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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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36e Législature, 1ère Session


HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 210

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 19 avril 1999

VINITIATIVES PARLEMENTAIRES

. 1105

VLA RÉFORME DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES
VM. Keith Martin
VMotion
VAmendement

. 1110

. 1115

. 1120

. 1125

VM. Julian Reed

. 1130

. 1135

VMme Monique Guay

. 1140

. 1145

VM. Bill Blaikie

. 1150

VM. Peter Adams

. 1155

VM. André Bachand

. 1200

. 1205

VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLES CRÉDITS
VJour désigné—Les Balkans
VM. Gilles Duceppe
VMotion

. 1210

. 1215

VM. Paul Crête
VM. Daniel Turp

. 1220

. 1225

VAmendement

. 1230

VM. Julian Reed

. 1235

. 1240

VM. Daniel Turp

. 1245

VM. Bob Mills
VM. Bob Mills

. 1250

. 1255

VM. John McKay
VM. Bob Mills
VM. Benoît Sauvageau

. 1300

VM. Gordon Earle

. 1305

. 1310

VM. John McKay
VM. Ghislain Fournier
VM. Jean-Paul Marchand

. 1315

VM. André Bachand

. 1320

. 1325

VM. Myron Thompson
VM. Daniel Turp

. 1330

VM. René Laurin

. 1335

. 1340

VM. John Richardson

. 1345

VM. Sarkis Assadourian
VMme Francine Lalonde

. 1350

. 1355

VDÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
VARTHUR MEIGHEN
VM. John Richardson
VLE SECTEUR FORESTIER
VM. Bill Gilmour

. 1400

VLE JOUR DE LA TERRE
VL'hon. Charles Caccia
VWAYNE GRETZKY
VM. Carmen Provenzano
VVAISAKHI
VM. Gurbax Singh Malhi
VLA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ
VM. Howard Hilstrom
VRASHPAL DHILLON
VM. Reg Alcock

. 1405

VLA SEMAINE NATIONALE DU TEXTILE
VMme Eleni Bakopanos
VLE BÉNÉVOLAT
VM. Antoine Dubé
VWAYNE GRETZKY
VM. Rahim Jaffer
VL'AFFAIRE «PERSONNES»
VM. Rey D. Pagtakhan
VJUDY COOK
VMme Bev Desjarlais

. 1410

VLE BLOC QUÉBÉCOIS
VM. Robert Bertrand
VLE BLOC QUÉBÉCOIS
VM. Paul Crête
VWAYNE GRETZKY
VM. Peter MacKay
VLE BÉNÉVOLAT
VMme Raymonde Folco

. 1415

VWAYNE GRETZKY
VLe Président
VQUESTIONS ORALES
VLE KOSOVO
VM. Bob Mills
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Bob Mills
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Bob Mills
VL'hon. Arthur C. Eggleton
VLA FISCALITÉ
VM. Monte Solberg

. 1420

VL'hon. John Manley
VM. Monte Solberg
VL'hon. John Manley
VLE KOSOVO
VM. Gilles Duceppe
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Gilles Duceppe
VLe très hon. Jean Chrétien

. 1425

VM. Daniel Turp
VL'hon. Lloyd Axworthy
VM. Daniel Turp
VLe très hon. Jean Chrétien
VLES DÉCHETS NUCLÉAIRES
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Lloyd Axworthy
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Christine Stewart
VLE KOSOVO
VM. David Price
VL'hon. Arthur C. Eggleton

. 1430

VM. David Price
VL'hon. Arthur C. Eggleton
VLA FISCALITÉ
VM. Richard M. Harris
VL'hon. John Manley
VM. Richard M. Harris
VL'hon. John Manley
VLE KOSOVO
VMme Monique Guay
VL'hon. Lloyd Axworthy

. 1435

VMme Monique Guay
VL'hon. Lloyd Axworthy
VLA FISCALITÉ
VM. Paul Forseth
VM. Tony Valeri
VM. Paul Forseth
VM. Tony Valeri
VLE KOSOVO
VM. René Laurin
VL'hon. Arthur C. Eggleton
VM. René Laurin
VL'hon. Arthur C. Eggleton

. 1440

VLES DÉCHETS NUCLÉAIRES
VM. Rick Casson
VL'hon. Lloyd Axworthy
VM. Rick Casson
VL'hon. Ralph E. Goodale
VLES BOURSES DU MILLÉNAIRE
VM. Bernard Bigras
VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VLE KOSOVO
VM. John McKay
VL'hon. Lucienne Robillard
VLA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA
VM. Jay Hill

. 1445

VL'hon. Lawrence MacAulay
VM. Jay Hill
VLe très hon. Jean Chrétien
VLE KOSOVO
VM. Bill Blaikie
VL'hon. Lloyd Axworthy
VM. Bill Blaikie
VL'hon. Lloyd Axworthy

. 1450

VM. André Bachand
VL'hon. Arthur C. Eggleton
VM. André Bachand
VL'hon. Arthur C. Eggleton
VL'AGRICULTURE
VMme Rose-Marie Ur
VM. Joe McGuire
VLE MINISTRE DU COMMERCE INTERNATIONAL
VM. Rob Anders
VL'hon. Sergio Marchi
VLA PRODUCTIVITÉ CANADIENNE
VMme Francine Lalonde
VL'hon. John Manley
VL'ASSURANCE-EMPLOI
VM. Yvon Godin

. 1455

VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VLE KOSOVO
VM. David Price
VL'hon. Arthur C. Eggleton
VL'hon. Arthur C. Eggleton
VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VM. Mike Scott
VL'hon. Jane Stewart
VLE SECTEUR DU BÉNÉVOLAT
VM. Bryon Wilfert
VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VLE KOSOVO
VM. Gilles Duceppe
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Gordon Earle
VL'hon. Lloyd Axworthy

. 1500

VM. David Price
VL'hon. Arthur C. Eggleton
VPRÉSENCE À LA TRIBUNE
VLe Président
VAFFAIRES COURANTES
VAFFAIRES ÉTRANGÈRES ET COMMERCE INTERNATIONAL
VL'hon. Lloyd Axworthy
VRÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
VM. Peter Adams
VLES COMITÉS DE LA CHAMBRE
VJustice et droits de la personne
VM. John Maloney

. 1505

VProcédure et affaires de la Chambre
VM. Peter Adams
VLOI SUR LE PROGRAMME DE PROTECTION DES TÉMOINS
VProjet de loi C-494. Présentation et première lecture
VM. Jay Hill
VLES COMITÉS DE LA CHAMBRE
VProcédure et affaires de la Chambre
VM. Peter Adams
VMotion d'approbation
VWAYNE GRETZKY
VM. Sarkis Assadourian

. 1510

VPÉTITIONS
VLes droits des grands-parents
VM. Mac Harb
VLa pornographie juvénile
VMme Val Meredith
VM. Richard M. Harris
VL'avortement
VM. Richard M. Harris
VLe mariage
VM. Richard M. Harris
VLe centre correctionnel communautaire Sumas
VM. Randy White
VQUESTIONS AU FEUILLETON
VM. Peter Adams
VL'hon. Lyle Vanclief
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES

. 1515

VLES CRÉDITS
VJour désigné—Les Balkans
VMotion
VM. John McKay
VM. Gordon Earle

. 1520

VL'hon. Arthur C. Eggleton

. 1525

VM. Deepak Obhrai
VL'hon. Arthur C. Eggleton

. 1530

VM. René Laurin
VL'hon. Sheila Finestone

. 1535

. 1540

VM. Myron Thompson

. 1545

VM. Paul Crête
VMme Monique Guay

. 1550

. 1555

VM. Deepak Obhrai

. 1600

VM. Jean-Guy Chrétien
VM. Stéphane Bergeron

. 1605

. 1610

VM. Daniel Turp

. 1615

VM. Robert Bertrand

. 1620

. 1625

VM. Art Hanger

. 1630

VM. Daniel Turp
VM. Steve Mahoney

. 1635

. 1640

VM. Paul Crête

. 1645

VM. Steve Mahoney
VM. Derrek Konrad

. 1650

VM. Art Hanger

. 1655

. 1700

VM. Peter Adams
VM. Gordon Earle

. 1705

VM. Derrek Konrad
VM. Chuck Strahl

. 1710

. 1715

VM. Daniel Turp
VM. John McKay

. 1720

VM. John Richardson

. 1725

. 1730

VM. Daniel Turp

. 1735

VM. Peter Adams
VMme Diane Ablonczy
VL'hon. Lloyd Axworthy

. 1740

. 1745

VM. Lee Morrison

. 1750

VM. Benoît Sauvageau
VM. Gordon Earle

. 1755

VM. Benoît Sauvageau

. 1800

. 1805

VM. Ted McWhinney
VM. René Laurin
VM. Daniel Turp

. 1810

VM. Bernard Bigras

. 1815

. 1820

VReport du vote sur l'amendement
VMOTION D'AJOURNEMENT
VLes anciens combattants
VM. Gordon Earle

. 1825

VM. Bob Wood

. 1830

VLe budget
VM. Yvon Godin
VMme Bonnie Brown

. 1835

VL'économie
VM. Jim Jones
VM. Walt Lastewka

. 1840

VLa mine BC de Black Lake
VM. Jean-Guy Chrétien

. 1845

VMme Bonnie Brown

(Version officielle)

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 210


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 19 avril 1999

La séance est ouverte à 11 heures.



Prière


INITIATIVES PARLEMENTAIRES

 

. 1105 +

[Traduction]

LA RÉFORME DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.) propose:  

    Motion no 338

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait convoquer, en 1998, une réunion de «nations de même esprit» afin d'élaborer un plan d'action multilatéral visant à réformer les organismes internationaux (par ex., le Fonds monétaire international, la Banque mondiale, les Nations Unies) de manière à ce qu'ils puissent reconnaître les signes précurseurs de conflits et concevoir des initiatives multilatérales permettant de les prévenir.

 

—Madame la Présidente, j'aimerais avoir le consentement unanime de la Chambre afin de retirer «en 1998» puisque cela rend désuète la motion qui a été rédigée il y a deux ans. L'élimination de «en 1998» supprimerait la contrainte de temps et assurerait une plus grande flexibilité.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le député demande de retirer «en 1998» de la motion dont la Chambre est saisie, de manière à ce qu'elle soit à jour. Y a-t-il consentement?

Des voix: D'accord.

M. Keith Martin: Madame la Présidente, je remercie la Chambre de la compréhension dont elle a fait preuve en acceptant le retrait de la mention de l'année dans la motion.

Du Kosovo à l'Afrique centrale, en passant par le Cambodge et tant d'autres régions du monde, plus de 40 conflits sévissent en ce moment même dans le monde. Le Kosovo, qui a dominé les travaux la Chambre depuis un bon moment déjà, n'est que le dernier conflit d'une série de crises qui affligent notre monde et ont entraîné à ce jour la mort ou la mutilation de centaines de milliers voire de millions de personnes, et leur déplacement.

La grande majorité, en fait 90 p. 100 des personnes qui ont été tuées ou mutilées dans ces conflits sont des non-combattants innocents et sans armes, qui souhaitent seulement vivre en paix.

Avant 1945, il y a eu la Seconde Guerre mondiale. De 1945 à la fin des années 80, un état de guerre froide a opposé deux superpuissances qui se surveillaient mutuellement, armées jusqu'aux dents et munies d'arsenaux nucléaires très puissants. La fin des années 80, qui a marqué la fin de la guerre froide et le début de l'après-guerre froide, a été le théâtre d'une prolifération de conflits. De fait, plus de 40 conflits ont éclaté dans le monde et leur nombre n'a toujours pas diminué.

Après la période qui a suivi la guerre froide, on a cru pouvoir profiter des dividendes de la paix. On croyait que le monde serait un endroit plus sûr qu'avant. En réalité, il est maintenant beaucoup plus dangereux, et nous n'avons pas les moyens de faire face à l'instabilité actuelle qui menace de plus en plus d'innocents, coûte des milliards de dollars et cause des ravages dans de nombreux États, dont beaucoup sont en train de s'effondrer.

Certes, le Kosovo retient actuellement notre attention, mais c'est loin d'être le conflit le plus étendu, le plus sanglant ou le plus destructeur de l'heure. Au moment où je vous parle, la plus vaste région ravagée par la guerre se trouve sur le continent africain. Depuis le Sierra Leone et le Liberia à l'ouest, au Soudan, à l'Érythrée et à l'Éthiopie à l'est, et depuis la République centrafricaine au nord à la République démocratique du Congo et à l'Angola au sud, une guerre sanglante fait chaque semaine des milliers et des milliers de morts. Les mutilés sont légion, les viols sont monnaie courante, des enfants meurent de faim et des pays tout entier sont mis à feu et à sang.

Le fait est qu'en tant que nation et qu'en tant que membre de la communauté internationale nous avons échoué lamentablement dans notre tentative de prévenir une telle situation.

 

. 1110 + -

En 1957, Lester B. Pearson a remporté le prix Nobel de la paix pour le concept de maintien de la paix, une mesure innovatrice destinée à sauver des vies humaines. Depuis lors, de nombreuses initiatives intéressantes ont vu le jour, comme le secours humanitaire rapide et le déploiement de forces de rétablissement et de maintien de la paix partout dans le monde.

Cependant, on confond le rétablissement de la paix avec la prévention des conflits. Or, il ne s'agit pas de prévention des conflits, car lorsqu'il nous faut rétablir la paix, le sang a déjà coulé, des gens ont été tués et les germes du mécontentement ethnique et des conflits ont été semés pour des générations à venir. Nous n'avons pas besoin de regarder plus loin que ce qui se passe dans l'ex-Yougoslavie.

Slobodan Milosevic a accédé au pouvoir et a fomenté la violence contre une population. Il a commencé par monter les gens contre les Croates en faisant de la propagande, et maintenant, il sème la haine contre les habitants du Kosovo. La communauté internationale a réagi comme il se devait en empruntant la voie diplomatique.

Quand nous étions confrontés au drame des Juifs et de beaucoup d'autres groupes qui se faisaient massacrer au cours de la Seconde Guerre mondiale, qu'avons-nous fait? Rien. Si l'histoire nous a appris une chose, c'est bien que nous n'avons rien appris. Nous restons encore assis à ne rien faire pendant qu'ailleurs, des milliers de gens sont victimes d'une boucherie.

La motion no 338 a pour objet de nous amener à faire quelque chose, à modifier les organismes internationaux dont nous faisons partie pour en faire des outils de prévention des conflits. Quand des despotes se livreront à des exactions qui ont pour résultat d'exterminer des milliers de gens, nous ne resterons pas là, les bras croisés, à les regarder faire. Nous passerons à l'action avec d'autres pays mus par les mêmes intentions.

Le coût des opérations de maintien de la paix est énorme. De 1945 à 1989, l'ONU a dépensé 23 p. 100 de son budget en missions de maintien de la paix. De 1990 à 1995, ce pourcentage est passé à 77 p. 100. Le maintien de la paix est ruineux pour l'ONU.

Je vais proposer des solutions à ce problème en redonnant de l'autorité à l'ONU. Comme nous le savons, ces conflits ne sont pas apparus du jour au lendemain. Le problème de la Bosnie existe depuis longtemps. Le problème du Kosovo se pose depuis dix ans. Beaucoup de conflits couvaient depuis longtemps. Quand le général Roméo Dallaire nous a mis en garde avec éloquence et conviction avant que n'éclatent les tueries au Rwanda et au Burundi en disant qu'elles allaient provoquer une spirale échappant à tout contrôle et entraîner la mort de centaines de milliers de personnes, nous n'avons rien fait.

Il y a des choses que nous pouvons faire. Nous devons tenir compte des signes précurseurs des conflits. Rien n'arrive en effet sans qu'il y ait d'abord eu polarisation. Un groupe majoritaire commence par priver d'autres groupes de leurs droits fondamentaux. Il se met à en persécuter les membres et à les frapper d'ostracisme. Il polarisera les groupes et essaiera d'imposer ses propres gens.

Comme l'a dit le célèbre auteur, Michael Ignatieff, il polarisera les groupes en misant sur le narcissisme des peuples. Deux peuples peuvent être très similaires, mais accorder une importance démesurée aux petites différences qui existent entre eux et commencer à s'entretuer, jouant ainsi le jeu du despote. C'est ce qui est en train de se produire. C'est très clair.

Les institutions financières internationales, les Nations Unies et les ONG qui oeuvrent sur le terrain pourraient adresser des comptes rendus au centre de crises des Nations Unies. Ce centre, dirigé par Stan Carlson, un Canadien, peut servir à canaliser cette information, qui pourrait être transmise au Conseil de sécurité des Nations Unies ou communiquée à d'autres organisations comme renseignement de sécurité nécessaires pour établir plus rapidement les opérations sur le terrain.

Une réforme du Conseil de sécurité s'impose. Nous pouvons profiter de ce que nous allons siéger au Conseil de sécurité pendant les dix-huit mois à venir pour faire quelque chose en ce sens. Dans sa forme actuelle, le Conseil de sécurité est dépassé, mais il existe peut-être un moyen de le réformer. Nous pourrions l'étendre, y faire participer un plus grande nombre de pays, en particulier ceux de l'Afrique, de l'Amérique du Sud et d'autres régions du monde en développement, afin que toutes les régions soient représentées.

 

. 1115 + -

Il faudrait abolir le droit de veto des cinq membres du Conseil de sécurité, mais, je reconnais que ce serait extraordinairement difficile. Il y aurait peut-être moyen de contourner le problème en veillant à ce que le droit de veto ne puisse être employé que pour les mesures prises en vertu du chapitre VII. Ou bien nous pourrions exiger deux vetos pour bloquer une motion ou une mesure du Conseil de sécurité, ou exiger que toutes les mesures prises par le Conseil de sécurité soient adoptées à une majorité des deux tiers.

L'ONU a également besoin d'être réformées quant à ses initiatives diplomatiques. L'ONU doit se concentrer sur ce qu'elle doit faire. Elle ne peut pas tout faire et être tout pour tous. Actuellement, il y a des dizaines d'organisation qui font la même chose. Pourquoi ne pas focaliser et rationaliser leurs activités de sorte qu'une seule organisation, au lieu de plusieurs, soit chargée d'effectuer certaines tâches?

L'ONU peut faire bien des choses. Premièrement, comme je l'ai déjà mentionné, la propagande est l'un des outils les plus puissants qu'utilisent les groupes pour polariser la population. Par exemple, Slobodan Milosevic a exploité le sentiment anti-Croate pour inciter son propre peuple à approuver les mesures anti-croates. Au Rwanda, les Hutus ont diffusé de la propagande contre les Tutsis au moyen de la radio à ondes courtes.

L'ONU a les moyens de faire de la propagande positive pour rassembler les modérés des deux camps. Il faut employer ce moyen. C'est indispensable pour dissiper la propagande négative diffusée par les despotes qui cherchent à polariser les groupes.

Nous devons recourir à la diplomatie pour rapprocher les différents groupes. Quand la diplomatie échoue, on peut alors avoir recours aux sanctions de même qu'aux interventions militaires.

La puissance douce est une bonne chose, mais elle doit pouvoir montrer les dents quand cela est nécessaire. On ne peut se permettre d'établir une puissance douce que si l'on a une force suffisante. De fortes interventions militaires sont parfois nécessaires pour empêcher que des milliers de personnes ne soient tuées. C'est ce qui se passe aujourd'hui au Kosovo.

Toute la diplomatie du monde ne suffira pas à convaincre des individus comme Slobodan Milosevic de se présenter à la table des négociations avec une véritable volonté de paix. Ces gens-là n'ont pas le même sens de la morale que nous. Il est différent. Des individus comme Hitler, Milosevic, Sese Seko Mobuto et Daniel Arap Moi n'ont pas le même cadre moral que nous. Ils ont un comportement que nous jugeons tous répréhensible.

Les Nations Unies doivent également songer à réorganiser leur registre d'armes en obligeant les divers pays à s'y inscrire afin que l'on puisse savoir quels sont ceux qui se militarisent de façon inappropriée. Si les auteurs du Jane's Fighting Ships peuvent obtenir des renseignements de façon à dresser l'inventaire détaillé des dépenses militaires, alors les Nations Unies devraient certainement pouvoir en faire autant.

J'aimerais m'arrêter aux institutions financières internationales. La Banque mondiale et le FMI sont deux parties d'un triumvirat. Ils conjuguent leurs efforts depuis Bretton Woods, après 1945, afin de se concentrer sur l'établissement de la paix, la reconstruction des sociétés, l'amélioration des marchés des divers pays, et chercher à stabiliser les taux de change sur le plan international. À mon avis, ces deux organismes exercent une force beaucoup plus importante pour la paix dans le monde.

Nous devons tout d'abord voir à ce qu'ils communiquent entre eux et qu'ils coordonnent leurs actions. J'ai été très étonné d'apprendre pendant mon séjour à Washington et à New York l'an dernier que ce n'est que depuis la fin de l'année dernière que les Nations Unies, le FMI et la Banque mondiale ont commencé à se parler. Auparavant, ils fonctionnaient tous chacun de leur côté. Il est donc arrivé que leurs interventions aient empiré les choses du point de vue de la sécurité internationale. Il importe donc qu'ils coordonnent leurs interventions.

Comme le Canada siège au conseil de sécurité et qu'il a beaucoup de contacts dans la plupart des organisations, il peut servir de catalyseur afin d'amener les pays partageant les mêmes idées à travailler ensemble. Le Canada pourrait attirer d'autres pays à collaborer pour réformer tous ces groupes.

Il faut de l'argent pour faire la guerre. Chaque fois qu'on présente des reportages sur des pays en voie de développement à la télévision, on nous montre des enfants de 13 ou 14 ans qui se promènent un AK-47 à la main. Cette arme à elle seule coûte plus cher que ce que cette personne peut espérer gagner un an. D'où vient l'argent? Il arrive que cet argent vienne de chez nous, par l'intermédiaire du FMI, de la Banque mondiale et d'autres organismes. Ces pays en voie de développement s'adonnent parfois à des activités de déstabilisation qui font des victimes innocentes. Nous ne pouvons permettre cela. Nous devrions avoir le pouvoir d'empêcher que cet argent tombe dans les mains de dirigeants mondiaux qui ne répugnent pas à faire une utilisation abusive de leurs pouvoirs aux dépends de leurs habitants et de la sécurité locale.

 

. 1120 + -

Le FMI, la Banque mondiale et d'autres banques de développement régional doivent surveiller très étroitement la façon dont les pays bénéficiaires utilisent les fonds et n'en prêter qu'à condition que ces pays s'engagent dans des activités de bon gouvernement, de consolidation de la paix et d'investissement dans des besoins fondamentaux comme l'éducation et la santé. Investir dans l'achat d'AK-47 et d'armes légères ne permet pas de consolider la paix et nous ne devrions pas être complices de cela.

Nous pourrions investir dans des activités par l'entremise d'institutions financières internationales, comme le fait la banque Grameen depuis longtemps. Du microcrédit consenti à des citoyens ordinaires permet à ceux-ci d'être financièrement autonomes et au monde de consolider la paix.

Les activités des institutions financières internationales peuvent servir à encourager les pays bénéficiaires, mais elles peuvent et doivent parfois servir aussi à les punir. Lorsque des dirigeants de ces pays se livrent à des actes sanglants contre d'autres pays, comme l'a fait Laurent Kabila, de la République démocratique du Congo ou l'empereur Bokassa, en République centrafricaine, ou comme le fait aujourd'hui Daniel Arap Moi, du Kenya, qui incite les Maasis et les Kalenjins à commettre des actes sanglants contre les Kikuyus, pourquoi appuyons-nous de tels actes?

Il faut empêcher ces gens d'agir. Nous devons exercer des pressions sur eux. Nous pouvons le faire de diverses façons. Nous pouvons réclamer le remboursement des prêts, en empêcher la renégociation et suspendre les privilèges d'emprunt.

Je me souviens que j'étais au Kenya, à la fin des années 80, lorsque Daniel Arap Moi, un des hommes les plus riches du monde, demandait l'aumône à d'autres pays. Pourtant, il est multimilliardaire. Cela ne devrait jamais être permis.

Il y a d'autres outils à notre disposition comme le refus du crédit et les sanctions économiques. Cependant, l'argent doit aller aux gens, car nous ne voulons pas qu'ils souffrent. L'argent peut être versé par l'entremise d'organisations non gouvernementales. De bonnes ONG réussissant à offrir de façon efficace des services de base peuvent servir d'intermédiaires pour promouvoir la stabilité économique et s'assurer que les fonds profitent aux citoyens et les aident à devenir autonomes.

L'expérience montre que le principal obstacle à une intervention précoce réside dans la notion de la souveraineté des États. Beaucoup de gens dans le monde entier affirment que la souveraineté des États est sacro-sainte. Beaucoup de gens ont le sentiment que ce qui se passe à l'intérieur des frontières d'un pays ne regarde que ce pays. Cependant, lorsqu'on examine de près cette notion pour voir ce qu'elle signifie en matière de droit international, on peut constater qu'elle ne tient pas lorsque les dirigeants ont un comportement conduisant à la destruction de leur peuple.

La notion de souveraineté des États vient de la croyance selon laquelle la souveraineté est une manifestation de la volonté du peuple. La convention des Nations Unies sur les droits de l'homme protège et défend la volonté du peuple et constitue la base d'un gouvernement. Ainsi, le droit international protège la souveraineté du peuple et sa volonté, et non la souveraineté de l'État.

Aux termes du droit international, il est donc acceptable pour nous de prendre des mesures contre les dirigeants d'un État lorsque ces dirigeants ont un comportement brutal qui va à l'encontre de la volonté du peuple et déstabilise également la région dans laquelle ils se trouvent.

Il y a également une raison tout à fait pratique et égoïste pour laquelle nous devrions intervenir. Lorsque des guerres échappent à tout contrôle et des pays se détruisent de l'intérieur et connaissent l'enfer, qui ramasse les morceaux? En général, ce sont les pays industrialisés. Après le conflit, les pays en guerre sont plus dévastés qu'ils ne l'ont jamais été. Le monde industrialisé et des pays comme le Canada doivent payer la note. Nous fournissons de l'aide humanitaire et militaire et devons même parfois subir des pertes humaines dans le cadre d'opérations de maintien de la paix comme celles dans l'ex-Yougoslavie.

 

. 1125 + -

Nous avons le droit d'intervenir dans de tels cas et ce, dès le départ, parce que c'est nous qui devons réparer les dégâts causés par la guerre.

Au cours des 40 premières années des Nations Unies, il y a eu 13 missions de paix, alors que depuis dix ans, il y en a eu plus de 25. Loin de s'améliorer, la situation empire. Aux termes de la motion no 338 que je parraine, nous devrions convoquer une réunion de nations de même esprit, comme nous l'avions fait dans le cas des mines terrestres. Je crois fermement que c'est faisable. Nous devons faire appel à des nations ayant les mêmes convictions, telles que la Norvège, l'Islande, l'Afrique du Sud, l'Australie et les pays d'Amérique centrale, soit les pays épris de paix. Nous devons élaborer un plan d'action. Nous devons convoquer une conférence, à Ottawa ou ailleurs, pour convenir d'un plan d'action commun. Il ne suffit pas de nous engager à approfondir des études. Nous pouvons présenter ce plan d'action aux organisations internationales. Si nous déployons ensemble des efforts qui tendent vers le même objectif, d'autres pays se rallieront à nous.

Au bout du compte, nous réussirons à réformer les organisations internationales et à en faire des instruments de prévention, de telle sorte que les conflits d'hier ne se répéteront plus et que des vies humaines ne seront plus sacrifiées par suite de l'implosion d'un pays.

S'il est impossible d'empêcher tous les conflits dans le monde, nous réussirons tout de même à en prévenir quelques-uns. Voilà l'objet de la motion no 338 et j'espère que tous les députés l'appuieront, peu importe leur allégeance. Nous pouvons poursuivre ensemble cet objectif, car il est conforme aux mesures que le Canada a prises dans le passé, sans compter qu'il nous permettra de sauver de nombreuses vies et d'économiser des milliards de dollars.

M. Julian Reed (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Madame la Présidente, le député a soulevé bon nombre de questions fort importantes touchant la situation mondiale; chacune à elle seule pourrait justifier un débat.

Un des points les plus importants qu'il a mentionnés est celui de la réforme du système monétaire. Les finances mondiales ont un impact marquant sur les conflits qui éclatent dans divers pays. Ce n'est pas la seule raison, nous l'admettons volontiers. Cependant, le système monétaire est fondamental dans notre monde. Avec la permission du député et de la Chambre, je me pencherai donc sur la question du système monétaire au lieu d'essayer d'aborder tous les points soulevés. Je veux m'attarder à cette question primordiale.

On a récemment vu apparaître, dans le grand plan international, une pléthore d'initiatives concernant la prévention des crises, une gestion plus efficace des crises financières internationales et un développement économique plus durable. Ce qui a d'abord été un plan d'action du G7 est maintenant repris par les nations de l'APEC, principale organisation internationale pour la promotion du commerce ouvert et la coopération économique entre les 21 pays membres riverains du Pacifique. Ce plan fera l'objet de discussions plus tard ce mois-ci, lors des réunions du printemps du FMI et de la Banque mondiale, et en juin, lors du sommet du G7.

Il y a un mouvement de fond en faveur d'une consolidation des institutions financières nationales et internationales et en faveur d'économies plus résistantes aux crises économiques et financières le cas échéant. Le Canada s'est engagé à renforcer le système financier international et l'économie mondiale. Nous avons amorcé le processus lors du sommet du G7 à Halifax en 1995.

L'année dernière, dans le sillage de la crise financière en Asie, le Canada a proposé un plan en six points visant à soutenir la croissance mondiale tout en réduisant le risque d'éventuelles crises financières.

 

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Nous voulons une politique monétaire judicieuse appliquée par les banques centrales des pays du G7, une politique qui soit attentive au risque d'un nouveau ralentissement de l'économie mondiale; une intervention rapide pour renforcer les systèmes financiers nationaux et la surveillance internationale; l'élaboration d'un guide pratique de libéralisation sans danger de la circulation des capitaux dans les pays en développement; un accord sur la mise en place d'urgence d'un meilleur mécanisme pour faire participer les investisseurs du secteur privé à la résolution des crises financières, ce qui n'exclut pas la possibilité d'une disposition permettant de suspendre les opérations en cas d'urgence; et une plus grande attention aux besoins des pays les plus pauvres pour veiller à ce que ces pays reçoivent les ressources et le soutien voulus pour réduire la pauvreté et amorcer leur croissance.

Au sommet du G7 de mai 1998, à Birmingham, les dirigeants ont accéléré le travail entrepris au sommet de 1995, à Halifax, sur le renforcement de l'architecture financière internationale afin de prévenir et de mieux gérer les crises financières. Voici quelques éléments clés de ces efforts: les rapports des trois groupes de travail du G22 sur l'amélioration de la transparence et de la reddition des comptes, le renforcement des systèmes financiers nationaux et la lutte contre les crises financières internationales, rapports remis à la réunion du G22 qui a eu lieu le 5 octobre 1998; la déclaration des dirigeants du G7 sur l'économie mondiale, rendue publique le 30 octobre 1998, avec la déclaration des ministres des Finances et des gouverneurs de banque centrale du G7; le communiqué publié le 20 février 1999 par les ministres des Finances et les gouverneurs de banque centrale du G7; le rapport Tietmeyer remis en février 1999 aux ministres des Finances et aux gouverneurs de banque centrale du G7 sur la coopération internationale et la coordination dans le domaine du contrôle et de la surveillance des marchés financiers et sa proposition prévoyant l'établissement d'une instance chargée de la stabilité financière pour fournir un mécanisme de coordination et d'échange de vues entre responsables de la réglementation et surveillants du secteur financier; la première réunion de cet instance le 13 avril; et deux colloques, dont l'un a eu lieu le 11 mars et l'autre se tiendra le 25 avril 1999 avec la participation de 33 pays industrialisés et marchés émergents pour discuter de problèmes non réglés dans l'architecture financière internationale.

Les secteurs prioritaires pour le renforcement de l'architecture internationale dont les dirigeants ont tracé l'ébauche dans leur déclaration d'octobre 1998 sur l'économie mondiale comprennent une plus grande transparence et une plus grande ouverture des systèmes financiers, de meilleurs moyens de surveiller et de promouvoir la stabilité financière internationale et des améliorations de la régie des sociétés, une libéralisation méthodique du compte capital, la participation du secteur privé à la prévention et la résolution des crises future, la protection des membres les plus vulnérables de la société et l'amélioration de l'efficacité des institutions financières internationales.

Ce dernier secteur prioritaire comprend une proposition pour l'amélioration de l'installation du FMI de façon à prévoir une ligne de crédit de précaution pour les pays qui adoptent vraiment une politique approuvée par le FMI, de même qu'une aide bilatérale au cas par cas et une participation pertinente du secteur privé. Beaucoup a déjà été accompli dans ces secteurs.

Six secteurs ont aussi été cernés comme méritant une plus grande attention dans la déclaration des dirigeants d'octobre 1998. Ces six secteurs prioritaires qui formaient la base de discussion du G33 au cours des colloques internationaux tenus le 11 mars et à tenir le 25 avril, comprennent: l'examen de la portée de la réglementation prudentielle dans les pays industrialisés; le renforcement de la réglementation pudentielle et des systèmes financiers dans les marchés en croissance; l'examen des éléments nécessaires pour le maintien de régimes durables de taux de change dans les marchés en croissance; l'élaboration de nouvelles façons de réagir aux crises et de promouvoir une plus grande participation du secteur privé; l'évaluation des propositions pour le renforcement du FMI et des propositions pour le renforcement des comités provisoire et de développement du FMI et de la Banque mondiale; ainsi que la réduction au minimum du coût humain des crises et la protection des plus vulnérables.

 

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Le Canada appuie les six secteurs prioritaires exposés dans la déclaration des dirigeants d'octobre 1998 et est déterminé à faire avancer les choses dans ces secteurs. Notamment, les objectifs du Canada dans les discussions sur la réforme de l'architecture internationale sont centrés à l'heure actuelle sur la nécessité de s'assurer que les aspects essentiels de ces discussions prennent place dans le cadre d'un processus permanent qui soit représentatif des principaux participants au système financier international, que des mesures visant à faire participer le secteur privé à la résolution de crises soient établies pour atténuer les prêts imprudents et que les aspects sociaux des crises financières internationales soient pris en compte.

Les chances de donner suite aux grands éléments des discussions sur l'établissement d'un processus permanent visant à régler les questions financières internationales seront meilleures si l'on trouve une façon de tenir compte des intérêts et des opinions des principaux participants au système financier international et si l'on se fonde sur les structures de l'autorité, au sein du FMI. Voilà pourquoi le Canada appuie les efforts visant à améliorer le fonctionnement du comité intérimaire.

Le groupe de travail des 22 sur les crises financières s'est entendu sur certains mécanismes à appliquer pour accroître la participation du secteur privé dans la prévention et la résolution des crises, y compris l'insertion de mesures de recouvrement dans les contrats et des accords financiers conditionnels avec le secteur privé. Le Canada accorde la priorité à l'application de ces mécanismes et veut même aller plus loin pour corriger les facteurs qui peuvent inciter certains à accorder des prêts imprudents. Les propositions du Canada visant à accroître la participation du secteur privé dans la prévention et la résolution de conflits ont été, en général, bien accueillies à la rencontre du 11 mars.

Le Canada s'inquiète en particulier des répercussions sociales associées à l'instabilité financière et se réjouit d'avoir l'occasion d'exposer sa position sur la réforme de ces institutions financières.

[Français]

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Madame la Présidente, c'est pour moi un grand plaisir de prendre la parole aujourd'hui à la Chambre et de participer au débat sur la motion M-338 de mon collègue du Parti réformiste.

La motion M-338 se lit comme suit:

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait convoquer une réunion de «nations de même esprit» afin d'élaborer un plan d'action multilatéral visant à réformer les organismes internationaux (par ex., le Fonds monétaire international, la Banque mondiale, les Nations Unies) de manière à ce qu'ils puissent reconnaître les signes précurseurs de conflits et concevoir des initiatives multilatérales permettant de les prévenir.

Quelle belle rhétorique! Mais d'emblée, à la lecture de la motion M-338, le Bloc québécois se devra de voter contre celle-ci. Prenons ensemble le temps d'analyser de plus près cette motion.

Premièrement, il est écrit dans la motion, et je cite:

      [...] le gouvernement devrait convoquer une réunion de «nations de même esprit» afin d'élaborer un plan d'action [...]

On parle de «nations de même esprit». On conviendra avec moi que ce concept de «nations de même esprit» est très général et imprécis. Mais suivant la logique de la motion M-338, il m'apparaît assez évident que le Parti réformiste tente de créer une ségrégation et une coupure qui semble, à nous du Bloc québécois, inacceptable entre les pays industrialisés, communément appelés «nations de même esprit», et les pays en voie de développement.

Cette façon de faire des réformistes est clairement antidémocratique et paternaliste. Comment peuvent-ils, du revers de la main, exclure les pays en voie de développement dans l'élaboration dudit plan d'action multilatéral?

Pourtant, cette réforme proposée par le député d'Esquimalt—Juan de Fuca concerne directement les pays pauvres, puisque la majorité des conflits se retrouvent dans les pays en voie de développement.

Toute réforme qui va changer ou modifier en substance le rôle des organismes internationaux, comme le Fonds monétaire international, la Banque mondiale ou les Nations Unies, doit passer par une consultation des pays concernés par ces changements.

D'ailleurs, j'aimerais faire remarquer au Parti réformiste qu'un organisme comme la Banque mondiale ou les Nations Unies ont pour principale mission d'aider les pays en voie de développement.

 

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Alors pourquoi exclure les pays pauvres de cette réforme? Ce sont eux les principaux bénéficiaires de l'aide apportée par ces organismes. Afin de connaître leurs besoins, leurs préoccupations et d'avoir une juste idée des réalités que vivent ces peuples affligés par la pauvreté ou par des conflits, il est important de les consulter avant d'entreprendre toute réforme. C'est la logique même qui le veut.

Les réformes doivent se faire de concert avec les organismes internationaux, les gouvernements, la population et les ONG en place sur le terrain. Nous avons beaucoup à apprendre de ceux-ci. Mais le Parti réformiste favorise quant à lui l'action unilatérale des pays industrialisés. Le Bloc québécois dit non à cette façon de procéder.

De plus, avec ses idées de grandeur, le Parti réformiste, c'est le cas de le dire, veut réformer tous azimuts. Mais avant de vouloir réformer la terre entière, il devrait commencer par regarder plus près de lui, soit dans le jardin du gouvernement canadien. De la mauvaise herbe, il y en a dans ce jardin!

Le budget de l'ACDI en matière d'aide internationale a été réduit de presque 30 p. 100 depuis l'arrivée des libéraux au pouvoir en 1993. Pourtant, plus de 1,3 milliard de personnes vivent dans une misère épouvantable, survivant à peine avec moins de 1 $ par jour. Chaque jour, 34 000 enfants meurent de malnutrition et de maladies.

Avant l'arrivée des libéraux au pouvoir, le Canada était perçu comme un chef de file dans le domaine de l'aide au développement. Par contre, aujourd'hui, avec la contre-performance budgétaire des libéraux en matière d'aide au développement, le Canada voit son image et sa réputation ternies.

En effet, le Canada ne figure plus au premier rang des pays qui donnent le plus pour l'aide aux pays en voie de développement. Il a du cinquième au onzième rang des pays donateurs les plus riches du monde.

Mme Betty Plewes, présidente-directrice générale du Conseil canadien pour la coopération internationale, le CCCI, qui regroupe une coalition de 100 grandes organisations canadiennes impliquées dans le développement, affirmait, et je cite:

    Le programme de l'aide au développement a été plus touché par les mesures visant à réduire le déficit que ne l'ont été les autres programmes fédéraux.

Voilà qui prouve que le Canada risque de ne plus figurer, très prochainement, sur la liste des membres les plus généreux et les plus engagés de la communauté internationale des donateurs. Ce gouvernement est tellement irresponsable qu'il en est venu à oublier les vraies valeurs humaines.

Dans le dernier budget, le gouvernement a augmenté de 50 millions de dollars son apport au budget de l'aide internationale sur un budget total à l'ACDI d'un peu moins de 2 milliards de dollars.

Le ministre des Finances dit vouloir ainsi faire un pas vers l'atteinte de l'objectif de 0,7 p. 100 du PIB consacré à l'aide au développement. Pourtant, cette somme lui permet tout juste de ne pas reculer. Au rythme actuel, le gouvernement fédéral n'atteindra pas son objectif avant le quatrième millénaire.

Le budget de l'aide internationale constitue l'exemple parfait de la distorsion entre la rhétorique libérale et la réalité des faits et des chiffres.

J'espère donc qu'avec cette petite analyse, le député d'Esquimalt—Juan de Fuca et son parti vont se rendre compte qu'il serait opportun et préférable de venir voir ce qui se passe ici au Canada avant de vouloir révolutionner la terre entière. Avant de vouloir créer de nouvelles structures internationales, concentrons-nous afin de mieux adapter les institutions que nous avons déjà aux nouvelles réalités politiques, sociales et économiques de notre temps.

La motion M-338 du Parti réformiste est d'autant plus incompréhensible quand on regarde le rapport final du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, déposé en mai 1995, et qui s'intitulait: «De Bretton Woods à Halifax et au-delà, vers un 21e Sommet pour relever le défi du XXIe siècle.» Il s'agissait d'un rapport unanime qui s'attardait à étudier les questions liées aux réformes des institutions financières internationales à inscrire au programme du Sommet d'Halifax du G7 en juin 1995.

Il est indiqué à la p. 9 du résumé, et je cite:

    Il importe, en dernière analyse, que les peuples de la terre aient leur mot à dire, par le biais de leurs représentants, au sujet des changements qui ont une incidence sur la sécurité et le développement économique mondiaux.

Le Parti réformiste était d'accord avec cet énoncé puisqu'il a appuyé ce rapport. Alors, comment expliquer aujourd'hui ce changement de cap soudain? Pourrait-on parler d'improvisation?

 

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J'invite le député d'Esquimalt—Juan de Fuca à lire ce rapport très instructif sur le renouvellement et la réforme des institutions d'intendance économique internationale, dont le FMI et la Banque mondiale. S'il avait lu ce rapport, le député n'aurait probablement pas présenté sa motion, parce qu'il est justement question des préoccupations soulevées par le député dans sa motion.

En terminant, je rappelle que le Bloc québécois a toujours été très soucieux du bon fonctionnement des organismes internationaux tels l'ONU, le FMI ou la Banque mondiale. Ils ont déjà prouvé à maintes reprises qu'ils avaient leur raison d'être dans le bon fonctionnement de l'ordre mondial.

Cela étant dit, rien n'est parfait. Au rythme de l'évolution politique, sociale et économique de notre planète, il est essentiel que ces institutions suivent ces changements. Mais de vouloir exclure les pays en voie de développement dans l'élaboration des réformes de ces institutions, comme le préconise le Parti réformiste, le Bloc québécois se doit de voter contre la motion M-338.

L'équilibre mondial est déjà assez fragile présentement. Il est donc hors de question d'accentuer cette réalité d'exclusion des pays en voie de développement. La mondialisation n'est pas uniquement un phénomène économique, mais aussi social et humain.

[Traduction]

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Madame la Présidente, je prends la parole pour faire quelques observations succinctes sur la valeur et la pertinence de la motion présentée par le député, dans le cadre des initiatives parlementaires. Cette motion tombe probablement avec plus d'à-propos que le député ne l'aurait imaginé, même si je sais qu'il a probablement d'abord regretté qu'elle n'ait pas été présentée plus tôt et qu'il a dû demander le consentement unanime de la Chambre pour la modifier et y supprimer la mention de 1998.

Le hasard a voulu qu'en 1999, nous soyons en mesure de comprendre la sagesse de ce qui est proposé dans la motion, c'est-à-dire que le monde devrait s'employer à prévenir les conflits plus qu'il ne l'a fait jusqu'à maintenant et que le Canada devrait convoquer une rencontre ou prendre d'autres dispositions afin de réunir des pays qui partagent une optique commune et qui souhaiteraient réformer nos institutions internationales de manière à ce que la prévention de ce genre de conflits soit plus probable et faisable.

Ce débat tombe à point nommé. Je sais qu'il s'agit d'une initiative parlementaire, mais mon parti et moi-même nous préoccupons depuis longtemps de la réforme de nos institutions internationales. L'autre jour, toujours dans le cadre des initiatives parlementaires, la Chambre a adopté à l'unanimité une motion du député néo-démocrate de Regina—Qu'Appelle qui portait sur le principe de la taxe Tobin et qui, d'une certaine façon, traite d'un élément qui laisse à désirer dans l'économie mondiale et qui a fini par empêcher ou limiter les interventions des institutions financières internationales.

L'un des problèmes de l'économie mondiale et des institutions financières internationales tient au fait que ces dernières ont été conçues pour une économie beaucoup moins mondiale et nettement plus réglementée. Un des problèmes auxquels nous faisons face actuellement, c'est la déréglementation massive des capitaux et de leur mouvement.

Cela risque de créer un climat propice à la déstabilisation des économies nationales, à la déstabilisation des régions, et c'est l'une des raisons pour lesquelles nous devons, en tant que communauté internationale, travailler à l'établissement de ce que l'on pourrait appeler un nouvel accord de Bretton Woods ou une nouvelle façon de réglementer l'économie mondiale, afin de faire pour celle-ci ce que nous avons déjà fait pour les économies nationales. Tout comme nous avons déjà veillé à ce que les économies nationales favorisent l'intérêt national, l'intérêt public pour le bien de tous, nous devons maintenant réglementer l'économie mondiale pour créer les mêmes institutions, à l'échelle mondiale, que nous avons déjà créées au niveau national.

À défaut de quoi, nous finirons par avoir un marché mondial libre de toute entrave où nous constaterons ce que nombre d'observateurs désignent comme le nivellement vers le bas, c'est-à-dire, l'asservissement à une certaine conception de la concurrence. Cela veut dire que les pays sont à la merci des besoins des investisseurs étrangers et du capital international, ce qui se traduit par une baisse des salaires et une diminution des recettes de l'État, ce qui, en retour, entraîne des réductions des programme sociaux et de la capacité des pouvoirs publics d'agir au nom du public, tant en ce qui concerne la fourniture de programmes sociaux, que l'adoption de lois en matière de travail et d'environnement ou de toute autre loi ayant, semble-t-il, pour effet de nous rendre moins concurrentiels.

 

. 1150 + -

Nous sommes donc dans la situation où il faut certainement centrer davantage nos efforts sur la réforme de nos institutions internationales. Certes, en ce qui concerne le FMI et la Banque mondiale, à bien des égards, ces institutions font partie du problème plutôt que de la solution. Elles obligent certains pays à faire des choses qu'ils ne devraient pas être forcés à faire. Par des mesures comme l'ajustement structurel, Elles forcent certains pays, les plus pauvres notamment, à faire crever de faim leur population pour rembourser leurs dettes, soit par l'entremise du FMI, des banques ou, de façon générale, de leurs créanciers. C'est déplorable.

C'est pourquoi, récemment, les dirigeants des Églises du Canada ont lancé un événement appelé Jubilé de l'an 2000, dans lequel on invoque l'esprit du jubilé proclamé dans le Deutéronome, c'est-à-dire l'idée que, tous les 50 ans, la dette devrait être effacée et que les gens aient la chance de...

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Lévitique.

M. Bill Blaikie: Je suis désolé. Lévitique. C'est ce que dit le député libéral, qui connaît très bien la bible.

De toute façon, cette notion du jubilé que nous trouvons dans le testament hébreu est une solution qu'un nombre croissant de Canadiens sont prêts à envisager. Ils ne voient pas à quoi cela servirait de forcer ces pays plus pauvres à s'enliser de plus en plus dans des situations qui, en bout de ligne, sont destructrices pour l'environnement et le tissu social de ces pays et pour nous tous, dans la mesure où ils sont forcés de transformer leur économie pour l'axer sur les exportations et dans la mesure où, pour ce faire, ils sont forcés de détruire leur propre environnement,par exemple s'ils doivent détruire leur forêt tropicale humide pour créer des pâturages afin de faire de l'élevage de bovins pour exporter du boeuf. C'est la seule façon pour eux d'obtenir des devises fortes pour payer leurs dettes, au lieu d'avoir une économie qui répondrait davantage aux besoins alimentaires et sociaux de leur propre population.

