Passer au contenu
Début du contenu

FAAE Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

PDF

PARTIE III :
LE RÔLE DU CANADA EN CE QUI A TRAIT À L’ÉTABLISSEMENT D’UNE GOUVERNANCE DÉMOCRATIQUE ET à LA CRÉATION D’UN ÉTAT
doté d’institutions solides

Une action militaire efficace peut museler l’insurrection [en Afghanistan], mais seule une gouvernance efficace pourra la mater.

Mark L. Schneider, vice-président principal,
International Crisis Group, 2 avril 2008[218]

[L]a guerre en Afghanistan ne peut pas être gagnée en l’absence d’une action politique ou d’une action pour la paix […] Mes observations tiennent compte du gouvernement et de la politique qui l’entoure. La guerre civile fait obstacle à la réforme de la gouvernance et de l’administration publique. Une bonne gouvernance est impossible à réaliser tant que le conflit dure.

Seddiq Weera, conseiller principal, Commission nationale
indépendante sur le renforcement de la paix et conseiller principal
en matière de politiques au ministre de l’Éducation,
République islamique d’Afghanistan, 14 février 2008[219]

[L’] objectif [stratégique] devrait être que le régime politique afghan devienne assez fort pour survivre sans soutien international.

Robert Jackson, directeur des relations internationales,
Université de Redlands (Californie), et ancien directeur du département
de Sciences politiques, Université Carleton, Ottawa, 13 mars 2008[220]

Imaginez, dans trois à cinq ans, lorsqu’une armée afghane exercée, ayant essuyé des pertes, se tournera vers le gouvernement civil et verra sa corruption. Pouvez-vous imaginer ce qui risquerait de se produire?

Général Rick Hillier, chef d’état-major de la Défense du Canada,
27 mars 2008[221]

Nous devons mettre l’accent, dans tous les domaines, sur le renforcement des institutions et leur obligation de rendre compte, plutôt que de privilégier les particuliers, si l’on veut que la stabilité [en Afghanistan] soit durable.

Nick Grono, président associé (Opérations),
International Crisis Group, 2 avril 2008[222]

La bonne gouvernance en tant qu’objectif essentiel de la politique internationale

Comme en témoignent les citations qui précèdent et les points dont ont convenu les témoins, soulignés dans l’Introduction, la bonne gouvernance — qui comprend la primauté du droit, une administration publique transparente et comptable, la démocratie et les droits de la personne — est un élément essentiel de ce que le général Rick Hillier, chef d’état-major de la Défense canadienne, a appelé, dans le contexte de la protection des civils, « les conditions gagnantes » quand il a témoigné devant le Comité en avril 2008[223]. Elle constitue d’ailleurs l’un des trois piliers du Pacte pour l’Afghanistan qui doit servir à orienter l’action de la communauté internationale et du gouvernement afghan pendant ces années décisives. D’ailleurs, Chris Alexander, le premier ambassadeur que le Canada a affecté en Afghanistan après les attentats du 11 septembre et actuellement représentant spécial adjoint du Secrétaire général de l’ONU en Afghanistan, a déclaré lors d’une conférence de presse à Kaboul en mars 2008 que « l’Afghanistan et ses partenaires sont maintenant plus convaincus que jamais que la paix et la sécurité dépendront du succès des institutions étatiques[224] ».

Pourtant, les témoignages que le Comité a entendus et une somme croissante d’analyses sérieuses sur la question[225] confirment qu’il reste encore beaucoup à faire pour bien réaliser les objectifs de la bonne gouvernance, à partir des plus hauts niveaux internationaux (ONU, FIAS, participants au Pacte) jusqu’au niveau local dans les villages afghans. Stefan Lehmeier a souligné qu’au niveau international : « Malgré les leçons tirées au fil des ans, même le mécanisme de coordination récemment établi pour superviser la mise en œuvre du Pacte pour l’Afghanistan (Conseil de coordination et de surveillance conjoint) s’avère très peu efficace, vu sa structure et ses procédures actuelles[226]. » En ce qui concerne le niveau local, le gouvernement afghan et les analystes afghans savent depuis un certain temps déjà que la mauvaise gouvernance est un facteur important qui alimente les récriminations locales, surtout dans les régions rurales, et attise les flammes de l’insurrection. D’ailleurs, selon une évaluation du renseignement réalisée en 2006 par la Direction nationale de la sécurité de l’Afghanistan : « La première condition pour contrecarrer les talibans dans les villages est une bonne gouvernance, soit des dirigeants honnêtes et compétents à la tête des institutions […] De nombreux habitants de Zaboul, Helmand, Kandahar et Orouzgan […] estiment que le gouvernement est corrompu[227]. »

Son Excellence Omar Samad, ambassadeur de la République islamique d’Afghanistan au Canada, a fait preuve de la même candeur quand il s’est adressé au Comité sur ce qu’il reste à faire : « Nous sommes d’autre part confrontés à des institutions et des services gouvernementaux faibles auxquels viennent s’ajouter la corruption et, à l’occasion, un appareil judiciaire dysfonctionnel qu’il faudra selon nous beaucoup de temps pour réformer. Or, l’ennemi exploite toutes ces lignes de faille pendant que nous tentons de maintenir notre équilibre. En tant qu’État fragile, nous ne pouvons pas toujours compter sur des solutions miracles ou immédiates qui satisfassent toutes les parties prenantes, qu’elles soient internes ou étrangères. Compte tenu des traditions afghanes, le processus de reconstruction est une mission à long terme, avec de nombreux écueils en cours de route, et cela exigera un sens politique aigu, une solide volonté politique, des sacrifices, des compétences en matière de leadership, de la persévérance et un appui durable pour pouvoir aboutir[228]. »

On s’est rendu compte qu’il était primordial, pour la sécurité et le développement de l’Afghanistan, de remédier à la faiblesse des institutions de gouvernance, où la corruption est répandue[229].  Ashraf Ghani, qui a été le premier ministre des Finances de l’Afghanistan après le régime des talibans et est coauteur d’un livre qui vient de paraître (Fixing Failed States: A Framework for Rebuilding a Fractured World), a d’ailleurs déclaré récemment : « le problème ne tient pas à la force des talibans, mais à la faiblesse du gouvernement[230] ». Le gouvernement de l’Afghanistan est bien conscient du problème et affirme, dans sa nouvelle stratégie nationale de développement quinquennale (2008-2013) dont il a été question lors de la conférence internationale sur l’Afghanistan qui a eu lieu le 12 juin dernier à Paris, qu’il est essentiel d’améliorer la gouvernance pour concrétiser le projet national du gouvernement et voir à la bonne marche de la société[231]

La conférence de Paris a fait ressortir un certain nombre de préoccupations quant à la nature et au niveau de l’aide internationale, notamment le fait que, sur les 25 milliards de dollars promis entre 2001 et 2008, 15 milliards seulement environ ont été engagés, dont une grande partie finit par revenir sous une forme ou sous une autre aux donateurs, et que les deux tiers à peu près de l’aide internationale ne passe pas par le budget du gouvernement afghan[232].  Le président Karzaï a dit à Paris que le processus de développement était brouillon et que les structures parallèles compromettaient l’établissement des institutions.  Selon lui, l’Afghanistan a certes besoin d’une aide financière considérable, mais la manière dont cet argent est dépensé est tout aussi importante[233].  On parle souvent de la corruption qui serait répandue dans la fonction publique afghane, mais dans une entrevue qu’il accordait au journal allemand Der Spiegel, M. Karzaï a renvoyé la balle, alléguant que certains membres de la communauté internationale entretiennent des liens étroits avec des éléments corrompus et s’en servent comme sources[234].

Suivant la nouvelle stratégie de développement quinquennale du gouvernement afghan,

Le programme en matière de gouvernance vise à corriger trois grands problèmes : la corruption omniprésente, le manque de capacité du secteur public et le fait que les femmes et les filles soient privées de l’exercice de leurs droits.  Durant des consultations infranationales, 80 p. 100 des provinces ont indiqué que la lutte contre la corruption dans l’administration publique était prioritaire.

Le cadre de projet de réforme en vue de consolider la gouvernance vise toutes les structures des administrations nationale et infranationales, du parlement et de la société civile ainsi, que les structures politiques[235].

L’Afghanistan, dont 90 p. 100 des dépenses publiques dépendent de l’aide internationale, souhaitait obtenir des engagements additionnels de 50 milliards de dollars à la conférence de Paris (on lui a promis 20 milliards de dollars, la moitié environ de cette somme provenant des États-Unis).  L’envoyé spécial de l’ONU Kai Eide souscrit au plan afghan, mais avec une réserve critique cependant.  Il a dit le 22 mai : « Il est évident que la communauté internationale n’emploie pas ses ressources aussi bien qu’elle le devrait et que la corruption est bien trop répandue en Afghanistan.  Je souhaiterais que la conférence de Paris aboutisse à une sorte d’entente où la communauté internationale s’engagerait à mieux orchestrer ses dépenses et où le gouvernement s’engagerait pour sa part à mener une lutte plus vigoureuse contre la corruption[236].  La veille de la conférence, il a dit à une journaliste de la télévision française qu’une trop grande partie de l’argent des donateurs finissait par revenir au pays donateur et n’atteignait jamais les Afghans, ce qu’il considérait comme un gros problème.  Il a ajouté qu’on ne respectait pas les plans et priorités du gouvernement afghan et que bien des projets étaient lancés sans même que les Afghans ne soient au courant de ce qui se fait chez eux[237]

Réforme de l’administration publique, de l’échelon national à l’échelon local

Les témoins que nous avons entendus abondent dans le sens de nombreuses analyses récentes qui ont exposé en détail les déficiences du gouvernement afghan sur tous les plans en ce qui touche sa capacité de s’acquitter des fonctions d’un État efficace. Un témoin, Grant Kippen, ancien directeur de pays pour l’Afghanistan au National Democratic Institute, a fait part au Comité d’un rapport sur la réforme de l’administration publique réalisé par l’Unité afghane de recherche et d’évaluation établie à Kaboul[238]. Tous reconnaissent que l’Afghanistan est pratiquement reparti à zéro après le renversement des talibans, dont le régime répressif avait transformé le pays en État défaillant. Confronté à une tâche ardue depuis le début, l’Afghanistan en paye encore le prix.

Le colonel (retraité) Mike Capstick, premier commandant canadien de l’Équipe consultative stratégique–Afghanistan (ECS–A) à Kaboul a dit au Comité : « Nous n’avons pas élaboré la stratégie de gouvernance appropriée […] Nous avons besoin d’un chef et d’une stratégie qui recouvre absolument tout, de A à Z, dans la fonction publique afghane […] Il y a des ministères, comme le ministère de l'Intérieur... Tout le monde sait que la plupart des responsables au ministère de l'Intérieur sont de vrais bandits. Ce sont d'anciens chefs de guerre[239]. » Robert Jackson a informé le Comité que : « Le pays souffre d’un sérieux manque de capacités administratives. Il ne dispose que d’un effectif très limité de ressources humaines compétentes, et cela est particulièrement vrai aux échelons les plus élevés du gouvernement. Sur un total de 27 ministères, entre un quart et un tiers fonctionnent efficacement. Les échelons supérieurs de la bureaucratie afghane ont été décimés par les décennies passées sous la férule des Soviétiques et des talibans. Les fonctionnaires sont actuellement étouffés par l’énorme quantité de paperasse qu’exigent les organismes internationaux de financement et les gouvernements donateurs. La fonction publique doit consacrer près de 25 p. 100 de son temps à rendre compte des fonds reçus. Il ne lui reste pas beaucoup de temps à consacrer au vrai travail à faire[240]. »

On sait depuis le début que le processus pour surmonter les obstacles à la bonne gouvernance sera long et pénible. Mais selon certains analystes, la situation a été compliquée par la création d’un État unitaire centralisé lors de l’adoption de la Constitution de 2004, ainsi que par l’arrivée, après le 11 septembre 2001, d’une foule de consultants étrangers prônant des solutions à l’occidentale, sans concertation. Comme l’ont constaté Barnett Rubin et Humayun Hamidzada : « Après des décennies de conflits, l’Afghanistan présente l’un des gouvernements les plus faibles du monde. Selon le Fonds monétaire international (FMI), la part des recettes publiques qui ne découlait pas de la drogue représentait 5,4 p. 100 du PIB en 2005‑2006, soit les plus faibles recettes de tous les pays examinés. De plus, l’administration a de la difficulté à répartir les fonds dont elle dispose : les dix provinces les plus pauvres reçoivent les plus faibles allocations budgétaires, d’où un gouvernement pratiquement inexistant et des problèmes de sécurité endémiques […] Le gouvernement a commencé à pratiquer des réformes à l’échelon national, mais de nombreux ministères sont toujours non fonctionnels ou corrompus. Les administrations de province et de district, qui représentent le gouvernement aux yeux de nombreux Afghans, sont principalement aux mains de personnes qui s’arrogent le pouvoir par des moyens illicites ou violents[241]. »

Marc André Boivin a souligné à l’intention du Comité que : « L’avenir de l’Afghanistan repose sur l’aspect politique […] le gouvernement est complètement coupé de la population. Il perpétue des pratiques prédatrices qui ont plus à voir avec les intérêts de certaines factions qu’avec l’offre de services[242]. » Deux autres témoins, soit un civil et un ex-militaire qui ont occupé des postes de dirigeants canadiens en Afghanistan, n’ont pas non plus mâché leurs mots concernant les correctifs à apporter et la meilleure façon d’utiliser nos efforts. Tous deux ont insisté sur le fait qu’il appartient à l’Afghanistan de mener le processus de réforme de la gouvernance. Nipa Banerjee, anciennement chef de l’aide en Afghanistan à l’ACDI de 2003 à 2006, vient tout juste de revenir d’Afghanistan et a déclaré au Comité que :

La crise de légitimité du gouvernement afghan pourrait être atténuée dans la mesure où les Afghans accepteraient de jouer un rôle de chef de file et où les dirigeants politiques pourraient compter sur l'appui d'une stratégie bien coordonnée de la part des pays donateurs. Or la mainmise de la communauté internationale sur le processus de renforcement des institutions a fait basculer tout le processus de reconstruction du pays dans un déclin auquel l'Afghanistan ne s'échappera peut-être jamais […]

En ce qui concerne le lien entre la construction d'une nation et le renforcement des capacités, il faut bien comprendre que la reconstruction du pays passe par le renforcement des capacités. Malgré un investissement de 1,6 milliard de dollars dans le renforcement des capacités, la communauté internationale n'a pas réussi à améliorer de façon soutenue les capacités des institutions et ministères afghans les plus critiques. L'achat et le remplacement des capacités grâce à des solutions de gestion faciles n'ont pas permis de créer des capacités soutenues. Une multiplicité de récents diplômés des pays du Nord, surrémunérés, inexpérimentés et sans formation adéquate se sont servis des crédits versés au titre de l'APD pour renforcer leurs propres capacités au sein de l'industrie de l'assistance en progression constante qui a englouti l'Afghanistan[243].

