardeau pour les petites entreprises, un obstacle à la création d'emplois. La décision du ministre des Finances de diminuer en 1995, le taux de cotisation à l'assurance-chômage permettra à l'industrie d'économiser 300 millions de dollars rien que l'année prochaine.

Au nom des petites entreprises du Canada, je voudrais féliciter le ministre de cette initiative audacieuse et bien adaptée aux besoins, ce qui, nous l'espérons, favorisera considérablement la création d'emplois.

* * *

[Français]

LA LUTTE AU CRIME ORGANISÉ

M. Gilles Bernier (Beauce): Monsieur le Président, je me réjouis de constater que la lutte au crime organisé dans certaines réserves autochtones ait été amorcée par la GRC.

On a mentionné qu'auparavant les policiers fédéraux et provinciaux avaient des ordres de ne pas intervenir afin de ne pas faire exploser ce baril de poudre. C'était la confusion totale, l'absence de volonté politique. Dorénavant, la loi va s'appliquer partout au pays.

À titre de député de Beauce, j'ai lutté longtemps pour que cessent cette tolérance, ces hésitations policières et ce laxisme politique. On a ainsi contribué à créer un chaos social permettant au crime organisé de s'implanter davantage chez nous. On a érigé en système les réseaux de vendeurs de tabac, d'armes, d'alcool et de drogue. Il n'y a donc plus de zones interdites. Désormais, les policiers auront toute latitude pour exercer la surveillance et procéder aux arrestations, s'il y a lieu.

J'ose croire que le seul député indépendant élu au Canada ne rêve pas.

_____________________________________________


1720

QUESTIONS ORALES

[Français]

LE BUDGET

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Le budget présenté hier par le gouvernement a suscité une profonde déception dans tous les milieux. De nombreux critiques, aujourd'hui, disent à quel point ils sont déçus par cette attitude laxiste. De plus, il lance contre les chômeurs une attaque d'une ampleur sans précédent en leur enlevant plus de 5 milliards de dollars de bénéfices d'assurance-chômage et il ne contient aucune nouvelle mesure concrète de création d'emploi.

Le premier ministre peut-il nous dire pourquoi son gouvernement a choisi de s'en prendre aux chômeurs plutôt que de s'attaquer aux dépenses de fonctionnement de l'appareil fédéral, aux chevauchements et aux dédoublements administratifs?


1721

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, je vais simplement citer le dossier du chef de l'opposition lorsqu'il faisait partie du gouvernement Mulroney.

Tout d'abord, il y a eu la TPS, une taxe imposée à la classe moyenne. En outre, qui a arrêté l'universalité des fonds de pension pour nos gens âgés? C'est le chef de l'opposition. Et il ose nous parler de l'assurance-chômage! Son dernier geste a été d'enlever 3 milliards de dollars au fonds de l'assurance-chômage lorsqu'il était ministre. Alors qu'il ne vienne pas nous critiquer. Nous sommes pris avec les problèmes qu'il a causés!

Des voix: Bravo!

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, autrement dit, le gouvernement nous dit: «Nous ne sommes pas pire que les conservateurs.» Mais, c'est un parti que j'ai quitté avec plaisir!

Des voix: Bravo!

(1420)

M. Bouchard: La question se pose: Comment ce gouvernement ose-t-il faire porter par les chômeurs, ces démunis, victimes de l'incurie actuelle, le fiasco des dépenses publiques, non seulement en coupant dans l'assurance-chômage, mais aussi en ne prévoyant aucune nouvelle mesure concrète de création d'emploi, reniant ainsi son engagement électoral sacré de redonner espoir et dignité aux chômeurs?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, le chef de l'opposition a quitté le Parti conservateur, il a quitté le Parti libéral et il a quitté l'Union nationale. Quand va-t-il quitter le Bloc québécois?

Des voix: Oh, oh!

M. Martin (LaSalle-Émard): Alors, on n'a rien fait pour les chômeurs? Le programme des infrastructures, qui devrait créer entre 50 000 et 60 000 emplois au Canada; le programme d'aide de remise en état des logements, qui avait été aboli par son ancien gouvernement; le régime d'accession à la propriété, qui devait prendre fin le 1er mars, vient d'être prolongé encore une fois; un service jeunesse pour aider nos jeunes; de nouveaux programmes d'apprentissage. Et vous avez encore le front de nous dire qu'on ne fait rien! On est en train de créer des emplois, on est en train de mettre l'économie en place, et on va le faire, monsieur le Président.

Des voix: Bravo!

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, vous me permettrez de m'étonner de voir l'acharnement que le ministre met à attaquer les conservateurs, puisqu'il a déposé un Budget identique à celui qu'ils présentaient. C'est un Budget qu'aucun conservateur encore dans ce parti-il y en a de moins en moins-ne renierait aujourd'hui.

Je voudrais vous dire que je trouve qu'il y a quelque chose de profondément indécent dans ce Budget, c'est de voir le ministre des Finances se faire le complice de l'iniquité fiscale. D'un côté, il enlève aux démunis plus de 5 milliards de dollars sur trois ans, de l'autre, il permet aux plus riches de ce pays de parquer des milliards dans des fiducies familiales et d'en tirer des revenus sans payer d'impôt.

Je demande au ministre, lui qui a voté l'an dernier avec nous, du Bloc québécois, contre la reconduction de ce privilège indu, de nous dire comment il peut prétendre aujourd'hui à l'équité fiscale, alors qu'il cautionne une telle politique de deux poids, deux mesures?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, on fait au moins preuve d'une certaine constance. C'était une suggestion de son critique des finances d'envoyer les fiducies familiales au vérificateur général. Nous, parce qu'on pense que les députés de cette Chambre devraient prendre leurs responsabilités, on l'a renvoyé au Comité des finances pour étude. On va le faire; on a suivi ses conseils. Alors, au lieu de me poser la question, posez-la à votre ami.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Monsieur le Président, dans son Budget déposé hier-si on peut encore qualifier de Budget ce qu'il en reste-le ministre des Finances prévoit un déficit record de près de 40 milliards de dollars. Or, lorsqu'on connaît la qualité des prévisions du ministère des Finances, le déficit pourrait s'avérer beaucoup plus élevé que ces 40 milliards. En effet, en 1992, le Budget a surévalué les recettes de 11 milliards de dollars et, en 1993, de 10 milliards, un léger écart. En fait, depuis au moins deux ans, les recettes du gouvernement diminuent, alors que l'activité économique souterraine augmente et que les prévisions sont tout à fait faussées sur le plan des recettes fiscales.

Comment peut-on prendre au sérieux le ministre des Finances? Comment peut-on prendre au sérieux un stand-up comic lorsqu'il annonce un déficit déjà record de près de 40 milliards en surestimant, comme ses prédécesseurs, le niveau des recettes, alors qu'il sait très bien que, depuis plusieurs années, les recettes fiscales ne progressent plus au même rythme que l'activité économique?

Le Président: J'espère que les réponses seront aussi courtes que les questions.

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, je sais que le critique du Bloc québécois n'a pas eu le temps de lire le document, parce qu'il était trop pressé à formuler ses questions. Mais s'il voulait consulter la page 61, il verra une explication très claire qui dit qu'il y a des facteurs uniques qui ont fait baisser les recettes cette année et, lorsqu'on les ôte de notre calcul, il devient très clair


1722

qu'on s'attend à une augmentation réelle que de 3 p. 100, ou nominale de 4 p. 100, ce qui est conforme à la grande majorité des économistes au pays.

(1425)

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Monsieur le Président, le ministre ne convient-il pas qu'un déficit record de plus de 40 milliards de dollars minera la confiance des investisseurs et des contribuables et compromettra une reprise durable de l'économie et de l'emploi?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, on reconnaît très bien les problèmes avec les déficits tels qu'on a hérité. C'est pour cela que notre chemin est très clair: 39,7, 32,7 et 25. On va y arriver, monsieur le Président!

[Traduction]

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Le budget que le ministre a présenté hier va accroître la dette fédérale de 100 milliards de dollars au cours des trois prochaines années. Bon nombre de députés de ce côté-ci de la Chambre sont vivement préoccupés par le fait que le budget ne s'attaque pas vraiment au déficit et à l'endettement.

Si la Chambre, par l'intermédiaire de ses comités ou dans le cadre de l'examen des crédits, présentait d'autres propositions visant à réduire davantage le déficit en 1994-1995, le ministre serait-il disposé à les adopter?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, à une récente réunion du Comité des finances, en réponse à une invitation lancée par le compagnon de pupitre du député, j'ai dit que je serais heureux de m'entretenir avec ses collègues pour examiner leurs suggestions constructives.

J'ai également dit qu'on devrait partir des données financières les plus récentes, et non de celles dont se sert le parti d'en face et qui, malgré toute sa bonne volonté, sont vieilles de six mois. Il serait bon qu'on se fonde sur des prévisions économiques fiables, et non sur des prévisions gonflées, comme celles qui figurent dans la plate-forme électorale du parti d'en face.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, je remercie le ministre de sa demi-réponse. Ma question supplémentaire s'adresse au même ministre.

Son budget ressemble quelque peu au premier budget de M. Clinton, aux États-Unis. Il comportait aussi un nouveau plan de dépenses, de même qu'un train de mesures visant à réduire les coûts. Lorsque le budget Clinton a été soumis au Congrès, on a supprimé les nouvelles propositions de dépenses et on a consacré les économies ainsi réalisées à la réduction du déficit, ce qui a fait grand bien à l'économie américaine.

Le ministre est-il prêt à supprimer son nouveau plan de dépenses, évalué à 1,7 milliard de dollars, ou du moins à en retarder l'application de un an ou deux pour réduire davantage les coûts et le déficit en 1994-1995?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, il faut comprendre, tout d'abord, qu'une bonne partie des fonds dégagés va au programme d'infrastructure qui a été approuvé par toutes les provinces et qui a reçu un accueil très favorable de la part de celles-ci et des municipalités. Combiné à d'autres mesures que nous avons proposées, ce programme va permettre de créer un nombre considérable d'emplois.

Je suis persuadé que le député d'en face comprend la fragilité de notre économie et la nécessité de créer des emplois. Voilà notre engagement! Voilà ce que ce budget va nous aider à réaliser! Bien que modestes, ces propositions de dépenses vont vraiment aboutir à la création d'un nombre considérable d'emplois.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, j'ai une question supplémentaire pour le ministre des Finances.

Le budget ne prévoit absolument aucune mesure qui pourrait donner au Parlement une plus grande capacité de contrôler les dépenses en trop du gouvernement. Le ministre peut-il dire à la Chambre s'il est prêt à adopter des mesures pour que le Parlement soit davantage capable de contrôler les dépenses en trop du gouvernement, par exemple des mesures de temporalisation, de limitation des dépenses, d'assouplissement des règles pour que les députés puissent se prononcer librement sur le budget des dépenses, et d'autres mesures du genre?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, si le député regarde les prévisions que nous avons faites au sujet du déficit, elles sont nettement en deçà des limites qui auraient été établies en vertu des plafonds actuels de contrôle des dépenses. En fait, nous sommes allés beaucoup plus loin, ce qui montre bien qu'avec une volonté et des convictions politiques, un gouvernement peut faire beaucoup plus que s'en tenir à cette sorte de norme artificielle que l'ancien gouvernement a essayé de faire valoir pour s'en sortir.

(1430)

En ce qui concerne le rôle du Parlement, le député a eu la possibilité de lire ce que j'ai dit hier dans le discours du budget et sait donc que nous voulons un processus budgétaire complètement transparent. Le Comité des finances de la Chambre va jouer un rôle très important sur ce plan.

Nous avons dit que nous allions présenter au Comité des finances nos prévisions en vue du prochain budget, les propositions que nous avions l'intention d'examiner dans le cadre du prochain budget et nos propositions de dépenses, puis que tous ces éléments seraient scrutés à la loupe par un comité de la


1723

Chambre, ce qui ne s'est jamais vu dans l'histoire du Parlement du Canada.

Nous avons voulu, avant de présenter ce budget, avoir un débat unique à ce sujet et savoir ce que pensaient les députés. En fait, en ce qui concerne les prévisions, le contrôle des dépenses et l'examen du budget, nous sommes prêts à coopérer avec les députés. Nous avons même hâte de le faire.

[Français]

M. Pierre Brien (Témiscamingue): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Plutôt que de s'attaquer au véritable problème que constitue le niveau élevé des dépenses de fonctionement de l'appareil gouvernemental et d'éliminer les coûteux dédoublements, le gouvernement indique son intention de couper 7,5 milliards dans les programmes sociaux, et ce, principalement au niveau de l'assurance-chômage. Ce gouvernement, comme le précédent, tente donc de régler le problème du déficit sur le dos des chômeurs et des personnes âgées.

Pourquoi le ministre s'acharne-t-il sur le dos des chômeurs, alors qu'il pourfendait le précédent gouvernement chaque fois que celui-ci diminuait les bénéfices du programme d'assurance-chômage? Que sont devenus ces beaux principes, monsieur le Président?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, lorsqu'on regarde ce qu'on a fait en ce qui concerne l'assurance-chômage, tout d'abord, on a haussé le niveau de 57 à 60 p. 100 pour les plus démunis de notre société, c'est-à-dire pour les mères de famille seules et pour les familles ayant leurs parents, des personnes âgées, avec elles. Alors, il est très clair que nous sommes vraiment en train de viser, au point de vue aide, ceux qui en ont vraiment besoin. Nous sommes en train de libérer des fonds pour la formation, parce que nous voulons vraiment que les gens quittent l'assurance-chômage afin de travailler. De plus, c'est à cause de ces mesures que nous avons été capables d'abaisser la prime d'assurance-chômage de 3,07 $ à 3 $, ce qui va créer énormément d'emplois au pays.

M. Pierre Brien (Témiscamingue): Monsieur le Président, je désire poser une question supplémentaire. Il est intéressant que le ministre revienne sur des mesures qu'ils ont eux-mêmes introduites. Puisque le ministre se targue d'avoir atteint les gens à revenu élevé dans son Budget, prétend-il qu'une personne âgée gagnant 26 000 $ par année est une personne riche, pour justifier sa récupération de 200 millions de dollars sur le dos de 800 000 personnes âgées?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, en ce qui concerne le problème du déficit, lorsqu'on a fait les consultations nécessaires, partout au pays, auprès des personnes âgées, celles-ci nous ont dit qu'il fallait que tout le monde partage le fardeau. Alors, si on regarde ce qu'on a fait, pour ne vraiment plus pouvoir bénéficier de l'exemption d'âge, il faut avoir un revenu de 49 000 $ à 50 000 $. Il s'agit à peine de 5 p. 100 des personnes âgées au pays. Alors, on a épargné 75 p. 100 des personnes âgées, lesquelles ne sont pas touchées, et les autres 20 p. 100 ne le sont presque pas. Ce sont vraiment les derniers 5 p. 100 qui sont touchés.

[Traduction]

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest): Monsieur le Président, ma question s'adresse aussi au ministre des Finances.

Pendant les discussions qui ont précédé le budget, le ministre avait promis à la Chambre qu'il donnerait des renseignements financiers complets et réalistes dans les documents annexes du budget.

Ce qui manque dans les documents du ministre, ce sont des données financières complètes pour la troisième année, 1996-1997, celle où il doit atteindre son objectif de 3 p. 100 du PIB. Nous n'avons pas de prévisions économiques du ministère. Nous n'avons pas de relevé sommaire des transactions, et de nombreux tableaux sont incomplets. Va-t-il fournir les renseignements qui proviennent du ministère des Finances et les déposer à la Chambre immédiatement?

(1435)

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, nous avons dit clairement que ce budget était en deux étapes et nous donnons des prévisions financières pour les deux premières années.

Par contre, nous avons donné des renseignements financiers complets pour la troisième année et indiqué la courbe des réductions de dépenses pour cette année. Ce que les chiffres démontrent, c'est que nous arriverons à 25 milliards ou 3 p. 100 du PIB.

Tous les renseignements que le député demande sont là. La seule chose qui n'est pas précisée, ce sont les prévisions de la croissance économique. La raison pour laquelle nous n'avons pas donné ces prévisions, c'est que nous ne voulons pas faire la même erreur que le gouvernement précédent, c'est-à-dire faire des prévisions trop lointaines et des promesses impossibles à tenir sur la foi d'une croissance illusoire.

Néanmoins, nous avons fourni tous les renseignements permettant de suivre la courbe des réductions prévues dans ce budget, des réductions qui vont ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB en trois ans.

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest): J'ai une question supplémentaire, monsieur le Président. Il s'agit là d'une réponse intéressante, car je conviens que le budget renferme des indications pour la troisième année, mais aucun des tableaux ne contient des prévisions économiques ou des renseignements détaillés pour la troisième année.

Le ministre admettra-t-il, et je sais qu'il voudra bien réfléchir à sa réponse, que si, en plus des données qui figurent dans le budget, il présente des prévisions économiques réalistes, le déficit prévu dans le budget ne tombera pas sous la barre des 30 milliards de dollars la troisième année et demeurera à près de 4 p. 100 du PIB?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, si le député d'en face veut bien jeter un coup d'oeil au texte qui figure sous les graphiques, il constatera qu'on y dit très clairement qu'après le suivi jusqu'à la troisième année des décisions prises dans ce budget, le niveau de croissance pendant la troisième année sera analogue à celui de la deuxième année et nous donnera un déficit de 3 p. 100 du PIB.


1724

La réponse à la question du député est tout autre. Avec ce niveau de croissance, il est absolument certain que nous aurons un déficit qui représentera 3 p. 100 du PIB.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Les familles riches peuvent mettre à l'abri des milliards de dollars dans des fiducies familiales, sans payer d'impôt. C'était un gouvernement libéral qui avait créé en 1972 ce régime inacceptable. Et, l'année dernière, les députés libéraux ont voté contre la reconduction du régime des fiducies proposée par le gouvernement conservateur. Or, nous avons appris hier que le lobby des familles riches l'a encore emporté.

Comment le ministre peut-il justifier un hold-up des chômeurs et des plus démunis, alors qu'il refuse de s'attaquer aux privilèges des plus riches. Le ministre ne reconnaît-il pas s'être écrasé devant les pressions des familles riches et des amis du régime?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Pas du tout, monsieur le Président. Tout ce que nous avons fait, c'est nous rendre à la suggestion du critique financier de son parti, qui a dit lui-même que, étant donné qu'il s'agissait d'une question assez embrouillée, il fallait qu'elle soit étudiée au Comité des finances. C'est d'ailleurs consigné au hansard, monsieur le Président.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, le ministre a très mal compris notre suggestion, ou ne veut pas admettre l'avoir entendue. Il nous propose un raisonnement un peu tordu. Il nous dit: il y a nécessité d'étudier pendant un an la question d'imposer les plus riches. Mais il est capable d'agir immédiatement quand il est question d'imposer les plus démunis, de cela il en est capable.

Or, monsieur le Président, j'aimerais rappeler également au ministre qu'en 1987, lorsque l'économie était en pleine croissance, plus de 90 000 entreprises au Canada, ayant fait des profits de plus de 27 milliards de dollars, n'avaient pas payé un seul sou d'impôt, ce qui a été dénoncé par les libéraux.

Pourquoi le ministre refuse-t-il le principe d'un impôt minimum pour les compagnies, comme ils en ont parlé lorsqu'ils formaient l'opposition?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, il y a déjà un impôt minimal pour les grandes compagnies. On l'a fait pour les banques, pour les compagnies d'assurances, pour toutes les grandes compagnies. Cela existe déjà. J'aimerais bien dire que cela n'existe pas pour l'imposer, mais que voulez-vous, cela existe.

(1440)

Deuxièmement, dans le Budget on a changé le système de taxation des corporations privées pour répondre exactement aux points soulevés par le député. Je regrette mais peut-être que demain, après qu'il aura pris le temps de lire le Budget, on pourra continuer la discussion.

[Traduction]

M. Ray Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, ma question s'adresse également au ministre des Finances. À la page 67 de son plan budgétaire, le ministre précise que la Loi limitant les dépenses publiques ne sera pas prorogée au-delà de 1995-1996.

Le ministre envisagerait-il de prolonger l'application de cette loi qui pourrait être un point de référence ou un objectif pour le gouvernement et montrerait que ce dernier entend bien maintenir le déficit ou les dépenses à un niveau inférieur à ce qui est prévu maintenant?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, la Loi limitant les dépenses publiques mise en oeuvre par le gouvernement précédent est une mesure plutôt inefficace en ce sens qu'elle permettait d'emprunter d'une année à l'autre et laissait les gouvernements manipuler les chiffres comme ils l'entendaient.

Lorsque nous nous penchons sur nos prévisions relatives au déficit ainsi que sur celles en matière de dépenses, selon lesquelles, pour répondre au député, nous dépenserons moins la troisième année que cette année, il est tout à fait clair que nous entendons ramener ces chiffres à des niveaux nettement inférieurs à tout ce qui pourrait être prévu dans la Loi limitant les dépenses publiques, et c'est pourquoi nous n'allons pas prolonger son application.

Comme la vice-première ministre vient de le demander, pourquoi avons-nous besoin d'un point de repère? Nous avons l'intention de dépasser de beaucoup ces objectifs.

M. Ray Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, le ministre va-t-il songer à présenter une loi plus stricte pour limiter les dépenses publiques? Va-t-il s'engager au nom de son gouvernement à repenser les prévisions de dépenses actuelles et à soumettre cet automne un mini-budget précisant les objectifs de réduction des dépenses pour les trois prochains exercices?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, je le répète, nous sommes tout à fait disposés-et nous entendons d'ailleurs le faire-à soumettre au Comité des finances toute une série de prévisions pour l'année prochaine ainsi que toutes nos propositions. Nous sommes prêts à consacrer autant de temps qu'il le faut et à examiner de façon aussi détaillée que nos vis-à-vis le souhaitent tous les postes de dépenses contenus dans ces prévisions.


1725

Quant à savoir si nous avons l'intention de présenter un mini-budget à l'automne, la réponse est non. Nous allons atteindre les objectifs fixés dans le budget présenté à la Chambre.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Je commencerai par le citer: «Les modifications proposées à l'assurance-chômage dans ce Budget, évalué on le sait à 5,5 milliards, doivent être considérées comme des mesures intérimaires en attendant une réforme complète de la sécurité sociale évaluée, elle, autour de 7,5 milliards.»

Et on ajoute: «Cette réforme entraînera d'autres réductions sensibles des dépenses d'assurance-chômage.»

Comment le ministre peut-il concilier l'amorce de la consultation sur une réforme des programmes sociaux avec l'ampleur, 7,5 milliards, et la précision-7,5 milliards-des mesures décrétées hier?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, je veux juste donner à mon collègue une chance de se reposer.

Je me fais un plaisir de répondre à la députée, parce que je crois que c'est d'une logique absolument limpide. Nous avons annoncé dans le budget une nette stimulation de la création d'emplois. En réduisant le taux de cotisation à l'assurance-chômage, nous favorisons la création et le maintien de plus de 40 000 emplois au Canada. C'est pour cela que nous avons été élus. C'est le début d'une véritable transition entre un système où l'on préférait garder les gens dépendants de l'assurance-chômage et un système où l'on préfère leur assurer un emploi.

(1445)

Je demande à la députée et à son parti ainsi qu'à tous les Canadiens de nous aider à refondre toutes ces mesures sociales que sont l'assurance-chômage, le Régime d'assistance publique du Canada ainsi que les programmes d'emploi, de formation et d'études. Ainsi, la première étape que nous avons franchie hier pourrait être suivie de plusieurs autres tout au long de l'année, ce qui nous assurerait un tout nouveau système d'emploi et de sécurité sociale qui nous permettrait de redonner du travail à des centaines de milliers de Canadiens.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier): Monsieur le Président, j'ai une question complémentaire. Comment le gouvernement, qui a augmenté en janvier les cotisations à l'assurance-chômage, est-il le même qui nous dit qu'il va créer des emplois en les laissant à ce niveau-là et en les réduisant l'année prochaine du même montant?

N'est-il pas indécent de faire payer par les chômeurs l'incapacité du gouvernement à faire le ménage dans ses affaires?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, je rappelle à la députée la demande qu'elle a faite à la Chambre des communes, le 19 janvier dernier, parce qu'elle était outrée du taux élevé des cotisations à l'assurance-chômage. Elle nous a demandé de ne pas les augmenter. Nous avons fait encore mieux, nous les avons réduites.

Je dirais même que non seulement nous les avons réduites pour les deux prochaines années, mais que nous les réduirons encore si nous poursuivons la réforme sur cette lancée, ce qui créera encore plus d'emplois pour les Canadiens.

* * *

LA LOI SUR LE PAIEMENT ANTICIPÉ DES RÉCOLTES

M. Paul Steckle (Huron-Bruce): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture.

Les Canadiens sont heureux de constater que ce gouvernement qu'ils viennent d'élire tient ses promesses et ses engagements. Pendant la campagne électorale, notre parti avait promis à maintes reprises de rétablir la portion sans intérêt des avances pécuniaires consenties aux termes de la Loi sur le paiement anticipé des récoltes.