Nous ne serons pas plus avancés si, en bout de ligne, toutes les dettes sont payées et toutes les banques sont heureuses, mais que nous ne pouvons plus respirer de l'air pur et ne pouvons plus sortir dehors à cause de l'amincissement de la couche d'ozone. Qu'est-ce que cela nous donnera si les banques finissent par posséder le monde entier, mais si nous perdons du même coup notre capacité de survivre sur la planète parce que nous avons forcés tous ces pays à agir de façon destructrice non seulement pour leur environnement à eux, mais aussi pour notre environnement commun? C'est certainement là une des préoccupations que j'ai et une des choses que nous devons examiner, à mon avis, dans le cadre d'une réforme des institutions financières internationales.

Enfin, je dirai un mot au sujet des Nations Unies. Selon moi, personne ici n'oserait dire dans le contexte de ce débat, compte tenu de ce qui se passe dans l'ancienne Yougoslavie, que les Nations Unies font un travail adéquat dans les circonstances mondiales actuelles. Nous sommes devant un grave dilemme à cause de l'incapacité des Nations Unies d'intervenir dans l'ancienne Yougoslavie. Le Conseil de sécurité est incapable d'en venir à une entente quelconque à cause des droits de veto qui existent. De plus, l'ONU n'a pas la volonté de se donner, à long terme, la capacité de réagir aux situations de ce genre, même s'il y avait entente à cet égard.

 

. 1155 + -

Même si l'ONU avait réussi à convenir d'une intervention au Kosovo, il lui aurait fallu miser sur les capacités militaires des pays membres plutôt que sur ses propres moyens militaires. Il a notamment été suggéré au fil des ans que l'ONU se donne une capacité d'intervention permanente.

Il faut envisager la démocratisation des Nations Unies afin de ne plus nous trouver dans une situation où les pays qui étaient considérés comme de grandes puissances après la Seconde Guerre mondiale continuent d'exercer un droit de veto exclusif sur les affaires mondiales par l'entremise de l'ONU. Beaucoup d'aspects doivent être revus.

Dans la situation actuelle au Kosovo, un des problèmes tient au fait que des gestes sont posés au nom de la communauté internationale. Je vais répéter ce que j'ai dit l'autre soir. Malheureusement, la communauté internationale, par le biais de l'ONU, n'a pas été en mesure d'agir, mais cela ne rend pas l'OTAN représentative de la communauté internationale.

Je crois que des gens qui appuieraient à un certain niveau les interventions au Kosovo ne sont pas à l'aise quand l'OTAN se pose comme représentative de la communauté internationale, ce qu'elle n'est manifestement pas. De plus, l'OTAN est dans ce cas-ci à la remorque d'un pays, les États-Unis d'Amérique, qui a clairement fait tout ce qui était en son pouvoir au fil des ans pour marginaliser les Nations Unies. Ce pays ne verse pas ses cotisations. Un nombre important de membres du Congrès des États-Unis s'en prennent régulièrement aux Nations Unies.

Beaucoup d'autres aspects devraient aussi faire l'objet d'un débat. Il est regrettable que certains pays qui soutiennent actuellement que l'OTAN est représentative de la communauté internationale n'interviennent pas davantage à l'ONU afin de veiller à ce qu'elle puisse devenir le porte-parole authentique de cette communauté.

[Français]

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, je serai assez bref, car beaucoup de députés sont ici dans le but d'intervenir sur la motion du Bloc québécois, en cette journée consacrée à l'opposition.

La façon dont la motion de notre collègue, le député d'Esquimalt—Juan de Fuca, est rédigée est loin d'être parfaite. J'en conviens, et je crois que le député en conviendra aussi. Bien sûr, il ne s'agit pas seulement de la date de la conférence, soit 1998. Mais en résumé, je vais tenter de me pencher sur la l'aspect de la rédaction de la motion.

D'autres collègues l'on soulevé, il est dit dans la motion «nations de même esprit». Il faudrait peut-être faire attention, car lorsqu'on parle d'organisations internationales et qu'on se limite à des «nations de même esprit», même si c'est un travail préalable, pour changer les organisations internationales, il faut un consensus des pays membres de ces organisations.

On se rend compte que, malgré les bons discours et les rencontres qu'on pourrait avoir avec des pays qui pensent comme nous dans certains domaines, on se tire un peu dans le pied, parce qu'on sera incapables de faire ces changements et d'obtenir un consensus dans les organisations internationales.

Mon collègue du Parti réformiste a donné l'exemple des mines antipersonnel. C'est un exemple qui peut être positif ou négatif. Pourquoi? Parce qu'il n'y avait pas de consensus au sein des pays les plus concernés par le problème des mines antipersonnel. Par contre, les pays les moins touchés, comme le Canada, ont signé le Protocole d'Ottawa.

Les pays les plus concernés, ceux qui créent le plus de dommages avec les mines antipersonnel, ne faisaient pas partie du consensus. On doit donc élargir le débat à l'ensemble des pays membres d'une organisation. Au préalable, il faudrait peut-être le faire ici même au pays.

La plupart des gens ne savent même pas combien il y a d'organismes internationaux, et quel organisme fait quoi. De plus en plus, on se rend compte que les gens sont un peu perdus et ne savent plus très bien faire la différence entre l'ONU, l'OMC, l'ancien GATT, l'OTAN et d'autres. Il y a tellement d'acronymes que les gens s'y perdent. Je dois vous avouer que c'est le cas de beaucoup de parlementaires, et moi le premier. On peut y perdre son latin assez rapidement, si on regarde la nomenclature des organisations internationales.

Donc, selon la motion, les «organisations internationales» semblent, d'un côté, inclure l'ensemble des organismes, et de l'autre, semblent les exclure.

 

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Dans la motion, il est stipulé ceci:

    Les organismes internationaux (par ex., le Fonds monétaire international, la Banque mondiale, les Nations Unies) de manière à ce qu'ils puissent reconnaître les signes précurseurs de conflits et concevoir des initiatives multilatérales permettant de les prévenir.

Je ne suis pas certain que l'OMC ait un rôle très important dans la résolution de conflits. Encore là, on ne sait pas exactement de quoi il s'agit. Est-ce que c'est vraiment une question de sécurité, une question militaire, économique ou humanitaire? On ne le sait pas, et c'est malheureux, parce qu'il y a trois grands organismes internationaux dont on entend parler depuis quelques semaines: l'OMC, qui est intervenue à la veille des négociations, l'ONU et l'OTAN.

Donc, on devrait peut-être regarder à l'intérieur même du Parlement et du pays et vulgariser ces organisations internationales, informer les gens qui résident au Québec et au pays et en discuter ensuite avec eux pour voir ce qu'ils en pensent. Lorsque le Canada développera une position à l'intérieur, il sera beaucoup plus crédible à l'extérieur.

Le Canada a un rôle de leadership à jouer à l'intérieur du pays, mais aussi sur la scène internationale. Depuis des décennies, le Canada a joué un rôle en ce qui concerne des changements, des améliorations ou même dans la conception d'organismes internationaux. Malheureusement, depuis quelques semaines, on voit que le leadership du gouvernement du Canada a «mangé une claque» avec ce qui se passe au Kosovo. On a demandé ce que le Canada a fait préalablement à la guerre au Kosovo, et on attend d'avoir les informations. Quels ont été les efforts du gouvernement du Canada? Quel a été le leadership dont le gouvernement du Canada a fait preuve dans le conflit armé en république yougoslave? On ne le sait toujours pas.

L'ONU a fait place au drapeau de la guerre, la guerre sous l'OTAN. Les organismes internationaux changent, l'OTAN en étant le plus bel exemple. L'OTAN était une organisation qui visait à prémunir un des pays membres contre l'envahissement. Maintenant, l'OTAN est devenue une police internationale.

Est-ce là un fait à critiquer? Sûrement à questionner. La réponse de l'OTAN aujourd'hui au Kosovo n'est-elle pas une faiblesse de l'ONU? Peut-être. Peut-être que c'était le seul moyen. Peut-être qu'il y avait aussi d'autres moyens. Peut-être que l'ONU et les leaders à l'ONU, comme le Canada, n'ont pas fait leur travail. Il y a beaucoup de questions qui resteront probablement sans réponse, du moins à court terme.

On voit qu'il y a beaucoup de points négatifs au niveau de la rédaction de la motion. Cependant, nous allons appuyer cette motion, parce qu'elle vise à faire une réflexion sur l'ensemble des organismes internationaux, réflexion qui doit se faire.

Présentement, un comité va étudier l'OMC, un comité va étudier telle autre organisation, tel autre comité va étudier telle autre organisation, mais on n'a pas de portrait global. Il y a une mouvance au niveau des organisations internationales. Un exemple, qui n'est pas militaire, au niveau du droit et de la protection de la propriété intellectuelle, c'est qu'on se rend compte que cette organisation internationale, qui n'a pas de dent, demande à l'OMC d'appliquer des sanctions.

On voit donc qu'il y a une mouvance à l'intérieur des organisations internationales, qui fait en sorte qu'il y a un besoin d'analyser l'ensemble des organisations. Et ce faisant, on devrait peut-être regarder, ici même, au Parlement, la façon dont le Canada adhère à ces organisations et signe des protocoles et des traités sans que le Parlement ait un mot à dire, ou pas grand-chose.

Dans la réforme des organisations internationales, on devrait aussi voir une réforme du Parlement en ce sens qu'il devrait être partie prenante à ces organisations internationales et être impliqué du début à la fin. Ce serait très important. Le Parlement est un outil dont le gouvernement devrait apprendre à se servir beaucoup plus qu'il ne le fait présentement.

Nous tenons à souligner la qualité de la motion, peut-être pas au niveau de son écriture, mais au niveau de ce qu'elle propose, c'est-à-dire une analyse, un changement profond de la manière dont les organisations internationales fonctionnent.

Nous allons l'appuyer avec grand plaisir et nous espérons que cela sera le début d'une réflexion au niveau de ce Parlement par rapport aux organisations internationales.

 

. 1205 + -

Le président suppléant (M. McClelland): La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est reporté au bas de la liste de priorité au Feuilleton.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ—LES BALKANS

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ) propose:  

    Que la Chambre exige du gouvernement qu'il soumette à un débat et à un vote de la Chambre l'envoi dans les Balkans de soldats canadiens pouvant être engagés dans des opérations militaires terrestres et/ou de maintien de la paix au Kosovo et dans la région des Balkans.

M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.

Je voudrais soumettre à votre attention que le chef du Bloc québécois partagera son temps avec notre honorable collègue de Beauharnois—Salaberry. Ultérieurement, pour toute la durée du débat, les députés du Bloc québécois qui prendront la parole partageront le temps qui leur est alloué.

Le président suppléant (M. McClelland): Y a-t-il le consentement unanime pour procéder de cette façon?

Des voix: D'accord.

M. Gilles Duceppe: Monsieur le Président, nous débattons aujourd'hui d'une motion dont l'esprit est éminemment démocratique, dont le caractère est raisonnable et responsable.

Cette motion invite les députés à se prononcer sur l'opportunité de tenir un vote concernant l'envoi de troupes canadiennes au Kosovo et dans les Balkans. La motion devant nous est valable, qu'il s'agisse de troupes combattantes ou de troupes de maintien de la paix.

Peut-être que le débat d'aujourd'hui nous permettra d'en savoir un peu plus sur les intentions du gouvernement, sur ce qui se passe vraiment, sur sa planification militaire et sur ses initiatives diplomatiques. Car c'est là notre principal problème et une des raisons expliquant la présente motion. Nous manquons cruellement d'information. En fait, le gouvernement dispense l'information au compte-gouttes, de sorte que nous sommes mieux renseignés par RDI et CNN.

L'objet de notre démarche n'est pas théorique ou hypothétique, comme le disait le premier ministre la semaine dernière, en réponse à nos questions. J'en veux pour preuve les dépêches parues dans les journaux d'hier ou d'aujourd'hui, notamment The Sunday Observer, faisant état de préparatifs pour une invasion terrestre de la Yougoslavie vers la fin mai.

L'OTAN elle-même, dans les tracts qu'elle a largués récemment au-dessus du territoire yougoslave, affirmait qu'une invasion serait lancée si la Serbie ne se retirait pas du Kosovo.

Nous ne sommes pas les seuls à réclamer que le Parlement se prononce. De nombreux éditoriaux, dans les principaux quotidiens du pays, ont affirmé la même chose.

Par exemple, l'édition du 14 avril du quotidien montréalais The Gazette, mentionnait que nos soldats méritaient de savoir que les élus les appuient et que le premier ministre était «badly wrong» de ne pas permettre un vote à la Chambre des communes.

Le 13 avril, le National Post disait que seul un vote du Parlement donnerait au premier ministre «l'autorité morale» d'impliquer le Canada dans une guerre au sol en ex-Yougoslavie.

La Presse, le même jour, soulignait que le refus du gouvernement de tenir un vote créait un «déficit démocratique».

L'éditorialiste du quotidien Le Soleil écrivait samedi que, heureusement, le Bloc québécois forcerait lundi—soit aujourd'hui—un tel vote à la Chambre des communes.

Susan Riley, chroniqueur du groupe Southam, disait qu'il valait mieux abolir le Parlement plutôt que de le soumettre à la parodie de consultation à laquelle le gouvernement a procédé jusqu'ici.

Il y a quelque chose de singulier et d'inquiétant dans toute cette affaire. Depuis le début, le gouvernement semble être à la remorque des événements. Il donne l'impression d'improviser constamment. D'ailleurs, il est pour le moins ironique que le premier ministre, qui s'est taillé une carrière à se faire du capital politique en évoquant la nécessité pour le Canada d'avoir une politique étrangère indépendante des États-Unis, semble être complètement à la remorque de Washington dans ce dossier.

 

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Nous sommes aussi en droit de nous demander si des soldats canadiens risquent de se retrouver sur la ligne de feu par improvisation parce qu'ils verraient leur mission humanitaire transformée en mission combattante. Ils pourraient entrer ainsi dans le conflit en ex-Yougoslavie par la porte d'en arrière, sans que le Parlement ait pu se prononcer.

Encore hier, on annonçait l'envoi de six nouveaux CF-18 en Italie, ce qui triple notre participation initiale.

Ceci m'amène à poser une question bien simple au premier ministre: jusqu'où ira l'escalade dans la participation canadienne avant que le Parlement ne soit appelé à se prononcer?

Le Canada pourrait donc être techniquement en guerre sans que les parlementaires aient pu voter sur cette question. Cela me semble plutôt incongru dans une société démocratique et dans une démocratie parlementaire.

Cela me semble d'autant plus incongru que le premier ministre, qui était chef de l'opposition officielle en 1991, et qui était assis de ce côté-ci de la Chambre lors des opérations militaires contre l'Irak, réclamait à grands cris un vote du Parlement.

Le chef libéral disait que le gouvernement n'avait pas, et je le cite: «l'autorité morale pour amener le pays dans une situation de guerre», puisque la Chambre des communes, disait-il, n'avait pas approuvé par un vote la participation canadienne à l'opération Tempête du désert.

Le même député, aujourd'hui premier ministre, devrait faire preuve de cohérence, lui qui affirmait le 15 janvier 1991, et je le cite encore:

    Nous nous demandons tous pourquoi le premier ministre [...]

Il parlait du premier ministre Mulroney.

      [...] n'a pas voulu poser la véritable question à la Chambre aujourd'hui, celle à laquelle le pays fait face. Il s'agit de déterminer si les Forces armées canadiennes doivent participer à la guerre.

Aujourd'hui, le gouvernement cherche désespérément des raisons pour ne pas tenir un vote et pour s'objecter à notre motion qui, je le rappelle, est tout à fait raisonnable.

Par exemple, la semaine dernière, on a entendu le premier ministre dire, en réponse à nos questions, qu'il ne voulait pas tenir un vote car cela risquerait de faire paraître des divisions parmi nous. Des divisions que la propagande de Milosevic pourrait exploiter.

Il a utilisé cet argument ridicule, sachant très bien que la presque totalité des députés appuient la participation canadienne à une intervention internationale pour mettre fin aux crimes contre l'humanité perpétrés par le régime de Milosevic au Kosovo.

De plus, un vote de cette Chambre, avec un appui de 90, 95 ou 98 p. 100 des députés, serait beaucoup plus authentique pour le gouvernement que les sondages invoqués par le premier ministre.

S'il devait y avoir des objections, cela ne serait que le fruit d'un sain débat dans une assemblée démocratique où il est presque impossible que règne l'unanimité.

Cette Chambre doit débattre de cette question. Nous devons donner à Milosevic l'exemple de la démocratie plutôt que d'afficher une unanimité imposée et non vérifiée. Notre force réelle, c'est la démocratie, et c'est là la principale faiblesse de Milosevic.

Je ne sais pas trop ce qui se dit au siège du gouvernement de Milosevic, à Belgrade, mais je doute fort que le président Milosevic attende, dans l'angoisse ou l'espoir, la tenu d'un vote à la Chambre des communes à Ottawa pour décider de maintenir ou non son refus de mettre fin à l'épuration ethnique du Kosovo.

La tenue d'un vote sur l'envoi de troupes dans les Balkans n'a rien à voir avec un vote de confiance envers le gouvernement, comme le soutenait de façon tordue le premier ministre la semaine dernière ou comme le disait le leader du gouvernement à la Chambre en indiquant qu'un vote de la Chambre, c'était de la foutaise. Ces déclarations ne sont pas un très bon exemple pour l'ensemble des citoyens canadiens ou québécois.

Il est également faux de prétendre, comme le faisait il y a quelques jours le leader du gouvernement à la Chambre, que la motion devant nous implique que tout déplacement de troupes, même la rotation normale des effectifs à l'étranger, devrait être approuvé par le Parlement.

Cet argument est ridicule et démontre à quel point il a fallu que le gouvernement creuse pour trouver une excuse pour s'opposer à notre motion.

 

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Il faut que les députés, les élus du peuple, puissent se prononcer. Invoquer des sondages, comme l'a fait le premier ministre la semaine dernière, revient à travestir la démocratie parlementaire. La Chambre des communes, c'est l'expression de la démocratie. Nous ne sommes pas une maison de sondages, nous sommes les représentants élus du peuple.

Il est d'autant plus logique que nous votions, que l'intervention de troupes au sol en ex-Yougoslavie était prévisible dès le départ.

À partir du moment où il devenait évident que les frappes aériennes de l'OTAN ne suffiraient pas à faire plier le président Milosevic, trois choix s'offraient à l'Alliance atlantique: premièrement, le plan allemand de paix, sur lequel nous devons tabler, qui représente la voie diplomatique; deuxièmement, compléter les frappes aériennes par une intervention terrestre afin de compléter la mission prévue, c'est-à-dire de mettre fin aux crimes de Milosevic au Kosovo; ou, troisièmement, laisser tomber notre objectif, abandonner le peuple kosovar, laisser la voie libre au président Milosevic pour qu'il complète l'épuration ethnique du Kosovo, si ce n'est un génocide. Cela reviendrait à récompenser l'agression du régime Milosevic et à encourager tous les autres tyrans et despotes du monde.

La situation est claire: par souci de cohérence avec les discours tenus en 1991 par ceux qui sont aujourd'hui premier ministre et ministre des Affaires étrangères, pour respecter l'esprit démocratique, tel que les médias l'ont si bien résumé, et pour répondre aux voeux de la population, le gouvernement doit permettre aux parlementaires de se prononcer par vote. La position et la participation du Canada, si cela s'avérait nécessaire, seront renforcées d'autant.

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec attention le discours du chef du Bloc québécois, et j'ai une question assez simple à lui poser.

Dans l'état d'urgence dans lequel se trouve ce conflit présentement, la volonté des Parlements ne serait-elle pas le meilleur outil pour contrer la propagande et donner l'heure juste sur la volonté, les instances démocratiques, les gestes qui soient posés pour qu'on trouve enfin une solution à cette crise?

M. Gilles Duceppe: Monsieur le Président, évidemment, et je pense que les Allemands nous ont montré la voie. C'est l'Allemagne qui a proposé un plan de paix, et c'est aussi en Allemagne qu'il y a eu un débat au Parlement allemand. Ils ont été responsables, cohérents, et ont renforcé la voie diplomatique en agissant de façon démocratique. Et l'un ne va pas sans l'autre.

Je sais qu'il y aura un vote des deux Chambres en République tchèque. Eux aussi, ils sont cohérents. C'est ça qu'il faut faire. Il faut impliquer l'ensemble des députés ici et faire en sorte—et je pense que tous les partis d'opposition sont d'accord là-dessus—que nos collègues d'en face se réveillent, cessent de s'agenouiller devant le premier ministre et se rappellent du temps où ils avaient un peu de jugement, du temps où ils étaient de ce côté-ci de la Chambre. Il semble que le fait de traverser le parquet leur a fait perdre tout jugement critique.

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, je prends la parole au nom du Bloc québécois sur cette motion que nous présentons et qui s'inscrit dans un contexte où la crise au Kosovo s'aggrave.

Nous lisions dans les journaux, ce matin, que le Kosovo se vide. Il est donc essentiel que le débat à la Chambre se poursuive, que les députés aient l'occasion de se prononcer sur cette grave crise à laquelle nous sommes associés par la télévision, les médias et les journaux. Les Québécois et les Canadiens ont manifesté un grand intérêt à l'égard de ce conflit, qui révèle qu'il y a bel et bien une épuration ethnique, laquelle s'aggrave de jour en jour.

Des populations civiles sont déplacées dans les pays avoisinants, qu'il s'agisse de l'Albanie, qui accueille des milliers de réfugiés, au-delà de 40 000 dans les dernières heures, la Macédoine, le Monténégro, des pays qui vont devoir partager cette tâche avec d'autres pays comme la France et, vraisemblablement, un jour, le Canada, qui s'est dit prêt, d'ailleurs, à accueillir ces réfugiés.

 

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C'est une épuration ethnique qui commence à ressembler à un génocide, le plus grave des crimes contre l'humanité. Un crime pour lequel on a consacré une Convention, en 1948, et dont on célébrait l'année dernière le 50e anniversaire. Cette Convention prévoit non seulement que le crime de génocide est punissable, mais que les États ont un devoir de le prévenir.

Les États, y compris le Canada, semblent aujourd'hui trop peu soucieux de vouloir prévenir un génocide, de prévenir en cette fin de siècle un crime qui a été commis depuis le début du siècle. Qu'on pense à celui des Arméniens, du peuple juif pendant la Seconde Guerre mondiale et, plus récemment, des peuples cambodgiens et rwandais.

Il faut dire tout haut que nous avons une obligation de prévenir un génocide. Il faut le dire tout haut devant les parlements car ils ont un rôle lorsqu'il s'agit d'informer la population, de lui dire quel est l'état des choses et d'informer les citoyens par l'intermédiaire de leurs élus. Jusqu'à présent, les élus n'ont pas eu un rôle satisfaisant lorsqu'il s'est agi de recevoir de l'information et de la transmettre par des débats aux citoyens qui les ont légitimement élus.

Alors que le ministre des Affaires étrangères, qui est le principal porte-parole du gouvernement dans ce dossier, nous dit—et nous avons eu des débats à ce sujet—qu'il s'agit d'une prérogative du gouvernement que de décider de l'envoi de troupes à l'étranger, il oublie déjà que ce Parlement s'est prononcé en 1991 pour l'envoi de troupes en Irak. Il y a un précédent qui justifierait, une fois de plus, que le Parlement se prononce et vote en faveur de l'envoi de troupes au Kosovo, qu'il s'agisse de troupes qui iront imposer la paix ou maintenir la paix.

Ce précédent est important. Nous l'invoquons et continuerons de l'invoquer parce qu'il dément toute affirmation selon laquelle le gouvernement ne devrait pas consulter le Parlement et tenir un vote parce que sa prérogative veut qu'il ne doive pas nécessairement le consulter.

Il devrait pourtant prendre exemple sur d'autres parlements. C'est le ministre des Affaires étrangères lui-même qui, lors d'une réunion du Comité permanent des affaires étrangères, donnait l'exemple de l'Allemagne. Ce pays a d'ailleurs proposé un plan de paix. Un plan de paix que le Bloc québécois demandait au gouvernement du Canada de proposer et d'en prendre l'initiative.

L'Allemagne n'a pas peur de son Parlement. Il y a déjà eu deux débats et deux votes au Parlement allemand sur cette question. On ne peut pas invoquer l'expérience d'autres parlements pour justifier qu'il n'y ait pas de vote dans ce Parlement.

Les Hongrois et les Tchèques ont également eu l'occasion de se prononcer. La Constitution tchèque prévoit même que s'il y a envoi de troupes à l'étranger, le Parlement devra se prononcer et voter en faveur d'un tel envoi.

Donc, d'autres pays de l'OTAN font confiance à leurs parlementaires et à leurs parlements. Ce Parlement devrait aussi avoir une voix décisive à ce chapitre.

Je ne m'empêcherai pas, outre le fait de dire que le Parlement doit jouer un rôle décisif, de parler d'autres dimensions de ce conflit qui intéressent le Bloc québécois depuis le début des hostilités.

Il y a une dimension humanitaire qui doit nous intéresser au plus haut point. Les réfugiés sont trop nombreux. Ils se comptent maintenant par centaines de milliers. Le Kosovo, je le répète, se vide et est victime d'une épuration ethnique, vraisemblablement, d'un génocide.

Il faut lui venir en aide. Il faut être généreux et solidaires dans cette grande épreuve du peuple kosovar. Les actions du gouvernement à cet égard doivent être plus transparentes. Il doit partager l'information. C'est ce que, de toute façon, les militants du Bloc québécois, réunis en conseil général au cours de la fin de semaine, ont voulu que nous disions au gouvernement, c'est-à-dire d'être généreux à l'égard des réfugiés et que les 100 millions de dollars prévus pour l'aide aux réfugiés soient investis dans les pays qui accueillent aujourd'hui ces réfugiés.

 

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Il y a aussi toute cette dimension criminelle et pénale au conflit que nous ne devons pas oublier. Des personnes, des chefs d'État, des hommes politiques participent vraisemblablement à ces crimes contre l'humanité et à ces crimes de génocide. Ces personnes ne doivent pas rester impunies.

Il y a un Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie qui doit pouvoir, un jour, et un jour prochain, rapidement, traduire en justice ces personnes qui ont commis et continuent de commettre des crimes contre l'humanité. Sans doute, la personne qui est responsable de ces crimes contre l'humanité, le chef d'État yougoslave, ne devrait pas être épargné et rester impuni.

Il y a aussi un rôle ou une dimension politique qu'il ne faut pas oublier. Nous, du Bloc québécois, avons toujours été préoccupés par le rôle que l'ONU doit continuer de jouer lorsqu'il s'agit de mettre fin à des conflits internationaux, lorsqu'il s'agit de régler des différends, de façon à maintenir la paix et la sécurité internationale.

Nous croyons toujours que le Conseil de sécurité devrait jouer un rôle, que Kofi Annan, qui est bien reçu par les Européens lors de leur conseil, devrait aussi être invité par le Canada à jouer un rôle plus actif.

On pourrait éventuellement, si cela s'avérait nécessaire, confier à l'Assemblée générale des Nations Unies, en vertu de la Résolution Acheson, un rôle aussi dans le maintien de la paix et de la sécurité internationale dans le cadre de ce conflit. Ce qui est important pour nous, c'est que l'ONU ne soit pas écartée, qu'elle ne soit pas marginalisée et qu'elle participe à la solution d'un différend, de façon à ce que son rôle, dans l'avenir, soit préservé.

Je termine en présentant un amendement. Je propose:  

    Qu'on modifie la motion en ajoutant entre les mots «vote» et «de la Chambre» ce qui suit:

      «préalables».

Je veux également citer un extrait, non pas d'Euripide que je citais la semaine dernière, mais de Victor Hugo. Ce grand poète disait dans un ouvrage: «La guerre, c'est la guerre des hommes. La paix, c'est la guerre des idées.»

Rétablissons la paix au Kosovo par tous les moyens appropriés, de façon à ce qu'une grande idée, celle de la paix, triomphe, et que les générations futures de Kosovars soient préservées du fléau de la guerre.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): L'amendement à la motion est recevable.

M. Yvan Bernier (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, BQ): Madame la Présidente, qu'il me soit permis, avant de poser une question à mon collègue de Beauharnois—Salaberry qui, soit dit en passant, s'occupe très bien des affaires internationales, de joindre ma voix, peut-être avec un trémolo, à celle de mon collègue, parce que j'ai trouvé les mots de son discours très forts.

Lorsqu'on regarde ce que la population pense, ce que les éditoriaux disent, quand on titre: «Le Kosovo se vide», je crois qu'il est très important que les parlementaires canadiens se penchent sur cette question.

 

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Lorsque des journaux ou des politiciens utilisent le mot «génocide», je pense qu'il est important que les parlementaires canadiens se lèvent à la Chambre et assument leur rôle. Ils doivent prendre une décision en leur âme et conscience, à savoir si leur pays doit, oui ou non, envoyer, pour maintenir la paix, des troupes militaires au sol, le cas échéant, comme notre chef, le député de Laurier—Sainte-Marie, l'a mentionné.

Je veux maintenant poser une question au député. Il a fait état, dans son discours, qu'il existait un précédent, car en 1991, la Chambre s'était prononcée là-dessus. Je sais que pour ce qui est des traités et accords internationaux, le gouvernement peut prendre des décisions lui-même. Mais il offre, dans de nombreux cas, la possibilité aux parlementaires canadiens de le faire. J'en veux pour preuve le fameux projet de loi C-27. C'est un traité international, l'Accord des pêcheries des Nations Unies, qui sera mis aux voix mardi de cette semaine. Certes, les poissons sont importants pour moi, mais la vie au Kosovo est encore plus importante.

Je demande au député de Beauharnois—Salaberry quel rôle peut-on jouer auprès du Conseil de sécurité de l'ONU, et qu'il nous démêle cela un peu. Je connais bien les poissons, mais j'aimerais bien que l'ONU prenne la chose au sérieux et que le député nous explique la situation à la Chambre.

M. Daniel Turp: Madame la Présidente, je remercie mon collègue pour sa question. Alors que le gouvernement, dans la révision de sa politique étrangère, proposait de la démocratiser en donnant une voix aux citoyens sur la question, on constate qu'il ne semble pas vouloir donner une voix réelle à ceux qui les représentent au Parlement.

On en a la preuve, parce qu'il a, de nombreuses fois, récusé l'idée que ces parlementaires devraient voter en faveur de l'envoi de troupes à l'étranger, pas seulement dans ce débat, d'ailleurs, mais dans d'autres débats qui ont été tenus sur l'envoi de troupes en Irak ou en République centrafricaine. Il a toujours refusé qu'il y ait un vote à la suite d'un débat sur une motion relative à l'envoi de troupes.

D'ailleurs, puisque mon collègue fait allusion au traité, il est vrai que parfois, le Parlement puisse se pencher sur des lois mettant en oeuvre des traités, parce qu'il a l'obligation d'adopter de telles lois. Mais ce même gouvernement refuse que la Chambre des communes approuve des traités avant qu'ils ne soient signés ou ratifiés.

Encore là, il s'agit, à mon avis, d'un grand déficit démocratique qui devrait être corrigé ici, qui a été corrigé dans une certaine mesure dans d'autres Parlements du Commonwealth, comme en Australie ou en Nouvelle-Zélande, et que veut corriger, d'ailleurs, l'actuel gouvernement britannique.

Ce gouvernement et d'autres avant lui, d'ailleurs, ont mis fin à une pratique qui voulait que jadis, on approuvait des traités importants. Je peux d'ailleurs vous en citer un, qui est tout à fait important dans le cadre de l'actuel débat, puisque ce Parlement, la Chambre des communes, a déjà approuvé, avant que le Canada ne le ratifie, le Traité instituant l'OTAN. Ce traité a été approuvé à la Chambre avant qu'il soit ratifié par le gouvernement du Canada. Il y en a eu d'autres, mais cette pratique a été abandonnée et depuis quelques mois maintenant, avec d'autres collègues du Bloc québécois, je plaide pour que cette pratique soit réinstituée au Parlement.

Cela ferait partie d'une véritable démocratisation à laquelle se refuse, de toute évidence, le gouvernement actuel, comme on le verra sans doute par la façon dont il votera sur la motion d'aujourd'hui, à moins qu'il considère que la démocratie l'interpelle aujourd'hui, et qu'elle exige que le Parlement décide aussi de questions relatives à la politique étrangère.

[Traduction]

M. Julian Reed (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Madame la Présidente, je commencerai en répétant pourquoi le Canada participe à l'intervention militaire de l'OTAN dans l'ancienne Yougoslavie.

Au Kosovo, le régime yougoslave a lancé une campagne de répression brutale depuis qu'il a unilatéralement retiré son statut d'autonomie à cette province et aboli ses institutions locales en 1989 et en 1990.

 

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Le Conseil de sécurité des Nations Unies, sous le régime du chapitre VII, a adopté plusieurs résolutions se rapportant à la crise au Kosovo dans lesquelles le conflit était qualifié de menace pour la paix et la sécurité dans la région.

Ces résolutions et les accords d'octobre entre l'ancienne république de Yougoslavie et l'OSCE et l'OTAN, imposent clairement à l'ancienne Yougoslavie l'obligation légale de respecter un cessez-le-feu, de protéger les populations civiles et de limiter le déploiement d'une force de sécurité au Kosovo.

L'ancienne Yougoslavie viole clairement les engagements qu'elle avait acceptés en octobre, et viole aussi les obligations imposées par les résolutions 1199 et 1203. Elle a violé le cessez-le-feu et a également violé systématiquement le droit humanitaire international en lançant une campagne de terreur contre des civils, en recourant au meurtre et à la torture, à la détention arbitraire, à la persécution et à la négation des droits fondamentaux en raison de l'origine ethnique.

Nous avons toujours préféré que le problème du Kosovo se règle par les voies diplomatiques. On a tout fait pour trouver une issue par la diplomatie. De nombreuses missions diplomatiques sont allées à Belgrade. L'OSCE a lancé une importante mission de vérification. Finalement, la conférence de Rambouillet a échoué en raison de l'intransigeance du président Milosevic.

Ce n'est que lorsque les ressources de la diplomatie ont été épuisées et lorsque toutes les tentatives faites pour mettre un frein à la campagne de terreur contre les civils ont échoué que les alliés ont eu recours à une action militaire.

Il est évident qu'il aurait été préférable que l'ONU réussisse à trouver le moyen de mettre fin au conflit au Kosovo. Quand le Conseil de sécurité est incapable de parvenir à un consensus, on ne saurait resté les bras croisés face à ces massacres et à cette tragédie humanitaire.

L'objectif de l'OTAN est de forcer le gouvernement yougoslave à mettre fin à la répression sauvage qu'il exerce contre sa population, de dégrader la machine militaire qui soutient cette brutalité et d'inciter Belgrade à négocier un accord menant à un règlement politique qui soit juste pour les Kosovars.

Les forces de sécurité yougoslaves et des organisations paramilitaires mènent actuellement une campagne de terreur et expulsent massivement les Kosovars. Selon des renseignements qui ont été confirmés, ces gens-là se sont livrés à des exécutions sommaires et à d'autres atrocités contre des civils.

Plus du tiers de la population du Kosovo a quitté le pays. L'OTAN réagit à cette catastrophe humanitaire non seulement en intensifiant son intervention militaire, l'unique obstacle au nettoyage ethnique pratiqué par les Serbes, mais également en aidant directement les réfugiés, en renforçant son aide aux organismes humanitaires et en appuyant le travail du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie.

La critique selon laquelle l'action de l'OTAN serait cause de la détérioration de la situation humanitaire est injustifiée. Le nettoyage ethnique décidé par les autorités yougoslaves est en cours depuis des mois; à preuve les expulsions forcées, les destructions de villages, les massacres commis par les forces de sécurité en 1998 et au début de 1999.

Le régime a violé d'une manière flagrante les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies et d'autres obligations, harcelé des vérificateurs internationaux et intensifié son déploiement militaire en prévision d'une vaste offensive du printemps qui a commencé des que la mission de vérification de l'OSCE a été forcée de quitter les lieux.

Tout cela est survenu avant le début de l'intervention militaire de l'OTAN. L'OTAN n'a pas provoqué la campagne d'épuration ethnique de Milosevic, elle y a réagi. La meilleure solution demeure la diplomatie, mais une ouverture diplomatique doit ouvrir la voie à une solution durable.

Milosevic connaît parfaitement les conditions préalables à une ouverture diplomatique. Il doit mettre un terme immédiatement à l'épuration ethnique et à la terreur contre les civils, retirer les forces serbes du Kosovo, accepter la présence d'une force de maintien de la paix internationale, afin que les Kosovars se sentent suffisamment en sécurité pour retourner chez eux et, enfin, accepter un règlement politique juste.

J'appuie sans réserve la participation du Canada à l'action de l'OTAN, qui a été précipitée par un désastre humanitaire. En outre, j'appuie pleinement les hommes et les femmes des Forces canadiennes qui font si courageusement face à la situation.

 

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Je ne puis appuyer la motion. Le gouvernement s'est engagé à consulter le Parlement, ce qu'il a toujours fait dans le passé. Jusqu'à maintenant, la Chambre a tenu, sur la crise du Kosovo, trois débats distincts qui ont duré 26 heures et au cours desquels près de 100 députés ont pris la parole. En ce qui a trait au déploiement de troupes au sol, l'OTAN n'a pas encore demandé au Canada de fournir des fantassins. La question demeure donc hypothétique. S'il reçoit une demande en ce sens, le premier ministre s'est engagé à consulter le Parlement.

En ce qui concerne la tenue d'un vote, je crois que notre système, qui donne au gouvernement et non pas au Parlement le pouvoir de déployer des troupes, doit conserver sa flexibilité actuelle. Le gouvernement conservera ainsi la capacité de déployer des troupes d'urgence, comme il l'a fait dans le passé.

Le Parlement ne siège pas continuellement et ne serait pas nécessairement en mesure de réagir à une situation d'urgence. Dans les faits, le personnel militaire canadien qui est appelé à participer à des missions de maintien de la paix ou à des missions humanitaires doit parfois intervenir sans délai. Le meilleur exemple est celui du groupe d'intervention en cas de catastrophes, dont les 180 membres doivent pouvoir être déployés dans un délai de 48 heures. C'est pourquoi j'estime qu'il serait inapproprié de lier le gouvernement, car il doit être en mesure de réagir rapidement et efficacement.

L'opposition du gouvernement à cette motion ne signifie pas qu'il nie l'importance du rôle du Parlement. Le Parlement a joué un rôle tout au long de ce conflit, tout comme les Comités permanents des affaires étrangères et de la défense nationale. Je le répète, le premier ministre s'est engagé fermement à consulter le Parlement si un changement important survient dans la situation au Kosovo.

[Français]

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Madame la Présidente, j'ai écouté avec attention les propos du secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères. Le seul argument qu'il semble invoquer pour justifier le fait que le Parlement ne doive pas voter sur cette motion est celui de la flexibilité. C'est le seul argument que j'ai entendu.

C'est un argument qui n'est pas valable parce que l'article 32 de la Loi sur la défense nationale donne la flexibilité au gouvernement. J'invite le secrétaire parlementaire à lire avec attention cet article qui prévoit que si le Parlement n'est pas en session, le gouverneur en conseil peut tout de même mettre les Forces canadiennes en service actif et doit, par ailleurs, rappeler le gouvernement dans un certain délai pour que la question puisse être présentée et, éventuellement, discutée au Parlement.

C'est le seul argument qu'il a invoqué. Il n'est pas convainquant. Il serait toutefois convainquant d'entendre le secrétaire parlementaire et, par lui, son gouvernement, dire qu'il croit à la démocratie parlementaire. Nous sommes dans une démocratie parlementaire.

Ma question est la suivante: une démocratie parlementaire ne devrait-elle pas donner aux députés une véritable voix lorsqu'il s'agit d'envoyer des troupes à l'étranger, d'envoyer des soldats dont la vie pourrait être menacée et d'investir des sommes importantes pour la paix et la sécurité internationale, comme nous le faisons depuis le début du conflit? La démocratie parlementaire n'exige-t-elle pas justement que le gouvernement accepte, comme l'avait fait un gouvernement précédent, que nous votions sur une motion comme celle qui serait présentée pour autoriser l'envoi de troupes au Kosovo?

 

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[Traduction]

M. Julian Reed: Madame la Présidente, j'ai aussi écouté très attentivement l'argument de notre collègue.

Historiquement, le Canada n'a pas tenu de vote sur des questions de cette importance. Lorsqu'il y a eu un vote dans le cas de l'Irak, mon collègue va se rappeler qu'il a eu lieu des mois après coup. Le débat ne s'est pas tenu au début des hostilités. Je crois que c'est plus de quatre mois après le déclenchement des hostilités qu'on a même tenu un débat.

Je tiens à dire au député que la position du gouvernement a toujours été que le Parlement devait être consulté. Dans ce cas-ci, le Parlement est consulté régulièrement, probablement plus souvent que pour tout autre conflit grave, mais c'est toujours la prérogative du gouvernement de prendre les décisions instantanées qui s'imposent au besoin.

Mon collègue a parlé de l'article de la Loi sur la défense nationale qui donne une certaine souplesse au gouvernement. Chose certaine, cette souplesse doit être maintenue à tous égards.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Madame la Présidente, j'ai entendu le secrétaire parlementaire affirmer que le premier ministre allait consulter le Parlement avant d'engager des troupes au sol, mais on en revient toujours à la question d'aujourd'hui qui est de savoir si nous allons nous prononcer là-dessus.

Il est plutôt difficile de justifier à la population canadienne que le gouvernement ne tiendra pas de vote sur l'engagement au sol de membres de nos forces armées qui vont aller risquer leur vie. Qu'y a-t-il de vraiment répréhensible dans cela?

M. Julian Reed: Madame la Présidente, je vais à nouveau répéter la réponse que j'ai donnée au porte-parole du Bloc. Historiquement, les gouvernements canadiens successifs ont maintenu qu'il est préférable d'avoir une position unanime de tous les partis dans le cas d'une décision d'une telle gravité et d'une telle importance.

Je comprends la position de mon collègue. C'est un autre point de vue, mais ce n'est pas celui qui a été retenu historiquement par les gouvernements canadiens.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Madame la Présidente, la motion dont nous sommes saisis est relativement simple. Elle exige du gouvernement qu'il s'engage à tenir un débat et un vote avant l'envoi de troupes terrestres pour participer à la guerre dans les Balkans.

Cette requête n'a rien de curieux. Il n'y a pas là sujet à controverse. Cette motion est neutre. Elle va dans le sens des traditions démocratiques de notre pays.

Ce qui est curieux, c'est que le gouvernement n'ait pas présenté une motion faisant l'objet d'un vote à ce sujet. Ce qui prête à controverse, c'est le refus répété du gouvernement d'autoriser un débat ou un vote à ce sujet. Les électeurs se demandent pourquoi le gouvernement s'y refuse.

Il est vraiment ahurissant que le gouvernement refuse à la Chambre de décider quel rôle ce pays devrait jouer dans une guerre. Comprenons-nous bien. Le gouvernement n'a aucun mandat après les trois débats que nous avons eus sur le Kosovo. Le fait qu'il prétende en avoir un est inacceptable. Ce n'est certainement pas la raison pour laquelle nous avons participé à ces débats.

En août 1914, le gouverneur général a tout simplement avisé ce pays qu'il était en guerre. La décision avait été prise à Londres. En septembre 1939, le Canada a attendu 10 jours avant de s'engager dans la Seconde Guerre mondiale, aux côtés de la Grande-Bretagne et de la France, 10 jours pendant lesquels le Parlement a débattu pour finalement se prononcer sur cette question. Le 9 septembre 1939, le premier ministre MacKenzie King a accepté que la Chambre des communes décide si le Canada devait ou non entrer en guerre.

 

. 1250 + -

Cela ne s'est pas fait en 1999. Nos pilotes ont déjà participé à plus de 100 missions de combat et le gouvernement actuel maintient que nous ne sommes pas en guerre. Cette position n'est qu'une manière de jouer sur les mots qui ferait plaisir à beaucoup d'avocats à la Chambre des communes mais qui ne plaît certainement pas à la population canadienne. Le Canadien ordinaire, les députés à la Chambre et nos adversaires en Yougoslavie voient les choses très différemment. Certains considèrent que c'est la guerre.

En 1991, quand nous avons appuyé la coalition de l'ONU, la Chambre avait été saisie d'une résolution sur la participation militaire du Canada, et celle-ci avait fait l'objet d'un vote. À l'époque, le premier ministre actuel, qui était alors chef de l'opposition officielle, avait critiqué le gouvernement Mulroney. Je cite: «Les Canadiens en ont assez de ces ambiguïtés et de ces décisions prises au hasard sans qu'ils soient informés de la situation exacte. Les Canadiens devraient-ils s'engager dans une guerre, oui ou non?»

Les principes édifiants que nous avions si fermement approuvés il y a tout juste huit ans semblent n'avoir été rien de plus que des paroles. Apparemment, le premier ministre les a oubliés, et ils se sont envolés, comme chassés par les courants politiques.

Le ministre des Affaires étrangères n'est pas plus constant. Il a déclaré à la Chambre, en 1991: «Ce que je crains le plus, c'est que les conservateurs essaient d'obtenir l'approbation ou la ratification de décisions déjà prises plutôt que de laisser le Parlement parvenir à des décisions à cet égard.» Jeudi dernier, au Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, il a aussi semblé oublier cette crainte au sujet de la Chambre. Il a dit que comme le Canada n'est pas une république, la Couronne conserve le droit d'élaborer la politique étrangère et de décider elle-même des questions relatives à la guerre et à la paix.

Les Canadiens pourraient demander avec raison ce qui cause cette incertitude et pourquoi des ministres ayant une aussi longue expérience parlementaire peuvent faire volte-face et changer aussi radicalement d'opinion. Je ne tenterai pas de répondre à ces questions. Compte tenu de l'incertitude qui règne du côté ministériel, je suggère de favoriser la démocratie. Après tout, c'est cela que notre pays attend. Nous prêchons et vendons la démocratie à l'étranger. Nous devrions la pratiquer chez nous.

Huit ans après la guerre du Golfe, le Canada se retrouve de nouveau mêlé à une guerre. À cette étape-ci du débat, il importe peu que notre intervention militaire n'ait pas été sanctionnée par l'ONU ou que la stratégie à long terme de l'OTAN ne soit pas claire. Il n'importe pas non plus que nous ignorions les objectifs à long terme du conflit actuel, abstraction faite des considérations morales fondamentales dont mon honorable collègue, le chef de l'opposition, a fait état il y a une semaine.

Ces problèmes ne sont pas les plus urgents qu'il faille résoudre dans le présent débat. Il ne s'agit pas non plus de l'argument du gouvernement voulant qu'on ne puisse débattre de choses qui ne sont pas encore arrivées. Cette motion demande au gouvernement de s'engager à tenir un débat dans l'éventualité où il deviendrait nécessaire d'envoyer des troupes au sol au Kosovo. Que cette éventualité ne matérialise dans une semaine, dans un mois ou plus tard encore, la Chambre devrait pouvoir se prononcer sur l'envoi de troupes au moyen d'un vote.

La motion ne porte pas sur la guerre au Kosovo, mais sur la démocratie au Canada. Cette motion étant si importante pour notre démocratie, je l'appuie sans hésitation. Je ne souscris peut-être pas à beaucoup des idées du Bloc, mais je le félicite d'avoir eu celle-ci.

Nous sommes à la Chambre des communes. C'est le seul endroit dans tout le pays où les représentants élus du peuple canadien peuvent se rencontrer pour discuter de l'avenir de notre pays. C'est la Chambre des communes, et non le Cabinet, qui constitue le point central de notre système gouvernemental démocratique. Le gouvernement en poste doit rendre des comptes au peuple par l'intermédiaire des députés élus. C'est ici que les lois sont adoptées. C'est ici que les grandes questions qui ont des répercussions importantes sur les Canadiens sont censées être décidées.

Avant d'envoyer des troupes terrestres se battre dans des contrées éloignées, il faut d'abord consulter les députés. C'est la seule chose logique à faire. Je ne veux pas qu'un jour des parents, des épouses, des maris ou des enfants de soldats puissent m'accuser de ne pas avoir pris position et posé les questions qui s'imposaient lorsque c'était le temps de le faire.

 

. 1255 + -

Le gouvernement ne semble pas vouloir comprendre ce simple fait. La motion à l'étude aujourd'hui ne vise pas à mettre le gouvernement dans l'embarras. Elle ne vise pas à exprimer la confiance ou le manque de confiance des députés face au premier ministre et à son cabinet. C'est tout simplement une mesure qui demande au gouvernement de respecter les droits et privilèges du Parlement et d'observer les normes les plus fondamentales de la démocratie canadienne.

