propose que le projet de loi , soit lu pour la troisième fois et adopté.
— Monsieur le Président, je suis ravi de prendre la parole aujourd'hui pour lancer le débat à l'étape de la troisième lecture du projet de loi .
Lors de la dernière campagne électorale fédérale, le Parti conservateur du Canada a exposé des plans clairs pour accroître la sécurité publique au Canada. Nous avons promis de cibler les organisations criminelles et les gangs qui tirent profit de la violence, des drogues et de la peur, et qui minent le sentiment de sécurité des Canadiens et leur confiance dans notre système de justice pénale.
Les Canadiens ont écouté notre message d'espoir et y ont répondu en nous accordant le privilège de former le gouvernement. Donc, aujourd'hui, je suis très fier d'intervenir à la Chambre, à titre de , pour donner suite à nos promesses, pour remplir nos promesses fondamentales au chapitre de la lutte contre la criminalité.
Afin d'accroître la sécurité dans nos collectivités, nous avons présenté plusieurs projets de loi en matière de justice pénale qui visent à mettre derrière les barreaux les criminels violents et dangereux.
Nous avons présenté le projet de loi , qui concerne l'âge de protection, afin de protéger les adolescents de 14 et 15 ans contre les prédateurs sexuels adultes.
Nous avons présenté le projet de loi , afin d'améliorer le processus par lequel les récidivistes violents seront gardés en prison, ainsi que le projet de loi , qui vise à ce que les délinquants violents et dangereux ne soient pas détenus à domicile et qui, je suis ravi de le dire, a été adopté à la Chambre.
Ce ne sont là que quelques-unes de nos récentes initiatives.
Le projet de loi , qui en est actuellement à l'étape de la troisième lecture, est une mesure législative importante qui cible expressément la violence liée aux armes à feu et aux gangs.
Je suis très heureux que nous ayons obtenu l'appui d'une majorité de députés pour rétablir le projet de loi et, bien que sa version originale ait été amendée quelque peu, il renferme toujours de lourdes peines minimales obligatoires dans le cas de graves infractions commises à l'aide d'armes à feu.
Plus précisément, le projet de loi amendé propose des peines de plus en plus sévères, soit de cinq ans d'emprisonnement dans le cas d'une première infraction et de sept ans en cas de récidive pour huit infractions graves commises à l'aide d'armes à feu. Ces infractions sont les suivantes: tentative de meurtre, décharger une arme à feu avec l'intention de blesser une personne ou d'éviter l'arrestation, agression sexuelle avec une arme, agression sexuelle grave, enlèvement, prise d'otage, vol qualifié et extorsion.
Je souligne que ces peines sévères s'appliqueront s'il existe un lien entre l'infraction et une organisation criminelle ou si l'infraction a été commise à l'aide d'une arme à feu à autorisation restreinte ou d'une arme à feu prohibée.
Qui peut être contre cela? Qui peut être contre ces dispositions? C'est ce dont nous avons parlé à la population canadienne lors de la dernière campagne électorale et, à mon avis, il y a beaucoup de gens en faveur d'un projet de loi de cette nature.
Le projet de loi définit ce qui constituera une récidive en ce qui concerne les infractions mettant en jeu des armes à feu. Cela signifie que toute déclaration de culpabilité pour utilisation d'une arme à feu afin de commettre un crime au cours des dix années précédentes, exclusion faite du temps de détention, entraînera l'imposition de la peine obligatoire accrue prévue pour les récidives.
Aussi, je ferai remarquer que le projet de loi propose maintenant une peine de trois ans à la première infraction et de cinq ans aux infractions suivantes pour quatre infractions graves sans utilisation proprement dite d'une arme à feu. Ces infractions sont la possession illégale d'une arme à feu à autorisation restreinte ou prohibée et de munitions, le trafic d'armes à feu, la possession d'armes à feu dans le but d'en faire le trafic et la contrebande d'armes à feu.
Pour ce qui est des infractions sans utilisation d'armes à feu, il est important de noter que toute déclaration antérieure de culpabilité pour infraction avec ou sans utilisation d'armes à feu entraînera l'application de la peine minimale obligatoire la plus lourde prévue dans les cas de récidives.
Le projet de loi, tel que modifié, crée également deux nouveaux types d'infractions ayant trait, plus précisément, au vol d'armes à feu. L'introduction par effraction pour voler une arme à feu et le vol qualifié visant une arme à feu sont maintenant considérés comme des actes criminels passibles de l’emprisonnement à perpétuité.
Par conséquent, comme nous pouvons le voir, ce projet de loi vise les actes criminels graves commis à l'aide d'armes à feu, plus particulièrement dans les cas où ces actes sont commis par des organisations criminelles, y compris, bien entendu, des gangs.
De plus, cette mesure législative montre très clairement aux Canadiens que le gouvernement conservateur est sérieux quand il s'agit de s'attaquer à ce genre de crime. Je suis ravi et fier que nous ayons présenté ce projet de loi et que nous l'amenions à terme.
Je signale que la façon dont le projet de loi a été amendé à l'étape du rapport montre notre détermination à faire en sorte que ce gouvernement minoritaire fonctionne. Avec la collaboration des députés néo-démocrates, nous nous sommes penchés sur le problème et nous avons trouvé une solution tenant compte de nos préoccupations et de nos priorités respectives. Je me réjouis d'avoir eu l'appui des néo-démocrates et de plusieurs autres députés.
Si je ne m'abuse, environ cinq députés du Parti libéral sont sortis du rang. Je tiens à dire à la Chambre à quel point j'ai apprécié leur décision et leur appui. Je crois qu'ils ont bien compris le message à cet égard. Je suis très heureux de bénéficier de leur appui à l'étape de la troisième lecture. Je souhaiterais néanmoins que davantage de députés de l'opposition nous soutiennent.
Je dois également souligner que le projet de loi jouit également de l'appui d'autres intervenants importants. Les agents de police et les procureurs soutiennent le gouvernement qui souhaite faire adopter cette mesure législative visant à durcir le ton contre les criminels. Ces intervenants soutiennent que des peines obligatoires plus sévères s'imposent pour s'attaquer à une nouvelle tendance qui se manifeste dans les collectivités canadiennes, soit la possession et l'utilisation d'armes à feu, généralement des armes de poing, par des gangs de rue et des trafiquants de drogue.
À cet égard, je souligne que le procureur général de l'Ontario appuie cette approche du gouvernement. Dans son édition du 6 mars dernier, le Globe and Mail rapporte que le procureur apprécie le fait que le gouvernement ait décidé de sévir davantage contre la criminalité. Le procureur a invité ses collègues du Parti libéral fédéral à soutenir les mesures législatives de ce genre parce que, à son avis, elles sont appropriées.
Monsieur le Président, la sécurité et la sûreté des Canadiens ne sont pas des questions partisanes. Si nous voulons voir des progrès dans la lutte contre les infractions mettant en cause des armes à feu, nous devons faire notre part.
Les agents de police doivent participer en menant des enquêtes et en arrêtant les auteurs d'infractions criminelles. Quant aux procureurs de la Couronne, ils doivent s'assurer que les accusés font effectivement l'objet de poursuites, et évidemment, les juges doivent également faire leur part en imposant des peines.
À titre de parlementaires, nous avons également un important rôle à jouer. Nous adoptons les lois. De plus, nous informons les tribunaux de la peine que nous estimons appropriée à chaque infraction.
Un certain nombre de députés de l'opposition prétendent qu'ils ne peuvent pas appuyer le projet de loi , mais beaucoup d'entre eux se sont déjà prononcés en faveur de peines obligatoires par le passé, en particulier dans le cas des infractions commises avec une arme à feu. C'est d'ailleurs le gouvernement libéral qui a instauré des peines obligatoires au milieu des années 1990 et qui a proposé, pendant la dernière législature, des peines légèrement plus sévères dans le cas de certains crimes commis avec une arme à feu.
Notre gouvernement ne croit pas qu'un an de plus fera une différence suffisante. Nous voulons envoyer un message plus clair. Nous voulons nous assurer que des peines suffisamment lourdes seront imposées aux trafiquants d'armes et aux membres de gangs qui utilisent des armes à feu pour commettre des infractions graves comme des tentatives de meurtre, des prises d'otage, des vols qualifiés et des crimes d'extorsion.
Nous croyons que les propositions contenues dans le projet de loi , tel qu'il a été amendé, sont à la fois fermes et raisonnables. Comme je l'ai déjà indiqué, ces mesures se limitent aux questions clés qui préoccupent de plus en plus les citoyens du pays.
Il y a bien sûr des données qui corroborent les problèmes associés à l'incidence actuelle des crimes commis avec une arme à feu. Les statistiques sur la criminalité, les policiers et plusieurs experts du domaine signalent l'existence d'un problème croissant en ce qui a trait aux armes à feu et aux gangs. Bien que les tendances observées à l'échelle nationale révèlent que certains crimes sont généralement en baisse depuis quelques décennies, ce n'est toutefois pas le cas des crimes violents comme les homicides, les tentatives de meurtre, les agressions armées et les vols qualifiés, surtout dans les grands centres urbains.
Les statistiques révèlent aussi que, malgré la diminution du nombre de crimes commis avec une arme à feu sans restrictions, les armes de poing et les autres armes à feu interdites ou à autorisation restreinte sont devenues les armes de choix des criminels.
Le taux d'homicides commis avec des armes à feu à Toronto a souvent fait la manchette au cours des dernières années. D'après les données de Statistique Canada, ce problème n'est pas propre au centre du pays. Edmonton a récemment vu son taux augmenter et Vancouver affiche des taux sans cesse plus élevés depuis une dizaine d'années.
Les homicides liés aux gangs et la proportion d’armes de poing utilisées pour commettre des crimes avec violence sont devenus un sujet majeur de préoccupation, et les crimes perpétrés par des membres de gangs à l’aide d’armes à autorisation restreinte est un problème de plus en plus présent dans nos villes.
Les criminels qui font partie de bandes organisées sont responsables d’une bonne part du problème de la criminalité, et le plan d’action du gouvernement dans le domaine de la justice a pour but de s’attaquer à ce problème en augmentant les peines minimales obligatoires pour les crimes commis à l’aide d’une arme à feu et en mettant fin à la détention à domicile pour les personnes trouvées coupables de crimes graves avec violence, de délits sexuels ou d’autres crimes graves, par exemple les infractions majeures où la drogue est en cause.
Comme je l’ai mentionné précédemment, le projet de loi prévoit l’imposition de peines plus sévères dans le cas de crimes commis avec ou sans arme à feu. Le projet de loi vise les crimes graves commis avec des armes à feu par des gangs ou des organisations criminelles ainsi que les armes à feu prohibées qu’ils utilisent.
En plus de proposer cette mesure législative, le gouvernement fédéral a également pour rôle d’appuyer financièrement les efforts déployés en vue de prévenir la perpétration de crimes. Je suis heureux que le gouvernement ait investi dans la prévention de la criminalité, notamment en vue d’empêcher les plus vulnérables de nos jeunes de joindre les rangs de gangs criminels ou de s’adonner à des activités ayant un lien avec les armes ou la drogue.
Nous mettons des fonds à la disposition des collectivités pour leur permettre de se pencher sur les problèmes liés aux activités des gangs, d’élaborer des stratégies de sensibilisation au recrutement des jeunes par des gangs, ainsi que des stratégies de prévention et d’intervention, de déceler les lacunes qui existent en matière de services et de diffusion des pratiques exemplaires dans ce domaine, et de mettre sur pied les programmes qui s’imposent.
Déjà, le gouvernement s’est engagé dans la réalisation de plusieurs activités donnant suite à son engagement de collaborer avec les provinces et les territoires afin d’aider nos collectivités à susciter de l’espoir chez nos jeunes et à leur offrir des possibilités en vue de mettre fin au cycle de violence qui menace de déstabiliser nos collectivités et de briser des vies.
J’aimerais parler un instant de la façon dont le projet de loi respecte les principes prévus dans le Code criminel concernant la détermination de la peine ainsi que les droits garantis par la Charte. Le Code criminel stipule qu’un des principes fondamentaux du régime canadien de détermination de la peine, c’est que la peine doit être proportionnelle à la gravité de l’infraction et au degré de responsabilité du délinquant.
Il stipule également que la peine a pour objet d’imposer au délinquant des sanctions qui sont justes, et ce, pour faire en sorte que la loi soit respectée et que nous puissions vivre dans une société juste, pacifique et sûre.
En conséquence, l’imposition d’une peine a pour but de dénoncer les contacts illégaux, de dissuader le délinquant et d’autres personnes de commettre des infractions et, au besoin, de les tenir à l’écart de la société, ainsi que de les aider à se réadapter et à assumer la responsabilité de leurs actes en plus de réparer le tort qu’ils ont causé à leurs victimes et à leur collectivité.
Les dispositions du projet de loiqui précisent la façon dont seront appliquées les peines d’emprisonnement obligatoires plus sévères visent à faire en sorte que les sanctions imposées ne soient pas disproportionnées ou contraires à la Charte. Les peines les plus sévères, soit celles de sept ans pour une infraction avec utilisation d’une arme à feu et de cinq ans pour perpétration d’un crime sans arme, sont réservées aux récidivistes qui ont déjà fait usage d’une arme à feu.
Dans le cas d’un délinquant ayant des antécédents pertinents récents d’infraction commise avec une arme à feu, il n’est pas déraisonnable qu’on tienne à s’assurer que le tribunal chargé de déterminer la peine estimera prioritaire de faire en sorte que la peine imposée permette d’atteindre les objectifs de dissuasion, de dénonciation et de mise à l’écart du délinquant dangereux.
Le gouvernement estime que les peines d’emprisonnement obligatoires proposées dans le projet de loinon seulement sont justes, mais s’attaquent comme il se doit au problème particulier auquel elles visent à remédier, à savoir la nouvelle tendance en ce qui a trait aux armes à feu et aux gangs.
Au début de mon intervention, j’ai mentionné que le gouvernement était déterminé à rendre nos rues et nos collectivités plus sûres et à prendre fait et cause pour les victimes. La bonne nouvelle à cet égard, c’est que les mesures que nous proposons aujourd’hui ne sont qu’un début.
