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ACVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des anciens combattants


NUMÉRO 030 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 20 mars 2007

[Enregistrement électronique]

  (0910)  

[Traduction]

    Good morning, everyone. Bonjour tout le monde.
    Je suis sûr que le président va être ici d'un moment à l'autre. En attendant, je vais occuper le fauteuil à sa place.
    Le quorum réduit est atteint, alors nous allons entendre nos témoins. Nous sommes très reconnaissants à nos témoins d'être ici aujourd'hui pour discuter du sujet qui nous occupe. Nous aimerions accueillir le Colonel Donald S. Ethell —
    Maintenant que le président est ici, je vais reprendre ma place habituelle. Lorsque le président va s'asseoir, veuillez présenter vos collègues, puis continuez comme vous êtes habitués de le faire.
    Merci.
    J'en déduis qu'on vous a présentés? J'ai entendu une personne dire qu'elle voulait se présenter elle-même, alors je vais la laisser faire cela.
    Comme M. Stoffer l'a indiqué, je m'appelle Donald Ethell. Je préside le Conseil consultatif pour le soutien social aux victimes de stress opérationnel. Les deux cogestionnaires m'accompagnent; l'une est du MDN, l'autre d'ACC. Le major Mariane Le Beau est gestionnaire du programme au sein du ministère de la Défense nationale, et Mme Kathy Darte est cogestionnaire à Anciens combattants Canada. Elles sont deux des personnes qui travaillent le plus fort pour les anciens combattants et pour les soldats.
    Des voix: Bravo!
    Col Donald S. Ethell: Elles m'ont payé pour que je dise cela!
    Le Lieutenant-colonel (à la retraite) Jim Jamieson m'accompagne aussi; c'est un travailleur social chevronné, et il est conseiller médical du MDN dans le cadre du programme de SSVSO.
    Puis-je continuer, monsieur?
    Oui, s'il vous plaît.
    On vous a remis un exemplaire imprimé de notre mémoire. C'est un document plein de couleurs et en format PowerPoint, mais il est très facile à lire. Nous allons parler de ce qui se trouve dans ce document pendant notre bref exposé au début, puis, bien entendu, pendant la période de questions.
    Je ne vais évidemment pas lire toutes les diapositives, mais je me propose plutôt d'aborder quelques-uns des points importants et de me concentrer sur ce qu'il y a de neuf au sujet du programme de soutien social aux victimes de stress opérationnel, sur les principaux facteurs qui déterminent le succès du programme et sur les défis importants auxquels l'organisation fait face.
    Je suis convaincu que la plupart d'entre vous connaissez déjà le terme « blessure liée au stress opérationnel ». Au risque de m'écarter de mon sujet pendant un instant, je précise que ce terme a été inventé au Canada, par l'équipe du SSVSO, et on l'a adopté à l'échelle internationale, ce dont nous allons parler lorsque nous aborderons les activités internationales.
    Comme vous le savez, il s'agit non pas d'un terme de diagnostic, mais plutôt d'un terme forgé par l'organisation de SSVSO pour mettre l'accent sur la blessure et contrer l'effet de stigmatisation qui y est lié. Il est maintenant couramment utilisé par les cliniciens et les non-cliniciens comme désignant toute blessure psychique — et, comme je l'ai mentionné, à l'échelle nationale et internationale. Je suis convaincu que, si la question est posée pendant la période de questions, les deux officiers qui seront ici avec moi peuvent témoigner de leur participation à des forums internationaux de l'OTAN, en Europe, et, bien sûr, très souvent, aux États-Unis, où elles ont travaillé avec leurs collègues qui ont servi en Irak.
    Le document de l'exposé présente des renseignements généraux sur le comité consultatif pour le SSVSO. Le groupe a été créé en 2002, et il rassemble les gens intéressés d'Anciens combattants Canada, de la Défense, des organisations d'anciens combattants, de la GRC et du bureau de l'Ombudsman du MDN, ainsi que différents professionnels de la santé mentale trois fois l'an pour fournir des conseils au SSVSO et une rétroaction à la haute direction des deux ministères qui supervisent les activités de SSVSO.
    Vous pourrez prendre connaissance du mandat du comité consultatif en lisant le document, mais, très brièvement, ce mandat consiste à fournir des conseils et une orientation à l'équipe de direction du SSVSO en vue d'améliorer l'exécution du programme, à contribuer au repérage des lacunes ou des manques systémiques du programme de soutien par les pairs, à aider l'équipe de direction du SSVSO à coordonner le programme, à offrir certains volets du réseau de soutien par les pairs en ce qui concerne les organismes et les ministères et à prendre part activement, là où c'est possible et quand c'est possible, au travail de sensibilisation au programme de SSVSO. À titre de président du comité, je le rappelle à tous les membres du comité, tout en reconnaissant que nous n'avons aucun pouvoir exécutif, mais nous les encourageons, comme ils le disent, à répandre la bonne nouvelle en ce qui concerne le succès extraordinaire du programme de soutien par les pairs. Le comité compte 24 membres, et il y a une liste de ces membres dans l'un des documents que l'on vous a remis.
    Le SSVSO lui-même — vous allez remarquer que je passe de « comité » à « SSVSO » — existe au sein du MDN depuis le printemps 2001 et il est le fruit des suggestions du CPDNAC, de la Commission d'enquête sur la Croatie et du bureau de l'Ombudsman du MDN. Peu après, on a reconnu le fait que la responsabilité du bien-être des membres des Forces canadiennes et des anciens combattants est une responsabilité conjointe, et on a conclu un partenariat avec Anciens combattants Canada.
    Il est clair que c'est la vision et la motivation d'un officier, le Lieutenant-colonel Stéphane Grenier, qui sont à l'origine du SSVSO. Il n'est pas ici parce qu'il a terminé son service. Il souffre du SSPT.

  (0915)  

    Il a servi au Rwanda avec le général Dallaire pendant dix mois. Il est rentré à la maison, a reconnu qu'il avait un problème, il a appris à vivre avec ce problème. En fait, il a été déployé au Cambodge, en Haïti, au Liban, et ainsi de suite, et il a continué de lutter contre ce problème. Il va sans dire que, à un moment donné, il a bien discuté avec des supérieurs sympathiques à sa cause, en particulier le général Dallaire, qui était en poste à l'époque, et qui a été suivi par le général Couture — puisse son âme reposer en paix — qui est devenu un champion du programme de SSVSO. En passant, même s'il souffre encore du SSPT, le colonel Stéphane Grenier sert en Afghanistan à titre d'officier des affaires publiques. Il dit qu'il était temps pour lui de faire face à lui-même, et il faut dire que c'est exactement ce qu'il a fait. La gouverneure générale lui a remis la Croix du service méritoire pour la motivation et l'initiative dont il a fait preuve en mettant sur pied le programme.
    Il est passé à autre chose, mais il est remplacé avec compétence par le Major Mariane Le Beau, qui, comme je l'ai mentionné, est un officier qui travaille extrêmement fort et qui est tout à fait dévouée, puisqu'elle a passé de nombreuses années — et qu'elle a servi en Afghanistan. La cogestionnaire, bien entendu, a soutenu Stéphane Grenier dès le départ. Kathy Darte est une des fondatrices, comme nous l'appelons, et elle travaille en collaboration très étroite avec sa collègue du MDN.
    La mission du SSVSO est double : il s'agit d'élaborer des programmes de soutien social à l'intention des membres des Forces, des Anciens combattants et de leur famille affectée par le stress opérationnel et d'offrir l'enseignement et la formation qui permettront éventuellement de modifier la culture des FC au chapitre des blessures psychiques. Je veux mettre l'accent sur le mot « famille », parce que la famille a toujours été une chose importante pour ceux qui portent l'uniforme. Comme j'ai servi à l'occasion de 14 missions différentes et que j'ai dû laisser ma famille derrière moi, la plupart du temps, je suis tout à fait d'accord avec l'accent qu'on met sur les familles avec l'adoption récente de la nouvelle charte des anciens combattants.
    La clé de l'efficacité du soutien par les pairs, qui est au coeur du programme de SSVSO, c'est le choix des bonnes personnes au départ, les coordonnateurs du soutien par les pairs, et, récemment — mais les choses commencent à bouger, à juste titre — leurs pairs, les coordonnateurs du soutien par les pairs-familles. Je vais garder les chiffres pour la période de questions, et ce sont mes collègues qui répondront aux questions.
    En plus du cours de formation de base de deux semaines que les coordonnateurs du soutien par les pairs et les coordonnateurs du soutien par les pairs-familles suivent toujours, le programme de SSVSO comporte aussi, à leur intention, un volet d'enseignement qui a des répercussions profondes, parce qu'on reconnaît leur besoin de prendre soin d'eux-mêmes, ce dont je vais laisser mes collègues parler pendant la période de questions.
    Au bout du compte, l'important est que les membres des Forces, les anciens combattants et les familles qui viennent discuter avec un coordonnateur du soutien par les pairs établissent des liens de confiance, peu importe d'où ils viennent et qui les a aiguillés — techniquement, c'est le MDN ou AAC. Ces gens se rencontrent dans un bureau, ou encore, s'ils n'en ont pas envie, ils peuvent se rencontrer dans un Tim Horton, pour discuter à fond des problèmes et pour que le coordonnateur puisse effectuer une évaluation informelle et les aiguiller en fonction de celle-ci, en créant des liens de confiance avec les membres des Forces et les anciens combattants qui s'adressent à lui, en leur permettant de faire avancer les choses à leur rythme et en leur offrant une épaule sur laquelle s'appuyer. Si vous le souhaitez, nous pouvons vous faire part d'expériences personnelles pendant la période de questions.
    Il est essentiel que les personnes qui travaillent au soutien par les pairs comprennent le rôle qu'ils jouent, comprennent quand ils doivent cesser d'intervenir et soient prêts à recommander leurs pairs à un professionnel, un clinicien. Le danger, pour les coordonnateurs du soutien par les pairs, c'est l'épuisement professionnel, le stress lié à la compassion, le traumatisme, la dépression et la maladie physique. Ce qui est absolument extraordinaire et qui témoigne à la fois des qualités des participants et de l'intensité des soins dispensés par les deux ministères dans le cadre du programme en question, c'est qu'on a connu que très peu de ces problèmes depuis les cinq ans que le programme existe.
    Il y a plusieurs nouvelles initiatives dans le cadre du SSVSO dont il serait intéressant de parler, et nous vous invitons à y revenir pendant la période de questions. La nouvelle initiative de soutien par les pairs en cas de deuil offrira un soutien à la famille immédiate des gens qui ont perdu un être cher pendant son service militaire, et, encore une fois, ce seront les gens qui ont vécu un événement semblable qui offriront le soutien. Je tiens à vous faire remarquer que je mets l'accent sur le mot « pair ».
    Le succès du programme intéresse beaucoup de gens dans le monde, et, comme je l'ai mentionné, les deux cogestionnaires peuvent parler de ces démarches en détail.

  (0920)  

    L'opération de « décompression » dans un tiers lieu qui se déroule à Chypre offre aux membres des Forces qui reviennent de mission en Afghanistan l'occasion de passer quelques jours en transition entre le théâtre des opérations et leur salon, tout cela dans le cadre d'un programme de redéploiement auquel on a apporté des améliorations importantes. Comme j'en ai fait l'expérience moi-même, je peux vous assurer que ce programme fonctionne bien. Nous avons poussé plusieurs personnes qui relevaient de mon commandement et qui avaient été sur les lieux de massacres et ainsi de suite. Nous ne renvoyons pas le capitaine X auprès de sa femme 24 heures plus tard. Il faut qu'il passe par la décompression, ce qui signifie passer trois ou quatre jours ailleurs et peut-être avoir la possibilité de discuter à fond des problèmes, d'obtenir du soutien de la part de ses pairs, qui peuvent lui offrir une épaule sur laquelle s'appuyer, comme je l'ai déjà mentionné.
    Nous avons appris qu'il y a plusieurs facteurs déterminants importants pour le succès d'un programme du genre de celui dont il est question ici. Le premier facteur, qui doit être le plus important, c'est la nécessité de faire participer les pairs dès le début de l'élaboration du programme et des politiques. Un excellent partenariat interministériel est aussi essentiel au succès, tout comme le recours à une équipe de gestion multidisciplinaire. Une autre chose importante a été de mettre l'accent sur le fait, pour les coordonnateurs, de prendre soin d'eux-mêmes et l'établissement de limites réalistes.
    Comme je l'ai mentionné au début, le recrutement et le choix des bonnes personnes est une chose essentielle, et c'est peut-être le domaine dans lequel le programme a été excellent, à mon avis. Pour aider ce noyau d'employés chargés de soutenir les pairs à se reposer, il est nécessaire de recruter, de former et de maintenir en poste un réseau de bénévoles.
    Tout cela est une répercussion d'une collaboration interministérielle qui a commencé il y a dix ans, au moment où les deux ministères étaient chacun à un bout de la table. J'imagine qu'ils se parlaient, mais, depuis la nouvelle charte des Anciens combattants, ou à partir de la création du Conseil consultatif sur les Forces et de ce qui en a découlé — je m'éloigne un peu du sujet — un certain nombre de personnes qui se trouvent dans cette salle ont participé personnellement au processus. Cela faisait vraiment chaud au coeur de voir les deux ministères collaborer. En d'autres termes, comme l'a recommandé le conseil, c'est une démarche homogène. C'est là où nous en sommes rendus aujourd'hui, et ces deux officiers sont ici pour en témoigner.
    En ce qui concerne les défis à relever, ils sont certainement nombreux. Il y a encore, par exemple, un certain nombre d'obstacles systémiques. Certains cliniciens se méfient encore lorsque des personnes qui ne sont pas des professionnels de la santé mentale viennent jouer dans leur plate-bande. Je ne sais pas si je suis autorisé à dire ce que je vais dire, mais, à la lecture des transcriptions des témoignages de certaines personnes que vous avez reçues, je pense qu'on peut constater que les professionnels ont encore des réticences à l'égard du soutien par les pairs. Cependant, d'autres gens qui ont pu apprécier d'eux-mêmes la valeur du travail des coordonnateurs du soutien par les pairs chantent leurs louanges au sein des deux ministères.
    En soi, la simple taille du territoire dont s'occupent de très petits groupes de coordonnateurs du soutien par les pairs et de coordonnateurs du soutien par les pairs-familles est une chose extraordinaire, lorsqu'on sait qu'il n'y a, à l'heure actuelle, que cinq cliniques d'Anciens Combattants Canada traitant les TSO et un certain nombre de CSTSO du MDN. Se rendre à l'endroit où se trouve l'un de nos coordonnateurs du soutien par les pairs peut poser un réel défi, surtout pour les réservistes qui vivent loin d'une base importante.
    Faire grossir le réseau de bénévoles dont j'ai parlé est un autre défi quotidien pour nos CSP — et je pourrais ajouter que cela relève en partie d'eux. Une fois réalisé l'investissement nécessaire pour trouver et former des bénévoles, le défi devient de les maintenir en poste. Les groupes de soutien par les pairs qui sont une partie si importante du programme exigent aussi beaucoup d'efforts et des ressources importantes, parce que de nombreux pairs sont réticents à participer à des rencontres dans les bases. Comme je l'ai déjà mentionné, même trouver un endroit pour se rencontrer peut poser problème. C'est pourquoi j'ai dit que les gens se rencontrent parfois chez McDonald ou chez Tim Horton.
    Je vais revenir là-dessus, parce qu'il y a beaucoup de soldats qui ne sont pas prêts à admettre qu'ils ont un problème. Ils ne veulent pas qu'on les voie entrer dans un « établissement de santé mentale » ou un établissement du genre dans une base militaire. On va les étiqueter, et, à leurs yeux, ce n'est pas une bonne chose ou ce n'est pas viril — si on veut utiliser ce mot — puisqu'ils doivent se redresser et se débarrasser du problème. On leur offre donc différentes possibilités.

