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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le vendredi 23 septembre 1994

RECOURS AU RÈGLEMENT

LE VOL 2033 DE KOREAN AIR

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA LOI FÉDÉRALE SUR LES HYDROCARBURES

    Projet de loi C-25. Étape du rapport 6071
    Motion d'approbation 6071
    Adoption de la motion 6071
    Motion portant troisième lecture 6071
    Adoption de la motion; troisième lecture et adoption du projet de loi 6076

LA LOI SUR LE MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE

    Projet de loi C-49. Motion portant deuxième lecture 6076

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LE MARATHON DE L'ÎLE DE MONTRÉAL

LE RÉFÉRENDUM DE 1992

LES REVENDICATIONS TERRITORIALES

LA SASKATCHEWAN

LE MEXIQUE

L'UNITÉ CANADIENNE

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 6080

LE RÉFÉRENDUM DE 1992

LES DROITS DE LA PERSONNE

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

    Mme Kraft Sloan 6081

LES FONCTIONNAIRES FÉDÉRAUX

LE RÉFÉRENDUM DE 1992

LES PERSONNELS DES SERVICES DE SECOURS D'URGENCE

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

ÉQUIPE-CANADA

L'ENVIRONNEMENT

QUESTIONS ORALES

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

L'ÉCONOMIE MONTRÉALAISE

    M. Mills (Broadview-Greenwood) 6084

LE RÉGIME ENREGISTRÉ D'ÉPARGNE-RETRAITE

    M. Speaker (Lethbridge) 6084
    M. Speaker (Lethbridge) 6084
    M. Speaker (Lethbridge) 6084

LE RÉFÉRENDUM DE 1992

    M. Gauthier (Roberval) 6085
    M. Gauthier (Roberval) 6085

LA SANTÉ

    M. Hill (Macleod) 6085
    M. Hill (Macleod) 6085

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 6086
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 6086

LA FONCTION PUBLIQUE

LA FRANCOPHONIE

    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 6087
    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 6087

LE MAINTIEN DE LA PAIX

LE COMITÉ DE SURVEILLANCE DES ACTIVITÉS DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ

    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 6087
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 6088

LA SANTÉ

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 6088
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 6088

LE PROGRAMME D'INFRASTRUCTURE

LE PATRIMOINE FAMILIAL

L'IMMIGRATION

LE COMMERCE INTERNATIONAL

AFFAIRES COURANTES

LOI SUR LE MINISTÈRE DU PATRIMOINE CANADIEN

    Projet de loi C-53. Adoption des motions portant présentation et première lecture 6090

PÉTITIONS

LE SUICIDE ASSISTÉ

LE IRVING WHALE

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

LE SUICIDE ASSISTÉ

LES AFFAIRES INDIENNES

LES CARTES DE TUEURS

L'AVORTEMENT

LE SUICIDE ASSISTÉ

L'AVORTEMENT

    M. Harper (Simcoe-Centre) 6091

L'EUTHANASIE

    M. Harper (Simcoe-Centre) 6091

LES DROITS DE LA PERSONNE

    M. Harper (Simcoe-Centre) 6091

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LE SUICIDE ASSISTÉ

LE SUICIDE ASSISTÉ

L'EUTHANASIE

LES DROITS DE LA PERSONNE

DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES

    M. Gauthier (Ottawa-Vanier) 6092

QUESTIONS TRANSFORMÉES EN ORDRES DE DÉPÔT DE DOCUMENTS

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI SUR LE MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE

    Projet de loi C-49. Reprise de l'étude de la motion 6092
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projet de loi etrenvoi à un comité 6104

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LA LOI SUR L'IMMIGRATION

    M. Hill (Macleod) 6110

6071


CHAMBRE DES COMMUNES

Le vendredi 23 septembre 1994


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

[Traduction]

RECOURS AU RÈGLEMENT

LE VOL 2033 DE KOREAN AIR

M. Nelson Riis (Kamloops): Monsieur le Président, Barry Woods, le commandant canadien du vol 2033 de Korean Air, qui s'est écrasé le 10 août et dont les 152 passagers et membres d'équipage ont eu la vie sauve grâce à ses efforts, était détenu par les Sud-Coréens. Ce matin, on a annoncé qu'il avait été remis en liberté et autorisé à rentrer au Canada pour y retrouver sa femme et sa famille.

Au nom de la famille du commandant Woods, je tiens à exprimer ma reconnaissance au ministre des Affaires étrangères pour ses efforts personnels, ainsi qu'à son ministère pour l'extraordinaire travail qu'il a accompli, en Corée du Sud et au Canada, afin de rendre cette réunion possible. Monsieur le ministre, au nom de la famille du commandant Woods, encore une fois merci!

_____________________________________________

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI FÉDÉRALE SUR LES HYDROCARBURES

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi fédérale sur les hydrocarbures, dont le comité a fait rapport (sans propositions d'amendement).

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien) propose que le projet de loi soit agréé.

(La motion est adoptée.)

Le vice-président: Quand lirons-nous ce projet de loi pour la troisième fois? Maintenant, avec votre permission?

Des voix: D'accord.

M. Irwin propose: Que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.

-Monsieur le Président, je ne pense pas que ce projet de loi soit très controversé. Il a l'appui de tous les partis, et donc je serai bref. Il s'agit plus d'un changement d'ordre administratif que d'une modification substantielle de ce qui se fait dans ce domaine. C'est le domaine du député. Je m'en souviens après la dernière série d'interventions.

Pour commencer, je voudrais remercier les députés d'avoir appuyé ce projet de loi à la deuxième lecture et en comité. Leur appui garantit des avantages à long terme et la stabilité à des douzaines de personnes, familles et entreprises associées au projet de Norman Wells.

Le projet de loi C-25 atteindra deux objectifs: premièrement, il va prolonger les emplois existants et créer des emplois ainsi que de nouveaux débouchés commerciaux. Deuxièmement, il va permettre une gestion responsable de l'un des gisements exploités les plus importants du Canada.

Comme le savent les députés, le projet de loi permettra la poursuite de l'exploitation des immenses champs pétrolifères de Norman Wells au-delà de l'an 2008, possiblement jusqu'à l'an 2020. Sans cette prolongation, la communauté de Norman Wells se retrouverait en difficulté économique puisqu'elle est grandement dépendante de l'industrie pétrolière.

Ce projet de loi comporte un élément humain important. Il s'agit ici de conserver les emplois existants et d'en créer de nouveaux dans une région qui dispose de peu de débouchés économiques. Il s'agit de préserver le mode de vie et la source de revenu de familles qui dépendent du projet Norman Wells depuis de nombreuses années.

L'information recueillie par suite de la prolongation de la période de production et au moyen de la technologie de pointe révèle que les limites du gisement devront être redéfinies et la date d'expiration reportée afin d'exploiter au maximum les possibilités de production.

L'Office national de l'énergie a effectué une étude indépendante de l'évaluation de la Compagnie pétrolière impériale et a appuyé la conclusion selon laquelle les régions limitrophes du gisement pétrolier débordent les limites de 1944 et que la durée de production va au-delà de l'an 2008 prévue par la société pétrolière.

(1005)

Il incombe au gouvernement, en tant que gestionnaire des ressources du Nord pour l'ensemble des Canadiens, de veiller à ce que le gisement de Norman Wells soit exploité à son maximum. La prolongation et l'expansion de l'accord concernant la zone prouvée permettra d'atteindre cet objectif stratégique.


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La pleine exploitation du gisement de Norman Wells servira les intérêts de tous les Canadiens. Les avantages seront particulièrement évidents dans le Nord et en Alberta, où se fait la majeure partie des investissements servant à la production et à l'exploitation. Les députés seront heureux d'apprendre, monsieur le Président, que cet argent est dépensé dans votre province d'origine.

Les contribuables canadiens retireront quelque chose de l'investissement du gouvernement dans Norman Wells, qui représente le tiers de l'ensemble des investissements dans ce projet. Cette participation devrait rapporter des millions de dollars supplémentaires en recettes après l'an 2008. Par ailleurs, la prolongation du projet assurera au gouvernement des millions de dollars de recettes sous forme de redevances. Ces deux sources de recettes amélioreront la situation financière générale du gouvernement et allégeront le fardeau des contribuables.

Je suis heureux de souligner qu'une partie des redevances provenant du gisement de Norman Wells sera versée aux autochtones de la région, conformément aux ententes sur le règlement des revendications territoriales. Les autochtones pourront utiliser cet argent pour améliorer leurs conditions de vie, accroître le nombre de projets de développement économique et, de façon générale, construire un meilleur avenir pour le Canada.

Enfin, la prolongation de la période de production du gisement de Norman Wells contribuera à revitaliser l'intérêt de l'industrie pour le Nord, surtout compte tenu que les ententes de règlement des revendications territoriales garantissent l'ouverture de nouvelles régions à l'exploration et au développement.

En approuvant le projet de loi C-25, nous faisons clairement savoir que le Nord canadien est une région ouverte aux investissements. Il y a de nombreux arguments en faveur de l'adoption du projet de loi et de la poursuite de la production du gisement pétrolier de Norman Wells. À ma connaissance, et je crois que les députés seront d'accord, il n'existe pas d'arguments de poids contre le projet.

Aussi, j'exhorte les députés à manifester encore une fois leur appui au projet de loi afin qu'il soit renvoyé rapidement à l'autre endroit et promulgué. Je sais que la compagnie pétrolière engagée dans le projet attend patiemment depuis plusieurs mois que la Chambre et le Sénat étudient le projet de loi. Cette société attend de pouvoir poursuivre ses activités. Je ne crois pas qu'il y ait dissension à la Chambre au sujet du projet de loi.

[Français]

M. René Canuel (Matapédia-Matane): Monsieur le Président, il me fait plaisir aujourd'hui d'intervenir sur le projet de loi C-25. Bien que ce projet de loi ne représente qu'une modification mineure du champ pétrolifère de Norman Wells, les impacts de cette modification n'en demeurent pas moins importants.

Le but de ce projet de loi est de soustraire l'accord amendé de Norman Wells à être signé, de la Loi fédérale sur les hydrocarbures. Pour bien comprendre le but de la modification, il faut faire un retour en arrière afin de comprendre l'évolution de ce puits de pétrole. Sa découverte remonte en effet à 1919 et les opérations de forage ont commencé en 1920.

L'éloignement du site des marchés et la crise économique des années 1930 n'ont pas été favorables au développement des premiers puits. L'extraction et le raffinage du pétrole produit se résumaient à combler les besoins locaux. La Seconde Guerre mondiale permit la relance de l'exploration et l'acheminement du pétrole vers Whitehorse par pipeline. La fin de la guerre en 1945 mit fin à ces opérations. De 100 barils par jour qu'elle était en 1940, la production a varié entre 1 500 et 25 800 barils par jour.

C'est en 1944 que le gouvernement du Canada signe un accord avec Imperial Oil pour assurer le développement du champ de Norman Wells. En 1966, on y produit plus de 2 000 barils de pétrole par jour qui servent surtout à alimenter les localités de la vallée du Mackenzie, la côte de l'Arctique ainsi que les stations radar du réseau Dew.

(1010)

En 1974, avec 54 puits productifs, c'est 2 738 barils de pétrole par jour et 4,9 millions de pieds cubes de gaz que l'on y produit. En 1981, le Cabinet permet à Esso Canada d'augmenter sa production qui atteint alors 25 000 barils de brut acheminé par pipeline jusqu'à Zama en Alberta.

Depuis cette date, plus de 200 puits par injection et puits productifs ont fait de Norman Wells le quatrième champ de pétrole au Canada pour sa production. La première livraison vers le sud s'est faite en avril 1985, grâce à un pipeline de 868 kilomètres de long, soit 65 ans après la découverte du gisement.

L'accord de 1944 accordait le droit et le privilège exclusifs de forage et de recherches minérales pour trois périodes de 21 ans. Cet accord fixait aussi les limites du champ pétrolifère. Cet accord, comme je l'ai dit tantôt, se termine donc en l'an 2008.

Le gouvernement canadien détient une participation au projet. Cette participation équivaut au tiers de la valeur de la production, moins le tiers de tous les coûts de production et de développement, ainsi que des frais de gestion. La compagnie Esso s'engageait aussi à verser 5 p. 100 de redevances annuelles sur les deux autres tiers de sa production.

En 1992, la production s'est élevée à 12,1 millions de barils de pétrole, ce qui a généré des gains de 50 millions pour le gouvernement. Le programme de forage entrepris en 1984 et de nouvelles technologies ont permis de forer des puits horizontaux tout en permettant de produire de façon économique le pétrole se trouvant aux limites du champ.

Les nouvelles technologies ont aussi permis de découvrir qu'il serait possible d'exploiter ce champ jusqu'en l'an 2020 si ses limites étaient agrandies.

L'Office national de l'énergie est en accord pour ajouter au champ ses parties périphériques afin d'aller récupérer le pétrole qui s'y trouve. C'est à cette étape que la Loi fédérale sur les hydrocarbures entre en ligne de compte. Cette loi prévoit aller en


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appel d'offres lorsqu'il s'agit d'accorder des droits de production.

Étant donné que la zone périphérique ne pourrait intéresser d'autres producteurs, surtout à cause des coûts que cela engendrerait, il devient donc nécessaire de changer la loi pour permettre l'extraction du pétrole de cette zone non comprise dans les accords de 1944.

À ce stade, il est important de souligner ce que d'autres intervenants pourraient penser de la modification des limites du champ pétrolifère de Norman Wells.

Dans un premier temps, l'Association canadienne des producteurs de pétrole se prononce en accord avec la modification des limites de Norman Wells, étant donné les circonstances très particulières dans ce cas. L'association, par contre, a fait savoir que cette modification ne doit pas être considérée comme un précédent pour les futures émissions de droits de production.

Pour leur part, en mars 1994, les autochtones ont donné leur aval au projet, à la condition que le projet de loi, relativement à l'Entente sur la revendication territoriale des Dénés et Métis soit approuvé avant l'entrée en vigueur de la modification à la Loi sur les hydrocarbures.

(1015)

Cette condition a été respectée et le Bloc québécois se félicite que le gouvernement ait pris acte de la volonté des peuples autochtones sur cette question. Cette position du gouvernement dénote une nouvelle tendance importante qu'il faudra conserver pour d'autres dossiers à venir.

L'exploitation des nouvelles limites comprises dans l'accord amendé de Norman Wells, qui devrait se signer en 1994, semble à priori bénéfique pour toutes les collectivités. Dans un premier temps, il permet à Impériale d'investir plus de trente millions de dollars dans un programme de développement, dont dix millions de dollars directement dépensés dans cette région nordique. On parle aussi de la création de 65 emplois directs, dont 40 p. cent seraient occupés par des résidents du Nord, et de nombreux emplois indirects chez les industries de service et autres entreprises.

Dans le projet de développement, on parle d'un marché de six millions de dollars relié aux équipements nécessaires au forage. Une compagnie en participation appartenant aux Dénés et aux Métis ainsi qu'Impériale, ont obtenu le contrat de forage. Comme de nouvelles technologies seront mises au point concernant les puits horizontaux, cette entreprise pourra acquérir les connaissances nécessaires pour participer à d'autres travaux de forage. On parle de plus d'investissements à long terme, surtout concernant l'utilisation de techniques de récupération assistée du pétrole.

Ces investissements pourront atteindre jusqu'à cent millions de dollars, dépendant de la période d'extraction du pétrole dans ce champ pétrolifère. Ce projet de loi semble répondre à des besoins autant pour l'industrie pétrolifère que pour les communautés autochtones qui en vivent. Il est important aussi que la Loi fédérale sur les hydrocarbures garde sa force pour l'octroi futur des droits d'exploitation. En qualité de critique de l'opposition officielle pour les ressources naturelles, et après consultation avec mes collègues, je ne m'opposerai pas à ce projet de loi et j'espère qu'il apportera tous les fruits qu'il semble démontrer.

[Traduction]

M. David Chatters (Athabasca): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui sur le projet de loi à l'étude. C'est la première fois que je prends la parole à titre de nouveau critique du Parti réformiste pour le pétrole et le gaz au sein du secteur des ressources naturelles.

Le projet de loi C-25 traite d'une question qui touche un région du Canada que je connais bien, puisque j'ai participé au forage de plusieurs puits d'exploration aux limites du gisement d'hydrocarbures de Norman Wells. Ce projet de loi apporte une modification mineure à la Loi fédérale sur les hydrocarbures pour qu'elle ne s'applique plus au Norman Wells Amending Agreement, lequel va être élargi et s'appliquer à des terres qui relèvent actuellement de cette loi.

Bien que ce ne soit qu'une modification mineure, il est important que ce projet de loi soit adopté, car c'est seulement après que le Norman Wells Amending Agreement aura été soustrait à l'application de la Loi fédérale sur les hydrocarbures que le gouverneur en conseil pourra donner suite à l'intention de reculer les limites des terres visées.

Même si je risque de répéter des choses qui ont été déjà été dites, je voudrais faire un bref historique de ce gisement, parler de la nécessité de ce projet de loi et mentionner les mesures positives que le gouverneur en conseil prendra pour prolonger la vie de ce gisement d'hydrocarbures.

L'histoire de ce gisement est longue, puisque le premier puits a été foré en 1920. Depuis, il s'est développé et c'est maintenant le quatrième gisement producteur au Canada. En 1994, la Compagnie pétrolière impériale et le Canada ont signé le Norman Wells Proven Area Agreement qui couvrait une superficie de 3 300 hectares.

Lorsque la Loi fédérale sur les hydrocarbures est entrée en vigueur, la zone visée par l'accord a été exemptée, puisqu'elle était régie par une autre loi. Grâce au projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui les futurs renouvellements et expansions seront pareillement exemptés.

Vu que les limites du gisement de Norman Wells changeront pour inclure de nouvelles zones de production, une nouvelle exemption à la Loi fédérale sur les hydrocarbures est nécessaire.

(1020)

Il importe de noter que l'accord de Norman Wells original a été signé avant que la Loi fédérale sur les hydrocarbures prenne effet. Les nouvelles terres qui s'ajouteront au gisement de Norman Wells en vertu de la modification des limites sont celles qui seraient normalement visées par la Loi fédérale sur les hydrocarbures. Cela signifie que sans modification, un appel


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d'offres public devrait être lancé pour l'attribution du permis de prospection et de la licence de production applicables à ces nouvelles terres. Cette modification est donc nécessaire pour préserver le mandat de la Compagnie pétrolière impériale et ainsi permettre de nouveaux investissements et l'amélioration des techniques de récupération appliquées à ce gisement.

De plus, cette modification assure au Canada la propriété du tiers de la production de ces nouveaux secteurs.

Outre l'expansion du champ exploité, la modification permettra la réalisation d'une autre initiative visant la prolongation de la durée d'exploitation du gisement. En effet, le gouverneur en conseil a décidé de prolonger jusqu'en l'an 2020 la licence de Impériale pour l'exploitation du gisement de Norman Wells.

Au sujet de l'évolution des techniques d'extraction employées par l'industrie, Impériale a perfectionné et expérimenté bon nombre des développements technologiques dans le gisement de Norman Wells. C'est à Norman Wells que le forage dirigé et, plus tard, le forage horizontal ont été mis au point, parce que les réserves gisent sous le lit du fleuve Mackenzie. Ces techniques sont maintenant utilisées dans le monde entier. Les techniques de construction d'îles dans des eaux qui gèlent en hiver et dégèlent au printemps ont aussi été mises au point dans cette région, puis appliquées dans le delta du Mackenzie et dans la mer de Beaufort.

D'autres techniques de reconditionnement des puits visant à stimuler la production, comme l'injection d'eau et de gaz, la rupture de formation et l'acidification, ont été mises au point dans ce gisement, pour une bonne part. Le Canada est ainsi devenu un exportateur mondial de technologie de production de pétrole, sans compter qu'au cours des 20 ou 25 dernières années, ces techniques nous ont permis d'augmenter les réserves récupérables dans nos champs de pétrole classiques, dans une proportion allant jusqu'à 15 p. 100. On a ainsi évité le déclin de la production classique de pétrole brut annoncé depuis longtemps.

À la suite de ces progrès de la technologie, on croit maintenant que le gisement de Norman Wells restera productif bien après la date limite prévue à l'origine. C'est pourquoi il importe que le gouverneur en conseil prolonge la durée de la licence, afin qu'on puisse extraire autant de pétrole que possible dans un délai réaliste.

Grâce à ce projet de loi prévoyant l'expansion de la zone d'exploitation du champ pétrolifère de Norman Wells et au décret autorisant la prolongation de la licence de Imperail Oil, cette société obtiendra le droit au maintien dans les lieux dont elle a besoin pour planifier à long terme et contrôler les frais généraux, garantissant ainsi la viabilité financière de ce champ pétrolifère pendant une période beaucoup plus longue.

D'aucuns ont assuré qu'un rendement serait éventuellement réalisé sur les gros investissements dans la nouvelle technologie. Ces investissements sont essentiels pour maximiser la production dans ce secteur.

Avec l'extension des limites et de la licence, Imperial Oil entreprendra un programme de forage de 30 millions de dollars. Ce programme sera exécuté surtout dans la zone additionnelle de réserves prouvées; plus précisément, 12 nouveaux puits, quatre pour l'injection d'eau et huit pour la production, seront forés le long des nouvelles limites du champ. Environ le tiers des fonds, ou dix millions de dollars, seront dépensés directement dans le Nord. La plus grande partie des 20 millions de dollars qui restent seront dépensés en Alberta, ma province.

J'espère que cette mesure montre que le gouvernement se rend compte qu'il est important d'assurer à nos industries basées sur les ressources la prévisibilité et la stabilité en matière de politique. Si le gouvernement commence à envoyer des signaux aux entreprises leur indiquant qu'elles peuvent sans crainte établir des plans d'investissement à long terne, il stimulera la croissance économique et la création d'emplois permanents beaucoup plus nombreux qu'il peut espérer le faire avec n'importe quel projet gouvernemental visant à créer artificiellement des emplois.

Ce projet de loi est excellent pour Imperail Oil, parce qu'il assure la stabilité en matière de planification. Il est avantageux pour les Dénés, les Métis du Sahtu et les autres résidents de cette région, qui pourront compter sur des débouchés et des rentrées de fonds dans l'économie locale pendant de nombreuses années encore. Il est bon pour les Canadiens en général, puisqu'il générera encore plus de recettes et de redevances pétrolières.

À mon avis, la seule ombre au tableau, c'est qu'il a fallu plus de deux ans pour que ce projet de loi tout simple franchisse un processus lourd et rigide, même si aucun parti ne s'y est opposé de quelque manière que ce soit.

Mon parti et moi-même appuyons ce projet de loi et invitons tous les députés à faire de même.

(1025)

M. Nelson Riis (Kamloops): Monsieur le Président, j'appuie moi aussi le projet de loi et me réjouis, à l'instar de l'orateur précédent, de constater qu'on reconnaît enfin, dans cette mesure législative, les travaux de développement technique effectués par la Compagnie pétrolière impériale. Ce projet de loi sera utile à la compagnie pétrolière de même qu'au processus de règlement de la revendication territoriale des Dénés et Métis du Sahtu.

Les Dénés de la région profiteront directement de la situation, surtout du grand contrat de 6 millions de dollars ainsi que du contrat conditionnel accordé à la société Shatta Drilling Ltd, une coentreprise des Dénés-Métis et de la Compagnie pétrolière impériale. Tout cela est de bon augure pour le développement ultérieur du Nord et du Canada en général.

Comme le signalait également l'orateur précédent, les Canadiens profiteront de cette ressource de deux façons: grâce premièrement au versement des redevances et deuxièmement à la participation aux bénéfices. Il me semble que cette association entre le gouvernement fédéral, les Canadiens, la Compagnie pétrolière impériale du Canada et les premières nations du Nord offre un excellent modèle sur lequel on pourrait fonder le développement ultérieur du Nord.

Je me posais certaines questions sur l'objet de ce projet de loi. Je tiens à remercier le ministre, de même que ses adjoints, qui ont clarifié certains points. Par exemple, je n'étais pas sûr si la Loi sur le règlement de la revendication territoriale des Dénés et Métis du Sahtu avait été proclamée. C'était l'une des conditions qu'ils imposaient avant de donner leur accord. On m'a dit que la loi était en vigueur.

Je m'inquiétais aussi de la nouvelle technologie qui serait utilisée. L'orateur précédent a précisé que la nouvelle technologie avait été élaborée dans cette partie du Canada et qu'on avait prêté une attention particulière au forage horizontal


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qui permet de contourner les secteurs écologiques fragiles. Très franchement, c'est une bonne technologie qui contribuera au développement non seulement d'autres régions septentrionales du Canada mais, en fait, d'autres régions du monde écologiquement fragiles.

La question était de savoir si la production accrue de pétrole qui découlera du forage horizontal influera sur le système des redevances. Le ministre m'assure que non. Il s'agissait aussi de savoir si l'on mènera en permanence des études environnementales à l'égard de cette situation nouvelle découlant du forage horizontal. Encore là, le ministre a fait savoir que l'Office national de l'énergie, entre autres organismes, surveillera les répercussions environnementales de ce projet.

Je tiens en outre à reconfirmer que, conformément à cet accord, le tiers des profits continuera d'aller au peuple canadien. Après tout, comme la ressource appartient au peuple canadien, il est normal que celui-ci profite directement de son exploitation. Cela est confirmé aussi.

Ce programme de forage de 30 millions de dollars, qui donnera huit puits productifs, engendrera non seulement des possibilités d'emploi dont les gens de la région ont certes besoin, mais encore les retombées dont j'ai déjà parlé pour tout le Canada.

Au nom de mes collègues, je tiens à dire que nous allons appuyer ce projet de loi avec enthousiasme. Je partage, toutefois, la préoccupation du député qui vient de parler quant au temps que l'on prend pour adopter un projet de loi aussi simple. La lenteur avec laquelle il traverse les étapes du processus parlementaire en dit long sur notre façon de travailler et nous incitera peut-être à accélérer l'adoption des projets de loi, surtout quand ils sont aussi simples.

Toutefois, je suppose qu'il importait, conformément à la Loi sur le règlement de la revendication territoriale des Dénés et Métis du Sahtu, d'avoir l'accord des autochtones là-dessus. Cela a peut-être pris plus de temps que prévu.

Dans l'ensemble, je crois qu'on a bien compris le problème. Notre procédure est pour le moins lourde et nous devrions tous nous efforcer à l'avenir d'accélérer l'adoption des projets de loi. Le monde change rapidement autour de nous alors que nous prenons encore tout notre temps.

M. John Loney (Edmonton-Nord): Monsieur le Président, je suis très heureux de pouvoir apporter mon appui à cet important projet de loi. Il est vrai que le projet de loi C-25 ne contient qu'une petite modification, mais elle aura de grandes répercussions à Norman Wells et dans d'autres collectivités du Nord. Comme mon collègue, le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, l'a souligné, le projet de loi vise deux grands objectifs.

Dans un premier temps, il garantira la gestion responsable d'une importante ressource naturelle. Quelqu'un a déjà expliqué en quoi le projet de loi garantit une saine gestion des ressources. Je suis convaincu que la plupart des députés reconnaîtront que de telles mesures sont nécessaires pour protéger nos ressources.

(1030)

Quant au deuxième objectif du projet de loi C-25, il s'agit du renforcement de l'économie du Nord. L'adoption de la mesure législative permettra le maintien et l'expansion de l'emploi et des possibilités d'affaires. De mon point de vue, cet objectif justifie le projet de loi.

Un peu d'histoire s'impose pour bien faire comprendre l'important rôle économique que le champ pétrolifère de Norman Wells a eu dans le Nord et le nouveau rôle qu'il pourrait avoir après l'adoption du projet de loi.

En 1994, le gouvernement du Canada a conclu avec la Compagnie pétrolière impériale un accord portant sur l'exploitation du champ de Norman Wells, qui est situé dans la vallée du Mackenzie. L'accord précisait les limites de la zone contenant les réserves prouvées et fixait une limite de production.

À l'époque, on prévoyait que le champ serait productif jusqu'en 2008, au plus tard. Cependant, grâce aux progrès technologiques, nous savons maintenant que le champ pourra être productif pendant bien plus longtemps. En fait, il devrait être exploitable jusqu'en 2020 au moins.

