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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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36e Législature, 1ère Session


HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 42

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 2 décembre 1997

VAFFAIRES COURANTES

. 1005

VRÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
VM. Peter Adams
VLE COMMISSAIRE À L'INFORMATION
VL'hon. Don Boudria
VMotion
VLOI DE 1997 SUR LE MAINTIEN DES SERVICES POSTAUX
VL'hon. Don Boudria
VMotion

. 1010

VPÉTITIONS
VLe drapeau canadien
VM. Peter MacKay
VLes armes nucléaires
VM. John O'Reilly
VLa famille
VM. Paul Szabo
VLe revenu de retraite
VMme Judy Wasylycia-Leis
VQUESTIONS AU FEUILLETON
VM. Peter Adams
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLOI DE 1997 SUR LE MAINTIEN DES SERVICES POSTAUX
VProjet de loi C-24. Deuxième lecture
VL'hon. Lawrence MacAulay

. 1015

. 1020

. 1025

VM. Jim Gouk

. 1030

. 1035

. 1040

. 1045

. 1050

. 1055

VM. Michel Gauthier

. 1100

. 1105

. 1110

. 1115

VM. Pat Martin

. 1120

. 1125

. 1130

. 1135

VM. Paul Szabo

. 1140

VM. Jim Gouk
VM. Pat Martin

. 1145

VM. Gilles Bernier

. 1150

. 1155

. 1200

. 1205

VM. Jim Gouk
VM. Yvon Godin

. 1210

VM. Jerry Pickard

. 1215

VM. Jerry Pickard

. 1220

. 1225

VM. Monte Solberg

. 1230

VMme Pierrette Venne
VM. Jerry Pickard
VM. Steve Mahoney

. 1235

. 1240

VM. Ghislain Fournier

. 1245

VM. Dick Harris
VM. Randy White

. 1250

. 1255

. 1300

. 1305

VM. Lynn Myers

. 1310

VM. Ghislain Lebel

. 1315

VM. Sarkis Assadourian
VMme Pierrette Venne

. 1320

VMme Sarmite Bulte

. 1325

VM. Jim Gouk

. 1330

VMme Sarmite Bulte
VM. Yvon Godin
VM. Guy St-Julien

. 1335

. 1340

VMme Pierrette Venne
VM. Yvon Godin

. 1345

VMme Jocelyne Girard-Bujold

. 1350

. 1355

VLE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL DU CANADA DE 1997
VLe Président
VDÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
VL'ENVIRONNEMENT
VM. Joe Jordan
VLE MINISTÈRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS
VM. Chuck Strahl
VLE CENTENAIRE DE LA COMMUNAUTÉ SIKH CANADIENNE
VM. Sarkis Assadourian

. 1400

VLES MINES ANTIPERSONNEL
VM. Daniel Turp
VLA FRANCOFÊTE
VMme Claudette Bradshaw
VL'ENVIRONNEMENT
VM. John Finlay
VLA CRÉDIBILITÉ
VM. Gurmant Grewal
VLE DÉCÈS DE M. MICHEL BÉLANGER
VM. Nick Discepola

. 1405

VLA MINE WESTRAY
VM. Darrel Stinson
VLES MINES ANTIPERSONNEL
VL'hon. Sheila Finestone
VLE PARTI QUÉBÉCOIS
VM. Denis Coderre
VL'ENVIRONNEMENT
VM. Bill Blaikie
VLE PARTI QUÉBÉCOIS
VM. Denis Paradis

. 1410

VLE DÉCÈS DE M. MICHEL BÉLANGER
VMme Hélène Alarie
VL'ÉDUCATION
VM. Norman Doyle
VL'INDUSTRIE DE L'AUTOMOBILE
VM. Gurbax Singh Malhi
VLE RAPPORT KREVER
VM. Greg Thompson
VLE NÉPOTISME
VM. Chuck Strahl

. 1415

VQUESTIONS ORALES
VL'ENVIRONNEMENT
VM. Preston Manning
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Preston Manning
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Preston Manning
VLe très hon. Jean Chrétien

. 1420

VMme Deborah Grey
VLe très hon. Jean Chrétien
VMme Deborah Grey
VLe très hon. Jean Chrétien
VLA POLITIQUE LINGUISTIQUE
VM. Louis Plamondon
VL'hon. Sheila Copps
VM. Louis Plamondon
VL'hon. Sheila Copps

. 1425

VM. Pierre de Savoye
VL'hon. Sheila Copps
VM. Pierre de Savoye
VL'hon. Sheila Copps
VLE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL
VMme Alexa McDonough
VL'hon. John Manley
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Fred Mifflin
VL'ENVIRONNEMENT
VL'hon. Jean J. Charest

. 1430

VL'hon. Christine Stewart
VL'hon. Jean J. Charest
VL'hon. Ralph E. Goodale
VLA JUSTICE
VM. Paul Forseth
VL'hon. Anne McLellan
VM. Paul Forseth
VL'hon. Anne McLellan
VL'ENVIRONNEMENT
VM. Odina Desrochers

. 1435

VL'hon. Christine Stewart
VM. Odina Desrochers
VL'hon. Christine Stewart
VTED WEATHERILL
VM. John Williams
VL'hon. Lawrence MacAulay
VM. John Williams
VL'hon. Lawrence MacAulay
VL'INDUSTRIE DE L'AMIANTE
VMme Suzanne Tremblay
VL'hon. Sergio Marchi

. 1440

VMme Suzanne Tremblay
VL'hon. Sergio Marchi
VLA COMMISSION D'APPEL DE L'IMMIGRATION
VM. John Reynolds
VL'hon. Lucienne Robillard
VM. John Reynolds
VL'hon. Lucienne Robillard
VLA STRATÉGIE NATIONALE SUR LE SIDA
VM. Réal Ménard
VL'hon. Allan Rock
VTFO
VM. Mauril Bélanger

. 1445

VL'hon. Sheila Copps
VLES TRANSPORTS
VM. Lee Morrison
VL'hon. David M. Collenette
VM. Lee Morrison
VL'hon. David M. Collenette
VLES PÊCHES
VM. Svend J. Robinson
VL'hon. David Anderson
VM. Svend J. Robinson

. 1450

VL'hon. David Anderson
VLA MINE WESTRAY
VM. Peter MacKay
VL'hon. Anne McLellan
VM. Peter MacKay
VL'hon. Lawrence MacAulay
VLES TRANSPORTS
VM. Reg Alcock
VL'hon. David M. Collenette
VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VM. Derrek Konrad
VL'hon. Jane Stewart
VLA STRATÉGIE DU POISSON DE FOND DE L'ATLANTIQUE
VM. Yves Rocheleau

. 1455

VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VLA MINE WESTRAY
VM. Gordon Earle
VL'hon. John Manley
VLES EXPORTATIONS DE SUCRE
VMme Elsie Wayne
VL'hon. Sergio Marchi
VL'AGRICULTURE
VM. Paul Bonwick
VL'hon. Lyle Vanclief
VHAÏTI
VM. Bob Mills

. 1500

VL'hon. Lloyd Axworthy
VPRÉSENCE À LA TRIBUNE
VLe Président
VLE REGRETTÉ JACK PIKERSGILL
VL'hon. Fred Mifflin

. 1505

VMme Deborah Grey

. 1510

VMme Madeleine Dalphond-Guiral
VL'hon. Lorne Nystrom

. 1515

VL'hon. Jean J. Charest
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLOI DE 1997 SUR LE MAINTIEN DES SERVICES POSTAUX
VProjet de loi C-24. Deuxième lecture

. 1520

VM. Réjean Lefebvre

. 1525

VM. Howard Hilstrom

. 1530

VL'hon. Alfonso Gagliano

. 1535

. 1540

. 1545

VM. Ken Epp
VM. Réjean Lefebvre

. 1550

VM. Pat Martin
VM. Jean Dubé

. 1555

VM. Bill Blaikie

. 1600

. 1630

(Vote 48)

. 1645

VM. Bob Kilger
VM. Louis Plamondon
VMotion no 1

. 1650

. 1655

VL'hon. Alfonso Gagliano

. 1700

VM. Paul Crête

. 1705

VM. Jim Gouk
VM. John Bryden
VL'hon. Lawrence MacAulay
VM. Réal Ménard

. 1710

VReport du vote sur la motion no 1
VM. Jim Gouk
V(Motion no 2)
VM. Dale Johnston
VM. Pat Martin

. 1715

VM. Paul Crête

. 1720

VM. Jim Gouk
VM. Pat Martin

. 1725

VReport du vote sur la motion no 2
VM. Jim Gouk
VM. Paul Crête
VM. Pat Martin
VReport du vote sur la motion no 3
VM. Pat Martin
VM. Réjean Lefebvre

. 1730

. 1735

VM. Réal Ménard
VM. Louis Plamondon
VL'hon. Lawrence MacAulay

. 1740

VM. Paul Crête
VL'hon. Alfonso Gagliano

. 1745

VM. Louis Plamondon
VM. Paul Crête
VM. Nelson Riis

. 1750

VL'hon. Don Boudria
V(Report du vote sur l'article 9 modifié)

. 1755

VM. Jim Gouk
VM. Paul Crête
VMotion no 4
VM. Jim Gouk

. 1800

VM. Louis Plamondon

. 1805

VM. Denis Coderre
VM. Yvon Godin
VM. Dale Johnston
VM. Réal Ménard

. 1810

VL'hon. Lawrence MacAulay
VM. Paul Crête
VM. Nelson Riis
VM. Svend J. Robinson

. 1815

VReport du vote sur la motion no 4
VM. Pat Martin
VM. Louis Plamondon

. 1820

VM. Jim Gouk
VM. Guy St-Julien

. 1825

VM. Paul Crête
VM. Denis Coderre

. 1830

VL'hon. Don Boudria
VReport du vote sur l'amendement
VM. Dale Johnston
VAmendement
VReport du vote sur l'amendement
VM. Andrew Telegdi
VAmendement
VReport du vote sur l'amendement
VM. Andrew Telegdi
VReport du vote sur l'article 13

. 1835

VM. Paul Crête
VMotion no 5
V(Report du vote sur la motion no 5.)
VM. Jim Gouk
VReport du vote sur l'article 21
VL'hon. Don Boudria
VM. André Bachand
VAmendement à l'article 21
VReport du vote sur l'amendement
VM. André Bachand
VAmendement à l'article 22
VReport du vote sur l'amendement
VM. André Bachand
VAmendement à l'article 23
VReport du vote sur l'amendement

. 1855

. 1905

VM. Jim Gouk

. 1910

VRejet de l'amendement

. 1915

VM. Bob Kilger

. 1920

VMotion d'approbation
VL'hon. Lawrence MacAulay

. 1925

(Vote 49)

VTroisième lecture
VM. Chuck Strahl

. 1930

. 1935

. 1940

VM. Dale Johnston

. 1945

. 1950

VM. Dale Johnston

. 1955

. 2000

. 2005

VM. Yves Rocheleau

. 2010

. 2015

VMme Francine Lalonde

. 2020

. 2025

VM. Paul Mercier

. 2030

VMme Libby Davies

. 2035

. 2040

VM. Bill Blaikie

. 2045

. 2050

VM. Mark Muise

. 2055

VM. Louis Plamondon

. 2100

VM. Jean-Guy Chrétien

. 2105

VM. André Bachand

. 2110

VM. Louis Plamondon

. 2115

VM. Andrew Telegdi
VM. John Bryden

. 2120

VM. Denis Coderre

. 2125

VM. Paul Crête

. 2130

VM. Yvon Godin
VM. Louis Plamondon

. 2135

VM. Lynn Myers

. 2140

VM. Peter Stoffer
VM. Jim Abbott
VM. Michel Guimond
VM. John Herron

. 2145

VM. Yvon Godin
VMme Deborah Grey

. 2150

. 2155

VM. John Herron

. 2200

. 2225

(Vote 50)

VAdoption de la motion
VL'hon. Don Boudria

(Version officielle)

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 42


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 2 décembre 1997

La séance est ouverte à 10 heures.



Prière


AFFAIRES COURANTES

 

. 1005 +

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à deux pétitions.

*  *  *

[Français]

LE COMMISSAIRE À L'INFORMATION

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je crois qu'il y aurait consentement unanime pour la motion suivante, à être adoptée sans débat. Je propose:  

    Que, conformément au paragraphe 54(3) de la Loi visant à compléter la législation canadienne en matière d'accès à l'information relevant de l'administration fédérale, chapitre A-1 des Lois révisées du Canada (1985), cette Chambre approuve la reconduction de la nomination de M. John Grace, à titre de commissaire à l'information, jusqu'au 30 avril 1998.

(La motion est adoptée.)

*  *  *

[Traduction]

LOI DE 1997 SUR LE MAINTIEN DES SERVICES POSTAUX

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je propose:  

    Que, relativement au projet de loi C-24, Loi prévoyant la reprise et le maintien des services postaux:

    1. Au plus tard à 16 heures aujourd'hui, les travaux dont la Chambre est saisie soient interrompus et toute question nécessaire pour disposer du projet de loi à l'étape de la deuxième lecture soit mise aux voix sans autre débat;

    2. Au début de l'étape de l'étude en Comité plénier, tout député qui désire proposer un ou plusieurs amendements les dépose et s'ils sont jugés recevables, ces amendements soient réputés avoir été déposés au moment opportun des délibérations du Comité, sous réserve qu'au plus tard à 18h30 aujourd'hui les travaux dont le Comité est saisi soient interrompus et que toute question nécessaire pour disposer du projet de loi à l'étape de l'étude en Comité plénier soit mise aux voix sans autre débat;

    3. Au plus tard à 22h00 aujourd'hui, tous les travaux dont la Chambre est saisie soient interrompus et toute question nécessaire pour disposer du projet de loi à l'étape de la troisième lecture soit mise aux voix sans autre débat.

(La motion est adoptée.)

*  *  *

 

. 1010 + -

PÉTITIONS

LE DRAPEAU CANADIEN

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter aujourd'hui, conformément à l'article 36 du Règlement, une pétition venant des électeurs de Pictou—Antigonish—Guysborough.

Les signataires demandent au Parlement d'adopter un serment officiel d'allégeance au drapeau canadien et de consulter les Canadiens pour en formuler la teneur.

LES ARMES NUCLÉAIRES

M. John O'Reilly (Victoria—Haliburton, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter une pétition venant de gens de Victoria—Haliburton, qui demandent au gouvernement et au Parlement du Canada d'appuyer l'amorce immédiate, et la conclusion pour l'an 2000, d'un processus menant à la convention internationale qui établira un échéancier exécutoire pour l'abolition de toutes les armes nucléaires.

LA FAMILLE

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre aujourd'hui une pétition signée par de nombreux Canadiens, dont des gens de ma circonscription, Mississauga-Sud.

Les pétitionnaires désirent attirer l'attention de la Chambre sur le fait que la gestion d'un foyer familial et les soins à apporter aux enfants d'âge préscolaire constituent une profession respectable qui n'a pas été reconnue à sa juste valeur au sein de notre société.

Les pétitionnaires désirent aussi exprimer leur accord avec le rapport du Forum national sur la santé, selon lequel la Loi de l'impôt sur le revenu ne tient pas compte de combien il en coûte, pour élever des enfants, aux parents qui choisissent de rester à la maison et de prendre soin de leurs enfants d'âge préscolaire.

Les pétitionnaires demandent donc au Parlement de prendre des mesures afin d'aider les familles où un parent choisit de rester à la maison et de prendre soin des enfants d'âge préscolaire.

LE REVENU DE RETRAITE

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, je suis heureuse et honorée de présenter, au nom de mes électeurs de Winnipeg-Centre-Nord et d'autres Manitobains, une pétition conforme à l'article 36 du Règlement et témoignant de leurs inquiétudes au sujet des modifications proposées au régime de retraite du Canada.

Les pétitionnaires demandent au gouvernement d'annuler le projet de loi C-2 et de mettre en place une commission d'examen des régimes garantissant un revenu de retraite au Canada, de façon à concevoir un système qui garantira que les revenus de retraite seront satisfaisants demain et à l'avenir.

*  *  *

[Français]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions soient réservées.

Le vice-président: Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI DE 1997 SUR LE MAINTIEN DES SERVICES POSTAUX

 

L'hon. Lawrence MacAulay (ministre du Travail, Lib.) propose: Que le projet de loi C-24, Loi prévoyant la reprise et le maintien des services postaux, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité plénier.

—Monsieur le Président, je prends la parole pour parler du projet de loi C-24, la Loi de 1997 sur le maintien des services postaux, une mesure destinée à obtenir le rétablissement des services postaux au Canada.

Les députés ne sont pas sans savoir que l'arrêt de travail a commencé à la Société canadienne des postes le 19 novembre, après une longue période de négociations. En dépit des efforts des parties, elles n'ont pas pu parvenir à une résolution de leurs différences.

Les députés se souviendront que j'ai dit à plusieurs occasions, à la Chambre, qu'il fallait laisser au processus de négociation collective, prévu à la partie I du Code canadien du travail, le temps de fonctionner.

 

. 1015 + -

Je crois sincèrement au principe démocratique de la libre négociation collective. Naturellement, je suis déçu que les parties aient refusé d'assumer leurs responsabilités dans le cadre de ce processus et qu'elles ne soient pas parvenues à un règlement. Je suis aussi conscient des torts que cette grève cause aux entreprises canadiennes ainsi qu'aux organismes de charité. Toutefois, je ne regrette pas d'avoir fourni aux parties toutes les possibilités pour résoudre leur différend elles-mêmes.

Heureusement, les cas d'intervention comme celle-ci sont relativement rares au Canada. La grande majorité des négociations collectives, plus de 90 p. 100, se règlent sans arrêt de travail, grève ou lock-out. Voilà qui témoigne de la confiance que les gouvernements, à quelque palier que ce soit, mettent dans le régime de négociation collective.

Le différend qui est à l'origine de la mesure législative proposée a trait aux négociations entreprises en vue du renouvellement de la convention collective conclue entre la Société canadienne des postes et le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, qui représente 45 000 membres. La précédente convention collective, qui avait été conclue par voie de négociations directes, a expiré le 31 juillet de cette année.

Après six semaines de négociations directes, le syndicat a signifié un avis de différend en vertu de l'article 71 du Code canadien du travail. Même si le syndicat a exprimé le souhait que mon ministère n'intervienne pas, j'ai cru qu'il serait dans l'intérêt des deux parties de nommer un conciliateur afin de faciliter les délibérations, ce qui fut fait le 20 juin 1997.

Les parties avaient décidé de poursuivre leurs négociations avant que le négociateur n'entre en scène le 19 août. Il y a eu plusieurs séances, puis le syndicat a demandé au conciliateur de me faire son rapport, ce qui mettait fin à sa participation. Le 18 décembre, le STTP a rejeté l'offre globale que l'employeur lui avait faite trois jours plus tôt.

Après avoir examiné à fond la situation, j'ai décidé d'aider les parties dans le cadre d'une seconde étape du processus de conciliation en nommant, le 7 octobre, M. Marc Gravel, une tierce partie neutre fort respectée, comme commissaire-conciliateur. M. Gravel a tenu des réunions le 14 octobre et a continué d'explorer avec les parties diverses possibilités de règlement jusqu'à la fin du mois.

Dans le rapport qu'il m'a remis, le commissaire-conciliateur mentionne qu'il n'a pas réussi à aider les parties à régler leurs différends. À son avis, il faudrait la menace d'une grève ou d'un lock-out pour que les parties arrivent à s'entendre. Il a également recommandé qu'on exhorte les parties à négocier rapidement et de bonne foi et qu'ils puissent avoir recours au Service fédéral de médiation et de conciliation. J'ai communiqué le rapport du commissaire-conciliateur aux parties le 10 novembre, et les parties ont acquis le droit de déclencher une grève ou d'imposer un lock-out à minuit une minute le 18 novembre.

Dans la semaine qui a suivi la communication du rapport du commissaire-conciliateur, les parties se sont réunies à plusieurs reprises dans le cadre de négociations directes. Ces réunions se sont poursuivies à la suite du déclenchement d'une grève dans tout le pays par le STTP, le 19 novembre.

Après m'être entretenu avec les deux parties et avoir obtenu d'elles la garantie qu'elles désiraient encore un règlement négocié, j'ai nommé le directeur général du Service fédéral de médiation et de conciliation, M. Warren Edmondson, en tant que médiateur. Je le répète, le commissaire-conciliateur avait également souscrit à cette mesure dans son rapport.

La réputation de M. Edmondson en tant que spécialiste du règlement des différends est bien connue. Sa présence a donné aux parties une occasion de montrer qu'elles entendaient bien en arriver à une nouvelle convention collective.

 

. 1020 + -

Malheureusement, aucune des deux parties n'a fait preuve de la souplesse nécessaire pour parvenir à un règlement du différend. Après environ quatre jours de négociations intenses, le médiateur a déterminé qu'il y avait peu de chances de parvenir à un règlement.

Après m'être entretenu avec M. Edmondson vendredi, j'ai décidé que le moment était venu de mettre un terme à cet arrêt de travail et de rétablir le service postal. C'est pour cette raison que je présente aujourd'hui à la Chambre ce projet de loi qui prévoit la reprise des services postaux et un mécanisme de règlement du différend pour régler les questions en souffrance.

Le projet de loi C-24 vise essentiellement deux choses: la reprise des services postaux réguliers et la nomination d'un médiateur-arbitre pour régler les questions qui divisent encore l'employeur et le syndicat, à part quelques exceptions mineures.

Le projet de loi va mettre en oeuvre une nouvelle convention collective d'une durée de trois ans qui expirera le 31 juillet de l'an 2000. Il prévoit une augmentation de salaire de 1,5 p. 100 à compter du 1er février 1998, une autre augmentation de 1,75 p. 100 entrant en vigueur le 1er février 1999 et une dernière augmentation de 1,9 p. 100 à compter du 1er février de l'an 2000. Cette durée de trois ans correspond à ce qui se fait dans le cas de la plupart des conventions collectives signées de nos jours. Les augmentations de salaire ne sont pas déraisonnables étant donné le niveau actuel des règlements dans le secteur public.

Les questions en suspens seront renvoyées au médiateur-arbitre, qui sera guidé par la nécessité pour la société de se doter d'objectifs financiers et liés au service, objectifs fixés par le gouvernement, tout en tenant compte de la nécessité de bonnes relations patronales-syndicales entre l'employeur et le syndicat.

Les principes directeurs contenus dans le projet de loi visent à faire en sorte que le médiateur-arbitre reconnaisse les directives que le gouvernement du Canada a fournies à l'employeur en ce qui concerne le rendement financier et les normes de service, tout en mettant dans la balance ces questions et l'importance d'entretenir de saines relations en milieu de travail. La plupart des arbitres chevronnés prennent ces facteurs en considération et cet article est inséré dans le projet de loi pour plus de certitude.

On peut se demander pourquoi le projet de loi prévoit le recours à un médiateur-arbitre, étant donné que la médiation a déjà été offerte aux parties dans un effort pour régler le conflit. Il y a essentiellement deux raisons à cela. La première, c'est qu'un grand nombre de questions complexes opposent encore les deux parties. Ensuite, la démarche prévue dans le projet de loi offre aux parties une dernière possibilité de régler ces questions elles-mêmes à la table des négociations.

Comme je l'ai dit, le syndicat et l'employeur restent d'avis qu'ils préféreraient parvenir eux-mêmes à un règlement. Les deux parties sont conscientes que, si elles ne parviennent pas à s'entendre à ce stade-ci, la question sera réglée par arbitrage. Quiconque connaît les relations de travail comprend que la meilleure convention collective est celle sur laquelle les parties peuvent s'entendre par voie de négociation, au lieu d'une convention imposée par une tierce partie.

Je suis désolé de devoir prendre cette mesure, surtout après avoir offert aux parties toute l'aide dont je disposais en tant que ministre du Travail. Je demeure convaincu que le régime de négociation collective peut fonctionner et fonctionne pour la majorité des employeurs et des syndicats canadiens. Toutefois, les parties n'ont pu faire preuve de la souplesse nécessaire pour que le processus leur donne satisfaction.

En nommant le médiateur, j'ai mentionné qu'il suivrait de près le processus de médiation et évaluerait la situation à mesure qu'elle avancerait. Nous avons fait cela, mais nous jugeons que le temps est venu d'agir pour mettre fin à cet arrêt de travail qui commence à nuire aux entreprises, aux organisations de bienfaisance et à l'ensemble de la population du Canada.

 

. 1025 + -

Nous ferons sûrement l'objet de critiques venant de divers milieux, notamment du mouvement syndical parce que nous intervenons dans le processus de négociation en légiférant, de la communauté des affaires et de divers segments de la population qui nous reprocheront de ne pas être intervenus plus tôt dans le conflit. Mais je crois fermement que cette intervention correspond à ce que demande la majorité des Canadiens.

Nous avons donné au processus de négociation collective, qui est un élément essentiel de notre société démocratique, la chance de fonctionner sans qu'il y ait d'interférence. Le Code canadien du travail accorde aux parties le droit à la grève ou au lock-out. Une intervention hâtive pour retirer ce droit serait contraire à l'esprit de la loi et détournerait les parties de toute tentative sérieuse pour régler leurs différends.

Cependant, quand il est devenu évident que les parties ne pouvaient pas travailler efficacement en suivant le processus, nous avons décidé d'agir pour protéger les intérêts des Canadiens. J'invite les députés à appuyer le projet de loi et à redonner au Canada ses services postaux.

M. Jim Gouk (West Kootenay—Okanagan, Réf.): Monsieur le Président, je commencerai tout d'abord par dire très clairement que le Parti réformiste est favorable à l'adoption d'une mesure ordonnant le retour au travail pour permettre la reprise des services postaux pour les 30 millions de Canadiens qui en dépendent. En adoptant ce projet de loi, nous nous trouvons essentiellement à nous accommoder au mieux d'une mauvaise situation au moyen d'une mesure imparfaite.

Avant d'aborder le thème principal de mon intervention, je voudrais faire deux ou trois commentaires sur l'intervention que le ministre du Travail vient de faire. Il a dit notamment qu'il ne regrette pas du tout de laisser libre cours à ce processus, et il le dit en reconnaissant le tort économique et personnel incroyable que cela a causé aux Canadiens. C'est vraiment honteux. Il devrait avoir honte de dire que le tort que cette grève et ce processus ont causé aux Canadiens ne lui inspire aucun regret.

Il a également parlé avec beaucoup d'éloquence, comme il l'a fait toujours fait avant que nous finissions par tenir le débat actuel, pour nous assurer qu'il fallait laisser fonctionner le processus de négociation collective. Le pourcentage de succès de ce processus est aujourd'hui de 90 p. 100 alors que le ministre se plaisait à dire auparavant que le taux de règlement était de 94 p. 100 sans arrêt de travail. Or, il s'agit en fait de la quatrième grève à la Société canadienne des postes depuis 10 ans.

Il y avait eu deux grèves en 1987 et, pour être juste, disons que cela en aurait fait une si les deux syndicats avaient été fusionnés comme ils le sont maintenant. Nous avons eu présumément un règlement en 1989, puis nous avons connu une autre grève en 1991. Nous avons ensuite joui d'un peu de paix sociale pour finir par connaître le conflit de 1997.

Que le ministre se targue d'un taux de règlement de 90 p. 100 ou de 94 p. 100 sans grève, cela n'est pas le cas à la Société canadienne des postes, et il le savait en affrontant le conflit actuel. Nous n'avons cessé de réclamer que le gouvernement fournisse au syndicat et à la Société canadienne des postes un mécanisme de règlement des conflit sans recours à la grève ni au lock-out. Le Parti réformiste a toujours eu pour position qu'il faudrait établir une solution sans grève ni lock-out pour tous les conflits contractuels aux postes. Notre première préoccupation a toujours été et demeure le droit des Canadiens à un service postal ininterrompu.

Pendant la période des questions, les libéraux aiment à faire de belles phrases. Ainsi, le ministre des Finances a fait grand cas de la réduction de 10c. des cotisations à l'assurance-chômage et de ce que cela va coûter au gouvernement. Il revient sans cesse à cet énorme sacrifice consenti par le gouvernement, dont les recettes vont diminuer de 1,4 milliard de dollars.

Depuis le début de cette grève, les entreprises canadiennes ont dû absorber des pertes de 3 milliards, et elles continuent de perdre 200 millions par jour. Avant que le projet de loi ne soit adopté et que tout le service ne se remette en route, elles perdront encore au moins 1 milliard. Les coûts seront donc de 4 milliards pour l'économie canadienne. Et le gouvernement a le culot de se vanter de l'énorme sacrifice qu'il fait en réduisant ses recettes de 1,4 milliard par une baisse excessivement généreuse des cotisations à l'assurance-chômage.

 

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Avant même le début de la grève, uniquement à cause de la menace de grève, un millier de personnes ont été mises à pied dans les entreprises tributaires du service postal. C'est à ce moment-là que le gouvernement aurait dû ouvrir les yeux, prendre conscience du problème et reconnaître qu'il lui incombait d'intervenir. Malheureusement, il a complètement négligé sa responsabilité envers les Canadiens.

Depuis le début de la grève, plus de 10 000 personnes ont été mises à pied, selon les estimations. J'espère que le ministre qui s'occupe de l'emploi tiendra compte de ces chiffres quand il se vantera du merveilleux bilan du gouvernement en matière de création d'emplois, car son inertie a fait perdre leur emploi à bien des travailleurs juste à la veille de Noël.

En cette période de l'année la plus importante dans le secteur de la vente au détail, le conflit commence à être ressenti par les entreprises qui ne comptent même pas sur la distribution du courrier, à cause de la baisse des activités et des mises à pied que cela entraîne. De nombreuses oeuvres de bienfaisance souffrent également du conflit, puisqu'elles profitent généralement de cette période de l'année pour recueillir jusqu'à 80 p. 100 de leur budget annuel. Une bonne partie de leur période la plus profitable est écoulée et ne reviendra jamais. Les effets du conflit de travail sur les oeuvres de bienfaisance seulement se feront sentir l'an prochain, pendant toute l'année, lorsque des gens dans le besoin s'adresseront à ces organismes pour obtenir des services. Les gens s'apercevront que les organismes n'ont pas d'argent pour les aider. Pourquoi? Parce que le gouvernement a refusé d'agir rapidement pour défendre les intérêts des Canadiens.

Aucune des statistiques mentionnées ne tient compte des épreuves et de la souffrance que vivent bien des gens qui attendent leur chèque d'assurance-emploi, leur chèque d'aide sociale, leur pension alimentaire ou d'autres formes de revenu, qu'ils reçoivent habituellement par la poste. Des dispositions ont été prises pour certaines personnes, d'autres prestataires ont été oubliés et bien des gens se sont retrouvés dans une situation désespérée. Nous avons reçu des appels de tous les coins du pays, de gens absolument désemparés et complètement abattus. Ils n'ont pu toucher leur chèque de l'organisme qui devait le leur remettre. J'ai décrit à la Chambre le cas d'une femme de l'île de Vancouver, une jeune mère de deux enfants qui touche des prestations d'assurance-chômage. Son chèque a déjà une semaine de retard.

Avec le grand programme gouvernemental qui devait s'occuper des gens et distribuer les chèques, et bien le chèque s'est perdu dans le fouillis des postes. La dame n'avait plus de quoi nourrir ses enfants. Le gouvernement ne se préoccupe peut-être pas du sort de ces gens. Je peux vous dire que nous nous en soucions.

Nous devons agir dans l'intérêt de ces gens et de l'ensemble des citoyens du Canada pour veiller à ce que cette situation ne se reproduise pas à intervalles réguliers. Nous devons trouver aux grèves et aux lock-out une solution de rechange qui soit juste envers toutes les parties concernées et juste envers les Canadiens qui comptent sur les services postaux. Le projet de loi ministériel ne prévoit rien de tel.

La présente loi de retour au travail n'est rien de plus qu'un sparadrap sur une plaie suppurante et ne prévoit aucune des mesures réelles qu'exige une solution à long terme. Le gouvernement a une grande part de responsabilité dans ce conflit de travail. Il n'a offert aucune solution de rechange raisonnable à la grève. Il a sciemment provoqué le SPC tout au long des négociations. Le STTP est malheureusement tombé dans le panneau en s'en prenant aux entreprises postales et en encourageant la désobéissance civile. Je me réjouis de constater qu'il est un peu revenu sur sa position là-dessus, du moins pour le moment. Il mérite des félicitations pour avoir su déjouer le stratagème du gouvernement.

À cet égard, les dirigeants du syndicat s'en prennent beaucoup à des organisations comme l'Association canadienne du marketing direct et la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Ces organisations agissent comme se doit au nom de leurs membres. Les syndicalistes du STTP estiment-ils que ces gens ne devraient pas pouvoir parler du tort qui est causé à leurs membres?

Les dirigeants du syndicat des postiers ne devraient pas oublier que les entreprises dont ils critiquent le comportement au cours de ce conflit ne sont pas des entités isolées. Elles ont des employés, fort probablement syndiqués. Lorsqu'on s'en prend à ces entreprises, on s'en prend aussi à leurs employés à cause de l'incidence qu'on aura si l'on réussit à leur nuire.

Dans l'intérêt de la population canadienne, le Parti réformiste appuiera la loi de retour au travail. Toutefois, nous allons proposer des amendements au projet de loi afin de le rendre plus juste pour toutes les parties. Nous cherchons surtout à assurer une certaine paix sociale au sein du service postal afin que tous les Canadiens puissent compter sur un service postal efficace et sûr.

 

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Si le processus n'est pas juste et équitable, et ce que les libéraux proposent ne l'est certainement pas, le climat de tensions qui existe entre la direction de la Société canadienne des postes et ses employés ne fera que s'envenimer, pour peu que cela soit possible.

Nous devons établir un processus qui servira de modèle d'équité et qui fera oublier les interruptions actuelles et passées du service postal. Ces grèves se terminent toujours par l'adoption d'une loi, mais en ayant tout d'abord causé bien des préjudices à la population.

On en veut de plus en plus au syndicat d'avoir déclenché la grève d'entrée de jeu. Avant de le blâmer unilatéralement, il faut toutefois prendre un aspect en considération. Il ne pouvait recourir à aucune autre solution de rechange, et c'est le gouvernement actuel et ses prédécesseurs qui sont responsables de cette situation.

Si le gouvernement voit la nécessité de mettre un terme à la grève dans l'intérêt public, pourquoi alors ne voit-il pas la nécessité d'adopter une solution de rechange excluant toute grève et tout lock-out? Bon nombre prétendent, et ce n'est pas moi qui vais les contredire, que le gouvernement a agi selon un plan prédéterminé depuis le début du conflit; songeons aux déclarations du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux au sujet de l'adoption d'une loi et des mesures qu'il entendait prendre, à ses déclarations selon lesquelles il veillerait à ce que le STTP porte l'odieux d'une grève, aux retards dans les négociations attribuables au gouvernement, retards qui semblent avoir entraîné le report de la grève apparemment inévitable jusqu'à la période de Noël, et enfin au dépôt d'un projet de loi intentionnellement mesquin. Je vais expliquer dans un instant pourquoi je considère cette mesure mesquine.

Je pense qu'il faut d'abord s'interroger sur la volte-face du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Je tiens à rappeler à la Chambre que ce n'est pas la première fois qu'un projet de loi sur le maintien des services postaux est proposé. Il y en a eu un de proposé en 1991, et un en 1987, bien entendu.

En 1987, le gouvernement conservateur de l'époque a présenté un projet de loi qui correspondait sensiblement à celui dont nous sommes saisis aujourd'hui, mais qui n'était peut-être pas aussi draconien, car il ne prévoyait pas de règlement législatif. L'actuel ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux a alors fait, en tant que porte-parole de son parti en matière de services postaux, la déclaration suivante qui figure dans le hansard du 9 octobre 1987: «Il faudrait laisser la Société canadienne des postes s'organiser.» C'est ce que le STTP a dit dès le début. L'actuel ministre a ensuite décrit le gouvernement conservateur en ces termes: «Vous êtes un gouvernement anti-travailleurs; c'est pour cela.»

Il semble qu'il se passe quelque chose quand ils changent de côté. En outre, une autre membre du gouvernement actuel, l'ancienne leader adjointe de son parti, qui occupe maintenant le poste de ministre du Patrimoine et qui siégeait alors sur les banquettes de l'opposition, a dit, selon le hansard du 13 octobre 1987, que cette mesure législative était draconienne au point de constituer une possible violation de la Charte des droits de la personne. Elle a ajouté que c'était un projet de loi très coûteux et draconien.

Fait à remarquer, ce projet de loi, bien que vicié parce qu'il n'offrait pas de solution définitive, était encore moins vicié et draconien que celui dont la Chambre est maintenant saisie.

Si j'ai traité ce projet de loi de mal intentionné, c'est à cause d'une de ses dispositions, soit l'inclusion du taux et des dates d'entrée en vigueur des augmentations salariales. Le gouvernement nomme un arbitre pour régler les questions toujours en litige, mais il lui enlève la question salariale.

Le règlement que prévoit ce projet de loi est moins généreux que celui qu'a offert la Société canadienne des postes. La question n'est pas de savoir ce qui convient comme augmentation ou si celle-ci convient. Aucune raison valable ne justifie l'inclusion du règlement salarial dans le projet de loi quand on a un arbitre sauf si cela vise à provoquer une réaction de la part du syndicat.

La question qu'il faut se poser à cet égard, c'est pourquoi le gouvernement a agi ainsi et dans quel but. Le retrait de ce règlement salarial imposé d'avance fait l'objet d'un amendement que le Parti réformiste présentera au moment de l'étude en comité plénier. Je demande sincèrement au gouvernement d'appuyer cet amendement, car il enlèvera un peu de sa dureté au projet de loi. J'imagine que le projet de loi comportera autant de défauts que les anciennes mesures législatives. Nous essaierons de remédier à cela aussi pour corriger le projet de loi à la place du gouvernement.

 

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Une autre proposition d'amendement, la principale, visera à remplacer le mode d'arbitrage mesquin du gouvernement par l'arbitrage des offres finales afin d'offrir une meilleure option de remplacement à la grève et au lock-out.

Pourquoi le gouvernement tient-il à présenter un projet de loi qui ne sert qu'à envenimer des relations de travail déjà mauvaises et à préparer le terrain pour une nouvelle grève dans moins de trois ans? Si le gouvernement accepte cet amendement, nous pourrons avoir un service postal permanent sur lequel les Canadiens pourront compter et nous pourrons ensuite commencer à nous occuper des problèmes internes de la société et de ses employés.

La Société canadienne des postes a été créée en 1981 par une loi du gouvernement libéral de l'époque. Celui-ci confiait trois missions à la société des postes. La première était de réduire le déficit des services postaux. Elle l'a fait. Elle l'a même éliminé. Nous pouvons donc dire que la société s'est bien acquittée de cette mission.

La deuxième mission était d'améliorer le service au public. Je ne sais pas s'il y a quelqu'un à la Chambre qui serait prêt à défendre la Société canadienne des postes sur ce point. Dans ma circonscription rurale, le service s'est beaucoup détérioré. Elle n'a pas rempli sa deuxième mission. Il faut plus longtemps pour acheminer le courrier qu'avant et les tarifs ont augmenté sans arrêt. Aujourd'hui, le courrier n'est pas livré dans des villes qui satisfont aux lignes directrices sur l'admissibilité à la livraison du courrier. Dans les villes où le courrier est livré, les nouveaux quartiers n'ont pas de livraison du courrier. Le service s'est donc détérioré.

La troisième mission était d'améliorer les relations avec ses employés. Peut-être, lorsqu'il s'agit de la deuxième mission, la société pourrait-elle essayer à tort de soutenir que les services sont bons, mais je ne pense pas qu'il y ait une seule personne à la Chambre qui aurait l'audace de soutenir que les rapports entre Postes Canada et ses employés se sont améliorés.

J'ai mentionné que notre solution était l'arbitrage des offres finales. Nous en avons déjà beaucoup parlé. Certaines personnes ont demandé ce que cela signifiait au juste. Nous l'avons expliqué avec amples détails. Je crois que le gouvernement devrait réfléchir sérieusement à cette option.

Je signalerai que, bien que le gouvernement ait fait remarquer à l'occasion que l'arbitrage des offres finales ne fonctionne pas, les libéraux ont eu recours à ce mécanisme deux fois durant la dernière législature. En effet, c'est le mécanisme de règlement qu'ils ont imposé pour mettre fin à la grève au port de Vancouver en 1994. C'est aussi le mécanisme qu'ils ont imposé dans la Loi sur les transports au Canada, mesure législative adoptée par les libéraux au cours de la dernière législature pour le règlement des conflits entre les expéditeurs et les chemins de fer.

Si les néo-démocrates ont l'intention de s'opposer à cette proposition, je vais leur couper l'herbe sous le pied en leur rappelant que le gouvernement néo-démocrate du Manitoba avait prévu ce mécanisme dans une loi provinciale il y a quelques années. En fait, c'est le parti de la droite qui l'a supprimé. Je suis donc très intéressé à entendre leurs remarques à l'appui, je l'espère, de l'arbitrage des offres finales.

Dans l'arbitrage des offres finales, comme le propose le Parti réformiste du Canada, toutes les étapes du processus de négociation collective demeureront intactes, sauf le mécanisme ultime de règlement des différends. Dans le moment, le mécanisme ultime de règlement des différends, qui n'est pas un mécanisme du tout—soit une grève du STTP ou un lock-out par la Société canadienne des postes—sera remplacé par l'arbitrage des offres finales.

À n'importe quel moment durant le processus de négociation collective, un autre mécanisme de règlement des différends peut être utilisé si les deux parties y consentent, à condition que cela n'entraîne pas une interruption des services au public. Si toutes les étapes du processus de négociation collective ont été suivies et qu'il reste un point ou plus à régler et que l'une ou l'autre partie estime qu'il est impossible de faire d'autres progrès, seuls les points en litige seront réglés au moyen de l'arbitrage des offres finales.

 

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Une chose importante, qui va à l'encontre de ce que le gouvernement a fait, c'est que ce dernier a nommé l'arbitre dans ce projet de loi. J'ai déjà dit qu'en nommant l'arbitre, le gouvernement se trouvait en situation de conflit d'intérêts.

Le gouvernement se retrouve dans la situation d'une entreprise qui, confrontée à un conflit de travail avec ses employés, fixerait toutes les règles, ou, à l'inverse, dans la situation d'un syndicat qui fixerait toutes les règles du jeu et imposerait sa volonté à la compagnie.

Je crois que le gouvernement s'y prend mal car il ne tente même pas de paraître juste et impartial. Il ne fait que préparer le terrain en vue du prochain conflit de travail, dans quelques années, peut-être au moment où les entreprises touchées par le confit actuel auront tout juste commencé à s'en remettre.

Selon notre conception du choix des arbitres, une fois que les négociations ont atteint le stade où il est nécessaire d'avoir recours à l'arbitrage, les deux parties doivent choisir chacune trois personnes qui leur paraissent mutuellement acceptables, dans la mesure du possible. Chaque partie dispose ensuite de sept jours pour communiquer à l'autre les noms des personnes choisies et leurs curriculum vitae.

Chaque partie doit ensuite choisir une personne parmi les trois que lui propose la partie adverse et aviser cette dernière de son choix dans les sept jours.

Cette procédure permet à chaque partie de savoir si l'autre a choisi, que ce soit volontairement ou non, un arbitre avec lequel elle ne pourrait pas s'entendre en raison de conflits antérieurs ou pour d'autres raisons.

Les parties ont ainsi la possibilité de choisir entre trois personnes, sinon de soumettre une liste de trois candidats à la partie adverse. Elles disposent donc d'une certaine liberté de choix au cas où l'une ou l'autre partie aurait des objections au sujet d'un candidat.

Les deux arbitres choisis auront ensuite au plus 14 jours pour s'entendre sur le choix d'un troisième arbitre, qui présidera le groupe d'arbitrage composé de ces trois personnes.

Chaque partie devra ensuite, dans les 30 jours suivant le choix des membres du groupe d'arbitrage, lui soumettre sa proposition finale sur chaque question en litige.

Le groupe d'arbitrage avisera par écrit les deux parties de l'endroit où leurs propositions finales doivent être enregistrées, y compris la date et l'heure précises où elles doivent l'être.

La non-présentation d'une offre finale dans les trente jours par l'une des parties sera considérée comme un abandon du processus et l'offre finale de l'autre partie sera acceptée.

Si aucune des parties ne présente d'offre finale dans un délai de trente jours, le règlement ira en arbitrage obligatoire. Le groupe spécial d'arbitrage ne divulguera aucun détail concernant l'offre de l'une ou l'autre partie tant qu'une décision n'aura pas été prise.

Le groupe spécial d'arbitrage examinera en bloc l'offre finale de chaque partie concernant les points encore en litige, à moins que les deux parties au différend ne s'entendent pour examiner ces questions individuellement ou par groupes.

Toutes les questions de salaires, d'argent, de primes, de rémunération des heures supplémentaires, etc. peuvent être traitées en groupe, si les parties en conviennent ainsi. Tout ce qui a trait aux horaires de travail, aux vacances, aux congés payés, aux congés de récupération peut être examiné en bloc, si les parties en conviennent ainsi.

L'un des avantages de l'arbitrage des propositions finales est qu'il a tendance à rapprocher les parties. Cela ne veut pas dire qu'il les rapproche, mais seulement qu'il a tendance à le faire.

Par exemple, disons que l'augmentation appropriée est de 1 $ de l'heure; si l'employeur offre 75 cents alors que les employés réclament une augmentation de 4 $, les employés peuvent se retrouver avec une augmentation de 25 cents inférieure à celle à laquelle ils auraient raisonnablement droit. Il serait dans leur intérêt d'essayer de demander une augmentation proche de l'offre faite par l'employeur, peut-être légèrement supérieure.

De même, s'ils demandent 1,25 $ quand tous les indicateurs montrent qu'il n'ont droit qu'à 1 $ et que l'employeur ne propose aucune augmentation ou même une réduction de salaire, ils vont—et devraient dans ces circonstances—obtenir un peu plus que ce à quoi ils ont droit.

Une fois que les deux parties auront fait leur offre finale, chaque partie disposera, durant les délibérations du groupe spécial d'arbitrage, d'un jour, soit de 7 heures et demie au maximum pour défendre et justifier sa position.

Chaque partie sera avisée de la date, de l'heure et du lieu où elle devra défendre sa position au minimum cinq jours ouvrables avant la date. Cet avis peut être émis durant le délai de présentation de l'offre.

 

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Le groupe d'arbitrage choisira la position finale de la partie dont la position lui semble la plus justifiable selon les lignes directrices établies pour le groupe d'arbitrage, dans les 30 jours suivant la date de leur présentation.

Le groupe d'arbitrage ne peut changer ou modifier la position d'aucune partie. C'est un mécanisme qui vise à assurer que les deux parties sont raisonnables et savent qu'elle perdront sur certains points.

Si, de l'avis du groupe d'arbitrage, les deux parties sont loin d'une position justifiable, le groupe peut remettre aux deux parties un avis leur demandant de présenter une nouvelle proposition finale. Le cas échéant, chaque partie aura 20 jours pour présenter une nouvelle proposition finale. Le groupe d'arbitrage devra donner un nouvel avis écrit aux deux parties concernant l'endroit où leur nouvelle offre doit être présentée, ainsi que la date et l'heure limites de présentation. Aucune information ne doit être divulguée concernant les détails de la première offre avant l'annonce de l'entente finale.

Si l'une ou l'autre partie omet de présenter son offre avant la date limite, le groupe d'arbitrage utilisera sa dernière position présentée.

Le groupe d'arbitrage devra choisir la position la plus justifiable entre celles qui lui auront été soumises dans les 20 jours de délai de présentation.

Dans les 30 jours suivant l'annonce de la soumission gagnante, le groupe d'arbitrage devra remettre un rapport complet présentant la soumission finale des deux parties et la justification détaillée, point par point, de son choix quant à l'offre retenue.

Si le rapport n'est pas unanime, le membre dissident du groupe d'arbitrage doit remettre un rapport minoritaire dans les mêmes délais que les autres membres du groupe. Le rapport minoritaire, annexé au rapport majoritaire, fait partie de ce dernier.

Le rapport doit ensuite être soumis aux deux parties et au ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Le ministre doit le déposer à la Chambre des communes dans les cinq jours de séance suivant sa réception ou, si la Chambre s'est ajournée pour une longue période, le ministre doit envoyer une copie du rapport à chaque parti d'opposition dans les 14 jours civils suivant sa réception.

Avant de lire les facteurs dont le groupe d'arbitrage doit tenir compte, j'aimerais souligner que je suis venu à Ottawa pendant la soi-disant période de relâche, alors que la possibilité d'une grève se précisait. J'ai pris contact avec la Société canadienne des postes et le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes. J'ai offert aux deux parties de les rencontrer et de leur expliquer le processus et notre proposition pour qu'elles nous disent ce qu'elles en pensaient.

J'ai rencontré la Société canadienne des postes, et je me suis entretenu au téléphone avec un membre du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, mais je n'ai pas reçu de commentaires de sa part à ce sujet. Néanmoins, j'ai essayé de prendre en considération les choses qui sont justes pour le syndicat et justes pour la Société canadienne des postes de façon à ce que le mécanisme soit équilibré et qu'il semble équitable aux yeux des deux parties.

Les facteurs dont le groupe d'arbitrage doit tenir compte sont les suivants:

Premièrement, l'évolution de l'indice du coût de la vie depuis la dernière convention collective. L'un des arguments de base pour réclamer un augmentation de salaire, tous autres facteurs mis à part, est l'augmentation du coût de la vie.

Deuxièmement, la moyenne des augmentations dans le secteur public depuis la dernière convention collective. J'utilise volontairement le secteur public comme point de référence car, même si l'organisme en cause est une société d'État et non un véritable service gouvernemental, le syndicat lui-même est ouvertement opposé à la privatisation et ne veut pas appartenir au secteur privé. Par conséquent, il convient d'examiner les augmentations salariales accordées dans le secteur public.

Troisièmement, l'impact sur les services postaux. En abordant ce point, on touche davantage aux conditions spéciales et à leur impact, positif ou négatif, sur le service postal. Quel sera l'impact financier du règlement? Aucune entreprise, même une entreprise à but non lucratif, ne peut parvenir à un règlement sans examiner quel sera l'impact de celui-ci.

Quatrièmement, le règlement entraînera-t-il une augmentation des tarifs postaux supérieure à l'inflation depuis le dernier rajustement? On prend cette mesure non pas pour le STTP ou la Société canadienne des postes, mais bien pour les citoyens du Canada. Ils ont le droit de s'attendre à des tarifs et à une efficacité raisonnables et il faut en tenir compte.

 

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Cinquièmement, les changements dans les descriptions de postes. Si la Société canadienne des postes a modifié ses attentes par rapport au travail de ses employés, les propositions syndicales doivent refléter ce fait en disant par exemple: «Nous avons modifié nos tâches, par conséquent, nous demandons qu'on en tienne compte et qu'on change les barèmes.»

Enfin, les comparaisons avec les conditions dans le secteur public sur les articles non résolus. On doit chercher quelle est la norme dans le secteur public. Si le syndicat ou la Société canadienne des postes demande une condition d'emploi précise, il faudra déterminer quelle est la norme dans le secteur.

Voilà les amendements que nous demanderons. Si nous les obtenons, nous demanderons aussi que la Loi sur la Société canadienne des postes soit modifiée afin qu'elle veille à ce que ces éléments fassent partie du mécanisme permanent de règlement pour que les Canadiens, qui viennent de subir leur quatrième grève postale en dix ans, n'aient pas à en subir d'autres à l'avenir.

Dans le même contexte, j'aimerais rappeler au ministre du Travail qu'il a dit, dans son discours, qu'il ne regrettait pas d'avoir permis cette grève. Nous regrettons tous que cette grève ait eu lieu. Il appartient au gouvernement de veiller à instaurer un processus juste afin que ce soit la dernière interruption du service postal au Canada.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, nous voilà à débattre une loi de retour au travail. Cette loi va forcer quelque 45 000 travailleurs à retourner à leurs occupations à la Société canadienne des postes.

Normalement, on n'en serait pas là si le gouvernement avait laissé calmement le jeu des négociations de travail se faire comme cela se doit. Malheureusement, aujourd'hui, on est obligés d'étudier un projet de loi qui enlève à 45 000 personnes des droits fondamentaux, soit ceux de négocier leurs conditions de travail.

Notre régime de relations de travail repose essentiellement sur cette capacité qu'ont les travailleurs et les patrons de s'affronter, d'établir un rapport de force, de discuter et de faire en sorte que des décisions soient prises pour une meilleure organisation du travail, pour faire en sorte que les travailleurs aient une satisfaction dans leur emploi et que l'employeur y trouve son profit.

C'est comme cela que notre système fonctionne habituellement. Mais voilà qu'aux Postes, ce ne sera plus comme ça. Ce n'est plus comme ça, parce que le gouvernement a décidé d'intervenir. Je vous le dis tout de suite, il serait facile de faire de la démagogie avec la question des Postes. Oui, tout le monde souhaite évidemment recevoir son courrier à domicile. Tout le monde est bien content quand les facteurs livrent les lettres ou les colis à notre résidence. Tout le monde considère que c'est là un service essentiel, un service normal.

Il y a eu, et il y aura des entreprises qui diront, très justement d'ailleurs, combien d'argent elles perdaient avec cette grève des Postes. Bien sûr que cela crée des ennuis, tantôt à des entreprises, tantôt à des organismes de charité, tantôt à des citoyens. Mais c'est bien évident. Voilà une grève, voilà un geste posé par une collectivité de travailleurs qui leur donne un rapport de force permettant de faire pression sur l'employeur, en l'occurrence, la Société canadienne des postes, un peu beaucoup sur le gouvernement, parce qu'il est impliqué jusqu'au cou dans cette négociation. Mais on devrait permettre normalement à ces travailleurs d'exercer leurs droits.

Une grève qui ne dérangerait personne, ce serait bien gentil pour les observateurs, mais ça ne servirait pas à grand-chose pour les travailleurs. Par définition, une grève, ça fait mal. Dans notre société, on l'a accepté depuis longtemps, il faut savoir que si on ne donne pas cet outil aux travailleurs, si on ne leur permet pas de s'exprimer comme groupe, si on ne leur permet pas de négocier leurs conditions de travail, on vient de fausser le jeu, on vient de s'attirer des problèmes. Et voilà que le gouvernement a décidé, aujourd'hui, par ce projet de loi de retour au travail, de s'attirer tous ces problèmes.

 

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Qu'en est-il au juste de la négociation qui s'est faite? Depuis déjà quelques mois, dans cette Chambre, on questionne le ministre responsable des Postes et le ministre du Travail. On a même questionné le premier ministre. On leur a demandé: Que se passe-t-il dans le dossier des Postes? Le gouvernement va-t-il laisser les négociations se faire un peu? Chaque fois, bien calmement, le premier ministre ou le ministre de Travail, et ce dernier s'est levé et l'a répété à peu près 50 fois: «Eh bien oui, laissez travailler le processus, laissez aller les choses. Ça discute, ça va bien. On espère que ça se réglera.» Le ministre responsable de la Société des postes l'a dit également. Jusqu'au premier ministre qui nous a dit: «Laissez négocier ces gens-là. Ils ont la capacité de négocier leurs conditions de travail. On espère que ça va se régler.»

Comment se fait-il qu'on se retrouve aujourd'hui, dans ce contexte-là, avec un gouvernement si bien intentionné, semble-t-il? Comment se fait-il qu'aujourd'hui, on enlève le droit des travailleurs de faire la grève par un projet de loi spécial? C'est tout simple: on a faussé le jeu. Dès le début, dès le mois d'août, le ministre responsable des Postes a faussé le jeu des négociations. J'accuse le ministre responsable de la Société des postes d'avoir fait en sorte que les 45 000 travailleurs de la Société des postes aient perdu leur capacité de faire face à l'employeur. Ils ont perdu leur pouvoir de négociation.

Le ministre était bien à l'aise lorsqu'il a rencontré les représentants de l'Association canadienne du marketing direct. Il se pensait avec des chums. Il leur a dit: «Ne vous en faites pas pour la grève des postes. Premièrement, ils vont négocier un peu, ils vont sortir en grève, parce qu'on ne leur donnera rien. Bien sûr qu'ils vont sortir en grève. Ils vont porter l'odieux de la grève. Et quelques jours plus tard, après sept ou huit jours de grève, la pression publique sera telle que, là, le gouvernement sera légitimé d'adopter une loi spéciale. Je vous promets, leur a-t-il dit, qu'il y aura, non seulement une grève, mais qu'elle sera courte et que le gouvernement interviendra par une loi spéciale.»

C'est le ministre responsable de la Société canadienne des postes, le 6 août, qui a enlevé le droit de grève aux travailleurs. Il leur a enlevé cette capacité de négocier leurs conditions de travail. Et c'est ce même ministre qui, aujourd'hui, essaie de jouer à l'ange, celui qui sauve la société, celui qui sauve la Société canadienne des postes. Voilà qu'on va retourner les méchants postiers au travail. C'est cet homme que j'accuse d'avoir enlevé aux travailleurs leur droit de grève.

C'est un jeu inacceptable auquel s'est livré le gouvernement. Le gouvernement a mis en place toutes les conditions pour faire en sorte que les gens du syndicat et les travailleurs se sentent floués, se sentent abandonnés. Qui plus est, non seulement le gouvernement a-t-il faussé le jeu, non seulement nous a-t-il maintenus artificiellement dans un climat de négociations, mais il s'est posé des gestes entre le négociateur patronal et le négociateur syndical, des gestes inacceptables. Il y a eu des reculs. Pourtant, il y a eu des mouvements de bonne foi de la part des employés syndiqués. Il y a eu des gestes qui ont été posés, mais la partie patronale est restée inflexible.

Quand elle a cédé quelque peu sur des éléments qui pourraient permettre de penser à un rapprochement, qu'est-il arrivé? Il est arrivé une altercation entre le négociateur patronal et le négociateur syndical. Du côté du gouvernement, du côté de la Société canadienne des postes, on a changé. Je me suis trompé en disant «gouvernement» au lieu de Société canadienne des postes, mais tout le monde aura compris que c'est bonnet blanc, blanc bonnet. Le gouvernement se distingue de la Société des postes, mais on sait combien il en est proche. Ils ont des amis à la Société des postes, ils ont d'ex-collègues à la Société des postes. C'est tout proche. Ça se parle chaque jour, ces gens-là. La stratégie de la Société des postes, pensez-vous que le gouvernement n'était pas au courant? Voyons donc! C'est bonnet blanc, blanc bonnet.

 

. 1105 + -

Alors, le gouvernement, ou la Société canadienne des postes, son mandataire, a changé de négociateur, et voilà qu'on a eu un recul. Voilà que les quelques pas qui avaient été franchis dans le cadre de l'évolution de la négociation ont échoués. On est revenus à une position rigide de départ.

On pourrait commenter longtemps sur les demandes, mais les employés veulent finalement protéger leurs emplois. Peut-on leur en vouloir? Ils veulent négocier des augmentations de salaire, après des années de gel comme tout le monde, après des situations quand même assez difficiles qu'ils ont partagées. On ne peut pas leur en vouloir de chercher à améliorer leurs conditions de travail. C'est normal, c'est humain, c'est correct. On n'est pas obligés de prendre partie au coeur du débat pour comprendre que ces gens-là agissent bien dans les circonstances. Ils ont eu recours au droit de grève pour préserver une quantité d'emplois. Oui, ils sont inquiets dans le domaine des Postes; oui, ils ont vécu et ils vivent chaque jour très durement les changements technologiques. Oui, ces gens-là ont perdu de nombreux emplois dans le passé et le gouvernement en annonce encore 4 000 de plus pour cette période-ci.

Bien sûr, ces gens-là veulent se défendre. Bien sûr, ils veulent limiter les dégâts. Y a-t-il quelqu'un qui nous écoute qui en voudra aux gens des Postes de défendre, avec la dernière énergie, leur travail, leur sécurité, leur salaire, leurs conditions de travail? Mais non, on ne peut pas en vouloir à ces gens-là. On peut en vouloir au gouvernement, par exemple, de faire preuve d'aussi peu d'humanité, d'aussi peu d'ouverture et d'avoir un tel comportement, alors que c'est lui qui a faussé le jeu des négociations.

Le plus grand drame, ce matin, si on devait identifier un responsable, une personne qui a tout fait échouer, il faudrait identifier le ministre responsable de la Société canadienne des postes.

Non seulement le gouvernement retourne ces gens-là au travail, mais en plus, il les retourne avec un projet de loi qui est extrêmement dur. Heureusement, le travail de négociation qui s'est produit et qui se poursuit toujours entre l'opposition et le gouvernement pour faire en sorte qu'on puisse aujourd'hui adopter ce projet de loi en évitant, je dirais, l'excès de zèle qui aurait pu nous caractériser, ces négociations amèneront des adoucissements.

Il me fait plaisir de dire qu'à au moins un des articles qui pose terriblement problème dans le projet de loi, le contexte de la médiation dans lequel s'opérera la médiation arbitrale sera changé. Nous avons l'assurance que le gouvernement acceptera de changer tout le contexte de l'article 9 du projet de loi, dans lequel il est stipulé, en quelque sorte, que le médiateur-arbitre devra faire son travail dans un contexte où on aligne carrément la Société canadienne des postes sur l'entreprise privée, où on parle de concurrence, de compétition, et où on parle quasiment, à mots couverts, de privatisation éventuelle.

Le contexte dans lequel on fait travailler le médiateur-arbitre n'a pas de bon sens. Il faut comprendre que la Société canadienne des postes est un service public. Il faut comprendre que la Société canadienne des postes doit être performante. Oui, on doit avoir des critères de performance. Oui, on doit faire en sorte que ces gens-là soient compétitifs le plus possible. Oui, on doit donner une qualité de service qui, non seulement se rapproche, mais excède ce que pourrait donner l'entreprise privée. Mais il faut le faire dans le contexte d'un service gouvernemental, d'un service public, et non dans le contexte d'une société qu'on voudrait privatiser au plus vite pour faire encore plus d'argent, en négligeant le service aux citoyens.

Alors, nous avons l'assurance que l'opposition, c'est-à-dire le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique, par son travail, aura gagné du gouvernement un adoucissement de ce contexte d'arbitrage. Au moins, on aura donné à l'arbitre, à qui le gouvernement avait attaché les deux mains avant même qu'il ne soit nommé—avant même qu'il ait commencé son travail, on lui avait lié les deux mains—un peu d'espace. Il pourra bouger, ce qui fera en sorte que les travailleurs auront peut-être une chance de se faire entendre dans un contexte où leur discours risque de toucher cette personne qui sera nommée.

 

. 1110 + -

Nous avons cette assurance et nous en sommes fiers. Les amendements nécessaires seront déposés, lors de l'étude en Comité plénier, par un de nos collègues du NPD, mais il faut comprendre que nous avons la certitude que ce sera accepté.

Nous déposerons d'autres amendements. Les députés du Bloc demanderont au gouvernement de faire en sorte qu'au moins dans la nomination du médiateur-arbitre—on a bien assez de faire retourner les travailleurs des Postes au travail—est-ce qu'il ne serait pas de bonne guerre de faire en sorte que les syndiqués soient consultés? S'il y avait possibilité d'une entente, pourquoi le gouvernement n'accepterait-il pas de consulter les syndiqués et de nommer quelqu'un dont le travail risque de rallier tout le monde, parce que ce sera une personne au-dessus de tout soupçon, une personne respectée par toutes les parties? Nous apporterons des propositions de changement dans ce sens et nous verrons comment le gouvernement les accueillera.

Il y a également la question des salaires. Non seulement le gouvernement fait retourner les postiers au travail, mais on leur donne moins que dans la dernière offre. On a décalé dans le temps la dernière offre salariale, de telle sorte qu'il y a des pertes pour chacun d'eux. Pourquoi, sinon par je ne sais trop quel esprit revanchard, est-ce qu'on ne donnerait pas à ces gens tout ce qui a été négocié de bonne foi, le mieux possible, pour qu'ils en tirent quelque avantage?

Également, nous proposerons à des amendements concernant les frais imposés, les frais du médiateur-arbitre qui devraient être payés à ce moment-ci 50-50 par les parties. Il faut donc faire en sorte de demander au gouvernement de manifester de l'ouverture.

Malgré les erreurs du gouvernement dans ce dossier, si, au cours de cette journée de travail, il acceptait de poser des gestes dans la bonne direction—et je fais appel au bon sens de ceux et celles qui veulent sincèrement que la situation ne se détériore pas aux Postes—si le gouvernement acceptait avec humanité, avec ouverture, avec le sentiment qu'ils ont à réparer la gaffe du ministre responsable des Postes, il faut qu'ils en soient conscients, s'ils acceptaient de bouger, s'ils acceptaient d'arrondir les coins, je suis persuadé, je suis profondément persuadé que les employés des Postes retourneraient au travail.

Oui, ce serait avec le sentiment qu'ils ont été en quelque sorte bernés par le gouvernement, mais au moins, ce serait avec le sentiment que les législateurs du côté gouvernemental, qui ne sont pas nécessairement partie prenante à la stratégie ministérielle, que ceux et celles qui sont élus pour représenter les citoyens, les ont représentés aussi dans ce débat.

Sans mettre la Société des postes en faillite, sans acculer personne à la fermeture, sans fermer les yeux sur l'obligation d'être compétitifs, de donner un bon service, de rationaliser, sans fermer les yeux sur toutes ces réalités, le législateur aurait au moins eu une sensibilité à l'endroit de ceux et celles qui, depuis plus de 10 ou 11 jours, 12 jours maintenant, sont dehors et revendiquent tout à fait correctement pour leurs conditions de travail.

En terminant, je dois dire que le Bloc québécois est contre ce projet de loi. Il n'est pas question pour nous d'enlever des droits aux travailleurs, quand on sait pertinemment qu'ils ont été piégés par le ministre responsable des Postes. Il faudrait quand même que le gouvernement comprenne que l'opposition, dans un geste responsable, va proposer des changements au projet de loi, des changements qui sont de nature à améliorer les choses, à réparer les gaffes de ce gouvernement.

 

. 1115 + -

[Traduction]

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, normalement, on dit que l'on est heureux de se lever pour prendre la parole sur un certain sujet ou un certain projet de loi. Je ne peux pas dire cela aujourd'hui. Je ne suis pas heureux d'être ici pour parler de cette mesure législative.

Je ne suis pas venu à Ottawa pour voter en faveur d'une mesure qui porte atteinte aux droits des travailleurs. Nous n'avons certainement pas l'intention d'approuver le projet de loi.

Je voudrais commencer par indiquer combien le NPD est critique de cette mesure de rappel au travail. Nous estimons que c'est de l'abus de pouvoir. C'est une intervention regrettable dans la libre négociation collective. En fin de compte, cela ne fera que prolonger l'hostilité qui règne dans les relations entre le syndicat et la direction à Postes Canada et condamner le public canadien au même genre de problème, parce que l'on n'aura rien fait pour s'attaquer aux causes profondes de l'hostilité, alors que cela aurait été possible dans le cadre d'une libre négociation collective.

Ce recours disparaît avec le projet de loi dont nous parlons aujourd'hui. Même si le service reprend, même si les employés des postes retournent au travail et distribuent le courrier, rien n'aura réellement été résolu et, dans trois ou quatre ans, nous aurons de nouveau le même débat et les mêmes arguments.

Ce que nous devrions rechercher, c'est une solution à long terme. Le seul espoir d'en trouver une est de laisser les parties négocier de bonne foi et sans intervention extérieure. Voilà la solution. Tout au cours de cette série de négociations, nous avons été témoins de toutes sortes d'ingérences. L'ingérence a commencé dès l'annonce que les négociations allaient débuter. Elle a consisté à cette étape à faire en sorte que les parties ne viennent pas à la table de négociations dans un délai raisonnable.

Il n'y a aucune raison pour que les négociations commencent six mois après l'expiration de la convention collective. De telles négociations devraient avoir lieu tôt dans l'année afin que les parties puissent conclure une nouvelle convention avant l'expiration de la précédente. Le service est maintenu, il n'y a pas d'arrêt de travail, le public est heureux et les travailleurs sont satisfaits. Tel devrait être l'objectif. Mais ce n'est pas ce qui s'est passé.