  (0925)  

    Le dernier défi de la liste n'est certainement pas le moindre. Il ne fait aucun doute que la culture des Forces canadiennes, en ce qui a trait aux questions de santé mentale, a évolué de façon importante au cours des six dernières années environ. Cependant, il y a encore beaucoup de choses à faire, et, à mon avis, les vieilles habitudes ne vont jamais disparaître complètement. Nous devons continuellement nous battre contre le stigmate rattaché aux blessures liées au stress opérationnel, y compris le SSPT et d'autres problèmes.
    L'enseignement et la formation sont des éléments clés des changements culturels, et, comme c'est souvent le cas, les besoins à court terme ont priorité sur des investissements à long terme. Même pour conserver les acquis des quelques dernières années, il faut déployer des efforts importants, et cela va continuer d'être un défi constant.
    Mesdames et messieurs, juste avant de terminer, je voudrais dire que ce programme qui fonctionne très bien est financé par les deux ministères, bien entendu, et 75 p. 100 des gens qui reçoivent des services sont d'anciens combattants, 25 p. 100, des membres des Forces, plus ou moins quelques points de pourcentage, et les deux officiers qui sont ici vont me corriger si je me trompe. De toute façon, cela ne fait pas grande différence, parce que, monsieur le président, on peut comprendre que ces pourcentages sont ce qu'ils sont en raison du fait que le programme est unique parce que de nombreux anciens combattants, qu'ils aient pris part à une mission en Corée, à Beyrouth, en Yougoslavie ou en ex-Yougoslavie, s'adressent à nous et nous disent : « J'ai un problème »; « J'ai participé à un bombardement effectué à partir d'Aviona et j'ai un problème »; « J'ai participé à l'opération de nettoyage lors de la tragédie de Swiss Air, et j'ai un problème »; « J'étais à bord de l'avion qui s'est écrasé en atterrissant à Alert, et j'ai un problème »; « Je suis un technicien en recherche et sauvetage, et j'ai un problème ». Ces gens arrivent soudainement, et ils sont, dans certains cas, à la retraite. Alors, à mon avis, le programme est vraiment une réussite extraordinaire.
    Merci de votre attention. J'aimerais maintenant vous inviter à poser des questions. Si vous voulez bien me les poser, je vais demander à l'officier le mieux placé pour y répondre de le faire, monsieur.
    Merci beaucoup, Colonel Ethell.
    Je déduis que vous êtes l'orateur principal et que les autres personnes qui vous accompagnent ne vont rien ajouter à ce moment-ci, mais vont intervenir plus tard, lorsque nous poserons des questions?
    Oui, monsieur.
    D'accord. Merci beaucoup, Colonel.
    Très bien. Eh bien, cédons la parole à nos amis libéraux.
    Monsieur Valley, à vous de commencer. Vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup. C'était un exposé très précis.
    J'ai beaucoup de questions; je suis convaincu que le président va m'interrompre. Mais, rapidement, en ce qui concerne votre carte du réseau de soutien par les pairs, est-ce que Shilo, dans le sud du Manitoba, c'est la base?
    Ma fille fréquente l'université de Brandon, et elle faisait partie du personnel de soutien bénévole qui s'est occupé de certains des problèmes lorsque nous avons perdu des gens à la base. Je n'avais pas fait le lien avant de voir la carte et de me rappeler les appels qu'elle avait faits à la maison.
    Vous avez parlé des lacunes et des manques systémiques. Pouvez-vous nous en parler rapidement, ainsi que de la manière dont nous avons comblé la lacune systémique?
    Je vais relayer la question aux deux cogestionnaires, si vous me le permettez.
    Oui, je suis convaincue que nous avons toutes deux des choses à dire à ce sujet.
    Pour moi, l'une des lacunes systémiques les plus importantes est le problème de culture, qui est l'un des derniers éléments qu'on a définis. Je ne crois pas avoir besoin de vous expliquer à quel point les stigmates attachés aux problèmes de santé mentale dans la société canadienne en général sont forts, dans la vie de tous les jours. On se retrouve dans un milieu militaire, où le problème est plus gros, plus complexe, où le stigmate est encore plus fort. C'est donc l'un des défis et des obstacles systémiques importants auxquels nous devons faire face. Nous travaillons vraiment dur pour régler ce problème.
    L'une des choses auxquelles nous travaillons, c'est le bureau des conférenciers. Il s'agit précisément de faire appel à des bénévoles, des pairs, qui ont souffert d'une blessure liée au stress opérationnel, qui se sont rétablis, et qu'on choisit et forme, pour qu'ils animent des séances d'information sur les blessures liées au stress opérationnel au sein des FC, dans le cadre de cours de leadership, de cours de perfectionnement professionnel, afin de faire disparaître les stigmates et régler le problème que pose la culture.

  (0930)  

    Ça a trait à l'enseignement, au fait de parler, de mettre les choses en lumière, pour utiliser des termes simples.
    En effet, monsieur.
    Kathy.
    J'ajouterais à cela, et j'insisterais simplement sur le fait que nous faisons constamment, dans le cadre du programme, un travail de sensibilisation et d'éducation des gens au sujet de ce que c'est de vivre avec une blessure liée au stress opérationnel, de ce que c'est pour les personnes atteintes elles-mêmes, et aussi des répercussions sur leur famille.
    Nous ne luttons pas contre la culture en place. Comme je fais partie du programme depuis le tout début, j'ai vu une réduction considérable des lacunes. Il y avait de nombreuses lacunes lorsque le Lieutenant-colonel Grenier et moi avons commencé à travailler en 2001-2002, mais il y a eu des changements positifs importants.
    Toutes les personnes qui travaillent dans le cadre du programme et qui offrent leur soutien ont eux-mêmes une blessure, tous les travailleurs qui s'occupent du soutien; nous les appelons coordonnateurs du soutien par les pairs. Pour tous ces gens, on a posé un diagnostic de syndrome du stress post-traumatique, le trouble de l'anxiété ou de dépression. Ces gens ont tous été traités. Ils se sont tous rétablis et sont en mesure de continuer à travailler au quotidien. C'est quelque chose de très exigeant que de travailler avec des gens qui en sont là où on en était il y a de nombreuses années. Ce qu'ils sont, c'est une source d'espoir, parce qu'ils deviennent un excellent exemple de gens auprès desquels on est intervenu rapidement, qui ont suivi un traitement, sans l'abandonner, et cela montre qu'il est possible de se rétablir et de revenir dans l'état dans lequel on était avant la blessure.
    Nous sommes donc tout à fait conscients de cela, et nous travaillons très dur pour nous assurer de préserver la santé et le bien-être des gens qui travaillent au programme, pour qu'ils demeurent en santé et puissent continuer de travailler, parce qu'il s'agit d'un travail très, très exigeant.
    Merci.
    Colonel, vous avez mentionné le fait qu'on met l'accent sur la famille, le soutien social aux familles, dont nous avons beaucoup parlé ici. Votre passion de la famille est très évidente. Pouvez-vous nous dire quand cela a commencé? Vous nous avez raconté toute une histoire. Quand avons-nous pris conscience du fait que la famille était l'élément le plus important du réseau de soutien, l'élément qui doit être là pour que la blessure liée à ce genre de stress puisse guérir? Est-ce que ça toujours été comme ça? Est-ce il y a 30 ou 40 ans? Il y a 10 ou 15 ans?
    C'est un bon point. Je dirais qu'il faut remonter 40 ans en arrière. Je me rappelle l'époque où nous étions stationnés en Allemagne — une jeune famille — de 1960 à 1963, avec un bataillon. C'est au moment de la construction du Mur de Berlin et de la crise cubaine, et ainsi de suite. Lorsque les soldats étaient déployés, ils se préoccupaient toujours de ce qui allait advenir de leur famille. Eh bien, il fallait trouver une manière de se rendre jusqu'à la base, avant d'être renvoyé au Canada. C'était ce qui tenait lieu de soutien familial. Dieu merci, il y avait le système régimentaire, qui s'appliquait.
    Depuis, cependant — je fais un bond en avant dans le temps —, comme je ne cesse de le rappeler, le conseil consultatif d'Anciens combattants Canada et des Forces canadiennes s'est vu confier la tâche de formuler des recommandations au sujet d'une charte : il fallait soit modifier l'ancienne charte soit en rédiger une nouvelle. Pendant les délibérations, M. Pierre Allard, qui est ici aujourd'hui, de la Légion royale canadienne, était membre de ce conseil, comme moi, et on a demandé à un certain nombre d'entre nous de se rendre dans les différentes bases pour avoir des discussions informelles avec les soldats, de 30 à 40 personnes, dont les rangs allaient de simples soldats à capitaines, deux ou trois anciens adjudants, sans qu'on relève les noms, pour organiser une table ronde et discuter, avec le consentement du commandant de la base, celui du QGDN, et ainsi de suite. Nous étions censés faire cela trois fois — une fois pour l'armée, une fois pour la marine et une fois pour la force aérienne — mais nous avons fini par le faire 18 fois.
    En même temps que nous, il y avait là-bas deux membres féminins de notre conseil qui étaient là pour parler aux familles, parfois au centre de ressources pour les familles des militaires, et parfois les gens ne voulaient pas se rencontrer là-bas, et ils se rencontraient ailleurs, en comités réduits. Les soldats avec qui nous avons discuté, et pas seulement eux, ont exprimé haut et fort qu'ils étaient vraiment surchargés et stressés au plus haut point. Ils étaient stressés, et les gens qui étaient laissés derrière eux l'étaient aussi. Si, sur une section de quatre soldats, trois étaient partis, et qu'une personne devait tout faire, quel effet cela avait-il sur la famille? Notre équipe chargée du soutien à la famille l'a exprimé haut et fort lorsque nous avons présenté un exposé au sous-ministre et à d'autres intervenants, et, au bout du compte, au ministre, et on a accepté que, parmi toutes les choses que nous envisagions à l'époque, la famille figure en haut de la liste. Croyez-le ou non, la famille allait être au premier plan, avant même les anciens combattants.
    Le ministre et son ministère ont accepté et adopté le rapport en question en rédigeant la nouvelle charte des anciens combattants, et ainsi de suite. C'est donc comme ça que les choses ont commencé. Depuis, évidemment, comme vous l'avez entendu dire, le programme a évolué au cours des cinq dernières années. Stéphane Grenier l'a écrit au début, assis à sa table de cuisine de cuisine : Comment vais-je influencer le système afin d'aider mes pairs? En passant, ma femme aussi a un problème, parce que je suis devenu renfermé. Je suis devenu renfermé, elle est devenue renfermée, et cela a un effet sur la famille.
    Ce n'est pas une chose propre à M. Grenier, c'est une chose qui caractérise un certain nombre d'entre nous qui sommes passés par là : où pouvons-nous obtenir de l'aide? La famille fait donc partie du processus, mais il faut être capable de marcher avant de pouvoir courir. L'idée était la suivante : avec l'aide des deux champions du programme de SSVSO à l'époque, le Général Couture et le SMA Brian Ferguson du ministère des Anciens combattants, allons de l'avant, faisons en sorte que les pairs puissent courir, et nous allons régler les problèmes liés à la famille.
    Cela donne peut-être l'impression qu'on a dit eh bien, d'accord, amenez la famille. On a amené la famille, et, maintenant, on rassemble les soldats et leur famille, et on s'occupe de tout le monde. J'empiète sur le domaine des deux cogestionnaires, mais de mon point de vue, on s'occupe à la fois des soldats et de leur famille. Bien sûr, il y a beaucoup de travail à faire.
    Kathy ou Mariane, voulez-vous ajouter quelque chose?

