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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent de la santé


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 30 septembre 2003




¿ 0905
V         La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.))
V         M. André Corriveau (médecin chef, Ministère de la Santé et des Services sociaux des Territoires du Nord-Ouest)

¿ 0910
V         La présidente
V         M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne)

¿ 0915
V         M. André Corriveau
V         M. Rob Merrifield
V         M. André Corriveau
V         M. Rob Merrifield
V         M. André Corriveau
V         M. Rob Merrifield
V         M. André Corriveau
V         M. Rob Merrifield
V         M. André Corriveau
V         M. Rob Merrifield
V         La présidente
V         Mme Betty Hinton (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, Alliance canadienne)

¿ 0920
V         M. André Corriveau
V         Mme Betty Hinton
V         M. André Corriveau
V         Mme Betty Hinton
V         M. André Corriveau
V         Mme Betty Hinton
V         M. André Corriveau
V         Mme Betty Hinton
V         M. André Corriveau
V         Mme Betty Hinton
V         La présidente
V         M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ)

¿ 0925
V         M. André Corriveau
V         M. Réal Ménard
V         M. André Corriveau
V         M. Réal Ménard
V         M. André Corriveau
V         M. Réal Ménard
V         M. André Corriveau
V         M. Réal Ménard
V         M. André Corriveau
V         M. Réal Ménard

¿ 0930
V         M. André Corriveau
V         M. Réal Ménard
V         M. André Corriveau
V         M. Réal Ménard
V         La présidente
V         M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan)
V         M. André Corriveau
V         M. Stan Dromisky
V         M. André Corriveau

¿ 0935
V         M. Stan Dromisky
V         M. André Corriveau
V         M. Stan Dromisky
V         M. André Corriveau
V         M. Stan Dromisky
V         La présidente
V         M. Greg Thompson
V         M. André Corriveau
V         M. Greg Thompson
V         M. André Corriveau
V         M. Greg Thompson
V         M. André Corriveau

¿ 0940
V         M. Greg Thompson
V         La présidente
V         M. Greg Thompson
V         M. André Corriveau
V         La présidente
V         Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.)
V         M. André Corriveau
V         Mme Carolyn Bennett
V         M. André Corriveau

¿ 0945
V         Mme Carolyn Bennett

À 1000
V         M. André Corriveau
V         Mme Carolyn Bennett
V         M. André Corriveau
V         La présidente
V         M. André Corriveau
V         La présidente
V         M. David Bougher (directeur, politique et programmes sur les produits pharmaceutiques, Ministère de la Santé et du Mieux-être de l'Alberta)
V         La présidente
V         M. Rob Merrifield
V         M. David Bougher
V         M. Rob Merrifield
V         M. David Bougher

À 1005
V         M. Rob Merrifield
V         M. David Bougher
V         M. Rob Merrifield

À 1010
V         M. David Bougher
V         M. Rob Merrifield
V         M. David Bougher
V         M. Rob Merrifield
V         La présidente
V         Mme Betty Hinton
V         M. David Bougher
V         Mme Betty Hinton
V         M. David Bougher
V         Mme Betty Hinton
V         La présidente
V         M. Réal Ménard
V         M. David Bougher
V         M. Réal Ménard
V         M. David Bougher
V         M. Réal Ménard
V         M. David Bougher
V         La présidente
V         L'hon. Hedy Fry (Vancouver-Centre, Lib.)

À 1015
V         M. David Bougher
V         Mme Hedy Fry

À 1020
V         M. David Bougher
V         La présidente
V         M. Greg Thompson

À 1025
V         M. David Bougher
V         M. Greg Thompson
V         M. David Bougher
V         La présidente
V         M. Jeannot Castonguay (Madawaska—Restigouche, Lib.)
V         M. David Bougher
V         M. Jeannot Castonguay

À 1030
V         M. David Bougher
V         La présidente
V         Mme Carolyn Bennett
V         M. David Bougher
V         Mme Carolyn Bennett
V         M. David Bougher
V         Mme Carolyn Bennett
V         M. David Bougher

À 1055
V         La présidente
V         La présidente
V         M. Greg Eberhart (régistraire, Alberta College of Pharmacists)

Á 1100

Á 1105
V         La présidente
V         Mme Lori Turik (vice-présidente, politiques, Association canadienne des chaînes de pharmacies)
V         M. Jeffrey May (directeur, affaires gouvernementales et réglementaires, Association canadienne des chaînes de pharmacies)

Á 1115
V         La présidente
V         M. Rob Merrifield
V         Mme Lori Turik

Á 1120
V         M. Rob Merrifield
V         M. Jeffrey May
V         M. Rob Merrifield
V         M. Jeffrey May
V         La présidente
V         Mme Betty Hinton

Á 1125
V         M. Jeffrey May
V         Mme Betty Hinton
V         M. Jeffrey May
V         Mme Betty Hinton
V         M. Jeffrey May
V         Mme Betty Hinton
V         M. Jeffrey May
V         M. Greg Eberhart
V         La présidente
V         M. Réal Ménard

Á 1130
V         M. Jeffrey May
V         M. Réal Ménard
V         M. Jeffrey May

Á 1135
V         M. Réal Ménard
V         M. Jeffrey May
V         M. Greg Thompson
V         La présidente
V         M. Greg Thompson
V         La présidente
V         M. Réal Ménard
V         La présidente
V         M. Réal Ménard
V         La présidente
V         Mme Hedy Fry

Á 1140
V         M. Greg Eberhart
V         Mme Hedy Fry
V         M. Greg Eberhart
V         La présidente
V         M. Greg Thompson

Á 1145
V         Mme Lori Turik
V         M. Greg Thompson
V         Mme Lori Turik
V         M. Greg Thompson
V         Mme Lori Turik
V         M. Greg Thompson
V         Mme Lori Turik
V         M. Greg Thompson
V         M. Jeffrey May
V         M. Greg Thompson
V         M. Jeffrey May
V         M. Greg Thompson
V         M. Jeffrey May
V         M. Greg Thompson
V         M. Jeffrey May
V         M. Greg Thompson
V         M. Jeffrey May
V         M. Greg Thompson
V         M. Jeffrey May

Á 1150
V         M. Greg Thompson
V         M. Jeffrey May
V         M. Greg Thompson
V         La présidente
V         M. Stan Dromisky
V         M. Greg Eberhart
V         M. Stan Dromisky

Á 1155
V         Mme Lori Turik
V         La présidente
V         Mme Carolyn Bennett

 1200
V         La présidente
V         Mme Lori Turik
V         Mme Carolyn Bennett
V         Mme Lori Turik
V         Mme Carolyn Bennett
V         La présidente
V         Mme Lori Turik
V         La présidente
V         M. Réal Ménard
V         La présidente
V         M. Greg Eberhart

 1205
V         La présidente
V         M. Réal Ménard
V         La présidente
V         M. Réal Ménard

 1210
V         La présidente
V         M. Réal Ménard
V         La présidente
V         M. Réal Ménard










CANADA

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 051 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 30 septembre 2003

[Enregistrement électronique]

¿  +(0905)  

[Traduction]

+

    La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)): La séance est ouverte. Bonjour, mesdames et messieurs. Je suis heureuse de vous accueillir ici pour cette deuxième réunion dans la série d'audiences publiques que le Comité permanent de la santé est en train de tenir dans le cadre de sa tournée nationale pour étudier les médicaments sur ordonnance.

    Nous entendons ce matin dans notre première session deux témoins. Je vais vous demander votre indulgence afin d'autoriser l'un de ces deux témoins à nous entretenir seul pendant la première demi-heure, étant donné qu'il lui faut prendre un avion pour retourner à son travail.

    Accueillons donc André Corriveau, médecin chef au Ministère de la Santé et des Services sociaux des Territoires du Nord-Ouest, qui va nous faire un exposé et que nous interrogerons ensuite avant de passer au deuxième témoin.

    Monsieur Corriveau, vous avez la parole.

+-

    M. André Corriveau (médecin chef, Ministère de la Santé et des Services sociaux des Territoires du Nord-Ouest): Merci, madame la présidente.

    Bonjour, mesdames et messieurs les membres du comité permanent. Merci de l'occasion qui m'est ici donnée de comparaître devant vous pour vous soumettre une perspective des Territoires du Nord-Ouest sur cet important sujet qu'est celui des médicaments sur ordonnance.

    Je comparais ici au nom de notre Ministère de la Santé et des Services sociaux. Il importe pour nous de souligner tout d'abord que bien qu'il semble que votre étude porte principalement sur les médicaments sur ordonnance eux-mêmes, l'une de nos principales préoccupations dans ce domaine concerne la disponibilité de pharmaciens. L'aspect recrutement et rétention pourrait devenir un facteur critique et limitant en vue de la bonne distribution de médicaments d'ordonnance au niveau communautaire.

    L'apparente pénurie au Canada de pharmaciens, et notamment de pharmaciens hospitaliers, a une incidence directe sur les petits territoires comme le nôtre, comme c'est vraisemblablement le cas d'autres régions rurales et isolées du pays. La majorité de nos collectivités n'ont pas de pharmacie de détail. Une part importante des ordonnances sont exécutées par des infirmières praticiennes travaillant en centres de santé, avec le soutien de pharmaciens régionaux qui jouent un rôle important en tenant à jour les formulaires, sources de conseils et garants de qualité dans ce domaine.

    Par ailleurs, même dans les centres urbains, un plus grand rôle pourrait être joué par les pharmaciens en vue de l'amélioration de la prestation de services de santé primaires au Canada, notamment en ce qui concerne la gestion d'états pathologiques chroniques, le contrôle de réactions indésirables à des médicaments et la surprescription ou la prescription directe, par exemple, dans le cas de contraception d'urgence.

    Nous appuyant sur des données anecdotiques, nous nous demandons dans quelle mesure l'émergence au Canada de comptoirs pharmaceutiques sur Internet est peut-être en train de contribuer à l'actuelle pénurie de pharmaciens. Quoi qu'il en soit, nous espérons que le comité n'ignorera pas cet aspect de la question des médicaments sur ordonnance, bien qu'il puisse sembler n'être qu'un corollaire de votre sujet d'intérêt principal.

    Comme c'est le cas d'autres provinces et territoires au Canada, nous sommes également préoccupés par le coût croissant des médicaments délivrés sur ordonnance. Il s'agit, certes, d'un phénomène à facettes multiples qui ne peut pas être réglé au moyen d'une solution unique. Nous comprenons la nécessité pour l'industrie de s'attendre à des rendements raisonnables sur ses investissements, mais nous aimerions néanmoins voir une introduction plus rapide de médicaments génériques concurrentiels comme moyen de contenir l'augmentation des dépenses des Canadiens au titre des médicaments sur ordonnance.

    En ce qui concerne la meilleure gestion des formulaires de médicaments, les Territoires du Nord-Ouest ont très tôt compté parmi les adhérents au processus fédéral-provincial-territorial nouvellement établi d'examen des médicaments, qui relève maintenant de l'OCCETS, l'Office canadien de coordination de l'évaluation des technologies de la santé, qui est doté de son propre comité consultatif canadien d'experts en matière de médicaments.

    Étant donné notre propre capacité limitée d'effectuer l'évaluation d'un grand nombre de médicaments délivrables sur ordonnance disponibles, les Territoires du Nord-Ouest pourront maintenant compter sur ce comité d'experts pour obtenir des examens objectifs et des recommandations quant à la place que devraient occuper les nouveaux médicaments dans nos formulaires pharmaceutiques.

    Une autre question qui nous préoccupe, et qui est elle aussi a une incidence sur le coût des médicaments dans une optique à facettes multiples, est celle de la publicité s'adressant directement aux consommateurs. On parle de PDMO, ou publicité directe des médicaments d'ordonnance.

    Un récent commentaire de David M. Gardner, Barbara Mintzes et Aleck Ostry, publié dans le Journal de l'Association médicale canadienne du 2 septembre 2003, fait ressortir certaines des questions et préoccupations que nombre d'entre nous avons quant à cette pratique de PDMO, qui semble prendre furtivement de plus en plus de place au Canada.

    C'est en gros le fait que des publicités adressées au grand public puissent être diffusées sans examen par des autorités de réglementation gouvernementales. Les fabricants de médicaments peuvent profiter d'échappatoires et (ou) de domaines de compétence vagues ou chevauchant entre le Conseil consultatif de publicité pharmaceutique et les normes canadiennes en matière de publicité.

    L'apparente sous-capacité de Santé Canada de réglementer, de surveiller et de donner suite aux plaintes en matière de PDMO est peut-être en train d'aggraver le problème. La publicité directe des médicaments d'ordonnance amène et stimule l'adoption de nouveaux médicaments qui ont tendance à être plus coûteux et à n'offrir que des avantages marginaux par rapport aux thérapies standard, ce avant que l'on ait documenté tous les effets indésirables imprévus.

    Le coût de la PDMO finit par être répercuté sur le consommateur, tant dans le prix lui-même que dans les primes d'assurance et les taxes plus élevées nécessaires au financement des programmes d'assurance-médicaments. Sous prétexte d'appuyer le besoin et le droit du consommateur d'avoir accès à des renseignements, la PMDO a tendance à présenter des messages qui ne font que rarement état de la maladie, des facteurs de risque, des options de traitement de rechange, du taux de réussite du médicament ou de son rapport coûts-avantages.

¿  +-(0910)  

    Dans le contexte particulier des Territoires du Nord-Ouest, les consommateurs peuvent également avoir une connaissance plus limitée de la langue anglaise et être plus vulnérables au baratin publicitaire vantant des médicaments nouveaux et meilleurs, ce qui pourrait grever encore notre capacité d'offrir les meilleurs soins possibles avec nos ressources limitées.

    Encore un autre aspect qui mérite selon nous qu'on s'y attarde est celui des activités de commercialisation dirigées vers les médecins par les compagnies pharmaceutiques. Même s'il n'existe encore aucune preuve concluante que ces activités de commercialisation influent sur les habitudes de délivrance d'ordonnances, il n'y a aucun doute que ces pratiques coûtent cher et qu'elles contribuent donc au prix ultime des médicaments sur ordonnance.

    Nombre de ces activités font d'ailleurs l'objet de déclarations déontologiques de la part de groupes et de collèges professionnels. Il serait sans doute avantageux que de telles activités continuent d'être assujetties à un certain degré de surveillance active de la part d'un organe indépendant, comme le CCPP, par exemple. À ce sujet, le même numéro du JAMC que j'ai évoqué plus tôt présente une théorie courante : Ray Chepesiuk fait état de problèmes potentiels liés à la pratique de distribution de publicité déguisée en documentation éducative en provenance de réunions ou de rapports d'études dont l'auditoire médical visé ignore peut-être qu'ils n'ont pas fait l'objet d'évaluations indépendantes.

    En passant, j'ai fourni à la présidente des copies de ces articles afin qu'on puisse vous les distribuer.

    Les réactions indésirables à des médicaments représentent une proportion non négligeable des coûts de santé d'ensemble au Canada. Nous estimons qu'il importe de renforcer les systèmes de surveillance postcommercialisation et les activités de contrôle et de rapport de réactions indésirables aux médicaments et vaccins. Nous pensons que cela pourrait être intégré aux autres efforts présentement déployés à l'échelle du Canada pour améliorer la sécurité du patient.

    Enfin, comparativement à la situation dans des provinces plus peuplées, les dépenses des Territoires du Nord-Ouest au titre de produits pharmaceutiques peuvent paraître faibles, mais les coûts directs et indirects liés aux médicaments sur ordonnance comptent pour une part relativement importante de nos coûts de soins de santé d'ensemble. La gestion des produits pharmaceutiques est un domaine dans lequel la pression continue qui est exercée est en train d'avoir une incidence sur les ressources limitées dont nous disposons pour la prestation de soins de santé, et c'est ainsi que nous sommes très reconnaissants au comité permanent ici réuni de l'occasion qui nous a été donnée de comparaître devant lui.

+-

    La présidente: J'aimerais dire, pour la gouverne de ceux qui viennent tout juste d'arriver, que le Dr Corriveau doit prendre l'avion pour retourner aux Territoires du Nord-Ouest, et nous allons donc entamer tout de suite la période des questions.

    Monsieur Merrifield.

+-

    M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne): Merci d'être venu.

    Je suppose que la question qu'il nous faut nous poser lorsque vous parlez de publicité s'adressant directement aux consommateurs est celle de savoir si la publicité vise à renseigner ou à exploiter. C'est cela qu'il faut soupeser.

    J'aimerais savoir si vous pensez ou constatez que la publicité directe de médicaments d'ordonnance et le débordement des stations américaines—j'imagine via satellite—sont davantage un problème dans le Nord que dans la population canadienne générale, ou bien est-ce simplement là un problème potentiel contre lequel vous vouliez nous mettre en garde?

¿  +-(0915)  

+-

    M. André Corriveau: Je pense que l'important pour nous était d'avertir le comité que c'est une question qui mérite une enquête un peu plus poussée et qui ne devrait pas être ignorée.

    Selon notre interprétation de l'article, nous aurions tendance à convenir qu'il y a eu certains mouvements dans ce domaine qui n'ont pas réellement été sanctionnés jusqu'ici, ou bien qu'il y a une zone grise quant à la façon dont cela se répand dans notre pays en dépit des règlements qui devraient limiter le phénomène. Nous tenons simplement à veiller à ce que le comité s'y penche très sérieusement. Je n'entends pas ici me prononcer sur les motifs, mais je pense qu'il s'agit d'une chose dont il nous faut nous méfier.

+-

    M. Rob Merrifield: Je suis un petit peu intrigué par votre suggestion que vous voyez un problème à ce que les compagnies pharmaceutiques ou les pharmacies essaient de rallier suffisamment de dissidents dans le Nord pour pouvoir faire face à la question des pharmacies et qu'elles voient dans l'Internet une solution possible.

    Est-ce à cela que vous faisiez allusion?

+-

    M. André Corriveau: Non, excusez-moi. J'imagine que je ne me suis pas exprimé assez clairement. Nous ne disposons que de preuves anecdotiques que... Nous avons de la difficulté à recruter des pharmaciens dans le Nord. Bien que nous ne comptions pas un grand nombre de comptoirs de vente de détail, même ceux que nous avons dans nos trois hôpitaux régionaux ont dû mener une dure lutte et l'on y constate un taux de roulement élevé. Certains des pharmaciens que nous avons perdus ont en fait été recrutés par ces comptoirs pharmaceutiques sur Internet. Nous n'avons pas de preuve qu'il s'agit là d'un facteur important, mais l'approvisionnement en pharmaciens au Canada pose problème.

    Nous estimons que les pharmaciens ont un rôle important à jouer dans la gestion d'ensemble des médicaments délivrés sur ordonnance. Nous ne pouvons pas simplement regarder les médicaments sur ordonnance sans regarder du côté de ceux qui facilitent la chose ou qui peuvent jouer un rôle dans le contrôle de ce qui se passe, dans la surveillance des réactions indésirables aux médicaments et ainsi de suite. Pour nous, la question de la disponibilité de pharmaciens ne doit pas être laissée de côté lorsqu'on examine les médicaments sur ordonnance. C'est cela que j'essayais d'expliquer.

+-

    M. Rob Merrifield: Merci de cet éclaircissement. J'avais mal compris ce que vous disiez.

    Est-ce que vous voyez beaucoup de cas d'accoutumance à des médicaments sur ordonnance ou d'erreurs, mettons, du côté des pharmacies? Pourriez-vous nous donner une petite idée de ce que vous constatez, ou à l'intérieur des hôpitaux ou à l'extérieur? Pourriez-vous également nous dire dans quelle mesure la pharmacie devrait selon vous jouer un rôle sur le plan freins et contrepoids?

+-

    M. André Corriveau: Il ressort de plus en plus de preuves de nombreux pays industriels comme l'Australie et les États-Unis, voire même le Canada, que les réactions indésirables aux médicaments ne sont pas un élément sans conséquence dans l'actuel fardeau financier du coût des soins de santé au Canada. L'effort visant à renforcer notre capacité de surveiller et d'améliorer la sécurité en matière d'ordonnances dépend par ailleurs non seulement du comportement de l'industrie pharmaceutique, mais également de notre besoin de changer notre système de prestation de soins de santé et de faire intervenir les pharmaciens de façon un peu plus proactive à l'intérieur du système de soins de santé primaires. C'est là encore une autre raison pour laquelle nous voulions souligner la question de l'approvisionnement du Canada en pharmaciens et de leur intégration.