Peu après le début des négociations, et nous avons entendu d'autres députés en parler, nous avons été témoins d'un type d'ingérence aux effets plus dévastateurs encore. Je veux parler du spectre d'une loi forçant le retour au travail, qui a été agité, si ma mémoire est fidèle, le 8 août. Nous avons entendu le leader du Bloc québécois à la Chambre raconter que l'Association canadienne du marketing direct avait informé ses membres qu'elle s'était fait dire par le ministre responsable qu'il ne fallait pas se faire du souci pour la livraison du courrier, que même si les négociations traînaient une loi forçant le retour au travail n'allait pas tarder, que l'interruption du service serait de courte durée. Je crois qu'il avait parlé d'une reprise du service dans les sept ou huit jours.

Comment peut-on s'attendre à ce que les parties s'assoient à la table de négociations et qu'elles arrivent à s'entendre quand l'une d'elles sait très bien qu'elle peut se prévaloir à tout moment d'un puissant atout de concurrence déloyale, qu'elle peut cogner sur la table pour obtenir tout ce qu'elle veut? Cela ne permet pas d'en arriver à une solution durable. L'hostilité existait déjà avant que les négociations ne commencent et n'a fait que s'aggraver et, en fait, cela a conduit au problème ultime, l'arrêt de travail.

Là encore, je tiens à dire que nous sommes critiques à l'égard de ce projet de loi et je trouve, en fait, regrettable d'être ici pour discuter de cette question. En tant que Chambre des communes et à titre de législateurs, nous devrions prendre garde de ne jamais prendre ce type de mesure législative à la légère, lorsqu'elle limite ou annule des droits individuels. C'est le début. On s'avance alors sur une pente glissante et il est trop facile d'avoir recours à ce type de dérobade pour régler des problèmes sociaux complexes.

Mussolini s'est assuré que les trains soient à temps. Tout cela est très bien, mais est-ce le type d'orientation que nous voulons prendre en tant que pays? Je crois que non.

Nous ne devrions jamais envisager à la légère une mesure ayant pour objectif de limiter le droit des travailleurs d'utiliser le seul moyen—arme serait trop fort—ou le seul outil qu'ils ont vraiment à leur disposition, soit le fait de ne plus offrir leurs services.

On peut penser qu'une grève est un moyen violent ou très perturbateur. Ce n'est pas nécessairement le cas.

 

. 1120 + -

Le fait même de ne plus offrir ses services est un moyen très pacifique et passif qu'on utilise pour essayer de sortir d'une impasse, tout comme la négociation est la façon la plus civilisée d'essayer de sortir d'une impasse. Lorsque les négociations échouent, le prochain moyen civilisé qu'on peut utiliser dans une situation comme celle-là est de ne plus offrir ses services. C'est un droit qu'on a accordé aux travailleurs aux termes de conventions internationales sous les auspices des Nations Unies et du BIT parce que le monde reconnaît que c'est une chose qu'on doit avoir pour essayer de remédier au déséquilibre historique qui existe entre les employeurs et les employés. On sait très bien que l'employeur a un pouvoir de force supérieur et pour rétablir un certain équilibre, il faut accorder ce droit aux travailleurs.

Par conséquent, j'exhorte la Chambre des communes, mes collègues et les législateurs à ne pas prendre l'habitude de recourir à de tels cataplasmes chaque fois qu'un différend survient dans le secteur public ou d'user de notre influence et d'adopter ce genre de mesure législative maladroite, qui constitue un pas en arrière pour les droits des travailleurs et les droits individuels. Cette situation nous entraîne sur une pente dangereuse où nous cessons d'accorder la plus haute priorité à ces droits.

Pour comprendre certains des problèmes avec lesquels nous sommes aux prises aujourd'hui et la raison pour laquelle nous étudions ce projet de loi, nous devrions faire une rétrospective du processus de négociation qui nous a conduit dans ce bourbier. Les questions en suspens sont simples et toutes deux sont mentionnées dans le projet de loi que le gouvernement a déposé.

Au fond, la véritable difficulté ici est le désaccord entre la Société et le gouvernement sur la politique voulant que les recettes excédentaires générées par la Société canadienne des postes puissent être utilisées à d'autres fins et, comme dans le cas des recettes générales, servent à réduire le déficit. Cela n'a fait que compliquer davantage les négociations, causer le problème auquel nous sommes confrontés aujourd'hui et aboutir à cet arrêt de travail.

Le gouvernement a forcé la Société canadienne des postes à devenir rentable et à produire des recettes excédentaires, alors que son mandat consiste réellement à fournir de bons services et à donner des recettes suffisantes pour couvrir ses frais de fonctionnement, investir des capitaux et assurer que ses installations matérielles sont modernes. Mais elle n'avait jamais pensé devenir la vache à lait du gouvernement fédéral.

La Société canadienne des postes doit produire un montant déterminé de recettes chaque année. Elle a déjà fait tout ce qu'elle pouvait pour accroître sa productivité au cours des sept ou huit années. Même l'ancien ministre chargé des postes, David Dingwall, a mentionné que la Société avait accru sa productivité de 63 p. 100 entre 1982 et 1994. Elle a donc fait tout ce qu'elle pouvait à cet égard. Il y a eu une augmentation énorme de productivité.

En même temps, la Société a réduit du quart le nombre de ses employés. Je me demande bien comment une entreprise peut pousser davantage la rationalisation, quand elle réussit à accroître sa productivité de 60 p. 100 tout en réduisant du quart son personnel.

Même après avoir réalisé tout cela, après s'être tant serré la ceinture, peu importe la terminologie employée, la Société doit encore produire des centaines de millions de dollars de plus, pas pour offrir de meilleurs services postaux aux Canadiens, mais bien pour enrichir davantage les coffres du gouvernement du Canada. Voilà bien la pression que subissait la Société canadienne des postes quand elle s'est présentée à la table des négociations. La seule façon dont la Société pouvait réaliser des recettes additionnelles consistait à changer radicalement les règles de travail et à sabrer dans son effectif. Elle devait aller chercher ces recettes dans les poches des travailleurs, parce qu'elle ne pouvait plus le faire sur le plan du marketing.

Naturellement, le syndicat se trouve ainsi confronté à la menace de voir disparaître 4 000 emplois. Il aurait été irresponsable de ne pas s'opposer vigoureusement aux pertes d'emplois, au nom des gens qu'il représente. Voilà l'impasse. Elle est vraiment facile à retracer. La question aurait facilement pu être réglée au cours des six derniers mois de négociations ou à l'intérieur des limites de cette grève.

 

. 1125 + -

Il aurait été bien simple pour le gouvernement du Canada de dire à la Société canadienne des postes qu'elle devra lâcher du lest du côté des recettes. Le gouvernement devrait lui dire qu'il veut qu'elle génère des recettes suffisantes pour couvrir ses frais d'exploitation et qu'il ne tient pas à ce point à réduire le déficit au moyen des revenus de la Société canadienne des postes parce que cela va à l'encontre du mandat initial de la société d'État, à l'encontre de la Loi sur la Société canadienne des postes et à l'encontre des recommandations découlant de l'examen du mandat qui a eu lieu il n'y a pas plus tard que l'année dernière.

Je voudrais signaler une de ces recommandations. Dans son rapport sur l'examen du mandat de la Société canadienne des postes, George Radwanski a recommandé que la SCP ait pour mandat de fonctionner sans profits ni pertes. Il a même dit qu'il n'était pas raisonnable que la Société canadienne des postes paie des dividendes au gouvernement fédéral. Il a abordé tout particulièrement cet aspect il y a un an. Il a dit qu'une telle obligation de payer des dividendes se traduirait par des tarifs postaux plus élevés que nécessaire ou par une diminution des ressources disponibles à consacrer à la nécessaire expansion des services, étant donné que 82 p. 100 seulement des foyers canadiens bénéficient de la livraison directe du courrier. Il existe un besoin d'expansion des services.

La dernière chose que je citerai du rapport, c'est la recommandation elle-même, portant le numéro 16: «Que la Société canadienne des postes soit tenue de faire ses frais plutôt que d'obtenir un rendement commercial sur les capitaux propres, et que le seuil de rentabilité soit défini de manière à dégager des revenus suffisants pour financer les frais d'exploitation, les investissements, les expansions et améliorations des services postaux de base, ainsi que les déficits d'exploitation possibles grâce à la constitution de réserves».

Cela montre clairement que le groupe de spécialistes chargés d'examiner le mandat de la Société canadienne des postes recommandait de bien déterminer à quelles fins devaient servir les recettes excédentaires ou toutes les recettes enregistrées par la société.

Je veux en venir au fait que nous traversons une crise fabriquée de toutes pièces, une tempête dans un verre d'eau, provoquée par les pressions que le gouvernement fédéral exerce sur la Société canadienne des postes et qui, à la table des négociations, se traduisent essentiellement par une demande de changements aux conditions de travail, ce qui entraînerait la perte de 4 000 emplois. Aucun syndicaliste digne de ce nom n'aurait accepté ce genre d'argument, puisqu'il est trop facile de retracer l'historique de la révision du mandat, de la Loi sur la Société canadienne des postes et d'autres événements similaires.

Voilà donc le rappel historique que je voulais faire pour expliquer la terrible impasse dans laquelle nous nous trouvons; premièrement, le climat des relations de travail est demeuré hostile pendant de nombreuses années, puis l'augmentation des recettes qui était exigée a posé des problèmes à la table des négociations.

Pour rétablir les services postaux au Canada et fournir des services aux Canadiens, aux petites et moyennes entreprises et à tous ceux qui attendent impatiemment que la Chambre des communes fasse preuve de leadership, le gouvernement a déposé hier un projet de loi. J'ai eu le temps de parcourir cette mesure législative et l'occasion, à l'époque où je m'occupais de relations de travail, d'examiner d'autres documents exigeant le retour au travail de grévistes, et je peux vous dire qu'il y a deux dispositions, deux articles, dans le projet de loi dont nous sommes saisis qui me surprennent.

Les précédents intervenants ont bien cerné les principales questions qui posent problème et nous allons, nous aussi, proposer des amendements à ce projet de loi dans l'espoir que d'autres députés comprendront le bien-fondé de nos argumentations et mettront en oeuvre une loi de retour au travail qui respectera au moins les normes nationales des autres lois de retour au travail et dont les buts et les objectifs respecteront la norme, à savoir amener les travailleurs à reprendre le travail. Cela mérite quelques explications.

Je voudrais commencer par l'article 9 du projet de loi, sur le mandat et le principe directeur du médiateur-arbitre, sur les choses, en fait, dont l'arbitre doit tenir compte dans son jugement.

Compte tenu de sa formulation, l'article a l'air d'une liste des cadeaux que Postes Canada voudrait pour Noël. Dans les paramètres de cet article se trouvent presque toutes les propositions litigieuses qui ont marqué les négociations. Elles sont ici regroupées dans un article et présentées par le biais de la loi de retour au travail.

 

. 1130 + -

D'habitude, je le répète, une loi de retour au travail vise à amener les travailleurs à reprendre le travail. Cette loi de retour au travail ne prévoit pas apporter des modifications substantielles à la façon dont Postes Canada mènera ses affaires à partir de maintenant.

C'est ce que cet article donne le droit de faire. Voilà pourquoi nous le trouvons choquant. Cet article doit absolument être modifié pour qu'il y ait une certaine justice dans toute le série de négociations et que le travail reprenne.

Je tiens à citer la partie de cet article qui heurte le plus les membres de notre caucus.

    Le médiateur-arbitre doit s'inspirer des conditions de travail qui existent dans les entreprises privées et publiques comparables et qui offrent la marge de manoeuvre nécessaire pour assurer, à court et à long terme, la viabilité économique et la compétitivité de la Société canadienne des postes, compte tenu

      de la nécessité pour celle-ci...d'obtenir des résultats financiers acceptables pour une entreprise commerciale.

Rien de tout cela n'est prévu dans la Loi sur la Société canadienne des postes. Rien de tel n'est prévu dans l'examen du mandat. Rien de tel n'a vraiment fait l'objet d'une entente. À notre avis, si le gouvernement libéral veut modifier en profondeur le mode de fonctionnement de la Société canadienne des postes, il devrait le faire ouvertement, en proposant des modifications à la Loi sur la Société canadienne des postes, plutôt qu'en essayant de les faire adopter en douce, dans un projet de loi qui est censé rétablir les services postaux au Canada.

Nous allons certainement proposer un amendement qui visera à modifier cet article pour redonner un semblant d'équité à l'ensemble du processus.

Un autre aspect frappant, c'est que le projet de loi fixe les augmentations salariales que toucheront les travailleurs qui reprendront leurs fonctions. Cela va bien au-delà de ce que nous souhaiterions voir dans n'importe quelle loi de retour au travail, car cela retire à l'arbitre toutes les dispositions de nature monétaire.

L'arbitre ne pourra plus considérer ce qui est juste et ce qui ne l'est pas. Il ne pourra même pas prendre en considération les arguments qui ont été présentés pendant les négociations. Il ne pourra prendre en considération ni la capacité de payer de l'employeur, ni la part de marché ni les augmentations du coût de la vie.

L'arbitre ne pourra examiner aucun de ces aspects, parce que les augmentations seront prédéterminées dans le projet de loi.

Nous dénonçons l'idée même des traitements prévus dans le projet de loi parce que, sincèrement, en tant que députés, nous ne sommes pas en mesure de nous prononcer sur cette question. Nous ne sommes pas au courant des discussions qui ont eu lieu. Nous n'avons pas accès aux livres. Nous ne connaissons pas l'histoire des négociations. Pourquoi devrions-nous nous prononcer sur une hausse aussi précise qu'une augmentation de 1,9 p. 100 en l'an 2000?

Il n'appartient pas à la Chambre de régler cette question, car, sauf votre respect, personne n'a ici les compétences pour le faire. Les gens à la table de négociation ont ces compétences, et l'arbitre les aura. Cette décision devrait lui appartenir.

De plus, outre le fait que le règlement salarial ne devrait pas figurer dans le projet de loi, les taux de majoration prévus dans ce dernier sont en fait inférieurs à la dernière offre de la Société canadienne des postes.

Nous ignorons, comme le leader parlementaire du Bloc québécois l'a fait remarquer, si le gouvernement a agi par malice, s'il tente de retourner le couteau dans la plaie, si c'est une erreur ou si cela est fondé sur des raisons financières. Le fait est qu'il s'agit d'un montant si insignifiant que cela me porte à penser qu'il y a plus que des motifs financiers.

Voici la différence entre la dernière offre de la SCP et le règlement prévu dans le projet de loi. La dernière offre de la SCP était de 1,5 p. 100 la première année, de 1,75 p. 100 la deuxième et de 2 p. 100 la troisième. Le règlement prévu dans le projet de loi est identique, sauf pour la troisième année, où l'augmentation est de 1,9 p. 100 au lieu de 2 p. 100. S'élevant à 0,1 p. 100, la différence est tellement minime qu'elle est insignifiante. On les frappe pendant qu'ils sont au tapis. On les force à retourner au travail. On leur enlève le droit de faire la grève. On leur enlève la possibilité d'exprimer leur point de vue sur le montant de leur augmentation de salaire. On en profite même pour leur en enlever un petit peu.

Mais il y a un autre changement plus coûteux. La prise d'effet des augmentations est retardée de six mois.

 

. 1135 + -

Alors que la SCP a offert de verser les augmentations salariales rétroactivement à la date d'expiration de la convention collective, le projet de loi prévoit qu'elles ne prendront effet que le 1er février 1998. Selon nos calculs, cette entrée en vigueur retardée fera économiser 35 millions de dollars au détriment des employés sur la durée de trois ans du règlement.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'ai certaines observations à formuler et une question à poser au député.

J'ai trouvé intéressant d'entendre le député raconter l'historique de la Société canadienne des postes et souligner ses gains de productivité. C'est très important. Il est également très important que le gouvernement ait donné au processus de négociation une chance de fonctionner. Le ministre du Travail mérite des félicitations pour la patience dont il a fait preuve envers toutes les parties afin de laisser aux négociations la possibilité d'aboutir.

En écoutant le député, je me dis que le passé est le passé, mais que les conséquences de la situation actuelles sont importantes aussi, particulièrement pour l'avenir de la SCP.

Le rapport Radwanski contenait certainement des recommandations intéressantes, mais tous les députés savent que la SCP a perdu beaucoup de clients aux mains de ses concurrents. Beaucoup d'entreprises ont commencé à compter sur des services de messagerie privés et d'autres services. Elles ont signé des ententes contractuelles à long terme qui feront mal à la Société canadienne des postes. Cela entravera ses efforts pour se moderniser.

Les Canadiens savent que les entreprises perdent 200 millions de dollars par jour en raison de la grève. Les Canadiens et les députés savent que les organismes de charité perdent des dizaines de millions de dollars en dons parce que c'est actuellement la période de l'année où ils recueillent le plus de fonds.

Déterminer si les postes constituent oui ou non un service essentiel ne ramènera pas nécessairement l'harmonie dans les relations de travail, mais nous savons que les Canadiens soulèveront à nouveau la question. Il est extrêmement important que nous cessions de nous inquiéter du passé pour nous tourner vers les questions de l'heure, c'est-à-dire, reconnaître que la Société canadienne des postes subira de plus en plus de pressions pour fournir un service efficace et économique à tous les Canadiens.

Le député dit que cette mesure législative est inacceptable pour le NPD. Il devrait savoir que cette grève est inacceptable pour les entreprises canadiennes qui perdent des emplois et qui ne peuvent pas obtenir les liquidités dont elles ont besoin. Il devrait aussi savoir que la grève est inacceptable pour les Canadiens qui attendent des communications de leurs parents et de leurs amis durant la période des Fêtes. Ils ne veulent pas que le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes gâte leur Noël. Ils veulent un beau Noël. Le député sait que cette situation est aussi inacceptable pour les organismes de charité. Je ne pense pas comme les néo-démocrates.

Le député a dit qu'il avait une certaine expérience dans le domaine des relations de travail. Le ministre a signalé que le règlement, qui comprend les augmentations prescrites jusqu'en février 2000, correspond à ce qui se fait actuellement dans le secteur public pour ce qui est des taux.

Les paramètres établis dans cette mesure législative correspondent aux autres ententes conclues récemment dans le secteur public. Le député pourrait-il expliquer pourquoi, selon lui, il ne convient pas d'établir les paramètres d'un contrat de trois ans dans ce projet de loi?

M. Pat Martin: Monsieur le Président, je répondrai d'abord à la question du député et je commenterai ensuite certaines de ses observations.

 

. 1140 + -

Le projet de loi ne devrait pas prévoir une convention collective de trois ans. Nous ne devrions pas avoir à voter sur cet aspect puisque les parties sont déjà convenues d'une convention collective d'une durée de deux ans. Il ne nous appartient pas davantage de fixer la majoration des taux de salaire à 1,5 p. 100, 1,75 p. 100 et 1,9 p. 100.

Comme je le disais, nous ne disposons pas d'une documentation suffisante. Nos renseignements, qui proviennent de la motion, n'ont qu'un caractère anecdotique. Nous sommes maintenant en situation de grève et il n'existe pas d'autre milieu de travail comparable dont nous puissions nous inspirer ou qui puisse servir de comparaison car le cas de la Société canadienne des postes est unique.

Nous devrions tenir compte de la rentabilité de la société ou de la capacité de l'employeur de payer. Il faut nous rappeler que la SCP a réalisé des profits de 112 millions l'an dernier. Certes, elle a connu des années plus difficiles depuis quelque temps, mais elle a cependant tenté de redresser la situation en augmentant sa part du marché. Certes, elle a perdu par-ci gagné par-là.

La SCP prévoit une croissance se situant entre 500 et 800 millions de dollars au cours des prochaines années. Elle fait une promotion active de ses produits et tente de compenser la part de marché perdue en raison des changements technologiques et diverses autre causes.

Je persiste néanmoins à croire que la Chambre n'est pas qualifiée pour rendre une décision équitable dans le cas présent. Nous pouvons toujours le faire, mais ce qu'il faudrait, c'est une solution durable. Or une loi ne nous permettra pas d'avoir une solution durable car l'hostilité et les mauvaises relations de travail persisteront néanmoins. Cette sorte de rancune aurait pu être dissipée de manière raisonnable et sensée à la table des négociations comme nous l'avions espéré.

Nous sommes sensibles à la situation des autres intérêts qui sont affectés par la grève, notamment la population, les organismes de charité et les petites entreprises. Nous sympathisons avec eux, mais les dés étaient pipés. La solution au problème existait déjà lorsque la grève a commencé et même avant. Le problème tient à la politique du gouvernement libéral qui, comme je l'ai déjà dit en des termes assez forts, prend la Société canadienne des postes pour une vache à lait en exigeant d'elles des revenus plus élevés que ses seuls coûts de revient.

Le gouvernement aurait pu tuer le problème dans l'oeuf, avant que la grève n'éclate, en modérant certaines de ses exigences de profit et nous ne serions pas aux prises avec la crise actuelle. Comme je le disais, c'est une crise artificielle.

J'espère avoir répondu à certaines des questions du député.

M. Jim Gouk (West Kootenay—Okanagan, Réf.): Monsieur le Président, j'aimerais poser une question.

Le député a dit que ce projet de loi n'était pas nécessaire. Essentiellement, cela veut dire qu'il faudrait laisser les travailleurs des postes continuer leur grève pour qu'ils puissent arriver à une entente. Je signale au député qu'une grève précédente des postes avait duré six semaines avant de se terminer finalement par une loi de retour au travail.

En moins de deux semaines, les entreprises du secteur privé ont subi un manque à gagner de 3 milliards de dollars. Le député veut-il vraiment dire que nous devrions laisser les parties continuer ainsi pendant six semaines ou même plus puisque la grève de six semaines avait été réglée au moyen d'une loi de retour au travail?

J'ai une autre question. J'ai du mal à comprendre la position du NPD. Les néo-démocrates disent qu'ils sont tout à fait contre cette mesure législative. Pourtant, ils ont acquiescé sans protester à ce qu'elle soit étudiée rapidement à toutes les étapes. Ils ont aussi accepté les délais alloués à son étude, également sans protester.

Le député peut-il expliquer pourquoi il dit, d'une part, que les néo-démocrates vont combattre cette mesure et, d'autre part, qu'ils sont d'accord pour qu'elle soit étudiée de façon accélérée à la Chambre?

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, pour répondre à la première question, disons que nous devons traiter chaque conflit de travail comme celui-ci selon ses propres mérites. Ce n'est pas parce que la grève a duré six semaines la dernière fois qu'il faut tuer celle-ci dans l'oeuf pour l'empêcher de durer aussi longtemps.

Ce raisonnement ne tient pas. Chaque cas est unique, et surtout cette année parce que les deux parties sont aux prises avec des circonstances qu'elles n'ont jamais eu à affronter auparavant.

En fait, quand je demande qu'on laisse les parties continuer leurs négociations, c'est parce que j'ai confiance qu'elles sont capables de parvenir à un règlement durable. Ma propre expérience des relations de travail me dit que tant que les anciennes plaies ne commencent pas vraiment à se cicatriser, nous sommes condamnés à répéter ce processus année après année.

 

. 1145 + -

Je ne dis pas que nous aurions dû leur permettre de faire la grève durant six semaines, six mois ou quoi d'autre. Je dis que nous aurions dû laisser la négociation collective suivre son cours sans intervenir, de manière qu'elle puisse aboutir naturellement. Ainsi, nous aurions peut-être pu rester dix ans sans que ces parties ne se trouvent à nouveau dans une impasse, plutôt que de voir ces conflits se répéter ainsi.

Le député a demandé pourquoi nous avions permis, hier, que cette motion doit déposée avec le consentement unanime. Je signale que son parti a fait la même chose. Nous l'avons fait parce qu'il y a de nombreux intérêts en jeu. Les membres du Parti réformiste, du Parti libéral et du Bloc québécois ont tous mentionné que la population canadienne voulait ravoir son service postal. L'entreprise canadienne en souffre. Les organismes de charité du Canada sont en pleine campagne de levée de fonds et ont besoin du service postal. Toutefois, il faut aussi tenir compte des intérêts des 45 000 travailleurs des postes.

Cette mesure législative devait être déposée. D'ici la fin de la semaine, les choses auraient été réglées. Nous avons utilisé tous les moyens à notre disposition pour que le règlement se fasse le plus équitablement possible. C'est la conclusion à laquelle nous sommes arrivés.

[Français]

M. Gilles Bernier (Tobique—Mactaquac, PC): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui à la Chambre dans ce débat sur le projet de loi C-24, Loi de 1997 sur la maintien des services postaux, mieux connu sous le nom de loi de retour au travail.

Je voudrais parler de la grève qui dure depuis deux semaines à Postes Canada, de la façon dont elle s'insère dans une longue série de conflits de travail à la Société des postes et de la façon dont le gouvernement actuel, loin de résoudre le problème, a contribué, par sa négligence, à l'aggraver.

[Traduction]

Premièrement, et ce qui est le plus important, je parlerai du tort que cette grève a fait aux Canadiens, de même qu'aux entreprises et aux oeuvres de bienfaisance canadiennes.

Deuxièmement, je montrerai que l'absence de leadership dans ce dossier est caractéristique de ce gouvernement qui ne fait rien pour les Canadiens.

Troisièmement, je mettrai en contraste le manque d'efficacité de ce gouvernement en ce qui concerne cette question et la compétence avec laquelle le gouvernement conservateur avait réglé une question similaire en 1991.

Enfin, je parlerai de ce que l'avenir réserve à la Société canadienne des postes et de la réelle nécessité que ce gouvernement fasse preuve de leadership dans ce domaine.

Pour quiconque a lu les journaux, écouté la radio ou regardé la télévision depuis une douzaine de jours, il n'y a pas de doute que cette grève des postiers a fait du tort non seulement à la Société canadienne des postes, mais à la plupart des 93 p. 100 de Canadiens qui utilisent encore le bureau de poste comme un important moyen de communication.

Pour les personnes qui travaillent dans des industries qui dépendent des services des postes et qui ont perdu soit leur entreprise, soit leur emploi, l'effet a été désastreux.

Mercredi dernier, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante a publié les résultats d'une enquête menée auprès de ses membres, qui montre que l'interruption des services postaux a nui à 96 p. 100 des petites et moyennes entreprises. Se basant sur des hypothèses prudentes, la FCEI estime que les pertes subies par les entreprises se chiffrent au total à plus de 200 millions de dollars par jour.

Concrètement, que signifient ces chiffres? Greg Dickie, de Delong Farms, à Truro, en Nouvelle-Écosse, a dû fermer son entreprise de vente de cadeaux et de guirlandes de Noël par correspondance et mettre à pied 100 personnes pour la saison. Robert Van Velzen, de S.S.A. Incorporated, à Markham, en Ontario, a perdu un contrat d'un demi-million de dollars avec les États-Unis pour le tri du courrier et a dû licencier une douzaine de personnes. Columbia House, qui expédie des disques compacts et des cassettes vidéo à travers le pays, a dû mettre à pied 200 personnes la semaine dernière. Télémedia Publishing est en train de perdre des centaines de milliers de dollars par semaine.

[Français]

Les propriétaires de Golfinn International, une entreprise de distribution de matériel et d'accessoires de golf, Dave et Jane Finn, qui réalisent 60 p. 100 de leur chiffre d'affaires à cette époque de l'année, ont dû mettre 17 de leurs employés à pied. Un hebdomadaire de Saskatoon, le Western Producer, qui est distribué surtout par la poste, n'a pu publier, la semaine dernière, perdant ainsi 250 000 $. D'après Terry Robinson, de Sir Mail Order Sporting Goods Ltd., son entreprise perd 25 000 $ par jour à cause de la grève.

 

. 1150 + -

[Traduction]

Globalement, l'enquête de la FCEI montre que près de 80 p. 100 des petites entreprises utilisent le télécopieur ou font appel à des services de messagerie plus coûteux. Environ les deux tiers d'entre elles font leurs propres livraisons ou ramassent elles-mêmes leur courrier. La moitié ont constaté une interruption des rentrées de fonds et un dixième d'entre elles ont dit avoir perdu des commandes.

L'Association canadienne du marketing direct évalue à des milliers le nombre de mises à pied dans son secteur. L'ACMD compte parmi ses membres de nombreux organismes caritatifs qui estiment que les dons postaux ont baissé de dix millions de dollars par jour. Par exemple, la Mission Bon Accueil de Montréal, qui fournit le gîte et le couvert à 3 100 familles chaque année, reçoit 40 p. 100 de ses revenus annuels durant le mois de décembre, par le courrier. Le directeur exécutif de la mission nous a écrit avant le début de la grève en disant: «Je peux affirmer catégoriquement qu'une grève postale aura des effets désastreux sur nos revenus et que cela entraînera une baisse des services offerts à nos clients».

Il n'est pas le seul. La United Way of Greater Toronto estime que sa campagne postale a rapporté un million de dollars de moins que prévu cette année. L'Armée du salut signale qu'elle souffre aussi de la grève. Soixante-dix pour cent de ses revenus lui parviennent par le courrier. La campagne du timbre de Noël de l'Association pulmonaire du Canada est la plus importante mesure d'appel de fonds au pays à l'époque des fêtes. Chaque année, à Noël, l'association récolte huit millions de dollars en dons, ce qui représente 80 p. 100 de ses revenus annuels. Elle se trouve maintenant quasiment en situation de crise. De même, UNICEF Canada vend près de quatre millions de cartes de Noël chaque année, lesquelles rapportent normalement 1,5 million de dollars.

Que doivent faire ces organismes cette année? Ces groupes aident des centaines et des milliers de Canadiens dans le besoin chaque année. Où se trouvait donc le ministre du Travail lorsqu'ils ont eu besoin de lui?

Mais par dessus tout, monsieur le Président, cette grève fait très mal aux Canadiens. Comme on l'a déjà dit, des milliers d'entre eux ont été mis à pied parce que le gouvernement n'est pas intervenu au début alors qu'il aurait pu empêcher le déclenchement de la grève. Pour les plus vulnérables de nos concitoyens, pour ces Canadiens qui dépendent entièrement ou en partie de l'aide du gouvernement pour vivre, cette grève est particulièrement difficile et le gouvernement a particulièrement manqué de compassion.

Le 12 août, j'ai écrit au ministre responsable de la Société canadienne des postes, l'exhortant à envisager toutes les options possibles pour distribuer les chèques du gouvernement en cas de grève des postes. En réponse à ma lettre, le ministre a signé une entente avec le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes pour que, en cas de grève, ils continuent à distribuer les chèques d'assurance-emploi, de LSPA, du RPC et autres. Malheureusement pour les Canadiens qui dépendent de ces chèques, le ministère du Développement des ressources humaines a décidé de ne pas honorer cet engagement, choisissant plutôt de mettre en place son propre système de distribution des chèques dont on peut dire, au mieux, qu'il est chaotique et, au pire, qu'il est cruel et sans compassion pour ceux qui ont besoin de cette aide pour survenir aux besoins fondamentaux des leurs et d'eux-mêmes.

Une personne qui a demandé que je ne révèle pas son nom n'a pas pu acheté d'insuline pour sa mère parce que son chèque était en retard d'une semaine. Une dame, qui conduisait son fils à l'urgence tard un soir de la semaine dernière, est tombée en panne d'essence. Sans argent pour en acheter, elle a dû faire appel à des inconnus pour emmener son fils à l'hôpital. Heureusement, il s'en est sorti.

Un gouvernement normal trouverait de telles situations si embarrassantes qu'il prendrait des mesures pour traiter ses clients avec un peu plus de respect, mais pas ce gouvernement-ci. Le pire de tout, c'est que les Canadiens qui avaient fait, dans certains cas, des centaines de kilomètres pour se rendre au centre de distribution des chèques le plus proche, le 20 novembre, ont dû signer un imprimé d'ordinateur portant le nom, le numéro d'assurance sociale et le montant du chèque de tous les prestataires de l'aide sociale de la collectivité. Suite à des plaintes, mon bureau a pu demander au commissaire à la vie privée d'enquêter et de mettre fin à cette pratique orwellienne.

Pourquoi le gouvernement permet-il, par négligence, que cette grève cause autant de tort à l'économie canadienne, aux entreprises, aux organismes de charité et à la population canadienne? Il ne s'agit pas d'un incident isolé, mais presque d'une règle au sein de ce gouvernement où il y a une absence complète de leadership, depuis la tête.

 

. 1155 + -

Lors de la période menant au référendum de 1995 sur la souveraineté, au Québec, on a demandé plusieurs fois au premier ministre de prendre la parole et de poser un geste d'unité. Il a refusé. Ce n'est que dans les derniers jours de la campagne, lorsqu'il s'est rendu compte que tout pouvait être perdu, qu'il a fait des offres symboliques au Québec. Si ce n'avait été de la générosité et de l'amour sincère pour ce pays de la part de Canadiens qui se sont rendus à Montréal, si ce n'avait été de l'engagement du chef de mon parti et de sa volonté de tout mettre en oeuvre pour le pays, tout aurait effectivement été perdu.

La conférence de Kyoto sur les changements climatiques s'est ouverte hier; tous les grands pays ont fait connaître leur position des mois à l'avance, tous sauf le Canada. Notre gouvernement a tergiversé jusqu'à hier. Des délégués d'autres pays et les organisateurs de cette conférence ont fait observer que le Canada a perdu sa crédibilité au chapitre de l'environnement.

Il y a cinq ans, le gouvernement conservateur, sous la houlette de mon chef, qui occupait alors le poste de ministre de l'Environnement, a montré que le Canada était à même de donner l'exemple au Sommet de la Terre, tenu à Rio, et ce, parce que nous étions préparés.

En 1993, sur l'avis du ministère de la Défense, le gouvernement conservateur a fait preuve de leadership et de clairvoyance quand il a décidé de remplacer les hélicoptères maritimes Labrador et Sea King vieillissants par des EH-101 neufs, dont l'électronique et les cellules seraient fabriqués au Canada. Cet achat d'hélicoptères aurait placé le Canada à la fine pointe de la technologie dans le domaine, sans qu'il en coûte un sou de plus aux contribuables canadiens. Et voilà que le gouvernement libéral a dépensé des sommes exorbitantes pour faire annuler ce contrat. Nos vieux hélicoptères ont maintenant cinq ans de plus et les Canadiens attendent toujours que le gouvernement leur dise par quoi il songe les remplacer.

Dans quelque domaine que ce soit, le gouvernement actuel préfère la procrastination au leadership, de là sa politique néfaste pour tant de Canadiens, face à la grève des postes en cours.

La commission royale sur les peuples autochtones a remis son rapport il y a plus d'un an. Quelle a été la réponse du gouvernement? Il n'a pas encore eu le temps de le lire.

Et que dire du défi de l'an 2000? Quel est le plan du gouvernement pour remettre les pendules de ses ordinateurs à l'heure afin que le système ne tombe pas en panne le 1er janvier 2000? Il n'en a pas encore. Il a dit qu'il va signer les chèques à la main si besoin est. Ce sont les propos mêmes qu'a tenus le ministre des Travaux publics il y a à peine trois semaines.

Il y a ensuite le poisson. Comme si ce n'était pas assez que les stocks de morue aient disparu et que le gouvernement n'ait rien pu négocier avec les Américains, certainement pas un traité sur le saumon du Pacifique, voilà que les fonds affectés à la stratégie du poisson de fond de l'Atlantique sont presque épuisés et le gouvernement n'a absolument aucun plan pour s'occuper des milliers de pêcheurs et de travailleurs des usines de transformation de poisson qui perdront leurs prestations l'année prochaine.

Un bon gouvernement doit faire preuve de leadership. Cependant, le gouvernement libéral est incapable de vraiment prendre l'initiative, qu'il s'agisse de poisson, d'hélicoptères, d'environnement, de peuples autochtones, de l'avenir de notre pays ou de la Société canadienne des postes.

Où peut-on trouver un exemple de véritable leadership? En octobre 1991, le gouvernement progressiste conservateur a été confronté à un conflit de travail qui ne différait pas beaucoup de celui avec lequel le gouvernement actuel est aux prises. À l'époque, la Société canadienne des postes négociait pour réunir un certain nombre de syndicats avec chacun leur propre convention collective au sein de ce qu'on appelait à l'époque le SPC, en vertu d'une convention unique. À la suite d'une série de grèves tournantes en août, le gouvernement s'est vu forcé de prendre toutes les mesures nécessaires pour permettre aux deux parties de parvenir à un règlement négocié.

Cela s'est fait en trois étapes. Tout d'abord, on a nommé un médiateur extrêmement efficace et très expérimenté, le juge en chef de la Cour supérieure du Québec, Alan Gold, qui a été nommé pour aider les parties à négocier des mini-accords dans un certain nombre de secteurs. Malheureusement, la Société canadienne des postes et le SPC ont été incapables de conclure une entente globale à ce stade-là, même s'ils avaient réussi à conclure des ententes partielles dans de nombreux domaines avec l'aide du juge Gold.

L'étape deux a été l'adoption de la Loi de 1991 sur le maintien des services postaux. Avec la fin de la médiation, les deux parties allaient bientôt être en position d'imposer un lock-out ou de déclencher une grève et le gouvernement devait empêcher que l'économie canadienne ne soit durement touchée par un arrêt de travail juste avant Noël.

Cette loi empêchait la Société canadienne des postes et le syndicat de causer des torts aux Canadiens en ayant recours à une grève ou un lock-out. Elle reconnaissait et officialisait également les ententes déjà conclues par les négociateurs durant six semaines de pourparlers avec l'aide du médiateur, Alan Gold. Cela comprenait une augmentation de salaire immédiate de 2,03 $ l'heure pour les travailleurs et un acompte sur le salaire rétroactif s'élevant à plus de 3 600 $, et tout cela sans qu'on ait à attendre la décision d'un arbitre.

 

. 1200 + -

Enfin, on a fourni aux parties un autre mécanisme de règlement des différends. La Loi sur le maintien des services postaux a prévu à cette fin le recours à l'arbitrage comme on le fait fréquemment dans le cas de services essentiels.

Tout en protégeant les Canadiens contre un arrêt de travail, en garantissant au syndicat dans la nouvelle convention des gains négociés, assortis d'une indemnisation financière accordée immédiatement aux travailleurs, et en prévoyant un moyen pour les deux parties de parvenir à une entente, cette loi a permis au STTP et à la Société canadienne de conclure une entente au cours de l'année qui a suivi.

La Loi sur le maintien des service postaux constitue un exemple de vrai leadership sur une question difficile et devrait servir de modèle à d'autres gouvernements. Cependant, lorsque nous avons communiqué avec le bureau du ministre du Travail le 30 octobre dernier, dès qu'il est devenu apparent que le processus de négociation collective avait échoué, on nous a dit de ne pas nous inquiéter, que les choses s'arrangeraient. Le fait qu'elles ne se soient pas arrangées témoigne de l'absence de leadership de la part du gouvernement et du premier ministre, qui ne fait rien, ne dit rien et attend nonchalamment de prendre sa retraite.

Malheureusement, le problème ne s'arrête pas ici. Admettons que le gouvernement réussise à faire adopter son projet de loi; nous nous retrouvons encore avec une société d'État et un syndicat dont le bilan des relations de travail ferait rougir Jimmy Hoffa. Depuis que les postiers ont obtenu le droit de grève en 1967, il y a eu au moins 11 interruptions de travail. Cela dénote une société d'État qui s'en va manifestement à la dérive et qui a perdu et son ancre et son gouvernail.

[Français]

Le gouvernement du Canada n'a aucun plan d'action pour l'avenir de Postes Canada. Les libéraux n'ont tracé, pour la société d'État, aucun plan qui tienne compte des nouveaux choix qui s'offrent aux Canadiens pour la livraison du courrier, dont les services de messagerie, le courrier électronique, les télécopieurs, et les dépôts directs.

Le gouvernement n'a pas établi de stratégie d'entreprise pour assurer le maintien du service de Postes Canada aux Canadiens, exploré des façons d'exploiter de nouveaux marchés comme le transfert d'information par voie électronique et décidé, une fois pour toutes, s'il veut privatiser Postes Canada.

Le ministre des Travaux publics n'a pas été franc à ce sujet pendant la grève, affirmant d'abord qu'il n'y aura pas de privatisation, puis menaçant le syndicat de privatiser la société d'État, avant de changer d'avis et de répéter qu'il n'en ferait rien.

[Traduction]

Le fait que le gouvernement libéral tolère une grève postale montre qu'il a été inconscient au cours des quatre dernières années. Maintenant plus que jamais, les Canadiens ont besoin d'un plan pour la Société canadienne des postes.

Le 24 novembre, à la Chambre, le ministre responsable a dit que le gouvernement avait pris connaissance du rapport sur l'examen du mandat de la Société canadienne des postes, avait répondu au rapport et confié un nouveau mandat à la société. Le ministre a ajouté qu'il était sûr qu'avec le règlement négocié ce mandat pouvait être réalisé.

Comme le ministre le sait, l'examen du mandat renfermait 31 recommandations visant à améliorer la Société canadienne des postes. Le ministre devra se pencher éventuellement sur ces recommandations, car le gouvernement n'a pas encore réagi à la majorité d'entre elles. Étant donné la crise que traverse actuellement la société d'État, il est temps que le ministre revoie ces recommandations.

Tant le rapport sur l'examen du mandat paru en octobre 1996 que le rapport subséquent de TD Securities, rendu public en avril 1997, ont relevé de graves problèmes concernant le climat de travail à la Société canadienne des postes. Même si le gouvernement connaît la situation depuis sept mois, il n'a pris aucune mesure constructive pour y remédier avant que les Canadiens ne soient confrontés à cette grève des postes.

[Français]

Nous avons vu que la crise actuelle à Postes Canada est attribuable surtout au manque endémique de leadership de la part du gouvernement actuel. Les citoyens n'ont pas manqué de se plaindre à bon nombre de députés ici présents des difficultés que cette grève inutile leur a causées.

J'ai signalé un des moyens utilisés par le gouvernement conservateur antérieur pour régler un grave conflit de travail à Postes Canada et comment on aurait pu éviter complètement cette interruption du service. Vous avez entendu le récit des difficultés persistantes d'une société d'État qui ne reçoit guère d'instructions de son actionnaire.

[Traduction]

Bien sûr, la réalité, c'est que la Société canadienne des postes n'appartient pas vraiment au gouvernement. Elle appartient aux Canadiens. Le gouvernement doit aux Canadiens de s'asseoir pour élaborer une politique pratique, réaliste et exhaustive à l'égard des postes au Canada, au lieu de l'approche fragmentaire qu'il a adoptée jusqu'à maintenant.

 

. 1205 + -

M. Jim Gouk (West Kootenay—Okanagan, Réf.): Madame la Présidente, je suis passablement d'accord avec ce que le député a dit au sujet de la Société canadienne des postes. Cependant, je ne veux certainement pas lui donner raison pour tout ce qu'il a dit.

Je ferai très rapidement remarquer que le gouvernement conservateur précédent a mis fin par une loi à une interruption des services postaux en 1987 et de nouveau en 1991. Dans les deux cas, il a reconnu qu'il était essentiel de laisser circuler le courrier dans notre pays. Il a réagi en faisant adopter une mesure législative. Cela n'a manifestement pas résolu le problème puisque nous voici de nouveau confrontés en 1997 à une autre grève postale et saisis d'une autre mesure législative pour y mettre fin.

Le député regrette-t-il que son parti n'ait pas apporté une solution permanente à ce problème de sorte que nous n'ayons pas constamment à adopter pareille mesure année après année. Regrette-t-il également que le gouvernement libéral n'ait rien fait pour apporter une solution permanente au problème? Appuie-t-il la position du Parti réformiste qui soutient que nous avons besoin d'une solution permanente à cette interruption de travail de sorte que les Canadiens puissent compter de nouveau sur la livraison de leur courrier?

M. Gilles Bernier: Madame la Présidente, je suis heureux que le député du Parti réformiste soit d'accord sur la majeure partie de ce que j'ai dit. J'aurais été encore plus heureux s'il avait été d'accord sur toute la ligne.

Pour répondre à ses questions, je dirai que, si nous formions le gouvernement, nous irions un peu plus loin, car nous croyons que les postes sont un service essentiel. En 1967 ou 1969, les États-Unis ont légiféré pour rendre illégales les grèves des postiers.

Cette grève qui survient à la veille de Noël, à combien d'entreprises a-t-elle causé du tort, combien d'emplois a-t-elle fait disparaître? Qu'on pense aux enfants. Le Père Noël compte beaucoup pour eux. Ils ne sont même pas sûrs de pouvoir lui écrire. Je ne crois peut-être pas au Père Noël, mais beaucoup d'enfants y croient.

Je désapprouve totalement la décision du gouvernement d'attendre si longtemps. L'économie du pays a été presque paralysée par la grève qui dure depuis une semaine et demie. La Société canadienne des postes perd 20 millions de dollars par jour. J'ai été dans les affaires pendant une quinzaine d'années. Je ne connais pas une société ou une entreprise qui puisse absorber des pertes semblables. Je n'en connais pas une seule. Pourtant le gouvernement s'est comporté comme un zombie pendant tout ce processus et a attendu à cette dernière semaine et demie pour agir.

D'après les états financiers de l'an dernier, la Société canadienne des postes a déclaré des bénéfices de 112 millions de dollars. Cinq jours de grève auront suffi à faire disparaître tous les bénéfices de cette année. Qui va payer la différence cette année, puisque la société, loin de réaliser des bénéfices, va être déficitaire?

Une voix: Le gouvernement.

M. Gilles Bernier: C'est donc le tour du gouvernement. C'est lui qui va payer la note. Mais le gouvernement, c'est qui? C'est le peuple canadien. Assez, c'est assez. Nous sommes ici pour faire un travail. Faisons en sorte que l'argent soit bien dépensé et utilisé aux bonnes fins. Je suis heureux de constater ce matin que nous allons légiférer pour que les services postaux reprennent. Nous n'avons tout simplement pas les moyens que la société perde 20 millions de dollars par jour.

[Français]

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Madame la Présidente, je désire poser une question à mon collègue mais, juste avant, j'aimerais faire quelques commentaires, surtout que je sympathise avec les petites entreprises qui souffrent à cause de cette grève. Par contre, il ne faut pas oublier que nous, les Canadiens et les Canadiennes, selon la Charte canadienne des droits et libertés, avons le droit de nous syndiquer.

 

. 1210 + -

Le gouvernement a déposé une législation avec certains mandats qui, encore une fois, attaquent les travailleurs et les travailleuses, et c'est regrettable. Alors, j'aimerais bien savoir, en réponse à une de mes questions, si le Parti conservateur serait prêt à proposer des amendements et à se battre contre ce que le gouvernement est en train de faire.

Ce n'est pas vrai que si le gouvernement veut adopter une législation contre les travailleurs et les travailleuses pour les faire retourner au travail, cela punira seulement les travailleurs et les travailleuses. C'est une honte aujourd'hui de voir ce qui est déposé à la Chambre. C'est un recul des négociations qui avaient déjà eu lieu entre l'employeur et l'employé et un recul au niveau des salaires.

J'aimerais poser une question à mon collègue du Parti conservateur. Il dit qu'il ne veut plus qu'il y ait de grève aux Postes. Alors, confirme-t-il, devant les Canadiens et les Canadiennes, les travailleurs et les travailleuses, qu'il est contre la libre négociation pour tous les postiers? Est-ce que c'est ce qu'est en train de dire mon collègue?

Je veux que soit consignée la position des conservateurs, à savoir qu'ils sont contre le fait que les travailleurs et les travailleuses des Postes n'aient pas droit à ce que les autres Canadiens et Canadiennes ont droit, c'est-à-dire le droit de grève et être capables de faire la grève jusqu'au bout.

Qu'a été leur opinion quand le gouvernement, vers le 6 août, s'est mêlé de la négociation et a laissé savoir à l'employeur qu'il n'y aurait pas de problème s'il y avait une grève, parce qu'il songeait déjà à présenter une législation sur le retour au travail? Ce n'est pas comme cela que devraient se dérouler les négociations. Avec mon expérience des syndicats et des négociations, quand une troisième partie avec un certain pouvoir vient se mettre le nez dans ce qui ne la regarde pas, je vous garantis que cela ne donne pas une bonne négociation.

Alors, j'aimerais entendre la réponse de mon collègue du Parti conservateur.

[Traduction]

M. Gilles Bernier: Madame la Présidente, je remercie le député néo-démocrate du Nouveau-Brunswick pour la question qu'il me pose. Nous ne sommes pas du tout contre les syndicats, mais nous devons être responsables.

Le syndicat à la Société canadienne des postes représente 45 000 travailleurs. La Société canadienne des postes a perdu des millions et des millions de dollars. Les entreprises ont perdu des millions de dollars. Les oeuvres de bienfaisance ont perdu des millions de dollars et que dire des 29 millions de Canadiens qui méritent de recevoir leur courrier?

Il existe une loi au Canada qui interdit aux policiers de faire la grève. Nous croyons que la Société canadienne des postes offre un service essentiel, tout comme les agents de police. Je ne suis pas contre le syndicat. J'appuie le syndicat dans certains cas, mais il faut des négociations justes et équitables.

Cette grève traîne depuis une semaine et demie. Combien de millions de dollars de plus le député veut-il faire perdre aux Canadiens et à la Société canadienne des postes? Jusqu'où la grève doit-elle aller pour que le député se rendre compte qu'il leur est impossible de conclure une entente? Il faut que cela aboutisse.

Mon collègue devrait comprendre que nous sommes tous ici, en tant que députés, pour faire notre travail et représenter les Canadiens. Les mots suivants que je vais prononcer sont très importants. Il faut agir dans l'intérêt de tous les Canadiens et non seulement du syndicat, tous les Canadiens. Tant que le député ne pourra faire la distinction entre quelques milliers de travailleurs et l'ensemble des Canadiens, il aura des problèmes à la Chambre.

M. Jerry Pickard (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Madame la Présidente, c'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai écouté les observations de mon collègue, notamment en ce qui concerne le service essentiel.

J'ai un peu de mal à comprendre que le parti de mon collègue, qui a été au pouvoir pendant neuf ans, soit de 1984 à 1993, n'ait pas profité de l'occasion pour présenter un projet de loi prévoyant que la Société canadienne des postes offre un service essentiel et que ses employés ne peuvent pas faire la grève. Maintenant que ce parti siège dans l'opposition, il dit exactement le contraire de ce qu'il disait lorsqu'il formait le gouvernement. Cela me pose un problème et je me demande si mon collègue peut expliquer le fait qu'il a dit une chose de 1984 à 1993 et qu'il dit maintenant le contraire.

 

. 1215 + -

Une voix: Il n'était pas ici.

M. Jerry Pickard: Son parti y était.

La Présidente suppléante (Mme Thibeault): Nous en sommes au débat.

M. Jerry Pickard: Madame la Présidente, je croyais que nous en étions aux questions et aux observations. Je ne vous ai pas entendu annoncer la reprise du débat. Je croyais que j'avais la parole pour poser des questions ou présenter des observations. Le député pourrait-il avoir la chance de répondre avant que le débat ne reprenne?

[Français]

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je reconnais l'honorable député de Tobique—Mactaquac, s'il veut répondre, mais très brièvement.

[Traduction]

M. Gilles Bernier: Madame la Présidente, je comprends la question de mon collègue d'en face. Cela vaut pour les deux côtés. En 1987 et 1991, nous étions au pouvoir. Nous avons adopté une loi de retour au travail avant même qu'ils ne fassent la grève. Il n'y a pas eu de grève. Le gouvernement du député l'a appuyée. Cela incluait le premier ministre, le ministre des Finances, le ministre du Travail, le ministre des Travaux publics. Ils étaient tous d'accord. Le problème, aujourd'hui, avec le parti du député, c'est qu'il a laissé la grève traîner pendant une semaine et demie. La Société canadienne des postes pourrait perdre 20 millions de dollars par jour, ce qui n'est pas rien.

M. Jerry Pickard (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Madame la Présidente, je partagerai mon temps avec le député de Mississauga-Ouest.

Voyons quelle est la raison d'être du débat, en quoi consiste le projet de loi et ce sur quoi ont porté les négociations jusqu'à maintenant. Elles concernent la gestion et la direction du milieu de travail. Il ne fait absolument aucun doute que la gestion et la direction du milieu de travail sont, en fin de compte, des questions très importantes.

Selon le mandat que le gouvernement a prévu pour les services postaux canadiens, ces derniers doivent être auto-suffisants, c'est-à-dire qu'ils doivent fonctionner conformément à la méthode la plus productive et rentable possible, pour assurer à l'ensemble des Canadiens un service postal à un coût raisonnable. En entamant des discussions sur les orientations gouvernementales, il est très important de comprendre que le gouvernement a dit à la Société canadienne des postes qu'il n'y aurait pas d'augmentation cette année ni l'an prochain. C'est là le mandat clair conféré par le gouvernement. Nous avons une ligne de conduite à suivre: veiller à ce qu'il n'y ait pas d'augmentation et assurer des services efficaces et améliorés, si possible.

Voyons l'autre aspect de la question. Le syndicat a le manuel à l'intention des travailleurs de la Société canadienne des postes, qui fait état de sa constitution nationale. Je vais présenter l'énoncé suivant, car c'est un élément capital pour comprendre pourquoi les négociations ont été rompues: «Le syndicat considère comme une orientation prioritaire la prise en main du milieu de travail par les travailleurs. Ce principe garantit que le syndicat et ses membres chercheront, en tout temps, à limiter le pouvoir de l'employeur d'organiser leur travail ainsi que les méthodes de production et la planification de leur travail. Le syndicat cherchera plutôt à ce que ses membres aient la pleine maîtrise du travail qu'ils effectuent et du milieu dans lequel ils l'effectuent.»

Dans cet énoncé, le syndicat dit que la Société canadienne des postes ne dirigera plus l'entreprise, que c'est le syndicat qui s'en chargera. Le syndicat dit qu'il n'acceptera pas que quelqu'un d'autre ait un droit de regard sur ses emplois ou sur les orientations qu'il adopte. Il entend contrôler le milieu de travail et tout ce que ses membres y font. La Société canadienne des postes ne peut gérer ce milieu de travail ni pénaliser les travailleurs qui ne s'acquittent pas de leurs fonctions.

 

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Nous avons travaillé très fort pour faire aboutir les négociations. Nous avons tenté la médiation et la conciliation. Nous avons laissé toute la latitude au syndicat et à la SCP pour qu'ils s'entendent. Cependant, compte tenu de l'attitude du syndicat et de ce que dit sa constitution nationale, à savoir que la SCP ne doit plus exercer aucun contrôle sur elle-même, un projet de loi a dû être présenté. Nous avons été forcés d'examiner attentivement la situation.

Le temps du retour au travail est arrivé. Nombre de Canadiens souffrent à cause de la grève postale. Celle-ci fait mal aux organismes de charité qui comptent sur la période des Fêtes pour recueillir la plus grande partie de leurs fonds. La grève fait mal à des milliers de petites entreprises qui ont grand besoin du service postal. La grève fait mal à des centaines d'entreprises qui vendent leurs produits par correspondance et qui, dans la plupart des régions du pays, font la plus grande partie de leurs ventes dans le mois précédant Noël. La grève fait mal aux employés d'entreprises qui sont forcées de faire des mises à pied. Bref, la grève fait mal à une foule de Canadiens dans tous les secteurs d'activité.

Je voudrais parler des terribles effets que cette grève a sur les organismes de charité. Ces organismes sont au service des plus vulnérables de la société et dépendent de la générosité des Canadiens pendant la période des Fêtes pour la plus grande partie de leur financement. En effet, ces organismes font la plus grande partie de leur collecte de fonds par la poste. C'est la méthode la plus abordable et la plus pratique pour recueillir des fonds servant à venir en aide aux Canadiens. Les organismes de charité ont été gravement touchés par l'incertitude des dernières semaines.

Je voudrais donner des exemples à la Chambre de ce que la grève signifie pour les organismes de charité du pays.

La coordonnatrice du programme de timbres de Noël en Alberta, Audrey Hamm, a dit que l'association pulmonaire de l'Alberta a besoin de la SCP pour l'acheminement de 95 p. 100 de ses dons. Mme Hamm a ajouté qu'une longue grève postale se traduirait sans doute par une diminution de quelque 50 p. 100 des recettes de l'association.

Nicole Mirault de la Société canadienne du cancer a dit: «Nous risquons la catastrophe. Au Québec seulement, des millions de dollars nous arrivent par la poste tous les ans. Nous n'avons pas les moyens de recourir à des services de messageries. Nous recourons exclusivement au service des postes. Par conséquent, nous serons durement touchés.»

L'Inter-faith Food Bank, de Calgary, comptait recueillir près de 100 000 $ en dons postaux cette saison, mais les gens n'envoient pas de dons de Noël à cause de l'incertitude.

Résultat, ces organismes, qu'il s'agisse de l'UNICEF ou de l'association pulmonaire, sont durement touchés parce qu'ils ne reçoivent pas de dons.

Même les organismes qui ont réussi à poster leurs lettres de sollicitation avant le déclenchement de la grève ne reçoivent pas de dons en ce moment. Si les organismes de charité ne reçoivent pas les dons pour Noël, il se pourrait bien qu'ils ne les reçoivent jamais.

Le moment est très important. Nous devons rétablir les services postaux pour que ces organismes puissent recevoir le soutien des généreux Canadiens et avoir l'assurance qu'ils pourront faire pendant la période des fêtes ce qu'ils font habituellement pour les Canadiens.

Du côté des entreprises, il est évident que plusieurs secteurs commerciaux sont touchés. Selon le sondage effectué la semaine dernière par la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, les petites et moyennes entreprises perdent 200 millions de dollars chaque jour en raison de la grève. Tout le monde reconnaît que ces entreprises sont le moteur de notre économie. Elles créent des possibilités pour des millions de Canadiens, pourtant, la grève leur a déjà coûté deux milliards de dollars.

Chaque heure qui passe coûte des millions à notre économie. Lorsque nous parlons des coûts économiques, nous pensons surtout en termes de dollars, mais il y a d'énormes coûts humains aussi. Ces dernières semaines, des entreprises qui dépendent de la poste ont mis des milliers de Canadiens à pied. Sans la Société canadienne des postes, beaucoup d'entreprises de vente par correspondance, d'entreprises qui comptent sur le publipostage et d'autres ont tout simplement dû cesser leurs activités et mettre leurs employés à pied.

 

. 1225 + -

Je vous donne quelques exemples. Le Western Producer, un nom familier pour les habitants de l'ouest du Canada, compte sur la poste pour rejoindre ses lecteurs. Il n'a pas été publié la semaine dernière, ce qui lui a fait perdre tous les revenus en publicité et en abonnements d'une semaine. Le journal a donc dû mettre à pied 65 de ses 80 employés.

Columbia House, l'une des entreprises de vente par correspondance les mieux connues au Canada, a mis à pied 200 de ses 400 employés la semaine dernière. Les mises à pied se poursuivront si la grève dure encore.

Il y a aussi GWE, une entreprise de vente par correspondance de Calgary qui emploie 1 500 Canadiens d'un océan à l'autre. La semaine dernière, elle en a mis à pied 700 et ce n'est peut-être pas fini.

Golfinn International, une entreprise de vente par correspondance qui se spécialise dans l'équipement de golf, a dû mettre à pied 17 de ses employés à cause de la grève.

La survie de bien de nos petites entreprises dépend de la période de Noël. Il reste à voir si nous nous remettrons ou non des effets de cette grève. La grève des postes a forcé bien des entreprises à faire des mises à pied. Il y a un coût économique à cela. Les gens qui ont été mis à pied ne dépenseront pas d'argent durant la période des Fêtes et, dans bien des cas, c'est le public qui en souffre.

Mais il y a aussi un coût humain énorme. Enfin, j'en arrive à la décision du syndicat de ne pas appuyer une mesure législative de retour au travail. Nous avons reçu environ 1 600 appels téléphoniques à notre bureau la semaine dernière, par l'intermédiaire du bureau du ministre, et 96 p. 100 de ces gens étaient en faveur d'une loi de retour au travail. Quatre-vingt-seize pour cent des Canadiens demandent au gouvernement d'adopter une loi de retour au travail, tandis que seulement 4 p. 100 appuient la grève.

Nous avons donné au processus de négociation collective une chance de réussir, mais, comme ce processus est actuellement dans une impasse, nous savons que le moment est venu de forcer les employés des postes à retourner au travail.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Madame la Présidente, on ne pourra jamais reprocher aux libéraux de manquer d'audace. Le député qui vient de prendre la parole en face a parlé de douzaines d'organismes de charité qui sont affectés par la grève. J'ai vu dans le Globe and Mail de ce matin une annonce dans laquelle l'hôpital pour enfants malades de Toronto invitait les gens à envoyer leurs dons par télécopieur ou par téléphone, mais indiquait par ailleurs qu'il lui était impossible, en raison de la grève, d'envoyer ses lettres de collecte de fonds comme à l'habitude.

Le député a dit que la grève actuelle coûte des milliards de dollars à l'économie et que des travailleurs ont été mis à pied. Il a cependant oublié de dire que la situation actuelle aurait pu être évitée parce que le gouvernement avait les moyens de prévenir la grève.

Le gouvernement aurait pu accepter la proposition du Parti réformiste et permettre le recours à un nouveau mécanisme de règlement, l'arbitrage des propositions finales, pour prévenir le gâchis actuel. Le gouvernement, trop avisé, a préféré laisser les Canadiens supporter deux semaines de cette grève des postiers qui a, de surcroît, empêché les organismes de charité de recueillir des fonds pour toutes leurs précieuses oeuvres à l'approche de Noël. Les libéraux se félicitent maintenant d'avoir eu le courage, deux semaines plus tard, de légiférer pour forcer les postiers en grève à retourner au travail.

Nous tournons en rond. C'est complètement ridicule.

Si mon collègue veut s'attribuer le mérite de la loi de retour au travail, va-t-il aussi assumer la responsabilité des dommages que lui et son gouvernement ont causés en n'agissant pas plus tôt?

M. Jerry Pickard: Madame la Présidente, il est essentiel que le Parti réformiste se rende compte qu'il existe au Canada un système de négociations collectives. Ce qu'il propose de faire revient à dire qu'aucun processus de négociation collective n'est acceptable.

Il existe un système, et ce système doit être maintenu. Nous devons donner au système la possibilité de régler les problèmes. Comme le ministre du Travail l'a dit cette semaine alors que les postiers étaient en grève, notre objectif est ultimement de veiller à ce que le syndicat et la Société canadienne des postes aient la possibilité de trouver ensemble une solution au différend qui les oppose. C'est dans l'intérêt des Canadiens à long terme. Légiférer le retour au travail des travailleurs n'est pas l'objectif, contrairement à ce que les réformistes veulent laisser entendre. L'objectif, c'est de faire en sorte que les travailleurs et la société règlent le différend qui les oppose et arrivent à une solution qui soit acceptable pour toutes les parties.

 

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Cependant, nous rendant compte qu'il était impossible d'arriver à cet objectif à court terme, nous avons décidé de présenter une mesure législative afin de forcer le retour au travail des postiers. C'est nécessaire compte tenu du tort que cause cette grève.

Nous avons présenté cette mesure législative une semaine après le début de la grève. Nous étions tenus à un préavis de quarante-huit heures et nous l'avons donné vendredi dernier.

La question n'est pas de mettre fin au système de négociations collectives, ainsi que le suggère le Parti réformiste. Les réformistes ne veulent plus de négociations collectives dans ce pays. Ils veulent y mettre fin, et légiférer le retour au travail de tous les travailleurs, que ce soit dans la fonction publique ou ailleurs, qui ne sont pas d'accord sur le processus.

[Français]

La présidente suppléante (Mme Thibeault): L'honorable députée de Saint-Bruno—Saint-Hubert dispose de 30 secondes pour poser une question.

Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno—Saint-Hubert, BQ): Madame la Présidente, c'est un peu court, 30 secondes. J'interviens aujourd'hui spécialement en cette Chambre afin de signifier mon appui au projet de loi du gouvernement visant à mettre un terme à la grève des Postes. Cette grève, qui entreprend sa troisième semaine, ne va en ce moment nulle part. Devant l'impasse, il est impératif d'agir, considérant que la Poste est un service public nécessaire au bon fonctionnement de notre économie.

Je ne poserai pas de question pour l'instant, puisque le temps est trop court, mais je poursuivrai le débat plus tard.

[Traduction]

M. Jerry Pickard (Kent—Essex, Lib.): J'apprécie certainement le fait que le Bloc admette qu'il fallait imposer cette loi de retour au travail à cette étape du conflit.

Je crois que les bloquistes ont dit, par ailleurs, que nous devons permettre la poursuite de la négociation collective sur des bases raisonnables. C'est une position équilibrée. Nous avons présenté ce projet de loi aussi rapidement qu'il était raisonnable de le faire.

M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Madame la Présidente, j'aimerais faire quelque chose d'inhabituel dans le cadre de ce débat. J'aimerais parler du projet de loi dont nous sommes saisis, en commenter certains aspects et dire pourquoi nous en sommes arrivés là.

Permettez-moi de dire pour commencer que le Parti réformiste n'a pas inventé ce qu'il appelle l'arbitrage des propositions finales. Il ne devrait pas faire la leçon au gouvernement et lui rappeler qu'il lui avait bien dit qu'il devrait adopter ce système. L'arbitrage des propositions finales est un processus qui existe depuis un certain temps. Il permet aux deux parties engagées dans des négociations de mettre sur la table des questions claires et définissables.

Le problème dans le cadre de négociations comme celles-ci c'est qu'il y a beaucoup de questions qui ne sont pas noires ou blanches. S'il s'agit simplement de revendications salariales, le syndicat met son offre sur la table, la société présente la sienne et l'arbitre choisit l'une ou l'autre. Il n'y a pas de position médiane.

Ce n'est pas le cas lorsqu'on essaie de définir les routes postales, et la façon de distribuer le courrier. Ce sont des questions qui nécessitent des négociations beaucoup plus subtiles.

Je conviendrais toutefois que l'arbitrage des propositions finales est un instrument efficace quand la question est simple et claire. Les deux parties n'ont qu'à se présenter avec leur offre la plus raisonnable et la plus susceptible de conduire à un règlement.

Ce n'est pas le cas dans le conflit actuel. En fait, madame la Présidente, demandez-vous pourquoi nous en sommes arrivés là. Pourquoi le mouvement syndical est-il en train de devenir si militant? Selon moi, c'est précisément à cause du programme de droite que poussent dans ce pays, et plus particulièrement en Ontario, des partis comme le Parti réformiste ou le Parti conservateur.

Une voix: Et votre programme de gauche, il aboutit à quoi?

M. Steve Mahoney: Il n'est pas question de la gauche. C'est ce que le député se refuse à comprendre. Pour procéder à des négociations collectives, il faut viser la justice et l'équilibre et reconnaître que les droits des travailleurs doivent être protégés. Dans le présent cas, les droits de la population canadienne doivent aussi être protégés.

 

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Nous assistons à une croissance du militantisme. Nous entendons les chefs syndicaux clamer qu'ils vont défier la loi, bloquer les ponts, fermer les aéroports et obstruer les autoroutes. Je dirais à ces chefs syndicaux que leurs propos sont totalement irresponsables.

Ils ne rendent pas service à la remarquable tradition qui existe au sein du mouvement ouvrier de notre pays, une tradition dont les composantes de base ont contribué à assurer la force de notre économie. Aucun chef syndical qui se respecte n'a poussé une entreprise à la faillite en essayant d'obtenir une meilleure convention pour les travailleurs. C'est assez fondamental; une telle attitude serait insensée.

Je prie les chefs en cause dans ce conflit de tempérer leur propos et de ramener les travailleurs et les travailleuses des services postaux au travail afin de rétablir la paix et l'harmonie dans les relations de travail à la Société canadienne des postes.