:
Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi , qui vise à modifier le Code criminel ou, plus précisément, à mettre en oeuvre des peines minimales pour les infractions mettant en jeu des armes à feu.
Dès le départ, j'aimerais dire que le projet de loi ne permet pas aux juges d'imposer des peines plus sévères. Les peines maximales sont les mêmes. Les juges peuvent imposer les mêmes peines maximales dans les cas d'infractions graves et ils continueront de le faire.
J'aimerais rappeler aux gens que nous avons un système de comités. Lorsque le Parlement est saisi d'une proposition, un comité s'y penche. Des députés de tous les partis participent aux réunions du comité pour entendre des témoins qui sont des spécialistes du domaine. Nous examinons beaucoup de projets de loi. De toute évidence, les députés ne sont pas experts dans tous les domaines. C'est pourquoi nous faisons comparaître devant les comités des gens qui ont consacré leur carrière aux domaines en question. En nous fondant sur leurs connaissances, leurs compétences spécialisées et leurs avis, nous prenons des décisions éclairées.
En l'occurrence, je crois qu'aucun membre du comité ne nierait qu'une écrasante majorité de témoins a indiqué que les peines minimales obligatoires ne fonctionnaient pas. Si un député nie que c'est ce qu'ont dit les spécialistes ayant témoigné devant le comité, c'est qu'il refuse d'exercer ses facultés cognitives.
Dans ce cas-ci, en toute conscience, si on utilise le système comme il se doit, on devrait accepter les avis on ne peut plus clairs formulés par les spécialistes. Très souvent, les comités reçoivent des avis contraires, mais en l'occurrence, il y a eu très peu d'avis allant à l'encontre de ceux formulés par la majorité des témoins.
Je suis d'accord avec le : il s'agit d'une question non partisane. Je ne ferai pas preuve de partisanerie dans mon discours aujourd'hui. Pour cela, je vais seulement faire allusion aux propos tenus par les témoins. Je vais communiquer leur témoignage aux autres députés pour qu'ils sachent ce que certaines personnes ayant consacré leur vie à ce domaine ont dit.
Je présenterai d'abord quelques observations de l'Association du Barreau canadien, un organisme national représentant 37 000 juristes, y compris des notaires, des professeurs de droit et des étudiants en droit d'un bout à l'autre du pays. Parmi les principaux objectifs de l'association, on compte l'amélioration de la loi et de l'administration de la justice. En fait, je crois que le a déjà été membre de cette association.
L'ABC s'oppose depuis toujours au recours aux peines minimales obligatoires. Elle favorise plutôt les mesures ayant pour but de dissuader l'utilisation d'armes à feu illégales, mais elle souligne que pareilles mesures doivent être conformes aux principes fondamentaux de détermination de la peine prévus au Code criminel, respecter les garanties constitutionnelles et se fonder sur les principes bien établis de la common law du Canada. Telle est la position de l'ABC qui, je le répète, représente 37 000 personnes. L'association s'oppose à ce projet de loi. Elle doit, certes, avoir de bonnes raisons et de bonne informations pour prendre une décision de cette importance.
L'opposition de l'ABC se fonde sur quatre arguments:
Des peines minimales obligatoires ne facilitent pas la réalisation de l'objectif de dissuasion. Des recherches internationales en matière de sciences sociales établissement clairement ces faits. Le gouvernement du Canada a affirmé que:
Les preuves démontrent que des longs séjours en prison augmentent la probabilité que le criminel récidive... En fin de compte, cela compromet davantage la sécurité publique, plutôt que la renforcer, si « on jette la clé ».
En fait, cette loi rendrait la société plus dangereuse. Je sais que ce n'est pas ce qui semble évident à première vue, mais comme les experts en sciences sociales et le rapport du gouvernement lui-même le laissent entendre, cela rendrait la société plus dangereuse.
Le deuxième argument présenté par l'association est le suivant:
Les peines minimales obligatoires ne visent pas les délinquants les plus notoires ni les plus dangereux, qui sont déjà assujettis à des peines très strictes précisément en raison du type de crimes qu'ils ont commis. Souvent, ce sont les délinquants moins coupables qui font l'objet de peines obligatoires et qui sont assujettis à des peines d'emprisonnement d'une très longue durée.
Ce qui se produit, c'est que ces dangereux contrevenants reçoivent déjà de longues peines d'emprisonnement et ceux qui ne devraient pas recevoir de longues peines d'emprisonnement à cause des circonstances sont injustement visés par les peines d'emprisonnement minimales lorsque les juges se voient privés de leur pouvoir discrétionnaire.
Le troisième argument de l'Association du Barreau canadien est le suivant:
Les peines d'emprisonnement minimales obligatoires ont une incidence disproportionnée sur les groupes minoritaires qui souffrent déjà de pauvreté et de pénurie. Au Canada, ce sont les collectivités autochtones, qui sont déjà beaucoup trop représentées dans les centres de détention, qui seront touchées.
Le quatrième argument de l'ABC est le suivant:
Les peines d'emprisonnement minimales obligatoires vont à l'encontre d'importants aspects du régime d'imposition des peines au Canada, y compris les principes de proportionnalité et d'individualisation ainsi que la capacité des juges de déterminer une peine équitable après avoir entendu tous les faits.
L'ABC fait aussi une importante critique relativement à l'interprétation de l'article 718.1 du Code criminel. Voici ce que dit l'ABC:
L'article 718.1 du Code criminel stipule que le principe fondamental de détermination de la peine est la proportionnalité et exige que la peine soit « proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité du délinquant. »
Le projet de loi fera en sorte que les mêmes peines d'emprisonnement minimales s'appliquent à tous les contrevenants, même si la gravité des infractions et le degré de responsabilité peuvent varier énormément. Ce n'est pas équitable.
La proportionnalité reflète l'équilibre délicat qui doit être atteint dans l'imposition d'une peine. Le bon sens et l'équité exigent que les peines soient proportionnelles et individualisées. L'Association du Barreau canadien croit que c'est pour cela que les peines minimales obligatoires ont été décriées par bon nombre d'études importantes, y compris le rapport de la Commission canadienne sur la détermination de la peine.
De plus, le Code criminel contient la reconnaissance législative du principe de la séquestration, précisant qu'un des objectifs des peines d'emprisonnement est d'isoler les délinquants du reste de la société, au besoin.
Voici comment l'Association du Barreau canadien conclut ses observations:
Les peines d'emprisonnement minimales obligatoires proposées par le projet de loi favorisent la dénonciation et la dissuasion à l'exclusion d'autres principes légitimes de la détermination des peines, ce qui crée trop souvent des injustices. Bref, il y a peu de chances que ce projet de loi améliore la sécurité publique. Il risque plutôt de diminuer encore plus la confiance du public dans l'équité et l'efficacité du système de justice canadien.
Je vais maintenant citer les paroles d'autres témoins qui ont comparu devant le comité. Ces témoins, qui sont des experts dans ce domaine, sont d'avis qu'il s'agit d'un projet de loi lacunaire.
Un des témoins, Paul Chartrand, professeur de droit à l'Université de la Saskatchewan, nous a posé la question suivante: si nous voulons « favoriser une société juste et tolérante [...] est-ce que l'imposition d'une peine minimale obligatoire, avec le projet de loi C-10, est une solution légitime au problème? Je réponds que non. »
Plus loin, M. Chartrand répond à une autre question: « Est-ce que les peines minimales obligatoires sont efficaces? Encore une fois, la réponse est non. » À son avis, pour lutter contre la criminalité, il faut s'attaquer aux causes profondes du crime: aider les enfants au moyen de prestations, aider les familles au moyen de services communautaires, de centres de loisirs, etc.
M. Chartrand a aussi ajouté que le gouvernement fédéral ne peut s'attaquer seul à la criminalité. Il a dit que celui-ci devra collaborer non seulement avec les provinces et les territoires, mais aussi avec les municipalités.
Un autre témoin, M. Alan Borovoy, avocat auprès de l'Association canadienne des libertés civiles, nous a parlé de la lacune dans le projet de loi . Il a dit, lors de la réunion du Comité de la justice du 29 novembre 2006:
J'ai un autre cas qui montre les injustices qui peuvent résulter de ces dispositions. En 1994, la cour d'appel de l'Ontario a allégé une peine d'emprisonnement de 12 mois à 6 mois pour un contrevenant déclaré coupable d'avoir déchargé une arme à feu dans le but de causer intentionnellement des lésions corporelles. La cour fondait son opinion sur le fait que l'accusé avait fourni un excellent service à la collectivité et qu'il avait agi dans une situation de stress intense et qu'il avait dû prendre une décision en une fraction de seconde. Il se trouve que le contrevenant est un policier. La personne sur laquelle il a tiré était un cambrioleur qu'il pourchassait. Il n'a eu qu'un éraflure.
Aux termes du projet de loi , cet homme aurait purgé une peine d'au moins quatre ans; je suis sûr que le Parti conservateur, qui appuie entièrement nos agents de police, n'aurait pas permis à une telle injustice monumentale d'avoir lieu. Toutes sortes de circonstances justifieraient l'imposition d'une peine autre que la peine minimale.
Je répète, on ne tend pas à modifier ici les peines maximales. Notre système de justice prévoit des peines très sévères. Aux termes de ce projet de loi, les peines maximales sont les mêmes et les juges peuvent toujours les imposer.
Avec le projet de loi , ce serait au moins 5 ans. Il est difficile de croire que même les défenseurs les plus ardents des peines minimales obligatoires puissent vouloir vouer ce policier à un tel sort.
Comment cela s'est -il produit? C'est parce que la réalité est trop complexe pour être régie par des solutions si simplistes. Voilà d'où vient une telle abomination.
Il s'agit, je le répète, du témoignage devant le Comité de la justice de M. Alan Borovoy, avocat conseil de l'Association canadienne des libertés civiles, au sujet du projet de loi .
Passons maintenant à un autre témoin pour que le député ne s'imagine pas qu'il n'est question ici que d'une ou deux personnes, même si nous avons eu la recommandation d'une organisation qui représente 37 000 personnes des milieux juridiques au Canada.
Nous allons maintenant passer à M. Graham Stewart, directeur exécutif de la Société John Howard du Canada. Il nous a invité à réfléchir sur ce qui suit:
Le respect accordé au système de justice pénale n'a jamais été atteint étant donné les mesures qui engendrent la méfiance de notre système judiciaire. Les mesures qui pourraient éliminer le pouvoir discrétionnaire des tribunaux et le remplacer par un pouvoir dont la nature est arbitraire et irrationnelle ne peuvent générer la confiance du public accordée à la justice et au système politique.
M. Steward a également évoqué la triste réalité qui pourrait résulter du projet de loi :
Les peines sévères encouragent la récidive. Lorsque l'impact du projet de loi C-10 aura fait son chemin, autant de délinquants qui ont utilisé une arme à feu seront libérés chaque année qu'à l'heure actuelle. Ceux qui auront purgé des peines plus longues, lorsqu'ils seront libérés de nos prisons, auront davantage de difficulté à réintégrer la société et nous aurons moins de ressources pour empêcher des crimes ou pour réinsérer dans la société les délinquants. Ils récidiveront vraisemblablement.
Voilà un message que nous avons déjà entendu. Lorsque nous incarcérons des délinquants pour des durées plus longues, surtout lorsque, dans les circonstances, leurs peines ne sont pas justes, ils ont tendance à récidiver. Notre système de justice pénale est un échec à cet égard. La plupart des crimes ne sont pas des premières infractions. Ainsi, pour les empêcher, comme les témoins l'ont dit, il faut tout d'abord s'attaquer à la racine du problème et, ensuite, intervenir dans les lieux de détention ou prévoir d'autres modes de détermination des peines, possibilités qu'un autre projet de loi visait largement à supprimer, bien que, fort heureusement, le Parlement n'y ait pas donné son assentiment,
C'est la raison pour laquelle j'avais certaines craintes lorsque le a déclaré dans son discours que, après ces projets de loi, de nombreuses autres mesures étaient prévues.
Un autre témoin a expliqué que ceux qui purgent des peines plus longues dans cette université du crime en sortent pires qu’avant. Ils sont alors plus portés à commettre des crimes et le problème de la récidive s'aggrave. La criminalité dans la société va donc empirer parce que les gens risquent davantage de commettre d'autres crimes quand ils sortent de prison. Une fois le décalage rattrapé, c’est le même nombre de détenus qui seront libérés.
Il ne faut pas oublier que tous ces criminels obtiennent leur libération. Tous ceux qui sont visés par ce projet de loi sont libérés, à part quelques rares délinquants dangereux. Un autre projet de loi les garde en prison indéfiniment, mais aux termes de ce projet de loi, tout le monde en sort.
Si l’on veut que justice soit faite aux victimes dans notre société, si l’on veut que justice soit faite aux personnes innocentes de manière qu’elles ne deviennent pas des victimes, que ce soit pour la première fois ou pour une autre fois, il faut améliorer la sécurité dans la société. Nous voulons que ceux qui sortent de prison soient moins susceptibles de récidiver, parce que c’est eux qui commettent réellement la plupart des crimes.
Comment faire pour qu’ils soient moins susceptibles de commettre d'autres crimes? Les statistiques ainsi que les spécialistes en sciences sociales et les experts qui ont comparu devant le comité ont montré que les détenus sont moins portés à récidiver quand ils purgent des peines plus courtes et bénéficient d’un traitement approprié.
M. Stewart a aussi posé une question fondamentale, à laquelle aucun représentant du gouvernement n’a pu répondre, et qui est la suivante:
La mise en application de nouvelles peines obligatoires serait difficile à contrôler. Si les peines minimales obligatoires se révèlent efficaces pour une infraction, pourquoi pas pour toutes?
Je voudrais citer encore une autre personne qui a témoigné devant le comité. Je devine que ceux qui suivent nos travaux et les nombreux députés ici présents commencent à comprendre pourquoi la perception du crime qui circule dans le public n'est pas celle qu’on aurait pu croire. D’après moi, c’est là une des raisons qui expliquent pourquoi le système des comités sert bien le Parlement. D’une façon générale, les gens pensent que la criminalité est en hausse, alors que le nombre de crimes violents diminue.