Les progrès technologiques des 50 dernières années nous ont aussi permis d'acquérir une meilleure connaissance des réserves de pétrole de la région de Norman Wells. Cependant, il a été démontré qu'une petite partie des réserves se trouvaient à l'extérieur de la zone délimitée à l'origine. Comme le savent les députés, le projet de loi C-25 étend la zone d'exploitation de manière à inclure toutes les réserves prouvées.

Que signifie le projet de loi C-25 pour la population de Norman Wells et d'autres collectivités du Nord? En termes simples, elle signifie stabilité et croissance économiques. Les activités liées au projet Norman Wells amènent des millions de dollars chaque année dans le Nord.

Ce projet représente une part importante du chiffre d'affaires de plus de 50 sociétés à Norman Wells et dans d'autres localités du Nord, en plus des retombées indirectes qu'il apporte à ces sociétés et à d'autres entreprises.

Pour mieux comprendre la situation, pensons un instant à l'effet qu'une réduction des dépenses des employés du champ de Norman Wells aurait sur les entreprises. Compte tenu du fait que le projet verse quelque 3,7 millions de dollars en salaires aux résidents du Nord, une telle perte aurait certainement des effets économiques dévastateurs sur les petites entreprises.

Pensons maintenant aux effets positifs qu'aurait une augmentation de la taille et de la production du champ de Norman Wells. L'adoption du projet de loi à l'étude ouvre la voie à un programme de forage de 30 millions de dollars qui sera entrepris par la Compagnie pétrolière impériale, celle qui exploite le champ de Norman Wells.

Ce projet et la prolongation de la vie productive du champ en général contribueront à accroître l'emploi à court terme et à stabiliser l'emploi à long terme dans la région de Norman Wells. On estime que des emplois indirects additionnels représentant au total 25 années-personnes seront également créés dans le Nord.


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Les entreprises du Nord auront aussi l'occasion d'apprendre les techniques modernes de forage horizontal, ce qui ouvrira des portes à ces entreprises non seulement dans le Nord, mais aussi en Alberta et en Colombie-Britannique, où ce genre d'expertise est très recherchée.

Les avantages économiques de ce petit amendement à la Loi fédérale sur les hydrocarbures ne s'arrêtent pas au 60e parallèle. En fait, tous les Canadiens bénéficieront de l'adoption de ce projet de loi.

Les recettes fiscales additionnelles que verseront les sociétés et les particuliers contribueront à améliorer la position financière du gouvernement du Canada, et la participation à 33 p. 100 du gouvernement dans le projet de Normal Wells devrait rapporter des millions de dollars de plus.

Les Albertains bénéficieront de ce projet sur le plan économique. À un moment où les Canadiens recherchent des stimulants économiques, ce projet représente clairement une occasion unique. Je prie instamment les députés d'appuyer ce projet de loi afin que le renouvellement économique puisse se poursuivre.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

* * *

(1035)

LA LOI SUR LE MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire) propose: Que le projet de loi C-49, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Agriculture et abrogeant ou modifiant certaines lois, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Monsieur le Président, je suis heureux de prendre aujourd'hui la parole pour lancer le débat sur le projet de loi C-49, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Agriculture et abrogeant ou modifiant certaines lois.

La mesure à l'étude reflète à certains égards le genre de changements que l'industrie agricole et agroalimentaire canadienne a subis ces dernières années et auxquelles elle peut s'attendre pour les années à venir.

Les modifications ajoutent le terme «agroalimentaire» au nom du ministère, reconnaissant ainsi que la mission du ministère va bien au-delà de l'exploitation agricole. Ce changement reconnaît également que ce qui se passe dans l'exploitation agricole et au-delà est intimement lié. La force de l'agriculture primaire dépend dans une grande mesure de la force de toutes les industries en aval dans la chaîne alimentaire qui transforment et utilisent les produits agricoles.

La mesure à l'étude définit également avec plus de précision les responsabilités du ministère en matière de recherche. La loi existante ne mentionne qu'indirectement la recherche en faisant allusion aux stations agronomiques. Le projet de loi élargit le mandat du ministère pour englober la recherche dans les domaines de l'agriculture et des produits dérivés de l'agriculture, notamment l'exploitation de stations agronomiques.

Cet éclaircissement du mandat du ministère ne diminue en rien l'engagement de notre gouvernement à l'égard des agriculteurs canadiens en tant que producteurs de produits primaires. Il le renforce au contraire en confirmant qu'il est important de maintenir et d'accroître la santé et la prospérité de toute l'industrie agricole et agroalimentaire.

Les agriculteurs occupent et occuperont toujours une place centrale dans l'industrie agricole. Cela étant, le ministère continuera donc de consacrer une très forte proportion de ses ressources aux agriculteurs. Mais il est également de plus en plus nécessaire de tenir compte des produits des producteurs agroalimentaires canadiens. Nous devons être toujours plus conscients que le développement des marchés est important non pas seulement pour les produits bruts, mais de plus en plus pour les produits à valeur ajoutée.

Des débouchés s'offrent à l'industrie agricole pour fournir des ingrédients pour la fabrication de produits pharmaceutiques, de produits cosmétiques, de peintures et de produits énergétiques tout comme pour celle des produits alimentaires. Nous voulons être assurés que les systèmes sont en place pour fabriquer ces produits et veiller à ce qu'ils atteignent les marchés auxquels ils sont destinés.

Avant toute chose, nous devons veiller à ce que les produits de l'agriculture et de l'élevage qui sont en demande sur ces marchés soient effectivement produits et à ce que nous ayons les services de recherche et la technologie voulue pour fabriquer les produits transformés qui sont en demande dans le monde entier. C'est là qu'intervient la fonction de recherche du ministère, aussi bien pour développer les produits de base que pour leur trouver de nouvelles utilisations.

Le service de recherche du ministère a fait des travaux dont ont bénéficié les secteurs primaire et secondaire de l'agriculture pendant de longues années, et il s'est acquitté de cette tâche avec brio. Les modifications proposées dans le projet ne font que tenir compte du travail qui se fait effectivement dans la définition des responsabilités du ministère en matière de recherche.

Il conviendrait maintenant de dire un mot du mandat du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. À l'aube du prochain siècle, il est temps de s'interroger sur l'avenir que nous entrevoyons pour le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire à l'horizon des années 2000, 2005 et 2010.

Il s'agit d'un secteur crucial pour notre pays. Il représente 8 p. 100 de notre produit intérieur brut et procure 1,8 million d'emplois, soit 15 p. 100 de tous les emplois au Canada. La valeur des exportations annuelles de produits agricoles et alimentaires dépasse les 13 milliards de dollars. En 1992, des facteurs de production évalués à 10,5 milliards ont permis une production agricole de 20 milliards, ce qui s'est traduit par une production de denrées alimentaires transformées et de boissons de 44 milliards.


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(1040)

Le secteur agricole et agroalimentaire améliore la qualité de la vie au Canada aussi bien dans les campagnes qu'à la ville. Il produit des aliments sains et d'excellente qualité. Grâce à lui, les Canadiens arrivent au deuxième rang des pays qui dépensent la moins grande part de leur revenu disponible pour l'alimentation.

Il importe de veiller à ce que cette industrie si essentielle à tous les Canadiens continue de prospérer. Les secteurs agricole et agroalimentaire du Canada doivent être en mesure de soutenir la concurrence dans ce monde qui change rapidement. Il nous faut une vision commune partagée par le gouvernement et l'industrie pour faire passer le secteur agroalimentaire dans le XXIe siècle. De cette façon, nous pourrons prendre les décisions qu'il faudra pour assurer notre avenir.

Le monde dans lequel évolue l'industrie agricole et agroalimentaire du Canada a beaucoup changé depuis 25, 10 ou même 5 ans. Par exemple, dans le secteur du grain et des oléagineux seulement, les marchés pour les produits canadiens ont radicalement changé. Il n'y a pas si longtemps, nous comptions sur des marchés céréaliers en vrac habituels valant des milliards de dollars comme l'Union soviétique et la Chine.

Nombre de ces marchés ont maintenant été remplacés par des marchés plus variés et un peu plus petits et fragmentés. Les acheteurs sont de plus en plus exigeants. Notre marché aux États-Unis s'est accru à presque 60 p. 100 des exportations agroalimentaires jusqu'à maintenant cette année.

D'ici l'an 2010, la population rurale devrait augmenter encore de deux milliards de personnes. Au cours des cinq années à venir, les revenus de régions comme l'Asie et le Pacifique devraient augmenter de 6 à 12 p. 100 par année. Les revenus devraient également s'accroître en Afrique, en Amérique latine et au Moyen-Orient.

Par suite de ces hausses de revenus et de l'amélioration de la qualité de vie que cela entraîne, les habitudes de consommation globales vont changer, et on consommera plus de produits contenant des protéines animales et de produits davantage transformés que jamais auparavant. Parallèlement, les marchés d'exportation clés comme les États-Unis demeurent d'une importance capitale pour que notre industrie continue de se développer et de prospérer.

Du point de vue interne, nous sommes aussi confrontés à des marchés en mutation ainsi qu'à des contraintes financières imposées par les budgets provinciaux et fédéraux. L'industrie agricole et agroalimentaire canadienne est-elle prête à répondre à la demande en pleine mutation partout dans le monde? Est-elle prête à réagir au changement au Canada même?

Cette industrie est forte à bien des égards. La valeur de notre production agricole continue de croître d'environ 2 p. 100 par année. Le taux de croissance de la productivité est élevé comparativement aux normes internationales. Nombre d'entreprises de transformation visent de plus en plus les marchés mondiaux.

L'industrie agricole et agroalimentaire du Canada possède de solides bases comme des ressources naturelles abondantes, des pratiques écologiques saines, des ressources humaines qualifiées et productives, une infrastructure et des institutions bien développées ainsi qu'un climat d'exploitation raisonnablement stable. Cependant, il y a des secteurs où nous devons faire beaucoup mieux.

À l'heure actuelle, les coûts de commercialisation et de transformation sont plus élevés au Canada que chez un bon nombre de nos concurrents; de plus, il se fait moins de recherche dans le secteur privé ici que dans ces pays. Même si le Canada exporte des produits agroalimentaires à plus grande valeur ajoutée aux États-Unis, nos importations croissent plus vite que nos exportations et nous perdons des occasions de vendre des produits agroalimentaires à plus grande valeur ajoutée. Nos exportations de produits à plus grande valeur ajoutée vers des pays autres que les États-Unis, notamment vers les marchés asiatiques où le niveau de vie et la demande augmentent rapidement, connaissent une faible croissance.

(1045)

En 1993, avec l'appui des ministres fédéral et provinciaux de l'Agriculture, notre industrie s'est fixé un objectif de 20 milliards de dollars d'ici l'an 2000 pour les exportations de produits agricoles et agroalimentaires. Pour atteindre cet objectif, l'industrie ainsi que les gouvernements fédéral et provinciaux devront travailler plus fort afin de relever les défis du marché mondial.

Le taux de croissance actuel de nos exportations agroalimentaires ne sera en effet pas suffisant pour que nous atteignions cet objectif de 20 milliards de dollars d'ici l'an 2000. Des changements s'imposent si nous voulons que l'agriculture et l'industrie agroalimentaire canadiennes connaissent croissance et prospérité à l'aube du prochain siècle.

Si nous prenons l'exemple des céréales et des oléagineux, il est clair que, dans ce secteur, des changements commencent à se produire. Les agriculteurs commencent à diversifier leurs activités, délaissant certaines cultures traditionnelles comme le blé au profit de cultures plus nouvelles comme celles des graines de moutarde, des graines à canaris et des lentilles, et plus particulièrement du colza canola.

La superficie employée pour les cultures spécialisées a augmenté d'environ 130 p. 100 de 1988 à 1994. Durant la même période, la superficie utilisée pour la culture du blé a chuté d'environ 15 p. 100. Alors que les agriculteurs commencent à diversifier leurs activités en délaissant les cultures traditionnelles, notre système de manutention et de transport doit satisfaire à de nouveaux défis et exigences, étant donné que les produits de ces différentes cultures peuvent désormais être exportés.

Comme nous le savons tous, au cours de la dernière campagne agricole, nous avons connu de très graves problèmes de transport des céréales et des oléagineux, problèmes attribuables en partie à un manque de wagons et à un certain nombre d'autres facteurs dont les effets se sont conjugués en même temps. Comme je l'ai expliqué à la Chambre à d'autres occasions, nous nous occupons de ces questions, de manière à éviter le plus possible, pour la campagne agricole actuelle et les prochaines à venir, le genre de problèmes que nous avons éprouvés l'an dernier.

Toute cette expérience concernant notre système de manutention et de transport du grain place au premier plan la question de savoir si le système canadien a le matériel nécessaire pour satisfaire aux demandes des marchés internationaux qui évoluent rapidement.


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Nous devons aussi examiner la question de la technologie et nous assurer que le Canada ne traîne pas de l'arrière. Ainsi, on s'attend à ce que l'utilisation des céréales et des oléagineux et d'autres produits agricoles augmente de manière spectaculaire dans les prochaines années. Selon certaines prévisions, aux États-Unis et en Europe, jusqu'à 50 p. 100 des produits agricoles non transformés serviront dans l'avenir à des fins industrielles non alimentaires.

Le Canada investit-il suffisamment dans la recherche nécessaire pour élaborer de nouveaux produits à partir de nos céréales, nos oléagineux et nos autres denrées agricoles?

Il y a beaucoup d'autres questions au programme en ce qui concerne la renouvellement de nos systèmes de gestion de l'offre, le secteur de la viande rouge, les problèmes horticoles et les défis que doivent relever tous les secteurs de l'agriculture canadienne.

Manifestement, le fait d'être confrontés à ces questions et ces défis nous ouvre en même temps d'énormes débouchés. Nous devons nous donner une vision commune pour que les décisions prises aujourd'hui et les initiatives lancées à l'avenir fassent partie d'un plan global à long terme qui assurera la survie d'un secteur agricole et agroalimentaire progressiste, compétitif et prospère.

Selon moi, cette vision de l'avenir doit englober au moins cinq éléments essentiels. Premièrement, elle doit être basée sur la réalité économique. Si les assises sont artificielles, tout notre plan s'effondrera.

La réalité fondamentale, c'est le marché. Nous devons produire ce qui se vend bien sur le marché mondial. Il faut le faire de façon rentable et nous diversifier. Nous devons être de bons gestionnaires et savoir commercialiser nos produits sur le marché international. Il s'agit d'établir des alliances stratégiques aux niveaux national et international. Nous devons nous assurer que les profits sont répartis équitablement entre toutes nos régions et tous ceux qui ont un rôle à jouer dans cette complexe chaîne alimentaire.

(1050)

Deuxièmement, notre vision doit tenir compte du fait que le Canada rural n'est pas un trou perdu. Il peut, en fait, être la source de la création de richesses et d'emplois et d'une certaine croissance économique.

La diversification sur l'exploitation agricole et à l'extérieur, la transformation des produits pour leur donner une valeur ajoutée et l'exploitation de créneaux, notamment sur le marché des exportations, sont toutes des choses qui font partie de cette équation pour le Canada rural, au même titre que la recherche et le développement, de même la technologie de l'information qui relie les gens de Sedley, en Saskatchewan, à Toronto, Vancouver, puis Osaka et Hong Kong.

La troisième exigence relative à notre vision est la sécurité financière. Je n'ai pas encore rencontré d'agriculteurs qui m'ont dit vouloir être subventionnés. Ils veulent un marché acceptable leur permettant de produire un rendement suffisant.

Des exploitations agricoles bien gérées devraient pouvoir s'attendre à un taux de rendement raisonnable, même si, dans certains cas, ce rendement peut devoir être augmenté à l'aide d'un certain revenu extra-agricole. Les conditions climatiques et d'autres risques en matière de production et de commercialisation nécessiteront toujours un programme de sécurité du revenu agricole, mais les recettes fiscales des gouvernements fédéral et provinciaux sont rares et cette protection du revenu ne doit pas fausser les signaux de production ou de commercialisation.

Quatrièmement, nous devons assurer la viabilité des ressources et de l'environnement. Nous devons établir entre les facteurs socio-économiques et environnementaux un équilibre délicat et raisonnable fondé sur l'accroissement de notre base de ressources, le maintien des écosystèmes environnants et l'élaboration, l'adaptation et la commercialisation de nouvelles technologies visant à protéger notre environnement. En fait, notre gestion de l'environnement pourrait devenir pour le Canada une occasion d'exportation unique et nouvelle.

Le cinquième et dernier élément de cette vision que je voudrais mentionner pour le moment, c'est le maintien de matières premières sûres et salubres pour l'industrie alimentaire. Il s'agit réellement du fondement sur lequel repose tout le reste. La salubrité des aliments est une priorité au Canada et doit continuer de l'être. Notre réputation dans le domaine de la salubrité et de la qualité des aliments est indispensable aux consommateurs canadiens et représente un atout crucial sur les marchés internationaux.

Nous devons réduire nos coûts d'inspection sans nuire à l'ensemble de notre système d'inspection, mais plutôt en l'améliorant. Nous pouvons atteindre cet objectif à l'aide d'un système national, sans dédoublements, qui est adapté aux besoins du marché et aux normes internationales, et qui comporte d'autres options de distribution.

Ce dont j'ai parlé au cours des derniers instants, c'est d'un cadre dans lequel j'estime que nous pouvons concevoir un plan raisonnable et solide pour les terres agricoles et le secteur agroalimentaire du Canada. Ce plan n'est pas encore exhaustif et n'est certes pas immuable, mais je pense qu'il constitue un bon point de départ.

On ne peut pas prédire l'avenir, pas plus que l'on ne peut l'empêcher. Nous devons définir le meilleur scénario possible, déterminer nos objectifs et établir les étapes nécessaires qui devraient mener à leur réalisation. J'espère que nous serons en mesure d'y parvenir, grâce à un consensus le plus large possible et à la collaboration de tous et chacun.

En terminant, je tiens à dire que je suis très optimiste en ce qui concerne notre industrie agroalimentaire et que je crois beaucoup en son avenir. On ne peut rien garantir, mais comme Wayne Gretzky a déjà dit: «On rate évidemment tous les lancers que l'on n'essaie pas d'exécuter.» Nous devons commencer à lancer la rondelle en direction du filet et nous devons marquer. C'est précisément ainsi que nous voyons l'avenir de l'agriculture au Canada.

Si nous accordons une grande attention au marché, si nous utilisons sagement nos maigres ressources financières en ayant recours à la diversification, à l'innovation et à la valeur ajoutée, si nous administrons bien nos ressources naturelles, si nous mettons en valeur nos ressources humaines, si nous accordons une priorité aux régions rurales et aux collectivités, si nous observons des normes internationales strictes et si nous sommes tous animés de la même volonté de réussir, nous serons à même d'atteindre les objectifs que nous avons énoncés dans notre livre rouge de l'an dernier, c'est-à-dire la croissance, les emplois, la

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sécurité. L'agriculture et le secteur agroalimentaire peuvent jouer un rôle très important.

(1055)

[Français]

M. André Caron (Jonquière): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir au nom du Bloc québécois sur le projet de loi C-49 présenté par le ministre de l'Agriculture, qui vient modifier la loi qui régit son ministère.

Essentiellement, le projet de loi a pour but de changer le nom du ministère. Le ministère deviendra celui de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. Cette désignation, comme le ministre nous l'a précisé dans son exposé, vient confirmer le fait qu'aujourd'hui, les responsabilités du gouvernement en ce qui concerne l'agriculture ne se limitent pas à aider les producteurs agricoles, car l'avenir économique de ceux-ci est grandement conditionnée par le fait que leurs produits doivent être transformés, commercialisés et distribués.

Je pense que c'est la responsabilité d'un pays de voir à ce que son secteur agricole, secteur dont on connaît l'importance dans la vie des nations, dans la vie des peuples, se développe de façon harmonieuse.

Le ministre a précisé, dans son exposé, ses responsabilités en ce qui concerne la commercialisation. Je pense que c'est un domaine important. Au Québec, j'ai eu connaissance de réclamations faites par des producteurs de fromage fin par exemple qui voyaient le problème principal de leur industrie comme étant celui de la distribution. J'espère que ce projet de loi permettra au ministère, dans de tels cas, d'aider nos producteurs à distribuer leurs produits.

Il est sûr que la responsabilité du ministère de l'Agriculture dans un État moderne dépasse la simple attention à la production agricole comme telle. Que ce soit dans le domaine de la distribution, de l'aide aux producteurs, ou au soutien à apporter aux gens qui transforment nos produits agricoles, l'État doit exercer ses responsabilités jusque-là. D'autant plus qu'on sait qu'avec la mondialisation des marchés, il faudra exporter.

Je crois que le temps est fini, et le ministre l'a d'ailleurs mentionné dans son exposé, où on exportait des produits bruts. On exportait par exemple en Russie des quantités énormes de blé. Je pense qu'il va falloir raffiner nos politiques dans ce domaine-là et que nous devrons prendre des mesures pour que nos produits soient transformés ici, parce que l'agriculture-le ministre l'a aussi mentionné-fournit un nombre important d'emplois au Canada. L'aval de l'agriculture, toute l'industrie de la transformation, est très important à cet égard-là.

Il est donc important que le ministère de l'Agriculture vise à améliorer notre compétitivité, notre autonomie par rapport aux pays étrangers et assure l'avenir de notre système agricole. Il est aussi essentiel que le ministère de l'Agriculture fasse sa part en ce qui concerne la recherche. Le projet de loi mentionne qu'il a des responsabilités dans ce domaine.

Il est ironique, et je voudrais le souligner, que lundi dernier, on ait déposé le projet de loi C-50 visant la Commission canadienne du blé dans lequel on proposait que des retenues soient faites sur les ventes pour aider la recherche. J'ignore si, à l'avenir, on demandera le même effort des autres secteurs agricoles. Sinon, on pourrait se demander si les producteurs de blé ne subventionnent pas deux fois, par leurs taxes et par les retenues sur leurs ventes, les recherches en agriculture? Ce sera à voir à l'avenir.

Vous pouvez constater, par mon intervention, que le Bloc québécois est favorable à l'adoption de ce projet de loi, quoique ce projet ne règle pas du tout la question des chevauchements. Il me fera plaisir de préciser ce que j'entends par cela après la période qui suit.

Le vice-président: Comme il est 11 heures, conformément à l'article 30(5) du Règlement, la Chambre procédera maintenant aux déclarations de députés, conformément à l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


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DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Français]

LE MARATHON DE L'ÎLE DE MONTRÉAL

M. Martin Cauchon (Outremont): Monsieur le Président, c'est avec fierté que je rends hommage et félicite aujourd'hui les organisateurs et tous les bénévoles qui ont rendu possible la troisième édition du Marathon de l'île de Montréal qui a eu lieu dimanche dernier dans les villes d'Outremont, Mont-Royal, Saint-Laurent et auquel j'ai eu moi-même l'honneur de participer.

Cet événement sportif d'envergure internationale engendre pour la grande région de Montréal des retombées économiques directes évaluées à plusieurs millions de dollars. Il a rassemblé encore cette année plus de 6 000 athlètes dont plusieurs venaient de tous les coins du monde. Bref, le marathon du 18 septembre dernier fut un éclatant succès.

En terminant, je désire souligner d'une façon particulière la participation de 1 200 bénévoles qui se sont donné la main pour faire de cette importante manifestation sportive une aussi grande réussite. Je veux attirer l'attention sur l'excellent travail qu'ils ont accompli et je les en remercie bien sincèrement.

* * *

LE RÉFÉRENDUM DE 1992

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Monsieur le Président, encore une fois, le premier ministre du Canada prend un malin plaisir à faire payer au Québec son appartenance au Canada.

Ce premier ministre a fait tout ce qu'il fallait pour susciter l'amour des Québécois et des Québécoises à son égard. Il a participé à la proclamation des mesures de guerre de 1970. Il a été l'artisan de la nuit des longs couteaux. Il est celui qui a remercié le premier ministre terre-neuvien, Clyde Wells, d'avoir coulé l'Accord du lac Meech.

Et maintenant, il est celui qui agit en mauvais payeur refusant de rembourser la contribution du Québec au référendun de 1992 tenu selon la loi du Québec avec l'accord du gouvernement fédéral du temps.

Monsieur le premier ministre, vous n'êtes cohérent qu'avec vous-même lorsque vous démontrez tant de mépris envers le peuple québécois, et ce dernier est en mesure de vous juger quand il observe qui défend les intérêts du Québec en cette Chambre.


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Vous nous accusez d'avoir été élus sous de fausses représentations, nous vous répliquons que vous usurpez la fierté et l'honneur du peuple québécois.

* * *

[Traduction]

LES REVENDICATIONS TERRITORIALES

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin): Monsieur le Président, je voudrais attirer l'attention de la Chambre sur la nécessité de rendre publiques les négociations sur les revendications territoriales en Colombie-Britannique.

Le 20 septembre, le premier ministre Harcourt a cédé à la pression publique et a affirmé vouloir favoriser la transparence du processus. Certaines mesures ont été prises pour que les gouvernements municipaux participent aux négociations des traités, mais il faut faire davantage.

Comme le premier ministre provincial l'a déclaré récemment, les négociations à huis clos et la confidentialité obligatoire ont ébranlé la confiance du public.

L'atmosphère est à l'incertitude et à la peur dans les collectivités en cause. Les négociations se sont déroulées en secret et le citoyen moyen est craintif. La gestion des affaires publiques doit se faire ouvertement et non derrière des portes closes. Les gens qui subiront les conséquences des décisions devraient pouvoir participer au processus décisionnel.

Je demande donc au gouvernement fédéral de suivre l'exemple du premier ministre provincial et de permettre aux citoyens de participer aux négociations afin de rétablir la confiance du public à l'égard d'un processus entouré depuis trop longtemps d'un mystère injustifié.

* * *

LA SASKATCHEWAN

Mme Georgette Sheridan (Saskatoon-Humboldt): Monsieur le Président, je veux traiter de trois sujets: la Saskatchewan, l'immigration et les anniversaires.

Ma province, la Saskatchewan, s'est jointe à la Confédération en 1905. Ce sont les politiques visionnaires d'un autre premier ministre libéral en matière d'immigration, celles de M. Laurier, qui ont ouvert l'Ouest à la colonisation et aux immigrants venant de tous les coins de la planète.

Les colons se sont installés dans un territoire que Connie Kaldor, de la Saskatchewan, a décrit comme un lieu dur et impitoyable. Il offrait toutefois l'indépendance et bien des possibilités, des trésors suffisamment précieux pour compenser la poussière et les engelures.

Nous célébrerons l'année prochaine le 90e anniversaire de la Saskatchewan, le 90e anniversaire de la visite de Laurier dans l'Ouest. En moins d'une génération, la vie en Saskatchewan est passée de l'époque des chars à boeufs des pionniers aux télécopieurs d'aujourd'hui.

Je pense ici à Herbert S. Wright, un immigrant anglais né ce jour-ci en 1907. Stan et sa femme Peggy ont élevé trois enfants, ce qui n'était certes pas une tâche facile au début de la grande crise, mais les Wright ont relevé les défis et ils en ont tiré force et prospérité.

Les immigrants, ou pionniers comme on les appelle parfois, ont aussi contribué à faire du Canada un pays fort.

* * *

LE MEXIQUE

M. Andrew Telegdi (Waterloo): Monsieur le Président, le 21 août 1994 était jour d'élections au Mexique. Je faisais partie, tout comme le député de Louis-Hébert, d'une délégation de neuf personnes représentant le Centre international des droits de la personne et du développement démocratique, situé à Montréal. Cette délégation était dirigée par Ed Broadbent et financée par le gouvernement du Canada.

Nous faisions partie d'un groupe de mille observateurs étrangers invités par le mouvement Accion Civica, une organisation politiquement indépendante regroupant des dizaines de milliers de Mexicains qui revendiquent la tenue d'élections justes et l'instauration d'une société civile au Mexique.

(1105)

Au dire de tous, les résultats des élections au Mexique, malgré de nombreuses failles, ont bien représenté la volonté des Mexicains. Vu les rapports étroits que nous entretenons avec le Mexique, en raison de l'ALENA, les Canadiens ont intérêt à ce que ce pays continue sur la voie de la démocratisation et de l'instauration d'une société civile.

Le Canada et le Mexique peuvent être des alliés stratégiques et faire en sorte que l'ALENA soit juste pour les trois pays qui y participent. Je demande à mes collègues de la Chambre de se joindre à moi pour féliciter les Mexicains et le mouvement Accion Civica des efforts qu'ils déploient en ce sens.