Le ministre peut-il dire à la Chambre quand le gouvernement va éliminer les intérêts sur la première tranche de 50 000 dollars de tels paiements?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

Je reconnais que notre livre rouge, publié à l'occasion des élections de l'automne dernier, contient d'excellentes idées dans le domaine de l'agriculture. Ces idées, qui ont été très bien accueillies par les agriculteurs et les organismes agricoles, concernent entre autres les avances pécuniaires, objet de la question du député.

Je ne demande qu'à améliorer notre système d'avances de fonds aux agriculteurs à la seule condition que les principaux organismes agricoles de ce pays me fassent part de leurs conseils et de leurs recommandations. J'aimerais qu'ils me disent si, à leur avis, les avances pécuniaires constituent la meilleure utilisation possible de ces 50 ou 75 millions de dollars que nous avons l'intention de consacrer à ce programme par exercice financier, étant donné que les fonds dont nous disposons pour aider les agriculteurs sont limités et que nous devons établir des priorités.

* * *

LE BUDGET DES DÉPENSES

M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Depuis 25 ans, l'examen annuel du Budget des dépenses fait par le Parlement a permis de réduire les dépenses publiques d'un millionième pour cent. De toute évidence, on n'a pas permis au


1726

système de fonctionner. Le gouvernement n'a pas accepté de recommandation de réduire ses dépenses en vingt ans.

Aussi, je demande au ministre des Finances s'il est disposé à accepter les recommandations de comités visant à réduire les prévisions de dépenses et, ce faisant, à permettre au Parlement de jouer son rôle.

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, aucun gouvernement ne souhaite plus que nous voir le Parlement participer au redressement des problèmes financiers de ce pays.

Je réponds sans équivoque par l'affirmative au député. Si des comités parlementaires font au gouvernement des recommandations qui lui permettent d'améliorer la situation ou la gestion financière du Canada, soyez assurés que le gouvernement les acceptera.

(1450)

M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, d'après le budget déposé hier, le gouvernement prévoit dépenser 163 milliards de dollars au cours du prochain exercice financier.

Le ministre est-il en train de nous dire que, parce qu'il tient à réduire le déficit, il est disposé à accepter les réductions que des comités recommanderont d'apporter au Budget des dépenses principal qui sera déposé sous peu?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, comme il s'agit à mon avis de la même question, la réponse est aussi la même: c'est oui.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, dans le budget déposé hier, le ministre des Finances décidait de geler les transferts aux provinces, économisant, ce faisant, 500 millions de dollars en 1995 et 1,5 milliard en 1996. Un bref calcul nous permet de constater que le gouvernement du Québec serait ainsi privé d'environ 600 millions de dollars sur deux ans.

Doit-on comprendre des décisions du ministre des Finances qu'il a décidé d'adopter les mêmes stratégies que ses prédécesseurs et de pelleter une partie de son déficit directement dans la cour des provinces?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, la réponse à la question est catégoriquement non. D'abord, il faut dire qu'il y a un mois et demi, lorsqu'on a signé avec les provinces notre projet de péréquation, nous avons été très généreux envers les provinces et certainement envers le Québec.

Deuxièmement, ce que nous avons fait cette fois-ci, c'est qu'au lieu de couper, on a décidé de geler pour deux ans, mais en donnant un moratoire, une période où le ministre des Ressources humaines pourra travailler avec les provinces pour vraiment épargner de l'argent des deux côtés. On espère, avec la réforme de la sécurité sociale menée par le ministre, qu'il n'en coûtera rien ni aux provinces ni au fédéral. D'ailleurs, il faut dire que les discussions que j'ai eues avec les ministres des Finances, incluant le ministre des Finances du Québec, c'est une approche qui a été fort appréciée.

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, en augmentant directement le nombre d'assistés sociaux à la charge des provinces par les coupures au programme d'assurance-chômage, tout en réduisant les transferts aux provinces, en sauvant deux milliards de dollars sur le dos de ces gouvernements, le ministre des Finances ne convient-il pas qu'il étrangle, ce faisant, les gouvernements provinciaux, les obligeant prochainement à couper encore sur le dos des plus démunis au Canada?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, dans le cadre de notre nouveau programme d'alphabétisation, nous allons recommander que les gens d'en face apprennent à lire plus attentivement le budget, parce qu'il est évident que des détails leur ont échappé.

Le budget prévoit un fonds spécial de 800 millions de dollars pour établir, de concert avec les provinces, un programme visant à remettre au travail les chômeurs chroniques, 800 millions de dollars pour aider les gens qui en ont le plus besoin à retourner sur le marché du travail.

Il est à peu près temps que les députés de l'opposition se rendent compte qu'il faut effectuer un virage pour remettre les Canadiens au travail.

* * *

LES AFFAIRES INDIENNES

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes et du Nord.

Lundi, à la Chambre, le ministre a déclaré que la Bande indienne de Sawridge, dans le nord de l'Alberta, était probablement l'une des bandes les plus riches du Canada. Pourtant, je cite: «La bande dit à ses membres qu'elle ne partagera pas l'argent.»

Que le ministre sache que, au début des années 80, j'ai travaillé trois ans pour le compte du gouvernement de l'Alberta à préparer les collectivités autochtones et métisses du nord de l'Alberta à assumer leur autonomie administrative. J'ai pu constater par moi-même le sens aigu des affaires et la générosité de la Bande indienne de Sawridge, dirigée par son chef, le sénateur Walter Twinn.

Je demande au ministre de dire sur quels éléments de preuve il s'appuie pour lancer une accusation aussi scandaleuse contre cette bande indienne.

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, la députée me demande sur quoi je m'appuie. Les preuves sont devant la Cour fédérale.


1727

En ce moment même, la Bande indienne de Sawridge, dirigée par le sénateur Twinn et sa famille, ont une cause devant la Cour fédérale. Ils allèguent que les femmes ne devraient pas être autorisées à revenir sur le territoire de la bande et à toucher leur part de l'argent, aux termes du projet de loi C-31.

(1455)

Au début des années 80, un gouvernement libéral a présenté un projet de loi modifiant la Constitution pour mettre fin à la discrimination contre les femmes. C'est ce qui est au coeur de cette affaire.

Nous avons appuyé le projet de loi C-31, qui a été présenté par un gouvernement conservateur, mais dont la paternité revient à un gouvernement libéral.

Une voix: La paternité?

M. Irwin: Nous en sommes les parents. Aujourd'hui, nous reprenons le combat. Nous disons qu'il y a de la pauvreté, de la richesse, de la discrimination et de la non-discrimination, mais nous prenons le parti des victimes de discrimination et des pauvres. C'est à cela que se ramène toute la question.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, j'ai une question supplémentaire à poser.

Hier, le ministre a complètement éludé une question au sujet des remarques qu'il aurait faites à des autochtones de l'Alberta au cours de la fin de semaine. Selon les médias, il aurait affirmé que les membres du Parti réformiste haïssent les Indiens et se posent en défenseurs de l'homme blanc.

Le ministre a-t-il, oui ou non, fait ces remarques citées dans les médias?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, lorsque j'étais beaucoup plus jeune, j'ai été très influencé par un conservateur. Je n'aime pas le dire, mais c'est vrai. L'ancien premier ministre John Diefenbaker avait dit, lors d'une visite à Sault Ste. Marie, qu'il aimait la Chambre des communes et que, malgré l'esprit de parti qui y régnait, les députés pouvaient quand même être amis. Il aimait l'esprit de parti, et c'est dans cette optique que je perçois la Chambre. Je ne pourrai jamais aimer cette institution autant que lui, et je ne pourrai jamais être aussi bon politicien que lui.

Ce que je veux dire, c'est que je ne crois pas avoir fait une telle déclaration. J'ai vérifié auprès d'autres personnes qui étaient présentes à cette réunion, et elles ne se souviennent pas d'avoir entendu pareilles remarques. C'est malheureux qu'on soit en train de créer une telle impression et de faire une telle réputation au Parti réformiste.

Le Parti réformiste ne veut pas avoir l'air d'appuyer les riches et non les pauvres, ni de se ranger du côté de M. et Mme Walter Twinn et non du côté des femmes qui devraient être réadmises au sein de la bande.

LA DÉFENSE NATIONALE

L'hon. Charles Caccia (Davenport): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale.

Le ministre peut-il expliquer à la Chambre ce qu'il compte faire pour garantir que la base Downsview, à Toronto, sera conservée à perpétuité de sorte que la population puisse profiter d'un espace vert en milieu urbain assorti d'installations à vocation récréative et éducative? Les Canadiens qui aiment la nature et les citadins qui veulent se détendre dans des espaces verts pourraient ainsi en bénéficier.

Ces terres seront-elles désignées comme notre première forêt nationale en milieu urbain?

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants): Monsieur le Président, comme la question va dans le menu détail, je ne pourrai fournir une réponse détaillée au député que plus tard.

À mon avis, le gouvernement a toutefois pris une initiative unique en l'occurrence. Nous devrions remercier le premier ministre de donner, à perpétuité, un vaste espace vert en milieu urbain dont les Torontois profiteront dans les années à venir.

À mon avis, en agissant ainsi, le gouvernement montre qu'il y a des solutions de rechange au pavage de terrains et à la construction d'édifices, notamment dans les secteurs à forte densité démographique. Il est prévu que le ministère de la Défense nationale conservera ces terres et les aménagera à des fins récréatives, pour le plus grand plaisir des Torontois. Le projet sera mis en oeuvre en collaboration avec mon collègue, le ministre du Patrimoine canadien, qui est responsable de Parcs Canada, et avec mon autre collègue, le président du Conseil du Trésor. De cette façon, nous créerons un environnement unique dont les Torontois pourront profiter dans les années à venir.

* * *

[Français]

LE COLLÈGE MILITAIRE ROYAL DE SAINT-JEAN

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg): Monsieur le Président, il n'existe encore au Canada qu'un seul collègue militaire francophone, celui de Saint-Jean. Nous avons appris hier, malheureusement, que le gouvernement fédéral a décidé de mettre la hache dans ce véritable symbole que représente ce collège pour les francophones. Ma question s'adresse au ministre des Finances ou au ministre de la Défense nationale.

Comment peut-il concilier cette fermeture avec l'application de la politique officielle du bilinguisme tant vantée par le premier ministre? Et espère-t-il nous faire croire que l'héritage francophone du Collège militaire royal de Saint-Jean ne sera pas trahi en transférant ses activités au Royal Military College de Kingston?

(1500)

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants): Monsieur le Président, je pense que dans ce cas, nous avons un exemple de deux poids, deux mesures du Bloc québécois, parce que l'honorable député a déclaré la semaine passée au cours du débat tenu

1728

dans cette Chambre, et je cite: «Malgré tout ce remue-ménage, les infrastructures de la défense sont encore beaucoup trop grosses compte tenu du volume de ses troupes.»

[Traduction]

Aujourd'hui, le député prend la parole à la Chambre pour dénoncer une décision que le gouvernement a malheureusement dû prendre, celle de fermer le Collège militaire de Saint-Jean. N'oublions pas le Royal Roads Military College, à Victoria. Les députés oublient en effet trop facilement que deux collèges militaires seront fermés.

Si nous réduisons le personnel des Forces armées, il va de soi que les besoins en formation des officiers s'en trouveront réduits. Voilà pourquoi nous regrouperons les activités à un seul endroit et, financièrement, il est plus avantageux de les regrouper à Kingston.

Le député laisse entendre qu'il est impossible d'avoir un collègue bilingue en Ontario; j'en suis profondément vexé. Les députés du Bloc québécois devraient savoir que la raison d'être de la Loi sur les langues officielles est de permettre aux Canadiens des deux langues officielles de se sentir à l'aise partout au Canada. Il y aura effectivement un collège militaire bilingue à Kingston.

Le Président: La présidence comprend parfaitement que c'est aujourd'hui le premier jour suivant le dépôt du budget. C'est aussi la première fois que j'occupe le fauteuil après la présentation d'un budget, et je dois dire qu'une grande latitude a été autorisée dans la formulation des questions et réponses.

Comme il est maintenant 15 heures, nous allons passer à un rappel au Règlement soulevé par le député de Markham-Whitchurch-Stouffville.

* * *

RECOURS AU RÈGLEMENT

RETRAIT DE LA DEMANDE DE DÉLAI

M. Jag Bhaduria (Markham-Whitchurch-Stouffville): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement pour vous informer officiellement que je souhaite retirer la demande de délai que j'avais formulée, car j'ai été dans l'impossibilité de consulter mon avocat. Il me faudra peut-être un certain temps pour le faire. Je crois qu'il serait inutile de retarder cette affaire.

Plus tard, lorsque j'aurai consulté mon avocat, je vous demanderai de nouveau de vous prononcer sur la question de privilège qui sera alors soulevée à la Chambre. Pour l'instant, je demande à retirer cette affaire jusqu'à ce que je puisse y revenir.

Le Président: La Chambre prendra note que je ne vais pas rendre de décision sur la question de privilège qui a été soulevée il y a quelque temps par le député de Markham-Whitchurch-Stouffville.

_____________________________________________


1728

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LA POLITIQUE DE DÉFENSE

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 17 février, de la motion de M. Collenette.

Le Président: Comme il est 15 heures, conformément à l'ordre adopté le mardi 22 février 1994, la Chambre procédera maintenant au vote par appel nominal différé sur l'affaire émanant du gouvernement no 8 portant sur la création d'un comité mixte spécial sur la politique de défense du Canada.

Convoquez les députés.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 6)

POUR

Députés
Abbott
Adams
Alcock
Anderson
Arseneault
Assadourian
Augustine
Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre)
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellemare
Benoit
Berger
Bernier (Beauce)
Bertrand
Bethel
Bevilacqua
Bhaduria
Blaikie
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Brown (Calgary-Sud-Est)
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Calder
Campbell
Cannis
Catterall
Cauchon
Chamberlain
Chan
Chatters
Chrétien (Saint-Maurice)
Collenette
Collins
Comuzzi
Copps
Cowling
Crawford
Culbert
Cummins
de Jong
DeVillers
Dhaliwal
Dingwall
Discepola
Dromisky
Duhamel
Duncan
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Epp
Fewchuk
Finestone
Finlay
Flis
Fontana
Forseth
Frazer
Fry
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Gauthier (Ottawa-Vanier)
Gerrard
Gilmour
Godfrey
Goodale
Gouk
Graham
Gray (Windsor-Ouest)
Grey (Beaver River)
Grose
Grubel
Guarnieri
Hanger
Hanrahan
Harper (Churchill)
Harper (Simcoe-Centre)
Harris
Hart
Harvard
Hayes
Hermanson
Hickey
Hill (Macleod)
Hill (Prince George-Peace River)
Hoeppner
Hopkins
Hubbard
Ianno
Irwin
Jackson
Jennings
Johnston
Jordan
Kerpan
Keyes
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lastewka
LeBlanc (Cap-Breton Highlands-Canso)
Lee
Loney
MacAulay
MacDonald
MacLaren (Etobicoke-Nord)
MacLellan (Cap-Breton-The Sydneys)
Maheu
Malhi
Maloney
Manley
Manning
Marchi
Marleau
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Massé
Mayfield
McClelland (Edmonton-Sud-Ouest)
McCormick
McGuire
McKinnon
McLaughlin
McLellan (Edmonton-Nord-Ouest)
McWhinney

1729

Meredith
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Minna
Mitchell
Morrison
Murphy
Murray
Nault
Nunziata
O'Brien
O'Reilly
Ouellet
Parrish
Patry
Payne
Peric
Peters
Peterson
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Ramsay
Reed
Regan
Rideout
Ringma
Robichaud
Rock
Rompkey
Schmidt
Scott (Fredericton-York--Sunbury)
Serré
Shepherd
Sheridan
Silye
Skoke
Solberg
Solomon
Speaker
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Stinson
Strahl
Szabo
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Thompson
Tobin
Torsney
Ur
Valeri
Vanclief
Verran
Volpe
Walker
Wayne
Wells
White (Fraser Valley-Ouest)
White (North Vancouver)
Williams
Wood
Young
Zed-202

CONTRE

Députés
Asselin
Bachand
Bellehumeur
Bergeron
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bouchard
Brien
Bélisle
Canuel
Caron
Chrétien (Frontenac)
Crête
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
Deshaies
Dubé
Duceppe
Dumas
Gagnon (Québec)
Gauthier (Roberval)
Godin
Guay
Guimond
Jacob
Landry
Langlois
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Lefebvre
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loubier
Marchand
Mercier
Ménard
Nunez
Paré
Picard (Drummond)
Plamondon
Pomerleau
Péloquin
Sauvageau
St-Laurent
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Venne-49

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

nil/aucun

(1520)

[Traduction]

Le Président: Je déclare la motion adoptée.

M. Richardson: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Comme je suis arrivé après que le whip se fut assis, je n'ai pas pu voter, mais je tiens à faire savoir que j'aurais voté comme mon parti.

M. Simmons: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Si le timbre ne s'était pas arrêté prématurément, j'aurais eu le triple bonheur de voter pour mon gouvernement, de voter comme le Parti réformiste et de bénéficier d'un vote libre.

M. Pagtakhan: Pour la même raison, monsieur le Président, j'aurais voté moi aussi comme le gouvernement.

Mme Cohen: Monsieur le Président, si on n'avait pas arrêté la sonnerie plus tôt que prévu, j'aurais moi aussi voté comme mon parti.

_____________________________________________


1729

AFFAIRES COURANTES

(1525)

[Traduction]

LOI SUR LE POUVOIR D'EMPRUNT POUR 1994-1995

L'hon. Marcel Massé (au nom du ministre des Finances) demande à présenter le projet de loi C-14, Loi portant pouvoir d'emprunt pour l'exercice 1994-1995.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada) demande à présenter le projet de loi C-15, Loi visant à adapter certaines dispositions législatives relatives à l'impôt sur le revenu au texte révisé de la Loi de l'impôt sur le revenu et des Règles concernant l'application de l'impôt sur le revenu.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

[Français]

PÉTITIONS

L'IMMIGRATION

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition signée par plus de 4 000 résidants de mon comté de Québec-Est et de plusieurs régions de la province de Québec, leurs signatures s'ajoutant aux 5 000 signatures présentées en Chambre jusqu'à maintenant et aux 13 000 que je déposerai demain.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de bien vouloir inciter le ministre de l'Immigration à reconsidérer la décision du ministère de l'Immigration d'expulser la famille Maraloï de Vanier et de lui permettre de rester au Canada, où elle s'est parfaitement intégrée depuis trois ans. J'appuie, sans réserve, cette pétition et j'exhorte le gouvernement à y donner suite.

LE LOGEMENT SOCIAL

Mme Christiane Gagnon (Québec): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je voudrais, au nom des concitoyens et concitoyennes de mon comté, présenter une pétition pour demander au gouvernement le rétablissement intégral des budgets accordés au logement social.

1730

Cette pétition comporte plus de 400 signatures et est présentée pour rappeler au gouvernement son devoir d'offrir aux plus démunis de notre société un logement adéquat, adapté à leurs besoins et tenant compte de leur revenu.

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac): Monsieur le Président, il me fait plaisir de présenter une pétition des gens qui demeurent dans la municipalité de Vianney.

Nous, soussignés, résidants de la municipalité de Vianney, du comté de Frontenac, faisons remarquer à la Chambre des communes, ce qui suit: Nous prions le Parlement de faire reconnaître officiellement, par la Société canadienne des postes, la municipalité de Vianney, composée des rangs 1, 2, 3, 4 et le village, afin que nos adresses soient reconnues Vianney et non pas Saint-Ferdinand ou encore Bernierville, tout en gardant le même code postal, soit le G0N 1N0.

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL

M. Jay Hill (Prince George-Peace River): Madame la Présidente, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter une pétition signée par plus de 1 000 habitants de la circonscription de Prince George-Peace River.

Les pétitionnaires demandent à la Chambre des communes d'abroger le projet de loi C-17, la plus récente modification à la partie III du Code criminel.

(1530)

Ces citoyens estiment que les mesures législatives relatives au contrôle des armes à feu étaient suffisamment sévères avant les modifications prévues par le projet de loi C-17 et que ce projet de loi a imposé des restrictions indues aux propriétaires d'armes à feu respectueux de la loi, au lieu de se concentrer sur les sanctions à prendre contre les personnes qui utilisent des armes à feu à des fins criminelles. Je suis très heureux d'appuyer cette pétition.

* * *

[Français]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Madame la Présidente, je suggère que toutes les questions soient réservées.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Les questions sont-elles réservées?

Des voix: D'accord.

[Traduction]

DEMANDES DE DOCUMENTS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Madame la Présidente, je suggère que la seule demande de documents reste inscrite au Feuilleton.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

_____________________________________________


1730

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

La Chambre reprend l'étude de la motion, interrompue le 22 février: Que la Chambre approuve la politique budgétaire générale du gouvernement.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Madame la Présidente, on n'a pas souvent l'occasion de le faire mais j'aimerais, d'entrée de jeu, avant la poursuite de la critique du Budget du ministre des Finances, en profiter pour féliciter l'équipe d'interprétation qui fait un excellent travail, autant en français qu'en anglais. Ce n'est pas toujours facile, surtout lorsqu'on parle vite et qu'on emploie des termes techniques.

Le discours sur le Budget que nous a présenté hier le ministre des Finances est diamétralement opposé à tous les espoirs que pouvait susciter l'arrivée d'un nouveau gouvernement dans cette Chambre. Ce gouvernement nous promettait des emplois qui allaient redonner de la dignité-comme le disait et comme le répétait depuis toujours l'actuel premier ministre, en campagne électorale surtout-au million et demi de Canadiens en chômage et à près du demi-million de chômeurs au Québec. Ce n'est pas ce qu'il est advenu avec ce Budget.

Ce Budget se contente de rappeler tout simplement le programme d'infrastuctures déjà annoncé à de multiples reprises et qui ne créera que 45 000 emplois temporaires, répondant à peine à 3 p. 100 des besoins des sans-emploi; 3 p. 100, c'est ce que nous offrent le gouvernement d'en face et son ministre des Finances après nous avoir rebattu les oreilles pendant je ne sais combien de mois, en brandissant toujours le livre rouge et en nous criant sans cesse: «Jobs, jobs, jobs.» C'est tout ce qu'on nous offre : 45 000 emplois, 3 p. 100 des besoins du marché du travail canadien.

Ce gouvernement s'était aussi engagé à remettre de l'ordre dans les finances publiques. Or, le déficit pour 1994-1995 demeurera très élevé, à peu près 40 milliards de dollars, soit la plus élevée des estimations pour un déficit dans toute l'histoire des finances publiques canadiennes.


1731

Et ce gouvernement s'enorgueillit depuis hier. Le ministre se targue d'avoir un bon budget et il nous présente le plus élevé des déficits de l'histoire des finances publiques canadiennes. Comment peut-on être fier, avec un budget aussi catastrophique.

Le gouvernement a lamentablement échoué dans la nécessaire réduction des dépenses gouvernementales. Il n'a pas su faire preuve de courage et s'attaquer aux dépenses de fonctionnement des ministères en coupant dans le gras de l'appareil fédéral. Et il y en a encore, du gras, dans cet appareil fédéral. Tous les ans, bon an, mal an, le vérificateur général ne cesse de répéter que, dans l'administration des programmes, il y a du gras à couper; dans l'utilisation des fonds publics en général, il y a du gras à couper. Mais où retrouve-t-on cette volonté de couper dans les dépenses publiques, de couper véritablement là où le vérificateur général le lui demande et le lui a demandé récemment? Nulle part.

(1535)

L'actuel gouvernement, le ministre des Finances en tête, n'a pas le courage non plus de mettre fin aux chevauchements et aux duplications qui nous coûtent au bas mot, au Québec seulement, de deux à trois milliards de dollars. C'est inacceptable, c'est inadmissible que pour un premier budget du gouvernement fédéral, qui nous promettait justement un meilleur contrôle des finances publiques, on en arrive à une réduction, si ma mémoire est bonne, depuis hier, de 400 millions seulement dans les dépenses de fonctionnement du gouvernement fédéral. Quatre cents millions sur près de 20 milliards de dépenses de fonctionnement, comment peut-on être fier de cette réalisation?

Plutôt que de couper dans les dépenses, le ministre des Finances et son gouvernement ont bêtement choisi d'accroître le fardeau fiscal des contribuables, et plus particulièrement celui de la classe moyenne, tombant ainsi dans les mêmes ornières que celles du précédent gouvernement.

Au total, le gouvernement percevra pas moins de 575 millions en nouvelles taxes de toutes sortes en 1994-1995 et plus de 1,3 milliard en 1995-1996. Tout le monde dans ce gouvernement, en particulier l'actuel premier ministre et le ministre des Finances, disait il n'y a pas si longtemps que lorsqu'ils prendraient la tête du gouvernement, il n'y aurait aucune augmentation de taxes, aucune augmentation de l'impôt sur le revenu. Ils font tout le contraire de ce qu'ils nous ont véhiculé depuis des mois, ils font tout le contraire aussi du torchon qu'ils nous brandissent tous les jours et qu'on appelle le livre rouge, the red book, madame la Présidente.

