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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le vendredi 7 février 1997

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-LA COMMISSION D'ENQUÊTE SUR LA SOMALIE

    M. Leroux (Shefford) 7821
    M. Leroux (Shefford) 7824
    M. Leroux (Shefford) 7828

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

M. BILL KERIENS

LE CHÔMAGE

LE DÉFICIT

LE PROGRAMME D'INFRASTRUCTURE

LES TRANSPORTS

LA SEMAINE DU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL

LE SERVICE DE TRAVERSIERS

LES PARENTS D'ENFANTS MALADES

LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA

LE CODE DU BÂTIMENT DE L'ONTARIO

LES PÊCHES

LE COMMODORE DE L'AIR LEN BIRCHALL

LE GARDIEN DE BUT PATRICK LALIME

LES LANGUES OFFICIELLES

    M. Breitkreuz (Yellowhead) 7831

ÉQUIPE CANADA

L'ORDRE DU MÉRITE MILITAIRE

LE TRAVAIL AU NOIR

QUESTIONS ORALES

LA CULTURE

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 7832
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 7833
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 7833

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 7833
    M. Leroux (Shefford) 7833

LES ENQUÊTES PUBLIQUES

LE PROJET DE LOI C-46

LA COMMISSION KREVER

L'AÉROPORT PEARSON

L'EMPLOI

LES PERSONNES HANDICAPÉES

    M. Scott (Fredericton-York-Sunbury) 7837

L'AÉROPORT PEARSON

LE TRANSPORT DU GRAIN

LA POLITIQUE CULTURELLE

LES PÉNITENCIERS

LES INITIATIVES JEUNESSE

    M. Tremblay (Lac-Saint-Jean) 7839
    M. Tremblay (Lac-Saint-Jean) 7839

LA POLITIQUE CULTURELLE

L'EMPLOI

LE ZAÏRE

    Mme Stewart (Northumberland) 7840

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA CONFÉRENCE SUR LA JEUNESSE DU PARTI RÉFORMISTE

AFFAIRES COURANTES

LA FISCALITÉ

LA LOI SUR L'EXPANSION DES EXPORTATIONS

    Projet de loi C-368. Adoption des motions de présentationet de première lecture 7841

PÉTITIONS

LE RÉSEAU ROUTIER

    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 7841

L'AVORTEMENT

LA TAXE SUR L'ESSENCE

LE RÉSEAU ROUTIER

L'IMMIGRATION

LA COMMISSION D'EXAMEN DU PRIX DE L'ÉNERGIE

LE RÉSEAU ROUTIER

LA TAXE SUR L'ESSENCE

LES DROITS DE LA PERSONNE

LA MONNAIE

LA FISCALITÉ

QUESTIONS AU FEUILLETON

LA LOI SUR LA TAXE D'ACCISE

PROJET DE LOI C-70. AVIS DE MOTION CONCERNANT L'ATTRIBUTION DE TEMPS

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-L'ENQUÊTE SUR LES ÉVÉNEMENTSSURVENUS EN SOMALIE

    Reprise de l'étude de la motion 7842
    M. Leroux (Shefford) 7846
    Report du vote sur la motion 7851

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LA CONDUITE AVEC FACULTÉS AFFAIBLIES

    Reprise de l'étude de la motion 7852
    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 7857
    Adoption de la motion 7860

7821


CHAMBRE DES COMMUNES

Le vendredi 7 février 1997


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-LA COMMISSION D'ENQUÊTE SUR LA SOMALIE

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ) propose:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait s'engager à ce que toute la lumière soit faite sur les événements survenus avant, pendant et après le déploiement des forces canadiennes en Somalie, en octroyant à la Commission d'enquête la prolongation de son mandat jusqu'au 31 décembre 1997.
-Monsieur le Président, le 10 janvier dernier, le ministre de la Défense annonçait qu'il mettait un terme aux travaux de la Commission Létourneau, c'est-à-dire l'enquête sur la Somalie qui devait et qui devra tenter de faire toute la lumière sur ce qui s'est passé avant les événements de la Somalie, pendant et après.

Ai-je besoin de dire que, comme beaucoup de Canadiens et de Québécois, l'opposition officielle est très déçue de cette décision. Aujourd'hui, nous allons tenter de démontrer à cette Chambre la nécessité, pour cette Commission, d'avoir une prolongation qui serait et qui sera salutaire pour le Canada tout entier.

(1005)

Lors de l'établissement de cette Commission, le premier ministre du Canada déclarait, et je cite: «Pour le première fois depuis bien longtemps, un gouvernement a eu le courage de commander une enquête sur le fonctionnement de la Défense nationale. Cela ne s'était jamais fait.» Le premier ministre du Canada déclarait cela le 16 septembre 1996. Il disait également: «Entre-temps, nous devons faire montre de respect envers la Commission et la laisser terminer son travail. Nous nous inspirerons de ses recommandations.»

À ce moment-là, le premier ministre du Canada nous disait qu'il y avait un précédent, qu'on établissait une commission. Or, le 10 janvier, ce même gouvernement, par son ministre de la Défense, décidait de mettre un terme aux travaux, et ça aussi, c'était la première fois que cela se faisait au Canada. Jamais un gouvernement n'a osé mettre fin aussi abruptement à une commission qu'il avait lui-même commandée.

Tout au cours des débats, le Comité permanent de la défense nationale n'a à peu près pas siégé. Encore une fois, le gouvernement a décidé qu'il était important que la Commission fasse toute la lumière sur les événements de Somalie. Or, on s'aperçoit aujourd'hui que cela ne se fera pas.

Bien sûr, on sera mis au courant de ce qui s'est passé avant les événements de la Somalie, c'est-à-dire comment nos soldats étaient prêts à aller défendre l'honneur du Canada en Somalie. Cela, on le saura. Mais finalement, le Canada n'était pas prêt. On a décidé d'envoyer des hommes là-bas et ils n'étaient pas prêts. Probablement saurons-nous également ce qui s'est passé, c'est-à-dire les événements mêmes, les deux présumés assassinats qui ont eu lieu en Somalie. Cette Commission avait comme mandat de rétablir l'honneur et l'intégrité des forces canadiennes.

J'ai eu le plaisir de siéger sur le Comité mixte de la Chambre, avec mon collègue, le député de Charlesbourg, où nous avons proposé toute une série d'amendements. Il y a trois ans que je siège sur le Comité de la défense nationale et on nous parle constamment du moral des troupes qui n'est pas bon. Monsieur le Président, je veux vous aviser, à ce moment-ci, que je partagerai mon temps de parole avec le député de Charlesbourg. Donc, le moral des troupes n'était pas bon, il y a trois ans, il n'est pas meilleur aujourd'hui. Je pense qu'il y a longtemps que le moral des troupes n'est pas bon.

La Commission doit découvrir pourquoi le moral des troupes s'est tellement détérioré. C'est ce qui est important. C'est comme si le ministre de la Défense et le premier ministre avaient décidé que, finalement, la Commission Létourneau, ce n'était pas important, qu'elle ferait des recommandations, mais que. . . Bon. Alors, le ministre a décidé d'établir un autre comité qui se penchera sur le moral des troupes, sans attendre les conclusions de la Commission. Et ça, c'est tragique.

La vérité, c'est que ce gouvernement, politiquement, a établi cette Commission en se disant que ce seraient les conservateurs, le gouvernement précédent qui écoperaient. Or, plus ça va, plus on s'aperçoit qu'il y a des liens avec ce gouvernement et que probablement toute la période qui suit touchera des amis du régime qu'on ne veut pas toucher.

Rappelez-vous la grande fouille du 9 avril 1996. Le commandant en chef Boyle décidait qu'il y aurait une fouille partout, sous les poubelles, dans les poubelles, dans les dossiers, sous les sièges, dans les chars, etc., on fouillerait partout, il fallait trouver des documents perdus. Une farce, une farce monumentale! Les Cana-


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diens savent bien que c'est une farce, une dérision. Pendant six mois, l'armée canadienne a refusé de collaborer, et là, en une journée, on déclare que c'est «la journée de la fouille».

(1010)

Cette journée-là, les officiers et les subalternes, et ceux qui ont des gros galons sur les bras, ont fouillé partout pour essayer de trouver des documents. Ça faisait six mois que l'armée canadienne refusait de collaborer avec la Commission. Or, cette Commission a été établie principalement pour voir ce qui s'est passé après. C'est ce qui est important. Quand on veut corriger des choses, quand on veut améliorer le moral des troupes, ne faut-il pas voir ce qui va mal?

Qui veut-on protéger? Il y a des personnes très importantes qui ne pourront pas participer, qui ne pourront pas être citées comme témoins. Il y a d'abord Robert Fowler, qui a été sous-ministre sous les libéraux, sous les conservateurs puis sous les libéraux: un survivant. Or, il est maintenant ambassadeur du Canada aux Nations Unies. Il ne pourra pas être cité devant la Commission; on n'aura pas le temps, malheureusement. C'est probablement une personne qui en sait long sur le sujet. Mais il y en a d'autres. Il y a John Anderson aussi, le chef d'état-major au moment des événements. Il a été nommé ambassadeur à l'OTAN. Lui non plus ne sera pas questionné.

Il y a l'ancienne première ministre, Kim Campbell, qui ne sera pas présente non plus à cette Commission. Elle occupe le poste de consul général à Los Angeles. Donc, cette personne, qui dit avoir été intimidée, à l'époque, on lui a dit: «Wow madame! si vous voulez que ça aille bien, ne parlez pas de cela.»

Que fait-on actuellement? C'est bien simple. Je qualifie le ministre de la Défense de pompier du gouvernement. On se rappellera la carrière de ce ministre: il était aux Transports, donc il a décidé qu'il n'y aurait plus de trains au Canada; ensuite, on l'a envoyé aux Ressources humaines, où il a décidé de fermer les centres d'emploi un peu partout, c'est lui qui a fait la job de bras; et actuellement, il est à la Défense pour faire le même travail. On a décidé de mettre le couvercle sur la marmite.

On s'est aperçu que le gouvernement libéral serait durement attaqué. On se rappellera ce que le premier ministre nous avait dit: «C'est la première fois que ça se fait, c'est la première fois qu'on établit une telle Commission.» C'est également la première fois qu'on décidait d'y mettre fin abruptement.

C'est la raison pour laquelle le Bloc québécois, opposition officielle au Canada jusqu'à la prochaine élection et conscient de ses responsabilités d'opposition officielle, demande au gouvernement de changer d'idée.

En terminant, je vous lis la motion qui dit ceci:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait s'engager à ce que toute la lumière soit faite sur les événements survenus avant, pendant et après le déploiement des forces canadiennes en Somalie, en octroyant à la Commission d'enquête la prolongation de son mandat jusqu'au 31 décembre 1997.
Si nous ne faisons pas cela, on ne connaîtra la vérité, et ce sera un éternel recommencement. On aura gaspillé 25 millions de dollars sans même savoir ce qui s'est vraiment passé.

M. Eugène Bellemare (Carleton-Gloucester, Lib.): Monsieur le Président, le député du Bloc québécois s'acharne à essayer de noircir davantage la réputation de l'armée canadienne. On sait très bien que les députés du Bloc n'ont aucunement l'intention d'essayer d'améliorer la situation de la Défense nationale. Leur ambition est de noircir.

D'ailleurs, le député qui vient de parler-ou devrais-je plutôt dire qu'il balbutiait toutes sortes de choses concernant la Défense nationale-n'est-ce pas lui qui a écrit aux militaires, au cours de la période précédant le référendum, pour essayer de former sa propre armée séparatiste? Si ce n'est pas lui, c'est sûrement son collègue, parce que c'est cette gang de séparatistes qui veulent noircir la Défense nationale.

(1015)

Il y a eu des problèmes en Somalie, oui. Le gouvernement l'a remarqué. Quand les problèmes sont-ils survenus? Ils sont survenus durant le règne du gouvernement conservateur, avant 1993. Le premier ministre a pris ses responsabilités et on a fait enquête. Cela fait deux ou trois fois qu'on accorde des prolongations à la Commission. Va-t-on en donner une cinquième, une sixième, une septième jusqu'à l'an 2025?

On doit maintenant mettre en marche des procédures pour améliorer le système militaire. C'est ce que le ministre de la Défense est en train de faire. Le but principal de ce gouvernement, en somme, le but principal de tous les parlementaires, c'est bien d'améliorer le système de défense nationale et non pas d'essayer de le traîner dans les poubelles, tel que vous essayez de faire, vous, les séparatistes.

M. Leroux (Shefford): Monsieur le Président, évidemment, mon collègue a parlé de toutes sortes de choses de façon très décousue. Il n'est vraisemblablement pas au courant du dossier.

Je voudrais tout simplement dire que quand on regarde l'histoire de l'armée canadienne depuis les dix dernières années, on s'aperçoit qu'il y a beaucoup de lacunes, un manque de leadership flagrant, que toutes les mesures prises par les ministres de la Défense qui se sont succédé n'ont rien réglé. Au contraire, plus ça va, pire c'est.

Nous avons une Commission qui a coûté, je l'admets, beaucoup d'argent, mais qui ne coûterait pas beaucoup plus cher à être prolongée. À partir du 31 mars, la Commission va écrire son rapport, si le ministre ne change pas d'idée. Donc, du 31 mars au 30 juin, il ne se passera plus rien, et le 30 juin, la Commission déposera son rapport. On trouve cela inacceptable.

La Commission n'a pas terminé son travail. L'armée a fait des entraves pendant six mois pour empêcher les commissaires d'entendre la vérité. On a falsifié des documents, on a déchiqueté des documents qui existaient, on les a fait disparaître. Ces gens sont très


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professionnels. Le juge Létourneau est une personne extraordinaire qui veut connaître la vérité, comme tous les Canadiens et les Québécois. Nous voulons connaître la vérité pour pouvoir corriger la situation.

Le député dit n'importe quoi. Le Québec, lorsqu'il sera souverain, aura une force, et nous nous inspirerons de ce qu'il y a au Canada actuellement, et c'est la raison pour laquelle nous voulons avoir une armée canadienne présente, solide, déterminée, une armée où il y a du leadership et où on peut voir de l'avant. Si on envoie nos soldats garder la paix ailleurs, on veut qu'ils soient préparés et qu'ils soient fiers de le faire au nom des Canadiens et des Québécois.

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, il me fait toujours plaisir de prendre la parole ici en Chambre, mais parfois, sur certains sujets, on pourrait presque dire que c'est triste et désolant dans certains cas.

Plutôt que de rappeler ce qui s'est passé concernant les dernières décisions du nouveau ministre de la Défense, je vais vous tracer un certain historique de cette situation, pour vraiment faire comprendre les problèmes à l'intérieur de l'armée, que certains députés libéraux accusent le Bloc de vouloir salir intentionnellement. Je vais rappeler certains faits et l'évolution historique.

En 1985, il y avait une enquête sur le défunt Régiment aéroporté. Sur les 568 membres du Régiment aéroporté, 112 avaient des dossiers avec la police militaire et 89 en avaient avec la police civile. Il y avait eu, à ce moment, certains avis donnés de façon à ce que la hiérarchie militaire, l'état-major, corrige cette situation, mais cela a continué d'évoluer.

En 1992, à la base de Petawawa, où était le défunt Régiment aéroporté, le colonel Morneau avait indiqué au chef d'état-major du temps, le général John de Chastelain, que le Régiment n'était pas entraîné ou formé adéquatement pour ce genre de mission, et il recommandait de ne pas déployer ce Régiment en Somalie.

Comme le général de Chastelain était sur la fin de son mandat, il a quand même accordé le déploiement, en se disant que le mois suivant, il serait consul à Washington, aux États-Unis. C'était en décembre 1992.

(1020)

En janvier 1993, il y a un nouveau chef d'état-major, John Anderson. Ce dernier se rend en Somalie, aux mois de février et début mars, avec Bob Fowler et d'autres généraux. Tous sont à même de voir le comportement un peu agressif ou raciste déjà signalé. D'ailleurs, si ma mémoire est bonne, il y avait eu, à ce moment-là, des réprimandes contre le commandant qui était là. Je pense que c'était le commandant Seward. Il avait été réprimandé et aussi mis à l'amende pour avoir eu des activités trop agressives envers les Somaliens.

Lors de cette visite, ni M. Fowler ni le général John Anderson n'ont pu signaler qu'il s'était passé certaines anomalies. Chose curieuse, c'est que le général John Anderson, lui, était là deux jours après le premier incident du 4 mars avec le jeune Shidane Arone: aucun rapport.

Six semaines plus tard, la police militaire décide de déclencher une enquête. On connaît la suite. On a trouvé tout de suite un coupable, Kyle Brown. Il a été accusé, condamné à cinq ans de prison. Les officiers et les sous-officiers: non coupables. Certaines réprimandes, des promotions gelées; on arrête cela là.

Et on continue. En 1993, il commence à y avoir certaines pressions de la part du public à l'effet qu'il devrait se passer quelque chose. On continue à avoir des déboires. Rappelez-vous qu'au début de l'année 1994, en février et mars-probablement que certains députés vont dire que le Bloc tentait encore de salir l'armée, bien au contraire-on signalait que dans le Régiment aéroporté de Petawawa, des individus se promenaient avec des bandeaux du Ku Klux Klan et arboraient des drapeaux nazis sur les véhicules de l'armée canadienne. À ce moment-là, c'était le colonel Kenward et c'était toléré, il n'y avait pas de problème.

Je trouve que l'évolution se poursuivait et ça devait aberrant. Et ce n'est pas simplement le cas de la Somalie, c'est l'ensemble de tout ce qui s'est produit.

Après certaines pressions populaires, l'ex-ministre de la Défense, le député de Don Valley-Est, à ce moment-là, annonce la création d'une Commission d'enquête sur la Somalie, que toute la vérité se saura, que tous les témoins seront assignés devant cette Commission.

Il faut se rappeler aussi que vers le mois d'octobre 1995, ici en cette Chambre, autant les représentants du Parti réformiste que ceux du Bloc québécois ont accusé le ministre de la Défense de l'époque de certaine complicité avec l'armée pour empêcher de remettre des documents à la Commission d'enquête.

Je me souviens très bien qu'à ce moment-là, l'ex-ministre de la Défense avait fait une petite colère, un peu comme dans le style de celle du ministre de la Défense hier. Il nous a donné un beau spectacle. Comment peut-on oser attaquer l'intégrité de l'armée?

Je rappelle que si on fait la nomenclature, ce n'est pas dans le but, comme certains peuvent le penser, de vouloir salir. Je regrette, ce sont simplement des faits. Vous avez vu, dernièrement, on a révélé ce qui s'est passé en 1994.

Ce qui est drôle avec l'armée, c'est que ça sort toujours deux ou trois ans après: les événements de Bacovici; on pourrait rappeler les abus sexuels à Wainwright; on pourrait rappeler la fraude et la malversation à la base de Valcartier. On pourrait en faire la liste tant et aussi longtemps qu'on veut. On pourrait ajouter que même un civil, à l'état-major, a réussi à créer un réseau de pornographie à l'intérieur du ministère de la Défense.

Je pense que c'est certainement un problème de fonctionnement. Au début de 1995, je lisais un rapport du brigadier-général Jeffries qui disait que le problème à l'intérieur de l'armée, qui pouvait amener des comportements, disons, déviés chez certains soldats, dépendait justement d'un manque de leadership. C'est un brigadier-général qui disait cela, ce n'est pas moi.


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Il y a un autre rapport, celui du colonel Oehring, qui mentionnait justement qu'il y avait un manque flagrant de leadership, un manque de discipline et une complète distorsion entre la hiérarchie et les soldats. Je rappelle à tous les députés de cette Chambre qu'à un moment donné, les médias nous ont appris la nouvelle que certains militaires et certains marins de l'armée canadienne tentaient de retirer du bien-être social, et allaient même à la soupe populaire, et cela, dans l'ouest du Canada.

(1025)

De l'autre côté, regardez certains officiers. Je pense justement à l'amiral Murray, qui témoignait de façon très cavalière et arrogante, qui, lui, était logé dans une maison d'environ 6 000 pieds carrés et qui payait le montant faramineux de 581 $ par mois. Pour un simple militaire qui regarde l'agissement de ces officiers, c'est très facile de perdre le moral.

C'est un peu toute l'évolution de cette chose. On n'a qu'à regarder l'historique et tous les acteurs. John Anderson était au courant: il est allé en Somalie, il savait exactement ce qui se passait, et pour le punir d'avoir manqué de leadership, on le nomme à l'OTAN. Bob Fowler a été sous-ministre de la Défense durant de nombreuses années: c'est encore lui qui était présent en Somalie au mois de mars 1993, mais il ne signale rien et ne voit rien. À un moment donné, vers la fin de l'année 1995, M. Fowler est nommé délégué du Canada à l'ONU. Chose curieuse, si on recule encore quelques années, on apprend qu'il était l'attaché politique de M. Trudeau, ancien premier ministre libéral dans les années 1983-1984 et, chose curieuse encore, il est le beau-frère du nouveau Gouverneur général. Il faut croire que c'est une filière et qu'on protège nos amis.

On peut continuer en disant que John de Chastelain est revenu comme chef d'état-major. Il était consul à Washington et il a été remplacé par le cousin du premier ministre, M. Chrétien. Lorsqu'est arrivée l'abolition ou l'éradication du Régiment en Somalie, rappelez-vous que le général John de Chastelain a remis sa démission, que le premier ministre a refusée. Finalement, en décembre 1995, le général de Chastelain remet sa démission et quitte le théâtre, puis revient M. Boyle.

Je vois, monsieur le Président, que vous venez de me signaler qu'il ne me reste plus que deux minutes. J'aurais pu élaborer plus longuement, mais je vais en venir à ma conclusion. Ce que je veux dire à l'intérieur de cela, c'est qu'autant l'ex-ministre de la Défense, le député de Don Valley-Est, autant le nouveau ministre de la Défense actuel, autant le premier ministre ont déclaré, que ce soit en novembre 1994, octobre 1995, mars 1996 ou juin 1996, qu'on devait connaître la vérité, que ça ne touchait pas simplement le déploiement du Régiment aéroporté en Somalie, mais qu'il y avait aussi d'autres événements pour lesquels, comme je l'ai signalé, certains officiers disaient qu'il y avait des carences de leadership.

Ce qu'on fait maintenant, c'est une question d'éthique. Je dirais même que lorsqu'on dit vouloir mettre un terme à la Commission d'enquête, ça n'a plus aucune espèce d'importance. Regardez le comportement de l'amiral Murray. On ne connaîtra jamais la vérité.

Je pense que c'est un manquement à l'éthique ou même à la confiance qu'on peut avoir envers le gouvernement actuel quand on dit qu'on ne veut pas prolonger. Il a fallu presque un an à l'armée avant de remettre certains documents, et lorsqu'on regarde d'autres commissions d'enquête qui ont duré cinq ans et qui portaient sur des dossiers pas mal moins sérieux, on se pose de sérieuses questions sur le comportement du gouvernement actuel. Sans vouloir prendre les Canadiens pour des gens qui ne comprennent pas, lorsque le gouvernement libéral décide d'arrêter les travaux de cette Commission, il est clair qu'il a quelque chose à cacher. Il est clair qu'il a des gens à protéger et je ne pense pas que les Canadiens et les Québécois accepteront cette situation.

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, je voudrais féliciter mon collègue pour sa présentation. Comme vous le savez, le député a été vice-président du Comité permanent de la défense. Il a aussi fait partie du Comité mixte de la Chambre et du Sénat qui a proposé des changements aux Forces armées canadiennes.

J'aurais une question à lui poser. Au cours des trois ans au cours desquels il a été membre du Comité permanent de la défense, sent-il qu'actuellement, il y a du changement au Comité permanent de la défense du Canada?

De l'autre côté, on dit n'importe quoi, mais on sait très bien que les députés du Bloc participent aux travaux et qu'ils travaillent fort pour faire avancer les choses. Je pense qu'il ferait mieux de se taire et d'écouter la question.

(1030)

J'aimerais demander à mon collègue de Charlesbourg s'il croit qu'il y a eu du changement dans les forces canadiennes et qu'il nous explique cela.

M. Jacob: Monsieur le Président, oui, il y a eu des changements. Il y a eu des changements de ministres, de chefs d'état-major. Mais je ne pense pas qu'il y ait eu de véritables changements dans la mentalité. Mon collègue a parlé du Comité permanent de la défense nationale. C'est vrai, le Bloc a participé et a fait des suggestions très souvent constructives. Certains de mes collègues libéraux savent très bien que les bloquistes tentaient d'apporter des solutions à certains problèmes, de participer aux discussions.

Si on se reporte aux rapports du vérificateur général ou à d'autres rapports, le ministère de la Défense nationale a souvent été taxé de mal administrer ses infrastructures, de faire des dépenses abusives et d'autres choses.

Il me fait plaisir que mon collègue me permette de parler de l'aspect financier. Lundi, le nouveau ministre de la Défense disait que tout cela avait coûté assez cher et que le Bloc se plaignait que trop d'argent était dépensé au ministère de la Défense nationale. Il s'agit de 25 millions de dollars pour connaître la vérité et savoir où vraiment, à l'intérieur de la chaîne de commandement, sont les lacunes, comment apporter des améliorations et trouver les coupables.


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Le Comité de la défense a souvent signalé qu'il y a trop de généraux et que ces généraux manquaient souvent de leadership ou d'autorité vis-à-vis les militaires. Bien souvent, ce sont les caporaux et les simples soldats qui écopent, et les officiers s'en tirent à bon compte. Cela s'est produit à plusieurs reprises. Le sujet a été discuté au Comité de la défense nationale.

Si vraiment on désire un changement dans la mentalité comme dans l'action, je ne pense pas que cela se produira en disant que la Commission a assez duré, qu'elle aura le temps d'entendre les derniers témoins, ce qui est faux, mais on devrait, pour différentes raisons, que ce soit pour laver l'honneur de l'armée, redonner la fierté à tous les militaires, arrêter de vivre dans le passé et prétendre que les militaires et l'armée canadienne ont vécu dans l'honneur et que tous les gens en sont fiers.

Si on retourne trois ou quatre ans en arrière, je ne suis pas sûr que tout le monde soit fier de ce qui se passe dans l'armée. Je ne suis pas sûr que tous les gens soient fiers des montants dépensés pour diverses raisons. Avec la volonté nécessaire, le gouvernement actuel pourrait modifier cela.

L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de participer à ce débat aujourd'hui.

Lorsque j'entends mes collègues du Bloc québécois discuter d'intégrité, parler de ce qui s'est passé en Somalie, et répéter la litanie des problèmes que tous les Canadiens connaissent trop bien, j'ai de la difficulté à comprendre comment toute cette concentration sur l'éthique qui existe ou non dans les forces canadiennes peut être en équilibre avec l'approche du Bloc québécois.