Je demande également au Parlement d'essayer de renforcer nos liens avec le gouvernement mexicain afin de favoriser la démocratisation et l'instauration d'une société civile au Mexique.

* * *

[Français]

L'UNITÉ CANADIENNE

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, comme Canadienne et comme politicienne, je viens de vivre un été unique, enrichissant et éclairant. Je tiens à partager mon expérience avec la Chambre et avec mes collègues.

Étant donné l'actualité de la question du Québec à l'intérieur du Canada, beaucoup de Canadiens discutent ensemble et partagent leurs vues. C'est ce que j'ai voulu faire au cours de l'été de façon active.

Je suis allée plusieurs fois au Québec pour étudier le français et pour entrer en contact avec les gens et les lieux. Je crois qu'il y a toujours deux côtés à une médaille et au moins deux perceptions du problème et de sa solution.

J'ai voulu aller aux sources pour m'informer et pour mieux comprendre. J'ai fait cela cet été. J'en suis reconnaissante et je remercie tous ceux et celles qui m'ont aidée à le faire.


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LE RÉFÉRENDUM DE 1992

M. Antoine Dubé (Lévis): Monsieur le Président, qu'il ne faille pas se fier à la parole du gouvernement fédéral, ça, les Québécois le savent depuis longtemps. Qu'on soit obligés de se battre pour obtenir des millions de dollars qui nous sont dus, ça aussi on en a l'habitude. Mais qu'il faille se taper les sourires narquois, les moqueries et les sarcasmes de tous les députés libéraux lorsque nous réclamons les 26 millions dus aux contribuables du Québec pour le référendum de Charlottetown, cela fait mal au coeur.

Que cela vienne du premier ministre, du ministre des Finances et de celui chargé du Renouveau de la fonction publique, ça fait encore plus mal à entendre. Tous les autres députés ministériels du Québec auront un jour à expliquer pourquoi ils méprisent avec autant de satisfaction les réclamations justifiées du Bloc québécois.

Devant leurs gloussements et leurs sarcasmes face aux intérêts du Québec, doit-on comprendre qu'il s'agit là du prix à payer pour rester dans le fédéralisme canadien?

* * *

[Traduction]

LES DROITS DE LA PERSONNE

Mme Mary Clancy (Halifax): Monsieur le Président, les députés libéraux sont d'ardents défenseurs des droits de la personne. Nous appuyons sans réserve les principes du projet de loi C-41 qui prévoient que, au moment de la détermination de la peine, on considère comme des circonstances aggravantes les éléments de preuve établissant que l'infraction a été motivée par des préjugés fondés sur l'orientation sexuelle de la victime.

Le gouvernement du Canada appuie sans réserve ce projet de loi, car il estime que les lois sur les droits de la personne et la Charte des droits de la personne doivent protéger les Canadiens contre toute forme de discrimination.

L'orientation sexuelle est au nombre des points à protéger. Nous avons promis, dans le livre rouge, de modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne. Nous allons remplir cette promesse pour montrer que la société canadienne accorde réellement de l'importance aux droits de la personne.

* * *

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe): Monsieur le Président, les Canadiens des deux côtés du débat chargé d'émotions et hautement polarisé sur le contrôle des armes à feu doivent s'écarter de leur position extrême et essayer ensemble de trouver un terrain d'entente. Nous devons être attentifs aux préoccupations légitimes des propriétaires d'armes à feu responsables.

Nous ne devons pas mettre les propriétaires d'armes à feu sur le même pied que les criminels. Néanmoins, nous devons empêcher l'utilisation abusive des armes à feu.

Tous les Canadiens doivent reconnaître et comprendre la terrible sauvagerie de la violence familiale. Au Canada, 42 p. 100 des femmes tuées par leur mari sont tuées par balle, dont 80 p. 100 avec des carabines et des fusils de chasse. La majorité de ces armes appartiennent à des personnes qui les ont acquises en toute légalité.

Posséder une arme à feu est un privilège, non un droit. Nous devons faire tout notre possible pour assurer la sécurité de nos communautés, de nos maisons et de nos enfants.

* * *

[Français]

LES FONCTIONNAIRES FÉDÉRAUX

M. Mark Assad (Gatineau-La Lièvre): Monsieur le Président, les employés du gouvernement fédéral qui travaillent dans la région de la capitale nationale ont subi des changements et des bouleversements depuis de nombreuses années. Le gouvernement conservateur avait démoralisé les fonctionnaires de la région et il a payé le prix pour sa politique partisane mal fondée.

Toute étude de décentralisation des services fédéraux devrait être suspendue immédiatement. Un moratoire de cinq ans est nécessaire avant de permettre le transfert de fonctionnaires.

(1110)

C'est le Conseil du Trésor qui devrait élaborer des règles précises fondées sur le gros bon sens en tenant compte des coûts, du moral des fonctionnaires et de la question de savoir si les services seront vraiment améliorés.

Comme membres de la députation de la capitale nationale, nous allons faire valoir notre point de vue et démontrer l'erreur de ces démarches. Des règles précises émises par le Conseil du Trésor éviteraient que le parti au pouvoir puisse procéder à des transferts de services pour des fins politiques.

* * *

LE RÉFÉRENDUM DE 1992

M. André Caron (Jonquière): Monsieur le Président, comment peut-on sérieusement faire confiance au gouvernement fédéral qui renie les ententes verbales faites avec l'ancien premier ministre du Québec de la grande famille libérale.

Tout le monde a pu voir M. Bourassa affirmer à l'Assemblée nationale du Québec qu'une telle entente sur les coûts du référendum existait. Comment comprendre cette attitude lorsque ce même gouvernement fédéral, sur la foi d'un simple engagement pris par une personne que l'on ne connaît pas, a permis une transaction totalement inacceptable dans le cas de Ginn Publishing?

Cette règle non écrite du deux poids, deux mesures de ce gouvernement confirme ce que pensent de nombreux citoyens québécois quant à la mauvaise foi de certains politiciens fédéraux qui ne respectent pas leur parole donnée une fois l'élection gagnée.

C'est un triste moment pour la démocratie, et les Québécois se rappelleront longtemps que dans ce Canada, ils doivent payer deux fois les frais du référendum fédéral et que la parole d'un premier ministre du Québec à Ottawa ne vaut rien.

6082

[Traduction]

LES PERSONNELS DES SERVICES DE SECOURS D'URGENCE

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke): Monsieur le Président, je me lève aujourd'hui pour faire savoir aux députés que j'ai l'intention de présenter un projet de loi d'initiative parlementaire très important, qui pourrait bien, un jour, sauver la vie d'un pompier ou d'un policier.

Cette mesure législative exigerait que les autorités hospitalières avisent les employés des services de secours d'urgence qui, par inadvertance, ont été exposés à une maladie infectieuse dans l'exercice de leurs fonctions. Ces renseignements resteraient rigoureusement privés et confidentiels.

À cette époque où les maladies contagieuses, du VIH à l'hépatite, sont en hausse au Canada, il est plus nécessaire que jamais de protéger le personnel des services d'urgence. Il y va de vies humaines.

Je demande au gouvernement d'accorder une attention très sérieuse à ce projet de loi quand je l'aurai présenté. Un colloque se tiendra officiellement à ce sujet à Ottawa la semaine prochaine. Ce serait, à mon avis, un signe de bonne volonté de la part des députés que de reconnaître le danger que courent nos précieux employés des services de secours d'urgence et de s'engager à régler ce problème.

* * *

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, de nombreux propriétaires légitimes d'armes à feu se sont rassemblés hier sur la colline du Parlement pour exprimer leurs préoccupations au sujet du projet de loi du gouvernement sur le contrôle des armes à feu, présentement à l'étude.

Ils ont écouté le ministre de la Justice leur donner des assurances, avant de présenter une longue pétition comptant plusieurs milliers de noms.

L'heure des présentations des pétitions était alors passée, mais je tiens à ce que ces gens sachent que leur pétition a été présentée sans délai au greffier de la Chambre pour qu'il l'examine afin de voir si elle peut être déposée à la Chambre ou présentée officiellement au ministre de la Justice.

* * *

ÉQUIPE-CANADA

M. John O'Reilly (Victoria-Haliburton): Monsieur le Président, le Canada a été l'hôte cet été des Jeux du Commonwealth et je suis fier de dire qu'Équipe-Canada a réalisé la meilleure performance de son histoire. Nous avons recueilli 128 médailles dont 40 d'or, 42 d'argent et 46 de bronze.

Je tiens à féliciter tous les Canadiens qui ont participé aux jeux, mais en particulier deux athlètes canadiennes, originaires de la circonscription de Victoria-Haliburton, en Ontario. Nancy Sweetnam, de Lindsay, a décroché une médaille d'argent aux 400 mètres quatre nages et une médaille de bronze aux 200 mètres quatre nages. Linda Szulga, originaire de Burnt River, a remporté une médaille de bronze à la compétition en couple de tir à la carabine de petit calibre.

Après avoir consacré de longues heures à leur entraînement, ces femmes ont représenté le Canada avec beaucoup de classe et d'esprit sportif aux jeux.

Je salue encore une fois leurs succès et j'exhorte tous les députés à applaudir la belle performance d'Équipe-Canada à Victoria, en août.

* * *

L'ENVIRONNEMENT

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest): Monsieur le Président, le gouvernement accorde beaucoup d'importance au développement durable, dans le but à la fois de préserver l'environnement et de nous assurer une économie forte et concurrentielle, à l'échelle internationale.

C'est pourquoi, hier, la vice-première ministre et ministre de l'Environnement et le ministre de l'Industrie ont annoncé la mise en branle d'une stratégie nationale de 57,5 millions de dollars au bénéfice de l'industrie canadienne de l'environnement.

La stratégie pour l'industrie de l'environnement a été mise au point à la suite de vastes consultations auprès de l'industrie, de tous les gouvernements et des associations industrielles.

(1115)

Pour l'industrie de l'environnement, cette stratégie facilitera l'accès aux programmes et services gouvernementaux, soutiendra le développement et la commercialisation de technologies environnementales rentables, solidifiera sa position dominante au sein du marché canadien en pleine expansion et permettra d'augmenter les exportations de technologies environnementales.

L'industrie canadienne a un rôle important à jouer dans le développement durable du Canada, et le gouvernement est résolu à renforcer ce secteur de notre économie.

_____________________________________________


6082

QUESTIONS ORALES

[Français]

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, dans un rapport percutant, le Conseil canadien de développement social fait part de ses inquiétudes face à l'accroissement de la pauvreté au Canada. Dans ce rapport, le Conseil conclut et je cite: «Nos programmes sociaux ont peut-être besoin d'être révisés, mais ils fonctionnent. Ce qui ne fonctionne pas, c'est le marché du travail.»

Ma question s'adresse à la personne qui remplace le premier ministre et la vice-première ministre.

Une voix: Posez votre question.


6083

M. Duceppe: Je vais y venir; je cherchais la personne qui pourrait me répondre, car il n'y a pas grand monde, ce matin.

Donc, est-ce que ce ministre ne convient pas que plutôt que d'envisager une réforme des programmes sociaux, le gouvernement doit mettre en place des mesures concrètes de création d'emploi, puisque, comme le Conseil le souligne, ce ne sont pas les programmes sociaux qui ne fonctionnent pas, ce sont les emplois qui manquent?

[Traduction]

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire): Monsieur le Président, j'aurais deux choses à dire, au nom de mon collègue le ministre du Développement des ressources humaines, en réponse à la question du député.

Comme le ministre le faisait remarquer hier, le rapport du Conseil canadien de développement social couvre une période qui se termine en 1991; il est donc basé sur des données statistiques vielles de plus de trois ans.

Pour être tout à fait exact, un rapport sur la pauvreté doit prendre en considération l'évolution du marché du travail à laquelle faisait allusion le député dans sa question et la nécessité d'orienter les jeunes vers des secteurs d'emploi en développement qui offrent un bon potentiel à long terme.

Je suis sûr que le député aura noté que dans notre livre rouge, qui était notre plate-forme électorale, dans le discours du Trône, dans le budget et dans toutes les activités du ministre du Développement des ressources humaines, on met l'accent sur sur la croissance de l'économie canadienne et la création d'emplois pour les Canadiens.

Les statistiques montreraient que dans les premiers neuf ou dix mois de notre administration, nous avons pris un bon départ. C'est certes loin d'être suffisant, mais notre gouvernement a réussi à faire d'honorables progrès.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, je demande au ministre de l'Agriculture comment il peut prétendre qu'une réforme qui a pour objectif d'économiser de l'argent en coupant dans les programmes sociaux puisse créer de l'emploi.

[Traduction]

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire): Monsieur le Président, comme le ministre du Développement des ressources humaines l'a dit à maintes reprises à la Chambre, l'objectif de la réforme dans laquelle il s'est lancé est de transformer le système canadien en quelque chose qui prépare les Canadiens pour les besoins futurs du marché du travail.

Au lieu de n'offrir qu'un simple filet de sécurité à ceux qui ont besoin d'une aide particulière, nous cherchons à leur donner un système qui les aidera à retourner sur le marché du travail et qui les préparera pour les possibilités d'emploi qui s'ouvriront à l'avenir.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, pour transformer le système social, en effet, il le transforme! Il y a 22 00 chômeurs, au Québec seulement, qui n'ont plus droit à l'assurance-chômage et la réforme du gouvernement est en voie d'en expulser des milliers d'autres. Ces gens sont rendus sur le bien-être social. Vingt mille personnes de plus, depuis un an, sur l'aide sociale, au Québec seulement. Ça, c'est du changement, en effet, monsieur le Président!

(1120)

Le premier ministre, ou le ministre de l'Agriculture, reconnaît-il que le gouvernement contribue lui-même à l'accroissement de la pauvreté au Canada par ces coupures injustifiées et inhumaines dans l'assurance-chômage?

[Traduction]

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire): Monsieur le Président, le seul objectif du gouvernement est de favoriser la croissance économique et, par conséquent, de créer des emplois pour les Canadiens.

À preuve les 275 000 emplois, dont 79 000 au Québec, que nous avons contribué à créer au Canada depuis novembre dernier.

* * *

[Français]

L'ÉCONOMIE MONTRÉALAISE

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Le rapport du Conseil canadien du développement social identifie Montréal comme la ville canadienne où l'on retrouve le plus grand nombre de personnes vivant sous le seuil de la pauvreté, soit 30 p. 100 de la population, 386 000 ménages vivant sous le seuil de la pauvreté à Montréal. C'est plus du double du nombre de toutes les provinces de l'Atlantique réunies.

Compte tenu de la gravité de la situation à Montréal, le premier ministre s'engage-t-il à mettre en place une stratégie de relance économique pour Montréal, puisque le programme temporaire d'infrastructures ne suffira visiblement pas?

[Traduction]

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire): Monsieur le Président, le programme d'infrastructure lancé en novembre par ce gouvernement, littéralement dans les heures qui ont suivi son arrivée au pouvoir, remporte un succès remarquable auprès des maires, des municipalités et des provinces presque partout au pays.


6084

Le ministre responsable de ce dossier pourrait vous donner plus de détails, mais autant que je sache, le programme d'infrastructure a été très bien accueilli et sa réputation n'est plus à faire. Il arrive à point nommé pour donner du travail aux Canadiens, au moins pendant les deux années qu'il durera.

Mais qui plus est, grâce à ce programme, l'infrastructure de chaque province et de nombreuses localités d'un bout à l'autre du Canada, sera modernisée, jetant ainsi les bases du renouveau économique de notre pays.

Les retombées de ce programme sont déjà visibles à Montréal, tout comme dans ma propre ville de Regina et dans toutes les localités entre ces deux villes. Ce fut la première initiative d'envergure de notre gouvernement pour encourager la croissance économique et la création d'emplois.

Cependant, comme ne l'ignore pas le député, nous avons également beaucoup d'autres projets encore à l'état d'ébauche. Lorsqu'ils verront le jour, les villes canadiennes, dont Montréal, pourront en ressentir les effets bénéfiques.

[Français]

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies): Monsieur le Président, est-ce que le premier ministre entend annoncer sous peu des mesures d'aide à la reconversion des entreprises du secteur militaire à des fins civiles, car plus de 10 000 emplois sont menacés dans la région de Montréal?

[Traduction]

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, la question du député touche toute une gamme d'activités que poursuit le ministère de l'Industrie.

Pour ce qui est du Programme de productivité de l'industrie du matériel de défense, nous avons procédé à un examen minutieux et à une restructuration, de telle sorte que nous pourrons utiliser au maximum les ressources limitées prévues à ce chapitre et que nous pouvons faciliter la conversion de l'industrie, afin que celle-ci soit mieux informée de l'évolution des industries fondées sur les connaissances, nouvelle source de création d'emplois.

Nous accordons aussi à cette industrie un meilleur soutien en matière de marketing en vue de l'aider dans ses travaux de conversions. Nous ne devons jamais oublier qu'en tant que gouvernement, nous comptons énormément sur le fait que toutes les institutions financières du Canada se montreront beaucoup plus progressistes dans leurs activités concernant les prêts et les services aux petites et moyennes entreprises. Nous croyons que c'est là que réside notre meilleur espoir de remettre les Canadiens au travail.

(1125)

LE RÉGIME ENREGISTRÉ D'ÉPARGNE-RETRAITE

M. Ray Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, je soulève une question qui préoccupe beaucoup des millions de Canadiens. Il s'agit de leurs économies et de leur retraite.

Ma question s'adresse au ministre des Finances. Pourquoi le gouvernement envisage-t-il d'imposer les REER?

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales)): Monsieur le Président, les réformistes parlent constamment de nouveaux impôts, mais pas le ministre des Finances.

Ceux-ci ont d'abord parlé d'une taxe sur les hydrocarbures et voilà qu'ils font maintenant allusion à un impôt sur les REER. Toutes ces suggestions viennent du Parti réformiste, qui ne peut toutefois formuler une seule proposition quant à la façon de réduire les dépenses.

M. Ray Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, j'ai une question complémentaire à poser au ministre responsable des institutions financières.

Le premier ministre, le ministre des Finances et, maintenant, le ministre responsable des institutions financières ont tous été vagues et n'ont pas dit clairement aux Canadiens que le gouvernement n'a pas l'intention d'imposer les REER.

Si le ministre est aussi sûr de lui, qu'il se lève et qu'il dise aux Canadiens que les REER ne seront pas imposés pendant la durée de cette législature.

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales)): Monsieur le Président, comme vous le savez et comme les réformistes l'apprendront avec l'expérience, les nouvelles mesures fiscales sont annoncées dans les budgets. Le prochain budget doit être déposé en février.

Dans l'intervalle, un énoncé sera publié cet automne. Ce document sera transmis au Comité des finances, auquel le Parti réformiste pourra formuler toutes ses idées en matière de fiscalité.

M. Ray Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, compte tenu de la réponse du ministre, je dois conclure que la possibilité de nouveaux impôts existe et qu'il y a lieu de s'en préoccuper.

Le ministre laisse entendre que les REER ne sont pas différents des autres régimes de pension. Je lui rappelle que ces régimes ont été créés afin que les Canadiens qui travaillent à leur compte puissent mettre de l'argent de côté en vue de leur retraite.

Voici ma question: Est-il exact que le gouvernement n'envisage pas seulement d'imposer les REER, mais aussi les régimes de retraite publics et privés?


6085

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales)): Monsieur le Président, je répète encore une fois que les réformistes sont les seuls à parler de nouveaux impôts. Ils ont commencé par parler d'imposer les REER et voilà maintenant qu'ils veulent en faire autant avec les régimes de retraite publics et privés.

Toutes ces mesures fiscales sont proposées par le Parti réformiste. Ont-ils des suggestions quant à la façon de réduire les dépenses? De grâce, qu'ils nous en fassent part.

* * *

[Français]

LE RÉFÉRENDUM DE 1992

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, hier à la sortie de la Chambre des communes, le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes a commencé son point de presse en déclarant; «Le fédéral ne doit rien au Québec.» Quelle arrogance! Le premier ministre, pour sa part, persiste toujours à affirmer qu'il doit avoir une facture pour payer les 26 millions qui sont dus aux Québécois.

Le ministre sait très bien que les Québécois ont payé deux fois pour le référendum, payant pour le référendum dans le reste du Canada en plus de payer le référendum chez eux. Pourquoi alors s'obstiner à refuser de payer ce qu'ils doivent au Québec?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique): Monsieur le Président, le 26 octobre 1992, il y a eu deux référendums au Canada; il y en eu un qui a été fait sous la Loi du référendum fédérale et il y en a eu un qui a été fait sous la Loi 150 et la Loi référendaire du Québec. Les deux lois sont différentes. Par exemple, les prérequis de résidence dans la loi québécoise sont différents de la loi fédérale. Il n'y a donc aucune base légale pour payer les frais du gouvernement du Québec pour un référendum sous sa propre loi au Québec.

(1130)

L'argument qui est avancé ne pourrait être résolu que s'il y avait dans nos dossiers un accord clair qui avait été conclu à l'effet de passer par dessus la loi. Or, dans nos dossiers, il n'y a pas de preuve d'un accord semblable.

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, est-ce que la réponse du ministre n'est pas le constat de l'incapacité du gouvernement à accepter les différences qui existent entre la communauté du Québec et le reste du Canada? Est-ce que ce n'est pas là un aveu d'impuissance à accepter cette différence fondamentale, d'une part? D'autre part, je lui demanderais; Est-ce que la déclaration du premier ministre du Québec, faite devant l'Assemblée nationale du Québec officiellement, à l'effet qu'il y avait une entente, ne suffit pas, comme preuve, qu'il y a eu une entente? Le ministre met-il en doute la parole de l'ex-premier ministre du Québec?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique): Monsieur le Président, quant à la première question de l'honorable député, si le premier ministre Bourassa a décidé d'avoir un référendum en vertu de sa propre loi, il est clair qu'il est venu à la conclusion qu'il y avait des avantages politiques pour lui et pour la province d'avoir un référendum différent.

Quant à la seconde question, la question que je me pose, c'est s'il y a eu un accord entre le premier ministre Bourassa et M. Mulroney, et ensuite Mme Kim Campbell, pourquoi est-ce que le premier ministre Mulroney et Mme Campbell n'ont ni indiqué leur accord ni payé une dette que présumément, ils se seraient décidés à payer?

* * *

[Traduction]

LA SANTÉ

M. Grant Hill (Macleod): La ministre de la Santé a déclaré que le système de collecte de sang du Canada devait satisfaire à des normes moins sévères que le système américain. C'est de la foutaise. La ministre acceptera-t-elle de relever les normes afin que tous les Canadiens puissent de nouveau se sentir protégés?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, notre système de collecte de sang est l'un des meilleurs au monde. Le problème avec la FDA tient au fait, je le répète, que différents règlements s'appliquent à différents systèmes et non pas au fait qu'un système est supérieur à l'autre.

Cela étant dit, nous collaborons avec la FDA pour harmoniser les règlements afin de pouvoir envoyer du plasma aux États-Unis. Nous continuerons de chercher des façons d'améliorer la qualité de nos réserves de sang.

M. Grant Hill (Macleod): Monsieur le Président, c'est la toute première fois que j'entends la ministre dire qu'elle veut améliorer le système, un système qu'elle a toujours qualifié d'excellent et qui n'avait pas besoin, selon elle, d'améliorations. Les patients et tous les Canadiens ne veulent plus entendre de vieilles déclarations toutes faites. Ils préféreraient que des améliorations soient apportées à notre système.

La ministre cessera-t-elle de faire des déclarations toutes faites dans le seul but de brouiller les pistes?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, j'ai toujours été très claire à ce sujet. Depuis que je suis ministre de la Santé, nous avons pris toutes les mesures possibles et imaginables pour garantir la qualité de nos réserves de sang et nous continuerons de le faire.

Cela m'ennuie beaucoup de constater que des gens responsables sèment des doutes dans l'esprit des gens quand, tous les jours, dans chaque hôpital du Canada, nos réserves de sang contribuent à sauver des vies. Appuyons les donneurs et encourageons-les à continuer de faire le don de la vie.


6086

(1135)

[Français]

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien. À la conférence de presse annonçant la nomination de M. Manera comme président de la Société Radio-Canada, le ministre du Patrimoine déclarait, et je cite: «Le gouvernement s'engage à ne pas réduire davantage les crédits budgétaires octroyés par le gouvernement à Radio-Canada.»

Comment le ministre, qui se prétend le grand ami de la maison, peut-il justifier sa volte-face et renier son engagement du 3 février dernier en annonçant qu'il lui sera difficile de ne pas couper les budgets de Radio-Canada?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, je suis ravi de voir que notre collègue s'intéresse à cette grande maison fédérale, Radio-Canada, qui soutient notre culture d'un océan à l'autre.

J'aimerais savoir, si elle fait allusion à des décisions qui ont été prises, quelles sont ces décisions. Ce qui a été dit au début de l'année n'a pas changé et donc je crois qu'elle fait des spéculations qu'elle a peut-être entendues ailleurs. Mais il n'y a pas de changements ni de décisons qui ont été prises qui contreviennent à ce que nous avons dit plus tôt.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, il est bien évident que cela n'a pas été annoncé, comme le disait le collègue du ministre du Patrimoine canadien. Le budget n'a pas encore été annoncé, mais il n'y a jamais de fumée sans feu. Quand on lit dans le journal qu'il sera difficile d'éviter des coupures de 5 à 8 p. 100 à Radio-Canada, c'est déjà prévenir que ça s'en vient.

Pas plus tard qu'hier, le vice-président, M. Pineau, pour ne pas le nommer, a bel et bien dit au Comité du patrimoine qu'il y avait dans l'air des coupures. Alors, il faudrait qu'on arrête de nous prendre pour des imbéciles. Le ministre confirme-t-il que ces réductions, si elles devaient avoir lieu, toucheraient principalement les services offerts aux communautés francophones et acadiennes du Canada?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, je vois que notre collègue s'inquiète de la fumée. Je ne savais pas qu'elle allait changer de métier et devenir pompier plutôt que d'être députée.

Je crois que si elle veut rendre service à cette grande institution qu'est Radio-Canada et sur laquelle elle-même travaille, puisqu'elle est membre du comité parlementaire qui est en train d'examiner Radio-Canada, si elle le veut, qu'elle déclare franchement qu'elle est satisfaite que cette institution travaille à l'unité canadienne et qu'elle demande qu'elle le fasse davantage.

[Traduction]

LA FONCTION PUBLIQUE

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, on projette de déraciner des fonctionnaires et de les renvoyer dans l'Est et cela suscite, semble-t-il, des querelles au sein du Cabinet libéral. Le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux veut les renvoyer dans sa ville natale, dans la région de l'Atlantique, ce à quoi le ministre chargé du Renouveau de la fonction publique et le ministre de l'Industrie, notamment, auraient répliqué, je crois, qu'on ne déménage pas des ministères pour le plaisir de les déménager.

Le ministre chargé du Renouveau de la fonction publique mettra-t-il fin à ces querelles en affirmant catégoriquement qu'il n'est plus question de déménager des parties de la fonction publique sur la côte est?

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants): Monsieur le Président, je tiens à vous assurer et à assurer catégoriquement les députés que le Cabinet n'est absolument pas divisé sur cette question.

L'administration du gouvernement fédéral est complexe. Nous avons des centaines de milliers d'employés. Mon collègue, le président du Conseil du Trésor, pourra peut-être parler, en réponse à une question complémentaire, de questions plus spécifiques intéressant les fonctionnaires.

Comme l'a fait remarquer le ministre des Affaires intergouvernementales, nous nous proposons de réorganiser le gouvernement, de revoir nos priorités budgétaires. Mais nous procéderons avec méthode. Certes, les déclarations de mon collègue, le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ne vont nullement à l'encontre de la politique gouvernementale.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, je me demande si le gouvernement tient compte de ses propres rapports. Le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux a donné à un comité le mandat spécifique: De mettre au point un plan d'action visant à rehausser la présence du gouvernement dans la région canadienne de l'Atlantique. Cela va drôlement à l'encontre du projet «de réorganiser la fonction publique afin qu'elle soit moins coûteuse et plus efficace».

(1140)

Le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux va-t-il respecter cette politique de l'efficacité et déclarer aujourd'hui qu'il supprimera ce comité chargé tout bonnement de rehausser son avenir politique personnel?