Je dois d’ailleurs féliciter la Fédération canadienne des municipalités. Dans une quinzaine de jours, elle tiendra une séance précisément sur la criminalité, sur le fait que le nombre de crimes violents diminue et sur le rôle que jouent les médias pour corriger la perception du public.
De même, parmi ceux qui sont venus au comité, certains auraient pu croire au premier abord que ce projet de loi est plein de bon sens. C’est pourquoi je pense que les nombreux témoins convoqués par tous les partis ont changé la façon de voir et de comprendre de bien des gens face à ce problème très complexe. Il faut qu’il soit complexe sans quoi nous en serions venus à bout depuis longtemps et, de toute évidence, nous n’avons pas réussi à le faire.
Et maintenant, l’avant-dernier témoin dont je veux parler est Mme Debra Parkes, membre du conseil d'administration de l’Association canadienne des sociétés Elizabeth Fry, qui possède évidemment une riche expérience en la matière. Elle a déclaré:
[...] d'autres pays ont commencé à abandonner cette approche [de peines plus sévères], après l'avoir mise en oeuvre de façon généralisée. Il y a un certain nombre d'États américains et d'États australiens qui ont commencé à renoncer aux peines minimales obligatoires, précisément parce qu'elles entraînent des coûts financiers et humains très lourds, et n'apportent pas la dissuasion promise.
Une fois de plus, même si, intuitivement, on ne serait pas porté à voir les choses ainsi, un témoin vient expliquer aux gens que cette approche n'a pas d'effet dissuasif.
En outre, Kim Pate, la directrice exécutive de l'Association canadienne des sociétés Elizabeth Fry, résume ainsi la position de cette association:
[...] il serait préférable que ce projet de loi soit retiré et que le gouvernement renonce à adopter des dispositions prévoyant des peines minimales obligatoires de ce genre. C'est de cette façon que le comité pourrait le mieux servir la population.
Comme je l'ai mentionné au début de mon discours, il s'agit de personnes qui ont témoigné devant le Comité de la justice lors des audiences sur le projet de loi . L'immense majorité des témoins ont conseillé au gouvernement de renoncer à ce projet de loi. Ils lui ont rappelé que leur expérience exhaustive sur la question leur indique nettement qu'une telle politique ne donnera pas de bons résultats et que le gouvernement servirait mieux les intérêts des Canadiens en tournant son attention vers d'autres formes de dissuasion plus efficaces contre le crime.
Je dirais pour terminer que l'objectif de réduire la criminalité fait l'unanimité au sein des députés. Je pense qu'ils jouent très bien leur rôle et qu'ils savent écouter. Espérons donc qu'ils sauront écouter ce que leur disent les observations, les faits et les experts, alors qu'ils se retrouveront seuls avec leur conscience pour prendre leur décision finale et choisir la meilleure solution, c'est-à-dire celle qui fera du Canada un pays plus sûr. Espérons qu'ils tiendront compte des témoignages qu'ont fournis les experts sur plusieurs années et que je viens de présenter à la Chambre des communes.
:
Monsieur le Président, j'ai écouté ce qui a été dit parce que ce n'est pas la première fois que nous parlons de ce projet de loi. Or, plus j'écoute, plus je réalise que ce n'est que de la poudre aux yeux et que le gouvernement veut instaurer un projet de loi pour tenter de redorer son image et faire croire aux gens que ce n'est qu'en appliquant des peines minimales qu'ils seront en sécurité dans leur maison, dans leur ville, dans leur province et dans leur pays.
Si on se réfère à tout ce qui se passe autour de nous, on constate qu'il y a vraiment des événements tragiques, comme à Dawson par exemple. Je ne crois pas que la perspective d'une peine minimale aurait empêché ce jeune homme de commettre ce geste. Je ne pense pas que la perspective d'une peine minimale aurait empêché M. Lépine de tuer ces nombreuses jeunes filles à l'École polytechnique.
La plupart des événements tragiques de cette nature sont des crimes spontanés et irréfléchis, commis par une personne dérangée, et une peine minimale ne changerait absolument rien à la situation.
Malheureusement, dans plusieurs États américains, il existe encore la peine de mort. Or, on constate que dans ces États, beaucoup de crimes, de meurtres et d'homicides sont commis. Cela signifie que, malgré la peine de mort, cela ne fonctionne pas. Réveillons-nous et regardons, dans les institutions carcérales aux États-Unis, qui sont les personnes condamnées à des peines de mort. Ce ne sont pas des collets blancs, ce ne sont pas des millionnaires et ce ne sont pas des personnes qui ont eu une vie facile. Il y a évidemment un faible pourcentage d'irréductibles, c'est-à-dire de personnes qu'on ne pourrait jamais réinsérer dans la société ou aider à s'en sortir. Malheureusement, il existe de ces personnes. Le diable existe. Personnellement, je sais qu'il existe vraiment.
Plus tôt, un de mes collègues a demandé à mon collègue du Parti libéral s'il avait déjà été victime d'un acte criminel. Il pourrait alors comprendre et savoir ce que c'est que d'avoir peur d'être victime. Personnellement, j'ai été victime dans ma vie. J'ai été à quelques reprises dans des situations dangereuses où je me suis retrouvée face à des armes à feu et où j'ai compris que ma dernière heure était peut-être arrivée.
J'ai travaillé dans la restauration et un soir, très tard, un jeune homme a placé une arme à feu sur sa table, parce que je ne voulais pas le servir et il a alors essayé de me menacer. Je sais donc ce que c'est que d'être menacée. Or, ce n'est pas parce qu'il y a des crimes qui sont commis que toutes les personnes qui les commettent sont des criminels non réformables. Ce n'est pas vrai, parce que plusieurs personnes pourraient être réinsérées dans la société et contribuer grandement à notre société. On voit tous les jours de ces personnes et on en connaît. Je ne voudrais pas que ces personnes soient taxées toute leur vie parce qu'elles ont commis une erreur étant jeunes. Or, ce que font les peines minimales, c'est exactement ça.
Dans la loi canadienne, nous avons déjà 29 actions, donc 29 causes, qui peuvent amener une peine minimale. Est-ce que cela fonctionne mieux parce que nous avons toutes ces dispositions? Y a-t-il moins de personnes qui vont en prison?
À mon avis, comme ma collègue du Nouveau Parti démocratique le disait tantôt, si on veut vraiment combattre la criminalité, il faut s'attaquer aux causes essentielles de la criminalité que sont la pauvreté, le manque de contacts humains, de chaleur humaine et de communication, qui font en sorte que beaucoup de nos jeunes se retrouvent isolés et sans personne pour les guider.
Je pense que si on y faisait plus attention et que si on s'assurait que les personnes occupent de vrais emplois et ont de vrais salaires, on aurait peut-être des chances d'avoir moins de criminalité. Je ne parle pas de main-d'oeuvre à bon marché, d'emplois saisonniers, d'emplois pour lesquels une femme qui travaille pendant 35 heures, 40 heures ou 60 heures est obligée de demeurer chez son employeur et ne peut pas sortir. Il est prouvé que ce n'est pas parce que des peines minimales sont imposées que la criminalité diminue. Plusieurs études ont été faites à ce sujet.
J'ai trouvé une étude réalisée par Mme Nicole Crutcher et M. Thomas Gabor. Il s'agit d'une étude qui a été menée sur une période de 20 ans. Vingt ans, ce n'est pas rien. Une étude menée sur 20 ans est une étude sérieuse.
Cette étude a montré que l'imposition de peines minimales ne donne rien et n'aide en rien. Ce n'est qu'une façon de faire croire aux gens que parce qu'on emprisonne plus de gens et qu'on leur impose des peines minimales, il y aura moins de criminalité. Ce n'est pas la vérité. Ce n'est pas comme cela que ça se passe.
Selon cette étude, seule une faible proportion des délinquants incarcérés appartient au type calculateur et pèse soigneusement les risques est les avantages liés au crime. On y dit aussi que de nombreux délinquants préféreraient aller en prison plutôt que de se voir infliger des sanctions communautaires. Ils ne prennent pas en considération la différence entre une peine de trois ans, une peine de cinq ans ou une peine de dix ans. Ils ne font pas la différence. Lorsqu'ils commettent un crime, ils ne pensent pas à la peine qui pourrait leur être infligée. Tout ce à quoi ils pensent, c'est à ne pas se faire prendre. Ce n'est pas parce que les peines sont publicisées qu'ils y penseront plus, on peut me croire.
Il vaudrait mieux réinstaurer le registre des armes à feu et s'assurer qu'on ne donne pas impunément aux jeunes criminels les outils pour commettre des crimes.
Hier, à la télévision, j'ai vu qu'un grand-père a procuré à son petit-fils de deux ans un permis d'arme à feu. Deux ans! Est-ce ce que nos collègues du Parti conservateur voudraient nous voir devenir? Est-ce ce qu'on devrait devenir? Devrait-on avoir des armes à feu pour se défendre? C'est ce qu'on a invoqué aux États-Unis lors de la fusillade d'il y a deux semaines. Est-ce ce qu'on veut? Devrions-nous tous avoir des armes à feu et être poursuivis en justice chaque fois qu'on les utilisera pour commettre un crime? Il n'y a pas d'arme à feu chez moi. La plupart des gens n'en veulent pas non plus. Ce n'est pas l'imposition de peines minimales qui empêchera les gens de posséder une arme à feu. Qu'on arrête plutôt les vrais criminels et qu'on les incarcère.
Bien souvent, la petite criminalité est commise par des jeunes qui sont membres d'un gang de rue. C'est malheureux. Qu'on règle alors le problème des gangs de rue. Il ne faut pas penser que l'imposition de peines minimales empêchera les jeunes de devenir membres d'un gang de rue. Ce n'est pas ainsi que cela fonctionne.
Quand les criminels commettent un crime, ils ne pensent pas qu'ils se feront arrêter et qu'ils seront incarcérés pendant trois ans et qu'ils feraient mieux de ne pas utiliser d'armes, mais plutôt un petit papier sur lequel il est écrit qu'ils commettront un crime. Ils ne pensent pas ça. Lorsqu'ils ont décidé de commettre un crime, ils le commettent, peu importe qu'une peine minimale y soit rattachée.
Par exemple, si un jeune sans antécédent se fait prendre dans le jeu de la vie, dans le jeu de l'adolescence où on veut impressionner les gens autour de soi et où, parfois, être le meilleur dans le pire, c'est tout ce qu'on connaît, ce jeune pourrait se retrouver en prison pour longtemps. Il pourrait être perdu pour notre société. Ce serait très malheureux.
Aujourd'hui, au lieu de se débarrasser de la méthamphétamine, de l'ecstazie, des drogues dures, des drogues qui font du tort à nos enfants, au lieu de faire des razzias partout pour s'assurer que cela n'existe plus, on veut donner des peines minimales aux gens. Ce n'est pas normal. Notre société n'est pas ainsi.
Je sais que les adolescents sont souvent influençables. Il faut faire attention à eux constamment. Mais les adolescents les plus influençables sont ceux qui sont les plus laissés pour compte. On parle d'un taux élevé d'incarcération de jeunes autochtones et de jeunes qui proviennent de communautés culturelles de minorité visible. Pourquoi? Parce que la pauvreté est encore plus répandue dans ces communautés qu'elle ne l'est ailleurs. Ne pourrait-on pas plutôt s'assurer d'avoir des logements sociaux, des logements abordables, d'offrir des emplois décents, d'offrir du travail à ces jeunes, de créer des centres communautaires? Ne pourrait-on pas les laisser avoir l'occasion de travailler l'été et les laisser travailler dans la communauté plutôt que de couper des programmes d'aide à l'emploi pour les jeunes? Ce n'est pas ce qu'on fait.
Sous le couvert de vouloir assurer la sécurité des gens, on veut faire adopter des lois qui vont servir à un très petit nombre de personnes, et un grand nombre de personnes vont remplir nos prisons. Si on remplit nos prisons, que fera-t-on après? Elles sont déjà pleines. On en construira d'autres? Peut-être veut-on devenir un État militaire? Veut-on devenir un État où on ne fait que s'assurer que personne ne commet de crimes? Il faut être sérieux. On ne gouverne pas pour soi-même, on gouverne pour les gens qu'on représente.
On nous accusait plus tôt de ne pas avoir consulté les gens que nous représentons. C'est bien parce que nous les avons consultés que nous refusons d'adhérer à une telle philosophie. C'est bien parce que nous les avons consultés que nous savons que ce n'est pas ce que les gens veulent. Au contraire, ils nous demandent de réinstaurer le registre des armes à feu. Les policiers le demandent, tout comme les femmes violentées et les groupes. C'est cela que les personnes veulent pour assurer une vraie sécurité. C'est de cela qu'on a besoin. On a besoin d'outils; on n'a pas besoin de lois matraques qui mettront plus de gens en prison sans leur donner l'occasion et la chance de se réhabiliter autrement. Ce n'est pas de cela qu'on a besoin. Ce n'est pas ce qu'on veut.
Mes collègues du Bloc québécois, du NPD et mes collègues libéraux aussi l'ont énoncé très clairement. Nous voulons des mesures humaines, des mesures qui permettent aux personnes qui se sont égarées de revenir sur le droit chemin, de recommencer et de participer à la société, et non pas d'être envoyées dans des caveaux pendant 10 ans, 15 ans ou 20 ans où il est certain qu'elles n'apprendront rien.
Quand ces personnes-là vont ressortir de leur prison, il est certain que ce ne sera pas pour faire le bien, parce qu'elles n'auront qu'une idée en tête, c'est ce qu'elles auront appris en dedans pour ne pas y retourner. Quand on sort, après 10 ans ou 15 ans de prison et qu'on y est entré jeune, qu'a-t-on appris de la société? Qu'a-t-on appris de la vie en société ? Qu'a-t-on appris de l'implication, du partage ou de l'intégration? Rien. On n'a appris qu'à survivre. Est-ce cela qu'on veut, un peuple de survivants? Pas moi.