Certains laissent entendre que nous sommes parvenus à cette solution un peu trop rapidement et sans réfléchir. Rien ne saurait être plus faux. En juillet dernier, le gouvernement fédéral a fait appel à des agents de conciliation fédéraux pour essayer de résoudre les points de différend entre les parties. En octobre dernier, le gouvernement fédéral a nommé un commissaire-conciliateur. Le mot conciliation lui-même devrait transmettre un message clair, signifiant que le gouvernement a essayé de prévenir la situation où nous nous trouvons maintenant. Cela signifie que le gouvernement veut tenter de concilier les demandes du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes et de la Société canadienne des postes, afin que la livraison du courrier ne soit pas interrompue au pays.

La solution des extrémistes de droite, ici et dans le reste du pays, est tout simplement de privatiser des institutions comme la Société canadienne des postes et la SRC. Nous avons un pays particulier, un pays qui a besoin d'un service public pour donner à tous les Canadiens un service équitable et juste. On ne peut pas laisser cela au secteur privé. Je n'ai rien contre, j'appuie même, un certain degré de concurrence dans le domaine de la livraison du courrier, et nous en avons. Le courrier électronique devient de plus en plus important. Les entreprises utilisent des services de messagerie. Essentiellement, tout comme nous avons besoin d'une SRC forte, nous avons besoin d'un service postal fort pour livrer le courrier d'un océan à l'autre. Nous n'avons pas besoin de solutions simplistes, tout en noir et blanc, comme celles que nous proposent les députés d'en face.

Nous avons tenté la conciliation. Le gouvernement avait nommé M. Marc Gravel, une tierce partie respectée et neutre. Il a fait de son mieux, mais en fin de compte il a dû admettre qu'il ne trouvait pas de terrain d'entente, pas de solution. Après le début de la grève, le gouvernement a nommé un Canadien très distingué, j'espère que tous les députés le reconnaîtront, M. Warren Edmondson, le 24 novembre, en lui demandant de voir s'il ne pourrait pas trouver un terrain d'entente entre les parties. Il n'a pas pu le faire. C'est pour cela qu'il y a grève.

Que peut faire le gouvernement? Nous avons essayé la conciliation. Nous avons essayé la médiation avec des Canadiens compétents et respectés. La direction du syndicat s'est opposée, a fulminé et opté pour la grève. J'ai parlé à des employés des postes de ma circonscription, et ces hommes et ces femmes en grève demandaient qu'on présente une loi de rappel au travail. C'est la période de Noël. Ils s'inquiètent pour leur famille. Ils ont des salaires raisonnables de l'ordre de 17 $ de l'heure, jusqu'à un maximum de 17,41 $. Ils n'ont pas envie de passer les fêtes de Noël à faire le piquet, sans pouvoir faire vivre leur famille.

 

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Nous voyons de plus en plus que ce ne sont pas les syndiqués de la base qui mènent le bal dans les conflits de travail. C'est pourtant ce que voudraient nous faire croire les leaders syndicaux. Oui, c'est la vérité, quoi qu'en pensent les députés d'en face.

Je sais passablement ce que je dis puisque j'ai été élevé par un syndicaliste. J'étais à Sudbury quand les travailleurs de l'acier ont pris pour cible le syndicat des travailleurs des mines et des fonderies. J'avais alors seize ans et j'amenais mon père à Sudbury où il devait prendre la tête de l'opération. Je pensais que c'était formidable. Je croyais qu'il s'agissait de pourchasser des communistes. C'est ce qu'on nous avait dit. Nous allions à Sudbury, au syndicat des mines et fonderies, pour chasser tous les communistes. Les députés savent-ils ce que nous pourchassions? Nous pourchassions d'autres membres. Est-ce que les députés savent pourquoi? Pour les cotisations. C'était pour remplir les coffres.

Je signalerai aux députés que les chefs syndicaux qui sont partie à ce différend brandissent le chiffre de 4 000 emplois. Il s'agit de savoir calculer un peu. Quelque 50 dollars par mois par syndiqué, est-ce que ça ne fait pas une jolie somme au bout du compte? Or, l'argent c'est le pouvoir, et le pouvoir exercé dans les négociations collectives tente de plus en plus les leaders syndicaux militants.

J'implore les syndicats de la base de comprendre que, même si on a évoqué la situation des institutions charitables et celle des petites entreprises, c'est précisément aux hommes et aux femmes que les leaders syndicaux prétendent vouloir protéger que la grève fait le plus mal.

Car les grandes sociétés s'en soucient comme de l'an quarante. Les grandes sociétés auxquelles les leaders syndicaux prétendent s'attaquer, s'en moquent parce qu'elles ont des solutions de rechange. Elles peuvent faire appel à leur propre personnel ou à des services de messagerie. Elles ont des solutions de rechange. Ce sont les petites entreprises, les institutions charitables et les gens ordinaires qui sont les plus durement touchés. Et c'est pourquoi il est du devoir du gouvernement de mettre fin à cette grève.

Je voudrais terminer en disant que j'espère que les syndiqués de la base comprendront que nous voulons y mettre fin de façon équitable et en accordant une augmentation salariale raisonnable. Nous croyons que c'est ce que fera ce projet de loi. Nous attendons avec impatience que les services de distribution postale reprennent de plus belle dans tout le pays.

[Français]

M. Ghislain Fournier (Manicouagan, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec attention mon collègue de Mississauga-Ouest, et franchement, je n'ai pas retiré grand encouragement des propos de ce député.

À l'heure actuelle, nous sommes en train de faire le procès des postiers. On démontre le plus grand mépris que j'ai jamais vu à l'égard des postiers. Ce gouvernement accuse et condamne les seuls responsables de la situation actuelle, les gros méchants, les travailleurs et le syndicat. Selon lui, ceux-ci n'ont pas de responsabilité, ils ne sont pas de bonne foi, alors que lui, il est de bonne foi. Le gouvernement est bon, mais les travailleurs n'ont pas le sens des responsabilités.

Pourquoi est-ce qu'on a fait semblant de leur accorder le droit de grève? Si vous regardez les arguments que vous avez apportés à l'époque où vous avez donné le droit de grève, c'était un droit sacré, parce que les travailleurs avaient le droit de se battre pour leurs conditions de travail, pour leur famille, comme citoyens de ce pays.

Aujourd'hui, on fait semblant de leur donner le droit de grève. Si on le leur enlève, alors pourquoi le leur a-t-on donné? Si vous pensez qu'ils n'ont pas le droit de grève, vous n'avez qu'à le leur enlever. Est-ce que vous avez la volonté, le courage de le faire? Là, vous leur enlevez ce droit. C'est inconcevable.

Vous êtes en train de faire le procès des postiers, sans qu'ils puissent se défendre. Vous êtes ici et vous les accusez de tout. Le scénario est très bon. Mon collègue, le leader du Bloc québécois à la Chambre, l'a dit ce matin, s'il y a un responsable à identifier, c'est le ministre responsable de la Société canadienne des postes. Et je suis du même avis.

Ce gouvernement, même le premier ministre, a tout arrangé d'avance. Là, le gouvernement se donne bonne bouche, bonne figure. Il dit: «Voyez, les travailleurs sont méchants. Je présente une loi pour les faire retourner au travail. Je suis bon, je les fais retourner au travail. Je redonne la paix aux travailleurs.»

 

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Pourquoi leur avez-vous donné le droit de grève si, aussitôt qu'ils veulent l'exercer, vous le leur retirez, après le leur avoir accordé à la suite de toutes sortes d'argumentations?

[Traduction]

M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, je me réjouis de ne pas avoir encouragé un député du Bloc. Une des raisons pour lesquelles je ne l'ai pas encouragé, lui ou les députés du NPD, c'est que, manifestement, ils n'écoutaient pas.

Je ne fustigeais pas les travailleurs de la Société canadienne des postes. Je parlais des dirigeants du syndicat, des gens qui contestent et disent qu'ils vont fermer les aéroports, les ponts et les routes. Dans quelle genre de démocratie croient-ils que nous vivons?

Le gouvernement est élu et a tous les droits et toutes les responsabilités nécessaires pour régler le conflit. La question des droits et l'activité syndicale vont bien au-delà du simple droit de grève. Il y a le droit de s'organiser. Les conseils des relations de travail, fédéraux et provinciaux, ont des règlements. Leurs membres ont le droit d'oeuvre dans un syndicat pour améliorer les conditions de travail de leurs collègues. Mais ils n'ont pas le droit d'enfreindre la loi. Personne ne possède ce droit.

En outre, je crois de tout coeur que les syndiqués de la base ne veulent pas cette grève. Ils veulent retourner au travail et toucher leurs chèques de paye pour pouvoir avoir un Noël convenable et offrir un bonne qualité de vie à leurs familles. Nous appuyons les syndiqués de la base. Nous n'appuyons pas le militantisme des dirigeants de ce syndicat.

M. Dick Harris (Prince George—Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, toute la journée, on va, sans aucun doute, voir des députés libéraux intervenir pour essayer de se faire passer pour les bons gars et de s'attribuer le mérite de la fin de la grève.

En fait, c'est le gouvernement qui est responsable de cette grève, de ce gâchis. Depuis sept mois, il sait que la Société canadienne des postes et le syndicat sont dans une impasse, que les deux parties restent sur leurs positions et ne veulent faire aucune concession. Les arbitres ou les conciliateurs qu'on a nommés ont dit la même chose au gouvernement. Qu'a fait ce dernier? Rien. Le gouvernement a dit qu'il fallait attendre, et c'est ce qui a entraîné cette grève.

Étant donné ces pertes de temps qui nous ont conduits à cette grève et étant donné l'argent que cela a coûté aux familles canadiennes et aux entreprises canadiennes, que peut dire le député à ceux qui ont subi tant de torts et perdu autant d'argent? Leur dirait-il que cette temporisation était une bonne idée?

M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, je leur dis exactement ce que j'ai précisé dans mon discours. Nous avons essayé d'offrir des services de conciliation et de médiation.

Ce que les réformistes ne comprennent pas, c'est que sitôt qu'on fait appel à un médiateur, on perd le contrôle des négociations collectives. Voyons les faits. En général, au Canada, la médiation conduit à une augmentation des coûts dans le cadre de conflits de travail. Si c'est la solution que le Parti réformiste souhaite, cela voudra dire une augmentation des coûts de la Société canadienne des postes.

Nous préférons un règlement négocié. Cependant, puisque les parties ont été incapables de négocier une convention, nous devons assumer nos responsabilités et assurer la reprise des services postaux au Canada.

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir en faveur du projet de loi sur le retour au travail, dont la Chambre est saisie aujourd'hui.

Pendant 15 ou 16 ans, j'ai rencontré des syndicats pour négocier des conventions de travail. J'ai participé à des arbitrages. J'ai eu affaire à des grèves, des débrayages et des lock-out. J'espère corriger certaines des inexactitudes que les députés libéraux ont formulées à la Chambre.

 

. 1250 + -

Je dois faire remarquer que la situation dont nous sommes saisis aujourd'hui n'est pas différente de celle que nous connaissons depuis quelques années maintenant. Nous sommes confrontés à un manque de leadership, à une absence de positionnement sur des dossiers. Tant à la table des négociations qu'à la Chambre des communes, il y a un manque flagrant de planification stratégique.

Dans le débat sur la conférence de Kyoto, sur le réchauffement de la planète, notre chef s'est levé pour présenter un plan, une position. La ministre de l'Environnement n'en revenait pas. Elle ne comprenait même pas de quoi il parlait. C'est un exemple du manque de leadership chez les libéraux.

Aujourd'hui, c'est la grève des postes. En ce qui concerne le Régime de pensions du Canada, le gouvernement n'a pas la moindre idée de ce qu'il fait. Les commissions royales ont été mal constituées, et leurs recommandations, souvent mises de côté. Nous sommes confrontés à un manque de leadership.

La récente intervention d'un député sur les mérites des mesures prises par le gouvernement pour alléger la souffrance nous a étonnés. Je reconnais que c'est la première fois de ma vie que je suis d'accord avec un des députés séparatistes qui rappelle que nous ne sommes pas ici pour juger les travailleurs des postes. Nous devrions faire le procès du gouvernement.

La grève a commencé le 18 novembre. C'est aujourd'hui le 2 décembre, quelque 13 jours plus tard, et elle dure encore. Elle ne se terminera pas avant un jour ou deux. C'est le temps qu'il faudra pour que le Sénat adopte le projet de loi et le mette en vigueur.

Comment le gouvernement peut-il se lever à la Chambre aujourd'hui pour expliquer pourquoi il faut absolument que le travail reprenne tout d'un coup. Sept mois à peine ont passé.

J'entends dire que les organisations de bienfaisance sont privées de fonds. Comme mon collègue de Prince George—Bulkley Valley le rappelle, nous le disons aux députés du gouvernement depuis des semaines. Soudain, la lumière se fait et ils s'aperçoivent qu'un projet de loi est nécessaire pour le retour au travail.

Depuis des semaines, nous répétons chaque jour que des organisations de bienfaisance éprouvent des difficultés. Nous parlons des journaux, des périodiques et des magazines qui dépendent du courrier. Nous parlons des pertes d'emploi qui se produisent surtout à ce temps-ci de l'année. Nous parlons du coût humain. Nous rappelons que c'est bien la quatrième grève en dix ans et que le gouvernement devait légiférer le retour au travail. Il n'y a aucune surprise. Pourtant, il manque vraiment un plan stratégique dans l'organisation. Le gouvernement est responsable des services postaux que nous avons aujourd'hui.

Une voix: Les conservateurs ne valaient pas mieux.

Des voix: Oh, oh!

M. Randy White: Beaucoup d'entre nous se demandent si la grève était ou non évitable. Quelqu'un vient de reprocher aux conservateurs une grève antérieure. Nous sommes tous au courant. Les voilà maintenant tout excités. J'attendrai qu'ils se calment.

Les négociateurs patronaux ont été à la table des négociations durant sept mois. Que s'est-il passé? Au bout de sept mois, ils ont le culot de dire qu'il est grand temps de faire adopter une loi ordonnant la reprise du travail. D'après l'expérience que j'ai acquise à la table des négociations, quand les négociations en sont à ce point après sept mois, ce n'est pas maintenant que la lumière devrait se faire. Elle aurait dû se faire longtemps avant cela. Ils connaissent les questions en litige. Ça ne prend pas sept mois pour les connaître.

Il était intéressant d'entendre un député d'en face parler d'arbitrage des propositions finales. Il a dit essentiellement que nous ne pourrions pas recourir à ce processus dans le cas des services postaux parce que les questions en litige sont tellement différentes. Il ne connaît vraiment pas grand-chose à propos de la négociation de conventions collectives de travail. Pour chaque position que la partie syndicale peut avoir sur une question, la partie patronale doit en avoir une elle aussi. Il y a donc tout le temps deux positions sur chaque question dans les négociations. Une position peut bien être nulle, elle doit quand même être soumise à l'arbitre dans le processus d'arbitrage des propositions finales.

 

. 1255 + -

Dire que nous ne pourrions pas recourir à l'arbitrage des propositions finales parce que les questions en litige sont très complexes, ou dire que nous ne pouvons pas y recourir parce que la partie syndicale a un problème et nous pas, c'est tenir un discours stupide typiquement libéral. Les libéraux ne savent pas de quoi ils parlent.

Nous devons tâcher de trouver ce qu'il faut faire à partir de maintenant. Après quatre grèves en dix ans, il est grand temps d'adopter un processus beaucoup plus productif, soit l'arbitrage des propositions finales. Il se trouve décrit dans nos propositions d'amendement au projet de loi. À en juger d'après ce que j'ai entendu aujourd'hui, je ne pense pas ce que les libéraux y comprendront grand-chose. Nous avons donc décrit ce processus par écrit. S'ils lisent les propositions d'amendement avant que la Chambre en soit saisie, la lumière se fera peut-être dans leur esprit.

Le système actuel de négociations collectives ne donne pas de résultat surtout pour un monopole existant dans notre pays et dont les gens dépendent.

Les représentants d'un organisme qui publie un magazine en Colombie-Britannique m'ont dit qu'ils se trouvaient dans une situation désespérée. Ils utilisent presque exclusivement les services de la Société canadienne des postes. Ils ont demandé pourquoi les libéraux ont dit à peu près un jour avant le début de la grève qu'ils veilleraient à ce que les chèques d'assurance-emploi et de pension de vieillesse soient livrés. Ils n'ont pas dit une seule fois qu'ils se soucieraient des petites entreprises. Je doute fort que cela soit jamais entré en ligne de compte.

C'est pourquoi nos petites entreprises ont un vrai problème avec le gouvernement libéral. On dirait presque qu'elles sont là pour payer des impôts et non pour offrir des services. Elles sont pourtant le moteur de notre économie. Elles sont maintenant les otages d'un groupe, à un moment de l'année, l'époque de Noël, où la situation est intenable pour nombre d'entre elles.

Le problème n'est pas limité à la Colombie-Britannique. Avant-hier, je participais à une émission de radio à l'Île-du-Prince-Édouard. Les correspondants qui appelaient disaient la même chose, que les petites entreprises qui ont besoin du service postal sont laissées pour compte. C'est à se demander où le gouvernement se situe dans les dossiers qui concernent l'industrie privée ou la petite entreprise.

Monsieur le Président, je sais que vous êtes bien occupé, mais je voudrais savoir combien de temps il me reste.

Une voix: Dix minutes, Randy.

M. Randy White: Il est bien de savoir que le Président est aussi alerte.

Parlons des coûts de la grève. Selon la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, la grève des postes a coûté aux PME canadiennes 200 millions de dollars par jour, soit un total de 2,4 milliards jusqu'au 1er décembre. Je dirais que ce chiffre extrêmement prudent est probablement bien en-deça de la réalité.

Je ne peux réprimer un mouvement d'exaspération lorsque j'entends un libéral d'en face dire que les PME perdent de l'argent et qu'il est temps de légiférer. Avant la grève, nous avons dit et nous avons répété au gouvernement que cela allait se produire. Et voici que les libéraux, d'un ton moralisateur, commencent à le reconnaître. Et non seulement ils le reconnaissent, mais ils s'en arrogent aussi le mérite, comportement typique des libéraux.

 

. 1300 + -

Au cours des sept jours qui ont précédé la grève appréhendée des postes, le volume du courrier a diminué de 50 p. 100. La société perd 17 millions de dollars par jour depuis le début de la grève. Quel paradoxe. C'est l'organisation qui a besoin de l'argent qui en perd. Les employés prétendent que la société a de l'argent, et ils veulent mettre la main dessus. La réalité, c'est que les grèves aident rarement qui que ce soit.

Les employés ont beau dire que c'est la seule solution qu'il leur reste, ce n'est pas le cas cette fois-ci. Dans le cas qui nous intéresse, les deux parties ont eu sept long mois d'avis. Je le répète, je n'a jamais participé à des négociations où je n'ai pas été en mesure de déterminer à mi-chemin où nous nous en allions et si je pouvais changer de direction. Je sais que les gens qui participaient à ces négociations savaient où ils s'en allaient. La population a exprimé ses craintes, mais le gouvernement n'est pas intervenu. Il a fait preuve d'un piètre leadership.

Un sondage nous apprend que 82 p. 100 des propriétaires de petites et moyennes entreprises sont d'avis que la Société canadienne des postes devrait être déclarée service essentiel. Faut-il se surprendre que la population en soit arrivée à cette conclusion? Est-ce vraiment ce que veulent les employés? Est-ce vraiment ce que veulent les libéraux? Est-ce vraiment ce que veut la direction de la Société canadienne des postes? C'est pourtant ce que la population commence à dire. Elle ne croit plus que ce processus de négociation se terminera un jour, qu'il s'améliorera ou qu'il sera réexaminé dans l'intérêt des citoyens canadiens.

Que fait le gouvernement à ce sujet? Dit-il: «La situation suscite des inquiétudes, les gens sont préoccupés»? Non, il laisse les choses aller, comme il l'a déjà fait, puis il déclare: «Nous devons mettre un terme à ce conflit, qui dure depuis 13 jours et qui nuit à tout le monde. Nous devrions proposer un projet de loi.» Quel piètre leadership.

Plus de 1 000 Canadiens ont été mis à pied avant même le début de la grève. Jusqu'à 10 000 Canadiens auraient été mis à pied à cause de la grève des postes. Comment cela cadre-t-il avec la stratégie utilisée par les gens d'en face? Quand la question a-t-elle été abordée, à part ce matin lorsqu'un député a dit: «Nous avons un problème. Les gens sont licenciés à cause de cette grève»? Jour après jour, mes collègues réformistes se sont levés pour dire que non seulement le chômage nous cause assez de soucis au Canada, mais voici que le gouvernement est directement responsable de la perte d'emplois à cause de l'inertie du gouvernement.

Que dire des oeuvres de bienfaisance? J'ai discuté avec quelques-uns de leurs représentants. Oui, la grève leur fait mal. Elle ne pouvait survenir à pire moment. Naturellement, les parties en cause en étaient très conscientes. Les deux parties ont su très bien choisir le moment pour déclencher la grève. Les parties qui veulent faire la grève choisissent toujours le moment idéal. Elles choisissent le moment où elles peuvent exercer le plus de pressions sur le gouvernement afin de l'inciter à régler le différend.

Les parties ont choisi le temps des Fêtes pour exercer des pressions sur le gouvernement. Mais que dire des oeuvres de bienfaisance? À part le Parti réformiste qui l'a dit et répété tous les jours à la Chambre, quelqu'un ici a-t-il songé aux torts qu'on causait aux oeuvres de bienfaisance? Non. Les libéraux viennent nous dire tout à coup aujourd'hui qu'ils présentent un projet de loi parce que cette affaire nuit aux oeuvres de bienfaisance. Il se trouve que les oeuvres de bienfaisance recueillent 80 p. 100 de leurs recettes annuelles dans le temps des Fêtes.

 

. 1305 + -

Que va-t-on dire aux oeuvres de bienfaisance? Mince alors, nous avons eu sept mois. Nous avons comme oublié les oeuvres de bienfaisance et nous savions que Noël approchait. Nous avons eu des rumeurs du syndicat. Les négociateurs dans ce dossier ont toujours su ce qui se passait. Et voici que, à la douzième heure, le gouvernement libéral dit qu'il va sauver la situation. Hé bien, il ne fait rien de tel. Son inertie et son manque d'autorité ont fait du tort aux oeuvres de bienfaisance.

Un député mal informé d'en face dit que c'est de la foutaise. Je puis dire aux députés mal informés d'en face que ce n'est absolument pas de la foutaise. S'ils veulent savoir quelles oeuvres de bienfaisance ont été lésées, nous nous ferons un plaisir de les en informer. Nous ne devrions même pas avoir à venir dire cela ici. Ils devraient savoir cela. Voilà ce que c'est que manquer de leadership. Ils ne savent pas cela.

Je le répète: je suppose que c'est seulement une autre journée décevante pour le reste d'entre nous. Les gens d'en face vont partir d'ici aujourd'hui en se félicitant d'avoir remporté une victoire, d'avoir fait adopter une loi de retour au travail, en se croyant de vrais héros au Canada. Ils ne sont pas des héros. Ils déçoivent terriblement la majorité des législateurs de la Chambre et même, je crois, beaucoup de députés libéraux de l'arrière-ban, quoique je n'en sache rien. Ils déçoivent beaucoup les oeuvres de bienfaisance. Ils déçoivent beaucoup toutes les personnes qui comptent sur la Société canadienne des postes.

Hier, j'ai participé à une émission de radio sur les ondes de CKNW, à Vancouver. J'ai entendu des auditeurs dire que les syndiqués allaient bloquer l'accès de la population aux ponts, aux aéroports et aux routes. Je ne trouve aucun plaisir à attaquer le syndicat ou la direction en pareilles circonstances, car cela n'aide aucune des parties, mais il convient de rappeler aux Canadiens que la Société canadienne des postes est finalement un organisme gouvernemental. Il convient aussi de rappeler que, dans notre pays, les ponts, les aéroports et les routes appartiennent à ceux qui les ont payés et à personne d'autre.

Adopter ce genre de position est pour le moins irresponsable. J'espère que ceux qui envisagent d'agir de la sorte réfléchiront bien à leur responsabilité, au respect dont ils doivent faire preuve et aux efforts qu'ils doivent déployer pour que la population bénéficie de nouveau d'un service dont elle a déjà été fière dans notre pays et pour rétablir un peu de bonne volonté au sein de la Société canadienne des postes.

Enfin, voilà une autre absurdité du gouvernement libéral. Encore une fois, il nous montre son manque de leadership, son indécision et son incapacité de procéder à une planification stratégique.

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec un certain intérêt le député d'en face et, comme d'habitude, son discours réformiste et sa position pharisienne.

Je constate que le Parti réformiste, le grand partisan de la réduction de la taille de l'État, demande depuis un certain temps que le gouvernement intervienne dans ce conflit. Il semble que les penseurs du Parti réformiste croient toujours que l'interventionnisme est la meilleure méthode, sauf quand les travailleurs canadiens exercent leurs droits légitimes. En pareil cas, semble-t-il, selon le député et son parti, l'intervention de l'État devient plus acceptable.

 

. 1310 + -

Pourquoi ces deux poids deux mesures? Pourquoi le député dit-il une chose dans un cas, et le contraire, dans un autre? Je voudrais bien entendre la réponse du député.

M. Randy White: Monsieur le Président, je croyais avoir été clair. Cela semble peut-être partisan, mais il se pourrait bien que je sois l'un des rares à la Chambre à comprendre une foule de complexités des négociations collectives. Le fait est que je crois vraiment que les députés d'en face sont assez mal informés sur le processus.

La réponse, c'est qu'il n'y a pas deux poids deux mesures. On aurait pu prévenir cette situation. Nous en sommes maintenant à une étape où le gouvernement estime qu'il convient de penser que la solution est de réagir 13 jours après le fait. Une organisation responsable aurait réagi il y a trois mois. Il n'y a pas deux poids deux mesures. Il n'y a que l'incurie de la part de nos vis-à-vis, qui ne savent pas comment gérer un pays.

[Français]

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, j'écoutais le porte-parole du Parti réformiste et, une fois de plus, j'ai l'impression que les réformistes saisissent la couleuvre par le milieu du corps.

Je suis d'accord avec le député lorsqu'il dit qu'on aurait dû régler cela il y a longtemps, mais à ce moment-là, ils n'ont rien suggéré. Le problème, c'est qu'on a confié un droit de grève à des employés syndiqués qui, en toute bonne foi, pouvaient s'en prévaloir. C'est peut-être l'hypocrisie de la loi qui fait que ces gens sont tombés dans le panneau. Ils ont exercé un droit qu'on leur a légitimement accordé, et une fois qu'ils l'exercent, on leur dit: «Vous n'auriez pas dû y toucher.»

C'est là l'hypocrisie du gouvernement en place: il arrive par après avec des lois spéciales. Les réformistes ne sont pas différents. Ils ont vu passer le courant, ils savaient que les employés des Postes allaient peut-être ou devraient utiliser leur pouvoir, et aujourd'hui, ils appuient le gouvernement sur ce projet de loi, mais ils n'ont pas une vision à long terme du règlement du conflit.

Actuellement, ce projet de loi est un cataplasme. Le Parti réformiste appuie ce cataplasme. Pourquoi ne pas avoir le courage politique de dire aux postiers: «La Poste est un service essentiel. C'est fini la grève dans ce service essentiel»? Que par une législation, on en vienne à une autre manière de régler les différends de travail, à ce moment-là, j'ai l'impression qu'on pourrait régler l'ensemble du dossier.

Comme c'est leur intervention coutumière, les réformistes arrivent, comme un cheveu sur la soupe, dans un dossier quelconque, et se vantent d'avoir vu la lumière ou la vérité avant tout le monde. En réalité, ils ont une vue à court terme et jamais ils ne proposent des choses qui pourraient nous aider à régler de façon permanente le problème des Postes au Canada.

Je demande au député ce qu'il peut nous suggérer; c'est ça ma question. Qu'est-ce qu'il nous suggérerait, comme opposition constructive, pour que dans trois ou quatre ans, lorsque la convention collective qu'on impose aujourd'hui par voie législative sera échue, quand ce sera terminé, pour ne pas revivre ce qu'on vit aujourd'hui, que propose-t-il? C'est la question que je pose au député du Parti réformiste.

[Traduction]

M. Randy White: Monsieur le Président, où cet homme était-il? Je croyais que, ce matin, nous avions plutôt bien expliqué notre position. Mais nous l'avions fait même avant ce matin. Je viens juste de dire que, depuis maintenant plusieurs mois, nous essayons de convaincre le gouvernement d'adopter des solutions comme l'arbitrage des offres finales. Depuis la dernière session parlementaire, nous essayons de dire au gouvernement comment éviter de telles situations.

Nous avons aussi essayé de le convaincre que toute la question aurait pu être réglée bien avant si les bonnes tactiques avaient été utilisées, si les bons conseils avaient été donnés et le reste. À dire vrai, je ne sais trop d'où sort le député.

 

. 1315 + -

Il est essentiel que le gouvernement comprenne bien. Peu importe la tournure que prend la situation actuelle, il est essentiel que, à la fin de 1997, il se rende compte qu'il doit adopter une meilleure façon de faire parce que sa stratégie actuelle ne fonctionne pas.

Nous ne récupérerons jamais tout l'argent perdu au Canada par les petites entreprises et les organismes de charité. Cet argent est perdu. Cela ne semble pas émouvoir nos vis-à-vis outre mesure. C'est ce qui est vraiment exaspérant dans tout cela.

Je répondrai donc au député en lui disant: levez-vous plus tôt le matin, présentez-vous à la Chambre des communes et écoutez, vous en apprendrez beaucoup.

M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au porte-parole du Parti réformiste qui a parlé il y a quelques minutes.

Pourrait-il dire à la Chambre s'il connaît des pays occidentaux, particulièrement des pays du G7, qui privent leurs travailleurs du droit à la négociation collective? S'il en connaît, je voudrais qu'il nomme ces pays.

M. Randy White: Monsieur le Président, je ne suis pas certain s'il y a des pays qui privent leurs travailleurs du droit à la négociation collective, mais ce n'est pas le cas dans notre situation.

Le fait est qu'il y a eu des négociations collectives. Le fait est qu'elles ont été vaines. Le fait est que cela aurait pu être évité. Le fait est que le gouvernement libéral n'a rien fait. Le fait est que le gouvernement libéral ne voit pas plus loin qu'aujourd'hui à la Chambre des communes. Le fait est que le gouvernement libéral se préoccupe plus de son image médiatique que des organismes de charité et des petites entreprises de notre pays.

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno—Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, comme le mentionnait le député du Parti réformiste, la grève postale ne touche pas seulement les entreprises et les organismes de charité, elle touche aussi toute la population.

Ma propre petite enquête auprès des résidants de ma circonscription a été particulièrement révélatrice. Toutes les personnes que j'ai rencontrées, sans exception, m'ont exprimé leur insatisfaction par rapport à cette grève qui perdure.

Je voterai en faveur de ce projet de loi. Les souverainistes ne sont pas tous de gauche, socialistes et syndicalistes. Il y en a, dans nos rangs, comme moi, qui pensent que l'arc-en-ciel que formait le Bloc québécois à ses débuts a toujours sa place.

J'ai une question pour le député. A-t-il ressenti les mêmes préoccupations dans son comté que j'ai eues dans le mien, mis à part, comme nous le mentionnions au début, les entreprises et les organismes de charité? Je parle de la population en général.

[Traduction]

M. Randy White: Oui, monsieur le Président. En fait, dans ma circonscription, beaucoup de gens ont exprimé des inquiétudes, non seulement dans le secteur des entreprises et des organismes de charité, mais dans la population en général. Je n'ai pas vérifié récemment, mais je soupçonne qu'il y a encore beaucoup de gens dans ma circonscription qui n'ont pas reçu leur chèque de pension, et ainsi de suite. Du moins, il y a certainement eu des retards.

C'est une question qui préoccupe les gens d'un bout à l'autre du pays, mais il faut se demander pourquoi nous sommes ici, en ce 2 décembre, à débattre une mesure législative de retour au travail. Ceux qui ne sont pas plus intelligents que le fauteuil de la présidence n'ont pas encore compris que cette situation aurait pu être complètement évitée. Plusieurs députés ont louangé le gouvernement pour avoir présenté un projet de loi de retour au travail. Le problème, c'est que le gouvernement se préoccupe davantage des médias que des gens qui ont été lésés. C'est dégoûtant.

 

. 1320 + -

Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député d'Abitibi.

Monsieur le Président, je vous remercie de me donner l'occasion de parler du projet de loi C-24. Je regrette que le gouvernement ait été forcé de légiférer pour mettre fin à cette grève des postes qui a débuté il y a deux semaines, mais le temps était venu d'agir. Les circonstances se prêtaient à une intervention, et c'est pourquoi je demande à tous les députés de la Chambre d'appuyer aujourd'hui cette mesure législative.

Le week-end dernier, lorsque je suis rentrée dans ma circonscription, des gens, des dirigeants de petites entreprises et des bénévoles à l'église locale m'ont arrêtée plusieurs fois pour me dire: «Le temps est venu d'agir. Nous croyons dans le processus de négociation collective, mais le temps est venu d'intervenir. Nous avons besoin de votre aide.»

Au Canada, nous avons la chance d'avoir un excellent système de relations de travail. La majorité des conflits se règlent sans grève ou lock-out. Le système fonctionne. Le gouvernement a dit maintes et maintes fois qu'il laisserait le processus de négociation collective suivre son cours. Malgré la nomination d'un médiateur et malgré tous les efforts déployés pour tenter d'en arriver à un règlement négocié, les parties n'ont pas réussi à s'entendre.

Pour une raison ou une autre, les parties n'ont pas pu ou n'ont pas voulu prendre les décisions difficiles nécessaires pour régler le conflit. Le ministre du Travail a été avisé par l'un des meilleurs négociateurs au pays que les parties étaient dans une impasse et qu'il était peu probable qu'elles puissent en arriver à une entente. Sur les conseils du médiateur et sous la direction du ministre, le gouvernement n'a eu d'autre choix que de présenter une mesure législative de retour au travail pour régler cette affaire.

Je crois que les deux parties ont essayé de négocier un règlement au meilleur de leurs capacités. Nous ne pouvons plus attendre. Oui, les petites entreprises ont été durement touchées par cette grève. Malheureusement les petites entreprises, qui comptent beaucoup sur le service postal, doivent continuer de payer leurs employés, mais certaines manquent de liquidités pour le faire. On le sait, la petite entreprise est le moteur de notre économie et le moment est venu de lui prêter main-forte.

Je voudrais répondre au député de l'opposition qui dénonçait la situation des organismes de charité et affirmait que le gouvernement ne s'était pas préoccupé de leur sort. C'est précisément parce qu'il se préoccupe des organismes de charité que le gouvernement demande à la Chambre de s'unir et d'adopter le projet de loi de retour au travail de postiers. Nous suivons chaque jour, chaque semaine et chaque mois les difficultés éprouvées par les organismes de charité. La grève des postes les a affectées de quatre manières. Je vais en faire part au député.

Les oeuvres de bienfaisance hésitent à envoyer du courrier et les consommateurs, à y répondre. Les oeuvres de bienfaisance risquent maintenant de devoir mettre à pied des employés parce qu'il n'y a plus assez de travail. La saison où ils reçoivent le plus de dons, Noël, est maintenant compromise. La perte de recettes aura un impact direct sur la capacité des oeuvres de bienfaisance d'assurer des programmes et des services. Nous le savons. Nous savons quels sont leurs besoins. Le sachant, il est temps pour nous de légiférer.

Encore une fois, la montée des tensions et l'incertitude créée initialement par la situation à la Société canadienne des postes ont fait du tort à un certain nombre d'oeuvres de bienfaisance. Quoique moins nombreux, des fonds sont quand même parvenus aux oeuvres de bienfaisance durant les événements qui ont conduit à la situation actuelle. À présent, plusieurs organisations qui dépendent en grande partie des dons directs qui leur sont envoyés par la poste, ont complètement cessé d'en recevoir. Pour vous donner une idée de ce que ça représente, je connais plusieurs organisations qui reçoivent 90 p. 100 de leurs fonds par courrier. L'arrêt des services postaux signifie qu'on n'a plus besoin de personnes ou de bénévoles pour distribuer les dons. Certaines organisations sont maintenant confrontées à la nécessité de mettre à pied des employés.

 

. 1325 + -

À l'approche de Noël, beaucoup d'organisations risquent de ne pas avoir les fonds dont elles ont tellement besoin. Les objectifs en matière de collecte de fonds, qui avaient été fixés en fonction des besoins des organisations, sont maintenant compromis.

Je connais une organisation dans ma circonscription qui, après avoir enregistré d'excellents résultats durant l'année qui a précédé cette grève, risque maintenant de voir ses recettes diminuer de 15 p. 100. Il n'y a rien que cette organisation puisse faire pour réduire ses dépenses. Cela veut dire qu'elle ne peut pas poursuivre ses activités de bienfaisance.

Depuis dix jours, on peut lire dans un journal de Toronto des articles sur le rôle important et vital de nos organismes de charité. Encore une fois, compte tenu de ce que font les organismes de charité pour le Canada et nos concitoyens, j'exhorte les députés à admettre qu'il est maintenant temps d'adopter cette mesure de retour au travail.

La plupart d'entre nous n'en sont peut-être pas conscients, mais une autre menace guette les organismes de charité à la fin de la grève des postes. Les organismes de charité se feront concurrence les uns les autres au cours d'une période très courte, avec une intensité que peu d'entre eux connaissent. Tous les organismes dont le courrier a été retardé par la grève et ceux qui ont attendu pour envoyer leurs lettres de sollicitation demanderont en même temps aux Canadiens de les aider financièrement.

Les organismes de charité perdent 10 millions de dollars par jour. C'est important d'obtenir que les travailleurs des postes reviennent maintenant au travail.

Je voulais simplement dire au député d'en face que, au lieu de déplorer le fait que le gouvernement n'ait rien fait et de dire qu'il néglige les organismes de charité, il ferait mieux non seulement de voter en faveur du projet de loi, mais de prendre la parole à la Chambre le jour suivant et de s'adresser à tous les Canadiens pour leur parler de l'importance de ces organismes de charité. Il devrait leur demander d'être attentifs au contenu de leur courrier et de donner davantage, pour faire preuve de civisme. C'est ce que je ferai.

Je regrette que nous ayons dû procéder ainsi. Je crois au système de négociations collectives. Toutefois, mes électeurs veulent que les travailleurs des postes retournent au travail. Ces gens et ces organismes de charité me tiennent à coeur et tiennent à coeur au gouvernement. Je demande donc à tous les députés de voter en faveur de ce projet de loi.

M. Jim Gouk (West Kootenay—Okanagan, Réf.): Monsieur le Président, je serais tenté de dire quelles sornettes si je ne pensais pas que les propos de la députée étaient très sincères. Elle a dit qu'il était temps de légiférer.

Il est plus que temps de légiférer. Nous réclamons une loi depuis l'été. Le gouvernement libéral commence enfin à nous écouter, à écouter la population canadienne, les gens d'affaires, les organismes caritatifs et les individus auxquels cette grève fait beaucoup de mal. Pourquoi a-t-il attendu quinze jours pour se décider?

La députée qui vient de parler a dit en termes très éloquents que les entreprises perdaient de l'argent, qu'elles licenciaient leurs employés. C'est vrai et ça l'a été dès le début de la grève. Les organismes caritatifs perdent de l'argent, 80 p. 100 de leurs revenus. Ça aussi c'est vrai, et ça l'est depuis quinze jours. Nous l'avons dit au gouvernement libéral. Pourquoi ne nous a-t-il pas écoutés?

La députée a parlé du système de négociation collective. Il comporte trois étapes: négociation, conciliation, arbitrage. Ça a toujours été comme ça. Nous proposons un mécanisme de règlement pour les cas où ces étapes n'aboutissent à rien, comme c'est arrivé non seulement cette fois-ci, mais à quatre reprises au cours des dix dernières années.

Je pense que la députée était sincère, même si elle a commis une erreur du fait qu'elle ait attendu si longtemps pour faire sa déclaration. Cette grève est la quatrième en 10 ans et c'est la troisième fois qu'on est obligé de légiférer. Le gouvernement précédent avait reconnu la nécessité de légiférer. Le gouvernement actuel reconnaît, un peu tard, la nécessité de légiférer. Combien de fois encore allons-nous laisser souffrir ces entreprises, ces organismes caritatifs, ces particuliers qu'elle a plaints si fort, avant de mettre en place une solution permanente pour régler ce sempiternel problème?

 

. 1330 + -

Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Monsieur le Président, je ne peux que répéter au député les propos qu'ont tenus maintes et maintes fois les députés de ce côté-ci de la Chambre. Le gouvernement libéral croit au processus de négociation collective.

Nous avons négocié. Nous avons eu recours aux services d'un médiateur. Mais nous croyons également au droit de grève, au droit de règlement des différends. Nous avons essayé, et je le répète, le gouvernement libéral reconnaît l'importance de la négociation.

Deux semaines après le déclenchement de la grève, après avoir offert aux parties des possibilités de négocier et après que le ministre a fait intervenir le meilleur médiateur du Canada pour résoudre ce problème, nous avons négocié des solutions dans un effort de concertation. Telles sont les solutions.

Quand ces efforts de concertation échouent ou ne peuvent pas être mobilisés, il est de notre devoir de présenter une mesure législative. Je ferai remarquer respectueusement que c'est précisément ce que nous faisons. Je demanderai au député de se joindre à moi afin que cette mesure législative soit adoptée ce soir.

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, je pense que ma collègue devrait songer à devenir vedette de cinéma. Elle a presque réussi à me faire pleurer ce matin.

Ma collègue pourrait-elle dire à la Chambre et aux travailleurs postaux pourquoi, en même temps qu'il présente une loi pour forcer leur retour au travail, le gouvernement réduit l'offre salariale faite lors des négociations? S'il est à ce point sérieux, s'il est à ce point honnête, pourquoi est-il intervenu? Pourquoi n'a-t-il pas laissé à l'arbitre le soin de prendre la décision?

De plus, qu'est-ce que le gouvernement fait des 4 000 personnes qui vont ainsi perdre leurs emplois? J'aimerais entendre les propos de ma collègue à ce sujet, et non pas ceux d'une vedette de cinéma.

Mme Sarmite Bulte: Monsieur le Président, ces négociations ne portaient pas sur un seul sujet, mais sur de nombreuses questions qu'il vaut mieux, nous en convenons tous, laisser les parties régler entre elles.

On ne peut pas examiner une question en demandant pourquoi ceci et pourquoi pas cela. Le médiateur a probablement posé cette question. Je n'étais pas la médiatrice, mais c'est ce que les deux parties ont tenté de faire.

Quant à la seconde question du député concernant la mise à pied de 4 000 travailleurs, personne ne sait combien d'employés vont être mis à pied. D'où viennent ces chiffres? Depuis deux semaines, des gens ont perdu leur emploi, notamment des travailleurs à temps partiel, ceux qui ont besoin de travailler maintenant pour pouvoir acheter à leurs familles ce dont elles ont besoin, surtout à l'approche de Noël.

Qu'en est-il de ces gens? Comment faire pour les dénombrer? Je demande à tous les députés de s'unir et de faire en sorte que le système fonctionne beaucoup mieux, en votant pour le projet de loi aujourd'hui.

[Français]

M. Guy St-Julien (Abitibi, Lib.): Monsieur le Président, dimanche soir, j'ai préparé un discours d'environ 20 minutes, mais je m'en tiendrai aux cinq minutes réglementaires.

Il est vrai que le gouvernement avait nommé un médiateur spécial et qu'au bout d'une semaine, vu l'impasse, il n'y a pas eu de bons résultats entre les parties.

En Abitibi—Témiscamingue, la poste est un service public essentiel au bon fonctionnement de l'économie. Le moment était venu de prendre une décision. Les postiers ont déclenché la grève vers le 19 novembre dernier, et ce, après l'échec des négociations sur les salaires, sur la sécurité d'emploi et sur les modifications apportées à la livraison du courrier.

Depuis lundi, le meilleur médiateur au Canada, M. Edmondson, a tenté de trouver un terrain d'entente entre la Société canadienne des postes et les travailleurs du syndicat. Selon le médiateur, il n'y avait pas assez de flexibilité, ni dans un camp ni dans l'autre, pour permettre d'en venir à une entente. En l'absence de cette entente, cette grève fait de plus en plus mal au commun des mortels, mais surtout aux entreprises qui dépendent de la livraison du courrier pour leurs affaires et aux travailleurs et travailleuses dont l'emploi est lié directement au bon fonctionnement de ce service.

 

. 1335 + -

Cette grève fait aussi très mal aux associations communautaires. Malgré de nombreuses solutions alternatives qui sont apparues au fil des ans, seul le réseau public des postes est en mesure de livrer le courrier dans tous les coins et recoins du Canada à un coût raisonnable. Même en Abitibi, au nord de ma circonscription, le courrier se rend et c'est efficace.

On sait que ce n'est pas facile actuellement de présenter une loi spéciale au Parlement, mais pendant la grève et avant son déclenchement, le gouvernement du Canada est demeuré fermement engagé à laisser les parties parvenir à une entente négociée. J'ai toujours pensé qu'une convention collective serait la meilleure solution pour les travailleurs et les travailleuses des Postes, pour les clients de la Société et pour tous les Canadiens et Canadiennes. Le gouvernement du Canada a donné à la Société canadienne des postes et au syndicat toutes les occasions de parvenir à une entente, mais il y avait toujours une impasse. Aujourd'hui, nous avons devant nous une loi spéciale.

Pendant la grève, il y a une chose que j'ai très appréciée du gouvernement du Canada, c'est de ne pas avoir mis en place des briseurs de grève. La dernière fois, il y a eu des briseurs de grève et ce fut assez difficile dans tous les secteurs au Québec. On sait que la province de Québec a une loi spéciale interdisant les briseurs de grève, et les relations s'en portent très bien.

Vendredi dernier, je me suis rendu sur les lignes de piquetage dans mon comté, à Val-d'Or et à Amos. J'ai rencontré les syndiqués, les travailleurs et les travailleuses. Quand on leur pose la question, ils disent appuyer le national. C'est le national qui mène tout du côté du syndicat, même si on regarde la convention collective que j'ai ici en ma possession et que je dépose sur mon bureau, parce que je n'ai pas le droit de tenir des accessoires, me diront mes adversaires, c'est une convention de 541 pages. Trouvez-moi un syndicat, en Abitibi, qui a une convention de 541 pages. Je pense qu'il n'y en a que deux au Canada, soit Radio-Canada et Postes Canada.

Nous savons tous que les travailleurs et les travailleuses de Postes Canada travaillent très fort. Nous essayons de trouver une entente, une solution pour le bien-être de nos employés. Une chose qu'ont très bien faite les grévistes, c'est de distribuer les chèques de pension, les chèques venant du provincial, du municipal ou du fédéral. Mais il y a une impasse actuellement. Beaucoup de familles n'ont pas reçu leur chèque, il y a des retards de livraison dans les centres de distribution. Mais nous essayons par tous les moyens d'en arriver à une entente pour que cela cesse actuellement. Le seul moyen, c'est de déposer ce projet de loi, car cette grève fait très mal aux entreprises de chez nous, en Abitibi—Témiscamingue.

La Société canadienne des postes souhaite redessiner le parcours quotidien de chaque facteur pour livrer plus de courrier avec moins d'employés. Lorsque j'ai parcouru le grand comté qu'est l'Abitibi, plusieurs personnes ont déclaré que cet objectif était fort légitime. Nous savons que le gros litige actuellement, c'est de redéfinir la question du courrier et les routes des facteurs.

Du côté du syndicat, ce fut une autre réaction. Il demande de créer plus de postes permanents pour sécuriser le travail du plus grand nombre possible de syndiqués. Mais actuellement, avec les nouvelles technologies, l'Internet, le courrier électronique, nous savons ce qui se passe dans les grandes banques au Canada et au Québec, nous savons ce qui se passe dans les villes, dans les compagnies de téléphone, dans les entreprises. Même les hôpitaux ont subi, du côté du syndicat, beaucoup de coupures. C'est vrai que c'est le droit des travailleurs syndiqués de faire pression pour améliorer leur sort, mais nous sommes rendus à un point où il faut trouver des solutions, et la seule solution, c'était de présenter une loi spéciale pour le retour de nos travailleurs.

Je demande une seule chose. Nous savons qu'en Abitibi, nous avons de bons travailleurs, de bons facteurs et de bonnes travailleuses sur le terrain. Ils rencontrent beaucoup de personnes âgées lorsqu'ils font la distribution du courrier. Je souhaite que, lorsque ce projet de loi sera adopté, après le retour au travail, il y ait de bonnes relations, surtout avec la bonne convention collective qu'ils ont déjà en main. Il faut l'améliorer dans certains secteurs. Je sais qu'il y aura peut-être des coupures de postes à certains endroits au Canada, mais je ne souhaite pas qu'il y en ait dans mon comté, parce que mon comté a besoin de ces gens-là pour livrer le courrier.

La population veut connaître l'heure juste. En 1996, une commission a été mise en place. M. Radwanski, selon le rapport, disait qu'on pouvait économiser, par année seulement, de 100 à 200 millions de dollars rien qu'en révisant la convention collective de 541 pages, et ce, sans imposer aux employés des privatisations ou des réductions salariales démesurées.

 

. 1340 + -

Le principal problème n'est pas le niveau excessif de salaire. La rémunération du temps non travaillé pèse encore lourd sur les coûts à la Société des postes. Par exemple, des facteurs sont payés à taux supérieur pour les heures excédant leur semaine normale, comme en décembre, mais ils sont payés 40 heures l'été, même s'ils font des journées plus courtes. Peut-être que la population ne connaît pas ces enjeux actuellement.

Postes Canada paie aux facteurs le transport et le temps pour venir dîner à leur port d'attache. Il y a plusieurs autres exemples, soit le remplacement d'un employé en cas d'absence. Pour devenir efficace, la Société canadienne des postes veut pouvoir modifier le parcours des facteurs pour essayer de trouver des solutions à l'intérieur de la Société. La souplesse dont a besoin Postes Canada signifiera moins d'emplois, et peut-être moins de cotisations au syndicat. Le syndicat estime qu'il y aura 4 000 employés, sur 45 000 aujourd'hui, qui vont perdre leur poste.

Nous comprenons le syndicat de résister farouchement aux demandes de Postes Canada, mais je suis un ancien président de syndicat, et nous connaissons tous les enjeux. Je souhaite que, à leur retour au travail, ces gens garderont fièrement de bonnes relations avec les gens de chez nous, avec la population et avec Postes Canada.

Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno—Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, je trouve également que cette loi spéciale est nécessaire, étant donné qu'à l'évidence même, les deux parties ne peuvent et ne pourront en arriver à une entente.

Chez les postiers eux-mêmes, plusieurs sont exaspérés par ce conflit qui s'enlise. Ils sont nombreux à accueillir avec soulagement cette loi spéciale, parce qu'il faut le dire, les postiers sont aussi affectés financièrement par cette grève. Ils vous diront également que les demandes du syndicat sont trop élevées dans le contexte économique actuel.

À cet égard, un article paru dernièrement dans le journal Les Affaires disait «que l'enjeu du conflit des Postes c'est la flexibilité que doit obtenir la Société canadienne des postes pour devenir concurrentielle et éviter des coûts injustifiés à ses clients.»

On apprend de plus dans cet article que selon Gordon Ritchie, ex-négociateur en chef adjoint de l'Accord de libre-échange nord-américain: «La convention collective des employés de la Société des postes est vraisemblablement la moins concurrentielle et la plus inefficace du genre en Amérique du Nord, tous domaines confondus.»

Le député d'Abitibi est-il d'accord avec cette assertion de l'ex-négociateur en chef de l'Accord de libre-échange nord-américain?

M. Guy St-Julien: Monsieur le Président, ça tombe à pic, j'ai entre les mains l'article écrit par Jean-Paul Gagné, du journal Les Affaires du samedi 29 novembre, qui est titré: «Ottawa doit sonner la fin de la récréation».

La députée du Bloc québécois oublie de citer le paragraphe de Gordon Ritchie où il est écrit: «Le principal problème n'est pas le niveau excessif de salaire, la rémunération du temps non travaillé pèse encore plus lourd sur les coûts.»

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, j'aimerais poser une question à mon collègue.

Durant son discours, il a semblé dire que Postes Canada avait l'intention d'éliminer 4 000 emplois. Notre autre collègue tout à l'heure ne semblait pas savoir où je prenais cela. Eh bien, je l'ai pris de leur côté à eux. Il semble qu'ils ne se consultent pas entre eux. Au moins mon collègue le confirme, il est au courant de cela.

L'autre collègue n'a pas pu répondre à ma question, mais ce député a l'air un peu plus sincère, il a déjà été président de syndicat.

Pour quelle raison le gouvernement n'a-t-il pas seulement présenté une loi pour envoyer les parties devant un conciliateur? Il a mis des bâtons dans les roues du conciliateur et a placé les salaires des employés en deça de ce qui avait été négocié.

 

. 1345 + -

M. Guy St-Julien: Monsieur le Président, je disais tout à l'heure dans mon discours d'à peu près cinq minutes, que le syndicat estime qu'il perdrait 4 000 emplois sur les 45 000 en date d'aujourd'hui. On sait que, selon le projet de loi, il y aura un médiateur-arbitre, mais dans le projet de loi qui est actuellement déposé, aucun employé ne perdra son emploi aujourd'hui, même après le retour au travail.

Concernant les salaires, le projet de loi parle d'un étalement sur trois ans, où les hausses salariales seront de 1,5 p. 100, 1,75 p. 100 et 1,9 p. 100. À la table de négociations, on ne savait pas s'il s'agissait de 8 p. 100 ou de 11 p. 100. On sait que les gens demandaient 11 p. 100, alors qu'actuellement, selon le coût de la vie, ils ont plus de 3 p. 100.

On souhaite toujours améliorer le salaire des employés, mais avec le médiateur-arbitre qui sera nommé pour trouver une solution satisfaisante pour les deux parties, on ne sait jamais. Actuellement, oui, ils peuvent, passé l'an 2000, durant trois ans, c'est ferme. Mais les gens peuvent toujours se reprendre après trois ans.

Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, je vais partager mon temps avec mes collègues du Bloc québécois.

Nous avons assisté, hier, à l'heure tant attendue par le ministre responsable de la Société canadienne des postes, celle du dépôt du projet de loi C-24, intitulé Loi prévoyant la reprise et le maintien des services postaux. Je dis «attendue», car à la manière dont les choses évoluaient dans le dossier des Postes, il était prévisible pour toute la députation présente en cette Chambre que l'aboutissement serait celui que nous connaissons aujourd'hui.

Cette loi que nous étudions aujourd'hui force quelque 45 000 travailleurs et travailleuses à retourner à leurs occupations à la Société canadienne des postes et leur enlève des droits fondamentaux, soit ceux de négocier leurs conditions de travail pour que les travailleurs aient une satisfaction dans leur emploi et que l'employeur y trouve son profit.

En clair, les dés étaient pipés d'avance dans cette négociation. La Société canadienne des postes, elle le savait, pouvait compter sur une loi spéciale du ministre responsable de la Société canadienne des postes.

Il faut se rappeler la note d'information rédigée par l'Association canadienne de marketing direct et rendue publique par le Syndicat des travailleurs et travailleuses des Postes, le 7 août dernier. Cette note stipulait que Postes Canada avait reçu l'assurance du ministre responsable qu'en cas de grève, le gouvernement légiférerait le retour au travail.

Nous, du Bloc québécois, croyons que l'impasse dans les négociations résulte, dans ce contexte, de la mauvaise foi de la Société canadienne des postes. C'est pourquoi le Bloc québécois exprime, d'entrée de jeu, qu'il est en désaccord avec le projet de loi C-24.

Ce n'est pas tant le ministre du Travail mais bien le ministre responsable de la Société canadienne des postes qui doit être blâmé dans toute cette affaire.

La population québécoise et canadienne doit savoir que le ministre responsable de la Société canadienne des postes a sapé les négociations en cours, notamment en déclarant, le 18 novembre, au moment où les deux parties avaient entrepris des discussions exploratoires, que le syndicat était intransigeant, qu'il serait responsable d'une éventuelle privatisation, tout en rappelant que le gouvernement avait le pouvoir de recourir à une loi spéciale. Trop, c'est trop.

Un bref rappel des enjeux nous permet de constater que le syndicat réclame de manière générale plus de sécurité d'emploi. Cette sécurité d'emploi s'exprime par la conversion des heures supplémentaires en postes permanents. À ce sujet, il est intéressant de noter que le syndicat a consenti à réduire sa demande de création de postes permanents de 3 000 postes à 1 500. Les autres demandes du syndicat sont l'extension du service postal de porte à porte, une hausse de salaire équivalent au coût de la vie, plus une augmentation de salaire et une durée du contrat de travail de 18 mois à 2 ans.

 

. 1350 + -

Pour sa part, la Société canadienne des postes veut récupérer quelque 200 millions de dollars sur la masse salariale, correspondant à des coupures de 4 000 postes. Quant aux postes permanents, la Société offre de créer 500 postes au lieu de 1 500 demandés par le syndicat. Le gouvernement manque une très belle occasion de créer des emplois, pas des emplois précaires, mais des emplois permanents, et de répartir la richesse entre les personnes désireuses de travailler. Il ne faut pas oublier que la Société canadienne des postes n'est pas déficitaire.

De plus, en ce qui concerne les conditions salariales, la Société canadienne des postes offre une hausse salariale sur trois ans de 1,5 p. 100 la première année, 1,75 p. 100 la deuxième, et de 2 p. 100 la troisième année plus l'indice du coût de la vie. Le gouvernement, par son projet de loi, se trouve à imposer des salaires qui sont en deçà de la dernière offre patronale du 17 novembre qui prévoyait les mêmes augmentations, mais six mois plus tôt.

En aucun moment, permettez-moi de le souligner, nous n'avons eu d'indication à l'effet que la partie patronale jetait du lest en ce qui a trait à ses demandes de récupérer 200 millions de dollars sur le coût de la main-d'oeuvre. Forte des diverses interventions du ministre responsable de la Société canadienne des postes, la direction de Postes Canada a maintenu la ligne dure en attendant la loi spéciale déposée par ce gouvernement libéral.

Le projet de loi C-24 est donc le résultat d'une négociation avortée où le processus de négociation n'a pas suivi son cours normal. S'il avait suivi son cours normal, il se serait soldé par une entente négociée uniquement entre les parties, comme le réclamait depuis le début le Bloc québécois.

Le Bloc québécois a toujours défendu le principe de la libre négociation et nous continuons à le défendre. Mes collègues et moi-même sommes cependant conscients qu'en l'état actuel des choses, les deux parties sont dans une impasse, une situation qui n'est guère surprenante quand on constate à quel point Postes Canada est une succursale du Parti libéral du Canada y nommant les sénateurs pour lesquels il n'a pas de place au Sénat.

C'est pourquoi le Bloc québécois proposera une série d'amendements lors de l'étude en comité plénier. Ces amendements visent essentiellement à accélérer la fin du conflit qui a cours, et ce, afin d'améliorer les relations patronales-syndicales qui ont été mises à rude épreuve et redonner aux Québécois et aux Canadiens les services postaux qu'ils attendent avec impatience.

Parmi les articles qui posent problème au Bloc québécois, il y a l'article 9, l'article 12, les articles 8 et 10, l'article 15, ainsi que l'article 17.

L'article 9 stipule les principes qui doivent guider le médiateur-arbitre lorsqu'il rend ses décisions. On y précise notamment que le médiateur-arbitre doit s'inspirer des conditions de travail qui existent dans les entreprises privées et publiques comparables et qui offrent la marge de manoeuvre nécessaire pour assurer, à court et à long terme, la viabilité économique et la compétitivité de la Société. Le Bloc québécois dénonce ces paramètres desquels doit s'inspirer le médiateur-arbitre, car ils viennent amender la Loi sur la Société des postes qui parle d'autofinancement plutôt que de compétitivité.

Avec l'article 9, le ministre du Travail indique clairement que Postes Canada doit être géré comme une entreprise privée. Voilà qui diffère considérablement avec le caractère de service public qui est prévu aux termes de sa propre loi, la Loi sur la Société des postes. Aussi, le Bloc québécois a demandé au gouvernement de considérer sérieusement un amendement qui prévoit que le médiateur-arbitre devra tenir compte plutôt des paramètres de service public qui doit s'autofinancer, tels qu'énoncés dans la loi constitutive de Postes Canada. Nous avons déjà l'assurance du gouvernement que ce changement sera accepté et qu'il procurera un adoucissement dans ce contexte d'arbitrage.

Pour ce qui est de l'article 12, il fixe, quant à lui, les salaires des travailleurs et des travailleuses pour la prochaine convention.

 

. 1355 + -

Le Bloc québécois estime que le gouvernement aurait pu laisser la question salariale en suspens, de manière à donner la chance au syndicat de présenter son argumentation au médiateur-arbitre. C'est pourquoi nous demandons au gouvernement d'amender l'article 12, de manière à verser aux syndiqués, au minimum, les salaires prévus dans la dernière offre patronale.

D'autre part, les articles 8 et 10 prévoient que le gouvernement nomme le médiateur-arbitre. Le Bloc réfute ces articles, car il considère que le gouvernement doit faire en sorte que les syndiqués soient consultés. Il s'agit, à notre point de vue, d'un préalable à une réelle médiation qui rallierait tout le monde, parce que ce serait une personne au-dessus de tout soupçon, une personne respectée par toutes les parties.

Il y a aussi l'article 15 qui pose un problème. On y précise que le gouvernement refile la facture de la médiation aux deux parties. Cela nous apparaît particulièrement aberrant, compte tenu qu'il a été un acteur de premier niveau dans le conflit qui persiste actuellement. Il est de l'avis du Bloc québécois que le gouvernement doit payer la note de la médiation qu'il impose, et c'est pourquoi nous demandons d'abroger l'article 15.

Quant à l'article 17, il fixe les amendes à ceux qui contreviennent à la loi. Un calcul rapide nous amène à constater qu'il pourrait en coûter jusqu'à 50 millions de dollars par jour à la partie syndicale pour transgresser la loi. On comprendra...

Le Président: C'était très intéressant. Il est dommage que nous n'ayons pas plus de temps. Mes collègues, au lieu d'entamer la période de questions et commentaires, comme nous n'avons plus que quelques minutes, j'aimerais déposer un rapport du vérificateur général.

*  *  *

[Traduction]

LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL DU CANADA DE 1997

Le Président: J'ai l'honneur de déposer le rapport du vérificateur général du Canada pour l'année 1997.

[Français]

Conformément au paragraphe 108(3)d) du Règlement, ce document est réputé renvoyé en permanence au Comité permanent des comptes publics.



DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

L'ENVIRONNEMENT

M. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.): Monsieur le Président, vendredi dernier j'ai eu l'honneur de présider une table ronde sur l'environnement qui s'est tenue à la station forestière G. Howard Ferguson, à Kemptville, dans ma circonscription. Les participants, qui étaient plus de 40 et représentaient 4 générations, provenaient d'au moins 20 groupes populaires et de nombreuses industries du secteur primaire.

Tout au long de leurs discussions détaillées et franches, les participants n'ont pas cherché à savoir pourquoi le climat change, mais ont cherché avec enthousiasme à trouver des solutions au problème. Ce regroupement de Canadiens attend du Canada qu'il devienne un leader mondial du virage vers le développement durable.

J'ai trouvé cette expérience très enrichissante pour moi-même et mes électeurs, et j'invite les députés à suivre cet exemple.

*  *  *

LE MINISTÈRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, les terres agricoles de la vallée du Fraser sont demeurées cultivables grâce aux centaines de kilomètres de fossés de drainage qui tapissent la région. Depuis des générations, les autorités provinciales et municipales nettoient ces voies d'eau du limon et des débris qui s'y accumulent afin de réduire au minimum les inondations et les perturbations pour les cours d'eau et les habitats.

Le ministère des Pêches et des Océans semble maintenant déterminé à bouleverser notre région. Il décrit l'entretien régulier des fossés comme une modification nuisible de l'habitat des poissons et a soudainement demandé une compensation aux agriculteurs et aux municipalités. Le ministère souhaite un examen professionnel chaque fois qu'un fossé est nettoyé et il décrit même les cours d'eau saisonniers comme des eaux poissonneuses.

Bref, le ministère met en péril la vie et le gagne-pain des gens de notre région en menaçant l'habitat des poissons que ce ministère est censé protéger et il le fait d'une manière qui empêche toute coopération en temps opportun.

Dans ma circonscription, Fraser Valley, et dans celles de Langley—Abbotsford et Nanaïmo—Cowichan, il est temps que le ministre des Pêches et des Océans intervienne, ordonne à ses fonctionnaires de cesser de confronter les agriculteurs et leur demande de commencer plutôt à consulter les fermiers, les maires, les conseillers et les autres habitants de ces régions.

*  *  *

LE CENTENAIRE DE LA COMMUNAUTÉ SIKH CANADIENNE

M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens à la chambre aujourd'hui pour souligner la célébration du centenaire de la communauté sikh canadienne. L'année 1997 marque le centième anniversaire du début de l'immigration sikh au Canada.

Les sikh partagent la même foi et la même origine historique, puisqu'ils descendent des habitants de la vallée de l'Indus, mais la communauté sikh canadienne a été formée à même la diaspora mondiale qui a aussi des racines en Angleterre, en Afrique, en Nouvelle-Zélande, en Asie et aux États-Unis. De nos jours, les sikh sont présents dans chaque secteur professionnel et social de la vie canadienne; ils sont même élus députés à la Chambre des communes et aux assemblées législatives provinciales, ainsi que membres des gouvernements municipaux.

 

. 1400 + -

Je félicite donc la communauté sikh canadienne d'avoir contribué à la composition du tissu multiculturel du Canada au cours des cent dernières années et je lui souhaite tout le succès possible au cours des prochains siècles.

*  *  *

[Français]

LES MINES ANTIPERSONNEL

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, au moment où Ottawa est l'hôte d'une rencontre réunissant des représentants de plus de 100 pays qui signeront le traité d'Ottawa sur l'interdiction des mines antipersonnel, le Bloc québécois désire réitérer son appui à cette initiative de désarmement.

Les députés du Bloc saluent également avec détermination les organisations non gouvernementales et les individus, en particulier madame Jody Williams, Prix Nobel de la paix 1997, qui ont réussi à sensibiliser la majorité des États sur la nécessité d'agir rapidement dans ce dossier.

Le Bloc demeure convaincu que l'initiative du gouvernement constitue une avancée majeure quant à la promotion de la paix, et ce, bien que certains pays producteurs et utilisateurs de mines refusent encore de signer ce traité.

Nous enjoignons le gouvernement à poursuivre ses efforts pour faire signer le plus grand nombre de pays possible. Par ailleurs, nous l'assurons qu'un Québec souverain signera lui aussi le traité d'Ottawa.

*  *  *

LA FRANCOFÊTE

Mme Claudette Bradshaw (Moncton, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à féliciter les organisateurs de la Francofête, un festival qui s'est déroulé à Moncton du 13 au 16 novembre 1997. La Francofête fut un vrai succès. Elle a mis en vedette les musiciens et artistes acadiens. En plus, c'était la première fois qu'on organisait un gala francophone qui rendait hommage aux musiciennes et musiciens acadiens, un peu du genre du East Coast Music Awards. Ce festival a donné l'occasion aux gens des provinces Maritimes de partager leur fierté acadienne.

De plus, je tiens à remercier les artistes acadiens, comme Antonine Maillet et Edith Butler, qui ont frayé la voie afin d'assurer que les Acadiens et Acadiennes puissent oeuvrer et prospérer dans les provinces Maritimes. Nous sommes tous fiers que la culture acadienne soit plus vive que jamais.

*  *  *

[Traduction]

L'ENVIRONNEMENT

M. John Finlay (Oxford, Lib.): Monsieur le Président, imaginez ma surprise en apprenant que le chef de l'opposition contestait l'existence même d'un problème de réchauffement de la planète.

Lui et ses amis réformistes sont-ils les seuls qui continuent de croire que le réchauffement de la planète serait bénéfique pour notre climat, que le smog est une de ces choses dont on se délecte? Peut-être croient-ils que le réchauffement de la planète est une conspiration fomentée par la communauté internationale? À moins qu'ils ne soient tous membres de cette société qui croit que la terre est plate?

