FINA Rapport du Comité
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CHAPITRE 2 :
ALLÉGEMENTS FISCAUX ET RÉFORME FISCALE
Maintenant que les remous de la crise financière asiatique s'atténuent, les perspectives d'avenir de l'économie canadienne sont de nouveau très bonnes. La reprise économique est déjà bien avancée au Canada et aux États-Unis, mais rien ne laisse présager de grave récession dans un proche avenir. Les deux pays appliquent une politique monétaire et budgétaire propre à susciter une croissance non inflationniste si bien que le risque de récession induite par les politiques publiques est faible. Une récession, s'il y en avait une, proviendrait vraisemblablement de l'économie réelle, et aurait éventuellement son origine dans d'autres économies.
Sur une note optimiste, on constate que l'économie canadienne a finalement très peu pâti de la crise asiatique, dont les conséquences ont été bien moindres que celles de la crise du peso mexicain. Celle-ci, quoique beaucoup moins importante à l'échelle mondiale, avait néanmoins eu des contrecoups beaucoup plus graves sur le Canada. Cela donne à penser que l'amélioration de la structure de l'économie canadienne (notre économie est beaucoup plus ouverte qu'il y a seulement 10 ans, le poids relatif de nos exportations de matières premières continue de baisser et l'activité économique fondée sur la connaissance occupe une place de plus en plus importante dans l'économie canadienne) et l'assainissement des finances publiques rendent notre économie plus sûre et plus stable.
Le gouvernement fédéral doit être prêt à soutenir la continuation de la reprise en réinvestissant des excédents budgétaires croissants dans l'économie.
Congrès du travail du Canada
Ainsi, nous devrions être en mesure de bien supporter n'importe quel problème de courte durée. De plus, si l'on observe actuellement une certaine accélération de l'augmentation des prix au-delà du point milieu de la cible fixée par la Banque du Canada, ce phénomène devrait être de courte durée et avoir peu d'impact sur la politique monétaire de la Banque Canada.
Compte tenu de ce qui précède, les prévisions raisonnables de croissance économique, basées sur les prévisions consensuelles d'économistes du secteur privé, indiquent que le gouvernement fédéral devrait être en mesure d'enregistrer des excédents budgétaires substantiels croissants durant les prochaines années. La Mise à jour économique et financière du ministre des Finances est basée sur ce consensus. En voici les détails :
- Croissance économique s'établissant en moyenne à 2,9 % par année en termes réels à moyen terme.
- Taux d'inflation annuel de 1,5 %.
- Croissance nominale du PIB de 4,4 % par an.
- Augmentation des recettes fédérales de 4,4 % par an.
- Stabilité de frais de service de la dette.
- Excédents budgétaires croissants allant d'environ 9,5 milliards de dollars en 2000-2001 à 18,5 milliards de dollars en 2002-2003 et 30 milliards de dollars en 2004-2005.
Avec un contexte monétaire non inflationniste et une baisse du montant nominal de la dette, les frais de service de la dette devraient demeurer stables. Ce scénario suppose l'absence de tout nouveau programme de dépenses important. Les fonds nécessaires pour répondre aux engagements des programmes courants sont maintenus, mais tout nouveau programme devra être financé à même une restructuration de l'enveloppe de dépenses du gouvernement. Comme l'a recommandé l'Institut des dirigeants financiers du Canada (IDFC) :
Tant que des progrès notoires n'auront pas été constatés au titre de l'amortissement de la dette, l'Institut estime que le gouvernement fédéral devrait contenir ses dépenses en termes réels, se contentant de les adapter à l'inflation et à la croissance démographique. Il y aura une légère augmentation annuelle des dépenses, mais la dette nationale et le fardeau fiscal du contribuable diminueront, ce qui renforcera progressivement l'économie nationale et sa compétitivité et fera augmenter les revenus des particuliers.
Beaucoup de personnes ont recommandé que les dépenses de programme réelles par habitant demeurent constantes. Le mémoire de la Banque de Montréal en est un bon exemple :
En dehors d'assurer la santé et l'instruction de la population active et de voir à ce que l'infrastructure physique soit en bon état (des responsabilités provinciales), il ne semble pas exister d'arguments économiques probants qui justifieraient une augmentation sensible des dépenses.
Le faible taux d'augmentation des revenus bruts réels durant les années 90 ne s'est pas accompagné d'un accroissement des disparités au niveau du revenu après impôt, ce qui donne à penser que l'impôt sur le revenu des particuliers fonctionne de façon équitable et qu'il n'est pas nécessaire de prévoir des augmentations des dépenses à ce chapitre.
Enfin, d'après des données fournies par la Banque TD, les dépenses de programmes réelles par habitant de tous les paliers de gouvernement ont certes baissé par rapport au sommet atteint au début des années 90, mais elles sont encore au même niveau qu'au début de la décennie, dépassant d'environ 25 % ce qu'elles étaient en 1980 et représentant près du double de ce qu'elles étaient en 19701.
Le Comité n'a rien contre une augmentation modeste des dépenses de programmes réelles par habitant lorsque cela est justifié, et seulement quand cela est justifié, mais nous estimons que la règle du « taux d'inflation plus croissance démographique » est un bon indicateur. Toutes les dépenses courantes et nouvelles doivent répondre aux conditions de l'examen des programmes. Elles doivent en outre respecter les impératifs de l'augmentation de la productivité, ce que nous avons précédemment appelé le pacte de productivité. Ainsi, le Comité recommande que le gouvernement s'efforce de maintenir les dépenses réelles par habitant près des niveaux actuels, tout en sachant qu'il s'agit là d'un défi, étant donné le coût croissant des programmes gouvernementaux.
Le gouvernement fédéral n'aura toutefois qu'une capacité limitée de réduire les impôts afin d'aiguillonner la compétitivité internationale du Canada s'il n'est pas en mesure de contrôler les dépenses.
Association canadienne des pâtes et papiers
L'opinion du Comité à ce sujet est conforme à la position de la Chambre de commerce de Calgary dans la conclusion de son mémoire. On y note en effet ce qui suit :
La meilleure façon d'assurer que les Canadiens pourront continuer à financer les dépenses sociales du gouvernement, c'est de réduire sensiblement la dette au fil des ans. Il faut pour cela rembourser bel et bien la dette et baisser les impôts de manière à stimuler la croissance économique. Tout comme la spirale du déficit a entraîné la capitalisation de la dette au Canada, le même processus peut aider à la rembourser [ . . . ] Le dégrèvement fiscal devrait être utilisé pour accélérer le processus. En outre, le gouvernement ne devrait pas songer à se lancer dans de nouvelles dépenses tant que la spirale de la dette ne sera pas solidement jugulée.
Le scénario économique et financier présenté
plus haut est conforme aux prévisions utilisées par des économistes
du secteur privé lors de leur récente rencontre avec le ministère
des Finances. L'analyse de la Banque Royale a récemment été
étendue à la position budgétaire des gouvernements
provinciaux2.
Les projections des excédents budgétaires correspondent à
peu près à celles du gouvernement fédéral,
avec un total global de 15,6 milliards de dollars projeté pour 2004-2005.
En analysant les effets que les réductions de l'impôt sur le revenu des particuliers peuvent avoir sur les investissements des personnes physiques et morales, la prise de risques, l'innovation et les autres facteurs qui encouragent la croissance économique et le développement social, on constate que la réduction de la dette et les diminutions d'impôts sont complémentaires
Institut des dirigeants financiers du Canada
Ce scénario est aussi conforme aux données récentes fournies par le ministère des Finances3. Exception faite de l'Ontario, de la Colombie-Britannique, de la Nouvelle-Écosse et du Yukon, toutes les provinces et tous les territoires ont maintenant un budget équilibré ou enregistrent un excédent. Collectivement, ces administrations publiques sont beaucoup moins endettées que le gouvernement du Canada, si bien que leurs frais de service de la dette sont plus faibles. Leur assiette fiscale n'est pas très différente de celle du gouvernement fédéral, et leurs recettes fiscales augmentent à peu près au même rythme.
Le plan quinquennal proposé par le Comité pour réduire les impôts et les cotisations d'assurance-emploi se fonde sur le contexte économique et financier présenté par le ministre des Finances dans la Mise à jour économique et financière : Des finances saines pour une meilleure qualité de vie. Ce plan prévoit une réduction graduelle d'impôts de 3 milliards pour les quatre premières années et de 4 milliards pour la cinquième. Il s'appuie sur les initiatives récentes du gouvernement fédéral visant à lancer le processus de réduction des impôts. Le contexte économique dans lequel il s'inscrit est, dans l'ensemble, conforme aux projections économiques et budgétaires des économistes du secteur privé.
Dans un mémoire qu'il envoyait au premier ministre en septembre,
le Conseil canadien des chefs d'entreprise a écrit « nous
voulons essentiellement souligner l'urgence d'agir. Le Canada a très
peu de temps pour le faire, et l'inaction risque vite de coûter très
cher ». Il faut donc non seulement intervenir rapidement, mais dans
un contexte à long terme avec un plan à long terme. C'est
précisément ce que nous présentons dans le Plan d'allégement
fiscal et de réduction des cotisations d'assurance-emploi du Comité.
Maintenant que le gouvernement fédéral a réussi à atteindre et à dépasser ses diverses cibles dans plusieurs budgets consécutifs, le moment est venu de « hausser la barre » et de commencer à fixer des cibles à plus long terme pour les réductions d'impôts, les dépenses et les autres facettes du budget.
Institut des dirigeants financiers du Canada
Le Comité estime que ce plan d'allégement fiscal et de réduction des cotisations d'assurance-emploi laisse quand même au gouvernement fédéral une certaine marge de man9uvre qui lui permettra de s'occuper des autres priorités et de parer à l'imprévu. Il est utile de répéter ici que ce scénario économique et financier présuppose une augmentation des dépenses de programme d'environ 2,7 % par année; celles-ci passeraient d'environ 111 milliards de dollars aujourd'hui à environ 128 milliards en 2004-2005. On prévoit une réduction de la dette de 3 milliards de dollars par an par le biais de la réserve pour éventualités, de même qu'un tampon additionnel, sous la forme d'une mesure de prudence économique transparente, qui passera de un milliard de dollars en 2000-2001 à 4 milliards de dollars en 2004-2005. Enfin, le plan prévoit une somme non affectée de 2,5 milliards de dollars en 2000-2001 qui grimpera progressivement jusqu'à 8 milliards de dollars en 2004-2005, et qui pourrait servir à réduire encore davantage les impôts et la dette, à financer des engagements pris dans le discours du Trône ou d'autres nouveaux programmes ou à parer à des événements imprévus. Il importe ici de répéter notre recommandation antérieure voulant que le gouvernement fédéral s'efforce de maintenir les dépenses de programmes réelles à un niveau constant et que tout écart par rapport à cette croissance soit justifié par un examen des programmes.
Ce scénario prend aussi en considération la réduction récemment annoncée de 0,15 $ des cotisations d'assurance-emploi qui doit entrer en vigueur le 1er janvier 2000 et qui coûtera au gouvernement fédéral environ 1,2 milliard de dollars par an.
TABLEAU 1
PLAN D'ALLÉGEMENT FISCAL ET DE RÉDUCTION DES COTISATIONS D'ASSURANCE-EMPLOI DU COMITÉ
(en milliards de dollars)
On trouvera au tableau 2 des données comparatives sur les impôts
perçus par le Canada et les autres pays du G7. Ces données
attestent les mêmes tendances que celles que nous avions dégagées
dans nos rapports antérieurs sur les consultations prébudgétaires.
Si le fardeau fiscal au Canada est légèrement inférieur
à la moyenne des pays du G7, il est substantiellement plus élevé
qu'aux des États-Unis ( 36,1 % du PIB c. 28,4 % du PIB). De même,
le Canada est unique sur le plan de l'importance de l'impôt sur le
revenu des particuliers, lequel est 30 % plus élevé au Canada
qu'aux États-Unis et 46 % plus élevé que la moyenne
du G7.
[V]otre comité a la chance historique de pouvoir discuter de toute l'orientation que va prendre la gestion des excédents à l'avenir, ce qui aura des répercussions importantes sur le programme de votre gouvernement, sur ses dépenses d'ensemble, et surtout sur le développement économique de notre pays.
Association canadienne des fabricants de produits chimiques
Le régime fiscal du Canada n'est pas compétitif et il aurait dû être réformé il y a longtemps. Étant donné l'important excédent qui s'annonce, les conditions présentes sont propices à un rajustement des leviers économiques.
Toronto Board of Trade
Une baisse des impôts est ce que les Canadiens méritent dès maintenant et une réforme fiscale est ce dont le Canada a besoin sans délai pour retrouver et maintenir sont avantage concurrentiel au sein de l'économie mondiale.
Association canadienne de la technologie de l'information
TABLEAU 2
LES RECETTES FISCALES DANS LES PAYS DU G7
(tous paliers de gouvernement)
en % du PIB
Source : « Looking Ahead to Canada's Federal Budget 2000 »,
TD Economics, 28 octobre 1999.
On a plusieurs raisons de placer les allégements fiscaux en tête de liste des priorités gouvernementales. Tout d'abord, pour citer le ministre des Finances, « [ . . . ] Les Canadiens ont le droit de conserver une plus grande part de l'argent qu'ils gagnent. Après tout, les Canadiens travaillent pour cet argent. Il est à eux. [ . . . ] Les Canadiens ont dû payer plus d'impôts lorsque nous étions en déficit et que la dette augmentait. Ils ont le droit de s'attendre à ce que le gouvernement allège leur fardeau fiscal maintenant que nous traversons une période d'excédents budgétaires ». (la Mise à jour économique et financière, p. 17-18).
Entre 1989 et 1998, le revenu personnel disponible par habitant après inflation a diminué de 5 % au Canada. Ces données contrastent avec une augmentation de 9,9 % aux États-Unis.
Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires
Le gouvernement fédéral et de nombreux gouvernements provinciaux ont réussi à surmonter leurs problèmes budgétaires annuels, et ceux qui ne l'ont pas encore fait, sont sur le point de le faire. Il est donc réaliste maintenant d'envisager d'accorder des allégements fiscaux, ce qui n'était pas le cas il y a quelques années seulement.
Statistique Canada rapporte que le revenu réel après impôt des familles canadiennes n'a pratiquement pas bougé depuis 1989, bien qu'il commence maintenant à grimper avec des hausses de 3 % du revenu réel après impôt par habitant ces trois dernières années. C'est ce qu'on constate dans le graphique 2 ci-dessous. Les allégements fiscaux peuvent améliorer directement le niveau de vie des familles canadiennes par l'augmentation de leur revenu disponible, ce à quoi, selon le ministre, celles-ci sont en droit de s'attendre.
La seconde raison de proposer des allégements fiscaux réside dans le fait que les Canadiens supportent un fardeau fiscal plus élevé qu'il y a 20 ans et à coup sûr plus lourd que celui des Américains. Cela reste vrai même quand on tient compte du fait que certains biens et services, l'exemple le plus connu étant les soins médicaux, sont offerts surtout par le secteur privé aux États-Unis mais par le secteur public au Canada4. Ce fardeau fiscal plus élevé au Canada rend notre régime fiscal et notre économie moins compétitifs vis-à-vis des États-Unis. Cela s'avère particulièrement au niveau de l'impôt sur le revenu des particuliers, lequel est sensiblement plus important ici qu'aux États-Unis. Comme l'a noté le Conseil du patronat du Québec, un fardeau fiscal excessif encourage l'évasion fiscale, la participation à l'économie souterraine et l'exode des travailleurs spécialisés, surtout chez les jeunes. En raison de l'ouverture grandissante de l'économie canadienne aux échanges internationaux, et aux mouvements de capitaux et de main-d'9uvre, il est de plus en plus important que notre régime fiscal soit concurrentiel par rapport à ceux des autres pays. Cela est particulièrement important en ce qui concerne nos partenaires commerciaux. La conclusion d'accords de libre-échange avec les États-Unis et le Mexique a non seulement contribué à augmenter sensiblement notre dépendance vis-à-vis du commerce international, mais a aussi accru notre dépendance vis-à-vis des États-Unis en tant que partenaire commercial.