Je pense bien que plusieurs députés en cette Chambre ne sont pas d'accord non plus avec cela. Les survivants sont comme des rats, et ils feront tout pour pouvoir s'en sortir. Ça, ça fait peur.
Cela fait peur. Pourtant, avec des lois progressistes et des lois humaines qui prennent en considération l'ensemble des facteurs permettant aux juges de donner des sentences éclairées, on peut avancer. Comme société, avec de telles lois, on peut être fiers parce que nos enfants ne seront pas laissés pour compte. J'en suis convaincue car toutes les études le disent et le prouvent. Ce n'est pas Nicole Demers qui le dit. Excusez-moi, monsieur le Président, mais j'ai le droit de me nommer. Des centaines d'experts le disent. La preuve, c'est qu'aux États-Unis, dans les États où des peines minimales sont obligatoires, il y a plus de crimes que dans les autres États.
Mais de quoi donc a besoin le gouvernement pour voir la lumière? De quoi a-t-il besoin pour être éclairé? Je l'ignore. Au lieu de jeter de la poudre aux yeux, ce gouvernement devrait écouter les vraies personnes et arrêter de faire des petits focus groups qui lui donneront les réponses qu'il veut avoir, plutôt que les vraies réponses du vrai monde qui est dans la vraie société. C'est ce qu'il devrait faire.
J'espère que ce projet de loi ne sera pas adopté. Je l'espère vivement parce que si on se dirige vers cela, on commet une grave erreur envers nos enfants et nos petits-enfants et envers la société dans laquelle on vit. C'est certain.
:
Monsieur le Président, c'est avec un grand plaisir que je prends la parole à la Chambre aujourd'hui pour parler du projet de loi .
Ce projet de loi améliorerait la sécurité des Canadiens en faisant en sorte que les criminels violents qui utilisent des armes à feu pour commettre des infractions se voient imposer de lourdes peines d'emprisonnement proportionnelles à la gravité de leur infraction.
Ce projet de loi traite de deux types d'infractions. Le premier type comprend les infractions dans le cadre desquelles une arme à feu est utilisée pour commettre un autre crime. C'est ce qu'on appelle les infractions mettant en jeu une arme à feu, étant donné qu'une telle arme est utilisée pour commettre l'infraction. Le deuxième type d'infraction vise la possession d'armes à feu illégales. Ce sont les infractions non liées à l'utilisation d'une arme à feu.
Je vais d'abord parler du premier type. Le projet de loi prévoit des peines minimales obligatoires lorsqu'un fusil est utilisé pour commettre un crime grave aux termes du Code criminel. Ces infractions comprennent les tentatives de meurtre, la décharge volontaire d'une arme à feu, les agressions sexuelles et les agressions sexuelles graves, l'enlèvement, la prise d'otage, le vol et l'extorsion.
Si une arme à autorisation restreinte ou une arme prohibée est utilisée pour commettre une de ces infractions, ou si des armes à feu sont utilisées relativement aux activités de gangs — qui, comme nous le savons, sont un réel problème au Canada — le contrevenant qui en est à sa première infraction se verra automatiquement imposer une peine d'emprisonnement de cinq ans. Les peines grimperont à sept ans dans le cas d'une ou de plusieurs récidives d'un même crime ou d'un crime semblable commis avec une arme à feu.
De toute évidence, ce projet de loi cible les récidivistes violents qu'il faut empêcher de circuler dans nos rues, pour le bien de nos collectivités. Cette mesure aura aussi un effet dissuasif sur les jeunes qui font partie de bandes, en les obligeant à songer aux conséquences des actes criminels qu'ils seraient susceptibles de commettre.
Le deuxième groupe d'infractions vise évidemment la possession illégale d'une arme à feu à autorisation restreinte ou d'une arme à feu prohibée. Ces infractions incluent notamment le trafic d'armes, le vol d'une arme à feu, la possession d'une arme à feu en vue de faire le trafic de drogues, la fabrication d'une arme à feu automatique et la contrebande d'armes. Des peines minimales obligatoires sont aussi prévues pour ces infractions, qui ne supposent pas d'utilisation d'une arme à feu.
Le projet de loi cible directement, entre autres, l'industrie que représente le trafic d'armes à feu. Pratiquement tous les crimes liés à des bandes partout au Canada sont commis non pas par ceux qui achètent légalement des armes à feu et les enregistrent, mais par des gens qui achètent des armes à feu sur le marché noir ou qui les volent à leurs propriétaires légitimes.
Dans ma province, la Colombie-Britannique, on estime que des fusillades ou des meurtres attribuables à des bandes criminelles se produisent en moyenne une fois par mois, et parfois plus souvent. Le taux de croissance de l’activité des bandes en Colombie-Britannique est vraiment étonnant. Il est évidemment attisé par le trafic de la drogue, notamment la marijuana à forte teneur en THC. Les participants sont des jeunes gens portant des armes illicites, qui font preuve d’un mépris total de la sécurité et de la vie des gens qui les entourent.
Abbotsford, dans ma circonscription, a la réputation d’être une belle ville. C’est une collectivité sûre, relativement parlant. Elle est bâtie sur un site pittoresque, situé entre le mont Baker, haut de 3000 mètres, et le fleuve Fraser. Notre population se compose de personnes âgées, de jeunes familles, de célibataires et d’étudiants qui aiment tous vivre à Abbotsford à cause de la qualité de vie que la ville offre. Abbotsford est hautement cotée selon différents critères. Elle a récemment été désignée ville la plus généreuse de tout le Canada, sur la base d’études de Statistique Canada et d’organismes de la Colombie-Britannique.
Malheureusement, les maux urbains ont envahi Abbotsford. Les bandes et les pistolets y sont devenus de plus en plus courants, ordinairement en marge du trafic de la drogue. Même si les bandes de ma région se déplacent fréquemment dans la vallée du bas Fraser, nous avons eu notre part de souffrances et de désespoir causés par les fusillades.
En 2006, le rapport statistique de fin d’année du service de police d’Abbotsford a révélé que 126 infractions mettant en cause des armes à feu avaient été commises dans ma circonscription. Il y a notamment des vols qualifiés, des agressions, des agressions sexuelles, des tirs au hasard au volant d’une voiture, qui deviennent de plus en plus fréquents, et des cambriolages à domicile. Tout cela se produit à Abbotsford, de même que dans la plupart des collectivités du pays où nous vivons.
Le 26 septembre 2006 l' Abbotsford Times rapportait que la police avait répondu à l’appel d’un jeune homme de 25 ans blessé par balles et dont l’état était grave. L’homme était connu de la police, qui pensait qu’il avait été sciemment ciblé.
Vendredi dernier, 11 mai, la CBC a signalé une fusillade sur Commercial Drive, à Vancouver, dans un café très fréquenté. Un homme avait reçu plusieurs balles dans l’estomac et a dû être transporté à l’hôpital pour une intervention d’urgence.
À Surrey, le 3 mars 2006, un jeune de 18 ans venant d’Abbotsford, Yulian Limantoro, a été abattu après avoir été pris dans une fusillade causée par une vente de drogue qui avait mal tourné.
Le 28 octobre 2005, une femme de 40 ans de Port Moody a été atteinte par une balle perdue pendant qu’elle regardait la télévision dans son salon. La balle s’est logée dans son cerveau. Heureusement, elle a survécu.
Bien sûr, aucun d’entre nous ne pourra oublier la série de crimes violents commis à Toronto en 2005. À la mi-septembre, il y avait déjà eu 40 assassinats dans la ville. Nous avons tous été choqués et horrifiés par le décès de Jane Creba, étudiante de dixième année, qui a été abattue en pleine rue Yonge, le 26 décembre, tandis que six autres personnes étaient blessées. Cette jeune de 15 ans était la 52e victime de meurtre à Toronto en 2005.
Depuis 2006, les services policiers de la Colombie-Britannique ont indiqué que plus de 1 000 armes à feu soit ont été utilisées pour commettre des crimes, soit étaient possédées illégalement, dans la vallée du Bas-Fraser. Quiconque croit que les crimes commis à l'aide d'armes à feu est un problème typiquement états-unien n'a qu'à jeter un coup d'oeil à la Colombie-Britannique.
Entre 2001 et 2006, 195 Britanno-Colombiens ont été tués par des armes à feu. Seulement en 2006, la police a récupéré 379 pistolets semi-automatiques, 28 revolvers, 139 autres armes de poing, 76 carabines, 66 fusils de chasse, 88 fusils d'assaut et 12 armes modifiées.
Les peines d'emprisonnement minimales obligatoires actuelles pour les crimes commis à l'aide d'armes à feu ne sont pas suffisantes. Nous devons dissuader ces criminels en imposant un coût élevé pour l'achat, la vente ou l'utilisation d'armes à feu à des fins criminelles. Pour ce faire, nous devons empêcher les délinquants de commettre de tels crimes et alourdir les peines pour chaque infraction subséquente.
En plus de dire clairement que les activités commises au moyen d'une arme à feu entraîneront de graves conséquences, le projet de loi fera disparaître ces criminels de nos rues pour plus longtemps.
J'insiste sur le fait que ce projet de loi n'impose pas une augmentation généralisée des peines minimales obligatoires. Il cible plutôt des crimes liés aux activités de bandes organisées ou commis par des délinquants violents et récidivistes.
Comme les députés le savent, ma circonscription, Abbotsford, est juste à côté de la frontière avec les États-Unis et fait partie du réseau complexe de crime organisé dans la vallée du Bas-Fraser. Des drogues, comme la marijuana à teneur élevée en THC et la méthamphétamine en cristaux, sont régulièrement échangées contre des armes à feu en provenance des États-Unis. Il s'agit des mêmes armes que les bandes de rue utilisent pour commettre leurs crimes.
Même si les responsables de la sécurité à la frontière, Canadiens comme Américains, font preuve de vigilance pour protéger notre frontière et stopper le commerce transfrontalier des armes à feu, ils ne peuvent pas faire grand-chose quand, après un bref séjour en prison, les criminels se retrouvent dans la rue, prêts à recommencer. Évidemment, il s'agit souvent de crimes violents.
Le commerce des armes et celui de la drogue sont très lucratifs, au point d'attirer beaucoup de jeunes dans ces bandes. Les peines minimales obligatoires prévues dans le projet de loi feront beaucoup pour inciter ces jeunes à ne pas embrasser ce genre de vie.
Notre gouvernement veut aussi, grâce à des initiatives communautaires, éviter carrément que les jeunes ne tombent dans la criminalité. C'est pourquoi, dans le budget de 2006, le gouvernement a investi 20 millions de dollars à l'intention des collectivités. Cet argent servira surtout à prévenir la criminalité chez les jeunes et à les aider à se tenir loin des armes à feu et des bandes de rue.
Je crois que ce projet de loi et nos autres initiatives de prévention permettront de réduire le nombre de crimes commis avec une arme à feu et de décès liés à l'utilisation d'armes à feu au Canada.
Si nous ne laissons pas clairement savoir aux criminels que l'utilisation d'une arme de poing pour perpétrer un crime aura des conséquences beaucoup plus graves que les avantages liés à l'utilisation de l'arme, je crois que le nombre de crimes commis avec une arme à feu continuera d'augmenter. Le message très clair que nous voulons envoyer à cet égard est le suivant: les criminels qui commettent un crime grave avec une arme doivent s'attendre à purger une peine de prison, un point c'est tout.
Je crois que ces peines constitueront également un outil important pour les policiers qui se retrouvent quotidiennement dans des situations pouvant leur être fatales. Ils sauront maintenant que s'ils envoient un contrevenant en prison pour une infraction qui met en jeu une arme à feu et qui est visée par le projet de loi , ce contrevenant ne recouvrera pas sa liberté avant longtemps. Lorsque nous retirons ces contrevenants des rues et que nous les gardons en prison plus longtemps, ils ne représentent pas, pendant cette période, une menace pour les simples citoyens travailleurs et respectueux des lois. En même temps, les policiers peuvent concentrer leurs efforts sur d'autres criminels dans nos collectivités.
Il est clair que les crimes violents commis avec une arme à feu sont un problème qui affecte les collectivités de l'ensemble du pays. Pourtant, l'ancien gouvernement libéral n'a absolument rien fait pendant 13 ans pour combattre ce fléau qui sévit dans notre pays. Malheureusement, le Parti libéral et le Bloc ont fait tout ce qu'ils ont pu pour tenter de nous empêcher de faire adopter le projet de loi .
En fait, lorsque ce projet de loi a été renvoyé au comité, il a été vidé de sa substance; il est devenu essentiellement insignifiant et n'avait plus aucun mordant. C'est l'appui du NPD qui nous a permis de rétablir les dispositions du projet de loi relatives aux peines minimales obligatoires, soit une peine de cinq ans à la première infraction et de sept ans à chacune des récidives. Néanmoins, la peine minimale obligatoire de dix ans d'incarcération à la troisième infraction et à toute récidive ultérieure a été supprimée. À ce stade, le projet de loi, tel que libellé, est mieux que rien. Les Canadiens exigent une mesure législative comme celle-ci.
On pourrait dire que la façon dont les libéraux ont fait volte-face sur la question des crimes mettant en jeu des armes à feu pourrait être comique si, en fait, la question n'était pas aussi grave. La Chambre se souvient peut-être que, à la faveur d'un revirement de dernière minute pendant la campagne électorale, les libéraux avaient accepté d'adopter la ligne dure face au crime. Ils avaient notamment promis de proposer et d'appuyer des peines minimales obligatoires pour les crimes mettant en jeu des armes à feu. Ils avaient en quelque sorte été convertis.
Des promesses ont donc été faites aux Canadiens concernant leur sécurité personnelle. Pourtant, nous en sommes toujours au même point. Les libéraux ont été priés de défendre les Canadiens contre une escalade croissante des crimes violents mettant en jeu des armes à feu, et qu'ont-ils fait? Une autre volte-face soudaine contre notre projet de loi . Quelle honte! On peut dire à juste titre que le Parti libéral du Canada est tendre envers les criminels.