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants): Monsieur le Président, on a demandé à tous les ministres de veiller à ce que l'administration de leur ministère respectif soit la moins coûteuse possible. Le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux fait la même chose que les autres: il examine minutieusement le budget de son ministère pour voir s'il y a moyen d'épargner davantage.


6087

Nous n'avons pas d'excuses à faire. En tant que gouvernement fédéral, nous sommes fiers qu'il y ait des fonctionnaires dans tout le pays et pas seulement à Ottawa.

Le député ne devrait pas chercher la petite bête à un ministre qui demande, comme il a le droit de le faire, à ce que l'on tente de régler une situation difficile.

* * *

[Français]

LA FRANCOPHONIE

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien.

Après avoir renoncé à mettre en oeuvre une véritable politique globale de développement de la francophonie, comme le lui demandait d'ailleurs la Fédération des communautés francophones et acadienne, le ministre du Patrimoine a finalement accouché d'une politique. La politique qui vient de sa planche à dessin n'est rien de plus qu'un plan d'action visant à respecter ses propres obligations en vertu de la Partie VII de la Loi sur les langues officielles.

Le ministre peut-il nous dire en quoi et comment son plan d'action assure le développement de la francophonie?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, je crois que notre collègue aurait dû parler davantage aux francophones et Acadiens à travers le Canada. Il aurait la réponse, car ce sont eux qui ont demandé cette application des articles de la Loi sur les langues officielles. Et ils l'ont applaudie, lorsque nous avons décidé de mobiliser le gouvernement canadien derrière les francophones et les Acadiens de tout le pays.

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, le ministre peut-il nous dire comment il peut vanter les mérites de son plan d'action, alors qu'aucun budget ni programme nouveau n'est mis sur pied?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, je crois que notre collègue n'a rien compris à ce qu'était ce plan d'action. Peut-être devrait-il l'étudier un peu davantage et peut-être comprendrait-il, à ce moment-là, que ce que l'on fera sera de mobiliser les ressources qui existent dans tout le gouvernement canadien pour appuyer le développement des communautés de langue officielle minoritaire. C'est ce qu'il devrait comprendre.

* * *

[Traduction]

LE MAINTIEN DE LA PAIX

Mme Beryl Gaffney (Nepean): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale.

Mercredi, la Chambre a discuté du rôle du Canada dans les missions de maintien de la paix des Nations Unies pour en arriver à une décision sur les engagements du Canada à cet égard. Le ministre peut-il dire à la Chambre si une décision a été prise au sujet de notre participation à la mission de maintien de la paix en Bosnie-Herzégovine, dans l'ex-Yougoslavie, et, si oui, peut-il nous expliquer sur quoi est fondée cette décision?

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants): Monsieur le Président, la députée a souligné que nous avions eu un excellent débat et que plusieurs points de vue avaient été entendus. Je crois qu'il existe un large consensus autour de la volonté du Canada de continuer à participer activement aux missions de maintien de la paix des Nations Unies.

Dans mon discours, j'ai expliqué que les ressources du ministère de la Défense étaient soumises à de fortes contraintes depuis quelques années. Cependant, les Forces canadiennes demeurent capables de participer à un certain nombre de missions.

[Français]

Oui, le gouvernement a décidé que le Canada renouvellera pendant une période supplémentaire de six mois sa participation actuelle en ex-Yougoslavie, en Croatie et en Bosnie.

[Traduction]

Nous avons décidé de renouveler pour six mois notre engagement dans ces deux républiques de l'ancienne Yougoslavie.

Je tiens cependant à faire une mise au point. Nous avons pris cette décision, mais en nous réservant le droit de nous retirer si l'évolution de la situation politique ou militaire sur le terrain venait à menacer la sécurité des troupes canadiennes ou à remettre en question l'utilité du mandat de la FORPRONU.

* * *

LE COMITÉ DE SURVEILLANCE DES ACTIVITÉS DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, en juillet 1992, le Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité a présenté au solliciteur général, qui était Doug Lewis à l'époque, un rapport très secret en vertu de l'article 54, rapport qui portait sur les cibles en matière de terrorisme national.

Le ministère a-t-il examiné ce rapport et, dans l'affirmative, le secrétaire parlementaire peut-il dire à la Chambre s'il y est fait mention du Parti réformiste?

(1145)

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général): Monsieur le Président, j'imagine que les députés d'en face attendaient depuis quelque temps que je prenne la parole.

En réponse à cette question qui m'a été posée dans l'autre langue officielle du Canada, je suis très au courant de ce qui se passe. Le gouvernement tiendra compte du rapport que le CSARS présentera au solliciteur général.


6088

Il y a également d'autres enquêtes en cours qui sont menées par l'inspecteur général. Nous examinons attentivement ce qui s'est passé, et je suis certain que le solliciteur général prendra les mesures nécessaires en temps et lieu.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, je ne suis pas certaine que le secrétaire parlementaire ait compris que le rapport dont je parle a déjà été présenté. C'est un rapport en vertu de l'article 54 qui a été soumis à Doug Lewis lorsque celui-ci était solliciteur général.

Le secrétaire parlementaire peut-il assurer à la Chambre que, contrairement à ses prédécesseurs, le gouvernement actuel avisera les partis politiques légitimes lorsque le SCRS apprendra que des groupes ou des individus considérés comme étant une menace à la sécurité nationale tentent de les infiltrer?

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général): Monsieur le Président, notre gouvernement n'approuve pas les enquêtes qui visent des organisations politiques légitimes. C'est une question de politique. Nous avons été très clairs à cet égard.

Nous avons également entendu de la bouche de députés de l'opposition toutes sortes d'allégations selon lesquelles notre gouvernement fait enquête sur divers partis politiques. C'est absolument faux.

Le gouvernement du Canada et le solliciteur général rendront publiques certaines parties du rapport qui sera présenté à ce dernier. Je peux assurer à la députée que notre gouvernement libéral ne tolérerait pas que notre service secret pose de tels actes.

* * *

[Français]

LA SANTÉ

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve): Monsieur le Président, je désire poser ma question à la ministre de la Santé.

En mars 1993, le gouvernement canadien rendait publiques les modalités de financement de la Stratégie nationale de lutte contre le SIDA, phase 2. On y apprenait alors que, pour les cinq prochaines années, Ottawa allait consacrer 211 millions de dollars, à raison de 42 millions de dollars par année à cette stratégie. De ces 42 millions, 1,5 million n'était pas affecté à des programmes normés précis, mais octroyé de façon discrétionnaire par la ministre à des besoins non prévus dans la stratégie.

La ministre de la Santé peut-elle nous indiquer si, pour 1994-1995, comme prévu initialement, en plus des 40,7 millions de programmes normés, 1,5 million sera octroyé à la Stratégie nationale sur le SIDA de façon discrétionnaire par son autorité?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, oui, bien entendu. Nous avons établi des normes pour le 1,5 million et nous allons essayer de les suivre. Mais il faut dire aussi que nous avons déjà prévu une dépense de 400 000 $ sur le 1,5 million de dollars pour la conférence qui aura lieu à Vancouver au cours de l'année 1996.

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve): Monsieur le Président, est-ce que la ministre peut nous informer, au sujet des montants restants, quels sont les critères d'attribution qu'elle a retenus et quels organismes vont bénéficier de ces sommes d'argent?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, à ce stade, nous n'avons pas pris de décision sur le choix des organismes ou des projets, mais il faut qu'il s'agisse de projets pour lesquels on n'avait pas prévu un autre mode de financement.

* * *

[Traduction]

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien.

La SRC reçoit déjà plus d'un milliard de dollars par année des contribuables canadiens, et le gouvernement actuel semble être sur le point de les taxer encore davantage.

Le ministre a en sa possession une étude du Groupe Nordicité qui recommande de nouvelles sources de financement pour la SRC, mais il ne veut pas que le public en prenne connaissance. L'organisation, le développement et le financement de la SRC se font depuis trop longtemps maintenant à huis clos et il est temps qu'on nous rende des comptes sur ce point.

Le ministre rendra-t-il publique ou mettra-t-il du moins à la disposition des parlementaires cette étude qui recommande de nouvelles sources de financement pour la SRC?

(1150)

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, j'aimerais avoir la chance de lire ce rapport moi-même avant de décider ce que j'en ferai.

Quant à la transparence, nous avons donné à tous les députés désireux de participer aux audiences du Comité permanent du patrimoine l'occasion d'examiner la SRC. Les audiences ont débuté hier et dureront quelques mois. Il n'y aura aucun secret aux audiences. Les députés pourront y siéger, et je crois comprendre qu'un certain nombre de questions ont déjà été adressées à la SRC par le truchement du comité.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, je suis vraiment très étonnée que le ministre n'ait pas encore pris connaissance du rapport du groupe Nordicité. Je trouve la réponse absolument inacceptable.

Quoi qu'il en soit, les libéraux continuent de ne pas rendre de comptes aux Canadiens et ils songent à s'en prendre au monde du spectacle pour générer plus d'argent pour la SRC. Les Canadiens n'ont plus les moyens de payer et ils ne toléreront pas de nouvelles taxes, surtout pas pour la SRC.

Le ministre nous dira-t-il catégoriquement et tout de suite qu'on n'instituera pas de nouvelle taxe sur les spectacles afin de financer cette entreprise publique inutile qui nous coûte un milliard de dollars?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, le Parti réformiste a l'air ce matin de vouloir taxer les Canadiens par-dessus la tête.


6089

Nous n'avons pas parlé de taxes. C'est une invention des députés d'en face. Nous verrons en temps opportun ce que le Comité permanent du patrimoine aura à dire sur la question du financement de la SRC.

* * *

LE PROGRAMME D'INFRASTRUCTURE

M. John Loney (Edmonton-Nord): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au ministre responsable de l'Infrastructure.

De nombreux observateurs de l'économie soutiennent que le Canada s'arrache à la récession, et le nombre d'emplois est là pour le prouver. Mes électeurs pensent tout de même qu'il y a encore trop de chômeurs.

Le ministre peut-il me dire combien d'emplois ont été créés en Alberta, pour que je puisse rassurer mes électeurs?

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure): Monsieur le Président, l'Alberta manifeste beaucoup d'intérêt.

Nous progressons rapidement dans la mise en oeuvre du programme partout au Canada. Grâce à la collaboration du gouvernement de l'Alberta, cette province ne fait pas exception. En Alberta, on dénombre quelque 719 projets d'infrastructure qui représentent des investissements de plus de 422 millions de dollars et créent environ 7 000 emplois.

Je suis heureux de dire que, dans l'ensemble du pays, nous avons maintenant affecté plus des deux tiers des 6 milliards prévus pour le programme d'infrastructure. Nous en sommes à 6 500 projets dans tout le Canada et nous avons ainsi redonné du travail à 70 000 personnes jusqu'à maintenant. Ce n'est qu'un début.

D'autres emplois seront créés en Alberta et partout au Canada. Le programme suscite de nouveaux investissements, ce qui aide le gouvernement à atteindre son objectif prioritaire, redonner du travail aux Canadiens.

* * *

[Français]

LE PATRIMOINE FAMILIAL

M. René Laurin (Joliette): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre ou à celui qui le remplace. Suite à l'adoption par le gouvernement du Québec de la Loi sur le partage du patrimoine familial, le gouvernement déposait le projet de loi C-55 approuvé par le Parlement le 29 septembre 1992. La loi C-55 permettrait de saisir ou de partager les rentes de retraite fédérale. Près de deux ans après son adoption, le règlement d'application de la loi C-55 n'est toujours pas approuvé par le gouvernement fédéral.

Le premier ministre ou son remplaçant reconnaît-il qu'après deux ans d'attente, le Cabinet fédéral devrait adopter rapidement le règlement d'application en question afin que les Québécois qui se trouvent lésés par cette inaction puissent obtenir la part de retraite du couple qui leur revient?

(1155)

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure): Monsieur le Président, j'ai maintenant signé et recommandé au gouverneur général la Loi sur le partage des prestations de retraite, en vue de l'entrée en vigueur du règlement d'application du projet de loi C-55, dont le député semble s'inquiéter.

Le projet de loi C-55 a été adopté sous le gouvernement précédent, et il a fallu faire un examen très détaillé de son règlement d'application. Nous avons agi le plus rapidement possible. Comme je l'ai déjà annoncé, nous avons fait des modifications prévoyant l'assujettissement des employés à temps partiel aux dispositions sur les prestations de retraite ainsi que l'inclusion des mariages survenus après la retraite, et le nouveau règlement est sur le point d'entrer en vigueur.

[Français]

M. René Laurin (Joliette): Monsieur le Président, le ministre peut-il donner les raisons précises de ce retard de deux ans dont près d'un an sous le régime libéral, et s'engage-t-il formellement aujourd'hui à ce que ce règlement soit adopté d'ici Noël?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure): Monsieur le Président, comme je viens de le dire, le gouvernement précédent n'avait pas tellement fait avancer le dossier du règlement lorsque je l'ai pris en main. Nous avons agi avec célérité, et notre travail tire à sa fin. Nous avons abattu une énorme besogne en très peu de temps parce que nous étions impatients d'assurer l'entrée en vigueur de ces dispositions de manière à mieux servir nos ex-employés désormais à la retraite et leurs héritiers.

* * *

L'IMMIGRATION

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, plus tôt cette semaine, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a négligé de répondre à une question des plus simples.

Dudley Vincent Forbes, qui est accusé du meurtre de deux personnes survenu lors d'une fusillade à Toronto au cours de la fin de semaine, a été expulsé deux fois plutôt qu'une pour avoir enfreint les dispositions canadiennes sur le visa.

La question que je veux poser à la secrétaire parlementaire est la suivante: Comment une personne ayant enfreint à deux reprises les lois canadiennes, soit le Code criminel et la Loi sur l'immigration, et ayant été expulsée deux fois a-t-elle pu être parrainée en tant que conjoint et revenir au Canada?

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

6090

En fait, le ministre n'a pas manqué de répondre à la question. Comme il l'a dit, les agents n'avaient aucune raison, à ce moment-là, de rejeter la demande de la personne en cause.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, encore une fois, ce ministère-là nous sert le même genre de charabia, de réponses ambiguës et vagues en matière d'expulsion.

Le ministre fait tout un plat de sa nouvelle réforme du régime d'immigration dont la Chambre est maintenant saisie. Étant donné que rien dans ce projet de loi n'aurait empêché quelqu'un comme Forbes de revenir au Canada, le ministre est-il prêt à apporter des modifications législatives pour interdire l'entrée au Canada comme immigrant à toute personne ayant déjà été expulsée pour quelque raison que ce soit?

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, je n'arrive pas à comprendre. Je regrette que le député soit d'avis que ma réponse précédente manquait de limpidité. Je vais essayer d'être plus claire.

Pour répondre de nouveau clairement à sa première question, les agents d'immigration n'avaient à ce moment-là aucune raison d'interdire l'entrée à la personne en cause.

Quant à sa deuxième question, je demanderais au député, qui a pris part au débat sur le projet de loi C-44, de venir la semaine prochaine lorsque nous passerons au vote sur ce projet de loi. De notre côté, nous voterons justement en faveur de modifications qui auront les effets souhaités par le député. Nul doute qu'il les appuiera aussi.

* * *

[Français]

LE COMMERCE INTERNATIONAL

M. René Canuel (Matapédia-Matane): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international. Dans le dossier du bois d'oeuvre, premièrement, le gouvernement fédéral n'a pas obtenu que le Québec soit exclu de l'application des droits compensatoires alors qu'il ne subventionne même pas ses exportations.

Deuxièmement, le gouvernement fédéral s'est laissé ballotté par des groupes de pression américains qui inventaient toutes sortes de tours pour faire durer le plaisir. Troisièmement, après avoir remporté la victoire, finalement, le gouvernement n'est même pas capable d'obtenir des États-Unis 500 millions de dollars qui nous sont dus.

Le ministre est-il en mesure d'annoncer la conclusion d'un accord en cette Chambre ou doit-il encore se contenter de nous annoncer que des discussions se poursuivent, toujours sans résultat?

(1200)

M. Alfonso Gagliano (secrétaire d'État (Affaires parlementaires) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, au nom du ministre du Commerce international, j'aimerais assurer le député que le ministre et le gouvernement canadien étudient toute cette question avec intérêt. Le gouvernement est convaincu que nous allons récupérer la somme à laquelle le député fait allusion. Malheureusement, à ce moment-ci, il y a eu des groupes américains qui ont intenté des poursuites et donc nous devons laisser cet aspect judiciaire suivre son cours. Comme gouvernement canadien, nous faisons de la représentation pour nous assurer que les sommes soient remboursées aux Canadiens.

_____________________________________________


6090

AFFAIRES COURANTES

[Français]

LOI SUR LE MINISTÈRE DU PATRIMOINE CANADIEN

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien) demande à présenter le projet de loi C-53 intitulé Loi constituant le ministère du Patrimoine canadien et modifiant ou abrogeant certaines lois.

(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

[Traduction]

PÉTITIONS

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell): Monsieur le Président, j'ai une pétition signée par 22 000 Canadiens qui demandent au Parlement du Canada de maintenir tel quel l'article 241 du Code criminel du Canada interdisant à quiconque d'aider quelqu'un à se donner la mort.

Cette pétition a circulé grâce à une quadraplégique, une dame de Winnipeg, une certaine Theresa Ducharme. Je tiens à féliciter publiquement Mme Ducharme de l'immense effort que comporte le lancement de cette initiative.

[Français]

LE IRVING WHALE

Mme Monique Guay (Laurentides): Monsieur le Président, la semaine dernière, je me suis rendue aux Îles-de-la-Madeleine. Les Madelinots m'ont remis cette pétition concernant l'épave du Irving Whale. Les pétitionnaires demandent de colmater les fuites de l'épave le plus tôt possible. Ils demandent aussi que de nouvelles audiences publiques soient tenues.

Ayant vu et pris connaissance du dossier du Irving Whale, j'appuie avec vigueur les demandes des Madelinots et je dépose leur pétition.

[Traduction]

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, j'aimerais présenter deux pétitions à la Chambre. La première porte 478 signatures. Elle demande au Parlement d'examiner et de modifier la Loi sur les jeunes contrevenants afin d'épargner à la société d'autres maux dont se rendent coupables de jeunes délinquants et de décourager la criminalité chez les jeunes en rendant les peines plus sévères,


6091

en publiant les noms des grands délinquants et en élargissant les pouvoirs d'enquête de la police.

LE SUICIDE ASSISTÉ

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, ma deuxième pétition est signée par des électeurs de ma circonscription. Ces pétitionnaires exhortent le Parlement à ne pas abroger ni modifier de quelque façon que ce soit l'article 241 du Code criminel et à confirmer le jugement qui a été rendu par la Cour suprême du Canada le 30 septembre 1993 et qui interdit les suicides commis avec l'aide d'un médecin.

LES AFFAIRES INDIENNES

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon): Monsieur le Président, j'ai ici une pétition signée par des membres du Conseil des Dénés Kaskas. Il s'agit d'habitants de Fort Ware, en Colombie-Britannique, de Good Hope Lake et de Watson Lake, au Yukon.

(1205 )

En tant que membres du Conseil des Dénés Kaskas, les pétitionnaires supplient le gouvernement, qui est représenté par le ministre des Affaires indiennes, de ne pas maintenir sa compétence et son contrôle sur les terres non cédées et de faire en sorte que les revendications territoriales du Conseil des Dénés Kaskas soient réglées équitablement avant que toute terre ne soit cédée.

C'est avec plaisir que je présente cette pétition. Je l'appuie et j'encourage le gouvernement à poursuivre les négociations relatives aux revendications territoriales avec le Conseil des Dénés Kaskas.

LES CARTES DE TUEURS

M. John Cannis (Scarborough-Centre): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui, au nom des électeurs de Scarborough-Centre, trois pétitions.

La première porte la signature de 74 habitants de la région de Scarborough qui prient le gouvernement de modifier les lois afin d'interdire l'importation, la distribution, la vente et la fabrication de cartes de tueurs en série et d'aviser les producteurs de ces cartes que les produits destinés au Canada seront saisis et détruits.

L'AVORTEMENT

M. John Cannis (Scarborough-Centre): Monsieur le Président, la deuxième pétition porte la signature de 80 électeurs de Scarborough-Centre; elle demande au gouvernement de modifier le Code criminel afin que les foetus jouissent de la même protection que celle accordée aux êtres humains vivants.

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. John Cannis (Scarborough-Centre): Monsieur le Président, la troisième pétition provient de 115 pétitionnaires de Scarborough-Centre qui prient le Parlement de veiller à ce que les dispositions du Code criminel interdisant le suicide assisté par un médecin soient strictement mises en application et de ne promulguer aucune loi qui sanctionnerait ou permettrait l'aide ou le soutien au suicide ou à l'euthanasie, active ou passive.

L'AVORTEMENT

M. Ed Harper (Simcoe-Centre): Monsieur le Président, je voudrais présenter trois pétitions au nom des habitants de Simcoe-Centre.

La première pétition porte sur l'avortement. Les pétitionnaires demandent au Parlement de réexaminer les modifications au Code criminel.

L'EUTHANASIE

M. Ed Harper (Simcoe-Centre): Monsieur le Président, la deuxième pétition porte sur la question de l'euthanasie. Les pétitionnaires demandent que l'on mette en application les lois actuelles concernant l'euthanasie active.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Ed Harper (Simcoe-Centre): Monsieur le Président, la troisième pétition demande au gouvernement du Canada de ne pas modifier la Loi sur les droits de la personne pour y inclure l'expression «orientation sexuelle».

Les pétitionnaires craignent que l'inclusion de l'orientation sexuelle signifierait que la société approuve les comportements homosexuels. Ils croient que le gouvernement ne devrait pas légitimer ces comportements, car ce n'est manifestement pas ce que souhaite la majorité.

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole à la Chambre pour présenter des pétitions signées par plus de 800 habitants de la circonscription de Cariboo-Chilcotin.

Ces électeurs viennent de nombreuses collectivités, dont McLeese Lake, Alexis Creek, Anahim Lake, Quesnel, Williams Lake, Tatla Lake et 100 Mile House. Ils demandent tous au gouvernement de ne pas adopter une mesure législative qui augmenterait le nombre de lois sur le contrôle des armes à feu.

Je souscris à ces pétitions.

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, et au nom des électeurs de Saanich-Les Îles-du-Golfe et des environs, j'ai le devoir et l'honneur de présenter deux pétitions jugées conformes par le greffier des pétitions.

Dans ces deux pétitions, les pétitionnaires demandent humblement qu'il plaise au Parlement d'assurer le maintien des dispositions actuelles du Code criminel du Canada qui interdisent l'aide au suicide.

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je voudrais présenter à la Chambre une pétition dans laquelle certains de mes électeurs expriment leur opinion.

6092

Les pétitionnaires demandent au gouvernement de faire respecter les dispositions actuelles du Code criminel qui interdisent l'aide au suicide. Ils demandent également qu'aucun changement qui approuverait ou autoriserait l'aide au suicide ne soit apporté à ces dispositions.

Je suis heureux de déposer cette pétition à la Chambre au nom de ces électeurs soucieux.

L'EUTHANASIE

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, je voudrais présenter deux pétitions différentes à la Chambre aujourd'hui.

J'ai l'honneur de présenter une pétition venant de la Netherlands Reform Congregation de ma circonscription au sujet de l'euthanasie. Des centaines de Canadiens disent ainsi aux parlementaires que les médecins canadiens devraient essayer de sauver des vies plutôt que d'y mettre un terme.

Je souscris de tout coeur à leur déclaration et j'espère vivement que le comité sénatorial chargé de tenir des audiences sur cette question écoutera notre appel collectif en faveur de la vie.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, la seconde pétition que j'ai l'honneur de présenter vient de 89 de mes électeurs qui s'inquiètent de l'inclusion de l'expression non définie «orientation sexuelle» dans la législation fédérale sur les droits de la personne.

Selon les pétitionnaires, les privilèges que la société accorde aux couples hétérosexuels ne devraient pas s'étendre aux relations entre gens de même sexe.

Je souscris à la position de mes électeurs.

M. Milliken: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'espère qu'il y aura consentement pour revenir à la présentation des rapports de délégations interparlementaires pour permettre au très éminent député d'Ottawa-Vanier de soumettre un rapport qu'il a sur une récente réunion d'une de nos organisations interparlementaires.

* * *

(1210)

DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES

M. Jean-Robert Gauthier (Ottawa-Vanier): Monsieur le Président, je remercie mes collègues. J'étais un peu distrait, j'étais ici, mais je n'étais pas tout à fait présent.

En vertu de l'article 34 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre, dans les deux langues officielles, le rapport de la section canadienne de l'Assemblée internationale des parlementaires de langue française, concernant la 20e session ordinaire, qui a eu lieu à Paris du 10 au 13 juillet 1994.

QUESTIONS TRANSFORMÉES EN ORDRES DE DÉPÔT DE DOCUMENTS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, si la question no 67 posée par l'honorable député de Hochelaga-Maisonneuve pouvait être transformée en ordre de dépôt de document, ce document serait déposé immédiatement.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre que la question no 67 soit transformée en ordre de dépôt de document?

Des voix: D'accord.

[Texte]

Question no 67-M. Ménard:

En ce qui concerne le Programme de productivité de l'industrie du matériel de défense (PPIMD) administré par le ministère de l'Industrie, a) quelles sont les compagnies qui se sont vues accorder de l'aide financière depuis le 1er janvier 1994, b) de quel type d'aide (subventions, prêts remboursables avec ou sans redevances, avantages fiscaux) ces compagnies ont-elles pu bénéficier, c) quels montants d'argent ont été engagés par compagnie pour les aider, d) à quels critères les compagnies bénéficaires d'aide ont-elles répondu face aux exigences gouvernementales favorisant la reconversion militaire de ces entreprises?
(Le document est déposé.)

[Français]

M. Milliken: Je propose que toutes les autres questions soient réservées.

Le vice-président: Les autres questions sont-elles réservées?

Des voix: D'accord.

_____________________________________________


6092

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LOI SUR LE MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-49, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Agriculture et abrogeant ou modifiant certaines lois, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. André Caron (Jonquière): Monsieur le Président, je vais continuer l'intervention que j'avais commencée avant la période des questions. Je rappelle que j'intervenais sur la loi présentée par le ministre de l'Agriculture visant à changer le nom de son ministère et à présider certaines attributions en ce qui concerne la recherche et la transformation des produits agricoles.

J'ai dit que le Bloc québécois est favorable à ce projet de loi. Mais je constate toutefois à la lecture du projet et après avoir entendu l'intervention du ministre qui a fort bien décrit les implications de son ministère dans le domaine de l'agriculture au Canada, qu'il y a potentiellement beaucoup d'activités constituant des chevauchements.

Si l'on regarde ce que le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada font dans le domaine de l'agriculture et de l'agroalimentaire aussi, on s'aperçoit qu'il y a beaucoup d'activités qui sont à peu près les mêmes. Le gouvernement du


6093

Québec soutient aussi les agriculteurs; le gouvernement du Québec voit au développement des marchés, voit à favoriser les activités de recherche, voit aussi à favoriser des activités relatives à l'inspection des produits agricoles.

Je me rends compte que c'est à peu près cela que le gouvernement fédéral va faire. C'est un exemple de chevauchements. Si on considère par ailleurs que, historiquement, les dépenses du gouvernement fédéral dans l'agriculture québécoise ont toujours été inférieures à la part de la population du Québec dans la fédération canadienne, on s'aperçoit qu'au fond, il y a peut-être encore un exemple où les gens du Québec paient en double. Ils paient pour des activités de recherche et de développement de l'agriculture dans leur province, et par leur participation au budget du gouvernement fédéral ils paient aussi pour les activités qui se déroulent ailleurs.

Si on pouvait constater que le gouvernement fédéral dépensait au Québec à peu près sa part relative à la population, on pourrait dire que l'on ne paie pas plus pour avoir les mêmes services ou se donner des services particuliers, pour se donner des services qui sont à peu près les mêmes que ceux que le gouvernement fédéral peut nous donner. On constate que ce n'est pas le cas.

Si je ne m'abuse, la part des dépenses du gouvernement fédéral dans l'agriculture au Québec n'a jamais historiquement dépassé les 20 p. 100 et souvent le pourcentage était pas mal inférieur à ce chiffre.