Des voix: Bravo!

M. Loubier: Ce faisant, madame la Présidente, ils entrent directement en contradiction aussi avec leur désir d'accroître les possiblités de croissance économique, parce qu'en augmentant ainsi le fardeau fiscal des contribuables, le gouvernement diminue leur pouvoir d'achat et compromet les effets d'une reprise économique déjà anémique.

Enfin, le ministre des Finances, le stand-up comic de la politique économique canadienne, va chercher dans les poches des travailleurs à revenu moyen plus d'un demi-milliard sur trois ans, en taxant uniquement-et c'est juste un exemple-la contribution de l'employeur aux régimes d'assurance-vie, en taxant les travailleurs à revenu moyen.

Par ailleurs, on sait maintenant ce que cachent les mots «modernisation» et «rationalisation» dans la bouche de ce gouvernement et de ses mandarins, l'apparatchik du gouvernement libéral.

Le ministre des Finances, le véritable boss de la conduite des affaires publiques canadiennes, impose, à ceux et celles qui doivent compter sur le soutien de l'entière communauté, une réduction odieuse de 7,5 milliards de dollars au niveau des programmes sociaux.

Une voix: Inacceptable.

M. Loubier: Et c'est inadmissible. C'est inadmissible pour un gouvernement qui disait il n'y a pas si longtemps au gouvernement précédent qu'il trouvait scandaleux qu'on touche à l'universalité des programmes sociaux, qui trouvait scandaleux aussi qu'on se mette à sabrer dans ces mêmes programmes.

On ose parler de l'autre côté de la Chambre, et depuis longtemps que je les entends, depuis longtemps que j'entends cette litanie, on ose parler de justice sociale et d'effort équitable dans la recherche d'un meilleur contrôle des finances publiques. On se gargarise sur la pauvreté et le chômage, et c'est en s'attaquant aux victimes de ces deux fléaux que ce gouvernement entend régler son problème.

Je ne sais pas ce que ces gens ont comme conscience sociale, mais aussitôt qu'ils prennent les rênes du gouvernement, ils oublient ceux et celles qui ont permis qu'ils soient à la tête de ce gouvernement, et ça c'est inadmissible.

Là ne s'arrêtent pas les ponctions qu'effectue le gouvernement sur l'ensemble des contribuables car, contrairement à son engagement électoral, le gouvernement coupe dans les paiements de transfert aux provinces qui servent à financer les programmes d'éducation et d'aide sociale. Il soutire, il vole de la poche des provinces près de deux milliards de dollars pour les années 1995-1996 et 1996-1997. C'est cela qu'on appelle depuis quelques années pelleter son déficit dans la cour des provinces, tout en évitant l'odieux d'affronter l'électorat avec des augmentations de taxes supplémentaires.

Des voix: Voilà! C'est ça!

Une voix: Le chat sort du sac!

Une voix: Mets ça dans ta pipe!

M. Loubier: Et qui paiera cela? Qui paiera cela? Encore et toujours les mêmes personnes: les contribuables. Il n'y a pas des contribuables qui contribuent à l'impôt fédéral et des contribuables qui contribuent à l'impôt provincial, et une autre classe de contribuables qui contribuent uniquement à l'impôt foncier des municipalités, il n'y a qu'un seul contribuable. Qu'on augmente les taxes directement au fédéral ou qu'on pellette dans la cour des provinces, il n'y a toujours qu'un contribuable. Et ce contribuable-là, en particulier le contribuable moyen, est étranglé depuis 1984, et on vient de lui donner un autre coup, un autre croc-en-jambe avec le fardeau fiscal qu'il a à affronter.


1732

(1540)

Dans cette perspective, l'opposition officielle ne peut que condamner les orientations budgétaires du ministre des Finances qui ne règlent en rien le problème colossal du déficit fédéral, au contraire!

[Traduction]

Il n'y a aucune mesure de création d'emplois dans le budget et aucun espoir pour 1,5 million de Canadiens. Le programme d'infrastructures, qui est censé créer 45 000 emplois, ne répond qu'à 3 p. 100 des besoins en la matière.

Le ministre des Finances s'attend au déficit le plus spectaculaire jamais vu de mémoire de Canadiens. Il n'a jamais été aussi élevé. Nous savons, car telle est l'habitude, qu'il dépassera le chiffre avancé de 40 milliards de dollars. En fait, il dépassera probablement les 45 milliards cette année.

Le ministre des Finances n'a pas de quoi être fier.

Aucune réduction des dépenses fédérales n'est prévue, mais les contribuables à revenus moyens vont voir leurs impôts augmenter. Rien n'est prévu pour éliminer les échappatoires fiscales que sont les fiducies familiales, à part la promesse de soumettre la question au Comité des finances. Pas un mot au sujet de la recommandation du vérificateur général concernant la possibilité d'économiser plus de 5 milliards de dollars par année en rendant la fonction publique plus efficace. Le budget ne fait aucunement mention des logements sociaux. Par contre, le ministre a décidé de réduire l'assistance sociale de 7,5 milliards de dollars au cours des trois prochaines années, et les paiements de transfert aux provinces de 2 milliards.

[Français]

Madame la Présidente, est-il nécessaire de rappeler à cette Chambre que l'incapacité du gouvernement à juguler le déficit n'est que le prolongement du laxisme budgétaire des gouvernements libéraux-et je ne dis pas des conservateurs-n'est que le reflet du laxisme des gouvernements libéraux des années 1970 et du début des années 1980. Dans cette période, rappelons-le, même l'actuel premier ministre était ministre des Finances pour un temps. Ce laxisme des libéraux, de la première, de la deuxième, de la troisième et de la quatrième heure est directement responsable de l'explosion de la dette publique qui s'élève aujourd'hui à plus de 507 milliards de dollars.

De 1970 à 1985, durant les 15 années presque ininterrompues de gouvernement libéral, le rapport du solde budgétaire du PIB est passé d'un surplus de 0,3 p. 100 à un déficit de 8,5 p. 100 du PIB, un sommet inégalé depuis. Et ce sont des gouvernements libéraux successifs qui nous ont menés à cette catastrophe dans les finances publiques.

Et, si le passé est garant de l'avenir, et je pense que le passé va être garant de l'avenir, à la lumière de ce que le ministre des Finances a présenté comme budget hier, je pense que si le passé est garant de l'avenir, ça promet! Ça promet en poursuite d'injustice sociale, ça promet en poursuite de laxisme budgétaire, ça promet en poursuite d'iniquité fiscale. Les plus riches et les grandes sociétés ne paieront pas, et les plus pauvres et les revenus moyens vont continuer à payer le fruit de l'attitude du gouvernement libéral. C'est inacceptable!

Le ministre des Finances n'a aucune raison d'être fier de nous annoncer un déficit pour l'année financière de 1994-1995 de l'ordre de 40 milliards de dollars. D'autant plus qu'il a sciemment-je dis bien qu'il a sciemment-volontairement gonflé la valeur du déficit du dernier exercice, pour avoir l'air plus efficace dans ses coupes lors du dépôt du Budget, tel qu'il nous l'a présenté hier.

Et, de l'avis même de plusieurs économistes, et d'une partie de ceux qu'il a consultés au cours du processus de préparation budgétaire, le vrai déficit du Canada pour l'année courante n'est pas de 45 milliards mais se situe dans les faits autour de 42 milliards. Et sur ce point, le Conference Board, qui n'est pas réputé pour être un organisme souverainiste, le Conference Board affirme, dans sa note de conjoncture canadienne de l'hiver 1994, et je cite: «Une importante partie des dépassements budgétaires s'élevant à 3 milliards de dollars en 1993-1994 sont imputables au changement de l'entrée en vigueur de certaines mesures prévues dans les politiques et représentent en tant que tels des décisions uniques discrétionnaires sur le plan comptable». Cela signifie que par rapport aux prévisions du gouvernement, ou du ministère des Finances, en matière de déficit, et étant donné le Budget déposé hier, l'effort que le ministre a consenti dans son objectif de réduction des dépenses n'a atteint que 2 milliards de dollars. Il parle de 7 ou 8 milliards de réduction du déficit, mais c'est de la poudre aux yeux, c'est de la fumisterie. Je ne dirai pas qu'ils sont menteurs parce que c'est non parlementaire, mais je dirai qu'ils ne disent pas la vérité.

(1545)

Il y a donc une coupure de 2 milliards dans le déficit de 1994-1995. Mais où est l'effort d'assainissement des finances publiques lorsqu'on ne prévoit réduire ce déficit que de 2 milliards? Ce n'est pas sérieux, ce n'est pas crédible. Est-ce que vous pensez, est-ce qu'on pense, est-ce que nous pensons tous que le ministre des Finances et ce gouvernement attendent un troisième avertissement du Fonds monétaire international pour réagir? Est-ce qu'ils attendent aussi que la situation des finances publiques canadiennes se détériore davantage, à cause d'une décote de crédit auprès des principales agences d'évaluation? Ce gouvernement, le ministre des Finances en tête, font preuve d'irresponsabilité crasse.

Je pense que la situation du Canada, si on la compare aux principaux pays industrialisés, commandait des mesures énergiques sur le plan budgétaire. Si vous me le permettez, madame la Présidente, je vous citerai quelques exemples de mauvaises performances du Canada qui auraient commandé que le ministre des Finances fasse autre chose que du maquillage dans un budget.

Les quelques faits que je vais vous citer sont connus, du moins j'espère qu'ils sont connus du ministre des Finances. Je l'espère, car c'est l'ABC, c'est élémentaire. Premièrement, l'ampleur relative du déficit canadien est plus importante que les autres pays du Groupe des sept pays les plus industrialisés. En 1993, selon l'Organisation de la coopération et du développement économique, et selon la définition des comptes nationaux, le ratio du déficit par rapport au PIB était 63 p. 100 plus élevé au Canada que la moyenne du G-7. Soixante-trois p. 100, c'est spectaculaire, dans le mauvais sens du terme.

Deuxième donnée que le ministre des Finances aurait dû connaître, que son gouvernement aurait dû connaître, que ses ministres auraient dû connaître, mais qu'ils font semblant


1733

d'ignorer pour maquiller la véritable situation d'un régime qui est une catastrophe nationale, deuxième donnée, dis-je, c'est que la dette augmente beaucoup plus rapidement au Canada que dans l'ensemble des pays de l'OCDE. De 1985 à 1993, le ratio de la dette sur le PIB des pays de l'OCDE n'a augmenté que de 21 p. 100, alors que celui du Canada a augmenté de 82 p. 100; 82 p. 100 contre 21 p. 100! Ce que cela signifie en termes un peu moins techniques, un peu moins arides, mais que la démonstration m'oblige à utiliser, cela veut dire que la dette du Canada croît beaucoup plus rapidement que les revenus pouvant un jour servir à la réduire. Lorsqu'on en est rendu, dans un pays, à ne pas générer suffisamment de recettes pour espérer un jour rembourser les intérêts et une partie du capital, c'est parce que ça va mal, ça va très mal.

Comme si cela ne suffisait pas, de 1983 à 1992, la proportion de la dette fédérale détenue par des non-résidants a plus que doublé. Cette situation est inadmissible. Elle nous fait perdre le contrôle sur l'économie canadienne et ce sont les générations futures, en particulier les jeunes, qu'on étrangle plus que tout autre contribuable, qui auront à rembourser cette dette globable et cette partie de la dette importante à l'étranger.

Je peux vous dire qu'avec un taux de chômage chez les moins de 25 ans de 17,5 p. 100-c'est ce qui apparaissait au dernier trimestre de 1993-c'est tout un héritage que ce gouvernement, que les gouvernements précédents laissent à ces jeunes, c'est tout un héritage et c'est tout un espoir qu'on leur laisse aussi.

Troisièmement, et toujours selon les données de l'OCDE, les facteurs structurels entraînent une augmentation plus rapide des dépenses du secteur public canadien que dans la majorité des pays de l'OCDE, ainsi que dans tous les pays du Groupe des Sept. Ceci veut dire, en mots très simples, que le système ne fonctionne plus.

(1550)

Ce système est pourri à l'os, comme on a l'habitude de dire au Québec. Et cette situation du système qui ne fonctionne plus est exacerbée par le fait que les recettes fiscales ne garnissent plus, au gré de la croissance économique, les coffres de l'État fédéral. Et pourquoi? À cause de la surtaxation, à cause, et j'emploierai un terme cru, de l'écoeurement peut-être des contribuables québécois et canadiens. Il y a une émergence certaine et d'une importance qui prend de l'ampleur de l'économie souterraine.

Je vous dirais que le ministre des Finances-avec le budget qu'il a déposé hier-contribue lui-même à l'émergence encore plus forte d'une économie au noir, d'une économie souterraine au Québec comme au Canada. Cela, je pense, est impardonnable. Il contribue à la faillite de ce pays, à la faillite du pays qu'il prétend défendre et du système qu'il prétend aussi défendre.

Cela veut dire, toutes ces données techniques de l'OCDE, que les dépenses publiques sont devenues incontrôlables et que la situation commande des changements, pas seulement un peu de maquillage par ci par là, mais un véritable changement en profondeur que le ministre des Finances n'a pas le courage d'effectuer. C'est de la lâcheté que de nous présenter un budget comme celui qui a été présenté hier par le ministre des Finances.

Ce n'est pas par plaisir-et je pense que nos amis d'en face avant le dépôt du premier budget riaient beaucoup de cela-que nous n'avons cessé de demander à ce gouvernement de mettre en place rapidement un comité parlementaire spécial devant analyser, pas seulement étudier, devant analyser de façon sérieuse et exhaustive, l'ensemble des postes de dépenses effectuées par le gouvernement canadien et l'ensemble aussi, non seulement des dépenses budgétaires, mais des dépenses fiscales. C'était justement dans le but d'en arriver à effectuer ces changements fondamentaux qui nous permettraient, je dirais, de contrôler davantage, mais pas tout à fait parce que le régime est complètement en faillite, l'évolution de la détérioration des finances publiques canadiennes.

C'est certain que nous ne referons pas l'histoire des trois derniers mois, mais déjà, même sans le comité, même sans la réponse du gouvernement face à l'établissement d'un comité parlementaire spécial, le ministre des Finances aurait pu, hier, s'il avait eu le courage des convictions qu'il manifestait lorsqu'il était sur les banquettes de l'opposition officielle, il aurait pu appliquer les recommandations du vérificateur général des trois dernières années. Et, ce faisant, ce n'est pas des pacotilles, ce n'est pas 40 millions de dollars qu'il serait allé chercher dans les dépenses de fonctionnement de l'État, mais il serait allé chercher, selon l'avis de plusieurs fiscalistes, au moins 5 milliards de dollars, annuellement, en dépenses publiques, en gaspillage, en efficacité, en bureaucratie de toutes sortes. Mais le ministre des Finances, et son gouvernement, n'a pas eu le courage d'appliquer cette médecine.

Du côté des recettes, lorsqu'on regarde les prévisions- et c'est une farce monumentale ces prévisions, quelque chose qui est dénué de toute crédibilité dans le milieu économique et financier-force nous est de constater que le ministre des Finances fait exactement les mêmes erreurs que celui qui l'a précédé dans cette Chambre. Il se croit encore au milieu des années 1970 jusqu'au milieu des années 1980 où les recettes fiscales suivaient la progression de l'économie, mesurée par le produit intérieur brut, c'est-à-dire la croissance de la richesse nationale.

Le ministre des Finances prévoit injustement que toute augmentation de 1 p. 100 de la richesse nationale, mesurée par le produit intérieur brut, va se solder par une augmentation de plus de 1 p. 100 des rentrées fiscales, alors que depuis le milieu des années 1980, comme le confirme une étude effectuée par le Conference Board du Canada en janvier dernier, ce n'est plus le cas. Lorsqu'il y a progression de 1 p. 100 de la richesse collective, mesurée par le produit intérieur brut, il n'y a augmentation que de 0,4 p. 100 des recettes fiscales. Et pourquoi? Pour une raison bien simple, et je l'ai mentionnée tout à l'heure, c'est qu'il y a émergence et croissance d'une économie souterraine importante, au Québec comme au Canada, parce que les contribuables en ont soupé de la taxation et en ont soupé d'être surtaxés et de voir qu'en même temps le gouvernement actuel, comme le précédent, n'a pas le courage de poser des gestes pour éviter des gaspillages, pour éviter des inefficacités.

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Je vous rappellerais, madame la Présidente, que les prévisions de recettes sont irréalistes par rapport même aux évaluations, aux estimations qui avaient été faites au cours des trois dernières années. Par exemple, le Budget de février 1991 a surestimé les recettes de l'année fiscale 1991-1992 de 6,5 milliards de dollars. L'année suivante, le Budget a encore surestimé les recettes de l'année fiscale 1992-1993 non pas de 6,5 milliards, mais de 10,6 milliards de dollars. Finalement, selon les estimations du ministère des Finances, le Budget d'avril dernier a surestimé les recettes de près de 10 milliards de dollars. Alors, quelle crédibi-


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lité pouvons-nous avoir avec de telles estimations de recettes contenues dans le Budget du ministre des Finances alors que, premièrement, les hypothèses qui sont sous-jacentes aux rentrées fiscales liées à la croissance de l'économie sont fausses et non crédibles et que, deuxièmement, la même équipe qui faisait les prévisions économiques et financières du gouvernement précédent est en place et offre encore au ministre des Finances le même type d'estimation?

J'écoutais, hier, les commentaires des analystes. Les estimations du ministre des Finances sont carrément irréalistes et, au cours des prochaines années, il n'atteindra pas son objectif de 3 p. 100 du décifit par rapport au PIB. Cela s'avère techniquement impossible.

Non seulement le ministre des Finances manque-t-il de finesse et de crédibilité à cet égard, mais il manque aussi de vision, tout comme ses prédécesseurs, parce qu'il va encore plus loin que l'utilisation de données non crédibles. Il affirmait dans son discours, hier, que les recettes du gouvernement non seulement suivraient la tendance de l'économie, mais augmenteraient à un rythme plus rapide que celui de l'économie. Imaginez, il va plus loin que le show que le gouvernement précédent nous a offert en utilisant des hypothèses complètement irréalistes: il dit que les recettes fiscales vont rentrer plus vite que la richesse collective.

Je ne sais pas de quelle façon on a pu vendre ces choses-là au ministre des Finances. Je ne sais pas si le ministre des Finances y croyait tout de suite en partant, mais je puis vous assurer que cela ne peut pas se produire. C'est impossible. Et si cela se produisait, les amis du régime ou les représentants des Chambres de commerce s'inquiéteraient grandement de ce genre de prévisions.

Je ne sais pas si le ministre des Finances se rappelle de l'indignation qu'il affichait lorsqu'il se trouvait de ce côté-ci de la Chambre pour condamner les prévisions surréalistes du gouvernement conservateur. Est-il affligé, tout comme son prédécesseur, du syndrome des lunettes roses qui pousse les ministres des Finances à surestimer les recettes du gouvernement, ou cherche-t-il à être à la hauteur de sa réputation de stand-up comic, étiquette dont l'a affublé récemment le prestigieux quotidien torontois The Globe and Mail?

En regard des recettes, ce gouvernement et son ministre des Finances élargissent l'assiette fiscale comme ils nous avaient promis qu'ils le feraient, mais ils le font en s'acharnant de nouveau sur la classe moyenne déjà surtaxée.

Si vous me le permettez, madame la Présidente, je donnerai quelques exemples pour étoffer mon propos. Le ministre des Finances va piger indûment au cours des trois prochaines années dans la poche des contribuables à revenu moyen, et tout d'abord en taxant la contribution de l'employeur aux différents régimes d'assurance collective. Le ministre des Finances va chercher sur le dos des travailleurs à revenu moyen pas moins de 520 millions de dollars, soit un demi-milliard au cours des trois prochaines années sur le dos des travailleurs à revenu moyen.

Par ailleurs, lorsque le ministre des Finances, désirant peut-être éliminer les abus et les échappatoires des plus riches contribuables, peut-être, sait-on jamais, un éclair de génie à un moment, au cours de la semaine dernière, le ministre des Finances a peut-être eu cette idée. Mais en voulant éliminer les abus et ces échappatoires, il a jeté le bébé avec l'eau du bain en diminuant la portée de la déduction des repas et des frais de représentation. Car s'il est vrai qu'une partie de ceux et celles qui profitent de cette déduction font partie des classes de revenu très élevé, il est tout aussi vrai qu'à peu près 80 p. 100 des utilisateurs et des montants demandés en déduction proviennent soit des revenus moyens soit des revenus à peu près faibles. Ce sont les travailleurs autonomes qui sont touchés en grande partie, ici. Ce ne sont pas les hauts revenus, ce ne sont pas ceux qui placent leur argent dans les fiducies familiales, ce sont ceux et celles qui travaillent d'arrache-pied pour créer leur propre emploi parce qu'ils font face à un gouvernement incapable de les supporter dans cette création d'emploi.

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Il va de soi aussi que le ministre n'a pas pensé une seconde, même s'il nous brandit toujours le red book et «jobs, jobs, jobs», le ministre n'a pas pensé aux impacts de cette mesure qui, en partie, pourrait être salutaire mais, en grande partie, non salutaire. Il n'a pas pensé aux effets de cette mesure sur les emplois dans le secteur de la restauration. Il n'y a pas pensé. Il n'a pas pensé non plus aux effets de découragement que cette mesure pourrait avoir face aux travailleurs autonomes qui, d'arrache-pied, jour après jour, étant donné le fardeau fiscal et la bureaucratie fédérale qu'ils doivent affronter, buchent pour gagner leur vie.

Mon impression-et nous avons un représentant illustre de l'ancienne administration-c'est que le gouvernement libéral, le ministre des Finances en tête, comme il a l'habitude de le faire depuis les années 1970, suit tout simplement et aveuglément les conseils de l'apparatchik fédéral, des mandarins, dont on a le pâle reflet devant nous. À 170 000 $ pour un discours à New York-merveilleux!-en Challenger, aux frais des contribuables, ceux-là mêmes qui doivent payer aujourd'hui une hausse de taxation décrétée par le ministre des Finances, une hausse de taxation irresponsable, aussi irresponsable que l'utilisation d'un Challenger à 170 000 $ pour aller livrer un discours.

Lorsqu'il parle d'éliminer le crédit d'impôt en raison de l'âge des contribuables retraités, le ministre des Finances élargit l'assiette fiscale sur le dos de plus de 800 000 retraités. C'est ça la justice fiscale, c'est ça récompenser les personnes retraitées qui ont travaillé d'arrache-pied toute leur vie pour fonder des familles et construire le pays que le gouvernement prétend défendre.

Il va ainsi chercher dans les poches des personnes âgées, au cours des trois prochaines années, à peu près un autre demi-milliard. Comment le ministre peut-il soutenir sérieusement qu'une personne âgée, gagnant 25 000 $ par année, est une personne riche et ainsi justifier la réduction du crédit d'impôt pour les personnes âgées? Comment peut-il justifier cela et laisser en même temps les grandes sociétés très profitables ne pas payer un cent d'impôt? C'est inadmissible!

Je dois donc en conclure que comme ses prédécesseurs conservateurs-parce que ce Budget est un budget conservateur présenté par les libéraux-le ministre des Finances s'acharne sur la classe moyenne. Est-il nécessaire de rappeler à ce ministre, à son gouvernement que, entre 1971 et 1991, le taux moyen réel de l'impôt payé par des familles ayant des revenus moyens d'à peu près 46 000 $ a augmenté de 32,3 p. 100, alors qu'il n'augmen-


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tait que de 26,7 p. 100 pour les familles gagnant en moyenne plus de 110 000 $ par année?

Cette injustice flagrante, lorsqu'elle est sortie il n'y a pas si longtemps, amenait l'éditorialiste du quotidien Le Devoir, M. Jean-Robert Sansfaçon, à rappeler la situation d'iniquité subie par la classe moyenne, et je cite M. Sansfaçon: «Depuis 1980, la classe moyenne canadienne a dû renoncer à tous ses gains supplémentaires de revenu aux profits des gouvernements». Tous leurs gains supplémentaires de revenu depuis 1980, tout ce qu'ils ont gagné depuis 1980, on le donne au gouvernement. Je continue la citation: «Le fardeau fiscal a grimpé plus vite que les taux d'inflation et de croissance réunis. Encore en janvier, les libéraux, fraîchement débarqués dans la capitale fédérale, ont imposé une hausse de 7 p. 100 des primes d'assurance-chômage. Une taxe directe à la création d'emplois.»

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Donc, le ministre des Finances s'est comporté de façon odieuse, pire que les conservateurs à certains égards, pire que ce qu'ils reprochaient au régime conservateur en taxant les revenus moyens. Une situation assez loufoque qu'on retrouve dans le Budget, c'est que dans une partie, on dénonce la taxe sur la contribution de l'employeur et de l'employé devant financer l'assurance-chômage, qui a été augmentée de 3 $ à 3,07 $ en janvier, car, dit-on, c'est un frein à la création d'emplois et qu'il faut vraiment réduire cette contribution. Mais c'est eux, c'est le régime libéral, en janvier dernier, qui a augmenté la contribution des employeurs et des employés effectuant une ponction d'à peu près 800 millions dans la poche des travailleurs et des entrepreneurs, compromettant ainsi ce qu'ils prétendent défendre, c'est-à-dire la création d'emplois durables au Québec comme au Canada.