Les précédents de 1939 et 1991 ont clairement et franchement démontré que les questions de guerre et de paix ne relèvent pas exclusivement de la Couronne dans ce pays, et j'insiste sur ce fait. Le premier ministre et le ministre des Affaires étrangères l'ont compris en 1991. Je ne comprends pas comment ils ont pu l'oublier maintenant.

Cette motion aurait dû être déposée il y a plusieurs semaines déjà. L'opposition officielle réclame depuis un certain temps déjà la tenue d'un vote à la Chambre avant que le Canada n'engage des troupes terrestres dans la guerre qui se poursuit au Kosovo. Les autres partis d'opposition en ont également convenu et ont réclamé la même chose. Je félicite encore une fois nos collègues du Bloc d'avoir déposé cette motion aujourd'hui.

On dit qu'il y a un temps et un endroit appropriés pour chaque chose. Le temps est donc venu de mettre aux voix une motion sur le déploiement de troupes terrestres au Kosovo et l'endroit propice pour le faire est ici même à la Chambre.

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Madame la Présidente, j'ai entendu le député dire qu'il appuie fortement cette motion.

Je demande au député de se rappeler qu'un débat sur la question a eu lieu à la Chambre en novembre, puis en février. Le ministre a comparu devant le comité en mars. Puis, la semaine dernière, la Chambre a tenu un autre débat qui a duré jusqu'aux petites heures du matin. Je pensais que le Parlement s'était entendu à l'unanimité dans tout ce débat. La position adoptée par le gouvernement suscitait très peu de dissidence.

J'ai peine à comprendre pourquoi le député appuie fortement une motion qu'on peut très aisément qualifier de vague et de déroutante. Cette motion invite-t-elle à voter sur la tenue d'un vote ou porte-t-elle sur une éventualité ou une situation hypothétique? Le député estime-t-il que cette motion met en cause la confiance dans le gouvernement?

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Madame la Présidente, elle ne met certainement pas en cause la confiance dans le gouvernement. Comme je l'ai souligné, lorsqu'il s'agit de la vie de nos soldats, il faudrait adopter une attitude non sectaire à l'égard de toute cette question.

En ce qui concerne le débat thématique, je ne peux pas croire qu'un député puisse dire qu'un débat a eu lieu et qu'il a permis à tous les députés d'être informés de la question. Je n'ai pas besoin de mentionner le nombre de députés qui sont à la Chambre lorsque des débats thématiques ont lieu au milieu de la nuit. Ils ne sont certainement pas nombreux.

Lorsqu'il s'agit de la vie de nos soldats et d'une question aussi importante que la guerre, nous estimons que cette question devrait faire l'objet d'un vote. À notre avis, la plupart des partis à la Chambre voteraient honnêtement pour qu'on appuie les activités de l'OTAN. Je pense que tel serait le cas.

Je n'arrive pas à comprendre pourquoi le gouvernement craint à ce point de soumettre la question à un vote. Une fois que le vote aurait eu lieu et que la majorité l'aurait emporté, tous les députés, je l'espère, accorderaient leur appui à nos soldats dans cette situation de guerre. Soumettons donc la question à un vote. Il s'agit d'un geste tellement judicieux sur le plan politique que j'ai du mal à imaginer pourquoi le gouvernement refuse de le faire.

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Madame la Présidente, je remercie le porte-parole du Parti réformiste qui, dans son discours, a félicité le Bloc québécois pour avoir présenté une telle motion. On voit bien, et il l'a dit dans sa réponse au député libéral, que ce n'est pas un débat partisan, et on a vu sa prise de position dans son discours.

 

. 1300 + -

Plus tôt, au cours du débat, le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères disait: «Oui, mais en 1991, nous avons dû attendre plusieurs mois avant de pouvoir voter sur le conflit en Irak.»

Je demande au porte-parole réformiste en matière d'affaires étrangères s'il croit que le vote doit être tenu après le conflit. Je veux aussi savoir s'il partage l'opinion des libéraux qui parlent d'une question hypothétique. Lorsqu'on apprend qu'il y a 43 charniers qui ont été découverts avec des dizaines de milliers de morts, il s'agit plutôt d'une situation d'urgence.

Le secrétaire parlementaire a fait état d'une décision qui pourrait être prise à la dernière minute. Je demande donc au député s'il a déjà entendu parler d'une convocation urgente de la Chambre pour un vote spécial.

[Traduction]

M. Bob Mills: Madame la Présidente, cela fait au moins deux ans que je parle du Kosovo à notre caucus, de sorte que les événements qui s'y déroulent ne nous surprennent pas du tout.

Déjà en 1991, le premier ministre et le ministre des Affaires étrangères avaient crié au scandale et avaient vigoureusement dénoncé le gouvernement conservateur de l'époque qui n'avait pas procédé à un vote immédiatement avant de déployer des troupes. J'ai recueilli des pages et des pages de propos qu'ils ont alors tenus au comité et à la Chambre, disant à quel point ils étaient consternés de n'avoir pas eu l'occasion de se prononcer. Ils condamnaient le gouvernement d'avoir tant tardé à consulter la Chambre.

Aujourd'hui que les libéraux songent à procéder de la même façon, comment peuvent-ils, en toute conscience, se lever à la Chambre sur une question comme celle-ci?

[Français]

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Madame la Présidente, au cours du temps, l'humanité n'a cessé de vivre des crises. Le monde, aujourd'hui, semble s'orienter vers une nouvelle tendance que l'histoire retiendra sans doute comme les crises propres à notre époque. Si, plus tôt dans notre siècle, les guerres entre les pays étaient une réalité, ce concept semble aujourd'hui frôler l'obsolescence.

Je n'apprendrai rien à mes collègues en leur disant que les guerres, aujourd'hui, se font à l'intérieur des pays. Des pays pluralistes en proie à des tendances extrémistes voient les différents groupes représentés dans leur population transformer leur attitude de cohabitation pacifique en pure et simple belligérance.

Dans ces cas, on dénombre une grande quantité de victimes parmi la population civile. C'est déplorable, d'autant plus que l'on y retrouve alors les pires violations des droits de la personne. Or, le principe de la souveraineté des pays interdit toute intervention extérieure. La communauté internationale, en ne se basant que sur ces principes, pourrait légitimer sa passivité. Mais réalisons-nous alors le coût d'un tel non-interventionnisme?

Il y a une chose que nous ne devrions en aucun cas oublier à propos de la sacro-sainte souveraineté des pays, c'est que celle-ci en elle-même n'est rien si elle ne sert pas une bien plus grande cause qu'est la souveraineté de ses citoyens.

Il est facile d'exposer en long et en large ces nouveaux conflits, mais contentons-nous de nommer quelques pays: Algérie, Sierra Leone, Rwanda. Ceux-ci seront à jamais associés aux atrocités dont ils furent le théâtre et dont les populations furent les acteurs, les spectateurs et les victimes. Tandis que notre attention est concentrée ailleurs, certaines de ces crises continuent de faire rage. Mais entre tous, aucun exemple n'est plus marquant pour son actualité et pour l'ampleur de son déploiement que la crise du Kosovo.

[Traduction]

C'est précisément à cause de la gravité de cette crise, que nous débattons cette motion aujourd'hui à la Chambre. La motion explique justement pourquoi je suis venu en politique.

 

. 1305 + -

En faisant du porte à porte au cours de la campagne électorale, j'ai entendu de nombreux Canadiens, jeunes ou vieux, qui disaient se méfier des politiciens. Ils étaient très cyniques à l'endroit du processus politique. Ils m'ont souvent dit qu'ils étaient découragés et songeaient même à ne pas aller voter. Je les ai suppliés de ne pas abandonner ce droit fondamental de voter qui est l'un des principes de base de notre démocratie. Dès que l'on abandonne son droit de vote, on renonce à sa possibilité de modifier ce que l'on juge insatisfaisant. On abandonne son droit de participer au processus décisionnel qui touche sa vie. Ce droit de vote est primordial. J'ai dit aux Canadiens que j'ai rencontrés qu'il m'importait peu qu'ils votent pour moi ou non, dans la mesure où ils exerçaient leur droit de vote.

Aujourd'hui, dans la situation actuelle, nous avons besoin d'information. Il est important d'avoir l'information pertinente pour évaluer la situation. Nous savons que l'information est une des premières victimes de la guerre. Si nous avons du mal à évaluer la crise au Kosovo, c'est que très souvent nous ne savons pas si l'information qui nous parvient a été censurée ou s'il s'agit de propagande provenant d'un côté ou de l'autre. Cela cause des difficultés pour évaluer la situation et prendre des décisions. Raison de plus alors pour que le Parlement soit saisi de la question. Nous avons besoin d'être informés aussi complètement que possible.

Il est également important de tenir un vote en l'occurrence, car nous allons envoyer nos hommes et nos femmes à la guerre. La situation est très grave. Quand on envoie ainsi des gens risquer leur vie, il est important qu'à titre de Canadiens, nous ayons notre mot à dire à ce sujet.

Je trouve très inquiétante une expression que j'ai entendue de la bouche du ministre des Affaires étrangères qui a parlé de «gouvernement par l'exécutif» lorsqu'il a été question de la tenue d'un vote. Nous reconnaissons que le Cabinet est important. Nous reconnaissons que le gouvernement a le droit de gouverner et qu'il doit assumer une responsabilité dont il ne peut se décharger sur quelqu'un d'autre. Cependant, une telle responsabilité ne l'empêche pas de consulter, de se faire guider par un vote ou de demander la participation des autres.

Quelqu'un a parlé plus tôt de flexibilité pour agir. On a cette flexibilité quand on dispose de toute l'information, de tout l'appui et de tous les avis possibles. Cela ne signifie pas que le gouvernement renonce à son droit de prendre la décision finale. Cela signifie que le gouvernement prend la décision finale en fonction de tous les avis, de toute l'information et de tous les votes raisonnables. Il est donc très important de ne pas confondre le gouvernement par l'exécutif avec le droit du Parlement de voter.

En ce qui concerne les troupes au sol, il est très important que des lignes directrices soient données avant que nous ne lancions nos hommes et nos femmes dans le feu de l'action, qu'il s'agisse d'une intervention pacifique ou à caractère plus offensif. Nous devrions savoir de quoi il retourne. Nous devrions savoir, par exemple, quel type d'équipement sera utilisé, quel sera le degré de préparation de nos troupes et quel genre de soutien elles recevront. Nous avons également besoin de savoir quel genre d'appui sera accordé à notre personnel à son retour de mission, car le problème a déjà surgi.

Une autre chose me préoccupe, concernant les réservistes. Nous croyons savoir qu'il est possible de faire appel aux réservistes pour aider à défendre notre pays, mais le gouvernement ne leur garantit pas leur emploi à leur retour. Quelles seront leurs perspectives à leur retour? Feront-ils face à la même situation que celle des marins de la marine marchande qui, après avoir bien servi leur pays, ont constaté à leur retour qu'ils n'avaient plus d'emploi ni de possibilité d'avancement, tandis que le gouvernement leur disait qu'il n'avait aucune responsabilité là-dedans.

Voilà quelques-unes des questions que nous devons nous poser lorsqu'il s'agit d'envoyer des troupes au sol au Kosovo. C'est pourquoi il est d'autant plus important que le Parlement puisse tenir un débat sérieux et se prononcer sur le sujet.

Très souvent, le gouvernement dit qu'il a accordé des débats et que les députés ont eu l'occasion d'exprimer leur opinion. Tout cela est vrai, mais ces débats n'ont pas donné au Parlement la possibilité de se prononcer concrètement par un vote.

C'est comme les gens qui me parlaient sur le pas de leur porte en exprimant leurs préoccupations sur les politiciens et sur l'importance d'avoir leur mot à dire dans la société. Les gens qui ont exprimé leur opinion en disant qu'ils n'iraient pas voter me font penser aux débats thématiques que nous tenons. Beaucoup de points de vue et d'opinions sont exprimés, mais cela ne débouche sur aucune action. Mais les personnes qui sont sorties et qui ont voté ensuite ont traduit leur opinion en action, et c'est ce que devrait faire la présente Chambre du Parlement. Nous devons pouvoir, au moyen du droit très démocratique de voter, traduire en action les opinions qui sont débattues ici.

Comme les députés peuvent le constater, j'appuie fortement la motion qui a été proposée. J'estime que si je n'ai pas le droit de voter sur cette question en tant que député, toutes les personnes qui m'ont élu et toutes les personnes que je représente ont perdu leur droit de vote et ne peuvent pas dire leur mot sur cette question d'une extrême importance pour les Canadiens. Leur seule façon pour eux de se faire entendre, c'est par l'intermédiaire de leur représentant élu. Si nous n'avons pas le droit de voter sur cette importante question à la Chambre des communes, cela revient à priver tous les Canadiens de leur droit de s'exprimer et de voter sur cette question.

 

. 1310 + -

J'exhorte tous les députés à y réfléchir très sérieusement et à appuyer cette motion très importante.

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Madame la Présidente, le député comprendra que, avant de voter, il faut savoir sur quoi l'on vote. Il dit qu'il est très important de voter et qu'il encourage ses électeurs à voter.

La question, en fait, n'est pas tellement de savoir si nous devrions voter, mais ce sur quoi au juste nous votons. Votons-nous sur le droit de voter? Votons-nous sur une situation hypothétique? Votons-nous sur la question de savoir si le Canada devrait ou non entrer en guerre?

Je voudrais bien savoir comment le député interprète cette motion. La motion, qui vise à exiger du gouvernement qu'il soumette à un débat et à un vote la possibilité d'envoyer des soldats canadiens dans les Balkans, me semble bien vague. J'aurais encouragé les rédacteurs à être beaucoup plus précis.

Compte tenu du caractère vague de cette motion, sur quoi le député croit-il qu'il va voter lorsqu'il aura l'occasion de se prononcer sur cette motion?

M. Gordon Earle: Madame la Présidente, je comprends ce qui préoccupe le député. Les gens ne veulent évidemment pas traiter de situations hypothétiques. Cependant, nous parlons ici du principe selon lequel nous devrions avoir le droit de voter sur une question très importante, soit l'envoi de troupes à la guerre. Si nous n'envoyons pas de troupes, nous n'aurons pas à voter, mais si nous envoyons des troupes, nous devrions avoir le droit de nous prononcer à ce sujet.

Jusqu'à maintenant, le gouvernement a refusé de s'engager, de nous garantir que nous aurions le droit de voter sur cette question. Il a précisé que la décision reviendra au Cabinet ou même au premier ministre. En tant que parlementaires, nous revendiquons simplement la possibilité de voter. Voilà l'objet de la motion. Nous pouvons toujours ergoter sur la formulation de la motion, mais je pense que tous les députés savent, en leur for intérieur, à quoi rime exactement la motion.

[Français]

M. Ghislain Fournier (Manicouagan, BQ): Madame la Présidente, mon intervention n'est certainement pas un blâme à votre égard, même si je me suis levé quatre ou cinq fois pour prendre la parole. J'ai tellement le goût d'exprimer à la Chambre les sentiments que nous éprouvons en ce qui a trait à ce conflit au Kosovo. Je me contenterai toutefois de la minute qui m'est accordée pour poser une question à l'honorable député qui vient de faire une bonne intervention.

Aujourd'hui, je voudrais qu'il n'y ait pas de partisanerie politique face à ce qui se passe. Je voudrais savoir si on pourrait collaborer ensemble étant donné qu'on parle de mondialisation de marchés. Si on pouvait mondialiser une paix qui serait durable, on pourrait y travailler avec les États associés.

Je voudrais demander au député s'il partage notre optique voulant mondialiser la paix.

J'aurai l'occasion, lors d'autres interventions, de reprendre la parole au cours de la journée.

[Traduction]

M. Gordon Earle: Madame la Présidente, je suis bien d'accord sur le concept de la mondialisation de la paix. J'appuie certainement ceux qui veulent unir leurs efforts pour faire régner la paix.

J'ai déjà dit à la Chambre, au cours d'un débat sur la situation au Kosovo, qu'il ne faut pas penser que nous cherchons simplement querelle au gouvernement. La discussion ne porte pas sur un désaccord entre nous et le gouvernement ou vice-versa, mais bien sur la volonté des gens de collaborer pour tenter de rétablir la paix dans une région du monde agitée par de grands conflits. C'est très important.

Je suis parfaitement d'accord avec le député qui affirme que, lorsque des vies sont en jeu, il faut tâcher d'adopter une attitude impartiale.

[Français]

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Madame la Présidente, je veux également féliciter mon honorable collègue pour son discours et pour son appui à cette motion. Je veux lui poser une question concernant ce vote.

 

. 1315 + -

Tout le monde reconnaît que c'est une véritable barbarie qui se passe au Kosovo, une barbarie comme on en a rarement vu dans toute l'histoire humaine.

La question se pose de savoir si on devrait envoyer des troupes pour refouler les Serbes sur le territoire du Kosovo. Dans cette éventualité, j'aimerais poser la question suivante à mon collègue: voterait-il en faveur de l'envoi de troupes sur le territoire du Kosovo pour refouler les Serbes?

[Traduction]

M. Gordon Earle: Madame la Présidente, toutes les parties engagées dans ce conflit ont un comportement barbare. Les actions des Serbes à l'égard des Kosovars sont barbares, mais les émanations toxiques qui sont libérées dans l'air et qui détruisent l'environnement sont également barbares. On fait preuve de barbarie de toutes parts.

Nous arrivons maintenant dans le domaine de l'hypothétique et c'est en pesant bien mes mots que je parlerai de la façon dont je voterais sur la question. Il faudrait que je connaisse les détails relatifs aux forces terrestres. Nous demandons donc au gouvernement de nous livrer ces informations avant que nous ne puissions débattre vraiment de la question et procéder à un vote.

[Français]

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Madame la Présidente, ce n'est pas avec plaisir que j'interviens aujourd'hui sur la motion du Bloc québécois sur la guerre au Kosovo et l'envoi probable de troupes terrestres.

Nous allons appuyer la motion du Bloc, bien sûr, mais pas l'amendement. Il reste que lorsqu'on se lève ici, à la Chambre, pour parler de guerre, d'hommes, de femmes et d'enfants qui meurent par la faute d'un régime, mais aussi par la faute de ceux qui veulent faire en sorte que le régime disparaisse, c'est-à-dire l'OTAN, ce n'est jamais avec plaisir.

Cependant, on doit en parler, on doit en débattre et, effectivement, on doit voter. Depuis quelques semaines, on parle de l'époque de la guerre du Golfe. Il est certain qu'il n'y a rien de parfait dans une guerre; au contraire, une guerre, c'est imparfait. Cependant, au niveau des procédures d'information et de consultation vis-à-vis des parlementaires et du public québécois et canadien, c'est important.

Dans le peu de temps dont je dispose, je vais prendre quelques minutes pour faire la chronologie des événements qui se sont produits, en 1990-1991, et ce, de façon très succincte. Mais auparavant, j'ai deux commentaires à faire.

S'il y a une chose insultante pour un parlementaire—peut-être que je ne suis pas assez expérimenté—ce sont des débats pour prendre note, car c'est une façon de se débarrasser du travail légitime des parlementaires, des règles extraordinaires qui font en sorte qu'il n'existe plus aucune autre règle traditionnelle en ce Parlement.

Depuis 1993, le gouvernement s'est servi de mesures extraordinaires, lors de la tenue des débats, sans aucune substance au niveau des règles qui font en sorte que le Parlement fonctionne bien: pas de quorum, pas de votes, pas d'amendements, rien. Depuis 1993, ce gouvernement s'est servi à plusieurs reprises de règles extraordinaires lors de débats essentiels. Donc, de tels débats ne veulent plus rien dire, et j'espère qu'on n'en aura plus.

De plus, le ministre des Affaires étrangères est venu témoigner devant le comité, c'est vrai. La dernière fois, il y est demeuré pendant deux heures et demie. À cet égard, je le salue.

Cependant, ce n'était pas ce que nous avions demandé. Nous aurions voulu une séance d'information complète pour les parlementaires, mais cela n'a été qu'une extension de la période des questions orales. C'était peut-être mieux que rien, mais on n'a pas eu d'informations. Cela fait un mois qu'on est en guerre, et on n'a jamais eu de séance d'information officielle.

On nous promet que cette semaine, il y en aura une. Le Comité des affaires étrangères va se réunir et on est supposé avoir des informations, un mois plus tard. Pendant ce temps, on a triplé notre présence militaire, et peut-être plus. C'est ce qu'on nous dit ici. Cette guerre a mal débuté au plan des règles parlementaires ainsi qu'au niveau militaire.

 

. 1320 + -

Je ne suis pas un spécialiste des questions militaires, mais ce semble être une guerre d'improvisation, une guerre ad lib, comme on dit. La guerre du Golfe avait tous les défauts d'une guerre. Mais si on se souvient du contexte, on avait préparé le terrain. Tout était là: les avions, les bateaux, les forces terrestres. Tout y était.

Nous avons dit à Saddam Hussein: «Écoute bien, petit casque, tu t'en vas du Koweït ou nous intervenons.» Nous sommes intervenus. Nous n'avons pas doublé ou triplé en cours de route les préparatifs de guerre du départ. Nous étions préparés.

Au sujet de la guerre du Golfe, le 2 août 1990, Saddam Hussein essaie d'envahir le Koweït. Le 2 août, on remarque la première résolution du Conseil de sécurité de l'ONU. L'ONU n'est pas là pour rien ou pour les beaux yeux de quelqu'un. C'est là pour servir la communauté internationale. La première résolution demandait à l'Irak de sortir du Koweït.

Le 6 août, on est en plein été j'en conviens, la résolution 661 prévoit des sanctions économiques. Le 10 août, il y a une déclaration du premier ministre de l'époque, le très honorable Brian Mulroney. Je résume du mieux que je peux en quelques minutes. Il disait que le Canada était prêt, s'il y avait lieu, à soutenir un envoi de troupes. À ce moment-là, on parlait surtout de bateaux. Le premier bateau est parti d'Halifax le 24 août.

Le 25 août, la résolution 665 prévoyait que nous allions prendre tous les moyens nécessaires pour appliquer les sanctions économiques.

Le 14 septembre, le Cabinet s'engage à envoyer des CF-18, si nécessaire. Le premier débat se tient le 24 septembre. Il n'y a pas un fusil qui a été utilisé, pas une balle qui soit déjà parti ou un missile qui ait été lancé. Personne n'est encore mort à cause des forces alliées. Le premier débat dure 14 heures.

La motion de l'époque condamnait l'invasion du Koweït et indiquait que le Canada donnait son appui à l'envoi de troupes militaires, d'une force multinationale, sous l'égide des Nations Unies. En septembre, on a eu un débat avec un vote.

Il y a eu une autre motion qui a fait l'objet d'un débat les 28 ou 29 novembre. On n'a pas encore lancé de missiles et on a un deuxième débat. Que se passe-t-il? On a des débats et il n'y a encore personne qui tire. On a un deuxième débat, avec un vote, pour appuyer la résolution 660. Un amendement du Parti libéral, dont on a parlé, a été rejeté par la Chambre.

On est en janvier. Les choses commencent à être urgentes parce que les dates-butoir pour Saddam Hussein sont imminentes. Le 11 janvier, le leader de l'opposition officielle de l'époque, notre actuel premier ministre, qui est membre du Conseil privé, est informé par le premier ministre de l'époque. On n'a pas encore lancé un missile.

L'actuel premier ministre, alors chef de l'opposition officielle, a droit, en vertu du poste qu'il occupe, à une séance d'information. Cela fait un mois que nous attendons la tenue du telle séance. Un mois plus tard, la première séance d'information officielle d'un chef de l'opposition a eu lieu ce matin parce qu'il est membre du Conseil privé. Un mois plus tard! On lance des missiles, on triple notre participation militaire et il faut attendre un mois pour être informés.

De plus, le chef de l'opposition officielle de l'époque, l'actuel premier ministre, après avoir été informé en détail, déclare, le 16 janvier 1991:

[Traduction]

«La guerre du Golfe est inutile et dangereuse.»

[Français]

Je ne suis pas certain qu'il ne regrette pas ses paroles aujourd'hui.

Au mois de janvier, nous avons eu un troisième débat bien qu'aucun missile n'avait encore été lancé. Le débat a duré 46 heures. Bien sûr, le 16 janvier, l'intervention et la guerre du désert commence.

 

. 1325 + -

Il y a eu trois débats, trois votes, sur des questions hypothétiques. Est-ce qu'on va aller faire la guerre dans le golfe Persique ou non? Ce sont des questions hypothétiques. Les parlementaires de l'époque ont eu l'opportunité et l'honneur d'en débattre trois fois. C'est un privilège parlementaire que de voter. Mais c'était sur une question hypothétique: est-ce qu'on va aller se battre ou non? Cela s'est produit trois fois.

Comme je le disais plus tôt aujourd'hui, le gouvernement va devoir comprendre que les parlementaires et ce Parlement sont un outil. On a besoin d'avoir de la vraie information. On sait tous ce qui se passe au Kosovo. Enfin, on sait ce que les médias nous en disent, parce qu'il ne faut pas se fier au gouvernement.

On sait ce qui se passe au Kosovo. On sait qu'il s'y passe des crimes importants. De quelle nature exactement? On s'en doute. On parle de plus en plus de charniers. On sait qu'il y a des problèmes avec le Monténégro et la Macédoine et qu'il y en aura éventuellement avec la Hongrie. Il se brasse des choses là-bas.

Un mois après le début de l'intervention militaire, on n'a pas encore eu un vote. Pourrait-on au moins avoir un vrai débat, un vote sur ce qui s'est passé? Et si on envoie des troupes terrestres sur une base officielle, pourrait-on le faire aussi?

Malheureusement, on a beaucoup de leçons à apprendre des guerres. Jamais rien n'est parfait. À l'époque, on avait mis des comités parlementaires au travail. J'espère que le gouvernement comprendra que le Parlement est un outil. La guerre, c'est fou, mais la paix se fait avec les parlementaires et avec les gens.

[Traduction]

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Madame la Présidente, plus tôt aujourd'hui, le député de Red Deer nous a rappelé un certain nombre d'occasions où le premier ministre actuel et le ministre des Affaires étrangères actuellement en fonction ont pris la parole à la Chambre pour reprocher au gouvernement conservateur de n'avoir pas tenu de débat ni de vote lors de l'Opération Tempête du désert de 1991. Aujourd'hui, nous sommes témoins de la situation inverse. Selon le gouvernement libéral, il n'y aura pas de vote. Ce n'est pas là le genre de débat que nous, de l'opposition, souhaitons avoir. Les conservateurs font maintenant aux libéraux les mêmes reproches que ceux qui leur étaient adressés en 1991. Tout cela devient un peu difficile à démêler.

Je me souviens du débat qui a eu lieu pendant la dernière législature et dans le cadre duquel nous devions nous prononcer sur l'opportunité d'envoyer des troupes en Bosnie. À mon grand désarroi, pendant que nous discutions de l'opportunité d'envoyer ou non des troupes en Bosnie, nous avons appris que des soldats avaient déjà été envoyés trois jours avant que ne commence le débat.

J'appuie certainement la motion. Nous devrions tenir un vote sur cette question. Cependant, le député ne croit-il pas qu'avant que nous puissions accomplir quoi que ce soit de légitime à la Chambre des communes, un coup de barre important s'impose par rapport à la tenue de débats ouverts, honnêtes et transparents et à la tenue de vote plus libres qui seraient conformes à la volonté des électeurs que nous représentons et non pas à celle des whips des partis?

[Français]

M. André Bachand: Madame la Présidente, notre rôle, aujourd'hui, ce n'est pas de critiquer le gouvernement en lui disant: «Voyez, dans le temps, vous n'étiez pas bon. Aujourd'hui, vous êtes meilleur.» Ce n'est pas ça, l'idée.

La partisanerie, on a le temps d'en faire amplement. Mais on tenait à répondre au gouvernement qui dit: «Vous en avez eu, des débats», que c'est de la bouillie pour les chats.

Le député a tout à fait raison. Il est temps et peut-être même un peu trop tard. On saura peut-être, à un moment donné, qu'on est plus avancés qu'on le pense. On va peut-être savoir trop tard qu'on est déjà trop avancés et qu'on n'a pas juste les doigts dans le tordeur, mais que le bras y est passé au complet.

Nous sommes d'accord qu'il faut de la vraie information, un vrai débat qui respecte les règles parlementaires qui nous régissent, mais il nous le faut rapidement, parce que les choses changent très rapidement.

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Madame la Présidente, tout d'abord, je veux dire que je partage les critiques du député de Richmond—Arthabaska sur le processus de breffage du gouvernement.

On apprend, ce matin, que plutôt que d'être informés demain matin de 8 heures à 9 heures, nous le serons pendant une demi-heure demain après-midi, et nous ne savons pas encore si nous allons obtenir cette séance d'information qu'on nous a promise pour jeudi prochain.

 

. 1330 + -

Ce gouvernement manque de transparence. Il a, de toute évidence, des choses à nous cacher. Il ne veut pas être transparent, et nous devons le condamner le plus souvent possible dans cette Chambre pendant ce débat.

Notre collègue de Richmond—Arthabaska a bien souligné qu'il y avait un précédent important à la Chambre qui devrait la régir, qui devrait inspirer ceux qui, depuis quelques années déjà, débattent de cette question d'envoi de troupes à l'étranger.

Mon collègue dit que son parti appuiera notre motion, ce que nous apprécions. Par ailleurs, il dit également qu'il ne votera pas en faveur de l'amendement. Pourquoi n'appuie-t-il pas l'amendement?

En 1991, son parti a justement fait en sorte que des débats et des votes aient lieu préalablement à l'envoi de troupes. Le Bloc québécois souhaite que ce vote ait lieu préalablement à l'envoi des troupes, et il est possible qu'il ait lieu de façon préalable, comme l'expérience de 1991 l'a démontré.

M. André Bachand: Madame la Présidente, je vais être très bref. Quand on parle de la guerre du Golfe, il y avait un mandat de l'ONU. À ce moment-là, les pays se sont entendus, au Conseil de sécurité, pour adopter des résolutions et pour intervenir militairement. C'est par la suite que le Parlement a été consulté.

Alors, si on dit «préalablement», cela veut dire qu'avant même de pouvoir aller à l'ONU et d'avoir une entente au Conseil de sécurité, il faudrait avoir une entente ici. Au niveau de la mécanique, c'est un peu difficile.

Cependant, je comprends les craintes de mon honorable collègue, et éventuellement, après le conflit, nous aurons le temps d'analyser cela et d'améliorer le système.

M. René Laurin (Joliette, BQ): Madame la Présidente, nous intervenons, encore une fois, aujourd'hui, sur ce sujet très important du Kosovo, et cette fois, nous avons voulu être on ne peut plus clair dans nos demandes au gouvernement.

Nous avons posé plusieurs questions depuis une vingtaine de jours, en fait, c'est plus de vingt jours, soit depuis le début de la crise du Kosovo. Chaque fois, nous avons toujours eu des réponses moitié-moitié, c'est-à-dire des réponses incomplètes, qui manquaient de transparence ou des réponses qui n'en étaient pas.

Aujourd'hui, ce que nous demandons au gouvernement, c'est de nous donner une occasion de nous prononcer de façon claire. Cela suppose évidemment d'abord que le gouvernement nous donne de l'information, puisqu'avant de prendre une décision éclairée, il faut posséder toutes les informations disponibles.

Donc, le gouvernement a du chemin à faire sur cette question. C'est pourquoi nous demandons, s'il y a d'autres développements concernant l'envoi de troupes terrestres au Kosovo, que le gouvernement nous permette de tenir un débat sur cette question, à la fin duquel on devrait avoir l'occasion de se prononcer par un vote.

Le gouvernement dit non. Ce matin, son représentant, le secrétaire d'État, nous a dit que c'était pour des raisons de commodité, de disponibilité du gouvernement.

Comment un député peut-il s'exprimer à la Chambre de façon officielle, et comment un député peut-il parler au nom de ses contribuables et de bien les représenter, si ce n'est que par un vote?

Dans une démocratie, le vote d'un député, c'est le seul moyen de s'exprimer officiellement et sans ambiguïté. On peut s'exprimer, évidemment, par un discours, et c'est ce que je suis en train de faire. C'est ce que le gouvernement nous a permis de faire jusqu'à maintenant sur la question du Kosovo. Le gouvernement a dit: «Je vais consulter le Parlement en permettant aux députés de s'exprimer sur la question.» Jusqu'à maintenant, au-delà de 130 députés ont profité de cette occasion.

Mais il y a toute une différence entre s'exprimer par un discours et s'exprimer par un vote. Dans un discours, on peut toujours nuancer nos propos.

 

. 1335 + -

On peut toujours faire en sorte de se laisser des portes de sortie. Mais quand vient le temps d'un vote, il n'y a pas bien des façons de s'exprimer: on est pour ou contre. Ça, c'est clair.

Les contribuables, ceux et celles que nous représentons dans chacun de nos comtés, ont le droit de savoir à quelle enseigne loge leur député. Est-ce que leur député est d'accord ou non avec ce qui s'en vient au Kosovo? Est-ce que leur député est d'accord avec une intervention terrestre ou s'il ne l'est pas?

Dans un discours, on pourrait toujours dire: «Oui, je suis d'accord à condition que» ou «Non, je ne suis pas d'accord parce qu'il y a tel événement ou telle autre condition qui n'a pas été réalisée». Cela n'est pas un vote. On ne met pas de condition à un vote. On vote pour ou contre quelque chose. Les contribuables à qui nous devons rendre des comptes ont le droit de savoir à quelle enseigne nous allons loger.

Pourquoi les contribuables méritent-ils ce respect? D'abord, parce que c'est le fondement même de la démocratie. Ils ont le droit de savoir ce que nous sommes venus dire en leurs noms. Deuxièmement, parce que cette crise au Kosovo sera très longue. Ce n'est pas seulement la crise que nous vivons actuellement, avec ses bombardements qui ne sont pas terminés. On ne sait pas, de toute façon, quand cela s'arrêtera. Il y aura peut-être ou non une intervention terrestre. Nous ne le savons pas. Mais cette opération sera longue.

Dès qu'un accord de paix aura été obtenu, il y aura encore beaucoup de semaines, de mois et, je dirais même, d'années avant que le problème du Kosovo ne soit réglé. Les contribuables seront donc appelés à s'impliquer encore.

On demandera peut-être aux contribuables de faire des sacrifices pour payer les engagements auxquels on aura consenti pendant la guerre du Kosovo. Les contribuables ont le droit de savoir maintenant quels sont ces engagements, jusqu'où on est prêt à aller, jusqu'où on est capable d'aller et devant quels choix ils pourront éventuellement être confrontés à cause des décisions que nous prenons maintenant.

Les contribuables ont le droit de savoir si, aujourd'hui, au Canada, c'est le cabinet du ministre ou le Cabinet ministériel qui prend les décisions sans un vote de la Chambre. Ce Cabinet engage des sommes astronomiques. Pour accueillir seulement 5 000 réfugiés, on envisageait des coûts de 100 millions de dollars. C'était seulement pour accueillir chez nous 5 000 kosovars. Un accueil qu'on a retardé pour le moment, il va sans dire. Toutefois, la somme qu'on prévoyait était de 100 millions de dollars.

S'il en coûte 100 millions pour recevoir 5 000 kosovars, combien en coûte-t-il de plus pour envoyer 18 appareils CF-18, les militaires qui sont là-bas, l'aide humanitaire qu'on a déjà fournie aux réfugiés qui sont encore au Kosovo, en Albanie, en Macédoine ou dans les autres pays limitrophes?

C'est plusieurs centaines de millions de dollars que nous imaginons avoir déjà engagés. Nous demandons au gouvernement de nous le dire, d'être transparent et de nous permettre de voter pour ou contre.

Jusqu'à maintenant, nous n'avons pas été très ennuyeux et embarrassants pour le gouvernement. Jusqu'à maintenant, nous avons appuyé les positions du gouvernement. Nous avons appuyé ces positions parce qu'il nous semblait prioritaire d'envoyer de l'aide au Kosovo où des enfants, des femmes et des familles entières risquent d'être tués, blessés ou déportés. Ils sont malades, sans logement et sans nourriture.

C'était donc prioritaire qu'on dise: «Oui, allons-y».

 

. 1340 + -

Maintenant que le processus est engagé, cela nous permet de nous asseoir et de nous poser d'autres questions. Les décisions que nous prenons, nous les prenons pour des raisons humanitaires, mais nous devons les prendre maintenant en mettant tout sur la table, pour que chacun d'entre nous puisse transmettre à ses contribuables, à ses concitoyens, aux électeurs et électrices, l'information justifiant les positions que nous avons prises ensemble.

Il n'y a pas de raison justifiant le gouvernement de nous refuser cette façon de nous exprimer. Pourquoi nous le refuserait-il? La raison de la disponibilité ne tient pas.

Ce n'est pas tous les six mois que va se déclarer un conflit armé. Et si jamais cela devait se produire une autre fois, notre motion ne demande pas au gouvernement de disposer de toutes les fois à venir. La motion demande au gouvernement de nous garantir qu'on pourra s'exprimer par un vote sur la question d'envoi de troupes militaires pour le maintien de la paix, ou pour d'autres fins, au Kosovo et dans les pays des Balkans. C'est là-dessus qu'on veut avoir un vote.

Pour les autres fois, on ne s'engage pas. On ne demande pas au gouvernement de nous promettre quoi que ce soit pour les autres fois. On dit: «Voici une situation. Dans cette situation bien particulière, nous demandons au gouvernement d'avoir le droit d'exercer notre pleine démocratie, d'avoir le droit d'être renseignés, et surtout, que le gouvernement nous fournisse l'occasion de pouvoir donner une opinion, de donner un consentement en toute connaissance de cause.»

C'est un minimum auquel le gouvernement devrait s'engager.

[Traduction]

M. John Richardson (Perth—Middlesex, Lib.): Madame la Présidente, le gouvernement s'oppose à la motion à l'étude pour des raisons assez sérieuses. D'abord, elle n'est pas conforme à la pratique parlementaire canadienne. Elle renferme une question hypothétique dont le libellé est clairement hypothétique. Elle établirait un précédent impraticable en liant les mains du gouvernement quant à l'opportunité et à l'efficacité de futurs déploiements de forces canadiennes, que ce soit pour aller se battre ou pour maintenir la paix, comme les Balkans ou ailleurs dans le monde.

Dans le système parlementaire canadien, la responsabilité de déployer des forces canadiennes incombe au gouvernement. Par exemple, il n'y a pas eu de résolution parlementaire officielle pour l'entrée du Canada dans la guerre de Corée. Même en 1939, il n'y a pas eu de résolution spécifique de déclaration de guerre à l'Allemagne nazie. L'approbation parlementaire de la politique du gouvernement a été signifiée par l'appui accordé au discours du Trône et au budget des dépenses de la Défense. Il n'y a pas eu de vote sur la déclaration de guerre au Japon impérial.

Depuis 1950, les forces canadiennes ont participé à plus de 50 missions de tailles diverses. Pour une bonne partie de ces missions, le Parlement n'a pas été consulté du tout. Sur une vingtaine de missions qui ont été débattues à la Chambre, seulement cinq d'entre elles ont fait l'objet d'un vote par appel nominal et trois d'entre elles ont été approuvées sans la tenue d'un vote par appel nominal. Seulement trois de ces votes ont été tenus avant le déploiement: pour le Congo, en 1960, Chypre, en 1964, et le Moyen Orient, en 1973.

Si le parti de l'opposition s'oppose vraiment au déploiement, il ne devrait pas se cacher derrière des motions de procédure. Il devrait avoir le courage de présenter une motion de défiance. Le gouvernement a livré...

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je regrette de devoir interrompre le député. C'est maintenant la période des questions et des observations, et non celle consacrée au débat. Je compte que le député en est conscient et qu'il posera sa question.

Le député a-t-il une question à poser au dernier orateur?

M. John Richardson: Je conteste le fait que mon tour de parole ait été donné au député du Bloc québécois.

[Français]

M. René Laurin: Madame la Présidente, je commenterai le commentaire de mon collègue libéral.

Nous sommes intervenus, parce que c'était à notre tour de le faire. Nous n'avons pris le tour de personne. Vous savez que notre intervention peut durer 20 minutes, mais nous avons accepté de partager notre temps. J'ai fait une intervention de durée normale.

 

. 1345 + -

Mais je profite du commentaire qu'a commencé à faire le député libéral pour lui dire que je trouve étonnant qu'il fasse appel aux pratiques parlementaires pour refuser un tel vote à la Chambre.

Quand vient le temps d'envoyer à l'étranger une délégation composée de 5, 6, 7, 8 ou 10 députés dans le cadre des travaux d'une association parlementaire ou d'un autre groupe, on demande l'autorisation de la Chambre pour accorder le budget nécessaire. On trouve important que la Chambre se prononce là-dessus.

Aujourd'hui, on parle d'envoyer éventuellement des soldats risquer leur vie au Kosovo et on ne trouve pas nécessaire que la Chambre se prononce là-dessus. On dit qu'une décision du Conseil des ministres est suffisante. Si cela prend l'assentiment de la Chambre pour que 10 députés se rendent à l'étranger, cela doit prendre le consentement de la Chambre pour envoyer des centaines et des milliers de soldats à l'étranger.

[Traduction]

M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Madame la Présidente, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt l'intervention du député.

Il faut cependant lui rappeler, comme l'a mentionné auparavant mon collègue, que nous avons souvent envoyé des soldats de la paix outre-mer sans qu'il y ait de débat. Au cours des cinq dernières années, il y a eu cinq ou six débats, et le député y a participé.

De plus, lorsqu'on lui a posé la même question la semaine dernière, le ministre des Affaires étrangères a répondu que les pays d'Europe n'ont jamais tenu de débat ou de discussion à ce sujet. Le Royaume-Uni envoie des milliers de soldats au Kosovo et n'a jamais tenu de débat sur cette question. Les États-Unis ont envoyé beaucoup de soldats et d'avions et n'ont jamais tenu de débat à ce sujet.

Cette année, il y a un débat. Tous sont libres d'exprimer leur point de vue.

[Français]

M. René Laurin: Madame la Présidente, je demanderais d'abord à mon collègue de bien vérifier ses informations. Il y a effectivement eu un débat en Allemagne, qui est le pays qui a proposé le plan de paix. Il y a aussi eu un débat aux États-Unis sur la question. Le gouvernement américain informe beaucoup mieux leurs citoyens sur ces questions que nous ne le faisons.

M. Benoît Sauvageau: Il n'est même pas au courant de ces dossiers.

M. René Laurin: On voit bien que le Canada est mal à l'aise dans sa façon de réagir parce que depuis la dernière guerre mondiale, il n'est intervenu militairement, je crois, qu'à trois reprises...

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je regrette, mais le temps alloué à l'honorable député est écoulé. La députée de Mercier a la parole.

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Madame la Présidente, je trouve extrêmement important de m'exprimer aujourd'hui sur cette motion. Je vais me permettre de la relire.

    Que la Chambre exige du gouvernement qu'il soumette à un débat et à un vote préalables de la Chambre l'envoi dans les Balkans de soldats canadiens pouvant être engagés dans des opérations militaires terrestres et/ou de maintien de la paix au Kosovo et dans la région des Balkans.

Depuis le début, le Bloc québécois exige que cette Chambre se prononce dans l'éventualité où il y aurait une décision d'envoyer des soldats pour assurer le maintien de la paix et, encore davantage, pour participer à une guerre terrestre qui sera certainement une sale guerre. Le Bloc québécois n'a pas voulu exprimer qu'il était opposé à une telle initiative, mais veut avoir toute l'information. Il veut que cette question soit débattue par les représentants de la population.

Les émissions d'information parlent beaucoup de ce qui se passe au Kosovo. Cependant, les débats à la Chambre ne se déroulent pas à la lumière de toute l'information dont dispose le gouvernement. On a eu, à plusieurs reprises, l'occasion de s'en rendre compte.

Or, même si on entend parler que depuis quelque temps du conflit au Kosovo, ce n'est pas un conflit récent. L'an dernier, comme déléguée du Bloc québécois à une réunion de Conseil de l'Europe—où des députés des autres partis étaient aussi présents—j'ai assisté à deux reprises à des débats sur la crise au Kosovo. Ces débats se faisaient entre des parlementaires de tous les pays d'Europe.

 

. 1350 + -

Il s'agissait de débats déchirants et troublants. Là-bas, les partis sont nombreux, et les parlementaires sont divisés en cinq tendances, toujours présentes, depuis la fondation du Conseil de l'Europe en 1949. L'Europe a une expérience en cette matière. Or, les débats étaient troublants et déchirants, parce que tout le monde voulait que cela se termine pacifiquement.

L'expression de nombreuses volontés de règlement pacifique, d'appel à tous les bons sentiments, à l'intervention d'observateurs, de négociations avec des tierces parties revenaient ad nauseam. Mais ce qui revenait le plus souvent, c'est que Milosevic se fichait absolument et résolument de cette quête et de cette volonté des Européens, qui ont connu plus que leur part de guerres.

Je ne vais citer que quelques phrases, mais j'ai entendu des personnes, comme Lord Russell-Johnston, maintenant président du Conseil de l'Europe, parler au nom du groupe libéral et dire sa profonde tristesse et son pessimisme. Cela se passait le 22 avril de l'année dernière.

Il disait:

    Le rapport Barsoni est un bon rapport [...]

Le rapport Barsoni faisait état de ce qui se passait.

      [...] mais les négociations entre la République fédérale de Yougoslavie et le Kosovo ne devraient pas être assorties de conditions préalables. Tant que les deux parties ne s'engageront pas dans cette voie, la situation restera bloquée et la violence continuera. En Irlande du Nord aussi, les problèmes étaient complexes et la situation grave, mais la médiation extérieure a montré son utilité. Aucun dossier ne doit être exclus des négociations. Le Conseil de l'Europe n'a pas à choisir entre les Kosovars albanais et les Serbes. Il veut simplement que tous les citoyens puissent vivre dans la paix et dans la tolérance. Un libéral n'est pas, a priori, favorable à un État ethnique, mais lorsqu'une population manifeste clairement sa volonté [...]

Il parlait des Kosovars.

      [...] elle a le droit de la faire valoir. C'est un principe international reconnu par la Charte des Nations Unies. Les droits de l'homme concernent tout le monde. Les Serbes doivent reconnaître les droits de ceux qui vivent depuis des siècles sur le territoire du Kosovo. Ils n'ont pas le droit de leur imposer quoi que ce soit.

M. Solé Tura, qui a longtemps été emprisonné sous Franco, disait:

    Ce qui se passe au Kosovo n'est certainement pas un problème interne à la Yougoslavie. Rien de ce qui touche à la défense des droits de l'homme ne peut être réduit à une affaire intérieure.

Et je pourrais continuer ainsi et longtemps. C'était il y a un an.

J'ai participé à l'autre débat en septembre. Il y avait beaucoup à apprendre de ce débat. Au Conseil de l'Europe, on s'inquiétait des centaines de milliers de Kosovars qui, déjà, avaient été délogés et qui s'apprêtaient à passer l'hiver—qui est rude là-bas—dans les forêts, sans support suffisant. Tout le monde appelait à toutes les pressions pour qu'il y ait des accords de paix. Il n'y en a pas eu.

Finalement, il y a eu Rambouillet. Il y avait la menace des frappes de l'OTAN que, d'ailleurs, plusieurs appelaient déjà de leurs voeux. Ils étaient nombreux à dire qu'il fallait que l'OTAN s'implique. Qu'a fait Milosevic par rapport à Rambouillet? Il a massé 40 000 hommes de troupe, à ce qu'on a su, aux frontières.

Nous sommes rendus au 26e jour des frappes. On entendait, hier, qu'il y aurait 150 000 hommes sous les drapeaux de Milosevic.

Les raisons pour lesquelles l'OTAN, sans avoir l'appui préalable des Nations Unies, s'est engagée comme elle l'a fait, c'est qu'elle estimait que c'était pour des raisons humanitaires. On ne sait pas comment la situation va déboucher, mais une chose est certaine, c'est qu'on ne semble pas être à la veille d'une solution, ni à la veille de la paix.

 

. 1355 + -

Si, pour être conséquents avec la première frappe sans une résolution de l'ONU—certes, je l'ai dit, c'est la première fois depuis que l'ONU est créée qu'il se passe une chose semblable—si, dis-je, pour être conforme à cette volonté de départ de ne pas laisser le peuple kosovar se faire chasser de sa terre, l'OTAN estimait—il est souhaitable que ce soit de concert avec l'ONU—qu'il faille des troupes terrestres, il faut qu'il y ait débat ici, parce que ce ne sera pas une parade, et parce que d'autres pays d'Europe, eux, ne sont pas décidés à s'y impliquer. Il n'y a que 19 pays de l'OTAN.