Le colonel Mike Capstick, qui, en 2005-2006, a dirigé l’Équipe consultative stratégique–Afghanistan du Canada et a travaillé directement avec les ministères afghans à Kaboul, a lancé au Comité l’appel suivant :

Tous les efforts que consent le Canada dans les secteurs de la gouvernance et du développement, ces deux piliers du Pacte, doivent avoir pour but de raffermir la légitimité du gouvernement afghan […] le soutien de l'ACDI au Programme de solidarité nationale a non seulement eu les résultats positifs que d'autres témoins ont décrits, mais est aussi l'une des raisons principales pour lesquelles le ministère du Relèvement rural et du Développement, le MRRD, est aujourd'hui l'une des structures les plus crédibles du gouvernement afghan. Mettre sur pied d'autres ministères et doter la province de Kandahar d'une administration aussi efficace que l'est le MRRD, voilà ce que le Canada devrait avoir pour objectif […]

La réforme de l'administration publique et des structures de gouvernance à Kaboul se fait de façon fragmentée et indisciplinée depuis la chute du régime taliban. Malgré les quantités d'argent qui y sont déversées et la présence de centaines de techniciens d'aide internationale, il n'y a encore aucune stratégie cohérente de réforme du système et de ses modalités. Le Canada devrait faire preuve de leadership à cet égard et travailler en étroite collaboration avec l'ONU et la Banque mondiale à l'élaboration de la stratégie nécessaire et à la coordination des efforts de la communauté internationale[244].

haut

De nombreux témoins ont insisté sur l’importance que la réforme de l’État ne se pratique pas du haut vers le bas, et englobe plutôt l’autonomie gouvernementale au niveau local qui, comme l’ont constaté MM. Rubin et Hamidzada, « a permis à la population de survivre même quand le gouvernement central s’est effondré[245] ». L’honorable Flora MacDonald, qui se rend souvent en Afghanistan, a fourni au Comité des exemples d’« une forme de gouvernance locale [qui] commence à se manifester, mais [qui] ne correspond pas nécessairement à une vision occidentale ». Elle signale que dans la capitale de la province de Bamyan (la plus pauvre de l’Afghanistan), pour la première fois dans l’histoire de l’Afghanistan, une femme a été choisie pour diriger la choura locale. Des initiatives locales de ce genre sont maintenant en train de se propager « dans d’autres provinces. [Cette forme de gouvernance] est strictement indigène et n’a rien à voir avec la forme de gouvernance préconisée par l’OTAN, la FIAS, le gouvernement Karzaï ou n’importe qui d’autre qui s’inspire des idées occidentales. C’est une forme de gouvernance d’origine purement locale, qui réussit bien[246]. »

Il y a donc des petits pas encourageants, même s’ils ne concernent pas le  système d’État officiel. De façon plus générale, il importe de considérer les conseils de développement communautaire (CDC) qui ont été créés dans le cadre du Programme de solidarité nationale (PSN)[247]. On dénombre actuellement plus de 12 000 CDC, dont les progrès sont examinés dans une récente étude de la Banque mondiale intitulée, Implementation Completion and Results Report of the National Solidarity Report Programme[248]. Selon Mariam Sherman, responsable pour l’Afghanistan à la Banque mondiale, « le Programme de solidarité nationale présente, pour la première fois dans l’histoire de l’Afghanistan, un cadre institutionnalisé qui permet d’intégrer au gouvernement d’État la prise de décision par consultation pratiquée dans les villages. Avant le Programme, les femmes n’étaient pas autorisées à participer aux institutions rurales […] Avec l’adoption des CDC, on promeut activement la représentation équitable des femmes et 35 p. 100 en moyenne des représentants aux CDC sont des femmes[249]. »

En outre, le Comité constate avec satisfaction que le gouvernement afghan met de plus en plus l’accent sur les questions de gouvernance locale; il est heureux de la création d’une Direction indépendante pour la gouvernance locale en août 2007, ainsi que des consultations réalisées en Afghanistan par le Groupe de travail sur la gouvernance infranationale dans le cadre de la Stratégie nationale de développement de l’Afghanistan[250].

Néanmoins, il reste encore beaucoup à faire sur le plan de la réforme des structures générales de gouvernance, au niveau provincial, au niveau des districts et au niveau local, notamment dans les comités de développement provincial mis sur pied en 2006[251]. D’après le résumé d’un rapport de juillet 2007 de la Banque mondiale, ce qui nuit le plus à la consolidation du système infranational en Afghanistan, c’est l’absence de politique cadre claire sur la structure institutionnelle souhaitée et l’absence de stratégie pour en guider la réalisation[252]. L’essentiel est que les Afghans voient les institutions publiques œuvrer efficacement pour répondre directement à leurs besoins, compte tenu du fait que la situation sur le terrain est compliquée et ne cesse de changer[253].

Il y a plus d’un an, Sarah Chayes, fondatrice d’Arghand, une coopérative près de Kaboul, a mis le Comité en garde, par vidéoconférence à partir de Kandahar, au sujet de la désillusion croissante de la population locale à l’égard du gouvernement : « Le gouverneur n’est pas élu, ni le maire. Aucun de ceux qui exercent une influence directe sur la vie quotidienne des gens n’a été élu[254]. » Emmanuel Isch, de Vision mondiale Canada, a aussi rappelé au Comité que : « le développement durable passe par une gouvernance locale stable. L’approche du Canada au développement en Afghanistan devrait privilégier des stratégies renforçant les structures de gouvernance infranationales. Il est souvent question de problèmes de corruption et de l’insuffisance des capacités en Afghanistan. Nous savons ce qu’il en est, mais nous aimerions qu’il y ait plus d’investissement sur le plan des capacités des administrations locales et des collectivités […] Nous devons investir non seulement au niveau national mais aussi au niveau des collectivités pour que les autorités locales puissent servir la population de façon plus efficace[255]. »

Une meilleure gouvernance de la part des autorités afghanes est essentielle au succès de la mission canadienne à Kandahar. Le colonel Capstick a prévenu le Comité qu’il faut : « à tout prix, instaurer une gouvernance efficace dans la province de Kandahar. Toute la structure de gouvernance des provinces de l’Afghanistan pose problème, et je suis généreux. La corruption, le manque de capacité et les décisions arbitraires sont monnaie courante ». Il a ajouté qu’ : « il ne fait aucun doute que les projets visant à corriger cette situation à Kandahar devraient faire partie des priorités du Canada. Il pourrait s’agir de projets visant à réformer le système d’administration publique, la police et les forces de l’ordre, le système pénal et le contrôle des finances publiques. En même temps, le Canada doit soutenir le gouvernement afghan dans ses efforts pour livrer les services de base à la population[256]. »

Recommandation 26

Afin de s’assurer de l’atteinte des jalons établis par le Pacte pour l’Afghanistan en matière de gouvernance, le gouvernement du Canada devrait notamment envisager de prendre tous les moyens nécessaires pour renforcer la légitimité et la capacité des institutions d’administration publique en Afghanistan, tant au niveau national qu’au niveau local. Pour ce faire, il devrait notamment, quand c’est possible, songer à soutenir les structures et les processus dirigés par les Afghans. Il devrait accorder une attention particulière à l’amélioration des mécanismes de gouvernance dans la province de Kandahar afin d’accroître la sécurité et les services de base fournis à la population. Le gouvernement du Canada devrait rechercher à cet égard des partenaires locaux responsables.

Réforme du système judiciaire et des institutions du secteur de la sécurité

L’ordre et la justice sont essentiels à l’établissement d’un État afghan légitime et stable, comme l’a souligné le lieutenant-colonel (retraité) Rémi Landry à l’intention du Comité[257]. Or, la primauté du droit englobe ces deux aspects. L’ordre ne saurait exister sans justice, et inversement. Le rétablissement d’un système de justice opérationnel est en cours. La conférence de Rome de juillet 2007 sur la règle de droit en Afghanistan a abouti à une série de recommandations conjointes ambitieuses aux gouvernements de l’Afghanistan, aux pays donateurs et à la communauté internationale[258]. Le rapport de mars 2008 du Secrétaire général de l’ONU au Conseil de sécurité brosse un tableau mitigé : « Si l’accès aux tribunaux et à l’aide juridictionnelle est un droit inscrit dans la Constitution, il demeure illusoire pour la majorité des Afghans, notamment pour les femmes, les enfants et les groupes vulnérables. À ce problème vient se greffer la faible sensibilisation du public aux droits et aux procédures juridiques […] De lentes améliorations ont néanmoins été enregistrées dans le développement de l’infrastructure pour le système juridique et le corps d’avocats financé par des fonds privés a continué de croître[259].

Les mesures prises sur plusieurs fronts dépendent de l’aptitude de l’État afghan à fournir à la population des services de base en matière de justice et d’ordre. Plusieurs témoins ont suggéré d’établir des conditions minimales de sécurité de la personne et ont affirmé que les moyens d’y parvenir — c’est‑à‑dire les instruments nécessaires pour faire respecter la loi — doivent exister pour qu’il soit possible de réaliser tous les autres objectifs. Comme l’a dit au Comité Sally Armstrong : « Il est impossible de rien faire sans sécurité. Il est impossible de gouverner, impossible de faire fonctionner un appareil judiciaire, de gérer une école ou un hôpital[260]. »

Nipa Banerjee a fait valoir au Comité que l’intervention internationale pratiquée en Afghanistan depuis le 11 septembre présente des lacunes à cet égard : « En réalité, les réformes liées à la sécurité — la condition sine qua non pour stabiliser le pays — ont été reléguées au second plan, étant donné qu’il a fallu atteindre rapidement les objectifs politiques du processus établi par l’Accord de Bonn. Les forces de sécurité et l’armée afghane ne sont pas encore suffisamment fortes pour pouvoir résister aux agressions. La force policière n’arrive pas à gagner la confiance de la population. Les réformes qui devaient être instituées au ministère des Affaires intérieures ne se sont pas encore concrétisées, et l’accès à la justice est à peu près inexistant[261]. »

Kamran Bokhari, directeur des analyses du Moyen-Orient, Strategic Forecasting Inc. (STRATFOR), s’est fait encore plus critique dans ses commentaires au Comité : « Nous avons absolument besoin de développer des institutions. Quelles sont donc les institutions essentielles que nous devons établir et qui constitueront le fondement de toutes les autres? Il y a les organismes de sécurité : la Police nationale afghane et l’Armée nationale afghane. Ces organismes n’existent pas encore et on ne pourra pas compter sur eux avant très longtemps. Nous devons l’admettre. Tant que ces organismes ne pourront pas assumer leur rôle, nous aurons besoin de les soutenir[262]. »

haut

La réforme de la police nationale semble particulièrement urgente aux yeux des témoins, dont le général (retraité) Lewis Mackenzie, qui estime préférable d’organiser la réforme au niveau provincial[263], et l’ancien ministre des Affaires étrangères, Maxime Bernier, qui a reconnu cette urgence lors de son allocution à l’ouverture du nouveau centre de formation canadien sur le site de reconstruction provincial de Kandahar, le 13 avril 2008 : « La présence d’une police nationale afghane responsable et professionnelle est essentielle pour assurer la stabilité et soutenir la règle de droit en Afghanistan. L’établissement d’une véritable règle de droit est essentiel pour reconstruire l’Afghanistan et promouvoir la paix, la stabilité et la démocratie, un objectif que nous visons tous[264]. »  Il faut aussi penser à instituer une surveillance suffisante du grand nombre d’employés de fournisseurs privés de services de sécurité qui travaillent en Afghanistan[265].