J'avais cru que le monde avait atteint son plus bas sur le plan de l'environnement lorsque Ronald Reagan avait contesté l'existence des pluies acides. Aujourd'hui, je n'en suis pas si sûr car je ne peux pas croire qu'un homme aussi cultivé que le chef de l'opposition puisse dire des choses aussi ridicules que celles qu'il a dites la semaine dernière à la Chambre.

Le réchauffement de la planète est un problème réel. En tant que Canadiens, nous devons aider à régler le problème des émissions excessives de gaz à effet de serre. J'espère que le chef de l'opposition nous aidera à l'avenir à protéger l'environnement de notre planète.

*  *  *

LA CRÉDIBILITÉ

M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens veulent rétablir chez leurs politiciens et dans leur système politique les notions de responsabilité et de crédibilité.

Ils estiment que cette chambre est trop partisane pour se concentrer sur les questions importantes. Quand les politiciens se regardent dans la glace chaque matin, ils devraient y voir les visages de tous ceux qui les ont élus pour les représenter, non celui du whip de leur parti.

Les Canadiens veulent que les politiciens tirent des enseignements de leurs erreurs et prennent leur travail au sérieux. Ils veulent que les politiciens écoutent ce qui se dit à la Chambre et décident de la façon dont ils vont voter, au lieu de sortir de leur trou au moment du vote et de voter dans le sens où on leur dit de voter. Il arrive que beaucoup de députés ne savent même pas sur quoi portait le vote.

Agissons comme des législateurs responsables et respectueux de la démocratie. Nous pouvons rétablir la crédibilité à l'égard des politiciens en prenant conscience de nos responsabilités et en écoutant notre coeur et celui des Canadiens qui nous ont élu, et non pas celui du whip du parti.

Soyons responsables envers les gens qui nous ont élus si nous voulons retrouver notre crédibilité à leurs yeux.

*  *  *

[Français]

LE DÉCÈS DE M. MICHEL BÉLANGER

M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec tristesse que nous avons appris le décès, hier, d'un grand canadien, monsieur Michel Bélanger, qui s'est fait remarquer depuis plusieurs décennies, tant sur les plans économique et social que culturel et politique.

Nous avons tous connu monsieur Bélanger comme étant une personne de conviction, ayant un profond attachement aux valeurs humaines, tout en gardant à l'esprit que notre société devait s'orienter dans une voie de prospérité économique et sociale. Il estimait que tout être humain pouvait contribuer positivement à l'amélioration de notre qualité de vie.

 

. 1405 + -

Le temps me manque pour énumérer les réalisations d'un homme aussi actif. Mais soulignons tout de même qu'il était l'un des plus grands banquiers de la scène canadienne. Nous nous souviendrons de son rôle comme coprésident de la Commission parlementaire sur l'avenir politique et constitutionnel du Québec. J'ai eu le plaisir de travailler avec lui quand il présidait le Comité du non, lors du référendum de 1995.

Nous ne vous oublions pas, monsieur Bélanger. Mille fois merci pour votre extraordinaire contribution au développement du Canada. Vous demeurez un exemple de travailleur acharné, consciencieux et soucieux de perfection...

Le Président: Je regrette d'interrompre l'honorable député. La parole est au député d'Okanagan—Shuswap.

*  *  *

[Traduction]

LA MINE WESTRAY

M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, Réf.): Monsieur le Président, la première tâche de tout gouvernement est de protéger les citoyens respectueux de la loi. Pourtant, ni la province ni le gouvernement fédéral ne se sont assurés que les mineurs de Westray rentrent chez eux sains et saufs tous les jours.

Selon le livre sur la tragédie de la mine Westray, le CANMET avait recommandé une évaluation plus poussée du projet. La centaine de morts de la mine de charbon Foord aurait dû inciter le gouvernement à être des plus prudents dans le cas de Westray. Alors, pourquoi le gouvernement fédéral a-t-il soudainement donné son autorisation sous la forme de garanties de prêts? Si le gouvernement fédéral n'avait pas de craintes quant à la sécurité des mineurs de Westray, pourquoi n'a-t-il pas fait en sorte que l'investissement puisse être récupéré grâce à une exploitation profitable et sûre de longue durée.

Le rapport publié hier révèle toute une série de problèmes de sécurité solubles. En tant que bailleur de fonds, Ottawa porte une partie des responsabilités pour avoir transformé un projet de création d'emplois en tombeau, une mine tellement dangereuse que 11 corps n'ont pas pu être retrouvés et que toute une région de Nouvelle-Écosse reste en deuil.

*  *  *

LES MINES ANTIPERSONNEL

L'hon. Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.): Monsieur le Président, un récent voyage au Moyen-Orient avec le ministre des Affaires étrangères m'a donné l'occasion de voir personnellement les dangers des mines antipersonnel, particulièrement pour nos troupes de maintien de la paix et des enfants innocents. Contrairement aux autres armes, les mines restent dans le sol dans l'attente d'une victime sans méfiance, tuant ou estropiant toutes les 22 minutes chaque jour.

Les tables rondes qui se tiennent à Ottawa essaient de planifier des mesures concrètes pour sauver des membres, des terres et des vies. Ottawa est l'hôte de quelque 120 pays prêts à signer un traité interdisant l'emploi, la production, le transfert et le stockage des mines antipersonnel et demandant que l'on démine dans les 10 ans.

Tous les pays devront collaborer à un régime de respect de la convention. Le gouvernement canadien et les ONG veulent une interdiction totale de ces mines. Nous devons nous mobiliser, non seulement pour obtenir la signature du traité, mais aussi sa ratification, pour apporter de l'aide aux victimes et pour procéder au déminage, mettant fin ainsi à ce crime contre l'humanité.

*  *  *

[Français]

LE PARTI QUÉBÉCOIS

M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Monsieur le Président, que c'était beau de voir les deux comparses, Lucien Bouchard et Jacques Parizeau, sur une même tribune, hier. Que c'était beau de les entendre dire qu'il n'y avait pas de division chez les séparatistes.

Lorsque Jacques Parizeau fait des déclarations sur le vote ethnique du dernier référendum et que Lucien Bouchard l'endosse en disant que son prédecesseur mérite le respect, que c'est un grand démocrate, c'est vrai qu'il n'y a pas de division. Parizeau et Bouchard, c'est du pareil au même. Non seulement veulent-ils diviser le Canada, ils veulent également diviser le Québec en différentes classes, voire en castes.

Messieurs Parizeau et Bouchard, mon Québec comporte une seule classe de citoyens, des citoyens de première classe. Avez-vous bien compris? Au Québec, c'est une seule classe de citoyens, des citoyens de première classe.

*  *  *

[Traduction]

L'ENVIRONNEMENT

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, cette semaine, alors que nous discutons de la conférence de Kyoto et de la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre, il est important pour le gouvernement en particulier de se rappeler le rôle qu'une revitalisation du transport ferroviaire au Canada pourrait jouer dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

J'exhorte le gouvernement à prendre au sérieux une bonne partie des recommandations que l'Association des chemins de fer du Canada a faites il y a une quinzaine de jours. Je ne suis pas d'accord avec toutes ses recommandations, mais le gouvernement devrait certes en prendre quelques-unes au sérieux.

L'une des meilleures façons de combattre les émissions à effet de serre au Canada consiste à revitaliser le transport ferroviaire, qu'il s'agisse du transport de marchandises ou du transport de voyageurs, et de réglementer à nouveau notre système de transport pour favoriser le transport ferroviaire.

Pour éviter de compromettre la sécurité publique et de polluer notre environnement, faisons en sorte qu'une partie des marchandises soit transportée par chemin de fer à nouveau plutôt que par camion.

*  *  *

[Français]

LE PARTI QUÉBÉCOIS

M. Denis Paradis (Brome—Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, hier soir, les péquistes ont assisté à de grandes retrouvailles, alors que l'ancien président du Comité du oui, M. Jacques Parizeau, partageait la même tribune que le premier ministre du Québec, M. Lucien Bouchard.

 

. 1410 + -

Pas de doute maintenant, les propos du grand démocrate Parizeau, c'est ainsi que l'a qualifié Lucien Bouchard, constituent la position officielle du Parti québécois en matière de politique ethnique. On comprend maintenant le silence du Bloc québécois sur cette question, le Bloc, un parti qui a perdu sa raison d'être.

C'est le caucus libéral du Québec, que j'ai l'honneur de présider, qui est la véritable courroie de transmission des intérêts des Québécois ici à Ottawa, et tout Brome—Missisquoi s'en réjouit.

*  *  *

LE DÉCÈS DE M. MICHEL BÉLANGER

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, Michel Bélanger vient de mourir. Recruté au début des années 1960 par les acteurs de la révolution tranquille au Québec, il devint conseiller économique de René Lévesque. Sous sa gouverne, il mit en branle l'audacieux projet de la nationalisation de l'électricité.

Premier francophone à accéder à la présidence de la Bourse de Montréal, président par la suite de la Banque Provinciale, artisan de sa fusion avec la Banque Canadienne Nationale, il demeura à la barre de cette nouvelle Banque Nationale jusqu'en 1989.

Après l'échec de Meech, il accepta de concrétiser avec Jean Campeau la Commission sur l'avenir politique et constitutionnel du Québec. Fédéraliste convaincu, il n'hésitait pas à contredire ceux qui brandissaient des épouvantails économiques en parlant des risques de la souveraineté.

En septembre 1991, il s'exprimait ainsi: «J'ai toujours pensé que la souveraineté était faisable, mais pas nécessaire. Sauf que si personne ne veut régler le problème autrement, c'est ce qu'il faut faire.»

Le Bloc exprime ses condoléances à la famille et aux amis de M. Bélanger.

*  *  *

[Traduction]

L'ÉDUCATION

M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Monsieur le Président, il est temps pour le gouvernement fédéral d'investir dans notre avenir. J'exhorte le ministre des Finances à affecter davantage d'argent à l'enseignement postsecondaire. Depuis 1993, le ministre a réduit de milliards de dollars les transferts aux provinces, ce qui a entraîné directement une augmentation des frais de scolarité pour les étudiants de tout le Canada.

Dans ma province, Terre-Neuve, les inscriptions à l'université Memorial ont baissé régulièrement depuis 1993 alors que les frais de scolarité ont augmenté de 200 p. 100, ce qui est vraiment énorme. Ainsi, on est maintenant confronté à une crise en ce qui concerne l'endettement des étudiants.

Si le gouvernement n'agit pas bientôt, l'enseignement postsecondaire accessible et abordable pour tous les Canadiens sera chose du passé.

*  *  *

L'INDUSTRIE DE L'AUTOMOBILE

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea—Gore—Malton, Lib.): Monsieur le Président, le secteur automobile est en pleine expansion au Canada. La fabrication d'automobiles et de pièces d'automobile se poursuit à un rythme record cette année. Les succès continus dans le secteur automobile ont des effets extrêmement positifs pour l'économie canadienne.

Ainsi, Chrysler Canada emploie 3 500 personnes dans ma circonscription, Bramalea—Gore—Malton et 14 000 personnes environ dans tout le pays. De plus, Chrysler espère maintenant créer 1 300 nouveaux emplois à son usine de montage de Bramalea en travaillant en collaboration avec le ministère du Développement des ressources humaines.

Ce sont des partenariats innovateurs comme la proposition de Chrysler qui vont permettre à la main-d'oeuvre canadienne d'être concurrentielle sur les marchés mondiaux du XXIe siècle.

*  *  *

LE RAPPORT KREVER

M. Greg Thompson (Charlotte, PC): Monsieur le Président, cela fait maintenant une semaine qu'on a publié le rapport Krever. De nombreux Canadiens attendent avec impatience que le gouvernement réponde aux besoins de plus de 12 000 victimes de l'hépatite C, victimes de réserves de sang contaminées au Canada.

Je demande au ministre fédéral de réagir de façon unilatérale et de faire preuve de l'esprit d'initiative nécessaire pour résoudre ce très grave problème. N'attendez pas les provinces. Donnez l'exemple que nous pouvons attendre du ministre de la Santé. Agissez maintenant. N'attendez pas. Ces gens ont besoin de votre aide.

*  *  *

LE NÉPOTISME

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président,

      Ma foi, nous avons des problèmes, mon ami
      Ici même, je vous le dis, dans la ville libérale

      Voyons donc, il s'agit bien sûr de népotisme
      Ils sont toujours sacrément fiers de dire
      Oui, toujours rudement fiers de dire

      Que le temps qu'ils consacrent à
      Un ami démarcheur vaut à leurs yeux de l'or

      Qu'il leur permet de cultiver de bonnes amitiés
      Avec de gros chèques
      Et de beaux cadeaux

      Avez-vous déjà essayé de vous tailler une belle place
      Lorsque des valets du Parti libéral sont sur les rangs?

      Eh bien, on appelle cela l'auge
      Le premier grand pas vers l'abîme
      De la dégradation. D'abord, une cuillerée de vin
      Médicinal, puis, une bouteille de bière

      Et la première chose que vous savez, leurs copains
      Travaillent et les gens ordinaires attendent toujours

      En écoutant quelque grande gueule d'étranger
      Se vanter de ses belles vacances
      Et de son revenu garanti, payés par les contribuables

      Cela vous fait bouillir d'indignation? Ma foi
      Mes amis, laissez-moi vous expliquer ce que je veux dire

      Il y a 1, 2, 3, 4, 5, 6 nominations partisanes
      Des nominations qui différencient
      Le gentilhomme du Grit, le libéral

      Cela commence par un G et cela rime avec
      T et cela annonce des problèmes

      Oh, nous avons des problèmes
      Nous avons des problèmes absolument terribles
      Ces cadeaux libéraux sont le signe
      De l'intervention du diable

      Oui, nous avons des tas de problèmes
      Nous avons des problèmes, de très gros problèmes
      Avec un P et qui riment avec G
      Et qui signifient libéraux
      Ici même, dans cette ville libérale

 

. 1415 + -

Le Président: Nous avons effectivement des problèmes.



QUESTIONS ORALES

[Traduction]

L'ENVIRONNEMENT

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Il est difficile d'enchaîner après une telle prestation, monsieur le Président.

Des voix: Bravo!

M. Preston Manning: Sérieusement, tout accord sur les émissions de gaz à effet de serre signé à Kyoto est voué à l'échec sans la collaboration des provinces.

Le mois dernier, la ministre de l'Environnement a rencontré ses homologues. Ils se sont entendus sur certains niveaux, mais le gouvernement fédéral a déjà changé ces niveaux deux fois. Les négociateurs de la Saskatchewan refusent d'aller à Kyoto, et le gouvernement de l'Alberta dit qu'il a été trahi par les actions du gouvernement fédéral.

Ma question s'adresse au premier ministre. Comment entend-il faire accepter l'accord de Kyoto aux provinces si elles se sentent trahies par la façon dont cet accord a été élaboré?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons présenté une proposition à Kyoto aux fins de négociation. De nombreux aspects de cette proposition ont été abordés durant nos discussions avec les provinces. Il a été dit que nous avions besoin de flexibilité.

Nous allons participer à des négociations où 150 pays seront représentés. Nous devons nous assurer que le problème des changements climatiques sera traité de façon très sérieuse par tous les pays du monde.

Au Canada, nous avons dit que nous voulions une position réaliste, compte tenu du fait que nos voisins, les États-Unis, ont un problème plus grave que le nôtre. Nous avons décidé d'avoir une position...

Le Président: Le chef de l'opposition.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral a changé de position trois fois au cours des trois dernières semaines. C'est une des raisons pour lesquelles les provinces sont mécontentes.

Une autre raison, c'est que le gouvernement fédéral a refusé catégoriquement de donner son opinion sur ce que coûtera l'accord de Kyoto. D'autres ont donné leur opinion sur le coût de cet accord.

La Conference Board a dit que l'accord coûterait 780 $ par année à chaque homme, femme et enfant. Le CCCE estime que l'accord de Kyoto pourrait entraîner une réduction de 2 à 3 p. 100 du PIB, mais le gouvernement refuse de dire à combien il estime ce coût.

Le premier ministre peut-il nous dire exactement à combien le gouvernement fédéral estime le coût des engagements pris à Kyoto? Croit-il que ce coût est acceptable?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous entreprenons des négociations en vue de régler un problème avec lequel tous les pays du monde sont aux prises.

Nous savons que, au Canada, nous pouvons profiter de cette occasion pour développer de nouvelles technologies et les exporter dans le monde entier. Nous sommes un grand exportateur d'énergie.

Nous cherchons à faire reconnaître certaines des choses que nous faisons. Par exemple, nous nettoyons l'essence au Canada afin de pouvoir donner de l'essence propre aux Américains. Nous aimerions que ce genre de chose soit reconnu.

Nous allons là-bas avec une très bonne position de négociation.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, avec des réponses aussi vagues, il est clair que la position des libéraux à Kyoto sera tout aussi inefficace que la position des conservateurs à Rio.

Lorsque le député de Sherbrooke est allé à Rio, ce n'était qu'une affaire de publicité. C'était une énorme campagne de relations publiques qui ne voulait absolument rien dire parce qu'il n'y a pas eu de vraies consultations avant le sommet. Il n'y a pas eu de véritable accord au Canada. Il n'y avait que des objectifs irréalistes. Il n'y avait pas de plan de financement, ni de plan de mise en oeuvre.

Pourquoi le gouvernement libéral fait-il exactement la même erreur à Kyoto que les conservateurs ont faite à Rio?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, au moins les conservateurs, eux, avaient une position, contrairement aux réformistes, qui n'ont aucune position sur la question.

Au moins notre gouvernement et la plupart des partis à la Chambre ne croient plus que la Terre est plate, mais croient que la Terre est ronde, qu'il y a des problèmes internationaux et que nous sommes à la veille du XXIe siècle. Nous ne sommes pas au IXe siècle.

 

. 1420 + -

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, il n'y a pas qu'Ottawa qui nous donne des difficultés. Kyoto est en train de nous en donner beaucoup aussi.

La ministre de l'Environnement a dit vouloir imposer une réglementation stricte concernant nos voitures, nos maisons et toutes les industries du pays, mais pas une fois elle n'a abordé la question des coûts de ces mesures.

Le gouvernement veut que nous ramenions la conjoncture économique au niveau où elle était en 1990, puis que nous réduisions encore les dépenses de 5 p. 100, mais il n'a pas calculé combien d'emplois seront perdus dans cette entreprise.

Le premier ministre peut-il me dire pourquoi le gouvernement a si peur de parler du coût de ce vol de kamikaze sur Kyoto?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, notre position est très raisonnable. La question est délicate. Certains disent que nous allons trop loin, d'autres, que nous n'en faisons pas assez. C'est le scénario habituel au Canada, un pays très raisonnable ayant une vision des choses très équilibrée.

Nous croyons qu'il y existe un problème mondial, mais je sais que le Parti réformiste ne pense qu'à protéger certains intérêts financiers.

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre parle de position très équilibrée. En fait, les libéraux ont présenté trois positions équilibrées. Ils sont en train de faire le tour du chapeau avec ce voyage à Kyoto, et je ne crois pas qu'ils aient raison d'en être fiers.

Ils n'ont pas de plan de financement de l'entente de Kyoto. Ils n'ont pas de plan de mise en oeuvre. Ils n'ont pas de plan pour obtenir la collaboration des provinces, et les provinces sont déjà réticentes, surtout l'Alberta et la Saskatchewan.

Le seul plan que les libéraux aient élaboré consiste à s'assurer qu'ils auront l'occasion de se faire photographier, souriants et l'air préoccupés par l'environnement.

Je veux poser cette question au premier ministre: comment les Canadiens pourraient-ils faire confiance à un gouvernement qui leur a dit cette semaine de signer maintenant et de payer plus tard? Combien cela coûtera-t-il?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens savent que le gouvernement du Canada a le sens des responsabilités. C'est un gouvernement qui se rend compte qu'il y existe un problème et que ce n'est pas en faisant l'autruche que nous réglerons le problème du changement climatique dans le monde.

D'autres ont pris de très mauvaises décisions, par le passé; c'étaient des gens qui ne voulaient rien changer. Ils ont fait des erreurs graves, et ce n'est pas la voie que le gouvernement entend suivre aujourd'hui.

Le gouvernement croit qu'il existe un problème international qui mérite notre attention. Les autres partis à la Chambre des communes ont leur position sur la question, mais le Parti réformiste n'a que des intérêts.

*  *  *

[Français]

LA POLITIQUE LINGUISTIQUE

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le Président, le dernier recensement de Statistique Canada confirme ce matin le grave recul du français.

Le pourcentage des personnes dont la langue d'usage est le françaistombe sous la barre des 3 p. 100 en dehors du Québec. Partout au Canada, sauf au Yukon, la proportion des francophones a diminué.

À la lumière des chiffres publiés aujourd'hui, la ministre du Patrimoine mesure-t-elle l'ampleur de l'échec de la politique linguistique du fédéral?

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je pense qu'une chose est importante: si on regarde le recensement de 1996, on constate tout d'abord que l'utilisation de la langue française au Canada a augmenté, et ça c'est une bonne nouvelle. Bien sûr, là où on a eu la plus grande augmentation, c'est dans la province de Québec.

On veut maintenir, comme nous le faisons déjà avec un programme de langue minoritaire, la reconnaissance de la langue française comme langue égale à la langue anglaise, en appuyant par exemple des organismes comme la Télévision française de l'Ontario. On a besoin que la télévision en français soit dans tout le pays et on espère que ça va continuer.

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le Président, le taux d'assimilation des francophones a encore augmenté, comme le Bloc québécois l'a toujours appréhendé. Le nombre de personnes qui parlent français à la maison a même diminué de 57 400 depuis l'adoption de la Loi sur les langues officielles.

La ministre prévoit-elle procéder à un examen en profondeur de sa politique linguistique, afin de la rendre plus conforme aux exigences de la situation critique des francophones hors Québec?

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'ai déjà, par l'entremise de mes collègues du Cabinet, procédé à un réexamen de tous les financements que nous faisons actuellement pour les langues minoritaires.

[Traduction]

Une voix: Envoyez-leur un autre chèque.

[Français]

L'hon. Sheila Copps: Ce que je trouve triste, du côté du Parti réformiste, c'est qu'ils disent: «Envoyez-leur un chèque.» La capacité de parler français ne dépend pas d'un chèque, ça dépend de la volonté de chaque Canadien et chaque Canadienne, et depuis 100 ans la langue a survécu. Maintenant qu'on a les institutions, il faut continuer avec elles, il faut les bâtir ensemble dans un Canada uni. On est bien placés pour bâtir le français à travers le pays.

 

. 1425 + -

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre du Patrimoine.

L'objectif de la politique linguistique fédérale est de permettre aux groupes francophones du Canada de vivre en français. Aujourd'hui, la ministre se gargarise des données sur le bilinguisme, mais elle demeure aveugle aux problèmes croissants que vivent les francophones.

Pourquoi la ministre du Patrimoine ne s'engage-t-elle pas à entreprendre une série de consultations avec ses homologues des provinces à majorité anglaise afin de trouver comment le Canada pourrait réellement permettre à ces francophones de vivre en français?

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je le fais, et j'ai justement fait cette même démarche le mois dernier.

Il y a eu une réunion des ministres de la Francophonie mais, malheureusement, le ministre du Québec a décidé de ne pas y participer.

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, depuis 1971, le taux d'assimilation canadien est passé de 27 p. 100 à 37 p. 100.

Dans la région de la ministre, à Hamilton, le taux d'anglicisation a atteint, en 1996, 68 p. 100.

La ministre du Patrimoine se rend-elle compte que le message qu'elle lance par son immobilisme, c'est qu'au Canada, c'est en anglais que ça se passe?

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'invite le député à venir dans mon comté rencontrer les gens qui travaillent à l'école Notre-Dame, à l'école Georges-P.-Vanier ou qui travaillent dans une chambre de commerce francophone.

Veut-il venir voir ou préfère-t-il fermer les yeux, comme l'a fait son ministre de la Francophonie, qui ne veut rien savoir des francophones hors Québec, sauf quand ça le sert de façon politique.

*  *  *

[Traduction]

LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

Les banques ont dépensé des millions pour poser une question: Une banque peut-elle changer? En fin de compte, la question devrait être: Une banque peut-elle compter? Avec des prêts aux petites entreprises, le gouvernement fédéral canalise dans les banques 6 milliards de dollars en prêts sans risque. Le gouvernement prétend obtenir 37 emplois pour chaque million de dollars prêté, car c'est ce que les banques lui disent. Or, le vérificateur général a révélé que le compte réel est un misérable sept emplois par million de dollars.

Le ministre mettra-t-il un frein à cette aventure sans risque pour Monsieur le Banquier et fera-t-il en sorte...

Le Président: Le ministre de l'Industrie.

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, non seulement le chef du NPD comprend profondément mal le programme, mais elle ne reconnaît pas le fait que la Loi sur les prêts aux petites entreprises, qui aide actuellement 30 000 petites entreprises au Canada, nécessite un accès à du capital, une des préoccupations fondamentales que le secteur de la petite entreprise a porté à notre attention.

Jour après jour, les petites entreprises créent le genre même d'emplois dont le chef du NPD prétend vouloir la création. Pourquoi ne se réveille-t-elle pas et ne se rend-elle pas compte que ce programme fonctionne?

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, nous parlons d'aventure sans risque pour les banques, et non pour les petites entreprises.

Le vérificateur général a constaté que l'Agence de promotion économique du Canada atlantique est elle aussi handicapée sur le plan mathématique. Il semble que l'APECA ne soit pas non plus en mesure de compter le nombre d'emplois qu'elle a créés et maintenus. Au lieu de cela, elle joue avec les chiffres en présumant, ce qui est incroyable, que chaque emploi dure dix ans.

Le ministre responsable de l'APECA cessera-t-il de se vanter au sujet d'emplois présumés et commencera-t-il à travailler avec les Canadiens de la région de l'Atlantique pour fixer et atteindre des objectifs en vue d'une augmentation d'emplois réels, dont ils ont désespérément besoin?

L'hon. Fred Mifflin (ministre des Anciens combattants et secrétaire d'État (Agence de promotion économique du Canada atlantique), Lib.): Monsieur le Président, l'APECA est très heureuse de noter que, dans son dernier rapport, le vérificateur général reconnaît explicitement les progrès qu'a réalisés l'agence. Je me réjouis de pouvoir le confirmer.

Malgré cela, le vérificateur général a fait certaines observations et je suis enchanté de pouvoir prendre ces observations en délibéré et de mettre en oeuvre de nouvelles méthodes au sein de l'APECA pour assurer qu'elle sera plus efficace que jamais.

*  *  *

L'ENVIRONNEMENT

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, il y a maintenant 24 heures que le gouvernement a annoncé la position qu'il entend défendre à la conférence de Kyoto. Je voudrais reposer ma question d'hier. Le gouvernement pourrait-il dire à la Chambre des communes aujourd'hui quels gouvernements provinciaux ou territoriaux appuient officiellement la position qu'il a annoncée il y a 24 heures?

 

. 1430 + -

L'hon. Christine Stewart (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai déjà dit, le gouvernement a eu une longue série d'entretiens avec tous ses partenaires au Canada, y compris les provinces et les territoires.

Au cours de la rencontre à Regina, nos homologues provinciaux et territoriaux ont déclaré qu'ils reconnaissaient que le Canada devait avoir un peu de latitude à Kyoto, qu'en tant que membres de la communauté internationale, nous devions négocier une convention et qu'il était dans l'intérêt de tous les Canadiens que nous soyons à la table des négociations et que nous aboutissions à un accord satisfaisant à Kyoto.

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, je suis heureux d'apprendre que la ministre est favorable au dialogue, parce que je voudrais justement l'inviter à s'entretenir avec son collègue des Ressources naturelles et demander au premier ministre de les aider à s'entendre.

Au cours d'une entrevue radiophonique ce matin, la ministre a déclaré que l'engagement du Canada à Kyoto aurait force obligatoire, contredisant ainsi directement son collègue des Ressources naturelles qui a dit que «lorsque le plan de mise en oeuvre du Canada aura suffisamment mûri, nous songerons à une ratification formelle à Kyoto.»

Le premier ministre peut-il nous dire lequel des deux ministres fait vraiment valoir la position du gouvernement du Canada?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, je crois que le député comprend mal le processus législatif dont il est question ici.

Tout d'abord, les parties doivent obtenir un consensus à Kyoto sur les engagements qu'elles sont disposées à transformer en obligations légales. Puis, il y aura le processus de signature. Ensuite, un processus de ratification suivra. Enfin, il y aura un processus d'entrée en application.

Les propos de la ministre de l'Environnement et les miens concordent donc parfaitement. Le député ne saisit tout simplement pas le processus.

*  *  *

LA JUSTICE

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, j'ai une question à poser à la ministre de la Justice.

Hier, en Saskatchewan, le juge a refusé de tenir compte des lois du Parlement et a dit que, dans l'affaire Latimer, les dispositions canadiennes sur le meurtre sont mal conçues. Dans la situation, il important que la ministre de la Justice fasse part de ses intentions. Est-ce que le Code criminel a un sens ou bien est-ce que les juges peuvent y choisir ce qui leur convient?

Quelle mesure législative la ministre envisage-t-elle, vu le traitement que le juge a réservé au Code criminel dans sa décision sur l'affaire Latimer?

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le député soulève une question très importante relativement au jugement que le juge Noble a rendu dans l'affaire Latimer.

Comme le député le sait, il m'est impossible de commenter cette cause. Il appartient au procureur général de la Saskatchewan de décider s'il y a lieu d'interjeter appel.

Je tiens néanmoins à souligner dans l'intérêt de tous les députés que le juge Noble a tenu compte des circonstances exceptionnelles dans lesquelles il a rendu sa décision. Il a conclu que la charte avait été violée, que les droits de M. Latimer...

Le Président: La parole est au député de New Westminster—Coquitlam—Burnaby.

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, la réponse était prévisible. Avec le gouvernement libéral, c'est encore le vide juridique.

Les groupes de handicapés craignent que cette nouvelle brèche dans la loi n'entraîne le Canada sur la pente glissante d'une dévalorisation de la vie humaine. Que peut dire la ministre à ces handicapés qui sont maintenant plongés dans la crainte? Comment va-t-elle protéger les personnes vulnérables et nous donner un code pénal qui a du sens?

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Le député devrait savoir que rien, dans tout ce que le juge Noble a dit hier, n'a d'incidence sur les dispositions du Code criminel sur le meurtre au deuxième degré. La peine obligatoire minimum de dix ans demeure.

Hier, l'avocat de M. Latimer a soutenu que, dans les circonstances, l'imposition de cette peine aurait constitué un châtiment cruel et inusité. Le juge Noble a dit clairement que sa décision ne portait que sur cette cause précise et que les dispositions du code dont il est question restent en vigueur.

*  *  *

[Français]

L'ENVIRONNEMENT

M. Odina Desrochers (Lotbinière, BQ): Monsieur le Président, dans son rapport ce matin, le vérificateur général constate que le gouvernement fédéral n'a aucune politique interne concernant la gestion, le remplacement et l'élimination des substances affaiblissant la couche d'ozone. Pourtant, les ministères fédéraux, d'après le vérificateur, sont de grands utilisateurs de ces substances.

 

. 1435 + -

Comment ce gouvernement peut-il prétendre être en mesure d'appliquer l'entente qu'il signera à Kyoto sur les gaz à effet de serre, alors que ses propres ministères sont incapables de prêcher par l'exemple en matière de réduction des substances affaiblissant la couche d'ozone?

[Traduction]

L'hon. Christine Stewart (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, mon ministère prend le rapport du vérificateur général très au sérieux. Le Canada a joué un rôle de chef de file en mettant en place le Protocole de Montréal portant sur la réduction des substances appauvrissant la couche d'ozone. Nous savons qu'il se fait un trafic illégal de ces substances et nous sommes en train d'élaborer un plan national d'action pour veiller à ce que toutes les substances appauvrissant la couche d'ozone fassent l'objet d'un contrôle au Canada.

[Français]

M. Odina Desrochers (Lotbinière, BQ): Monsieur le Président, comment le gouvernement fédéral pourrait-il convaincre les provinces récalcitrantes d'adhérer aux objectifs de Kyoto, alors que dans le cas de la lutte aux gaz qui affaiblissent la couche d'ozone, il n'a même pas été capable de donner l'exemple?

[Traduction]

L'hon. Christine Stewart (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, le Canada a effectivement donné le bon exemple sur la scène internationale à propos des substances appauvrissant la couche d'ozone. Nous avons établi des objectifs que nous avons dépassés. Cela a eu d'énormes avantages économiques pour notre pays, pour les entreprises privées et pour les particuliers.

Nous espérons que cela donnera un bon exemple pour la conférence de Kyoto.

*  *  *

TED WEATHERILL

M. John Williams (St. Albert, Réf.): Monsieur le Président, le vérificateur général a descendu en flammes Ted Weatherill et le Conseil canadien des relations du travail dans son rapport publié ce matin.

Le vérificateur général a relevé 1 300 cas où Ted Weatherill a excédé les lignes directrices du Conseil du trésor dans ses notes de frais. Ce gars-là est absolument incontrôlable.

J'aimerais que le ministre du Travail se lève immédiatement pour nous dire que ce gars-là ne fait plus partie du Conseil.

L'hon. Lawrence MacAulay (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, j'ai reçu et parcouru le rapport, et je suis d'accord avec ce qu'il dit.

Les membres du Conseil canadien des relations du travail sont nommés par le gouverneur en conseil à titre inamovible. Il y a des mesures légales à prendre pour que le gouverneur en conseil puisse révoquer un membre du Conseil, et j'ai entamé ces mesures ce matin.

Des voix: Bravo!

Des voix: Nous voulons Lawrence pour chef.

M. John Williams (St. Albert, Réf.): Monsieur le Président, le ministre ne nous a rien dit ce matin que nous ne savions pas le printemps dernier, et cela nous a coûté des dizaines de milliers de dollars. Va-t-il rembourser le trésor public, puisqu'il aurait pu prendre ces mesures il y a déjà six mois?

L'hon. Lawrence MacAulay (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, mon honorable collègue est sûrement au courant de ce que je viens de dire. J'ai pris des mesures.

*  *  *

[Français]

L'INDUSTRIE DE L'AMIANTE

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Monsieur le Président, hier, le ministre du Commerce international affirmait que le premier ministre du Québec avait expressément demandé au fédéral de ne pas porter plainte devant l'OMC.

Vérification faite, le premier ministre du Québec n'a jamais, directement ou indirectement, en aucun cas, formulé une telle demande.

Comment le ministre a-t-il pu faire une telle déclaration en cette Chambre?

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, hier, j'ai dit très clairement que le premier ministre du Québec avait donné des directives au gouvernement, à des fonctionnaires fédéraux. Je suis très fier de l'avoir dit hier, et je le répète aujourd'hui.

 

. 1440 + -

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Monsieur le Président, nous avons la preuve que monsieur Bouchard, le premier ministre du Québec, n'a jamais fait une telle demande au ministre. Je lui demande de déposer en cette Chambre la preuve selon laquelle le premier ministre du Québec lui a bel et bien demandé de ne pas porter plainte à l'OMC.

[Traduction]

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, de toute évidence, l'amiante est une question qui passionne la députée, mais nos fonctionnaires ont bien compris que le gouvernement du Québec tient deux discours, un pour la population et l'autre à huis clos.

Hier, j'ai bien précisé que le gouvernement du Canada a mené la discussion sur l'amiante et qu'il a organisé une conférence internationale. La semaine dernière, il a ménagé une rencontre avec des agents du gouvernement du Québec et des représentants de l'industrie, qui sont bien décidés et résolus à adopter une stratégie pour...

Le Président: Le député de West Vancouver—Sunshine Coast.

*  *  *

LA COMMISSION D'APPEL DE L'IMMIGRATION

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Monsieur le Président, aujourd'hui, le vérificateur général a rendu public un rapport dans lequel il critique sévèrement la Commission d'appel de l'immigration. Le vérificateur général a relevé de graves problèmes à tous les stades du processus de détermination du statut de réfugié.

Je voudrais poser à la ministre de l'Immigration la question suivante: 20 000 personnes font l'objet d'une mesure d'expulsion. Seulement 4 000 ont été expulsées. Que fait le gouvernement pour accélérer le processus afin de se débarrasser de ces 16 000 personnes qui font l'objet d'une mesure d'expulsion?

[Français]

L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, laissez-moi dire en premier lieu que nous accueillons favorablement le rapport du vérificateur général en regard du processus de détermination du statut de réfugié dans lequel il nous recommande de réviser en profondeur ce processus. C'est ce que nous allons faire et c'est ce pourquoi nous avons un groupe consultatif qui doit déposer un rapport et des recommandations en décembre de cette année. Donc ça nous servira à apporter des changements au processus.

Quant au problème des renvois, oui nous avons des problèmes quant aux renvois, mais laissez-moi vous dire que, comparativement à l'an dernier, nous avons quand même augmenté notre pourcentage de renvois de 37 p. 100, à l'heure actuelle.

[Traduction]

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Monsieur le Président, la ministre sait qu'un ministre qui agit est applaudi à tout rompre à la Chambre des communes. Le vérificateur général précise bien que, pour préserver l'intégrité du programme d'immigration, les ordonnances de renvoi doivent être exécutées rapidement.

Au ministère, il y a 35 000 demandes de statut de réfugié qui sont en attente et 16 000 personnes qui font l'objet d'une mesure de renvoi. La ministre peut-elle dire aux Canadiens ce qu'elle fera pour régler ce problème non pas l'année prochaine ou l'année d'après, mais bien aujourd'hui même?

[Français]

L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, j'inviterais mon collègue du Parti réformiste à relire aussi le rapport du vérificateur général dans lequel il stipule justement de faire attention à ne pas apporter des modifications à la pièce au système mais plutôt de le regarder dans son ensemble parce que c'est un processus très complexe. Et c'est exactement ce que nous allons faire.

*  *  *

LA STRATÉGIE NATIONALE SUR LE SIDA

M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, hier, à Toronto, le ministre de la Santé a annoncé la phase III de la Stratégie nationale sur le sida. Or, au cours de la phase II, tous les intervenants avaient déploré le manque de coordination de Santé Canada dans la mise en oeuvre de la Stratégie nationale sur le sida.

Afin d'éviter les problèmes qu'on a connus au cours de la phase II, le ministre peut-il nous dire à qui il a confié la coordination de la phase III de la Stratégie nationale sur le sida?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, c'est vrai qu'hier à Toronto j'ai annoncé que le gouvernement respectera son engagement de renouveler la Stratégie nationale sur le VIH et le sida. Nous allons dépenser 211 millions de dollars durant les cinq prochaines années.

En ce qui concerne la coordination de ces efforts, j'ai consulté les groupes communautaires impliqués et j'ai créé un conseil ministériel pour assurer la représentation de ceux qui sont impliqués dans ce sujet.

*  *  *

TFO

M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Monsieur le Président, des citoyens se sont réunis hier soir à Ottawa afin de discuter de l'avenir de TFO, la chaîne française éducative de TV Ontario, et pour faire part de leur vive opposition à sa privatisation.

La ministre du Patrimoine peut-elle nous rassurer quant au genre d'appui auquel TFO peut s'attendre de la part de son ministère?

 

. 1445 + -

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais d'abord féliciter le député qui a toujours démontré un grand intérêt en ce qui concerne l'épanouissement du fait français à travers le Canada.

Je peux l'assurer qu'on travaille avec nos homologues pour s'assurer que TFO puisse continuer le service public et que, deuxièmement la Télévision française de l'Ontario, qui a déjà commencé au Nouveau-Brunswick, puisse diffuser dans la province de Québec et dans tout le Canada, afin d'avoir plus de programmation en français pour les enfants et pour tout le monde.

*  *  *

[Traduction]

LES TRANSPORTS

M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Réf.): Monsieur le Président, j'ai une question qui s'inspire de Noël à poser aux rabat-joie qui sont assis là-bas.

Pourquoi le ministre des Transports laisse-t-il ses collaborateurs se déchaîner sur la reréglementation du secteur des vols nolisés, forçant ainsi les milliers de Canadiens qui prévoyaient de voyager pendant le congé de Noël à payer des centaines de dollars de plus pour leurs vols ou à rester chez eux?

L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement n'est pas en train de réglementer de nouveau le secteur des vols nolisés.

Ce qui s'est passé est assez normal. L'Office des transports du Canada examine périodiquement toute la réglementation. Il a consulté le public au sujet d'un certain nombre de propositions de règlement. Le public peut maintenant prendre connaissance de ces propositions et donner son avis à cet égard. Les propositions me seront ensuite présentées en ma qualité de ministre. Aucune modification ne sera apportée sans l'approbation du Cabinet.

Le député ne devrait pas croire tout ce qu'il lit dans la presse.

M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Réf.): Monsieur le Président, je tiens à préciser que la presse n'est pas ma seule source d'information. Le ministre peut s'attendre à au moins une mauvaise surprise dans son bas de Noël cette année.

Les réservations de dernière minute à prix d'escompte pour les vols nolisés sont devenues monnaie courante parce qu'elles répondent à une demande des consommateurs. Voilà que les libéraux, à cause de leur haine pathologique du marché libre, veulent mettre un terme à cette pratique.

Pourquoi le ministre veut-il restreindre les voyages outre-mer des nantis?

L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, bien au contraire. La réglementation de l'OTC vise plutôt à libéraliser davantage le secteur des vols nolisés.

Quoi qu'il en soit, cela montre que les choses fonctionnent bien parce que l'OTC a fait paraître ses nouveaux règlements dans la Gazette et invité le public à donner son avis à cet égard. Le député et d'autres expriment leur opinion. Cela donne lieu à un débat éclairé sur cette très intéressante et importante question.

*  *  *

LES PÊCHES

M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Pêches et des Océans.

Selon le rapport du vérificateur général sur la survie à long terme des stocks de saumon du Pacifique, la destruction de l'habitat serait un facteur dans la diminution du nombre de saumons chinook et coho qui remontent se reproduire dans les cours d'eau de la Colombie-Britannique.

Le vérificateur soutient que le ministère des Pêches et des Océans a failli à ses responsabilités en n'examinant pas sa politique de protection des habitats.

Le ministre dira-t-il à la Chambre pourquoi, en dépit des avertissements lancés à l'issue d'une vérification interne faite par le ministère en 1994, le gouvernement n'a pas examiné sa politique de protection des habitats?

L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, nous avons une bonne politique de protection des habitats en Colombie-Britannique. Cependant, un de nos problèmes, c'est que le gouvernement provincial est responsable de l'agriculture, des mines, des forêts, du développement urbain et de la construction des routes.

Ces six dernières années, 13 accusations ont été portées contre le gouvernement provincial et sept procès ont été intentés contre lui.

J'espère que le député parlera à ses amis du gouvernement de la Colombie-Britannique afin qu'il y ait une véritable collaboration dans la protection de l'habitat du saumon du Pacifique en Colombie-Britannique.

M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, le vérificateur général a clairement blâmé le ministère fédéral des Pêches et des Océans.

Le gouvernement de l'Alaska menace les pêcheurs de la Colombie-Britannique de saisir leurs navires de pêche et de leur enlever ainsi leur moyen de subsistance.

Quelles mesures précises prend-il devant cette menace très sérieuse du gouvernement de l'Alaska? Le ministre soutiendra-t-il les pêcheurs dans leur action reconventionnelle contre le vol illégal du saumon par les pêcheurs de l'Alaska?

 

. 1450 + -

L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, la mention de vol illégal par le député est intéressante. Cette expression illustre bien le genre de propos excessifs qu'il utilise dans ce dossier.

Je lui fais remarquer que nous faisons tout ce que nous pouvons pour parvenir à une entente avec les Américains, tant de l'Alaska que de l'État de Washington, afin que la pêche au saumon du Pacifique soit gérée dans le meilleur intérêt des pêcheurs des deux pays.

Pour ce qui est des pêcheurs qui ont pris part au blocus de Prince Rupert, leur dossier suit le processus normal devant les juges et les tribunaux canadiens, selon les règles de droit canadiennes...

Le Président: Le député de Pictou—Antigonish—Guysborough.

*  *  *

LA MINE WESTRAY

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, très tôt le matin du 9 mai 1992, 26 mineurs sont morts à la suite d'une violente explosion survenue à la mine Westray de Plymouth, dans le comté néo-écossais de Pictou.

Hier, le juge Peter Richard a déposé son rapport à la suite de l'enquête publique sur la catastrophe de la mine Westray. Dans son rapport, il a recommandé au gouvernement du Canada, par l'entremise du ministère de la Justice, d'instituer une étude sur l'obligation de rendre compte des gestionnaires et des administrateurs de la société relativement aux erreurs ou à la négligence commises par la société et de présenter au Parlement du Canada les modifications législatives nécessaires pour garantir que les gestionnaires et administrateurs rendent compte de ce qu'ils font.

La ministre de la Justice peut-elle nous dire si elle prendra des mesures...

Le Président: La parole est à la ministre de la Justice.

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le député soulève un problème très important, celui de l'énorme tragédie survenue à la mine Westray.

Nous avons reçu le rapport final du juge Richard hier. Mes collaborateurs examinent le document en question. Nous analyserons ce rapport de concert avec les ministères concernés, dont ceux de l'Industrie, du Développement des ressources humaines et d'autres.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, ma question complémentaire s'adresse au ministre du Travail.

La recommandation no 64 du même rapport invite la province de la Nouvelle-Écosse à conclure un accord avec le ministère fédéral du Travail et à transférer au gouvernement fédéral la responsabilité provinciale de l'exploitation souterraine du charbon et de l'inspection. Elle invite aussi le gouvernement de la Nouvelle-Écosse à tenir le gouvernement fédéral à jour sur la rédaction de la réglementation.

Le ministre du Travail est-il prêt à s'engager sur la pente savonneuse du transfert de responsabilités fédérales aux provinces?

L'hon. Lawrence MacAulay (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, je puis donner au député l'assurance que le ministre du Travail et le ministère qu'il dirige se préoccupent des questions concernant la santé et la sécurité dans l'ensemble de l'industrie minière canadienne.

*  *  *

LES TRANSPORTS

M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.): Monsieur le Président, la semaine dernière le premier ministre a annoncé un nouvel accord bilatéral avec la Chine.

La société Winport Logistics de Winnipeg, qui s'est jointe à Kelowna Flightcraft, est prête à entrer sur ce nouveau marché. Le ministre des Transports peut-il nous dire ce qu'il fait pour permettre aux entreprises canadiennes de profiter de ce nouvel accord?

L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes très heureux de cet accord car il ouvre de nouveaux débouchés aux industries de fret aérien des deux pays.

Avant le début des négociations avec la Chine, j'ai ordonné à mes fonctionnaires d'élaborer des lignes directrices applicables au Canada. Dès que j'aurai ces lignes directrices, je désignerai un transporteur aérien pour assurer le transport des marchandises entre le Canada et la Chine.

*  *  *

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Monsieur le Président, le travail du vérificateur général consiste à mettre au jour des scandales et j'en ai justement un ici. Un rapport de consultant rédigé par une réserve des premières nations en Ontario avait estimé le coût de réparation d'une usine de traitement des eaux à 26 000 $. Lorsque les contribuables canadiens ont reçu la note, elle se chiffrait à 2,3 millions de dollars.

Étant donné que le coût final du projet était environ 100 fois plus élevé que l'estimation initiale, la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien peut-elle nous dire pourquoi elle a choisi de remplacer à grands frais un système au lieu de s'en tenir aux travaux prévus à l'origine, qui auraient été suffisants en l'occurrence?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, la communauté dont il est ici question est située près d'un cours d'eau au nord duquel se trouve une mine en exploitation. L'eau de la rivière contient de l'aluminium et la première nation refusait de consommer l'eau tirée de cette rivière.

Soucieuse de la sécurité de ses membres, la communauté a donc décidé, à juste titre, qu'il lui fallait une nouvelle source d'approvisionnement en eau. Nous avons donc travaillé avec les autochtones pour trouver une solution de rechange.

*  *  *

[Français]

LA STRATÉGIE DU POISSON DE FOND DE L'ATLANTIQUE

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Pêches et des Océans.

Alors que la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique arrive bientôt à terme, un comité parlementaire consulte actuellement sur les suites à donner à ce programme, dont dépendent toujours plus de 20 000 personnes. En même temps, nous apprenons que les fonctionnaires du ministère du Développement des ressources humaines, qui prévoient la fin du programme, se préparent à gérer une crise sociale majeure.

Le ministre peut-il nous dire si les consultations actuelles déboucheront sur des suites à ce programme ou si l'on assiste plutôt à un enterrement de première classe, qui fait que les gens se retrouveront devant rien dès le printemps prochain?

 

. 1455 + -

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, nous suivons la situation de très près.

Nous nous préparons bien sûr à l'après-SPFA. J'ai déjà dénoncé ce que l'on prétendait être notre politique par rapport à la formation de nos agents. Ce n'est absolument pas le cas.

J'ai déjà parfaitement bien exprimé le fait que nous avions en ce moment un de nos fonctionnaires qui faisait un rapport très précis. Le comité parlementaire est allé également sur place pour se pencher sur l'après-SPFA auprès des communautés et des provinces. Nous allons prendre nos responsabilités comme gouvernement.

*  *  *

[Traduction]

LA MINE WESTRAY

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, 26 mineurs ont perdu la vie dans la catastrophe à la mine Westray et je sais que tous les députés sont conscients des souffrances des familles et des collectivités touchées.

Le gouvernement va-t-il donner suite immédiatement à la recommandation du président de la commission d'enquête sur l'accident de la mine Westray, le juge Peter Richard, qui a demandé que le gouvernement fédéral procède à une étude de la responsabilité des cadres supérieurs et des administrateurs de la société en ce qui concerne les actes de négligence ou répréhensibles de la société, et que le gouvernement modifie la loi pour que les cadres supérieurs et les administrateurs de sociétés soient tenus responsables comme il se doit de la sécurité en milieu de travail?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je signale au député qu'on procède depuis maintenant un certain temps à une étude de la Loi sur les sociétés par actions et qu'on se penche notamment sur les responsabilités des dirigeants et des administrateurs.

Je pense que les observations formulées par la commission d'enquête, hier, apporteront une contribution importante à l'étude globale de la loi. Nous prévoyons une réforme en profondeur de la loi. Je prendrai en considération toutes les recommandations à ce moment-là.

*  *  *

LES EXPORTATIONS DE SUCRE

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international. Tout d'abord, je tiens à lui dire que je suis également une personne passionnée, surtout lorsqu'il s'agit des quotas d'exportation de sucre du Canada vers les États-Unis, qu'on a fait passer de 35 000 tonnes à 10 000 tonnes à la suite de la conclusion de l'Accord sur l'Organisation mondiale du commerce, en 1995. Les raffineries de sucre Lantic de Saint John et de Montréal souffrent de cette décision.

Le ministre pourrait-il saisir la Chambre des mesures qu'il va prendre dans le cadre des prochaines négociations de l'OMC pour rétablir les quotas de sucre canadiens destinés aux États-Unis.

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, nous dites-vous qu'il faut être trois pour danser le tango?

J'accueille certes avec plaisir la passion dont la députée fait preuve à la Chambre pour défendre une circonscription nationale très importante.

Comme la députée le sait, il y a eu beaucoup de discussions entre l'industrie sucrière et le gouvernement fédéral au sujet de toute la question de l'entente avec les États-Unis.

L'industrie a jugé bon de recommander au gouvernement fédéral de conclure cette entente plutôt que d'être continuellement soumis au type de harcèlement qu'elle a subi dans le passé, mais nous continuerons de déployer des efforts pour défendre ses intérêts.

*  *  *

L'AGRICULTURE

M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Monsieur le Président, la circonscription de Simcoe—Grey que je représente compte beaucoup de gens qui oeuvrent dans le secteur agricole.

En tant que porte-parole de ces agriculteurs, je voudrais poser la question suivante au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. Quels sont les nouveaux engagements en matière de financement qu'il a pris en faveur du secteur agricole?

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, bien sûr, nous continuerons de collaborer avec le secteur agricole, de développer de nouveaux horizons et de nouvelles possibilités dans le secteur.

Je suis heureux de rappeler à tous que, grâce au fonds canadien d'adaptation et de développement rural, une contribution a été versée au Conseil canadien des nouvelles applications agricoles, qui est composé de représentants du secteur à la grandeur du pays, afin qu'il puisse travailler, de concert avec le secteur agricole, au développement de nouveaux produits alimentaires et non alimentaires en provenance du secteur agricole et à destination des consommateurs d'ici et du monde entier.

*  *  *

HAÏTI

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, nos soldats sont enfin revenus d'Haïti après y avoir accompli une mission impossible.

On a eu beau consacrer 500 millions de dollars à cette mission, il n'y a toujours pas de Parlement démocratique dans ce pays. On n'a pas bâti d'hôpitaux ni d'écoles. Il n'existe toujours pas de système judiciaire et de corps de police dignes de ce nom.

Bien que nos soldats et nos policiers aient fait tout leur possible, comment le ministre peut-il qualifier cette mission de réussite?

 

. 1500 + -

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais rappeler au député qu'il y a quelques années à peine, Haïti était gouverné par l'une des pires dictatures qu'ait jamais connue l'Occident. Le pays est maintenant doté d'un président élu et d'un parlement élu. La population d'Haïti fait un réel effort pour se reprendre en main.

Je trouve tout à fait incongru qu'un député réformiste puisse ainsi dénigrer les efforts déployés par le gouvernement d'Haïti et nos casques bleus qui ont tout mis en oeuvre pour rebâtir ce pays.

Le Président: Chers collègues, ceci met fin à la période des questions.

*  *  *

[Français]

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je voudrais souligner la présence dans la tribune de son excellence M. Albert Pintat, ministre des Affaires étrangères de la principauté d'Andorre.

Des voix: Bravo!

[Traduction]

Le Président: Nous allons maintenant rendre hommage à l'un de nos anciens collègues décédé il y a quelque temps, M. Jack Pikersgill. La parole est au ministre des Anciens combattants.

*  *  *

LE REGRETTÉ JACK PIKERSGILL

L'hon. Fred Mifflin (ministre des Anciens combattants et secrétaire d'État (Agence de promotion économique du Canada atlantique), Lib.): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui pour moi un honneur et un privilège—quoique cela m'attriste—de rendre hommage à un grand ami, un Canadien vraiment remarquable, l'honorable John Whitney Pickersgill, ou Jack comme l'appelaient beaucoup de ses collègues.

Avec sa disparition, le mois dernier, un être extraordinaire nous a quittés. Jack Pickersgill était un politicien exceptionnel, un fonctionnaire dévoué, un auteur et historien avide. Ses talents extraordinaires et ses accomplissements remarquables font partie du riche legs qu'il laisse au Canada. Admiré pour son intégrité, son intelligence et son sens parfait de la justice sociale, il a servi quatre premiers ministres avec grande distinction.

Son engagement inébranlable pour le Canada se reflétait dans tous les défis qu'il acceptait de relever. Que ce fut comme ministre du gouvernement ou comme député de l'opposition officielle, dans son rôle coloré de membre du groupe des «quatre cavaliers», il était très respecté de ses collègues du Parti libéral et des autres partis.

En tant qu'auteur et historien, il nous a laissé des écrits perspicaces qui seront longtemps des ouvrages de référence pour les Canadiens. Son sens exemplaire de la responsabilité sociale et son intelligence pénétrante ont contribué à...

Le Président: Cher collègue, je sais que la question dont nous parlons est très sérieuse.

 

. 1505 + -

Si d'autres occupations vous attendent, spécialement pendant les hommages, je vous inviterais à y vaquer dans le couloir. Je prie le député de m'excuser de l'avoir interrompu.

L'hon. Fred Mifflin: Je vous remercie, monsieur le Président. Je vous sais gré de votre intervention. Elle s'imposait.

Je reprends donc pour dire du très honorable Jack Pickersgill que, bien que son influence se soit faite sentir dans presque tous les aspects de la vie politique et administrative, je pense qu'il est important de se souvenir que, pour lui, le succès semblait se mesurer en grande partie en fonction de ce qu'il pouvait accomplir pour le compte de tous les Canadiens.

Deux réalisations dont il était particulièrement fier sont révélatrices de l'homme qu'il était et des valeurs qui lui étaient chères, en dépit du pouvoir et de l'influence qu'il possédait. L'une était d'avoir fait en sorte que les pêcheurs puissent bénéficier de l'assurance-chômage. L'autre était d'avoir accueilli au Canada 35 000 réfugiés hongrois, qui sont devenus des citoyens exemplaires.

Dans la même foulée, alors que nous rendons hommage aujourd'hui à Jack Pickersgill, nous ne pouvons passer sous silence son engagement inébranlable envers le Canada. À un moment de notre histoire où nous sommes appelés à réfléchir à la question de l'unité du Canada, inspirons-nous du dévouement de Jack et de sa foi dans un avenir meilleur pour renouveler notre engagement à édifier un pays fort et indivisible.

Après avoir travaillé sans relâche à la mise en place d'un grand nombre des institutions dont les Canadiens jouissent aujourd'hui, prenons un moment pour exprimer notre gratitude et pour reconnaître sa contribution.

Pour ma part, je suis extrêmement fier de l'avoir connu, comme vous d'ailleurs, monsieur le Président, et de l'avoir compté parmi mes amis. Nous n'avons pas passé beaucoup de temps ensemble, mais les moments que nous avons partagés étaient précieux. Ses conseils étaient d'une sagesse hors du commun, son esprit et son discernement, une source d'inspiration.

Ayant eu tous deux le privilège de servir les habitants de Terre-Neuve et de représenter au Parlement, lui, Bonavista—Twillingate, et moi, une circonscription à l'image de la sienne, Bonavista—Trinity—Conception, je sais que les Terre-Neuviens, et particulièrement les Labradoriens, auront toujours une affection toute spéciale pour lui. Ce qu'il a apporté à la vie publique de son vivant est remarquable. Son influence personnelle sur la vie de ceux qu'il a touchés est tout aussi importante.

Je me rappelle la première fois que je l'ai vu quand j'étais encore un jeune garçon: je l'observais par les fentes de la clôture entourant le terrain de la loge orangiste de Bonavista en train de faire campagne au début de sa carrière aux côtés de Joey Smallwood. J'étais frappé, même à cette époque, par sa présence imposante et par son sourire perpétuel et rassurant.

Le Canada déplore la disparition d'un leader exceptionnel qui a laissé sa marque indélébile sur la scène nationale et se réjouit du passage de Jack Pickersgill parmi nous et du formidable héritage qu'il a laissé. M. Pickersgill était dévoué à sa circonscription et attaché à son pays, et ses réalisations personnelles et publiques sont des piliers sur lesquels notre pays a été bâti.

Je rappellerai en terminant que, dans son livre Seeing Canada Whole, il décrit ses valeurs familiales en ces termes: «L'amitié de nos enfants pour leurs parents et les uns pour les autres a été une grande récompense pour Margaret et moi. Malgré deux grandes guerres et quelques chagrins personnels, j'aurai mené une vie heureuse. Le demi-siècle que j'ai vécu avec Margaret a été le plus grand bonheur de cette vie heureuse.»

Jack laissera toujours le souvenir d'un véritable trésor canadien. Tous nos collègues ici, au Parlement qu'il a tant aimé, se joignent sûrement à moi pour exprimer nos plus sincères condoléances à sa femme, Margaret Pickersgill, et à leur famille.

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole au nom de l'opposition officielle pour reconnaître les longues années que Jack Pickersgill a consacrées au service du public. Il a vécu de 1905 à 1997.

Le député de Terre-Neuve vient de parler du livre, Seeing Canada Whole, que Jack Pickersgill a écrit. Il est stupéfiant de penser que Jack Pickersgill est né en Ontario, a grandi sur une ferme du Manitoba et a ensuite siégé au Parlement comme député d'une circonscription de Terre-Neuve. Il a peut-être vraiment vu le Canada comme un tout. Il a servi sous trois premiers ministres libéraux dont il a été le conseiller, Mackenzie King, Louis Saint-Laurent et Lester Pearson. Il a également siégé sous John Diefenbaker, dont il a contribué à orchestrer la chute au cours des années 1960.

 

. 1510 + -

M. Pickersgill a également fait partie du premier «rat pack», c'est-à-dire des «quatre cavaliers», comme on les appelait à l'époque. Il s'illustrait surtout pendant la période des questions, et je crois savoir qu'il adorait cela. Il aimait les joutes oratoires auxquelles les débats donnaient lieu et a peut-être été le roi de la réplique cinglante.

Beaucoup d'articles en parlent comme d'un maître conteur et un tacticien à l'esprit acéré. C'est sûrement une bonne qualité à posséder ici. Un bon sens de l'humour n'a jamais fait de mal à personne.

Je rends encore une fois hommage à Jack Pickersgill et, au nom de l'opposition officielle, j'exprime toute notre sympathie à sa famille. Nous sommes reconnaissants envers quelqu'un qui a consacré tant d'années de sa vie au service du public.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, je tiens aujourd'hui à offrir, au nom de mes collègues du Bloc québécois, mes plus sincères condoléances à la famille de M. Jack Pickersgill, décédé le 14 novembre dernier.

Né en 1905 à Wyecomb, Ontario, M. Pickersgill a connu une longue et fructueuse carrière sur la Colline. Il entre dans le monde politique en 1937 comme secrétaire au cabinet du premier ministre de l'époque, M. Mackenzie King. Il servira également sous le premier ministre Louis Saint-Laurent, qui le nommera, en 1952, greffier du Conseil privé et secrétaire du cabinet du premier ministre.

En 1953, il quitte les coulisses pour être élu à la Chambre des communes député de la circonscription de Bonavista—Twillingate, à Terre-Neuve, circonscription qu'il représentera jusqu'à sa démission, en 1967.

Au cours de sa carrière parlementaire, il occupera les fonctions de secrétaire d'État et de ministre de l'Immigration. Député d'opposition de 1957 à 1963, c'est à lui que nous devons la maxime qui nous dit de ne jamais poser une question si nous n'en savons pas déjà la réponse.

Avec le retour de l'équipe libérale au pouvoir en 1963, il sera ministre des Transports, jusqu'à ce qu'il quitte la Chambre des communes pour devenir président de la Commission des transports jusqu'en 1972.

En mon nom et au nom de mes collègues du Bloc québécois, je voudrais dire à sa famille et à ses proches qu'ils ont toutes les raisons d'être fiers de ce qu'il a accompli au cours de sa longue et fructueuse carrière politique.

[Traduction]

L'hon. Lorne Nystrom (Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, au nom de notre parti, je veux dire quelques mots en hommage à Jack Pickersgill, qui est mort récemment.

Comme on l'a dit à la Chambre, M. Pickersgill était un homme rare. Né en Ontario, il a grandi dans la campagne manitobaine et a été député de la belle province de Terre-Neuve. C'était un homme très versatile et cultivé. Il a su mettre ses qualités à profit en tant que fonctionnaire, conseiller du premier ministre, auteur, ministre et député d'opposition très efficace.

Il n'a pas essayé de se faire réélire en 1968, année où je suis entré à la Chambre pour la première fois. Je n'ai donc pas eu la chance de le voir à l'oeuvre à la Chambre des communes. Toutefois, à mon arrivée, j'ai souvent entendu parler de l'efficacité de Jack Pickersgill.

Je suppose qu'il se classait parmi ces parlementaires extrêmement intéressants des années 50 et 60. Je pense à John Diefenbaker, à Paul Martin, père, à Tommy Douglas, à Réal Caouette et à Jack Pickersgill comme à autant de parlementaires très efficaces, du genre que nous ne voyons pas souvent de nos jours à la Chambre des communes. C'était avant l'ère de la télévision.

Il a contribué très efficacement à amener Terre-Neuve à se joindre à la Confédération. Il était alors devenu un ami intime du premier premier ministre de cette province, M. Joey Smallwood. Il a joué son rôle de ministre avec efficacité et passion. On se souvient peut-être surtout de lui pour son rôle dans l'opposition, quand le Parti libéral a été défait, en 1958 et en 1963. Il faisait partie du groupe qu'on appelait les quatre cavaliers, la première «meute» de la Chambre des communes. Je crois savoir qu'il s'engageait souvent dans des échanges animés avec le premier ministre John Diefenbaker.

C'est avec beaucoup de respect que j'offre aujourd'hui mes condoléances à sa femme, Margaret, et à sa famille, au nom du Nouveau Parti démocratique. M. Pickersgill a fait une contribution majeure à l'évolution du Canada et de la Chambre des communes. Comme Stanley Knowles, Jack Pickersgill aimait vraiment notre institution et tout ce qu'elle a de meilleur. Nos plus sincères condoléances à l'occasion de son décès.

 

. 1515 + -

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, je joins ma voix à celle des autres partis à la Chambre aujourd'hui pour offrir à la famille, à l'épouse, aux enfants et aux petits-enfants de M. Pickersgill mes plus sincères condoléances, en mon nom personnel et au nom de mon parti.

Tous ceux qui connaissent l'histoire du Canada et de la Chambre des communes savent que M. Pickersgill était un géant. Comme nous tous en cette enceinte, il appartenait à un parti et il faut souligner que tous les aspects de cette appartenance à un parti lui plaisaient énormément. Je l'affirme en ma qualité de progressiste conservateur représentant un parti politique qui a toujours fait les frais de l'esprit de parti de M. Pickersgill, tout au long de sa carrière.

Bien des députés connaissent l'éminent écrivain Doug Fisher. C'est un membre distingué de la tribune de la presse, un homme qui a déjà siégé à la Chambre des communes en tant que député. M. Fisher a déjà dit de M. Pickersgill qu'il était le politicien le plus vivant, le plus habile et le plus dévoué à son parti qu'il lui avait été donné d'observer. Quel compliment.

Dans cette optique, je peux peut-être ajouter que M. Pickersgill a admis, dans son autobiographie, que son second prénom était Whitney. Ce prénom lui avait été donné en l'honneur du premier ministre conservateur de l'Ontario, James Pliny Whitney, qui s'était emparé du pouvoir en Ontario l'année de la naissance de M. Pickersgill.

M. Pickersgill ne se contentait pas de pratiquer la politique, il écrivait aussi à son sujet. J'ai particulièrement noté son histoire du renouveau du Parti libéral dans son livre intitulé: The Road Back. En dehors de l'histoire de la reconstruction et du renouveau de son parti, on est frappé par tout le matériel que M. Pickersgill et ses contemporains des deux côtés de la Chambre ont fourni aux caricaturistes de l'époque.

Dans son dernier livre, Seeing Canada Whole, il résume sa vie publique et sa vie privée. Le titre a donc un sens considérable, il voit le Canada dans son ensemble, uni. Il a joué un rôle important dans l'entrée de Terre-Neuve et du Labrador dans la Confédération.

À la fin de sa vie, M. Pickersgill travaillait encore passionnément à aider le Canada à rester uni, notamment par son appui actif à l'accord du Lac Meech. En fait, il s'était joint au très hon. Robert Stanfield pour inviter les gens à adopter l'accord pendant son témoignage devant le Sénat du Canada. Ce témoignage restera un élément important des archives publiques de ce pays. La défense de sa position, dans son livre, est instructive, et c'est une inspiration pour ceux qui ne savent pas, oublient facilement ou dédaignent ce qui a été l'histoire de notre grand pays.

Comment voyait-il sa propre carrière parlementaire? D'après son évaluation, il a réussi certaines choses ou du moins a contribué à certaines choses qui ne se seraient peut-être pas produites autrement. L'une de ces choses est l'assurance-chômage pour les pêcheurs. L'autre, c'est la disposition prévoyant l'accueil de 35 000 réfugiés hongrois qui sont devenus des citoyens exemplaires. Il a dit également: «Le Parlement ne m'a jamais ennuyé. J'essaierais de nouveau.» Si seulement nous avions pu le persuader de se représenter, je suis sûr qu'il aurait été élu.

Cependant, son évaluation est beaucoup trop modeste. Je pense que nous reconnaissons tous, aujourd'hui, que le Canada a perdu un géant.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LOI DE 1997 SUR LE MAINTIEN DES SERVICES POSTAUX

 

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-24, Loi prévoyant la reprise et le maintien des services postaux soit lu pour la deuxième fois et renvoyé au comité plénier.

