TRGO Rapport du Comité
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CRÉER UNE CULTURE DE LA SÉCURITÉ DANS LES TRANSPORTS : LE TRANSPORT AÉRIEN DABORD
Avant les événements tragiques du 11 septembre 2001, la plupart des Canadiens et Canadiennes et des citoyens des autres pays estimaient que le transport aérien était sécuritaire. Comparativement à dautres pays, le Canada a été relativement épargné par les détournements davion, les atteintes à la sécurité et les actes terroristes. Une évaluation de risques a révélé quessentiellement, la probabilité que de tels événements se produisent au pays était faible.
Depuis le 11 septembre 2001, la sécurité dans le transport aérien demeure acceptable au Canada, mais elle peut être améliorée. Il faut se souvenir que ce jour-là, les terroristes ne transportaient pas darticles interdits. Peut-être le problème réside-t-il dans les systèmes de sécurité qui nétaient pas conçus pour contrer des terroristes prêts à mourir durant une attaque. À la lumière de cette nouvelle réalité, une approche différente simpose pour assurer la sécurité aéronautique.
Le scénario étant changé, quelles mesures sont nécessaires pour améliorer la sécurité aérienne dans lavenir? Les pays ont réagi de différentes façons aux événements du 11 septembre 2001. Les États-Unis ont adopté une loi prévoyant un sous-secrétariat de la sécurité des transports, une administration de la sécurité des transports au Département des transports, une commission de la sécurité des transports, une vérification intégrale des bagages par les employés fédéraux et des frais imposés aux passagers pour cette vérification.
De son côté, le Canada sen est surtout tenu jusquici aux directives du ministre des Transports en faveur de la modernisation des procédures de sécurité aérienne et au dépôt du projet de loi C-42, Loi sur la sécurité publique, qui porte sur le transport aérien et une série dautres questions, et du projet de loi C-44, Loi modifiant la Loi sur laéronautique. Le gouvernement fédéral a réagi en adoptant des mesures prenant appui sur les niveaux de sécurité élevés qui existaient. Cependant, nous pouvons faire plus. Cest dans cette optique que le Comité permanent des transports et des opérations gouvernementales de la Chambre des communes a amorcé en octobre et en novembre 2001 une étude sur la sécurité aérienne. Sont énoncés dans le présent rapport les principaux enjeux soulevés par les témoins lors des délibérations, ainsi que des recommandations visant à accroître la sécurité aérienne au Canada.
ASSURER LA SÉCURITÉ DES TRANSPORTS
Les témoins qui ont comparu devant les membres du Comité ont répété à maintes reprises quil fallait un organisme unique responsable de lensemble de la sécurité des transports aériens. Différentes options ont été proposées pour cette entité. Certains privilégient un rôle accru pour les administrations aéroportuaires locales (AAL), puisque ces dernières sont présentement chargées de tous les aspects entourant la sécurité, mis à part linspection des passagers et des bagages. À leur avis donc, il serait logique de confier cette tâche aux AAL. En revanche, dautres estiment que les AAL sont en conflit dintérêt, puisque leur priorité pourrait être dassurer le service à la clientèle et la satisfaction des transporteurs aériens plutôt que la sécurité purement et simplement. De plus, certaines AAL pourraient être incapables dassumer toutes les fonctions de sécurité en raison de leur taille relativement réduite, doù un système qui risquerait dêtre fragmenté.
Les témoins qui ont parlé du statu quo partage des responsabilités entre les aéroports et les transporteurs aériens ont mis laccent sur le rôle des transporteurs et sur le fait que ces derniers lèguent à des sous-traitants linspection des passagers et de leurs effets personnels. Ils ont jugé très majoritairement que des changements simposaient et que les transporteurs aériens ne devaient plus jouer le même rôle, même dans la perspective dune supervision fédérale accrue. Selon eux, cette option a le désavantage important de pouvoir donner lieu à des conflits dintérêts.
Des témoins ont proposé la création dun nouvel organisme, sans but lucratif, sur le modèle de NAV CANADA. À leur avis, un tel organisme ne serait pas susceptible dêtre perçu comme étant en conflit dintérêts comme les aéroports et les transporteurs aériens.
Finalement, dautres ont proposé que des fonctionnaires fédéraux se chargent de la sécurité aérienne selon la formule adoptée récemment pour les préposés au filtrage aux États-Unis.