On parle de leadership dans les forces canadiennes, et je suis d'accord avec mes honorables collègues pour dire qu'il y a un problème. Il faudra trouver un moyen de le corriger. Les honorables députés du Bloc québécois s'attendent-ils à ce qu'on applique aux forces canadiennes la même éthique, le même comportement que ce qu'on a appliqué au personnel de l'ancien chef du Bloc québécois?

Veut-on s'organiser pour congédier des gens pour pouvoir les rémunérer? Est-ce ce genre d'éthique qu'on prêche, ici, aujourd'hui en faisant la morale aux Canadiens, au gouvernement, aux membres des forces canadiennes? Est-ce que ce sont des gens qui tentent, lorsqu'il y a des référendums, de créer des fissures à l'intérieur des forces canadiennes avec de supposés complots?

(1035)

Est-ce sur ce genre d'intégrité que les forces canadiennes doivent se baser? J'espère que ce n'est pas le cas. Probablement parce que les deux honorables députés qui ont parlé aujourd'hui ne seront pas des candidats au leadership du Bloc québécois, ils n'appliquent pas ce genre d'éthique qu'on a vu exprimé dernièrement dans les médias.

[Traduction]

La question que les Canadiens doivent se poser aujourd'hui, c'est si le pays va vraiment bénéficier de la production de documents historiques à la toute fin de ce siècle sur un incident survenu en 1993.

Prenons un document qui relate des commentaires faits au bulletin de nouvelles nationales de la Société Radio-Canada, le 13 janvier dernier. Après avoir fait ses propres calculs, examiné le programme de la Commission d'enquête sur la Somalie, tenu compte de la période visée, regardé son propre plan de travail, la SRC a conclu que la commission, au rythme auquel elle avait progressé jusqu'à la date du reportage, aurait besoin d'environ six ans pour terminer ses travaux. Il ne s'agit pas ici de la vision gouvernementale, mais bien d'une évaluation faite par la SRC de la question.

Je le répète encore, les Canadiens qui s'intéressent à ce qui s'est passé en Somalie savent fort bien qui a tiré. Ils savent que ces incidents étaient totalement inacceptables. Nous reconnaissons que le leadership a gravement fait défaut. Nous savons qu'il y a eu de graves lacunes dans la façon dont nous avons réagi aux événements en Somalie, dans le système de justice militaire, dans la façon dont l'enquête militaire a été menée. Nous comprenons cela.

Je suis d'avis que les Forces canadiennes et le pays tout entier doivent aller de l'avant, aller au-delà de cette affaire, sans revenir indéfiniment sur des événements que nous connaissons trop bien, afin d'en arriver à des solutions.

Je suis parfaitement au courant du fardeau énorme que nous imposons aux hommes et aux femmes membres de nos forces armées. Je rentre justement de Bosnie. Il est parfaitement inutile de dire à ceux qui parcourent les rues des villes dévastées de la Bosnie et qui voient des enfants aux yeux creux que nous menons une enquête sur les incidents en Somalie ou que nous allons reporter la date prévue pour la fin des travaux. Ces hommes et ces femmes veulent qu'on leur dise que les députés vont prendre des mesures pour que nos soldats aient une bonne formation, qu'ils soient bien équipés, qu'ils aient des lignes directrices et des structures à observer pour s'acquitter de leurs missions.

Au nom du gouvernement, je me suis engagé à présenter, d'ici le 31 mars 1997, au premier ministre, au gouvernement et à la population du Canada un plan exhaustif et une série de propositions sur la façon dont nous pouvons aller de l'avant pour rétablir l'intégrité et la fierté d'une des meilleures institutions militaires du monde entier.

C'est un défi considérable. Nous nous attendons à ce qu'on nous juge et à ce qu'on analyse les recommandations, et nous tâchons de nous attirer autant d'appui que possible auprès d'un ensemble aussi vaste que possible de la population du pays.

Contrairement à mes honorables collègues ce matin, je crois que l'énorme réservoir d'appui public en faveur des hommes et des femmes appartenant aux Forces canadiennes constitue la base solide à partir de laquelle nous pouvons aller de l'avant. Il ne fait aucun doute que les Canadiens ont été dégoûtés de ce qui s'est passé en Somalie. Il ne fait aucun doute qu'ils mettent en doute la qualité et la formation de certains des éléments de la direction des Forces canadiennes depuis un certain nombre d'années.


7826

Quand on songe qu'il faut donner au Canada une institution militaire très efficace et compétente, à quoi cela peut-il bien servir d'énumérer les problèmes dont nous avons déjà entendu beaucoup parler; ne serait-il pas plus utile pour les députés du Bloc québécois et ceux de tous les autres partis représentés à la Chambre d'exposer ce qu'ils pensent que nous devrions faire?

Pour être très honnête à ce sujet et sans vouloir minimiser en quoi que ce soit les incidents qui se sont produits en Somalie, ce qui s'est passé avant l'intervention en Somalie ou ce qui s'est passé après que les incidents eurent été constatés, il nous reste encore à examiner le contexte global dans lequel les Forces canadiennes exercent leurs activités. Certains parleront d'un environnement de temps de paix. Je puis vous assurer, monsieur le Président, que, si l'on visitait la Bosnie aujourd'hui, on ne la trouvait pas très paisible, bien qu'elle le soit de jour en jour actuellement, mais quand on voit la dévastation qui y subsiste, on sait bien que la situation pourrait très rapidement redevenir très dangereuse.

(1040)

Nous avons un contingent des Forces canadiennes en Haïti. Ces dernières font autant partie de l'image du Canada que les montagnes Rocheuses ou que la Gendarmerie royale du Canada partout où l'on va dans le monde. Je ne veux pas excuser les très graves erreurs qui se sont commises dans le passé, mais étant donné tous les problèmes auxquels nous avons eu à faire face, quand on les considère en pensant aux jeunes hommes et aux jeunes femmes qui risquent leur vie partout autour de la planète, et quand on voit comment d'autres institutions militaires ont eu à fonctionner dans des environnements similaires, je crois que les Canadiens à l'esprit impartial-et c'est le cas de la plupart-comprendront que, dans l'ensemble, les Forces canadiennes restent quand même l'une des institutions militaires les plus respectées dans le monde.

Nous pouvons discuter longtemps de la question de savoir si les commissions d'enquête au Canada devraient être constituées de telle façon qu'une fois qu'elles ont entrepris leur travail, elles ont carte blanche pour aller au bout de ce qui leur paraît être le niveau d'enquête qui s'impose. Aucune objection. Si le Parlement légifère pour que les commissions d'enquête, une fois mises sur pied, poursuivent leurs travaux jusqu'à ce que les commissaires, les parties en cause et leurs avocats soient tous convaincus que tous les documents ont été étudiés, tous les problèmes abordés et toutes les questions posées, si c'est bien ce que veulent les Canadiens et les députés, alors il faut en discuter.

Pour que tous les faits soient connus, cette commission a été mise sur pied le 30 novembre 1995. Le délai initial que les commissaires ont accepté, lorsqu'ils se sont engagés à faire ce travail, était le 20 décembre 1995. Nous en sommes maintenant à discuter du bien-fondé d'une troisième prolongation. C'est la troisième fois que la date est repoussée, cette fois à la fin de juin prochain. Il y avait eu une deuxième prolongation, jusqu'au 20 juin 1996, puis une deuxième, jusqu'au 31 mars 1997. La troisième prolongation fixe le délai au 30 juin 1997. La commission aura eu plus de deux ans pour accomplir son travail, avant qu'elle soit priée de remettre ses conclusions.

Je comprends l'irritation des commissaires et les inquiétudes des députés. Ils disent qu'on n'aura pas entendu tous les témoins, examiné tous les documents ni abordé toutes les questions. J'aimerais entendre mes collègues me dire-j'espère qu'ils le feront au cours du débat d'aujourd'hui-s'ils estiment que, non seulement pour l'enquête sur les incidents de Somalie, mais aussi pour toutes les enquêtes à venir, il faut avoir un processus qui se prolonge indéfiniment, tant que tout le monde n'est pas convaincu que tout a été fait. Si c'est la proposition qu'on avance, je crois qu'il faudrait en discuter à la Chambre, car les conséquences sont énormes.

Qu'advient-il des dirigeants? Nous avons entendu le témoignage de personnes qui ont été réaffectées ou nommées à de nouveaux postes. Que se passera-t-il si nous ne recevons le rapport que sept, huit ou dix ans après les événements? En tant que document historique, il a peut-être une certaine valeur, mais, pour ce qui est de tirer les leçons des erreurs du passé, en quoi peut-il être utile? Où seront les gens qui occupaient des postes de commandement? Pis encore, qu'arrive-t-il à ces personnes entre temps? Rien? Nous avons choisi de passer à autre chose.

Je tiens à ce qu'il soit clair que nous n'avons jamais dit qui devrait être appelé à comparaître devant la commission. Je n'ai jamais fait d'observations sur les témoignages entendus devant la commission. Je n'ai jamais fait d'observations sur le plan de travail ou l'ordre du jour de la commission parce que je sais pertinemment que les Canadiens comprennent que sont inacceptables les incidents survenus en Somalie et où des Somaliens ont été tués par des Canadiens.

Nous savons aussi, comme mes collègues ne l'ignorent pas, qu'il y a déjà eu au Canada des procès pour meurtre où plus de trois personnes, parfois cinq et même dix ont été tuées. Ces procès ont duré des mois et non des années. J'estime que les Canadiens qui comprennent ce qui est important en ce qui concerne les forces canadiennes reconnaissent que le gouvernement devait prendre une décision après trois prolongations et fixer une date finale à l'enquête.

Je voudrais faire remarquer également aux députés que, tout récemment, une autre enquête menée dans une province sur une question d'une grande importance a été prolongée. Quand la province en cause a accordé un délai supplémentaire à l'enquête, elle a aussi fixé une date finale pour le dépôt du rapport.

(1045)

Je pense que ce gouvernement était sensiblement dans la même situation que nous. Il ne voulait pas, des années plus tard, un compte rendu historique des événements et des raisons pour lesquelles il était survenu. Il voulait pouvoir apporter des solutions aux problèmes avec lesquels il devait composer.


7827

Nous avons, par différents moyens, expliqué aux Canadiens nos inquiétudes quant aux événements de la Somalie. Il faut bien le reconnaître, d'autres événements montrent clairement qu'il faut prendre sérieusement en main l'avenir des Forces canadiennes.

J'ai été très heureux lorsque l'ex-juge en chef de la Cour suprême maintenant à la retraite, Brian Dickson, a accepté d'examiner le système de justice militaire. Ce qui est si épouvantable à propos des incidents survenus en Somalie et des meurtres brutaux qui y ont été commis-et Dieu sait que rien ne saurait excuser cela-c'est que, par la suite, le système n'a pas réagi convenablement, ce qui est tout aussi sinon plus troublant.

Le système d'enquête et le système de justice militaire n'ont pas réagi d'une manière satisfaisante. Nous avons constitué un groupe d'éminents Canadiens comprenant notamment le juge Dickson, J. W. Bird et le général Belzile et nous les avons habilités à présenter au gouvernement des recommandations globales et détaillées sur la réforme du système de justice militaire ainsi que des observations sur la façon d'exercer le mieux possible la capacité d'enquête dont dispose actuellement la police militaire.

En outre, nous ferons rapport au premier ministre et aux Canadiens de l'obligation de rendre compte des Forces armées canadiennes, du système de promotions et de diverses questions sur la mentalité et l'éthique militaires.

Qui plus est, le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants doit examiner ce que je décris comme étant les besoins des membres des Forces armées canadiennes, les avantages, les systèmes de soutien pour les familles, les besoins concernant le logement et toutes les autres considérations socio-économiques des membres des Forces armées canadiennes.

Nous avons pris toutes ces mesures ces derniers mois, en réponse à une vaste gamme de défis que doivent relever les Forces canadiennes. J'ai une confiance énorme dans les Canadiens et dans les Forces canadiennes, mais j'ai aussi beaucoup de respect pour cette institution.

Voilà pourquoi j'espère que, par le biais de nos travaux aujourd'hui et dans les semaines à venir, les députés nous présenteront des propositions concrètes sur ce qu'il conviendrait de faire, à leur avis, avec les Forces canadiennes: au lieu de simplement préconiser la poursuite d'une enquête sur des incidents que nous connaissons très bien, il faudrait qu'ils nous disent concrètement s'ils croient, par exemple, au financement des Forces canadiennes.

Sont-ils en faveur des niveaux que nous avons établis pour les effectifs, soit 60 000 membres dans les forces régulières et 30 000 dans la réserve? Sont-ils pour le rééquipement des Forces canadiennes? Croient-ils que nous devrions dépenser de l'argent pour nous assurer que nous avons une armée apte au combat et qui représente bien le Canada dans le monde lorsque nos alliés nous demandent de prendre part à différents types de missions?

Sont-ils prêts à dire aux hommes et aux femmes qui font partie des Forces armées canadiennes quelle est leur position? Il serait important qu'ils nous la fassent connaître aujourd'hui. S'ils étaient élus, ressusciteraient-ils l'enquête sur la Somalie? Sont-ils sérieux lorsqu'ils disent qu'il est dans l'intérêt des forces canadiennes de poursuivre l'enquête sur les événements de Somalie ou est-il préférable de passer à autre chose en tirant les leçons de ces événements?

Cela est très important parce que nous parlons du moral des Forces armées canadiennes comme s'il suffisait de faire ici et ailleurs des déclarations sur certains aspects particuliers de l'affaire pour aider.

J'ai le grand privilège d'être le ministre de la Défense nationale depuis octobre dernier. Je me suis rendu dans presque toutes les bases militaires du Canada et j'ai voyagé avec les troupes postées en Bosnie. Je peux dire sans équivoque, en m'appuyant sur mes observations personnelles et également sur ce que m'ont dit mes collègues de l'OTAN et du NORAD, aux États-Unis, que tous les Canadiens peuvent tirer fierté sans aucune honte du rôle, de la compétence et du professionnalisme des Forces canadiennes.

Il ne fait aucun doute que les incidents survenus à Petawawa, à Val-Cartier, en Somalie et, plus récemment, à Haïti suscitent de sérieuses inquiétudes. Les Forces canadiennes comptent des dizaines de milliers d'hommes et de femmes. Dans tout organisme de cette taille au Canada, dans toute collectivité comptant autant de gens, il y a chaque jour des incidents inacceptables et intolérables. Des crimes sont commis, des agressions, des abus de privilèges, des abus de pouvoir ou de fonctions. Ces choses se produisent partout, même dans le monde du hockey professionnel. Je ne veux absolument pas dire que nous essayons de diminuer l'importance de ce qui s'est produit ou d'occulter le caractère totalement inacceptable de ces actes.

(1050)

Les Canadiens sont justes. Ils comprennent et reconnaissent que les Forces canadiennes ne doivent pas être jugées différemment ou plus sévèrement que tout autre groupe du pays. Les militaires travaillent dans des conditions très différentes. Très peu de Canadiens s'engagent à mettre leur vie en jeu. C'est pourtant ce que font les militaires. Ils subissent un entraînement pour apprendre à faire des choses qui ne sont pas très agréables. Ils doivent aussi apprendre à maintenir des relations correctes entre eux et avec les populations qu'ils vont défendre.

Évidemment, les Canadiens n'accepteront pas pour argument le fait que des choses dont on entend fréquemment parler aujourd'hui et qui auraient été inacceptables ou inouïes autrefois vont réduire à néant plus de 125 ans de service autour du monde. C'est certain que les Canadiens qui ont à coeur de rester justes, ainsi que les députés à la Chambre, comprennent que les Forces canadiennes doivent relever des défis que peu d'entre nous accepteraient, à commencer par moi, que ce soit en Bosnie ou en Haïti.


7828

J'ajoute une chose à l'intention de mes collègues. Peu importe ce qui s'est passé en Somalie, nous devons nous demander qui le ministre de la Défense nationale pourrait chercher à protéger. Qu'aurait-il pu se produire de plus odieux que le fait d'avoir torturé et abattu des jeunes Somaliens? De quelle façon le fait d'imposer le bâillon à l'enquête sur la Somalie pourrait-il nous permettre, à moi ou au gouvernement, de nous faire du capital politique?

On a prétendu que le sous-ministre de la Défense nationale, au moment de l'incident en Somalie, avait employé diverses tactiques pour tenter de confondre la ministre de la Défense nationale de l'époque, qui est ensuite devenue première ministre du Canada, et qui a laissé à cette personne le poste de sous-ministre de la Défense nationale.

J'espère que tous mes collègues seront bien clairs en nous faisant part de leurs opinions sur ce que la Chambre, le gouvernement et le Canada devraient faire pour les hommes et les femmes des Forces canadiennes, et sur ce que nous devrions faire si jamais des incidents comme celui-là se produisaient de nouveau-et Dieu sait que nous espérons tous que cela ne se reproduira jamais. C'est ce que nous devons établir, et c'est le défi qui nous attend aujourd'hui, en ce qui concerne les Forces canadiennes et leur avenir.

[Français]

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos du ministre qui nous disait qu'il était d'abord et avant tout un député; c'est très bien qu'il soit venu participer à ce débat.

Le ministre disait, le 9 octobre 1996: «Nous voulons faire toute la lumière sur tout ce qui s'est passé entourant la situation en Somalie. Je suis certain que tous les députés de cette Chambre-il devait s'inclure-comprennent qu'on ne doit pas s'ingérer dans les travaux de la Commission d'enquête.» Or, décider de la fin des travaux, n'est-ce pas s'ingérer?

De notre côté, on demande à ce ministre et à ce gouvernement libéral de prendre la décision de prolonger pour quelques mois les travaux. Il nous parle de cinq ans, de dix ans. Il nous parle d'un document qui serait historique. Ce n'est pas ce qu'on demande. On demande tout simplement de prolonger pour permettre à la Commission d'entendre des témoins qui ne seront pas entendus, des témoins qui, nous le pensons, sont la clé de toute l'affaire.

Aujourd'hui, le ministre, bien calme, comme il l'est toujours, nous a parlé comme un expert et a tenté de mettre le couvercle sur la marmite, doucement. Si vous avez remarqué, ce n'est pas ainsi tous les jours, mais aujourd'hui, c'est comme ça. Il a tenté doucement, délicatement, il a expliqué, il a parlé de la base, il a essayé de faire vibrer la base, de nous faire vibrer là-dessus.

(1055)

On sait que les gens au sein des forces canadiennes travaillent professionnellement; nous, de l'opposition officielle, on n'en est pas à s'attaquer à cela. Ce qu'on veut savoir, c'est qu'il semble que ce soit en haut que ce soit pourri. De la façon que cela fonctionne, on saura ce qui s'est passé avant et pendant, mais, malheureusement, on ne saura pas ce qui s'est passé après, on ne saura pas le camouflage que tente de faire ce gouvernement, et c'est ce qui nous inquiète. C'est ce qui inquiète les Canadiens actuellement.

M. Young: Monsieur le Président, pour donner un peu de précision au sujet de la façon dont on pourrait camoufler tout ce qui s'est passé, comme je le disais antérieurement, le gouvernement a décidé de prolonger le mandat de la Commission d'enquête sur la Somalie jusqu'au 28 juin 1996, puis jusqu'au 31 mars 1997 et, finalement, jusqu'au 30 juin 1997.

L'honorable député est-il convaincu? A-t-il une garantie quelconque qu'une prolongation de trois, six, ou neuf mois supplémentaires permettrait d'en arriver à un point où les trois commissaires, ainsi que les avocats représentant tous les intervenants, s'assoiront tous en disant: «Oui, on est d'accord. Tout a été fait. On a maintenant fait la lumière.»

Ce qui est intéressant dans tout cela, c'est qu'environ 150 000 documents ont déjà été présentés à la Commission d'enquête, deux millions de pages, au-delà de 100 témoins ont été entendus.

Je crois que les Canadiens et les Canadiennes qui sont véritablement intéressés dans l'avenir des forces canadiennes savent très bien ce qui s'est passé en Somalie, et ils veulent s'assurer que les forces canadiennes puissent fonctionner de façon efficace et professionnelle à l'avenir. Pour faire cela, il ne s'agit pas de répéter la litanie des problèmes, c'est de passer à l'action avec des solutions concrètes.

[Traduction]

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais poser une question au ministre concernant la responsabilité ministérielle, notamment à l'égard du mépris des autorités civiles qui règne au sein du quartier général des forces armées.

Shidane Arone a été torturé et tué le 16 mars. Le 18 mars, soit deux jours plus tard, le Chef d'état-major de la Défense, John Anderson, et le sous-ministre, Bob Fowler, informent la ministre de l'époque qu'un incident malheureux s'est produit en Somalie.

La ministre de la Défense de l'époque, Kim Campbell lit dans la revue Maclean's que la possibilité d'une intention criminelle avait été évoquée le 18 mars, le jour même où on lui avait transmis ces informations sans lui faire part de l'intention criminelle. Ce n'est qu'en mars. . .

Le vice-président: Le député pourra reprendre sa question après la période des questions. Nous procédons maintenant aux déclarations des députés.

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7829

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

M. BILL KERIENS

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, le lundi 10 février, je me rendrai à Brandon, au Manitoba, pour assister à l'audience du céréaliculteur Bill Keriens. Son crime consiste à avoir franchi la frontière pour vendre son blé. Par la suite, il sera condamné à payer une amende pour ce crime et sera amené devant le tribal chaîne aux pieds et menottes aux poignets.

Je me pose la question: La punition est-elle proportionnée au crime? Nous n'avons qu'à examiner les répercussions du projet de loi C-41. Il visait les auteurs de crimes mineurs qui ne posent aucune menace à la collectivité, mais le fait est qu'il a été appliqué à des cas de trafic de drogues, d'agression sexuelle, de vol de banque et d'autres types d'agression. Leurs auteurs ne reçoivent parfois pour toute punition q'une assignation à résidence.

Il est évident qu'il nous faut déterminer qui constitue un danger pour la société et que la punition doit être proportionnée au crime commis. Ce céréaliculteur ne présente aucun danger pour la société et ne mérite certainement pas d'être menacé d'un séjour en cellule avec d'autres criminels, comme ce fut le cas d'Andy McMechan, un autre céréaliculteur.

Pourquoi la loi punit-elle si sévèrement des citoyens respectueux de la loi qui ne font que lutter pour la reconnaissance du principe de liberté, alors que des criminels violents circulent en toute liberté?

* * *

[Français]

LE CHÔMAGE

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, malgré les beaux discours et les promesses d'un avenir radieux, l'année 1997 débute mal pour les Québécois et les Canadiens. La morosité est toujours présente sur le marché. Alors que le Canada compte 1,5 million de chômeurs, seulement 500 nouveaux emplois ont été créés en janvier. Et il y a toujours moins d'emplois pour les jeunes.

(1100)

Bon nombre de nouveaux emplois créés en 1996 sont le fait des travailleurs indépendants. Pourtant, le gouvernement ne fait rien pour les aider. La nouvelle réforme de l'assurance-chômage prétend assurer une couverture plus grande pour les travailleurs et travailleuses, mais ce n'est qu'un leurre. En réalité, ces nouveaux emplois qui émergent, les emplois autonomes, ne sont protégés ni par l'assurance-chômage, ni par la quasi-totalité des programmes de la sécurité sociale.

Les libéraux se sont fait élire avec le slogan «jobs, jobs, jobs». La réalité, c'est qu'il y a «no jobs, no jobs, no jobs». Le jour où les Canadiens et les Québécois réaliseront que la situation est un désastre, leur verdict sera sévère et ce gouvernement en paiera le prix.

[Traduction]

LE DÉFICIT

M. John Finlay (Oxford, Lib.): Monsieur le Président, nous gagnons la bataille contre le déficit. Qui aurait pensé il y a à peine trois ans que le déficit serait maintenant réduit de plus de 20 milliards de dollars? Cette réduction du déficit fait que notre économie est plus forte et que les taux d'intérêt n'ont jamais été aussi bas.

Alors que le ministre des Finances prépare son budget, je l'exhorte à poursuivre dans la même voie. Nous devons éliminer le déficit le plus tôt possible, de façon raisonnable. Ce n'est pas le temps maintenant de procéder aux réductions d'impôt irréfléchies proposées par le Parti réformiste, qui ralentiraient le rythme de réduction du déficit ou compromettraient des programmes essentiels.

L'élimination du déficit garantira l'avenir économique de nos enfants et de nos aînés.

Je suis fier d'avoir appuyé les objectifs de réduction du déficit du ministre des Finances au cours des trois dernières années et j'attends avec impatience qu'il présente un autre budget fort réussi, le 18 février.

* * *

LE PROGRAMME D'INFRASTRUCTURE

Mme Marlene Cowling (Dauphin-Swan River, Lib.): Monsieur le Président, le programme canadien d'infrastructure est, sans aucun doute, un succès. Il suffit de se pencher sur certaines statistiques qui sont assez éloquentes à ce sujet.

Ainsi, dans ma circonscription, Dauphin-Swan River, on a investi plus de 9 millions de dollars. Les projets en question ont inclus des travaux de réfection des routes, l'installation de systèmes d'adduction d'eau, le remplacement de caniveaux et la construction de ponts.

Le programme d'infrastructure profite énormément aux régions rurales. En effet, presque 62 p. 100 de ces projets s'adressaient à ces régions.

Pour commercialiser nos produits et services localement et à l'étranger un autre programme s'impose afin que nos collectivités continuent de se développer.

Le programme d'infrastructure contribue à renforcer l'économie rurale au Canada, notamment dans ma circonscription, Dauphin-Swan River, et c'est ce à quoi je travaille.

Le programme d'infrastructure est, sans aucun doute, une grande réussite.

* * *

LES TRANSPORTS

M. Vic Althouse (Mackenzie, NPD): Monsieur le Président, j'ai été mis au courant aujourd'hui d'une chose qui se produit depuis quelques semaines.


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On est en train d'enlever la deuxième voie du Canadien Pacifique entre Winnipeg et Thunder Bay. Il s'agissait d'un merveilleux programme d'infrastructure qui a fait la fierté de nombreux gouvernements précédents et qui était destiné à accélérer la livraison du grain, de la potasse, du soufre, etc. On constate également la détérioration des terminaux à Thunder Bay et la démolition de certains d'entre eux. Cela faisait partie du grand programme d'infrastructure dont le pays était si fier. La voie maritime est maintenant devenue inutile. Des fonctionnaires du ministère des Transports disent qu'il s'agit d'un merveilleux parc du patrimoine.

Si le gouvernement s'intéressait vraiment à la création d'emplois et aux infrastructures, il aurait pris davantage de précautions avec ses autres programmes de déréglementation et de signature d'accords commerciaux internationaux qui ont rendu ces investissements dans l'infrastructure tout à fait inutiles.