Établir une armée de 70 000 hommes (chiffre qui a depuis été porté à 80 000) et une police de 62 000 hommes, toutes deux compétentes et dignes de confiance, pour un effectif combiné de 132 000 personnes d’ici 2011 est un des jalons établis dans le Pacte pour l’Afghanistan 2006. En ce qui concerne le volet policier, le Pacte précise que : « D’ici la fin de 2010, constituées dans toute leur plénitude, une police nationale afghane et une police des frontières afghane qualifiées, opérationnelles, à composition ethnique équilibrée et disposant d’un effectif combiné de 62 000 hommes, seront en mesure de faire face efficacement aux besoins du pays en matière de sécurité et elles seront de plus en plus autonomes sur le plan financier[266]. » Le Canada s’évertue à marquer des progrès à cet égard, mais beaucoup considèrent que le délai de 2011 est, au mieux, optimiste[267].  D’après le rapport de janvier 2008 du Groupe d’experts indépendant sur le rôle du Canada en Afghanistan, l’objectif visé relativement à l’effectif combiné des deux forces de police a par la suite été porté à 82 000[268].  Il est difficile d’établir avec exactitude l’effectif de la police.  En février 2008, le ministère afghan de l’Intérieur a  remis au Conseil de coordination et de surveillance conjoint du Pacte pour l’Afghanistan des chiffres de décembre 2007 faisant état de 75 000 salariés de la Police nationale afghane et prévoyant l’embauche de 1 417 personnes à contrat.  Le Ministre a en outre indiqué qu’il avait commandé un examen professionnel indépendant[269]. En juin 2008, le brigadier-général Peter Atkinson a dit au Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes que, en date du 1er février 2008, l’effectif de la Police nationale afghane avait atteint 76 410 hommes (93 p. 100 de l’objectif numérique visé).  Cependant, du côté de la police des frontières, on n’en était encore qu’à la moitié de l’objectif (9 000 hommes au lieu de 18 000)[270]

Actuellement, 60 soldats et agents de police canadiens travaillent avec la police des frontières chargée de patrouiller les 5 500 km de frontière, les 14 postes-frontière terrestres et les quatre aéroports internationaux[271] de l’Afghanistan.  On admet qu’il reste encore fort à faire sur le plan de la qualité et des effectifs des forces de police afghanes.  De concert avec les autorités afghanes, le Canada et d’autres partenaires internationaux s’efforcent de faire avancer les réformes nécessaires pour que l’on puisse atteindre les objectifs visés sur le plan des effectifs et de l’entraînement des forces[272].

Le Pacte pour l’Afghanistan affirme aussi ce qui suit : « La gouvernance démocratique et la protection des droits de l’homme constituent la pierre angulaire de tout progrès politique durable en Afghanistan […] La réforme du système judiciaire sera une priorité pour le Gouvernement afghan et la communauté internationale. L’objectif sera d’assurer pour tous un accès égal, juste et transparent à la justice sur la base de codes écrits et au moyen de procès équitables et de verdicts applicables. Les mesures à prendre seront notamment les suivantes : compléter les réformes législatives pour le secteur aussi bien public que privé; renforcer les capacités des institutions et du personnel judiciaires; promouvoir les droits de l’homme et la connaissance de la loi; et remettre en état l’infrastructure judiciaire[273]. »

Ici encore, c’est la concrétisation des objectifs qui témoignera des progrès accomplis. En 2006, Barnett Rubin a observé que : « La police ne peut pas assurer la sécurité sans tribunaux. La magistrature est la seule partie de l’État encore dominée par les oulémas, les doctes théologiens, qui jouent un rôle central puisqu’ils peuvent déterminer — et saper — la légitimité des gouvernements. Par conséquent, la réforme judiciaire est une question délicate. Cependant, l’absence de réformes judiciaires donne lieu à un goulot d’étranglement qui nuit à la sécurité, à la gouvernance et au développement économique[274]. »

La communauté internationale doit être consciente du fait que l’Afghanistan est une république islamique définie par une constitution approuvée par la presque totalité des 502 députés de la Loya Djirga constitutionnelle le 4 janvier 2004[275]. La constitution actuelle affirme à l’article 2 du chapitre premier sur « l’État » que « [l]a religion de l’État de la République islamique d’Afghanistan est la religion sacrée de l’islam » et à l’article trois que « [e]n Afghanistan, aucune loi ne peut aller à l’encontre des croyances et des principes de la religion sacrée de l’islam[276]. »  La nouvelle Stratégie nationale de développement de l’Afghanistan indique par ailleurs clairement que tous les aspects de la politique gouvernementale doivent refléter les « valeurs islamiques »[277].

Évidemment, le résultat ne sera pas le même selon que les tribunaux interprètent ces dispositions de façon libre ou restrictive. D’autres questions légales touchant les droits de la personne ont été portées à l’attention de l’Assemblée législative de l’Afghanistan, composée de la Chambre basse avec ses 249 sièges, la « Wolesi Djirga », et de la Chambre haute avec ses 102 sièges, la « Mechrano Djirga ». Deux questions en particulier sont décrites dans un document préparé pour le Congrès américain :

L’opposition parlementaire a contribué à la décision du président afghan Hamid Karzaï de renoncer apparemment à une proposition de juillet 2006 visant à rétablir le « ministère de la Promotion de la vertu et de la Prévention du vice », par le truchement duquel les talibans ont atteint gravement aux droits de la personne. Hamid Karzaï a déclaré que le ministère serait chargé de donner des conseils et d’effectuer des activités de relations publiques afin de favoriser un comportement islamique. Un autre vote important est survenu en février 2007, quand les deux Chambres ont adopté une loi accordant l’amnistie aux soi-disant « chefs de guerre », soit les chefs de faction qui ont participé à 20 années d’insurrection antisoviétique puis de guerre civile. Malgré les manifestations à Kaboul de quelque 25 000 Afghans qui appuyaient la résolution, Karzaï a proposé une ébauche modifiée qui donnait aux victimes de ces chefs le droit de demander réparation pour les abus subis. La nouvelle version a été adoptée et est entrée en vigueur[278].

Les témoins ont fait part au Comité des préoccupations qui persistent concernant l’appareil de justice pénale en Afghanistan à tous les niveaux, des tribunaux aux services correctionnels, ainsi que les conditions dans les prisons. Hilary Homes, d’Amnistie Internationale Canada, en a parlé au Comité en mars 2008 : « De nombreuses promesses d'amélioration de la situation sur le plan des droits de la personne ont été faites par le biais des mandats des forces internationales, des Nations Unies, de la récente Conférence de Rome sur la primauté du droit en Afghanistan et, naturellement, de la constitution afghane comme telle. Ces engagements à créer ou à renforcer les institutions et à édifier une vaste culture des droits de la personne pour assurer leur survie doivent être respectés si l'on veut que les progrès réalisés ne soient pas vains[279]. » Par ailleurs, Alex Neve, secrétaire général canadien d’Amnistie Internationale, est d’avis, comme un autre témoin, soit la journaliste et auteure Sally Armstrong, que la Commission afghane indépendante des droits de la personne, qui jouit de l’appui du Canada, a connu de véritables réussites[280]. Il demande par conséquent que le Canada appuie davantage cet organisme :

La Commission afghane indépendante des droits [de la personne] est une institution extrêmement importante dans le pays; elle a fait de l'excellent travail […] Elle a fait beaucoup de travail, et pas seulement sur la question des prisonniers de guerre, qui n'est qu'un des nombreux problèmes qui se posent au niveau des droits de la personne […] [D]es ressources supplémentaires sont absolument essentielles, et pas seulement un peu, mais beaucoup plus[281].

Le Comité a entendu de nombreux témoignages sur la question des détenus, question qui continue de faire l’objet d’un examen judiciaire au Canada. Nous nous permettrons de souligner toutefois que la motion sur l’Afghanistan adoptée par la Chambre des communes le 13 mars 2008 précise « qu’en ce qui concerne le transfert de prisonniers afghans aux autorités afghanes, le gouvernement [doit] : a) s’engager à respecter les normes les plus élevées de l’OTAN et de la communauté internationale en ce qui concerne la protection des droits des détenus, ne procédant aux transferts que lorsqu’il sera en mesure de croire qu’il le fera en respectant les obligations internationales du Canada; b) établir une solution avec les alliés de l’OTAN à la question des détenus, par le biais d’efforts diplomatiques issus des valeurs canadiennes profondes que sont le respect des droits humains et de la dignité pour tous; c) s’engager à mettre en œuvre une politique de transparence accrue en ce qui concerne les mesures entourant la capture et le transfert de prisonniers, qui inclura l’engagement de rapporter au public les résultats de révisions ou inspections des prisons afghanes menées par les représentants canadiens ».

Le gouvernement canadien doit être tenu de respecter les engagements précités. De plus, tout en respectant la souveraineté de l’Afghanistan, il a aussi pris des engagements ayant force obligatoire à l’échelle internationale en application du Pacte pour l’Afghanistan de 2006, et il doit les respecter. Comme l’a signalé au Comité Marc André Boivin : « sur la scène internationale, il faut exiger du gouvernement afghan qu’il remplisse ses obligations en termes de droit de la personne, de liberté de la presse et de liberté d’association, et qu’il assume pleinement ses responsabilités envers sa population[282] ».

Recommandation 27

Dans le cadre de ses rapports d’état trimestriels au Parlement du Canada sur la mission canadienne en Afghanistan, le gouvernement du Canada devrait inclure des renseignements détaillés sur les mesures prises — et avec quel succès — par la République islamique d’Afghanistan et la communauté internationale, dans le cadre de l’application du Pacte pour
l’Afghanistan, en vue de mettre en œuvre les engagements visant la gouvernance, la primauté du droit et les droits de la personne, et de respecter les jalons et les délais établis.

Recommandation 28

Étant donné les progrès accomplis jusqu’à maintenant en collaboration avec la Commission afghane indépendante des droits de la personne, le gouvernement du Canada devrait accroître le soutien qu’il accorde à cet organisme vital pour que ce dernier ait la capacité et les ressources nécessaires pour remplir son mandat.

Recommandation 29

De plus, en ce qui concerne le transfert de prisonniers afghans aux autorités afghanes, le gouvernement du Canada devrait indiquer dans ses prochains rapports les détails des mesures prises pour la mise en œuvre des conditions énumérées dans la motion sur l’Afghanistan adoptée par la Chambre des communes le 13 mars 2008.

haut

La lutte anticorruption et antidrogue

Nous avons bien dit au président [de l’Afghanistan] que la population canadienne ne continuera de souscrire à l’intervention du Canada en Afghanistan – des Canadiens y perdent la vie et on y dépense des sommes considérables – que si elle est convaincue que l’objectif poursuivi en vaut la peine. Dès qu’il est le moindrement  question de corruption, l’opinion se raidit. Je lui ai donc fait valoir l’importance de régler le problème.

David Emerson, ministre des Affaires étrangères, Paris, 12 juin 2008[283]

Tous conviennent que la corruption est un cancer contre lequel il faut constamment lutter. L’Afghanistan, qui se classait au 162e rang des 179 pays examinés par un indice de Transparency International cité dans un rapport de l’ONU en 2006, constitue un exemple éloquent[284]. Le Pacte pour l’Afghanistan signé au début 2006 précise que : « La Convention des Nations Unies contre la corruption sera ratifiée d’ici à fin 2006, la législation nationale sera adaptée en conséquence d’ici à fin 2007 et un mécanisme de contrôle chargé de surveiller l’application sera mis en place d’ici à fin 2008 ». L’Afghanistan a signé la Convention en février 2004 et celle-ci a été ratifiée par le parlement en août 2006, ce qui respectait l’engagement prévu dans le Pacte.  Reste la mise en œuvre, l’élément le plus crucial. Les travaux à ce sujet se poursuivent, avec l’aide des donateurs internationaux[285].

Il n’y a pas de temps à perdre. Comme l’a constaté Barnett Rubin, plusieurs mois après l’adoption du Pacte : « L’administration anémique en Afghanistan maîtrise peu la corruption, voire pas du tout, ce qui a pour effet d’affaiblir l’appui au gouvernement. Certains systèmes ont été mis en place pour éviter les types de corruption les plus importants, notamment un mécanisme pour assurer la transparence des soumissions publiques aux fins des acquisitions. Cependant, de plus en plus, les ministères contournent ce mécanisme et signent des marchés à fournisseur unique, dont bon nombre sont ensuite approuvés par le président afin de ne pas retarder des projets importants. Le Pacte oblige le gouvernement à lutter contre la corruption, sans lui dire comment[286]. »

Le Comité remarque que des progrès ont été accomplis grâce à la création, en août 2007, de la Direction indépendante pour la gouvernance locale (DIGL) chargée de revoir le rendement des personnes nommées à une charge de gouvernance infranationale.  En effet, en date du début du mois de mai 2008, la DIGL avait limogé les gouverneurs de huit des 34 provinces de l’Afghanistan[287].  L’Afghanistan a aussi établi une commission de lutte contre la corruption, laquelle a produit un document intitulé « Fighting Corruption in Afghanistan – Strategy and Action »[288].   Il faut encourager l’Afghanistan à continuer de renforcer ces mesures de surveillance et de lutte contre la corruption.

C’est à la fois au gouvernement afghan et à ses partenaires internationaux qu’il incombe d’améliorer la reddition de comptes et le rendement.  M. Rubin, qui a par la suite témoigné à plusieurs reprises devant le Comité, avait recommandé en 2006 que le « président afghan [informe] son conseil des ministres qu’il ne signera plus de marché à fournisseur unique à moins de circonstance exceptionnelle et que tous les ministres qui présentent de tels marchés seront limogés. Les donateurs internationaux devraient concourir à accroître la capacité du gouvernement afghan à rédiger des propositions et à traiter les marchés de façon à ce que la transparence n’entraîne pas des retards intolérables[289]. »

Dans sa déclaration au Comité, le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Maxime Bernier, a reconnu tout à fait l’importance d’insister sur la réforme :

La lutte contre la corruption dans la fonction publique est un élément important, et le Canada fait d'énormes efforts pour aider le gouvernement afghan à rendre ces institutions plus responsables […] Ce gouvernement doit être présent sur l'ensemble du territoire, et pour ce faire, on doit éliminer la corruption existante. Nous voulons que le gouvernement soit des plus crédibles pour la population; c'est pourquoi la communauté internationale et nous, tous ensemble, luttons pour diminuer et abolir la corruption dans les différentes fonctions publiques afghanes. Notre pays a aussi insisté pour que le Pacte pour l'Afghanistan comporte une clause importante sur la mise en place d'un mécanisme juste et transparent pour l'examen des nominations gouvernementales. Vous le savez, la corruption est une affaire d'humains, et nous voulons nous assurer que les gens que le gouvernement afghan va nommer à différentes positions, à des positions supérieures, comme par exemple le chef de police, les avocats du ministère de la Justice, les directeurs de la sécurité des districts et les gouverneurs provinciaux, sont au-dessus de tout soupçon de corruption. Ce mécanisme de nomination à des postes supérieurs a été établi dernièrement par décret par le gouvernement afghan, en septembre 2006, et nous travaillons actuellement avec nos partenaires internationaux et afghans pour assurer la mise en œuvre de ce décret[290].