Afin de mettre un terme au cycle de la violence armée, le nouveau gouvernement conservateur respectera sa promesse électorale de sévir contre les criminels dangereux. Nous devons rien de moins aux Canadiens que de les protéger du mieux que nous le pouvons. J'estime que ce projet de loi constitue un excellent moyen d'y parvenir. Dissuader les criminels, notamment en prévoyant des peines d'emprisonnement minimales obligatoires et progressives, et en les empêchant de se procurer illégalement des armes de poing sont d'importantes mesures pour réduire la criminalité dans nos rues.
C'est pourquoi le projet de loi comporte deux volets, l'un concernant les infractions mettant en jeu des armes à feu, l'autre la possession illégale d'armes à feu. En général, lorsque le véhicule d'un trafiquant de drogues est intercepté, on y trouve des armes à feu. Il est donc facile de poursuivre ces trafiquants.
Les habitants de la Colombie-Britannique et d'Abbotsford sont las de voir des délinquants commettre des crimes violents et s'en tirer avec une simple réprimande. Enfin, nous pouvons compter sur un gouvernement qui a à coeur le droit des honnêtes citoyens de vivre dans la sûreté et la sécurité. C'est une promesse que nous avons faite pendant la campagne électorale et que nous sommes maintenant en train de mettre intégralement en oeuvre.
Je sais que la Chambre fera ce qui s'impose en protégeant les familles canadiennes comme nous le leur avons promis.
:
Monsieur le Président, en début d’intervention, je dois revenir sur les propos que le a tenus tout à l’heure. Il est clair qu’il a parlé d’un effort visant à définir une position avantageuse sur le plan politique plutôt qu’une bonne politique d’intérêt public. Ce que le ministre a présenté était en partie une minable politique d’intérêt public, mais, d’après lui, une proposition politiquement avantageuse.
Selon lui, le gouvernement veut lancer un message. Il voulait sans doute dire que le gouvernement essaie de lancer un message aux criminels en présumant que, dans tous les cas, nous les avons identifiés. Le veut donc lancer un message aux criminels, mais au fond, lui et son gouvernement adressent un message politique aux Canadiens. C’est de la politique, pas une bonne politique d’intérêt public. Toute cela sent la politique et n’a rien à voir avec une politique d’intérêt public.
Mon collègue, le député de a parlé d’une liste de témoins qui ont comparu au Comité de la justice, et la vaste majorité d’entre eux avaient de bonnes raisons fondées sur l’intérêt public pour ne pas approuver le régime de peines minimums obligatoires proposé dans le projet de loi.
L’une des suppositions sur lesquelles repose cette idée de peines obligatoires ou rigoureuses est qu’elles auront un effet dissuasif. On a l’impression que plus la peine est sévère, plus l’effet dissuasif est prononcé. Il y a peut-être là une certaine logique, mais les données statistiques, les sociologues et les criminologues nous disent tous aujourd’hui que ce n’est pas la sévérité ou la durée de la peine qui décourage le crime; c’est la perspective d’être pris qui est le facteur majeur de dissuasion dans la société.
Que le risque soit l’emprisonnement à vie ou une peine de deux jours, celui qui va commettre ou non un crime prémédité songe davantage à la possibilité de s’en tirer qu’à la peine qui pourrait lui être imposée par la suite. C’est une logique fausse qui nous porte à penser que, si les peines sont plus lourdes ou s’il y a des peines minimums obligatoires, un lien s’établira directement dans l’esprit de celui qui s’apprête à commettre un crime.
Il n’empêche que mon parti et moi acceptons volontiers qu’il y ait des catégories dans le Code criminel, des éléments d’activité où la société se doit de dénoncer le crime d’une manière qui exige le recours à une peine minimum.
Je signale à ce propos que le Code criminel a été modifié assez récemment, il y a seulement trois ou quatre ans, pour imposer des peines obligatoires minimums d’un an pour les infractions liées aux armes à feu et de quatre ans pour un vol commis avec une arme à feu. Je crois qu’il s’agit de l’article 344. Il y a également des minimums obligatoires pour la conduite en état d’ébriété, surtout s’il s’agit d’une deuxième infraction. S’il s’agit de récidive, le délinquant va en prison. Le Parlement, le gouvernement et les Canadiens acceptent qu’il y ait des peines minimums obligatoires.
La fausse logique sur laquelle le projet de loi repose, cependant, c’est que, si on élabore et on applique une foule de peines minimums obligatoires, il y aura une réaction immédiate et la criminalité diminuera. Ce n’est pas comme ça que ça marche. Je ne crois pas qu’un seul témoin digne de crédit qui a comparu devant le comité après avoir étudié le projet de loi ait été prêt à admettre que, si nous imposons toutes ces peines obligatoires minimums, le taux de criminalité va diminuer. On peut se sentir soulager à l’idée de retirer des criminels de la circulation.
Je vais citer les paroles du ministre de la Justice. J’ai eu du mal à le croire, mais le a déclaré que les criminels auraient le temps d’y réfléchir en prison. Le député du Bloc québécois avait demandé si le délinquant potentiel réfléchissait aux conséquences de son acte avant de commettre une infraction. Selon la logique du ministre, il aura le temps d’y penser plus tard. C’est ce qui s’appelle mettre la charrue avant les boeufs. Il n’y a là aucun effet dissuasif. Je regrette ce raisonnement et le fait que le ministre ne veuille pas tenir compte de la logique des propos du député du Bloc.
D’autre part, je crois que le ministre a essayé d’envoyer un message et un autre exemple montrant que ce message est inapproprié est qu’il utilise l’expression « détention à domicile ». La détention à domicile n’a rien à voir avec le projet de loi que nous débattons. Le projet de loi porte sur les peines minimales obligatoires. Le ministre faisait allusion au projet de loi qui concerne les peines d'emprisonnement avec sursis. Le , le , a envoyé un message trompeur en employant une expression populaire qui ne figure pas dans le Code criminel, en parlant de détention à domicile.
La plupart des Canadiens se demanderont ce qu’est la détention à domicile et si cela a quelque chose à voir avec la liberté sous caution ou la prison. Quoi qu’il en soit, si le ministre désire utiliser ces expressions familières plutôt que le mot qui convient, cela le regarde. Il a aussi parlé d’envoyer les contrevenants dans un centre de redressement. C’est ridicule. C’est ce que nous dit le . Il pourrait certainement utiliser des expressions qui figurent dans le Code criminel plutôt que des expressions populaires pour essayer d’envoyer un message subliminal au public.
Quoi qu’il en soit, j’estime qu’en parlant de détention à domicile et de centre de redressement, le ministre a cherché de façon vraiment malhonnête à critiquer nos méthodes correctionnelles actuelles. Personnellement, je n’aime pas entendre ce genre de propos dans la bouche d’un ministre, mais cela le regarde et s’il était ici maintenant, nous aurions sans doute une petite discussion à ce sujet. Maintenant que j’ai eu l’occasion de commenter les propos du ministre au sujet de ce projet de loi, je vais faire mes propres observations.
Une voix: Ce serait une bonne idée.
M. Derek Lee: Peut-être que non. Le député n’aime pas ce que j’ai dit au sujet du ministre, mais nous sommes dans une tribune public.
M. Ed Fast: C’est une honte.
M. Derek Lee: Cela n’a rien de honteux. Nous jouissons de la liberté de parole à la Chambre.
Quoi qu’il en soit, je tiens à mentionner qu’un peut partout dans le pays les gens ont l’impression qu’il y a davantage de crimes violents. Si nous remontons aux années 1960, nous pouvons constater une augmentation de la criminalité. De nombreux criminologues disent qu’en fait c’est le nombre de crimes signalés qui a augmenté. L’activité criminelle des années 1960 et du début des années 1970 n’était peut-être pas toujours déclarée et c’est pourquoi les chiffres étaient un peu plus bas qu’ils n’auraient dû l’être. Quoi qu’il en soit, la tendance est là. Nous pouvons constater une augmentation tangible à partir des années 1960 jusqu’en 1992.
En 1992, il y a eu des changements sociologiques. Je ne crois pas que ce soit dû à ce que le gouvernement a fait ou n’a pas fait. Nous avons eu une récession économique, mais nous pouvons voir quelle est la tendance qui se dégage. Après cette période, tous les types d’activité criminelle ont commencé à diminuer. Je reconnais que le public a l’impression qu’il y a beaucoup plus de crimes. Ces crimes retiennent beaucoup plus l’attention des médias. La télévision, les journaux et Internet contribuent à ce phénomène. Si un crime a lieu, les gens en entendent parler et cela peut exacerber le problème au niveau de la politique publique.
Je ne dis pas qu'il n'y a pas de crime. Il y en a en masse, c'est un problème social, mais la criminalité n'augmente pas autant qu'on essaie de le faire croire aux gens. À Toronto, on avait l'impression qu'il y avait un grave problème d'armes à feu il y a environ deux ans. Effectivement, il y a eu une nette augmentation du nombre de fusillades et d'incidents mettant en cause des armes à feu à Toronto. J'y reviendrai un peu plus tard, mais il semble maintenant qu'il y ait eu en 2005 une augmentation ponctuelle, puis les choses se sont calmées. Aujourd'hui, la situation est tout autre.
Cependant, les statistiques sur la criminalité à l'échelle du pays montrent bien que chaque ville, chaque région rurale et chaque région urbaine est différente. Dans certaines villes canadiennes, le taux de criminalité est deux fois celui de Toronto ou de Montréal. Cela pourrait nous sembler contraire à la logique, mais la criminalité existe dans les petites villes comme dans les grandes. Dans certaines petites villes, le taux de criminalité—et non le nombre d'incidents brut—est considérablement plus élevé que dans certaines régions urbaines.
Dans ces localités-là, les habitants ont un véritable problème. Je représente une circonscription de la grande région de Toronto. Il m'est impossible de parler de cette question sans reconnaître que, en fonction d'où on se trouve au Canada, dans le Nord, dans le Sud, dans l'Est ou dans l'Ouest, on n'a pas la même perception des choses quand vient le temps de déterminer à quel point la situation est mauvaise ou bonne, ou encore où exactement se situe le taux de criminalité.
Avant d'aller plus loin, en ce qui concerne les principes de détermination de la peine déjà énoncés dans le Code criminel, y compris ceux liés aux peines minimales obligatoires dont j'ai parlé plus tôt en rapport avec les armes à feu, mon parti a bien proposé durant la dernière campagne électorale d'allonger les peines minimales obligatoires. Le député d'en face soulève la question, mais l'allongement qui a été proposé visait les peines d'un an et de quatre ans.
Ce que le gouvernement a proposé dans le projet de loi était toute une série de peines minimales obligatoires allongées de trois, cinq, sept, voire dix ans. Cela est bien différent de ce que le Parti libéral avait proposé, soit des rajustements raisonnables, particuliers et ciblés des peines minimales dans le Code criminel. Nous pourrions peut-être clore ce débat. Cela a-t-il été discuté durant la campagne électorale? Oui, certes, mais je voulais énoncer clairement ce que mon parti a proposé.
Il ne s'agit pas de créer de nouvelles infractions. Le projet de loi ne crée pas de nouvelles infractions. Il ne crée pas de nouvelles peines. Tout cela est déjà dans le Code criminel. Ce que fait le projet de loi, c'est, et je pourrais dire uniquement, établir une peine minimale obligatoire à l'autre bout du spectre. Nos juges ont pour fonction de déterminer les peines et ils peuvent imposer les peines appropriées, ce qu'ils font. Dans 99 p. 100 des cas, ils imposent la peine qui convient. Ils peuvent imposer une peine plus longue que la peine minimale et, parfois, ils le font, mais ils se fondent sur une série de critères énoncés dans le Code criminel. Nous avons légiféré là-dessus il y a une dizaine d'années.
Je crois que le régime de détermination de la peine de notre système juridique fonctionne très bien. De temps en temps, il y a une aberration. De temps en temps, il y a des circonstances dans un tribunal où l'attitude d'un juge ou encore les faits paraissent un peu étranges. Un journal, une chaîne de télévision, un journaliste en aura connaissance et alertera l'opinion publique au sujet d'une peine jugée un peu trop sévère ou un peu trop légère. Mais pareilles aberrations surviennent très rarement. Il semble y en avoir plus parce que les médias en parlent plus. Et on connaît l'appétit des médias pour la nouvelle.
On a évoqué, dans une intervention précédente sur ce projet de loi, un scénario que j'avais trouvé fort convaincant lors des travaux du comité. Il se rapporte à l'imposition de peine en milieu rural, dans le Nord, dans l'Ouest et dans l'Est du pays aussi, mais surtout dans le Nord. Il faut se rappeler que, avant qu'une personne ne se voie imposer une peine, il faut d'abord mener une enquête, mettre cette personne en accusation, puis la déclarer coupable à l'issue d'un procès, avant de déterminer sa peine.
Un témoin qui a comparu devant le comité a fait valoir de façon très convaincante l'argument qui suit. Dans le Nord, la personne déclarée coupable d'une infraction, même une infraction avec violence, ne peut espérer être réadaptée et se réinsérer dans la société que si elle peut continuer de vivre dans son milieu.
On ne peut tout simplement pas retirer de leur milieu les contrevenants qui habitent dans le Nord pour les envoyer quelque part dans le Sud et espérer qu'ils vont pouvoir être réadaptés et se réinsérer dans la société. Ce ne sont pas des gens du Sud. Ce sont des citoyens du Nord.
La création d'un régime de peines minimales obligatoires d'une durée de plus de deux ans garantit que les peines seront du ressort fédéral. Toutes les peines d'une durée de plus de deux ans doivent être purgées dans un pénitencier fédéral. Si l'on impose des peines minimales obligatoires d'une durée considérablement supérieure à deux ans, il faudra alors retirer les contrevenants de leur milieu et les envoyer purger leur peine dans un pénitencier fédéral, établissement qui pourrait se trouver à des milliers de kilomètres de chez eux.