  (0935)  

    Le Colonel Ethell a raison, oui, les familles ont toujours fait partie du programme de SSVSO. Notre énoncé de mission précise que le programme vise les membres des FC, les anciens combattants et leur famille. Les familles n'ont jamais été exclues de notre programme. Elles en font partie depuis le tout début, en ce qui concerne ce pourquoi le programme a été conçu.
    Le programme était au départ un projet. Dans le cadre du projet pilote, nous avons commencé avec quatre personnes seulement, qui se trouvaient à être d'anciens combattants eux-mêmes. Nous avons ensuite mis en oeuvre le volet famille. En 2005, le volet famille du programme était prêt.
    Alors oui, les familles font tout à fait partie du programme de SSVSO.
    Merci.
    J'aimerais ajouter quelque chose.
    Comme je ne participe au programme que depuis l'été dernier, j'ai l'impression d'avoir un point de vue tout à fait objectif sur celui-ci, et je veux que ce soit clair qu'il n'y a pas eu de modèle. Le programme de SSVSO est un programme unique. Il n'existe pas de programme semblable ailleurs. La formation et le fonctionnement du programme sont uniques. Les choses ont commencé lentement, avec quatre coordonnateurs du soutien par les pairs, et nous en aurons bientôt 30.
    C'est tout ce que je voulais ajouter.
    Merci. Votre passion est évidente.
    Merci, monsieur Valley.
    Monsieur Perron, vous avez sept minutes.

[Français]

    Messieurs, mesdames, bonjour et bienvenue.
    Je vais essayer de vous diriger vers un dossier similaire, qui fait partie de la situation mais dont on ne traite pas assez. Oui, il est bien que nous reconnaissions les gens qui souffrent du SSPT, mais quels efforts faisons-nous pour le prévenir? Je m'adresse surtout à Mme Le Beau, parce que je me pose des questions. Lorsqu'elles sont déployées dans un champ de bataille ou un terrain de guerre, les recrues reçoivent-elles vraiment une formation qui leur permet de s'auto-évaluer, de détecter des problèmes de stress et de décider de consulter quelqu'un immédiatement? Sont-elles assez formées à cet effet?
    Deuxièmement, y a-t-il du personnel compétent, des psychologues, etc.? Je me suis laissé dire qu'en Afghanistan, par exemple, si on découvre que quelqu'un a des symptômes de stress post-traumatique, on l'envoie voir un Américain ou autre ou l'aumônier. Avons-nous du personnel compétent?
    Ma dernière question est vraiment typique. Il n'y a pas de réponse, mais je la pose quand même. Si on pouvait avoir un bon système, s'organiser et contribuer à l'effort surhumain que vous faites quand ils reviennent de là-bas, de combien d'argent aurait-on besoin? On court après l'argent. Serait-ce plus avantageux d'investir dans du personnel qualifié pour traiter les gens que d'acheter un avion C-130 ou C-17? Quelles sont nos priorités en termes d'investissements?

  (0940)  

[Traduction]

    Je vais demander au Major Le Beau de répondre à la première question, puis je vais répondre à la deuxième.
    En fait, puisque M. Jim Jamieson est le conseiller médical des Forces canadiennes pour le SSVSO —
    C'est un bon point.
    — Je vais lui demander d'intervenir aussi.

[Français]

    J'aimerais répondre en français.
    En ce qui concerne les recrues, vous demandez quelle formation elles reçoivent. Depuis deux ans, le Programme de soutien social aux victimes de stress opérationnel, notre programme, offre de façon systématique à toutes les recrues qui entrent dans les Forces armées canadiennes une session d'environ trois heures et demie sur les blessures de stress opérationnel. C'est quand même considérable comme effort, c'est beaucoup d'heures de formation.
    Trois heures et demie par recrue, c'est beaucoup d'heures?
    Une demi-journée durant le cours des recrues, c'est la première étape. La deuxième étape a lieu durant les cours de caporal-chef. À compter du mois d'août, il y aura de la formation de l'Académie canadienne de la Défense. On parle seulement de blessures de stress opérationnel, dans ce cas-ci, monsieur Perron. On ne parle pas nécessairement de gestion du stress ou d'autres techniques de leadership, mais cela fait quand même partie du big picture. Ce sera de plus en plus intégré à tous les cours de leadership des Forces armées canadiennes. Il y a aussi le perfectionnement professionnel, c'est-à-dire une unité ou une base qui organise des journées de formation, et nos pairs, nos coordonnateurs vont sur place et donnent de la formation sur les blessures de stress opérationnel.
    Depuis cinq ans que le programme existe, on constate une progression quant aux demandes, quant à la façon dont il est sollicité et offert. On constate que les gens le connaissent de plus en plus. Est-ce parfait, monsieur Perron? Non, c'est sûr et certain. Il y a encore des gens dans les Forces armées canadiennes qui connaissent très peu les blessures de stress opérationnel, mais on a fait un bon bout de chemin.

[Traduction]

    Jim, en ce qui concerne les compétences —

[Français]

    Madame, avant de passer à une autre question, on vient d'apprendre qu'on a envoyé le Royal 22e Régiment aux États-Unis s'entraîner à faire la guerre en Afghanistan. Durant ce séjour, a-t-on parlé aux soldats de stress post-traumatique et de la manière d'en reconnaître les symptômes? Je ne crois pas.
    Je ne peux pas vous dire si on l'a fait dans le cadre de cette formation en particulier, mais je sais qu'il y a eu de la formation à Valcartier. Ils ont organisé la formation de pairs aidants. Ils ont un programme de résilience, justement élaboré par Mme Routhier, qui a été nommée ici, je crois, pour la préparation des soldats qui seront déployés en Afghanistan. Il y a donc des choses qui se passent, effectivement.
    En termes du personnel en Afghanistan —

[Traduction]

J'aimerais que M. Jamieson réponde à cette question, puisque c'est un domaine qu'il connaît très bien.
    De manière générale, un processus exhaustif de surveillance et d'enseignement a lieu avant le déploiement. Le processus prend maintenant plusieurs semaines, et une grande partie de celui-ci porte sur les préoccupations liées à la santé mentale et les premiers soins en santé mentale. De plus, monsieur, comme vous le savez peut-être, nous déployons à l'heure actuelle une équipe de spécialistes en santé mentale chaque fois que nous déployons des soldats. Il y a toujours des travailleurs sociaux, des infirmières spécialistes de la santé mentale et, habituellement, un psychiatre sur le lieu des opérations, et nous ajoutons maintenant des psychologues cliniciens spécialistes de la santé mentale.
    Après le déploiement, la surveillance est très rigoureuse, avec suivi après six mois. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour encourager les familles à participer, mais nous ne pouvons pas les y forcer. Par l'intermédiaire des centres de ressources pour les familles des militaires, dont M. Valley a parlé, on déploie des efforts considérables pour aider les familles avant le déploiement, pendant celui-ci et après. Nous pouvons entrer dans les détails, mais je ne pense pas qu'il y a de problèmes de ressources concernant cette partie du programme. Je pense que nous devons en faire plus pour les familles. J'espérais que quelqu'un me demande de formuler un commentaire là-dessus lorsque M. Valley a posé la question. Il y a des lacunes systémiques en ce qui concerne les familles.
    Nos principales bases opérationnelles, comme Valcartier et, assurément, Petawawa et Gagetown, ne sont pas situées près de centres urbains importants. Aux États-Unis, les familles des militaires en service obtiennent des soins médicaux de l'armée. Nous ne faisons pas cela au Canada, et, dans des endroits comme Petawawa, il y a d'importantes lacunes systémiques, et il est même difficile de trouver un médecin de famille, et encore plus d'obtenir des soins spécialisés pour la famille ou pour un enfant, lorsqu'il y a des préoccupations liées à la santé mentale. L'enseignement et la surveillance sont de bonnes choses, mais si on ne dispose pas des ressources nécessaires pour aiguiller les gens et leur permettre d'obtenir l'aide dont ils ont besoin, c'est là que se trouve la lacune systémique, à mon avis.

  (0945)  

    Et en ce qui concerne la dernière partie de ma question, Donald?
    Désolé, j'écoutais le Colonel Jamieson. Il est parfois difficile de comprendre les problèmes des familles qui se trouvent loin d'un centre urbain important. C'est comme ça, c'est tout. Il manque beaucoup de médecins, de généralistes, à l'échelle du pays, et encore davantage de psychiatres et de psychologues.
    Votre deuxième question portait sur le fait d'investir davantage dans la formation de personnel qualifié que pour l'achat d'avions. Vous avez dit que vous n'aviez pas besoin qu'on y réponde, mais je vais quand même vous répondre. La réponse est la suivante: je ne peux répondre à la question, parce que c'est une question qui a trait au ministère. L'affectation des ressources à l'équipement militaire relève du MDN.

[Français]

    Vous manque-t-il des fonds?

[Traduction]

    Monsieur le président, le major Lebeau et Mme Darte peuvent si vous le souhaitez, décrire plus tard la répartition des fonds. Elles peuvent vous parler des fonds dont elles disposent à l'heure actuelle, et peut-être de ce qu'elles ont demandé pour l'avenir.
    Je peux peut-être faire un bref commentaire.
    La part du budget du MDN consacré aux services de santé mentale aura doublé en 2010, par rapport à 2005. Le nombre de spécialistes est passé de 212 à un peu plus de 400. Je pense qu'on a vraiment pris conscience du fait que nous avions besoin de plus de ressources, et il y a assurément eu un mouvement important dans ce domaine.
    Merci.
    Nous allons passer la parole à M. Stoffer, du NPD. Monsieur Stoffer, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup à tous de l'exposé que vous nous avez présenté.
    Comme vous le savez probablement, il y a un certain temps, il y a eu dans le journal une histoire à propos des enfants de Petawawa. Certains de ces enfants vivent une angoisse mentale assez grave. Dans le journal, on disait que les gens ne s'entendaient pas pour dire qui devrait s'occuper de soins de santé mentale des enfants de la base, la province ou le gouvernement fédéral.
    Mon avis personnel à moi, c'est que ces enfants se trouvent sur une base militaire; il faudrait donc que ce soit l'administration militaire, le gouvernement fédéral, qui s'occupe d'eux. Tout de même, certains font valoir que la question relèverait de la province.
    À votre avis, qui devrait, grâce au SSVSO, s'occuper des enfants dans ce cas particulier, à Petawawa?
    On peut remonter à l'époque où nous avions de nombreux soldats en Europe avec les familles et ainsi de suite — si je comprends bien, c'était une responsabilité du MDN. Cette époque est révolue.
    J'aimerais que Jim Jamieson réponde à la question. C'est un point très important. Nous en avons parlé, mais il s'est attaqué à la question personnellement.
    Au ministère, certains d'entre nous exercent de très grandes pressions en faveur de mesures qui soient plus bénéfiques aux familles, tout à fait comme vous le dites. Comme je l'ai déjà mentionné, c'est un problème d'une importance critique.
    Permettez-moi d'utiliser Gagetown comme exemple : j'y connais mieux la situation. Nous avions de l'argent pour la pédopsychiatrie, la pédopsychologie ainsi que la psychologie générale et la psychiatrie. Nous n'arriverons pas à trouver des gens qui sont prêts à se rendre dans ces endroits-là. C'est donc en partie un problème de ressources, en partie un problème d'emplacement.
    Comme le colonel Ethell l'a souligné, par le passé, nous avons fourni des soins médicaux directs à nos familles. C'est une responsabilité provinciale, et voilà le dilemme dans lequel nous sommes pris. Je dois dire tout de même que, même dans le meilleur des mondes, il serait difficile d'avoir un nombre suffisant de psychologues cliniciens pour les enfants dans la région de Pembroke-Petawawa.
    Qui devrait s'en occuper? Officiellement, c'est la province qui devrait le faire. C'est ce que dit la loi.
    J'imagine que nous n'avons pas le droit d'exprimer d'avis personnels, mais je crois que mon avis à moi est assez évident pour ce qui est de savoir ce que nous devrions faire — nous devrions en faire beaucoup plus.