Surendrini Wijeyaratne, du Conseil canadien pour la coopération internationale, en témoignant par la suite, a convenu que : « Le Canada et d’autres pays donateurs ont la possibilité de jouer un très grand rôle diplomatique en veillant à ce que [le groupe chargé des nominations de haut niveau] remplisse toutes ses fonctions d’une manière crédible sans être manipulé par le gouvernement[291] ». Cependant, la manière de jouer ce rôle peut être une question délicate, comme a pu le constater le ministre Bernier : après avoir formulé, le 14 avril 2008, des commentaires au sujet du gouverneur de la province de Kandahar, Asadullah Khalid, qui semblaient établir un lien entre ce dernier et la corruption et qui ont suscité des protestations de la part du gouvernement afghan, M. Bernier a dû apporter certains éclaircissements. Il a donc diffusé une déclaration à l’effet que : « l’Afghanistan est un État souverain qui prend ses propres décisions en matière de nominations gouvernementales. Je peux vous assurer que le Canada respecte pleinement ce fait et qu’il ne demande nullement au gouvernement afghan de faire des changements dans ce domaine[292]. »

Il est vrai que le gouvernement de l’Afghanistan s’est engagé, aux termes du Pacte pour l’Afghanistan, à effectuer des réformes anticorruption, et il sera tenu de remplir ses promesses. Sally Armstrong a dit au Comité que l’un des problèmes tient au fait que, les premières années du processus d’édification de l’État, «  les chefs des moudjahidines ont pris le contrôle des ministères et ont simplement refusé de se retirer. N’oubliez pas que le gouvernement a invité la communauté internationale à l’aider. Il ne nous a pas demandé de prendre des décisions. Nous ne pouvions pas lui dire : " Chassez donc ces trois ministres. " Nous ne pouvions pas le faire car ce n’était pas notre rôle. C’est un dossier très délicat[293]. » La question de savoir jusqu’à quel point les donateurs internationaux peuvent exprimer publiquement leurs préoccupations relativement à la corruption dans les institutions de gouvernance n’est pas encore tranchée, mais on s’entend pour dire que la question ne doit pas être escamotée.  Au moins un ministre afghan, le ministre de l’Éducation Haneef Atmar, aurait dit souhaiter que les pays étrangers dénoncent les fonctionnaires véreux[294].

De plus, il est impossible de lutter contre la corruption en Afghanistan sans s’attaquer à la puissante économie illicite de la drogue qui a infecté la société afghane, déformant la gouvernance à tous les niveaux et attisant l’insurrection[295]. Bien que la Constitution de 2004[296] interdise la culture du pavot asiatique à des fins de trafic, les données brutes sont renversantes. En 2007, 93 p. 100 de la production mondiale d’opium provenait de l’Afghanistan; la province de Helmand, à côté de celle de Kandahar, a fourni à elle seule près de la moitié de la production mondiale. La valeur de cette économie illicite (environ 5 milliards de dollars par année, dont seulement 20 p. 100 revient aux producteurs) est de loin supérieure à ce que reçoit l’Afghanistan en aide internationale et dépasse le PIB légal de tout autre pays du monde; d’ailleurs, d’après l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC) et la Banque mondiale, l’ampleur de cette production est virtuellement sans précédent dans l’histoire moderne[297]. De plus, le problème touche aussi bien l’offre que la demande. En effet, la narcomanie augmente en Afghanistan, où l’on compte maintenant près d’un million de toxicomanes et où le taux de maladie mentale atteint des niveaux inquiétants[298]. Cependant, la majeure partie de la récolte d’opium est exportée, principalement en Europe, où sa valeur de revente est estimée à 60 milliards de dollars par année[299]. Environ 70 p. 100 du volume total d’héroïne dans le monde est tiré de l’opium brut récolté en Afghanistan, d’où la nécessité d’interdire le trafic de précurseurs chimiques, comme l’anhydride acétique utilisé pour fabriquer l’héroïne.

La complexité du problème, ses liens avec l’insurrection des talibans – d’après des estimations, de 20 à 40 p. 100 du financement des talibans provient des exportations d’opiacés[300] – et la corruption gouvernementale sont exacerbés par les difficultés causées par les mesures antidrogues, dont il a été amplement question[301]. Le Comité a entendu de nombreux témoignages sur les enjeux[302]. Un des témoins, l’analyste réputé Barnett Rubin, a réclamé des stratégies exhaustives modifiées prévoyant notamment le développement rural à long terme et une meilleure application de l’interdiction aux frontières[303] – ce qui exige la participation de tous les pays voisins de l’Afghanistan, à savoir l’Iran et les républiques d’Asie centrale[304], ainsi que le Pakistan[305]. Il suit en cela l’évaluation faite par le rapport Manley : « Les bénéfices tirés du trafic d’opium vont aux talibans, à des éléments criminels ainsi qu’à des fonctionnaires corrompus des administrations provinciales et du gouvernement central. Le Groupe a constaté que le gouvernement de l’Afghanistan et ceux des pays étrangers ont recours à des pratiques et à des politiques différentes, et parfois même contradictoires, en matière de lutte contre les stupéfiants, de sorte qu’ils travaillent mutuellement à contre-courant. Il importe que l’ensemble des autorités compétentes adoptent des stratégies cohérentes de lutte contre les stupéfiants[306]. Ces approches doivent inclure une réforme du secteur judiciaire afin de renforcer les mesures visant à traduire en justice les trafiquants Elles doivent également prévoir des moyens économiques qui soient efficaces afin d’inciter les producteurs de pavot et les intermédiaires potentiels à se tourner vers d’autres secteurs d’activité[307]. »

haut

Les efforts d’éradication de la culture du pavot sont vivement contestés, notamment par des fonctionnaires locaux du gouvernement afghan[308], et le président Hamid Karzaï[309] de même que certains partenaires internationaux résistent au projet des États-Unis de faire de l’épandage aérien, puisqu’ils estiment qu’une telle intervention risque d’aliéner encore plus les petits agriculteurs et la main-d’œuvre migrante qui récoltent en fait la plus grosse partie de l’opium brut[310]. Des solutions de rechange — en fait, une légalisation de la production –, dont la culture du pavot à des fins médicinales (« poppy-for medicine ») proposée par le Senlis Council, financé par des fonds privés et dirigé par la Canadienne Norine MacDonald[311] — ont suscité de l’intérêt. Le groupe d’experts qui a rédigé le rapport Manley s’est montré prudent : « Par exemple, un projet limité de culture du pavot à des fins médicinales pourrait valoir la peine d’être poursuivi. Toute bonne stratégie mettra du temps à produire des résultats[312]. » Cependant, les gouvernements afghan et canadien ont rejeté les propositions du Conseil Senlis, critiquées par des analystes bien renseignés[313].

Dans son plus récent rapport sur la situation en Afghanistan, le Secrétaire général de l’ONU a constaté que la lutte contre les stupéfiants était passée « à une vitesse supérieure », devant l’augmentation alarmante de la culture du pavot et du trafic en 2007, mais le tableau qu’il brosse n’est pas homogène :

Les pouvoirs publics [afghans] assureront une protection au cours des opérations de lutte contre les stupéfiants, compte tenu du lien puissant qui unit trafic de drogue et insurrection. Le Plan met fortement l’accent sur l’importance des activités de substitution, d’une démarche axée sur les provinces, d’un renforcement de l’appui des donateurs au Fonds d’affectation spéciale pour la lutte antidrogue et d’une restructuration réussie, qui est essentielle à de meilleurs résultats […] Il faut de toute urgence renforcer les efforts en matière de lutte contre les stupéfiants en précisant les rôles et les responsabilités du ministère de la Lutte contre les stupéfiants et des autres autorités appelées à intervenir […].

D’après l’étude de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime « Opium Winter Rapid Assessment Survey », publiée en février, la culture du pavot à opium ne devrait pas subir de gros changements en 2008. Elle reste concentrée et devrait augmenter dans les provinces du sud et de l’ouest touchées par l’insurrection. On ne s’attend à aucun changement majeur dans la province de Helmand, source de plus de la moitié de la récolte afghane l’an dernier. Si, élément positif, 12 provinces devaient s’abstenir de cultiver du pavot à opium cette année, l’Afghanistan serait en passe de devenir l’un des plus gros producteurs de cannabis au monde avec près de 70 000 hectares de cannabis en 2007[314].

Recommandation 30

Le gouvernement du Canada devrait recourir à une diplomatie prudente et mesurée pour amener le gouvernement afghan à respecter ses engagements pris en vertu du Pacte pour l’Afghanistan en matière de lutte contre la corruption. Le gouvernement du Canada devrait appuyer une approche coordonnée à l’égard des mesures anticorruption, et, en particulier, devrait œuvrer avec le gouvernement de l’Afghanistan et ses partenaires de la communauté internationale afin de s’assurer que le groupe chargé des nominations des hauts fonctionnaires joue son rôle efficacement afin d’empêcher la corruption dans les institutions gouvernantes.

Recommandation 31

Le gouvernement du Canada devrait travailler avec le gouvernement de l’Afghanistan et ses partenaires de la communauté internationale à une réforme des politiques de lutte contre les stupéfiants afin que des stratégies efficaces et cohérentes de lutte contre les stupéfiants puissent être adoptées. Toutes les mesures réalisables devraient être examinées à cet égard.

Soutien à une gouvernance responsable, à une démocratie multipartite, aux élections et à des institutions législatives efficaces

La création d’un État efficace et plus démocratique en Afghanistan sera un processus long et difficile, dans le cadre duquel, plutôt que d’imposer tout « modèle » occidental, il convient de respecter les caractéristiques locales, et ce, en conformité tant avec la constitution islamique de l’Afghanistan qu’avec les obligations internationales de ce dernier en matière de droits de la personne. Dans son rapport de juillet 2007 sur le soutien du Canada au développement démocratique international, le Comité avait souligné l’appui apporté par Élections Canada aux élections de 2004 (présidentielle) et de 2005 (parlementaire), ainsi que l’importance de l’expertise canadienne déployée en Afghanistan. Plusieurs témoins avaient suggéré au Comité des activités additionnelles de développement de la démocratie en Afghanistan, mais, dans son rapport, le Comité avait préféré rappeler « qu’une connaissance bien plus grande des circonstances locales fort variées dans le pays est essentielle pour qu’un programme de développement démocratique à long terme destiné à ce pays ait une chance de réussir[315] ». Les évènements, depuis lors, n’ont fait que confirmer la validité de ce point de vue.

Lors de la signature de l’Accord de Bonn, en décembre 2001, dans un optimisme exalté, les parties en appelaient, dans leur préambule, à « la constitution d’un gouvernement à large base, soucieux de l’équité entre les sexes, multiethnique et pleinement représentatif [316] ». Les « Jalons et délais », en annexe du Pacte pour l’Afghanistan (voir l’annexe II), parlent de gouvernance et de participation, mais ne font aucune référence à des objectifs démocratiques en tant que tels. De fait, hormis la tenue des premières élections démocratiques depuis des décennies, l’établissement de la démocratie en Afghanistan est un travail qui n’est pas encore terminé.

Afin de remettre les choses brièvement en contexte, il convient de rappeler que la constitution afghane de 2004 a institué un régime présidentiel où le président (tout comme les deux vice-présidents figurant sur le même « ticket ») est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans. Un président ne peut remplir plus de deux mandats. L’Assemblée nationale bicamérale est composée d’une chambre basse élue (également pour cinq ans), la Wolesi Djirga (Chambre des représentants), comptant 249 sièges, et d’une chambre haute, mi-élue, mi‑nommée, la Mechrano Djirga (Assemblée des anciens). La Wolesi Djirga compte dix sièges réservés aux populations « kouchis » (nomades), dont trois doivent être occupés par des femmes, et deux femmes doivent être élues dans chacune des 34 provinces du pays afin de garantir à la population féminine une représentation générale d’environ 25 p. 100 des sièges. Le président nomme un tiers des membres de la Mechrano Djirga (dont la moitié doivent être des femmes), les deux autres tiers étant également choisis, l’un par les conseils provinciaux élus, et l’autre par les quelque 400 conseils de district (bien que les élections de ces derniers aient été reportées[317]). En avril 2008, les femmes constituaient 27,7 p.100 des membres de la Chambre basse (67 sur 242) et 21,6 p. 100 de ceux de la Chambre haute (22 sur 102)[318].

S’ajoute à la complexité du régime le fait, jugé problématique par de nombreux analystes, que l’élection du Parlement se déroule selon le mode compliqué, peu connu et peu utilisé, d’un scrutin proportionnel connu sous le nom de vote unique non transférable (VUNT). Il semble que le VUNT ait été choisi, du moins en partie, afin d’éviter la formation de partis politiques, mais il s’avère difficile pour le citoyen moyen, et plus encore s’il est analphabète, d’en comprendre le fonctionnement et il a abouti à quelques effets pervers. Ce n’est là qu’une des nombreuses questions que soulève le développement démocratique en Afghanistan[319], une autre étant celle suscitée par la capacité du Parlement à garantir une surveillance adéquate des dépenses publiques. De fait, cet aspect de la gouvernance responsable affecte le gouvernement afghan dans son ensemble, puisque, comme l’a souligné Nipa Banerjee au Comité, « [tout] gouvernement doit répondre de ses actes devant la population en premier lieu. Là où un gouvernement a une dépendance excessive et de longue durée à l'égard des sommes versées au titre de l'aide, le devoir de ce dernier d'être responsable devant ses citoyens est transmis aux pays donateurs[320] ».