(1215)

Je ne dirais pas que je suis surpris parce qu'on constate cela depuis bien longtemps au Québec, mais je suis surpris que le ministre n'ait pas inclus dans son projet de loi certaines dispositions visant à limiter les chevauchements possibles avec les activités dans le domaine de l'agriculture qui relève du gouvernement du Québec.

J'ai à coeur de prendre part à ce débat. En écoutant la période des questions et en entendant les déclarations des députés, on a rappelé le fait qu'au cours des trois dernières années, particulièrement lors du référendum de 1992 au Québec, les Québécois avaient payé pour le référendum en vertu d'une loi du Québec et qu'ils avaient payé aussi pour le référendum tenu ailleurs au Canada. Payant des impôts comme tout le monde, une part des montants versés par le gouvernement fédéral pour le référendum au Canada-à Regina, à Toronto, à Saint-Jean, Terre-Neuve-provient des impôts payés par les Québécois. Ils ont payé pour la tenue de ce référendum et ils ont payé aussi pour le leur. Il y a là un chevauchement évident.

Les Québécois avaient cru comprendre que leur premier ministre avait obtenu la parole du premier ministre canadien à l'effet que ces montants leur seraient remboursés. Les Québécois ont cru leur premier ministre, M. Bourassa. Ils ne pensaient pas nécessairement que M. Bourassa mentait. Monsieur Bourassa avait parlé de son siège à l'Assemblée nationale. Aujourd'hui, on nous dit que la parole du premier ministre du Québec ne suffit pas pour prouver une dette du gouvernement fédéral envers le Québec.

C'est pour cela que j'aurais aimé que dans la loi présentée actuellement par le ministre de l'Agriculture, il y ait des dispositions nous indiquant que celui-ci consultera le ministère de l'Agriculture du Québec pour éviter les chevauchements, pour s'assurer qu'il n'y ait pas d'endroit où les Québécois seront exposés à payer en double.

J'aurais aimé voir cela dans la loi parce que je réalise que quand ce n'est pas écrit noir sur blanc, quand ce n'est pas écrit devant témoin, enregistré par un notaire, quand ce n'est pas complètement clair dans un projet de loi, rien ne se fait. À ce moment-là, on dit que même si des promesses ont été faites par un premier ministre fédéral, rien ne tient si ce n'est pas écrit.

C'est pour ça que j'aurais aimé voir dans le projet de loi du ministre des indications claires que des efforts véritables seront faits pour éviter les chevauchements de façon que les Québécois ne paient pas encore une fois-là comme à beaucoup d'autres endroits-deux fois pour le même service.

Je ne retiendrai pas l'attention de la Chambre plus longtemps. Naturellement, le Bloc québécois est favorable à l'esprit du projet de loi. Nous l'étudierons en comité. Nous demanderons notamment que soit précisée la question des inspecteurs. On donne en français et en anglais une définition de l'inspecteur; il ne semble pas qu'on dise tout à fait la même chose.

En comité, les membres du Bloc québécois demanderont que cela soit précisé parce que c'est très important que les francophones du Québec puissent avoir la conviction et l'assurance que ce qu'ils lisent en français dans un projet de loi signifie la même chose que dans sa version anglaise.

Je vous remercie de l'attention que vous m'avez accordée et soyez assuré que nos collègues du Bloc québécois, membres du Comité de l'agriculture, veilleront à faire en sorte que ce projet de loi soit bonifié dans l'intérêt de la population du Québec et du Canada.

[Traduction]

M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre): Monsieur le Président, à première vue on aurait tendance à voir dans ce projet de loi une simple mesure d'ordre administratif. En tant que député réformiste, je suis certainement en faveur de tout projet de loi qui aurait pour effet de rationaliser le ministère et de le rendre plus efficace.

(1220)

Certains aspects du projet de loi me préoccupent cependant. Tout d'abord, il y a le nouvel article sur les services d'inspection, qui stipule: «Le ministre peut désigner des inspecteurs pour fournir les services d'inspection qu'il estime nécessaires à l'application de toute loi lui conférant des attributions.»

J'ai des questions à ce sujet. Cet article a-t-il pour effet de créer un niveau supplémentaire de police chargée de l'inspection au Canada? Par exemple, cet article donne-t-il au ministre le pouvoir d'appliquer, par l'intermédiaire d'un inspecteur désigné, toute loi concernant l'agriculture qui relève de sa compétence?

Ma deuxième question concerne l'abrogation de l'article 6 de la loi actuelle, qui stipule: «Dans les cinq premiers jours de séance de chaque chambre du Parlement suivant le 31 janvier, le ministre fait déposer devant elle le rapport d'activité de son ministère pour l'exercice précédant cette date.»

Les questions que j'aimerais poser sont: premièrement, combien cette mesure permettra-t-elle d'économiser? Si effectivement elle permettait de réaliser des économies, je serais le premier à l'appuyer. Deuxièmement, le comité permanent


6094

pourra-t-il effectivement examiner le rapport du ministre sans que le document soit déposé à la Chambre?

Il y a actuellement dans le monde des facteurs qui risquent de modifier radicalement la façon dont l'agroalimentaire est pratiquée. Les nouveaux accords commerciaux, les filets de sécurité, l'endettement agricole, pour ne nommer que ceux-là, modifieront radicalement l'agroalimentaire au cours des prochaines années. Une merveilleuse occasion s'offre à nous. Au lieu de rafistoler le ministère en lui donnant un nouveau nom, pourquoi le gouvernement et le ministre ne procèdent-ils pas à une réorganisation complète?

Nous sommes prêts à contribuer à un tel exercice, mais pas à ce qui est proposé actuellement. Tous les députés, y compris le ministre-tout particulièrement le ministre-, devraient retourner à la case départ et élaborer une politique à partir de la base.

Nous ne pouvons pas nous contenter simplement d'un projet de loi superficiel qui se limite à changer le nom du ministère. Nous entrons dans une période cruciale de changements rapides qui touchent l'industrie agricole, l'industrie de soutien, les deux niveaux de gouvernement et leurs responsabilités en matière d'agriculture. Nous vivons une époque de grands changements, peut-être encore plus importants que ceux qu'on a vécus au moment de la colonisation des terres du dominion et de la grande dépression, qui nous a forcés à adopter des mesures d'urgence. Nous savons quels sont les changements en cours. Il y a les accords de commerce international. Il y a les nouveaux marchés. Il y a les nouvelles biotechnologies. Il y a aussi moins d'argent injecté par les gouvernements. Il y a une plus grande demande de denrées dans le monde. Et il faut prendre soin de préserver notre environnement.

Pour réussir sur tous ces plans, nous ne pouvons pas nous contenter de faire des petits changements ici et là. Nous devons maintenant envisager ce que j'appellerai une reconfédération de l'agriculture. C'est la vision que nous préconisons et, pour que cette vision soit bien claire, je crois qu'elle doit s'articuler en trois volets.

Premièrement, en tant que Canadiens, nous devons nous amener mutuellement à apprécier davantage nos réserves alimentaires sûres et abordables. Qu'y a-t-il de plus important que l'alimentation, dans notre vie quotidienne? Pourtant, nous tenons tellement pour acquis l'abondance de nos réserves. Dans d'autres régions du monde, bien des gens ont souffert de désastres naturels majeurs ou de conflits militaires destructeurs, qui ont créé des pénuries alimentaires conduisant à la famine. Nous devons être reconnaissants de n'avoir jamais eu à vivre une telle situation au Canada.

Nous devons apprécier davantage nos réserves alimentaires. Évidemment, nous ne devons pas évaluer le ministère de l'Agroalimentaire uniquement d'après les statistiques et les chiffres. Oui, l'industrie ne représente que 8 p. 100 du PIB, mais qu'y a-t-il de plus important dans notre vie quotidienne que notre pain quotidien?

En tant que dirigeants, nous devrions sensibiliser les gens à cette question. C'est ce que le ministre de l'Agriculture devrait faire. J'aimerais bien voir le ministre de l'Agriculture livrer un discours aux Canadiens, à l'approche du Jour d'Action de grâces, sur les bienfaits de nos réserves alimentaires sûres et abondantes, et sur l'importance de les conserver. Il pourrait en profiter pour encourager les législateurs de tous les ordres de gouvernement à faire en sorte de protéger cette ressource agricole et agroalimentaire. Ce serait le premier élément d'une déclaration sur la vision qui nous anime.

Deuxièmement, nous devons prendre conscience de l'importance d'avoir une politique solide en matière de législation, pour ce qui touche nos agriculteurs, ces gens qui produisent et transforment nos aliments. L'objectif de base que nous devons atteindre à tout prix, c'est de rétablir la rentabilité de l'agriculture. Nos politiques doivent être orientées en ce sens.

(1225)

C'est décourageant de savoir qu'en 1991, le revenu net réel des agriculteurs n'était que la moitié de ce qu'il était en 1971. En outre, tout comme le reste des Canadiens, les agriculteurs ont eu à subir les effets de l'inflation auxquels n'a pas échappé le prix des terres, du matériel, des matériaux de construction, etc. Les impôts fonciers et l'impôt sur le revenu des particuliers ont augmenté de façon spectaculaire. Comment les agriculteurs peuvent-ils survivre dans un tel climat économique?

Ils sont obligés d'avoir recours aux programmes de soutien. Mais ce qu'ils veulent, c'est un climat économique et financier leur permettant de gagner honnêtement leur vie. Ils ne veulent pas qu'on leur fasse la charité. Ils ne veulent pas que le gouvernement leur dise comment gérer leurs affaires. «Ôtez vos mains de nos poches et laissez-nous tranquilles», tel est leur message.

M. Stinson: Bien dit!

M. Kerpan: C'est la direction que le gouvernement devrait prendre.

Le troisième volet de notre vision est qu'il faut redéfinir le rôle du gouvernement fédéral, des provinces et de l'industrie dans le secteur agricole. La division des pouvoirs doit être plus nette, plus précise.

Lors du débat qui a eu lieu ici en mai dernier, notre parti a fait connaître sa position sur ce que devraient être ces nouvelles dispositions. Nous continuons à examiner la question. Des spécialistes nous ont dit qu'un nouvel arrangement était possible sans rouvrir le dossier constitutionnel. Il faudrait que tous les joueurs entament des pourparlers et négocient un meilleur partage des pouvoirs. Nous devons rationaliser et mettre fin au double emploi et aux chevauchements.

Nous proposons que les provinces détiennent le pouvoir de réglementation en ce qui concerne la gestion des ressources physiques-les terres, l'eau, les cultures et le bétail-et la formation et le perfectionnement des ressources humaines-les jeunes, les agriculteurs, les industriels, bref tous les intervenants du secteur. Les relations commerciales, la politique financière et monétaire ainsi que les programmes de soutien conformes aux ententes commerciales relèveraient du gouvernement fédéral. Le secteur agricole serait seul responsable de la vaste majorité des décisions concernant la production, la transformation, la commercialisation et le transport.

Ce n'est qu'une ébauche dont il faut encore préciser les détails. Je sens toutefois qu'il y a dans ce pays un désir très fort de parvenir à un arrangement de ce genre. À mon avis, c'est dans cette direction qu'il faut nous diriger.

Je voudrais dire au ministre de l'Agriculture que son discours de présentation et ses commentaires sur le projet de loi m'ont


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beaucoup plu. Il a fait état d'une vision en cinq points. La mienne n'en a que trois. Quoi qu'il en soit, nos deux visions ont, à bien des égards, beaucoup de points communs.

Il a parlé de la consultation nationale que l'on projette et la question que je pose est celle-ci: Comment procéderons-nous? Comment faire pour savoir ce que pensent ou proposent nos agriculteurs? C'est bien difficile.

J'invite fortement le ministre à mettre lui-même la main à la pâte. Une consultation comme celle-là ne peut fonctionner sans la collaboration et la participation totales du ministre et de tout son ministère.

La dernière chose dont les agriculteurs ont besoin c'est d'un autre processus de consultation suivi d'un rapport qui ira dormir sur une tablette et ne sera jamais consulté. Ces derniers mois, j'ai eu l'occasion d'examiner des rapports de ce genre. Beaucoup d'entre eux étaient excellents. Ils présentaient des plans et des politiques qui auraient pu et auraient dû être mis en oeuvre par le gouvernement, mais ils n'ont jamais été étudiés. Nous ne pouvons plus nous permettre ce genre de processus de consultation.

Le ministre disait dans son discours que le secteur a changé au cours des 25 dernières années. Je suis tout à fait d'accord. Il n'y a aucun doute là-dessus, mais comme le disait le ministre, les agriculteurs et les consommateurs de tout le pays doivent avoir une vision commune.

En tant qu'agriculteur, je me souviens que mon père me répétait souvent: «Tu dois te préparer. Tu dois être prêt à toute éventualité et tu dois te garder diverses possibilités ouvertes.» C'est comme partir pour une journée de travail sans faire le plein du réservoir du tracteur. Vous partez peut-être avec les meilleures intentions du monde, mais une heure plus tard vous allez être en panne sèche et vous ne pourrez pas atteindre votre objectif. Ce serait tout à fait impossible.

(1230)

Nous devons entrer dans le prochain siècle par nos propres moyens et non y être remorqués par les forces du marché. En tant que gouvernement, en tant qu'industrie, nous devons nous diriger vers le siècle prochain munis de bonnes politiques conçues et arrêtées au niveau des agriculteurs eux-mêmes.

En terminant, je dirais que le Parti réformiste est plus qu'heureux, plus que prêt et plus que désireux de collaborer avec le gouvernement à la définition de telles politiques. Espérons qu'ensemble nous pourrons concevoir pour le siècle prochain quelque chose de satisfaisant et de juste, quelque chose que les agriculteurs désirent.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Monsieur le Président, j'ai bien aimé la présentation du député et j'aurais peut-être le goût qu'il donne des détails sur l'idée suivante, à savoir que la valorisation des milieux ruraux, pour laquelle l'agriculture est sûrement un facteur très important, ne nécessiterait-elle pas, par exemple, une approche beaucoup plus large qui, comme il l'a dit lorsqu'il parlait d'une collaboration entre les consommateurs et les producteurs, demanderait aussi une approche globale?

Parce que le gouvernement fédéral, face aux milieux ruraux, a beaucoup d'actions qui sont négatives, actuellement, que ce soit, par exemple, par la Société des postes, que ce soit par les sociétés de transport ferroviaire. Il y a beaucoup d'endroits où la main gauche ne sait pas ce que la main droite fait et j'aimerais savoir du député s'il croit que le gouvernement fédéral devrait avoir des approches différentes et quelles seraient les voies de solutions pour s'assurer que l'action du gouvernement, dans ces sociétés nationales, vienne concrétiser les volontés d'action présentées par le ministre de l'Agriculture, plutôt que d'avoir un effet négatif qui vienne détruire cette bonne volonté par des visions beaucoup plus centralisatrices et qui viennent annihiler les efforts, souvent, des communautés locales.

Le vice-président: Cher collègue, je me suis trompé. Il n'y a pas de période de questions et commentaires après que le porte-parole d'un parti a parlé. C'est tout à fait ma faute. Est-ce qu'on peut accepter cela comme une représentation ou est-ce qu'il y a consentement unanime pour permettre au député de répondre à cette question?

Des voix: D'accord.

[Traduction]

M. Kerpan: Monsieur le Président, j'aimerais répondre à cette question et je vous remercie de m'accorder le temps de le faire. Je serai très bref.

Nous faisons partie d'un marché mondial. Cela ne fait aucun doute. Le rôle des membres du comité est d'élaborer une politique qui s'applique chez nous. Une partie de ce travail de planification doit toutefois consister à mettre au point une politique qui débouchera sur une économie encore plus large que celle dont nous faisons actuellement partie.

Il me semble, en tant que député de la Saskatchewan à l'écoute des agriculteurs de cette province, qu'il faut commencer par le commencement plutôt que d'élaborer d'abord une politique internationale.

Le ministre l'a probablement mieux expliqué que moi lorsqu'il a dit au début de son intervention qu'une base solide est essentielle, sinon tout s'écroule. Compte tenu de mon expérience de la construction, je suis d'accord avec lui. On ne peut ériger une structure si les fondations ne sont pas solides. Tout s'écroulerait.

À mon avis, il faut planifier une politique agricole comme si aucune n'existait à l'heure actuelle. Il faut partir du début, mettre cette politique en oeuvre chez nous puis, ensuite, l'étendre au niveau international.

M. Lyle Vanclief (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire): Monsieur le Président, je suis certes très heureux d'intervenir aujourd'hui pour faire des observations sur le projet de loi C-49.

Permettez-moi d'abord de rappeler à tous l'objet de cette mesure. Le projet de loi met en vigueur le nouveau titre du ministère de l'Agriculture qui sera désormais désigné ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. Cette modification exige que d'autres modifications soient apportées aux lois


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connexes. Le nouveau titre est nécessaire en raison du rôle plus vaste que le ministère joue depuis quelques années et de la mise à jour législative qui s'impose.

(1235)

Pour répondre à certaines observations faites par les orateurs de l'opposition, soit du Parti réformiste et du Bloc québécois, qui ont parlé, entre autres, de l'affectation des crédits, je fais remarquer que le projet de loi ne traite pas du tout de cette question. La mesure ne porte aucunement sur ce sujet, qui se situe plutôt à un niveau administratif de la collaboration entre le fédéral et les provinces. Cette collaboration est constante et sera certainement maintenue.

Quant au député réformiste qui a demandé que le ministre prononce un discours le Jour d'Action de grâces, s'il le veut, il obtiendra certainement copie du discours que le ministre a prononcé, le 19 septembre dernier, devant les membres de la Chambre de commerce à Regina. Le ministre a alors insisté clairement sur l'importance de l'industrie canadienne de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Il a aussi mentionné les questions qui, selon lui, nécessitent notre attention. Comme le député le sait pertinemment, jeudi prochain, le ministre assistera à la réunion du comité permanent, où il expliquera en détail sa vision ainsi que les inquiétudes et problèmes que soulève notre industrie dans son ensemble.

Le projet de loi modifie le nom du ministère, mais il clarifie également son mandat, pour qu'il ne porte plus seulement sur l'agriculture, mais aussi sur les produits dérivés de l'agriculture. Il faut que nous fassions cela. Le projet de loi étend aussi la responsabilité du ministre en ne se rapportant plus seulement aux stations agronomiques, mais à la recherche dans ce domaine, notamment à l'exploitation de stations agronomiques partout au Canada.

Ces modifications importantes sont nécessaires à la mise à jour de la loi. Elles tiennent compte de la relation qui existe déjà depuis longtemps entre le ministère et l'industrie de l'agriculture et de l'agroalimentaire au Canada. La relation a commencé à changer il y a quelques années, lorsque le ministère a reçu le mandat de garantir la salubrité des aliments au Canada.

Nos services d'inspection constituent encore un des principaux points de contact entre l'industrie et le ministère. C'est à la Direction générale de la production et de l'inspection des aliments que l'on retrouve le plus fort pourcentage de fonctionnaires du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire.

Nous savons aussi que, au fil des ans, le ministère a joué un rôle de plus en plus important et de plus en plus nécessaire dans la recherche de débouchés, le soutien au développement des marchés et même le développement des marchés tout court. L'application des règles de salubrité demeure importante, mais le ministère se considère plus comme un surveillant dans ses fonctions d'inspection.

L'une des activités clés au sein du ministère est le partenariat. Nous devons continuer de repenser nos relations avec nos clients de l'industrie. Il faut rappeler que, oui, la salubrité des aliments demeurera toujours notre grande priorité, mais que nous intervenons aussi dans d'autres domaines. Pour qu'un partenariat survive, il faut toutefois qu'il y ait une bonne communication entre le ministère et les autres parties intéressées. J'espère trouver, au sein du comité permanent, ce genre de communications et de collaboration, que j'ai d'ailleurs toujours été en mesure de constater depuis mon arrivée au Parlement, soit depuis 1988.

Je désire signaler un autre partenariat que nous reconnaissons au ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et que nous avons constaté pour la première fois à la conférence fédérale-provinciale des ministres de l'Agriculture tenue à Winnipeg, au début de juillet. Il s'agit du rôle important que jouent les femmes dans le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Elles jouent un rôle important non seulement comme productrices dans un secteur qui nourrit la nation, mais de plus en plus comme femmes d'affaires et partenaires de leur conjoint. Elles jouent un rôle clé, et nous savons que l'avenir leur réserve encore plus de défis. Elles rappellent aux agents du ministère qu'il faut toujours se préoccuper de la sécurité à la ferme.

(1240)

En Ontario, il y a déjà quelques années, j'ai eu l'occasion de faire partie pendant deux ans d'un groupe de travail sur la santé et la sécurité dans le secteur agricole. Le rôle important que nous avons à jouer nous a été clairement décrit par des agricultrices en grande partie et par des représentants de l'industrie.

Nous savons bien, surtout au niveau de la production primaire, qu'il y a des jours et des nuits longs, humides, grisâtres et ainsi de suite, où les conditions sont loin d'être idéales. Il y a aussi des banquiers qui veulent que les agriculteurs apportent leur grain aux silos ou aux élévateurs afin d'être en mesure de payer leurs dettes. Il faut être très conscient de ces préoccupations aussi, car il en va de la sécurité de tous les membres du secteur industriel.

Le rôle du gouvernement change. Le système fédéral d'inspection des aliments en est un bon exemple. Nous ne pouvons pas nous permettre d'assigner en permanence un inspecteur à tous les établissements et à toutes les usines de transformation. Par conséquent, nous devons dans une large mesure compter sur le secteur industriel pour se surveiller lui-même, d'autant plus qu'il bénéficie sans aucun doute aussi des normes très élevées régissant au Canada les aliments et la qualité des denrées. Il a aussi la responsabilité de s'assurer que ses produits et ses méthodes satisfont aux normes fixées. Le ministère a là aussi un rôle de facilitateur à jouer.

Le secteur industriel se rend bien compte que la grande qualité des produits canadiens est un atout commercial auprès des consommateurs, tant canadiens qu'étrangers, et nous vendons beaucoup à l'étranger. La réputation de qualité des produits canadiens rapporte beaucoup d'argent. Il faut la maintenir.

C'est une responsabilité partagée qui coûte cher. Nous y consacrons énormément d'argent. Je ne dis pas le moins du monde que ce soit de l'argent gaspillé, mais il faudra probablement-et on le fait effectivement-négocier des accords de frais partagés avec le secteur industriel. Cela fonctionne très bien dans d'autres pays. Cela marche


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parfaitement en Australie, en Nouvelle-Zélande et aux États-Unis. Ces pays ont certes aussi d'excellentes normes.

Nous devons continuer d'améliorer le système d'inspection, et cela coûte cher. Pour sa part, le ministère s'efforce d'harmoniser les normes dans tout le pays. Je voudrais dire, à l'intention du député bloquiste qui a parlé tout à l'heure, que les efforts déployés conjointement par le gouvernement fédéral et les provinces pour éliminer les dédoublements dans le système d'inspection des aliments portent fruit. Il reste encore beaucoup de travail à faire, mais nous pouvons éliminer les dédoublements et nous le ferons.

Cela aura des avantages pour tout le monde. C'est pourquoi il est essentiel de continuer de collaborer. Dans le domaine de la recherche, il importe de travailler encore plus étroitement avec l'industrie, car souvent les innovations scientifiques ou techniques bénéficient à l'ensemble des Canadiens.

Nous avons certains objectifs à atteindre en matière de commerce. Tout à l'heure, le ministre en a parlé, mentionnant notamment notre volonté de porter à 20 milliards de dollars d'ici l'an 2000 nos exportations dans le secteur agroalimentaire. Nous savons-et je tiens à le dire clairement à mes collègues et aux acteurs de l'agroalimentaire-que pour atteindre cet objectif, il nous faudra améliorer notre rendement.

Nous devons miser sur les possibilités que nous offrent les progrès technologiques, savoir tirer profit de l'évolution des marchés et des accords commerciaux comme le GATT, l'ALENA et d'autres encore. Nous avons un objectif à atteindre.

Le marché de la région Asie-Pacifique, par exemple, nous intéresse beaucoup. Nous savons que d'ici l'an 2000, 50 p. 100 de l'accroissement de la richesse mondiale se fera dans cette région. Nous savons que c'est également là que se produira 50 p. 100 de l'accroissement des échanges internationaux d'ici l'an 2000. Nous savons aussi qu'il y a actuellement une explosion des possibilités commerciales en Amérique centrale et en Amérique du Sud. Nous devons être présents sur place. Notre ministère doit travailler en collaboration avec tous les intervenants et tous les partenaires de l'industrie pour profiter au maximum de toutes ces possibilités. Des occasions se présentent. Une étroite collaboration est nécessaire.

(1245)

Dans le programme électoral que nous avons mis de l'avant l'automne dernier, nous avons promis la création d'un conseil de l'agroalimentaire dont le mandat serait axé sur la compétitivité sur les marchés internationaux. Je sens déjà que certains de mes vis-à-vis vont dire: «Bien, nous sommes en train de mettre les choses en place, mais vers quoi nous dirigeons-nous?» Je puis vous assurer que ces groupes ne seront pas formés tant qu'on ne sera pas prêt à leur confier un mandat et à écouter leurs recommandations de façon à pouvoir tirer profit des ressources de ces gens.

Nous avons également dit que nous mettrions sur pied un service commercial pour le secteur agroalimentaire, et c'est ce que nous faisons à la Direction générale des services à l'industrie et aux marchés. Nous voulons créer un guichet unique pour éliminer les dédoublements et réduire les formalités bureaucratiques afin que les gens de l'industrie qui veulent discuter de l'accès aux programmes fédéraux, que ce soit sur le plan de la recherche, que nous encourageons, ou sur le plan du marketing, puissent le faire en s'adressant à un seul endroit.

Le programme «Préparons-nous à la mondialisation» est un autre de nos programmes, dans lequel nous avons investi 4 millions de dollars. Plus tôt cette semaine, j'ai eu l'occasion de me joindre à un groupe d'électeurs à la Ferme expérimentale ici, à Ottawa. Ces gens, qui font partie du Indian Agricultural Program, reçoivent de l'aide dans le cadre du programme «Préparons-nous à la mondialisation» pour le développement d'une variété de maïs blanc devant être utilisée pour la fabrication de croustilles au maïs, etc.

Le programme «Préparons-nous à la mondialisation» aide les gens à améliorer leurs compétences en gestion, à promouvoir des alliances stratégiques, à appliquer des solutions technologiques et à recueillir des renseignements sur les marchés. Nous sommes heureux de pouvoir apporter ce genre d'aide.

Parmi les autres programmes, mentionnons le programme «Stratégies de commercialisation des produits agroalimentaires» et le Fonds pour l'expansion des exportations. Je vais donner seulement un exemple du genre d'aide fournie dans le cadre du programme «Stratégies de commercialisation des produits agroalimentaires». Grâce à ce programme, le Club des exportations agroalimentaires du Québec reçoit jusqu'à 475 000 $ pour le développement de ses marchés internationaux. C'est un club qui affiche des ventes internationales de 25 millions de dollars, sans compter les ventes aux États-Unis. Il fournit de l'information, des conseils et de la formation à ses membres. Il soutient et encourage la coopération entre ses membres dans leurs activités de promotion à l'étranger.

Le ministère aide également les exportateurs de l'industrie agroalimentaire en recueillant et en diffusant de l'information sur le commerce extérieur. Nous comptons à l'heure actuelle environ 85 commissaires travaillant à temps plein ou à temps partiel dans une centaine de marchés étrangers dans le monde, et nous continuerons de mettre l'accent sur cette activité.

Pendant trop longtemps, l'industrie agroalimentaire canadienne s'est contentée de vendre uniquement au client américain. C'est bien sûr notre client le plus important, le plus rapproché et le plus facile. Mais nous ne pouvons mettre tous nos oeufs dans le même panier, si je peux me permettre ce cliché. Nous devons continuer d'explorer les débouchés qu'offrent les autres régions du monde, et nous le faisons. Nous devons apprendre à satisfaire les appétits du reste du monde. Comme le ministre l'a dit ce matin, nous ne sommes probablement pas loin d'en arriver en Amérique du Nord au point où la moitié de la production des exploitations agricoles sert quelque part et de façon ou d'une autre chez nous autrement que comme produit alimentaire. Les besoins vont croissant à cet égard.