* * *

[Français]

LA SEMAINE DU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL

M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, la Semaine du développement international nous donne l'occasion de réfléchir au rôle unique que joue le Canada sur la scène internationale dans le domaine du développement international.

Les principaux acteurs du développement sont les pays en développement eux-mêmes. Et c'est au sein de leur gouvernement, de leurs organisations bénévoles, de leurs institutions et de leurs collectivités que se trouvent les véritables spécialistes du développement.

Mais en collaborant avec ces partenaires, les Canadiens ont fait également leur part. Du Pérou au Zimbabwe, les technologies et le matériel de communication canadiens ont sorti maintes collectivités de leur isolement. En prêtant un appui dans le domaine juridique, le programme canadien a aidé des pays comme Haïti et l'Afrique du Sud à élaborer des lois qui fassent respecter les droits de la personne et la primauté du droit.

À notre façon bien canadienne-qui respecte les pays et les cultures et vise les résultats concrets-nous avons aidé les pays en développement. La Semaine du développement international est l'occasion de célébrer ces réalisations et d'anticiper les réussites à venir.

* * *

[Traduction]

LE SERVICE DE TRAVERSIERS

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Monsieur le Président, les îles Christian et Georgina sont habitées par les bandes indiennes Ojibway de Beausoleil et de Georgina. Des centaines de bungalows appartenant à des non-indiens sont aussi construits sur ces îles qui représentent une destination pour des milliers de visiteurs.

(1105)

[Français]

En 1995, le gouvernement fédéral et le gouvernement de l'Ontario étaient convenus de financer ensemble le remplacement des traversiers desservant ces îles, une amélioration essentielle au développement économique. Le gouvernement conservateur de l'Ontario refuse maintenant d'honorer ses engagements bien que le secteur des transports soit de compétence provinciale.

La situation n'est pas sans rappeler la décision unilatérale et arbitraire du gouvernement de l'Ontario de revenir sur l'entente qu'il avait conclue avec les Premières Nations au sujet de la distribution des recettes du Casinorama.

[Traduction]

Les accords doivent être respectés. Malheureusement, il nous est arrivé assez souvent dans le passé de ne pas honorer notre parole, mais, dans ce cas-ci, c'est un outrage puisque l'encre à peine sèche, nous mettons ces accords de côté unilatéralement et sommairement.

* * *

[Français]

LES PARENTS D'ENFANTS MALADES

M. Maurice Dumas (Argenteuil-Papineau, BQ): Monsieur le Président, je veux aujourd'hui rendre hommage aux parents d'enfants malades, car il nous arrive souvent d'oublier leur courage et leur dévouement.

La famille Séguin, de Saint-André-d'Argenteuil, est un exemple d'amour, de courage et de dévouement. Deux de leurs enfants, Sylvie et Patrick, sont atteints de dystrophie musculaire. Pour les parents, c'est un travail à temps plein. Patrick n'a plus l'usage de ses membres supérieurs. Son état requiert soins et assistance permanente car l'amyotrophie spinale entraîne une dégénération sévère des tissus musculaires.

Sylvie, quant à elle, est un peu plus autonome, bien que sa condition pulmonaire soit extrêmement fragile. M. et Mme Séguin ont investi temps, énergie et argent. Sans l'aide de l'Association de la dystrophie musculaire, il leur aurait été impossible d'acheter tout l'équipement nécessaire.

Donner aux associations et fondations visant à aider les gens aux prises avec la maladie, c'est reconnaître leur courage.

* * *

[Traduction]

LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, la démocratie fonctionne bien seulement quand les électeurs sont bien informés et connaissent parfaitement les choix qui s'offrent à eux. Je déplore donc la multitude de mauvais renseignements qui circulent sur les réformistes. Je suis profondément peiné quand on m'étiquette et m'attribue des préjugés que je n'ai pas.

En tant qu'employeur, j'ai embauché des gens en me fondant sur leur compétence et leur mérite. Certains seraient considérés comme étant des membres de minorités visibles ici, à Ottawa, mais moi, je ne faisais pas de distinction. J'ai enseigné à des élèves dont la peau pouvait avoir une couleur différente ou qui s'exprimaient avec des


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accents différents, mais je ne faisais pas de distinction. Dans notre famille, il y a des personnes venant de milieux raciaux différents, mais nous les aimons et nous en prenons soin sans faire de distinction. Ma femme et moi avons été particulièrement fiers du fait que notre fils et notre bru travaillent comme bénévoles au Rwanda. Ils se sont occupés de 400 beaux enfants dont les parents avaient été tués pendant l'horrible conflit là-bas.

Je suis devenu membre actif du Parti réformiste parce que j'ai été attiré par sa politique d'égalité envers tous les concitoyens, peu importe leur race. Je crois qu'il faut être charitable et bon. Je voudrais bien que mes collègues à la Chambre me traite d'une façon aussi charitable.

* * *

LE CODE DU BÂTIMENT DE L'ONTARIO

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement ontarien examine la possibilité d'apporter au Code du bâtiment de l'Ontario des modifications qui réduiraient du tiers l'isolation dans les maisons neuves. Cette proposition bien mal inspirée alourdira les frais de chauffage et de climatisation des propriétaires et fera augmenter les émissions de dioxyde de carbone dans l'atmosphère, aggravant ainsi le problème des changements climatiques.

Cette proposition à courte vue est préconisée par la Ontario Home Builders' Association. Au lieu de céder à ces instances, le gouvernement ontarien devrait défendre les intérêts des futurs propriétaires de maison et de l'environnement en veillant à ce que le code soit plus exigeant sur le plan de l'efficacité énergétique et plus respectueux à la fois de l'environnement et des consommateurs.

* * *

LES PÊCHES

M. Derek Wells (South Shore, Lib.): Monsieur le Président, la Nouvelle-Écosse est le chef de file dans l'industrie de la pêche au Canada. Ma circonscription, celle de South Shore, dépend énormément de la pêche et des emplois qui en découlent. Je travaille avec cette industrie depuis plus d'un an pour établir quels sont les effets des frais imposés aux usagers. Cette semaine, le Comité permanent des pêches et océans a recueilli des témoignages sur les effets cumulatifs de ces frais.

Hier, le président du Conseil du Trésor a annoncé qu'un comité multisectoriel avait été mis sur pied et chargé d'étudier la question. L'objectif visé est d'alléger le fardeau que ces frais représentent pour les entreprises.

Je félicite le ministre de s'être ainsi engagé à revoir les frais relatifs à la pêche et autres. Il a tout mon soutien.

LE COMMODORE DE L'AIR LEN BIRCHALL

M. Peter Milliken (Kingston et les Îles, Lib.): Monsieur le Président, sir Winston Churchill a honoré le commodore de l'air Len Birchall du titre de «sauveur du Ceylan» pour avoir averti les défenseurs de l'île d'une attaque imminente de la part des Japonais. Le 4 avril 1942, son avion a été abattu après qu'il eut repéré la flotte japonaise et envoyé son message par radio. Il a été prisonnier des Japonais durant toute la guerre.

(1110)

Mercredi, Len Birchall a reçu des mains de Son Excellence le Gouverneur général la cinquième agrafe à sa décoration des Forces canadiennes. Il est le premier Canadien à avoir été ainsi honoré. Cette agrafe reconnaît 62 années de loyaux services au sein des Forces armées canadiennes.

Comme je suis son député, j'ai eu l'honneur d'assister à cette cérémonie. Les Canadiens lui rendent hommage pour ses services envers son pays, pour son patriotisme et pour son courage. Len Birchall est un grand héros canadien.

* * *

[Français]

LE GARDIEN DE BUT PATRICK LALIME

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, au nom de la population de Saint-Bonaventure et de toute la circonscription de Drummond, je veux aujourd'hui rendre hommage à l'un des nôtres dont le nom est maintenant synonyme de courage, talent et succès: Patrick Lalime.

Le 15 janvier dernier, le gardien de but, recrue des Pingouins de Pittsburgh, a éclipsé le record du légendaire Ken Dryden en demeurant invaincu lors de ses 16 premiers matchs dans la Ligue nationale de hockey, dont trois jeux blancs en prime.

Ainsi, il est allé au bout d'un rêve qu'il caressait sans jamais perdre espoir, en investissant toute l'ardeur possible dans son travail. Il a gravi les échelons du succès un à un, avec courage et confiance, dans l'objectif qu'il s'était fixé. L'exploit de Patrick nous rappelle qu'on peut atteindre notre but si on y met détermination et effort.

Je souhaite à Patrick Lalime une longue et fructueuse carrière dans la Ligue nationale. Patrick, on est fiers de toi.

* * *

[Traduction]

LES LANGUES OFFICIELLES

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Monsieur le Président, il y a plus de 30 ans, le gouvernement libéral Pearson a changé le drapeau du Canada et créé la Commission sur le bilinguisme et le biculturalisme. Par la suite, Pierre Trudeau a mené durant plusieurs années l'attaque avec la Loi sur les langues officielles, qui a été un

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facteur de division. Tous les secteurs ont été forcés de succomber les uns après les autres à la révolution linguistique: la fonction publique, le Parlement, les Forces armées, les sociétés d'État et, oui, même la GRC.

Au fil des années, les milliards de dollars dépensés pour cette cause ont alourdi la dette fédérale de 50 milliards de dollars, tout cela dans le but de promouvoir l'unité nationale, sans même parler du service hebdomadaire de limousine avec chauffeur pour les déplacements du commissaire aux langues officielles entre Ottawa et Montréal, gracieuseté des contribuables canadiens.

Voilà maintenant que les jumeaux libéraux du Québec parlent d'accorder la société distincte aux séparatistes. Grands dieux, quoi d'autre vont-ils donner aux séparatistes pour les garder au Canada: le reste du pays?

Le traitement que mérite ce dilemme distinctement canadien est un nouveau départ, le nouveau départ réformiste.

* * *

[Français]

ÉQUIPE CANADA

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.): Monsieur le Président, la compagnie FRE Composites Inc., de Saint-André-Est, dans la région d'Argenteuil, faisait partie de la dernière mission d'Équipe Canada en Asie.

Le passage d'Équipe Canada en Thaïlande aura été profitable pour cette entreprise québécoise qui emploie actuellement 85 personnes. Elle a signé, avec un partenaire thaïlandais, un accord pour la construction d'une installation de production en coentreprise à Bangkok. FRE Composites fera profiter la nouvelle entreprise de sa technologie de fabrication et de ses compétences. Le projet est évalué à quatre millions de dollars.

Pour cette compagnie québécoise, Équipe Canada aura permis d'ouvrir les portes nécessaires à l'exportation de sa technologie d'avant-garde. Voilà, chers collègues du Bloc, un autre exemple des avantages de faire partie de l'équipe canadienne.

* * *

[Traduction]

L'ORDRE DU MÉRITE MILITAIRE

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.): Monsieur le Président, mercredi, le gouverneur général et commandant en chef des Forces armées canadiennes, Roméo LeBlanc, a décoré 52 membres des forces régulières et de réserve de l'Ordre du mérite militaire, nous rappelant ainsi que, en dépit des problèmes actuels, les militaires canadiens se sont distingués non seulement dans des conflits armés, mais encore dans des missions de maintien de la paix et dans des opérations de sauvetage.

Le commodore de l'air de 81 ans, Leonard Birchall, était au nombre des récipiendaires de l'Ordre du mérite militaire. Il est aussi le premier Canadien à recevoir la Cinquième agrafe de la décoration des forces canadiennes, représentant 62 années de service militaire honorable pour le Canada.

Pendant qu'il était en patrouille de reconnaissance, le 4 avril 1942, le commandant d'aviation Birchall a aperçu des navires japonais qui s'apprêtaient à mener une attaque surprise contre le Ceylan. Il a alerté la flotte britannique, mais son avion fut abattu et il fut fait prisonnier par les Japonais.

En tant que plus haut gradé parmi les prisonniers, il s'est constamment efforcé de protéger ses codétenus contre les actes de brutalité de leurs geôliers, mais n'y a pas toujours réussi. Ses efforts lui ont valu d'être décoré de la Médaille de l'empire britannique pour bravoure et d'être qualifié de sauveur du Ceylan par Winston Churchill.

Je suis persuadé que tous les députés voudront féliciter avec moi Len Birchall.

* * *

(1115)

[Français]

LE TRAVAIL AU NOIR

M. Mark Assad (Gatineau-La Lièvre, Lib.): Monsieur le Président, il est temps que les gouvernements, à tous les niveaux, prennent des mesures pour contrer le fléau montant du travail au noir. Cette hausse inquiétante est due en grande partie à la surréglementation imposée par les gouvernements eux-mêmes, les syndicats et autres organismes impliqués.

Toute cette réglementation a un prix à payer par toute la population, directement et indirectement, et surtout par le consommateur qui trouve onéreux les tarifs qui lui sont imposés actuellement. Ce n'est donc pas surprenant et c'est l'évidence même que ce fléau du travail au noir va s'aggraver.

Il est donc temps d'apporter des réformes qui amèneraient le travail au noir à être désavantageux, non seulement pour le travailleur, mais aussi pour le consommateur. Et une des premières mesures serait que tous les soumissionnaires qui obtiennent des contrats gouvernementaux se conforment à la loi et soient soumis à une vérification obligatoire.

______________________________________________


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QUESTIONS ORALES

[Français]

LA CULTURE

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre et ministre du Patrimoine.

Vingt-deux groupes du secteur culturel du Canada et du Québec, représentant 900 000 travailleurs et travailleuses, ont d'une manière unanime exigé du gouvernement canadien qu'il maintienne et renforce les mesures de protection culturelle actuellement en place. Cette demande fait suite à la déclaration du ministre du Commerce international de faire table rase des mécanismes de protection culturelle élaborés depuis 30 ans.

Hier, la vice-première ministre nous disait qu'il y avait unanimité au Cabinet sur la question culturelle. Si tel est le cas, comment explique-t-elle les déclarations de son collègue au Commerce international qui affirmait que les règles de propriété canadienne et de


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contenu canadien sont des obstacles au développement culturel au Canada et au Québec?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je pense que lorsqu'on répond, de façon unanime, aux revendications des groupes culturels, ce matin, c'est en disant que nous voulons faire tout notre possible, non seulement pour renforcer la protection culturelle qui existe, mais pour l'améliorer pour le XXIe siècle.

On sait qu'on vit dans une période bouleversante de changements, et on veut être équipés et à l'avant-garde des nouvelles possibilités culturelles, tel que nous l'avions quand nous étions le premier pays à établir le CRTC.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, nous étions peut-être le premier pays à établir le CRTC, mais on est peut-être aussi le premier pays à s'être vendu à la miette, quand on voit les cas de Ginn Publishing, Power DirecTv et DMX.

Le passé étant garant de l'avenir, dit le vieux dicton, comment la vice-première ministre peut-elle espérer qu'on puisse la croire lorsqu'elle affirme que son gouvernement défend les souverainetés culturelles du Québec et du Canada?

[Traduction]

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, la question de la députée mérite une réponse très sérieuse, car la culture canadienne nous offre deux possibilités: nous raconter notre histoire, ce qui est essentiel pour la survie de notre pays, et créer près d'un million d'emplois canadiens à valeur ajoutée basés sur les connaissances.

Lorsque nous avons formé le gouvernement, il y a trois ans et demi, nous avons promis de faire tout notre possible pour créer des emplois au Canada pour les Canadiens. Une des plus grandes réussites de la dernière décennie dans le domaine de la création d'emplois se situe dans le secteur culturel. Certes, nous allons collaborer très étroitement avec tous les ministères pour nous assurer non seulement que le nombre des emplois culturels continuent de croître au Canada, mais surtout que les Canadiens aient l'occasion de se raconter des histoires canadiennes.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, vraiment, je crois que la vice-première ministre vit dans la science-fiction. Son gouvernement n'a pas créé de «jobs, jobs, jobs» dans le domaine culturel. Il a «coupé, coupé, coupé» des jobs dans le domaine culturel, avec tous les crédits qu'il a enlevés, entre autres à l'ONF, à Téléfilm et à Radio-Canada. Il y a des limites quand même.

(1120)

Quand la secrétaire américaine se réjouit des déclarations du ministre du Commerce international, il y a lieu de s'inquiéter.

La ministre du Patrimoine semble être la seule, au Cabinet, à croire qu'il faut adopter des mesures pour protéger et développer les cultures canadienne et québécoise. Peut-elle nous garantir dans cette Chambre qu'elle y consacrera toutes ses énergies?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Oui, monsieur le Président.

* * *

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe, BQ): Monsieur le Président, on prendra la ministre au mot. Puisqu'elle y consacrera ses énergies, je lui rappelle que les quatre ex-présidents de Radio-Canada, Al Johnson, Pierre Juneau, Tony Manera et Laurent Picard, et en plus, le commissaire aux langues officielles, affirment que Radio-Canada n'a plus les moyens de remplir son mandat. Le gouvernement libéral a réduit les crédits parlementaires de 414 millions depuis son élection.

La ministre du Patrimoine peut-elle nous expliquer la différence qu'il y a entre le Parti réformiste qui veut couper les budgets du tiers, et son propre gouvernement qui a déjà coupé les budgets de Radio-Canada du tiers?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, il est faux de prétendre qu'on a coupé les budgets de Radio-Canada du tiers. Deuxièmement, on a suivi les conseils de la députée de Rimouski-Témiscouata qui déclarait, le 16 mars 1995, et je cite: «Si on veut faire des coupures, il y a des coupures magistrales à faire à Radio-Canada.» Donc, on a justement suivi les conseils de la députée de Rimouski-Témiscouata.

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, l'article du journal titrait: «Crise sans précédent à Radio-Canada». Dois-je rappeler à la ministre les propos de son collègue de la Défense nationale qui disait que Radio-Canada n'a plus sa raison d'être.

Des voix: Oh, oh!

M. Leroux (Richmond-Wolfe): Concernant les postes coupés, la ministre du Patrimoine n'a aucune considération pour Radio-Canada et ses employés, compte tenu que le 15 décembre dernier, elle déclarait que seulement 19 personnes avaient perdu leur poste à CBC, alors qu'on calcule qu'il y a un total de 4 000 postes de coupés.

Si la ministre a vraiment à coeur Radio-Canada et si elle fait l'unanimité au Cabinet, annulera-t-elle les 200 millions de compressions prévues pour l'an prochain?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, les déclarations du député sont fausses. Quand on parle de réductions, si le député est vraiment honnête quand il parle de coupures, pourquoi ne va-t-il pas parler à sa collègue, la ministre de la Culture et des Communications du Québec, qui a coupé de moitié les emplois de Télé-Québec. En 1995, il y avait 580 employés; en 1996, il n'est reste que 329.


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C'est évident qu'on a pris des décisions difficiles, mais on a fait moins de coupures et abolis moins de postes que ce qu'a fait son honorable collègue, la ministre de la Culture et des Communications du Québec, à Télé-Québec.

* * *

[Traduction]

LES ENQUÊTES PUBLIQUES

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, une tendance troublante se fait jour en ce qui concerne la façon dont le gouvernement s'occupe des enquêtes publiques sur des méfaits causant la mort.

Quand sont survenus les décès causés par le sang contaminé et le camouflage des meurtres en Somalie, les libéraux étaient très impatients d'enquêter sur les fautes des conservateurs. Toutefois, quand l'enquête a commencé à s'approcher d'un peu trop près du sommet au goût des libéraux, le gouvernement a commencé à faire traîner les choses en élevant des contestations judiciaires, en falsifiant des documents et en commettant de l'ingérence politique.

Dans le cas de l'enquête sur la Somalie, après avoir causé lui-même la moitié des retards, le gouvernement signifie aux membres de la commission qu'ils n'ont plus de temps.

Que fera le gouvernement pour veiller à ce que les Canadiens connaissent la vérité, toute la vérité et non pas seulement la vérité à la mode des conservateurs sur la tragédie du sang contaminé, le scandale de la Somalie et l'enquête bâclée sur les Airbus?

L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je pense qu'il va falloir que le chef du Parti réformiste se dépêche à exposer clairement son point de vue sur ce que devraient être les commissions d'enquête.

Comme je l'ai déjà dit à quelques reprises dans cette enceinte, il nous a demandé, au mois de septembre, de lui donner l'assurance que l'enquête sur la Somalie serait terminée avant les élections.

(1125)

En outre, il est très important que la population canadienne sache si le chef du Parti réformiste croit qu'une fois qu'une enquête est amorcée, elle doit continuer jusqu'à ce que tous ceux qui y participent, que ce soit les membres de la commission, les parties ou les avocats, aient la conviction que tout a été fait. Si telle est sa position, le chef du Parti réformiste devrait le dire parce que la recherche de la vérité dans un délai raisonnable a d'énormes répercussions pour les Canadiens et les enquêtes.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le ministre n'a pas répondu à ma question. Je crois plutôt qu'il a fait allusion aux observations que j'ai faites au premier ministre quand je lui ai demandé de veiller à ce que les résultats de l'enquête sur la Somalie soient rendus publics avant les prochaines élections; et il s'agit non pas de la moitié d'un rapport, ni d'un rapport de camouflage ni de disculpation, mais de résultats qui font toute la lumière sur les événements.

Le ministre comprend-il le sens du mot «résultats», c'est-à-dire les noms, les dates, les actes commis ou non commis par les ministres, libéraux et conservateurs, les sous-ministres, les généraux, les officiers supérieurs qui ont été liés de près ou de loin aux meurtres et à l'opération de camouflage en Somalie?

Comment le ministre peut-il garantir que toute la lumière sera faite au cours de l'enquête même si les retards causés par le gouvernement et l'ingérence politique empêchent les membres de la commission de la mener à terme?

L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, beaucoup de Canadiens s'intéressent de très près à toute cette affaire. Je veux simplement, je le répète, m'assurer que le chef du Parti réformiste a l'occasion d'expliquer, dans cette enceinte, son point de vue aux Canadiens.

Le 17 septembre, il a dit ceci: «Pour garantir qu'il n'y ait pas de camouflage dans l'enquête sur l'affaire somalienne, le premier ministre est-il disposé à donner à la Chambre l'assurance que les résultats de l'enquête seront intégralement rendus publics avant les prochaines élections?»

Il peut jouer avec les mots si cela lui plaît. Il sait qu'on ne peut pas forcer les membres d'une commission d'enquête à appeler des témoins qu'ils ne veulent pas entendre ni à rendre publics des résultats avant les élections si l'enquête n'est pas terminée. Les résultats sont donnés quand le travail est terminé, et c'est ce que nous avons demandé à la commission de faire.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le ministre, comme à l'accoutumée, a recours à des fanfaronnades et à des faux-fuyants pour éviter de répondre à la vraie question, qui est de savoir ce que le gouvernement a fait depuis le début dans les affaires de la Somalie, de la commission Krever et de l'enquête bâclée des Airbus.

Si je devais résumer la conception du gouvernement libéral de l'intégrité et de l'obligation de rendre des comptes-et c'est là où je veux en venir-, je dirais que nous sommes passés du livre rouge aux opérations de blanchiment. Les Américains ont eu le scandale de Whitewater; nous avons celui du blanchiment. Les réponses à la commission Krever: une tentative de blanchiment. Les réponses à l'enquête sur la Somalie: une tentative de blanchiment.

Pourquoi le gouvernement a-t-il choisi de blanchir les faits au lieu de dire la vérité aux Canadiens sur le scandale du sang contaminé ainsi que sur le camouflage des meurtres en Somalie?

L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, tôt ou tard, mon collègue, le chef du Parti réformiste, va devoir se brancher.

Voici un manuel rédigé par le Parti réformiste, qui sert de guide aux députés de cette formation durant la période des questions et renferme la stratégie du parti pour la présente session. À l'article 13 de ce manuel, on lit ceci: «Les questions ne doivent pas servir à obtenir des renseignements directs. C'est un usage primitif de la période des questions qui est maintenant derrière nous.»


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À quoi bon essayer de faire la lumière sur une question quand le chef du Parti réformiste dit qu'il ne veut pas obtenir de réponses directes? Le pire, c'est qu'il n'est même pas capable de poser une question directe.

* * *

[Français]

LE PROJET DE LOI C-46

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.

Hier, la Cour suprême a rendu un jugement sur la communication des dossiers de la victime dans un cas d'infraction d'ordre sexuel. À cinq contre quatre, les juges majoritaires ont ordonné l'arrêt des procédures dans une cause d'agression sexuelle parce qu'un centre d'aide aux victimes de viol a détruit le dossier de la victime auquel l'accusé voulait avoir accès pour sa défense.

Comment se fait-il que le projet de loi déposé en juin 1996 et qui voudrait restreindre justement l'accès aux dossiers des victimes de façon beaucoup plus sévère ne soit pas encore adopté? Il s'agit d'un projet de loi déposé depuis juin 1996, et encore aujourd'hui, le ministre n'a rien fait pour accélérer. Le ministre va-t-il, oui ou non, accélérer l'adoption de ce projet de loi?

(1130)

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme l'a dit le député, le projet de loi C-46 a été déposé au mois de juin dernier pour régler toutes les questions relatives aux dossiers privés pour les plaignants dans les causes criminelles devant les tribunaux.

Mardi dernier, nous avons commencé le débat en deuxième lecture du projet de loi C-46. J'espère que dans les jours et les semaines à venir, nous pourrons compléter le débat en deuxième lecture pour renvoyer le projet de loi au comité.

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, depuis juin 1996, la Cour suprême a eu le temps de rendre deux décisions au détriment des victimes. J'offre au ministre toute la collaboration de l'opposition officielle pour faire adopter le plus rapidement possible le projet de loi C-46.

Le ministre peut-il s'engager à faire adopter le projet de loi C-46 avant les prochaines élections, pour assurer la pleine protection des victimes d'infractions d'ordre sexuel?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je m'engage à faire tout ce que je peux pour assurer que le projet de loi soit adopté aussitôt que possible.

[Traduction]

LA COMMISSION KREVER

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, la vice-première ministre a laissé échapper hier que c'était mal d'avoir déchiqueté des documents de nature délicate du Comité canadien du sang. Il se trouve que ces documents portaient sur une période où un gouvernement libéral était au pouvoir, soit de 1982 à 1984.

Les victimes de cette tragédie veulent savoir pourquoi la personne qui a déchiqueté ces documents a été récompensée au moyen d'une généreuse prime de départ au lieu d'être punie, puisque ce qu'elle a fait était mal?

M. Joseph Volpe (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais bien que le député porte attention à ce que le gouvernement a fait jusqu'à maintenant.

Des voix: Oh, oh!

M. Volpe: Ce n'est pas important pour le Parti réformiste que le gouvernement fasse les choses comme il se doit. Le député saura que le ministère a suivi toutes les lignes directrices dictées. . .