On ignore qui serait prêt à s'embarquer là-dedans. On a besoin de connaître tous les tenants et aboutissants, on a besoin d'avoir toute l'information, on a besoin de savoir dans quelles circonstances, on a besoin que l'ONU soit impliquée.

La pression semblait s'exercer sur la Russie; il faut qu'elle continue. Nous savons aussi à quel point la Russie est dans une situation fragile.

Ce ne serait pas une question de routine s'il devait y avoir des troupes terrestres au Kosovo. Ce ne serait sûrement pas une question d'une durée déterminée, connue d'avance. Ce ne serait certainement pas une parade sans danger.

Dans ces circonstances, nos collègues d'en face doivent être tout à fait d'accord avec notre motion, à savoir qu'il y ait débat à la Chambre. S'il y a une question importante sur laquelle cette législature, même celle d'avant et les autres avant elle, se sera penchée, ce sera cette question.

Je suis intervenue avec émotion, mais il est impossible de parler de ce sujet sans se sentir impliqué émotivement. Les soldats qui vont là sont des personnes, et ce seront des personnes qui s'engageront en ne sachant pas si elles reviendront ou non. Je ne dis pas qu'il ne faut pas y aller, mais je dis que cette Chambre doit débattre de cette question comme de la question la plus importante qui nous ait été soumise.

Le Président: Nous passerons à la période de questions et commentaires après la période des questions orales.

Comme il est presque 14 heures, nous allons commencer les déclarations de députés.



DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

ARTHUR MEIGHEN

M. John Richardson (Perth—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre à la parole à la Chambre pour déclarer que, le 16 juin 1999, la ville de St. Mary's tiendra une cérémonie commémorative sur la tombe du très honorable Arthur Meighen, 125 ans après sa naissance.

La carrière politique d'Arthur Meighen a débuté par son élection comme député de la circonscription manitobaine de Portage La Prairie en 1908. Il est ensuite devenu chef du Parti progressiste conservateur puis premier ministre du Canada en 1920-1921 et à nouveau en 1926. Il a la réputation d'avoir été un des plus brillants orateurs de la Chambre des communes.

Parmi ses grandes réalisations, je mentionnerai la participation à la création du Chemin de fer Canadien national, son rôle dans la fin de la grève générale à Winnipeg et l'adoption d'une loi sur le jour de l'armistice.

Il était un bon citoyen du Manitoba.

Son héritage parlementaire se perpétue par l'intermédiaire de son petit-fils, le sénateur Michael Meighen.

*  *  *

LE SECTEUR FORESTIER

M. Bill Gilmour (Nanaïmo—Alberni, Réf.): Monsieur le Président, le Parti réformiste exhorte le gouvernement à faire obstacle aux tentatives déployées par les Américains pour restreindre l'importation de produits du bois spécialisés. Mon bureau a reçu plus de 400 lettres d'électeurs qui craignent de perdre leur emploi, parce que Nanaïmo—Alberni est un des plus grand producteurs canadiens de produits du cèdre.

Ma circonscription a déjà été durement frappée en raison de l'incapacité du gouvernement de bien gérer les pêches et il faut lui éviter les pertes d'emploi dans le domaine de la foresterie. Si les États-Unis réussissent à restreindre les importations, l'île de Vancouver sera la plus durement touchée et risque de perdre des milliers d'emplois liés au travail forestier. Si des usines de sciage sont fermées, beaucoup d'entreprises connexes, par exemple, des sociétés de camionnage, des exploitants de machinerie, des firmes d'ingénieurs, différentes installations d'hébergement, des petites entreprises et des sous-traitants indépendants, seront aussi touchées.

Le Canada doit lutter contre toute reclassification de ses produits susceptible de lui nuire. Le gouvernement ne doit pas reculer. Il doit lutter pour protéger nos emplois dans le secteur forestier.

*  *  *

 

. 1400 + -

LE JOUR DE LA TERRE

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, en Ontario, il n'y a pas de quoi fêter, le Jour de la Terre. Pourquoi? C'est parce que le gouvernement de la province a paralysé son ministère de l'Environnement en congédiant plus de 700 de ses fonctionnaires. Il a également cessé d'appliquer les lois sur la protection de l'environnement, ce qui a fait de l'Ontario le troisième pollueur en importance en Amérique du Nord.

Il n'a pas mis en oeuvre de programme efficace et équitable de contrôle des gaz d'échappement des véhicules. Il a permis aux usines fonctionnant au charbon d'augmenter de 60 p. 100 leurs émissions polluantes. Il a réduit les dépenses consacrées aux transports en commun, ce qui a causé la grève actuelle de la TTC, laquelle grève a entraîné une augmentation du nombre de voitures sur les routes et aggravé la situation au plan de la pollution.

En Ontario, le Jour de la Terre, au lieu de fêter, nous exhortons le gouvernement à agir, comme l'a instamment demandé l'Ontario Medical Association, selon laquelle la pollution de l'air cause 1 800 morts prématurées par année dans la province.

*  *  *

WAYNE GRETZKY

M. Carmen Provenzano (Sault Ste. Marie, Lib.): Monsieur le Président, le départ à la retraite de Wayne Gretzky amène beaucoup de Canadiens à se souvenir avec émotion des jours glorieux que le no 99 a connu avec les Oilers.

Mais pour les gens de Sault Ste. Marie, les bons souvenirs remontent à encore plus loin, soit à l'année où Wayne Gretzky a dominé la Ligue de hockey de l'Ontario, nous donnant ainsi les premiers signes de sa grandeur.

Repêché au troisième rang de l'ensemble des recrues par les Greyhounds de Sault Ste. Marie en 1977, lors de repêchage de la Ligue de hockey de l'Ontario, Gretzky, qui avait alors 16 ans, a connu une saison 1977-1978 phénoménale. Il a médusé les amateurs en enregistrant 70 buts et 112 aides en 64 parties seulement. Hélas, l'année suivante, la population de Sault Ste. Marie le voyait à regret partir pour rejoindre l'Association mondiale de hockey.

Le numéro 99 pend des entraits du toit du Memorial Gardens de Sault Ste. Marie afin de rappeler la contribution exceptionnelle de Gretzky à l'équipe des Greyhounds et à la LHO.

Ce n'est qu'aujourd'hui que les habitants de Sault Ste. Marie réalisent la chance qu'ils ont eue de voir Gretzky perfectionner sa magie sous ses yeux. Sault Ste. Marie lui sera éternellement reconnaissante de la saison inoubliable qui a marqué le début de son histoire d'amour avec le fils le plus connu du Canada.

*  *  *

VAISAKHI

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea—Gore—Malton—Springdale, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui, le premier ministre soulignera le lancement d'un timbre spécial pour le 100e anniversaire de l'établissement des Sikhs au Canada.

Le timbre vise à marquer les réalisations des Canadiens d'origine sikhe qui ont fait de leur communauté un élément aussi important du riche tissu social canadien. En tant que membres des professions libérales, gens d'affaires et dirigeants politiques qui ont réussi, leur contribution au Canada est un exemple pour nous tous.

Je suis heureux que la Société canadienne des postes ait choisi de les honorer de cette façon cette année qui marque également le 300e anniversaire de la création de la religion sikhe. Le 13 avril, les Sikhs du Canada et du monde entier ont fêté le Vaisakhi qui commémore l'événement le plus important dans la religion sikhe.

Aujourd'hui, le 19 avril, les Sikhs peuvent fêter à nouveau alors qu'ils reçoivent cet honneur bien mérité de la Société canadienne des postes.

[Note de la rédaction: Le député s'exprime en penjabi.]

*  *  *

[Traduction]

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Réf.): Monsieur le Président, la Commission canadienne du blé a enfin accepté que le vérificateur général procède une vérification de ses livres.

Le député réformiste de Portage—Lisgar réclame une vérification ouverte de la Commission canadienne du blé depuis 1993.

Les agriculteurs ont le droit de savoir dans quelle mesure la Commission canadienne du blé commercialise leur grain de façon efficace. La vérification permettra d'avoir un avis indépendant et public sur le rendement de la commission.

En plus d'examiner le mandat de base de la Commission canadienne du blé, qui consiste à régulariser le marché, le vérificateur général doit également déterminer si la commission maximise le rendement pour les producteurs de blé et d'orge.

Cette vérification ne doit pas servir simplement à défendre les entreprises publiques de commercialisation comme la Commission canadienne du blé dans le cadre de la prochaine ronde de négociations de l'Organisation mondiale du commerce.

Le vérificateur général du Canada doit avoir le pouvoir de vérifier les livres de la commission régulièrement. Le Parti réformiste continuera d'exercer des pressions pour obtenir une loi en ce sens.

*  *  *

RASHPAL DHILLON

M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je veux faire connaître M. Rashpal Dhillon à la Chambre.

M. Dhillon habite à Richmond, en Colombie-Britannique. Né en 1938 au Penjab, en Inde, il est arrivé au Canada dans les années 50. Il a une femme, Surinder, ainsi que trois enfants et trois petits-enfants.

M. Dhillon a une longue et distinguée carrière dans le domaine du maintien de l'ordre, qu'il a commencée en tant que premier agent de la paix indo-canadien au Canada. D'abord membre de la Gendarmerie royale du Canada en poste dans la région intérieure de la Colombie-Britannique, M. Dhillon est ensuite devenu gardien de prison au pénitencier Oakalla, puis shérif adjoint à Vancouver.

 

. 1405 + -

Actuellement, M. Dhillon est propriétaire de plusieurs entreprises oeuvrant dans le domaine de l'agroalimentaire et d'un terrain de golf dans le Lower Mainland. Il se dévoue aussi pour la communauté en siégeant, entre autres, aux conseils d'administration de la Société du crédit agricole et de l'Institut national canadien pour les aveugles. Nous lui rendons hommage aujourd'hui pour son oeuvre de pionnier et de philanthrope.

Au nom de tous les députés, au jour où le gouvernement du Canada célèbre officiellement les cent premières années de la présence sikhe au Canada et les 300 ans de la Khalsa, je tenais à souligner la contribution de M. Paul Dhillon en tant que membre distingué de la communauté indo-canadienne.

*  *  *

LA SEMAINE NATIONALE DU TEXTILE

Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): Monsieur le Président, c'est la Semaine nationale du textile au Canada. Cette semaine est organisée par le Conseil des ressources humaines de l'industrie du textile dans le but de souligner l'innovation et l'excellence dont fait preuve l'industrie canadienne du textile.

[Français]

Dans mon comté de Ahuntsic, on compte deux douzaines d'entreprises de textile, dont les Textiles Silver, Doubletex et Montreal Fast Print, pour n'en nommer que quelques-unes.

Depuis 1988, les exportations ont triplé, les investissements en capitaux ont atteint un sommet sans précédent, même les emplois n'ont cessé d'augmenter depuis les cinq dernières années, passant de 53 000 personnes en 1993, à 56 000 en 1997.

[Traduction]

Les programmes établis par Développement des ressources humaines Canada tels que le Fonds du Canada pour la création d'emplois, les programmes destinés aux jeunes, les initiatives d'Industrie Canada dans le domaine des sciences et de la technologique et les lignes directrices fédérales sur les normes professionnelles sont autant d'exemples de la manière dont le gouvernement aide le secteur industriel canadien à rester compétitif sur le marché international.

Je félicite les fabricants canadiens de textile, en particulier ceux de ma circonscription, de leur importante contribution...

Le Président: Le député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière a la parole.

*  *  *

[Français]

LE BÉNÉVOLAT

M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Monsieur le Président, à l'occasion de la Semaine de l'action bénévole, je tiens à rendre hommage à toutes ces personnes qui donnent généreusement de leur temps pour le mieux-être de notre société.

Ces bénévoles, même si on les félicite cette semaine, ne sont pas que des bénévoles d'un jour ou d'une semaine, ils se donnent toute l'année durant. Statistique Canada, dans une étude d'août 1998, indiquait que 16,7 millions de Canadiens, soit environ sept personnes sur dix, font du bénévolat.

Ces bénévoles s'impliquent aussi dans tous les domaines: dans le milieu de la santé, de l'éducation, au sein des coopératives, auprès des plus démunis, dans le milieu culturel, celui des sports, au sein des syndicats, même en politique.

Le thème québécois de l'action bénévole de cette année, «Bâtir demain ensemble», traduit bien ce que le bénévolat contribue à faire et cadre avec la venue du nouveau millénaire.

Au nom du Bloc québécois, je remercie donc tous les bénévoles québécois et canadiens pour leur contribution inestimable.

*  *  *

[Traduction]

WAYNE GRETZKY

M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Réf.): Monsieur le Président, à l'instar de la plupart des Canadiens, c'est avec des sentiments partagés que je rends hommage aujourd'hui à Wayne Gretzky.

À présent qu'il prend sa retraite de notre sport national, le moment est venu de célébrer ce talent exceptionnel, ce parfait ambassadeur du hockey et ce grand Canadien.

Wayne Gretzky a récrit le livre des records du hockey et a bouleversé la pratique du hockey. Ses exploits lors des matches de la coupe Canada nous ont valu des moments palpitants. Ses 894 buts en saison régulière et ses 1 963 passes sur un but marqué ne seront jamais égalés.

Une statue de Wayne Gretzky soulevant fièrement la coupe Stanley au-dessus de sa tête orne la ville d'Edmonton, que je suis fier de représenter, et rend hommage à la contribution de Wayne à notre ville, à notre histoire et à la suprématie sans partage du hockey en Alberta.

[Français]

Wayne prend sa retraite de la même façon qu'il jouait: avec classe, humilité et appréciation. Aujourd'hui, les Canadiens de partout au pays sont fiers qu'un des leurs reçoive cet hommage mondial.

Bonne chance, Wayne, and thank you for the memories.

*  *  *

[Traduction]

L'AFFAIRE «PERSONNES»

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord—St. Paul, Lib.): Monsieur le Président, il y a 83 ans aujourd'hui, le gouvernement libéral de l'Alberta a accordé le droit de vote aux femmes, suivant en cela l'exemple de la Saskatchewan et de ma province, le Manitoba, qui avaient fait de même un peu plus tôt cette année-là.

Cette initiative qui devait faire du Canada le champion du suffrage des femmes dans le monde, nous la devons en bonne partie à Nellie McClung, l'instigatrice de la campagne. Elle-même, ainsi qu'Emily Murphy, Louise McKinney, Irene Parlby et Henrietta Edwards, les Famous Five comme on les appelle, ont obtenu l'égalité juridique pour l'ensemble des Canadiennes lors de l'affaire «personnes» en 1929.

Puissions-nous en tant que députés de la Chambre nous joindre à la présente génération de Canadiens pour rendre hommage à ces activistes de la première heure qui, grâce à leur détermination inébranlable, pour mettre fin à toute forme de discrimination.

Ce que ces femmes ont fait, elles l'ont fait pour les Canadiennes, pour la démocratie, nous léguant ainsi un véritable patrimoine historique.

*  *  *

JUDY COOK

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, en décembre 1998, le Manitoba perdait une personne remarquable. Judy Cook est morte alors qu'elle attendait une greffe du coeur. Elle avait consacré sa vie à la justice sociale et à l'amélioration du sort des autres.

En décembre, un métallurgiste de Leaf Rapids s'est vu donner de nouvelles chances de vie grâce à une amie de Leaf Rapids qui lui a fait don de l'un de ses reins.

 

. 1410 + -

Il est bien établi que le don d'organes au Canada pose un problème. Nous sommes le pays du monde occidental à avoir le taux de dons d'organes le plus faible. À l'heure qu'il est, 3 000 Canadiens attendent des greffes d'organes. Moins de la moitié d'entre elles auront reçu l'organe dont elles ont besoin d'ici la fin de l'année. Outre les pertes de vies humaines, l'attente de dons entraîne aussi des coûts croissants, tout cela à cause des règlements fédéraux.

Il est urgent de faire en sorte d'augmenter le taux des dons d'organes au Canada. Pour cela, il ne suffit pas d'éduquer le public et d'améliorer les hôpitaux. Il faut des approches innovatrices et proactives, à commencer par la création d'un registre national de donneurs d'organes pour élargir le bassin des donneurs d'organes potentiels et la mise en place d'un mécanisme simple qui permette aux gens d'exprimer leurs désirs.

Il est important de donner aux Canadiens la possibilité d'exprimer leur désir de faire don de leurs organes.

*  *  *

[Français]

LE BLOC QUÉBÉCOIS

M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.): Monsieur le Président, le Bloc québécois a essayé, au cours de son congrès, de redéfinir ce qu'est un «vrai Québécois».

Toute une trouvaille que celle du Bloc québécois en fin de semaine: un Québécois est une personne qui réside au Québec. Donc, un Ontarien est une personne qui réside en Ontario, un Italien est une personne qui réside en Italie et un Espagnol est une personne qui réside en Espagne.

Et voilà, il n'en fallait pas plus pour que le Bloc québécois partage encore cette idée d'exclusion.

Bravo, et vive le Canada!

*  *  *

LE BLOC QUÉBÉCOIS

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, le Bloc québécois a effectivement tenu, en fin de semaine, à Rivière-du-Loup, un conseil général qui fera étape dans la jeune histoire de notre parti.

Je tiens à souligner l'ouverture d'esprit et la vision de notre chef et à le féliciter d'avoir lancé cet exercice d'orientation et de débats portant sur l'avenir du Québec. Je félicite aussi les membres de nos quatre chantiers de réflexion pour la très grande qualité de leur travail.

Les membres du Bloc seront donc engagés dans cette vaste opération de réflexion au cours des prochains mois. J'invite également tous les Québécois et Québécoises, de même que tous les Canadiens et Canadiennes, qui peuvent s'interroger sur la question du partenariat, par exemple, à se saisir des documents que nous avons rendus publics en fin de semaine, puisque je suis convaincu qu'ils y trouveront des pistes de solution valables aux problèmes politiques auxquels font face le Québec et le Canada.

Au Québec, une chose est de plus en plus claire: les souverainistes discutent de questions fondamentales touchant leur avenir telles que le partenariat, la mondialisation, la citoyenneté et les pratiques démocratiques...

Le Président: L'honorable député de Pictou—Antigonish—Guysborough a la parole.

*  *  *

[Traduction]

WAYNE GRETZKY

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, hier Wayne Gretzky a pris sa retraite de la Ligue nationale de hockey, marquant ainsi la fin d'une ère merveilleuse. Tout en redéfinissant le jeu grâce à des habiletés hors du commun, il a rapproché ses coéquipiers, ses admirateurs et ses concitoyens.

Fidèle à ses racines, il a représenté le Canada sur la scène sportive internationale et ravivé la fierté des Canadiens chaque fois qu'il arborait la feuille d'érable. La Merveille a amélioré l'image de ce sport au Canada et modelé le style du jeu.

À titre d'ambassadeur du hockey et de son pays, il a connu une carrière remarquable grâce à un excellent esprit de leadership.

L'humilité que manifeste Wayne Gretzky malgré sa célébrité le place dans une classe à part. Son amour du jeu et sa recherche de l'excellence en ont fait un modèle, responsabilité qu'il n'a jamais chercher à éluder. Jusqu'à la fin, Gretzky a minimisé l'importance de ses réalisations personnelles et des records qu'il ne cessait d'établir.

Ses cartes de hockey, son numéro 99 et son chandail rentré dans sa culotte laissent un souvenir chaleureux dans notre mémoire. Nos parents avaient pour héros des gens comme Joe DiMaggio. Nous avons Wayne Gretzky.

La feuille de marque de sa dernière partie de la LNH fait état d'une passe sur un but marqué, ce qui est très approprié puisqu'il a toujours insisté sur le travail d'équipe.

De ce monde très complexe, il nous a permis d'échapper pendant quelques instants précieux.

Le temple de la renommée et de nouveaux défis vous attendent. À vous et à votre famille, nous souhaitons une longue et heureuse vie. Merci, Wayne Gretzky, pour tout ce que vous avez donné à notre pays et à notre sport national.

*  *  *

[Français]

LE BÉNÉVOLAT

Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec un énorme plaisir que je souligne que le prix Hommage bénévolat-Québec a été décerné à la Société de l'autisme et des troubles envahissants du développement, T.E.D., de Laval dans le cadre de la Semaine nationale de l'action bénévole.

La Société de l'autisme et des T.E.D. de Laval est un organisme sans but lucratif qui regroupe les familles des personnes atteintes d'autisme ou de troubles envahissants du développement.

Grâce au travail incessant de ses bénévoles, la Société de l'autisme et des T.E.D. de Laval offre les services du camp «Le Chat botté» reconnu pour ses programmes d'intervention précoces, intensifs et systématiques. «Le Chat botté» permet aux personnes atteintes de T.E.D. d'améliorer, souvent d'une façon très impressionnante, leurs conditions de vie. Le dévouement de la Société de l'autisme et des T.E.D. de Laval représente ce qu'il y a de plus beau dans chaque Canadien et Canadienne.

Félicitations et un grand merci aux bénévoles.

*  *  *

 

. 1415 + -

[Traduction]

WAYNE GRETZKY

Le Président: Avant d'amorcer notre période des questions aujourd'hui, j'aimerais offrir, au nom des députés et du Parlement, nos respects, nos félicitations et nos remerciements à un citoyen remarquable. Je fais évidemment allusion à M. Gretzky.

[Note de la rédaction: Tous les députés se lèvent et applaudissent.]



QUESTIONS ORALES

[Traduction]

LE KOSOVO

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, hier, le secrétaire général de l'OTAN, Javier Solana, a admis que l'OTAN n'écarte plus la possibilité de recourir à des troupes terrestres dans une offensive de l'OTAN au Kosovo.

Il a exprimé l'assurance que, s'il devenait nécessaire d'envahir la Yougoslavie, les pays membres de l'OTAN seraient prêts à le faire.

Selon l'OTAN, le Canada devrait se préparer à l'offensive terrestre. Le premier ministre demandera-t-il enfin l'approbation de la Chambre et consentira-t-il à la tenue d'un vote afin de clarifier la participation du Canada à toute offensive?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, pour l'instant, l'OTAN ne nous demande pas d'envoyer des troupes terrestres au Kosovo. J'ai dit que, si on nous demandait de le faire, un débat sur la question serait tenu à la Chambre des communes.

La question est hypothétique pour l'instant, car une telle demande ne nous a pas été présentée.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, si le secrétaire général demande notre participation, le premier ministre consentira-t-il à la tenue d'un vote? Nous sommes ici pour cela.

Nous nous opposons à la purification ethnique au Kosovo. Nous appuyons nos forces qui participent déjà à la campagne de l'OTAN. Pourquoi le premier ministre refuse-t-il que nous votions à la Chambre pour établir les conditions de notre participation à venir? Croit-il vraiment qu'il a le droit de préparer notre pays pour la guerre sans laisser les Canadiens se prononcer?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, depuis quatre ou cinq ans, le gouvernement n'a jamais autant demandé la participation du Parlement aux débats sur les affaires étrangères et sur la présence du Canada à l'étranger. Plus de deux débats par année ont eu lieu sur ces questions. L'opposition a accepté une formule pour qu'il y ait davantage de débats thématiques.

J'ai dit que, si on nous demandait d'envoyer des troupes terrestres là-bas, nous tiendrions un débat sur la question. À ce moment-là, selon la nature de la demande, je ferai savoir si nous devrions ou non tenir un vote. Nous avons...

Le Président: Le député de Red Deer a la parole.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, nous parlons de la tenue d'un vote, et le premier ministre devrait le savoir.

Au cours du week-end, le Canada a ajouté six CF-18 de plus aux effectifs de la campagne de l'OTAN, ce qui porte notre contribution totale à 18 chasseurs-bombardiers. Il a fallu envoyer plus de la moitié de nos pilotes de combat pour piloter ces appareils.

Quelle ampleur doit prendre notre participation avant que le premier ministre ne juge nécessaire de tenir un vote sur l'envoi d'autres effectifs au Kosovo?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je me trouvais à Aviano, samedi, et à Bruxelles, la veille, pour rencontrer des représentants de l'OTAN.

J'informe la Chambre que le général Short, commandant de la campagne de frappes aériennes de l'OTAN, a fait l'éloge de la participation du Canada. Il a dit que nos soldats étaient des gens très professionnels qui faisaient un travail remarquable et qu'ils croyaient dans la juste cause que défend l'OTAN.

*  *  *

LA FISCALITÉ

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Il serait bien agréable de recevoir des réponses à nos questions, n'est-ce pas, Monsieur le Président?

Nortel est l'une de nos plus grandes sociétés et l'une des meilleures au Canada et même dans le monde entier. Elle a à son service 21 000 employés au Canada seulement, et leurs emplois sont parmi les meilleurs qui soient. Elle laisse maintenant clairement entendre qu'elle risque de partir à cause de la politique fiscale du gouvernement.

J'ai une question à poser au premier ministre. Combien d'entreprises, combien de rapports et combien de membres de sa propre famille faudra-t-il avant qu'il comprenne un message fort simple, soit qu'il doit réduire les impôts tout de suite?

 

. 1420 + -

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, ce matin, j'ai pris le temps de discuter avec le président de Nortel. Il m'a dit une chose qui devrait être évidente pour le député: c'est à cause de sa loyauté envers le Canada, et non le contraire, comme les journaux semblent le laisser entendre, que Nortel est aussi solidement implantée chez nous.

Le député a fort justement donné le nombre d'employés de Nortel au Canada, où cette société ne réalise pourtant que 7 p. 100 de ses ventes, et où elle fait un nouvel investissement très important dans la région de Kanata afin d'accroître ses travaux de recherche et développement. Cela montre que Nortel reste loyale au Canada.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, c'est une réponse ridicule. Nortel vient à peine de dire qu'elle ne doit pas allégeance au Canada et qu'elle envisage de quitter notre pays. Nortel a 56 000 employés qui travaillent à l'extérieur du Canada.

Comme le ministre semble penser que les impôts élevés sont bons pour l'entreprise au Canada, je dois lui demander pourquoi il ne comprend pas le message. Pourquoi continue-t-il de présenter des excuses bancales pour son gouvernement? Pourquoi le gouvernement ne se met-il pas sérieusement au travail et ne réduit-il pas les impôts afin d'attirer des investissements au Canada?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, contrairement au refrain de Johnny, le fait est que...

Le Président: À l'ordre. Je préfère que nous nous désignions les uns les autres comme des députés.

L'hon. John Manley: Monsieur le Président, le député chante toujours le même refrain, quelle que soit la partition, et il tient à toujours présenter le Canada sous le jour le plus défavorable.

Je dirai simplement ceci: Northern Telecom, l'une de nos sociétés les plus avancées, continue d'investir généreusement au Canada, ce qui témoigne de son assurance que le Canada est dans la bonne voie.

*  *  *

[Français]

LE KOSOVO

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, il y a quelques jours, le Pentagone demandait la mobilisation de 33 000 réservistes. On a aussi noté, au cours des derniers jours, un durcissement dans la position du secrétaire général de l'OTAN, de même que dans les déclarations de la secrétaire d'État et du président des États-Unis au sujet de la crise au Kosovo.

Le premier ministre nous disait, il y a peu de temps, qu'il était impossible de prévoir la durée de ce conflit. Est-ce qu'il ne considère pas aujourd'hui que ces développements nous laissent entrevoir un conflit qui peut être long, voire très long?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, évidemment, le conflit pourrait être très long. D'un autre côté, il y a des gens qui travaillent à trouver une solution.

Ce matin, j'ai eu une très longue conversation avec Victor Tchernomirdine, l'envoyé spécial du président russe, qui travaille sur ce dossier. J'étais très heureux de constater que les Russes cherchent une voie pour mettre un terme au conflit de telle façon que les Kosovars puissent retourner au Kosovo et pour qu'effectivement nous soyons en mesure d'arrêter les bombardements.

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, au cours des derniers jours, la population serbe de Bosnie a remis en question les accords de Dayton. On a vu des manifestations de Serbes en Macédoine, ce qui remet en question la stabilité de ce pays. Au tout début du conflit, le Bloc québécois avait soulevé la question du danger de l'élargissement de ce conflit.

Est-ce que le premier ministre ne considère pas aujourd'hui, qu'effectivement, l'élargissement de ce conflit est imminent et probable et qu'il faut se préparer en fonction du développement de la conjoncture?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, il est clair qu'il y a toujours des risques qu'un conflit comme celui-là puisse prendre de l'expansion. Ce serait regrettable.

Ce qui est clair pour le gouvernement et pour la Chambre des communes, c'est que tous les partis d'opposition appuient, comme le fait le parti du gouvernement, les activités du gouvernement canadien pour ce qui est des bombardements de l'OTAN en Serbie. Parce qu'il faut travailler pour permettre aux Kosovars de retourner chez eux, au Kosovo, et pour mettre fin aux meurtres et aux crimes du même genre que ceux qui ont cours présentement.

 

. 1425 + -

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, hier, le secrétaire général de l'OTAN, Javier Solana, et la secrétaire d'État américaine, Madeleine Albright, ont affirmé tous les deux qu'ils n'excluaient plus l'envoi d'une force terrestre au Kosovo.

Des informations circulaient également que ces forces terrestres pourraient être déployées dans six à huit semaines et être composées de 280 000 soldats.

Le premier ministre approuve-t-il les propos du secrétaire général de l'OTAN et de Mme Albright et est-il en mesure de confirmer les informations sur le délai d'envoi et la composition de l'éventuelle force terrestre au Kosovo?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, présentement, aucune décision n'a été prise par l'OTAN sur les questions des forces armées. Mais vendredi prochain, les chefs de gouvernement de tous les pays de l'OTAN auront l'occasion de discuter de ces questions sérieuses. Mais en ce moment, il n'y a aucune décision.

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, voilà une autre preuve qu'on nous donne de l'information au compte-gouttes.

Vendredi, il va se passer quelque chose, ou on va avoir de l'information, quelque chose qui ne nous a jamais été dit jusqu'à présent.

Et si l'OTAN demande au Canada de contribuer à l'envoi de troupes terrestres au Kosovo, est-ce que le premier ministre maintenant peut enfin s'engager à demander l'approbation du Parlement avant l'envoi des troupes dans les Balkans?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le député est surpris. Tout le monde sait, sauf le député, qu'il y a une réunion des chefs de gouvernement des pays de l'OTAN vendredi prochain à Washington. L'honorable député devrait être au courant qu'on va être là et il devrait être au courant aussi qu'on va parler du Kosovo. On ne va pas là pour parler de la température.

Alors, il ne devrait pas être surpris qu'on discute de ces problèmes vendredi prochain. Je pense que le député devrait être au courant des dossiers avant de se lever.

*  *  *

[Traduction]

LES DÉCHETS NUCLÉAIRES

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Les Américains et les Russes font face à un problème au niveau de la gestion des déchets nucléaires. Au mépris de tout principe environnemental ainsi que de la recommandation unanime formulée par un comité parlementaire, le Canada s'apprête maintenant à empirer les choses en transportant du plutonium, une matière très dangereuse, sur des milliers et des milliers de kilomètres en traversant des localités canadiennes.

Pourquoi soumettre le Canada à un tel risque pour l'environnement? Pourquoi le Canada ne demande-t-il pas aux Américains et aux Russes de régler eux-mêmes leur problème?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je crois sincèrement que c'est la question la plus bête que j'aie entendu depuis mon arrivée au Parlement, il y a bien des années. Il est très dangereux d'essayer de faire peur aux Canadiens en s'appuyant sur des hypothèses et des suppositions.

Mon collègue le ministre de la Défense et moi déposerons cet après-midi une réponse à la recommandation du comité. Nous avons déjà affirmé qu'aucune décision n'avait été prise pour ce qui est du transport de cette matière. Toute décision devra être basée sur des normes de sécurité environnementale.

Je considère que c'est une question honteuse de la part d'un parti engagé depuis des années dans la lutte pour le désarmement nucléaire.

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, je suppose que nous allons maintenant entendre les mêmes excuses invraisemblables en ce qui a trait aux BPC, puisque le Canada s'apprête à importer des bases militaires américaines au Japon des BPC dont les Américains n'ont pas voulu en raison du danger qu'ils présentaient.

Comment cela fonctionne-t-il? Clinton n'a qu'à tirer la corde et son petit copain répond sans délai. Pourquoi le Canada est-il en train de devenir un dépôt de choix pour les déchets dangereux du monde entier?

L'hon. Christine Stewart (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, je crois que je peux répondre à la question sur les BPC.

Mon ministère n'a reçu aucune demande visant à autoriser un tel envoi au pays. Si nous en recevions une, nous nous pencherions très certainement sur la question. Toute mesure que nous pourrions prendre respecterait sans contredit les politiques gouvernementales établies.

*  *  *

LE KOSOVO

M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Monsieur le Président, le ministre de la Défense nationale va-t-il admettre que des membres des Forces canadiennes participent déjà à des opérations terrestres au Kosovo ou en Yougoslavie?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je ne sais pas ce que le député entend par opérations terrestres.

 

. 1430 + -

Nous avons, en Macédoine et en Albanie, du personnel qui doit surtout aider les réfugiés et exécuter d'autres tâches de ce genre. Nous n'y avons pas envoyé de troupes. Nous avons déjà indiqué que nous enverrions de 600 à 800 militaires dans le cadre d'une force de maintien de la paix déployée après la signature d'un accord de paix. De toute évidence, ces troupes ne sont pas encore sur place. Le personnel qui se trouve dans la région contribue à l'effort global en vue d'aider les réfugiés.

M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Monsieur le Président, je ne parlais pas des régions environnantes.

Je demande au ministre si les membres de la deuxième force opérationnelle interarmées participent maintenant à des opérations terrestres au Kosovo et en Yougoslavie.

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, les opérations en cours en Albanie, en Macédoine, ou ailleurs dans la région ont déjà fait l'objet d'abondantes discussions et ont été annoncées à la Chambre. Nous avons dit clairement que nous n'enverrions pas de troupes de maintien de la paix dans une situation de conflit et que nous ne prendrions aucune mesure, sauf celles déjà acceptées, sans d'abord procéder à d'autres discussions.

*  *  *

LA FISCALITÉ

M. Richard M. Harris (Prince George—Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de l'Industrie dit que nous sommes sur la bonne voie. La voie que les Canadiens les plus brillants et compétents empruntent, c'est celle qui mène aux États-Unis, dont le régime fiscal les accueille à bras ouverts, tandis que celui du Canada les pousse à s'exiler à l'étranger. Nortel a maintenant joint sa voix à celles des autres ténors de l'industrie en demandant au gouvernement d'améliorer sa législation fiscale, faute de quoi l'entreprise quittera notre pays.

Avant que toute l'industrie de la haute technologie ne plie bagage et ne ferme ses portes pour échapper au régime fiscal odieux du gouvernement actuel, le ministre des Finances et le premier ministre vont-ils proposer certains allégements fiscaux?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, après la période des questions aujourd'hui, le député devrait prendre le volant et, en compagnie de son petit acolyte railleur, il devrait se diriger vers l'ouest, jusqu'à Nepean, pour y constater le nombre de gratte-ciel autour du complexe de Nortel et y compter le nombre de grues. Il sera ainsi en mesure de juger si Nortel s'apprête à quitter le Canada.

M. Richard M. Harris (Prince George—Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, de toute évidence, le ministre de l'Industrie a été frappé prématurément par le bogue de l'an 2000.

Les impôts trop élevés du gouvernement libéral menacent actuellement notre secteur de la haute technologie, tandis que le régime fiscal américain accueille à bras ouverts nos Canadiens les plus brillants et compétents.

Je réitère ma question au premier ministre. Avant que toute l'industrie de la haute technologie ne plie bagage et ne ferme ses portes pour échapper au régime fiscal odieux du gouvernement actuel, va-t-il proposer certains allégements fiscaux afin de garder notre industrie de la haute technologie au Canada et de procurer ainsi des emplois à nos Canadiens les plus brillants?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, d'année en année, le Parti réformiste refuse toujours d'appuyer les mesures que nous prenons. À mon avis, nous avons en face un exemple des méfaits du bogue de l'an 2000.

Nous investissons constamment dans l'innovation. Nous investissons dans les activités de recherche et développement. Nous appuyons les conseils subventionnaires des universités. Nous accordons des crédits d'impôt au titre de la R-D. Tout ce que fait le Parti réformiste, c'est multiplier ses critiques.

Alors que nous favorisons l'expansion de notre secteur de la haute technologie, nous sommes témoins du succès d'entreprises comme Nortel, mais aussi de toute une foule d'autres qui ont vu le jour dans notre région.

*  *  *

[Français]

LE KOSOVO

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, tandis que les Albanais du Kosovo sont retenus à l'intérieur du pays puisque les Serbes ont miné les voies d'accès à l'Albanie, on semble avoir découvert 43 charniers, une preuve additionnelle que l'épuration ethnique se transforme en génocide.

Puisque les Serbes ont miné les sorties du Kosovo vers l'Albanie afin de contraindre les Albanais à rester au Kosovo, est-ce que le Canada ne craint pas que l'objectif poursuivi par cette opération soit d'éliminer purement et simplement cette population qui se voit ainsi prise au piège?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je conviens avec la députée que, en truffant de mines cette frontière et ses abords comme il le fait à l'heure actuelle, le régime serbe se trouve seulement à multiplier les actes criminels qui ont cours depuis deux ans.

 

. 1435 + -

La plus importante tâche que nous aurons à accomplir lorsque nous en arriverons à un accord sera de s'assurer de prendre la tête du déminage qui s'imposera pour sauver la vie de civils innocents dans la région. Je suis persuadé que la Chambre, qui a si largement appuyé le traité sur les mines terrestres, appuiera aussi ce genre d'initiative de la part du gouvernement fédéral.

[Français]

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, le devoir des pays de l'OTAN n'est-il pas de prévenir un génocide plutôt que de constater après coup qu'il y a eu génocide et, en ce sens, qu'ont-ils l'intention de faire à la suite des indices sérieux qu'il y aurait génocide au Kosovo?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, au cours de la dernière semaine, le gouvernement fédéral a participé, en tant que membre de l'OTAN, à un accord avec le tribunal international à La Haye qui examine des questions de crimes de guerre.

Il a déjà envoyé des lettres aux dirigeants du régime yougoslave et nous sommes maintenant engagés activement dans l'enquête et le transfert d'information de telle sorte que le tribunal des crimes de guerre puisse établir la preuve contre les personnes qui commettent des crimes de guerre dans cette région.

*  *  *

LA FISCALITÉ

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, le problème du Canada, ce sont les impôts. Voyons les priorités du gouvernement: des milliards de dollars perdus en subventions perturbatrices de marché versées aux entreprises; des milliards de dollars gaspillés pour différents événements et galas liés au millénaire; des centaines de milliers de dollars engloutis dans un hôtel en mauvais état à Shawinigan.

Est-ce parce que le gouvernement a une soif de dépenser insatiable que les Canadiens n'obtiennent pas de véritables réductions d'impôt? Dépenser est-il la seule chose que le gouvernement sait faire?

M. Tony Valeri (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, que les choses soient bien claires. Le gouvernement a commencé à réduire les impôts il y a environ deux budgets de cela et nous continuerons de les réduire. Il faut aussi mentionner une réduction d'impôt de 16,5 milliards de dollars en trois ans et également une réduction des cotisations à l'assurance-chômage.

Si le député veut parler de ce que fait le gouvernement, parlons de la politique économique. Parlons des budgets équilibrés qui font un retour au Canada après 50 ans. Parlons d'une réduction des dépenses jusqu'à 12 p. 100 du PIB, soit le pourcentage le plus bas en 50 ans.

Le gouvernement a remis le pays sur la voie de la prospérité et nous voulons rester sur cette voie.

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, les entreprises acculées au pied du mur savent que ce ne sont là que des paroles. Le gouvernement ne comprend tout simplement rien. Le ministre croit que les entreprises peuvent se payer le luxe d'attendre que le gouvernement réduise les impôts.

Pourtant, le besoin est criant. Pourquoi le gouvernement n'agit-il pas? Le ministre ne comprend-il pas que la justice fiscale retardée est la justice fiscale niée?

M. Tony Valeri (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député parle de retard. Parlons de ce que nous avons fait.

Nous avons augmenté l'exemption de base de 675 $ pour tous les contribuables, soustrayant ainsi 600 000 Canadiens à l'impôt. Nous avons éliminé la surtaxe générale de 3 p. 100 applicable à tous les contribuables qui avait été introduite par le gouvernement précédent. Les deux derniers budgets contenaient des réductions d'impôt de 16,5 milliards de dollars. Mais nous ne nous sommes pas arrêtés là. Nous avons investi 11,5 milliards de dollars dans les soins de santé.

Le député parle d'investissement. Parlons de l'augmentation des budgets de recherche en santé.

*  *  *

[Français]

LE KOSOVO

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, on a appris, en fin de semaine, que le Canada allait augmenter son effort militaire en envoyant six F-18 de plus au Kosovo.

Sans remettre en question la nécessité de notre participation, le ministre de la Défense nationale peut-il nous dire ce qu'a coûté à ce jour notre implication dans ce conflit et quel cadre budgétaire le gouvernement s'est-il fixé pour les opérations qu'il mène actuellement au Kosovo?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes en train de rassembler les chiffres. Nous devrions, j'espère, pouvoir donner une indication à ce sujet aux députés dans le courant de la semaine.

[Français]

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, nous aurions 18 avions qui participent actuellement aux frappes aériennes en Yougoslavie.

Le ministre peut-il nous dire s'il s'agit là du maximum d'appareils que le Canada peut mettre à la disposition de l'OTAN et, sinon, de combien d'appareils opérationnels supplémentaires le Canada dispose-t-il pour faire face à d'éventuelles demandes en ce sens?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je ne pourrais le dire à ce stade. On ne nous a pas demandé d'autres appareils à part les six qui, avec les appareils supplémentaires de nos alliés, permettront d'assurer une campagne aérienne vingt quatre heures sur vingt quatre.

Il est trop tôt pour savoir si d'autres appareils seront nécessaires. J'ai parlé de cette question au général Clark. Il n'en sait rien à ce stade. En cas de besoin, nous étudierons la demande.

*  *  *

 

. 1440 + -

LES DÉCHETS NUCLÉAIRES

M. Rick Casson (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, en dépit de ce qu'a dit le ministre des Affaires étrangères, on rapporte que le Cabinet a approuvé des essais, dans des réacteurs canadiens, de plutonium provenant d'ogives nucléaires américaines.

Si c'est vrai, cela va directement à l'encontre de la décision d'un comité composé de représentants de tous les partis, qui a expressément exclu ce genre d'essai.

Qu'est-ce que le ministre ne comprend pas dans un non?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le comité a fait des recommandations, il n'a pas pris de décision. Il appartient au gouvernement de répondre à ces recommandations et il déposera la réponse.

Je rappelle ce que j'ai déjà dit à plusieurs reprises à la Chambre. Premièrement, les essais en cours, qui portent sur une partie infime du combustible, visent à en déterminer la validité et l'innocuité et à établir dans quelle mesure il respecte les normes environnementales. En définitive, tout cela est en rapport avec une question fondamentale à savoir la dénucléarisation militaire du monde, à laquelle le comité a fermement recommandée au Canada de contribuer.

M. Rick Casson (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, les essais vont tout de même se dérouler au Canada. Le comité a entendu des spécialistes et des Canadiens préoccupés par cette question. Il a rejeté unanimement l'idée de procéder à des essais, mais le gouvernement va tout de même le faire.

Ces essais, si modestes soient-ils, vont engendrer un problème énorme. Le Canada va-t-il devenir le dépotoir des déchets nucléaires du monde?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, le député semble confondre deux choses. Le permis de la centrale de Chalk River prévoit déjà l'essai de quantités infimes de MOX. Toutefois, pour qu'un programme d'essai à part entière du MOX soit créé au Canada, il faudrait non seulement que les essais soient concluants, mais également que le projet fasse l'objet d'un examen environnemental complet, conformément à toutes les lois canadiennes fédérales et provinciales, pour s'assurer qu'il ne comporte pas de risques pour l'environnement, la santé et la sécurité au Canada.

*  *  *

[Français]

LES BOURSES DU MILLÉNAIRE

M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): Monsieur le Président, le président de Bell Canada, M. Monty, en a déjà plein les bras avec ses téléphonistes qu'il veut mettre en chômage, et ses actionnaires n'apprécieront sûrement pas qu'il passe tout son temps à négocier à la place du fédéral dans le dossier des bourses du millénaire.

Compte tenu que le dossier des bourses du millénaire est complètement bloqué et que des étudiants risquent d'être pénalisés par cette nouvelle guerre de drapeaux du fédéral, le ministre du Développement des ressources humaines peut-il sortir de sa belle immobilité et aller s'asseoir avec le ministre Legault, à Québec, qui l'attend depuis des semaines pour régler ce dossier?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je regrette la situation dans laquelle on semble vouloir maintenir, à Québec, un refus de s'engager dans la voie de la résolution Gautrin.

La résolution Gautrin, votée à l'unanimité par l'Assemblée nationale, avait identifié certains critères pour pouvoir s'entendre entre la Fondation des bourses du millénaire et le gouvernement du Québec.

Je peux vous assurer que la législation que ce Parlement a adoptée permettrait, je crois, facilement à la Fondation de rencontrer les objectifs de la résolution Gautrin, que le Parti québécois a lui-même adoptée à l'Assemblée nationale.

*  *  *

[Traduction]

LE KOSOVO

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. Les bombardements et les actes de violence en Yougoslavie ont déjà causé l'exode de milliers de réfugiés. La ministre peut-elle assurer à la Chambre que toutes les demandes d'asile faites par des réfugiés seront traitées de la même façon, quelle que soit l'origine ethnique des demandeurs?

L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, le Canada offre une protection basée sur la persécution et non sur l'origine ethnique.

À l'heure actuelle, nous acceptons les réfugiés qui nous sont envoyés par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Je dois avouer que nous accordons la priorité aux Kosovars d'origine albanaise, mais d'un autre côté, à notre bureau de Vienne, nous traitons en priorité les demandes de candidats yougoslaves parrainés, faites au titre de la réunification des familles.

*  *  *

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, les agents de la GRC sont transformés en fonctionnaires. Le ministre et l'état-major de la GRC estiment que, pour réduire les dépenses, il vaut mieux que les agents de la GRC inscrivent leur kilométrage et noircissent du papier au lieu de répondre aux appels et d'enquêter sur des crimes.

 

. 1445 + -

Vendredi, en réponse aux préoccupations que j'ai soulevées relativement à l'insuffisance du financement de la GRC, le solliciteur général a fait allusion à une étude en cours sur les ressources. La GRC n'a pas besoin d'une autre étude, mais d'un financement suffisant.

Le solliciteur général n'a-t-il pas honte du fait que, sous le gouvernement libéral, la fière tradition de la GRC se soit dégradée au point où ce corps de police n'est plus que l'ombre de lui-même?

L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'ai dit au député que le budget de la GRC s'élève à 1,2 milliard de dollars, soit une augmentation de 37 millions de dollars dans le dernier budget. Un examen des ressources est en cours. Le député est-il en train de nous dire qu'il ne s'inquiète pas du tout de la façon dont les deniers publics fédéraux sont dépensés dans notre pays?

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, évidemment que cela nous préoccupe. Cependant, les centaines de millions de dollars que le gouvernement consacre à l'enregistrement des armes à feu seraient peut-être mieux dépensés dans la lutte contre le crime. La GRC a besoin de 400 agents de plus en Colombie-Britannique et de millions de dollars supplémentaires. Et les libéraux ont besoin d'un groupe de travail pour déterminer pourquoi l'Ouest se sent aliéné.

Je voudrais informer le solliciteur général, qui est de l'Île-du-Prince-Édouard, que deux problèmes retiennent l'attention des Britanno-Colombiens: le crime organisé et les stupéfiants. Or, de l'aveu même des agents de la GRC, les enquêtes criminelles qui sont mises en suspens en raison d'un manque de fonds sont justement celles qui ont trait au crime organisé et aux stupéfiants.

Le solliciteur général s'engagera-t-il aujourd'hui à fournir un financement suffisant pour lutter contre le crime organisé et le trafic de stupéfiants?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais répondre à la question. Je voudrais m'opposer fermement à ce que l'on décrive un membre du Cabinet comme le ministre d'une province. Les ministres représentent tous les Canadiens de toutes les provinces.

*  *  *

LE KOSOVO

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, j'aimerais poser au ministre des Affaires étrangères une question qui ne tient pas pour acquis qu'un déploiement de troupes au sol semble inévitable et qui met plutôt l'accent sur la nécessité de trouver une solution diplomatique et de ramener les gens à la table de discussion.