Dans le contexte de libre-échange, d'intégration grandissante de l'économie canadienne à l'économie nord-américaine et de mondialisation des marchés, nous pensons que le gouvernement fédéral doit s'engager plus à fond à réduire le fardeau fiscal des contribuables afin d'améliorer la capacité concurrentielle de notre économie, de promouvoir le développement économique à plus long terme et de favoriser la création d'emplois.
La Confédération des caisses populaires et d'économie Desjardins du Québec
C'est là la comparaison la plus importante. Notre régime fiscal est peut-être relativement concurrentiel par rapport à ceux d'un certain nombre de pays industrialisés, mais la majeure partie de nos échanges concernent les États-Unis, avec lesquels nous avons les liens financiers les plus étroits et où nos travailleurs hautement spécialisés sont le plus susceptibles de migrer. Si l'on veut voir dans quelle mesure le niveau d'imposition a déjà affecté la croissance économique du Canada, on peut comparer les fardeaux fiscaux du Canada et des États-Unis sur une certaine période et le taux de croissance du revenu et le taux de chômage respectifs des deux pays. Dans les années 60, par exemple, le fardeau fiscal était à peu près le même au Canada et aux États-Unis, en proportion du PIB. À cette époque-là, le PIB augmentait plus rapidement au Canada qu'aux États-Unis. Depuis, l'écart fiscal n'a cessé de se creuser, et les Canadiens assument un fardeau fiscal de plus en plus lourd par rapport aux Américains. (De nos jours, l'excédent de notre fardeau fiscal par rapport à celui des Américains représente presque 8 % du PIB.) Pendant ce temps-là, le taux de croissance des États-Unis a surpassé le nôtre régulièrement et continuellement.
Les Canadiens sont trop imposés et [ . . . ] il convient de réduire à la fois l'impôt sur le revenu des particuliers et celui des entreprises. La meilleure référence en l'espèce est la suivante : « Nous devons baisser les impôts le plus rapidement possible. Les impôts peuvent être un facteur lié à la productivité. Ils peuvent être un facteur contribuant à l'exode des cerveaux. Mais nous n'avons pas besoin de ces raisons pour le faire ». L'honorable Paul Martin, ministre des Finances, juin 1999.
Association canadienne de la construction
On obtient à peu près le même tableau au chapitre du taux de chômage. Lorsque l'écart fiscal entre le Canada et les États-Unis était petit, l'écart entre les taux de chômage était lui aussi relativement faible. Quand l'écart fiscal s'est creusé, en particulier durant les années 80 et 90, il s'est produit la même chose entre le taux de chômage du Canada et celui des États-Unis. De nos jours, le taux de chômage au Canada est supérieur d'environ trois points à celui des États-Unis5.
De nombreux facteurs influent sur la performance relative de l'économie américaine et de l'économie canadienne, et le régime fiscal n'en est qu'un parmi bien d'autres. Il reste que les données sont claires : dans le même temps que le fardeau fiscal du Canada s'alourdissait par rapport à celui des États-Unis, la performance économique du Canada diminuait par rapport à celle des États-Unis.
La meilleure chose à faire pour que les Canadiens profitent de l'amélioration de la situation financière est de veiller à ce que l'économie canadienne continue de croître et à ce que les possibilités d'emploi augmentent.
Fédération canadienne de l'entreprise indépendante
L'économiste canadien Robert Mundell a fait ressortir ce fait dans une entrevue donnée après qu'il a reçu le prix Nobel d'économie. En réponse à une question sur les réductions d'impôt, il a dit ce qui suit :
Chaque pays doit décider pour quelle proportion de la production totale de la société il veut que le gouvernement prévoie des dépenses. Au Canada, ce pourrait être 50 %. Aux États-Unis, ce pourrait être moins de 40 %. En Suède, la proportion est de 65 % . . .
Ce que je constate, c'est que plus le taux marginal d'imposition nécessaire pour soutenir ce niveau de dépenses est élevé, moins l'économie fonctionnera de façon efficace et moins le taux de croissance sera élevé. Pour moi, l'important, c'est d'avoir un régime fiscal qui soit efficace. De toute façon, dès que l'impôt dépasse les 30 %, trop de gens sont incités à chercher des façons de s'y soustraire, légalement ou non, ce qui finit par nuire, compromettre la croissance et, partant, réduire les recettes fiscales futures.
En réponse à une autre question sur le caractère dissuasif de taux d'imposition marginaux élevés, il a répondu :
Dans une économie fermée où le taux d'imposition est très élevé, les gens décideront que cela ne vaut pas la peine de travailler [ . . . ] Cependant, dans une économie ouverte, c'est beaucoup plus dangereux. Des taux d'imposition élevés vont pousser les gens à aller ailleurs. Ils vont quitter le pays ou iront dans une autre province, bref, ils iront là où les impôts sont moins élevés. Ils iront dans ce no man's land international où les gens peuvent se soustraire complètement aux impôts. Quand un pays pratique des taux d'imposition plus élevés que ses voisins, cela entraîne un exode des cerveaux6.
Il faut réformer la fiscalité des entreprises de manière significative, afin que le Canada paraisse plus intéressant aux investisseurs internationaux. L'Association canadienne des fabricants de produits chimiques travaille actuellement à la définition de réformes précises qu'il compte recommander le moment venu, peut-être lors du processus de consultation de l'année prochaine, une fois que les questions les plus urgentes en matière d'impôt des particuliers auront été réglées.
Association canadienne des fabricants de produits chimiques
S'il est important que le régime fiscal du Canada soit compétitif au niveau international sur le plan des taux d'imposition, il est tout aussi important qu'il soit compétitif sur le plan de sa structure. Cela veut dire que d'accorder des allégements fiscaux n'est pas nécessairement en soi suffisant si ces allégements sont mal ciblés. Ils doivent viser les défauts inhérents à notre régime fiscal. Autrement dit, les allégements fiscaux doivent aussi être les catalyseurs d'une réforme fiscale.
Le comité Mintz sur la fiscalité des entreprises offre un exemple de la nécessité de combiner les allégements fiscaux avec une réforme fiscale. Chacun sait que les divers secteurs d'activité ne sont pas tous égaux devant le régime fiscal et que celui-ci fausse les comportements économiques. On a demandé au Comité d'étudier la fiscalité des entreprises et de recommander des réformes ayant un effet neutre sur les recettes fiscales. Une réforme fiscale est plus facile à mettre en 9uvre lorsque tous les contribuables profitent d'un certain allégement. Il en va de même de l'impôt sur le revenu des particuliers. La perspective d'allégements fiscaux permettra d'effectuer une réforme nécessaire et plus en profondeur du régime fiscal dans la mesure où tous les contribuables bénéficieront d'une baisse d'impôt à la suite de la réforme.
En réalisant une réforme aussi profonde, le gouvernement fédéral aurait la possibilité d'améliorer l'« équité horizontale » de l'impôt sur le revenu des particuliers. Cette expression désigne la mesure dans laquelle les contribuables se trouvant dans des circonstances analogues sont traités également, c'est-à-dire la mesure dans laquelle le régime fiscal tient compte des circonstances spéciales. Comme l'ont souligné de nombreux témoins au cours de nos audiences, et dans le passé, le Canada se distingue du fait que son régime fiscal ne reconnaît pas les enfants à charge, ce qui va carrément à l'encontre du principe de l'équité horizontale. Il est possible de rectifier cette situation par une réforme fiscale.
Bien sûr, l'équité horizontale ne concerne pas seulement les enfants. Les personnes handicapées et ceux qui s'occupent d'elles engagent de nombreuses dépenses non discrétionnaires qui ne sont pas prises en compte par le régime fiscal. Certes, le gouvernement a déjà pris des mesures pour tenir compte de ces circonstances spéciales, mais il n'est pas allé assez loin, de l'avis de certains témoins.
Le Comité recommande donc que la réforme de l'impôt sur le revenu des particuliers s'attache en grande priorité à faire en sorte que les critères de l'équité horizontale soient respectés, notamment en ce qui concerne les enfants à charge et les personnes handicapées.
Enfin, un autre argument en faveur de la réduction des impôts figure dans la déclaration des ministre provinciaux et territoriaux des Finances, publiée le 3 décembre 1999. Ce document souligne que les impôts ont absorbé 60 % de l'augmentation totale du PIB entre 1980 et 1996. Aux États-Unis, la proportion correspondante est de 34,3 %, et elle est seulement de 32,4 % dans les autres pays du G7. Cette tendance est l'une des raisons pour lesquelles le communiqué réclame une réduction du fardeau fiscal imposé aux particuliers.
J'aimerais seulement dire que l'impôt sur le revenu des particuliers n'est pas un impôt sur la richesse, mais sur l'acquisition de richesse, et que la jeune personne qui souhaite devenir riche choisira probablement de s'installer dans un endroit où le taux marginal d'imposition n'est pas élevé. Je suis de ceux qui croient que les taux marginaux élevés peuvent provoquer un exode des cerveaux. Cela m'inquiète, même si je reconnais parfaitement que l'exode des cerveaux est loin de tenir seulement à la fiscalité.
David Laidler
L'impôt sur le revenu des particuliers
En 1980, l'impôt sur le revenu des particuliers au Canada représentait 10,9 % du PIB, proportion qui n'était que légèrement supérieure à celle observée aux États-Unis. Or, en 1996, le même impôt comptait pour 13,9 % du PIB, soit 30 % de plus qu'aux États-Unis. Le poids relatif de l'impôt sur le revenu des particuliers au Canada est beaucoup plus élevé que dans n'importe quel autre pays du G7 ou que la moyenne de l'OCDE, comme on l'a vu au tableau 2. L'importance croissante de cet impôt tient en partie au fait qu'on a abandonné la pleine indexation du régime fiscal en 1985
De nombreux observateurs estiment que c'est d'abord et avant tout au niveau de l'impôt sur le revenu des particuliers qu'il faut accorder des allégements fiscaux, parce que c'est cet impôt qui est à l'origine de certaines des plus importantes distorsions économiques. Le taux marginal d'imposition (c.-à-d. le taux d'imposition qui s'applique à chaque dollar supplémentaire de revenu) que supportent les Canadiens à des niveaux de revenu même modestes est élevé, ce qui a divers effets pervers : réduction de l'activité ou de l'effort de travail, réduction au niveau de la prise de risques et réduction au niveau de l'épargne. En outre, l'impôt sur le revenu du capital est aussi excessivement élevé par rapport aux États-Unis, en particulier en ce qui concerne les gains en capital, où le taux effectif d'imposition est environ le double de celui des États-Unis.
L'industrie des assurances générales encourage le gouvernement fédéral à commencer à réduire le fardeau de l'impôt sur le revenu des particuliers en pourcentage du PIB, afin de mieux l'aligner sur la moyenne des pays de l'OCDE.
Bureau d'assurance du Canada
La Banque TD a calculé le fardeau réel de l'impôt sur le revenu en additionnant l'impôt sur le revenu des particuliers et les charges sociales pour ensuite en établir la proportion du revenu personnel7. Or, cette proportion augmente régulièrement et substantiellement depuis le milieu de la décennie, croissance qui ne peut pas s'expliquer par une hausse des charges sociales. Elle est due en partie à la croissance de l'emploi, spécialement de l'emploi à temps plein. Le fardeau fiscal des entreprises, qui lui aussi augmente depuis le milieu des années 90, semble s'être stabilisé, contrairement à ce que l'on observe au niveau du fardeau de l'impôt sur le revenu des particuliers.
Dans son mémoire au Comité, le CN affirme que les réductions des impôts seraient un outil important d'amélioration de la productivité. Il recommande au gouvernement :
[de] Réduire les impôts sur le revenu des particuliers. Il ne s'agit pas d'accorder un allégement fiscal aux contribuables; il s'agit plutôt de déterminer où prendra place l'activité économique. Le Canada doit exercer sa concurrence dans le contexte d'une économie nord-américaine de plus en plus intégrée. Tout écart important sur le plan d'allégement fiscal et de réduction des cotisations d'assurance-emploi risque de forcer les entreprises, comme le CN, qui doivent attirer du personnel de gestion hautement qualifié, à exercer d'importantes activités aux États-Unis.
Le régime de l'impôt sur le revenu des particuliers présente un autre aspect notable, à savoir le fait qu'il est très progressif aux tranches de revenu faibles et moyennes pour atteindre le taux le plus élevé à environ 60 000 $. Le taux devient à toutes fins pratiques uniforme au-delà de ce revenu. Non seulement le taux d'imposition supérieur au Canada est élevé par rapport au taux américain, mais il s'applique à partir d'un seuil de revenu qui représente environ le sixième du seuil américain.
Ainsi, s'il est vrai que les Canadiens à revenu élevé paient davantage d'impôts et doivent assumer un taux marginal d'imposition supérieur à celui des Américains à revenu élevé, la vraie disparité entre les deux régimes fiscaux se trouve au niveau des revenus moyens.
D'après un sondage, les problèmes liés à la rétention et au recrutement de personnel qualifié sont en partie attribuables au niveau relativement élevé des impôts personnels en vigueur au Canada.
Alliance des manufacturiers et exportateurs du Canada
Pour bien cibler les réductions d'impôt, on peut envisager d'adopter un concept appelé coût d'efficacité marginal des impôts, qui mesure ce qu'on appelle aussi le fardeau fiscal excédentaire. Il s'agit d'évaluer dans quelle mesure un impôt en particulier réduit le bien-être économique en raison des distorsions qu'il produit. Autrement dit, il s'agit de mesurer le coût d'un impôt pour la société, au-delà des recettes que cet impôt rapporte au gouvernement. Ce coût tient au fait que les impôts modifient le comportement économique - celui-ci reposant non seulement sur la rareté des ressources ou les taux de rendement, mais aussi sur des considérations fiscales. Par exemple, si un impôt réduit le taux de formation de capital, la capacité de production de l'économie s'en trouvera amoindrie parce que le parc des immobilisations sera moindre que ce qu'il aurait été autrement et moins moderne. La main-d'9uvre sera donc moins productive et, par conséquent, la production et les revenus futurs seront inférieurs à ce qu'ils auraient été autrement, et c'est la même chose pour les recettes fiscales futures.
De même, si un impôt décourage l'esprit d'entreprise, le nombre des nouvelles entreprises créées va diminuer. Cela va non seulement entraîner une moindre croissance de l'emploi mais aussi retarder la conversion de l'économie canadienne en une économie nouvelle. La productivité aussi pourrait s'en trouver amoindrie, ce qui cause alors une baisse des salaires réels et du niveau de vie.
Bien sûr, les impôts n'ont pas tous le même effet sur l'économie. Certains influent principalement sur l'offre de main-d'9uvre ou sur sa qualité. Certains agissent sur les décisions en matière d'épargne, tandis que d'autres infléchissent les décisions de placement des entreprises. Il arrive que des impôts aient un effet sur le bien-être économique des particuliers sans pour autant avoir vraiment un impact sur le PIB, tandis que d'autres impôts se répercutent sensiblement sur le PIB. Dans certains cas, les impôts poussent l'activité économique vers l'économie souterraine. L'activité économique a quand même lieu certes, mais elle est sans doute bien moins efficace du fait que les techniques de production sont choisies non pas pour leur efficacité mais pour leur invisibilité du point de vue fiscal. Sur le plan de l'efficacité économique, les baisses d'impôt doivent cibler les impôts dont le coût d'efficacité marginal est le plus élevé.
Selon des estimations américaines, le coût d'efficacité
de l'impôt sur le revenu des particuliers s'établit à
environ 52 cents pour chaque dollar de recettes fiscales (c'est-à-dire
que chaque dollar d'impôt non seulement retire un dollar au secteur
privé mais finit aussi par réduire la production de 52 cents).
Cela représente environ le double du coût d'efficacité
des taxes de vente et la moitié du coût des impôts sur
le revenu du capital au niveau des particuliers8.
On a fait des estimations analogues pour le régime fiscal canadien. Ainsi, l'impôt de base sur le revenu des particuliers induit une perte économique de 38 cents pour chaque dollar de recettes fiscales. Cependant, pour ce qui est de la surtaxe sur les revenus élevés, celle-ci génère une perte économique de plus de 12 $ pour chaque dollar de recettes fiscales9. Cette surtaxe est imposée sur le taux marginal le plus élevé du régime d'impôt sur le revenu des particuliers et, en grande partie, elle s'applique à des revenus tirés du capital.