Des voix: Oh, oh!

M. Volpe: Je vois que vous ne voulez pas la réponse, mais je vais vous la donner quand même. Vous aurez peut-être de la difficulté à l'avaler. Le ministère a collaboré avec la commission d'enquête et avec le commissaire en ce qui concerne l'accès à l'information et a respecté entièrement les règles dans tous les cas.

Le député saura aussi que le ministère avait en sa possession un rapport préliminaire le 3 décembre. Les députés comprendront que ce genre de rapport doit respecter les exigences de la Loi sur l'accès à l'information, qui dit que toutes les enquêtes doivent être confidentielles. Les personnes qui font l'objet d'un enquête ont le droit d'avoir une vie normale tant que le rapport final n'a pas été déposé.

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, le secrétaire parlementaire parle de collaboration avec la commission d'enquête. Écoutez bien ce qui s'est passé lorsque le commissaire a essayé d'aller au fond des choses au sujet du déchiquetage.

La première chose que le ministère a faite, c'est essayer de lui mettre les bâtons dans les roues au moyen d'une contestation judiciaire. Le deuxième chose que le ministère a faite, c'est mentir au commissaire en disant que les documents n'existaient même pas. Le commissaire doit maintenant retourner en arrière. Il cherche à savoir pourquoi on a essayé de lui mettre des bâtons dans les roues.

Les victimes veulent simplement savoir une chose: pourquoi le gouvernement cherche-t-il constamment à cacher la vérité non pas à moi, mais à elles?

M. Joseph Volpe (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, il est malheureux que le député d'en face se serve d'une situation aussi tragique à des fins politiques.

Il se souviendra-et s'il ne s'en souvient pas, d'autres députés s'en souviendront-que, premièrement, ce sont les libéraux qui ont réclamé la création de la commission Krever au départ. Deuxièmement, ils ont insisté pour que la commission ait accès à tous les renseignements. Troisièmement, le ministère a acquiescé à cette demande. Le ministre de la Santé a vu à ce que toutes les renseignements pertinents soient fournis.


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(1135)

On a donné suite immédiatement à toutes les recommandations préliminaires de la commission Krever qui concernaient le gouvernement fédéral. Lorsque le ministre de la Santé a reçu le rapport final, il a agi immédiatement. C'était le 21 janvier et, le 30 janvier, il a remis ce rapport final au solliciteur général.

Réveillez-vous! Il n'y a pas de camouflage.

* * *

[Français]

L'AÉROPORT PEARSON

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre.

Dans le dossier de l'annulation de la privatisation de l'aéroport Pearson, le ministre des Transports a confirmé que son gouvernement est prêt à conclure une entente hors cour avec les promoteurs de l'aéroport Pearson. Par ailleurs, on a appris que plus de quatre projets d'entente à l'amiable auraient été négociés entre les promoteurs et le fédéral, mais qu'ils ont tous été rejetés par le bureau du premier ministre.

Le gouvernement peut-il confirmer que l'entente hors cour qu'il négocie présentement secrètement avec les promoteurs de Pearson pourrait coûter entre 85 et 100 millions de dollars aux contribuables québécois et canadiens?

[Traduction]

L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, la question du député est fondée sur un certain nombre d'affirmations qui sont purement hypothétiques et souvent erronées.

Je puis donner au député l'assurance qu'il n'y a, à ma connaissance, aucune négociation actuellement en cours avec la société qui devait réaménager les aérogares 1 et 2 de l'aéroport Pearson.

De toute évidence, dans tout litige juridique, il y a une possibilité de règlement. Généralement, il est dans l'intérêt des deux parties de s'entendre à l'amiable. À ce que je sache, il n'y a toutefois aucun pourparler en cours à cette fin. La question est tout simplement fondée sur des informations erronées et elle est inexacte.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, le ministre reconnaît-il que la stratégie actuelle du gouvernement vise uniquement à gagner du temps à la veille des élections, même si cela risque de coûter des centaines de millions de dollars de plus aux contribuables?

[Traduction]

L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je ne comprends pas pourquoi le Bloc québécois, qui a jusqu'à maintenant opté pour une approche beaucoup plus juste et précise dans ce dossier, adopte maintenant les tactiques du Parti réformiste.

L'hypothèse selon laquelle le consortium visé s'apprête à encaisser des centaines de millions de dollars est fausse. S'il était vrai que l'entreprise essuie de telles pertes, cela voudrait dire que le contrat signé à l'origine n'était pas un contrat de bonne foi et qu'il n'aurait pas dû être signé. Le gouvernement aurait donc entièrement raison de dire que cela allait à l'encontre de l'intérêt public.

* * *

L'EMPLOI

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, les chiffres sur le taux de chômage publiés aujourd'hui mettent en lumière la piètre performance des libéraux et des conservateurs dans la création d'emplois. Chaque fois que ces chiffres paraissent, le ministre des Finances se vante de mieux faire que le reste des pays du G-7. Pourtant, les faits le contredisent.

Selon les chiffres du G-7, le Japon, les États-Unis et la Grande-Bretagne ont tous des taux de chômage inférieurs à celui du Canada. À 9,7 p. 100, notre taux de chômage est beaucoup plus élevé que la moyenne des pays de l'OCDE, soit 8,5 p. 100.

Pour le 76e mois d'affilée, nous avons un taux de chômage bien au-dessus des 9 p. 100. Les libéraux ont eu trois ans et demi pour régler le problème. Comment le ministre des Finances peut-il justifier cette situation désastreuse et prétendre avoir tenu la promesse de création de nombreux d'emplois faite par les libéraux?

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, la question soulevée par le député est d'une extrême importance. Les emplois sont la priorité de notre gouvernement. En fait, l'enquête sur la population active dont les résultats viennent de paraître fait état d'une augmentation de seulement 5 000 emplois le mois passé, ce qui est très décevant.

J'ajouterai cependant que le rapport contient quelques données positives. Ainsi, 32 000 emplois ont été créés le mois dernier. Depuis septembre seulement, 91 000 emplois ont été créés. Pratiquement tous les prévisionnistes sont d'avis qu'il y aura une forte croissance de l'emploi et une forte croissance économique cette année.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, belles paroles, mais il n'y a à vrai dire là rien à se mettre sous la dent. Je dirais pour ma part que les seuls emplois dont se soucie le ministre sont les emplois des libéraux, et c'est pourquoi le camouflage est tellement à la mode ici.

En trois ans et demi, le gouvernement a majoré les impôts à 35 reprises. Il est allé cherché 24 milliards de dollars de plus dans les poches des contribuables. Ce sont là des faits.


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(1140)

Quant le ministre des Finances se mettra-t-il dans la tête que la politique des impôts élevés fait disparaître des emplois au Canada?

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, quand les réformistes se mettront-ils dans la tête que ce n'est pas en abaissant les impôts des riches et en augmentant les impôts des pauvres qu'ils créeraient des emplois? C'est pourtant là le fondement de la politique fiscale du Parti réformiste.

Grâce à ses politiques, le gouvernement a pu créer près de 800 000 emplois au cours des trois dernières années et demi, ce qui est très bien.

* * *

LES PERSONNES HANDICAPÉES

M. Andy Scott (Fredericton-York-Sunbury, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Le récent groupe de travail sur les questions touchant les personnes handicapées recommandait notamment au ministère du Développement des ressources humaines de s'engager à nouveau à d'inclure les Canadiens handicapés dans ses programmes destinés au grand public.

Quelles mesures le ministère a-t-il prises ou va-t-il prendre pour s'assurer que cet engagement sera respecté à la grandeur du ministère, des régions et des bureaux locaux du ministère partout au Canada?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement canadien a toujours été le chef de file lorsqu'il s'agit de répondre aux besoins des personnes handicapées. Nous avons justement créé un remarquable groupe de travail dans lequel le député de Frederiction-York-Sunbury a joué un rôle très constructif. Je le remercie beaucoup de la créativité dont il a fait preuve et des conseils qu'il nous a donnés.

C'est l'une des raisons pour lesquelles le Programme de réadaptation professionnelle des personnes handicapées a été prolongé jusqu'en 1998. Nous avons fait de l'aide aux personnes handicapées l'une des plus importantes priorités du Conseil des ministres sur la réforme et le renouveau de la politique sociale dans le cadre des travaux que nous effectuons également avec les provinces.

De plus, j'ai demandé à mes hauts-fonctionnaires d'élaborer des plans d'action pour permettre à mon ministère d'aller de l'avant et d'intégrer les questions touchant les personnes handicapées dans tous nos programmes et activités à la grandeur du Canada.

[Français]

L'AÉROPORT PEARSON

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.

L'actuel premier ministre déclarait, au sujet de la privatisation de l'aéroport Pearson, lors de la dernière campagne électorale, que les promoteurs feraient, et je cite «des projets qui vont jusqu'à 200 millions de dollars par année». Pourtant, les avocats du gouvernement fédéral sont présentement en cour pour tenter de démontrer que les profits des promoteurs privés à l'aéroport Pearson n'avaient rien d'excessifs, et qu'au contraire, leurs experts prétendent que les promoteurs auraient même pu perdre jusqu'à 180 millions de dollars.

La défense du gouvernement dans la saga Pearson n'est-elle pas un aveu à l'effet qu'Ottawa a annulé une entente qui aurait pu être bonne pour les contribuables canadiens et pour les voyageurs, et tout cela, simplement pour respecter les engagements partisans du premier ministre?

L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, cette question et les questions précédentes du Bloc québécois indiquent que les bloquistes n'ont pas vraiment compris ce qu'il y a dans l'affaire Pearson.

Le gouvernement précédent a négocié avec une compagnie privée un accord on ne peut plus imparfait concernant l'aéroport Pearson. Notre gouvernement, dès son entrée en fonction, s'est attaché à réparer les dommages en l'annulant. Nous venons tout juste de céder l'aéroport Pearson à une administration aéroportuaire sans but lucratif; tout comme ceux de Montréal, Vancouver, Calgary, Edmonton et d'autres.

Nous n'avons cessé d'affirmer que, pour nous, seul un accord équitable pour les plaignants et les contribuables est admissible.

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, BQ): Monsieur le Président, on comprend parfaitement bien que tout cela risque de coûter des dizaines de millions de dollars aux contribuables qui ne sauront jamais le fin mot de l'affaire, comme dans les autres enquêtes en cours actuellement.

Pourquoi le ministre n'avoue-t-il pas que son gouvernement a préféré faire de la petite politique en attaquant mesquinement les conservateurs, plutôt que de faire toute la lumière en ordonnant une enquête publique sur toute cette affaire, comme le réclame le Bloc québécois depuis plus de trois ans? Le gouvernement avait-il peur que l'enquête publique relève du patronage autant, sinon plus, du côté des libéraux que des conservateurs?

(1145)

L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.): De nouveau, monsieur le Président, le député et son parti ont mal compris la situation actuelle. Les plaignants veulent davantage obtenir une somme pour les profits qui, selon eux, ont été perdus dans cette affaire. Leur demande est déraisonnable.


7838

Deux fois, le gouvernement a déposé des mesures législatives pour un règlement acceptable, pour finalement essuyer un refus devant le Sénat, naturellement majoritairement conservateur.

Je veux répéter à nouveau que nous n'allons pas payer pour les prétendus profits qui n'ont pas été réalisés et qui sont totalement hypothétiques.

* * *

[Traduction]

LE TRANSPORT DU GRAIN

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture.

Le transport du grain, dans les Prairies, en est au point mort, ce qui cause de graves problèmes aux agriculteurs. Le gouvernement a aboli la subvention du Nid-de-Corbeau pour le transport du grain, ce qui a plus que doublé le coût du transport des marchandises pour les agriculteurs, à qui l'on avait promis, toutefois, que le système fonctionnerait mieux. Le ministre de l'Agriculture croit-il que le système fonctionne mieux, comme il l'avait promis?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, c'est évident que, sur la question du transport du grain, il n'est ni juste ni approprié d'établir un lien entre l'ancienne subvention du Nid-de-Corbeau et la situation actuelle dans les Prairies, comme le fait le député.

Comme je l'ai dit hier à la Chambre, en réponse à une question du Nouveau Parti démocratique, nous avons un hiver très dur, des chutes de neige abondantes et des températures particulièrement froides. J'ai ensuite admis que ce n'était pas suffisant pour excuser la situation.

Les sociétés de chemins de fer ont l'obligation de fournir assez de locomotives pour transporter le grain des Prairies à travers les Rocheuses, jusqu'aux ports de l'Ouest, et jusqu'à Thunder Bay, à l'Est. De toute évidence, au cours des dernières semaines, le service n'a pas été satisfaisant. Ces sociétés sont tenues de faire un meilleur travail.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, les agriculteurs et les députés réformistes ont insisté sur l'importance de régler le problème de l'attribution des wagons, d'abolir les taux fixes des tarifs marchandises et de faire d'autres changements pour laisser libre cours à un système concurrentiel avant l'abolition du tarif du Nid-de-Corbeau et avant l'adoption de la nouvelle loi sur les transports.

Le ministre a refusé de le faire. Il doit maintenant en assumer les conséquences. Chaque jour de retard dans le transport du grain coûte très cher aux agriculteurs. Que fera le ministre pour régler cette situation déplorable que le gouvernement a créée au détriment des agriculteurs? Que fera-t-il pour que le transport du grain reprenne normalement?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, la sociétés de chemins de fer ont dit qu'elles faisaient actuellement le nécessaire pour augmenter le parc de locomotives dans l'Ouest, afin d'assurer le transport du grain. C'est une amélioration appréciée, même si ce n'est peut-être pas suffisant.

Au cours des jours à venir, je consulterai ces sociétés et d'autres intervenants de l'industrie du grain, y compris la Commission canadienne du blé, pour déterminer quelles autres mesures pourraient et devraient être prises pour rattraper le retard et nous assurer qu'on vienne à bout des arriérés d'ici la fin de la saison du transport.

Dans l'industrie du grain, tous les intervenants doivent travailler plus fort pour faire en sorte que cette situation ne devienne pas un problème périodique caractéristique du système de transport. Les sociétés de transport devraient savoir qu'il fait toujours froid et qu'il neige toujours en janvier, et qu'elles doivent posséder tout le matériel nécessaire pour surmonter ces difficultés.

* * *

LA POLITIQUE CULTURELLE

M. Clifford Lincoln (Lachine-Lac-Saint-Louis, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien.

Cette fin de semaine, la ministre va rencontrer les dirigeants du secteur culturel du Canada. Pourrait-elle nous dire ce qu'elle espère obtenir de cette rencontre?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. Je sais qu'en tant que président du Comité permanent du patrimoine canadien, il travaillera très fort à la réalisation de notre politique culturelle.

Une des choses que nous voulons faire cette fin de semaine, c'est écouter les dirigeants de la communauté culturelle du Canada, être ouverts au changement, mais en même temps réaffirmer qu'au cours des 25 dernières années nous avons obtenu une masse critique d'artistes et de succès canadiens, en raison des politiques du gouvernement.

* * *

LES PÉNITENCIERS

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, hier j'ai visité le pénitencier de Millhaven. Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'endroit est en triste état. Les détenus ont brisé les canalisations d'eau. Il y a des débris partout. Ils ont démoli des murs en béton et bombardé les gardiens et le personnel avec des excréments et de l'urine. Cette situation dure maintenant depuis 17 jours. Les détenus sont enfermés et l'escouade d'intervention est en alerte. Pendant ce temps-là, ces brutes réclament une meilleure nourriture et plus de divertissements. Pourtant, même dans leurs cellules, ils ont la télévision par câble.

(1150)

Quand le solliciteur général du Canada va-t-il rétablir l'ordre et la discipline en vidant complètement les cellules, en n'accordant aux détenus que l'essentiel et en vendant aux enchères les télévisions et autres appareils des détenus pour payer les dégâts?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, plus tôt cette semaine, mon collègue, le solliciteur général, a rencontré le commissaire


7839

intérimaire des services correctionnels pour demander à ce qu'on le tienne parfaitement au courant de la situation.

Elle a déclaré à mon collègue qu'elle visiterait l'établissement cette semaine, en compagnie du directeur général de la sécurité, pour s'assurer que l'ordre est rétabli. Le service correctionnel du Canada a un plan pour assurer la sécurité du personnel et des détenus.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, la population de ce pays est lasse de l'inaction du gouvernement et de sa promotion des droits des détenus. Maintenant, les dirigeants de la prison parlent de négocier un règlement avec les détenus de Millhaven.

Le mot à la mode est compromis plutôt que responsabilité. Il est absolument stupide de négocier avec des détenus.

Pourquoi le solliciteur général appuie-t-il des criminels et leurs demandes de droits supplémentaires au lieu d'appuyer les droits des victimes? Où est la responsabilité?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit à la Chambre, nous faisons tout ce que nous pouvons pour rétablir l'ordre dans la prison et assurer la sécurité du personnel et des détenus.

Dans leur recherche de solutions à ces difficultés, je doute que les autorités choisissent les méthodes simplistes, médiévales et répressives préconisées par le député.

* * *

[Français]

LES INITIATIVES JEUNESSE

M. Stéphan Tremblay (Lac-Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Le taux de chômage des jeunes a été catastrophique en 1996, et il s'annonce encore pire cette année.

Dans son Discours sur le budget de mars dernier, le gouvernement annonçait un programme de 315 millions de dollars sur trois ans pour les programmes jeunesse. Un an plus tard, rien n'a été fait, même si le ministre du Développement des ressources humaines a déclaré, le 11 octobre dernier, et je cite: «Il y aura des initiatives jeunesse qui seront annoncées cet automne.» J'ai l'impression que le gouvernement attend que les jeunes deviennent vieux, puisqu'un an après les promesses, les initiatives sont toujours absentes.

Ma question est la même qu'il y a six mois: Qu'est-ce que le ministre attend pour débloquer les fonds qui dorment encore dans ses coffres?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je veux d'abord remercier le député de Lac-Saint-Jean pour sa question extrêmement pertinente.

La situation du chômage chez les jeunes préoccupe notre gouvernement d'une façon très importante. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le ministre des Finances avait alloué 315 millions de dollars supplémentaires à tous les autres programmes que nous avons déjà pour aider les jeunes à intégrer le marché du travail d'une façon qui soit plus intéressante.

Je dois vous dire que cette situation des jeunes qui se cherchent un emploi est quelque chose qui nous atteint profondément. J'en ai moi-même plusieurs dans ma propre circonscription électorale et je sais combien, pour la jeunesse, il est extrêmement important de ne pas perdre espoir dans la vie.

Cette semaine, nous allons avoir. . .

Des voix: Oh, oh!

M. Pettigrew: Monsieur le Président, si je peux me permettre, il me fera plaisir de répondre au député de Lac-Saint-Jean que l'impatience qu'il a manifestée trouvera bientôt une réponse, parce que je me suis assuré que les programmes que nous allons présenter au public canadien, dans les prochains jours peut-être, seront des programmes extrêmement bien faits et en partenariat avec le secteur privé.

M. Stéphan Tremblay (Lac-Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, je dis souvent que les jeunes ne sont pas seulement l'avenir, ils sont le présent. Pour une fois, en tout cas, le ministre semble nous dire qu'il va enfin, après six mois, nous annoncer des programmes jeunesse. Mais je commence à croire que ça prend des élections pour passer à l'action avec ce gouvernement.

(1155)

Le ministre ne considère-t-il pas qu'il devrait intégrer tous les programmes destinés aux jeunes et surtout les fonds reliés à ces programmes aux présentes négociations fédérales-provinciales sur les mesures actives d'emploi?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux que le député de Lac-Saint-Jean me permette, une fois de plus, d'indiquer à quel point notre gouvernement s'est engagé à mettre de l'ordre dans toutes les questions de la formation et des mesures actives pour aider à intégrer le marché du travail.

En ce qui concerne les programmes d'emploi que nous allons annoncer, je l'espère bien, au cours des prochains jours, vous verrez que ce sont des programmes de partenariat avec le secteur privé. Ce sont des programmes intégrés très clairement aux responsabilités du gouvernement fédéral, de nos juridictions constitutionnelles, et ils apporteront aide et espoir aux jeunes.

Ce dont nous avons besoin dans notre société, c'est d'offrir aux jeunes l'opportunité d'acquérir de l'expérience. Comme société, nous avons besoin de leur exubérance.


7840

[Traduction]

LA POLITIQUE CULTURELLE

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, il est très intéressant de voir les ministériels libéraux rapprocher peu à peu leur politique culturelle de celle du Parti réformiste. Le ministre de la Défense, par exemple, a adopté la position du Parti réformiste à l'égard de Radio-Canada, et je l'en remercie. Il a fait preuve de bon sens.

Par opposition au ministre du Commerce international, il a certainement fait preuve de gros bon sens.

Ma question s'adresse à la ministre du Patrimoine canadien. À cette rencontre, où elle a convoqué toute l'élite culturelle du Canada, va-t-elle inspirer une certaine réflexion prospective par l'intermédiare du ministre du Commerce? À vrai dire, a-t-elle invité le ministre du Commerce à participer afin qu'il se dégage un peu de bon sens de cette réunion pour faire changement?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Oui, monsieur le Président.

M. Abbott: On aboutit enfin.

* * *

L'EMPLOI

M. Vic Althouse (Mackenzie, NPD): Monsieur le Président, les statistiques récemment publiées au sujet de la population active révèlent que le taux de participation à l'emploi se situe entre 63 et 64 p. 100 pour tous les Canadiens, mais nous avons constaté que le taux de participation des jeunes Canadiens est passé de 62,7 p. 100, en 1989, à 48,8 p. 100, en 1996.

Au cours des trois années et demie qui viennent de s'écouler, pourquoi le gouvernement a-t-il choisi de ne rien faire pour répondre aux besoins des jeunes Canadiens en matière d'emploi?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, bien au contraire. Les problèmes des jeunes Canadiens à la recherche d'un emploi nous préoccupent au plus haut point, et nous voulons faire de notre mieux pour y remédier.

Dans son budget de 1996, notre gouvernement a alloué des sommes supplémentaires de 315 millions de dollars à tous les programmes qui visent à combler les besoins des jeunes. J'espère pouvoir annoncer très bientôt le lancement de certains programmes conçus en partenariat avec le secteur privé justement pour répondre aux attentes des jeunes Canadiens à la recherche d'un emploi. S'ils doivent acquérir de l'expérience, notre société peut leur en donner l'occasion. Nous avons besoin de leur énergie et de leur scolarisation.

[Français]

LE ZAÏRE

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre.

Alors que plus de 400 000 réfugiés sont toujours pris entre deux feux dans l'est du Zaïre, la crise qui sévit encore entre les forces gouvernementales et les rebelles s'intensifie de jour en jour. Les agences humanitaires évacuent les régions à risque, alors que les réfugiés, eux, fuient leur campement, sans aide ni nourriture. C'est la catastrophe, comme on a pu le voir hier à la télévision.

Dans le contexte où le gouvernement avait voulu faire montre de leadership, en novembre dernier, au tout début de la crise, la vice-première ministre peut-elle nous dire aujourd'hui si son gouvernement fera preuve d'autant de zèle, cette fois-ci, alors que la crise qui sévit au Zaïre menace la sécurité, et même la vie des centaines de milliers de réfugiés qui y sont toujours?

[Traduction]

L'hon. Christine Stewart (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique), Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement continue de suivre de très près la crise qui sévit au Rwanda. Nous avions espérer que la situation allait s'améliorer avec l'arrivée au pouvoir d'un nouveau gouvernement et le retour des réfugiés. Or, ces derniers jours, nous avons été choqués par le massacre de secouristes. La situation est très préoccupante pour le Canada.

Nous étions prêts à envoyer encore 10 observateurs canadiens chargés de veiller au respect des droits de la personne sur place. Vu les circonstances, nous avons suspendu l'envoi de ces Canadiens qui connaissent très bien le dossier.

(1200)

Lorsque je suis arrivée à la Chambre ce matin, je rentrais tout juste d'une séance de consultation auprès d'environ 200 organismes non gouvernementaux, universitaires et représentants de gouvernement où il a été question des moyens à prendre pour rétablir la paix dans des situations comme celles qui sévissent au Rwanda et dans la région des Grands Lacs.

Dans deux semaines aura lieu aux Nations Unies un débat auquel participera le Canada pour discuter de la crise en cours au Rwanda. Nous sommes très préoccupés. Nous avons appelé l'ambassadeur du Rwanda hier. Nous le faisons encore aujourd'hui afin de nous entretenir de la situation actuelle. Nous nous ferons un plaisir de tenir la Chambre au courant de nos démarches.

* * *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le vice-président: Je veux signaler la présence à notre tribune du président de l'assemblée législative de l'Ontario, l'honorable Chris Stockwell.

Des voix: Bravo!

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RECOURS AU RÈGLEMENT

LA CONFÉRENCE SUR LA JEUNESSE DU PARTI RÉFORMISTE

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, comme vous le savez, le Parti réformiste tiendra ce week-end une conférence sur la jeunesse. Nous profitons de l'occasion pur signaler la présence de nombreux jeunes ici aujourd'hui.

Des voix: Bravo!

______________________________________________


7841

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LA FISCALITÉ

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, suite à une demande faite au cours d'un échange entre le ministre des Finances et son collègue, le député de Saint-Hyacinthe-Bagot, le mercredi 5 février, j'ai le plaisir de déposer une liste des mesures visant à améliorer l'équité du régime fiscal que le gouvernement a introduites au cours des trois dernières années.

* * *

LA LOI SUR L'EXPANSION DES EXPORTATIONS

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-368, Loi modifiant la Loi sur l'expansion des exportations.

-Monsieur le Président, en gros, ce projet de droit est directement inspiré d'un chapitre du livre rouge portant sur le développement durable. Il vise à encourager la Société pour l'expansion des exportations, les ministres et le gouverneur en conseil à exercer les pouvoirs que leur confère la Loi sur l'expansion des exportations, et, lorsque l'occasion se présente, à promouvoir le développement durable dans l'exercice de leurs fonctions respectives.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

[Français]

PÉTITIONS

LE RÉSEAU ROUTIER

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe, BQ): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je désire déposer, au nom de mes concitoyens du comté de Richmond-Wolfe, de Sherbrooke et de Mégantic-Compton-Stanstead, une pétition visant à assurer un meilleur système routier.

Dans cette pétition, on désire attirer l'attention de la Chambre sur le fait que l'étude de la politique du réseau routier national a établi que le programme de réseau routier se solderait par la création d'emplois, l'accroissement du développement économique, mais surtout par la diminution de pertes de vies, la prévention de blessures et la réduction considérable des embouteillages.

Je désire déposer cette pétition au nom de l'ensemble des pétitionnaires.

(1205)

[Traduction]

L'AVORTEMENT

M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, j'ai trois pétitions.