À ce sujet, je suis convaincu que le ministre sait que le président Clinton a répété que le président Milosevic doit satisfaire aux cinq conditions établies par l'OTAN. Le ministre ayant appuyé le plan allemand qui prévoit un seuil différent de retour à la table de discussion, le gouvernement est-il disposé à manifester poliment son désaccord au président Clinton en ce qui concerne le seuil de retour à la table de discussion et à dire que les cinq conditions fixées par l'OTAN sont elles-mêmes négociables, sauf, bien sûr, pour ce qui est...

Le Président: Le ministre des Affaires étrangères a la parole.

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, si le député se reporte aux déclarations du secrétaire général des Nations Unies, des ministres des pays membres de l'OTAN à l'occasion de leur dernière réunion, du président et du plan allemand, il constatera que l'on fixe dans chaque cas les mêmes conditions essentielles. Les soldats du gouvernement serbe doivent se retirer. L'exploitation des réfugiés et les violences contre ces derniers doivent cesser. Un accord de paix doit être conclu. L'intégrité de ce secteur ainsi que les droits de la personne doivent faire l'objet d'une protection réelle. C'est sur cette base que les négociations se déroulent.

Je souligne au passage que, dans le cadre de ce processus, le premier ministre a conversé ce matin avec l'ancien premier ministre Chernomyrdin de Russie. Toutes ces interventions font partie du dialogue qui a cours afin de déterminer comment amorcer le...

Le Président: Le député de Winnipeg—Transcona a la parole.

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, le ministre a parlé des conditions essentielles. Peut-il nous dire si une de ces conditions demeure le recours à une force de l'OTAN après le règlement du conflit? Ce fut manifestement une des pierres d'achoppement à Rambouillet. Elle figure dans le plan en cinq points. Lorsqu'il parle des conditions essentielles, le gouvernement canadien est-il disposé à dire que cet aspect n'en fait plus partie? Cela modifierait considérablement le seuil de retour à la table de discussion et améliorerait à notre avis la possibilité d'une solution diplomatique qui, selon moi...

Le Président: Le ministre des Affaires étrangères a la parole.

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je renvois le député au débat que nous avons tenu la semaine dernière à la Chambre. Le premier ministre a indiqué que l'on pourrait confier à une vaste force internationale la tâche de vérification et de surveillance à l'intérieur du Kosovo. C'est là le fondement des discussions actuelles qui ont pour objet de déterminer qu'elle serait la composition de la force et, plus important encore, de convaincre Milosevic d'accepter quelque chose afin que l'on puisse entreprendre des négociations sérieuses.

 

. 1450 + -

[Français]

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, le ministre de la Défense nationale peut-il confirmer qu'il y a déjà du personnel des Forces canadiennes présentement engagé dans des opérations au Kosovo et en Yougoslavie, plus précisément le Joint Task Force 2, oui ou non?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, tout ce que je peux confirmer tient à une liste qui a été distribuée à tous les députés. Elle énumère les divers effectifs qui participent, par exemple, à la mission de vérification, à la campagne aérienne à partir de la base d'Aviano, à la force d'extraction en Macédoine et à la force de détection lointaine aéroportée de l'OTAN à partie de l'Allemagne. Nous nous préparons bien sûr à envoyer, dans le cadre d'un accord de paix, des troupes de maintien de la paix pour soutenir cet effort. Il y a beaucoup de militaires qui sont engagés, mais dans des fonctions de ce type.

[Français]

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, le ministre n'a pas répondu à ma question.

Je demande au ministre de me corriger, mais est-il vrai que le Canada, comme d'autres pays, mais spécialement le Canada, a des membres des Forces canadiennes en mission à l'intérieur du Kosovo et de la Yougoslavie? Donc, déjà nous aurions des troupes au sol; vrai ou faux?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Non, Monsieur le Président, nous n'avons pas de forces terrestres dans la région. Les seuls de nos militaires qui sont là-bas participent à des missions comme celles que je viens d'énumérer.

*  *  *

L'AGRICULTURE

Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire.

Aujourd'hui, à Ottawa, les chefs de file de l'agroalimentaire présentent leur façon de voir la prochaine ronde de négociations de l'OMC. Le secrétaire parlementaire peut-il assurer aux Canadiens que le gouvernement se battra pour protéger nos agriculteurs et faire en sorte que les points de vue de l'industrie agricole et agroalimentaire soient pris en compte aux négociations?

M. Joe McGuire (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, en 1996, les participants à la rencontre fédérale-provinciale ont convenu de tenir une conférence avant le début, cet automne, de la prochaine ronde de négociations de l'OMC.

Comme la députée le sait, le comité permanent de la Chambre a tenu des audiences dans l'ensemble du pays. Des gens sont venus de partout pour y participer. Le ministre a depuis quelques mois des rencontres bilatérales avec des associations et des comités nationaux. Aujourd'hui, 500 transformateurs et producteurs sont réunis au Centre des Congrès pour établir la position que le Canada défendra aux négociations. Il ne s'agit pas de sa position finale, mais d'une position qui évoluera d'ici aux négociations, avec la participation des transformateurs et des producteurs.

*  *  *

LE MINISTRE DU COMMERCE INTERNATIONAL

M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le ministre du Commerce se cherche un nouveau poste. Une rumeur circule selon laquelle il sollicite des appuis en vue d'obtenir un de ces postes tant convoités à l'autre endroit. Suivant la bonne vieille tradition libérale, il ne veut pas d'une élection, mais d'une intronisation. La situation est-elle devenue à ce point intenable que les ministres cherchent des portes de sortie?

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je pensais que la période des questions était vraiment une occasion d'échanger. Le député a peut-être une question sérieuse à poser.

*  *  *

[Français]

LA PRODUCTIVITÉ CANADIENNE

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, on apprend, aujourd'hui, dans le National Post, à la page A1, qu'un rapport troublant du cabinet du premier ministre établit une relation directe entre la faiblesse de la productivité au Canada et l'aggravation des inégalités sociales.

Ma question s'adresse au ministre de l'Industrie. Est-ce que le ministre conteste les conclusions de ce rapport, et sinon, qu'entend-il faire pour casser la spirale de la faible productivité qui entraîne l'appauvrissement?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Il est vrai, monsieur le Président, que la question de la productivité est très importante. C'est une question primordiale pour l'économie canadienne.

Nous avons déjà investi beaucoup dans le secteur de la recherche et développement, dans le secteur de l'innovation, dans l'éducation, dans le Fonds du millénaire, ce qui va aider le Canada à se préparer pour le XXIe siècle.

C'est en faisant de telles choses qu'on peut se préparer pour les changements qui sont en train de devenir la réalité ici.

*  *  *

L'ASSURANCE-EMPLOI

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, certains députés libéraux réalisent enfin que le régime d'assurance-emploi n'est pas assez généreux.

 

. 1455 + -

Le caucus libéral vient de créer un comité pour étudier les problèmes causés par la réforme de l'assurance-emploi. L'intention est louable, mais l'exercice est partisan.

Le ministre du Développement des ressources humaines ne pense-t-il pas qu'il serait plus productif de confier l'examen de la réforme au Comité permanent du développement des ressources humaines où les députés de tous les partis pourraient s'exprimer et en faire la priorité numéro un?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, l'article 108(2) du Règlement est très clair. Le comité est maître de ses décisions et étudie les dossiers qu'il souhaite.

Lorsque nous avons entrepris cette réforme de l'assurance-emploi, nous avons manifesté beaucoup de sensibilité à l'égard de son impact sur les communautés et les citoyens à travers notre pays. Je suis extrêmement reconnaissant à mes collègues du caucus libéral qui veulent m'aider à comprendre la réalité de l'assurance-emploi à travers leur propre réalité. Je peux vous assurer qu'ils auront toute mon attention et ma vigilance pour aider nos citoyens canadiens.

*  *  *

[Traduction]

LE KOSOVO

M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Monsieur le Président, le ministre de la Défense nationale confirmera-t-il que des membres des Forces canadiennes sont sur le terrain au Kosovo pour identifier des cibles et soutenir l'ALK?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, non.

Le Président: Aux fins du compte rendu, je crois que la réponse était non. Est-ce exact? Je n'ai pas entendu la réponse du ministre de la Défense nationale. Pourrait-il la répéter?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, non, nous n'avons pas de forces terrestres sur le terrain.

*  *  *

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, nous avons demandé à plusieurs reprises au gouvernement pourquoi il a accepté de ratifier un traité qui attribuera aux Nisga'as le droit d'interdire les syndicats sur leur territoire.

Je le demande à nouveau à la ministre: pourquoi est-elle prête à réduire les droits des Nisga'as en acceptant un traité qui permettra au gouvernement central des Nisga'as d'interdire les syndicats sur son territoire?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, le député devrait prendre le temps de lire le traité des Nisga'as. Il constatera que ce qu'il affirme ne correspond absolument pas à la vérité.

*  *  *

LE SECTEUR DU BÉNÉVOLAT

M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Nous célébrons cette semaine la Semaine nationale de l'action bénévole. Le secteur du bénévolat constitue un élément indispensable de la vie au Canada. Les bénévoles méritent la gratitude de tous les Canadiens et méritent aussi que le gouvernement reconnaisse leur rôle important.

Que fait au juste le gouvernement du Canada pour encourager et appuyer cet élément essentiel de la société canadienne?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à remercier le député de sa question fort intéressante.

Je ne saurais être davantage d'accord avec lui; le secteur du bénévolat mérite la gratitude des Canadiens et du gouvernement. Nous voulons donner aux bénévoles les moyens de jouer un rôle encore plus important au sein de la société canadienne.

Le ministre de la Santé, le ministre du Revenu et moi-même oeuvrons de concert avec des représentants du secteur pour élaborer des façons de soutenir et de renforcer leur capacité de poursuivre leur excellent travail. Sur un autre plan, je lancerai aussi, mercredi prochain, un site d'échange sur les débouchés et les ressources en bénévolat, c'est-à-dire un site Internet national où les bénévoles seront assortis aux organismes oeuvrant dans ce secteur.

*  *  *

[Français]

LE KOSOVO

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, un collègue a affirmé à la Chambre qu'il y avait des troupes canadiennes actuellement présentes à l'intérieur des frontières du Kosovo.

Je demande au premier ministre d'informer cette Chambre si, oui ou non, et quel que soit le rôle que joueraient ces troupes, il y a des troupes canadiennes intervenant sur le terrain, à l'heure où l'on se parle, à l'intérieur des frontières du Kosovo.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la réponse n'est pas très compliquée, c'est non.

[Traduction]

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, j'ai demandé l'autre jour au ministre des Affaires étrangères ce qu'il pensait d'une résolution d'unité pour la paix. Il a fait savoir qu'une telle résolution ne serait opportune qu'en cas d'accord de la part de Milosevic. Le ministre parle d'obtenir d'abord l'accord, mais la raison pour laquelle Milosevic refuse de collaborer tient peut-être à l'endroit d'où vient la proposition d'accord, à savoir l'OTAN, le groupe qui le bombarde.

Le ministre ne conviendra-t-il pas qu'il vaut la peine de s'y prendre autrement et de chercher à obtenir une résolution d'unité pour la paix par l'intermédiaire de l'Assemblée générale des Nations Unies?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, comme je viens de le dire au collègue du député, le secrétaire général a pris une série d'initiatives ce matin, chargeant un représentant spécial d'entreprendre une série de négociations en vue d'obtenir l'accord du Conseil de sécurité sur un plan de paix qui inclurait le mandat prévu à l'article 7, d'où découle un série d'obligations que tous les pays du monde doivent respecter.

 

. 1500 + -

Comme je l'ai dit au député, bien que se déroulent ces négociations et qu'une résolution d'unité pour la paix est une option, nous devrions maintenant chercher le moyen d'appuyer les efforts du secrétaire général.

M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Monsieur le Président, pourquoi le gouvernement n'informe-t-il pas les Canadiens et le Parlement de ce que font réellement les Forces canadiennes au Kosovo?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Mais nous informons les Canadiens, monsieur le Président. Nous informons le Parlement.

J'ai déjà dit exactement ce que font nos gens dans la région en rapport avec le Kosovo.

*  *  *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: J'attire l'attention des députés sur la présence à notre tribune du ministre australien de l'Environnement et du Patrimoine, l'honorable Robert Hill.

Des voix: Bravo!



AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET COMMERCE INTERNATIONAL

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 109 du Règlement, j'ai le plaisir de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement au septième rapport du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international intitulé Le Canada et le défi nucléaire: Réduire l'importance politique de l'arme nucléaire au XXIe siècle.

Les membres du comité, sous la direction du président, M. Bill Graham, ont entendu des centaines de Canadiens sur la question, qu'il s'agisse d'experts ou de citoyens intéressés, avant de rédiger un rapport tout à fait réfléchi. Je les félicite et je les remercie.

En plus de la réponse du gouvernement au rapport, conformément au paragraphe 32(2) du Règlement, j'ai le plaisir de déposer, dans les deux langues officielles, l'énoncé du gouvernement sur la politique nucléaire intitulé Désarmement et non-prolifération nucléaires: Favoriser l'atteinte des objectifs canadiens.

Le vice-président: Le ministre des Affaires étrangères voulait sans doute parler du représentant de Toronto-Centre—Rosedale lorsqu'il a appelé le député par son nom. Je suis persuadé qu'il ne voudra pas répéter cela. Je sais qu'il connaît aussi bien que nous le député de Toronto-Centre—Rosedale.

*  *  *

[Français]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à neuf pétitions.

*  *  *

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

JUSTICE ET DROITS DE LA PERSONNE

M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le 18e rapport du Comité permanent de la justice et des droits de la personne.

[Traduction]

Conformément à son ordre de renvoi du jeudi 22 octobre 1998, votre Comité a étudié le projet de loi C-251, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (peines consécutives), et a convenu, le mercredi 24 mars 1999, de supprimer les articles et le titre du projet de loi.

 

. 1505 + -

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le 69e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet de la liste des membres associés du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international.

Si la Chambre y consent, j'ai l'intention de proposer l'adoption du 69e rapport plus tard aujourd'hui.

*  *  *

LOI SUR LE PROGRAMME DE PROTECTION DES TÉMOINS

 

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-494, Loi modifiant la Loi sur le programme de protection des témoins et une autre loi en conséquence (protection des conjoints dont la vie est en danger).

—Monsieur le Président, je voudrais tout d'abord remercier mon collègue, le député de Langley—Abbotsford, d'appuyer la motion de première lecture.

Je prends la parole pour présenter mon projet de loi d'initiative parlementaire que j'appellerais la loi permettant de se créer une nouvelle identité. S'il est adopté, ce projet de loi garantira officiellement la protection des personnes dont la vie est en danger à cause des actes commis par leur conjoint ou ex-conjoint ou par leur conjoint de fait ou ex-conjoint de fait, en les admettant dans le programme de protection des témoins.

Les ministères fédéraux du Développement des ressources humaines et du Revenu disposent à l'heure actuelle d'un programme spécial visant à aider ces personnes à se créer une nouvelle identité afin de se protéger, elles et leurs enfants, contre toutes sortes de dangers, y compris la mort.

Malheureusement, ce programme est dépourvu d'un mandat défini par la loi et d'un financement adéquat. En tant que parlementaires, nous avons l'obligation de faire notre possible pour aider ces gens. J'espère que les députés, tous partis confondus, feront preuve d'impartialité en accordant au projet de loi l'appui qu'il mérite.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

[Français]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, si la Chambre donne son consentement, je propose:  

    Que le 69e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, présenté à la Chambre plus tôt aujourd'hui, soit adopté.

Le vice-président: Est-on d'accord

Des voix: D'accord

(La motion est adoptée.)

*  *  *

[Traduction]

WAYNE GRETZKY

M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens ont vécu un moment historique au cours de la fin de semaine. Voilà pourquoi j'ai le plaisir de proposer une motion, pour laquelle j'espère avoir le consentement unanime de la Chambre:

    Que la Chambre demande à Société canadienne des postes d'émettre un timbre en l'honneur de Wayne Gretzky en reconnaissance de sa contribution unique au sport au Canada en général et au hockey en particulier.

Le vice-président: Le député de Brampton-Centre a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour proposer cette motion?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: La Chambre a entendu le libellé de la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Une voix: Non.

M. Sarkis Assadourian: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'ai parlé aux leaders de tous les partis à la Chambre et ils ont accueilli favorablement ma proposition. Si vous posiez de nouveau la question, ils pourraient clarifier leur position.

Le vice-président: La présidence hésite à mettre de nouveau la motion aux voix. La présidence est certaine d'avoir entendu un non. Je ne pense pas qu'il appartienne aux leaders des différents partis à la Chambre de décider unilatéralement d'une question comme celle-là. Comme il faut le consentement de tous les députés, et non pas seulement celui des leaders, je ne crois pas qu'il y ait eu consentement.

[Français]

M. Michel Gauthier: Monsieur le Président, j'ai l'impression que l'accord a été donné unanimement.

 

. 1510 + -

Le non que vous avez entendu ne concernait pas du tout la question que vous posiez.

Le vice-président: Je vais donc poser de nouveau la question à la Chambre.

La Chambre a entendu l'énoncé de la motion proposée par l'honorable député de Brampton-Centre. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

*  *  *

[Traduction]

PÉTITIONS

LES DROITS DES GRANDS-PARENTS

M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition signée par de nombreux habitants de ma circonscription. Ces pétitionnaires demandent au Parlement de modifier la Loi sur le divorce de manière à y ajouter la disposition prévue dans le projet de loi C-340, disposition qui reconnaît aux parents des conjoints le droit de garde ou de visite des enfants sans qu'ils aient pour cela à se présenter devant les tribunaux.

LA PORNOGRAPHIE JUVÉNILE

Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Monsieur le Président, au nom de signataires de partout en Colombie-Britannique, je présente une pétition qui demande au gouvernement de prendre toutes les dispositions nécessaires afin que la possession de matériel pornographique juvénile demeure un crime grave et que les corps policiers qui relèvent du gouvernement fédéral reçoivent pour consigne d'appliquer la loi de manière à protéger nos enfants.

M. Richard M. Harris (Prince George—Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, je suis fier de présenter trois pétitions d'électeurs de la circonscription de Prince George—Bulkley Valley.

La première renferme plusieurs centaines de signatures de gens qui s'inquiètent du commerce croissant de la pornographie juvénile. Ils sont très préoccupés par l'inaction du gouvernement dans la lutte contre la pornographie juvénile.

Ces pétitionnaires prient le gouvernement fédéral de faire tout ce qui est en son pouvoir pour appliquer les dispositions du Code criminel interdisant la possession de matériel pornographique exploitant des enfants.

L'AVORTEMENT

M. Richard M. Harris (Prince George—Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, ma deuxième pétition vient également d'électeurs de Prince George—Bulkley Valley.

Ces pétitionnaires s'inquiètent vivement de la pratique de l'avortement au Canada et de la mort de plus de 105 000 innocents tous les ans. Par conséquent, ils prient le Parlement d'adopter une loi interdisant le fait de tuer un être humain non encore né par l'avortement à tout stade de la vie prénatale.

LE MARIAGE

M. Richard M. Harris (Prince George—Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, ma troisième pétition vient elle aussi d'électeurs de Prince George—Bulkley Valley.

Ces pétitionnaires s'inquiètent de la mauvaise interprétation de la loi sur le mariage, lequel est pourtant clairement défini. Ils prient le Parlement d'adopter le projet de loi C-225, Loi visant à modifier la Loi sur le mariage et la Loi d'interprétation de façon à ce que la loi réserve l'institution du mariage à un homme célibataire s'unissant à une femme célibataire.

LE CENTRE CORRECTIONNEL COMMUNAUTAIRE SUMAS

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, en l'espace de seulement 10 mois, quatre agressions sexuelles ont été commises dans la région d'Abbotsford, toutes les quatre étant l'oeuvre de résidents du centre correctionnel communautaire Sumas. La dernière des agressions a été commise par un dangereux récidiviste ayant déjà à son actif 63 condamnations.

Les pétitionnaires prient donc le Parlement d'adopter une loi accordant aux autorités du centre correctionnel communautaire Sumas le droit de refuser d'admettre des délinquants dangereux, récidivistes et violents, qui pourraient constituer un danger pour la société, et de refuser d'héberger plus longtemps des récidivistes et des délinquants sexuels.

Cette pétition porte à plus de 30 000 le nombre de gens qui attendent toujours une réponse du gouvernement.

*  *  *

[Français]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, on répondra aujourd'hui à la question no 221. .[Texte]

Question no 221—M. Rick Borotsik:

    Quel est le nombre total d'entreprises agricoles et agroalimentaires au Canada qui ont déclaré faillite depuis la campagne culturale de 1996-1997 par suite directe ou indirecte de la chute des cours des marchandises pendant la crise du revenu agricole, et le nom de ces entreprises.

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Les faillites sont causées par une combinaison de facteurs qui peuvent comprendre un fléchissement des prix, des problèmes de production, des difficultés de commercialisation et un niveau d'endettement élevé. La perte d'un revenu non agricole peut également, dans certains cas, contribuer à la faillite. Il n'est donc pas réaliste d'attribuer la cause d'une faillite à un seul facteur. Par ailleurs, la plupart des entreprises agroalimentaires telles que les restaurants et les épiceries ne seraient pas affectés à outrance par des fluctuations des prix des denrées agricoles et il n'est pas pertinent d'en tenir compte dans le calcul des faillites d'entrepises agricoles. Au total, 596 entreprises agricoles ont déclaré faillite entre le début de la campagne agricole 1996-1997 et la fin de 1998. Pour la période allant du 1er janvier 1996 à la fin de l'année 1998, ce nombre s'est élevé à 762, ce qui représente la plus basse moyenne triennale de faillites d'entreprises agricoles pour les deux dernières décennies. Au cours des années 1980, cette moyenne a varié entre 1 013 et 1 547, pour descendre graduellement jusqu'en 1992 où ce nombre était de 1 231.

Agriculture et Agroalimentaire Canada ne possède aucune liste de noms d'entrepises agricoles et de fermes qui ont eu a déclarer faillite. Des informations additionnelles concernant les faillites peuvent être obtenue du Bureau du surintendant des faillites au numéro (613) 941-1000.

[Français]

M. Peter Adams: Monsieur le Président, je suggère que les autres questions soient réservées.

Le vice-président: Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

 

. 1515 + -

[Traduction]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ—LES BALKANS

 

La Chambre reprend l'étude de la motion, ainsi que de l'amendement.

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec attention le discours de la députée. Je suis un peu préoccupé par la formulation de la motion, qui est pour le moins vague et qui crée un précédent. C'est à la question de précédent que doit réfléchir attentivement la députée.

Nous nous sommes lancés dans la Seconde Guerre mondiale sans qu'il y ait une résolution du Parlement, nous avons déclaré la guerre avec l'empire du Japon sans qu'il y ait une résolution du Parlement et nous nous sommes lancés dans le conflit coréen sans qu'il y ait une résolution du Parlement. La motion laisse entendre qu'avant d'entrer en guerre, dans le cas présent, le gouvernement doit obtenir une résolution du Parlement.

La motion est pour le moins imprécise, il s'agit en réalité de déterminer si nous devrions voter. Puisque la motion traite des possibilités et de toutes sortes de choses qui pourraient être interprétées de diverses manières, je me demande si la députée se préoccupe du précédent que la motion va créer au sujet d'un aspect fondamental de notre démocratie, à savoir le droit du Parlement de diriger le gouvernement. Se préoccupe-t-elle du fait que la motion est peut-être loin d'être aussi précise que le souhaiteraient bon nombre de députés avant de procéder à un vote sur une question aussi fondamentale de notre processus démocratique?

[Français]

Mme Francine Lalonde: Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement mon honorable collègue. Je suis certaine qu'en donnant l'exemple de la résolution par laquelle le pays est entré dans la Seconde Guerre mondiale, il ne suggérait pas qu'il aurait été préférable que le Canada accepte d'aller en guerre sans avoir une résolution du Parlement. Je ne rappellerai pas les souvenirs historiques douloureux des Québécois.

Je ne comprends pas sa référence au flou de la motion. Ce qui est devant nous, en ce moment, dans l'actualité, c'est la probabilité du recours aux troupes terrestres. Si on n'en a pas besoin, tant mieux. Mais on ne voit pas en ce moment de solution, malgré les rappels, de plus en plus faibles, que les frappes aériennes seraient suffisantes. On ne voit pas comment l'OTAN pourrait s'en tirer, et comment les peuples qui ont voulu se soucier de cette cause humanitaire pourraient s'en tirer sans envoyer de troupes au sol.

Je répète donc ce que j'ai dit, ce ne sera pas une parade si tel était le cas. La décision prise, si c'était le maintien dans un cadre qui n'est pas sûr et qui pourrait, lui aussi, dégénérer, il faut que ce Parlement, avec toute l'information, puisse voter, qu'il se décide. Ce n'est pas vrai seulement pour les députés de ce côté-ci, mais également pour les députés de l'autre côté, parce que nous allons vivre sans doute longtemps avec cette décision. Mais le vote doit absolument être pris dans cette assemblée.

[Traduction]

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, j'ai ici un extrait d'une lettre que m'a adressée un de mes électeurs. Il s'agit d'un poème sur le déclenchement de la guerre. Je crois qu'il résume de façon très éloquente la nécessité de tenir un vote à la Chambre. Voici:

    Le jour où la guerre a commencé, Les premières pousses du printemps
    Pointaient à travers l'épais tapis de feuilles
    Vers le chaud soleil d'après-midi.

    Le jour où la guerre a commencé,
    Une locomotive diesel de Norfolk and Southern
    Tirait des wagons remplis de pin blanc Destiné à la construction de centaines de maisons.

    Le jour où la guerre a commencé,
    Des couples se sont mariés à l'Hôtel de ville,
    Des enfants ont appris la beauté des prairies,
    La beauté de la neige sur les montagnes qui s'étirent à l'horizon.

    Et ce jour-là aussi, tellement loin qu'on n'a pas pu le remarquer,
    Des enfants ont appris la beauté des flammes,
    La beauté de l'avion tellement haut dans leur ciel blanc
    Que personne à bord ne pouvait remarquer,
    que personne ne pouvait même entendre
    Le rugissement de l'air aspiré
    Dans les vastes champs de flammes immaculées,
    Là où il y avait eu avant des écoles, des maisons et des familles.

La députée ne croit-elle pas que c'est là une bonne raison pour tenir un vote sur une question aussi importante?

 

. 1520 + -

[Français]

Mme Francine Lalonde: Monsieur le Président, je pense que mon collègue illustre autrement la réponse que je viens de donner au collègue de l'autre côté de la Chambre.

La situation internationale est sérieuse. Il eut été préférable d'avoir ce vote avant les frappes, mais là, avant de s'engager dans un engrenage dont on ne peut prévoir la fin, il devient indispensable. C'est le coeur de la démocratie. Il n'y aura pas de décision plus importante qui sera prise, pour toute espèce de raison. La situation ne sera plus jamais la même. C'est la première fois que l'OTAN fait cela.

Il devra y avoir des changements importants dans les institutions internationales. On n'a pas le temps d'en débattre davantage en ce moment, mais cette sale guerre—parce que si elle a lieu, elle le sera—exige qu'il y ait d'abord un vote.

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai le temps dont je dispose avec la députée de Mont-Royal.

Pour commencer, je veux informer la Chambre des réunions que j'ai eues à Bruxelles et à Londres ces trois derniers jours.

À Bruxelles, j'ai rencontré le secrétaire général de l'OTAN, M. Solana, le commandant suprême des Forces alliées en Europe, le général Clark, et le président du comité de l'OTAN, le général Nauman. J'ai aussi pu consulter mon homologue belge, M. Poncelot, et, à Londres, j'ai rencontré mon homologue britannique, M. Robertson.

À chacune de ces rencontres, nous avons discuté de tous les aspects de l'opération de l'OTAN, tant la campagne aérienne que les efforts déployés pour faire face à l'urgence humanitaire dont nous n'avons pas encore vu la fin.

Je tiens à affirmer à la Chambre que la détermination de l'OTAN reste inébranlable. Ses opérations intensifiées détruisent graduellement la capacité militaire de la Yougoslavie. La campagne aérienne correspond aux objectifs politiques globaux visés par les pays de l'OTAN. Ces objectifs reçoivent un large appui au sein de la communauté internationale. Ils reçoivent aussi le soutien du Parlement et des citoyens du Canada.

En fin de semaine, j'ai également eu l'occasion de visiter nos militaires stationnés à Aviano, en Italie. Je suis heureux de pouvoir dire ici qu'ils ont un excellent moral. Ils comprennent l'importance de la mission qui leur a été confiée et ils sont fiers que le Canada agisse. Ils sont très loin de chez eux et ils se réjouissent du soutien qu'ils obtiennent du gouvernement, du Parlement et de leurs concitoyens.

La campagne aérienne en est maintenant à son 27e jour. Les progrès sont constants et chaque jour qui passe, le prix que M. Milosevic paie pour sa politique inhumaine s'élève. Ses forces militaires sont frappées jour et nuit et leurs pertes augmentent sans cesse.

Chaque jour qui passe, l'infrastructure qui soutient les forces d'oppression de M. Milosevic est un peu plus mise à mal. Il y a moins de carburant, moins de ponts et toujours plus de lignes de communication coupées.

L'OTAN intensifie à nouveau ses opérations aériennes en ajoutant de nouveaux appareils. Comme je l'ai dit samedi, le Canada enverra six CF-18 de plus dans la région, ce qui portera le total des appareils canadiens à Aviano à 18.

[Français]

Cette nouvelle contribution dénote l'engagement ferme du gouvernement à l'égard de l'opération. Nous continuerons d'exercer le leadership nécessaire pour qu'elle soit menée à bien.

[Traduction]

Un bon gouvernement exige bien des choses. L'une d'entre elles est un fort leadership. Une autre, la volonté de faire des choix fondés sur la compréhension des besoins et des désirs des Canadiens.

Avant d'être élu, le gouvernement s'est engagé clairement à consulter davantage le Parlement. Nous étions déterminés à offrir aux Canadiens un leadership fort tenant compte du point de vue de leurs représentants élus au Parlement. C'est d'ailleurs ce que nous avons fait. Depuis son élection, le gouvernement libéral a consulté à maintes et maintes reprises la Chambre à l'occasion de décisions importantes concernant les forces armées et la défense nationale.

 

. 1525 + -

La Chambre a tenu des débats au sujet des engagements du Canada en République Centrafricaine, en Haïti, au Moyen-Orient et dans l'ancienne Yougoslavie. Le Parlement a tenu récemment trois débats concernant la très importante question du Kosovo.

La motion à l'étude aujourd'hui ne tient absolument pas compte des débats et décisions pertinents de la Chambre. La question de la participation du Canada à une opération de maintien de la paix au Kosovo a déjà fait l'objet d'un débat.

Le 17 février, la Chambre a discuté de la participation du Canada à une force chargée de vérifier et d'exécuter un accord qui, l'espérait-on, découlerait des pourparlers diplomatiques ayant lieu à Rambouillet, en France. Tous les partis ont convenu que le Canada devrait participer à ce genre de force de maintien de la paix.

Pendant le débat, j'ai annoncé que le Canada serait disposé à fournir de 500 à 800 soldats. Bien que nous participions actuellement à une campagne aérienne, notre objectif consiste à réunir les conditions dans lesquelles le gouvernement yougoslave permettra le déploiement d'une force militaire internationale.

Depuis ce temps, la force de 500 à 800 soldats, y compris un escadron de reconnaissance blindé et une unité d'hélicoptères, a terminé sa formation et se prépare en vue d'un déploiement possible. Tenir de nouveau aujourd'hui un débat sur cette question marquerait un pas en arrière. Dans une crise comme celle-ci où de graves questions humaines sont en jeu, les Canadiens s'attendent à ce nous fassions preuve de leadership.

Le gouvernement a l'habitude de tenir des consultations. Nous sommes déterminés à exercer le leadership décisif que les Canadiens attendent de nous. Les Canadiens n'accepteraient aucune mesure qui porterait atteinte au pouvoir du gouvernement qu'ils ont élu pour prendre rapidement des mesures en vue de protéger les intérêts humanitaires et nationaux du Canada.

Cette motion, outre qu'elle ne tient pas compte des mesures qui ont été prises et des nombreux débats, semble suggérer qu'en l'absence de vote très précis qu'elle propose, on se moque de ce que disent les députés. C'est faux et le Kosovo en est la preuve parfaite.

Au cours des trois débats qui se sont tenus sur le Kosovo, 131 députés ont pris la parole. Plusieurs députés ont exprimé leur opinion et il s'est dégagé de ces débats un consensus frappant. Les députés ont clairement exprimé leur opinion et donné un caractère légitime aux mesures prises par le Canada. Le débat parlementaire est un outil important, mais il devrait avoir pour but de faciliter l'action et non pas de lui nuire.

M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt le ministre qui a dit que la Chambre avait débattu de la question du Kosovo à sept reprises. La question que nous posons aujourd'hui est très simple. Les Canadiens ont élus des députés pour les représenter dans cet endroit. Pourquoi les libéraux ont-ils peur de soumettre à un vote la question de l'envoi de troupes terrestres pouvant être engagés dans des opérations de combat? Pourquoi ont-il peur de soumettre cette question à la Chambre?

Le ministre dit qu'un bon gouvernement doit montrer la voie. Je rappellerai au ministre que les libéraux ne l'ont emporté qu'avec seulement environ 38 p. 100 des voix. La question que je pose au ministre est pourquoi ne laisse-t-il pas le Parlement canadien se prononcer sur cette question?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, le pourcentage de voix que nous avons obtenues dépasse de loin celui qu'ont obtenu les députés de l'autre côté. Nous avons un gouvernement majoritaire à Chambre car telle est la volonté des Canadiens. Les Canadiens ont élu un gouvernement afin qu'il prenne des décisions.

 

. 1530 + -

Le Parlement a toute la latitude voulue pour exprimer sa défiance à l'égard du gouvernement s'il ne croit pas que celui-ci prend la bonne décision. Les députés d'en face n'ont pas proposé une motion de défiance. Non, parce qu'ils savent bien que les Canadiens sont d'avis que nous faisons ce qu'il convient de faire. Les Canadiens estiment que nous devrions faire l'impossible pour sauver la vie des gens qui ont été chassés du Kosovo, qui ont fait l'objet d'un nettoyage ethnique. Les Canadiens croient que c'est bien, c'est le geste humanitaire qui s'impose, et c'est pourquoi nous allons de l'avant.

Je n'ai entendu personne s'opposer à ce que nous faisons. Au cours des débats qui ont eu lieu ici, soit sept sur la Yougoslavie et trois sur le Kosovo, j'ai été témoin de l'assentiment général qui régnait dans cette enceinte. Quel est le problème? Si les députés n'approuvent pas ce que nous faisons, s'ils estiment que nous n'avons pas pris la bonne décision, qu'ils présentent une motion de défiance. Mais je serais étonné qu'ils le fassent, car ils savent bien que nous agissons en fonction de ce que les Canadiens considèrent comme ce qu'il convient de faire dans les circonstances.

[Français]

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, je désire poser deux questions au ministre.

Tout d'abord, il dit qu'on a eu suffisamment de temps pour s'exprimer à la Chambre et que plus de 130 députés déjà l'ont fait. C'est bien vrai, mais lorsque l'on vote, ce n'est pas 137 députés sur 301 qui s'expriment, lorsque l'on vote, c'est 301 députés sur 301 qui votent.

Tous et chacun des militaires qui sont au Kosovo peuvent dire que leur député qui les représente à la Chambre des communes a donné son appui ou ne l'a pas donné. Un militaire sait que son député, celui qui le représente à la Chambre des communes, a aussi son appui à lui là-bas et qu'il souhaite continuer à travailler comme on lui demande de le faire.

Mon autre question est: est-ce que le ministre peut nous dire s'il y a des troupes au Kosovo actuellement qui sont en opération terrestre ou s'il n'y en a pas?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton: Monsieur le Président, le Parlement doit avoir toutes les chances, a eu toutes les chances et continuera d'avoir toutes les chances d'exprimer son point de vue.

Quand j'ai visité nos militaires à Aviano, je leur ai dit que le gouvernement du Canada, le Parlement du Canada et les Canadiens les appuyaient. Ils l'ont cru, et ils croient qu'ils font ce qu'il faut au nom de ces trois entités. Je crois également que c'est le cas.

Nous prenons cette décision de façon responsable. Le gouvernement doit pouvoir être en mesure de faire ce genre de chose, c'est-à-dire réagir rapidement quand de telles situations dangereuses se présentent.

Il n'y a pas de troupes terrestres déployées dans la région. On a déjà dit que les seules troupes que nous préparons en vue d'un déploiement dans cette région, en fait d'opérations terrestres, seraient des troupes de maintien de la paix. Cela reste vrai. Nous avons dit que, si cela devait changer d'une manière ou d'une autre, nous tiendrions un nouveau débat à la Chambre pour en discuter.

L'hon. Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui une journée marquante pour les juifs. Le Yom ha-Zicharon, le jour du souvenir, commence ce soir et se poursuit demain. Cette journée rappelle les événements qui se sont produits à compter de 1933 en Europe, en particulier le Yom ha-Choa, ou l'holocauste. La semaine dernière, au cours du Yom ha-Choa, des survivants ont raconté leur expérience. Cette semaine, le Yom ha-Zicharon rappelle le souvenir de nos soldats qui ont péri à l'époque.

Témoin aujourd'hui de l'épuration ethnique, du génocide et des crimes contre l'humanité, je peux seulement dire que nous avons le coeur serré et que nous regrettons de constater que la leçon n'a pas été apprise. Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, en 1945, nous avions pourtant déclaré que ces événements ne se reproduiraient plus jamais et nous avions légiféré pour condamner le génocide. Il est fort regrettable que l'on ait passé outre à ce plus jamais.

J'ai entendu des députés critiquer les Nations Unies. On peut reprocher des choses au Conseil de sécurité, notamment en ce qui concerne la manière dont s'exerce le veto, mais ce n'est pas une raison pour critiquer les Nations Unies.

Nous savons tous qu'à maintes reprises, on a demandé au Conseil de sécurité de prendre des mesures et aux Nations Unies d'intervenir. Chaque fois, on a essuyé un refus. Notre ministre des Affaires étrangères est revenu à trois occasions sur cette question. Il y a déjà eu un vote indiquant que le monde nous approuvait, mais des intérêts internes ont empêché l'application de mesures. Le veto des Russes ou la possibilité d'un veto russe a été un facteur très important.

 

. 1535 + -

Je reviens tout juste d'une semaine à Bruxelles. Nous avons consacré nos travaux à des questions concernant les armes nucléaires ainsi que les grandes villes et les problèmes auxquelles elles font face. Mais c'est surtout la situation au Kosovo qui a retenu l'attention. Plus de 130 pays ont exprimé leurs inquiétudes. Oui, certains pays ont appuyé la position de la Yougoslavie, de M. Milosevic. Mais la grande majorité des pays ont unanimement convenu que cette guerre devait cesser. Pas un seul pays n'a demandé le déploiement de troupes terrestres pour l'instant.

C'est une situation qui évolue, et elle est très épineuse. J'ai entendu ce qu'a dit M. Stroyev, le chef de la délégation russe, qui a suggéré de créer une commission mixte pour les réfugiés et de confier un rôle spécial aux parlements des pays de l'OTAN. Il a également dit qu'il ne faut pas punir le peuple yougoslave pour les exactions du président Milosevic. Mais si on n'arrête pas Milosevic, la population du Kosovo continuera de souffrir à cause de lui. Nous ne pouvons pas rester là à ne rien faire et lui permettre de se livrer à de telles atrocités. Selon le porte-parole russe, l'action de l'OTAN ne vise pas à punir Milosevic, mais à mettre fin à l'application de son horrible politique de nettoyage ethnique.

Je suis certaine que tous reconnaissent le rôle majeur que la Russie doit jouer dans l'élaboration du règlement de cette crise. Nous espérons que lorsque les affrontements seront terminés, elle jouera une rôle de premier plan dans le maintien de la paix dans la région. Nous avons intérêt autant que la Russie à trouver une solution politique au conflit, et le plus tôt sera le mieux.

J'ai écouté les discussions, et de nombreuses causes de préoccupation majeures ont été énoncées. Pourquoi des centaines de milliers de personnes—vieillards, femmes et enfants sans défense—fuient-ils le Kosovo, terrifiés? Fuient-ils les bombardements de l'OTAN? Je crois que non. Ils fuient le président Milosevic et sa campagne de nettoyage ethnique.

Chez les Albanais du Kosovo, les jeunes hommes sont séparés de force de leurs familles, ce qui est très inquiétant. Où sont-ils? Que deviendront-ils? Que font-ils? Certains d'entre nous venons de voir qu'ils creusent des tombes. Voilà qui est fort troublant. Nous savons ce qui est arrivé lorsque des événements similaires se sont produits à Srebrenica. Tous les hommes ont été massacrés. Cette affaire requiert une réponse immédiate des autorités yougoslaves.

Certains parlementaires disent que la population du Kosovo et celle de la Yougoslavie ont souffert une terrible tragédie humaine à cause de la brutalité de leur chef, M. Milosevic. La situation était intolérable et bien des intervenants ont demandé que des mesures soient prises pour venir en aide aux Kosovars.

Nous savons tous, comme l'ont démontré les débats à la Chambre, que la population canadienne, les parlementaires canadiens, le gouvernement canadien, ainsi que tous les partenaires de l'OTAN, auraient préféré que le conflit se résolve grâce au dialogue et aux négociations. Cependant, le président Milosevic a fait échec à toute tentative de solution.

Il n'existe pas de solution miracle en Yougoslavie et au Kosovo. Nous le savons. La campagne de frappes aériennes de l'OTAN se poursuivra jusqu'à ce que Milosevic accepte la présence au Kosovo d'une force militaire internationale capable d'assurer le retour en toute sécurité des réfugiés créés par son programme de purification ethnique. Il a systématiquement violé le droit humanitaire international en lançant, contre des civils, une campagne de meurtre, de torture, de détention arbitraire et de retrait des droits fondamentaux pour des motifs ethniques. C'est ce qui s'est produit en 1933. Le monde n'a pas réagi alors. Nous avons évolué. Nous sommes en position de constater le changement. Nous devrions tous nous en réjouir.

En outre, Milosevic contrevient à deux résolutions du Conseil de sécurité, les résolutions 1199 et 1203, qui imposent nettement à la fédération yougoslave l'obligation de respecter le cessez-le-feu et de protéger la population civile.

 

. 1540 + -

Le Canada a fait énormément de démarches au cours de la dernière année pour que le Conseil de sécurité des Nations Unies s'engage davantage au Kosovo. Nous aurions évidemment souhaité que l'ONU puisse faciliter le règlement du conflit au Kosovo. Cependant, les Russes ont dit clairement qu'ils auraient opposé leur veto à toute mesure du Conseil de sécurité condamnant cette purification ethnique.

Alors l'OTAN est intervenue et c'est tant mieux pour les Albanais kosovars de Yougoslavie. L'OTAN a réussi au moins à sauver la majeure partie de cette population. La situation des réfugiés est très troublante, c'est vrai. Ce pays est handicapé à cause d'un chef insensé. Ce n'est pas sa première attaque contre les gens de cette région, nous le savons bien. Il y a eu la Bosnie, la Croatie et la Slovénie; l'histoire est riche en événements dans cette partie du globe.

J'espère sincèrement que, quand le gouvernement arrivera à la conclusion qu'il n'a pas d'autre choix que d'envisager l'envoi de troupes terrestres et qu'il nous demandera notre opinion sur la question, nous appuierons tous d'une seule voix sa décision dans l'intérêt des Kosovars d'origine albanaise. Quant au sort de ces derniers, il convient de ne pas oublier que la politique et les objectifs généraux du Canada sont l'atteinte d'un règlement négocié sur la base de l'accord de Rambouillet et que notre grande préoccupation, c'est la situation humanitaire.

Dans l'intérêt du droit humanitaire international, nous devons appuyer l'idée que nous avons le droit et l'obligation de pénétrer dans un pays, en dépit du fait qu'il s'agit d'un pays souverain, lorsque sa population est menacée. Les dernières générations ont vu de graves problèmes, que ce soit en Afrique, en Asie, en Amérique latine ou, comme c'est le cas actuellement, au Kosovo.

Le rôle de l'OTAN est capital. Je suis heureuse de voir que nous avons appuyé cette organisation jusqu'à maintenant. J'espère sincèrement que le souhait de Kofi Annan, de notre Parlement, de notre ministre et de notre premier ministre se réalisera grâce à la négociation et que, si nous envoyons des troupes terrestres, ce sera pour une mission de maintien de la paix. J'espère que ce ne sera pas le même type de mission que celle qui se déroule actuellement, qui est si dramatique, si dangereuse et si coûteuse tant pour notre peuple que pour le peuple éprouvé du Kosovo, de l'Albanie et de toute la région.

J'espère que le Parlement et les députés comprendront pourquoi nous ne votons pas encore à ce moment-ci. La situation change de jour en jour et nous tiendrons la promesse faite par le premier ministre. Espérons que le conflit connaîtra un dénouement négocié.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, j'ai bien aimé le discours de la députée. Elle a très bien exprimé les choses. Je suis certes d'accord avec ce qu'elle a dit. Une chose tout à fait drastique se poursuit. Nous espérons tous que cela prendra fin sous peu.

Je suis inquiet au sujet des débats qui ont lieu à la Chambre. J'ai déjà exprimé ces réserves et je vais le faire de nouveau. La députée reconnaît-elle avec moi que les débats devraient être ouverts et transparents et servir à prendre des décisions au sujet de questions? Si elle est d'accord, pourrait-elle nous expliquer pourquoi, au cours de la dernière législature, alors que nous discutions pour savoir si nous devions envoyer des troupes en Bosnie, nous avons appris que les troupes étaient déjà en route, que les décisions avaient déjà été prises? Reconnaît-elle que parfois ces décisions sont prises sans débat? Est-elle d'accord avec cela?

L'hon. Sheila Finestone: Monsieur le Président, c'est une question très intéressante qui pose un dilemme. Je crois dans une démocratie transparente et ouverte et je crois qu'en général, le gouvernement se conforme à cette notion.

On ne le fait pas seulement dans les circonstances comme celles dont le député a parlé, lorsqu'il est question d'envoyer des troupes au sol et de risquer la vie de nos militaires dans les airs, sur terre et sur la mer. C'est une très lourde responsabilité que le Cabinet doit examiner, évaluer et peser.

 

. 1545 + -

En général, les modifications qui ont été apportées récemment pour qu'on puisse avoir des débats ouverts constituent un grand pas en avant. Peut-être n'est-il pas aussi important que certains le voudraient, mais toutes les déclarations faites à la Chambre sont examinées par le Cabinet et évaluées par le ministère des Affaires étrangères auxquels on soumet un bon aperçu des points de vue exprimés dans cette enceinte. C'est une grande amélioration par rapport à ce que nous avions dans le passé.

J'ai siégé à la Chambre lorsque les choses étaient bien différentes, lorsqu'il était question d'interventions très importantes, alors que les gens menacés avaient peur et que nous n'avions pas notre mot à dire. Maintenant, nous ne devons plus jamais être silencieux; nous devons savoir ce qui se passe.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec attention le discours de l'honorable députée. En cette matière, il est très important de disposer de l'information pertinente avant de prendre des décisions et d'utiliser aussi tous les outils pour permettre de revenir à la paix le plus tôt possible.

Dans son discours, elle a dit à peu près ceci: «Il faut être en mesure d'influencer les événements.» Un vote du Parlement ne serait-il pas une façon d'aider à influencer les événements pour appuyer le gouvernement dans la position qui a été prise et pour dire que maintenant, ce n'est plus du tout une position partisane? Ce n'est pas une position de parti, c'est une position de l'ensemble de la Chambre où les députés devront voter chacun selon leurs responsabilités.

Est-ce que ce ne serait pas une façon d'aider aussi à ce que le plan de paix qui a été proposé par les Allemands, mais qui peut devenir le plan de paix de tout le monde, soit adopté plus facilement? Des personnes de nos circonscriptions pourraient être appelés à intervenir dans cette guerre. Ne serait-il pas pertinent qu'ils puissent connaître la position précise de leurs députés sur cette question? N'est-ce pas une matière suffisamment grave et importante pour laquelle le poids du Parlement peut aider au retour de la paix en Europe?

L'hon. Sheila Finestone: Monsieur le Président, je voudrais remercier mon collègue pour sa question. S'il y a une chose qui a beaucoup changé depuis le siècle dernier, c'est qu'on a maintenant la télévision. On peut assister d'heure en heure, de jour en jour, à ce qui se passe au Kosovo et surtout dans toute la Yougoslavie.