+-

    M. Rob Merrifield: Hier, en Colombie-Britannique, nous avons parlé du programme PharmaNet qu'a en place cette province. Est-ce là une chose que vous avez ou que vous avez envisagé dans le Nord?

+-

    M. André Corriveau: Nous n'avons pas accès à un lien direct. Nous nous démenons pour améliorer nos systèmes d'information d'ensemble pour la totalité du système de santé car nous sommes très éparpillés. En matière de communications dans le Nord, il se pose toutes sortes de questions concernant les types d'infrastructures qui pourraient être utilisés en vue de l'instauration de bons systèmes d'information.

+-

    M. Rob Merrifield: Vous ne vous êtes donc pas encore penchés là-dessus?

+-

    M. André Corriveau: Eh bien, cela nous intéresse, mais nous n'y sommes pas encore.

+-

    M. Rob Merrifield: Merci.

+-

    La présidente: Madame Hinton.

+-

    Mme Betty Hinton (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, Alliance canadienne): Bonjour.

    Hier, alors que je me préparais à venir entendre ce que l'on nous soumet d'un bout à l'autre du pays, j'ai eu connaissance d'un message diffusé sur l'Internet annonçant des ordonnances tout à fait gratuites : « Aucune ordonnance antérieure requise. Nos médecins autorisés aux États-Unis vous établiront gratuitement une ordonnance pour vos médicaments et vous les feront livrer à votre porte dans les 24 heures ».

    Vous avez parlé plus tôt de réactions indésirables à des médicaments. Je suis certaine que vous conviendrez avec moi que le fait de permettre aux gens de commander des médicaments sur Internet sans intervention professionnelle aucune n'est sans doute pas une très bonne idée.

¿  +-(0920)  

+-

    M. André Corriveau: Je suis de votre avis là-dessus.

+-

    Mme Betty Hinton: Je pensais bien que vous seriez d'accord. J'ai en réalité été plutôt choquée de constater que c'est ce qui se passe.

    Quant à la pénurie de pharmaciens, il n'y a pas que les Territoires du Nord-Ouest qui connaissent ce problème; nous le vivons dans ma propre circonscription, qui est une importante ville de la Colombie-Britannique. Avez-vous une idée—et c'est ma première question—de ce que l'on pourrait faire pour surmonter ce problème?

    En ce qui concerne les réactions indésirables aux médicaments, il est certain que si les gens vont obtenir des médicaments via l'Internet, nous allons connaître un sérieux problème, mais je pense que la pénurie de pharmaciens crée elle aussi des problèmes. J'aimerais bien entendre votre avis là-dessus, si vous le voulez bien.

+-

    M. André Corriveau: Au cours des dernières années l'on s'est beaucoup attardé sur les médecins et les infirmières, qui sont souvent perçus comme étant la ligne de front du système, mais il y a beaucoup d'autres gens qui sont l'armature du système—et je songe personnellement tout particulièrement aux pharmaciens, aux techniciens de laboratoire et ainsi de suite.

    Il nous faut une autre tribune, pour examiner les ressources humaines dans les services de santé, ce afin d'être sûrs de ne pas oublier certains de ces autres joueurs clés qui sont peut-être moins nombreux, et d'avoir une approche nationale en matière d'évaluation des nouveaux besoins et de création de postes ou de places dans les universités et dans les programmes de formation. Il y a souvent des questions de rémunération et de possibilités d'emploi qui expliquent pourquoi la profession n'attire pas davantage de gens ou pourquoi les gens n'y restent pas. Je n'ai pas ces réponses.

+-

    Mme Betty Hinton: Votre opinion est-elle que nous avons une pénurie de personnel pharmaceutique?

+-

    M. André Corriveau: Oui, c'est là mon opinion.

+-

    Mme Betty Hinton: Avec mon bagage d'aide-pharmacienne dans une autre vie, je sais le fardeau que portent les pharmaciens et les assistants en pharmacie; ce sont eux aussi des travailleurs de première ligne. Les médecins étant si occupés, il incombe réellement au pharmacien de revérifier pour être bien certain qu'il n'y aura pas d'interaction susceptible de nuire au patient.

    Avez-vous des idées quant à ce que nous pourrions faire pour encourager davantage de pharmaciens à aller à l'université ou bien pensez-vous qu'il y a un manque de places? Je sais qu'il a été question d'un manque de places pour les médecins dans le système universitaire. Constatez-vous qu'il se passe la même chose dans le cas des pharmaciens, ou bien est-ce simplement que moins de gens souhaitent devenir pharmaciens?

+-

    M. André Corriveau: Je ne pense pas être en mesure de me prononcer pour le moment sur les causes profondes de la situation, mais ayant discuté avec certains des pharmaciens qui ont quitté notre région, je peux vous dire que certains d'entre eux se sont vu offrir de meilleurs postes dans le secteur privé et que d'autres étaient... Mais s'agissant du simple fait de recruter, nous constatons que notre système de soins de santé n'est pas très proactif dans l'identification de secteurs. Nous dépensons toute notre énergie à nous préoccuper des médecins et des infirmières, et certaines de ces autres questions seraient laissées à...

+-

    Mme Betty Hinton: À l'abandon?

+-

    M. André Corriveau: Oui, à l'abandon.

+-

    Mme Betty Hinton: Merci beaucoup.

+-

    La présidente: Monsieur Ménard.

[Français]

+-

    M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Je voudrais vérifier l'idée suivante auprès de vous. Vous ajoutez à l'affirmation de plusieurs témoins qui nous disent qu'il y a un problème par rapport à la promotion que les compagnies pharmaceutiques font pour favoriser l'utilisation de certains médicaments.

    Qu'est-ce que vous pensez de l'idée selon laquelle le comité pourrait éventuellement recommander la création d'un registre et selon laquelle aussi tous les médicaments qui ne sont pas vendus devraient être déclarés? Ce n'est pas encore clair dans mon esprit si cela devrait relever du ministère de la Santé ou du ministère de l'Industrie, mais il ne devrait pas y avoir d'échantillons ni de matériel promotionnel remis à des professionnels de la santé, à des médecins et à des infirmières dans des endroits publics, sans que ce soit connu du législateur et des consommateurs, dans la mesure où on peut penser que si une compagnie pharmaceutique met en circulation 6 000 échantillons d'un médicament, elle s'attend à ce que les médecins qui en ont reçu prescrivent ce médicament. On peux penser qu'il y a un lien entre la vente, le don d'échantillons, le don d'un certain matériel promotionnel et la faculté qu'auront les médecins de le prescrire.

    Alors, qu'est-ce que vous pensez de l'idée d'avoir un registre pour identifier ce qui n'est pas vendu, mais qui fait partie du matériel promotionnel des compagnies pharmaceutiques?

¿  +-(0925)  

+-

    M. André Corriveau: Je vais répondre en français.

+-

    M. Réal Ménard: Eh bien, vous êtes mon idole. Je vais aller passer mes vacances dans les Territoires du Nord-Ouest.

+-

    M. André Corriveau: Je pense que c'est une idée qui vaut la peine d'être explorée. Je ne peux pas vous dire d'emblée que cela fonctionnerait, mais l'idée semble intéressante et je vous encouragerais sûrement, en tant que comité, à examiner cela plus à fond.

+-

    M. Réal Ménard: Pouvez-vous nous rappeler la population, le nombre approximatif de médecins et nous dire quelles sont les compagnies pharmaceutiques représentées sur votre territoire? Est-ce qu'il y a des succursales?

+-

    M. André Corriveau: Non, on a un système de distribution des médicaments. La population des Territoires du Nord-Ouest est dispersée dans 32 communautés dont le nombre d'habitants peut varier entre 18 000 personnes, à Yellowknife, et 65 personnes, dans des petites communautés. Alors, on a peut-être quatre communautés qui ont des pharmacies de vente au détail sur place et il y a cinq communautés où des médecins se sont établis.

+-

    M. Réal Ménard: Avez-vous des indications à l'effet qu'il y a des représentants des compagnies pharmaceutiques qui opèrent sur votre territoire?

+-

    M. André Corriveau: Les représentants viennent où il y a des médecins. Je ne peux pas vous dire s'ils vont visiter les pharmacies de vente au détail, mais c'est probablement le cas puisqu'elles sont dans les mêmes villes, dans les mêmes communautés. Alors oui, il y a des visites qui se font. Ce sont des représentants qui viennent de l'Alberta ou d'autres bureaux.

+-

    M. Réal Ménard: Au fond, les principaux problèmes de vos communautés, ce sont des problèmes qui interpellent beaucoup les gouvernements des territoires: le manque d'effectif médical et la difficulté d'accéder à des ressources de première ligne. Ça, c'est une réalité à laquelle vous êtes confrontés, et vous êtes inquiets face au nombre de médicaments en circulation et face à la promotion que font les compagnies pharmaceutiques.

+-

    M. André Corriveau: On est inquiets, justement, du fait qu'ayant peu de travailleurs de la santé, quand le public demande certains médicaments, on n'a pas autant de moyens de surveiller ce qui se passe et il y a des risques qui s'accumulent, selon nous, parce souvent un médecin qui est très occupé est tenté de donner une ordonnance plutôt que de discuter avec le patient pour lui expliquer qu'il y a d'autres traitements disponibles qui sont moins dispendieux et aussi sécuritaires. Alors, c'est une de nos préoccupations.

+-

    M. Réal Ménard: Sur une base comparative, est-ce que vous savez quel est le médicament le plus prescrit dans vos communautés? Est-ce que c'est une information qui est disponible?

¿  +-(0930)  

+-

    M. André Corriveau: On a pas de système d'information qui permette de répondre de façon précise à votre question, mais on sait que les ordonnances d'antibiotiques sont plus nombreuses, proportionnellement, qu'ailleurs au pays. On sait aussi qu'il y a un usage important des médicaments neuroleptiques, comme le Valium.

+-

    M. Réal Ménard: Si on compare à l'Alberta ou à la Saskatchewan, par exemple, est-ce que, pour le consommateur, le coût des médicaments en vente au détail est plus élevé qu'ailleurs?

+-

    M. André Corriveau: Il est un peu plus élevé parce qu'il y a évidemment des coûts de transport qui sont inclus et des coûts d'opération des pharmacies.

+-

    M. Réal Ménard: Merci.

[Traduction]

+-

    La présidente: Merci, monsieur Ménard.

    Monsieur Dromisky.

+-

    M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan): Merci beaucoup.

    Au début de votre exposé, vous avez fait plusieurs déclarations que j'ai reçues un peu à la manière d'une liste de courses relativement aux droguistes ou pharmaciens et au genre de rôle qu'ils pourraient jouer. Je ne sais trop à quoi vous vouliez en venir. Il me semble que vous laissiez entendre qu'ils devraient avoir une formation supplémentaire afin de pouvoir jouer un rôle plus exhaustif dans les collectivités isolées du Nord, comme dans toute région du Nord du Canada où les services font défaut.

    Nous avons dans le nord-ouest de l'Ontario des infirmières qui sont praticiennes. En d'autres termes, elles assument certaines des responsabilités des médecins dans leurs collectivités. Étant donné la pénurie de médecins, certaines de ces infirmières ont reçu une formation de praticiennes et assument certaines de ces responsabilités en médecine. Est-ce ce que vous souhaitez dans le cas des droguistes ou des pharmaciens dans votre région, c'est-à-dire qu'ils jouent un plus grand rôle que simplement vendre des médicaments?

+-

    M. André Corriveau: Je ne parlais pas forcément de la formation, car je crois personnellement, ayant travaillé dans plusieurs autres provinces au long de ma carrière de médecin de premier recours, que les pharmaciens, même avec la formation qu'ils ont déjà reçue, sont sous-utilisés quant à leur capacité d'offrir et d'augmenter les services de soins primaires. En un sens, les pénuries nous ont empêché de faire davantage appel à eux pour qu'ils offrent des services de conseils aux patients et qu'ils assurent la distribution de médicaments. Ces choses pourraient être faites tout de suite si nous disposions de plus de main-d'oeuvre.

    Il vous faudrait demander aux pharmaciens eux-mêmes s'ils estiment qu'il leur faudrait davantage de formation. M'appuyant sur mon expérience, ayant travaillé dans un système dans le cadre duquel des pharmaciens participaient à l'exercice des mécanismes d'assurance de la qualité, visitaient les centres de soins, aidaient les infirmières dans l'établissement d'ordonnances, faisaient leur travail, surveillaient le système et conseillaient des médecins, je peux vous dire qu'il faut du temps pour faire cela. Si c'est un combat au jour le jour pour maintenir le rythme, vous n'avez pas le temps de prendre ces extras qui sont sans doute plus critiques pour la qualité des soins que vous pouvez offrir.

+-

    M. Stan Dromisky: Cela m'amène tout droit à la question suivante sur votre bureau. Je n'ai pas la moindre idée de l'importance de votre personnel. J'ignore dans le cadre de quel modèle vous travaillez et s'il est comparable à des modèles et responsabilités d'agents et d'administrations de soins de santé de district ailleurs au Canada. Cependant, en ce qui concerne votre bureau et votre organisation, j'aimerais savoir s'il existe un genre de relations exécutives entre votre ministère et les praticiens et distributeurs de médicaments à l'échelle de votre district.

+-

    M. André Corriveau: Il ne s'agit pas d'une relation directe, mais, en gros, je suis le seul médecin dans ce département de santé. Mes principales responsabilités concernent la santé publique—le SRAS ou tout autre problème. Mais parce que je suis le seul médecin, à cause de mon titre, mon rôle a évolué de telle sorte que je dois également jouer un rôle de leader auprès de la communauté médicale, qui n'est pas très nombreuse. À cet égard, bien que nos médecins soient recrutés directement par notre autorité sanitaire—les agents de prestation de soins de santé dans la communauté, qui sont basés à l'hôpital—j'exerce une certaine influence sur les débats et les dossiers auxquels l'on se consacre. Je peux donc influer sur certains aspects de l'organisation des soins ou des protocoles qui sont mis en place.

¿  +-(0935)  

+-

    M. Stan Dromisky: Vous dites que vous ne pouvez qu'exercer une influence; vous ne pouvez pas diriger et contrôler.

+-

    M. André Corriveau: Je ne peux intervenir que si je pense que la santé publique est de quelque façon menacée.

+-

    M. Stan Dromisky: Vous devez compter parmi votre personnel des infirmières et ainsi de suite. Si un membre de votre personnel obtient des renseignements concernant un patient qui a eu un surdosage—en d'autres termes, le médecin a sans cesse renouvelé les ordonnances, la personne a développé une accoutumance et un membre de votre équipe le découvre—pouvez-vous intervenir et parler au médecin de ce patient qui a consommé des doses importantes ou des surdoses de médicaments qui n'auraient pas dû lui être administrés de façon régulière?

    S'il existe un problème et que vous en êtes au courant, que faites-vous? Vos infirmières vous en avisent-elles? En parlez-vous avec les médecins? Quelle influence—pour reprendre le terme que vous avez employé—avez-vous réellement face à l'un quelconque de ces problèmes?

+-

    M. André Corriveau: Je n'ai pas vraiment de système pour surveiller cela. Comme je l'ai dit, les membres de mon personnel se consacrent davantage aux questions de santé publique—hygiène de l'environnement et contrôle des maladies infectieuses. Il arrive que des membres du public ou d'autres me signalent des problèmes à cause de mon titre et du fait qu'ils puissent parcourir l'annuaire et y repérer « Médecin chef ».

    Je suis à l'occasion averti de questions du genre, et nous avons des processus en place. Par exemple, je peux aller voir le directeur médical de l'hôpital à Inuvik et lui dire que j'ai reçu une plainte au sujet d'un des médecins, ou qu'une des infirmières est préoccupée par ceci ou cela. Je peux alors offrir certains conseils quant aux mesures à prendre, mais ce n'est pas un rôle dirigé.

    Nous avons également un mécanisme formel à la disposition des personnes désireuses de déposer des plaintes. Nous avons passé contrat avec un médecin en Alberta qui est chargé par notre ministre de faire formellement enquête sur les plaintes relativement à des questions médicales émanant du public.

+-

    M. Stan Dromisky: Merci beaucoup.

+-

    La présidente: Merci, monsieur Dromisky.

    Monsieur Thompson.

+-

    M. Greg Thompson: Merci, madame la présidente.

    J'aimerais enchaîner sur ce qu'a dit M. Dromisky au sujet des questions de santé publique. Vous avez mentionné le SRAS, etc., mais je ne vous ai pas entendu parler de l'accoutumance aux médicaments délivrés sur ordonnance. Cela s'inscrit-il également sous la rubrique « questions de santé publique »?

+-

    M. André Corriveau: Selon moi, oui. Traditionnellement, au Canada, cela n'a pas fait partie des fonctions de santé publique essentielles; cela a davantage été une question de santé mentale. Je me prononce régulièrement sur ces questions, car l'un de mes rôles, par exemple, est d'exposer et de publier les conditions critiques ou les principaux dossiers dont notre système doit traiter de façon générale. Je me prononce donc sur ces aspects. Mais compte tenu de la façon dont mon bureau est structuré et du personnel dont je dispose, nous nous concentrons principalement sur les fonctions traditionnelles en matière de santé publique concernant l'environnement, les dépotoirs, l'épuration de l'eau et la prévention des maladies transmissibles. Le gros de mon équipe se consacre à ces questions.

+-

    M. Greg Thompson: Quelles sont les ventilations de pourcentages dans votre partie des Territoires du Nord-Ouest s'agissant des sociétés autochtones versus les sociétés non autochtones? Comment ces pourcentages se reflètent-ils côté toxicomanie et problèmes d'abus de drogue, dans le contexte de la santé publique telle que vous la voyez?

+-

    M. André Corriveau: La population des Territoires du Nord-Ouest est composée à 51 p. 100 d'Autochtones et à 49 p. 100 de non-Autochtones, selon le dernier recensement. Mais dans la pratique, le partage est très inégal d'une collectivité à une autre. Des collectivités comme Yellowknife et d'autres centres régionaux sont principalement non autochtones. La plupart de nos collectivités sont principalement autochtones.

    Dans notre travail d'examen des questions de santé, nous avons constaté que les problèmes d'accoutumance sont davantage liés au statut économique qu'à des paramètres autochtones versus non autochtones. Il y a bien sûr dans les communautés autochtones d'autres facteurs prédisposants, comme toute la question des écoles résidentielles. Mais dans l'ensemble, lorsque nous nous penchons sur cette question, cela est lié à la situation économique.

+-

    M. Greg Thompson: Très bien, mais cela revient à dire en code que cela se retrouve davantage du côté autochtone. En d'autres termes, il y a de ce côté-là un plus gros problème, car si vous examinez les conditions socio-économiques, c'est de cela que vous parlez.

    Quelles recommandations précises pourriez-vous faire au comité quant à des mesures que nous pourrions prendre pour non seulement aider à cerner le problème mais bien le résoudre? Je sais que l'on ne dispose probablement pas de suffisamment de temps, mais y a-t-il quelques choses bien précises que nous pourrions faire ou recommander en vue de corriger cet énorme problème?

    Je ne ferai que mentionner ceci, de façon anecdotique. J'ai rencontré des dentistes en activité dans le Nord qui m'ont donné un exemple de la façon dont Santé Canada travaille avec la communauté autochtone. Un jeune Autochtone est envoyé par avion à Yellowknife pour y subir un examen de dents en très mauvais état. Il souffre beaucoup mais on ne peut pas tout de suite faire d'intervention chirurgicale ou autre. Il finit par être renvoyé chez lui pour deux ou trois semaines avec un énorme sac rempli de médicaments qu'on lui a prescrits pour la douleur atroce qu'il vit, alors que le problème aurait pu être réglé plus tard dans la même journée ou deux jours plus tard.

    En d'autres termes, il y a certaines pratiques en cours au sein de la communauté des soins de santé que l'on pourrait très rapidement cerner, mais le problème est que la bureaucratie ne veut pas reconnaître les problèmes et en traiter. C'est très frustrant pour les médecins. C'est là un tout petit volet qui a été identifié comme pouvant être amélioré ou corrigé immédiatement mais dont on ne s'est jamais préoccupé.