Le Comité a consacré passablement de temps à lanalyse des questions de sécurité aérienne et il est davis quil existe une autre option, non envisagée par les témoins : un Secrétariat dÉtat à la sécurité des transports, ayant pour responsabilité première la sécurité. Ce dernier serait habilité à choisir les méthodes, les outils et la structure organisationnelle les plus aptes à favoriser la sécurité aéronautique au Canada. À notre avis, cette option comporte un ingrédient clé gage de succès : une entité unique qui est responsable de la sécurité aérienne et qui peut créer un réseau national pouvant être appliqué et géré uniformément.
Relevant dune Administration de la sécurité des transports dans le portefeuille de Transports Canada, le Secrétariat dÉtat proposé devrait être habilité à engager et à détacher des employés des ministères pertinents pour sassurer quon dispose des meilleures compétences. Il devrait également présenter un rapport annuel au Parlement sur létat de la sécurité aérienne. Même si le Comité a concentré son étude sur la sécurité aéronautique, il estime que le mandat du Secrétariat dÉtat proposé pourrait être élargi afin denglober tous les modes de transport assujettis à la réglementation fédérale. Dans cette perspective, le Comité recommande :
o 1Recommandation n
Que le gouvernement fédéral adopte une Loi sur la sécurité des transports administrée par un Secrétariat dÉtat à la sécurité des transports. Ce dernier devrait être appuyé par une Administration de la sécurité des transports dans le portefeuille de Transports Canada et présenter un rapport annuel au Parlement sur létat de la sécurité des transports au Canada. En outre, le Secrétariat dÉtat devrait entretenir un dialogue continu avec des organismes analogues dautres pays. Le mandat, les modes de fonctionnement et les responsabilités du Secrétariat dÉtat à la sécurité des transports et de lAdministration de la sécurité des transports devraient être prescrits par la loi. Un examen législatif obligatoire devrait être effectué un an après ladoption de la loi.
Le Comité croit que les Canadiens et Canadiennes seraient rassurés par la création dun Secrétariat dÉtat à la sécurité des transports, quils verraient comme un système national de sécurité des transports unique, uniforme et cohérent, assorti dun mécanisme de reddition de comptes. Lintégration dun mandat législatif assure une plus grande certitude, délimite clairement les pouvoirs et les champs de responsabilité et renforce le rôle de supervision du Parlement.
Le Comité pense que le Secrétariat dÉtat proposé pourrait remplir son mandat très efficacement en collaborant étroitement et en dialoguant avec les ministères, les groupes et les particuliers intéressés par la sécurité aérienne. À cette fin, nous croyons que deux organismes consultatifs devraient être constitués : lun regrouperait les ministres responsables des ministères fédéraux pertinents et lautre, les parties concernées.
Le premier organisme, le Groupe de travail ministériel de la sécurité des transports, pourrait être composé par exemple des ministres responsables des Transports, de la Défense nationale, de la Justice, du Solliciteur général, de la Citoyenneté et de lImmigration, et des Affaires étrangères et du Commerce international. Le deuxième, le Groupe consultatif de la sécurité du transport aérien pourrait être formé
de représentants des ministères, de NAVCANADA, des aéroports, des transporteurs aériens, des syndicats représentant le personnel aéronautique, des groupes de passagers et dautres intervenants. Nous croyons que ce groupe consultatif pourrait servir de modèle aux fins de la création de groupes analogues pour dautres modes de transport. Le Comité recommande donc :
o 2Recommandation n
Que le gouvernement fédéral crée le Groupe de travail ministériel de la sécurité des transports et le Groupe consultatif de la sécurité du transport aérien pour aider le Secrétariat dÉtat à la sécurité des transports à formuler des politiques, des procédures et des mécanismes servant à renforcer la sécurité aérienne au Canada.
Pour assurer la sécurité des transports et gagner la confiance de la population, il est essentiel que le gouvernement assume des responsabilités dans la sphère de la sécurité aérienne par le biais dune autorité chargée de la sécurité des transports, autorité appuyée, conseillée et dotée de manière adéquate, du Secrétariat dÉtat à la sécurité des transports proposé et dun examen législatif.
OUTILS POUR RENFORCER LA SÉCURITÉ AÉRIENNE
Un thème principal est revenu chez les témoins qui ont comparu devant le Comité : limportance de recueillir et de partager linformation ou les renseignements. Des témoins ont indiqué que le partage dinformation faisait actuellement défaut au Canada et que la sécurité se trouverait améliorée si les ministères communiquaient plus régulièrement entre eux. Par ailleurs, ils nont pas focalisé uniquement sur la situation au Canada. Certains ont mentionné que le même problème existait dans les gouvernements et organismes gouvernementaux dautres pays.