J'ai posé la question lorsque j'étais à l'Union interparlementaire, à Bruxelles, à savoir pourquoi les Yougoslaves ont bloqué l'accès à la télévision pour que le peuple serbe ne sache rien de ce qui se passe là-bas. C'est pénible. Quand les gens ne savent pas la vérité, il est difficile d'agir en toute connaissance de cause.

C'est pour cela que je crois qu'on est en connaissance de cause. Les députés du caucus de ce côté-ci de la Chambre sont aussi intéressés que le député et tous les autres parlementaires. Je suis persuadée qu'on va prendre une décision ouverte et transparente en temps et lieu. J'espère que l'honorable député sera satisfait, parce qu'on a des conditions très nettes et très claires.

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de prendre à nouveau la parole à la Chambre dans le cadre de notre journée d'opposition.

La guerre au Kosovo est maintenant rendue à son 26e jour. Qui aurait cru que ce conflit aurait duré toute cette période? Pourtant, avec l'OTAN et toutes les nouvelles technologies militaires, nous pouvions espérer que cette guerre ne durerait tout au plus que quelques jours.

Malheureusement, nous avons sous-estimé Milosevic et le gouvernement serbe. Et surtout, nous n'avions pas prévu le souci d'efficacité et de rapidité de ce gouvernement dans ses actions d'épuration ethnique contre la population du Kosovo.

Le Bloc québécois a toujours déploré cette guerre et toutes les guerres, d'ailleurs. Mais l'intervention au Kosovo était devenue malheureusement nécessaire. Nécessaire, parce que Milosevic et l'armée serbe sont en train de vider littéralement le Kosovo de sa population.

Les derniers chiffres de l'exode massif de la population kosovare sont terrifiants. Le Haut-Commissariat aux réfugiés parle maintenant d'environ 400 000 réfugiés kosovars en Albanie, 150 000 en Macédoine, 75 000 au Monténégro et 32 000 en Bosnie.

 

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Et là, nous ne comptons pas les 260 000 Kosovars réfugiés à l'intérieur du Kosovo même, et ceux aussi qui se sont réfugiés dans les montagnes. À ce jour, l'OTAN estime à 3 200 morts le nombre de victimes de cette guerre. Et toujours selon l'OTAN, l'organisation pense maintenant avoir trouvé 43 charniers au Kosovo. C'est sans compter les viols qui ont eu lieu, les atrocités physiques et la souffrance psychologique de tout un peuple.

C'est pour ces raisons qu'il faut immédiatement déployer toutes les ressources disponibles pour soulager la souffrance et améliorer les conditions de vie des réfugiés kosovars en Bosnie, en Macédoine, en Albanie et au Monténégro. Il importe donc de fournir toute l'aide humanitaire et le soutien logistique approprié au Haut-Commissariat pour les réfugiés.

À cet effet, nous attendons toujours une réponse claire de la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, à la suite de la question que je lui ai posée, ici, à la Chambre, la semaine dernière. On se souviendra que je lui demandais si le gouvernement était prêt à prendre l'engagement d'utiliser les 100 millions de dollars prévus pour accueillir les réfugiés ici, afin d'ajouter à l'aide fournie aux ONG sur le terrain dans les Balkans.

La ministre m'a répondu à l'époque des banalités telles que: «la situation se stabilise sur les frontières là-bas.» Mais, selon le HCR, seulement pour la Macédoine, 100 000 nouveaux réfugiés sont attendus dans les prochains jours. Nul besoin de dire que les besoins sont criants dans les différents camps de réfugiés.

Or, quand la ministre va-t-elle annoncer que ces 100 millions de dollars iront pour les réfugiés dans les Balkans? C'est une question de vie ou de mort et l'argent est là et disponible maintenant.

J'ose croire que la ministre et le gouvernement vont faire preuve de compassion le plus rapidement possible avant qu'il ne soit trop tard.

Il est très clair que nous sommes maintenant confrontés à de nouvelles réalités et que les forces militaires de l'OTAN devront réévaluer leurs stratégies dans cette guerre.

C'est là où le bât blesse. L'attitude et le comportement hautain du gouvernement canadien à l'égard des membres de ce Parlement, qui, faut-il le dire, sont inspirés par l'arrogance du chef libéral envers les députés de l'opposition, ne nous permettent pas d'avoir un portrait précis de la situation dans les Balkans. Cette attitude déplorable se reflète dans le manque de transparence de ce gouvernement quant à la divulgation d'information sur cette guerre.

En tant que députée de cette Chambre démocratiquement élue par la population du comté de Laurentides, je vis une grande frustration devant le refus du premier ministre de ne pas vouloir tenir un débat suivi d'un vote dans l'éventualité de l'envoi de troupes militaires canadiennes dans les Balkans ou sur toute autre initiative, qu'elle soit militaire ou diplomatique.

Pourtant, selon un sondage Angus Reid, 59 p. 100 de la population canadienne seraient prêts à appuyer l'envoi de troupes au sol, et 61 p. 100 accepteraient que les soldats canadiens prennent part à cette opération terrestre, si cela s'avérait nécessaire.

Alors, pourquoi ce gouvernement s'entête-t-il toujours à ne pas vouloir tenir un vote sur cette question ici, à la Chambre? Considérant les résultats du sondage Angus Reid, le gouvernement aurait tout intérêt à voter sur cette question. De cette façon, le gouvernement en sortirait plus fort dans ses appuis, de même que le système démocratique canadien.

Rappelons-nous la guerre du Golfe en 1991. À cette époque, les libéraux étaient dans l'opposition. Or, malgré les trois votes à la Chambre des communes sur cette guerre, le député de Shawinigan avait critiqué ouvertement le gouvernement pour son manque d'empressement à s'acquitter de son devoir de consultation et de débat.

Huit ans plus tard, le gouvernement libéral bafoue non seulement la démocratie canadienne, mais aussi ses propres idées. Même M. Yves Fortier, ancien ambassadeur du Canada à l'ONU, a publiquement reproché au premier ministre son manque de transparence à l'égard des positions et des actions canadiennes dans le conflit au Kosovo.

Depuis le début de la guerre dans les Balkans, le gouvernement fournit au compte-gouttes l'information sur le conflit. Il est temps que cette pratique cesse. Les Québécois et les Canadiens, de même que les parlementaires ici, à la Chambre, ont le droit de savoir et de connaître les différentes options militaires ou diplomatiques qui sont priorisées par le gouvernement canadien et par l'OTAN.

Jusqu'à ce jour, le Bloc québécois et les autres partis d'opposition ont tous appuyé les décisions du gouvernement, mais cela ne signifie pas que le Bloc québécois soit prêt à lui offrir un chèque en blanc. Nous exigeons un véritable débat de fond, suivi d'un vote, afin que les parlementaires puissent prendre des décisions justes et éclairées quant à l'éventualité d'envoi de troupes au sol au Kosovo.

Comment expliquer ce manque de transparence, contrairement à d'autres gouvernements? L'Allemagne a voté deux fois sur la pertinence des frappes aériennes au Kosovo.

 

. 1555 + -

Les États-Unis vont aussi voter pour l'octroi de budgets supplémentaires demandés par le Pentagone pour accroître la participation américaine au Kosovo. La Hongrie a elle aussi voté au Parlement afin d'autoriser l'OTAN à circuler dans son espace aérien et la République tchèque a aussi voté pour la même raison que la Hongrie. Alors, qu'attend le gouvernement canadien pour faire preuve de cette même ouverture d'esprit?

Le présent déficit démocratique causé par le mutisme du gouvernement libéral peut avoir des conséquences négatives sur le consensus qui existe présentement à la Chambre. En effet, comment être en mesure de poser un jugement réfléchi sur les initiatives diplomatiques ou militaires de l'OTAN, si le gouvernement n'a pas la présence d'esprit de bien nous expliquer et, du fait même, favoriser le débat et un vote à la Chambre sur ces initiatives?

Si tel est le cas, le Bloc québécois se verra peut-être dans l'obligation d'émettre de sérieuses réserves quant au bien-fondé de ces initiatives, ce qui, par ricochet, risquerait de briser le consensus actuel.

En 1991, lors de la guerre du Golfe, les députés de cette Chambre bénéficiaient de très bonnes informations sur l'état du conflit et des initiatives gouvernementales, mais cette fois-ci ce sont les médias qui nous informent le mieux sur le conflit au Kosovo. Ce n'est pas normal.

En terminant, je rappelle aux députés de cette Chambre que le Bloc québécois s'inquiète au plus haut point des atrocités et de l'épuration ethnique faites au peuple kosovar. Or, pour mettre fin à ces atrocités, toutes les alternatives diplomatiques et militaires, dont celle d'envoi de troupes militaires sur le terrain au Kosovo, doivent être débattues à la Chambre et, par la suite, recevoir son aval par un vote. Il en va de la santé de notre système démocratique, de la légitimité de ce gouvernement et peut-être même de la survie d'un peuple.

Je termine en citant un petit poème écrit par une étudiante de l'école des Ursulines de Québec, Sarah-Émilie Mercier, qui porte sur la paix. Je le cite:

Pourquoi la paix est si compliquée?
Pourtant, il ne suffit que d'aimer.
Il y a des guerres et de la misère partout sur la terre.
Mais qui pourra la retrouver? La paix est tellement bien cachée.
Je la cherche depuis toujours, mais je ne trouve pas ce véritable amour.
La paix s'est peut-être arrêtée, mais où ça? Personne ne le sait.
Pourquoi la paix est si compliquée?
Pourtant, il ne suffit que de se respecter.

[Traduction]

M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Réf.): Monsieur le Président, c'est un très beau poème, et je félicite la députée du Bloc de l'avoir lu à la Chambre.

Selon la députée, quelle est la véritable raison pour laquelle le gouvernement n'est pas disposé à soumettre ce débat à un vote à la Chambre? Le gouvernement craint-il à ce stade-ci que nous remettions en question son engagement? La députée pense-t-elle que le gouvernement tiendra un débat après s'être engagé, si jamais il faut se rendre jusque-là et étant à espérer qu'il n'en sera pas ainsi? Quel est son point de vue?

[Français]

Mme Monique Guay: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

Je pense que dans tout parlement, on doit exercer la démocratie. Ce qu'on vit présentement ici, dans le Parlement canadien, c'est inquiétant pour l'avenir et les décisions qui doivent être prises, surtout quand on demande d'envoyer des militaires pour défendre les intérêts de gens qui sont dans la misère là-bas et qui sont en guerre.

Comme je le mentionnais dans mon discours, même les sondages publics sont en faveur d'envoi de troupes. Donc, je ne vois pas pourquoi le gouvernement ne pourrait pas consulter les députés de tous les partis. Il pourrait y avoir un consensus au sein de cette Chambre et cela donnerait un support moral et plus fort à nos soldats qui quitteraient pour aller là-bas.

C'est décevant, parce qu'on est là pour représenter la population. Je représente tous les électeurs du comté de Laurentides, et ces gens-là auraient peut-être aimé me voir prendre position et la défendre ici, à la Chambre, face à l'envoi de militaires au Kosovo.

 

. 1600 + -

Je souhaite sincèrement, parce que je ne sais pas si la décision du gouvernement est finale, qu'il prenne la bonne décision, qu'il nous laisse débattre de ce sujet à la Chambre pour que, finalement, tous les partis puissent se prononcer sur cette décision.

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Monsieur le Président, suite à la période des questions orales, il y a eu du côté de l'opposition, principalement chez le Bloc québécois et le Parti progressiste-conservateur, une foule de questions qui ont été soulevées. On craint, à juste titre, que le ministre de la Défense nationale ait déjà engagé des troupes terrestres au Kosovo.

Je demande donc à la députée de Laurentides si le gouvernement pourrait agir en sourdine en envoyant des troupes sans consulter le Parlement et sans, bien sûr, demander un vote de tous les parlementaires de cette Chambre.

Mme Monique Guay: Monsieur le Président, il est certain que si le gouvernement le désire, il pourrait envoyer des troupes sans nous consulter. Je pense toutefois que ce ne serait pas souhaitable. Cela lui ferait énormément mal de prendre des décisions sans au moins consulter les députés de la Chambre. Qu'on envoie des troupes sans nous en informer, je pense que c'est antidémocratique. Ce sont des choses qui doivent se décider et être débattue à la Chambre. Il y a des députés qui ont des opinions à exprimer. Il y a des députés de toutes les régions du Canada qui ont aussi des opinions à cet égard et qui reçoivent certainement des appels, à leur bureau de comté ou à Ottawa, de gens qui prennent position, qui veulent savoir ce que leur député pense vraiment de cette guerre et qui n'ont peut-être pas toute l'information.

On a donc un rôle à jouer comme élus et il faut qu'on soit capables de le jouer ici dans cette Chambre. Sinon, à quoi sert-il d'élire des députés. Est-ce que c'est pour être des béni-oui-oui derrière le gouvernement? On n'est pas là pour cela. On est ici pour représenter nos commettants et pour voter sur des questions qui sont aussi importantes que celle d'envoyer des troupes dans la guerre qui fait rage en ce moment au Kosovo.

M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, tôt en matinée, mardi dernier, j'ai déjà eu l'occasion et le privilège d'intervenir dans cette Chambre pour exprimer les raisons pour lesquelles je suis personnellement en faveur de l'intervention qui a cours actuellement en ex-Yougoslavie.

Pourquoi en sommes-nous là aujourd'hui à devoir débattre à nouveau de cette question? Si nous en sommes là, je dirais ou je serais tenté de dire que c'est en raison de la mauvaise foi du gouvernement. Mais je ne parlerai pas de mauvaise foi, je parlerai plutôt de maladresse. Je ne veux pas présumer d'entrée de jeu de la mauvaise foi du gouvernement: je vais donc parler de maladresse. Pourquoi de maladresse? Parce que le gouvernement, malgré le fait qu'il jouit d'un consensus spontané qui s'est établi sur la question de l'intervention en ex-Yougoslavie, un consensus spontané de tous les partis de cette Chambre pour l'appuyer dans son intervention, agit de façon mesquine à l'égard des partis d'opposition en distillant l'information au compte-gouttes, en entretenant sciemment la confusion et en donnant une impression d'improvisation. Je crois que cela nuit à l'image du gouvernement et de l'intervention du Canada et de l'OTAN sur les théâtres d'opération.

J'ose espérer qu'il n'y a pas une telle improvisation. J'irais même jusqu'à dire que je suis convaincu qu'il n'y a pas une telle improvisation. Ce qui m'amène donc à penser qu'effectivement, le gouvernement cache de l'information à cette Chambre. On répond à nos nombreuses questions par des réponses fallacieuses, disant que la question est hypothétique, qu'il n'y a pas de demandes à cet effet qui ont été formulées par les autorités de l'OTAN et que la question est prématurée. En fait, on nous a déclaré cela à toutes les étapes du conflit depuis qu'il est commencé.

 

. 1605 + -

Le ministre de la Défense nationale a déclaré subrepticement qu'il fallait maintenant envisager le déploiement de troupes au sol, se rétractant quelques heures plus tard en disant: «Nous n'en sommes pas là.» Nous avons posé des questions sur le déploiement de troupes de maintien de la paix au Kosovo, et on s'est fait répondre: «C'est hypothétique, on n'a pas encore reçu de demande. Nous n'en sommes pas encore là.» Mais on a appris, quelques jours plus tard, que le gouvernement était en train de préparer un contingent de 600 soldats qui iraient jouer un rôle de maintien de la paix en Macédoine.

Ce fut la même chose concernant l'envoi possible de nouveaux CF-18 pour répondre aux voeux du président américain, qui souhaitait doubler la capacité aérienne de l'OTAN. On a posé la question: «Combien allons-nous envoyer d'appareils additionnels pour répondre à ce voeu?» Le gouvernement a répondu: «On n'a pas encore reçu de demande à cet effet, nous n'en sommes pas encore là, c'est hypothétique, c'est prématuré.» Finalement, on a appris que 6 autres CF-18 ont été envoyés ou sont sur le point de l'être sur le théâtre des opérations.

Aujourd'hui, nous apprenons qu'il y aurait possiblement des troupes déjà sur le terrain, au Kosovo même, des troupes canadiennes qui seraient sur le théâtre des opérations. Encore une fois, nous posons la question, et on se fait répondre: «C'est une question hypothétique, nous n'en sommes pas encore là.» C'est le fameux credo de réponses qui nous est donné depuis déjà un certain nombre de jours.

On comprend bien qu'en période de conflit, les contraintes de la stratégie font en sorte qu'on ne puisse pas étaler publiquement le détail des opérations et des préparatifs, que cela pourrait aller à l'encontre de l'intérêt national et de l'intérêt des forces alliées, il va sans dire.

Mais si c'est le cas, pourquoi ne pas faire preuve d'un peu d'ouverture et d'honnêteté et répondre: «Dans l'état actuel des choses, nous ne pouvons donner une réponse à cette question pour des raisons stratégiques.» Ainsi, on n'induirait pas les parlementaires de cette Chambre en erreur en répondant, comme on le fait: «C'est une question hypothétique, nous n'avons pas reçu de demande à cet effet, nous n'en sommes pas encore là, c'est une question prématurée.»

Un homme célèbre a dit un jour que la guerre était une chose trop sérieuse pour être confiée aux politiciens. J'ai l'impression que c'est la maxime qui, actuellement, anime le gouvernement et l'état-major qui agit derrière lui dans ce conflit. Effectivement, on semble considérer que les députés de la Chambre ne sont pas suffisamment informés, crédibles ou sérieux pour pouvoir traiter de choses aussi importantes que des questions de guerres et de conflits.

Par son attitude un peu mesquine, le gouvernement remet en question ce puissant consensus qui s'était spontanément formé autour de lui sur la question de l'intervention militaire en ex-Yougoslavie.

Le gouvernement, et on le voyait aujourd'hui de la part du premier ministre, prend ce consensus pour acquis. Il se permet d'agir de façon condescendante avec l'opposition en disant: «De toute façon, ils sont d'accord.» Ce n'est pas que nous voulions remettre en question notre position sur l'intervention en ex-Yougoslavie, mais malheureusement, il est en train de s'établir une espèce de climat de méfiance à l'égard du gouvernement, qui n'est certes pas sain en période de conflit.

Je disais tout à l'heure que par son attitude, le gouvernement pouvait laisser entendre ou entrevoir une certaine improvisation. Cette improvisation prend plusieurs visages, notamment celui de donner l'impression qu'on laisse l'initiative à d'autres. On se serait attendus de la part du Canada, pays qui a une longue tradition de maintien et de recherche de la paix, membre du Conseil de sécurité des Nations Unies, qu'il fasse preuve d'un certain leadership dans ce conflit pour tenter d'en arriver à une solution négociée.

Non. Le Canada est demeuré coi, silencieux; il a participé d'emblée aux opérations militaires sans nécessairement chercher ou donner l'impression qu'il cherchait une solution politique. Nos amis allemands ont surgi avec un plan de paix très étoffé avec lequel nous sommes d'accord, évidemment, et le Canada semble en être à la remorque.

 

. 1610 + -

On a dit aussi que le Canada était à la remorque de l'OTAN et des États-Unis au niveau des opérations militaires. Sur ce point, on me permettra de faire une mise en perspective par rapport à cette prétendue inféodation aux intérêts américains.

Je me souviens qu'en 1991, lors du conflit du golfe Persique, plusieurs opposants au conflit disaient qu'il était un peu odieux de voir les États-Unis principalement et la communauté internationale, dans la foulée des États-Unis, intervenir au Koweït et demeurer complètement impassibles devant le conflit qui se déclarait alors en Bosnie.

Ces âmes bien pensantes disaient: «On sait bien, il y a des intérêts économiques au Koweït, il y a du pétrole. S'il y avait eu du pétrole en Bosnie, ils seraient intervenus.» Maintenant, on entend souvent ces mêmes gens nous demander pourquoi le Canada est à la remorque des États-Unis. Mais ces mêmes gens qui critiquaient les États-Unis, l'OTAN et la communauté internationale de ne pas intervenir en Bosnie critiquent aujourd'hui l'intervention au Kosovo. Je pense qu'il faut mettre cette situation en perspective.

Mes collègues du Bloc québécois et moi-même avons bien étoffé les raisons pour lesquelles il était devenu absolument nécessaire d'intervenir. Nous pensions, au terme de la Seconde Guerre mondiale, que l'humanité avait évolué, qu'elle avait appris de ses erreurs. Eh bien, les événements atroces du Rwanda ont démontré que ce n'était pas le cas, que nous n'avions pas appris de nos erreurs, que nous n'avions pas autant évolué que nous le pensions. À ce moment-là, nous nous sommes dit que plus jamais nous n'allions laisser la situation se détériorer au point d'assister à un tel charnier.

Nous sommes donc intervenus au Kosovo, et le fait que l'ex-Yougoslavie ait refusé le plan de paix allemand, le fait que le ministre de la Défense du Royaume-Uni, le secrétaire général de l'OTAN, la secrétaire d'État des États-Unis laissent entendre que Milosevic doit être écarté du pouvoir à Belgrade donnent à penser que le conflit sera long et qu'il y aura vraisemblablement été nécessaire, éventuellement, d'en arriver à une intervention de troupes au sol. Si tel devait être le cas, il est tout à fait inadmissible que le gouvernement décide d'envoyer des soldats canadiens sur le théâtre des opérations sans que cette Chambre ait été consultée. Il s'agit de la vie de nos concitoyennes et concitoyens et nous avons des comptes à leur rendre.

J'ai entendu le ministre dire tout à l'heure: «Nous avons l'appui de la population canadienne.» Ce gouvernement semble gouverner par sondages. Il devrait se souvenir qu'il n'a de légitimité que par le vote qui a constitué cette Chambre et que, conséquemment, il doit consulter celle-ci avant d'envoyer des troupes au sol.

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, je veux faire appel à mon collègue, le député de Verchères—Les-Patriotes, qui siège à la Chambre depuis maintenant six ans, un diplômé et maître en sciences politiques.

J'aimerais qu'il nous dise pourquoi un parlement devrait véritablement être saisi d'une question comme celle-là. Pourquoi ne suffit-il pas que le gouvernement décide d'une question et qu'il fasse appel, comme d'autres parlements d'ailleurs—il pourrait donner des exemples d'autres parlements qui ont été saisis de la question et qui ont voté—pourquoi il est si essentiel qu'un parlement ait une voix décisive au chapitre?

M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, je suis un peu embarrassé d'avoir à répondre à une question aussi pertinente de la part de mon honorable collègue de Beauharnois—Salaberry, éminent professeur de droit. Cette question pourrait me laisser pantois et m'indisposer au point que je ne puisse y répondre.

Mais malgré tout, je vais tenter une réponse, qui, je l'espère, saura trouver grâce à ses yeux.

Il est vrai, compte tenu de l'ordre constitutionnel propre au Canada et des dispositions de la Loi sur la défense nationale du Canada, que le gouvernement n'a pas, théoriquement, le devoir de demander l'autorisation de la Chambre pour procéder en ces matières. Mais la situation va un peu, je dirais, au-delà du principe légal.

 

. 1615 + -

Faisons appel à des principes moraux. Faisons appel à la légitimité qu'aurait un gouvernement, d'envoyer sur les théâtres d'opération des soldats prendre part à un conflit armé mettant en danger leur vie sans en avoir référé préalablement à un vote du Parlement.

Tout à l'heure, mon collègue de Joliette disait fort à-propos que, bien sûr, nous avons eu des débats à la Chambre. Bien sûr, plusieurs parlementaires ont eu l'occasion de se prononcer sur une question aussi importante. Mais ce que la population du Canada et du Québec veut savoir, c'est si son député ou sa députée est en faveur de l'envoi de troupes au sol. Elle ne pourra le savoir que si le gouvernement prend la peine de consulter cette Chambre.

Mon collègue de Beauharnois—Salaberry soulignait, à juste titre, le fait que parmi les pays membres de l'OTAN, il y a un certain nombre de gouvernements qui ont eu la décence, en s'appuyant justement sur ce principe de légitimité et ces principes moraux, de consulter leur parlement.

Aujourd'hui même, il y aurait un débat à la Chambre des communes à Londres. Nous avons eu droit jusqu'à présent à deux votes au Parlement allemand sur la question de l'intervention en ex-Yougoslavie. Les deux chambres de la République tchèque s'apprêteraient à voter aujourd'hui même sur une telle intervention.

J'aimerais rappeler aux députés du gouvernement qu'à l'époque de la guerre du Golfe, en 1991, l'opposition officielle de l'époque appelait de tous ses voeux un vote à la Chambre pour une intervention armée. J'invite la majorité ministérielle à se rappeler les exhortations qu'elle faisait auprès du gouvernement en 1991 en faveur d'une consultation de ce Parlement.

M. Robert Bertrand (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai le temps qui m'est alloué avec mon collègue de Mississauga-Ouest.

Je considère qu'il est essentiel que je m'adresse à la Chambre pour aborder l'importante question dont elle est saisie aujourd'hui.

Certains députés de cette Chambre semblent juger à-propos que le gouvernement soumette, non seulement à un débat, mais aussi à un vote de la Chambre, l'envoi dans les Balkans de soldats canadiens pouvant être engagés dans des opérations militaires terrestres et/ou de maintien de la paix au Kosovo et dans la région des Balkans.

Dans un premier temps, je souhaite faire part de mon opposition à cette motion, tout comme cela avait été le cas lorsque nous avons débattu d'une motion similaire à trois reprises au cours de la dernière année.

Je suis convaincu que l'adoption d'une telle motion paralyserait inutilement le gouvernement dans des situations qui, bien souvent, nécessitent une réaction rapide et efficace. Je pense également qu'en adoptant cette position, je respecte le désir des Canadiens et des Canadiennes. Enfin, je continue à croire que le Parlement peut, dans de telles circonstances, apporter une contribution importante par le biais de la consultation.

Je veux rappeler que le gouvernement tient compte du rôle important joué par le Parlement dans cette crise. De toute évidence, nous croyons qu'il est essentiel d'obtenir l'appui de tous les députés de cette Chambre. Les décisions du gouvernement ne s'en trouvent que plus valables, aux yeux des acteurs internationaux, lorsqu'elles jouissent de l'appui unanime du Parlement. Et c'est dans cet esprit que nous avons tenu jusqu'à présent trois débats sur la question.

En octobre 1998, la Chambre tenait un débat spécial sur la crise humanitaire du Kosovo et sur les mesures spéciales que le gouvernement entendait prendre avec la communauté internationale en vue de régler ce conflit.

En février dernier, alors que nous espérions voir un dénouement pacifique de cette crise, nous avons tenu un autre débat, portant cette fois sur le déploiement éventuel de troupes canadiennes en sol yougoslave.

Lundi dernier, soit le 12 avril, nous avons débattu de cette question, permettant à autant de députés qui le souhaitaient de s'exprimer sur cette grave crise humanitaire.

Qu'il me soit permis de rappeler qu'à chacune de ces occasions, nous avons heureusement pu constater l'appui unanime des députés de tous les partis.

 

. 1620 + -

Comme le premier ministre l'a expliqué lui-même à quelques reprises, il est essentiel que nous parlions d'une seule et même voix et que la position du gouvernement canadien ne fasse aucun doute dans l'esprit de M. Milosevic. La paix, le respect des droits de la personne et la démocratie sont des valeurs qui sont unanimement respectées et supportées par la population canadienne et le Parlement canadien.

L'heure est grave et suffisamment importante pour que nous ne laissions aucune porte entrouverte. M. Milosevic doit comprendre que notre position est sans équivoque. L'heure n'est pas au jeu politique. Agir autrement ne ferait que démontrer un manque de respect envers l'institution démocratique par excellence du Canada, la Chambre des communes.

Le gouvernement demeure engagé à consulter le Parlement. Il s'est engagé à recourir davantage à la participation du Parlement pour étudier les grandes questions liées à la politique étrangère et de défense, et il a tenu un grand nombre de débats parlementaires.

Depuis 1994, le gouvernement a consulté le Parlement sur de nombreux déploiements des forces canadiennes à l'étranger. Ainsi, nous avons débattu à deux reprises la participation d'une force de maintien de la paix en République centrafricaine, soit en avril 1998 et en février dernier. Nous avons tenu un débat concernant une intervention militaire possible contre l'Irak, en février 1998.

En novembre 1996, nous avons débattu du rôle de chef de file joué par le Canada pour alléger la souffrance dans la région des Grands Lacs africains. Nous avons également tenu plus d'un débat sur le rôle joué par le Canada dans les mesures prises par la communauté internationale afin de maintenir la stabilité et la sécurité en Haïti, en 1995 et en 1997.

En ce qui concerne notre engagement en Yougoslavie, nous avons tenu jusqu'à présent huit débats à la Chambre. Je n'énumère pas les nombreuses séances des comités de la Chambre des communes chargés de la défense et des affaires étrangères, qui se sont réunis pour discuter de la participation canadienne à de nombreuses forces de maintien de la paix.

En 1994, des comités mixtes spécialement mis sur pied à cet effet ont examiné en profondeur la politique étrangère et la politique de défense du Canada. Ces comités ont mené des consultations publiques complètes sans précédent. Leurs travaux ont mené à l'adoption d'une nouvelle politique de défense et à la révision de la politique étrangère du Canada.

Le Parlement a aussi joué un rôle important sur plusieurs autres questions de politique étrangère et de défense. Par exemple, l'élargissement de l'OTAN, le renouvellement de l'accord du NORAD pour la sécurité et la défense de l'Amérique du Nord, la politique du Canada en matière de non-prolifération des armes nucléaires, de contrôle des armements et de désarmement ont tous fait l'objet de consultations auprès de ce Parlement.

En 1998, le Comité de la défense nationale et des anciens combattants, que j'ai eu l'honneur de présider, a effectué une étude sans précédent sur les défis socioéconomiques auxquels étaient confrontés les membres des Forces canadiennes. Cette étude a largement contribué à l'élaboration d'un programme gouvernemental de qualité de vie qui répond aux défis posés par la vie militaire. De plus, le comité étudie actuellement la politique d'acquisition du gouvernement fédéral, et procède à des consultations auprès de l'industrie de la défense à travers le Canada.

Toutes ces mesures témoignent de la volonté du gouvernement de consulter le Parlement quant à l'orientation à donner aux politiques étrangères et à la défense.

Permettez-moi aussi de réitérer la position présentée par le ministre de la Défense nationale: le gouvernement est pleinement engagé dans un processus de consultation avec le Parlement et il a démontré, à maintes reprises, comme je viens de l'exposer, qu'il a tenu ses engagements à cet égard.

 

. 1625 + -

Cependant, le gouvernement canadien, dûment élu par la population canadienne, ne doit pas perdre sa capacité de gouverner de façon responsable et de prendre les décisions qui s'imposent lorsque les circonstances le commandent. Agir autrement serait faire preuve d'irresponsabilité et serait jugé comme tel par la population canadienne.

L'ajout systématique d'une quelconque étape au processus de déploiement des troupes affaiblirait la capacité du Canada à réagir avec efficacité et rapidité en cas de crise internationale. La tenue d'un vote sur le déploiement des Forces canadiennes à l'étranger pourrait même occasionner des retards inutiles.

Je le répète, la situation est suffisamment grave et l'ampleur de la crise humanitaire qui sévit au Kosovo ne peut servir de prétexte à des agendas politiques. Même si nous nous engageons à consulter la population canadienne et les députés de cette Chambre, nous tenons aussi résolument à contribuer le plus efficacement possible à la préservation, et dans certains cas, au rétablissement de la paix et de la liberté. Nous avons écouté les Canadiens et les Canadiennes, et nous avons consulté le Parlement.

Notre gouvernement et la population canadienne sont fiers du rôle exercé par le Canada en tant que chef de file mondial du maintien de la paix et en tant que partenaire fidèle en situation de crise. Nous continuerons de consulter le Parlement, soit par le biais des débats à la Chambre ou par la comparution des ministres ou d'autres porte-parole devant les comités permanents. Il ne pourrait en être autrement pour quiconque souhaite préserver la sensibilité des gouvernements aux opinions des représentants élus des Canadiens.

Mais ces mêmes Canadiens reconnaîtront aussi à quel point il serait mal avisé d'adopter une motion qui risquerait de ralentir la capacité de réaction du Canada lorsque les événements commandent une intervention immédiate.

[Traduction]

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, je trouve intéressantes les accusations du secrétaire parlementaire à l'endroit de l'opposition. J'utilise le terme opposition, bien que chacun des partis appuie effectivement le gouvernement sur cette question. Ils accordent leur soutien au gouvernement en ce qui concerne la crise du Kosovo et la participation du Canada à l'OTAN.

Le secrétaire parlementaire accuse l'opposition de se livrer à des manigances politiques. L'opposition ayant essentiellement demandé à l'unanimité la tenue d'un vote sur cette importante question, on l'accuse de se livrer à des manoeuvres ou à des manigances politiques.

À mon avis, la Chambre a le devoir de montrer aux soldats canadiens qu'elle les appuie à l'unanimité et qu'elle les soutient moralement. Il faut qu'ils sachent que c'est le sentiment de leurs représentants élus de tout le pays. Il se trouve que, dans le moment, le gouvernement libéral accuse l'opposition de faire exactement le contraire, ce qui est faux.

Je me demande pourquoi le secrétaire parlementaire tient des propos aussi préjudiciables au sujet de l'opposition et de son appui aux soldats.

M. Robert Bertrand: Monsieur le Président, comme je l'ai dit dans mon intervention, j'ai mentionné à plusieurs occasions que les partis d'opposition étaient d'accord pour que le gouvernement envoie des soldats. J'ai mentionné que je leur en savais gré. Mais ils semblent également dire que nous voulons clore le débat.

Je sais qu'on l'a déjà dit, mais je vais le répéter. Nous en sommes au quatrième débat sur le Kosovo. Selon le ministre de la Défense nationale, plus de 131 parlementaires ont pris la parole sur cette question.

 

. 1630 + -

Je souligne également que, cet après-midi, quelques députés ont mentionné, probablement par inadvertance, ou ont laissé entendre, semble-t-il, que des soldats canadiens se trouvaient actuellement au Kosovo. Je tiens à préciser, comme le premier ministre et le ministre de la Défense nationale l'ont fait, que des soldats canadiens ne se trouvent pas au Kosovo à l'heure actuelle.

M. Art Hanger: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.

La question dont la Chambre est saisie et une partie du débat portent évidemment sur le vote, comme la motion du Bloc l'indique clairement. Cela n'a rien à voir avec les renseignements présentés au cours de la période des questions et selon lesquels des soldats enterraient des...

Le vice-président: Je suis désolé, mais je ne crois pas que le rappel au Règlement que fait le député soit justifié. Il a posé une question et on y répond. Il n'est peut-être pas d'accord sur la réponse, mais je crains qu'il ne doive s'en contenter.

[Français]

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Vos arguments ne sont pas convaincants, monsieur le secrétaire parlementaire...

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. L'honorable député de Beauharnois—Salaberry doit adresser ses remarques à la Présidence.

M. Daniel Turp: Monsieur le Président, les arguments du secrétaire parlementaire ne sont pas plus convaincants que ceux de son homologue aux Affaires étrangères.

Une des raisons pour lesquelles ils sont encore moins convaincants, c'est que ce matin, un de ses collègues nous a rappelé que cette Chambre a déjà voté à plusieurs occasions pour l'envoi de troupes, pas seulement lorsqu'il s'est agi d'envoyer des troupes en Irak, mais aussi lorsqu'il s'est agi d'en envoyer au Congo, à Chypre et au Moyen-Orient.

Il y a des exemples où cette Chambre a voté. Pourquoi le gouvernement ne veut-il pas changer la pratique qu'il a instaurée depuis qu'il est élu où il refuse qu'il y ait un vote après des débats?

Le gouvernement et ses députés devraient apprendre une leçon de cette guerre, une leçon de démocratie.

M. Robert Bertrand: Monsieur le Président, je ne comprends pas du tout l'attitude des députés d'en face.

J'ai répété à maintes reprises dans mon discours, ainsi que plus tôt lorsque j'ai répondu à la question de mon collègue de Calgary-Nord, que je ne sais combien de débats ont eu lieu, ni combien de parlementaires se sont levés ici à la Chambre pour intervenir sur cette question.

Il ne faut pas oublier que tous les jours, il y a des séances d'information technique à l'édifice de la Défense nationale. C'est donné par les fonctionnaires du ministère de la Défense nationale et du ministère des Affaires étrangères. Il y a énormément d'information qui est donnée. Il s'agit simplement pour les gens d'aller la chercher.

Le vice-président: Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement, ce soir, à savoir: l'honorable député de Halifax-Ouest, Les anciens combattants; l'honorable député d'Acadie—Bathurst, Le budget; l'honorable député de Markham, L'économie; et l'honorable député de Frontenac—Mégantic, La mine BC de Black Lake.

[Traduction]

Des voix: Oh, oh!

M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, les députés savent que je ne crois pas en le combat.

Pour commencer, je voudrais féliciter le Bloc d'avoir utilisé cette journée d'opposition de manière constructive en soulevant à la Chambre une question qui doit être débattue.

J'ai dit la semaine dernière que la journée d'opposition était mal utilisée par l'opposition officielle, alors que le Canada est en guerre. Si quelqu'un souhaite débattre d'un vote, pourquoi ne pas le faire de cette manière? Pourquoi ne pas utiliser la journée d'opposition, qui fait partie de la tradition parlementaire, pour soulever cette question en vue d'un vote, plutôt que de dire une chose durant la période des questions et d'en faire une autre lorsque se présente l'opportunité d'une journée d'opposition?

 

. 1635 + -

Je félicite donc le Bloc, ce que je n'ai pas souvent l'occasion de faire, d'avoir saisi l'opportunité de présenter cette motion et de permettre ainsi un débat constructif. Les bloquistes ne seront certainement pas surpris d'apprendre que je ne peux cependant pas appuyer la motion telle qu'elle est. Mais j'appuie l'idée de la tenue d'un débat à la Chambre, particulièrement lorsque dans les médias ces derniers temps, quatre mots, étrangers à notre pays, reviennent: le Canada en guerre. Et je crois que le réseau anglais de la SRC présentera demain soir une émission portant sur ce sujet. Il y a de quoi s'étonner quand on pense qu'on est en 1999.

Une voix: L'est-on?

M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, bien sûr qu'on l'est. Le Canada est engagé très activement aux côtés de ses alliés dans une guerre afin de résoudre un problème.

Il n'y a personne ici, je pense, qui mette en doute les intentions ou le désir de rétablir la paix dans cette région. Ce que je n'arrive pas à comprendre dans toute cette affaire, c'est qu'on voudrait tenir un débat sur ce que devrait être ou ne pas être la prochaine étape de notre déploiement militaire.

Qu'on y pense. Nous mettons nos militaires en danger quand nous disons en quelque sorte à M. Milosevic: «Un instant, nous allons tenir un débat au Parlement. Ne quittez pas. Nous vous rappellerons. Nous avons aligné nos hommes, ils sont prêts à se lancer à l'assaut, mais auparavant il nous faut tenir un débat dans un lieu qu'on appelle le Parlement du Canada, après quoi nous allons procéder à un vote pour savoir si, oui ou non, nous allons déployer nos troupes».

Jamais dans l'histoire de notre pays un tel processus n'a été engagé. Il n'a pas été engagé quand, en 1939, notre pays a joint les rangs des forces luttant contre les nazis. Il n'a pas été engagé quand le Canada a déclaré la guerre à l'empire du Japon. Il n'a pas été engagé quand nous avons participé à la guerre de Corée. Il est difficile de croire qu'un parlementaire sensé puisse exiger que l'on tienne un tel débat et que l'on procède à un tel vote. Imaginez les conséquences.

Quel message enverrait-on si pour une raison ou pour une autre les résultats du vote étaient très serrés? D'accord, étant majoritaire, le gouvernement l'emporterait, mais quand même. Je ne crois pas que l'opposition officielle ou quiconque dans l'opposition veuille envoyer un message d'instabilité ou des messages mitigés aux gens qui risquent leur vie. Je ne peux tout simplement pas le croire.

Je vais vous lire une citation et préciser ensuite aux députés de qui elle vient. «Par ailleurs, comme je l'ai écrit au premier ministre le 31 mars, nous sommes d'avis qu'une fois que la décision a été prise d'engager les forces aériennes canadiennes aux côtés de l'OTAN en Yougoslavie, nous, les parlementaires, ne devrions pas essayer de reconsidérer leur mission alors qu'elle vient à peine de commencer. Nous devrions plutôt offrir et proférer notre appui inébranlable, tant sur le plan politique que moral, aux courageux Canadiens qui y participent». C'est le chef de l'opposition officielle qui a déclaré cela le 12 avril 1999.

Nous dirions que c'est une position très responsable. À nouveau, je félicite l'opposition officielle. Je crois qu'il est tout à fait sensé d'adopter une position comme celle-là lorsque les gens risquent ainsi leur vie.

Voici une autre citation faite à nouveau dans cette enceinte. «Le Nouveau Parti démocratique est convaincu que le Canada doit remplir ses obligations internationales et prendre toutes les mesures possibles pour tenter de mettre un terme aux souffrances et aux effusions de sang insensées qui se produisent dans de nombreux pays, fournir une aide humanitaire et stabiliser la situation dans ces pays.»

 

. 1640 + -

Cette citation vient du porte-parole du Nouveau Parti démocratique en la matière, le député de Halifax-Ouest. Là encore, je pense que c'est une position tout à fait réfléchie de la part d'un parti d'opposition.

Le fait de politiser cette guerre par opportunisme comme cela se produit durant la période des questions ou comme le font nos vis-à-vis est vraiment inquiétant. C'est franchement dangereux. On n'entre pas en guerre par voie de consultation. Nous n'allons pas nous lancer dans une guerre où nous devons dire: «Attendez, nous n'avons pas encore tenu un vote là-dessus. Il y a 301 députés qui doivent se prononcer là-dessus.» Nous lierions alors les mains de nos dirigeants militaires. Nous lierions aussi les mains du gouvernement. Je ne pense pas que les Canadiens se laissent tromper par les belles paroles selon lesquelles nous devrions procéder de cette façon.

J'ai quelques points à signaler au sujet de ce qui se passe dans la région. Nombreux sont ceux qui se souviendront du débat plein d'amertume sur la question de savoir si les députés devraient avoir un petit drapeau du Canada sur leur bureau. Je m'en souviens très bien. On voyait des voitures peintes aux couleurs du drapeau du Canada rouler sur la colline du Parlement. Tous les moyens étaient bons pour dire: «mon nationalisme est plus gros que le tien». Tous les moyens étaient bons pour gagner des points pour notre camp. Franchement, je pense que nous étions aussi coupables que certains des députés d'en face qui ont alimenté ce débat.

Mon collègue le député d'Owen Sound m'a dit quelque chose d'intéressant. Il a dit: «Vous savez ce qui me dérange le plus dans cette affaire, c'est qu'il s'agit de nationalisme et que c'est dangereux». Il y a une différente entre être fier de son pays et crier à qui veut l'entendre que nous sommes les meilleurs et les plus forts. Ce que nous voyons, au Kosovo et en Yougoslavie, c'est du nationalisme et du tribalisme exacerbés.

En 1990, en tant que député provincial, je faisais partie d'une délégation parlementaire qui devait observer les premières élections libres en Croatie depuis la Seconde Guerre mondiale. J'ai passé un peu de temps à Zagreb, puis j'ai suivi la côte où j'ai rencontré beaucoup de Croates. Je me souviens que, le jour des élections, les gens faisaient la queue pour aller voter. Ils avaient les larmes aux yeux parce qu'ils n'avaient jamais eu cette chance sous Tito. C'était leur chance de dire «Zivjela Hrvatska». C'était leur chance de voter pour l'indépendance, pour une Croatie forte. Or, cela se passe dans la même région.

L'autre soir, pendant que je regardais le téléjournal, un commentateur—je pense que c'était Henry Kissinger—a dit: «C'est une haine irrémédiable qui règne dans cette région du monde.» C'est absolument vrai. Je ne crois pas que nous puissions remédier à la haine et à la passion que ces gens ressentent. Je ne suis pas sûr que nous puissions même le comprendre, alors pour ce qui est d'y remédier, n'y pensons pas. Je ne vois pas comment on peut dire que nous allons siéger à une conférence de pais et résoudre comme par magie un conflit qui n'est pas vieux de dix ou vingt ans, mais qui dure depuis des centaines, voire des milliers d'années. Ce conflit revêt un tel caractère personnel qu'on a du mal à l'imaginer.

Jamais je ne pourrais approuver que nos soldats aillent risquer leur vie là-bas. Suggérer de tenir un vote sur la question aurait cet effet et cela enverrait le mauvais signal. Nous devrions appuyer nos militaires. Je les appuie, et j'espère que tous les députés en font autant.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec attention le discours de mon collègue.

Peut-être ne le sait-il pas, mais il y a déjà eu des votes à la Chambre pour décider si des militaires allaient participer à des forces de frappe à l'extérieur. Je n'en ferai pas la liste puisqu'on l'a déjà donnée dans un discours précédent.

 

. 1645 + -

Donc, il y a un précédent à la Chambre où on s'est servi du Parlement comme un outil important de politique étrangère.

Je demande au député s'il ne considère pas, dans la situation actuelle, considérant la gravité de la situation au Kosovo et de toute la région des Balkans, qu'un vote du Parlement serait un poids moral important qui devrait être utilisé par le gouvernement. Cela transmettrait le message à la communauté internationale que non seulement le gouvernement du Canada et les partis présents à la Chambre des communes sont d'accord, mais que l'ensemble des députés de la Chambre des communes partagent la même position, c'est-à-dire qu'ils s'entendent sur la nécessité d'envoyer des forces terrestres.

Est-ce que cela ne serait pas un poids politique supplémentaire, et est-ce que cela ne serait pas aussi faire progresser la démocratie que de montrer à tous les concitoyens et concitoyennes du Canada que les députés qu'ils ont élus pour les représenter dans ce Parlement ont eu la chance de se prononcer sur cette question primordiale?

[Traduction]

M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, le principe voulant que le Parlement du Canada vote sur des questions d'intérêt national et international est valable. En pratique, cependant, l'opposition a tort de se servir du débat sur la possibilité de tenir un vote dans le dossier du Kosovo pour faire des déclarations politiques ou pour mettre le gouvernement dans l'embarras.

Le député sait que ce que l'opposition fait est parfaitement valable. Elle a présenté, lors d'une journée réservée à l'opposition, une motion dont le débat doit déboucher sur un vote et qui donne à tous les députés à la Chambre la possibilité d'intervenir et dire s'il appuie ou non ce que fait le gouvernement.

Je crois que nous devrions être prudents et dépolitiser autant que possible le débat sur la question de savoir si nous devons envoyer ou non des troupes terrestres au Kosovo. Je prie le ciel que nous n'ayons jamais à le faire, mais quand je songe à la situation, je crains fort que nous y soyons tôt ou tard forcés. Nous devons leur laisser une marge de manoeuvre et leur permettre de régler cette question au niveau militaire.

M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Monsieur le Président, j'ai un commentaire ou deux à formuler, puis une brève question à poser. Le député de Mississauga-Ouest me semble souvent s'engager dans des attaques démagogiques à des moments importants, lorsque nous devrions plutôt discuter de questions d'intérêt national. Comme il n'y a aucun risque imminent d'attaque de la part des Serbes ou de qui que ce soit, nous avons amplement le temps de discuter de la question.

La Chambre n'a pas vraiment eu l'occasion de le faire encore. On ne lui a pas donné l'occasion de se prononcer à ce sujet. Au moment où la guerre faisait rage au Koweït, le premier ministre, le chef de son propre parti, avait lui-même accusé le premier ministre en poste à l'époque de servir de pantin aux Américains parce qu'il ne voulait pas inviter la Chambre à se prononcer sur le fait qu'il appuyait les Américains.

Que pense le député de la situation, maintenant que son parti est au pouvoir au pays? Veut-il qu'on dise la même chose d'eux, ou accepteront-ils finalement de tenir un vote sur la question puisqu'on a le temps de le faire et qu'à mon avis, cela s'impose?

M. Steve Mahoney: Je suis prêt à reconnaître qu'il m'est arrivé de temps à autres de me lever et de lancer des critiques sévères aux partis d'opposition. Je ne l'ai pas fait dans le discours que je viens de prononcer, justement pour la raison que le député vient d'évoquer. La question est beaucoup trop sérieuse pour que nous nous livrions à des attaques partisanes. Je suis persuadé que nous aurons beaucoup d'autres occasions de le faire.

J'ai même cité de façon favorable les paroles du chef de l'opposition telles que rapportées dans le hansard et je l'en ai même félicité. J'ai cité les paroles du député néo-démocrate de Halifax-Ouest. J'ai félicité le Bloc d'avoir eu recours à une journée de l'opposition d'une façon que je considère tout à fait appropriée.