  (0950)  

    Si vous le permettez, monsieur Stoffer, j'aimerais revenir à un témoignage présenté au sous-comité sénatorial le 22 novembre, celui du général Yaeger, le médecin-chef. On lui a demandé: « Est-ce une question d'argent? » Le général Yaeger a donné la réponse suivante :
Non, sénateur, le problème n'est pas l'argent. Il s'agit de la disponibilité de personnes bien formées qui acceptent de travailler pour nous, soit en uniforme ou à titre de fonctionnaires ou de civils à contrat.
Si j'avais une baguette magique, je ferais apparaître des fournisseurs de soins de santé mentale. Aujourd'hui, leur embauche est notre plus important défi.
    Et c'est ce que faisait valoir Jim Jamieson.
    D'accord.
    Dans votre mémoire, j'ai vu qu'il y a des cercles qui recoupent le MDN et AAC. Ils sont combinés. Mais Santé Canada aurait un rôle à jouer dans tout cela. Quel rôle jouerait Santé Canada pour aider le SSVSO et les gens de cette organisation? Joueraient-ils un rôle?
    Je vais demander à Kathy Darte de parler de l'hôpital Sainte-Anne et ainsi de suite.
    Nous n'avons pas travaillé directement avec Santé Canada. Les cercles illustrés font voir le partenariat qui existe pour ce programme particulier. Dans le cas de ce programme particulier, il n'y a pas de critères d'admissibilité pour accéder aux services du SSVSO. Lorsque des familles et des enfants se présentent pour accéder aux services de notre programme — et il y a bien des enfants qui se présentent individuellement —, nous essayons de les brancher sur ce qui se trouve à être disponible dans leurs régions respectives. Alors, avec les familles, oui, c'est un défi. Nous devons regarder, à partir du programme du SSVSO, ce qui est offert au sein de la collectivité, mais, en même temps, ce qui est offert par le MDN et ce qui est offert par Anciens Combattants : il y a certainement des programmes qui sont offerts.
    Par exemple, aux Anciens Combattants et aussi au MDN, il y a une ligne d'assistance 1-800, pour du counselling. C'est offert 24 heures sur 24, sept jours sur sept. Du côté militaire, ça s'appelle le Programme d'aide aux membres des Forces canadiennes. Aux Anciens Combattants, ça s'appelle le Service d'aide d'Anciens Combattants Canada. Les gens peuvent composer le numéro de ce service à tout instant pour parler de n'importe quel problème, y compris un problème psychologique. Il existe d'autres sortes de problèmes qui font surface, mais nous allons nous attacher aux problèmes psychologiques. Les coûts sont couverts par un ministère ou un autre : la seule question qui est posée à la personne qui appelle est la suivante : « Êtes-vous encore dans l'armée ou avez-vous quitté l'armée? » C'est seulement pour envoyer la facture au bon ministère, qu'il s'agisse du MDN ou d'Anciens Combattants. Les gens peuvent recevoir jusqu'à huit séances de counselling — counselling familial, counselling individuel ou counselling pour les enfants. Il est à espérer que, grâce à ce programme, les gens vont avoir accès à des conseillers dans leur secteur. C'est un point de départ, pour qu'ils puissent être mis en relation avec un spécialiste de leur domaine, dans leurs régions respectives. C'est donc une des choses qui est offerte.
    Et, grâce au SSVSO, nous dirigeons un certain nombre de personnes vers des spécialistes ou les mettons au fait qu'un service est offert.
    J'ai deux questions rapides à vous poser.
    Bon nombre de réservistes ne font pas partie d'une base militaire, bien entendu. Ils travaillent pour Postes Canada, et ils reviennent à la maison et retournent à leur lieu de travail habituel. Ils ne profitent pas de la camaraderie qui existe dans une base militaire et n'ont pas accès à d'autres militaires avec qui partager leurs expériences. Il y a une explication ici qui dit que si vous comprenez, c'est simple à expliquer; si vous ne comprenez pas, il n'y a pas d'explications à donner.
    J'ai trouvé que c'était très bon. Tout de même, comment ce programme aide-t-il les réservistes et leur famille?
    De même, Major Le Beau, vous dites qu'il n'y a pas de programme nulle part ailleurs. Dites-vous qu'il n'y a pas de programme comme celui-là dans nos pays membres de l'OTAN? Est-ce que certains de nos alliés à l'OTAN ont un programme semblable? Le cas échéant, est-ce que nous coordonnons les choses ou échangeons les informations pour voir quelles sont les meilleures pratiques en Hollande, en Australie ou aux États-Unis, les façons de s'occuper de ces problèmes particuliers?
    Cette citation provient de Stéphane Grenier, soit dit en passant. C'est une citation très célèbre, justement.

  (0955)  

    Oui, c'est très bon, de fait. Je vais m'en servir.
    C'est un problème qui est toujours là dans le cas des réservistes. Ils disparaissent. Parfois, ils ne veulent rien savoir de l'armée. De fait, dans certains cas, il y a des membres de la force régulière qui souhaitent simplement fermer cette porte et s'en aller. C'est difficile. Je sais que j'aborde le domaine d'intérêt du Major Le Beau, mais c'est un fait qui se confirme depuis des années; les gens disparaissent simplement.
    Cela dit, s'ils se présentent à l'un quelconque des CSP ou des FPMC, l'aide est là. De fait, ils s'adresseront à n'importe qui s'ils ont un problème concernant l'armée.
    Mariane.
    C'est un fait, cela ne nous importe pas, que vous soyez membres de la réserve régulière ou en service de classe A, de classe B, de classe C. Du point de vue des services que nous offrons au SSVSO, cela n'a aucune importance.
    Je dirais que les unités de la réserve elle-même sont davantage conscientes du problème des réservistes. Et nous avons été appelés — davantage au cours de la dernière année, de fait, qu'auparavant — à tenir des séances d'information à l'intention des unités de la réserve. Encore une fois, c'est processus, et nous y arrivons. C'est la première fois.
    Pour ce qui est du genre de programme que représente le SSVSO, il y a des variantes. Tout de même, je pourrais m'installer avec vous et vous expliquer vraiment dans le détail comment fonctionne le travail des pairs, du fait que nous ne les considérons pas comme des conseillers. Il y a eu des programmes de consultation des pairs aux États-Unis dans le passé. Nous leur donnions une formation de conseiller et ils devenaient conseillers. Nous avons décidé de ne pas faire cela. Nos pairs ne sont pas conseillers; ce sont des pairs, et ils ne s'occupent pas de counselling.
    De ce point de vue, dans le cas de l'OTAN, autant que je sache, c'est comme dire qu'il n'y a pas deux flocons de neige qui soient tout à fait pareils. Il vous faut voir tous les flocons de neige. Autant que je sache, il n'y pas de programme et, dans la documentation, il n'y a pas de programme qui soit exactement comme le SSVSO, et nous échangeons bel et bien des informations avec nos collègues.
    Kathy, voulez-vous prendre le relais?
    Pour répondre à votre question au sujet des réservistes, je tiens à souligner, comme je l'ai dit plus tôt, que tout le monde est le bienvenu au programme du SSVSO. Qu'ils soient en uniforme ou non, nous les servons tous.
    Il y a un certain nombre de réservistes qui se sont présentés et se sont prévalus des services du programme de SSVSO. Un des travailleurs dûment formés en soutien par les pairs dans le cas du programme est lui-même membre de la réserve. Il s'appelle Vince Tytler, et il travaille à Vancouver.
    Pour une bonne part, le rôle du coordonnateur consiste à se faire connaître dans sa région géographique, et cela consiste en partie en un réseautage. En partie, il s'agit de sortir et de prendre la parole devant les unités de la réserve, de dire aux gens ce qu'est le programme de SSVSO et les services qui sont offerts, et répandre la bonne nouvelle pour ainsi dire.
    En partie, notre programme sert non seulement à fournir une aide individuelle aux gens, mais aussi à réunir les Anciens Combattants et les membres des forces dans un contexte de groupe. À ces réunions de groupe, il y a des membres de la réserve. Ils viennent et rencontrent des pairs, d'autres grands amis, d'autres membres de la réserve, d'autres membres des forces régulières et d'autres Anciens Combattants. C'est du bouche à oreille.
    C'est un défi : vous avez tout à fait raison, ils s'en retournent chez eux. Il nous faut donc simplement nous appliquer toujours à faire un travail de sensibilisation et d'éducation, et à faire en sorte que le programme soit connu.
    Pour ce qui est de la scène internationale et des meilleures pratiques, c'est une très bonne question. Nous — les gestionnaires, le Lieutenant-colonel Grenier, le Major Le Beau et moi-même —, nous avons présenté notre programme sur la scène internationale, à plusieurs occasions. Nous savons que nous avons un programme qui est tout à fait unique.
    Il n'y a nulle part ailleurs dans le monde un programme qui ressemble au nôtre, pour ce qui est de la manière dont nous l'avons mis sur pied. D'autres pays se tournent vers nous. Ils veulent entendre parler du programme; nous l'avons donc présenté en Australie, aux États-Unis, en Europe. Nous sommes invités à retourner en Europe cette année. Nous avons présenté le programme à l'OTAN.
    Dans le monde, il existe plusieurs programmes que les administrations militaires et les responsables des Anciens Combattants ont mis sur pied, mais ces programmes sont légèrement différents du nôtre. Je crois que notre succès tient en partie — et ce sont les autres pays qui l'ont relevé — au fait que Anciens Combattants et la Défense nationale travaillent ensemble au programme. Il n'y a pas de programme distinct pour Anciens Combattants dans un ministère des Anciens Combattants et un autre programme à la Défense. Il y a un programme pour tous, que vous portiez encore l'uniforme ou non, et pour les familles.
    De même, nos collègues à l'étranger nous parlent des paramètres du programme et de l'importance que nous y attachons. Les personnes qui y travaillent sont très bien formées. Nous ne nous contentons pas de les engager pour simplement les envoyer travailler. Ce sont les mêmes critères de sélection qui s'appliquent à tous, c'est-à-dire qu'il faut que ce soit un ancien combattant — la personne doit avoir servi dans les Forces — et elle doit avoir été blessée.
    Puis, nous formons la personne. Nous offrons une formation approfondie, qui se déroule à l'hôpital Sainte-Anne. Le personnel des Anciens Combattants chargé des questions de santé mentale à l'hôpital Sainte-Anne, aux côtés d'autres personnes de la Défense nationale et du ministère des Anciens Combattants, offre la formation. C'est une formation presque sans interruption. Ça ne s'arrête pas. Nous renforçons la formation continuellement.
    L'autre élément auquel nous attachons de l'importance dans notre programme, c'est la question des limites — il faut que vous vous limitiez au rôle qui vous est donné — et à l'auto-administration des soins, car pour travailler avec les autres, il faut savoir se soigner soi-même.
    Je crois que les autres pays remarquent donc qu'il s'agit d'un programme très officiel. C'est officiel du fait de la manière dont nous l'avons mis sur pied et de la manière dont nous continuons à surveiller les gens. Nous avons besoin de les surveiller toujours. Le Dr Richardson —qui est le conseiller médical des Anciens Combattants rattaché au programme et qui, malheureusement, ne pouvait comparaître aujourd'hui parce qu'il est en vacances — et moi-même suivons ces gens au moyen d'une recherche à long terme, en étudiant leur santé et leur bien-être. Nous mesurons leur santé au moment où ils commencent à faire ce travail pour nous, puis nous mesurons continuellement leur santé au fil de leur emploi chez nous.
    Essentiellement, ce que nous constatons, c'est qu'il n'y a pas de diminution du niveau de santé des personnes en question. De fait, elles se portent mieux, et c'est parce qu'elles sont maintenant en mesure de se remettre à travailler, de contribuer à la société et d'aider d'autres personnes qui se trouvent dans la même situation qu'elles.

  (1000)  

    Monsieur le président, j'aimerais revenir à ce que M. Stoffer a évoqué tout à l'heure, et c'est très important : c'est la question des membres de la réserve qui disparaissent. Veuillez me corriger si je me trompe, Mariane, mais tous les conseillers en soutien par les pairs sont d'ex-MR et non pas des officiers. Il y a une bonne raison à cela : les officiers dirigent, alors que les MR dirigent les hommes sur le terrain. Ensuite, le Sergent Bloggins aura plus de facilité à discuter avec le Sergent-major ou le Caporal Smith, plutôt qu'avec le Colonel Untel, si bon que soit ce dernier, qu'il porte encore l'uniforme ou non.
    L'autre question concerne les personnes qui disparaissent entre les mailles du filet, qu'il s'agisse de réservistes ou non. Je ne suis pas psychiatre, mais je sais très bien — et d'autres qui évoluent dans notre secteur le savent très bien aussi — que l'effet des situations stressantes est cumulatif — les massacres de Sabra et de Shatila, la Bosnie, puis un tour en Afghanistan et ainsi de suite. Les jeunes, les soldats qui s'y trouvent en ce moment, ne le savent peut-être pas, mais, dans deux ou trois ans, comme c'est arrivé à Grenier dans une certaine mesure, cela va s'accélérer et s'intensifier. Son problème s'est intensifié. Cela dit, les gens ne savent pas que, s'il y a un problème qui se présente, ils peuvent revenir; ils n'ont pas à aller se cacher dans un trou ou à aller vivre dans le bois et ainsi de suite. Ils peuvent revenir, s'en aller au bureau régional d'ACC ou repérer un pair, un CSP, et demander : Qu'est-ce que je fais? Peux-tu m'aider? Où est-ce que je vais? Chez qui peux-tu m'envoyer? C'est un des points forts du programme.
    Monsieur Stoffer, nous nous retrouvons dans une situation incroyable. Étant donné la durée des réponses données par les témoins, vous avez eu trois fois le temps qui est normalement accordé. Impressionnant.
    Écoutons maintenant Mme Hinton, pendant sept minutes.
    J'ai eu l'occasion de rencontrer le Colonel Ethell à plusieurs reprises. J'aimerais formuler quelques observations, puis poser une question aux quatre témoins.
    Je tiens à dire à quel point j'apprécie votre candeur; habituellement, vous dites exactement ce que vous pensez, ce qui correspond exactement à ce que nous souhaitons entendre ici. Vous avez tout de même fait une observation tout à l'heure à propos du programme de consultation des pairs, et vous avez parlé de psychologues et de psychiatres, pour qui je sais que vous avez un grand respect, mais votre observation m'a frappée. Je crois vous avoir entendu dire que rien ne remplace l'expérience, et c'est pourquoi vous attachez tant d'importance à un programme de consultation des pairs. Il se trouve que je suis d'accord avec vous. Je crois que celui qui a vécu la situation est nettement mieux placé pour soutenir l'autre, qui est aux prises avec les mêmes types de traumatismes, et je suis très heureuse d'entendre des précisions sur le programme de consultation des pairs. Cela me semble très intéressant.
    Je voulais dire aussi que j'ai énormément de respect pour tout le monde qui travaille au comité, mais nous ne serons peut-être pas d'accord, M. Perron et moi, sur une question qu'il a évoquée. Je crois qu'il y aurait davantage de stress si l'avion, le camion, le char d'assaut ou les autres instruments nécessaires pour faire leur travail n'y étaient pas. Je crois que cela ajouterait au stress que vivent nos soldats quotidiennement.
    Pour ce qui est des réservistes, il y a dans ma circonscription un des meilleurs groupes que l'on puisse trouver au pays à cet égard; ce sont les Rocky Mountain Rangers. Je sais que les gens peuvent se parler entre eux et qu'ils ont accès à un lieu où ils peuvent se rassembler. J'espère qu'il y a une sorte de groupe d'entraide. Le Major Le Beau a insisté là-dessus aujourd'hui: que ces genres de programmes soient accessibles et que les gens puissent aller chercher de l'aide. Voilà donc une chose positive.
    À tous les quatre, je vais poser une question que j'ai posée à tous les témoins qui sont venus s'adresser au comité à propos de cette question. Jusqu'à maintenant, personne n'a réussi à y répondre. Comment pensez-vous que le ministère des Anciens Combattants du Canada peut aider à modifier le stéréotype négatif qui est entretenu à propos des Anciens Combattants qui souffrent en silence de stress post-traumatique?