La première est signée par 75 électeurs de ma circonscription. Ils demandent au Parlement d'appuyer la tenue d'un référendum national exécutoire qui aurait lieu dans le cadre des prochaines élections fédérales pour déterminer si les Canadiens sont d'accord pour que le gouvernement fédéral finance l'avortement sur demande.

LA TAXE SUR L'ESSENCE

M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième pétition est signée par 25 personnes de ma circonscription. Les pétitionnaires demandent au Parlement de ne pas augmenter la taxe d'accise fédérale sur l'essence dans le prochain budget fédéral.

LE RÉSEAU ROUTIER

M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, la troisième pétition est signée par environ 60 personnes de ma circonscription. Les pétitionnaires demandent au Parlement d'exhorter le gouvernement fédéral à collaborer avec les gouvernements provinciaux pour améliorer la qualité du réseau routier canadien.

L'IMMIGRATION

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea-Gore-Malton, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter une pétition demandant au Parlement de faire en sorte que les visiteurs qui portent atteinte aux privilèges d'un député en réclamant le statut de réfugié soient déportés et que leurs complices soient poursuivis en justice.

LA COMMISSION D'EXAMEN DU PRIX DE L'ÉNERGIE

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea-Gore-Malton, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter une seconde pétition qui demande que le Parlement encourage la mise sur pied d'une commission d'examen du prix de l'énergie pour contrôler le prix de l'essence et des autres produits énergétiques.

LE RÉSEAU ROUTIER

M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, cette pétition porte sur le programme national d'infrastructure et elle a l'appui de l'Association canadienne des automobilistes. Les pétitionnaires demandent au Parlement d'exhorter le gouvernement fédéral à collaborer avec les gouvernements provinciaux pour améliorer la qualité du réseau routier canadien.

M. John Maloney (Erie, Lib.): Monsieur le Président, j'ai trois pétitions demandant que le gouvernement prenne des mesures pour améliorer le réseau routier canadien.


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LA TAXE SUR L'ESSENCE

M. John Maloney (Erie, Lib.): Monsieur le Président, ma deuxième pétition demande au gouvernement fédéral de ne pas augmenter la taxe d'accise fédérale sur l'essence dans le prochain budget.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. John Maloney (Erie, Lib.): Monsieur le Président, ma troisième pétition s'oppose à l'inclusion de l'expression «orientation sexuelle» dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.

LA MONNAIE

M. John Maloney (Erie, Lib.): Monsieur le Président, j'ai deux autres pétitions. La première demande que le gouvernement fédéral reprenne son pouvoir de créer de la richesse sans s'endetter.

LA FISCALITÉ

M. John Maloney (Erie, Lib.): Monsieur le Président, mon dernier groupe de pétitions demande au Parlement d'annuler l'article 21 de la convention fiscale Canada-États-Unis qui porte sur l'imposition à la source des montants portés au crédit des non-résidents.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. John Richardson (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le vice-président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

* * *

[Français]

LA LOI SUR LA TAXE D'ACCISE

PROJET DE LOI C-70. AVIS DE MOTION CONCERNANT L'ATTRIBUTION DE TEMPS

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre du Travail et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, il a été impossible d'en arriver à un accord en vertu des dispositions du paragraphe 78(1) ou 78(2) du Règlement relativement aux délibérations à l'étape du rapport et à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-70, Loi modifiant la Loi sur la taxe d'accise, la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces, la Loi de l'impôt sur le revenu, la Loi sur le compte de service et de réduction de la dette et des lois connexes.

En vertu des dispositions du paragraphe 78(3) du Règlement, je donne avis qu'un ministre de la Couronne présentera une motion d'attribution de temps à la prochaine séance de la Chambre afin d'attribuer un nombre spécifié de jours ou d'heures aux délibérations à ces étapes et aux décisions requises pour disposer de ces étapes.

* * *

[Traduction]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-L'ENQUÊTE SUR LES ÉVÉNEMENTS SURVENUS EN SOMALIE

La Chambre reprend l'étude de la motion.

Le vice-président: Le député d'Edmonton-Sud-Ouest terminait sa question.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, pour rafraîchir la mémoire des députés, ce débat porte sur les événements qui ont eu lieu en Somalie.

Plus précisément, je posais au ministre, en réponse à son discours dans ce débat, des questions concernant la responsabilité ministérielle ou les rapports entre le Quartier général de la Défense nationale, le sous-ministre, le chef d'état-major de la défense et la ministre de la Défense de l'époque, Kim Campbell.

Les terribles événements survenus le 16 mars ont été signalés à la ministre par le chef d'état-major de la défense, John Anderson, et par le sous-ministre, M. Fowler, le 18 mars, soit deux jours plus tard. La ministre de la Défense n'a pas été informée à ce moment-là qu'il pouvait y avoir un problème de justice criminelle.

(1210)

La ministre de la Défense a lu dans la revue Maclean's par la suite que, le même jour, soit le 18 mars, John Anderson aurait déclaré qu'on soupçonnait depuis le début qu'il y avait eu intention criminelle. Cela signifie que le chef d'état-major de la défense ou le sous-ministre ont induit la ministre en erreur ou ont fait preuve d'une incompétence totale lorsqu'ils ont informé la ministre, soit l'autorité civile dont ils relevaient. Ce n'est que le 31 mars, près de deux semaines plus tard, que la ministre de la Défense a été informée des événements qui avaient eu lieu.

Il y a peut-être eu incompétence de la part de la ministre ou de la part du sous-ministre, mais il y a bien eu incompétence. Il s'agissait soit d'une incompétence flagrante soit d'un camouflage visant à protéger la ministre.

Le sous-ministre, M. Fowler, a conservé la confiance du gouvernement et a été nommé à un poste de haut niveau aux Nations Unies. M. Fowler a menti ou camouflé l'affaire ou il a induit la ministre en erreur. Alors, pourquoi ce camouflage a-t-il eu lieu et pourquoi l'a-t-on laissé se poursuivre? Pourquoi une personne qui y a été mêlée a-t-elle continué d'avoir la confiance du gouvernement?

M. Young: Monsieur le Président, je sais que le député qui a posé la question est un parlementaire très sérieux qui comprend l'incidence que pourraient avoir mes observations sur les explications


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qu'il vient de donner. Si on me le permet, je vais essayer de lui répondre. Je ne cherche pas à me défiler, mais les déclarations du député ont évidemment des répercussions troublantes pour lui et pour d'autres.

Je répète au député qu'il n'y a absolument rien qui empêche les commissaires de convoquer l'actuel ambassadeur du Canada aux Nations Unies ou l'ancienne première ministre du Canada, qui occupe aujourd'hui le poste de Consul général à Los Angeles, ou d'autres témoins. Certains ont laissé entendre que le temps manquait. Il reste pourtant beaucoup de temps d'ici la fin de mars, la commission d'enquête devant faire rapport à la fin de juin.

Même si j'ai pris grand soin de ne pas m'occuper de la question, en évitant de recommander des témoins à entendre ou de commenter des témoignages ou des allégations, je comprends les inquiétudes du député. Je suis d'avis que celui-ci et les membres de son parti devraient préciser clairement les personnes qui, à leur avis, devraient comparaître en raison de l'importance du témoignage qu'elles pourraient présenter.

En conclusion, je dirai simplement au député que la personne qui était ministre de la Défense nationale à l'époque où cet incident est censé s'être produit est ensuite devenue première ministre du Canada. La personne qui occupait le poste de premier ministre du Canada avant l'élection de notre gouvernement, à la fin d'octobre 1993, a continué à appuyer le sous-ministre qui était en place quand elle était ministre de la Défense nationale et qui était resté en poste. Je ne crois pas pouvoir faire des observations sur les causes de ce qui s'est produit ni dire s'il y a eu une mauvaise communication entre le sous-ministre et la ministre de la Défense nationale de l'époque, qui est ensuite devenue le grand patron de tout le monde, à titre de première ministre du Canada.

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.): Monsieur le Président, j'ai une observation à faire au ministre. Je tiens à citer ce que le juge Létourneau a dit hier en parlant de la possibilité pour la commission d'entendre tous les témoins qu'elle souhaitait entendre: «Il n'est pas vrai à cet égard que nous ayons amplement le temps de convoquer des témoins comme M. Fowler et M. Anderson. Entendre des témoignages sur des questions aussi importantes sans la possibilité d'en vérifier vraiment la validité, cela risque de blanchir les allégations de camouflage au lieu de les examiner.»

Je comparerais le travail d'enquête de la commission à un casse-tête. Dans un casse-tête, il y a une pièce essentielle; une fois qu'on l'a mise en place, on comprend la structure et toutes les pièces peuvent s'agencer.

Je soutiens au ministre qu'il n'est pas raisonnable que la commission s'adresse aux témoins au bout de la chaîne avant d'avoir établi le reste de la structure, de sorte que les commissaires puissent poser des questions qui se fondent sur des témoignages qui se rapportent directement aux personnes qu'ils interrogent.

M. Young: Monsieur le Président, je comprends très bien ce que veut dire le député et le vif intérêt qu'il porte à cette question.

Je crains bien que sa question comporte un sous-entendu; si je me trompe, le député aura sûrement amplement l'occasion de me corriger. On dirait qu'à cette étape-ci, en février 1997, longtemps après que les incidents en question se soient produits en Somalie, il faudrait encore procéder comme s'il fallait traquer tous les témoins, tous les documents, tous les incidents jusqu'à ce que les commissaires aient réussi à entendre tous ceux qui ont quoi que ce soit à voir avec les incidents. Comme le député le sait, les commissaires ont déjà entendu un nombre considérable de témoins, plus d'une centaine. Plus de 50 ou 60 avocats participent à temps plein à ces travaux.

(1215)

Je ne crois pas pouvoir commenter les observations des juges à propos du temps qu'ils ont pour convoquer des témoins. L'audition de certains témoins a pris énormément de temps. Des efforts ont été faits pour poursuivre certaines pistes dont je n'ai jamais parlé. Il y a une chose que les Canadiens comprennent sûrement: c'est que, d'ici la fin de mars, rien n'empêche les commissaires d'entendre les personnes qu'ils estiment important d'entendre à l'intérieur de ce délai en fonction de leur propre ordre du jour.

S'ils pensent que ces témoignages pourraient fausser ou compliquer le cours de l'enquête, c'est à eux qu'il appartient d'en juger. Ce n'est pas mon avis, ni celui du gouvernement. Sérieusement, si l'on pense que cette commission d'enquête devrait poursuivre ses travaux jusqu'à ce que tout le monde soit totalement satisfait, jusqu'à ce que les commissaires aient trouvé réponse à toutes leurs questions à leur satisfaction, je ne crois pas que cette enquête pourrait se terminer avant la fin du siècle.

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais revenir aux propos que le ministre a tenus tout à l'heure. J'aurais souhaité comme n'importe qui que cette commission termine ses travaux il y a un an. Je ne suis pas d'accord pour qu'elle les prolonge indéfiniment, mais je veux avoir des réponses. Il me semble essentiel qu'elle puisse achever son travail.

Je tiens à souligner que nos forces armées font un excellent travail. Elles ont été affectées souvent à l'autre bout du monde, à des endroits dangereux ou elles n'avaient pas la vie facile. Maintes et maintes fois, elles se sont montrées très engagées à l'égard du travail qui leur était confié. Lorsqu'elles s'engagent, elles le font très bien. Tout marche bien.

Il est vraiment dommage que le désastre de la Somalie fasse planer la suspicion sur toutes les forces militaires, moi compris. Après avoir servi pendant 36 ans dans les forces aériennes, je suis parti très fier des années que j'y avais passées. Au moment de mon départ, j'étais un officier supérieur. Aujourd'hui, quand des gens l'apprennent, ils prennent un air inquisiteur et me demandent presque: êtes-vous un de ceux qui font du camouflage, qui n'assument pas leurs responsabilités? La plupart des officiers supérieurs prennent leurs responsabilités. Ce sont de bons dirigeants.


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Ceux qui, malheureusement, ont été accusés dans cette affaire resteront plus ou moins en suspens, à moins que l'enquête n'aille jusqu'au bout et qu'on ne décide ou bien qu'ils sont entièrement innocents, ou bien que leur conduite a laissé à désirer sur un plan ou l'autre.

Au départ, le gouvernement fédéral refusait l'enquête, disant que le ministère de la Défense menait la sienne. C'est seulement lorsque le major Armstrong a parlé, en novembre 1994, que le ministre de la Défense nationale de l'époque a été forcé d'ordonner la tenue d'une enquête. Encore là, compte tenu du congé de Noël, la nouvelle année était bien entamée lorsqu'il a finalement annoncé qu'une enquête serait menée conformément à la Loi sur la défense nationale. Cela signifie que, encore une fois, l'enquête serait menée à huis clos. Elle ne serait pas publique.

Le 20 mars, j'ai exigé ici que l'enquête soit menée conformément à la Loi sur les enquêtes plutôt qu'à la Loi sur la défense nationale. Le lendemain, le ministre-et je l'en félicite-a vu que c'était plein de sagesse et s'est arrangé pour que l'enquête soit menée conformément à la Loi sur les enquêtes, c'est-à-dire publiquement.

Voici que l'enquête est écourtée alors qu'elle en est à ses dernières étapes. D'abord, elle était censée porter sur les événements survenus avant, pendant et après le déploiement des troupes en Somalie. La commission a terminé l'examen des événements antérieurs au déploiement. Elle achève son enquête de l'étape du déploiement. Mais elle ne pourra pas examiner les événements qui ont suivi le déploiement parce que le ministre de la Défense nationale a mis arbitrairement fin à l'enquête.

(1220)

Je considère cela comme une ingérence politique flagrante dans une enquête judiciaire. Par sa décision, le ministre prive des gens contre lesquels des accusations ont été portées de vraiment se faire entendre et d'obtenir justice. Cela semble injuste. Le juge Létourneau a dit qu'il ne rendrait pas de jugement s'il ne pouvait pas entendre les gens. Je crois qu'il a parfaitement raison. Il serait injuste de condamner des gens qui n'auront pas eu la chance de témoigner, de se faire entendre, d'être interrogés.

Cela signifie que des responsables n'auront peut-être pas à répondre de leurs gestes. Ce n'est pas juste.

Puis, voyez ce que cette décision signifie pour les futures enquêtes. Que dira-t-on à l'avenir lorsqu'on sera convié à participer à une enquête? On se demandera si l'enquête ne se fera qu'aux deux tiers et s'il vaut la peine de participer à quelque chose qui risquera de tourner au fiasco et d'être interrompu sur les caprices de quelque ministre. Dans ce cas, nous aurons perdu au Canada une possibilité incroyable d'enquêter et de s'assurer que justice est faite dans tous les secteurs du gouvernement. Il y va de l'intégrité, de l'impartialité et de l'indépendance de la commission.

Le ministre a demandé, dans le cours de ses observations, si le Parti réformiste voulait proposer aux commissaires des témoins qu'ils devraient entendre. À mon sens, ce serait là une ingérence dans l'enquête. Les commissaires ont établi la qualité de comparaître de diverses personnes. J'imagine que les commissaires ont choisi certaines personnes et qu'ils en écarté d'autres, compte tenu de l'information et des faits qu'elles avaient à présenter. Il ne m'appartient pas de dire aux commissaires comment faire leur travail.

Monsieur le Président, j'ai oublié de dire que je partagerai mon temps avec le député d'Edmonton-Sud-Ouest.

Le vice-président: Il reste alors quatre minutes au député.

M. Frazer: Merci. Je voudrais aussi souligner que ceux qui devaient faire l'objet de l'enquête ont, dans une large mesure, paralysée celle-ci. Des documents ont été retenus, l'information a été fournie au compte-gouttes. Nous avons ensuite assisté à cette extraordinaire quête des oeufs de Pâques: pendant une journée, certaines personnes ont été en réclusion dans leurs bureaux et ont dû éplucher tous leurs dossiers pour finalement amasser une quantité faramineuse d'information qui a ensuite été transmise à la commission. Sauf erreur, la commission a littéralement dû scruter, une à une, des milliers de pages de témoignages parce qu'elle ne pouvait rien négliger. Elle risquait d'omettre quelque chose d'important. Des preuves ont été délibérément dissimulées à la commission, ce qui l'a retardée dans ses travaux.

À mon avis, nul ne met en doute le fait qu'il y a eu, en Somalie, un problème de commandement et de surveillance. Ce problème trouve ses origines directement au quartier général de la Défense nationale à Ottawa. Il est aussi lié au leadership et à la discipline. De toute évidence, les personnes sur place n'étaient pas bien dirigées ni soumises à une discipline appropriée. On nous relate des situations qui se sont produites et qui sont tout simplement inacceptables, que ce soit en situation opérationnelle ou autre.

Le meurtre de Shidane Arone s'est produit dans une enceinte relativement petite, et il y avait, à proximité, au moins 80 personnes qui n'ont pu faire autrement qu'entendre ce qui s'est passé. Pourtant, nul n'est intervenu, et je n'arrive pas à comprendre pourquoi.

Où étaient le commandant de peloton, le sergent-major régimentaire, le sergent-major de compagnie et le commandant de compagnie? Comment ont-ils pu laisser cela se produire sans s'interposer ni intervenir? Je sais qu'un certain nombre de personnes sont allées dans l'abri, ont été témoins de ce qui se passait et ont décidé de ne rien faire. C'est tout à fait inacceptable et cela n'aurait pas dû être permis.

Le problème, à mon avis, c'est qu'on ne peut réparer une chose avant de savoir qu'elle est brisée. Il faut savoir ce qui a cloché avant de pouvoir poser un diagnostic sur la nature du problème et de pouvoir proposer une solution. Je ne vois pas comment on peut y parvenir si ce n'est en se rendant au bout de la chaîne, en décrivant ce qui s'est produit, ce qui a été fait et la façon dont on a réglé le


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problème. S'il n'a pas été réglé de manière satisfaisante, il n'est que juste d'y remédier.

(1225)

Je veux revenir à ce qu'a dit le ministre au sujet des propos tenus par mon chef, propos auxquels il a fait allusion plusieurs fois. Voici les propos du chef du Parti réformiste, qui apparaissent à la page 4308 du hansard du 17 septembre 1996: «Monsieur le Président, pour garantir qu'il n'y aura pas de camouflage dans l'enquête sur l'affaire somalienne, le premier ministre est-il disposé à donner à la Chambre l'assurance que les résultats de l'enquête seront intégralement rendus publics avant les prochaines élections?» Cela ne veut absolument pas dire qu'il faut mettre un terme à l'enquête, mais simplement qu'il faut l'achever.

Le premier ministre et son gouvernement ont été élus en octobre 1993 pour un mandat de cinq ans, ce qui leur donne jusqu'en octobre 1998. Ce n'est pas mon chef qui déclenche les élections, c'est le premier ministre, et il peut le faire quand bon lui semble. S'il n'a pas peur du résultat de l'enquête, pourquoi alors n'attend-il pas que le rapport soit déposé avant de déclencher les élections?

Je propose maintenant un amendement à la motion.

Je propose:

Qu'on modifie la motion en remplaçant tous les mots suivant le mot «mandat» par ce qui suit:
«et en dirigeant la Commission à déposer son rapport final le plus tôt possible ou au plus tard le 31 décembre 1997.»
Le vice-président: La motion est recevable.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais demander à mon collègue de Saanich-Les Îles-du-Golfe, qui a été 36 ans dans l'armée, de nous en dire plus sur cette culture qui a produit les horribles événements du 16 mars et d'avant.

D'après l'expérience du député dans le domaine militaire, est-il possible que, dans l'environnement fermé que constitue une base militaire, un caporal ait pu se retrouver seul dans une situation délicate dans un bunker sans que personne le sache, sans que personne d'autre qu'un sergent accepte la responsabilité?

M. Frazer: Monsieur le Président, je l'ai dit auparavant et j'y crois sincèrement, si j'avais été commandant sur place, cela ne se serait pas produit. Cela ne serait pas arrivé parce que mon personnel aurait su que je ne l'aurais pas permis. Pour moi, ce serait inacceptable.

Le député d'Edmonton-Sud-Ouest a mis le doigt sur quelque chose de très important. On savait qu'il y avait des problèmes au sein du régiment aéroporté avant même son déploiement. Ces problèmes avaient été portés à l'attention des plus hauts officiers du quartier général, mais les soldats que l'on recommandait de laisser au Canada ont tout de même été emmenés en mission. C'est un de ces soldats, on l'a vu, qui a commis le crime.

De toute évidence, il y a eu des ratés dans la chaîne de commandement.

(1230)

Était-ce à Petawawa? Était-ce au quartier général des forces terrestres en Ontario? Était-ce au quartier général de la Défense nationale? Où se sont produits ces ratés? Je n'en suis pas certain. J'imagine que la commission possède les renseignements. De toute évidence, de tels comportements sont inacceptables dans la culture militaire.

Ce qu'il faut, c'est déterminer comment cette aberration a pu se produire et qui est responsable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour corriger la situation quand il était encore temps.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux de participer à ce débat. Je voudrais lui donner une orientation un peu différente en insistant davantage sur l'aspect humain de la tragédie que vit actuellement Kyle Brown.

Je vais également démontrer comment les terribles événements du 16 mars 1993, en Somalie, ont eu pour effet de lier inextricablement la vie de trois personnes et comment ces trois personnes ont été affectées de façon très différente. Je veux parler ici de ce jeune Somalien, Shidane Arone, qui a été torturé et tué sans aucune justification, de Robert Fowler, qui était à l'époque le sous-ministre de la Défense nationale, et de Kyle Brown, qui avait alors le grade de caporal dans les Forces canadiennes en Somalie.

J'avais 17 ans lorsque je suis entré dans la marine canadienne. C'est là que j'ai acquis, pour la première fois, le sens de la fraternité. Pour la première fois de ma vie, j'ai senti que j'étais semblable à tous les autres, car j'avais grandi dans un milieu différent. Lorsqu'elles entrent dans les forces militaires, de nombreuses personnes y acquièrent, pour la première fois, des valeurs fondamentales. Le drame réside précisément dans le fait que les forces armées ne sont plus l'endroit où il est possible d'acquérir ce sens de la participation et du civisme, de se renouveler et de grandir.

Je reviens au cas du para Kyle Brown. Il est né et a grandi en Alberta. À l'âge de 14 ans, Kyle a perdu sa mère décédée d'une surdose de drogue. Un an plus tard, son père se suicidait. Kyle et sa soeur aînée ont dû subvenir aux besoins d'un cadet. Kyle Brown s'est battu toute sa vie. Il ne venait pas d'un milieu favorisé, mais avait dû lutter comme tant d'autres Canadiens. Son entrée dans les forces armées a été pour lui le point culminant de son existence. Il en était fier, car il avait beaucoup travaillé pour y arriver. Il n'a pas été accepté à la première tentative dans les forces armées. Il a dû travailler pour y arriver.

Je connais un peu le fonctionnement des forces armées puisque je suis moi-même entré dans la marine à l'âge de 17 ans. Lorsque j'ai vu les résultats de ce qui s'était produit en Somalie, j'ai cru que


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c'était plus que bizarre. C'était injuste. Il y avait quelque chose de foncièrement mauvais dans le fait que le militaire de grade inférieur soit condamné à cinq ans de prison, alors que ceux-là même qui avaient permis que cette mentalité évolue au sein des forces s'en tiraient à bon compte. Cela me semblait injuste.

Lorsque j'étais dans les Forces canadiennes, si le navire frappait un iceberg, c'était la faute du capitaine, peu importe qui se trouvait sur le pont. C'était une question de responsabilité. Et cette responsabilité gravit tous les échelons de la hiérarchie jusqu'au niveau du ministre. Dans notre système, et d'un point de vue plus général, cela signifie que, en notre qualité de législateurs ou de chefs, si nous acceptons l'honneur d'une responsabilité, nous devons aussi en accepter le fardeau.

J'ai demandé à rencontrer Kyle Brown parce que je voulais lui parler personnellement pour comprendre ce qui s'était produit et, plus encore, je voulais lui dire: «Ce qui s'est passé est inexcusable, mais vous devez savoir que vous n'êtes pas seul. Certains d'entre nous savent qu'ils portent une part de responsabilité pour ce qui vous est arrivé.»

J'ai d'abord rencontré Kyle Brown, alors qu'il était détenu à la prison à sécurité maximale d'Edmonton. C'était la première fois que je me trouvais dans une telle situation. J'ai traversé tous les points de contrôle et j'ai entendu toutes les portes se verrouiller avant de parvenir à cet homme. Lors de notre première rencontre, il était craintif parce que tous les gens de pouvoir qu'il avait rencontrés jusque-là l'avaient trompé et utilisé d'une façon ou d'une autre: les journalistes pour en tirer un article et le laisser tomber ensuite, le système judiciaire militaire pour le berner, dès le début. Kyle Brown, en remettant l'enregistrement vidéo aux autorités, s'est incriminé lui-même et a empêché tout camouflage de l'incident. C'est celui qui, en toute connaissance de cause, s'est incriminé pour prévenir la dissimulation, tout en sachant très bien qu'il allait porter blâme parce que personne d'autre ne le ferait. Il s'est retrouvé en prison.

(1235)

Je crois qu'un tel geste dénote un style de personne de la plus haute trempe. Il ne s'agit pas d'une personne qui a grandi dans un milieu privilégié. Comparez cela au style d'un autre intervenant dans cette affaire, Robert Fowler. Celui-ci vient d'un milieu privilégié. Il occupait un poste d'autorité morale au sein de notre nation. Et qu'a-t-il fait? Il a induit en erreur le ministre de la Défense nationale, vis-à-vis duquel il était responsable pour une raison ou une autre. Pourtant, il est resté à son poste parce que le premier ministre de l'époque était incompétent ou pour une autre raison. Cette personne a toujours la confiance du gouvernement.

J'ai rendu visite à la personne qui se trouve à l'autre extrême, celle qui a eu le courage de s'incriminer pour éviter que l'on étouffe toute l'affaire. Il savait, depuis le début, que ce qui se passait était répréhensible. Il savait que sa participation était répréhensible. Il y avait participé en raison de l'orientation du régiment auquel il appartenait. Il n'était qu'un subalterne.

Je l'ai rencontré en prison. Il avait les larmes aux yeux. Il m'a dit: «Aux yeux de tous les citoyens canadiens, je suis responsable. Je suis moins que rien. Je suis entré dans l'armée et je suis allé en Somalie dans l'espoir de faire honneur à notre pays. Je voulais rentrer après avoir apporté une certaine gloire à mon pays et à mon régiment. Au lieu de cela, je suis en prison. D'autres militaires impliqués dans cette affaire font n'importe quoi pour se blanchir. Personne n'a accepté de responsabilité.»