La question est beaucoup trop grave pour que nous en faisions un débat politique et que nous nous livrions à des attaques mesquines les uns envers les autres.

 

. 1650 + -

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir au sujet de la motion proposée par le Bloc québécois. Ce n'est pas souvent que le Bloc québécois a droit aux compliments de l'opposition officielle.

À mon avis, ce débat tombe à point. On aurait pu le pousser un peu plus loin, mais enfin. La motion dont la Chambre est saisie et sur laquelle elle doit se prononcer a pour but d'encourager au moins le gouvernement à prendre les mesures qui s'imposent, c'est à dire à soumettre à un vote la question d'intervenir ou d'accroître notre intervention dans la crise du Kosovo.

J'ai écouté certaines remarques qui ont été faites à propos du vote sur cette motion. Pour l'information des personnes qui suivent ce débat, je vais relire la motion:

    Que la Chambre exige du gouvernement qu'il soumette à un débat et à un vote...

J'ajoute l'amendement proposé par le député de Beauharnois—Salaberry: «préalables».

      ...de la Chambre l'envoi dans les Balkans de soldats canadiens pouvant être engagés dans des opérations militaires terrestres et/ou de maintien de la paix au Kosovo et dans la région des Balkans.

Cela ne fait pas longtemps que je me trouve à la Chambre pour suivre le débat, mais les remarques que j'ai entendues prononcer de ce côté-là de la Chambre à l'endroit de l'opposition ou de quiconque réclame un vote sur cette question sont absolument ahurissantes. En soi, elles n'ont rien à voir avec les événements qui se déroulent là-bas.

D'abord, les sonnettes d'alarme ont retenti: «On n'aura pas le temps de tenir un débat à la Chambre sur cette question, parce qu'il pourrait y avoir une situation d'urgence.» Or, la situation n'est pas urgente. Il y a amplement de temps pour tenir un débat sur l'envoi de forces terrestres. Il y a amplement de temps pour que le gouvernement se prépare et pour que les députés de l'opposition reçoivent l'information pertinente, afin que tous les députés soient bien informés avant que la Chambre procède à un vote. En outre, cela traduirait un appui solide. Il n'y a plus moyen de revenir en arrière, une fois que les députés se sont prononcés à la Chambre sur une question aussi importante que celle-ci.

On a encore une fois accusé l'opposition d'essayer de transformer notre régime parlementaire en un régime présidentiel. Qu'est-ce que cela peut bien vouloir dire? En quoi le fait de réclamer un processus démocratique pour décider si le Canada devrait envoyer des troupes terrestres au Kosovo ou accroître sa présence dans la crise qui s'y déroule, peut-il transformer notre régime parlementaire en un régime présidentiel?

Mme Val Meredith: C'est-à-dire un régime où une seule personne ne prend pas toutes les décisions.

M. Art Hanger: Oui, comme ma collègue le dit, un régime où une seule personne ne prend pas toutes les décisions. Voilà qui semble soulever la plus grande crainte en face. Or, si un vote est pris, le gouvernement peut compter sur un appui non équivoque, même de la part des députés de l'opposition.

Dans ce cas-ci, j'informe nos vis-à-vis que le Parti réformiste, l'opposition officielle, appuie le rôle que le gouvernement et les troupes de l'OTAN ont joué jusqu'à maintenant.

Le député de Mississauga-Ouest a fait une affirmation très exacte à propos de notre chef et de sa position en disant que nous avons bel et bien appuyé le gouvernement. Il aurait pu poursuivre en disant, à la Chambre et aux téléspectateurs qui suivent le débat, que notre chef a aussi indiqué, au premier ministre et à la Chambre, qu'il chercherait à obtenir un autre débat et un vote sur la question en cas d'escalade exigeant l'envoi de troupes terrestres. C'était la conclusion de la déclaration du chef de l'opposition.

Il y a aussi eu une déclaration de la part des libéraux qui, parlant du vote, ont affirmé que le fait de voter sur ce point mettrait les troupes en péril. Est-ce qu'un député d'en face peut m'expliquer comment un vote pourrait mettre nos troupes en péril? Je n'arrive pas à comprendre cela.

 

. 1655 + -

Comment pourrions-nous menacer leur sécurité en votant sur cette question? J'aimerais qu'on me montre le lien logique entre le risque pour nos troupes et le fait que l'on débatte de la question pour voter ensuite.

Je peux affirmer aux députés que nos troupes se sentiraient fermement appuyées si la majorité des députés à la Chambre se levaient pour indiquer qu'ils approuvent leur intervention là-bas. Je crois que nos troupes méritent notre appui.

Le secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale a fait une déclaration accusant l'opposition de manoeuvre politique. Une manoeuvre dans quel but? La majorité des députés de l'opposition appuient notre rôle et le rôle du gouvernement dans cette crise où intervient l'OTAN. Quelles sont ces manoeuvres politiques?

Tout ce que nous demandons, c'est de tenir un vote sur cette question au Parlement. C'est aussi simple que cela. Il n'y a aucune manoeuvre politique en jeu. Nous disons simplement que nous appuyons l'initiative, mais nous voulons un vote sur la question à la Chambre. C'est de la démocratie.

Toutes ces questions ont été soulevées au cours des dernières minutes. Un député libéral vient de dire que l'opposition se servait de la question et de la motion pour faire des déclarations politiques et pour se trouver des partisans. Est-ce là la position officielle du gouvernement libéral? Nous avons pourtant dit et redit que nous appuyons l'intervention en Yougoslavie.

Le gouvernement libéral porte toutes ces accusations contre l'opposition pour d'autres raisons également. Le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères a déclaré, comme en fait foi le hansard, que des gouvernements canadiens successifs ont estimé qu'il était préférable de faire l'unanimité entre tous les partis à la Chambre sur une décision aussi sérieuse et ayant d'aussi graves conséquences.

Comment le gouvernement peut-il le savoir? Depuis quand le gouvernement parle-t-il au nom de tous les députés? Le gouvernement ne parle pas pour tous les députés. Il existe une opposition et l'opposition a un rôle à jouer dans le système parlementaire. En dépit de ce qu'en dit le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, le gouvernement ne parle pas au nom de tous les députés.

Voilà toutes les raisons qui ont été invoquées seulement durant les deux dernières heures du débat. Les ministériels n'ont pas ménagé leurs accusations pour discréditer ou étouffer l'opposition.

Je ne puis parler pour tous les partis, mais je sais que mon propre parti appuie l'action du gouvernement au Kosovo sous l'égide de l'OTAN. Pourquoi le gouvernement tente-t-il continuellement d'éviter la tenue d'un vote? Je ne vois qu'une raison: il est contre la tenue de votes sur des questions importantes. Le gouvernement veut empêcher le processus démocratique...

Le président suppléant (M. McClelland): Je regrette d'interrompre le député de Calgary-Nord-Est, mais ce dernier m'a-t-il dit qu'il partageait son temps de parole avec le député de Fraser Valley?

M. Art Hanger: En effet.

Le président suppléant (M. McClelland): Il vous reste une minute pour terminer.

M. Art Hanger: Monsieur le Président, je m'excuse de ne pas vous en avoir informé plus tôt.

Il m'apparaît évident que le gouvernement tient à éviter la tenue de votes sur des questions importantes, même s'il s'agit d'envoyer des troupes au sol au Kosovo et d'exposer la vie de nos militaires. Le gouvernement ne veut pas avoir à se prononcer sur des questions de ce genre.

 

. 1700 + -

Il n'y a là rien de nouveau. Je pourrais citer toute une liste d'autres sujets, notamment l'indemnisation des victimes de l'hépatite C. Nous n'avons pas tenu de vote sur cette importante question. Je pense également à la question du financement de l'enquête concernant l'APEC, qui a occupé tellement de temps à la Chambre. L'opposition officielle et les autres partis de l'opposition ont soulevé de nombreuses questions à la Chambre, mais il n'y a pas eu de débat.

Je rappelle également le cas de l'impôt des familles monoparentales ou des familles à revenu unique, qui a jeté la honte sur le secrétaire d'État aux institutions financières. C'est honteux. Ou encore la question de l'interdiction de la pornographie juvénile. Mais la liste ne s'arrête pas là. Voilà la véritable raison pour laquelle le gouvernement tient à éviter un vote sur la question du Kosovo.

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais expliquer aux gens à l'écoute que c'est aujourd'hui un jour réservé à l'opposition. Chaque année, chacun des quatre partis d'opposition bénéficie d'un certain nombre de jours où il peut choisir le thème du débat. Aujourd'hui, nous discutons d'une motion du Bloc concernant le Kosovo.

Je crois que nous venons d'entendre le troisième discours du Parti réformiste. Ce discours, comme ceux qui ont été prononcés ce matin, comprend les critiques habituelles à l'endroit du gouvernement et beaucoup de propos moralisateurs au sujet de la démocratie et la façon dont nous devrions agir dans le dossier du Kosovo. Soit dit en passant, c'est le quatrième débat portant sur le Kosovo. Les téléspectateurs ne se rendent peut-être pas compte que le Parti réformiste a bénéficié d'un jour réservé à l'opposition, soit un jour où il peut choisir n'importe quel thème de discussion. Il y a eu droit à la suite du débat de toute une nuit ayant porté sur le Kosovo. Les réformistes ont présenté une motion bidon. C'était une motion tragi-comique et partisane au sujet de l'aliénation.

Ma question au député réformiste est la suivante: s'il s'intéresse autant qu'il le dit à ce dossier, pourquoi son parti a-t-il présenté une motion bouffonne le lendemain du débat sur le Kosovo au lieu d'appuyer la motion que le Bloc a présentée aujourd'hui? Ce n'est pas un parti qui appuie normalement le Bloc. C'est le parti qui déclare «nous ne voulons plus de premiers ministres venant du Québec.»

M. Art Hanger: Monsieur le Président, je me réjouis de la question du député jusqu'à un certain point. Le député a souvent critiqué indûment notre parti, notamment dans ses déclarations. Je pense que les travaux de la Chambre n'ont rien d'une plaisanterie, pas plus que la motion que nous avons présentée à l'occasion de la journée de l'opposition qui nous était réservée.

La question du vote est toutefois claire. Nous avons demandé le consentement unanime pour tenir un vote sur la question faisant l'objet du débat ce jour-là à la Chambre. Nous avons discuté toute la nuit de la question. Que s'est-il produit? Les libéraux ont opposé leur refus. Nous avons demandé le consentement unanime, et ils ont refusé.

J'encouragerais le député à ne pas accabler l'opposition avec des déclarations comme celle-là.

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, le député réformiste a sans doute entendu le député libéral qui a parlé avant lui citer mes paroles lorsque j'ai dit que nous étions persuadés de la nécessité de ne négliger aucun moyen à notre disposition pour tenter de mettre un terme à ce bain de sang inutile. Dans cette optique, une des mesures que nous préconisons fermement, c'est l'adoption d'une résolution d'unité pour la paix. Nous estimons important de soumettre cette question à l'Assemblée générale des Nations Unies. Le gouvernement semble toujours écarter cette solution. On pourrait penser qu'il ne veut pas saisir de la question un grand organisme international autre que l'OTAN.

Le député peut-il nous dire ce qu'il pense de cette idée?

M. Art Hanger: Monsieur le Président, je crois que tout doit être mis en oeuvre sur le plan diplomatique pendant que la question de l'attaque est à l'étude. Sur le plan diplomatique, il incombe à notre gouvernement de ne pas ménager ses efforts. Je félicite le député pour cette initiative. Je lui dirais que, pour ma part, je souscris à l'idée qu'il appartient aux Nations Unies de faire un geste de plus pour tenter d'apporter une solution raisonnable à la crise du Kosovo.

 

. 1705 + -

M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Monsieur le Président, qu'il s'agisse «des» Nations Unies ou d'«une» nation unie, je crois qu'un vote à la Chambre serait la preuve que nous parlons tous d'une seule voix. Nous serions une nation unie, ce qui serait bon pour le moral de nos troupes et pour la cohésion de nos alliés. Ce serait encore plus représentatif que le plus grand parti à la Chambre...

Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Calgary-Nord-Est dispose de 15 secondes pour terminer ses remarques.

M. Art Hanger: Monsieur le Président, j'aimerais remercier mon collègue de sa question. Voilà précisément ce qui en est: la Chambre, par un vote assis et levé, exprime son appui à nos troupes et l'initiative dans laquelle nous sommes engagés aux côtés de l'OTAN. Je suis de son avis et je le remercie de sa question.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, je remercie la Chambre de la possibilité qui m'est donnée de prendre part au débat sur cette importante question. La motion présentée aujourd'hui par le Bloc québécois est très importante. Elle se résume essentiellement à savoir non seulement si la Chambre des communes devrait ou non être consultée, mais aussi si elle devrait avoir la possibilité de voter sur le déploiement de troupes, en particulier de troupes terrestres dans la région du Kosovo.

Je rappellerai à cette occasion à la Chambre le projet de loi C-295 que j'avais présenté en 1995. Ce projet de loi prévoyait un processus d'approbation de tout déploiement de troupes à l'étranger pour participation au combat. À l'époque, je faisais partie du comité des affaires étrangères. Ce projet de loi avait été présenté à la suite du dépôt en 1994, à l'automne, d'un rapport du comité de la défense qui regroupait tous les partis. Ce rapport de l'examen de la politique de la défense disait notamment que les Canadiens n'accepteraient pas, et c'est tout à fait normal, que l'élaboration de la politique se fasse à huis clos et qu'on les mette devant le fait accompli. En outre, le gouvernement ne doit pas non plus envoyer les militaires à l'étranger sans tenir auparavant à ce sujet un débat public et sans que les Canadiens aient pleinement signifié leur accord. Nous voulons que, sauf en des circonstances exceptionnelles, tout déploiement soit précédé d'un débat au Parlement.

Telle était la conclusion unanime du rapport produit en 1994 à la suite d'un examen de la politique étrangère et de la défense par le comité de la défense qui regroupait tous les partis. Je vois ici certains députés qui ont pris part aux travaux de ce comité. L'une des conclusions auxquelles ils étaient arrivés était que non seulement le Parlement devrait être consulté, mais que—sauf en des circonstances exceptionnelles—il devrait l'être préalablement au déploiement de troupes à l'étranger.

Le comité multipartite qui a recommandé cela serait aussi triste que moi, aujourd'hui, de voir que, encore une fois, six chasseurs-bombardiers partir à destination du Kosovo, puis douze et maintenant dix-huit. Nous n'avons aucune idée des autres engagements que le gouvernement pourrait prendre, parce que nous avons des débats thématiques, mais nous ne votons jamais et nous ne sommes jamais avisés au moment où le gouvernement prend des mesures. C'est en contradiction complète avec la décision du comité multipartite, qui est encore plus puissant que le gouvernement, je crois. Or, ce comité dit que ce n'est pas ainsi que nous devrions faire. On n'obtient pas l'appui général de la population quand on agit unilatéralement.

J'ai soulevé certaines autres choses qui seraient très pertinentes au débat d'aujourd'hui. Si ce projet de loi avait été adopté, nous ne tiendrions pas ce débat aujourd'hui, parce que ce ne serait pas nécessaire. Le député de Red Deer a présenté deux motions semblables depuis la présentation du projet de loi C-295. Ces motions suivaient la même ligne de pensée, et ont toutes été rejetées par le gouvernement.

L'avantage de tenir un vote à la Chambre des communes, c'est que ce serait ainsi les Canadiens qui décideraient du rôle que le Canada doit jouer. La raison que nous invoquons pour envoyer des troupes terrestres doit être acceptable pour les Canadiens. Beaucoup de gens, dans ce débat et dans des débats antérieurs sur ce thème, ont parlé de la nécessité d'une intervention militaire. De ce côté-ci de la Chambre, nous ne nions pas que ce soit nécessaire, que les Forces canadiennes doivent participer à cette intervention, et qu'elles le font. Toutefois, l'opposition exige avant tout, au nom des Canadiens, que nous appliquions ce processus politique, soit faire sanctionner par la Chambre tout déploiement des forces canadiennes. Nous devrions prendre ensemble la décision de les envoyer outremer sur un front dangereux.

 

. 1710 + -

Deuxièmement, je crois que le vote—non seulement le débat, mais aussi le vote—permettra au gouvernement d'évaluer le soutien à la mission militaire avant même que le gouvernement n'envoie effectivement des troupes. Je crois que cet appui serait unanime. Je n'ai encore entendu aucun député dire que nous ne devrions pas aller au Kosovo faire tout ce que nous pouvons pour mettre fin au nettoyage ethnique de Milosevic. Je crois donc que le vote serait unanime.

Ce vote fournit au gouvernement une magnifique occasion d'évaluer l'appui de la Chambre à cette opération. Le Parlement devrait être l'instrument du gouvernement. Celui-ci ne devrait pas s'en remettre au National Post ou au Globe and Mail ou les résultats d'un sondage Léger & Léger. Ce n'est pas la bonne façon de procéder. S'il est certain d'avoir raison, comme il le dit—et je crois qu'en l'occurrence, il dit vrai—, il devrait soumettre la question au Parlement et passer ensuite à l'action, fort de savoir que tous les députés—et non seulement les députés ministériels—auraient appuyé la motion.

Troisièmement, un vote favorable donnerait plus d'assurance aux ministres. Lorsque le ministre des Affaires étrangères ira à Bruxelles négocier avec nos alliés de l'OTAN, et lorsque le ministre de la Défense nationale et lui discuteront avec le Cabinet, ils seront rassurés de savoir qu'ils ont l'aval de la Chambre.

C'est une excellente occasion pour eux de dire au Cabinet: «Nous devons agir pour telle raison. Vous avez vu le vote et vous avez entendu les députés. La Chambre a pris une décision et nous devrions l'écouter.» Il n'y a pas que nous, les députés, mais il y a aussi les Canadiens que nous représentons. Nous avons l'occasion d'affermir la position des ministres en tenant un vote ce soir.

Par ailleurs, j'ai quelques craintes au sujet d'une décision qui viendrait uniquement du gouvernement. Qu'arriverait-il si, à un moment donné, un parti de l'opposition décidait de critiquer cette décision? Qu'arriverait-il si, Dieu nous en garde, il y avait une perte de vie? C'est possible. Il s'agit d'une zone de combat. Si quelqu'un se faisait tuer, cela pourrait donner la frousse à un député de ce côté-ci, qui dirait: «Bien sûr, j'étais d'accord dans mon discours, mais je n'ai certainement pas voté pour cela.», mais ce sont probablement des sornettes. Toutefois, si l'on demande aux députés de se lever et de voter, d'exprimer leurs opinions, il n'y aura pas lieu de revenir en arrière. Ils diraient: «J'ai appuyé cette décision. Nous avons envoyé nos soldats là-bas et j'étais entièrement avec eux.»

J'en arrive à mon quatrième argument. Un vote envoie un message plus fort que tout aux troupes. Nous proposons des motions. On a tenté vendredi de proposer une motion concernant Wayne Gretzky. Aujourd'hui un député a parlé de Wayne Gretzky. Nous proposons des motions en faveur de choses qui, bien franchement, ne sont pas vraiment des questions de vie et de mort. Je suis un partisan enthousiaste du hockey, mais cela ne me trouble pas comme les événements qui se passent au Kosovo.

Nous pouvons envoyer un message à nos troupes en nous levant et en votant en faveur de la mesure que le gouvernement décidera de proposer. Ainsi, nous pourrions montrer à nos militaires non seulement que nous intervenons concrètement à la Chambre, mais aussi que nous nous tenons symboliquement à leurs côtés alors qu'ils s'apprêtent à faire le travail du Canada à l'étranger en affrontant Dieu sait quels dangers au cours des mois à venir.

La dernière fois que je suis intervenu à ce sujet, j'ai raconté l'histoire d'un habitant de ma circonscription, Mark Isfeld, tué accidentellement par une mine antipersonnel en Bosnie. Ce fut un moment de profonde tristesse dans ma circonscription. Les funérailles furent de grande envergure et les manifestations de deuil et de chagrin furent nombreuses au sein de la collectivité qui n'est pas si grande pourtant.

J'espère que cela ne se produira jamais, mais avant que cela ne se produise, j'aimerais que les députés puissent se lever et dire: «Membres de nos forces armées, nous sommes avec vous. Nous sommes ici debout et ce geste montre que nous sommes à vos côtés. Nous vous sommes reconnaissants de ce que vous faites pour la paix, pour prévenir la multiplication des massacres et la poursuite de la purification ethnique. Nous sommes à vos côtés alors que vous vous apprêtez à défendre les valeurs comme la vérité et la paix, si chères aux Canadiens, et à prendre les mesures qui s'imposent dans une situation très difficile.» Cependant, pour exprimer tout cela, il faut voter.

 

. 1715 + -

Je suis heureux d'appuyer la motion. Il s'agit d'une demi-mesure puisque nous sommes déjà impliqués dans le conflit des Balkans. Cependant, je crois que tous les Canadiens aimeraient voir leurs députés se lever et prendre position à la Chambre. J'interviendrais en disant «Prêts, toujours prêts» comme les femmes et les hommes des Forces armées canadiennes.

[Français]

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, comme le Parti réformiste, nous avons beaucoup de critiques à formuler à l'égard du processus de consultation et de débats. Il ne se solde pas par un vote alors qu'il le devrait. Il devrait l'avoir été depuis longtemps, surtout depuis que le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants l'a recommandé.

Je viens de recevoir un document qui montre jusqu'à quel point le gouvernement ne veut pas nous informer et qu'il manque de transparence. Je reçois à l'instant une note d'une personne responsable du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international qui nous dit de noter que la session d'information sur le Kosovo, qui était prévue pour demain, à 10 heures, aux bureaux de la Défense nationale, n'aura pas lieu.

J'aimerais demander à mon collègue du Parti réformiste ce qu'il pense de l'annulation, à la dernière minute, de cette réunion qui visait à nous informer. Que pense-t-il aussi du fait que nous aurons demain une réunion au Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international. Cette réunion devrait durer 30 longues minutes et constitue maintenant la seule session d'information à laquelle les députés de cette Chambre auront droit. Est-ce que nous aurons droit à une séance d'information jeudi, comme on nous l'a promis? Peut-être qu'elle aussi sera annulée. Alors, mon ami du Parti réformiste peut-il nous indiquer quelles sont ses vues sur ces annulations et ce manque de transparence du gouvernement?

[Traduction]

M. Chuck Strahl: Monsieur le Président, je sympathise avec le député qui signale à quel point il est difficile d'obtenir toute l'information au cours d'une séance d'information d'à peine 30 minutes dans le cadre formel d'un comité.

Bien souvent, un ministre présente un exposé de 10 ou 15 minutes et laisse les autres partis—sans parler des députés ministériels qui pourraient ou devraient avoir des questions à poser sur le même sujet—réduits à poser deux questions de trois minutes, avec des réponses de même durée, sans aucun suivi. C'est une séance d'information plutôt insuffisante pour une situation qui semble dégénérer très rapidement.

Nous avons envoyé six bombardiers, puis douze et maintenant dix-huit. Des négociations ont cours à l'heure actuelle dans les cercles de l'OTAN à propos de l'envoi de 50 000 à 100 000 fantassins. C'est une immense discussion qui devrait faire partie d'un immense débat et déboucher éventuellement sur un vote, et non seulement un vote au comité, où huit ou dix personnes peut-être sont bien informées pendant 30 minutes.

Le ministre devrait proposer une motion visant à exposer la situation et les objectifs militaire et politique visés. Nous savons tous que l'objectif moral est de mettre fin à la purification ethnique. Toutefois, le ministre devrait venir à la Chambre informer tous les députés et pas seulement les rares députés qui ont la chance de participer aux séances du comité.

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Monsieur le Président, je sais que le député a suivi le débat à la Chambre. Je suis certain qu'il sait qu'au cours du dernier siècle, nous sommes intervenus dans un certain nombre de conflits sans que la Chambre n'adopte de résolution à cet égard. Nous sommes intervenus dans la Seconde Guerre mondiale, dans la guerre de Corée et ainsi de suite, sans résolution de la Chambre.

Le député a-t-il lu la motion? Je suis curieux de savoir sur quoi il se prononce au juste. La motion propose que la Chambre exige du gouvernement qu'il soumette à un débat et à un vote de la Chambre l'envoi éventuel dans les Balkans de soldats canadiens pouvant être engagés dans des opérations militaires terrestres ou de maintien de la paix au Kosovo et dans la région des Balkans. Le député se prononce-t-il sur la tenue d'un vote? Se prononce-t-il sur l'envoi hypothétique de soldats? Souscrit-il à ce que le gouvernement fait déjà, en envoyant notamment des avions qui participent aux missions de bombardement? Souscrit-il à une intervention militaire, auquel cas il est disposé à...

 

. 1720 + -

Le président suppléant (M. McClelland): Je suis désolé de devoir interrompre le député. Il reste 60 secondes au député de Fraser Valley pour répondre.

M. Chuck Strahl: Monsieur le Président, j'ai la motion amendée en main. Elle est claire. Elle dit: «Que la Chambre exige du gouvernement qu'il soumette à un débat et à un vote préalables de la Chambre l'envoi dans les Balkans de soldats canadiens pouvant être engagés dans des opérations militaires terrestres et/ou de maintien de la paix au Kosovo et dans la région des Balkans.

De mon point de vue, à première vue, nous demandons au gouvernement de soumettre à la Chambre une proposition aux fins de la tenue d'un débat et d'un vote avant d'envoyer des troupes pour maintenir la paix ou pour combattre dans une zone militaire. C'est une motion directe et elle dit la même chose dans les deux langues officielles. Je pense qu'elle est facile à comprendre et j'encourage tous les députés à y souscrire. C'est un pas en avant pour la démocratie.

M. John Richardson (Perth—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat d'aujourd'hui.

La proposition dont la Chambre est saisie est très intéressante. C'est comme s'il n'y avait pas déjà de précédent à la Chambre des communes. La Chambre se base toujours sur des précédents.

Le gouvernement actuel et les gouvernements avant lui ont laissé des soldats, des marins et des aviateurs aller à l'étranger participer, au nom des Nations Unies, à des opérations de rétablissement ou de maintien de la paix ou, dans le cas de la Seconde Guerre mondiale ou de la guerre de Corée, participer à des combats et risquer leur vie sans tenir de vote. Nous ne nous sommes jamais prononcés sur ces conflits à la Chambre des communes.

Nous examinons un précédent. Nous avons consacré plusieurs heures de débat à cela. Par conséquent, on nous demande continuellement «Pourquoi n'agissez-vous pas de telle façon?» Nous sommes fidèles à la pratique bien établie et bien éprouvée de la Chambre des communes britannique fondée sur la théorie de la pratique et du précédent.

Cela va à l'encontre de la pratique parlementaire. La proposition présentée par le député est hypothétique. Une question hypothétique est en règle générale rejetée. On ne traite pas de situations hypothétiques à la Chambre des communes. On y aborde des situations concrètes.

Compte tenu de la situation présentée, il pourrait être et serait impossible d'agir. Je ne veux pas me livrer à un débat sur cette question. J'estime qu'elle est ultra vires parce qu'elle va à l'encontre du précédent à la Chambre. À notre avis, mieux vaut pour les députés à la Chambre d'étudier des façons de résoudre la crise au Kosovo que de s'engager dans des querelles de procédure comme celle-ci.

Le système parlementaire canadien chargé de déployer les forces canadiennes est entre les mains du gouvernement. C'est la responsabilité du gouvernement, dans le cadre du discours du Trône, des pouvoirs attribués au ministre de la Défense et de l'administration gouvernementale comme telle. On ne devrait pas chercher à inventer à ce stade-ci un nouveau style de gouvernement.

L'opposition ne doit pas oublier que nous avons envoyé des soldats à Chypre, à la guerre du Golfe et au Golan. Nous avons de nouveau envoyé des soldats à l'étranger, dont bon nombre à la demande des Nations Unies. Nous sommes membres d'une alliance de sécurité qui nous a demandé de participer à l'intervention au Kosovo et dans les environs. On nous demande, en tant que membre légitime de cette alliance, de participer aux activités de l'équipe et c'est ce que nous faisons. En tant que membre de l'alliance, nous savons, par l'entremise de nos comités des affaires étrangères et de la défense, que c'est un solide engagement de notre part.

 

. 1725 + -

Je me demande pourquoi on nous sert ces propos nébuleux alors que ce n'est pas la réalité. La réalité, c'est que nous nous sommes engagés par écrit à participer à l'alliance défensive. Nous devons respecter cet engagement, et nous le ferons.

Je voudrais mentionner que je vais partager mon temps de parole.

Le gouvernement a promis de tenir des consultations, et il a tenu promesse. S'il venait sur le tapis que nous faisons quelque chose de mal, l'opposition l'aurait amplement signalé et nous aurait fait part de ces engagements, mais rien n'indique que nous soyons sur la mauvaise voie. Nous sommes dans la bonne voie en étant avec nos alliés. Nous sommes sur la bonne voie en essayant de ramener la paix dans une région assiégée et troublée.

Nous n'avons pas de plan de déploiement de soldats armés au sol au Kosovo pour le moment. Cela ne veut pas dire toutefois qu'il n'y en aura jamais. Nous devons toujours avoir des troupes d'infanterie prêtes au combat.

Bien peu de nos alliés de l'OTAN ont voté sur la question du Kosovo. Le Royaume-Uni n'a pas voté ni débattu la question. La France n'a pas voté. Le président Chirac a décidé d'intervenir et a consulté l'Assemblée nationale, mais il n'y a pas eu de vote. Nous ne sommes donc pas loin de nos alliés.

La motion à l'étude pourrait constituer un précédent très gênant si elle était adoptée, car elle laisse entendre qu'il serait approprié que la Chambre des communes contrôle dans les moindres détails les aspects du déploiement de troupes dans les Balkans, même les éléments d'ordre administratif les plus simples.

Des militaires canadiens sont actuellement déployés dans les Balkans, dans neuf missions dont la taille varie et dont chacune est gérée sur une base quotidienne conformément aux politiques établies des Forces canadiennes relatives à la rotation et au remplacement du personnel. Selon les termes de la motion, toutes ces décisions seraient soumises à l'approbation de la Chambre.

Le BQ ferait voter la Chambre pour décider si un cuisinier doit être envoyé en Croatie. Même l'envoi d'une équipe pour secourir un pilote canadien abattu serait soumis au vote de la Chambre. La motion ralentirait la capacité du Canada à répondre de façon rapide et souple aux crises humanitaires qui sont devenues si courantes. Nous serions entraînés dans les conflits de la guerre froide, dont la crise du Kosovo constitue le dernier exemple dans les Balkans.

Aucune de nos missions actuelles n'a fait l'objet d'un vote à la Chambre. Il ne fait aucun doute que la rapidité du déploiement a sauvé des vies innocentes et pour nous, sauver des vies aura toujours la priorité sur les querelles de procédure.

La conduite inacceptable de M. Milosevic est antérieure à la crise actuelle au Kosovo. L'utilisation qu'il a faite de l'armée yougoslave pour soutenir ses compatriotes serbes au cours de la guerre en Croatie et en Bosnie a contribué beaucoup au nettoyage ethnique qui a eu lieu au cours de ces conflits.

Avant l'arrivée au pouvoir de M. Milosevic, le Kosovo était principalement peuplé d'Albanais qui avaient une autonomie constitutionnelle au sein de la Yougoslavie. Ce droit leur a été arraché en 1989 par M. Milosevic, qui s'est dès lors attaché à appauvrir les Kosovars opprimés.

Depuis le début de l'année dernière, ses forces de sécurité ont lancé une campagne lors de laquelle des civils innocents ont été soumis à des atrocités similaires à celles auxquelles nous avons assisté en Croatie et en Bosnie. De 1992 à 1995, nous avons fait partie de la mission de surveillance de la Communauté européenne dans le cadre de la force de protection des Nations Unies. Plus de 1 300 militaires canadiens sont actuellement stationnés en Bosnie au titre de la participation du Canada à la force de stabilisation de l'OTAN.

 

. 1730 + -

Notre engagement envers la paix et la stabilité dans la région ne fait aucun doute. Cet engagement s'inscrit dans la politique traditionnelle du Canada qui vise à promouvoir la paix et la stabilité dans le monde.

Une solution diplomatique au conflit du Kosovo a toujours été l'option préférée du Canada et de ses alliés. En mars 1998, les Nations Unies ont adopté la résolution 1160 qui exhortait toutes les parties à parvenir à un règlement pacifique. En septembre 1998, les Nations Unies ont adopté la résolution 1199 qui demandait aux deux camps de mettre fin aux hostilités et d'améliorer la situation humanitaire.

Pour ce qui est de la consultation du Parlement, le 1er octobre 1998, tous les partis sont convenus que le Canada devrait se joindre aux autres alliés de l'OTAN en vue d'opérations aériennes. Celles-ci se révélaient nécessaires. Nous avons tenu une deuxième réunion le 17 février 1999. On espérait alors qu'un accord de paix pourrait être signé et que notre participation consisterait à déployer une force de maintien de la paix. Le 12 avril 1999, quand le Parlement a abordé de nouveau la situation au Kosovo, tous les partis ont appuyé la position du Canada, soit la participation aux opérations aériennes de l'OTAN.

De plus, le Comité permanent de la défense et le Comité permanent des affaires étrangères ont tenu plusieurs réunions consacrées à l'évolution de la situation au Kosovo. Le 31 mars les ministres des Affaires étrangères, de la Défense nationale et de la Coopération internationale ont tenu une réunion et ont exposé la réponse du gouvernement à cette crise. Le 15 avril, le ministre des Affaires étrangères a comparu devant le Comité des affaires étrangères pour faire état de la situation au Kosovo. Tous les député intéressés ont été invités.

Il y a donc eu participation pleine et entière de la Chambre, à tous les niveaux.

[Français]

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté mon collègue avec attention. J'espère qu'il pourra rester des nôtres pour répondre à des questions.

Je ne crois pas que les citoyens du Canada et du Québec pensent que c'est du «procedural wrangling», pour reprendre son expression, que de vouloir non seulement débattre de la question de l'envoi de troupes, mais aussi de voter sur cette question. C'est là l'objet de notre motion qui, je ne crois pas, est excessive, et ne lierait pas le gouvernement pour l'avenir, bien que ce serait peut-être intéressant que, pour l'envoi de toute troupe d'importance, le Parlement ait à débattre mais aussi à voter.

Son autre argument, le deuxième que j'entends aujourd'hui, c'est qu'il ne faudrait pas changer la pratique établie ici, qui est celle de la British House of Commons.

D'abord, cette pratique n'a pas toujours été suivie, parce qu'il y a eu des votes à la Chambre, avant l'envoi de troupes à l'étranger. S'il avait entendu le discours de notre collègue de Richmond—Arthabaska, il se serait rendu compte que des votes, qui avaient été réclamés par son parti, par le ministre des Affaires étrangères, porte-parole aux affaires étrangères alors que son parti formait l'opposition officielle à l'époque, avaient eu lieu et que cette pratique avait été changée à l'occasion.

Par conséquent, il est possible de changer des pratiques, il est même souhaitable de le faire. J'aimerais savoir notamment la réaction du député au fait que M. Clinton, aujourd'hui même, a appelé les membres du Congrès à voter unanimement et sans délai une loi budgétaire supplémentaire pour autoriser des dépenses additionnelles pour le Kosovo, en disant, et je cite le président Clinton: «Ce fonds est une nécessité urgente, immédiate, et il est clairement dans l'intérêt national que le Congrès se penche sur cette question.»

Pourquoi ce Parlement ne pourrait-il pas voter comme le Congrès américain sera appelé à le faire sur cette question?

 

. 1735 + -

[Traduction]

M. John Richardson: Monsieur le Président, premièrement, la proposition dont nous sommes saisis n'est pas recevable. Il s'agit d'une situation hypothétique et le député le sait parfaitement.

Deuxièmement, les Américains sont souvent retournés au Congrès lorsqu'ils avaient besoin de fonds supplémentaires pour une action militaire à l'étranger. Ce n'est pas une première. Il n'y a là rien de nouveau. C'est ainsi qu'ils procèdent lorsqu'ils veulent des crédits supplémentaires pour renforcer les effectifs à l'étranger.

Nous ne devrions pas voter sur une question hypothétique. Qui plus est, l'analogie avec les Américains est mauvaise. C'est la façon américaine de procéder lorsque le président demande des fonds supplémentaires pour apporter l'aide des États-Unis à des opérations comme celle de l'OTAN au Kosovo.

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai suivi avec beaucoup d'intérêt ce qu'a dit le député. Sa contribution à ce débat sur la motion d'opposition du Bloc a été extrêmement utile.

Le Parti réformiste appuie très vigoureusement cette motion. Nous savons qu'il a eu sa propre journée d'opposition depuis la nuit de débat sur le Kosovo. Je me demande si mon collègue aurait une idée de la raison qui a incité les députés réformistes à débattre toute une journée d'une motion tout à fait futile après le débat que nous avons eu sur le Kosovo, plutôt qu'à présenter eux-mêmes une motion de ce genre.

M. John Richardson: Monsieur le Président, le Parti réformiste fait des choses qui n'ont pas toujours de sens. Je n'étais pas ici lorsque la motion a été présentée et je ne puis donc vraiment me prononcer à son sujet. Je ne suis pas en mesure de répondre à cette question.

Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Réf.): Monsieur le Président, brièvement, je voudrais que le député nous explique pourquoi son collègue lui a demandé de préciser les intentions et les positions du Parti réformiste plutôt que de poser la question au Parti réformiste. Peut-il expliquer cela?

M. Peter Adams: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.

Je sais que la députée vient à peine de se joindre à nous, mais j'ai posé la même question au Parti réformiste plus tôt aujourd'hui.

Le vice-président: Je ne pense pas que ce soit vraiment un rappel au Règlement, mais peut-être que le député de Perth—Middlesex voudra répondre.

M. John Richardson: Monsieur le Président, je le répète, je ne me sens pas bien placé pour répondre à cette question. Je serais vraiment dans le noir là-dessus.

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je pense qu'il est important de reconnaître que, sans compter les dernières heures de débat, que la Chambre a déjà eu l'occasion au cours des deux derniers mois de discuter pendant 26 heures de l'importante question du Kosovo. Plus de 100 députés ont participé au débat. On y a consacré de 20 à 25 heures au comité. Il y a eu un examen poussé durant l'étude des prévisions budgétaires au comité pour déterminer les responsabilités du gouvernement sur cette question importante.

Il est quelque peu étrange qu'on s'offusque tant du manque d'information, de consultation, alors qu'en fait, lorsqu'on connaît la situation dans beaucoup d'autres pays membres de l'OTAN, on s'aperçoit qu'il n'y a eu aucun débat, aucun vote.

Je le signale non pas pour faire des comparaisons, mais simplement pour préciser qu'au Parlement, nous avons réalisé des progrès très importants pour ce qui est de faire participer les députés aux décisions touchant la politique étrangère et les activités internationales.

Ainsi, j'ai entendu la question précédente posée à mon collègue, le secrétaire parlementaire. Je veux signaler une chose. Je siégeais ici au moment de la guerre du Golfe. Les navires de guerre sont partis du Canada en août et le Parlement n'a pas repris ses travaux avant la fin de septembre, presque cinq semaines plus tard. Le Parlement n'a joué absolument aucun rôle. Il a fallu attendre un autre mois avant qu'il y ait même un débat là-dessus. Nous sommes restés presque deux mois et demi sans étude par le Parlement, même si le Canada s'était engagé dans une entreprise importante, dans la guerre du Golfe.

 

. 1740 + -

Lorsque le vote a finalement eu lieu, un mois ou deux plus tard, il ne visait pas à autoriser la participation de troupes terrestres, mais tout simplement à appuyer une résolution des Nations Unies. Voilà de quoi il s'agissait, purement et simplement. Tous les précédents dont les députés d'en face ont parlé n'ont en fait aucun fondement réel dans l'histoire connue ou les faits survenus au Parlement.

Cela est important. Je témoigne toujours beaucoup de déférence envers mes prédécesseurs. Je me reporte au discours prononcé par le très honorable Joe Clark, qui était ministre des Affaires étrangères à l'époque. Je remarque qu'il en a profité ce matin pour parler des responsabilités parlementaires. Le 25 septembre, il a dit que nous ne pouvions pas toujours attendre que les assemblées délibérantes délibèrent et prennent des mesures et que c'était la raison pour laquelle il n'était pas prêt à garantir la tenue d'un vote à la Chambre des Communes sur le recours aux Forces canadiennes.

Quand on veut remonter en arrière et citer des précédents, il est important de bien vérifier les faits. Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, nous avons décidé de changer tout cela, de démocratiser le processus pour permettre au Parlement d'être entendu et d'entendre les commentaires qu'on lui adresse. Nous l'avons déjà fait. Plus de 100 députés se sont exprimés très clairement sur les engagements les plus manifestes.

J'aimerais reconnaître que la Chambre a fait front commun face au terrorisme répréhensible auquel le régime de Milosevic a soumis les Kosovars. Nous avons dit ce que nous avions à dire sur la nécessité de venir en aide aux centaines de milliers de réfugiés.

Je dirais même qu'au moment où le monde passe par une période de transition, nous les Canadiens reconnaissons très fermement que de nouvelles normes humanitaires sont en train de s'établir dans le monde. Nous établissons de nouvelles normes de comportement selon lesquelles même le concept sacro-saint de la souveraineté nationale ne devrait pas nous empêcher d'intervenir pour protéger la vie d'être humains innocents, de civils persécutés et terrorisées par leur propre gouvernement.

Je reconnais que c'est un changement. Tout comme le monde a changé sur le plan géologique, on note en matière de relations internationales une évolution analogue à la dérive des continents. Je suis heureux de dire que, en tant que Canadiens, nous avons participé de plus en plus activement au cours des dernières années à l'établissement de nouvelles normes et de nouvelles règles.

Nous disons que des innocents ne devraient pas être tués par de telles armes. Qu'il s'agisse de la campagne contre les mines antipersonnel, des travaux du tribunal international ou de la lutte contre le commerce des armes légères, tout cela s'inscrit dans un même processus fondamental et élémentaire. Nous devons donc maintenant commencer à assurer une meilleure protection des personnes, des êtres humains, des gens.

C'est pourquoi je trouve curieux que la Chambre passe tellement de temps à discuter de la possibilité de tenir un vote plutôt que de se préoccuper de l'essentiel, soit la question de savoir comment le pays se prépare à prendre les initiatives requises pour protéger la vie humaine, la sécurité individuelle, la responsabilité humaine et la sécurité. Voilà ce qui intéresse les Canadiens.

Comme le premier ministre l'a dit dans le débat précédent, lundi dernier, toutes les circonstances vont se présenter. Le gouvernement décidera de la nature de la consultation parlementaire et du rôle du Parlement. Mais insister maintenant sur la tenue d'un vote sur une chose qui ne s'est pas encore produite, c'est contraire à la pertinence de la Chambre. De grâce, qu'on ne s'attende pas à ce que la Chambre se prononce sur une proposition visant ce qui pourrait ou devrait être.

Nous attendons du gouvernement qu'il prenne une décision et en saisisse la Chambre. C'est tout. Selon notre régime parlementaire de gouvernement par le Cabinet, nous tenons pour acquis que le gouvernement jouit de la confiance de la Chambre, du Parlement. Si la Chambre n'est pas d'accord avec ce que fait le gouvernement, elle peut lui retirer sa confiance, en déposant une motion de censure.

 

. 1745 + -

Comme le député l'a fait remarquer plus tôt, l'opposition l'a déjà fait. Le Parti réformiste n'a pas proposé cela dans la dernière motion qu'il a présentée, mais il avait la possibilité de le faire comme il l'a déjà fait à l'égard de questions économiques, entre autres. Cela est conforme au processus parlementaire. Ce sont les principes fondamentaux du Parlement. Il ne s'agit pas de proposer que nous prenions à un moment donné un engagement qui nous lie les mains.

Dans cette situation incroyablement instable, nous constatons qu'une décision prise un jour n'est peut-être pas celle qu'il faut le lendemain. Des changements doivent être effectués. Nous devons faire preuve de souplesse. Nous devons être en mesure de prendre des décisions, parce que nous faisons aussi partie d'une alliance.

Le Canada n'est pas seul dans cette affaire. Nous n'y sommes pas tous seuls. Nous faisons partie d'une vaste alliance regroupant de nombreux pays. Nous sommes engagés sur plusieurs fronts. Il y a la campagne militaire à proprement parler et les engagements très importants que nous prenons en matière d'aide humanitaire. Il y a aussi des efforts diplomatiques considérables en cours. Pour agir sur ces divers fronts, nous devons avoir l'autorité et la capacité de prendre des décisions, d'évaluer la situation et d'agir en fonction des circonstances qui se présentent.

Je crois qu'aucun député ne voudrait lier les mains du gouvernement du Canada et l'empêcher de prendre ces décisions et d'intervenir au Kosovo au nom des Canadiens, mais ce dernier doit le faire en reconnaissant pleinement que le Parlement a un rôle à jouer.

Il n'y a pas d'autre pays au monde où le gouvernement se présente chaque jour à la Chambre pour répondre aux questions de l'opposition. On parle de reddition de comptes, mais dans quel autre pays la pratique-t-on chaque jour, comme ici? Le Président Clinton ne se présente pas au Congrès chaque jour. Le premier ministre britannique se montre à la Chambre une fois toutes les deux semaines. Mais au Canada, le premier ministre vient répondre aux questions de la Chambre chaque jour. D'où viennent ces questions? Qui les pose?

Je dirai aux députés d'en face que le Parlement a un rôle vital et crucial à jouer et qu'il le joue très bien. La situation est critique et tient à coeur aux députés des deux côtés de la Chambre. Que ce soit aux réunions des caucus, en posant des questions chaque jour, en assistant aux séances d'information ou en faisant leurs commentaires, les députés livrent ce combat au nom des Canadiens.

Ce serait une erreur grave que de limiter tout à coup les possibilités d'action du Parlement et son aptitude à adapter chaque jour cette action aux circonstances. Nous avons eu l'occasion de débattre des principes, des objectifs fondamentaux des Canadiens, qui ne veulent pas voir un gouvernement opprimer son peuple et le priver de la dignité que lui procurent ses droits. Le Canada est disposé à prendre les mesures nécessaires, dans le cadre d'une vaste alliance, pour créer une nouvelle norme en matière de sécurité humaine, afin que tous les habitants de la terre aient, un jour, le sentiment qu'ils peuvent compter sur la communauté internationale pour protéger l'intégrité et les droits qui leur reviennent en tant que membres de la famille humaine.

M. Lee Morrison: Monsieur le Président, c'est à mon tour d'intervenir, mais comme le ministre est parmi nous cet après-midi, je me demande s'il est possible d'avoir le consentement unanime de la Chambre pour prolonger de dix minutes la période des questions et des observations.

Le vice-président: Y a-t-il consentement?

Des voix: D'accord.

Une voix: Non.

M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Réf.): Monsieur le Président, si un habitant d'une autre démocratie, je devrais dire d'une vraie démocratie, lisait la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui, cela lui donnerait matière à réfléchir. Il constaterait que nous débattons à cette Chambre d'une motion exhortant le gouvernement à laisser voter les députés sur une question d'importance nationale. C'est du jamais vu.

J'ai vécu dans des pays où c'est la norme, où le gouvernement propose des mesures législatives que tous les membres de l'assemblée s'empressent d'adopter, parce qu'ils n'ont pas d'autre choix. J'espérais toutefois beaucoup mieux de la part du Parlement du Canada. D'après ce que je comprends, dans la motion, on propose simplement que la Chambre ait voix...

 

. 1750 + -

Le vice-président: Le ministre des Affaires étrangères peut répondre s'il le désire.

L'hon. Lloyd Axworthy: Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de plaisir que je profite de l'occasion pour faire savoir ceci à mon collègue. Celui-ci demande ce que les habitants d'autres démocraties vont penser. Au Royaume-Uni, qui est le berceau du système parlementaire, il n'y a eu ni débat ni vote. En Belgique, il n'y a eu ni débat ni vote. En France, il n'y a eu ni débat ni vote. Aux Pays-Bas, deux débats, aucun vote. Et aux États-Unis d'Amérique, la décision revient au président.

Dans les circonstances, le Canada semble avoir battu un record pour ce qui est des débats à la Chambre. C'est ainsi qu'a été autorisé le mandat de participer à la mission au Kosovo; il y a eu un débat au cours duquel les députés ont autorisé une mission de maintien de la paix; et nous avons eu, lundi soir dernier, un débat qui a duré jusqu'au matin. Nous avons eu ces séances d'information. Je crois que les Canadiens peuvent être fiers.