Il est généralement reconnu que les prisons sont simplement des entrepôts à délinquants, où les jeunes apprennent comment devenir de meilleurs criminels. Les prisons ne sont pas les meilleurs endroits. J'accepte que nous en ayons besoin pour protéger la société, du moins en tant que centres de transit, mais le témoin du Nord a dit que ces nouvelles peines d'une durée minimale obligatoire supérieure à deux ans feraient en sorte qu'il serait presque impossible de réhabiliter et de réintégrer ces délinquants des collectivités nordiques. En d'autres mots, nous créons des causes perdues avant même de commencer.
Certains députés pourraient me demander ce que je propose pour quelqu'un qui a commis une grave infraction et qui doit être puni en conséquence. Le système de justice pénale y pourvoit déjà grâce à une variété de peines et à un juge qualifié qui décidera ce qu'est une peine appropriée pour ce condamné, en tenant compte de tous les aspects de l'affaire, y compris les circonstances concernant la victime, l'existence d'un dossier criminel, les risques de récidive et les possibilités de réhabilitation. C'est ce que nous demandons à nos juges de faire. Les peines croissantes prévues dans ce projet de loi enlèveraient, d'un point de vue pratique, toute latitude aux juges. Il en sera ainsi si le projet de loi est adopté. Cela m'attriste, mais c'est ainsi.
Le député d'en face a parlé de la hausse subite, cette année, des infractions commises avec des armes à feu à Toronto. Je suis heureux de signaler que, alors qu'en 2005 et en 2006 il y avait eu à cette époque de l'année environ 87 et 81 fusillades, cette année ce nombre n'est que de 60 pour l'instant, ce qui représente une baisse de plus de 25 p. 100. Cela est dû à une bonne présence policière. Je n'ai toutefois pas le temps d'entrer dans les détails. Une fusillade, c'est déjà trop, mais il s'agit d'une grande ville de quelques millions d'habitants et il y aura de tels incidents. Je parle toutefois d'une baisse de 25 p. 100. La hausse perçue de fusillades n'existe pas, et cette baisse s'est produite dans le cadre des lois actuelles. Je voulais simplement le signaler. Une grande partie du crédit revient à la police de Toronto et à ses nouvelles méthodes de maintien de l'ordre.
:
Monsieur le Président, je ne sais pas de combien de temps je dispose, mais je serai bref. Je vais commencer et voir où cela nous mènera.
J'ai écouté le débat à l'écran dans mon bureau toute la matinée, en essayant de régler plusieurs choses, mais je n'ai pas pu m'empêcher de venir pour tenter de présenter mon point de vue parce qu'il y a certaines choses que j'aimerais souligner.
Nous avons entendu très récemment le député d' prononcer un discours qui venait à mon avis directement du coeur, de l'âme et de l'esprit des Canadiens ordinaires de sa circonscription. Il y a un grand nombre de gens ordinaires d'un bout à l'autre du pays qui se demandent ce qui se passe.
J'ai vraiment beaucoup de respect pour les avocats, mais ils semblent souvent voir la réalité bien différemment de plusieurs d'entre nous. Je le dis tout simplement parce qu'il est difficile de les comprendre lorsqu'ils se mettent à utiliser leur jargon. Ils utilisent un langage juridique tellement fermé qu'il est difficile de savoir exactement à quoi ils veulent en venir, et lorsque nous le leur faisons remarquer, ils nous répliquent toujours que le problème avec les gens comme moi, le député d' et d'autres, c'est que nous sommes tout simplement trop simplistes. J'ai entendu ce mot tellement souvent qu'il me fait bondir.
C'est une réponse simpliste, disent-ils, alors que nous essayons de nous exprimer du mieux que nous pouvons. C'est ce que font tous les députés, et je sais qu'il en est de même pour vous, monsieur le Président. Nous écoutons les gens dans nos circonscriptions. Ils en ont vraiment assez de voir certaines des choses qui se passent dans notre système de justice. Ils veulent un système de justice qui soit véritablement bon. Il semble que notre système de justice se soit transformé plutôt en système juridique, où nous nous engageons constamment dans des débats sur la signification de tel ou tel terme et sur d'autres choses du genre, de telle sorte que nous perdons de vue l'essentiel, soit le fait que le public n'est pas satisfait du fonctionnement de notre système de justice. C'est aussi simple que cela. Le public n'est pas satisfait.
Les députés peuvent vérifier n'importe quel sondage ou, s'ils le désirent, ils peuvent même effectuer leurs propres sondages dans leurs circonscriptions. Même le député libéral qui vient de prendre la parole peut faire cela dans sa circonscription, auprès des gens ordinaires. Les députés peuvent oublier que les gens ordinaires sont simplistes. Ils n'ont qu'à se souvenir que ce sont ces gens qui travaillent fort et qui paient des impôts dans notre pays, et ils veulent que les services fournis par le gouvernement soient efficients et efficaces.
Une des meilleures choses que nous puissions faire pour répondre à bon nombre de leurs préoccupations, c'est de fournir un système qui fera en sorte que notre société est la plus sûre possible et qui protégera l'ensemble de la population. Une de nos obligations les plus fondamentales en tant que députés consiste à proposer des mesures législatives qui nous permettront d'atteindre ce but. Je crois que nous essayons tous très fort de faire cela, même selon notre propre façon de penser qui, trop souvent, est qualifiée de simpliste par trop de gens à la Chambre.
Le jour où j'ai vraiment commencé à être plus inquiet que je ne l'avais jamais été, c'est le jour où j'ai vu 14 agriculteurs, et deux autres avant eux, sortir d'un tribunal, menottes aux mains et chaînes aux pieds, et se faire conduire en prison pour purger des peines consécutives. Cela veut dire que, pour chaque crime, ils devaient purger une peine donnée avant de commencer à en purger une autre. Les tribunaux n'imposent habituellement pas de peines consécutives; les peines sont plutôt purgées simultanément. Clifford Olson, par exemple, a été condamné à l'emprisonnement à vie pour le meurtre de 11 personnes, mais il ne purge qu'une peine. Il devrait probablement purger 11 peines d'emprisonnement à vie.
Ces agriculteurs ont carrément été jetés en prison. On les a amenés de force, menottes aux poings, pour la plupart, devant leur épouse et leurs enfants. Pourquoi? Parce qu’ils avaient vendu leur propre grain, du grain qu’ils avaient eux-mêmes cultivé sur leur ferme, à la sueur de leur front. Ils avaient enfreint la loi parce qu’ils avaient tenté de vendre leur grain de l’autre côté de la frontière. Personne ne nie qu’ils ont ainsi désobéi à la loi et qu’il fallait peut-être les accuser de quelque chose. La question n’est pas là.
La question qui se pose, c’est celle de savoir si la punition était proportionnelle au crime commis, si on a agi correctement au ministère. Il s’agissait d’agriculteurs qui avaient travaillé d’arrache-pied à cultiver leur grain et qui, en posant un quelconque acte de désobéissance civile, s’étaient avisés de tenter de faire plus d’argent, plus de profit, avec leur ferme, eux qui sont constamment aux prises avec des problèmes de rentabilité. Pouvons-nous dire qu’on a agi correctement quand on voit que le gouvernement libéral qui était au pouvoir à l’époque est demeuré passif lorsque ces personnes ont été jetées en prison?
M. Ed Fast: C’est la façon de faire des libéraux.
M. Myron Thompson: Voilà! C’est la manière libérale. C’est ce que j’avais à l’esprit. Ce n’est pas correct. Il y a quelque chose de vicieux là-dedans.
Naturellement, certains diront peut-être qu’il s’agit là d'un raisonnement simpliste, mais ce n’est pas le cas. La punition devrait être proportionnelle au crime commis. Je ne vois rien de mal dans ce principe. Or, en examinant les divers aspects de la détermination de la peine, nous constatons que, dans certains cas, des délinquants qui ont commis une infraction avec violence se voient imposer tout simplement une assignation à domicile ou une peine à purger dans la collectivité. Pendant ce temps, ces 14 agriculteurs ont été jetés en prison pour avoir vendu leur propre grain. Mais on dira probablement que je tiens des propos simplistes.
Des millions de Canadiens se demandent quand nous allons mettre fin à cette absurdité pour enfin nous attaquer à la criminalité. Ils veulent que nous disions haut et fort aux criminels qu’on ne les laissera pas s’en prendre aux gens ou à leur propriété ou faire quoi que ce soit qui contrevient à la loi. Cela me dépasse que certains députés ne soient pas capables de comprendre ce principe.
Pourtant, il se trouve qu’un groupe d’agriculteurs ont été jetés en prison, menottes aux poings, pour avoir vendu leur propre grain. Ils y ont été traînés de force devant leurs épouses et leurs enfants en pleurs. J’y étais et j’ai tout vu. J’ai parlé aux femmes et aux enfants après que le calme fût revenu et que ces agriculteurs eurent été enfermés à double tour. Ce jour-là, j’ai juré que je ferais tout en mon pouvoir pour faire régner le gros bon sens dans l’esprit des gens ici à la Chambre des communes. Nous nous devons de nous rendre compte que ce genre de comportement est inacceptable.
Nous avons donc préparé un texte de loi. Comme nous voulons sévir contre la criminalité, nous avons opté pour l’application d’une peine minimale obligatoire dans le cas d’un crime commis à l’aide d’une arme à feu. Nous voulons faire comprendre qu’il est inacceptable d’utiliser des armes à feu dans la commission d’un crime. Nous disons aux criminels que nous ne le tolérerons pas. Nous allons durcir le ton. Nous disons aux criminels que, s’ils utilisent une arme, ils feront face à une peine minimale obligatoire.
Cela va-t-il les dissuader? Comme certains l’ont dit, ils ne seront pas nombreux ceux chez qui cela traversera l’esprit. Je ne rejette pas cette façon de voir les choses, mais là n’est pas la question. La question est de savoir si la peine est adaptée au crime. Y aura-t-il correspondance entre les deux? Nous commençons effectivement à prendre des mesures sérieuses, surtout contre les auteurs de crimes violents qui utilisent une arme à feu pour perpétrer leur acte.
Les exemples abondent. D’ailleurs, personne dans cette Chambre ne trouvera un seul exemple où la détention à domicile ou encore le travail communautaire représente une peine adaptée à un crime violent. Il est honteux pour cette Chambre de penser ainsi. Malheureusement, biens des crimes auxquels je pense ont été commis contre des enfants, les membres les plus vulnérables de notre société. Des crimes qui ont été traités avec une grande légèreté.
Nous essayons de faire adopter une mesure législative qui indiquera, sans équivoque, que la Chambre des communes ne tolère pas les crimes violents. Nous allons faire de notre mieux pour que les criminels soient appelés à payer le prix de leurs forfaits, parce que c’est la sanction qu’ils méritent.
Il est vrai, toutefois, que nous devons également travailler très fort du côté des programmes d’intervention précoce et des activités de prévention. J’ai travaillé pendant 30 ans dans une école et je peux vous dire que je passais 90 p. 100 de mon temps à essayer d’éviter que les jeunes aient des ennuis. Ils ont fini par comprendre avec le temps que, s’ils dépassaient les limites, ils auraient des comptes à rendre. Ils savaient que leur punition ne serait pas une partie de plaisir. J’essayais de leur faire comprendre que je ne tolérais pas certaines activités et que voulais qu'ils y mettent fin.
Je suis découragé de voir que le meilleur argument qu’on peut m’opposer dans un débat à la Chambre des communes, c’est une remarque du genre: « J’ai écouté le discours du député d’Abbotsford, mais il a été simpliste ». Grands dieux! ce député exprimait pourtant le sentiment de ceux et de celles qu’il représente et qui parlent quotidiennement de ce genre de problème.
Je serai franc avec vous: c’est vrai que je suis simple et je vais même être simpliste. J’en ai par-dessus la tête de toutes ces sornettes. J’en ai vraiment ras le bol. J’ai des connaissances, des amis, qui ont perdu des êtres chers et qui n’ont pas vraiment pu tourner la page parce que l’auteur du crime va bientôt être mis en liberté conditionnelle. Ces gens-là ne comprennent pas comment il se fait que leurs proches ne soient plus là tandis que le coupable, qui a commis un crime sadique et horrible en agressant sexuellement et en assassinant un enfant, sera prochainement remis en liberté.
Nous pouvons bien nous frotter les mains en nous disant que nous avons fait un merveilleux travail. Eh bien, je vous invite à réfléchir un peu à cela, en fait à pousser un peu la réflexion. La peine est-elle adaptée au crime? Si vous répondez par la négative, c’est qu’il nous faut faire quelque chose.
Je suis fier du , qui a présenté ce projet de loi et qui veut prendre des mesures. Aucun d'entre nous n'a de solution magique pour améliorer la situation, mais nous ne devons négliger aucune possibilité.
En attendant, lorsqu'un individu violera la loi et se servira d'une arme à feu pour commettre un crime, la peine imposée sera sévère. Elle sera lourde. Si le problème persiste, il faudra peut-être prévoir des peines encore plus lourdes. Nous devons envoyer le message selon lequel ce n'est pas le genre de société dans laquelle nous voulons vivre.
S'il faut investir quelques millions de dollars de plus pour construire un autre pénitencier afin de garder ces individus en détention, qu'on le fasse. Qu'y a-t-il de mal là-dedans? J'ai toujours pensé que garder les criminels derrière les barreaux était une mesure sage.
Il existe de petites collectivités en Alberta qui n'ont pas de policier à tous les coins de rue, ou qui n'ont même pas accès à des services de police. Ce sont des endroits où l'on trouve de petites entreprises, telles que des épiceries ou des quincailleries. Or, si un crime était commis, la police mettrait probablement une demi-heure à arriver sur les lieux.
Comment ces gens font-ils? Ils se barricadent. Ils installent des barreaux dans chaque fenêtre et dans chaque porte. Ils font tout ce qu'ils peuvent pour protéger leurs biens et empêcher les criminels de s'y attaquer. Ces gens déverrouillent leur porte, entrent dans leur commerce, puis referment la porte et travaillent toute la journée derrière des barreaux, parce qu'ils ont peur des individus qui se promènent dans la rue. Il doit y en avoir un trop grand nombre, parce que ces collectivités sont constamment aux prises avec des problèmes d'introduction par effraction et de dommages matériels. Il est à espérer que ces commerçants ne se retrouvent pas face à face avec ces individus pendant qu'ils sont au travail, parce que cela pourrait être dangereux.