Comme le ministre l'a dit également, nous devons donc explorer les débouchés existants, que ce soit au pays ou à l'étranger, et nous devons produire ce que nous pouvons vendre. Nous ne pouvons plus réussir en tâchant de vendre ce que nous aimons produire. Nous faisons tous la même erreur. Quand on s'adonne à l'agriculture, on se dit: «J'ai toujours fait ceci ou


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cela»-c'est-à-dire les cultures qu'on connaît bien, mais nous devons constamment nous adapter.

(1250)

Je voudrais confirmer les objectifs que les modifications proposées dans ce projet de loi font ressortir et les perspectives nouvelles qui s'offrent ainsi à nous. Il ne s'agit pas seulement de reconnaître ce que nous avons fait, ce que le gouvernement du Canada a fait par le passé. De meilleures recherches en agriculture et en alimentation nous aideront à concevoir de nouveaux produits. De nouvelles alliances nous aideront à conserver des normes élevées. Il peut y avoir un meilleur partenariat avec les agricultrices, avec l'industrie, avec tous les protagonistes de ce secteur. Il y a une foule d'acteurs qui doivent intervenir, et tous doivent être solides et collaborer étroitement.

Grâce à de meilleures alliances, nous pourrons être davantage à l'écoute des besoins. Grâce à de meilleurs services de renseignements, nous serons parfaitement au fait des tendances du marché. Une meilleure publicité fera augmenter la demande de produits agroalimentaires canadiens non seulement au Canada, mais aussi à l'étranger. De meilleures relations entre l'industrie et le ministère feront en sorte que le secteur agroalimentaire soit une source de prospérité pour tous les Canadiens.

En guise de conclusion, je rappelle à la Chambre et à tous les Canadiens que le secteur agroalimentaire, depuis l'agriculteur jusqu'au consommateur en passant par le commerce de détail et le secteur de la restauration et de l'hôtellerie, emploie 15 p. 100 des travailleurs canadiens. Il donne de l'emploi à 1,8 million de Canadiens et représente 8 p. 100 de notre produit intérieur brut. C'est un secteur d'activité important.

Le gouvernement s'engage à travailler encore plus fort pour que ce secteur réussisse encore mieux, et nous espérons pouvoir compter pour cela sur l'appui de tous les députés.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, je suis heureux de participer aujourd'hui au débat sur le projet de loi C-49.

Cette mesure législative concerne la gestion du ministère fédéral de l'Agriculture. Comme vous le savez, monsieur le Président, tout ce qui a des répercussions sur l'agriculture est important pour moi, en ma qualité d'agriculteur, et pour un grand nombre de mes électeurs de la circonscription de Kindersley-Lloydminster, où l'agriculture est la principale industrie.

Les membres de mon caucus et moi-même estimons que la Chambre ne discute pas assez souvent des questions agricoles et que les mesures gouvernementales se font encore plus rares à cet égard. Nous avons toutefois eu droit à un peu d'action l'autre jour, lorsque le Cabinet a été élargi. Sauf erreur, il y a maintenant un secrétaire d'État responsable de l'agriculture. C'est très bien, mais ce que l'industrie souhaite, ce n'est pas une expansion du Cabinet, mais des solutions réelles, concrètes et efficaces aux problèmes qui lui tiennent à coeur.

J'ai entendu une description assez amusante, celle d'un homme qui rajuste sa cravate pendant que son pantalon est en feu. À mon avis, cette description pourrait s'appliquer à l'actuel ministre de l'Agriculture, qui a, du reste, fait un discours très éloquent. Je crois en effet qu'il y a très peu à redire de celui-ci. Nous souhaitons tous ce qu'il y a de mieux pour notre industrie, mais la réalité, c'est qu'il y a beaucoup de problèmes dans ce secteur et que, tant que nous ne prendrons pas de mesures concrètes, nos belles paroles resteront plutôt vides de sens.

La plupart des réformes dans le secteur agricole ont l'un ou l'autre des résultats suivants. Ou bien les agriculteurs voient leurs fonds réduits à la suite de compressions de programmes, ou bien il y a un remaniement ministériel qui entraîne encore plus de tracasseries administratives. Le projet de loi à l'étude semblerait plutôt appartenir à la deuxième catégorie.

Les agriculteurs ont indiqué clairement leur volonté d'action dans un certain nombre de dossiers très importants. Au lieu de cela, dans le premier projet de loi qu'il nous présente cette session-ci, le ministre propose d'apporter quelques changements superficiels au ministère, de réorganiser certaines fonctions et d'engager quelques inspecteurs de plus. Le ministre semble délibérément faire fi des grandes préoccupations de l'industrie agroalimentaire.

Ainsi, dans les Prairies, il y a un vaste consensus sur la nécessité de tenir un plébiscite à propos de la commercialisation de l'orge. Des sondages, des groupes d'agriculteurs et des enquêtes, dont une que j'ai effectuée dans ma circonscription, révèlent qu'une grande majorité d'agriculteurs sont favorables à la tenue d'un plébiscite auprès des producteurs. Selon une enquête menée dans ma circonscription, 93 p. 100 des titulaires de permis de la Commission canadienne du blé verraient d'un bon oeil la tenue d'un plébiscite sur le mode de commercialisation de l'orge. Ces chiffres non équivoques indiquent clairement que toutes les parties souhaitent vivement régler la question d'une manière démocratique.

Avant les élections, le premier ministre avait d'ailleurs demandé la tenue d'un plébiscite à ce sujet. Pourquoi le ministre ne prend-il aucune mesure relativement à cette initiative démocratique? Il semble s'intéresser davantage à la réorganisation de son ministère qu'à l'adoption de mesures importantes pour les agriculteurs.

(1255)

Une autre question porte sur la Commission canadienne du blé. Tous les agriculteurs savent que cet organisme est dépassé et qu'il ne répond plus à leurs besoins. Certains éléments de la presse de l'Ouest exigent la suppression de la commission. Les réformistes estiment qu'il vaudrait mieux faire en sorte que la commission soit plus énergique et réceptive et offre des choix aux agriculteurs plutôt que de la supprimer.

La plupart des agriculteurs veulent avoir une commission démocratisée qui les écouterait, répondrait à leurs besoins et s'adapterait au fur et à mesure des changements. Je le répète, cette question figurait dans un sondage fait dans ma circonscription. En fait, 96 p. 100 des détenteurs de permis de la Commission canadienne du blé de la circonscription de Kindersley-Lloydminster qui ont répondu au sondage ont dit qu'ils étaient favorables à la démocratisation de la Commission canadienne du blé. Autrement dit, il faut enlever aux politiques le pouvoir qu'ils exercent sur la CCB et le remettre aux producteurs, comme c'est le cas dans la plupart des organismes de commercialisation au Canada.


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Il me semble encore une fois que le ministre préfère prendre des mesures administratives qui ont davantage pour effet de réaffecter des fonctionnaires plutôt que de faire quelque chose pour les agriculteurs.

Il existe une foule de changements constructifs visant à réformer le ministère de l'Agriculture qui seraient bénéfiques pour les producteurs.

Comme mes collègues du Parti réformiste, je soutiens que les fonds destinés à l'agriculture devraient principalement servir à aider les agriculteurs qui, sans qu'ils y soient pour quelque chose, éprouvent des difficultés financières.

Je rappelle au ministre de l'Agriculture qu'il existe actuellement 41 programmes fédéraux de soutien du revenu agricole, 286 programmes provinciaux et 22 programmes fédéraux-provinciaux. Le nombre total de ces différents programmes s'élève donc à 349, et chacun est administré et justifié séparément.

Les frais administratifs liés à la mise en oeuvre d'un si grand nombre de programmes qui, souvent, se chevauchent et sont désuets, sont pour le moins renversants. En effet, le ministre de l'Agriculture dépense plus de 2 milliards de dollars par année, dont plus de 700 millions pour les seuls coûts d'exploitation et d'immobilisation. Ces chiffres ne comprennent pas les 728 millions de dollars dépensés aux termes de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest. Sauf erreur, ils portent sur l'année 1992. Ils ont été réduits quelque peu depuis.

Ces frais généraux épouvantablement élevés dénotent une mauvaise administration causée par une gestion exagérée. En réunissant tous ces projets et ces programmes fédéraux en trois ou quatre, le gouvernement pourrait économiser de nombreux millions de dollars et offrir ainsi un meilleur soutien à l'industrie.

Nous devons exposer au grand jour le mythe que des dépenses supplémentaires donnent toujours lieu à des programmes plus efficaces. Dans le cas de l'agriculture, non seulement il est possible d'offrir un meilleur soutien avec moins d'argent, mais cela est également indispensable à la viabilité de cette industrie à long terme, étant donné la mauvaise situation financière dans laquelle se trouve le gouvernement.

Le gouvernement a l'obligation morale envers la prochaine génération d'agriculteurs de faire en sorte que les programmes qu'il met en oeuvre aujourd'hui demeureront économiquement viables demain. À l'heure actuelle, avec un déficit annuel de 40 milliards de dollars, le gouvernement ne respecte pas cette obligation.

La réforme des programmes agricoles est essentielle, car nous devons pouvoir justifier les coûts du soutien de l'agriculture devant les contribuables, les consommateurs et les générations à venir. Les programmes de soutien qui protègent nos agriculteurs et nos producteurs contre des situations échappant à leur contrôle sont défendables et souhaitables pour le maintien de notre secteur agricole.

Les collègues de mon parti à la Chambre ont proposé trois principaux programmes que nous appuyons. Je ne les réexaminerai pas intégralement aujourd'hui, mais je vais les énumérer, car nous croyons que ce sont là des programmes défendables. Il s'agit, premièrement, d'un programme fédéral-provincial d'assurance-récolte financé par les producteurs et basé sur un bon calcul actuariel. Deuxièmement, nous proposons un programme global de stabilisation du revenu offert à tous les secteurs de l'industrie. Troisièmement, nous recommandons un programme d'adaptation à la distorsion des échanges conçu pour indemniser les producteurs exportateurs, afin de contrebalancer directement les subventions étrangères.

Mes collègues et moi-même croyons que si ces programmes améliorés sont offerts aux producteurs qui en ont besoin, on en retirera de nombreux avantages.

Quelques-uns d'entre eux sont des programmes de soutien du revenu qui sont ciblés stratégiquement afin d'accroître leur efficacité bien des fois. Pourquoi distribuons-nous l'argent à tort et à travers lorsqu'il n'y a pas de besoin quantifiable? En outre, en offrant le soutien voulu plus directement aux agriculteurs, plutôt que par l'intermédiaire d'une énorme bureaucratie, l'argent est versé à ceux qui en ont besoin, et ce, plus rapidement.

(1300)

Ce ne sont là que quelques exemples de la façon dont le ministre peut accroître son efficacité et celle de son ministère pour les agriculteurs qui ont besoin d'aide, tout en réduisant le fardeau pour les contribuables. Ce sont des mesures de ce genre que le gouvernement devrait prendre. Ce n'est pas en apportant simplement quelques modifications administratives internes au sein du ministère qu'on va vraiment venir en aide aux producteurs.

Plutôt que de procéder aux réformes permettant de faire progresser le secteur agricole, le ministre se contente de réorganiser son ministère. Je le répète, il ajuste sa cravate, alors que son pantalon est en feu. Autrement dit, l'agriculture est confrontée à de graves problèmes que nous devons résoudre de toute urgence et nous sommes ici aujourd'hui en train de discuter d'un projet de loi de réorganisation qui ne fait que reprendre, en gros, les mesures que les conservateurs ont déjà présentées à cet égard.

Lorsqu'on se penche sur le bilan concret du ministre, on peut comprendre que les agriculteurs et les producteurs de tout le pays sont insatisfaits de son travail. Je vais vous énumérer quelques-unes des initiatives que le ministre n'a pas prises. Il a signé l'accord du GATT comme nous l'avions prévu durant la dernière campagne électorale. Il n'a absolument rien changé, contrairement aux promesses du livre rouge.

Nous étions conscients de la décision qui devait être prise, alors que les libéraux et les autres partis à la Chambre hésitaient à accepter le fait que le Parti réformiste avait signalé que l'entente serait signée plus ou moins comme elle l'a été. En fait, le ministre de l'Agriculture a dû signer l'accord du GATT plus ou moins tel que négocié, même si son parti avait promis de n'en rien faire.

Notre ministre de l'Agriculture a nui à l'efficacité du système de transport des céréales l'année dernière et bon nombre de producteurs ont connu une année désastreuse à cause de son intervention. Les producteurs craignent que la chose ne se reproduise cette année, car aucune mesure n'a été prise pour prévenir une nouvelle paralysie du système de transport.


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Le ministre de l'Agriculture cherche à gagner du temps sur la question du transit des céréales par Thunder Bay. Les échéances ont déjà été reculées et rien ne nous permet d'espérer qu'il respectera les dates cibles qu'il a lui-même fixées.

Élément encore plus inquiétant, le ministre de l'Agriculture a renié l'engagement qu'il avait pris de défendre les producteurs canadiens de blé dur en acceptant d'exporter des quotas vers les États-Unis, alors que tous les atouts étaient dans notre jeu, que nous avions raison et que les Américains étaient dans le tort. Malgré cela, il a cédé. Il a créé des obstacles pour nos producteurs qui découvraient, pour leurs produits, un excellent marché d'exportation débordant de clients prêts à payer rubis sur l'ongle.

Notre ministre de l'Agriculture a traité les agriculteurs canadiens comme des criminels désireux d'exporter leurs céréales vers les États-Unis. Au lieu de régler le problème, il s'en est pris aux producteurs qu'il est censé représenter. Notre ministre de l'Agriculture n'a pas réformé la Commission canadienne du blé, alors que la plupart des agriculteurs lui demandaient de le faire. Notre ministre de l'Agriculture n'a pas regroupé les programmes d'aide à l'industrie agricole, comme je l'ai déjà dit plus tôt. En outre, il n'a pas réussi à faire baisser le ratio entre les bureaucrates de l'agriculture et les producteurs. Je crois qu'il y a actuellement un fonctionnaire pour 3, 4 ou 5 agriculteurs. Le nombre varie suivant la source.

Le ministre parle de consulter les producteurs. Certes, il n'y a pas un parti qui soit plus favorable à la consultation que le Parti réformiste. Mais, comme mon collègue de Moose Jaw-Lake Centre l'a dit, nous avons vu des consultations, nous avons vu des études, nous avons vu un tas de producteurs et de groupes de producteurs travailler avec acharnement à l'élaboration d'une proposition qui, après avoir été présentée au Cabinet, dort dans un tiroir ou dont le résultat final est loin de ressembler à ce qu'avait produit le processus de consultation.

J'exhorterais le ministre à dépasser le stade de la consultation et à passer aux actes, soit en se fiant au jugement et à la sagesse des producteurs qui ont déjà donné leur avis, soit en permettant de façon démocratique aux producteurs de prendre des décisions concernant, par exemple, la commission du blé et la commercialisation de l'orge.

Le ministre doit agir. On ne saurait négocier sans fin, de peur que l'industrie décline et finisse par disparaître à cause de l'inaction.

Dans son intervention, le ministre a évoqué Wayne Gretzky. Étant un passionné de hockey, j'ai immédiatement tendu l'oreille quand il a dit: «Wayne Gretzky a affirmé qu'il marquait parce qu'il lançait la rondelle.» Ce qui me préoccupe, c'est que notre ministre de l'Agriculture n'est même pas sur la patinoire. S'il y était, il ne dépasserait même pas la ligne bleue. Cette préoccupation, elle est partagée par un grand nombre de producteurs.

J'espère que le ministre a prêté l'oreille aux suggestions que j'ai formulées sans ménagement. Si j'ai parlé sans ménagement, c'est que je crois que la situation urge, mais ces suggestions se veulent des critiques constructives. Je souhaite que le gouvernement présente très bientôt des projets de loi d'ordre administratif et qu'il agisse enfin pour le plus grand bien du secteur agricole.

(1305)

M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn): Monsieur le Président, je voudrais dire au député de Kindersley-Lloydminster que le ministre, où qu'il soit sur la glace et quelle que soit la position qu'il occupe, a tellement le compas dans l'oeil qu'il peut marquer des points.

En ce qui concerne la critique qu'il adresse au ministre à propos des quotas de blé dur, je voudrais lui rappeler que le plafond sur lequel on s'est entendu est plus élevé que la moyenne des expéditions qui ont été faites aux États-Unis au cours des dernières années.

La question que je voudrais lui poser a trait à la Commission canadienne du blé et à la critique qu'il a adressée au ministre concernant l'expédition du grain aux États-Unis. C'est une question très simple. Le député et son parti appuient-ils ou non la Commission canadienne du blé et son maintien?

M. Hermanson: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

Je voudrais dire quelques mots au sujet du plafond auquel il a fait allusion à propos du blé dur. Le ministre de l'Agriculture ou son secrétaire parlementaire ont parlé des changements rapides qui surviennent dans le secteur de l'agriculture.

C'est un fait. Comme je l'ai dit, le ministre de l'Agriculture s'est montré très éloquent dans son allocution. On ne pouvait faire autrement que l'applaudir. Nous avons assisté à une augmentation assez rapide des exportations de blé dur aux États-Unis, à un point tel que ces trois ou quatre dernières années, nous avons vu se développer un marché fantastique pour nos producteurs qui étaient très bien rémunérés pour leur produit.

Or, le ministre de l'Agriculture a réduit ces exportations de moitié dans un marché en développement qui aurait pu prendre encore de l'expansion. Même s'il reconnaît que le secteur de l'agriculture évolue rapidement, le ministre empêche la réalisation de changements très positifs, qui sont parmi les rares changements positifs dans le secteur de l'agriculture. Il a en effet privé les agriculteurs de ces débouchés et déclaré que «non, nous reviendrons plutôt à la moyenne», ce qui correspond à la moitié de ce que les producteurs auraient pu exporter si le ministre s'était montré ferme, s'il avait respecté les termes de l'accord signé avec les Américains, l'accord de libre-échange, qui protégeait nos producteurs et nous donnait accès au marché américain.


6101

C'est inexcusable. Comme le chef de mon parti, le Parti réformiste, l'a dit, on s'est fait avoir. Nous avons été consternés d'apprendre que le ministre plaçait nos producteurs dans une position aussi désavantageuse et leur permettait ou leur refusait l'accès à un marché aussi intéressant.

En ce qui concerne la Commission canadienne du blé, le Parti réformiste a fait connaître sa position. Le programme du parti a appuyé la Commission canadienne du blé. Je l'ai déjà mentionné à la Chambre. Les temps changent. Quand, jeune homme, mon père livrait son grain, il devait parcourir une vingtaine de milles dans une voiture tirée par des chevaux. Quand il arrivait à destination, il y avait un seul acheteur. Celui-ci lui offrait un prix en fonction de la qualité du grain et des impuretés qui s'y trouvaient. Il était impossible à mon père de marchander. Si le prix ne lui plaisait pas, il attelait de nouveau ses chevaux et reprenait le chemin de la ferme, ce qui lui prenait une autre journée-du temps perdu à cette époque où les gens étaient tellement occupés.

Aujourd'hui, la situation est différente. Nous sommes en 1994, et il existe de nombreuses possibilités de commercialisation. Malheureusement, les politiciens se sont mis en travers de la Commission canadienne du blé. J'ai toujours dit qu'il faudrait que les producteurs contrôlent leurs propres offices de commercialisation-la plupart le font-la Commission canadienne du blé est la seule exception.

Même l'Ontario Wheat Board, qui s'occupe de commercialiser le blé pour le compte des producteurs de l'Ontario, est contrôlé par les producteurs. La Commission canadienne du blé, qui se limite à la région des Prairies, est la seule à être contrôlée par le gouvernement.

Si les producteurs prennent le contrôle de la commission, ils décideront ce qu'il y a de juste pour eux. S'il leur arrive de faire une erreur, il pourront la corriger très vite. Si les gouvernements font des erreurs-ils en ont fait plusieurs, croyez-moi-ils ne le reconnaîtront jamais et feront du tort aux producteurs qu'ils sont censés protéger.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, je suis reconnaissant au député pour ses remarques sur la façon d'améliorer notre industrie agroalimentaire.

Étant donné que le Canada est rapidement en train de s'urbaniser, pourrait-il nous dire en quoi un Sénat triple E renforcerait la représentation des agriculteurs au Parlement? Pourrait-il nous le dire?

Le vice-président: La présidence a de la difficulté à comprendre ce qu'un Sénat triple E a à voir avec ce qu'a dit le député, mais je suis sûr que le député peut nous éclairer sur ce point.

(1310)

M. Hermanson: En fait, monsieur le Président, je n'ai aucun mal à répondre à cette question.

Comme nous le savons, aux États-Unis et même en Australie où il y existe un Sénat triple E, l'industrie agricole a beaucoup plus d'influence sur les décisions qui sont prises au niveau national ou fédéral.

Prenons des États comme l'Iowa, le Montana, le Dakota du Sud et le Dakota du Nord, qui sont représentés par deux sénateurs élus, soit la même représentation qu'au Texas, dans l'État de New York et en Californie; nous nous rendons compte que notre Sénat, qui est nommé-et nous avons vu le type de nominations, des nominations par favoritisme qui ne comportent aucune obligation à l'égard des gens que ces sénateurs sont censés représenter-ne risque guère de s'intéresser beaucoup à l'agriculture. C'est un obstacle pour les régions du pays où la population est moins dense et qui ont tendance à être des régions agricoles.

M. Jerry Pickard (Essex-Kent): Monsieur le Président, je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole dans le débat sur le projet de loi C-49.

Mon collègue, le secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture, a parlé de la relation du ministère avec l'industrie agroalimentaire. Je veux aborder un autre aspect important du projet de loi, soit la reconnaissance du rôle du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire dans la recherche et le développement.

Au moment de la création du ministère de l'Agriculture, le ministre s'est vu confier la responsabilité des fermes expérimentales, qui concentraient leurs recherches sur les récoltes et le bétail. Depuis ce temps, le rôle du ministère a acquis une portée beaucoup plus grande. La mesure proposée ne fait que refléter la réalité moderne.

Le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire concentre toujours ses recherches sur les récoltes et le bétail, mais leur portée dépasse largement les simples techniques agricoles. Le ministère a maintenant à coeur d'aider non pas seulement les agriculteurs, mais aussi tous les intéressés du secteur agroalimentaire à devenir plus compétitifs, ici et à l'étranger.

Le ministère fait notamment porter ses recherches sur l'utilisation de produits agricoles à des fins non alimentaires. Par exemple, il étudie de nouveaux produits pharmaceutiques, ainsi que des carburants à base de céréales, comme l'éthanol. Il essaie aussi de mettre au point des pratiques durables respectueuses de l'environnement dans l'industrie agricole et agroalimentaire-par exemple des pesticides biologiques.

Quelles sont les répercussions de ces activités sur l'ensemble de la population canadienne? Permettez-moi de les mettre en perspective. Bien des gens ne se rendent pas compte que c'est pratiquement grâce aux recherches du ministère qu'ils peuvent compter sur leur pain quotidien. Presque toutes les variétés de blé cultivées dans notre pays ont été mises au point par des scientifiques à l'emploi du ministère fédéral de l'Agriculture, qui oeuvrent constamment à l'amélioration de nos variétés fourragères et animales. C'est grâce à leur travail que nous jouissons d'abondantes réserves d'aliments sains et, qui plus est, parmi les moins chers du monde.

L'un des succès les plus spectaculaires du gouvernement et même de la recherche à l'échelle mondiale, c'est l'exploitation du colza, ou canola, comme nous l'appelons maintenant. À l'époque de la Seconde Guerre mondiale, l'huile de colza était utilisée comme lubrifiant dans l'industrie navale. Personne n'aurait pensé à en mettre sur la salade à l'époque. Les scientifiques du gouvernement, qui travaillaient en collaboration avec les universités, ont vu les possibilités qu'offrait le colza. Ils en ont éliminé les éléments toxiques et ont créé une nouvelle variété ayant des qualités nutritives. Le


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canola, qui constitue maintenant la culture la plus rentable, rapporte un milliard de dollars par année.

Le ministère poursuit des travaux remarquables dans le domaine du croisement végétal et animal. Il exploite maintenant certaines des possibilités qu'offrent les nouvelles techniques du génie génétique et de la biotechnologie.

Nous avons tous entendu parler du projet sur le génome humain, qui vise à identifier et répertorier toutes les composantes de l'ADN humain. Sur une échelle plus modeste, nos scientifiques agricoles tentent de déchiffrer la structure de l'ADN de l'avoine commune. Le centre de recherche sur les plantes d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, installé à Ottawa, travaille en collaboration avec la société Quaker Oats du Canada et trois universités américaines à un projet de cartographie des gènes. Lorsque nous saurons de quoi est constituée l'avoine, nous pourrons l'améliorer.

La recherche dans le secteur agroalimentaire n'est pas un luxe. Dans un monde où les marchés évoluent rapidement, la technologie offre aux agriculteurs et aux sociétés d'aliments de nouveaux moyens de répondre aux besoins de leur clientèle. De nouvelles techniques de transformation des aliments pourraient stimuler la croissance économique et créer beaucoup d'emplois au Canada.

(1315)

L'industrie agroalimentaire canadienne doit demeurer technologiquement compétitive. Il est essentiel de poursuivre une recherche de pointe si nous voulons que le Canada demeure un leader mondial dans le domaine de l'agriculture et de l'agroalimentaire.

Agriculture et Agroalimentaire Canada s'efforce de poursuivre des activités de recherche et de développement poussées en dépit des restrictions budgétaires. Le gouvernement ne peut sans doute pas augmenter son budget de recherche et de développement en agroalimentaire, mais nous pouvons au moins conserver ce que nous avons.

Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a clairement fait savoir qu'il demeurait très attaché à la recherche. Nous devrons cependant procéder à une redistribution des fonds. À cette fin, le ministère entend réduire ses coûts et dépenser de façon plus avisée. Il veillera à ce que les priorités en matière de recherche soient déterminées par les débouchés commerciaux. Autrement dit, nous effectuerons une recherche qui rapporte.

Le sunola, tournesol miniature résistant au gel mis au point au centre de recherche de Saskatoon, en est un parfait exemple. Les redevances que rapportera la vente de graines certifiées retourneront à la station qui entreprendra d'autres projets de recherche en collaboration avec le secteur privé. Le ministère fait en sorte que la recherche réponde aux besoins des consommateurs. La participation de l'industrie aide le service de la recherche à établir ses priorités. Le ministère encourage ses chercheurs à suivre des ateliers de sensibilisation aux demandes du marché. L'an dernier, sur 13 nouvelles technologies possibles présentées à l'une de ces sessions par la direction de la recherche du ministère pour la région de l'Est, 11 ont été acceptées comme ayant un potentiel commercial important.

Depuis que le Conseil du Trésor autorise le ministère à recevoir des fonds de l'extérieur sous forme notamment d'appuis financiers, de redevances et de revenus, le secteur agroalimentaire participe à un nombre croissant de projets de recherche. Les investissements de ce secteur dans la recherche agroalimentaire faite par le gouvernement fédéral sont passés de 5 milliards de dollars en 1989 à près de 18 milliards aujourd'hui.

L'an dernier, le ministère a entrepris un projet pilote d'investissement de contrepartie. Pour chaque dollar investi par le secteur privée dans la recherche agroalimentaire, le gouvernement en investit un autre. Cette année, la part du fédéral s'élève à deux millions de dollars, chiffre qui pourrait augmenter sensiblement au cours des années à venir.

De toute évidence, l'industrie n'investirait pas de telles sommes à moins d'être convaincue du bien-fondé de la recherche. Lorsque le produit est prêt à être commercialisé, le ministère n'a pas à rechercher un acheteur, il est déjà là. Les projets conjoints entre le secteur public et le secteur privé débouchent plus vite et plus facilement sur des applications pratiques des connaissances théoriques.

La recherche agroalimentaire présente de nombreux avantages. Les découvertes scientifiques faites dans nos laboratoires contribuent non seulement à augmenter les connaissances de l'humanité, mais aussi à relever notre niveau de vie sur le plan tant économique qu'environnemental.

Envisagez le cas de l'éthanol. Ce pourrait être le carburant miracle du XXIe siècle. Il est dérivé d'une ressource renouvelable, nos excédents de grains, et sa combustion est plus propre que celle de l'essence, ce qui fait qu'il est moins dommageable pour l'environnement. L'éthanol et les autres combustibles dérivés de la biomasse pourraient former le noyau d'une nouvelle industrie qui donnerait un sérieux coup de pouce à l'économie du Canada rural. Les scientifiques d'AAAC travaillent à cela. Un jour, grâce à eux, nous exporterons peut-être de l'éthanol, et sa technologie d'élaboration, à un monde en manque d'énergie.