  (1005)  

    Merci. C'est une excellente question.
    D'abord et avant tout, je vous remercie de ces remarques bienveillantes. Elles sont appréciées.
    J'aborderai votre question dans une minute, mais, d'abord, je reviendrais à la question de l'expérience que vous avez évoquée en ce qui concerne les cliniciens, les psychologues et ainsi de suite... comme vous le savez peut-être, les premiers ont été envoyés sur le terrain pendant deux ou trois semaines, au début, en Bosnie, période trop courte. Y étant allé, j'ai vu que les soldats les regardaient d'un oeil noir — un truc du genre « J'arrive du QGDN et je suis là pour vous aider ». Les soldats aimeraient bien mieux s'entretenir avec leurs pairs.
    Cela dit, d'après ce que j'en sais — et j'exprime un avis personnel —, le système de santé des Forces canadiennes cherche à envoyer du personnel clinique sur le terrain même en Afghanistan, comme vous l'avez entendu dire. Il y a une personne sur place. Le psychiatre en chef revient à peine d'une tournée de quatre mois, et il y en a deux qui l'ont remplacé. Il y a une personne à Halifax qui, à un moment donné, était médecin d'unité au Rwanda et médecin d'unité sur le plateau de Golan, qui a une formation de spécialiste et qui est allé non pas une fois, mais deux fois en Afghanistan à titre de psychiatre. C'est le genre de gars qui met de côté son rang et qui parle avec les soldats; il fait cela très, très bien. Il y a donc une certaine expérience qui s'accumule parmi le personnel clinique, sans compter les soldats expérimentés sur le terrain qui se parlent entre eux. Mais merci d'avoir soulevé la question.
    Au ministère des Anciens Combattants — et je dis ceci à titre particulier plutôt qu'en tant qu'employé d'un ministère ou de l'autre, ce que je ne suis pas —, il y a eu une évolution marquée des choses, pourrait-on presque dire, par rapport à il y a dix ans en ce qui concerne une certaine bienveillance. Il y a dix ans, c'était presque un affrontement de principe quand quelqu'un s'adressait à AAC pour obtenir une forme quelconque de rente, de traitement et ainsi de suite. Il y a eu une évolution radicale des choses parce que le bénéfice du doute est maintenant accordé à la personne — et, évidemment, il y a certaines formalités bureaucratiques qu'il faut respecter.
    La culture n'est plus la même, à mon avis, et cela a commencé par d'importantes modifications faites à AAC il y a six à huit ans, époque à laquelle on a décidé d'axer les choses sur la personne plutôt que sur le système, en accordant le bénéfice du doute à la personne. Je suis donc tout à fait certain que ce genre d'activité continuera. Avec l'exemple des deux cercles qui se recoupent, comme M. Stoffer l'a fait voir, ou l'approche harmonieuse dont j'ai parlé moi-même, il y a moins de risques que les gens passent entre les mailles du filet qu'il y a quelques années. Y en aura-t-il encore qui passeront entre les mailles du filet? Bien entendu. Aucun système n'est parfait. Au moins, nous avons fait des progrès considérables.
    Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question, madame Hinton, mais merci de l'avoir posée.

  (1010)  

    C'est proche. Je vais simplement répéter la question pour qu'il n'y ait plus de malentendus possibles.
    Que peuvent faire Anciens Combattants Canada pour changer le stéréotype négatif — car il existe — qui est véhiculé à propos des gens qui souffrent de cette maladie silencieuse? Qu'est-ce que nous pouvons faire?
    Qu'est-ce qu'ils peuvent faire?
    Vous avez entre les mains un dossier qui contient toutes sortes de documents. Il y en a partout, dans toutes les bases, dans tous les bureaux. Il y a les annonces à la télé et ainsi de suite. C'est un problème de communications monumental. Les directeurs de district réunissent toutes les associations d'Anciens Combattants une fois par trimestre — sinon, les directeurs régionaux les réunissent tous les cinq mois — pour répandre la bonne nouvelle. Ils s'adressent aux associations d'entraide et aux associations régimentaires, entre autres, pour parler du ministère des Anciens Combattants. Je dis cela à titre de citoyen originaire de l'ouest du Canada qui a participé à tout cela. J'ai été écouté ce qu'on y disait et j'ai entendu la même chose à plusieurs reprises. Nous avons abordé cette question, et nous l'avons fait avec franchise. Par exemple, vendredi, à Calgary, il y aura un exposé de l'un des coordonnateurs de soutien par les pairs en même temps que les exposés des gens d'Anciens Combattants Canada.
    Le directeur de district est en train de dire ceci aux représentants de toutes les associations d'Anciens Combattants: voici notre intention; veuillez en informer toutes les personnes que nous pouvons aider. Cela ne se faisait pas il y a des années de cela.
    L'insistance là-dessus part de Charlottetown et va aux directeurs régionaux, et jusqu'au directeur de district, si ce n'est pas directement: allez et répandez la bonne nouvelle.
    Mariane.
    Je suis sûre que vous avez vu mon sourire.
    Kathy et moi avons lu hier soir un article qui m'a été envoyé par voie électronique des États-Unis. J'imagine qu'il a été publié récemment. Il y est question de stigmatisation, d'un modèle de stigmatisation qui évoque l'auto-stigmatisation... notre façon de percevoir la stigmatisation et ce qui semble être la meilleure façon de s'y prendre pour lutter contre la stigmatisation.
    À de nombreux égards, c'est ce que Don disait. Le SSVSO est probablement le meilleur programme qui soit pour lutter contre la stigmatisation : les gens qui ont vécu eux-mêmes l'expérience en sont sortis plus fort et sont là pour aider les autres. Il peut y avoir interaction, information et éducation. C'est probablement la meilleure façon de lutter contre la stigmatisation.
    Si vous le permettez, madame, je peux vous remettre une copie de l'article, si cela vous intéresse.
    Merci.
    Voilà une excellente remarque.
    Kathy.
    J'aimerais donner suite à cette question. Je suis en mesure de dire que le soutien d'Anciens Combattants Canada à l'égard du programme de SSVSO aide vraiment à contrer la stigmatisation qui existe, à la fois dans la société dans son ensemble et chez les individus.
    Dix-sept coordonnateurs du soutien par les pairs sont affectés au programme, dont 15 dans les bureaux régionaux. Dans les bureaux régionaux, il y a maintenant des gens qui sont des Anciens Combattants et qui, de fait, sont des clients de notre Ministère. Ils ont subi leur traitement, se sont remis sur pied et sont là pour aider d'autres Anciens Combattants. Ils aident énormément nos bureaux à mieux comprendre ce que vivent les gens qui ont ce genre de blessures. Il y a beaucoup de consultations entre le personnel des Anciens Combattants et les coordonnateurs du soutien par les pairs, qui discutent des conséquences de ce stress pour les individus et leur famille. Je crois que c'est un gros avantage.
    Dans les cliniques de traitement du BSO, nos cliniques de traitement des blessures de stress opérationnel, il y a aussi deux membres de la famille, deux coordonnateurs du soutien par les pairs volet famille, qui travaillent dans les cliniques. C'est une autre façon de faire contribuer ceux qui ont vécu l'expérience et qui sont des exemples vivants d'une démarche: si on traite la maladie tôt, on peut s'en remettre et réintégrer la société, y apporter une pleine contribution, travailler et avoir une famille tout à fait fonctionnelle à nouveau. Je crois que cela aide beaucoup à conscientiser les gens.
    Je crois que l'article auquel Mariane faisait allusion est excellent. Il traite de la stigmatisation, des deux genres de stigmatisation. Il y a la stigmatisation sociale, qui existe, nous le savons tous, en autant que cela se rapporte aux blessures de stress opérationnel. Il y a aussi l'auto-stigmatisation, le fait pour les gens de se stigmatiser eux-mêmes.
    Au SSVSO, nous préconisons un dépistage rapide et l'instauration du traitement dès les premiers stades. L'auto-stigmatisation fait partie de ce qui empêche les gens d'aller se faire traiter; c'est qu'ils ont l'impression qu'il y aura des conséquences d'une manière ou d'une autre s'ils se déclarent victimes de stress post-opérationnel. Nous pouvons encourager les gens à se présenter, car, à ce moment-là, ils peuvent obtenir un traitement dès les premiers stades, le temps de rétablissement est nettement plus court, et les conséquences pour les gens, individuellement, et pour leur famille sont moindres.

  (1015)  

    Merci.
    Jim
    Je serai bref. J'aimerais proposer trois choses.
    Premièrement, je crois qu'AAC doit déployer tous les efforts possibles pour reconnaître les Anciens Combattants ayant des problèmes de santé mentale en ce qui concerne les opérations, le service, de les reconnaître en tant que héros.
    Deuxièmement, c'est un peu en lien avec ce que je viens de dire, je crois — et je peux le dire parce que je ne suis pas employé d'AAC — en ce qui concerne la formation du personnel — Nous avons affaire ici à l'ancien combattant nouvelle mouture. Ce ne sont plus des Anciens Combattants de la guerre de Corée et de la Seconde Guerre mondiale, qui ont tendance à être plaisants, dont il est il est question, essentiellement. Les gens qui éprouvent des problèmes de santé mentale ne sont pas toujours plaisants, mais ce sont nos clients. Ce sont les gens que nous servons. Dès le départ, avec l'accueil de la réceptionniste, qui fait une tâche incroyablement importante, il faut donner à ces gens la reconnaissance qui leur est due et non seulement les traiter comme des menaces pour la sécurité, avec qui nous parlons derrière une vitre laminée. Je sais bien qu'il faut un équilibre entre la sécurité et la reconnaissance, et je me suis rendu moi-même dans de nombreux bureaux d'AAC, où j'ai pu constater que le personnel fait un travail formidable, essentiellement, mais, souvent, vous arrivez là et avez l'impression que vous êtes pour eux une menace, étant donné qu'il y a cette vitre et aucun contact visuel. « Qu'est-ce que vous voulez donc? » Voilà le message qu'on croit percevoir. Lorsque la personne est déjà hérissée, je crois que la reconnaissance, le fait de dire « Je suis là pour vous servir » doit être le premier message communiqué, et non pas : Vous pourriez être une menace pour nous. Je sais bien que c'est une question qui est très délicate.
    Et troisièmement, à mon avis, mes collègues l'ont dit, il faut continuer de soutenir le SSVSO. Je ne suis pas à l'emploi direct du SSVSO. J'ai mon emploi, que ce dernier existe ou non. Mais c'est une chose merveilleuse, et j'espère qu'AAC va continuer de le soutenir.
    Voilà mes propositions. Je crois que c'est un problème pluridimensionnel. Il n'y a pas de solution simple au problème de la stigmatisation.
    Merci beaucoup.
    Avec tout le respect que je dois à la critique modeste que Jim Jamieson fait à l'endroit d'AAC — et je ne travaille pas moi non plus pour AAC —, le programme du SSVSO permet de contrer cela en partie, par ses points forts, car il y a des gens qui ne s'approcheront pas d'un bureau d'AAC, qui n'iront pas dans une clinique qui se trouve sur une base, mais qui feront l'effort de retrouver un pair, du fait du bouche à oreille. S'ils doivent parler à quelqu'un, ce sera le CSP.
    Mme Darte a souligné le fait que les CSP ont leur bureau dans les locaux du bureau du directeur de district. Ce n'est pas là qu'ils vont forcément rencontrer leurs clients, ou leurs pairs. Certains d'entre eux le font, mais d'autres demanderont : « Voulez-vous que nous nous rencontrions ici? » Si vous ne voulez pas, nous pouvons aller ailleurs. Voulez-vous que je me rende chez vous ou que la rencontre se fasse ailleurs? » Puis, ils se rencontrent en dehors de la maison. Autrement dit, on cherche à éviter que les gens se trouvent en butte à cet obstacle, celui que Jim m'a souligné à juste titre : on passe le pas de la porte, puis on hésite.
    Si vous êtes blessé au bras, c'est un problème qui va se régler. Pour aller consulter un médecin, il faut d'abord s'admettre à soi-même qu'on a un problème. Si vous avez un problème, allez-vous l'admettre à quelqu'un d'autre? C'est le problème dont Jim parlait : quand vous arrivez dans ce cabinet, vous êtes sur la défensive. « Est-ce que je vais parler au médecin, sinon, est-ce que je dois aller voir un psychiatre? Je vais peut-être parler au curé ou je ne sais quoi encore. À qui vais-je parler? Ma femme ne va pas me parler parce qu'elle sait que j'ai changé. » Il y a donc l'obstacle qu'il faut contourner, celui du bureau d'Anciens Combattants.
    Merci beaucoup. Est-ce que j'ai répondu à votre question, madame Hinton?
    Oui. C'est la meilleure réponse que j'ai obtenue jusqu'à maintenant, après avoir parlé à tous les témoins qui sont venus comparaître. Nous avons entendu un groupe de témoins auparavant, en rapport avec cette question.
    J'apprécie particulièrement ce que le Major Le Beau a dit, ce qui sera très utile, et aussi ce que le Lieutenant-colonel Jamieson a dit. C'est une critique constructive, si vous voulez mon avis, et je serai heureuse de relayer l'information.