Si ces estimations elles-mêmes sont parfois contestées, le concept est en revanche admis par les économistes, tout comme les conclusions sur les coûts relatifs des divers impôts. Un impôt qui frappe principalement les revenus de placement, c'est-à-dire le revenu du capital, aura généralement un impact négatif plus grand sur l'économie qu'un impôt qui frappe le revenu du travail au même taux. En général, ce sont les taxes à la consommation qui ont les moindres répercussions fâcheuses sur l'économie.
Plusieurs observations s'imposent ici sur la nature de ces estimations.
Comme le niveau d'imposition est plus élevé au Canada qu'aux
États-Unis, l'on s'attendrait que, toutes choses égales par
ailleurs, le fardeau fiscal excédentaire soit plus élevé
ici aussi. Cette conclusion ne suscite aucune controverse. Comme l'a noté
Pierre Fortin, « dans les écrits sur les finances publiques,
on observe une forte présomption voulant que les inefficacités
causées par l'augmentation des impôts et des transferts -
lesquelles vont de distorsions normales dans l'affectation des ressources
à l'évasion fiscale et à la migration - augmentent
plus que proportionnellement avec les taux d'imposition et de transfert10.
C'est une conclusion importante quand on se rend compte que le fardeau
fiscal est passé de 30 % du PIB en 1980 à 38 % en 1998 tandis
que les transferts sont passés de 9 à 17 % du PIB pendant
la même période. Chacun a ses propres effets pervers, lesquels
sont, à de nombreux égards, cumulatifs.
Deuxièmement, il importe d'établir une distinction entre le fardeau excédentaire moyen et le fardeau excédentaire marginal du régime fiscal. Un régime fiscal peut générer un fardeau excédentaire relativement petit en moyenne, mais le fardeau sur le dernier dollar de recettes fiscales sera généralement beaucoup plus élevé parce que c'est le dollar de recettes fiscales qui est généré au moyen de taux d'imposition élevés. Par conséquent, les effets bénéfiques de réductions d'impôt sont généralement beaucoup plus élevés que le donnent à penser les estimations du fardeau excédentaire moyen.
Troisièmement, lorsque le fardeau excédentaire est élevé, il est difficile de répondre à la question suivante: « Qui assume le véritable fardeau d'un impôt? » Il est utile une fois encore de revenir à l'exemple de la surtaxe de 5 %. À première vue, c'est un impôt qui ne touche que les contribuables à revenu élevé. Cependant, s'il a pour effet de fausser considérablement les décisions économiques, ses conséquences ne sont pas limitées à ceux qui paient directement cet impôt. Elles vont vraisemblablement s'étendre à tous les secteurs de l'économie et toucher un vaste éventail de contribuables. D'ailleurs, il pourrait même imposer un fardeau à des personnes qui ne sont pas des contribuables. Le même type d'analyse s'applique aux impôts sur les entreprises. Ces impôts ne sont pas nécessairement assumés par les actionnaires. S'ils entraînent une baisse des investissements, il s'ensuivra une diminution des salaires réels ou de l'emploi. Dans cette mesure, le fardeau sera assumé par les travailleurs et non par les actionnaires.
Le fait que des allégements fiscaux et une réforme fiscale pourraient avoir ces effets avantageux à un moment donné dans l'avenir signifie qu'ils ne limitent pas l'aptitude du gouvernement à atteindre d'autres objectifs de politique (augmentation des dépenses de programmes, accélération de la réduction de la dette, etc.), comme on pourrait le penser à première vue. Le Comité ne veut pas faire des affirmations exagérées et ne pense pas que toutes les recettes auxquelles on renonce, ou même une forte proportion d'entre elles, seront récupérées. En outre, il n'est pas facile de déterminer combien de temps ces effets bénéfiques mettront à se réaliser. Cependant, comme l'a dit Dale Orr, économiste en chef au Canada de WEFA Inc., « Si Ottawa réduit l'impôt sur le revenu des particuliers, il récupérera entre 20 et 50 % des recettes perdues11 ». Si cette affirmation est exacte, elle jette un jour tout à fait différent sur les mesures d'allégement fiscal et de réforme fiscale. Il est cependant possible que l'on puisse récupérer le manque à gagner résultant de certaines réductions d'impôt en particulier. Comme on l'indique dans une récente étude américaine, « ... il est extrêmement improbable que les réformes fiscales passées se soient financées elles-mêmes au niveau global. Des données empiriques montrent que les changements fiscaux axés sur les contribuables à revenu élevé peuvent être autofinancés, peut-être en raison de changements au niveau des arrangements financiers et au niveau de l'activité économique12 ».
Le gouvernement fédéral aura une influence considérable sur l'évolution de la production agricole, selon les dépenses qu'il choisira de faire. Parmi les domaines les plus importants, citons : la réglementation, la facilitation de l'accès aux marchés, la satisfaction des besoins du public en matière d'information, le recouvrement des coûts et la mise en place d'un climat propice à la croissance économique.
Institut canadien pour la protection des cultures
Enfin, les attentes peuvent jouer un rôle important dans les effets de l'impôt. Un programme crédible d'allégements fiscaux à long terme aurait probablement des effets plus profonds que l'annonce de mesures à court terme mal coordonnées. Cela est particulièrement vrai au niveau de l'épargne et des placements, où les rendements s'étalent sur plusieurs années.
Selon une étude de l'OCDE fondée en partie sur des modèles élaborés par le ministère des Finances du Canada, il est possible que jusqu'à un tiers de la baisse des taux de croissance économique depuis les années 60 soit imputable à l'augmentation du fardeau fiscal dans les économies de l'OCDE et à la composition des impôts. Là encore, ces résultats ne sont pas concluants mais ils donnent à penser que le fait de privilégier les taxes de vente de préférence à des impôts sur le capital ou à des charges sociales pourrait entraîner de petites augmentations permanentes du taux de croissance économique qui, à long terme, auraient des répercussions importantes sur les niveaux de revenu13. Maintenant que le gouvernement a une marge de man9uvre suffisamment grande pour réduire les impôts au lieu de simplement redistribuer le fardeau fiscal, les retombées pourraient être importantes à terme.
En ce qui concerne leur capacité d'économiser pour la retraite, les Canadiens sont désavantagés par rapport à nos principaux partenaires commerciaux. [ . . . ] L'ADC appuie les cinq principes [équité, durabilité, exhaustivité, prévisibilité et compétitivité] endossés par la Retirement Income Coalition, comme moyens de faire en sorte que le régime de revenu de retraite du Canada soit bien administré.
Association dentaire canadienne
Cette discussion illustre la principale préoccupation du Comité, à savoir que doit-on faire pour que l'économie soit plus en mesure d'améliorer rapidement le niveau de vie des Canadiens. Une réforme fiscale et des allégements fiscaux pourraient jouer un rôle de premier plan dans la recherche de productivité ou de croissance.
Une fois ce rôle admis, on peut envisager les allégements fiscaux sous un jour nouveau. Les réductions d'impôt peuvent avoir des effets favorables même sur ceux qui ne sont pas directement touchés par elles. Par exemple, des réductions d'impôt visant l'épargne ou les gains en capital pourraient entraîner des retombées avantageuses (augmentations au niveau des investissements, de la recherche-développement et de la prise de risques; amélioration de la compétitivité des entreprises canadiennes) pour l'ensemble de l'économie et, partant, pour tous les Canadiens. Il en va de même pour les impôts qui visent les entreprises, comme pour ceux qui ciblent les contribuables à revenu élevé.
Certes, nous ne nous attendons pas à ce que le gouvernement ouvre complètement les vannes à l'appui des programmes sociaux, mais nous demandons au Comité de prendre en considération, dans ses recommandations concernant les réductions d'impôts, la réforme fiscale et les appuis aux infrastructures sociales, les besoins de certains des citoyens les plus vulnérables du Canada.
Société canadienne de la sclérose en plaques
De plus, il faut aussi tenir compte des retombées des programmes financés au moyen des recettes fiscales. Néanmoins, ce type d'analyse nous rappelle que le coût des programmes publics dépasse les simples dépenses directes qui y sont associées - ils sont coûteux en raison même de la façon dont ils sont financés. De plus, l'analyse montre que si le fardeau fiscal global peut être approprié, la composition des impôts ne l'est pas nécessairement.
Options pour alléger ou réformer l'impôt personnel
Pour réduire le fardeau fiscal des particuliers, le gouvernement fédéral dispose de divers moyens. Un allégement fiscal réduira naturellement l'impôt moyen supporté par les ménages. Mais cela ne réduira pas nécessairement le taux marginal d'impôt supporté par tous les contribuables, bien que tous, ou une grande partie, pourraient bénéficier d'une réduction du fardeau fiscal14. Mais on obtient de meilleurs gains économiques avec la réduction des taux marginaux d'impôt, en particulier les plus élevés.
L'impôt fédéral sur le revenu des particuliers comporte trois taux : 17 % sur les revenus de 30 000 $ ou moins, 26 % entre 30 000 et 60 000 $ et 29 % sur les revenus dépassant 60 000 $. En outre, une surtaxe de 5 % s'applique aux revenus élevés, ce qui porte le taux marginal d'impôt fédéral à quelque 30,5 %.
L'impôt fédéral comporte aussi un crédit applicable aux particuliers et aux conjoints à charge. Une fois que les mesures du budget de 1999 seront pleinement opératoires, ces crédits soustrairont à l'impôt 7 131 $ de revenu dans le cas des particuliers et 13 186 $ dans le cas des couples mariés avec un seul revenu, ou des parents seuls.
La personne qui prodigue des soins à un membre de sa famille devrait être reconnue dans le régime fiscal et dans le régime des pensions.
Le Conseil national des femmes du Canada
Enfin, la définition d'une assiette de l'impôt sur le revenu aura aussi un effet marqué sur le fardeau fiscal et les taux réels d'imposition. De fait, notre impôt personnel est un croisement entre un impôt personnel (dont l'application n'est pas universelle) et une taxe de consommation. L'inclusion partielle des gains en capital et la disposition permettant la déduction de l'épargne-retraite du revenu donnent une assiette qui ressemble à celle d'une taxe de consommation. Les dispositions concernant les REER prévoient que jusqu'à 18 % du revenu gagné peut être déposé dans un régime d'épargne-retraite, jusqu'à hauteur de 13 500 $ par année.
Envisager un allégement fiscal général, ou une réforme fiscale, implique habituellement des changements à ces éléments du système d'impôt personnel. Ainsi, le gouvernement pourrait augmenter les crédits de base et de conjoint pour accorder un allégement à tous ceux qui sont imposables, ou réduire les taux marginaux d'imposition qui s'appliquent aux trois fourchettes, ou réduire ou éliminer la surtaxe sur le revenu élevé, ou augmenter les seuils des deuxième et troisième taux d'imposition, ou encore il pourrait améliorer l'assiette de l'impôt.
Nous examinerons maintenant les implications de chacune de ces options.
1. Crédit personnel de base et crédit de conjoint
L'effet des budgets de 1998 et 1999 a été d'augmenter de 675 $, pour tous les contribuables, le crédit personnel de base et le crédit de conjoint. Cela a eu pour résultat de hausser le revenu que les particuliers et les familles peuvent gagner sans payer d'impôt. Si cette mesure profite à tous, elle n'a aucun effet sur les taux marginaux d'impôt qui s'appliquent à la plupart des contribuables canadiens.
Dans le cadre d'une approche budgétaire vraiment équilibrée, qui comprendrait des réinvestissements à grande échelle dans les programmes sociaux et des réformes fiscales équitables, le CTC serait en faveur d'une augmentation progressive substantielle du crédit d'impôt fédéral de base et d'une indexation complète des crédits et des seuils d'imposition sur le taux de l'inflation.
Congrès du travail du Canada
Accroître les crédits se traduit par un impact proportionnellement plus fort sur les contribuables à faible revenu que sur les contribuables à revenu élevé.
Chaque augmentation de 100 $ dans l'exemption personnelle de base coûte au gouvernement fédéral 240 millions de dollars, alors qu'une augmentation de 100 $ du crédit de conjoint (et son équivalent) coûte au gouvernement 40 millions. Les budgets de 1998 et 1999 ont soustrait à l'impôt fédéral quelque 600 000 contribuables, au coût estimé de 1,8 milliard en l'an 2000-2001.
2. Seuils des fourchettes d'imposition
Depuis 1985, les seuils des diverses fourchettes d'imposition sont indexés lorsque le taux d'inflation dépasse 3 % par année. Comme l'inflation a été inférieure à 3 % depuis 1992, les seuils n'ont pas bougé. Au fil des années, cette indexation partielle a permis à un grand nombre de contribuables de migrer vers des fourchettes supérieures, même en l'absence d'augmentation réelles de leur revenu.
Une réforme fiscale se justifie, surtout à la lumière de la faible progression des revenus de la plupart des Canadiens. En raison de l'indexation partielle des impôts au niveau fédéral, les contribuables tombent dans la fourchette supérieure d'imposition, du simple fait que les seuils d'imposition ne sont ajustés en fonction de l'inflation que lorsque celle-ci dépasse 3 %. Les coopératives de crédit souhaiteraient que le gouvernement prenne l'engagement de réduire le fardeau fiscal dans son budget pour l'an 2000.
Centrale des caisses de crédit du Canada
Mais cela soulève une question fondamentale : les fourchettes sont-elles trop étroites et le seuil de la fourchette supérieure est-il fixé à un niveau de revenu trop bas? (Les fourchettes actuelles sont le produit d'une réforme de l'impôt sur le revenu qui a réduit de 10 à 3 les fourchettes d'imposition et transformé de nombreuses exemptions et déductions en crédits d'impôt non remboursables.) En outre, si l'on considère que le taux d'imposition du milieu est presque celui d'un taux d'imposition élevé et que les deux sont élevés par rapport aux moyennes internationales, il tombe sous le sens que les contribuables canadiens à revenu moyen sont plus lourdement imposés que leurs homologues des États-Unis.
Le peu d'étendue des fourchettes a aussi des effets non négligeables sur le fardeau fiscal des familles, question qui a déjà fait l'objet de longues discussions, ainsi que d'un rapport du Comité permanent des finances de la Chambre des communes15.
Une autre raison qui explique pourquoi les familles à revenu unique paient plus d'impôt que celles à deux revenus, alors que le revenu global est le même, est le fait que le taux d'imposition du milieu est considérablement plus élevé que le taux d'imposition inférieur et que son seuil, soit 30 000 $, est relativement bas. Une famille à revenu moyen et unique verra une proportion assez importante de son revenu fédéral imposée au taux de 26 %, alors qu'une famille à deux revenus comparables verra presque la totalité de son revenu fédéral imposé au taux de 17 %.
Toute réforme qui élèvera le seuil du taux d'imposition du milieu pourra contribuer de façon importante à réduire la disparité entre les familles à un seul revenu et celles à deux revenus, sans toucher aux mesures fiscales destinées expressément aux familles à deux revenus, comme la déduction pour frais de garde.
Le seuil de la fourchette d'imposition fédérale supérieure se situe à 60 000 $, soit environ le sixième du niveau de revenu correspondant au seuil du taux d'imposition américain le plus élevé. (En outre, le taux d'imposition américain le plus élevé est inférieur au taux canadien équivalent.)
Ces seuils créent un système d'imposition des particuliers qui est hautement progressif aux niveaux de revenu inférieurs, mais qui devient dans les faits un impôt uniforme pour les revenus moyens. Cette progressivité est supérieure à ce qu'on constate ailleurs et touche une forte proportion de la population imposable. C'est une des raisons pour lesquelles l'impôt canadien sur le revenu des particuliers produit des revenus aussi importants en proportion du PIB.
Pour bien comprendre l'importance de ces seuils, prenons un exemple fictif d'ajustement fiscal : le seuil de la fourchette du milieu est porté de 30 000 à 40 000 $ alors que celui du taux supérieur est augmenté de 30 000 $. Dans le premier cas, cela représente pour le gouvernement fédéral un coût de 4,5 milliards de dollars par année, alors que dans le second, on parle d'un coût de quelque 490 millions.