Le président suppléant (M. McClelland): L'honorable députée de Jonquière dispose de cinq minutes pour des questions et commentaires. Alors, questions ou commentaires? Nous reprenons donc le débat avec le député de Champlain.

 

. 1520 + -

M. Réjean Lefebvre (Champlain, BQ): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole en cette Chambre pour vous entretenir du projet de loi C-24, Loi portant sur le rétablissement et le maintien des services postaux.

Au départ, je dois dire que si les députés doivent aujourd'hui se prononcer sur le projet de loi C-24, c'est à cause de l'incompétence du gouvernement, et je m'explique.

Depuis le début des négociations, en avril dernier, on se doutait bien des intentions du gouvernement dans le dossier de la Société canadienne des postes. Le dépôt du rapport Radwanski, en octobre 1996, sur l'avenir de la Société canadienne des postes nous a donné plusieurs indices sur les priorités du gouvernement quant à la gestion future de la Société.

Le rapport est formel et je cite, à la page 4: «Les opérations de la Société sont soumises à une convention collective dont les dispositions, notamment en ce qui concerne la rémunération versée pour du temps non travaillé, la flexibilité et la sécurité d'emploi, ne reflètent plus du tout les nouvelles réalités du monde du travail. Les conséquences financières de ces dispositions constituent une grave menace pour sa viabilité à terme et, par conséquent, pour l'avenir de tous ses employés.»

C'est sur cette base que le gouvernement a tracé sa ligne de conduite dans le conflit des Postes. À partir de ce moment, tout est devenu une question de rentabilité. Le gouvernement a fixé, avec la haute direction de la Société, ses objectifs en ce qui a trait à la rentabilité et au rendement commercial.

C'était facile de s'entendre sur cette question, puisque le gouvernement a pris le soin d'y placer ses amis au conseil d'administration. Tout le monde sait que la présidence est actuellement occupée par nul autre que l'honorable André Ouellet, ancien ministre des Affaires étrangères du gouvernement libéral.

Puiser dans les surplus de la Société des postes pour éponger le déficit fédéral n'était donc pas un problème.

Évidemment, un tel objectif ne pouvait se réaliser sans effectuer des coupures de postes, sans une diminution des avantages sociaux versés aux employés, sans une réorganisation du travail des facteurs, et j'en passe.

C'est exactement le résultat voulu et obtenu par le dépôt du projet de loi C-24.

Les événements se sont précisés davantage dès la fin de la convention collective des employés de la Société des postes en juillet dernier. La stratégie du gouvernement était simple: laisser traîner les choses, c'est-à-dire tout faire pour que les négociations piétinent et pousser les travailleurs de la Société à déclencher la grève à l'approche des Fêtes. À cette période de l'année, le gouvernement peut aisément justifier un recours rapide à une loi spéciale de retour au travail, et c'est ce qu'il a fait.

Pour le ministre responsable de la Société canadienne des postes, la table était mise depuis le mois d'août. La population canadienne sait maintenant que le ministre a indiqué «que la grève serait très courte et qu'un projet de loi de retour au travail serait vite déposé.» C'est lors d'une réunion tenue le 6 août dernier avec le président de l'Association canadienne de marketing direct et d'autres grands expéditeurs de courrier que le ministre a fait connaître ses intentions.

Je n'invente rien. Le détail de cette rencontre est d'ailleurs bien décrit dans une note de service que le syndicat des postiers a rendue publique en septembre lors d'une conférence de presse.

Évidemment, le dévoilement du contenu de cette note de service a placé le gouvernement, et particulièrement le ministre, dans l'embarras. C'est le moins qu'on puisse dire. Une copie de cette note a d'ailleurs été expédiée le 8 septembre par le président national du syndicat au premier ministre Jean Chrétien.

Le syndicat venait de faire la preuve qu'il y a eu collusion entre le gouvernement et les grands expéditeurs de courrier. C'est honteux.

Les grand expéditeurs jouissent déjà des taux d'affranchissement les moins élevés au monde. Pour conserver ces avantages, ils ont soutenu le gouvernement afin qu'il réduise les salaires et avantages sociaux des travailleurs et travailleuses des Postes.

Le ministre responsable de la Société des postes avait même prévu un service parallèle de livraison pour les chèques gouvernementaux. Toujours selon la fameuse note de service rendue publique par le syndicat, le ministre avait même déclaré que: «cette fois, les chèques de prestations sociales ne seront pas livrés par les travailleuses et travailleurs des Postes pendant la grève, mais par un autre service de livraison non identifié ayant déjà une entente avec le gouvernement.»

La mise au jour de cette autre tactique pour faire monter le ton pendant les négociations a fait reculer le gouvernement sur cette question.

 

. 1525 + -

Pour maquiller son erreur, le gouvernement a finalement accepté l'offre que le syndicat des postiers avait fait parvenir au ministre responsable de la Société le 7 août dernier. C'est du bout des lèvres que le gouvernement s'est finalement rallié à cette idée quelques jours avant le déclenchement de la grève.

Il est apparu évident que les parties au conflit ont conservé des positions opposées, mais la preuve est faite que le gouvernement a une grande part de responsabilité dans l'échec des négociations. Le ministre responsable de la Société canadienne des postes a fait la promesse d'adopter une loi de retour au travail pour décourager le processus de négociation. Eh bien, voilà, la promesse est tenue. Nous devons maintenant débattre du projet de loi C-24, un projet de loi qui est le fruit de la collusion.

Le gouvernement a fait une fois de plus la preuve de son incompétence et de son manque de rigueur. On se fout complètement du droit de grève accordé par le Code canadien du travail en bousillant à l'avance toute chance de succès pour la négociation d'une vraie convention collective. Le gouvernement a tout fait pour que le syndicat porte l'odieux de cette grève. C'est le ministre responsable des postes qui l'aurait affirmé. C'est ce qui est rapporté dans la note de service rédigée par l'Association canadienne de marketing direct.

Nous, les députés du Bloc québécois, avons demandé à maintes reprises au gouvernement de ne pas intervenir dans le conflit des postes. Il revenait aux deux parties de négocier un nouveau contrat de travail. Par ses interventions répétées, le gouvernement a gâché la sauce. Le gouvernement ne doit pas se leurrer, le projet de loi C-24 fera, d'un côté comme de l'autre, des mécontents et beaucoup d'insatisfaction.

En bout de piste, c'est encore la population qui va payer par une dégradation du service postal. On a même parlé de désobéissance civile chez les postiers. Voilà le résultat apporté par ce gouvernement.

L'analyse du projet de loi C-24 démontre clairement que le gouvernement a choisi de répondre davantage aux objectifs de la partie patronale au détriment des revendications syndicales.

La Société canadienne des postes va devenir un bailleur de fonds pour le gouvernement. Le projet de loi représente beaucoup plus que la fin d'une grève. C'est aussi une police d'assurance qui garantit que la Société sera également une source croissante de revenus à verser au Fonds consolidé que gère le gouvernement.

Il ne faut pas le cacher, le gouvernement s'est placé en situation de conflit d'intérêts dans les négociations. Maintenant, il va toucher les bénéfices faramineux de 200 millions de dollars en cinq ans avec les profits que la Société va réaliser suite aux économies qui découleront de l'application du projet de loi C-24.

Le Bloc québécois favorise le règlement d'un conflit de travail par la négociation. Imposer des conditions de travail par une loi spéciale ne règle pas les questions de fond.

Je reconnais que la grève des postes a un effet dévastateur sur l'économie du pays. Les entreprises, et particulièrement les PME du Québec, souffrent cruellement de l'absence du service postal. Les clients tardent à payer leurs factures et les fournisseurs restent impayés. Des millions de dollars sont perdus par cette grève. Tout cela ne serait pas arrivé si le gouvernement avait agi de bonne foi et s'il n'était pas intervenu dans les négociations. Le gouvernement a planifié à l'avance le résultat.

C'est pour toutes ces raisons que le Bloc québécois est contre le projet de loi C-24 qui force le retour au travail des employés des postes malgré leur droit reconnu à faire la grève.

[Traduction]

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Réf.): Monsieur le Président, les sociétés ferroviaires avaient beaucoup de contrats dans les années 50, 60 et 70 qui renfermaient des taux de traitement très élevés et d'autres dispositions de type syndical. En raison du coût d'exploitation élevé, il a fallu abandonner des lignes ferroviaires au Manitoba. Le service postal doit s'assurer de ne pas se retrouver dans la même situation, soit imposer des prix si élevés que la société perdra sa clientèle.

Je demande aux députés du Bloc et à d'autres députés de me dire combien de temps ils auraient laissé cette grève se poursuivre. Indéfiniment?

[Français]

M. Réjean Lefebvre: Monsieur le Président, je ne mettrai pas beaucoup de temps à répondre à la question de mon collègue.

Je crois que, lorsque le gouvernement a le choix entre la création d'emplois et l'augmentation de son capital, il choisit ses propres intérêts financiers au détriment des travailleurs.

 

. 1530 + -

On a vu ce choix s'exercer dans d'autres champs d'activités comme l'assurance-emploi, sur le dos des sans-emploi. On se souvient de la grève du rail. Je pense que le gouvernement a plus envie de se mettre des milliards dans les poches que de régler les conflits par une loi spéciale.

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, malgré les circonstances regrettables qui amènent ce débat, j'aimerais vous dire à quel point je suis fier d'être le ministre responsable de la Société canadienne des postes.

Postes Canada est l'une des plus importantes institutions de notre pays. Elle a vu le jour parmi les premiers ministères de la Confédération en 1867. Par la suite, elle s'est développée en harmonie, au rythme et à l'image du Canada.

Transportant 11 milliards de pièces de courrier par année aux 12 millions d'adresses inscrites à son registre, la Société canadienne des postes sert de lien entre nous et entre nos communautés.

Certaines petites localités de nos grands territoires nordiques sont absolument dépendantes du service postal qui n'y livre pas seulement le courrier mais aussi les médicaments, la nourriture et les produits essentiels à leur survie.

Devenue une société de la Couronne en 1981, Postes Canada est aujourd'hui la cinquième plus grande entreprise canadienne, avec un chiffre d'affaires de cinq milliards de dollars et plus de 54 000 employés. Le prix d'un timbre pour acheminer une lettre normale est le deuxième plus bas au monde et il est gelé pour les deux prochaines années.

Le service de Postes Canada, bien que souvent dénigré au pays, se compare très avantageusement à toutes les autres administrations postales au monde. Malgré tout, notre service postal, comme l'ensemble de notre société d'ailleurs, traverse une période de changements intensifs.

Face à l'implantation massive de nouvelles technologies comme le télécopieur, le courrier électronique et Internet, Postes Canada doit prendre le virage ou sombrer. Ce qui constituait autrefois l'essence même du service postal, soit la livraison du courrier, ne représente plus que 55 p. 100 de ses activités. Aujourd'hui, 45 p. 100 des opérations de Postes Canada touchent des produits modernes et compétitifs.

C'est cette approche, cette vision moderne de notre service postal qui, de toute évidence, est à la base du conflit de travail qui nous occupe aujourd'hui. Normalement, les sept mois de négociations, les trois habiles médiateurs et conciliateurs qui ont travaillé au dossier auraient dû produire l'entente négociée que nous cherchions tous. C'est en effet le cas dans plus de 95 p. 100 des conflits de travail au Canada.

Le plus étonnant, c'est que cette année même, en 1997, Postes Canada a réussi à signer des ententes avec ses trois autres syndicats d'employés. Alors, pourquoi est-ce que les choses sont toujours si difficiles avec les postiers et les facteurs?

Après des mois d'observation attentive de ce dossier, je dois admettre que le Syndicat des travailleurs et des travailleuses des postes refuse de reconnaître certaines évidences. Le plus bel exemple touche une éventuelle privatisation de Postes Canada. Je l'ai dit, je l'ai répété et je l'ai redit dans toutes les langues, Postes Canada n'est pas à vendre, ni aujourd'hui, ni demain, ni dans un avenir prévisible. Les deux ministres qui m'ont précédé l'ont aussi dit et répété. Pourtant, le Syndicat persiste toujours à faire peur à ses membres et à la population avec une éventuelle menace de privatisation.

Cette décision n'a pas été prise à la légère. Elle a été confirmée par le gouvernement en avril dernier, à la suite d'une révision complète du mandat de Postes Canada. Un rapport complet a été produit au terme d'audiences publiques qui ont eu lieu dans toutes les régions du pays. Une conclusion s'imposait très clairement.

Dans un pays où la géographie est aussi grande et la population aussi disséminée qu'au Canada, aucun système privé n'arriverait à fournir un service universel à un prix raisonnable.

 

. 1535 + -

Depuis dix ans, la Société canadienne des postes n'a reçu aucun financement public et nous devons nous assurer qu'elle ne sera jamais plus un fardeau pour les contribuables canadiens.

Dans un premier temps, le gouvernement a donc décidé, le printemps dernier, de lui donner les moyens d'assurer sa viabilité à long terme.

[Traduction]

En avril dernier, le gouvernement a ordonné à la Société canadienne des postes d'offrir aux Canadiens un service postal universel à un prix raisonnable; d'établir des critères de présentation de rapports plus transparents et les normes les plus élevées de pratique commerciale; d'atteindre un rendement financier conforme à celui des monopoles réglementés du secteur privé; d'améliorer constamment le service de distribution du courrier et le service des comptoirs postaux, notamment dans les régions rurales; de respecter le gel du prix des timbres pendant deux ans, puis de maintenir les augmentations au-dessous de l'inflation; d'interdire tout interfinancement de produits exclusifs et privilégiés; de créer un poste d'ombudsman; et enfin, de reconnaître ces principes dans la négociation collective.

La Société canadienne des postes a déjà agi sur bon nombre de ces points. Elle a ouvert ses registres et publié son rapport annuel. Elle a nommé un ombudsman et a montré qu'il n'y a aucun interfinancement entre ses produits exclusifs et les produits concurrentiels.

Au cours des derniers mois, la Société canadienne des postes a également consacré des ressources considérables à la transformation et à l'amélioration du service postal dans les régions rurales. Il en résultera un service plus rapide, plus fiable et plus prévisible dans les régions rurales.

Au-delà de ces initiatives précises, il est urgent que la société cherche à améliorer le service à un niveau plus fondamental. C'est pourquoi elle est devenue un facteur clé dans les négociations actuelles. Dans sa forme actuelle, la convention collective constitue un obstacle majeur aux améliorations du service que les clients exigent de la Société canadienne des postes.

Dans une évaluation indépendante, le célèbre négociateur en chef suppléant de l'Accord de libre-échange Canada—États-Unis, Gordon Ritchie, dit ceci:

    Le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes a remarquablement su, au cours des 23 dernières années, décrocher pour ses membres la part du lion des rentes économiques du monopole qu'est la Société canadienne des postes.

Des sondages récents montrent que 85 p. 100 environ des Canadiens croient que les employés de la Société canadienne des postes ont dans l'ensemble de bonnes conditions de travail, surtout en ce qui concerne la rémunération et les avantages sociaux.

Ritchie en vient à la conclusion suivante:

    On peut soutenir que les actuelles conventions collectives de la Société canadienne des postes sont les moins concurrentielles et les moins efficaces de toutes les conventions collectives actuellement en vigueur en Amérique du Nord.

Il ajoute:

    Les salaires excessifs ne constituent pas le principal problème.

    La rémunération du temps non travaillé constitue un coût direct encore plus important.

    Les dispositions les plus coûteuses à longue échéance sont probablement celles qui empêchent la Société canadienne des postes de congédier, de redéployer ou d'employer plus efficacement son énorme main-d'oeuvre.

[Français]

Voilà précisément le coeur du conflit actuel. Postes Canada doit pouvoir ajuster son personnel à ses besoins. Permettez-moi d'illustrer ce phénomène avec un exemple concret.

Le printemps dernier, la Société a entamé un processus de réaffectation de 47 employés de Toronto qui étaient en surplus, et ce, en suivant méticuleusement la procédure inscrite à la convention collective.

À travers un rouage extrêmement compliqué qui permet aux employés de postuler par ordre d'ancienneté des postes qui deviennent vacants, on a réussi, sept mois plus tard, à placer quatre des 47 employés.

Toujours conformément à la procédure, la direction pourra, au cours des prochains mois, affecter les autres à des postes vacants. Mais ce mouvement de personnel aurait dû impliquer des centaines de personnes. Et en tout, il aura fallu un an pour compléter.

De plus, dans la plupart des cas, l'employé qui change de poste a besoin de formation pour remplir ses nouvelles tâches, diminuant d'autant sa productivité pendant une longue période.

 

. 1540 + -

Visiblement, le carcan dans lequel l'administration des postes doit évoluer occasionne des frais d'opération qui ont un effet considérable sur la capacité concurrentielle de la Société.

La présente convention collective qui lie Postes Canada au Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes comporte des dizaines de clauses tout aussi incompatibles avec le monde concurrentiel dans lequel la société doit opérer.

C'est uniquement pour cette raison que le projet de loi devant nous aujourd'hui demande au médiateur-arbitre de «s'inspirer des conditions de travail qui existent dans les entreprises privées et publiques comparables et qui offrent la marge de manoeuvre nécessaire pour assurer à court et à long terme, la viabilité économique et la compétitivité de la Société canadienne des postes.»

Nous lui demandons aussi de tenir compte du fait que la Société doit, sans avoir recours à des hausses indues de tarifs postaux, obtenir des résultats financiers acceptables pour une entreprise commerciale, être efficace, accroître sa productivité et respecter des normes de services acceptables.

Les salaires et bénéfices des employés représentent 63 p. 100 des frais d'opération de Postes Canada. Le plus étonnant, c'est qu'une trop grande partie de ces frais est versée pour des activités non productives des employés. Mais cela n'est nullement un reproche envers les employés des postes.

En effet, la très grande majorité d'entre eux sont des travailleurs dévoués et compétents. Le vice vient plutôt d'un système désuet qui a grand besoin de modernisation.

Par exemple, chaque jour les 16 000 facteurs et factrices passent en moyenne 16 minutes en autobus ou en taxi pour revenir à leur dépôt à l'heure du lunch. Ils n'ont pas le droit de manger en route, même si cela leur conviendrait mieux. Leur convention collective l'interdit.

Si on permettait seulement à ceux et celles qui utilisent un véhicule motorisé de manger en route, la Société pourrait économiser huit millions de dollars par année. Mais cela non plus n'est pas permis par la convention collective actuelle.

Le 15 septembre dernier, la Société canadienne des postes a présenté une offre globale au syndicat. En échange de certains assouplissements touchant justement la gestion du personnel, elle a offert des augmentations de salaire de 1,5 p. 100 par année pendant trois ans, la création de 500 postes à plein temps et le maintien de la pleine sécurité d'emploi à tous ceux qui en profitent déjà.

Quelques semaines plus tard, dans le but d'en arriver à une entente avant le déclenchement de la grève, la Société a abandonné certaines de ses demandes, bonifié son offre salariale, et accédé à une demande du syndicat touchant les valeurs de temps représentant des coûts de 35 millions de dollars par année. Encore là, le syndicat a refusé.

Je l'ai dit plus tôt, ce conflit de travail ne ressemble à aucun autre. Comme l'a si bien démontré mon collègue le ministre du Travail, le gouvernement du Canada a tenté par tous les moyens de créer le contexte favorisant une entente négociée entre les deux parties.

Trois médiateurs-conciliateurs chevronnés ont mis leur talent et leur expertise au service des parties. Nous avons laissé toute la chance au processus de négociation, mais rien n'a réussi.

Pendant ce temps, des centaines de petites et moyennes entreprises ont périclité, des centaines d'hommes et de femmes ont perdu leur gagne-pain, des dizaines d'oeuvres de charité ont été privées de leur principal véhicule pour ramasser les dons nécessaires à la poursuite de leurs oeuvres humanitaires.

J'ai personnellement reçu plus de 2000 messages d'usagers des postes de tous les coins du pays suppliant le gouvernement d'agir.

Cette grève a déjà causé des dommages majeurs à notre économie et à notre tissu social. Nous avons donc dû avoir recours à ce projet de loi prévoyant la reprise et le maintien des services postaux. Nous ne l'avons pas fait de gaieté de coeur, mais plutôt par sens des responsabilités. Cependant, nous reconnaissons tous qu'il ne s'agit pas d'une solution parfaite. Ce conflit, comme ceux qui l'ont précédé, laissera des séquelles. De nombreux clients ne reviendront jamais à Postes Canada. Privés de services, il auront trouvé une alternative, souvent permanente. C'est le cas, par exemple, de près d'un million de prestataires de nos différents programmes sociaux qui se sont inscrits au dépôt direct au cours des dernières semaines. Ce sont des revenus perdus à jamais pour Postes Canada.

 

. 1545 + -

Pour éviter d'autres conflits du genre, il faut définitivement changer les mentalités et trouver des mécanismes plus efficaces pour gérer les relations de travail à la Société canadienne des postes.

C'est pourquoi j'ai l'intention d'entreprendre, au cours des prochains mois, une sérieuse recherche en vue de trouver des instruments mieux adaptés aux réalités et aux impératifs de notre système postal canadien.

Certains progrès sont déjà palpables. Ainsi, pour la première fois de l'histoire, Postes Canada a totalement suspendu ses opérations pendant la grève et elle n'a pas eu recours à des travailleurs de remplacement. C'est un premier pas dans la bonne direction. Il en faudra beaucoup d'autres.

En attendant, je demande à tous mes collègues d'appuyer ce projet de loi, afin de rétablir rapidement notre service postal, au grand profit des petites et moyennes entreprises, de nos oeuvres de charité et de tous les Canadiens et Canadiennes.

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): Questions et observations. Je demande aux députés d'être brefs dans leurs questions et réponses, car le sujet suscite beaucoup d'intérêt.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, vous avez dû lire dans mes pensées parce que j'ai de nombreuses questions à poser au ministre.

Premièrement, je voudrais revenir sur ce qu'il a affirmé dans son discours, à savoir que la société rend clairement compte de ses activités et qu'il n'y a aucune preuve d'interfinancement entre le courrier de première classe, les circulaires et le service de messagerie Purolator. En réalité, ce n'est pas exact. Les livres de la Société canadienne des postes ne présentent pas séparément les activités de ses différents services. Par conséquent, la déclaration du ministre n'est pas tout à fait exacte.

Deuxièmement, je voudrais aussi demander au ministre de nous expliquer sa façon de procéder. J'ai beaucoup de mal à comprendre pourquoi, après avoir hésité à intervenir pendant des semaines, le gouvernement fait maintenant volte-face et intervient au point de fixer les augmentations salariales et de déterminer les dates d'entrée en vigueur. C'est inacceptable. Un projet de loi de retour au travail devrait exclure toute possibilité de grève avant la conclusion d'un accord et il devrait alors prévoir un mécanisme en vertu duquel les parties seraient liées à la décision d'un médiateur ou d'un arbitre.

Si le ministre a le temps, je voudrais aussi connaître les plans à long terme du gouvernement, s'il en a, ce dont je doute fort, une fois le conflit réglé.

L'hon. Alfonso Gagliano: Monsieur le Président, je ne pense pas avoir suffisamment de temps pour prouver au député l'absence d'interfinancement. En fin de compte, je lui enverrai les documents pertinents qui le lui prouveront.

Pour ce qui est de l'avenir, j'ai dit dans mon discours qu'une fois le conflit réglé, et ce n'est évidemment pas quelque chose dont on s'enorgueillit, il nous faudra rétablir le service. Il n'y a là rien de nouveau, comme bien des gens le savent. Dans le passé, lorsque l'on a tenté de moderniser le système, cela ne s'est pas fait sans heurt pour la direction et le syndicat de la Société canadienne des postes. Nous devons enrayer le problème à la base et envisager la situation dans une perspective différente de celle que nous avons adoptée dans le passé. La dernière grève remonte à 1991. Chaque fois que le gouvernement confère un mandat visant à garantir aux Canadiens qu'ils pourront compter sur un service postal universel, le syndicat réagit différemment.

J'espère qu'une fois que le ministre du Travail aura désigné un médiateur, il sera possible d'entretenir avec l'administration de la Société canadienne des postes les relations normales que nous avons toujours souhaitées. Comme je l'ai dit, je vais chercher d'autres façons, d'autres solutions, afin que la prochaine fois, les Canadiens ne se heurtent pas au même problème que celui avec lequel ils ont été aux prises depuis 13 ans.

[Français]

M. Réjean Lefebvre (Champlain, BQ): Monsieur le Président, d'après le ministre, ils obtiendront 200 millions de profit par année. Est-ce que le ministre va s'arrêter à 200 millions, ou si sa gourmandise ne s'arrêtera pas plutôt à 300 ou 400 millions?

 

. 1550 + -

Pourquoi le ministre et la Société n'investiraient-ils pas ces centaines de millions de dollars pour donner plus de services à la clientèle et maintenir un climat sain entre la Société et ses employés?

L'hon. Alfonso Gagliano: Monsieur le Président, j'ai écouté plus tôt le discours de l'honorable député. Malheureusement, l'honorable député ne veut voir seulement qu'un côté de la situation.

Le gouvernement, dans son mandat, a été bien clair. Il veut une Société qui soit commercialement viable, oui; on veut que la Société canadienne des postes fasse des profits, justement pour payer les salaires de ses employés et pour continuer à offrir un service aux Canadiens qui ne doit pas coûter trop cher.

Le député oublie d'indiquer que le gouvernement a pris la décision de ne plus fermer les bureaux de poste en milieu rural, parce qu'on veut que les Canadiens, peu importe où ils sont, aient le même service que ceux qui vivent en milieu urbain. Il devrait aussi noter qu'on a dit, pour les prochains deux ans, à la Société canadienne des postes qu'elle n'a pas le droit d'augmenter le prix des timbres. C'est donc pour que les Canadiens n'aient pas à payer une augmentation des coûts des services postaux. On a dit qu'après deux ans, la Société pouvait les augmenter moins que le coût de l'inflation.

Bien sûr, c'est une décision du gouvernement. Nous aurions pu prendre une autre décision. Nous avons pris celle-ci, parce que nous voulons garantir un service postal universel au Canada, d'un océan à l'autre. Avec ce mandat, nous croyons pouvoir y arriver. Nous invitons les employés à signer, comme l'ont d'ailleurs fait trois des quatre syndicats à Postes Canada. Alors, nous demandons au syndicat des postiers de signer.

Maintenant, on est malheureusement arrivés à une impasse et on a une loi pour la reprise de service, mais nous aimerions qu'ils puissent s'asseoir pour trouver des solutions, afin de s'assurer que les Canadiens puissent avoir toujours un service postal qui soit un des meilleurs au monde.

[Traduction]

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement le discours du ministre. Il a dit des choses, du moins dans son préambule, que j'ai été très heureux d'entendre.

D'abord, il y a la reconnaissance que la Société canadienne des postes effectue en fait de l'excellent travail en distribuant d'incroyables quantités de lettres d'un bout à l'autre du pays. La productivité a augmenté. La distribution du courrier dans les foyers a augmenté de 30 p. 100, et les bénéfices se sont accrus et s'élèvent à 112 millions de dollars. Compte tenu de la hausse de la productivité et des bénéfices, la SCP a jugé bon d'offrir une raisonnable hausse salariale durant les négociations.

Le ministre peut-il nous dire comment le gouvernement justifie que, dans le projet de loi dont nous sommes maintenant saisis, l'offre soit en fait inférieure à celle que la SCP a faite pendant les négociations? Le ministre peut-il répondre à cette question?

L'hon. Alfonso Gagliano: D'abord, monsieur le Président, si le député examine l'offre faite dans le projet de loi, il constatera qu'elle est presque identique à l'offre définitive que la SCP a faite à ses employés.

Je remercie le député de me donner l'occasion d'expliquer comment nous en sommes arrivés à cette offre. La SCP a formulé une offre. Les députés se souviendront fort bien que le syndicat menaçait à ce moment-là de faire une grève illégale. Entendant ces rumeurs, la plupart des clients de la SCP n'ont rien mis à la poste.

Le président, M. Clermont, a appelé M. Tingley et a dit: «Le volume de courrier diminue comme la neige au printemps. Nous devrions peut-être négocier et tenter de trouver un règlement parce que la SCP risque d'y laisser sa chemise, et les employés, de perdre leur emploi.» La SCP est donc retournée négocier de bonne foi et a fait des concessions au syndicat, et présenté une meilleure offre finale. Offre que le syndicat a de nouveau rejetée.

Depuis lors, la SCP perd 17 millions de dollars par jour. Si on compte le nombre de jours de grève ainsi que les pertes subies par la SCP deux semaines avant à cause de la rumeur de grève illégale, on en arrive à une perte financière plus grande que ce dont il est question dans le projet de loi aujourd'hui.

M. Jean Dubé (Madawaska—Restigouche, PC): Monsieur le Président, s'il y a une chose que nous pouvons dire aujourd'hui au ministre, c'est qu'il était temps.

 

. 1555 + -

Les oeuvres de bienfaisance, les entreprises et d'autres segments cruciaux de notre société ont perdu des millions de dollars. Que pouvons-nous dire à ces gens?

Le ministre a déclaré qu'il entamera des discussions sur différents mécanismes qui nous permettraient d'éviter de telles situations à l'avenir. Le ministre peut-il nous dire qui participera à ces discussions, le gouvernement, les syndicats, les entreprises, les oeuvres de bienfaisance? Son ministère a-t-il déjà songé à des mécanismes dont il proposerait l'application?

L'hon. Alfonso Gagliano: Monsieur le Président, comme je l'ai dit dans mon discours, j'aimerais examiner la situation. Nous devons effectuer des recherches. Si j'avais trouvé une solution et que j'étais convaincu qu'elle fonctionnerait, je l'aurais annoncée aujourd'hui. Ce que je veux demander aux Canadiens, une fois que nous aurons rétabli le service, est différent.

Je remercie le député pour sa question. Y participeront non seulement le ministre et ses fonctionnaires, mais également des agents de la Société canadienne des postes, des représentants du syndicat et d'autres entreprises, grandes et petites, ainsi que des chercheurs, des universitaires qui s'intéressent aux relations de travail à la Société canadienne des postes.

Dans la situation actuelle, 55 p. 100 des activités de cette société sont exercées en situation de monopole et dans le 45 p. 100 qui reste, elle concurrence directement le secteur privé. Devrions-nous continuer ainsi? Comment pouvons-nous équilibrer ces proportions de 45 et 50 p. 100 des activités? Les travailleurs devraient-ils avoir droit de grève et convient-il d'avoir un monopole? Et que penser de la concurrence avec le secteur privé?

Comme la question est fort complexe, j'espère pouvoir compter sur le concours de spécialistes dans divers domaines, qui pourront trouver des solutions que nous serons en mesure d'appliquer. Ainsi, la prochaine fois que la convention collective arrivera à échéance, nous pouvons espérer en venir à un accord négocié et éviter une perturbation des services qui coûte très cher. Les Canadiens aiment bien compter sur les services de la Société canadienne des postes partout au pays.

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, je constate que je n'ai que quelques minutes. J'aurais encore un ou deux points à faire ressortir. Combien de temps me reste-t-il, monsieur le Président? Je croyais n'avoir que quelques minutes.

Le président suppléant (M. McClelland): Le député a raison. Le débat se termine dans trois minutes.

M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, je voulais vous livrer quelques réflexions sur le paradoxe que ces lois forçant le retour au travail font ressortir quelques fois à la Chambre. Après avoir participé à un certain nombre de ces débats, je puis dire qu'on y voit le pire et le meilleur de notre régime parlementaire. Le pire, c'est une tendance, de la part du gouvernement, à recourir à l'arsenal lourd de la procédure.

Hier, il était prêt à proposer la motion no 8, qui était en fait une forme de clôture extraordinaire. À bien y réfléchir, il y aurait lieu que tous les partis d'opposition, et peut-être même le gouvernement, s'interrogent sur la recevabilité et le bien-fondé de ces motions.

Nous avons une procédure ordinaire pour étudier les projets de loi et elle prévoit diverses formes d'attribution de temps et d'accords entre les partis. Pourtant, lorsqu'il s'agit d'une loi sur le retour au travail, toute cette procédure est mise en veilleuse. Ce qu'il y a eu de déplorable hier, c'est que certains partis d'opposition étaient prêts à laisser piétiner leurs droits sans même songer à exiger quelque chose en retour.

Nous nous sommes opposés, mais notre position était peu confortable: il fallait essayer de conclure une entente avec le gouvernement pour faire en sorte que cette loi, si inacceptable soit-elle, soit meilleure que si nous ne consentions à aucune négociation. Nous avons une entente voulant qu'un de nos amendements, portant sur le mandat du médiateur-arbitre, soit adopté à l'étape du comité plénier. La loi en sera beaucoup plus juste.

Cela n'enlève rien au fait que la motion no 8, telle qu'elle a été présentée et, en fin de compte, adoptée par le gouvernement, et une forme de clôture extraordinaire contre laquelle nous devrions tous nous insurger. Hier, les protestations ont été trop timides.

 

. 1600 + -

J'imagine que c'est tout ce que j'aurai la chance de dire, car je vois que vous vous levez, monsieur le Président. C'est dommage parce que j'aurais tant de choses à apporter au débat.

Le président suppléant (M. McClelland): Comme il est 16 heures, et conformément à la motion adoptée plus tôt aujourd'hui, j'ai le devoir d'interrompre les délibérations et de mettre immédiatement aux voix toutes les motions nécessaires pour terminer le débat en deuxième lecture du projet de loi.

La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. McClelland): Convoquez les députés.

 

. 1630 + -

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

Vote no 48

POUR

Députés

Abbott Ablonczy Adams Alcock
Anders Assad Assadourian Augustine
Bachand (Richmond – Arthabaska) Bailey Bakopanos Barnes
Beaumier Bélair Bélanger Bellemare
Bennett Benoit Bernier (Tobique – Mactaquac) Bertrand
Bevilacqua Blondin - Andrew Bonin Bonwick
Borotsik Boudria Bradshaw Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton – Melville) Brison Bryden Bulte
Byrne Cadman Calder Cannis
Carroll Casey Casson Catterall
Cauchon Chan Charbonneau Charest
Clouthier Coderre Cohen Collenette
Comuzzi Copps Cullen Cummins
DeVillers Dhaliwal Dion Discepola
Dromisky Drouin Dubé (Madawaska – Restigouche) Duhamel
Easter Elley Epp Finestone
Finlay Folco Fontana Forseth
Fry Gagliano Gallaway Gilmour
Godfrey Goodale Gouk Graham
Gray (Windsor West) Grewal Grey (Edmonton North) Hanger
Hart Harvard Harvey Herron
Hill (Macleod) Hill (Prince George – Peace River) Hilstrom Hubbard
Ianno Iftody Jackson Jaffer
Jennings Johnston Jones Jordan
Keddy (South Shore) Kerpan Keyes Kilger (Stormont – Dundas)
Kilgour (Edmonton Southeast) Knutson Konrad Kraft Sloan
Lastewka Lavigne Lee Leung
Lincoln Longfield Lowther Lunn
MacAulay MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) Mahoney Malhi
Maloney Manley Manning Marchi
Mark Marleau Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) Massé
Matthews Mayfield McCormick McGuire
McKay (Scarborough East) McLellan (Edmonton West) McNally McTeague
McWhinney Mifflin Milliken Mills (Broadview – Greenwood)
Mills (Red Deer) Minna Mitchell Morrison
Muise Murray Myers Nault
Normand Obhrai O'Brien (London – Fanshawe) O'Reilly
Pagtakhan Pankiw Paradis Parrish
Patry Penson Peric Peterson
Pettigrew Phinney Pickard (Kent – Essex) Pillitteri
Pratt Proud Provenzano Ramsay
Redman Reed Reynolds Richardson
Ritz Robillard Rock Saada
Schmidt Scott (Fredericton) Serré Shepherd
Solberg Speller St. Denis Steckle
Stewart (Brant) Stewart (Northumberland) Stinson St - Julien
Strahl Szabo Telegdi Thibeault
Thompson (Charlotte) Torsney Ur Valeri
Vanclief Vellacott Venne Wappel
Wayne Whelan White (Langley – Abbotsford) Wilfert
Wood – 201


CONTRE

Députés

Alarie Axworthy (Saskatoon – Rosetown – Biggar) Bachand (Saint - Jean) Bellehumeur
Bergeron Bigras Blaikie Brien
Canuel Chrétien (Frontenac – Mégantic) Crête Dalphond - Guiral
Davies Debien Desjarlais Desrochers
Dockrill Dubé (Lévis) Dumas Earle
Fournier Gagnon Gauthier Girard - Bujold
Godin (Acadie – Bathurst) Godin (Châteauguay) Guay Guimond
Hardy Laliberte Lalonde Laurin
Lebel Lefebvre Lill Mancini
Marchand Martin (Winnipeg Centre) McDonough Ménard
Mercier Nystrom Picard (Drummond) Plamondon
Proctor Riis Robinson Rocheleau
Sauvageau Solomon St - Hilaire Tremblay (Lac - Saint - Jean)
Tremblay (Rimouski – Mitis) Turp Wasylycia - Leis  – 55


«PAIRÉS»

Députés

Anderson Asselin Baker Bernier (Bonaventure – Gaspé – Îles - de - la - Madeleine – Pabok)
Duceppe Eggleton Karetak - Lindell Loubier
Marceau Martin (LaSalle – Émard) O'Brien (Labrador) Perron


Le président suppléant (M. McClelland): Je déclare la motion adoptée.

(Le projet de loi est lu pour la deuxième fois et la Chambre se forme en comité plénier, M. McClelland étant au fauteuil.)

 

. 1645 + -

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. La Chambre étudie en comité plénier le projet de loi C-24.

M. Bob Kilger (Stormont—Dundas, Lib.): Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Il y a eu des discussions entre les représentants de tous les partis. Je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour que tous les votes demandés soient reportés à 18 h 30.

J'ajoute que, si le débat en comité plénier se prolonge jusqu'à 18 h 30, nous entendrons le timbre pendant 15 minutes. Si le débat se termine avant cette heure, il y aura un timbre de 30 minutes.

Le vice-président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: L'article 2 est-il adopté?

(Les articles 2, 4, 5, 6 et 7 sont adoptés.)

[Français]

(Sur l'article 8)

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le président, je voudrais présenter un amendement à cette étape du rapport.

Je propose: Motion no 1  

    Que le projet de loi C-24, à l'article 8, soit modifié

      a) par substitution à la ligne 36, page 3, de ce qui suit:

      «8.(1) Sous réserve du paragraphe (1.1), après l'entrée en vigueur de la»

      b) en ajoutant, après la ligne 42, page 3, ce qui suit:

    «(1.1) Le ministre nomme, dans la mesure du possible, un médiateur-arbitre qui convient aux parties.

Vous me permettrez d'élaborer un petit peu, pendant quelques minutes, sur la raison de cette modification que nous voulons apporter, nous du Bloc québécois, en exigeant que le médiateur-arbitre convienne aux deux parties, c'est-à-dire à la partie syndicale et à la partie patronale.

Il va de soi que beaucoup de points d'interrogation demeurent suite à la négociation, pseudo-négociation qui a eu lieu au cours des derniers mois et principalement des dernières semaines. Y a-t-il eu vraiment une véritable négociation? D'autant plus que si on se réfère au rapport, en octobre 1996, de M. Radwanski, aux articles 14 et 15 on pouvait lire des choses assez surprenantes. Je me permets de citer le rapport en question.

À la recommandation 14, le rapport disait: «Que le gouvernement demande à la Société canadienne des postes de réviser, en négociant de bonne foi, le contrat de 1997, ses coûts de main-d'oeuvre aux termes de la convention collective, de manière à ce qu'elle reflète la réalité du monde du travail d'aujourd'hui.»

Dans ce rapport, vous voyez déjà une tendance à légitimer l'action de la Société canadienne des postes à un durcissement contre la partie syndicale, d'où la nécessité, me semble-t-il, d'un médiateur-arbitre qui convienne aux deux parties, tel que je le souhaite dans l'amendement que je propose.

À la recommandation 15, et je vous la lis, il est dit, et c'est toujours la recommandation de 1996 du rapport Radwanski: «Que dans le cas où le processus des négociations collectives n'aboutisse pas aux ajustements nécessaires sans interruption du service, le gouvernement soit prêt à prendre des mesures appropriées afin de protéger l'intérêt public immédiat et d'assurer la viabilité financière à long terme de la Société.»

 

. 1650 + -

Alors, il est carrément dit, à l'article 15, que le gouvernement doit se préparer à exiger, aussitôt qu'il y aura une mise en place d'un acte de la part du syndicat, un acte de démocratie, puisque le droit de grève est acquis et que c'est un geste démocratique que de l'exercer, un service de livraison à domicile dans les centres urbains qui offrent les services de livraison par facteur, sous réserve de la disponibilité des ressources, après avoir pris soin, en priorité, d'apporter des améliorations à la rapidité et à la fiabilité du service de livraison.

Donc, déjà, lorsqu'on a accepté le rapport Radwanski, en octobre 1996, la Société des postes s'est accrochée aux articles 14 et 15 pour faire en sorte de démontrer un semblant de négociation. À la suite de cela, les déclarations du ministre des Travaux publics étaient pour le moins tendancieuses et pour le moins surprenantes, alors qu'un ministre responsable doit souhaiter un rapprochement des deux parties. Qu'a-t-il dit? Il a dit, au lieu d'être neutre, que le syndicat faisait semblant de négocier. Il a dit aussi qu'il y avait bien des avantages à ce que le syndicat aille en grève, pour aller en chercher plus, et qu'il cherchait seulement à aller en grève.

Mais nommez-moi donc un travailleur syndiqué ou pas qui souhaite se planter avec un piquet pendant des semaines en grève et perdre son salaire. C'était quand même assez surprenant de la part d'un ministre.

Donc, à partir des déclarations du ministre, à partir du rapport Radwanski, aux articles 14 et 15, on se doit, il me semble, si on veut être honnêtes et objectifs, d'avoir, comme je le suggère, un médiateur-arbitre qui convient aux deux parties. De plus, pendant les négociations, on a été mis au courant d'un appui que je qualifierais de douteux, de l'Association du marketing direct. Marketing Direct, c'est celui qui livre vos Reader's Digest, etc. Cette compagnie reçoit un tarif préférentiel. Or, la Société des postes est partenaire dans Marketing Direct. Donc, est-elle en conflit d'intérêts en ce sens? Alors, c'était douteux de voir l'action de la Société des postes donner des taux préférentiels à Marketing Direct et ensuite demander à Marketing Direct d'appuyer la Société des postes publiquement dans son action de pression contre la grève que pouvait faire le syndicat.

Pourquoi la compagnie Purolator a-t-elle signé également sa convention je dirais même rapidement? On sait que Purolator appartient à 75 p. 100 à la Société des postes. Alors, la Société des postes était-elle en conflit d'intérêts de signer avec Purolator immédiatement et rapidement, à des conditions acceptables, et de ralentir le processus de négociation avec ses propres postiers, puisqu'elle avait un service qui était rentable pour elle, puisqu'elle en possède 75 p. 100, pendant une grève potentielle?

Pourquoi la dernière convention collective a-t-elle été signée, en 1995, avant son expiration et que, pour celle-ci, on n'est même pas arrivé à parler ensemble? Il y a donc des grandes interrogations à se faire sur l'action de la Société des postes et sur sa façon d'agir, d'où la nécessité d'un médiateur-arbitre qui serait accepté par les deux parties, comme je le suggère dans mon amendement.

On sait également qu'il y a eu des rumeurs à savoir que le gouvernement pourrait possiblement demander 200 millions par année en dividendes à la Société des postes. Il y a eu ces rumeurs-là. Donc, cela entrave ou cela peut porter à penser qu'il y a une coalition entre le gouvernement et la Société des postes pour aller chercher ces dividendes sur le dos de ses travailleurs.

Je dis donc que ces raisons-là me conduisent à suggérer et à souhaiter ardemment que le médiateur choisi convienne aux deux parties, en se rappelant que la Société des postes n'est pas là pour faire de l'argent. Son rôle, c'est de livrer un service et que l'argent qu'elle fait serve à créer des emplois par la distribution.

On sait que, depuis quelque temps, dans certaines régions, comme dans ma région, à Sorel, tous les nouveaux secteurs n'ont plus de service de facteur. On met des superboîtes. Il y a également des contradictions: dans une petite ville comme Saint-Joseph-de-Sorel qui compte 2 000 personnes, on offre le service du facteur. Tandis que pour une ville comme Nicolet, qui compte 7 000 habitants, on n'offre aucun service de facteur.

Donc, pourquoi ne pas se servir des profits pour agrandir le service, pour donner un meilleur service à la population et faire en sorte, en même temps, de créer des emplois pour nos enfants? Quel intérêt a-t-on à faire disparaître des emplois intéressants?

 

. 1655 + -

Donc, la bataille que le syndicat a entreprise n'est pas nécessairement une bataille de protection de ses propres intérêts. En fait, c'est d'empêcher la Société des postes de faire une remise en question de ses droits acquis. Au fond, c'est la bataille du droit de travailler à temps plein plutôt que de travailler à temps partiel.

C'est ce qu'ils ont entrepris comme bataille, et ça sert non seulement aux travailleurs de la Société des postes, mais ils deviennent des porte-drapeaux pour l'ensemble des travailleurs dans d'autres domaines de sociétés de la Couronne, ou dans des sociétés para-publiques. En fait, c'est stopper l'éclatement de cette Société des postes en exigeant de cette Société qu'elle continue d'avoir un service complet, personnalisé.

On a assisté à la fermeture de bureaux de Postes, on a assisté à la venue de super-boîtes, mais jusqu'où ira-t-on? On veut faire disparaître une partie du service des facteurs. Jusqu'où veut-on aller? Que deviendra la Société des postes? Une entité avec des profits qui sont décernés au gouvernement comme on l'a fait pour l'assurance-chômage, et ensuite on va développer une technologie qui ne sert à rien en ce qui concerne la création d'emplois.

Il y a la nécessité d'avoir un arbitre juste choisi par les deux parties. Cela est nécessaire parce qu'il y a eu toutes sortes de messages pendant cette pseudo-négociation, à savoir qu'une minute enlevée aux postiers c'est un million d'économie. Il y a toutes sortes de chiffres lancés en l'air mais toujours une attaque directe par la Société des postes au service nécessaire à la population, un service direct et complet.

Les conséquences de la perte d'emplois sont extrêmement grandes pour les petites régions, au Québec comme ailleurs. Quand j'ai dans ma région cinq ou six employés, qu'on ramène ce nombre à quatre, c'est un emploi de moins pour les jeunes qui grandissent dans la région. Mais c'est plus qu'un, ce sont des dizaines d'emplois qu'on pourrait créer pour les jeunes dans nos villages, dans nos paroisses, au lieu de concentrer l'argent dans des centres de tri automatisé qui, au fond, desservent très mal la population avec des périodes de cinq jours de livraison, plutôt qu'un jour comme c'était avant.

Je conclus en disant que ce choix d'un médiateur-arbitre pourrait être une façon de montrer de quel bord est ce Parlement, de quel bord sont ces députés. Tout à l'heure, le député d'Abitibi, au lieu de se porter à la défense des employés—un ex-chef syndical, et le député d'Anjou, un ex-chef syndical de la CEQ—a voté en faveur d'un projet de loi, c'est quand même incroyable un projet de loi comme ça, et dire: «Ah, ils sont bien payés.» Mais qu'est-ce qu'on veut dans sa région? Des emplois à temps partiel à 6 $ ou 7 $ de l'heure? On veut des emplois bien payés parce que lorsqu'il y a un emploi bien payé, le vendeur d'automobiles, le restaurateur et le commerçant profitent de ce salaire en vendant des produits.

C'est une répartition de l'argent que la Société des postes fait. Rappelons que la Société des postes n'est pas déficitaire. Elle fait un profit à l'heure actuelle. Il s'agit donc que ce profit soit simplement bien réparti en services à la population et en création d'emplois.

Dans ce sens, je n'ai pas peur aujourd'hui de dire, en conclusion, sur l'amendement que je propose, que je suis du bord de ma région, que je suis du bord des jobs à temps plein et que je suis du bord du gros bon sens.

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le président, j'aimerais bien sûr corriger un peu les propos du député de Richelieu. Je regrette, mais malgré son expérience, il a fait des affirmations que je qualifie de gratuites.

Je n'ai jamais dit que je voulais faire paraître mal le syndicat. En même temps que je rencontrais l'Association du marketing direct, j'ai rencontré aussi le syndicat. J'ai dit clairement que je défendais leur droit de grève. D'ailleurs, la preuve, le député devait reconnaître cela, c'est la première fois dans l'histoire de la Société canadienne des postes qu'on a une grève et qu'il n'y a pas de violence sur les lignes de piquetage.

M. Louis Plamondon: Ce n'est pas à cause de vous, c'est à cause des postiers.

 

. 1700 + -

L'hon. Alfonso Gagliano: Monsieur le président, c'est la Société canadienne des postes qui n'a pas embauché des travailleurs de remplacement et elle avait le droit de le faire.

Le problème de ce côté, c'est que le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique n'ont aucune objectivité et que, mot par mot, relèvent ce que les dirigeants syndicaux disent. Ils sont à la merci des dirigeants syndicaux. Les propos que le député m'attribue, je ne les ai jamais dits. J'ai toujours défendu le droit de grève; ils ont le droit de faire la grève. J'ai aussi dit qu'il fallait protéger les intérêts de tous les Canadiens et non seulement une partie des Canadiens comme les unions ou les grandes compagnies. C'est ce que nous faisons aujourd'hui.

Alors, avant que le député de Richelieu ne fasse des affirmations gratuites ou qu'il ne m'attribue des propos, qu'il soit bien précis et qu'il prouve que j'ai dit cela, au lieu de commenter sur des ouï-dire ou sur des choses que d'autres ont dites. Je pense que, dans cette Chambre, on se doit de dire la vérité telle que les choses ont été dites, et non se fier à des commentaires que d'autres auraient pu faire et à des ouï-dire. Donc, j'espère que le député aura le courage d'admettre que ce qu'il a dit en Chambre fut dit par d'autres.

M. Louis Plamondon: Monsieur le président, je ne voudrais pas partir un débat là-dessus, mais je voudrais simplement dire au ministre que s'il avait écouté les nouvelles à la télévision, il se serait entendu dire: «Le syndicat fait semblant de négocier.» Il a carrément dit cette phrase-là à la télévision.

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le président, le débat concernant cet article-là fait justement la preuve que notre amendement est bon. On dit dans l'amendement:

    (1.1) Le ministre nomme, dans la mesure du possible, un médiateur-arbitre qui convient aux parties.

C'est important de voir que dans le projet de loi initial, c'est le ministre qui nomme dans une situation conflictuelle, sans dire qui a tort et qui a raison, si c'est le syndicat ou si c'est l'employeur. Le principe de base que cela prend, c'est que le médiateur-arbitre—ce n'est pas juste un arbitre, c'est un médiateur-arbitre—, on le voit dans le paragraphe (2) de l'article, a comme première job de s'efforcer d'intervenir sur les questions visées au paragraphe (1) et d'amener les parties à se mettre d'accord. Donc, c'est très important qu'il y ait apparence de justice, que les gens qui viendront à la table de négociations se disent qu'ils sont capables de faire confiance, à un niveau minimum, à cette personne qui a été nommée, et ce, autant du côté de l'employeur que du côté du syndicat.

Là-dessus, l'amendement du Bloc québécois, au fond, vise à assurer un gros bon sens. Je pense qu'il faudrait que le gouvernement le reçoive dans ce sens. Ce n'est pas un amendement pour gagner une bataille contre le gouvernement, c'est un amendement pour faire en sorte qu'il y ait de meilleures conditions, de meilleures relations de travail à l'intérieur d'un milieu qui a eu un passé très difficile.

Il faut se souvenir du passé de la Société canadienne des postes. Il y a eu des périodes difficiles. Il y a eu, en 1995, une négociation quasiment modèle là-dessus. Je suis allé à Kanata, pas loin d'Ottawa, avec le président du syndicat et le négociateur, Philippe Arbour, pour aller convaincre la municipalité d'avoir des services motorisés pour facteurs. Ce n'est pas une attitude syndicale traditionnelle, c'est une attitude pour permettre aux gens d'avoir un emploi et de le développer pour qu'il y ait un service de qualité. Donc, le médiateur-arbitre que l'on nomme à ce moment-là devra travailler sur la détermination des conditions de travail. Il devra inviter les groupes à se mettre d'accord.

Plus tôt quand le ministre a parlé, je l'ai laissé parler. J'aborde le débat actuel dans un contexte où je veux qu'il y ait les meilleures relations possibles entre les partis, et je trouve que la partie gouvernementale présentement joue un très mauvais jeu en ne s'occupant pas du fond de la question. En comité plénier, on est là pour faire la meilleure loi possible parce que les Canadiens et les Québécois veulent avoir un service postal, mais un service postal qui va fonctionner. Si le gouvernement n'est pas capable d'avoir un sérieux, nous, nous l'aurons.

Revenons-en au but de l'amendement. Le but de l'amendement est que tout simplement—il faut simplifier les choses—dans la loi, le ministre nomme le médiateur-arbitre. Nous, nous disons que le ministre peut le nommer, mais il doit, dans la mesure du possible, nommer quelqu'un qui convienne aux parties. On veut juste s'assurer que ce soit dans les meilleures conditions possibles. On tient compte de l'article 9 de la loi. On a montré la chose principale.

Ce n'est pas un débat de questions et réponses. Si je comprends bien, c'est un débat où chaque député a le droit de prendre la parole et les autres devraient écouter les arguments plutôt que d'essayer de les contester pendant qu'on parle.

 

. 1705 + -

Je veux donc revenir à la question. Le médiateur-arbitre aura un mandat, en vertu de l'article 9, de décider de choses très importantes. Cet article définit que le médiateur-arbitre décidera de certaines choses en fonction de critères économiques où il considérera la Société canadienne des postes comme si elle était une entreprise privée. Balayer le monopole sur les lettres, balayer les bureaux de poste ruraux, c'est s'en aller directement vers la privatisation. C'est pour cela qu'il faut absolument que le médiateur-arbitre soit, le mieux possible, reconnu par les parties.

C'est le seul et unique objectif visé par le Bloc et on espère que de ce côté-là, le gouvernement va faire preuve de sens des responsabilités et permettra que toute la population canadienne et les parties négociantes puissent s'assurer un avenir dans la Société des postes.

[Traduction]

M. Jim Gouk (West Kootenay—Okanagan, Réf.): Monsieur le président, je ne voudrais pas interrompre les députés bloquistes, mais je leur demande de tenir compte du fait qu'il y a 15 amendements en tout et qu'une demi-heure du temps alloué est déjà écoulée. Dans une heure vingt-cinq, le timbre va retentir.

Je sais qu'ils ont des arguments à faire valoir, mais nous voudrions entendre tous les amendements, y compris les leurs.

M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le président, j'ai simplement une ou deux observations à faire.

J'ai écouté attentivement tout ce que disait le Bloc et je suis entièrement d'accord avec le principe voulant qu'on nomme un médiateur-arbitre que les deux parties acceptent, mais je souligne que la situation est exceptionnelle, parce que les parties en cause sont le syndicat et la population du Canada. La Société canadienne des postes, c'est la population. C'est une société d'État. Ce sont les intérêts des Canadiens qui sont en jeu.

J'ai écouté les observations du Bloc avec beaucoup d'attention et de sympathie, mais il me semble qu'il serait préférable dans ce cas-ci de nommer comme arbitre-médiateur une personne qui pense d'abord aux intérêts de tous les Canadiens plutôt qu'à ceux du syndicat.

L'hon. Lawrence MacAulay (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le président, à titre de ministre du Travail, il me revient de nommer un médiateur-arbitre et il serait simplement logique que je nomme une personne équitable envers les deux parties.

Je suis disposé à recevoir des noms ou des suggestions proposés par les deux parties, mais la nomination d'un médiateur-arbitre est finalement la responsabilité du ministre du Travail.

[Français]

M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, je suis un peu surpris des propos de mon ami, le député de Saint-Léonard—Saint-Michel, avec qui j'ai eu le plaisir de travailler.

Il y a une contradiction, parce que ce que dit le Bloc, c'est que, pour que le processus aboutisse, il faut que la personne qui incarnera ce rôle très important de médiateur soit investie de la confiance des deux parties. C'est l'ABC des relations de travail. Il ne s'agit pas simplement ici de faire une nomination, il faut que cette personne ait la confiance des deux parties.

Ce que je vous dis est tellement vrai, que toute la philosophie qui a présidé, lorsque le ministre du Travail était le député de Saint-Léonard—Saint-Michel, a consisté à vouloir changer le Conseil canadien des relations de travail, qui va devenir le Conseil canadien des relations industrielles, où ce sont les parties qui nomment les personnes sur les listes. On sait très bien que si les deux parties n'ont pas confiance en cette personne, le processus ne peut pas aboutir favorablement.

Je trouve que le député est un peu culotté, avec toute l'amitié que je lui porte, je lui dis qu'il ne peut pas se lever en cette Chambre et dire que les négociations se sont déroulées de bonne foi. On a vu des scènes disgracieuses qui ont fait rougir tous les parlementaires, lorsque le négociateur en chef du gouvernement a pris à la gorge, à l'instar d'un autre homme public, son vis-à-vis syndical dans un geste de violence qui n'a pas sa place. Je crois qu'il faut le reconnaître.

Monsieur le Président, je ne permets pas au ministre des Travaux publics de dire qu'il y a eu des provocations. Ce geste est inacceptable en toute circonstance. Lorsqu'il y a des négociations, ce n'est pas par la violence que cela se règle.

On sait ce qu'est une négociation: une négociation, c'est l'expression d'un rapport de force où toutes les parties tentent de faire valoir leurs intérêts.

 

. 1710 + -

Quelqu'un peut-il nier en cette Chambre qu'il n'y ait pas eu négociation de bonne foi? Il n'y a pas eu négociation de bonne foi parce que le rapport de force était biaisé. Nous sommes en présence d'un gouvernement qui, dès le début, avait donné des assurances que, pour le cas où la négociation n'aboutirait pas favorablement, le gouvernement était de connivence pour forcer un retour au travail. C'est ça la caractéristique.

Quand le ministre des Travaux publics dit: «La caractéristique de ce conflit-ci c'est qu'on n'ait pas eu recours à la violence», ce n'est pas la caractéristique. La caractéristique, c'est qu'il n'y a pas eu négociation de bonne foi. Mais on donne la possibilité au gouvernement de se racheter, de montrer qu'il a un parti pris pour les travailleurs, de montrer qu'il est capable de reconnaître les erreurs passées. Et cette reconnaissance, elle doit trouver l'expression d'un appui à l'amendement du Bloc.

[Traduction]

Le vice-président adjoint: Je signale que nous avons 15 amendements. Par conséquent, pour permettre à tout le monde d'intervenir, je vous prierais d'être brefs et concis.

La motion no 1 est-elle adoptée?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.  

Le vice-président adjoint: Le vote est reporté.

M. Jim Gouk (West Kootenay—Okanagan, Réf.) propose:  

Motion no 2

    Que le projet de loi C-24, à l'article 8, soit modifié par substitution aux lignes 36 à 42, page 3, et aux lignes 1 à 31, page 4, de ce qui suit:

    «8.(1) Le syndicat et l'employeur choisissent trois personnes comme arbitres éventuels qui leur soient acceptables. Le syndicat et l'employeur ont alors sept jours pour fournir à l'autre partie la liste des noms de ceux qu'ils ont choisis et leur résumé. Dans le délai de sept jours après sa réception, la partie recevant cette liste choisit le nom d'une personne dans la liste proposée et avise l'autre partie de sa décision. Les deux arbitres choisis ont alors un délai maximal de quatorze jours pour s'entendre sur le choix d'un troisième arbitre qui devient président de la commission d'arbitrage.

    (2) La commission d'arbitrage est donc composée de trois membres dont le président.

    (3) Après le choix de la commission d'arbitrage, chacune des parties transmet sa dernière et meilleure proposition sur chacun des articles non résolus du contrat dans les trente jours du choix de l'arbitre. La commission d'arbitrage avise, par écrit, chacune des parties de l'endroit où les propositions finales sont à déposer et indique la date et l'heure précises de l'expiration du délai de production des propositions.

    (4) L'omission de déposer une proposition finale dans les trente jours est réputée constituer un désistement de la procédure et emporte acceptation de la proposition finale de l'autre partie. Si les deux parties font défaut de déposer leur proposition finale dans les trente jours, le règlement est déterminé par arbitrage obligatoire.

    (5) La commission d'arbitrage ne peut dévoiler aucun détail des propositions d'une partie à l'autre avant d'avoir arrêté une décision.

    (6) La commission d'arbitrage considère la proposition finale de chaque partie sur les articles non résolus du contrat comme un tout à moins qu'il n'y ait consentement des deux parties de considérer chaque article séparément ou selon des regroupements précis.

    (7) Pendant la période de délibérations de la commission d'arbitrage, chaque partie aura une journée d'au plus sept heures et demie pour présenter des observations particulières à la commission.

    (8) Chaque partie aura droit à un préavis d'au moins cinq jours ouvrables de la date, de l'heure et du lieu de la présentation de ses observations particulières à la commission. Cet avis peut être donné pendant le délai intérimaire de dépôt des propositions.

    (9) La commission d'arbitrage choisit la proposition finale de chaque partie qui est la plus conforme aux lignes directrices formulées à la commission dans les trente jours du délai de dépôt des propositions.

    (10) La commission d'arbitrage n'a pas le pouvoir de modifier la position finale de l'une ou l'autre partie.

    (11) Si, de l'avis de la commission d'arbitrage, les deux parties s'éloignent beaucoup d'une position légitime, la commission peut demander aux deux parties de soumettre de nouvelles propositions finales. Le cas échéant, chaque partie a vingt jours de délai pour soumettre à nouveau ses propositions finales. La commission avise à nouveau les parties, par écrit, du lieu de dépôt des nouvelles propositions et de la date et de l'heure précises de l'expiration du délai de production. Il est interdit de révéler des détails des premières propositions jusqu'à ce qu'un règlement définitif soit annoncé.

    (12) Si l'une ou l'autre partie fait défaut de déposer de nouvelles propositions dans le délai de vingt jours, la commission d'arbitrage utilise la dernière proposition déposée par cette partie.

    (13) La commission d'arbitrage choisit la proposition finale la plus légitime déposée dans les vingt jours accordés pour le dépôt de nouvelles propositions.

    (14) Dans les trente jours de l'annonce d'une proposition agréée, la commission d'arbitrage dépose un rapport énonçant les propositions finales des deux parties et une justification point par point du choix fait par elle des propositions soumises.

    (15) À défaut d'un rapport unanime de la commission, l'arbitre dissident dépose un rapport minoritaire dans le délai accordé aux autres arbitres.»

M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.): Monsieur le président, je parlerai très brièvement de cet amendement qui propose de mettre en place un mécanisme d'arbitrage de l'offre finale pour régler la question des échelles salariales, au lieu d'avoir recours à un moyen arbitraire.

Lorsque ces questions ont été soulevées à la Chambre et lorsque nous avons interrogé le ministre du Travail durant la période des questions, il a insisté sur la nécessité d'avoir un règlement négocié. Nous sommes d'accord avec lui. Nous croyons qu'un règlement négocié est toujours et de loin préférable à un règlement imposé. Nous croyons cependant que l'arbitrage de l'offre finale peut être utilisé également par les deux parties et que ce mécanisme très valable peut être appliqué dans des cas comme celui-ci sans qu'il soit nécessaire d'avoir recours à une loi forçant le retour au travail, à laquelle le syndicat et l'employeur s'attendaient. Une loi de retour au travail n'est jamais la solution parfaite.

M. Jim Gouk: Monsieur le président, je voudrais ajouter quelques brèves observations. L'amendement concernant l'arbitrage de l'offre finale prévoir un mécanisme de sélection d'un groupe d'arbitrage. Je n'entrerai pas dans les détails puisqu'ils sont disponibles et que le vote à ce sujet est reporté à 18 h 30.

Il en a été question durant le débat aujourd'hui. L'amendement propose la création d'un mécanisme de sélection très précis en vertu duquel le syndicat et la Société canadienne des postes choisiraient chacun leur arbitre et désigneraient conjointement un troisième arbitre qui agirait comme président du groupe d'arbitrage. L'amendement prévoit également des délais très précis concernant la présentation des propositions respectives des parties et propose un mécanisme régissant la décision du groupe d'arbitrage.

Comme je le disais, s'il y a des députés qui désirent en faire une lecture détaillée, je serai heureux de leur en montrer une copie d'ici 18 h 30. Une copie de l'amendement a également été remise aux fonctionnaires de la Chambre.

Le vice-président adjoint: L'amendement compte trois pages et est très détaillé. Il y en a une copie sur le bureau.

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le président, depuis quinze jours, nous avons beaucoup entendu parler de l'arbitrage des propositions finales. Je pense que presque tous ceux qui ont abordé le sujet ont dit en guise d'introduction que rien ne remplaçait un règlement librement négocié. Je pense que nous sommes tous d'accord là-dessus, même le député qui a proposé cet amendement.

L'arbitrage des propositions finales par sélection, qui se résume à un choix fait pendant les négociations patronales-syndicales, n'a sa place que dans un nombre très limité de cas.

 

. 1715 + -

Ainsi, même dans les présentes négociations, si les deux parties avaient convenu que c'était une façon acceptable de résoudre l'impasse, elles auraient pu y recourir à n'importe quel moment. Tant le Code canadien du travail que la convention collective en vigueur renferment des dispositions selon lesquelles, si les deux parties le veulent, elles peuvent régler leurs différends en suspens en ayant recours à n'importe quel type d'arbitrage exécutoire, dont l'arbitrage des propositions finales.

J'ai personnellement eu recours à l'arbitrage des propositions finales quand j'étais représentant syndical au Manitoba. Pendant six ou sept ans, dans cette province, cette méthode d'arbitrage a été prévue par la loi. C'est le NPD qui l'avait introduite. Elle a survécu quatre ou cinq ans jusqu'au jour où le gouvernement Filmon a été élu et elle a disparu. En tant que représentant syndical dans les nombreuses négociations que j'ai menées, j'y ai eu recours trois ou quatre fois. J'ai donc fait l'expérience de son application limitée.

L'idée c'est que, lorsqu'on a réduit toutes les questions en suspens à une ou deux questions simples comme le montant de la rémunération, les deux parties peuvent décider d'y avoir recours. Même au Manitoba, c'était optionnel. L'une ou l'autre des parties pouvaient faire une demande au ministre pour régler les questions en suspens, soit 60 jours avant une grève, soit 90 jours après une grève. C'étaient les délais dans lesquels on pouvait opter pour l'APF.

L'Union internationale des travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce y ont eu souvent recours. Le SCFP y était violemment opposé. Les travailleurs de l'acier et le syndicat des charpentiers l'ont essayé. Personnellement, j'ai dû y avoir recours un maximum de cinq fois en sept ou huit ans.

L'arbitrage des propositions finales nous vient du base-ball professionnel où il est encore utilisé. Une fois que le syndicat a négocié toutes les questions en suspens, à l'exception des questions d'argent, si les deux parties n'ont pas encore réglé la question monétaire, la partie syndicale fait son offre finale, et l'employeur la sienne. L'arbitre choisit l'une ou l'autre, mais pas une combinaison des deux. Ce n'est pas comme à la cafétéria. C'est l'une ou l'autre.

Essayons d'imaginer ce que ça donnerait dans les négociations à la Société canadienne des postes. Quiconque a le sens des négociations collectives ou s'y connaît un peu dans le domaine y verrait aussitôt une tour de Babel. C'est simplement impossible quand les négociations portent sur des règles de travail complexes ou sur des questions comme qui ont fait achopper les négociations actuelles. L'arbitrage des propositions finales ne peut absolument servir à rien, et c'est pourquoi les gens qui s'y connaissent à la table des négociations ont décidé de ne pas exercer leur droit de régler cette ronde de négociations en ayant recours à l'arbitrage des propositions finales.