  (1020)  

    C'est voulu comme une critique constructive.
    Oui. C'est très constructif.
    Vous avez posé d'excellentes questions, et je vous en remercie.
    Comme Mme Darte l'a dit, il y a de nombreux pays qui regardent ces gens et qui disent : « Comment faites-vous? » À la fin de la séance, je peux vous remettre des exemplaires d'un livre, à vous et au comité, et il y en a un pour la bibliothèque, monsieur le président, un livre qui porte sur les blessures de stress subi au combat, écrit par un ex-marine américain et ex-commandant de la force navale américaine, psychologue et ancien combattant en Iraq. Et il y a un chapitre qui est signé par quatre de mes collègues : Kathy Darte, Stéphane Grenier, le Major Heber et le Dr Richardson. Tout est là. De fait, le Commandant Nash, de Quantico, en Virginie, a assisté à nos réunions et a présenté un exposé.
    Ils étudient donc le travail de ces gens et disent : « Bon, comment faire pour que ce programme fonctionne? » Il faut qu'il y ait quelque chose de bien pour qu'ils puissent être invités, comme on le voit, à se rendre à La Haye et dans divers pays, et voilà qu'ils retourneront, au début du mois prochain, aux États-Unis, pour donner une séance d'information sur le SSVSO — ce programme très fructueux qu'est le SSVSO
    Merci de la question.
     Merci beaucoup.
    Passons maintenant à M. Cuzner, des libéraux pour cinq minutes.
    C'était un exposé fantastique.
    Je vous assure que Mme Hinton pose cette question à tous les témoins, et je dois dire que j'ai bien aimé les réponses fournies par les témoins aujourd'hui.
    Nous avons établi que l'un des problèmes auxquels nous sommes confrontés, c'est que la personne doit reconnaître qu'elle a un problème. Je suis certainement d'accord avec cela. Les gens qui l'entourent doivent également être en mesure de reconnaître qu'il y a un problème, et ils doivent savoir qu'il y a des programmes pour aider cette personne. Ensuite, troisièmement, il faut finir par faire appel à ces programmes.
    Je représente une collectivité rurale à l'extérieur de la région de Halifax. Parfois, seulement savoir que ces programmes existent dans les régions peut être problématique. Et ensuite, il faut y recourir.
    J'aimerais revenir sur une question posée par M. Stoffer. Il s'agit d'une situation réelle. Nous avons connu une grande tragédie en Nouvelle-Écosse, il y a deux semaines, quand nous avons perdu un jeune soldat, le caporal Kevin Megeney. Mais la tragédie est double. Une autre personne a été touchée par cette tragédie, et c'est le jeune homme qui était impliqué, car il s'agissait d'un coup de feu accidentel. Il y a une autre vie en jeu dans ce cas-là, et si ce jeune soldat ne reçoit pas le soutien dont il a besoin, je crois qu'il est à risque.
    Pouvez-vous me décrire le protocole, étape par étape? Il s'agit d'un réserviste. Qu'arrivera-t-il maintenant? Comment ce soldat et sa famille vont-ils obtenir le soutien dont ils ont besoin pour faire face à ce qui les attend? Il y aura une enquête et toutes ces choses, mais je crois que certains craignent —
    Tout le monde ici a probablement eu un ami ou une connaissance qui a connu une fin tragique. Lorsqu'une personne s'enlève la vie, tout le monde dit : « Nous aurions dû savoir que cela se produirait. Tous les indicateurs étaient là, mais nous ne les avons pas vus. »
    Pouvez-vous m'expliquer les mesures que nous devons prendre pour veiller à ce que ce jeune soldat obtienne le soutien dont il a besoin?
    Je vais laisser les professionnels répondre, mais j'aimerais ajouter un commentaire, comme j'ai tendance à le faire.
    Je suis soldat depuis de nombreuses années, et je dois vous dire que cette situation, où un soldat perd la vie à la suite du geste d'un autre soldat, n'est pas unique.
    Dans le cas qui nous occupe, le tireur était... mais d'abord, prenons un peu de recul. On espère que la famille du soldat décédé va faire appel à un programme d'aide aux personnes en deuil, ou que des gens du SSVSO vont lui parler. C'est leur décision : on ne peut leur imposer cela. Cette démarche est effectuée par l'officier désigné, et ainsi de suite. Alors, c'est quelque chose qu'on offre dans le cadre du programme de SSVSO.
    Le tireur est confronté à deux problèmes. Vous vous souviendrez peut-être de l'incident, il y a un an ou deux, où le tireur fait maintenant l'objet d'accusations. Vous pouvez sûrement vous imaginer — et j'ignore les circonstances de cet événement — ce qui vient à l'esprit du jeune soldat : « C'était un accident, mais va-t-on m'inculper comme l'autre gars? » Il doit composer avec cela. Je vais laisser les professionnels vous en parler, mais j'aborde la question du point de vue du soldat.
    Je suis certain que les soldats vont serrer les rangs, car je me rappelle que la plupart des unités, des sous-unités, et ainsi de suite ont pris part à une formation relative au soutien par les pairs. Et cet apprentissage est à la fois officiel et officieux. Cela commence par trois heures et demi de formation dans une école de recrues. C'est le volet officiel. Vient ensuite le volet officieux, où, pendant une pause-café, on dit : « Comment puis-je surmonter ce problème? Est-ce que j'ai un problème? À qui dois-je parler? » Autrement dit, votre compagnon de dortoir, votre compagnon de campement, sera là pour vous. J'aime à croire que c'est là que tout commence. Je sais qu'il y a des mécanismes grâce auxquels le commandement peut ordonner à une personne d'obtenir de l'aide si elle en a besoin.
    Je ne suis pas du tout dans mon élément ici, alors je cède la parole au Major Le Beau.

  (1025)  

    Je suppose que, d'une certaine façon, je ne peux pas vraiment faire de commentaires sur ce dossier en particulier, car, en ma qualité de gestionnaire de projet du SSVSO, je n'ai pas été appelée à intervenir. Le SSVSO n'est pas directement lié à cette affaire, sauf pour ce qui est de l'aide aux personnes en deuil. Nous n'avons pas encore parlé de cet aspect, même si on l'a mentionné. C'est un service qu'on offre aux veuves et aux parents qui perdent un être cher dans le cadre d'opérations militaires. Il y a un officier désigné qui communique directement et proactivement avec la famille pour l'aiguiller vers ce service. Nous avons des bénévoles qui ont connu des expériences similaires et qui fournissent du soutien au conjoint, à la veuve, ou aux membres de la famille.
    Quant à la personne dont il est question, Jim, je crois que vous connaissez la démarche.
    Cette personne bénéficiera certainement de l'aide active de l'équipe d'intervention en santé mentale. Par contre, monsieur, j'aimerais également préciser que le SSVSO ne va pas chercher les gens, mais que nous allons parler avec toute personne qui vient nous voir, et nous allons la traiter. Pour nombre de nos pairs, c'est le noeud du problème. Ils ont enlevé la vie à une personne, qu'il s'agisse d'un ennemi ou, dans le cas qui nous occupe, d'un ami, de façon accidentelle. Les militaires ont souvent du mal à vivre avec cette réalité, et si ce soldat de votre bureau a besoin de notre aide, nous avons une personne excellente à Halifax, un adjudant-chef de l'infanterie à la retraite, un dur à cuire avec un coeur d'or. Nous serons heureux de soutenir cette personne, mais, pour ce qui est du SSVSO, c'est lui qui doit venir à nous.
    Votre bureau pourrait peut-être même jouer un rôle crucial en veillant à ce qu'il sache que nous existons.
    Merci.
    Est-ce que cela répond à votre question, monsieur?
    Merci.
    Passons maintenant à M. Roy, pour cinq minutes, s'il vous plaît.

[Français]

     Je voudrais d'abord m'adresser à Mme Darte.
     Vous avez dit plus tôt que les gens faisant appel à vous avaient droit à huit séances de counseling.  Ai-je bien compris? Pourquoi huit séances? Qui a déterminé cela? On parle ici de stress post-traumatique, et il me semble que ce problème dure des années. Alors, pourquoi y a-t-il seulement huit séances de counseling? Est-ce parce que vous n'avez pas les moyens d'en offrir davantage? Il doit y avoir une théorie derrière cela.

[Traduction]

    Le nombre est passé à huit séances. Peut-être s'agit-il d'une sorte de programme provisoire. Au début, c'était une ligne téléphonique pour les personnes en crise, qui se sentent confuses, qui ne savent pas quoi faire. Ils peuvent téléphoner à un numéro 1-800. Ils peuvent se rendre dans un centre principal. On discute de l'enjeu soulevé par la personne lors de son appel. Ensuite, on va mettre en contact cette personne avec les ressources dans sa collectivité, pour jusqu'à huit séances, mais au cours de la période où se déroulent ces huit séances, cette personne doit entrer en communication avec le MDN ou avec Anciens Combattants. C'est seulement une sorte de mécanisme nous permettant d'intervenir sur-le-champ, et de vous aiguiller ensuite vers d'autres mécanismes de soutien.

  (1030)  

[Français]

    J'ai de la difficulté à comprendre la façon dont vous offrez du soutien aux victimes de stress opérationnel. J'ai entendu beaucoup de théories et j'ai entendu parler de choses très pratiques. Je n'ai pas lu tous les documents, mais je concevais davantage la chose comme un programme de parrainage mettant à contribution un ou deux membres des Forces canadiennes ou encore des anciens membres.
    Habituellement, un système de parrainage ne s'établit pas à court terme mais plutôt à long terme. Si vous offrez un parrain ou une marraine à quelqu'un mais que vous le lui retirez après huit séances, cette personne va décrocher. Vous la précipitez dans les bras de quelqu'un d'autre et vous lui demandez de recommencer à raconter son histoire. Il faut alors tout reprendre à zéro. J'ai des réserves sur cette façon de fonctionner.

[Traduction]

    Je vais inviter le Major Le Beau à commenter, et ensuite je formulerai quelques commentaires.

[Français]

    Si la chose a été perçue de cette façon, je suis très heureuse que vous posiez la question. Je pense que la distinction n'a pas été faite clairement entre les services offerts par le Soutien social aux victimes de stress opérationnel et ceux offerts par le programme dont parlait Mme Darte, soit un programme très spécifique d'aide à court terme en cas d'urgence. Ce programme est du ressort du ministère des Anciens Combattants, mais le ministère de la Défense nationale en partage les frais avec lui. Il reste qu'il ne s'agit pas de notre programme.
    Vous avez raison de dire que le parrainage peut être à très long terme. On ne peut pas déterminer à l'avance le nombre de sessions requises. J'aime l'image que vous avez utilisée. Pour notre part, nous parlons davantage de soutien par les pairs que de parrains. Certains participent au groupe et continuent d'avoir des entretiens individuels pendant des années. On espère qu'ils voudront éventuellement devenir bénévoles avec nous afin d'aider d'autres personnes. Les choses se développent de cette manière.
    Une autre chose m'inquiète: la manière dont vous rejoignez les gens. Vous en avez beaucoup parlé. Dans les données que vous nous avez fournies, on dit qu'environ 2,8 p. 100 des membres des forces régulières et 1,2 p. 100 des réservistes ont signalé des symptômes correspondants.
    Sur l'ensemble des gens atteints de stress post-traumatique et identifiés comme tels par les Forces canadiennes, combien en rejoignez-vous? Même si leur problème est identifié par un psychologue ou un psychiatre des Forces canadiennes, ces gens ne vont pas nécessairement vous voir, n'est-ce pas?
    Non, ça se fait de façon volontaire.
    Vous avez entre autres parlé d'un système téléphonique, mais dans les régions éloignées, comment arrivez-vous à trouver des parrains?
    J'ai un exemple très concret chez moi d'un gars qui vient régulièrement me voir. Il est dans la fonction publique à l'heure actuelle, mais permettez-moi de vous dire qu'il n'est pas un « cadeau ». Il n'a pas de parrain pour le moment, et je ne pense pas qu'il fasse appel à vous. Je ne suis pas sûr qu'il soit conscient des problèmes qu'il cause autour de lui. Ce n'est pas toujours facile, quand il vient me voir.
    Comme le disait M. Jamieson, ce sont des gens qui —
     Ça lui cause des problèmes physiques également, il faut le comprendre.
    Comment faites-vous pour trouver des parrains aux gens qui vivent dans des régions comme la mienne? Ce n'est pas évident.
    Je devrais probablement préciser d'abord que nous ne trouvons pas de parrains pour les gens des régions : nous engageons des coordonnateurs qui couvrent des régions données. Dans le cas de Matane, le coordonnateur le plus proche serait à Valcartier ou à Québec.
    C'est à 400 kilomètres environ.
    C'est exact. Vous avez tout à fait raison. Il s'agit d'une distance considérable.
    Il y a en ce moment 17 coordonnateurs au Canada. Il va bientôt y en avoir 19 pour les militaires et les anciens combattants. Il y en a six pour les familles, mais ce chiffre va bientôt passer à 12. On va donc doubler le nombre de nos coordonnateurs pour les familles au Canada.
    Ensuite, il y a la question des bénévoles. Nous sommes tout à fait conscients qu'il nous est impossible d'avoir des employés qui couvrent à temps plein toutes les unités régulières et de réserve partout au Canada. En faisant appel à des bénévoles, on veut étendre les tentacules et offrir du soutien à divers endroits. Bien sûr, quand les populations sont regroupées, c'est plus facile.
    Quoi qu'il en soit, j'aimerais qu'on nous donne les références de cet individu.