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Affaires étrangères a mentionné des pays où il n'y avait pas de votes. Je pourrais lui mentionner un pays où il y a eu deux votes: l'Allemagne, d'où émane le plan de paix.

Le Canada aurait pu faire preuve de leadership et demander un vote ici, à la Chambre.

Je demande au ministre s'il se rappelle—parfois, on est frappé d'amnésie quand on change de côté de la Chambre—la citation suivante: «Dans l'état actuel des choses, nous sommes devant une situation qui pourrait durer des mois. Nous sommes témoins d'une escalade de grande envergure. Le risque de combat est très réel. Nous voudrions avoir l'assurance de la part du gouvernement qu'aucune manoeuvre offensive ne sera entreprise sans le consentement du Parlement». Cette citation est du ministre actuel des Affaires étrangères.

L'hon. Lloyd Axworthy: Monsieur le Président, c'est la raison pour laquelle nous avons un processus parlementaire: pour que le Parlement exprime ses positions et ses consensus par le débat.

Comme je l'ai dit, 100 députés de cette Chambre se sont prononcés, il y a eu 26 heures de débat et trois séances pour répondre aux questions des députés de cette Chambre. C'est un grand exemple de la déclaration que j'ai faite il y a 10 ans.

[Traduction]

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, le ministre dit que le seul vote à avoir été tenu visait à appuyer une résolution de l'ONU. Nous accepterions volontiers cela. Au risque de me répéter, je demande au ministre s'il se prévaudra du siège du Canada au Conseil de sécurité pour présenter officiellement une résolution d'unité pour la paix, pour saisir l'Assemblée générale des Nations Unies de cette affaire. Nous aurons alors peut-être quelque chose sur quoi nous prononcer en appuyant cette résolution.

L'hon. Lloyd Axworthy: Monsieur le Président, le député et moi avons eu d'excellents échanges à ce sujet la semaine dernière. Cela montre bien que le Parlement peut fonctionner et comment les députés de l'opposition peuvent contribuer au débat et faire part de leurs recommandations.

Je veux simplement signaler au député que le secrétaire général a nommé un représentant spécial aujourd'hui. Il a travaillé sans relâche pour tenter d'élaborer une résolution du Conseil de sécurité. Pourquoi? Parce que, selon la Charte, une résolution en vertu de l'article 7 est assortie d'un vaste mandat qui s'appliquera à tous les membres. Si nous pouvons arriver à cela, et nous déployons beaucoup d'efforts en ce sens, cette solution serait nettement préférable. C'est la formule que nous privilégions actuellement. C'est pour cette raison que nous travaillons si fort avec le secrétaire général.

Comme je l'ai dit au député, si ces efforts échouent, nous étudierons sérieusement une recommandation comme celle que le député préconise. Pour l'instant, nous devons toutefois faire de notre mieux pour épauler le secrétaire général.

M. Lee Morrison: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Auriez-vous l'obligeance de définir pour nous ce qu'est un «Parlement qui ne discute que pour la forme»? Le ministre aimerait peut-être...

 

. 1755 + -

Le vice-président: Le député de Cypress Hills—Grasslands sait que le Président ne propose pas de définition.

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur le Président, je remercie le ministre des Affaires étrangères d'être présent à la Chambre pour écouter mon discours. Je sais qu'il est venu de son bureau expressément pour cette raison. Cela me fait plaisir parce que je vais lui rappeler quelques-unes de ses déclarations célèbres. J'en ai mentionné une tantôt et je vais la lui répéter.

Je vais demander aux députés de la Chambre d'identifier les personnes qui ont fait les déclarations suivantes. La première déclaration du ministre, que j'aimerais rappeler, a été prononcée le 24 septembre 1990:

    Dans l'état actuel des choses, nous sommes devant une situation qui pourrait durer des mois [...]

Il parlait à ce moment-là de la guerre du golfe Persique.

    Nous sommes témoins d'une escalade de grande envergure [..] Le risque de combats est très réel.

Et le plus important est sa dernière partie:

    Nous voudrions avoir l'assurance de la part du gouvernement—progressiste-conservateur à ce moment-là—qu'aucune manoeuvre offensive ne sera entreprise sans le consentement du Parlement.

C'était une déclaration du ministre actuel.

Le même ministre, qui était alors dans l'opposition, voulait aussi, et je vais le citer, si on me le permet—s'il est en désaccord, il n'a qu'à le souligner—, toujours au sujet de la guerre du golfe Persique, proposer un amendement afin que la Chambre se réunisse plus tôt après le congé des Fêtes. Il disait:

    Voilà qui permettra clairement au Parlement, c'est-à-dire aux Canadiens, par le truchement de leurs représentants élus, de se présenter comme les véritables décideurs, et non le Cabinet, les ministres ou le premier ministre.

Alors, le 15 janvier 1991, l'actuel ministre des Affaires étrangères présentait cette motion.

Plus loin, il disait, en parlant des Canadiens:

    Ils savent que, pour un gouvernement, il n'y a pas de décisions plus importantes que celles concernant la guerre et la paix. Il revient à chaque État de prendre ses décisions. Ils veulent s'assurer que ces décisions seront prises par tous les Canadiens et que cette tribune, le Parlement du Canada, sera respectée.

L'éminent auteur de cette déclaration, c'est l'actuel des Affaires étrangères.

Je vais continuer parce que les députés d'en face en ont fait quelques-unes. Le 15 janvier 1991, toujours concernant la guerre du golfe Persique, on disait:

    Je voudrais affirmer, à ce moment-ci, que le gouvernement n'a pas dans les circonstances l'autorité morale pour amener le pays dans une situation de guerre.

Ce n'est pas le ministre des Affaires étrangères qui disait cela, c'était l'actuel premier ministre de ce pays.

Toujours en parlant des députés de ce Parlement, en reprochant au gouvernement d'avoir convoqué la Chambre trop tard, c'est-à-dire deux jours avant le début des frappes, et de poser les mauvaises questions, un député du Parti libéral disait:

    Cependant, je pense qu'à l'instar de mes électeurs, j'avais le droit d'être saisi de cette question fondamentale, ce qui nous aurait permis de tous nous prononcer sur la question.

C'était l'actuel leader du gouvernement à la Chambre, un député qui a beaucoup d'expérience, qui demandait en 1991 le droit de se prononcer sur la question, par un vote soit dit en passant.

Ma dernière citation concerne un amendement proposé par les libéraux à la motion gouvernementale:

    Que cet appui ne soit pas interprété comme une approbation de l'emploi des Forces armées canadiennes dans une action offensive sans une consultation et l'appui ultérieur de la Chambre.

    Comme il a été convenu que le Parlement serait consulté avant que des décisions sur notre présence dans le Golfe ne soit définitives, le ministre peut-il nous donner les assurances voulues?

C'était une question posée par l'actuel ministre des Affaires étrangères, le 23 octobre 1990, c'est-à-dire avant le début du conflit.

Que ce soit le premier ministre, le ministre des Affaires étrangères, le leader du gouvernement à la Chambre ou d'autres députés qui ont, à l'unanimité, appuyé un rapport du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants, ils demandaient tous ensemble, lorsqu'ils étaient dans l'opposition et même avant le début du conflit, qu'on puisse se prononcer par un vote. Comment peut-on maintenant nous expliquer cette volte-face des libéraux?

On nous a dit toutes sortes d'inepties. Je vais en citer quelques-unes. Un des derniers intervenants libéraux avant le ministre des Affaires étrangères disait: «Nous allons voter contre cette motion présentée par le Bloc québécois parce que, par exemple, si on veut envoyer un cuisinier au Kosovo préparer de la nourriture aux soldats qui sont là pour le maintien de la paix, nous allons devoir demander un vote de la Chambre.»

 

. 1800 + -

Ils ont également dit: «Nous allons voter contre cette motion, parce que s'il y a des pilotes de CF-18 qui se font tuer, pour envoyer un sauveteur pour les chercher, on aura besoin d'un vote de la Chambre.»

Les libéraux disaient: «Nous allons voter contre cette motion du Bloc québécois, parce qu'on doit se revirer sur un 10¢ pour envoyer des membres des forces terrestres se battre au Kosovo pour nous, c'est-à-dire sans entraînement.» Peut-être que cette nuit décideront-ils que demain matin, à 5 h 15, il y a 1 000 soldats qui vont partir, et à ce moment-là, personne n'aura eu le temps de se prononcer.

On n'a entendu aucune raison valable de la part du gouvernement libéral pour s'opposer à la motion. On n'a entendu aucune raison qui viendrait infirmer la position du ministre des Affaires étrangères au moment où il était dans l'opposition. On n'a entendu aucune raison valable venant infirmer les propos du premier ministre actuel, alors qu'il était chef de l'opposition.

On peut se poser la question de savoir pourquoi le gouvernement ne veut absolument pas voter en faveur de cette motion. On nous a dit aussi qu'il n'y avait jamais eu de vote à la Chambre des communes concernant l'envoi de troupes terrestres, alors qu'il y a eu un vote lors de la guerre du Golfe, il y a eu un vote dans les années 1970 et un autre vote au cours des années 1960.

Plus tôt, le ministre a énuméré quelques pays où il n'y avait pas eu de vote. Je lui ai répondu qu'il y avait eu des votes en Allemagne, et qu'il y a eu deux votes en République tchèque pour savoir si le pays devait s'engager dans un tel conflit.

Il y a eu un vote cet après-midi aux États-Unis pour l'octroi de plusieurs milliards de dollars pour continuer à défendre les intérêts des Kosovars dans ce conflit. Il est intéressant de rappeler qu'il y a eu un vote aujourd'hui aux États-Unis concernant le budget.

À deux reprises, la semaine dernière et cette semaine, nous avons demandé au ministre de la Défense nationale à combien s'élève le budget prévu, à combien s'élèvent, au moment où on se parle, les coûts prévus au Canada pour faire face à ce conflit.

Au moment où on vote aux États-Unis pour un budget de 4 ou 6 milliards de dollars, les deux réponses que mon collègue de Joliette a obtenues du ministre de la Défense nationale étaient les mêmes: «Nous ne le savons pas.» Nous avons demandé combien d'avions restaient en réserve. Présentement, on en a 18 qui sont là-bas. Combien en reste-t-il, si on a une autre demande de l'OTAN? On nous a donné la réponse suivante: «Nous ne le savons pas.»

On peut se poser des questions sur l'improvisation apparente du gouvernement libéral face à ce conflit. Combien ça coûte? On ne le sait pas. Combien d'avions peut-on envoyer de plus? Nous ne le savons pas. Est-ce que ce sont des secrets d'État? Est-ce que c'est un secret pour la Défense nationale que d'ignorer ou de ne pas divulguer un budget comme celui-là? Ce serait surprenant, quand même, au même moment où le gouvernement Clinton vote sur le budget à octroyer pour ce conflit, que le ministre de la Défense et le premier ministre disent: «C'est un secret national que de savoir si cela va coûter 40, 50, 100 ou 200 millions aux concitoyens canadiens.» Nous posons ces questions, mais nous ne pouvons avoir de réponses.

On a l'unanimité des partis de l'opposition, fait rare à la Chambre, sur la motion du Bloc québécois concernant le vote à la Chambre. Il s'agit d'une des actions constructives et positives que le Bloc a entreprises. Nous avons demandé...

Une voix: Une des nombreuses.

M. Benoît Sauvageau: Une des nombreuses, oui. En voilà d'autres: nous avons demandé au ministre des Affaires étrangères de profiter du fait que le Canada soit président du Conseil de sécurité pour coparrainer le plan de paix présenté par l'Allemagne. Ce qu'on a répondu, c'est: «Nous ne le savons pas, nous allons vérifier, nous attendons.» Comme pour les avions et le budget.

Le chef du Bloc québécois a proposé, dans un discours, de convoquer une conférence de l'Union européenne afin de définir le devenir des petites nations, particulièrement dans les Balkans. Du côté libéral, on a fait la sourde oreille.

Mon collègue de Joliette a ironiquement rappelé tantôt que si on veut envoyer une mission parlementaire de 5, 6 ou 7 députés à l'extérieur, comme à Genève, par exemple, pour discuter du devenir de l'OMC, cela nécessite le consentement unanime pour débloquer un budget de 25 000 $, 30 000 $ ou 40 000 $. C'est une règle qui existe présentement à la Chambre.

On veut envoyer de 2 000 à 3 000 soldats se battre au Kosovo, et on n'aura pas de vote à la Chambre, parce que le Parlement veut que cela se décide dans le bureau du premier ministre et au Cabinet des ministres, alors qu'il y a 9 ans, on disait que cette forme de décision n'était pas bonne.

 

. 1805 + -

J'exhorte mes collègues libéraux, il reste peut-être une demi-heure ou trois quarts d'heure de débat, à s'ouvrir l'esprit, à penser convenablement, à regarder les citations antérieures et à appuyer la motion du Bloc québécois.

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le Président, question de fait, l'honorable député de Repentigny a cité l'exemple constitutionnel des États-Unis.

Il faut se souvenir que depuis la déclaration de guerre contre le Japon, en 1941, le Congrès américain n'a jamais utilisé la règle constitutionnelle américaine. Les engagements des États-Unis dans l'application de leurs forces armées sont toujours un exercice du pouvoir présidentiel, du pouvoir exécutif.

On a, d'une façon, emprunté au système britannique d'antan, système qui est appliqué au Canada.

M. Benoît Sauvageau: Monsieur le Président, l'éminent constitutionnaliste et collègue de Vancouver Quadra, spécialiste de relations internationales, a probablement raison en partie sur ce qu'il vient d'énoncer.

Cependant, ce que je peux dire c'est que, premièrement, lorsque son collègue, le ministre des Affaires étrangères, était dans l'opposition, il demandait un vote pour l'envoi des troupes.

Deuxièmement, il y a déjà eu un vote ici, à la Chambre. Je ne parle pas des États-Unis.

Troisièmement, pas plus tard que l'année dernière ou il y a deux ans, Bob McNamara, ancien conseiller de John F. Kennedy, s'est excusé devant la population pour le drame et l'erreur qui avaient été commis au Vietnam.

Est-ce qu'on veut que le ministre des Affaires étrangères ou le premier ministre, après le conflit, fassent des excuses au peuple canadien? Ce que nous demandons, c'est que les parlementaires exercent leurs responsabilités et qu'ils votent ici à la Chambre.

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, je désire poser une question à mon collègue.

N'est-il pas d'avis que dans une démocratie, ce que le gouvernement est en train de suggérer ici, c'est de demander aux démocrates que nous sommes de ne pas utiliser l'instrument le plus puissant que nous ayons pour exprimer notre démocratie, c'est-à-dire notre droit de vote?

Le gouvernement dit: «Vous pouvez parler tant que vous voudrez, on va vous le permettre, on va faire des séances. On va vous permettre de parler, et vous pouvez le faire, mais quand viendra vraiment le temps de le dire, vous ne pouvez pas dire ce que vous voulez.» Un parlementaire dit des choses avec son droit de vote. Ce qu'on nous offre, c'est un droit de parole.

Est-ce que mon collègue n'est pas d'avis qu'on est en train de saboter notre droit le plus sacré, celui de voter?

M. Benoît Sauvageau: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Joliette de sa question.

Dans le livre rouge des libéraux, en 1993, on parlait de réinstaurer la confiance de la population. Une des façons de réinstaurer la confiance de la population face aux parlementaires, c'est justement de respecter ce droit historique qu'est le droit de vote. Il est difficile de comprendre pourquoi les libéraux veulent se délester d'un droit aussi important que le droit de vote.

Plusieurs électeurs, dans l'ensemble des circonscriptions, j'en suis sûr, ont un certain dégoût face à la politique. Ils nous disent souvent: «Au Canada, c'est une dictature élective aux quatre ans. C'est-à-dire qu'on vote une fois pour le premier ministre et pour le Parlement, ensuite, on n'a plus de décision à prendre, c'est le premier ministre et le Cabinet qui les prennent.»

Je crois que par l'exemple qu'ils donnent aux Canadiens, les membres du gouvernement donnent raison, malheureusement et ironiquement, à nos électeurs.

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, le consentement du Parlement était voulu par l'ancien porte-parole aux affaires étrangères, aujourd'hui ministre des Affaires étrangères, comme l'a signalé plus tôt mon collègue.

Mais un consentement doit d'abord être éclairé. On doit être bien informé avant de donner son consentement, et un consentement sur des choses aussi importantes que l'envoi de troupes à l'étranger, dans un pays comme le Kosovo ou la Yougoslavie, ne doit pas être implicite. Ce consentement devrait être explicite et il le sera seulement si l'on vote.

Je demande à mon collègue s'il considère, en l'instance, que le consentement que le ministre des Affaires étrangères et le ministre de la Défense nationale, et même le premier ministre, semblent vouloir évoquer est éclairé, à la lumière peut-être aussi de l'annulation de la rencontre qui devait avoir lieu demain pour nous informer de la situation au Kosovo. Est-ce que ce consentement sera explicite s'il n'y a pas de vote?

 

. 1810 + -

M. Benoît Sauvageau: Monsieur le Président, effectivement, le ministre des Affaires étrangères a dit que 130 députés étaient intervenus sur le sujet du Kosovo. Je ne crois pas que ce soit un consentement explicite de la part des parlementaires. Le consentement doit s'exprimer par un vote éclairé, à la suite de rencontres avec les principaux intervenants, c'est-à-dire le ministère de la Défense nationale et celui des Affaires étrangères.

Trop souvent, à la dernière minute, on nous annonce que cette séance d'information est remise ou annulée. Comme mon collègue de Beauharnois—Salaberry l'a dit plus tôt, les séances d'information vont maintenant durer 30 minutes et, avec le papotage, il restera à peu près pas de temps pour poser des questions.

M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): Monsieur le Président, au moment où je prononce ces paroles à la Chambre des communes, l'aviation des pays membres de l'OTAN mène des frappes aériennes sur les cibles militaires serbes de la Yougoslavie et du Kosovo.

Sur la scène internationale, les diplomates de partout s'affairent à trouver une solution négociée à l'agression serbe contre les Albanais du Kosovo.

Dans les pays voisins du Kosovo, le personnel des organisations non gouvernementales d'aide humanitaire font tout en leur pouvoir pour faciliter l'accueil des centaines de milliers de réfugiés dont le nombre augmente sans cesse depuis le début de ce conflit.

Ici même par contre, personne ne veut, ne peut ou ne désire nous dire si oui ou non les Forces canadiennes se préparent à intervenir sur le terrain avec des troupes au sol dans les Balkans.

Cet après-midi encore, le ministre de la Défense nationale refusait de préciser si les officiers militaires planifiaient la participation canadienne à une intervention armée au sol. Ce ne sont pas des propos qui datent de la semaine dernière. Ce sont des propos adressés à des questions posées par les députés de l'opposition à ce ministre.

Le ministre de la Défense nationale affirmait cet après-midi pendant la période des questions orales, et je cite: «La seule chose que je peux confirmer, c'est la répartition des troupes canadiennes actuellement impliquées dans les Balkans.»

Quand un ministre refuse de répondre aux questions claires de l'opposition et fait usage de précaution oratoire—et je dois dire que le mot n'est pas faible—comme «la seule chose que je peux vous dire», on est en droit de se demander si le gouvernement ne se prépare pas à prendre une décision aussi lourde de conséquences derrière des portes closes, sans consulter le Parlement.

C'est justement ce que nous voulions éviter en présentant la motion que nous défendons aujourd'hui. La motion est claire, et je la cite:

    Que la Chambre exige du gouvernement qu'il soumette à un débat et à un vote préalables de la Chambre l'envoi dans les Balkans de soldats canadiens pouvant être engagés dans des opérations militaires terrestres et/ou de maintien de la paix au Kosovo et dans la région des Balkans.

Notre objectif est simple: nous exigeons qu'une telle décision, qui peut mettre en jeu la vie de nos concitoyens et concitoyennes, soit prise de façon transparente et démocratique. Jusqu'à maintenant, devant le refus du gouvernement de s'engager à tenir un vote préalable à l'envoi de troupes au sol dans les Balkans, nous sommes forcés de présenter cette motion qui le demande en bonne et due forme.

Il est étonnant que nous soyons obligés d'en arriver là pour ce qui nous semble une simple question de bon sens. Une poignée de personnes ne peut décider à elle seule d'envoyer les Forces canadiennes dans un conflit au sol qui risque de durer des mois encore.

Pour nous, l'implication du Parlement dans la politique canadienne à l'égard du Kosovo est essentielle. Jusqu'à maintenant, les partis d'opposition ont appuyé les décisions du gouvernement en faveur des attaques aériennes contre l'agression serbe au Kosovo, mais cela ne signifie pas...

 

. 1815 + -

M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'aimerais faire appel à la diligence et à l'indulgence de mes collègues pour que nous puissions permettre à l'honorable député de Rosemont de terminer son allocution, suivie de la traditionnelle période de questions et commentaires.

[Traduction]

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour autoriser le prolongement du débat?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

[Français]

Le vice-président: Comme il est 18 h 15, il est de mon devoir d'interrompre les délibérations et de mettre aux voix sur-le-champ toute question nécessaire à l'expédition des travaux des subsides.

[Traduction]

M. Bob Kilger: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.

Si je comprends bien, avant que je ne revienne à la Chambre, quelqu'un a demandé le consentement unanime pour prolonger la séance de cinq minutes environ afin que le dernier orateur puisse terminer son discours.

Je me demande si la présidence accepterait de demander à nouveau ce consentement unanime, à la condition bien entendu qu'il n'y ait aucune période de questions ou observations après cette dernière période de cinq minutes ajoutée au débat.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour poursuivre le débat pendant cinq minutes afin que le député de Rosemont puisse terminer son allocution?

Des voix: D'accord.

[Français]

Le vice-président: Il n'y aura toutefois pas de questions ni de commentaires.

M. Bernard Bigras: Monsieur le Président, je remercie également les députés de cette Chambre de me permettre de m'exprimer sur cette importante question.

La décision d'impliquer des troupes au sol est une décision qui pourrait être lourde de conséquences. Je pense qu'il ne faut pas se le cacher aujourd'hui, cela peut impliquer la perte de vies humaines. Il ne fait pas de doute que le Parlement doit être beaucoup mieux informé qu'il ne l'est actuellement avant de prendre une telle décision. Un véritable débat doit avoir lieu avant que les parlementaires ne puissent prendre une décision éclairée sur un sujet aussi grave. Par la suite, ce débat doit être sanctionné nécessairement par un vote qui donnera un mandat clair au gouvernement sur la pertinence de l'envoi de troupes au sol.

La motion présentée par le Bloc québécois n'a pas pour objectif de prendre position sur un éventuel engagement terrestre et militaire au Kosovo, mais plutôt d'obliger le gouvernement à débattre et à autoriser un vote de la Chambre si une telle éventualité se présentait. Ne pas y songer et ne pas y réfléchir dès maintenant consisterait à éviter le problème qui se posera à plus ou moins long terme.

Pour nous, il est clair que le gouvernement ne peut pas jouir d'une caution démocratique solide s'il ne passe pas au préalable par un vote à la Chambre des communes. En outre, sans vote, la position des différents partis n'a aucun poids réel. Toute la journée, les députés du parti gouvernemental se sont employés à ne pas se prononcer sur cette question en soutenant qu'il s'agissait d'une question hypothétique.

D'abord, je tiens à souligner qu'à mesure que les événements défilent devant nous, les chances qu'une intervention au sol soit nécessaire augmentent de plus en plus. Ensuite, même s'il ne s'agit que d'une hypothèse, rien n'empêche le gouvernement de s'engager dès aujourd'hui à consulter les parlementaires avant l'envoi de troupes au sol. En fait, à nos yeux, il est impossible de justifier la position actuelle du gouvernement qui ne peut être qu'antidémocratique.

 

. 1820 + -

En outre, le gouvernement est probablement inquiet à l'idée que certains députés ou certains partis s'opposent à l'envoi de troupes au sol, ce qui serait vu comme une division et enverrait le mauvais message aux dirigeants yougoslaves.

En fait, le comportement actuel du gouvernement, qui n'informe que très mal la Chambre des communes, qui refuse de la voir jouer un rôle important, pousse les députés et les partis à être de plus en plus critiques.

Si, en effet, les députés de cette Chambre ne sont pas informés des initiatives diplomatiques ou militaires, si les raisons des décisions prises par l'OTAN ou le gouvernement ne sont pas expliquées et débattues à la Chambre, cela oblige les députés du Bloc québécois à émettre de sérieuses réserves quant au bien-fondé des décisions.

Refuser un vote sous des prétextes fallacieux, de la part du gouvernement, enverrait un signal dommageable aux parlementaires et à cette Chambre. Ce serait refuser de lui faire jouer son rôle le plus essentiel, et risquerait de briser le consensus actuel.

Le gouvernement ne devrait pas avoir peur d'entreprendre un véritable débat et de répondre à certaines critiques. Il serait totalement stupide de faire comme si tous les Québécois et tous les Canadiens, à 100 p. 100, étaient d'accord avec l'implication canadienne dans l'intervention actuelle de l'OTAN.

D'ailleurs, il est important de souligner que de nombreux citoyens sont inquiets et critiques, et le gouvernement devra répondre de cela. Prendre une décision grave sans l'assentiment du Parlement constituerait un déni de notre système démocratique.

Je termine en disant qu'on reçoit beaucoup d'appels à nos bureaux de comté. Plusieurs citoyens se posent des questions, ils veulent que leurs élus puissent débattre de la question. Ils veulent aussi que leurs élus puissent bien les représenter et pour cela, il faut évidemment qu'il y ait un vote démocratique.

Le vice-président: Comme il est 18 h 22, il est de mon devoir d'interrompre les délibérations et de mettre aux voix sur-le-champ toutes questions nécessaires à l'expédition des travaux des subsides.

[Traduction]

Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Convoquez les députés.

Et la sonnerie s'étant arrêtée:  

Le vice-président: À la demande du whip en chef du gouvernement, le vote sur l'amendement est différé jusqu'à demain, à la fin de la période réservée à l'étude des initiatives ministérielles.

Est-on d'accord pour passer maintenant à la motion d'ajournement?

Des voix: D'accord.



MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LES ANCIENS COMBATTANTS

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, le Herald de Halifax a publié en février 1999 une caricature d'un tee-shirt portant la légende suivante: «J'ai survécu à Buchenwald et je n'ai obtenu en retour que ce misérable tee-shirt.» Cette légende s'applique aux plus récentes mesures adoptées par le ministère des Anciens combattants.

Bien que l'expérience de 26 prisonniers de guerre ne prête certainement pas à rire, le traitement que leur a réservé le gouvernement libéral insensible est une farce. Le 12 février 1999, j'ai demandé au ministre des Anciens combattants d'offrir aux survivants du camp de concentration de Buchenwald un règlement juste et honnête. J'ai signalé à cette occasion au ministre que l'indemnité d'à peine 1 000 $ versée par le gouvernement était en soi une insulte.

L'incapacité pathétique du gouvernement de réussir, là où d'autres ont échoué, à obtenir une juste réparation de la part du gouvernement allemand en dit long sur ses priorités mal placées.

Le ministre a eu le culot de dire que ces survivants étaient ravis. Il a semblé ensuite se contredire dans sa déclaration suivante, précisant que le gouvernement canadien avait de nouveau soulevé cette question auprès du chancelier allemand.

 

. 1825 + -

Un commettant de ma circonscription ayant survécu aux horreurs du camp de concentration de Buchenwald a retourné le chèque insultant de 1 098 $ au gouvernement libéral, après y avoir inscrit la mention «refusé».

Les gouvernements d'Australie et de Nouvelle-Zélande ont conclu un accord satisfaisant avec les anciens combattants de ces pays qui ont connu des horreurs semblables.

Ces anciens combattants ont été internés dans le camp de concentration nazi de Buchenwald plutôt que dans un camp de prisonniers de guerre où ils auraient dû être envoyés selon la Convention de Genève. D'autres gouvernements ont réussi à convaincre le gouvernement allemand de verser une réparation pertinente. Notre gouvernement a échoué et à misérablement laissé tomber ces braves Canadiens.

Je ne peux comprendre l'incapacité du gouvernement d'obtenir un règlement juste pour ces Canadiens. Est-ce une question d'incompétence ou est-ce simplement dû au fait que le gouvernement se préoccupe peu du sort d'une poignée de 26 anciens combattants?

Le gouvernement américain est récemment parvenu à un règlement enviable avec l'Allemagne pour les anciens combattants américains placés dans une situation semblable à celle de nos anciens combattants. Dans sa lettre au ministre des Anciens combattants, mon électeur, William R. Gibson, a exprimé les sentiments suivants. Il a dit:

    J'espère que le gouvernement du Canada peut encore parvenir à un règlement juste et honorable. Vous serez peut-être intéressé de savoir que le gouvernement américain a négocié pour ses anciens combattants un règlement avec l'Allemagne qui prévoit le versement de sommes allant de 10 000 $ à 200 000 $.

Ce qui est peut-être encore plus insultant que le chèque envoyé à ces Canadiens par le gouvernement, ce sont les paroles de l'ancien ministre des Anciens combattants dans la lettre d'accompagnement. Il a déclaré qu'il était très heureux que soit réglée cette question en souffrance depuis longtemps.

Très heureux en effet. Cela fait maintenant plus de huit ans qu'on a discuté du sort de ces anciens combattants dans le rapport de janvier 1991 du Sous-comité des affaires des anciens combattants intitulé Presque trop tard. Plus de huit ans plus tard, je dirais que c'est presque trop tard.

Cette question a été soulevée à nouveau au comité en août 1994 et dans des lettres adressées aux ministres des Anciens combattants, de la Défense et des Affaires étrangères en 1997. J'ai soulevé à de nombreuses reprises cette question pendant plus d'un an maintenant et le gouvernement se reconnaît battu alors que d'autres gouvernements ont réussi.

Dans une lettre que le cabinet du ministre des Affaires étrangères a envoyée à mon bureau, on reconnaît l'échec du Canada en disant: «Le Canada a entrepris plusieurs démarches demandant l'indemnisation des prisonniers de guerre par l'Allemagne, mais sans succès.»

Lorsque j'ai essayé d'aller au fond des choses dans l'intérêt de ces anciens combattants, on m'a dit que le gouvernement libéral refusait de façon objecte de rendre publique sa correspondance avec l'Allemagne sur cette question. Pourquoi le gouvernement a-t-il peur de montrer qu'il a échoué là où d'autres ont réussi?

Le gouvernement libéral devrait profiter de cette occasion maintenant pour agir de façon honorable et s'engager devant la Chambre et tous les Canadiens à entreprendre immédiatement des négociations pour parvenir à un règlement juste avec les anciens combattants et à réussir à finaliser les négociations appropriées avec le gouvernement allemand.

M. Bob Wood (secrétaire parlementaire du ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je suis stupéfait que le député de Halifax-Ouest veuille dénoncer les mesures que le gouvernement a prises pour venir en aide aux anciens combattants du Canada qui ont été détenus dans le camp de concentration de Buchenwald. Rectifions tout de suite les faits.

Dans les années 80, certains pays, notamment l'Australie et la Nouvelle-Zélande, ont décidé d'accorder une indemnité forfaitaire de 10 000 $ et de 13 000 $ respectivement à leurs anciens combattants internés à Buchenwald. Le Canada avait déjà choisi une voie différente au milieu des années 70.

Nous avions décidé de verser une indemnité mensuelle viagère aux anciens combattants et des prestations régulières au conjoint survivant. Ces paiements indexés équivalent à au moins 45 000 $, en dollars actuels, pour chaque ancien combattant ayant passé au moins 89 jours en captivité. Comme pour toutes les prestations versées aux anciens combattants, ces indemnités ne sont pas imposables. Si un ancien combattant est devenu invalide en raison de sa détention, il reçoit une indemnité distincte, sous forme de pension d'invalidité également non imposable.

En ce qui concerne l'indemnité annoncée le 11 décembre, elle a été accordée parce que, dans les années 80 et 90, le gouvernement n'avait pas réussi à obtenir une indemnisation de la part du gouvernement allemand. Le gouvernement du Canada a donc estimé que ces anciens combattants avaient attendu assez longtemps et a décidé de leur verser exactement la même indemnité que celle qui a été accordée aux prisonniers de guerre de Hong Kong, soit 18 $ par jour de captivité à Buchenwald. Cependant, les indemnités versées à nos anciens combattants internés à Buchenwald étaient beaucoup moins élevées que celles accordées à nos anciens combattants détenus à Hong Kong, qui ont souffert pendant trois ans et demi dans des conditions de captivité indescriptibles.

Je souligne un dernier point. Le 11 décembre, le ministre des Affaires étrangères a dit clairement que l'indemnité versée par le gouvernement aux anciens combattants détenus à Buchenwald ne l'empêcherait pas de présenter d'autres instances en leur nom auprès du gouvernement allemand. Ces instances ont été présentées personnellement par le premier ministre au nouveau chancelier allemand. Le chancelier a consenti à étudier la question et le ministère des Affaires étrangères suit la progression de cet engagement.

Bref, le gouvernement du Canada a fait tout ce qu'il fallait faire. Je pense que le député devrait l'admettre.

 

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[Français]

LE BUDGET

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président le 17 février 1999, j'ai posé la question suivante à la Chambre:

    Monsieur le Président, avec le budget, le ministre des Finances continue de dépendre de l'assurance-emploi. Il utilise le surplus de la caisse pour gonfler ses coffres et donner aux millionnaires. Pendant que le ministre paie la dette sur le dos des travailleurs et des travailleuses, le budget ne donne pas une cenne aux chômeurs qui n'ont pas accès à l'assurance-emploi.

J'ai posé la question au ministre des Finances et c'est le ministre du Développement des ressources humaines qui a répondu. J'ai demandé quel était le montant du surplus qui se trouvait dans la caisse de l'assurance-emploi.

Le ministre m'a dit qu'il s'agissait de 4,9 milliards de dollars. Il a ajouté ceci:

    Mais je suis renversé que du côté de l'opposition, on dise constamment, d'une façon lamentable et simpliste, que la meilleure manière d'aider les chômeurs, c'est de leur donner de l'assurance-emploi le plus longtemps possible et le plus possible.

    De notre côté, ce que nous voulons donner aux chômeurs, c'est un espoir, une stratégie globale avec la capacité de les intégrer au marché du travail. Nous voulons leur donner de l'espoir et non pas de la dépendance, comme le voudraient les députés de l'autre côté.

Quand on parle de dépendance, c'est le ministre des Finances qui dépend de l'assurance-emploi, ce ne sont plus les travailleurs qui ont perdu leur emploi.

Même le député libéral de Fredericton disait dans le Time Transcript: «We want him to be generous with the EI system.» Les députés libéraux disaient qu'après le 12 avril, ils allaient rencontrer le ministre pour lui dire à quel point le programme de l'assurance-emploi fait mal aux travailleurs et aux travailleuses du pays.

D'un côté, ils savent que ça fait mal, ils sont même en train d'en parler, mais ils ne sont pas prêts à inviter les parlementaires de l'opposition à s'asseoir ensemble pour essayer de trouver des solutions.

Même l'évêque de Moncton a déclaré, la semaine dernière, dans L'Acadie Nouvelle que le trou noir n'était plus supportable dans le sud-est du Nouveau-Brunswick. À la grandeur du pays, tout le monde sait que les changements à l'assurance-emploi ont fait mal aux gens.

Je vais rapidement donner un exemple. Une personne de ma circonscription qui était sur la Stratégie du poisson de fond m'a téléphoné. Elle avait plus de 850 heures. Elle a fait sa demande de prestations d'assurance-emploi, car les gens qui représentaient la Stratégie du poisson de fond disaient qu'elle pouvait se qualifier à l'assurance-emploi. On lui a dit que non, elle ne se qualifiait pas à l'assurance-emploi et qu'elle devait retourner à nouveau sur la Stratégie du poisson de fond. Imaginez-vous! Elle est allée en appel, mais elle a perdu.

Quand elle est retournée de nouveau à la Stratégie du poisson de fond, elle a été acceptée. Plus tard, quand elle a fait une demande d'assurance-emploi, avec le nombre d'heures dont elle avait supposément besoin, on lui a dit: «On a fait une erreur la première fois, on va te verser l'assurance-emploi.» Elle a donc reçu l'argent de l'assurance-emploi, plus celui de la Stratégie du poisson de fond, et en plus, elle avait travaillé.

Elle s'est retrouvée dans une autre échelle de Revenu Canada, ce qui fait qu'elle doit maintenant plus d'argent que normalement.

Elle a essayé de faire régler ce problème. Mais elle n'a jamais pu le faire régler par Revenu Canada, pas plus que par Développement des ressources humaines Canada ou par qui que ce soit d'autre. On a un système qui ne fonctionne plus.

[Traduction]

Mme Bonnie Brown (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, l'argent dont parle le député, il appartient aux Canadiens. Ceux-ci s'attendent que nous fassions des choix judicieux quant à l'utilisation de leur argent.

Certes, nous cherchons activement des moyens d'aider les chômeurs, mais nous voulons également investir dans les soins de santé, dans les compétences et l'enseignement supérieur, dans la création d'emplois et également donner un coup de main aux jeunes familles grâce à diverses mesures telles que la prestation fiscale pour enfants et les modifications apportées à la Loi de l'impôt sur le revenu.

Toujours au chapitre des dépenses judicieuses, les Canadiens souhaitent que nous fassions preuve de transparence quant à l'utilisation que nous faisions des deniers publics. Voilà pourquoi les fonds de l'assurance-emploi sont inscrits dans une colonne séparée de nos grands livres, conformément à la recommandation du vérificateur général.

Alors que la plupart des personnes qui ont récemment perdu leur emploi ou qui l'ont quitté pour des motifs valables sont admissibles au régime d'assurance-emploi, il faut tenir compte du grand nombre de Canadiens qui sont en quête d'un premier emploi ou qui ne travaillent pas depuis longtemps. À l'intention de ces Canadiens, l'assurance-emploi finance un certain nombre de programmes qui sont de nature à les aider à trouver du travail. Ainsi, 2,1 milliards de dollars sont consacrés aux personnes qui ont besoin d'une aide financière pour effectuer un retour sur le marché du travail. Un montant de 155 millions sert à aider les jeunes à acquérir de l'expérience. Chaque année, 100 millions de dollars sont versés aux collectivités qui affichent un taux de chômage élevé et 430 millions de dollars vont aux provinces afin d'aider les personnes handicapées à trouver du travail.

 

. 1835 + -

Certes, une gestion prudente et responsable des deniers publics est importante, mais pour cela il faut d'abord équilibrer le budget. Notre objectif, c'est d'aider les Canadiens à assurer leur avenir grâce à de bons emplois.

Je me dois de rappeler à mon collègue que nous avons le plus bas niveau de chômage au Canada depuis huit ans et que le déficit a été éliminé. J'ose croire que la plupart des Canadiens seront d'avis que nous sommes sur la bonne voie.

L'ÉCONOMIE

M. Jim Jones (Markham, PC): Monsieur le Président, le gouvernement libéral continue d'être le principal obstacle à la croissance dans ce pays. Aujourd'hui, nous avons eu la dernière preuve du ralentissement de l'économie canadienne. Selon un rapport fédéral interne, les hausses d'impôt sur le revenu ont entraîné une importante baisse du revenu après impôt des Canadiens. Les revenus stagnants des familles, une classe moyenne pauvre et l'augmentation de la pauvreté ont été identifiés comme conséquences de la politique d'impôts élevés pratiquée au Canada. Bref, le rapport conclut qu'en moyenne, les Canadiens sont devenus plus pauvres dans les années 90.

Ce dont on parle moins, c'est de l'impact négatif du programme de recouvrement des coûts du gouvernement libéral sur l'économie. Il n'y a rien de mal à avoir un programme de recouvrement des coûts fondé sur des frais d'utilisation raisonnables, une plus grande efficacité et un meilleur rendement. Cependant, certains signes plausibles laissent penser que le programme en vigueur est la toute dernière attaque du gouvernement contre le secteur privé.

Un récent rapport de la Business Coalition for Cost Recovery, qui représente les petites, moyennes et grandes entreprises qui emploient 2,2 millions de personnes et dont la contribution à l'économie nationale s'élève à 330 milliards de dollars, décrit en détail les effets dévastateurs qu'a eus le programme fédéral de recouvrement des coûts depuis 1994. Les droits réglementaires des fabricants canadiens ont subi une augmentation massive de 153 p. 100. Les frais d'utilisation facturés au titre du programme de recouvrement des coûts font partie des coûts de faire des affaires au Canada qui augmentent le plus rapidement. Les droits réglementaires de 1,6 milliard facturés aux entreprises durant l'exercice 1996-1997 ont réduit le PIB du Canada d'au moins 1,3 milliard de dollars et ont coûté au moins 23 000 emplois canadiens.

Les frais de recouvrement des coûts, selon la structure actuelle, nuisent à la productivité et à la compétitivité internationale des entreprises canadiennes. Malgré tous les problèmes que cause le recouvrement des coûts, le gouvernement ne gagne de 20 cents de recettes pour chaque dollar de frais imposé aux entreprises.

Comme j'ai remarqué à plusieurs reprises à la Chambre, au cours des derniers mois, si les libéraux se préoccupaient vraiment des questions de productivité et d'augmentation des investissements d'affaires, ils auraient profité de ce budget pour imposer un moratoire immédiate sur les nouveaux frais ou l'augmentation de ces frais, jusqu'à ce qu'une révision complète du programme de recouvrement des coûts ait été effectuée. Au lieu de cela, ils choisissent cette structure de recouvrement des coûts qui nuit indûment au secteur privé, celui-là même qui devrait se développer davantage pour nous assurer une économie plus forte.

Ces règlements et ces frais constituent une forme d'imposition cachée et il faut en réduire les excès pour assurer la croissance soutenue de l'économie canadienne. Je mets le gouvernement au défi de commencer à s'attaquer aux causes profondes de la faible productivité, comme la lourde réglementation du programme fédéral de recouvrement des coûts.

M. Walt Lastewka (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir répondre à la question du député concernant la productivité. Les éléments de preuve dont nous disposons montrent que les Canadiens peuvent améliorer leur productivité par rapport à leurs grands partenaires commerciaux.

Il importe d'améliorer notre productivité parce que, plus nous arriverons à combiner nos ressources pour produire des biens et des services, plus les Canadiens utiliseront ces ressources à des fins qu'ils jugent importantes pour améliorer leur niveau de vie, c'est-à-dire la santé, l'éducation et l'environnement. C'est pourquoi le gouvernement s'est engagé à bâtir une économie plus solide, plus innovatrice et plus productive.

Le budget de 1999 fait valoir cet engagement en continuant de miser sur les sources de recettes pour réaliser une croissance durable. Ce budget prévoit en outre de réaliser d'importants nouveaux investissements en partenariat avec le secteur privé afin de créer du savoir, de le diffuser et d'en faire le commerce. Entre autres, le budget prévoit d'accorder 200 millions de dollars à la Fondation canadienne pour l'innovation pour mettre en place une infrastructure pour la recherche, 60 millions de dollars sur trois ans pour réaliser des projets de démonstration dans le cadre du programme des collectivités branchées, de manière à élargir l'accès à l'autoroute de l'information, et 90 millions de dollars sur trois ans aux réseaux des centres d'excellence, afin d'appuyer les partenariats entre les chercheurs de niveau international du secteur privé.

 

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Ces investissements et d'autres vont contribuer à améliorer l'activité étrangère et, au bout du compte, notre standard de vie. Ils sont extrêmement importants à l'heure actuelle, mais ils ne constituent pas la seule solution.

Ensemble, nous devons nous attaquer aux éléments à facettes multiples du défi de la productivité que sont, par exemple, un investissement d'entreprise fort, des activités de recherche et de développement, la commercialisation de l'innovation, la promotion d'une meilleure formation dans les secteurs pertinents de la demande de la nouvelle économie fondée sur les connaissances, et l'amélioration de notre performance commerciale. Nous devons tous collaborer à améliorer la productivité à la Chambre, aux comités et dans nos circonscriptions.

[Français]

LA MINE BC DE BLACK LAKE

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Monsieur le Président, je désire dénoncer une injustice envers les ex-travailleurs de la Mine BC de Black Lake.

Lors de la fermeture de la mine d'amiante BC, le 1er novembre 1997, 300 travailleurs perdaient leur emploi, dont les deux tiers étaient âgés de plus de 52 ans.

Le ministre du Développement des ressources humaines a agi très timidement pour soutenir les mineurs d'amiante du Québec avec quelque quatre millions de dollars. À l'inverse, pour les mineurs du Cap-Breton en Nouvelle-Écosse, le même ministre trouve des sommes importantes.

D'ailleurs, le ministre de la Défense nationale, remplaçant le ministre du Développement des ressources humaines, a répondu à ma question sur le sujet, posée le 19 mars 1999, en ces termes:

    Dans ce cas, un programme d'indemnisation des employés représentant 111 millions de dollars a été offert pour assurer aux travailleurs des indemnités de départ équitables et la possibilité de prendre une retraite anticipée.

À cette généreuse indemnité de 111 millions de dollars dont je viens de parler s'ajoutent 148 millions de dollars de deux autres ministères pour accélérer, semble-t-il, l'expansion économique du Cap-Breton.

Je dénonce donc cette politique de deux poids, deux mesures. Les gars de Black Lake se sentent injustement traités par le ministre du Développement des ressources humaines. La région de Thetford se sent injustement traitée par le gouvernement libéral du Canada. Le Québec ne retire pas sa part.

Aux 111 millions de dollars s'ajoutent 68 millions de dollars du développement économique et 80 millions de dollars de l'Agence de promotion économique du Canada, ce qui totalise 259 millions de dollars pour les mineurs de la Nouvelle-Écosse et à peine quatre millions de dollars pour les gars de Black Lake au Québec.

Voilà l'équité libérale de ce gouvernement. Quatre millions de dollars pour le Québec, 259 millions de dollars pour la Nouvelle-Écosse.

J'invite le ministre du Développement des ressources humaines à corriger cette injustice en ouvrant le dossier des gars de la Mine BC. Tous au Canada doivent être traités équitablement. Pourquoi 259 millions de dollars pour les travailleurs dans les mines de charbon de Nouvelle-Écosse et seulement quatre millions pour les gars de l'amiante de la Mine BC de Black Lake? Voilà l'iniquité.

La secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, à une question de mon collègue d'Acadie—Bathurst tout à l'heure, disait que l'argent des surplus de la caisse de l'assurance-emploi, qui dépassent les 20 milliards de dollars, appartenait à tout le monde, pas seulement aux millionnaires. Si cet argent appartient à tout le monde, une bonne partie de ces 20 milliards de dollars devrait revenir aux ex-travailleurs de la Mine BC. Voilà...

Le vice-président: Je regrette d'interrompre l'honorable député.

 

. 1845 + -

[Traduction]

Mme Bonnie Brown (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement partage l'intérêt du député pour les travailleurs touchés par la fermeture de la mine de la British Canadian, à Black Lake, au Québec.

Il compare la situation de ces travailleurs à celle des travailleurs de la mine Phalen, en Nouvelle-Écosse. Ces deux groupes de travailleurs n'ont pas vécu la même situation, mais le gouvernement les a traités avec la même justice et la même considération.

Voici les mesures que nous avons prises pour venir en aide aux 300 mineurs de la BC, au Québec. D'abord, nous avons réagi rapidement et nous avons fourni en tout quelque 4 millions de dollars.

Dès septembre 1997, près de 3 millions de dollars ont été mis de côté pour aider les 300 travailleurs à réintégrer rapidement le marché du travail, et cette aide semble avoir porté fruit. En effet, près de 70 travailleurs ont trouvé du travail, tandis que une soixantaine d'autres suivent des cours de formation et de perfectionnement des compétences qui les aideront à trouver un travail différent, et que six autres tentent de lancer leur propre entreprise. Nous savons que ces gens veulent travailler et nous espérons que notre intervention continuera de les aider.

De plus, en juin 1998, le gouvernement a aussi annoncé un investissement d'un million de dollars pour aider les travailleurs âgés de 55 à 64 ans. Le gouvernement du Québec a donné son aval au programme et l'a mis en oeuvre à l'intention des travailleurs âgés de la mine BC l'automne dernier.

Des rencontres ont eu lieu avec d'anciens travailleurs, des représentants d'Emploi Québec et des fonctionnaires fédéraux afin d'échanger de l'information et d'accepter des demandes.

Je suis heureuse de signaler que des travailleurs admissibles commenceront à toucher dans les prochains mois des prestations de retraite anticipée dont le coût est partagé par les deux gouvernements. Le gouvernement continuera d'offrir un soutien à tous les travailleurs canadiens dans le cadre de programmes destinés à les aider à participer pleinement au marché du travail au Canada.

Le vice-président: La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 46.)