Donner suite à la recommandation qui a été faite aujourd'hui concernant cet amendement et imposer dorénavant l'arbitrage des propositions finales comme moyen de règlement de toutes les négociations, ce serait absolument ridicule. Ça montre qu'on ne sait pas de quoi on parle. C'est comme si quelqu'un était tombé sur une idée nouvelle et avait décidé de l'essayer. Avec les médias à l'affût, on n'arrête pas de nous rebattre les oreilles de cette idée jusqu'à ce la plupart des députés de ce côté-ci de la Chambre en aient marre d'entendre parler d'arbitrage des propositions finales. Vive le jour où je n'entendrai plus cette expression.

Je suis tout à fait opposé à un tel amendement. Le seul élément que nous pourrions juger nécessaire d'introduire dans le Code canadien du travail, ce serait de laisser aux deux parties la possibilité de choisir. Les parties pourraient, si elles le jugent bon, mettre fin aux négociations en ayant recours au processus d'arbitrage obligatoire, l'arbitrage des propositions finales demeurant une option.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le président, je vais essayer d'être rapide et aussi concis que possible.

L'offre finale, pour que les gens qui nous écoutent comprennent bien, cela veut dire que la partie syndicale et la partie patronale font une proposition globale, et, en bout de ligne, l'arbitre décide, ou dans le cas présent la commission arbitrale décide laquelle des deux sera acceptée.

Il faut voir que, pour le secteur public, cela fausse beaucoup le jeu au départ parce que les membres du syndicat, dans leur offre finale, voudront s'assurer que leur offre soit acceptée le plus possible. Cela met une pression terrible et on ne met finalement à peu près rien dans la demande syndicale pour être certain qu'elle sera acceptée.

 

. 1720 + -

Du côté patronal, dans le secteur public, on a beaucoup de temps devant nous. Personne n'a parlé de diminuer le salaire du président du conseil d'administration de la Société des postes, s'ils n'arrivaient pas à une entente, ou celui du directeur général de la Société des postes, s'ils n'arrivaient pas à une entente. S'il y a eu ce genre de situation dans la négociation, peut-être qu'on se serait entendus plus rapidement sur des choses.

Donc l'offre finale, surtout dans l'article qu'on a devant nous, c'est un article nébuleux, compliqué et qui créerait des nouveaux droits en relations de travail. Je crois que, dans une loi spéciale, il faut essayer, autant que possible, de ne pas créer de précédent qui, ensuite, pourrait être exporté à d'autres secteurs et faire qu'on en viendrait systématiquement à une interprétation qui nuit aux bonnes relations de travail.

N'oublions pas que c'est toujours associé à l'article 9, qui est un article majeur. J'espère qu'on réussira en cette Chambre à avoir un amendement sur cet article, parce qu'avec l'article 9 actuel, si, en plus, on avait l'offre finale, on va dire à l'arbitre ou à la commission d'arbitrage: «Vous allez maintenant gérer cela, l'évaluer comme si c'était une entreprise totalement privée, une compagnie privée, et en même temps, vous allez regarder les meilleures conditions pour régler.»

Donc, cela voudra dire, du côté syndical, pour arriver à un règlement, se rebattre à des conditions de travail qu'on retrouve chez des employeurs du secteur privé. On a vu cette bataille chez UPS aux États-Unis. Elle a pu être gagnée parce qu'on a convaincu la population qu'il fallait des emplois réguliers, des emplois permanents. Mais si on avait été devant la situation de l'offre finale, le syndicat et les employés concernés se ramasseraient face à une situation inacceptable.

Donc, la proposition du Parti réformiste a pu être faite de bonne foi, mais elle m'apparaît inacceptable, parce que nébuleuse, et parce qu'elle ne place pas les parties à égalité dans ce débat.

[Traduction]

M. Jim Gouk (West Kootenay—Okanagan, Réf.): Monsieur le président, je voudrais d'abord réagir aux propos du député néodémocrate qui a prétendu que nous ne connaissions rien au fonctionnement de l'arbitrage des propositions finales et que nous faisions entièrement fausse route. Je ne sais trop quel jargon il parlait.

S'il y a quelqu'un qui ignore ce qui se passe, c'est bien lui. Nous avons annoncé notre proposition avec force détails aujourd'hui. Je sais qu'il était présent à la Chambre à ce moment-là, mais j'ignore s'il écoutait vraiment. Quoi qu'il en soit, il est clair qu'il n'a pas très bien compris ce que nous avons proposé. Nous avons pourtant été très explicites.

Il a soutenu que l'arbitrage des propositions finales était efficace mais qu'il n'y avait pas lieu d'y recourir dans ce cas-ci parce que le syndicat et la société des postes avaient eu la possibilité d'y recourir et ne l'avaient pas fait. Pourtant, il est favorable à l'arbitrage. Ils ont eu la possibilité d'y recourir, mais ils ne l'ont pas fait. Pourquoi est-il favorable à l'arbitrage ou, dans le cas présent, à toute autre solution?

Cette proposition leur permet de négocier ensemble, collectivement. Il y est question de conciliation, de médiation et de toute forme de règlement sur lequel les deux parties s'entendent, pourvu qu'il ne conduise pas à un arrêt de travail.

Une solution définitive s'impose quand les deux parties disent qu'ils ne peuvent aboutir à un accord, convenir de la façon de régler le conflit, s'entendre sur le choix d'un arbitre ou s'en remettre à un tirage au sort. S'ils ne peuvent s'entendre sur rien, une solution définitive s'impose. Et c'est pourquoi nous sommes ici ce soir.

Qu'il s'agisse de l'arbitrage des propositions finales, d'un simple tirage au sort ou de quelque autre méthode, l'important c'est de faire quelque chose. Quand le député laisse entendre que nous ne devrions pas avoir recours à l'arbitrage des propositions finales parce que les parties ont eu la possibilité d'y recourir mais ne l'ont pas fait, cela revient à dire que nous ne devrions pas être ici ce soir.

Je reviens à la première question que je lui ai posée aujourd'hui et à laquelle il n'a pas répondu. Pourquoi les néodémocrates ont-il tout d'abord été unanimes sur la nécessité de mettre la motion aux voix et d'accélérer son adoption? S'ils sont à ce point opposés à tout ce que nous essayons de faire au nom de 30 millions de Canadiens, qu'ont-ils alors à faire dans cette enceinte?

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le président, je peux peut-être répondre brièvement.

Le député du Parti réformiste a dit que nous étions en faveur de l'arbitrage, mais nous ne sommes pas favorables à l'APF. Ce point n'était pas clair. Rien, dans ce que nous avons fait, ne doit l'amener à croire que nous votons en faveur d'une loi de retour au travail ou de l'arbitrage obligatoire. Rien n'est plus loin de la vérité.

Hier, quand le gouvernement a demandé le consentement unanime pour que le projet de loi soit adopté rapidement et qu'il ne se bute à aucun obstacle ou pierre d'achoppement, à ce moment-là, nous lui avons donné notre accord.

Le député du Parti réformiste ne sait pas comment nous allons voter sur cette mesure imposant le retour au travail et l'arbitrage obligatoire. Je pense qu'il peut probablement le deviner. Ce ne sera certainement pas comme il le croit.

 

. 1725 + -

Pour ce qui est du choix de l'arbitrage des offres finales, nous avons lu attentivement la proposition du député. Ce n'est pas en ajoutant des pages au projet de loi qu'on y donnera plus de mérite. C'était une mauvaise idée au départ. Il valait la peine de la lancer à titre de ballon d'essai, mais ce n'est pas en ajoutant des masses de papier au document de base ni en retournant la question dans tous les sens qu'on donne plus de mérite à une mauvaise idée.

Le vice-président: L'amendement à l'article 8 inscrit au nom de M. Gouk est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Conformément à l'ordre adopté, le vote sur l'amendement à l'article 8 est reporté.

Nous passons maintenant aux deux amendements à l'article 9, un présenté par M. Gouk et l'autre, par le député de Winnipeg-Centre.  

(Article 9)

M. Jim Gouk (West Kootenay—Okanagan, Réf.) propose:

Motion no 3

    Que le projet de loi C-24, à l'article 9, soit modifié par substitution, aux lignes 32 à 41, page 4, et aux lignes 1 à 10, page 5, de ce qui suit:

    «9. La commission d'arbitrage doit s'inspirer des principes suivants:

      a) l'indice du coût de la vie depuis la conclusion de la dernière convention;

      b) l'augmentation moyenne des salaires dans le secteur public;

      c) les répercussions sur le service postal;

      d) les répercussions financières de la conclusion de la convention;

      e) à savoir si la conclusion de la convention entraînera une hausse des tarifs postaux supérieure à l'inflation depuis leur dernier ajustement;

      f) les changements des descriptions de fonctions;

      g) la comparaison avec les conditions dans le secteur public sur les articles non résolus.»

—Monsieur le président, mon amendement ne fait que supprimer une partie des lignes directrices précises imposées par le gouvernement pour orienter le travail de son arbitre et les remplacer par six points qui vont guider la commission d'arbitrage proposée par le Parti réformiste en fonction du marché, du service postal, du coût du règlement, des règlements moyens dans le secteur public, etc.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, je ne parlerai pas longtemps sur cette question. L'amendement tel que proposé élargit encore la notion de la commission d'arbitrage dont on parlé tout à l'heure.

C'est encore plus nébuleux et quant à moi il faudra absolument que cet amendement soit rejeté.

[Traduction]

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Je vais parler brièvement, monsieur le président, de l'amendement présenté à l'article 9. La commission d'arbitrage devrait, selon le Parti réformiste, examiner une liste complète lorsqu'elle prend sa décision dans le cadre du règlement du conflit.

La liste précise que l'arbitre devrait tenir compte de l'indice du coût de la vie, des répercussions sur le service postal, des répercussions financières sur la conclusion de la convention, etc. On devrait laisser à l'arbitre les coudées franches pour rendre une décision basée sur les conditions et les lignes directrices qui lient toujours les arbitres, et pour tenir compte des facteurs locaux qui auraient une influence sur cette industrie.

Le fait de les énumérer à nouveau de façon si détaillée ne donne rien. Tout comme une déclaration constitutionnelle ou une déclaration de n'importe quel type on devrait prévoir des termes généraux et ne pas imposer aux futurs arbitres des lignes directrices qui feront en sorte qu'il sera plus difficile pour eux de rendre une décision sur une multitude de scénarios différents.

Cet amendement enlèverait beaucoup de latitude à l'arbitre et nous allons certes nous y opposer.

Le vice-président: L'amendement à l'article 9 inscrit au nom de M. Gouk est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant: Conformément à l'ordre adopté, le vote sur l'amendement est reporté.

Nous allons maintenant passer à l'étude de l'amendement proposé par le député de Winnipeg-Centre.  

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD) propose:

    Que le projet de loi C-24, à l'article 9, soit modifié par substitution aux lignes 32 à 41, page 4, et aux lignes 1 à 10, page 5, de ce qui suit:

    «9. Le médiateur-arbitre doit s'inspirer de la nécessité d'avoir des conditions de travail compatibles avec la Loi sur la Société canadienne des postes et la viabilité et la stabilité financière de la Société canadienne des postes, compte tenu de:

      a) la nécessité pour celle-ci, sans recours à des hausses indues de tarifs postaux:

    (i) d'être efficace,

    (ii) d'accroître sa productivité,

    (iii) de respecter des normes de service acceptables;

      b) l'importance des bonnes relations patronales-syndicales entre la Société canadienne des postes et le syndicat.»

[Français]

M. Réjean Lefebvre (Champlain, BQ): Monsieur le Président, le Bloc québécois a présenté un amendement à cet article qui prévoit que l'arbitre devra tenir compte des paramètres de service public qui doit s'autofinancer, qui sont prévus actuellement dans la Loi constitutive de Postes Canada. Les paramètres donnés par le ministre à l'arbitre dans le projet de loi ne lui donnent aucun choix.

 

. 1730 + -

Postes Canada doit être gérée comme une entreprise privée avec des critères qu'on impose à l'entreprise privée, alors que Postes Canada constitue un service public aux termes de sa propre loi. Ce libellé démontre que le gouvernement demande à l'arbitre de poursuivre les mêmes objectifs de négociation que Postes Canada, sans augmenter le coût des tarifs postaux et réduire les coûts à Postes Canada. Or, le seul endroit où de telles réductions sont possibles est au chapitre de la main-d'oeuvre.

La Société avoue, depuis le début de ses négociations, qu'elle a comme objectif de récupérer 200 millions de dollars sur ses coûts de main-d'oeuvre, ce qui représente l'abolition de 4 000 postes. Cette indication du gouvernement n'est pas faite au hasard. En effet, le gouvernement s'attend à ce que Postes Canada lui verse des dividendes de l'ordre de 200 millions de dollars au cours des prochaines années.

Ainsi, lorsque le gouvernement a le choix entre la création d'emplois et l'augmentation de son capital, il choisit ses propres intérêts financiers au détriment des travailleurs. On a vu ce choix s'exercer dans d'autres champs d'activités, comme l'assurance-chômage où, sur le dos des sans-emploi, le gouvernement encaisse de l'argent par milliards de dollars. Il faut aussi se rappeler la fameuse grève du rail.

[Traduction]

M. Pat Martin: Monsieur le président, l'article 9 du projet de loi est celui qui, plus que tout autre, a attiré l'attention de tout le monde. Les députés de notre parti s'accordent pour dire qu'il faut modifier cet article afin de rendre la mesure législative équitable, pour ne pas lier les mains de l'arbitre et pour pouvoir en arriver à un règlement susceptible de fournir une solution durable pour assainir le climat des relations de travail en ruines à la Société canadienne des postes.

Nous avons proposé des amendements au projet de loi qui, croyons-nous, répondraient quand même aux objectifs du gouvernement tels que proposés dans ce libellé, mais en retireraient certaines dispositions qui nous paraissent trop sectaires ou inéquitables.

Nous sommes convaincus que l'arbitre, s'il était lié par le projet de loi dans son libellé actuel, n'aurait vraiment aucun choix en rendant sa décision. Il n'aurait pas la possibilité de prendre en considération tous les facteurs normaux par lesquels un arbitre devrait être lié, parce que certaines de ces dispositions imposeraient un résultat préétabli au travail de l'arbitre.

Par exemple, nous rejetons tout particulièrement la disposition proposée à l'alinéa 9(a)i) par laquelle la Société canadienne des postes serait tenue d'obtenir des résultats financiers acceptables pour une entreprise commerciale.

À première vue, cela semble être une disposition assez inoffensive. Or elle représenterait un énorme changement de politique pour la Société canadienne des postes quant aux obligations qu'elle aurait maintenant. Tout d'abord, elle est trop vague parce qu'elle ne précise pas la comparaison à faire pour établir ce qui est acceptable pour une entreprise commerciale. Deuxièmement, la société d'État serait tenue pour toujours de mener ses activités de façon différente.

Nous sommes d'avis que si le gouvernement veut modifier le mandat de la Société canadienne des postes ou la Loi sur la Société canadienne des postes, il devrait le faire directement, en proposant des modifications à la Loi sur la Société canadienne des postes, au lieu de procéder de façon détournée, au moyen d'une loi de retour au travail.

Le projet de loi va bien plus loin que ce qui est nécessaire pour ordonner le retour au travail des employés ou pour régler les négociations. En fait, il ressemble à une liste de souhaits visant la Société canadienne des postes.

L'amendement que nous proposons tiendrait compte de toutes les préoccupations légitimes des auteurs de la disposition originale, mais d'une manière beaucoup plus équitable.

Nous pensons que le véritable objectif, en l'occurrence, c'est que le médiateur-arbitre s'inspire de la nécessité d'avoir des conditions de travail compatibles avec la Loi sur la Société canadienne des postes et la viabilité et la stabilité financière de la Société canadienne des postes, compte tenu de la nécessité pour celle-ci, sans recours à des hausses indues de tarifs postaux, d'être efficace, d'accroître sa productivité et de respecter des normes de service acceptables.

Cela résume bien ce que devraient être les buts et objectifs d'une organisation bien administrée et assujettie aux paramètres de l'actuelle Loi sur la Société canadienne des postes.

 

. 1735 + -

Nous espérons que les autres partis comprendront qu'en appuyant cet amendement, ils rendront tout le système plus juste et équitable tout en évitant que l'arbitre ne soit lié par une décision préconçue avant même d'avoir pu examiner les problèmes.

[Français]

M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, c'est toujours un plaisir de parler sous votre supervision.

Je voudrais dire que cet amendement est extrêmement important, parce que si nous adoptions le statu quo, c'est une référence platement et bêtement néo-libérale, où on parle d'efficacité un peu vide, sans faire référence. Croyez-le ou non, initialement, on avait l'audace, je dirais, de nous proposer un libellé qui ne dit même pas—et je vois que le leader parlementaire opine du bonnet—que c'est un service public.

Ce dont on discute aujourd'hui et ce que l'amendement nous invite à réaliser c'est, bien sûr, qu'on peut être un syndiqué et croire à la productivité. On peut être un syndiqué efficace, on peut être un syndiqué qui croit que, pour que ça se passe bien dans un milieu de travail, il faut qu'il y ait de saines relations de travail.

Ça n'existe pas en l'air, la productivité. La productivité, ça s'inscrit en conjonction avec la motivation au travail. Et pour qu'il y ait de la motivation au travail, il faut qu'on se sente respecté. Et pour qu'on se sente respecté, il faut que les conditions de travail dans lesquelles on évolue au quotidien fassent l'objet d'une négociation.

Cet amendement-ci—proposé à la fois par le Bloc et par le NPD, et j'ai bon espoir que d'autres puissent s'y rallier—dit très clairement que, pour que cette productivité soit atteinte, il faut qu'il y ait de saines relations de travail. Les relations de travail, c'est quelque chose qui peut être une référence admise. On dit que la façon dont le médiateur-arbitre aura à rendre des décisions, aura à rapprocher les partis devra être un objectif clair. Et il est important que nous ayons le courage, en tant que parlementaires, de le dire et de le réaffirmer. C'est ce que l'amendement nous invite à faire.

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le Président, je serai bref. Je veux ajouter un mot sur cet amendement que proposent les néo-démocrates en collaboration avec le Bloc québécois. Nous suggérons cet amendement à la suite de rencontres avec les négociateurs de la partie syndicale qui craignent de voir le libellé actuel du projet de loi.

C'est les renvoyer à la notion de société privée, à la notion de business, alors que le fondement même de l'existence de la Société des postes repose sur un service à la population qui doit être vu dans un cadre de service très personnalisé et un service direct, le plus approprié, et avec une complicité nécessaire de ceux qui travaillent à l'intérieur de cette Société des postes.

J'ai reçu un téléphone à mon bureau, après ma première intervention tout à l'heure, d'un travailleur des postes d'Edmonton. Il voulait remercier le Bloc québécois de le défendre. Son prénom est Ron. Il me disait: «J'ai voté libéral la dernière fois, mais je me demande comment ces représentants, par rapport aux discours qu'ils avaient, peuvent maintenant présenter ce projet de loi qui va dans le même sens que la négociation a eu lieu.» C'est-à-dire que les négociations ont été biaisées dès le début.

Là, on dépose un projet de loi, sous prétexte de rétablir un service public, mais on biaise déjà le rôle qu'aura le médiateur en le désignant soi-même plutôt que de le faire après consultation et, deuxièmement, en lui donnant un mandat à l'article 9 qui est en contradiction avec la vocation même de la Société des postes. Dans ce sens, cet amendement doit être absolument accepté par l'ensemble des partis pour rendre justice à ceux qui travaillent à l'intérieur, mais aussi pour qu'on aille dans le sens que doit exister la Société des postes.

[Traduction]

L'hon. Lawrence MacAulay (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le président, j'appuie cet amendement. Conformément au libellé proposé, l'article 9 obligera l'arbitre à s'inspirer de la viabilité et de la stabilité financière de la société.

 

. 1740 + -

N'oublions pas que les actionnaires de la société sont le gouvernement du Canada et, en fin de compte, l'ensemble des Canadiens. Le gouvernement a donné des instructions à la Société canadienne des postes. Conformément à ces instructions, la société doit réaliser certains bénéfices. C'est essentiel pour assurer la coopération, la viabilité et la stabilité.

Dans l'exercice de son mandat, l'arbitre devra s'inspirer des instructions concernant la réalisation de bénéfices. De plus, il devra veiller à ce que les relations patronales-syndicales soient équilibrées.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, je suis très heureux de voir que le gouvernement a décidé, finalement, d'écouter l'argument présenté sur l'article 9. J'avais dit au préalable que c'était un article très important.

Cet amendement va permettre aux règles du jeu de demeurer les mêmes à la Société des postes pendant la prochaine ronde de négociations, pendant la ronde de négociations qui résultera de la loi spéciale. De cette façon, on aura peut-être réparé une petite partie de ce qui n'a pas été fait correctement pendant cette négociation.

Il faut se féliciter d'avoir obtenu ce genre d'unanimité. Je souhaite profondément que tout de suite, ici, en comité, on puisse adopter cet amendement et qu'on obtienne l'appui du Parti réformiste et des conservateurs sur cet amendement. Il faut qu'on puisse montrer très bien qu'il y a unanimité de la Chambre sur le fait que ce n'est pas vrai qu'on changera le régime de travail et la finalité de la Société des postes par une loi spéciale. La loi spéciale vise à régler un problème de relations de travail, elle ne vise pas à régler les problèmes de la Société des postes.

Il faut respecter les règles du jeu actuelles. J'en appelle aux réformistes et aux conservateurs d'accepter ce genre d'amendement et d'avoir le même esprit que celui du gouvernement à ce sujet.

[Traduction]

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le président, je veux être certain que l'on comprend bien ce que signifie cette proposition d'amendement.

Tout d'abord, je comprends que le syndicat—comme l'a confirmé le député bloquiste qui vient de parler—a demandé au NPD et au Bloc québécois de proposer cet amendement parce qu'il a peur. Je l'ai dit à maintes reprises. Le syndicat a peur que le gouvernement ait secrètement l'intention de privatiser la Société canadienne des postes. Je répète que nous voulons pas du tout privatiser les postes. En français, en anglais et en italien, c'est non. J'espère que c'est clair.

S'il faut adopter cet amendement pour rassurer tout le monde, je suis prêt à adopter la même position que le ministre du Travail.

Je dirai également que l'amendement ajoute des mots. Ils ont réuni certains mots et ont ajouté «compatibles avec la Loi sur la Société canadienne des postes», ce qui est tout à fait acceptable, «et la viabilité et la stabilité financière de la Société canadienne des postes, compte tenu de...» et le reste.

Comme mon anglais n'est peut-être pas bon, je lis en français:

[Français] <«La Société canadienne des postes: la viabilité et la stabilité financière de la Société canadienne des postes».

[Traduction]

Pour moi, stabilité et viabilité financière signifie que l'entreprise, qu'elle soit ou pas une société d'État, doit réaliser des profits. Il y a de beaux jours et il y en a aussi de moins beaux. Lorsqu'une entreprise ne réalise pas de profits, elle doit puiser dans les profits réalisés l'année d'avant pour garantir le maintien de ses services.

Nous voulons que la Société canadienne des postes existe encore pendant des années. Elle fut la première institution du Canada. Nous voulons qu'elle existe encore très longtemps. Nous croyons que les Canadiens devraient recevoir leur courrier où qu'ils habitent au Canada. Ils doivent avoir un service universel, qui coûte la même chose peu importe où ils habitent.

J'appuierai cet amendement, cependant, la stabilité financière et la viabilité signifie que Postes Canada doit réaliser des profits. C'est ce que le gouvernement a fait et lui a donné le mandat de faire. Nous avons dit très clairement à la Société canadienne des postes qu'elle devait geler le prix des timbres pour deux ans, puis, après deux, qu'elle pouvait les hausser, mais en deça de l'inflation. Nous lui avons demandé de ne plus fermer de bureaux de poste ruraux.

 

. 1745 + -

Nous croyons que les Canadiens des localités rurales ont droit à un service postal. C'est la seule identité canadienne dans ces localités et nous y tenons. Pour maintenir le service, nous voulons des améliorations. Les députés ne savent peut-être pas, par exemple, que le courrier était d'abord trié dans une grande ville avant d'être livré dans une petite ville. Nous avons changé cela. Maintenant, le courrier local est trié localement et non dans la grande ville.

La Société canadienne des postes apporte des améliorations à son fonctionnement, car elle et nous croyons dans le service. J'espère qu'avec cet amendement qu'accepte le gouvernement, le syndicat, le NPD et le Bloc comprendront qu'il n'est pas question de privatisation. Je l'ai dit clairement. Le gouvernement l'a dit clairement. Et mes prédécesseurs l'ont dit très clairement. J'espère qu'avec cela, c'est clair. Mais il est aussi clair que la Société canadienne des postes doit être une société viable et stable pour servir les Canadiens. C'est pour cela qu'elle doit réaliser des profits.

[Français]

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le président, je veux tout simplement dire qu'à entendre le ministre parler comme il vient de le faire, il vient de confirmer à peu près ce que j'ai dit au début de ma première intervention, c'est-à-dire qu'il se prend pour le président de la Société canadienne des postes.

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le président, je ne veux pas étirer le débat sur cette question, mais je veux seulement préciser une chose. Ce n'est pas un vote qui a été accepté par le Bloc québécois parce que les syndicats l'ont demandé, c'est un amendement qui est proposé. Le gouvernement le reconnaît en votant en faveur de l'amendement, parce que si c'était juste une position syndicale, il serait contre. Donc, il le reconnaît.

Il faut retrouver les deux composantes de l'amendement pour bien voir que le gouvernement n'avait pas prévu dans son projet de loi cet amendement. S'il n'y avait pas eu une proposition du NPD et notre appui pour l'expliquer, je pense que le gouvernement n'en serait pas venu au résultat de l'accepter, et je le félicite aujourd'hui de l'accepter. Mais il faut quand même se rappeler qu'il y a deux éléments. On dit que la négociation doit se faire en fonction de la Loi sur la Société canadienne des postes, la nécessité d'être efficace, d'accroître sa productivité, de respecter ses normes, mais aussi l'importance de bonnes relations patronales-syndicales entre la Société canadienne des postes et le syndicat.

Là-dedans, ce n'est pas juste une question de syndicat, ce n'est pas juste une question de patron. Depuis quelques années, à la Société des postes, des gens ont essayé de créer de nouvelles relations de travail. Il y a eu des expériences en vertu d'une annexe de la convention pour qu'il y ait la livraison motorisée du courrier et, à répétition, le syndicat des postiers a demandé que ces choses-là soient mises en place.

Je dis, comme le ministre, qu'on a réussi à sauver les bureaux de poste ruraux en mettant de côté la politique de fermeture sauvage que les conservateurs avaient mise en place pour les bureaux de poste ruraux. Mais cela veut dire que dans la loi sur laquelle nous allons voter aujourd'hui, c'est tout à fait normal que la négociation se fasse en fonction de la Loi sur la Société canadienne des postes et non en fonction des règles du marché pur. Je pense qu'il y a là une victoire, non seulement pour les syndiqués ou le syndicat, mais aussi pour l'employeur et pour l'ensemble des Québécois et des Canadiens, et avec cela on aura une société des postes qui, après le résultat des négociations, aura de plus en plus, je le souhaite, un climat favorable.

[Traduction]

M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Monsieur le président, je tiens à dire quelques mots au sujet de cet amendement.

Je tiens à bien marquer les propos de mon collègue, le ministre chargé de la Société canadienne des postes. Il a dit qu'il s'agit ici de bien préciser que le but et le rôle fondamentaux de la Société canadienne des postes sont de servir les Canadiens en leur offrant un service postal de première classe, et non d'être la vache à lait du gouvernement fédéral. Le but n'est pas de faire de l'argent avec cette entreprise pour aider d'une façon ou d'une autre le gouvernement.

Nous appuyons évidemment ce principe et nous reconnaissons le travail qu'ont accompli les députés du Bloc et les députés du Nouveau Parti démocratique en collaboration avec le gouvernement et le ministre et nous reconnaissons le fait que le ministre a constaté l'opportunité de cet amendement. Nous sommes heureux que tous aient collaboré pour rendre ce projet de loi plus acceptable pour tous les intéressés.

 

. 1750 + -

Toutefois, nous ne saurions trop insister sur le fait que la société des postes existe pour servir les Canadiens et non pour faire de l'argent. Le problème fondamental de la société des postes remonte au temps de Mulroney, lorsque ce principe a été avancé et que l'ordre a été donné de faire de l'argent avec la société des postes. Depuis que ce mandat a été fixé, les principaux problèmes ont commencé à se manifester. Et je sais que mon collègue, le ministre, serait d'accord avec moi là-dessus.

J'ose croire que cet important amendement à un projet de loi crucial permettra de repenser des priorités en matière de service et de profit.

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le président, j'aimerais ajouter quelques mots pour étayer les propos de mon collègue au Cabinet, le ministre responsable de la Société canadienne des postes.

Je viens d'entendre quelqu'un de l'autre côté prononcer des paroles qui n'ont rien à voir avec la réalité. D'abord, l'amendement dont nous sommes saisis parle de la viabilité financière de la Société canadienne des postes. Il porte sur des principes comme la productivité, l'efficacité du fonctionnement, etc. Cela pourrait s'appliquer à n'importe quelle société. Mon collègue a déclaré très clairement que le gouvernement, lorsqu'il parle de stabilité financière et de viabilité, entend que la Société canadienne des postes doit fonctionner d'une manière conforme à ce qui se passe dans les entreprises semblables des secteurs public et privé. Elle doit fonctionner de cette façon.

Voyons un peu la réalité. Il y a sept ans, la Société canadienne des postes ne se trouvait pas dans un milieu concurrentiel comme celui d'aujourd'hui, non pas parce que nous avons changé quoi que ce soit, mais plutôt parce que la société en général a changé. Les télécopieurs, les appareils de télécommunication, le réseau Internet, le transfert électronique de données et d'informations financières et le reste, font partie de notre quotidien. Nous devons donc garder cela à l'esprit.

En outre, la Société canadienne des postes doit être suffisamment souple pour survivre dans un tel contexte concurrentiel. Si elle ne l'est pas, elle perdra des clients au profit d'autres entreprises. De toute évidence elle doit fonctionner de cette façon. Bien entendu, la perte de clients signifie la perte d'emplois et personne ne souhaite cela.

Pour atteindre tous ces objectifs, toute société doit maintenir un rendement financier raisonnable. J'ai entendu un collègue d'en face traiter la Société canadienne des postes de vache à lait alors que son rendement sur capitaux propres s'élève à un peu moins de 2 p. 100 je crois. C'est ça, une vache à lait? Mes collègues plus instruits en comptabilité diraient que toute entreprise dont le rendement sur les capitaux propres est inférieur à 10 p. 100 n'est pas très rentable. De toute évidence, celle dont le rendement se limite à 2 p. 100 n'est certainement pas une vache à lait, pas d'un point de vue objectif et pas à mes yeux. En outre, dans l'exécution de ses tâches, l'arbitre devra se fier aux lignes directrices du gouvernement pour que la société soit rentable.

Je suis convaincu que tous mes collègues, comme moi, espèrent que la Société canadienne des postes fonctionnera de façon rentable afin de pouvoir continuer pendant longtemps à fournir des services précieux aux Canadiens.

Le vice-président: Le comité est-il prêt à se prononcer sur l'amendement à l'article 9 proposé par le député de Winnipeg-Centre?

L'amendement est-il adopté?

Des voix: D'accord.

(L'amendement est adopté.)

Le vice-président: L'amendement est adopté, mais l'article sera...

Une voix: Pas nécessairement.  

Le vice-président: Non, parce qu'il y avait deux amendements. Le premier a été rejeté. Comme l'article modifié n'a pas été adopté, le vote est reporté, conformément à l'ordre. Le vote sur l'article 9 tel que modifié est donc reporté conformément à l'ordre.

 

. 1755 + -

[Français]

M. Paul Crête: Monsieur le Président, je veux juste que le recours au Règlement soit bien clair. Ce qui sera soumis au vote plus tard, c'est la proposition telle qu'amendée par l'amendement accepté par tous les partis. Le précédent amendement, celui du Parti réformiste, sera voté, mais ce qui sera soumis au vote, c'est la loi telle qu'amendée en fonction de l'amendement accepté et en tenant compte de l'amendement du Parti réformiste.

[Traduction]

Le vice-président: C'est exact. Certainement.

M. Jim Gouk (West Kootenay—Okanagan, Réf.): Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Si je comprends bien, ce qui va arriver c'est que l'on va d'abord se prononcer sur l'amendement proposé par le Parti réformiste, puis sur l'article modifié comme il l'est maintenant ou modifié en fonction de l'amendement proposé par le Parti réformiste, puisqu'il est assujetti à un deuxième amendement.

Le vice-président: Mes chers collègues, nous passons à l'article suivant. Cet article sera mis aux voix tel que modifié. Le vote portera sur l'amendement proposé par le Parti réformiste. Si ce dernier est adopté, alors on se prononcera sur l'article, mais l'article sera mis aux voix tel que modifié. Si c'est clair, nous passons à l'article 10.

(Les articles 10 et 11 sont adoptés.)

Le vice-président: Il y a quatre amendements à l'article 12. Nous commencerons par l'amendement à l'article 12 inscrit au nom du député de Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques.

[Français]

(Sur l'article 12)

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ) propose:  

Motion no 4

    Que le projet de loi C-24, à l'article 12, soit modifié par substitution aux lignes 29 à 35, page 5, de ce qui suit:

    «12. La convention collective est également réputée modifiée par la majoration des taux de salaire énumérés à son annexe A, applicables le 1er février 1997, de 1,5 p. 100 à compter du 1er août 1997, de 1,75 p. 100 supplémentaire à compter du 1er août 1998 et de 2 p. 100 supplémentaires à compter du 1er août 1999.»

—Monsieur le Président, notre amendement vise tout simplement à s'assurer que ce qu'il y aura dans la loi, ce soit la meilleure offre qui ait été faite à la table par la partie patronale au moment où les négociations ont cessé. Par exemple, cela veut dire qu'au lieu d'avoir, au 1er février 1998, l'augmentation de 1,5 p. 100, elle soit applicable au 1er février 1997, qu'au lieu du 1er février 1999, l'augmentation de 1,75 p. 100 soit applicable au 1er août 1998, et qu'au lieu du 1er février 2000, le 2 p. 100 soit applicable au 1er août 1999.

Autrement dit, il s'agit de s'assurer que les pourcentages d'augmentation de salaire qui feront partie de la loi spéciale soient ceux que la partie patronale était prête à offrir à la partie syndicale. Dans la proposition actuelle du gouvernement, il y a eu comme un retour sur la proposition à des montants inférieurs, ce qui nous apparaît assez inacceptable et qui ne fait pas preuve d'une volonté d'instaurer un bon climat de relations de travail. Il faut comprendre les gens dans ce secteur. Toutes les offres dont on parle sont en bas ou à égalité de l'inflation, et, de ce côté, je pense qu'il y avait un certain rattrapage à faire.

Nous pensons que si la partie patronale a jugé bon de le déposer à la table de négociations, au moment où on en est rendus, il devrait être considéré. De plus, l'amendement du NPD qui suit, si notre amendement est accepté, viendra le compléter de façon à ce qu'on s'assure que les conditions de travail au niveau salarial qui en résulteront seront les meilleures qui puissent être négociées avec le consentement des deux parties.

[Traduction]

M. Jim Gouk (West Kootenay—Okanagan, Réf.): Monsieur le président, deux choses très brèves.

D'abord, j'ai un peu de mal à comprendre pourquoi, en changeant les dates de mise en oeuvre, on remonte plusieurs mois avant l'expiration du contrat. Je dois dire que cela me trouble quelque peu. Mais c'est sans conséquence de notre point de vue, étant donné que nous nous opposons à l'imposition d'un règlement par voie législative lorsque l'on place un arbitre.

 

. 1800 + -

Ce que l'on dit à l'arbitre c'est de laisser les gens négocier, les laisser régler leur différend dans toute la mesure du possible. S'ils ne peuvent pas y arriver, alors l'arbitre a le pouvoir d'imposer un règlement. Si le gouvernement ne fait pas confiance à son arbitre, il est mieux de faire un choix différent.

Tout d'abord, s'il y a un arbitre cela ne leur permet pas de continuer leurs négociations sur l'importante question des salaires. Deuxièmement, s'ils ne peuvent parvenir à une décision, ce ne devrait pas être au gouvernement de décider à la place d'une société qu'il possède, pas plus que le syndicat ne devrait être capable de décider quelle augmentation il veut sans que la compagnie ne puisse répondre. Si on ne peut régler la question par la négociation, il faut procéder par arbitrage. C'est la raison pour laquelle nous sommes opposés à cette motion.

M. Pat Martin: Monsieur le président, je vais être bref, car l'amendement dont nous parlerons ensuite et qui a été présenté par le NPD, est très similaire.

Il est facile pour nous d'être d'accord avec le principe du dernier amendement présenté par le député du Bloc québécois. Nous aussi, nous estimons que le moins que l'on puisse offrir aux travailleurs est ce qui était dans la dernière offre de Postes Canada et était sur la table de négociation au moment de la rupture.

J'ajouterais, et vous le verrez au prochain amendement, que même si nous estimons que l'analyse du Bloc québécois est correcte, nous pensons que cette dernière offre devrait être le plancher, mais pas nécessairement le plafond. Nous pourrions presque fusionner ces deux résolutions. Nous devrions fusionner l'idée du Parti réformiste et celle du Bloc.

L'arbitre serait alors libre de choisir entre la dernière offre de Postes Canada et la dernière position du syndicat. Cela donnerait une plage pour choisir. Cela donnerait à l'arbitre une marge de manoeuvre. Nous estimons que ce serait la meilleure façon de résoudre cette question.

Le vice-président: Chers collègues, je sais que le rôle de la présidence consiste simplement à faciliter le débat. Il reste encore un bon nombre d'amendements à étudier.

Le débat prendra fin dans 27 minutes. Je prierais instamment les députés d'être brefs et d'aller droit au but afin que l'on puisse les passer tous en revue.

Le député de Richelieu a la parole.

[Français]

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le président, vous conviendrez cependant que certains amendements apparaissent beaucoup plus primordiaux que d'autres, et celui-ci, vu qu'il touche aux salaires, il m'apparaît important qu'on en parle suffisamment, sans exagération bien sûr.

Je siège en cette Chambre depuis 13 ans et je suis surpris qu'on dépose un projet de loi spécial et qu'on inclut des conditions salariales inférieures à ce qui a été proposé par la partie patronale, la Société des Postes, au cours de la négociation. C'est là que le bât blesse. C'est inacceptable qu'on ait pu faire un tel geste, et je suis surpris de voir mes confrères libéraux, que ce soit le député Charbonneau, le député St-Julien, le député Coderre—nous avons le droit de nommer des députés par leur nom puisque nous sommes en comité plénier—de les voir silencieux où ils s'abstiennent de voter ou d'intervenir pour pouvoir soutenir dans leur propre comté leurs postiers, leurs facteurs et leur dire: «Oui, la société de la Couronne a proposé quelque chose.» C'était un minimum et ce minimum, en déposant le projet de loi, le gouvernement leur retire, leur en enlève.

Quand le ministre Gagliano disait tout à l'heure qu'il agit en toute objectivité, il vient de faire un discours comme s'il était le président de la Société des Postes et il se comporte plus durement que le président de la Société des Postes en offrant moins.

C'est pour cela que cet amendement, associé à celui du NPD, rendrait justice aux travailleurs et irait quand même dans le sens du dépôt que la Société des Postes a fait lors des négociations. Il ne faut quand même pas que ce gouvernement coupe davantage après avoir maquillé cette négociation.

 

. 1805 + -

M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Monsieur le Président, si on met de côté la démagogie du député de Richelieu et qu'on regarde un petit peu les faits, on se rend compte d'une chose. Dans un premier temps, c'est un projet de loi gouvernemental, et ça doit être basé sur des lignes directrices du président du Conseil du Trésor. Or, on ne peut pas augmenter...

M. Louis Plamondon: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je soumets ceci à votre attention: Est-ce que le mot «démagogie» est parlementaire? On m'a dit que j'étais démagogique parce que je prenais pour les postiers.

[Traduction]

Le vice-président: La présidence demanderait à tous les députés de ne pas faire exprès pour élever la température du débat.

Le député de Bourassa a la parole.

[Français]

M. Denis Coderre: Monsieur le Président, quand il y aura nébulosité croissante, on parlera de météo. Chose certaine, monsieur le Président, une chose est claire, c'est que peu importe qu'on soit froissé ou pas des propos, quand on regarde les faits on ne peut pas être froissé, et les faits sont les suivants. Lorsqu'on fait une loi gouvernementale qui est basée sur des règles du Conseil du Trésor, on ne peut pas donner plus que ce qu'on négocie nous-mêmes en tant que gouvernement. Ça, c'est le premier point.

Le deuxième point est que je ferai remarquer qu'on a offert les 2 p. 100 au syndicat dans une offre de règlement, ce qui a été rejeté. Alors je pense qu'on doit prendre ça en considération.

Maintenant, ce qui est le plus important pour nous, c'est qu'on puisse adopter cette loi au plus coûtant parce que les entreprises perdent 54 millions par jour au Québec. De plus, les organismes de charité attendent des millions de dollars par la poste. Alors si on enlève la cassette des unions qu'on entend continuellement du côté du Bloc et qu'on regarde les choses très clairement et à tête reposée, je pense qu'on doit non seulement rejeter cet amendement mais passer à l'étude des prochains articles.

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, j'essaierai d'être assez bref parce que, comme vous le dites, on a plusieurs amendements à étudier avant 18 h 30.

Cet après-midi, on parlait de certaines personnes qui avaient de l'expérience en négociation. Je peux vous dire que de la négociation j'en ai fait depuis 1979. Puis chaque fois qu'on retournait à la table après être arrivé à un but où on pouvait avoir une convention collective et que des salaires avaient été proposés par l'employeur, cela allait. Mais le jour où on s'est retourné puis qu'ils nous en ont enlevé, c'était plus souvent lors d'une négociation de mauvaise foi.

Alors quand un gouvernement renvoie la négociation à un arbitre sans nous donner la confiance de nous amener une convention collective pour nos postiers, je trouve qu'il manque le bateau. Et encore une fois il dit qu'il n'est pas impliqué dans la négociation. Il montre avec cette motion qu'il est impliqué dans les négociations et qu'il ne veut pas que Postes Canada donne quelque chose à ses travailleurs.

[Traduction]

M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.): Monsieur le président, ça m'étonne que les bloquistes présentent une motion en faveur d'un règlement par voie législative, à tout le moins en ce qui concerne l'aspect pécuniaire. On s'attendait, bien sûr, à ce qu'ils recommandent un règlement négocié et je n'y trouve rien à redire.

Si on en est au point où il nous faut avoir recours à la loi pour forcer un organisme à retourner au travail et pour nommer un arbitre, on devrait ensuite faire en sorte que l'arbitre ait les coudées franches pour prendre les décisions qui s'imposent.

J'estime que l'on a tort de parler de dollars et de cents dans le projet de loi. C'est comme si on mettait les menottes à l'arbitre.

[Français]

M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, je suis obligé de demander au député de Bourassa de garder quand même la tête froide et d'être un peu serein dans les débats qu'on a aujourd'hui parce que, ce que nous avons dit, je crois que le député conviendra que c'est quelque chose de très raisonnable, et je sais qu'il peut être raisonnable quand il le veut. Il faut le prendre au bon moment.

La réalité est celle-ci: est-ce qu'il va convenir qu'il y a quand même une contradiction innommable dans le fait de vouloir cristalliser dans un projet de loi une offre qui est inférieure à ce que la Société canadienne des postes, qui doit librement conduire les négociations, était elle-même prête à offrir.

Est-ce que le député peut convenir qu'il y a quelque chose d'aberrant et que dans le fond de tout ça—et je crois que les ministériels devraient se lever en cette Chambre et le reconnaître—nous sommes dans une orientation où ce qui prime n'est pas la qualité de vie au travail, n'est pas le service public, mais c'est l'impératif de recueillir 200 millions de dollars. C'est la ligne directrice, le leitmotiv. C'est ce qui caractérise et a toujours caractérisé l'esprit des négociations.

Je crois que nous devons nous faire des porte-voix avisés et autorisés et reconnaître qu'il y a une erreur inacceptable.

 

. 1810 + -

De quel droit le député de Bourassa, le ministre des Travaux publics, le ministre responsable du Code du travail peuvent-ils s'arroger le droit de dire qu'ils vont parler, et qu'ils vont parler moins en faveur des travailleurs, qu'ils vont faire une offre en deçà de ce que la Société canadienne des postes était prête à offrir? Cela obéit à quel principe de générosité?

Je termine en disant que nous devons arrêter tous ceux qui sont platement circonscrits et arrêtés dans une logique limitée de Conseil du Trésor.

[Traduction]

L'hon. Lawrence MacAulay (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le président, on est en négociation depuis le mois d'avril. Il est clair que les parties n'auraient jamais pu s'entendre sur la question salariale. Les nouveaux taux de salaire que prévoit la mesure législative correspondent aux montants fixés par convention collective au Canada et se comparent avantageusement aux taux qui sont actuellement en vigueur ailleurs dans la fonction publique. Le fait est que ces taux sont même légèrement supérieurs à ceux applicables pour le troisième trimestre de 1997. C'est une solution juste pour le STTP et pour la société des postes. Et c'est pourquoi on a majoré les taux de la sorte.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, je veux seulement dire une chose que je trouve très importante présentement et qui me marque de façon significative.

Le député qui vient d'intervenir, c'est le ministre du Travail. C'est quelqu'un qui devrait, dans ce débat, avoir une attitude très neutre. Son objectif premier, c'est que les relations de travail fonctionnent bien. Son objectif, ce n'est pas de vendre une offre patronale.

Je pense qu'il devrait y réfléchir sérieusement.

[Traduction]

M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Monsieur le président, j'ai écouté les observations du ministre du Travail et je me sens obligé de dire que lorsqu'il s'agit de négociation collective, il est juste de dire que la négociation collective sous responsabilité fédérale a été une catastrophe complète au cours des dernières années.

Le ministre du Travail devrait se lever et présenter des excuses aux dizaines de milliers d'employés qu'il a mis à la porte ces derniers temps. C'est vraiment incroyable qu'on prétende que cette entente reflète le processus de négociation collective au Canada après avoir obtenu un si mauvais bilan.

Cependant, cela dit, je dois être d'accord avec notre collègue bloquiste qui vient de dire que s'il nous faut imposer un règlement, nous devrions au moins imposer celui que la Société canadienne des postes avait proposé au départ. Aller en-dessous de cela, c'est faire un pas de plus pour humilier les gens qui travaillent pour le gouvernement fédéral, que ce soit directement ou dans des sociétés d'État.

Cela montre le mépris que le ministre du Travail a pour les travailleurs du pays.

M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le président, je serai très bref. Je voulais profiter de l'occasion de cet amendement pour appuyer les observations de ma collègue de Winnipeg-Centre-Nord et d'autres collègues, ainsi que la motion de mes collègues du Bloc.

Lorsqu'on examine tout l'historique des relations entre la Société canadienne des postes et ses employés, on s'aperçoit qu'à bien des égards, cette relation a été empoisonnée par l'ingérence absolument intolérable du gouvernement dans le processus de négociation collective.

On a qu'à penser, par exemple, à l'engagement copain-copain que le ministre de Montréal a pris à l'égard de la Société canadienne du marketing direct, à qui il a dit de ne pas s'inquiéter, qu'on allait renvoyer les postiers au travail de toute façon.

Comment peut-il y avoir alors des négociations de bonne foi? Comment peut-il y avoir des négociations sérieuses dans ces circonstances lorsque l'employeur sait fort bien qu'il lui suffit de tenir le coup et qu'en fin de compte, les employés seront forcés de retourner au travail.

Ce qui est inadmissible dans ce projet de loi, c'est que non seulement on les force à reprendre le travail, non seulement on foule aux pieds à tout le processus de négociation collective, mais on leur impose des conditions de travail qui sont même inférieures à ce que l'employeur était prêt à leur offrir au début du processus de négociation collective.

Je veux simplement souligner notre préoccupation. Nous nous prononçons contre cette mesure non seulement parce qu'elle représente une ingérence dans le processus de négociation collective, ce qui est déjà assez répréhensible, mais également parce qu'elle reflète un mépris total à l'égard des hommes et des femmes loyaux et laborieux qui travaillent maintenant pour la Société canadienne des postes.

 

. 1815 + -

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Le vote porte sur la motion no 4.

La motion est-elle adoptée?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Conformément à l'ordre adopté aujourd'hui, le vote est reporté.  

Nous passons au deuxième amendement à l'article 12.

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD) propose:

    Que le projet de loi C-24, à l'article 12, soit modifié par substitution aux lignes 29 à 35, page 5, de ce qui suit:

    «12. La convention collective est également réputée modifiée par la majoration des taux de salaire des montants que le médiateur-arbitre établira, pourvu que ces montants ne soient pas inférieurs à la plus récente offre de la Société canadienne des postes ou supérieurs à la plus récente proposition du syndicat.»

—Monsieur le président, cet amendement est tellement semblable, en substance, à celui du Bloc québécois qu'il ne mérite vraiment pas une discussion approfondie. Le seul élément qui le différencie de l'amendement original du Bloc, c'est que nous proposons que le règlement imposé par l'arbitre ne soit pas inférieur à la plus récente offre de Postes Canada ou supérieur à la plus récente demande du syndicat.

L'arbitre aurait ainsi une plage pour faire son choix. Nous sommes d'avis qu'il est conforme au rôle d'un arbitre d'avoir une certaine latitude, d'être en mesure de tenir compte des conditions du marché et de la rentabilité d'une société pour arriver à un compromis entre la dernière offre de cette société et la dernière augmentation salariale demandée par les employés.

Nous espérons que les députés bloquistes jugeront bon d'appuyer notre amendement. De même, d'autres députés devraient voir le principe d'équité qui en est la base.

Le député de Burnaby—Douglas qui m'a précédé a demandé, vu que cette offre est si légèrement inférieure à la dernière qui est restée sur la table, si l'on ne faisait pas cela par pure malice, par moquerie ou dans le but d'humilier davantage les employés. L'idée serait de frapper celui qui est déjà par terre. C'est l'unique raison que l'on puisse imaginer pour justifier une offre qui, pour la troisième année, est de un dixième pour cent inférieure à la dernière offre de la Société canadienne des postes. À notre avis, la correction devrait être automatiquement apportée, simplement de bonne foi. Cela ne représente que quelques cents.

L'essentiel ici, c'est que la date d'entrée en application de l'augmentation salariale est avancée de six mois. Un montant considérable est en cause. Selon les calculs de Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, ce montant s'élève à huit millions de dollars par an. Sur trois ans, il se situerait donc entre 25 et 27 millions de dollars. Des salaires moins élevés seraient donc versés aux employés pendant la durée de la convention collective.

C'est énorme. On tire avantage d'une mauvaise situation. Si l'employeur était disposé à affecter cet argent aux salaires quand les négociations ont été rompues, cette affectation est sûrement déjà prévue et l'argent est disponible. Le gouvernement récolte cet argent par suite de cette situation regrettable, il tire avantage d'une mauvaise situation.

Nous invitons les autres partis à appuyer l'amendement. Nous pensons qu'il calmera les inquiétudes de tous les partis qui siègent de ce côté-ci. Il répond à la préoccupation initiale des bloquistes, selon qui l'offre ne doit pas être inférieure à la dernière. Il est conforme à l'idée des réformistes qui veulent que le médiateur ait toute la latitude voulue pour fixer l'augmentation salariale. Nous avons réuni ces deux idées dans un seul amendement qui représenterait la position la plus équitable.

[Français]

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le Président, je serai très bref. J'appuie également l'intervention que vient de faire un des députés du NPD, qui va exactement dans le même sens que les propos que nous tenions sur le premier amendement que nous avons présenté sur l'article 12, c'est-à-dire respecter les offres qui avaient été faites aux travailleurs par la Société des postes.

Ils sont allés en grève à cause de leur insatisfaction à l'égard du comportement de la Société des postes pendant les négociations. Il y avait un minimum insuffisant. Le gouvernement arrive, dépose une loi spéciale et donne un coup de poignard dans le dos en plus aux travailleurs et travailleuses en leur enlevant le petit montant qui leur avait été accordé. Tous les députés libéraux restent silencieux devant une telle injustice, devant un tel comportement. Certains parmi eux sont d'ex-chefs syndicaux, comme le député d'Abitibi, M. St-Julien, qui nous disait aujourd'hui être allé visiter...

Une voix: Vous n'avez pas le droit d'utiliser le nom des députés.

M. Louis Plamondon: Oui, on a le droit de les nommer. Nous sommes en Comité plénier, monsieur St-Julien, je peux nommer votre nom.

 

. 1820 + -

On disait qu'il avait visité les grévistes et qu'il leur avait dit qu'il comprenait leurs problèmes. Il a dit: «J'ai consulté leur convention. Ils sont suffisamment, je pense, payés. Ils ont un bon salaire, de bonnes conditions. On peut leur donner un petit coup de poignard en votant avec le ministre sur une diminution des conditions offertes à la Société des postes.» C'est ce que j'ai de la difficulté à comprendre de députés comme M. St-Julien, M. Coderre et M. Charbonneau, qui sont des gens qui se disent sensibles aux préoccupations des citoyens.

Ces 24 millions de dollars qui étaient déjà acquis pour les postiers, on leur enlève. C'est de l'argent qui n'ira pas dans nos comtés et dans vos comtés parce que le facteur ou le postier, lorsqu'il reçoit sa paye, il la dépense dans la région. C'est donc de l'argent qu'on coupe à l'ensemble des régions du Canada et qu'on préfère laisser dormir dans les fonds accumulés de la Société canadienne des postes qui, je le disais tout à l'heure, fait un profit dépassant les 125 millions. Ce petit montant de 20 millions de dollars ne l'aidera en rien. Cette Société est déjà profitable et son rôle n'est pas de faire de l'argent, mais bien de distribuer le courrier correctement dans le respect des travailleurs et des travailleuses qui assument cette responsabilité à l'intérieur de la Société.

Alors, je fais appel, non pas à la générosité, mais au gros bon sens de l'ensemble des députés pour voter en faveur de l'amendement dont mon confrère du NPD a parlé, ainsi que mon confrère de Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, qui a parlé de premier rendement. Ces deux amendements sont très complémentaires et ils feraient en sorte que l'argent qui a été offert aux postiers et aux facteurs pendant la négociation soit le minimum dans le projet de loi. Je n'ai jamais vu, je le disais, en 13 ans un projet de loi qui allait être déposé pour forcer un retour au travail et contenir moins que ce à quoi les négociations avaient abouti en partie. Donc, je fais appel au bon sens de l'ensemble des députés de la Chambre pour qu'ils comprennent cette situation et qu'ils se joignent à l'amendement proposé par le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique.

[Traduction]

M. Jim Gouk (West Kootenay—Okanagan, Réf.): Monsieur le président, nous n'aimons pas l'amendement du Bloc québécois parce que, je le répète, c'est un règlement par voie législative. Dans le cas de l'amendement du NPD, il s'approche de la solution, mais c'est comme être assis sur une clôture, et on sait tous ce qui se passe si on a les jambes trop courtes. Nous pensons qu'il y a un problème. Cependant, c'est un pas dans la bonne direction et s'il faut choisir entre deux mauvaises solutions, la dernière est sûrement la meilleure.

Quand on a un arbitre, la meilleure façon de procéder est de ne pas dicter de conditions et de le laisser décider.

[Français]

M. Guy St-Julien (Abitibi, Lib.): Monsieur le président, j'ai très bien écouté le député du Bloc québécois. Il parle de coups de poignard. On a déjà vu des gens ici, comme des Lucien Bouchard, qui ont donné des coups de poignard. Ils sont rendus ailleurs aussi.

Je regarde le député d'en face qui vient d'arriver de la Floride, qui était absent durant la grève et qui vient nous dire qu'on ne fait rien ici au Parlement. Quand je vois le député Louis Plamondon, qui s'est promené en Floride et qui arrive ici bien bronzé, nous accuser de donner des coups de poignard dans le dos des grévistes, je tiens à lui dire qu'on s'est rendus sur les lignes de piquetage et ce que les gens veulent, chez nous actuellement—et j'ai vérifié cet après-midi ce que les gens d'Abitibi veulent—c'est que le service des postes reprenne. Les groupes communautaires veulent que cela reprenne. Les PME veulent que cela reprenne.

Mais nous, ce qu'on dit aussi aux travailleurs syndiqués en Abitibi—Témiscamingue, c'est qu'ils font du bon travail, qu'ils ont toujours bien travaillé. Je comprends qu'ils suivent les directives du bureau national ici à Ottawa ou à Toronto. On voit, dans une bible de 541 pages, que depuis 1981, ce sont toujours les mêmes délégués syndicaux. Ils sont à la page ici. Il n'y a personne de l'Abitibi—Témiscamingue dans ce chapitre. On ne voit personne, à la page 29 dans la convention collective, de l'Abitibi représenter la province de Québec. Ce sont toujours les mêmes gens qui représentent le syndicat depuis 1981. Pensez-y. Pensez que les gens de chez nous, les syndiqués, les travailleurs et les travailleuses sont représentés à Postes Canada avec une convention collective de 541 pages.

Il parle de coups de poignard. Je comprends qu'il arrive, ce n'est même pas un amateur de chasse. Mais en voilà un qui a déjà donné des coups de poignard dans le Parti conservateur. Mais je tiens à vous dire qu'on veut avoir de bonnes relations avec nos travailleurs qui ont toujours bien travaillé. J'appuie ce projet de loi. J'ai parlé cet après-midi et on ne changera pas mon opinion à ce sujet-là.

 

. 1825 + -

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais ramener le débat sur le projet de loi. Aujourd'hui, on est ici pour adopter une loi le plus tôt possible, une loi de retour au travail, pour que les relations de travail soient correctes.

Il y a deux conditions: la loi la plus correcte possible et le plus tôt possible afin d'avoir une bonne loi. Ce sont les critères et les objectifs qu'on vise.

Lorsqu'on a deux objectifs comme ceux-là, cela veut dire qu'il faut inclure dans cette loi les meilleures conditions possible. Lorsqu'on demande que ce qui se trouve dans la loi, ce soit l'offre patronale qui a été déposée sur la table, ce n'est toujours pas secret, ça ne demande pas la tête à Papineau pour comprendre cela.

M. St-Julien devrait comprendre cette notion. C'est la proposition patronale qu'on a mise sur la table dans notre amendement, la proposition des patrons eux-mêmes. J'ai écouté le député d'Abitibi tout à l'heure, j'ai enduré tout ce qu'il a dit. Entre autres, il a dit que les gens qui ont été choisis par les syndicats, parce qu'ils sont là depuis 1981, ce ne serait pas les bonnes personnes.

M. Réal Ménard: Honteux!

M. Paul Crête: C'est une insulte pour tous les officiers syndicaux. C'est aussi une insulte...

M. Denis Coderre: Étouffe-toi pas.

M. Paul Crête: C'est une insulte pour tous les députés du Parlement qui sont ici depuis plusieurs années.

Je vais conclure là-dessus. On se doit de faire la meilleure loi possible et j'aimerais bien que M. St-Julien ne participe pas au reste des débats pour qu'on puisse aboutir à une loi raisonnable.

Des voix: Bravo!

Le président: À l'ordre, s'il vous plaît,

L'honorable député de Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques sait bien qu'il ne doit pas s'adresser à un autre député par son nom et qu'il doit employer le nom de sa circonscription. J'espère que le député suivra le Règlement de la Chambre à cet égard.

M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui, je suis insulté. Je suis insulté parce que les députés du Bloc, à la solde et financés par les syndicats, viennent dire que je donne un coup de poignard aux travailleurs.

M. Paul Crête: Par qui tu es financé, toi?

M. Denis Coderre: Il y a des gens qui s'en vont en Floride, moi, je vais dans mon comté et j'y travaille. Qu'est-ce qu'on me dit? Qu'on perd de l'argent. Il y a des entreprises qui ont été obligées de mettre des gens dehors, parce que ces gens-là n'ont pas voulu entendre raison.

M. Paul Crête: Viens donc t'essayer chez nous.

M. Denis Coderre: Chose certaine, il est temps qu'on mette sur pied cette loi spéciale au plus sacrant. Il est temps qu'on arrête de sortir continuellement la cassette des syndicats et qu'on arrête de nous parler en termes de poignard.

J'ai choisi d'aider les entreprises, j'ai choisi d'aider les citoyens. J'ai choisi d'aider les organismes de charité. J'ai choisi d'aider mes concitoyens, parce qu'on perd de l'argent. J'ai décidé d'aider l'Armée du Salut. J'ai décidé d'aider la fondation Enfants Soleil. J'ai décidé d'aider tous ces gens parce que, justement, ils perdent de l'argent. J'ai décidé d'aider ceux et celles qui peuvent gagner leur pain pendant la période des Fêtes.

Chose certaine, quand j'entends certains députés parler de coups de poignard, les coups de poignard, je ne sais pas d'où ils viennent, mais ils n'ont pas de leçon à nous donner. Nous devons rejeter cet amendement, parce que la gang de syndicat de l'autre bord, ce qu'ils ont fait, c'est qu'ils ont refusé un règlement. On leur avait donné un règlement, ils l'ont refusé. C'est une loi gouvernementale. On doit suivre les règles du Conseil du Trésor.

Si ces gens-là n'ont rien compris, c'est parce qu'ils n'ont rien compris de leurs concitoyens. Au lieu de voyager en Floride, le député Plamondon devrait aller dans son comté. Au lieu de parler de poignard, le député de Richelieu devrait aller voir ses concitoyens et il verrait que 76 p. 100 de la population de tous les comtés appuient ce gouvernement qui a décidé de présenter une loi spéciale, parce qu'on a choisi de prendre position pour les citoyens, et non pas d'être à la solde et de sortir la cassette des syndicats. C'est ça, le problème, monsieur le Président.

Des voix: Oh, oh!

M. Réal Ménard: J'invoque le Règlement, monsieur le Président.

Le président: C'est trop tard.

Des voix: Oh, oh!

Le président: À l'ordre, s'il vous plaît.

Des voix: Oh, oh!

 

. 1830 + -

Le président: À l'ordre, s'il vous plaît. Il faut que l'on mette aux voix à ce moment-ci toutes les questions pour disposer de l'étape de ce projet de loi.

Une voix: J'invoque le règlement.

Le président: Je regrette, nous n'avons plus assez de temps pour un recours au règlement.

[Traduction]

Comme il est 18 h 30, conformément à l'ordre adopté aujourd'hui, j'ai le devoir d'interrompre les délibérations et de mettre immédiatement aux voix toutes les motions nécessaires pour mettre fin à l'étude en comité plénier du projet de loi dont la Chambre est maintenant saisie.

Nous allons d'abord mettre aux voix les propositions d'amendement et les articles du projet de loi qui restent avant de revenir aux votes différés. Les députés sont-ils d'accord pour que l'on dise que tous les articles du projet de loi et les amendements ont été mis aux voix et que le vote a été demandé pour chacun des articles et des propositions d'amendement, ou voulez-vous que nous fassions toute la procédure avant de faire sonner le timbre?

L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Monsieur le président, je pense qu'on devrait demander aux motionnaires s'ils veulent toujours présenter leurs motions. Il n'est pas impossible que certains députés, après avoir suivi le débat, veuillent retirer leur motion. D'autre part, d'autres motions pourraient être semblables et les députés en cause pourraient s'en satisfaire. La présidence pourrait peut-être mettre chacune des motions aux voix.

Le président: Je dirais que toutes les motions sont réputées avoir été mises aux voix. Elles ne l'ont pas été effectivement. Tel est le problème de procédure de la présidence, mais nous allons mettre aux voix toutes les motions.

Le premier vote porte sur l'amendement proposé par le député de Winnipeg-Centre à l'article 12 du projet de loi. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.  

Le président: Le vote sur l'amendement est reporté.

Le deuxième amendement relatif à l'article 12 du projet de loi est inscrit au nom du député de Wetaskiwin.

M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.) propose:  

    Que le projet de loi C-24 soit modifié à l'article 12, par substitution aux lignes 29 à 35, page 5, de ce qui suit:

    «12. Les taux de salaire dans la nouvelle convention collective seront déterminés par l'arbitrage des propositions finales, dans l'éventualité où les parties ne peuvent en arriver à un accord.»

Le président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.  

Le président: Le vote sur l'amendement est reporté. Le vote suivant porte sur l'amendement proposé par le député de Kitchener—Waterloo.

M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.) propose:  

    Que le projet de loi C-24 soit modifié à l'article 12 par substitution aux lignes 29 à 35, page 5, de ce qui suit:

    «12. La convention collective est également réputée être la plus récente offre de la Société canadienne des postes. La convention collective est également réputée modifiée par la majoration du taux de salaire selon l'offre la plus récente de la Société canadienne des postes.»

Le président: L'amendement est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.  

Le président: Le vote sur l'amendement est reporté.

M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Monsieur le président, l'amendement est le même que l'amendement no 3 du Bloc, donc cet amendement, numéroté L-1, est redondant. Je le retire.

Le président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

(L'amendement est retiré.)

Le président: L'article 13 est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.  

Le président: Le vote sur l'article 13 est reporté.

[Français]

L'article 14 est-il adopté?

Des voix: D'accord.

(L'article 14 est adopté.)

 

. 1835 + -

(Sur l'article 15)

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ) propose:  

Motion no 5

    Que le projet de loi C-24, à l'article 15, soit modifié par substitution aux lignes 18 et 19, page 6, de ce qui suit:

      «titre auprès de l'employeur devant»

Le président: Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: Non.

Des voix: Oui.

Le président: Le vote sur l'amendement est reporté.  

[Traduction]

(L'article 16 est adopté.)

[Français]

Le président: L'article 17 est-il adopté?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Le président: La mise aux voix est reportée.

[Traduction]

L'article 18 est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Une voix: Avec dissidence.

(L'article 18 est adopté.)

Le président: L'article 19 est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Une voix: Avec dissidence.

(L'article 19 est adopté.)

[Français]

Le président: L'article 20 est-il adopté?

Des voix: Oui.

Des voix: Avec dissidence.

(L'article 20 est adopté.)

[Traduction]

M. Jim Gouk (West Kootenay—Okanagan, Réf.): Monsieur le président, cette motion était conditionnelle à l'adoption d'autres motions du Parti réformiste. Si ces autres motions ne sont pas adoptées, le Parti réformiste retirera celle-ci avant qu'elle soit mise aux voix.

Le président: Je crains que le député n'ait pas la possibilité de la retirer. La présidence estime que la motion est irrecevable et elle ne sera pas mise aux voix.

L'article 21 est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président: Le vote sur l'article 21 est reporté.  

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le président, au sujet de l'article 21, s'il y a des propositions d'amendement, je suggère que nous en disposions avant de nous prononcer sur l'article.

Le président: Il n'y a pas de proposition d'amendement recevable sur l'article 21.

L'hon. Don Boudria: Il y a deux propositions.

Le président: Je n'ai pas vu la deuxième.

[Français]

M. André Bachand: Monsieur le Président, je crois que vous avez sous la main maintenant les trois amendements proposés par le Parti conservateur. On ne peut pas adopter 21 parce qu'il y a une modification sur 21. Je pense que le leader du gouvernement va être d'accord avec moi. Si on adopte 21, automatiquement nos modifications aux amendements tomberaient à l'eau.

Le président: Je vais proposer les amendements maintenant.

(Sur l'article 21)

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC) propose:  

    Qu'il soit ajouté au projet de loi C-24, à la page 7, après la ligne 23, le nouvel article suivant:

    «21. Dès l'entrée en vigueur de la présente loi, le syndicat et ses représentants sont tenus:

      a) d'entreprendre une consultation de ses membres afin d'obtenir un consensus sur un nouveau processus de négociation et de ratification de la convention collective;

      b) qu'à la première date anniversaire de l'entrée en vigueur de la présente loi, le syndicat et ses dirigeants soumettent leur consensus au ministre responsable.»

Le président: Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: Non.

Des voix: Oui.  

Le président: Le vote est reporté.