Il y a deux explications à cette énorme différence. D'abord, les contribuables visés dans le premier cas sont très nombreux, environ6,6 millions. Ensuite, le revenu imposable entre 30 000 et 40 000 $ bénéficierait d'une baisse du taux marginal d'imposition de 26 à 17 %, soit une baisse du tiers. Le nombre de contribuables touchés même par une augmentation de 30 000 $ du seuil de la fourchette supérieure est beaucoup moindre, soit environ 1,5 million. En outre, le taux marginal d'imposition des revenus entre 60 000 et 90 000 $ chuterait de 29 à 26 %, une baisse d'un dixième seulement.
Le système d'impôt fédéral comporte trois taux : 17, 26 et 29 %. Il existe aussi une surtaxe de 5 % sur les revenus élevés qui porte le taux marginal d'impôt effectif à 30,5 %. S'ajoutent à ces taux d'impôt fédéraux (mais pas à la surtaxe) les impôts provinciaux sur le revenu qui ont pour effet d'augmenter le fardeau de moitié environ. Combiné avec les surtaxes provinciales, le taux marginal d'imposition supérieur se situe dans les 50 %.
Les taux marginaux d'imposition sont des facteurs importants qui influent sur les décisions des particuliers et des entreprises. Car c'est « à la marge » que les décisions économiques se prennent16. C'est du taux marginal d'impôt que dépendent les retenues qui seront faites sur un investissement, une augmentation, un nouvel emploi, les heures supplémentaires, etc. Et plus le taux marginal d'impôt est élevé, plus grand sera l'écart entre les revenus avant et après impôt dus à l'effort de travail, aux économies, à l'investissement, à la prise de risques et à l'activité entrepreneuriale. On le voit, des taux marginaux d'impôt élevés ont un plus grand impact sur le fonctionnement de l'économie, la productivité et la croissance.
La désindexation partielle des impôts sur le revenu des particuliers, la prestation fiscale canadienne pour enfants et le crédit pour TPS ont eu pour effet d'alourdir le fardeau fiscal de l'ensemble des Canadiens et surtout celui des soutiens de famille touchant un revenu faible, modeste ou moyen.
Citizens for Public Justice
Mais il n'y a pas que le régime d'imposition des particuliers qui influe sur les taux marginaux d'impôt des Canadiens. Les cotisations sociales comme les cotisations d'assurance-emploi et les cotisations du régime de pensions du Canada (ou du régime des rentes du Québec) ont aussi un impact sur les taux marginaux d'imposition. À cet égard, les taux de réduction qui sont appliqués à certains avantages sociaux fonctionnent aussi comme des taux d'imposition. Ils ont l'effet de réduire le revenu disponible associé à tout dollar additionnel provenant d'un revenu du travail ou d'un revenu de placements. Cela est particulièrement vrai dans le cas des taux de réduction appliqués à la Prestation fiscale canadienne pour enfants, à la Prestation nationale pour enfants, au crédit pour TPS remboursable et aux prestations d'assistance sociale. C'est la combinaison de tous ces éléments qui fait que des contribuables à relativement faible revenu sont aux prises avec des taux marginaux d'imposition de 40 % et même de 60 %.
Il y a diverses façons pour le gouvernement de s'attaquer à ces taux marginaux d'impôt élevés. Il pourrait éliminer la surtaxe de 5 % qui frappe les contribuables à gros revenus. Il pourrait abaisser les trois taux d'imposition légaux. Ou il pourrait abaisser ou éliminer les taux de réduction qui s'appliquent à la Prestation fiscale canadienne pour enfants.
Depuis six ans, le gouvernement fédéral réduit annuellement les cotisations d'assurance-emploi, et il a également réduit la prime de 15 cents par 100 $ de revenu assurable pour l'an 2000.
Le Toronto Board of Trade a rappelé au Comité que les contribuables de la fourchette supérieure ne sont pas nombreux, mais qu'ils sont essentiels au fonctionnement de l'économie. Seulement 4 % des contribuable gagnent plus de 70 000 $, mais ils contribuent pour plus de 31 % à l'ensemble des recettes fiscales fédérales. Comme il a été dit, le coût marginal d'efficacité associé à la surtaxe de 5 % est particulièrement élevé. C'est ce groupe qui dispose de nombreuses options économiques. Il peut se déplacer facilement et il a accès à des ressources qui lui permettent d'être moins taxé. Éliminer cette taxe serait encore plus profitable pour l'ensemble de l'économie canadienne que pour les contribuables directement concernés. Selon les estimations du ministère des Finances, éliminer cette surtaxe coûterait au gouvernement fédéral quelque 650 millions en perte directe de recettes.
Les taux marginaux d'imposition fédéraux pourraient aussi être réduits. Réduire le taux le plus élevé par un point de pourcentage coûterait au gouvernement 550 millions. Réduire le taux moyen par un point de pourcentage coûterait 1,05 milliard, alors que la même réduction du taux inférieur coûterait 1,93 milliard. Étant donné la structure de l'impôt personnel dans toutes les provinces sauf le Québec, de telles réductions se traduiraient automatiquement par une réduction de l'impôt provincial. C'est le cas de presque toute réduction de l'impôt fédéral, avec l'exception de la surtaxe de 5 %. Mais il faut dire que les provinces ont maintenant la possibilité d'appliquer leur impôt sur le revenu plutôt que sur l'impôt fédéral de base, tout en continuant de participer à l'accord de perception fiscale avec le gouvernement fédéral. Si elles choisissent de le faire, elle peuvent « découpler » leurs recettes de celles du gouvernement fédéral.
Des trois taux marginaux d'impôt, celui qui présente le plus d'intérêt pour la réduction est le taux du milieu. À 26 %, il est un peu plus faible que le taux supérieur et seulement une fois et demie plus élevé que le taux inférieur. De fait, on pourrait presque affirmer que le système d'impôt fédéral ne comporte que deux taux et que le seuil du taux supérieur se situe aux environs de 30 000 $. Cela tient au fait que le gouvernement fédéral n'a pas mené à terme à la fin des années 80 la réforme fiscale qu'il avait promise.
Le choix de l'assiette fiscale peut avoir un impact important sur les recettes du gouvernement et sur l'efficacité de l'économie. Comme il a été dit, ce sont les taux marginaux d'impôt supérieurs qui font généralement le plus mal à l'économie, à la productivité et à la croissance. Un système fiscal qui s'appuie sur une large assiette sera en mesure d'appliquer des taux marginaux d'impôt moins élevés qu'un système dont l'assiette est étroite. C'est ce qu'a tenté de faire la réforme fiscale des années 80.
Mais tout débat sur l'assiette fiscale implique une autre question. L'assiette devrait-elle être basée sur le revenu ou sur la consommation? Il est bien connu que l'épargne est sujette à une double imposition. Celui qui consomme tout son revenu paiera globalement moins d'impôt que celui qui épargne pour pouvoir dépenser davantage plus tard. Cette double imposition est une désincitation à l'épargne.
Comme il a été dit, les impôts appliqués au revenu du travail ou à la consommation perturbent moins l'économie que les impôts sur les gains en capital. L'impôt personnel au Canada s'applique au revenu à la fois du travail et du capital. Il y a trois mesures qui atténuent en partie l'effet de l'impôt sur le revenu du capital : l'inclusion partielle des gains en capital dans l'impôt de base, l'intégration partielle de l'impôt sur les sociétés et de l'impôt personnel par le biais du crédit d'impôt pour dividendes, et la déduction du revenu des cotisations à certains régimes enregistrés d'épargne. Toutes ces mesures contribuent à réduire l'impôt sur le revenu du capital.
Quant à savoir si ces incitatifs sont suffisants ou efficaces, le débat n'est pas clos. Aux États-Unis, le taux d'impôt réel sur les gains en capital est environ la moitié du taux canadien. Si le gouvernement canadien veut encourager les investissements dans des entreprises reliées à la nouvelle économie, où les risques sont élevés et où le rendement prendra sans doute la forme de gains en capital, un taux d'impôt plus près du taux américain serait plus susceptible de favoriser ces investissements.
Les problèmes de financement des petites entreprises canadiennes sont bien connus. Alors que le gros du débat se polarise sur les prêts bancaires aux PME, il devient de plus en plus évident qu'une grande partie du problème est lié aux capitaux propres. Le capital-actions des petites entreprises, des entreprises qui démarrent ou des jeunes entreprises de haute technologie tend à provenir de l'économie locale. Il ne vient habituellement pas de l'extérieur. C'est ainsi que l'impôt appliqué aux gains en capital risque d'avoir un gros impact sur la mesure dans laquelle les investisseurs locaux sont disposés à assumer les risques élevés associés aux entreprises qui démarrent ou aux entreprises fondées sur le savoir.
Le régime fiscal canadien n'a pas d'impôt distinct pour les gains en capital, mais il lui applique plutôt le même barème qu'aux autres formes de revenu. C'est le taux d'inclusion qui détermine le taux d'imposition réel qui s'applique aux gains en capital. Depuis l'introduction de l'impôt sur les gains en capital, ce taux d'inclusion a habituellement été de 50 % et il est passé au taux actuel de 75 % au cours de la dernière décennie.
L'imposition des gains en capital appelle deux observations. D'abord, si le taux d'impôt sur les gains en capital est nettement moins élevé aux États-Unis qu'au Canada, il génère une part beaucoup plus grande des recettes du gouvernement américain. Ce qui laisse supposer qu'une réduction des taux d'impôt sur les gains en capital ne signifie pas nécessairement une perte de recettes pour le gouvernement. Il convient toutefois de noter que le régime des gains en capital ne se résume pas au taux d'imposition. Exemptions, transferts d'impôt, successions, et d'autres éléments du régime fiscal sont tous utiles pour évaluer l'impact économique des impôts sur les gains en capital.
Ensuite, bien que les gains en capital soient surtout réalisés par les contribuables à revenus élevés, on a tendance à exagérer les faits. Les gains en capital se réalisent généralement en bloc. Plutôt que d'être répartis de façon égale dans le temps, ils sont concentrés et irréguliers c'est notamment le cas des petits entrepreneurs qui font des gains en capital lorsqu'ils vendent leur entreprise. Ainsi, le revenu cumulatif de ceux qui font des gains en capital tend à être plus faible que normalement dans l'année où ils réalisent ces gains.
L'Institut des fonds d'investissement du Canada suggère qu'un taux d'inclusion à deux échelons, en fonction de la période de détention des avoirs, devrait s'appliquer aux gains en capital. En l'absence d'études, on ignore ce que devrait être la période de détention pour profiter d'un taux d'imposition plus faible et quel serait le fardeau administratif et les conditions d'observation. En outre, cela pourrait influer sur les décisions des investisseurs, les amenant à retenir leurs gains plus longtemps uniquement pour profiter d'un meilleur taux d'impôt, ce que le Comité souhaite justement éviter. Nous croyons que les décisions d'investir doivent être fonction de la conjoncture économique et non pas de considérations fiscales. Contrairement à la plupart des autres formes de revenu, les contribuables peuvent décider quand convertir ces gains en espèces et, partant, quand payer l'impôt qui s'applique.
Pour de nombreux Canadiens, les REER sont le seul moyen de préparer adéquatement leur retraite du point de vue financier.
La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante
L'imposition des gains en capital est compliquée du fait que les entreprises ont un peu de latitude dans la façon de répartir les bénéfices. Les gains peuvent être distribués sous forme de dividendes, mais s'ils sont retenus, ils peuvent faire monter la valeur des actions. Si le taux d'imposition est différent dans les deux cas, il y a une incitation à accroître les rendements des actionnaires sur la forme de revenu qui bénéficie du taux le moins élevé. Selon Jack Mintz, la neutralité justifie actuellement un taux d'inclusion d'environ les deux tiers, comparé au taux existant des trois quarts. Autrement dit, les gains en capital sont imposés plus fortement que les dividendes. Si les taux d'imposition des particuliers et des sociétés devaient baisser, assez rapidement la neutralité pourrait justifier un taux d'inclusion de 50 %.
Par le traitement fiscal qu'il réserve aux cotisations aux REER, le gouvernement encourage l'épargne. Ces instruments sont liés aux économies réalisées en vue de la retraite et les raisons de certaines limites aux cotisations sont fondées sur une évaluation des niveaux raisonnables d'aide fiscale au revenu de retraite. Selon le Comité, toutefois, de tels régimes ne devraient pas exister seulement comme protection du revenu de retraite. (De fait, le gouvernement fédéral permet l'existence d'un régime distinct d'épargne-éducation, ayant moins d'avantages fiscaux que les REER, mais qui bénéficie maintenant d'une subvention de 20 %; il permet aussi que les REER servent à financer l'achat d'une maison et l'éducation permanente sous certaines conditions. En outre, un groupe de travail fédéral a recommandé récemment que les REER servent à financer les jeunes en affaires.) Si l'économie bénéficie d'une augmentation du taux d'épargne des Canadiens - taux qui a fait un plongeon depuis 10 ans en quoi le but de l'épargne importe-t-il ? Les REER sont en train de devenir des instruments d'épargne pour bien plus que la retraite.
Bon nombre de membres de caisses coopératives ne disposent d'aucun régime de retraite d'employeur ou sont couverts par un régime qui ne leur permettra pas de jouir de revenus suffisants une fois à la retraite.
Centrale des caisses de crédit du Canada
Essentiellement, deux voies s'offrent au gouvernement. Ou bien il applique un taux marginal d'imposition différent au revenu de retraite, ou il utilise un instrument comme les REER pour reporter l'impôt sur l'épargne. Si le gouvernement choisit de ne pas prendre la première voie, il serait alors avantageux d'élever les plafonds actuels des cotisations aux REER.
La règle des 20 % de placements en biens étrangers
Le Comité a déjà fait valoir que le gouvernement devrait augmenter le montant des biens étrangers pouvant être détenus pas les Canadiens dans leurs REER. À l'heure actuelle, ils sont limités à 20 %. Comme le Canada ne représente qu'environ 2,5 % des marchés financiers mondiaux, cette restriction limite la capacité des Canadiens de diversifier leur portefeuille de retraite. Il est largement reconnu que cette restriction réduit le rendement que les Canadiens peuvent tirer de leurs épargnes. Cela augmente également les risques pour les Canadiens étant donné que l'économie canadienne n'est pas aussi diversifiée que l'économie mondiale, et notamment que l'économie américaine. Comme nous l'avons déjà dit, la disposition qui « protège » les Canadiens contre un investissement dans des marchés naissants risqués est la même disposition qui les empêche d'investir dans le marché américain relativement stable, un marché dont le taux de rendement est supérieur à celui de notre propre marché financier.
Il est clair que les Canadiens souhaitent avoir une plus grande portion en valeurs étrangères dans leurs régimes d'épargne. Récemment, une nouvelle forme de fonds mutuels est apparue, destinée précisément à permettre une plus grande exposition aux risques étrangers, à leur permettre de profiter davantage du rendement des titres étrangers, tout en se conformant aux règles de la Loi de l'impôt sur le revenu. Ces fonds mutuels sont des instruments dérivés destinés à permettre un rendement tiré d'un portefeuille de valeurs étrangères.
Récemment, une décision d'un tribunal a confirmé que ces fonds mutuels sont effectivement admissibles à titre d'investissements dans des REER. Les institutions financières canadiennes offrent et annoncent ces fonds maintenant, qui sont souvent liés au rendement d'un indice ou d'une bourse, comme NASDAQ, S&P 500, etc.
Outre les arguments que le Comité a déjà fait valoir dans le passé, notamment qu'un contenu accru de biens étrangers ne nuirait pas aux marchés financiers du Canada et que cela accroîtrait le rendement pour les Canadiens, nous souhaitons faire une observation plus pratique. Nous croyons que les Canadiens devraient pouvoir faire directement ce qu'ils ne peuvent faire qu'indirectement à l'heure actuelle. Le recours à des instruments dérivés dans les fonds mutuels a un coût. Il en coûte plus cher aux Canadiens d'obtenir ainsi un rendement sur des valeurs étrangères que s'ils pouvaient acheter ces valeurs directement. De fait, l'Institut des fonds d'investissement du Canada indique que les fonds qui permettent une exposition aux risques étrangers ajoutent de 40 à 80 points de base au coût des fonds sous-jacents, pourcentages qu'il serait plus intéressant de retrouver dans le rendement de l'épargne.
De nombreux courtiers en placement sont en train de mettre sur pied un nouveau type de fonds commun de placement, des fonds « clonés », qui permettent de contourner la règle sur la propriété étrangère et grâce auxquels les investisseurs peuvent détenir une quantité quasi illimitée d'instruments étrangers.