Le Comité croit fermement que la collecte et le partage des renseignements constituent un des éléments fondamentaux dune culture de la sécurité. À notre avis, la sécurité commence bien avant larrivée des passagers et de leurs bagages aux portes dembarquement. Certes, des organisations un peu partout dans le monde recueillent de linformation sur les passagers pour identifier les individus qui présentent un intérêt particulier, mais cette information ne semble pas être partagée entre les ministères et organismes au sein même des pays, encore moins entre pays différents.
Il faut une organisation internationale assurant la tenue dune base de données mondiale et diffusant linformation pertinente en temps réel aux aéroports, aux transporteurs aériens, aux organismes dexécution de la loi et aux autorités appropriées. Des organismes comme Transports Canada, la Gendarmerie royale du Canada, le
Service canadien du renseignement de sécurité, Justice Canada, Citoyenneté et Immigration Canada, Affaires étrangères et Commerce international, lAgence des douanes et du revenu du Canada, le ministère de la Défense nationale, les forces policières et, ce qui est important, leurs homologues dans dautres pays verseraient linformation figurant dans leurs bases de données existantes dans cette base de données mondiale. Même si lattention du Comité porte présentement sur la sécurité aérienne, nous croyons que les renseignements contenus dans cette base de données pourraient aider à améliorer la sécurité dans dautres modes de transport.
Le Comité a entendu des témoignages au sujet du système automatisé de profilage des passagers (CAPPS) employé aux États-Unis. Ce système pourrait constituer un modèle utile et être élargi pour permettre la participation de tous les pays, ministères, organismes et parties prenantes ainsi que la collecte de toute une gamme de renseignements garantissant une grande sécurité.
Une base de données mondiale serait dune utilité inestimable pour assurer la sécurité des transports, car elle permettrait déchanger linformation nécessaire à lidentification dindividus présentant un intérêt particulier bien avant quils ne se présentent aux aéroports et ne prennent place à bord des aéronefs. De plus, cette base pourrait aussi servir doutil de filtrage en faveur des passagers qui noffrent pas dintérêt particulier, ce qui permettrait de concentrer les efforts sur les premiers.
Dans cette perspective, reconnaissant que la création dune base de données mondiale est essentielle à lamélioration de la sécurité aérienne, le Comité recommande :
o 3Recommandation n
Que le Secrétariat dÉtat à la sécurité des transports consulte les ministères fédéraux pertinents, y compris Justice Canada, le Solliciteur général, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, Transports Canada, le ministère de la Défense nationale, ainsi que Citoyenneté et Immigration Canada, avant de constituer une base de données nationale en matière de sécurité. Cette base pourrait notamment comprendre des renseignements sur des terroristes connus ou des personnes soupçonnées dêtre des terroristes ou sur leurs organisations, ainsi que sur les passeports et les visas, des vérifications des antécédents criminels, des messages et avis dalerte au terrorisme et des modèles de déplacements. Elle devrait être conçue de manière à pouvoir être intégrée ultérieurement à des bases analogues situées dans dautres pays, dans le cadre defforts concertés à léchelle mondiale.
Par ailleurs, autant le projet de base de données nationale est important, autant il est important que les renseignements soient partagés avec les ministères et organismes pertinents dans dautres pays. Le Comité est davis que le Secrétariat dÉtat à la sécurité des transports qui est proposé devrait rencontrer en priorité les intervenants pertinents dans dautres pays pour discuter de la création dune base de données mondiale. Le Comité recommande donc :
o 4Recommandation n
Que le Secrétariat dÉtat à la sécurité des transports rencontre les responsables du sous-secrétariat à la sécurité des transports des États-Unis et dautres intervenants au sujet de létablissement dun organisme international chargé de la tenue dune base de données mondiale permettant de partager les renseignements pertinents entre les parties intéressées à léchelle nationale et internationale.
B. Filtrage des passagers et des bagages
À lheure actuelle, le filtrage des passagers et des bagages relève des transporteurs aériens, qui normalement sous-traitent cette activité à une entreprise du secteur privé. Tous les passagers franchissent un détecteur de métal et peuvent faire lobjet de mesures de sécurité additionnelles, comme un contrôle effectué par un agent à laide dun « détecteur manuel ». Les bagages de cabine passent à travers un appareil de radiographie et peuvent également être examinés à la main. Une très petite proportion des bagages enregistrés fait lobjet dun filtrage, lequel est effectué au hasard.
Le Comité a entendu de nombreux témoignages concernant le filtrage des passagers et des bagages. Certains témoins ont mentionné la rémunération relativement peu élevée des agents de filtrage, lennui professionnel, un taux de roulement élevé, une formation inadéquate et le manque duniformité des méthodes de filtrage dans le réseau des aéroports. Des témoins ont exprimé des préoccupations concernant la faible proportion de bagages enregistrés qui font lobjet dun filtrage. Dautres ont proposé des solutions comme des salaires plus élevés, la rotation des postes, une formation accrue et des stimulants financiers pour les agents qui font un bon travail.