La déclaration que je vais vous lire est en réponse à des questions posées à des audiences de libération conditionnelle, alors que Kyle Brown était à Bowden, dans l'attente d'être libéré. Je voudrais ajouter aussi que Kyle Brown a dû payer sa propre défense. Sa soeur s'est endettée pour le défendre, car ils n'avaient pas confiance dans la justice militaire. Les deux avocats à se rendre en Somalie ont pris la défense des deux premiers accusés. Les quatre autres n'ont pas eu droit à un avocat. Les deux premiers accusés ont été acquittés. Les quatre autres ont été inculpés. Après cela, parce qu'ils ne sont pas stupides, les soldats ont compris que quiconque donnait des renseignements était inculpé, ce qui fait que personne n'en a donnés.

Kyle Brown a dit ceci à l'audience de libération conditionnelle: «On conditionne le soldat à obéir aux ordres sans discussion. On lui apprend également qu'il a l'obligation morale de ne pas exécuter un ordre illégal.» Kyle Brown a dit à moi et à d'autres: «J'ai eu ce que je méritais. Je le savais et je n'aurais pas dû le faire. Je l'ai fait. J'aurai dû intervenir pour les protéger. J'ai eu tort. J'accepte la punition qui m'a été infligée.» Mais enfin pourquoi personne d'autre n'échoue en prison? Pourquoi la personne qui a permis le développement de cette culture ne finit-elle pas en prison? Pour est-ce Bob Fowler, le sous-ministre de la Défense qui a mal conseillé la ministre de la Défense, qui représente notre pays aux Nations Unies?

Kyle Brown a dit encore ceci à son audition: «Le problème, c'est qu'on ne nous dit pas ce qu'il faut faire lorsque des supérieurs donnent des ordres illégaux, voire les exécutent.» Que faire dans une situation comme en Somalie où des sous-officiers haut gradés se promènent ivres? Il n'y a pas de leadership. Personne ne rend des comptes à personne. Pendant ce temps, le militaire qui est au plus bas échelon échoue en prison. Quel genre de signal cela envoie-t-il aux autres membres des forces armées? Voilà ce dont il est question ici.

(1240)

Il est question de personnes en position d'autorité qui devraient assumer les responsabilités de leurs fonctions au lieu de blâmer un caporal, par exemple, qui a montré qu'il a du caractère, contrairement au sous-ministre qui n'en a pas. C'est de cela dont il s'agit.

[Français]

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, je veux d'abord féliciter les deux députés qui sont intervenus pour le Parti réformiste.

J'ai eu le plaisir de travailler avec le député de Saanich-Les Îles-du-Golfe qui, pour moi, est un gentilhomme extraordinaire. Il a été militaire pendant plusieurs années et il connaît les problèmes des forces canadiennes. Nous avons siégé ensemble au comité


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mixte. Je pense que le député de Saanich-Les Îles-du-Golfe sait de quoi il parle lorsqu'il parle du moral des troupes.

Je veux également féliciter l'autre député qui est intervenu. Je pense que ces gens-là, comme nous, veulent connaître la vérité.

Au moment où on se parle, on prévoit que cette Commission coûtera 25 millions. Or, ce qui est le plus triste, c'est qu'on ne saura pas vraiment ce qui s'est passé après, que les Canadiens ne sauront pas de quelle façon on a tenté de camoufler la vérité, et c'est ce qui est aberrant. Dépenser de l'argent, quand il est bien dépensé, vous comprendrez que les Canadiens sont d'accord.

On a un problème dans les forces canadiennes. Il y a, je le dis et mon parti le pense, des gens extraordinaires dans les forces canadiennes. Il y a des gens qui travaillent fort, mais actuellement, le moral des troupes est miné, et on pense que c'est par le haut. C'est pour cela qu'il faut prendre les mesures nécessaires.

Ce que nous demandons, et je vois que le Parti réformiste nous appuie, c'est un prolongation de quelques mois. On ne demande pas dix ans mais quelques mois.

Je demande au député si, selon son expérience, il croit que le délai que le Bloc québécois et le Parti réformiste demandent est un délai raisonnable. Est-ce qu'il croit que grâce à cela, on connaîtra la vérité et qu'on pourra prendre les mesures qui s'imposent pour corriger la situation?

[Traduction]

M. McClelland: Monsieur le Président, à mon avis, la seule façon dont nous-non seulement nous, mais également les Canadiens et les forces armées-pouvons conserver la confiance dans les Forces canadiennes, c'est d'y exorciser tous les fantômes et tous les démons. Peu importe le temps qu'il faudra et combien cela coûtera, le jeu en vaut la chandelle.

Permettez-moi de donner un autre exemple. Le sergent Mark Boland dormait au moment des événements. Il était chef de section. Il a accepté la responsabilité des événements, car ils se sont produits pendant son quart de surveillance. Même s'il n'était pas sur les lieux, les personnes en cause étaient directement sous ses ordres et il a accepté la responsabilité de leurs actes. Il a plaidé coupable à un abandon de responsabilité parce que ces événements s'étaient produits. Il a négocié un plaidoyer et a obtenu une peine d'emprisonnement de neuf mois.

Il est militaire de carrière. Il a reconnu ses torts. Les forces armées lui ont dit: «Plaidez coupable. Nous vous imposerons neuf mois d'emprisonnement, puis vous pourrez refaire votre vie.» Il a purgé ses neuf mois, puis les forces armées ont interjeté appel. Ensuite, il s'est vu imposer plus d'une année d'emprisonnement et les forces armées ont pu le renvoyer.

Mark Boland était soldat de carrière exemplaire. Si la commission d'enquête veut entendre des histoires d'horreur sur ce qui se passait en Somalie, elle devrait l'interroger. Mark Boland a reçu directement d'un officier plus haut gradé complètement ivre l'ordre de tirer de sang-froid sur un Somalien et il a refusé. La commission n'a qu'à l'interroger.

Mark Boland n'a pas qualité pour comparaître devant la commission. Comment est-ce possible? Lorsque la police militaire s'est rendue à son domicile à Petawawa pour l'arrêter une deuxième fois, elle l'a fait devant sa femme et ses enfants. Elle l'ont emmené de force pendant que ses enfants criaient: «Papa, qu'est-ce qui se passe?»

Voilà le traitement qu'on a réservé aux bas gradés, contrairement à celui qu'ont reçu les hauts gradés. C'est pour cette raison qu'il existe actuellement un problème de moral dans les Forces canadiennes. Nul n'est besoin d'être savant pour s'en rendre compte.

(1245)

[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, d'entrée de jeu, j'aimerais vous signaler que je partagerai mon temps avec mon honorable collègue d'Hochelaga-Maisonneuve.

«Le capital de confiance des gouvernants auprès des gouvernés est de toute première importance. Cette désaffection semble tenir à plusieurs causes: certains élus ont commis des indélicatesses, d'autres ont gouverné avec arrogance. Les citoyens sont mécontents parce qu'ils ne sont pas consultés, parce que leurs buts ne sont pas pris en compte, parce que les affaires publiques, lorsqu'elles deviennent cruciales, sont traitées à huis clos.» Je ne saurais m'attribuer ces belles paroles; ce texte vient du livre rouge du Parti libéral du Canada. Le texte se poursuit ainsi: «Un gouvernement libéral adoptera un train de mesures pour rétablir la confiance dans les institutions publiques.»

Ce parti qui, au cours de la campagne électorale, se présentait comme étant le modèle d'intégrité, les champions de l'intégrité, les champions de la transparence, ceux qui voulaient, qui souhaitaient, qui disaient pouvoir restaurer la confiance de la population en leurs politiciens et dans leurs institutions, eh bien, ce parti nous présente plutôt l'exemple d'un modèle de camouflage, d'affaires nébuleuses, d'affaires floues, d'affaires cachées, d'affaires hypocrites.

C'est avec plaisir que je m'associe à la motion présentée par mon honorable collègue, le député de Shefford, et qui se lit comme suit:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait s'engager à ce que toute la lumière soit faite sur les événements survenus avant, pendant et après le déploiement des forces canadiennes en Somalie, en octroyant à la Commission d'enquête la prolongation de son mandat jusqu'au 31 décembre 1997.
Et ce, tout comme elle l'avait demandé.

Cette enquête, comme nous le savons tous, a été abruptement et prématurément avortée par le ministre de la Défense et le gouvernement fédéral. Nous sommes en droit de nous demander pourquoi cette Commission ne bénéficie pas de toute la tolérance habituellement accordée aux commissions royales d'enquête.

En effet, ce geste est sans précédent. C'est la première fois qu'un gouvernement refuse une demande de prolongation pour une commission royale ou toute autre enquête judiciaire. Il est donc tout à


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fait normal qu'on s'interroge sur les raisons de ce précédent, qu'on pourrait malheureusement qualifier d'historique.

Notre perplexité et notre questionnement se trouvent par ailleurs amplifiés lorsque le président de cette Commission, le juge Létourneau, affirme qu'avec cette interruption, il lui sera impossible, ainsi qu'à la Commission, de faire toute la lumière dans cette histoire.

En effet, les Québécoises et les Canadiens ne pourront être éclairés sur le rôle des hautes instances militaires et politiques dans cette affaire, et cela, grâce aux bons soins de nos collègues libéraux. Ce seront donc encore une fois les plus petits qui paieront et, dans ce cas-ci, ce seront les simples soldats qui paieront.

Aussi, alors même que l'enquête sur la Somalie s'apprêtait à toucher le coeur même de son mandat, on la coupe brusquement. Pourquoi? «Parce qu'elle a déjà coûté trop cher aux contribuables», répond le ministre de la Défense. Quelle réponse superbe et fallacieuse, venant d'un ministre libéral dont le gouvernement déclenchera bientôt des élections.

Bien sûr, on nous avance des chiffres de l'ordre de 25 millions de dollars, ce qui peut effectivement paraître énorme pour le commun des mortels, mais on omet d'indiquer ce qu'inclut cette somme. Ce chiffre avancé par le gouvernement s'élève plutôt à 14 millions de dollars lorsque l'on déduit le coût de la représentation légale de certains témoins, ainsi que les 10 millions dépensés par le ministère de la Défense pour préparer l'enquête.

De plus, si l'on compare les coûts de cette Commission avec ceux des commissions qui ont eu lieu durant les 15 dernières années, on peut constater que cette dernière n'est pas hors de proportion, loin de là. En effet, à titre d'exemple, la Commission sur les nouvelles technologies de reproduction de 1984 a coûté aux contribuables québécois et canadiens exactement 29 726 730 $, alors que celle concernant les peuples autochtones, qui s'est échelonnée de 1991 à 1996, aura, quant à elle, coûté la somme astronomique de 51 220 732 $.

(1250)

Vous pouvez donc voir que le premier argument soulevé par le ministre au sujet du coût trop élevé de l'enquête sur la Somalie est tout simplement sans fondement.

On a également invoqué la question du délai, la durée de cette Commission. À titre d'exemple, encore une fois, je vous dirai simplement que la Commission sur les peuples autochtones s'est échelonnée sur cinq années; la Commission sur les nouvelles technologies de reproduction, sur quatre années; la Commission sur le futur de la région portuaire de Toronto-imaginez, la Commission sur le futur de la région portuaire de Toronto-près de quatre ans; et celle-ci, qui touche le coeur même de l'organisation et de la discipline au sein des Forces armées canadiennes, on dit qu'elle est trop longue. Argument fallacieux.

C'est comme si j'engageais un détective pour faire enquête sur une situation que je trouverais un peu nébuleuse et, au bout d'un certain temps, alors que le détective touche presque sa cible, touche presque au but, je lui dis: «Écoute, tu m'as déjà fait investir10 000 $, ça me coûte trop cher, on va arrêter là», sachant fort bien que le détective est sur le point de toucher au but; «en plus, ça dure trop longtemps, je ne suis plus capable d'attendre, il faut que je trouve une solution au problème.»

Si je souhaite que le détective arrête son enquête à ce moment, c'est peut-être parce que quelque part, je réalise que le détective est sur le point de découvrir que je suis mêlé à cette affaire. C'est ce dont il est question actuellement.

Il est important pour la Commission de pouvoir utiliser les instruments disponibles avec parcimonie et attention, de façon à faire toute la lumière sur les événements, et ce, le plus efficacement possible. Il ne faut pas se surprendre que tout cela prenne un peu de temps.

Par ailleurs, lorsqu'une commission se retrouve accablée pendant des mois avec des documents falsifiés et lorsqu'elle est submergée de milliers de documents jusque-là introuvables, comme c'est le cas ici, il est normal que les travaux se retrouvent inévitablement ralentis. On nous dit également que la procédure est trop longue, qu'il faut passer aux solutions plutôt que de s'attarder aux problèmes. Mais comment peut-on trouver une solution à un problème qu'on n'a pas fini de définir, qu'on n'a pas fini de cerner? À moins, bien sûr, qu'on veuille éviter de faire la lumière sur ce problème, auquel on se propose d'apporter des solutions.

N'était-ce pas l'ancien ministre de la Défense qui avait promis que la Commission aurait tout le temps et toutes les ressources nécessaires pour aller au fond de cette histoire? Comme il faut passer au coeur du problème pour aller au fond et que le coeur du problème concerne les hauts dirigeants politiques et militaires de ce pays, on préfère ici se contenter de rester en surface, dans le superficiel.

Il aurait été embarrassant pour le gouvernement libéral de devoir dire que M. Anderson, qui a été nommé, par ce gouvernement, ambassadeur du Canada à l'OTAN, que M. Fowler, qui a été nommé ambassadeur du Canada à l'ONU par ce gouvernement, que Mme Campbell, qui a été nommée consul général par ce gouvernement à Los Angeles, que tous ces gens aient pu tremper dans des gestes illégaux. Alors, plutôt que de demander à ces bonnes personnalités, à ces gens honorables de comparaître devant la Commission, on met fin à la Commission, on escamote le tout.

Je pense que la décision du gouvernement est motivée par des considérations purement électorales. Le gouvernement a demandé à la Commission de mettre un terme à ses audiences publiques le 31 mars, et l'oblige à remettre le rapport final le 30 juin. Il est question d'élections générales, c'est dans l'air, au début juin, on parle du 9. Évidemment, le premier ministre ne m'a pas consulté, mais on parle du 9 juin. Donc, les audiences publiques seraient terminées au moment du déclenchement des élections et le gouvernement ne serait pas embarrassé non plus par le rapport qui serait publié après la conclusion des élections.

(1255)

Si c'est le cas, si le gouvernement prend ce genre de décision pour des motifs purement électoraux et pense que les citoyens et les citoyennes ne se souviendront pas, au moment de faire leur «x» sur


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leur bulletin de vote, de la turpitude de ce gouvernement, eh bien, le Bloc québécois sera là pour le leur rappeler.

[Traduction]

M. John Richardson (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, dans la situation actuelle, les Canadiens sont intervenus en Somalie. Ils faisaient partie d'une équipe qui s'est rendue sur place pour prendre la relève d'un État qui avait échoué. Toutes les infrastructures, politiques et autres, avaient disparu et le pays était aux mains de bandes armées.

Les Canadiens ont répondu à l'appel des Nations Unies et des États-Unis. Ils ont envoyé le régiment aéroporté. Nos soldats ont été déployés à Belet Huen où le chaos régnait. Ils ont été soumis à des tirs à de nombreuses reprises. Cela ne ressemblait pas aux autres opérations de maintien de la paix, alors qu'on leur tirait de vraies balles régulièrement et qu'ils étaient victimes de vols, de pillage et d'incursions quotidiennement. Ils étaient soumis à des pressions que les troupes participant aux autres opérations du maintien de la paix n'avaient jamais connues.

Ainsi, nos soldats canadiens ont entrepris l'opération Délivrance comme une mission humanitaire d'une complexité sans précédent. Ils étaient soumis à des conditions auxquelles jamais nos troupes n'avaient été confrontées en tant de guerre. La température variait entre 35 et 40 degrés et nos troupes ont dû affronter des tempêtes de sable, des serpents venimeux et des insectes, en plus d'être toujours confrontées à la menace de la malaria et de dysenterie.

La nature représentait une menace. Nos soldats étaient soumis à des tirs de mortier et des tirs d'armes de petits calibres, on leur lançait des pierres et ils étaient victimes d'attaques en bande. C'était une mission dangereuse.

[Français]

M. Bergeron: Monsieur le Président, je ne comprends pas très bien l'objet de l'intervention de mon collègue. Intervient-il dans le cadre des questions et commentaires ou est-il en train de commencer son discours?

[Traduction]

Le vice-président: Il ne reste que cinq minutes. Je demande à l'honorable secrétaire parlementaire de formuler son observation ou de poser sa question et de conclure assez rapidement.

M. Richardson: Monsieur le Président, je pense que cela ne fait que trois minutes que j'interviens.

Dans le cadre de cette mission précise, nos soldats, ont assuré la sécurité dans une région d'environ 30 000 kilomètres carrés, escorté des convois militaires, procédé à d'importantes opérations de déminage, détruit ou confisqué de grandes quantités d'armes. et les problèmes ne se sont pas arrêtés là.

Ils ont également fait de leur mieux pour améliorer la vie de la population locale. Permettez-moi de vous donner quelques exemples. À l'hôpital Medina de Mogasdiscio, le régiment aéroporté a fait pratiquement la même chose qu'à Belet Huen. Les soldats du génie ont réparé la machinerie, d'autres ont aidé à remettre en état la prison locale, des médecins et des infirmières de l'équipe chirurgicale du groupement tactique ont aidé le personnel médical de l'hôpital international. Ce sont des choses dont on ne parle pas.

Nos soldats ont reçu des éloges des Américains pour s'être acquittés de leur travail de façon extrêmement professionnelle et pour avoir été les meilleurs sur le terrain à ce moment-là.

[Français]

M. Bergeron: Monsieur le Président, je constate que le secrétaire parlementaire du ministre de la Défense a voulu profiter de cette période pour commencer son discours avant le temps. Je ne lui en tiens pas rigueur.

Les arguments qu'il a invoqués manquent nettement de pertinence concernant le discours que je viens de prononcer. Le secrétaire parlementaire laisse entendre que par nos interventions, nous ne reconnaîtrions pas la valeur du travail fait par les militaires dans les bases et dans les missions un peu partout dans le monde et, particulièrement, en ce qui concerne la mission en Somalie.

Là n'est pas la question. Cette semaine, j'entendais le ministre de la Défense vociférer contre une de nos collègues du Parti réformiste en disant qu'elle n'avait aucun respect pour les militaires parce qu'elle osait soulever cette question.

Ce que nous remettons en question aujourd'hui, ce n'est pas la qualité du travail fait par nos militaires ici et dans le monde, c'est la qualité du travail fait par ce gouvernement qui nuit à la crédibilité des militaires canadiens.

(1300)

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, je veux remercier le député de Shefford dont l'intégrité et la perspicacité sont connues de tous. Il nous reste à souhaiter qu'elles soient contagieuses, puisque depuis la prise d'un certain nombre de décisions, nous sommes en droit de critiquer, de poser des questions et d'exiger des comptes. C'est à cela que servent les journées d'opposition.

Pour ceux qui se joignent à nous, je voudrais rappeler que nous avons choisi, comme opposition officielle, comme opposition responsable, comme opposition éclairée, de demander à ce gouvernement de s'expliquer dans ce qui est maintenant devenu le malheureux scandale de la Somalie.

Je voudrais rappeler le libellé de notre motion pour que soit très claire la façon dont nous voulons poser les termes de ce débat:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait s'engager à ce que toute la lumière soit faite sur les événements survenus avant, pendant et après le déploiement des forces canadiennes en Somalie, en octroyant à la Commission d'enquête la prolongation de son mandat jusqu'au 31 décembre 1997.
J'espère qu'on entendra tantôt les députés ministériels se lever et s'expliquer là-dessus. Il est possible, selon une loi du Conseil privé, d'instituer des commissions d'enquête. C'est un mécanisme inhérent à la démocratie que de demander à des gens extérieurs, qui souventes fois ont de l'expertise, de faire le point sur une question en particulier, ou de faire le point sur des éléments contentieux.


7850

Est-ce qu'il y a quelqu'un qui peut être fier, de la Colombie-Britannique jusqu'à Terre-Neuve, en passant par le Québec, est-ce que ce gouvernement peut être solidaire des événements malheureux qui se sont passés en Somalie?

À quoi réfère-t-on? Dans un premier temps, on réfère à des gens qui ont perdu la vie, qui ont été tués, qui ont été assassinés dans des circonstances mystérieuses. Comme parlementaires, lorsqu'il s'agit de politique étrangère, et Dieu sait qu'à maintes reprises, les parlementaires de cette Chambre, particulièrement les ministériels, mais je crois que c'est un élément de consensus, ont toujours été reconnus comme des gens qui croient à la communauté internationale, peu importe le parti en cette Chambre. Non seulement nous croyons à la communauté internationale, mais nous croyons qu'il est possible de dépêcher des gens qui par leur action, par leur présence, par leurs convictions ou par leur expérience vont contribuer au dénouement de conflits de façon préventive ou active.

Est-ce que quelqu'un va nous expliquer, parmi les ministériels, comment il se fait que lorsque nous avons décidé de déployer des troupes en Somalie, à la faveur d'un contexte trouble, il est vrai, comment il se fait que des soldats canadiens aient trempé dans des assassinats? Comment il se fait que des gens aient perdu la vie dans leur pays, alors qu'il y avait des soldats canadiens mêlés à cela? C'est de cela qu'on parle.

Évidemment, quand on pose cette question, le ministre joue les vierges offensées, le ministre tente d'utiliser l'éloquence qu'on lui connaît, mais cette éloquence va sonner creux dans les urnes lorsque les gens auront à se prononcer et lorsqu'ils auront à évaluer le camouflage dans lequel s'est engagé ce gouvernement.

Ce que nous demandons, c'est clair. Il ne s'agit pas de discréditer l'armée. Tous autant que nous sommes savons très bien qu'il y a des gens qui ont choisi de s'engager dans les Forces armées canadiennes, pour lesquels ça donne un sens à leur vie, des gens intègres, honnêtes, brillants, studieux, qui ont fait ce choix de carrière. Nous ne remettons pas cela en cause. Ce que nous remettons en cause, c'est la façon dont les décisions se prennent, la chaîne de commandement. Comment il se fait qu'on se retrouve dans des situations comme celles que nous décrivons aujourd'hui?

Nous souhaitons, et nous continuerons de nous faire insistants auprès du gouvernement pour qu'il nous permette de faire toute la lumière dans ce dossier. Ce n'est pas vrai que toutes les opportunités ont été offertes à la Commission. Vous savez très bien que l'histoire de cette Commission est une histoire de tribulations, parce qu'il y a eu une difficulté d'accès à des documents.

(1305)

Nous savons très bien que le ministère de la Défense n'a pas offert toute la collaboration qu'il aurait dû dans les premiers temps de la Commission pour que les commissaires puissent être saisis de l'ensemble de la documentation qui leur aurait permis de bien faire leur travail.

Qu'est-ce que le gouvernement a à cacher? On sait très bien que dans l'histoire passée des commissions, règle générale, elles ont été un plus, collectivement. Qu'on pense à la Commission Laurendeau-Dunton qui nous a permis de faire le point sur les besoins du Québec. Et l'ensemble des commissions d'enquête, généralement, dans une collectivité, c'est un moyen d'acquérir de l'expertise, des connaissances et, souhaitons-le, de déboucher sur des actions extrêmement précises. Nous pourrions, avec le matériel de cette Commission, si tant est qu'elle est capable d'aller jusqu'au fond des choses, revoir la chaîne de commandements et restructurer le processus décisionnel à l'intérieur des Forces armées canadiennes.

C'est triste. Ce n'est pas un grand jour dans une démocratie lorsque des hommes de pouvoir, lorsqu'on est un ministre autoritaire comme l'est le ministre de la Défense, lorsqu'on choisit d'utiliser son pouvoir pour faire de l'intimidation. En définitive, quelle est la décision du ministre? C'est une décision d'intimidation. On dit à la Commission et à ses commissaires: «Vous n'irez pas jusqu'au fond des choses; vous ne disposerez pas tous les moyens dans vos politiques.»

Il est vrai qu'elle peut convoquer des témoins d'ici jusqu'au mois de mars; il est vrai qu'elle peut déposer un rapport au mois de juin, mais la charge de travail, l'ensemble des documents qu'il faut traiter, la complexité du sujet font en sorte que le facteur temps est une variable déterminante dans la capacité qu'auront les commissaires de s'attaquer à l'ampleur de leur tâche.

Il n'y a pas de quoi être fier de constater jusqu'à quel point le ministre refuse de faire preuve de transparence, parce que c'est de ça dont il s'agit. Pourtant, il fallait entendre les libéraux, en campagne électorale, nous parler de transparence, d'éthique, d'intégrité. Il n'y avait pas de superlatif assez puissant pour dire combien ce gouvernement voulait gouverner de façon différente. Mais chaque fois qu'il y a des éléments un peu contentieux, chaque fois qu'il s'agit de s'expliquer, on se retrouve en présence d'un gouvernement vieillit, éculé par le temps et qui a ce réflexe traditionnel du camouflage et, il faut le dire, non seulement du camouflage, mais du manque d'intégrité.

Il est encore temps parce que, grâce à la vigilance du député de Shefford et de ses amis députés, nous offrons une occasion à ce gouvernement, un gouvernement qui, il faut le dire, devra affronter le verdict populaire dans quelque temps, et vous savez combien nous y sommes prêts, nous, de ce côté-ci de la Chambre.

Je vois que le député de Pontiac-Gatineau-Labelle, une fois de plus, opine. J'espère qu'il votera en faveur de la motion. Nous offrons au gouvernement et à tous les députés la possibilité de se lever un à un et de mettre fin à cette opération de camouflage et de voter dans le sens de l'intégrité, de l'honnêteté et de la transparence. Et si ces mots veulent encore dire quelque chose pour ceux qui forment le gouvernement, ils voteront en faveur de notre motion, permettant aux commissaires d'aller au fond des choses et ils accorderont la prolongation que demandent les commissaires, parce que c'est la façon de faire, compte tenu de ce qui s'est passé en Somalie.

J'espère que les ministériels saisiront cette occasion.

M. Robert Bertrand (Pontiac-Gatineau-Labelle, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt le discours de mon collègue, le député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Bergeron: Ce n'est pas tout de l'écouter, il faut le comprendre.


7851

M. Bertrand: C'est justement cela, j'ai écouté et j'ai compris.

Si vous me le permettez, j'aimerais offrir quelques commentaires. Il est vrai que la Commission se penche sur une question très complexe, soit les événements intervenus en Somalie, ce qui s'est passé avant que les troupes soient envoyées et, évidemment, ce qui s'est passé après.