En matière de développement parlementaire, il existe, outre des ententes bilatérales avec des pays donateurs, des initiatives multilatérales, telles que le Soutien à l’établissement du pouvoir législatif afghan du Programme des Nations Unies pour le développement, qui a débuté en 2005[321]. Après des décennies de dictatures et de guerres, il a fallu repartir à zéro. Des efforts sont également déployés actuellement afin de venir en aide aux femmes parlementaires, et ce, bien que, là encore, il reste encore énormément à faire. Surendrini Wijeyaratne a déclaré que « […] les femmes parlementaires ont des difficultés et devraient être mieux soutenues. Elles doivent faire face à beaucoup d’intimidation et de harcèlement. Elles ont besoin d’un plus grand soutien pour être en mesure de faire leur travail de parlementaires[322] ».

Se tournant vers l’avenir, les témoins ont également déclaré au Comité qu’il était urgent de se préparer sérieusement au prochain cycle électoral de 2009 (élection présidentielle en septembre) et 2010 (législatives). Le Secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-Moon, a déclaré, dans son plus récent rapport sur l’Afghanistan au Conseil de sécurité qu’« [il] faut commencer immédiatement les préparatifs pour l’établissement des listes électorales et la planification des prochaines élections. Les autorités afghanes doivent pour cela prendre des décisions quant aux dates des élections et promulguer une législation électorale. La communauté internationale, pour sa part, devra commencer à mobiliser des fonds à l’appui de ces processus d’importance vitale, en particulier l’enregistrement des électeurs, qui doit impérativement commencer à l’été 2008 pour que les élections puissent se tenir en 2009[323] ».

haut

Les commentaires formulés à ce sujet par l’honorable John Manley, président du Groupe d'experts indépendant sur le rôle futur du Canada en Afghanistan, méritent qu’on les cite dans leur intégralité :

Je veux d'abord souligner l'importance des élections prochaines, en partie parce que nos efforts visent à favoriser l'émergence d'institutions démocratiques, mais aussi parce que les élections précédentes serviront de repère pour le déroulement de celles qui s'en viennent. Tout compte fait, j'estime que ce fut un succès remarquable étant donné la conjoncture de l'époque; ces élections serviront de point de référence pour celles de 2009 qui, comme bien des gens l'espèrent, je crois, combineront scrutins présidentiel et parlementaire. Si les choses tournent mal, il y aura un grave problème, non seulement pour l'Afghanistan, mais aussi pour l'ensemble de la communauté internationale. Il est donc important que l'on déploie des efforts suffisants à cet effet.

Ce n'est pas la première fois que le Canada aura un rôle à jouer en la matière. Élections Canada a été très actif lors de la dernière série de scrutins. Nous devons donc nous engager à fond dans le processus, que ce soit par l'entremise des agences des Nations Unies ou de l'OSCE, ou sous la coordination de quelque instance que ce soit. C'est l'une des choses dans lesquelles nous excellons et c'est un rôle que nous devons absolument jouer [324].

D’autres témoins ont également attiré l’attention du Comité sur les élections à venir et sur le rôle d’appui que le Canada se doit de jouer à cet égard. Grant Kippen, qui a récemment surveillé les élections pakistanaises de février 2008, et a été le président de la Commission des plaintes électorales en Afghanistan lors de l’élection du parlement et des conseils provinciaux en 2005[325], a déclaré au Comité que « [des] élections ne font pas une démocratie. Il est essentiel que nous restions pour le long terme, que nous facilitions cette compréhension, cette éducation et que nous renforcions les capacités. Je pense que la communauté internationale a de nombreuses attentes à l'égard des Afghans en ce qui concerne leur propre gouvernance et dans d'autres domaines, mais je pense que nous n'avons pas du tout été à la hauteur pour ce qui est de leur apporter les compétences, les connaissances et les capacités nécessaires[326] ». Il a ajouté qu’« [il] pense que les parlementaires canadiens et le gouvernement du Canada ont une occasion en or d'établir des relations professionnelles avec les nouveaux parlementaires, tant ceux de l'Assemblée nationale que ceux des assemblées provinciales, surtout au Béloutchistan qui, c'est connu, partage une frontière avec la province de Kandahar. Je pense que le temps presse et qu'il faut saisir cette occasion très rapidement[327] ».

Des élections ne sont pas suffisantes en soi si elles ne sont pas suivies par le développement et le maintien d’institutions de gouvernance législatives efficaces, et ce, dans la perspective plus large d’améliorer la légitimité et la stabilité de l’État. Comme Marc André Boivin l’a expliqué au Comité, « [les] présidentielles et les législatives tenues en 2004 et en 2005 représentaient sans aucun doute un grand succès. Chez les spécialistes de la consolidation de la paix, le consensus est qu’en réalité, ce sont les deuxièmes et les troisièmes élections qui sont déterminantes, c’est-à-dire que le succès symbolique de la tenue d’élections doit être accompagné d’une œuvre patiente de mise en place des structures et institutions propres à soutenir un système politique qui exclut le recours à la violence pour arriver à ses fins[328] ».

De même, Derek Burney a rappelé avec prudence et pragmatisme au Comité que « lorsqu'on sème les graines de la démocratie, on ne récolte pas toujours un verdict parfait de la part des électeurs. Certaines de ces personnes sont peut-être élues par les citoyens de leur localité pour bien des raisons, mais il est très difficile pour la communauté internationale d'imposer une norme de démocratie qui correspond à nos intérêts, par rapport à ce qu'ils considèrent être leurs intérêts[329] ».

En résumé, le Comité s’est vu déclarer que le Canada pourrait faire plus pour appuyer les Afghans dans leur cheminement vers la mise en œuvre des objectifs généraux que sont des élections libres et justes, la démocratie multipartite, des institutions législatives efficaces et une gouvernance démocratique responsable. Mais nous ne saurions présumer ce qui leur convient le mieux. Il s’agit avant toute chose d’un processus d’apprentissage réciproque qui doit se prolonger à long terme.

Recommandation 32

Le gouvernement du Canada devrait examiner les moyens d’accroître son soutien à l’établissement d’un Parlement national afghan et d’institutions de gouvernance subnationales élues, et ce, en tirant leçon du travail déjà accompli en ce sens. Ce soutien devrait inclure des mesures additionnelles adaptées aux besoins particuliers des femmes parlementaires. De plus, l’appui canadien au développement législatif et aux autres aspects du développement démocratique doit aboutir à la mise en place d’un processus durable, mené par les Afghans, respectant les priorités afghanes et propre à renforcer la capacité de représentation et de surveillance démocratiques de l’Afghanistan. Par ailleurs, le Canada devrait aider l’Afghanistan à établir une démocratie qui puisse s’acquitter de ses obligations internationales en matière de droits de la personne.

Recommandation 33

Le gouvernement du Canada devrait immédiatement examiner comment fournir le meilleur appui possible aux prochaines élections démocratiques afghanes de 2009-2010, et ce, en collaboration avec les autorités afghanes compétentes et ses partenaires internationaux. Le gouvernement du Canada devrait également favoriser des relations de travail professionnelles entre les parlementaires canadiens et les législateurs afghans nationaux, provinciaux et locaux.

Le rôle futur de l’Équipe consultative stratégique — Afghanistan (ECS‑A) du Canada

L’une des composantes les plus innovatrices de l’appui canadien à la bonne gouvernance a été l’« Opération Argus », lancée par les Forces canadiennes à l’été 2005, et qui s’appuie sur une équipe, connue sous le nom d’Équipe consultative stratégique — Afghanistan (ECS-A) et constituée d’environ 15 militaires (en tenue civile) et civils, installée à Kaboul « en vue d’aider le gouvernement de la République islamique d’Afghanistan à élaborer des stratégies nationales clés ainsi que les mécanismes permettant de les mettre en œuvre[330] ». Selon les renseignements officiels fournis par le gouvernement canadien, l’ECS-A « comporte un petit élément de commandement et de soutien, deux équipes de planificateurs stratégiques, un analyste de défense, un conseiller en communications stratégiques [et] un expert en matière de développement […] [Elle] travaille en étroite collaboration avec l’ambassadeur Arif Lalani et le Chef de la coopération, George Saible, à l’ambassade du Canada, et avec un représentant supérieur du gouvernement afghan, afin de fournir un soutien de planification direct aux ministères et aux groupes de travail gouvernementaux chargés du développement et de la gouvernance. Jusqu’à présent, l’équipe a complété de nombreux travaux de concert avec le ministère du Relèvement rural et du Développement de l’Afghanistan, ainsi qu’avec des groupes de travail sur la stratégie de développement national, la réforme de l’administration publique et la politique en matière d’égalité des sexes dans la fonction publique afghane. Les membres des équipes de planification de l’ECS-A mettent à profit leur large éventail de compétences, de connaissances, d’expérience et d’aptitudes de planification stratégique (civiles et militaires) en vue de résoudre des problèmes civils complexes. Ils sont intégrés dans les ministères et les organismes du gouvernement afghan et ils travaillent sous la direction des Afghans en vue d’aider les fonctionnaires à intégrer les idées concrètes des experts internationaux et des dirigeants afghans à l’intérieur de cadres stratégiques cohésifs[331] ».

Le colonel Mike Capstick, premier commandant de l’ECS-A, aujourd’hui à la retraite, a déclaré en mars 2008 au Comité que les membres de l’ECS-A ont participé aux intenses efforts déployés pour arriver à produire le Pacte pour l'Afghanistan et la Stratégie nationale intérimaire de développement de l'Afghanistan à temps pour la Conférence de Londres, au début de 2006, à laquelle il a participé[332]. L’un des témoins, le professeur Robert Jackson, a souligné de façon très positive le rôle que l’ECS-A, par sa composition, a joué en prodiguant son soutien au gouvernement afghan. Il a expliqué au Comité le contexte et la nature de ce rôle dans les termes suivants :

Il n’y aura jamais de succès en Afghanistan si un gouvernement fort et compétent n’est pas établi à Kaboul. Bien sûr, il est important de détruire les champs de pavot, de construire des routes, d’éduquer les gens et de combattre les talibans, mais toutes ces activités ne réussiront jamais si les institutions démocratiques et la bureaucratie d’État ne sont pas assez fortes pour contrer la fragmentation causée par la présence de puissants chefs de guerre.

L’Équipe consultative stratégique du Canada contribue à cette tâche vitale. À mon avis, le gouvernement devrait attribuer plus de ressources financières et humaines à cet effort. Ces quelques bureaucrates armés du Canada — l’équipe ne compte que 16 officiers — ont une influence extraordinaire à Kaboul. Ils ont récemment été intégrés dans les ministères qui s’occupent de l’éducation, de la justice, de la réforme de la fonction publique, des transports, de l’aviation, du rétablissement et du développement rural ainsi qu’au bureau du conseiller économique spécial du président. Ils n’interviennent évidemment pas au ministère de la Défense parce que leur travail ne s’étend pas au domaine de la sécurité. Ce petit groupe dévoué de planificateurs et d’analystes stratégiques met ses compétences au service du gouvernement de l’Afghanistan. Il soutient la capacité de recevoir et de dépenser les fonds et élabore des politiques publiques cohérentes à partir du centre. Pendant mon séjour dans le pays, les responsables du gouvernement, les ministres et les autres personnalités à qui j’ai parlé ont été unanimes à dire que l’équipe canadienne était nécessaire, faisait un excellent travail et devrait être maintenue[333].

haut

Un autre témoin, cependant, Paul Heinbecker, ancien ambassadeur canadien auprès des Nations Unies, a posé ouvertement la question de savoir si l’ECS-A devrait fonctionner dans le cadre d’une opération des Forces canadiennes. Il a ainsi affirmé au Comité que l’ECS-A « est une excellente idée, mais voilà un cas où une approche pangouvernementale aurait été vraiment opportune. Je ne comprends pas tout à fait pourquoi ce travail a été confié à des planificateurs militaires, surtout s’il est prévu, à la base, qu’ils n’ont pas à s’occuper d’activités militaires. Je dirais en outre que la gestion de l’équipe prête quelque peu à controverse. Il n’y a pas de raison pour que ce travail ne soit pas intégré à l’ensemble de la mission canadienne. Il devrait être géré comme n’importe quel autre élément du gouvernement canadien[334] ».

Bien qu’il n’ait pas abordé la question des planificateurs travaillant en tant que membres des Forces canadiennes dans le cadre de l’Opération Argus, il a exprimé son désaccord dans les termes suivants : « Les membres de l’équipe travaillent pour des ministres afghans. Supposons qu’un diplomate américain soit détaché au ministère des Affaires étrangères à Ottawa. Voudriez-vous qu’il prenne ses ordres à Washington ou bien qu’il relève du ministre des Affaires étrangères à Ottawa? Il est évident que nous voudrions qu’il relève de son ministre à Ottawa. Pour les membres de l’équipe, le facteur le plus important est qu’ils font ce que les ministres afghans, et non les responsables canadiens, leur demandent de faire[335] ».

Des témoins ont fait valoir au Comité que l’ECS-A doit poursuivre son importante mission, et que cette dernière doit être accrue, si les circonstances le permettent, selon des modalités décidées d’un commun accord par les gouvernements canadien et afghan. La nature des liens hiérarchiques appropriés devra être examinée lors de l’élaboration et de l’adoption, par le Canada, de la politique cadre publique pour l’Afghanistan que le Comité a recommandée dans l’Introduction.