+-

    M. André Corriveau: Premièrement, je dirais que vous devriez pouvoir obtenir immédiatement que soit réglé ce genre de problème, bien que la même chose puisse exister dans d'autres centres.

    En ce qui concerne les problèmes d'accoutumance, nous ne disposons pas de preuves solides que les médicaments sur ordonnance soient à l'heure actuelle un gros problème. Le problème d'accoutumance le plus prévalent, traditionnellement, dans nos collectivités est celui de l'alcoolisme, mais l'on relève une consommation croissante de cocaïne, de drogues illicites, parce que...

¿  +-(0940)  

+-

    M. Greg Thompson: Mais vous aviez mentionné, monsieur—et, encore une fois, je n'ai plus de temps, c'est un problème...

+-

    La présidente: Je regrette, monsieur Thompson, mais le temps qui vous était alloué est malheureusement écoulé.

+-

    M. Greg Thompson: Vous aviez identifié quelques médicaments qui sont surprescrits ou... Cela n'indiquerait-il pas qu'il y a un problème avec les médicaments sur ordonnance?

+-

    M. André Corriveau: Eh bien, il y a peut-être une certaine surprescription de médicaments chez les personnes âgées, par exemple, dans la gestion des symptômes. Ces personnes ne souffrent peut-être pas nécessairement d'accoutumance, mais peut-être qu'elles consomment plus de médicaments qu'elles ne le devraient. Je ne parlais pas forcément d'un contexte toxicomanogène.

+-

    La présidente: Merci, monsieur Thompson.

    C'est Mme Bennett qui posera les dernières questions, car le Dr Corriveau doit nous quitter.

+-

    Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Docteur Corriveau, il est clair que vous avez en régions rurales et isolées certains problèmes en matière de ressources humaines pour les services de soins de santé. Un groupe d'entre nous s'est rendu dans le Nord et l'un des messages que nous avons entendus était que la capacité des médecins ou des infirmières ou, comme vous l'avez mentionné, des pharmaciens, de sortir pour poursuivre leurs études ou pour prendre des vacances avec leur famille semble être une sérieuse désincitation qui frustre le recrutement dans le Nord et dans d'autres régions rurales isolées.

    Y a-t-il quelque chose que nous pourrions selon vous faire sous forme de recommandation en vue d'aider les pharmaciens et les médecins à pouvoir aller et venir? Chaque fois que nous proposons quelque chose pour nos médecins, il semble clair que ce ne serait pas juste de limiter cela à nos seuls médecins, sans inclure les infirmières, les pharmaciens et les autres professionnels des soins de santé.

    Pensez-vous que cela tend à décourager les gens désireux de travailler dans le Nord qu'une fois qu'ils sont là il n'y a personne pour les remplacer et ils y sont en quelque sorte coincés à jamais? Cela va du simple fait de prendre des vacances au désir de se tenir à jour, je suppose, s'agissant de la formation médicale continue ou de méthodes meilleures ou nouvelles de soigner certains états pathologiques.

+-

    M. André Corriveau: Pour revenir à l'un de mes commentaires antérieurs, relativement aux médecins, par exemple, presque à l'échelle du pays, je pense que le problème a été réglé. Je reviendrai sur le fait que les professionnels paramédicaux, y compris les pharmaciens, ont tendance à être ignorés ou relégués à l'arrière-plan pour ce qui est de l'élimination de certaines de ces désincitations ou de ces problèmes de rétention. Même certains des travaux fédéraux, provinciaux et territoriaux qui se font en matière de ressources humaines pour la santé ont tendance à ne se concentrer que sur les médecins et infirmières.

    Je pense donc qu'une recommandation que l'on pourrait faire serait de veiller à ce que lors de l'élaboration de toute stratégie de ressources humaines en soins de santé l'on examine toutes les pièces importantes du système et pas juste certaines d'entre elles, bien qu'elles puissent sembler, du fait de leur nombre, être les plus critiques.

+-

    Mme Carolyn Bennett: Y a-t-il quelque chose que l'on pourrait apprendre en regardant certaines des plus petites localités dans la façon dont les professionnels de la santé travaillent ensemble et dans le rôle que jouent les infirmières praticiennes dans certaines des localités isolées s'agissant de la délivrance d'ordonnances? Peut-être que lorsqu'il y a moins de médicaments disponibles, on soigne autrement qu'avec des médicaments. Est-ce que c'est là...?

    Pour ce qui est de la réassurance, du rôle du travailleur social et de la fonction d'une approche multidisciplinaire adéquate, pensez-vous qu'il y ait des choses que nous puissions apprendre des localités isolées?

+-

    M. André Corriveau: Je pense que oui, et pas seulement dans les Territoires du Nord-Ouest. Je suis certain que c'est également le cas de certaines régions du nord du Québec, de l'Ontario et de la Colombie-Britannique.

    Je reviens tout juste d'une conférence circumpolaire sur la santé tenue au Groenland il y a quelques semaines. Il y a en place là-bas beaucoup de bonnes pratiques et nous aimerions avoir la capacité de mettre en oeuvre certaines de ces meilleures pratiques.

¿  +-(0945)  

+-

    Mme Carolyn Bennett: Devrions-nous lutter pour obtenir pour vous un système TI, pour lequel le gouvernement fédéral paierait sa juste part?

À  +-(1000)  

+-

    M. André Corriveau: Eh bien, en tant que territoire, nous aimerions voir une progression accélérée de la mise au point d'un système d'information sur la santé.

+-

    Mme Carolyn Bennett: Cela vous aiderait dans votre travail en ce sens que vous pourriez faire plus facilement votre travail si vous disposiez de ces données.

+-

    M. André Corriveau: Oui. Dans notre cas, le facteur limitant est souvent l'infrastructure pour ce qui est de la largeur de bande et ainsi de suite en vue de l'expansion réelle de nos systèmes de télésanté et autres. Ce n'est donc pas le coût de la technologie en tant que tel, mais bien les limites de l'infrastructure qui nous imposent cette lenteur.

+-

    La présidente: Merci, madame Bennett.

    Merci, docteur Corriveau, d'être venu pour repartir aussitôt à la hâte. Nous savons à quel point vous êtes occupé et nous vous remercions du travail que vous faites quotidiennement ainsi que de votre contribution à nos délibérations.

+-

    M. André Corriveau: Tout le plaisir était pour moi.

+-

    La présidente: Mesdames et messieurs, nous allons maintenant passer à notre deuxième témoin, le directeur de la politique et des programmes sur les produits pharmaceutiques du ministère de la Santé et du Mieux-être de l'Alberta.

    Bienvenue, David. La parole est à vous.

+-

    M. David Bougher (directeur, politique et programmes sur les produits pharmaceutiques, Ministère de la Santé et du Mieux-être de l'Alberta): Merci beaucoup, madame la présidente, et merci au comité permanent de l'occasion qui m'est ici donnée de discuter de questions relatives aux médicaments sur ordonnance.

    J'aimerais entretenir le comité de trois sujets, en établissant d'abord un contexte pour les principaux défis auxquels se trouvent confrontés les soins pharmaceutiques au Canada. J'entends traiter de ces défis par rapport aux principales parties prenantes—dont il a déjà été question ici—et examiner le cadre d'action et la nécessité d'approches novatrices face aux problèmes qui ont été identifiés.

    Les soins pharmaceutiques ont, au cours des dernières années, beaucoup attiré l'attention du fait de l'augmentation des coûts. Je soulignerai ici qu'il y a dans cette équation un autre élément dans la balance, soit que les médicaments offrent aux Canadiens d'énormes bienfaits, et l'une de nos plus grosses lacunes et erreurs est que nous n'en mesurons pas la valeur. Nous ne comprenons pas d'un point de vue quantitatif les bienfaits offerts par les produits pharmaceutiques.

    En 2002, les Canadiens ont dépensé plus de 18 milliards de dollars au titre de médicaments, soit 16 p. 100 des dépenses de soins de santé, et la part publique de ce montant est passée de 15 p. 100 en 1975 à 36 p. 100 en 2002. Je pense qu'il est important que les gouvernements fassent preuve de prudence dans leur recherche de solutions à l'aspect coûts de la situation, car le marché pharmaceutique est complexe et les questions qui se posent s'étendent bien au-delà des coûts.

    Les politiques conçues en vue de traiter des coûts peuvent déboucher sur d'autres effets indésirables, comme l'a illustré Robyn Tambly, de l'Université McGill, dans certaines de ses recherches sur l'incidence de changements aux programmes de médicaments conçus pour les personnes âgées dans le contexte de certains services essentiels. Je dirais qu'il importe d'adopter des approches novatrices et très inclusives engageant toutes les parties prenantes dans la recherche de solutions.

    Il se présente quatre défis selon moi. Le premier est celui de la durabilité des dépenses publiques. En Alberta, nos dépenses au titre des programmes des médicaments ont augmenté de 17,5 p. 100 au cours des dernières années, augmentation qui n'est clairement pas durable mais, là encore, l'autre considération est que nous dépensons peut-être le bon montant d'argent mais qu'il nous faut voir de quelle façon cet argent est dépensé.

    Il y a des catégories de médicaments qui ne sont ni prescrits ni utilisés comme il se doit et je citerai à titre d'exemple ceux utilisés pour traiter l'hypertension artérielle. D'un autre côté, il y a selon nous des médicaments qui font l'objet d'une utilisation excessive si l'on tient compte de leur rentabilité. La question de la rentabilité est l'un de nos quatre points clés, car il importe de disposer de preuves solides et rigoureuses à l'appui de la valeur d'un médicament. C'est à ce niveau que je considère que le secteur pharmaceutique a un avantage par rapport aux autres services et technologies de santé étant donné qu'il existe une bien plus vaste base de données et de preuves sur les effets des médicaments. Mais il nous faut néanmoins davantage d'analyses coûts-efficacité. Les essais qui résultent en l'homologation de médicaments en vue de leur utilisation au Canada s'appuient sur des comparaisons avec des placebos. Les médicaments qui sont homologués sur la base de leur sécurité et de leur efficacité ne nous éclairent pas beaucoup s'agissant de prendre des décisions quant aux médicaments que nous devrions payer en vue d'offrir un bienfait donné. De quelle façon les médicaments seront-ils utilisés dans le monde réel? Nous savons qu'ils sont sûrs dans le contexte d'essais cliniques, mais il s'agit là d'un cadre idéal. Lorsqu'un médicament arrive sur le marché, plusieurs autres facteurs entrent en ligne de compte.

    Comptent parmi les groupes de drogues qui ont fait leur apparition au cours des dernières années les produits biologiques utilisés pour traiter la polyarthrite rhumatoïde et la maladie de Crohn. Ces médicaments, dont le coût s'élève à entre 15 000 $ et 20 000 $ par an, ont offert d'énormes bienfaits à de nombreux patients. Mais notre souci dans le cas de nouvelles classes de drogues comme celle-ci est de déterminer si ces produits présentent une sécurité à long terme, une rentabilité à long terme et, encore une fois, une valeur pour le système de soins de santé.

    Les soins de santé primaires sont le défi numéro trois, et il importe de se concentrer sur la délivrance d'ordonnances en soins primaires et l'importance d'une meilleure collaboration entre professionnels de la santé. Les pharmaciens sont la plus importante ressource inexploitée dans notre système de soins de santé. Ils ont énormément à offrir et il nous faut faire la promotion de systèmes qui amènent pharmaciens, infirmières et médecins à travailler plus étroitement ensemble en équipe.

    Le quatrième défi est celui des systèmes d'information, de la nécessité de fonder les décisions sur des preuves, sur les meilleures preuves disponibles, et de l'importance de la communication de renseignements sur les médicaments qui soient eux aussi fondés sur des preuves. Il y a des préoccupations en ce qui concerne la publicité directe des médicaments d'ordonnance. Par exemple, cette publicité informe-t-elle véritablement le public? Livre-t-elle les renseignements nécessaires à une bonne compréhension de ce qu'offrent les nouveaux médicaments?

    Il importe que soient reliées entre elles électroniquement les pharmacies s'agissant des profils pharmaceutiques. L'Alberta oeuvre depuis six ans à l'élaboration d'un réseau d'information pharmaceutique. Celui-ci n'est pas tout à fait comparable au PharmaNet de la Colombie-Britannique, mais c'est un système qui vise l'intégration des renseignements médicaux dans un dossier électronique de santé qui fera le lien entre pharmacies et médecins à l'échelle de la province.

    L'un des aspects au sujet desquels nous apprécierions de l'aide est la loi fédérale interdisant le transfert électronique d'ordonnances. Il y a là un certain nombre d'obstacles réels, mais je songe ici à la loi PIPEDA à laquelle nous oeuvrons à l'heure actuelle et au sujet de laquelle nous avons des discussions avec le gouvernement fédéral.

    Passant maintenant aux principales parties prenantes, les objectifs communs à celles-ci visent l'offre de médicaments sûrs, efficaces et de qualité élevée. Les patients souhaitent avoir accès aux meilleurs médicaments disponibles, et ce pour un coût nul ou faible. La part médicaments sur ordonnance des différents régimes de soins de santé supplémentaires qui existent dans le pays va en augmentant, mais les adhérents à ces régimes veulent des coûts inférieurs et des fardeaux fiscaux réduits.

    Les professionnels de la santé, les médecins, veulent servir au mieux leurs patients et ils n'apprécient pas nombre des obstacles auxquels ils voient confronter leurs patients qui ont accès à des médicaments en vertu de nos programmes publics d'assurance-médicaments. L'industrie pharmaceutique fait un excellent travail de recherche. Les entreprises pharmaceutiques ont des actionnaires à satisfaire et il leur faut être profitables. Et les gouvernements recherchent quant à eux des soins de santé optimaux pour la population.

    Nous avons également des gouvernements qui doivent assurer un équilibre entre la science, l'innovation et la R-D économique. C'est là l'un de nos défis.

    Passant maintenant au cadre d'action en matière de soins de santé primaires, il importe tout d'abord de rehausser le profil de la délivrance d'ordonnances, d'intégrer les pharmaciens à des équipes de soins de santé primaires et d'élargir le rôle des pharmaciens au-delà de la simple exécution d'ordonnances, et de faire une bien meilleure utilisation des aides- pharmaciens. Je pense que la situation sur le plan main-d'oeuvre de pharmacie en Alberta est la mieux décrite par le terme « serrée ». Nous continuons de constater l'ouverture de nouvelles pharmacies. Certes, le magasinage outre-frontière a une certaine incidence, mais au niveau du gouvernement, l'on ne constate pas véritablement de pénurie critique à l'intérieur de la province.

    Il nous faut une collaboration nationale. Le rapport du conseil consultatif sur la santé auprès du premier ministre de l'Alberta dit qu'il nous faut poursuivre des stratégies de collaboration en vue de gérer et de contenir nos coûts croissants, et l'Alberta appuie pleinement les efforts nationaux. L'un de ces efforts est la création d'un processus national commun d'examen des médicaments, processus qui est maintenant en place, et l'établissement d'un système national d'utilisation et d'information sur les médicaments d'ordonnance qui fournira des renseignements à l'appui de l'élaboration de politiques.

    Un examen des prix des produits génériques est une autre question à l'ordre du jour national. Nous estimons que nous payons sensiblement plus pour les médicaments génériques au Canada. Les prix des médicaments génériques sont plus ou moins arrimés au taux en vigueur en Ontario, car le processus ontarien est imposé par la loi. Lorsqu'arrive sur le marché un nouveau médicament générique, le remboursement se fait à un taux qui est de 30 p. 100 inférieur au prix du médicament de marque. Il nous faut intégrer les listes de produits génériques dans les formulaires provinciaux.

    J'aimerais vous parler maintenant de quelques initiatives auxquelles nous oeuvrons en Alberta avec l'industrie et les principales parties prenantes. Je vais vous donner trois exemples. Premièrement, l'Institute of Health Economics est une organisation unique, un exemple de partenariat entre l'industrie, les universités et le gouvernement. La recherche qui est si importante, faisant intervenir tous les partenaires, est menée par l'Institut, qui livre des travaux de recherche remarquables sur les politiques de santé, l'économie de la santé et les résultats.

    Le deuxième exemple est un projet d'envergure portant sur les médicaments utilisés pour soigner l'ostéoarthrose. Vous avez peut-être entendu parler du Celebrex et du Vioxx, médicaments homologués il y a de cela quelques années. Ces nouveaux médicaments ont beaucoup capté l'attention du public et ont également fait l'objet de publicité qui nous est arrivée des États-Unis. Nos dépenses correspondant à ces produits ont connu une véritable flambée. Par suite de préoccupations quant à la façon dont ces médicaments sont utilisés, l'industrie pharmaceutique a investi une somme considérable, soit un total de 3 millions de dollars, dans un projet qui nous a réjouis et qui a pour objet de cerner la façon dont ces médicaments sont en fait utilisés et d'élaborer des stratégies axées sur des soins optimaux. Ces nouveaux médicaments ne sont pas les meilleurs pour tous les patients souffrant d'arthrite, et il est important de fournir l'information et l'éducation requises en vue de décisions d'ordonnance les meilleures possibles. Ont également participé à cette initiative la Société d'Arthrite et des groupes professionnels de médecins et de pharmaciens de la province.

    J'ai déjà évoqué l'étude post-commercialisation portant sur les produits biologiques Remicade et Humira, médicaments qui coûtent 15 000 $ à 20 000 $ par an. L'une de nos conditions de remboursement de ces médicaments est que les compagnies qui les produisent investissent dans des activités de surveillance post-commercialisation avec la participation de chercheurs et de spécialistes. Ce travail est en cours.

    Enfin, en ce qui concerne les systèmes d'information, j'ai fait état du dossier de santé électronique et de l'importance de la fourniture aux médecins prescripteurs et aux travailleurs de la santé des outils et des renseignements nécessaires à la prise des meilleures décisions possibles. Il se fait à l'intérieur du système de santé trop de prise de décisions en isolement, en l'absence de données exhaustives sur les résultats de laboratoire et l'utilisation d'autres médicaments. Nous avons fait des progrès considérables quant à l'élaboration pour l'Alberta d'un dossier de santé électronique.

    Pour conclure, il nous faut de l'innovation pour rendre disponibles les médicaments sans pour autant mettre le système de soins de santé en faillite. Il nous faut mettre davantage l'accent sur la prescription en soins primaires, sur une solide collaboration nationale, sur des partenariats efficaces avec toutes les parties prenantes, y compris l'industrie pharmaceutique, et sur l'élaboration d'un dossier de santé électronique comprenant les profils pharmaceutiques.

    Merci beaucoup.

+-

    La présidente: Merci, monsieur Bougher.

    Monsieur Merrifield.

+-

    M. Rob Merrifield: Merci, David d'être venu ici. Nous nous sommes en fait connus dans une autre vie, lorsque nous avions beaucoup à faire avec le système de soins de santé ici en Alberta. Je vous suis reconnaissant d'être venu ici discuter de certaines de ces questions.

    Hier nous avons appris—en fait, au cours des trois dernières semaines nous avons entendu des témoins nous entretenir de cela—que 50 p. 100 des patients en milieu hospitalier connaissent des réactions indésirables et que la plupart des infirmières et médecins sont incapables de détecter les réactions indésirables et de faire le diagnostic qui s'impose. Ils ne peuvent même pas reconnaître le phénomène. Et on nous a dit hier que 40 p. 100 des conducteurs pourraient être sous l'influence d'un médicament ou d'un autre.

    Nous pourrions entreprendre toutes sortes d'études, car lorsqu'on demande « Comment peut-on vérifier cela et quels genres d'études sont en train d'être menées? », on apprend qu'il ne se passe en fait pas grand-chose. Il ne se fait pas beaucoup d'études sur la post-surveillance, sur la gravité du problème. Je pense néanmoins que peu de gens contesteraient le fait qu'il s'agit d'un sérieux problème. Nous ne sommes donc peut-être pas en mesure de cerner le degré de gravité du problème, mais peu importe en réalité; je pense que nous devrions tendre vers certaines des solutions.

    En Colombie-Britannique, les gens ont beaucoup parlé du programme PharmaNet, qui assure en quelque sorte le lien entre la pharmacie et le patient, mais non pas le médecin. Ce n'est pas obligatoire. Je comprends qu'en Alberta, grâce au programme de mieux-être, dans le cadre duquel vous envisagez des dossiers médicaux qui suivent les patients, vous êtes arrivés plus loin dans ce processus.