Par ailleurs, des témoins ont indiqué au Comité quune mesure susceptible daméliorer le processus de filtrage serait de limiter davantage les bagages de cabine. Les transporteurs aériens pourraient envisager de limiter les passagers à un seul sac. Il serait ainsi moins facile pour des passagers de transporter des articles visés par des interdictions à bord des avions. Cela permettrait également de réduire le volume des bagages à vérifier pour les agents de filtrage, de sorte quils pourraient concentrer leurs efforts sur les gens qui franchissent les contrôles de sécurité. Certains membres de lindustrie aéronautique considèrent que lattention devrait être concentrée davantage sur les passagers que sur ce quils transportent avec eux.
Le Comité reconnaît que les agents de filtrage ont été à lavant-plan du débat sur la sécurité aérienne et, à linstar des témoins, il est davis que des facteurs comme les salaires relativement peu élevés, une formation inadéquate et lennui professionnel peuvent jouer un rôle dans la qualité des services fournis. Toutefois, nous croyons que dautres facteurs sont à considérer, dont la pratique actuelle qui consiste à attribuer les contrats de filtrage au soumissionnaire le moins disant et labsence de techniques de gestion visant à atténuer lennui professionnel et à faire en sorte que les agents sacquittent de leurs tâches de façon optimale.
Il convient de préciser également que les agents de filtrage ne constituent pas la première ligne de défense dans la sécurité aérienne les autres employés des compagnies aériennes et des aéroports, y compris les agents de billets et les policiers locaux, ont également un rôle à jouer. Par ailleurs, nous soulignons de nouveau que les articles transportés à bord des avions le 11 septembre 2001 nétaient pas interdits; on ne peut donc pas dire que les agents nont pas effectué leur travail ce jour-là.
Le Comité croit quun certain nombre déléments peuvent contribuer à améliorer le travail de filtrage aux aéroports. Entre autres, il faut effectuer les inspections en appliquant les normes les plus rigoureuses et en utilisant les meilleures pratiques de la communauté aéronautique mondiale; assurer la cohérence des normes et pratiques de filtrage à léchelle du pays; et adopter des pratiques de gestion des ressources humaines comme la rotation des postes, une rémunération adéquate pour attirer et garder les employés, des programmes de reconnaissance non financière pour les personnes très performantes, des possibilités davancement, une meilleure formation dans des domaines comme celui du profilage des passagers ainsi que lélaboration dun système dagrément pour les agents de filtrage.
En outre, les améliorations du système de filtrage devraient comprendre ce qui suit : une radiographie de tous les bagages enregistrés et l'appariement bagage-personne; lutilisation dappareils didentification biométrique ainsi que de systèmes améliorés de radiographie et de détection dexplosifs; et lamélioration des techniques de profilage des passagers. Nous reconnaissons que ces initiatives exigeront énormément de temps et dargent, mais nous croyons que leur mise en uvre est un élément essentiel de lamélioration de la sécurité aérienne.
Pour que les bonnes décisions soient prises dans les secteurs susmentionnés, le Comité recommande :
o 5Recommandation n
Que le Secrétariat dÉtat à la sécurité des transports se penche sur les éléments suivants : des normes de filtrage plus rigoureuses; des pratiques dinspection cohérentes exigées dans tous les aéroports canadiens; des
exigences de formation et de rendement pour les agents de filtrage; la mise sur pied dun système dagrément pour les agents de filtrage; lamélioration des techniques de filtrage des passagers; et lapplication de technologies de pointe en matière de filtrage.
Pendant les audiences, des témoins ont soulevé la question de savoir sil y avait lieu dutiliser des policiers armés sur certains ou lensemble des vols internes et/ou internationaux. Certains pays emploient des policiers de bord depuis un certain nombre dannées.
Des policiers canadiens sont requis pour litinéraire Toronto-Washington, D.C. (aéroport national Reagan), comme lexigent les États-Unis. La Gendarmerie royale du Canada a donc mis sur pied un programme de formation de policiers de bord pour cet itinéraire. Nous appuyons la prestation continue de ce service par la Gendarmerie.