Je ne comprends pas, madame la Présidente. J'ai l'impression que les libéraux et le ministre des Finances se rient des contribuables québécois et canadiens, comme jamais un gouvernement n'a osé le faire dans l'histoire politique du Canada.

En même temps qu'on reconnaît que cette augmentation a mis un frein à la création d'emplois, on accepte de la garder quand même, cette augmentation, à 3,07 $ durant toute l'année 1994. On dit qu'on va créer des emplois de cette façon-là, alors que d'une part, on dit que c'est un frein, et d'autre part, on dit «c'est un frein, mais on va le garder». Mais quel ridicule, madame la Présidente! Quel ridicule peut sortir de cela, les «jobs, jobs, jobs» et «cut, cut, cut», and quelle insignifiance too!

Le ministre des Finances sait-il que les particuliers, toutes classes de revenu, paient, en proportion, sept fois plus d'impôt que les entreprises au Canada? C'est un autre aspect du Budget que j'aimerais commenter.

L'assiette fiscale fédérale est alimentée à environ 73 p. 100 par les particuliers, comparativement à 27 p. 100 pour les entreprises québécoises et canadiennes. Il est peut-être temps qu'on rétablisse un meilleur équilibre, parce que cette proportion, la contribution à l'assiette fiscale fédérale par les entreprises, ne cesse de décroître année après année.

À ceux et celles qui, comme le ministre et tous ses collègues d'en face, les amis, les grands contributeurs au Parti libéral du Canada-et j'y reviendrai tout à l'heure, madame la Présidente-à ceux et celles qui croient que les entreprises, et en particulier les très grosses entreprises profitables font leur part, je rappellerai les chiffres suivants qui proviennent aussi del'OCDE.

Je rappellerai que le fardeau fiscal des entreprises canadiennes représente à peu près 6,6 p. 100 de la production intérieure brute canadienne, alors que pour le Groupe des Sept, pour l'ensemble des sept pays les plus industrialisés, la proportion est de 9,9 p. 100. Il reste encore un petit jeu, j'ai l'impression, sans en arriver à compromettre la compétitivité des très grandes entreprises profitables. J'ai l'impression qu'il reste un petit jeu pour aller taxer les grosses sociétés qui ont fait 27 milliards de profit en 1987-1988 et qui n'ont pas payé un cent d'impôt. Il me semble qu'on devrait y penser à cela.

Lorsqu'on dit «ce ne sont pas les pays industrialisés qui doivent être considérés, mais notre principal partenaire commercial», eh bien justement, si on compare le fardeau fiscal des entreprises américaines, il est de 7,2 p. 100 du PIB américain contre 6,6 p. 100 du PIB au Canada.

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Alors il y a même un jeu entre le Canada et les États-Unis en matière de ponction fiscale qu'on devrait aller faire, de façon tout à fait légitime, auprès des grandes sociétés qui profitent des évasions fiscales.

Voilà la preuve indéniable qu'un impôt minimum sur les sociétés s'impose, impôt minimum qui n'existe pas pour les grosses entreprises très profitables qui transfèrent même des profits ailleurs et rapatrient les pertes d'autres pays pour les déduire de leurs déclarations ici. Voilà la preuve qu'un impôt minimum est le bienvenu. Je pense qu'il est temps que ces iniquités fiscales, que ces injustices, cessent tout à fait.

Dans cette veine, nous avons demandé à maintes reprises au ministre des Finances du Canada de mettre un terme à ce véritable scandale des fiducies familiales, régime qui, rappelons-le, a été implanté par un gouvernement libéral.

M. Plamondon: Encore, encore!

Une voix: Les amis du parti.

M. Plamondon: Encore, encore eux!

M. Loubier: Voilà! Ce régime permet à des familles millionnaires de reporter indéfiniment-c'est-à-dire jusqu'à la mort du dernier héritier, donc à l'infini-toute imposition, non seulement du capital déposé dans ces fiducies, mais également des intérêts générés par ces fiducies soustraites à l'application du fisc.

Plusieurs analystes estiment, contrairement à ce que prétendait le ministre des Finances cet après-midi, qu'on pourrait aller chercher là au minimum 350 millions de dollars par année en recettes fédérales fraîches. . .

M. Milliken: Qui a dit cela?

M. Loubier: . . .en passant jusqu'à un milliard de dollars de recettes fraîches, selon les évaluations.

J'entends des commentaires de nos amis d'en face qui n'ont pas ce courage. Et s'ils rient de ces fiducies-là, pourquoi n'ont--


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ils pas tout de suite aboli le privilège des fiducies familiales et voir le résultat sur l'augmentation des recettes fiscales?

Pourquoi n'ont-ils pas justement aboli le régime des fiducies familiales tout de suite, comme ils ont eu l'odieux d'augmenter la taxation, directe et indirecte, sur les revenus moyens? Ils l'ont fait tout de suite. Ils n'ont pas demandé qu'on fasse une analyse au Comité des finances. Ils n'ont pas demandé qu'on évalue l'impact de l'augmentation des taxes qu'ils nous proposent.

M. Plamondon: Faire un forum? Ah non!

M. Loubier: Ils ont augmenté les taxes. Alors pourquoi ne l'ont-ils pas fait avec les fiducies familiales?

Le ministre disait ce matin à cet égard aussi que, étant donné que le critique de l'opposition officielle en matière de finances avait demandé qu'on analyse les fiducies familiales, il avait amené ce problème au Comité des finances. Le ministre sait fort bien que ce que je lui ai demandé, c'est d'abolir ces fiducies familiales. Je lui ai demandé, par ailleurs, de donner mandat au vérificateur général, s'il y avait un consentement de la Chambre, -parce que ça entre dans ses attributions-d'évaluer l'ensemble des évasions fiscales des grandes entreprises, et c'est ce que je lui ai demandé. Mais je lui ai demandé d'abolir les fiducies familiales, et tout de suite, immédiatement.

Le ministre sait fort bien qu'avec le mandat très serré que son gouvernement, pour des raisons politiques et de politicaillerie, a donné au Comité des finances de trouver des alternatives à la TPS, cet examen des fiducies familiales ne pourra se faire avant l'année prochaine.

Si ce n'est pas aider les amis du parti, je me demande ce que c'est. Si ce n'est pas se conduire de manière à ne pas dire tout à fait la vérité, c'est quoi?

Une voix: Protéger les copains.

M. Loubier: Pourquoi, au lieu de s'attaquer aux revenus moyens et aux personnes à faible revenu, le gouvernement ne s'est-il pas attaqué à ces évasions fiscales des plus riches? Pourquoi aussi ne s'est-il pas vraiment attaqué aux vrais problèmes auxquels les Québécois et les Canadiens sont confrontés, c'est-à-dire le chômage, la plaie du chômage et du sous-emploi? Pourquoi ce gouvernement, qui parle de jobs, jobs, jobs tout le temps, n'a-t-il pas daigné mettre une priorité absolue sur cet objectif qui est souhaitable? Sur cet objectif, nous l'aurions appuyé, mais il n'y a rien dans ce Budget, sauf de répéter tout le temps que 45 000 emplois à temps partiel, temporaires, et liés aux infrastructures urbaines, seront créés.

(1615)

À l'égard de la création d'emploi, nous ne pouvons que condamner l'absence de véritables stratégies de création d'emploi. Faut-il rappeler au ministre des Finances que la faible reprise économique n'a pratiquement eu aucune incidence sur la création de nouveaux emplois. Le Québec, par exemple, n'a récupéré que 25 p. 100 des emplois qu'il a perdus au cours de la récession et le reste du Canada en a récupéré un peu plus, soit 40 p. 100. Mais d'un côté comme de l'autre, la reprise est anémique et d'un côté comme de l'autre, au Québec comme au Canada, les travailleurs sans emploi et les familles qui en arrachent vont en arracher encore plus avec le Budget du ministre des Finances.

J'ajouterais que le ministre des Finances, hier, n'a pas tout à fait dit la vérité non plus en ce qui a trait à la politique économique canadienne lorsqu'il a affirmé, sans sourire, sans coup férir, que le gouvernement canadien, son gouvernement, était très fier parce que, depuis le 26 octobre, il avait appliqué à la lettre son programme électoral contenu dans le Red Book. Lorsqu'il a parlé de la politique monétaire, il a dit, conformément à ce qui est inscrit dans le Red Book: «Nous avons changé la politique monétaire pour qu'elle ne compromette plus jamais la reprise économique.» Mais, cela aussi c'est rire à la face des contribuables québécois et canadiens. C'est une blague!

Dès décembre dernier, j'assistais à une conférence de presse où le ministre des Finances était accompagné du nouveau gouverneur de la Banque du Canada, M. Thiessen. M. Thiessen, c'est le bras droit de John Crow, l'ancien gouverneur de la Banque du Canada et le principal conseiller de John Crow. Et à ce moment-là, M. Thiessen déposait sa politique monétaire. Et quelle était-elle, la politique monétaire de M. Thiessen? C'était exactement la même politique monétaire que celle de l'administration précédente. C'est une lutte acharnée et dogmatique contre l'inflation, sans égard à l'objectif que ce gouvernement prétend défendre, c'est-à-dire la création d'emploi. Alors qu'on arrête de tromper la population et qu'on arrête de lui dire aussi que lorsque la reprise sera vraiment bien enclenchée, si jamais un jour cela se fait et ce gouvernement-là ne la compromet pas, lorsque la reprise sera vraiment enclenchée, que le gouverneur de la Banque du Canada ne nous imposera pas, comme c'est arrivé lors du premier trimestre de 1990, une médecine de cheval pour combattre des tensions inflationnistes.

Je n'ai pas compris l'argument du ministre, hier, qui disait qu'il avait changé cette politique pour tenir compte d'un objectif pondéré entre la stabilité à long terme des prix et la création d'emploi à court terme.

Une voix: Le Red Book est devenu le Blue Book!

M. Loubier: Voilà! J'ai été étonné aussi de l'absence, dans ce Budget, de mesures concrètes pour aider les entreprises et, en particulier, les petites et moyennes entreprises québécoises et canadiennes à relever le défi de la mondialisation. Encore une fois, le Red Book est trahi parce qu'on y disait que c'était la priorité, qu'on aiderait les petites et moyennes entreprises justement à se sortir de la récession et à affronter l'internationalisation des échanges, affronter la mondialisation. Et qu'est-ce qu'on retrouve là-dedans? À son habitude, le ministre des Finances ne nous a pas déçus: on ne retrouve que des voeux pieux. On ne retrouve qu'une propension à consulter, consulter, discuter, mais sans prendre de décision et sans mettre de mesures concrètes en place.

Le ministre des Finances souffre de consultationnite aiguë, comme on a l'habitude de dire. Il dit, et je le cite: «De concert avec des partenaires du secteur privé et les milieux financiers, le gouvernement s'efforcera de déterminer la meilleure façon de fournir des capitaux à long terme aux entreprises.» Le gouvernement ne prend aucune décision; il s'engage à discuter. J'ai l'impression que cela fait 30 ans-et je suis quand même jeune, mais j'ai connaissance de certaines choses-j'ai l'impression, dis-je, que depuis 30 ans, je n'entends que «consultation». Quand ce ne


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sont pas des discusions constitutionnelles, ce sont des forums à la Spicer qu'on nous organise pour décider de l'avenir du pays, pour décider de l'avenir d'une faillite technique.

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Et cela c'est un peu spécial. Je cite un autre passage du discours du Budget où on dit: «Le gouvernement entreprendra un examen approfondi [il va entreprendre un examen approfondi] des dépenses fédérales dans les domaines scientifique et technologique, afin de mettre en place une politique plus efficace d'aide à la recherche et au développement.»

Encore une fois, cela fait à peu près cinq ans que le Canada a un déficit chronique en matière de recherche et de développement, en matière de développement technologique, le nerf de la guerre pour affronter les défis de la mondialisation, et on nous dit qu'on procédera à un examen approfondi. Quelle crédibilité le ministre des Finances et ce gouvernement peuvent-ils avoir en nous présentant des choses comme celles-là.

Et c'est toujours les propos du ministre des Finances que je cite. Il ajoute: «Le ministre de l'Industrie, avec les fonds disponibles en 1994-1995, établira un programme de partenariats technologiques, qui favorisera un renforcement de la coopération entre les établissements publics et privés, de manière que les fruits de la recherche se traduisent en produits et en emplois nouveaux.» Cela fait dix ans qu'on discute sur ces aspects, cela fait dix ans qu'on n'a pas de décision et le ministre perpétue cette inertie gouvernementale.

Il me semble qu'il serait temps qu'on passe à l'action, qu'on arrête de discuter, qu'on arrête d'être autour d'une table et de tenter de développer de nouveaux partenariats. Les partenaires sont là. Les partenaires attendent que ce gouvernement sorte de son laxisme, qu'il prenne des décisions concrètes, qu'il ne compromette pas, par ses actions, par l'augmentation de la taxation, par différents détours, la reprise économique. C'est ce que les gens veulent. Et ça ne fait pas sérieux de présenter des choses comme celles-là.

Un autre point très important du Budget, que j'ai trouvé particulièrement ébranlant, hier, nous avons découvert-j'entends les rires de l'autre côté, cela ne fait pas sérieux, tout comme le Budget-donc nous avons découvert hier qui était le véritable ministre du Développement des ressources humaines, et nous nous sommes aperçus que c'était le ministre des Finances, le député de LaSalle-Émard, qui dictait à son ministre du Développement des ressources humaines que, au cours des trois prochaines années, il devrait se passer des 7,5 milliards de dollars en matière de programmes sociaux.

J'ai été ébranlé parce qu'il y a toujours une certaine confiance qui peut s'établir entre les individus, et je croyais que de l'autre côté, à certains égards, les libéraux, quand ils formaient l'opposition officielle, étaient sérieux lorsqu'ils disaient: «Il ne faut pas toucher aux programmes sociaux». Et qu'ils martelaient constamment les conservateurs en disant qu'il ne faut pas toucher au Régime d'assistance publique du Canada, qu'il ne fallait pas toucher non plus à la contribution fédérale à l'éducation postsecondaire, qu'il ne fallait pas faire ça.

Le ministre des Finances actuel, de même que l'actuel premier ministre, ont déchiré leur chemise chaque fois que les conservateurs, chaque fois que l'administration précédente parlait de toucher d'un iota les programmes sociaux. Hier, le ministre nous présente comme cela-et tout le monde riait, s'enorgueillissait de cela, tout le monde était content, tout le monde était fier-donc le ministre nous présente un plan de compressions budgétaires à cet égard de 7,5 milliards de dollars au cours des trois prochaines années.

Quelle conscience sociale ces gens ont-ils? Est-ce que c'est cela rétablir l'équité et la justice fiscale, au Québec comme au Canada? Est-ce que c'est ce qu'ils avaient en tête? S'attaquer aux victimes du sous-emploi, aux victimes de la pauvreté? C'est cela qu'ils avaient en tête? C'est proprement scandaleux.

Le chef du Bloc québécois et leader de l'opposition officielle avait raison. Lorsqu'on parle de réforme de l'autre côté de la Chambre, lorsqu'on parle de réforme des programmes sociaux, lorsqu'on parle de réforme du régime de santé, comme l'a fait le député de Hull-Aylmer, on parle de coupures. On ne parle pas d'améliorations à des régimes, on ne parle aucunement d'amélioration, on parle de coupures purement et simplement. Et hier, nous en avons eu une preuve indéniable.

En matière de logement social, c'est la même chose, la même situation. Vous savez qu'au Canada, vous le savez probablement mieux que moi, madame la Présidente, il y a 1,2 million de Canadiens-je dirais plutôt 1,2 million de Canadiennes et de jeunes enfants canadiens-qui sont en attente d'un logement social. Pourquoi sont-ils en attente d'un logement social? Parce qu'ils consacrent-parce qu'elles consacrent-entre 30 et 50 p. 100 de leur revenu au paiement du logement. Ça veut dire qu'il reste pour se nourrir, se vêtir, payer l'électricité, le téléphone, les médicaments et les imprévus, à peu près la moitié de leur revenu mensuel.

(1625)

On a eu l'occasion, il n'y a pas tellement longtemps, d'accueillir des gens du Québec, mais aussi de toutes les parties du Canada, des gens pauvres, qui sont venus nous rencontrer dans le cadre d'une manifestation. Justement, c'est l'occasion rêvée de vous souligner un fait. Il y avait cinq députés qui les accueillaient ici, à Ottawa, et c'étaient cinq députés du Bloc québécois. Il n'y avait personne du Parti libéral, il n'y avait personne non plus du Nouveau Parti démocratique.

Ces gens nous ont demandé d'être le porte-parole de leurs demandes pour exprimer en cette Chambre et à la face des Québécois et des Canadiens la misère qu'ils doivent vivre tous les jours. Nous, ma collègue des Laurentides, mon collègue d'Ahuntsic, d'autres que je m'en voudrais d'oublier, et moi-même, avons eu l'occasion de travailler avec ces gens pour les aider à calculer leur budget. Je peux vous dire qu'une fois le logement, la nourriture, les vêtements payés-et quand je parle de vêtements, ce sont quelques vêtements-une fois les médicaments pour les enfants payés, certaines de ces personnes, en particulier les familles monoparentales, avaient un déficit dans leur budget mensuel. Dans le cas d'une personne pour qui j'ai eu l'honneur de contribuer à faire son budget, le déficit était de 27 $.

Alors, encore une fois, les députés du gouvernement libéral d'en face, lorsque qu'ils étaient dans l'opposition, déchiraient aussi leur chemise lorsque les conservateurs ont dit, l'année dernière, qu'ils couperaient 600 millions dans le logement so-


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cial. Et que font-ils par l'entremise de ce Budget? Ils ne font rien, justement, pour rétablir un tant soit peu un certain espoir auprès des familles les plus démunies.

Je rappellerais au ministre des Finances, et député de LaSalle-Émard surtout, qu'à Montréal seulement le niveau de pauvreté ne cesse d'augmenter depuis dix ans. Cette ville est maintenant devenue la plus pauvre du Canada. Dans cette ville-le ministre des Finances devrait le savoir, il est un de ses représentants éminents-près de 64 000 familles consacrent plus de 50 p. 100 de leur revenu à se loger; 64 000 familles, c'est une famille sur cinq à Montréal. Ce qui en fait la ville canadienne qui compte le plus grand nombre de ménages locataires payant plus de 50 p. 100 de leur revenu pour se loger.

Ce n'est pas tout, et j'aimerais ici que le ministre des Finances lui-même, député de LaSalle-Émard, écoute. Il n'est pas là? Il m'écoute sûrement. Pardon. Je m'excuse, madame la Présidente, j'ai commis une bévue. J'aimerais que le ministre des Finances comprenne qu'à Montréal, comme je le mentionnais, 64 000 familles, un ménage sur trois, consacre plus de 50 p. 100 de ses revenus pour le logement, et 20 000 personnes se trouvent sans abri. Le ministre des Finances, comme tous les membres de son gouvernement, vont-ils fermer les yeux encore longtemps sur cette misère humaine?

Il faut en terminer avec les beaux discours et passer aux actes. Il faut que le gouvernement cesse de dire qu'il déchirerait sa chemise pour différents événements, alors qu'il accepte qu'on maintienne la décision de réduire de 600 millions le budget du logement social.

Quelques mots sur la défense nationale, parce que le ministre des Finances a relevé cet après-midi, tout comme le ministre de la Défense nationale, la position du Bloc québécois à ce sujet. Je vous dirais que les mesures prévues dans ce Budget ne sont pas ce que le Bloc québécois demandait. Et je vais vous expliquer, peut-être pour la dernière fois dans cette Chambre, ce qu'était la position du Bloc québécois en matière de budget de la Défense nationale. Le Bloc québécois préconisait une coupure de 25 p. 100 du budget de la Défense nationale. Il préconisait l'utilisation d'une partie de cette économie pour la conversion des industries militaires en industries civiles, chose qui n'apparaît nullement dans le plan budgétaire du gouvernement, du ministre des Finances. Ce n'est pas la même chose. On peut bien faire de la démagogie tant qu'on voudra, le ministre de la Défense en a fait cet après-midi, mais on ne peut nier cette demande du Bloc québécois.

(1630)

Deuxièmement, nous avons demandé et nous l'avons défendu aussi au cours de la campagne électorale, le rétablissement de l'équité dans l'attribution du budget de la Défense nationale canadienne sur le territoire québécois. À cet égard, nous avons demandé le rétablissement de l'équité avant de procéder à des coupes sombres un peu partout.

Je pourrais vous dire qu'à l'heure actuelle, et mon collègue, le critique de l'opposition officielle en matière de défense pourra me corriger si je me trompe, mais la part du budget de la Défense nationale canadienne attribuée au Québec, représente à peu près 19 p. 100, entre 17 et 19 p. 100 au maximum, alors que le poids démographique du Québec est à 25 p. 100. Et on ose nous dire qu'on devrait être d'accord avec la fermeture du seul collège militaire francophone en Amérique du Nord. C'est odieux de nous présenter de telles choses. On ne sera jamais d'accord avec cela et on peut vous assurer que dans le cas du collège militaire de Saint-Jean, vous pouvez être assurés que le Bloc québécois et ses partisans, et je pense qu'on en compte beaucoup au Québec à l'heure actuelle, feront une bataille, mais une bataille sérieuse, une bataille intense contre la fermeture du seul collège militaire francophone en Amérique du Nord.

Des voix: Bravo!

M. Loubier: Je vois que le temps file, mais on m'a dit que je disposais d'une période de temps illimité, et je trouve cela extraordinaire, mais je ne voudrais pas abuser non plus.

J'aimerais maintenant dire quelques mots sur l'aide internationale. On en a très peu parlé, alors nous allons commencer à le faire. Le Budget prévoit une réduction de 2 p. 100 du budget de l'aide internationale, donc, une réduction du budget d'environ 400 millions au cours des trois prochaines années.

Le Bloc québécois, à défaut d'augmenter ce budget, aurait demandé au gouvernement canadien que l'effort canadien en matière d'aide au développement soit à tout le moins maintenu, car nous sommes loin d'avoir atteint l'objectif de consacrer 0,7 p. 100 de notre PIB à des programmes d'aide internationale. Comme j'ai pu le constater au cours de mes années à l'emploi d'un syndicat agricole, la misère internationale en Amérique latine, tout comme en Afrique, continue de sévir et continue de sévir à un rythme croissant. Ceci n'aurait pas empêché ce gouvernement de corriger certains défauts dans l'administration des programmes de développement international, tels que véhiculés par le vérificateur général du Canada lors du dépôt de son dernier rapport. On aurait dû avoir au moins la décence de maintenir notre aide internationale, de maintenir notre propension à aider les plus démunis de la planète. Il me semble que ce n'est pas un gros effort qu'on demande à un pays comme le Canada.

Il ne faut jamais oublier que toutes les fois qu'on apprend à des habitants de pays sous-développés à pêcher, ces gens s'enrichissent, et en s'enrichissant normalement, ils acquièrent des biens et services produits au Canada. Donc, c'est de reporter une croissance possible de la demande pour les biens et services canadiens, si on le prend en termes économiques, si on le prend en termes comptables, parce que ce gouvernement ne résonne qu'en termes comptables, eh bien il faut considérer ce genre de choses. Alors, nous trouvons déplorable que l'aide internationale soit diminuée de 400 millions au cours des trois prochaines années, alors que des enfants africains et latino-américains continuent de mourir tous les jours.

Je vais maintenant conclure en disant que ce Budget ne contient rien de ce que le gouvernement aurait dû faire. Mais, en plus, ses objectifs de réduction de dépenses sont ridicules. En termes nominaux, comme je le disais au début, les dépenses ne seront pas réduites au cours des trois prochaines années. Elles vont demeurer à peu près sensiblement les mêmes.

Ce Budget ne contient pas de mesures pour redresser les finances publiques, pas de mesures sérieuses. Le Budget n'a pas de vision non plus, comme plusieurs commentateurs, depuis hier, l'ont signalé. Il n'y a aucun soutien à la création d'emploi pour redonner espoir aux 1,5 million de chômeurs au Canada et aux 460 000 chômeurs au Québec. On continue à étrangler, par la taxation, la classe moyenne, tout en frappant encore les plus démunis, en sabrant dans les programmes sociaux.


1739

(1635)

Je voudrais maintenant ouvrir une parenthèse. En relisant les mémoires de M. René Lévesque, la semaine dernière, l'idée m'est venue de mettre ces faits en lumière. Vous savez, au Québec, M. Lévesque nous a donné un bel héritage qu'on appelle le financement populaire des partis politiques. Je m'aperçois que du côté du Parti libéral fédéral, comme du côté du Parti réformiste, comme un peu partout ailleurs au Canada, il n'y a pas de régime de financement populaire. Je me suis demandé si le fait que cela n'existe pas du côté des libéraux n'est pas ce qui explique en partie que le régime des fiducies familiales qui profitent aux plus riches de cette société, les différentes évasions fiscales des grandes entreprises, ne soit pas éliminé par ceBudget.