(1310)

Nous avons toujours respecté l'indépendance de la Commission, et le gouvernement n'a jamais fait de commentaires sur qui devait être appelé à venir témoigner à la Commission d'enquête sur la Somalie, nous n'avons jamais commenté sur les témoignages reçus par cette Commission. La Commission d'enquête sur la Somalie a vu son mandat prolongé jusqu'à la fin juin 1997. Cela signifie qu'elle aura siégé pendant plus de deux ans.

Si pour des raisons internes, la Commission veut entendre des témoignages qui reflètent les inquiétudes de l'opposition, elle est libre de le faire. Nous attendons, avec impatience, le rapport final afin. . .

M. Leroux (Shefford): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le député est-il en train de lire son discours, pose-t-il une question ou fait-il un commentaire?

M. Bertrand: C'est un commentaire, monsieur le Président.

Le vice-président: C'est un point très important pour la Chambre, mais dans notre système parlementaire, on a effectivement le droit de lire des notes. Personnellement, je le regrette, mais c'est aux députés de faire valoir cette question.

M. Bertrand: Monsieur le Président, je disais donc qu'on attend avec impatience, de ce côté-ci, le rapport final de la Commission afin de mettre en oeuvre les conclusions du rapport.

M. Ménard: Monsieur le Président, le député rivalise d'ingéniosité et de spontanéité. Je respecte mon collègue député et je lui dis, en toute amitié, qu'il reconnaîtra avec nous que dans les documents du Conseil privé, que je l'invite à lire, on voit que le Conseil privé a reconnu, lors des prolongations antérieures, qu'il y avait eu un déficit d'évaluation, qu'il y avait eu une mauvaise évaluation quant au temps qui avait été imparti à la Commission pour compléter ses travaux.

La question que doit se poser notre collègue est la suivante: Dans l'état actuel des choses, et compte tenu de l'importance de ce dont on discute, et chaque parlementaire ne devrait jamais oublier qu'il y a eu mort d'hommes, c'est ce qui doit guider nos discussions, le collègue député ne souhaite-t-il pas que pareille situation soit évitée dans l'avenir? Pour que pareille situation soit évitée, notre collègue ne peut-il pas admettre qu'il est souhaitable d'aller au fond des choses et de faire confiance aux commissaires?

Personne en cette Chambre n'a de raison de douter de l'ardeur au travail des commissaires. Alors, s'ils ont besoin de plus de temps pour effectuer leur travail, je crois que le député devrait se rendre à cet argument et faire preuve de maturité et d'ouverture d'esprit et davantage de transparence et d'intégrité.

[Traduction]

Le vice-président: Le député de Saanich-Les Îles-du-Golfe dispose d'environ une minute et il en va de même pour son collègue qui doit répliquer.

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement était très déterminé à poursuivre l'enquête tant qu'il était question de ce qui s'était passé quand les conservateurs étaient au pouvoir, mais, maintenant, l'enquête est sur le point d'aborder la phase qui a suivi le déploiement. Même si les événements se sont produits en mars 1993, ils se sont poursuivis ensuite et, depuis les élections d'octobre 1993, où les libéraux sont arrivés au pouvoir, bien des choses se sont passées.

Le député ne voit-il pas de lien entre le fait que l'enquête s'est déroulée de façon satisfaisante tant qu'elle ne touchait pas le gouvernement et le fait que, à mesure qu'elle s'en rapproche, elle fait peut-être moins son affaire?

[Français]

M. Ménard: Monsieur le Président, le député est un homme perspicace, c'est connu, et nous faisons évidemment les liens qui s'imposent. Les liens qui s'imposent sont ceux d'un gouvernement qui aura de la difficulté à s'expliquer sur les choix qui ont été faits. Cela nous renvoie à la chaîne de commandement. Le député de Verchères a été extrêmement éloquent quant aux nominations récentes et à la classe politique impliquée au sujet de la gestion que le gouvernement a fait de cette crise après le déploiement en Somalie. Ces liens ne nous échappent pas.

Le vice-président: Chers collègues, comme il est maintenant13 h 15, il est de mon devoir d'interrompre les délibérations et de mettre aux voix sur-le-champ toute question nécessaire à l'expédition des travaux des subsides.

La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

[Traduction]

Le vote porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Conformément à l'article 45 du Règlement, le vote par appel nominal est reporté au lundi 10 février, à l'heure ordinaire de l'ajournement.

[Français]

Le vice-président: Est-on d'accord pour dire qu'il est maintenant 13 h 30?

7852

Des voix: Non.

[Traduction]

M. Williams: Monsieur le Président, avant que vous disiez qu'il est 13 h 30, vous constaterez probablement qu'il y a consentement unanime pour que le député de Calgary-Sud-Ouest soit inscrit comme parrain du projet de loi C-341, au lieu de la motion no 259, sur la liste de priorité.

Le vice-président: La Chambre a entendu ce que vient de proposer le député de St-Albert. Y a-t-il consentement unanime à l'égard de sa proposition?

Des voix: non.

[Français]

M. Laurin: Monsieur le Président, j'aimerais qu'on m'explique les conséquences d'intervertir l'ordre de priorité.

Le vice-président: C'est au député de St-Albert à donner cette explication.

[Traduction]

Le député de St-Albert voudrait-il clarifier la question à l'intention du député?

M. Williams: Monsieur le Président, il y a eu des démissions à la Chambre, et j'ai demandé le consentement unanime pour apporter des modifications, afin de tenir la liste de priorité à jour.

[Français]

M. Laurin: Monsieur le Président, il n'y a pas de consentement unanime.

Le vice-président: Évidemment, il n'y a pas de consentement unanime de la Chambre.

M. Bergeron: Monsieur le Président, avant que nous ne décrétions d'emblée qu'il est maintenant 13 h 30. . .

Une voix: Non, non. C'est refusé.

M. Bergeron: Poursuivons-nous avec le débat de la journée d'opposition officielle, monsieur le Président? C'est un peu l'objet de mon intervention.

Avant de décréter qu'il est 13 h 30, peut-être pourrions-nous nous enquérir auprès des collègues à savoir s'il n'y a pas d'autres orateurs sur cette question avant de procéder à autre chose.

Le vice-président: Je saisis très bien ce que le député veut dire, mais malheureusement, ou heureusement, il y a une règle qui dit qu'il faut voter à 13 h 15, c'est pourquoi on a été obligés de le faire tout à l'heure.

Maintenant, il y a une lacune, semble-t-il, et si on peut dire qu'il est maintenant 13 h 30, on peut commencer les affaires émanant des députés. Sinon, nous sommes obligés d'entamer quelque chose pour dix minutes.

[Traduction]

M. Williams: Monsieur le Président, je dois malheureusement avouer que je ne faisais pas trop attention, mais notre député qui doit prendre la parole est absent et je me demandais si vous pouviez suspendre les travaux pendant quelques minutes jusqu'à ce qu'un de nos députés puisse prendre la parole.

Je vous présente mes excuses, monsieur le Président, nous avons un député de la formidable province de Colombie-Britannique qui est disposé à débattre la motion.

[Français]

Le vice-président: On peut dire, semble-t-il, qu'il est maintenant 13 h 30. Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.

______________________________________________


7852

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LA CONDUITE AVEC FACULTÉS AFFAIBLIES

La Chambre reprend l'étude de la motion, interrompue le 2 décembre 1996.

M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, c'est pour moi un plaisir d'aborder le sujet de la motion à l'étude. Le député de Prince George-Bukley Valley propose une motion invitant le gouvernement à renforcer les peines prévues pour conduite avec facultés affaiblies afin de mieux décourager ce comportement et de faire en sorte que les peines correspondent à la gravité de l'infraction.

Je tiens à dire que j'appuie la motion du député, et que je le fais avec plaisir. Je voudrais toutefois élargir le débat et dire, au départ, que je suis généralement en faveur des solutions qui marchent. Toute la question de la conduite en état d'ébriété et des excès d'alcool, avec tous les problèmes qu'ils entraînent, est fort compliquée, et il n'y a pas de solutions simples.

Le député tient à ce que les sanctions correspondent à la gravité de l'infraction, et je suis d'accord avec lui. Quant à savoir si celles qui sont prévues actuellement par le Code criminel sont suffisantes, je crois que cela se discute, et j'ai hâte que le projet de loi soit approuvé et renvoyé à un comité pour qu'on en débatte plus à fond.


7853

En ce qui concerne l'effet dissuasif du code pénal et des sanctions qu'il prévoit, nous devons tenir compte des divers types de personnes qui conduisent en état d'ébriété et nous interroger sur la meilleure façon de les influencer. Tous n'ont pas les mêmes motivations. Cela dépend de l'âge et des antécédents. Tous ne sont pas influencés de la même manière par une modification de la loi.

Une foule de facteurs peuvent décourager la conduite en état d'ébriété. Les sanctions au pénal sont certainement un facteur important, mais elles ne sont pas le seul.

La difficulté, c'est de trouver à partir de quel point elles ont un bon effet dissuasif et quand elles n'en ont pas. Si nous nous éloignons de ce juste milieu, nous risquons de ne pas obtenir beaucoup d'effet d'un accroissement des sanctions. En ce cas, il vaut mieux orienter nos efforts différemment, afin d'obtenir un effet dissuasif beaucoup plus important.

Il semble qu'on peut distinguer au moins quatre catégories de personnes qui conduisent en état d'ébriété. Je ne suis pas sûr qu'elles réagissent toutes positivement à un accroissement des peines.

Il y a tout d'abord les jeunes. Certains n'ont même pas l'âge minimum pour consommer de l'alcool. Pour beaucoup, il s'agit d'une forme de rébellion, l'expression de la volonté d'être adulte, d'une réaction aux personnes de leur groupe d'âge ou d'un ensemble de ces facteurs, entre autres. L'infraction de conduite en état d'ébriété peut être simplement une réaction aux mêmes facteurs qui ont incité le jeune à boire illégalement. Quant aux jeunes qui prennent le volant avec les facultés affaiblies, ils pensent peut-être bien peu ou pas du tout aux conséquences que peut avoir leur geste, que ce soit la mort, les blessures, les ennuis que cela peut leur attirer sur le plan pénal ou l'incidence que cela peut avoir sur leur permis de conduire ou sur leur prime d'assurance, même si l'impression que les accidents n'arrivent qu'aux autres et le sentiment d'invulnérabilité bien connu chez les adolescents peuvent l'emporter sur le simple bon sens comme cela arrive souvent dans d'autres cas.

Ce sont peut-être les conseils de pairs ou l'éducation publique qui réussiraient le mieux à dissuader davantage les jeunes de conduire avec les facultés affaiblies. Il est tout à fait possible que des peines plus sévères prévues au Code criminel figurent dans la seconde moitié de la liste des mesures qui permettraient vraiment d'en dissuader les jeunes.

Je doute pour ma part que des peines plus sévères aient plus d'effet que les peines actuelles prévues au Code criminel sur la décision d'un jeune de prendre le volant après avoir bu.

Un deuxième type de personne qui conduit en état d'ivresse est l'adulte par ailleurs responsable mais qui, par un écart de jugement, boit trop et, sous l'effet de l'alcool, décide ensuite de prendre le volant, ou qui boit et qui prend ensuite le risque irresponsable mais calculé de prendre le volant. Je suppose que ce genre de risque calculé tourne habituellement autour des probabilités de se faire intercepter par la police, et que toute considération à propos de sa sécurité personnelle ou de celle d'autrui n'entre pas en ligne de compte.

Il me semble que renforcer les peines sanctionnant l'ivresse au volant ne contribuerait pas beaucoup à dissuader ce genre de personnes, qui ne font que peser les risques de se faire pincer ou pas. Peu leur importe que la peine minimale consiste à l'heure actuelle en une amende de 300 $ ou de 1 000 $ ou qu'ils risquent de passer un minimum de 30 jours en prison pour une deuxième offense au lieu des 14 jours prévus à l'heure actuelle.

On pourra le mieux dissuader les personnes appartenant à ce groupe en insistant sur le fait qu'elles se feront pincer à coup sûr ou en leur présentant des solutions de rechange à la conduite ou en diffusant des messages qui contribueront à les faire réfléchir sur le risque mince mais inacceptable de perdre la vie ou d'infliger des blessures à soi-même ou aux autres. Autrement dit, au lieu de dépenser de l'argent pour mettre davantage de gens derrière les barreaux, nous ferions mieux de dépenser davantage pour les services de police chargés de dissuader les gens de conduire avec les facultés affaiblies.

Ensuite, il semble qu'un groupe de personnes ayant des problèmes exceptionnels décident de conduire après avoir consommé des boissons alcoolisées. Ce sont les alcooliques qui ajoutent à leur problème d'alcoolisme le fait de conduire en état d'ébriété.

Je tiens à signaler, par contre, qu'il y a aussi des alcooliques qui se montrent très responsables en ne conduisant pas en état d'ébriété. Ils empruntent alors un autre moyen de transport.

Le meilleur moyen d'enrayer la conduite en état d'ébriété, c'est peut-être de vaincre l'alcoolisme. Toutefois, ce ne sont pas tous les alcooliques qui sont prêts à reconnaître qu'ils ont un problème de consommation.

Certes, il semble important de favoriser le recours à des solutions de rechange à la conduite en état d'ébriété, étant donné que beaucoup d'alcooliques ne sont pas disposés à admettre qu'ils ont un problème ni à se soumettre à un traitement.

S'il faut envoyer plus de gens en prison, nous devrions tous souhaiter que les prisons disposent de plus de ressources pour s'attaquer aux problèmes de l'alcoolisme et de la toxicomanie et arriver à y trouver un jour une solution.

Il y a un quatrième groupe de personnes qui conduisent en état d'ébriété, à savoir celles qui se moquent bien de ce qui peut leur arriver ou de ce qui peut arriver à d'autres à cause d'elles. Elles consomment des boissons alcoolisées quand elles le veulent et elles conduisent quand elles ont décidé de conduire. Si quelqu'un est tué ou blessé à cause d'elles, c'est tant pis.

Accroître les peines prévues au Code criminel pour la conduite en état d'ébriété n'aurait aucune incidence sur ce groupe très effrayant bien que petit. Finalement, la décision de conduire en état d'ébriété revient à des personnes de tous genres et de toutes mentalités.


7854

Pour ceux d'entre nous qui ne conduisent pas en état d'ébriété, la solution semble simple. Il s'agit de ne pas conduire lorsqu'on a consommé des boissons alcoolisées et, si l'on ne peut pas rester là où on est, de se faire reconduire. Si l'on ne peut pas rentrer à pied ou en taxi, il vaut mieux ne pas boire.

Pour vous et moi, le risque, aussi léger soit-il, d'avoir un accident tragique et de tuer quelqu'un pour avoir conduit en état d'ébriété a probablement un grand pouvoir de dissuasion. Il y a des gens qui ne sont tout simplement pas dissuadés par cette éventualité ni par les peines qui, dans le Code criminel, punissent la conduite en état d'ébriété, que celles-ci restent les mêmes ou qu'elles soient alourdies.

Pour ces raisons, il vaudrait mieux, à mon avis, au lieu de renforcer les peines prévues dans le Code criminel, axer davantage nos efforts sur les mesures visant à décourager la conduite avec facultés affaiblies et à changer les mentalités au point que celle-ci devienne complètement inacceptable en tout temps et non pas seulement lorsque quelqu'un est blessé ou tué.

Pour cela, il faudrait nécessairement trouver des façons d'aider les gens à dissocier complètement la consommation d'alcool de la conduite. Pour être efficaces au maximum, il faudrait que les efforts soient bien ciblés en fonction des caractéristiques des groupes que j'ai clairement identifiés.

Mais surtout, il faudrait que les gens commencent à se responsabiliser par rapport à ce qu'ils disent ou font à la maison, à l'école, au bureau et dans leur milieu pour empêcher la conduite avec facultés affaiblies.

Je ne veux pas dire que les peines prévues dans le Code criminel n'ont pas d'effet dissuasif, au contraire. Nous savons tous qu'elles en ont un. Les peines actuelles sont très dissuasives.

Cependant, il est beaucoup plus efficace de combiner les peines du Code criminel à d'autres initiatives visant à enrayer la conduite avec facultés affaiblies. Parmi les exemples d'efforts qui aident à prévenir la conduite avec facultés affaiblies, mentionnons la formation dispensée au personnel qui travaille dans des bars ou le recours à des chauffeurs désignés qui ne consomment pas d'alcool.

Les mesures de sensibilisation publique qui permettent d'évoquer le problème, qui aident les jeunes à réfléchir aux conséquences et à décider de ne pas conduire après avoir consommé de l'alcool, cela, avant qu'ils se trouvent à une soirée, en sont un autre exemple.

Une famille peut encourager tous ses membres à téléphoner pour qu'on vienne les chercher sans leur faire subir un interrogatoire lorsqu'ils ont consommé de l'alcool et qu'ils n'ont pas d'autres moyens de transport à leur disposition. Dans le même ordre d'idées, elle peut les encourager à demander de l'aide au lieu d'accepter de monter à bord du véhicule d'un conducteur aux facultés affaiblies.

En résumé, nous devons faire en sorte que la conduite avec facultés affaiblies soit socialement inacceptable. Nous sommes en train d'y arriver. Il est vrai que certains respectent la loi uniquement parce que c'est la loi. Pour d'autres, le risque de tuer ou de blesser autrui est beaucoup plus dissuasif qu'une peine plus sévère qui pourrait leur être infligée en vertu du droit pénal s'ils se faisaient prendre et étaient trouvés coupables.

Il est clair que les conducteurs avec facultés affaiblies et leurs passagers constituent la plus forte proportion des victimes de cette catégorie de conducteurs, plutôt que les personnes dans les autres automobiles ou les piétons.

Au lieu de considérer comme un rabat-joie ou un emmerdeur celui qui tente d'empêcher un autre de conduire s'il a consommé de l'alcool, il faut en arriver à ce que pareille intervention soit la chose à faire pour être socialement responsable.

On peut mettre le droit pénal à contribution pour réduire la conduite avec facultés affaiblies. À mon avis, il y contribue déjà. On peut se demander s'il devrait être davantage mis à contribution, mais on ne devrait pas s'appuyer uniquement sur celui-ci et on devrait laisser d'autres systèmes et personnes intervenir afin de mettre un terme aux méfaits tragiques de la conduite avec facultés affaiblies.

C'est un piège de penser que seul un renforcement des peines prévues en vertu du Code criminel peut faire une différence.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole sur cette motion qui dit ceci:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait songer à renforcer les peines prévues dans les articles du Code criminel qui portent sur la conduite avec facultés affaiblies de manière à a) dissuader davantage les gens de conduire avec des facultés affaiblies et b) faire en sorte que les peines correspondent à la gravité de l'infraction.
À première vue, on se dit que c'est inacceptable que les gens conduisent en état d'ébriété et ils devraient être très fortement pénalisés. C'est le genre de motion où on doit vraiment évaluer la situation actuelle et se demander si la solution proposée par la motion est adéquate.

Après avoir consulté le député de Berthier-Montcalm, notre porte-parole en matière de justice, et un certain nombre d'experts dans le domaine, on réalise que les peines actuellement prévues sont très significatives, et que la voie d'avenir pour que ce problème diminue est d'investir dans l'éducation.

Il faudrait faire plus de publicité, des tournées dans les écoles, les clubs sociaux, mettre à contribution les policiers qui visitent les écoles, les gens qui font des interventions dans les clubs sociaux. C'est de cette façon qu'on obtiendra un changement de comportement, et non parce qu'on recevra un, deux ou trois ans de plus de pénalités dans le Code criminel. On a déjà renforcé le Code criminel et le faire de nouveau n'apporterait pas nécessairement de solution.

Je voudrais donner un exemple qui, au cours des dernières années, a valu beaucoup plus que l'approche punitive, c'est ce qu'on appelle, au Québec, l'Opération Nez rouge, et qui est devenue pancanadienne. Cette initiative est née à l'Université Laval, à Québec, pour venir en aide à l'autofinancement de l'équipe de natation. Cette initiative a pris de l'ampleur et s'étend maintenant à plusieurs provinces du Canada.

Pendant la période des Fêtes, lorsque les gens ont tendance à fêter un peu fort, à prendre trop d'alcool, ils peuvent appeler «Nez rouge»


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et obtenir que quelqu'un les reconduise chez eux. Cela a amené une diminution significative des accidents. C'est ce genre de comportement qu'il faudrait étendre. En même temps qu'on effectue le transport des gens, on fait aussi de l'éducation. D'année en année, le message porte fruit. Les solutions d'avenir sont plutôt dans ce genre d'initiative.

Un autre élément d'information, peut-être pertinent pour les députés réformistes, c'est qu'il y a des provinces où il y a déjà des méthodes dissuasive qui s'ajoutent à celles du Code criminel. Au Québec, avec l'administration des permis de conduire, chaque fois qu'un juge condamne M. X ou Mme Y, par exemple, à six mois d'interdiction de conduire, automatiquement, la suspension est doublée et le permis est suspendu pour une année. Il y a déjà une mesure dissuasive qui existe. On a développé une habitude en ce sens et les conducteurs sont déjà conscients de cette dynamique. Donc, l'effet de la perte du permis de conduire est déjà couvert et il y a déjà un doublement de l'effet de la mesure.

Il y a une autre situation au niveau des récidives. Lorsqu'il arrive à quelqu'un de se retrouver deux fois dans une situation semblable, eh bien, à ce-moment-là, la récidive est traitée plus sévèrement. Au lieu d'avoir, par exemple, six mois de suspension, ce sera un an ou deux, de telle façon qu'il y a vraiment une pénalité supplémentaire. La perte du permis de conduire pour une deuxième fois, c'est presque automatiquement l'annonce que cette personne ne pourra plus conduire pour une très longue période.

Donc, ce sont des mesures qui existent déjà. Elles sont en place et elles donnent déjà des résultats. Ce n'est pas en rajoutant ou en renforçant les peines prévues dans le Code criminel, tel que proposé par la motion, qu'on obtiendra des résultats. La loi est déjà dissuasive.

Le type de comportement qui fait que quelqu'un conduit lorsqu'il ne le devrait pas, parce qu'il est en état d'ébriété, demande une intervention préventive. Il faut aussi développer l'habitude dans les familles et dans les groupes de ne pas laisser quelqu'un partir avec l'automobile lorsqu'il n'est pas en état de conduire. Ce n'est pas parce qu'il y aura deux ou trois ans de plus dans le Code criminel qu'une personne qui a pris une bière de trop décidera nécessairement de ne pas conduire. C'est une habitude qui doit être acquise.

Je voudrais attirer votre attention sur un autre élément qui porte sur la deuxième partie de la motion qui dit qu'on devrait faire en sorte que les peines correspondent à la gravité de l'infraction. Nous croyons que les peines correspondent déjà à la gravité de l'infraction. Celui qui conduit avec des facultés affaiblies et qui ne cause aucun dommage ne recevra pas la même sentence que celui qui, dans le même état, cause des dommages corporels ou autres.

(1335)

Cette latitude, cette discrétion judiciaire qui est donnée aux juges, dans la pratique telle qu'elle a été vécue, l'est correctement, présentement, et il y a un message qui est donné à la personne qui est accusée. Le juge peut en tenir compte, et je pense qu'il faut continuer à ce qu'il puisse y avoir un jugement qui soit porté par le juge dans le cadre des directives qui lui sont données, mais avec une latitude pour bien voir que plus la situation et les effets du comportement sont graves, plus la sentence donnée en conséquence.

On est aussi contre cette motion parce qu'elle laisse sous-entendre qu'il n'y a présentement pas de dissuasion dans le Code criminel, comme si on était vraiment dans une situation de laisser-faire, comme si quelqu'un qui conduit en état d'ébriété, présentement, n'avait aucune pénalité, que les peines étaient vraiment minimes. Et ce n'est pas le cas, il y a de la dissuasion.

On laisse entendre qu'il n'y a pas d'équité dans les sentences, et ce n'est pas démontré au niveau de la jurisprudence quand on fait l'analyse des sentences. C'est sûr que si on s'arrête tout simplement à faire un peu de sensationnalisme, qu'on regarde l'article du journal d'un samedi ou d'un dimanche matin qui rapporte un accident, une situation pénible, difficile, ça peut nous faire réfléchir dans le sens de la motion actuelle. Mais dans ce genre de situation, il faut aller voir plus à fond. Il faut se donner des tableaux sur la situation réelle de ce qui est vécu. Il faut également aller voir à qui est la responsabilité de la juridiction. Par exemple, est-ce que les provinces prennent leurs responsabilités? Est-ce que les mesures qui devraient être mises de l'avant ne sont pas plutôt du type de ce que le Québec a fait, c'est-à-dire de doubler la pénalité prévue pour quelqu'un qui perd son permis de conduire en vertu du Code criminel?

Donc, pour l'ensemble de ces raisons nous considérons que les responsabilités sont déjà exercées correctement. Nous croyons que la mesure proposée dans la motion n'apporterait pas, sur une période de deux, trois, quatre, cinq ou dix ans, de modifications de comportement suffisant. Il n'y aura pas diminution du nombre de personnes qui ne conduiront plus en état d'ébriété à cause de la sévérité accrue. On est déjà rendu à des peines qui sont très significatives.

En conclusion, investissons plutôt dans l'éducation, permettons aux provinces, aux organismes à but non lucratif qui interviennent dans ce secteur, à ceux qui combattent l'alcoolisme d'avoir les moyens de le faire. Donnons-leur la chance d'avoir des fonds pour les aider à intervenir dans leur secteur d'activité. À ce moment-là, on rendra vraiment service à la société.

L'approche punitive sous-jacente à la motion devant nous ne réglera aucune situation, si ce n'est de faire croire, dans une approche que j'appellerais très électoraliste et superficielle, qu'on peut corriger le genre de problème qu'on rencontre avec des solutions de ce type. Cela m'apparaît un peu semblable à l'adolescent pour lequel, au lieu de lui expliquer que son comportement est inacceptable, on va lui taper sur les doigts. Et la deuxième et troisième fois qu'on lui tape sur les doigts, il ne se souvient même plus si cela lui a fait mal. Alors que, si on prend le temps d'investir dans son éducation en s'assurant qu'il y a compréhension du phénomène, la plupart du temps, on va réussir à faire adopter des comportements sociaux plus adéquats. Je pense que l'avenir est plus de ce côté-là.

Je souhaite que la Chambre rejette cette motion et que si jamais il y a un autre débat sur cette situation, qu'il se fasse dans l'optique de connaître la façon dont on règle vraiment le problème, parce qu'on rencontre dans ce secteur un peu le même genre d'attitude que le Parti réformiste a dans plusieurs autres sujets. On va régler les choses avec des gros bâtons et en tapant sur les doigts des gens, alors que les problèmes demandent plus de subtilité dans l'approche.