J'espère qu'on ne pense pas que mon point de vue est trop simpliste. J'ai beaucoup d'amis et de membres de ma famille qui travaillent fort et qui paient des impôts. Le moins que je puisse faire pour eux pendant que je suis ici, c'est, j'espère, de faire en sorte qu'il y ait des députés dans cette Chambre qui soient d'avis que les criminels ne sont pas une bonne chose au sein de notre société, et qu'il faut faire notre possible pour régler cette question. Lorsque nous entendons des témoins en comité, nous nous penchons sur des questions de droit et des avis juridiques que la plupart d'entre nous ne comprennent pas, et c'est mon cas. J'admets que, la plupart du temps, lorsque des représentants de l'Association du Barreau canadien discutent avec des députés qui ont des diplômes en droit, je suis perdu.
J'ai écouté une intervention aujourd'hui qui portait sur les témoins experts qui s'opposent au projet de loi. Je ne comprends pas pour quelle raison ils sont considérés comme des témoins experts quand ceux qui sont en faveur du projet de loi, comme les policiers et beaucoup d'autres, ne sont pas considérés comme tels. En d'autres mots, si les témoins ont la même opinion que le député sur ce à quoi devrait ressembler le projet de loi, ce sont des experts. Sinon, ils n'en sont pas.
La police a très bien expliqué les raisons pour lesquelles elle appuie ce projet de loi et d'autres mesures législatives connexes. C'était parfaitement logique.
Nous ne nous sommes certainement pas lancés dans des débats juridiques, car je n'aurais rien compris, mais nous avons eu une conversation. Les gens, dans l'ensemble, sont capables d'entretenir des conversations. Je veux simplement dire aux députés qu'ils feraient mieux de se réveiller. Le public n'est pas satisfait de la façon dont le système judiciaire fonctionne.
Ceux qui ne me croient pas n'ont qu'à mener des sondages par Internet et dans les journaux et à demander aux gens de leur circonscription s'ils sont satisfaits de la façon dont le système judiciaire fonctionne. On verra si les Canadiens sont satisfaits ou non.
Ils ne le sont pas. Ils payent pour quelque chose qui ne les satisfait pas. Je crois que nous devrions travailler fort pour nous assurer qu'ils payent pour quelque chose dont ils sont satisfaits. Je pense qu'il est important de satisfaire les besoins des clients.
Si certains députés jugent cela trop radical ou trop extrême, tant pis. C'est ainsi que cela devrait être. C'est ainsi que les gens de ma circonscription me disent que cela devrait être. Tant et aussi longtemps que je serai à la Chambre, je vais marteler cela. C'est ainsi que cela devrait être.
Réveillons-nous, faisons ce qu'il faut et appuyons le projet de loi pour montrer à la population que nous prenons la criminalité un peu plus au sérieux. Laissons les Canadiens savoir que, loin d'avoir des idées simplistes, nous sommes sincères à cet égard. Si les gens doutent de ma sincérité, qu'ils me mettent à l'épreuve.
Je ne sais pas s'il me reste du temps de parole, mais je ne crois pas avoir besoin d'en dire davantage. J'ai pratiquement dit tout ce que je veux dire et tout ce que je peux dire. Pour l'amour du ciel, je ne peux pas comprendre ce qui se passe dans la tête des gens qui disent tout simplement qu'il n'est pas acceptable de penser que le châtiment doit correspondre au crime.
Je reviens encore une fois au jour où j'ai vu emmener des agriculteurs, menottes aux poings, parce qu'ils avaient vendu leur grain. À mon avis, personne dans toute la société publique au Canada n'a pavoisé ce jour-là. Personne n'a dit: « Nous allons donner une leçon à ces agriculteurs. »
Les députés d'en face disent que le projet de loi ne dissuadera pas les criminels de commettre ces autres infractions, mais ils ont certainement pensé qu'il serait un moyen de dissuasion. Il ne s'agit pas de dissuasion. Il s'agit de faire correspondre le châtiment au crime, de laisser savoir à l'ensemble de la société qu'il n'est pas acceptable de faire du mal aux gens dans notre pays, de détruire leurs biens ou de les voler. C'est mal. C'est très mal et nous allons prendre des mesures sévères.
Je suis reconnaissant que nous ayons un ministre qui veut agir ainsi. Je remercie la Chambre du temps qu'elle m'a accordé. Je n'avais pas l'intention d'intervenir aujourd'hui, mais je ne pouvais pas résister, après avoir entendu bien des choses ce matin.
J'espère que les députés réfléchiront à deux fois à ce projet de loi avant d'y réagir de façon aussi négative et critique et de dire que nos idées sont trop simplistes parce que nous pensons ce que nous disons et que nous allons faire le travail. Il n'a pas été fait depuis des années. Il est maintenant temps de le faire.
:
Monsieur le Président, j'espère que mon collègue de écoutera ce que j'ai à lui dire parce que je veux débuter en signalant que mon intention n'est pas de dire que ce dernier est un député simpliste. Je ne le crois pas, et ce, pour plusieurs raisons.
En effet, j'ai eu l'occasion de voir le député de au Comité permanent de la justice et des droits de la personne, et il est le reflet de beaucoup de gens de la population canadienne: on se pose de sérieuses questions sur la criminalité et sur la façon d'y mettre fin.
Je n'oserai jamais dire au député de , pour qui j'ai énormément de respect, qu'il est un être simpliste et qu'il a des solutions simplistes. Nous avons affaire ici au problème extrêmement complexe de la criminalité. Mon collègue et moi-même ne partageons pas la même façon de voir la lutte à la criminalité.
Durant les quelques minutes qui me sont allouées, je tenterai de démontrer que la lutte à la criminalité ne passe pas par une augmentation de peines minimales d'emprisonnement. Je sais qu'aux yeux du député de , je n'y parviendrai pas, mais j'espère que certains en cette Chambre le comprendront.
J'ai été avocat au cours des 25 dernières années. Pendant les 15 dernières années, je n'ai oeuvré qu'en droit criminel en tant qu'avocat criminaliste de la défense. J'ai vu à peu prés tous les amendements que les députés ont adoptés à la Chambre des communes au cours des 15 dernières années pour amender le Code criminel. Comme je ne suis ici que depuis 2004, je n'ai rien eu à voir avec les amendements de cette Chambre au Code criminel. Cependant, nous, les criminalistes, avons vécu avec ces importantes modifications au Code criminel.
Je veux signaler à mon collègue de et à tous ses collègues du Parti conservateur que, de 1991 à 2000 — je ne remonte pas bien loin et j'ai les chiffres qu'a aussi mon collègue —, la criminalité a diminué de près de 26 p. 100 au Canada. La criminalité a baissé et elle est encore en baisse.
Il y a mieux encore. Le nombre de crimes avec violence — l'homicide, la tentative de meurtre, les voies de faits, les voies de faits armées, les agressions sexuelles, l'enlèvement et le vol qualifié — a diminué d'année en année entre 1992 et 2004. En 1992, on comptait environ 1084 crimes avec violence, que je viens d'énumérer, par 100 000 habitants au Canada. Mais en 2004, on n'en comptait que 946. C'est donc une baisse de 13 p. 100.
Les crimes avec violence ont baissé de 13 p. 100, mais la criminalité dans son ensemble a baissé de 25 p. 100. Le Québec et le Canada sont des pays sûrs. Ce sont des endroits où il fait bon vivre. Alors, où est le problème?
Il y a un principe fondamental, un principe énoncé par la Cour suprême du Canada. J'espère que les 308 députés de cette Chambre ont du respect pour cette institution. Donc, la Cour suprême a dit et a répété qu'un des facteurs essentiels, lorsque l'on s'apprête à rendre une sentence, est le facteur d'individualisation des sentences. Ce que cela veut dire en des mots qu'on peut comprendre facilement, c'est que lorsque l'individu arrive devant la cour, le juge doit administrer une sentence qui s'adapte à la personne qui est devant lui. Je sais que, malheureusement, ces mots ne feront pas plaisir au député de et à la majorité des députés du Parti conservateur. Ils devraient aller lire les décisions de la Cour suprême. Ce n'est pas moi qui les ai rendues. Personnellement, j'ai énormément de respect pour la Cour suprême et ce qu'elle a dit, je le répète, c'est qu'on doit individualiser la sentence et l'adapter à l'individu.
Ce que cela veut dire, c'est que lorsqu'un individu reçoit sa sentence, on doit lui dire, ou lui faire comprendre, que son crime est grave et que ce crime reçoit la réprobation de la société. Toutefois, dans la sentence que le juge s'apprête à rendre, il doit tenir compte d'un facteur important: la réhabilitation possible de l'individu. Là, je m'adresse encore une fois au député de et à ses collègues du Parti conservateur. Depuis de récents amendements, le tribunal doit tenir compte de l'impact du crime sur la victime. On appelle cela, en anglais: un « impact statement ». Il s'agit d'une déclaration. Les victimes viennent à la cour et peuvent témoigner pour expliquer quels ont été pour eux ou pour elles les impacts de ce crime.
Je dirai au député de et à ses collègues du Parti conservateur que depuis que cette mesure est entrée en vigueur, il n'y a pas 10 p. 100 des victimes qui se présentent à la cour. Ce n'est pas parce qu'on ne veut pas les entendre, c'est parce que, bien souvent, elles ne veulent plus avoir affaire au système judiciaire. Pourquoi? Là, il faut se poser des questions.
Au Bloc québécois, nous pensons que ce n'est pas en instaurant des sentences minimales d'emprisonnement qu'on réglera le problème. Le député de et ses collègues du Parti conservateur devraient se rendre compte que le problème se situe peut-être à la sortie et non pas à l'entrée de la cour ou de la prison. Ce que nous disons, c'est que l'individu qui reçoit sa sentence doit purger une peine d'emprisonnement et, s'il purge cette peine d'emprisonnement, il doit être admissible à une libération conditionnelle. Peut-être est-il libéré trop rapidement? Il s'agit d'un débat qu'il faudra bientôt avoir en cette Chambre. Cependant, ce n'est pas en liant les mains des juges avec des sentences minimales que l'on va régler le problème. C'est faux.
Je m'adresse encore au député de . Il était présent au Comité permanent de la justice et des droits de la personne quand l'ex-ministre de la Justice est venu témoigner. On lui a posé des questions. On lui a demandé s'il avait des études, si des enquêtes avaient démontré que l'augmentation des sentences minimales d'emprisonnement avait diminué la criminalité. La réponse est non. C'est non.
Alors, on ne peut pas voter en faveur d'un projet de loi qui ne règle pas le problème. Je vais tenter d'expliquer au député de et à ses collègues du Parti conservateur ce qui va se passer si ce projet de loi est adopté. Nous allons avoir un accusé qui, au départ, risque une peine minimale d'emprisonnement de cinq ans, par exemple.
Dès lors, conseillé par son avocat, il plaidera non coupable, choisira un procès devant jury et demandera à ce que soit menée une enquête préliminaire afin de faire durer les procédures le plus longtemps possible. Par la suite, il tentera de faire de la négociation de plaidoyer.
J'invite le député de à m'accompagner dans divers palais de justice, que ce soit à Calgary, à Vancouver, à Toronto ou à Montréal. Tous ceux qui ont fait du droit criminel lui diront que la négociation de plaidoyer existe. Or, le Barreau est venu nous le dire, le projet de loi fera augmenter la négociation de plaidoyer.
Cela signifie qu'on arrivera devant le juge, on parlera au procureur de la Couronne et on lui demandera de retirer un chef d'accusation, en échange de quoi on ne fera pas de procédures à n'en plus finir. Cela s'est vu dans plusieurs dossiers.
Je crois que le député de et plusieurs de ses collègues étaient ici en cette Chambre lorsque la Cour suprême du Canada a déclaré qu'une peine minimale de sept ans d'emprisonnement pour importation de stupéfiants était cruelle et inusitée. Ce n'est pas moi qui ai fait la Charte. Cependant, la Charte canadienne des droits et libertés est là depuis 1982 et on l'applique.
À mon avis, on ne règle pas le problème. C'est ce que je tente d'expliquer, non seulement au député de , mais à plusieurs de ses collègues. On ne règle pas le problème à la source. En augmentant les peines minimales d'emprisonnement, on augmentera les procédures à la cour. On a même des chiffres. Le député de sera d'accord avec moi, puisqu'en comité, on a fait état de chiffre qui démontrent qu'on devra investir près de 22 millions de dollars par année, uniquement pour s'occuper des détenus additionnels dans les prisons.
Si on veut bâtir des prisons, on peut en bâtir, mais ça ne réglera pas le problème de la criminalité. Il existe des causes profondes au problème de la criminalité. On n'entrera pas dans ce débat, mais il y a des causes profondes à la délinquance et à la violence. J'espère que le député de et ses collègues les connaissent. C'est la pauvreté, c'est clair.
Après avoir analysé la situation, une question m'est venue à l'esprit. Si le député de est si favorable au projet de loi , comment se fait-il qu'on n'y ait pas inclus les crimes commis avec des armes de chasse? Effectivement, ce n'est pas dans le projet de loi. On a un problème, parce que 35 p. 100 des homicides au Canada ont été commis avec des armes de chasse. Il commence à y avoir des petits trous, et les petits trous deviennent de gros trous.
Ce projet de loi ne règle pas le problème. Cela signifie — et je veux que le député de y soit bien sensible —, que ce projet de loi doit tenter de condamner ceux qui se promènent avec des revolvers et qui tirent sur n'importe qui dans les rues. Sur ce point, je suis tout à fait d'accord avec lui, il faut enrayer cela. Cependant, que va-t-il se passer? Au lieu d'aller faire un vol à main armée avec un revolver, on le fera désormais avec une arme de calibre 12, 410, 22 ou 303.