    Pourriez-vous nous renseigner davantage sur la façon dont le programme fonctionne et sur l'échéancier? Je sais qu'il s'est fait un certain nombre de projets pilotes en la matière. Vous pourriez peut-être nous dire ce qui se fait.

+-

    M. David Bougher: Si vous permettez que je parle d'abord de ce que nous avons en matière de système de rapport relativement passif quant au répertoriage des réactions indésirables, je sais que c'est un domaine que Santé Canada est en train de renforcer, mais nous savons que les effets indésirables ont une influence sensible sur l'utilisation des ressources de soins de santé. Vous avez tout à fait raison de dire que la fourniture aux professionnels de la santé des bons renseignements et le fait de leur fournir la possibilité d'assurer la rétroaction sur les effets des médicaments qu'ils constatent chez leurs patients vont constituer un élément clé de notre système.

    Pour répondre plus précisément à votre question, l'initiative Wellnet, qui est le système d'information mis au point en Alberta, en est maintenant à la phase dossiers de santé électronique, sous la surveillance d'un organe de gouvernance, et sa mise en oeuvre progresse assez rapidement. Je siège au comité de contrôle des dossiers de santé électronique qui surveille l'utilisation, la divulgation et l'accès aux données, et il se pose beaucoup de questions. Je pense que la clé de la réussite de l'approche albertaine est l'inclusion des parties prenantes. Les médecins représentant les associations locales, les pharmaciens et les régions de santé participent tous en tant que parties prenantes à l'élaboration du système, ce qui est important pour en obtenir l'adoption et un appui actif.

+-

    M. Rob Merrifield: Quel est en gros votre échéancier?

+-

    M. David Bougher: Je pense que la mise en oeuvre concrète doit se faire dans le courant de l'année à venir.

À  +-(1005)  

+-

    M. Rob Merrifield: Très bien.

    Une chose que j'ignorais et que vous avez mentionnée est l'existence d'une loi fédérale interdisant la transmission des dossiers médicaux via l'Internet.

+-

    M. David Bougher: Il existe une loi au niveau fédéral qui ne permet pas la délivrance d'ordonnance par voie électronique, mais je ne pourrais pas vous entretenir quant au détail de cette loi.

+-

    M. Rob Merrifield: Voyez-vous là un obstacle au progrès?

À  +-(1010)  

+-

    M. David Bougher Je pense que si les médecins pouvaient travailler en ligne, de sorte qu'il ne faille pas que les ordonnances soient écrites à la main, si cela pouvait être fait par voie électronique, cela présenterait un certain nombre d'avantages sur les plans exactitude des renseignements et interprétation.

+-

    M. Rob Merrifield: Et cela figure dans une loi fédérale.

+-

    M. David Bougher: Dans une loi fédérale.

+-

    M. Rob Merrifield: Je n'étais pas au courant, mais il s'agit certes là de quelque chose que le comité devrait examiner. Ce qui m'émerveille est que nous ayons une loi fédérale sur une chose qui est en train d'être élaborée et qui avance. Je comprends qu'il y ait eu des lois par le passé, mais on est en train de discuter de ceci en vue de pouvoir maîtriser la technologie au fil de notre progression en attendant que ces garanties soient mises en place. Peut-être que notre évolution a été telle...

+-

    La présidente: Merci, monsieur Merrifield.

    Madame Hinton.

+-

    Mme Betty Hinton: J'ai trouvé vos propos très intéressants. Certaines de vos déclarations m'ont quelque peu troublée. J'ignorais que l'on consacrait 18 milliards de dollars par an aux médicaments et que 36 p. 100 de ce total étaient payés par le public. C'est une somme considérable.

    Je vais simplement vous demander si, d'un point de vue professionnel, vous partagez ou non l'opinion suivante. Personnellement, je conviens avec vous que les antibiotiques ont un rôle très important à jouer, et je pense qu'ils ont sauvé énormément de vies, mais conviendriez-vous ou non que l'élément clé à côté duquel nous passons sans doute dans ce pays est la capacité des gens de renforcer leur système immunitaire afin d'être moins dépendants des médicaments sur ordonnance? D'après mon expérience, ce qui se passe avec le médicament sur ordonnance est que, bien qu'il fasse ce qu'il est censé faire, c'est-à-dire tuer une infection particulière, il n'a pas la capacité de choisir quelles infections tuer, alors il tue absolument tout et vous laisse exposé à la prochaine bactérie qui se présentera sur votre chemin. Êtes-vous d'accord avec moi là-dessus ou bien est-ce que je me trompe?

+-

    M. David Bougher: L'on est très préoccupé par l'utilisation appropriée des antibiotiques, car ils ne sont pas efficaces contre les virus, et diverses initiatives ont été lancées dans le pays. L'Alberta a eu son initiative « Do Bugs Need Drugs? », axée sur l'éducation. C'est un programme qui a été livré en salle de classe ainsi que chez des particuliers pour éduquer le public, pour lui expliquer qu'il ne faut pas prendre des antibiotiques chaque fois qu'on est malade. Je pense qu'il a réussi, car les statistiques que nous avons vues et que l'industrie a partagées avec nous indiquent que la consommation d'antibiotiques a sans doute reculé. C'est une des catégories de médicaments qui affichent un recul. Nous croyons que cela est positif, car ce qui nous soucie c'est le développement de résistance aux agents antimicrobiens et, comme vous l'avez dit, l'incidence générale de ces médicaments sur les patients. L'utilisation appropriée de ces médicaments est l'un des éléments clés dans tout ce dossier pharmaceutique.

+-

    Mme Betty Hinton: Je pense également—c'est un avis personnel et c'est une pratique qui est mienne—que le fait de se laver les mains est sans doute l'un des meilleurs moyens de prévenir les infections et vous n'avez alors pas besoin d'antibiotiques. Personnellement, cela fait 25 ans que je n'ai pas pris d'antibiotiques. Votre corps a la capacité de se remettre de beaucoup de choses sans avoir à recourir aux antibiotiques. Ce que j'ai moi-même observé c'est qu'il y a des enfants qui semblent se faire prescrire des médicaments sur ordonnance à un âge de plus en plus jeune, et ils finissent par être moins en santé lorsqu'ils atteignent l'âge de 10 ou 12 ans. Ai-je raison, ou bien, encore une fois, ne suis-je pas en train d'observer le bon groupe?

+-

    M. David Bougher: Je ne peux pas confirmer cela. Je ne peux pas dire sur la base de quelque travail de recherche si cela est vrai ou non. C'est peut-être le cas, mais je ne le sais pas.

+-

    Mme Betty Hinton: Merci.

+-

    La présidente: Monsieur Ménard.

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: Bonjour.

    J'ai trois courtes questions pour vous. Vous avez soulevé l'idée d'une nouvelle base de comparaison. Quand il y a un avis de conformité d'émis par Santé Canada, il y a évidemment une monographie clinique et on compare cette drogue de recherche avec un placebo. Il y a certains témoins qui pensent que cette comparaison ne devrait pas prendre cette forme. Selon eux, on devrait comparer la drogue de recherche avec un médicament déjà existant.

    Est-ce que vous êtes favorable à cette idée?

    Deuxièmement, je crois que l'Alberta a participé au groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur l'évaluation des causes du coût des médicaments. On nous donnait trois indicateurs de coût. Vous les connaissez: 50 p. 100, c'est l'augmentation; 18 p. 100, c'est l'idée que ce sont des médicaments qui ont très peu d'effets thérapeutiques nouveaux, etc.

    Est-ce que l'Alberta a fait elle-même des études spécifiques que vous pourriez partager avec nous sur les causes du coût des médicaments?

    Je n'ai pas très bien compris ce que vous avez dit au sujet des nouveaux médicaments génériques. Vous dites que vous vous inscrivez en Ontario en ce qui a trait aux remboursements. J'aimerais que vous reveniez là-dessus. Ce sont mes trois questions.

[Traduction]

+-

    M. David Bougher: Ce sont là trois excellentes questions. L'une de nos préoccupations quant aux essais cliniques est que l'on utilise des placebos aux fins de comparaison, et nous n'avons donc pas de bonnes normes de comparaison. Si un nouveau médicament est supérieur à un placebo, il peut être approuvé aux fins d'utilisation au Canada, tant et aussi longtemps qu'il est conforme aux normes en matière de sécurité. Des essais en confrontation directe, des essais comparant des médicaments à des produits existants, seraient nettement préférables et nous renseigneraient beaucoup mieux quant à la valeur apportée par les nouveaux produits. De tels essais sont coûteux, mais c'est vers cela qu'il nous faut tendre.

    Quant aux analyses des coûts des drogues et de différentes études, nous avons une assez bonne connaissance des facteurs inducteurs de coûts. Plusieurs catégories sont vers le haut de l'échelle, et dans certains de ces cas c'est une bonne chose, car les drogues à action hypotensive et ceux destinés à abaisser le niveau de cholestérol sont des produits importants et prisés. Dans d'autres cas, les drogues utilisées pour soigner des infections, les antibiotiques, ainsi que d'autres produits tels les inhibiteurs de la pompe à protons et des drogues comme le Losec, qui sont très efficaces... nous ne savons simplement pas si nous devrions payer pour ces genres de drogues, vu les quantités consommées. Il y a beaucoup de gens qui les prennent. Je ne pense pas qu'il ait été prévu qu'ils soient utilisés sur de longues périodes de temps. Nous savons donc quels sont les facteurs inducteurs de coûts. Le plus grand défi qui se présente aujourd'hui à nous est qu'il nous faut gérer de façon appropriée l'utilisation de ces produits, ciblant les patients qui vont en bénéficier le plus.

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: Sur les coûts, on ne s'entend pas. Par exemple, l'industrie pharmaceutique conteste les chiffres. On nous dit que c'est dans les deux années suivant l'introduction d'un médicament que les coûts augmentent et que seulement 10 p. 100 des nouveaux médicaments ayant des effets thérapeutiques nouveaux font l'objet d'un avis de conformité de Santé Canada. Ça, c'est contesté. Donc, on a des indicateurs sur les générateurs de coût, mais sur leur importance relative et absolue, on ne s'entend pas.

    Vous, comme ministère de la Santé, vous avez participé au groupe de travail fédéral-provincial-territorial, mais vous n'avez pas fait d'étude maison que vous pourriez déposer au comité. C'est ce que je comprends.

[Traduction]

+-

    M. David Bougher: Vous avez raison lorsque vous dites que les travaux fédéraux-provinciaux ont permis de cerner les générateurs de coûts, et des rapports sur ces résultats ont été diffusés par le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés. Ce sont là d'intéressants résultats qui sont à la disposition du public.

    Votre troisième question portait sur les médicaments génériques, et j'ai mentionné l'Ontario. L'Ontario fixe les prix de référence des médicaments génériques en exigeant que le coût de tout nouveau médicament arrivant sur le marché soit remboursé à 30 p. 100 de moins que le produit de marque. Cela n'est aucunement lié au coût, pour la compagnie manufacturière du produit générique, de la mise au point et de la production du médicament, alors il nous faut trouver des moyens originaux autres que d'encourager l'Ontario à exiger dans la loi 40 p. 100...

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: Pourquoi est-ce l'Ontario? C'est la première fois que j'entends cela et j'aimerais qu'on fasse des recherches là-dessus. Je ne sais pas si mes collègues le savaient. Vous dites que pour les médicaments génériques, les provinces comme la vôtre, l'Alberta, se basent sur le prix déterminé par l'Ontario. Pourquoi est-ce l'Ontario, et comment cela se fait-il? J'aimerais comprendre davantage.

[Traduction]

+-

    M. David Bougher: L'approche de l'Ontario est très réglementée s'agissant de la façon dont les décisions sont prises relativement à la couverture offerte en vertu des programmes de médicaments. De fait, les médicaments passent par le système tout entier et je pense qu'il faut que l'approbation vienne du palier le plus élevé à l'intérieur du gouvernement ontarien. L'Ontario est donc à une extrémité du spectre pour ce qui est de l'approbation requise. La situation est très réglementée et est prescrite par la loi. Si vous déménagez en Colombie-Britannique, c'est à toutes fins pratiques l'inverse. Les décisions sont prises à l'intérieur du ministère à moins qu'il ne s'agisse d'un médicament à coût très élevé, auquel cas il faudrait que cela passe par les gens aux finances. Je pense qu'il y a à l'échelle du pays des variations dans la façon dont sont traités les nouveaux produits et dans les règles régissant leur paiement par le biais des programmes publics de médicaments.

+-

    La présidente: Merci, monsieur Ménard.

    Madame Fry.

+-

    L'hon. Hedy Fry (Vancouver-Centre, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.

    J'aimerais vous remercier de votre excellente présentation. Vous avez très bien couvert tous les aspects. La question que vous avez soulevée et qui m'intéresse vraiment en est une dont nous ont parlé toutes les personnes à qui j'ai en tout cas posé la question. J'espère que j'obtiendrai une réponse un jour. Je veux parler des analyses coûts-avantages, et vous en avez fait état. Vous avez dit qu'il importe de déterminer l'augmentation du coût des médicaments et qu'il y a la question des bienfaits qui font baisser d'autres coûts. On me dit qu'il ne s'est jusqu'ici pas fait de travail là-dessus et que le travail réalisé aux États-Unis n'a pas été mené de façon à vraiment cerner le rapport coûts-avantages. Le travail fait jusqu'ici traite dans une certaine mesure de l'aspect coût-efficacité, mais on ne serait pas en train de faire la bonne analyse. Je suis donc heureuse que vous ayez mentionné cela.

    L'autre aspect qui m'intéresse est une chose à laquelle je reviens sans cesse : la surveillance post-mise en marché. Faites-vous ici en tant que gouvernement de la surveillance après-vente et, dans l'affirmative, car je sais que sont en jeu ici des domaines de compétence provinciaux, territoriaux et fédéraux, verriez-vous les différents paliers de gouvernement s'unir pour collaborer à des initiatives de surveillance post-mise en marché? Pensez-vous qu'il devrait être obligatoire pour les médecins, les infirmières et les pharmaciens de rapporter les cas d'effets indésirables?

À  +-(1015)  

+-

    M. David Bougher: Pour répondre tout d'abord à votre deuxième question, c'est le gouvernement fédéral qui est responsable de la surveillance post-approbation, et il s'agit d'une approche relativement passive, d'une approche volontaire en matière de divulgation d'événements indésirables. Santé Canada a créé une direction des produits de santé commercialisés avec laquelle nous envisageons avec plaisir de travailler en vue de renforcer ce rôle et la déclaration d'événements indésirables. J'ignore dans quelle mesure il sera possible de mettre en oeuvre un mécanisme obligatoire. Je pense qu'il nous faut offrir les bons incitatifs et les bons systèmes, ce afin d'encourager la fourniture de rapports beaucoup plus complets sur les événements malencontreux. Je pense que ce sera là une stratégie essentielle pour l'avenir. Il importe que cela se fasse en collaboration avec les provinces et les territoires ainsi qu'avec le gouvernement fédéral.

    Si vous permettez que je revienne un instant sur la question de l'après-commercialisation, nous appelons cela vigilance pharmaceutique et surveillance pharmaceutique pour les nouveaux agents biologiques. Santé Canada participe à cette étude de recherche. Nous estimons que Santé Canada devrait jouer un plus grand rôle de leader en la matière au pays, et nous l'y encourageons. Je pense que le ministère compte assumer plus activement ce rôle.

+-

    Mme Hedy Fry: Il me semble que s'il y a une incidence de morbidité très élevée, ce qui coûte au système de soins de santé—et l'on parle maintenant de facteurs de coûts imputables aux réactions aux médicaments—il serait presque essentiel d'avoir un système de rapport qui dise que l'on sait quelle est l'incidence de morbidité par suite de l'utilisation de tel ou tel médicament.

    J'aimerais poser deux questions. Mme Hinton a parlé plus tôt du remplissage d'ordonnance transfrontalier par voie électronique. J'ai exercé comme médecin en Colombie-Britannique pendant 23 ans. Je ne pouvais pas établir d'ordonnance pour un ami en Alberta. Dans ce pays, l'on ne peut pas franchir à cette fin les frontières entre les provinces. Comment se fait-il donc qu'un médecin aux États-Unis puisse délivrer une ordonnance qui soit valide ici au Canada? Y a-t-il des règles gouvernant les pharmaciens? Les collèges de pharmaciens ont-ils des règles? Cela relève-t-il de quelque autorité? Cela me semble être une chose bien étrange. Il me semble que c'est également de la mauvaise médecine, si je puis me permettre de le dire. C'est le patient qui paiera en bout de ligne, non pas avec des dollars mais avec toutes sortes de réactions et de problèmes, ne sachant pas exactement ce qui ne va pas et en l'absence de tout suivi ici. Quelle est la responsabilité du pharmacien qui exécuterait une telle ordonnance pour une personne se trouvant dans un pays tout à fait différent? Voilà la première question.

    Ma deuxième question est la suivante : l'Alberta paie-t-elle pour l'accès aux médicaments utilisés pour soigner le VIH/sida et à certains des nouveaux médicaments?

À  +-(1020)  

+-

    M. David Bougher: C'est là une question simple. Oui, nous couvrons les médicaments pour le VIH, comme nous couvrons ceux utilisés pour soigner diverses maladies bien particulières, ainsi que pour les patients ayant subi des greffes d'organes ou souffrant du cancer. Nous ne couvrons pas cela par l'entremise de notre programme de médicaments public, mais bien par l'intermédiaire de services spécialisés qui relèvent de deux des principaux régimes de soins de santé.

    En ce qui concerne le magasinage transfrontalier, les pouvoirs publics sont préoccupés par ce qui se passe. Je dirais cependant que ce sont les organes de réglementation de la pharmacie et de la médecine qui ont pour responsabilité de veiller au respect des normes. Nous hésiterions par exemple à commencer à dire au Collège des médecins et chirurgiens comment celui-ci doit faire son travail. Nous sommes néanmoins très intéressés par ce qui se passe.

    En réponse à votre question au sujet de l'autorisation de la délivrance d'ordonnances, d'après ce que j'ai compris, il existe au Canada deux filières pour que de telles ordonnances soient reconnues légales au Canada. Dans un cas, il y a un petit nombre de médecins aux États-Unis qui détiennent deux licences d'exercice de la médecine et qui sont en fait autorisés à exercer dans une région du Canada. Il y a une compagnie en particulier qui exploite ce créneau. Je pense que l'autre moyen c'est d'obtenir qu'une ordonnance soit contre-signée, d'avoir dans la région concernée du Canada un processus qui permette de valider l'ordonnance ou qui prévoie l'autorisation de l'exécution de l'ordonnance.

+-

    La présidente: Merci, docteur Fry.

    Monsieur Thompson.

+-

    M. Greg Thompson: Merci, madame la présidente.

    Certains des chiffres que vous avez mentionnés n'étonnent pas plusieurs d'entre nous. Vous parlez des 18 milliards de dollars dépensés chaque année. L'une des choses qui nous fait peur, bien que nous sachions ce qui est arrivé, c'est que vous parlez d'une augmentation moyenne de 17 p. 100 au cours des dernières années, et cette croissance est exponentielle. Où cela va-t-il s'arrêter? Nous avons discuté de solutions possibles à ce problème de prix. Vous dites qu'elles ne peuvent pas être simplistes. En d'autres termes, il s'agit d'une équation très compliquée à résoudre. Vous ne pouvez pas identifier un domaine et dire qu'une seule chose réglera la situation.

    Vous avez ensuite parlé de l'innovation au sein de l'industrie—de certaines des choses qui pourraient arriver à différents niveaux. Vous avez mentionné l'industrie pharmaceutique. Je pense vous avoir entendu dire qu'elle agit de façon plutôt responsable. Je vous paraphrase bien sûr; ce n'est pas une citation exacte. Mais vous parliez du fait que les entreprises pharmaceutiques sont redevables à leurs actionnaires en ce sens qu'elles doivent bien faire parce qu'elles leur doivent des comptes. Je devine que vous entendez par là que c'est une bonne chose, et je ne dis pas le contraire.

    Reste à savoir si cela est lié à la protection des brevets, si les compagnies pharmaceutiques sont redevables à leurs actionnaires sur le dos d'un grand nombre de personnes—je veux parler des 20 années de protection qu'on leur accorde.