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Je crois qu'il serait important que les députés qui déposent des motions de ce type aillent voir dans chacun des milieux comment c'est vécu. Qu'ils aillent voir les résultats, qu'ils s'enquièrent des statistiques pour qu'on puisse, à partir des conséquences qui sont connues, prendre des mesures adéquates, et non pas tout simplement faire du sensationnalisme.

[Traduction]

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que je prends la parole aujourd'hui sur la motion de mon collègue de Prince George-Bulkley Valley. Cette motion, je le dis clairement, n'est pas excessive. C'est simplement une motion qui stipule:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait songer à renforcer les peines prévues dans les articles du Code criminel qui portent sur la conduite avec facultés affaiblies de manière à a) dissuader davantage les gens de conduire avec des facultés affaiblies et b) à faire en sorte que les peines correspondent à la gravité de l'infraction.
(1340)

J'ai quatre garçons adultes. Ce sont de jeunes hommes normaux qui profitent de la vie au maximum. Tous les soirs, quand ils sortent, je crains qu'ils me soient victimes d'un accident causé par un conducteur avec les facultés affaiblies. Je pense que d'autres parents de toutes les régions du pays ont la même crainte.

J'ai eu l'occasion de discuter avec des parents qui ont, hélas, perdu un enfant à cause d'un conducteur avec les facultés affaiblies. L'un des membres de mon exécutif est un père dont le fils et les petits-enfants ont été tués sur le coup par un conducteur en état d'ébriété à Prince George, en Colombie-Britannique.

Un père de famille est venu à mon bureau pour m'inciter à participer à une campagne qu'il a amorcée et à parcourir le Canada pour diffuser le message que l'alcool au volant tue. Cet homme a perdu son jeune fils de 23 ans qui ne faisait que commencer à vivre pleinement sa vie. Un jour, tôt dans la soirée, un conducteur avec les facultés affaiblies n'a pas fait un arrêt obligatoire à une intersection, a percuté la voiture du jeune de 23 ans, le tuant sur le coup.

Ce conducteur avait déjà été arrêté plusieurs fois pour conduite avec les facultés affaiblies, il s'était fait suspendre son permis et avait été signalé deux fois à la police le jour même: une fois pour avoir accroché une voiture dans un stationnement et une fois pour avoir grillé un feu rouge alors qu'il avait les facultés affaiblies. A-t-il été arrêté et incarcéré pour la journée à cause des accusations de conduite avec les facultés affaiblies portées contre lui des mois avant? Non, il a pu continuer de conduire avec les facultés affaiblies et, dans la soirée, il a tué un jeune homme qui avait toute la vie devant lui.

Les gens qui prennent le volant après avoir bu de l'alcool sont irresponsables. Ils ont le choix. Ils peuvent prendre une décision. Ils savent qu'il y a des peines, qu'ils risquent de perdre leur permis, mais cela ne semble guère les impressionner. Ils ne semblent pas se rendre compte de la gravité de ce qu'ils font. Je partage les préoccupations de mes collègues.

Je dois avouer que je n'aimais pas voir dans le projet de loi la disposition prévoyant une peine d'emprisonnement automatique de sept ans pour le conducteur en état d'ébriété causant un accident entraînant un décès. Je trouvais cela un peu radical dans le cas d'une première infraction.

Depuis que j'ai été élue, fidèle à la manière de faire réformiste, je soumets les questions aux électeurs de ma circonscription. Je leur ai dit que je trouvais que c'était peut-être un peu trop dur envers ceux qui en étaient à leur première infraction. Je leur ai demandé leur avis et 3 685 d'entre eux ont répondu à un questionnaire. Je leur demandais si un conducteur en état d'ébriété qui causait la mort dans un accident devait être condamné à une peine minimale d'emprisonnement de sept ans.

Les électeurs ont répondu en sachant que je trouvais cela un peu radical lorsqu'il s'agissait d'une première infraction. J'ai reçu 2 463 réponses affirmatives, ou 66,84 p. 100, qui estimaient qu'une peine minimale de sept ans devait être imposée. En revanche, 1 082 réponses, ou 29,36 p. 100, étaient négatives. Ces répondants trouvaient, comme moi, que c'était là une peine nettement exagérée.

Il me faut croire que les gens qui ont étudié la question l'ont abordée en s'appuyant sur leur propre expérience et ont reconnu que les peines avec sursis ne réduisaient pas l'usage de l'alcool au volant. Quelques mois de prison n'arrêtent pas les gens de prendre le volant après avoir bu.

Je ne contredirai pas les députés du Bloc québécois et du Parti libéral qui affirment que l'éducation est importante. Une chose m'impressionne plus que tout le reste et c'est que les programmes d'information sur les risques de décès associés à la conduite en état d'ébriété ont fait en sorte que les jeunes d'aujourd'hui sont beaucoup plus responsables que les gens de notre âge.

La plupart du temps, les jeunes désignent un conducteur lorsqu'ils planifient une sortie. Aujourd'hui, ils hésitent moins qu'avant à laisser leur automobile à la maison et à prendre un taxi ou les transports en commun. Ils sont bien informés sur les risques associés à la conduite en état d'ébriété. Cependant, cela ne les met pas à l'abri de ceux d'entre nous qui boivent trop et prennent le volant, transformant ainsi leur automobile en une arme dangereuse.

(1345)

Aujourd'hui même, un individu a tenté d'enfoncer la porte du Parlement avec un véhicule à moteur. Cela démontre que les véhicules sont des instruments très dangereux lorsqu'ils sont mis entre les mains de personnes qui ont trop consommé d'alcool ou d'autres substances intoxicantes.

Certaines statistiques sur les actes criminels donnent la chair de poule. Les gens savent que la loi interdit l'alcool au volant. Nous savons bien que les tribunaux sont indulgents envers les personnes reconnues coupables de conduite avec facultés affaiblies. Le Code criminel est fait en majeure partie de cas documentés de conduite


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avec facultés affaiblies. Il constitue en grande partie l'historique des cas de conduite avec facultés affaiblies dont les tribunaux ont été saisis.

L'organisation Mothers Against Drunk Driving fait campagne en permanence pour sensibiliser les gens à certains problèmes qui devraient être réglés et pour faire modifier la législation en conséquence, mais elle n'a guère réussi à convaincre le gouvernement jusqu'à maintenant.

Comme je le disais, certaines statistiques sont très inquiétantes. J'ai en main les chiffres de 1994, qui indiquent que la conduite avec facultés affaiblies à causé la mort de 1 414 personnes cette année-là. Cela signifie que l'alcool au volant tue chaque jour 3,8 personnes. Quelque 311 personnes sont blessées quotidiennement au Canada par des chauffeurs ayant les facultés affaiblies. La Ontario Medical Association estime qu'il en coûte 100 millions de dollars par année à la province pour traiter les victimes de l'alcool au volant. Une autre statistique inquiétante révèle que chaque soir un automobiliste sur cinq conduit avec les facultés affaiblies.

L'éducation est une bonne chose, mais il y a lieu de se demander dans quelle mesure les gens tiennent compte des messages véhiculés par des organismes comme MADD, Mothers Against Drunk Driving, les programmes judiciaires pour les personnes reconnues coupables à plusieurs reprises de conduite avec facultés affaiblies, les programmes des Alcooliques anonymes et les programmes de sensibilisation en milieu scolaire. Ces organismes et programmes sont-ils efficaces? Les statistiques que j'ai devant moi semblent indiquer que les gens ne tiennent pas compte de l'information qu'ils reçoivent. Il est naïf de considérer l'alcool au volant comme une maladie sociale et, partant, comme un acte non criminel. C'est non seulement naïf, c'est refuser de voir ce qui se passe et de tenter de faire quelque chose. C'est naïf de penser que l'éducation mettra un frein à ce genre de comportement.

Je viens d'une famille qui a malheureusement souffert de l'alcoolisme. Mon père a passé de très nombreuses années à tenter d'implanter des programmes de traitement dans la province de l'Alberta, et on a reconnu ses efforts en ce sens. Je crois que nous devons considérer l'alcoolisme comme une maladie et le traiter en conséquence. Ce n'est pas cela qui nous empêche de dire que c'est criminel de conduire en état d'ébriété. Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour mettre un terme à ce comportement.

Je ne veux pas joindre les rangs des parents qui ont perdu un enfant parce que quelqu'un a pris le volant après avoir trop bu. Un véhicule devient une arme très dangereuse dans ces circonstances. Je serais en deuil pour le reste de ma vie si cela devait arriver.

Je suis en position d'essayer de faire quelque chose pour empêcher ce comportement et je ne crois certainement pas que nous exagérons en demandant au gouvernement d'examiner le Code criminel et d'envisager des changements qui rendraient la loi fédérale très ferme à l'endroit des gens qui prennent la décision de conduire un véhicule après avoir bu. Ce ne serait pas exagéré de donner plus de mordant au Code criminel et de traiter ces infractions beaucoup plus sévèrement pour faire en sorte que ce genre de tueurs ne circulent pas dans nos rues.

(1350)

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais tout d'abord féliciter mon collègue de Prince George-Bulkley Valley du leadership dont il a fait preuve dans ce dossier.

Comme l'ont mentionné les collègues qui ont parlé avant moi, malgré tous les programmes mis en oeuvre par les services de police pour arrêter ceux qui conduisent avec les facultés affaiblies, le problème a pris l'ampleur d'une épidémie.

Les difficultés sont nombreuses et il vaut la peine de bien définir les problèmes et leurs conséquences pour le Canada.

Les coûts de la conduite en état d'ébriété sont énormes pour la société canadienne. En 1994, 87 838 personnes ont été accusées de conduite avec facultés affaiblies et 1 414 personnes ont été tuées. Ce chiffre est trois fois plus élevé que le nombre de meurtres.

Le gouvernement a fait d'énormes efforts pour promulguer des lois et des règlements sur l'enregistrement des armes à feu. Ces initiatives ne feront absolument pas baisser le nombre de meurtres au Canada.

Il y a, dans notre société, un problème endémique qui cause trois fois plus de décès que les meurtres et le gouvernement ne fait rien pour y remédier. Il en a pourtant l'occasion. Il pourrait adopter les idées proposées dans la motion no 78 pour mettre fin à cette épidémie.

Les coûts sont massifs: près de 400 000 $ par accident mortel; 310 000 $ par mortalité; 12 000 $ par personne blessée. Et ce n'est là que la pointe de l'iceberg.

J'ai eu l'occasion de constater certains faits lorsque je me suis occupé de conducteurs en état d'ébriété dans les urgences des hôpitaux et dans les prisons. D'abord, dans l'une des prisons, j'ai rencontré un détenu qui a été accusé et trouvé coupable de conduite en état d'ébriété à 22 reprises. Il en parlait en riant, il trouvait cela absolument hilarant. Les sanctions actuelles ne sont pas dissuasives.

Le deuxième problème, c'est qu'il est extrêmement difficile pour un policier de faire condamner quelqu'un pour ivresse au volant. Actuellement, il faut environ six heures de travail à un agent pour inculper une personne de conduite en état d'ébriété. C'est pour cela que, lorsqu'un agent arrête une personne dont le taux d'alcoolémie est supérieur à la norme, il préfère suspendre son permis pour 24 heures et le renvoyer chez lui que se lancer dans tout le processus d'inculpation. Ceux qui ont l'habitude d'abuser du système, ceux qui conduisent en état d'ivresse savent cela. Ils savent que si, en théorie, les sanctions peuvent être assez sévères, dans la pratique, elles sont plutôt légères.

Nous devons faire un certain nombre de choses. Nous devons permettre aux agents d'inculper les conducteurs en état d'ébriété de façon expéditive.

Grâce à un certain nombre d'échappatoires du système, un bon avocat peut généralement obtenir que son client s'en tire à bon


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compte. Tout commence au moment où l'on obtient l'échantillon sanguin et cela va jusqu'au procès.

Je ne saurais répéter suffisamment l'importance pour le gouvernement de prendre des initiatives pour simplifier le processus et donner à nos agents de police des moyens d'enrayer cette épidémie. Il faut qu'ils puissent envoyer un message clair à ceux qui envisagent de prendre le volant après avoir bu; il faut que ceux-ci sachent que, s'ils se font prendre, ils seront inculpés et recevront une peine qui sera plus qu'une simple réprimande.

Mon collègue de Prince George-Bulkley Valley a présenté cette motion pour permettre à la Chambre de proposer des sanctions sévères pour lutter contre cette épidémie. Cela n'a rien de bénin. Les statistiques prouvent que le taux est très élevé. C'est très coûteux pour la société.

(1355)

Il nous incombe, à la Chambre, de donner l'exemple une fois de plus et de montrer aux Canadiens que nous nous préoccupons de leur sécurité et que nous allons proposer des idées intelligentes pour résoudre ce problème. Il est également question de façons intelligentes de traiter la question.

Comme ma collègue qui m'a précédé vient de le dire, l'alcoolisme est une maladie qu'on doit traiter comme telle. C'est pourquoi les condamnés pour conduite avec facultés affaiblies devraient être forcés, dans le cadre de la détermination de la peine, de suivre des traitements pour les drogués et les alcooliques. Le seul fait de leur imposer une peine et de les remettre ensuite en liberté ne fait absolument rien pour empêcher que des événements de ce genre ne se reproduisent. La toxicomanie et l'alcoolisme constituent des problèmes complexes, auxquels on doit s'attaquer grâce au counselling. Même si le counselling et le traitement ne sont pas des solutions à toute épreuve, nous en avons désespérément besoin.

Un des grands problèmes dans nos établissements pénitentiaires, c'est qu'on ne met pas suffisamment l'accent sur la toxicomanie et l'alcoolisme dont souffrent ceux qui sont incarcérés dans nos établissements. Il faut essayer davantage de résoudre le problème d'alcoolisme et de toxicomanie de ces individus au lieu de simplement les incarcérer. Quelles que soient les raisons pour lesquelles ils ont été accusés au départ et condamnés, il est important de veiller à briser le cycle de la criminalité, de la punition et de la récidive dans lequel, trop souvent, sont enfermés les gens qui ont commis tout un éventail d'infractions criminelles, qu'il s'agisse de conduites avec facultés affaiblies, de meurtres, de vols qualifiés, de voies de fait causant des lésions corporelles, etc.

Je voudrais une fois de plus féliciter mon collègue de Prince George-Bulkley Valley d'avoir présenté cette motion qui essaie de s'attaquer à l'épidémie de cas de conduite avec facultés affaiblies. J'implore le gouvernement de prendre note de ses initiatives et d'y donner suite.

J'espère que le gouvernement jouera un rôle de chef de file avec ses homologues provinciaux, les procureurs généraux de tout le pays. Il pourrait collaborer avec eux pour établir des moyens efficaces de prévention par l'entremise de l'imposition de traitements obligatoires aux drogués et aux alcooliques. Il pourrait imposer des sanctions importantes à ceux qui se font prendre à conduire avec des facultés affaiblies ou à ceux qui, dans cet état, commettent des infractions et blessent ou tuent des civils innocents et sans défense.

Conduire avec des facultés affaiblies, c'est un peu comme prendre une arme à feu et tirer sur quelqu'un. L'automobile peut se transformer en arme. Il s'agit d'une arme mortelle dont on se sert avec une fréquence indue et tragique au Canada

Souvent, les gens ne se rendent pas compte que des conducteurs avec des facultés affaiblies, qui blessent ou tuent quelqu'un, sont tout à fait insensibles aux souffrances des victimes. Je me rappelle d'un cas tragique dans lequel un homme en état d'ébriété a tué un jeune homme qui conduisait une autre automobile. Cet individu et son copain ont été tous deux blessés. Il était conscient, alors que son copain ne l'était pas. Il s'est approché de son copain, l'a tiré jusqu'au siège du conducteur et s'est assis dans le siège du passager. Il a refusé totalement de collaborer avec la police et n'a pas cessé de mentir tout au cours du processus. Il a fait tout en son pouvoir pour s'en sortir. Il se fichait éperdument du jeune homme que je devais traiter un peu plus loin, qui avait de graves blessures à la tête et qui était en train de mourir.

J'implore le gouvernement de tenir compte des initiatives de mon collègue qui sont constructives, utiles et productives et qui visent à protéger la santé de tous les Canadiens.

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de traiter de la motion no 78 qu'a présentée le député de Prince George-Bulkley Valley.

La motion no 78 demande que le gouvernement songe à renforcer les peines prévues dans les articles du Code criminel qui portent sur la conduite avec facultés affaiblies, de manière à dissuader davantage les gens de conduire avec des facultés affaiblies et de faire en sorte que les peines correspondent à la gravité de l'infraction.

(1400)

Les faits nous montrent tout simplement qu'on ne s'attaque pas au problème et qu'on ne le règle pas. La conduite avec facultés affaiblies est la plus grande cause criminelle de décès et de blessures au Canada. Je répète, car c'est grave. La conduite avec facultés affaiblies est la plus grande cause criminelle de décès et de blessures au Canada.

Le taux de décès résultant d'une conduite avec facultés affaiblies est trois à quatre fois supérieur au taux national de meurtres. Pour situer cela dans son contexte, en 1992, il y a eu 732 homicides au Canada. La même année, 2 500 décès ont résulté d'une conduite avec facultés affaiblies.

De toute évidence, nous avons un problème et nous ne nous y attaquons pas. Les gens semblent penser que, s'ils causent la mort ou des blessures en utilisant une tonne de métal et de plastique qu'ils sont capables de conduire, ce n'est pas vraiment de leur faute.

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À mon avis, c'est de leur faute et notre système d'application des lois et, à bien des égards, notre appareil judiciaire sont conçus pour protéger ces gens. Encore une fois, que fait-on des droits de la victime dans ces cas?

Je voudrais mentionner quelques faits pour situer les choses dans leur contexte. En 1994, l'alcool a constitué un facteur dans 47 p. 100 des décès survenus à la suite d'accidents de la route en Ontario et dans près de la moitié des décès de ce genre survenus en Colombie-Britannique. En 1994, sur les 176 piétons qui ont été tués en Ontario, 57 p. 100 de ces décès sont survenus à la suite de consommation d'alcool par la victime ou par le conducteur du véhicule.

Il nous arrive souvent de ne pas penser aux passagers. Nous pensons à la personne qui est dans l'autre véhicule, mais dans 25 p. 100 des cas de décès, la victime est le passager du conducteur ivre.

Une autre bien triste statistique, c'est que 88 p. 100 des décès consécutifs à des accidents de navigation sont attribuables à l'alcool. On a tendance à ne songer qu'aux voitures sur la route. Et que dire des embarcations? En Colombie-Britannique, ma province, la police a sévi, et à juste titre, contre l'alcool au volant d'une embarcation, car c'est devenu un fléau. Les gens comprennent aisément qu'il ne faut pas conduire sa voiture quand on est ivre, mais quand ils sont dans leur embarcation sur le lac, ils s'imaginent qu'ils peuvent boire autant de bières qu'ils veulent. C'est faux, car c'est encore piloter en état d'ébriété. Or, 88 p. 100 des accidents de navigation mortels sont liés à l'alcool. C'est un chiffre épouvantable. Combien de personnes doivent-elles encore mourir avant qu'on réagisse?

Mon collègue a bien expliqué la situation. Il a dit que nous étions confrontés à un problème. Tous les Canadiens, tous les députés et tous les partis devraient souscrire à cette motion.

En 1995, le juge Peter Cory de la Cour suprême du Canada faisait observer que, chaque année, l'alcool au volant laisse derrière elle sa terrible traînée de morts, de blessures, de souffrances et de ruines. Au chapitre des décès et des blessures nécessitant l'hospitalisation, l'alcool au volant est nettement le crime qui cause le plus de maux sociaux chez nous.

Soixante-cinq pour cent des suspensions de permis pour conduite en état d'ébriété sont consécutives à une deuxième infraction. Que faut-il conclure de cette deuxième infraction? Mais, bon Dieu, pourquoi cette deuxième infraction et d'autres encore pour conduite en état d'ébriété? On ne devrait pas tolérer de récidive.

Si je parle ainsi, c'est que j'étais en Suède il y a plusieurs années. Les Suédois aiment prendre un verre et s'amuser. Mais il ne leur viendra pas à l'esprit de conduire en état d'ébriété. Pourquoi? À cause des peines prévues. Si j'ai bonne mémoire, à l'époque c'était automatique: cinq ans. En cas de récidive, ils perdent leur permis.

C'est le genre de peine qu'il nous faut. Il nous faut saisir l'attention de celui qui conduit avec facultés affaiblies. Ce n'est évidemment pas le cas en ce moment.

(1405)

J'ai pensé notammment à la photographie par radar. On a pu constater un manque de volonté politique à ce sujet. N'oublions pas ce qui s'est passé en Ontario, au cours des dernières élections provinciales. Je pense que l'attitude à l'égard de la conduite en état d'ébriété est semblable. Le public disait ne pas vouloir de la photographie par radar. Les personnes qui roulaient trop vite tuaient des gens, mais on exercé assez de pression sur le gouvernement ontarien pour que celui-ci laisse tomber la photographie par radar. L'Ontario a vendu son système à ma province, la Colombie-Britannique, qui s'en sert maintenant. Depuis, il y a moins d'excès de vitesse chez nous.

Je parle de cela parce que je crois que nous voyons le même phénomène en ce qui a trait à la conduite en état d'ébriété. On se dit: «C'est un problème, mais c'est une question épineuse, sur le plan politique. Le prochain gouvernement ou quelqu'un d'autre s'en occupera.» Ce n'est pas cela qui se passe.

Qu'avons-nous fait? Nous avons mis en place un système où un bon avocat, comme le dit mon collègue, peut pratiquement sortir n'importe qui du pétrin. Le système judiciaire est aujourd'hui submergé. La plupart des causes portent sur la conduite avec des facultés affaiblies et il n'y a tout simplement pas de peines prévues. Cette façon de penser et d'agir se retrouve partout dans le système. Il est clair qu'il faut sonner l'alarme.

J'espère que tous les députés se pencheront sur cette motion et se prononceront en sa faveur. Même si c'est une motion et non un projet de loi, son adoption enverra un message clair à tous les gouvernements les invitant à s'attaquer énergiquement au problème, à élaborer des moyens de dissuasion et à mettre en oeuvre des programmes de sensibilisation pour mettre un terme aux pertes de vie sur nos grandes routes.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion d'aborder la motion d'initiative parlementaire que propose mon collègue de Prince George. Je le félicite d'avoir pris cette initiative afin de pouvoir discuter du problème très grave que pose la conduite avec facultés affaiblies.

Je suis content de l'appui que nous témoigne l'autre côté de la Chambre, notamment le député libéral qui a traité de cette mesure. Il est bon de constater que la plupart des gens appuient ce genre de mesures prises contre ceux qui décident de prendre le volant après avoir bu.

Dans le peu de temps qui m'est accordé, je tiens à discuter de l'effet dissuasif. Bien des fois, lorsqu'il est question d'imposer des peines plus sévères pour diverses infractions, les gens ne sont pas d'accord, parce qu'ils ne croient pas à l'effet dissuasif des peines envisagées. Je sais que cet argument est utilisé notamment dans le cas de la peine capitale. La plupart du temps, l'argument invoqué contre la peine de mort, c'est tout simplement que ce n'est pas un bon moyen de dissuader les gens de commettre des crimes.

De toute façon, que les peines qu'on réclame dans cette motion pour les cas de conduite avec facultés affaiblies soient ou non un bon moyen de dissuasion, ce n'est peut-être pas là le message qu'on veut faire passer. Le message, c'est peut-être que notre système échoue lamentablement pour ce qui est d'imposer des peines qui correspondent à la gravité de l'infraction.

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Je vais donner quelques exemples de personnes qui subissent leur procès ou qui ont subi leur procès et qui ont été accusées ou reconnues coupables d'un certain genre de crime. Il y a le cas deM. Latimer, en Saskatchewan, qui a été accusé de meurtre au deuxième degré. Par contre, il y a le cas d'un autre homme qui subira bientôt son procès et qui, à l'origine, avait été accusé de meurtre au premier degré pour avoir sauvagement étranglé sa femme. Je suppose qu'au aura prouvé qu'il n'y avait pas d'intention criminelle. Le crime a donc été réduit à un homicide involontaire, un crime moins grave que le meurtre au second degré. On doit s'interroger sur ces deux genres de cas.

Ce n'est pas qu'on tente de dissuader un individu sans égard à ce qu'il a fait. Est-ce que la peine correspond à la gravité du crime? Cette considération est très importante dans tout notre système judiciaire.

La décision la plus évidente qui ait été prise récemment et qui donne à penser que notre système de justice est conçu pour faire autre chose est probablement celle qui a sanctionné le geste d'une personne comme Andy McMechan qui avait vendu son produit outre-frontière illégalement, sans permis de la Commission canadienne du blé, et qui a été emmené en prison menottes aux poings, qui a comparu devant un tribunal les fers aux pieds et qui est resté en prison assez longtemps.

Cet homme n'avait rien volé. Il n'avait pas agressé personne. Il avait violé la loi. Personne ne dit le contraire. Il ne détenait pas le permis de la Commission canadienne du blé qui l'aurait autorisé à faire ce qu'il a fait, c'est tout. Pourtant, il a été rudoyé de cette manière, tandis que d'autres, qui entrent par effraction dans les maisons, qui font des violations de domicile et détruisent ou volent les biens qui s'y trouvent, qui commettent des agressions, même des agressions sexuelles ou des viols, se promènent librement dans nos rues.

Mais que se passe-t-il donc? Arrive-t-il que les peines soient proportionnelles au crime commis? C'est ce que ce projet de loi vise à corriger.

Je comprends ce que le député libéral a dit, mais il ne s'agit pas de savoir pourquoi les adolescents boivent ou pourquoi les alcooliques conduisent après avoir bu. Rien de tout cela n'importe vraiment. La chose importante, c'est de faire savoir clairement aux gens que, quelles que soient les circonstances, les peines seront sévères pour les personnes qui conduiront un véhicule après avoir consommé de l'alcool. Cela ne dissuadera personne, je ne conteste pas cela, mais la peine sera sévère. Ce comportement est inacceptable au Canada. Notre seuil de tolérance à l'égard de cette activité très dangereuse va baisser considérablement.

Voilà le message que nous devons transmettre à la population. J'espère que tous les députés vont prendre la bonne décision et appuyer cette motion à l'unanimité afin que les modifications soient mises en oeuvre.

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Des voix: Avec dissidence.

Le vice-président: La motion est adoptée avec dissidence.

(La motion est adoptée.)

Le vice-président: La Chambre est-elle d'accord pour déclarer qu'il est 14 h 30?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: Comme il est 14 h 30, la Chambre s'ajourne à 11 heures lundi prochain.

(La séance est levée à 14 h 16.)