Je suis allé chercher le rapport de l'Agence libérale fédérale du Canada qui a été déposé l'année dernière auprès du directeur général des Élections pour constater que dans les donateurs que je ne nommerai pas-c'est public, tout le monde peut le consulter-il y a des entreprises manufacturières canadiennes qui ont donné jusqu'à 68 000 $ de contributions à la caisse du Parti libéral du Canada. Ceux-là même probablement qui profitent des évasions dans les paradis fiscaux comme la Barbade et autres. J'ai pu remarquer aussi que les banques et les sociétés de fiducie, les trusts, donnaient aussi au Parti libéral du Canada un montant qui variait entre 12 000 $ et 45 000 $. Ce sont ceux-là qui gèrent les fiducies familiales.

Je me suis demandé si ce n'était pas un peu cela qui expliquait que le gouvernement d'en face, les libéraux, n'élimine pas ce genre de taxation préférentielle auprès des amis contributeurs au Parti libéral du Canada. Lorsqu'on accepte de tels dons, il faut s'attendre à avoir les mains liées lorsqu'on est à la tête d'un gouvernement. Il faut s'attendre aussi à ne pas avoir l'esprit libre de prendre les bonnes décisions, de les prendre à temps et en toute justice. Je me suis demandé si la cause n'était pas là. Mais si telle en est la cause, je trouve que c'est scandaleux. Si ce n'est pas à cause de cela, qu'on le prouve et qu'on instaure chez nos amis d'en face, à un moment donné, le bel héritage que M. René Lévesque nous a légué et qu'on a adopté, nous, du Bloc québécois.

Nous, on n'a pas les mains liées. Nous pouvons parler pour les contribuables à revenu moyen et ceux qui souffrent le plus dans notre société et nous n'avons pas à subir le diktat des grandes entreprises et des familles les plus riches du Québec et du Canada.

En conclusion, je demanderais au ministre les Finances d'enlever les bottes de travailleur que le premier ministre lui a offertes parce que je crois que le ministre des Finances en est indigne.

Je propose donc:

Qu'on modifie la motion en retranchant tous les mots suivants le mot «que» et en les remplaçant par ce qui suit:
«La Chambre dénonce la volte-face budgétaire du gouvernement qui règle le problème du déficit sur le dos d'une classe moyenne exsangue par les hausses d'impôts subies au cours des dernières années; renonce à contrôler la montée en spirale des dépenses reliées au déficit en basant son analyse fiscale sur des anticipations de revenus irréalistes; refuse de mettre fin aux échappatoires fiscales pour les mieux nantis et les grandes entreprises; abandonne les plus démunis à leur propre sort en se préparant à sabrer dans les fonds alloués aux programmes sociaux; et continue les politiques dévastatrices des gouvernements précédents en démontrant un manque de vision à long terme flagrant et n'offrant aucun espoir aux sans-emplois.»
Des voix: Bravo!

(1640)

[Traduction]

M. Ray Speaker (Lethbridge): Madame la Présidente, je vous remercie beaucoup de me permettre de prendre la parole devant cette assemblée. Je tiens tout d'abord à féliciter le ministre pour la présentation de son premier budget. Je l'encourage, toutefois, à faire mieux la prochaine fois, à se donner cela comme objectif.

Ce que j'ai à dire ici se résume, en fait, à trois choses: premièrement, examiner les aspects positifs du budget; deuxièmement, considérer la fiscalité et le déficit du budget; troisièmement, au nom du Parti réformiste, présenter à la Chambre et au gouvernement libéral des propositions sur les priorités à respecter et sur ce qui pourrait être fait pour contenir les dépenses nationales et établir une fiscalité plus responsable.

Je veux aussi féliciter ici le député de Saint-Hyacinthe-Bagot. C'est avec beaucoup d'éloquence que le député a présenté un certain nombre de propositions. Je dois dire que je ne souscris pas à certaines des solutions qui ont été proposées ici aujourd'hui, mais j'espère que, lorsque je pourrai parler français, j'aurai la parole aussi facile que le député l'a eue ici, cet après-midi.

Ce budget nous fournit, en tant que Canadiens et certes en tant que parlementaires, une première occasion de juger si le gouvernement sait tenir ses promesses. Ces dernières années, les Canadiens ont eu à subir bien des ennuis-l'inflation, d'importantes hausses d'impôt, la TPS et, certes, la récession.

Aujourd'hui, ils demandent au gouvernement une question très importante, à savoir si ce nouveau budget leur redonnera espoir, s'il allégera leur fardeau fiscal et mettra fin aux déficits chroniques que notre pays accuse depuis une dizaine d'années, déficits qui nous étouffent et qui ont freiné la création d'emplois, l'expansion des entreprises et la croissance économique au Canada. C'est la question qu'ils posent, et le gouvernement doit y répondre.

Pour être juste-et le Parti réformiste est le parti de la justice-,je dois dire que ce budget comporte des aspects positifs. Tout d'abord, je reconnais ce que le gouvernement a fait en ce qui concerne les programmes sociaux. Il a commencé à faire en sorte que ces programmes s'adressent aux personnes qui en ont le plus besoin. En ces temps difficiles, nous, réformistes, croyons que c'est un principe fondamental à respecter. Compte tenu de ce principe, nous accueillons favorablement les modifications ap-


1740

portées à la Commission de l'assurance-chômage ainsi que la suppression, pour les riches, du crédit d'impôt accordé en raison de l'âge.

Ensuite, je reconnais que ce budget prévoit des compressions modestes-non pas des compressions excessives ou du genre que nous souhaiterions, mais des compressions modestes. Si ce n'est qu'un léger avant-goût de ce que nous allons voir plus tard, c'est un bon commencement. Si ce n'est pas le cas, ce budget est très inacceptable.

(1645)

Ce que nous ne voyons pas dans ce budget, c'est un véritable plan de dépenses qui accompagnerait les compressions, et cela nous inquiète. Nous voyons ces compressions sous forme de réductions dans le secteur militaire. Je sais que le ministre parlera de cela aujourd'hui et qu'il donnera plus de détails sur certaines de ces réductions qui, nous l'espérons, seront faites de façon juste et équitable d'un bout à l'autre du Canada.

À première vue, il semble que ces réductions aient été faites de façon juste et équitable dans tout le pays, et nous en sommes bien contents. Avant la présentation du budget, nous avions peur que ces réductions ne touchent qu'une seule province ou une seule région du Canada, ce qui aurait été très injuste.

L'autre secteur où il y a des compressions modestes, c'est celui des subventions aux entreprises et des subventions régionales. Le livre rouge parlait de réductions de 225 millions à 250 millions de dollars. Elles sont inférieures d'environ 150 millions de dollars à ce qui était prévu, mais ce sont quand même des réductions.

Le troisième secteur où il y a des compressions modestes, c'est celui du fonctionnement de l'État. Nous encourageons certainement le gouvernement à poursuivre dans cette voie.

Lorsque j'ai examiné le budget et écouté le discours du ministre des Finances, certaines remarques qui se trouvent aux pages 1, 3 et 15 du discours ont attiré mon attention. Je voudrais prendre le temps de lire ces remarques à la Chambre à titre d'introduction à ce que je vais dire plus tard.

Voici ce que le ministre des Finances a dit au sujet de ce que veut le gouvernement:

Un Canada aux finances publique solides, plutôt que délabrées.
L'époque où le gouvernement faisait semblant de s'attaquer aux problèmes est chose du passé.
Nous avons besoin d'une architecture nouvelle-pour le gouvernement comme pour l'économie.
À la page 3, on peut lire ceci:

L'ère où le gouvernement imposait davantage la population pour dépenser plus est révolue.
La population nous a demandé de geler les dépenses. Nous sommes d'accord.
À la page 15, on trouve des remarques qui viennent appuyer en quelque sorte celles que j'ai déjà citées. Le ministre a dit: «L'une des raisons expliquant l'expansion de l'économie souterraine réside dans le fait que les Canadiens estiment que les impôts sont trop élevés. Nous sommes d'accord.» Il a dit cela, et je le dis aussi. Il a ajouté ceci:

Nous voulons que les Canadiens reviennent participer à l'économie légitime, et non qu'ils en sortent. Notre objectif est de stimuler la croissance et de réduire le déficit de manière que, au cours des prochaines années, les impôts puissent être allégés. Au bout du compte, la réduction du déficit sera récompensée par une diminution des impôts.
Ce sont là d'excellentes remarques. Lorsque je les ai entendues, je me suis senti comme un aigle qui vole au-dessus des prairies de l'Alberta. J'ai senti que le pays passait avant tout. Puis, en lisant d'autres parties du budget, j'ai eu l'impression soudainement que je venais de m'écraser sur la glace du lac Lost, dans le sud de l'Alberta, comme un canard. Quel changement et quelle déception!

Lorsque nous avons examiné ce discours du budget, nous en sommes venus à la conclusion que le gouvernement ne s'attaquait pas à certains des problèmes. Nous avons appelé ce budget, qui découle en quelque sorte du livre rouge, le livre à l'encre rouge. Je vais parler de cela pendant quelques instants aujourd'hui.

Tout d'abord, examinons pourquoi nous parlons d'encre rouge. Les Canadiens nous ont dit à nous et à tous les députés de la Chambre des communes qu'ils sont surtaxés. Toutefois, si nous regardons le livre à l'encre rouge. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je suis désolée. Le député ne sait peut-être pas qu'il n'est pas censé brandir son livre à l'encre rouge à la Chambre des communes.

M. Speaker (Lethbridge): Madame la Présidente, je vais certainement essayer. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je suis désolée. J'ai demandé au député de ne pas brandir le livre rouge à la Chambre des communes.

(1650)

M. Ray Speaker (Lethbridge): Merci, madame la Présidente. Je retiendrai ce rappel de la présidence.

D'après le budget à l'encre rouge qui a été présenté, les Canadiens peuvent conclure qu'il y aura une augmentation des taux d'imposition et que le gouvernement compte sur un accroissement de ses recettes pour réaliser de larges pans de son programme de réduction du déficit. C'est inacceptable.

Depuis quelques mois, les Canadiens disent qu'il faut arrêter de dépenser sans compter et éliminer le déficit tout de suite. Que dit ce livre à l'encre rouge aux Canadiens? Qu'a dit le gouvernement hier et que dit-il aujourd'hui?

Le budget comporte un déficit de 40 milliards de dollars, et il y aura de timides mesures de compression des dépenses visant à réduire le déficit. Le gouvernement dit qu'il en fait peu maintenant et que le gros de ses mesures viendra plus tard. Les vrais mesures viendront plus tard, mais pas maintenant. Si nous examinons le budget plus à fond, nous constatons que la majeure partie des compressions est compensée par de nouvelles dépenses. Nous n'avançons pas. Nous nous endettons de 40 milliards de dollars.

Les Canadiens attendaient un plan à long terme, un plan couvrant au moins toute la 35e législature. Nous offre-t-on un plan dans ce livre à l'encre rouge? Nous avons un plan en deux étapes, mais il est loin d'être à la hauteur de ce qu'attendaient les Canadiens. Ce livre à l'encre rouge ne contient aucun plan officiel de redressement de l'économie canadienne.

Les Canadiens, et c'était là le thème principal de la campagne électorale des libéraux, voulaient des emplois, des emplois et encore des emplois. Nous pouvons parcourir tous les documents qui nous ont été remis-discours du budget, plan budgétaire et documents d'accompagnement-, mais en vain, car nous n'y trouvons aucun objectif précis de création d'emplois, pas même


1741

dans les petites et les moyennes entreprises. Les chiffres donnés dans tous ces documents sont bien minces comparés aux besoins réels des Canadiens. Il n'y a rien de détaillé dans un plan qui est censé révéler aux Canadiens ce que le gouvernement a l'intention d'accomplir.

Pour résumer le plan, et c'est pourquoi je le décris comme celui du livre à l'encre rouge, le gouvernement n'a pas écouté les Canadiens en matière de fiscalité, en matière de déficit ni en matière de plan budgétaire, et, plus grave encore, il ne s'est certainement pas attaqué au problème de l'emploi.

Le ministre assure à la Chambre qu'il va le faire. Il a présenté son budget chaussé d'une paire de bottes d'agriculteur. Je vais m'exprimer bien clairement. Si quelqu'un se présentait le matin à ma ferme en se disant prêt à travailler, je l'espère, et s'il avait encore des bottes bien propres à midi, pas salies du tout, et que rien ne s'était fait, je ne le garderais pas très longtemps à mon emploi.

Il est temps que le ministre des Finances chausse ses bottes et se mette au travail, et qu'il salisse ses bottes. Il est temps que le ministre, le premier ministre et les membres de son gouvernement s'attaquent à la tâche difficile qui les attend sur le plan économique. Ils doivent faire montre d'une volonté de s'attaquer aux difficultés économiques, aux dépenses excessives, aux impôts et aux taxes élevées qui font disparaître nos entreprises d'un bout à l'autre du Canada et qui suscitent un climat de doute et de méfiance peu propice aux investissement qui devraient créer les emplois que nous souhaitons pour tous les Canadiens.

J'ai dit que je voulais parler de fiscalité et de l'attitude du gouvernement libéral à l'égard des taxes et des impôts. Il souligne dans le budget, dont le ministre était bien fier quand il l'a présenté, que pour chaque dollar de nouvelles recettes, il réduira ses dépenses de 5 $ au cours des trois prochaines années.

Quand on examine certaines des projections en matière de réduction des dépenses, on doute que le gouvernement réussisse à atteindre ces objectifs avec les politiques actuellement en place. Voilà une première critique. Voilà donc pour le premier point. Or, l'autre indicateur plus réaliste, c'est peut-être le budget présenté pour 1994-1995. D'après le discours de budget, les coupes en 1994 totaliseront 2,1 milliards de dollars, et le financement des nouveaux programmes qui vont être mis en oeuvre s'élèvera à 1,7 milliard de dollars. Il est réaliste de croire que les réductions nettes s'élèvent à 600 millions de dollars.

(1655)

Dans l'ensemble, en comparant les impôts et les réductions, on constate que, pour chaque hausse d'impôts de 1,25 $, il y a une réduction de 1 $. C'est donc tout le contraire de l'affirmation du gouvernement, selon laquelle il y a une réduction de 5 $ pour chaque hausse d'impôts de 1 $.

Ma deuxième inquiétude concernant les impôts, c'est que, à bien y réfléchir, ce budget mise sur la croissance pour obtenir des revenus d'impôts qui permettent au gouvernement de faire face à ses responsabilités. On remarque que le niveau des dépenses reste de l'ordre des 122 milliards de dollars, mais que, pour réduire le déficit, le gouvernement met tous ses espoirs dans la croissance des recettes. Il n'y a pas de mal à cela, mais il ne faut pas oublier les dépenses qui sont prévues.

Si nous regardons ce que le gouvernement conservateur a fait par rapport à sa planification, au cours de la dernière décennie, nous constatons qu'il n'a jamais pu contrôler les dépenses et qu'il ne s'est jamais occupé des priorités, de sorte qu'il a continué de dépenser. Une des principales faiblesses de ce budget, c'est qu'il nous rappelle que les jours où les conservateurs se contentaient d'imposer des taxes et de dépenser ne sont pas si loin. C'est regrettable parce que nous attendions mieux du gouvernement actuel.

Pourquoi devrions-nous nous inquiéter des impôts élevés qui ne cessent d'augmenter au Canada? Tout d'abord, on dit partout dans le monde, et le porte-parole en matière de finances du Bloc québécois l'a aussi signalé, que le Canada est le pays du G-7 qui porte le plus lourd fardeau fiscal après l'Allemagne. Quand on y songe, on s'interroge ensuite sur notre économie souterraine. Nous devons réduire les impôts.

Deuxièmement, je voudrais attirer l'attention du gouvernement sur la situation des provinces. Les provinces s'inquiètent des taxes qui ne cessent d'augmenter.

Récemment, le premier ministre du Québec, M. Johnson, déclarait qu'il fallait faire l'impossible pour éviter d'augmenter les taxes et les impôts. Dans le même article, son ministre des Finances disait souscrire à ces propos, affirmant qu'il fallait réduire les dépenses au lieu d'accroître les recettes fiscales. Tous les deux exhortaient Ottawa à maintenir les niveaux d'imposition actuels.

En Alberta, où il existe un programme très exhaustif de réduction du déficit, le premier ministre a bien l'intention d'équilibrer le budget d'ici trois ou quatre ans et de résorber le déficit. Cette initiative est fort louable.

Cependant, la tâche de la province sera d'autant plus difficile si Ottawa continue d'augmenter les taxes et de lui imposer des coûts supplémentaires. C'est au niveau fédéral que nous devons réagir de façon responsable au nouveau budget.

La quatrième chose qui m'inquiète est documentée dans un rapport du Dominion Bond Rating Service, diffusé en février 1994, qui décrit les faiblesses du secteur public au Canada. Cet organisme est chargé d'établir la cote de crédit du gouvernement fédéral. Dans le rapport, il dit deux choses: «Le nouveau problème, ce sont les recettes. A. Dans la conjoncture actuelle, il est plus difficile de générer des recettes fiscales que par le passé. B. Par rapport aux taux américains, les taux d'imposition au Canada sont élevés dans presque toutes les catégories.» Cela n'augure rien de bon pour le Canada. Nous devons le reconnaître et tenter de corriger la situation.

Je voudrais faire quelques observations sur le plan de réduction du déficit que propose le gouvernement. Je le répète, les réductions prévues sont contrebalancées par les dépenses qu'entraîneront 18 nouveaux programmes. Dans le nouveau budget, on prévoit l'examen de 15 programmes. L'expérience m'a appris que les comités ou groupes chargés d'examiner des programmes font toujours des recommandations entraînant des coûts considérables et proposent une augmentation des dépenses. J'espère sincèrement que ce ne sera pas le cas ici, mais c'est ce qui se passe en général.


1742

(1700)

Le troisième point que je tiens à faire valoir, c'est que les dépenses budgétaires sont appelées à croître, dans l'ensemble, au cours des deux prochaines années. Elles ne vont pas décroître. Il est prévu dans le budget qu'elles augmenteront légèrement. Ma foi, compte tenu de la situation actuelle, c'est plutôt scandaleux.

J'ai notamment parlé ici aujourd'hui de la Loi sur le contrôle des dépenses. J'estime que cette loi offre au moins la possibilité de fixer des repères permettant aux gens de voir si le gouvernement fait vraiment quelque chose pour réduire le déficit et les dépenses. Ma foi, le gouvernement a jugé qu'il n'avait pas besoin de cela. Il supprime les balises et il va rendre des comptes. Rien ne nous le garantit encore. Pourquoi ne pas les maintenir? A-t-il peur des objectifs?

Un autre point que je tiens à faire valoir, c'est que ce budget en deux étapes ne répond pas aux besoins. La première étape n'accomplit rien ou presque, et la seconde prévoit que l'on prenne des mesures après des études longues et coûteuses. Eh bien, ce n'est pas suffisant. Où et quand pourrons-nous atteindre ces objectifs élevés?

Le programme gouvernemental des 3 p. 100 qui vise à ramener le déficit à 25 milliards de dollars en 1996-1997 n'est pas suffisant non plus. Les Canadiens veulent quelque chose de plus concret. Cet objectif de 3 p. 100 est insuffisant pour plusieurs raisons. C'était une condition de participation au traité de Maastricht. Les pays parties à cette union économique devaient réduire leur déficit et équilibrer leur budget. C'était une condition de participation.

La réduction et la suppression de la dette constituent des priorités pour le Parti réformiste. Au cours de notre mandat, nous, réformistes, voulons être la conscience du Parlement et exiger des comptes pour toutes les dépenses qui seront faites.

Je veux proposer très rapidement l'amendement suivant:

Qu'on modifie l'amendement en remplaçant tous les mots après le mot «gouvernement» par ce qui suit:
«et regrette qu'on n'ait pas pris les mesures nécessaires pour équilibrer le budget avant la fin de la 35e législature.»
La présidente suppléante (Mme Maheu): La présidence va étudier le sous-amendement qui a été proposé et elle avisera le député dans les meilleurs délais.

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants): Madame la Présidente, je demande à la Chambre d'être indulgente.

Je voudrais poser une question au député de Lethbridge. Je peux comprendre certaines des remarques qu'il a faites. Il a été assez juste dans son analyse. Toutefois, d'après le sous-amendement que le député vient de proposer, le Parti réformiste voudrait manifestement que notre budget comporte des réductions beaucoup plus importantes.

Je veux demander au député comment il s'y prendrait pour réduire davantage le budget de la défense. Préconise-t-il aujourd'hui, à la Chambre, la fermeture d'autres installations militaires en plus de ce qui a été annoncé hier? Voudrait-il qu'on ferme des installations comme la BFC Winnipeg, la BFC Moose Jaw, la BFC Edmonton, la BFC Calgary, les centres de formation de Wainwright et de Suffield et la BFC Cold Lake? Le député peut-il répondre à cette question?

M. Speaker (Lethbridge): Madame la Présidente, je remercie le ministre de la Défense pour sa question. Le Parti réformiste a effectivement réclamé des réductions dans le secteur de la défense, d'après les chiffres budgétaires d'il y a quelque 8 à 12 mois. Les choses ont quelque peu changé depuis ce temps. Toutefois, si je ne m'abuse, nous avions parlé à ce moment-là de 25 p. 100, soit environ 2 milliards de dollars.

Compte tenu de la situation actuelle, nous appuyons les réductions faites par le gouvernement. C'est un peu comme si nous mettions la charrue devant les boeufs.

(1705)

Comme d'autres députés, je suis certain que le ministre aurait voulu pouvoir examiner d'abord la position globale du Canada en matière de défense. Puis, une fois que nous nous serions entendus sur nos objectifs, nous aurions pu nous servir du budget pour appuyer ces objectifs.

Je suis certain que, tout comme nous, le ministre aurait aimé pouvoir procéder de cette façon. Cependant, on ne peut pas toujours agir dans les conditions les plus favorables.

En ce qui concerne les réductions qui ont été faites, nous appuyons ces réductions. Je crois cependant que nous devrions nous empresser d'examiner notre politique de défense afin de pouvoir ensuite envisager d'autres réductions.

Notre caucus n'a pas analysé de façon précise la situation de chacune des bases. Je ne peux donc pas répondre à la question du ministre à ce sujet. Si j'avais des renseignements précis, oui, je m'empresserais de les communiquer au ministre, mais notre caucus n'a pas encore porté de jugement relativement à chacune de ces bases.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Madame la Présidente, j'ai une petite question pour le député. J'ai écouté avec attention ses commentaires et je trouve que ce sont des commentaires assez philosophiques, assez dans les grandes lignes. Cependant, on connaît maintenant le Budget avec précision, entre autres, que le gouvernement s'attaque-et je vais toucher à deux points seulement-à l'assurance-chômage et aux personnes âgées. On sait que le crédit d'impôt accordé aux personnes de 65 ans et plus diminuera de façon progressive à partir d'un revenu net de 25 921 $ et disparaîtra quand les revenus dépasseront 49 100 $. On sait également que le gouvernement fédéral au niveau de l'assurance-chômage, de l'éducation et de l'aide sociale va couper dans les dépenses de transfert environ 466 millions, 1,5 milliard en 1996. J'aimerais que le député dise à la Chambre si le Parti réformiste est en accord avec ce genre de mesures? Si les personnes âgées, les personnes qui vont recevoir des prestations d'assurance-chômage peuvent


1743

compter sur le Parti réformiste, qui est un parti d'opposition, pour crier haut et fort cette injustice-là. Est-ce que ces personnes peuvent compter sur l'appui du Parti réformiste?

[Traduction]

M. Speaker (Lethbridge): Madame la Présidente, pour ce qui est du régime d'assurance-chômage, le Parti réformiste croit qu'il faut tout d'abord le transformer en un véritable régime d'assurance pour qu'il s'autofinance. Ceux qui y contribueraient en retireraient les avantages. C'est la première chose.

Deuxièmement, le Parti réformiste appuie certaines mesures mises de l'avant pour éliminer le déficit actuel de 6,6 milliards de dollars du régime d'assurance-chômage. Nous croyons que les gens qui ont les besoins les plus pressants continueront de recevoir des prestations.

Pour ce qui est des transferts aux provinces au titre de l'enseignement et des soins de santé, c'est un domaine que je me proposais d'aborder au cours de mon intervention d'aujourd'hui, mais je n'ai pas pu donner notre liste de priorités.

Le Parti réformiste a déclaré très clairement que les transferts aux provinces au titre l'éducation et les soins de santé ne seraient pas réduits à des montants inférieurs à ce qui était prévu dans le budget de 1992-1993. Donc, si le gouvernement proposait aujourd'hui de réduire le montant de ces transferts à des montants inférieurs à ceux-là, nous serions inquiets.