Centrale des caisses de crédit du Canada
Ces fonds mutuels n'existeraient sans doute pas si une forte proportion de Canadiens ne souhaitaient pas dépasser dans leurs REER la règle des 20 % de biens étrangers. Ces fonds sont simplement la réaction du marché à une limitation réglementaire ni souhaitée ni nécessaire. Leur existence montre que cette politique du gouvernement n'a pas l'appui de bien des Canadiens qui épargnent pour leur retraite. Nous reprenons donc notre recommandation des années précédentes. Le gouvernement devrait porter à 30 % sur une période de cinq ans le contenu en biens étrangers des REER et d'autres instruments de retraite admissibles à l'aide fiscale.
Nous croyons qu'une règle de 30 % répondrait à l'essentiel des besoins de rendement et de diversification des épargnants canadiens. Il y aurait lieu de mentionner aussi que ces fonds « clonés » permettent à certains détenteurs de REER de contourner la règle des 20 %, mais que ceux dont le gros de l'épargne-retraite est sous forme de REER ne le peuvent pas.
L'impôt sur les sociétés
Le comité Mintz a formulé plusieurs recommandations pour améliorer le régime fiscal qui s'applique au revenu des entreprises. Il avait comme instruction d'examiner la question de la réforme de la fiscalité des entreprises de façon à ce qu'elle soit sans incidence sur les recettes.
Aujourd'hui, le secteur des affaires paie environ 30 % de tous les impôts perçus par tous les ordres de gouvernement au Canada. En 1995, ce montant s'élevait à 84 milliards de dollars. Les principales formes d'impôt sont les cotisations sociales (27 % de toutes les taxes d'affaires), l'impôt sur les sociétés (22 %), l'impôt foncier (18 %), les taxes de vente (8 %), l'impôt sur le capital (5 %) et les taxes d'accise sur l'essence (5 %). Le gouvernement fédéral applique trois taux d'impôt sur les sociétés (y compris la surtaxe des sociétés) : 29,12 % en général, 22,12 % sur les entreprises de fabrication et de transformation et 13,12 % sur les entreprises privées sous contrôle canadien. Le gouvernement applique aussi un impôt de 0,225 % sur le capital dépassant 10 millions de dollars qui est réduit du montant de la surtaxe payée par les sociétés. Cela s'appelle l'impôt des grandes sociétés. Les institutions de dépôt paient un impôt additionnel sur le capital au taux de 1,25 %. Et les grandes institutions de dépôt sont aussi assujetties à une surtaxe temporaire (Partie VI, surtaxe sur le capital). Il y a aussi une surtaxe progressive pour les assureurs. Le gouvernement retire environ 1,5 milliard de l'impôt des grandes sociétés. En 1996, les institutions financières réglementées ont payé environ 350 millions en impôt fédéral sur le capital.
Selon le rapport Mintz, la neutralité devrait être la principale caractéristique d'un régime fiscal, bien qu'il devrait y avoir place pour des situations spéciales. Le régime fiscal des entreprises au Canada comporte une grande variation dans les taux d'imposition, en raison de différents taux prévus par les lois et de différentes dépenses fiscales qui s'appliquent aux divers secteurs de l'économie. Toutes les grandes sociétés paient en moyenne un taux fédéral réel de 17 %. Au plus haut échelon, on trouve les institutions de dépôt et les services publics avec un taux de 26 %; au bas de l'échelle, le secteur minier avec 6 %; alors que l'agriculture, l'industrie forestière et les pêches ont un taux de 12 %. De fait, les secteurs à forte croissance de l'économie, soit ceux de la nouvelle économie, sont ceux qui sont assujettis au taux d'imposition le plus élevé.
En comparant la fiscalité des entreprises au Canada à celle
d'autres pays du G7, on voit que le Canada se situe au milieu pour ce qui
est du secteur manufacturier, avec un taux marginal d'imposition des investissements
qui est légèrement supérieur à celui des États-Unis.
Le comité Mintz a toutefois noté que le secteur des services
au Canada paie des impôts nettement plus élevés que
son pendant aux États-Unis, et se rapproche du sommet de l'échelle
du G7. En gros, c'est l'industrie des services qui est le secteur porteur
de l'économie canadienne.
La Mise à jour économique et financière a souligné cette caractéristique de la fiscalité des entreprises au Canada. Voici ce qu'on constate :
Depuis 1996, tous les pays du G7, sauf le Canada et les États-Unis, ont réduit leur taux général d'impôt des sociétés ou prévoient le faire. D'autres pays réduisent aussi leur taux, y compris la Suisse (de 35,5 à 25 %) et l'Australie (de 36 à 30 %).
À la différence de la plupart des pays, le Canada fait varier son taux d'impôt des sociétés selon la taille et l'activité de l'entreprise. Il applique aux petites entreprises un des taux d'imposition les plus bas qui soient (taux d'imposition effectif fédéral-provincial de 21 %); il applique des taux comparables au secteur de la fabrication et de la transformation (taux d'imposition effectif de 35 %), mais il impose le taux général d'impôt de 43,5 % à la plupart des autres secteurs, y compris l'industrie des services et l'industrie fondée sur le savoir.
En matière d'allégement et de réforme fiscale, il y a plusieurs domaines qui méritent de retenir l'attention du gouvernement. Si le Comité s'est fait dire qu'une réforme et des allégements fiscaux devraient d'abord être axés sur la fiscalité des particuliers, il ne faudrait pas ignorer le secteur des affaires. D'autre part, comme les taxes d'affaires ne rapportent par les énormes recettes que procure l'impôt sur le revenu des particuliers, une réforme valable peut toujours être entreprise sans absorber une large part du dividende budgétaire.
D'après le rapport Mintz, la réforme de la fiscalité des entreprises devrait porter en priorité sur l'égalisation des taux d'imposition effectifs dans les divers secteurs de l'économie, l'élimination des surtaxes des sociétés et la réduction de l'échelle de l'impôt sur le capital. D'autre part, les déductions pour amortissement devraient être ajustées pour mieux tenir compte de l'amortissement économique réel. Il faudrait alors appliquer à certaines catégories des taux d'amortissement plus lents et à d'autres des taux d'amortissement plus rapides.
En appliquant à différents secteurs de l'économie des taux différents, le gouvernement se trouve à encourager certains types d'activité économique et à en dissuader d'autres. Le taux d'imposition effectif qui s'applique aux secteurs les plus imposés est presque cinq fois celui du secteur le moins imposé, et les industries les plus imposées paient presque les deux tiers de plus que la moyenne des sociétés, selon le témoignage de l'Association des banquiers canadiens. Certes, la péréquation des taux d'imposition prévue par des lois serait un pas dans la bonne direction, mais il y a d'autres éléments du régime fiscal qui exacerbent cette non-neutralité.
Le témoignage de l'Association canadienne des compagnies d'assurances des personnes va dans le même sens. D'après son mémoire, le secteur des services financiers fournit 20 % des recettes fédérales en impôt sur les sociétés, alors qu'il ne produit que 16 % des profits. De 1987 à 1997, les impôts payés par ces compagnies d'assurances ont augmenté de 15 % par année, alors que leurs profits n'augmentaient que de 6 % par année.
Un autre grand défi que l'industrie mondiale doit relever, c'est celui de générer un meilleur rendement du capital. Au Canada, cela est essentiel pour que s'opère l'investissement continu en installations et en nouvelles technologies qui permettront aux métallurgistes de mieux servir la population et l'économie du Canada.
Association canadienne des producteurs d'acier
Ce qui est paradoxal à cet égard, c'est que les taux les plus élevés s'appliquent au secteur des services et à cette partie de l'économie qu'on appelle généralement la « nouvelle économie ». Ce sont ces domaines où la croissance est la plus rapide et qui sont les plus prometteurs. C'est également là que se trouvent nos meilleures chances d'accroître la productivité et de hausser le niveau de vie des Canadiens. La nouvelle économie représente une part plus importante de l'économie américaine que de celle du Canada. Il se pourrait que la fiscalité y soit pour quelque chose.
Tout comme l'impôt des particuliers, l'impôt sur les sociétés comprend une surtaxe destinée au départ à lutter contre le déficit. Comme le Comité l'a déjà fait valoir, les mesures spécifiques de réduction du déficit devraient être éliminées maintenant que le déficit n'existe plus. L'élimination complète de la surtaxe des sociétés coûterait au gouvernement fédéral quelque 580 millions de dollars par année. Il est important de rappeler que la surtaxe a un effet sur l'impôt des grandes sociétés, celles-ci pouvant déduire leur « dette fiscale » de cette surtaxe. (Ce qui a à peu près pour effet de faire de l'impôt des grandes sociétés un impôt minimum pour celles-ci.) Si elle était éliminée, les sociétés qui y sont assujetties devraient pouvoir déduire cette dette fiscale de leur impôt à payer.
Essentiellement, l'impôt sur les sociétés comporte trois taux d'imposition différents. Il y a un taux général, un taux plus bas pour les entreprises de fabrication et de transformation et un taux encore plus bas pour les petites entreprises. Une façon d'égaliser les divers taux serait d'abaisser le taux général. Chaque réduction d'un point de pourcentage coûte au gouvernement fédéral environ 270 millions de dollars.
Il faudrait abaisser le taux d'imposition général des sociétés pour que les entreprises canadiennes, dont celles de transport routier dans l'ensemble de l'Amérique du Nord, soient moins désavantagées sur le plan de la concurrence internationale.
Alliance canadienne du camionnage
Comme le montre l'extrait de la Mise à jour économique et financière notre régime fiscal ne suit pas l'évolution du reste du monde industrialisé, où les impôts sur les sociétés sont à la baisse et où les impôts payés par le secteur des services et les entreprises de la nouvelle économie sont moins élevés qu'au Canada.
Enfin, il convient de noter que de tous les impôts sur le revenu d'entreprise, l'impôt sur les sociétés en représente environ le quart. De fait, avec le temps, le gouvernement fédéral en est venu à compter davantage sur des impôts qui ne tiennent pas compte des bénéfices. Si cela a pu contribuer à accroître les recettes fiscales en période de faibles revenus ou d'absence de revenus des entreprises, ce fut un fardeau de plus en plus lourd pour celles-ci à un moment où elles étaient moins en mesure de le supporter. Les petites entreprises, représentées par la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, ont souvent critiqué énergiquement cette tendance, car ce sont elles qui en ont souffert le plus.
Ces impôts sans égard aux bénéfices ne sont pas tous dus au gouvernement fédéral. Il reste que les hausses des cotisations d'assurance-emploi, du RPC, des impôts sur le capital, et ainsi de suite, ont contribué à faire augmenter le fardeau fiscal des entreprises en période de performance économique faible. Ces dernières années, seules les cotisations d'assurance-emploi ont baissé, mais la baisse fût tout de même significative. De 4,3 cents par 100 $ de rémunération assurable en 1994, le taux de la cotisation de l'employeur en 2000 sera de 3,36 cents par 100 $. Cela représente une baisse de 22 % sur6 ans, ce qui ne s'est pas vu dans le cas des autres impôts. En outre, cela ne tient pas compte de l'impact de cette réduction sur le maximum de la rémunération assurable ou de l'exonération de primes pour les nouveaux employés.
Le rapport Mintz s'est aussi penché sur la question du seuil de 200 000 $ du taux d'imposition des petites entreprises. Il reconnaît que ce seuil n'a pas suivi le mouvement de l'inflation. Néanmoins, il n'a pas recommandé une hausse de ce seuil, parce que la grande majorité des petites entreprises ont des revenus inférieurs à ce seuil et que celles dont les revenus le dépassent appartiennent en fait à des gens riches. Le rapport conclut qu'un relèvement du plafond ne serait pas compatible avec l'objectif de cette mesure, qui est de venir en aide aux « vraies » petites entreprises, pour lesquelles les obstacles sont l'accès au financement et les coûts d'observation, entre autres choses17. Pour reprendre le message de la Mise à jour économique, le taux d'imposition des petites entreprises au Canada est déjà très bas par rapport aux autres pays.
Le rapport Mintz a aussi examiné le rôle que joue l'impôt sur le capital dans la fiscalité des entreprises. Le gouvernement fédéral perçoit environ1,5 milliard de dollars en impôt sur le capital, soit le tiers du montant perçu dans l'ensemble du pays. Un des principaux problèmes de l'impôt sur le capital est que son assiette diffère d'une province à l'autre, et qu'elle est différente aussi au niveau fédéral. Le rapport recommandait une harmonisation afin de réduire les coûts d'administration et d'observation.
Mais il y a plus. L'Association des banquiers canadiens indique que :
[ . . . ] le Canada est le seul pays à appliquer un impôt sur le capital depuis que l'Allemagne a aboli le sien en 1997. L'impôt sur les sociétés de l'Allemagne sera tombé à 35 % en l'an 2000, ce qui représente une baisse importante par rapport à 1997, où le taux sur les bénéfices répartis s'élevait à 57 %. Dans d'autres pays Danemark, Finlande, Norvège et Suède, par exemple , les taux de l'impôt sur les sociétés et sur les particuliers dans le cas des intérêts et des gains en capital varient entre 25 et 30 %. L'Italie a aussi baissé ses taux d'imposition des sociétés de 51 à 37 % avec l'élimination, en 1998, de l'impôt régional sur les sociétés et d'autres petits impôts sur le capital et les cotisations sociales pour les remplacer par un nouvel impôt régional sur la valeur ajoutée [ . . . ] Le Canada se situe au bas de l'échelle en termes de compétitivité fiscale d'après un tableau établi par IMD International, une école de cadres de direction établie en Suisse. Avec 3,8 % du PIB, par exemple, nous percevons plus d'impôts sur le capital et d'impôts fonciers que tout autre gouvernement recensé dans le tableau d'IMD, après Taiwan et la Russie.
Si l'ABC pointe du doigt l'impôt sur le capital et l'impôt foncier, c'est que ces deux impôts s'appliquent à du capital plutôt qu'à des flux économiques. De sorte que ces impôts s'appliquent année après année aux mêmes avoirs, qu'ils génèrent des bénéfices ou non. Et même s'ils produisaient des bénéfices, ceux-ci seraient imposés en tant que tels.
Pour être valable, la réforme fiscale doit se solder par une amélioration de la situation des investisseurs qui fournissent des capitaux, des entités qui créent des emplois hautement spécialisés et techniques et des entrepreneurs qui font preuve d'innovation.
L'Association charbonnière canadienne
Le Comité a insisté plus tôt sur le fait que l'allégement fiscal devrait être axé sur l'impôt que paient les particuliers sur leurs revenus. L'impôt sur les sociétés devrait jouer un rôle moins important. Dans cette question de réforme et d'allégements fiscaux, il n'y a pas d'opposition entre allégement pour les particuliers et allégement pour les sociétés. Une réduction des taxes d'affaires ne profite pas qu'aux entreprises ou aux riches, mais aux particuliers également.
L'impôt sur le capital ou sur le rendement du capital tend à réduire le rendement sur les investissements, ce qui en retour réduit le montant des investissements effectués. Cela signifie un capital à la fois plus petit et plus vieux. Ces deux facteurs se traduiront par une baisse de productivité et des salaires réels plus bas. Et comme cette faible productivité rendrait les entreprises canadiennes moins compétitives sur les marchés internationaux, cela pourrait signifier moins d'emplois au Canada. Des salaires réels et un niveau d'emploi plus bas auraient un impact négatif sur les particuliers. C'est dire que les ménages canadiens ont tout autant intérêt à ce que la fiscalité des entreprises soit efficace et compétitive que les entreprises elles-mêmes.
Le but des recommandations du comité Mintz est de rendre la fiscalité des entreprises au Canada compétitive sur le plan international en réduisant les taux d'imposition pour les rapprocher des normes internationales. Elles visent à réduire les distorsions créées par la fiscalité des entreprises, en appliquant à tous les secteurs de l'économie des taux d'imposition plus égaux. Enfin, le comité souhaite incorporer dans le système le principe de l'imposition des bénéfices, afin que dans le cas des impôts qui ne tiennent pas compte des bénéfices, ces impôts soient appliqués aux secteurs de l'économie qui bénéficient des programmes gouvernementaux.
Il faut éliminer toutes les anomalies fiscales qui compromettent la productivité et la compétitivité sur le plan international des entreprises canadiennes.