Le Comité sest demandé si le Canada devrait élargir lutilisation des policiers de bord à dautres vols. Nous sommes convaincus que les policiers de bord sont lun des éléments nécessaires dans le cadre dune stratégie globale de la sécurité aérienne. Toutefois, nous pensons quil faut étudier de plus près certaines questions comme celle des risques encourus afin de déterminer à quels vols doivent être affectés des policiers de bord, et fournir une formation exhaustive à la fois aux policiers et aux équipages de bord afin quils sadaptent à ce genre de système de sécurité. Pour cette raison, le Comité recommande :
o 6Recommandation n
Que le Secrétariat dÉtat à la sécurité des transports examine sil est nécessaire daffecter des policiers de bord aux vols internes et internationaux et si des programmes de formation peuvent être offerts tant aux policiers quaux équipages de bord afin dassurer leur adaptation à ce nouveau cadre de sécurité.
On a fait valoir au Comité que le verrouillage et le renforcement des portes du poste de pilotage constituaient un élément essentiel dune meilleure sécurité. Outre le renforcement de la cabine de pilotage, certains voyaient dans larmement des pilotes la « dernière » ligne de défense contre les détournements et le terrorisme. On sest
demandé quel type darmes devraient être utilisées, quelle serait la formation requise pour les pilotes et si la principale fonction des pilotes dans la cabine piloter lappareil serait entravée dune manière quelconque par le fait quils soient armés.
Le Comité croit que la cabine de pilotage doit être protégée contre ceux qui veulent y entrer sans y être autorisés et exhorte le gouvernement fédéral à faire en sorte que les portes satisfassent aux exigences les plus strictes en matière de sécurité. Pour ce qui est des pilotes, nous croyons quils ne devraient pas être armés.
Afin dassurer la sécurité du poste de pilotage, le Comité recommande :
Recommandation no 7
Que le gouvernement fédéral mette en uvre des normes correspondant aux mesures de sécurité les plus strictes en ce qui concerne les portes du poste de pilotage.
Des témoins ont fait valoir au Comité que lamélioration de la formation du personnel de bord devrait faire partie intégrante de léventail des mesures visant à améliorer la sécurité à bord des avions. Compte tenu du verrouillage des portes du poste de pilotage et des possibilités limitées pour le personnel du poste de quitter ce dernier, certains soutiennent que les agents de bord sont isolés dans la cabine de lavion et ne disposent daucun appui additionnel en cas durgence. À leur avis, les agents de bord doivent recevoir une formation leur permettant de se protéger eux-mêmes ainsi que les passagers et de réagir adéquatement aux actes terroristes.
Le Comité appuie les témoins à cet égard et il croit que le Canada doit se doter de normes pour la formation des agents de bord dans des domaines comme celui de lautodéfense et du règlement des conflits. Par conséquent, le Comité recommande :
o 8Recommandation n
Que le gouvernement fédéral élabore des normes pour la formation des agents de bord dans des domaines comme celui de lautodéfense et du règlement des conflits.
D. Formation
Tout au long de ses délibérations, le Comité sest fait dire quune formation normalisée du personnel aéronautique revêtait une importance cruciale du point de vue de la sécurité. Cette formation est particulièrement importante pour ceux qui participent directement au filtrage de bagages et qui sont directement en contact avec les passagers. À lheure actuelle, bien quune formation soit nécessaire, rien nen garantit la cohérence à léchelle du système aéronautique. Des témoins ont également souligné limportance dune formation dans des domaines comme celui du profilage des passagers.
Le Comité considère lui aussi que la formation est importante et il croit que les parties prenantes doivent être consultées au sujet des services dont elles ont besoin afin de mieux contribuer à la sécurité aérienne au Canada. Dans cette optique, le Comité recommande :
o 9Recommandation n
Que le Secrétariat dÉtat à la sécurité des transports rencontre les parties prenantes de lindustrie afin délaborer des normes nationales de formation pour le personnel aéronautique. Ces normes devraient prévoir des services de formation permanente et une variété de modes de prestation.
E. Technologie
La technologie a été lun des sujets de prédilection des témoins, qui ont dit quil fallait utiliser le meilleur matériel possible, et ce de manière uniforme, à léchelle du Canada. Ils ont mentionné des innovations technologiques comme les appareils didentification biométrique ainsi que des systèmes améliorés de radiographie et de détection dexplosifs, et ont souligné limportance dune formation pour les employés au moment de mettre en uvre ces innovations. Bien que le développement et la mise en uvre de la technologie impliquent dimportantes dépenses, cela est nécessaire. De nombreux témoins croient que lachat de nouvelles technologies devrait être financé par le gouvernement fédéral dans le cadre dune stratégie de la sécurité nationale.