    Vous avez parlé des prix des médicaments. Vous n'avez pas parlé des médicaments brevetés, mais vous avez mentionné les médicaments génériques. Vous n'avez pas fait état du monopole exercé dans ce pays par deux grosses compagnies productrices de médicaments génériques. Y a-t-il, si vous voulez, participation croisée du côté des compagnies pharmaceutiques et des pharmacies? C'est une question à laquelle j'ignore la réponse.

    Quoi qu'il en soit, vous parlez d'innovation, de systèmes de prestation différents, et ainsi de suite. Je reviens encore à la question de l'offre de solutions simples, et il ne semble pas qu'il y en ait. Nous voulons une solution.

    L'une des choses que vous avez également mentionnées était l'aspect sécurité et efficacité des médicaments. Vous dites qu'il n'y a pas là de problème, et je pense que je serais d'accord avec vous là-dessus, pour ce qui est du tableau d'ensemble. Mais vous dites qu'il y a un problème quant à la façon dont ces produits sont utilisés dans le monde réel. Je pense que la plupart d'entre nous serions d'accord avec vous là-dessus également.

    Je vous ai soumis là une vaste gamme de commentaires, monsieur Bougher. Je vous invite à prendre la parole pour peut-être réagir à certains d'entre eux.

À  +-(1025)  

+-

    M. David Bougher: Merci.

    Mon premier commentaire serait que je ne suis au courant d'aucune relation de propriété entre compagnies pharmaceutiques génériques et pharmacies, bien que nous sachions que certaines des compagnies pharmaceutiques génériques ont des arrangements spéciaux avec des pharmacies, et des remises sont vraisemblablement proposées aux pharmaciens, mais nous n'avons aucun moyen de le savoir ou de le déterminer. C'est là l'un de nos vrais dilemmes.

    Nous avons fait les choses simples relativement aux coûts de gestion, aux médicaments génériques, à la pharmacopée. Nous avons maintenant un défi énorme à relever relativement aux coûts. Comme je l'ai dit plus tôt, peut-être que nous dépensons suffisamment d'argent. Peut-être que nos dépenses se situent au bon niveau. Simplement, nous ne savons pas quelle valeur nous obtenons, et c'est une chose qu'il nous faut mesurer. Il nous faut faire des études post-mise en marché sur l'aspect coût-efficacité, l'aspect coût-avantages pour savoir dans quelle mesure ces produits sont rentables. Nous savons qu'ils bénéficient à un très grand nombre de personnes.

+-

    M. Greg Thompson: Je ne veux pas vous faire vous écarter du sujet ici, mais je suis intrigué par les fabricants de médicaments génériques. Les fabricants de médicaments, que ceux-ci soient brevetés ou non, sont bien sûr très internationaux. Ils ne connaissent aucune frontière, si vous voulez, s'agissant d'investissement et du mouvement d'argent outre-frontière et ainsi de suite. Il me semble qu'il y a en gros dans ce pays deux fabricants de médicaments génériques qui exercent un monopole. Pourquoi cet influx de médicaments génériques bon marché aux États-Unis coule-t-il dans le sens que l'on sait? Nos médicaments brevetés meilleur marché partent dans ce sens-là, mais il ne semble pas qu'il y ait de commerce transfrontalier du côté des produits génériques.

+-

    M. David Bougher: Je ne suis pas sûr, sinon que le marché au Canada est relativement restreint et qu'il existe probablement quelques restrictions pour ce qui est de l'importation de médicaments génériques au Canada. Nous n'avons pas fait d'enquête sur la viabilité de cela. Mais les prix des médicaments génériques aux États-Unis sont extrêmement variables aussi. Je suppose que l'une des stratégies à envisager serait d'explorer quels médicaments sont disponibles aux États-Unis. Je pense qu'il existe quelques lois qui empêchent l'entrée de médicaments génériques au Canada et qui causent des problèmes chez nous.

+-

    La présidente: Merci, monsieur Thompson.

    Monsieur Castonguay.

[Français]

+-

    M. Jeannot Castonguay (Madawaska—Restigouche, Lib.): Merci, madame la présidente.

    Merci pour votre présentation. À quelques reprises, vous avez mentionné l'importance d'une collaboration nationale entre les divers intervenants, entre les diverses régions du pays.

    Pourriez-vous élaborer un peu et nous donner quelques exemples pratiques de choses qui pourraient être faites dans l'immédiat pour favoriser ou encore pour actualiser ce genre de collaboration nationale? Selon vous, quel serait le rôle du gouvernement fédéral à cette fin?

[Traduction]

+-

    M. David Bougher: Beaucoup a déjà été accompli au niveau national jusqu'à présent et il existe quelques initiatives déjà mises au point. Il en est une en particulier que l'on appelle « l'initiative des meilleures pratiques », qui établit un centre d'information et un système de partage des renseignements à l'échelle nationale sur ce qui donne de bons résultats dans d'autres régions du pays. Le gouvernement fédéral a effectivement engagé des ressources considérables pour les prochaines années en vue de la réalisation de cette initiative et ce budget sera soumis à l'aval des sous-ministres en décembre.

    Il existe ainsi une collaboration étroite entre les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral relativement aux produits pharmaceutiques. La gestion des produits pharmaceutiques représente une initiative clé produisant ce que j'estime être quelques résultats positifs en vue de ce qui a été accompli déjà et nous en sommes satisfaits.

[Français]

+-

    M. Jeannot Castonguay: Si je comprends bien, vous dites qu'au ministère, ce sont des choses qui se font déjà. Vous avez quand même mentionné à quelques reprises l'importance d'une plus grande collaboration.

    Est-ce que vous pouvez nous suggérer d'autres éléments auxquels on devrait s'attaquer pour améliorer la livraison du service et avoir un meilleur retour sur notre investissement?

À  +-(1030)  

[Traduction]

+-

    M. David Bougher: Je n'ai pas d'exemples supplémentaires que je puisse vous donner sur des mesures actuellement en cours. J'ai mentionné le système d'information nationale sur la consommation de médicaments sur ordonnance et l'initiative des meilleures pratiques. Je pense que le domaine de la surveillance après mise en marché en est un où nous attendons que le gouvernement fédéral joue un rôle de premier plan, pour ce qui est de la coordination et de la mise en oeuvre d'initiatives.

    Tout le domaine de la gestion des produits pharmaceutiques a fait l'objet d'une forte activité et nous avons exploré autant de perspectives que possible pour le gouvernement fédéral. Je suppose que le rôle de Santé Canada est un sujet qui revient sur le tapis à intervalles réguliers s'agissant de déterminer son rôle de réglementation; il y a, par exemple, la déclaration d'interchangeabilité, pour ce qui est des médicaments génériques. Ce sont là des questions qui échappaient jusqu'à présent au gouvernement fédéral et qui n'ont pas été activement examinées.

+-

    La présidente: Merci, monsieur Castonguay.

    Madame Bennett.

+-

    Mme Carolyn Bennett: Merci.

    J'aimerais revenir sur la question de la collaboration nationale ou pancanadienne dans les domaines qui mettent en jeu le ministère de la Santé, s'agissant de déterminer qui doit payer quoi et quels traitements sont appropriés.

    Vous vous souviendrez qu'il y avait dans le rapport Romanow une recommandation prévoyant une agence des médicaments indépendante. Pensez-vous que cela aiderait à régler certains des problèmes, avec peut-être l'établissement d'un formulaire commun en vue d'une surveillance après mise en marché, de telle façon que les provinces puissent collaborer avec le gouvernement fédéral en tant que partenaires égaux? Quelle serait la structure de reddition de comptes aux Canadiens avec un tel organisme, et quels en seraient les avantages et inconvénients?

    Ma première question est de savoir si, dans l'éventualité d'une mise en oeuvre en l'espace d'un an, la totalité des Albertains se verraient attribuer un dossier médical électronique?

+-

    M. David Bougher: Non. La participation est volontaire mais il y aura beaucoup d'incitations et d'encouragements pour les praticiens à participer à un système de dossiers médicaux électroniques.

    S'agissant d'une agence nationale, ce n'est pas là un concept nouveau. C'est une bonne idée en théorie, présentant quantité d'avantages. Mais une bonne part du travail qui serait accompli ou des fonctions qui seraient celles de l'agence sont actuellement exécutées par l'Office canadien de coordination de l'évaluation des technologies de la santé, ou OCCETS. Je pense que c'est la taille de cet organisme qui fait un peu peur puisqu'il lui faudra rassembler et coordonner tous ces éléments. Je ne sais pas dans quelle mesure l'idée fait l'objet d'un examen serré. Manifestement, je ne sais pas ce qu'il en est du côté fédéral. Actuellement, différentes organisations s'occupent de divers éléments.

    Si l'on envisage un formulaire national, cela va contrecarrer les priorités des provinces et territoires individuels pour ce qui est de la couverture. Je ne sais pas trop, mais si l'on va passer à un régime d'assurance-médicaments, c'est le genre de chose sur lequel il sera difficile de s'entendre.

+-

    Mme Carolyn Bennett: Je suppose que nous espérions que l'on commencerait à faire certaines choses en commun, un peu de la même façon que le nouveau formulaire a commencé à se constituer, de telle façon que l'on partage l'information et évite de tout refaire treize fois d'affilée, n'est-ce pas? Il y aurait ainsi une base de données commune qui serait beaucoup plus rentable et, s'agissant de certaines des questions que l'on se pose, les provinces n'auraient pas chacune à refaire le même travail. Si vous, en Alberta, avez fait un excellent travail dans un domaine, toutes les autres provinces ne seraient pas obligées de le refaire pour elles-mêmes.

+-

    M. David Bougher: C'est juste et l'objectif de l'examen commun des médicaments mis en place par l'OCCETS est justement de faire ce travail, de recueillir et de partager l'information et d'avoir un seul comité national qui se pencherait sur les données touchant les médicaments et qui puisse formuler des recommandations aux régimes d'assurance-médicaments à travers le pays quant aux médicaments qui offrent la meilleure valeur.

+-

    Mme Carolyn Bennett: Comment avez-vous appelé cela?

+-

    M. David Bougher: L'examen commun des médicaments. Les ministres ont annoncé récemment la création d'un Comité consultatif canadien d'experts sur les médicaments, composé de représentants de tout le pays, pour remplir cette fonction.

À  +-(1055)  

+-

    La présidente: Merci, madame Bennett.

    Au nom des membres du comité, je vous remercie, monsieur Bougher, d'être venu comparaître à titre de représentant du gouvernement de l'Alberta pour la suite de nos délibérations. Merci beaucoup.

    Mesdames et messieurs, avant de faire une petite pause, j'aimerais que vous me fassiez part, peut-être juste après le déjeuner de vos intentions concernant la journée de demain. Je crois savoir que certains membres pourraient devoir rentrer précipitamment à Ottawa. J'aimerais savoir qui sera présent demain et jeudi et je vous serais très reconnaissant de me faire part de vos intentions.

    Nous allons suspendre la séance quelques courts instants.

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    La présidente: Nous reprenons les travaux, mesdames et messieurs.

    Je souhaite la bienvenue à nos nouveaux témoins, qui représentent l'Alberta College of Pharmacists et l'Association canadienne des chaînes de pharmacie. Nous allons commencer avec le College of Pharmacists dont le représentant est son registraire, M. Greg Eberhart.

    Monsieur Eberhart.

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    M. Greg Eberhart (régistraire, Alberta College of Pharmacists): Merci, et bonjour à vous, membres du comité. Je suis heureux de cette invitation à intervenir lors de vos délibérations sur le coût et l'utilisation des médicaments au Canada, lesquelles viennent à point nommé.

    Je suis Greg Eberhart et je suis le registraire de l'Alberta College of Pharmacists. Nous sommes responsables de la réglementation des pharmaciens, des pharmacies et du contrôle des médicaments dans la province de l'Alberta. Nous avons comme adhérents plus de 3 100 pharmaciens qui exercent dans plus de 800 pharmacies communautaires et dans environ 150 institutions publiques. Notre mandat met l'accent sur la protection du public et sur l'usage sûr et efficace des médicaments grâce à une pratique pharmaceutique de qualité.

    J'aimerais traiter ce matin de trois questions énoncées dans votre lettre d'invitation, à savoir la surveillance des effets néfastes et des pratiques de prescription, la publicité s'adressant directement aux consommateurs, et les comparaisons internationales. Je prendrai la liberté de traiter de ces questions dans l'ordre inverse.

    Le prix des médicaments brevetés au Canada, à notre avis, se situe à peu près à la moyenne des pays étrangers. Le prix de nombreux médicaments génériques au Canada est sensiblement inférieur à ce qu'il est chez nos voisins américains. La politique du gouvernement américain, les prix des médicaments et les taux de change favorables ont amené les consommateurs américains à acheter des médicaments sur ordonnance au Canada. C'est là un problème qui concerne conjointement les ordres de médecins, les ordres des pharmaciens, les gouvernements provinciaux et le ministère fédéral de la Santé.

    Il n'est pas du rôle de notre ordre des pharmaciens de nous pencher sur les considérations économiques ni sur l'offre et la demande de produits pharmaceutiques. Cependant, nous ne manquons pas de porter à l'attention des autorités compétentes l'information sur ces tendances. L'on nous a fait savoir que la vente aux États-Unis de médicaments homologués au Canada pourrait nuire à la disponibilité de ces produits au Canada. On nous a indiqué en outre que cette industrie émergente pèse sur la disponibilité de pharmaciens au service des Canadiens dans certaines régions. En outre, d'aucuns considèrent que si ces tendances se maintiennent, le coût et la disponibilité de certains médicaments sur ordonnance au Canada pourraient s'en ressentir.

    En réaction à des problèmes similaires, le gouvernement néo-zélandais a promulgué une législation afin de contrôler l'exportation de produits pharmaceutiques homologués pour la vente en Nouvelle-Zélande. En dépit de ces facteurs, notre préoccupation première en tant qu'ordre est que les pharmacies répondant à cette demande fonctionnent dans un environnement quasi non réglementé. La juridiction n'est pas claire.

    La gouvernance de la conduite professionnelle est un privilège conféré par les gouvernements provinciaux aux ordres individuels comme le nôtre et ne prévoit pas la réglementation de ces pratiques dans la sphère internationale. Les instances de réglementation provinciales dans le domaine pharmaceutique n'ont compétence qu'à l'intérieur du Canada et des provinces et n'ont donc pas juridiquement la faculté, pas plus que les ressources, pour mener des enquêtes à l'échelle internationale.

    L'emploi de pathologies électroniques qui facilitent la prestation des soins de santé ne connaît pas les frontières. Il en résulte quantité de conflits juridictionnels.

    J'attire votre attention sur un rapport qui soit a été publié tout récemment soit le sera très prochainement, couvrant les initiatives nationales relatives aux systèmes de télémédecine et les lignes directrices en la matière. Je vous renvoie plus particulièrement à la section 6.2.6 qui traite de la télémédecine à l'échelle mondiale et internationale. Parmi les recommandations, le rapport préconise que les ministères fédéraux et provinciaux de la Santé collaborent avec les autorités internationales compétentes en vue de négocier des accords internationaux de façon à établir des mécanismes de réglementation capables de protéger le public et d'assurer une reddition de comptes.

    En conclusion, j'aimerais vous adresser les recommandations suivantes. Premièrement, que le ministre fédéral de la Santé se concerte avec les autorités fédérales et provinciales afin de déterminer l'effet potentiel à long terme sur le système de santé canadien de la vente transfrontalière de médicaments sur ordonnance.

    Deuxièmement, dans la mesure où les politiques fédérales et provinciales continuent à interdire la vente et la distribution internationale de produits pharmaceutiques homologués au Canada, des négociations devraient être ouvertes avec les autorités internationales en vue de conclure les accords nécessaires à la clarification des champs de compétence et à la protection des consommateurs.

    J'aimerais ensuite aborder la question de la publicité directe visant les consommateurs. Encore une fois, ce débat intervient en temps utile car le sujet est d'actualité chez nos voisins étrangers. Notre ordre juge l'information des consommateurs importante et se prononce en faveur du choix des consommateurs. Ce sont là les pierres angulaires, axées sur le malade plutôt que sur les prestateurs de soins, mises en lumière et dans le rapport Romanow et dans le rapport Kirby.

Á  +-(1100)  

    La publicité ciblant directement le consommateur fait appel à une diversité de médias, y compris l'emballage et l'étiquetage, bien que ce dernier aspect soit souvent négligé. Pour être informé le consommateur a besoin de renseignements accessibles, objectifs, équilibrés, sous une forme compréhensible et impartiale. La publicité ciblant directement le consommateur est typiquement concentrée sur le produit et présente rarement ces qualités. Souvent, elle met en scène des modes de vie malsains comme moyen de créer une demande pour le produit promu.

    Ma recommandation au comité est que Santé Canada élabore des stratégies nouvelles afin de mieux contrôler la publicité directe et garantir qu'elle soit équilibrée, objective et impartiale. La publicité directe ne doit pas être autorisée à encourager des modes de vie malsains.

    Enfin, j'aimerais traiter du suivi des effets indésirables et des pratiques de prescription, en commençant par le premier sujet.

    Le suivi des effets indésirables est une sous-composante de l'énorme processus d'homologation et de contrôle des médicaments et constitue une responsabilité fédérale. Ce processus peut être amélioré au moyen de technologies intégrées. Les fournisseurs de services de santé devraient pouvoir faire rapport en ligne ou bien accéder facilement en ligne à une information actualisée. Les renseignements doivent être présentés de manière claire et pratique. Encore une fois, ma recommandation est que Santé Canada rende plus accessible et plus maniable le mécanisme de rapports sur les effets néfastes des médicaments au moyen de technologies informatiques intégrées. Il sera ainsi possible à l'avenir de faciliter les choses aux praticiens au fur et à mesure que nos provinces se dotent de systèmes de santé intégrés.

    Le contrôle des pratiques de prescription est du ressort surtout provincial mais des partenaires fédéraux-provinciaux-territoriaux sont nécessaires pour promouvoir des approches factuelles. Nous applaudissons les subventions fédérales récemment accordées à l'appui d'initiatives pour la promotion de la sécurité des patients.

    Le volet contrôle des pratiques de prescription exige des stratégies à long terme coûteuses en temps et en ressources. Le contrôle doit déboucher sur des interventions et représente un processus de gestion du changement. L'intervention doit être éducative chaque fois que possible. L'accent doit être mis sur le bon usage des médicaments, et pas seulement sur les pratiques de prescription.

    Je recommande que Santé Canada fournisse un soutien continu au moyen d'initiatives pancanadiennes afin de promouvoir le bon usage des médicaments et la sécurité des patients grâce aux meilleures pratiques et à la médecine factuelle.

    Je serais ravi de répondre aux questions que vous pourriez avoir.

Á  +-(1105)  

+-

    La présidente: Merci, monsieur Eberhart.

    Notre deuxième intervenante représente l'Association canadienne des chaînes de pharmacies; elle en est la vice-présidente chargée des affaires publiques. Elle sera secondée par le directeur des affaires gouvernementales et réglementaires, M. Jeff May.

    Madame Turik.

+-

    Mme Lori Turik (vice-présidente, politiques, Association canadienne des chaînes de pharmacies): Madame la présidente, membres du comité, merci beaucoup de cette invitation à comparaître devant vous sur un sujet de si haute importance pour les Canadiens.

    L'Association canadienne des chaînes de pharmacies est une associations nationale représentant 22 chaînes de pharmacies au détail. Nous représentons les chaînes de pharmacies conventionnelles, ainsi que des chaînes de magasins d'alimentation avec comptoir pharmaceutique. À eux tous, nos membres exploitent plus de 60 p. 100 des pharmacies du Canada. Nos membres sont actifs dans tout le pays et remplissent près de 75 p. 100 des ordonnances au Canada chaque année.

    Chaque jour, plus de huit millions de Canadiens se rendent dans une pharmacie. Cela ouvre d'énormes possibilités qui restent inexploitées, à notre sens, dans notre système de santé actuel car les interactions entre pharmaciens et pharmacies et le patient ne sont pas intégrées dans le système de santé autant qu'elles pourraient l'être.

    En sus de toucher près de huit millions de Canadiens par jour, nous employons également plus de 80 000 personnes, et en particulier 60 p. 100 des pharmaciens actifs au Canada.