Ce n'est pas farfelu. Il existe actuellement des projets prometteurs en biotechnologie dans les laboratoires de recherche d'AAAC. Il y a quelques années on aurait dit que c'était de la science-fiction.

Croiriez-vous que nos spécialistes en biologie moléculaire travaillent sur un produit naturel, appelé stevioside, dont le pouvoir édulcorant est 300 fois plus grand que celui du sucre? Que certains scientifiques d'AAAC utilisent les carapaces de crabe comme matériau d'emballage véritablement biodégradable? Un jour, des enzymes génétiquement modifiées, extraites de l'estomac des vaches, pourraient remplacer le chlore, un produit toxique, dans le blanchiment des tissus et des papiers. Je ne parlerai pas des micro-organismes «sur mesure» qu'AAAC lance comme insecticides et engrais naturels.

(1320)

L'expérience prouve que la R-D en agriculture est l'un des meilleurs investissements que l'on puisse faire. Nombre d'études effectuées au Canada ont montré que le rendement de l'investissement dans la recherche agroalimentaire peut dépasser 50 p. 100. La même chose a été constatée aux États-Unis. C'est un moteur de croissance dans tous les sens du terme et nous devons en tirer parti.

Avec l'aide de nos partenaires du secteur privé, nous devrions profiter de bien d'autres occasions de ce genre dans l'avenir.


6103

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, j'aimerais bien poser une question au sujet du Sénat, mais je vais me retenir.

Le député a longuement traité de la recherche qui est, avec son financement, une question importante dont il faut discuter. Il arrive souvent que l'on ait recours à un système de contributions ou de prélèvements pour soutenir la recherche.

J'aimerais que le député nous dise si ces contributions devraient être volontaires ou non, s'il accepte la façon dont les niveaux de ces contributions seraient établis, et comment ce système pourrait améliorer le financement de la recherche agricole.

M. Pickard: Monsieur le Président, il importe de bien comprendre le rôle essentiel joué par la recherche dans l'industrie agricole au cours de cette période. Il ne fait aucun doute que, depuis 40 ans, chaque dollar consacré à la recherche et au développement a rapporté énormément.

Hier encore, lors des audiences du Comité de l'agriculture, c'était au tour du professeur McEwen, de l'Université de Guelph, de formuler des observations très intéressantes sur la R-D.

La production des vaches laitières a doublé. Nous produisons la même quantité de lait qu'il y a 40 ans, même si le nombre de vaches a diminué de moitié. Dans l'industrie du porc, nous produisons du porc qui est 80 p. 100 plus maigre qu'il y a 40 ans, tout en utilisant beaucoup moins de provendes. Dans les années 1950, il fallait trois kilos de provendes pour produire une douzaine d'oeufs, alors qu'il n'en faut que la moitié aujourd'hui. Il y a 40 ans, à l'Île-du-Prince-Édouard, un acre donnait environ 200 boisseaux de pommes de terre. Aujourd'hui, les agriculteurs jugeraient la situation catastrophique s'ils n'obtenaient pas 500 boisseaux par acre. Ces exemples illustrent l'importance de la recherche-développement.

Comment financer les activités de R-D? Le gouvernement a fait preuve d'initiative et de dynamisme en proposant de créer une association unique entre lui et le secteur privé pour financer la R-D. Cette façon de procéder nous permettra de dépenser judicieusement, comme l'a laissé entendre le ministre. Nous devons recourir à la coparticipation pour savoir dans quelle voie l'industrie souhaite s'engager, comment elle compte s'y prendre au niveau de la R-D, et où elle veut aller.

Si l'industrie elle-même considère que des projets de recherche sont utiles et importants, elle sera prête à participer à leur financement. Par conséquent, la solution de l'avenir réside dans le cofinancement de la recherche-développement, par le gouvernement et l'industrie, de façon à faire progresser ces activités.

Je suis convaincu que les nouvelles innovations et initiatives liées à la R-D sont essentielles à la prospérité de notre pays. Par conséquent, je pense que le financement de ces activités doit être assuré conjointement par l'industrie et le gouvernement, qui doivent travailler de concert et viser les mêmes objectifs.

M. Hermanson: Monsieur le Président, je n'ai peut-être pas formulé ma question assez clairement, ou alors le député n'écoutait pas. J'aurais probablement dû poser une question concernant le Sénat.

(1325)

Ma question au député d'en face visait précisément la levée de fonds pour la recherche au moyen du système de déduction. Le député ne sait peut-être pas ce qu'est un système de déduction. C'est le moyen par lequel on effectue un prélèvement sur les ventes d'un produit agricole, disons tant de cents sur une tonne de blé ou sur un litre de lait, pour aider à financer la recherche.

Je voulais savoir si le député était favorable au recours à un système de déduction afin de financer la recherche. Dans l'affirmative, comment devrait-on gérer ce système? Sur quelle base ferait-on les prélèvements? Ces prélèvements seraient-ils volontaires ou non? Autrement dit, la participation des producteurs au programme serait-elle obligatoire ou facultative?

M. Pickard: Monsieur le Président, j'ai tenté d'élargir la perspective du leader parlementaire. Il semble avoir une vision très restreinte de la recherche et du développement.

Concernant le système de déduction, je serais favorable à une participation volontaire de l'industrie. Cette dernière peut choisir de contribuer de l'argent ou non. Je n'y vois aucune objection. Cependant, je suis convaincu qu'il faut se rendre compte que, dans l'industrie, la recherche dispose d'une base très vaste et ne se limite d'aucune façon à des groupements de producteurs spécialisés, mais à toutes les autres sources de production au Canada. Il faut stimuler la science, la technologie, la recherche ou toute autre activité de ce genre à l'avenir.

J'ai tenté d'indiquer jusqu'où le Canada était allé dans le domaine de la recherche. Je crois qu'en tant que Canadiens, nous devrions être fiers de nos réalisations. La recherche que nous avons effectuée est sûrement plus avancée que celle qui se fait dans la plupart des autres pays. Aujourd'hui, nous pouvons exporter notre technologie. Nous avons de belles réalisations. Si l'on pense aux progrès que nous avons obtenus avec le blé et à nos autres découvertes, le Canada a décidément pris une bonne longueur d'avance.

Le vice-président: La présidence se trouve dans une position difficile, puisque le député a commencé son intervention à 13 h 10 et qu'il pourrait en principe parler jusqu'à 13 h 30. Je voudrais que tous les députés comprennent bien que si les échanges se poursuivent pendant encore trois minutes, nous ne pourrons procéder au vote aujourd'hui.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, une brève question. Si le député ne peut répondre à la question sur les prélèvements, je me demande ce qu'il pense du Sénat triple E et de l'aide qu'un Sénat réformé pourrait offrir au secteur agricole?

M. Pickard: Monsieur le Président, le Parti réformiste semble avoir du mal à s'en tenir au sujet à l'étude aujourd'hui. Il semble avoir la ferme intention de faire passer la question d'un Sénat triple E avant celle de l'agriculture. C'est un comportement très discutable à adopter à la Chambre.

6104

Toutefois, je crois que le problème ne vient pas du gouvernement. Il vient de l'opposition. Les médias ont d'ailleurs très souvent souligné son incompétence, qui ressort très clairement aujourd'hui.

(La motion est adoptée, le projet de loi est lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.)

Le vice-président: Comme il est 13 h 30, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

_____________________________________________


6104

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LA LOI SUR L'IMMIGRATION

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est) propose:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait exiger, en vertu des paragraphes 11(1) et (3) de la Loi sur l'immigration, que tous les aspirants immigrants subissent un test de détection du VIH et inclure, en vertu du paragraphe 19(1) de la Loi sur l'immigration, le résultat positif d'un test de détection du VIH parmi les motifs d'inadmissibilité au Canada.
-Monsieur le Président, c'est pour moi un honneur de prendre la parole à la Chambre et de débattre de cette question avec mes collègues quoique, à franchement parler, il n'y a ici pas grand-chose à débattre.

Cette motion, qui vise à exiger que tous les aspirants immigrants subissent un test de détection du VIH et à inclure le résultat positif d'un tel test parmi les motifs d'inadmissibilité au Canada, relève du simple bon sens. Toutefois, le simple bon sens n'a pas toujours le dessus en matière d'immigration.

Je me permets de donner un bref aperçu de la situation afin que tous les députés saisissent l'importance de cette question et la nécessité d'adopter cette motion. Je n'apprendrai rien à personne ici en disant que le VIH, le SIDA-et j'emploie ces termes indifféremment pour des raisons évidentes-est un fléau meurtrier qui, pour intolérable et navrant qu'il soit, n'a pas encore atteint son pire niveau.

Des milliers de Canadiens en sont affligés et des milliers d'autres le seront encore. Aussi tragique et dévastateur que le SIDA ait été au Canada, cette maladie n'a pas encore ici les terribles proportions qu'elle a prises dans bien d'autres pays, surtout dans les pays en développement. Il y a en Afrique des pays où l'on estime à 20 p. 100 au moins le taux de contamination au VIH. C'est là une statistique qui a de quoi nous attrister et nous terrifier tous.

Il ne fait aucun doute que la prévention du SIDA est une priorité pour les Canadiens. Nous avons lancé des campagnes d'information, des programmes d'épuration de nos stocks de sang et des programmes de sensibilisation des personnes infectées pour les empêcher de répandre la maladie. Cependant, en dépit de tous les efforts déployés pour contrer la maladie, aucun gouvernement n'est intervenu au niveau de l'immigration.

La Loi sur l'immigration contient pourtant certaines dispositions claires: premièrement, la protection de la santé et de la sécurité des Canadiens doit constituer une priorité de notre politique et, deuxièmement, toute personne atteinte d'une maladie susceptible d'imposer un fardeau excessif à nos services sociaux et à nos services de santé doit être déclarée inadmissible à la citoyenneté canadienne. Le texte de la Loi sur l'immigration est simple et clair sur ces points.

En conformité de la Loi sur l'immigration, le ministère de l'Immigration fait subir une batterie de tests à toutes les personnes qui demandent à immigrer ou à obtenir le statut de réfugié au Canada. Il convient de souligner que le règlement médical relatif à l'immigration impose des tests rigoureux. Voici une liste de maladies dont on effectue actuellement le dépistage: tuberculose, hépatite, diabète, maladies physiques débilitantes et même syphilis. Les maladies sexuellement transmissibles font actuellement l'objet d'un dépistage et les personnes qui en sont atteintes sont écartées du processus. Il y a cependant une exception et c'est la plus dangereuse de ces maladies, celle qui est fatale dans 100 p. 100 des cas, à savoir, le SIDA.

Pourquoi? C'est une bonne question. J'ai posé cette question à de nombreuses reprises. Voici quelques-unes des réponses obtenues du ministère et du ministre. Des hauts fonctionnaires du ministère de l'Immigration m'ont dit que l'infection au VIH n'était pas une maladie contagieuse.

Je ne plaisante pas. On m'a dit que le SIDA n'était pas contagieux. Bien sûr, ces fonctionnaires m'ont expliqué dans leurs termes qu'une maladie contagieuse est une maladie qui se transmet par le souffle d'une personne atteinte ou par le toucher. Il est vrai que l'on ne peut vraisemblablement pas contracter le SIDA ainsi, mais tout le monde sait qu'il s'agit d'une maladie hautement transmissible. Affirmer que nous n'avons pas besoin de dépister le VIH chez les immigrants sous prétexte que ce n'est pas une maladie contagieuse constitue le comble de la bêtise sémantique ou de la rectitude politique et cela risque de provoquer des centaines sinon des milliers de pertes de vie et de nous coûter des millions de dollars.

(1335)

J'ai demandé au ministre si son gouvernement préconise qu'on fasse subir aux immigrants un test de dépistage du SIDA. Il m'a dit que cette décision était laissée à la discrétion des médecins à l'étranger, tout comme celle de recommander qu'un immigrant soit déclaré non admissible.

Il a dit que, si les médecins détectent des traces du SIDA, ils peuvent, s'ils le désirent, recommander qu'une personne ne soit pas admise au Canada. Je ne suis pas certain de ce qu'il entendait exactement lorsqu'il a parlé de traces du SIDA. Je suppose qu'il voulait dire des symptômes.

Il n'y a évidemment pas de symptômes de l'infection par le VIH. La seule façon de déterminer si une personne est infectée, c'est de lui faire subir une analyse sanguine. C'est un test rapide, peu coûteux et facile à administrer. J'ai dit peu coûteux parce que plusieurs personnes m'ont interrogé au sujet du coût d'un tel test. D'après ce que je crois comprendre, le coût serait minime.


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Le test de dépistage du SIDA est l'une des analyses sanguines les plus fréquentes. Tous les immigrants sont déjà soumis à des analyses sanguines, et il en coûterait très peu pour y ajouter le test de dépistage du SIDA. Et même si le coût était élevé? C'est une question de vie ou de mort.

Si une personne infectée par le VIH venait au Canada, nous, les contribuables, devrions débourser au moins 200 000 $ pour traiter cette personne jusqu'à sa mort. Nous n'avons pas les moyens d'assumer de tels coûts.

Nous ne pouvons pas courir le risque d'admettre des immigrants infectés par le VIH qui ne savent probablement qu'ils le sont. J'ai demandé à des fonctionnaires du ministère de l'Immigration qui travaillent actuellement à l'élaboration d'une nouvelle série de lignes directrices sur la non-admissibilité pour des raisons médicales si l'infection par le VIH sera une raison suffisante pour déclarer une personne non admissible en supposant que nous ayons pu découvrir que la personne était infectée. Ils m'ont répondu non.

Ils m'ont donné une explication basée sur le genre de logique que seuls certains bureaucrates peuvent avoir, soit que les nouvelles lignes directrices sont fondées sur la consommation de services médicaux sur une période de cinq ans. Un immigrant sera admis si on estime qu'il ne recevra pas plus de services médicaux que la moyenne durant les cinq années suivant son arrivée au Canada.

Ainsi, comme une personne infectée par ce virus pourrait rester relativement en santé pendant cinq ans, l'infection par le VIH ne figure pas sur la liste, même si les coûts seront énormes une fois que les symptômes du SIDA commenceront à se manifester-ce qui est inévitable-et même si les risques de transmission avant l'apparition de la maladie sont grands.

Par ailleurs, maintenant que les médecins partout dans le monde ont reconnu l'existence du VIH-2, dont les porteurs prennent souvent beaucoup plus de cinq ans avant de développer le SIDA, il est encore plus évident que les nouvelles lignes directrices du ministère basées sur le coût des services médicaux pour une période de cinq ans sont absolument insensées lorsqu'il s'agit de cette maladie. Voilà précisément pourquoi il faut que le gouvernement prenne des mesures particulières concernant cette maladie.

À l'heure actuelle, le Canada n'impose pas de test de détection du VIH tout d'abord parce qu'il ne s'agit pas d'une maladie contagieuse; deuxièmement, parce que les médecins doivent rechercher les symptômes même s'il n'en existe pas; et troisièmement, ce n'est pas une maladie dont le traitement est coûteux. Voilà le genre de logique que l'on pratique actuellement dans le système de l'immigration.

Il est clair qu'il faut presser le ministère de l'Immigration de faire montre d'un peu de logique en tâchant de servir les meilleurs intérêts des Canadiens. La motion à l'étude devrait procurer ce choc salutaire une fois mise en application dans la réglementation de l'immigration.

Je ne comprends tout simplement pas pourquoi le gouvernement actuel se refuse à mettre une telle mesure en application, mais quand je me sens cynique, je pense que certains groupes d'intérêt ont peut-être l'oreille de l'actuel ministre de l'Immigration et celle de ses prédécesseurs et ont semé la confusion à propos de cette mesure pleine de bon sens.

Au cas où mes collègues d'un côté ou de l'autre de la Chambre croiraient que voter en faveur de cette motion pourrait leur coûter des votes ou soulèverait la colère d'un grand nombre de gens, je tiens à leur assurer qu'il n'en sera rien.

Je tiens également à assurer aux députés que voter contre pourrait au contraire leur coûter des votes. Voici quelques faits pour prouver ce que j'avance. L'Association de l'immigration a mené un sondage d'opinion au cours de l'été.

(1340)

Une des questions posées à plus de 1 000 personnes d'un bout à l'autre du pays demandait si les gens atteints de maladies contagieuses incurables devraient être autorisés à immigrer au Canada. Or, 77 p. 100 des répondants estimaient que non. Soit dit en passant, un sondage mené par une station de radio de Calgary juste avant l'été posait la même question. Le résultat fut spectaculaire, bien que non scientifique: 94 p. 100 des répondants étaient d'avis qu'on ne devrait pas laisser immigrer au Canada les gens atteints du VIH.

Quand a-t-on vu pour la dernière fois une question susciter un tel consensus? Voilà ce que je voulais démontrer. Il existe un consensus sur ce point. Bien sûr, j'ai aussi reçu des lettres d'une ou deux personnes représentant un point de vue radical qui contestaient mes appels en faveur d'un test de détection du VIH. Mais cela ne fait pas le poids en comparaison du taux de répondants en faveur du test.

Je puis assurer à mes collègues qu'il y a consensus sur la question. Les Canadiens ont été étonnés lorsque j'ai signalé qu'il n'y avait pas de dépistage du SIDA chez les immigrants. Maintenant qu'ils le savent, ils sont en faveur des changements nécessaires.

Il ne s'agit pas simplement de répondre aux voeux des Canadiens- ce qui est déjà une raison suffisante pour agir-mais il faut aussi faire ce qu'il y a de mieux, ce qui est bien, ce qui est sensé.

Les Canadiens, y compris les députés, veulent que le SIDA disparaisse du Canada. Il n'y a personne qui soit contre l'élimination de ce fléau. Dans ces conditions, pourquoi ne pas prendre la mesure la plus élémentaire, la plus prévoyante, la plus évidente pour atteindre cet objectif? Pourquoi ne pas empêcher ceux qui sont atteints de cette maladie de venir au Canada?

Cela dépasse l'imagination. Je ne sais plus combien de mes électeurs et de citoyens de tous les coins du pays m'ont demandé, soit par lettre, soit de vive voix comment les Canadiens pouvaient être assez stupides pour ne pas imposer de tests de dépistage aux immigrants afin de refouler les séropositifs.

Pourquoi ne pas le faire, alors que presque tous les autres pays le font, alors que des pays comme les États-Unis vont jusqu'à refouler les SIDAtiques qui veulent venir comme simples visiteurs?

Je m'empresse de préciser que ce n'est pas là l'objet de ma motion. Il n'y a pas de moyen de soumettre tous les visiteurs à des tests; ce ne serait pas possible. La motion ne porte que sur ceux


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qui demandent à venir au Canada à titre d'immigrant ou de réfugié pour devenir des citoyens permanents.

Je voudrais dire un mot du caractère humanitaire de cette motion. Un ou deux de mes collègues d'en face m'ont reproché d'être insensible, de ne pas être sympathique à la cause de ceux qui veulent immigrer au Canada et sont porteurs du VIH.

Il n'est jamais agréable de refuser des immigrants, peu importe pour quel motif. Le Canada est le plus beau pays du monde et l'une des destinations de prédilection pour tous ceux qui veulent commencer une nouvelle vie dans un autre pays.

C'est pourquoi le Canada reçoit plus de demandes d'immigration qu'il ne peut en accepter, même si nous en acceptons beaucoup trop. Le Canada doit dire non à quelques candidats. Il n'y a pas moyen de faire autrement. Nous ne pouvons pas accepter tout le monde. Les Canadiens et le gouvernement doivent donc faire des choix.

Nous devons concevoir des règles qui permettent d'écarter certains candidats pour en accepter d'autres. Pour rédiger de bonnes règles et concevoir un processus de sélection juste et adéquat, nous devons établir des priorités.

À mon avis, la priorité qui devrait éclipser toutes les autres, c'est la protection de ceux qui ont déjà été admis au Canada ou de ceux qui y sont nés. Il n'y a pas d'autre solution. Nous serions très injustes envers nos électeurs si leur protection et celle des services que le gouvernement administre pour eux ne constituaient pas notre priorité absolue.

(1345)

Aussi, quand quelqu'un demande l'autorisation d'immigrer au Canada et qu'il a une maladie constituant non seulement une menace pour la sécurité des Canadiens, mais très certainement un fardeau monumental pour nos services de santé déjà au bord de l'effondrement, nous n'avons guère d'autre choix que celui de conclure que l'admission de cette personne met sérieusement en péril la sécurité et le budget des Canadiens. Il faut exclure de tels immigrants afin de laisser la place à d'autres.

Le Canada n'a pas l'obligation morale d'accepter tous ceux qui demandent à immigrer dans notre pays. Sa seule obligation est de fournir une bonne terre d'asile à ceux qu'il accepte.

À titre de législateurs, nous avons le devoir de nous assurer que seuls les meilleurs candidats à l'immigration, les plus capables et les plus productifs soient acceptés dans notre pays. Nous avons le devoir de protéger nos électeurs. Nous avons le devoir d'appliquer le préambule de la Loi sur l'immigration, qui nous enjoint de garantir la santé, la sécurité et l'ordre public au sein de la société canadienne.

Dernièrement, la politique d'immigration n'a pas su respecter cette obligation. Les Canadiens ont été déçus de la politique d'immigration et de ceux qui l'appliquent. Ils croient en effet que l'on n'admet pas les bonnes personnes et qu'il y a un trop grand nombre de bons candidats qui sont exclus. Il faut que cela change.

Cette motion est un petit pas en vue de redonner une certaine légitimité au programme d'immigration du Canada et de convaincre la population canadienne que sa protection est vraiment notre priorité absolue. C'est un petit pas en vue de donner un sens au programme d'immigration.

Faisons ce pas. Adoptons cette motion unanimement, sans sectarisme, et améliorons ainsi l'immigration. Par la même occasion, prenons une autre mesure qui est aussi importante, ou même plus, soit prévenir la progression du SIDA au Canada.

Si elle était mise en oeuvre, cette motion constituerait une étape importante dans la lutte contre le SIDA. Personne n'y perd. Tout le monde y gagne. La population canadienne y gagne la sécurité et un allégement du fardeau imposé à notre régime de santé. Les législateurs y gagnent en appuyant une initiative extrêmement populaire. Le gouvernement y gagne en recevant l'ordre de la Chambre de faire quelque chose qui se fait attendre depuis longtemps. Les immigrants y gagnent en faisant l'objet d'un examen médical approfondi.

Oui, c'est une décision difficile que d'interdire l'entrée comme immigrant à quelqu'un pour des motifs médicaux, mais il y a tellement de gens qui sont contaminées par le virus et ne le savent pas. Tout en empêchant ceux qui sont contaminés d'immigrer au Canada, nous rendrons un inestimable service à des centaines ou des milliers de personnes qui pourraient ne pas savoir qu'elles sont contaminées.

Nous ne rendrons pas un mauvais service à celles qui le savent parce que, j'en ai bien peur, leur sort est connu. Cependant, nous pourrions rendre involontairement service à celles qui sont contaminées, mais ne le savent pas.

Enfin, cette disposition se fait attendre depuis longtemps. Elle doit être adoptée. Il n'y a pas de raison qu'elle ne le soit pas. Le fait qu'elle vienne de ce côté-ci de la Chambre ne devrait pas être un facteur. Que la Chambre l'adopte afin que la population sache que nous avons fait notre travail et que nous avons pris une mesure importante pour la protection des Canadiens et la rationalisation du régime d'immigration canadien qui est mis à rude épreuve.

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): À la lumière de nos discussions, il est clair qu'il y a encore un certain nombre d'idées fausses qui sont répandues au sujet des personnes infectées par le VIH ou atteintes du SIDA. Malgré des efforts soutenus pour sensibiliser la population, il y a manifestement encore des préjugés bien ancrés en ce qui concerne cette terrible maladie et le virus qui lui est associé. La motion dont nous sommes saisis reflète quelque peu cette attitude regrettable.

Je voudrais préciser très clairement que, même si je ne remets pas en question les intentions de mon honorable collègue, je me demande si cette motion ne repose pas sur des idées préconçues et tout à fait fausses. Je voudrais signaler que beaucoup de gens pensent à tort qu'une personne infectée par le VIH est nécessairement atteinte du SIDA. Il est également faux de croire,


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comme certains, que le SIDA peut être transmis par simple contact. Ce qui est pire encore, c'est qu'on s'imagine parfois à tort qu'une personne porteuse du VIH ne peut plus apporter aucune contribution à la société. Nous savons tous que ces idées sont fausses. Quoi qu'il en soit, elles continuent malheureusement d'influencer certaines perceptions du public.

(1350)

Les idées fausses sur les maladies, les handicaps et les affections n'ont rien de nouveau au Canada. Il suffit, pour s'en convaincre, d'examiner la Loi sur l'immigration de 1952. On s'aperçoit alors qu'il y a certains précédents dans l'histoire concernant le dépistage obligatoire de maladies chez les aspirants immigrants.

En 1952, la protection de la santé et de la sécurité publiques était, comme à l'heure actuelle, un objectif essentiel des législateurs relativement à l'immigration au Canada. C'était avant que le Canada n'adopte un système universel de soins de santé. Ainsi, le problème qui se posait n'était pas relié à un fardeau excessif sur notre système de soins de santé. Quoi qu'il en soit, la loi énumérait des maladies et des déficiences qui, en soi, constituaient des motifs suffisants pour refuser l'entrée au Canada à quelqu'un.

La loi était loin d'être subtile. Elle reflétait les préjugés communs à l'époque. Elle refusait l'admission au Canada aux idiots, aux imbéciles, aux faibles d'esprit, aux épileptiques, aux aliénés, ainsi qu'aux muets, aux aveugles et aux autres déficients physiques. Les attitudes au sujet des handicaps étaient bien différentes à l'époque.

En 1952, on ne croyait pas qu'une personne ayant un problème de santé pouvait vivre normalement. On n'envisageait pas la possibilité d'avoir recours à la science médicale pour contrôler ces problèmes.

On jugeait, par exemple, que l'épilepsie était un motif valable d'exclusion, même lorsqu'elle était contrôlée. Lorsqu'une nouvelle loi sur l'immigration a été promulguée en 1978, elle constituait, Dieu merci, un progrès considérable par rapport à l'ancienne loi, surtout en ce qui concerne les motifs possibles d'exclusion sur le plan de la santé.

On a apporté alors deux modifications importantes. La première réSIDAit dans le critère relatif au fardeau excessif pour le système de santé. On voulait protéger ainsi le système universel de soins de santé créé neuf ans plus tôt. Il s'agissait d'empêcher qu'il ne soit débordé par des gens qui n'avaient pas contribué à son financement.

Ensuite, la liste des maladies et des déficiences rendant automatiquement une personne non admissible a été supprimée. La non-admissibilité devait être dorénavant décidée par des médecins chargés de juger si l'état de santé d'une personne représentait une menace pour la santé publique ou un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé. Ainsi, les épileptiques peuvent désormais être admis au Canada si leur état est jugé contrôlable.

Nous avons fait beaucoup de progrès depuis 1952 et je crois que nous devrons continuer sur cette lancée. Malheureusement, la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui nous ramène, à mon avis, à des attitudes qui avaient cours en 1952.

Cette motion ferait du résultat positif d'un test de détection du VIH un motif de non-admissibilité au Canada. Elle fait fi des attitudes envers des maladies qui ont évolué au fil des ans. Elle fait fi des progrès réalisés dans les attitudes et les pratiques médicales. Par-dessus tout, elle fait fi des progrès accomplis face à notre approche du SIDA.

Nos lois et nos institutions doivent refléter ces progrès. En tant que législateurs, nous devons analyser sans parti pris ces questions qui donnent trop souvent libre cours aux préjugés et aux actions discriminatoires.

Si nous sommes des législateurs dignes de ce nom, nous devons chercher à éviter d'imposer nos jugements de valeur aux autres. Nous devons nous efforcer de résister aux données peu sûres et aux idées préconçues. Nous devons prendre garde de ne pas adopter à toute vapeur une politique qui soit fondée davantage sur la peur que sur les faits.