(Sur l'article 22)

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC) propose:  

    Qu'il soit ajouté au projet de loi C-24, à la page 7, après la ligne 23, le nouvel article suivant:

    «22. Dès l'entrée en vigueur de la présente loi, l'employeur est tenu:

      a) d'entreprendre une réflexion sur un nouveau processus de négociation et de ratification de la convention collective;

      b) qu'à la première date anniversaire de l'entrée en vigueur de la présente loi, l'employeur présente ses recommandations au ministre responsable.»

Le président: Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.  

Le président: Le vote sur l'amendement est reporté.

(Sur l'article 23)

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC) propose:  

    Qu'il soit ajouté au projet de loi C-24, à la page 7, après la ligne 23, le nouvel article suivant:

      «Avant la deuxième date anniversaire de l'entrée en vigueur de la présente loi, le ministre responsable s'engage à soumettre à la Chambre un projet de loi qui offrira à la Société canadienne des postes et à ses employés un nouveau processus de négociation et de ratification de la convention collective.»

Le président: Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.  

Le président: Le vote sur l'amendement est reporté.

Convoquez les députés.

 

. 1855 + -

[Traduction]

Après l'appel du timbre:

Le président: Le vote porte sur la motion no 1.

 

. 1905 + -

[Français]

(La motion no 1 est rejetée.)

[Traduction]

Le président: Le vote porte maintenant sur la motion no 2. Plaît-il au comité d'adopter l'amendement?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président: Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien se lever.

Peut-on convenir, sans compter les oui, que l'amendement est rejeté?

Des voix: D'accord.

(La motion no 2 est rejetée.)

Le président: L'article 8 est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

(L'article 8 est adopté.)

Le président: Le vote porte maintenant sur l'amendement que M. Gouk propose d'apporter à l'article 9.

M. Jim Gouk (West Kootenay—Okanagan, Réf.): Monsieur le président, cette motion est dans la ligne de celle qui vient d'être rejetée dans le vote précédent et est, par conséquent, redondante.

Le président: Est-on d'accord pour que l'amendement soit retiré?

Des voix: D'accord.

(La motion no 3 est retirée.)

Le président: L'article 9, tel que modifié, est-il adopté?

Une voix: Avec dissidence.

(L'article 9 modifié est adopté.)

Le président: Le vote porte maintenant sur l'article 12.

[Français]

Plaît-il au Comité d'adopter cet amendement?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président: Que tous ceux qui appuient l'amendent veuillent bien se lever.

Est-il nécessaire de compter les votes contre? Est-on d'accord que l'amendement est rejeté?

Des voix: D'accord.

(L'amendement est rejeté.)

 

. 1910 + -

[Traduction]

M. Bob Kilger: Monsieur le président, vous trouverez, je crois, qu'il y a consentement unanime pour appliquer le résultat du vote précédent à l'amendement que M. Crête propose d'apporter à l'article 15.

Le président: Le comité consent-il à appliquer ainsi le résultat du vote précédent?

Des voix: D'accord.

[Français]

M. Michel Gauthier: Monsieur le président, il y a un problème dans l'identification qu'on vient de faire de l'autre côté. Cela ne correspond pas avec ce que nous avons. Je ne sais pas si l'honorable whip du gouvernement voudrait regarder à nouveau pour faire la correspondance, l'application du vote. L'article 15, ce n'est pas ce qu'on a, l'article 15 étant une motion de M. Bachand.

M. Bob Kilger: Monsieur le président, il s'agit de la motion libellée BQ no 5.

Le président: Êtes-vous d'accord qu'on applique le résultat du vote sur la motion de M. Crête à l'amendement à l'article 15?

Des voix: D'accord.  

Le président: Je déclare l'amendement rejeté.

(La motion no 5 est rejetée.)

[Traduction]

M. Bob Kilger: Monsieur le président, vous trouverez, je crois, qu'il y a consentement unanime pour appliquer le résultat du vote précédent à la motion dont est présentement saisi le comité.

Le président: Est-on d'accord pour appliquer le résultat du vote précédent à l'amendement de M. Martin? Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.

(L'amendement est rejeté.)

Le président: Le vote du comité porte maintenant sur l'amendement que M. Johnston propose d'apporter à l'article 12.

(L'amendement est rejeté.)

Le président: L'article 12 est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Une voix: Avec dissidence.

(L'article 12 est adopté.)

 

. 1915 + -

Le président: L'article 13 est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Une voix: Avec dissidence.

(L'article 13 est adopté.)

Le président: L'article 15 est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Une voix: Avec dissidence.

(L'article 15 est adopté.)

Le président: L'article 21 est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Une voix: Avec dissidence.

(L'article 21 est adopté.)

Le président: J'ai trois amendements inscrits au nom de M. Bachand. Le vote porte sur le premier amendement.

(L'amendement est rejeté.)

M. Bob Kilger (Stormont—Dundas, Lib.): Sauf l'immense respect que je vous dois, monsieur le président, je pense qu'il y aurait consentement unanime pour que le résultat du dernier vote s'applique aux deux autres amendements inscrits au nom de M. Bachand.

Le président: Je pense qu'il faudra procéder à une mise aux voix. Si je lis les amendements, nous obtiendrons peut-être le consentement de la Chambre pour appliquer le résultat du dernier vote.

Le vote suivant porte sur le deuxième amendement. La Chambre consent-elle à ce que le résultat du vote sur le dernier amendement s'applique au deuxième amendement?

Des voix: D'accord.

(L'amendement est rejeté.)

Le président: Le vote porte sur le troisième amendement. La Chambre consent-elle à ce que nous appliquions le résultat du vote sur le dernier amendement au troisième amendement?

Des voix: D'accord.

(L'amendement est rejeté.)

Le président: L'article 1 est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Une voix: Avec dissidence.

(L'article 1 est adopté.)

Le président: Le titre est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Une voix: Avec dissidence.

(Le titre est adopté.)

(Rapport est fait du projet de loi.)

 

. 1920 + -

 

L'hon. Lawrence MacAulay (ministre du Travail, Lib.) propose: Que le projet de loi C-24, Loi prévoyant la reprise et le maintien des services postaux, soit agréé.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

 

. 1925 + -

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

Vote no 49

POUR

Députés

Abbott Ablonczy Adams Alcock
Anders Assad Assadourian Augustine
Bachand (Richmond – Arthabaska) Bailey Bakopanos Barnes
Beaumier Bélair Bélanger Bellemare
Bennett Benoit Bernier (Tobique – Mactaquac) Bertrand
Bevilacqua Blondin - Andrew Bonin Bonwick
Borotsik Boudria Bradshaw Breitkreuz (Yorkton – Melville)
Brison Bryden Bulte Byrne
Caccia Cadman Calder Cannis
Carroll Casey Casson Catterall
Cauchon Chan Charbonneau Charest
Clouthier Coderre Cohen Collenette
Comuzzi Cullen Cummins DeVillers
Dhaliwal Dion Discepola Dromisky
Drouin Dubé (Madawaska – Restigouche) Duhamel Easter
Elley Epp Finestone Finlay
Folco Fontana Forseth Fry
Gagliano Gallaway Gilmour Godfrey
Goodale Gouk Graham Gray (Windsor West)
Grewal Grey (Edmonton North) Hanger Harb
Harris Hart Harvard Harvey
Herron Hill (Macleod) Hill (Prince George – Peace River) Hilstrom
Hubbard Ianno Iftody Jackson
Jaffer Jennings Johnston Jones
Jordan Keddy (South Shore) Kerpan Keyes
Kilger (Stormont – Dundas) Kilgour (Edmonton Southeast) Knutson Konrad
Kraft Sloan Lastewka Lavigne Lee
Leung Lincoln Longfield Lowther
Lunn MacAulay MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) Mahoney
Malhi Maloney Manley Manning
Marchi Mark Marleau Massé
Matthews Mayfield McCormick McGuire
McKay (Scarborough East) McLellan (Edmonton West) McNally McTeague
McWhinney Mifflin Mills (Broadview – Greenwood) Mills (Red Deer)
Minna Mitchell Muise Murray
Myers Nault Normand O'Brien (London – Fanshawe)
O'Reilly Pagtakhan Pankiw Paradis
Parrish Patry Penson Peric
Peterson Pettigrew Phinney Pickard (Kent – Essex)
Pillitteri Pratt Proud Provenzano
Ramsay Redman Reed Reynolds
Richardson Ritz Robillard Rock
Schmidt Scott (Fredericton) Serré Shepherd
Solberg Speller St. Denis Steckle
Stewart (Brant) Stewart (Northumberland) Stinson St - Julien
Strahl Szabo Telegdi Thibeault
Thompson (Charlotte) Ur Valeri Vanclief
Vellacott Wappel Wayne Whelan
Wilfert Williams Wood – 195


CONTRE

Députés

Alarie Axworthy (Saskatoon – Rosetown – Biggar) Bachand (Saint - Jean) Bellehumeur
Bergeron Bigras Blaikie Brien
Canuel Chrétien (Frontenac – Mégantic) Crête Dalphond - Guiral
Davies Debien Desjarlais Desrochers
Dockrill Dubé (Lévis) Dumas Earle
Fournier Gagnon Gauthier Girard - Bujold
Godin (Acadie – Bathurst) Godin (Châteauguay) Guay Guimond
Hardy Laliberte Lalonde Laurin
Lebel Lefebvre Lill Mancini
Marchand Martin (Winnipeg Centre) McDonough Ménard
Mercier Nystrom Picard (Drummond) Plamondon
Proctor Riis Robinson Rocheleau
Sauvageau Solomon St - Hilaire Stoffer
Tremblay (Lac - Saint - Jean) Tremblay (Rimouski – Mitis) Wasylycia - Leis  – 55


«PAIRÉS»

Députés

Anderson Asselin Baker Bernier (Bonaventure – Gaspé – Îles - de - la - Madeleine – Pabok)
Duceppe Eggleton Karetak - Lindell Loubier
Marceau Martin (LaSalle – Émard) O'Brien (Labrador) Perron


Le vice-président: Je déclare la motion adoptée.

Quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois? Avec l'autorisation de la Chambre, maintenant?

Des voix: D'accord.  

L'hon. Lawrence MacAulay propose: Que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Vous avez demandé quand nous lirions ce projet de loi pour la troisième fois. Pourriez-vous demander l'unanimité pour que le vote sur la troisième lecture ait lieu maintenant?

Le vice-président: Si aucun député ne désire participer au débat, je serai heureux de mettre la question aux voix.

La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Certains députés s'y opposent. En outre, il me semble que des députés désirent débattre le projet de loi.

L'hon. Lawrence MacAulay: Monsieur le Président, je suis heureux de prendre de nouveau la parole au sujet du projet de loi C-24, Loi de 1997 sur le maintien des services postaux.

Comme je l'ai déjà dit à la Chambre, je regrette d'avoir dû présenter un projet de loi pour mettre fin à un conflit de travail que les parties étaient tout à fait capables de régler elles-mêmes.

 

. 1930 + -

Toutefois, ce conflit de négociation ne concerne pas seulement...

Le vice-président: À l'ordre. Je suis sûr que les députés veulent entendre le ministre. Nous attendrons donc que les députés qui veulent partir aient quitté la Chambre pour lui donner la parole.

L'hon. Lawrence MacAuley: Monsieur le Président, je suis heureux de prendre de nouveau la parole au sujet du projet de loi C-24, Loi de 1997 sur le maintien des services postaux.

Comme je l'ai déjà dit à la Chambre, je regrette d'avoir dû présenter un projet de loi pour mettre fin à un conflit que les parties étaient tout à fait capables de régler elles-mêmes.

Toutefois, ce conflit de négociation ne concerne pas seulement les deux parties en cause puisqu'il a aussi des conséquences sérieuses pour les entreprises canadiennes, les organismes de charité et les simples particuliers qui comptent sur le service postal pour communiquer avec les membres de leur famille et leurs amis.

Le gouvernement n'est pas insensible à leur situation. Des mesures d'urgence ont été prises pour assurer la distribution des chèques d'aide sociale et éviter aux prestataires de l'aide sociale d'avoir à subir des difficultés financières graves. Je signale également que la Société canadienne des postes et le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes avaient reconnu la nécessité de ces mesures et avaient accepté un mécanisme de distribution des chèques en cas d'arrêt de travail.

Le gouvernement prend très au sérieux son rôle de protecteur de l'intérêt public. Ce conflit du travail prolongé fait clairement du tort aux Canadiens, et il était donc nécessaire que le gouvernement intervienne pour mettre fin à l'arrêt de travail et rétablir des services postaux réguliers.

Bien qu'il ait déjà été question durant l'examen de ce projet de loi des circonstances qui ont mené à sa présentation, je voudrais passer en revue ce qui s'est passé durant ces négociations collectives.

La Société canadienne des postes et le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes ont engagé des négociations en vue d'arriver à une nouvelle convention pour remplacer celle qui a expiré le 31 juillet 1997. La convention s'applique à quelque 45 000 postiers et facteurs travaillant un peu partout au Canada.

Il est important de faire remarquer que les parties ont pu arriver à la convention précédente à la table des négociations, sans avoir besoin de recourir à un arrêt de travail ou à l'aide d'une tierce partie. Étant donné que les parties avaient engagé des négociations intensives bien avant la date d'expiration, on espérait qu'il serait possible de s'entendre sur une nouvelle convention sans un recours à la grève ou au lock-out.

Lorsque les négociations directes ont cessé entre les deux parties et que mon ministère a reçu notification du différend, j'ai affecté deux agents à ce dossier afin qu'ils essaient de régler le problème qui empêchait les deux parties d'arriver à un accord. Des efforts de conciliation ont eu lieu dans la seconde moitié du mois d'août et au début septembre. Malgré les efforts des conciliateurs, les négociations sont restées bloquées.

Le 15 septembre, l'employeur a fait un offre globale au syndicat, mais celui-ci l'a rejetée environ trois jours plus tard. Le 7 octobre, j'ai nommé commissaire-conciliateur dans ce conflit, M. Marc Gravel, un éminent spécialiste des relations du travail du secteur privé, connu pour son impartialité. M. Gravel a commencé à rencontrer les parties le 14 octobre mais m'a fait savoir à la fin du mois qu'il n'arrivait guère à faire bouger les parties de leur position.

M. Gravel a suggéré que la menace d'un arrêt de travail était nécessaire afin d'exercer des pressions appropriées sur le processus de négociation et, en même temps, il a suggéré que je mette les services du Service fédéral de médiation et de conciliation à la disposition des parties en vue de futures négociations.

Après m'être entretenu avec les deux parties, le 24 novembre, j'ai nommé le directeur général du Service fédéral de médiation et de conciliation, M. Warren Edmondson, à titre de médiateur dans le conflit. M. Edmondson a immédiatement organisé des séances de médiation intensives avec l'employeur et le syndicat dans l'espoir de briser l'impasse et de relancer les négociations.

 

. 1935 + -

À l'issue de quatre jours de réunions avec les parties, M. Edmondson m'a dit que les perspectives d'une solution étaient minces et que les parties n'étaient pas disposées à faire preuve de la flexibilité voulue pour en arriver à un accord.

Tout ayant été mis en oeuvre pour que le processus de négociation collective produise des résultats satisfaisants et face à un arrêt de travail qui causait de graves maux économiques aux Canadiens, j'ai décidé de présenter une loi qui mette fin à la grève et assure un règlement négocié.

La mesure législative dont les députés sont saisis vise à ce que les services postiers reprennent immédiatement et à ce que soit nommé un arbitre-médiateur chargé de régler les questions qui sont encore en litige entre les deux parties, à l'exception de la question salariale et de la durée de la convention.

La mesure législative comporte une ligne de conduite qui aidera le médiateur-arbitre dans l'exécution de son mandat. Elle stipule que le médidateur-arbitre doit s'assurer que la société respecte les normes de productivité et de service lui permettant d'offrir aux Canadiens un service postal fiable partout au pays.

Telle qu'amendée après la deuxième lecture, la ligne de conduite stipule également que l'arbitre doit entre autres faire en sorte d'assurer la viabilité et la stabilité financières de la société. Je voudrais préciser ce que le gouvernement entend par la viabilité et la stabilité financières de la Société canadienne des postes dans ce projet de loi.

Le gouvernement ne veut pas privatiser la Société canadienne des postes, et c'est pourquoi nous avons appuyé l'amendement à l'étape de la deuxième lecture. Il veut que la société fonctionne comme des entreprises comparables du secteur privé ou public. La société doit avoir assez de souplesse pour pouvoir fonctionner dans des conditions de concurrence. Très important également, elle doit être rentable, conformément à la Loi sur la gestion des finances publiques.

L'arbitre devra suivre les instructions du gouvernement pour que la Société canadienne des postes reste rentable, quand il s'acquittera de ses fonctions. Il devra donner suite à ces instructions. Pour aider l'arbitre en ce sens, les parties pourront présenter des preuves, des témoins et des documents. L'arbitre fera la part des choses entre ces instructions présentées à la société et l'importance de préserver de bonnes relations de travail entre la société et le syndicat.

Les bonnes relations de travail sont essentielles au fonctionnement d'un service postal moderne et indispensable. Comme toute entreprise moderne, la société a besoin de la coopération de ses employés pour relever les défis du monde du travail en évolution.

Les principaux enjeux contenus dans les principes directeurs sont ceux que les arbitres prennent généralement en considération quand on leur demande de décider des conditions de travail des employés d'une unité de négociation. Dans cette mesure législative, les facteurs dont le médiateur-arbitre devra tenir compte ont été présentés par écrit pour plus de certitude.

Les dispositions concernant la nomination d'un médiateur-arbitre plutôt que d'un arbitre donneront aux parties une chance de plus de régler autant d'enjeux qu'elles le peuvent par la médiation, avant qu'une décision d'arbitrage soit rendue sur les questions encore en litige.

Le processus prévoyant la médiation suivie de l'arbitrage encourage les parties à régler leurs différends plutôt que de se voir imposer leurs conditions de travail par une tierce partie. Plus les parties pourront régler de points par elles-mêmes, plus elles ont de chances d'avoir ensuite des relations de travail productives.

Je suis convaincu que les mesures prises par le gouvernement pour régler ce conflit correspondent aux souhaits de la majorité des Canadiens. Nous appuyons sans réserves le principe du processus de négociation collective, et nous avons laissé toutes les chances aux parties de faire aboutir ce processus. Ce n'est que lorsqu'il n'y avait manifestement plus aucune chance qu'un règlement soit négocié que le gouvernement est intervenu pour mettre fin à un arrêt de travail que les Canadiens souhaitaient clairement voir prendre fin.

 

. 1940 + -

Je répète que je crois fermement dans le processus de négociation collective et que ce n'est pas de gaîté de coeur que je présente un projet de loi de ce genre à la Chambre. Toutefois, même si j'appuie les droits dont bénéficient les employés et le syndicat conformément au Code canadien du travail, j'ai le devoir de m'assurer que le bien-être économique du Canada et la santé et la sécurité des citoyens canadiens ne sont pas menacés par des arrêts de travail prolongés.

Il est clair que le conflit actuel aux postes entre dans cette catégorie et qu'il doit être résolu pour le bien de tous les intéressés.

Le projet de loi C-24, ou Loi de 1997 sur le maintien des services postaux, prévoit la reprise des services postaux au Canada. Il prévoit un mécanisme de règlement du différend en faisant appel à un médiateur-arbitre pour résoudre les questions qui demeurent en litige entre l'employeur et le syndicat, à l'exception des hausses salariales et de la durée de la convention, qui sont toutes deux prévues dans le projet de loi.

Le projet de loi expose le principe directeur du processus qui établit un équilibre entre les objectifs de rentabilité et de service de la société et le besoin de bonnes relations patronales-syndicales. Je remercie les députés des deux côtés de la Chambre pour le débat franc et constructif qu'ils ont tenu aujourd'hui sur ce projet de loi. Je leur demande d'appuyer ce projet de loi afin que le service postal reprenne au Canada.

M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.): Monsieur le Président, nous sommes à la veille d'une reprise du service postal. C'est une raison pour moi de partager quelques idées avec le ministre et les Canadiens en général. Il a fait bon entendre le ministre dire qu'il était en faveur du processus de négociation collective. Il nous l'a répété à je ne sais combien de reprises et je suppose que c'est donc sa position.

Il a également affirmé qu'il ne tirait aucune satisfaction de la présentation d'une loi de ce genre. C'est un point sur lequel le ministre et moi sommes d'accord. Même si en tant que parti nous avons demandé que le service postal reprenne, cela semble être la seule méthode qui reste pour y parvenir et nous appuyons à regret ce mécanisme.

Nous croyons qu'il n'est pas nécessaire d'adopter des lois de retour au travail en cas d'arrêts de travail, surtout dans des secteurs où il n'y a pas d'alternative. Il n'y a pas d'alternative à la Société canadienne des postes. Si on veut faire livrer du courrier de première classe, il sera distribué par les employés de la Société canadienne des postes. Personne ne livre concurrence à la Société canadienne des postes.

Lorsqu'il existe un monopole, nous devons en arriver à un mécanisme qui règle ces différends sans une grève ou un lock-out. La population canadienne ne peut tout simplement pas supporter des coûts de ce genre. Des gens ont appelé à de nombreuses reprises à nos bureaux pour nous dire combien d'argent ils perdent et combien d'employés ils devront licencier.

Nous craignons que chaque fois que cela se produit, la Société canadienne des postes ne perde une autre part de marché. Ce n'est pas tout le monde qui a accès à l'Internet, au courrier électronique, aux télécopieurs, etc. Chaque fois que le service de livraison du courrier de première classe est interrompu, les gens cherchent d'autres solutions.

Un journal local de ma circonscription en est un bon exemple. Il fait partie de l'association des hebdomadaires et il publie depuis 50 ans dans ma ville. Chaque semaine, il envoie par la poste ses journaux aux régions éloignées. C'est un journal publicitaire avec aucun coût d'abonnement. Il est simplement envoyé à tous les foyers dans la région visée et il est financé par la publicité. J'ai parlé avec le rédacteur en chef de ce journal récemment et il m'a dit que ses coûts postaux étaient d'environ un millier de dollars par semaine. Sitôt qu'on a parlé de cette interruption du service postal, sitôt qu'il y a eu beaucoup de fanfaronnades et qu'on a su qu'une grève des postes était inévitable, il a pris des dispositions pour livrer son journal sans les services de la Société canadienne des postes.

 

. 1945 + -

On est ainsi arrivé à un système de distribution dans le cadre duquel on a installé des boîtes à journaux à des points pratiques dans la zone de diffusion du journal. On approvisionne ces boîtes le jour même de l'impression du journal.

Maintenant, tous les gens vont obtenir le journal le même jour, qu'ils vivent dans la ville où le journal est imprimé, dans une ville voisine ou quelque part dans une région rurale. Ils vont tous se procurer le journal le même jour.

La chose la plus importante, c'est qu'en plus d'avoir maintenant un système qui lui coûte la moitié de ce qu'il devait verser à la Société canadienne des postes, soit 500 $ par semaine comparativement à 1 000 $ par semaine, ce rédacteur en chef n'a aucune intention d'avoir de nouveau recours aux services de la Société canadienne des postes une fois que le service postal aura repris. Je pense que c'est regrettable, car c'est une autre part de marché que la Société canadienne des postes vient de perdre.

Une des choses qui a été vivement contestée durant toutes ces négociations collectives, c'est la peur de licenciements. Le STTP n'a cessé de répéter que...

M. Pat Martin: J'invoque le Règlement, monsieur le Président, d'habitude je ne m'enthousiasme guère pour ce que le Parti réformiste a à dire, mais je pense que tout le monde à la Chambre mérite la courtoisie d'être au moins écouté par des représentants de l'autre côté, quels que soient les mérites des arguments avancés.

Même avec ce député qui reprend sa place, nous n'avons pas le quorum.

Le président suppléant (M. McClelland): Est-ce que le député de Winnipeg-Centre demande qu'on détermine s'il y a quorum?

M. Pat Martin: Oui, monsieur le Président.

Le président suppléant (M. McClelland): Convoquez les députés.

 

. 1950 + -

Après le compte:

Le président suppléant (M. McClelland): Il y a quorum. Nous reprenons le débat.

M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.): Monsieur le Président, comme je le disais, une des questions les plus graves, c'est que le syndicat alléguait que Postes Canada voulait licencier un bon nombre de travailleurs.

Je suppose que la perte d'une part de marché va accélérer ce processus. Si Postes Canada ne peut pas maintenir sa part de marché, il y aura moins de travail à faire et, en conséquence, moins de personnes travaillerons pour la Société. C'est logique.

Je pense que l'anecdote que je citais, à propos du journal local de ma circonscription, n'est qu'un exemple dans une circonscription d'une province. Je suis sûr que l'on peut multiplier cela de nombreuses fois, car les gens commencent à dire qu'ils perdent trop, que toutes ces interruptions du service postal créent trop de risques et qu'il faut chercher d'autres solutions.

C'est une triste situation. Nous devrions avoir une bonne société des postes, forte et viable, de sorte qu'on soit sûr qu'une lettre déposée dans une boîte sera livrée n'importe où dans le monde.

Naturellement, c'est ce que nous avions par le passé et je ne vois pas pourquoi ce ne serait pas pareil à l'avenir. Le fait que nous sommes ici aujourd'hui pour parler du rappel au travail des travailleurs des postes et du rétablissement du service postal prouve que quelque chose ne va pas.

Nous avons déjà fait la même chose au cours des dix dernières années, au moins deux autres fois. Pourquoi continuons-nous à imposer un règlement par voie législative?

Il nous faut un système qui règle ce problème avant qu'il n'y ait arrêt de travail et que des gens en pâtissent, des gens qui n'ont rien à dire là-dedans.

Nous avons proposé à la Chambre d'amender le projet de loi en y ajoutant une disposition sur le recours à la formule d'arbitrage des propositions finales, en vertu de laquelle, essentiellement, les deux parties soumettent des propositions finales à un arbitre qui doit choisir entre les deux. Il n'y a pas de compromis possible entre les deux.

Comme je l'ai déjà dit à la Chambre, j'estime que c'est une formule que le syndicat et l'employeur ont tout intérêt à utiliser. Je ne pense pas qu'elle favorise une partie au détriment de l'autre. Je crois que c'est ce qu'il nous faut dans la législation en matière de relations patronales-syndicales au Canada. Il faut établir un équilibre.

Si la balance penche trop d'un côté, ce dernier jouira d'un avantage indu. Par conséquent, c'est une formule qui, si elle est bien appliquée, ne servira même pas parce que les parties négocieront de bonne foi, sachant que cette formule est l'étape finale prévue par la loi.

Si elles ne réussissent pas à s'entendre, les parties seront forcées de recourir à cette formule par laquelle elles donnent à un tiers le pouvoir de trancher. Nul doute que toutes les parties voudront en venir à un règlement négocié. Cependant, j'estime que l'arbitrage des propositions finales est une formule qui pourrait être utilisée également par chacune des parties. Cela aiderait le processus de négociation.

 

. 1955 + -

D'aucuns diront que cette formule enlève aux travailleurs le droit de grève. Je ne le pense pas. Si on demande aux travailleurs sur les lignes de piquetage s'ils aiment faire la grève, la plupart d'entre eux répondront qu'ils n'aiment pas cela, mais qu'ils estiment y être contraints.

Tous cherchent la stabilité. Tous aiment avoir la maîtrise de leur vie. Quand ils ne touchent plus de paye et qu'ils sont sur les lignes de piquetage, ce n'est pas très plaisant, en novembre et en décembre notamment. Nul doute que ces gens-là aimeraient mieux travailler et être payés comme avant.

Selon moi, ce que nous sommes en train de faire prive davantage ces gens du droit de grève et du droit au lock-out que l'arbitrage des propositions finales ne le ferait. En obligeant ces gens à reprendre le travail, nous disons qu'ils n'ont pas le droit de faire la grève, qu'ils ont fait la grève pendant neuf ou dix jours, mais que c'est fini maintenant et qu'ils doivent reprendre le travail. Et s'ils refusent de reprendre le travail, ils violent une loi du Canada, ce qui est très grave.

Nous sommes d'accord avec le ministre lorsqu'il dit qu'il n'éprouve que très peu de satisfaction, voire aucune, à avoir recours à une loi pour que le travail reprenne. Nous sommes d'accord là-dessus. Il faut faire quelque chose. Il faut que le courrier recommence à circuler et il est évident que ce n'est pas le processus de négociation qui allait arriver à le faire circuler.

Comme tout le monde, nous croyons que la meilleure solution est une solution négociée. Si les parties négocient, elles ont toutes le sentiment d'avoir eu leur mot à dire et d'avoir participé à la prise de décisions au lieu de baisser les bras et de se faire imposer une décision par quelqu'un d'autre.

J'ai été très surpris de voir que le ministre et son ministère avaient inclus une échelle de salaires dans le projet de loi, que les augmentations étaient prévues par la loi. J'ai été surpris qu'un gouvernement libéral fasse ça. J'ai également été surpris de voir que certains des partis plus à gauche étaient d'accord. Ils ont accepté l'idée en principe, mais l'ont quelque peu modifiée en jouant avec les chiffres. Le NPD et le Bloc ont accepté un règlement imposé. Cela m'a vraiment surpris. J'avais toujours cru qu'ils étaient les champions des travailleurs et qu'ils réclameraient un règlement négocié. C'est ce que nous voulons nous aussi.

Nous pensons qu'une partie du projet de loi aurait dû être supprimée. Nous l'avons suggéré et nous avons proposé un amendement à cet effet. Je suppose que le gouvernement dans sa sagesse et certainement grâce à sa supériorité numérique a pouvoir de vie ou de mort sur le projet de loi.

En quoi les Canadiens moyens ont-ils été touchés ces neuf ou dix derniers jours? Ils n'ont pas reçu leur journal par la poste. Ils n'ont pas reçu leurs chèques. Bien que La Société canadienne des postes nous ait assuré que les chèques de pension de vieillesse seraient distribués, cette semaine j'ai reçu plusieurs appels de mes électeurs qui se plaignaient de ce qu'ils n'avaient pas reçu leur chèque alors que beaucoup de leurs voisins avaient reçu le leur. C'est le 1er décembre et ils ne savent pas quoi faire. Que puis-je leur dire? Comment puis-je vérifier où sont leurs chèques si la poste ne fonctionne pas? Tout ce que je peux leur dire c'est que leurs chèques ont été émis par Ottawa, mais que nous n'avons aucun moyen de savoir où ils sont passés.

La grève a eu des répercussions pour les retraités qui ont un revenu fixe et qui dépendent de leur chèques de pension. Je ne veux certainement pas laisser entendre que les personnes âgées vivotent de chèque de pension en chèque de pension, mais elles aiment bien qu'il arrive le même jour que d'habitude.

 

. 2000 + -

Dans les petites localités, le bureau de poste est une sorte de centre communautaire. On y rencontre ses voisins et ses associés dans les affaires. Tous ne vont pas aux assemblées de la chambre de commerce, mais tous vont souvent à la banque et au bureau de poste. C'est là qu'ils rencontrent leurs associés, confrontent leurs vues et parlent de toutes sortes de choses. Lorsque le bureau de poste est fermé, cet aspect de la vie sociale fait défaut.

Il ne faut pas oublier non plus que les organismes de charité comptent beaucoup sur cette période de l'année, à Noël, pour tenir leur plus grandes activités de levée de fonds. Ils recueillent 80 p. 100 de leurs fonds en décembre.

Notre parti politique essaie aussi de lever des fonds en novembre et en décembre parce que la fin de l'année financière approche et que, à ce moment, la plupart des gens voient clair dans leur situation financière. Bien des gens prévoient donner un certain montant aux organismes de charité, et ils le font d'habitude dans le dernier mois de l'année.

Je suis très heureux de constater que le service postal va reprendre. J'espère que le retour au travail sera rapide et que toutes les rumeurs de désobéissance civile resteront à l'état de rumeur. Je sais que beaucoup de postiers dévoués sont fiers d'accomplir un excellent travail en distribuant le courrier dans toutes sortes de conditions. J'ai hâte que le système postal fonctionne normalement à nouveau.

Une occasion rare se présente au ministre du Travail, qui n'a pas souvent été offerte aux autres ministres du Travail, et c'est la possibilité de choisir et de mettre en oeuvre le processus d'arbitrage des propositions finales. Comme je l'ai souvent dit à la Chambre, ce processus est un outil formidable qui peut prévenir les préjudices causés à d'innocentes tierces parties, qui n'ont aucun moyen de prévenir ces interruptions du travail.

Ces arrêts de travail sont trop souvent déclenchés par le pouvoir et les conflits de pouvoir. Je ne sais pas ci c'était le cas en l'occurrence, mais la possibilité d'un conflit de pouvoir est toujours présente. Il est tout à fait injuste que des tierces parties, qui ne sont que des utilisateurs du système, subissent des torts de l'ampleur de ceux que cette grève à causés.

Nous entendons beaucoup parler de justice et d'équilibre en cette Chambre. Voilà exactement ce que nous devrions rechercher: la justice et l'équilibre. La population canadienne, les consommateurs des services de la Société canadienne des postes, méritent la justice et ils méritent un projet de loi équilibré, qui assure la justice.

Au cours des deux dernières semaines, 30 millions de Canadiens ont été privés de services postaux. D'ici quelques jours, j'ai bon espoir que ces services seront rétablis.

Je pourrais sans doute continuer et présenter d'autres arguments, mais le temps file. J'ai hâte d'entendre ce que mes collègues ont à dire.

 

. 2005 + -

[Français]

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de débattre de cette question très importante dans l'histoire du Canada, étant donné qu'il s'agit d'une loi spéciale.

D'entrée de jeu, je voudrais vous indiquer que je partagerai mon temps de parole avec ma collègue de Mercier et mon collègue de Terrebonne—Blainville, c'est-à-dire dix minutes chacun.

Cela étant dit, c'est donc pour moi un devoir et une responsabilité de prendre la parole dans ce débat sur cette loi spéciale de retour au travail...

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): Veuillez m'excuser. Le député de Trois-rivières a demandé le consentement unanime de la Chambre pour partager le temps en trois, soit dix minutes à chacun. Nous en sommes à la première ronde de 40 minutes. Le député de Trois-Rivières a-t-il le consentement unanime de la Chambre?

Des voix: D'accord.

[Français]

M. Yves Rocheleau: Monsieur le Président, je remercie mes collègues de leur compréhension.

C'est un plaisir et une responsabilité pour moi en tant que critique en matière de travail d'intervenir dans ce débat très important qui marque l'histoire du Canada dans le domaine des relations de travail.

C'est toutefois une date triste aujourd'hui, parce que ce n'est pas le plus beau dossier non plus, dans l'histoire du Canada, dans le domaine des relations de travail, ni aujourd'hui ni dans les semaines qui ont précédé, parce qu'on sait que, compte tenu de l'attitude du gouvernement, notamment celle du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, que c'est là un dossier où le gouvernement devrait être très gêné et honteux, de par l'attitude qu'on a vue en torpillant littéralement l'embryon ou les balbutiements de négociations qu'il y avait, il y a déjà quelques mois, entre les deux parties. On se rappellera le moment où le ministre est venu avouer candidement qu'on disposerait facilement d'un éventuel arrêt de travail de la part des postiers par une loi spéciale, faisant en sorte que la négociation perdait dès lors tout son sens.

Donc, c'est une triste mascarade à laquelle nous avons assisté. De plus, elle s'est embourbée dans des gestes disgracieux.

Les événements récents, on peut rapidement les décrire ainsi: appel à la réduction de l'utilisation du système postal à l'approche de l'expiration du délai de grève, licenciement pour réduction d'activités, annonce de sa volonté de couper plus de 4 000 postes, comportement violent d'un membre de l'équipe patronale et agression d'un négociateur syndical, annonce du recours au lock-out, etc. C'est là donc un triste dossier.

J'aborderai maintenant la question plus spécifique du caractère vicieux dans sa globalité quant à la stratégie et à l'opération de ce gouvernement, le gouvernement d'un pays souverain qui s'appelle le Canada, où on assiste ici à une orchestration, je dirais, face à toute la classe syndiquée, face à toute la classe moyenne, partout où elle existe sur cette planète, afin de diminuer le rôle de l'État, de démantibuler, jusqu'à un certain point, tous les mécanismes qu'il s'est donné pour mieux partager la richesse et où on donne un cadre évident à la privatisation des principaux services de l'État. Vous aurez compris que je fais allusion à l'article 9, que je vais lire:

    9. Le médiateur-arbitre doit s'inspirer des conditions de travail qui existent dans les entreprises privées et publiques comparables et qui offrent la marge de manoeuvre nécessaire pour assurer, à court et à long terme, la viabilité économique et la compétitivité de la Société canadienne des postes, compte tenu:

      a)de la nécessité pour celle-ci, sans recours à des hausses indues de tarifs postaux:

    (i) d'obtenir des résultats financiers acceptables pour une entreprise commerciale,

    (ii) d'être efficace,

    (iii) d'accroître sa productivité,

    (iv) de respecter des normes de service acceptables;

      b) de l'importance des bonnes relations patronales-syndicales entre la Société canadienne des postes et le syndicat.

C'est là une opération orchestrée, ici au Canada comme en France, comme en Allemagne, comme en Italie, partout en Occident, pour faire en sorte que ceux qui ont pu tirer leur épingle du jeu, notamment par la syndicalisation des travailleurs et des salariés, voient aujourd'hui leur pouvoir, leur rapport de force, diminué de façon systématique.

 

. 2010 + -

Je veux vous faire profiter de l'écrit paru hier dans Le Monde Diplomatique, écrit par un Européen de grande classe, M. Ignacio Ramonet, qui écrivait hier, dans ce journal, ce qui suit et qui est tout à fait pertinent à ce qui se passe ici, le tout étant à mon avis orchestré, et il faut le dire pour qu'il y ait enfin un débat occidental, planétaire bientôt, pour faire en sorte que le progrès de l'économie soit synonyme de progrès humain.

Je cite M. Ramonet:

    La mondialisation financière a d'ailleurs créé son propre État. Un État supranational, disposant de ses appareils, de ses réseaux d'influence et de ses moyens d'action propres. Il s'agit de la constellation Fonds monétaire international (FMI), Banque mondiale, Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE), et Organisation mondiale du commerce (OMC). Ces quatre institutions parlent d'une seule voix—répercutée par la quasi-totalité des grands médias—pour exalter les «vertus du marché».

    Cet État mondial est un pouvoir sans société, ce rôle étant tenu par les marchés financiers et les entreprises géantes dont il est le mandataire, avec, comme conséquence, que les sociétés réellement existantes, elles, sont des sociétés sans pouvoir. Et cela ne cesse de s'aggraver. Succédant au GATT, l'OMC est ainsi devenue, depuis 1995, une institution dotée de pouvoirs supranationaux et placée hors de tout contrôle de la démocratie parlementaire.

Je dis bien «et de la démocratie parlementaire».

    Une fois saisie, elle peut déclarer les législations nationales, en matière de droit du travail, d'environnement ou de santé publique, «contraires à la liberté du commerce» et en demander l'abrogation.

C'est à ce scénario qu'il faut se plier ici aujourd'hui en cette Chambre. Heureusement, les partis d'opposition ont formé une belle coalition entre le Nouveau Parti démocratique et le Bloc québécois. Cela a fait en sorte qu'on humanise un peu l'article 9 en rappelant que les Postes, tant qu'elles existeront au Canada sous cette forme, sont un service public avec une logique, une cohérence et des attentes qu'on doit avoir en fonction d'un service public avec toutes ses forces, ses faiblesses et ses contraintes, et non pas une entreprise privée avec toute sa logique interne.

Je veux souligner ici le rôle de mon collègue de Champlain qui a fait un travail émérite aujourd'hui. Il a fait en sorte que toutes nos forces s'unissent pour faire entendre raison à ce gouvernement qui s'en allait béatement et vicieusement dans la voie du néo-libéralisme qui est en train d'appauvrir les pauvres, d'enrichir les riches. Ainsi, ceux ceux qui s'en tirent «pas pire» comme on dit au Québec, ce n'est pas grâce au Bon Dieu, ni à Notre-Dame du Cap chez nous, ils s'en tirent pas pire parce qu'ils ont réussi à se syndiquer. Ils ont gagné de haute lutte le droit de se syndiquer qu'on ne leur a jamais donné, qu'on a toujours été chercher.

Aujourd'hui, c'est avec des mesures aussi vicieuses que celles auxquelles on assiste qu'il faut dénoncer pour faire en sorte qu'il y ait ici au Canada, ici au Québec, ici en Amérique, ici en Occident, là où c'est surtout développé, parce que le reste, on sait, on ne peut même pas en parler en termes de syndicalisation, que c'est lamentable.

Il faut que les gens et les organismes tels que les syndicats qui ont fait en sorte qu'il y ait une meilleure répartition des richesses aient toujours voix au chapitre et qu'il y ait enfin un débat de plus en plus public, de plus en plus ouvert, de plus en plus énergique.

Il faut faire en sorte que la distribution de la richesse qui a été parcellaire, parce qu'on a mis en place des organismes qui s'appellent les syndicats, qu'on a mis en place des États, notamment au Québec et au Canada qui ont eu comme mandat et qui ont pris leur responsabilité pour que la richesse se distribue, que cela fasse en sorte qu'on continue et qu'on réalise que ce n'est pas en restreignant la richesse entre les mains des multinationales, entre les mains des sociétés supranationales qui subjuguent les États souverains qu'on va aller vers le progrès humain.

Il faut en fait plutôt que la richesse soit mieux distribuée, que les abris fiscaux soient remis en question, que les paradis fiscaux disparaissent. C'est une mesure honteuse qui permet aux plus munis d'entre nous de se moquer littéralement des gagne-petit, de ceux qui paient loyalement leur impôt, et ce par toutes sortes de stratagèmes, dénoncés ici au Canada par le vérificateur général qu'on a tenté d'étouffer et de bâillonner au Comité des finances, j'en ai été témoin.

 

. 2015 + -

Donc, je suis très fier du rôle que l'opposition a joué aujourd'hui et j'espère que le gouvernement n'aura pas une telle attitude à l'avenir.

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, ce projet de loi a suscité, notamment de l'autre côté de la Chambre, beaucoup d'excitation.

J'aimerais cependant, pour les citoyens et les citoyennes qui nous écoutent, revenir un peu aux faits. C'est certain que pour plusieurs personnes et pour les petites entreprises, il y a des inconvénients. Les petites entreprises qui ont besoin des rentrées d'argent et qui ont été obligées de négocier une marge ont eu des problèmes.

Mais, c'est important d'expliquer ce qui s'est passé. Ce qui s'est passé, c'est que la Société des postes est d'abord une société où les relations de travail sont mauvaises. Quand les relations de travail dans une société, qu'elle soit publique ou privée, sont mauvaises, les clients, quels qu'ils soient, peuvent avoir des problèmes. Les négociations sont une occasion pour régler les problèmes. J'ai vu le syndicat chercher à régler les problèmes; j'aurais aimé voir la Société canadienne des postes chercher à régler les problèmes. J'ai pensé que la menace de la grève, d'abord, et ensuite le début de la grève permettrait d'arriver à un règlement.

Mais quand j'ai vu, comme beaucoup de citoyens et de citoyennes, à la télévision les négociateurs patronaux s'en prendre avec leurs mains au négociateur syndical, je me suis dit qu'il y a quelque chose qui ne tourne pas rond là-dedans. J'ai été syndicaliste et jamais je n'ai vu dans une négociation les négociateurs patronaux faire ce qu'on a vu là, jamais. Les négociateurs patronaux sont ceux qui doivent aider à faire régler les différends, même si les deux parties qu'ils représentent ont des intérêts divergents, opposés, aux antipodes.

Alors, quand je les ai vu s'en prendre au négociateur syndical, j'ai soudain perdu toute confiance qu'il puisse y avoir un règlement autrement que par une intervention autre. Je regrette vivement que les travailleurs des postes soient de nouveau obligés de rentrer au travail, forcés par une loi du travail. Cependant, je souhaite tout aussi vivement que leur conflit et que les peines encourues par les citoyens et les PME ne l'aient pas été en vain.

C'est pourquoi je suis extrêmement fière de ce que le Bloc québécois a fait, en collaboration avec le NPD, qui est d'avoir échangé avec le gouvernement pour que la loi soit adoptée dans une même journée, même si nous sommes contre, mais de changer le cadre de la médiation. Il y a un arbitre nommé et cet arbitre, dans le projet de loi initial, avait un mandat parfaitement inacceptable pour une entreprise de service public. Ce mandat, dont je pourrais lire les éléments principaux, disait ceci:

    9. Le médiateur-arbitre doit s'inspirer des conditions de travail qui existent dans les entreprises privées et publiques comparables et qui offrent la marge de manoeuvre nécessaire pour assurer, à court et à long terme, la viabilité économique et la compétitivité de la Société canadienne des postes [...].

 

. 2020 + -

Il n'y a même pas un médiateur dans n'importe quel cas qui serait capable de régler en vertu de cela. C'est de dire qu'il faut créer toutes les conditions pour être en mesure de privatiser. Et le premier point disait «d'obtenir des résultats financiers acceptables pour une entreprise commerciale». Cela va complètement à l'encontre d'un service public.

Le gouvernement a accepté l'amendement, et nous en sommes extrêmement fiers, ce qui fait qu'aujourd'hui, l'article 9 se lit comme suit:

    9. Le médiateur-arbitre doit s'inspirer de la nécessité d'avoir des conditions de travail compatibles avec la Loi sur la Société canadienne des postes

    et la stabilité financière de la Société canadienne des postes.

Il faut que le service s'autofinance et les travailleurs sont d'accord avec cela.

    La nécessité pour celle-ci, sans recours à des hausses indues de tarifs postaux, d'être efficace, d'accroître la productivité et de respecter les normes de service acceptable en signalant l'importance des bonnes relations patronales-syndicales.

Ce que cet amendement donne comme cadre à un médiateur-arbitre, c'est le moyen d'aider à améliorer les relations de travail. Il faut savoir qu'il y a 45 000 travailleurs, c'est un syndicat fort. Est-ce qu'on sait qu'il y a 17 000 travailleurs et travailleuses qui ont des postes occasionnels—sur les 45 000, c'est beaucoup de monde, c'est le tiers—et que le syndicat voulait, à l'occasion de la négociation, dans le cadre d'un régime efficace, efficient, transformer des postes à temps partiel en postes à temps complet?

Dans le cadre où un des problèmes principaux du Canada, c'est l'emploi, est-ce indécent, pour un service public, de se préoccuper de transformer du temps partiel en temps complet? Il y a des pays qui mettent cela de l'avant pour régler leur problème d'emploi. Est-ce que c'est indécent? Est-ce que cela n'a pas de bon sens? C'est le contraire.

Le médiateur-arbitre va être capable de tenir cela en considération. Il a le mandat de tenir tête aussi à la partie patronale. Dans le cas présent, je pense que c'est indispensable, compte tenu, je dois le dire, hélas, que le ministre responsable n'a pas su tenir l'équilibre nécessaire pour qu'il y ait en négociation un rapport de force.

Dans une négociation, quand il y a une partie qui peut toujours dire «non» et qu'elle sait qu'au bout du compte, elle va avoir raison par la loi, il n'y en a pas de négociation dans ce temps-là. Il faut avouer que même si le gouvernement dit: «Ah, nous avons laissé une chance au processus de négociation», en réalité, il n'y en a jamais eu, parce qu'il y avait un ministre qui disait: «Cela va durer quelques jours et ensuite, on va présenter une loi spéciale».

Ce qu'il faut vivement souhaiter, à ce moment-ci, comme Québécois et comme Canadiens, malgré ce conflit et la triste résolution pour les travailleurs qui doivent être extrêmement ulcérés, c'est que le mandat donné au médiateur-arbitre—et j'espère que le gouvernement va consulter le syndicat sur la nomination du médiateur-arbitre—lui permettra de décider et de faire des recommandations qui pourraient faire en sorte qu'enfin, à la Société des postes, il y ait des relations de travail saines pour l'amélioration des services.

Les PME, qui sont celles qui ont le plus souffert, ce qu'elles veulent—j'ai lu le courrier aussi un peu partout—oui, on voulait que les Postes reprennent, mais on veut aussi un service efficace et on veut un service qui réponde aux besoins. À ce moment-là, le médiateur-arbitre va avoir l'occasion de donner suite à cette demande du public, des consommateurs et des PME.

C'est pour cela que je suis extrêmement contente qu'on ait eu la position qu'on a eue, le Bloc québécois et le NPD, au lieu de seulement dire: «Oui, parce qu'il y a de la pression, il faut qu'ils rentrent au travail». Oui, il faut que le service postal recommence, mais pas dans n'importe quelle condition, pas avec des travailleurs qui sont ulcérés, qui ont le sentiment que l'injustice à leur égard a été telle qu'ils n'auront pas le coeur à l'ouvrage.

Les travailleurs et travailleuses dans les entreprises publiques et privées, ce sont eux et elles qui font la qualité du service, qui font le succès d'une entreprise.

 

. 2025 + -

Il faut leur donner l'occasion de jouer un rôle, le rôle qui peut faire en sorte que ces entreprises, et notamment les services publics, jouent leur rôle.

M. Paul Mercier (Terrebonne—Blainville, BQ): Monsieur le Président, je montrerai dans un premier temps que le projet de loi dont nous discutons aujourd'hui constitue une négation, un déni de la notion même de service public. Je montrerai ensuite que ce projet de loi constitue également un déni du droit de grève.

Tout d'abord, ce projet de loi constitue un déni de la notion de service public. Les paramètres que le gouvernement veut imposer au médiateur-arbitre dans sa négociation avec les travailleurs révèlent à tout le moins une conception pour le moins curieuse que se fait le gouvernement de ce qu'est un service public.

À ce titre, de même que la députée de Mercier qui m'a précédé, je vais vous lire, parce qu'il est éloquent, un autre extrait de l'article 9. Aux termes de l'article 9, le médiateur-arbitre doit, et je cite, s'inspirer de:

      a) la nécessité pour celle-ci, sans recours à des hausses indues de tarifs postaux:

    (i) d'obtenir des résultats financiers acceptables pour une entreprise commerciale [...]

Je dis qu'à partir du moment où un tel critère doit guider le médiateur-arbitre, on ne peut plus parler de la Société des postes comme d'un service public. Sa fonction principale n'est plus d'être un service public, mais bien d'être un service rentable.

Encore, s'il ne s'agissait pour le gouvernement que de chercher à ce que la Société des postes soit autofinancée. Mais ce n'est absolument pas le cas. Le gouvernement veut que la Société des postes lui rapporte 200 millions de dollars. Il faut que l'expédition de nos lettres et de nos colis soit rentable, rapporte de l'argent, comme ce serait le cas dans une entreprise commerciale, et la somme que l'on veut obtenir, c'est 200 millions. La Société des postes devient une vache à lait que le gouvernement veut pouvoir traire à sa volonté.

Imaginez ce qui se passerait si ce principe du service public nécessairement rentable se généralisait. Première conséquence, VIA Rail n'existerait plus. VIA Rail, comme toutes les sociétés de transport de passagers par rail, ne peut pas vivre sans subventions et peut encore moins rapporter de l'argent. VIA Rail périrait. Imaginez aussi que, par contagion, les municipalités soient touchées par ce principe du service public rentable. Alors, vous imaginez qu'un policier, avant d'être embauché pour 50 000 $ disons, devrait rapporter des amendes pour 60 000 $. Ce serait joli.

J'en reviens à ma citation de plus tôt. Je la rappelle, car il est dit que la Société des postes doit atteindre ses 200 millions de dollars sans recourir «à des hausses indues de tarifs postaux». Cela revient à dire qu'elle veut atteindre ses objectifs au détriment des travailleurs. Cela, c'est l'évidence même. Et même si nous n'aimons pas les grèves, nous devons comprendre que les travailleurs n'avaient vraiment pas d'autres moyens à leur disposition pour se défendre contre cette véritable agression.

Nous savons tous que cette grève fait souffrir des entreprises et des particuliers, et s'il est une partie de la loi avec laquelle nous sommes d'accord, c'est celle sur le retour au travail le plus vite possible. Mais ce contre quoi nous nous insurgeons, ce sur quoi ne nous pouvons pas être d'accord, c'est sur le point que la négociation que le médiateur-arbitre va entreprendre soit faite dans un esprit mercantile. Nous ne pouvons pas l'accepter, et je suis, comme ma collègue de Mercier notamment, particulièrement fier que le NPD et nous-mêmes ayons composé un amendement qui aura pour effet d'humaniser cette disposition.

 

. 2030 + -

J'en viens maintenant à la deuxième partie de mon exposé qui est de montrer que le projet de loi dont nous discutons est également un déni du droit de grève.

Comment peut-il en être autrement, alors que, dès le régime, les dés sont pipés. Depuis le mois d'août, la Société des postes sait que le gouvernement, s'il y a grève, sortira immédiatement une loi spéciale qui y mettra fin. Alors que signifie, dans des conditions pareilles, le droit de grève? La loi institue un droit de grève, et le gouvernement fait en sorte que ce droit de grève soit brimé, qu'il n'existe pas dans la réalité, puisqu'il dit: «Ah, s'il y a grève, j'interviens et j'y mets fin.» Alors il n'y a plus d'égalité, il n'y a plus le principe même d'une négociation qui est un rapport de force équitable. C'est faussé et c'est faussé par le gouvernement, alors qu'il devrait défendre la loi et l'esprit de la loi. C'est incroyable.

C'est incroyable, mais ce n'est pas tellement incroyable, ce n'est pas étonnant, au contraire. En fait, la Société des postes n'est rien d'autre qu'une créature du Parti libéral. Le président de la Société des postes est un ancien ministre libéral. La Société des postes est truffée d'anciens amis ou d'amis des libéraux. Alors comment s'étonner de ce qui vient de se passer. Dans cette histoire, ce sont des relations, j'allais dire incestueuse, mais disons simplement familiales qui existent entre, d'une part, le gouvernement et, d'autre part, la Société des postes. Le gouvernement, c'est le papa; la Société des postes, c'est le fiston. Le papa va défendre les intérêts du fiston, d'autant plus que le fiston doit lui apporter 200 millions, alors c'est bien normal.

Pour finir, permettez-moi de vous rappeler une citation de Karl Marx, dont tout le monde connaît la réputation un peu fasciste. Karl Marx, sous le régime qu'il appelait capitaliste—nous disons maintenant une société de marché—disait que le pouvoir, quel qu'il soit, démocratique ou autoritaire, est toujours du côté du patron contre les travailleurs. Il disait cela, mais il avait tort, bien que ce qui se passe ici aujourd'hui pourrait donner à croire qu'il avait raison. Il avait tort parce qu'il existe une voie pour que ce ne soit pas vrai, pour que, sous le régime démocratique, ce ne soit pas vrai que le pouvoir est nécessairement du côté du patron. Et cette voie, c'est la social-démocratie.

M. André Bachand: Celle du Québec.

M. Paul Mercier: Monsieur m'arrache les mots de la bouche. Enfin, je suis d'accord avec lui, c'est le gouvernement du Québec, et ce sera aussi celui du Québec quand il sera souverain. Je ne veux pas dire que, sous un Québec souverain, il n'y aura pas de conflit tel que celui que nous voyons aujourd'hui, mais s'il y a un conflit il ne se passera pas d'une façon telle que soit brimés ces deux piliers d'une vie démocratique que sont le droit à un service public qui soit un service public et le droit de grève dans sa réalité.

Le président suppléant (M. McClelland): Nous reprenons le débat avec l'honorable députée de Vancouver-Est.

[Traduction]

Vous partagez le temps qui vous est alloué. Il y aura deux périodes de dix minutes, et cinq minutes réservées aux questions et observations.

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, je partagerai le temps qui m'est accordé avec le député de Winnipeg—Transcona.

Je remercie le député du Bloc québécois de ses excellentes observations. Nous partageons son avis à peu près sur tout. Il est bon que le Bloc québécois et le NPD soient solidaires aujourd'hui à la Chambre pour défendre les droits des travailleurs. Il s'agit véritablement d'un projet de loi de retour au travail historique.

Je voudrais parler de plusieurs aspects de cette mesure législative de retour au travail, le projet de loi C-24. Je veux d'abord expliquer pourquoi cette mesure a été nécessaire au premier chef. On n'aurait jamais envisagé l'adoption d'un projet de loi de retour au travail si le gouvernement avait montré sa détermination politique et sa volonté de faire en sorte que le processus de négociation collective fonctionne.

Si le gouvernement avait à coeur le sort de la Société canadienne des postes à titre d'organisme public, nous ne serions pas en train de discuter aujourd'hui de ce projet de loi draconien de retour au travail.

 

. 2035 + -

À mesure que nous apprenons ce qui s'est produit, ce qui est vraiment arrivé pendant les dernières semaines et les derniers mois, et alors que nous en sommes au neuvième jour de la grève, il nous semble de plus en plus clair que le ministre et le gouvernement avaient un plan secret. Le gouvernement était déterminé à présenter ce projet de loi de retour au travail.

Il est indiscutable que tous les parlementaires ont entendu les vives inquiétudes de leurs électeurs, des entreprises, des retraités et des autres Canadiens qui dépendent de la Société canadienne des postes. Nous comprenons leurs préoccupations.

Pourquoi la situation s'est-elle tant détériorée? Pourquoi le gouvernement en est-il venu à présenter à toutes vapeurs sa loi de retour au travail?

Le rôle fondamental et le mandat de Postes Canada sont en jeu. Le gouvernement a créé une crise financière et administrative. Si nous examinons les faits, nous constatons que le gouvernement a demandé à Postes Canada de payer des dividendes ou, disons, de lui verser des profits. Cette société d'État doit verser au gouvernement plus de 200 millions de dollars en profits en cinq ans.

Cela contredit directement tout ce que les libéraux défendaient en 1990, lorsqu'ils étaient dans l'opposition. Ils soutenaient alors que Postes Canada devait générer seulement les fonds de fonctionnement nécessaires pour payer ses propres immobilisations afin de maintenir et d'améliorer les services. Telle était la position des libéraux en 1990. Ils défendaient et soutenaient une société d'État, mais depuis, ils ont changé leur fusil d'épaule.

Comprendre les véritables intentions du gouvernement c'est comprendre pourquoi nous sommes ici ce soir pour débattre du projet de loi. Nous croyons que le gouvernement est en train de préparer le terrain en vue de nouvelles privatisations. Il prend délibérément des mesures qui détruiront Postes Canada. Le gouvernement a réclamé des profits élevés. Il a déjà créé un système de distribution du courrier à deux niveaux.

Nous avons tous assisté au drame de la fermeture, par Postes Canada, de plus de 1 700 bureaux de poste en région rurale et de 175 en région urbaine. Nous avons déjà assisté à une privatisation massive.

Le gouvernement déstabilise délibérément la crédibilité de la Société canadienne des postes pour créer un climat politique qui vise à miner les employés de cette société et à aller de l'avant avec son programme de privatisation.

Les membres du Syndicat canadien des postiers ont un intérêt légitime qui consiste à protéger leurs emplois et à obtenir des emplois à plein temps.

N'est-il pas étrange que les parlementaires, y compris les ministériels, prétendent se préoccuper du chômage élevé? Les membres du STTP luttent d'arrache-pied pour conserver des emplois dans un service public qui revêt une importance cruciale. Qu'obtiennent-ils? Ils obtiennent un projet de loi qui les écrase, qui lie les mains d'un arbitre afin qu'il leur fasse avaler de force le programme du gouvernement. Ensuite, pour envenimer les choses, ce projet de loi impose un règlement salarial qui est inférieur à celui qui avait été proposé à la table des négociations.

Ce projet de loi est très draconien et ses amendes s'élèvent à 50 000 $ et même à 100 000 $ par jour. Nous devons cesser de blâmer les travailleurs. Nous devons exiger que le gouvernement agisse de façon responsable en tant qu'employeur. Il a déjà montré qu'il ne se soucie pas de l'équité salariale après 13 années. Maintenant, il a aussi abandonné la négociation collective dans sa détermination à déstabiliser la Société canadienne des postes au détriment des travailleurs.

Il est indispensable que le gouvernement se penche sérieusement sur les griefs de longue date à la Société canadienne des postes et qu'il appuie la création d'un climat patronal-syndical propice à la stabilité de la société et de ses employés.

Ce projet de loi de retour au travail est draconien et maladroit et il montre le vrai programme du gouvernement. L'amendement que nous avons présenté aujourd'hui constituait un effort véritable pour apporter au moins un peu d'équité à ce projet de loi. En dernière analyse, nous, du NPD, rejetons ce projet de loi. Nous appuyons les droits des travailleurs à la négociation collective et à la grève. Nous appuyons l'élaboration d'une société publique saine et du meilleur service postal pour tous les Canadiens.

 

. 2040 + -

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, j'ai eu l'occasion d'intervenir quelques minutes tout à l'heure à l'étape de la deuxième lecture. Je voudrais reprendre là où je m'étais arrêté.

Je disais que les mesures ordonnant la reprise du travail faisaient ressortir ce qu'il y a de mieux et ce qu'il y a de pire au Parlement. Je n'ai pas réussi à parler de ce qu'il y a de mieux, mais j'aimerais m'attarder encore un peu à ce qu'il y a de pire.

Une voix: Il y a d'avantage à dire.

M. Bill Blaikie: Il y a davantage à dire, comme le fait remarquer le député de Winnipeg-Centre.

Je vais commencer par féliciter le député de Winnipeg-Centre pour l'excellent travail qu'il a accompli aujourd'hui en réussissant à faire apporter un amendement constructif à cette mesure de retour au travail.

Il a empêché le gouvernement de faire progresser la privatisation de la Société canadienne des postes à la faveur d'une mesure législative d'urgence. Le projet de loi C-24 consiste en réalité à énoncer les instructions initiales au médiateur-arbitre. Ils tentent de faire indirectement ce que le gouvernement n'a pas eu jusqu'ici le courage de faire directement, soit parler de la privatisation de la Société canadienne des postes qui figure à son plan d'action, comme certains le croient.

Cela dit, quand je dis que cela fait ressortir ce qu'il y a de pire au Parlement, je veux parler en réalité de la motion no 8 que le gouvernement a proposée hier. Comme nous étions en train de négocier avec le gouvernement à propos de l'amendement auquel je viens de faire allusion, nous avons décidé de ne pas nous opposer à la motion no 8 dans le contexte de nos discussions avec le gouvernement pour en arriver à une entente sur cet amendement très important que nous proposions.

Tous les députés devraient se préoccuper de la nature de cette motion. Essentiellement, le gouvernement aurait pu faire étudier sa mesure législative sans opposition et donc avec le consentement de la Chambre. Il aurait cependant pu le faire sans le consentement de la Chambre. Si 25 députés s'étaient levés à leur place, il aurait pu être empêché de le faire en un jour. Les députés ministériels auraient pu débattre de la motion jusqu'à ce que les députés d'opposition soient épuisés. À ce moment-là, la majorité des députés auraient pu se prononcer sur la motion et il aurait été décidé par la volonté de la majorité à la Chambre, non par le consentement de la Chambre, de procéder à l'étude de la mesure législative à toutes les étapes en une seule journée.

Cela veut dire que le gouvernement a toujours en réserve ce qu'on pourrait appeler son pouvoir de dictature parlementaire. Toutes les autres choses que nous faisons ici quand nous avons la première lecture suivie de la deuxième lecture, puis du renvoi au comité, nous pouvons les faire à condition que le gouvernement ne veuille pas vraiment faire approuver tout de suite son projet de loi.

On ne le fait pas par obligation. Des jours ou des semaines comme ceux que nous vivons, nous constatons que cela ne fait pas nécessairement partie de notre façon d'agir à la Chambre. Il s'agit simplement d'une convention. C'est gratuit. C'est un processus que le gouvernement peut choisir s'il le veut. Cela devrait inquiéter tous les députés, en particulier ceux de l'opposition.

Plus tôt, je voulais dire que j'ai été surpris que le Parti réformiste ait permis que son enthousiasme à remettre les gens au travail fasse oublier à ses députés le précédent qu'ils laissaient le gouvernement établir en utilisant, une fois de plus, ce règlement rigoureux sans que le Parti réformiste ne s'y oppose et ne demande rien en retour.

C'est une tragédie au Parlement dans la mesure où nous voulons tous croire que le Parti réformiste est sincère quand il s'oppose à la façon dont le gouvernement leurre le Parlement. Il s'agit d'un abus fondamental du Parlement, mais il n'y a pas la moindre protestation venant du Parti réformiste.

Je comprends pourquoi les conservateurs sont restés silencieux, parce que ce sont eux qui ont d'abord proposé ce règlement. Sauf erreur, le Parti conservateur l'a présenté en 1991. Les députés conservateurs auraient été trop embarrassés de se lever pour dénoncer ce règlement, puisque c'est eux qui l'ont adopté.

 

. 2045 + -

Je signale aussi que, lorsque les conservateurs ont proposé ce règlement particulier, les libéraux l'ont dénoncé comme étant une trahison envers le Parlement. Je ne comprends donc pas pourquoi ils ont eu recours à ce règlement ni pourquoi ils n'ont pas hésité à utiliser un instrument qu'ils ont tant décrié, surtout quand ils étaient dans l'opposition.

Le meilleur, c'est ce que nous avons vu aujourd'hui au comité plénier. Un grand nombre de députés étaient présents. C'est peut-être ainsi que les Canadiens imaginent le Parlement, tous les députés étant présents à la Chambre, des amendements étant débattus et le gouvernement devant réellement communiquer avec l'opposition pour parvenir à une sorte de compromis.

Dans le cas présent, les libéraux ont estimé, pour une raison quelconque, qu'ils devaient obtenir l'approbation de certains partis d'opposition. Ils n'ont pas eu à traiter avec le Parti réformiste, car ils avaient déjà convaincu ses membres. Cependant, pour une raison ou pour une autre, ils ont jugé utile d'avoir le NPD et le Bloc dans leur camp, de sorte que nous avons pu amender ce projet de loi d'une manière constructive.

N'est-ce pas là le genre de Parlement que nous devrions avoir tout le temps, au lieu d'avoir ce qui est habituellement le cas avec un gouvernement majoritaire, une sorte de dictature parlementaire pendant quatre ans, jusqu'à ce que d'autres élections soient tenues pour déterminer quels députés formeront la dictature collective pendant les quatre années suivantes?

C'est ce que j'entendais par un Parlement à son meilleur. Tout le monde participe. Le gouvernement doit communiquer avec l'opposition d'une manière réelle, et non pour la forme.

Voilà ma préoccupation sur le plan de la procédure, mais, pendant le temps qu'il me reste, je voudrais dire quelques mots au sujet de la question qui nous occupe, à savoir les mesures prises par la Société canadienne des postes et le gouvernement et la situation dans laquelle se trouvent les membres du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes.

Je voudrais traiter d'un argument précis, car, de toute évidence, je ne peux pas parler de tout, et c'est un argument que nous entendons parfois. Nous l'entendons chez certains députés. Nous l'entendons dans la rue. Nous l'entendons ici et là. Les gens disent que ces employés sont bien payés. De quoi se plaignent-ils? Comment ont-ils le culot de faire la grève, de demander plus, d'exiger la sécurité d'emploi ou d'exiger que les emplois qui existent déjà soient protégés?

Le Canada, ce pays qu'on aime, ce pays que les Nations Unies place encore et encore au premier ou au second rang des pays du monde, a été construit en offrant des salaires raisonnables et non de faibles salaires. Chaque fois que des Canadiens luttent pour garder de bons salaires, tout le monde devrait se réjouir. Ils se battent pour nous tous au moment où nous nous dirigeons vers l'économie de faibles salaires que nous préparent, année après année, les administrateurs d'entreprises de notre pays, en commençant par l'Accord de libre-échange Canada—États-Unis, l'ALENA, l'OMC et, maintenant, l'accord multilatéral sur l'investissement. Voilà ce qui arrive.

Nous ne rendons pas service à nos enfants et à nos petits-enfants en acceptant cela, en disant que nous devons devenir plus concurrentiels. Cela veut fondamentalement dire que des familles ne peuvent plus joindre les deux bouts avec un seul revenu. Ce n'est plus seulement une question de salaires, élevés ou faibles, mais une question de tissu social et le fait que les familles ne peuvent plus vivre avec un seul bas revenu.