    Il existe au Canada une tendance pour les pouvoirs publics, à notre avis, d'examiner isolément l'augmentation des frais de médicaments, de les considérer dans un silo, au lieu d'aborder le problème selon une perspective large, à l'échelle de tout le système, c'est-à-dire en considérant le rapport coût-avantage des médicaments au niveau des systèmes et l'effet qu'ils peuvent avoir sur la santé et le bien-être des Canadiens aujourd'hui, avec notamment la possibilité qu'ils réduisent le besoin de services de santé plus coûteux et donc allègent les pressions extrêmes qui s'exercent sur la disponibilité limitée de professionnels de la santé. Comme on l'a déjà préconisé aujourd'hui, nous aussi serions certes en faveur de recherches plus poussées à cet égard.

    Il existe une interrelation claire entre pharmacies, pharmaciens et fabricants de produits pharmaceutiques. Outre l'interrelation entre les fabricants des produits, tant ceux de marque que génériques, il existe une interrelation avec toute la chaîne d'approvisionnement. À l'évidence, toute modification de la réglementation ou de la tarification a des effets directs et délibérés sur les pharmacies, les pharmaciens et, surtout, sur les soins fournis aux citoyens canadiens. Il est donc très important que le comité réfléchisse à la tarification des médicaments et aux règlements mis en place dans le domaine de la distribution selon cette perspective.

    On peut faire l'analogie à cet égard avec un caillou jeté dans la mare, qui produit des ronds dans l'eau qui se répercutent sur l'environnement de la mare elle-même, sur les êtres qui dépendent de la mare, mais aussi sur le rivage. De fait, on pourrait dire que ce que vous faites ici aujourd'hui consiste à examiner les choses selon le contexte plus large de l'écosystème en général.

    Nous pouvons tous convenir que les médicaments sont essentiels à la santé et, lorsque ils sont correctement utilisés, ces thérapies sauvent des vies, réduisent des invalidités et améliorent la qualité de vie des citoyens canadiens. Ils ne contribuent pas seulement à la santé de notre société, mais aussi à celle de toute notre économie.

    Le coût des médicaments, je pense que nous pouvons en convenir, n'a cessé d'aller en augmentant, et c'est le résultat de notre vieillissement démographique et de l'apparition de nouveaux produits qui sont plus coûteux et plus complexes, tels que les produits biologiques. Nous pouvons également convenir que les médicaments représentent un élément essentiel de notre système de santé actuel, un élément qu'il faut examiner non seulement sous l'angle de ses avantages, mais également du point de vue de la possibilité de maximiser l'utilité des médicaments pour nos citoyens et de retirer le meilleur rendement de notre investissement.

    Pour ce qui est du travail du comité, le message que nous voulons transmettre principalement et spécifiquement est que le gouvernement fédéral détient la clé. C'est lui qui détient la clé des solutions, s'agissant du mécanisme d'homologation et des effets qui en résultent sur le coût des médicaments. Il détient la clé du cadre réglementaire, lequel se répercute sur les modes d'accès aux médicaments et leur distribution aux citoyens. Il détient la clé de l'investissement dans la recherche et la technologie informatique dont sont tributaires les pharmaciens, les médecins et les patients eux-mêmes.

    Le gouvernement a investi très lourdement dans des domaines tels que la réforme des soins primaires et les pharmaciens peuvent et devraient jouer un rôle plus important dans cette initiative. Le gouvernement détient également la clé du soutien à l'innovation, la clé de la recherche ainsi que de la disponibilité de ressources humaines dans les professions de la santé. Tous ces facteurs ont des effets réels sur les citoyens canadiens.

    Jeff traitera de la manière dont les pharmacies et les pharmaciens peuvent être intégrés beaucoup plus efficacement dans le système de manière à améliorer le rendement sur l'investissement et réduire les gaspillages de façon générale.

+-

    M. Jeffrey May (directeur, affaires gouvernementales et réglementaires, Association canadienne des chaînes de pharmacies): Merci, Lori.

    Merci beaucoup de l'invitation à nous entretenir avec vous aujourd'hui.

    De façon générale, il y a lieu d'examiner les pharmacies et les services de gestion de l'utilisation des médicaments tels que les programmes d'observation, le suivi des résultats des médicaments et des interactions entre médicaments, et les pratiques de prescription des médecins. Tous ces aspects ne sont pas pleinement intégrés dans notre système de santé primaire. Qui plus est, les régimes d'assurance publics et privés qui paient pour les ordonnances et services de pharmaciens ne reconnaissent pas ou ne rémunèrent pas ces services professionnels. Les professionnels de la santé et les patients ne tirent pas pleinement partie des services des pharmaciens.

    Un sondage commandé par la CACDS à POLLARA et qui sera prochainement publié indique que seul 40 p. 100 des Canadiens utilisent les services traditionnels des pharmaciens, tels que les avis sur les médicaments, les interactions entre eux et leurs effets secondaires. Il y a là une occasion majeure de mieux sensibiliser au rôle des pharmaciens et nous devons créer au Canada un environnement qui promeut et facilite l'accès à ces services gratuits.

    Nous pensons que trois mesures primordiales s'imposent si l'on veut utiliser de façon optimale les services des pharmacies aux fins de la gestion de la consommation de médicaments, et par ce biais de la promotion de la santé et du bien-être.

    Premièrement, il faut mettre en place un cadre pour les services pharmaceutiques qui définisse clairement quels services les pharmaciens fournissent, qui maximise la portée actuelle de leurs pratiques et l'assortisse de normes cohérentes et qui optimise leur interaction avec d'autres fournisseurs de soins de santé.

    Deuxièmement, il faut améliorer l'échange d'information entre prestateurs de soins, de même qu'avec les pouvoirs publics et les responsables des politiques, en vue de suivre et d'évaluer les réactions des patients aux médicaments.

    Troisièmement, il faut instaurer un environnement sanitaire propre à promouvoir et à faciliter l'accès à ces services.

    Au sein de l'Association canadienne des chaînes de pharmacies et de notre comité pharmaceutique nous avons rédigé un livre blanc sur l'intégration des services pharmaceutiques dans les soins primaires, document que nous remettrons bien volontiers au comité.

    Nous avons cherché à sensibiliser les responsables politiques à ce rôle et nous mettons au point des programmes pilotes et des initiatives afin de démontrer les avantages de ce service intégré comme élément de la réforme des soins primaires, mettant l'accent sur la gestion de la consommation de médicaments, la collaboration et le partage d'information. Le financement fédéral de l'innovation en matière de soins primaires doit être explicitement ciblé vers l'intégration des services de pharmacie dans les soins primaires, en focalisant sur une bonne gestion de la consommation de médicaments.

    Comme je l'ai indiqué, une plus grande collaboration et un meilleur partage de l'information s'imposent pour ce qui est du mésusage et de l'abus des médicaments, ainsi que de la dépendance et du bon usage des médicaments. Il s'agit de déceler et d'atténuer l'usage abusif et la dépendance et de promouvoir une meilleure prise de décisions et un meilleur contrôle au niveau des professionnels de la santé. Le recours à l'informatique et aux dossiers médicaux électroniques faciliterait cet échange, réduirait le coût humain du mésusage, de l'abus et de la dépendance, favoriserait le développement des technologies informatiques et la mise en place de cadres réglementaires autorisant les pharmaciens et d'autres soignants à accéder aux dossiers pharmaceutiques complets des patients et permettrait de déceler les tendances inhabituelles de consommation de médicaments et de repérer le mésusage ou l'abus.

    Les pharmacies communautaires utilisent déjà les dossiers pharmaceutiques électroniques contenant des renseignements exhaustifs sur les médicaments que prennent les patients. Ces systèmes sont actuellement reliés à tous les régimes d'assurance-médicaments provinciaux et territoriaux de même que privés. Les chaînes de pharmacies de tout le pays ont le savoir et l'expérience voulus sur le plan de l'utilisation des réseaux d'information sanitaire aux fins des décisions de remboursement, du contrôle de l'utilisation et de la gestion des médicaments et, combinés avec l'infrastructure informatique des pharmacies communautaires, ces attributs peuvent servir de fondement à la création de dossiers médicaux électroniques.

    L'expérience faite avec les dossiers électroniques de santé d'Alberta Wellnet et ses programmes pilotes, l'initiative MOXXI à Montréal et le système PharmaNet de la Colombie-Britannique, montre que c'est là un excellent point de départ.

    Pour ce qui est du mésusage, de l'abus de médicaments et de la dépendance dans la population en général, le réseau informatique des pharmacies communautaires représente également un important mécanisme autorisant une gestion rationnelle et la protection contre le détournement des médicaments. La commande électronique de médicaments sur ordonnance et en vente libre offre une plus grande protection contre la manipulation d'informations et le détournement potentiel de produits. Des discussions à cet égard sont en cours avec Santé Canada.

    Les gouvernements doivent également commencer à distinguer entre le coût croissant des produits pharmaceutiques et les services des pharmacies et consentir un investissement stratégique assurant le meilleur rendement possible pour chaque dollar dépensé. Investir dans les systèmes et la technologie informatiques au niveau des pharmacies facilitera et renforcera l'échange d'information et ne pourra qu'atténuer la croissance du coût des médicaments sur ordonnance.

    En outre, nous, les pharmacies communautaires et membres de chaînes, sommes préoccupés par l'effet de la hausse des prix sur l'accès des patients. Le manque d'accès impose à la société un fardeau énorme, contribuant à la mauvaise santé, aux invalidités et à la perte de productivité, et aboutit à un transfert du coût vers des secteurs toujours plus coûteux du système sanitaire.

    Toutes ces initiatives, en fin de compte, sont tributaires d'une disponibilité suffisante de pharmaciens dans le système de santé, ainsi que de quantités suffisantes de médicaments. Le temps consacré par les pharmaciens à l'administration est du temps enlevé aux patients et aux services de gestion de la consommation de médicaments. Le Canada souffre d'une pénurie de pharmaciens. Il en manque 10 p. 100 dans la pratique tant communautaire qu'hospitalière. Il faut impérativement veiller à ce que les modifications introduites dans le système ne se répercutent pas négativement sur la disponibilité de pharmaciens dont dépend l'amélioration des soins aux patients.

    En conclusion, en permettant aux pharmaciens communautaires de réaliser leur plein potentiel et en mettant pleinement à profit le savoir-faire, l'infrastructure informatique et les ressources des pharmacies, on pourra mieux gérer le coût des médicaments et améliorer la santé et la qualité de vie des Canadiens.

    Nous serions ravis de répondre aux questions que vous pourriez avoir sur ces questions et d'autres.

    Merci.

Á  +-(1115)  

+-

    La présidente: Merci, monsieur May.

    Nous allons passer à la deuxième moitié de notre enquête et nous commencerons le tour des questions avec M. Merrifield.

+-

    M. Rob Merrifield: Merci d'être venu.

    J'aimerais commencer avec les pharmaciens.

    Premièrement, vous dites qu'il faudrait débloquer davantage de ressources afin de vous intégrer dans le continuum des soins de santé. On nous avait déjà dit la même chose hier. Effectivement, l'idée était que si nous vous confions les ressources requises, vous pourrez nous aider à mener les consultations et à formuler des recommandations quant aux médicaments à administrer.

    Comment concilier cela avec l'idée qui règne actuellement que les médecins sont les marionnettes des compagnies pharmaceutiques en ce qui concerne leurs habitudes de prescription? Comment pensez-vous pouvoir convaincre les Canadiens qu'il en ira différemment de vous, sachant que toute l'activité de votre commerce consiste à vendre des produits pharmaceutiques?

    Pouvez-vous me dire comment vous prévoyez éviter les soupçons naturels à cet égard?

+-

    Mme Lori Turik: C'est une excellente question.

    Bien entendu, les pharmaciens aujourd'hui ne prescrivent pas de médicaments, si bien qu'ils n'ont aucun effet sur la demande publique d'un produit donné. Ils se contentent de dispenser le produit et ils peuvent jouer un rôle très notable en matière de gestion de la consommation des médicaments, de façon à en assurer le meilleur effet thérapeutique, dans l'intérêt du public et en réduisant considérablement les gaspillages présents dans le système.

    Tant nos pouvoirs publics que les régimes d'assurance tiers-payeurs, de même que les particuliers, paient très cher pour des médicaments qui ne sont pas utilisés au mieux et conformément aux ordonnances. Je crois savoir que Neptune en Alberta a établi qu'environ 30 tonnes métriques de médicaments non utilisés s'accumulent chaque année. Ce sont là des médicaments qui ne sont pas pleinement mis à profit et pour lesquels l'un ou l'autre de ces régimes a dû payer.

    En outre, nous savons que si nous investissons dans les services pharmaceutiques... Un certain nombre d'études ont été faites. L'une est toute récente et a été réalisée en 2003. C'est une étude américaine commandée par l'American Journal of Managed Care. Elle a démontré que lorsqu'on dépense un million de dollars pour améliorer l'accès aux service de conseils pharmaceutiques de 4 000 assurés, il en résulte un recul de la morbidité, de la mortalité, une diminution du nombre de visites au pavillon d'urgence et un recul de la demande de services de médecin.

    Statistique Canada affirme que de 19 p. 100 à 28 p. 100 des admissions hospitalières chez les plus de 50 ans sont le résultat d'une forme ou d'une autre d'interaction entre médicaments. Nous pensons qu'il est possible d'éviter ou de réduire ce genre d'effets.

Á  +-(1120)  

+-

    M. Rob Merrifield: Que faites-vous en ce moment face à un patient qui présente soit une réaction négative à un médicament ou que vous soupçonnez d'être devenu dépendant d'un médicament sur ordonnance?

+-

    M. Jeffrey May: La relation entre le médecin et le pharmacien, particulièrement s'agissant du rôle de surveillance continue du pharmacien, de l'appui au médecin qui a prescrit le médicament... Lorsque les patients viennent renouveler une ordonnance, le pharmacien a loisir de parler avec eux des effets du médicament, ce qui permet de déterminer s'il y a des effets négatifs ou secondaires. Le pharmacien peut conseiller le patient sur la façon de gérer ces choses. Si les renseignements recueillis auprès du patient sont source d'inquiétude, le pharmacien peut communiquer directement avec le médecin et c'est là un dialogue qui a lieu régulièrement entre les pharmaciens et les médecins. Dans certains cas, il est possible de réduire facilement les effets négatifs et secondaires en changeant la façon dont le médicament est pris et le moment de la prise, mais souvent lorsque les effets sont plus sérieux, une discussion intervient entre le pharmacien et le médecin.

+-

    M. Rob Merrifield: Je crois savoir que le programme de mieux-être fera en sorte que les dossiers médicaux seront accessibles de façon à couvrir les réactions aux médicaments et à alerter les médecins, de même que les régimes d'assurance. Est-ce vrai? Pensez-vous que cela pourrait fonctionner de cette façon?

+-

    M. Jeffrey May: À l'heure actuelle, les renseignements sanitaires et les dossiers médicaux en possession des pharmaciens et des médecins sont totalement compartimentés. Vous pouvez avoir un patient fréquentant une, deux ou plusieurs pharmacies communautaires, le dossier du patient étant confiné à la pharmacie qui a dispensé tel ou tel médicament. D'autres renseignements cliniques que le pharmacien a pu recueillir auprès du patient restent confinés à cette pharmacie. Le système de mieux-être et les dossiers médicaux électroniques de l'Alberta permettent que ce type de renseignements soient versés dans la base de données, en quelque sorte, de façon à être accessibles aux autres pharmaciens au cas où le patient choisisse de se fournir dans plusieurs pharmacies, ou par d'autres médecins, et ce genre de partage plus large de l'information—ne se limitant pas à indiquer le jour où un médicament a été dispensé mais couvrant également des effets secondaires ou doléances que le patient peut avoir ou la date de début de prise ou d'arrêt d'un médicament—représente une étape très positive en matière de dossier médical et permet de mieux soigner les patients et de prendre de meilleures décisions de prescription, et de suivre en continu les patients de façon à gérer toute réaction néfaste.

+-

    La présidente: Merci, monsieur Merrifield.

    Madame Hinton.

+-

    Mme Betty Hinton: J'ai toute une série de questions. Je les poserai toutes, si vous le permettez, et j'attendrai ensuite les réponses.

    Avez-vous été menacé par les compagnies pharmaceutiques de refus d'accès à des médicaments pour cause de vente transfrontalière sur l'Internet?

    Ma deuxième question est de savoir si elles peuvent le faire? Peuvent-elles fermer le robinet ou bien sont-ce là des menaces en l'air?

    Ma troisième question est de savoir si vous pouvez estimer le volume par an et le coût en dollars de cette pratique pour l'industrie pharmaceutique canadienne? N'existe-t-il pas une possibilité d'autoréglementation pour votre association qui puisse interdire cette pratique—apparemment, plusieurs pharmaciens se livrent à cette distribution transfrontalière? Voilà une autre question.

    En outre, est-ce que les frais d'exécution d'ordonnance restent la seule source de—je n'ai pas utilisé le mot « profit » car il ne s'agit pas réellement d'un profit—la seule façon de couvrir vos frais généraux étant donné que les prix des médicaments sont contrôlés, ou bien cela a-t-il changé ces dernières années?

    La dernière question que j'aimerais vous poser, monsieur Eberhart, concerne la publicité télévisée. Il me semblait que la publicité pour les médicaments est interdite depuis pas mal d'années, mais je vois une publicité télévisée qui est très précise. Elle s'adresse aux hommes et elle donne le nom du produit. Ce nom apparaît à l'écran si bien que l'on n'est même pas obligé de deviner qu'il s'agit de Viagra. J'aimerais savoir ce que vous en pensez et si l'on peut faire quoi que ce soit pour empêcher cela.

Á  +-(1125)  

+-

    M. Jeffrey May: Nous pouvons peut-être commencer par répondre à la première question, soit la distribution internationale de services pharmaceutiques et la question du refus d'accès. Jusqu'à présent, nous n'avons pas—et je pense pouvoir parler au nom des membres de l'association—fait l'objet de menaces directes de perte d'accès aux médicaments au Canada. Nous savons qu'il y a des exemples de médicaments homologués par la FDA aux États-Unis et qui ont reçu leur avis de conformité de Santé Canada qui sont distribués aux États-Unis et non au Canada. Et il existe des exemples de situation inverse.

    On en est réduit à spéculer sur les raisons pour lesquelles un médicament n'est pas distribué au Canada. Toutes sortes de raisons peuvent motiver la compagnie pharmaceutique, mais de dire que nous avons été menacés d'une perte d'accès ou de fermeture du robinet serait exagéré. Mais nous avons conscience des préoccupations de l'industrie pharmaceutique à cet égard.

    Pour ce qui est du coût, la meilleure estimation que nous puissions donner de la valeur des médicaments canadiens vendus au-delà de la frontière américaine, un chiffre dont vous comprendrez qu'il est très difficile à mesurer, est celui de 1 milliard de dollars canadiens couramment donné par des groupes tels que IMS Health.

+-

    Mme Betty Hinton: Avez-vous dit 1 million de dollars?

+-

    M. Jeffrey May: J'ai dit 1 milliard de dollars.

    Greg, peut-être pourrais-je vous demander de parler de l'aspect réglementaire.

+-

    Mme Betty Hinton: Qu'en est-il du caractère creux des menaces, ou bien les compagnies peuvent-elles effectivement vous refuser l'approvisionnement si elles le décident?

+-

    M. Jeffrey May: Entendez-vous par là le refus de nous approvisionner?

+-

    Mme Betty Hinton: Oui.

+-

    M. Jeffrey May: Je pense que tout dépend des accords commerciaux conclus entre les fabricants de produits pharmaceutiques et les pharmacies. Toute pharmacie qui achète des médicaments à un fabricant doit signer un contrat qui énonce les conditions de la transaction. L'une des conditions prévue dans ces contrats est que vous n'allez pas exporter le médicament vers l'étranger et la grande majorité des pharmacies respectent cette contrainte.

    L'industrie pharmaceutique a indiqué qu'elle protégera l'approvisionnement en médicaments des Canadiens au mieux de sa capacité.

+-

    M. Greg Eberhart: Sur le plan de l'autodiscipline, en tant que profession autoréglementée nous nous inscrivons à l'intérieur d'un système et notre responsabilité spécifique porte sur la pratique pharmaceutique.