La présidente suppléante (Mme Maheu): La présidence a étudié le sous-amendement et l'a jugé recevable. M. Speaker propose:

Qu'on modifie l'amendement en remplaçant tous les mots après le mot «gouvernement» par ce qui suit:
«et regrette qu'on n'ait pas pris les mesures nécessaires pour équilibrer le budget avant la fin de la 35e législature.»
(1710)

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants): Madame la Présidente, je suis très heureux d'avoir l'occasion de m'adresser à la Chambre en cette première journée de débat sur le budget de 1994 et sur ses répercussions, notamment en ce qui concerne le ministère de la Défense nationale.

Depuis quelques semaines, nous semblons être constamment saisis de questions de défense. Nous avons tenu un débat sur notre mission de maintien de la paix dans l'ancienne Yougoslavie, ainsi que sur les essais de missiles de croisière au Canada. Il y a également eu un débat la semaine dernière sur l'établissement d'un comité mixte spécial chargé d'étudier notre politique de défense. Bien entendu, on a posé de nombreuses questions à la Chambre relativement à quelques-uns de ces sujets.

Manifestement, on s'intéresse beaucoup au Canada à notre politique de défense.

[Français]

Pourquoi un tel intérêt? C'est parce que le gouvernement entend tenir les promesses qu'il a faites aux Canadiens au cours de la campagne électorale. En particulier, celle de procéder à un examen de la politique de défense et de réduire substantiellement le budget de la Défense nationale.

Le moment est venu de remplir nos promesses, et c'est ce que nous faisons. C'est pourquoi nous avons pris des mesures importantes pour mettre en oeuvre le programme économique énoncé dans le livre rouge. Si vous le voulez bien, je commencerai par notre programme économique.

La priorité numéro un du gouvernement consiste à redresser l'économie canadienne. Le gouvernement a indiqué qu'il était déterminé à s'attaquer à l'énorme déficit fédéral. En même temps, il nous faut relancer l'emploi et la croissance économique. Notre politique est fondée sur ces deux impératifs et elle se traduit par un programme qui comporte deux volets, d'une part, la création d'emploi et la relance économique et, d'autre part, une intervention décisive pour maîtriser la dette et le déficit.

[Traduction]

Sur le plan budgétaire, nos objectifs sont très ambitieux mais réalistes. Cela nous distingue de nos collègues réformistes. En effet, comme le député de Lethbridge vient de nous le préciser, son parti souhaiterait mettre en place un régime de réduction du déficit qui, selon nous, plongerait le Canada dans une dépression économique en règle s'il fallait mettre en oeuvre les mesures que ses collègues et lui prônent pour réduire le déficit durant la présente législature.

Au lieu de cela, notre gouvernement entend ramener le déficit fédéral à un niveau plus réaliste, soit 3 p. 100 de notre produit intérieur brut, durant notre premier mandat. Il faudra pour ce faire exercer un contrôle très strict sur les dépenses publiques dans tous les ministères. Afin de stimuler la croissance de l'emploi, qui est l'autre aspect du problème que le Parti réformiste semble oublier, nous allons agir sur plusieurs fronts à la fois.

Ainsi, de concert avec les provinces, nous avons lancé un programme de travaux publics afin de rénover notre infrastructure nationale. Durant la dernière campagne électorale, le Parti libéral a promis de réduire de 1,6 milliard de dollars sur quatre ans, à compter du 1er avril de cette année, les sommes consacrées à la défense. La majeure partie de l'argent économisé hier, dans le budget, servira bien entendu à notre programme national d'infrastructure.

D'une part, nous sabrons dans le budget de la défense et, d'autre part, nous prenons l'argent ainsi économisé pour le réinvestir dans notre programme d'infrastructure qui vient d'entrer en vigueur et qui fera sentir ses effets dans toutes les régions du pays.

Le député de Lethbridge soulève une question fort intéressante. J'en ai parlé la semaine dernière, mais je voudrais revenir là-dessus. Pourquoi avons-nous procédé aux compressions en question dans notre budget d'hier sans attendre les résultats de


1744

l'examen de notre politique de défense? C'est une question tout à fait légitime, et je vais répéter la réponse que j'ai donnée la semaine dernière.

Dans un monde parfait, on analyse ses priorités et sa politique et on voit ensuite l'argent dont on dispose pour mettre en oeuvre cette politique, puis on l'applique. Nous ne vivons cependant pas dans un monde parfait. Comme le député de Lethbridge en est conscient, j'en suis persuadé, le fait est que notre endettement devient tout à fait alarmant. Le déficit a atteint des proportions astronomiques. Il est beaucoup plus élevé que nous ne le pensions lorsque nous sommes arrivés au pouvoir. Le ministre des Finances l'a très bien dit. Ainsi, nous avons dû agir très rapidement.

Nous avons reconnu tout cela avant la dernière campagne électorale. Je ne brandirai pas à nouveau le livre rouge; c'est inutile. Il est devenu un point de référence dans le domaine du discours politique au Canada et passera à l'histoire comme l'un des grands documents politiques de tous les temps.

(1715)

Nous avions énoncé dans le livre rouge un programme visant à réduire de 1,6 milliard de dollars, comme je l'ai mentionné, les dépenses de la défense à compter du 1er avril. Nous ne pouvions pas attendre un examen de la politique de défense. Il a fallu du temps simplement pour instituer le comité. La rentrée parlementaire n'a eu lieu qu'en janvier. Nous avons dû débattre de la motion. Nous avons été étonnés de voir l'opposition officielle forcer la tenue d'un vote par appel nominal sur la motion lorsque nous avons été appelés à nous prononcer cet après-midi, parce que les députés de l'opposition s'opposent à la participation du Sénat bien que, il faut le reconnaître à leur crédit, ils soient disposés à participer après avoir exprimé leur point de vue contre le Sénat.

Nous venons donc tout juste de mettre un comité sur pied, mais le ministre des Finances avait à agir. Il lui fallait démontrer aux Canadiens et aux marchés financiers que nous savons où nous allons en ce qui concerne les finances de notre pays. Il en est résulté que ces compressions budgétaires devaient s'appliquer dès maintenant.

Pour préserver l'intégrité du processus en faveur duquel nous avons voté cet après-midi, je dirai au député de Lethbridge que nous avons réduit le budget de la défense de manière à ne pas en affaiblir les capacités opérationnelles. Autrement dit, nous avons pris les décisions difficiles. Les députés le constateront dans les jours à venir quand se révélera tout l'impact du budget. Nous avons pris des décisions difficiles concernant la fermeture de bases et d'autres installations militaires. Il y aura en tout 21 fermetures de bases et autres réductions de services que les gouvernements précédents ont négligé de faire.

Pendant dix ans, les conservateurs ont gouverné ici au milieu du plus grand essor économique d'après-guerre, mais ils ne se sont pas occupés des décisions difficiles à prendre touchant les infrastructures militaires excédentaires. Ils n'ont tout simplement rien fait, et ont ainsi imposé à la présente législature les conséquences de leur incurie, soit un déficit atteignant l'an dernier 45 milliards de dollars. Ils devraient avoir honte.

Ils en ont cependant payé le prix lors des dernières élections, et voilà pourquoi ils ne sont plus que deux à siéger à la Chambre. Je n'en suis pas si sûr à propos de la député de Saint John. Elle a voté avec nous plus souvent qu'avec le Parti conservateur. Elle sait peut-être quelque chose que le reste des Canadiens ont compris lors des dernières élections. Les conservateurs ont été pénalisés peut-être irrévocablement pour le tort qu'ils ont causé au pays. Ils auraient dû prendre ces décisions difficiles au lieu de nous en laisser le soin.

Cela a été déchirant pour nous, de ce côté-ci de la Chambre, car la plupart des fermetures se feront dans des circonscriptions représentées par des députés libéraux. Il est plutôt difficile pour eux de retourner chez eux à Cornwallis, à Shelburne, à Gander ou à Chatham. Cela est difficile même pour le ministre de l'Industrie ici à Ottawa et pour ceux d'entre nous qui viennent de la région de Toronto. Je vois certains de mes collègues ici de Don Valley-Nord, de High Park, de Rosedale, ils sont tous ici. Nous devons retourner dans nos circonscriptions et expliquer la suppression de 1 000 emplois à Toronto. Nous ne nous déchargeons pas de nos responsabilités sur l'opposition. Nous les assumons, comme les conservateurs auraient dû le faire au cours des dix dernières années.

Si nous n'avions pas procédé ainsi, il nous aurait fallu aller puiser dans le budget des forces de combat. Nos avions ne pourraient voler, et nos frégates, qui font l'admiration du monde entier, et tout particulièrement de nos voisins du sud, ne pourraient naviguer. Elles ne pourraient s'éloigner des Grands Bancs, car nous n'aurions pas les fonds nécessaires pour les exploiter. Nous enverrions en Bosnie des soldats chargés du maintien de la paix qui, fort heureusement, n'ont pas à faire feu trop souvent, mais nous serions peut-être obligés de les envoyer là-bas sans munition. Je plaisante un peu, mais le fait est que nous n'aurions pu respecter nos engagements internationaux si nous avions sabré le budget des forces de combat. Nous avons donc pris des décisions difficiles.

Lorsque l'examen sera terminé, nous aurons au moins des forces militaires dont nous pourrons être fiers. Malgré ces réductions, l'effectif de combat verra son nombre augmenter d'environ 2 500. Le nombre de militaires en uniforme passera de 76 000 à 66 700, mais en raison des économies ainsi réalisées, nous augmentons de 2 500 personnes notre effectif de combat, en prévision de nos engagements futurs. C'est là une bonne méthode de gestion, et je crois que les Canadiens l'apprécient.

Certains demanderont peut-être pourquoi le gouvernement ferme des bases et supprime des emplois au lieu de simplement réduire les dépenses en capital. Je n'aime pas le dire, mais le gouvernement dont je faisais partie au début des années 70 a adopté cette ligne de conduite. Il a maintenu ses dépenses en capital à un faible niveau, ce que nos alliés de l'OTAN et nos militaires n'ont certes pas apprécié. C'est comme le reste. Si vous n'entretenez pas votre voiture et si vous ne peignez pas votre maison, vous devrez un jour ou l'autre le faire, mais cela vous coûtera plus cher parce que vous devrez soit acheter une nouvelle voiture, soit faire des réparations majeures, comme j'ai dû faire cette semaine pour ma voiture après ce dur hiver.

(1720)

Nous n'avons pas supprimé les projets d'immobilisations. Les députés voudraient-ils que nous supprimions la commande de transports de troupes blindés qui sont maintenant construits à London, en Ontario, par General Motors qui, en raison de l'importance de la commande, peut produire et vendre 800 de ces transports à l'armée américaine, ce qui fait entrer des devises au Canada et procure des emplois non seulement au sud-ouest de


1745

l'Ontario, mais encore à d'autres parties du pays qui produisent des pièces? Est-ce que c'est que veulent les députés? Je ne pense pas.

Comme je l'ai demandé à certains de mes collègues de la côte est: «Voulez-vous que nous annulions le contrat de construction du navire de surveillance côtière au coût de un milliard de dollars, ce qui tiendra les chantiers maritimes de Halifax occupés pour les prochaines années?» C'est du travail qui profite à d'autres entrepreneurs et qu'on pourrait appeler à valeur ajoutée. Non.

[Français]

Je m'adresse particulièrement aux députés du Bloc québécois, l'opposition officielle en cette Chambre, et je leur demande s'ils veulent l'annulation du contrat de construction du nouveau centre d'approvisionnement à Montréal.

[Traduction]

Nous allons construire un centre d'approvisionnement ultramoderne à Montréal dans les circonscriptions représentées par le Bloc québécois. Nous ne faisons pas de la basse politique. Nous pensons d'abord aux intérêts du Québec dans cette affaire.

Veulent-ils que les réductions de 25 p. 100 dont ils ont parlé soient appliquées de cette façon, en annulant un contrat informatique de 270 millions de dollars, dont une bonne partie va être dépensée au Québec? Veulent-ils que nous ne consolidions pas les mécanismes d'approvisionnement à Edmonton et à Montréal? J'aimerais avoir une réponse à ces questions.

Pendant que j'y suis, je voudrais citer les propos qu'un député de l'opposition officielle a tenus pendant la période des questions d'hier. En fait, ces propos sont tellement édifiants que je veux les relire. Mais avant, je voudrais lire un extrait du compte rendu d'hier.

[Français]

Je cite l'honorable député de Saint-Hyacinthe-Bagot, qui vient de terminer son discours, lors de sa réplique au discours sur le Budget, hier, en cette Chambre: «J'ai l'impression que ce gouvernement vit sur une autre planète, qu'il n'a pas conscience de l'endettement excessif du Canada, cet endettement qui lui donne la première place un peu partout en termes de mauvaises performances.»

[Traduction]

Ils disent que nous vivons sur une autre planète et que nous faisons comme si la dette n'existait pas. Or voilà que, cet après-midi, ils nous critiquent parce que nous faisons des réductions dans la province de Québec.

Le député d'en face, le porte-parole de l'opposition, est un vrai bon gars, mais voici ce qu'il a dit à la Chambre des communes le 17 février.

[Français]

Je cite l'honorable député de Charlesbourg: «Malgré tout ce remue-ménage, les infrastructures de la défense sont encore beaucoup trop grosses, compte tenu du volume de ses troupes. Alors que le personnel militaire des Forces armées canadiennes atteint à peine 78 000 militaires, les infrastructures de l'armée à travers le Canada sont suffisantes pour accueillir environ 140 000 soldats. Il va de soi que de nouvelles coupures s'imposent, d'autant plus que plusieurs bases militaires»-plusieurs bases militaires, madame la Présidente!-«sont désuètes et qu'elles coûtent de plus en plus cher à entretenir.»

Mais pas au Québec. Non, non, pas au Québec! Ah, mon confrère, surtout pas au Québec! Coupez à travers tout le pays, mais pas au Québec! C'est le genre de propos que tient le Bloc québécois.

Je continue ma citation, madame la Présidente: «Enfin, leurs fonctions stratégiques ne sont plus les mêmes que lorsqu'elles furent construites, de sorte que tous ces éléments obligent le gouvernement à faire un choix et à imposer une nouvelle vague de fermetures.» Voilà les propos que tenait le critique de l'opposition officielle en matière de défense nationale et d'affaires étrangères.

J'aimerais citer un autre commentaire, celui du député de Verchères, lors du même débat, le 17 février: «Au cours des dernières élections et depuis le 25 octobre, le Bloc québécois a maintes fois réitéré son soutien ferme à des coupures dans le budget du ministère de la Défense nationale. En dépit du contexte international dont je viens de faire état, nous croyons qu'il serait possible d'effectuer des coupures d'environ 25 p. 100 dans le budget du ministère de la Défense nationale, sans affecter d'une façon dramatique le fonctionnement de cet important ministère.» C'est ce qu'il a dit à la Chambre, madame la Présidente.

(1725)

Si on effectue des coupures dans le budget militaire, et nous l'avons annoncé hier, le résultat en est la diminution du nombre de soldats et d'officiers dans l'armée et dans les autres forces canadiennes. C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas besoin des trois collèges militaires. Mais je dis aux députés là-bas d'être honnêtes en cette Chambre. Il ne s'agit pas que du Collège militaire royal de Saint-Jean, au Québec, mais aussi du Royal Roads à Victoria, en Colombie-Britannique. Nous essayons d'être justes envers la population québécoise et envers tous les autres Canadiens.

Une voix: C'est triste!

M. Collenette: Nous avons effectué des coupures, et c'est triste en effet. Quand j'étais député il y a 10 ans, j'ai étudié la langue française au Collège militaire royal de Saint-Jean, et cela m'attriste de fermer ce collège. Comme je l'ai dit à la période des questions orales, il y aura un collège militaire à Kingston, un collège militaire national, pour tous les Canadiens, afin de parler les deux langues officielles, et tout sera dans les deux langues officielles. Là, il ne veut pas croire ça.

[Traduction]

Ces gens-là disent une chose tous les soirs aux nouvelles au Québec. Et je regarde les bulletins de nouvelles du Québec. Ils disent une chose là-bas et une autre ici. Leur idée du Canada n'est pas la même que la nôtre.

Le député de Charlesbourg, à l'instar de ses collègues, dit qu'on ne peut avoir de collègue bilingue parce qu'il serait à l'extérieur du Québec. Que fait-il du million de francophones qui vivent à l'extérieur du Québec? Ne tient-il pas compte d'eux? Je ne me fâche pas souvent, mais quand j'entends ce genre de propos partisans je ne puis m'empêcher de réagir. En tenant ce genre de propos, ils n'ont qu'un but: détruire notre pays. Nous ne voulons pas nous prêter à ce jeu-là.


1746

Avant de me fâcher complètement, je voudrais dire que je trouve vraiment déplorables certains des propos hypocrites que nous avons entendus au sujet de la fermeture du collège militaire au Québec.

[Français]

M. Crête: Madame la Présidente, je soulève une question de privilège.

La présidente suppléante (Mme Maheu): L'honorable député de Kamouraska-Rivière-du-Loup soulève une question de privilège.

M. Crête: Madame la Présidente, le ministre de la Défense nationale nous prête des propos que nous n'avons nullement tenus. Il fait de l'interprétation. Je ne parle pas de la lecture des discours, mais des discours où il nous accuse de faire de la rhétorique. Nous sommes en situation. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette de faire savoir à l'honorable député que cela ne constitue pas une question de privilège. Je cède donc la parole au ministre.

[Traduction]

M. Collenette: Madame la Présidente, il y a pire que d'être accusé de donner dans la rhétorique.

Je voudrais revenir aux choses sérieuses. Comme je l'ai dit, la décision d'hier a été déchirante. Quelque 16 500 personnes appartenant à l'effectif des Forces canadiennes seront graduellement licenciés au cours des quatre prochaines années, une situation tragique pour bon nombre. Nous nous sommes en quelque sorte immiscés dans la vie de bien des Canadiens. Je crois que nous devons, en tant que députés, nous montrer sensibles au sacrifice que feront tous ces gens.

Nous tavaillons actuellement à mettre en place un régime très généreux à l'intention de nos militaires et de nos civils. Parmi les mesures offertes aux militaires, mentionnons la pension, des rentes et des stages de formation. Quant aux civils, ils bénéficieront d'un genre d'indemnité de départ, de crédits à la formation et de tous les avantages prévus dans le Programme de réaménagement de l'effectif. Nous avons discuté de ces questions avec nos syndicats et nous espérons qu'ils collaboreront avec nous. Je reconnais que la pilule ne sera pas facile à avaler.

Lorsqu'ils auront pris connaissance du tableau d'ensemble et constaté tout ce que nous essayons de faire pour les gens qui sont ainsi privés de leur emploi, les députés constateront que nous avons fait preuve de la plus grande équité possible, compte tenu de la situation financière du gouvernement.

Pour ce qui est des communautés touchées, nous avons un sérieux problème dans certaines régions. J'en ai parlé à mes collègues de South West Nova, de Miramichi, de South Shore et de Gander. Ce sont des régions pauvres. On y trouve très peu d'industries. Ces installations étaient de trop. Rien ne pouvait justifier de les maintenir ouvertes. Nous travaillerons avec les députés. Nous travaillerons avec les premiers ministres des provinces, notamment ceux des trois provinces atlantiques touchées, M. Wells, M. Savage et M. McKenna, afin de trouver une utilisation à ces installations.

(1730)

Comme je l'ai dit la semaine dernière, il n'y a pas de solution magique. Nous n'avons tout simplement pas d'argent à jeter par les fenêtres, comme l'a fait l'ancien gouvernement dans le cas de la base Summerside. Une fois ces mesures mises en oeuvre, nous allons avoir des effectifs militaires extrêmement réduits et efficaces. Tous les Canadiens en seront fiers. Dans l'intervalle, nous devons essayer d'atténuer les conséquences que va avoir la fermeture des bases en cause.

Dans quelques mois, quand l'examen de la politique de défense sera terminé, les Canadiens seront contents de voir comment seront utilisés les fonds consacrés à la défense et de constater le rendement que nous pouvons tirer de l'argent des contribuables, tant à l'échelon national qu'à l'échelon international. J'espère que ce qui se dégagera de cet examen sera une politique bien réfléchie, bien conçue, une politique que nous pourrons nous permettre.

Encore une fois, en agissant comme nous l'avons fait ces derniers jours, nous avons préservé l'essentiel de nos forces, des effectifs militaires très réduits, mais aussi très professionnels et très efficaces, une armée bien équipée pour aller à l'étranger et défiler aux côtés des meilleures armées. Nous aurons des effectifs militaires fiers et dignes de la tradition militaire canadienne.

Pour terminer, je voudrais vous répéter ce qu'a dit le chef de l'état-major de la défense, qui nous est extrêmement reconnaissant des efforts qui ont été faits, en particulier des sacrifices de ceux qui vont perdre leur emploi, et qui sait gré aux forces du pays de leur compréhension.

[Français]

Les Forces qui travaillent dans les deux langues officielles.

[Traduction]

Ces forces, qui font partie intégrante du tissu de notre nation et qui travaillent à l'unification de notre pays, vont réussir à surmonter ces temps difficiles et à envisager l'avenir sous un jour meilleur.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest): Madame la Présidente, je tiens à dire, tout d'abord, qu'avant d'être député réformiste, je suis Canadien et très fier de l'être. J'espère que le budget présenté par le ministre des Finances fonctionnera bien. Il s'agit de notre pays, et nous avons besoin de faire front commun. La plupart d'entre nous ici sont des Canadiens et ont l'intention de le rester jusqu'à la fin de nos jours.

Dans ce budget, le ministre de la Défense nationale a expliqué les problèmes qu'il a eus à décider des réductions qu'il devait effectuer. Je pense que, dans l'ensemble, ces réductions ont été justes. Le ministre a tout à fait raison de dire que ces décisions auraient dû être prises il y a dix ans. Si elles avaient été prises dix ans plus tôt, la situation aurait été beaucoup moins difficile aujourd'hui. Je tiens personnellement à féliciter le ministre de l'excellent travail qu'il a accompli à cet égard.

Je voudrais poser une question à propos des prévisions budgétaires. Le budget se fonde presque exclusivement sur une augmentation des recettes. Il se fonde sur une augmentation des


1747

recettes d'environ 15 p. 100 sur une période de deux ans, après une année, l'an dernier, où il y a eu une diminution de 5,6 p. 100.

Personnellement, chaque fois que j'ai eu des problèmes dans mon entreprise, la plupart des banquiers disaient que très souvent, lorsque des entreprises ont des problèmes, c'est qu'elles prévoient des recettes trop élevées et des dépenses trop faibles. Selon les prévisions, les dépenses sont censées n'augmenter que de 0,3 p. 100 au cours de la même période.

Le ministre pourrait-il me dire si, dans une période de déflation comme celle que nous connaissons maintenant-car je pense que nous sommes dans une période de déflation-, nous avons envisagé des mesures pour empêcher notre situation financière de se détériorer davantage advenant que les recettes ne sont pas aussi élevées que prévu?

(1735)

M. Collenette: Madame la Présidente, je ne suis pas sûr d'être qualifié pour répondre à cette question. Je suis quelque peu préoccupé par un ministère dont le budget va être amputé; le ministre des Finances devrait s'en occuper.

Je pense qu'il est convaincu que ses prévisions sont exactes et qu'elles se réaliseront, et que le scénario apocalyptique auquel fait allusion mon ami dans sa question ne se concrétisera pas.

J'aimerais ajouter que je le remercie de ses commentaires, dans la pure tradition des débats parlementaires, et de la compréhension dont il a fait preuve à l'égard des difficiles décisions que nous avons dû prendre pour réduire le budget de la défense.

[Français]

M. Claude Bachand (Saint-Jean): Madame la Présidente, j'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos du ministre. Il me semble qu'il y a certains chiffres ou certains détails sur lesquels il n'est pas passé ou est passé très rapidement, car je ne les ai pas entendus.

Avant de m'engager dans ma question, je voudrais seulement qu'il convienne avec moi qu'en ce qui concerne le nombre de bases au Québec, le nombre de collèges, les infrastructures, on a toujours été un peu dévalués. Il n'y a pas d'équité entre ce qui se passe au Québec et ce qui se passe dans le reste du Canada.

La politique de la Défense nationale à cet effet, depuis plusieurs années, était de compenser cette iniquité par des contrats militaires intéressants qui venaient compenser le manque d'infrastructures militaires que nous avions au Québec.

Le contexte international a changé, et on a une preuve ici que le Bloc québécois ne soulève pas de vagues quand il y a une abolition de contrat, comme dans le cas des hélicoptères, car on sait très bien que ce contrat devait être dévolu en grande partie à Montréal. Pourtant, on aurait peut-être aimé que cet argent soit placé ailleurs, mais on ne s'est jamais opposés au fait de couper le contrat comme tel.

Il y a eu aussi la nouvelle façon de répartir ces contrats à travers le Canada. Quoi qu'il en soit, aujourd'hui, le ministre peut-il confirmer les chiffres que je vais lui citer? Que le Québec a seulement 13,8 p. 100 de l'ensemble des infrastructures du Québec? Que le Québec a seulement 15,8 p. 100 de l'ensemble des dépenses de la Défense nationale au Canada et pourtant on représente 25 p. 100 de la population?