L'Association des chemins de fer du Canada
Le Comité souhaite revenir sur une prémisse importante pour que la fiscalité des entreprises soit internationalement compétitive, comme il est expliqué dans le rapport Mintz. Nul n'ignore que le commerce international est en pleine expansion. Ce qu'on sait moins c'est qu'une grande partie de ce commerce se fait entre entreprises une branche d'une société multinationale qui fait affaire avec une branche d'une multinationale. La production d'une telle entreprise peut se faire dans un pays, le financement est obtenu dans un deuxième pays alors que le siège social, donc la prise de décisions, se trouve dans un troisième. En pareil cas, il est facile pour les entreprises de déclarer leurs bénéfices dans un pays où les taux d'imposition sont bas et leurs coûts dans un pays où les taux sont élevés. Si nos impôts des sociétés sont élevés comparativement aux niveaux internationaux, il se peut que nous perdions inutilement des recettes fiscales, des recettes que nos contrôles et notre règle anti-évitement ne nous permettent pas nécessairement de récupérer. Nous voulons ici simplement signaler qu'il est facile de déplacer les profits d'un pays vers un autre.
Des impôts moins élevés non seulement amélioreraient l'efficacité de l'économie, mais pourraient permettre le rapatriement au Canada de bénéfices déclarés. Un très bon exemple est le traitement généreux que le Canada accorde aux dépenses de R-D, et ses taux relativement élevés de son impôt sur les sociétés. Ces deux facteurs incitent les entreprises à mener leur R-D au Canada afin de bénéficier des allégements fiscaux, et du même coup les incitent à appliquer ces acquis à l'extérieur du Canada afin d'éviter les taux élevés d'imposition sur les bénéfices.
C'est un point très important, et l'Irlande en est un très bon exemple. Selon le professeurs Mintz18 :
[ . . . ] l'Irlande, avec un taux moyen d'imposition des sociétés qui est moins du tiers de celui du Canada, perçoit plus de recettes en impôts sur les sociétés par rapport à son produit intérieur brut (PIB) que le Canada. Autrement dit, en Irlande les bénéfices des entreprises en pourcentage du PIB sont trois fois plus élevés qu'au Canada.
L'expérience irlandaise montre que des réductions fiscales et une fiscalité qui fait concurrence à celle des autres pays ne signifient pas une course vers le bas de l'échelle, comme le croient de nombreux opposants aux réductions fiscales. Cela ressemble davantage à une course vers le haut de l'échelle. Le tableau 1 du chapitre sur la productivité l'indique assez bien. De tous les pays de l'OCDE, l'Irlande a connu le taux de croissance le plus rapide au cours des années 90, loin devant le Canada.
D'autres observations du professeur Mintz sur la compétitivité internationale de la fiscalité des entreprises au Canada méritent d'être signalées. Il note que les impôts sur les sociétés sont à la baisse dans bien des pays depuis quelques années, sauf au Canada, de sorte que dès l'an 2000, le Canada risque de se retrouver à la tête du G7 pour ce qui est de la fiscalité des entreprises19. Il se classera deuxième pour l'impôt sur les sociétés en général, devancé seulement par le Japon, et des pays du G7, il aura le plus haut taux d'imposition sur le capital des entreprises de services.
À l'échelle internationale, la tendance à la baisse des taux d'imposition des sociétés est nette. Depuis deux ans et demi, l'Allemagne, le Danemark, le France, l'Irlande, l'Italie, et bien d'autres pays, ont baissé ces taux d'imposition. Mais pas le Canada.
La nécessité d'une fiscalité des entreprises qui soit compétitive à l'échelle internationale ne pourra que prendre de l'importance. Comme nous le disions dans notre chapitre sur la nouvelle économie, le commerce électronique accélère la tendance à la séparation des divers éléments des processus par lesquels les entreprises répondent aux besoins de leurs clients. La gestion, la recherche, la production des pièces et l'approvisionnement, la vente et la distribution, toutes ces fonctions sont séparées et localisées là où elles peuvent être exécutées au meilleur coût. Elles peuvent être situées à des milliers de milles les unes des autres, puisque les nouvelles technologies font que la distance n'a effectivement plus d'importance. Autrement dit, chaque élément du fonctionnement d'une entreprise est de plus en plus mobile, et les entreprises qui sont officiellement basées dans un pays, peuvent facilement déménager le gros de leurs activités ailleurs. Les considérations fiscales peuvent jouer un rôle important dans ces décisions.
Enfin, il est utile de mentionner un autre point soulevé par le professeur Mintz. Le rapport du comité technique souligne les effets négatifs d'une fiscalité qui n'est pas neutre. Les gouvernements canadiens le font consciemment en appliquant des taux d'imposition qui varient selon l'activité et la taille de l'entreprise. Il devient de plus en plus difficile de définir les catégories d'activité et de limiter le transfert des bénéfices d'une activité fortement imposée vers une activité qui l'est beaucoup moins. Plusieurs pays délaissent les systèmes à plusieurs niveaux d'imposition pour un système standardisé et simplifié.
L'Alliance nationale pour les enfants reconnaît qu'il est impératif de trouver le juste équilibre. Pour venir en aide aux enfants et à leurs familles, il faut des programmes de sécurité du revenu (prestation nationale pour enfants et réforme fiscale), des services d'assistance sociale et de soutien communautaire (soins et enseignement à la petite enfance); des services d'aide à la jeunesse et un système d'aide sociale destiné aux enfants; des systèmes concertés de recherche et de suivi à l'échelle nationale et des projets de renforcement de capacité pour le secteur bénévole.
L'Alliance nationale pour les enfants
Les avantages sociaux
Comme nous l'avons déjà dit, les avantages sociaux ont une incidence sur le taux marginal d'imposition effectif, en raison des taux de réduction des prestations qui s'y appliquent puisqu'ils ciblent les familles à revenu modeste. Pour limiter le coût de ces programmes, les prestations diminuent graduellement avec le revenu des bénéficiaires. Dans certains cas, la réduction des prestations peut-être notable, surtout lorsque le contribuable voit plus d'un de ses avantages sociaux diminuer.
Il serait également possible de procéder à une réforme plus globale en faisant de la Prestation fiscale canadienne pour enfants une prestation universelle, et en éliminant totalement les réductions des prestations. Selon les témoignages que le Sous-comité a entendus au printemps dernier, une telle mesure coûterait au gouvernement fédéral environ 2,8 milliards de dollars par an. Il sera également possible, comme mesure intermédiaire, de diminuer sensiblement le taux d'élimination progressive appliqué à la Prestation fiscale canadienne pour enfants. Ainsi, la prestation destinée aux familles à revenu moyen augmenterait et davantage d'enfants seraient couverts par le programme, ce qui améliorerait l'équité horizontale du régime de transferts et d'imposition.
Le graphique 2 illustre l'incidence qu'aurait sur les familles la réduction de moitié du taux d'élimination progressive de la Prestation fiscale canadienne pour enfants. Une telle mesure augmenterait nettement le bassin de familles admissibles.
Le Plan d'allégement fiscal et de réduction des cotisations d'assurance-emploi proposé par le Comité
Pour faire suite aux arguments présentés ci-dessus, le Comité propose de faire en sorte que la politique fiscale des cinq prochaines années soit axée sur la diminution des impôts et sur la réforme fiscale. Le Plan d'allégement fiscal et de réduction des cotisations d'assurance-emploi du Comité représenterait 3 milliards de dollars en réductions fiscales progressives pour les quatre premières années et une réduction de 4 milliards de dollars pour la cinquième.
Selon ces projections, l'excédent que le gouvernement fédéral devrait dégager passera de quelque 9,5 milliards de dollars l'an prochain à environ 30 milliards en 2004-2005. Si l'on tient compte d'une réserve pour éventualités de 3 milliards de dollars et d'une marge supplémentaire de prudence, le surplus discrétionnaire dont disposera le gouvernement, c'est-à-dire le montant à l'aide duquel il pourra financer de nouveaux projets, passera de 5,5 milliards de dollars l'an prochain à 23 milliards de dollars en 2004-2005.
Tant que le rythme de croissance de l'économie se maintiendra, les budgets nationaux devront avoir pour priorités des baisses d'impôt et une réduction de l'endettement. La réduction automatique de la dette publique grâce à la réserve pour éventualités comptera pour 16 % du surplus projeté pour les 5 prochaines années. Le plan d'allégement fiscal que propose le Comité représentera 47 % de l'excédent. Ces 2 éléments combinés compteront pour 63 % du surplus projeté.
Selon certains, les allégements fiscaux s'opposent aux programmes sociaux. J'estime qu'il s'agit là d'un faux problème. Parmi les programmes sociaux les plus efficaces, nombreux sont ceux qui s'appliquent par le truchement des impôts. Par ailleurs, beaucoup de dépenses de programmes stimulent la productivité et la création d'emplois
Bureau d'assurance du Canada
Le plan du Comité porte essentiellement sur des réductions des impôts sur le revenu que paient les particuliers. Il faut également envisager des allégements fiscaux pour les entreprises, pour qu'il y ait un dosage adéquat de réformes fiscales et de baisses d'impôt. À notre avis, la priorité devrait être donnée aux baisses d'impôt et à la réduction de la dette plutôt qu'aux dépenses de programmes. Le Comité estime qu'à l'issue du plan quinquennal qu'il propose les objectifs suivants devront avoir été atteints. Pour ce qui est des impôts des particuliers, le Comité recommande les objectifs suivants en matière d'allégement fiscal, qui devront être réalisés d'ici cinq ans :
- Relèvement de 15 % des montants de base.
- Abaissement de 26 à 23 % du taux d'imposition moyen.
- Réduction substantielle du taux de réduction des prestations s'appliquant à la Prestation fiscale canadienne pour enfants.
- Relèvement de 15 % des seuils auxquels débutent les tranches d'imposition.
- Réduction de 40 cents des cotisations d'assurance-emploi.
- Relèvement de 2 000 $ des limites des REER sur 5 ans.
- Abaissement à 65 p. 100 du taux d'inclusion des gains en capital.
- Élimination progressive de la surtaxe de 5 %.
Le Comité estime que les montants de base et les seuils d'imposition devraient être relevés de 15 % d'ici la cinquième année que couvre son plan, ce qui permet de tenir compte de la hausse des prix, même si l'inflation atteint la limite supérieure de la fourchette visée par la Banque du Canada. Compte tenu de la performance de cette dernière à cet égard, le Comité est d'avis que son calcul se justifie.
Le Comité est convaincu que les gains en capital sont trop lourdement imposés au Canada par rapport aux États-Unis et que cela nuit à la compétitivité des entreprises canadiennes. Il estime que le taux d'imposition des gains en capital entrave considérablement le financement des PME, des entreprises nouvelles et de celles de l'industrie du savoir. Il croit également comprendre que, pour de nombreux Canadiens, les gains en capital sont désormais davantage imposés que les dividendes. Cette absence de neutralité pourrait être contrebalancée en grande partie par un taux d'inclusion d'environ 65 %.
Pour ce qui est des entreprises, le Comité recommande l'inclusion des éléments suivants dans un plan de réduction fiscale de cinq ans. À la fin de la période, les objectifs suivants devraient être atteints :
- Réduction de 5 points de pourcentage du taux d'imposition général des revenus des entreprises.
- Abaissement des cotisations d'assurance-emploi.
- Abaissement du taux d'inclusion des gains en capital,
- Réduction de l'impôt sur le capital, conjointement avec des réductions des impôts provinciaux et harmonisation de l'assiette fiscale.
Ce qui visent les propositions du Comité
En formulant ces propositions, le Comité est mû par le désir d'améliorer le régime fiscal et d'apporter des allégements fiscaux à ceux qui en ont le plus besoin et là où ils seraient le plus bénéfiques pour l'économie. Comme nous l'avons indiqué précédemment, le Comité cherche notamment à accroître sans tarder le revenu disponible des familles canadiennes. Il importe donc que le gros des allégements vise directement les particuliers et les familles.
Dans le même temps, nous croyons important de nous donner un régime fiscal plus adéquat qui, tout en respectant le principe de l'équité, ne nuise pas à l'adoption de comportements économiques souhaitables pour l'ensemble de l'économie. Le régime fiscal ne doit pas pénaliser l'effort de travail, ni décourager l'épargne. Il ne doit pas non plus dissuader les gens de prendre des risques ou de faire preuve d'esprit d'entreprise. Le choix des dégrèvements et la réalisation de la réforme fiscale doivent être guidés par une volonté de créer de la richesse.
Lors d'une conférence qu'il donnait récemment devant l'Institut C.D. Howe, Pierre Fortin a abordé ce sujet en posant la question suivante : « Comment remettre le niveau de vie des Canadiens sur la voie de la croissance? »
Voici ce qu'il a répondu :
Ce qui ressort essentiellement de l'abondante documentation de recherche sur la fiscalité, c'est qu'il faudrait revoir le niveau et la structure d'imposition de manière à assurer le maintien des incitatifs au travail, à encourager l'épargne et l'investissement, à soutenir l'innovation technologique et à renforcer la position concurrentielle du Canada comme pays où il fait bon travailler et faire des affaires. Cette réponse n'est pas nouvelle et n'offre pas non plus de solution facile à appliquer, mais elle a le grand mérite d'être juste20.
Pierre Fortin préconisait, entre autres mesures concrètes, qu'on abaisse les taux marginaux d'imposition de tous les contribuables, mais principalement des contribuables à revenus moyen et élevé, qu'on réduise l'impôt sur l'épargne et sur l'investissement mais non sur la consommation, qu'on remplace partiellement l'impôt sur le revenu des particuliers par une taxe à la consommation en augmentant les déductions au titre de l'épargne, qu'on réduise les taux d'imposition des sociétés et que non seulement on évite de diminuer les cotisations d'assurance-emploi, mais qu'on augmente même les charges sociales. Cette dernière conclusion repose sur des données nombreuses qui montrent que, à long terme, les charges sociales ont davantage pour effet d'exercer une pression à la baisse sur les salaires que de freiner l'emploi.
Le Plan d'allégement fiscal et de réduction des cotisations d'assurance-emploi proposé par le Comité concorde largement avec cette vision.
Notre plan va également dans le sens de l'opinion qu'a exprimée le Fonds monétaire international dans son récent énoncé21. On y faisait valoir que, bien qu'une augmentation modérée des dépenses puisse présenter certains avantages, la réduction de la dette et la réforme de la fiscalité devraient constituer les principales priorités du gouvernement, car, à long terme, de telles mesures devraient se révéler considérablement plus bénéfiques pour l'économie qu'un accroissement des dépenses. Une telle réforme fiscale permettrait en effet de réaliser d'importants gains d'efficience économique. En ce qui touche l'impôt des particuliers, le FMI propose notamment une réduction du taux d'imposition intermédiaire, un relèvement des seuils d'imposition et une réduction du taux de réduction de la Prestation fiscale canadienne pour enfants.
Le plan de réduction des impôts et des cotisations d'assurance-emploi ci-dessous présente quelques-unes des options que le ministre des Finances pourrait prendre en considération dans la préparation de son prochain budget. Le gouvernement peut établir ses priorités au regard d'éléments particuliers du train de mesures que nous proposons. Le Comité croit toutefois qu'il devrait se pencher sérieusement sur chacune de ces hypothèses.
1. Augmenter les montants
personnels de base
Le Comité a constaté en 1997 qu'en raison du fait que le régime fiscal n'est que partiellement indexé, 840 000 nouvelles familles à faible revenu avaient été assujetties à l'impôt en 1995. Cette tendance s'est maintenue par la suite. Dans les budgets de 1998 et de 1999, le gouvernement a augmenté les montants personnels de base, ce qui a eu pour résultat de soustraire à l'impôt 600 000 Canadiens à faible revenu. Ces premiers allégements ont permis de compenser dans une large mesure les conséquences négatives de plus d'une décennie d'indexation partielle. Il reste toutefois du rattrapage à faire à ce chapitre.
Le Comité croit qu'il faudrait faire davantage que de simplement neutraliser les conséquences passées de l'indexation partielle.
En haussant les montants de base, on allège le fardeau fiscal de tous les contribuables, mais ceux qui en profitent le plus, ce sont les Canadiens à faible revenu et à revenu moyen. On soustrait ainsi à l'impôt des familles à faible revenu et on contribue à diminuer le phénomène du piège de l'aide sociale.