    Néanmoins, lorsque nous lançons une enquête, nous devons souvent nous concerter avec d'autres ordres professionnels tels que celui des médecins. Ce processus ne va pas sans difficulté et, particulièrement lorsqu'on traite avec l'étranger, on se heurte à des écueils sur le plan du partage de l'information.

    Mais plus précisément, et ce qui nous préoccupe le plus... par exemple, nous avons plusieurs enquêtes actuellement en cours en Alberta. Mais si ces enquêtes aboutissaient à la conclusion que des sanctions s'imposent, nous n'avons pas le pouvoir de conduire une enquête à l'étranger pas plus que celui de citer à comparaître des témoins étrangers.

    C'est pourquoi j'ai fait état de l'initiative nationale de télésanté, qui vient d'entreprendre une étude de deux ans sur l'évolution de la télésanté et ce qu'elle représente pour le monde électronique et la prestation des soins de santé. Plus précisément, ce groupe, qui est de nature multidisciplinaire, a reconnu qu'il y a lieu pour le gouvernement fédéral et les provinces de définir une juridiction et de conclure les accords nécessaires de telle façon que si les soins de santé vont être dispensés sur un marché international, la sécurité des patients puisse être efficacement assurée.

+-

    La présidente: Merci, madame Hinton.

    Monsieur Ménard.

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: Merci. Votre témoignage est précieux, d'autant plus que les associations de médecins de même que les pharmaciens disent, lorsqu'on les rencontre, qu'ils ne sont pas responsables des coûts. Finalement, il s'avère très difficile de préciser qui en a la responsabilité. Je voudrais vous poser trois questions.

    Au Canada, le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés réglemente le prix du médicament à sa sortie de l'usine. Ainsi, le prix du Viagra qui sort de chez le manufacturier ne peut pas être supérieur à l'indice des prix à la consommation.

    D'abord, dans le cas d'un pharmacien qui a sa propre pharmacie, que ce soit à Edmonton, à Toronto, à Calgary ou à Vancouver, comment est établie la marge bénéficiaire lors de la vente d'un médicament? Pour votre part, vous l'achetez d'un manufacturier et vous le vendez aux consommateurs; vous êtes donc des détaillants de médicaments. Comment s'établit cette marge bénéficiaire?

    Ensuite, est-ce que vous avez le droit de suggérer un médicament générique lorsque, dans le cadre d'une ordonnance, vous savez que ce dernier est en tout point conforme à l'objectif poursuivi par le médecin prescripteur?

    Enfin, avez-vous des recommandations précises à nous faire concernant le coût des médicaments? S'il me reste du temps, je reviendrai sur la question de la publicité. Celle qui porte sur le Viagra n'est pas illégale. On peut la remettre en question sur le plan éthique, mais il reste qu'en vertu de la Loi sur les aliments et drogues, on peut faire de la publicité en autant qu'on ne parle pas de maladie dans le cadre de cette même publicité.

    L'annonce publicitaire sur le Viagra, dans laquelle on peut voir un monsieur complètement hilarant qui, on le présume, vient de passer une nuit de rêve, ne traite pas d'impuissance. Elle n'est donc pas illégale. Mais c'est une autre histoire, à laquelle on reviendra plus tard.

    Je veux surtout savoir comment vous établissez votre marge bénéficiaire, parce que selon certains à l'intérieur du système, les pharmaciens sont ceux qui s'enrichissent le plus.

Á  +-(1130)  

[Traduction]

+-

    M. Jeffrey May: Merci de ces questions. Je pense que le fonctionnement économique des pharmacies communautaires n'est pas très bien compris au Canada.

    Je pourrais peut-être vous indiquer les grandes lignes de la distribution du produit et des paiements qui interviennent à l'intérieur de ce système.

    Tout d'abord, les coûts en général sont déterminés par les formulaires provinciaux. Une fois qu'ils sont fixés par le CEPMB, principalement dans le cas des médicaments brevetés, les gouvernements provinciaux fixent le coût des médicaments génériques. C'est là le coût typiquement payé par les pharmacies.

    Le système prévoit également un coût de distribution, c'est-à-dire d'acheminement du médicament du fabricant jusqu'à la pharmacie, par le biais d'un secteur de vente en gros ou de quelque mécanisme logistique de type centre de distribution, et donc un petit pourcentage, qui varie d'une province à l'autre du Canada, est ajouté, dont le montant peut aller de...

+-

    M. Réal Ménard: Il faudrait être plus précis. Voyons la chaîne de distribution.

[Français]

    Quel est ce coût? Donnez-nous l'exemple d'un médicament précis et de la chaîne des intermédiaires.

    Prenons l'exemple du Viagra, pour que ça ne devienne pas une cause pendante! Décrivez-nous l'évolution de son prix à partir du début jusqu'au moment où le consommateur le paye dans le cadre d'une ordonnance.

[Traduction]

+-

    M. Jeffrey May: Merci. C'est probablement la meilleure façon de répondre à la question, car je pourrais parler indéfiniment de généralités.

    Je ne connais pas le prix exact sur le marché de ce médicament, mais disons qu'il soit fixé à 100 $ pour une livraison standard. La pharmacie achètera ce médicament pour, mettons, 107 $, étant donné qu'il y a une marge de grossiste. Certaines nomenclature provinciale reconnaissent ce prix de 107 $, d'autres un prix légèrement inférieur, particulièrement en Ontario.

    Le coût pour le patient, donc, est déterminé réellement par trois facteurs : le coût du médicament, plus une marge autorisée déterminée par chaque province et son régime d'assurance, et les frais d'ordonnance. Les frais d'exécution d'ordonnance représentent typiquement de 10 $ à 12 $ au Canada. Mais les variations sur ce plan sont très importantes. Si vous considérez l'Ontario, les frais d'ordonnance sont de 6,54 $; le montant est très similaire au Québec.

    Le programme d'assurance-médicaments provincial fixe typiquement un droit standard qui peut être perçu dans la province. Certains régimes d'assurance-médicaments privés qui ne dépendent pas du programme provincial peuvent autoriser des droits plus élevés. Mais si vous considérez la moyenne, en prenant comme prix du médicament à la fabrication le niveau de 100 $ et en ajoutant une marge additionnelle pour la distribution en gros, la pharmacie est autorisée à ajouter des frais allant typiquement de 50¢ jusqu'à un pourcentage de 10 p. 100.

Á  +-(1135)  

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: Finalement, d'après ce que je comprends, les pharmaciens ne sont pas toujours propriétaires, et les propriétaires ne sont pas toujours pharmaciens.

    Or, est-ce que c'est le pharmacien qui décide d'ajouter un dollar ou un dollar cinquante au prix? On sait que le conseil réglemente et que la province détermine le prix remboursable, mais la marge bénéficiaire du pharmacien, qui est d'environ un dollar--à ce sujet, il s'agira sans doute de la partie la plus conservatrice de votre exposé--, est-elle discrétionnaire ou réglementée?

[Traduction]

+-

    M. Jeffrey May: Les majorations de prix dans le système sont principalement déterminées au Canada par les régimes d'assurance-médicaments provinciaux.

+-

    M. Greg Thompson: C'est faux. C'est totalement faux.

+-

    La présidente: Ce n'est pas votre tour.

+-

    M. Greg Thompson: C'est juste que je suis indigné d'entendre ce genre de sornettes.

+-

    La présidente: Eh bien, lorsque ce sera votre tour, vous pourrez donner votre avis. Je serai ravie de l'entendre.

+-

    M. Réal Ménard: J'aimerais bien savoir ce qu'il en est, car nous ne vivons qu'une fois et j'aimerais bien ne pas mourir idiot. Peut-être pourrais-je lui céder une partie de mon temps.

+-

    La présidente: Êtes-vous prêt à céder votre temps? En fait, ce n'est pas le tour de M. Thompson, c'est plutôt celui de Mme Fry.

+-

    M. Réal Ménard: Mais s'il peut nous donner des renseignements utiles pour tous...

+-

    La présidente: Il le fera lorsque ce sera son tour, monsieur Ménard. Avez-vous terminé? En fait, votre temps est écoulé de toute façon.

    Madame Fry, c'est à vous.

+-

    Mme Hedy Fry: J'ai une question pour l'ordre des pharmaciens qui porte de nouveau sur la vente transfrontalière. C'est un sujet qui me préoccupe réellement et je pense que il y a de quoi, sur le plan du coût, de l'accès—toutes ces choses que nous examinons dans cette étude. Vous dites que l'ordre n'a pas réellement de responsabilités face à cette situation car il s'agit d'un problème international. Mais ne pourriez-vous pas imposer des sanctions aux pharmaciens qui se livrent à cette pratique si vous la considérez comme néfaste et contraire à l'éthique? Ne pouvez-vous rien faire à ce niveau?

    J'aimerais savoir également quelle est la responsabilité d'un pharmacien canadien qui vend de l'autre côté de la frontière en cas de réaction néfaste au médicament chez un patient américain? Y a-t-il là un problème de responsabilité civile de nos pharmaciens?

    Troisièmement, quel est le statut d'un médicament opiacé vendu par un pharmacien à un patient de l'autre côté? Le transport de l'autre côté de la frontière de cet opiacé est-il licite? J'aimerais savoir ce qu'il en est.

    Je vais vous laisser répondre dans une seconde. J'aimerais auparavant poser une question à Lori et Jeff. Il s'agit de... Vous avez parlé très clairement du rôle des pharmaciens et de l'élargissement de ce rôle. En tant que médecin de famille, je suis on ne peut plus d'accord avec vous. Je pense qu'il faut une collaboration beaucoup plus étroite entre le médecin et le pharmacien dans l'intérêt du patient étant donné qu'ils ont tous deux un contact direct avec celui-ci sur le plan thérapeutique. Je ne vois pas de problème à cela et je pense qu'il faut élargir ce rôle.

    Selon votre conception, comment le pharmacien se ferait-il rémunérer pour ce rôle élargi? Pensez-vous que ce rôle devrait englober la prescription directe par le pharmacien? Dans l'affirmative, ma grande question est de savoir quelle serait la responsabilité civile du pharmacien sur le plan de la prescription?

    Et j'en reviens toujours à cette question : Quelles sont les incitations offertes par les fabricants pharmaceutiques aux pharmaciens pour la vente de leurs produits? Par exemple, si vous vendez une certaine quantité, vous offre-t-on des remises telles que si vous achetez un lot, on vous en donne deux gratuits, ou bien si vous vendez 2 000 pilules, on vous en ajoute 500 gratuitement? Je ne connais nulle autre profession qui ait davantage à gagner—hormis l'industrie pharmaceutique elle-même—de l'incitation donnée à certains patients d'acheter un produit donné, car vous gagnez votre vie en vendant des médicaments. C'est ce que vous faites, qu'il s'agisse de médicaments en vente libre ou sur ordonnance.

    Ma question est donc de savoir, si vous avez l'intention d'accroître votre rôle, comment respecter certaines règles éthiques à cet égard?

Á  +-(1140)  

+-

    M. Greg Eberhart: Je vais commencer par la première partie de votre question. Ce n'est pas que nous n'avons pas de responsabilité, mais celle-ci est circonscrite. En ce qui concerne l'autoréglementation, il nous appartient d'enregistrer les pharmacies et les pharmaciens. Nous devons surveiller leur pratique—autrement dit, nous établissons des normes, nous vérifions leurs compétences et leur respect de ces normes. Il nous incombe également de régler les plaintes.

    Pour ce qui est de l'octroi de permis aux pharmacies, ces permis sont largement fonction de l'infrastructure. Autrement dit, si une pharmacie répond à certaines conditions de taille et possède le matériel voulu, nous lui délivrons une licence—encore une fois, à condition qu'elle soit placée sous la gestion d'un pharmacien.

    La difficulté qui est la nôtre n'est pas que nous n'avons pas de rôle dans cette équation; c'est plutôt que nous ne pouvons pas remplir nos responsabilités absolues à cause des problèmes de juridiction et du manque de clarté sur le plan de la juridiction. C'est là où intervient la responsabilité des gouvernements provinciaux et fédéral, particulièrement s'agissant de problèmes transfrontaliers.

    La deuxième question portait sur la responsabilité civile. Nous pensons qu'il faudra attendre qu'un tribunal tranche. Si un problème survient et qu'un produit a été homologué au Canada et qu'un pharmacien a pris la décision de le fournir à un citoyen américain, il n'est pas établi où se situe la responsabilité. Nous avons entendu divers arguments à cet égard—autrement dit, la distribution a-t-elle eu lieu aux États-Unis ou bien a-t-elle eu lieu au Canada? C'est une argumentation juridique sur laquelle je ne puis me prononcer tant qu'une décision de justice ne sera pas intervenue.

+-

    Mme Hedy Fry: Le transport des stupéfiants.

+-

    M. Greg Eberhart: Le transport des stupéfiants. Nous n'avons pas connaissance, à ce stade, de pharmacies canadiennes qui transportent ou vendent des stupéfiants ou des opiacés à des clients américains. La plupart des pharmacies, à ma connaissance, ont très conscience du fait qu'il s'agit là de médicaments spécifiques contrôlés et ne les vendent pas sur ce marché.

    Avant de passer la parole à mes collègues, permettez-moi de répondre à votre question sur la faculté de prescrire. C'est un sujet qui est très d'actualité en Alberta et notre collègue y travaille dans le cadre de la nouvelle législation sur les professions de santé. Nous ferons des présentations à notre comité consultatif des professions de la santé vers la fin novembre, concernant le rôle des pharmacies et la prescription de médicaments.

    Nous avons élaboré un modèle pour tenter de définir et de décrire ce que l'on entend par la prescription de médicaments par les pharmaciens. Je dirais que les pharmaciens sont dans une situation très particulière à cet égard, comparé aux autres professions de la santé, du fait de leur position dans le système sanitaire. Le modèle que nous avons élaboré définit trois catégories, soit la prescription à titre de soin primaire, la prescription aux fins d'ajustement et la poursuite d'une thérapie, en vue d'assurer l'observation de l'ordonnance et les résultats appropriés et, troisièmement, la gestion globale d'une pharmacothérapie.

    Pour décrire très brièvement chacune de ces catégories...

+-

    La présidente: En fait, le temps de Mme Fry est écoulé. Peut-être pourrez-vous insérer cela dans une autre réponse.

    Monsieur Thompson.

+-

    M. Greg Thompson: Merci, madame la présidente.

    J'ai remarqué dans votre mémoire, soit le texte de l'Association canadienne des chaînes de pharmacies, et j'ai entendu votre exposé presqu'au complet... C'est pas mal auto-louangeur. Je ne vois guère de critiques des pharmaciens dans ce tableau tout en rose. Et je remarque à la première page sur les huit de votre texte, et je cite :

Étude après étude fait apparaître que les Canadiens apprécient hautement leur pharmacie. De toutes les professions libérales, les pharmaciens sont ceux qui suscitent la plus grande confiance (Ipsos-Reid 2002).

    Est-ce que cela vous place légèrement devant ou derrière les politiciens et les vendeurs de voitures d'occasion? Je dis cela car lorsque vous parlez du prix des médicaments et des marges bénéficiaires, je n'ai pas l'impression que vous faites preuve de la franchise voulue envers ce comité ou le public.

    Il est difficile de croire que le profit d'une pharmacie... Lorsqu'on va dans une pharmacie typique, on voit qu'elle vend plus d'articles qu'une quincaillerie et vous ne pourrez pas me convaincre que les pharmaciens, dans la plupart des cas, surtout avec les associations que vous avez, sont effectivement les propriétaires du commerce, en quelque sorte. Vous ne pourrez pas me convaincre qu'ils gagnent davantage sur une boîte de chocolat que sur le Viagra, par exemple. La marge bénéficiaire sur les articles de consommation est la même que partout ailleurs.

    Aussi, comment les profits de la pharmacie se décomposent-ils entre la vaste gamme des articles autres, depuis les marteaux jusqu'aux vis et aux boîtes de chocolat? Comment cela se compare-t-il avec la marge bénéficiaire sur les médicaments que vous dispensez?

    Mon autre question est de savoir quelle latitude vous avez en tant que pharmaciens, lorsque vous prescrivez un médicament, de substituer un médicament générique à un médicament de marque ou un médicament dont le brevet est expiré à un médicament breveté. Ce matin, par exemple, M. Bougher, du gouvernement albertain, le Directeur de la politique et des programmes pharmaceutiques, a parlé de catégories de médicaments qui ne sont pas prescrits et d'autres qui sont surprescrits. Il y a toute une série de médicaments que vous prescrivez et d'autres que vous ne prescrivez pas.

    J'aimerais donc savoir quelle latitude vous avez face à l'ordonnance d'un médecin? Pouvez-vous substituer un produit à un autre à l'intérieur d'une certaine gamme? Voilà l'une des questions. Et dans quelle mesure cela se répercute-t-il sur vos profits? Autrement dit, vous verrez rarement une pilule que vous n'aimez pas, pourvu que la marge bénéficiaire qu'elle dégage soit meilleure qu'une autre. Dans quelle mesure cela influence-t-il votre décision au moment de dispenser le médicament, ou bien le médecin est-il la seule autorité?

    Peut-être pourriez-vous traiter de quelques-uns de ces points.

Á  +-(1145)  

+-

    Mme Lori Turik: Le secteur pharmaceutique est hautement réglementé...

+-

    M. Greg Thompson: Nous le savons, venez-en au fait. Je ne veux pas entendre de généralités. Je veux seulement traiter de la profitabilité et de la marge de manoeuvre que vous avez. Laissez tomber les généralités. Nous les connaissons.

+-

    Mme Lori Turik: D'accord.

    Nous ne contrôlons pas les prix. Nous sommes payés, selon les formulaires, pour les trois éléments dont nous avons parlés.

+-

    M. Greg Thompson: Que le payeur soit un régime d'assurance ou non?

+-

    Mme Lori Turik: Oui, les deux.

+-

    M. Greg Thompson: Donc cela s'applique... Par exemple, si un patient est assuré, le prix du médicament ne varie pas. Autrement dit, si j'arrive et que je suis couvert par une assurance, on me fait payer le montant x car c'est le plafond imposé par le régime d'assurance. Ensuite, M. Ménard arrive, qui n'est pas assuré. Est-ce qu'on va lui faire payer un prix identique? Est-ce exact?

+-

    Mme Lori Turik: Nous sommes remboursés sur la base de...

+-

    M. Greg Thompson: Non, je ne parle pas de remboursement. Lorsque vous êtes payés à la caisse par cet homme, comparé à moi où c'est le régime d'assurance qui vous paie, est-ce que vous lui faites payer le même prix? Autrement dit, le médicament lui coûte 50 $ et il vous paie au comptoir. Moi-même, je suis couvert par un régime d'assurance. Le régime vous paie typiquement un prix moindre, n'est-ce pas?

+-

    M. Jeffrey May: Je pense que la meilleure réponse à donner est que les remboursements des régimes d'assurance-médicaments sont variables...

+-

    M. Greg Thompson: Ça y est, vous recommencez. Arrêtez de parler en code, je vous prie, je n'aime pas les mots code. D'ailleurs, lorsque je lis votre mémoire, vous y parlez en code tout au long, de manière ambiguë.

    Effectivement, lorsque je lis le passage sur les médicaments brevetés, par exemple, je tombe sur un autre exemple de code, madame la présidente. C'est à la page 6 de 8 :

Nous pensons qu'il est essentiel que le gouvernement canadien collabore avec l'industrie pharmaceutique afin d'assurer de réelles incitations propres à stimuler la R-D pharmaceutique et permettre aux Canadiens d'avoir un accès rapide aux thérapies novatrices.

    De réelles incitations. Est-ce que cela signifie que vous êtes en faveur d'une protection par brevet pendant 20 ans, 30 ans, 40 ans? Qu'est-ce que cela nous apprend?

+-

    M. Jeffrey May: Puis-je revenir en arrière et répondre à la question sur la variabilité et le prix?

+-

    M. Greg Thompson: Oui, veuillez expliquer la variabilité, mais n'utilisez pas de mots code.

+-

    M. Jeffrey May: Je ne le ferai pas, monsieur.

    Si vous arrivez avec une ordonnance et que vous êtes couvert, par exemple, le programme d'assurance-médicaments ontarien, typiquement, s'il s'agit d'un médicament de 100 $, vous paierez 116,54 $. Si vous êtes membre d'un régime d'assurance privé dans la province de l'Ontario, le prix pourra être proche de 120 $.