Recommandation 34

Le renforcement et le prolongement de la mission de l’Équipe consultative stratégique — Afghanistan à Kaboul devraient être examinés par le Comité spécial sur la mission canadienne en Afghanistan. À la suite des recommandations de ce comité, le gouvernement du Canada devrait décider s’il prolonge la mission de l’Équipe consultative et s’il renforce cette dernière par l’ajout de membres civils. Par la suite, la nature des liens hiérarchiques appropriés devrait être examinée, en concertation avec le gouvernement afghan, lors de l’élaboration et de l’adoption, par le Canada, de la politique cadre publique pour l’Afghanistan proposée dans la Recommandation 1.

Assurer la coordination de l’aide canadienne et internationale à l’établissement d’une bonne gouvernance en Afghanistan

La coordination inadéquate de l’aide à l’Afghanistan, tant nationale qu’internationale, militaire ou non, a été un problème abordé à maintes reprises par les témoins qui se sont succédé devant le Comité. Comme le professeur Douglas Bland, titulaire de la Chaire d'études en gestion de la défense de l’École des études politiques à l’Université Queen's, l’a déclaré au Comité : « Nous pouvons avoir des slogans comme les trois D, mais ce ne sont que des slogans. Il nous faut l'autre slogan, celui de “ l'approche pangouvernementale ”, dont certains d'entre nous parlons depuis longtemps, afin de réunir les efforts […] de tous les éléments du gouvernement afin que tous puissent travailler de façon cohérente dans le cadre d'une stratégie […] Nous n'avons pas adapté la bureaucratie canadienne à cette constante des engagements à l'égard du maintien de la paix par l'OTAN et par les Nations Unies […] Il nous faut donc réfléchir à la façon dont nous allons traiter de cela sur le plan politique, bureaucratique, et avec tous les instruments du gouvernement[336] ».

La nécessité de doter le Canada d’un meilleur système a également été soulignée, en janvier 2008, dans le Rapport final du Groupe d'experts indépendant sur le rôle futur du Canada en Afghanistan, qui a entraîné la prise d’un certain nombre de mesures relevant de « l'approche pangouvernementale », telles que la création d’un Groupe de travail sur l’Afghanistan au sein du Bureau du Conseil privé et celle d’un Comité du Cabinet sur l’Afghanistan. Pour sa part, le Parlement a créé le Comité spécial de la Chambre des communes sur l’Afghanistan aux termes d’une motion adoptée par la Chambre des communes le 13 mars dernier (voir l’annexe 1).

Le Comité juge ces développements encourageants et il pense qu’ils renforceront l’élaboration d’une politique cadre publique du Canada pour l’Afghanistan comportant des rapports réguliers au Parlement et une meilleure information des Canadiens quant aux objectifs et aux progrès accomplis au regard de ces derniers.

Pour ce qui est de la gouvernance, Nipa Banerjee a déclaré au Comité que « [la] réponse de la communauté internationale en matière de renforcement des institutions manque totalement de coordination. Malgré le discours qui veut que la coordination passe par les repères du Pacte pour l'Afghanistan, il est tout à fait évident que la communauté internationale n'a pas de vision commune, sans parler d'une stratégie commune[337] ». Et pourtant, comme le souligne très clairement le rapport sur la situation en Afghanistan remis le même jour au Conseil de sécurité par le Secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-Moon, rien ne serait plus nécessaire, ni plus urgent :

Pour régler les problèmes de sécurité et stabiliser la situation en Afghanistan, il convient d’adopter une approche commune intégrant les questions de sécurité, de gouvernance, d’état de droit, de droits de l’homme et de développement social et économique. Cette approche, qui repose sur la coopération entre le Gouvernement, la Force internationale d’assistance à la sécurité, l’Organisation des Nations Unies et la communauté internationale, doit également être axée sur la réalisation des ambitions partagées exprimées dans le Pacte, sous la direction du Gouvernement afghan et avec l’appui du Parlement, de la société civile et du secteur privé[338].

Le Canada doit faire tout ce qui est en son pouvoir sur la scène internationale afin de promouvoir l’approche commune défendue par le Secrétaire général des Nations Unies. Au niveau national également, des mesures restent à prendre. Le colonel (retraité) Mike Capstick s’est réjoui de la création du Groupe de travail sur l’Afghanistan au sein du Bureau du Conseil privé, d’un Comité du Cabinet sur l’Afghanistan et du Comité spécial de la Chambre des communes sur l’Afghanistan, mais il a également fait part au Comité de plusieurs suggestions en la matière, qu’il a reprises par la suite dans le numéro d’avril 2008 de la revue Policy Options. En tant qu’ancien commandant de l’ECS-A canadienne à Kaboul, il a déclaré au Comité :

Ces mesures très positives doivent maintenant s'accompagner d'une stratégie publique d'ensemble, qui définisse avec exactitude les objectifs que poursuit le Canada en Afghanistan — les fins —, les organismes, méthodes, priorités et étapes à franchir pour les réaliser — la manière — et les ressources, humaines et financières, qui y seront consacrées — les moyens. Cette stratégie doit être compatible avec le Pacte et devra servir de guide suprême à l'effort “ pangouvernemental ” du Canada. Elle permettra aux parlementaires de suivre les progrès de la mission et, du même coup, d'informer la population canadienne des objectifs nationaux que nous visons en Afghanistan et des moyens que le gouvernement entend mettre en œuvre pour les réaliser. Tous ensemble, le comité du Cabinet, le groupe de travail, le comité parlementaire spécial et la stratégie publique sur l'Afghanistan ne pourront qu'accroître la cohérence de notre stratégie nationale[339]».

haut

Le colonel a souligné un point important, à savoir la nécessité de mieux coordonner les interventions du gouvernement canadien[340].  Plus précisément, le colonel Capstick a proposé la création d’un nouveau poste, dont le titulaire serait chargé de superviser la mise en œuvre d’une stratégie globale, cohérente et coordonnée pour l’Afghanistan. Il a déclaré à ce propos au Comité que, « [sans] mettre en doute la compétence et l'habileté diplomatiques de nos agents des Affaires étrangères, il faut comprendre que la gestion d'une opération aussi complexe et multidimensionnelle que la mission afghane n'est tout simplement pas du ressort des ambassadeurs du Canada, ni des commandants militaires. Pour trouver une solution, le premier ministre doit nommer un envoyé spécial canadien, crédible et compétent, lui conférer le pouvoir d'agir à titre de responsable de “ l'équipe canadienne ” et lui donner pour mandat de veiller à la bonne coordination de la Stratégie Canada-Afghanistan. Cet envoyé devrait relever directement du premier ministre et être soutenu par une équipe de coordination stratégique formée d'environ quatre personnes. Celles-ci devraient avoir de l'expérience en Afghanistan et des compétences en matière de sécurité, de gouvernance et de développement international, ainsi que des capacités éprouvées dans les secteurs de la planification et de la coordination stratégiques. Les membres de cette équipe ne doivent pas être des soldats ni des fonctionnaires encore actifs, car il faut pouvoir garantir leur indépendance, et les soustraire aux pressions inévitables de la bureaucratie qui ne pourraient que freiner leurs décisions. Cette équipe serait chargée de conseiller l'envoyé spécial du premier ministre, de réviser les projets et activités de manière à en assurer la cohérence stratégique, et d'être les yeux et les oreilles de l'envoyé spécial, partout au pays[341] ».

Recommandation 35

Le gouvernement du Canada devrait accroître ses efforts en vue d’améliorer la coordination de ses actions en Afghanistan en rapport avec la mise en œuvre d’une politique cadre publique. Dans un tel contexte, le gouvernement du Canada pourrait envisager de nommer un coordonnateur canadien expérimenté en Afghanistan. De plus, les actions du gouvernement du Canada devraient tenir compte des réalités du terrain, et être coordonnées avec celles des autorités afghanes. Au niveau stratégique le plus large, le gouvernement du Canada devrait utiliser tous les moyens diplomatiques à sa disposition pour favoriser une meilleure coordination afghano-internationale indispensable au respect des engagements que toutes les parties ont pris en vertu du Pacte pour l’Afghanistan.

Notes de la partie III


[218]       « Strategic Chaos and Taliban Resurgence in Afghanistan », témoignage devant le Sous-comité du Moyen-Orient et de l’Asie du Sud, Comité des affaires étrangères, Chambre des représentants des États-Unis, Washington (D.C.), 2 avril 2008, http://www.crisisgroup.org/home/index.cfm?id=5370&l=1 . [traduction]

[219]       Témoignages, réunion 14 du FAAE, 14 février 2008, p. 4.

[220]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 15.

[221]       Observations au Sommet commercial Canada-États-Unis à Myrtle Beach (Caroline du Sud), citées dans l’article de Theo Caldwell, « The ‘Vimy effect’ – 91 years later », The National Post, 7 avril 2008, p. A12.

[222]       « Success in Afghanistan: how to define it, how to make it happen », discours à la conférence Pol icy Dialogue, European Policy Centre, Bruxelles, 2 avril 2008, http://www.crisisgroup.org/home/index.cfm?id=5371&l=1 . [traduction]

[223]       Témoignages, réunion 23 du FAAE, 10 avril 2008, p 8.

[224]       Mission des Nations Unies en Afghanistan, conférence de presse, 10 mars 2008, http://www.unama-afg.org/news/_pc/Index.htm. [traduction]

[225]       Voir, par exemple, les nombreux rapports de l’International Crisis Group sur l’Afghanistan (http://www.crisisgroup.org/home/index.cfm?id=1266&l=1), de l’Unité afghane de recherche et d’évaluation (http://www.areu.org.af/index.php?option=com_content&task=view&id=12&Itemid=53), du Centre for Conflict and Peace Studies Afghanistan, http://www.caps.af/ et du Crisis States Research Centre de la London School of Economics (http://www.crisisstates.com/publications/publications.htm); voir aussi les 12 articles du numéro spécial d’International Peacekeeping, « Special Issue: Afghanistan in Transition: Security, Governance and Statebuilding »; sous la direction de Robert Rotberg, Building a New Afghanistan, World Peace Foundation et Brookings Institution Press, Cambridge et Washington (D.C.), 2007; Asia Foundation, State-Building, Political Progress, and Human Security in Afghanistan: Reflections an a Survey of the Afghan People, San Francisco et Kaboul, avril 2007, http://www.asiafoundation.org/publications/ .

[226]       Stefan Lehmeier, coordonnateur, Comité coordonnateur canadien pour la consolidation de la paix, Afghanistan Reference Group, Témoignages, réunion 5 du FAAE, 29 novembre 2007, p. 10.

[227]       Amrullah Saleh, Strategy of Insurgents and Terrorists in Afghanistan, Direction nationale de la sécurité, Kaboul, 2006, cité dans Seth Jones, « The Rise of Afghanistan’s Insurgency: Flawed Ideas about Failed States », International Security, vol. 32, no 4, 2008, p. 20. [traduction]

[228]       Témoignages, réunion 6 du FAAE, 4 décembre 2007, p. 9. M. Samad a aussi fait remarquer, lors de la table ronde Afghanistan : Paix et prospérité pour la population et une cause type pour l'OTAN organisée conjointement par la Friedrich Ebert Foundation et l’Institut Nord-Sud qui a eu lieu à Ottawa le 19 juin 2008, que ces dimensions avaient été négligées durant les premières années de l’intervention de la communauté internationale en Afghanistan et que, durant la seconde phase de cette intervention, qui a coïncidé avec la résurgence des talibans, les problèmes de corruption et d’impunité avaient atteint un niveau aigu.

[229]       Comme on le dit dans un éditorial de la revue The Economist, « [pour ce qui est de l’objet de l’intervention des pays occidentaux en Afghanistan], la faiblesse et la corruption de l’Afghanistan sont des facteurs plus importants que le nombre des soldats de l’OTAN [qui y sont postés]. (« Afghanistan: How the ‘good war’ could fail », 24 mai 2008, p. 18.) [traduction]

[230]       Cité par Peter Goodspeed dans  « An Afghan’s fears », National Post, 17 mai 2008, p. A20 [traduction]; Ashraf Ghani et Clare Lockhart, Fixing Failed States: A Framework for Rebuilding a Fractured World, Oxford University Press, 2008.

[231]       République islamique d’Afghanistan, Afghanistan National Development Strategy (2008-2013), Gouvernement de l’Afghanistan, Kaboul, avril 2008, p. 61.

[232]       Voir Andrew Bishop, « Can Paris save Afghanistan? », Middle East Times, 5 juin 2008; Nipa Banerjee, « Remember who we’re supposed to be helping », The Ottawa Citizen, 12 juin 2008, p. A17.

[233]       Cité par Cyril Vanier et Armen Georgian dans  « Donors led by the United States pledged about $20 billion in aid to Afghanistan on Thursday but said Kabul must do far more to fight corruption », Reuters, 12 juin 2008.

[234]       Cité par Peter O’Neill dans,  « Canadians won’t tolerate corruption in Afghanistan; Wasted resources will chip at mission confidence: Emerson », The Calgary Herald, 13 juin 2008, p. A24.

[235]       Afghanistan National Development Strategy (2008-2013),  p. 62. [traduction]

[236]       Cité par Jon Hemming dans « Calls to back $50bn Afghanistan aid plan », Kaboul, Reuters, 22 mai 2008 [traduction].  Cette somme de 50 milliards de dollars représente plus du double du total cumulatif (24 milliards de dollars) de l’aide promise à l’occasion des trois conférences des donateurs qui ont eu lieu depuis 2002.