Le Comité considère que la technologie est lun des outils de sécurité les plus importants dans ce nouveau contexte. Certes, elle ne peut résoudre tous les problèmes, mais il sagit dun élément clé dun système avancé de sécurité aérienne. Cela dit, nous devons également reconnaître que la technologie est coûteuse et parfois difficile à obtenir, particulièrement à une époque comme celle-ci où la demande mondiale est élevée. En outre, il faudrait améliorer considérablement les infrastructures aux aéroports canadiens pour faire place à cette nouvelle technologie, en plus de dispenser une formation complète et normalisée au personnel.
Pour ces raisons, le Comité croit quil faut effectuer les meilleurs choix possible au moment dacquérir la nouvelle technologie et que, une fois lachat effectué, celle-ci doit être utilisée de façon optimale. En outre, il faut accorder une attention adéquate à des questions tel le genre déquipement requis, sa facilité dentretien et son taux de défaillance. À cette fin, le Comité recommande :
o 10Recommandation n
Que le gouvernement fédéral étudie en priorité léventail des innovations technologiques disponibles et examine la manière dont seront financées les améliorations nécessaires à ce chapitre ainsi que les modifications des infrastructures et les services de formation correspondants.
F. Laissez-passer et autorisations de sécurité
Actuellement, les employés daéroport qui doivent se rendre dans une zone réglementée doivent porter un laissez-passer. Lorsque ladministration de laéroport détermine quune personne doit avoir accès à une zone réglementée, elle soumet son nom à Transports Canada en vue dobtenir une autorisation de sécurité. À cet effet, Transports Canada tient compte de plusieurs facteurs : casier judiciaire, indices de sécurité nationale, antécédents en matière de crédit et liens avec des groupes et des particuliers. Si lautorisation de sécurité est accordée, ladministration de laéroport délivre alors un laissez-passer, lequel doit être renouvelé tous les cinq ans, ce qui exige une nouvelle autorisation de sécurité de Transports Canada.
Pour les témoins entendus par le Comité, il serait important dassurer luniformité partout au Canada au niveau du format des laissez-passer, de lorganisation qui les délivre et de ceux qui les reçoivent. On se demande aussi combien de personnes omettent de rendre leur laissez-passer au moment où elles quittent leur emploi. Selon les témoins, il ny a pas de raison que lon procède dune manière à laéroport international Lester B. Pearson et dune autre à laéroport international de Vancouver. Les témoins ont aussi fait remarquer que lobtention dune autorisation de sécurité prend parfois beaucoup de temps.
Le Comité partage bon nombre de ces préoccupations. En effet, le manque duniformité quant à lorganisation qui délivre les laissez-passer aux personnes autorisées à pénétrer dans les zones réglementées, à la présentation matérielle des laissez-passer et à la récupération de ceux-ci une fois que leur titulaire quitte son emploi ou perd le droit daccès aux zones réglementées présente des problèmes de sécurité éventuellement sérieux. Il faut instituer un nouveau système dattribution et de contrôle des laissez-passer par une organisation unique qui délivrerait les laissez-passer pour tous les aéroports canadiens. Linformation serait stockée dans une base de données
unique, les laissez-passer seraient tous de même format et ne seraient délivrés quaux personnes ayant absolument besoin dentrer dans les zones réglementées. De plus, un mécanisme permettant de récupérer les laissez-passer dès que leur titulaire quitte son emploi serait mis en place.
Par conséquent, le Comité recommande :
o 11Recommandation n
Que le Secrétariat dÉtat à la sécurité des transports fasse en sorte quune organisation unique soit chargée de délivrer des laissez-passer de présentation uniforme pour les fins du contrôle de laccès aux zones réglementées dans tous les aéroports et de récupérer ces laissez-passer dès que leur titulaire quitte son emploi ou perd son droit daccès aux zones réglementées. Les laissez-passer doivent être délivrés et récupérés en temps opportun.
G. Vérifications et inspections
Actuellement, le personnel de Transports Canada examine les procédures de sécurité et en vérifie lexécution dans les grands aéroports du Canada, ce qui comprend notamment le contrôle et lessai des méthodes de filtrage. Ces activités ont été accrues depuis le 11 septembre 2001.
Les témoins ont exprimé des réserves au sujet de ces activités, en particulier en ce qui concerne le nombre dinspecteurs et la fréquence et la qualité des vérifications. À leur avis, Transports Canada devrait faire davantage pour contrôler et mettre à lépreuve les méthodes de filtrage de manière à assurer un niveau de sécurité élevé dans laviation canadienne.