C'est ce que je veux dire au député de . Cet aspect n'est pas inclus dans le projet de loi. J'ai posé la question au ministre. Si le député de était présent à cette séance du comité — tout comme ses collègues, il n'en a pas manqué beaucoup —, il sait que j'ai posé la question au ministre. Or ce dernier m'a répondu que ce n'était pas nécessaire, parce que ça risquait d'emprisonner des Autochtones et des Inuits. Parlons-en! Nous avons un problème: nous sommes en train de créer une deuxième justice, et c'est inacceptable.
J'ajouterai qu'il y a trois fois plus d'homicides aux États-Unis qu'au Canada, et quatre fois plus qu'au Québec. Il y a un véritable problème: ce projet de loi ne règle pas le problème des crimes avec violence. C'est ce que je veux faire comprendre aux députés d'en face.
Le Bloc québécois pense que c'est peut-être plutôt les libérations conditionnelles qui posent problème. Je laisse au député de le soin d'amener cela, parce qu'il connaît bien le .
Je reprendrai ici ce que le député de répondait à mon honorable collègue du Parti libéral. Peut-être des directives doivent-elles être données aux juges. Selon moi, il y aura toujours — c'est du moins ce que je souhaite — les cours d'appel et la Cour suprême pour réviser, étudier et analyser le fait qu'une sentence soit appropriée ou non, et pour savoir si elle a été rendue en respectant les règles qui dirigent les tribunaux en ce qui a trait à l'imposition des sentences. Voilà ce que je veux faire comprendre aux députés d'en face et à ceux qui se préparent à voter en faveur d'un projet de loi qui, non seulement n'est pas complet et ne règle pas la criminalité avec violence, mais aggravera les problèmes d'embouteillage observés dans les salles de cour. Si ce projet de loi est adopté, il y aura des embouteillages. Les avocats de la défense en droit criminel feront beaucoup d'argent, je peux l'assurer.
Je trouve aussi déplorable que dans ce dossier, on se prépare à investir énormément dans les prisons. Le député de a visité plusieurs pénitenciers. Manque de chance, moi aussi, j'y suis allé à plusieurs reprises pour rencontrer mes clients. Les pénitenciers sont des écoles du crime. On ne me fera pas croire, en cette Chambre, que les pénitenciers sont autre chose. Des programmes doivent être mis en oeuvre pour aider les individus qui désirent se prendre en main.
Au cours de ma carrière, j'ai posé des questions à mes clients, et des questions leur ont été posées alors qu'ils étaient en détention. Je leur ai demandé s'ils auraient hésité à commettre un tel crime s'ils avaient su que le temps minimum d'emprisonnement était de trois ans. La réponse était non. Quand on est décidé à commettre un crime, on prend tous les moyens pour le commettre. Il faut mettre fin à cette croyance qui veut qu'en augmentant les peines d'emprisonnement, on diminuera la criminalité. C'est faux.
Il faut s'attacher à régler rapidement les causes. Il faut surtout commencer à penser sérieusement qu'il y a peut-être un problème à la sortie. Je veux dire par là que les détenus sortent peut-être trop tôt. Sur ce point, je suis d'accord avec le député de , qui est de cet avis. C'est ce que le député a souvent mentionné en comité. Au bout de quelque temps, les détenus sortent trop tôt. Ils écopent de trois ans de pénitencier et au bout de 6 mois, ils sont dans la rue. C'est peut-être un élément. Toutefois, ce n'est pas en liant les mains des juges et en leur disant qu'ils doivent imposer telle sentence minimale qu'on réglera le problème, au contraire.
M. Normandeau, un criminologue de l'Université de Montréal qui a étudié la plupart des dossiers du Palais de justice de Montréal, mentionnait que les peines minimales conduisaient les avocats à négocier les plaidoyers de leur client contre des chefs d'accusation ne débouchant pas sur des peines minimales d'emprisonnement. Que se passera-t-il alors?
Ce n'est pas compliqué. On ira en cour et on dira au procureur de la Couronne: « Retirez ce chef d'accusation, moi, je plaide coupable sur un chef d'accusation peut-être un peu plus sérieux, le vol qualifié ». Il aura une sentence de deux ans et on ne réglera pas le problème.
Je termine en invitant le député de et ses collègues du Parti conservateur à y réfléchir à deux fois lorsqu'on est devant un projet de loi qui ne règle pas les problèmes de la criminalité. La meilleure chose à faire, c'est probablement d'admettre qu'on a fait une erreur, de retirer ce projet de loi et de faire en sorte que l'on trouve d'autre moyens pour régler la criminalité.
:
Monsieur le Président, j'ai l'honneur de m'exprimer aujourd'hui en cette Chambre sur le projet de loi .
Ce projet de loi a été ramené en Chambre avec des changements substantiels à la suite de son passage au Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Mais à l'arrière-scène, on a vu se développer une alliance contre nature entre ce gouvernement minoritaire conservateur réactionnaire et le Nouveau Parti démocratique. Ensemble, ces deux partis ont détruit le bon travail du Comité permanent de la justice et des droits de la personne pour y insérer à nouveau une série de dispositions rétrogrades. Je considère que le projet de loi, tel que nouvellement amendé, n'est carrément pas une bonne législation.
Toutefois, je suis heureuse que ce projet de loi ait permis de faire la lumière sur le débat portant sur les peines minimales obligatoires.
C'est donc avec fierté que je prends la parole et que j'invite mes collègues députés à emprunter la voie libérale en votant contre le projet de loi tel que nouvellement amendé.
Le projet de loi initialement présenté par le gouvernement proposait, et ce, en dépit de l'avis des experts du milieu de la lutte à la criminalité, d'alourdir les peines minimales encourues en cas de récidive. De plus, le projet de loi allait même jusqu'à ajouter à l'historique de la récidive, des infractions non reliées au crime reproché.
Il importe de rappeler les raisons qui ont mené le Comité permanent de la justice et des droits de la personne à amender aussi substantiellement le projet de loi initial. En effet, les députés de l'opposition siégeant au comité se sont avérés très réticents face à l'introduction de peines minimales graduellement plus sévères selon le taux de récidive d'une personne.
[Traduction]
En adoptant cette position, les membres du comité ne faisaient que se ranger à l'avis exprimé par la majeure partie des experts qu'ils avaient entendus. De l'opinion de tous les experts, et c'est peut-être plutôt étonnant, rien ne prouve que les peines d'emprisonnement minimales dissuadent les gens de commettre des crimes graves.
Dans certains cas, en Californie par exemple, cette méthode semble même être allée à l'encontre du but recherché. Le taux annuel de crimes graves a augmenté dans cet État depuis l'adoption de cette mesure. C'est la conclusion que l'on trouve dans le rapport présenté récemment par une commission chargée d'étudier le système correctionnel de la Californie.
En janvier 2005, la Little Hoover Commission a remis au gouverneur de la Californie son rapport sur ce qu'elle a qualifié de « crise correctionnelle en Californie ». Ce rapport souligne le cuisant échec du système californien prévoyant l'emprisonnement après trois fautes. Il soulève d'importantes questions sur le modèle californien de détermination des peines qui prévoit l'imposition d'une peine de durée déterminée comme on dit là-bas. Ici au Canada, on parle de « peines minimales obligatoires ». Autrement dit, ces peines de durée déterminée imposées aux États-Unis correspondent aux peines minimales obligatoires que le gouvernement conservateur ne veut pas seulement adopter, mais rendre plus sévères et progressives ici au Canada.
Le rapport de la Little Hoover Commission de la Californie est clair:
Malgré toutes les belles paroles, après trente années d'application de la politique de durcissement de la répression de la criminalité, la sécurité n'est pas plus grande dans l'État. Bien au contraire...
Le taux de récidive en Californie est parmi les plus élevés aux États-Unis. De plus, le gouverneur Schwarzenegger a lui-même comparé le système carcéral de l'État à un baril de poudre.
N'est-il pas absurde de constater qu'au moment même où les Américains tentent d'apporter des correctifs à leur système inefficace, ici au Canada, le gouvernement conservateur minoritaire et rétrograde cherche à reproduire l'ancien modèle américain dont l'inefficacité a été prouvée?
Le modèle américain de peines minimales obligatoires progressives ne fonctionne pas. Pour l'amour du ciel, pourquoi les Canadiens voudraient-ils copier un modèle qui a échoué? Nous devrions plutôt copier des modèles qui ont fait leurs preuves. Le modèle américain qui prévoit l'imposition d'une peine de durée déterminée, et surtout de façon progressive, qui est l'équivalent du système canadien de peines d'emprisonnement minimales, ne fonctionne pas. Depuis 2003, environ 25 États américains ont même abandonné ce système de longues peines minimales obligatoires et de peines progressives.
Les critiques relatives aux peines minimales obligatoires sont basées sur des arguments très solides. Ce système renferme un très grand nombre de désavantages. Il arrive très souvent, et ce à cause des très graves conséquences possibles, que les accusations soient retirées ou que les plaidoyers soient modifiés dans le but de changer ou réduire les accusations. De même, la menace d'une peine minimale obligatoire risque de décourager un accusé de plaider coupable, ce qui risque bien entendu d'entraîner des coûts et des délais supplémentaires.
Ce genre de mesure peut également faire en sorte qu'un jury hésite à déclarer une personne coupable, pas parce que l'accusé est innocent, mais parce que le jury croit que la peine est trop sévère pour le crime commis, compte tenu de l'accusé et de la victime, et de l'incidence réelle et confirmée sur la victime et la collectivité.
On sait également que les peines d'emprisonnement minimales obligatoires frappent particulièrement les membres de certaines communautés ethno-culturelles, soit les Noirs et les Autochtones, comme il a été démontré en Australie et aux États-Unis. Ce n'est certainement pas un résultat que le Canada devrait viser.
[Français]
La bonification des peines minimales obligatoires suggérée dans le projet de loi nouvellement amendé aurait eu pour conséquence paradoxale d'entraîner des coûts exorbitants pour le système judiciaire canadien. En proposant d'augmenter le nombre et la durée des peines minimales, tout en diminuant le nombre de peines avec sursis, ce gouvernement réalise-t-il la hausse draconienne du nombre de détenus qu'il comptait imposer à nos pénitenciers déjà surpeuplés, selon son propre ?
Selon Neil Boyd, de l'Université Simon Fraser, il faudrait construire pas moins de 23 nouvelles prisons pour absorber ce lot de nouveaux détenus. À 82 000 $ par année, par détenu, le projet de loi initialement proposé par ce gouvernement aurait imposé aux contribuables canadiens une hausse approximative des coûts du système allant de 220 millions de dollars à 245 millions de dollars sur cinq ans.
De plus, cette nouvelle manie d'emprisonner systématiquement entraînera évidemment d'autres coûts supplémentaires puisqu'il est raisonnable de supposer qu'avec une telle attitude, les cas d'appels et de longs procès deviendront de plus en plus courants. Les peines minimales obligatoires ne sont donc pas la meilleure voie à adopter pour résoudre les crimes au Canada. Ces dernières limitent le pouvoir discrétionnaire des juges d'examiner les circonstances particulières d'un cas précis. On devrait y recourir avec grande parcimonie afin de cibler des offenses très précises et, surtout, les limiter aux premières infractions. C'est d'ailleurs ce que le projet de loi , présenté sous l'ancien gouvernement libéral, proposait de mettre en place.
[Traduction]
La raison d'être des peines d'emprisonnement minimales est d'avoir un effet sur les personnes qui commettent un premier crime, en tenant compte de l'impact du crime sur les victimes et sur la collectivité où il a eu lieu. Elles visent à retirer une personne reconnue coupable d'une infraction grave de sa collectivité pendant un certain temps pour l'empêcher de commettre d'autres crimes et pour assurer la sécurité de la collectivité. Dans de tels cas, ce genre de peine est très utile.
Le problème avec les peines d'emprisonnement minimales croissantes, comme le propose la version amendée du projet de loi , est qu'elles s'appliquent aux récidivistes. Dans sa forme originale, le projet de loi aurait empêché les juges, dans les cas de récidive, d'imposer une peine d'emprisonnement adaptée à l'accusé, aux circonstances, à la nature de la nouvelle infraction, à l'impact sur la victime et sur la collectivité, à la situation contextuelle et à la possibilité de réhabilitation.
Dans les cas de récidive, les juges doivent pouvoir tenir compte de tous ces facteurs pour imposer une peine appropriée. Avec le système de peines croissantes, c'est impossible. Le projet de loi, tel qu'amendé à l'étape du rapport par le gouvernement avec l'aide du NPD, rend la chose impossible.
Le projet de loi fraîchement modifié montre que le gouvernement veut aligner sa soi-disant stratégie de lutte contre le crime sur l'approche répressive privilégiée par l'extrême droite américaine. Le Parti conservateur propose que nous suivions un modèle qui ne fonctionne pas.
J'ajouterais que l'appui du NPD pour ce type de justice est pour le moins déconcertant. Encore une fois, le NPD sacrifie ses racines progressistes pour réaliser un gain politique à court terme et concourt à l'exécution du programme de droite du .
Examinons quelques faits. L'écart entre les taux d'infractions graves des deux pays est stupéfiant. Par exemple, selon Statistique Canada, qui n'est pas un organisme de gauche, le taux de vols aux États-Unis est de 59 p. 100 supérieur à ce qu'il est au Canada. Et qu'en est-il des voies de fait graves? Ils sont 85 p. 100 plus fréquents aux États-Unis qu'au Canada. Le nombre d'homicides? Il est de 275 p. 100 plus élevé au sud de la frontière.
Je suis certaine que mes collègues trouveront intéressant d'apprendre que, comparé à un habitant de Dallas, un habitant de Calgary court 840 p. 100 moins de risques d'être assassiné. Si nous voulons comparer le degré de sécurité de nos deux capitales, un habitant de Washington, D.C., court 2 700 p. 100 plus de risques d'être victime d'un crime grave qu'une personne vivant à Ottawa.
Je ne sais pas où le gouvernement veut nous mener avec sa stratégie anti-crime d'inspiration américaine, mais une chose est sûre. Ces chiffrent montrent...