+-

    M. Greg Thompson: Pourra l'être ou bien l'est-il?

+-

    M. Jeffrey May: C'est variable. Différentes pharmacies pratiquent différentes commissions. C'est l'une des réalités du commerce.

+-

    M. Greg Thompson: Il existe donc une fourchette au niveau des pharmacies. Une pharmacie typique jouit d'une certaine latitude de tarification.

+-

    M. Jeffrey May: C'est juste. Les programmes gouvernementaux et...

+-

    M. Greg Thompson: Tout dépend donc de la pharmacie individuelle. Le chiffre de 10 p. 100 que vous avez cité à M. Ménard peut être appliqué par certaines mais non par d'autres. Est-ce exact?

+-

    M. Jeffrey May: Oui. Les contrats que nous concluons avec les régimes d'assurance fixent les frais d'exécution d'ordonnance maximaux que nous pouvons percevoir. Les pharmacies, selon leur nature et leur situation sur le marché peuvent choisir de percevoir moins, et c'est ce qui entraîne les variations sur le marché.

Á  +-(1150)  

+-

    M. Greg Thompson: Certaines de ces ordonnances dont j'ai été le bénéficiaire, puisqu'elles étaient censées me guérir... Je me souviens que ma femme allait à la pharmacie et l'approvisionnement pour cinq jours coûtait 1 500 $. Donc, lorsque vous touchez 10 p. 100 sur 1 800 $, vous encaissez une jolie somme, n'est-ce pas?

+-

    M. Jeffrey May: Oui.

+-

    M. Greg Thompson: C'est une plus belle commission que ne touche un vendeur de voiture d'occasion sur une vieille casserole, n'est-ce pas?

+-

    La présidente: Je crains que votre temps soit écoulé. Il ne reste plus de temps pour la réponse, mais peut-être Mme Bennett ou Mme Fry pourront-elles revenir sur votre sujet.

    Monsieur Dromisky.

+-

    M. Stan Dromisky: Merci beaucoup.

    Nous savons que le dollar tout puissant contrôle à peu près tout, n'est-ce pas? Un point commun à toutes les publicités... J'en reviens toujours à cette analogie : tous les détergents se ressemblent. Tide arrive et dit « Mon savon est le meilleur ». Ensuite, les autres adaptent un peu le leur. Ils ajoutent quelque chose. Mais ce n'est pas un vrai changement. Du savon, c'est du savon. Vous ne pouvez pas vraiment changer la formule moléculaire. Vous ne pouvez qu'y ajouter des ingrédients.

    La même chose est vraie dans le domaine pharmaceutique. Un fabricant dépense des millions et des millions de dollars pour créer un produit. Il est très efficace. Ensuite, le fabricant bricole un peu la recette. Il la change un petit peu par rapport à ce que fait la concurrence. Ensuite il fait une campagne publicitaire pour dire combien ce produit est merveilleux et supérieur—et il coûte plus cher.

    Dans les pharmacies, toutes les pharmacies... Je ne sais pas quelle sorte de conseils s'y donnent. Dites-vous à vos patients que l'ancienne marque est aussi bonne que la nouvelle? Avez-vous le droit de faire ce genre de chose? Existe-t-il des lignes directrices déontologiques ou bien ne dites-vous rien du tout et refilez simplement au client le produit le plus coûteux?

+-

    M. Greg Eberhart: Les pharmaciens ont pour responsabilité de conseiller les patients, non seulement sur le plan des effets qu'ils peuvent attendre des médicaments et la manière de les prendre, en rapport avec la maladie pour laquelle ils sont traités, mais il importe aussi que les patients comprennent ce qu'ils prennent et à quoi s'attendre pour obtenir les résultats recherchés.

    Cela nous mène au mécanisme de suivi. Habituellement, lorsqu'un malade va voir son médecin, celui-ci pose un diagnostic et la décision est prise de prescrire un médicament et le pharmacien donne alors les conseils que j'ai décrits. Une fois que le mécanisme de suivi commence, si le patient présente des effets secondaires néfastes ou d'autres anomalies inquiétantes, c'est habituellement à ce stade que le pharmacien fera des recommandations, remplaçant un produit par un autre à l'intérieur d'une même catégorie chimique ou non.

    Au début—c'est-à-dire au premier contact, soit à la réception de l'ordonnance initiale—le pharmacien peut formuler des recommandations ou discuter avec le patient d'une substitution sur la base du coût. Habituellement, ce ne sera pas sur la base des effets à ce stade, car le pharmacien respecte la décision du médecin. Les modifications d'ordonnance interviendront au stade du suivi.

+-

    M. Stan Dromisky: D'accord. Très bien.

    Ma deuxième question s'adresse aux chaînes. Si je fabrique des conserves de porc et de haricots et veut les vendre dans les supermarchés de Safeway, je vais devoir payer pour x pouces de rayonnage sur lesquels exposer mon produit. Dans le même ordre d'idée, j'aimerais savoir si le même arrangement a lieu, mettons entre une chaîne de pharmacies qui a mille magasins à travers le pays et les deux branches de l'industrie pharmaceutique. J'ai mille pharmacies et je m'engage à favoriser tel médicament ou tel produit, qu'il soit prescrit ou non, pour un certain prix. Appelons-le ristourne, appelons-le dessous de table ou bien participation à un programme de parrainage ou quelque chose. Peu importe comment on appelle cette rémunération, mais je me demande s'il existe des accords de cette nature avec les grandes chaînes de pharmacies de ce pays qui leur permettent d'accroître leur marge de profit dans l'intérêt des actionnaires.

Á  +-(1155)  

+-

    Mme Lori Turik: En tant qu'association nationale, nous ne nous prononçons pas sur les activités commerciales de nos membres. Mais cela étant dit, et vu la discussion qui se déroule autour de la table, les allocations professionnelles sont une pratique commerciale courante que l'on rencontre dans tous les milieux dans ce pays. C'est une pratique commerciale courante non seulement dans le secteur privé mais également dans des cadres tels que les hôpitaux de soins de longue durée et sans but lucratif.

    Donc, la réalité, c'est que certaines allocations professionnelles sont certainement versées, mais pas seulement aux pharmaciens; elles ont cours dans le secteur sans but lucratif privé et dans le secteur public lui-même. On parle également d'allocations professionnelles versées aux médecins et je sais qu'il en a été question ici aussi.

    Nous pensons que les pharmacies ne sont pas réellement équitablement rémunérées pour les services qu'elles fournissent. Actuellement, nous pensons que tous les services des pharmacies ne sont pas rémunérés par les régimes d'assurance-médicaments et que les allocations professionnelles sont utilisées par les pharmacies pour fournir des conseils directs aux patients et des services professionnels éducatifs aux pharmaciens.

    Si les pouvoirs publics vont modifier les prix, choisissent de modifier les frais d'exécution d'ordonnance, choisissent de modifier les marges bénéficiaires dont nous avons parlé, il faudra tout de même tenir compte de tous les facteurs de coûts encourus par les pharmacies en tant que commerces en vue de fournir ces services dans le meilleur intérêt des patients.

    Ces allocations professionnelles servent à fournir des services tels que des journées éducatives, des services de formation aux pharmaciens, l'investissement dans la technologie informatique de façon à pouvoir échanger directement l'information entre pharmacies et gouvernements provinciaux et pouvoir ainsi créer une base de données permettant de repérer le mésusage ou l'abus de médicaments ou de mettre en place des programmes de soins pour diabétiques et asthmatiques. En réalité, c'est là une pratique commerciale légitime.

    Je ne puis me prononcer sur ce qu'est une marge de profit raisonnable pour quelque entreprise que ce soit, mais lorsqu'on regarde la tarification et la réglementation et la distribution et les coûts, on ne peut négliger l'effet que tout cela aura sur la fourniture globale des soins aux patients.

+-

    La présidente: Merci, monsieur Dromisky.

    Madame Bennett.

+-

    Mme Carolyn Bennett: Merci beaucoup.

    Je pense qu'il ne fait aucun doute qu'il existe des pharmacies où des hommes d'affaires cherchent à réaliser un profit et nouent des relations spéciales avec les fournisseurs de leurs produits. Je me souviens du Secrétariat à la réforme de l'assurance-médicaments en Ontario où nous siégions à un Sous-comité sur l'élargissement du rôle des pharmaciens, à l'époque où l'assurance-médicaments voulait faire du pharmacien un consultant pour aider les Canadiens à mieux comprendre leur traitement ou la façon de gérer leur maladie. Il y a un mélange entre les deux volets, ce qui signifie que les pharmacies doivent vendre leur teinture pour cheveux et où tout le devant du magasin se retrouve amalgamé avec le pharmacien au fond. Le type dans une pharmacie de Sault Ste. Marie qui considère son poste comme un bureau de conseil où les patients vont parler confidentiellement de leur maladie est très différent du type assis dans le bureau à l'étage qui regarde en bas pour repérer les voleurs à l'étalage, ou quelle que soit la raison pour laquelle ces bureaux sont disposés en hauteur. Pour reprendre l'argumentation de Stan, c'est là un aspect sur lequel il faudra travailler si l'on doit vraiment faire du pharmacien un des membres importants de l'équipe de soins.

    J'ai été surprise de voir votre inquiétude face à une agence nationale des médicaments. La plupart des gens pensent qu'il n'est pas rationnel que chaque province procède par elle-même aux évaluations de médicaments et toutes ces choses. J'ai plutôt entendu l'avis que tout cela devrait être fait en collaboration. Même le directeur de la politique et des programmes pharmaceutiques de l'Alberta souligne l'importance d'une collaboration nationale et, dans ces conditions, je ne vois pas pourquoi vous vous alarmez de la création d'une structure à cet effet.

    Je ne vois pas comment vous arrivez à la conclusion que les médicaments ne devraient être disponibles que s'ils sont jugés rentables. Je ne vois pas pourquoi ce serait une mauvaise chose. Mais il est manifestement bon pour les provinces de communiquer entre elles leurs meilleures pratiques. Le gouvernement fédéral est le cinquième plus gros fournisseurs de soins de santé dans ce pays, avec tous nos programmes pour les Autochtones, les anciens combattants etc. Même avec votre exemple de ce qui se fait dans les forces armées, il y a beaucoup à dire en faveur du rôle des pharmaciens et d'une certaine collaboration sur les meilleures pratiques. Quelle est exactement votre crainte devant la perspective d'une agence des médicaments chargée de la surveillance coordonnée après la mise sur le marché?

  +-(1200)  

+-

    La présidente: Vous avez à peu près une minute et demie pour répondre.

+-

    Mme Lori Turik: Nous sommes certes en faveur d'examens communs des médicaments s'ils vont produire les résultats escomptés, soit une amélioration de l'efficience, de la cohérence et de la transparence du processus. Je pense que c'est là un processus nouveau auquel les gouvernements et provinciaux et fédéral sont pleinement favorables. Nous sommes très optimistes quant à la possibilité qu'ils remplissent ces objectifs.

    Pour ce qui est du contrôle après mise en marché, nous y sommes tout à fait favorables. De fait, nous disons même qu'il y a un rôle manifeste pour le gouvernement fédéral à jouer, sous forme d'une initiative de développement informatique permettant de saisir les données dans les cabinets des médecins et dans les pharmacies à cet effet. Donc, nous sommes d'accord du point de vue de la rentabilité.

+-

    Mme Carolyn Bennett: Et un secrétariat qui remplirait ces deux rôles : voyez-vous des objections à ce que...?

+-

    Mme Lori Turik: À condition qu'il remplisse les objectifs fixés, n'alourdisse pas les frais administratifs qui pèsent déjà très lourdement sur l'industrie et qu'il accélère le processus, nous sommes tout à fait en faveur. Nous sommes optimistes et nous attendons de voir les résultats.

+-

    Mme Carolyn Bennett: Il est tout de même anormal qu'il faille s'adresser à 13 endroits différents. Je ne vois pas pourquoi vous autres jugeriez que ce n'est pas la chose à faire.

+-

    La présidente: Vous n'êtes pas tout à fait arrivée à cinq minutes. D'autres membres ont eu plus de six minutes car les témoins avaient la parole au moment où la limite de cinq minutes était atteinte. Mais actuellement vous en êtes à cinq minutes, madame Bennett et je vous autorise une réponse.

+-

    Mme Lori Turik: Pour répondre à votre question, nous sommes en faveur du mécanisme d'évaluation commun des médicaments s'il remplit les objectifs fixés.

+-

    La présidente: Deux demandes m'ont été présentées. M. Ménard a un rappel au Règlement et M. Merrifield et quelqu'un d'autre ont demandé que M. Eberhart puisse poursuivre l'explication des trois points qu'il avait commencée.

    Monsieur Ménard, permettez-vous que M. Eberhart termine son explication avant votre rappel au Règlement?

+-

    M. Réal Ménard: Oui.

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

+-

    M. Greg Eberhart: Une nouvelle loi a été introduite en Alberta. Nos collègues vont proposer que les pharmaciens soient habilités à prescrire des médicaments. Nous avons mis au point un modèle comportant trois catégories. Ces trois catégories peuvent être définies comme les soins primaires, la poursuite et l'ajustement d'une pharmacothérapie lorsqu'il s'agit d'assurer l'observation de la prescription et des résultats appropriés, et la gestion globale d'une pharmacothérapie. Ce modèle a été introduit dans le contexte où les pharmaciens prendraient des décisions à l'intérieur d'un système de santé coopératif. Nous le soulignons, car c'est là le fondement de toute la discussion, les pharmaciens ne travailleraient pas en autonomie mais en concertation avec d'autres professions de la santé. Le but de la proposition est d'améliorer l'accessibilité et la liberté des clients. On respecte le privilège des clients de faire des choix personnels quant au lieu et à la manière dont ils accèdent aux services de santé.

    Pour vous décrire brièvement les trois catégories, je les prendrai dans l'ordre inverse. La gestion globale de la pharmacothérapie est une situation où le patient souffre d'une maladie chronique, va voir un médecin qui pose un diagnostic. Le médecin, en prescrivant la thérapie, renvoie le patient au pharmacien pour un suivi et une gestion continue. Le pharmacien, usant de son savoir et de sa compétence, aurait la faculté de vérifier les effets du traitement et d'ajuster la thérapie le cas échéant. Cela pourrait signifier l'augmentation des doses ou leur diminution. Dans certains cas, cela pourra signifier la prescription d'autres médicaments. Un excellent exemple de cela aujourd'hui est la gestion de l'anticoagulation, où les pharmaciens travaillent exactement comme je l'ai décrit avec les médecins pour gérer un patient qui a besoin de cette thérapie.

    Le deuxième scénario en est un que la plupart d'entre nous comprennent bien dans la pratique communautaire, soit le cas où un patient consulte un médecin, un diagnostic est posé et un traitement décidé, avec éventuellement un certain nombre de renouvellements d'ordonnance. La première décision que le pharmacien doit prendre est de savoir si le médicament est approprié pour le patient. La posologie et la concentration sont-elles les bonnes? Les instructions d'utilisation sont-elles appropriées? Périodiquement, il peut falloir modifier ces instructions et nous proposons que le pharmacien puisse appliquer ses connaissances et sa compétence et faire cela sans demander l'autorisation du médecin. Nous pensons également que dans ces situations, les pharmaciens devraient pouvoir substituer un produit à un autre dans l'intérêt tant de la rentabilité que dans le but de minimiser les effets secondaires néfastes qu'un patient peut présenter. Nous pensons aussi que les pharmaciens devraient pouvoir prescrire des médicaments pour poursuivre la thérapie si le patient vient à manquer de pilules ou s'il a perdu son flacon ou est en voyage et a oublié le médicament à la maison. Ce sont là des scénarios que les pharmaciens rencontrent chaque jour. Encore une fois, le but n'est pas de se substituer au médecin, mais de combler des lacunes dans le système afin d'améliorer l'accessibilité et minimiser les coûts.

    Dans le premier cas, nous parlons de la faculté des pharmaciens de prescrire des médicaments pour la modification du mode de vie, par exemple une thérapie de sevrage du tabac. Nous parlons de la prescription par les pharmaciens de médicaments pour aider les patients dans des situations d'urgence. Une pratique devenue aujourd'hui courante au Canada est la prescription d'une contraception d'urgence. Ou encore, nous pouvons avoir un patient qui arrive à la pharmacie avec une crise d'asthme que le pharmacien sait comment traiter. Le pharmacien pourra alors lui remettre le médicament voulu pour le dépanner. Troisième exemple dans la catégorie un : le pharmacien pourrait puiser dans une pharmacopée élargie pour traiter des maladies qu'il évalue déjà. Par exemple, les patients s'adressent couramment à un pharmacien comme premier point d'accès au système de santé, et le pharmacien leur pose quelques questions et recommande de l'aspirine ou de l'ibuprofène. Nous disons que le pharmacien devrait pouvoir recommander d'autres médicaments au cas par cas présentant moins d'effets négatifs. Ou bien il peut s'agir d'une maladie saisonnière, pour laquelle le pharmacien possède les renseignements appropriés, lui permettant de prescrire la thérapie appropriée.

  +-(1205)  

    Je souligne, pour terminer, qu'avec ce modèle nous parlons de pharmaciens travaillant à de nombreux points différents du système de santé, nous parlons d'un grand nombre de pharmaciens, d'un grand nombre de patients et de médicaments. Le fondement de cette législation en Alberta, tout comme dans le cas de la médecine ou des sciences infirmières, est que les limites imposées à la pratique de tout professionnel de la santé sont fonction des compétences et capacités individuelles. Les médecins ont un vaste savoir sur le plan du diagnostic. Mais ils ne reçoivent qu'une formation limitée en pharmacothérapie. Les pharmaciens sont dans la situation exactement inverse : ils connaissent très bien les médicaments mais sont peu formés à poser des diagnostics. Et il y a une interface entre les deux champs de savoir qui est similaire dans les deux cas.

+-

    La présidente: Je sais que tout cela est terriblement intéressant et que nous aimerions continuer à poser des questions au Dr Eberhart, mais je vous rappelle, si je fais le calcul à rebours à partir de la fin de la journée, où nous devons prendre l'avion sur un vol bondé et qu'il nous faut être là tous à l'heure pour embarquer, compte tenu des témoins que nous entendrons cet après-midi, qu'il nous reste environ 60 minutes pour libérer nos chambres et déjeuner etc. Je vais donc remercier ces témoins et, si vous voulez continuer à leur parler, je vous en prie, faites-le en tête-à-tête à la fin de cette séance.

    Merci.

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: J'ai un rappel au Règlement.

[Traduction]

+-

    La présidente: Désolée, rappel au Règlement.

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: Comme on n'aura pas le temps d'avoir un second échange avec nos invités, je tiens à ce qu'on ait une note de recherche et qu'on dépose les documents. Je veux que l'on connaisse très bien la chaîne des intermédiaires que vous avez déposée et je pense que votre association doit garder contact avec notre recherchiste afin que nous ayons une copie des documents et que nous ayons une note de recherche pour tous les députés sur la façon dont les choses se passent, pour qu'au moment où on présentera notre rapport, on connaisse très bien cela.

    Peut-être faut-il envisager la possibilité, madame la présidente, que cette association revienne à Ottawa. Les pharmaciens jouent un rôle tellement important qu'ils devraient peut-être revenir, lorsque nous aurons une audience à Ottawa, pour pouvoir approfondir un peu notre compréhension des mécanismes qui sont les leurs.

  -(1210)  

[Traduction]

+-

    La présidente: Excusez-moi, monsieur Ménard, qui souhaitez-vous faire venir à Ottawa?

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: L'Association canadiennes des chaînes de pharmacies.

[Traduction]

+-

    La présidente: L'Association canadienne des chaînes de pharmacies? Vous souhaitez les réentendre, est-ce cela?

[Français]

-

    M. Réal Ménard: Oui, et je veux qu'on ait une note de recherche avec les documents sur ce que les provinces leur donnent et sur leur réglementation, pour qu'on puisse vraiment bien connaître les intermédiaires qui sont les leurs.

[Traduction]

    [Note de la rédaction : Difficultés techniques]

    La présidente: La séance est ajournée.