2. Le taux d'imposition intermédiaire
Le taux d'imposition intermédiaire devait à l'origine être fixé à 23 % à compter de l'entrée en vigueur de la TPS, mais ce ne fut jamais le cas.
Le taux d'imposition intermédiaire n'est inférieur que de un dixième au taux supérieur. Il n'est inférieur que de un sixième au taux qui frappe les contribuables canadiens les plus riches, à savoir ceux qui sont également assujettis à la surtaxe sur les revenus élevés, surtaxe dont nous recommandons l'abolition. Nous croyons donc qu'il n'est pas vraiment faux de considérer les deux paliers supérieurs de revenu comme ne faisant pratiquement qu'un.
On peut donc considérer qu'on applique en fait un taux d'imposition quasi uniforme à tous les revenus supérieurs à 30 000 $. Le Comité imagine mal qu'un tel régime fiscal puisse être acceptable pour les Canadiens et qu'il jouirait d'un très large appui si on le proposait aujourd'hui. Nous avons également de la difficulté à croire que 30 000 $ constitue un seuil à partir duquel on peut considérer qu'un revenu est élevé. C'est pourtant ce que fait le régime actuel d'imposition des particuliers.
Quand un contribuable atteint la tranche d'imposition intermédiaire, il voit son taux marginal passer de 17 à 26 %. Autrement dit, son taux fait un bond de plus 50 %. Et ce, sans compter les effets des taux de réduction progressive des prestations sociales.
Notre régime d'imposition du revenu des particuliers est réputé ne pas être concurrentiel avec celui des Américains, mais les gens pensent le plus souvent que c'est surtout pour les contribuables à revenu élevé qu'il ne l'est pas. Or, bien qu'il y ait dans cette affirmation une certaine part de vérité, beaucoup seraient étonnés de constater que c'est en réalité au niveau des contribuables à revenu moyen que se situe le vrai problème. Qui plus est, c'est dans cette tranche de revenu que de nombreuses familles voient décroître leur Prestation fiscale canadienne pour enfants, ce qui, en définitive, augmente leur taux marginal d'imposition.
Le Comité estime que les Canadiens et l'économie canadienne y gagneraient de beaucoup si le taux d'imposition intermédiaire était ramené à un niveau plus approprié. Les taux d'imposition moyens aussi bien que les taux d'imposition marginaux sont trop élevés.
Le Comité croit par ailleurs que la réduction du taux intermédiaire contribuerait à remédier en partie au manque d'équité apparent entre les familles à revenu unique et celles à deux revenus pour un même revenu total. Cette injustice perçue est la plus préoccupante pour les familles à revenu moyen. L'élaboration d'une politique juste envers les familles à revenu unique et les familles à deux revenus n'est pas simple, mais une réduction du taux d'imposition intermédiaire constituerait un pas important vers la résolution de ce problème.
Conjuguée à la mise en 9uvre de nos autres recommandations, une réduction sensible du taux d'imposition intermédiaire pour le ramener à 23 % se traduirait par un régime d'impôt fédéral sur le revenu des particuliers comportant quatre taux bien distincts, à savoir 0 % dans le cas des revenus n'excédant pas les montants de base, 17 %, 23 % et 29 %. Une telle mesure aurait pour effet de diminuer le taux marginal d'imposition des familles à revenu moyen, dont le taux d'imposition est actuellement élevé. Elle atténuerait la disparité entre les familles à revenu unique et les familles à deux revenus et constituerait un incitatif au travail.
La désindexation partielle des seuils d'imposition a pour effet non seulement d'assujettir les Canadiens à faible revenu à l'impôt, mais aussi de faire passer des Canadiens à une tranche d'imposition supérieure même si leur revenu réel n'a pas augmenté.
Il faut indexer pleinement le régime d'imposition du revenu des particuliers à l'inflation pour éliminer l'augmentation d'impôt automatique cachée que cause chaque année cette progression par tranches d'imposition.
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Nous croyons que les seuils d'imposition doivent augmenter au même rythme que les montants de base. C'est là un choix délibéré de notre part. Notre régime d'imposition du revenu des particuliers comporte actuellement trois niveaux d'imposition, à savoir 17 %, 26 % et 29 %. Le crédit de base et le crédit pour conjoint ont pour effet de créer un autre niveau d'imposition, de 0 %. À l'heure actuelle, ce niveau de 0 % s'applique à tous les revenus inférieurs à 7 100 $ environ dans le cas d'un contribuable seul et à 13 100 $ dans le cas d'un contribuable ayant des personnes à charge. Les revenus qui se situent entre ces montants et 30 000 $ sont imposés au fédéral à hauteur de 17 %.
Si les montants de base augmentent plus rapidement que le seuil du palier d'imposition intermédiaire, la tranche de revenu qui est imposée au taux de 17 % se rétrécit. Un contribuable dont le revenu n'augmente que de 16 900 $22 verra son taux marginal d'imposition passer de 0 % à 26 %, ce qui correspond pratiquement au taux d'imposition maximal. En d'autres termes, toute la progressivité du régime fédéral d'impôt sur le revenu des particuliers est concentrée dans une tranche de revenu très restreinte. Par comparaison, d'après l'OCDE, le taux marginal d'imposition d'un particulier dans les pays membres de cette organisation passe en moyenne de 31,4 % à 45,9 % quand son revenu passe des deux tiers du salaire moyen dans l'industrie au salaire moyen.
Cette caractéristique est propre au Canada, comme le montre le
graphique 3.
Le Comité est d'avis que, dans cette mesure, notre régime d'imposition du revenu des particuliers n'est ni équitable ni efficace. Nous estimons que la progression du taux d'imposition le plus bas au taux le plus élevé devrait être plus graduelle, et nos recommandations concernant le relèvement des seuils des tranches d'imposition et le taux d'imposition intermédiaire reflètent notre position à cet égard.
4. Les cotisations d'assurance-emploi
Le gouvernement fédéral a annoncé pour l'an 2000 une réduction de 15 cents des cotisations, poursuivant ainsi une tendance déjà amorcée.
Jusqu'à maintenant, les cotisations d'assurance-emploi ont accaparé une part démesurée des réductions fiscales fédérales. En 1995, le taux de cotisation a été fixé à 3 $ par tranche de 100 $ de gains assurables, malgré le fait que la formule commandait un taux de 3,30 $. En 1996, on a réduit ce taux de 5 cents, au coût de 350 millions de dollars. En 1997, on l'a encore réduit de 5 cents, et on a abaissé le plafond des gains assurables, ce qui a entraîné une baisse de 900 millions de dollars des recettes tirées des cotisations. En 1995, ainsi qu'en 1997 et en 1998, on a accordé des allégements de cotisations aux petites entreprises. L'année dernière, le taux de cotisation a été réduit de 15 cents, au coût de 1,15 milliard de dollars, et on a annoncé une nouvelle réduction de 15 cents pour l'an 2000. Il reste que le taux est encore supérieur au taux d'équilibre, et le Comité estime qu'on doit le ramener à ce niveau.
Malheureusement, le débat entourant les cotisations d'A-E s'est enlisé dans le bourbier du compte d'assurance-emploi et de son surplus accumulé. Les charges sociales sont faibles au Canada en regard des normes internationales et sont même inférieures à celles qu'on observe aux États-Unis. D'après les chiffres dont on dispose, il semble que les charges sociales aient un effet relativement modéré sur l'économie à long terme comparativement à la plupart des autres formes d'imposition.
Le Comité estime pour sa part que le débat sur les cotisations d'assurance-emploi est faussé et trop restreint parce que borné aux considérations touchant l'évolution annuelle aussi bien que cumulative du compte d'assurance-emploi. Nous croyons qu'un système efficace et efficient de soutien du revenu des personnes qui sont temporairement sans emploi est essentiel au bon fonctionnement d'une économie. Il incombe au gouvernement fédéral d'administrer un tel programme et de s'assurer qu'il soit vraiment efficient et efficace, ce qu'il s'est déjà engagé à faire.
Le Comité voudrait faire les observations suivantes au sujet de l'histoire récente du compte d'assurance-emploi. En 1986, on a finalement répondu à une réserve que le vérificateur général du Canada exprimait depuis longtemps au sujet des états financiers du gouvernement fédéral. Sur la recommandation de celui-ci, il a été décidé de consolider dans les recettes et dépenses budgétaires les opérations concernant un certain nombre de comptes à fins déterminées, notamment le Compte d'assurance-chômage (maintenant appelé Compte d'assurance-emploi).
On a opté pour cette façon de procéder parce que, en dernière analyse, le gouvernement était responsable des activités de ces programmes, à la fois sur le plan des paramètres politiques et sur le plan du financement des déficits, le cas échéant. Dans le cas du régime d'assurance-emploi, le gouvernement détermine les conditions d'admissibilité, le montant des prestations et la durée de la période de prestations. La Commission fixe le taux des cotisations suivant les directives énoncées dans la législation, la Loi sur l'assurance-emploi. Si le gouvernement n'est pas d'accord avec le taux établi par la Commission, il doit légiférer pour en établir un nouveau.
Depuis la consolidation, le solde annuel net des cotisations d'assurance-emploi et des coûts du programme influe directement sur le solde budgétaire du gouvernement. Ainsi, lorsque les coûts du régime d'assurance-emploi dépassent les recettes tirées des cotisations, la situation budgétaire du gouvernement s'aggrave d'autant. En revanche, lorsque les cotisations d'assurance-emploi dépassent les coûts du régime, c'est l'inverse qui se produit.
Aux termes de la Loi actuelle, la Commission de l'assurance-emploi fixe le taux des cotisations à un niveau qui couvrira les coûts du régime tout en préservant la stabilité relative du taux sur l'ensemble du cycle conjoncturel - le point d'équilibre cyclique. Elle doit non seulement essayer de prévoir le montant des recettes nécessaires pour couvrir les coûts du régime sur l'ensemble d'un cycle conjoncturel, mais aussi revenir en arrière et tenir compte de l'excédent ou de l'insuffisance des recettes passées par rapport aux coûts du programme.
À la fin de 1998-1999, le Compte d'assurance-emploi affichait un excédent cumulé de 21 milliards de dollars, chiffre qui est bien supérieur au montant que l'actuaire en chef de Développement des ressources humaines Canada considère suffisant pour les fins de la Loi sur l'assurance-emploi. Cet excédent va continuer de grossir tant que les recettes dépasseront les coûts du régime. Même si le taux de cotisations était fixé à un niveau juste suffisant pour couvrir les coûts durant un cycle conjoncturel, le solde continuerait d'augmenter en raison des intérêts portés au compte sur la base de l'excédent actuel.
Tant que l'obligation de « retour en arrière » existera, l'établissement du taux des cotisations d'assurance-emploi en fonction des critères actuels de la Loi va grandement perturber la gestion globale du budget fédéral. Les taux des cotisations vont devoir être fixés à un niveau bien inférieur aux niveaux actuels. À très court terme, à cause des intérêts créditeurs, il va falloir établir les cotisations à un niveau inférieur au niveau nécessaire pour financer les coûts du régime. Ainsi, le fonctionnement du régime d'assurance-emploi aura de graves répercussions sur le solde budgétaire du gouvernement. Il faudrait que les taux des cotisations soient établis en fonction des recettes nécessaires pour couvrir les coûts du régime sur l'ensemble d'un cycle conjoncturel, sans prendre en considération les excédents ou les déficits cumulés et les intérêts créditeurs, le cas échéant.
Cela nous amène à la question de la pertinence même du Compte d'assurance-emploi. Le Compte d'assurance-emploi sert uniquement à faire les inscriptions comptables qui permettent le « retour en arrière » requis par les procédures actuelles d'établissement des taux. En fixant les taux en fonction seulement des recettes nécessaires pour couvrir les coûts à venir, on n'aurait plus à veiller à l'équilibre historique entre les cotisations et les coûts. En outre, lorsqu'il a recommandé de revoir l'utilité du Compte de service et de réduction de la dette, le vérificateur général a indiqué que toutes les recettes du gouvernement doivent être portées au crédit du Trésor et que tout décaissement doit être approuvé par le Parlement. La même observation s'applique au Compte d'assurance-emploi. Au demeurant, il n'existe pas de compte distinct dans lequel sont déposées les cotisations d'assurance-emploi ou à partir duquel on verse les prestations. Il n'existe nulle part un compte affichant un excédent cumulé de 21 milliards de dollars. Les commentaires du vérificateur général sur le Compte de service et de réduction de la dette s'appliquent tout autant au Compte d'assurance-emploi. Il ne serait plus nécessaire de préparer des états financiers distincts sur les soldes cumulés d'un Compte d'assurance-emploi sujet à vérification.
L'adoption d'un taux de cotisation correspondant au taux d'équilibre cyclique aurait des répercussions budgétaires immédiates de plus de 3 milliards de dollars. Cela veut dire que, à court terme, la majeure partie de l'excédent budgétaire aux fins de planification servirait à financer une réduction des cotisations d'assurance-emploi, ce qui n'est pas nécessairement la meilleure affectation du gros de cet excédent. Les charges sociales du Canada sont inférieures à celles de la plupart des autres pays de l'OCDE. Ce n'est cependant pas le cas de l'impôt sur le revenu, en particulier de l'impôt sur le revenu des particuliers. À court terme, on a des choses plus pressantes à faire avec l'excédent budgétaire aux fins de planification que d'accorder d'importantes réductions du taux de cotisations d'assurance-emploi. Le taux des cotisations d'assurance-emploi devrait certes refléter les coûts du régime sur l'ensemble d'un cycle conjoncturel, mais le rythme auquel on poursuit cet objectif doit tenir compte des priorités dans d'autres secteurs.
En conséquence, le Comité estime que le gouvernement fédéral devrait envisager de revoir les pratiques comptables relatives à l'assurance-emploi et le mode de calcul des cotisations. Il devait en particulier envisager les mesure suivantes : une procédure d'établissement des cotisations fondée sur les dépenses à venir.
Le Comité recommande que l'on continue de réduire les cotisations d'assurance-emploi pour les ramener progressivement au niveau d'équilibre.
Les préoccupations en matière de transparence qu'éprouve le Comité au sujet de la pertinence du Compte d'assurance-emploi trouvent un écho dans des déclarations récentes du vérificateur général. Lorsqu'il a comparu, récemment, devant le Comité permanent des comptes publics, M. Desautels a dit :
. . . Le compte d'assurance-emploi sert, en tant que tel, à comptabiliser les rentrées et sorties de fonds. [ . . . ] Il permet de tenir compte des rentrées et des sorties de fonds. Point à la ligne. On peut soutenir qu'il affiche un surplus de 21 milliards de dollars, mais cela veut tout simplement dire que le gouvernement a recueilli21 milliards de plus que ce qu'il a versé de façon cumulative. Aucune dette n'est créée par cette opération.23
M. Desautels a ajouté :
. . . vous avez raison, les recettes ont été ajoutées aux autres fonds du gouvernement utilisés à d'autres fins. Il n'y a qu'une seule façon de renverser cette tendance dans les années futures, et c'est en utilisant les excédents des autres opérations gouvernementales pour financer, disons, un déficit dans le compte d'assurance-emploi.
Le montant des prestations est fixé par le gouvernement, sauf que la Loi dit aussi qu'il est acceptable d'accumuler un certain surplus au cours d'une année donnée, parce qu'on pourrait connaître des conditions économiques plus difficiles l'année suivante et avoir un déficit24.
Ce témoignage du vérificateur général montre comment le fait qu'on comptabilise l'assurance-emploi dans un compte à part a engendré beaucoup de confusion dans l'esprit des Canadiens à propos de la nature de l'excédent du Compte d'assurance-emploi. Il en va de même d'un autre compte de contrôle du gouvernement, le Compte de service et de réduction de la dette. Ce compte n'a aucune incidence pratique sur la politique budgétaire du gouvernement et n'a aucun effet sur l'ampleur de la dette publique.
Dans les Comptes publics de 1996-1997, le vérificateur général écrivait ce qui suit 25:
[ . . . ] à mon avis, étant donné le concept fondamental du Trésor qui sous-tend le système comptable du gouvernement, le Compte est un mécanisme interne qui n'est peut-être pas nécessaire [ . . . ]
Par conséquent, le gouvernement et le Parlement pourraient vouloir réexaminer la nécessité et l'utilité du Compte de service et de réduction de la dette
Le Comité recommande donc au gouvernement d'abolir le Compte de service et de réduction de la dette et de traiter les recettes provenant de la TPS comme tous les autres types de recettes.