[237]       Propos tenus à Claire Billet de la chaine de télévision de France 24 et cités par N. Germain dans  « In an unusually frank interview with FRANCE 24, the UN’s aid chief in Afghanistan says too much Western aid goes back to the donor countries, instead of the Afghan people it was intended to help », 11 juin 2008.

[238]       Témoignages, réunion 16 du FAAE, 4 mars 2008, p. 10. Le rapport a été rédigé par Sarah Lister, Moving Forward? Assessing Public Administration Reform in Afghanistan, Unité afghane de recherche et d’évaluation, Briefing Paper, septembre 2006; voir aussi Lister, « Understanding State-Building and Local Government in Afghanistan », Crisis States Research Centre de la London School of Economics, Working Paper No.14, mai 2007, et, de façon plus générale, Hamish Nixon, Aiding the State? International Assistance and the Statebuilding Paradox in Afghanistan, Unité afghane de recherche et d’évaluation, Briefing Paper Series, avril 2007, http://www.areu.org.af/index.php?option=com_content&task=view&id=39&Itemid=73 .

[239]       Témoignages, réunion 16 du FAAE, 4 mars 2008, p. 9-10.

[240]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 7.

[241]       Barnett Rubin et Humayun Hamidzada, « From Bonn to London: Governance Challenges and the Future of Statebuilding in Afghanistan », International Peacekeeping, vol. 14, n1, janvier 2007, p. 17-18. [traduction]

[242]       Marc André Boivin, « Helping Canadian Policy in Afghanistan to Succeed », déclaration présentée à la réunion 14 du FAAE, 14 février 2008, p. 4. M. Boivin est directeur adjoint du Réseau francophone de recherche sur les opérations de paix au Centre d’études et de recherches internationales (CÉRIUM), Université de Montréal. [traduction]

[243]       Témoignages, réunion 17 du FAAE, 6 mars 2008, p. 3-4. Mme Banerjee est actuellement professeure à l’École supérieure d’affaires publiques et internationales, Développement international et mondialisation, Université d’Ottawa.

[244]       Témoignages, réunion 16 du FAAE, 4 mars 2008, p. 6. Voir aussi, par Capstick, « Reviewing Canada’s Afghan Mission », Policy Options, avril 2008, p. 22‑25; « The war will be won in Kabul », The Ottawa Citizen, 14 avril 2008, p. A11.

[245]       Rubin et Hamidza, « From Bonn to London: Governance Challenges and the Future of Statebuilding in Afghanistan », 2007, p. 18. [traduction]

[246]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 1‑2 et 10.

[247]       À ce sujet, voir l’analyse de Hamish Nixon, « The Changing Face of Local Governance Community Development Councils in Afghanistan », Working Paper Series de l’Unité afghane de recherche et d’évaluation, Kaboul, février 2008.

[248]       Le rapport de février 2008 peut être consulté en ligne à www.worldbank.org/af. Au sujet des CDC, voir aussi Christine Noelle-Karimi, « Village Institutions in the Perception of National and International Actors in Afghanistan », Centre de recherche sur le développement de l’Université de Bonn, Série Amu Darya, document no 1, avril 2006.

[249]       Communiqué de presse du ministère du Relèvement rural et du Développement de la République islamique d’Afghanistan et de la Banque mondiale, Kaboul, 4 février 2008. [traduction]

[250]       Voir Calotta Gall, « Kabul battling Taliban with better governance », International Herald Tribune, 25 avril 2008, p. 2; et http://www.ands.gov.af/ands/andsconts/consultation/front.asp .

[251]       Sarah Lister et Hamish Nixon, « Provincial Governance Structures in Afghanistan: From Confusion to Vision », Briefing Paper de l’Unité afghane de recherche et d’évaluation, mai 2006.

[252]       Banque mondiale, Afghanistan: Service Delivery and Governance at the Subnational Level, Washington , juillet 2007, http://web.worldbank.org/WBSITE/EXTERNAL/COUNTRIES/SOUTHASIAEXT/0,,contentMDK:21414488~pagePK:146736
~piPK:146830~theSitePK:223547,00.html
.

[253]       Voir le rapport local de Sean Maloney, « Paving the Way in Afghanistan », Maclean’s , 21 avril 2008, p. 28‑32. M. Maloney enseigne au programme des études sur la guerre du Collège militaire royal du Canada.

[254]       1re session, 39e législature, Témoignages, réunion 58 du FAAE, 29 mai 2007, p. 2.

[255]       Témoignages, réunion 5 du FAAE, novembre 2007, p. 4. M. Isch est vice-président des programmes internationaux et canadiens de Vision mondiale Canada, qui est membre de l’Afghanistan Reference Group.

[256]       Témoignages, réunion 16 du FAAE, 4 mars 2008, p. 6.

[257]       Témoignages, réunion 17 du FAAE, 6 mars 2008, p. 6. M. Landry est adjoint de recherche au Groupe d’étude et de recherche sur la sécurité internationale de l’Université de Montréal.

[258]       On trouvera des informations sur la conférence à l’adresse http://www.rolafghanistan.esteri.it/ConferenceRol .

[259]       Rapport du Secrétaire général, La situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales, 6 mars 2008, p. 7, http://doc.operationspaix.net/serv1/NUSG_rapport_MANUA_2008-03-06_.pdf .

[260]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 4.

[261]       Témoignages, réunion 17 du FAAE, 6 mars 2008, p. 3.

[262]       Témoignages, réunion 14 du FAAE, 14 février 2008, p. 13.

[263]       Ibid., p. 14.

[264]       Cité dans Ryan Cormier, « Training Afghan army, police a key goal: Bernier », The Ottawa Citizen, 14 avril 2008, p. A6. [traduction]

[265]       Information reçue le 10 juin 2008 de Najeeb ur Rahman Manalai, chercheur associé, Centre for Conflict and Peace Studies, Kaboul, Afghanistan (site Web de l’organisation : http://www.caps.af/).  D’après M. Manalai, 59 entreprises privées de services de sécurité sont inscrites auprès de l’Afghanistan Investment Support Agency, mais seulement 36 sont inscrites auprès du ministère de l’Intérieur aux termes d’une nouvelle réglementation de leurs activités.  Le Ministère a fermé une douzaine de ces entreprises et estime que de 16 000 à 25 000 personnes travaillent actuellement pour des entreprises privées de services de sécurité.  Voir aussi à ce sujet,  « Afghanistan cracks down on private security companies », The Associated Press, 11 octobre 2007, http://www.iht.com/bin/printfriendly.php?id=7849013.

[266]       Faire fond sur le succès, Conférence de Londres sur l’Afghanistan : le Pacte pour l’Afghanistan, 31 janvier ‑ 1er février 2006, « Annexe I – Jalons et délais », p. 9, http://www.un.org/french/documents/view_doc.asp?symbol=S%2F2006%2F90&Submit=Recherche&Lang=F.

[267]       Il existe de nombreuses études sur les perspectives et les progrès à ce jour. Une étude particulièrement détaillée et utile à ce sujet est celle d’Andrew Wilder, « Cops or Robbers? The Struggle to Reform the Afghan National Police », Unité afghane de recherche et d’évaluation, Issue Paper series, Kaboul, juillet 2007. Voir aussi International Crisis Group, Reforming Afghanistan’s National Police, Asia Report No. 138, 30 août 2007.

[268]       Groupe d’experts indépendant sur le rôle futur du Canada en Afghanistan, janvier 2008, Annexe 5, p. 83.

[269]       République islamique d’Afghanistan, ministère de l’Intérieur, Review of the Quality, Structures, and Accountability of the Afghan National Police (ANP), Report to the Seventh Joint Coordination and Monitoring Board Meeting, Tokyo, 5-6 février 2008, p. 4, http://www.ands.gov.af/ands/jcmb/site/index.asp?page=j7 .

[270]       Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes,  Témoignages, réunion 30, 10 juin 2008, p. 2-3.

[271]       Ibid.

[272]       Il existe de nombreuses études sur les progrès réalisés et les perspectives. Une étude particulièrement utile et détaillée a été effectuée par Andrew Wilder (« Cops or Robbers? The Struggle to Reform the Afghan National Police », Afghanistan Research and Evaluation Unit, Issue Paper series, Kaboul, juillet 2007). Voir aussi, International Crisis Group, Reforming Afghanistan’s National Police, Asia Report No. 138, 30 août 2007.  Pour une information plus générale sur les efforts institutionnels pour lutter contre l’insurrection afghane, voir Seth Jones, « The Rise of Afghanistan’s Insurgency: State Failure and Jihad », International Security, vol. 32. no 4, printemps 2008, p. 7-40; Counterinsurgency in Afghanistan, National Defense Research Institute, RAND Counterinsurgency Study, vol. 4, juin 2008, p. 68-72, http://www.rand.org/pubs/monographs/2008/RAND_MG595.pdf.

[273]       Le Pacte pour l’Afghanistan, op. cit., p. 6.

[274]       Barnett Rubin, Afghanistan’s Uncertain Transition from Turmoil to Normalcy, Council on Foreign Relations, Center for Preventive Action, Council Special Report No. 12, mars 2006, p. 24, http://www.cfr.org/publication/10273/ .

[275]       Pour un résumé utile, voir Barnett Rubin, « Crafting a Constitution for Afghanistan », Journal of Democracy, vol. 15, no 3, juillet 2004, p. 5-19. La Constitution de 2004 est inspirée de celle de 1964, considérée comme la plus progressiste des neuf constitutions précédentes.  Pour le texte intégral, voir RAND, Democracy and Islam in the New Constitution of Afghanistan, Centre for Asia Pacific Policy, Conference Proceedings, Santa Monica, CA, 2003, http://www.rand.org/pubs/conf_proceedings/CF186/.

[276]       The Constitution of Afghanistan, version anglaise non officielle, p. 3, http://www.afghan-web.com/politics/currentconstitutionenglish.pdf . La version officielle est publiée dans les langues officielles de l’Afghanistan, soit le dari et le pashto. [traduction]

[277]       Voir République islamique d’Afghanistan, Afghanistan National Development Strategy (2008-2013), avril 2008, section sur les affaires religieuses, p. 67-69. 

[278]       Kenneth Katzman, « Afghanistan: Government Formation and Performance », CRS Report for Congress, mis à jour le 15 juin 2005, p. 5‑6, http://www.fas.org/sgp/crs/row/RS21922.pdf . M. Katzman est spécialiste en affaires du Moyen-Orient aux Affaires étrangères, Division de la défense et du commerce, Congressional Research Service, Library of Congress. [traduction]

[279]       Témoignages, réunion 16 du FAAE, 4 mars 2008, p. 2.

[280]       Voir les remarques de Mme Armstrong dans Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 2.

[281]       Témoignages, réunion 16 du FAAE, 4 mars 2008, p. 11.

[282]       Témoignages, réunion 14 du FAAE, 14 février 2008, p. 4.

[283]       Cité par Peter O’Neill dans « Canadians won’t tolerate corruption in Afghanistan; Wasted resources will chip at mission: Emerson », The Calgary Herald, 13 juin 2008, p. A24. [traduction]

[284]       D’après le « 2007 Corruption Perceptions Index » de Transparency International, ce rang n’a pas changé l’année dernière.  En outre, comme le souligne Integrity Watch Afghanistan, la corruption demeure une réalité quotidienne pour les Afghans, ce qui mine la légitimité du gouvernement à tous les niveaux. (Voir http://iwaweb.org/index_en.html.)

[285]       Par exemple, en juin 2008, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) cherchait un expert international des stratégies de lutte contre la corruption qui travaillerait à Kaboul avec les autorités afghanes (http://unjobs.org/vacancies/1212249542836).  

[286]       Rubin, Afghanistan’s Uncertain Transition from Turmoil to Normalcy, op. cit., p. 28. [traduction]

[287]       Doug Saunders,  « The Afghan Mission: ‘Bigger than the Taliban’ Corruption eats away at Afghan government », The Globe and Mail, 3 mai 2008, p. A1.

[288]       République islamique d’Afghanistan, Afghanistan National Development Strategy (2008-2013), mai 2008, p. 62.

[289]       Rubin, op.cit., p. 28. [traduction]

[290]       Témoignages, réunion 8 du FAAE, 11 décembre 2007, p. 4-5.

[291]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 10.

[292]       Affaires étrangères et Commerce international Canada, « Le ministre Bernier clarifie ses commentaires sur le gouvernement afghan », communiqué de presse, 14 avril 2008, no 83, http://w01.international.gc.ca/minpub/Publication.aspx?isRedirect=True&publication_id=386061&Language=F&docnumber=83.

[293]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 3.

[294]       « Afghanistan: A war of money as well as bullets », The Economist, 24 mai 2008, p. 40.

[295]       Comme le fait remarquer le très respecté The Economist, « les mafias qui ont la mainmise sur ce commerce [le trafic de stupéfiants] comptent de plus en plus sur la collaboration de fonctionnaires véreux à tous les niveaux de l’administration ». (« Afghanistan’s opium poppies: No quick fixes », édition électronique, 19 juin 2008).

[296]         La culture du pavot n’est pas illégale en soi, mais sa transformation en stupéfiants l’est. Il est intéressant de noter que l’article 7 de la Constitution ratifiée le 26 janvier 2004 établit un lien entre la culture de stupéfiants et le respect des droits universels et la lutte contre le terrorisme. Cet article est ainsi libellé : « L’État respecte la Charte des Nations Unies, les accords internationaux, ainsi que les traités internationaux auxquels il est partie, ainsi que la Déclaration universelle des droits de l’homme.  L’État prévient tous types d’activités terroristes, la culture et la contrebande de stupéfiants et la production et la consommation de boissons alcoolisées. » (http://www.president.gov.af/english/constitution.mspx).  D’après l’ambassadeur d’Afghanistan au Canada Omar Samad, 80 p. 100 des Afghans sont contre la culture du pavot en vue de produire des opiacés. (Remarques prononcées à l’occasion de la table ronde Afghanistan : Paix et prospérité pour la population et une cause type pour l'OTAN , Ottawa, 19 juin 2008.)