Selon le Comité, la vérification et lexamen des procédures de sécurité par le gouvernement jouent un rôle crucial dans la sécurité aérienne et la confiance du public. Il est donc important que lAdministration de la sécurité des transports proposée dispose dun nombre suffisant dinspecteurs et de vérificateurs bien entraînés de manière à garantir des vérifications et inspections suffisamment rigoureuses, fréquentes et uniformes dans tout le pays. Dans cet ordre didées, le Comité recommande :
o 12Recommandation n
Que le gouvernement fédéral déploie davantage defforts au niveau de la vérification et de linspection des installations de filtrage dans les aéroports canadiens. À cet effet, il faut affecter un nombre suffisant demployés à plein temps bien entraînés à ces tâches et sassurer que les inspections et vérifications sont suffisamment rigoureuses et fréquentes et sont uniformes partout au le Canada.
H. Registre des ressources en matière de sécurité aérienne
Les témoins entendus par le Comité ont formulé diverses propositions en vue daccroître la sécurité du transport aérien au Canada : ladoption dinnovations techniques, une meilleure formation du personnel de laviation, la normalisation des procédures et les règlements ainsi que des vérifications et des inspections pour en garantir lapplication, la constitution dune base de données pour la collecte et la diffusion de linformation, des policiers de bord, le renforcement des portes des cabines de pilotage, un meilleur contrôle des laissez-passer dans les zones réglementées et le resserrement du filtrage des passagers et des bagages.
Le Comité considère ces suggestions comme essentielles à lamélioration de la sécurité aérienne. Cependant, les ressources énumérées seraient beaucoup plus utiles si lon pouvait facilement en déterminer le type, le nombre et la localisation. Nous estimons opportun de constituer un registre à jour des ressources en matière de sécurité aérienne. Ainsi, nous serions en mesure dapprécier notre degré de préparation et nous pourrions déployer rapidement les ressources nécessaires aux endroits voulus et en temps opportun. Pour cette raison, le Comité recommande :
o 13Recommandation n
Que le gouvernement fédéral établisse un registre national des ressources de la sécurité aérienne dans lequel seraient consignés des renseignements sur la quantité, le type et la localisation des ressources (chiens détecteurs, spécialistes des matières dangereuses, équipes de neutralisation dengins explosifs et forces de déploiement rapide) et que soit établi un mécanisme de mise à jour constante du registre.
LE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ AÉRIENNE
Actuellement, les coûts de la sécurité aérienne sont assumés par les aéroports et les transporteurs, selon les normes établies par Transports Canada. Les aéroports soccupent de toutes les formes de sécurité sauf du contrôle des passagers et des bagages, lequel relève des compagnies aériennes.
Beaucoup de témoins réclament un niveau de sécurité plus élevé, et notamment le contrôle de tous les bagages de soute, le recours à des technologies de pointe, le relèvement de la rémunération des agents de filtrage pour améliorer le rendement et la présence de policiers à bord des avions. Cependant les avis étaient partagés sur le financement de ces mesures. Certains voudraient que le gouvernement fédéral assume la totalité des coûts de la sécurité aérienne, arguant que cette solution est dans lintérêt national. Dautres proposent un système utilisateur-payeur dans lequel les passagers des lignes aériennes paieraient un droit spécial dont le produit irait directement à lamélioration de la sécurité aérienne dont ils sont les premiers bénéficiaires.
Le Comité sait parfaitement que les changements à apporter pour améliorer la sécurité aérienne seront coûteux. Il va par exemple falloir acheter du matériel neuf et modifier linfrastructure des aéroports. On ne peut pas savoir à lavance ce que déciderait le Secrétariat dÉtat à la Sécurité des transports proposé au sujet de la propriété, de lentretien et de la responsabilité du matériel de filtrage et du financement des aménagements apportés aux aéroports pour y installer les technologies modernes. Quoi quil en soit, les sources de financement sont limitées : les voyageurs, le Trésor, les transporteurs aériens et les aéroports, qui assument déjà certains des coûts de la sécurité.
Selon la décision que prendra le Secrétariat dÉtat à la Sécurité des transports, les aéroports et les transporteurs aériens devront sans doute continuer dassumer les mêmes dépenses en matière de sécurité, mais cela ne suffira peut-être pas. On a répété à maintes reprises au Comité que les passagers étaient prêts à payer pour bénéficier dun niveau de sécurité accru et nous le croyons. De plus, nous estimons que, la sécurité étant une priorité nationale, le gouvernement fédéral pourrait éventuellement participer au financement de la sécurité aérienne. Par conséquent, le Comité recommande :
o 14Recommandation n
Que toutes les parties concernées aéroports, transporteurs aériens, passagers des lignes aériennes et résidents du Canada assument ensemble le coût de lamélioration de la sécurité aérienne. En particulier, les aéroports et les compagnies aériennes doivent conserver le même niveau de dépenses à ce chapitre, avec correction pour tenir compte de linflation. On pourrait aussi imposer une surtaxe sur les billets davion et puiser dans le Trésor le reste des fonds nécessaires.