Le Comité a recommandé l'an dernier l'abolition progressive de cette surtaxe. Nous croyons qu'on devrait la supprimer progressivement en relevant le seuil à partir duquel elle s'applique. Dans l'esprit des arguments que nous avons invoqués à cet égard dans le passé, nous croyons qu'avec l'élimination du déficit, les mesures fiscales prises précédemment en vue de le réduire doivent disparaître elles aussi. Même si cette mesure profiterait principalement aux contribuables à revenu élevé, tout indique qu'il s'agit d'une taxe particulièrement inefficiente. Bien qu'il ne soit peut-être pas exact de dire que les coûts d'efficacité de cette surtaxe sont à ce point énormes qu'il en résulte une perte financière pour le gouvernement, nous croyons sincèrement qu'ils n'en sont pas moins suffisamment élevés pour que l'abolition de la surtaxe se révèle au bout du compte peu coûteuse pour le gouvernement. Les Canadiens ne devraient pas subir les inconvénients d'une taxe excessivement lourde simplement parce qu'on craint que sa suppression ne soit perçue par le grand public comme ne profitant qu'aux contribuables à revenu élevé.
Cette mesure d'allégement fiscal vise à réduire le taux marginal d'imposition des contribuables aux revenus les plus élevés. C'est ce groupe en effet qui est le plus touché par le phénomène de l'exode des cerveaux, et c'est ce groupe aussi qui est le plus susceptible de fournir des capitaux aux nouvelles entreprises.
6. Le taux d'inclusion des gains en capital
Le Comité estime qu'il faut réduire le taux d'inclusion des gains en capital pour le rendre plus compétitif sur le plan international. À l'heure actuelle, bien des contribuables paient davantage d'impôt sur les gains en capital que sur les revenus de dividendes. L'objectif de neutralité serait atteint si le taux d'inclusion des gains en capital était d'environ 65 %.
Le Comité croit toutefois qu'on ne devrait pas s'arrêter là. Le taux d'inclusion devrait être progressivement ramené à 50 %, à mesure que les taux d'imposition du revenu des particuliers et des sociétés baissera. Le régime canadien d'imposition des gains en capital se rapprocherait ainsi davantage du régime américain.
Le ministère des Finances estime que le fait de ramener le taux d'inclusion à 65 % coûterait au gouvernement fédéral quelque 375 millions de dollars par an. Environ la moitié des économies d'impôt que réaliseraient ainsi les contribuables reviendraient aux entreprises. On connaît mal l'impact qu'aurait initialement une telle réforme sur les revenus de l'État. Comme les contribuables peuvent habituellement choisir le moment où ils réalisent leurs gains, des taux d'imposition élevés les amènent parfois à immobiliser leurs gains. Si une réduction du taux effectif d'imposition venait renverser en partie cette tendance, il se pourrait bien que le gouvernement bénéficie d'une véritable manne fiscale au cours des premières années qui suivraient le changement.
Au cours de ses audiences, le Comité a entendu un nombre considérable de témoins, représentant des milieux fort divers, qui recommandaient au gouvernement fédéral, comme moyen d'aider financièrement les 9uvres de bienfaisance ou de contribuer à la préservation des terres écosensibles et des biens patrimoniaux, de bonifier ses mesures fiscales concernant les dons de biens dont la valeur s'est appréciée.
Dans le budget de 1997, le gouvernement fédéral avait réduit le taux d'inclusion des gains en capital sur les titres cotés en bourse remis en don à des 9uvres caritatives pour le fixer à 37,5 % au lieu du taux normal de 75 %.
Les dons à des organisations caritatives de biens dont la valeur s'apprécie sont beaucoup plus courants aux États-Unis qu'au Canada, surtout du fait que le traitement fiscal de ce genre de don y est plus généreux. Plusieurs témoins ont recommandé que le taux d'inclusion applicable à ces biens soit de zéro.
Le Comité note que, dans ses récents budgets, le gouvernement fédéral a adopté de nombreuses mesures visant à favoriser les 9uvres de charité et le bénévolat. Le Comité recommande que le taux d'inclusion des gains en capital applicable aux dons de biens dont la valeur s'est appréciée soit fixé à la moitié du taux d'inclusion des gains en capital en général et soit automatiquement corrigé chaque fois que le gouvernement réduit le taux général d'inclusion.
L'autre proposition concerne le choix des biens admissibles à cette mesure. Comme celle-ci est très appréciée dans le milieu des 9uvres de bienfaisance, nous jugeons qu'il pourrait être utile d'en accroître la portée, bien que nous comprenions les craintes légitimes de certains concernant le risque qu'on utilise cette mesure abusivement. Ce problème n'est pas nécessairement insurmontable. Le Comité recommande donc au gouvernement d'envisager d'allonger la liste des biens qui pourraient être admissibles à l'application du taux d'inclusion réduit et d'établir un mécanisme qui rendrait une telle mesure réalisable.
7. Les plafonds de cotisations à un REER
Le Comité croit que le gouvernement doit chercher à inciter les ménages canadiens à épargner. Un des moyens dont il dispose pour ce faire, c'est d'augmenter le plafond des cotisations à un REER. Le Comité recommande de relever le plafond des cotisations à un REER d'ici cinq ans et que le nouveau plafond soit indexé.
8. Le taux de réduction
de la Prestation fiscale canadienne
pour enfants
Le Comité est d'avis que le taux de réduction de la Prestation fiscale pour enfants devrait être abaissé progressivement avec les années. Une réduction du taux de moitié coûterait au bout du compte environ 1,2 milliard de dollars par an au gouvernement.
Cette mesure répondrait à plusieurs préoccupations. D'abord, elle augmenterait le nombre des familles admissibles à la prestation ainsi que le montant de la prestation pour les familles à revenu moyen. Dans les deux cas, elle réglerait le problème d'équité horizontale entre les familles avec enfants et les familles sans enfant. Elle contribuerait également à remédier au problème des taux marginaux d'imposition élevés auxquels sont assujetties les familles à revenu moyen. En abaissant le taux de réduction de la prestation, on réduirait du même coup le taux marginal d'imposition effectif de ces familles.
Nous considérons ici cette mesure comme une réduction d'impôt, mais on pourrait également y voir un volet de ce que beaucoup qualifient de plan d'action pour les enfants. De fait, certains témoins favorables à l'établissement d'un tel plan d'action ont fait valoir qu'il faudrait privilégier un modèle qui permet d'augmenter les ressources dont disposent les familles, au lieu de créer d'autres programmes.
Changements à apporter au régime fiscal des entreprises
La question de l'imposition des entreprises est complexe, comme l'a bien fait ressortir le rapport Mintz, et elle devrait faire l'objet d'une étude parlementaire spéciale. En fait, le Business Council of British Columbia a recommandé que notre comité examine le rapport du comité technique.
Le Comité formule plusieurs recommandations sur le sujet, même s'il faut admettre qu'une véritable refonte du régime serait probablement plus appropriée. Nous estimons néanmoins important de fournir quelques indications concernant le moment où il conviendrait d'appliquer les changements que nous avons à l'esprit, et sur l'orientation et l'ampleur de ces changements. Le gouvernement aurait sans doute un ensemble plus complet de réductions de taux et de modifications à l'assiette fiscale à proposer.
Le Comité estime que les taux d'imposition effectifs du régime fiscal de sociétés doivent devenir plus neutres. Nous envisageons donc en particulier une réduction du taux général de l'impôt des sociétés. Il faudrait aussi se pencher sur l'impôt sur le capital. À en juger par des commentaires de l'Association des banquiers canadiens cités plus haut, le Canada est le seul à imposer un tel impôt. Il reste que l'impôt sur le capital est un instrument utilisé surtout par les provinces, et nous recommandons que sa réduction ait lieu en parallèle avec une baisse des taux provinciaux.
Il n'y a pas que les taux d'imposition qui font que le régime d'imposition des sociétés n'est pas neutre. Il y a toutes sortes de déductions et d'amortissements qui ou bien sont inefficaces ou bien favorisent une industrie plus qu'une autre. Le professeur Jack Mintz soutient que « . . . sans perdre un seul sou de revenu, les gouvernements pourraient, en abolissant les déductions inefficaces des coûts d'investissement, réduire les taux d'imposition du revenu des sociétés pour les ramener au taux moyen de 34 % qu'on observe dans l'ensemble des pays de l'OCDE26 ».
Le Comité recommande donc au gouvernement fédéral d'effectuer une réforme en profondeur du régime fiscal des sociétés afin de réduire davantage les taux d'imposition des entreprises, de rétablir le principe de neutralité et d'adapter le régime aux nouvelles réalités économiques de la mondialisation, de la mobilité des facteurs et de la nouvelle économie fondée sur l'innovation et le capital humain.
Le Comité n'a formulé que quelques recommandations concernant
les impôts sur le capital, principalement parce qu'il n'a pas entendu
suffisamment de témoignages techniques pour pouvoir faire des recommandations
détaillées à cet égard. L'impôt des grandes
sociétés constitue par exemple un genre d'impôt minimum,
car le montant d'impôt payé est déductible de la surtaxe
des sociétés. Nous avons déjà indiqué,
dans notre rapport27
sur le Groupe de travail MacKay, que les impôts sur le capital sont
singulièrement contre-productifs dans le secteur financier, où
le capital est un élément essentiel de sécurité
et de solidité. À cet égard, nous croyons fermement
que les impôts sur le capital auxquels sont assujetties les institutions
financières ne sont pas compatibles avec un secteur financier sûr
et solide. L'application de notre recommandation portant sur la diminution
du taux général d'imposition des sociétés contribuerait
à régler ce problème.
Les impôts sur le capital constituent un instrument fiscal principalement provincial.
Nos membres réclament une réduction de l'impôt sur le revenu des particuliers pour toutes les personnes qui touchent un revenu.
Fédération canadienne de l'entreprise indépendante
Nous recommandons que le gouvernement fédéral s'emploie, conjointement avec les provinces, à établir une définition commune de ce qu'est le capital aux fins de l'impôt ainsi qu'un plan de réduction des impôts sur le capital.
À court terme, l'application de nos autres recommandations devrait atténuer les effets négatifs des impôts sur le capital.
Le Comité s'est également abstenu de formuler des recommandations précises concernant le secteur de la petite entreprise. Le Comité est vivement préoccupé par la santé et la vitalité des petites entreprises. Un abaissement des impôts sur les gains en capital et une réduction des cotisations d'assurance-emploi profiteraient directement à ce secteur. Le taux d'imposition auquel sont assujetties les petites entreprises au Canada est déjà le plus bas parmi les grands pays industrialisés.
Cependant, nous estimons que le meilleur moyen de soutenir la petite entreprise serait d'abaisser l'impôt sur le revenu des particuliers, et nous avons d'ailleurs fait de nombreuses recommandations en ce sens. Pour les entreprises non incorporées, les changements que nous proposons équivaudraient en réalité à une réduction de leur taux d'imposition. Pour ce qui est des petites entreprises constituées en société, ces mêmes modifications profiteraient à leurs propriétaires pour autant que ceux-ci soient des employés de ces entreprises ou touchent des dividendes sur leur investissement dans l'entreprise.
1 « Looking Ahead to Canada's Federal Budget 2000 », TD Economics, 28 octobre 1999.
2 John McCallum, Dividende budgétaire : Avantage à Ottawa ou aux provinces?, Conjonctures, Banque Royale du Canada, septembre 1999.
3 Canada, ministère des Finances, Équilibre des finances publiques au Canada, août 1999.
4 La plupart des Canadiens seraient surpris d'apprendre que, d'après les chiffres de l'OCDE, les États-Unis ont à peu près les mêmes dépenses de santé publiques que le Canada, en proportion du PIB. En outre, comme le PIB par habitant des États-Unis est supérieur à celui du Canada, les dépenses publiques des Américains en matière de santé sont supérieures à celles des Canadiens. Des données sur 1996 indiquent que les États-Unis ont consacré 6,3 % du PIB aux dépenses publiques dans le secteur de la santé contre 6,4 % dans le cas du Canada. L'importance relative des dépenses publiques du Canada au chapitre de la santé a légèrement baissé de 1986 à 1996, mais on a observé le contraire aux États-Unis, où la part de ces dépenses est passée de 4,4 % du PIB en 1986 à 6,3 % en 1996.
5 R.D. Brown, « Tax Reform and Tax Reduction: Let's Do the Job Right », Canadian Tax Journal, 1999, vol. 47, no 2.
6 « Father of Reagan tax cuts says it's Canada's turn », The National Post, 2 novembre 1999. La mise en relief est notre fait.
7 Looking Ahead to Canada's Federal Budget in 2000, TD Economics, 28 octobre 1999.
8 D.W. Jorgenson et K-Y Yun, « The Excess Burden of Taxation in the United States », Journal of Accounting, Editing and Finance, automne 1991.
9 B. Dahlby, « The Distortionary Effect of Rising Taxes », dans W.B.P. Robson et W.M. Scarth, éd., Deficit Reduction: What Pain, What Gain?, Institut C.D. Howe, 1994.
10 Pierre Fortin, The Canadian Standard of Living : Is There a Way Up? C.D. Howe Institute Benefactors Lecture, 1999. La mise en relief est notre fait.
11 Bruce Little, « Canada's high taxes stem from large debts, not big hearts », The Globe and Mail, 8 octobre 1999.
12 Eric Engen et Jonathan Skinner, « Taxation and Economic Growth », National Tax Journal, vol. 49, no 4, 1996, p. 636.
13W. Leibfritz et al, Taxation and Economic Performance, document de travail no 176 du Service d'économie de l'OCDE, 1997.
14 Les mesures du budget de 1998 qui ont éliminé ou réduit la surtaxe de 3 % pour la plupart des contribuables, et qui ont haussé les crédits de base et de conjoint pour les contribuables à faible revenu, ont eu pour effet de hausser les taux marginaux d'impôt pour certains. S'il peut sembler paradoxal qu'une réduction d'impôtsse traduise par une augmentation des taux marginaux d'impôt, c'est le résultat inévitable de mesures ciblées. Le budget de 1999 a corrigé cela en appliquant ces mesures à tous les contribuables.
15 Voir le rapport du Sous-Comité sur l'équité fiscale pour les familles canadiennes avec des enfants à charge, Dans l'intérêt de nos enfants : une plus grande équité fiscale, 9 juin 1999.
16 Dans les discussions sur les facteurs qui contribuent à l'exode des cerveaux, il est question du fardeau fiscal moyen, et non pas des taux marginaux d'impôt. Toutefois, selon la nature de l'activité économique envisagée (par exemple, changer de pays), c'est la différence entre un fardeau fiscal moyen et un autre qui constituera l'effet marginal sur le contribuable. L'idée que les décisions économiques se prennent à la marge demeure valable. Il en va de même de l'évasion fiscale. Celui qui choisit de travailler « au noir » se retire complètement du système fiscal, et c'est là, de fait, qu'est le changement marginal.
17 Rapport du Comité technique de la fiscalité des entreprises, p. 5.9.
18 Jack M. Mintz, Why Canada Must Undertake Business Tax Reform Soon, Institut C.D. Howe, 4 novembre 1999, p. 5.
19 Mintz, 1999.
20 Pierre Fortin (1999), p. 64.
21 Fonds monétaire international, Consultation au titre de l'article IV avec le Canada (2000), 16 novembre 1999.
22 Cet exemple vaut pour une famille de deux personnes à revenu unique, par exemple pour une mère seule avec un enfant. Dans le cas d'une personne seule, l'écart de revenu entre un taux marginal d'imposition de 0 % et un taux de 26 % est de 22 900 $. Même là, c'est bien peu pour faire passer le contribuable d'un taux d'imposition nul au taux marginal virtuellement le plus élevé.
23 Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, Délibérations,16 novembre 1999, 1605.
24 Ibid., 1620.
25 Comptes publics du Canada 1996-1997, p. I-34, États financiers du gouvernement du Canada.
26 Mintz, Jack M., «Target: Taxes», National Post - Business Special, novembre 1999.
27 L'avenir commence maintenant : Une étude du secteur des services financiers au Canada.