[297]       UNODC et la Banque mondiale 2006, sous la direction de Doris Buddenberg et William Byrd, Afghanistan’s Drug Industry: Structure, Functioning, Dynamics, and Implications for Counter-Narcotics Policy, novembre 2006, http://www.unodc.org/pdf/Afgh_drugindustry_Nov06.pdf.

[298]       Information provenant du sous-ministre de la Santé responsable des affaires techniques Faizullah Kakar.  D’après M. Kakar, près des deux tiers des Afghans souffrent de dépression ou d’une autre forme de trouble mental.  Ce problème et la toxicomanie constituent d’après lui les deux plus importants problèmes de santé de l’Afghanistan, mais le pays ne compte que deux psychiatres travaillant dans le secteur public. (Tan Ee Lyn, « Traumatized and depressed, more Afghans turn to drugs, official says », The Ottawa Citizen, 21 avril 2008, p. A4.)

[299]       « A World Awash in Heroin », The Economist, 28 juin 2007, d’après les données de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC), Rapport mondial sur les drogues, juin 2007, http://www.unodc.org/unodc/world_drug_report.html.

[300]       Doug Saunders, « Reckoning: Fatal Flower: The Poppy Problem – Afghanistan’s drug war yields the wrong kind of casualties », The Globe and Mail, 3 mai 2008, p. F3.

[301]       Voir par exemple : Larry Goodson, « Bullets, Ballots, and Poppies in Afghanistan », Journal of Democracy, vol. 16, n1, janvier 2005, p. 24-38, http://www.tecom.usmc.mil/caocl/OEF_Afghanistan/Reconstruction/ Jan%202005_Bullets%20Ballets%20and%20Poppies.pdf.; Jan Koehler et Christoph Zuercher, « Statebuilding, Conflict and Narcotics in Afghanistan: The View from Below », dans International Peacekeeping, Special Issue: Afghanistan in Transition: Security, Governance and Statebuilding, vol. 14, numéro 1, janvier 2007, p. 62‑74; Alain Labrousse, Alain 2006, Afghanistan : opium de guerre, opium de paix, Paris, Éditions Fayard, 2006; The Transnational Institute, « Missing Targets: Counterproductive drug control efforts in Afghanistan », Drug Policy Briefing No. 24, septembre 2007, http://www.tni.org/policybriefings/brief24.pdf?%3c.

[302]       Voir la 1re session de la 39e législature : Roland Paris, Témoignages, réunion 28 du FAAE, 8 novembre 2006, p. 12; James Appathurai, Témoignages, réunion 42 du FAAE, 27 février 2007, p. 5; Gordon Smith, Témoignages, réunion 47 du FAAE, 29 mars 2007, p. 4, 6 et 15; Barnett Rubin, Témoignages, réunion 47 du FAAE, 29 mars 2007, p. 6 et 16; col. (ret.) Brian MacDonald, réunion 48 du FAAE, 17 avril 2007, p. 3; Nigel Fisher, Témoignages, réunion 48 du FAAE, 17 avril 2007, p. 4; Marc André Boivin, Témoignages, réunion 48 du FAAE, 17 avril 2007, p. 12; Marc Sedra, Témoignages, réunion 51 du FAAE, 26 avril 2007, p. 10; Seema Patel, Témoignages, réunion 54 du FAAE, 8 mai 2007, p. 9‑10; Norine MacDonald, Témoignages, réunion 58 du FAAE, 29 mai 2007, p. 4.

[303]       Outre les nombreux écrits publiés par M. Rubin, voir les notes de 2007 sur son blogue « Informed Comment: Global Affairs », http://icga.blogspot.com/search/label/Afghanistan: Counter-Narcotics in Afghanistan I: « Defining the Problem »; II « The Value Chain, The Corruption Chain »; III « The False Promise of Crop Eradication »; IV « Beyond Interdiction », 24, 25, 31 août et 27 septembre; « Points on Counter-Narcotics in Afghanistan: A Critique and a Proposal », 28 août; V « Is Opium Poppy Cultivation Related to Poverty? », 22 octobre; VI « Alternative Livelihoods or Development? », 24 octobre; « Globalization and Corruption », 3 novembre.

[304]       Voir Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, Securing Central Asia’s Borders with Afghanistan, « Outline Action Plan », septembre 2007, http://www.unodc.org/documents/regional/central-asia/Microsoft%20Word%20-%20yellow_paper__no%20maps_16.09.17.pdf .

[305]       Pour ce qui est des contrôles sur la frontière constestée avec le Pakistan, la question s’est peut-être compliquée depuis les attentats suicides du 13 juin contre la prison de Kandahar. Voir Jeff Davis, « Afghanistan Border Diplomacy in Jeopardy », Embassy, 18 juin 2008, p. 1 et p. 12. 

[306]       Comme le signale Jonathan Goodhand, les objectifs de la lutte contre les stupéfiants doivent être pesés dans le contexte plus vaste de la consolidation de la paix et de la constitution d’un État démocratique (« Corrupting or Consolidating the Peace? The Drugs Economy and Post-conflict Peacebuilding in Afghanistan », International Peacekeeping, vol. 15, no 3, juin 2008, p. 405-423).   

[307]       Groupe d’experts indépendant sur le rôle futur du Canada en Afghanistan, janvier 2008, p. 17.

[308]       Par exemple, le gouverneur de la province de Kandahar Asdullah Khalid a critiqué les soldats de la FIAS à ce sujet. Voir Graeme Smith, « NATO undermining opium fight, Khalid says », The Globe and Mail, 21 avril 2008, p. A11.

[309]       Suivant un reportage en provenance de Kaboul paru dans le New York Times, « M. Karzaï a manifesté à plusieurs reprises son opposition à l’épandage de produits sur les champs de pavot,  que ce soit par poudrage aérien ou par l’intervention d’équipes d’éradication sur le terrain. Parallèlement, les pressions exercées par les Américains et les dissensions au sein du gouvernement afghan suscitent des tensions, ce qui a amené une réévaluation et la formulation de propositions relativement à un programme pilote d’épandage terrestre. [traduction]  (Kirk Semple et Tim Golden, The New York Times, 8 octobre 2007. Voir aussi Carlotta Gall, « Afghan poppy set for another big year, UN report warns », International Herald Tribune, 6 février 2008.

[310]         Bien que certaines opérations terrestres d’éradication soient en cours, beaucoup de spécialistes et de gouvernements sont contre l’adoption d’un plan d’éradication de type colombien.  Joseph Kirsche rapporte que le président Karzaï n’est pas le seul à éprouver des réserves : « Certaines personnes au Pentagone et à la CIA hésitent à souscrire à un tel programme—particulièrement avant qu’on soit en mesure de proposer un autre gagne-pain aux paysans, pauvres, qui cultivent le pavot, lequel sert à la production d’héroïne et d’opium. Les détracteurs de l’éradication des champs de pavot craignent de compromettre la lutte contre les talibans et les opérations de renseignement sur le terrain. Par ailleurs, les 25 autres alliés de l’OTAN sont tous fermement opposés au plan—en particulier les Britanniques et les Hollandais, qui ont beaucoup à perdre dans le premier déploiement de soldats de l’Alliance en dehors de son théâtre d’opérations habituel. » [traduction] (« State Department Pushing Aerial Poppy Eradication in Afghanistan », Worldpress.org, 29 février 2008, http://www.worldpress.org/Asia/3082.cfm#down.)

[311]       The Senlis Council, « Poppy for Medicine: Licensing poppy for medicines: an integrated counter-narcotics, development, and counter-insurgency model for Afghanistan », Londres, juin 2007 (toutes les publications du Senlis Council sont disponibles à : http://www.senliscouncil.net/).

[312]       Groupe d’experts indépendant sur le rôle futur du Canada en Afghanistan, 2008, p. 17.

[313]       Voir, par exemple, Cindy Fazey, « Responding to the Opium Dilemma », sous la direction de Robert Rotberg, Building a New Afghanistan, Washington, Brookings Institution Press et World Peace Foundation, 2007, p. 178‑204; Nick Grono et Joanna Nathan, International Crisis Group, « Defeating Afghanistan’s Drug Fix », The Christian Science Monitor, 31 mai 2007, http://www.crisisgroup.org/home/index.cfm?id=4877&l=1; Najeeb ur Rahman Manalai, « Opium Licensing: Jumping from the Frying-Pan into the Fire », Commentary, Centre for Conflict and Peace Studies Afghanistan, 10 décembre 2007; Frédéric Grare, « Anatomy of a Fallacy: The Senlis Council and Narcotics in Afghanistan », Centre for international Governance Innovation, State Fragility Working Paper No. 34, février 2008, http://www.cigionline.org/.

[314]       « La situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales : rapport du Secrétaire général au Conseil de sécurité », 6 mars 2008, p. 8, S/2008/159, http://www.un.org/french/docs/sc/reports/2008/sgrap08.htm.

[315]       FAAE, Renforcer le rôle du Canada dans le soutien international au développement démocratique, Ottawa, juillet 2007, p. 164, /Error/Error.asp"#_ednref99" name="_edn99" title="">[316]       Le texte intégral peut être consulté à : http://www.un.org/french/documents/view_doc.asp?symbol=S%2F2006%2F90&Submit=Recherche&Lang=F.

[317]       Pour plus de détails, voir United Nations, Division for Public Administration and Development Management in the Department of Economic and Social Affairs, Islamic Republic of Afghanistan: Public Administration Country Profile, janvier 2006, et Kenneth Katzman, « Afghanistan: Government Formation and Performance », CRS Report for Congress, juillet 2007.

[318]       Information provenant de l’Union interparlementaire, http://www.ipu.org/wmn-e/classif.htm.

[319]       Voir Andrew Reynolds, « Electoral Systems Today: The Curious Case of Afghanistan », Journal of Democracy, vol. 17, nº 2, avril 2006, p. 104-117; « Afghanistan: From Presidential to Parliamentary Elections », Asia Report No. 88, International Crisis Group, 23 novembre 2004; « Political Parties in Afghanistan », Asia Briefing No. 39, International Crisis Group, 2 juin 2005; « Afghanistan Elections: Endgame or New Beginning? », Asia Report No. 101, International Crisis Group, 21 juillet 2005; « Afghanistan’s New Legislature: Making Democracy Work », Asia Report No. 116, International Crisis Group, 15 mai 2006, et David Donovan, « Afghanistan: Democratization in Context », Transitions to Democracy – Afghanistan, Queen’s University Centre for the Study of Democracy, Kingston, mars 2006.

[320]       Témoignages, réunion 17 du FAAE, 6 mars 2008, p. 4.

[322]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 17. Voir aussi Anna Wordsworth, « A Matter of Interests: Gender and the Politics of Presence in Afghanistan’s Wolesi Jirga », Afghanistan Research and Evaluation Unit, Issues Paper Series, juin 2007.

[323]       Rapport du Secrétaire général, « La situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales », 6 mars 2008, p. 19.

[324]       Témoignages, réunion 18 du FAAE, 11 mars 2008, p. 13.

[325]       Ce fut la première Commission des plaintes électorales dans l’histoire de l’Afghanistan. À partir de son siège, établi à Kaboul, et par l’intermédiaire de 34 bureaux provinciaux, la Commission a enquêté sur près de 7 000 contestations et plaintes relatives au scrutin de 2005.

[326]       Témoignages, réunion 16 du FAAE, 4 mars 2008, p. 11.

[327]       Ibid., p. 12. D’autres aussi éprouvent ce sentiment d’urgence. Par exemple Dr. Ashraf Ghani, le ministre des Finances de l’Afghanistan de 2002 à 2004, qui est actuellement président de l’Institute for State Effectiveness, a déclaré : « La question est urgente. Les préparatifs sont très très partiels, très fragmentaires; on est loin du compte.  Mais j’espère qu’ils peuvent être mobilisés. » (Cité par Lee Berthiaume dans « Mounting Urgency over Afghan Elections », Embassy, 28 mai 2008, p. 1 et p. 14.)

[328]       « Permettre à la politique canadienne en Afghanistan de réussir », texte présenté à la réunion 14 du FAAE, 14 février 2008, p. 4.

[329]       Témoignages, réunion 18 du FAAE, 11 mars 2008, p. 9.

[330]       Opération Argus, Commandement de la Force expéditionnaire du Canada, mis à jour le 28 février 2008, http://www.cefcom.forces.gc.ca/site/ops/argus/index_f.asp. L’ECS‑A est le résultat d’un accord bilatéral Canada-Afghanistan d’août 2004. À l’époque, le général Rick Hillier, futur chef d’état-major de la Défense, commandait les forces de la FIAS à Kaboul.

[332]       Témoignages, réunion 16 du FAAE, 4 mars 2008, p. 5.

[333]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 7.

[334]       Ibid., p. 11.

[335]       Ibid., p. 12.

[336]       Témoignages, 1re session, 39e législature, réunion 45 du FAAE, 22 mars 2007, p. 13.

[337]       Témoignages, réunion 17 du FAAE, 6 mars 2008, p. 3.

[338]       Rapport du Secrétaire général, « La situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales », 6 mars 2008, p. 19.

[339]       Témoignages, réunion 16 du FAAE, 4 mars 2008, p. 6. Voir aussi Capstick, « Reviewing Canada’s Afghan Mission », Policy Options, avril 2008, p. 23-24.

[340]       Ibid

[341]       Ibid.

haut