  (1035)  

    J'ai posé une question, mais je n'ai pas obtenu de réponse.
    Combien de gens rejoignez-vous, en fin de compte?
    À l'heure actuelle, nous en rejoignons environ 2 400.

[Traduction]

    Monsieur Jamieson.

[Français]

    Puis-je ajouter quelque chose?
    Vous savez, je suppose, que la situation

[Traduction]

— dont a parlé Kathy Darte.

[Français]

concerne seulement les personnes qui ne veulent pas aller à la clinique du SSVSO. Tous les membre des Forces canadiennes et tous les anciens combattants, de même que les épouses des membres de ces deux groupes, ont le droit d'avoir recours aux services du SSVSO.

[Traduction]

    Mais certaines personnes ne veulent pas recourir à ce service. Elles tiennent à ce que leur situation demeure privée. Or, ce n'est qu'une passerelle qui leur permet d'accéder aux services.
    Comme l'a dit le Major Le Beau, nous faisons tout notre possible pour trouver dans la collectivité un bénévole qualifié qui fournira un soutien personnel à un militaire qui se sent relativement isolé. Cela n'a pas été facile, mais nous avons trouvé des dizaines de bénévoles qualifiés susceptibles de fournir leur aide, et nombre de ces personnes vivent dans des collectivités relativement éloignées.
    J'espère que cela répond à votre question, ne serait-ce que partiellement.
    Si vous permettez, monsieur le président, j'empiète sur votre temps, monsieur, mais —
    Ce n'est pas mon temps; c'est le temps de ce député-là.
    Je suis désolé, mais, pour terminer, il manque une étape qui ne vous a pas été présentée.
    Le comité pour le SSVSO, les coordonnateurs du soutien par les pairs et les autres renvoient les gens à la clinique pour TSO. Je ne vais pas tout vous lire, mais il y a les rubriques suivantes : « Qu'est-ce qu'une clinique pour TSO? », « Quels services y offre-t-on? », « À quoi puis-je m'attendre si je me rends à la clinique? », « Comment puis-je recourir aux services de la clinique? »
    Je vous laisse ce document, au cas où vous voudriez faire des copies.
    Très brièvement, avant d'en arriver à l'étape de l'affectation d'intervenants, une personne va commencer par consulter une infirmière clinicienne en vue de subir divers tests, et ainsi de suite. J'ai déjà subi ce processus, et je peux vous dire qu'il est intensif. Et il y a d'autres tests effectués par un autre membre du personnel. Ensuite, le dossier est examiné par le directeur, un psychiatre et deux psychologues, et on détermine à qui l'évaluation initiale sera confiée. Une décision est prise. L'évaluation initiale a lieu. Il y a une séance de suivi, une autre séance de suivi, et ensuite ce rapport, quelles que soient les conclusions, sera transmis à Anciens Combattants Canada à Charlottetown, et cette personne peut poursuivre et si le traitement — les huit séances — est autorisé.
    Même si on prévoit huit séances, j'ai suffisamment confiance dans le système pour savoir que Anciens Combattants ne va pas laisser tomber une personne aux prises avec un problème de longue durée. On trouvera bien un moyen.
    Désolé, je ne voulais pas empiéter sur le temps qui vous est consenti.
    Ça va, c'est le temps de M. Shipley.
    M. Shipley a cinq minutes.
    Merci beaucoup. Merci à vous tous d'être venus aujourd'hui pour prendre part à ce processus.
    J'aimerais que vous me donniez des précisions en ce qui concerne le stress opérationnel, qui fait partie du syndrome de stress post-traumatique — je crois que l'un fait partie de l'autre. J'aimerais savoir qui s'adresse à vous. Y a-t-il une différence entre les deux sexes, pour ce qui est de la probabilité qu'une personne veuille recourir aux services de traitement des TSO? Homme ou femme, qui est plus susceptible d'y recourir?
    Y a-t-il une différence entre les deux sexes en ce qui concerne les préférences quant au choix du fournisseur de soins ou, entre un coordonnateur et un bénévole, le choix de la personne à qui on veut se confier?

  (1040)  

    Quand nous avons lancé le programme, nous pensions que cela poserait problème, qu'il y aurait une différence entre les sexes. Au début, tous nos coordonnateurs étaient des hommes. Nous savions qu'il y avait de nombreuses femmes aux prises avec des problèmes de TSO. Nous nous demandions si elles allaient se manifester.
    Nous n'avons pas vraiment eu de problème à cet égard dans le cadre de notre programme. Nous avons deux coordonnatrices dans le cadre du programme, et elles voient de nombreux hommes, et vice versa, les coordonnateurs voient de nombreuses femmes. La question du sexe ne pose pas vraiment problème dans le cadre du programme, et s'il pose problème, cela fait l'objet de discussions avec le coordonnateur. Si une telle exigence est formulée clairement au départ, alors le coordonnateur peut aider cette personne à entrer en contact avec une personne du sexe qui lui convient. Alors, non, il n'y a pas eu de problème à cet égard.
    Dans la documentation fournie, on dit quelque chose d'intéressant au sujet du stress opérationnel : « Les résultats d'une étude commandée à la McMaster University, une fois ajustés statistiquement selon les écarts d'âge et de sexe, a révélé que la prévalence à vie du SSPT » — et il n'est question ici que du SSPT — « chez les membres des FC est la même que chez le grand public. » J'ai bien l'impression que la plupart d'entre nous aurions cru que les problèmes liés au stress opérationnel seraient plus fréquents chez les gens de nos Forces canadiennes, en raison de la nature même de leur occupation.
    Si cette affirmation est vraie — et il s'agit d'une étude, alors nous nous intéressons à la source de l'étude —, est-ce que cela tient en partie au fait que les militaires bénéficient d'une préparation et d'une instruction militaire fantastique, qu'ils savent qu'ils ont accès à des cliniques pour TSO? Est-ce que cela montre toute la valeur du travail que vous faites et que nous faisons pour veiller à ce que nos militaires demeurent à ce niveau, ou est-ce que je vais trop loin dans mon interprétation?
    J'irai en premier.
    De fait, sans vouloir contrer ce qu'ils vont dire, le programme de SSVSO a empêché une telle chose, et je laisserai les experts ici présents vous dire cela, en signalant que personne ici n'a jamais, à un moment ou un autre, souffert du SSPT, pour quelque raison que ce soit — un accident de la route particulièrement stressant, l'angoisse quant à sa réélection, ce genre de chose.
    Des voix: Oh, oh!
    Col. Donald S. Ethell: Je crois que je n'aurais pas dû dire cela, mais ce n'était qu'un exemple.
    Sérieusement, au sein du grand public, les policiers, les pompiers, le personnel de recherche et sauvetage, la GRC et ainsi de suite sont exposés à de nombreuses situations traumatisantes, alors on établit un parallèle entre la situation de toutes ces personnes et celles des membres des Forces canadiennes.
    Au moins, les Forces canadiennes et Anciens Combattants sont maintenant dotés d'un système. Il s'agit du programme de SSVSO.
    Jim.
    Nous pourrions parler de cela pendant longtemps, et je serai heureux de le faire si c'est ce que vous voulez, mais je tenterai d'être bref.
    Tout d'abord, histoire de commenter directement cette affirmation, je tiens à préciser que l'étude de l'Université McMaster n'a pas utilisé les mêmes critères que les FC et Statistique Canada dans leur étude de 2002, beaucoup plus rigoureuse. L'étude de Statistique Canada ne tenait pas compte de ce que nous pourrions qualifier de symptômes de stress post-traumatique d'avant-seuil. Je n'accorderai pas trop d'importance à cet article.
    Deuxièmement, les TSO ne se limitent qu'au syndrome de stress post-traumatique; il englobe d'autres préoccupations importantes, comme la dépression clinique. Or, selon l'étude menée en 2002, le taux de dépression clinique dans les Forces canadiennes est deux fois plus élevé, après correction pour l'effet de l'âge, qu'au sein du grand public. Nous affichons également des taux supérieurs de toxicomanie et d'alcoolisme, problèmes considérés comme des TSO. Nous affichons des taux supérieurs au chapitre des phobies sociales. Les gens pensent souvent que cela concerne la peur de parler en public, mais ce dont il est question ici, c'est de soldats qui se retirent de l'interaction sociale, qui se retirent de leur famille, qui commencent à vivre dans leur sous-sol. C'est à cela que correspond l'acronyme.
    Alors oui, je crois que nous sélectionnons les gens, nous les formons, et nous les aidons effectivement à composer avec le stress post-traumatique, mais nous avons certainement notre part de cas.
    L'autre chose, monsieur, c'est que le traitement d'une personne aux prises avec un problème de stress post-traumatique exige des ressources considérables, dans un grand nombre de cas. Je crois qu'il serait erroné de conclure que nous ne sommes pas confrontés à un certain nombre de problèmes en matière de santé mentale. Pour tout dire, il s'agit de bien plus que mon opinion : c'est la réalité.

  (1045)  

    Je suis intéressé à entendre non pas la totalité, mais bien le résumé de ce dont vous avez parlé à l'égard de cette étude. Cette information nous a été fournie, alors nous n'avons pas cherché à l'obtenir. Je crois que nous voulons savoir vraiment ce qui influe sur certains des cas de stress opérationnel, qui vont au-delà du syndrome de stress post-traumatique —
    L'étude menée par Statistique Canada en 2002 est la meilleure étude jamais menée sur la question, et nous pouvons certainement vous remettre cette documentation, monsieur, à vous et au reste du comité.
    Je suppose que je préférerais obtenir le résumé, si c'est possible.
    J'aimerais poser une autre question, rapidement. En ce qui concerne la formation des pairs, des coordonnateurs et des bénévoles, est-ce qu'on insiste sur une certaine formation professionnelle relative à l'aide par les pairs? Lors d'un échange entre pairs, je pense que la personne qui a déjà vécu cette situation peut, de toute évidence, mettre son expérience personnelle à contribution. Parfois, le fait de ne pas savoir... je crois qu'on mentionne que chaque situation est différente. Il y a fort à parier que la formation professionnelle de ce bénévole va au-delà de la compassion et de la compréhension, si importantes soient elles. J'ai peu-être manqué le passage relatif à cette question, et je m'en excuse, mais offre-t-on une sorte de formation professionnelle aux pairs avant qu'ils n'interviennent?
    Oui, il y en a une. Pour les pairs qui sont embauchés, qui font partie du personnel rémunéré, il y a une formation intensive au tout début, avant même qu'ils ne commencent à travailler.
    Et qu'en est-il des bénévoles?
    Pour devenir un bénévole officiel du programme de SSVSO, il faut satisfaire à deux exigences importantes. Il faut tout d'abord avoir fait l'objet d'un examen médical. Si vous êtes en traitement, votre thérapeute doit consentir à ce que vous vous portiez volontaire pour faire ce genre de travail. Après cette présélection et l'application de tous les autres freins et contrepoids, nous pouvons intégrer les bénévoles à notre programme. Et il faut procéder à une vérification policière, et ainsi de suite. Lorsque tout cela est terminé, nous pouvons leur offrir une formation, dispensée par le personnel de soins en santé mentale du centre Sainte-Anne. Ils bénéficient de trois jours de formation — et, effectivement, il s'agit d'une formation officielle — avant de commencer à travailler.
    Merci, monsieur Shipley.
    Nous allons maintenant passer à M. St. Denis et, si nous avons le temps, à M. Sweet. Je tiens seulement à signaler à tout le monde, avant la fin de la séance, que nous allons brièvement parler des témoins que nous allons entendre jeudi, et de ce que nous aimerions faire à l'occasion de la séance de mardi, la semaine prochaine — d'autres témoins.
    Monsieur St-Denis.
    Merci, monsieur le président. Je me fais fort de garder du temps pour M. Sweet. Je serai bref.
    Merci beaucoup d'être ici. Nous avons couvert beaucoup de matière aujourd'hui, et je vous en remercie. Je m'intéresse spécifiquement à la question de la disponibilité, ou du manque, de professionnels, qu'il s'agisse de médecins, d'infirmières et d'autres intervenants dans le domaine. Même si vous aviez tout l'argent dont vous aviez besoin, y a-t-il encore sur le marché des gens à embaucher? Par quel facteur le plafond est-il déterminé: par les dollars ou par les gens? Je vous prierais de répondre brièvement.
    Je vais laisser Jim répondre à la question, mais je tiens seulement à répéter la statistique selon laquelle le système médical des Forces canadiennes ne dispose que de 40 p. 100 des gens dont il a besoin, en raison d'un manque de ressources dans le domaine.
    On a beau affecter plein d'argent à cette question, s'il n'y a pas de gens à recruter — Il y a une grande pénurie de médecins, du moins dans l'Ouest canadien, et peut-être même à l'échelle du pays.
    Jim.
    Il s'agit principalement d'une ressource liée tout particulièrement au domaine spécialisé de la gestion des traumatismes. Nous avons du mal à recruter des psychiatres, par exemple. Même si nous pouvons en trouver, nombre d'entre eux ne possèdent pas la formation nécessaire pour apporter une aide optimale à nos clients.
    Le problème tient principalement au recrutement de ressources dûment formées, mais il y a de nombreuses ramifications. On peut trouver une personne qui est disposée à travailler à Ottawa, mais pas à Pembroke.
    Je dirais que l'autre problème tient à la disponibilité, pour ce qui est de servir les familles. Comme nous l'avons mentionné plus tôt, c'est un problème très compliqué et difficile.
    À votre connaissance, est-ce que les Forces ou Anciens Combattants projettent de travailler avec les collèges et universités ou avec Immigration Canada, pour d'une façon ou d'une autre, avec le temps, combler ces lacunes? Je présume que ces pénuries ne vont pas s'améliorer avec le temps, car nos engagements militaires mondiaux deviennent toujours plus compliqués et sortent des sentiers battus, alors je me demande si vous êtes au courant de l'existence d'un plan visant à combler ces lacunes.