Beaucoup de familles peuvent vivre avec un revenu raisonnable ou un revenu élevé. Entendons par revenu élevé, un revenu de travailleur syndiqué qui a permis à toute une génération de Canadiens d'acheter une maison, d'envoyer leurs enfants à l'université, d'avoir une voiture neuve de temps à autre et de se payer des loisirs. Tout cela n'était pas possible pour la génération antérieure et voici que l'on dit que ce n'est pas concurrentiel et qu'on n'en veut plus. On veut se conformer à un autre modèle économique mondial dans lequel il faut tous bûcher comme des fourmis pour arriver à vivre et cela, sur l'ordre de l'élite corporative, qui veut nous accorder de moins en moins en salaires et en avantages sociaux.

 

. 2050 + -

Le NPD n'est pas d'accord. Nous ne sommes pas d'accord quand il s'agit des postiers. Nous ne sommes pas d'accord quand il s'agit des cheminots. Nous ne sommes pas d'accord, quels que soient les travailleurs dont il s'agit.

Nous sommes tous concernés par cette affaire. Un groupe de personnes qui a toujours été bien payé se voit attaquer et demander d'accepter de moins en moins d'argent, qu'il s'agisse des employés de la Défense nationale, dont le travail est confié à la sous-traitance ou transformé au moyen de modes d'exécution différents et autres euphémismes, ou qui sont payés la moitié de ce qu'ils étaient payés afin d'épargner de l'argent. Parfois, il est tout aussi coûteux de sous-traiter. Les personnes qui font les travaux à contrat amassent de l'argent sur le dos des travailleurs au lieu que cet argent aille à des gens qui avaient l'habitude de toucher le même montant d'argent sous la forme d'un salaire décent.

Tout cela est mauvais. Tous les Canadiens devraient se serrer les coudes et protester contre l'idée que nous allons devoir accepter des salaires bas et que nous ne pourrons plus oeuvrer dans les clubs communautaires, les groupes de bénévoles et toutes ces autres mouvements créés par les Canadiens quand ils ne devaient pas passer leur vie entière à essayer de gagner suffisamment d'argent pour joindre les deux bouts. Les Canadiens devraient pouvoir compter sur un salaire décent et avoir le temps de s'occuper de leurs enfants et de leur communauté. Nous ne pouvons plus le faire à cause de mesures législatives comme celle-ci.

M. Mark Muise (West Nova, PC): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec mon collègue de Richmond—Arthabaska.

[Français]

La seule chose que l'on puisse dire aujourd'hui c'est: enfin. Mais il faut aussi se demander pourquoi il a fallu tellement de temps au gouvernement pour démontrer un peu de leadership dans le conflit de travail à la Société canadienne des postes.

Le 17 novembre dernier, il y a exactement deux semaines, nous avons demandé au ministre du Travail ce qu'il attendait pour présenter un projet de loi de retour au travail. Il nous a alors répondu que nous aurions intérêt à porter attention aux événements du passé et du présent plutôt que de nous soucier des événements à venir.

C'était une réponse qui témoignait très bien de l'attitude de laisser-faire du ministre qui nous a mis dans le pétrin dans lequel nous nous trouvons aujourd'hui. C'est justement parce que je me suis soucié des événements du passé et du présent que je l'implorais de présenter un projet de loi de retour au travail.

Les négociations ont commencé en avril, il y a plus de huit mois. Elles semblaient se détériorer de jour en jour et rien n'indiquait que l'on faisait du progrès. Si le ministre s'était enlevé la tête des nuages, il aurait bien vu qu'un conflit aux Postes aurait des conséquences terribles pour bien des Canadiens. Il aurait agi en conséquence. Mais il a refusé de le faire.

Ainsi, des milliers d'entreprises ont perdu de l'argent et des milliers de Canadiens ont connu des contretemps et des casse-têtes qui auraient pu être évités.

Prenons l'exemple des petites et moyennes entreprises. Mercredi dernier, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante révélait les résultats d'un sondage auprès de ses membres. Ce sondage indiquait que la grève des Postes coûtait, en moyenne, 240 $ par jour en coûts de livraison plus élevés, en ventes perdues et en paiements en retard. Au total, on estime qu'il s'agit de pertes de 200 millions de dollars par jour pour les petites et moyennes entreprises. C'est absolument incroyable. Et le gouvernement a laissé faire cela.

La période des Fêtes est une période très importante, voire primordiale, pour bien des entreprises de vente par correspondance, mais c'est aussi une période importante pour les organisations de charité.

Celles-ci ont connu un ralentissement flagrant dans leurs levées de fonds. Qu'est-ce que le gouvernement entend répondre à ces organisations qui ne pourront pas effectuer leur travail dans les communautés à cause du manque de courage du ministre du Travail et des manigances du ministre responsable de la Société canadienne des postes? Il n'y a pas grand-chose à dire à cela, n'est-ce pas?

 

. 2055 + -

Les coûts sociaux du conflit postal ne s'arrêtent pas non plus aux organismes de charité. Permettez-moi de citer une partie d'une lettre que j'ai reçue par courrier électronique à mon bureau.

[Traduction]

Elle se lit ainsi:

    Je veux payer la pension alimentaire de mes enfants, que j'envoie toujours par la poste. Mes enfants ont besoin de cet argent pour vivre. La Société canadienne des postes, le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes et le gouvernement du Canada m'empêchent de respecter mes obligations.

    La province de l'Ontario considère que j'ai des arrérages si je manque un paiement. Or, nous n'avons rien reçu du gouvernement provincial pour nous dire quoi faire advenant une grève des postes. Pourtant, toutes les entreprises avaient des plans en ce sens.

    Le projet de loi C-41 du gouvernement fédéral me fera perdre mon permis de conduire, mon passeport, ma cote de crédit, alouette!, à cause de leur échec.

    Des enfants ont faim; des mères se battent parce qu'elles sont jetées à la rue. Ni le gouvernement ni le syndicat ne s'en fait pour autant. Pourquoi n'ont-ils pas pensé aux femmes et aux enfants avant de faire cette grève? Pourquoi ne pensent-ils pas aux enfants et aux femmes?

Je suis sûr que vous serez d'accord pour dire que c'est là une lettre très éloquente, qui montre bien les conséquences de cette grève pour tout le monde, surtout pour les moins riches.

[Français]

Mes collègues ont aussi soulevé à la Chambre le cas de cet homme qui ne pouvait se procurer l'insuline dont il avait besoin parce qu'il n'avait pas reçu son chèque du gouvernement.

[Traduction]

Mais les histoires d'horreurs ne s'arrêtent pas là. À Terre-Neuve, il semblerait que le système de distribution que le ministère du Développement des ressources humaines a mis en place s'est révélé un échec monumental. Lorsque les bénéficiaires se présentaient au centre de distribution, ils se voyaient remettre un imprimé d'ordinateur qu'ils devaient signer pour accuser réception des chèques du gouvernement. Mais le pire, c'est que sur l'imprimé d'ordinateur figurait les noms, les adresses et les montants des chèques de tous les bénéficiaires de la localité. La situation a été portée à la connaissance du commissaire à la vie privée qui dira si l'on a bel et bien enfreint la Loi sur la protection des renseignements personnels.

Pourquoi cela s'est-il produit? Il avait pourtant été convenu que les travailleurs postaux distribueraient les chèques du gouvernement en cas de grève. Mais le gouvernement a fait fi de cette entente, préférant mettre de l'avant son propre plan.

[Français]

Ce qui est le plus ridicule dans tout ça, c'est que le ministre savait, le jeudi 30 octobre dernier, que le commissaire-conciliateur préparait son rapport et qu'une grève devait être déclenchée sept jours plus tard à la Société canadienne des postes. Même lorsque le rapport s'est retrouvé sur son bureau, le mardi suivant, il a choisi de ne rien faire.

Plutôt que de présenter un projet de loi de retour au travail de nature préventive, il y a plus d'un mois, il a choisi de permettre une interruption du service postal canadien et, ce faisant, de nuire aux entreprises et aux organisations de bienfaisance canadiennes et de causer des inconvénients à des millions de Canadiens. C'est absolument honteux, surtout parce que la solution était pourtant si facile.

En octobre 1991, notre gouvernement a fait adopter la Loi prévoyant le maintien des services postaux. Cette loi a empêché les deux parties d'infliger un lock-out ou une grève à l'économie canadienne.

Il a également mis en place un mécanisme de règlement des différends qui a permis à Postes Canada et au syndicat des postiers du Canada de conclure un règlement à l'amiable sans le bouleversement coûteux et douloureux associé à une grève. Mais à cause de l'absence de leadership du gouvernement libéral, nous avons dû attendre aujourd'hui pour une solution.

C'est un peu trop tard pour les milliers d'entreprises et les organismes de charité qui ont perdu de l'argent. C'est aussi un peu trop tard pour les milliers de Canadiens et de Canadiennes qui comptent sur le service postal et qui ont subi les conséquences de son arrêt.

C'est très dommage que ce soit eux qui fassent les frais de l'incompétence du gouvernement.

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le Président, je suis surpris de l'allocution que vient de faire le député qui m'a précédé, de voir à quel point il a fait un discours uniquement axé sur le besoin de services, sans critiquer le non-respect de la Société des postes dans cette négociation envers son personnel.

 

. 2100 + -

Plusieurs députés en ont parlé, surtout ceux du NPD et du Bloc québécois, et ils ont bel et bien démontré que ce fut une véritable négociation faussée. En fait, les dés étaient pipés avant qu'elle ne commence et on a fait semblant de négocier. On s'est ramassés avec un conflit, sachant que le gouvernement était complice. Le discours du ministre tout à l'heure a bien confirmé—il s'est adressé à la Chambre comme s'il était président de la Société canadienne des postes—qu'il y avait collusion entre la Société canadienne des postes et le ministre responsable, plutôt que d'avoir un ministre qui, objectivement, essaie de rapprocher les parties.

Donc, le député met tous les torts sur les syndiqués d'être à l'extérieur et il se plaint que les services à la population ne sont pas rendus. Mais je trouve qu'il a été tendre envers le gouvernement dans son allocution, et je lui demande ce qu'il pense que cela va donner comme climat de travail, le fait que dans cette loi le gouvernement inscrive le taux de salaire inférieur à ce que la Société des postes avait offert. La Société des postes avait offert un salaire plus gros que celui qui est inscrit dans le projet de loi.

Ne pense-t-il pas qu'un tel agissement va à l'encontre des habitudes lorsqu'il y a un tel projet de loi? On part de ce qu'on était prêts à offrir et on demande au médiateur d'essayer de concilier les deux parties, mais pas avant de commencer la conciliation avec ce nouveau médiateur nommé par le projet de loi, médiateur nommé par le ministre. On a refusé notre amendement à l'article 8 pour nommer un médiateur en consultation avec les deux parties.

Alors, je lui demande s'il serait d'accord pour recommander au gouvernement que le médiateur vienne d'une consultation des deux parties, et, deuxièmement, que le salaire qui est inscrit dans le projet de loi soit le salaire qui était offert par la Société des postes.

M. Mark Muise: Monsieur le Président, ma réponse à la question, c'est oui. On a voté en faveur de cela.

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt mon distingué collègue, mais j'aimerais obtenir son avis concernant le député d'Anjou—Rivière-des-Prairies.

Vous savez, je suis issu du monde de l'enseignement. J'ai vu mon distingué camarade, le député d'Anjou—Rivière-des-Prairies, venir prêcher dans la région de l'amiante les bienfaits de la CEQ. Lui-même avait cherché ses directives du fameux colonel, le colonel Kadhafi, dont vous vous rappelez encore sûrement.

En 1972, au Québec, il y a eu une loi spéciale semblable à celle sur laquelle nous sommes sur le point de voter. Mon chef de l'époque, qui est devenu aujourd'hui le bon député des pauvres d'Anjou—Rivière-des-Prairies, va s'apprêter à voter en faveur d'une loi identique à celle qui avait été passée au Québec sous les ordres de Robert Bourassa. On n'avait pas hésité un instant à le mettre en prison avec ses deux complices du temps, Marcel Pépin et Louis Laberge. Il a fait douze mois de prison pour avoir invité ses sujets à défier la loi. Je demande à mon collègue ce qu'il pense aujourd'hui d'un homme comme le député d'Anjou—Rivière-des-Prairies qui est une vraie girouette là où se trouve le pouvoir, le pouvoir de l'argent.

M. Denis Coderre: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je ne voudrais pas comparer les marxistes-léninistes de part et d'autre, mais j'aimerais bien que notre distingué collègue, qui est un homme honorable, retire...

Le président suppléant (M. McClelland): Je ne pense pas que ce soit un recours au Règlement, mais un débat.

[Traduction]

Le député de West Nova a la parole pour une réponse.

 

. 2105 + -

M. Mark Muise: Monsieur le Président, la vraie question ici aujourd'hui a trait à ce que la population, les petites et moyennes entreprises, et les oeuvres charitables ont enduré depuis le début de la grève des postes. C'est tout ce qui m'intéresse et telle est la raison d'être de mes interventions ce soir.

[Français]

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, d'abord, j'aimerais faire quelques commentaires, parce que toute la journée, on a entendu des remarques sur le projet de loi qui est déposé devant nous, projet de loi qui force le retour au travail. Ce n'est pas un projet de loi sur lequel le Parti conservateur vote de gaieté de coeur. Je dois dire cependant qu'on est quand même logiques avec nos interventions du passé.

Je commenterai les propos de certains honorables députés du Bloc et du NPD, entre autres, l'honorable député du NPD qui est intervenu avant mon confrère et qui disait que c'était une dictature parlementaire, que les partis se chicanaient lors des élections pour avoir une dictature parlementaire.

Chose certaine, les néo-démocrates n'auront aucune chance de faire partie de cette soit-disant dictature parlementaire. Cependant, je leur rappellerai qu'ils sont très proches d'une dictature prolétaire, laquelle n'a pas fonctionné en Europe, d'ailleurs. Alors, on n'a pas de leçon à donner sur le type de dictature que le NPD pourrait proposer.

Ce que l'on entend beaucoup aussi, à tort, c'est que la Société canadienne des postes va devenir une vache à lait, une société de la Couronne, qu'elle devrait faire juste ses frais. J'aimerais dire à nos amis du Bloc qu'au Québec, les mêmes critiques à l'endroit d'Hydro-Québec sont faites quotidiennement. Hydro-Québec augmente ses tarifs ou coupe dans son personnel pour faire augmenter les dividendes au niveau du gouvernement du Québec.

Il faut faire attention dans les commentaires que l'on fait. On peut être contre la loi qui nous est présentée aujourd'hui, on peut être contre bien des choses, mais lorsque l'on donne des exemples, je pense qu'il faut les respecter. Et lorsqu'on parle du Québec comme étant le royaume de la social-démocratie, je rappellerais que le gouvernement du Québec, qu'importe la couleur, a été le gouvernement, depuis les années 1975-1976, qui a introduit le plus de lois spéciales de retour au travail et de fixation des conditions d'emploi. L'honorable député de Frontenac—Mégantic devrait le savoir. Les échelles salariales des professeurs au Québec sont gelées depuis plus de six à huit ans. Il devrait savoir cela. Et c'est un gouvernement social-démocrate qui l'a fait.

Cela étant dit, les députés bloquistes, de même que les néo-démocrates, ont fait les gorges chaudes de l'amendement qu'ils ont réussi à arracher à ce gouvernement de dictature parlementaire qu'est le Parti libéral au niveau de l'article 9, que nous n'avons pas appuyé.

Je leur rappelle simplement, sans trop les décourager, qu'à l'article 9, on parle de la stabilité financière, et caetera, et on dit qu'on doit en tenir compte sans recours à des hausses indues des tarifs postaux. Ils auraient peut-être dû écouter ce que le ministre responsable de la Société des postes disait cet après-midi, qu'il s'était engagé, pour les deux prochaines années, à ce qu'il n'y ait aucune hausse du prix du timbre et qu'à la troisième année, c'était le taux d'inflation. Alors, cet article ne veut absolument rien dire, mais je ne veux pas les décourager, cela fait partie du jeu parlementaire.

L'autre chose, et le pire dans cette loi aujourd'hui, comme celle de 1991, comme toutes les lois antérieures, c'est qu'effectivement, le processus normal de négociation n'a pas eu lieu. On n'a pas besoin d'une grève pour savoir que le processus n'a pas lieu. Il y a un problème à la Société canadienne des postes et cela, depuis des années, depuis des décennies.

Ce que plusieurs gouvernements antérieurs ont essayé de faire—souvenons-nous que dans le temps, il y avait des grèves, des conflits de travail à peu près à toutes les années et demie, deux ans, les postiers d'un côté et quelques années après, c'étaient les facteurs—c'est d'unifier cela, faire un immense syndicat pour faire en sorte que le processus de négociation connaisse un meilleur équilibre. Malheureusement, on peut dire que cela n'a pas fonctionné.

Cependant, aujourd'hui, dans le projet de loi qui a été déposé en cette Chambre, il y a un seul parti qui a proposé des amendements pour faire en sorte que ce type de loi ne soit plus jamais présentée. On a présenté trois amendements, dont un à l'article 21, et je n'ai pas vu les néo-démocrates, les bloquistes ou les libéraux voter en faveur de cela.

On obligeait le gouvernement, on obligeait l'employeur, la Société canadienne des postes, on obligeait le syndicat à commencer immédiatement—et c'était dans la loi—un processus de consultation et un processus de révision du système de ratification de négociation de la convention collective. Mais non, on décrie cela, mais lorsque l'on arrive avec un processus de solution avant la fin de la prochaine convention collective, on n'entend plus rien. Ils sont tous disparus.

 

. 2110 + -

Lorsqu'on veut apporter les vrais mécanismes de solution, ils ne sont pas là. Nous, on a apporté des solutions. Effectivement, cependant, il faut le reconnaître, il y a déséquilibre dans le processus de négociation à savoir qu'il n'y en a pas de processus de négociation. Lorsqu'on fait affaire avec des sociétés d'État, il y a toujours l'épée de Damoclès du gouvernement, une loi spéciale, et ce, d'un océan à l'autre. Depuis 30 ans, des lois spéciales, on en a eu, peu importe que ce soient des sociaux-démocrates, des néo-démocrates, des blancs, des rouges, des bleus, des partis de droite ou de gauche. C'est rendu une mode, on a coupé partout. On a commencé à gérer avec des lois spéciales.

Cependant, j'aimerais que les autres partis retiennent, et j'aimerais que les gens, autant du syndicat que de la Société canadienne des postes, que le public se souvienne que nous avons apporté des solutions pour faire en sorte que ça n'arrive plus jamais, que ça n'arrive plus jamais une grève, que ça n'arrive plus jamais une loi spéciale, et ce fut niet de la part de nos camarades néo-démocrates et bloquistes. Rien. Les réformistes, tout ce qu'ils ont eu eux, cependant, c'est un petit mécanisme dans la loi spéciale, un processus d'arbitrage obligatoire pour cette convention, mais on ne parle pas de l'avenir. Franchement, c'est extrêmement décevant.

Il faut arrêter de jouer à la vierge offensée, parce que les petits cousins à Québec de nos amis du Bloc font exactement la même chose. Souvenons-nous des négociations de l'année passée et de cette année. Avant d'avoir l'honneur d'être élu député, j'étais maire d'une ville. Une facture nous est arrivée du gouvernement. Quelle soit bonne ou pas bonne, ce n'est pas la question. On disait au syndicat et à tout le monde: «Il faut qu'il y ait une coupure de 6 p. 100 dans la masse salariale, sinon on fait une loi spéciale.» Quel genre de négociation est-ce? Ce n'est pas de la négociation. On retrouve la même chose à la Société canadienne des postes.

Alors ce que nous soulevons aujourd'hui, c'est de rétablir un processus, parce que les députés conservateurs sont conscients d'une chose, c'est que le Code du travail existe, la Charte des droits existe, le droit de se regrouper en syndicat est un droit qu'on ne peut pas toucher. Cependant, lorsqu'on parle d'un service dit essentiel au bon fonctionnement d'un pays, d'une province ou d'une région, il faut s'interroger sur les mécanismes de négociation. Il faut peut-être arrêter de crier au meurtre et peut-être s'asseoir et trouver des solutions. Mais non, nos amis d'à côté, majoritairement ceux de gauche mais également ceux de droite, ne sont pas d'accord qu'on puisse s'asseoir et rétablir un processus de négociation normal. On l'a vu, on le voit partout, on le voit dans la région d'Asbestos entre autres, avec la mine, que les relations de travail se sont beaucoup améliorées. Pourquoi? Parce qu'on a mis en place une coopérative. C'est un exemple qui a eu lieu dans une ville au Québec. D'ailleurs, mon ami de Frontenac—Mégantic est au courant de cela.

On est capables de prendre des initiatives, on est capables d'être original, on est capables, comme on l'a fait, de proposer des amendements. Cependant, ce qu'on demande aux autres c'est d'être capables d'écouter, d'être capables de s'ouvrir l'esprit, d'arrêter d'être partisan en disant: «On est en faveur des syndicats» ou «On est en faveur des employeurs». Ce n'est pas ça. On est en faveur du monde, on est en faveur des Canadiens et des Canadiennes, des Québécoises et les Québécois. C'est ça, l'avis du Parti conservateur.

Cela étant dit, je vais terminer là-dessus. Si les gens ont bien écouté, le ministre responsable de la Société canadienne des postes s'est engagé cet après-midi à faire en sorte de regarder le processus et même regarder le rôle de la Société canadienne des postes. J'invite tout le monde à être très ouvert d'esprit et à suivre le ministre de très près parce qu'il nous dit souvent des choses qu'il ne fait pas.

De notre côté, on va suivre le ministre. Ne vous surprenez pas, monsieur le Président, on prend l'engagement ici, avec notre député responsable de la Société canadienne des postes, de faire en sorte de vous apporter des éléments de solution. Ce qu'on espère, c'est que nos amis dans cette Chambre auront l'ouverture d'esprit de collaborer avec le Parti conservateur pour faire en sorte que plus jamais, et je répète, plus jamais il n'y aura de loi spéciale pour obliger le retour au travail dans des conditions qui ne plaisent ni à Ève ni à Adam.

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): Y a-t-il des questions ou des observations? Veuillez être brefs. Je vais donner la parole aux députés de Richelieu, de Waterloo—Wellington et de Hamilton—Wentworth dans cet ordre.

[Français]

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le Président, je vous remercie de m'accorder la parole. Je suis surpris d'entendre l'orateur qui vient de parler.

 

. 2115 + -

C'est un député qui a été élu au Québec, et nécessairement, dans son message pendant la campagne électorale, il a dit qu'il défendrait les intérêts du Québec. Or, dans une situation quand même assez exceptionnelle, dans un débat important sur le retour forcé des travailleurs des Postes, il vient dire ici à la Chambre des communes que le Québec a fait ci, le Québec a fait ça. Il vient faire un discours anti-Québec. C'est surprenant, alors qu'on devrait parler des Postes.

Deuxièmement, il y a une contradiction dans son discours. Il a parlé de dictature. Je m'interroge à savoir s'il est vraiment venu défendre les intérêts du Québec.

Il a parlé d'une dictature en parlant du gouvernement. Or, quand un gouvernement agit de façon dictatoriale, est-ce qu'il ne serait pas normal, monsieur le député...

Le président suppléant (M. McClelland): La parole est au député de Richmond—Arthabaska.

M. Louis Plamondon: J'en ai pour deux minutes seulement, monsieur le Président.

Le président suppléant (M. McClelland): Non.

M. André Bachand: Monsieur le Président, je pense que si le député a bien écouté, et je l'invite à lire le hansard, il pourra savoir que lorsque j'ai parlé du Québec c'est un exemple parmi tant d'autres.

Ce que je disais c'est qu'au Québec en particulier...

M. Louis Plamondon: Vous avez calé le Québec.

M. André Bachand: Un de ses honorables confrères du Bloc québécois a cité le Québec comme étant un exemple de social-démocratie, que là tout allait bien, qu'il n'y avait pas de loi spéciale.

Ce que je disais c'est que d'un océan à l'autre, de Terre-Neuve en Colombie-Britannique, il y a eu des lois spéciales qui ont été déposées.

M. Louis Plamondon: Vous avez parlé seulement du Québec.

M. André Bachand: C'était la façon de négocier. Et le fondateur du Bloc québécois, qui est rendu à Québec, est prêt à en mettre n'importe quand des lois spéciales. Et le Québec, je le défendrai toujours.

[Traduction]

M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens veulent sans aucun doute que le service postal reprenne à cette époque-ci de l'année.

Je sais que le député est un ancien maire et ancien conseiller municipal et j'occupais ce poste au sein du conseil régional de la municipalité régionale de Waterloo lorsque j'ai dû traiter pour la première fois avec la Société canadienne des postes. Je dois dire que dans le cas des superboîtes ou de la publicité importune, la direction de la société a été loin d'être coopérative.

Je peux dire qu'avant les dernières élections, on a modifié le processus pour que les propriétaires de maisons puissent refuser le courrier publicitaire.

[Français]

M. André Bachand: Monsieur le Président, juste pour compléter l'aspect municipal, effectivement pendant plusieurs années on a dû se battre pour maintenir des services ou améliorer les services dans les collectivités rurales, entre autres au Québec.

Lorsqu'en plus de maire j'étais préfet de la MRC, il y a une municipalité qui s'appelle Saint-Camille, c'est devenu un cas pour maintenir le bureau de poste ouvert, et on s'est battus. Cependant, aujourd'hui on parle de négociation, d'une loi spéciale.

Ce qu'on dit, c'est qu'on est le seul parti aujourd'hui, et j'aimerais que tout le monde s'en souvienne, qui a présenté des amendements pour améliorer le processus de négociations et de ratification de la convention collective, que personne d'autre, aucun parti dans cette Chambre ne s'est levé pour nous appuyer.

[Traduction]

M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, lorsqu'on examine les demandes salariales du syndicat, je me demande comment il réagit. Juge-t-il que ces demandes étaient excessives? Croit-il que ce qu'on propose dans la loi convient?

[Français]

M. André Bachand: Non, monsieur le Président, nous ne pensons pas que les demandes salariales étaient exagérées, absolument pas. Ce que nous aurions souhaité au début, c'est que le médiateur-arbitre puisse avoir la chance de négocier l'ensemble des conditions de travail avec les deux parties, incluant les salaires.

Cependant, dans le jeu des procédures parlementaires aujourd'hui, dans le jeu des amendements, il nous a été impossible d'appuyer cette demande. Cependant, nous pensons que c'est un minimum acceptable pour les deux parties, ce qu'on retrouve dans la loi. C'est une base de négociation intéressante qui reflète aussi ce qui se fait ailleurs et qui reflète aussi les taux d'inflation qu'on trouve au pays.

M. Louis Plamondon: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. C'est au sujet de la façon dont vous distribuez le temps de parole.

Il me semble que dans la coutume parlementaire ici, lorsqu'il y a un débat, on alterne à savoir ceux qui sont en faveur et ceux qui sont contre. Comme le Parti conservateur et le Parti libéral sont d'accord sur le projet de loi, n'aurait-il pas été normal que vous accordiez de préférence la parole à ceux qui sont opposés au projet de loi, de façon à faire un débat plus sain, comme cela s'est toujours fait dans la tradition de la Chambre des communes?

 

. 2120 + -

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): Ce soir, on a, sans aucun doute, suivi ce principe général. La présidence voudrait également s'assurer que tous les députés présents ont la chance de participer au débat, qu'il se déroule bien et qu'il se termine très bientôt.

Les députés ne sont pas sans savoir que s'il y a plus de un, deux, trois ou quatre députés qui interviennent pour poser des questions ou formuler des observations, vous allez remarquer alors que je tends à mettre un terme aux questions pour que davantage de députés puissent participer et que nous puissions tenir un débat.

Je vais essayer de faciliter le débat et d'accélérer les choses. Vous avez tout à fait raison. Nous devons tenir un débat ce soir, mais la Chambre est pleine de députés.

[Français]

M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Monsieur le Président, il y a deux sortes de loi. Il y a d'abord celles que le gouvernement propose parce qu'il le veut, comme celles qui visent à donner du travail, à renforcer le filet de sécurité sociale ou à améliorer le système judiciaire. Il y a aussi celles que le gouvernement est obligé d'adopter. Je pense qu'il est évident, pour tous les députés de notre côté à tout le moins, que le projet de loi à l'étude appartient à la seconde catégorie.

Je prends la parole aujourd'hui, parce que je pense qu'il faut mettre les pendules à l'heure. On a entendu toutes sortes de «salissages» de la part des députés du Bloc québécois. On a essayé d'atteindre mon collègue et ami, le député d'Anjou—Rivière-des-Prairies qui, en passant, a «planté» un député du Bloc québécois par plus de 10 000 voix. Alors, je pense que les gens sont intelligents dans le comté d'Anjou—Rivière-des-Prairies. S'ils l'ont élu par 10 000 voix et s'ils m'ont élu par 9 000 voix, cela veut dire quelque chose. Cela veut dire en plus qu'on a élu quelqu'un d'Anjou—Rivière-des-Prairies qui a une expérience du monde syndical. Donc, c'est encore un plus pour le gouvernement libéral.

Chose certaine, je n'ai pas de leçon à recevoir des émules du Bloc québécois quand ces gens-là du PQ sont les champions de la loi spéciale, du reniement de la signature. Rappelez-vous 1982. Si le député de Frontenac—Mégantic était un enseignant, il se rappelle que le gouvernement du Parti québécois a présenté une loi spéciale, la Loi 111, qui reniait la signature des conventions collectives et qui a coupé son salaire de 20 p. 100. Ça, c'est une gang qui travaille pour les travailleurs. Ça, c'est fort. S'ils disent que notre ministre se prend pour le président de la Société des postes, je ne sais pas si eux ont l'air du président du syndicat, mais il y a sûrement des problèmes. Cette loi spéciale était cent fois pire que le projet de loi C-24.

La cerise sur le sundae, pour ne pas dire autre chose, qui était le négociateur en chef lors de la Loi 111? Qui était le négociateur en chef? Lucien Bouchard. Que ça fait mal! Donc, qu'ils ne viennent pas me faire de leçon.

Encore une fois, quand on n'est pas de l'avis ou du côté du Bloc québécois, il commence à nous faire brailler en nous disant qu'on n'est pas pour les intérêts du Québec, qu'on travaille contre les intérêts du Québec, crois ou meurs. On perd 54 millions de dollars par jour. Les organismes de charité ont perdu, dans tout le Canada et cela comprend le Québec, plus de 10 millions de dollars par jour. L'Armée du Salut, Jeunesse au soleil, ces gens qui ramassent des denrées et des dons pour aider les moins nantis n'ont pu avoir cet argent à cause de la grève du service postal.

Cette grève ne nous fait pas plaisir. Cette loi spéciale ne nous fait pas plaisir, mais il est évident que ce gouvernement responsable a laissé les parties négocier pendant huit mois avec nos meilleurs médiateurs en les personnes de Marc Gravel et de Warren Edmondson—on ne pourra pas dire que MM. Edmondson et Gravel ne sont pas de bons médiateurs, ce sont les meilleurs—mais les deux parties ne se sont pas entendues. Entre les médiateurs de notre bord et la gans à Bouchard, c'est bien dommage, mais je pense que je vais me fier à mon monde.

Avant d'aller plus loin, j'avais oublié de vous dire que je vais partager le temps qui m'est alloué avec l'honorable collègue de Waterloo—Wellington. Vous aviez compris, mais je vous le répète.

 

. 2125 + -

On perd 54 millions de dollars par jour. Des dizaines et des dizaines d'emplois sont perdus.

M. Réjean Lefebvre: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Cela prend le consentement unanime pour partager son temps de parole. Il a demandé que son temps de parole soit divisé avec son collègue, et cela prend le consentement unanime.

Le président suppléant (M. McClelland): On ne requiert pas un consentement unanime maintenant.

M. Denis Coderre: Monsieur le Président, je peux parler 20 minutes si vous le voulez. Vous voulez que je conclue? Je vais conclure, cela ne me fait rien. Je peux revenir si vous le voulez, et je peux parler longtemps.

Chose certaine, c'est que ce gouvernement-ci a été responsable. Il a pris ses responsabilités. Nous croyons au droit de grève. Nous croyons à la négociation collective. Nous les avons laissé aller.

Qu'on m'entende bien: je n'ai rien contre le syndicat ou les syndiqués. Je n'ai absolument rien contre le syndicat et les syndiqués, mais quand j'entends la cassette du Bloc à chaque fois venir nous faire des remontrances, je ne peux l'accepter et je me demande qui est à la solde de qui. J'ai le droit de me poser cette question.

Quand on perd 54 millions de dollars par jour, lorsque des millions et des millions de dollars ne rentrent pas dans les caisses des organismes de charité pour aider les moins bien nantis, le gouvernement doit être responsable. Quand les citoyens n'ont pas le service auquel ils ont droit, le gouvernement est là pour gouverner et pour prendre ses responsabilités.

S'ils ne sont pas d'accord avec cela, demandez aux citoyens, tous ceux qui nous regardent. Les milliers et les milliers de personnes qui nous regardent aujourd'hui comprendront une chose, c'est que de ce côté-ci de la Chambre ceux et celles qui seront pour cette loi spéciale seront pour les intérêts des citoyens, pour les intérêts des Québécois et de tous les autres Canadiens. Encore une fois, je viens de comprendre pourquoi dans le sondage d'aujourd'hui on voyait qu'au Québec le dernier sondage donnait 54 p. 100 d'appuis aux libéraux fédéraux et 30 p. 100 au Bloc québécois.

Quand même on nous fait des «sparages», quand même on vient nous salir, quand même on vient nous dire n'importe quelle ineptie, les faits demeurent, les gens nous regardent, les gens vont juger. Ceux et celles qui auront pris position pour cette loi spéciale—elle n'est pas parfaite mais il y a une chose qui est certaine, c'est que cette convention collective de 540 pages prend force. Si vous voulez que je vous en lise des bouts, je peux vous la lire toute la soirée si vous le voulez, mais si monsieur et madame Tout-le-Monde avaient la même convention collective, cela voudrait dire qu'ils seraient très, très, très contents.

Quand quelqu'un reçoit des vestons, des pantalons, des chapeaux, des casquettes, des chemises, qu'il a cinq jours de congé pour se marier et que le conjoint a aussi les mêmes avantages, et je n'ai rien contre, c'est dû à des négociations et des négociations et c'est correct. Ce projet de loi spécial, lorsqu'adopté, permettra à cette convention collective d'être reconduite.

On leur laisse encore la chance, il reste un vote. Je salue la députée de Saint-Bruno—Saint-Hubert qui a eu le courage de ses convictions, qui a dit: «Moi, ce n'est pas ci, ce n'est pas ça. Je prends pour les citoyens et j'appuie la loi spéciale».

Si j'entends le député de Terrebonne—Blainville me citer Karl Marx, l'autre ami de son chef, je vais vous citer Mao en terminant. Il a dit: «La bouse de vache est plus utile que les dogmes. Au moins on peut en faire de l'engrais».

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, je vais laisser la population juger de qui a eu la meilleure attitude face au projet de loi, qui a amené aujourd'hui le gouvernement libéral à accepter un amendement du NPD, appuyé par le Bloc québécois, qui a été accepté par les libéraux pour s'assurer que la négociation va se faire en fonction de la loi qui régit la Société des postes.

Je ne suis pas gêné du tout d'aller devant tous les citoyens du Québec, de faire juger par les citoyens du Québec qui a eu la meilleure attitude face à ce projet de loi.

 

. 2130 + -

Est-ce que c'est la majorité libérale qui a concocté, pendant quatre mois, par l'entremise du ministre des Travaux publics, responsable de la Société des postes, une parodie de négociation pour mener à cette loi spéciale?

Nous, dans les partis d'opposition, ce qu'on a essayé de faire, c'est de s'assurer de deux choses: la première, c'est qu'on respecte des droits qui font partie de la tradition au Québec et au Canada en matière de relations de travail; la deuxième, c'est que les gens puissent avoir un service postal le plus tôt possible. N'oublions pas qu'il aurait pu y avoir trois, quatre ou cinq jours de débat ici à la Chambre, mais il y a eu une collaboration pertinente. Je ne suis pas gêné de le dire aux gens de chez nous.

Je vais poser ma question au député de Bourassa. Est-ce qu'effectivement, il ne devrait pas plutôt saluer la collaboration, le professionnalisme dont le Bloc québécois, le NPD et tous les partis d'opposition ici ont fait preuve?

M. Denis Coderre: Monsieur le Président, quand un député pose des questions et qu'il est sur la défensive, comme il l'est, et qu'il est en train de faire de la gestion de crise dans ses propos, je comprends que j'avais raison de parler de cette façon et qu'encore une fois, le gouvernement a raison dans cela.

Chose certaine, nous avons pris position pour les citoyens. Même les gens de mon comté, à 76 p. 100—j'ai fait un petit sondage—sont d'accord avec ce genre de loi. De tous ceux qui m'ont appelé, il y en a 76 p. 100 qui sont d'accord. Il y a même des postiers dans mon comté qui m'ont dit qu'ils ont hâte de retourner au travail, qu'ils comprennent et qu'ils vont retourner au travail.

Alors, chose certaine, c'est qu'eux, ils sont déconnectés de la réalité.

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, je veux poser une question au député, mais avant, je veux faire un petit commentaire.

Je pense que tout le monde au Canada sait que je suis syndicaliste. J'ai travaillé dur pour les travailleurs et les travailleuses de ce pays, et surtout ceux de ma région qui est défavorisée à cause des problèmes économiques. Plus tôt, mon collègue de Bourassa nous a insultés. Il a insulté les travailleurs et les travailleuses de ce pays quand il a insulté les syndicats.

Mon collègue aurait-il les «guts» et le courage de se lever et de s'excuser devant les travailleurs et les travailleuses de ce pays?

M. Denis Coderre: Monsieur le Président, dans un premier temps, je veux saluer le travail du député, parce que c'est un homme honorable.

Le député d'Acadie—Bathurst est un homme honorable. Ceux qui me connaissent savent que ça fait 15 ans que je suis dans la vie publique, ça fait 15 ans que je travaille pour les travailleurs. Je suis fils de menuisier, j'ai des origines modestes et j'ai toujours oeuvré pour les travailleurs.

Mais quand on pose des questions aux travailleurs plutôt qu'aux hautes instances syndicales, parfois, le message n'est pas le même. Alors, ce n'est pas parce qu'on n'est pas d'accord avec son point de vue qu'on est contre les syndicats et contre les syndiqués. Mais chose certaine, cette loi, j'en suis convaincu, finalement va aider les citoyens à recevoir des services. On va conserver nos emplois et enfin, on va aider ceux qui sont dans le besoin.

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le Président, je serai bref.

Mon commentaire ira dans le même sens que celui du député d'Acadie—Bathurst qui vient de s'exprimer. Je voudrais donner la chance au député de Bourassa de pouvoir corriger son tir de cet après-midi. Il vient de dire qu'il a du respect pour les syndicats et les syndiqués.

Je cite ce qu'il a dit cet après-midi. Il a dit: «La gang de syndicat de l'autre bord, ce qu'ils ont fait, ils ont refusé un règlement. On leur avait donné un règlement, ils l'ont refusé. C'est les règles du Conseil du Trésor qui doivent dominer.» Il a ajouté: «Il est temps qu'on mette sur pied une loi spéciale...»

Le président suppléant (M. McClelland): Nous sommes à court de temps. Veuillez donner une réponse brève.

M. Denis Coderre: Monsieur le Président, encore une fois, c'est une technique facile que de prendre les choses hors contexte. Une chose est certaine, c'est que oui, c'est vrai qu'on avait une offre globale de règlement qui aurait permis, qui aurait pu permettre à ces employés...

M. Jean-Guy Chrétien: Excuse-toi donc.

M. Denis Coderre: Si on avait posé la question aux syndiqués, peut-être qu'ils auraient accepté ce règlement. Chose certaine...

M. Jean-Guy Chrétien: Peut-être, peut-être.

M. Denis Coderre: Non, je ne m'excuserai pour dire ce genre d'ineptie de la part de mon ami, le député de Richelieu, parce que ce que j'ai dit, c'est dit. J'ai dit qu'on a besoin de cette loi spéciale à partir de règlements du Conseil du Trésor, parce qu'on est responsables dans notre façon de procéder.

 

. 2135 + -

[Traduction]

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, je tiens moi aussi à participer au débat sur le projet de loi C-24, Loi prévoyant la reprise et le maintien des services postaux, afin d'appuyer cette mesure qui prévoit la reprise des services postaux et l'établissement d'un mécanisme visant à régler les problèmes qui ont mené à l'interruption de ces services.

Je dois dire que j'appuie cette mesure avec peu d'enthousiasme, car un projet de loi de retour au travail traduit toujours un échec du processus de négociation collective, processus que je considère comme un pilier de notre démocratie et un outil de progrès économique et social.

Le projet de loi prescrit la durée d'une nouvelle convention collective pour la Société canadienne des postes et le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes; il la fixe à trois ans. Il prévoit également des hausses salariales de 5,15 p. 100 étalées sur cette période de trois ans pour les membres du STTP. Les autres questions en litige, à savoir la sécurité d'emploi, le travail à temps partiel et la longueur des itinéraires des facteurs, seront réglées par un processus dit de médiation-arbitrage.

Selon cette méthode de règlement des différends, le médiateur est doté du pouvoir de régler les questions nous résolues par un arbitrage exécutoire si elles n'étaient pas réglées par la médiation. Comme le stipule le projet de loi, le rapport du médiateur-arbitre, ainsi que les conditions prévues dans le projet de loi, formeront la base de la nouvelle convention collective.

Le gouvernement fédéral n'avait d'autre choix que d'agir par voie législative pour rétablir les services postaux réguliers pour les Canadiens. Les coûts économiques d'un arrêt de travail prolongé auraient été énormes pour les Canadiens. Des milliers d'entreprises canadiennes et leurs employés dépendent des services postaux. Une longue interruption des services postaux menacerait la viabilité économique de ces entreprises et menacerait les emplois de leurs travailleurs.

De nombreux organismes de bienfaisance dépendent de la poste pour leurs dons à cette période de l'année. Beaucoup reçoivent l'essentiel de leurs dons pendant la période de Noël.

De nombreux Canadiens comptent sur la poste à cette période de l'année pour envoyer leurs voeux à la famille et aux amis. En dépit de l'utilisation accrue de l'Internet et du courrier électronique, et en dépit de l'existence de services de courrier efficaces, la plupart des Canadiens dépendent encore de la poste pour leurs lettres et leurs paquets.

En ce qui concerne ceux qui reçoivent une aide de l'État, même si des plans d'urgence ont été mis en place pour la distribution des chèques de pension et de bien-être, il y a encore des risques de retards ou d'erreurs susceptibles de causer des réelles difficultés à des prestataires.

Enfin, il y a le coût d'une longue interruption de travail pour les parties elles-êmes. Postes Canada perd des millions chaque jour et les travailleurs perdent des sommes importantes en salaires. Si la Société canadienne des postes est acculée à la faillite cela ne sera dans l'intérêt de personne.

En bref, l'intérêt public exige que le gouvernement fédéral adopte cette mesure. L'intérêt public exige que le gouvernement fédéral mette un terme aux difficultés économiques et à l'incertitude causées par cet arrêt de travail. L'autre solution, laisser la grève se poursuivre, n'est pas une vraie solution.

Cela dit et ayant expliqué pourquoi ce projet de loi C-24 est nécessaire, je voudrais dire que je suis très déçu que les deux parties n'aient pu parvenir à un accord. Comme je l'ai dit au début de mes remarques, une loi de rappel au travail signifie que le processus de négociation collective a échoué.

La négociation collective est l'un des meilleurs processus que nous ayons créés pour essayer de résoudre les conflits de travail d'une façon ordonnée, démocratique et pacifique. Les recherches historiques et empiriques montrent que la négociation collective s'est avérée un outil efficace pour favoriser le développement économique et la justice sociale. C'est aussi une façon de se prendre en main qui incite les parties à trouver leurs propres réponses aux problèmes qui les divisent. Pour toutes ces raisons, la négociation collective est très importante.

Je ne crois pas être la seule à penser ainsi. Je suis certaine que la plupart des Canadiens préfèrent que les conflits entre patrons et employés se règlent par des négociations. Je suis aussi convaincue que la Société canadienne des postes et le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes préfèrent trouver leurs propres solutions à leurs problèmes.

J'aurais souhaité qu'on laisse davantage le champ libre à la négociation, notamment dans le domaine salarial. Au lieu d'un accord salarial imposé, il aurait été préférable que les deux parties parviennent à un règlement salarial en poursuivant les négociations.

Certains membres du mouvement syndical et du Nouveau Parti démocratique reprocheraient vivement au gouvernement d'avoir présenté cette loi de retour au travail. Je peux vraiment comprendre leur position, mais je leur demande quel signal le gouvernement devait-il attendre avant d'agir.

Que la Société canadienne des postes atteigne financièrement le point de non retour? Que des milliers d'entreprises canadiennes fassent faillite et que les emplois disparaissent? Que Noël soit passé et que les Canadiens n'aient pas pu communiquer avec leurs amis et parents? Ou encore, que de nombreux organismes caritatifs canadiens aient été forcés de remercier leur personnel et de refuser de répondre aux gens dans le besoin qui comptent sur eux?

 

. 2140 + -

Un observateur objectif conclurait sans doute que les parties ont eu amplement le temps de parvenir à une entente. Elles ont aussi profité de l'aide de professionnels compétents du Service fédéral de médiation et de conciliation, mais elles n'ont pas réussi à conclure une entente elles-mêmes; par conséquent, l'intervention du gouvernement était presque inévitable.

Je remarque que le Parti réformiste, le parti qui est toujours le moins d'accord avec le gouvernement, réclame à hauts cris, et depuis longtemps, une intervention gouvernementale. Apparemment, selon les penseurs du Parti réformiste, un gouvernement moins interventionniste est préférable, sauf quand les travailleurs canadiens exercent leurs droits légitimes. Une intervention plus grande de l'État leur semble alors plus acceptable.

Je suis d'avis que l'opposition officielle et le Nouveau Parti démocratique n'ont pas tenu compte de toutes les complexités de la question. Ils n'ont pas vu que tous les intéressés avaient des droits et des préoccupations légitimes, et qu'il fallait trouver un équilibre. C'est précisément ce que veut dire gouverner efficacement. C'est prendre au sérieux les préoccupations légitimes de chacun. Le gouvernement l'a fait et c'est pourquoi je recommande l'adoption de ce projet de loi.

M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, je rappelle aux simples députés libéraux que c'est leur gouvernement qui est responsable de la situation actuelle.

En août dernier, le ministre des Travaux publics a promis à John Gustavson de l'Association canadienne du marketing direct qu'il y aurait une loi de retour au travail, peu importe ce qui se produirait au cours des négociations. Il l'a ensuite nié. Puis, il a confirmé que c'était exact. Ce ne sont ni les travailleurs des postes ni les PME qui ont protesté. Nous ne devrions pas être ici ce soir. C'est le gouvernement libéral qui a fait des promesses dans le dos des négociateurs. Tout le problème vient de là et le NPD est favorable à la négociation.

Que le ministre nous accuse de vouloir nuire aux PME au Canada est scandaleux. En réalité,...

Le président suppléant (M. McClelland): La parole est au député de Waterloo—Wellington.

M. Lynn Myers: Monsieur le Président, je rappelle au député d'en face que le gouvernement a travaillé très fort pour s'assurer qu'il faisait ce qu'il fallait. Les processus de médiation et de négociation se sont déroulés de façon raisonnable et équitable comme cela se devait...

Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Kootenay—Columbia.

M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole au nom des employés des postes de Revelstoke. Ils m'ont demandé de prendre parti contre le projet de loi de retour au travail et d'autres mesures, mais je ne puis car ce ne serait pas conforme aux meilleurs intérêts du Canada.

Ils ont demandé, entre autres choses, la démission de l'actuel ministre responsable de la Société canadienne de postes. Le député sera très intéressé d'apprendre que je suis d'accord avec le député néodémocrate et avec les travailleurs du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes de Revelstoke...

Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Waterloo—Wellington.

M. Lynn Myers: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. Le ministre et le gouvernement ont travaillé très fort pour assurer le rétablissement des services postaux. je crois que c'est ce que nous devons faire dès ce soir.

[Français]

M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Orléans, BQ): Monsieur le Président, j'ai ici une lettre de mesures disciplinaires qui a été envoyée et j'aimerais savoir si le député est d'accord avec cela.

Cette lettre est signée par Yvan Grenier, gestionnaire dans la région de Québec, et fait référence à des incidents du 29 septembre 1997: «Monsieur, la présente fait suite à votre participation aux incidents qui se sont déroulés le 29 septembre au dépôt de facteurs Henri-Bourassa. Vous vous êtes présenté au travail sans porter l'uniforme réglementaire prévu au code vestimentaire de la Société canadienne des postes, et ceci en violation de l'article 303 et 34.10 de la convention collective, et vous avez ainsi débuté votre travail. Vers 7 h 30, vous avez été avisé par M. Gaston Roy que vous deviez revêtir l'uniforme prescrit par...»

Le président suppléant (M. McClelland): La parole est au député de Waterloo—Wellington.

[Traduction]

M. Lynn Myers: Monsieur le Président, je ne suis pas au courant des circonstances pertinentes, mais cela me semble être une procédure normale de règlement de grief et le cas devrait être traité en conséquence.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, pendant le discours du député, je me suis demandé à quel moment le gouvernement aurait dû intervenir. Le moment où le gouvernement aurait dû intervenir était censé être négocié au cours de l'été pour éviter la situation dans laquelle nous nous trouvons maintenant.

 

. 2145 + -

Le député a dit aussi que le fait que nous devons débattre une loi de retour au travail équivaut à un échec. Le gouvernement a échoué en ne veillant pas à la conclusion d'une convention collective, ce qui nous force à discuter d'une loi de retour au travail. C'est la seule raison pour laquelle nous appuyons ce projet de loi.

M. Lynn Myers: Monsieur le Président, les négociations qui se sont tenues au cours des derniers mois étaient sérieuses. Nous devions, en tant que gouvernement, veiller à la tenue de ces négociations, et nous sommes ici ce soir pour faire notre devoir envers la population canadienne.

[Français]

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, j'ai une question précise à poser à mon collègue. Ce soir, il a vu la façon dont a agi en cette Chambre le député d'Abitibi quand il a enlevé son manteau et a demandé à un des travailleurs de descendre en bas pour se battre avec lui. Est-ce la sorte de gouvernement qu'on a ici au Canada, celui qui dit qu'il n'est pas en faveur de la violence? Ce soir, on a vu la manière qu'il a agi, puis l'autre qui a insulté les syndicats...

M. Denis Coderre: Monsieur le Président, j'interviens sur un recours au Règlement. C'est de la démagogie et il sait pertinemment qu'il y a eu en haut de la provocation...

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): Le rappel au Règlement n'est pas fondé.

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, nous pourrions certainement reprendre le débat...

[Français]

M. Guy St-Julien: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'ai très bien écouté les propos de mon collègue qui est un grand défenseur, un bon travailleur, un excellent député. Mais quand il a mentionné que...

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): Sauf votre respect, ce n'est pas un rappel au Règlement. La parole est à la députée d'Edmonton-Nord.

Mme Deborah Grey: Monsieur le Président, nous laisserons donc les petits s'amuser là-bas.

Je tiens à terminer le débat sur quelques réflexions très sérieuses et quelques préoccupations très graves sur la situation qui prévaut pour les 31 millions de personnes sans services postaux. Je suis convaincue—nonobstant tout le bruit derrière moi—qu'ils sont aussi préoccupés que moi par la grève des postes.

Je voudrais parler un peu de la situation qui prévaut dans la circonscription d'Edmonton-Nord et ce qui s'y est dit au sujet de la grève des postes. La population craignait cette grève des postes. Les gens ont essayé de prendre des arrangements de remplacement en prévision de la grève. Ils ont essayé de faire entendre leur voix pour dire que Postes Canada détenait un monopole et ne devrait donc pas être en grève. Nous espérions tous qu'il n'y aurait pas d'arrêt de travail.

Le Parti réformiste croit au processus de négociation collective. Nous croyons en la conciliation. Nous croyons en la médiation. Nous espérions sincèrement qu'on trouverait une solution, que le STTP et Postes Canada s'entendraient et que nous aurions un service sûr et efficace de livraison du courrier, particulièrement pour la période des fêtes.

Malheureusement, ce n'est pas ainsi que les choses ont évolué. Le député de West Kootenay—Okanagan a demandé un débat d'urgence le jour même où la grève a été déclenchée. Nous savions ce qui se passerait si le courrier était paralysé d'un bout à l'autre du Canada. Nous verrions les porte-parole du gouvernement se lever à la Chambre durant la période des questions et nous donner les réponses qu'ils nous ont données, exactement comme le ministre du Travail l'a fait. «Je m'occuperai du processus de négociation collective», disait-il. C'est justement ce qui m'inquiétait de même que la population de ma circonscription. Nous avons entendu le ministre dire: «Je m'occuperai personnellement de tout». Cela me donnait des frissons dans le dos.

Deux semaines plus tard, nous sommes ici, devant une grève des postes qui a coûté environ trois milliards de dollars alors que le gouvernement aurait pu intervenir le premier jour. Il aurait pu négocier de bonne foi. C'est terrible. Peut-être pourrions-nous maintenant baptiser le ministre du Travail l'homme de trois milliards de dollars. C'est ce que nous a coûté sa décision de constamment remettre les choses à plus tard.

La semaine dernière, j'ai entendu dire que des travailleurs du STTP établiraient un piquet de grève devant mon bureau de circonscription, dans Edmonton-Nord.

 

. 2150 + -

Les employés de la Société canadienne des postes étaient en grève et sont venus à mon bureau, vendredi matin. J'ai téléphoné à leur représentant syndical pour lui dire: «J'ai hâte de vous rencontrer. Ma porte n'est pas fermée. Je crois que les membres de votre syndicat ont le droit de manifester pacifiquement.» C'était certainement autre chose que ce qu'on a vu quand le premier ministre a fait taire des gens qui manifestaient pacifiquement à la conférence de l'APEC, quand la GRC a donné l'ordre de leur vaporiser du poivre dans le visage.

J'ai dit à ces syndiqués: «Venez dans mon bureau. J'aimerais discuter de la situation avec vous.» Ils sont entrés. Je m'étais procuré du café et des beignes de chez Tim Horton pour eux. La rencontre a vraiment été intéressante. J'ai passé 45 minutes à parler avec eux. Quelques personnes du syndicat m'ont dit croire qu'elles devraient parvenir à une entente. Je leur ai dit que j'étais d'accord avec elles, qu'une entente devrait être négociée. Malheureusement, les deux parties n'étaient tout simplement pas capables de s'entendre d'une manière ou d'une autre. Je leur ai également dit qu'il y avait certainement des solutions meilleures que ces quatre grèves depuis 1987, leur rappelant qu'il y en avait eu deux en 1987, une autre en 1991 et encore une autre en 1997.

Que ce soient les conservateurs ou les libéraux qui sont au pouvoir, ça ne change rien. C'est pile ou face, ou deux faces d'une même pièce de monnaie. Quel que soit le parti au pouvoir, l'autre s'énerve et crie «Vous n'avez pas le droit!» Une fois passé dans l'opposition, c'est la même chose.

Si la société est autorisée à conserver le monopole, il faudra trouver une solution à long terme pour éviter de continuer à subir grève sur grève pour les 10 ou 15 prochaines années.

Il nous faut nous poser la question: N'y a-t-il pas une meilleure solution pour l'opposition et le gouvernement que de s'entêter à défendre des idées différentes qui mènent au même résultat? Je crois que oui.

Nous pensons que l'arbitrage des propositions finales est la solution à retenir. Si quelqu'un travaille, disons, pour Safeway et qu'il se met en grève—et il a tout le loisir d'exercer son droit de grève paisiblement—, on peut toujours aller faire ses achats chez IGA.

L'usine de transformation de la viande Maple Leaf à Edmonton est actuellement en grève. On peut toujours acheter des saucisses chez Schneider's. Un choix s'offre à nous. Mais quand la Société canadienne des postes est en grève, il n'y a rien à faire d'autre, surtout si on habite une région rurale. Il n'existe pas beaucoup de solutions de rechange.

Nous disons qu'il y a des lieux et des circonstances où l'arbitrage des propositions finales s'impose et qu'il faut alors demander à chacune des parties jusqu'où elle est prête à aller. C'est alors qu'un arbitre peut intervenir pour nous sortir de l'impasse que nous avons connue à quatre reprises ces 10 dernières années. C'est un service essentiel.

Beaucoup de gens disposent de télécopieurs, ceux-là ne s'énervent pas si la Société canadienne des postes se met en grève. Mais il y a aussi beaucoup de gens qui n'ont pas de télécopieur ou de modem et qui ne peuvent faire appel aux services d'UPS ou de Purolator. J'ai vécu dans des régions où l'on n'aurait jamais eu recours au service de livraison de Purolator, qui coûte une fortune en passant.

Les services postaux sont donc essentiels. Le jour même où la grève a été déclenchée, mon collège, notre critique en matière de services postaux, le député de West Kootenay—Okanagan a demandé un débat d'urgence. Il semble que ce n'est que depuis 24 ou 48 heures que le gouvernement a compris qu'il y avait urgence. Il devait bien savoir qu'il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond et qu'il fallait s'attendre à de sérieux problèmes avant Noël. Car tout le monde sait qu'il y a énormément de courrier à distribuer pendant la période des Fêtes.

Quand ces gens se sont présentés à mon bureau vendredi j'ai passé 45 minutes avec eux. Nous avons discuté de la situation et je leur ai dit que bien des électeurs de ma circonscription tenaient à ce que les travailleurs postaux retournent au travail. L'un des syndiqués m'a dit qu'il ne me croyait pas. Il pensait qu'ils représentaient la majorité de mes électeurs, car ils avaient apporté avec eux une pile de lettres.

La plupart de ces gens n'étaient pas de ma circonscription, mais d'Edmonton-Nord et ils ont dit qu'ils étaient là, qu'ils avaient la majorité maintenant et qu'ils devraient dépasser le nombre d'appels téléphoniques opposés à leur cause et de gens qui s'étaient plaints. Ils ont affirmé qu'ils représentaient la majorité et qu'en tant que réformiste, je devais voter en faveur du consensus majoritaire de mes électeurs. Je leur ai répondu qu'ils étaient une centaine ce jour-là. J'ai environ 100 000 électeurs et ils ne m'ont certes pas tous fait connaître leur point de vue. Cependant, les postiers m'ont demandé comment je pouvais savoir s'il y avait une majorité.

Pas longtemps après leur visite, j'ai appris que le gouvernement avait présenté sa loi de retour au travail autour de midi vendredi. J'ai pensé que le gouvernement avait changé d'idée. Il n'a cessé de dire avec véhémence depuis deux semaines qu'il n'allait pas légiférer pour forcer les postiers à reprendre le travail. Tout à coup, il a présenté sa mesure.

 

. 2155 + -

S'ils n'étaient pas si tristes, les propos tenus aujourd'hui seraient risibles. Ces gens se font maintenant les grands défenseurs de la défense de la Société canadienne des postes. Les Canadiens veulent être sûrs d'avoir un service postal.

C'est drôle que l'on me demande comment je sais ce que pensent 100 000 Canadiens de la question. Je vais dire aux députés comment faire pour savoir ce que pensent 100 000 Canadiens de cette question. Pour commencer, faisons faire une enquête scientifique...

Des voix: Oh, oh!

Mme Deborah Grey: C'est un début pour savoir ce que les gens pensent. Je défie les députés qui protestent de se mettre à la place de ces gens. C'est une chose scientifique, équilibrée et fiable. C'est une mesure à laquelle nous devrions avoir recours pour veiller à ce que ces gens aient une chance de dire à leur député ce qu'ils pensent. Je conviens que les députés puissent chercher à parvenir à certains résultats. L'idée qu'un député puisse déformer les résultats pour qu'ils correspondent à son opinion personnelle ou à la position de son parti me fait horreur. Malheur s'il s'avise de le faire.

J'ai commandé cette enquête vendredi après-midi. Nous avons fait un appel d'offres et choisi une compagnie qui n'avait jamais travaillé pour moi. Elle s'est mise au travail dès le samedi matin. J'ai commandé cette enquête tard le vendredi après-midi. Les députés peuvent glousser et rire, je ne trouve pas drôle que les ministériels s'amusent quand 31 millions de gens sont sans travail. C'est ça l'important.

Lorsque j'ai voulu connaître l'opinion des gens, j'ai commandé un sondage scientifique, équilibré et fiable dont je vous livre les résultats, monsieur le Président. Je sais que cela va vous intéresser, étant donné que nous sommes presque voisins à Edmonton.

On a posé une question toute simple aux électeurs de la circonscription d'Edmonton-Nord. Il est très facile de fausser les résultats lorsqu'on veut obtenir telle ou telle réponse. J'ai voulu savoir ce que les gens pensaient d'une loi de retour au travail.

Voici essentiellement la question qui a été posée: «Le gouvernement propose un projet de loi de retour au travail pour obliger les travailleurs de la Société canadienne des postes à réintégrer leurs fonctions. Croyez-vous qu'on devrait les obliger à retourner au travail, oui ou non?» C'était une question assez simple. Que l'on soit libéral, conservateur, néo-démocrate ou bloquiste, on peut probablement comprendre le sens de cette question. Les gens n'ont pas eu à sacrifier 20 minutes de leur temps pour y répondre. Je pense que certaines personnes sont parfois exaspérées par les appels des sondeurs.

Les électeurs d'Edmonton-Nord se sont dits en faveur d'un retour au travail immédiat dans une proportion de 68 p. 100; 20,9 p. 100 se sont prononcés contre, et 11 p. 100 étaient indécis. Tout ce qu'ils savaient, c'est qu'ils ne recevaient pas leur courrier. Ils étaient indécis parce qu'ils ne comprenaient pas les modalités d'un projet de loi de retour au travail.

Tout le chahut actuel de l'autre côté de la Chambre est intéressant. Les députés d'en face refusent-ils la démocratie? Certainement pas. Les conservateurs n'oseraient sûrement pas se moquer de la démocratie.

Un député de l'Abitibi, à l'autre extrémité, qui était autrefois conservateur et qui est maintenant d'allégeance libérale, a enlevé son veston aujourd'hui et a mis les travailleurs de la Société canadienne des postes au défi de venir se battre. N'est-ce pas une façon de procéder fort élégante et démocratique? Quelle honte! Quelle comportement pitoyable et inadéquat de la part d'un député!

Au lieu de faire toute cette tempête quant à l'opportunité de légiférer pour ordonner un retour au travail, prenons le taureau par les cornes et faisons en sorte de ne pas nous retrouver dans la même situation dans 10 ans. Il faut l'arbitrage des propositions finales pour éviter que nous nous trouvions de nouveau dans cette malheureuse situation. La situation n'est guère plaisante pour les travailleurs des postes.

J'ai parlé avec les 125 travailleurs qui sont venus à mon bureau l'autre jour. Ils m'ont dit qu'ils voulaient rentrer au travail.

Une voix: S'agit-il d'un sondage scientifique?

Mme Deborah Grey: Comprenez-moi bien. Il y a eu 125 personnes qui se sont présentées à mon bureau. Il ne s'agit pas d'un sondage scientifique, mon cher; le sondage a eu lieu plus tard, le week-end dernier. C'est cela qu'il faut retenir.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. La députée d'Edmonton-Nord vient de dire qu'il est impérieux de maintenir le décorum convenable à la Chambre. Je demanderais à la députée d'Edmonton-Nord de faire ses observations en s'adressant à la présidence.

 

. 2200 + -

Le président suppléant (M. McClelland): La présidence trouve l'observation tout à fait pertinente.

Comme il est 22 heures, conformément à un ordre adopté plus tôt aujourd'hui, je dois interrompre les délibérations et mettre aux voix sur le champ toute question nécessaire pour disposer de l'étape de la troisième lecture du projet de loi dont la Chambre est maintenant saisie.

Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. McClelland): Convoquez les députés.

 

. 2225 + -

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

Vote no 50

POUR

Députés

Abbott Adams Alcock Anders
Assad Assadourian Augustine Bachand (Richmond – Arthabaska)
Bakopanos Barnes Beaumier Bélair
Bélanger Bellemare Bennett Benoit
Bernier (Tobique – Mactaquac) Bertrand Bevilacqua Blondin - Andrew
Bonin Bonwick Borotsik Boudria
Bradshaw Breitkreuz (Yorkton – Melville) Bryden Bulte
Byrne Caccia Cadman Calder
Cannis Carroll Casey Casson
Catterall Cauchon Chan Charbonneau
Charest Chrétien (Saint - Maurice) Clouthier Coderre
Cohen Collenette Comuzzi Copps
Cullen Cummins DeVillers Dhaliwal
Dion Discepola Drouin Dubé (Madawaska – Restigouche)
Duhamel Easter Elley Epp
Finlay Folco Fontana Forseth
Fry Gagliano Gallaway Gilmour
Godfrey Goodale Gouk Graham
Gray (Windsor West) Grewal Grey (Edmonton North) Hanger
Harb Harris Hart Harvard
Harvey Herron Hill (Macleod) Hill (Prince George – Peace River)
Hilstrom Hubbard Ianno Iftody
Jackson Jaffer Jennings Johnston
Jones Jordan Karetak - Lindell Keddy (South Shore)
Kerpan Keyes Kilger (Stormont – Dundas) Kilgour (Edmonton Southeast)
Knutson Konrad Kraft Sloan Lastewka
Lavigne Lee Leung Lincoln
Longfield Lowther Lunn MacAulay
MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) Mahoney Malhi Maloney
Manley Manning Marchi Mark
Marleau Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) Massé Mayfield
McCormick McGuire McKay (Scarborough East) McLellan (Edmonton West)
McNally McTeague McWhinney Mifflin
Milliken Mills (Red Deer) Minna Mitchell
Morrison Muise Murray Myers
Nault Normand Obhrai O'Brien (London – Fanshawe)
O'Reilly Pagtakhan Pankiw Paradis
Parrish Patry Penson Peric
Peterson Pettigrew Phinney Pickard (Kent – Essex)
Pillitteri Pratt Proud Provenzano
Ramsay Redman Reed Reynolds
Richardson Ritz Robillard Rock
Saada Schmidt Scott (Fredericton) Shepherd
Solberg Speller St. Denis Steckle
Stewart (Brant) Stewart (Northumberland) Stinson St - Julien
Strahl Szabo Telegdi Thibeault
Thompson (Charlotte) Torsney Ur Valeri
Vanclief Vellacott Venne Wappel
Wayne Whelan White (Langley – Abbotsford) Wilfert
Williams Wood – 198


CONTRE

Députés

Alarie Axworthy (Saskatoon – Rosetown – Biggar) Bachand (Saint - Jean) Bellehumeur
Bergeron Bigras Blaikie Brien
Canuel Chrétien (Frontenac – Mégantic) Crête Dalphond - Guiral
Davies Debien Desjarlais Desrochers
Dockrill Dubé (Lévis) Dumas Earle
Fournier Gagnon Gauthier Girard - Bujold
Godin (Acadie – Bathurst) Godin (Châteauguay) Guay Guimond
Hardy Laliberte Lalonde Laurin
Lebel Lefebvre Lill Mancini
Marchand Martin (Winnipeg Centre) McDonough Ménard
Mercier Nystrom Picard (Drummond) Plamondon
Power Proctor Riis Robinson
Rocheleau Sauvageau Solomon St - Hilaire
Stoffer Tremblay (Lac - Saint - Jean) Tremblay (Rimouski – Mitis) Turp – 56


«PAIRÉS»

Députés

Anderson Asselin Baker Bernier (Bonaventure – Gaspé – Îles - de - la - Madeleine – Pabok)
Brown de Savoye Duceppe Eggleton
Karetak - Lindell Loubier Marceau Martin (LaSalle – Émard)
O'Brien (Labrador) Perron


 

Le Président: Je déclare la motion adoptée.

(Le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'ordre spécial adopté hier, j'ai le plaisir de proposer:

    Que la Chambre s'ajourne maintenant.

(La motion est adoptée.)

Le Président: Comme il est 22 h 29, la Chambre s'ajourne à 14 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 22 h 29.)