Ce sont des chiffres sur lesquels je ne l'ai pas entendu. Qu'il puisse fermer des bases ou des collèges au Québec, couper ne fut-ce que 5c. ou un dollar, il se trouve à accentuer cette iniquité à l'égard du Québec.

Les chiffres que j'ai avancés, 13,8 p. 100 d'infrastructures militaires, 15,8 p. 100 de la dépense qui est accordée au Québec alors que nous avons 25 p. 100 de la population, s'il me confirme ces chiffres, ne peut-il pas convenir qu'il se trouve à accentuer l'iniquité à l'égard du Québec dès qu'il entreprend des coupures budgétaires au Québec?

M. Collenette: Madame la Présidente, je ne sais pas si j'ai le temps de faire une longue réponse au député, mais il a raison de dire que le pourcentage du budget militaire dans la province de Québec est plus bas, simplement à cause du fait qu'il y a eu beaucoup de construction durant la Seconde Guerre, dans les provinces Maritimes.

Je dois souligner que le pourcentage du budget militaire, au Québec, après ce Budget, a en effet été augmenté à cause des grandes coupures effectuées dans le reste du pays. Il était de 19 p. 100 hier alors qu'il est de 22 p. 100 aujourd'hui, et ce, malgré la fermeture du Collège militaire de Saint-Jean et d'une partie de la base.

J'apprécie ses arguments à l'effet que le Québec est défavorisé, mais c'est à cause de sa situation géographique au Canada. Si nous avions coupé 25 p. 100 de plus, si l'on veut, cela aurait donc voulu dire que nous aurions fermé la base de Valcartier, à Québec, ou peut-être Bagotville. Si on avait suivi les directives du Bloc québécois avec des coupures de l'ordre de 25 p. 100, il y aurait eu des coupures plus sévères.

(1740)

Ce n'est pas une bonne situation pour le Québec, mais ce ne l'est pas plus pour aucune autre province, surtout pour les provinces de la région atlantique. Je pense que les Québécois vont apprécier d'avoir fait leur part dans la bataille contre le déficit avec la diminution du budget militaire.

[Traduction]

M. Jay Hill (Prince George-Peace River): Madame la Présidente, je remercie le ministre de ses observations et j'ai été ravi d'écouter sa déclaration.

Pour reprendre ses propos, il faut conserver les éléments vitaux de la défense et, à l'avenir, nos forces militaires seront affinées, mais efficaces. Pourtant, après les élections, le gouvernement a pris la décision difficile de supprimer le contrat d'achat des hélicoptères EH-101, mais le livre écrit à l'encre rouge ne semble faire aucune mention des coûts d'annulation de ce contrat. Il ne semble pas mentionner les coûts de remplacement de ces hélicoptères. De toute évidence, si nous voulons avoir des forces militaires affinées, mais efficaces, il faudra remplacer ces hélicoptères. Or, cet exposé budgétaire ne semble associer aucun coût à ce matériel.


1748

Où sont ces prévisions des coûts et pourquoi ne font-elles pas partie des coûts prévus par le gouvernement?

M. Collenette: Madame la Présidente, les coûts d'annulation du contrat d'achat des EH-101 seront imputés au budget général et heureusement pas au budget de la défense. Le président du Conseil du Trésor pourrait peut-être aborder cette question lorsqu'il déposera le budget des dépenses. Cela sera alors très clair.

Le député a également demandé ce que nous allons faire pour remplacer les EH-101. C'est l'examen de la politique de défense qui déterminera si nous devrions nous doter de ce matériel. Je présume que ce sera le cas, parce que nous avons besoin d'un appareil de recherche et de sauvetage. Les vieux Sea King feront l'affaire jusqu'à la fin du siècle, mais il faudra les remplacer par la suite.

De toute évidence, le ministère devra puiser dans ce budget très réduit pour procéder à ces remplacements. Non seulement nous avons fait des coupes sombres de 7 milliards de dollars hier, qui viennent s'ajouter aux 14 milliards retranchés par les conservateurs mais, avec ce budget, nous devons financer les activités courantes de même que l'achat de nouveau matériel, par exemple, dans quelques années, en remplacement des hélicoptères Sea King, probablement par des appareils qui existent déjà sur le marché.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier): Madame la Présidente, le 22 février 1994 va demeurer, à la Chambre des communes du Canada, la date des promesses bafouées et de l'espoir trompé. Un certain nombre de Québécois et beaucoup de Canadiens ont cru aux promesses du chef du Parti libéral qui promettait des «jobs, jobs, jobs». Malheureusement pour eux, ce n'était qu'un slogan flamboyant, mais un slogan, tout de même, de campagne électorale.

Promesses bafouées, espoirs trompés par un parti qui promettait la rupture avec les politiques et la gestion conservatrices, dont ce budget éclaire violemment la continuité et même le renforcement des politiques monétaires, budgétaires, économiques et sociales telles que pratiquées par le précédent gouvernement.

Le discours sur le Budget démontre clairement que ce gouvernement n'a pas l'ombre d'une volonté politique de s'attaquer au chômage. Il n'a aucune politique d'emploi à part quelques artifices comme le programme des infrastructures qui, pendant deux ans, pour tout le Québec, ne voudra dire qu'environ 15 000 emplois non permanents. Pire encore, ce gouvernement, au lieu de s'attaquer au chômage, s'attaque aux chômeurs et aux personnes les plus vulnérables de notre société. Le ministre des Finances a annoncé en effet sans aucune gêne et immédiatement, qu'il entend couper dans les programmes sociaux afin de récupérer d'ici 1996-1997 plus de 7,5 milliards de dollars.

Considérons ces éléments les uns après les autres. Au niveau de l'emploi, non seulement le gouvernement n'a pas de politique d'emploi, mais il a nui et ce, gravement, à l'emploi.

(1745)

Il faut en effet rappeler que ce gouvernement, dès le mois de janvier, s'est empressé d'augmenter les taux de cotisation à l'assurance-chômage, effectuant une ponction fiscale supplémentaire de 800 millions auprès des entreprises et des travailleurs. Le ministre des Finances s'est payé le luxe de reconnaître, comme le Bloc québécois l'avait dit à plusieurs reprises, qu'un tel type de taxe sur la masse salariale décourage l'emploi, nuit à l'emploi, aux entreprises qui comptent sur un grand nombre de travailleurs plutôt, par exemple, que sur la technologie.

Comprenons-nous bien. Si le ministre s'est payé le luxe de dire ces choses, il n'a pas cependant diminué immédiatement cette taxe dont il disait qu'elle était mauvaise pour l'entreprise et l'emploi. Il l'a laissée durer pendant toute l'année 1994. Et ce n'est que l'année prochaine, une fois qu'elle aura produit 800 millions de dollars provenant de la poche des travailleurs et des entreprises, qu'il la ramènera au niveau de 1993. Mais il l'a ramènera, non seulement quand elle aura rapporté 800 millions, mais également quand elle l'aura fait à même la diminution des bénéfices dus aux travailleurs.

C'est ainsi que cette mesure s'ajoute non seulement à celles qui ne produisent pas, qui n'aident pas à l'emploi, mais elle s'ajoute à celle qui lui nuisent. Ce n'est pas pour rien que le ministre des Finances prévoit dans le Budget qu'au cours des deux prochaines années, le chômage ne passera que de 11,2 p. 100 en 1993, à 10,8 p. 100 en 1995. On sait que Mme Campbell, en début de campagne électorale, a payé cher de tenir des propos semblables. C'était inadmissible en campagne électorale.

Parlons maintenant de l'assurance-chômage. Selon les prévisions du ministre, c'est plus de 5 milliards qu'il ira chercher au chapitre de l'assurance-chômage. Voyons quelles sont les mesures et voyons quelles sont les personnes qui vont écoper. En augmentant le nombre de semaines minimales de travail donnant droit à l'assurance-chômage-notamment, pour une première fois, cela prendra 40 semaines qui donneront droit à 20 semaines-et en réduisant la durée des prestations, le ministre des Finances condamne plusieurs des citoyens, particulièrement dans les régions déjà défavorisées et parmi les clientèles qui ont déjà le plus de problèmes, à l'assistance sociale. Par le fait même, le ministre refile les coûts aux provinces parce que l'emploi ne sera pas là. Il appauvrit encore davantage ceux qui sont déjà dans une situation difficile.

C'est là une contradiction parfaite avec le discours officiel qui est celui de dire: Il faut combler le gouffre entre les classes sociales dont les revenus s'écartent de plus en plus. Le ministre des Finances, par contre, se dit tout fier d'annoncer que des mesures spéciales ont été prises à l'endroit des personnes les plus démunies. Ainsi, il est en effet tout heureux de dire que les personnes qui gagneraient 390 $ par semaine et qui auraient des personnes à leur charge auraient droit à 60 p. 100 du revenu industriel moyen. Pourtant, ces personnes sont déjà dans une situation où elles ne recevront pas plus de 234 $ par semaine de prestations. Il s'engage à augmenter à 60 p. 100. Voyons dans quelles conditions. C'est important, on ne l'a pas encore mis en lumière.

Il ne faut pas oublier qu'au Québec, et sans doute dans d'autres provinces, on a vécu à l'aide sociale les situations des femmes, chefs de famille, ayant charge d'enfants qui ont eu à subir des


1749

vexations, une véritable inquisition dans leur vie privée et qui n'avaient droit à de tels bénéfices que parce qu'elles avaient des enfants à leur charge. Alors, quand le ministre aborde cette notion d'enfants à charge dans les prestations d'assurance-chômage pour s'autoriser à baisser les prestations de tout le monde de 57 à 55, se rapprochant ainsi du niveau des États-Unis, quand le ministre s'en autorise pour dire que c'est généreux, car nous pensons aux personnes les plus démunies, en fait, il nous ramène à des temps haïs où les femmes étaient obligées de faire la preuve qu'elles méritaient bien, par leur vie privée, d'être reconnues comme des femmes indépendantes, chefs de famille et ayant besoin de support adéquat.

(1750)

C'est pour cela que je veux dénoncer comme une fumisterie un discours qui serait apparemment libéral et progressiste, mais qui nous ramène avant la réforme des années 1970. Cette mesure va ouvrir une batterie d'enquêtes et de tatillonneries, va ouvrir prise à la délation, va créer un système dans un système, encore une fois, pour à peu près 10 $ par semaine.

Il y a fort à parier que cette mesure ne coûtera pas cher, quand on sait le temps que cela prend pour avoir une décision de l'assurance-chômage et recevoir son premier chèque. Il est donc faux de dire que c'est un monde merveilleux qu'on ouvre. Par contre, c'est une voie dangereuse qu'on trace, alors qu'on est en train de lancer, soi-disant, une vaste consultation sur la réforme des programmes sociaux. On initie la démarche vers un revenu familial qui nous a plongés, au niveau de l'aide sociale, dans cette situation d'inquisition que j'ai dénoncée tantôt.

L'autre cible des coupures, ce sont les travailleuses et les travailleurs saisonniers, ceux qui ont de la difficulté à se trouver un emploi stable, souvent parce qu'ils sont jeunes, qu'ils n'ont pas l'expérience de base ou qu'ils sont dans des secteurs où il n'y a pas d'emploi quelles que soient leurs qualifications, ceux qu'on appelle les abonnés de la 10/42 ou de la 10/39.

Au lieu de s'attaquer aux problèmes structurels que connaissent les régions, on conclut à la responsabilité des individus et on limite leur accès à l'assurance-chômage et aux bénéfices auxquels ils auront droit. Que fait le ministre des Finances pour régler les problèmes de ces personnes dans le besoin? Rien, aucune solution n'est proposée, pire, on abolit plusieurs encouragements fiscaux et subventions à dimension régionale, aucun espoir pour les personnes de ces régions.

Ces coupures à l'assurance-chômage, leur importance, l'introduction du statut familial indiquent, pour qui en doutait, que la soi-disant modernisation et restructuration des programmes de sécurité sociale semble n'être que la voie vers un retour aux années 1970. En tandem, le ministre des Finances et le ministre du Développement des ressources humaines font resurgir ces vieux fantômes des années 1970. Ils se proposent un voyage dans le passé et remettent en place le concept démodé et archaïque de la détermination du taux de prestation en fonction de la situation familiale.

Plus de 5,5 milliards de dollars au chapitre de l'assurance-chômage pour les deux prochaines années, c'est ce que nous annonce le gouvernement, mais ce n'est pas tout. Ce n'est qu'un volet, qu'un côté de la médaille de l'imminente réforme des programmes sociaux.

L'autre volet, soit la réforme de l'aide sociale, ou la décision plus que probable du gouvernement de ne pas renouveler le Régime d'assistance publique du Canada, cet autre volet ne laisse pas d'inquiéter non plus. Il ne laisse pas d'inquiéter parce qu'il est précis. Quand, au total, le ministre des Finances dit que la réforme devrait aller chercher plus de 7,5 milliards de dollars d'ici la fin de 1996-1997, c'est qu'il sait ce qu'il veut et que la consultation qui est présentement en cours en réalité, pourrait bien ne pas se faire.

En fait, ces chiffres permettent de tirer trois conclusions, aussi claires et incontournables les unes que les autres. La première, les seules coupures importantes de ce budget-je ne dis pas que les coupures au chapitre militaire ne représentent pas une certaine proportion, mais comparativement à ce qu'on va chercher dans les dépenses sociales, c'est bien peu-donc les seules coupures importantes annoncées pour les deux années à venir le sont dans les programmes sociaux, et encore plus précisément chez les personnes sans emploi et souvent les plus vulnérables.

Deuxièmement, le ministre du Développement des ressources humaines ne peut se moquer plus longtemps des Québécois et des Canadiens qu'il appelle à une vaste consultation sur leurs priorités et leurs préoccupations puisque ses priorités, à lui, sont claires; ses préoccupations sont les coupures, et elles sont dans le Budget.

(1755)

Je le somme donc, madame la Présidente, de déposer sans plus tarder son projet de réforme et de libérer ses experts à 500 $ par jour, à part les dépenses.

Troisièmement, si le ministre des Finances est ainsi capable de chiffrer de façon aussi précise les effets de la réforme, c'est que le projet de son gouvernement est prêt, qu'il est prêt depuis longtemps et que c'est celui des conservateurs.

Nous pouvons comprendre, en voyant ce que nous voyons et en devinant ce que nous devinons, pourquoi Mme Campbell a reculé au début de la campagne électorale devant les conséquences possibles d'une réforme. Elle n'a pas eu le cynisme du présent gouvernement qui s'est fait élire sur l'emploi et ne cesse de faire la politique de coupures de ses prédécesseurs.

Il faut dire qu'à leur tour et en leur temps, les conservateurs ont fait la politique des libéraux. Ils ont mis en oeuvre toute les recommandations principales de la Commission Macdonald, créée par l'ex-premier ministre Trudeau, sauf une, la réforme de la sécurité du revenu. Nous y sommes. Nous sommes devant le projet de la Commission Macdonald, bien sûr, avec des variantes que nous pourrons admirer, mais pour l'essentiel, il est là ce projet, dont on devine tous les contours.

Intervention ministérielle après intervention sous-ministérielle, il ne faut pas oublier que les mêmes sous-ministres qui ont mis au parfum le ministre sont essentiellement les mêmes qui avaient préparé l'ancien gouvernement, et qui avaient préparé


1750

M. Benoît Bouchard, avant sa conférence à l'OCDE, tenue les 8 et 9 décembre à Paris, où il a livré un discours que le ministre du Développement des ressources humaines ne pourrait pas renier, discours qui pourrait être le sien.

Est-ce à dire qu'il n'y a pas d'autre façon de faire de la politique que celle des libéraux, des conservateurs? Des libéraux? Non. Il faut dire que tant que les partis fédéraux du Canada ne se seront pas libérés de la tutelle des grandes entreprises qui les financent, et dont les intérêts prévalent gouvernement après gouvernement, les Canadiens n'auront de choix qu'entre bonnet blanc et blanc bonnet.

Pourquoi le ministre des Finances a-t-il refusé de s'attaquer aux vraies sources de revenu et de s'assurer que les grandes sociétés paient des taxes, que leur soit bloquée la voie royale vers les paradis fiscaux? Heureusement, et j'étais heureuse de constater que notre critique aux finances faisait le même constat, les Québécois, grâce au regretté René Lévesque, se sont donné cette liberté. Personne ne prétend que la situation des gouvernements n'est pas difficile, mais seule l'équité entre les citoyens et avec les citoyens corporatifs peut être acceptable.

En l'absence de cette équité, les citoyens sont floués, manoeuvrés, manipulés par une clique que les insécurités nombreuses et croissantes du monde ordinaire n'atteignent pas. Ils n'ont même pas idée de ce que veut dire la crainte de ne plus avoir un maigre chèque d'assurance-chômage ou d'aide sociale. Ils ne savent pas l'humiliation et l'angoisse devant les sourcils froncés de tous les agents d'aide sociale et d'assurance-chômage du pays. Ils ne vivraient pas une seule journée avec ce qui doit permettre à une femme d'élever deux enfants pendant tout un mois. Et voilà que cette femme va devoir prouver que c'est bien elle qui a la charge de la famille et que ses revenus à elle justifient qu'elle reçoive, pendant quelques semaines, 60 p. 100 de pas beaucoup, à peine plus que le salaire minimum. Le ministre vient nous parler de la gestion responsable des programmes sociaux.

L'oubli du ministre des Finances dans son discours de s'attaquer rapidement aux coûteux dédoublements, forte source potentielle d'économie, est aussi scandaleux et indicatif. Indicatif de l'absence de volonté chez ce gouvernement de régler cet important dossier, particulièrement avec le gouvernement du Québec. Indicatif aussi de la volonté centralisatrice de ce gouvernement qui n'hésite pas à s'ingérer dans les champs de compétence des provinces.

Monsieur le Président, je vais vous faire un aveu et j'y ai pensé à deux fois. J'avais entendu dire que le ministre du Développement des ressources humaines était un homme progressiste, qu'avec l'étrange mais habituelle façon de l'opposition officielle, je pourrais aider. Désormais, je sais qu'il n'en est rien, que malgré ses propos généreux, il a accepté de faire les seules coupures importantes du gouvernement libéral sur le dos des personnes les plus vulnérables et leurs enfants. Le ministre des Finances nous affirme aujourd'hui: «Nous faisons avancer la réforme de la sécurité sociale en prenant des mesures précises touchant l'assurance-chômage et les transferts fédéraux aux provinces en matière de sécurité sociale.»

Nous disons au ministre des Finances qu'il n'a pas fait avancer la réforme de la sécurité sociale. Il s'est honteusement attaqué aux plus démunis. Il a refusé de s'attaquer à la cause principale de tous ces problèmes, l'emploi. Il a aussi refusé de s'attaquer sérieusement aux importantes sources d'économies potentielles que sont les fiducies familiales, la défense et les dédoublements. C'est parce que nous, du Bloc, refusons cette vision qui a été aussi celle des gouvernements précédents, que nous voulons pour le peuple du Québec un vrai projet d'avenir, lequel ne pourra s'accomplir, même s'il ne sera pas facile, s'il n'ira pas tout seul, que grâce à la souveraineté du Québec.

(1800)

[Traduction]

M. Maurizio Bevilacqua (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement le discours de la députée et j'ai été très étonné d'entendre certaines de ses observations, surtout celles qui concernaient les cotisations à l'assurance-chômage.

Sauf erreur, il y a quelques semaines, la députée a protesté en disant qu'à 3,07 $, les cotisations étaient trop élevées. Nous les avons maintenant réduites pour alléger le fardeau des petites entreprises et leur permettre de protéger et de créer plus de 40 000 emplois.

La députée apprendra très vite qu'il est très dangereux de se contredire pour faire valoir des arguments à la Chambre des communes, surtout quand on est député de l'opposition. J'ai aussi été très surpris lorsque la députée a dit que le gouvernement restait indifférent aux problèmes des jeunes.

Il convient peut-être de rappeler à la députée que le gouvernement a annoncé la mise en oeuvre du Service jeunesse et du Programme national d'apprentissage. Ces initiatives figuraient aussi dans notre livre rouge.

La députée doit absolument comprendre que les problèmes auxquels s'attaque le budget correspondent beaucoup aux engagements pris dans le livre rouge. Permettez-moi d'expliquer pourquoi c'est important. Elle a peut-être oublié que c'est au livre rouge que nous devons l'une des plus fortes. . .

Le vice-président: À l'ordre! Il y a trois députés qui veulent faire des observations ou poser des questions. Je doute que ce soit le moment d'entendre un discours du secrétaire parlementaire. Il acceptera sûrement de formuler une brève observation ou de poser une question pour que d'autres députés puissent participer au débat.

M. Bevilacqua: Monsieur le Président, vous saviez probablement que trois députés voulaient participer au débat. Je pensais que j'avais la parole, et c'est pourquoi j'ai soulevé ces questions.


1751

Il y a des contradictions. Nous devons porter un jugement équitable sur les mesures du budget. C'est un budget qui donne suite aux engagements pris dans le livre rouge. Je suis d'avis que la députée de Mercier a tort de dire le contraire aux Canadiens.

Mme Lalonde: Monsieur le Président, les contradictions ne viennent pas de mon côté. Quand le gouvernement a été élu, il avait le choix de hausser ou non les cotisations à l'assurance-chômage. Le ministre des Finances a déclaré hier que la hausse de ces cotisations nuisait aux petites entreprises et à l'emploi. Or, vous avez fait passer les cotisations des petites entreprises, de 3 $ qu'elles étaient en décembre, à 3,07 $ en janvier.

Si le député l'ignore, il n'a qu'à s'en tenir aux faits. On se contredit en disant que c'est mauvais pour l'entreprise, en puisant 800 millions de dollars dans l'économie pour revenir à 3 $ l'année suivante.

Le gouvernement se contredit quand, après avoir dit qu'une chose était nuisible, il l'a fait. Pour ma part, j'étais bien heureuse qu'il agisse comme cela. En effet, j'étais contente de lire que ce n'était pas une bonne mesure parce qu'ils l'ont prise.

(1805)

M. Simon de Jong (Regina-Qu'Appelle): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai écouté les observations de la députée.

Comme l'a dit le militant politique américain, Jesse Jackson, ce ne sont pas les pauvres qui étaient au banquet des années 70 et 80, lorsque le financement déficitaire des gouvernements, libéraux et conservateurs, a suscité une poussée inflationniste et une augmentation incroyable de la richesse dans l'immobilier, les actions et les obligations, le recours complaisant aux achats par endettement, le gaspillage éhonté de l'argent des contribuables et de l'entreprise privée. Les pauvres n'étaient pas à ce banquet, mais ce sont eux qui doivent aujourd'hui payer l'addition.

La députée souscrira-t-elle à l'analyse de Jesse Jackson et conviendra-t-elle que le gouvernement est justement en train de présenter l'addition aux pauvres alors qu'ils ne sont pas responsables du déficit ni du pétrin financier dans lequel nous nous trouvons à l'heure actuelle?

[Français]

Mme Lalonde: Monsieur le Président, je remercie le député pour son commentaire. Je pense qu'il pouvait tirer ses conclusions du texte qui est là.

En effet, il y a actuellement des personnes qui n'ont pas accès à des emplois stables. J'ai nommé particulièrement les jeunes, les femmes, de très nombreuses personnes des régions éloignées, et d'autres aussi. Je vais vous parler du Québec où il y a en ce moment plus de 4 000 jeunes ingénieurs brillants, bollés, qui n'ont pas d'emploi. Ces personnes n'ont comme seul recours que le filet de sécurité sociale qu'on veut encore rétrécir et, en plus, on veut leur faire payer les inconsistencies des gouvernements répétés.

[Traduction]

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin): Monsieur le Président, je tiens à remercier la députée de Mercier pour son allocution.

Elle a fait allusion, à la fin, à la souveraineté du Québec. Plus tôt, cet après-midi, le premier intervenant du Bloc a parlé des Canadiens et des Québécois. Lorsqu'ils distinguent Canadiens et Québécois et qu'ils font allusion à la souveraineté du Québec, les députés du Bloc québécois renvoient-ils à la séparation du Québec?

[Français]

Mme Lalonde: Monsieur le Président, je crois que ce n'est un secret pour personne que les députés du Bloc québécois se sont fait élire sur une plate-forme qui privilégie la souveraineté du Québec. Ils ne viennent pas faire à Ottawa la souveraineté du Québec, ils viennent défendre ici les intérêts du Québec. Ils respectent le Canada, je dirais qu'ils apprécient le Canada. Mais pendant toutes ces années où des volontés de réforme qui auraient donné au Québec une place suffisante n'ont pas abouti, depuis toutes ces années a crû, monté, gonflé, un vaste mouvement qui va dans le sens de dire que cela n'a plus de bon sens.