  (1050)  

    Pour répondre brièvement, je dirais que oui, mais c'est difficile. Nous avons du mal à convaincre des médecins de se joindre aux forces armées, malgré les incitatifs importants. Il y a une équipe de personnes qui se consacrent uniquement au recrutement de médecins pour les Forces canadiennes. C'est très difficile.
    En ce qui concerne la promotion de la carrière, est-ce que les jeunes songent à pratiquer la psychiatrie ou la psychologie ou à prodiguer des soins infirmiers en psychiatrie dans le contexte militaire lorsqu'il sont au secondaire?
    Je l'ignore, mais je sais que nous commanditons nos gens pour qu'ils prennent une spécialité, et seulement dans quelques domaines. Au pied levé, les trois seuls qui me viennent à l'idée sont la chirurgie, la chirurgie orthopédique et la psychiatrie. Nous prenons ces gens qui appartiennent déjà à notre organisation, et c'est, bien sûr, au sein de ce groupe que le taux de réussite est le plus élevé. Si vous prenez des médecins militaires et que vous les envoyez à l'école pour qu'ils deviennent psychiatres, alors, ils sont d'autant plus précieux, car ils comprennent la culture.
    Mais, vraiment, ce n'est pas mon domaine de prédilection. J'ignore qui pourrait répondre à votre question. Peut-être que le chef du Service de santé pourrait mieux que moi répondre à votre question, monsieur.
    Juste un dernier bref commentaire — et je vous prie de répondre de façon tout aussi concise —, lorsque vous envisagez le contexte préalable au traumatisme, y compris l'instruction des soldats déployés, la préparation des familles, le processus de sélection et de préparation, et les ressources nécessaires pour faire cela, qu'il s'agisse de ressources humaines, financières ou autres, et le coût humain et financier des problèmes liés au traumatisme et aux services offerts après-coup, avons-nous établi un bon équilibre? Affectons-nous suffisamment de ressources à la prévention, par rapport au traitement?
    Je sais que l'on ne peut jamais atteindre la perfection. On ne peut évaluer totalement une personne, il y a des limites raisonnables à cela. Mais, à l'heure actuelle, avons-nous réussi à établir cet équilibre, vu les ressources dont nous disposons?
    Je vais laisser le Major Le Beau répondre à cette question.
    Je vais tenter de répondre brièvement.
    Je ne crois pas qu'un de ces volets soit désavantagé par rapport à l'autre, faute de ressources. De plus, nous manquons de données, nous savons très peu de choses sur les facteurs permettant de prédire l'apparition de traumatismes liés au stress opérationnel. Il n'y a pas de test de sélection à toute épreuve, alors nous manquons également de connaissances à ce chapitre.
    Même après-coup, à la lumière de la recherche que nous avons certainement utilisée et dont nous nous sommes inspirés pour élaborer le programme, avec une partie de la méta-analyse relative aux variables explicatives du SSPT, certaines des variables explicatives les plus fiables tiennent à des événements qui ont lieu non pas avant le traumatisme, mais bien au moment même où le traumatisme a lieu, et par la suite. Parmi les facteurs plus prévisibles qui ont lieu après le traumatisme, mentionnons le soutien par les pairs et le niveau de stress dans la vie d'une personne. Cela nous dit peut-être qu'il importe d'investir dans les événements qui ont lieu par la suite, mais cela ne veut pas dire qu'il faut faire fi totalement de ce qui se passe auparavant.
    J'espère que cela répond à votre question.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Sweet, il vous reste le temps qui reste à notre séance, et ensuite, j'aimerais intervenir brièvement.
    Merci beaucoup d'être venu. Votre contribution aujourd'hui nous est très utile.
    Lieutenant-colonel Jamieson, dans votre réponse à la question de M. St. Denis — il s'est aventuré dans la voie que je voulais prendre —, vous avez mentionné qu'un médecin militaire qui retourne aux études pour devenir psychiatre ou psychologue connaît la culture des forces armées.
    Selon votre expérience, est-ce qu'un soldat souffrant du SSPT ou de toute autre affection connexe serait plus disposé à se confier à un militaire qu'à un civil travaillant pour le compte d'un entrepreneur privé?
    Cela dépend de la personne. Certaines personnes veulent rester dans le cadre qui leur est familier. D'autres préfèrent être traités à l'externe. Dans la mesure du possible, nous tentons de leur donner le choix.
    Dans une ville comme Ottawa, cela ne pose pas problème. Nous avons accès à d'excellents spécialistes des traumatismes — des psychologues cliniciens, des psychiatres, des travailleurs sociaux et d'autres intervenants — au sein de la collectivité, alors nous pouvons offrir un accès à ces spécialistes. Dans un endroit comme Petawawa, nous n'avons pas ce luxe.
    Certaines personnes ont subi un traumatisme si important qu'elles ne peuvent même plus aller dans une base. Elles ne veulent rien savoir de toute personne en uniforme, pour quelque raison que ce soit.
    Bref, nous tentons de leur donner le choix, selon ce qui convient à leur situation.

  (1055)  

    J'étais encouragé, dès le début... car l'une des principales raisons pour lesquelles les soldats refusent de parler, du moins dans le cas des nombreuses personnes auxquelles j'ai parlé, en particulier les militaires du rang, concerne l'esprit de corps, la notion de « frères d'armes », toute cette camaraderie qui unit les militaires. C'est un phénomène qui occupe leur vie et leur carrière, et c'est très précieux. Ainsi, il serait mal vu de prendre la parole et de menacer cette solidarité en déclarant qu'on souffre du syndrome de stress post-traumatique.
    Dès le début, Colonel, je crois que vous avez parlé d'un général qui est de retour en service actif malgré le fait qu'il souffre du SSPT. Est-ce bien cela?
    Il s'agit du Lieutenant-colonel Stéphane Grenier; comme je le dis, il est remonté sur son cheval.
    Les représentants des FC peuvent vous expliquer cela un peu mieux que moi, mais l'objectif est de ramener les gens sur le terrain, si possible, conformément à certaines directives, évidemment. J'ignore si vous avez lu le dernier numéro de la revue Maclean sur les blessures physiques, mais tous ces gars veulent retourner dans leur unité. Ils veulent retourner dans leur unité. Ils veulent être avec l'unité. D'ailleurs, l'un d'eux a quitté Ottawa pour retourner à Petawawa et être avec son unité, en raison justement de cette camaraderie, de cet esprit de corps, et ainsi de suite.
    Et c'est là qu'ils estiment pouvoir obtenir des conseils à l'égard de blessures non seulement physiques, mais mentales aussi. S'ils ont un problème, je suis sûr qu'ils entendent parler, ne serait-ce que par le bouche à oreille, du fait qu'ils peuvent consulter un coordonnateur du soutien par les pairs. Ces coordonnateurs peuvent donc leur fournir des options.
    Il est tout à fait normal que ces gars veuillent retourner avec leur unité, car c'est dans ce monde qu'ils vivent. Ils ne veulent pas être exclus de la vie militaire; ils veulent regagner la santé.
    Cela me fait penser à ce que nous ont dit de nombreuses personnes à l'occasion de nos visites dans les bases. Quand Anciens Combattants Canada a commencé à verser une rente aux membres en service souffrant du SSPT — j'ignore combien de membres touchent cette rente à l'heure actuelle, mais il y en a des centaines — on nous a dit que, certes, l'argent est apprécié, mais rétablissez-moi. Rétablissez-moi. Où puis-je aller pour me rétablir? Ce n'est peut-être pas un terme élégant, mais c'est un terme qu'ils utilisent. Ils veulent savoir : où se trouve ce coordonnateur du soutien par les pairs? Que peut-il me dire? Vers qui peut-il me diriger?
    Est-ce que cela répond à votre question, monsieur?
    Oui, mais, de façon plus spécifique, si je souffre d'un traumatisme lié au stress opérationnel, est-ce que je peux espérer rependre le service après la thérapie, si j'en suis capable? Puis-je espérer être rétabli à 100 p. 100?
    Je vais laisser le Major Le Beau ou le Colonel Jamieson vous répondre, mais, selon moi, si les circonstances sont favorables, et si le commandement en décide ainsi, alors oui.
    Jim.
    Notre principal objectif consiste toujours à favoriser le retour des militaires.
    Le stress post-traumatique attire beaucoup l'attention, mais commençons par quelque chose de plus simple. Dans le cas de la dépression clinique, les résultats sont excellents. Pour ce qui est du stress post-traumatique, on obtient de bons résultats, mais il faut mettre plus de temps.
    Nous ne sommes soumis à aucune règle écrite à cet égard, mais nous avons tendance à donner aux militaires jusqu'à deux ans pour se rétablir, sans quoi ils doivent changer de métier ou peut-être même quitter les forces.
    Nous avons réalisé de nombreuses réussites. Si nous offrons le bon traitement et le bon soutien, les résultats sont excellents. Comme l'a déclaré Mariane il y a quelques minutes, ce qui arrive après le traumatisme est souvent beaucoup plus important que ce qui s'est passé avant. Si tous les facteurs sont en place, les résultats sont excellents.
    Le pire, dans tout ça, c'est que plus on attend avant de demander de l'aide, plus il est difficile d'être aidé. Or, il règne chez les militaires une sous-culture selon laquelle on n'est pas des mauviettes et on n'a pas besoin d'aide.

  (1100)  

    Dans la formation offerte au soldat, d'après ce que j'ai entendu aujourd'hui, je crois comprendre qu'il m'incombe d'être à l'affût d'indices de traumatisme lié au stress post-opérationnel afin que je puisse demander de l'aide rapidement.
    Maintenant, nous apprenons de plus en plus de choses au sujet du SSPT. Existe-t-il une formation qui me permettrait de composer avec une situation traumatisante grave de façon à éviter de sombrer dans un état émotionnel menant au traumatisme?
    Au chapitre de l'entraînement préalable au déploiement, au fil des ans, je dirais, encore une fois, qu'il y a eu un phénomène de mode.
    Je suppose que cette formation relative aux facteurs de stress dont vous parlez correspond à la formation en gestion du stress. Elle existait pendant les années 90. Ensuite, il y a eu le modèle relatif au stress provoqué par un incident critique utilisé, mis en oeuvre et enseigné par les Forces canadiennes, qui a aussi sombré dans l'oubli. Je suppose qu'il ne s'est pas révélé aussi efficace que certains l'espéraient.
    Il y a la formation relative à l'état mental du combattant, quelque chose de nouveau que les intervenants en santé mentale utilisent dans le cadre de la décompression dans un tiers lieu. C'est de la gestion du stress, on aide les gens à distinguer l'attitude à adopter au front et l'attitude à adopter à la maison. Mais c'est également tout un programme de préparation à la vie quotidienne, on ne met pas l'accent que sur la décompression. C'est peut-être une voie que les FC vont emprunter.
    Mais je tiens à signaler qu'il y a toujours eu quelque chose. Cela ne donne peut-être pas toujours les résultats escomptés en ce qui concerne l'entraînement préalable au déploiement, mais nous continuons d'essayer de trouver de meilleures façons de procéder.
    J'aimerais seulement vous interrompre pour dire plusieurs choses.
    Jeudi, nous accueillerons Stéphane Guay. Mardi, la semaine prochaine, j'espère que nous pourrons revenir sur la déclaration des droits afin que nous puissions l'étoffer et en finir avec cette question. Ensuite, nous reviendrons à la liste des témoins, Nous demanderons au greffier de faire tout son possible à cet égard.
    Je sais que le Colonel Ethell a des livres qu'il aimerait présenter.
    Si vous pouvez patienter un instant, monsieur, car M. Perron me réclame 30 secondes.

[Français]

    C'est au sujet de la question que Rodger vous a posée tout à l'heure au sujet du jeune qui a accidentellement tué son compagnon. Si j'ai bien compris votre explication, il est encore en Afghanistan et personne ne s'occupe de lui. On lui a dit qu'il pourra consulter quelqu'un à son retour à Halifax.
    Non, monsieur. Il y a une équipe qui s'occupe de santé mentale en Afghanistan: un psychiatre, deux travailleurs sociaux et une infirmière en santé mentale. Il y a une équipe là-bas.

[Traduction]

Mais il aura besoin d'aide plus tard aussi, et c'est à cela que nous devons l'affecter.

[Français]

    Vous avez parlé de —

[Traduction]

    Colonel Ethell.
    Monsieur le président, merci beaucoup à vous et à votre comité de nous avoir accueillis.
    J'ai deux exemplaires de Combat Stress Injury: Theory, Research and Management. Ce document, qui, comme je l'ai déjà mentionné, s'inscrit dans une série portant sur le stress psychosocial, a été écrit par deux médecins de renom, dont l'un est un ancien militaire.
    Au chapitre 13 de ce livre, il y a une section sur le programme de soutien social aux victimes de stress opérationnel, SSVSO, programme de soutien par les pairs établi grâce à une collaboration entre les Forces canadiennes et Anciens Combattants Canada. Cette section a été rédigée par le Colonel Stéphane Grenier, Kathy Darte et la Dre Alexandra Heber — elle s'est jointe aux forces et est maintenant major —et le Dr Don Richardson, conseiller à Anciens Combattants Canada.
    Je vous remets un exemplaire, monsieur le président, pour vous et votre comité, ainsi qu'un autre exemplaire pour votre bibliothèque.
    Merci beaucoup de nous avoir accordé votre temps, monsieur.
    Merci beaucoup, Colonel Ethell. Nous apprécions énormément.
    Il est évident, à voir la façon dont les membres du comité participent et posent des questions sur la question du SSPT au début de notre étude sur la santé, qu'il y a beaucoup d'intérêt, alors nous apprécions votre contribution. Merci.
    La séance est levée.