HARMONISATION DES RÉGIMES DE SÉCURITÉ AÉRIENNE
Les témoins ont brièvement parlé des questions internationales. Ceux qui lont fait en ont abordé deux aspects : limportance de la coopération internationale au niveau du partage des renseignements et les divergences des systèmes de filtrage des passagers et des bagages dans les divers pays du monde.
Le Comité estime que la collectivité internationale doit chercher à harmoniser les régimes de sécurité aérienne afin que les voyageurs jouissent du plus haut niveau de sécurité possible, quils se déplacent dans un pays ou dun pays à lautre. Nous pensons cependant quil vaudrait mieux non pas exiger de tous les pays quils adoptent le même régime, mais sassurer que tous se dotent de systèmes aux résultats équivalents sur le plan de la sécurité.
On peut envisager plusieurs formules pour harmoniser les régimes de sécurité aérienne. On pourrait notamment généraliser les normes de lOrganisation de laviation civile internationale (OACI). On pourrait aussi instituer la base de données dont on a parlé précédemment. Il vaudrait mieux une base de données mondiale, mais il pourrait être nécessaire de commencer par une base de données nord-américaine, qui serait augmentée ultérieurement.
Létude du Comité a pour objet la sécurité aérienne, mais nous estimons que les activités dharmonisation devraient sétendre aux autres moyens de transport. La base de données dont nous avons recommandé la création quelle que soit son envergure pourrait aussi être exploitée par les responsables des autres moyens de transport pour offrir une sécurité accrue.
Compte tenu de limportance dune harmonisation des systèmes de sécurité des transports au niveau international et entre les modes de transport, le Comité recommande :
o 15Recommandation n
Que le gouvernement fédéral étudie les systèmes de sécurité aérienne des autres pays et quil en prône lharmonisation à loccasion des réunions de lOrganisation de laviation civile internationale (OACI), notamment par ladoption des règles les plus rigoureuses actuellement appliquées dans les pays membres de lOACI. En outre, le gouvernement fédéral devrait examiner les mesures de sécurité appliquées dans les autres moyens de transport à lintérieur du Canada et imposer à ces autres moyens de transport les méthodes, outils et structures organisationnelles pertinents adoptés pour assurer la sécurité aérienne.
Nos délibérations nous ont amené à conclure entre autres que la sécurité aérienne, et en fait la sécurité de tous les déplacements, cest laffaire de tout le monde : du personnel, des passagers, du gouvernement et de tous les Canadiens. Lefficacité de tout système de sécurité dépend essentiellement dune redondance des moyens, en ce sens quil faut des contrôles multiples. On a peut-être trop mis laccent sur le rôle des agents de filtrage et pas assez sur les autres éléments clés du système.
La sécurité aérienne doit commencer dès lachat dun billet davion. Il faut exploiter cette occasion de jeter un pont entre le système de réservations et la base de données des services de renseignement afin de vérifier si le passager constitue un risque potentiel. Elle se poursuit à la rampe daccès où le personnel de laéroport observe larrivée des passagers, puis aux guichets des compagnies aériennes où lon remet aux passagers leur carte dembarquement. Elle doit continuer au poste de filtrage préalable à lembarquement où les passagers et leur bagage sont soigneusement contrôlés, puis à la porte dembarquement où le personnel des compagnies aériennes peut évaluer les passagers avant lembarquement. Enfin, elle doit continuer dans lappareil, où léquipage surveille les activités dans la cabine. De toute évidence, il importe dinstituer une culture de la sécurité aérienne, laquelle repose sur des contrôles multiples et une vigilance constante.
Cependant, cela ne peut pas suffire. Les auteurs des horribles attentats du 11 septembre 2001 se sont servis davions pour commettre leur forfait, mais ils auraient pu tout aussi bien utiliser un autre moyen de transport. Il nous faut donc établir une culture de la sécurité des transports en général qui comporte elle aussi les redondances nécessaires.
Létablissement dune telle culture serait plus facile sil existait des normes nationales uniformes administrées par un organisme central responsable de la sécurité, de la collecte de renseignements et de leur partage au niveau international et de la disponibilité des ressources en matière de sécurité. Le Comité est convaincu que la mise en uvre des recommandations contenues dans le présent rapport permettra létablissement de la culture de la sécurité des transports nécessaire pour protéger la vie des Canadiens et leur redonner confiance dans nos systèmes de transport.