Au lieu de perdre notre temps, de faire s'accroître l'intolérance de part et d'autre, justement parce qu'il y a tant de pauvreté, de chômage, mettons toute notre énergie à régler cette question-là. Prenons ensemble au Québec tous nos pouvoirs et développons avec le Canada les meilleures relations possibles. Oui, c'est ce à quoi je faisais référence.

[Traduction]

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud): Je serai bref, monsieur le Président. On a soulevé la question de la souveraineté.

La députée a conclu que la solution des problèmes financiers résidaient dans la souveraineté du Québec.

La députée voudrait-elle dire à la Chambre quelle proportion de la dette nationale de 500 milliards de dollars le Québec est disposé à assumer, et comment il entend l'éponger et survivre en tant que pays souverain.

Le vice-président: Avant que la députée de Mercier ne réponde et comme le président vient juste de partir, je rappelle aux députés de bien vouloir adresser leurs observations à la présidence s'ils ne veulent pas l'indisposer grandement.

(1810)

[Français]

Mme Lalonde: Monsieur le Président, vous comprendrez et l'honorable député comprendra aussi que ce n'est pas le Bloc qui, en ce moment, est chargé de négocier, négociation, normale dans une telle situation, qui devra tenir compte des actifs et des passifs et de la façon dont cette dette sera remboursée. Des personnes au Québec ont travaillé là-dessus. J'imagine qu'au Canada, il y en a qui s'y préparent aussi.


1752

[Traduction]

M. John Cannis (Scarborough-Centre): Monsieur le Président, la députée fait preuve de beaucoup de compassion. Elle a rappelé le court mandat de l'ancienne première ministre et le prix que celle-ci a dû payer pour ses décisions.

Jamais jusqu'à maintenant, on n'avait procédé à des consultations prébudgétaires. C'est la première fois, et il ne fait aucun doute que le ministre a parcouru le pays et a ouvert le processus. Il a écouté ce que les Canadiens avaient à dire. C'est d'ailleurs à leur demande qu'il a modifié le plafond des REER et l'exemption pour gains en capital.

La députée parle de manipulation et d'humiliation. Je ne vois pas en quoi on manipule les gens lorsqu'on va leur demander leur avis sur ce qu'on devrait faire dans l'intérêt de tous les Canadiens.

Il n'y a aucune hausse d'impôt. La députée ne croit-elle pas qu'en mettant 300 millions de dollars à la disposition des petites entreprises par suite de la réduction du taux de cotisation d'assurance-chômage, on va leur permettre d'engager des gens?

Mme Lalonde: Je répète que la hausse du taux de cotisation de l'assurance-chômage a empêché les petites entreprises d'engager davantage de personnes. Je n'en démordrai pas.

[Français]

Pour ce qui est de la consultation, personne ne dit que le ministre des Finances n'a pas effectivement consulté. Je peux dire qu'à titre de membre d'un certain comité en ce moment, j'aurais apprécié pouvoir faire une telle consultation à travers le Canada, bien que j'en connaisse le prix. Cependant, peut-être que lors de ces consultations, il n'y a pas eu suffisamment de jeunes sans emploi, de femmes monoparentales sans emploi et toutes ces personnes qui vont écoper du système mis en place car peut-être que, curieusement, les seuls qu'on va couper lourdement seront justement ceux qui n'ont pas été consultés.

[Traduction]

M. Andrew Telegdi (Waterloo): Monsieur le Président, je voudrais faire savoir que je partagerai le temps qui m'est accordé avec le député de York-Simcoe.

En rédigeant ce discours, qui est mon premier à la Chambre, je me suis rendu compte qu'il était tout à fait approprié de parler de ma circonscription parce que, à mon sens, la circonscription fédérale de Waterloo pourrait très bien incarner l'esprit du plan budgétaire du gouvernement.

Cette circonscription englobe la ville de Waterloo, une partie de la ville de Kitchener et le comté de Woolwich, au coeur du sud-ouest de l'Ontario. Je suis fier de dire que la Chambre de commerce du Canada a récemment choisi cette région comme l'une des cinq collectivités modèles du Canada, c'est-à-dire que la Chambre de commerce ira y demander conseil pour aider d'autres collectivités à prospérer.

En outre, selon des projections du gouvernement provincial, la région de Waterloo sera la région de l'Ontario qui connaîtra le plus fort taux de croissance au cours des deux prochaines décennies. Si ma circonscription est si prospère, c'est qu'il y existe un partenariat entre le monde des affaires, le monde de l'éducation et les conseils municipaux. De plus, la population locale appuie ce partenariat.

Comme le gouvernement le déclarait dans le livre rouge dont s'inspire le budget, nous devons faire davantage avec ce que nous avons, nous devons miser sur le partenariat entre tous les secteurs de la société, et nous devons saisir toutes les possibilités de développement économique et social qui se présentent et qui ne peuvent aboutir que si tous travaillent de concert.

Ainsi, dans la région de Waterloo, il y a des entreprises dérivées, c'est-à-dire des entreprises où la technologie et les ressources humaines sont en très grande partie le produit direct de la communauté universitaire. Ces entreprises ont déjà créé plus de 2 000 emplois au Canada. L'idée d'un partenariat entre les universités et les entreprises est mentionnée dans le budget.

En plus des nombreuses entreprises de pointe dans le domaine de l'information, la circonscription de Waterloo compte aussi beaucoup d'entreprises traditionnelles prospères. Cela ne veut pas dire que nous n'avons pas eu notre lot d'entreprises et de citoyens durement frappés par la récession. Qu'il suffise de penser à Seagram, à Uniroyal, à Goodrich et à Labbatt, entre autres. C'est pourquoi le budget est important. Il crée le climat où les entreprises peuvent prendre de l'expansion et prospérer en créant des emplois pour les chômeurs de Waterloo et d'ailleurs au Canada.

(1815)

Nous devons faire montre de compassion envers les victimes de la récession et de la mondialisation de l'économie. Le statu quo ne signifierait rien de bon pour le million et demi de Canadiens sans emploi et les millions d'autres qui comptent sur une aide du gouvernement. Je félicite le gouvernement de ne pas ménager ses efforts pour mettre sur pied un système de sécurité sociale responsable, juste, humain et abordable.

Les Canadiens ont simplement besoin d'un coup de main; ils n'ont pas besoin qu'on leur fasse la charité. Le meilleur programme social que nous puissions mettre en place, c'est de créer un climat économique qui permettra à chaque Canadien qui est désireux et capable de travailler de trouver un emploi convenable.

En particulier, le budget appuie le secteur de la PME, qui continuera d'être le principal créateur d'emplois au Canada. Cela est vrai dans ma circonscription aussi. L'esprit d'initiative des PME contribue grandement à renforcer notre économie. L'économie mondiale n'est pas seulement une expression à la mode que les entreprises locales utilisent; c'est une partie intégrante de leur marché.

Le concept de réseaux d'organisations, décrit dans le programme de ce budget, existe dans ma circonscription depuis un certain temps déjà. Les entreprises locales, les dirigeants municipaux et les universitaires ont formé des réseaux dans des domaines tels que l'exportation, l'environnement, la technologie informatique et la gestion de la qualité totale. Le concept de la gestion de la qualité totale, qui est mis en pratique depuis des années par les administrations locales dans ma circonscription, fait maintenant partie du plan du gouvernement en vue de réduire


1753

les dépenses et de rationaliser les opérations gouvernementales pour les rendre plus efficaces et efficientes.

Le premier ministre et le ministre des Finances méritent d'être applaudis pour avoir tenu compte des préoccupations de mes collègues libéraux, qui sont aussi les miennes, soit que les Canadiens de la classe moyenne ne toléreraient pas une autre augmentation de leur fardeau fiscal. Je suis heureux de voir que le ministre de la Défense nationale a pris des mesures courageuses dans ce budget pour rationaliser notre infrastructure de défense en se fondant sur les besoins. Il s'est aussi engagé à examiner le gaspillage au sein du gouvernement, y compris les déménagements, une autre de mes préoccupations. Tout au long de ma vie politique, j'ai toujours attaché une grande importance aux économies de coûts et à l'efficience des opérations gouvernementales, et je continue de le faire ici, à la Chambre des communes.

Dans le même ordre d'idées, nous devrions tenir un débat sur l'augmentation du nombre de sièges à la Chambre. Je souhaite ardemment qu'on examine tout réaménagement des limites des circonscriptions électorales en accord avec la prémisse centrale que le nombre des députés soit limité au chiffre actuel de 295. Les Canadiens ne veulent pas avoir plus de politiciens, ils veulent que nous fassions davantage avec les moyens dont nous disposons.

Mes concitoyens ont également tâché de créer un fonds local de capital-risque grâce auquel la ville pourrait soutenir ses propres entrepreneurs au moyen d'investissement de capitaux. Ce sont des idées comme celles-là qui concrétisent l'esprit de programmes comme notre Fonds d'investissement canadien.

Les questions environnementales ne représentent pas simplement une vogue passagère dans ma circonscription. L'Université de Waterloo est depuis des années à l'avant-garde dans le domaine des études environnementales. Le Waterloo Public Interest Research Group, créé il y a vingt ans par des étudiants de l'Université de Waterloo qui y ont consacré bénévolement temps et argent, a dépensé plus de un million de dollars à des études en matière de consommation et d'environnement. Les entreprises s'occupant de protection de l'environnement constituent un secteur en pleine expansion de notre milieu des affaires.

C'est pourquoi je me joins aux Amis de la terre pour féliciter le ministre des Finances, qui est le premier à avoir parlé de développement durable dans son exposé budgétaire, ainsi que le gouvernement actuel de leur engagement à cet égard.

Pour réaliser cet objectif, le budget annonce l'établissement d'un groupe de travail réunissant des représentants du gouvernement, de l'industrie et des organisations non gouvernementales oeuvrant dans le domaine de l'environnement, qui sera chargé de cerner les obstacles aux pratiques sans danger pour l'environnement ainsi que les facteurs qui en découragent l'adoption, et de trouver les moyens d'utiliser efficacement les instruments économiques pour protéger l'environnement.

La présence des institutions d'enseignement postsecondaire dont j'ai déjà parlé, soit le Collège Conestoga, l'Université de Waterloo et l'Université Wilfrid Laurier, permet aux travailleurs, aux administrateurs et aux entrepreneurs de ma circonscription d'accroître leur compétence. Ces institutions de niveau international participent à des transferts explicites de compétence grâce à l'excellence de leur participation aux programmes d'enseignement coopératif et d'apprentissage.

La circonscription peut bénéficier d'un avantage en matière de recrutement grâce à ce réservoir d'employés éventuels bien formés. Il en résulte que ces institutions d'enseignement postsecondaire de la région de Waterloo offrent leur compétence à la collectivité bien avant que leurs étudiants n'obtiennent leur diplôme.

(1820)

Jusqu'à maintenant, nos meilleures ressources, nos étudiants, avaient dangereusement tendance à se tourner vers les autres pays pour planifier leur avenir. Il était regrettable qu'ils cherchent de l'emploi aux États-Unis, auprès de sociétés comme Microsoft. Nous avons vraiment assisté à un exode de nos cerveaux.

Je me réjouis donc que le gouvernement ait réglé le problème en faisant activement la promotion de programmes comme celui qui concerne le réseau technologique canadien ainsi que les ingénieurs et les scientifiques, ce qui nous permettra de garder au Canada nos jeunes, notre ressource la plus précieuse.

Le gouvernement respecte son engagement de maintenir, dans le cadre du financement des programmes établis, les sommes qu'il dépense pour les universités. Il se préoccupe de l'éducation et de l'alphabétisation, comme il l'a démontré en rétablissant pleinement le financement du Programme national d'alphabétisation. C'est important aussi pour ma circonscription.

Les écoles aussi bien publiques que catholiques offrent un enseignement d'excellente qualité aux étudiants de notre région. Elles offrent d'excellentes possibilités de perfectionnement à la population. Les écoles publiques offrent aux travailleurs de la région la possibilité de terminer leurs études secondaires, grâce à des cours organisés sur les lieux de travail. Les écoles séparées se sont aussi acquis une réputation mondiale pour ce qui est de l'intégration dans des classes régulières d'étudiants aux prises avec des difficultés.

Comme le ministre des Finances l'a dit hier, le budget prévoit une réduction du déficit de 6 milliards de dollars l'an prochain et de 7 milliards de dollars l'année suivante, ce qui est un exploit compte tenu du fait que nos prédécesseurs avaient sous-estimé de 13 milliards de dollars le déficit dont nous avons hérité. Au cours des trois prochaines années, pour chaque dollar de nouvelles recettes, nous réduirons les dépenses fédérales de cinq dollars.

Lors des consultations prébudgétaires, les Canadiens ont demandé au gouvernement de présenter un budget juste et équitable. Notre gouvernement s'est engagé à être transparent. Nous conjuguerons nos efforts, car mon expérience dans ma circonscription m'a appris que les Canadiens peuvent travailler en partenariat afin de créer de nouvelles perspectives d'avenir pour notre pays. Le budget dont nous sommes saisis est la pierre angulaire qui fera de cela une réalité.

M. John English (secrétaire parlementaire du président du Conseil privé et ministre des Affaires intergouvernementales): Monsieur le Président, je félicite le député de Waterloo de son excellent discours.


1754

Je voudrais lui rappeler que la circonscription voisine, celle de Kitchener, est également englobée dans cette collectivité modèle citée par la Chambre de commerce du Canada.

Le député est bien connu dans la région pour son intérêt et ses connaissances en matière environnementale. Je me demande quelles seront les conséquences du budget sur la circonscription et la ville de Waterloo. Le député a parlé des observations des Amis de la Terre au sujet du ministre des Finances et du budget. En outre, Waterloo est une région où les entreprises de l'environnement occupent une place de choix. Est-il probable que le budget aidera ces entreprises?

M. Telegdi: Monsieur le Président, je remercie mon collègue, député de la circonscription voisine.

Il est certain que la circonscription de Waterloo et ma ville ont toujours pris une part très active dans tout ce qui concerne l'environnement.

Reportons nous à un fait qui a sans doute été un élément déclencheur dans la sensibilisation de l'opinion canadienne aux problèmes environnementaux. Il s'agit de Love Canal, aux États-Unis, site où étaient enfouies des substances extrêmement toxiques qui menaçaient la vie des gens. L'entreprise qui y travaillait, Conestoga-Rovers, est implantée à Waterloo. C'est l'une des nombreuses entreprises qui ont vu le jour dans notre région.

Je puis dire au député de Kitchener que, effectivement, le budget va grandement encourager ce secteur d'activité. Nous espérons être l'un des centres d'excellence. Je crois que nous le sommes déjà, d'ailleurs, et que nous pouvons tabler là-dessus pour garantir à la nouvelle économie du Canada sa juste part du marché international dans le secteur de l'assainissement de l'environnement.

M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, je voudrais remercier le député de son discours. J'ai une question à lui poser à propos du budget.

Le député sait-il quelles seront les conséquences pour le pays si nous ajoutons 100 milliards de dollars à la dette fédérale dans les trois prochaines années? Il n'est fait mention nulle part de ces conséquences dans le budget ni dans le discours sur le budget.

Qu'est-ce que le député a à dire là-dessus?

(1825)

M. Telegdi: Monsieur le Président, il n'y a pas tellement longtemps, nombre de mes collègues et moi avons débattu de ces mêmes questions à une assemblée réunissant tous les candidats. Je m'étonne toujours de la difficulté que nous avons à faire comprendre notre point de vue, et plus particulièrement aux membres du Parti réformiste.

Notre position a toujours été la même. Elle est énoncée dans le livre rouge. Nous sommes allés voir les Canadiens, nous leur avons exposé notre plan, et c'est là-dessus que se fondent toutes nos initiatives. C'est en ça que diffèrent nos démarches. En tant que libéraux, nous voulons relancer l'économie. Nous l'avons dit dans notre programme de dépenses.

La position du Parti réformiste, c'était qu'il supprimerait le déficit en trois ans. La nôtre, c'était que nous ramènerions le déficit à 3 p. 100 du PIB en trois ans. Le chef du Parti réformiste a mis, à plusieurs reprises, le gouvernement au défi d'atteindre ce pourcentage de 3 p. 100 du PIB. Ma réponse, c'est que nous pouvons le faire, ce que montrent le budget et les chiffres qu'il contient.

J'espère que le député du Parti réformiste se lèvera à la Chambre pour nous féliciter lorsque ce sera fait. Nous croyons que notre devoir est de relancer l'économie. Nous ne devons pas l'étouffer. Si nous l'étouffons, nous plongerons de nouveau le pays dans la récession. Nous devons croire en nous-mêmes et faire confiance aux Canadiens.

Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe): Monsieur le Président, c'est ma première intervention en tant que nouvelle députée à la Chambre. J'en suis ravie.

L'histoire de cet endroit m'intimide et, pourtant, vous me voyez réconfortée à l'idée de faire partie de la longue tradition démocratique de notre pays. Ce n'est pas que les choses soient statiques, qu'elles n'évoluent pas. En fait, c'est loin d'être le cas. La tradition, en particulier la tradition parlementaire canadienne, a évolué au fil de l'histoire de cette institution.

De nombreuses pressions sont exercées sur le Parlement, sur le gouvernement et sur les parlementaires pour les amener à revoir la façon dont le gouvernement fonctionne. Toutes sortes de forces-économiques, sociales, environnementales, technologiques, politiques et mondiales-nous obligent de diverses façons à revoir les relations qui existent entre la population et les institutions ainsi qu'à en définir de nouvelles. Le ministre des Finances et le gouvernement s'en sont rendu compte et s'en sont réjouis.

Aussi le ministre des Finances s'est-il lancé dans un processus budgétaire sans précédent, un processus qui ne se limite pas à ce document précis. Un processus qui, s'il peut être pleinement mis à profit, devrait mener à un nouveau genre de partenariat, un partenariat réel et concret entre les Canadiens, le gouvernement et les institutions socio-économiques.

Ce n'est que lorsque nous serons capables de comprendre toute la portée et la nature de nos problèmes et que nous entreprendrons d'examiner un choix aussi vaste que possible de solutions que nous pourrons en fait commencer à nous attaquer aux graves problèmes économiques qui accablent notre nation.

Au XXIe siècle, le Canada occupera à juste titre une place de leader au sein des nations. Grâce au genre de processus de consultation que le ministre des Finances vient de lancer, non seulement nous serons à même de régler nos problèmes, mais en plus, nous servirons de modèle aux autres pays. Le ministre des Finances nous a donné à tous la possibilité de travailler ensemble, de nous faire entendre, de mettre nos idées à l'épreuve et de contribuer à construire le Canada que nous désirons tous.

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Une tâche difficile nous attend: redonner au gouvernement son intégrité et mettre fin au cynisme du public. En tant que députée, je veux que les habitants de la circonscription de York-Simcoe sachent, comme tous les Canadiens et tous mes collègues de l'autre côté, que nous avons la volonté politique nécessaire pour entamer le dialogue. Nous avons la volonté politique de renouveler les institutions sociales, économiques et politiques de notre pays.

(1830)

C'est pourquoi j'ai décidé de me lancer en politique. J'estime qu'il est plus nécessaire que jamais de rebâtir la confiance disparue entre la population du Canada et ses représentants élus. Je suis sûre que beaucoup de mes collègues, ici, poursuivent le même but.

En tant que Canadiens, la chose la plus importante dont nous devons nous souvenir, c'est que nous sommes comme les autres.

Lorsque j'ai été élue députée, je n'ai pas perdu ma citoyenneté canadienne. Moi aussi, je suis concernée. J'ai une famille que j'aime, une communauté à laquelle je suis attachée et un pays que j'honore.

Comme les autres Canadiens, comme mes collègues des deux côtés de la Chambre, je veux que ce pays connaisse le succès. Je veux que le Parlement fonctionne comme il faut.

Mes collègues et moi avons besoin que les Canadiens fassent preuve de patience, car, comme le ministre des Finances le disait hier dans son discours, le défi actuel, ce n'est pas de faire les choses en vitesse, c'est de les faire comme il faut.

Nous ne demandons pas aux Canadiens de patienter pendant que le gouvernement attend sans rien faire. Nous avons commencé à mettre en oeuvre nos promesses et nous continuerons dans cette voie. Déjà, nous avons rétabli le Programme de contestation judiciaire, institué le programme d'infrastructure, le Service jeunesse, un programme d'aide préscolaire pour les autochtones, un Centre d'excellence pour la santé des femmes, un réseau technologique canadien, ainsi que beaucoup d'autres choses.

Le livre rouge prend vie dans le budget.

Nous avons besoin d'endroits où l'on peut susciter et sonder des idées sans les mettre en pièces. La pensée créatrice peut se tarir rapidement si la critique est sèche et stérile. Aujourd'hui, plus que jamais, il faut trouver d'autres façons de comprendre et de résoudre les problèmes.

Pour paraphraser Albert Einstein, tout à changé, sauf notre façon de penser.

Si nous voulons gouverner différemment, il faut bien comprendre que non seulement le gouvernement doit changer, mais nous devons changer aussi.

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je suis désolé, mais je vais devoir mettre fin à la première allocution de la députée, mais y a-t-il consentement unanime pour prolonger son temps de parole de quatre ou cinq minutes?

Des voix: D'accord.

Mme Kraft Sloan: Je remercie mes collègues de la Chambre de la patience qu'ils m'ont manifestée.

C'est au gouvernement de donner l'exemple et de créer le cadre et l'environnement nécessaires à l'établissement d'un dialogue ouvert et large. La tâche du gouvernement consiste maintenant à perfectionner le processus de consultation qui a conduit à ce budget.

Les députés sont en mesure d'appuyer ce processus dans leurs propres circonscriptions.

La justice et l'équité sont les deux grands principes qui servent de fondement au présent budget. Ces principes doivent encore et toujours guider le processus de consultation.

L'équité est assurée lorsque la consultation est large, lorsque toutes les composantes de la mosaïque canadienne sont respectées et validées.

Ces composantes sont multiples: géographie, race, religion, ethnie, âge, sexe, orientation sexuelle, capacités physiques et intellectuelles, classe, éducation, apparence physique, et j'en passe. L'équité est assurée lorsque nos responsabilités entre générations sont reconnues, lorsque nos rôles et nos relations dans la société sont honorés.

L'équité est assurée aussi lorsque l'environnement naturel est respecté.

Tous les coûts, qu'ils soient d'ordre social, écologique ou de santé, finissent par influer sur l'économie. Il est très important que le gouvernement, par le truchement de ces consultations, trouve un moyen de comptabiliser les choses autrement, une nouvelle façon de tirer parti, sur le plan écologique et de la santé, des avantages qui découlent de ses programmes, de ses subventions et de ses impôts.

Ce nouveau processus permanent de consultation budgétaire ainsi que l'examen et le renouvellement des grandes orientations gouvernementales, surtout dans les domaines des ressources, de la santé, de la défense et de l'industrie, témoignent du sérieux avec lequel le gouvernement actuel entend agir pour faire face aux grands changements et aux nouveaux défis qui nous attendent.

Voilà le gouvernement responsable que les Canadiens réclament et méritent!

Les premiers éléments du gouvernement responsable au Haut-Canada ont vu le jour dans ma circonscription de York-Simcoe. C'est là que William Lyon Mackenzie s'est joint aux forces rebelles des agriculteurs et des petits artisans pour s'opposer au Pacte de famille des conservateurs.

Cent cinquante ans ont passé depuis la création du gouvernement responsable, mais les descendants des rebelles ont perpétué la tradition de l'exploitation agricole et de la petite entreprise dans York-Simcoe, une circonscription que je suis fière de représenter.

Aujourd'hui, les exploitations agricoles embellissent le paysage de New Tecumseh, King, Gwillimbury Est et Ouest. Le Holland Marsh, connu dans le monde entier, se trouve près de Bradford. Les petites entreprises ont été et continuent d'être le moteur économique de localités comme Newmarket et Bradford. Leurs propriétaires ont toujours tenu boutique le long des rues

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principales de villages comme Sutton, Keswick, Mount Albert, Beeton, Tottenham, Pefferlaw et Schomberg.

La circonscription de York-Simcoe possède également les magnifiques plages de Georgina au lac Simcoe. Le tourisme, qui y est florissant à longueur d'année, offre la navigation de plaisance l'été et la pêche sur la glace l'hiver.

Nous avons également la chance d'avoir une bande des premières nations, les Chippewas de l'île Georgina, qui est déterminée à obtenir la reconnaissance de son droit inhérent à l'autonomie politique.

J'ai le privilège de représenter ici une circonscription qui est le reflet de la diversité de notre grande nation. La 35e législature est une étape déterminante de l'histoire parlementaire canadienne puisqu'elle est, plus que tout autre avant elle, représentative de la riche mosaïque canadienne.

Je regarde mes collègues autour de moi des deux côtés de la Chambre et je me dis que nous ne sommes ici que de passage, mais que cette institution continuera d'exister longtemps après que les pages du hansard d'aujourd'hui auront jauni et seront tombées en poussière.

En tant que parlementaires, nous serons jugés à la mesure du respect que nous aurons manifesté à l'ensemble des Canadiens.

Le vice-président: Comme il est 18 h 35, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 35).