Je voudrais que l'on comprenne très bien notre position. Les faits parlent d'eux-mêmes. Des personnes séropositives peuvent vivre bien des années sans développer le SIDA. Ces séropositifs peuvent apporter une précieuse contribution à notre société. Un grand nombre d'entre nous ont travaillé sans relâche à la destruction des mythes concernant le SIDA. Toute décision rétrograde risque de compromettre les progrès considérables qui ont été faits ces dernières années.

La décision que nous prendrons au sujet de cette importante question peut faire grand tort à notre réputation de transparence, d'équité et de justice dans le monde. Cela, il faut l'éviter à tout prix.

(1355)

En même temps, j'apprécie le fait que l'on ne veuille pas imposer un trop lourd fardeau à nos services sociaux et de santé. C'est une priorité pour le ministère de l'Immigration et pour le ministre.

Je suis certaine que nous pouvons en arriver à une décision qui soit à la fois juste et économique. C'est pourquoi le gouvernement examine actuellement les nombreux renseignements que nous possédons sur le VIH. Nous annoncerons notre décision très bientôt.

Le député admettra, j'en suis sûre, que cette question mérite toute notre attention. C'est en 1978 que l'on a examiné pour la dernière fois les dispositions médicales de la Loi sur l'immigration. Nous ne voudrions donc pas prendre une décision hâtive et mal éclairée sur cette question. Encore une fois, nous consacrons passablement de temps et d'attention aux questions de non-admissibilité pour des raisons de santé.


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Nos décisions tiendront compte, comme il se doit, des questions qui nous préoccupent à propos du système de soins de santé, de la justice sociale et de l'économie. Je sais que le député, qui s'intéresse de près à cette situation, ne voudrait pas que nous agissions de manière irréfléchie. Je tiens à vous dire, monsieur le Président, et à dire au député et à la Chambre qu'ils n'ont rien à craindre de ce côté-là.

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa): Monsieur le Président, je prends la parole dans le cadre de la discussion de la motion M-285 demandant l'imposition obligatoire pour les immigrants et certaines catégories de visiteurs de subir un test du VIH.

L'article 11 de la Loi sur l'immigration stipule que tous les immigrants, ainsi que les visiteurs de certaines catégories visés par règlement, sont astreints à un examen médical. L'article 11 définit la visite médicale prévue au paragraphe 11.1, à savoir la vérification des facultés mentales et physiques ainsi que l'étude sur le plan médical des dossiers concernant l'immigrant ou le visiteur.

L'article 19 de la loi fait état des catégories de personnes non admissibles au Canada, des terroristes aux criminels de guerre, en passant par les personnes ayant été déclarées coupables de crimes commis au Canada ou à l'étranger, etc.

Le libellé de la motion, déposée par mon collègue de Calgary-Nord-Est, du Parti réformiste, vise donc à interdire l'admission au Canada aux immigrants et aux visiteurs porteurs du virus du SIDA. Selon lui, cette maladie devrait être inscrite à l'article 19 de la Loi sur l'immigration.

Le ministre de l'Immigration a déjà reconnu que le Canada peut actuellement juger inadmissibles des personnes qui sont porteuses du VIH ou qui souffrent du SIDA. En 1993, 54 personnes ont été refusées pour ce motif. Il suffit qu'un médecin soupçonne qu'un immigrant soit porteur ou ait le SIDA pour qu'un test de dépistage soit effectué. Une fois la maladie confirmée, deux médecins doivent s'entendre pour recommander au gouvernement de rejeter la candidature.

Le ministre a déclaré à la presse que le motif du refus dans ces cas n'est pas le danger pour la santé publique, mais le poids financier que cela imposerait au système de santé canadien. Cette disposition serait d'ailleurs utilisée pour refuser l'admission des gens atteints d'autres maladies exigeant des soins de santé très coûteux, comme certains cancers, certaines maladies rénales ou cardiaques.

Le ministre a de plus lui-même souligné qu'il serait important de s'assurer de la fiabilité des tests dans les différents pays avant de rendre le dépistage obligatoire. En ce qui touche les demandeurs du statut de réfugié, qui doivent passer un examen médical dans les 60 jours de leur arrivée au Canada, le ministre considère sûrement que cette question est délicate, car il a déclaré; «d'un côté, il y a les considérations médicales et de l'autre, une peur réelle d'être persécuté».

(1400)

De plus, cette question a des implications au niveau des droits de la personne. Le ministère de la Justice devrait donc examiner cet aspect de la question avant de rendre une décision finale à ce sujet.

La sélection des immigrants basée sur le dépistage du SIDA est un débat public. Parmi les raisons invoquées pour ce débat, c'est la disposition à l'effet que l'exclusion des immigrants porteurs de VIH limiterait la transmission du virus et réduirait les coûts de santé inhérents au traitement du SIDA de ces immigrants.

Pour pouvoir évaluer si une minorité spécifique d'immigrants représente une charge financière pour un système de santé public, il faut examiner plus que simplement les coûts attribuables à une maladie particulière. La charge économique d'une maladie doit être comparée à celle d'autres maladies déjà existantes pour lesquelles les immigrants sont ou non sélectionnés. Ceci, bien entendu, afin de développer une politique d'immigration rationnelle, équitable et surtout exempte de toute discrimination.

Un groupe de chercheurs du Centre de médecine, d'éthique et de droit de l'Université McGill, à Montréal, a publié récemment une étude portant sur la comparaison des coûts occasionnés par le traitement du SIDA et ceux du traitement des maladies coronariennes. Dans cette étude, les chercheurs utilisent un modèle visant à estimer les coûts directs attribuables au SIDA et aux maladies coronariennes prévus pour les dix années suivant l'arrivée des immigrants entrés au Canada en 1988.

Le modèle se divise donc en trois composantes. D'abord, estimer les coûts du dépistage du SIDA chez les immigrants, deuxièmement, estimer les coûts des soins aux immigrants infectés du SIDA et troisièmement, estimer les coûts des soins aux immigrants souffrant d'une maladie coronarienne.

Les résultats de l'étude en surprendront peut-être plusieurs. Après dix ans, on estime que le coût total direct des soins de santé attribuables au VIH seraient de 18,5 millions de dollars. Pour cette même période de dix ans, le coût total pour les soins des immigrants atteints d'une maladie coronarienne serait de 21,6 millions.

[Traduction]

Il n'existe aucune méthode efficace de dépistage des éventuelles insuffisances coronariennes cliniques dont la probabilité croît avec le temps. Toutefois, en excluant tous les immigrants de plus de 50 ans, on pourrait économiser 14 millions sur le coût total prévu des maladies coronariennes qui se chiffre à 21,6 millions de dollars.

Quant à la fiabilité du test même, nous savons qu'elle n'est pas de 100 p. 100. En fait, nous savons qu'il faut trois tests consécutifs avant de pouvoir confirmer la présence du VIH chez quelqu'un. Ce processus long et coûteux ne détecte pourtant pas les porteurs du VIH dans 10 p. 100 des cas.

L'étude dont je parle ici présumait que les tests seraient effectués au Canada, de sorte que les faux résultats seraient réduits au minimum. Autrement, comment le gouvernement canadien pourrait-il contrôler la qualité des tests faits ailleurs? Un problème semblable est survenu en 1981, alors que des tests


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coûteux visant à détecter la présence d'un parasite de l'intestin chez d'éventuels immigrants ont été abolis, en partie parce que ces tests étaient effectués dans des laboratoires étrangers et qu'il était impossible d'en contrôler la qualité.

Ces éléments sont autant d'arguments contre la mise en place d'un programme de dépistage du SIDA chez les éventuels immigrants et les réfugiés. Je n'ai même pas parlé des considérations d'ordre moral qui auraient tout autant d'importance, à mon avis. Après tout, il est complètement discriminatoire d'appliquer un critère pour une maladie et non pour une autre. Des tests de dépistage du SIDA renforceraient également les stéréotypes et la discrimination contre les immigrants ou les réfugiés éventuels, que ce soit au Canada ou dans le pays où ils devraient retourner.

(1405)

Au lieu de penser que la propagation du virus du SIDA est le fait des visiteurs ou des nouveaux réSIDAnts du Canada, il faut plutôt l'examiner dans un contexte global. Autrement dit, si le gouvernement canadien imposait le test obligatoire de dépistage du SIDA, comment pourrait-il justifier de ne pas dépenser un montant équivalent, à même l'argent des contribuables, pour des programmes de sensibilisation visant à prévenir la progression de cette maladie? La prévention est le seul moyen de contrôler le SIDA, ce qui est sûrement mieux que de dépenser des millions de dollars pour des tests de dépistage qui ne donnent absolument aucun résultat concret.

[Français]

Monsieur le Président, pour toutes ces raisons, le Bloc québécois votera contre cette motion.

[Traduction]

Pour toutes ces raisons, le Bloc québécois votera contre cette motion.

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord): Monsieur le Président, je vous remercie de votre aimable attention. Je suis heureux de participer au débat sur la motion présentée par le député de Calgary-Nord-Est, qui demande essentiellement au gouvernement de rendre obligatoire le test de détection du virus du SIDA, ou VIH, pour toutes les personnes qui désirent immigrer au Canada.

Vu sa gravité, sa nature infectieuse et pandémique, l'absence de vaccin et de traitement efficace, le SIDA a, au début, semé la panique parmi le public, les employeurs, les compagnies d'assurance, les écoles et mêmes les travailleurs de la santé.

Aujourd'hui, certains sont encore effrayés à la simple mention du terme SIDA qui-il fut un temps-terrorisait presque tout le monde. Cependant, la crainte peut engendrer deux comportements opposés: elle peut soit inciter à prendre des mesures préventives, ce qui est louable, soit ôter toute pitié normalement ressentie pour ceux qui vivent avec la maladie, ce qui serait une tragédie.

La crainte du SIDA était souvent due à une mauvaise compréhension au sein du public, qui était aussi victime de désinformation. Mais cette crainte se dissipe à mesure que la recherche élargit nos connaissances et améliore notre compréhension du VIH, et que les mesures de sensibilisation détruisent le mythe qui entourait la maladie. On recommence à éprouver de la compassion à l'endroit des malades et des porteurs du virus. C'est pourquoi je redoute que la motion dont nous sommes saisis et que les mesures qu'elle propose soient motivées par les craintes non fondées du passé.

La motion pourrait donner aux Canadiens des raisons de croire que leur attitude d'autrefois, due à une mauvaise compréhension de ce qu'est le VIH, était justifiée, ce qui risquerait d'entraîner un mouvement de panique et de causer des souffrances inutiles, sans que cela présente le moindre avantage pour la santé publique. Cette méprise pourrait alors toucher directement les immigrants, même si ceux d'entre eux qui vivent actuellement au Canada ne sont absolument pas plus susceptibles d'êtres porteurs du VIH que ne le sont les Canadiens de souche.

Je redoute que nous ravivions involontairement-ou volontairement-l'animosité des Canadiens à l'endroit des immigrants, sans que cela profite d'aucune façon à la santé et à la sécurité publiques, ni à notre système de soins de santé. Nous devons mettre les choses en perspective.

Les experts médicaux ne considèrent pas l'infection au VIH comme une menace pour la santé et la sécurité publiques comparable à celle de la tuberculose, ou autrefois de la variole. J'ai plus à craindre de me trouver à proximité d'une personne qui a un rhume ordinaire que d'une personne séropositive.

Contrairement au rhume, le VIH ne se transmet pas par un contact occasionnel. Même les contacts étroits, par exemple entre des travailleurs de la santé et leurs patients, présentent un très faible risque. Je ne risque certainement pas d'être infecté à la suite d'un contact occasionnel avec un immigrant ou un visiteur étranger séropositif.

La campagne de sensibilisation a été un succès au Canada et j'ose espérer que l'époque où on interdisait l'accès à l'école à des enfants nés avec le VIH est révolue.

La motion d'initiative parlementaire dont nous sommes saisis, qui propose d'imposer le test de dépistage obligatoire du VIH aux immigrants et de refouler automatiquement toute personne déclarée séropositive, constitue une mesure rétrograde. Cette motion nous ramènerait à la noirceur du début des années 80 où nous ne comprenions pas grand-chose au SIDA.

(1410)

La motion proposée par le député est-elle plus justifiée que le fait d'empêcher les séropositifs d'accéder à l'école, au marché du travail ou aux transports publics? Pareille mesure est-elle plus sensée que de soumettre les 28 millions de Canadiens à un test de dépistage? Je ne le crois pas.

Si l'entrée de personnes séropositives au Canada présentait une menace pour les Canadiens, le député passerait-il à l'étape suivante, c'est-à-dire proposer le dépistage obligatoire pour qu'une personne puisse obtenir un visa de visiteur au Canada? Et comment protégerions-nous la frontière ouverte entre les États-Unis et le Canada? Le député propose-t-il aussi que le test de détection du VIH soit administré à compter d'aujourd'hui à la frontière canado-américaine?


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Le député est-il en train de proposer ici officiellement que toutes les personnes qui désirent entrer au Canada, y compris les pilotes d'avion-qui ne cessent d'aller et venir entre le Canada et l'étranger -, les diplomates, les touristes, les Canadiens rentrant de l'étranger, devront d'abord obtenir un résultat négatif à ce test? Le député a-t-il songé à ce qui adviendrait des personnes saines dont le test donnerait des résultats positifs? Le député a-t-il songé à l'épreuve que cela représenterait pour ces personnes?

Et que dire des personnes infectées dont les résultats seraient négatifs parce qu'elles n'auraient pas eu le temps de développer des anticorps? Le député peut-il imaginer le faux sentiment de sécurité que cela leur donnerait?

Je me demande si le député a songé à ce qu'il en coûterait de tester tout le monde, lui dont le parti ne cesse de réclamer chaque jour ici que le gouvernement réduise ses dépenses. Le député se rend-il compte du message que l'adoption de cette motion enverrait aux touristes et à la collectivité internationale?

Si la motion du député vise surtout à protéger la santé et la sécurité des Canadiens, elle n'est pas valable car elle ne tient pas compte de la façon dont le VIH se transmet d'une personne à l'autre. Si elle vise à empêcher que notre système de soins de santé ne soit surtaxé, le député reconnaîtra qu'il faut l'examiner à la lumière des critères généraux d'admissibilité qui existent déjà en matière médicale.

Il faudrait se poser une question fondamentale: sur le plan des coûts que doit absorber le système de soins de santé, les gens porteurs du virus du SIDA qui n'ont pas encore développé la maladie ne sont-ils pas différents de ceux qui souffrent de cette maladie ou de tout autre état chronique? Il y a une immense différence.

Le gouvernement n'écarte pas les craintes qu'entretiennent les Canadiens au sujet du test de dépistage du SIDA ou de son virus, le VIH, imposé aux étrangers qui font une demande d'immigration. Il tente de les dissiper de la façon la plus constructive et progressive qui soit, en effectuant une étude approfondie de tous les tests médicaux auxquels pourraient se soumettre les immigrants et en recueillant l'avis des meilleurs spécialistes. Une fois cette étude terminée, le gouvernement prendra les mesures qui s'imposent pour garantir la santé et la sécurité des Canadiens et pour protéger l'intégrité de notre système de soins de santé.

Toutefois, tant que l'étude ne sera pas terminée, les mesures que nous propose le député seront prématurées et injustifiées. Si cette Chambre devait tenir un débat et prendre une décision non éclairée sur cette question, cela ne ferait que favoriser les malentendus et les craintes qu'il faut précisément dissiper au sujet du VIH. Nous devons refuser de contribuer, sciemment ou non, à perpétuer les mythes et les craintes qui, trop souvent, radicalisent l'opinion des gens et font passer pour des parias ceux qui ont le plus besoin de notre compassion et de notre compréhension. Nous devons formuler une politique fondée sur les faits, les preuves et la raison, et non sur la peur, la spéculation et la propagande politique.

Je sais que le député d'en face qui a déposé cette motion partage les sentiments du gouvernement et du député de Winnipeg-Nord.

Pour terminer, je lui demande bien sincèrement de retirer sa motion jusqu'à ce que nous ayons toutes les preuves scientifiques nécessaires pour élaborer la politique de santé éclairée que souhaitent les Canadiens.

M. Grant Hill (Macleod): Monsieur le Président, permettez-moi de présenter à la Chambre l'un de mes héros, M. Joseph Lister. Il est le père de l'asepsie en chirurgie et l'un des pionniers de la médecine préventive. C'était un éminent chirurgien d'Édimbourg. Joseph Lister avait remarqué que la moitié des personnes qu'il avait amputées mouraient. La moitié des gens qu'il opérait ne survivaient pas, à cause de la septicité, mais il ne comprenait rien à cette septicité.

(1415)

Lister a toutefois constaté que l'acide phénique semblait avoir un effet sur la propreté de la plaie, une fois la chirurgie terminée. Mis ensemble, le phénol, les constatations de Lister sur les microbes, le nouveau microscope, récemment mis au point à cette époque, et les travaux de Louis Pasteur sur la pasteurisation ont formé la base de la médecine scientifique.

Au cours d'une brève période de sa vie, Lister a donc vu le taux de décès survenus à la suite d'une amputation chuter de 45 ou 50 p. 100 à seulement 5 p. 100. Il est intéressant de voir que le milieu médical a largement dénigré ses idées et ses réflexions au début.

Ce chirurgien, considéré encore aujourd'hui comme le pionnier des traitements chirurgicaux, fut la risée de ses pairs. Toutefois, il a vu la pensée évoluer au cours de sa vie et il a réussi à créer la chirurgie aseptique moderne.

Je voudrais aussi ajouter qu'on peut toujours critiquer la médecine moderne. Elle a toutefois eu un impact sur un autre genre de mortalité, celle des nourrissons. Selon les statistiques, en 1930, au Canada, 89 bébés sur 1 000 mouraient. En 1991, la proportion était seulement de 6 sur 1 000.

Je donne ces statistiques pour montrer que la médecine moderne évolue. Les schèmes de pensée évoluent également. J'ai écouté aujourd'hui des arguments assez éloquents selon lesquels nous devrions faire fi de l'information médicale. Or, à mon avis, nous risquons gros si nous agissons ainsi.

Mon bon collègue de Calgary-Nord-Est estime que les immigrants atteints du SIDA ne devraient pas être acceptés au Canada. Je voudrais parler des autres raisons médicales pour lesquelles nous n'acceptons pas d'immigrants au Canada.

Je vais comparer avec le VIH les maladies qui font obstacle à l'admission des immigrants au Canada. Il y a les maladies vénériennes, qu'on peut dépister à l'aide d'une prise de sang. Elles ne sont pas contagieuses et se transmettent par contact sexuel. Elles peuvent être traitées et, si tel est le cas, elles sont rarement mortelles. Elles ne sont pas visibles, sauf aux stades avancés. Leur traitement est peu coûteux. Deux médicaments permettent de les traiter: l'amoxicilline et la probénécide. On ne peut pas entrer au Canada si on est atteint d'une maladie vénérienne.

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L'hépatite est une autre de ces maladies. On la décèle à l'aide d'une prise de sang. Elle se transmet par contact sanguin. Ainsi, une infirmière qui se pique au doigt en effectuant une prise de sang à une personne atteinte d'hépatite peut contracter la maladie. Celle-ci n'est pas visible à moins que le malade ait la jaunisse ou le teint jaunâtre. Elle peut être mortelle dans certains cas, et il est difficile de la traiter à un coût modéré.

La tuberculose en est une autre. On la décèle à l'aide de la réaction de Mantoux ou d'une égratignure sur la peau. Elle est infectieuse. Dans le sens réel du terme, elle se transmet par la toux ou l'expectoration. Elle est traitable, rarement mortelle et également assez peu coûteuse à traiter.

(1420)

Si un immigrant est atteint de l'une de ces maladies, il n'est pas admissible. Désolé, il n'entre pas au Canada. Quelles sont les autres maladies qui entraînent le rejet d'une demande d'admission au Canada? Les parasites, la lèpre-et la liste est loin d'être exhaustive.

J'aimerais citer le hansard relativement aux propos qu'a tenus il y a quelque temps la secrétaire parlementaire du ministre. C'est un intéressant passage qui a trait à la question. « J'aimerais aussi revenir sur une affirmation du député. Il a déclaré que les gens qui entraient au Canada ne subissaient pas de test de détection du VIH et que le ministre avait promis, il y a quatre semaines, de faire quelque chose à ce sujet. Le député devrait savoir-je pensais qu'il le savait, mais peut-être que non-que la loi et le règlement sur les questions médicales qui relèvent du ministre n'ont pas été modifiés depuis 40 ans.» Elle a dit également que l'on n'agirait pas de manière hâtive, qu'on allait procéder par étapes, sans rien brusquer, et qu'aucune mesure ne serait prise précipitamment.

Je pense que si le député n'avait pas soulevé cette question, elle serait probablement restée enfouie pendant 40 autres années.

Où se situe le VIH par rapport aux autres maladies qui font qu'une personne se voit refuser l'entrée au Canada? Où se classe ce virus d'après les critères dont j'ai parlé? Ce virus est dépisté au moyen d'une analyse du sang. Il est transmis par le sang. J'insiste là-dessus: il est transmis par le sang. Il n'est pas visible, sauf dans des cas très avancés. Il est mortel et il n'y a pas de remède. Incurable. Traitement très coûteux. Plusieurs ont parlé du coût aujourd'hui. Selon les renseignements que j'ai, il pourrait être de l'ordre de 50 000 à 250 000 dollars pour une personne à un stade suffisamment avancé pour exiger des soins médicaux directs.

Combien coûte une maladie vénérienne? Environ 25 $ pour le test, 50 $ de médicaments, 100 $ de visites médicales, 25 $ pour un nouveau test, 50 $ de clinique et de pharmacie, pour un total de 250 $. Pour la tuberculose, on évalue le coût à 1 105 $. C'est donc loin d'être comparable.

Pourquoi l'infection par le VIH est-elle si différente des autres maladies? Je vais être franc avec vous. Elle est différente parce que l'aspect médical a été supplanté par l'aspect droits de la personne. Cette maladie n'est pas traitée comme purement médicale, elle est traitée comme une question de respect des droits de la personne.

Lorsque la maladie a été découverte, les médecins l'appelaient la maladie des homosexuels. Pourquoi? Parce que, au début, on a constaté qu'elle était présente surtout chez les homosexuels. Il y a eu un tollé, de sorte que la profession médicale n'a pu appeler la maladie par son nom. Il a fallu la baptiser autrement. À mesure que la maladie était mieux connue et comprise, on a constaté qu'elle était plus fréquente dans la communauté haïtienne. Cette communauté a protesté énergiquement, déclarant qu'elle ne devait pas être victime de discrimination parce que ses membres étaient plus souvent atteints de la maladie et que cela ne se disait pas. Or, les médecins doivent le dire. Peut-on faire l'autruche et nier l'existence d'un fait?

Nous savons que ceux qui s'injectent des drogues par voie intraveineuse finissent par attraper le VIH plus souvent que les autres. Nous connaissons la triste histoire des hémophiles qui doivent recevoir des produits sanguins et qui attrapent la maladie plus souvent que les autres. Nous savons que d'autres malheureux ont attrapé la maladie au cours d'interventions chirurgicales ou de contacts sanguins.

Le docteur Lister se serait penché sur la question et aurait cru que les Canadiens avaient perdu la tête. Nous savons où est la source de la maladie. Nous comprenons son cheminement, son diagnostic ainsi que son coût et le risque qu'elle représente.

(1425)

J'ai traité des malades toute ma vie. Le bon sens me dit qu'il faut fermer la porte à ceux qui ont des maladies spéciales. C'est aussi le bon sens qui me dit qu'il faut refuser l'entrée au Canada à ceux qui sont atteints du SIDA.

[Français]

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux): Monsieur le Président, la motion dont la Chambre est saisie aujourd'hui laisse entendre, et je cite: «La Loi sur l'immigration devrait imposer un test de détection du VIH à tous les aspirants immigrants et inclure le résultat positif parmi les motifs d'inadmissibilité.»

À première vue, la motion semble fort simple mais elle soulève une foule de questions et plus nous approfondissons ces questions plus le sujet se complique. Une question s'impose d'entrée de jeu. Pourquoi dans certaines circonstances on procède-t-on déjà, comme vous le savez, à des tests de détection du VIH d'éventuels immigrants et cela se passe en vertu des actuelles lignes directrices? Les requérants dont les résultats sont positifs peuvent être considérés comme non admissibles pour des raisons d'ordre médical. Nous devons donc nous demander pourquoi la pratique actuelle ne convient pas, si tel est le cas.

6112

Nous devrions à tout le moins, il me semble, commencer par bien comprendre la politique en vigueur sur l'inadmissibilité pour raisons médicales. La loi exige que tous les immigrants, et certains visiteurs, produisent leurs antécédents médicaux et se soumettent à un examen de santé. Elle n'énumère pas les maladies justifiant une déclaration de non admissibilité du point de vue médical. Le simple fait d'être atteint d'une maladie n'est pas en soi un motif de refus en vertu de la loi.

Les motifs de refus tiennent plutôt aux conséquences, aux répercussions qu'aurait sur le Canada l'admission d'une personne donnée, quels que soient les troubles médicaux.

[Traduction]

La loi exige que les médecins déclarent inadmissibles les personnes susceptibles de constituer une menace pour la santé ou la sécurité publiques ou d'imposer un fardeau excessif aux services de santé ou aux services sociaux du Canada.

Nous ignorons beaucoup de choses au sujet du VIH, mais les médecins s'entendent sur un point: une personne ne constitue pas une menace pour la santé ou la sécurité publiques tout simplement parce qu'elle est infectée par le VIH. J'espère que la plupart des Canadiens savent maintenant que l'on n'attrape pas le VIH ou le SIDA tout simplement en se trouvant à proximité d'une personne séropositive.

Le refus des demandes d'immigration des personnes infectées au VIH devrait être motivé par le fardeau excessif qu'elles sont susceptibles d'imposer à nos services de santé et à nos services sociaux. Il s'agit là d'une décision qui doit être prise au cas par cas. Il me semble que le fait qu'une personne souffrant d'une maladie donnée pourrait ou non imposer un fardeau excessif dépend de plusieurs facteurs: la gravité de la maladie, sa progression, les possibilités de guérison ou de détérioration, le traitement standard et ainsi de suite. Ce genre d'évaluation nécessite une très grande expertise et doit se faire au cas par cas.

Les députés devraient reconnaître que la motion à l'étude aujourd'hui demande qu'on s'écarte considérablement de la politique et de la pratique actuelles. Elle demande que nous mentionnions de façon précise une certaine maladie dans la loi et que les personnes souffrant de cette maladie soient automatiquement déclarées non admissibles sans qu'il soit question d'une évaluation médicale des conséquences par un expert.

[Français]

Je ne demanderai pas pour l'instant si nous en savons jusqu'ici assez sur le VIH pour adopter une telle mesure. Je me contenterai de souligner que c'est là une mesure qui n'a pas de précédents dans les récentes annales de l'immigration canadienne. Cette mesure ne doit donc pas être adoptée à la légère et elle ne doit sûrement pas être adoptée sans que ses futurs avantages, s'il en est, soient bien déterminés et bien défendus.

Le médecin n'est pas obligé de faire subir le test du VIH pour respecter la loi et le règlement d'application mais il y est autorisé s'il a des raisons de croire qu'il pourrait y avoir une infection.

Sur les antécédents médicaux d'un requérant où son examen révèle la possibilité d'une infection au VIH ou même un état pathologique qui inquiète le médecin, celui-ci peut imposer d'autres tests en vue de mieux évaluer le cas.

[Traduction]

Actuellement, on effectue des tests de dépistage du VIH quand on a une raison de le faire. En vertu des lignes directrices actuelles, les demandeurs qui se révèlent séropositifs sont habituellement considérés comme constituant un trop lourd fardeau pour nos services sociaux et de santé. Ils sont considérés non admissibles.

Je ne cherche pas à dénigrer la motion. Ce que je veux dire, c'est que nous pouvons maintenant nous pencher sur cette question et que nous devrions examiner si nos dispositions législatives actuelles sont satisfaisantes. Si elles ne le sont pas, nous devrions alors étudier la question plus en profondeur.

Le vice-président: Le temps prévu pour l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulé. Conformément à l'article 93 du Règlement, l'article retombe au bas de la liste de priorité du Feuilleton.

Comme il est 14 h 30, la Chambre s'ajourne à 11 heures lundi prochain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 14 h 31.)